Publications de la Chambre
Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 140
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 22 octobre 1998
AFFAIRES COURANTES |
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES |
M. Art Hanger |
M. Joe Comuzzi |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Peter Adams |
LOI SUR LA MISE EN OEUVRE DE MESURES CONCERNANT LE |
Projet de loi C-56. Présentation et première lecture |
L'hon. Andy Scott |
LA LOI SUR LE NUNAVUT |
Projet de loi C-57. Présentation et première lecture |
L'hon. Andy Scott |
LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL |
Projet de loi C-447. Présentation et première lecture |
M. Richard Marceau |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
Motion d'approbation |
M. Peter Adams |
PÉTITIONS |
Les pédophiles |
M. Art Hanger |
Le Code criminel |
M. Leon E. Benoit |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET |
Projet de loi C-54. Deuxième lecture |
M. Reg Alcock |
M. Ghislain Lebel |
M. Paul Forseth |
M. Antoine Dubé |
Amendement |
M. Ghislain Lebel |
M. Walt Lastewka |
M. Scott Brison |
M. Walt Lastewka |
M. Paul Crête |
M. Pierre de Savoye |
M. Dick Proctor |
Mme Francine Lalonde |
M. Réal Ménard |
M. Jean-Guy Chrétien |
M. Bernard Bigras |
M. Ghislain Lebel |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
M. John Bryden |
M. Richard Marceau |
Report du vote sur l'amendement. |
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES ÉDITEURS |
Projet de loi C-55. Deuxième lecture |
L'hon. Sheila Copps |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE CENTRE DES JEUNES DE LA GÉNÉRATION XX |
M. Joe McGuire |
LES ÉTANGS BITUMINEUX DE SYDNEY |
M. Bill Gilmour |
LE CENTRE NORD-SUD DU CONSEIL DE L'EUROPE |
L'hon. Charles Caccia |
LE CENTRE NORD-SUD DU CONSEIL DE L'EUROPE |
Mme Raymonde Folco |
L'AGRICULTURE |
M. Roy Bailey |
DANIELLE CAMPO |
Mme Shaughnessy Cohen |
LE CANADIEN NATIONAL |
M. Paul Mercier |
LA SEMAINE DE LA SENSIBILISATION À LA RECHERCHE DANS LE |
M. Gurmant Grewal |
BRIAN MULRONEY |
Mme Elsie Wayne |
LA HONGRIE |
M. Tom Wappel |
LES PERSONNES ÂGÉES |
M. Robert Bertrand |
LES PÊCHES |
M. Peter Stoffer |
L'ÉCART ENTRE LES RICHES ET LES PAUVRES |
Mme Christiane Gagnon |
LA VIOLENCE |
M. Peter Adams |
LE JUGE EN CHEF BRIAN DICKSON |
M. David Price |
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES |
M. Pat O'Brien |
QUESTIONS ORALES |
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC |
M. Jim Abbott |
L'hon. Herb Gray |
M. Jim Abbott |
L'hon. Herb Gray |
M. Jim Abbott |
L'hon. Herb Gray |
Mme Val Meredith |
L'hon. Herb Gray |
Mme Val Meredith |
L'hon. Herb Gray |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Andy Scott |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Andy Scott |
M. Richard Marceau |
L'hon. Andy Scott |
M. Richard Marceau |
L'hon. Andy Scott |
LA SANTÉ |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Allan Rock |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Allan Rock |
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Herb Gray |
M. Peter MacKay |
L'hon. Andy Scott |
LA SANTÉ |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
M. Grant Hill |
L'hon. Allan Rock |
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Jim Peterson |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Jim Peterson |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Monte Solberg |
L'hon. Jim Peterson |
M. Monte Solberg |
L'hon. Jim Peterson |
LA SANTÉ |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Allan Rock |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Allan Rock |
LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN |
M. Inky Mark |
L'hon. Sheila Copps |
M. Inky Mark |
L'hon. Sheila Copps |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Paul Crête |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE |
M. Claude Drouin |
L'hon. Sergio Marchi |
LA SANTÉ |
M. Mike Scott |
L'hon. Allan Rock |
M. Mike Scott |
L'hon. Allan Rock |
LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA PROTECTION DE LA SANTÉ |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Allan Rock |
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC |
M. Svend J. Robinson |
L'hon. Andy Scott |
LA SANTÉ |
M. Greg Thompson |
L'hon. Allan Rock |
M. Greg Thompson |
L'hon. Allan Rock |
LES PARCS NATIONAUX |
M. Joe Jordan |
L'hon. Andy Mitchell |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Rick Casson |
L'hon. Christine Stewart |
LE PROGRAMME D'ADAPTATION POUR LES TRAVAILLEURS ÂGÉS |
M. Maurice Dumas |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
VOLVO CANADA LTÉE |
M. Gordon Earle |
L'hon. John Manley |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Jean Dubé |
L'hon. Jim Peterson |
LE REVENU NATIONAL |
M. Alex Shepherd |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
L'INDUSTRIE DU BOIS DE SCIAGE |
M. Reed Elley |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LE PROJET DE LOI C-44 |
Mme Pierrette Venne |
L'hon. Marcel Massé |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Yvon Godin |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LA PAUVRETÉ |
M. Jean Dubé |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES PÊCHES |
M. Keith Martin |
L'hon. David Anderson |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Randy White |
L'hon. Don Boudria |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Justice et droits de la personne |
Mme Shaughnessy Cohen |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES |
Projet de loi C-55. Deuxième lecture |
L'hon. Sheila Copps |
M. Inky Mark |
Amendement |
Mme Suzanne Tremblay |
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Justice et droits de la personne |
Motion d'adoption |
Mme Shaughnessy Cohen |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES |
Projet de loi C-55. Deuxième lecture |
M. Bill Blaikie |
M. Scott Brison |
M. Deepak Obhrai |
M. Keith Martin |
M. John Duncan |
M. Keith Martin |
M. Peter Stoffer |
M. Grant McNally |
M. Charlie Penson |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
Le président suppléant (M. McClelland) |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-251. Deuxième lecture |
M. Bill Casey |
M. Bryon Wilfert |
M. Gurmant Grewal |
M. Mark Assad |
M. Janko Peric |
M. Keith Martin |
Adoption de la motion |
MOTION D'AJOURNEMENT |
La Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique |
M. Peter Stoffer |
Mme Bonnie Brown |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 140
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 22 octobre 1998
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter le cinquième rapport de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN qui a représenté le Canada lors de la séance du printemps 1998 des parlementaires de l'OTAN ou Assemblée de l'Atlantique Nord, qui a eu lieu à Barcelone, en Espagne, du 22 au 26 mai 1998.
M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Monsieur le Président, conformément au Règlement de la Chambre, j'ai l'honneur de présenter le rapport d'un sous-comité.
Comme la Chambre s'en rappelle, la dernière fois que j'étais ici, nous avons parlé de l'article 110 de la loi américaine sur l'immigration. Ce rapport reflète le travail que ne cesse d'accomplir le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis pour alléger les répercussions de cette loi sur les citoyens canadiens traversant aux États-Unis.
Comme la Chambre le sait, au cours de la dernière semaine, nous avons obtenu des résultats importants dans l'intérêt de tous les Canadiens et j'ai l'honneur de soumettre ce rapport.
* * *
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le trente-neuvième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales et de la liste des membres associés du Comité permanent des comptes publics.
Avec le consentement de la Chambre, je proposerai l'adoption du trente-neuvième rapport plus tard aujourd'hui.
* * *
LOI SUR LA MISE EN OEUVRE DE MESURES CONCERNANT LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS AU MANITOBA
L'hon. Andy Scott (au nom de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-56, Loi concernant l'accord conclu avec la nation crie de Norway House sur le règlement de questions liées à la submersion de terres et concernant la création de réserves au Manitoba.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LE NUNAVUT
L'hon. Andy Scott (au nom de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Français]
LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) demande à présenter le projet de loi C-447, Loi modifiant le Code canadien du travail (application de la partie I aux membres de la Gendarmerie royale du Canada ayant qualité d'agent de la paix).
—Monsieur le Président, le projet de loi que je dépose aujourd'hui a pour but de donner le droit aux policiers de la Gendarmerie royale du Canada de se syndiquer. Les policiers de la GRC sont les seuls membres des corps policiers de l'ensemble du Canada à ne pas avoir le droit à la négociation collective.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de déposer aujourd'hui, appuyé par mon collègue du NPD, de même que mon collègue et ami, le leader du Parti conservateur à la Chambre, vise à corriger cette injustice.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre donne son consentement, je propose que le 39e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.
(La motion est adoptée.)
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
LES PÉDOPHILES
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trois grands groupes de pétitions que je voudrais présenter à la Chambre aujourd'hui. Le premier groupe porte 606 signatures.
Les pétitionnaires demandent au Parlement de promulguer une loi prévoyant que toute personne reconnue coupable une deuxième fois d'une ou plusieurs infractions sexuelles à l'égard d'un mineur soit condamnée à l'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle ou de libération anticipée, et que toute personne attendant d'être jugée pour le type d'infraction mentionnée dans cette pétition soit détenue sans possibilité d'être libérée sous caution.
Le deuxième groupe de pétitions porte 573 signatures et demande au Parlement d'établir un registre des pédophiles pour consigner le nom des délinquants sexuels et pédophiles qu'on ne peut guérir ou réadapter. Les pétitionnaires exhortent le Parlement à promulguer une loi en ce sens.
Les pétitions qui font partie de ce troisième groupe sont signées par 526 Canadiens qui exhortent le Parlement à abolir le droit d'un pédophile reconnu coupable d'être remis en liberté sous caution en attendant son appel. Le Parlement garantirait ainsi la protection et la sécurité des victimes et de la collectivité dont fait partie le contrevenant.
LE CODE CRIMINEL
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, au nom de mes électeurs, j'ai le privilège de présenter une pétition concernant l'article 43 du Code criminel, selon lequel un instituteur, un parent ou une personne qui remplace un parent est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances.
Les pétitionnaires craignent que l'article 43 ne soit abrogé et que le gouvernement ne subventionne des groupes qui préconisent l'abrogation de cet article. Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de réaffirmer le devoir des parents, qui consiste à élever leurs enfants selon leur conscience et leurs croyances.
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-54, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Reg Alcock (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, cette question m'intéresse d'une façon particulière. J'ai eu l'honneur, à compter de 1987, de participer aux travaux sur le programme informatique stratégique du secteur public à l'Université Harvard. J'ai travaillé au sein du groupe de recherche dirigé par M. Jerry Mechling, qui est reconnu pour être l'une des deux sommités dans le monde dans le domaine de la gestion de l'information du secteur public. C'est un honneur pour moi que d'avoir fait la connaissance de Jerry et de travailler avec lui ainsi qu'avec l'équipe d'universitaires et de chercheurs du monde entier qu'il met sur pied régulièrement pour étudier ces questions afin de déterminer comment les politiques et les technologies de l'information doivent évoluer pour que les citoyens de la planète en profitent le plus.
Voici comment nous procédons. Trois fois par année, de façon régulière, nous convoquons des experts de l'État, des gouvernements fédéral et locaux des États-Unis, du Canada et d'autres pays de par le monde. Nous réunissons ensuite des experts d'autres entreprises comme IBM, Dell, Microsoft, notamment, et d'autres groupes d'usagers.
À une conférence qui a eu lieu l'an dernier, on a pu compter sur la présence de quelque 120 directeurs de l'information et membres du corps professoral d'écoles américaines, dont plusieurs représentants de Harvard, pour étudier la question qui est soulevée dans ce projet de loi. Au cours de l'étude de cette question, nous avons demandé aux participants comment nous devions procéder. Nous leur avons demandé comment il fallait faire pour encourager le Canadien moyen, qui ne s'y connaît peut-être pas beaucoup en informatique, à s'intéresser au commerce électronique et à s'en servir.
Depuis 1987, nous avons tenu beaucoup de réunions de recherche de ce genre. Au début, nous avons toujours parlé de questions technologiques. Il nous fallait de meilleurs outils. Nous devions mieux cerner l'objet, mettre de l'ordre dans tout le processus pour établir des prototypes, améliorer constamment la façon dont nous avons mis sur pied nos différents services. Nous avions besoin d'une plus grande largeur de bande et d'un mode d'acheminement plus efficace.
Le consensus auquel sont arrivés, l'an dernier, certains des plus grands spécialistes de ce domaine, c'est que les problèmes en matière de commerce électronique étaient d'ordre technique dans 2 p. 100 des cas et avaient trait à l'orientation dans 98 p. 100 des cas. Le volet technique des réseaux avait évolué au point où il ne restait que certains problèmes techniques. Il y a des questions qui restent à résoudre, et il y en aura toujours, car c'est un domaine qui évolue à une vitesse incroyable. Il était possible de surmonter la plupart des problèmes.
Toutefois, il nous manquait une structure stratégique et juridique nous permettant de passer à l'autre étape. Nous avons demandé ce que cela signifiait, ce qu'un gouvernement ou une entreprise devrait faire demain pour passer à la prochaine étape. Une multitude de problèmes ont été soulevés, mais nous avons ramené ceux-ci à une douzaine.
Les deux premiers problèmes qu'il nous fallait absolument régler de manière proactive concernaient les dispositions en matière de protection des renseignements personnels. Nous ne pouvions attendre qu'une foule de catastrophes surviennent et que la population se soulève et nous pousse à intervenir. Les gouvernements du monde entier devaient agir d'une manière proactive en adoptant des mesures législatives sur la protection des renseignements personnels qui montraient clairement à tout le monde que ces renseignements sont importants et qu'il faut les protéger. Il y a maintes façons de le faire, mais cet aspect était considéré comme un facteur capital pour permettre au commerce électronique de progresser.
Un des participants a présenté un exemple intéressant. L'exemple concernait IBM, mais il pouvait s'appliquer à bien des experts-conseils aux honoraires élevés. Il faisait partie d'un groupe d'IBM qui présentait un atelier avec des techniciens connaissant très bien l'utilisation de la technologie et très à l'aise avec celle-ci. IBM était là pour vendre son nouveau serveur commercial. Dès le début de l'atelier, cet homme a demandé aux quelque 200 utilisateurs d'expérience de cette technologie combien d'entre eux avaient déjà acheté quelque chose sur Internet. Environ trois personnes sur les 200 participants ont levé la main. C'est ce que voulait démontrer l'auteur de la question.
Il a lancé une discussion sur la façon dont le nouveau serveur allait les protéger, sur la façon dont on traiterait l'encodage et sur la façon dont on protégerait les individus. Après avoir vanté sa marchandise, il a demandé combien de personnes feraient des achats sur Internet. Une seule personne a levé la main. Même dans ce milieu qui connaissait la technologie et qui était à l'aise avec son utilisation, il y avait encore des réticences personnelles et émotionnelles à s'engager plus avant.
Le deuxième élément abordé au cours de la discussion est la question de leadership. C'est une énigme intéressante à l'échelle du globe et certainement ici aussi. Les technologies dont dépendent les affaires, le commerce et la vie quotidienne n'existaient pas du temps où la majorité des députés de cette Chambre faisaient leurs études.
Quand j'étais à l'université, un ordinateur était une chose qui était enfermée dans une pièce quelque part dans un édifice et avec laquelle je communiquais à l'aide de cartes perforées. Je ne suis pas le plus vieux ici. Le premier ordinateur personnel d'IBM est arrivé sur le marché en 1980 alors que nous étions, pour la plupart, bien lancés dans notre vie professionnelle.
Les personnes qui occupent des positions influentes en politique, les membres du Cabinet et les mandarins ont tous grandi sans l'aide de ces technologies qui sont aujourd'hui à la disposition des jeunes qui vont à l'école ou à l'université. Les exemples sont nombreux, j'en suis sûr. J'ai un fils de quatre ans. Il se sert d'un ordinateur depuis un an et demi. Ma fille, qui en a six, trouve tout à fait normal d'avoir accès à ses programmes de Disney ou autres divertissements sur Internet.
Nos enfants ont avec ces technologies une relation entièrement différente de la nôtre et pourtant, c'est nous qui décidons ce qu'ils peuvent faire ou ne pas faire. C'est une source de problèmes car certaines des craintes suscitées par la technologie sont de l'ordre des craintes traditionnelles concernant les boîtes noires et les pouvoirs magiques qu'elles renferment. Je dis cela sans vouloir paraître trop facétieux.
Il y a plusieurs années, l'une de mes fonctions consistait à former des cadres supérieurs à l'analyse de données informatisées. Très vite, je me suis aperçu d'une chose concernant les personnes de ce groupe d'âge. C'est presque une équation. Il semblerait que si quelqu'un ne sait pas se servir d'un ordinateur, c'est qu'il est stupide. Je ne suis pas très doué pour utiliser des outils à travailler le bois, mais ce n'est pas pour autant que je me considère stupide, et pourtant si une personne ne sait pas se servir d'un ordinateur, cette crainte s'installe.
Je me souviens d'un de mes étudiants qui était très frustré. Il n'arrivait pas à faire marcher le modèle et avait des difficultés avec une fonction très simple du clavier. Je l'ai arraché à l'ordinateur et je lui ai dit de se calmer. Il m'a répondu qu'il ne supportait pas les ordinateurs. Je lui ai demandé ce qu'il faisait dans la vie. Il était pilote d'avion à réaction et brigadier général de l'aviation israélienne. Il pilotait tous les jours un appareil doté de neuf ordinateurs et ça ne lui causait aucun problème. Cependant, son interaction avec cette boîte l'exaspérait.
Si je prends la peine de mentionner ce fait, c'est que nous éprouvons un peu ce genre de crainte quand nous abordons ces technologies.
Nous avons pour devoir à la Chambre—et je dis exactement la même chose au premier ministre et aux autres députés—de faire tout notre possible pour mettre en place toutes les mesures de protection nécessaires pour tous les Canadiens. Je crois d'ailleurs que notre loi va servir de modèle ailleurs dans le monde.
Nous devons dire à tous les Canadiens que nous prenons très au sérieux la protection de leur vie privée et que nous allons l'assurer. Nous allons faire en sorte que l'information qui les concerne soit traitée de façon aussi sûre que possible pour que ces systèmes fonctionnent bien. Nous voulons en même temps que cela améliore leur qualité de vie.
J'ai lu les interventions que les quatre porte-parole de l'opposition ont faites au sujet du projet de loi lorsque le ministre l'a présenté. J'ai été plutôt heureux de constater que ces quatre intervenants reconnaissaient qu'il était nécessaire d'agir ainsi et de voir le problème en face.
Nous y constatons une certaine peur habituelle du changement. Y aura-t-il une certaine désillusion? Quand nous produisons un changement sur le marché, il y a toujours une désillusion. Les gens peuvent imaginer des scénarios épouvantables à propos de la gravité de cette désillusion, mais c'est un aspect qu'il faut prendre en considération. C'est aussi pourquoi nous devons adopter une attitude proactive et agir rapidement au lieu d'attendre que le reste du monde apporte ces changements et que nous ayons à nous adapter.
À propos du leadership, je signale, sans vouloir féliciter exagérément le gouvernement, le ministre de l'Industrie et son adjointe, Michelle D'Auray, qui est à la tête de la section chargée du commerce électronique.
Nous, les Canadiens, sommes modestes et avons tendance à avoir peur de dire à quel point nous sommes bons. Les Canadiens ne savent pas à quel point le Canada est à l'avant-garde parmi les autres pays du monde.
Depuis le jour où il a assumé son portefeuille, John Manley a assuré exactement le genre de leadership que souhaitent voir exercer les professionnels dont je parlais. Manley est le...
Le président suppléant (M. McClelland): Je regrette d'interrompre le député en plein élan oratoire. Nous savons qu'il parle en l'occurrence du ministre de l'Industrie, et nous tenions simplement à le préciser.
M. Reg Alcock: Monsieur le Président, oui, je parle bien sûr de cette personne inoffensive qu'est le ministre de l'Industrie.
Nous nous laissons souvent aller à la Chambre à des débats partisans du genre «mon gars est meilleur que le tien», mais ce n'est pas ce que je veux dire. Je veux sincèrement que tous les Canadiens soient fiers de leur gouvernement—et je parlerai dans un instant des gouvernements provinciaux, car ils sont des intervenants et des partenaires très importants dans cette affaire. Tous les Canadiens bénéficient de tout ce qui est fait de cette façon et appuient tout ce qui est fait de cette façon. Il y a eu énormément de consultation. On y travaille depuis des années. Des milliers de Canadiens, littéralement, ont participé au travail devant aboutir à une décision politique de ce genre.
Pour en revenir à mon exemple, ce que nous dit la communauté des spécialistes c'est qu'il nous faut un leadership. Les étrangers n'en reviennent pas de ce que le Canada a pu faire. Cela vient du fait que le ministre de l'Industrie s'occupe énormément et de façon proactive de ces questions depuis le jour même où il est entré en fonctions.
Le ministre est le représentant du ministère. Il y a des gens au ministère qui étaient là bien avant l'arrivée au pouvoir du gouvernement et qui font qu'il nous est possible d'être aussi à l'avant-garde que nous le sommes. Il faut prendre le temps de reconnaître le labeur, l'intelligence et l'obligeance de tous les fonctionnaires qui nous appuient. Ces gens-là consacrent beaucoup de temps et d'énergie à nous aider à nous préparer ainsi pour ce qui vient.
Je veux revenir brièvement à la mesure législative en général. Le ministre et d'autres personnes en ont parlé en détail. Tout le monde peut la consulter. L'important c'est qu'il nous faut songer désormais à ce qui doit se passer maintenant. Quand on pense au commerce électronique, un excellent exemple vient à l'esprit.
Un groupe établi dans une ville ou une province du Canada gère un serveur destiné aux transactions électroniques. Il s'agit de la pièce d'équipement qui traite les transactions. Dans un environnement sûr, le consommateur qui a décidé d'acheter un bien ou un service et le vendeur qui offre ce bien ou ce service communiquent par voie électronique pour conclure la vente. L'argent est transmis au vendeur et le bien, à l'acheteur.
On peut comparer le serveur à la caisse enregistreuse utilisée dans un magasin pour une transaction traditionnelle. C'est là où l'argent change de mains. Le serveur est situé dans une province. Quant au vendeur, il pourrait se trouver n'importe où ailleurs dans le monde, comme c'est d'ailleurs de plus en plus souvent le cas.
Le matin, j'utilise Internet pour lire la revue The Economist, à laquelle je suis abonné. Je communique alors avec un serveur situé à Londres. Je choisis l'article que je veux lire. L'auteur mentionne un livre. Je clique sur la mention de ce livre et je me retrouve branché à un serveur, aux États-Unis, qui me permet d'acheter le livre en question. Je n'ai qu'à cliquer pour acheter le livre, car je suis enregistré auprès du libraire.
La vente est autorisée par un bureau de VISA à Vancouver. Ce n'est pas une vision de l'avenir. C'est ce qui se passe aujourd'hui même. L'entreprise qui gère le service de transaction dans ce cas est établie à New York. Le vendeur se trouve dans le centre des États-Unis. La revue est produite à Londres et le bureau d'autorisation de VISA est à Vancouver.
Qui paie les taxes? Comment sont taxées les transactions de ce genre? Il y a toute une variété de lois qui régissent tous ces domaines d'activités bien différents les uns des autres. Si nous voulons en retirer les bénéfices que nous escomptons, j'estime, comme la plupart des gens qui s'intéressent de près à ce dossier, que nous devons envisager l'adoption d'une loi universelle. Nous devons envisager l'élaboration d'une politique qui non seulement s'applique à une ville, à une province ou à un pays, mais qui devienne un jour mondiale.
Elle doit devenir mondiale, car les renseignements ne sont plus statiques. Des renseignements sur moi-même et, je présume, sur tous les députés à la Chambre, se trouvent dans toutes sortes de machines aux États-Unis, si nous avons voyagé dans ce pays, y avons eu des interactions ou acheté des produits. Ces renseignements peuvent également se trouver en Europe ou en Chine.
À mon arrivée à la Chambre, j'ai eu le privilège de représenter l'ancien leader à la Chambre, qui est actuellement vice-premier ministre à Londres. En déambulant dans le sous-sol de Westminster, j'ai aperçu un guichet automatique. Juste par curiosité, j'ai sorti ma carte de banque locale, je l'ai introduite et j'ai retiré des livres sterling. J'ai été stupéfait de voir que la transaction ait pu se faire aussi rapidement.
Je tiens à ce que mes renseignements personnels soient protégés, que j'utilise un guichet automatique à Londres, à Paris ou à Beijing. Cela est à notre avantage à tous.
Le Canada a de la chance, étant donné la structure de l'État fédéral et le caractère activiste de nos gouvernements. Le Québec s'est doté il y a bien longtemps d'une loi sur la protection des renseignements personnels qui s'applique à la fois au secteur public et au secteur privé. D'autres provinces s'apprêtent à lui emboîter le pas en présentant un projet de loi en ce sens et en cherchant des moyens d'adopter une réglementation.
Nous devons faire preuve de prudence. Nous ne voulons pas imposer une réglementation stricte sur le commerce. Nous avons eu suffisamment d'expériences, ces quelques dernières décennies, sur les aspects positifs et négatifs d'une telle réglementation. Quoi qu'il en soit, en tant que consommateur, je tiens à ce que mes renseignements soient protégés.
En un sens, le commerce électronique est une expression curieuse, car elle évoque la notion de commerce, de vente, de transaction, mais la même technologie vaut pour une transaction concernant des renseignements. Si je désire qu'un médecin d'ici puisse consulter sur son ordinateur des renseignements confidentiels qui m'appartiennent, comme mon dossier médical, et qui se trouvent dans le bureau de mon médecin à Winnipeg, ce qui serait extrêmement avantageux pour moi et pour le régime de santé, je veux m'assurer que cette transaction se fera d'une manière confidentielle, de façon à protéger ma vie privée.
Ce que je préconise et ce que prévoit le projet de loi, c'est un régime qui va tout à fait dans le sens de ce dont nous parlons à la Chambre, à savoir, un partenariat entre toutes les provinces du Canada où elles collaborent à l'élaboration d'un ensemble de lois et de politiques garantissant une protection égale à tous les Canadiens, en tout temps, peu importe où ils se trouvent au Canada. Je crois que le reste du monde regarde attentivement ce que nous faisons ici au Canada. Je ne serais pas étonné que nos lois et nos politiques dans ce domaine servent de modèle partout dans le monde.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, je viens d'entendre le discours du député et je le félicite pour la modération dont il fait preuve et également la lucidité dont il témoigne.
Son discours soulève toutefois un doute et j'aimerais entendre sa réponse là-dessus. Il est pour le respect des renseignements personnels et je le suis également, sauf qu'il semble vouloir doser un peu cette protection. Il dit qu'il faudrait également permettre le commerce. C'est le dosage qui peut être problématique.
Dans le commerce, on voit cela régulièrement. On achète une automobile chez un concessionnaire local à qui on dévoile son numéro d'assurance sociale et une foule de choses et on se met soudainement à recevoir de la sollicitation par la poste pour toutes sortes de produits inimaginables. Je pensais jusqu'à tout récemment que le commerçant avec qui on avait traité avait donné ces informations. Ce n'est pas le cas. Il les a vendues à des compagnies qui se spécialisent dans ce genre de marketing postal ou téléphonique.
Je voudrais savoir si, dans le projet de loi qu'on discute ce matin, l'interdiction est dorénavant faite de vendre des renseignements qui ne sont plus confidentiels parce qu'on doit les dévoiler au moment où on s'apprête à passer un acte juridique, un contrat d'achat, de vente ou peu importe. J'estime que ce n'est pas du domaine public, mais que ce n'est plus réellement personnel parce qu'on a divulgué l'information.
Dans le projet de loi, est-ce qu'on interdit aux commerçants de vendre ce type d'information? Je pense que c'est là que sera, ou bien le succès, ou bien la défaite complète du projet de loi si on ne vise pas précisément ce point. J'aimerais que le député m'éclaire là-dessus.
M. Reg Alcock: Monsieur le Président, je suis désolé, il ne m'est pas possible de répondre en français.
[Traduction]
Je ne répondrai pas en français, car je crois que le député trouverait cela plus éprouvant qu'il n'est nécessaire. Cependant, j'étudie encore le français et je pourrai bientôt répondre dans cette langue.
Le député soulève deux aspects très importants de la question. J'aborderai d'abord le deuxième parce que je crois pouvoir répondre assez rapidement. Le député a parfaitement raison. Il s'agit d'une vente. La collecte, l'organisation et la vente des données peuvent rapporter gros et une grande industrie s'est créée autour de ces données. Toute une série de questions intéressantes sur les données recueillies par les gouvernements se posent. Nous aurons un débat sur ce sujet et je m'y intéresserai de très près.
Chacun d'entre nous communique ces données depuis longtemps, par exemple, lorsque nous payons des cadeaux de Noël avec une carte de crédit. J'ai une carte bleue dans ma poche que je peux utiliser dans ma province. Chaque fois que je fais l'épicerie, par exemple, je peux obtenir des points du programme «Air miles». Lorsque cette carte est sortie, j'ai trouvé que c'était une bonne idée. Cependant, cette carte Air Miles sert à dresser mon profil en tant que consommateur. J'ai un bébé et ils savent que j'achète beaucoup d'articles pour bébé. Les commerçants qui ont les nouveaux parents comme clientèle cible vont soudainement se mettre à m'envoyer des produits.
Il y a dix principes qui sont énoncés dans le projet de loi. Le premier est la responsabilité. Une organisation est responsable des renseignements personnels dont elle a la gestion. L'organisation a donc une responsabilité.
Aux termes du deuxième principe, les fins auxquelles des renseignements personnels sont recueillis doivent être déterminées par l'organisation avant la collecte ou au moment de celle-ci. La personne visée doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir. J'invite les députés à aller sur Internet pour voir comment cela se passe. Les grandes sociétés qui sont plus avancées dans le domaine du commerce électronique posent toujours la question. Si nous donnons des renseignements, il y aura une boîte de dialogue, au bas de l'écran, où la société nous demandera, d'une manière attrayante parce qu'elle veut nous encourager, si nous voudrions recevoir de l'information d'autres fournisseurs de ce produit. Si nous cliquons sur oui, il arrivera exactement ce dont nous sommes en train de parler.
Grâce à ce projet de loi, c'est vous-mêmes qui contrôlez vos renseignements personnels. Aux termes de ce projet de loi, vous pouvez décider chaque fois si vos renseignements personnels seront traités de façon électronique. Vous saurez quelle utilisation on en fera et vous pourrez déterminer s'ils peuvent ou non être communiqués. Ce sera à vous de choisir.
L'autre question qui pose problème est celle du dosage. Nous avons connu des expériences malheureuses. Il ne s'agit pas de critiquer une certaine philosophie, mais lorsque les gouvernements ont le bras trop long, cela a pour effet de tout ralentir. Cela limite la capacité d'innovation des organisations. Cela limite aussi la capacité des entreprises d'ajuster rapidement leurs prix. Il y a toutes sortes de conséquences négatives qui découlent de cela.
Par contre, nous savons que, sans une forme quelconque de réglementation, de contrôle ou de pénalité, nous nous exposons à toutes sortes d'abus. Ce dosage entre la réglementation et la protection est justement l'un des problèmes auxquels nous sommes constamment confrontés à la Chambre. Ce sera un aspect important de ce débat.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, concernant les coûts d'observation et le climat que le gouvernement crée pour le monde des affaires, le Financial Post publie, sous la plume de Neville Nankivell, un article très opportun selon lequel l'Institut Fraser vient de publier un rapport accablant sur les conséquences de la surréglementation au Canada. Cet institut estime que les coûts d'observation imposés à l'économie pourraient atteindre 83 milliards de dollars, comparativement à 58 milliards de dollars au milieu des années 1970. L'auteur conclut en faisant observer que le secteur de la réglementation se porte bien au Canada mais que ce sont l'économie et les emplois qui en font les frais.
Le député peut-il nous donner l'assurance que cette mesure législative est un pas dans la bonne direction, qu'elle va améliorer la situation au chapitre de la réglementation? Le gouvernement n'a certainement pas pour rôle de créer artificiellement des entreprises ou des mesures interventionnistes et déraisonnables qui sont très coûteuses pour les contribuables. Il a été démontré à maintes reprises que de tels efforts sont très souvent inefficaces et ne valent pas l'argent qu'on y consacre.
Le député peut-il nous donner l'assurance que le cadre de contrôle proposé sera équilibré et sera adapté à la réalité d'un monde axé sur la concurrence? Qu'en sera-t-il de notre position concurrentielle au sein de la communauté internationale?
M. Reg Alcock: Monsieur le Président, j'aimerais aborder cette question très importante et complexe.
Le premier point sur lequel j'aimerais me pencher est la question du spectre des points de vue. À l'une extrémité du spectre, il y a des gens qui affirment très philosophiquement que la réglementation n'est pas nécessaire, et à l'autre extrémité, il y a ceux qui sont d'avis que l'on n'a pas même besoin d'électricité. Je ne me trouve ni à l'une ni à l'autre de ces extrémités. À mon avis, le juste milieu est à conseiller.
Je vous ai parlé de ceux qui prônent une protection légale des renseignements personnels parce que pour que le commerce puisse s'effectuer au niveau attendu afin que ma mère puisse utiliser son téléviseur pour faire ses emplettes, nous devons être en mesure de lui garantir qu'elle peut compter sur la protection de la loi. C'est évident.
Un bon programme de protection des renseignements personnels ne peut être que profitable pour les affaires. Tous les intéressés y trouveront leur compte. Au cours des discussions que le ministre a eues avec l'industrie, c'est exactement ce qu'on lui a affirmé. L'industrie est tout à fait en faveur de ces mesures parce qu'elle comprend qu'elles sont nécessaires pour assurer le niveau de concurrence et d'intervention qu'elle souhaite. Plus le système est important et plus il y a de joueurs, meilleur il est.
Malheureusement, à la lecture du rapport de l'Institut Fraser, je considère qu'il est plus motivé par des considérations philosophiques que par des besoins de recherches.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir, à titre de membre du Comité permanent de l'Industrie—qui compte aussi parmi ses membres la députée de Mercier—de prendre part à ce débat à l'étape de la deuxième lecture.
C'est un débat sur le principe, et là-dessus, je vais probablement décevoir le secrétaire parlementaire en disant que le Bloc québécois n'est pas du tout d'accord avec ce projet de loi. Je m'explique.
Lorsqu'on lit le titre du projet de loi, on s'aperçoit qu'il s'agit d'un long paragraphe assez complexe, et je vais le lire:
Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois.
J'ai ici, à côté de moi, le député de Chambly qui a travaillé longtemps au Comité sur l'examen de la réglementation. Il me disait qu'il y a environ 200 articles, qui sont assez concis dans les circonstances, mais tout de même complexes.
Il faut toujours faire attention, car une loi, même si le titre est long, lorsqu'il s'agit d'une mesure d'établissement, est plus facile à comprendre. Par contre, lorsqu'il s'agit d'une loi qui en modifie d'autres et qui nécessite des règlements en plus—dans ce cas-ci, il s'agit de la Loi sur la preuve et la Loi sur la révision des lois—cela commence à être complexe. Or, c'est justement l'un des défauts de cette loi.
Je n'irais pas jusqu'à dire que le long titre du projet de loi C-54 est un attrape-nigauds, mais il y a quand même une forme d'attrape là-dedans, parce qu'à l'article 1, on ne parle pas de commerce électronique.
J'écoutais le discours du secrétaire parlementaire, et il disait, dans ses premiers arguments, qu'il fallait reconnaître que la société avait évolué. Il nous disait qu'avec les ordinateurs personnels, on n'est plus à l'ère des cartes perforées et tout cela. Le secrétaire parlementaire est très sympathique, mais ce n'est pas ce dont il s'agit dans le projet de loi.
L'article 1 de ce projet de loi se lit ainsi, et il s'agit du titre abrégé du projet de loi:
1. Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.
Lorsque le député de Chambly a posé sa question tout à l'heure à savoir si cela allait interdire le commerce et la vente de données personnelles recueillies par des entreprises, j'ai écouté attentivement la réplique du secrétaire parlementaire, mais je ne pense pas qu'il ait répondu à la question du député de Chambly.
Il y a un autre problème avec ce projet de loi. La loi parle de dispositions, de formes habituelles qu'on retrouve dans les projets de loi, mais le coeur du projet de loi, dans ce cas-ci, se trouve à l'annexe. Or, l'annexe est un document fourni par des gens de l'industrie, qui se sont entendus entre eux, qui tentent d'appliquer, de façon volontaire, un code de discipline qui touche les industries.
Le gouvernement, voulant combler des attentes parce que des journalistes, des éditorialistes ou certains regroupements de consommateurs s'en inquiétaient, a finalement décidé d'adopter une loi. Mais, par un réflexe facile, il n'était pas vraiment préparé. C'est à cela que ça ressemble. S'il faut faire une loi, on va en faire une. Après examen, le coeur du projet du loi est quelque chose qui vient du secteur privé, du secteur concerné par cette question.
Pensons-nous, pour un instant, que les entreprises concernées feront exprès pour suggérer au gouvernement des choses qui risquent de les embêter? Voyons donc! Ce n'est pas dans leur intérêt. Je ne dis pas qu'il y a des choses absolument terribles dans le projet de loi, mais il y a au moins ça. Il me semble qu'on doit, comme législateur, avoir un doute raisonnable et s'assurer que cela fait l'affaire de tout le monde, comme les associations de consommateurs et les individus.
À mon avis, et je le répète: c'est essentiel. La Loi sur la protection des renseignements personnels s'applique à tout le monde, à tous les citoyens, même aux bébés. Ils ne savent pas lire encore et déjà, le secrétaire parlementaire faisait mention que le fait d'utiliser un système de points chez son épicier faisait en sorte que certaines entreprises savaient qu'il y avait un bébé à la maison. Donc, les compagnies ont déjà des renseignements personnels sur le bébé de mon honorable collègue d'en face. Elles savent déjà quelle sorte de couches, quelle marque de lait ou de produits alimentaires sont utilisés. Elles savent tout.
Ce sont des renseignements personnels, non seulement sur ceux qui savent lire, mais même sur ceux qui ne savent pas lire. Parlons aussi du cas de ces enfants qui utilisent l'ordinateur. C'est tant mieux mais on sait déjà que ce n'est pas étanche.
Ensuite, il a dit qu'il faudrait avoir une approche mondiale parce que le commerce électronique traverse les frontières. C'est vrai. Comme membre du Comité permanent de l'industrie, j'ai eu la chance de participer dernièrement, soit il y a deux ou trois semaines, à une réunion de l'OCDE, ici même à Ottawa, au sujet du commerce électronique. Je n'ai pu participer à tous les travaux, mais j'en ai parlé avec ma collègue, la députée de Mercier qui y a participé.
J'ai pu lire les documents et les informations qui circulaient à ce moment-là. La première préoccupation de ces pays membres de l'OCDE, dont le Canada—je ne dis pas que ce n'est pas correct—mais on s'est tout de suite aperçu que la première préoccupation des ministres des différents pays n'était pas tellement les renseignements personnels mais comment le gouvernement pourrait s'organiser pour les taxer.
Certes, toute transaction mérite d'être taxée. La fameuse TPS essaye de s'en occuper. Il semble qu'il y ait une foule de transactions électroniques qui risquent de nous échapper à cause de cette dimension internationale. Il faut s'en préoccuper.
Les renseignements personnels ou le fait que les gens soient protégés totalement ne semblent pas être la préoccupation majeure. Par contre, certains pays d'Europe avaient cette préoccupation et trouvaient, évidemment, que l'ensemble des pays de l'OCDE n'étaient pas assez avancés pour ce qui est de la protection des renseignements personnels.
À ma grande surprise, certains Québécois ont parfois tendance à penser que ce qui se passe ailleurs est mieux et les Canadiens pensent peut-être de façon similaire. Si des Américains font une chose, ce doit être bon, ils ont un grand pays. Toutefois, j'ai rencontré des Européens avec qui j'ai eu l'occasion de discuter. La qualité de mon anglais n'est pas la meilleure, mais on finissait par se comprendre. Ils disaient: «Vous êtes chanceux vous, les Québécois, vous avez une excellente loi qui protège les renseignements personnels au Québec». Une excellente loi qui non seulement touche les organismes gouvernementaux mais qui aussi le secteur privé.
Ces pays européens disaient qu'ils voulaient s'inspirer de la loi québécoise pour faire la même chose. Je me serais attendu à ce que, quelques semaines plus tard, on discute à la Chambre d'une loi qui ait au moins les mêmes qualités que la loi québécoise. Je comprends la dimension internationale de cela.
Au Québec, on dit que le commerce est de juridiction provinciale. Cela a beau être du commerce électronique, comme vous le savez, nous sommes à la Chambre pour défendre les intérêts du Québec. On est encore dans le système fédéral, car on n'a pas encore notre souveraineté, mais en attendant, on surveille nos intérêts, et c'est normal, personne ne peut nous le reprocher.
Ce sont des étrangers, des parlementaires, des délégués étrangers qui nous ont dit en privé, après discussion—un l'avait même en main—que c'était une excellente loi, qu'ils espéraient pouvoir faire adopter cela chez eux. Ce n'est pas nécessairement facile, parce qu'il y a des intérêts, il y a des gens qui ne veulent pas que cela change non plus.
Il y a aussi le fait que le coeur de cette loi soit dans son annexe, et que ce soient les propositions d'un secteur concerné. Je vais attirer votre attention sur le paragraphe 5(2). Je l'ai lu et je pensais pouvoir rassurer le député de Chambly, mais je m'aperçois que je vais renforcer son doute. On dit, à cet article:
(2) L'emploi du conditionnel dans l'annexe indique qu'il s'agit d'une recommandation et non d'une obligation.
Cela a attiré mon attention. J'ai alors lu l'annexe et le conditionnel y figure presque partout. Ce n'est pas par hasard, ce n'est pas surprenant, puisque c'est un code d'éthique qu'ils se sont donné entre eux. Est-ce qu'un secteur donné ferait exprès pour se donner du trouble? Non. Donc, c'est mis au conditionnel: «Il faudrait... C'est de nature de recommandation.»
Il faut le faire. Je n'ai pas souvent vu des lois qui, non seulement n'interdisent pas, comme le souhaiterait le député de Chambly, mais qui se limitent à dire: «On souhaiterait, cela devrait être ainsi.»
Je pense qu'une telle loi ne peut pas passer l'hiver. Les hivers au Québec sont durs, et ceux du Canada aussi. Il faut quelque chose de plus solide que cela. Surtout qu'on parle de l'avenir. Si j'ai bien écouté le député de Winnipeg-Centre tout à l'heure, il disait qu'il fallait faire quelque chose, même si ce n'était pas parfait—il l'a avoué lui-même dans toute sa candeur. Il a raison de le dire ainsi. Il dit: «Il faudrait faire quelque chose, et comme on était pressés de faire quelque chose—ça, il ne l'a pas dit—puisque les gens nous demandaient cela, eh bien, on a préparé une loi, on s'est dépêchés, on n'a pas fait nos devoirs.»
Le parti d'en face n'a pas fait ses devoirs. Au lieu de penser lui-même à des choses, il a laissé le secteur concerné suggérer une loi. Ce n'est pas habituel. J'espère que ce ne sera pas l'habitude en ce Parlement, parce que ce serait dangereux.
