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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 115
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 4 juin 1998
L'ACCÈS À L'INFORMATION |
Le vice-président |
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Peter Adams |
LOI PORTANT CRÉATION DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU |
Projet de loi C-43. Présentation et première lecture |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-418. Présentation et première lecture |
M. Paul Szabo |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Environnement et développement durable |
Motion d'approbation |
M. Rick Laliberte |
M. Peter Adams |
Motion |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LES JUGES |
Projet de loi C-37. Étape du rapport |
M. Jason Kenney |
M. Howard Hilstrom |
Mme Shaughnessy Cohen |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
Mme Marlene Catterall |
Motion |
LA LOI SUR LES JUGES |
Projet de loi C-37. Étape du rapport |
M. Richard Marceau |
M. Inky Mark |
M. Ted White |
Report du vote sur la motion no 1 |
Motion no 2 |
M. Jack Ramsay |
M. Myron Thompson |
M. Michel Bellehumeur |
M. Deepak Obhrai |
M. Reed Elley |
M. Roy Bailey |
M. Peter MacKay |
M. Ghislain Fournier |
Mme Val Meredith |
Mme Shaughnessy Cohen |
M. Jason Kenney |
M. Inky Mark |
M. Ted White |
M. Jay Hill |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE JOUR J |
M. Carmen Provenzano |
LES PENSIONS |
Mme Diane Ablonczy |
L'ENVIRONNEMENT |
L'hon. Charles Caccia |
LES DROITS DE LA PERSONNE |
M. Sarkis Assadourian |
L'IMMIGRATION |
Mme Colleen Beaumier |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Derrek Konrad |
L'IMMIGRATION |
M. John McKay |
LE MAINTIEN DE LA PAIX |
M. Hec Clouthier |
LE SÉNAT |
M. Eric Lowther |
LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA |
M. Claude Drouin |
LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE |
M. Peter Stoffer |
LE PARTI RÉFORMISTE |
M. Lynn Myers |
LE TÉLÉTHON OPÉRATION ENFANT SOLEIL |
M. Michel Bellehumeur |
LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA |
M. André Harvey |
LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS |
Mme Aileen Carroll |
LES PÊCHES |
M. John Duncan |
LE SALON INTERNATIONAL DES INVENTIONS |
Mme Pauline Picard |
LES FLAMES DE SAINT JOHN |
Mme Elsie Wayne |
QUESTIONS ORALES |
L'HÉPATITE C |
M. Preston Manning |
L'hon. Allan Rock |
M. Preston Manning |
L'hon. Allan Rock |
M. Preston Manning |
L'hon. Allan Rock |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
LE TRANSPORT AÉRIEN |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David M. Collenette |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David M. Collenette |
M. Michel Guimond |
L'hon. David M. Collenette |
M. Michel Guimond |
L'hon. David M. Collenette |
LA DÉFENSE NATIONALE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LA FISCALITÉ |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LE TRANSPORT AÉRIEN |
M. Michel Gauthier |
L'hon. David M. Collenette |
M. Michel Gauthier |
L'hon. David M. Collenette |
LES CONTRATS DU GOUVERNEMENT |
M. Werner Schmidt |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Werner Schmidt |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE |
M. Yvan Bernier |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Yvan Bernier |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'ACCÈS À L'INFORMATION |
Mme Deborah Grey |
Le très hon. Jean Chrétien |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Bob Mills |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LE KOSOVO |
M. Daniel Turp |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LE COMMERCE INTERNATIONAL |
Mme Sarmite Bulte |
M. Julian Reed |
LE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS |
M. Rob Anders |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. Rob Anders |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES MARCHÉS DE L'ÉTAT |
M. Dick Proctor |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Chris Axworthy |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE TABAC |
M. Greg Thompson |
L'hon. Allan Rock |
M. Greg Thompson |
L'hon. Paul Martin |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
L'hon. Sheila Finestone |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LES PÊCHES |
M. Gary Lunn |
L'hon. David Anderson |
LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
L'hon. David M. Collenette |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Yvon Godin |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le vice-président |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Randy White |
L'hon. Don Boudria |
M. Bill Blaikie |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LES JUGES |
Projet de loi C-37. Étape du rapport |
M. Jay Hill |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La conférence de presse de M. Ernst Zundel |
M. Bill Blaikie |
M. Randy White |
M. Peter MacKay |
L'hon. Don Boudria |
LA LOI SUR LES JUGES |
Projet de loi C-37. Étape du rapport |
Report du vote sur la motion no 2 |
LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA |
Projet de loi C-26. Troisième lecture |
M. Jay Hill |
Mme Hélène Alarie |
LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES |
Projet de loi C-3. Troisième lecture |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
L'hon. Andy Scott |
M. Peter Mancini |
LA CHAMBRE DES COMMUNES |
L'hon. Don Boudria |
Motion |
LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES |
Projet de loi C-3. Troisième lecture |
M. Jack Ramsay |
Amendement |
M. Richard Marceau |
M. Peter MacKay |
Report du vote sur l'amendement |
Suspension de la séance |
Reprise de la séance |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA CHARTE DES DROITS DES PÊCHEURS |
Projet de loi C-302. Deuxième lecture |
M. Greg Thompson |
M. Gerald Keddy |
M. Wayne Easter |
M. John Duncan |
M. Peter Stoffer |
M. Bill Casey |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Le Tokamak de Varennes |
M. Stéphane Bergeron |
M. Gerry Byrne |
L'environnement |
M. Lynn Myers |
M. Ovid L. Jackson |
La mine BC de Black Lake |
M. Jean-Guy Chrétien |
M. Gerry Byrne |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 115
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 4 juin 1998
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
L'ACCÈS À L'INFORMATION
Le vice-président: J'ai l'honneur, conformément à l'article 38 de la Loi sur l'accès à l'information, de déposer le rapport du Commissaire à l'information pour l'exercice se terminant le 31 mars 1998.
[Français]
Ce rapport est renvoyé en permanence au Comité permanent de la justice et des questions juridiques.
AFFAIRES COURANTES
[Français]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à neuf pétitions.
* * *
[Traduction]
LOI PORTANT CRÉATION DE L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-43, Loi portant création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
LE CODE CRIMINEL
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-418, Loi modifiant le Code criminel (counseling obligatoire dans le cas de certaines agressions).
—Monsieur le Président, je suis heureux ce matin de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire concernant la violence familiale qui, nous le savons tous, est un grave problème dans notre société. Si nous ne faisons rien pour y mettre fin, si on ne s'attaque pas à ce problème dès le début, la fréquence et l'intensité des agressions augmentent et la capacité de jugement s'affaiblit. Il est très difficile alors de s'en sortir. Les risques de lésions corporelles, voire de décès augmentent à mesure que le temps passe.
Ce projet de loi est un petit pas dans la voie des efforts en vue de mettre fin à la violence familiale. En vertu de ce projet de loi, toute personne déclarée coupable de violence familiale serait tenue, en plus des autres sanctions imposées par les tribunaux, de se soumettre à un programme de counseling.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)
* * *
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président, je propose que le troisième rapport du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, présenté le 25 mai 1998, soit agréé.
—Je voudrais saisir cette occasion pour attirer l'attention de mes collègues de la Chambre des communes et de tous les citoyens de notre merveilleux pays appelé Canada sur un rapport d'une importance cruciale qu'a déposé le Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
Le troisième rapport de notre comité s'intitulait «L'intérêt public d'abord! L'application des lois canadiennes sur la pollution». Il a été déposé le 25 mai 1998. Comme c'est la Semaine de l'environnement, le temps est tout indiqué pour mettre cette question en relief et pour informer tous les députés des détails que renferme ce rapport du comité.
Conformément à l'article 108 du Règlement, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a procédé à l'étude de l'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et des dispositions antipollution de la Loi sur les pêches.
Le comité a formulé 24 recommandations. Voici les points saillants de quelques-unes d'entre elles.
Il est primordial que la ministre de l'Environnement fournisse au comité des données sur les sommes prévues au budget et effectivement consacrées aux inspections, aux enquêtes et aux poursuites dans le cadre de l'application de la LCPE et des dispositions antipollution de la Loi sur les pêches. En outre, tout rapport résultant du processus d'examen du ministère relativement à l'application doit être présenté au comité.
Le comité a aussi recommandé que la ministre de l'Environnement et le ministre des Pêches et des Océans élaborent et publient une politique globale d'observation et d'application des dispositions antipollution de la Loi sur les pêches dans les six mois du dépôt de ce rapport.
Il a recommandé que la ministre de l'Environnement s'assure que les sociétés réglementées soient informées de leurs obligations légales aux termes des lois et de la réglementation environnementales du gouvernement fédéral et du fait que celles-ci continuent de s'appliquer et doivent être respectées.
Dans bien des cas, des ententes conclues entre les compétences provinciales et fédérales ont négligé de souligner que les obligations légales aux termes des lois fédérales sont toujours inchangées.
Le comité a recommandé que le nouveau projet de loi sur la protection de l'environnement, le projet de loi C-32, permette de désigner des inspecteurs et des enquêteurs dotés des pleins pouvoirs d'un agent de la paix pour assurer la protection de notre environnement. Le projet de loi C-32 fait actuellement l'objet d'un examen à la Chambre. Les inspecteurs et les enquêteurs qui travaillent sur place ont très peu de pouvoir pour imposer des amendes, mis à part le fait qu'ils peuvent donner des avertissements et entamer le processus de poursuite.
Il a aussi recommandé que la ministre crée sans tarder une capacité professionnelle d'analyse et de collecte de renseignements. C'est essentiel, car la pollution touche nos collectivités, notre santé et nos familles. Nous devons donc créer un organisme de renseignement au sein des forces de police, comme la GRC, la police provinciale, ou les agents des douanes qui contrôlent nos frontières.
Il a recommandé également une disposition de protection des informateurs pour tout ce qui touche aux obligations du fédéral. Il y a de nombreux corps de métier qui travaillent dans nos ports, nos sociétés de fabrication et nos industries, et qui sont au courant d'infractions. Il faut donc protéger les travailleurs et protéger leur carrière si l'on espère qu'ils divulguent ce qu'ils savent. Il y aura des cas où ils devront étendre leur autorité et mettre en lumière les infractions que leur compagnie ou leur employeur commet à l'égard de notre environnement. C'est une recommandation cruciale qui met le gouvernement au défi.
La ministre devrait revoir la structure actuelle de l'application de la loi et créer des directions régionales afin que les décisions soient prises non pas par des gestionnaires, mais par les membres du personnel chargé de faire respecter la loi. L'application doit relever du personnel qui en est chargé et non des gestionnaires ou des politiciens.
Une autre recommandation est de retarder la signature du sous-accord sur l'application proposé par le Conseil canadien des ministres de l'environnement. Dans l'accord d'harmonisation récemment signé, il y a un sous-accord qui doit être présenté plus tard. Nous recommandons fortement que l'on remette cela, car avec la structure actuelle on ne fait pas respecter les responsabilités fédérales.
La ministre devrait publier toutes les données sur l'application de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, de la Loi sur les pêches et de la Loi sur les additifs à base de manganèse. Il faut publier toutes ces données pour que les médias les étudient dans l'intérêt du public et pour que les dirigeants et les politiques des assemblées législatives des provinces et des territoires et de la Chambre des communes examinent à fond les moyens d'application de la loi qui existent au Canada. Les lois sur l'environnement sont particulièrement importantes pour la santé future de nos enfants.
Le ministre de l'Environnement devrait être tenu de publier et de déposer au Parlement un rapport annuel détaillé sur les mesures prises l'année précédente à l'égard des lois et règlements dont la LCPE et la Loi sur les pêches confient la responsabilité au ministère.
Nous entendons maintenant parler de cas où le ministre des Pêches est tenu de déposer le rapport aux Communes et est dans l'impossibilité de le faire parce que les gouvernements provinciaux ont refusé de lui communiquer les données. L'accord d'harmonisation comporte bien des lacunes. Si les divers niveaux de gouvernement ne peuvent collaborer pour présenter un rapport aux Communes, il y a vraiment quelque chose qui cloche dans les relations que nous avons avec les ministères provinciaux.
Une autre recommandation importante exhorte le gouvernement et le ministre de l'Environnement à procéder à une étude approfondie afin de déterminer si le méthylmercure rejeté dans le milieu aquatique lorsque des terres sont inondées à cause de nouveaux réservoirs, de barrages ou d'aménagements hydroélectriques sur les grandes rivières des régions septentrionales s'accumule dans le poisson et tout le reste de la chaîne alimentaire. Cette étude s'impose parce que, aux termes du règlement de la LCPE, le mercure est considéré comme une substance naturelle et non comme un produit toxique répandu par l'homme dans l'environnement. Cependant, étant donné que la construction de barrages fait augmenter la présence de mercure dans la chaîne alimentaire, nous devons creuser la question pour trouver des solutions.
La recommandation la plus importante veut que le ministre demande et que le gouvernement du Canada accorde plus de ressources pour pouvoir faire respecter comme il se doit la législation sur l'environnement. À maintes reprises, les témoins interrogés au comité ont dit que les ressources faisaient défaut à cause des deux étapes de la revue des programmes. Cette revue était de nature financière et n'avait pas pour but de vérifier si l'application de la législation permettait de protéger l'environnement. Ces examens visaient à déterminer où l'on pourrait exercer des compressions qui réduiraient le moins possible le bien-être financier de notre pays. Nous sommes témoins de notre bien-être financier. Nous constatons que des programmes qui étaient déficitaires ont maintenant des excédents notables. Le temps est maintenant venu de considérer l'environnement comme notre plus grande priorité, surtout dans notre beau pays.
La présentation du rapport et les recommandations sont le résultat d'assemblées publiques tenues entre le 18 février et le 26 mars 1998. Le comité a entendu différents représentants de l'industrie, des premières nations, des syndicats, des groupes environnementaux et du gouvernement. Il a pris connaissance de nombreux mémoires venant de partout au Canada.
Nous voulons souligner le courage des travailleurs sur le terrain d'Environnement Canada et les féliciter. Ils nous ont honnêtement fait part de leur perception des défis qu'ils doivent relever quotidiennement dans le cadre de leur travail d'inspecteur ou d'enquêteur, pour faire respecter le règlement d'application de la LCPE et la réglementation sur les pêches.
Les principaux éléments du rapport, tels que soulignés dans le document, portent sur la responsabilité d'Environnement Canada de faire appliquer efficacement la réglementation; les problèmes que suscitent les mesures d'application dans le cadre des ententes fédérales-provinciales-territoriales et auprès de la population canadienne, et c'est la partie cruciale du rapport; le droit de la population à être tenue au courant et son droit à la protection de notre environnement.
Je veux signaler à la Chambre l'existence d'un livre qui a tenu une grande place dans nos travaux. Ce livre dit que les citoyens d'une nation devraient avoir une charte des droits. La Charte des droits et libertés de notre pays devrait englober la protection de l'environnement, afin que nous puissions vivre à l'abri des poisons et des toxines des nombreuses industries qui ne se gênent pas pour déverser ces matières et autres polluants dans nos eaux, notre air et nos terres, abîmant les ressources vitales dont dépend notre survie.
Dans ce contexte, nous avons la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. C'est notre charte des droits. C'est ce qui définit la protection de notre environnement, mais cette loi est inutile si elle n'est pas appliquée. S'il n'y avait pas de policiers qui patrouillent nos autoroutes, qui se préoccuperait de surveiller le respect des limites de vitesse? Qui surveillerait les infractions au code de la route, trop fréquentes malgré le respect volontaire du code qu'on attend de nos citoyens? La réglementation de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et cette recommandation du comité montrent que l'application est un aspect crucial de la protection de l'environnement.
La LCPE compte 26 règlements d'application concernant les BPC, les déversements dans l'océan, l'air limpide et les eaux pures, les CFC, les dioxines, les furanes et les combustibles. Toutes ces questions concernent chacune des circonscriptions au Canada. Tous les députés devraient être conscients des répercussions, de l'incapacité du gouvernement et du ministère d'appliquer ces mesures législatives.
La Loi sur les pêches compte également des règlements d'application relatifs à l'habitat du poisson, aux rivières, lacs, océans et littoraux. Il ne faut pas oublier la situation catastrophique des pêches de l'Atlantique et le déclin des stocks de poisson, la côte du Pacifique, les changements dans l'environnement, la protection des espèces halieutiques et l'économie qui en dépend. En tout, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et la Loi sur les pêches comptent 32 règlements d'application.
Sept accords d'équivalence et à caractère administratif ont été conclus récemment avec les provinces et les territoires. Trois de ces accords sont régis par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et deux par la Loi sur les pêches. L'un d'eux, le règlement fédéral sur les pâtes et papiers, concerne le Québec, c'est un accord majeur entre les gouvernements fédéral et provincial.
Les Territoires du Nord-Ouest définissent un accord cadre pour les cinq bureaux régionaux qui se conforment aux modalités d'application et d'interprétation, soit les bureaux de l'Atlantique, du Québec, de l'Ontario, des Prairies et du Nord, et enfin, celui de la région Pacifique-Yukon. Les bureaux régionaux jouent un rôle important. Voici quelques données que nous avons obtenues. Au cours de la période 1996-1997, 701 inspections ont été effectuées en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Il y a eu 53 enquêtes, 2 directives, 28 avertissements, 5 poursuites et 7 condamnations. Dans certains cas, les enquêtes avaient débuté au cours des années précédentes.
Voici les données concernant la Loi sur les pêches pour la même année. Il y a eu 778 inspections, 25 enquêtes, 1 directive, 8 avertissements, 5 poursuites et 6 condamnations.
J'attire votre attention sur les aspects majeurs du rapport, notamment la nécessité d'une exécution efficace et l'existence de ressources limitées par suite de l'examen du programme de l'environnement. Environnement Canada a réduit son budget financier de 40 p. 100. Le plan d'action du fleuve Fraser, sur la côte ouest, accuse également une perte. Ce fleuve est un cours d'eau majeur. Le budget de la région du Pacifique-Yukon a été réduit de 30 p. 100, depuis le 1er avril dernier. On prévoit que le nombre d'inspections, qui se situe normalement à 550, tombera à 385 à cause des compressions budgétaires. Ces compressions affecteront certainement les ressources d'exécution. Les postes vacants ne sont pas comblés. Les charges de travail et les attentes à l'endroit des employés sont insurmontables.
Il y a également les questions relatives aux changements climatiques, sans parler de la nécessité d'effectuer des recherches et de recueillir des données sur l'état de l'environnement et de l'habitat du poisson. La charge de travail et les attentes à l'endroit des employés sont fondées sur la charge de travail existante, qui a été réduite de 40 p. 100. Dans la seule région du Québec, 60 p. 100 seulement du budget d'exécution est effectivement utilisé à cette fin. Nous devons utiliser ces ressources là où elles sont nécessaires. Il a fallu attendre jusqu'à deux ans pour que les postes vacants soient comblés au Québec, alors c'est une des provinces les plus industrialisées du Canada.
Les données que le ministère transmet au comité laissent beaucoup à désirer. Nous attendons encore des renseignements que nous avons réclamés depuis fort longtemps. Ça ne bouge pas de ce côté-là. Personne ne sait jusqu'à quel point la situation s'est dégradée. On ignore totalement où en sont les questions d'application et d'exécution. En Ontario, deux inspecteurs consacrent quatre ou cinq jours à chaque entreprise pour vérifier l'inventaire national des rejets de polluants, alors qu'il s'agit d'une nouvelle obligation internationale. On s'engage envers la communauté internationale à dresser l'inventaire de la situation de la pollution au Canada, mais on n'augmente pas les effectifs chargés de cette tâche. En Colombie-Britannique, là où les impacts vont bien au-delà de l'industrie, il y a environ 17 200 sites pour un total de 16 inspecteurs.
Des articles entiers de la Loi canadienne de protection de l'environnement ne sont pas appliqués au Canada. Il nous faut composer avec le fait que l'industrie se préoccupe peu ou prou des règlements qui ne sont pas appliqués, et espérer que les Canadiens aient à coeur la protection de l'environnement. Il faut à tout prix que cette législation soit appliquée. Or, dans les Prairies, il y a 15 inspecteurs pour couvrir près de la moitié de notre masse territoriale.
En 1992-1993, on a enregistré, dans le cadre de la Loi canadienne de protection de l'environnement, 1 233 inspections, 93 enquêtes, 105 avertissements, deux instructions, et 22 poursuites. En 1996, la situation s'est détériorée. Il y a eu seulement 97 avertissements, 15 poursuites, aucune instruction ni condamnation, ce qui témoigne d'une nette réduction de la présence fédérale dans l'environnement et d'une baisse manifeste de l'effort d'application des règlements.
Pressé de questions devant le comité, le sous-ministre a admis que les ressources étaient insuffisantes en matière d'application de la loi concernant l'environnement. Une étude de KPMG révèle que les mesures volontaires n'étaient pas prises suffisamment au sérieux par les compagnies. Au chapitre de l'efficacité, les mesures volontaires atteignent le score de 16 p. 100, et les mesures de coercition, 90 p. 100.
Le gouvernement continue d'encourager les mesures volontaires. Dans plusieurs parties du rapport, on note une faiblesse au chapitre des ressources et de la mise en application ainsi qu'un manque d'harmonisation entre les provinces.
Il n'y a pas suffisamment de comptes rendus au Parlement au chapitre des infractions aux règles sur les pêches et l'habitat. Les organismes provinciaux de réglementation et d'application de la loi sont censés fournir ces renseignements au ministre des Pêches. Il n'a pas encore été en mesure de fournir ce rapport à la Chambre pour informer le public et tous les Canadiens. C'est lui qui est juridiquement responsable.
L'entente conclue entre le Québec et le Canada sur l'application du règlement fédéral sur les pâtes et papiers a été mise en évidence. Il y a eu 20 infractions au cours de l'année où l'entente a été renouvelée et signée et aucune poursuite n'a été intentée.
Le protocole d'entente sur l'aquaculture entre le ministère des Pêches et Océans et le Nouveau-Brunswick est encore plus inquiétant. On constate des maladies répandues et la pollution des milieux marins dans cette région. Des pesticides sont déversés afin de corriger un problème d'aquaculture, mais l'environnement naturel s'en trouve compromis.
En 1997, l'Ontario s'est retiré de l'entente conclue avec le MPO sur la protection de l'habitat du poisson. En Ontario, on s'attend à ce que les agents d'exécution en place en Ontario fassent ce que la province de l'Ontario est censée faire.
Les ressources ont été réduites. On s'attend à davantage et ce rapport en fait état. Nous devons nous pencher sur la question de la mise en application de nos règles touchant la protection de l'environnement et la pollution.
J'implore la Chambre de tenir compte des répercussions de ce rapport et de relever le défi qui vise à faire de l'environnement la première priorité, tout particulièrement en cette semaine de l'environnement.
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je propose:
Que la Chambre passe maintenant à l'ordre du jour.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu la motion. Lui plaît-il de l'adopter?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.
[Français]
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 190
POUR
Députés
Adams | Alcock | Anderson | Assad |
Assadourian | Augustine | Axworthy (Winnipeg South Centre) | Baker |
Bakopanos | Barnes | Beaumier | Bélair |
Bélanger | Bellemare | Bennett | Bertrand |
Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick | Boudria |
Brown | Bryden | Bulte | Byrne |
Calder | Cannis | Caplan | Carroll |
Catterall | Chan | Charbonneau | Chrétien (Saint - Maurice) |
Clouthier | Coderre | Cohen | Collenette |
Copps | Cullen | DeVillers | Dhaliwal |
Dion | Discepola | Dromisky | Drouin |
Duhamel | Easter | Eggleton | Finestone |
Finlay | Folco | Fontana | Fry |
Gagliano | Gallaway | Godfrey | Goodale |
Graham | Guarnieri | Harb | Harvard |
Hubbard | Ianno | Iftody | Jackson |
Jennings | Karetak - Lindell | Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) |
Knutson | Lastewka | Lee | Leung |
Lincoln | Longfield | MacAulay | Mahoney |
Maloney | Manley | Marchi | Marleau |
Martin (LaSalle – Émard) | Massé | McCormick | McKay (Scarborough East) |
McTeague | McWhinney | Mifflin | Minna |
Mitchell | Murray | Myers | Nault |
Normand | O'Brien (London – Fanshawe) | Pagtakhan | Parrish |
Patry | Peterson | Pettigrew | Phinney |
Pickard (Kent – Essex) | Pratt | Proud | Provenzano |
Redman | Reed | Richardson | Robillard |
Rock | Saada | Scott (Fredericton) | Sekora |
Shepherd | Speller | St. Denis | Steckle |
Stewart (Brant) | Stewart (Northumberland) | St - Julien | Szabo |
Telegdi | Thibeault | Torsney | Ur |
Valeri | Vanclief | Volpe | Wappel |
Whelan | Wilfert | Wood – 131 |
CONTRE
Députés
Anders | Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) | Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bachand (Saint - Jean) |
Bailey | Bellehumeur | Benoit | Bergeron |
Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) | Bigras | Blaikie | Borotsik |
Cadman | Casey | Chatters | Chrétien (Frontenac – Mégantic) |
Dalphond - Guiral | de Savoye | Desjarlais | Dockrill |
Dubé (Lévis) | Duceppe | Dumas | Duncan |
Earle | Epp | Forseth | Gauthier |
Gilmour | Girard - Bujold | Godin (Acadie – Bathurst) | Godin (Châteauguay) |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guimond | Hanger |
Hardy | Hart | Harvey | Herron |
Hill (Macleod) | Hill (Prince George – Peace River) | Hilstrom | Jones |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary - Sud - Est) | Konrad | Laliberte |
Lalonde | Laurin | Lebel | Lefebvre |
Lill | Loubier | Lunn | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Mancini | Marceau | Mark | Matthews |
Mayfield | McDonough | McNally | Ménard |
Meredith | Mills (Red Deer) | Muise | Nystrom |
Obhrai | Perron | Picard (Drummond) | Proctor |
Ramsay | Reynolds | Robinson | Rocheleau |
Sauvageau | Schmidt | St - Hilaire | St - Jacques |
Stoffer | Thompson (Charlotte) | Thompson (Wild Rose) | Tremblay (Lac - Saint - Jean) |
Tremblay (Rimouski – Mitis) | Turp | Vautour | Wasylycia - Leis |
Wayne | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Williams – 92 |
«PAIRÉS»
Députés
Asselin | Brien | Crête | Guay |
Kilger (Stormont – Dundas) | Kraft Sloan | Marchand | McGuire |
McLellan (Edmonton West) | O'Reilly | Pillitteri | Venne |
Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LES JUGES
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 juin, du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, et de la motion no 1.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis ravi de pouvoir participer au débat à l'étape du rapport du projet de loi C-37, tendant à modifier la Loi sur les juges, après avoir été si rudement interrompu par le NPD qui a proposé une motion de forme.
La mesure législative vise à augmenter de 8,3 p. 100 la rémunération versée aux juges nommés par le gouvernement fédéral sur une période de deux ans. Déjà, les juges nommés par le gouvernement fédéral touchent en moyenne quelque 140 000 $, ce qui n'est pas une somme à dédaigner. Cela représente une portion assez considérable des recettes publiques.
Permettez-moi de préciser d'emblée que mes collègues de l'opposition officielle et moi ne sommes pas contre le fait de payer les juges ou tous ceux qui travaillent dans le secteur public. Nous ne pensons pas que ces gens devraient être défavorisés sur le plan salarial. Nous croyons que les juges devraient avoir droit à une rémunération juste, comme tous les autres membres de notre fonction publique.
L'aspect du projet de loi qui me préoccupe le plus, c'est le fait qu'il établit un système de deux poids deux mesures, qui avantagerait un petit groupe qui travaille dans le secteur public, c'est-à-dire les juges nommés par le fédéral. Ce qui me paraît le plus bizarre, c'est que, tandis que les travailleurs de première ligne de la fonction publique fédérale, particulièrement du système de justice fédéral, comme les travailleurs de première ligne de la Gendarmerie royale du Canada et du Service correctionnel du Canada, qui sont appelés à faire respecter la loi, n'obtiennent à peu près aucune augmentation de salaire depuis des années, ceux qui sont au sommet, qui touchent déjà une rémunération beaucoup plus élevée que la plupart des Canadiens, obtiendront les plus grandes augmentations salariales. L'approche adoptée par la commission dans son rapport est franchement inéquitable, injuste et malséante, au même titre d'ailleurs que le projet de loi.
Les gens qui se trouvent sur la ligne de front du système judiciaire, dont les agents de la GRC et leurs collègues du Service correctionnel, exposent quotidiennement leur vie à toutes sortes de dangers au nom du maintien de l'ordre. Ils sont tenus responsables de leur rendement. S'ils ne donnent pas satisfaction, ils peuvent être renvoyés. S'ils commettent des erreurs de jugement importantes, ils peuvent être renvoyés et faire l'objet de mesures disciplinaires. Autrement dit, ils sont tenus de rendre des comptes.
Mais les juges? Est-ce qu'ils sont tenus de rendre des comptes? Non. Ils ne rendent de comptes à personne d'autre qu'à eux-mêmes. Selon moi, le principe de la rémunération au rendement devrait s'appliquer à l'échelle du secteur public, tout comme cela se fait dans le secteur privé.
Quand mes électeurs prennent connaissance de certaines décisions rendues par des juges fédéraux dans diverses juridictions, dont la Cour suprême, ce qu'ils voient les étonne parfois. Certains de mes collègues réformistes ont mentionné plusieurs jugements absolument choquant rendus récemment par les gens à qui nous envisageons d'accorder une augmentation de 8,3 p. 100.
Par exemple, les députés auront récemment entendu parler de l'affaire Feeney, dans laquelle le tribunal a décidé d'acquitter un homme clairement coupable de meurtre au premier degré parce que le policier était entré chez lui sans mandat après avoir frappé à la porte et s'être annoncé. Il avait trouvé l'auteur de ce crime atroce couché dans son lit et couvert du sang de sa victime; il y avait du sang partout. C'est incroyable.
Nous proposons d'augmenter de 8,3 p. 100 le salaire du juge qui a rendu cette décision. Non seulement il n'est pas tenu de rendre des comptes, mais en plus, son rendement ne justifie pas son salaire. Nous sommes en présence d'une caste d'individus qui sont nommés à la seule discrétion du gouverneur général en conseil, du premier ministre, sans que le public ait son mot à dire, sans que le Parlement ait droit de regard, et qui n'ont aucun compte à rendre, même quand leurs jugements sont absolument choquants.
Que disons-nous à ces gens? Nous disons qu'ils ne rendent aucun compte. Leurs jugements sont parfois bizarres. Nous ne pouvons pas mesurer leur rendement. Mais nous allons quand même leur accorder une augmentation de 8,3 p. 100. C'est tout simplement immoral. Cela révèle, de la part du gouvernement, un sens complètement tordu des priorités.
Il est tout à fait inacceptable de parler d'une augmentation de 8,3 p. 100 pour les gens les mieux rémunérés au Canada alors les familles canadiennes entament leur deuxième décennie sans augmentation de leur revenu disponible, après impôt, et que les travailleurs de première ligne du gouvernement fédéral n'ont pas eu d'augmentation depuis sept ans.
Un de mes collègues a signalé, hier, que le projet de loi C-37 renferme une disposition portant sur la pension versée aux conjoints survivants des juges. Le texte définit, comme il se doit, ce qu'on entend par «conjoint». Toutes les lois fédérales portant sur des prestations familiales doivent comporter le terme «conjoint» et on définit donc ce terme.
Récemment, madame la juge Rosalie Abella de la Cour d'appel de l'Ontario a décidé, dans l'affaire Rosenberg, que la définition traditionnelle de «conjoint», la définition qui figure dans le projet de loi C-37 et dans des centaines d'autres lois fédérales et qui prend ses racines dans un millier d'années de common law et trois mille ans de loi mosaïque, ne s'applique plus aux lois fédérales, notamment celle dont nous discutons aujourd'hui.
Nous proposons d'accorder à la juge Abella une augmentation de 8,3 p. 100 après que celle-ci a rendu une décision contraire aux intérêts du gouvernement et de la justice, contraire à tout type de reddition de comptes à la population. Il s'agit d'un juge dont la nomination n'a pas été soumise à l'approbation de la population, du Parlement ou des élus du peuple. Sa nomination a plutôt été étudiée à huis clos par des bureaucrates du ministère de la Justice, qui ont soumis leur courte liste de candidats aux politiciens du Cabinet pour qu'ils choisissent une personne plutôt qu'une autre.
Nous devrions imposer un moratoire sur les augmentations pour les juges du gouvernement fédéral tant qu'il n'y aura pas un mécanisme de reddition de comptes. Là encore, la rémunération doit être liée à la reddition de comptes.
Nous, de l'opposition, réclamons l'établissement d'un comité parlementaire chargé d'examiner les nominations du gouvernement fédéral à la magistrature et de formuler des observations là-dessus. Nous pourrions au moins avoir ainsi un processus de présélection nous permettant de veiller à ce que des juges irresponsables, radicaux et défendant certaines idéologies, comme la juge Rosalie Abella, ne puissent pas faire partie de la magistrature. Si des gens comme Rosalie Abella veulent atteindre leurs objectifs politiques en légiférant, je leur suggère de se porter candidats à une charge publique, comme nous l'avons tous fait, et de ne pas se servir de leur poste de juge pour imposer unilatéralement leurs opinions politiques, aussi bizarres soient-elles, au reste des Canadiens.
Le moment est venu pour nous d'examiner tout le processus de nomination des juges, ainsi que le pouvoir antidémocratique énorme que nos tribunaux exercent. Tant que nous ne l'aurons pas fait, nous ne pouvons pas et nous ne devrions pas offrir aux juges une récompense sous la forme d'une augmentation de traitement de 8,3 p. 100. Il faudrait d'abord qu'ils soient enfin tenus de rendre des comptes au sujet de leurs décisions.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant que le débat ne reprenne, je tiens à dire officiellement qu'il est tout à fait acceptable de parler de la magistrature en général à la Chambre. Toutefois, il ne convient pas de parler d'un juge en particulier ni d'imputer des intentions à un juge en particulier. Cela n'est pas convenable. Il convient de remettre la magistrature en général en question, mais pas des juges en particulier.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, merci de fournir ainsi à la Chambre de sages conseils sur la façon de faire et le décorum à suivre ici.
C'est avec plaisir que je prends aujourd'hui la parole au sujet du projet de loi C-37. Lorsque j'ai parlé du projet de loi, le 30 mars dernier, j'ai laissé entendre qu'il faudrait envisager d'en modifier plusieurs aspects si l'on voulait s'assurer que son objet convenu soit atteint. Je tiens à faire valoir à nouveau aujourd'hui aux députés la nécessité d'y apporter ces amendements.
Nombre des juges du Canada méritent peut-être bien une hausse salariale raisonnable d'au plus 2 p. 100, ce qui est ce qu'obtiennent les fonctionnaires fédéraux moins payés. Je ferai remarquer en passant que 2 p. 100 de 20 000 $, c'est beaucoup moins que 2 p. 100 de 140 000 $. Les plus humbles et les plus nécessiteux de notre société disposent de beaucoup moins d'argent pour satisfaire leurs besoins fondamentaux que les membres les mieux rémunérés de notre société.
De faibles salaires sont le lot des travailleurs du secteur judiciaire en général, notamment pour ce qui concerne le domaine de l'exécution de la loi. Je crois comprendre qu'on a besoin d'un nouveau mécanisme de détermination du salaire des juges au Canada. Comme l'a signalé tout à l'heure un de mes collègues, le projet de loi va hausser le salaire des juges de 8,3 p. 100 sur deux ans. Les Canadiens conviendraient pour la plupart que cela n'est pas raisonnable, surtout lorsqu'on compare le salaire des juges à celui des autres personnes chargées d'exécuter la loi.
Les employés les moins bien rémunérés du secteur public éprouvent encore des difficultés financières parce que le gouvernement n'a pas réglé comme promis la question de l'équité salariale, par exemple. Encore une fois, je fais allusion ici à des gens qui font de 20 000 à 28 000 $ par année.
Je pense en particulier aux membres de notre force policière nationale, la Gendarmerie royale du Canada. Dans ce groupe, je suppose qu'il faut inclure les procureurs de la Couronne, les commis et les agents parajuridiques.
Les agents de la GRC risquent leur vie pratiquement tous les jours, mais ils n'ont eu droit qu'à une faible augmentation depuis 1991 environ. Les agents de police font la manchette en sauvant des vies.
La Chambre sait comment, au Canada, les juges ont accaparé le rôle des parlementaires et modifié les lois en les interprétant. À l'heure actuelle, la question qui soulève beaucoup d'inquiétude est la définition à donner au terme «conjoint». Comme on l'a mentionné tout à l'heure, l'affaire Rosenberg a fait en sorte qu'il ne revient plus aux parlementaires, qui devraient pourtant en être chargés, de régler une question aussi importante que celle qui consiste à définir le terme «conjoint». Je voudrais qu'à un moment donné, peut-être à l'automne, nous débattions de cette question pour pouvoir, au nom des Canadiens, faire une proposition à la Chambre, au lieu de laisser les tribunaux s'en charger.
Les députés devraient se demander quelle réaction auront les agents subalternes de la GRC en apprenant l'adoption de ce projet de loi. Ces agents travaillent quotidiennement dans des circonstances dangereuses. Un grand nombre de nos juges semblent n'avoir aucune idée des normes que respectent les gens ordinaires dans nos collectivités.
Dernièrement, j'ai présenté à la Chambre une pétition portant sur l'affaires Giles, au Manitoba. Une des principales déclarations que j'ai faites concernant cette pétition, c'est qu'un juge doit absolument tenir compte des normes, des principes et des croyances qui ont cours dans la société, sinon sa présence au tribunal soulève des interrogations.
J'en arrive ainsi à un autre objet du projet de loi qui est d'établir un mécanisme indépendant pour déterminer la rémunération des juges et ainsi préserver l'indépendance de l'ordre judiciaire. Cela soulève deux difficultés. Je suis partiellement d'accord avec l'intention de cette disposition, parce que nous voulons sans contredit l'indépendance des juges. Cependant, ils doivent être redevables et, comme je l'ai dit, ils doivent tenir compte des idées qui ont cours dans la société qu'ils jugent.
Les juges au Canada ne devraient certainement pas craindre de subir des baisses de salaire, s'ils rendaient des décisions blâmant le gouvernement. Cependant, la commission qui serait établie en vertu de ce projet de loi ne peut espérer assurer cette indépendance. Je suis d'avis que la disposition prévoyant la nomination de trois membres, un par la magistrature, un par le gouvernement et un par les deux ensemble, ne confère pas cette indépendance.
Le gouvernement doit prendre des mesures pour éviter les nominations partisanes qui surviendront certainement si le projet de loi est adopté. S'il est vrai que le pouvoir judiciaire devrait être indépendant du gouvernement, cela ne veut pas dire que les juges ne devraient avoir aucun compte à rendre.
Je sais que les députés d'en face peuvent dire qu'il y a en place des mécanismes permettant de revoir les décisions judiciaires. Je sais que, de l'avis de bon nombre, les cours d'appel assurent l'obligation de rendre compte dans notre système de justice parce qu'elles offrent un mécanisme qui permet parfois de renverser les mauvaises décisions.
Cependant, cela ne contribue guère à résoudre le problème plus profond des juges qui prennent des décisions qui heurtent les valeurs de leur collectivité et qui n'ont aucun compte à rendre aux membres de notre société. C'est dans ce cas que la question de l'obligation de rendre compte des juges devient épineuse. Comme nous en avons déjà convenu, les juges devraient être indépendants du Parlement qui, autrement, pourrait tenter d'infléchir leurs décisions à des fins politiques.
Les juges ne devraient pas être totalement indépendants des collectivités et de ceux qu'ils servent. Il faudrait reconnaître le travail des juges qui rendent des décisions conformes aux lois canadiennes et qui se prévalent de la latitude que celles-ci leur confèrent pour rendre des jugements compatibles avec les attentes de leur collectivité.
Les collectivités locales devraient avoir davantage l'occasion de faire part directement de leurs réactions aux associations de juges, à l'extérieur des tribunaux. À défaut de pouvoir adopter un système dans le cadre duquel les juges sont élus par la population pour des mandats déterminés, nous pouvons au moins donner aux collectivités la possibilité de s'exprimer.
Le projet de loi devrait être modifié pour permettre aux groupes qui représentent les victimes et aux leaders populaires de se prononcer sur le mode de détermination du traitement de chaque juge. Les juges recevraient les commentaires chaque année et cela les aiderait à mieux refléter les valeurs et les normes de la population qu'ils servent. L'avantage c'est qu'ils auraient des commentaires plus immédiats. Un juge saurait sur-le-champ que la société n'approuve pas les peines beaucoup trop douces imposées à des agresseurs d'enfant ou les condamnations avec sursis données à des auteurs d'homicides involontaires.
La Chambre des communes et les juges eux-mêmes ne doivent pas perdre de vue que les juges sont des fonctionnaires. Apparemment, les juges ont oublié qu'ils sont au service de la population.
Si on pense aux mesures législatives du gouvernement, particulièrement au projet de loi à l'étude en ce moment, c'est clair. Le gouvernement ne reflète pas les valeurs et les normes de la collectivité et les sentiments actuels sur une indemnisation approprié pour les fonctionnaires que sont les juges.
Je voudrais commenter la motion no 1 et les raisons qui la motivent. L'article 5 du projet de loi accorde aux juges une augmentation de salaire de 4,1 p. 100, avec effet rétroactif au 1er avril 1997. Personne d'autre n'obtient une augmentation avec effet rétroactif au 1er avril 1997 et les juges ne devraient pas en obtenir non plus.
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, en tant que présidente du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, je voudrais parler plus particulièrement de la motion no 2 dont la Chambre est saisie actuellement. Cette motion tend à...
M. Jack Ramsay: La motion no 1.
Le président suppléant (M. McClelland): Sauf votre respect, il doit bien y avoir un moyen pour la députée de faire entrer ses observations dans le cadre de la motion no 1.
Mme Shaughnessy Cohen: Monsieur le Président, à propos de la motion no 1, les députés ont concentré leurs propos sur les hausses de traitement prévues dans le projet de loi. En même temps, il est important pour nous de reconnaître et de comprendre que, bien que le projet de loi porte en partie sur la rémunération, il porte en général sur d'autres sujets également. Cela semble avoir échappé à l'attention de tous les partis d'opposition.
Je signale en particulier la disposition visant à créer des tribunaux de la famille. Je vois que la députée de London-Ouest est à la Chambre. Comme elle a pratiqué le droit devant ces tribunaux à London, elle doit savoir que la structure de tribunal de la famille a d'abord été mise à l'essai dans la ville de London, en Ontario, où elle s'est révélée une véritable bénédiction. Cette structure a permis de rationaliser le système judiciaire dans un domaine qui est crucial pour la vie familiale et pour le bon fonctionnement d'une collectivité.
Quand des conflits de cet ordre aboutissent devant le tribunal, il est important d'avoir un système qui permet de résoudre les conflits de façon aussi efficace que possible.
Je voudrais parler du climat dans lequel se déroule ce débat et plus particulièrement des propos que l'on a tenus au sujet de certains membres de la magistrature et de la magistrature en général. Quand j'entends dire, par exemple, que «les juges devraient être indépendants du Parlement, mais non de leur collectivité», cela me paraît plein de bon sens. Les juges vivent au sein de collectivités. Ils devraient être en contact avec leurs collectivités, et c'est une bonne chose. Voilà pourquoi le gouvernement a créé des comités composés de membres de la collectivité qui ne sont pas tous des juges, mais des profanes également. Ces comités étudient avec soin les candidatures des juges et passent des jugements avant de les renvoyer au ministre.
Je pense aux implications de la déclaration selon laquelle les juges devraient être indépendants du Parlement, mais non de leurs collectivités. Le député laisse entendre que si un groupe communautaire ou un particulier n'aiment pas un jugement même si ce dernier est fondé en droit, ils peuvent demander des comptes au juge.
Un député de Calgary a fait valoir, au sujet de la décision Rosenberg, que le juge en cause faisait la promotion de ses propres points de vue et objectifs politiques. Ce sont de très graves accusations contre un groupe ou des gens qui sont eux-mêmes des fonctionnaires et qui ne peuvent pas se défendre. Avant de recourir au privilège de la Chambre, au privilège de parler librement et publiquement sans risques, je suis d'avis que nous devrions faire preuve d'une grande prudence.
Quand on observe la situation dans d'autres pays comme Cuba, notamment, où la population ne peut exercer ses droits démocratiques, on recherche certaines caractéristiques pour mesurer le respect des principes démocratiques. Il doit y avoir une assemblée parlementaire où les représentants du peuple sont élus, où plus d'un parti peuvent se faire la lutte. Il doit y avoir des privilèges parlementaires en vertu desquels les parlementaires peuvent parler librement. Il doit y avoir aussi un système judiciaire indépendant. Dans tout régime démocratique, le pouvoir judiciaire est indépendant et l'on n'a pas à s'inquiéter de la question de savoir si les salaires des juges leur sont versés ou non ni de la possibilité que des juges soient destitués ou punis par un groupe communautaire faisant la promotion d'un programme particulier, s'ils ont rendu une décision fondée en droit et conforme à la Constitution.
Les réformistes jouent avec un concept très sérieux. L'indépendance judiciaire est plus importante que presque tout autre principe démocratique. Elle est certainement aussi importante que notre privilège de parler librement à la Chambre, et j'estime que les députés d'en face devraient faire très attention de ne pas en abuser.
Nous devons garder à l'esprit, que nous soyons du côté de l'opposition ou du gouvernement, qu'en tant que parlementaires nous faisons partie du système juridique. Nous légiférons. Nous faisons autant partie du système juridique que les juges, les policiers, les victimes, les criminels et les parties à des poursuites au civil.
Il nous incombe, lorsque nous débattons ces principes, de maintenir le débat à un niveau où nous ne nous trouvons pas à miner les institutions qui nous sont chères. Une magistrature indépendante est une institution tellement fondamentale à notre démocratie qu'elle mérite d'être protégée. Elle doit être encouragée. Elle ne doit pas être attaquée de façon irresponsable et mal informée. Malheureusement, à mon avis, c'est ce que nous entendons aujourd'hui.
Les juges ne peuvent pas répondre parce que cela ne convient pas en raison de leur position. Cela en fait des cibles faciles pour les gens qui cherchent à semer la peur et l'intolérance dans le but de promouvoir leurs propres objectifs politiques.
Nous devons être très prudents pour préserver ces droits précieux et nous devons voir à ce que notre magistrature soit respectée et soit bien traitée pour qu'elle puisse continuer de faire du bon travail.
Pour ces raisons, je voterai contre la motion no 1. Je suis très heureuse d'appuyer le projet de loi C-37. J'aimerais seulement que nous accordions plus d'attention à certains des aspects positifs de ce projet de loi, notamment les dispositions concernant les tribunaux de la famille.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois que vous trouverez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante:
Que si un vote par appel nominal différé est demandé à la conclusion de tout débat sur des projets de loi d'initiative gouvernementale durant les ordres du gouvernement aujourd'hui, il soit réputé différé à la fin de la période prévue pour les ordres émanants du gouvernement mardi, le 9 juin 1998.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu la motion présentée par le whip adjoint du gouvernement. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
[Français]
LA LOI SUR LES JUGES
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport sans amendement; ainsi que de la motion no 1.
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'ai écouté le discours de ma collègue et amie de Windsor—St. Clair, qui disait qu'il ne fallait pas absolument ou exclusivement mettre l'accent sur le salaire, mais qu'il y avait aussi d'autres enjeux dont il fallait parler et sur lesquels il fallait se pencher.
C'est bien beau tout cela, mais ce n'est pas parce qu'il y a d'autres enjeux qu'il faut nécessairement occulter la question du salaire des juges. On a beau parler de philosophie, d'indépendance judiciaire, de séparation des pouvoirs, de Montesquieu, de tout ce qu'on veut, il n'en reste pas moins que dans le projet de loi actuel, il y a un article très important qui traite du salaire des juges.
Mon collègue et ami de Berthier—Montcalm a présenté une motion, la motion no 1, à l'étude à l'heure actuelle, faisant en sorte de supprimer l'article 5 et, ainsi, modifier le projet de loi C-37.
L'article 5, disons-le clairement, n'a pas de bon sens. Cela n'a absolument pas de bon sens. Qu'en serait-il, à l'heure actuelle, du projet de loi s'il n'y avait pas d'article 5? Les juges ont déjà eu, le 1er avril 1997, 2,08 p. 100 d'augmentation et, le 1er avril 1998, une autre augmentation de 2,08 p. 100. Ça, c'est déjà là, avant le projet de loi C-37.
Or, le gouvernement a décidé de leur en donner plus, comme si plus de 4 p. 100, en calculant le taux composé, n'était pas assez. On leur donne 4,1 p. 100 d'augmentation au 1er avril 1997 et c'est rétroactif—cela fait un bon magot dans les poches—et une autre augmentation de 4,1 p. 100 au 1er avril 1998, ce qui fait qu'à un taux composé, ils recevront une hausse de salaire de plus—et là il faut bien s'attacher—de 13 p. 100.
Pendant qu'on coupe dans les transferts aux provinces, pendant que les chômeurs souffrent—on parle d'un surplus de 19 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi—pendant qu'on coupera aux provinces 130 milliards de dollars d'ici l'an 2003, pendant qu'on coupe l'aide au secteur de la santé et qu'on ferme des lits d'hôpitaux partout au Canada, on veut accorder une hausse de 13 p. 100 à des juges.
On ne dit pas que les juges ne le méritent pas, on ne dit pas que les juges ne font pas un bon travail. On reconnaît cela. On ne dit pas que leur travail n'est pas important, au contraire, moi-même, à titre d'avocat-juriste, je considère que le travail des juges dans une société est fondamental à une société de droit.
Or, le problème, c'est qu'en tant que société, on ne peut pas se permettre cette augmentation. On ne peut tout simplement pas se le permettre. C'est une question de choix et de priorités. Et même, cela va plus loin, c'est une question de choix de société.
Nous, du Bloc québécois, croyons que la priorité de tout gouvernement doit être les plus démunis de notre société, les malades, les personnes âgées, ceux qui ne peuvent prendre soin d'eux-mêmes, ceux qui ont besoin d'un salaire ou d'un minimum décent pour vivre dans notre société moderne.
On peut toujours dire: «Écoutez, s'il n'y a pas d'augmentation, on ne sera pas capables d'attirer des candidats de qualité», mais à ma connaissance, et je connais bien le milieu, il y a des listes d'attente pour devenir juges. Le fait qu'on n'accorde pas une augmentation de 13 p. 100, mais qu'on en consente une de 4 p. 100 n'empêchera personne de se porter candidat à la magistrature, loin de là. Il y a des listes d'attente, parce qu'un poste de juge est un poste prestigieux et important. Il n'y a pas que le salaire qui entre en ligne de compte.
Encore une fois, on voit que ce gouvernement fait les mauvais choix et décide de donner de l'argent à ceux que l'on nommera plus tard—parce qu'il ne faut pas se le cacher, ce sont des nominations politiques; on n'est pas élu juge, c'est une nomination du gouvernement—plutôt que d'en donner aux femmes, aux hommes et aux enfants qui, dans notre société, ont le plus besoin de l'aide de l'État.
C'est avec un plaisir évident que j'appuie avec enthousiasme la motion de mon collègue et ami de Berthier—Montcalm, parce que le choix du Bloc québécois, c'est le choix du peuple et non le choix des privilégiés.
[Traduction]
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence.
Permettez-moi d'abord de dire que nous n'avons vraiment pas besoin d'un sermon de la députée de Windsor sur la façon dont nous devrions nous exprimer à la Chambre. Nous sommes tous au courant des privilèges et obligations qui sont les nôtres en tant que députés à la Chambre.
Nous sommes ici dans la plus haute cour du pays. C'est ici qu'il faut dire ce qui doit être dit. Nous sommes au-dessus de la Cour suprême du Canada. Nous avons le droit de faire part à la Chambre des préoccupations de nos électeurs face aux injustices du système judiciaire dont nous entendons parler à chaque jour.
Un nombre croissant de Canadiens sont en train de perdre confiance dans le système judiciaire. En fait, 52 p. 100 d'entre eux font peu ou pas du tout confiance au système judiciaire actuel. À titre de députés du Parlement, nous avons donc le devoir d'exprimer à la Chambre des préoccupations de nos électeurs et de dénoncer les injustices dont ils nous font part. Si la cause Feeney est un bon exemple du manque de confiance à l'égard du système judiciaire, il ne faut pas hésiter à y faire allusion.
Si le projet de loi est adopté, les juges obtiendront très certainement une augmentation de 8,3 p. 100 sur une période de deux ans. Ce n'est vraiment pas le moment de discuter de salaires, surtout que les députés se font beaucoup critiquer relativement à des augmentations de 8 p. 100 sur une période de quatre ans, même si leur traitement est resté le même depuis 1991.
La question dont je veux discuter relativement à l'amendement est celle de savoir si les juges ont besoin d'une augmentation de traitement ou méritent une telle augmentation. Les députés qui ont déjà parlé de cet amendement ont soulevé la question de savoir si les juges avaient besoin d'une augmentation de salaire. Je veux citer des chiffres tirés de l'échelle de traitement des juges, afin que les Canadiens sachent exactement quels étaient les salaires des juges en avril 1998.
À la Cour suprême, le juge en chef gagne 208 200 $. Les autres juges touchent 192 900 $. Au Tribunal fédéral et à la Cour canadienne de l'impôt, le juge en chef et les juges en chef adjoints gagnent 177 700 $, tandis que les simples juges touchent 162 300 $. Dans les cours supérieures, le juge en chef et les juges en chef adjoints gagnent 177 700 $, alors que les autres juges touchent 162 300 $. Ces salaires sont de loin supérieurs à ceux des députés qui sont membres de la plus haute instance au pays.
Est-ce que ces juges méritent une augmentation de salaire? On ne peut répondre à cette question que si les juges sont évalués par un jury indépendant. Il est certes ironique d'entendre les juges se plaindre des décisions prises au niveau provincial concernant leur salaire et dire que les gouvernements provinciaux ne devraient pas avoir le droit de plafonner leur salaire. N'est-ce pas ironique?
Les députés sont évalués tous les quatre ou cinq ans par les gens qui payent leur salaire. Les juges devraient donc être eux aussi évalués afin qu'ils puissent obtenir les augmentations qu'ils méritent.
L'autre chose que j'aimerais dire, c'est que les juges sont nommés à vie. Les députés ne le sont pas. Le mandat des juges devrait être limité.
Malheureusement, le projet de loi C-37 n'a pas été modifié de façon à instaurer un nouveau système pour nommer les juges, un système plus transparent et plus ouvert. Aujourd'hui, nous avons entendu dire que le système actuel était entaché de favoritisme. Les juges sont nommés selon un système de favoritisme politique, selon leurs liens avec le système politique, avec le parti au pouvoir. C'est la façon normale de devenir juge. Il faut que le processus soit beaucoup plus transparent et qu'il soit soumis à l'examen des politiciens élus.
Récemment, le procureur général du Manitoba, M. Vic Toews, s'est attiré des critiques pour être intervenu dans le processus de nomination des juges. Personnellement, je l'en félicite. S'il agit au nom des citoyens du Manitoba, il a certainement le droit de s'assurer que les lois fédérales sont respectées et que les juges qui sont nommés sont les meilleurs.
J'aimerais également signaler à la Chambre que, aux termes d'un accord entre le fédéral et le Manitoba, trois des juges fédéraux doivent être domiciliés à l'extérieur de Winnipeg. C'est ce dont ont convenu le gouvernement fédéral et la province. Ces derniers temps, on a exercé des pressions pour que ce nombre soit réduit.
Je crois que les juges doivent refléter la mosaïque de la province. Comme 40 p. 100 de la population vit à l'extérieur de la ville de Winnipeg, je pense que 40 p. 100 des juges fédéraux du Manitoba devraient aussi vivre à l'extérieur de la ville. J'aimerais que la ministre de la Justice soit d'accord là-dessus.
Le gouvernement ne devrait pas concentrer ses efforts sur l'augmentation du traitement des juges. Nous devrions nous concentrer sur la présentation d'une charte des droits des victimes et sur l'apport de modifications substantielles à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je termine en mentionnant un article publié le 15 mai dans le Free China Journal. Cet article m'a surpris. Son titre disait «la loi sur la récompense des victimes est adoptée».
Le gouvernement de Taïwan a adopté récemment une nouvelle loi visant à corriger l'impression du public que les mesures légales ne protègent que les délinquants. La majorité des citoyens de notre pays croient certainement que les lois sont là pour ceux qui les enfreignent, et pas pour les citoyens respectueux de la loi. L'assemblée législative de Taïwan vient d'adopter une loi qui prévoit une indemnisation rapide des victimes d'un acte criminel et de leur famille. Cette loi sans précédent prévoit que, si un acte criminel entraîne la mort d'une personne qui est soutien de famille, la famille peut demander une indemnisation en raison de ces tristes circonstances.
Par le passé, le gouvernement avait aussi tenté d'offrir une indemnisation directe, mais il a constaté que ce type d'indemnisation était souvent difficile à obtenir. Dans bien des cas, les suspects ne pouvaient être identifiés positivement ou n'avaient pas été arrêtés. Les victimes ne pouvaient donc pas être indemnisées légalement, et les familles touchées se retrouvaient dans la misère.
Cela montre bien que les gouvernements s'intéressent aux victimes de leur pays. C'est une première étape dans l'entreprise de veiller à la sécurité financière des familles. Je vais envoyer une copie de cet article à la ministre de la Justice.
Il y a certainement beaucoup d'autres enjeux qui devraient préoccuper le gouvernement davantage que les augmentations de salaire des juges fédéraux. Les Canadiens attendent depuis longtemps que les choses changent. Malheureusement, le gouvernement a tendance à consacrer son temps aux questions d'argent plutôt qu'aux enjeux qui intéressent vraiment les Canadiens.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion no 1 concernant le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges. La motion présentée par le député bloquiste propose: Que le projet de loi C-37 soit modifié par suppression de l'article 5.
L'article 5 concerne la hausse de rémunération des juges. Ces derniers recevraient une hausse rétroactive de 4,1 p. 100 pour la période allant du 1er avril 1997 au 31 mars 1998 et une seconde hausse de 4,1 p. 100 pour la période allant du 1er avril 1998 au 31 mars 1999. Par la suite, leur rémunération serait examinée par un nouvel organisme, la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux. En définitive, les juges obtiendront une hausse de rémunération de 8,3 p. 100 sur deux ans. Il convient de rappeler que le traitement moyen des juges à l'heure actuelle est d'environ 140 000 $ par année.
Il y a quelques instants, le député de Windsor—St. Clair a dit qu'en parlant des juges et des décisions scandaleuses qu'ils ont rendues, nous minons leur prestige et celui des tribunaux. Je répondrai à mon collègue que ce n'est pas nous qui minons leur prestige, mais bien les juges qui prennent des décisions aussi ridicules. Plusieurs de mes collègues ont cité des exemples révoltants de décisions prises récemment par des juges. Je donnerai moi-même quelques exemples de décisions semblables rendues dans ma propre région. Si ces juges représentaient mieux leurs communautés et les valeurs de celles-ci, nous ne serions pas confrontés à ces problèmes.
Pour faire suite à ce que disait le député de Windsor—St. Clair, je rappelle qu'un sondage tenu en juillet dernier indiquait que plus de 50 p. 100 des personnes sondées faisaient peu confiance aux juges. Il y a forcément quelque chose qui fonctionne mal, si la moitié de la population estime que les juges ne font pas bien leur travail. Le moment est venu de s'attaquer à un problème majeur.
Plusieurs de mes amis de la région de Vancouver-Nord travaillent dans la GRC. La Gendarmerie dispense les services de police dans cette région. Certains d'entre eux m'ont parlé de leur mécontentement au sujet des juges et de la difficulté, pour un policier, d'obtenir que des accusations soient portées et que le tribunal y donne suite. C'est qu'il existe de nombreuses lacunes ou problèmes techniques qui viennent faire obstacle au dépôt d'accusations au départ et, par la suite, à l'obtention d'une condamnation. Par ailleurs, il est extrêmement difficile de faire emprisonner quelqu'un.
Les policiers qui se heurtent quotidiennement à ce genre de problème vivent une situation très frustrante. Les policiers travaillent fort pour assurer la sécurité dans nos rues et pour réprimer la criminalité. Pourtant, les agents débutants ont dû subir un gel salarial pour une durée de cinq ans et le premier échelon salarial après trois ans d'ancienneté se situe entre 50 500 $ et 52 400 $ environ. C'est 90 000 $ de moins que les juges qui président les procès des criminels que ces agents de police amènent devant eux.
Comme beaucoup de mes collègues l'ont mentionné, la plupart des Canadiens commencent à ne plus voir le système de justice comme un système de justice, mais plutôt comme un système de juristes où les juges peuvent partager leurs expériences entre eux, discuter de distinctions subtiles et de moyens d'ouvrir des échappatoires dans les lois adoptées par le Parlement. C'est la volonté du Parlement qui devrait l'emporter devant les tribunaux.
Dans la région de Lynn Valley, comme dans beaucoup d'autres régions du Canada, il y a un nombre appréciable de crimes commis par des jeunes. Les électeurs de ma circonscription, en fait, plus de 90 p. 100 des Canadiens, voudraient que des modifications majeures soient apportées à la Loi sur les jeunes contrevenants et ils aimeraient voir quelques juges attribuer des peines mieux adaptées aux crimes commis par les jeunes. Par exemple, en mai, de jeunes contrevenants de ma circonscription accusés d'avoir commis un crime dévastateur dans la région de Lynn Valley en mars dernier devaient comparaître devant un tribunal.
Au milieu de la nuit, ces jeunes auraient attaqué une personne dans la rue et l'auraient battue avec tant de force que de la chirurgie plastique a été nécessaire. Ils auraient ensuite saccagé une maison et sérieusement endommagé l'auto presque neuve des gens de cette maison. Ils ont été reconnus et arrêtés. Évidemment, personne ne peut révéler leurs noms. Il a été extrêmement frustrant pour le père de la victime, qui voudrait intenter des poursuites au civil contre ces jeunes, de n'avoir pas pu obtenir les noms des jeunes avant qu'ils comparaissent devant le tribunal. Dans la collectivité, le sentiment général est que ces jeunes devraient être nommés, particulièrement lorsqu'ils ont été condamnés.
Les défendeurs devaient se présenter devant le tribunal en mai, mais seulement quelques-uns d'entre eux étaient présents. Qu'a fait le juge? Il a fait une déclaration: «Vous devriez dire à vos amis qu'ils auraient intérêt à se présenter.» Il a fixé une nouvelle date d'audience qui retarde le jugement de quelques mois de plus.
Cela est tout à fait ridicule et révoltant. Le juge aurait dû émettre sur-le-champ des mandats d'arrestation contre les jeunes qui ne se sont pas présentés. Mais non, il a fait cette déclaration, presque avec désinvolture.
C'est le genre de commentaire qui nuit à la réputation des juges. Peut-être sont-ils tellement blasés après avoir entendu beaucoup de causes qu'ils ne prennent plus rien au sérieux. Les choses sont à un point tel qu'il faut commencer à fixer des sentences minimales à imposer par les juges. Sans cela, ils ne feront rien.
Dans un autre cas survenu il y a peu de temps dans la région de Vancouver, un détenu s'est échappé de l'institution de Kent en se cachant dans une boîte de carton. Il a demandé aux autorités une table pour son téléviseur, tout en sachant qu'il n'y en avait pas. Il a alors lui-même suggéré qu'une boîte de carton pourrait très bien faire l'affaire.
Les responsables du centre lui ont apporté une belle grosse boîte sur laquelle il a installé son poste de télévision. Pendant quelques mois, il s'est affairé à renforcer la boîte, y ajoutant des bouts de contre-plaqué et d'autre matériel recueilli à l'atelier. Il savait qu'un de ses amis devait être libéré sous peu. La veille de la libération de son ami, notre homme s'est caché dans la boîte que son ami a alors apportée dans sa cellule. On l'a entreposée pour la nuit, croyant qu'il s'agissait des effets personnels du prisonnier qui devait sortir le lendemain.
Personne n'a jamais vérifié le contenu de la boîte. Le lendemain matin, la boîte a été remise au prisonnier libéré et transportée dans la valise d'une voiture.
Notre homme est alors sorti de sa boîte, libre. Il a été repris peu de temps après. Il s'était déjà évadé à plusieurs reprises.
Ce qu'il y a de plus ridicule dans tout cela, c'est que lorsqu'il s'est présenté devant le juge, ce dernier l'a certes condamné à une peine d'emprisonnement supplémentaire, mais a considéré cette deuxième peine comme étant concomitante à la première. On ne lui a en réalité pas imposé une nouvelle sentence. Il s'en est donc sorti sans peine supplémentaire. Une évasion d'un centre de détention ne veut donc rien dire. Les détenus sans sortent indemnes. On les prie presque de recommencer.
Il faut féliciter le détenu d'avoir fait preuve de créativité en s'évadant dans cette boîte en carton, mais il n'y a aucun compte à rendre à ce sujet et le juge mine la confiance de la population en permettant une situation ridicule comme celle-là.
Je sais qu'un ministériel a essayé de soumettre à la Chambre un projet de loi d'initiative parlementaire qui mettrait un terme à ces peines concurrentes. On ferait purger leurs peines aux gens pour ce type de crime.
Le détenu avait commis des vols de banque et avait été emprisonné pour cela à un certain nombre de reprises, et il a été condamné à toutes ces peines concurrentes. Imaginez, on vous impose une peine pour le premier crime et par la suite, peu importe ce que vous ferez, vous purgerez toutes vos peines concurremment.
Ce que nous signalons vraiment, c'est que si on doit augmenter le traitement des juges, qui est déjà très généreux puisqu'il est de 140 000 $ par année en moyenne, il est à peu près temps de leur demander de rendre un peu plus de comptes. L'opposition officielle propose notamment de choisir les juges à la suite d'un processus plus démocratique.
Si nous ne pouvons en arriver au point où les électeurs élisent les juges eux-mêmes pour vraiment refléter les valeurs de la collectivité, prévoyons au moins une sorte de processus public grâce auquel les parlementaires ou les députés provinciaux pourront, à tout le moins, faire subir un interrogatoire serré pour tout connaître des gens qui vont être nommés juges, et notamment leur passé. Je pense que c'est une approche raisonnable. C'est une mesure que nous devrions adopter et avant que n'importe quel d'entre nous accepte d'adopter une mesure législative comme le projet de loi C-37, qui prévoit des augmentations de traitement très généreuses, nous devrions insister pour que les juges soient tenus de rendre des comptes.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le vote par appel nominal sur la motion no 1 est différé.
[Traduction]
La Chambre passe maintenant à l'étude de la motion no 2.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.) propose:
Motion no 2
Que le projet de loi C-37, à l'article 6, soit modifié par adjonction, après la ligne 34, page 3, de ce qui suit:
«(6.1) Le rapport déposé devant chaque chambre du Parlement en vertu du paragraphe (6) est déféré par cette chambre, dès son dépôt ou, si la chambre ne siège pas ce jour-là, dès le jour de la séance suivante de cette chambre, à un comité de celle-ci, désigné ou établi pour examiner les questions relatives à la justice.
(6.2) Le comité mentionné au paragraphe (6.1) peut effectuer une enquête ou tenir des audiences publiques au sujet du rapport qui lui a été déféré en vertu de ce paragraphe; s'il le fait, le comité fait rapport, au plus tard soixante jours de séance après le renvoi, de ses conclusions à la chambre qui l'a établi ou désigné.
(6.3) Pour l'application du paragraphe (6.2) «jour de séance» s'entend d'un jour où la Chambre des communes ou le Sénat, selon le cas, siège.»
—Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir pour parler de la motion no 2. Le projet de loi C-37 établit la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux qui doit, aux termes du paragraphe 26(1), déterminer si les traitements et autres avantages pécuniaires consentis aux juges sont adéquats. La commission commencera ses travaux le 1er septembre 1999 et elle refera le même exercice à partir du 1er septembre tous les quatre ans par la suite. La commission doit soumettre un rapport faisant état de ses recommandations au ministre de la Justice dans les neuf mois qui suivent le début de ses travaux. Cela est prévu au paragraphe 26(2).
Le ministre de la Justice dépose un exemplaire du rapport de la commission devant chaque Chambre du Parlement, comme l'exige le paragraphe 26(6). Il doit répondre au rapport de la commission dans les six mois qui suivent sa réception, aux termes du paragraphe 26(7).
On ne donne pas l'occasion ni le pouvoir au Parlement de réagir au rapport. La motion no 2 donne au comité concerné, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, l'occasion d'examiner le rapport de la commission, de convoquer des témoins et d'en faire rapport à la Chambre.
Pourquoi vouloir une telle chose? D'abord, pour déterminer, au nom de la population du Canada, si les recommandations formulées dans le rapport sont justes pour la société en général, pour la population du Canada.
Les hausses de traitement proposées dans ce projet de loi pour les juges fédéraux, qui s'élèvent de 5 000 $ à 17 000 $ sur deux ans, me rappellent un peu le rapport qui a été déposé à la Chambre et qui recommande que les députés reçoivent une hausse de traitement de 2 p. 100 au cours des quatre prochaines années. Tout cela à une époque où tellement de familles en arrachent.
C'est le cas de la famille de six enfants de Kim Hicks, qui, avec environ 30 000 $ par année, a de la difficulté à joindre les deux bouts et à payer les traitements dentaires et les examens de la vue. Des milliers de familles au Canada éprouvent de graves difficultés financières et sont au bord de l'éclatement. Si ce projet de loi est adopté, ces familles vont devoir payer plus d'impôts pour payer les hausses de traitement des juges, lesquels, comme mon collègue l'a souligné, gagnent 140 000 $ par année, en moyenne. Le juge en chef de la Cour suprême du Canada touche plus de 200 000 $ par année.
Il n'est pas juste que ce projet de loi demande au Parlement d'utiliser son pouvoir d'imposition pour encore affaiblir la stabilité financière de milliers et de milliers de particuliers et de familles du pays. Cela s'applique aussi au rapport qui a été déposé à la Chambre et qui propose que les députés obtiennent une autre augmentation de 2 p. 100 au cours des quatre prochaines années. Tout cela, je le répète, à un moment où les parents ont du mal à subvenir aux besoins de leur enfants.
Pourquoi les ponctionner encore? Pour donner une augmentation aux juges et aux députés. Cependant, cela ne convient pas. Cela ne convient pas parce que c'est injuste.
Pour relever le traitement des juges et des députés, il suffit de diminuer leurs impôts. En fait, je favorisais davantage une diminution d'impôt de 10 p. 100 plutôt qu'une hausse de traitement de 15 p. 100, mais il faut accorder cette diminution à tous les Canadiens. À défaut de le faire, il faut se garder d'alourdir le fardeau fiscal des Canadiens pour verser une hausse de traitement aux juges et aux députés. Ce serait inconvenant, tout simplement parce que ce n'est pas juste.
La plus grande menace à la stabilité économique des contribuables et de leurs familles est le pouvoir illimité du gouvernement de les taxer au maximum. C'est absolument inacceptable. Alors, lorsque la commission dit dans son rapport qu'il faut augmenter les salaires des juges aux dépens des familles canadiennes et de la société en général, nous devons nous poser des questions et faire un examen de conscience. Est-ce juste? Je crois que la plupart d'entre nous seraient prêts à admettre que ce n'est pas juste. Comment pouvons-nous comparer un juge dont le salaire annuel moyen est de 140 000 $ à une famille de six qui a du mal à joindre les deux bouts avec un revenu de 30 000 $ par année?
Si ce projet de loi est adopté sous sa forme actuelle sans examen minutieux, certains de ces juges recevront une augmentation de salaire de 17 000 $ sur les deux prochaines années. Nous, en tant que députés, recevrons une augmentation annuelle de 2 p. 100, soit presque 5 000 $ de plus au cours des quatre prochaines années. C'est ce que nous allons recevoir. Comment? En vertu d'une loi adoptée par la majorité à la Chambre. Nous irons chercher ces 5 000 $ pour chacun d'entre nous dans les poches des contribuables, dans les poches des parents qui ont du mal à habiller et à nourrir leurs enfants, à leur donner un toit, à leur donner une éducation et à s'occuper d'eux. Et nous ferons encore pire en adoptant un projet de loi qui donnera aux juges fédéraux une augmentation de plus de 8 p. 100 au cours des deux prochaines années.
Il y a quelque chose qui cloche dans tout cela. C'est simplement le pouvoir illimité et abusif de la Chambre, du gouvernement, de taxer à l'extrême la richesse que les Canadiens créent eux-mêmes chaque année.
Dans le moment, le Canada est le pays du G7 où les impôts sont le plus élevés. La famille moyenne dépense plus au titre des impôts qu'au titre de la nourriture, des vêtements et du logement. On dit qu'un enfant sur cinq vit dans la pauvreté. Qu'est ce que cela veut dire au sujet de leurs familles? Elles vivent dans la pauvreté également. Pourquoi? Parce que les impôts sous toutes leurs formes engloutissent environ 50 cents sur chaque dollar que gagnent ces familles. Ce projet de loi leur enlèvera encore plus d'argent.
Ce que nous faisons aux Canadiens est répréhensible. Nous sommes ici pour protéger les droits des Canadiens qui nous ont envoyés ici. Nous ne protégeons pas leurs droits lorsque nous faisons ce genre de choses. Nous ne protégeons pas leurs droits lorsque nous réclamons des augmentations de 2 p. 100 à leurs dépens. Ce n'est pas correct. Ce n'est pas juste. C'est un geste répréhensible qu'il y aurait lieu de reconsidérer.
Je ne peux pas retourner dans ma circonscription, Crowfoot, et dire à mes électeurs que c'est juste. Je leur dirai que c'est injuste. Nous sommes tous pris dans cette affaire. Pourquoi? Parce que le gouvernement a simplement décidé ce qu'il allait faire, et il le fera. Il va exercer son pouvoir pour aller chercher plus d'argent dans les poches des Canadiens. Pourquoi? Parce que les juges ont besoin d'un salaire plus élevé que les 140 000 $ qu'ils touchent déjà et que nous avons besoin de plus d'argent aussi. Ce n'est pas correct.
M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre part à ce débat sur la motion de mon collègue de Crowfoot. Mon collègue demande que l'article 6 soit modifié de façon à ce que tout rapport déposé par la ministre devant la Chambre soit déféré au Comité de la justice afin qu'il puisse faire enquête ou tenir des audiences publiques au sujet du rapport qui lui a été déféré et faire rapport de ses conclusions à la Chambre. Cet amendement fait énormément de sens.
Il est rare d'entendre mes collègues de l'autre côté de la Chambre, notamment le député qui préside le Comité de la justice, dire qu'il y a des points vraiment excellents dans le projet de loi C-37. S'il y a des points vraiment excellents, cela suppose qu'il y en a de vraiment très mauvais. Je me demande pourquoi les ministériels ne les reconnaissent pas et ne les modifient pas. Je me demande pourquoi ils ne prennent pas part au débat et n'essaient pas de comprendre ce que nous essayons d'accomplir en proposant ces amendements.
La ministre de la Justice est censée déposer un exemplaire du rapport de la commission, mais le Parlement ne peut y répondre. Cette motion lui permettrait de le faire. Comme à beaucoup d'autres égards, le gouvernement libéral estime ne pas avoir à rendre de comptes au Parlement. S'il ne tient pas compte de cet amendement dans le projet de loi C-37, ce sera une nouvelle preuve de son attitude antidémocratique.
Ce gouvernement ne cesse d'affaiblir le rôle des parlementaires. Nous l'avons vu récemment avec l'activisme judiciaire. Chaque jour, nous voyons les droits des criminels l'emporter sur ceux des victimes au travers des peines avec sursis imposées par les tribunaux. Nous le voyons tous les jours de la semaine.
Tout récemment, dans l'affaire Rosenberg c. le Canada, une lesbienne a contesté la constitutionnalité de la Loi de l'impôt sur le revenu qui met Revenu Canada dans l'obligation de refuser d'enregistrer le régime de retraite privé de son employeur si celui-ci accorde des prestations de décès aux partenaires de même sexe. Dans une décision rendue à l'unanimité le 23 avril, la Cour d'appel de l'Ontario a décidé d'interpréter le terme conjoint comme s'appliquant aux partenaires de même sexe.
Je pense que le gouvernement se doit de défendre sa position sur la définition du terme conjoint. Si un recours à une cour d'appel ne suffit pas, il faut soumettre la question au Parlement sous forme d'un débat. Démocratie oblige. Lorsqu'il s'agit de modifier les définitions contenues dans nos lois ou d'apporter d'autres modifications législatives, c'est à nous, la plus haute cour du pays, d'en décider.
Au cours de ce débat, il nous faudra tenir compte des souhaits exprimés par les Canadiens que nous représentons. Il nous faudra nous demander ce qu'ils attendent de la Chambre des communes. Il ne nous restera plus ensuite qu'à les bien présenter et à parler en leur nom.
Quand il s'est prononcé en faveur du projet de loi C-33, l'ancien ministre de la Justice a dit lui-même que «ce n'est pas aux tribunaux de définir la politique concernant des questions comme celles-ci. C'est le rôle des législateurs et nous devrions avoir le courage de le faire.» Je crois que tout le monde peut souscrire à cette déclaration. Il a fait là une déclaration pleine de bon sens. L'ennui, c'est que le gouvernement fait une belle déclaration mais que, lorsque vient le moment de l'appliquer, il n'en fait rien. C'est le genre d'amendement qui pourrait être utile dans les circonstances.
Cela se résume à une question. La ministre de la Justice actuelle va-t-elle laisser les tribunaux décider de la nouvelle définition du terme conjoint à la place du Parlement? Pour ma part, j'ai trop vu ces tribunaux rendre des décisions qui sont devenues par la suite des lois. Ils commencent à diriger le pays.
Le plus haut tribunal du pays, c'est nous. C'est nous qui sommes censés légiférer, pas la Cour suprême du Canada. Elle a une tâche essentielle à accomplir certes, mais ce n'est pas celle consistant faire passer la volonté de neuf personnes non élues, qui n'ont de comptes à rendre à personne, avant la volonté de 30 millions de Canadiens. Nous sommes les représentants de ces 30 millions de Canadiens et nous devons exprimer leurs avis sur les lois qui gouvernent notre pays.
Les tribunaux cherchent constamment à contourner le processus démocratique. Et on peut en dire autant de la ministre de la Justice qui dépose le rapport mais ne permet pas qu'il fasse l'objet d'un débat au Parlement. C'est la même chose que lorsqu'on impose la clôture pour mettre fin au débat sur des projets de loi. Cela se produit constamment. On me refuse, à moi député, le droit de représenter l'opinion de la population de Wild Rose. En me refusant ce droit de débattre de ces questions ou de les examiner, on me refuse la capacité de servir la population de ma circonscription. C'est pourtant pour cela que j'ai été envoyé ici.
Lorsque j'ai été élu, j'ai reçu des pouvoirs et l'un de ces pouvoirs est de servir. Ce que l'on fait en ce moment m'enlève complètement ce pouvoir, car les décisions sont prises à huis clos, ce qui est antidémocratique. Qu'on le veuille ou non, c'est ainsi que cela se fera.
La poignée de membres influents du parti se réunit à huis clos pour prendre les décisions. Puis ils instruisent la masse des députés du parti sur la façon de voter. Ils s'exécutent, car autrement ils en subiraient les conséquences. Quel genre de représentation est-ce là?
Récemment, je me suis fait un nouvel ami à Airdrie, en Alberta. Cette personne, déjà avancée en âge, est un ancien combattant de la Deuxième Guerre. Il est paraplégique et a beaucoup de mal à vivre avec ce qu'il reçoit et l'aide que nous pensons qu'il devrait avoir et qu'il n'a pas.
J'ai été voir cette personne et j'ai été vraiment honteux et confus lorsqu'il m'a dit: «J'ai une médaille d'honneur. J'ai une médaille de bravoure. Je voudrais vous donner ces deux médailles pour que vous les rendiez au gouvernement. Rendez-les au ministre de la Défense nationale en lui disant que je ne les veux plus, car je ne me suis pas battu pour le genre de choses que l'on fait aujourd'hui. Je ne me suis pas battu pour la façon non démocratique dont on opère.» Il exige que nous changions des choses.
Il croit que ses camarades qui gisent en terre outre-mer, qui se sont battus, qui ont donné leur vie pour leur pays pendant la grande guerre, se retourneraient dans leur tombe s'ils savaient ce qui se passe aujourd'hui dans un système démocratique qu'ils se sont efforcés de préserver au prix de si grands sacrifices.
J'exhorte tous les députés à appuyer la motion no 2 pour que ce projet de loi devienne au moins un peu plus supportable et témoigne de la valeur de tous les députés. Les députés devraient avoir l'occasion d'être les représentants que tant de députés veulent être, mais qu'ils ne peuvent pas être à cause de processus antidémocratiques.
Il faut mettre fin à la dictature en commençant par des mesures semblables. Les mesures devraient nous être soumises pour que nous les scrutions. Nous devrions discuter par exemple de la définition de conjoint. Les petits groupes minoritaires qui détiennent le pouvoir ne devraient pas définir ces choses-là à notre place et nous dicter leur volonté. La population en général, que nous servons, devrait avoir son mot à dire sur ce que doit être le traitement d'un juge ou d'un député. Que les citoyens prennent ces décisions-là. Ce sont eux qui paient, il ne faut pas l'oublier.
Il est scandaleux que, dans cette assemblée, nous en soyons arrivés à croire que nous savons mieux que tous les Canadiens eux-mêmes ce qui est bon pour eux. Cela nous amène à imposer notre volonté par toutes sortes de mesures antidémocratiques, et cela est injustifiable.
Le Canada est le plus beau pays au monde. Il pourrait aussi être une démocratie exemplaire, mais ce n'est pas le cas. Nous sommes dans une dictature. Changeons cela, et tout de suite.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, hier, je suis intervenu sur la motion no 1 que j'ai présentée, et j'ai fait état de la position du Bloc québécois. Par la suite, la secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice a demandé quelle était la position du Bloc québécois par rapport au projet de loi. Je veux qu'on s'entende bien, et je vais donc prendre quelques minutes pour l'expliquer.
Étant donné qu'on accorde des augmentations qui sont, je crois, injustifiées à l'heure actuelle compte tenu des finances publiques, compte tenu qu'on coupe des milliards de dollars à des gens qui en ont besoin, et que la motion que j'ai présentée a justement pour but de ne pas accorder cette augmentation d'environ 13 p. 100 aux juges, on comprendra que si mon amendement est adopté, nous allons appuyer le projet de loi dans son ensemble parce que, dans son ensemble, ce projet de loi a du bon; il y a des choses qui répondent à un jugement de la Cour suprême du Canada.
Je veux mettre les pendules à l'heure. Il y a un bon fond dans ce projet de loi, parce qu'on répond à un jugement de la Cour suprême, mais compte tenu qu'on a dénaturé à un tel point les remarques faites par la plus haute instance relativement aux rémunérations des juges, on comprendra que nous nous opposerons au projet de loi si ma motion n'est pas adoptée.
Cela étant dit, sur la motion no 2 plus précisément, j'annonce au Parti réformiste que le Bloc québécois votera en faveur de cette motion, puisqu'elle est importante. Je pense qu'elle répond davantage aux remarques, au jugement de la Cour suprême, et surtout, elle a pour objectif de clarifier les augmentations qui pourraient être éventuellement accordées aux juges des tribunaux fédéraux.
La motion demande d'ajouter, à l'article 6 du projet de loi, trois paragraphes en vue d'obtenir plus de précisions ou de faire participer davantage les parlementaires. Je ne veux pas faire le professeur d'école, mais je pense que pour comprendre très clairement la motion du Parti réformiste, il faut voir le contexte et surtout prendre connaissance de l'article qu'on veut modifier.
L'article 6 établit la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux. Cette commission est chargée, à des fréquences déterminées par la loi, d'examiner la Loi sur les juges pour voir s'ils reçoivent une rémunération suffisante, si l'on doit modifier la loi, si les juges ont fait part de remarques à cette commission, et ensuite, de faire rapport au ministre de la Justice.
Au paragraphe 1, on décrit le mandat de la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux. Au paragraphe (2), on dit qu'à partir du 1er septembre 1999, elle fera un examen quadriennal. Au paragraphe (3), on stipule que c'est le mandat de la commission de faire rapport au ministre de la Justice. Au paragraphe (4), on dit qu'il peut y avoir des initiatives ministérielles.