Quand on lit les objectifs, on dit que le projet de loi est complexe, parce qu'il y a plusieurs dimensions. Oui, il y a une dimension internationale.
Je vais ouvrir une parenthèse. Ce matin, je lisais dans le journal que, finalement, l'OCDE avait en quelque sorte renoncé à rendre l'AMI officiel. On se demandait si cela ne se ferait pas plutôt dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC. Je suis d'accord pour qu'il y ait des organisations internationales.
Oui, il y a des dimensions internationales là-dedans, et oui, il faut surveiller cela. En même temps, il faudrait faire attention avant de laisser libre cours à une approche qui irait dans un sens très universaliste. Cela échapperait au contrôle des pays concernés. Une fois qu'un accord comme l'AMI est signé, c'est fait pour un bon moment. Je pense que c'est 20 ans dans certains cas, 10 ans dans d'autres.
Monsieur le Président, je vous demande de bien vouloir m'indiquer quand il ne me restera plus qu'une minute, car j'aurai un amendement à proposer à la fin de mon discours.
Le député de Lac-Saint-Jean s'inquiétait de la perte de contrôle par les parlementaires, dans ce Parlement, du pouvoir de légiférer, du pouvoir de contrôler.
Je m'aperçois que dans ce cas-ci, il a un peu raison. Cela prendra un certains temps avant que tous les pays de l'OCDE s'entendent, mais une fois que ce sera fait, ce sera fait pour longtemps. Pourquoi cela prend-il un certain temps? Parce que les pays de l'OCDE ont des intérêts différents. Pourtant, ce ne sont pas les pays les plus mal pris. Même dans les pays les plus économiquement avancés, ils ont des réserves. Pourquoi? Est-ce que c'est pour protéger le simple citoyen à l'échelle internationale? Est-ce que les simples citoyens ont un lobby assez puissant pour parler de leurs intérêts dans ces réunions qui, sans être secrètes, ont quand même un accès limité? Ce sont les parlementaires qui peuvent faire cela.
Je ne suis pas tellement d'accord, d'une part, qu'on traite du coeur d'un projet de loi dans l'annexe et, d'autre part, qu'on mette une disposition là-dedans qui dit que tout ce qui n'est pas prévu, de même que les changements, tout cela sera décidé par le commissaire avec l'accord du gouverneur en conseil. Le gouverneur en conseil, on le sait, c'est le Conseil des ministres.
Cela échapperait complètement à la surveillance des députés de ce Parlement, dûment élus pour représenter les citoyens. C'est un autre aspect qui nous fait avoir de sérieux doutes, qui nous fait dire que ce projet de loi a été bâclé et qu'il n'a pas été assez étudié par les gens du ministère. On laisse le secteur concerné proposer une loi; on met les formes habituelles dans la loi et on dit que ce qui va faire force de loi se retrouvera dans l'annexe, c'est-à-dire les normes établies par le secteur concerné.
Je donnais l'exemple de la question du député de Chambly tout à l'heure. Le projet de loi ne répond pas à son objection dans le sens que ce qui est interdit n'est pas clairement établi. Les pénalités non plus ne sont pas clairement établies, s'il se produisait une chose semblable. D'autre part, la meilleure loi du monde a beau être bien rédigée, si elle n'est pas applicable, cela se limite au niveau du discours.
Il est intéressant de dire: «On est à l'ère de la modernité, des ordinateurs, de l'électronique. Cela va se faire chez nous: les transactions, le commerce. C'est un secteur nouveau. C'est de la haute technologie. C'est extraordinaire.» J'en suis pour les idées modernes, mais il ne faudrait pas que la modernité m'enlève la protection sur mes renseignements personnels et sur ceux de mes concitoyens.
Au Québec, on a une bonne loi. On a une loi qui touche tous les secteurs: les services gouvernementaux, le secteur des entreprises, même les organismes à but non lucratif. Tout ce qui est organisation est là. C'est une loi, je le répète, qui inspire les pays européens qui veulent aller dans le même sens.
Mon autre inquiétude, c'est qu'on touche au domaine du commerce qui est de juridiction provinciale. Mais on va surveiller cela.
Le nouveau député de Sherbrooke s'est vite mis dans l'affaire, il a étudié ce projet de loi et il trouve que cela n'a pas de sens. Il va d'ailleurs vous en parler dans les prochains jours. En attendant, le député de Sherbrooke va appuyer l'amendement suivant que je propose:
Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» en les remplaçant par ce qui suit:
«le projet de loi C-54, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, ne soit pas maintenant lu une deuxième fois, mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi retiré et l'objet déféré au Comité permanent de l'industrie.»
C'était l'essentiel de mon propos.
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, je félicite le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière pour le magnifique discours qu'il vient de prononcer.
Il a eu pour effet de m'ouvrir les yeux un peu. Ce discours va rester célèbre dans les annales de cette Chambre en matière de protection des renseignements personnels. C'est un peu comme ce qui a été cité à la Chambre, en 1916, lorsque les politiciens s'opposaient à la législation ontarienne sur la langue d'enseignement. C'est sûr que cela fera jurisprudence à la Chambre.
Je suis un peu surpris. J'ai posé des questions tout à l'heure au député de Winnipeg-Centre qui tentait de me rassurer. Toutefois, ce que je comprends de ce projet de loi, parce que lorsqu'on est un député et qu'on est assis dans cette Chambre, on essaie de se mettre dans la peau de nos commettants et de savoir si un projet de loi risque de les affecter ou de nous affecter, c'est que, à la lumière de ce que vient de dévoiler mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, on pourrait plutôt l'appeler: «Loi sur les voeux pieux en matière de protection des renseignements personnels.» Ce serait beaucoup plus juste de qualifier cette loi de cette façon.
Je voudrais savoir si le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a entendu ou a su s'il y avait eu des commentaires de personnes qui font autorité dans ce domaine. Je pense à des Québécois qui sont aussi, pour le moment—j'espère que ce sera le plus bref possible—encore des Canadiens. Parmi eux, y a-t-il des personnes qui l'ont éclairé? Et en vertu de cet éclairage, il a sûrement dû prendre position.
J'aimerais qu'il nous cite les propos de ces gens et qu'il nous dise ce que ces personnes ont à redire sur le projet de loi dont on parle ce matin, qui a un titre pompeux et sans fin, que, nous, on appelle la «Loi sur les voeux pieux». J'aimerais qu'il nous éclaire là-dessus.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant de poursuivre avec la réponse du député, je signale que l'amendement est recevable.
M. Antoine Dubé: Monsieur le Président, comme c'est son habitude, le député de Chambly pose des questions très pertinentes. Sans doute qu'il savait que je pouvais lui répondre. J'ai en effet une citation, et j'espère que cela va le satisfaire.
Il s'agit de la Commission d'accès à l'information du Québec, de son rapport annuel de 1997-1998. Je saute les commentaires portant sur autre chose, mais là, on fait des commentaires sur la protection des renseignements personnels sur l'autoroute de l'information.
Parlant du Code CSA, proposé par l'Association canadienne des normes, on dit:
La Commission a examiné les conséquences de l'adoption éventuelle, dans l'ensemble de la fédération canadienne, de normes et de principes légaux qui régissent la protection des renseignements personnels sur l'autoroute de l'information. Selon les termes d'un projet dont ont été saisis les ministres responsables de la mise en place de cette inforoute, la protection prendrait forme autour du code volontaire élaboré par l'Association canadienne des normes (CSA, en anglais) et adopté en 1990.
De l'avis de la Commission, l'adoption de cette proposition équivaudrait à un recul par rapport à la situation actuelle au Québec au chapitre de la protection des renseignements personnels.
Cette affirmation repose sur un examen en profondeur du Code CSA. Certes, on peut se réjouir de l'adoption, par l'industrie canadienne, d'un tel code. Il s'agit là d'une percée appréciable qui découle d'une analyse intéressante des lignes directrices de l'OCDE en matière de protection des renseignements personnels.
Je poursuis:
Par contre, le code CSA ne répond nullement aux objectifs des régimes de protection de renseignements personnels établis par les deux lois québécoises: assurer aux citoyens un règlement impartial et équitable des problèmes et différends qui peuvent survenir dans le domaine de plus important du respect de cette dimension de la vie privée.
Aussi, la Commission a-t-elle suggéré à la ministre de la Culture et des Communications du Québec de rappeler à ses homologues des gouvernements, l'existence d'un régime légal mis en place par le Québec. Le régime québécois constitue, aux yeux de la Commission, la seule réponse respectueuse des droits des citoyens devant les défis soulevés par la mise en place de l'autoroute de l'information.
En d'autres mots, cela se traduirait pas une expression publicitaire en vigueur au Québec: «On est mieux avec notre tête que de prendre une tête qui serait encore pire».
[Traduction]
M. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le discours du député de Lévis et j'ai observé les marques d'approbation entre les deux députés bloquistes. Je suis déçu d'entendre le député dire que le projet de loi a été rédigé à la hâte et sans consultation suffisante.
Les rédacteurs du projet de loi se sont inspirés de la Loi sur la protection de la vie privée qui est actuellement en vigueur au Québec et qui ne s'applique pas à l'extérieur de cette province. De nombreux intéressés ont contribué, par l'information qu'ils ont donnée, à l'élaboration du projet de loi. Le projet de loi à l'étude a été modelé non seulement d'après la loi québécoise mais également d'après le modèle de code de l'Association canadienne de normalisation en ce qui a trait à la protection des renseignements personnels.
Les rédacteurs du projet de loi ont tenu compte de nombreux éléments, notamment la responsabilité; la détermination des fins de la collecte; l'obtention d'un consentement; la limitation de la collecte, de l'utilisation, de la communication et de la conservation des renseignements; l'exactitude; les dispositifs de protection; la transparence; la facilité de l'accès individuel; et la possibilité de porter plainte contre la non-observation.
Je me demande comment nous en sommes venus à parler de l'AMI et d'autres questions qui n'ont rien à voir avec le projet de loi. Un des problèmes que nous avons à la Chambre, c'est que nous avons tendance à soulever d'autres questions durant l'étude d'un projet de loi de fond. J'espère que nous finirons par trouver un moyen de discuter de l'objet des projets de loi à l'étude à la Chambre au lieu d'aborder d'autres sujets.
Le député de Lévis a dit que le projet de loi ne ferait pas l'objet d'examens, notamment au Parlement. Je voudrais faire un survol des fonctions du commissaire à la protection de la vie privée. En plus de s'occuper des plaintes, des mesures correctives et de l'information publique, le commissaire présentera un rapport annuel à la Chambre. Le projet de loi prévoit déjà que cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi, la Chambre procédera à un examen approfondi de l'état de la loi.
Je sais qu'à l'époque de l'électronique, les ordinateurs évoluent, mais est-ce que le député de Lévis prétend que l'examen du rapport annuel et l'examen approfondi de la loi après cinq ans sont insuffisants? J'aimerais qu'il parle de ces deux questions plutôt que de parler de toutes sortes d'autres choses.
[Français]
M. Antoine Dubé: Monsieur le Président, en une minute je vais essayer de dire deux choses. Premièrement, ce que le secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie—que je respecte, par ailleurs—apporte comme commentaire, c'est que d'après lui, en vertu du projet de loi, le commissaire va faire rapport aux parlementaires. C'est l'un des problèmes. J'aimerais qu'il me l'indique. Cela pourrait être changé, je serais prêt à apporter la correction, mais, d'après moi le commissaire serait redevable au gouverneur en conseil, donc au Conseil des ministres par l'intermédiaire du ministre concerné.
De plus, l'ancien ministre de la Justice, qui est aujourd'hui ministre de la Santé, a déclaré que lorsqu'on parlait de renseignements personnels, il souhaitait que l'on parle de cela, et non pas imiter le ministre de l'Industrie qui se transforme en promoteur. Le titre du projet de loi parle de promouvoir le commerce électronique.
C'est le but principal du projet de loi, c'est l'objectif principal du ministre. Mais je dis attention, le vrai but de l'article 1 devrait être la protection des renseignements personnels. Or, ce n'est pas cela qu'on tente de nous faire avaler. C'est autre chose. On est bien prêts à discuter de cette autre chose, mais dans un cadre de promotion de commerce électronique.
Quand on parle de renseignements personnels, je veux être protégé et je veux que les citoyens et les citoyennes du Québec et du Canada le soient aussi.
[Traduction]
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-54. Comme je fais partie du Comité des finances de la Chambre des communes, je vais m'arrêter sur l'aspect financier.
Je suis fasciné par tout ce dossier du commerce électronique et je doute qu'il soit possible de se pencher sur l'aspect financier de ce dossier sans tenir compte de son aspect technologique. C'est particulièrement important quand on discute de dossiers comme celui du groupe de travail MacKay par exemple, parce que le commerce électronique joue de plus en plus un rôle de premier plan dans le secteur financier.
Il suffit de penser à la manière dont le monde change et de reconnaître que les changements reposent en grande partie sur la technologie de l'information pour admettre que le Canada peut devenir un chef de file dans le cyberespace. Pour que le Canada y parvienne et soit reconnu comme le pays le plus branché, le gouvernement doit adopter l'attitude qui convient. Il doit être visionnaire. Il doit établir un équilibre entre la protection de la vie privée des internautes et les efforts de commercialisation légitimes des entreprises canadiennes. Si nous prenons les bonnes décisions, le Canada deviendra un chef de file en matière de commerce électronique.
Tous nos efforts seront vains toutefois s'il n'y a pas la confiance. Les internautes doivent avoir confiance dans les garanties de sécurité que les commerçants électroniques mettent en place. L'industrie canadienne doit être convaincue que la loi l'autorise à faire du commerce électronique d'une manière responsable. Les contribuables doivent faire confiance à leurs représentants élus et avoir la certitude qu'ils s'efforcent d'élaborer une politique exhaustive et d'avant-garde en matière de commerce électronique.
En tant que vaste pays à l'immense superficie et à la population dispersée, le Canada est voué à devenir, ce ne devrait être une surprise pour personne, un leader mondial du commerce électronique. Divers moyens ont été mis au point afin de servir la population. L'industrie bancaire canadienne est un exemple d'une industrie en grande partie dominée par le commerce électronique et elle fait, à mon avis, un excellent travail pour ce qui est de répondre aux besoins des collectivités à travers le pays.
Nos collègues à la Chambre doivent comprendre que le projet de loi C-54 est à maints égards la première étape de la mise au point d'un cadre de réglementation du commerce électronique. Il est, à bien des égards, l'équivalent, au XXIe siècle, du premier clou du chemin de fer.
En fait, à mon avis, l'équivalent du premier clou de chemin de fer a été l'accord de libre-échange, en faveur duquel mon parti a fait campagne en 1988, quand les députés d'en face avaient tendance à se montrer plus luddites dans leur approche. Que nous sachions, ce n'était pas tant leurs convictions sur le plan économique qui leur dictait cette attitude, mais plutôt leur désir de survie politique et ce qui était alors politiquement acceptable. L'hypocrisie n'étant qu'un demi péché mortel, je suppose que nous devrions faire preuve de tolérance à l'égard de ces transgressions.
La croissance exponentielle continue de l'Internet a des répercussions sur chaque entreprise canadienne, chaque ministère et, en fait, chaque Canadien. Le Comité de l'industrie doit continuer de faire un effort assidu et, je dirai, non partisan, en vue d'élaborer un projet de loi efficace.
La question dépasse de loin les limites du ministère de l'Industrie. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je suis membre du Comité des finances. Les questions sur lesquelles nous nous penchons aujourd'hui, y compris les changements dans le secteur des services financiers au Canada, sont en grande partie dominées par la technologie et la technologie de l'information. Tout comme le bogue de l'an 2000 influe sur le moindre aspect des activités du gouvernement, nous devons reconnaître que la mesure législative que nous examinons aujourd'hui aura un impact sur tous les niveaux de gouvernement et sur tous les types d'activités.
Les répercussions du commerce électronique englobent beaucoup plus que la seule question de la confidentialité des renseignements. Le gouvernement doit élaborer un plan d'action complet qui tienne compte de questions comme l'uniformité du marché numérique, l'interception clandestine de renseignements par les forces de sécurité, les relations en ligne des secteurs public et privé, la concurrence, le rôle des petites et moyennes entreprises ainsi que la culture et le patrimoine canadiens. La liste est longue.
Je suis en train de lire un livre de David Brin, intitulé Transparent Society: will technology force us to chose between privacy and freedom? Il y en a un autre que j'ai lu récemment: Death of Distance, qui traite de la suppression du problème de la distance en tant que facteur déterminant dans le coût des télécommunications.
Ces forces mondiales sont en train de façonner notre économie. Il est extrêmement important pour nous tous à la Chambre de nous familiariser avec ces forces pour faire en sorte que les Canadiens soient en mesure de prospérer dans une telle conjoncture.
Un dirigeant canadien a fait une observation intéressante sur cette question. Je crois qu'il vaut la peine de la répéter à la Chambre. Il a dit qu'un télécopieur n'est utile qu'à partir du moment où le reste du monde en a un et que sa valeur connaît une croissance exponentielle avec la multiplication des utilisateurs.
Logiquement, le corollaire de cet énoncé veut que le gouvernement doive être très prudent pour ne pas que l'industrie d'Internet périclite. Il y a une marge de manoeuvre très étroite entre un manque de vision sur les questions de protection des renseignements personnels et une vision trop étendue qui entraînerait une réglementation terriblement lourde, comme c'est le cas actuellement pour l'entreprise canadienne. Cela risquerait d'étrangler son potentiel de concurrence et de prospérité dans l'industrie naissante du commerce électronique, si le gouvernement n'était pas rigoureux dans sa politique de veiller à ce que le coût de la réglementation ne soit pas excessif par rapport aux avantages qu'on pourrait possiblement en tirer.
Beaucoup d'industries sont blindées contre la concurrence sur Internet. Quand une famille de Wolfville, en Nouvelle-Écosse, dans ma circonscription, décide d'organiser un barbecue du samedi soir, il y a peu de chances qu'elle passe par Internet pour acheter des pains à hamburger. Il est probablement plus plausible dans ce cas d'imaginer que ces gens s'adresseront à une boulangerie où ils auront un service personnalisé.
Les consommateurs ont un grand choix de produits qui leur sont offerts sur écran d'ordinateur avec une présentation agréable. On peut penser que le boucher et le boulanger n'ont rien à craindre, mais que d'autres types de commerce devraient se préparer en conséquence.
Bien sûr, mon exemple est quelque peu simpliste, mais il m'amène à ouvrir un débat sur la compétition qui ne peut manquer de se produire entre le centre-ville et le marché virtuel. En adoptant des politiques pour protéger les intérêts du centre-ville, nous devons nous assurer que nous n'empêchons pas les Canadiens de profiter du marché virtuel.
Il y a une ligne de démarcation très fine entre protéger les Canadiens des risques d'une économie du savoir mondialisée et les empêcher de profiter pleinement des occasions qu'elle présente.
Un réseau très complexe d'incitatifs caractérise le marché. Certains sont intrinsèques, telle la volonté de travailler à son compte. D'autres sont inspirés par la recherche de la qualité de la vie. Ainsi, comme les distances ne comptent plus et que le coûts des communications est à la baisse, il devient de plus en plus intéressant d'aller habiter à des endroits comme les localités rurales de la Nouvelle-Écosse.
On peut choisir l'endroit où on travaille ou fait ses courses. Il faut reconnaître que l'on n'est pas obligé de s'y trouver en personne. J'estime qu'il y a là une occasion de développement économique sans précédent pour les localités éloignées. Pour le Canada atlantique, il se pourrait que la technologie de l'information soit l'équivalent moderne de la construction navale à l'époque des voiliers, si nous adoptons une politique judicieuse.
Ce qui importe, c'est que, lorsque des incitatifs artificiels sont créés par voie législative, il y a presque fatalement un effet de dissuasion qui se manifeste lorsque la politique gouvernementale est mise en oeuvre. C'est ce que veut la loi des conséquences non recherchées. Il incombe aux législateurs de voir quels sont ces effets de dissuasion et d'en discuter rationnellement.
Récemment, le ministre du Revenu national a annoncé que le gouvernement ne tenait pas à imposer de nouvelles taxes pour le commerce électronique. J'ose le féliciter. Les Canadiens se sont exprimés bien clairement: ils n'ont pas envie de nouveaux impôts. Nous devrions plutôt chercher des moyens de les réduire et de simplifier le régime fiscal existant.
La question qui se pose est la suivante: comment appliquer la législation fiscale existante de façon juste, prévisible et sans conséquence pour le montant des recettes? En ce moment, des détaillants implantés à l'Île-du-Prince-Édouard qui se livrent au commerce électronique et expédient des marchandises en Ontario ne sont pas tenus de percevoir la taxe de vente. Il incombe plutôt au consommateur de verser la taxe à la province où il habite. Ce sera peut-être un choc pour le ministre du Revenu, alors s'il écoute qu'il se prépare. Je soupçonne que, de façon générale, ces taxes ne sont pas versées.
Toutefois, ce n'est pas un problème insurmontable. L'industrie canadienne a maintes fois prouvé qu'elle était prête à respecter le règlement qui autorise le gouvernement à trouver les ressources qui lui permettent de fournir les services que les Canadiens demandent.
La question, c'est la situation dans l'intérim. Il semble exister un marché en vertu duquel ceux qui ouvrent des magasins, emploient des vendeurs et paient des taxes foncières doivent aussi faire face à un autre désavantage. Ils doivent aussi percevoir des taxes, ce que ne font pas leurs collègues qui commercent par voie électronique. Il faudra s'attaquer à cette situation et le plus tôt serait le mieux. Il ne devrait pas y avoir un calendrier fixant une date à laquelle les règlements fiscaux seront justes. La justice doit être un élément intrinsèque de la politique fiscale.
Pour l'instant, j'ai parlé de fiscalité à l'échelle nationale. Je vais maintenant m'intéresser au marché international. À une récente conférence des ministres de l'OCDE sur le commerce électronique, tenue à Ottawa, une bonne partie des discussions a porté sur la taxation de ce commerce. Il y a eu un accord général sur cinq points.
Premièrement, la neutralité. On devrait s'efforcer d'avoir une taxation équitable et juste du commerce électronique et des formes traditionnelles de commerce.
Deuxièmement, l'efficacité. La perception des taxes aurait pour double objectif de limiter les frais et l'administration.
Troisièmement, la prévisibilité et la simplicité. Les niveaux de taxation et les procédures de collecte seraient transparents et prévisibles.
Quatrièmement, l'efficacité et l'équité. On limiterait au maximum la possibilité d'échapper aux taxes et on s'efforcerait de s'assurer que le montant correct est prélevé au moment voulu.
Cinquièmement, la souplesse. Cet aspect vise à aider le législateur dans ses efforts pour rester au fait des nouvelles technologies.
Ces principes ne devraient pas s'appliquer seulement au commerce électronique, mais à toutes les formes de taxation. En accord avec le rapport Mintz présenté en juin au Comité des finances, il faut instaurer au Canada un régime fiscal plus équitable, plus uniforme et plus simple, et aider à éliminer ce qui me paraît être un fardeau réglementaire, c'est-à-dire un fardeau fiscal absolument excessif et un régime fiscal complexe qui pénalise les entreprises légitimes. Équitables, de grande portée, ces nobles objectifs pourraient servir à décrire les principes nécessaires en fiscalité pour établir plus d'équité non seulement dans le commerce électronique mais aussi dans n'importe quel domaine commercial.
Ces principes cherchent à instaurer de l'égalité dans un monde de régimes fiscaux disparates. Ils ne pourraient peut-être pas être mis en application par un pays tout seul ou être appliqués graduellement sur une longue période dans le cadre d'un accord de libre-échange. Cependant, ce n'est pas le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. À mesure que les frontières deviennent de moins en moins importantes à bien des égards dans le commerce mondial, il faut faire preuve de cohérence et de coopération entre pays en termes de politiques fiscales et de coopération fiscale pour éviter l'évasion fiscale.
À l'heure actuelle, il n'existe pas de formule d'imposition internationale pour uniformiser les règles du jeu. Si nous tentions de négocier un tel traité, cela prendrait beaucoup de temps. Cela constituerait un processus très long et laborieux. Cela présenterait les mêmes embûches que celles qu'on a connues dans le cas de l'accord multilatéral sur l'investissement. Bien que cet accord ne soit pas nécessairement mauvais en soi, le processus suivi pour sa négociation a été beaucoup trop exclusif. À tel point que les Canadiens et les citoyens des autres pays du monde n'ont pas eu de part effective à ces discussions.
La Chambre a pour devoir de protéger et d'encourager les intérêts canadiens. D'après ce que je comprends, nous avons le choix entre commercer dans un monde de libre-échange ou suivre la voie des politiques protectionnistes, une voie qui nous conduira assurément dans un cul-de-sac. Le Parti progressiste conservateur est l'auteur ou un partenaire fondateur de l'accord commercial le plus fructueux de l'histoire de notre pays. Il n'est pas à la veille de tourner le dos au libre-échange.
Toutefois, il faut estimer la concurrence à sa juste valeur. La dure réalité, c'est que le commerce électronique ne peut qu'être efficace. Internet permet de comparer des prix en quelques minutes, éliminant ainsi des après-midi de lèche-vitrines. Sur Internet, le prix est le facteur décisif.
Si nous comprenons bien ce fait et que nous reconnaissons que le Canada n'est pas très compétitif, nous sommes forcés de reconnaître qu'il faudra nous pencher sur les problèmes causés par notre système fiscal, le fardeau de la réglementation et les faiblesses structurales inhérentes à l'économie canadienne.
Il faut que chaque politique gouvernementale, et pas seulement le projet de loi C-54, doit viser l'amélioration de la productivité. Toutes les politiques gouvernementales qui font l'objet de discussions dans cette Chambre doivent insister tout particulièrement sur l'accroissement de la capacité concurrentielle du Canada dans l'environnement mondialisé qui caractérise le XXIe siècle.
De façon générale, les administrations qui ont voulu réglementer Internet ont échoué chaque fois qu'elles ont dépassé les bornes du bon sens.
Le 23 novembre, le CRTC commencera à tenir des audiences sur le genre de réglementation qu'il faudrait avoir le cas échéant pour les nouveaux supports et Internet. La commission a été calomniée et accusée de construire des fiefs.
Nous sommes d'avis que c'est exactement là le genre de discussions dans lequel nous devons nous engager. Cela ne veut pas dire pour autant que nous appuierons toute mesure visant à censurer l'Internet. Ce serait plutôt le contraire. Le secteur privé doit définir l'avenir d'Internet et le secteur public devra faciliter ce débat.
L'une des réalités que nous devons accepter est que l'Internet se développe à un rythme beaucoup plus rapide que la capacité du législateur de réagir. En réalité, si nos lois exigent des règlements d'application trop difficiles à respecter, je crains que nous ne soyons pas capable d'avoir l'infrastructure réglementaire nécessaire pour appliquer les mesures adoptées par la Chambre ou mises au point par un comité. Nous devons prendre soin d'adopter une structure réglementaire qui soit non seulement juste, mais également applicable.
Franchement, le gouvernement devra s'en remettre au secteur privé pour produire de nouvelles technologies permettant aux usagers d'Internet de choisir eux-mêmes d'autoriser ou d'empêcher l'accès à certains contenus.
Le rôle du gouvernement s'en trouvera alors grandement restreint si nous faisons bien notre travail. En fait, nous pouvons créer une industrie du commerce électronique relativement autoréglementée qui aider les Canadiens à bénéficier des débouchés économiques qu'offre la mondialisation tout en protégeant leur vie privée.
L'expansion de cette technologie conçue à l'origine pour être un outil de recherche au service des universitaires nous a tous pris par surprise. Récemment, un cadre d'IBM a baptisé ce phénomène de révolution numérique, disant que ses répercussions étaient d'une portée égale à celle de la révolution industrielle. Tout comme la révolution industrielle, le commerce électronique et Internet ont la capacité de transformer la façon dont nous faisons affaire, dont les gouvernements sont organisés et dont les économies sont structurées.
Réfléchissons un instant à la façon dont Internet et la technologie ont modifié notre rôle de parlementaire. Il y a vingt ans, nous aurions eu plus facilement accès à l'information que nos électeurs. Aujourd'hui, grâce à Internet et à la technologie, ils ont accès à la même information que nous et au même moment.
Je dirais que pour que nous demeurions pertinents à titre individuel en tant que parlementaires et à titre collectif en tant que Parlement et gouvernement, nous devons devenir plus rigoureux. Nous serons désormais jugés non pas tant en fonction de l'information à notre disposition, mais de plus en plus d'après la qualité des décisions prises à partir de cette information.
C'est très stimulant car je pense que nous allons être obligés de devenir plus pertinents et de prendre des décisions saines, qui ne seront pas forcément bien accueillies à court terme, mais qui, du point de vue de l'intérêt public, seront justes à long terme.
Cela représente une démocratisation significative de la démocratie, ce qui va avoir une incidence sur la façon dont nous faisons notre travail ici. C'est là l'une des façons dont la technologie est en train de changer la façon dont nous vivons et travaillons en tant que Canadiens.
Le défi qui se pose à nous est de nous assurer que, en essayant d'établir un équilibre entre ces divers objectifs, nous poursuivions ces buts intrinsèquement contradictoires et nous traitions cette question d'intérêt public d'une grande complexité avec la même maturité que nos électeurs. Nous ne pouvons pas considérer que la question se résume à des octets sonores de trois secondes et ce ne sera pas le cas si nous agissons de façon réfléchie.
La question du commerce électronique mondial ne devrait pas nous faire peur. En fait, de nombreuses personnes nous exhortent à agir à la Luddite. Un de ceux qui prônent cette solution brigue la direction de mon parti à l'heure actuelle, mais j'espère que cette solution sera écartée samedi prochain et que M. Orchard ira détruire des moulins à vent ou poursuivre ses activités à la Luddite dans d'autres partis politiques. Je crois que sa place naturelle se trouve plutôt dans le parti qui, fait ironique, occupe les banquettes de l'extrême droite à la Chambre.
Quoi qu'il en soit, je crois que les craintes des luddistes ne sont pas fondées. Les seules craintes justifiées concernent le risque que les gouvernements, et les membres de cette Chambre n'aient pas le courage voulu pour relier les Canadiens aux leviers de l'économie mondiale, qui peuvent nous fournir...
Le président suppléant (M. McClelland): Je crois que le moment est bien choisi pour faire une interruption.
M. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Kings—Hants de son discours. Je sais qu'il passe plus de temps au Comité des finances qu'au Comité de l'industrie, mais son collègue de Markham, qui connaît très bien le domaine informatique, joue un rôle précieux au sein de ce comité.
Je voudrais lui signaler, et je ne suis pas sûr s'il l'a mentionné ou non, que le ministre de l'Industrie a joué un rôle de premier plan dans ce domaine. C'est lui qui a pris le leadership à la récente conférence de l'OCDE, où on a tenté de fixer des objectifs. Il est important de se fixer des objectifs qui ne soient pas trop restreints. Nous devons conserver une marge de manoeuvre étendue et apporter des améliorations continuelles par la suite.
Le député sait certainement que le groupe Maritrain de Digby, en Nouvelle-Écosse, a obtenu un contrat spécial du ministère du Développement des ressources humaines, dans le domaine du commerce électronique et des ressources humaines. Le député est au courant de l'important établissement d'Aldershot, qui représente un investissement de 30 millions de dollars dans la formation informatique et des moyens précieux concernant Internet et la technologie future.
J'aimerais que le député s'attarde davantage au fait que, lorsqu'on parle de commerce électronique, d'Internet et d'ordinateurs, les frontières provinciales et nationales n'existent plus. Nous devons examiner la question dans un contexte général et agir comme leaders.
Lorsque le projet de loi sera à l'étude au Comité de l'industrie, nous devrions laisser de côté la politique partisane. Nous devons tenir compte des électeurs, ceux qui sont concernés par la question de la vie privée, et de tous les groupes intéressés. Je sais que quelque 36 secteurs ont déjà été mentionnés. N'est-il pas préférable de fixer ces objectifs et d'apporter ensuite des modifications continuelles sans esprit de parti pris, dans l'intérêt de la population?
M. Scott Brison: Monsieur le Président, le député a tout à fait raison de reconnaître que notre collègue de Markham a de remarquables antécédents professionnels dans le secteur de l'informatique, qu'il connaît bien le commerce électronique et qu'il contribue, en fait, régulièrement aux travaux du Comité de l'industrie.
Le député soulève une question intéressante au sujet des frontières provinciales, du droit national et de l'importance de déployer des efforts pour éliminer ces barrières.
Je prétends que le commerce électronique a la capacité de faire ce que les gouvernements n'ont pas eu la volonté et le courage de faire, c'est-à-dire réduire et éliminer les barrières au commerce interprovincial au Canada. Ces barrières coûtent des emplois au Canada à l'heure actuelle. En fait, une augmentation de 10 p. 100 du commerce interprovincial créerait environ 200 000 emplois dont les Canadiens ont bien besoin. Le fait qu'il y ait plus de barrières commerciales entre Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse qu'entre la Nouvelle-Écosse et Israël est tout à fait absurde.
Effectivement, nous devons nous engager dans un dialogue permanent avec d'autres gouvernements et faire tomber ces barrières commerciales. Cependant, même si le commerce électronique et Internet vont forcer la main du gouvernement dans beaucoup de secteurs, je prétends que rien ne peut remplacer le leadership. Nous devons agir de façon proactive plutôt que de suivre la voie dans laquelle l'industrie va nous entraîner. Je pense que nous devrions prévoir et essayer d'élaborer des politiques qui correspondent à la voie dans laquelle nous voulons que ces industries nous conduisent.
Je m'arrête brièvement aussi sur ce que le député a dit au sujet de la croissance de l'industrie du savoir en Nouvelle-Écosse. Ainsi, à Windsor, en Nouvelle-Écosse, la société Orion Electronics, prévoit prendre de l'expansion. Hugh Roddis, d'Orion Electronics a choisi Windsor à cause de la qualité de vie, du coût de la vie et parce qu'il voulait que sa fille ait la meilleure instruction possible et que Kings Edgehill, une école privée de la région, offre un programme de baccalauréat international. Il a choisi Windsor, parce qu'il travaille dans le domaine de la technologie de l'information. Il n'a pas à vivre à Toronto, Boston ou New York.
J'aimerais savoir ce que le député pense sur un point. Toute notre stratégie de développement économique pour la région de l'Atlantique doit tenir de plus en plus compte des possibilités qui s'offrent à nous, en mettant l'accent sur la place de la distance dans le coût des télécommunications et en centrant les efforts sur la Nouvelle-Angleterre, New York, Boston et les entreprises établies dans d'autres régions où les gens recherchent une meilleure qualité de vie.
En toute franchise, je voudrais que le gouvernement adopte une stratégie industrielle plus holistique, plus ouverte et qui, en fait, représente une vision économique durable à long terme pour la région de l'Atlantique, plutôt qu'un expédient.
M. Walt Lastewka: Monsieur le Président, je ne veux pas que la situation que le député de Kings—Hants a mentionné en matière de commerce interprovincial devienne la règle. Je ne sais pas s'il sait que le coprésident du comité est un membre de son parti, le premier ministre de la province, et que M. Al Palladini est l'autre coprésident. Je suis entièrement d'accord avec lui. Le plus tôt ces deux personnes commenceront à travailler sur le commerce interprovincial, le mieux ce sera pour le pays. Il aurait peut-être dû en parler la fin de semaine dernière à son congrès. Je l'encourage et je le prie d'en discuter avec les membres de son parti, afin de faire progresser le dossier du commerce interprovincial.
Sur l'autre point, je dirais que le gouvernement a travaillé intensément dans les provinces de l'Atlantique, et le député le sait. J'ai visité de nombreuses entreprises et organisations dans les provinces atlantiques l'été dernier pour être sûrs que nous ayons d'autres entreprises comme celles du groupe Maritrain à Digby, en Nouvelle-Écosse.
Le commerce électronique peut avoir lieu n'importe où. Les mouvements sont très rapides. Ils sont quasi instantanés sur Internet. C'est l'avantage que nous avons.
Je voulais être sûr que le député comprenne cet aspect du commerce interprovincial. J'espère qu'il continuera à encourager les membres de son parti à travailler à promouvoir le commerce interprovincial.
M. Scott Brison: Monsieur le Président, le député a raison de dire que le leadership en matière de commerce interprovincial doit venir des premiers ministres provinciaux, en raison de la carence du gouvernement fédéral. Il a tout à fait raison de reconnaître que nous avons besoin d'une plus grande participation dans ces domaines, que les provinces doivent s'attaquer à ces questions et faire les changements nécessaires pour nous guider dans le XXIe siècle. Il est clair que son gouvernement a renoncé à ce leadership dans les relations fédérales-provinciales. Je remercie le député de son point de vue et de ses observations sur cette importante tendance. J'espère qu'il continuera au sein de son caucus à demander ce genre de participation au niveau fédéral dans les questions liées au commerce interprovincial, les questions constitutionnelles et les questions fiscales.
Il fut un temps, et il ne faut pas remonter bien loin, où les gouvernements fédéraux prenaient les devants dans ce genre de questions. À cette époque-là, le gouvernement avait un programme politique et législatif fort actif. C'était à la fin des années 80 et au début des années 90 sous Brian Mulroney qui, soit dit en passant, mérite d'être décoré de l'Ordre du Canada aujourd'hui. Étaient inclus dans ce programme une série de changements structuraux apportés à l'économie canadienne, des changements comme le libre-échange, la suppression de la taxe sur les ventes des fabricants et la déréglementation des services financiers et des transports. Ces changements ont permis au gouvernement actuel d'éponger le déficit.
Je remercie le député de reconnaître l'important rôle de chef de file que joue le gouvernement fédéral dans ces domaines. J'entrevois l'avenir avec optimisme. À mesure que surviendront des changements, et les événements de samedi peuvent nous en donner l'indication, le temps viendra où le gouvernement fédéral pourra jouer ce genre de rôle actif en prenant les décisions requises et en travaillant avec les provinces à titre de chef de file. Le gouvernement peut diminuer les dépenses destinées aux provinces, il peut se délester d'une foule de responsabilités, mais il ne peut pas se délester de son leadership.
[Français]
Le président suppléant (M. McClelland): Nous passons maintenant à la période de dix minutes de débat, sans questions et commentaires.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, vous dites qu'on n'a plus droit qu'à dix minutes, et que la période des discours de 20 minutes est terminée. C'est un peu dommage, parce que je pense qu'il est important de pouvoir parler de ce projet de loi de façon fondamentale, pour bien faire comprendre aux citoyens la raison pour laquelle le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a présenté l'amendement suivant au projet de loi portant sur la promotion du commerce électronique:
ne soit pas maintenant lu une deuxième fois, mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi soit retiré et l'objet déféré au Comité permanent de l'industrie.
Pourquoi le Bloc québécois souhaite-t-il que ce projet de loi soit révoqué, qu'il soit retiré? Historiquement, on avait prévu qu'il y aurait une Loi sur la protection des renseignements personnels. L'ancien ministre de la Justice avait fait des déclarations disant qu'il était important, fondamental, qu'il y ait au Canada une Loi sur la protection des renseignements personnels.
C'est probablement parce qu'il avait vu que le Québec en avait une depuis quatre ans qui touchait toute la question de l'industrie privée, qui est opérationnelle, qui fonctionne bien. C'était dans cette logique qu'était inscrite la démarche du gouvernement fédéral.
Le dossier est passé au ministre de l'Industrie. Il a décidé que c'était tout simplement une loi de promotion du commerce électronique. On ne s'occupe plus de la question de la protection des renseignements personnels. On ne s'assure plus de cet aspect très important.
Pour démontrer à quel point cette question est importante, je vais donner des exemples de ce qu'est le commerce électronique dans la vie de tous les jours de tous et chacun.
Par exemple, je prends une journée type dans la vie de quelqu'un. Il sort du stationnement de son immeuble; cette sortie peut être filmée par des caméras, même être inscrite sur une carte. C'est un type de transaction électronique.
Plus tard dans la journée, il envoie un message électronique personnel à un ami, un second message à un collègue. Les deux messages peuvent être lus par son employeur. Même s'il les efface de son écran, ils restent sur le disque rigide de l'ordinateur central.
Il fait l'achat d'un cadeau pour l'anniversaire de quelqu'un; le lecteur de la carte de crédit a enregistré les détails de sa transaction, et la carte loyauté du magasin assigne des points, des rabais ciblés à son achat. Sa banque peut étudier les tendances que révèlent ses dépenses pour élaborer avec précision ses profils. C'est la même chose pour les achats de médicaments.
Ce sont donc des choses qui nous touchent maintenant dans notre vie quotidienne. Contrairement à une transaction commerciale traditionnelle, où il y avait un lien direct entre un vendeur et un acheteur, en commerce électronique, il y a des impacts directs sur les comptes de banque, les listes de consommateurs et maintes autres choses qui font que l'information peut être utilisée à plusieurs fins. On s'attendait à ce que le gouvernement propose une loi qui permettrait de corriger cette situation.
C'est une des raisons pour laquelle nous proposons aujourd'hui un amendement pour que le projet de loi soit renvoyé au comité et pour que le gouvernement refasse ses devoirs.
On n'est pas les seuls à penser ainsi. Dans le Rapport annuel de 1996-1997 du commissaire à la protection de la vie privée, on fait état du rapport du Comité permanent de la de la justice et droits de la personne et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes qui mentionait: «Le comité a souligné l'importance de la vie privée en tant que droit fondamental de la personne. La Charte des droits à la protection à la vie privée qu'il propose serait un document quasi constitutionnel qui primerait sur toute loi fédérale et garantirait la protection et l'intégrité du corps, de l'esprit et des biens, la protection des renseignements personnels».
On soulève là un élément important. On voulait même que cela soit inclus dans une charte qui soit quasi constitutionnelle. Aujourd'hui, l'éléphant a accouché d'une souris du côté du gouvernement fédéral. On n'a pas du tout tenu compte de ce rapport. Je pense qu'effectivement, c'est la tendance de l'actuel ministre de l'Industrie de souvent céder aux lobbys des commerces plutôt que de rechercher un équilibre entre le commerce électronique et les consommateurs. Il faut promouvoir le commerce électronique, on est tous d'accord avec cela, c'est un secteur d'activité économique important qu'il faut laisser se développer. Mais, en même temps, il ne faut pas qu'il s'agisse d'un développement sauvage, parce que cela touche les gens dans leur quotidien en ce qui a trait à des renseignements personnels qui peuvent avoir des impacts sur leurs choix dans le futur. Donc, c'est une question qui est très importante.
Il y a un autre élément important pour lequel nous souhaitons que le projet soit remanié. Au Québec, il y a une loi qui fonctionne depuis quatre ans et qui couvre cet aspect. C'est d'ailleurs une des lois modèles au monde dans le domaine en ce qui concerne la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. On aurait voulu que la loi contienne ce qu'on retrouvait dans les communiqués de presse du ministre, c'est-à-dire qu'une province qui a déjà une loi dans le domaine pourrait la substituer à la loi fédérale.
Mais ce n'est pas le message donné par le ministre. Le gouvernement fédéral n'a pas jugé opportun de l'indiquer formellement dans la loi et il y a là un élément important à modifier. Les députés du Bloc ne peuvent certainement pas permettre de fonctionner sur des qu'en dira-t-on. Il suffirait qu'il y ait un nouveau ministre de l'Industrie qui aurait une approche beaucoup plus dure par rapport au Québec sur une situation donnée et qui lui ferait payer le prix. C'est inacceptable. Il faut que cela soit corrigé.
D'autant plus que la Commission d'accès à l'information du Québec, qui administre cette loi au Québec, a évalué le code CSA. Le code CSA est le code qui est intégré dans la loi dans une des annexes pour définir les conditions dans lesquelles les règles du jeu sont précisées. Ces règles ont été précisées à la suite d'une consultation, mais une consultation surtout avec des gens du secteur de l'industrie. Les consommateurs, eux, ont été beaucoup moins consultés.
Dans le rapport annuel de 1997-1998, la Commission d'accès à l'information soulignait, et je cite:
Par contre, le code CSA ne répond nullement aux objectifs des régimes de protection des renseignements personnels établis par les deux lois québécoises: assurer aux citoyens un règlement impartial et équitable des problèmes et différends qui peuvent survenir dans le domaine de plus en plus important du respect de cette dimension de la vie privée.
Donc, la Commission québécoise, qui administre la loi depuis quatre ans, nous dit que le code ne répond pas aux exigences nécessaires. On est devant une loi où il y a un code qui sera un peu la charpente, la pièce maîtresse de la loi. Le gouvernement se réserve le droit de modifier la loi et le code sans avoir à revenir devant le Parlement. En même temps, ce code n'est pas satisfaisant pour les gens du Québec. C'est donc inacceptable pour nous.
Puisque le Québec a pris les devants sur le reste du Canada, on ne peut pas reculer et accepter des choses protéger moins les renseignements personnels des citoyens. C'est une des différences qu'il y a dans notre société. Si les Québécois ont pris les devants là-dessus, ils ont le droit de profiter de la sagesse qu'ils se sont donnée, d'autant plus que c'est une loi qui a été adoptée par le gouvernement libéral précédent.
On ne peut quand même pas prétendre que c'est une loi qui a été mise de l'avant par les souverainistes pour embêter le gouvernement fédéral; c'est une loi qui a été adoptée par le gouvernement provincial précédent. Il y a eu une vaste consultation et c'est une loi qui fonctionne très bien.
D'ailleurs, dans le même rapport de la Commission d'accès à l'information du Québec, on dit: «Le régime québécois constitue aux yeux de la Commission d'accès à l'information la seule réponse respectueuse des droits des citoyens devant les défis soulevés par la mise en place de l'autoroute de l'information.»
On a pris la peine de dire: «la seule réponse respectueuse des droits des citoyens». On n'a pas parlé d'une des réponses respectueuses possibles. C'est la raison fondamentale pour laquelle nous demandons que le projet de loi n'aille pas plus loin. Selon nous, il n'est pas suffisamment respectueux des droits des citoyens devant les défis soulevés par la mise en place de l'autoroute de l'information.
Plus tôt, le secrétaire parlementaire citait le ministère du Développement des ressources humaines comme un exemple dans l'utilisation des données personnelles. Regardons ce qui a été fait avec les données concernant les chômeurs en vacances: ils sont allés coupler les données avec celles du ministère du Revenu, sans poser de questions sur le fond du problème. Qu'ils puissent faire cela sans avoir obtenu au préalable une décision à l'effet que c'était légal, qu'ils aillent de l'avant sur cette question, je pense que ce n'est pas le bon exemple à citer.
Il m'apparaît donc que nous sommes devant un travail mal complété. S'il s'agissait d'une loi qui ne concernait que 2 p. 100 ou 3 p. 100 de la population, on la jugerait, à sa face même, en ce sens. Mais cette loi va toucher des gens dans toutes sortes de transactions quotidiennes. Aujourd'hui, dans notre société, de plus en plus de gens font des transactions commerciales électroniques. De plus en plus de gens soumettent des informations qui les concernent.
À la suite de ce que le gouvernement fédéral a fait au sujet du numéro d'assurance sociale, pensez-vous qu'il n'y a pas de préoccupations importantes chez les citoyens pour s'assurer, encore plus, lorsque nous serons rendus dans le secteur privé, qu'il puisse y avoir une gestion bien surveillée de cette information.
Aujourd'hui, le gouvernement fédéral a décidé d'aller de l'avant avec une position qui vise tout simplement à favoriser le commerce, je dirais, comme dans un marché sauvage, où on ne donnera pas la protection suffisante aux renseignements personnels. Il y a là un déséquilibre. Je crois qu'il y a là matière à retirer le projet de loi, et je pense que le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière avait bien raison de proposer un tel amendement.
Je considère qu'il serait important que le gouvernement fédéral soit conscient des obstacles qui ont été placés devant lui.
Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre pour pouvoir continuer pendant une dizaine de minutes encore, car j'ai autre chose à dire sur le sujet.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: Il n'y a pas de consentement.
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, je regrette que mon collègue de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques n'ait pu continuer. Je sais qu'il a encore des choses intéressantes et importantes à dire.
Il est regrettable que certains députés de la Chambre aient refusé ce consentement. Je crains que ce soit parce qu'ils n'ont pas d'intérêt dans le sujet. Ils ne se rendent pas compte de l'importance de ce sujet. Ils ne se rendent pas compte que ce qui est en jeu, c'est le fait que les Canadiens et les Canadiennes n'auront pas la protection requise eu égard à leurs renseignements personnels, parce que la loi ne donne pas cette protection.
J'ai eu l'occasion, depuis deux jours, d'examiner plus à fond ce projet de loi, qui est une illusion, parce que pour être vraiment protégé, le citoyen, la citoyenne, le consommateur devra indiquer d'une façon directe, d'une façon volontaire, d'une façon déterminée qu'il refuse que ses renseignements soient divulgués.
Si, d'aventure, le consommateur ne pose pas ce geste volontaire en disant: «Non, je ne veux pas que mes renseignements soient divulgués», ils pourront l'être. Quand nous consommons, nous ne prenons pas la peine ni le temps de lire en détail tout ce qui est écrit sur une facture. Ce que nous regardons, c'est combien ça coûte et on règle le montant.
Si on ne fait pas attention, dorénavant, avec ce projet de loi, il y aura une petite case qu'on oubliera de cocher et qui fera en sorte que notre information pourra circuler comme bon lui semble.
Ce projet de loi, je le répète, est une illusion de protection. En fait, le projet de loi, d'une façon très directe, est là pour favoriser le commerce électronique. Il n'est pas là pour protéger le renseignement personnel. C'est un à-côté. C'est un genre d'encouragement que le projet de loi voudrait donner au consommateur et à la consommatrice en leur disant: «Écoutez, si vous utilisez les transactions électroniques, ne craignez rien, les choses vont se passer d'une façon correcte. Vos transactions ne seront pas interceptées. Vous n'avez pas à craindre que l'information que vous fournissez sera divulguée. Soyez en paix.»
La réalité, hélas, est tout autre. Le coeur de ce projet de loi réside dans une annexe. Partout dans le projet de loi, on fait référence à l'annexe 1 dans laquelle on retrouve un code d'éthique, à toutes fins pratiques, basé sur la volonté d'un regroupement d'industriels, de gens d'affaires et d'organismes dans le domaine commercial.
Le problème est que dans cette annexe, les choses sont écrites au conditionnel, et dans le texte de loi, il est expressément dit que ce qui est écrit dans l'annexe au conditionnel n'est là qu'à titre suggestif et non impératif. Cela veut donc dire que ce projet de loi est une illusion trompeuse, une illusion de sécurité, un voeu pieux qui pourra être contourné au gré de ceux qui voudront le faire et, mieux encore, que l'annexe 1 peut être modifiée au gré de l'industrie et du commerce.
Il y a des choses ici qui sont aberrantes. On en a déjà parlé lundi. Le Québec, depuis quatre ans déjà, dispose d'une loi qui a pour objet de protéger le renseignement personnel confié par le citoyen ou la citoyenne à une entreprise privée, et pas seulement dans un contexte de commerce, mais dans tout contexte. Le Québec est à l'avant-garde avec cette loi.
Lundi, j'entendais un député du gouvernement dire, à la Chambre: «Le Canada sera à l'avant-garde avec le projet de loi C-54». Mais pas du tout. L'avant-garde, c'est le Québec qui l'a, et depuis quatre ans. Le Canada ne sera probablement même pas un bon deuxième, parce que déjà, la Communauté européenne a des enlignements bien supérieurs à ceux que l'on retrouve dans le projet de loi C-54.
Cela me permettait de dire, lundi, que le projet de loi devrait retourner à la table à dessin. Le projet de loi devrait être retiré. Le ministre devrait refaire ses devoirs et les faire avec la protection du citoyen et de la citoyenne en tête. S'ensuivra naturellement une bonification du commerce électronique.
Mais là, on a renversé les choses. Heureusement, aujourd'hui, un amendement a été déposé justement à l'effet de demander au ministre de refaire ses devoirs. Ce n'est pas une faveur qui est demandée au ministre ici. Ce n'est pas une faveur que les citoyens et les citoyennes du Canada demandent, par notre bouche, au ministre. C'est simplement d'être aussi bien servis au Canada que nous le sommes au Québec. Je dirais même que c'est plus que cela. Si ce projet de loi devait éventuellement devenir une législation en vigueur, les problèmes au Québec seraient potentiellement considérables.
On le sait, les lois fédérales ont souvent préséance sur des lois provinciales. Il y a des corporations au Québec et dans le reste du Canada qui sont incorporées en vertu de la loi fédérale. Ces corporations, nul doute, préféreraient être sous le chapeau d'une loi faiblarde comme celle qui nous est proposée ici, plutôt que de devoir respecter une loi forte, une loi bien structurée, une loi faite pour protéger les citoyennes et les citoyens.
Le problème est de taille. Le problème est d'abord celui d'une loi qui a été mal pensée et mal orientée. On pense aider le commerce électronique en donnant des illusions aux consommatrices et aux consommateurs. Ce ne sera pas le cas, cela ne fonctionnera pas. Pire, on risque d'affaiblir une situation heureuse que le Québec vit depuis quatre ans et de laquelle le ministre aurait pu et aurait dû s'inspirer. Nous lui donnons aujourd'hui, avec l'amendement proposé à la Chambre, l'occasion de revoir son projet de loi, de le retravailler et, éventuellement, de le présenter à nouveau à cette Chambre.
J'entendais l'autre jour un député—du parti ministériel, évidemment—prétendre que même si on acceptait ce projet de loi, on pourrait le renvoyer en comité et le bonifier. Vous le savez, je le sais et la plupart des députés de cette Chambre devraient le savoir, un projet de loi en comité ne peut pas être modifié au-delà de sa portée originelle. Sa portée est de favoriser le commerce électronique.
Si on tente d'ajouter des dimensions supplémentaires à ce projet de loi, par exemple la protection du renseignement personnel confié à des organismes sans but lucratif, la protection des renseignements médicaux, fiscaux et autres, à ce moment-là, on dénature le cadre même du projet de loi qui est devant nous en lui donnant une ampleur qu'il n'a pas aujourd'hui. Ce n'est pas recevable et permis par les règles de la Chambre lorsque nous travaillons en comité.
Par conséquent, si ce projet de loi reçoit l'assentiment en deuxième lecture, nous nous enterrons dans un processus qui est sans issue. Nous allons tout droit vers la mise en vigueur d'une mauvaise loi qui aura des effets pervers, qui ne répondra pas aux exigences modernes et nécessaires pour faire face à une concurrence non seulement domestique, mais également internationale. Le Québec avait pris cette avance il y a quatre ans.
Dans un contexte de commerce international, les pays qui ont des lois qui sont plus responsables que le projet de loi que nous avons devant nous exigeront de leurs entreprises qu'elles ne transmettent de l'information internationalement qu'aux pays qui ont des lois à la même hauteur que les leurs. Cette loi ne sera pas à la même hauteur et, par conséquent, le risque est grand que certains pays mettent un embargo sur la possibilité de faire des transactions avec les citoyens, les citoyennes et les entreprises de l'État canadien.
Vous ne voulez pas cela et je ne veux pas cela. Le Québec a déjà une loi qui, elle, est à la hauteur internationale.
M. le Président, puisque que je vois que vous allez m'interrompre, puis-je demander le consentement unanime de la Chambre pour répondre aux questions.
Le Président: Est-ce que l'honorable député a le le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
[Traduction]
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-54, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, dont l'objet est d'assurer aux Canadiens la protection des renseignements personnels qui les concernent et qui sont recueillis, utilisés ou communiqués dans le contexte d'une économie et d'un monde de plus en plus fondés sur l'information.
Les dispositions concernant la protection des renseignements personnels sont fondées sur le code modèle de l'Association canadienne de normalisation dans ce domaine. Le commissaire fédéral à la protection de la vie privée, dont le mandat serait renforcé, devrait s'assurer que les règlements sont observés.
Le projet de loi C-54 a aussi pour but de légaliser la transmission d'informations en prévoyant certaines mesures de protection comme la signature électronique sécurisée de manière à ce que, par exemple, les organismes fédéraux, les conseils et les commissions puissent décider des mesures à prendre pour satisfaire aux exigences des lois et des règlements existants en utilisant des moyens électroniques au lieu du papier.
Notre caucus s'oppose au projet de loi C-54. J'en préciserai les raisons plus tard.
D'abord, qu'est-ce que le commerce électronique? On peut le définir en gros comme un type de transaction effectué au moyen de la technologie numérique, y compris les réseaux ouverts, c'est-à-dire Internet et les réseaux fermés, comme les systèmes utilisés pour l'échange de données informatisées, les cartes de débit et les cartes de crédit. À l'heure qu'il est, les transactions effectuées sur réseaux fermés à travers le monde représentent des billions de dollars. C'est pourquoi certains de nous s'intéressent à ce qu'on appelle le péage ou la taxe Tobin.
Des commentateurs de toutes sortes ont vanté les possibilités du commerce électronique.
[Français]
Par exemple, le président et directeur général de Bell Canada, M. Jean Monty, disait récemment aux délégués à une conférence à Ottawa que nous assistons de nos jours à la naissance d'une nouvelle économie, d'un nouvel ordre économique basé sur des réseaux et des puces électroniques. Ce transfert électronique de l'information a modifié la façon dont les humains interagissent entre eux et, pour cette raison, constitue un sujet de grande importance. Il serait donc sage d'examiner très attentivement toutes les décisions que nous prenons à cet égard. Voilà pourquoi je dis que le projet de loi à l'étude est le premier à aborder directement ce dossier tout nouveau du commerce électronique.
Tout d'abord, il est peut-être utile de parler de la définition même de commerce électronique. S'il faut adopter une compréhension générale du concept de commerce électronique, nous verrons qu'il englobe deux types très différents de transactions. L'un, qui s'est révélé très fructueux dans notre pays, comporte l'échange de l'information au moyen de réseaux fermés. Cela inclut des systèmes comme ceux qui sont utilisés pour les cartes de débit et les cartes de crédit. Je le répète, le Canada est reconnu comme un chef de file mondial dans la mise au point de l'infrastructure nécessaire pour ces genres de réseaux fermés.
L'autre type de transferts correspond à ceux qui sont effectués au moyen de réseaux ouverts comme l'Internet.
[Traduction]
Le choix de produits offerts est limité et peu de Canadiens sont disposés à verser des renseignements personnels dans un réseau qui ne leur semble pas entièrement protégé. De plus, nombreux sont ceux qui hésitent à utiliser le réseau Internet à cause de son contenu parfois offensant, comme la pornographie juvénile.
La Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques est censée faire partie intégrante de la stratégie du commerce électronique annoncée par le premier ministre il y a un mois, jour pour jour. Le but de cette initiative consiste à offrir des défis et des débouchés aux entreprises et aux consommateurs dans l'espoir que le Canada devienne un chef de file mondial dans le domaine du développement et de l'utilisation du commerce électronique d'ici l'an 2000.
[Français]
Il est vrai qu'Internet est un médium très difficile à réglementer. Cependant, les organismes canadiens chargés d'appliquer la loi doivent pouvoir s'acquitter de leurs obligations fondamentales en matière de protection du public. Comme l'a déclaré récemment Barbara Roche, sous-secrétaire d'État britannique responsable des Petites entreprises, du Commerce et de l'Industrie, les gouvernements ne doivent pas perdre de vue que le commerce électronique concerne essentiellement des êtres humains.
D'autres pays se sont fermement opposés au cryptage sans restriction, dont les États-Unis, la France, la Russie, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Il existe, de toute évidence, un consensus international quant aux dangers qu'il y a à autoriser l'utilisation de toutes sortes de produits de cryptage. Je me demande pourquoi le gouvernement a décidé de ne pas tenir compte de ce problème. En omettant de le faire, il semble avoir raté une occasion de coopérer avec d'autres pays pour résoudre ce problème de sécurité. J'espère que, pendant l'étude de ce projet de loi à la Chambre, le gouvernement jugera opportun de modifier cet aspect et qu'il permettra au Canada de se joindre aux autres pays afin de lutter contre l'utilisation à mauvais escient des produits de cryptage.
[Traduction]
Permettez-moi maintenant de passer aux raisons pour lesquelles notre caucus s'oppose au projet de loi C-54. Nous reconnaissons que le commerce électronique joue un rôle de plus en plus important dans la vie des Canadiens et qu'une mesure législative visant à accroître la confiance du public dans cette technologie et à faire du Canada un chef de file est, en principe, une bonne idée. Toutefois, du coin qu'ils occupent à la Chambre, les députés de notre parti réclament un cadre plus large pour réglementer le commerce électronique, où l'on reconnaîtrait que 70 p. 100 des Canadiens n'ont pas accès à Internet. Cela risque de créer une société de l'information composée de deux catégories de gens, ceux qui y auront accès et ceux qui en seront exclus.
Le projet de loi C-54 reconnaît la révolution économique que provoque le commerce électronique, mais ne tient aucunement compte du déplacement des travailleurs contre lequel de nombreux spécialistes nous ont mis en garde. La mesure législative ne prend pas en considération les limites de l'infrastructure des télécommunications et de l'accès à cette technologie. Les Canadiens des régions rurales s'inquiètent déjà des hausses exorbitantes des tarifs téléphoniques locaux qui rendent l'utilisation d'Internet impossible.
Les PME se sont plaintes des coûts énormes associés au commerce électronique et le projet de loi C-54 ne prévoit pas grand-chose pour les aider à devenir plus compétitives.
À notre avis, le projet de loi C-54, qui est censé constituer la première étape pour faire du Canada un chef de file dans le domaine du commerce électronique, est une mesure législative qui ne va vraiment pas assez loin. Notre caucus exhorte le gouvernement à examiner toutes les répercussions que pourrait avoir cette technologie sur tous les Canadiens.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, si le Bloc québécois a déposé cet amendement qui demande au comité de retravailler le projet de loi, c'est que la question de la vie privée et la protection des renseignements personnels dans le secteur privé est trop importante pour être bâclée. Elle est trop importante aussi parce que l'objet principal recherché par le ministre, c'est-à-dire la protection des renseignements personnels pour favoriser le commerce électronique, n'est pas adéquatement poursuivi par ce projet de loi.
Je vais essayer de m'expliquer. Il y a quatre ans, le Québec s'est doté d'une loi protégeant les renseignements personnels et la vie privée dans le secteur privé. C'était la première fois qu'un État le faisait en Amérique du Nord. Au moment de la préparation de ce projet de loi, il y a eu plein de gens pour dire: «Cela va être effrayant. Les entreprises ne seront pas capables de respecter les exigences». Pourtant, cette loi fonctionne. Je serais surprise d'entendre quelqu'un de l'autre côté de la Chambre dire qu'elle pose des problèmes énormes. J'étais même portée à penser qu'on en était assez fiers et qu'on voulait s'en inspirer.
À répétition, il y a eu, de l'autre côté de la Chambre, des promesses d'une loi qui protégerait les renseignements personnels, la vie privée, dans le secteur privé. Or, quand le ministre de l'Industrie a déposé son projet de loi, c'était clairement un projet de loi, comme son nom l'indique, qui veut favoriser le commerce électronique.
Il se trouve à y avoir plusieurs effets à cela. Le premier effet est que la loi elle-même est trop faible pour rassurer les consommateurs. Elle n'est pas de nature à atteindre même l'objectif qu'elle se fixe, c'est-à-dire favoriser le commerce électronique.
J'ai entendu à répétition, à la réunion convoquée par le ministre de l'Industrie et le gouvernement du Canada des ministres de l'OCDE, dire que pour favoriser le commerce électronique, il fallait rassurer les consommateurs. Cette loi, par sa faiblesse, ne peut pas rassurer les consommateurs.
Mais il y a un autre effet qui, pour le Québec, est parfaitement inacceptable. Mes collègues en ont parlé et il faut le répéter. Cette loi aura pour effet de créer au Québec même deux régimes: un plus exigeant, un moins exigeant, dans le secteur privé. C'est extrêmement embêtant.
Mais ce qui est encore plus embêtant, c'est que cette loi donne au gouvernement un pouvoir arbitraire total pour décider ce qui, dans une loi similaire à la sienne, s'appliquerait ou ne s'appliquerait pas dans la province concernée, donc, dans le cas présent, le Québec.
C'est absolument inacceptable qu'une loi, une loi qui fonctionne, une loi qui a été reconnue pour sa qualité, son efficacité, puisse être rendue caduque globalement, ou par secteur, ou par catégorie, et surtout, qu'on lui crée une espèce de compétition malsaine qui ne servira personne en créant à côté, pour d'autres institutions, des lois moins exigeantes.
On nous a dit: «Ah, mais le gouvernement ne veut pas empêcher l'application de la loi québécoise.» Nous ne pouvons pas croire cela quand le texte de la loi est ce qu'il est. Nous savons que les gouvernements changent, même si celui-ci voulait vraiment la protéger, et nous savons que les ministres changent. C'est donc parfaitement inacceptable.
Plus tôt, j'ai dit qu'un des effets était que la loi était trop faible. Elle est faible, parce qu'elle ne couvre pas adéquatement les besoins de préservation de la vie privée. On sait à quel point les atteintes à la vie privée sont nombreuses dans ce monde où l'électronique est partout. Nous savons qu'il y a des dossiers qui se constituent sur les citoyens partout, que les citoyens, souvent, ne connaissent pas l'existence de ces dossiers, et que s'ils veulent les faire corriger, ils n'en sont pas capables non plus.
Le gouvernement accepte que ce soit un code volontaire auquel on se réfère dans la loi, un code volontaire où, quand il s'agit des droits des citoyens, on utilise le conditionnel, un conditionnel qui est extrêmement inquiétant. Je reconnais l'effort fait par les entreprises qui veulent se donner une façon de respecter les renseignements personnels, mais cela ne peut en aucune façon remplacer la responsabilité de l'État.
Je vais maintenant citer le discours, à l'OCDE, du secrétaire d'État à l'Industrie de la France, M. Christian Pierret. Il disait: «D'une part, il appartient au secteur privé de développer des pratiques, des normes et des outils pour instaurer la confiance.» Il ajoutait: «Deuxièmement, si les entreprises et les utilisateurs doivent être les principaux inspirateurs—inspirateurs de la confiance, il leur en revient beaucoup—les gouvernements sont les garants de l'intérêt public.»
C'est à cela que nous invitons le ministre de l'Industrie, non seulement à appuyer les entreprises dans leurs efforts, à les saluer, mais à soulever avec force que le gouvernement est le garant de l'intérêt public pour que cet intérêt public soit rassuré.
M. Pierret dit: «La confiance nécessite un cadre juridique sûr, stable, et qui préserve les intérêts légitimes de tous les acteurs. On ne peut pas prendre la chance de couvrir certaines organisations et pas d'autres». En France, je tiens à l'ajouter, ce cadre juridique, je le rappelle avec force, existe. Il dit: «Nous ne sommes pas dans un espace de non-droit». Ce n'est pas vraiment le cas au Canada et le ministre lui-même répond que pour ce qui est de la protection des renseignements personnels, les situations sont extrêmement inégales et inacceptables.
Cette situation d'inégalité et d'inefficacité doit être changée. Le ministre en a l'occasion. Qu'il prenne l'initiative. Nous serons heureux de la saluer. Il ne peut pas se contenter d'une loi bâclée qui ne donne pas aux citoyens la protection à laquelle ils ont droit.
Il n'est absolument pas rassurant de voir dans le code les conditions pour la cueillette, le stockage, le traitement des données et pour l'intervention des citoyens relativement à leurs dossiers. Non seulement cela n'est pas rassurant, mais la sanction qu'il y a, si les dispositions ne sont pas respectées, c'est seulement le recours au commissaire à la vie privée qui peut faire enquête et faire rapport, et c'est tout. Il ne peut pas trancher.
Or, il y a des questions de capacité d'accès à son dossier, comme faire changer une information qui est fausse. Est-ce qu'il faudra aller en cour pour faire cela? On sait que tout le monde n'en a pas les moyens. On sait qu'en plus il faudra que le citoyen attende le rapport du commissaire à la vie privée. Les conditions d'efficacité n'existent pas parce qu'en plus d'avoir des exigences insuffisantes, le recours lui-même est fugace. Le recours n'existe à peu près pas.
Le secrétaire d'État français dit que la protection à la vie privée des données personnelles est un droit dont les pouvoirs publics sont, en dernier ressort, les garants, tout comme ils sont les garants de la prévention et de la répression des...
Le Président: Je regrette, mais le temps alloué à l'honorable députée est maintenant écoulé.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, vous allez me permettre de remercier madame la députée de Mercier, notre collègue du Bloc québécois qui, aujourd'hui, nous interpelle. Ce qu'elle nous dit, c'est que les renseignements à la vie privée, l'accès à la vie privée et les renseignements personnels sont des questions extrêmement importantes et préoccupantes dans un monde moderne et que le projet de loi qui est devant nous est inacceptable.
Ce n'est pas la première fois que la députée de Mercier veut mettre toute sa fougue et toute son intelligence à convaincre le gouvernement d'entendre raison. Elle l'avait fait pour l'assurance-emploi. Elle l'avait fait lors de la loi spéciale sur l'industrie ferroviaire. Mais, dans toutes les cas, on se bute à un gouvernement obtus, têtu, insensible et gentiment stupide qui refuse toute espèce de collaboration.
Ce dont il s'agit, c'est de retourner le projet de loi en comité, là où les députés peuvent donner leur pleine mesure. C'est en comité qu'on peut véritablement bonifier le projet de loi et s'assurer que nous avons bien compris l'appel de nos concitoyens qui ont la possibilité de se faire entendre.
Ce dont nous sommes appelés à débattre dans ce projet de loi, c'est toute la question de la protection des renseignements personnels qui concernent les individus et qui, dans ce cas-ci, sont détenus par l'entreprise privée.
Monsieur le Président, vous qui êtes un connaisseur et un homme soucieux des droits de la personne, vous allez dire: «Oui, mais c'est une question de droit fondamental dans un monde où l'électronique a la puissance qu'elle a, dans un monde où il est facile, en poussant sur un bouton, d'avoir accès à des renseignements extrêmement personnels dans la vie des gens». C'est un droit fondamental et la question à poser est en quoi cela devrait d'abord et avant tout concerner le commerce.
N'aurait-on pas été en droit de s'attendre que toute la question de la protection des renseignements personnels concerne la Loi canadienne des droits de la personne? C'est une disposition qui devrait concerner tout autant la Loi canadienne des droits de la personne qui, on le sait, non seulement interdit la discrimination sur un certain nombre de motifs, mais fait en sorte que les individus puissent se sentir protégés dans un texte de loi extrêmement important qui régit les relations entre l'État et les citoyens, mais également qui régit les relations de citoyens à l'intérieur d'entreprises de juridiction fédérale.
Avant que ce projet de loi ne soit adopté, l'opposition, la députée de Mercier en tête, va déployer tous les moyens pour que ce projet ne soit pas adopté. Je dis, projet de loi, mais on comprendra que c'est une espèce de feuille de chou bâtarde, sans envergure, mal écrite, au conditionnel, dont le texte fondamental est l'annexe.
N'importe quel étudiant en droit, dont mon collègue, le député de Berthier—Montcalm, éminent juriste, sait très bien que ce qui est la quintessence d'un projet de loi, c'est son corps et son architecture. Dans ce cas-ci, on est dans une situation absolument, ma foi, invraisemblable où l'essentiel de ce que l'on nous demande d'adopter comme législateurs se retrouve dans une annexe écrite au conditionnel, avec toutes sortes de confusions, toutes sortes d'imprécisions, qui fait que n'importe quel avocat un peu averti donnerait la note C à un projet de loi aussi mauvais que détestable.
À ce moment-ci, je vous demande de vous retenir pour ne pas rire. Ce qui est le plus farfelu, c'est que non seulement on n'est pas capable d'aborder ce projet de loi sous l'angle de la protection de la vie privée, de l'accès à l'information et aux renseignements personnels en en faisant et en érigeant son hôtel des droits de la personne—quelque chose qui devrait être à l'abri de toute espèce d'indiscrétions et de toute espèce de diffusions—mais tenez-vous bien, je vais lire le titre du projet de loi et vous allez comprendre dans quelle espèce de monde de confusion ce gouvernement tente de nous entraîner: «Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois».
Ne faut-il pas avoir les idées assez claires? Ne faut-il pas être assez confus? Ne faut-il pas vivre sur une autre planète pour nous donner un intitulé aussi mal foutu que celui-là? N'importe quel étudiant de droit en première année serait mal avisé de présenter un travail à un professeur à l'UQAM ou ailleurs où on aurait un intitulé comme celui-là.
Quel message émane de cette loi? Que doit-on comprendre comme législateurs? Je ne voudrais pas réveiller les ministériels, mais que doit-on comprendre de cette loi? On dit que ce gouvernement doit s'intéresser aux renseignements personnels, au respect de la vie privée, seulement dans un cadre commercial, et pas n'importe lequel, dans un cadre commercial qui sera balisé de façon électronique.
N'aurait-on pu penser que le ministre de l'Industrie, une fois dans sa vie, puisse entendre raison et s'inspirer de la loi québécoise, une des lois les plus modernes, une des lois les plus avant-gardistes, une loi qui a résisté à l'épreuve du temps, puisque cela fait déjà quatre ans qu'elle est en vigueur, et qui aurait pu servir d'inspiration à ce gouvernement?
Mais non. Ce n'est pas de cela dont il s'agit. Il n'est pas question de s'inspirer du Québec, après tout. Le gouvernement fédéral—la députée de Mercier l'a dit—va se donner, par l'article 27 de la loi, la possibilité de décider ou pas si une province, qui a déjà une législation analogue ou qui peut être assimilée, pourra, de façon dérogatoire, se voir soustraite à l'application de la loi.
Cela n'a pas de bon sens. M. le Président, vous devriez, séance tenante, vous lever et rappeler le projet de loi, le demander au gouvernement immédiatement. Il sortirait grandi du débat parce qu'il pourrait compter sur l'appui de la députée de Mercier, sur le Bloc québécois. Je crois qu'il pourrait aussi compter sur l'appui du Parti progressiste-conservateur qui est encore loin de former un gouvernement, on en conviendra. Il pourrait aussi compter sur celui du NPD pour que tout le monde aille en comité, et cent fois revienne sur le métier, pour qu'on puisse, de façon éclairée, en s'inspirant de l'exemple du Québec, récrire le projet de loi, faire des recommandations pour s'assurer que cette espèce de feuille de chou bâtarde, sans envergure, mal écrite, au conditionnel, dont l'essentiel du texte est dans une annexe qui traîne les pieds à la fin du projet de loi, trouver le véritable sens qu'un État soucieux de l'intérêt public doit offrir à ses concitoyens.
Ce n'est pas peu de choses quand on y pense bien. Je le répète, si encore une fois on avait voulu s'inspirer du Québec, on aurait découvert que la Loi sur les renseignements personnels concerne bien sûr des transactions commerciales, mais qu'elle concerne également les relations de travail.
Je vais donner un exemple, parce que je sais qu'il faut être pédagogique à la Chambre, compte tenu du fait que les députés ministériels ne comprennent pas vite. Prenons le cas d'un travailleur de chez Eaton. L'employeur a des renseignements personnels à son sujet—plan de carrière, toutes sortes de données le concernant—, dans un dossier qui est à Toronto. Le travailleur qui est à l'emploi d'Eaton, lui, est à Montréal. À Montréal, au Québec, avec la loi telle que nous la connaissons et telle qu'elle existe depuis quatre ans, il serait possible pour ce travailleur, même si le siège social est à Toronto, d'avoir accès à l'ensemble de l'information qui le concerne.
Est-ce que ce sera le cas avec le projet de loi C-54? Non, ce ne sera pas le cas parce que le projet de loi, tel qu'on le connaît, tel qu'il est devant nous, s'il n'est pas modifié, ne couvrira pas le champ des relations de travail. Même s'il y a un commerce interprovincial qui peut s'effectuer et qu'Eaton n'a pas seulement des succursales au Québec, l'accès à l'information ne se fera pas dans un cadre commercial mais dans un cadre de relations de travail. On a été informés que c'est une lacune de la loi et que cet employé d'Eaton ne pourrait pas avoir accès à cette information.
Puisque vous m'indiquez que mon temps de parole est écoulé, monsieur le Président, je vous invite à rappeler cette loi, elle n'a pas de bon sens. De grâce, que l'on aille travailler en comité.
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, je vais relire l'amendement proposé par un collègue de ma formation politique, le Bloc québécois:
Que le projet de loi C-54, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques [...] ne soit pas maintenant lu une deuxième fois mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi retiré et l'objet renvoyé au Comité permanent de l'industrie.
Le but du projet de loi est de protéger les renseignements personnels. Cette loi est très timide et risque de pénaliser bon nombre de Québécois et de Québécoises.
Au Québec, en 1982, le gouvernement a adopté une loi protégeant la vie privée dans le secteur public. Toutes les provinces et le gouvernement fédéral se sont également, par la suite, dotés d'une loi similaire. Je rappelle que cela protègeait la vie privée dans le secteur public uniquement.
En 1994, sous le gouvernement de Robert Bourassa et de Daniel Johnson, donc un gouvernement libéral à Québec, on a amélioré la loi de 1982 en adoptant une loi élargissant la protection des renseignements personnels, au secteur privé.
Le Québec, par conséquent, est le seul État en Amérique du Nord à avoir une loi qui protège les renseignements personnels dans le secteur privé, et ce, depuis quatre ans maintenant.
Le projet de loi C-54 fait donc suite, au niveau fédéral, à de nombreuses promesses qu'une loi fédérale protégerait les renseignements personnels dans le secteur privé.
Je ne veux pas relire le titre de la loi, puisque je ne dispose que 10 minutes, mais mon collègue qui m'a précédé, le brillant député d'Hochelaga—Maisonneuve, s'est donné la peine de lire le titre qui comprend neuf lignes, en des termes très juridiques. On se rend compte, à la toute fin, que ce projet de loi ne vise véritablement pas à protéger les renseignements personnels dans le secteur privé, mais plutôt à promouvoir les ventes d'équipements électroniques.
Le projet de loi C-54 est très timide. À cet égard, il pourrait, comme je le disais tout à l'heure, priver plusieurs Québécois et Québécoises des droits qu'ils possédaient à l'intérieur de la loi adoptée en 1994 par le Parti libéral de l'époque.
Mon collègue a donné, tout à l'heure, l'exemple d'un employé d'Eaton à Montréal, et la maison mère à Toronto où sont empilés les dossiers personnels. Or, l'employé d'Eaton qui voudrait aller vérifier s'il n'y a pas des faussetés dans son dossier, en a le droit présentement, en vertu de la loi québécoise. Mais une fois qu'on aura adopté le projet de loi C-54 en troisième lecture, tel que proposé par le gouvernement du premier ministre et député de Saint-Maurice, l'employé n'en aurait plus le droit, parce que, dit-on dans la loi, il ne s'agit pas ici de relations commerciales, mais bien de relations de travail. Alors, il n'en aurait pas le droit.
S'il veut absolument voir ce qu'on a inscrit dans son dossier, il devra se diriger vers un tribunal fédéral. Cela n'a pas de bon sens.
Cette loi mérite tout au moins d'être grandement modifiée ou tout simplement retirée du Feuilleton, ce qui serait l'idéal. Ce que proposaient le député de Sherbrooke et le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, c'est tout simplement de le retourner au Comité permanent de l'industrie, où les députés ministériels et ceux de l'opposition pourraient voir à l'amélioration sensible et marquée de ce projet de loi.
Ce qui blesse aussi, ce sont les pouvoirs exorbitants qui sont accordés au gouverneur en conseil grâce à l'article 27(2)b) du projet de loi C-54. Le gouverneur en conseil, c'est dangereux. De plus en plus que je connais l'évolution de ce Parlement et du pays tout entier, je me rends bien compte qu'il ne faut pas donner de pouvoirs plus qu'il en possède présentement au premier ministre, surtout celui qui est là actuellement.
Je me rappelle toujours du gouvernement libéral de Pierre Trudeau, où, à l'intérieur du Cabinet de Trudeau, il y avait le premier ministre actuel qui y jouait un rôle déterminant, on s'en souvient, j'en suis certain. Ils avaient convenu d'appliquer la Loi des mesures de guerre, et on avait emprisonné près de 500 notables au Québec, dont la regrettée Pauline Julien. On l'avait emprisonnée pendant huit jours, sans aucune accusation par la suite, sous prétexte qu'elle pouvait être dangereuse. Ce sont des situations aberrantes comme celle-là que le Parti libéral gouvernant le Canada a utilisées au début des années 1970.
On voit encore présentement les ordres qui originaient du bureau du premier ministre, et le premier ministre lui-même qui ordonnait à la GRC, le 25 novembre dernier, à Vancouver, de «cleaner» la place—je reprends l'expression du premier ministre—pour 16 heures. Vingt secondes après que l'officier de la GRC ait donné ces directives, des jeunes étudiants accompagnés de leurs parents se faisaient copieusement arrosés de poivre.
Heureusement qu'on avait prévu le coup à la GRC. On avait, tout de suite, apporté en même temps que le poivre, des serviettes imbibées d'eau pour amoindrir les inconvénients causés à ces étudiants qui seront probablement nos remplaçants de demain, notre élite, ou possiblement des premiers ministres, députés ou encore des présidents d'Assemblée ou de la Chambre des communes.
D'un côté, ce gouvernement va investir plus de 2 milliards de dollars. On a voté des crédits et on a déjà investi dans les bourses du millénaire, un champ de compétence qui ne regarde nullement le gouvernement fédéral. On le fait pour se donner bonne gorge auprès des étudiants et, quelques heures plus tard, on va en brasser quelques centaines et on les emprisonne. Un étudiant racontait qu'on l'a emprisonné durant huit heures sans déposer aucune accusation contre lui et, pis encore, on l'a obligé à signer une formule à l'effet qu'il ne retournerait pas manifester au Sommet de l'APEC.
Le premier ministre a utilisé ses pouvoirs à mauvais escient. Dans le projet de loi C-54, on donne à ce premier ministre des pouvoirs qui seront transférés à ceux qui lui succéderont. C'est un homme que je crois parfois dangereux. Il ne faut pas lui donner de pouvoirs. Ce premier ministre en remet en disant que si on n'avait pas utilisé le poivre de Cayenne, on aurait pu se servir d'un bâton de baseball. Le lendemain, il disait qu'on aurait pu se servir de canons à eau. On aurait pu se servir, et pourquoi pas, comme en Chine sur la place Tiananmen, de chars d'assaut et les tuer tout simplement! C'est un homme dangereux et je ne comprends pas que certains de mes collègues refusent qu'on paye des avocats pour qu'on fasse finalement la lumière dans ce cas bien précis qui s'est produit le 25 novembre dernier, il y a bientôt 11 mois.
Donc, avec ce projet de loi C-54 qui vise à protéger les renseignements personnels de nos concitoyens, il est difficile de croire que ce gouvernement est sérieux lorsqu'il dit qu'il va protéger nos renseignements personnels alors qu'il ne respecte même pas nos droits civiques. Dans ce pays, c'est un droit reconnu de tous que celui de manifester notre désaccord envers un dictateur étranger en visite chez nous, tout comme on a le droit d'applaudir la reine Elizabeth II lorsqu'elle vient à Ottawa.
Où donc ce gouvernement veut-il nous emmener? Vers une dictature, peut-être? Monsieur le Président, je vous invite à faire les pressions dont vous êtes capable auprès du gouvernement pour qu'il retire le projet de loi C-54 dans les plus brefs délais.
M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi de la plus haute importance. Ce projet de loi touche à une valeur fondamentale de notre société, la protection de la vie privée.
La nécessité d'adopter un projet de loi qui protège les renseignements personnels et la vie privée ne date pas d'hier. La plupart des provinces se sont déjà dotées d'un tel projet de loi. Le gouvernement fédéral a longtemps tardé à prendre ses responsabilités en proposant une loi qui s'appliquerait notamment aux entreprises qui relèvent de sa juridiction.
On aurait pu s'attendre à ce que ce long délai soit profitable au Parti libéral pour proposer un projet de loi cohérent, efficace, clair et en harmonie avec les autres juridictions. Malheureusement, pour tous les Québécois, Québécoises, Canadiens et Canadiennes, ce projet de loi rate lamentablement la cible.
Au lieu de protéger la vie privée, ce projet de loi se limite à protéger le droit des grandes entreprises à faire des profits avec le moins de contraintes possible. C'est inacceptable.
Dans les minutes qui suivent, je vais revoir quelques-unes des raisons qui nous poussent, au Bloc québécois, à rejeter catégoriquement ce projet de loi incohérent, inéquitable et incomplet.
Nous déplorons, dans un premier temps, que le Parti libéral du Canada se serve de cette initiative vide et confuse pour tenter de convaincre nos concitoyens et concitoyennes que la protection de la vie privée les intéresse. Personne ne peux se fier à un projet de loi au conditionnel, qui se base sur le volontariat et qui est plein de trous, pour protéger sa vie privée.
Tout d'abord, j'insiste sur le caractère fondamental du droit à la vie privée. D'autres en ont parlé avant moi, mais j'y reviens, parce que dans ce projet de loi, le Parti libéral place le droit de faire des profits avant le droit à la vie privée.
Le droit à la vie privée est assimilé par les experts à un droit humain, au même titre que le droit à l'égalité et à la justice. Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Organisation des Nations unies, il y a 50 ans, et à laquelle le Canada a adhéré, précise que chacun a le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, et prévoit que, et je le cite: «Nul ne sera l'objet d'intimidations arbitraires dans sa vie privée, sa vie de famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation».
Au Canada, la Charte des droits et libertés a aussi fait écho à la protection de la vie privée, même si cette protection n'est pas inscrite comme telle dans la Charte. C'est en ce sens que les cours de justice ont interprété les articles 7 et 8 de la Charte. Je vais citer ici l'article 7, dans un premier temps:
7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.
L'article 8 précise ceci:
8. Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
Au Québec, comme on le sait probablement, ce droit à la vie privée est reconnu explicitement dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne promulguée en 1975. Au regard de l'article 5, aucune ambiguïté—je dis bien aucune ambiguïté—à la vie privée n'est discutable, et je le cite:
5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée.