Le paragraphe (5) parle de prolongation, dans le cas où la commission voudrait obtenir plus de temps avant de soumettre le rapport. Si la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux ne dispose pas de suffisamment de temps pour produire le rapport, en vertu de la loi, elle peut obtenir un prolongement.
Le paragraphe (6) dit ce qui suit:
(6) Le ministre dépose un exemplaire du rapport devant chaque Chambre du Parlement dans les dix premiers jours de séance de celle-ci suivant sa réception.
Les modifications du Parti réformiste suivent le paragraphe (6) de cet article pour ajouter ce qui suit:
(6.1) Le rapport déposé devant chaque Chambre du Parlement en vertu du paragraphe (6) est déféré par cette Chambre, dès son dépôt ou, si la Chambre ne siège pas ce jour-là, dès le jour de séance suivante de cette Chambre, à un comité de celle-ci, désigné ou établi pour examiner les questions relatives à la justice.
On sait fort bien que le Comité de la justice et des droits de la personne est celui qui serait mandaté ou qui aurait juridiction pour étudier le rapport déposé devant cette Chambre.
Au paragraphe suivant, le (6.2) que le Parti réformiste voudrait voir inscrire au projet de loi, on dit ceci:
(6.2) Le comité mentionné au paragraphe (6.1) peut effectuer une enquête ou tenir des audiences publiques au sujet du rapport qui lui a été déféré en vertu de ce paragraphe; s'il le fait, le comité fait rapport, au plus tard soixante jours de séance après le renvoi, de ses conclusions à la Chambre qui l'a établi ou désigné.
C'est là que cela devient important. Un rapport est déposé au ministre, ce dernier le dépose à la Chambre et au Sénat, et ça s'arrête là. Pourtant, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne est habilité à en faire l'examen et il connaît très bien toutes les questions relatives à la Loi sur les juges et autres lois connexes.
Les membres de ce comité pourraient, en vertu des modifications présentées par le Parti réformiste, faire enquête et tenir des audiences. Pourquoi? Parce que le comité aurait un objectif très précis, entre autres, celui d'obtenir des modifications qui reflèteraient ce que désire la population. Tous les députés sont élus pour représenter la population de leurs comtés respectifs. Nous sommes très bien placés pour savoir ce qui passe ou ce qui ne passe pas au sein de la population sur un sujet donné. À l'heure actuelle, une augmentation de 13,8 p. 100 aux juges est, j'en suis sûr, une chose qui ne passe pas. Lorsqu'on sait qu'ils gagnent, en moyenne, 140 000 $ par année, le fait d'augmenter le salaire des juges de 13,8 p. 100 ne passe pas.
Le comité, qui serait chargé d'étudier le rapport, pourrait faire rapport à cette Chambre en disant qu'il a entendu tel ou tel témoin et que l'augmentation n'est pas acceptable, ou encore, que l'augmentation n'est pas suffisante, parce qu'on ne sait pas dans quel état seront les finances publiques dans dix ans. Peut-être que ce serait le temps d'augmenter les salaires des juges, des fonctionnaires et des gens en général.
Lorsqu'on aura réglé le problème de la pauvreté, lorsqu'on aura remis, dans le domaine de la santé, l'argent que le fédéral vole présentement, lorsqu'on aura remis de l'argent dans le domaine de l'éducation et dans celui de l'aide sociale où le fédéral, à l'heure actuelle, coupe sauvagement, il sera peut-être temps, à ce moment-là, d'examiner la possibilité d'augmenter le salaire des juges, des fonctionnaires, des sous-ministres, des députés peut-être, du premier ministre, et ainsi de suite. Présentement, compte tenu que ce n'est pas le temps, le comité, s'il avait étudié très sérieusement le rapport, aurait dit au ministre de ne pas augmenter le salaire des juges.
Le comité parlementaire pourrait donc avoir un certain travail à faire selon la modification présentée par le Parti réformiste, d'autant plus que cela répond, à mon sens, à un désir assez généralisé des députés. On siège régulièrement à ces comités, on donne beaucoup de notre temps et on travaille de façon très sérieuse. En tout cas, pour ma part, je fais un travail très sérieux dans le domaine de la justice au sein du comité et j'estime qu'on ne contribue pas suffisamment, compte tenu du temps et de l'énergie qu'on met dans ces comités.
Avec une telle modification, en bout de ligne, c'est la job du député qui est revalorisée, ou qui serait possiblement revalorisée, par sa contribution à un projet de loi ou sur une question extrêmement précise, comme celle de la rémunération des juges et de tous les avantages qui leur sont consentis.
En terminant, je répète que nous allons appuyer la modification du Parti réformiste, parce qu'elle poursuit l'objectif de la transparence que les gens souhaitent et, surtout, de la contribution que les électeurs et électrices de mon comté, et des comtés en général à travers le Canada et le Québec, désirent avoir de leurs représentants.
[Traduction]
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Monsieur le Président, hier, j'ai traité de la motion no 1. Je voudrais aujourd'hui parler de la motion no 2 qu'a présentée le député de Crowfoot.
Avant d'entamer cette analyse détaillée, je voudrais dire que, d'une manière générale, cette motion vise à apporter transparence et responsabilité à un système qui fonctionne depuis longtemps en vase clos et dans lequel on prend des décisions arbitraires.
Par conséquent, la motion qu'a présentée le député de Crowfoot est fort importante. Je demande à tous les députés de l'examiner attentivement. Comme l'a dit le député du Bloc, elle apporte transparence et responsabilité à ce système.
Hier, j'ai appuyé la motion du Bloc visant à ne pas augmenter le traitement accordé aux juges, et j'ai expliqué pourquoi. Le même raisonnement s'applique également à mon cas. Je serais hypocrite de dire que j'aimerais bénéficier de la hausse de traitement de 2 p. 100 proposée aux députés. Les mêmes arguments s'appliquent à mon cas.
Par conséquent, je voudrais affirmer publiquement que je ne suis pas en accord avec la hausse de traitement de 2 p. 100 dont les députés sont censés bénéficier, car il s'agit là d'une hausse composée de 10 p. 100 sur quatre ans.
La motion dont la Chambre est saisie demande que le Comité de la justice examine les conclusions de la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux et tienne des audiences publiques. Y a-t-il plus grande obligation de rendre compte?
Les Canadiens auront voix au chapitre sur la rémunération des juges qui correspond vraiment aux décisions qu'ils rendent.
Les juges devront également rendre des comptes, car, au moment de la tenue de ces audiences, les Canadiens pourront exprimer leurs opinions sur le fonctionnement du système judiciaire. Comme les députés le savent, ce système fait actuellement l'objet d'un examen.
D'aucuns considèrent que les magistrats ne répondent pas toujours aux désirs que les Canadiens expriment par l'entremise du Parlement, car, en interprétant la Charte des droits, ils rendent des décisions qui semblent parfois fort déconcertantes.
Par conséquent, il serait utile que le rapport de la commission de rémunération soit soumis à l'étude du comité, afin que les députés et les citoyens puissent l'examiner en profondeur.
Il s'agit aussi de déterminer qui rédige nos lois. Est-ce la magistrature ou le Parlement? La question est importante et même cruciale, compte tenu de certaines décisions rendues récemment par des gens qui ont décidé d'interpréter à leur façon la charte des droits plutôt que les désirs des Canadiens tels qu'exprimés par les députés.
Comment les Canadiens peuvent-ils faire connaître leur mécontentement et leur insatisfaction quant au travail de la magistrature si les juges ne sont pas tenus de rendre des comptes? Il serait possible de le faire dans le cadre des consultations ou des audiences publiques, où les participants pourraient exprimer leur point de vue et attirer l'attention de la magistrature sur les sentiments qu'éprouvent les Canadiens. Cela rendrait les juges quelque peu responsables.
Dans une certaine mesure, les juges seraient heureux de savoir comment la population canadienne les perçoit, même si nous savons naturellement qu'ils sont les gardiens de la loi. Ils doivent respecter la loi. Ils doivent l'interpréter. Ils n'ont toutefois pas à lire ce qui ne figure pas dans la loi. Rédiger des lois concises est une responsabilité qui revient à la Chambre des communes.
Voilà pourquoi tout le monde, y compris l'opposition, estime que le régime de rémunération est généreux, sauf le gouvernement. Nous connaissons sa position. Il veut dépenser pour plaire à l'élite.
J'ai parlé hier de la classe ouvrière, de ces Canadiens qui ne peuvent même pas rêver au jour où ils pourront profiter d'un régime de ce genre. Mais j'interviens aujourd'hui sur la motion no 2, qui vise à tenir compte de tout le contexte pour bien servir les Canadiens, en assurant la transparence et l'imputabilité de l'ordre judiciaire. Ces deux aspects revêtent beaucoup d'importance pour les Canadiens et ont un effet sur leur vie quotidienne.
La Constitution canadienne garantit l'indépendance de l'ordre judiciaire. Nous respectons cette indépendance. Nous sommes extrêmement fiers de ce que l'ordre judiciaire soit indépendant au Canada. Aucune pression ne s'exerce pour compromettre les décisions de nos tribunaux.
Néanmoins, il doit exister une obligation de rendre compte. L'ordre judiciaire défend aussi les vues de la société. Il importe que la population et le judiciaire se comprennent et que chacun sache ce qu'il attend de l'autre.
Je termine en exhortant tous les députés à étudier cette motion et à y voir un petit pas vers un dialogue entre l'ordre judiciaire et la population canadienne.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, comme je l'ai fait hier, j'interviens pour dénoncer le projet de loi C-37, mais pour appuyer l'amendement proposé par mon collègue de Crowfoot.
Nos critiques sur ce projet de loi devraient fournir aux libéraux assez de motifs pour appuyer l'amendement proposé par mon collègue, le député de Crowfoot. Cependant, comme c'est souvent le cas à la Chambre, le gouvernement adoptera ce projet à toute allure et à peu près dans sa forme actuelle. Les gens d'en face ne veulent pas vraiment les critiques constructives venant de l'opposition ni les tentatives que nous pouvons faire pour améliorer le projet de loi. Il tient à adopter sa mesure dans les plus brefs délais et c'est ce qu'il fera.
Le projet de loi C-37 augmentera le nombre des juges des cours d'appel, le faisant passer de 10 à 13. De même, il portera de 12 à 36 le nombre des juges des tribunaux provinciaux de la famille. En soi, ce n'est pas une mauvaise décision de la part du gouvernement. Il y a des arriérés terribles dans les tribunaux de tout le pays. Un plus grand nombre de juges facilitera le traitement de ces causes par le système judiciaire.
Toutefois, compte tenu de la tendance actuelle du système judiciaire à inventer les lois plutôt qu'à les interpréter, je ne pense que, dans l'ensemble, les Canadiens verront cette mesure d'un oeil favorable.
Au sujet de la redéfinition de la famille, les décisions récentes de la Cour suprême illustrent bien cette tendance. Je ne pense pas que les Canadiens vont tolérer indéfiniment que la Cour suprême s'occupe de faire des lois, étant donné qu'en vertu de la Constitution et de la tradition parlementaire ce sont les représentants élus à la Chambre par les Canadiens qui doivent adopter les lois, particulièrement en ce qui a trait à des questions aussi importantes que la définition de la famille. Les lois doivent être adoptées ici à la Chambre et non pas à la Cour suprême du Canada.
Il existe donc une mauvaise tendance au pays dont les Canadiens se sont rendus compte et que le Parti réformiste va s'efforcer de combattre du mieux qu'il peut.
Le projet de loi prévoit aussi une augmentation rétroactive de 4,1 p. 100 du traitement des juges, suivie d'une hausse de 4,1 p. 100 pour la période du 1er avril 1998 au 31 mars 1999. En d'autres mots, les juges obtiendront une augmentation de 8,3 p. 100 sur une période de deux ans. Compte tenu que le traitement annuel moyen des juges se situe autour de 140 000 $, la plupart des Canadiens vont se demander si ces derniers ont vraiment besoin d'une telle augmentation. Je me demande si les juges eux-mêmes se sont mis à genoux pour dire qu'ils avaient besoin de plus d'argent. Permettez-moi d'en douter.
Un grand nombre d'autres Canadiens qui n'ont obtenu que des augmentations correspondant à la hausse du coût de la vie, voire aucune augmentation, vont se demander pourquoi les juges méritent une augmentation de 8,3 p. 100 au cours des deux prochaines années. Il est tout à fait cynique de la part du gouvernement d'accorder aux juges, aux hauts fonctionnaires et aux ministres d'énormes augmentations de traitement ainsi que des bonis, alors que les policiers qui sont sur la ligne de front et les fonctionnaires de niveaux inférieurs ne recevront rien ou si peu. Cela n'a pas de sens et ce n'est pas juste.
Je sais que les députés d'en face jetteront les hauts cris et diront que ce n'est pas vrai, qu'ils ont aussi donné aux agents de la GRC une augmentation en mars. Comme ils ont été généreux à leur égard! Je rappelle que les traitements des agents de la GRC ont été gelés durant cinq ans. La dernière augmentation prévue est de 0,75 p. 100 et doit entrer en vigueur au 1er octobre 1998. Cela n'a pas de sens et ce n'est pas juste.
Le projet de loi vise aussi à établir la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux, qui sera chargée d'examiner la question de savoir si les traitements et autres avantages consentis aux juges sont satisfaisants. Je veux prendre un moment pour discuter en détail de cette commission. Cela montre, en effet, que, même s'ils parlent de réforme judiciaire, les libéraux n'ont toujours pas perdu leur goût pour la politique de l'assiette au beurre.
La création de la Commission d'examen de la rémunération des juges fédéraux fournit au gouvernement fédéral une autre occasion de faire des nominations partisanes et aux libéraux durs à l'ouvrage l'occasion d'être récompensés par une part de l'assiette au beurre. La commission commencera ses activités le 1er septembre 1999 et remettra un rapport faisant état de ses recommandations au ministre de la Justice dans les neufs mois qui suivront. Elle refera le même exercice, dans le même délai, à partir du 1er septembre tous les quatre ans par la suite. À terme, le ministre de la Justice déposera un exemplaire du rapport de la commission.
Cela n'a pas vraiment d'importance, toutefois, car le Parlement n'aura ni l'occasion ni le pouvoir de répondre. Cela fait ressortir à nouveau le peu d'obligation de rendre des comptes prévue dans cette proposition.
La commission sera composée de trois personnes nommées par décret. En fait, les nominations par décret sont un euphémisme pour des nominations partisanes. Deux des nominations seront faites sur proposition, dans un cas, de la magistrature, dans l'autre, du ministre de la Justice, et les deux personnes ainsi nommées proposeront pour le poste de président le nom d'une troisième. Les commissaires seront nommés pour un mandat de quatre ans renouvelable une fois. Autre occasion de népotisme.
Comme peuvent le constater les Canadiens, le processus de nomination manque de transparence et, partant, de crédibilité. À aucun moment du processus la population ni le Parlement n'ont leur mot à dire. Les réformistes veulent s'assurer que le processus de nomination est transparent et responsable afin de supprimer ce genre de népotisme. En fait, en 1996, à Vancouver, notre assemblée nationale a approuvé des recommandations en ce sens. Le rapport faisait état d'un style de nomination plus peuple où un comité examinerait les candidatures et interviewerait les candidats dont les noms seraient soumis au premier ministre.
Pareille réflexion éclairée est absente du projet de loi. Je crois que c'est parce que les libéraux sont contre tout ce qui s'apparente à une action populaire.
Les Canadiens ne seront pas impressionnés par ce projet de loi. De plus, il ne règle absolument pas les problèmes fondamentaux inhérents au système de justice. En fait, alors que des problèmes urgents en matière de justice pénale restent non réglés dans notre pays, c'est la troisième fois que les libéraux modifient la Loi sur les juges. Nous pourrions faire des choses plus utiles au Parlement.
Pendant la dernière législature, en 1996, le gouvernement a présenté les projets de loi C-2 et C-42. Ces deux projets de loi étaient des mesures législatives sans conséquence et ils n'avaient guère d'importance pour les Canadiens préoccupés par leur sécurité, à juste titre, du reste.
Les deux ministres libéraux de la Justice n'ont pas présenté la Charte des droits des victimes que nous, du Parti réformiste, réclamons depuis de nombreuses années. Cette question figure bien bas dans la liste des priorités en matière de justice, comme si les ministres en question se fichaient éperdument des victimes de crimes dans notre pays. L'actuelle ministre de la Justice et son prédécesseur n'ont pas modifié en profondeur la Loi sur les jeunes contrevenants. Au lieu de cela, ils y apportent quelques retouches. Ces deux ministres n'ont pas réussi à limiter le recours aux condamnations avec sursis dans le cas des délinquants violents. Au lieu de cela, le Comité de la justice passe son temps à s'occuper de questions administratives.
Le projet de loi comporte d'autres lacunes, mais je veux, en terminant, parler brièvement de l'amendement proposé par mon collègue réformiste, le député de Crowfoot. Cet amendement permettrait au comité visé d'examiner le rapport de la commission, de convoquer des témoins et de rendre compte de ses conclusions à la Chambre. N'est-ce pas là une idée pleine de bon sens? N'est-ce pas là la démocratie en action?
J'exhorte tous les députés à appuyer l'amendement et à rejeter le projet de loi.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans ce débat pour rappeler un certain nombre d'événements qui se sont produits ici et là au Canada l'an dernier.
Il y a un an, nous nous remettions à peine de la terrible dévastation causée par l'inondation de la rivière Rouge. Ce désastre avait non seulement privé les gens de leur revenu, mais il avait également dans bien des cas détruit leur propriété, détruit leurs moyens d'existence et, dans certains cas, détruit leur famille.
Nous venions à peine de nous en remettre, quand l'hiver dernier nous avons subi une terrible tempête de verglas qui a causé pour plusieurs millions de dollars de dommages et ruiné les moyens d'existence de certaines gens pour un an, deux ans ou même davantage.
Tandis que les effets de ces deux désastres nationaux se font encore sentir, nous voici aujourd'hui en train de discuter d'une proposition visant à accorder à des gens qui sont au service du public une hausse de traitement d'environ 8 p. 100. Cela, alors que des centaines de gens n'ont même pas encore commencé à récupérer de ces désastres. C'est incompréhensible. Le gouvernement ne sait-il pas que nous sommes élus au Parlement pour servir la population?
Comment est-ce que je peux répondre à la lettre que j'ai reçue l'autre jour à mon bureau d'un chef de famille monoparentale avec deux enfants, dont le revenu était légèrement inférieur au seuil de la pauvreté? Ces gens qui sont dans une situation désespérée vont-ils bientôt obtenir une augmentation rétroactive de 8 p. 100? Non.
Des centaines de gens doivent produire des déclarations de revenu alors qu'ils ne devraient même pas figurer sur le rôle d'imposition. Quand ils voient que des gens nommés à des postes publics vont recevoir une hausse de 8 p. 100 sur un traitement qui atteint déjà 140 000 $, ils protestent bruyamment d'un océan à l'autre. Et ce n'est pas «non» qu'ils crient, mais «pas question».
Nous devons suivre le conseil de cette motion. Nous devons écouter les paroles de mon collègue de Calgary qui recommande de récupérer notre pouvoir d'examen pour nous rendre compte de ce que nous faisons ici.
Je me rappelle quand la fameuse charte des droits et des libertés est entrée en vigueur. Je me rappelle qu'on a déclaré à l'époque que nous avions maintenant le pouvoir de légiférer. C'est là que réside le danger que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays dénoncent depuis deux ans. Ils croyaient avoir élu des députés au Parlement et aux assemblées législatives pour qu'ils y fassent des lois.
Au cours des trois derniers mois, j'ai lu dans les journaux des phrases de ce genre: «le tribunal ordonne au gouvernement». On y emploie le mot «ordonner». Les tribunaux nous disent quelle interprétation donner à certains termes, comme «conjoint» et «mariage». Et le gouvernement n'aura rien à répliquer parce que ce sont les tribunaux qui décident? La démocratie chancelle sur certains de ces points, et elle chancelle dangereusement.
J'en reviens à mes électeurs. À cette époque-ci, l'an dernier, la zone entre les deux villes que je représente a subi une très violente tempête de grêle. Les gens dans l'Ouest ne pouvaient pas distinguer si les terres étaient en culture ou en jachère. Voilà qui montre à quel point les dégâts étaient graves. Ces gens n'ont pas perdu 140 000 $. Beaucoup ont perdu le double du salaire annuel d'un juge. Est-ce qu'ils ont reçu une rémunération rétroactive?
Non, ils n'ont pas encore récupéré et maintenant, ils font face à une sécheresse. En plus, des centaines de milliers d'acres, une partie dans la province voisine du Manitoba, ont subi six nuits consécutives de gel. Soixante-dix mille personnes ne savent pas quel revenu elles auront à l'automne, et encore ce n'est que dans l'Ouest. Pendant ce temps là, nous parlons de donner une augmentation de 8 p. 100 à des juges qui gagnent déjà plus de 140 000 $ par année. C'est incroyable. J'espère que tous les Canadiens qui nous écoutent aujourd'hui sont au courant de cela.
Il y a environ 18 mois, le magazine Maclean's avait fait une enquête pour savoir de quoi les gens se plaignaient le plus. Près du sommet de la liste se trouvait le système judiciaire. Ils disaient perdre confiance dans le système. Et maintenant, nous allons récompenser les juges de leur bon travail en leur donnant une augmentation de 8 p. 100.
Les députés, quel que soit le côté où ils siègent, quel que soit le parti qu'ils représentent, devraient penser aux véritables producteurs de richesses de ce pays, à ceux qui descendent dans les mines, à ceux qui produisent nos aliments, à ceux qui élèvent leur famille, à ceux qui sont en chômage, aux jeunes qui ne peuvent trouver d'emploi. Mais que disent-ils? Nous habitons un magnifique pays, nous venons tout juste d'accorder une augmentation de 8 p. 100 aux juges.
Ce n'est pas normal. Ce projet de loi, comme le dit l'amendement, devrait être renvoyé au comité. Le gouvernement ne devrait pas avoir peur de le renvoyer. Peu importe que la session tire à sa fin. Si jamais le gouvernement impose la clôture sur cette mesure, cela fera plus de bruit qu'aucune autre urgence n'en a jamais fait. Les gens diront «le gouvernement recommence encore.»
Il vole les Canadiens pour payer aux juges des salaires de plus de 140 000 $. Il affirme que tous les autres devront se débrouiller par eux-mêmes, que les agriculteurs, les gens du Saguenay, des prairies, de la vallée de la rivière Rouge et d'ailleurs devront se débrouiller tout seuls. Il faudra peut-être 10 ans à ces personnes pour retrouver leur niveau antérieur.
Je prie cette Chambre d'appuyer la motion. Au minimum il faut retarder les choses. Il faut renvoyer le projet de loi. Je pense que les juges peuvent vivre honorablement avec 140 000 $. Je ne vois pas de problème. Je ne pense pas que le système judiciaire s'écroulera pour autant. C'est une bonne motion et je prie tout le monde de l'appuyer.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer au débat d'aujourd'hui. On a eu un débat animé et franc à la Chambre au sujet du pour et du contre de cette mesure législative.
Pour revenir plus particulièrement sur la motion dont nous sommes saisis, il s'agit, en fait, de renvoyer cette mesure législative au comité pour qu'on en discute davantage, pour qu'on l'examine plus en profondeur.
Comme le député qui m'a précédé l'a signalé, on laisserait le projet de loi en suspens jusqu'à ce qu'on ait réussi à examiner plus en profondeur certains des éléments les plus controversés de cette mesure.
Cette motion réclame également un processus d'examen. Avant que le projet de loi n'entre en vigueur, on aurait une autre occasion d'examiner certains détails. En particulier, l'opposition officielle a fait part de ses réserves au sujet de l'échelle de traitement des juges si cette mesure législative était adoptée. Par la suite, bien entendu, on examinerait à nouveau cette mesure à l'autre endroit.
Il y a, bien entendu, beaucoup d'ironie dans les observations des députés de l'opposition officielle, étant donné que les députés envisagent de s'accorder des augmentations. Je pense que nous devons être très prudents lorsque nous abordons cette question.
Je m'oppose à certaines attaques personnelles et à certaines observations qui ont été faites au sujet de la magistrature. Je pense que nous nous devons, à titre de parlementaires, d'être très circonspects lorsque nous commençons à dénigrer la magistrature et à remettre en question son intégrité. Ce n'est certes pas une solution simple que de fustiger tout le processus juridique et tous les intervenants dans le système juridique.
Je peux assurer aux députés que notre système de justice comporte de nombreux problèmes. Je pense que personne au Canada ne le nie, mais je crois que la majorité des gens qui travaillent à l'heure actuelle dans ce système font de leur mieux. Même si le système est imparfait, il est certes une chose dont nous pouvons être fiers lorsqu'on le compare à celui d'autres pays.
Il est toujours facile de s'en prendre au système, de vouloir le détruire complètement, mais nous devons également toujours être prêts à le remplacer par une chose constructive. Malheureusement, on a tendance parfois à simplement détruire certaines choses sans avoir rien à offrir de constructif à la place. Je crois qu'il est important de le signaler.
Je voudrais préciser très clairement que nous, du Parti conservateur, appuyons la motion. Nous croyons qu'elle est importante en ce sens qu'elle réclame un système plus crédible et plus transparent. Elle permettrait un examen public plus important et à la possibilité de faire comparaître d'autres témoins. Il s'agit d'une proposition très positive et apparemment très objective, ce qui, à mon avis, est très important dans le cas des questions de justice, les avantages ou les inconvénients dans ce cas là n'ayant pas de frontières politiques.
Les questions de santé, d'éducation et de justice font trop souvent l'objet de remarques partisanes ou personnelles à la Chambre. Nous devons faire preuve d'un peu plus de modération lorsque nous intervenons à la Chambre.
Nous sommes sans aucun doute en faveur du processus d'examen ou de ré-examen proposé dans cette motion. En principe, nous appuyons cette idée. C'est une proposition positive. En tant que membre du comité de la justice, c'est une question que je suis prêt à approfondir la question, à étudier plus en détail.
En général, il y a pas mal de points positifs dans le projet de loi. La proposition d'avoir un plus grand nombre de juges aux tribunaux de la famille aura de gros avantages.
Il est également question dans le projet de loi d'un processus d'examen qui permettra, à l'avenir, d'examiner la question de la rémunération. Soyons réalistes, ce dont le système a le plus besoin, c'est de personnel compétent. Nous avons besoin de juges compétents, de juges qui ont de l'expérience en tant qu'avocats. Ça se paie. Nous devons nous assurer d'avoir des personnes prêtes, dans de nombreux cas, à faire un sacrifice en abandonnant la profession d'avocat.
Nous appuyons cet amendement. Nous suggérons à tous les députés d'appuyer comme nous cette motion. C'est tout ce que j'ai à dire.
[Français]
M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, si vous me le permettez, je voudrais demander le consentement unanime de cette Chambre pour la raison suivante. J'ai déposé un projet de loi antibriseurs de grève qui n'a pas encore été tiré au sort à ce moment-ci, parce que j'ai présenté une motion demandant une enquête dans les pénitenciers qui date déjà de six mois.
Dans le pénitencier au sujet duquel je demandais qu'on tienne une enquête, il semble que ce soit réglé, que cela va maintenant mieux, alors je demande le consentement unanime pour retirer la motion M-244 requérant une enquête publique sur l'administration du pénitencier de Port-Cartier, dont on doit débattre demain à 13 h 30.
Je crois que si vous le demandiez, vous pourriez obtenir le consentement de la Chambre.
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Manicouagan a-t-il le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: Oui.
Une voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Il n'y a pas de consentement unanime.
[Traduction]
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, je prendrai la parole au sujet de la motion no 2, qui propose d'amender le projet de loi, afin d'établir un mécanisme concernant le dépôt à la Chambre des communes des rapports concernant les décisions prises par des commissions.
Je me vois dans l'obligation d'appuyer cette motion car depuis mes débuts à la Chambre des communes, il y a quatre ou cinq ans, j'ai vu comment le gouvernement peut miner la démocratie parlementaire en continuant de déléguer les pouvoirs réglementaires et autres formes d'autorité à des conseils et commissions, à l'exécutif lui-même, c'est-à-dire au Cabinet, sans se soucier de soumettre ses décisions à l'examen du Parlement et de permettre aux élus de débattre ces décisions et de faire connaître leur point de vue sur des mesures qui ont des effets considérables sur les Canadiens.
Cette tendance m'inquiète beaucoup. Elle constitue une indication de plus que le Parlement est écarté du processus décisionnel et que le gouvernement a tendance à se soustraire à l'obligation de rendre des comptes au Parlement. Cela constitue un précédent très dangereux.
Il nous incombe, en tant que parlementaires, de représenter la population canadienne dans son ensemble et c'est pourquoi, si nous voulons continuer de tenir notre rôle de chien de garde, le Parlement doit absolument conserver son autorité et la capacité de surveiller et de vérifier ce que font les organismes gouvernementaux.
Il est nécessaire qu'il y ait une commission indépendante chargée de prendre les décisions concernant la rémunération. Les préoccupations exprimées par les électeurs au sujet des hausses de rémunération des députés sont un bon exemple de ce qui se produit lorsque des personnes doivent prendre des décisions intéressées.
Une commission indépendante a été créée, afin d'examiner la question de la rémunération et des avantages des députés. Cette commission a présenté un rapport. On sait que le gouvernement n'en a tenu aucun compte. Une fois de plus, les parlementaires se voient dans l'obligation de se prononcer eux-mêmes sur leur rémunération et avantages. Cela ne devrait pas être.
Les parlementaires ne devraient jamais avoir à débattre la question de leur salaire et de leurs avantages sociaux. Ce genre de décision ne devrait jamais être prise par les personnes qui vont en bénéficier.
Il devrait en être de même dans le cas de cette commission, qui est constituée de personnes qui appartiennent au pouvoir judiciaire, d'une façon ou de l'autre. Ou encore, ces gens travaillent pour le ministère de la Justice, siègent au comité judiciaire, ou quelque chose du genre. Ils sont liés à la décision concernant le régime de rémunération à accorder aux juges. Ce n'est pas correct. C'est un groupe indépendant qui devrait prendre cette décision, et cette décision devrait être soumise à l'approbation du Parlement du Canada.
Je me répète peut-être, mais je ne le dirai pas assez souvent. Je ne crois pas que les Canadiens sachent ce qui se passe. Je ne crois pas qu'ils se rendent compte de toute l'autorité et de tout le pouvoir décisionnel qui sont retirés aux députés. Je ne crois pas qu'ils comprennent à quel point les députés deviennent de plus en plus démunis, à cause de mesures législatives de ce genre qui confient des pouvoirs et des responsabilités à des conseils non élus et qui n'obligent personne à rendre des comptes ou à assurer un suivi.
Nous avons pu le constater avec les commissions des libérations conditionnelles, les comités de l'immigration et toutes sortes de commissions. Nous avons également pu le constater avec la commission créée par la Chambre ou quelqu'un d'autre pour examiner notre régime de rémunération. Ces comités et ces commissions prennent des décisions qui ne jouissent pas de l'appui des Canadiens, qui n'ont toutefois aucun moyen de le faire savoir.
Nous avons souvent posé des questions au sujet des comités et des commissions quasi-judiciaires. On nous a dit que ces organismes étaient indépendants. Nous ne pouvons leur demander de rendre des comptes. Qui peut le faire, si ce n'est la Chambre ou un comité de la Chambre?
À mon avis, cette motion est fort logique. Si j'ai bien compris, elle prévoit simplement que la commission fasse rapport à un comité parlementaire, afin que le comité parlementaire puisse examiner son rapport et se prononcer au nom des Canadiens que nous représentons en déterminant si le rapport mérite d'être appuyé et si les recommandations qu'il contient sont légitimes.
Si nous cessons pour un moment nos efforts en vue de rendre les commissions, les comités ainsi que l'organe exécutif responsables envers le Parlement, nous attaquons tout le fondement du système parlementaire comme les Canadiens le connaissent.
Je n'ai absolument pas d'objection et j'encourage tous les députés à appuyer cette motion qui vise à garantir que le Parlement sait ce qui se passe et qu'il est en mesure de poser des questions et d'amorcer des discussions publiques afin que les Canadiens soient bien informés.
Une bonne partie de ce qui se passe à l'extérieur de la Chambre, au sein des comités, des commissions, des conseils et autres et dans l'exécutif, c'est-à-dire au sein du Cabinet, a lieu derrière des portes closes. Ce ne sont pas des renseignements publics. Ces discussions ne sont pas d'ordre public. Chaque fois qu'une telle chose arrive, les Canadiens se montrent méfiants, souvent avec raison. Ils deviennent cyniques. Ils sont d'avis que si l'on ne tient pas un débat public, c'est qu'il y a probablement quelque chose que quelqu'un essaie de dissimuler et ils sont donc moins disposés à accorder leur appui en fin de compte.
Nous le constatons au niveau du système judiciaire. Nous le constatons au niveau du système parlementaire. Nous le constatons également au niveau du système d'immigration. Et la liste ne s'arrête pas là. Les Canadiens perdent confiance et ne sont pas disposés à appuyer certains de nos efforts à cause de ce qui se passe derrière des portes closes.
Il est très important que nous, députés de la 36e législature, fassions tout ce qui est en notre pouvoir pour rendre nos discussions et nos débats les plus ouverts possible. Nous devions non seulement permettre, mais également encourager, la participation des Canadiens aux discussions et aux décisions qui auront des répercussions sur la position du Canada à l'aube du nouveau millénaire, sur l'orientation que nous devons prendre et sur les objectifs finals que nous tentons d'atteindre.
C'est un moyen d'amorcer une ouverture du processus, du dialogue, des comités, des commissions et des conseils pour laisser l'électorat canadien savoir que nous n'avons pas peur de lui parler, que nous n'avons pas peur de laisser les Canadiens participer à la discussion. Nous devrions les encourager à participer à ce qui se passe ici, à la Chambre.
J'aimerais obtenir le soutien de tous les députés. Nous enverrions ainsi un message ferme aux Canadiens, qui se demandent ce que nous faisons ici. Nous leur ferions ainsi savoir que nous sommes ouverts, que nous n'avons rien à cacher, que nous voulons rendre des comptes. Nous voulons leur assurer des conseils et des commissions qui ont des comptes à rendre au Parlement. Nous pourrions ainsi défendre les décisions prises. Nous pourrions examiner certaines questions en comité; celui-ci pourrait formuler des suggestions. L'exécutif du gouvernement pourrait ainsi respecter les décisions, rapports et recommandations qui lui sont communiqués.
Si nous avions un gouvernement et un exécutif qui respectent le Parlement et les décisions prises par les comités et les commissions ayant des comptes à rendre par l'intermédiaire des comités parlementaires, de la Chambre des communes et des députés, les Canadiens seraient moins cyniques au sujet du gouvernement et des politiciens. Ils seraient aussi certainement moins cyniques au sujet de leur système judiciaire et des tribunaux.
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de prendre un instant pour énoncer la position du gouvernement sur la motion no 2 et signaler que le paragraphe 32(5) du Règlement de la Chambre permet de renvoyer n'importe quel rapport déposé au comité permanent compétent.
Deuxièmement, le paragraphe 108(2) du Règlement permet aussi au Comité de la justice, comme à n'importe quel autre comité, de prendre l'initiative d'étudier n'importe quelle question qui est du ressort des ministères dont il a la surveillance. Par conséquent, il me semble que la proposition est inutile. J'ignore s'il est acceptable qu'une loi ait la priorité sur le Règlement de la Chambre.
Le paragraphe 32(5) dit que les rapports déposés à la Chambre en conformité d'une loi du Parlement, ce qui serait le cas, sont renvoyés d'office au comité permanent qui a compétence. Les rapports sont déjà renvoyés. Il est inutile de le stipuler dans la loi, puisque le Règlement y pourvoit déjà.
Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne est libre de décider s'il est dans l'intérêt public de tenir des audiences publiques. J'ajoute que, au moment du dépôt, la Chambre a toujours le loisir d'adopter une motion portant que le comité fasse rapport, et elle l'a déjà fait à l'occasion.
Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a un programme chargé, mais il n'y a pas de raison pour qu'il ne puisse pas, s'il en a la volonté, étudier le document ou en faire rapport.
Je tiens à remercier la députée de son intervention, qui m'a paru intéressante. Il est utile de tenir ces débats, mais j'estime que la motion no 2 n'est pas nécessaire.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-37 et la motion no 2 présentée par mon collègue, le député de Crowfoot. Cette motion vise à modifier le projet de loi pour qu'il exige que soit déposé un rapport devant un comité établi pour examiner les questions relatives à la justice. Ce comité, qui serait, je suppose, le Comité permanent de la Justice et des droits de la personne, lequel est présidé par ma collègue qui vient de parler, pourrait faire une enquête, tenir des audiences et convoquer des témoins.
Celle-ci a dit, au cours de son discours, que la loi prévoyait déjà que des rapports de cette nature peuvent être déposés au comité, qui peut en discuter et entendre des témoins à cet égard. C'est à la discrétion du gouvernement. Le rapport n'a pas à être déposé au comité. Il ne l'est que si le gouvernement décide qu'il devrait l'être.
Ce que nous tentons de faire par la motion no 2, c'est exiger la tenue d'un examen public et la transparence de ces rapports pour que les contribuables qui paient la note aient l'occasion de faire des observations à l'étape de l'étude en comité. C'est entièrement différent du statu quo auquel le député d'en face a fait allusion.
Cela nous amène à nous demander: toutes les fois que nous avons l'occasion d'appliquer le pouvoir d'examen parlementaire aux questions de cette nature, pourquoi le gouvernement s'y oppose-t-il toujours? Pourquoi s'oppose-t-il à un élargissement du pouvoir d'examen parlementaire? Quand ils étaient dans l'opposition, nos vis-à-vis étaient d'ardents défenseurs de l'examen parlementaire, de la démocratie et de la transparence en pareils cas.
Or, toutes les fois qu'une motion est présentée à l'occasion d'un projet de loi de ce genre, les députés ministériels s'y opposent toujours. Je veux savoir pourquoi. Qu'est-ce qu'ils tentent de cacher? Qui en souffrirait? Quelles seraient les conséquences négatives pour le Parlement, le programme du gouvernement, l'indépendance de la magistrature si les rapports comme ceux ayant trait à la rémunération des juges étaient déposés au comité et commentés par des témoins y comparaissant?
Aucune, à mon avis. Le seul inconvénient, c'est que le gouvernement ne pourrait pas agir à sa guise et dissimuler des dossiers compromettants. Voilà pourquoi il s'y oppose.
Je me permets d'insister là-dessus parce que nous nous trouvons actuellement confrontés à une situation semblable. Il s'agit de la Loi sur le Parlement du Canada qui exige qu'après des élections générales une commission instituée par le gouverneur général en conseil se penche sur la rémunération et les avantages des parlementaires. Le gouvernement s'est plié à cette disposition, bien sûr.
Après les élections, il a institué la commission Blais, qui est composée de trois Canadiens indépendants et a pour mandat d'examiner la rémunération des députés. Cette commission a remis son rapport au Parlement, mais ses audiences ont eu lieu à huis clos, sans le moindre témoin.
Voilà à présent que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre dépose un rapport, au sujet duquel il n'a pas sollicité l'avis de la population. Une commission indépendante a été créée; elle a rédigé un rapport, sans soumettre la question à un examen public, sans faire comparaître de témoins. Elle s'est contentée de le déposer ici. Il faut supposer que ce rapport sera accepté.
Cette façon de faire me pose problème à deux égards: il y a les juges d'une côté, mais il y aussi les députés et la population en général. Toute proposition de puiser davantage dans le trésor public, ou de dépenser davantage l'argent des contribuables que nous allons chercher en utilisant le pouvoir de coercition qui permet de lever des impôts, afin de mieux rémunérer les parlementaires ou les juges par exemple, exige l'examen public le plus rigoureux possible.
C'est précisément l'objet de la motion no 2 amendant le projet de loi C-37. Je me demande vraiment pourquoi le gouvernement s'y oppose. Encore une fois, cette opposition soulève non seulement la question de la rémunération des juges, mais aussi celle du manque de transparence dans la manière dont ils sont nommés.
Le Canada est probablement la seule démocratie moderne où les candidats à la magistrature ne doivent pas faire l'objet d'un contrôle, être interrogés ou témoigner devant les membres de l'assemblée législative nationale.
Chez nos voisins du Sud, ceux qui sont appelés à la magistrature doivent subir un examen sénatorial avant que leur nomination soit confirmée. C'est une politique raisonnable, parce qu'elle garantit l'équilibre du pouvoir de l'exécutif de nommer à la magistrature des gens qui appuient son programme politique.
Il ne faut pas se leurrer. Même s'il y a au Canada de nombreux juges formidables qui travaillent fort et qui se contentent d'interpréter strictement la loi, nous avons également de nombreux juges qui se considèrent comme de valeureux législateurs. Ils siègent aux tribunaux et y font la loi. Ils n'interprètent pas la loi, ils la font.
À titre de représentants de la population et, finalement, de gardiens de la Constitution, nous n'avons aucun moyen de veiller à ce que les personnes nommées à la magistrature interprètent la loi et se gardent de légiférer.
Je demande une plus grande transparence en ce qui concerne la rémunération de juges, aux termes du projet de loi C-37. Par ailleurs, nous réclamons aussi une plus grande transparence dans la nomination des juges, de sorte que les Canadiens et leurs représentants à la Chambre et au Sénat sachent à quoi s'en tenir lorsque le premier ministre et le gouverneur général en conseil, lorsque le Cabinet décide d'installer à la magistrature quelque politicien radical qui prétend être juge.
Je suis également d'avis que ce principe devrait s'appliquer dans l'ensemble du secteur public. Nous ne devrions pas examiner le traitement des juges isolément. Chaque fois que nous discutons d'augmentations de la rémunération de hauts fonctionnaires dans le secteur public, y compris de nous-mêmes, pourquoi ne pas autoriser un examen public complet et exhaustif?
Monsieur le Président, il n'y a rien à craindre. Il est fort possible que des spécialistes et des Canadiens ordinaires examineraient favorablement une proposition d'augmentation du traitement ou de rajustement de la rémunération comme celle que renferme le projet de loi C-37, soit une hausse de 8,3 p. 100 sur deux ans. Ils diraient que, puisque ces personnes travaillent fort, elles méritent bien cette augmentation. Ne préjugeons pas de la sagesse de la population. Or, c'est ce que nous faisons en n'invitant pas les Canadiens et les spécialistes à présenter leurs témoignages au sujet de cette question.