C'est la Charte québécoise des droits et libertés de la personne qui le dit. Ce droit est également reconnu dans le Code civil du Québec, au chapitre 3, intitulé «Du respect de la réputation et de la vie privée» que je me permets encore une fois de citer. J'invite mes collègues d'en face à bien écouter ce que je vais dire. Ils auraient peut-être intérêt à copier et à voir ce qui se fait au Québec actuellement. L'article 35 dit ceci:
35. Toute personne a droit au respect de sa réputation et de sa vie privée. Nulle atteinte ne peut être portée à la vie privée d'une personne sans que celle-ci ou ses héritiers y consentent ou sans que la loi l'autorise.
Je pense avoir fait la démonstration que le respect de la vie privée est un droit fondamental reconnu, autant sur le plan international que sur la scène canadienne et québécoise. Il est aberrant de constater que le gouvernement fédéral nous propose un projet de loi qui ne protège pas ce droit fondamental.
La situation du Québec à cet égard est particulièrement exemplaire. En effet, le gouvernement du Québec est le seul gouvernement en Amérique du Nord—je dis bien, en Amérique du Nord—à s'être doté de lois pour régir la protection des renseignements personnels dans les secteurs public et privé. D'ailleurs, de nombreux experts affirment que la loi québécoise qui s'applique au secteur privé serait l'une des meilleures au monde.
Il est étonnant, dans ce contexte, que le gouvernement ne se soit pas inspiré de la loi québécoise. Il aurait ainsi atteint deux objectifs simultanément. Il aurait probablement atteint son objectif avec son projet de loi. Il a plutôt laissé de côté ce qui avait inspiré le Québec et s'est concentré sur un projet de loi bidon. Quels sont ces deux principes et ces deux objectifs qui auraient pu être atteints simultanément s'il s'était inspiré de la loi québécoise? Dans un premier temps, il aurait assuré aux consommateurs une protection exemplaire. Dans un deuxième temps, il aurait évité toutes les échappatoires et les difficultés inévitables d'application de la loi quand les lois fédérales et provinciales ne sont pas harmonisées.
Si ce gouvernement s'était inspiré de la loi québécoise, ce sont ces deux objectifs qu'il aurait pu atteindre avec ce projet de loi. Mais le gouvernement a décidé de faire fi de ce qui s'est fait jusqu'à maintenant au Québec.
C'est ce qui nous pousse à croire que l'objectif véritable de ce projet de loi n'est pas la protection de la vie privée, mais plutôt un pauvre exercice de relations publiques. Le gouvernement voudrait se servir de ce projet de loi pour faire croire qu'il répond enfin aux préoccupations de la population. Mais, rien n'est plus faux. Ce projet de loi ne répond pas aux attentes des citoyens du Québec qui désirent voir leur vie privée protégée. Il se limite plutôt à satisfaire des intérêts commerciaux.
Même le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada note que le document de travail proposé par Industrie Canada et le ministère de la Justice est orienté avant tout vers le commerce et non vers la protection de la vie privée. D'ailleurs, il dénonce aussi le fait que les citoyens sont définis comme de simples consommateurs par le gouvernement fédéral, et non pas comme des individus ayant droit à la protection de leur vie privée.
Ce n'est pas seulement le Bloc québécois, ce n'est pas simplement l'opposition qui le dit. Je viens de citer le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada.
Pour conclure, on n'a qu'à comparer les titres des deux lois. Mon collègue de Hochelaga—Maisonneuve l'a fait avec éloquence tout à l'heure. Celle du Québec est intitulée: «Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.» Le titre alambiqué du projet de loi fédéral est: «Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances.»
Alors que la loi québécoise a pour objectif de protéger la vie privée et assujettit toutes les organisations, le projet de loi fédéral ne s'applique qu'aux transactions faites dans un but commercial. Clairement, la loi du Québec est plus stricte et plus complète, tant dans sa forme, ses définitions, sa clarté que par le pouvoir d'ordonnance qu'elle donne au commissaire. C'est un pouvoir qui n'existe tout simplement pas au niveau fédéral.
C'est pour ces raisons que nous rejetons catégoriquement le projet de loi C-54. Le gouvernement fédéral a refusé de s'inspirer de la loi québécoise, alors que celle-ci est reconnue comme étant exemplaire dans ce domaine.
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté depuis ce matin les divers intervenants sur le projet de loi C-54 qui, dans son titre, comme le soulignait le député de Rosemont, et d'après le libellé du texte, consiste surtout à faciliter et à faire la promotion du commerce électronique.
On voit que le souci de préserver le consommateur, l'individu et la vie privée passe au second rang. C'est d'abord une loi de nature commerciale, si j'ose m'exprimer ainsi. C'est d'ailleurs pourquoi c'est le ministre de l'Industrie qui l'a parrainée.
Bien sûr, cela peut répondre à certains impératifs. Il ne manquera pas d'hommes d'affaires ou d'entreprises pour venir justifier la raison d'être de ce projet de loi. Généralement, la principale raison pour laquelle on est en affaires, c'est pour maximiser les entrées, les revenus. Moins on a de contraintes, plus les bénéfices peuvent augmenter.
Mais la vie privée, c'est quand même quelque chose d'important. Comme le disait si bien le député de Rosemont—je fais miens ses propos—la préoccupation devrait surtout être portée sur la protection des renseignements personnels de l'individu.
Je tiens à signaler aux députés d'en face qui ont déposé ce projet de loi et au ministre de l'Industrie en particulier où peuvent parfois se rendre des indiscrétions.
Je me souviens, pour l'avoir lu dans les journaux, il y a quelques années—je ne citerai pas la province—que des policiers qui avaient une banque de renseignements confidentiels vendaient ces renseignements à des agences de perception. On me répondra: «Qui paie ses dettes s'enrichit». Je comprends, mais ces agences de perception ou de collection revendaient ces renseignements à des groupes criminalisés qui, eux, cherchaient des débiteurs en défaut pour souvent s'en prendre à eux physiquement, et dans un cas, si ma mémoire m'est fidèle, pour en éliminer un. Il s'agissait d'une bande de motards criminalisés qui avaient fait appel aux services d'une firme qui se spécialise dans le retraçage des personnes, et moyennant un petit montant—pas grand-chose, finalement—la vie d'une personne avait été détruite.
Donc, il est très important de protéger les renseignements concernant la vie privée, renseignements qui peuvent sembler anodins pour certains, surtout pour ceux qui les commercialisent, mais qui peuvent avoir des conséquences absolument dramatiques pour ceux qui subissent cette indiscrétion.
Ce n'est pas le souci du ministre de prendre soin du corps et des biens des personnes, mais surtout de s'intéresser—comme c'est son devoir, et il l'a bien fait jusqu'à présent, je pense—à l'industrie, à sa rentabilité, et de répondre aux demandes que les lobbys de l'industrie lui présentent pour pouvoir faciliter tel ou tel type de commerce ou la création de tel type de commerce.
Mais revenons au projet de loi lui-même et à l'article 7 de sa section 1: «Pour l'application de l'article 4.3 de l'annexe 1 [...].»
On sait ce qu'est l'annexe, c'est le code de déontologie des gens qui ont pour vocation de trahir leurs semblables devant des informations concernant les individus. Ce code de déontologie est au conditionnel; il y a beaucoup de «serait», «pourrait» et «devrait». Le corps du projet de loi lui-même et l'annexe, l'annexe de voeux pieux, ont confondu l'ensemble des intervenants du milieu, ceux qui sont chargés, comme Equifax et d'autres compagnies du genre qui sont devenus extrêmement riches à faire les délateurs, à recueillir et à vendre des renseignements, parce qu'ils ne donnent rien.
L'article 7 dit ceci, et je cite:
7. Pour l'application de l'article 4.3 de l'annexe 1 et malgré la note afférente, l'organisation ne peut recueillir de renseignement personnel à l'insu de l'intéressé et sans son consentement que dans les cas suivants:
a) la collecte du renseignement est manifestement dans l'intérêt de l'intéressé et le consentement ne peut être obtenu auprès de celui-ci en temps opportun;
Jusque-là, ça va. Quelqu'un subit un accident de la circulation, il est inconscient, on veut savoir quel est son groupe sanguin, son adresse pour aviser ses parents; à ces fins, je comprends qu'on puisse introduire une disposition semblable dans le projet de loi.
On dit qu'on peut communiquer de l'information sans le consentement de l'intéressé dans le cas suivant:
b) il est raisonnable de s'attendre à ce que la collecte auprès de l'intéressé puisse compromettre l'exactitude du renseignement, ou contrarier les fins ou compromettre l'usage auxquels le renseignement est destiné;
Là, je pense à Equifax. Si une personne fait une enquête sur quelqu'un, et si cette personne ne veut pas dévoiler, par exemple, son passé financier, économique, politique aussi, c'est bien sûr que le recueilleur Equifax va dire: «Eh bien non, je ne le demanderai pas à lui, il ne me le donnera pas». Donc, cela ouvre la porte pour qu'il le demande à n'importe qui ou qu'il le vende à n'importe qui. C'est là qu'est le danger.
Le ministre, lui, ce n'est pas parce qu'il n'a pas voulu, ce n'est pas parce qu'il n'a pas vu, c'est parce qu'il n'a pas voulu voir les dangers que comporte son projet de loi, spécialement à son article 7(1)b).
À l'alinéa c), on dit ceci:
c) la collecte est faite uniquement à des fins journalistiques, artistiques ou littéraires.
On peut vivre avec ça. Mais où c'est vraiment catastrophique pour l'individu, c'est à l'alinéa 7(1)b). Et cela continue ainsi. On donne plein d'échappatoires dans le corps même de la loi.
On pond une loi, on a un code de déontologie—si je peux le qualifier ainsi, entre guillemets—que les commerçants d'informations privilégiées se sont donné. On dit dans le projet de loi que tout ce qui est au conditionnel dans l'annexe, dans le code de déontologie, ce n'est pas impératif. C'est «si on veut bien», «si on pense qu'on devrait», «si on pouvait», «si on voulait». Il n'y a pas de coercition là-dedans; on n'impose rien à personne.
On veut nous faire croire que c'est une loi qui est vraiment et manifestement déposée pour venir au secours des personnes qui sont accablées par des solliciteurs de toutes sortes, par des collecteurs avec des ruses plus ou moins habiles. On l'a vu d'une compagnie qu'on connaît bien, où on est allé chercher des renseignements tout à fait confidentiels sur la présidente d'une importante PME du Québec, une belle entreprise—Mme Verreault, pour ne pas la nommer—une Gaspésienne, comme moi d'ailleurs, qui réussit très bien en affaires.
Son compétiteur direct, son adversaire en affaires, a engagé une firme qui, par toutes sortes de subterfuges, de manigances, d'utilisation de faux et de fausses représentations sur son identité, a réussi à glaner des informations un peu partout mettant en péril la vie privée de cette dame, sa vie économique, sa vie financière, au profit de l'un de ses compétiteurs.
Le ministre, lui, arrive avec sa «loi sur les voeux pieux», comme je pourrais qualifier le projet de loi C-54. Il est encore temps qu'il réalise tout le mal, sinon celui qu'il fait lui-même, mais celui qu'il pourrait empêcher qu'on fasse aux autres, s'il retirait ce projet de loi qui a été garroché en vitesse. C'est un travail bâclé, c'est une loi qui ne vivra pas longtemps. Comme le disait le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière: «Je serais bien surpris qu'elle passe l'hiver». Ce n'est pas parce qu'on va la révoquer ici. Lorsque c'est adopté par les libéraux, ils sont majoritaires, ils peuvent faire n'importe quoi, changer un homme en femme.
La loi va rester, mais elle sera inopérante et inapplicable. Je supplie donc le ministre de l'Industrie de faire marche arrière, de retraiter là-dessus. Au moins, s'il ne veut pas faire de mal, qu'il ne permette pas aux autres d'en faire.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, j'espère que vous êtes conscient que la tâche qui m'est impartie aujourd'hui, à savoir de parler après le député de Chambly qui est très érudit, qui est un parlementaire redoutable, quelqu'un qui s'exprime de façon éloquente, m'ajoute une surcharge. Cela ajoute un stress au privilège que j'ai de prendre la parole à la Chambre.
Néanmoins, je vais essayer de faire de mon mieux, comme je l'ai toujours fait d'ailleurs. J'espère, monsieur le Président, que vous serez conciliant et que lorsqu'on se rencontrera en privé vous ne me ferez pas de commentaires à l'effet que ma prestation était hors de comparaison avec ce que le député de Chambly vient de faire.
Cela étant dit, mes remarques préliminaires étant clairement présentées—je vois les députés d'en face qui sourient—, il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi. Je veux féliciter ma collègue, la députée de Mercier, pour le travail qu'elle fait au Comité permanent de l'industrie relativement à ce projet de loi. Elle le fait dans chacun de ses dossiers, mais plus particulièrement en ce qui a trait à celui-ci. Le sujet est capital dans la mesure où il touche aux droits et libertés des citoyens et des citoyennes que nous représentons. C'est pour cela que la députée de Mercier avait pris la décision de mener le débat comme il est mené actuellement à la Chambre. Je veux donc la féliciter.
On sait, et ce n'est pas moi qui l'affirme, qu'on n'a pas besoin de reconnaître dans des textes législatifs que le Québec est une société distincte. Il n'est pas nécessaire de l'écrire, on est rendus beaucoup plus loin que cela, nous, au Québec, que l'affirmation du principe de la société distincte. Nous le savons, nous, les Québécois et les Québécoises, les gens qui habitent le Québec, le peuple du Québec, que le Québec est un modèle unique en Amérique du Nord pour ses lois protégeant les renseignements personnels.
Nous savons, nous, les Québécois et les Québécoises—et il me fait plaisir d'informer les Canadiens qui nous écoutent et les Canadiens à la Chambre—que depuis 1982, au Québec, nous avons une loi qui protège la vie privée dans le secteur public. Si on se rappelle bien, en 1982, c'était un gouvernement du Parti québécois dirigé par René Lévesque qui avait adopté ces dispositions protégeant la vie privée.
Toutes les provinces et le gouvernement fédéral se sont également, par la suite, dotés d'une telle loi. Au Québec en 1994, une loi a élargi la protection des renseignements personnels au secteur privé. Sur ce point, nous pouvons affirmer que le Québec est le seul État en Amérique du Nord à avoir une loi qui protège les renseignements personnels dans le secteur privé, et ce depuis plus de quatre ans. Comme preuve que nous sommes à l'avant-garde, il suffit de regarder ce projet de loi C-54, quatre ans après que le Québec se soit doté d'un tel mécanisme.
Je voulais faire une autre remarque. Les lois du Québec sont conformes à la Charte internationale des droits de l'homme qui considère la protection des renseignements personnels comme un droit fondamental.
On sait que l'article 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, promulguée en 1975 dit, et je cite cet article:
5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée.
On sait que le projet de loi C-54 fait suite à de nombreuses promesses d'une loi fédérale protégeant les renseignements personnels dans le secteur privé. Pourtant, le titre de la loi lui-même dit et je cite ce titre: «Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois».
Le projet de loi C-54 n'est pas un projet de loi qui vise la protection des renseignements personnels, mais plutôt une loi qui protège mal les renseignements personnels dans le seul secteur des activités commerciales. Le projet de loi C-54 est un projet de loi dont le coeur est l'annexe, comme l'a souligné avec justesse mon collègue, le député de Chambly.
Le projet de loi C-54 est un projet de loi où l'annexe est rédigée au conditionnel. On sait à quel point les mots revêtent, dans des textes législatifs, une grande importante. Quelle importance ont les mots? Les gens qui sont gouvernés et régis par ces lois disent: «Nul n'est au-dessus de la loi; mais il nous faut des lois écrites avec des mots». Donc, le libellé de cette loi, la terminologie, le vocabulaire employé devient capital pour ceux et celles qui devront en faire l'interprétation.
Dans ce cas-ci, l'annexe est rédigée au conditionnel, ce qui signifie qu'il s'agit uniquement de recommandations. On y dit: «devrait, pourrait, serait».
Monsieur le Président, je ne sais pas si vous avez une formation en droit, mais tous les jeunes avocats et avocates ou étudiants dans les facultés de droit qui nous écoutent présentement savent que dans les premiers cours de droit, on nous enseigne à distinguer la construction grammaticale des lois; on nous apprend à distinguer le «peut» du «doit».
Des voix: Oh, Oh!
M. Michel Guimond: Je ne sais pas pourquoi certains piaillent de l'autre côté. J'essaie simplement d'expliquer la différence entre «peut» et «doit». Dans une loi, quand il y a un «doit», on est régi, on doit faire, on est soumis à l'exécution. Tandis qu'un «peut» ou un «pourrait» signifie «si cela vous tente», «si vous avez le temps», etc. Donc, le «peut» et le «doit» n'ont pas le même caractère impératif.
Le projet de loi C-54 n'est même pas l'extension, au secteur privé, des principes régissant la protection des renseignements personnels sous juridiction fédérale. L'article 5(2) de la Loi sur les renseignements personnels régissant le secteur public stipule, et je donne une illustration:
5. (2) Une institution fédérale est tenue d'informer l'individu auprès de qui elle recueille des renseignements personnels le concernant des fins auxquelles ils sont destinés.
Mais le projet de loi C-54 affirme, à l'article 4.2.3 de l'annexe:
4.2.3 Il faudrait préciser à la personne auprès de laquelle on recueille des renseignements avant la collecte ou au moment de celle-ci, les fins auxquelles ils sont destinés.
Et à l'article 4.2.5 de la même annexe, on dit ceci:
4.2.5 Les personnes qui recueillent des renseignements personnels devraient être en mesure d'expliquer à la personne concernée à quelles fins sont destinés ces renseignements.
Puisqu'il ne me reste plus que deux minutes, je devrai chambouler légèrement ce que je voulais dire et passer immédiatement aux deux derniers points de mon propos.
Le projet de loi s'appuie sur le code volontaire CSA. Or, voyons ce qu'en dit la Commission de l'accès à l'information du Québec dans son rapport annuel 1997-1998, qui émettait certaines réserves à ce projet de loi, entre autres, celle-ci que je cite à partir du rapport:
De l'avis de la Commission, l'adoption de cette proposition équivaudrait à un recul par rapport à la situation actuelle au Québec au chapitre de la protection des renseignements personnels.
Nous sommes d'avis, au Bloc québécois, que le projet de loi C-54 comporte des recours inefficaces dans la mesure où le commissaire ne peut pas rendre d'ordonnances. Il ne fait que des rapports. Deuxièmement, les citoyens devront aller en Cour fédérale pour résoudre les litiges. Troisièmement, les citoyens ne peuvent se rendre en cour qu'une fois que le commissaire a rendu son avis.
En conclusion, le projet de loi C-54, en rendant la procédure longue et complexe, n'aura donc que peu d'effet. Comment, dans ces circonstances, affirmer qu'il s'agit d'un projet de loi protégeant les citoyens? S'il n'a pas d'effet, comment peut-on dire que son but est de protéger les citoyens? Poser la question, c'est d'y répondre.
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-54 que nous présente le ministre de l'Industrie, et sur lequel nous nous penchons aujourd'hui, est très décevant pour l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes.
Le projet de loi C-54 est une source de déception et devrait aussi être une source d'inquiétude parce qu'il passe complètement à côté de ce qui devait être son principal objectif, soit de protéger la vie privée dans le secteur privé dans un univers technologique qui remet en cause ce droit fondamental.
Non seulement le projet de loi rate complètement sa cible mais, tel que présenté, il atteint même un objectif tout à fait contraire, reléguant au second plan la protection de la vie privée.
En effet, il est clair à sa lecture que l'objectif du projet de loi C-54 est de favoriser le commerce électronique en mettant au second plan le droit à la protection de la vie privée dans le secteur privé.
À ce sujet, le titre du projet de loi ne pourrait pas mieux convenir pour décrire son objectif réel, puisque l'on parle d'une loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique. Il n'est donc plus question d'une loi fédérale protégeant les renseignements personnels dans le secteur privé, comme le réclament depuis longtemps les Canadiens, les Canadiennes, les Québécois et les Québécoises, mais d'une loi qui subordonne la protection des renseignements personnels à la volonté de faciliter et promouvoir le commerce électronique.
Le projet de loi C-54, présenté par le ministre de l'Industrie, dénature donc l'objectif initial recherché et démontre que le gouvernement libéral a décidé de faire fi de ses nombreuses promesses d'une loi fédérale protégeant les renseignements personnels dans le secteur privé.
Cette attitude du gouvernement fédéral est d'autant plus décevante que l'urgence d'adopter une telle loi au Canada est plus criante que jamais. En effet, le droit à la vie privée est un droit fondamental qui subit aujourd'hui des assauts sans précédent au moment où nous entrons dans une ère technologique à qui l'on pourrait appliquer le vieil adage: «Tout finit par se savoir... rapidement».
La lourde menace qui pèse sur le droit à la vie privée des Canadiens et Canadiennes ne peut être prise à la légère. La protection de ce droit est fondamentale pour assurer le maintien d'un véritable système démocratique au Canada. L'enjeu est très clair: sans respect de la vie privée, un coup mortel est porté à notre démocratie.
Un gouvernement qui renonce à tout mettre en oeuvre pour protéger le droit à la vie privée de ses concitoyens et de ses concitoyennes ouvre une dangereuse boîte de Pandore et bien malin celui qui peut prédire ensuite ce qui pourrait s'ensuivre.
Tout en me gardant bien de vouloir céder à un réflexe exagérément alarmiste, nous comprenons tous la valeur que représenterait, aux yeux d'un groupe terroriste, la liste des dizaines de millions de foyers canadiens regroupés par ethnie.
Si une telle liste, élaborée par une entreprise de marketing direct, pouvait être rendue disponible, serions-nous vraiment en mesure, par exemple, de pouvoir continuer à assurer la sécurité de nos concitoyens et concitoyennes, peu importe leur origine ethnique? Pourrions-nous leur garantir qu'ils ne seront jamais les victimes d'actes insensés que pourrait commettre un groupe terroriste? Poser la question, c'est y répondre.
Les menaces de groupes terroristes ne sont pas les seules à craindre dans une société où le droit à la vie privée n'est plus assuré. D'autres menaces, plus insidieuses mais tout aussi réelles, pèsent aussi dans la balance.
En effet, que faut-il penser de l'éthique de ces compagnies d'assurance qui lorgnent de plus en plus les résultats des tests d'ADN pour éliminer ou sélectionner des clients susceptibles de faire des réclamations sérieuses? De même, que dire des employeurs qui souhaitent même utiliser les résultats des échantillons d'urine recueillis sur place afin de détecter la consommation de drogues licites ou non?
Ces exemples ne sont que la pointe de l'iceberg de ce qui attend les Canadiens et les Canadiennes dans un contexte où l'entreprise privée, tout comme le secteur gouvernemental ont accès à bon nombre de renseignements personnels qu'ils peuvent maintenant relier grâce à l'explosion des nouveaux réseaux technologiques. Une société où, à toutes fins pratiques, il n'existera plus de renseignements dits personnels, et par voie de conséquence, il n'existera plus de vie privée pour personne.
Il est d'autant plus évident que le projet de loi C-54 est insuffisant pour protéger la vie privée, qu'il n'est même pas l'extension au secteur privé des principes régissant la protection des renseignements personnels sous juridiction fédérale. En effet, l'article 5 de la Loi sur les renseignements personnels qui régit le secteur public stipule:
5. Une institution fédérale est tenue d'informer l'individu auprès de qui elle recueille des renseignements personnels le concernant des fins auxquelles ils sont destinés.
Mais le projet de loi C-54 affirme, à l'article 4.2.3 de l'annexe:
4.2.3 Il faudrait préciser à la personne auprès de laquelle on recueille des renseignements, avant la collecte ou au moment de celle-ci, les fins auxquelles ils sont destinés.
Et à l'article 4.2.5 de la même annexe, on dit:
4.2.5 Les personnes qui recueillent des renseignements personnels devraient être en mesure d'expliquer à la personne concernée à quelles fins sont destinés ces renseignements.
Il faut remarquer que ces articles importants, qui devraient être le coeur du projet de loi C-54, ne se retrouvent qu'en annexe, écrits au conditionnel, ce qui signifie qu'il s'agit uniquement de recommandations, rien de plus.
Comme mes collègues du Bloc québécois, il me faut conclure et dire que le projet de loi C-54 n'est pas un projet de loi qui protège les renseignements personnels et le droit fondamental à la vie privée de nos concitoyennes et de nos concitoyens, mais un projet de loi qui vise à favoriser le commerce électronique en sacrifiant justement la vie privée des Canadiennes et des Canadiens.
[Traduction]
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je remercie les députés d'en face d'avoir proposé cet amendement. Cela me donne l'occasion de parler de nouveau du projet de loi.
En gros, l'amendement propose que la Chambre cesse l'examen à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-54 et qu'elle renvoie celui-ci à un comité pour qu'il le réexamine ou qu'elle le raye complètement du Feuilleton.
Je m'oppose à cela pour une raison très simple. Le projet de loi C-54 est indiscutablement la mesure législative la plus importante dont la Chambre a été saisie depuis le début de l'actuelle session. Le projet de loi C-54 tente d'exercer un certain contrôle sur l'utilisation que le secteur privé fait des renseignements personnels.
À titre de Canadiens, nous nous rallions tous à l'idée que notre religion, notre race, notre situation financière et notre dossier médical devraient être confidentiels. Dans le monde commercial, la réalité est différente, car il est de plus en plus fréquent que des renseignements de cette nature deviennent disponibles. Le projet de loi C-54 tente de résoudre ce problème.
Dans les premières observations que j'ai faites au sujet du projet de loi C-54, j'ai dit bien sincèrement que, à mon avis, celui-ci comporte des lacunes. Le projet de loi C-54 ne règle pas tous les problèmes concernant les renseignements personnels dans le secteur commercial. Étant donné l'importance de cette question, je pense toutefois qu'il faut renvoyer le projet de loi au comité le plus rapidement possible, afin que ses membres et la population puissent examiner les modifications qui s'imposent pour établir des dispositions législatives qui soient vraiment efficaces dans ce domaine.
Je vais dire aux députés ce qui est en jeu. Je vais essayer de m'expliquer très simplement. Ce qui est en jeu, à mon avis et d'après ce que j'ai pu constater personnellement, c'est l'achat et la vente de listes de renseignements personnels non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis.
J'ai déjà souligné que, pour faire des campagnes de financement efficaces, des organismes sans but lucratif et des organisations de bienfaisance donnent leurs listes de bienfaiteurs à des agents de vente directe des États-Unis.
J'ai été assez chanceux pour obtenir une liste des donateurs à des organismes qui communiquent leurs listes à un collecteur de fonds aux États-Unis. Ces organismes oeuvrent dans différents secteurs et mettent leurs listes en vente. On peut les acheter.
Par exemple, il est possible d'obtenir une liste de tous les donateurs juifs canadiens, soit 70 000 noms. On peut se procurer cette liste aux États-Unis. On peut aussi obtenir la liste de tous les gens qui ont fait un don à des organisations favorables au planning familial ou à l'avortement. On peut obtenir la liste de tous les Canadiens dits riches, soit 500 000 noms. Je ne pensais pas qu'il y avait autant de Canadiens riches, mais selon la liste qui circule aux États-Unis, il y en a 500 000. Que pourrait-il se produire si des criminels mettaient la main sur ces noms?
N'est-ce pas merveilleux de savoir quels ménages de Toronto, Vancouver ou Calgary donnent de grosses sommes, peut-être 5 000, 10 000 ou 20 000 dollars par année, à des oeuvres de bienfaisance? Ces gens ne sont-ils pas des cibles idéales pour les criminels? On peut acheter ces listes aux États-Unis.
Nous pouvons lire dans le Citizen d'aujourd'hui que l'on craint que des tireurs fous opposés à l'avortement puissent s'en prendre à des médecins qui pratiquent cette intervention. On peut trouver leurs noms sur ces listes; il ne s'agit pas uniquement de listes provenant d'organismes caritatifs ou à but non lucratif.
Aux États-Unis, diverses organisations louent leurs listes pour la collecte de fonds. Le magazine Scientific American loue sa liste d'abonnés à des gens qui veulent savoir qui est susceptible de faire des dons à des organismes de charité de nature scientifique. On peut imaginer qu'une personne ayant d'autres buts puisse trouver très utile cette liste où il y a des médecins. Aux États-Unis, on peut louer la liste des donateurs à la Marche des dix sous ou des gens qui donnent à Greenpeace.
Tant que l'utilisation de ces renseignements ne sera pas bien encadrée, il suffira à ceux qui ont l'argent voulu d'acheter ces listes contenant des données personnelles sur les citoyens Canadiens, que nous tentons de protéger. Je ne crois pas que le projet de loi contienne les dispositions nécessaires à cet égard. J'aimerais pourtant que ce soit le cas. Nous n'avons pas de temps à perdre. Nous ne pouvons pas attendre au siècle prochain pour régler le problème. Nous devons agir dès maintenant. Le seul moyen d'agir est de renvoyer cette mesure au comité pour que nos collègues l'examinent. J'espère qu'elle sera examinée en comité parce que je ne suis pas satisfait de la réponse des autres partis ici. Ce débat n'a été qu'un dialogue entre les libéraux et les bloquistes. Les conservateurs, les réformistes et les néo-démocrates n'y ont pratiquement pas participé.
Peut-être que si nous examinons cette mesure législative en comité où les autres partis sont représentés, ils hésiteront davantage à rester muets sur une question qui est probablement l'une des plus importantes dans notre pays aujourd'hui. Les renseignements personnels sont commercialisables et c'est un commerce très lucratif. C'est une question de sécurité personnelle.
Je regarde les députés d'en face et je me souviens de toutes les plaintes au sujet du projet de loi sur le contrôle des armes à feu. Les députés craignaient que les gens ne soient exposés à je ne sais quoi parce qu'ils devaient enregistrer leurs armes à feu. Je suppose qu'ils craignaient que, si une personne devait enregistrer son arme à feu, on saurait que cette personne avait assez d'argent pour acheter une arme à feu et elle pourrait donc devenir la cible de cambrioleurs. Je ne sais pas, mais je crois que c'était une de leurs craintes.
À l'heure actuelle, l'absence de législation dans ce domaine fait qu'on peut acheter une liste qui dit combien d'argent il y a dans un ménage, à quelle religion appartiennent les membres du ménage ou encore quelle est leur position sur l'avortement.
Je crois que le temps est venu de régler ce problème. Nous devons le faire sans plus tarder. C'est l'une des questions les plus importantes dont la Chambre est saisie, et je remercie le Bloc québécois d'avoir présenté cet amendement qui m'a permis de prendre la parole de nouveau à ce sujet. Cependant, je n'appuie pas l'amendement parce que nous devons agir dès maintenant et terminer l'étude de cette mesure législative.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, c'est toujours avec plaisir, et cette fois-ci avec un peu de surprise, que je prends part au débat sur ce projet de loi.
J'ai écouté mon prédécesseur, le député libéral, dire que la protection des renseignements personnels est un enjeu des plus pressants dans notre pays. Là-dessus, je suis d'accord avec lui. Dans une société électronique telle que la nôtre, avec des réseaux informatiques au bureau, à la maison et partout, qui relient les Canadiens, les Canadiennes, les Québécois et les Québécoises, c'est en effet un enjeu fondamental.
Mais là où je diffère d'opinion avec le député d'en face, c'est quand on veut faire quelque chose, comme disait Lyautey, il faut bien le faire. Or, ce que ce gouvernement propose, c'est tout croche, c'est mal fait, cela contredit ce qui a déjà été fait, et en plus, ce qui a déjà été bien fait.
J'ai pris l'habitude maintenant, depuis un an et demi que je suis député, de voir que la Chambre des communes ne tient pas compte de ce qui existe dans les provinces et en particulier au Québec. Il faut le rappeler, il existe au Québec une loi qui a été encensée de toutes parts et qui s'appelle la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. C'est une loi qui est presque unanimement appuyée et qui suscite l'admiration de plusieurs personnes à travers le monde.
Il faut aussi rappeler que le Québec est le seul État en Amérique du Nord à avoir une loi qui protège les renseignements personnels dans le secteur privé, et ce, depuis plus de quatre ans. Avec le projet de loi du gouvernement, on dirait qu'on n'en tient pas compte. Ce n'est pas grave, la loi fonctionne bien, ça va bien, mais parce que c'est au Québec, on n'en tient pas compte.
L'objectif du projet de loi qui est présenté par le gouvernement, c'est de favoriser le commerce électronique en mettant en second plan le droit à la protection à la vie privée dans le secteur public. On a beau faire des grands discours philosophiques en disant: «Oui, c'est important la protection des renseignements personnels», jouer du violon, avoir la main sur le coeur, mais l'objectif fondamental de ce projet de loi n'est pas la protection de la vie privée, c'est de favoriser le commerce électronique. Il ne faut pas se raconter de blagues, c'est cela l'objectif de ce projet de loi.
Parlant du projet de loi, il serait peut-être intéressant de se pencher sur certaines dispositions du projet de loi. Je pense en particulier à l'article 27 qui porte principalement sur les règlements.
Je cite l'article 27(2)b):
27. (2) Il peut par décret:
b) modifier l'annexe 1 pour tenir compte de toute révision de la norme nationale du Canada intitulée Code type sur la protection des renseignements personnels, CAN/CSA-Q830-96;
C'est du jargon. Ceux qui m'écoutent doivent se demander de quoi je parle, ou pourquoi c'est si compliqué. Ce que cela signifie, c'est que le gouvernement peut modifier une loi sans revenir devant le Parlement, et ça, c'est grave. Le gouvernement peut modifier, sans revenir au Parlement, quelque chose que le député d'en face trouvait fondamental au Canada, c'est-à-dire la protection de la vie privée.
À l'alinéa 27(2)d), on dit que le gouverneur en conseil, donc le gouvernement, peut:
d) s'il est convaincu qu'une loi provinciale [...]
Je répète qu'il existe déjà une loi au Québec qui fonctionne très bien. Pourquoi accorder cette discrétion au gouvernement, alors qu'on devrait tout simplement dire: «Il existe quelque chose au Québec. Laissons la loi québécoise s'appliquer et on n'appliquera pas le projet de loi C-54 au Québec».
Je veux aussi citer le rapport annuel 1997-1998 de la Commission d'accès à l'information du Québec. Je le cite, parce que c'est très important. C'est un organisme indépendant, non partisan, qui jouit d'une forte crédibilité au Québec.
Le rapport annuel dit ceci:
La Commission a examiné les conséquences de l'adoption éventuelle, dans l'ensemble de la fédération canadienne, de normes et de principes légaux qui régiraient la protection des renseignements personnels sur l'autoroute de l'information. Selon les termes d'un projet dont ont été saisis les ministres responsables de la mise en place de cette inforoute, la protection prendrait forme autour du code volontaire élaboré par l'Association canadienne des normes.
De l'avis de la Commission, l'adoption de cette proposition équivaudrait à un recul par rapport à la situation actuelle au Québec au chapitre de la protection des renseignements personnels.
Cette affirmation repose sur un examen en profondeur du Code CSA.
Certes, on peut se réjouir de l'adoption, par l'industrie
canadienne, d'un tel code. Il s'agit là d'une percée appréciable
qui découle d'une analyse intéressante des lignes directrices de
l'OCDE en matière de protection des renseignements personnels.
Par contre, le code CSA ne répond nullement aux objectifs des
régimes de protection des renseignements personnels établis par
les deux lois québécoises: assurer aux citoyens un règlement
impartial et équitable des problèmes et différends qui peuvent
survenir dans le domaine de plus en plus important du respect de
cette dimension de la vie privée.
Aussi, la Commission a-t-elle suggéré à la ministre de la Culture
et des Communications de rappeler à ses homologues des autres
gouvernements, l'existence d'un régime légal mis en place par le
Québec. Le régime québécois constitue, aux yeux de la Commission
la seule réponse respectueuse des droits des citoyens devant les défis soulevés par la mise en place de l'autoroute de l'information.
Cela, c'est au Québec. Il faut bien sûr se rendre compte que souvent, ce que les organismes québécois disent, le gouvernement fédéral en tient peu compte. Alors, je citerai le commissaire fédéral à la vie privée, M. Bruce Willis. Je cite le texte anglais, car c'est un organisme fédéral.
[Traduction]
«Pour une économie et une société de l'information au Canada» est révélateur car il accorde plus d'importance aux questions d'ordre économique qu'aux questions d'ordre sociale. De ce fait, l'accent porte davantage sur le commerce électronique que sur l'objectif de protection des renseignements personnels; le document indique également que le gouvernement fédéral cherche d'abord à inciter les Canadiens à participer à diverses activités de réseaux et qu'il ne cherchera que plus tard à mettre au point la protection de la vie privée.
[Français]
Après avoir cité toutes ces autorités, toutes ces sommités dans le domaine de la protection à la vie privée, le Bloc québécois ne peut que se faire le porte-parole du consensus qui existe au Québec, se battre et refuser de voter en faveur du projet de loi C-54.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai parlé aux représentants de tous les partis à la Chambre et je crois que vous obtiendrez le consentement pour reporter le vote par appel nominal sur l'amendement du député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-54 au mardi 27 octobre 1998, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce d'accord?
* * *
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES ÉDITEURS ÉTRANGERS.
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.) propose: Que le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, la culture canadienne est notre héritage. Elle illumine notre vie quotidienne et c'est notre cadeau aux Canadiens de demain.
Les Canadiens qui nous ont précédés ont permis l'avènement de la télévision canadienne. Ils l'ont fait en déployant des efforts extraordinaires dans le domaine des arts et en manifestant une volonté nationale.
Grâce à nos prédécesseurs, le Canada est aujourd'hui un chef de file dans l'industrie de la musique.
[Français]
Dans à peine dix jours, je vais me rendre à Montréal pour le gala de l'ADISQ, animé par Céline Dion, un nom connu mondialement, non seulement à cause de ses talents mais aussi à cause d'un appui national pour la culture.
[Traduction]
Nos prédécesseurs ont donc fait preuve d'une volonté nationale et d'un talent exceptionnels.
Grâce à eux, des livres écrits par des Canadiens et sur des Canadiens sont publiés au Canada. Ils ont travaillé d'arrache-pied et, je le répète, en manifestant une détermination collective.
C'est aussi grâce aux Canadiens des générations précédentes que nous avons notre industrie des périodiques, que nous avons en propre nos nouvelles, nos idées, nos talents, notre culture et nos voix.
Les réalisations des Canadiens qui nous ont précédés sont vraiment spectaculaires.
[Français]
Ils ont travaillé pour faire du Canada l'un des pays les plus ouverts aux cultures étrangères, tout en forgeant une identité culturelle forte qui nous unit les uns aux autres et que nous faisons rayonner aux quatre coins du monde.
La triste réalité, en tant que citoyens du monde, est que, pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, le nombre de langues parlées est en train de diminuer. Cette réalité devrait tous nous faire réfléchir et aussi nous alarmer. L'avenir de nos cultures respectives et la diversité culturelle et linguistique sont en jeu.
[Traduction]
Des gouvernements passés et des députés qui nous ont précédés ont eu à prendre des décisions difficiles et controversables. Les premières décisions remontent à une soixante d'années, au moment où fut créé un réseau national de radiodiffusion. Les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays ont jugé que la culture était au coeur même de notre identité. Ils ont compris qu'elle faisait la force de la personne, de la collectivité et du pays. Ils savaient que la culture est le langage qui parle au coeur, à l'esprit et à l'âme de notre pays.
C'est aujourd'hui notre tour de nous montrer à la hauteur du défi et de garantir un avenir prospère aux revues canadiennes. C'est notre tour de veiller avec sagesse sur notre patrimoine culturel et notre avenir. C'est notre tour de faire un acte de volonté nationale.
Des revues comme Canadian Legion Magazine sont importantes pour le Canada. Elles survivent grâce au soutien du gouvernement.
Pour faire naître des revues canadiennes, il faut des entrepreneurs qui ont de l'imagination, qui sont dévoués et qui ont des nerfs d'acier. Ils doivent croire à l'autonomie culturelle et être attachés à la libre circulation des idées. Il faut aussi que le Parlement du Canada se dote de politiques et prenne des mesures concrètes.
À certains égards, les défis que nous avons à relever aujourd'hui sont encore plus redoutables que ceux des législatures antérieures. Nous vivons à une époque où tombent toutes les barrières dans les communications. Nous vivons dans un pays qui doit sa prospérité aux exportations et à la concurrence, dans un pays qui, je le répète, est le plus ouvert du monde aux cultures des quatre coins du globe. Nous vivons dans un monde qui s'appuie sur les exportations et sur la concurrence, un monde où la technologie fait table rase des anciens schèmes de pensée et des règles éculées. Le Canada est le voisin de la seule superpuissance qui reste dans le monde et dont l'influence culturelle est dominante.
Un député demande pourquoi nous élevons des barrières. Ce n'est pas le cas. Le Canadian Legion Magazine mérite d'être appuyé par le gouvernement pour qu'il fasse entendre sa voix. Cela ne nous empêche pas de lire le American Legion Magazine. Nous avons l'occasion et la responsabilité, en tant que Parlement du Canada, de faire de la place, au sein du secteur culturel mondial, pour la rédaction d'articles canadiens à large diffusion.
Qu'on entre dans n'importe quel magasin de revues au Canada et on y verra plus de revues américaines que dans tout autre pays du monde. Nous n'élevons pas des barrières; nous nous réservons le droit, en tant que pays, de laisser un peu de place pour faire entendre notre propre voix.
Le Parlement a pour rôle, entre autres, de s'assurer que cette voix sera entendue par les générations à venir. La loi du marché ne respecte pas la loi de la diversité culturelle sur laquelle notre pays a été bâti. Le Parti libéral continuera d'offrir son soutien jusqu'à...
M. Charlie Penson: Protection de promotion.
L'hon. Sheila Copps: Il ne s'agit pas d'une protection de promotion. Le défi consiste à trouver de vraies solutions à ces questions de mondialisation, et non à étouffer la voix des Canadiens, à adopter l'attitude mondialiste de ceux qui disent qu'il n'existe pas de différence entre les revues canadiennes et les revues américaines, à tomber dans le piège de ceux qui prétendent que nous érigeons des barrières.
Les députés du Parti réformiste qui décrient ce projet de loi, qui contribuerait à protéger la voix des Canadiens, sont ceux-là mêmes qui veulent que le gouvernement appuie le Canadian Legion Magazine. Si quelque député d'opposition ne veut pas que nous appuyons directement ce magazine, je le mets au défi de prendre la parole aujourd'hui, à l'approche du Jour du Souvenir, et de nous dire qu'il s'oppose à ce que les Canadiens appuient cette publication. Je ne vois personne inscrire son nom. La vérité, c'est...
Une voix: Qu'en est-il de la censure?
L'hon. Sheila Copps: Personne ne parle de censure. Il ne s'agit pas de censure. Il s'agit de la multiplicité des voix dans le contexte de la mondialisation.
La vérité, c'est qu'il n'a jamais été facile de publier une revue canadienne. La toute première a été imprimée en 1792 par John Howe. Le tout premier magazine fut le Nova Scotia Magazine and Comprehensive Review of Literature, Politics and News. Il a cessé de paraître au bout de trois ans à cause de coûts de publication élevés, du nombre limité de lecteurs à l'échelle nationale et du pouvoir de commercialisation de publications bien mieux établies importées de l'étranger.
Cela fait 206 ans que les Canadiens doivent lutter dur pour assurer la survie et la croissance du secteur canadien des revues.
À ceux qui risquent de déformer la vérité, à ceux qui sont prêts à sacrifier le secteur canadien des revues sur l'autel de la mondialisation, je tiens à répéter que le Canada a le marché culturel le plus ouvert au monde. Plus de 80 p. 100 des revues qui sont vendues dans nos kiosques à journaux viennent de l'étranger. Quatre-vingt-quinze pour cent sont des revues américaines. Et nous n'avons nullement l'intention de mettre un terme à cela. Nous voulons voir une multiplicité d'idées.
L'exportation de revues américaines au Canada est l'exportation vers un seul pays la plus importante au monde. Pas un seul autre pays ne nous vient à la cheville pour ce qui est de l'accueil des revues étrangères. Si c'est là du protectionnisme, je devrais alors être membre du Parti réformiste.
Des voix: Non.
L'hon. Sheila Copps: C'est une idée qui me coupe même dans mon élan.
L'idée réformiste de marché fermé ne tient pas puisque, dans un petit marché comme le Canada, 71 revues américaines circulent à plus de 30 000 exemplaires.
Une voix: Elles ne seraient pas là si les Canadiens n'en voulaient pas.
L'hon. Sheila Copps: Bien sûr. Les gens ont parfaitement le droit de s'abonner à des revues américaines et de les recevoir. Absolument rien dans ce projet de loi n'empêchera cela.
Ce que fera ce projet de loi, c'est assurer que les enfants qu'aura un jour ma fille pourront lire des articles sur leur pays, sa géographie et son histoire. Tel sera le legs de ce projet de loi. Si c'est là du protectionnisme...
Le Président: Je suis persuadé que la députée poursuivra après la période des questions. Nous passons pour le moment aux déclarations des députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LE CENTRE DES JEUNES DE LA GÉNÉRATION XX
M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, le centre des jeunes de la génération XX, à Summerside, vient de remporter le Commonwealth Youth Service Award de 1998.
Le centre des jeunes de la génération XX offre un lieu de rencontre et d'activités où les adolescents peuvent se retrouver dans un environnement sans drogues ni alcool. Le centre a été créé par un groupe de jeunes, conseillés par l'agent Mike Rioux, du service de police de Summerside.
Ensemble, ils ont pris un vieil édifice, où avait logé auparavant un club de curling et une école commerciale, et ils l'ont transformé, grâce à leur travail acharné, en centre abritant une salle de concert et les seules installations intérieures de planche à roulettes de la région de l'Atlantique.
Le concept a été imaginé à la suite d'un incident où des policiers avaient ordonné de circuler à un groupe d'adolescents qui traînaient dans le stationnement d'un restaurant Tim Horton. Les jeunes avaient répondu aux policiers: «Où voulez-vous qu'on aille?»
L'agent Rioux s'est alors rendu compte qu'il y avait un problème: il n'existait aucun endroit où les jeunes de Summerside pouvaient se tenir. On imagine la suite.
Félicitations aux jeunes, au principal responsable, Gordie Whitlock, et à leur conseiller, l'agent Rioux.
* * *
LES ÉTANGS BITUMINEUX DE SYDNEY
M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, quand j'ai été élu pour la première fois, il y a cinq ans, j'ai visité le site de la pire catastrophe écologique qu'on ait eue au Canada, les étangs bitumineux de Sydney, en Nouvelle-Écosse. À cette époque, j'avais exhorté le ministre de l'Environnement à trouver une solution durable. Il y a deux semaines, je suis retourné à Sydney, et j'ai constaté peu de changement. En plus de 15 ans, on a investi plus de 70 millions de dollars pour régler ce problème—en pure perte, puisque les gens de Sydney attendent encore qu'on trouve la solution.
Hier, une nouvelle étude a été publiée. Parmi ses conclusions, on note que les habitants de Sydney courent un risque de cancer de près de 50 p. 100 plus élevé que l'ensemble de la population de la Nouvelle-Écosse. Combien d'autres preuves faudra-t-il pour que les gouvernements fédéral et provincial fassent quelque chose à cet égard?
En outre, les gens qui vivent près des fours à coke, le long de la rue Frederick, doivent être relogés. Personne ici n'accepterait de vivre là, alors pourquoi devraient-ils le faire?
Nous devons considérer l'assainissement de Sydney comme un objectif prioritaire. Le temps des études est terminé. Il faut agir.
* * *
LE CENTRE NORD-SUD DU CONSEIL DE L'EUROPE
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, le Centre Nord-Sud du Conseil de l'Europe accorde un prix à deux personnes pour leurs réalisations dans les domaines des droits de la personne, de la démocratie pluraliste et de la solidarité mondiale.
Cette année, un des prix du Centre Nord-Sud a été accordé au ministre des Affaires étrangères du Canada, en reconnaissance du son travail en vue de parvenir à un traité interdisant la production, le commerce et l'utilisation des mines terrestres.
Le président du Centre Nord-Sud a qualifié les efforts du ministre de contribution exceptionnelle et hautement pratique à la protection des droits humains dans un contexte nord-sud.
L'autre prix a été accordé à Graça Machel d'Afrique du Sud pour ses efforts afin de protéger les enfants des dévastations de la guerre dans son Mozambique natal.
Demain, le ministre des Affaires étrangères recevra ce prix prestigieux des mains du président du Portugal, au parlement portugais. J'invite les députés à se joindre à moi pour féliciter les récipiendaires, Graça Machel et le ministre des Affaires étrangères.
* * *
[Français]
LE CENTRE NORD-SUD DU CONSEIL DE L'EUROPE
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, demain au Parlement du Portugal, l'honorable Lloyd Axworthy, ministre des Affaires étrangères, se verra décerner le prix Nord-Sud remis par le Conseil de l'Europe...
Le Président: J'aimerais rappeler à l'honorable députée qu'habituellement nous ne mentionnons pas le nom d'un député. On doit seulement mentionner son titre.
Mme Raymonde Folco: Je m'excuse, monsieur le Président.
Demain, au Parlement du Portugal, le ministre des Affaires étrangères se verra décerner le prix Nord-Sud remis par le Conseil de l'Europe. Ce prix est décerné annuellement à deux personnes, provenant des hémisphères nord et sud, qui se démarquent sur la scène mondiale en épaulant les causes de la démocratie, des droits de l'homme et de la solidarité à l'échelle planétaire.
C'est pour son travail acharné et sa volonté de bannir la production, l'entreposage et la vente de mines antipersonnel que le ministre a mérité ce prestigieux honneur. Tous les Canadiens et les Canadiennes peuvent être fiers de son travail.
J'invite donc mes collègues de cette Chambre à se joindre à moi pour féliciter le récipiendaire du prix Nord-Sud 1998, le ministre des Affaires étrangères.
Des voix: Bravo!
* * *
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour informer la Chambre et tous les Canadiens de la grave situation économique dans laquelle se trouvent des milliers d'agriculteurs de l'Ouest.
En 1938, la vente de 26 boisseaux de blé permettait d'habiller un agriculteur pour l'hiver. En 1998, il faut 206 boisseaux pour cela. En 1938, les taxes foncières sur une section cultivée de 640 acres représentaient 273 boisseaux de blé. Aujourd'hui, les taxes sur cette même section valent 1443 boisseaux de blé.
Si les agriculteurs de la zone visée ne reçoivent pas une aide immédiate, les résultats seront triples. Premièrement, il y aura une augmentation des exploitations abandonnées. Deuxièmement, il y aura une augmentation des faillites et, troisièmement, il y aura une augmentation des saisies financières.
Nous ne devons pas tourner le dos...
Le Président: La députée de Windsor—St. Clair.
* * *
DANIELLE CAMPO
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de saluer une jeune athlète de ma circonscription, Danielle Campo, de Tecumseh. Danielle est une jeune superstar âgée de seulement 13 ans qui a brisé plusieurs records mondiaux aux championnats de natation pour handicapés tenus la semaine dernière à Christchurch, en Nouvelle-Zélande.
Danielle a d'abord enregistré un record mondial dans l'épreuve du 50 mètres nage libre pour femmes, puis elle a battu son propre record en l'emportant sur des nageuses beaucoup plus âgées et beaucoup plus fortes qu'elle pour gagner la médaille d'or et remporter la victoire au nom du Canada plus tard au cours de la journée. Elle a depuis remporté trois autres médailles d'or pour son équipe et pour le Canada.
Le courage dont cette jeune femme a fait preuve, son travail acharné et sa détermination à surmonter son handicap devraient nous servir d'exemple à tous.
Je demanderais aux députés de bien vouloir se joindre à moi pour féliciter Danielle, son entraîneur Mike Moore et tous les athlètes canadiens qui ont participé aux championnats mondiaux de natation à Christchurch.
* * *
[Français]
LE CANADIEN NATIONAL
M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, hier, 3 000 employés du CN apprenaient brutalement par la voie des journaux qu'ils allaient perdre leur emploi. C'est une façon pour le moins irrespectueuse, voire indécente, d'apprendre les choses. Pendant ce temps, les ministres fédéraux des Transports et des Finances faisaient preuve de compassion non pas envers les employés au bord du licenciement, mais envers la compagnie, dont ils disaient comprendre les raisons financières de poser un tel geste.
Le Bloc québécois déplore vivement la perte d'emplois au CN et trouve scandaleux que M. Paul Tellier, comme président du CN, soit prêt à sacrifier 3 000 travailleurs pour faire jubiler la bourse, 3 000 employés qui ont des familles à faire vivre, des familles qui se retrouvent plongées dans l'insécurité et la précarité.
Pour citer le directeur québécois des Travailleurs canadiens de l'automobile, c'est une annonce pire qu'une batte de base-ball. Il a raison, car c'est maintenant connu, la batte de base-ball représente la compassion de ce gouvernement.
* * *
[Traduction]
LA SEMAINE DE LA SENSIBILISATION À LA RECHERCHE DANS LE DOMAINE DE LA SANTÉ
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, on soulignera la semaine prochaine la Semaine de la sensibilisation à la recherche dans le domaine de la santé. J'exhorte les libéraux à participer à certaines des activités au programme un peu partout au Canada au cours de cette semaine. Nous espérons que les libéraux apprendront quelque chose au chapitre de la sensibilisation à la santé.
Le premier ministre et son gouvernement doivent accorder aux Canadiens la liberté de choisir les produits auxquels ils veulent avoir recours pour leur santé. Les Canadiens ne veulent pas qu'on leur impose des règlements abusifs qui classent des produits comme des suppléments alimentaires, des aliments fonctionnels et des nutraceutiques dans la catégorie des médicaments.
Donnons aux Canadiens la possibilité d'avoir recours à des produits et des traitements naturels dans le cadre de leurs saines habitudes de vie. Les Canadiens en ont assez du système de soins de santé des libéraux qui ne s'occupe des gens que lorsqu'ils ont besoin de traitements médicaux.
Nous, Canadiens, voulons que notre système de santé nous aide à rester en santé. Une bonne santé peut réduire la nécessité d'avoir recours à des traitements médicaux coûteux. Nous sommes fiers des efforts entrepris par l'Association of Canadian Teaching Hospitals pour parrainer la semaine de la sensibilisation à la recherche dans le domaine de la santé.
* * *
BRIAN MULRONEY
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président. On l'a qualifié de pionnier à l'échelle planétaire. Le libre-échange, l'ALENA, la réforme fiscale et la privatisation, la création du Territoire du Nunavut, l'engagement à l'égard des droits de la personne, le Sommet mondial pour les enfants des Nations Unies, l'obligation pour le gouvernement de rendre des comptes à la population, les excuses adressées aux Canadiens d'origine japonaise, l'Agence spatiale canadienne, l'accord sur les pluies acides conclu avec les États-Unis et le Plan vert sont autant d'exemples du précieux héritage qu'il nous a légué.
Sous la gouverne du premier ministre Brian Mulroney, le déficit calculé en pourcentage du PIB, a été réduit de moitié, les dépenses de fonctionnement du gouvernement ont été réduites de 70 p. 100, l'inflation a baissé à son niveau le plus bas en 30 ans et les taux bancaires se sont maintenus à leur niveau le plus bas en 20 ans. C'est sous la gouverne de Brian Mulroney que le Canada a été déclaré pour la première fois le pays avec la meilleure qualité de vie au monde.
Alors que Brian Mulroney est fait compagnon de l'Ordre du Canada, nous saluons son courage qui le pousse encore à oeuvrer au renouvellement du Canada, ses efforts en vue de préparer le pays au millénaire, son sens du devoir et son amour pour le pays. À Brian, Mila et les enfants, nous disons: Merci pour votre immense contribution...
Le Président: Le député de Scarborough-Sud-Est a la parole.
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LA HONGRIE
M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): monsieur le Président, il y a 42 ans demain, soit le 23 octobre 1956, la flamme de la liberté a brièvement éclairé les ténèbres du communisme staliniste en Hongrie. Des milliers de gens sont morts au cours d'une révolution pour la démocratie et les droits de la personne et contre la dictature. Si ces héroïques combattants de la liberté avaient survécu, ils verraient aujourd'hui les fruits de l'arbre de la liberté qui a poussé en sol hongrois comme s'il s'était nourri de leur sang.
Depuis 1990, les gouvernements hongrois qui se sont succédés ont travaillé à l'établissement d'une solide démocratie qui respecte la minorité et les droits de la personne. La Hongrie est maintenant notre partenaire au sein de l'OTAN. Seul le passage du temps a pu nous révéler le succès d'une révolution si brutalement écrasée.
Les gens épris de liberté partout dans le monde rendent hommage à ceux qui ont sacrifié leurs vies pour faire avancer la cause de la liberté il y a 42 ans.
* * *
[Français]
LES PERSONNES ÂGÉES
M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le 13 octobre dernier, le gouvernement canadien annonçait une bonne nouvelle aux personnes âgées.
À compter de 1999, les aînés n'auront plus à remplir de formulaires distincts pour leurs déclarations de revenu et le supplément de revenu garanti ou l'allocation au conjoint.
Donc, à partir de l'an prochain, les deux prestations seront renouvelées automatiquement lorsque les aînés rempliront leurs déclarations de revenu avant le 30 avril.
Auparavant, les personnes âgées devaient présenter une nouvelle demande chaque année, et ce, avant le 31 mars pour continuer de recevoir leur supplément de revenu garanti ou leur allocation au conjoint.
En allégeant les procédures administratives, notre gouvernement facilite ainsi la vie des personnes âgées.
* * *
[Traduction]
LES PÊCHES
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, après 400 ans d'autonomie, la ville de Canso, en Nouvelle-Écosse va devoir déclarer faillite au début de l'année. C'est la conséquence directe de la politique de privatisation des pêches du ministère des Pêches et des Océans et c'est un exemple classique des effets dévastateurs que peuvent avoir les politiques de ce gouvernement sur une petite collectivité côtière.
À Mulgrave, en Nouvelle-Écosse, une usine de transformation du poisson a décidé d'aller s'installer à Terre-Neuve parce que le MPO refuse d'accorder à la compagnie des contingents de crevettes nordiques. Pendant ce temps, le gouvernement libéral accorde des contingents de crevettes à des pays étrangers, des contingents de crevettes qui pourraient sauver plus de 100 emplois à Mulgrave. C'est absolument scandaleux.
Le gouvernement force des Canadiens à recourir à l'aide sociale alors que tout ce qu'ils demandent c'est de travailler et d'être des membres actifs de notre société. Le gouvernement et les gens qui administrent le MPO devraient avoir honte.
* * *
[Français]
L'ÉCART ENTRE LES RICHES ET LES PAUVRES
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, une étude réalisée par le Centre de justice sociale dénonce l'écart sans cesse croissant entre les riches et les pauvres ainsi que l'affaiblissement de la classe moyenne, tout en blâmant ce gouvernement d'y avoir contribué par l'effritement de ses politiques sociales.
Cet écart n'est pas le fruit du hasard. C'est entre autres le résultat des coupures sauvages de ce gouvernement dans la santé, l'éducation et la sécurité du revenu. Depuis leur arrivée au pouvoir, les libéraux ont réduit le transfert social annuel par habitant de 678 $ à 386 $. Cet écart est également le résultat direct de l'acharnement de ce gouvernement contre les chômeurs, les privant de 20 milliards de dollars.
Le premier ministre a beau dire que les enfants demeurent sa priorité, que sa responsabilité la plus grande est celle qu'il a envers les jeunes, les chiffres de l'étude le rappellent à l'ordre et lui demandent d'agir en passant de la parole aux actes pour que les femmes, les jeunes et les familles à faible revenu puissent vivre dans la dignité.
* * *
[Traduction]
LA VIOLENCE
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, la violence est une chose qui nous affecte sur les plans émotionnel, social et économique. Toutefois, une simple phrase comme «Puis-je vous aider» peut faire une énorme différence. C'est le message lancé à l'occasion de cette semaine sans violence organisée par les YWCA.
Quarante YWCA encourageront les Canadiens à réfléchir à la violence à laquelle ils sont confrontés dans leur vie. Plusieurs activités sont prévues, dont la présentation de documents, des vigiles, des concours d'affiches, des conférences données par des conférenciers invités, des concerts et des journées de divertissement en famille. Différents types de violence seront abordés et chaque jour de la semaine portera sur un thème spécifique.
Il existe un site Internet pour la semaine sans violence des YWCA. L'adresse en est www.ywcacanada.ca.
Je félicite les YWCA de Peterborough et d'ailleurs pour cette entreprise et je transmets leur message à tous les députés de la Chambre. Participez et n'ayez pas peur de proposer votre aide aux personnes qui en ont besoin.
* * *
LE JUGE EN CHEF BRIAN DICKSON
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, je me lève pour rendre hommage au juge en chef Brian Dickson, décédé samedi.
Dans sa jeunesse, Dickson servit avec bravoure en Europe dans l'Artillerie royale canadienne, au cours de la Seconde Guerre mondiale, où il fut d'ailleurs grièvement blessé. Nommé par la suite à la Cour suprême du Canada, il avait déclaré:
Dans le cadre des responsabilités qui me sont confiées, je m'engage à préserver les grandes traditions du tribunal, à rechercher la vérité et à exercer les pouvoirs judiciaires qui me sont conférés afin de résoudre équitablement les questions fondamentales touchant la justice et la liberté, les droits de la personne et le pouvoir de l'État.
Il a réalisé cet idéal, allant même au-delà. J'ai eu le privilège de rencontrer le juge en chef Dickson au printemps, lors des réunions du Comité de la défense, devant lequel il défendait énergiquement le rapport qui porte son nom.
Au moment où le Canada dit adieu à l'un de ses fils les plus distingués, le Parti progressiste conservateur du Canada offre ses condoléances à sa femme Barbara et à leurs quatre enfants. Nous sommes reconnaissants envers le juge en chef Dickson d'avoir mené une vie...
Le Président: Le député de London—Fanshawe.
* * *
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, octobre est le Mois de l'histoire des femmes. À titre de parlementaire ayant eu le plaisir d'enseigner l'histoire pendant nombre d'années, je voudrais rappeler les efforts considérables que les Canadiennes ont déployés au cours des deux grandes guerres, en particulier la Seconde Guerre mondiale.
Même si les femmes ne sont pas allées au front en tant que membres des troupes de combat des Forces canadiennes, elles ont joué un rôle crucial pour assurer les services de soutien, peut-être surtout dans le domaine du renseignement. Bien sûr, de nombreuses Canadiennes ont consenti d'énormes sacrifices et contribué de façon remarquable au sein des équipes médicales, souvent très près des hostilités. En fait, certaines femmes ont sacrifié leur vie pour nous aider à remporter la Seconde Guerre mondiale.
Au pays, les femmes ont contribué de façon inestimable en travaillant sans relâche dans les usines et les fermes, afin d'assurer l'approvisionnement en aliments, en armes et en munitions dont les alliés avaient besoin pour venir à bout de la tyrannie en Europe et dans le région du Pacifique. Tant à l'étranger qu'au pays, les Canadiennes ont consenti d'énormes sacrifices et fourni des services inestimables au cours de la Seconde Guerre mondiale, pour garantir la paix et la liberté auxquelles nous tenons tous.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, sur les bandes sonores de la GRC au sommet de l'APEC, on entend fréquemment l'ancien directeur des opérations du premier ministre, Jean Carle. Mais devinez qui filtre les enregistrements? L'avocat chargé de protéger le premier ministre aux audiences sur l'incident de l'APEC.
Comment se fait-il qu'on laisse Ivan Whitehall, avocat du premier ministre aux audiences sur l'incident de l'APEC, bloquer l'accès à ces enregistrements?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à propos de ces enregistrements, si on en croit le Ottawa Citizen d'aujourd'hui, le député de Kootenay—Columbia aurait avoué aux reporters qu'il n'a pas la moindre idée de ce que Carle a pu demander à la GRC. Il se peut qu'il ait donné des instructions anodines au sujet de l'heure d'arrivée ou de départ des dirigeants et du trajet emprunté par leur cortège.
Pourquoi le député n'avoue-t-il pas que, lorsqu'il a lancé des allégations, hier, il ne savait pas du tout de quoi il parlait?
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais que le vice-premier ministre comprenne bien que le problème, ce sont les enregistrements.
L'avocat du premier ministre bloque l'accès aux rubans de la GRC. C'est complètement inadmissible et contraire à toute attitude raisonnable.
Je répète ma question: pourquoi l'avocat du premier ministre bloque-t-il l'accès aux enregistrements de la GRC?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je vais devoir vérifier l'exactitude de cette assertion. Il se peut fort bien que le député ne sache pas plus aujourd'hui qu'hier de quoi il parle.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, l'avocat de la commission a reconnu l'existence des enregistrements. Pourtant, malgré les demandes répétées des étudiants, on ne leur a remis aucun de ces enregistrements sonores. C'est donc que l'avocat du premier ministre les dissimule. Pourquoi?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, d'après le Ottawa Citizen d'aujourd'hui, le porte-parole de la GRC, le sergent Russ Grabb, a dit au cours d'une interview que les services policiers avaient remis tous les rubans que la Commission des plaintes du public avait jugés pertinents jusqu'à maintenant. Les autres enregistrements qui sont censés manquer sont toujours disponibles et seront remis si la commission en fait la demande.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, le problème, en l'occurrence, c'est que les enregistrements qui ont été remis à la commission sont uniquement ceux que l'avocat du premier ministre a jugés pertinents.
Les étudiants ont été forcés de remettre absolument tous les documents qu'ils possédaient, y compris les messages électroniques de Craig Jones à sa petite amie. Il ne faut pas exagérer! Or, l'avocat du premier ministre refuse de communiquer d'importants enregistrements sonores qui révéleront que le cabinet du premier ministre a dirigé la répression policière au sommet de l'APEC.
Comment peut-on penser que l'enquête de la commission sera équitable si le...
Le Président: Le vice-premier ministre.
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, nous devrions vérifier l'exactitude des allégations sur lesquelles la députée fonde sa question.
Les députés d'en face se sont déjà souvent trompés dans les allégations sur lesquelles ils appuyaient leurs questions. Nous ferions mieux de voir s'ils en savent davantage aujourd'hui qu'ils en savaient sur ces points ces derniers jours.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, nous savons que les enregistrements existent. Le véritable problème, en l'occurrence, c'est de savoir pourquoi le gouvernement vérifie tous les documents qu'une commission indépendante doit examiner.
Le premier ministre peut-il donner aux Canadiens l'assurance que tous les documents seront remis à la commission sans avoir été vérifiés ou censurés au préalable? Communiquera-t-on la véritable information à la commission indépendante?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, autant que je sache, le gouvernement coopère avec la commission indépendante. Les allégations et les insinuations de la députée sont injustifiées et non fondées.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce qu'on apprend est plus que troublant. Cette Commission devait faire toute la lumière sur ce qui s'est passé dans l'affaire du «Peppergate». Or, on apprend aujourd'hui que des bandes sonores incriminant le premier ministre seraient retenues dans une voûte à la GRC.
Le solliciteur général peut-il nous dire si, oui ou non, il y a des bandes sonores retenues dans une voûte à la GRC?
[Traduction]
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la personne importante dans ce dossier est l'avocat auprès de la commission, lequel n'a jamais fait état de problème. Il dit que le gouvernement collabore pleinement. C'est la personne qui devrait se prononcer là-dessus.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le solliciteur général est responsable de la GRC. Je lui ai posé une question très claire. J'aimerais qu'il me réponde en se sentant aussi libre que s'il était dans un avion.
Y a-t-il des bandes sonores retenues dans une voûte de la GRC, oui ou non? Est-ce qu'il peut me répondre?
[Traduction]
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, cela fait l'objet d'une enquête indépendante. La personne à qui on devrait poser la question est l'avocat de la commission qui mène cette enquête.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, il existe une forte odeur de déjà vu dans le scandale du «peppergate».
On apprend que des bandes sonores incriminantes pour le bureau du premier ministre auraient disparu. Ceci rappelle fortement l'enquête sur la Somalie où des documents perdus avaient paralysé les forces armées pendant une journée au complet.
Dans le scandale du «peppergate», est-ce que le gouvernement va maintenant nous annoncer une «journée de la cassette» pour retrouver les rubans supposément perdus?
[Traduction]
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, le gouvernement collabore pleinement. L'avocat auprès de la commission le confirme.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, on sent le gouvernement fortement sur la défensive. Ma question est très simple: qu'est-ce que le gouvernement a à cacher?
[Traduction]
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la position du gouvernement sur ce point est on ne peut plus claire. Il s'agit d'une enquête très importante. La Commission des plaintes du public est l'organisme qui a pour mission de faire la lumière dans cette affaire. Et on devrait la laisser faire son travail.
* * *
LA SANTÉ
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.
Devant un comité sénatorial, ce matin, des scientifiques de la Direction générale de la protection de la santé ont expliqué, sous serment, comment, dans l'exercice de leurs fonctions, ils ont été muselés et bâillonnés, comment on leur a enjoint de falsifier des documents et comment on a fouillé et subtilisé leurs dossiers.
Compte tenu de ces tactiques dignes de celles employées par les États policiers, comment des scientifiques peuvent-ils faire leur travail et protéger la santé des Canadiens?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je crois savoir que les audiences de ce matin concernaient le processus d'examen d'une demande d'homologation d'un produit appelé hormone de croissance recombinante bovine.
Pour ne pas perdre de vue les faits, je tiens à dire que cette hormone n'a pas été approuvée au Canada. Santé Canada n'a pas donné son approbation. Même si cette hormone a été approuvée aux États-Unis, nous avons refusé de donner notre aval. Nous n'avons pas donné notre approbation. Nous ne la donnerons pas tant que l'innocuité de ce produit n'aura pas été prouvée à notre satisfaction. >Ce produit est à l'étude depuis neuf ans.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le ministre de la Santé peut prétendre que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes à la Direction générale de la protection de la santé. Est-il en train de dire qu'il est acceptable de museler des scientifiques? Est-il acceptable de falsifier des documents? Est-il acceptable de subtiliser secrètement des dossiers?
Si le ministre de la Santé n'a rien à cacher, pourquoi n'accepte-t-il pas la tenue d'une enquête publique en bonne et due forme sur ces graves allégations?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, si la députée ne prenait pas la parole pour des motifs politiques, elle reconnaîtrait que bon nombre de ces allégations ont déjà fait l'objet d'une enquête. La Commission des relations de travail dans la fonction publique étudie actuellement certaines d'entre elles; elle a tenu des audiences en bonne et due forme à cet égard et elle a entendu des témoins. Certaines des allégations mentionnées par la députée remontent à 1990. Elles ont fait l'objet d'émissions à la télévision en 1994.
Ces allégations ont été examinées au fil des ans. La Commission des relations de travail dans la fonction publique les étudie actuellement. Laissons cette commission examiner les preuves et tirer ses propres conclusions.
Quant à Santé Canada, elle continuera d'agir dans l'intérêt de la population.
* * *
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, la Commission des plaintes du public doit avoir accès à tous les enregistrements sonores des discussions entre agents de la GRC et Jean Carle, concernant la sécurité au sommet de l'APEC. Ils constitueraient une preuve irréfutable que le cabinet du premier ministre s'est rendu coupable d'ingérence dans les affaires de la GRC.
Le premier ministre a-t-il demandé à Jean Carle de diriger les opérations sécuritaires de manière à s'assurer que les manifestants pacifiques du Canada ne dérangent pas de cruels dictateurs de l'Asie?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, Jean Carle doit aller témoigner devant la commission. Pourquoi ne le laissons-nous pas témoigner? Je suis sûr qu'il confirmera que le premier ministre a agi correctement dans cette affaire.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est extrêmement troublant de voir que des enregistrements sonores pertinents sont actuellement détenus par un groupe autre que la Commission des plaintes du public. Cela laisse croire à une entreprise de camouflage venant des échelons supérieurs de la GRC, du solliciteur général ou du premier ministre.
Ma question s'adresse au solliciteur général. Pourquoi tous ces enregistrements n'ont-ils pas été remis à la Commission des plaintes du public, tel que demandé? Le solliciteur général essaie-t-il encore une fois de couvrir le premier ministre?
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit plusieurs fois, l'avocat-conseil de la commission ne s'est pas plaint d'un manque d'accessibilité de l'information. Le gouvernement a été très honnête. En fait, une remarquable quantité d'information a été mise à la disposition de la commission.
L'avocat-conseil de la commission et la commission elle-même font ce qu'ils ont à faire et le député devrait les laisser continuer.
* * *
LA SANTÉ
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Santé dit que le lait modifié à la somatotropine bovine est à l'étude depuis longtemps, mais n'a pas été approuvé, et c'est bien. Ce qui est intéressant, c'est que des scientifiques disent que 2 millions de dollars ont été offerts au ministère et que lorsque cela a été rapporté au ministère, absolument rien n'a été fait.
Je me moque qu'une émission de télévision ait exposé cette affaire. Pourquoi le ministère de la Santé ne fait-il rien si des millions de dollars ont été offerts?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons découvert hier que le député n'avait pas lu ses coupures de journaux de l'été. Nous pouvons voir maintenant que le député n'a pas regardé la télévision depuis 1994.
Toutes ces allégations d'entrée par effraction et d'autres choses du genre ont été examinées lorsqu'elles ont été rapportées aux hauts fonctionnaires en 1990, lorsque les événements allégués auraient eu lieu. La question est devenue publique et a été traitée dans le cadre d'une émission de télévision.
Je me permets de revenir à la véritable question, à savoir que Santé Canada veille à la sécurité des Canadiens. Nous n'avons pas approuvé la somatotropine bovine recombinante et nous ne l'approuverons pas.
Le Président: Le député de Macleod.
M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, cette affaire empire. Lorsque les cinq scientifiques qui s'occupaient de ce dossier se sont plaints, que leur est-il arrivé? À cause de la compagnie, ils ont été retirés du dossier.
Ma question est simple: qui veille au juste à l'innocuité du lait au Canada, nos scientifiques en qui nous avons confiance, ou quelque grande compagnie pharmaceutique anonyme? Qui s'occupe de nous?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député est mal informé. Il devrait être gêné. Le député devrait contrevérifier ses faits.
Pour le moment, Santé Canada n'a pas approuvé la STbr. Santé Canada n'approuvera pas la STbr tant que nous ne serons pas assurés qu'elle est sûre et cela, nonobstant le fait qu'elle a été approuvée aux États-Unis et qu'elle pourrait être vendue au Canada.
* * *
[Français]
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement refuse d'admettre qu'il dispose d'importants surplus budgétaires pour redonner aux provinces l'argent qu'il a dérobé dans le secteur de la santé. Pour citer Alain Dubuc de La Presse: «Cette fiction du surplus zéro est devenue une insulte à l'intelligence, carrément inacceptable sur le plan démocratique».
Le premier ministre admet-il qu'il a une marge de manoeuvre, puisqu'il a déjà mis 20 milliards de dollars sur la dette, en 15 mois, et que pour les cinq premiers mois de l'exercice en cours, le surplus est déjà de huit milliards de dollars?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, il est évident que, jusqu'à maintenant, nous avons un surplus mais, pour l'avenir, il y a beaucoup d'incertitude. Le tiers du monde est en récession en ce moment. Nous allons continuer d'agir de manière prudente et responsable. C'est notre devoir, c'est notre plan d'action.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas la marge de manoeuvre qui manque au gouvernement, c'est l'absence totale de compassion pour les gens. C'est ça, la réalité.
Je demande au répondant du gouvernement, un répondant responsable...
Des voix: Il n'y en a pas.
M. Yvan Loubier: ...si le gouvernement peut prendre l'engagement de répondre favorablement aux ministres des Finances des provinces et leur rembourser les 6,3 milliards de dollars qu'il leur doit pour la santé et les programmes sociaux?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, il est évident que nous avons dû couper, au nom de tous les Canadiens et du déficit, quelques transferts. Mais les transferts suggérés par le Bloc sont vraiment irresponsables.
Il ne tient pas compte de la péréquation de un milliard de dollars, de l'augmentation des points d'impôt de 2,1 milliards de dollars, des transferts pour le Programme d'infrastructures de 650 millions de dollars. En termes nets, le Québec n'a pas beaucoup souffert.
Il est évident que...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Le député de Medicine Hat a la parole.
* * *
[Traduction]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, selon une nouvelle étude qui vient d'être rendue publique, les Canadiens s'appauvrissent. Or, le gouvernement continue de ponctionner les Canadiens au moyen d'une forme d'impôt parmi les plus régressives qui se puissent imaginer. Le fait est que ce sont les travailleurs canadiens qui sont le plus durement touchés par cet impôt que constituent les cotisations d'assurance-emploi.
Pourquoi les simples travailleurs devraient-ils faire les frais de cette escroquerie de l'assurance-emploi s'élevant à plusieurs milliards de dollars?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, c'est vraiment une question de choix. Il nous incombe à tous de rechercher des solutions de rechange.
Allons-nous réduire les impôts pour seulement huit millions de contribuables ou allons-nous les réduire d'une manière plus générale, ce dont profiteraient quatorze millions de contribuables? C'est un des choix que nous devons faire.
Nous avons réduit les cotisations d'assurance-emploi. Celles-ci devaient être relevées à 3,30 $, mais nous les avons gelées à 3,07 $. Nous les avons ensuite ramenées à 3 $, puis à 2,95 $...
Le Président: La parole est au député de Medicine Hat.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, l'arrogance de ce gouvernement se mesure au fait qu'il tente de faire des choix avec l'argent d'autrui. Cet argent ne lui appartient pas, il appartient aux travailleurs et aux employeurs.
Une réduction de 350 $ des cotisations d'assurance-emploi ne veut peut-être pas dire grand-chose pour un ministre, mais elle est très importante pour un pêcheur, une serveuse ou quiconque a de la difficulté à joindre les deux bouts. C'est très important pour eux. C'est un impôt régressif qui frappe le plus durement les travailleurs.
Quand donc le gouvernement respectera-t-il la loi et leur redonnera-t-il cet argent? Qu'il se conforme à la loi. Quand donc le fera-t-il?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, dans le dernier budget, nous avons réduit de 1,4 milliard de dollars les charges sociales.
Nous avons des choix à faire pour soutenir la concurrence économique mondiale. D'une part, nos charges sociales comptent parmi les plus basses au sein du G7 et, d'autre part, nos impôts sur le revenu des particuliers sont les plus élevés. Lequel de ces deux facteurs est le plus favorable à la compétitivité du Canada? Ce sont des choix que nous devons faire.
Nous sommes déterminés à continuer de réduire les charges sociales. C'est ce que nous avons fait dans le passé...
Le Président: La parole est à la députée de Drummond.
* * *
[Français]
LA SANTÉ
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, les provinces sont prêtes à accepter un plan sur trois ans pour que le fédéral annule la coupure de six milliards dans les transferts pour la santé et les programmes sociaux.
Le ministre de la Santé s'engage-t-il, lui, à remettre aux provinces l'argent qu'il leur a coupé dans la santé?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme nous l'avons clarifié, nous avons précisé que pour le gouvernement fédéral, la santé est un sujet clé, une priorité très importante.
Nous avons déjà augmenté les transferts, l'année dernière, de 1,5 milliard de dollars...
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Allan Rock: ...et le premier ministre a dit aussi que la santé serait au coeur de notre prochain réinvestissement majeur.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, pourtant le ministre de la Santé disait dimanche qu'il était prêt à remettre aux provinces l'argent pour le secteur de la santé.
Maintenant que le gouvernement affiche des surplus budgétaires importants, le ministre va-t-il exiger que l'on rembourse intégralement les provinces pour la santé, ou va-t-il s'écraser devant le ministre des Finances, comme le fait si bien son collègue, le ministre du Développement des ressources humaines?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est clair que pour nous la santé est un sujet prioritaire. Nous avons déjà agi à cet égard et avons l'intention de respecter cette priorité.
Comme l'a dit le premier ministre lui-même, nous avons l'intention, comme prochain réinvestissement majeur, d'aborder le sujet de la santé et j'ai l'intention de travailler en collaboration avec mes partenaires des provinces pour le faire.
* * *
[Traduction]
LE MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, je signale à la Chambre que la ministre du Patrimoine tient à avoir ses policiers de la culture. Ces policiers de la culture seraient autorisés à procéder à des perquisitions et à des saisies.
La ministre peut-elle dire à la Chambre pourquoi elle a besoin d'une police de la culture?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse que le député m'ait posé la question. Un des défis que j'ai lancés au Parti réformiste aujourd'hui, c'est d'expliquer clairement aux Canadiens pourquoi il s'oppose à une mesure législative qui assure un appui aux publications de la Légion royale canadienne partout au Canada.
J'aimerais que des députés réformistes interviennent et répondent à cette question. À la veille du jour du Souvenir, je trouve absolument scandaleux que le Parti réformiste ne soit pas favorable à la promotion des publications de la Légion canadienne.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Rég.): Monsieur le Président, cela fait trois semaines qu'il est question de liberté d'expression et de démocratie. Et voilà qu'une ministre voudrait créer un autre corps policier, la police de la culture.
Est-ce que la ministre du Patrimoine estime que ce genre de censure est bien raisonnable dans une société démocratique?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, non seulement je m'oppose vigoureusement à la censure, mais je tiens à ce que les Canadiens puissent lire toutes les revues disponibles, y compris des publications canadiennes comme le Alberta Report, le Canadian Legion Magazine et le magazine Maclean's.
Le seul parti présent à la Chambre qui est favorable à la censure, c'est le parti qui ferait taire les voix des revues canadiennes, plutôt que de défendre le droit des Canadiens de s'exprimer par écrit.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, les dernières statistiques sur le taux de couverture des chômeurs condamnent encore une fois le régime du ministre. Seulement 43 p. 100 des chômeurs ont touché des prestations en août dernier. Une proportion de 57 p. 100 des chômeurs ont ainsi été appelés à contribuer de façon indécente aux surplus budgétaires.
Qu'attend le ministre du Développement des ressources humaines pour prendre des mesures immédiates pour redonner de la crédibilité à son régime? Peut-être attend-il l'autorisation du ministre des Finances?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le rapport déborde de chiffres sur les personnes qui sont en chômage. La succursale péquiste d'Ottawa essaie de mêler tout le monde à l'heure actuelle et d'insécuriser les travailleurs.
Les faits sont clairs: 78 p. 100 des Canadiens, qui ont travaillé au moins trois mois à plein temps et qui ont quitté leur emploi pour une raison valable ou à cause d'une mise à pied, sont couverts par le système d'assurance-emploi. Cela ne sert à rien d'insécuriser les Canadiens.
* * *
L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE
M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international. Hier, à l'Organisation mondiale du commerce, l'Union européenne a rejeté la requête du Canada pour la mise sur pied d'un comité qui aurait pu évaluer l'interdiction française de l'amiante. Puisque cette industrie est d'une importance capitale, est-ce que le ministre pourrait nous éclairer sur la situation?
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je remercie l'honorable député pour sa question très importante.
Hier, lors de sa réunion, l'OMC s'est penchée sur notre demande. Nous savions que l'Union européenne n'allait pas être d'accord. L'effet de son action est de repousser la décision d'un mois.
Alors, le 25 novembre prochain, un comité sera automatiquement mis sur pied pour examiner notre plainte. L'objectif du gouvernement du Canada, en partenariat avec celui du Québec, l'industrie et les syndicats...
Le Président: L'honorable député de Skeena a la parole.
* * *
[Traduction]
LA SANTÉ
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, en 1995, le ministre de la Santé a signé avec la bande indienne Gitksan, dans le nord de la Colombie-Britannique, une entente de 12 millions de dollars concernant l'administration des soins de santé.
Nous constatons que plusieurs centaines de milliers de dollars ont été investis à la bourse.
Lorsque j'ai écrit au ministre pour lui demander comment ces fonds ont pu se retrouver à la bourse, il a dit qu'il s'agissait de fonds excédentaires.
Le ministre pense-t-il vraiment que la bande Gitksan a plus d'argent qu'il ne lui en faut pour les soins de santé et qu'il s'agit là de fonds excédentaires?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'examinerai la question soulevée par le député et lui répondrai lorsque j'aurai tous les renseignements.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écrit au ministre il y a environ cinq mois et il m'a répondu. Je crois donc qu'il est au courant de la question.
Des membres de la bande m'ont dit qu'ils ne pouvaient pas obtenir de l'argent pour se rendre à Vancouver ou à Terrace pour y subir un examen TDM ou consulter un spécialiste. En fait, des membres de la bande m'ont dit que, lorsqu'ils se rendent à Vancouver, ils doivent passer la nuit dans une camionnette parce qu'ils n'ont pas d'argent pour payer une chambre d'hôtel en attendant d'être hospitalisés.
Comment le ministre de la Santé peut-il m'écrire qu'il s'agit là de fonds excédentaires, alors que beaucoup de membres de la bande ne reçoivent manifestement pas les fonds auxquels ils ont droit?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je répondrai au député lorsque je serai parfaitement au courant du dossier. J'examinerai attentivement les faits dont il a parlé aujourd'hui pour en vérifier l'exactitude.
* * *
LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA PROTECTION DE LA SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, aujourd'hui, les témoignages de scientifiques à l'emploi de Santé Canada ont donné une image terrifiante de ce qui se passe en ce moment à la Direction générale de la protection de la santé.
Ils ont rapporté des cas d'ordres de garder le silence et d'intimidation survenus au cours du mandat du ministre actuel et sous le gouvernement actuel.
Est-ce que le ministre nie que de tels événements soient survenus et, s'il ne le nie pas, que répond-il à des allégations aussi graves?
Lèvera-t-il l'ordre de garder le silence? Laissera-t-il les scientifiques faire leur travail?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, pour remettre les choses en contexte, je précise que les audiences d'aujourd'hui portaient sur la STbr, qui est un additif au lait approuvé aux États-Unis depuis des années.
Santé Canada n'a pas approuvé la STbr et ne l'approuvera pas tant que nous n'aurons pas la certitude que c'est un produit sans danger qui peut être utilisé au Canada.