J'ai mentionné plus tôt que j'ai du mal à croire le genre de décisions bizarres que des juges nommés par le gouvernement fédéral rendent de plus en plus fréquemment.
J'ai parlé de l'arrêt Feeney, dans lequel un juge nommé par le Cabinet a décidé d'acquitter un homme qui était manifestement et incontestablement coupable de meurtre au premier degré. Pourquoi? Un agent de la GRC avait omis d'obtenir un mandat de perquisition dans une région rurale de la Colombie-Britannique, lorsque des éléments de preuve l'avaient conduit jusqu'au domicile de cet homme. Qu'a-t-il fait? Il s'est présenté en tant qu'agent de la paix. Il a demandé la permission d'entrer, mais personne n'a répondu. Il est donc entré et a découvert l'accusé évanoui sur le lit, couvert du sang de la victime. Le juge dans cette cause, un juge nommé par le gouvernement sans surveillance parlementaire, a laissé acquitter cet homme.
Cela se produit trop souvent en matière de détermination de la peine et de condamnation avec sursis. Il arrive trop souvent que les juges décident de bâtir la loi à leur propre image en se réclamant d'une autorité spécieuse dans la charte des droits et libertés.
Voici qu'on propose de donner à ces mêmes juges, qui n'ont de comptes à rendre à personne d'autre qu'eux-mêmes, une hausse de traitement presque inimaginable ailleurs dans le secteur public, et je dirais même dans le secteur privé, dans un pays où les gens gagnent maintenant moins qu'il y a 20 ans. En même temps, le gouvernement nous dit que nous ne pouvons même pas soumettre un tel rapport à l'examen d'un comité avant que la Chambre en soit saisie afin de permettre une véritable révélation des faits et une véritable transparence.
Je sais, à la suite de conversations privées, que le projet de loi C-37 préoccupe beaucoup certains députés d'en face. Je les invite à défier l'autorité de leur whip pour une fois et à voter en faveur d'une plus grande transparence à la Chambre en appuyant la motion d'amendement no 2 au projet de loi C-37.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole pour appuyer la motion proposée par le député de Crowfoot.
L'amendement prévoit un processus d'examen du rapport de la commission qui inclurait la convocation de témoins et la présentation de conclusions à la Chambre.
Je tiens à souligner que la préoccupation qui sous-tend cet amendement est liée au fait que la commission est composée de trois membres nommés par décret du gouverneur en conseil: un par la magistrature, un par le ministre de la Justice, et un autre membre, proposé par les deux premiers, occupera le poste de président. Peut-on vraiment croire que ces personnes seront objectives? Toute la question est là, et c'est ce qui préoccupe le public et nos électeurs. Il est possible que ces membres ne soient pas objectifs, étant donné qu'ils ont un intérêt direct à augmenter leur traitement et avantages, ainsi que ceux de leurs collègues.
C'est une question de perception. La situation n'a tout simplement pas l'air correcte et elle ne sera pas tolérée. Au plan politique, je ne peux comprendre que le gouvernement ait pu proposer une telle disposition législative.
Je reviens brièvement sur l'augmentation de traitement de 8,3 p. 100 sur une période de quatre ans. À l'heure actuelle, le traitement maximum des juges est de 162 300 $. Si le projet de loi est adopté, ces juges toucheront une augmentation rétroactive de 13 000 $. Un grand nombre de résidents de ma circonscription de Dauphin—Swan River ne gagnent même pas 13 000 $ par année.
Le vrai problème n'est pas la nécessité d'augmenter le traitement des juges. Si le gouvernement veut vraiment réformer le système judiciaire, il doit s'occuper des vrais problèmes et non pas du traitement des juges.
Combien de personnes dans ma circonscription appuieraient cette augmentation? Je ne pense pas qu'il y en aurait beaucoup. Mes électeurs diraient que, comme il existe beaucoup de problèmes dans le système judiciaire, pourquoi ne pas d'abord s'occuper de ces problèmes?
Un nombre croissant de personnes ne se sentent plus en sécurité, à cause de la criminalité chez les jeunes. Nous avons parlé de la Loi sur les jeunes contrevenants pendant des années. En fait, je me souviens très bien que dès 1991, année où j'ai été élu au poste de conseiller pour la première fois, notre municipalité avait demandé au gouvernement fédéral de s'occuper de la Loi sur les jeunes contrevenants. Je me souviens d'avoir rempli des questionnaires envoyés par le bureau du solliciteur général, dans lesquels on nous demandait comment, selon nous, la Loi sur les jeunes contrevenants devrait être modifiée et réformée. Heureusement, la municipalité a coopéré et soumis les résultats du sondage, mais malheureusement, le gouvernement n'y a pas donné suite, et cela se passait en 1991-1992. Les Canadiens veulent que les choses changent, mais malheureusement, pour le moment, le gouvernement ne trouve pas important d'aller de l'avant.
Par conséquent, les gens n'ont que très peu confiance dans le système judiciaire et déplorent le manque d'un système de justice. On dit que 52 p. 100 des Canadiens n'ont pas confiance dans le système judiciaire. Le projet de loi C-68 est un autre de ces indicateurs qui témoignent du fait que le gouvernement traite les citoyens respectueux de la loi comme des criminels. Le gouvernement sait pertinemment que la somme de 1,2 milliard de dollars prévue pour la mise en oeuvre du régime d'enregistrement des armes à feu n'aura absolument aucun effet sur la criminalité. Toute une nouvelle administration a été créée et je suis sûr que des milliers de personnes vont être embauchées pour mettre sur pied un régime qui sera très coûteux pour les contribuables.
Le système judiciaire comporte de nombreux éléments. Mes collègues ont dit à ce propos qu'on pourrait y inclure les politiciens. J'en conviens, les politiciens font partie du problème. Peut-être même qu'ils sont le problème. Les politiciens savent que les gens veulent voir des changements dans le système de détermination des peines. Le public veut que les politiciens s'occupent des droits des victimes et nous savons tous qu'il veut que la Loi sur les jeunes contrevenants soit modifiée. Le gouvernement doit assumer une plus grande part de responsabilité pour la situation actuelle. Le gouvernement peut prendre es mesures nécessaires pour modifier la Loi sur les jeunes contrevenants et obliger les juges à rendre des comptes.
Ce que j'essaye de dire, c'est que bien que nous critiquions beaucoup les juges, il faudrait aussi que les politiciens reconnaissent leur part de responsabilité dans tout cela.
Contrairement à ce dont nous avons été témoins ces dernières années, les gouvernements ne peuvent pas, à leur guise, se servir du système judiciaire comme d'un instrument. Il faut que les juges soient responsables devant la Chambre parce que c'est la plus haute instance du pays.
Je demande à tous les députés, au nom de la démocratie, d'appuyer l'amendement présenté par le député de Crowfoot.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, la motion no 2, présentée par le Parti réformiste, vise à ajouter quelques lignes après la ligne 34, à la page 3 du projet de loi:
«(6.1) Le rapport déposé devant chaque chambre du parlement en vertu du paragraphe (6) est déféré par cette chambre, dès son dépôt ou, si la chambre ne siège pas ce jour-là, dès le jour de la séance suivante de cette chambre, à un comité de celle-ci, désigné ou établi pour examiner les questions relatives à la justice.»
L'amendement contient deux autres parties portant sur l'obligation de rendre compte.
Il y a quelques années, le gouvernement a essayé de réduire les salaires des juges dans le cadre de ses mesures de réduction des coûts. Le Cour suprême a alors rendu un jugement selon lequel toute tentative en vue de réduire les salaires des juges nuisait à l'indépendance de la magistrature.
Il est étonnant qu'une réduction des salaires puisse nuire à l'indépendance des juges, mais pas une augmentation. N'est-ce pas amusant? Dans un cas, cela nuit à leur indépendance, mais pas dans l'autre.
Le tribunal a décidé que le gouvernement devait établir une commission pour établir les salaires des juges. C'est un ordre qu'il a donné au gouvernement. En théorie, le gouvernement n'a pas à obéir à cet ordre. Il pourrait dire qu'il n'a certainement pas d'ordres à recevoir des juges. Toutefois, si le gouvernement n'acceptait pas la position mise de l'avant par la Cour suprême, il se retrouverait devant les tribunaux. Ce serait vraiment une situation bizarre avec, d'un côté, le gouvernement qui tenterait de légiférer pour ne pas se retrouver devant les tribunaux et, de l'autre côté, la Cour suprême qui essaierait d'amener le gouvernement devant les tribunaux, tout cela parce que les juges étaient d'avis que le gouvernement n'avait pas le droit de fixer leurs salaires.
Beaucoup des exemples donnés par mes collègues aujourd'hui montrent bien que la population est très insatisfaite du système judiciaire canadien. Le sondage auquel il a été fait allusion a été effectué en juillet 1997. Il a montré que plus de 50 p. 100 de la population est insatisfaite du rendement des juges. Les exemples que j'ai donnés dans mon discours tout à l'heure sont tous survenus dans North Vancouver au cours des derniers mois. Les courtes peines, le défaut de se présenter en cour, le défaut d'émettre des mandats d'arrestation, les instructions simples et le reste, tout cela a outré la population.
Les juges se comportent comme s'ils étaient des maîtres d'école et non pas comme s'ils présidaient un tribunal. Devant le manque de confiance envers les juges, l'opposition s'est demandé ce qui pouvait justifier ce projet de loi. Les juges nous disent quoi faire, mais c'est la Chambre des communes, le plus haut tribunal du Canada, qui devrait fixer les règles. C'est ce qui explique le nombre de motions présentées pour amender le projet de loi. Malheureusement, comme d'habitude, le gouvernement n'en acceptera aucune. Il les rejettera toutes. Peu importe si les idées sont bonnes, peu importe la logique des arguments présentés pour les soutenir, le gouvernement utilisera sa majorité pour rejeter toutes nos propositions.
Nous pouvons parler du projet de loi et défendre les amendements que nous proposons, mais nous savons bien qu'ils seront tous rejetés. Nous pouvons au moins faire savoir aux Canadiens que nous parlons en leur nom et que nous disons au gouvernement qu'ils sont insatisfaits du système de justice, car il ne rend plus justice, et qu'ils ne le respectent plus. Il est temps que la Chambre des communes prenne des mesures pour corriger les problèmes. C'est pour cela que l'opposition s'élève contre le projet de loi.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec un plaisir que je prends la parole au sujet de la motion no 2 proposée par mon collègue, le député de Crowfoot.
Elle concerne la question de la responsabilité. Voilà de quoi retourne cet amendement. Il fait valoir que la commission qui sera chargée conformément au projet de loi C-37 d'analyser les avantages sociaux et la rémunération des juges devrait être soigneusement examinée. Si cet amendement était adopté, la commission devrait comparaître devant notre Comité permanent de la justice et des droits de la personne. C'est ce que prévoit cet amendement. Cela ne me pose pas de problème.
Une députée libérale a déclaré tout à l'heure que cet amendement lui semblait redondant puisque, compte tenu de leur indépendance, les comités peuvent déjà convoquer des témoins à l'égard de tout sujet ou presque qui relève de leur domaine. Comme un député de Calgary l'a fait savoir au cours de son bref et brillant exposé, tous les députés, et certes les députés ministériels, savent bien que le gouvernement a une position majoritaire aux comités permanents.
Le ministre du ministère associé à tel ou tel comité permanent en établit essentiellement le programme des travaux par l'intermédiaire de son secrétaire parlementaire qui siège au comité en question. Telle est la réalité.
On peut prétendre que ces comités sont fondamentalement indépendants, mais ce n'est tout simplement pas le cas. Les faits montrent que le Cabinet et le ministre chargé du portefeuille en question déterminent le programme du comité.
Certes, dans le cas qui nous occupe, la ministre de la Justice et sa secrétaire parlementaire et la présidente du comité permanent nommée par elles désirent toutes que le rapport de cette commission ne soit pas examiné par le comité permanent. Elles imposent leur volonté comme elles le font à la Chambre des communes. Elles font se lever tous les députés membres du comité et refusent carrément d'examiner le rapport.
D'où la pertinence de cet amendement, car, s'il est adopté, on n'aura plus le choix; il faudra que le rapport de la commission soit soumis au comité permanent et qu'il fasse l'objet d'un examen public.
Devant le projet de loi C-37 et l'augmentation de salaire de 8,3 p. 100 qu'il a pour effet d'accorder à nos juges, force est de se demander comment les gens voient ça dans la vraie vie. Que pense la population de cette mesure législative?
Comme bon nombre de mes collègues l'ont dit bien clairement, par les temps qui courent, alors que bien des gens ont du mal à joindre les deux bouts, la population s'interrogera sûrement sur la nécessité d'accorder aux juges, lesquels gagnent en moyenne 140 000 $ par année, une augmentation rétroactive de 8,3 p. 100.
C'est le genre de chose sur laquelle le commun des mortels ne peut exercer aucun contrôle, mais qui finit pourtant par faire augmenter les taxes et impôts. Il faut bien aller chercher l'argent quelque part. Où? Dans les poches des contribuables. Par conséquent, une telle augmentation de salaire devrait pouvoir se défendre. Elle devrait être soumise à l'examen du grand public par l'intermédiaire du comité permanent, comme le prévoit l'amendement. Je vois que mon temps de parole est écoulé. Je me fais toujours interrompre par la période des questions.
Le vice-président: Je suis désolé d'interrompre le député, mais il sait l'importance que revêt la période des questions pour l'opposition comme pour le gouvernement. Je lui promets cependant qu'à la reprise du débat, il disposera de cinq minutes.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LE JOUR J
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour rappeler le rôle important que le Canada a joué dans le débarquement du jour J en France, lequel a eu lieu il y aura 54 ans samedi.
De nombreux hommes de ma circonscription, Sault Ste. Marie, ont participé à la bataille de Normandie, dont Bill Bentley, le lieutenant-colonel honoraire du 49e régiment d'artillerie de campagne de Sault Ste. Marie.
On avait affecté le Canada à la plage Juno, une des cinq plages visées pour l'invasion. À la fin de la première journée, nos soldats avaient progressé plus et atteint davantage d'objectifs que les Britanniques ou les Américains.
Les pertes du Canada ont été considérables, mais nos soldats ne sont pas morts en vain. Leur courage et leur sacrifice remarquables ont contribué à assurer la défaite d'Hitler et la libération de l'Europe occupée par les nazis.
Le 6 juin, j'invite tous les Canadiens à se souvenir du prix élevé qu'il a fallu payer pour jouir des libertés dont nous bénéficions actuellement, prix qui, dans une large mesure, a été payé dans le sang et l'horreur, sur les plages de la Normandie.
* * *
LES PENSIONS
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Les Canadiens ne croient pas que le gouvernement fédéral respectera ses promesses en matière de pension lorsqu'ils arriveront à l'âge de la retraite. Les Canadiens veulent des solutions de rechange sûres.
Les réformistes sont à l'écoute, et les Canadiens disent que, dans la planification de leur retraite, ils veulent avoir le choix, l'équité et la sécurité. La semaine dernière, à London, en Ontario, le Parti réformiste a présenté une proposition qui réunit ces trois éléments.
Le choix: celui de continuer de cotiser à un régime public comme le RPC ou de cotiser, à titre de travailleur, à son propre régime de retraite personnel, géré par le secteur privé.
L'équité: un régime de retraite qui traite toutes les générations équitablement et qui n'accable pas les jeunes d'impôts excessifs.
La sécurité: un régime de pension sûr, entièrement financé, qui appartient personnellement à son titulaire et qui n'est pas à la merci des fantaisies des futurs gouvernements.
Le Parti réformiste offre une nouvelle solution de rechange. La planification de la retraite sous un gouvernement réformiste serait synonyme de choix, d'équité et de...
Le vice-président: La parole est au député de Davenport.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement de l'Ontario est la seule province où la teneur en soufre de l'essence peut aller jusqu'à 579 parties par million. En Alberta et au Manitoba, elle n'est que de 198 parties par million et en Colombie-Britannique, de 260 parties par million.
La ministre fédérale de l'Environnement doit décider prochainement des normes nationales à respecter en ce qui concerne la teneur en soufre de l'essence. Nous insistons auprès d'elle afin qu'elle ne recommande pas une norme supérieure à 30 parties par million, conformément à la recommandation du groupe de travail du gouvernement sur la teneur en soufre de l'essence.
La réduction de la teneur en soufre de l'essence à 30 parties par million permettra de réduire le smog et les risques pour la santé des Canadiens.
* * *
LES DROITS DE LA PERSONNE
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais commémorer aujourd'hui les innocentes victimes mortes au cours de l'attaque perpétrée le 4 juin 1984 par le gouvernement indien contre le Temple d'or à Amritsar, dans l'État du Panjab, en Inde.
Des milliers de fidèles innocents ont péri sous les tirs de mortier et de mitrailleuse provenant des tanks de l'armée alors qu'ils étaient paisiblement en train de faire leurs dévotions.
Cet acte de cruauté a démoralisé un peuple tout entier. Vingt millions de Sikhs dans le monde ressentent encore aujourd'hui une souffrance profonde à l'égard de cet acte de violence et sont marqués à jamais.
La violence d'un État contre ses citoyens, comme l'attaque lancée par la Chine contre des étudiants qui manifestaient sur la place Tiananmen en faveur de la démocratie ou celle lancée par l'Inde contre le Temple d'or, symbolise l'abandon de la démocratie et de la primauté du droit par un gouvernement au profit des armes et de la violence.
Les Canadiens ne doivent pas oublier ces tristes événements; ils doivent plutôt promouvoir les droits de la personne en condamnant la violence où qu'elle soit perpétrée dans le monde.
* * *
L'IMMIGRATION
Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à condamner les observations incendiaires que le premier ministre ontarien Mike Harris et le député réformiste de West Vancouver—Sunshine Coast ont faites à l'égard de dix réfugiés du Moyen-Orient qui sont à l'heure actuelle en prison en Israël et qui peuvent être considérés comme des réfugiés au Canada.
Je suis stupéfaite de voir que des politiciens démocratiquement élus se permettent de douter de la validité de revendications du statut de réfugié rien que parce qu'elles viennent de prisonniers politiques. A-t-on oublié que Nelson Mandela a aussi fait de la prison? S'il avait revendiqué le statut de réfugié au Canada, ces politiciens auraient sûrement condamné sa demande à cause de son prétendu statut.
En tant que présidente du Sous-comité des droits de la personne, j'entends parler de véritables atteintes aux droits de la personne et je n'aurais pas la prétention de juger du cas de ces hommes sans avoir d'abord mené une enquête.
Si le Parti réformiste était au pouvoir, sa devise serait que toute personne est présumée coupable tant qu'elle n'a pas été déclarée innocente.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, l'oeuf de ma Mère l'Oie du Canada, le ministre des Finances, a ajouté une autre comptine à son répertoire pour enfants. La voici:
Old McMartin had an EI fund
E-I-E-I-O
With that fund he had some fun
E-I-E-I-O
With patronage here, patronage there, Liberal spending
everywhere
Old McMartin spent that fund
I-O-I-O-U
Les députés comprendront que, dans cette nouvelle version de la vieille comptine, «EI fund» signifie maintenant «I owe you». Les députés conviendront sans doute que cette réserve non existante pourrait être le meilleur conte de fée de notre époque.
* * *
L'IMMIGRATION
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, ce qui suit pourrait s'intituler «Histoire de deux C.V.».
Le Canada continue d'accueillir plus de 200 000 personnes par ans. Malheureusement, celles-ci ne peuvent pas toujours trouver tout de suite un emploi qui soit à la mesure de leurs compétences.
Dernièrement j'ai reçu deux curriculums vitae d'une seule et même personne. Le premier fait état d'un doctorat en histoire des relations internationales et en politique étrangère décerné par l'Université d'État de Kiev et d'une maîtrise en relations internationales. Cette personne était maître de conférences à la faculté de droit et de sciences politiques de l'Université de Kaboul et parle au moins trois langues.
Le deuxième curriculum vise à obtenir un emploi de débutant au sein du personnel de direction d'un hôtel. Cet homme possède un certificat de salubrité, de sécurité et d'hygiène.
Au Canada, il livre des pizzas deux fois par semaine et place des chaises dans une salle d'hôtel. Le Canada ne saurait ainsi gaspiller encore longtemps son capital humain.
* * *
LE MAINTIEN DE LA PAIX
M. Hec Clouthier (Renfrew—Nippissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à nos soldats de la paix en Bosnie-Herzégovine. Ces hommes et ces femmes, la plupart en garnison à la BFC Petawawa, dans la grande circonscription de Renfrew—Nippissing—Pembroke que je représente, font un travail magnifique dans des conditions très difficiles. Les 1 285 Canadiens qui font de la surveillance dans cette région témoignent de l'engagement du Canada envers le maintien de la paix.
J'ai eu l'insigne honneur de rencontrer un certain nombre de ces soldats lors d'un récent séjour que j'ai fait dans cette région à titre de membre du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants.
Les efforts que le Canada consent au nom du maintien de la paix sont reconnus et respectés de par le monde. Ces braves hommes et femmes qui servent actuellement dans cette région agitée nous représentent de façon remarquable.
Je tiens, au nom de mes électeurs et au nom de tous les Canadiens, à dire merci à ces militaires qui ont quitté parents et amis pour servir leur pays. Ils ont bien servi le Canada.
* * *
LE SÉNAT
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le sénateur Cogger a été trouvé coupable de trafic d'influence. Ce comportement honteux d'un haut serviteur de l'État nous rappelle que le Sénat doit être réformé.
Le Parti réformiste réclame un sénat triple-E depuis 10 ans. Les Canadiens sont las de la corruption et de l'inefficacité dans cette institution politique.
Les gestes de ce sénateur sont un autre exemple décevant. Faisons ce qui s'impose. Le sénateur Cogger doit démissionner et on doit le remplacer par une personne élue. Il n'est pas nécessaire d'attendre une modification constitutionnelle. Cela se fera en Alberta dès cet automne.
Ce sénateur ne doit pas garder le salaire et les avantages du poste dont il vient d'être trouvé coupable d'avoir abusé. S'il refuse de démissionner, le Sénat devrait l'exclure.
Fini la partisanerie politique. Laissons les Canadiens élire les sénateurs. Il est plus que temps.
* * *
[Français]
LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA
M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, un gros flop publicitaire que cette tentative de rapprochement entre les réformistes et les Québécois et Québécoises, hier soir, dans la Vieille Capitale.
On a vu le visage méprisant des réformistes qui exigent des coupures dans les subventions aux associations de francophones hors Québec.
Peut-on me dire pour quelle raison les réformistes en ont autant sur le coeur contre les francophones? On savait depuis longtemps que les associations et groupes de francophones hors Québec n'avaient pas la faveur des réformistes, mais de là à leur couper les fonds, il y a une marge indécente que les réformistes franchissent allègrement.
Bien franchement, le chef du Parti réformiste a du toupet, en caressant le rêve de représenter la population canadienne. Avec un discours pareil, il est évident qu'il sera difficile pour le chef des réformistes de faire une percée au Québec et de trouver son Louis-Hippolyte-Lafontaine.
Je trouve indécent que le Bloc québécois s'associe à eux.
* * *
[Traduction]
LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Il semble que le programme qui doit succéder à la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique ait été choisi par le Cabinet fédéral. On dit que le montant et les modalités du programme ont été communiqués au gouvernement de Terre-Neuve hier.
C'est un affront aux membres de cette assemblée auxquels le ministre du DRH avait promis qu'on les informerait sur le contenu du programme post-LSPA.
La population de Terre-Neuve et du Labrador a elle aussi des raisons d'être mécontente. D'abord, la stratégie se terminera prématurément, un an plus tôt que prévu. Deuxièmement, selon les rumeurs, le montant consacré au nouveau programme serait insuffisant pour répondre à l'ampleur des problèmes humains créés par l'effondrement de la pêche à la morue. Il ne semble pas qu'il y aura des dispositions de rachat des licences, de soutien du revenu ou d'incitation à la retraite.
Au lieu d'avoir un programme basé et administré au niveau local et conçu pour aider les pêcheurs et les travailleurs des usines de la région atlantique, le ministre des Finances et ses adjoints ont concocté un plan qui leur permettra de s'en laver les mains. Leur traitement cavalier de la population de la région ne s'oubliera pas facilement.
* * *
LE PARTI RÉFORMISTE
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, le mariage entre le Parti réformiste et les séparatistes se confirme, car le chef réformiste souhaite maintenant avoir des réunions avec son nouvel ami, Lucien Bouchard. Son parti a communiqué hier avec le Parti québécois pour demander s'il serait possible de présenter un exposé en bonne et due forme à l'Assemblée nationale.
Après avoir rencontré le Bloc québécois à Québec hier, les députés réformistes s'entendent même avec les séparatistes pour s'opposer au Fonds des bourses d'études du millénaire, appuyer l'interruption du soutien accordé aux groupes anglophones du Québec et prétendre que la Constitution de 1982 n'a pas été adoptée démocratiquement. Je ne vois pas comment ces idées peuvent être très populaires dans l'ouest du Canada.
Je mets le Parti réformiste au défi de répéter cela à sa réunion avec le Bloc québécois ce soir, à Edmonton. Bon nombre de réformistes feraient bien de lire les observations du Calgary Herald à ce sujet:
Le chef réformiste ne doit jamais oublier que l'idée de souveraineté [...] est liée à l'inébranlable conviction que le Québec doit devenir indépendant [...]. Ceux qui ont cette conviction ne se contenteront jamais de réformes parlementaires ni des propositions de décentralisation que le Parti réformiste préconise.
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[Français]
LE TÉLÉTHON OPÉRATION ENFANT SOLEIL
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je veux féliciter les organisateurs, les bénévoles, les artistes, les commanditaires ainsi que les généreux donateurs de tout le Québec qui ont fait ensemble un succès du dernier téléthon Opération Enfant Soleil.
C'est près de sept millions de dollars que cet organisme a réussi à amasser dans l'unique but d'améliorer la qualité de soins prodigués aux enfants malades du Québec.
Afin de solliciter de façon originale la générosité des gens du comté de Berthier—Montcalm, et plus précisément ceux de Berthierville et des environs, j'ai accepté de faire disparaître ma moustache en échange d'un total de dons d'au moins 2 500 $.
Eh bien, c'est avec la jolie somme de plus de 12 000 $ que les donateurs de chez nous ont décidé de m'imposer un nouveau look au profit d'Opération Enfant Soleil. Chose promise, chose due, demain matin, je vais passer aux actes.
En terminant, au nom des enfants du Québec, je les remercie de leur générosité et, monsieur le Président, je vous reverrai lundi matin, quelques poils en moins, et ce, pour une bonne cause.
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LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA
M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Monsieur le Président, le Bloc québécois et le Parti québécois désirent la séparation du Québec et les réformistes ne pourront pas former le gouvernement, à moins que le Québec ne se sépare. Ils sont donc les deux côtés d'une même pièce infernale.
En 1991, au moment où le Bloc québécois et le Parti réformiste étaient dans l'ombre, ils parlaient d'être des alliés objectifs. Une députée réformiste disait que, selon elle, la séparation du Québec arriverait plus vite qu'on pense.
Lucien Bouchard disait: «Je ne vois pas le Parti réformiste comme un adversaire.» Il disait aussi: «Vive le Parti réformiste!», en ajoutant qu'avec ce parti, c'était clair.
Les deux partis attisent les passions. Ils alimentent la désunion. Voilà donc la vérité. Le Bloc et les réformistes poursuivent le même objectif que nous devons dénoncer.
Le Parti réformiste, le Bloc québécois et le Parti québécois vivent une crise profonde et ce n'est que le début, comme nous le soulignent 65 p. 100 des Québécois.
* * *
[Traduction]
LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, les données que Statistique Canada vient de publier montrent que le problème social de la violence familiale s'aggrave, mais l'aspect le plus troublant de ce fléau social qui n'avait pas été révélé jusqu'à maintenant, c'est que les enfants de moins de deux ans sont ceux qui courent le plus grand risque d'être tués.
Selon les données compilées dans 154 services de police, surtout en Ontario et au Québec, dans le cinquième des cas de meurtres à l'intérieur des familles, c'est l'un des parents qui tue un enfant. Soixante pour cent des agressions sexuelles ont des enfants pour victimes et, dans le tiers des cas, l'agresseur est un membre de la famille. Ce rapport fait écho aux constatations du Profil de la pauvreté publié par le Conseil national du bien-être, qui dit que le taux de pauvreté chez les enfants, soit 21 p. 100. est à son plus haut niveau en 17 ans.
Aucune relation n'a été établie officiellement entre les deux rapports, mais il y a là des problèmes dont nous devons nous soucier en élaborant notre politique à venir, dans une économie qui s'est affranchie du déficit.
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LES PÊCHES
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches fonctionne au ralenti sur la côte de la C.-B., ce qui a des conséquences néfastes pour toutes les parties en cause. L'annonce des règles sur la pêche d'agrément a été faite de façon tellement maladroite en 1996 que l'économie de la Colombie-Britannique a essuyé inutilement des pertes de l'ordre de 170 millions de dollars.
La pêche d'agrément est pleinement ouverte cette année sur la côte de la C.-B., mais le ministre est encore une fois très lent à réagir et il ne fait qu'embrouiller les choses.
Les camps de pêche, les services d'affrètement et les collectivités sont très préoccupés. On ne peut pas non plus planifier pour la pêche commerciale, parce que le ministre retarde tout. On a reçu de son bureau confirmation d'une rumeur de rachat au montant de 200 millions de dollars, mais le ministre n'a pas encore fait d'annonce et il n'a toujours pas produit de plan pour 1998. De plus, bon nombre de programmes de transition pour les pêcheurs sont toujours en plan.
Ces retards sont purement politiques. C'est une situation très injuste pour les personnes en cause, qui a des répercussions sur les investissements et les emplois liés au tourisme en C.-B.
* * *
[Français]
LE SALON INTERNATIONAL DES INVENTIONS
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, cette année, le 26e Salon international des inventions se tenait à Genève.
Il a accueilli plus de 100 000 visiteurs venus de partout à travers le monde. Quelque 650 participants, représentant 44 pays, ont assisté à l'événement, et sept firmes québécoises se sont illustrées à cette occasion.
L'entreprise TEB-MAR de Gatineau a reçu le prix de l'État de Genève ainsi qu'une médaille d'or. La société JARDIBAC de Nicolet a mérité le prix du design industriel. Les compagnies TOP SÉCUR de Saint-Grégoire, PRO DUKE de Lorraine, et T.F. Jeux de Sainte-Foy ont raflé des médailles d'or, tandis qu'André Ouellette, de Glace Énergie de Magog, et Gilles Villandre, de Val-Bélair, récoltaient des médailles d'argent.
Encore une fois, les Québécois nous font honneur sur la scène internationale et nous en sommes très fiers.
Félicitations à tous ces gagnants!
* * *
[Traduction]
LES FLAMES DE SAINT JOHN
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à une équipe de hockey chère à mon coeur, les Flames de Saint John. Les Flames sont passés à la finale de la ligue américaine de hockey, où ils se mesurent aux Phantoms de Philadelphie pour l'obtention de la coupe Calder.
Les habitants de Saint John sont derrière la LAH et toute la ville suit les finales de la coupe Calder de très près, fracassant les records de présence aux éliminatoires.
Saint John bourdonnera d'activité au cours de la fin de semaine qui vient alors que la plus grande des petites villes de l'Est sera l'hôte des quatrième et cinquième parties éliminatoires.
Étant une supporter de ce club, je demande à tous mes collègues députés et à tous les fanatiques de hockey au pays de se joindre à moi pour encourager les Flames de Saint John ainsi que les gens de cette ville. Allez, les Flames.
Le vice-président: Puisque nous parlons sports, il est de mon devoir de faire savoir à la Chambre qu'hier soir, au cours du match de soccer qui a opposé les pages aux députés, les députés l'ont emporté trois à deux après une deuxième période de fusillade.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'HÉPATITE C
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, nous avons reçu aujourd'hui tous les documents de travail de la réunion des fonctionnaires de la santé tenue récemment à Edmonton. Il s'agit de la réunion d'où les victimes de l'hépatite C sont sorties en trombe parce qu'on n'a pas voulu les laisser voir la position du gouvernement fédéral.
Nous savons maintenant pourquoi le premier ministre ne voulait pas que les victimes voient la position du gouvernement fédéral. C'est parce qu'elle ne prévoyait pas un cent de plus pour élargir le programme d'indemnisation.
Pourquoi le premier ministre a-t-il dit qu'il était prêt à examiner toutes les options pour ensuite demander à ses négociateurs de ne pas offrir un cent de plus pour élargir le programme d'indemnisation?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il est important pour le chef de l'opposition de comprendre ce qui s'est passé en Alberta. Les fonctionnaires se sont rencontrés pour examiner un vaste éventail d'options.
Les documents auxquels le député fait allusion sont ceux dont il a été question dans les journaux le week-end dernier. Je vois que le Parti réformiste a mis quatre jours à se décider à les lire. Toutes les options ont été examinées attentivement et méthodiquement par les fonctionnaires afin que nous, les ministres, soyons en mesure de prendre une décision lorsque les résultats de ce travail nous seront présentés. À notre avis, c'est la bonne façon de travailler.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, les négociateurs du premier ministre avaient deux propositions: une qui consistait à ne rien faire, et l'autre qui consistait à ne presque rien faire.
Tout ce que le premier ministre était prêt à faire, c'était offrir quelques lits d'hôpitaux de plus pour que les victimes aient un endroit où aller mourir; il n'était pas question d'élargir le programme d'indemnisation. Mais il y avait bien sûr une mise en garde sur la mauvaise presse que pourrait avoir cette décision.
Pourquoi le premier ministre ne veut-il pas admettre qu'il refuse obstinément de permettre à ses négociateurs d'offrir un cent de plus pour élargir le programme d'indemnisation?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas pourquoi le chef de l'opposition ne veut pas tenir compte du processus en cours.
Nous avons des gens qui examinent minutieusement toutes les options. Pourquoi ne veut-il pas attendre que ce travail soit achevé?
Il dit qu'il veut que toutes les victimes de l'hépatite C soient indemnisées, mais, lorsque les fonctionnaires des divers gouvernements entreprennent d'examiner toutes les options de façon méthodique et responsable, il prend certains documents hors contexte et nous critique pour ne pas en arriver à une conclusion avant que le travail ne soit achevé. Il devrait attendre.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, nous préférons avoir des réponses du premier ministre plutôt que de l'avocat du gouvernement.
Une des options proposées par les négociateurs du gouvernement fédéral s'appelait le statu quo. Je suppose que c'est l'option préférée du premier ministre puisqu'il est en faveur du statu quo dans tous les dossiers. Toutefois, dans les listes des avantages et des inconvénients de cette option, les fonctionnaires fédéraux ont inclus dans les inconvénients le fait que cette option n'est pas conforme aux recommandations du juge Krever.
Le premier ministre admettra-t-il enfin que sa position préférée sur l'hépatite C n'est pas conforme aux recommandations que le juge Krever a faites dans son rapport?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il y a beaucoup de gens que je préférerais entendre, mais je vais quand même répondre à la question posée par le chef de l'opposition.
Cela ne sert à rien pour le député d'essayer d'argumenter à la Chambre des communes en se servant de bribes de documents de travail pris hors contexte. J'aimerais mieux que le travail soit bien fait.
C'est pourquoi nous avons demandé à des fonctionnaires provinciaux et fédéraux de se réunir pour mettre au point les détails et examiner les options. Lorsque nous aurons tous les renseignements pertinents, nous prendrons une décision. C'est la façon responsable de régler cette question.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, ces importants documents révèlent la vraie nature du premier ministre. Nous avons maintenant des preuves écrites que ses paroles compatissantes ne voulaient rien dire et n'étaient qu'une façade pour cacher une politique de non-indemnisation.
Pourquoi le premier ministre nous a-t-il dit qu'il étudierait toutes les options, alors que dans les coulisses il disait à ses fonctionnaires de saboter tout projet d'indemnisation?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il a été question des documents auxquels le député fait allusion dans les journaux de fin de semaine. J'imagine que c'était vraiment une nouvelle-choc pour le député.
La réalité c'est que toutes les options sont étudiées. Aucune décision n'a été prise et aucune ne le sera relativement au consensus national avant que nous ayons rassemblé toute l'information pertinente, et c'est précisément ce que les responsables sont en train de faire.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, certains participants sont arrivés à la réunion en se disant prêts à fournir des fonds. D'autres ont dit ne pas être certains d'avoir les moyens financiers nécessaires. Mais ceux-ci ont au moins le mérite d'être venus écouter toutes les propositions avec un esprit ouvert.
Les représentants du premier ministre sont arrivés à la réunion avec une seule idée en tête: n'offrir aucune indemnisation pour les victimes.
Pourquoi le premier ministre a-t-il affirmé une chose en public pour ensuite envoyer ses fonctionnaires à la réunion avec un message différent? Pourquoi a-t-il encore une fois trahi les victimes?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dit la même chose partout où nous sommes allés, à savoir que nous voulons que les participants examinent toutes les options, afin que les gouvernements soient en mesure de prendre une décision.
Le député de Macleod cite des bouts de textes hors contexte. Il ne faut pas qu'il perde de vue le bien-être des personnes que nous essayons d'aider dans ce dossier. Le député doit se rappeler qu'il n'est pas seulement un doreur d'image, mais qu'il est aussi médecin.
* * *
[Français]
LE TRANSPORT AÉRIEN
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre des Transports a soutenu qu'il avait besoin de deux transporteurs aériens compétitifs au Canada.
Or, ce faisant, le ministre avoue candidement qu'il coupe délibérément l'oxygène à Air Canada pour favoriser Canadien.
Le ministre est-il conscient que, par son favoritisme évident à l'endroit de Canadien, il empêche le développement normal d'Air Canada et, conséquemment, la création d'emplois à Montréal?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu beaucoup de discussions avec les compagnies aériennes. Nous avons fait un choix qui est, je pense, équitable, pas seulement pour Toronto ou Vancouver, mais aussi pour Montréal.
[Traduction]
Les faits ne confirment pas l'allégation selon laquelle nous favorisons Canadien plutôt qu'Air Canada. Nous tentons de trouver un juste équilibre afin que le plan de restructuration de Canadien aille de l'avant, ce qui est dans l'intérêt de ses employés et de tous les Canadiens, et nous voulons aussi donner à Air Canada plus de souplesse en lui accordant plus de routes.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, pourtant, le président et chef de la direction d'Air Canada a dénoncé le gouvernement fédéral qui continue, et je le cite, «d'attribuer les lignes internationales en fonction de considérations politiques».
Comment le ministre explique-t-il que son gouvernement s'adonne à un favoritisme grossier pour avantager Canadien et nuire à Air Canada en basant ses décisions sur des considérations politiques, au lieu de considérations économiques?
[Traduction]
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il est naturel que le président d'Air Canada exprime des réserves. C'est un homme d'affaires qui aime obtenir tout ce qu'il veut. Toutefois, le gouvernement recherche une approche plus équilibrée. Nous devons déterminer ce qui est dans l'intérêt de tous les Canadiens et c'est ce que nous avons fait.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, je rappelle au ministre des Transports que c'est un gouvernement libéral qui a causé le gâchis de Mirabel et que c'est aussi un autre gouvernement libéral qui nuit au développement d'Air Canada.
Le ministre admettra-t-il que par ses décisions politiques, non seulement il favorise le développement de Canadien, mais en plus, il ralentit le développement d'Air Canada en lui refusant des liaisons directes aussi nécessaires que Montréal-Milan, uniquement pour ne pas nuire à la liaison Toronto-Rome détenue par Canadien?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, nous avons donné la route Toronto-Hong-Kong à Air Canada, ce qui est dans le meilleur intérêt des résidants de Montréal, parce qu'ils peuvent prendre avantage d'un tel service. Aussi, nous avons donné cinq partages de code, ce qui est bon pour Air Canada.
[Traduction]
Nous avons donné cinq partages de code, c'est-à-dire des partages de dénominations, à Air Canada et cinq à Canadien. Nous nous sommes engagés à faire un suivi chaque année. Nous avons annoncé que la route de Taiwan sera probablement accordée d'ici un an. Qu'est-ce que la ligne Air Canada veut de plus?
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Orléans, BQ): Monsieur le Président, je ne comprends pas comment il se fait que la ligne Toronto-Hong-Kong peut être bonne pour le développement de Montréal.
Le ministre admettra-t-il qu'en freinant volontairement le développement d'Air Canada pour favoriser Canadien, il freine, par la même occasion, le développement de l'aéroport de Montréal?
Des voix: Oh, oh!
[Traduction]
Le vice-président: Certains députés ont certes de belles voix, mais cela empêche parfois le président d'entendre les questions et les réponses.
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il semble que nos amis du Bloc ne cessent jamais de se lamenter.
Dans le cas qui nous intéresse ici, nous avons examiné les routes aériennes de façon rationnelle et équilibrée. Nous nous sommes engagés à les examiner régulièrement. D'autres changements seront sûrement apportés dans l'année en cours.
Entre-temps, de nouvelles routes et de nouveaux partages de code ont été accordés à Air Canada. Cela profitera aux voyageurs non seulement de Toronto et de Vancouver, mais également de Montréal et d'autres régions du Canada.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le ministre de la Défense prétend appuyer la politique de tolérance zéro à l'égard des infractions sexuelles, mais il se garde bien de joindre le geste à la parole.
En février 1997, la Commission des droits de la personne recommandait une indemnisation pour l'une des victimes nommées dans l'article publié récemment par Maclean's. Seize mois plus tard, rien n'a été fait. Zéro. Le ministre ne donne-t-il pas l'impression que le harcèlement sexuel est toléré?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, absolument pas. Le colonel Patricia Samson, commandant de la prévoté, a annoncé aujourd'hui que, sur les 26 cas dont il est question dans l'article de Maclean's, deux vont être rouverts, six feront l'objet d'un examen plus approfondi, 15 sont des allégations nouvelles qui feront l'objet d'une enquête et trois sont des cas où l'on a jugé que le processus avait été mené à bonne fin et qu'il n'y a donc pas lieu de prendre d'autres mesures.
Nous sommes passés à l'action. Nous avons mis en place les mécanismes nécessaires. Nous procédons à la formation requise pour que la politique de tolérance zéro ne demeure pas lettre morte.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, il est clair que la politique en vigueur est de tolérer le harcèlement à moins qu'il ne soit découvert et exposé au grand jour.
Nous savons que le système de justice militaire ne protège pas les femmes. Pourtant, le ministre tient à ce que les cas d'agression sexuelle soient jugés par un tribunal militaire, et surtout pas par un tribunal civil.
Dans le système militaire, au lieu d'obtenir réparation, les femmes sont sujettes à des représailles constantes. Elles ne cessent d'être victimes.
Pourquoi devraient-elles faire confiance à un système qui les a toujours trahies?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le chef du Nouveau Parti démocratique se trompe car dans presque tous les cas dont j'ai parlé, et dont il est question dans l'article de Maclean's, c'est la police civile qui a fait enquête et c'est un tribunal civil canadien qui a statué.
* * *
LA FISCALITÉ
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, pas une seule province n'a adhéré à un projet d'établissement d'une agence nationale de perception des impôts, mais le gouvernement a présenté ce matin un projet de loi visant à créer un tel organisme.
L'Alberta et l'Ontario veulent avoir plus d'indépendance à l'égard d'Ottawa en matière fiscale et craignent que ce nouvel organisme ne leur enlève la liberté dont elles jouissent maintenant.
Pourquoi le ministre du Revenu propose-t-il cette mesure législative alors que l'étude qu'il a commandée pour élaborer ce projet d'agence s'appuyait sur l'hypothèse que toutes les provinces y participeraient? Le ministre est-il en train de prendre ses désirs pour des réalités?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, j'ai procédé à des consultations partout au Canada depuis que je suis devenu ministre du Revenu national et je puis dire à tous les députés que les Canadiens souhaitent avoir une seule administration fiscale. Les Canadiens veulent réduire le double emploi et les chevauchements.
La députée s'oppose-t-elle à ce qu'on réduise le coût de l'observation du régime fiscal? S'oppose-t-elle à ce qu'on donne un meilleur service au public, un meilleur service aux provinces et un meilleur service aux entreprises canadiennes? Elle ne sait pas de quoi elle parle. Elle devrait plutôt tâcher de trouver comment nous pouvons assurer un service plus efficace et plus économique et mieux servir le public canadien.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, si ce que dit le ministre était exact, tous les ministres et toutes les provinces auraient maintenant adhéré au projet.
Le gouvernement prétend que la nouvelle agence de perception des impôts améliorera l'efficacité administrative à Revenu Canada. Ce ministère regroupe le quart de toute la fonction publique. S'il y a un problème d'efficacité chez le quart de la fonction publique, c'est qu'il y en a un dans toute la structure de l'État et dans toute la fonction publique.
Faut-il voir, dans ce morcellement de l'État agence par agence, la solution parcellaire du gouvernement à ce problème plus vaste?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de citer le ministre des Finances du Manitoba. Voici ce qu'a dit Eric Stefanson, le ministre des Finances du Manitoba: «Les provinces de l'Ouest préconisent depuis longtemps la création d'une agence nationale. Nous appuyons donc entièrement ce projet.» La députée devrait écouter ce que disent certains membres de sa famille politique.
Je le demande à la députée, refuse-t-elle une possibilité de réduire le double emploi et les chevauchements? Est-elle favorable à l'établissement de systèmes parallèles d'un bout à l'autre du pays? Je ne le pense pas. Les Canadiens veulent...
Le vice-président: Le député de Calgary-Nord-Est.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans son édition du 25 mai, le magazine Maclean's a révélé 26 cas d'inconduite sexuelle dans les forces armées. Aujourd'hui, devant le comité, le chef d'état-major de la Défense a confirmé que 23 des 26 cas mentionnés feront l'objet d'une nouvelle enquête. Il y a quelque chose qui cloche dans tout cela. Autrement dit, les médias ont fait le travail que la police militaire a refusé d'accomplir.
Ma question s'adresse au ministre de la Défense. Pourquoi ces cas d'agression sexuelle n'ont-ils pas été traités sérieusement immédiatement?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les cas d'agression connus ont évidemment été traités très sérieusement. Tous les cas mentionnés n'étaient cependant pas connus.
Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, ce n'est que l'automne dernier qu'a été créé le service national d'enquête chargé de mener ce genre d'enquête indépendamment de la chaîne de commandement opérationnel. Nous avons aussi désigné des conseillers pour prévenir le harcèlement. Nous sommes sur le point de nommer un ombudsman. Nous améliorons les mécanismes qui sont en place et la formation qui est dispensée afin d'appuyer notre politique de tolérance zéro et de modifier les mentalités pour éviter que pareille situation ne se reproduise.
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, cette semaine, nous avons entendu, en provenance d'Edmonton et de Québec, de nouvelles allégations concernant d'autres agressions sexuelles. Les allégations de cette nature vont persister tant que le ministre de la Défense ne s'attaquera pas sérieusement au problème. Il ne suffit pas de dire que tous les mécanismes de protection sont en place. Ils ne fonctionneront pas d'eux-mêmes.
Quand le ministre de la Défense va-t-il sérieusement s'employer à enrayer ce genre de crime et quand établira-t-il un service indépendant chargé de mener les enquêtes et de traduire en justice ceux qui sont soupçonnés d'inconduite criminelle?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il existe un service indépendant, le service national d'enquête sous la direction du Colonel Patricia Samson. Ce service est indépendant de la chaîne de commandement opérationnel. De plus, on nommera sous peu un ombudsman qui est tout à fait à l'extérieur de la chaîne de commandement et qui doit faire rapport au ministre de la Défense nationale.
Ces mécanismes et de nombreuses autres mesures de protection sont actuellement en place ou le seront sous peu et assureront l'application de notre politique de tolérance zéro. Le député de l'opposition préférerait que nous nous débarrassions des victimes. Nous préférons nous débarrasser de ceux qui commettent des crimes.
* * *
[Français]
LE TRANSPORT AÉRIEN
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.
Le ministre des Transports refuse à Air Canada des liaisons internationales directes et cela, pour ne pas concurrencer Canadien. En conséquence, de plus en plus de passagers canadiens transitent par les États-Unis.
En bloquant l'accès direct d'Air Canada vers de grandes destinations internationales, est-ce que le ministre ne comprend pas qu'il force ainsi le plus souvent les passagers canadiens à utiliser les transporteurs américains?
[Traduction]
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, si je ne m'abuse, le public voyageur a tout intérêt à ce qu'il y ait deux lignes aériennes rentables au Canada. C'est pourquoi, il y a environ deux ans, le gouvernement a pris des mesures pour aider les Lignes aériennes Canadien à mettre en oeuvre leur plan de restructuration. Ce plan donne d'excellents résultats. Canadien est aujourd'hui rentable, comme l'est d'ailleurs Air Canada dont le chiffre d'affaires a atteint 427 millions de dollars l'an dernier et qui va très bien. Sa situation sera encore meilleure par suite de ces modifications.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, plus le ministre intervient pour maintenir en vie Canadien, presque artificiellement à toutes fins utiles, plus les passagers canadiens transitent par les aéroports américains pour se rendre en Europe. C'est bien simple, et le ministre devrait le comprendre.
Est-ce que le ministre admettra que sa politique pour sauver deux transporteurs aériens au Canada, qui consiste à retarder en quelque sorte le développement d'Air Canada, nuit, non seulement à Air Canada, mais aussi à l'aéroport de Montréal, qui devient finalement un aéroport satellite des aéroports américains?
[Traduction]
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je ne vois pas comment le fait de désigner Air Canada comme transporteur entre Toronto et Hong Kong sept jours par semaine et de lui accorder cinq partages de dénominations de son choix, deux mesures qui sont dans l'intérêt des voyageurs de Montréal, pourrait nuire à Air Canada; au contraire. Ces modifications, et d'autres qui viendront au cours de l'année, aideront Air Canada à améliorer sa compétitivité et permettront une hausse de ses recettes. Canadien en bénéficiera lui aussi. C'est une approche équilibrée que le gouvernement est prêt à défendre.
* * *
LES CONTRATS DU GOUVERNEMENT
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, la fédération des contribuables canadiens a publié ce matin un rapport qui montre très clairement que Bombardier est l'une des sociétés les plus subventionnées au Canada. Elle a déjà reçu 1,2 milliard de dollars en subventions au cours des 15 dernières années. Le premier ministre a accordé beaucoup de contrats sans appel d'offres à Bombardier, 110 en tout. Les règles de divulgation publique avaient au moins été respectées dans ces cas. Pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas appliqué ces règles lorsque le gouvernement a accordé le plus important contrat, évalué à 2,85 milliards de dollars?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui concerne ce contrat de Cold Lake, je me permets de citer ce qui suit: «Le 2 mai dernier, j'ai assisté à un dîner à Grand Centre, en Alberta, en l'honneur d'une délégation de l'OTAN. Cette délégation doit étudier» et vient ensuite un texte en faveur de tout cela «la délégation, composée de représentants du gouvernement et de l'industrie, se penche sur les avantages militaires et financiers que procurerait la formation donnée au Canada.» La soirée que les responsables du projet avait organisée «était un excellent exemple de l'hospitalité typique des gens de l'Ouest.» etc. Cette remarquable déclaration, aux termes de l'article 31, a été faite le 6 mai 1996.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre n'y comprend rien lorsqu'il est question de contrats sans appel d'offres. La société Frontec, qui fait partie du consortium Bombardier et qui est partie au contrat de 2,85 milliards de dollars, se verra accorder prochainement un autre contrat, de 550 millions de dollars, sans appel d'offres. Nous n'en avons pas contre la société Frontec, mais contre le premier ministre, qui ne suit pas les règles.
Quand le premier ministre va-t-il se conformer à la règle de la divulgation publique, faire preuve d'équité, respecter les règles de la concurrence et procéder à des appels d'offres pour ces énormes contrats?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le contrat dont parle le député a fait l'objet d'un appel d'offres. Il s'agit d'une alliance entre les Inuit et cette société dans le Nord. Le contrat pourra être renouvelé à un moment donné.
Toute entreprise qui veut faire une proposition est la bienvenue. Quoi qu'il en soit, la Chambre ferait bien de me laisser terminer la citation.
Lorsque la députée d'Edmonton a fait du lobbying pour que cette entreprise obtienne le contrat, elle a déclaré que la soirée que les responsables du projet avait organisée «était un excellent exemple de l'hospitalité typique des gens de l'Ouest. Des élèves avaient décoré l'endroit avec les drapeaux des pays membres de l'OTAN, qui avaient été faits à la main. Les invités ont eu droit à un dîner splendide de boeuf de l'Alberta. Toute la réception était marquée au sceau de l'unité et de l'appui [en faveur de ce contrat]».
* * *
[Français]
LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Les pêcheurs et les travailleurs des pêches attendent depuis des mois pour savoir ce que fera le gouvernement après l'expiration de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Le ministre, pour sa part, refuse de donner des réponses claires.
Des voix: Oh, oh!
M. Yvan Bernier: Il dit tantôt une chose, tantôt une autre. Bref, il se contredit.
Des voix: Oh, oh!
[Traduction]
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît! La présidence a beaucoup de mal à entendre les questions posées. Nous perdons du temps.
[Français]
M. Yvan Bernier: Ma question est très simple: Va-t-ily avoir, oui ou non, une autre Stratégie du poisson de fond et quand sera-t-elle annoncée?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je ne crois pas m'être jamais contredit dans ce dossier. J'ai toujours dit que nous nous étions préoccupés de la situation de l'après-Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique qui surviendra au mois d'août.
Nos gens ont travaillé très fort, et certains de nos fonctionnaires sont allés dans les provinces de l'Atlantique au cours des deux dernières semaines où ils mènent des consultations pour explorer certaines avenues, de sorte que nous travaillons en partenariat avec les provinces pour nous pencher sur cette situation.
M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, la SPA prend fin au mois d'août, mais il ne faudrait pas que le ministre attende la soirée du 31 juillet pour agir.
J'aimerais que le ministre nous dise si, dans le nouveau programme de la SPA, il songe à des mesures comme des retraites anticipées, des mesures de rachat de permis, le soutien au revenu, et la diversification de l'économie régionale. Est-ce que ces quatre éléments se retrouveront dans le futur programme? Bref, j'aimerais que cela se fasse avant le 31 juillet.
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le «package» que nous sommes en train de préparer présente plusieurs possibilités. Il y a plusieurs outils de développement qui seront là et j'espère que nous serons en mesure de pouvoir l'annoncer le plus rapidement possible.
* * *
[Traduction]
L'ACCÈS À L'INFORMATION
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, permettez-moi de dire que j'étais en faveur de Top Gun et que je le suis toujours. Mais je suis également en faveur d'une franche divulgation.
Incidemment, le commissaire à l'information a déposé son dernier rapport aujourd'hui. Alors qu'il aurait dû lancer un dernier bravo, il a plutôt dû affirmer que le gouvernement est empreint de culpabilité. Le secret est toujours à la mode. C'est inadmissible. Mulroney donnait au moins une conférence de presse à l'occasion, comme le fait Boris Eltsine.
Quelle sorte de renseignements le premier ministre fournit-il? Est-il fier de sa médaille d'honneur?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Madame la Présidente, je suis à la Chambre trois ou quatre fois par semaine. Je suis toujours ici pour répondre aux questions. Ce n'est pas de ma faute si la confusion règne en face.
Je devrais peut-être terminer la déclaration que la députée vient de faire à la Chambre. Grâce à Gary Blanchard, président du projet, et à son comité, la promotion de nos installations est excellente. Comme la députée l'a dit, toutes nos félicitations. Target: Top Gun.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, j'ai un peu de mal à saisir où le premier ministre veut en venir. Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
Hier, le ministère des Affaires étrangères a conclu, avec la Corée du Sud, une entente prévoyant la construction de réacteurs nucléaires en Chine et en Turquie. C'était hier.
Étant donné que nous sommes mêlés de près aux programmes nucléaires de l'Inde et du Pakistan, le ministre peut-il justifier la conclusion de cette entente sur la vente de réacteurs nucléaires en ce moment critique des relations internationales?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le député met en parallèle deux moments distincts, qui sont survenus à 24 ans d'intervalle, et deux séries de règles assez différentes.
Compte tenu de l'expérience des années 70, le Canada a considérablement durci ses exigences relatives à la non-prolifération nucléaire. Des ententes bilatérales sont requises avec tout pays où est exportée notre technologie. La signature des traités internationaux de non-prolifération est requise. Est également obligatoire l'inspection par l'Agence internationale de l'énergie atomique.
Quiconque veut faire affaire avec le Canada doit se conformer à ces exigences.
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[Français]
LE KOSOVO
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, le conflit au Kosovo s'aggrave de jour en jour.
Après les répressions violentes des manifestations en mars dernier, l'armée serbe se livre maintenant à des bombardements massifs qui poussent à l'exildes dizaines de milliers de personnes.
Puisque les sanctions économiques et les avertissements répétés de la communauté internationale à l'endroit de la Serbie ne donnent aucun résultat, le ministre favorise-t-il maintenant des mesures plus musclées, et notamment, l'envoi de forces de combat dans la région?
[Traduction]
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, la semaine dernière, à l'occasion d'une réunion du Conseil de l'OTAN, les ministres des Affaires étrangères ont déterminé d'importantes initiatives à soumettre à l'examen du comité militaire et d'autres comités.
Hier, au Conseil de l'OTAN, notre ambassadeur a demandé que ces examens soient accélérés afin que les ministres de la Défense de l'OTAN puissent étudier les initiatives en cause quand ils se réuniront la semaine prochaine.
Nous travaillons à ce que les possibilités que l'on donne suite à nos mesures préventives soient renforcées au Conseilde l'OTAN car nous devons le faire ensemble.
* * *
LE COMMERCE INTERNATIONAL
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.
Le public s'inquiète de plus en plus du manque de transparence des décisions que prennent les organismes internationaux sans avoir à en rendre compte.
Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire pour assurer une plus grande transparence des décisions prises à l'Organisation mondiale du commerce?
M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Je remercie la députée de sa question très perspicace.
À l'ouverture de l'assemblée plénière de l'Organisation mondiale du commerce, il y a eu deux semaines lundi dernier, le ministre a fait un discours dans lequel il invitait l'OMC à une plus grande transparence. Deux jours plus tard, j'ai eu l'honneur de faire un discours à la clôture de l'assemblée. Mon discours était aussi essentiellement une invitation à une plus grande transparence de l'Organisation mondiale de commerce.
* * *
LE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre du Développement des ressources humaines a nié tout scandale lié au Fonds transitoire pour la création d'emplois. Nie-t-il que 124 employés de St. John's ont perdu leur emploi? Nie-t-il qu'un million a été englouti en pure perte dans BPS pour des raisons politiques? Nie-t-il que les 285 000 $ accordés à Cape Shore Seafoods n'ont pas créé un seul emploi? Nie-t-il que le président de Cape Shore a admis avoir utilisé un prêt garanti par le gouvernement pour rembourser les arriérés d'impôt et les dettes d'une autre de ses entreprises?
Le ministre...
Le vice-président: Le ministre du Développement des ressources humaines.
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, ce qu'il faut bien faire comprendre aux députés et à la population, c'est que le fonds transitoire a servi à financer 700 projets et à créer plus de 30 000 emplois au Canada. De ces 700 projets, six ou sept n'ont peut-être pas donné de très bons résultats.
Je crois que six ou sept projets en difficulté sur 700, cela constitue une très très bonne moyenne.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le dernier ministre refusait de confirmer que le Fonds transitoire pour la création d'emplois avait permis de créer 80 000 emplois, au moins ce ministre est prêt à prendre la parole. Il n'a rien nié et n'a pas la moindre idée de ce qui se passe. Hier, il m'a mis au défi de répéter ce que je disais en dehors de la Chambre des communes. Aujourd'hui, c'est moi qui le mets au défi de sortir de la Chambre des communes et de nier devant les caméras que ce que j'ai dit est vrai.
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je suis toujours étonné par les exagérations du député d'en face.
L'exemple utilisé était BPS. Le député dit que 124 travailleurs n'ont pas été payés. Il demande où est allé le million.
Je peux affirmer au député que ces travailleurs ont été rémunérés pendant sept mois avant qu'il y ait des difficultés. Lorsque nous avons constaté ces difficultés, nous avons immédiatement corrigé la situation.
* * *
LES MARCHÉS DE L'ÉTAT
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, on entend parler quotidiennement de marchés attribués sans appel d'offres par le ministère de la Défense nationale. Je voudrais cependant faire porter mon attention sur le marché à fournisseur unique d'une durée de 20 ans accordé à Bombardier à l'égard de l'OTAN.
Est-il vrai qu'Industrie Canada permet à Bombardier de profiter des crédits pour retombées industrielles au Canada, même si cette société créera des emplois à l'étranger, y compris en Irlande du Nord? Si tel est le cas, le ministre de la Défense nationale peut-il assurer à la Chambre que ce marché à fournisseur unique ne prévoit aucune retombée industrielle pour des emplois qui ne sont pas créés entièrement au Canada?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je pensais que le député serait heureux de savoir que la base de Moose Jaw sera épargnée grâce à ce projet.
En fait, Bombardier fait partie d'un consortium qui a déjà assuré des services à Portage-la-Prairie, autre localité qui profite bien d'un programme de formation de pilotes. Nous avons réussi à nous doter de ce programme, car nous avons pu respecter les échéanciers de l'OTAN et attribuer un marché qui fera économiser aux contribuables canadiens 200 millions de dollars sur 20 ans.
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LA DÉFENSE NATIONALE
M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, il est bien évident que ce ministre de la Défense nationale a échoué lamentablement.
Compte tenu du fait que le ministre était aux commandes lorsque les recommandations de la commission d'enquête sur l'affaire de la Somalie n'ont pas été suivies, lorsque des activités d'inconduite sexuelle et de marché noir en Bosnie n'ont pas fait l'objet d'enquêtes appropriées, lorsqu'on a salué le départ de généraux à la retraite par des fêtes dont les coûts étaient scandaleux, lorsque le moral et les conditions de travail dans les forces armées étaient au plus bas, lorsqu'on a conclu des marchés de connivence et sans appel d'offres avec Bombardier, et lorsque les allégations de harcèlement sexuel dans les forces se sont multipliées et que le ministre a parlé de piètre rendement, quand le premier ministre se départira-t-il de ce ministre de la Défense nationale? Combien d'échecs doit-il accumuler avant d'être renvoyé?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai reçu de nombreuses instances du premier ministre de la Saskatchewan nous demandant de préserver la base de Moose Jaw.
Cette petite famille, dans ce coin-là, semble éprouver beaucoup de difficultés.
* * *
LE TABAC
M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, si le gouvernement voulait vraiment que le nombre de fumeurs diminue, surtout chez les jeunes, il n'aurait pas réduit les taxes sur le tabac en 1994. Cette capitulation a donné lieu à la plus grosse augmentation du nombre de fumeurs que nous ayons jamais connue au Canada.
Pour s'attaquer au problème du tabagisme, qui fait 40 000 victimes par année, il faut adopter une stratégie à trois volets, soit coût, publicité et sensibilisation.
Quand le ministre de la Santé va-t-il s'employer sérieusement à réduire le nombre de fumeurs au Canada et renverser la malheureuse décision prise en 1994?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député doit savoir que nous avons déposé hier un projet de loi prévoyant l'interdiction complète des commandites par les compagnies de tabac, et cela d'ici cinq ans.
Au terme de cette période de transition durant laquelle les organisateurs pourront se trouver de nouveaux commanditaires, les commandites des compagnies de tabac seront interdites au Canada bien avant de l'être en Europe et aux États-Unis. Dans sa lutte contre le tabagisme, le Canada sera une fois de plus un chef de file mondial.
M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, à ce propos, le ministre des Finances pourrait faire une chose qu'il fait rarement, c'est-à-dire prendre la parole pour appuyer le ministre de la Santé. Il ne l'a certes pas fait dans le dossier de l'hépatite C.
L'augmentation des taxes sur le tabac occasionnerait une réduction de 30 p. 100. Le nombre de nouveaux fumeurs, surtout chez les jeunes, baisserait de 30 p. 100 du jour au lendemain, surtout si cette mesure s'accompagnait de mesures énergiques de publicité et de sensibilisation.
Le ministre des Finances va-t-il y songer afin de contribuer à sauver des vies chez les jeunes Canadiens?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a fait connaître très clairement son intention de majorer les taxes sur les cigarettes et il est tout disposé à le faire. Il faut cependant que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, dont le gouvernement conservateur de l'Ontario, signent une entente à cette fin. Nous sommes prêts à le faire dans les plus brefs délais. Toutefois, les provinces nous ont fait savoir qu'elles ne voulaient pas qu'il y ait le moindre risque d'encourager la contrebande. Nous comprenons leur position, mais poursuivons nos pourparlers.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
Jeudi dernier, à une assemblée tenue à Montréal, des Canadiens d'origine pakistanaise, chinoise et indienne m'ont fait part de leurs profondes préoccupations concernant les essais nucléaires qui ont créé une situation très instable dans cette région.
Le ministre peut-il dire à la Chambre quelles sont les mesures que le gouvernement du Canada a prises ou compte prendre pour favoriser un retour à la stabilité en Asie du Sud-Est?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, c'est très encourageant de voir que, dans la circonscription de la députée, des gens de toutes origines appuient une idée que tous les Canadiens partagent, à mon avis, soit la nécessité d'empêcher la propagation des armes nucléaires.
Quant aux mesures que nous avons prises, tout d'abord, à la réunion des pays du G8, le premier ministre a dénoncé les essais nucléaires et demandé que tous les pays adoptent un train de mesures. Depuis lors, nous avons poursuivi nos efforts en adoptant un rôle de premier plan aux réunions de l'OTAN pour obtenir que l'organisation condamne les essais. Nous avons aussi joué un rôle de premier plan à l'OEA, pas plus tard que la semaine dernière, et nous participerons à des réunions la semaine prochaine.
Il faut absolument enfermer le génie nucléaire dans sa bouteille, et le Canada fera tout ce qu'il peut pour que ce soit fait.
* * *
LES PÊCHES
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Monsieur le Président, depuis maintenant plusieurs semaines, le ministre des Pêches refuse nos suggestions d'amendement du projet de loi C-27, Loi modifiant la Loi sur la protection des pêches. D'après le libellé actuel du projet de loi, le Canada serait incapable d'intenter des poursuites contre les navires étrangers qui enfreignent nos lois. Ironiquement, quand le premier ministre Tobin écrit au ministre pour lui demander de proposer des amendements, le ministre accepte de bonne grâce.
Nous savons que le premier ministre a demandé que cette lettre soit gardée secrète, mais nous ne savons pas qui s'occupe vraiment des pêches et des océans, M. Tobin ou le député de Victoria?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, comme le député est membre du Comité des pêches, il devrait comprendre que ce n'est ni moi ni le premier ministre de Terre-Neuve qui dirigeons ce comité. Il devrait aussi savoir, s'il assiste aux réunions, et apparemment il est permis d'en douter, que le comité est maintenant saisi du projet de loi. Si le comité propose des amendements, ce sera une très bonne chose.
Les autres députés à la Chambre étudieront les amendements à l'étape du rapport.
* * *
[Français]
LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Transports affirmait cette semaine, à une question du député de Chicoutimi, que le ministre des Transports du Québec ne lui avait présenté aucune demande d'implication financière concernant la route 175 entre Québec et le Saguenay.
Comment le ministre a-t-il pu faire une telle affirmation, alors qu'une lettre du 27 mai dernier, signée par le ministre des Transports du Québec, lui a été faxée à son bureau, à la veille de la rencontre d'Edmonton, et que cette lettre contient une demande très claire concernant la réfection de la route 175 dans le parc des Laurentides? À quel jeu joue le ministre des Transports?
[Traduction]
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, les déclarations attribuées à M. Brassard ont été faites, c'est évident, à la suite de la réunion d'Edmonton.
Il n'a pas été question de la route 175 à cette réunion. Il est évident que le ministre québécois s'intéresse à la route 175.
Le fait est que nous avons parlé de la possibilité de pouvoir compter sur les fonds destinés au réseau routier national. Si c'est le cas, la route 175 va alors être financée, sous réserve, bien entendu, de l'approbation du gouvernement du Québec.
Il n'y a aucune contradiction entre ce que j'ai dit il y a deux jours et ce que je dis aujourd'hui.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, en 1993, le premier ministre a dit clairement que les modifications apportées au régime d'assurance-chômage par le gouvernement conservateur avaient des répercussions catastrophiques sur l'emploi au Canada. Pourquoi cette volte-face? À l'heure actuelle, 780 000 chômeurs n'ont pas droit aux prestations de l'assurance-emploi.
Le premier ministre va-t-il tenir sa promesse électorale et aider les chômeurs en utilisant l'excédent de 17 milliards de dollars pour élargir l'accessibilité au régime d'assurance-emploi?
[Français]
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il y avait des éléments de cette réforme qui ne fonctionnaient pas du tout. Le fait que le supplément du revenu familial, que nous avons inclus dans notre réforme, s'adresse à l'ensemble du revenu familial et non pas au revenu individuel, comme le gouvernement précédent l'avait fait, était carrément inéquitable, et cela a été reconnu dans tous les rapports d'évaluation.
Nous avons voulu également amener le système sur une base d'heures pour mieux servir les Canadiens pour que le système soit plus juste et plus équitable. Il n'y a pas de contradiction, parce que nous avons souhaité améliorer les réformes qui avaient été faites précédemment et corriger certaines des erreurs qui avaient été commises par le précédent gouvernement.
* * *
[Traduction]
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le vice-président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de M. Franz Fischler, commissaire à l'Agriculture et au Développement rural de la Commission européenne de l'Union européenne.
Des voix: Bravo!
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, nous avons en main un document qui semble venir du bureau du leader du gouvernement à la Chambre des communes et qui laisse entendre que la Chambre ajournera ses travaux le 16 juin ou autour de cette date. Le leader du gouvernement à la Chambre des communes pourrait-il nous dire si cela est bien vrai et pourrait-il nous préciser les travaux pour le reste de la session?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, c'est une question intéressante. Si ce document a fait l'objet d'une fuite à mon bureau, il est évident que quelqu'un l'a mal lu.
Cet après-midi, nous allons continuer et, je l'espère, terminer l'étude du projet de loi C-37, les modifications à la Loi sur les juges, à l'étape du rapport, et allons nous pencher sur le projet de loi C-26, la Loi sur les grains du Canada et sur le projet de loi C-3, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques.
Demain, nous devrions étudier, en deuxième lecture, le projet de loi S-2, la Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et la sécurité des transports et étudier, à l'étape du rapport, le projet de loi S-3, la Loi sur les normes de prestation de pension.
Comme on l'a déjà annoncé, lundi et mardi prochains seront des jours désignés. Lorsque nous aurons terminé les travaux des crédits, mardi soir, nous aurons pour priorité de terminer l'étude du projet de loi C-37, en troisième lecture, je l'espère, et nous devrons adopter les amendements du Sénat au projet de loi C-4, la Loi sur la Commission canadienne du blé, et terminer l'étude d'autres projets de loi déjà mentionnés.
De plus, entre autres choses, nous entendons terminer l'étude des mesures suivantes: le projet de loi C-38 concernant le parc national Tuktut Nogait, le projet de loi C-25 sur la défense, le projet de loi C-27 concernant les pêches côtières, le projet de loi C-20 concernant la concurrence, le projet de loi S-9 concernant les billets de dépôt et le projet de loi C-30, la Loi sur l'éducation des Mi'kmaq.
C'est un programme bien chargé avant la date d'ajournement prévue au Règlement. J'entends consulter les leaders à l'autre endroit pour déterminer si nous aurons besoin de séances de soir pour respecter ce délai. J'espère que cela ne sera pas nécessaire, mais comme je le dis depuis un certain temps déjà, il est clair que nous avons au moins deux semaines de travail intensif.
Je sais que la rumeur veut que la Chambre ajourne ses travaux beaucoup plus tôt. Certaines personnes ont même dit, ce qui est tout à fait irréfléchi, que nous pourrions nous ajourner dès le 12 juin. Ce sont des inepties. Nous avons trop de travail pour cela. J'espère que nous pourrons nous ajourner le 19 juin si tout va bien.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je me demande si le leader du gouvernement à la Chambre pourrait parler des mesures législatives qui doivent être présentées mais non pas adoptées d'ici le congé d'été. Peut-il nous dire si la Chambre aura la possibilité d'examiner la mesure législative de l'après LSPA et si le gouvernement a l'intention de présenter une mesure législative concernant la mise en place de la prestation aux aînés? Beaucoup de gens aimeraient savoir si le gouvernement a ou non l'intention de donner suite à cette idée. Ils espèrent que non mais aimeraient connaître les intentions du gouvernement à ce sujet. Peut-être le leader du gouvernement à la Chambre pourrait-il nous donner des précisions à propos de ces deux questions.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, il serait manifestement déplacé de ma part de faire des commentaires à propos de mesures législatives qui n'ont pas encore été présentées.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LES JUGES
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que de la motion no 2.
Le vice-président: Lorsque la Chambre s'est interrompue pour la période des questions, la parole était au député de Prince George—Peace River, auquel il restait cinq minutes.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, comme toujours, c'est un plaisir pour moi que de prendre la parole. Décidément, je n'ai pas de chance. Les trois ou quatre fois que j'ai pris la parole au cours du printemps, j'ai été interrompu par la période des questions. Aujourd'hui, ça continue. Ça semble être devenu une tradition.
En réponse à ce que vient de dire le leader du gouvernement à la Chambre au sujet des mesures législatives que nous devons examiner, ajoutant qu'il espérait qu'il ne serait pas nécessaire d'avoir des séances le soir, je pense que tout le monde espère la même chose.
Mais si, en réalité, cela signifie que l'opposition doit approuver sans discussion toutes les mesures législatives que le gouvernement a présentées de façon à ce qu'elles soient toutes adoptées, qu'il n'y compte pas. S'il faut que nous siégions tard le soir au cours des prochaines semaines, c'est ce que nous ferons alors pour représenter les préoccupations des Canadiens qui vivent et travaillent dans le monde réel et ont de très vives réserves au sujet du projet de loi que le gouvernement veut faire adopter à la Chambre envers et contre tous.
Lorsque nous avons ajourné le débat, juste avant la période des questions, j'étais en train de parler du projet de loi C-37 et plus particulièrement de la motion no 2. Nous étudions à l'étape du rapport le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges, ainsi que la motion no 2, qui a été présentée par mon collègue de Crowfoot. Elle porte sur l'obligation de rendre des comptes et de soumettre au Comité permanent de la justice et des droits de la personne les rapports contenant les futures recommandations de la commission qu'on va créer aux termes du projet de loi C-37 pour examiner les traitements, les indemnités et les avantages consentis aux juges.
Là où je veux en venir, c'est qu'il s'agit, en fait, d'une question de reddition de comptes. Il faut que ces rapports soient soumis à l'examen public pour que la population en général puisse dire, par l'entremise des députés de l'opposition, au comité permanent, ce qui constitue, selon elle, une rémunération équitable pour nos juges.
Qu'est-ce qui dérange le plus les Canadiens dans cette augmentation de 8,3 p. 100 accordée aux juges? Je crois que c'est probablement les décisions qui viennent de certains de ces juges. Je veux préciser très clairement ici qu'il est question de certains juges et non pas de tous. Beaucoup rendent des jugements et des décisions qu'il peuvent défendre devant la population. Chose certaine, de plus en plus, il semble qu'il y a un thème qui sous-tend une bonne partie des jugements rendus par nos tribunaux.
Plus tôt, en parlant de la motion no 1 à l'étape du rapport du projet de loi C-37, je me suis reporté à trois affaires précises qui sont assez bien connues dans ma circonscription, Prince George—Peace River: les affaires Feeney, Solomon et Baldwin. En fin de compte, il est question des jugements rendus dans ces cas-là. Je crois que la population en général n'appuie pas une bonne partie des décisions rendues par des juges qui légifèrent, en fait, plutôt que d'interpréter la loi de façon équitable.
D'après ce que me disent de plus en plus d'électeurs, et je crois que l'affaire Feeney est un exemple classique de cela, il me semble qu'il importe peu de savoir si un accusé est innocent ou coupable. Ce qui importe, c'est de savoir si c'est légal ou illégal. Les tribunaux semblent se préoccuper davantage des questions techniques que de la culpabilité ou de l'innocence des individus. Je pense que c'est vraiment une grave lacune dans notre système judiciaire qu'on veut faire passer pour un système de justice, à l'heure actuelle.
Nous n'appuierons pas ce projet de loi. Nous ne croyons pas que la population canadienne va défendre, à ce stade-ci, une augmentation de 8,3 p. 100 du traitement des juges, alors qu'elle ne comprend pas ou n'appuie pas une bonne partie des décisions que ces mêmes juges rendent.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA CONFÉRENCE DE PRESSE DE M. ERNST ZUNDEL
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. On m'a signalé, et je pense que d'autres leaders et députés en ont également été informés, que demain, M. Ernst Zundel donnera une conférence de presse à la salle 130-S.
Les parlementaires ont tout lieu de s'inquiéter de ce que ces lieux puissent servir à pareille fin. Je voudrais exprimer ma préoccupation et je suis sûr que d'autres voudront en faire autant.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire suite aux propos de mon collègue, le leader à la Chambre du Nouveau Parti démocratique.
La conférence qui doit avoir lieu le vendredi 5 juin à 10 h 30 à la salle de conférences Charles Lynch, soit la pièce 130-S de l'édifice du Centre constitue, à mon avis, un geste de provocation à l'endroit de tous les Canadiens. Comme on le sait, ce type est le tristement célèbre porte-parole de tous ceux qui nient l'existence de l'holocauste. Je n'arrive pas à comprendre comment il se fait que les gens responsables de la salle de conférences Charles Lynch aient pu permettre une telle horreur.
J'aimerais que le leader du gouvernement à la Chambre nous donne l'assurance que cet événement n'aura pas lieu, bien sûr, et que cette salle ne sera plus jamais mise à la disposition d'un tel individu.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'abonde dans le sens de mes collègues. J'estime que le Parlement tout entier et les murs mêmes de la Chambre seraient souillés par la tenue d'une conférence de presse donnée par cet individu dont on connaît trop bien les positions concernant l'holocauste.
Ce serait pure folie que de permettre la tenue d'un tel événement dans ce qui est censé être le bastion de la tolérance et de la réflexion modérée. C'est à se demander quel vent de folie souffle sur la colline du Parlement, quand on apprend ce qui se prépare demain.
J'espère que, d'une façon ou d'une autre, le gouvernement saura remédier à la situation. Je suis impatient d'entendre la réponse du leader du gouvernement à la Chambre.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été mis au courant de cette affaire aujourd'hui, vers 13 h 45.
En apprenant cela, j'ai immédiatement communiqué avec les dirigeants de la Tribune de la presse parlementaire, qui sont responsables des lieux, si j'ai bien compris.
Je leur ai fait part de mon insatisfaction devant le fait que cet édifice, le siège de la démocratie dans notre pays, allait servir, d'une manière ou d'une autre, au bénéfice d'Ernst Zundel. Ces gens m'ont répondu que, de fait, la salle était accessible à cette personne et qu'ils allaient examiner l'affaire plus attentivement. J'espère vraiment qu'ils le feront.
J'ai signalé que, même si je n'en avais pas parlé aux autres membres du Bureau de régie interne, j'étais sûr d'exprimer aussi leur point de vue en disant que j'étais fort mécontent de savoir que M. Ernst Zundel allait utiliser une partie des installations parlementaires pour tenir une conférence de presse.
Les députés savent, bien sûr, que le gouvernement lui-même n'est pas responsable de l'administration de l'édifice, et encore moins de cette salle en particulier. Après avoir entendu les commentaires d'autres leaders parlementaires, étant sûr de leur appui à cause de ce qu'ils viennent de dire, j'espère que les personnes responsables des réservations de cette salle changeront immédiatement d'idée et veilleront à ce que cette conférence de presse, si elle a lieu, se tienne ailleurs qu'au Parlement.
Le vice-président: Je pense que les demandes du député de Winnipeg—Transcona, du leader de l'opposition officielle à la Chambre, du député de Pictou—Antigonish—Guysborough et du leader du gouvernement à la Chambre seront portées à l'attention des responsables de l'administration de cette salle.
J'insiste sur le fait que, comme le leader du gouvernement à la Chambre l'a signalé, cette question ne relève pas directement du Président ou du Bureau de régie interne. D'après ce que j'ai compris, cela relève de la Tribune de la presse parlementaire.
Je suis sûr que ces observations seront immédiatement portées à l'attention des responsables. Nous attendrons la suite des événements. Je ne crois pas utile de continuer à en discuter pour le moment.
* * *
LA LOI SUR LES JUGES
La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les juges et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement, ainsi que de la motion no 2.
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 2. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Conformément à la motion adoptée plus tôt aujourd'hui, le vote par appel nominal est reporté d'office à la fin de la période prévue pour l'étude des initiatives ministérielles, le mardi 9 juin.
* * *
LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 28 mai, de la motion: Que le projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion encore une fois aujourd'hui d'aborder le projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme.
Avant d'expliquer l'objet précis du projet de loi C-26 et les raisons pour lesquelles l'opposition officielle se prononcera contre cette mesure législative, je tiens à remercier tous les députés qui étaient partie à la décision qui a été prise jeudi dernier, la dernière fois que la Chambre a été saisie du projet de loi C-26.
J'étais malheureusement retenu ailleurs ce jour-là. En premier, j'ai cru ne pas avoir une dernière occasion de traiter de cette mesure législative, mais grâce à une décision unanime de la Chambre, l'étude du projet de loi a été reportée à aujourd'hui afin de me permettre d'intervenir. J'en suis très reconnaissant, particulièrement au gouvernement.
Le projet de loi vise trois objectifs très différents. Premièrement, en abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme, le projet de loi C-26 autorisera le gouvernement du Manitoba à réglementer la bourse de Winnipeg, tâche actuellement confiée au gouvernement fédéral, plus précisément à la Commission canadienne des grains.
La bourse semble vouloir offrir des contrats sur d'autres denrées que les grains, en particulier les porcs, et l'abrogation de la Loi sur les marchés de grain à terme facilitera cela.
Comme je l'ai fait remarquer en deuxième lecture et à l'étape du rapport, le fait que le Manitoba prenne cela en charge, par l'intermédiaire de la commission des valeurs mobilières du Manitoba, laquelle régira la bourse de commerce de Winnipeg, est une bonne chose, et nous appuyons cela.
Deuxièmement, le projet de loi C-26 placera la Loi sur les grains du Canada sous le régime de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire. De ce fait, les amendes pour infractions à la Loi et au règlement sur les grains du Canada pourront être perçues par la Commission canadienne des grains. Cette mesure législative ayant une plus grande gamme d'options en matière d'application de la loi, cette application sera plus souple et nous approuvons cela.
Cela m'amène à la troisième chose que fait le projet de loi C-26.
Parce que, une fois de plus, le gouvernement n'a pas écouté les agriculteurs et leurs représentants qui sont venus témoigner devant le comité de l'agriculture, nous devons nous opposer à la mesure.
Le projet de loi C-26 résulte de la création d'un comité chargé d'un programme d'initiative rurale pour les cultures spéciales. Ce comité est constitué de producteurs et d'entreprises agroalimentaires des trois provinces des Prairies, aidés d'un représentant de la Commission canadienne des grains.
En 1993, le comité a commencé à consulter les intéressés et, en avril 1996, il a rédigé un rapport sur un programme d'initiative rurale pour les cultures spéciales qui a un peu constitué la base du projet de loi de loi actuel.
Nombre de recommandations de ce comité ne figurent pas dans le projet de loi C-26, mais seront dans le règlement d'application qui, lui, ne sera pas examiné par le Parlement.
Bien qu'il soit peu réaliste de penser à préciser les contributions annuelles et les déductions permises dans la mesure législative, les agriculteurs seraient plus rassurés si la loi prévoyait certaines limites. La loi pourrait par exemple préciser que les contributions ne peuvent excéder un pour cent de la valeur brute des produits de la vente du grain. Cela permettrait de garantir que la contribution annuelle ne montera pas en flèche au cours des prochaines années pour atteindre un niveau excessif.