Quant à l'ordre de garder le silence, je dirai à la députée que, après que le comité sénatorial ait cité les chercheurs de Santé Canada à comparaître, ceux-ci ont tout d'abord dit qu'ils ne voulaient pas. J'ai demandé à des fonctionnaires de leur écrire pour les encourager à y aller et leur rappeler qu'ils étaient obligés de témoigner.
* * *
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général. Elle a trait à l'enquête sur les événements du sommet de l'APEC.
Le solliciteur général dira-t-il à la Chambre quel rôle précis l'avocat du gouvernement fédéral, Ivan Whitehall, a joué dans l'examen des enregistrements que la GRC a fait de Jean Carle, le principal fier-à-bras du premier ministre lors de ce sommet?
Whitehall a-t-il obtenu un accès privilégié à ces bandes et, si oui, le ministre reconnaîtra-t-il qu'il s'agit là d'une atteinte à l'indépendance de la commission pouvant même lui enlever toute crédibilité?
L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je m'en remets à la Commission des plaintes du public contre la GRC elle-même et à son avocat-conseil pour déterminer s'ils ont accès à tous les documents dont ils ont besoin.
Jusqu'à maintenant, il n'y a eu aucune plainte.
* * *
LA SANTÉ
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, la terrible maladie de la vache folle qui a ravagé la Grande-Bretagne a franchi la barrière des espèces.
La version humaine de la maladie est la MCJ. À cause de la possibilité que des agents infectieux se retrouvent dans le système d'approvisionnement sanguin du pays, le gouvernement britannique a interdit l'utilisation de tout plasma venant du Royaume-Uni.
En mars 1998, la Grande-Bretagne a fermé sa propre industrie du plasma et a cessé d'accepter du sang de ses citoyens, tout cela à cause du lien entre le boeuf britannique et la maladie de la vache folle qui pourrait se retrouver dans le système d'approvisionnement sanguin.
Quelles assurances le ministre va-t-il nous donner qu'il fait tout en son pouvoir pour protéger...
Le Président: Le ministre de la Santé.
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, un groupe consultatif a déposé la semaine dernière un rapport sur cette question. Les fonctionnaires et les scientifiques de Santé Canada ont reçu ce rapport et l'examinent très attentivement.
Je tiens à dire au député, pour répondre à sa question de façon plus large, que nous avons un système de surveillance de calibre mondial à Santé Canada en ce qui concerne les contaminants, y compris ceux de la maladie de Creutzfeld-Jakob. La MCJ fait l'objet d'un projet de recherche très approfondi qu'on a entrepris à Santé Canada pour mieux comprendre cette nouvelle catégorie de prions qui contaminent le sang. Je garantis à la Chambre que nous prenons très au sérieux le risque en question.
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je pense que c'est le même ministre qui a manqué de vigilance dans le cas du sang contaminé au Canada. La commission Krever ne nous a-t-elle rien appris? Alors que d'autres pays prennent à l'heure actuelle des mesures pour protéger leurs citoyens, nous voulons qu'on nous garantisse que la tragédie à laquelle nous faisons face maintenant ne se reproduira pas à cause de l'inaction du ministre.
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député se trompe quelque peu dans sa chronologie. En effet, la commission Krever a fait rapport au moment où nous étions au pouvoir, sur des événements qui s'étaient produits lorsque son parti formait le gouvernement.
* * *
LES PARCS NATIONAUX
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Monsieur le Président, en juin dernier, le secrétaire d'État pour les Parcs et la ministre du Patrimoine canadien ont annoncé qu'ils comptaient protéger nos parcs nationaux contre un développement commercial excessif.
Quelles mesures concrètes le secrétaire d'État a-t-il prises pour préserver les richesses naturelles de nos parcs pour les générations à venir, dont fait partie mon fils Zachary qui chahute présentement à la tribune?
L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Parcs), Lib.): Monsieur le Président, nous avons adopté un certain nombre de mesures, dont la réduction du développement commercial qui sera appliquée à Banff, la réduction de la taille de la communauté et l'adoption d'un moratoire sur le développement commercial extérieur en matière de logement. Justement hier, j'ai eu l'occasion d'annoncer la formation d'un comité qui sera chargé d'établir des principes particuliers qui régiront tous les futurs projets de développement. Toutes ces mesures sont basées sur un seul principe très simple qui est la protection de nos parcs, et ce non seulement pour la génération actuelle, mais aussi pour celle de Zachary.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, la pause publicitaire des libéraux est terminée.
Les étangs bitumeux de Sydney sont contaminés par des toxines cancérigènes. Des études ont démontré une augmentation de 130 p. 100 de l'incidence de cancer de l'estomac chez les habitants de Sydney.
J'ai pu me rendre compte de l'horreur de la situation moi-même et cela me porte à me demander ce qui se passerait si cette masse dégoûtante se trouvait sur la colline du Parlement ou sur un certain parterre de Shawinigan. Combien de temps faudrait-il alors au gouvernement libéral pour ordonner le nettoyage?
L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement libéral est très préoccupé par la contamination qui existe dans le secteur des étangs bitumeux de Sydney.
Nous avons collaboré de très près avec un groupe de citoyens de Sidney en Nouvelle-Écosse qui peut compter sur la participation des trois niveaux de gouvernement. Nous avons accordé des fonds pour le financement de ce projet qui vise à résoudre ce problème très grave. Nous avons rencontré les membres de ce groupe connu sous le nom de JAG et signé un protocole d'entente avec eux. Nous avons rencontré les habitants touchés par le problème et nous collaborons avec les responsables provinciaux pour tenter de régler le problème.
* * *
[Français]
LE PROGRAMME D'ADAPTATION POUR LES TRAVAILLEURS ÂGÉS
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau, BQ): Monsieur le Président, pour remplacer le PATA, le gouvernement s'était engagé, en 1996, à élaborer, et je cite: «diverses mesures de soutien du revenu visant ceux et celles qui ne pouvaient plus se trouver un emploi sur un marché du travail extrêmement concurrentiel».
Qu'attend le ministre du Développement des ressources humaines pour respecter l'engagement de son prédécesseur et élaborer de nouvelles mesures de soutien du revenu pour aider les travailleurs et les travailleuses âgés dans cette situation particulièrement difficile?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est vrai que la situation de plusieurs travailleurs âgés au pays nous préoccupe énormément. C'est une situation difficile.
En effet, nous avions dû mettre fin au programme PATA, qui était un programme inéquitable. C'était un programme qui n'était pas juste à l'endroit de l'ensemble des gens de cette catégorie.
Alors, évidemment, nous avons augmenté les budgets de mesures actives d'emploi pour aider les gens à réintégrer le marché du travail. Nous avons mis sur pied un certain nombre de programmes qui sont adressés à l'ensemble de la population, notamment aux gens qui sont à la recherche d'un emploi. Mais nous sommes très préoccupés par la situation de ces travailleurs.
* * *
[Traduction]
VOLVO CANADA LTÉE
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, des employés qui craignent pour leur avenir occupent l'usine Volvo située dans ma circonscription. Le gouvernement s'engage-t-il immédiatement à faire tout ce qu'il pourra pour s'assurer que ces travailleurs soient traités équitablement et pour tenter de trouver une solution qui leur permette de conserver un emploi rémunéré?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, l'avenir des travailleurs de l'usine Volvo nous préoccupe beaucoup. La situation actuelle est le résultat d'une restructuration de l'entreprise. À court terme, nous croyons que la meilleure façon, pour les travailleurs et le patronat, de résoudre plusieurs des différends qui les opposent actuellement serait de s'attaquer très rapidement à ce qui fait problème à l'usine même.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, le ministre des Finances rencontre ses homologues provinciaux qui le contraignent à expliquer pourquoi son gouvernement contrevient à la Loi sur l'assurance-emploi en imposant aux Canadiens des primes d'assurance excessives. Le gouvernement semble contourner la loi afin de maintenir la prime d'assurance-emploi à un niveau inutilement élevé.
La Loi sur l'assurance-emploi stipule que les primes doivent être réduites. Est-ce que le gouvernement entend légiférer afin d'empêcher la réduction des primes prévue par la loi?
[Traduction]
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, l'un des choix difficiles que nous avons tous à faire est de savoir si nous opterons pour une approche équilibrée alors que l'avenir de notre économie demeure tout à fait incertain. Heureusement, nous avons pris des mesures qui nous ont permis de passer d'un déficit de 42 milliards de dollars à un premier excédent budgétaire, une réalisation historique.
Pour ce qui est de l'avenir, nous devons effectivement adopter une ligne de conduite prudente. Nous devons éviter tout nouveau déficit. C'est primordial.
* * *
LE REVENU NATIONAL
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national. Certains affirment que les provinces refuseront d'adhérer au plan du ministre concernant l'Agence du revenu. Trois ministres de la Nouvelle-Écosse et le ministre du Revenu national ont passé un marché de services qui sera administré par l'agence. Qu'est-ce que cet accord et l'agence apporteront de bon à la population de la Nouvelle-Écosse?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, nous avons passé la semaine dernière un contrat de services avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse. Nous avons également paraphé un contrat qui prévoit que Revenu Canada percevra, sous l'autorité de la nouvelle agence, les cotisations de la Commission des accidents du travail. Le ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse, M. Don Downe, a déclaré que ce contrat viendra renforcer les liens de coopération étroits qui existent déjà entre la Nouvelle-Écosse et Revenu Canada et permettra de resserrer ces liens sous l'égide de la nouvelle agence. Je voudrais citer aussi M. Peter O'Brien, porte-parole de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante...
Le Président: Le député de Nanaïmo—Cowichan.
* * *
L'INDUSTRIE DU BOIS DE SCIAGE
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, Greenpeace attaque l'industrie du bois de sciage de Colombie-Britannique en faisant croire, à tort, que tous les produits du bois de Colombie-Britannique viennent de vieux peuplements. Il y a gros à parier que prochainement, ce sera l'industrie du bois en Alberta, en Ontario et au Québec.
Les députés libéraux de Colombie-Britannique restent étrangement silencieux, alors que l'industrie connaît de graves difficultés économiques. Quand le gouvernement libéral va-t-il se porter à la défense de la Colombie-Britannique. Quand le premier ministre va-t-il prendre la part des britanno-colombiens, réfuter ces mensonges et remettre les horloges à l'heure dans le monde?
Le Président: Il me semble avoir entendu le mot mensonge. Est-ce que le député a utilisé le mot mensonge? Je préfèrais que l'on n'utilise pas ce mot ici.
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le hansard peut montrer que la question a été soulevée pour la première fois à la Chambre par un député libéral.
Il est vrai qu'il y a un certain nombre d'organisations qui, ces derniers temps, ont mal compris ou mal interprété les pratiques forestières canadiennes. La question a été longuement discutée par les ministres des Forêts fédéral et provinciaux, y compris celui de Colombie-Britannique. Nous travaillons à une stratégie pour faire connaître au monde la situation véritable.
* * *
[Français]
LE PROJET DE LOI C-44
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, alors qu'il est de plus en plus évident que le gouvernement libéral tente de mâter toute opposition au Canada, l'idée même qu'il rende amovibles les postes au conseil d'administration de Radio-Canada est pour le moins inquiétante.
Puisque le projet de loi C-44, qui aura pour conséquence de transformer le radiodiffuseur public en radiodiffuseur d'État, est décrié par deux ex-présidents de Radio-Canada, le président actuel et plus de 20 journalistes au Canada, quand le premier ministre retirera-t-il son projet de loi C-44?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, les agences quasi-judiciaires, qui doivent évidemment garder leur indépendance, devront avoir des présidents ou des membres du conseil d'administration qui auront une bonne conduite, alors que toutes les autres agences, culturelles ou autres, devraient avoir des administrateurs qui sont là sous le bon plaisir du gouvernement de façon à pouvoir être changés lorsque leur comportement l'indique.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, la pêche est, le plus souvent, une industrie familiale. Des femmes ont travaillé pour leur mari comme femmes de pont pendant les huit dernières années et elles se sont toujours qualifiées à l'assurance-emploi. Au cours des dernières semaines, le ministère du Développement des ressources humaines a refusé l'assurance-emploi à 40 femmes pour raisons de dépendance.
Est-ce que le ministre du Développement des ressources humaines est contre les femmes qui travaillent dans le secteur de la pêche ou est-il d'accord pour dire que son ministère a fait de la discrimination contre ces femmes?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je suis absolument convaincu que mon ministère n'a pas fait de discrimination à l'endroit de ces femmes. Il y a des règles qui sont assez claires sur les liens de dépendance parce qu'on ne peut pas gérer un système d'assurance-emploi sans clarifier certaines règles à cet égard.
Je vais regarder de près le cas que le député soulève à l'heure actuelle à la Chambre, mais il n'y a certainement pas de discrimination. Il faut quand même respecter des règles qui sont claires par rapport à la situation de dépendance. Sinon, il n'y a pas un système d'assurance-emploi qui pourrait tenir.
* * *
LA PAUVRETÉ
M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
Un rapport a été publié disant que les familles canadiennes sont plus pauvres aujourd'hui qu'elles l'étaient quand les Libéraux ont formé le gouvernement en 1993. Les enfants sont plus pauvres et l'écart entre les riches et les pauvres s'accroît chaque année.
Ce gouvernement a refusé d'exempter deux millions de Canadiens à faibles revenus du régime de taxation en augmentant l'exemption personnelle à 10 000 $. Quand le gouvernement arrêtera-t-il de pénaliser les Canadiens à faibles revenus? Quand peut-on s'attendre à voir un plan à long terme à ce problème très sérieux?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que la situation d'un grand nombre de citoyens canadiens nous préoccupe au plus haut point. Le niveau de pauvreté dans le pays est quelque chose qui nous émeut et qui nous rejoint. C'est la raison pour laquelle nous en avons fait une priorité de l'action de notre gouvernement.
C'est la raison pour laquelle nous avons, en partenariat avec les provinces, mis sur pied la Prestation nationale des enfants qui augmentera, au cours des trois prochaines années, de 1,7 milliard de dollars les revenus des familles à faibles revenus dans le pays. Nous avons également adopté un grand nombre d'autres mesures dont j'espère avoir l'occasion de parler à la Chambre bientôt.
* * *
[Traduction]
LES PÊCHES
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches et des Océans a autorisé les Indiens Mekah à chasser la baleine grise chez nous avec un fusil illégal de calibre 50. Cette mesure risque de ruiner l'effet de l'interdiction de la chasse à la baleine qui est en vigueur depuis 16 ans et qui a permis de sauver un grand nombre d'espèces.
Le ministre des Pêches et des Océans va-t-il officiellement se plaindre à Washington, demander que l'on mette fin à cette chasse à la baleine et révoquer les permis de chasse qu'il a accordés?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, comme d'habitude, les réformistes sont mal informés. Aux États-Unis, les Indiens de la tribu Makah ont un permis les autorisant à prendre cinq animaux.
Si un animal blessé au cours d'une chasse aux États-Unis se réfugie dans les eaux canadiennes, j'ai dit que je les autoriserais à poursuivre la baleine pour des raisons humanitaires, afin que l'on puisse l'abattre au lieu de la laisser agoniser.
En outre, j'ai bien précisé...
Le Président: Voilà qui met fin à la période des questions.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, il n'y a rien d'habituel dans cette question-ci. Elle est sans précédent à la Chambre. Compte tenu de la conjoncture, je demande au leader du gouvernement à la Chambre ce qu'il entend faire exactement, en fait d'étude de mesures législatives, pour le reste de la semaine et la semaine prochaine, afin de traiter de l'économie.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux que le député d'en face pose cette très importante question. Comme d'habitude, le gouvernement continuera à appliquer son programme visant à répondre aux besoins du Canada, économiques et autres.
Par exemple, cet après-midi, nous reprendrons le débat sur le projet de loi C-55, la loi sur les périodiques. Vendredi, nous étudierons le projet de loi C-41, sur la Monnaie royale canadienne. Si ce débat se termine demain, je ne crois pas que nous passerons à un autre projet de loi au cours de la journée.
Lundi, ce sera un jour désigné qui permettra à l'opposition de soulever un débat sur des questions très importantes, du moins nous l'espérons. Mardi prochain, nous espérons terminer la deuxième lecture du projet de loi C-43, qui traite de l'Agence du revenu du Canada.
Mercredi prochain, nous étudierons le projet de loi sur les juges du Nunavut, suivi du projet de loi C-49 concernant la question tout aussi importante des revendications territoriales des autochtones.
Mme Shaughnessy Cohen: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Ce matin, au Comité de la justice, nous avons terminé un rapport, mais nous n'avons pas pu le déposer.
Je voudrais demander que la Chambre consente à l'unanimité à me permettre de déposer ce rapport qui règle la question de savoir quand notre comité étudiera la question de la conduite avec facultés affaiblies, qui était restée en suspens.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le 13e rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, concernant la rédaction d'un projet de loi visant à modifier les articles du Code criminel qui ont trait à la conduite avec facultés affaiblies.
Je remercie la Chambre d'avoir donné son consentement. Puisque j'ai la parole, je vais en profiter pour demander le consentement unanime de la Chambre afin de pouvoir proposer l'adoption du rapport.
Le président suppléant (M. McClelland): La députée a-t-elle le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES ÉDITEURS ÉTRANGERS
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le Parlement a le devoir de défendre les intérêts du Canada et pour ce faire, il faut respecter les règles
C'est pour cette raison que le Canada se conforme à tous les aspects de la décision que l'Organisation mondiale du commerce a rendue à l'égard des magazines. La disposition du code tarifaire sera supprimée. Celle qui concerne la taxe d'accise le sera aussi. Les règles postales seront modifiées.
Défendre les intérêts du Canada, c'est respecter les organismes qui permettent à notre monde de fonctionner, mais c'est aussi défendre la culture canadienne.
[Français]
En vertu de ce projet de loi présenté à la Chambre des communes, seuls les éditeurs canadiens auront le droit de vendre de la publicité qui s'adresse au marché canadien.
L'argent provenant de la publicité nous permet d'alimenter les écrits canadiens, de mettre en valeur la perspective du Canada et de voir des illustrations de chez nous. Elle permet également d'alimenter la rédaction et la production et permet la parution de nombreux périodiques qui sont fièrement et ouvertement des histoires de chez nous.
Les revenus de la publicité représentent 60 p. 100 des revenus des périodiques canadiens. Le Canada ne peut permettre aux publications étrangères de venir gruger le marché publicitaire de chez nous et nuire ainsi à une part essentielle de notre culture et de notre identité.
[Traduction]
On ne demande pas au Parlement d'imposer une censure. On lui demande d'interdire la vente et la distribution par des éditeurs non canadiens de services de publicité destinés spécifiquement au marché canadien. On demande au Parlement d'établir des amendes dont seront passibles les éditeurs étrangers qui essaieront de violer ces lois.
Ce qui est en jeu ici, c'est la capacité d'un pays de protéger et de promouvoir sa propre culture. Ce qui est en jeu ici, c'est le contenu canadien; ce sont des articles écrits par des Canadiens pour les Canadiens et le monde entier. L'enjeu réside dans la compétence individuelle et collective de milliers d'écrivains, de rédacteurs, de photographes, d'éditeurs et d'entrepreneurs. L'enjeu réside dans la diversité culturelle du monde.
Je voudrais répondre à des critiques qui ont été faites à l'égard de ce projet de loi. Certains, surtout dans le Parti réformiste, disent que si les revues canadiennes ne peuvent pas soutenir la concurrence, elles feraient mieux de disparaître. Les règles du jeu sont-elles équitables lorsque des publications étrangères, qui n'assument aucun coût rédactionnel, peuvent entrer au Canada et y écrémer les revenus de publicité? Il ne s'agit pas ici de concurrence. Les revues canadiennes veulent bien soutenir la concurrence auprès des lecteurs. Il s'agit des revenus canadiens de la publicité alimentant un secteur industriel et lui permettant d'exister.
Je dois faire remarquer que la politique canadienne vient en aide à des magazines comme le Canadian Legion Magazine qui fait connaître aux Canadiens les récits de nos héros militaires. Il est tout à fait scandaleux de la part d'un parti qui prétend représenter les Canadiens ordinaires de s'opposer à un projet de loi qui permettrait la survie de ce magazine qui, soit dit en passant, a indiqué que cette aide lui était indispensable.
Il est ici question de magazines étrangers dont les coûts sont déjà couverts grâce au contenu étranger qui vient étouffer le contenu canadien. Il est question d'assurer l'avenir des magazines agricoles canadiens. L'association canadienne des producteurs de maïs...
M. Leon E. Benoit: Ils n'ont pas besoin de votre aide et n'en veulent pas.
L'hon. Sheila Copps: J'ai bien entendu le député. Des subventions postales totalisant environ 45 millions de dollars sont versées à des organisations variées, notamment l'Association des producteurs de maïs de l'Ontario. Or, ces organisations ont déclaré très clairement au gouvernement qu'elles l'appuient et qu'elles approuvent sa politique, parce qu'elles veulent se faire entendre au sein de l'industrie agricole du Canada.
Il est question ici de l'avenir de magazines canadiens destinés aux anciens combattants ou aux pêcheurs, de revues d'actualités, de publications professionnelles telles que le BC Business Magazine, qui appuie la politique élaborée par le gouvernement, de publications érudites et de magazines d'intérêt général pour les consommateurs. Nous voulons pouvoir lire à nos jeunes des revues pour enfants produites au Canada.
Certains sont mécontents parce qu'ils craignent que ce projet de loi contrarie nos voisins du Sud. Nos vis-à-vis semblent oublier qu'ils ont été élus à la Chambre des communes pour défendre les intérêts du Canada et lutter pour sa survie. Ceux qui prétendent que le projet de loi irritera les États-Unis doivent comprendre qu'aucun pays dans le monde n'a jamais importé et lu autant de périodiques par habitant que le Canada en importe actuellement des États-Unis. Le projet de loi gardera ce marché ouvert.
Aucun pays dans l'histoire du monde n'a jamais exporté autant de périodiques par habitant vers un autre pays que les États-Unis en exportent vers le Canada. Nous sommes plus ouverts aux périodiques américains que n'importe quel autre pays du monde.
Les députés peuvent-ils imaginer la réaction des Américains s'ils entraient dans la tabagie de leur quartier et constataient que 80 p. 100 des périodiques sur les étagères sont canadiens? Nous aimerions que nos voisins américains réfléchissent à cela.
Les États-Unis sont notre plus grand allié et notre ami le plus proche. Nous accueillons à bras ouverts les influences culturelles américaines. Cependant, nous avons envers nos enfants la responsabilité de défendre le Canada. Il est absolument hors de question, comme certains le laissent entendre, que nous fassions approuver les lois canadiennes par les États-Unis avant de les adopter.
Les députés peuvent-ils imaginer le Congrès des États-Unis soumettant un projet de loi au Parlement du Canada avant de l'adopter? Si les Canadiens ne défendent pas leur culture, qui le fera? À moins que le Canada ne défende les intérêts des Canadiens, qui le fera? Évidemment, agir comporte des risques, mais les risques seraient beaucoup plus grands si nous n'agissions pas.
La lâcheté des réformistes dans le domaine culturel présente des risques bien plus grands. Ne rien faire pour défendre les intérêts légitimes du Canada présente de bien plus grands risques.
[Français]
Certaines critiques proviennent de ceux et celles qui croient que les gouvernements ne devraient pas se mêler des politiques venant en aide aux périodiques. Mais la réponse est simple: si ce n'est pas le Canada qui appuie la culture canadienne, si ce ne sont pas les Québécois et le gouvernement du Québec qui appuient la culture québécoise, qui va le faire?
[Traduction]
Si nous ne défendons pas nos intérêts, qui le fera? Il y a quarante ans, il n'y avait qu'une poignée de magazines canadiens. Le gouvernement du premier ministre Lester Pearson a jugé nécessaire d'agir dans l'intérêt national et public et de créer un cadre réglementaire, non pour rédiger les magazines, non pour censurer les magazines, non pour faire obstacle aux autres magazines, mais pour créer une base pour les 1 500 magazines canadiens dont nous jouissons tous.
À Noël, je veux que ma fille puisse lire des articles au sujet des traditions canadiennes. Je veux qu'elle puisse en lire au sujet de la tourtière de ma belle-soeur. Je veux qu'elle puisse en lire également à propos de la façon dont je prépare au Canada mon potager pour nos hivers canadiens. Je ne veux pas qu'elle ait à lire un magazine qui célèbre les fêtes américaines, la culture américaine et les valeurs américaines parce qu'elle n'a pas d'autre choix. Voilà ce qui est en jeu.
Depuis L'Actualité jusqu'à Western Living, depuis Vancouver Living jusqu'à Canadian Geographic, depuis Maclean's jusqu'à Canadian Gardening, les magazines au Canada nous racontent maintenant l'histoire de ce que nous sommes. Ils parlent de notre mode de vie. Ils nous permettent de voir les régions du Canada que nous n'avons pas l'occasion de visiter personnellement. Ils nous permettent de lire les histoires de tous les âges, depuis celui de la garderie jusqu'à celui des arrière-grands-parents.
Nous pourrions peut-être ne rien faire pour assurer à ces magazines la chance de survivre, mais nous serions les perdants. Et les perdants, surtout, seraient nos enfants.
L'autre suggestion que font ces poltrons culturels, c'est de soumettre le projet de loi à l'examen des tribunaux avant de le présenter au Parlement. Une telle approche compromet les principes démocratiques, judiciaires et parlementaires selon lesquels le Parlement du Canada est la plus haute instance pour légiférer et l'ultime responsable des lois. Ces esprits négatifs voudraient lier les mains du Parlement et nous rendre otages de tous les groupes qui ne trouveraient pas un projet de loi de leur goût.
Nous ne compromettrons pas les droits législatifs fondamentaux du Canada en sollicitant l'approbation extérieure de gouvernements étrangers avant de légiférer dans l'intérêt national du Canada.
Je voudrais revenir sur l'argument défendu à maintes et maintes reprises par le ministre du Commerce international. Les services de publicité ne sont que cela, des services. Les services sont assujettis à l'accord général sur les services. La mesure dont le Parlement est saisi est absolument et parfaitement compatible avec les obligations internationales que cet accord impose au Canada.
J'insiste sur un autre argument qu'on a défendu maintes et maintes fois ces derniers mois. La mesure à l'étude ne fait pas obstacle à la possibilité pour un éditeur étranger d'exporter ses produits sur le marché canadien. Nous continuerons d'avoir et de nourrir le marché des magazines le plus ouvert au monde. Cela n'aura aucun effet sur les exploitations commerciales actuelles.
Les objectifs du Canada en cette matière sont équitables. La démarche adoptée dans le projet de loi est juste. La nécessité que le gouvernement passe à l'action est claire. Il est essentiel de ne pas tarder dans ce dossier. Ce projet de loi ne prévoit pas d'impôts, ni de subventions. Il ne restreint pas la circulation des biens étrangers.
[Français]
Ce projet de loi démontre que nous sommes déterminés à régulariser les services de publicité afin d'élaborer des politiques de chez nous qui reflètent la nature de notre pays et l'identité de notre population.
Les succès culturels canadiens ne sont pas le fruit du hasard. Les succès de notre culture et de notre pays nécessitent le travail, le génie, le dévouement et le renouvellement de nombreux individus et du statut du Parlement.
Pour contribuer à ces succès, les citoyennes et citoyens du Canada doivent prendre la résolution de promouvoir le contenu et d'appuyer la culture.
[Traduction]
C'est pourquoi le Parlement est maintenant saisi du projet de loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques. Il ne s'agit pas d'une situation où le Parlement agit dans l'intérêt du gouvernement ou dans le sien, mais bien dans l'intérêt du Canada.
Les revenus publicitaires représentent la plus grande partie des revenus des magazines canadiens et sont essentiels à l'expression sociale, économique, politique et culturelle de notre pays. Ce à quoi nous aspirons en tant que Canadiens, c'est à entendre nos histoires, à voir nos créateurs, à voir nos propres talents et à entendre nos propres voix chez nous et à l'étranger.
Le projet de loi dont nous sommes maintenant saisis veut protéger un patrimoine culturel fondé sur notre histoire, un patrimoine qui nous a été légué par des générations de parlementaires qui ont eu le courage d'y aller de leur apport dans le passé.
Ce projet de loi maintient les objectifs culturels canadiens de longue date et il appuie le droit du Canada et des Canadiens de promouvoir la culture canadienne et, par le fait même, de promouvoir notre identité.
Les députés qui croient vraiment que le Canada est un pays qui mérite d'être préservé n'ont d'autre choix que d'appuyer ce projet de loi.
M. Leon E. Benoit: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je demande le consentement unanime pour que la ministre réponde à des questions après son exposé.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: Non.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Madame la Présidente, malheureusement, la ministre vit encore dans les années 70. Nous sommes dans les années 90 et nous devons accepter le fait que le monde et la société changent.
Avant mon arrivée à la Chambre cet après-midi, j'ai assisté à une réunion du Comité du patrimoine canadien et nous avons reçu alors la présidente de l'Office national du film. J'ai entendu ce matin des idées intéressantes.
J'ai posé justement une question sur la culture parce que la présidente parlait alors de la politique culturelle canadienne devant le comité. Je lui ai demandé ce qu'elle préférerait entre la promotion et la protection. Elle a dit qu'à une époque, notre pays avait probablement besoin de protection, et je suis d'accord. Dans les années 90, avec les nouvelles technologies, elle a déclaré que la protection était de moins en moins soutenable. Nous savons ce que cela signifie. Cela veut dire que nous ne pouvons continuer d'offrir des subventions et d'appliquer la censure.
La présidente de l'Office national du film a déclaré qu'il n'y avait aucun problème avec le contenu canadien car les Canadiens veulent acheter, regarder et entendre des émissions et des revues canadiennes.
Elle nous a parlé de l'Office national du film et de son grand succès. L'office a fait la promotion du Canada dans le monde entier. Il accomplit un travail remarquable même avec un budget réduit. La présidente a dit au comité que l'un des problèmes au Canada résidait dans le fait que nous n'avons pas un plan directeur pour la politique culturelle. On agit un petit peu ici un petit peu là sans avoir de vision d'ensemble. La présidente a beaucoup d'excellents conseils à donner à tous les députés.
En ce qui concerne la politique culturelle, le système est tellement compliqué qu'il faut le simplifier. Il y a beaucoup trop de chevauchements.
Elle nous invite également à suivre le bon modèle. Nous ne pouvons continuer d'agir comme dans le passé. C'est un excellent conseil.
Je suis très heureux d'avoir l'occasion d'intervenir en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de patrimoine canadien sur ce projet de loi, à l'étape de la deuxième lecture. Chose plus importante, je représente les Canadiens. La ministre peut parler au nom du gouvernement du Canada, mais pour ma part, à partir des banquettes de l'opposition, je parlerai pour les Canadiens et leur Parlement. Il m'incombe de m'assurer que le projet de loi est dans l'intérêt des Canadiens. Or, quels intérêts cette loi va-t-elle servir? C'est une bonne question.
Chose plus fondamentale encore, je dois m'assurer que ce projet de loi est bien nécessaire. S'il y a une chose dont les Canadiens n'ont pas besoin, c'est d'une autre loi inutile. Le projet de loi s'attaque-t-il à un véritable problème ou est-il une solution à la recherche d'un problème? Voilà une question intéressante. Mon travail consiste à m'assurer que ce projet de loi ne soit pas une mauvaise mesure. Toute loi, quelle qu'elle soit, ne vaut pas plus qu'une mauvaise loi si elle a des résultats inattendus.
J'attire l'attention du gouvernement et de la Chambre sur ce qui m'apparaît comme étant des résultats inattendus du projet de loi. Nous devons également nous demander quelle image du Canada donne un projet de loi à impact international. Ce projet de loi est-il fidèle à notre véritable image? Comment sera-t-il accepté sur la scène internationale? Nous vivons dans une communauté mondiale. Que dit le projet de loi C-55 du Canada? Prépare-t-il notre pays à entrer dans le XXIe siècle, ou tend-il plutôt à perpétuer une vieille politique, mieux adaptée aux besoins du XIXe siècle?
Mais surtout, il nous incombe de nous assurer que si le projet de loi réduit les libertés des Canadiens, que ce soit justifié. S'il réduit les libertés sans raison valable, la Chambre ne devrait pas en laisser le second examen objectif à l'autre endroit, une assemblée non élue. Nous savons de quel endroit il s'agit.
Nous devons en tant que députés, nous opposer à une mauvaise loi pour mieux préserver les libertés et les intérêts des Canadiens qui nous ont élus, peu importe dans quel parti politique nous nous trouvons.
Le projet de loi C-55, Loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers, est la réponse du Canada à l'Organisation mondiale du commerce, au groupe de l'OMC chargé du règlement des différends et à la décision du groupe d'appel de l'OMC rendue en mars et en juin 1997. L'OMC s'est prononcée contre les tarifs punitifs et taxes prises par le Canada contre les éditions à tirage dédoublé de périodiques étrangers et contre les subventions déguisées des tarifs postaux pour les périodiques canadiens. Le Canada doit faire connaître sa réponse au plus tard le 30 octobre 1998.
Dans une tentative visant à contourner cette décision, le projet de loi C-55 définit la publicité non pas comme un bien mais comme un service. Qu'est-ce qu'une édition à tirage dédoublé? Il s'agit de «périodiques dont le contenu est essentiellement le même que l'édition originale, sauf pour la publicité qui s'adresse à l'auditoire canadien».
Pourquoi la ministre du Patrimoine canadien vise-t-elle les périodiques à tirage dédoublé? Un communiqué diffusé le 8 octobre 1998, le jour où la ministre a déposé le projet de loi C-55, indique que «seuls les éditeurs de périodiques canadiens pourront vendre aux annonceurs canadiens des services publicitaires destinés principalement au marché canadien».
Dans le même communiqué, la ministre indique que «plus de 80 p. 100 des journaux vendus dans les kiosques à journaux canadiens sont étrangers, la majorité provenant des États-Unis.» Cette affirmation de la ministre du Patrimoine tient-elle? Tout simplement, non. Le ministère du Patrimoine reconnaît lui-même qu'au moins 50 p. 100 des périodiques vendus au Canada sont des périodiques canadiens.
Permettez-moi de répéter que le ministère du Patrimoine canadien admet qu'au moins 50 p. 100 des périodiques vendus chez nous sont canadiens. La ministre semble être en train de susciter un besoin en faisant des statistiques un choix très sélectif.
De plus, la ministre sait que 75 p. 100 des revues sont lues au foyer. Les lecteurs y sont abonnés ou les reçoivent par distribution contrôlée. De quoi s'agit-il? Ce sont des revues que nous recevons avec nos journaux ou qui sont distribuées directement dans les foyers par d'autres moyens, le plus souvent gratuitement. Or, 94 p. 100 des revues de cette catégorie sont canadiennes. Cela m'amène à poser la question suivante à la ministre du Patrimoine canadien: Quel problème essaie-t-elle de régler? Pourquoi cherche-t-elle des problèmes là où il n'y en a aucun?
Le projet de loi C-55 est une solution en quête d'un problème. De qui la ministre cherche-t-elle à défendre les intérêts? Ceux des Canadiens? Ils lisent déjà des revues canadiennes qui expriment un point de vue canadien. Des revues comme Maclean's, Saturday Night et Chatelaine sont beaucoup lues. Si nous aussi tenons compte des quotidiens, les lecteurs ne manquent pas de points de vue canadiens sur leur pays et sur le monde. Le lectorat canadien des publications canadiennes fait déjà vivre un bon marché canadien de la publicité. Je le redemande, de qui la ministre essaie-t-elle de défendre les intérêts?
Si la ministre du Patrimoine canadien veut vraiment faire quelque chose pour les périodiques canadiens, elle devrait écouter le conseil du ministre de la Défense. Dans un discours du 17 janvier 1997, il a déclaré: «Dans ce nouveau monde numérique, peut-être les politiques de promotion culturelle seraient-elles plus judicieuses que les politiques traditionnelles axées sur la protection.» Promotion et non pas protection. Promotion, d'accord, mais ce projet de loi ne propose rien en ce sens. Il protège une industrie qui est déjà en santé.
Ce projet de loi n'est pas nécessaire. C'est donc un mauvais projet de loi. Mais il y a d'autres problèmes qui en font une mauvaise loi.
Le projet de loi C-55 tente de définir la publicité dans les magazines comme un service. La tentative de redéfinir la publicité comme un service est tirée par les cheveux. La publicité dans les magazines est imprimée avec de l'encre sur du papier et figure dans des milliers de magazines. La publicité est un bien tangible. On peut la voir, la toucher, écrire dessus, la ramasser, la déchirer, la froisser. Les magazines vendent de l'espace publicitaire, et non pas un service publicitaire. La ministre invente une définition qui n'est pas fondée sur la réalité.
La ministre a présenté le projet de loi C-55 par suite de décisions de l'Organisation mondiale du commerce, d'un groupe d'experts chargé du règlement des différends et d'un organisme d'appel. Ces décisions ont été rendues en mars et en juin 1997 contre les mesures de rétorsion fiscales et tarifaires du Canada contre les éditions dédoublées de périodiques distribués au Canada et les subventions postales cachées aux magazines canadiens.
La ministre veut nous protéger contre la dangereuse incursion de publications comme le New England Journal of Medecine.
Prenons donc un peu de recul et examinons le portrait plus général du commerce international du Canada. Le Canada dépend largement du commerce bilatéral avec les États-Unis. En fait, nous savons que ce commerce représente plus d'un milliard de dollars par jour. Le niveau de vie des Canadiens, leurs emplois, leur capacité de vendre leurs produits et services dépendent beaucoup de notre relation commerciale avec les États-Unis. Par conséquent, il convient de demander comment les Américains ont réagi au projet de loi C-55.
Je vais lire certaines des observations que le représentant au commerce des États-Unis a rendues publiques à Genève, au sujet du projet de loi C-55:
Le 8 octobre, le gouvernement du Canada a présenté au Parlement un projet de loi qui, s'il est adopté, interdira aux éditeurs étrangers d'utiliser les magazines qu'ils publient pour présenter de la publicité destinée essentiellement aux consommateurs canadiens.
Malheureusement, cela laisse les périodiques étrangers à tirage dédoublé dans la même situation que celle où ils se trouvent depuis 30 ans—c'est-à-dire qu'ils sont exclus du marché canadien.
Ce qui est aussi contrariant, c'est que le Canada semble penser qu'en présentant ce projet de loi, il se conforme aux rapports du groupe spécial et de l'organisme d'appel qui se sont penchés sur la question.
Le Canada semble penser que, s'il est illégal pour un gouvernement d'enfreindre les règles du GATT en confisquant 80 p. 100 des recettes publicitaires générées par les magazines importés à tirage dédoublé, il est tout à fait acceptable qu'il interdise systématiquement ces publicités.
Pour justifier ce nouveau projet de loi, les représentants canadiens semblent dire qu'il est régi par les dispositions antidiscriminatoires de l'AGCS plutôt que par les règles du GATT. De façon fort opportune, le Canada n'a pris aucun engagement au sujet de la publicité aux termes de l'AGCS.
Il étonnant que le Canada croit que cet argument qui oppose le GATT à l'AGCS soit maintenant valable en 1998, alors que le groupe spécial et l'organisme d'appel l'ont si nettement rejeté en 1997. Il est évident que le projet de loi proposé par le Canada vise à empêcher que des magazines importés puissent servir à présenter de la publicité destinée au marché canadien.
C'est justement ce que la taxe canadienne de 80 p. 100 empêche aussi.
Vus conjointement, le dépôt du projet de loi le 8 octobre et l'annonce, par le gouvernement canadien, du maintien du programme de subventions des tarifs postaux envoient un message très troublant au sujet de la volonté du Canada de se conformer à ses obligations internationales et, en particulier, d'observer la lettre et l'esprit des règles de l'OMC relatives au règlement des différends.
Pendant plus d'un an, le Canada a résolument refusé de divulguer les solutions de rechange qu'il envisageait ou de consulter les gouvernements intéressés concernant le respect des règles.
Après s'être traîné les pieds pendant 15 mois, le gouvernement canadien a soudainement annoncé des mesures de rechange qui demeurent néanmoins discriminatoires et protectionnistes.
Nous exhortons le Canada à revoir sa ligne de conduite. Dans le cas contraire, les États-Unis ont l'intention de réagir énergiquement.
La grippe asiatique qui frappe les marchés financiers affecte déjà le Canada. Les prix des denrées sont à la baisse et les agriculteurs canadiens risquent d'être les plus durement frappés. Les prix qu'ils obtiennent pour le blé et l'orge sont à la baisse. Les agriculteurs canadiens dépendent plus que jamais du marché des États-Unis. Le blé et l'orge font déjà l'objet d'un différend entre ce pays et le Canada. Quelles raisons aurions-nous d'envenimer encore davantage nos relations commerciales avec nos voisins?
Comme le disait M. Ron Lund, de l'Association canadienne des annonceurs, le projet de loi C-55 place dans une position très délicate les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Si la ministre du Patrimoine persiste dans la ligne de conduite qu'elle a adoptée au sujet des périodiques à tirage dédoublé, c'est l'ensemble des relations commerciales qui sera remis en question. Ce pourrait être la pointe de l'iceberg. Les États-Unis jouissent déjà de l'appui de l'Organisation mondiale du commerce dans le dossier des périodiques à tirage dédoublé. Le Canada devrait défendre ses décisions commerciales lorsqu'il sait qu'elles sont fondées, mais pourquoi provoquons-nous les États-Unis alors que ce pays a en main une décision quasi-judiciaire qui lui est favorable?
En présentant le projet de loi C-55, la ministre met en péril les exploitations agricoles canadiennes, les emplois des Canadiens, leur niveau de vie et les relations commerciales internationales du Canada. La ministre a-t-elle l'appui du ministre du Commerce international, du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et du ministre de l'Industrie?
J'ai démontré l'inutilité du projet de loi. J'ai démontré à quel point le projet de loi C-55 est une mauvaise loi pour le commerce international et notre économie nationale.
J'arrive maintenant aux répercussions du projet de loi C-55 sur les droits fondamentaux, les libertés et nos droits juridiques. L'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés garantit à tous la liberté d'expression, la liberté de la presse et des autres moyens de communication ainsi que la liberté d'association. En outre, l'article 8 prévoit que: «chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.»
Je me concentre sur le mot «abusive». Son contraire, le mot «raisonnable» paraît à l'article 1 de la charte, que je vous lis:
La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.
La charte nous donne des droits et des libertés. Ces droits et libertés sont garantis, sous réserve de limites raisonnables. Le projet de loi C-55 limiterait la capacité des annonceurs canadiens de faire la promotion de leurs produits et services dans des périodiques. C'est là une restriction à la liberté d'expression. C'est une restriction à la liberté de parole. Le projet de loi C-55 restreint le type d'association que les éditeurs et les annonceurs souhaitent conclure pour promouvoir leurs produits et services.
Si la ministre du Patrimoine canadien estimait qu'un éditeur qui publie des tirages dédoublés a vendu de l'espace publicitaire à un annonceur canadien, elle pourrait invoquer le Code criminel pour donner à des enquêteurs le pouvoir de fouiller et de perquisitionner ses locaux. Est-il raisonnable de créer une police des périodiques?