Le gouvernement aime bien sortir les violons en vantant les succès du processus de consultation dans le cadre du Programme des cultures spéciales, mais nous nous sommes bien vite rendu compte que la Commission canadienne du blé avait passé outre aux recommandations du comité en fixant la contribution à un niveau plus élevé que ce qui avait été recommandé. Ça ne présage vraiment rien de bon et les agriculteurs engagés dans des cultures spéciales sont très préoccupés.
Les agriculteurs qui seront touchés par ce projet de loi sont ceux qui cultivent les haricots, le sarrasin, le maïs, les gourganes, les lentilles, les graines de moutarde, les pois, les graines de carthame, le soja, les graines de tournesol et le triticale.
La production de ces grains ou produits augmente partout dans l'Ouest. Étant moi-même agriculteur et ayant travaillé sur la terre pendant près de 20 ans dans la région de la rivière de la Paix en C.-B., je peux dire à la Chambre que les agriculteurs considèrent de plus en plus que ces cultures spéciales peuvent leur permettre de diversifier leur production, d'étaler les risques et d'accroître le niveau de leurs profits.
C'est pourquoi ce projet de loi soulève beaucoup d'inquiétudes. On se préoccupe de la façon dont il est étudié et plus particulièrement de la façon dont les contributions seront structurées et gérées.
En ce qui a trait au régime d'assurance mis sur pied par cette mesure législative, on souligne le manque de concurrence criant. Le secrétaire parlementaire lui-même a affirmé que c'est la Commission canadienne du blé qui a préparé le projet de loi. Il y a donc un conflit d'intérêts puisque la commission sera également chargée d'administrer le régime.
Actuellement, les acheteurs et négociants sont libres de rechercher le meilleur prix pour leur cautionnement. J'ai soulevé la question lorsque le projet de loi était à l'étude en comité et que la Commission canadienne des grains comparaissait à titre de témoin. Le système actuel permet une certaine compétitivité. Les négociants, s'ils détiennent une licence et doivent fournir un cautionnement, peuvent choisir l'organisme auprès duquel ils obtiendront la caution. Cela ne leur sera plus possible en vertu du nouveau système. Ils n'auront plus cette liberté de choix.
Les producteurs de cultures spéciales ont également la possibilité de rechercher le meilleur prix pour leur produit, mais ils doivent être conscients du risque qu'ils courent s'ils choisissent un négociant qui ne détient pas de licence et ne fournit pas de cautionnement. Si l'acheteur déclarait faillite avant que les producteurs ne soient payés pour leur produit, ils ne seraient évidemment pas protégés. Les producteurs peuvent se prévaloir de cette option. S'ils estiment pouvoir obtenir un prix plus élevé pour leur produit, ils seront peut-être prêts à accepter le risque.
En vertu du nouveau système, tous les négociants détiendront une licence et seront assurés auprès de la Commission canadienne des grains, qui agira comme agent et la Société pour l'expansion des exportations deviendra l'unique assureur.
Le gouvernement a évoqué la possibilité que l'une ou l'autre de ces responsabilités, ou les deux, soient confiées, dans l'avenir, au secteur privé. Je ne me fais pas trop d'illusion à ce sujet. À moins que cet objectif ne soit énoncé dans une loi, je ne puis concevoir que la Commission canadienne des grains accepte de renoncer à son emprise sur le régime d'assurance et de le céder au secteur privé. Il s'agit pourtant de l'argent des agriculteurs et ces derniers devraient administrer le régime d'assurance à la place des fonctionnaires. L'expérience nous a souvent démontré que l'appareil bureaucratique n'est pas un très bon gestionnaire de programmes et régimes de ce genre, pour lesquels le secteur privé possède déjà les connaissances, les capacités et les ressources.
Le projet de loi C-26 apporte certaines améliorations à la situation des producteurs de cultures spéciales, mais il me fait penser, par ailleurs, à un train lancé en avant qui échappe de plus en plus au contrôle des agriculteurs.
Je me permets de faire une digression, afin de citer aux téléspectateurs certains exemples de lois qui témoignent du refus grandissant du gouvernement d'écouter les agriculteurs, ceux-là mêmes qui sont visés par le projet de loi. Cela correspond en fait à une certaine tendance. Il existe une similarité entre ce projet de loi et le projet de loi C-19 qui concerne les travailleurs.
De nombreux producteurs et groupes agricoles ont affirmé que nous devrions appuyer le projet de loi C-19 parce que l'article 87.7 représente une légère amélioration, dans la mesure où il assurera la continuité du transport des cultures courantes, même en cas de conflits de travail dans les ports, et fera en sorte que les navires continueront d'être chargés. Nous avons pourtant demandé à de nombreuses reprises pourquoi le gouvernement refuse d'écouter les agriculteurs et de modifier le projet de loi. Pourquoi n'écoute-t-il pas l'opposition et ne modifie-t-il pas le projet de loi afin de l'améliorer? Nous devons nous contenter de solutions de second choix et accepter le projet de loi tel quel parce qu'il contient quelque chose de bon.
Je dois avouer, à la défense du gouvernement, que la majorité des projets de loi dont la Chambre est saisie comportent de bonnes choses. Le gouvernement n'a pas décidé de présenter ce projet de loi simplement parce qu'il n'avait rien d'autre à faire. Je suis sûr qu'il est motivé par les meilleures intentions. Il n'en demeure pas moins que presque toutes les mesures législatives, certainement toutes celles dont cette Chambre est saisie, pourraient être améliorées si seulement le gouvernement et ses députés voulaient bien écouter et, dans le cas présent, s'ils voulaient bien écouter les agriculteurs.
Cela me rappelle le projet de loi C-4, qui va revenir à la Chambre la semaine prochaine. Il modifie la Loi sur la Commission canadienne du blé. Et là aussi, le gouvernement a eu tendance à ne pas écouter les agriculteurs et à ne pas tenir compte de leurs recommandations.
Voyons ce à quoi nous avons dû renoncer pour obtenir ce régime d'assurance.
Les agriculteurs seront obligés de contribuer au régime dès le départ, qu'ils veuillent y souscrire ou non. Ils devront ensuite demander par écrit qu'on leur rende l'argent gagné à la sueur de leur front. À cet égard, c'est comme un impôt. S'ils ont de la chance, à la fin de l'année, ils recevront un remboursement. Le régime est calqué sur l'abonnement par défaut que, si je ne m'abuse, le gouvernement a dénoncé à maintes reprises comme étant une pratique déloyale.
Cet aspect du projet de loi C-26 a suscité de nombreuses critiques pendant les audiences du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qui en a fait l'étude. Pendant le mois d'avril, outre la Commission canadienne des grains, nous avons entendu le témoignage de la Manitoba Pulse Growers Association, de la Saskatchewan Farmer Consultations for SCRIP, de la Western Canadian Marketers and Processors Association, de la Western Canadian Wheat Growers Association, de l'Alberta Pulse Growers Association, de la Saskatchewan Pulse Growers Association et de la Western Barley Growers Association.
Tous ces témoins ont pu comparaître devant le comité en dépit du fait que le processus d'adoption du projet de loi ait été accéléré. Ils n'ont pas eu beaucoup de temps pour présenter leurs mémoires et les députés, qu'ils soient du côté du gouvernement ou de l'opposition, n'ont pas pu leur poser toutes les questions qu'ils auraient voulu pour élucider les craintes que leur inspirait cette mesure législative. Le comité a pu quand même entendre un nombre important d'organisations agricoles.
Nous avons eu beaucoup de chance de pouvoir entendre tous ces témoins, car les audiences constituent un des meilleurs moyens dont disposent les parlementaires pour bien connaître la volonté de la population. Fort de leurs opinions, le Parti réformiste a proposé certains amendements, à l'étape de l'étude en comité et à l'étape du rapport, pour tenir compte de ces opinions.
Malheureusement, comme je l'ai dit, il semble que le gouvernement n'attache aucune importance à l'opinion des agriculteurs. Il a rejeté nos amendements qui auraient amélioré le projet de loi C-26 aux yeux des producteurs de cultures spéciales.
Pendant le temps qu'il me reste, je voudrais passer en revue quelques-uns des amendements que le gouvernement a décidé de rejeter. À l'étape de l'étude en comité, le gouvernement libéral a proposé d'apporter au projet de loi des amendements qui ont été adoptés et que les réformistes ont appuyés. Si je me souviens bien, les députés de tous les partis les ont appuyés. Certains de ces amendements sont de forme. Un amendement proposé à l'article 7 visait à faire en sorte que la contribution d'un producteur au régime d'assurance lui soit remboursée plus rapidement après son retrait du programme, à la fin de la saison.
Des représentants des agriculteurs nous ont répété maintes fois que, dans ce régime de facturation par défaut, tout le monde doit faire une contribution et participer au régime. On ne peut pas dire: «Ne prélevez pas de contribution. Je ne veux pas que, chaque fois que j'expédie un chargement de l'une de ces cultures désignées au silo, cette contribution soit prélevée sur mon chèque.» Les producteurs ne peuvent pas dire cela. Cette contribution est prélevée de toute façon. En outre, ils craignaient de devoir tenir un registre de cette contribution tout au long de l'année.
Je signale que, même avec l'amendement, on ne sait toujours pas au juste comment ce régime fonctionnera et à quel point la paperasserie sera compliquée pour chacun des agriculteurs. Cette préoccupation a pratiquement fait l'unanimité chez les représentants des agriculteurs que nous avons entendus.
Un autre amendement des libéraux était essentiellement une disposition d'exclusion que nous appuyions et avons applaudie. Un certain nombre de groupes d'agriculteurs représentant les producteurs de cultures spéciales de l'Ouest ont exprimé une réserve. Même la Commission canadienne des grains a dit craindre que cette contribution, que ce régime d'assurance et de délivrance de licences ne soit élargi plus tard pour englober les six cultures habituelles, soit le blé, l'avoine, l'orge, le seigle, le colza et le lin. Les producteurs ont exprimé une foule de préoccupations à cet égard.
Lorsque le gouvernement a présenté cet amendement pour indiquer très clairement que ces céréales seraient exclues, nous l'avons appuyé.
En outre, les autres partis ont eux aussi présenté des motions. Deux grands points de vue se dégagent des discussions sur ce projet de loi.
Les agriculteurs s'inquiètent de la façon dont la contribution sera prélevée. Ils craignent que tout le fardeau retombe sur eux, comme dans le cas de la TPS, et qu'il leur faille tenir un registre. Ils craignent que s'ils n'assurent pas leur récolte auprès du négociant, il leur incombera de calculer la contribution, qui est de 38 cents par 100 $ de ventes, de vérifier les déductions faites sur leurs chèques au cours de l'année et de présenter une réclamation. Cela ne ferait qu'alourdir la tâche de tenue de livres qui ne leur plaît guère d'avance.
Le manque de liberté de choix les préoccupe également. Ils ont l'impression que le gouvernement intervient sur le marché, limitant leur liberté en tant que gens d'affaires, et qu'ils devraient pouvoir vendre leur produit à un acheteur ou à un négociant qui n'est pas assuré, cautionné ou licencié, s'ils sont prêts à prendre un tel risque. Une fois de plus, le gouvernement intervient et leur dit comment mener leur barque.
Nous avons proposé plusieurs amendements sur ce dernier point à l'étape du rapport. Les agriculteurs craignaient aussi que le comité consultatif que le ministre sera tenu de constituer pour le conseiller au sujet de l'administration du régime d'assurance n'ait aucun pouvoir. Cette mesure ne lui en confère aucun, en dépit du fait que tous les frais d'administration et d'assurance seront entièrement assumés par les agriculteurs par le biais de leurs contributions.
Ils nous ont dit que le conseil consultatif devrait être un conseil d'administration chargé d'administrer et de superviser le régime d'assurance et de prendre des décisions. Ainsi, les agriculteurs veilleraient sur leur propre argent, car c'est bien de leur argent qu'il s'agit, et l'administreraient au mieux de leurs connaissances.
L'opposition officielle a proposé des amendements se rapportant à toutes ces préoccupations, mais le gouvernement a décidé de les rejeter. Vu que le gouvernement s'obstine à faire fi des préoccupations et des désirs des producteurs et des agriculteurs de l'ouest canadien, que ce soit dans le projet de loi C-4, dans le C-9 ou dans le C-26, l'opposition officielle, c'est-à-dire le Parti réformiste du Canada, ne peut appuyer le projet de loi C-26, même si, comme je le disais tout à l'heure, celui-ci renferme beaucoup de bons éléments. Le gouvernement refuse de l'amender ou de l'améliorer. Il devrait avoir honte. Nous ne pouvons appuyer cette mesure.
[Français]
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme.
Les effets positifs de cette loi sont de mieux servir les producteurs de cultures spécialisées en leur donnant des bases financières plus solides et un régime d'assurance tendant à les protéger des faiblesses du système actuel auprès des négociants de grain.
Il est à souhaiter que le ministre choisisse donc des administrateurs venant du milieu agricole, et plus précisément de celui des producteurs de cultures spécialisées. Globalement, rien dans ce projet de loi ne cause problème pour le parti que je représente et, en ce sens, notre caucus l'appuie.
Je tiens cependant à ajouter quelques réserves que j'ai déjà mentionnées, tant au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qu'à la Chambre. Ce projet de loi concerne spécifiquement des producteurs spécialisés de l'Ouest canadien, soit des Prairies, et il s'inscrit dans un réaménagement d'autres lois qui desservent cette même clientèle.
En tant que députée du Québec, je ne me sens guère concernée par cette problématique, si ce n'est de veiller, de manière générale, à ce que les agriculteurs en retirent le plus de bénéfices possible.
M'ingérer dans ce débat de façon plus technique ou plus pointue serait me mêler de ce qui ne me regarde pas, et je n'en ai guère l'intention. Je n'ai qu'à prendre, par exemple, la contribution volontaire au régime d'assurance. Nous avons notre propre régime d'assurance et toute la stratégie qui entoure ce débat m'est absolument étrangère. Donc, je ne tente pas de m'y ingérer.
Cependant, l'intérêt des agriculteurs de production spécialisée m'apparaît être manifeste et, en ce sens, nous voterons en faveur du projet de loi C-26.
Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Avec dissidence.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)
* * *
[Traduction]
LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (au nom du solliciteur général du Canada) propose: Que le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.
Le vice-président: Le solliciteur général est maintenant arrivé. Est-on d'accord pour qu'il puisse prendre la parole étant donné qu'il est le parrain de ce projet de loi?
Des voix: D'accord.
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la Chambre d'avoir donné son consentement. Je viens de quitter la salle de lecture, où nous tenions une séance de familiarisation sur notre initiative de prévention du crime. J'étais ravi de voir le nombre de représentants de votre personnel qui participaient à cette séance. Vous méritez des félicitations.
Je suis heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-3, qui prévoit l'établissement d'une banque nationale de données génétiques au Canada. La Loi sur l'identification par les empreintes génétiques fera du Canada un des rares pays du monde à avoir un système national de ce genre. Je suis très heureux de dire que cette mesure législative avant-gardiste est un élément essentiel de notre stratégie visant à rendre nos collectivités plus sûres. La sécurité publique est ma priorité. C'est pourquoi le projet de loi C-3 est un aspect important de mon engagement envers les Canadiens à cet égard.
Cette mesure législative vise à créer, pour les policiers, un outil pratique d'application de la loi qui résistera à l'épreuve du temps. Nous étions bien conscients du fait que cela nécessitait un équilibre entre, d'une part, les mesures de sécurité publique et, d'autre part, le droit à la vie privée qui est très cher aux Canadiens. Nous avons su trouvé un juste équilibre entre les deux.
Depuis que le projet de loi a été présenté en septembre dernier, les députés ont été prudents dans l'étude de cette mesure législative. Cette approche est louable, étant donné la portée des questions entourant l'utilisation et le risque d'une mauvaise utilisation des profils d'identification génétique et des échantillons, ainsi que les considérations légales et éthiques. C'est pourquoi le projet de loi C-3 a été renvoyé au comité avant son étude en deuxième lecture.
J'ai souhaité qu'on propose des améliorations et je pensais bien qu'après tous ces travaux, nous aurions un meilleur projet de loi. À mon avis, c'est précisément ce qui s'est passé.
[Français]
Je veux maintenant expliquer comment le projet de loi C-3 a été élaboré, comment il sera appliqué et quels seront ses avantages, et enfin, comment il a été amélioré grâce aux travaux du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
La présentation de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques a constitué la deuxième phase de la stratégie du gouvernement en matière d'ADN.
[Traduction]
La présentation du projet de loi sur l'identification par les empreintes génétiques marque la deuxième étape de la stratégie du gouvernement concernant l'ADN. La première étape importante a notamment consisté à établir les exigences à respecter pour obtenir des échantillons d'ADN dans le cadre d'enquêtes criminelles. En juillet 1995, des modifications au Code criminel ont donc été adoptées afin d'autoriser la police à demander un mandat pour prélever des échantillons d'ADN sur des suspects dans des enquêtes criminelles.
Cette mesure législative a fourni à la police un instrument efficace qui a aidé à résoudre des centaines de crimes graves. Il est efficace parce qu'il a permis d'éliminer des suspects et de prononcer des condamnations. Il a également servi à obtenir des plaidoyers de culpabilité, évitant à des victimes le traumatisme de la comparution, et réduit les frais généraux des enquêtes et des poursuites. Il a aussi résisté à une contestation en vertu de la Constitution.
Ayant fermement mis en place la loi autorisant la police à obtenir un mandat afin de prélever des échantillons d'ADN, le gouvernement passe à la deuxième étape de son initiative et crée une structure permettant le stockage des profils d'identification génétique et l'utilisation de ces profils dans des enquêtes sur des crimes graves.
Une banque nationale de données génétiques fera beaucoup pour aider la police à établir des liens avec un suspect, quand des éléments de preuve sont laissés sur le lieu d'un crime. La capacité de stocker et d'extraire ensuite des profils d'identification génétique permettra de raccourcir des enquêtes et de prévenir des récidives. Tout cela est synonyme d'une plus grande sécurité pour tous les Canadiens.
De plus, le projet de loi C-3 autorisera la police à prélever des échantillons d'ADN chez des contrevenants reconnus coupables d'infractions criminelles désignées. Ces dernières incluent les crimes de très graves préjudices corporels, dont les homicides et les agressions sexuelles, qui seraient liées à des substances corporelles trouvées sur le lieu d'un crime et pouvant servir d'éléments de preuve.
Les échantillons seront analysés et les profils tracés seront enregistrés dans la banque de données, dans le fichier des condamnés. La banque de données contiendrait aussi un fichier de criminalistique renfermant les profils d'identification génétique établis à partir de substances corporelles trouvées sur les lieux de crimes. Grâce à cette structure, les profils peuvent faire l'objet de renvois dans le système.
Les avantages d'un tel système sont évidents. Les renseignements stockés dans la banque de données génétiques aideront les policiers à identifier plus rapidement les suspects lorsqu'ils n'ont pas d'indices, et à repérer les récidivistes qui exercent leur activité dans plus d'un territoire. Ce système pourrait aussi dissuader les contrevenants de récidiver, puisqu'ils sauront que leur profil d'identification génétique se trouve dans la banque de données et qu'ils ne pourront contrevenir à la loi impunément.
Tout au long de l'élaboration du projet de loi C-3, le gouvernement fédéral a sollicité l'avis et les conseils de nombreux groupes et intervenants, notamment ceux qui sont sur la première ligne.
En outre, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a tenu 15 audiences sur le projet de loi et a entendu des représentants de 17 organismes, y compris des associations de policiers, des groupes de défense des victimes et des organisations juridiques.
Ces consultations ont permis de constater qu'il existait un appui solide à la création d'une banque nationale de données génétiques, mais qu'il y avait aussi des préoccupations concernant les valeurs canadiennes que sont la protection de la vie privée et du public, et le respect des droits individuels garantis par la charte. Afin de donner suite à ces préoccupations et d'améliorer le projet de loi dans son ensemble, un certain nombre d'amendements ont été apportés depuis que celui-ci a été déposé, l'automne dernier.
Divers groupes d'intérêts, y compris le commissaire à la protection de la vie privée, le Barreau du Québec et le Comité canadien d'action sur le statut de la femme, ont laissé entendre que le projet de loi ne renfermait pas des garanties suffisantes pour empêcher l'utilisation de profils d'identification génétique provenant des échantillons fournis par les victimes, les suspects innocentés et les personnes qui fournissent volontairement des échantillons pour aider la police.
Le gouvernement a donc déposé une motion précisant que l'accès à l'information dans le fichier de criminalistique sera interdit de façon permanente, si ces renseignements ont trait à une victime, ou à une personne qui n'est plus considérée comme un suspect dans une enquête criminelle.
L'analyse des empreintes génétiques a beaucoup progressé depuis qu'elle a été utilisée pour la première fois, il y a dix ans, par le système de justice pénale. Si la technologie a progressé à grands pas, une chose n'a pas changé: l'ADN peut en révéler beaucoup plus sur une personne que ne le font les empreintes digitales. Comme l'a mentionné un membre du comité, une empreinte digitale est une impression qu'on laisse, tandis que l'empreinte génétique est une partie de soi.
Afin de s'assurer que les données génétiques soient protégées et utilisées uniquement à des fins d'analyse génétique, le projet de loi autorise un accès très restreint à la banque de données. Le projet de loi interdit l'utilisation inopportune de l'information et limite l'accès à cette information à ceux qui participent directement à l'exploitation et au maintien de la banque de données.
Pour protéger davantage la vie privée des innocents, le projet de loi contient une nouvelle disposition qui précise que les renseignements concernant les empreintes génétiques doivent être rendus inaccessibles une fois pour toutes s'ils concernent quelqu'un qui n'est plus considéré comme suspect.
Lors des audiences du comité qui portaient sur le projet de loi, plusieurs témoins et membres du comité ont dit que l'on pourrait allonger la liste des infractions désignées de manière à inclure d'autres infractions graves pour lesquelles une preuve fondée sur les empreintes génétiques pourraient s'avérer utile.
Le comité a tenu compte des remarques en ce sens en ajoutant l'infanticide à la liste des infractions primaires et en élargissant la liste des infractions secondaires de manière à ce qu'elle comprenne la conduite dangereuse et avec capacité affaiblie causant des lésions corporelles ou la mort, de même qu'un certain nombre d'infractions sexuelles.
À mon avis, ces modifications seront très utiles aux policiers et permettront d'améliorer la sécurité publique. Pendant les audiences du comité, plusieurs témoins ont recommandé d'étendre la portée rétroactive de manière à ce que des prélèvements puissent être faits non seulement sur des délinquants dangereux et des délinquants sexuels récidivistes, mais aussi sur des meurtriers qui ont tué plus d'une fois.
Le gouvernement a tenu compte de cela en proposant un amendement au projet de loi qui permet de faire rétroactivement des prélèvements aux fins de l'analyse des empreintes génétiques de tels contrevenants. En élargissant la portée de ces dispositions, on pourra épingler de nombreux contrevenants connus au Canada et l'on donnera aux policiers des renseignements précieux qui les aideront à élucider des affaires criminelles en suspens.
Je conclus en expliquant les raisons qui justifient le prélèvement de substances corporelles une fois que quelqu'un est condamné. Les policiers ont insisté pour pouvoir faire de tels prélèvements avant cela, au moment de l'arrestation ou de la mise en accusation.
Je rappelle aux députés que la police peut déjà, au moment de l'arrestation, faire des prélèvements aux fins de l'analyse des empreintes génétiques, si elle a un mandat qui l'y autorise. Pour leurs enquêtes, les policiers pourront continuer d'utiliser des preuves fondées sur le profil génétique, conformément aux dispositions déjà en place depuis près de trois ans au sujet des mandats autorisant les prélèvements aux fins de l'analyse des empreintes génétiques.
Les ministères de la Justice et du Solliciteur général ont tenu de vastes consultations sur cette question, et le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a étudié celle-ci en profondeur. La grande majorité des personnes consultées se sont dites d'avis que le prélèvement de substances corporelles une fois que l'individu est trouvé coupable respectera les droits de tous les Canadiens en vertu de la Charte.
Elles pensent aussi que les prélèvements au moment de l'arrestation ou de la mise en accusation risqueraient fort d'être déclarés anticonstitutionnels. Comme bien des gens et bien des organismes ont continué d'exercer des pressions afin que le gouvernement élargisse la portée de cette disposition, ma collègue, la ministre de la Justice a demandé un avis juridique impartial à trois des juges les plus éminents de notre pays.
Chacun a conclu qu'une proposition donnant le droit de prélever des échantillons au moment de l'arrestation pour les inclure dans une banque de données génétiques ne pourrait résister à une contestation fondée sur la charte des droits. Certains députés ont repoussé les avis juridiques en soutenant que la charte n'est qu'un obstacle à la justice.
Je me permets de rappeler aux députés que le pouvoir de légiférer du Parlement découle de la Constitution et que la Constitution englobe la charte qui protège les droits et libertés fondamentaux de tous les Canadiens.
Le Parlement a le devoir d'exercer son pouvoir d'une manière qui respecte la charte. Prélever des échantillons pour la banque des données au moment de la condamnation plutôt qu'au moment de l'arrestation ou de l'inculpation n'empêchera pas les policiers d'accomplir leur travail.
Cela fournira aux policiers un outil d'enquête efficace qui leur permettra d'effectuer leur travail et assurera que le pouvoir d'utiliser cet outil soit conforme à l'exigence que nous impose la Constitution telle que la Cour suprême l'a définie récemment.
Je le répète, le projet de loi qui sort des audiences du comité est plus fort. Le gouvernement est convaincu que le projet de loi C-3 est fondamentalement solide.
Nous sommes convaincus d'avoir établi un véritable équilibre entre la nécessité de fournir aux policiers les outils dont ils ont besoin pour accomplir leur travail et celle de respecter les droits constitutionnels et le droit au respect de la vie privée de tous les Canadiens. Il ne fait aucun doute que l'utilisation de preuves fondées sur les données génétiques a constitué un progrès important dans le système de justice pénale. Nous ne devons cependant pas oublier qu'il s'agit d'un outil puissant et que nous devons nous protéger contre des abus éventuels. La création d'une banque de données génétiques qui puisse être maintenue par les tribunaux contribuera énormément à protéger les Canadiens contre les récidivistes violents.
J'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi C-3 afin que nous puissions procéder à la mise sur pied de la première banque nationale de données génétiques du Canada. Je remercie tous les députés qui ont beaucoup contribué à améliorer le projet de loi et qui ont participé à ce débat.
M. Jack Ramsay: Monsieur le Président, le député de Sydney—Victoria doit prendre un avion. Nous serions prêts à inverser l'ordre des députés qui doivent prendre la parole.
Le vice-président: Le député de Sydney—Victoria disposera d'une période de 20 minutes suivie de dix minutes de questions et d'observations. Puis, nous reviendrons aux deux allocutions de 40 minutes de l'opposition officielle et du Bloc québécois.
Y a-t-il consentement unanime pour que nous procédions de cette manière?
Des voix: D'accord.
M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je remercie les députés.
Le solliciteur général a dit qu'il y avait eu de longues délibérations au Comité permanent de la justice. Effectivement. Beaucoup de députés y ont participé, et un grand nombre d'experts ont témoigné. Nous sommes nombreux à y avoir appris beaucoup de choses. Nous avons appris ce qu'était l'ADN et comment ont l'extrayait et le conservait. Nous avons entendu les exposés de nombreux groupes très divers comme le Comité canadien d'action sur le statut de la femme, l'Association des policiers et l'Association du Barreau canadien. Bien des groupes au Canada s'intéressaient à ce projet de loi.
Beaucoup de députés ont proposé des amendements qui avaient été mûrement réfléchis. Les amendements portaient sur les modalités d'application du projet de loi et sur la manière dont la police et les tribunaux pourraient s'en prévaloir.
Le solliciteur général a tout à fait raison de dire que nous avons tâché de trouver un juste équilibre entre les droits civils et les droits à la vie privée des personnes et la nécessité indéniable de mettre cet outil important à la disposition de la police pour l'aider à combattre le crime.
Où se trouve le point d'équilibre, cela est toujours matière à discussion. Chacun de nous se fait une idée différente de la façon d'équilibrer les plateaux de la balance. J'ai proposé des amendements, et le gouvernement en a retenu certains. D'autres, présentés à la Chambre, ont reçu l'appui de la plupart des partis, mais non du gouvernement.
J'avais demandé que la période d'incarcération pour quiconque enfreindrait les lois sur la protection des renseignements personnels passe de deux à cinq ans, mais le gouvernement a jugé que cette proposition ne convenait pas vraiment et ne l'a donc pas appuyée.
Ce qui importe, c'est que la Chambre, en adoptant ce projet de loi, fournira à la police un important outil pour lutter contre le crime et élucider des crimes. N'oublions pas que la banque de données génétiques est un outil servant aux enquêtes. C'est une arme de plus dans l'arsenal de la police qui lui permettra de présenter des renseignements essentiels pour aider les tribunaux, les juges et, dans certains cas, les jurés à déterminer la culpabilité ou l'innocence des accusés.
Elle aidera la police à porter des accusations et à établir si elle dispose de motifs raisonnables et probables pour déterminer si un crime a été commis et si des accusations devraient être portées.
Elle aidera la société, les citoyens et la police. Nous devons toujours mettre cela en équilibre avec les droits des personnes. Je m'attends d'ailleurs à ce que mes collègues abordent la question de savoir si les substances corporelles doivent être prélevées au moment de l'arrestation ou de la condamnation. Cela a fait l'objet d'une motion présentée par le député de Crowfoot, laquelle a été longuement débattue à la Chambre. Mon opinion là-dessus est bien connue.
Je ne pouvais certes appuyer cette motion, mais c'était une façon de voir quel est le meilleur moyen de présenter le projet de loi. Il y en a d'autres. Je pense que l'on n'a découragé aucun député de donner son point de vue.
Nous avons longuement débattu cette question. Il en résulte que nous avons accouché, je crois, d'un projet de loi typiquement canadien. C'est un projet de loi tout en compromis et qui, je l'espère, constitue le meilleur projet de loi que nous puissions présenter dans les circonstances. Une fois adoptée, la loi sera soumise à un examen. Au cours du débat sur ce projet de loi, des amendements y ont été proposés pour veiller à ce que la loi soit examinée par le Parlement à intervalles plus réguliers. Quoi qu'il en soit, le Parlement examinera la loi dans quelques années pour déterminer si nous avons fait des erreurs, si des changements s'imposent.
Je remercie les nombreux témoins qui ont comparu devant le comité. Même si, parfois, nous n'étions pas d'accord avec eux, nous avons tous respecté les points de vue exprimés. Nous avons discuté longuement avec ces témoins et je les remercie, au nom de mon parti et de cette Chambre, de s'être rendus à Ottawa pour nous faire part de renseignements importants à leurs yeux.
En fin de compte, on a réussi à rédiger un projet de loi. Il n'est peut être pas le meilleur, mais il est acceptable pour mon parti. Nous avons fait certains compromis, mais je pense que nous avons quand même protégé les droits des personnes et que nous avons fourni aux associations policières les outils dont elles ont besoin pour lutter contre la criminalité. C'est un équilibre difficile à établir. On a tous fait un effort et en fin de compte on est parvenus au meilleur projet de loi possible.
* * *
LA CHAMBRE DES COMMUNES
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je veux aborder un sujet soulevé plus tôt cet après-midi et dont les leaders parlementaires ont discuté. M'appuyant sur ces discussions, je veux maintenant présenter une motion et demander qu'elle soit adoptée à l'unanimité sans débat. Je propose:
Que la Chambre ordonne qu'Ernst Zundel soit interdit d'accès aux locaux de la Chambre des communes pendant la session en cours.
(La motion est adoptée.)
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LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.
Le vice-président: Il n'y aura pas de période de questions et d'observations sur l'intervention du député de Sydney—Victoria.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir dire quelques mots sur le projet de loi C-3, à l'étape de la troisième lecture. Ce projet de loi suscite quelques inquiétudes chez moi.
Le Parti réformiste tient fermement à rétablir la confiance dans notre système de justice et à procurer aux Canadiens un véritable sens de la sécurité. Cela signifie que l'on doit renforcer nos agences d'exécution de la loi en mettant à leur disposition des outils à la fine pointe de la technologie pour débusquer et arrêter rapidement les auteurs des crimes avec violence commis dans notre société. L'identification par les empreintes génétiques est un outil qui entre dans cette catégorie.
Utilisée au maximum, la banque de données génétiques pourrait être le progrès le plus marquant de l'arsenal de lutte contre le crime depuis l'introduction de l'identification par les empreintes digitales. Priver les corps policiers de l'utilisation maximale de cet outil dans leur lutte contre le crime, comme le fait le projet de loi C-3 dans sa forme actuelle, est déplorable et inacceptable parce que cela perpétue inutilement un certain niveau de risque pour la vie et la sécurité des citoyens. S'il est adopté sans amendement, le projet de loi C-3 donnera aux Canadiens un faux sentiment de sécurité. Par conséquent, le Parti réformiste ne peut pas appuyer ce projet de loi imparfait. Nous sommes tout à fait en faveur de la création d'une banque de données génétiques, mais nous n'appuyons pas les limites qu'impose le projet de loi C-3 à l'utilisation de cette banque.
Le projet de loi C-3 ne donne pas à nos corps policiers la possibilité d'utiliser au maximum la panoplie des techniques d'identification par les empreintes génétiques déjà à leur disposition. Cela aiderait pourtant à résoudre des centaines de cas de meurtres et de viols non résolus et pourrait sauver des vies en nous aidant à mettre des prédateurs derrière les barreaux.
Le projet de loi C-3 ne permet pas le prélèvement d'échantillons au moment des arrestations. Il ne permet pas de prélever d'échantillons sur des criminels incarcérés sauf les contrevenants dangereux désignés, les auteurs d'agressions sexuelles à répétitions et les auteurs de meurtres multiples. Lorsqu'un individu commet ses meurtres le même soir, nous ne pouvons pas prélever d'échantillons sur lui. Les meurtres doivent être commis séparément. C'est inacceptable.
Le projet de loi C-3 prévoit une exemption dangereuse et inutile. Il autorise un juge à ne pas émettre de mandat pour le prélèvement d'échantillons s'il croit que l'atteinte à la vie privée ou à la sécurité de l'individu aurait un effet nettement démesuré par rapport à l'intérêt public en ce qui touche la protection de la société. Lors des audiences du comité, nous avons demandé que cette disposition soit illustrée au moyen d'un exemple. Je n'ai entendu aucun exemple raisonnable ou sensé pour expliquer ce que cela voulait dire ou quelle situation était visée.
Il existe des centaines de cas d'agressions, de viols et d'homicides non résolus, mais où les auteurs ont laissé des empreintes génétiques sur les lieux du crime. L'identification de ces empreintes nous offre une possibilité encore jamais vue de résoudre beaucoup de ces crimes et d'en amener les auteurs devant les tribunaux. Cependant, en raison de sa peur irrationnelle de violer les droits à la vie privée des auteurs de crimes haineux, le gouvernement restreint l'utilisation de cet outil très perfectionné.
Avec les restrictions qu'il contient, le projet de loi C-3 nuit à une application plus efficace de nos lois et à l'instauration d'une société plus sûre. Ceux qui sont responsables de modeler notre système de justice démontrent qu'ils n'entendent pas cesser de compromettre la vie et la sécurité des innocents. Je me demande parfois si le gouvernement accorde vraiment la moindre valeur à la vie des Canadiens.
La vie et la sécurité des membres de la société ne le préoccupent vraiment pas, même s'il dit le contraire. La vie ne semble pas avoir grand valeur quand on s'arrête à certaines des décisions prises à la suite de l'adoption de projets de loi à la Chambre, quand on prend conscience du refus du gouvernement de faire ce qu'il pourrait manifestement faire, puisque rien ne l'en empêche sauf sa peur irrationnelle de ce que risquerait de faire la Cour suprême du Canada en vertu de la Charte des droits et libertés.
Les responsables de l'évolution de notre système judiciaire continuent bien sûr à se montrer disposés à mettre la vie et la sécurité des innocents en danger, que ce soit en libérant sous condition des délinquants violents qui recommencent à violer et à tuer, en condamnant avec sursis des délinquants violents ou en enlevant tout pouvoir aux policiers, au moyen du projet de loi C-3. La sécurité de la société semble être un enjeu secondaire pour le gouvernement.
À l'étape du rapport de ce projet de loi, j'ai présenté un amendement qui aurait permis qu'on prenne des échantillons au moment où le contrevenant est inculpé, s'il a déjà été déclaré coupable d'une infraction, et qu'on les conserve pour analyse au moment de sa condamnation. L'amendement que nous avions d'abord présenté à l'étape de l'étude article par article autorisait le prélèvement d'échantillons auprès de toutes les personnes inculpées d'une infraction primaire désignée. Étant donné que cet amendement a été rejeté, nous en avons présenté une version modifiée qui tenait compte des réserves exprimées par le gouvernement.
Le gouvernement a cité des considérations financières comme une des raisons pour refuser d'élargir la base de données génétiques et d'autoriser le prélèvement et l'analyse d'échantillons au moment où la personne est inculpée plutôt qu'au moment où elle est reconnue coupable. J'ai répondu précisément à cet argument en proposant que les échantillons soient prélevés au moment de l'inculpation mais qu'ils ne soient pas analysés avant la condamnation. Cette façon de faire répond en outre aux préoccupations exprimées par l'Association canadienne des policiers au sujet des contrevenants mis en liberté sous caution, en attente de procès, qui en profiteraient pour filer.
Le contrevenant qui a commis une infraction pour laquelle il n'a pas été accusé risque de ne pas se présenter à son procès s'il sait que, une fois qu'il aura été condamné, son profil génétique pourra être comparé aux échantillons prélevés sur les lieux d'un crime non élucidé. Cet amendement nous a été recommandé par l'Association canadienne des policiers.
L'autre raison invoquée par la ministre de la Justice pour refuser de permettre le prélèvement d'échantillons au moment de l'inculpation, c'est que cette procédure ne résisterait pas à une contestation devant les tribunaux en vertu de la Constitution. À ce jour, un certain nombre de projets de loi du gouvernement actuel ont été contestés devant les tribunaux.
L'Alberta, le Manitoba, la Saskatchewan, l'Ontario et les deux territoires attendent la décision de la cour d'appel de l'Alberta sur la constitutionnalité du projet de loi C-68, qui porte sur les armes à feu.
La loi sur la protection des victimes de viol, oeuvre du ministre de la Justice précédent, a été déclarée anticonstitutionnelle. Les condamnations avec sursis, que nous devons également au ministre de la justice précédent, sont très controversées. En janvier, un groupe de trois juges, de la cour d'appel de l'Alberta, a condamné cette pratique de façon cinglante en disant que c'était une piètre tentative, sans aucune imagination, de réformer la loi.
Dans une décision de 50 pages, les juges d'appel décrivent en détail plusieurs réserves importantes qu'ils ont concernant la façon dont les juges et les avocats appliquent la réforme. La cour de l'Alberta reproche aux juges de donner, sans justification suffisante, des peines avec sursis qui sont trop laxistes et qui ne sont pas beaucoup plus que des assignations à résidence.
Après que le projet de loi C-3 eut été étudié par le comité et avant qu'il ne soit renvoyé à la Chambre à l'étape du rapport, la ministre de la Justice a remis aux membres du comité permanent trois opinions juridiques sur la constitutionnalité du prélèvement de spécimens d'ADN au moment de l'inculpation. Les auteurs de ces opinions étaient les juges Claude Bisson, Martin Taylor et Charles Dubin. Tous disaient qu'une telle pratique serait anticonstitutionnelle. La ministre n'a fourni aucune opinion dissidente, comme celle de Tim Danson, de l'Association canadienne des policiers.
J'ai étudié les trois opinions qui avaient été soumises à la hâte et qui indiquaient que prélever des spécimens d'ADN au moment de l'inculpation serait anticonstitutionnel. Elles m'ont semblé superficielles et peu convaincantes peut-être justement en raison de la hâte avec laquelle elles avaient été rédigées. L'opinion préparée par Tim Danson, pour le compte de l'Association canadienne des policiers, a été présentée devant le comité et nous avons pu l'étudier. Par contre, nous n'avons pu en faire autant avec les trois opinions des autorités que j'ai citées. Le comité n'a pas pu convoquer de témoins ni demander à ceux qui ont comparu ce qu'ils pensaient des trois opinions.
Je voudrais dire brièvement pourquoi j'ai de sérieuses réserves en ce qui concerne cette question et citer des passages de ces opinions juridiques. M. Claude Bisson ne parle pas des pouvoirs qu'a la police afin de prélever un spécimen de sang sur les personnes soupçonnées de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool ou par la drogue. Ces pouvoirs figurent maintenant dans le Code criminel.
Pourquoi n'en parle-t-il pas? S'il est maintenant autorisé de faire un prélèvement de sang en cas de conduite avec facultés affaiblies, pourquoi craint-on de faire un prélèvement de sang, ou de prendre un échantillon de cheveux ou un échantillon de salive par écouvillonnage? Puisque le pouvoir de le faire existe actuellement et est constitutionnel, pourquoi un amendement au projet de loi permettant de faire un prélèvement sanguin pour l'inclure dans la banque de données génétiques au moment de l'inculpation pour une infraction désignée primaire serait-il anticonstitutionnel?
Je ne comprends pas pourquoi l'honorable Claude Bisson n'a pas abordé cette question dans son avis juridique. D'ailleurs, l'avis juridique préparé par l'honorable Charles L. Dubin fait la même omission. Il ne parle pas du pouvoir qu'ont les policiers de faire des prélèvements sanguins quand ils soupçonnent quelqu'un de conduire avec les facultés affaiblies par l'alcool ou les stupéfiants.
L'honorable Martin R. Taylor aborde cette question jusqu'à un certain point dans son avis juridique. Je trouve cependant difficile à comprendre le raisonnement exposé dans ce document, c'est-à-dire pourquoi il est conforme à la constitution de faire des prélèvements sanguins aujourd'hui dans certaines circonstances, alors qu'il est contraire à la constitution de faire un prélèvement sanguin chez quelqu'un qui est, non pas soupçonné, mais accusé d'avoir commis un crime, une infraction désignée primaire.