Les éditeurs qui publient des tirages dédoublés sont des citoyens respectueux de la loi. Même la menace de l'adoption du projet de loi C-55 ne suffira pas à empêcher les éditeurs d'accepter plus de publicité de Canadiens. Est-il raisonnable de créer un corps policier des périodiques pouvant se lancer aux trousses d'éditeurs et de journaux respectueux des lois? Ce sont des personnes morales respectables. Ce ne sont pas des criminels de droit commun.
Qui plus est, est-il raisonnable de restreindre la liberté d'expression et la liberté d'association dans le monde de la publicité? L'industrie canadienne de l'édition est en pleine santé. Les journaux d'idée et la publicité des éditeurs canadiens sont lus par une bonne proportion des Canadiens. En fait, les éditeurs canadiens sont bien reçus à l'étranger. Nous savons que les Canadiens veulent lire des choses canadiennes et regarder des films canadiens. Il y a un marché.
Un éditeur canadien a dit: «J'ai toujours été vigoureusement opposé à ces règles restrictives. Je travaille dans ce secteur depuis presque 30 ans. En tant que propriétaire de Saturday Night, je suis opposé aux restrictions que proposent les représentants de l'industrie des magazines à l'égard des publications américaines.» Et il a ajouté: «Nous sommes bien reçus dans les pays étrangers, le Royaume-Uni, les États-Unis, Israël, où nous faisons des affaires. Le Canada ne devrait pas se comporter différemment de ces pays.»
En fait, j'ai même entendu Conrad Black s'opposer à ce projet de loi.
Le projet de loi C-55 n'est pas raisonnable. Il est absurde. Pire, il est utilisé pour imposer des restrictions idiotes aux libertés fondamentales et aux droits juridiques. Qu'est-ce que cela signifie?
Il y a aussi des conséquences du point de vue de la division des pouvoirs constitutionnels entre les provinces et le fédéral.
Plus d'une fois, la ministre a démontré qu'elle se préoccupait peu des effets des lois et politiques fédérales sur les autres niveaux de gouvernement. Elle l'a démontré dans son ancien portefeuille de ministre de l'Environnement. L'été dernier, elle a désavoué ses propres fonctionnaires qui, pendant des mois, avaient travaillé sur un plan pour la ville de Banff. La ministre du Patrimoine ne collabore pas très bien avec les autres. Nous y voilà de nouveau.
Il n'y a rien dans la Constitution qui place les imprimés dans la sphère de compétence fédérale. Je renvoie la Chambre à l'article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867. Par ailleurs, le projet de loi empiète sur le domaine provincial en matière de propriété et de droits civils. Je renvoie les députés au paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867. Le projet de loi C-55 ne peut pas être justifié en vertu des pouvoirs du gouvernement fédéral d'assurer la paix, l'ordre et le bon gouvernement.
Je voudrais maintenant lire un paragraphe d'un article écrit par l'Institut C.D. Howe. Il résume sa position sur la question de la loi restrictive. Je cite la dernière page:
Le Canada devrait défendre énergiquement son droit de promouvoir sa culture au moyen de subventions, d'allégements fiscaux et d'exigences et de définitions raisonnables en matière de contenu, dans le but d'assurer la disponibilité pour les Canadiens de produits de leur propre culture et, en général, un environnement compétitif équitable pour les productions culturelles canadiennes qui revêtent manifestement une valeur spéciale pour les Canadiens. Le Canada devrait également insister pour que la politique publique puisse traiter différemment à certains égards les magazines contenant des articles canadiens destinés à des lecteurs canadiens par rapport aux magazines produits pour un auditoire étranger. Or, en s'accrochant à des mesures qui restreignent de plus en plus l'accès à l'information, qui menacent les intérêts commerciaux canadiens et qui accélèrent peut-être, au lieu de la prévenir, l'assimilation culturelle,
le gouvernement fédéral risque au contraire d'appauvrir au bout du compte la santé culturelle et économique du Canada et il réduit les possibilités d'en arriver à une entente négociée avec les autres pays sur la frontière qu'il convient de tracer entre le libre-échange et la culture.
Je pourrais continuer longtemps encore, car il y a toutes sortes de preuves qui montrent que la mesure à l'étude est la mauvaise décision à prendre de la part du gouvernement actuel.
Il est clair que le projet de loi C-55 ouvre la porte à toute une série de contestations longues et coûteuses fondées sur la Constitution, toujours aux frais des contribuables. Tout cela uniquement pour brandir des menaces à peine déguisées.
Le projet de loi C-55 ne sert pas l'intérêt du public, l'intérêt des Canadiens. En réalité, il constitue une menace pour le commerce, les emplois et les moyens de subsistance des Canadiens.
Le projet de loi est inutile. Le secteur canadien des périodiques est sain et concurrentiel. Il peut se passer de protection. Les produits des éditeurs canadiens sont bien reçus à l'étranger. Le projet de loi C-55 ne représente qu'une vieille politique usée du siècle dernier. À l'aube d'un nouveau siècle, cherchons à promouvoir et non à protéger.
En proposant ce projet de loi, la ministre du Patrimoine canadien s'aventure dans des domaines où le pouvoir et la réglementation du gouvernement fédéral n'ont pas leur place.
Le pis de tout, c'est que ce projet de loi impose des limites déraisonnables à la liberté d'expression, à la liberté de la presse, à la liberté d'association et fait appel à une police des magazines ou de la culture pour menacer les citoyens respectueux des lois. C'est une très mauvaise loi.
Par conséquent, je propose l'amendement suivant:
Qu'on modifie la motion en supprimant tous les mots après le mot «Que» pour les remplacer par ce qui suit:
le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques, ne soit pas lu pour la deuxième fois maintenant, mais qu'il soit lu une deuxième fois dans six mois à compter d'aujourd'hui.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion est recevable.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Madame la Présidente, nous débattons aujourd'hui, en deuxième lecture, du projet de loi C-55 qui concerne les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques.
Ce projet de loi a été rendu nécessaire après que Sports Illustrated ait contourné, par voie électronique, le Tarif 9958 adopté en 1965 et qui interdisait l'importation au Canada de magazines dédoublés, c'est-à-dire des magazines étrangers qui contiennent de la publicité destinée au marché canadien. Sports Illustrated a contourné la réglementation canadienne en important, par voie électronique, son contenu éditorial et en imprimant son magazine au Canada.
En 1995, le Canada a adopté le projet de loi C-103 qui imposait une taxe d'accise de 80 p. 100 sur les revenus publicitaires de tels magazines. Cette mesure et trois autres ont été jugées incompatibles avec les accords du GATT signés par le Canada en 1947 et mis à jour en 1994.
Conséquemment, le Canada a dû revoir sa politique de soutien aux magazines et sa loi imposant une taxe d'accise de 80 p. 100 en particulier.
Aujourd'hui, la ministre du Patrimoine propose un projet de loi qui interdit aux magazines étrangers l'accès au marché de la publicité au Canada. Le gouvernement est d'avis que le Canada est en droit de protéger son marché de la publicité, puisque la publicité est un service et qu'en vertu de l'Accord général sur les services, la publicité est exemptée.
On dit d'un secteur qu'il est exempté lorsqu'il n'apparaît pas sur la liste des secteurs auxquels s'appliquent un accord. On parle d'une exception culturelle lorsqu'on inscrit, dans un accord, un texte prévoyant l'exclusion d'un secteur de l'accord.
Le Bloc québécois donne son accord de principe au projet de loi en deuxième lecture. Nous écouterons cependant attentivement les commentaires qui nous seront présentés lors des travaux du comité à ce sujet. En 1995, le ministre Michel Dupuy nous avait affirmé que son projet de loi C-103 respectait les règles commerciales internationales, comme nous l'affirme la ministre du Patrimoine aujourd'hui.
Regardons un peu l'historique.
En 1990, Time-Warner reçoit l'assurance de Revenu Canada que son plan de publier une édition canadienne de Sports Illustrated ne contrevenait pas au Tarif 9958.
Le 15 août 1990, Investissement Canada confirme que la venue de Sports Illustrated au Canada n'est pas soumise à la Loi sur les investissements au Canada.
Conséquemment, Time-Warner se croit autoriser à s'implanter au Canada.
Le 7 janvier 1993, Time-Warner annonce qu'elle publiera une version en tirage dédoublé du magazine Sports Illustrated.
Naturellement, comme le ministre des Communications n'avait pas été informé des décisions de son collègue de l'Industrie, il s'est objecté, en raison du Tarif 9958, au dédoublement de Sports Illustrated au Canada.
Le 5 avril 1993, Sports Illustrated publie son premier numéro à partir de Richmond Hill. Comme sa publication ne franchit pas la frontière physiquement, le Tarif 9958 ne s'applique pas.
Plutôt que d'agir immédiatement, le gouvernement commande, en avril 1993, un rapport sur l'industrie du magazine.
En décembre 1993, Time-Warner annonce son intention de passer de six numéros dédoublés à douze par année.
Le 24 mars 1994, le groupe de travail rend son rapport public. Il y est recommandé de prévoir une taxe d'accise de 80 p. 100 sur les magazines dédoublés, mais d'exempter Sports Illustrated à la condition qu'il ne publie pas plus de six numéros par année. L'industrie canadienne n'accepte pas cette dernière partie de la recommandation, et à juste titre.
En décembre 1995, le projet de loi C-103 est adopté.
Le 11 mars 1996, Mickey Kantor, le secrétaire au Commerce américain, annonce qu'il dépose une plainte auprès de l'Organisation mondiale du commerce contre: premièrement, la taxe d'accise de 80 p. 100 imposée aux magazines dédoublés en vertu du projet de loi C-103; deuxièmement, les tarifs postaux inférieurs consentis aux publications canadiennes; troisièmement, le subside postal; et, quatrièmement, le Tarif 9958 qui interdit l'importation au Canada des magazines dédoublés.
Le 30 juin 1997, l'OMC se rend à l'argumentation américaine et invalide les quatre mesures de protection des magazines canadiens et stipule que les magazines, étant des biens, les politiques canadiennes de protection des magazines devaient être compatibles aux règles du GATT sur les biens.
En août 1997, le Canada avise l'OMC qu'il se conformera à la décision de l'OMC.
En juillet et en octobre 1997, le gouvernement canadien annonce la série de mesures en vue de se conformer à la décision de l'OMC et de promouvoir les industries canadiennes et québécoises du magazine.
Pour se conformer au jugement de l'OMC, le Canada met de l'avant les propositions suivantes: premièrement, le code tarifaire 9958. Ce code tarifaire interdisait l'importation au Canada de magazines dédoublés. Il sera abrogé au moyen d'un décret.
Deuxièmement, le projet de loi C-103 modifiait la Loi sur la taxe d'accise. Cette modification autorisait le gouvernement à prélever une taxe d'accise de 80 p. 100 sur les revenus publicitaires canadiens enregistrés par les éditeurs de magazines dédoublés. Cette loi sera amendée par le truchement d'une motion de voies et moyens.
Troisièmement, le subside postal. Par cette mesure, Patrimoine Canada verse à la Société canadienne des postes près de 50 millions de dollars par an pour qu'en retour, la Société accorde des tarifs réduits à certains magazines. Cette mesure sera maintenue, sauf que dorénavant, Patrimoine Canada versera cette somme aux comptes dont disposent les revues à la Société des postes.
Quatrièmement, les tarifs postaux préférentiels. Cette mesure permettait à la Société des postes d'offrir un tarif préférentiel pour les revues canadiennes. Les tarifs pour les magazines étrangers seront réduits au taux préférentiel canadien. Cette mesure coûtera 16 millions de dollars à Postes Canada.
Je vais maintenant vous faire part des réactions à la législation jusqu'à aujourd'hui.
Les éditeurs canadiens ont applaudi au dépôt de cette législation. Le président de l'Association des magazines canadiens, M. François de Gaspé Beaubien, accompagnait même la ministre du Patrimoine lors du point de presse qui a suivi le dépôt de ce projet de loi. Pour l'Association, l'enjeu était d'éviter que les éditeurs étrangers, qui font leurs frais sur les marchés étrangers, ne viennent concurrencer les magazines canadiens en offrant des tarifs publicitaires plus bas que ceux pouvant être offerts par les magazines canadiens.
Les magazines canadiens tirent plus de 60 p. 100 de leurs revenus de la vente de services de publicité. De plus, l'Association ne voulait en aucun cas remplacer les revenus perdus de la publicité par des subventions. Cela était non seulement irréaliste—il aurait fallu des centaines de millions de dollars pour le faire—mais également posait des problèmes d'éthique. On voulait une mesure qui protège l'indépendance éditoriale des revues.
The Association of Canadian Advertisers a déclaré, pour sa part, son intention de contester la législation en vertu des dispositions de la Charte des droits et libertés. Les juristes qui ont travaillé à la rédaction de la législation sont d'avis toutefois que l'Association a peu de chances de succès puisqu'il s'agit ici de confirmer une pratique qui existe depuis plusieurs décennies au Canada.
Le secrétaire d'État américain au Commerce a pour sa part fait savoir qu'il contestera à nouveau ces dispositions du Canada pour protéger le marché de la publicité.
Dans le Financial Post du samedi 10 octobre 1998, on pouvait lire en effet, en page 4, que les États-Unis veulent entreprendre une autre bataille contre le Canada afin de bloquer le projet de loi que nous débattons aujourd'hui parce qu'il contient, d'après eux, des dispositions protectionnistes et discriminatoires.
Pourtant, ces dispositions n'ont qu'un objectif: interdire la concurrence américaine dans l'industrie du magazine au Canada. Les Américains estiment que le Canada tente de trouver de nouvelles astuces pour se soustraire à ses obligations internationales en vertu du GATT. À ce jour, cependant, le gouvernement américain n'a donné aucune suite concrète à ses déclarations de la première heure.
Dans sa cause l'opposant aux États-Unis dans le dossier de Sports Illustrated, le Canada a perdu parce que les mécanismes de règlements des différends de l'OMC ont statué que le magazine était un bien, et que les règles du GATT de 1994 devaient leur être appliquées puisque la publicité doit utiliser ce moyen, qui est un bien, comme vecteur. Or, on le sait, il n'existe pas de clause d'exception culturelle dans le GATT.
En intitulant son projet de loi «Loi concernant les services publicitaires fournis par les éditeurs étrangers de périodiques», et en interdisant, à l'article 3, aux éditeurs étrangers de fournir des services de publicité au marché canadien, le gouvernement tente de s'assurer que la mesure qu'il propose aujourd'hui soit comprise comme portant sur la publicité et, par voie de conséquence, comme relevant de l'Accord général sur le commerce des services. Comme le Canada n'a pas inscrit la publicité sur la liste des services admissibles à l'Accord, le ministère du Patrimoine canadien est d'avis que son projet de loi résistera à l'examen de l'OMC, advenant l'éventualité d'une contestation.
Le Bloc québécois souhaite que cette fois le gouvernement ait raison. Bien que le Québec soit moins affecté par l'importation de magazines dédoublés, le Bloc québécois n'a aucun intérêt à voir s'affaiblir l'industrie culturelle canadienne. Plusieurs de nos magazines cohabitent en symbiose avec des magazines canadiens et pourraient subir les retombées d'une politique qui ouvrirait le marché de la publicité du Canada aux éditeurs étrangers.
Il faut cependant rappeler que la décision de l'OMC portant sur Sports Illustrated a mis en lumière la fragilité de la vision canadienne quant à la protection du secteur culturel dans les accords commerciaux internationaux. En effet, l'OMC a choisi de statuer que la publicité—un service—ayant besoin d'un magazine pour être véhiculée—un bien—, ce bien pouvant être substituable par d'autres biens importés—l'OMC avait même comparé des contenus de différents magazines—le Canada ne pouvait prétendre soustraire ces biens à ses obligations prévues en vertu du GATT de 1994, version revue et corrigée du GATT de 1947.
Ainsi, des experts ont émis l'avis à l'effet que plusieurs mesures de protection culturelle qui utilisent un support tangible pourraient faire l'objet d'une plainte auprès de l'OMC en vertu du GATT de 1994. Les Américains pourraient ainsi contourner l'exception culturelle contenue dans l'ALENA.
Des experts qui ont comparu au Comité du patrimoine, et la Conférence canadienne des arts ont également invité le gouvernement canadien à être plus proactif en vue de protéger les intérêts culturels du Canada et du Québec dans les accords commerciaux internationaux.
Alors que l'Accord multilatéral sur les investissements, le désormais célèbre AMI, qui était en négociation à l'OCDE, vient de subir un échec, il est temps pour le gouvernement fédéral de se doter d'une réelle stratégie pour défendre l'exception culturelle dans tous les accords commerciaux internationaux. Ici, on parle bien entendu d'une exception culturelle autodéfinie qui protège la capacité actuelle et future du Canada et du Québec à adopter des mesures en vue de promouvoir leur culture respective.
Des négociations sont prévues au tournant de l'an 2000. Ces négociations doivent porter sur les services et peut-être sur les investissements. Le GATT de 1994 présente une déficience majeure, puisqu'il ne comporte aucune clause d'exception culturelle. L'Accord sur les services non plus. Tout au plus, ce dernier Accord prévoit des exemptions pour les services qui ne sont pas inscrits sur la liste des services auxquels l'Accord s'applique.
Le Bloc québécois demande donc au gouvernement de réfléchir à la proposition des experts et des artistes, à l'effet de se doter d'une véritable équipe, qui comprendrait des artistes et des représentants du Québec, en vue de sensibiliser tous les pays à l'importance d'obtenir une exception culturelle.
Le Canada pourrait jouer à cet égard le même rôle que celui assumé par le ministre des Affaires étrangères dans le dossier des mines antipersonnel.
Cette équipe, multipartite, à laquelle le Québec participerait de plain-pied, doit avoir l'expertise et les ressources financières pour mener à bien son travail de lobby. Les outils sont là. Il faut maintenant une volonté politique pour s'en servir et travailler.
Dans l'édition de 1997 de Statistique Canada, au chapitre intitulé «Le Canada, sa culture, son patrimoine et son identité», on apprend qu'en 1994, le Canada comptait 1 400 magazines; que les revenus totaux de l'industrie étaient de 867 millions de dollars, dont 520 millions provenaient de la publicité; et que la marge de profit était de 6 p. 100 dans les marchés anglophones et de 13 p. 100 dans les marchés francophones. Au Canada anglais, 80 p. 100 des magazines en kiosque sont étrangers, alors que la proportion est de 20 p. 100 au Québec, nous apprend le journal La Presse du 26 février 1997.
Dans le rapport du groupe de travail sur l'industrie des périodiques intitulé «Une question d'équilibre» et paru en 1994, on peut lire, à la page 40: «[...] que les Canadiens achètent pour l'équivalent de 700 millions de dollars de magazines américains et les Américains se contentent d'acheter pour 60 millions de dollars de magazines canadiens. Le Canada importe annuellement 25 fois plus de magazines des États-Unis qu'il n'en exporte».
Le rapport disait aussi ceci: «Les périodiques canadiens de langue française détiennent environ 95 p. 100 de leur intérieur, et les éditeurs canadiens ne touchent que 25 p. 100 du revenu du tirage sur leur propre marché intérieur».
Selon le journal The Citizen, une étude réalisée par Patrimoine Canada, dont nous n'avons pu malheureusement obtenir copie même en vertu de la Loi sur l'accès à l'information—et je pourrais même souligner que la cause est en appel devant le commissaire d'accès à l'information—conclut que 40 magazines américains réalisent assez de ventes au Canada, c'est-à-dire plus de 50 000 copies, pour avoir une édition dédoublée; 40 magazines canadiens seraient sur le point de faire faillite; et les revues américaines iraient chercher près de 40 p. 100 des revenus publicitaires investis par des Canadiens dans les revues canadiennes, ce qui serait dramatique si on les laisse faire pour ce secteur culturel si nous ne prenions pas les moyens pour l'aider.
En entrant dans cette Chambre, un de mes collègues, le député de Repentigny, m'a remis la Revue parlementaire canadienne, volume 21, no 3 de l'automne 1998, c'est-à-dire la Revue de l'Association parlementaire du Commonwealth, Région canadienne, où on peut lire un magnifique article de M. Dennis Browne, «La culture canadienne face au commerce international et l'affaire des magazines».
Je me permettrai, puisque le temps mis à ma disposition me le permet, de citer un extrait de cet article qui est absolument extraordinaire, à mon avis, et j'invite même mes collègues du Parti réformiste de peut-être prendre le temps de lire l'article. Bien sûr, dans un Parlement démocratique, tout le monde peut avoir son opinion, et on peut être seul contre tous et avoir raison, mais je pense qu'il serait important pour les députés du Parti réformiste de penser davantage à l'intérêt de la culture canadienne qu'à l'idéologie de nos partis qui, parfois, nous aveugle.
Donc, on peut lire, à la page 21 de l'article, les propos suivants de M. Browene:
Pour comprendre l'affaire des magazines, il faut connaître un peu l'industrie des périodiques. D'après l'intervention de mon collègue, il me semble qu'il aurait besoin d'un petit recyclage dans l'industrie des périodiques. Ce qui caractérise cette industrie, ce sont ses deux flux de recettes et ses deux flux de dépenses. Les recettes proviennent, premièrement, des abonnements et des ventes en kiosque, et deuxièmement, de la publicité.
Quant aux dépenses, ce sont, premièrement, le coût du contenu rédactionnel, photos et articles, et deuxièmement, le coût de l'impression et de la distribution. Dans le cas de Sports Illustrated, les recettes provenant des ventes en kiosque et des abonnement semblent plus que suffisantes pour couvrir les frais de production et de distribution du magazine. Avant l'affaire, Time-Warner vendait environ 140 000 exemplaires de chaque numéro au Canada. Ce commerce tournait depuis de nombreuses années et je ne pense pas que la société ait perdu d'argent.
L'autre grand poste de dépenses, le contenu rédactionnel, était complètement payé par la publicité vendue aux annonceurs américains. Ce sont les États-Unis qui ont saisi l'OMC de cette affaire pour contester les mesures canadiennes qui empêchaient, dans les faits, les magazines américains d'avoir accès aux annonceurs canadiens.
Donc, l'affaire ne portait pas sur l'accès au marché, ni même sur les bénéfices ordinaires. Elle concernait des super bénéfices. Lorsque le contenu rédactionnel est déjà payé et que le prix de vente couvre entièrement les frais de production et de distribution, chaque dollar perçu pour la publicité canadienne dans Sports Illustrated apporte en réalité un pur profit à l'éditeur. Avec le gros tirage sur lequel il pouvait compter au Canada, l'éditeur avait déjà le gâteau, mais il voulait le glaçage.
La décision de l'OMC ne fera pas vendre un nombre plus grand d'exemplaires de Sports Illustrated au Canada. Elle rendra simplement la vente du même nombre d'exemplaires beaucoup plus profitable. Toutefois, ce qui pour Time-Warner est le glaçage est le pain quotidien des éditeurs canadiens de magazines. En effet, le montant total engagé concurremment par les annonceurs canadiens dans les médias imprimés n'augmente pas. Chaque dollar qu'ils dépensent pour acheter de la publicité dans un magazine américain est un dollar perdu pour les éditeurs de revues canadiennes.
Or, il ne fait aucun doute que les périodiques américains sont en mesure d'attirer la publicité canadienne. Comme leurs frais rédactionnels sont déjà payés, ils peuvent facilement accorder des rabais pouvant atteindre 80 p. 100 et quand même gagner de l'argent.
Aucun éditeur canadien n'est capable de soutenir une concurrence aussi sauvage. Sans les recettes publicitaires, les magazines canadiens ne seront pas à même d'acheter un contenu rédactionnel de qualité et ils attireront de moins en moins le consommateur canadien. Le Canada pourrait ainsi perdre l'une des tribunes, une très importante tribune où il peut s'exprimer culturellement. Donc, pour protéger les recettes publicitaires des revues canadiennes, le Canada a mis en place un train de mesures dont quatre ont été contestées dans le cas qui a été soumis à l'OMC.
L'interdiction d'importer les magazines à tirage dédoublé viole nettement le principe du GATT qui demande l'élimination des contingents. L'interdiction d'importer est le contingent ultime puisque les importations sont réduites à zéro. Le Canada a cherché à justifier cette interdiction en invoquant l'exception qui autorise des contingents nécessaires pour assurer le respect d'une réglementation nationale, en l'occurrence, un règlement de l'impôt sur le revenu qui empêche les entreprises de déduire les dépenses engagées pour la publicité dans des publications à tirage dédoublé.
Je pourrais continuer ainsi à lire un autre extrait ailleurs dans la revue et on pourrait encore constater que ce qui important ici avant tout, c'est de défendre l'industrie culturelle canadienne. Le Bloc québécois a toujours été un ardent défenseur de cette industrie depuis son arrivée à Ottawa pour une simple, bonne et unique raison. Il nous apparaît important, au Bloc québécois, que le Canada ait une culture très forte, une identité très forte parce que nous voulons un voisin—quand nous serons souverain—qui est capable de ne pas confondre son identité avec l'identité américaine et confondre sa culture avec le divertissement américain.
Enfin, le Bloc québécois déplore, toutefois, que les libéraux aient eux-mêmes pris des mesures contre-productives au développement de l'industrie du magazine. Premièrement, ils ont réduit, de manière substantielle, le subside postal. Constatons seulement qu'en 1989, il était de 220 millions de dollars et que quand les libéraux sont arrivés au pouvoir, il était de 77 millions de dollars. Bien sûr, le gouvernement avait déjà fait une razzia épouvantable dans les subsides, mais les libéraux n'ont pas été plus à même de protéger ce secteur de notre industrie culturelle puisqu'ils ont fait subir, entre 1994 et 1998, une baisse considérable de 40 p. 100 passant de subsides de 77,5 millions de dollars à 47,3 millions de dollars.
Deuxièmement, au moment de la campagne électorale, le gouvernement libéral, avec le premier ministre actuel en tête, a parcouru le Canada en promettant d'abolir la TPS sur tout matériel de lecture, ce qui n'a pas encore été fait au moment où on se parle.
Donc, avec ces deux mesures contre-productives, le gouvernement libéral a lui-même nui énormément à l'industrie culturelle. Comme il se dégage des surplus au budget du gouvernement canadien, j'espère que les libéraux se rappelleront des promesses qu'ils ont faites au peuple canadien et prendront des mesures pour aider l'alphabétisation de notre pays et du Québec en abolissant la TPS, au moins sur tout matériel de lecture, et en augmentant les subsides dans la mesure qui sera nécessaire, pour que l'industrie culturelle du magazine et de l'édition puisse survivre décemment.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Madame la Présidente, je crois savoir que, si vous le sollicitez, vous obtiendrez le consentement unanime de la Chambre pour que je propose l'adoption du 13e rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
Je crois savoir en outre qu'il y a consentement unanime pour que la question soit réglée directement sans qu'il y ait vote.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime pour procéder de la sorte?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR LES SERVICES PUBLICITAIRES FOURNIS PAR DES ÉDITEURS ÉTRANGERS
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-55, Loi concernant les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers de périodiques, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité; ainsi que de l'amendement.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, je dois dire quant au dernier point qu'il y a peut-être eu des consultations, mais que tout le monde n'a pas été consulté. J'ai contribué au consentement unanime par simple respect pour le jugement de la députée et non parce qu'il y avait eu des consultations ou des pourparlers.
Je prends la parole au sujet du projet de loi C-55. Le débat a été très intéressant jusqu'à maintenant. La contribution du Parti réformiste à cet égard explique que les députés libéraux continuent d'avoir la vie aussi facile. Le gouvernement présente un projet de loi qui vise à protéger des périodiques canadiens comme le Legion Magazine, notamment. Il bénéficie de ce que j'appellerais l'avantage politique d'avoir une opposition officielle qui veut attaquer une telle proposition au nom de la liberté de la libre entreprise ou quelle que soit la raison pour laquelle elle défend une position aussi indéfendable.
Je dirai tout de suite que nous, du NPD, appuyons ce projet de loi avec certaines réserves. Nous souhaiterions surtout que la ministre aille ou puisse aller plus loin. Le projet de loi C-55 ne pourra, au mieux, que confirmer le statu quo. Il maintient des dispositions que nous voudrions voir remises en question. Rien dans le projet de loi ne fait particulièrement la promotion des périodiques canadiens, mais il sert à les protéger. Je ne vois aucun mal à protéger les périodiques canadiens.
En écoutant mes collègues du Parti réformiste, j'ai presque l'impression que le terme protection avait une consonance péjorative dans ce contexte. Il est également important d'en faire la promotion, mais il n'y a rien de mal à vouloir les protéger. Ce sont les mêmes personnes qui ne cessent de parler de la protection des Canadiens contre toutes sortes de choses, que ce soit le crime ou toute autre menace à la sécurité. Il n'y a rien de mal à vouloir protéger les Canadiens contre la puissance économique de l'industrie américaine des périodiques. Je ne vois rien là qui exige des excuses de notre part.
Nous sommes heureux que le gouvernement ait décidé de chercher une façon qui respecte les règles de l'Organisation mondiale du commerce de faire ce que les Canadiens ont toujours fait dans cette industrie. Ce qui nous gêne dans tout ça, c'est que les ministériels ne critiquent pas suffisamment les ententes elles-mêmes. Je fais allusion particulièrement à l'OMC.
Il y a une contradiction fondamentale entre l'idéologie et la conception du monde que l'on retrouve dans l'Organisation mondiale du commerce et toute cette notion de protection de la culture. C'est un point que la ministre a très bien compris dans une autre vie. Peut-être le comprend-elle toujours aussi bien, mais elle n'est peut-être pas aussi libre de le faire savoir de l'endroit où elle se trouve maintenant. Cependant, il y a une contradiction fondamentale entre la culture et le libre-échange tel que l'entend l'OMC et que défini dans l'ALENA. Le fait est que notre ancienne politique s'est heurtée à l'idéologie et à la vision que se fait le monde de l'OMC, et qu'elle n'a pas résisté.
C'est très bien que le gouvernement essaie autre chose. Ce qui serait également bon, c'est que le gouvernement reconnaisse que cela en dit long sur la vision que se fait le monde de l'OMC et sur la sagesse de signer des accords de ce genre. Ce serait rafraîchissant, mais la ministre ne l'a pas dit, le gouvernement non plus.
Au lieu de cela, les propos que nous a tenus l'autre jour non pas la ministre du Patrimoine canadien, mais le ministre du Commerce international, sont ceux d'un gouvernement qui s'accroche jusqu'à la fin à l'idée d'essayer de préserver l'Accord multilatéral sur l'investissement dont beaucoup de Canadiens estiment qu'il poserait à la culture canadienne une menace, la même que posent diverses dispositions actuelles de l'OMC.
C'est une occasion de réfléchir à un problème plus vaste, à savoir ou bien protéger la culture ou bien embrasser l'idée mondiale dominante incarnée par le libre-échange et l'OMC. Cette idée allait être inscrite dans l'Accord multilatéral sur l'investissement mais ne va pas l'être puisque les négociations qui se tiennent à l'OCDE à Paris ont été rompues.
Pourquoi l'ont-elles été? Les négociations ont été rompues parce que les Canadiens et d'autres personnes dans le monde entier s'y étaient opposés et enfin, le gouvernement socialiste français a jugé que c'était une façon inacceptable d'établir des relations entre les gouvernements et les investisseurs, et entre les gouvernements et les sociétés.
Cette relation qui devait être institutionnalisée par l'entremise de l'AMI aurait donné aux investisseurs et aux sociétés un statut et des pouvoirs que auraient menacé la capacité de gouvernements élus démocratiquement de bien exercer leur souveraineté dans l'intérêt de leurs citoyens, surtout dans le domaine de la culture. Or, comme nous le savons, le gouvernement français voulait exclure complètement la culture. Il ne voulait pas que l'AMI touche la culture.
C'est une occasion pour nous tous de réfléchir à cette question plus vaste. Dans son discours d'ouverture, j'ai entendu la ministre parler de la nécessité de défendre les intérêts du Canada. Puis elle a dit une chose que je trouve plutôt étrange. Elle a affirmé que pour défendre les intérêts du Canada, il fallait respecter les règles établies par ces organisations mondiales.
À mon avis, le Canada a des obligations lorsqu'il conclut des accords. On pourrait dire que, lorsque nous respectons ces obligations, nous faisons ce qui s'impose du point de vue des relations internationales, mais je n'appellerais pas cela défendre les intérêts du Canada si ces obligations ne sont pas nécessairement dans l'intérêt du Canada ou, dans ce cas-ci, de la culture canadienne.
Pour moi, défendre le Canada, c'est signaler à quel point les règles de cette organisation sont inadéquates et chercher à les modifier plutôt que d'essayer de les circonvenir d'une façon ou d'une autre sans vraiment reconnaître que nous avons probablement eu tort d'adhérer à cela. C'est ce qui se passe, selon moi, dans ce cas-ci, au sujet de notre adhésion à l'OMC, qui est bien différente du GATT.
Quoi qu'on dise du GATT, avant la création de l'OMC en 1994, il y avait un certain volet volontaire dans les dispositions prévues. L'OMC est une chose bien différente. Le gouvernement aurait dû réfléchir davantage avant de signer un accord comme l'OMC sans se poser plus de questions.
Le député de Dauphin—Swan River, qui a pris la parole au nom du Parti réformiste, a cité une personne de l'Office national du film—je crois que c'était la présidente. Cette personne aurait dit que toute la notion de protection de la culture devenait de moins en moins soutenable. Le député semblait dire que cette personne pensait peut-être en termes financiers. Je n'y étais pas. Ce ne sont donc que des suppositions de ma part, mais je crois que si cette protection est de moins en moins soutenable, c'est notamment en raison de tous les accords que conclut le gouvernement.
Ce n'est pas une question de soutien financier, mais de soutien dans le contexte de la signature d'accords comme l'ALENA, l'OMC et l'AMI, si on l'avait signé, qui mettent en jeu notre capacité de soutenir des politiques de protection de la culture canadienne. Ce n'est donc pas une question de soutien financier. Il s'agit de pouvoir soutenir des politiques dans le contexte d'accords qui mettent en péril ces politiques. Il faut donc que le gouvernement examine cette question.
Je ne suis pas surpris de voir que les députés du Parti réformiste semblent aussi blasés quant à la possibilité qu'autant de revues canadiennes risquent de disparaître, et qu'ils paraissent même se faire un honneur de faire en sorte que les revues américaines soient de plus en plus répandues au Canada et dominent le marché canadien. Je crois qu'ils ont une fascination pour la culture américaine que je trouve parfois troublante. Nous l'avons vu récemment, quand on nous a appris quelle fut la première réaction du chef du Parti réformiste à ce qu'il croyait être un problème pour le Canada, c'est-à-dire une victoire des souverainistes au référendum. Il a appelé l'ambassadeur américain pour l'inviter à participer à quelque processus postréférendaire.
Nous appuyons le projet de loi, malgré quelques réserves. Nous regrettons que le gouvernement ne veuille pas remettre en question les accords qui donnent lieu à de telles mesures législatives. Nous déplorons qu'il continue, sans la moindre critique, à négocier des accords comme l'AMI qui limiteraient sa capacité d'intervenir pour protéger la culture canadienne. Nous regrettons que le ministre du Commerce, au lieu de dire oui l'AMI est mort et c'est tant mieux, dise l'AMI est mort, mais je vais passer ma vie à chercher des moyens de le ranimer, de lui trouver un autre cadre, peut-être l'OMC.
Cela ne nous réconforte pas. Cela ne réconforte pas les Canadiens, qui ont l'impression que le Canada aurait dû imiter le gouvernement français, qui a jugé inadéquats le principe qui sous-tend l'accord et son objet.
Malgré toutes ces réserves et tous ces regrets, nous appuyons le renvoi du projet de loi au comité et nous espérons que, malgré le manque d'envergure des libéraux, ce projet de loi protégera la culture et les magazines canadiens.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Sackville—Eastern Shore—La Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je participe aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-55, Loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers.
Je voudrais d'abord expliquer ma position relative à certaines questions, dont le commerce. Notre parti croit encore et toujours en la force intrinsèque du commerce. Nous reconnaissons que si nous voulons aider les Canadiens à prospérer dans un contexte global et de plus en plus concurrentiel, il nous faut trouver des moyens pour leur assurer l'égalité d'accès aux leviers économiques.
Il faut nous garder de les protéger de tous les risques de la mondialisation si, ce faisant, nous les empêchons de saisir les possibilités et les gains que peut offrir une participation pleine et entière.
Cela étant dit, nous avons de fortes réserves quant au dogme prônant un marché libre sans balises, car cela risque d'annihiler ou de réduire notre capacité de protéger notre culture. Jadis, le gouvernement conservateur a cherché, dans le cadre de l'accord du libre-échange, à protéger la culture. Nous reconnaissons que la culture canadienne, compte tenu de notre faible densité démographique qui fait de nous une souris dormant aux côtés d'un éléphant, se trouve dans une situation spéciale.
Nous ne saurions nous en remettre à une recette toute faite, à un dogme strict pour atteindre notre objectif. Nous pouvons croire dans le libre-échange. Nous pouvons espérer réussir dans le contexte mondial tout en faisant en sorte que le Parlement protège la capacité des Canadiens de s'exprimer par le biais de véhicules culturels canadiens comme ceux que leur offre l'industrie des périodiques de notre pays.
Je pense que bon nombre de députés croient fermement à l'AMI et trouvent qu'un accord multilatéral sur l'investissement est essentiel et qu'il y a beaucoup d'avantages à en tirer. Cependant, cela ne veut pas dire qu'il faut accepter n'importe quel accord multilatéral sur l'investissement. L'AMI comportait de graves lacunes et il n'aurait peut-être pas protégé adéquatement la culture. C'est l'objection que la France a soulevée à l'égard de l'AMI.
Par conséquent, je ne pense pas qu'il soit dans l'intérêt des Canadiens, des parlementaires et du gouvernement de déployer des efforts pour conclure un accord multilatéral sur l'investissement.
Avant de conclure des accords commerciaux, il est important d'intensifier le dialogue entre les Canadiens et leurs gouvernements. Voilà pourquoi nous devons suivre l'exemple du gouvernement australien qui, en 1996, a établi un modèle pour la négociation de traités, modèle qui augmentait considérablement le dialogue entre le gouvernement fédéral et les provinces. En fait, les autorités municipales devraient aussi être consultées, parce qu'elles sont considérablement touchées par la participation du gouvernement fédéral aux mécanismes de négociation de traités commerciaux et parce qu'elles méritent de l'être.
En agissant ainsi, nous contribuerons à éliminer les spectres qui ont été brandis lorsqu'il a été question de la mondialisation. Si nous rendons le processus transparent et que nous permettons à l'ensemble des Canadiens de voir clairement que la mondialisation n'est pas que mauvaise, nous aurons progressé beaucoup plus qu'en négociant derrière des portes closes, comme le gouvernement actuel le fait.
Le gouvernement a conçu ce projet de loi pour protéger l'industrie canadienne des magazines par suite de la décision rendue par l'OMC en octobre dernier contre l'imposition par le Canada de droits de douane et de la taxe d'accise sur les éditions dédoublées de magazines venant des États-Unis. Dans la décision, l'OMC a soutenu que ces mesures contrevenaient à des accords sur le libre-échange international.
Le projet de loi C-55 est une importante mesure législative. En plus d'appuyer les éditeurs de magazines canadiens, il envoie un message clair à tous les Canadiens quant à la volonté canadienne de protéger et de maintenir la souveraineté canadienne en dépit des pressions qu'exercent de plus en plus des forces venant d'autres pays et notamment des États-Unis, que j'ai déjà décrits comme étant l'éléphant à côté de nous, la souris; cette comparaison est d'ailleurs assez juste sur le plan culturel.
La culture pop venant des États-Unis est certes assez difficile à concurrencer, mais je prétends que nos politiques culturelles ont permis l'éclosion de talents comme ceux de Sarah McLachlan, de Bryan Adams ou de K.D. Lang, qui ont fort bien réussi. Ces artistes ont pu développer leurs talents et se faire valoir, sur nos scènes d'abord, grâce à nos politiques culturelles.
Il en va de même de l'industrie des magazines canadiens. Nous voulons protéger notre intégrité culturelle. Elle a été une des grandes priorités de toute négociation commerciale. Les gouvernements conservateurs ont lutté pour protéger la culture dans les négociations commerciales, et ce, dès 1988. Plus récemment, l'écueil auquel on s'est heurté au Canada et en France dans les négociations de l'AMI réside principalement dans la réticence des partenaires de l'OCDE à se lancer dans une protection plus rigoureuse des industries culturelles.
Il faut noter que, dans la décision qu'elle a rendue, l'OMC ne contestait pas le droit du Canada de protéger ses industries culturelles. Elle s'opposait à une politique visant directement les revues américaines. Plutôt que de s'en prendre directement aux revues américaines, le projet de loi C-55 se borne à imposer des restrictions aux services publicitaires. En gros, le projet de loi C-55 limitera aux publications canadiennes la vente de la publicité destinée au marché canadien.
Il convient de noter que les revues américaines pourront encore vendre de la publicité canadienne dans leurs pages. Mais cette publicité doit paraître dans leurs publications destinées au marché nord-américain. Elle ne peut être destinée exclusivement au marché canadien.
Le projet de loi renferme des dispositions autorisant le gouvernement à infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 250 000 $ aux éditeurs étrangers qui violent cette mesure législative.
Il s'agit là d'une question très complexe et le projet de loi C-55 tente d'y apporte une solution. Je m'interroge néanmoins sur l'efficacité réelle d'une loi de ce genre face à une industrie qui devient de plus en plus difficile à réglementer. Les revues, passe encore. Mais Internet, c'est une autre paire de manches. Un nombre croissant de Canadiens lisent des publications, des journaux, des revues et des livres sur leur écran d'ordinateur.
Ce sont des questions que nous devons nous poser. Il faut y répondre avec beaucoup de diligence et de rigueur, après avoir effectué les recherches voulues, pour veiller à ce que nous élaborions des politiques publiques qui soient non seulement adaptées à la réalité actuelle, mais également au siècle prochain.
À mon avis, le projet de loi C-55 est ce qui s'impose maintenant. Nous avons des réserves importantes au sujet de ce projet de loi, et nous espérons qu'on pourra y répondre. Nous craignons les répercussions de l'harmonisation des tarifs postaux commerciaux et je reviendrai là-dessus plus tard dans mon intervention.
Certains peuvent se demander pourquoi nous devrions prendre des mesures pour protéger notre industrie canadienne des périodiques. Les réformistes se disent consternés de voir qu'on veuille protéger ce secteur. Le Parti réformiste a 60 porte-parole en matière de culture au sein de son caucus. Malheureusement, la plupart des Canadiens ne partagent pas leurs vues car ils croient que la culture canadienne n'a pas besoin d'être protégée ou ne devrait pas l'être. Nous attachons beaucoup d'importance à cette question dans notre caucus et c'est peut-être l'une des grandes différences entre les conservateurs et les réformistes sur ce plan.
Il y a de très importantes raisons pour lesquelles nous devrions protéger cette industrie. Elle emploie un grand nombre de Canadiens et injecte des millions de dollars dans notre économie. Elle offre des débouchés à des milliers de Canadiens. Une bonne partie de nos grands écrivains ont développé leurs aptitudes dans l'industrie canadienne des périodiques avant de percer sur la scène internationale.