C'est avec toute la considération et tout le respect possibles que je dis que ces trois avis juridiques me paraissent avoir été élaborés à la hâte, sans réflexion approfondie. Je vais citer l'un de ces avis, celui qui a été présenté par l'honorable Martin R. Taylor, c.r., qui écrit à la page 4:
On peut certainement s'attendre à un certain scepticisme au Canada aujourd'hui à propos du traitement des substances corporelles par les autorités publiques. Quand des échantillons génétiques passent du contrôle de la personne arrêtée à celui de l'État, les utilisations que l'on peut en faire dépendent non seulement de la loi telle qu'elle est et telle qu'elle peut devenir, mais aussi de la compétence de ceux qui en prennent le contrôle et de leur disposition à respecter la loi. On sait que les utilisations que l'on peut faire des données génétiques pour obtenir de l'information personnelle concernant l'individu vont bien au-delà du domaine de l'identité judiciaire, mais on ne les comprend actuellement que partiellement et imparfaitement. À mon avis, les tribunaux considéreront que des facteurs comme ceux-ci rendent le prélèvement d'échantillons génétiques contre la volonté de l'individu particulièrement grave en y voyant un déni de son attente raisonnable de respect de la vie privée et une atteinte à sa sécurité corporelle.
Il semble tout à fait correct de faire un prélèvement sanguin quand on soupçonne quelqu'un de conduire avec les facultés affaiblies, mais quand on se met à parler de données génétiques, c'est complètement différent. Le mot ADN semble créer une certaine appréhension, peut-être même de la peur. Les conséquences de ne pas bien garder et protéger un échantillon d'ADN, qu'il s'agisse d'un échantillon de sang prélevé afin de déterminer si une personne a les facultés affaiblies par l'alcool et les drogues ou qu'il s'agisse d'un échantillon qu'on doit comparer à un échantillon d'ADN laissé sur les lieux du crime, importent peu. Il y a eu atteinte à la vie privée. Tout cela est déjà prévu dans le Code criminel. Quelle est la différence?
Lorsqu'il est question de la sécurité corporelle, rien ne justifie de refuser un échantillon d'ADN en invoquant le respect de la vie privée parce que, je le répète, on a déjà le pouvoir de prélever un échantillon de sang lorsqu'on soupçonne une personne d'avoir conduit avec des facultés affaiblies. Ce pouvoir existe et il passe avant le droit à la vie privée de cet individu.
Examinons l'autre raison que Martin R. Taylor a signalée, l'atteindre à la sécurité corporelle. Il est question de vie privée et de sécurité. Ce que je veux dire c'est que chaque jour, des médecins prélèvent des milliers et des milliers d'échantillons de sang. Il y a des banques de sang dans les cliniques. Chaque fois que quelqu'un se rend pour un examen de santé annuel et qu'on prélève un échantillon de sang, ces échantillons aboutissent dans une banque. Chaque fois qu'un enfant naît, on prélève un échantillon de sang pour des raisons évidentes.
Ces échantillons sont gardés pendant une certaine période. J'ignore combien de temps les banques les conservent. S'il est légitime de craindre, comme on le dit dans cet avis juridique, que la vie privée des personnes en cause sera menacée et qu'on utilisera ces échantillons de façon inappropriée, pourquoi cela ne se produit-il pas? Pourquoi n'a-t-on aucune preuve à cet égard?
Chose certaine, pour ce qui est du prélèvement d'échantillons, la banque de données prévue dans le projet de loi C-3 offre la meilleure protection possible à l'heure actuelle, au Canada, en ce qui concerne les échantillons de sang et autres.
Ces gens nous disent le contraire au moyen de leurs avis juridiques. Ils voudraient nous faire croire qu'il y aura bientôt une contestation réussie aux termes de la Charte au sujet de ce qui se fait dans tout le pays, parce que quelqu'un pourrait utiliser ces échantillons à de mauvaises fins.
Rien ne prouve que cela ait déjà été fait. Il n'y a pas d'infraction criminelle comme cela est prévu dans le projet de loi pour l'utilisation des échantillons d'ADN à de mauvaises fins. La loi ne prévoit aucune infraction criminelle pour toute personne utilisant, à de mauvaises fins, des échantillons de sang que votre serviteur ou d'autres personnes donnent durant leur examen médical annuel ou des échantillons prélevés sur des êtres humains au moment de leur naissance. Il n'y a aucune preuve à cet égard, mais il reste qu'il n'en est pas question dans ces avis juridiques.
C'est très important. Sauf tout le respect que je lui dois, le gouvernement a retenu des avis juridiques qui faisaient son affaire. Il les a présentés afin de contrer l'avis juridique clair rédigé par M. Danson au nom de l'Association canadienne des policiers, selon lequel il n'y aucun problème constitutionnel au sujet du prélèvement de substances corporelles au moment de la mise en accusation.
Les trois avis juridiques ont été obtenus après la convocation de témoins, l'examen de leurs constatations, de leurs recommandations et de leurs décisions sur la question. Je propose donc:
Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:
«le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne afin de reconsidérer l'article 17 afin d'assurer que les prélèvements des empreintes génétiques au moment de l'accusation soient sujets à une révision.»
Le vice-président: Le débat porte sur l'amendement.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour participer au débat sur le projet de loi C-3. Ce projet de loi a été étudié longuement en comité et je me dois de saluer le travail de tous les membres du comité.
Bien que les points de vue aient été différents, et même quelquefois très, très différents, il n'en demeure pas moins que les échanges ont toujours été courtois. Le projet de loi a été étudié avec sérieux et professionnalisme, et j'en remercie mes collègues du comité.
Au nom du Bloc québécois, je désire aussi remercier tous les témoins qui sont venus présenter leurs points de vue au comité. Leurs avis et leurs opinions ont été écoutés avec attention, malheureusement, pas toujours avec la même attention par les députés du gouvernement, mais j'y reviendrai.
Le projet de loi C-3 concernant l'identification par les empreintes génétiques constitue en soi le point de convergence de plusieurs débats de société ayant cours au sein de notre collectivité. En ce sens, les progrès de la science sont tels aujourd'hui, surtout dans un domaine comme la génétique, que nous voyons apparaître, à travers des débats tels que celui qu'on a eu sur le projet de loi C-3, de grandes interrogations morales, philosophiques, éthiques et, partant, politiques.
Au grand dam de plusieurs personnes, j'en suis certain, je laisserai tomber les considérations philosophiques et morales pour me limiter aux aspects pratiques et à l'application concrète qui résultera de l'adoption du projet de loi C-3.
Avant d'aller un peu plus en profondeur dans ce domaine, je me dois, en tant que parlementaire, de dénoncer le peu d'ouverture d'esprit dont a fait preuve le gouvernement dans ce dossier. Le cheminement législatif du projet de loi C-3 est à l'image du règne libéral, c'est-à-dire sans envergure, caractérisé par un certain immobilisme, et surtout, par un refus d'écouter, non seulement les députés de cette Chambre, mais aussi les nombreux témoins qui sont venus donner leurs avis, et il y en a eu plusieurs, devant le comité.
Le gouvernement libéral, malheureusement, a fait de la petite politique avec des enjeux aussi importants que le projet de loi C-3. Il est important de dénoncer l'attitude des libéraux, puisqu'en définitive, la population aura à vivre avec les conséquences de l'étroitesse d'esprit de ce gouvernement, qui a maintenu une rigidité dans le processus, tout au long du débat sur le projet de loi C-3.
Je ne peux que m'en dire un peu déçu, parce que le projet de loi C-3 est innovateur et il fixera les balises de l'utilisation de l'ADN pour plusieurs années à venir.
Il faut savoir que la technologie d'aujourd'hui ne sera pas celle qui existera dans 5, 10 ou 15 ans, et les balises qui seront fixées avec ce projet de loi seront celles qui devront être suivies lorsque de nouvelles avancées technologiques auront lieu, d'où l'importance de ce débat.
L'initiative originale du solliciteur général visant à créer un fichier de données génétiques sur les criminels les plus dangereux de notre société a un but fort louable. Je précise ici que le Bloc québécois est en faveur de ce projet de loi et que nous l'appuierons, malgré tout, au terme de ce débat.
Cependant, l'esprit partisan des libéraux a empêché l'adoption d'amendements constructifs qui, à mon avis, étaient essentiels à l'application de cette mesure législative.
À l'étape du rapport, 14 motions ont été proposées afin d'apporter des précisions, des ajustements ou des resserrements au projet de loi C-3. De ce nombre—j'en ai proposé 8 au nom du Bloc québécois—la plupart visaient à assurer plus de transparence dans l'application de la loi et surtout à protéger les renseignements hautement confidentiels qui se retrouveront dans cette banque de données.
Mon collègue du Nouveau Parti démocratique le mentionnait tout à l'heure, tout, dans ce projet de loi, sera déterminé par l'équilibre entre les droits individuels et la protection de la société. Tout le débat peut être encapsulé dans cette dichotomie: droits individuels versus protection de la société. La plupart des débats que nous avons eus à la Chambre ou même en comité tournaient autour de cet enjeu.
Imaginons un instant la portée des informations que contiendra ce fichier génétique. Les empreintes génétiques permettent d'identifier sans erreur un individu à partir d'un cheveu, de la salive ou du sang. Mais cela peut non seulement identifier un individu, mais aussi sa parenté. Un frère, une soeur, un fils, un fille, un père ou une mère peuvent aussi être identifiés, à un moindre degré mais quand même, par l'utilisation de l'ADN de l'individu.
Donc, lorsqu'on parle de droits individuels, on parle non seulement du droit individuel de la personne en question, mais aussi de celui de sa famille immédiate.
Les conséquences d'une utilisation inappropriée des renseignements recueillis par l'ADN pourraient ruiner, démolir et anéantir l'existence d'un individu et de sa famille. D'où la précaution extrême que nous, en tant que parlementaires et législateurs, devons prendre dans les discussions et dans l'adoption de ce projet de loi.
J'ai proposé un amendement visant à encadrer l'utilisation que l'on fera des données génétiques recueillies. Le gouvernement libéral, dans sa doctrine autocratique, a refusé d'appuyer ma motion, malheureusement, probablement pour le simple fait qu'elle émanait d'un député de l'opposition, et du Bloc québécois par surcroît. Je trouve cela dommage.
Dans la même veine, j'ai proposé des amendements visant à obliger le gouvernement à rendre compte de l'application de la loi. Malheureusement, nous avons, encore une fois, essuyé un refus méprisant de la part du gouvernement pour qui la gouverne de l'État est une affaire secrète.
Le gouvernement a par exemple refusé de permettre au commissaire à la vie privée de faire rapport, à tous les trois ans, de l'utilisation qui sera faite des données contenues dans la banque. De quoi a-t-on peur? Nous demandions à ce qu'un organisme indépendant du gouvernement puisse vérifier l'utilisation de ces données pour faire en sorte que la vie privée des individus, des Canadiens, des Canadiennes, des Québécois et des Québécoises, soit respectée et assurée avec ce projet de loi.
Encore une fois, je répète la question: De quoi le gouvernement a-t-il peur? Du commissaire à la vie privée? Je trouve cela, encore une fois, malheureux.
Je pourrais énumérer pendant des heures—et je sais que vous voudriez bien que je le fasse, mais je devrai vous décevoir—les situations particulières que nous avons tenté de corriger, mais que le gouvernement se refuse à aborder de front.
Conscients comme nous le sommes de la rigidité idéologique du Parti libéral et du peu de latitude offerte par le premier ministre à ses députés, j'étais prêt à abandonner le parrainage de plusieurs des amendements, sinon de tous les amendements que j'ai présentés, par souci d'intégrité, par souci de l'intérêt public et pour enlever de l'arène politique un débat qui se veut essentiellement de nature apolitique.
Ce n'est pas avec un projet de loi tel que le projet de loi C-3, avec l'importance qu'on lui connaît, que l'on doive faire de la petite politique. J'ai toujours un esprit ouvert et le plus non partisan et apolitique possible, mais je me dois de mentionner que ce n'est pas l'attitude que le gouvernement libéral a adoptée. En revanche, je me dois de souligner l'ouverture qu'ont fait preuve mon collègue du Nouveau Parti démocratique et mon collègue du Parti progressiste-conservateur, avec qui de bonnes et franches discussions, malgré des points de vue divergents, ont pu prendre place.
Je dois avouer ma déception, je le disais, face à l'attitude générale du gouvernement dans la conduite et le cheminement de ce dossier. Mes collègues de l'opposition ont, comme moi, essuyé le refus constant et répété des libéraux de considérer leurs propositions. Je suis convaincu que les prochains orateurs sauront le souligner aussi.
Je me dois aussi de souligner que le solliciteur général, qui est le parrain de ce projet de loi, est allé, alors qu'en cette auguste Chambre l'on débattait de ce projet de loi, comparaître devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne sur un autre dossier, montrant par là le mépris, c'est peut-être un peu exagéré, mais du moins toute la non-importance qu'il accorde à la Chambre des représentants élus du peuple. Je ne peux, encore une fois, que m'en dire déçu.
Je suis extrêmement déçu parce que, lorsque nous étions en train de débattre de ce projet de loi-ci, il n'était pas là pour nous écouter et vice-versa. Alors qu'il présentait une autre initiative plus ou moins importante en comité, nous, représentants des partis d'opposition, ne pouvions y être. Comme nous ne pouvons être à deux endroits en même temps, il a fallu choisir. Nous avons choisi le débat en cette Chambre et, malheureusement, le solliciteur général, à mon avis, aurait dû aussi être présent.
Il est important de mentionner que des 14 motions débattues à la Chambre, seules trois d'entre elles ont reçu l'approbation d'une majorité des députés de cette Chambre, donc l'approbation du gouvernement. Les motions du groupe no 5, soit les propositions d'amendement no 9 et 14, ont été adoptées sans surprise puisque présentées par le parrain du projet de loi lui-même, le solliciteur général. Il n'y a donc pas de surprise là, le solliciteur général a présenté certains de ces amendements et ses moutons libéraux ont suivi.
En revanche, à ma très grande surprise, la motion no 13, que j'avais d'ailleurs mise de l'avant, a été adoptée. En fait, il faut dire qu'il aurait été mal venu pour le gouvernement de refuser la suppression des données relatives à un individu acquitté. L'opposition, du moins le Bloc québécois, était préparée à essuyer un autre refus de la part du gouvernement. Je présume que dans la loi des statistiques, c'est l'exception qui ne fait pas mentir la règle.
Nous sommes d'avis que le gouvernement aurait pu faire mieux et laisser de côté la partisanerie outrancière dont il a fait preuve tout au long de l'étude de ce projet de loi. Malgré cela, dans l'ouverture d'esprit du Bloc québécois, nous appuierons le projet de loi C-3, même si nous exprimons certaines réserves quant à l'application de ce projet de loi.
En concluant, nous espérons de tout coeur que la création de cette banque de données donne tous les outils nécessaires aux forces policières de tout le pays pour résoudre un nombre, malgré tout, très grand de crimes au sein de nos collectivités.
Nous maintenons toujours certaines craintes quant à l'utilisation biaisée et inappropriée des échantillons d'ADN et des analyses inutiles que la présente loi n'interdira malheureusement pas explicitement.
Le Bloc québécois se félicite des interventions constructives et souhaite ardemment voir le gouvernement adopter une attitude plus conciliante lorsque ce projet de loi, ou cette loi telle qu'elle le deviendra, sera étudié de nouveau un jour par cette Chambre, et aussi lorsque d'autres projets de loi seront présentés devant les députés, représentants élus de la population. Il en va de la légitimité du Parlement, il en va de la légitimité de cette Chambre, il en va de la démocratie.
[Traduction]
Le vice-président: En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Verchères, le Tokamak de Varennes; le député de Waterloo—Wellington, l'environnement; le député de Frontenac—Mégantic, la mine BC de Black Lake.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je dois dire que c'est un honneur pour moi que de prendre part à ce très important débat sur le projet de loi C-3, qui concerne une question tenant beaucoup à coeur au motionnaire, le député de Crowfoot, un ancien policier.
Je sais que d'autres membres du comité, comme des orateurs qui m'ont précédé l'ont déjà dit, ont pris une part active au débat au sein du comité, devant lequel ont comparu un certain nombre de témoins. C'était certainement un exemple du travail parlementaire à son meilleur, car nous avons abordé une foule de questions différentes. Des opinions divergentes ont été exprimées, comme l'a dit l'orateur précédent, un député du Bloc. Il était très important que le processus ne soit pas paralysé. Des députés ont présenté des propositions d'amendement qui ont été malheureusement rejetées par le gouvernement, mais le processus en tant que tel n'a pas été arrêté. Nous en sommes maintenant à l'étape où ce projet de loi est sur le point de devenir loi.
Le malheur, c'est que les députés se trouvent souvent à appuyer le projet de loi en principe et presque, sans exception, dans son intégralité, alors que celui-ci pose des problèmes. Il y a un hic ou un os, si je puis dire. Et c'en est tout un. En adoptant ce projet de loi, il y a de grandes chances que nous donnions aux services de police le pouvoir de combattre la criminalité de façon très significative.
Pour employer la terminologie du ministre en matière de prévention de la criminalité, si ce projet de loi était modifié comme certains membres du comité l'ont proposé, on pourrait se servir de l'ADN au moment de l'accusation. Lorsque je dis au moment de l'accusation, cela établit en soi une certaine norme, à savoir qu'il doit y avoir des motifs raisonnables et probables pour arrêter quelqu'un et suffisamment de preuves pour porter des accusations au criminel. Un échantillon d'ADN prélevé à ce moment-là pourrait de façon très importante être comparé à des échantillons contenus dans une banque de données génétiques recueillies sur les lieux de crimes non encore résolus.
C'est une occasion en or. On parle de recourir à la technologie et de la vitesse à laquelle la technologie progresse. Dans sa formulation actuelle, le projet de loi ne permet pas d'utiliser à fond cette banque de données génétiques.
Je tiens à dire tout de suite que j'appuie la motion proposée par le député de Crowfoot, à savoir, en substance, que le projet de loi soit renvoyé au Comité de la justice pour y être débattu plus à fond. Le problème vient du fait que, dans sa sagesse, le gouvernement a décidé après coup de solliciter des avis juridiques. En fait, il avait déjà obtenu l'opinion de l'Association canadienne des policiers. Il a demandé l'avis d'un éminent criminaliste, M. Danson, qui, après avoir examiné la situation et l'aspect pratique de se servir de l'ADN, a dit au comité que, le fait de prélever un échantillon d'ADN au moment de l'accusation, pourrait soutenir une contestation en vertu de la Constitution. Je dois dire que je trouve très suspect que le gouvernement ait attendu que le comité ait fini de délibérer pour consulter ensuite trois savants juristes à la retraite, qui étaient de l'opinion contraire.
Je ne conteste pas un instant l'intention ou le fait que ces juristes ont offert un avis contraire. En fait, le contraire m'eut étonné. Nous savons tous que des avis contraires surgissent constamment. Les intervenants dans le système de justice pénale adoptent constamment des positions contradictoires. C'est normal. Cela fait partie d'un débat sain et du caractère contradictoire de la pratique du droit.
Cependant, nous avons ici, encore une fois, une occasion de recourir à ce projet de loi pour appliquer la loi dans toute sa rigueur, et il se trouve essentiellement que la crainte nous retienne. Je ne dirais pas qu'il s'agit d'une crainte irrationnelle. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'elle est sans fondement et irraisonnée. Mais je soutiens que nous, en tant que représentants élus à la Chambre, ne devrions pas nourrir constamment la crainte que, si nous adoptons un projet de loi, un juge ou un groupe de juges, dans un tribunal quelque part dans notre grand pays, le rejettera parce qu'il estimera qu'il dépasser les limites de la Constitution.
M. Gary Lunn: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je m'excuse auprès du député de Pictou—Antigonish—Guysborough, mais la question porte sur le quorum du Comité permanent des pêches et des océans qui est actuellement en réunion. Le président du comité a décidé unilatéralement de poursuivre la réunion du Comité permanent des pêches et des océans...
Une voix: Il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement.
M. Gary Lunn: Le commentaire 806 du Beauchesne dit:
La règle générale régissant le quorum des comités est énoncée au paragraphe 118(1) du Règlement. La majorité des membres d'un comité permanent, spécial ou législatif constitue son quorum. Le quorum de chacun des comités mixtes est fixé par la Chambre des communes, en consultation avec le Sénat.
Je crois savoir que le Comité permanent des pêches et des océans ne compte actuellement que six membres. Leur nombre variait de six à huit, alors que le quorum est de neuf. Le comité a adopté une motion spéciale voulant qu'il y ait trois membres, dont un de l'opposition, mais aucun membre de l'opposition n'est présent.
Le paragraphe 118(1) du Règlement dit...
M. Stan Keyes: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Tout d'abord, je me demande si la Présidence pourrait dire s'il s'agit bien d'un rappel au Règlement.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois informer le député que cette question relève du comité et que la Présidence ne peut pas entendre ce rapport du comité en ce moment. Cette question doit être réglée auprès du comité.
M. Gary Lunn: Madame la Présidente, je sais que vous avez tranché sur cette question. Si vous ne désirez pas poursuivre plus avant, je signale l'absence de quorum.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je pense qu'il y a maintenant quorum. La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La question porte sur l'amendement. Puis-je me dispenser de lire le texte?
Des voix: Non.
[Note de la rédaction: La Présidente lit le texte de l'amendement à la Chambre.]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, le vote par appel nominal est différé au mardi 9 juin 1998, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.
[Traduction]
Mme Marlene Catterall: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour dire qu'il est 17 h 30, de sorte que nous pouvons passer à l'étude des initiatives parlementaires, à la condition que le député qui parraine le projet de loi d'initiative parlementaire à l'étude ce soir soit présent à la Chambre. Si le député est absent, je propose que nous suspendions la séance jusqu'à l'appel de la présidence, mais pas plus tard que 17 h 30 pour que le député qui veut présenter la motion puisse le faire d'ici 17 h 30.
SUSPENSION DE LA SÉANCE
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Consent-on à procéder de cette façon?
Des voix: D'accord.
(La séance est suspendue à 16 h 57.)
[Français]
REPRISE DE LA SÉANCE
La séance reprend à 17 h 02.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est maintenant 17 h 05, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LA CHARTE DES DROITS DES PÊCHEURS
M. Greg Thompson (Charlotte, PC) propose: Que le projet de loi C-302, Loi établissant les droits des pêcheurs, dont celui de participer à l'évaluation des stocks, à la préservation du poisson, à l'établissement des quotas de pêche, à l'attribution des permis de pêche et à la gestion du droit de pêche du public, et établissant également le droit des pêcheurs à être informés à l'avance des décisions touchant la pêche de subsistance et le droit à une indemnisation en cas d'abrogation injustifiée d'autres droits, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Madame la Présidente, je partagerai mon temps avec mon collègue de la Nouvelle-Écosse.
À mon avis, si les députés examinent attentivement ce qui s'est passé depuis les élections l'an dernier, ils constateront que c'est le premier projet de loi d'importance qui est présenté sur les pêches à la Chambre. Je suis très heureux d'en être le parrain, moi qui suis du côté de l'opposition.
Nous envoyons ainsi un message aux pêcheurs du Canada. Le gouvernement n'a pas suivi d'assez près ce qui se passe dans la communauté des pêcheurs.
Le Canada s'est fait avoir par d'autres pays en ce qui concerne la pêche en haute mer. Les gouvernements successifs n'ont jamais vraiment pris la défense de nos pêcheurs et n'ont jamais fait valoir leurs droits. C'est précisément l'objet du projet de loi dont nous sommes maintenant saisis. Ce projet de loi, c'est la Charte des droits des pêcheurs.
Ce que je tente de faire en présentant ce projet de loi, c'est de garantir aux pêcheurs le droit d'être consultés. Songez à ce qui s'est passé dans les pêcheries des côtes est et ouest, dans celles des Grands Lacs et même au lac Winnipeg.
Tout le secteur des pêches au Canada est dans une situation désespérée. Les pêcheurs ont besoin de certaines protections. Nous devons les consulter. Je suis persuadé que si nous les avions consultés dès le début, la situation serait bien différente de celle qui existe actuellement sur les côtes de notre pays et que les stocks ne seraient pas décimés.
Nous avons accepté la surpêche des étrangers pendant des années. À cause de cela, la pêche dans le Canada atlantique est presque chose du passé. La morue a pour ainsi dire disparu, à l'instar du poisson de fond dans certaines zones.
Si je prends la parole, ce n'est pas pour blâmer le gouvernement actuel ou celui dont j'ai fait partie, de 1988 à 1993. Ce ne serait pas utile.
En fait, les différents gouvernements qui se sont succédés ont fait des erreurs depuis le début, quelle que soit leur allégeance politique, et ils ne se sont jamais vraiment portés à la défense des pêcheurs. Les pêches de la côte est sont presque complètement effondrées.
Il y a un autre aspect du projet de loi qui intéressera vivement les pêcheurs et qu'ils appuieront, c'est l'idée selon laquelle, lorsque des programmes d'aide sont négociés à l'intention des pêcheurs, ces derniers doivent être présents à la table de négociation.
Je pense que les pêcheurs doivent être consultés dès le début, que ce soit au sujet des programmes d'aide qui visent à les orienter vers un autre secteur d'activité ou d'autres qui visent à racheter leurs permis. Ils ne l'ont jamais été.
Quelles consultations y a-t-il eu au tout début, relativement à la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique? Ce programme a été essentiellement conçu par Ottawa. Je le répète, je ne veux blâmer aucun gouvernement. Cette stratégie a été mise au point et administrée par des fonctionnaires. D'entrée de jeu, les pêcheurs n'ont pas été consultés.
L'autre domaine où la consultation des pêcheurs aurait pu faire une différence, c'est la conservation. Tout le monde sait que, dès le début du problème de la surpêche par les pays étrangers, nos pêcheurs savaient ce qui se passait. Ils voyaient que des quotas énormes étaient accordés à des étrangers qui venaient pêcher nos stocks de poissons. Les pêcheurs savaient très bien à l'époque ce qui allait se passer. C'est comme la vieille histoire au sujet des Canadiens. Nous sommes trop polis pour dire les choses telles qu'elles sont.
Je me souviens de l'histoire d'un Canadien à New-York. Lorsqu'un New-Yorkais lui a marché sur le pied, le Canadien s'est empressé de s'excuser. Le New-Yorkais lui a alors dit: «Vous êtes sûrement canadien.» Lorsque le Canadien lui a demandé pourquoi, il a répondu qu'il n'y avait que les Canadiens dans le monde entier qui s'excusaient lorsqu'on leur marchait sur le pied. N'est-ce pas ce que nous avons fait sur la scène internationale?
Lorsque le premier ministre Tobin a défendu les intérêts des pêcheurs sur la scène internationale, j'ai été le premier à l'applaudir. L'ancien ministre des Pêches, M. Crosbie, l'a félicité aussi. Pour la première fois dans l'histoire canadienne récente, nous avions enfin un politicien qui n'avait pas peur de dire les choses telles qu'elles étaient.
Nous pourrions débattre à savoir si la démarche a été fructueuse. Au moins, la communauté internationale nous a entendus. Abstraction faite de toute considération politique, c'est quelque chose que nous aurions dû faire il y a bien des années. Ce que le ministre des Pêches faisait à ce moment-là, c'est qu'il écoutait les gens qu'il représentait, quelle que soit leur affiliation politique. C'est ce que nous devons faire.
Le Comité des pêches a entendu des témoignages au sujet de ce que vivent certains de nos pêcheurs, des difficultés qu'ils connaissent sur le plan du revenu, des coûts associés à la pêche ou des efforts qu'ils déploient pour essayer de pêcher des poissons qui ne sont pas là. Certains de ces témoignages sont absolument scandaleux.
M. Fortin a témoigné devant le Comité des pêches le 27 novembre. Ce témoignage montre à quel point la situation est ridicule. Cette année, il a pris pour 40 000 $ bruts de poisson. Ses gains ont été de 16 000 $. Il a payé 5 500 $ en frais de pêche, 5 400 $ pour le carburant, l'huile et d'autres éléments, 5 525 $ de réparations parce qu'ils n'ont pas eu de chance, 4 775 $ pour le matériel électronique, 1 500 $ pour l'épicerie parce qu'ils vivent sur l'eau pendant des jours. Il a payé 4 000 $ pour l'assurance-auto, car il a une famille, dont il est le soutien. Il a payé 1 400 $ pour la CSST et 2 400 $ pour d'autres frais.
Puis il y a les intérêts sur le montant qu'il a été obligé d'emprunter à la caisse, et les taxes. Cela représente 25 p. 100 du paiement du bateau. Il a donc un déficit de 30 000 $ et 10 000 $ de dépenses, et on veut encore lui enlever mes prestations de la SPA. Il a dit qu'il ne pouvait l'accepter.
Qui ici tolérerait pareille chose? Je crois que ce cas se situe en droite ligne avec le projet de loi que j'ai présenté à la Chambre. Je signale encore que c'est le premier véritable projet de loi ayant trait à la pêche dont la Chambre est saisie depuis les élections de l'année dernière. Voilà qui dénote un déficit de ce côté-là de la Chambre, puisqu'on ne semble pas se soucier du cas des pêcheurs, des gens que le gouvernement est censé représenter dans leurs circonscriptions.
Ce n'est qu'un petit exemple qui illustre ce qui se passe depuis belle lurette. Ce que nous devons faire, comme députés, c'est dire que les pêcheurs ont des droits et que les gouvernements ne sauraient les en priver. Que lorsqu'ils sont privés de leur droit de pêcher et de leur gagne-pain, nous allons en sorte qu'ils soient dûment indemnisés, qu'au moment où le montant de l'indemnisation va être fixé, ils seront être à la table, pour nous aider à prendre les décisions qui s'imposent, qu'on ne va pas s'en remettre aux bureaucrates dans leurs tours d'ivoire à Halifax ou à Ottawa, que tout va se faire en consultation avec les pêcheurs.
Je laisse le reste de mon temps à mon collègue de la Nouvelle-Écosse. Je suis sûr qu'il saura faire progresser le débat. Je remercie la Chambre d'avoir attendu que j'arrive. Je sais que le débat précédent a pris fin tôt. Je suis impatient d'entendre les propos du député de South Shore.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui sur la motion du député de Charlotte qui propose l'adoption d'une déclaration des droits des pêcheurs.
On ferme trop souvent les yeux sur l'état des pêches au pays, particulièrement en Nouvelle-Écosse. C'est certainement le cas dans la circonscription de South Shore que j'ai l'honneur de représenter, ainsi que dans la circonscription voisine de West Nova qui est aussi très bien représentée à la Chambre.
Nous parlons des gens dans le domaine des pêches. Je connais ces gens. Je ne suis pas pêcheur, je ne prétends pas l'être, mais une bonne partie de mes électeurs vivent de la pêche. La circonscription de South Shore est la circonscription qui regroupe le plus grand nombre de pêcheurs au Canada. Quelque 800 bateaux de pêche sont enregistrés dans le seul comté de Shelburne. On en retrouve un peu plus de 200 autres dans le comté de Queens et environ 180 dans le comté de Lunenburg. C'est une ressource incroyable.
Or, cette ressource disparaît peu à peu. Elle a déjà beaucoup diminué. Comme le député de Charlotte l'a souligné, le nombre de pêcheurs a diminué au fil des ans en raison des mesures bureaucratiques, des interventions du gouvernement. Le député ne voulait pointer du doigt personne en particulier. Je ne tiens d'ailleurs pas à le faire non plus. Il est certain toutefois que les gouvernements de quelque parti qu'ils soient ont commis de graves erreurs dans le dossier des pêches et je crois que cela se poursuit encore aujourd'hui.
L'un des premiers commentaires que j'ai à formuler sur cette déclaration des droits des pêcheurs et sur le droit public de pêcher est que je ne suis pas du tout persuadé que ce droit public de pêcher existe toujours. On ne peut pas aujourd'hui simplement décider d'acheter une licence et d'aller pêcher. Il n'y a plus de poissons. On parle de quotas individuels transférables et de quotas de groupes. Toutes sortes de restrictions s'appliquent. Ce droit public à la pêche est une chose que nous avons perdue depuis longtemps, j'en ai bien peur.
Même dans les nouvelles pêches, je connais un certain nombre de cas, et je suis sûr que les députés d'en face en connaissent d'autres, où les gens qui pratiquent une pêche expérimentale n'ont même pas pu obtenir les premiers permis octroyés pour cette pêche, qu'il s'agisse de la pêche expérimentale à la crevette à la baie St. Margaret ou encore de la pêche des palourdes, semi-hauturière, hauturière ou autre. Les gens qui ont mis au point cette pêche, qui ont fait les premiers essais, ont très souvent été oubliés lorsqu'est venu le temps d'accorder les permis, ce qui est tout à fait contraire à la Loi sur les pêches.
Le député de Charlotte a mentionné la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique. Je voudrais prendre quelques instants pour parler de l'échec de cette stratégie et de l'incapacité du gouvernement de s'attaquer véritablement au problème. À l'origine, la stratégie a été conçue pour les ports terre-neuviens emprisonnés par les glaces. Ce n'est qu'après-coup qu'on a cru qu'elle pouvait s'appliquer aux stocks de poisson de la Nouvelle-Écosse qui périclitaient. Le gouvernement a donc appliqué la stratégie et un programme de rachat des permis, qui n'ont pas réussi à réduire suffisamment l'activité dans l'industrie de la pêche. La Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique ne couvrait que la première tranche de 26 000 $ de revenu brut provenant des poissons débarqués par chaque navire de pêche. Par la suite, il fallait racheter.
Imaginons ce qu'il faut faire pour enregistrer la première tranche de 26 000 $ de revenu brut pour une année de pêche. Il faut acheter le permis pour le bateau à vapeur. Il faut payer l'équipage. Il faut payer les fournitures. Il faut payer le diesel. Il faut payer les services de contrôle des prises à bord des navires. Il faut payer le transfert des QIT. On n'a pas encore fait de profit qu'on a déjà atteint la limite des 26 000 $ de revenu brut.
Les gens qui ont voulu travailler ont été pénalisés. Les gens qui ont profité de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique sont ceux qui ont décidé d'améliorer leur score au golf ou d'aller taquiner la truite. Les pêcheurs qui ont continué de travailler pour pouvoir nourrir leur famille ont connu un échec épouvantable. C'est le moins qu'on puisse dire.
Ces gens doivent encore composer avec la dégradation des stocks de poisson. La côte sud de la Nouvelle-Écosse et certaines régions du sud-ouest de la province ont énormément de chance. Il reste encore un peu de poisson. Nous sommes loin toutefois de la prospérité. En Nouvelle-Écosse, les groupes communautaires avaient chacun un quota l'an dernier, mais ces groupes n'ont pu prendre tout leur quota, le poisson se faisant trop rare.
Nous encourageons le rejet à l'eau du petit poisson. Si les pêcheurs ont droit à un contingent de seulement 4 000 livres de haddock, que vont-ils faire du petit poisson? Ils ne peuvent pas se permettre de le garder. Un petit haddock vaut 40 cents la livre alors que le gros vaut 1 $ la livre.
Ces gens se trouvent dans une situation vraiment désastreuse. Ces gens sont des environnementalistes, des protecteurs de l'environnement. Ils comprennent la situation. Ils ont des familles, des hypothèques, des voitures à payer, il faut qu'ils essaient de gagner leur pain. Les pêcheurs de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard, de Terre-Neuve et du Québec sont dans une situation désespérée par suite de la LSPA.
Pendant ce temps, on peut voir l'effort de pêche des chalutiers étrangers qui, à notre barbe, viennent prendre nos appâts, nos poissons comestibles, notre morue, notre haddock, notre flétan et ainsi de suite.
Cette année, on prévoit que les stocks de saumon de l'Atlantique regagnant les rivières de la partie sud-ouest de Nova atteindront les niveaux les plus bas jamais vus. Ces rivières sont menacées. Nous savons que, à cause des pluies acides, le frai arrive difficilement à survivre dans les rivières. Il n'y a pas besoin d'être un génie pour comprendre que la pollution joue un rôle dans tout cela.
Les stocks n'ont jamais été aussi réduits et pourtant jamais nos méthodes de conservation n'ont jamais été aussi rigoureuses. Il n'est plus permis de pêcher dans les estuaires. On ne peut plus garder le saumon adulte. On encourage les pêcheurs à ne garder que les grilses et, encore, seulement les grilses mâles.
Les autochtones pêchent les grilses mâles dans la passe migratoire. Ce n'est pas une menace pour le saumon qui remonte la rivière pour frayer et se reproduire.
Ce qui est une menace, c'est le fait que le gouvernement fédéral a autorisé des pêcheurs étrangers à Saint-Pierre-et-Miquelon à acheter leurs engins de pêche au saumon aux pêcheurs de Terre-Neuve qui les leur ont vendus. Ils ont installé ces engins dans un couloir de 10 miles qui s'étend sur 200 miles jusqu'au bord du plateau. Personne dans cette Chambre, au comité des pêches ou au ministère ne pourra me convaincre que ceci n'a pas été pour quelque chose dans la réduction des quantités de poisson qui retourne en Nouvelle-Écosse.
Nous avons pendant longtemps imposé un moratorium sur la pêche commerciale au saumon. Ça montre l'état de la pêche. Dans l'industrie de la pêche, l'argent provient du haddock, de la morue et de la plie. La pêche sportive est importante, mais c'est de la pêche aux poissons de fond et au homard que provient l'argent, c'est là-dessus que comptent la majorité des gens pour leur gagne-pain.
Les pressions se sont accentuées. Les pêches sont complètement dévastées. L'industrie de la pêche au homard compte davantage de permis de pêche et l'effort fourni y est plus grand aujourd'hui qu'au cours des 50 dernières années.
Nous devons nous occuper beaucoup plus sérieusement de la pêche au homard. Cette industrie est la seule source d'approvisionnement pour de nombreuses familles en Nouvelle-Écosse, dans la circonscription de South Shore et dans le sud-ouest de celle de Nova, et elle subit d'énormes pressions. Je soupçonne que la situation est la même dans l'Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et dans certaines régions du Québec. C'est pourquoi nous devons traiter ce secteur des pêches avec beaucoup de prudence si nous voulons qu'il survive.
En terminant, je voudrais dire quelques mots au sujet de l'incapacité du gouvernement de mettre en place un programme efficace de rachat des permis actifs. Les pêcheurs qui n'utilisent pas leur permis depuis 5, 10, 15 ou 20 ans ne pêchent pas de poisson et nous n'avons donc pas à nous en préoccuper. Il faudrait cependant racheter les permis actifs et imposer des limites au nombre de permis inactifs qui peuvent être réactivés.
M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-302.
Le projet de loi dont la Chambre est saisie repose sur une intention très louable, mais son approche laisse beaucoup à désirer. J'approuve même le but poursuivi par le député dans ce projet de loi sur la Charte des droits des pêcheurs. Son intention est louable, car le député s'intéresse manifestement aux pêcheurs canadiens et aux communautés de pêche au Canada, tout comme nous d'ailleurs.
Malheureusement, cet après-midi, lorsque nous examinions un très important projet de loi concernant l'accord de l'ONU sur la pêche, ses collègues sont sortis de la salle du comité au moment où nous entendions deux très importants témoins. Nous tentions alors d'examiner la question des stocks chevauchants et de faire adopter un projet de loi concernant l'accord de l'ONU sur la pêche, pour que le Canada fasse partie des 30 premiers pays à ratifier l'accord.
Je trouve cela regrettable et inquiétant. Les députés de l'opposition ont quitté la salle. Ils ne devraient pas se livrer à des jeux politiques au sujet d'une question si importante pour les pêcheurs canadiens en quittant la salle de comité au moment où nous entendions deux très importants témoins.
Voyons maintenant le projet de loi lui-même. Il repose sur une approche très défectueuse et, de ce fait, ne permettrait pas d'aider les communautés de pêcheurs du Canada à surmonter leurs problèmes actuels. En fait, et je le dis sérieusement, je crois que ce projet de loi pourrait miner les efforts de conservation du Canada et nuire aux pêches. Je sais bien que ce n'est pas là l'intention du député. Son but est certainement tout autre, mais c'est néanmoins ce que ce projet de loi risque de provoquer.
Il y aurait beaucoup d'aspects à aborder, mais je n'ai pas le temps de les aborder tous en dix minutes. Commençons d'abord par le libellé du projet de loi lui-même, qui laisse entendre que les communautés seraient mieux servies et, d'une certaine manière, mieux protégées contre les situations difficiles si la loi reconnaissait certains droits aux pêcheurs. Ces droits comprennent notamment:
...le droit de participer à l'évaluation des stocks, à la préservation du poisson, à l'établissement des quotas de pêche, à l'attribution des permis de pêche et à la gestion du droit de pêche du public, et établissant également le droit des pêcheurs à être informés à l'avance des décisions touchant la pêche de subsistance et le droit à une indemnisation en cas d'abrogation injustifiée d'autres droits.
Nous ne pouvons savoir exactement ce que le député a à l'esprit, mais il pense peut-être que les pêcheurs ont besoin d'être protégés de nous ou des décisions arbitraires de fonctionnaires bien loin d'eux, des décisions qui influent profondément sur leur vie, mais sur lesquelles ils ont l'impression de n'avoir aucun contrôle.
Nous compatissons avec quiconque pense ainsi, surtout lorsque la personne éprouve de sérieuses difficultés en raison de certaines décisions de gouvernements ou des gestionnaires des pêches.
Le Comité permanent des pêches et océans tient de vastes audiences dans tout le pays depuis septembre dernier. Je pense qu'en novembre nous étions à Terre-Neuve et dans l'est du Canada. Nous avons eu aussi des audiences sur la côte ouest, dans l'est de l'Arctique et dans la région des Grands Lacs.
Je pense que le comité va avoir d'importantes recommandations à faire en ce qui concerne tous les points que le député mentionnait sur les droits des pêcheurs. Je pense que nous constaterons, lorsque le comité remettra son rapport, qu'il contiendra de bonnes recommandations sur les façons de s'assurer de consulter les pêcheurs, de protéger leurs droits, de maintenir la priorité à la conservation, de faire participer les pêcheurs aux discussions et consultations sur les quotas, etc.
Ce qu'il faut aux pêcheurs, et ce qu'ils veulent, c'est la possibilité de gagner dignement leur vie en mer, pas seulement aujourd'hui et demain, mais au cours de la prochaine décennie et après cela. C'est ce que le gouvernement essaie de faire par ses efforts.
Les pêcheurs ne veulent pas seulement cela pour eux, mais aussi pour leurs enfants et petits-enfants. C'est ce dont ils ont besoin.
Selon l'endroit où ils sont et l'espèce de poisson qu'ils pêchent, ils peuvent avoir des quotas réduits ou même une saison de pêche fermée. Nous le savons. Ou bien, dépendant des endroits où ils habitent et ce qu'ils pêchent, ils peuvent déjà percevoir les bienfaits des efforts que le gouvernement a déployés ces dernières années pour restructurer le secteur de la pêche.
Le dernier député qui a pris la parole a fait allusion à la pêche au homard. Nous avons dû prendre cette année des mesures énergiques pour garantir l'avenir de cette forme de pêche. Nous devons permettre la reproduction pour que la ressource se perpétue, mais l'exploitation de cette espèce a été le pilier des pêches dans le Canada atlantique.
Dans la région de l'Atlantique, même avec le ralentissement de la pêche au poisson de fond —et nous avons tiré quelques leçons de l'expérience —la pêche aux coquillages, qui est en croissance, et la pêche au homard ont eu des retombées beaucoup plus considérables et rapporté de bons revenus aux pêcheurs et aux collectivités. Nous voyons déjà les efforts du gouvernement porter fruit.
Que cela nous plaise ou non, aucune loi ne va changer la réalité. Cette réalité, c'est nous ne pouvons pas exploiter la mer et ses ressources comme d'autres générations l'ont fait avant nous. Ce secteur d'activité est très complexe. Le gouvernement doit donc pratiquer une gestion très prudente, en s'appuyant sur les meilleures données scientifiques, pour le plus grand bien de tous: pêcheurs, collectivités, industries qui utilisent les espèces exploitées et industries qui fournissent le matériel et la technologie au secteur de la pêche. Ces industries ne se trouvent pas que sur les côtes de nos trois océans, il y en a aussi dans le Canada central, qui profite des retombées de la pêche.
À notre époque, avec le type de technologie et d'équipement que nous avons, il faut souvent prendre les décisions rapidement. Malgré les bonnes intentions l'auteur du projet de loi, celui-ci mettrait en place un processus d'examen extrêmement lourd et qui demanderait beaucoup de temps. L'application de décisions nécessaires et rapides pourrait être retardée tant que les appels n'ont pas été épuisés. Le plus important, en ce qui concerne la gestion des pêches à l'avenir, même si ce n'est pas le but visé du projet de loi, c'est que ce secteur risque d'être complètement paralysé.
Je sais que ce n'est pas ce que souhaite le député d'en face ni ce qu'il cherche à faire, mais c'est néanmoins ce qui risque d'arriver. Le projet de loi C-302 pourrait paralyser la gestion des pêches.
Permettez-moi de rappeler à la Chambre les cinq principes qui guident le gouvernement. Premièrement, l'industrie de la pêche doit être durable sur le plan écologique. Deuxièmement, elle doit être viable sur le plan économique. Troisièmement, elle doit ajuster sa capacité de capture en fonction de la disponibilité des ressources. Quatrièmement, les intervenants doivent participer davantage à la prise de décisions, et nous faisons un effort réel dans ce sens. Cinquièmement, elle doit être capable de soutenir la concurrence internationale.
Notre gouvernement progresse sur ces cinq fronts. La conservation est une priorité centrale. Je suis certain que, dans le cadre de ses travaux de consultation, le Comité permanent des pêches et des océans va continuer de nous encourager à appliquer ces cinq principes, nous proposant de meilleures idées en cours de route.
Toutefois, le projet de loi ne contribue guère à l'application de ces principes que le gouvernement veut promouvoir, malheureusement.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je n'étais pas par plaisir que j'ai quitté la réunion du comité des pêches, cet après-midi. Les témoins que le comité recevait cet après-midi comparaissaient à ma demande. Alors, quand les ministériels se sont ligués contre l'opposition pour s'assurer que le comité ne puisse pas insister pour que M. Tobin vienne témoigner sur cette question d'une grande importance, nous avons dû manifester notre déplaisir.
Je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-302 en deuxième lecture. Ce projet de loi que le député de Charlotte nous a présentés comporte trois éléments principaux. Les trois éléments en question sont la protection du droit de pêcher, la participation des Canadiens qui vivent de la pêche au processus consultatif et décisionnel, et l'établissement du principe qui veut qu'une indemnité soit versée quand des décisions indépendantes de la volonté des parties concernées ont pour effet d'abroger des droits de pêche.
Je suis fermement en faveur du droit public de pêcher, lequel existe en common law depuis la Grande Charte de 1215. Normalement, si un tel droit existe depuis aussi longtemps, il ne devrait pas être nécessaire d'adopter une mesure législative pour protéger ce droit. Ce n'est malheureusement pas le cas. Le gouvernement préférerait supprimer ce droit, parce que celui-ci est tout à fait compromis par l'incapacité du gouvernement d'assortir de pouvoirs législatifs son programme de ventes pilotes lié à la stratégie des pêches autochtones, lequel programme crée des divisions.
Au cours de la dernière législature, le gouvernement avait déposé une nouvelle Loi sur les pêches qui allait donner au ministre le pouvoir d'accorder un droit privé de pêche à des fins commerciales ou sportives à tout groupe jouissant des faveurs du gouvernement. Il est heureux que le projet de loi C-62 soit mort au Feuilleton.
La réalité n'est pas toujours conforme au bon sens. Nous aimerions croire qu'il n'est pas nécessaire d'énoncer des droits, puisque tous savent que nous détenons ces droits. Nous pensons que tous ont ces droits, mais en fait ceux-ci ne sont détenus que par le gouvernement libéral, parce que ce dernier s'amuse à exercer son autorité. On peut voir dans de nombreuses mesures législatives que ceux qui détiennent le pouvoir n'acceptent qu'à l'occasion d'accorder des droits à d'autres groupes. C'est la raison pour laquelle ces groupes luttent afin d'obtenir des choses telles que le droit d'accès public à la pêche.
C'est ce qui s'est produit. Le roi a supposé qu'il avait le droit de faire ce qu'il voulait des pêches. Les gens se sont mobilisés, la Grande Charte fut rédigée, et le roi dû réviser sa position. C'est la raison pour laquelle le droit public de pêcher est un droit écrit. C'est un droit gagné de haute lutte et celui-ci doit être protégé jalousement, autrement le groupe au pouvoir nous l'enlèvera lorsque nous ne veillerons pas au grain.
Les pêches sont une ressource publique et la responsabilité du ministre a trait à la conservation, à la gestion et à la protection de cette ressource. Le ministre n'a pas le droit de décider qui obtient le poisson. Cela dit, la gestion des pêches suppose que des décisions doivent être prises quant à savoir qui obtient les permis et quelles espèces peuvent être pêchées ou non. Les pêcheurs devraient être consultés lorsque ces décisions sont prises et pouvoir ainsi participer au processus décisionnel.
Étant donné que des ressources telles que les pêches sont limitées, le public doit décider qui peut y avoir accès, c'est-à-dire qui a le droit de pêcher. C'est la raison pour laquelle nous avons des permis d'accès limité et des pêcheurs professionnels désignés. Mais nous avons délégué au gouvernement la responsabilité de prendre les décisions liées aux permis et aux périodes de pêche. Après tout, nous pensons que c'est le rôle d'un gouvernement de prendre de telles décisions. Malheureusement, les décisions du gouvernement sont influencées par des priorités liées à la politique et au pouvoir. Nous l'avons vu clairement, comme je l'ai dit, dans le cas du SPA créé en 1992, qui était source de division raciale.
Voulons-nous déléguer ce genre de pouvoir décisionnel à une personne seulement, une personne qui pourra être influencée par des groupes d'intérêt précis qui n'ont qu'une vision partielle de la situation? Je ne le crois pas. Le projet de loi C-302, dont j'appuie l'idée générale, vise à prévenir ce genre de situation.
Le préambule tient pour acquis que les Canadiens dont la pêche est le gagne-pain sont ceux qui connaissent le mieux les pêches. Les pêcheurs font certainement partie de ce groupe de personnes, mais il y en a d'autres, comme les scientifiques, les créateurs de politiques sociales, les fonctionnaires de Pêches et Océans et les travailleurs sur le terrain, qui jouent un rôle considérable. Autrement dit, il existe divers groupes qui peuvent donner de bons conseils, mais ceux dont la pêche est le gagne-pain doivent en faire partie.
L'article 4 reconnaît aux pêcheurs le droit de participer aux décisions concernant l'évaluation des stocks de poissons, la préservation du poisson, les quotas de pêche, les permis de pêche et le droit de pêche du public. Ce droit devrait être établi et n'exclut pas d'autres parties. Le gouvernement ne serait aucunement obligé de suivre à la lettre les conseils des pêcheurs, mais du moins cela représenterait un changement par rapport à la situation actuelle. Les gouvernements actuels, c'est bien connu, affirment vouloir faire participer les gens au processus décisionnel, mais ils n'en font pas moins à leur guise.
L'article 5 reconnaît le droit à une indemnisation. Toutes les activités gouvernementales doivent être transparentes. Si les gens voient ce que le gouvernement fait et que les raisons qui sont à l'origine des décisions qu'il prend ne sont pas un secret, je crois que les gens n'auront pas l'impression que leurs droits sont foulés aux pieds. Ils sentiront rarement la nécessité de continuer de contester les résultats.
Si les dispositions sont obligatoires et qu'elles sont mises en oeuvre, les pertes visées à l'article 5 ne devraient pas se produire. Les gouvernements qui tenteraient de supprimer le droit de pêche du public s'exposeraient à de graves conséquences. L'expérience nous a cependant appris que les conséquences monétaires, comme l'indemnisation des personnes ayant perdu leur droit de pêche, ne protègent pas le droit lui-même.
J'ai été un ardent défenseur du droit de pêche du public et je me suis également opposé au pouvoir discrétionnaire du ministre d'établir des règles pour décider qui a le droit de pêcher et qui ne l'a pas.
J'appuie entièrement l'intention du projet de loi C-302. J'aimerais cependant que des amendements mineurs y soient apportés. Il est important que les personnes dont la pêche est le gagne-pain ne subissent pas la perte de leurs droits et les préjudices qui s'ensuivraient, sans avoir été consultées.
Nous devons poursuivre le combat pour empêcher des gouvernements imprévoyants d'empiéter sur des principes depuis longtemps établis.
[Français]
M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, je veux joindre ma voix à celle du député de Charlotte, le parrain du projet de loi. C'est quand même rafraîchissant de voir qu'il y a des gens qui s'occupent des pêcheurs.
Je veux aussi rappeler à la Chambre que le secrétaire d'État aux Pêches et à l'Agriculture, à une question posée par les conservateurs, l'automne dernier, avait promis qu'une politique des pêches serait déposée au mois de février de cette année. Or, il n'en est rien.
Je rappelle à la Chambre que le vérificateur général du Canada, M. Desautels, a lui aussi recommandé que le Canada se dote d'une telle politique. À défaut d'une telle politique, on assiste au chaos dans la gestion dont le gouvernement fédéral fait montre présentement.
Je vais aussi apporter quelques nuances au projet de loi, mais au moins il y a quelqu'un qui a réussi à passer à travers le système et à présenter un projet de loi. C'est tout à fait intéressant.
Présenter un projet de loi qui permette aux pêcheurs de participer à l'évaluation des stocks, c'est très intelligent. Permettre aux pêcheurs de participer à la préservation du poisson, c'est très intelligent. Toutefois, j'aurais un petit bémol relativement à l'établissement des quotas et à l'attribution des permis.
Quant à la gestion du droit de pêche du public, moi aussi, je voudrais que les pêcheurs puissent être protégés. Alors, il faudrait s'entendre, en comité, à savoir si c'est pour protéger les pêcheurs qui sont déjà actifs, pour qu'ils puissent être à l'abri de tout pouvoir discrétionnaire que le ministre des Pêches a actuellement dans la loi et qu'il tentait de renforcer dans l'ancien projet de loi C-62.
Les pêcheurs, ceux qui pêchent encore, sont contents, mais ils ont toujours peur que le ministre vienne tout chambouler, chambarder l'équilibre qu'ils ont établi. C'est important que leurs droits soient protégés, mais en même temps, si jamais on veut permettre un accès au public, il faudra encadrer de quelle façon on pourra permettre aux autres personnes d'entrer.
Ce que je trouve intéressant dans la deuxième partie du projet de loi, c'est lorsqu'on parle d'établir un droit pour les pêcheurs d'être informés à l'avance des décisions concernant la pêche de subsistance. J'imagine que le député veut faire référence aux pêcheries autochtones. Personnellement, je trouve cela sensé qu'ils en soient informées.
Mais je vais enchaîner avec le deuxième droit que ce projet de loi tente d'établir, soit d'avoir une indemnisation en cas d'abrogation injustifiée des droits. Prenons le droit qui serait accordé pour des pêcheries autochtones. J'aime vivre dans un État de droit, en ce sens que si, en vertu d'un traité, les autochtones ont droit à telle ou telle chose, ce n'est pas moi qui vais le leur enlever. Ce n'est pas la faute des pêcheurs non autochtones, et ce n'est pas à eux, aujourd'hui, d'avoir à payer pour tout.
Il est important, si jamais le Canada reconnaît les droits par traité, qu'on puisse indemniser les pêcheurs non autochtones qui occupent présentement la place. Cela a besoin d'être fait de façon systématique.
Quand on parle aussi d'abrogation de droits injustifiés, il faut faire référence à la notion de moratoires. Lorsque le ministre des Pêches établit un moratoire, qu'il interdit qu'on pêche une espèce, ceux qui ont toujours gagné leur vie avec ce type de pêche voient leurs droits abrogés et leur vie changée. Je pense que cela mérite une compensation.
Je fais référence au fameux programme de soutien du revenu, le programme de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, qui s'appelle en anglais le TAGS. On est à deux mois de la fin de l'échéance et les pêcheurs attendent toujours de savoir ce qui va se passer.
En face, on continue à parlementer, on continue à nous dire peut-être que oui, peut-être que non. Si de tels droits avaient déjà été enregistrés, cela serait automatique. Si le projet de loi se rend en comité, nous pourrons suggérer aux députés d'additionner certaines choses.
Nous avons vu en comité quels sont les méchants coups que le gouvernement peut faire, comment il essaie de se faufiler et de se défiler de sa responsabilité. Si cela a besoin d'être encadré, on fournira aux députés une façon de le faire.
Les points que j'aimerais nuancer concernent l'établissement des quotas, c'est-à-dire permettre aux pêcheurs de participer à l'établissement des quotas et à l'attribution des permis.
Ce n'est pas que je suis contre, mais si je reviens à l'esprit de la SPA, dans l'analyse que j'en fais et que j'ai partagée avec le ministre des Pêches, ce dernier nous a répondu en Chambre l'automne dernier qu'il reconnaissait que si la Stratégie des pêches n'avait pas marché, que si c'était un programme qui, au lieu d'être actif était passif, c'est justement parce qu'Ottawa n'a pas impliqué les provinces au niveau de la fabrication de la Stratégie.
Alors, en ce sens, il serait important de prévoir que les provinces puissent elles aussi participer à l'établissement des contingents, participer à l'attribution des permis.
Le Canada se vante d'être un leader mondial en termes de gestion des océans, et il fait aussi partie de l'OPANO. Le Canada fournit des données biologiques à l'OPANO, et c'est avec la participation et le partage des informations biologiques que l'on arrive à déterminer un régime de conservation ainsi que ce qu'il faut prélever et laisser dans l'eau pour assurer la pérennité de la ressource.
Je vais parler seulement du secteur est du Canada et je laisserai les députés de l'Ouest parler de leur secteur. Dans le golfe du Saint-Laurent et l'océan Atlantique, dans le 2GH et le 3KL—pour les pêcheurs qui connaissent cela—pourquoi cela ne pourrait pas être le Canada, de concert avec les provinces, dans le style de l'OPANO, qui puisse partager l'information biologique pour s'assurer d'un régime de mesures de conservation? Les provinces, une fois les quote-parts établies par celles-ci, pourraient ainsi procéder à l'émission des permis, c'est-à-dire faire la répartition de la richesse sur leurs territoires.
Il faut toujours se rappeler la règle suivante, c'est-à-dire qu'un pêcheur en mer nous amène à peu près cinq travailleurs à terre. Le principal problème dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, ce sont les provinces qui l'ont dans leur cour. Je pense qu'il y aurait un besoin de faire l'appariement entre ces deux choses.
Le secrétaire d'État a parlé tout à l'heure des cinq principes qui guident le ministère, pêcherie durable, pêcherie rentable, et il nous parlé aussi du fameux projet de loi C-27 dont il blâme l'opposition de s'être retiré. Mais ce qu'il n'a pas dit, et je suis content que le député du Parti réformiste l'ait mentionné, c'est que les députés d'opposition voulaient avoir comme témoin le père de l'ancien projet de loi C-29, c'est-à-dire M. Brian Tobin. C'est lui qui avait fabriqué la loi pour protéger les stocks chevauchants, lors de la dernière Législature.
On a l'impression que le gouvernement actuel est en train d'enlever les dents à cette loi. Alors, je ne voudrais pas qu'on accouche d'un bébé mort-né. Quand on se vante de l'autre côté d'avoir des beaux voeux pieux et que l'on veuille conserver la ressource, je pense qu'on prend énormément de gants blancs, pour ne pas dire une perche de 100 pieds pour ne pas prendre ses responsabilités, comme dans le cas de la SPA.
[Traduction]
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, au nom du Nouveau Parti démocratique et de chacun des pêcheurs et des travailleurs des usines à poisson, je tiens à remercier le député de Charlotte, au Nouveau-Brunswick, pour son projet de loi d'initiative parlementaire, qui est absolument fantastique.
Il est plutôt regrettable qu'un député de l'opposition ait à présenter un projet de loi de cette nature. Rien que de devoir en parler, c'est incroyable. Le député veut essentiellement que les pêcheurs et les travailleurs des usines à poisson aient le droit de participer aux négociations lorsque des discussions à leur sujet ont lieu ou que décisions les concernant sont prises.
Je me demande si le gouvernement a longuement consulté Bombardier avant de lui accorder le plus gros contrat de tous les temps en matière de défense. Je parie que les consultations ont été longues et nombreuses. Par contre, dans le secteur des pêches, il n'y a aucune consultation.
Le secrétaire parlementaire a énuméré les cinq principes régissant les activités du ministère des Pêches et des Océans. Pour la gouverne du gouvernement et de ceux qui nous écoutent aujourd'hui, je voudrais vous énumérer les cinq principes qui régissent, à mon avis, les activités du ministère.
Le principe numéro cinq: ne diffusez aucun renseignement à quiconque en temps opportun. Le principe numéro quatre: opposez les régions les unes aux autres. Le principe numéro trois: gaspillez l'argent précieux des contribuables. Le principe numéro deux: appliquez des mesures sans consulter les principaux intéressés. Le principe numéro un du ministère des Pêches et des Océans est de faire gonfler la bureaucratie à Ottawa et de tenir le ministre dans l'ignorance. Voilà exactement ce qui se passe.
Bien des Canadiens ne le savent pas, mais le ministère des Pêches et des Océans a environ 800 employés qui travaillent à Ottawa. Je ne vois pourtant personne qui pêche dans le canal Rideau.
Le territoire du Nunavut a une superficie de 2 millions de kilomètres carrés. Devinez combien d'agents de la paix travaillent au Nunavut. Pour couvrir une superficie de 2 millions de kilomètres carrés, ils sont deux. Ici, nous avons six agents pour surveiller les parcs de stationnement de l'édifice de l'Ouest et de l'édifice de la Confédération. C'est vraiment incroyable de voir à quoi le gouvernement accorde la priorité.
Je ferai toutefois remarquer une chose à l'honneur du secrétaire parlementaire des Pêches et des Océans. Il a mentionné que le Comité permanent des pêches et des océans, auquel tous les partis sont représentés, ferait des recommandations sérieuses au gouvernement pour l'aider au sujet de ce qu'il doit faire pour l'avenir des pêches. Je suis certainement d'accord avec lui sur ce point.
Soyons réalistes. Aujourd'hui, dans les journaux, on parle d'une crise du saumon de l'Atlantique sur la côte est. On parle d'une crise du saumon sur la côte ouest. C'est étonnant parce qu'il n'est pas censé y avoir de lien entre les deux. Nous avons donc une crise sur la côte ouest, une crise sur la côte est et une crise dans le secteur de la pêche en eau douce au Manitoba et en Ontario. Qu'est-ce que ces trois crises ont en commun? Le MPO.
Monsieur le Président, voulez-vous savoir pourquoi, depuis le jour où j'ai été élu, je réclame une enquête judiciaire publique sur les pratiques et les politiques de ce ministère? Ce ministère est complètement à la dérive. Il n'a pas de vision. Il n'a pas d'avenir. Un bon exemple de cela est le fameux examen post-SPA.
En 1992, le gouvernement du jour a imposé un moratoire sur la pêche à la morue et a mis en place divers programmes d'adaptation, soit le PARPMN, le PAPPFA et la SPA. Jusqu'à maintenant, 3,4 milliards de dollars ont été dépensés, et il y a une plus grande capacité de pêcher les poissons aujourd'hui qu'il y en avait lorsque le moratoire a été imposé. C'est absolument incroyable.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement ne veut pas consulter les pêcheurs lorsqu'il est question de l'allocation des quotas, du type d'engin ou de quoi que ce soit d'autre.
Récemment, dans le sud-ouest de Terre-Neuve, on a annoncé l'allocation d'un quota de 20 000 tonnes de morue. J'espère que le gouvernement travaillera avec les pêcheurs de cette région pour voir à ce que cette pêche se fasse selon les principes de la pêche durable.
Comme on le sait, le saumon de l'Atlantique est en sérieuse difficulté. Si on utilise de gros filets ou de gros chalutiers, on sait bien ce qui arrivera. Il y aura beaucoup de prises accessoires et, si l'histoire se répète, une bonne partie de ces prises accessoires seront jetées par-dessus bord.
Pour ce qui est de la SPA, les pêcheurs et les travailleurs d'usine de la côte est réclament des réponses de la part du gouvernement. Le ministre du Développement des ressources humaines a dit à la Chambre qu'il y aurait un rapport sur l'après-SPA. Qu'avons-nous? Nous avons des fonctionnaires fédéraux qui parcourent le Canada atlantique pour présenter leur nouvelle vision du programme post-SPA. C'est absolument incroyable que le ministre ne tienne aucun compte des députés de la Chambre dans un dossier aussi important. Bien sûr, le MPO n'écoute pas les pêcheurs et les travailleurs d'usine.
En 1983, dans le cadre d'une expérience menée à Lockeport, en Nouvelle-Écosse, on a injecté des centaines et des centaines de millions de dollars dans la société National Sea, qui a vidé l'océan.
Dans le centre du Canada, il y a l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce. Sans aucune consultation avec les pêcheurs du Nord, il décide qui il veut consulter et adopte des politiques en conséquence.
Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement entretient des relations aussi incestueuses avec ces gens, par exemple, avec le Sport Fishing Institute, sur la côte ouest. Prenons l'exemple classique de Mme Velma McCall. Elle travaillait pour le Sport Fishing Institute. Au nom de l'institut, elle a fait un lobbying intense pour obtenir, autour de l'île Langara, une zone d'où seraient exclus les chalutiers commerciaux. Un an plus tard, où est-elle rendue? Elle est adjointe du ministre des Pêches et Océans chargée de la côte ouest.
M. Tom Bird travaillait pour le MPO. Devinez où il travaille maintenant? Au Sport Fishing Institute. Les liens personnels entre le ministre des Pêches et des Océans et M. Bob Wright, d'Oak Bay Marine Group, sont absolument scandaleux. On fixe les politiques en fonction de ses amis, sans consulter d'aucune façon les pêcheurs commerciaux ni les membres du Coastal Community Network, sur l'une ou l'autre côte.
Les exemples sont innombrables. Mais permettez-moi de vous donner le nom de personnes qui pourraient aider le gouvernement et le MPO à arrêter des politiques nouvelles. Il s'agit d'Eric Tamma, du Coastal Community Network, à Ucluelet, de Ross Helberg, maire de Port Hardy, de Sam Ellsworth, de la Nouvelle-Écosse, d'Arthur Bull, de la région de la baie de Fundy, et de Mark Butler de l'Ecology Action Centre, en Nouvelle-Écosse. Ces cinq personnes ne constituent qu'un petit échantillonnage de l'expérience et des connaissances dont le gouvernement devrait s'inspirer.
Je dois dire à nouveau que je trouve absolument incroyable qu'il faille un projet de loi d'initiative parlementaire pour promouvoir cette idée. J'encourage tous les députés libéraux à prendre ce projet de loi au sérieux car il est réellement important et impératif que les personnes qui sont les plus proches des ressources aient leur mot à dire dans la gestion d'une industrie aussi viable.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, j'appuie le projet de loi. Je peux prouver que l'idée d'accorder aux pêcheurs le droit de participer aux consultations est excellente. Il existe une situation vraiment exceptionnelle sur la côte nord de la Nouvelle-Écosse, dans ma circonscription. Pendant de nombreuses années, les pêcheurs ont exercé des pressions sur le ministère des Pêches et des Océans pour qu'il accroisse les normes concernant la taille des homards, mais le ministère s'y est refusé pendant des années.
Les pêcheurs ont fait front commun. Ils se sont entendus entre eux pour ne capturer et ne garder que les homards dont la taille dépassait la taille minimale autorisée par le gouvernement fédéral. Par souci de conservation, ils ont rejeté à l'eau certains homards dont la taille était réglementaire. Voilà un très bon exemple de pêcheurs qui participent à leur industrie et aux consultations.
On a peine à croire que le gouvernement refuse aux pêcheurs de participer à ces décisions, alors qu'ils ont prouvé qu'ils feront du bon travail.
Ce projet de loi vise à donner voix au chapitre aux pêcheurs, mais aujourd'hui, au Comité des pêches, nous n'avons même pas eu voix au chapitre. Les députés d'opposition ont proposé que Brian Tobin, premier ministre de Terre-Neuve, vienne témoigner parce qu'il est un expert dans ce domaine. Il a déjà été ministre des Pêches et il est fort respecté. Il est devenu Capitaine Canada et, pourtant, les ministériels qui siègent au comité ont voté contre sa comparution devant le comité. C'est comme si on avait refusé d'entendre Albert Einstein lorsqu'on parlait de la théorie de la relativité.
Comme il est l'expert, il est déplorable de museler cette mine de renseignements, cette source de sagesse, et de refuser qu'il comparaisse devant le comité.
Le projet de loi C-302 convient pour doter les pêcheurs d'une Déclaration des droits des pêcheurs, mais nous devrions également nous doter d'une déclaration des droits pour pouvoir entendre les témoins que nous devons entendre.
Voilà un très bon exemple du ministère des Pêches qui cherche à étouffer toute l'information, toute la contribution et toute la consultation, non seulement des pêcheurs, mais également de premiers ministres des provinces et d'anciens ministres des Pêches.
[Français]
Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Français]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LE TOKAMAK DE VARENNES
M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, je veux, ce soir, faire suite à une question que je posais, le 15 mai dernier, à la ministre de l'Environnement afin de savoir si elle reconnaissait la pertinence de la recherche et du développement d'énergies renouvelables, comme la fusion nucléaire que s'emploie à développer le Tokamak de Varennes dans le but de faire face au phénomène des changements climatiques.
Dans la mesure où la ministre de l'Environnement confirme cette pertinence, le gouvernement fédéral serait désormais malvenu de soutenir qu'il ne peut poursuivre sa participation au projet Tokamak de Varennes.
Justement, hier, dans le cadre d'un autre débat sur la motion d'ajournement portant sur ce projet de recherche des plus prometteurs, le secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles répétait que le retrait de la contribution fédérale au Tokamak de Varennes résultait d'un choix budgétaire découlant d'impératifs financiers difficiles.
Avant d'obtenir une réponse analogue, ce soir, je vous dis qu'il n'en est rien. Non seulement l'argent est aujourd'hui disponible, puisque le gouvernement fédéral accumule maintenant les surplus, mais il s'agit d'une décision irresponsable du point de vue budgétaire. À quoi bon investir dans le développement de compétences techniques et scientifiques de haut niveau, si ces cerveaux doivent par la suite s'expatrier pour pouvoir mettre leur expertise à profit?
Avec la fermeture du Tokamak de Varennes, les spécialistes formés chez nous aux frais des contribuables iront exercer leur savoir dans le domaine de la fusion nucléaire au Japon, aux États-Unis et au sein de la communauté européenne. Et que dire des infrastructures et des équipements de pointe du Tokamak? C'est près de 150 millions de dollars de fonds publics qui auront été investis en pure perte depuis près de 20 ans, en raison du manque de vision d'avenir de ce gouvernement.
Ainsi, d'ici quelques années, le Canada sera donc vraisemblablement contraint d'acheter à prix d'or une technologie qu'il aura lui-même contribué à développer à coups de millions de dollars. Tout cela coûtera finalement beaucoup plus cher au Canada que son investissement annuel de 7,2 millions de dollars.
Quelle démonstration édifiante d'une saine gestion des finances publiques! Quel esprit visionnaire! J'ajoute que le Tokamak de Varennes, par les très hauts standards de qualité qu'il impose aux plans scientifique et technologique, a permis à ses partenaires de développer une expertise à la fine pointe de la technologie. La compagnie MPB Technologies, par exemple, a pu décrocher un contrat de 64 millions de dollars grâce à la technologie développée en collaboration avec le Centre canadien de fusion magnétique.
On estime que les retombées économiques que génère le Tokamak de Varennes rapportent beaucoup plus au gouvernement fédéral, en termes de retombées fiscales, que son investissement annuel de 7,2 millions de dollars.
Dans le but d'éviter le démantèlement prochain du patrimoine technologique du Tokamak de Varennes, et puisque le ministre des Ressources naturelles s'est montré ouvert à cette éventualité, j'aimerais savoir de quelle façon le gouvernement entend mettre à contribution les installations et le savoir-faire de l'équipe du Tokamak dans le cadre d'études connexes s'inscrivant dans sa stratégie sur les changements climatiques. Ne pourrait-on pas continuer de développer l'expertise du Tokamak de Varennes, reconnue mondialement, dans le domaine des micro-ondes?
Le Forum national sur le changement climatique déplorait, hier, les faibles moyens mis de l'avant par le gouvernement fédéral pour lutter contre les émissions de gaz à effets de serre. C'est d'autant plus inquiétant, qu'au tournant de l'an 2000, selon le commissaire à l'environnement et au développement durable, les émissions de gaz à effets de serre auront connu une hausse approximative de 11 p. 100 par rapport au niveau de référence de 1990.
Une telle statistique rend encore plus pertinente l'utilisation future de formes d'énergies propres et sécuritaires, telle la fusion magnétique, que s'emploie à développer le Tokamak de Varennes. L'alternative énergétique proposée par le Tokamak représente un risque environnemental beaucoup moins sérieux que la technologie mise de l'avant par les réacteurs CANDU qui, elle, bénéficie toujours d'un soutien indéfectible de la part du gouvernement fédéral.
C'est une entreprise à long terme à laquelle le Tokamak de Varennes peut contribuer positivement, pour autant que le gouvernement lui permette de le faire.
[Traduction]
M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je remercie beaucoup mon collègue d'avoir soulevé une fois de plus cette question qui a une influence directe et des effets dans sa province.
Le gouvernement est parfaitement conscient que les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre ne s'arrêtent pas avec l'engagement pris à Kyoto. La question soulevée ici se situe dans le contexte des changements climatiques et du réchauffement de la planète et de solutions innovatrices pour surmonter ce problème.
Le problème de changement climatique ne se réglera pas de sitôt, même si nous nous mettons tout de suite à la recherche d'une solution. Même si les émissions diminuent, les concentrations dans l'atmosphère continueront d'augmenter pendant des décennies avant la stabilisation. L'influence de l'homme sur le climat de la planète va donc continuer de s'amplifier.
Ce qui nous préoccupe beaucoup, c'est le rythme futur des changements climatiques. Si nous voulons que le rythme de changement reste dans des limites raisonnables, nous devons commencer à réduire les émissions en appliquant des technologies nouvelles d'ici quelques années. Nous ne pouvons pas attendre des décennies avant d'agir.
Le député a soulevé un point précis à propos d'une question particulière. Le gouvernement s'intéresse toujours aux solutions innovatrices et à l'exploitation des connaissances et de l'expertise de particuliers, d'universitaires, d'autres gouvernements et de tous les Canadiens pour résoudre les problèmes d'ordre climatique.
En ce moment, nous ne pouvons pas retenir toutes les options. Des choix s'imposent et ces choix doivent parfois se faire au détriment de solutions coûteuses à très haut risque et à très long terme.
Dans ce processus, nous avons du faire des choix difficiles. Nous n'avons pas les ressources pour faire tout ce que nous voulons, mais nous continuerons de travailler avec les députés et l'ensemble des Canadiens pour chercher les moyens les meilleurs, les moins coûteux et les plus efficaces susceptibles de résoudre dans le contexte canadien les problèmes de changement climatique.
L'ENVIRONNEMENT
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens de ma circonscription de Waterloo—Wellington et en fait de partout au Canada sont très inquiets de l'environnement. Ils veulent savoir que les responsables de tous les paliers de gouvernement et tous leurs partenaires font tout ce qu'ils peuvent pour garantir que les générations futures auront un environnement sûr et propre.
Les Canadiens veulent et demandent que l'on prenne des mesures concernant l'environnement. En tant que gouvernement, nous devons présenter une vision et faire preuve de leadership pour s'attaquer aux difficultés qui se posent à cet égard. Nous devons le faire dans le cadre de stratégies pour un développement durable dont tout le pays va bénéficier.
Le problème environnemental le plus difficile qui se pose aux Canadiens est celui des changements climatiques. Ces changements climatiques risquent d'avoir des effets à long terme tels que des étés plus secs dans les Prairies, une multiplication des incendies de forêts et des infestations par les insectes, des inondations sur les côtes ainsi que des phénomènes météorologiques extrêmes. Tout cela risque d'être dévastateur pour le Canada et tous les Canadiens.
Il est clair que nous devons agir dès maintenant et je suis encouragé de savoir que le gouvernement a reconnu le risque réel des changements climatiques et de leurs effets dévastateurs. Je sais aussi que le Canada est vu comme un chef de file dans les négociations internationales sur les changements climatiques.
Le gouvernement fédéral est chargé de diriger le pays dans sa lutte contre les changements climatiques. Il doit voir à ce que des partenariats soient bien définis. Il doit fixer des objectifs permettant de mesurer les progrès réalisés et mettre en place des plans d'urgence, au cas où des correctifs devaient être apportés.
[Français]
Le gouvernement fédéral devra continuer de veiller aux intérêts de tous les Canadiens et Canadiennes. Le gouvernement fédéral devra nous conduire dans le nouveau millénaire avec discernement et clairvoyance.
[Traduction]
Compte tenu de tout cela, la question que je voudrais poser au secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles est simple. Quelles mesures le gouvernement prend-il pour que le Canada respecte les engagements qu'il a pris à Kyoto en décembre dernier? Que faisons-nous pour laisser un environnement propre pour les générations futures?
M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à mon collègue, dont l'intérêt pour l'environnement est légendaire.
Depuis Kyoto, en tant que gouvernement, nous avons cessé de nous demander si nous devions prendre ce genre d'engagement. Avec la communauté internationale, nous avons concentré nos énergies à trouver comment respecter notre obligation collective de réduire les émissions sous le niveau de 1990 d'ici 2008 ou, au plus tard, 2012, parce que nous sommes déterminés à atteindre l'objectif. Ce sera difficile de respecter cette obligation. Il faudra changer la façon dont nous produisons et utilisons l'énergie, et la manière dont nous assurons le transport des gens et des marchandises.
Le mois dernier, les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux de l'Environnement et de l'Énergie se sont rencontrés à Toronto et se sont entendus sur un processus d'élaboration d'une stratégie nationale de mise en oeuvre de nos engagements de Kyoto concernant les changements climatiques.
Cette stratégie sera élaborée à partir de consultations et des suggestions des autres gouvernements ainsi que des secteurs privé et public. Tous les secteurs de la société seront invités à partager leurs points de vue et à faire part de leurs meilleures pratiques, afin que nous puissions apprendre, à partir de l'expérience de tous, ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
Les ministres ont accepté de prévoir des fonds pour permettre des interventions rapides et renforcer les mesures volontaires.
Je n'insisterai jamais assez sur la conviction du gouvernement et sur sa volonté d'assurer la participation du plus grand nombre d'intéressés possible à l'élaboration et à la mise en oeuvre de mesures visant à réduire les gaz à effet de serre. En fait, c'est la seule manière d'y arriver.
En exploitant les remarquables talents créateurs et innovateurs que l'on trouve au Canada, je suis sûr que nous pourrons non seulement atteindre nos objectifs en matière de réduction des émissions, mais aussi stimuler la croissance économique et améliorer notre qualité de vie. Si nous pouvons offrir aux Canadiens des moyens concrets de réduire les émissions ou d'améliorer notre efficacité énergétique, ils s'en serviront.
Notre récent budget nous aidera à y arriver. Le budget prévoit l'allocation d'une somme de 150 millions de dollars, durant les trois prochaines années, pour permettre les réalisations suivantes: premièrement, concevoir la stratégie nationale du Canada pour la mise en oeuvre des moyens d'atteindre les objectifs de réduction des émissions prévus dans le protocole de Kyoto; deuxièmement, sensibiliser davantage la population à la question des changements climatiques et amener les Canadiens à réduire leurs émissions; troisièmement...
Le vice-président: Je suis désolé, mais le temps de parole du député est écoulé. Le député de Frontenac—Mégantic.
[Français]
LA MINE BC DE BLACK LAKE
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, sept mois après la fermeture de la mine BC, on se rend bien compte que les mesures actives du ministre du Développement des ressources humaines, ça ne marche pas.
En date du 28 mai, seulement 25 ex-travailleurs de la BC bénéficient des mesures actives du ministre, à savoir 16 qui utilisent la subvention salariale ciblée, et 9 qui sont en formation, soit professionnelle, soit générale. Sur les 305 mineurs mis à pied le 1er novembre dernier, seulement 25 utilisent une très faible partie des 3 millions de dollars annoncés par le ministre pour les mesures actives.
Que fera le ministre des sommes inutilisées? C'est justement ce genre de question que les 100 ex-travailleurs de la BC sont venus poser au ministre mardi dernier. Ils ont fait 10 heures d'autobus, de Thetford à Ottawa, pour finalement obtenir un court entretien avec le parrain du comté de Frontenac—Mégantic, le député de Beauce, qui s'est contenté de réclamer une photocopie du dossier.
Le ministre devrait lire la récente chronique de Michel Vastel à son sujet. Le ministre est complètement déconnecté de la réalité. Le ministre devrait sortir de sa limousine. Le ministre n'a jamais connu le chômage. Le ministre n'a jamais travaillé au salaire minimum. Le ministre n'a jamais connu le travail de nuit. Le ministre ne connaît pas la classe moyenne, les pauvres du pays qui n'ont rien à donner à leurs enfants le matin avant qu'ils partent pour l'école.
Je rappelle au ministre que son prédécesseur, Douglas Young, lorsqu'il a mis la hache dans le PATA, le 1er avril 1997, avait pris l'engagement de le remplacer par un autre programme supposément meilleur. Le ministre du Développement des ressources humaines n'a absolument rien fait. Que fera-t-il?
Je pose à nouveau la question: Que fera-t-il avec les 2,5 millions de dollars qui seront inutilisés dans son programme annoncé? Ce ministre manque de respect envers la classe ouvrière. Il manque de courage. Il a refusé de rencontrer André Laliberté et Charles Lacroix. Qu'a-t-il à offrir, ce ministre, à Clermont Bégin, 63 ans, à qui il voulait couper les prestations d'assurance-emploi, sous prétexte qu'il ne recherchait pas suffisamment d'emplois dans une région où le taux de chômage dépasse les 11 p. 100?
Qu'a-t-il à offrir à ce mineur de 58 ans qui a plusieurs métiers dans le corps, mais aucun reconnu par les autres employeurs?
Qu'est-ce que le ministre a à dire à cet homme, ce mineur de 48 ans, qui a 28 ans d'expérience, avec une sixième année d'études?
Le ministre est tellement peu courageux qu'il ne se déplace même pas, ce soir, pour venir répondre aux gars de la BC. Il délègue le secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines.
Qu'a-t-il à dire, par exemple, à Noël Loubier, 50 ans, qui a 31 ans d'ancienneté à la mine BC? Qu'a-t-il à dire à Richard Rousseau, journalier, 49 ans, à l'emploi de la BC depuis 25 ans?
Je peux lui citer des cas aussi tristes, aussi pathétiques les uns que les autres, mais ce ministre, encore une fois, est déconnecté de la réalité.
[Traduction]
M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, à titre de secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, je suis heureux de répondre à cette question. C'est une des nombreuses questions que le député d'en face a posées concernant ce dossier qui touche directement sa circonscription.
Le député a soulevé très souvent ce problème et nous lui avons répondu comme il fallait. Nous lui avons dit très précisément que le gouvernement respecte les efforts des travailleurs. Nous sommes parfaitement au courant de leurs besoins. Voilà pourquoi le ministre du Développement des ressources humaines a annoncé la constitution d'un fonds de 3 millions de dollars pour fournir de l'aide et des allocations d'aide de transition aux travailleurs de ce secteur.
Comme on l'a fait à plusieurs autres occasions, je suis heureux d'informer la Chambre que les travailleurs profitent de cette opportunité. Outre les 40 à 50 travailleurs qui ont cherché des possibilités d'emploi ailleurs, plusieurs autres profitent des mesures actives d'emploi. Ils prennent leur avenir en main. Nous observons un retour au travail pour ce groupe de travailleurs, non pas autant que nous le souhaiterions, mais cela se poursuit. Nous espérons voir reprendre plus tard une certaine activité minière dans la région, une possibilité dont ces travailleurs voudront bien profiter.
Je tiens à signaler une chose. Le député d'en face prend des attitudes en soutenant que le ministre est le mieux placé à la Chambre pour répondre à cette question, mais il induit encore une fois en erreur les gens qui suivent nos délibérations. Comme le député le sait, c'est au secrétaire parlementaire qu'il incombe de répondre. Il a posé ses questions directement au ministre, qui lui a répondu directement. Nous suivons la procédure parlementaire. Le ministre se préoccupe très vivement de ces travailleurs.
Le vice-président: La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 22.)