Le marché canadien est l'un des plus ouverts du monde pour les périodiques importés. Les importations représentent 50 p. 100 des ventes de périodiques au Canada et plus de 80 p. 100 des publications vendues en kiosque. Il est facile d'anéantir l'argument selon lequel nous accordons une protection exagérée aux périodiques canadiens, ce qui empêche les publications étrangères d'entrer au Canada.
Malgré la féroce concurrence de périodiques étrangers, les périodiques canadiens continuent d'attirer leur part de lecteurs sur un marché très compétitif. À ce stade-ci, sans ce type de mesure législative, nous ne serons pas en mesure d'assurer la survie des périodiques canadiens.
J'aborde la question également du point de vue de l'unité nationale. Il est très important pour nous de conserver notre capacité de converser entre Canadiens. L'industrie canadienne du magazine joue un rôle culturel très important, car elle aide à définir qui nous sommes en tant que peuple et où nous nous situons en tant que nation. La culture définit nos croyances et nos valeurs.
On ne naît pas automatiquement avec une culture. On naît dans une culture, mais c'est une chose que l'on apprend en grandissant. C'est une des choses que je chéris en tant que Canadien.
Une des entités que j'apprécie beaucoup, c'est Radio-Canada. Voilà une autre différence entre la direction des progressistes conservateurs et celle des réformistes, même si les réformistes ont beaucoup d'excellents députés qui, tous, seront bienvenus dans nos rangs après samedi.
Nous avons besoin de l'industrie du magazine pour prospérer, pour que les prochaines générations de jeunes Canadiens puissent apprendre ce qu'est leur pays et mieux comprendre la diversité des peuples qui constituent notre grande nation. Une des choses qui fait du tort au Canada, à cause de la faiblesse de notre population et de l'immensité du territoire, c'est que nos différents peuples n'ont pas assez d'occasions de se parler et d'apprendre les uns des autres. Une des façons d'y parvenir est de protéger l'industrie du magazine.
Le député de West Nova, un membre de notre caucus, fait partie du Comité du patrimoine et a étudié cette question en détail. J'ai toujours quelques réserves au sujet des mesures que l'on peut considérer comme protectionnistes. En discutant avec lui, j'ai beaucoup appris sur les caractéristiques uniques de l'industrie canadienne du magazine et son importance pour notre culture, pour nos jeunes et pour notre système d'enseignement. Je partage son point de vue qui est que l'industrie canadienne des périodiques doit être protégée.
Plusieurs gouvernements de suite ont adopté des lois conçues pour aider les éditeurs canadiens à se faire suffisamment d'argent avec la publicité pour rester compétitifs sur le marché du périodique. Depuis 1993, l'affaire de Sports Illustrated a ouvert la porte à une concurrence qui aurait coulé l'industrie du périodique canadien si l'on y avait pas imposé de limites.
Compte tenu du fait que la publicité rapporte entre 65 p. 100 et 100 p. 100 des revenus des éditeurs canadiens, il faut absolument intervenir pour les protéger contre le potentiel de concurrence de leurs vis-à-vis américains, dans ce secteur culturel très important.
La publicité joue un rôle de premier plan dans la société moderne. Elle devient de plus en plus un élément de communication important. Elle est partout. Avant la radio et la télévision, les revues pouvaient compter sur la plus grande partie des revenus publicitaires, mais elles se battent maintenant juste pour conserver leur créneau et leur marché, afin de pouvoir survivre.
Depuis 10 ans, la publicité a changé davantage qu'elle ne l'avait fait depuis 60 ans. Selon moi, en raison de la technologie et des marchés mondiaux naissants, nous allons voir l'industrie du magazine canadien et l'ensemble des médias changer tellement rapidement qu'il est possible que, dans un délai assez court, nous devions réévaluer les besoins et repenser toute la manière dont nous protégerons la culture canadienne dans les années futures.
Ce sera de plus en plus difficile. Nous devrons donc devenir plus rigoureux. Nous devons travailler avec d'autres pays, en particulier avec les pays ayant une petite population, pour développer des stratégies qui nous permettront de continuer à défendre les intérêts culturels. Ce faisant, nous ne voulons pas non plus nuire ou réduire leur liberté en agissant suivant l'idéologie luddite comme si le commerce allait nuire au pays. Le commerce n'est pas une nuisance, mais des forces mondiales débridées agissant sur une industrie mal préparée au changement pourraient avoir un effet nuisible, dans un domaine précis. Ce que nous disons, c'est que nous avons besoin d'une stratégie de transition pour que le périodique canadien puisse franchir le pas.
À un certain point, et c'est déjà ainsi dans certains cas, les entreprises culturelles canadiennes seront non seulement compétitives à l'échelle mondiale, mais pourront prospérer au-delà de toutes nos espérances. Toutefois, il faut une structure protectrice qui permettra d'atteindre ce stade, dans un pays aussi grand et peu populeux que le nôtre. Nous ne devons jamais l'oublier.
Il ne peut y avoir de politique économique qui convienne à tous, il ne peut y avoir de politique commerciale qui convienne à tous. Face à l'effet conjugué de la mondialisation et du libre cours des forces du marché dans certains secteurs, nous devons faire bien attention de donner aux gens les compétences qui leur permettront de soutenir la concurrence sur le marché mondial, de leur donner la possibilité de réussir sur le marché mondial. Peut-être Marx avait-il tort à propos du communisme, mais si nous ne faisons pas attention, il pourrait s'avérer qu'il avait raison à propos du capitalisme.
Nous avons beaucoup de travail à faire. Tandis que nous continuons d'appuyer l'idée de marchés plus libres offrant de plus grands débouchés commerciaux, nous ne devons pas oublier les gens que nous représentons. Nous devons veiller à ce qu'ils puissent soutenir la concurrence et réussir sur ces marchés.
Cela signifie des choses comme une industrie culturelle dynamique. Cela signifie un ensemble solide de politiques de l'éducation qui permette aux jeunes Canadiens d'acquérir les compétences nécessaires pour soutenir la concurrence et réussir sur le marché mondial dans une société fondée sur la connaissance.
En ce qui concerne l'unité nationale, nous sommes sur le point d'assister à des élections au Québec. Nous sommes nombreux à suivre ces élections, comme toutes les élections qui ont eu lieu, avec inquiétude et intérêt. Nous devons nous assurer, à ce stade crucial, d'encourager un véritable dialogue entre les Canadiens.
Ce n'est pas le moment de laisser mourir l'industrie canadienne des périodiques.
Ce projet de loi est loin d'être parfait. Malgré une année complète passée à consulter les grands spécialistes du commerce international, d'innombrables conseillers juridiques et des représentants de l'industrie canadienne de l'édition, il reste encore beaucoup de questions à clarifier.
Comme je l'ai souligné plus tôt, la hausse des tarifs d'affranchissement pourraient avoir des conséquences graves pour les petites publications communautaires. Les filiales de la Légion, qui avaient autrefois droit à des subventions pour l'affranchissement, pourraient bien perdre cet appui. C'est une préoccupation très importante. Nous n'en faisons pas suffisamment pour nos anciens combattants et nous devons redoubler d'efforts pour venir en aide à ces valeureux soldats et aux légions qui les regroupent. On pourrait en dire autant des membres de groupements religieux qui transmettent périodiquement des renseignements à leurs fidèles sur les activités de leur Église.
Comme ces organismes ne font pas payer leurs membres pour le matériel dont ils se servent, ils n'ont plus droit aux subventions directes reliées à l'affranchissement, comme c'est le cas pour d'autres éditeurs de périodiques du pays. C'est une question sur laquelle la ministre devra se pencher, soit en apportant des amendements ou en prévoyant des règlements. Je suis persuadé que le député de West Nova sera en mesure de proposer et de présenter des amendements appropriés à ce sujet.
La dernière partie du projet de loi qui a trait à la clause des droits acquis doit être précisée. Dans sa formulation actuelle, le projet de loi semble empêcher d'importants collaborateurs de notre industrie canadienne des périodiques, comme Reader's Digest et Time Warner, d'accroître leurs intérêts actuels par des investissements futurs. Je comprends que ce n'était pas là la nature ou l'objet du projet de loi, mais nous devons bien nous assurer, ici comme à l'autre endroit, de bien tenir compte de la règle des conséquences imprévues et d'être très prudents, et rigoureux dans notre processus d'adoption des lois.
Bref, nous appuyons le projet de loi C-55 avec certaines réserves. Nous sommes d'avis que bien que les Canadiens doivent être en mesure de faire face à la concurrence et de remporter des succès dans un marché mondial, il ne faut pas oublier pour autant que nous avons au Canada une industrie culturelle florissante qui est trop importante pour qu'on la laisse aller.
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec mon collègue d'Esquimalt—Juan de Fuca.
J'interviens aujourd'hui pour dénoncer le projet de loi C-55, Loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers.
Depuis près d'un an et demi que je suis à la Chambre, j'ai pu observer les députés des deux côtés et interagir avec eux. À ce moment-ci, je voudrais dire au député qui a invité le député réformiste à se joindre à son caucus que je lui retourne la politesse et l'invite à se joindre à nous.
Ce qui distingue l'opposition officielle du gouvernement, ce n'est pas que les réformistes se préoccupent davantage des Canadiens, mais qu'ils ont une autre idée de ce qu'il faut faire pour assurer à tous une société meilleure.
Nos deux partis visent le même objectif: un Canada prospère et tolérant, où tous participent ouvertement. Cependant, tandis que le gouvernement pense y parvenir uniquement au moyen d'un organisme central lourd et compliqué qui planifie et intervient, l'opposition officielle est d'avis qu'il faut laisser plus de liberté aux Canadiens et leur faire confiance.
À une époque où, partout dans le monde, on se rend compte que l'intervention directe a ses limites, le gouvernement canadien poursuit sa politique et veut diriger tous les aspects de la société canadienne. Le projet de loi C-55 est conforme à la longue tradition d'ingérence libérale dans la vie des Canadiens.
Je m'arrête brièvement là-dessus avant d'aborder le projet de loi C-55 lui-même.
Bon nombre de mes collègues réformistes ont consacré beaucoup d'énergie à interroger le gouvernement dans le dossier de la Commission canadienne du blé. Comme on le sait, cette commission dicte le prix auquel le blé doit être vendu, privant ainsi nos collectivités agricoles de la liberté de vendre leurs produits.Cette intervention dans les forces du marché ressemble en tous points à la planification centrale qui se faisait dans le bloc de l'Est, jusqu'à ce que le gouvernement comprenne le bon sens vers la fin des années 1980.
Un autre exemple frappant est celui des hauts niveaux d'imposition que les particuliers et les entreprises du Canada continuent d'endurer. Les Canadiens ont vu fondre leur revenu du fait qu'ils sont forcés de transférer une part de plus en plus grande de leurs gains au Trésor public.
Tous reconnaissent que cela ferait du bien à l'économie qu'il reste plus d'argent dans les poches des particuliers et des entreprises. Le ministre des Finances se vante d'avoir équilibré le budget, mais il ne révèle pas comment il y est parvenu, aux dépens des contribuables canadiens et des entreprises canadiennes.
La vérité, c'est que les impôts ont augmenté depuis que le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir en 1993. Le fait que le gouvernement a manqué à sa promesse de supprimer la TPS montre bien qu'il tient à maintenir les impôts élevés.
Ce n'est un secret pour personne qu'il existe un lien direct entre les niveaux d'impôt et la création d'emplois. Est-ce une pure coïncidence que les deux provinces ayant les niveaux d'impôt sur le revenu les plus faibles, l'Ontario et l'Alberta, ma province, affichent les meilleurs résultats au Canada en matière de création d'emplois?
La ministre devrait peut-être examiner si le secteur canadien des périodiques pourraient bénéficier davantage d'une réduction des impôts que de l'élimination de la concurrence.
Nous avons entendu aujourd'hui un reportage décrivant la situation pénible de la classe ouvrière canadienne. L'étude publiée par le Centre canadien de la justice sociale affirme que les familles ouvrières sont en train d'être dévaluées au Canada. Les familles travaillent plus fort qu'il y a dix ans, mais touchent moins d'argent pour leurs efforts accrus. Entre 1989 et 1996, la famille moyenne a subi une baisse de revenu de 4 000 $. Pourquoi le ministre des Finances ne comprend-il pas que le temps est venu d'offrir des allégements fiscaux aux familles et aux entreprises à revenus faibles et moyens?
J'ai évoqué les dossiers de la Commission canadienne du blé et des impôts pour faire comprendre que le gouvernement a l'habitude d'intervenir dans l'économie, souvent avec des résultats qui n'ont rien d'éblouissant.
Le projet de loi C-55 s'inscrit dans la tradition libérale d'intervention et de contrôle étatique. Le projet de loi C-55 a très réellement des incidences économiques, mais je voudrais m'attacher à ses dimensions culturelles.
La mesure à l'étude cherche à protéger notre secteur national des périodiques contre la concurrence étrangère. Elle tâche de le faire en enlevant aux publications étrangères le droit de vendre de l'espace publicitaire à des entreprises qui visent un auditoire canadien. Cela permettrait de libérer des fonds publicitaires pour les publications canadiennes.
La ministre du Patrimoine canadien soutient que ce projet de loi protégera le patrimoine canadien. Pourtant, la ministre et le gouvernement n'ont pas reconnu l'essence de la culture.
La culture est le produit naturel de l'activité économique. Le mot clé ici est naturel. La culture survit et s'épanouit le mieux lorsqu'on lui permet de croître à l'état naturel, libre de soutien et d'ingérence. L'État doit promouvoir la culture et l'art, mais il ne doit jamais les protéger ni les créer. Lorsque l'État se mêle de définir ce qu'est la culture, il s'engage dans un sentier glissant qui aboutit à la suppression de la liberté artistique et culturelle et à la propagande d'État.
Je voudrais parler de certains aspects précis du projet de loi. L'alinéa 20(c) permet au ministre de prendre des règlements pour établir les critères permettant de déterminer parmi les services publicitaires lesquels sont destinés au marché canadien. En permettant au ministre de prendre des décrets concernant la nature de la publicité, le projet de loi C-55 lui confère essentiellement le pouvoir de légiférer dans le domaine du commerce international sans passer par le Parlement.
D'autre part, les articles 4, 5 et 6 permettent au ministre de créer sa propre police culturelle qui enquêtera pour déterminer si des publications étrangères contiennent de la publicité destinée au marché canadien.
Une voix: Les policiers de Sheila.
M. Deepak Obhrai: Les policiers de Sheila, les policiers de la culture, comme dit mon collègue.
Ce pouvoir sans précédent donne essentiellement au ministre le droit de créer sa propre police. Ce genre de chose est peut-être acceptable dans d'autres pays, mais je ne crois pas que les Canadiens l'accepteront.
Aussi, je crois que le projet de loi C-55 confère au ministre des pouvoirs qui vont au-delà de ce que devrait permettre notre démocratie parlementaire.
Je voudrais également parler de l'application extraterritoriale du projet de loi. Comme je le disais, le projet de loi C-55 vise à protéger l'industrie canadienne des périodiques. Aux termes de ce projet de loi, commet une infraction tout dirigeant, directeur ou agent d'entreprise qui publie un périodique à tirage dédoublé, c'est-à-dire un périodique dont le contenu est semblable à celui de l'édition originale étrangère, mais dont la publicité est destinée au public canadien.
Je trouve ironique que le gouvernement dépose un tel projet de loi après avoir tellement critiqué la loi Helms-Burton adoptée aux États-Unis, qui prévoyait des sanctions contre les compagnies canadiennes installées à Cuba. Les ministres du Patrimoine et des Affaires étrangères devraient peut-être se rencontrer de temps en temps pour s'assurer qu'il y a un semblant de cohérence dans les politiques du gouvernement.
En tant que parlementaires, nous devons aussi nous demander si le gouvernement fédéral a le droit constitutionnel de mettre en oeuvre le projet de loi C-55. Je n'ai rien trouvé dans la Loi constitutionnelle ni dans la jurisprudence qui place les imprimés dans le champ de compétence du gouvernement fédéral. En outre, le projet de loi empiète sur la compétence provinciale dans les domaines du droit de propriété et des libertés civiles.
De plus, les dispositions du projet de loi C-55 contreviennent aux articles 2, 7 et 8 de la Charte canadienne des droits et des libertés. Le projet de loi viole la liberté d'expression, la liberté de presse et la liberté d'association. Il porte aussi atteinte au droit à la sécurité prévu aux articles 7 et 8 de la Charte. En outre, il empêche de profiter des dispositions de la Déclaration canadienne des droits concernant la propriété.
Tout cela montre que nous avons affaire à une mesure législative très mal rédigée qui va à l'encontre des valeurs et des lois fondamentales que les Canadiens considèrent comme sacrées.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois interrompre le député, car le temps mis à sa disposition est expiré. Questions et observations. La parole est au député d'Esquimalt—Juan de Fuca.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour ses observations. Le fil de ses pensées était très intéressant.
Je voudrais qu'il dise à la Chambre quel sera l'impact du projet de loi C-55 sur la capacité de la culture canadienne de continuer d'exister de façon prospère et productive au Canada. C'est ce que nous souhaitons tous à la Chambre.
M. Deepak Obhrai: Madame la Présidente, en somme, le gouvernement devrait faire davantage confiance à la culture canadienne. Nos industries culturelles ont ce qu'il faut pour livrer concurrence sur un marché ouvert et libre de toute entrave.
On peut tomber dans le piège et croire que ce projet de loi aidera le secteur canadien des périodiques. Je me demande vraiment si ce sera le cas.
La prospérité économique et culturelle de notre pays repose sur la libre entreprise. Les Canadiens n'ont aucune raison de craindre la concurrence. Chaque fois que nous l'avons affrontée, nous nous en sommes bien tirés. Pourquoi paniquer maintenant? Ce projet de loi est une mesure à courte vue.
Avec le temps, notre secteur des périodiques pourrait être un objet de fierté dans le monde. Y a-t-il des publications canadiennes qui sont menacées d'extinction? Il est probable que seront effectivement menacées quelques revues où l'innovation et les résultats ne sont pas au rendez-vous.
J'ai bon espoir que la concurrence fera ressortir ce que notre industrie a de mieux à offrir et que ce secteur acquerra une réputation internationale sans que nous intervenions.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Madame la Présidente, voici ma question. Si la mesure législative proposée ici est jugée déficiente comme la précédente du point de vue des règles internationales et fait l'objet de contestations, n'est-il pas vrai—le député me corrigera si je fais erreur—n'est-il pas vrai que, si le Canada perd sa cause, des mesures de représailles pourraient être prises, sous les auspices de l'organisation internationale, contre une autre industrie canadienne? N'importe quelle autre industrie canadienne pourrait ainsi être exposée à des risques.
M. Deepak Obhrai: Madame la Présidente, c'est une bonne question. Les députés d'en face devraient réfléchir là-dessus. Ils sont ici pour protéger une petite industrie, mais ils nous accusent de ne pas les aider. Là n'est pas la question.
Il y a un problème plus global. Si des mesures sont prises contre d'autres industries, que feront-ils? Mon collègue a raison. En vertu de l'ALENA, je suis convaincu que ce projet de loi sera contesté et qu'il sera considéré comme déficient, de sorte que nous en paierons le prix.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Madame la Présidente, j'ai trouvé fort intéressants les propos tenus sur le projet de loi C-55.
Je pense que tous les députés, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, ne veulent pas que la culture canadienne disparaisse ou qu'elle soit diminuée de quelque façon que ce soit. Au contraire, ils veulent que la culture canadienne s'épanouisse.
Malheureusement, je pense que nous avons depuis longtemps un complexe d'infériorité en ce qui concerne la culture canadienne. Quand je vais aux États-Unis, ce qui me frappe très clairement, en comparant l'industrie culturelle américaine et sa contrepartie canadienne, c'est que celle-ci peut concurrencer l'autre, voire la battre dans bien des domaines.
Personne à la Chambre ne dirait que l'émission The Simpsons a une plus grande valeur éducative que certaines éditions de W5 ou certains documentaires ou dramatiques de la SRC, qui sont superbement réalisés et montés et sont très éducatifs. Ils sont de loin supérieurs à la vaste majorité des émissions culturelles américaines dans ces domaines.
S'il est une chose que, je l'espère, l'on retiendra de ce débat, c'est que les entreprises canadiennes peuvent soutenir la concurrence mais qu'elles doivent être bien plus dynamiques par rapport à ce que font leurs concurrents américains. Les magazines, les quotidiens, la télévision et surtout la radio de Radio-Canada sont tout à fait concurrentiels au sud de la frontière. Ils captent parfois Radio-Canada aux États-Unis. Le contenu canadien que l'on entend sur les ondes de Radio-Canada ne se compare absolument pas aux émissions américaines; c'est comme le jour et la nuit. Le contenu canadien est de loin supérieur.
Lorsque la ministre du Patrimoine canadien affirme, en parlant du projet de loi, que les entreprises américaines vont venir au pays et diluer tellement le contenu des magazines canadiens qu'il va disparaître, ce n'est tout simplement pas vrai. Nous affirmons que les magazines canadiens peuvent fort bien soutenir la concurrence par eux-mêmes. Ils n'ont pas besoin de protection, mais plutôt de promotion, et pas de promotion de la part du gouvernement. Il devrait donner aux périodiques et aux sociétés la possibilité de soutenir la concurrence des autres et les outils pour le faire, au lieu de leur imposer la situation actuelle où la fiscalité et la réglementation limitent la capacité des sociétés canadiennes, qu'elles s'occupent de publicité ou d'autre chose, de faire concurrence à nos voisins du Sud.
La fiscalité et la réglementation sont les principales raisons qui font que nos sociétés ne sont pas aussi concurrentielles qu'elles devraient l'être face à leurs concurrents au Sud. Je supplie les ministres en face qui ont des responsabilités dans ce domaine de travailler de concert et de collaborer avec leurs homologues afin de réduire le fardeau fiscal imposé à ce secteur et d'éliminer des règlements qui existent non seulement dans l'axe nord-sud aussi bien d'est en ouest. Cela suppose que les ministres du Cabinet assument un rôle de leadership avec leurs homologues provinciaux et qu'ils s'efforcent ensemble de lever les obstacles au commerce qui nuisent depuis longtemps au bon fonctionnement des entreprises canadiennes.
Nous nous opposons au projet de loi pour plusieurs raisons, dont l'une porte sur la liberté d'expression. Bien que nous ne soyons aucunement enchantés par la perspective qu'une grande entreprise internationale puisse démolir de petites entreprises canadiennes, nous estimons que cela ne se produira pas. Nous voulons nous assurer que les éditeurs de revues canadiennes livrent une concurrence selon des règles du jeu équitables.
Ce projet de loi va à l'encontre de la Charte, qui tient beaucoup à coeur à tous les Canadiens et qui constitue un pilier de notre pays. Je ne dirais pas qu'elle nous tient à coeur, mais elle existe et nous devons nous en accommoder. Un des principes de la Charte qui tient beaucoup à coeur aux Canadiens est énoncé à l'alinéa 2b): «Chacun a les libertés fondamentales suivantes: liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication.» Il serait bien que les députés de la Chambre des communes puissent jouir de la même liberté, mais nous en reparlerons un autre jour.
Le projet de loi C-55 va à l'encontre de ces libertés fondamentales. L'Association canadienne des annonceurs s'est élevée contre ce projet de loi en disant qu'il brimait les annonceurs dans leur liberté, garantie en vertu de la Charte, de livrer concurrence et de faire de la publicité à l'étranger. C'est pourquoi, depuis 1965, bien que les gouvernements canadiens aient continué de promouvoir cette notion, elle n'a mené absolument nulle part. Cela contrevient aux normes et aux règles du commerce international et cela a très peu à voir avec la capacité de protéger la culture canadienne.
Comme je l'ai déjà dit, depuis que cette situation existe, depuis 1965, avons-nous assisté à la disparition de la culture canadienne? Non. La culture canadienne est florissante et elle pourrait l'être beaucoup plus et connaître un rayonnement bien plus éclatant si, au lieu d'utiliser les fonds publics pour la promouvoir, nous permettions aux entreprises d'en faire elles-mêmes la promotion.
Une chose que nous pouvons faire sans engager de nouvelles dépenses, ce qui est une idée fort intéressante, c'est de mettre à contribution nos ambassades et nos services extérieurs dans d'autres régions du monde, notamment chez nos voisins du Sud, pour promouvoir et diffuser la culture canadienne à l'étranger et pour fournir de l'information sur les organismes culturels canadiens. À mon avis, il serait très intéressant pour les Américains de savoir ce qui se passe au Canada. Même s'il est très facile de franchir nos frontières et si les Américains sont d'excellents voisins, il est étonnant de voir à quel point de nombreux Américains savent peu de choses sur nous et vice versa. Une plus grande intégration culturelle et un meilleur échange d'information permettront de resserrer les liens qui existent entre nous.
Parfois, des différends surviennent, que ce soit à propos de la pêche, de la chasse à la baleine et des produits agricoles ou forestiers, et ces différends enveniment nos rapports avec nos cousins américains, mais il reste bien d'autres aspects de nos relations que nous pouvons améliorer. Nous nous enorgueillissons du fait que nous commerçons énormément avec les Américains. Quatre-vingts pour cent de nos exportations vont aux États-Unis et, en fait, nous sommes les plus importants partenaires commerciaux des Américains. Mais il n'en reste pas moins que cela est très peu, compte tenu de toutes les possibilités qui existent. Les sociétés canadiennes pourraient faire beaucoup plus de choses aux États-Unis qui apporteraient des avantages économiques directs aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays.
Lorsque j'étais aux États-Unis en mars, j'ai été frappé par le manque de connaissance qui existe des deux côtés de la frontière et aussi par les possibilités économiques énormes qui s'offrent aux Canadiens chez nos voisins du Sud. Ce n'est pas par hasard que, l'an dernier, 46 500 Canadiens parmi les plus brillants et les plus talentueux sont partis travailler aux États-Unis. La crème de la crème des Canadiens, de nos jeunes, est partie aux États-Unis, et ce, pour bien des raisons. Les Américains connaissent bien l'optimisation des ressources et ils reconnaissent la valeur et les compétences des Canadiens.
Mes collègues ont parlé de la capacité et de la responsabilité du gouvernement de permettre aux Canadiens de rester chez nous en réduisant les impôts, en allégeant la réglementation, en donnant aux Canadiens les moyens d'acquérir ici la formation dont ils ont besoin et en faisant les investissements nécessaires dans la recherche et le développement pour que nous soyons compétitifs. Cela étant dit, il y a beaucoup de choses que les Canadiens peuvent faire. Les sociétés canadiennes peuvent faire concurrence aux sociétés américaines et mêmes les surpasser à bien des niveaux.
J'encourage le ministre du Commerce international à travailler avec le ministre des Affaires étrangères, le ministre des Finances et les députés de tous les partis. Je suis certain que notre porte-parole en matière de commerce international serait heureux de donner des conseils éclairés au gouvernement sur ce que nous pouvons faire pour accroître nos possibilités économiques à l'étranger.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, le député réformiste a parlé du nombre de Canadiens brillants qui sont partis aux États-Unis.
Comme le député le sait, nous avons appris récemment que, pour la cinquième année d'affilée je crois, le Canada est le pays du monde où il fait le mieux vivre. Je me demande simplement s'il a des données statistiques sur le nombre d'Américains brillants et talentueux qui sont venus s'installer au Canada.
M. Keith Martin: Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour cette information. L'Institut C.D. Howe a fait une étude récente sur cette question et a pu établir des statistiques. Je ne peux cependant pas lui donner de chiffre exact à ce moment-ci, mais je pourrai certainement le trouver pour lui. Il reste que le déséquilibre est énorme. La crème de la crème des Américains ne vient tout simplement pas s'installer au Canada, alors que les Canadiens les plus brillants et les plus talentueux s'exilent aux États-Unis.
On en a répété maintes fois la raison principale. Les impôts sont beaucoup trop élevés. Aux États-Unis, le revenu net d'un couple qui travaille est de 44 p. 100 supérieur à celui d'un couple canadien dans la même situation. Lorsque nous nous entretenons avec de jeunes Canadiens qui se sont installés aux États-Unis, ils disent qu'ils préféreraient de beaucoup vivre au Canada. Ils adorent le Canada, mais comment notre pays peut-il concurrencer les États-Unis lorsque ces jeunes y gagnent un revenu de 44 p. 100 supérieur à celui des Canadiens? Il ne s'agit pas uniquement d'argent. Ils ont des chances d'exceller dans leur profession.
Dans ma profession, la médecine, la possibilité de pratiquer cet art et d'exercer d'autres activités professionnelles est beaucoup plus élevée aux États-Unis, en raison de l'investissement dans la recherche et le développement qu'on y fait.
Le Canada a énormément de possibilités d'entreprendre des initiatives novatrices. On pourrait peut-être accroître le plafond des montants investis dans les REER. On pourrait obliger les Canadiens à investir ces montants dans des entreprises canadiennes établies au Canada, de sorte qu'elles disposeraient d'un fonds de roulement et d'un capital d'investissement.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté très attentivement le discours du député. J'estime qu'il a bien résumé la question.
Plus tôt à la Chambre, nous avons entendu la ministre du Patrimoine expliquer pourquoi elle devait présenter ce projet de loi. L'approche interventionniste de la ministre ne semble pas convenir dans ce domaine. Ses arguments se fondent sur le postulat que l'industrie canadienne ne peut survivre sans la protection de l'État.
Mon collègue pourrait-il nous éclairer un peu à cet égard?
M. Keith Martin: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question. Cela va au coeur de la divergence de vues entre le Parti réformiste et le gouvernement. La question est de savoir comment la culture canadienne peut s'épanouir.
Le gouvernement estime que la solution, c'est de la protéger. Nous croyons plutôt qu'il faut aider les entreprises culturelles et les magazines canadiens à soutenir la concurrence. Nous croyons que l'industrie culturelle canadienne peut se défendre elle-même, sans l'intervention de l'État, et soutenir la concurrence étrangère, qu'elle peut rayonner dans le monde sans avoir besoin de barrières pour la protéger. La culture canadienne devrait s'épanouir vers l'extérieur, viser une population beaucoup plus importante et montrer ce que la culture canadienne a de mieux à offrir.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-55, mais je suis déçu du gouvernement, en voyant la manière dont il envisage de réagir à la demande de l'Organisation mondiale du commerce.
L'OMC a demandé au Canada de réviser sa loi pour qu'elle respecte la décision rendue en mars et en juin 1997 contre le Canada au sujet des mesures tarifaires et fiscales punitives prises contre les éditions dédoublées. Le Canada ne respectait manifestement pas les règles qu'il avait acceptées en se joignant à cet organisme international. Ce qui me dérange le plus, c'est que le Canada a été l'un des plus ardents défenseurs, auprès de l'Organisation mondiale du commerce et dans le cadre antérieur de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, de l'établissement d'un code de conduite clair pour les entreprises.
Le Canada a grandement besoin de cette mesure. Les exportations de notre pays sont importantes. Quarante pour cent de notre produit intérieur brut provient des exportations. C'est probablement plus que pour tout autre pays du monde. C'est plus qu'aux États-Unis, dont la part du PIB tirée de l'exportation est d'environ 10 p. 100.
C'est clair que le Canada a besoin de règles, d'un régime réglementé. Le Canada le sait depuis longtemps. En fait, le gouvernement qui présente aujourd'hui cette mesure législative est celui-là même qui, dans les années 1946 à 1948, avait été le plus grand défenseur du GATT, dont il reconnaissait l'utilité pour la défense des intérêts du Canada. Le Canada a exercé une très grande influence dans ces pourparlers internationaux.
Au printemps dernier, je suis allé à Genève avec le ministre du Commerce international pour assister à la conférence ministérielle des pays membres de l'Organisation mondiale du commerce. Le Canada préconise une plus grande libéralisation des échanges au niveau des investissements. Nous demandons aussi plus de réglementation, notamment dans le secteur des services, et nous voulons que l'agriculture soit assujetti aux règles commerciales qui ont nui à l'industrie dans le passé, à cause de guerres commerciales et de subventions massives.
Pourtant, au moment même où le Canada, par l'intermédiaire de son ministre du Commerce et le gouvernement, fait ces efforts, la ministre du Patrimoine semble nettement contredire le ministre du Commerce en refusant de se plier à la décision rendue en juin dernier par l'Organisation mondiale du commerce et en présentant son projet de loi C-55. Les États-Unis ont déjà déclaré que, si ce projet de loi était adopté, ils demanderaient à l'OMC de l'annuler.
Que se passerait-il alors? Je crains que cette menace ne soit exécutée, puisque le projet de loi va à l'encontre de la décision. Plutôt que de se conformer et de reconnaître de bonne grâce la défaite à cet égard, la ministre du Patrimoine préfère s'opposer à cet organisme de règlement des différends internationaux, l'Organisation mondiale du commerce. En fait, elle lui dit qu'elle ne va pas se conformer à sa décision, qu'elle s'en moque et qu'elle va agir à sa guise.
Qu'arriverait-il si les États-Unis nous amenaient devant l'Organisation mondiale du commerce à cause de ce projet de loi? Qu'arriverait-il si l'organisation mondiale du commerce se prononçait une seconde fois contre nous? Le Canada n'est pas tenu de respecter les jugements de l'Organisation mondiale du commerce, mais il le devrait certes, car il en va de notre réputation internationale. Toutefois, nous n'y sommes pas obligés. Nous pouvons poursuivre notre politique idiote si nous le voulons, mais tout pays qui nous traîne devant les tribunaux et qui obtient un jugement en sa faveur a le droit d'user de rétorsion. Ce sont là les règles du GATT. Un pays a le droit de faire la même chose à titre de représailles.
Quelle forme ces représailles prendraient-elles? Elles pourraient frapper dans le secteur culturel, dans le secteur agricole, dans le secteur forestier et même dans des secteurs qui n'ont même vraiment rien à voir avec ce différend.
Supposons que les représailles se fassent dans le secteur culturel. Qu'est-ce que le Canada a à perdre? Beaucoup, à mon avis. De nombreux artistes de spectacle canadiens travaillent aux États-Unis. Ce pays, avec ces 260 millions d'habitants, constitue un très grand marché. Nous avons des gens comme Shania Twain, notamment, qui veulent aller à Nashville et à Hollywood. Ils ne veulent qu'on les en empêche. Toutefois, si le jugement était contre le Canada—comme je crois qu'il le sera—, les États-Unis pourraient les en empêcher. Je crois que nous nous faisons du tort.
Qu'est-ce qui peut bien sortir de bon de tout cela? Des annonceurs canadiens veulent publier des réclames dans les périodiques à tirage dédoublé. Il me semble qu'ils devraient savoir ce qui est le mieux pour leur entreprise. Cela leur enlève un choix. Avons-nous vraiment besoin d'un périodique qui est tellement médiocre qu'il ne peut pas supporter la concurrence sans aide ni protection? Je ne le crois pas.
Voyons des périodiques qui prétendent avoir besoin de protection. Qu'arriverait-il à ces magazines si les États-Unis annonçaient qu'il est interdit aux Américains de placer des annonces dans les magazines canadiens si nous n'en faisons pas autant dans les leurs? Si l'on examine le numéro du 26 octobre de Maclean's, un des magazines canadiens susceptibles d'être frappés par de telles représailles, que voit-on sur la première page? Jaguar. Et ça continue. Les trois-quarts des annonces dans le Maclean's viennent de l'extérieur du Canada. Est-ce bien là le message que nous voulons envoyer de par le monde, c'est-à-dire que le Canada ne veut pas faire des affaires? Ce périodique est-il viable sans des publicités de Volvo, Subaru, Disney World, IBM, Air France, Oldsmobile et Kodak? Je ne le sais pas.
À l'heure actuelle, nous utilisons l'argent étranger pour faire vivre nos périodiques. D'un autre côté, nous disons que nous ne pouvons pas laisser les Canadiens placer des annonces dans des périodiques comme Sports Illustrated qui n'ont pas un contenu suffisamment canadien.
Nous avons déjà perdu gain de cause une fois et la décision sera encore une fois en notre défaveur. Dans ce cas, que fera le gouvernement? Les États-Unis ont le droit d'exercer des représailles et cette fois, je crois qu'ils ne vont pas y aller de main morte. Nous ne voulons certainement pas risquer de les voir fermer leur marché à nos artistes de la scène.
Voyons si cette industrie a besoin de protection. Mes collègues ont déjà exposé des arguments intéressants démontrant que l'industrie n'a probablement pas besoin de protection. Je serais d'accord pour dire qu'elle n'en a probablement pas besoin. Elle a cependant certes besoin d'être encouragée.
Des délégations commerciales canadiennes sont constamment en déplacement. Le premier ministre est très fier des missions commerciales de janvier qu'il organise pour faire la promotion des produits canadiens. Soit dit en passant, il semble qu'il ne visite en janvier que des pays ayant une température d'environ 30 degrés celsius, mais quoi qu'il en soit, il va là-bas faire la promotion des biens et des services canadiens, et le ministre du Commerce international se déplace tout le temps à cette fin. Ils se font accompagner de chefs d'entreprises canadiennes.
Pourquoi ne peuvent-ils pas faire également la promotion de la culture canadienne? Pourquoi ne font-ils pas la promotion des artistes canadiens de la scène, de nos industries du magazine et du livre, de notre industrie de l'édition? Cela devrait vraiment faire partie de leurs efforts de promotion, au même titre que les industries canadiennes de l'agriculture, de la forêt et ainsi de suite.
On trouve à l'opposé l'approche que la ministre du Patrimoine semble adopter, soit le protectionnisme. Je croyais qu'on avait abattu les murs protectionnistes il y a longtemps. Nous avons connu ces murs protectionnistes dans le passé. Sir John A. Macdonald a dressé des barrières tarifaires élevées après la Confédération et a à toutes fins utiles détruit la capacité des provinces de l'Atlantique de commercer avec les États de la Nouvelle-Angleterre. Cela a eu pour résultat de faire de ces provinces des assistées sociales, et voilà que le gouvernement veut s'engager de nouveau dans cette voie.
L'industrie canadienne vaut 800 milliards de dollars. Il s'agit du PIB du Canada. Le protectionnisme ne se rencontre pas dans beaucoup de secteurs de l'industrie. Il ne m'en vient qu'un ou deux exemples à l'esprit, dont le secteur de la gestion de l'offre en agriculture, un secteur qui ne connaît pratiquement pas d'exportations. Il doit répondre tout seul aux besoins du marché canadien. Il y a aussi d'autres secteurs de l'industrie canadienne qui n'ont pas de concurrence. Il s'agit en grande partie de secteurs comme celui de l'énergie électrique. Dans des cas semblables, des régies des services publics sont créées pour protéger l'intérêt public, puisqu'il n'y a aucune concurrence.
Pourquoi devrions-nous craindre la concurrence? Nous exportons chaque jour des produits sur les marchés mondiaux. Les échanges commerciaux quotidiens entre le Canada et les États-Unis se chiffrent à 1,4 milliard de dollars. Et ils disent que nous ne pouvons pas livrer concurrence? Il nous suffit d'avoir une petite partie du marché américain et nous nous tirerons bien d'affaire. Beaucoup d'artistes canadiens l'ont déjà constaté. C'est pour cette raison que Shania Twain ou Terri Clark, de Medicine Hat, vont à Nashville. Elles y sont attirées par un marché important. Elles servent non seulement les Canadiens mais ont accès à un marché beaucoup plus étendu.
Je ne pense pas que les Canadiens vont se laisser intimider, ils vont plutôt regarder au-delà de nos frontières nationales, vers l'économie mondiale. Nous avons suffisamment confiance en nous pour le faire, mais nous devons auparavant mettre de l'ordre dans nos propres affaires. Nous devons avoir des bases solides.
Lorsque le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a fait une étude des raisons pour lesquelles les petites et moyennes entreprises n'exportaient pas autant qu'elles le devraient, il a envoyé un message clair et net. Le comité a indiqué que la réglementation gouvernementale était beaucoup trop lourde et qu'il en coûtait trop cher de faire des affaires au Canada.
Un représentant d'une petite entreprise comptant moins de 100 employés a comparu devant le comité et a déclaré qu'il avait dû déménager son entreprise en Illinois. Il pouvait ainsi faire de meilleures affaires et commercer plus efficacement au Canada depuis l'Illinois que lorsque son entreprise se trouvait en Ontario. Ce genre de situation est imputable aux barrières commerciales interprovinciales.
Les petites entreprises nous disent que le problème est là. À mon avis, beaucoup de ces entreprises, comme Maclean's, ne sont pas de petites compagnies.
Elles comptent, en ce moment même, sur le marché international et sur les investisseurs et compagnies internationaux pour la publicité dans leurs périodiques. Je crois qu'elles peuvent réussir. Toutes les entreprises culturelles canadiennes, petites ou grandes, doivent faire face à la réalité, c'est-à-dire à l'immensité du marché mondial. Elles doivent s'en attribuer une part. Elles peuvent le faire. Nous devons reléguer aux oubliettes le mythe qui veut que les subventions et barrières sont nécessaires au Canada.
M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande à la Chambre de m'excuser de prendre son temps. Normalement, nous avons ces discussions dans les antichambres du gouvernement et de l'opposition. Je me demande si ce député pourrait en cinq minutes, environ, terminer son intervention sans une période de questions et d'observations. Nous demanderions alors le consentement de la Chambre pour reporter le vote sur l'amendement réformiste à la fin des initiatives ministérielles, le mardi 27 octobre.
Si un autre député veut intervenir, je crois comprendre qu'on va refuser ce consentement. Je demande à la Chambre de me pardonner de prendre son temps pour ces négociations dans cette enceinte. J'ai essayé d'en discuter ailleurs.
Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
* * *
[Français]
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
Le président suppléant (M. McClelland): À l'ordre, s'il vous plaît. Le député d'Hochelaga—Maisonneuve m'a avisé par écrit qu'il était incapable de présenter sa motion pendant l'heure réservée aux affaires émanant des députés, le vendredi 23 octobre 1998.
Comme il n'a pas été possible de procéder à un échange de position sur la liste des priorités, je demande au Greffier de porter cette affaire au bas de la liste de priorité. L'heure réservée aux affaires émanant des députés sera donc suspendue et la Chambre poursuivra l'étude des affaires dont elle sera alors saisie.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LE CODE CRIMINEL
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 24 septembre, de la motion: Que le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, c'est un plaisir que de prendre la parole sur le projet de loi C-251 modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Je félicite la députée de Mississauga-Est d'avoir présenté ce projet de loi. La plupart des électeurs de ma circonscription appuieraient ce projet de loi qui rallongerait les peines des délinquants sexuels et des meurtriers.
Je ne suis pas le porte-parole en matière de justice. Je ne suis même pas avocat. Notre excellent porte-parole pour la justice, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough, a été procureur de la Couronne. Il a souligné les avantages de ce projet de loi et il l'appuie intégralement. Je suivrai les recommandations de ce spécialiste.
Je veux néanmoins apporter mon appui personnel. Comme je l'ai dit, je ne suis pas porte-parole en matière de justice, mais un Canadien. J'ai le sentiment, tout comme la députée qui a présenté le projet de loi, j'en suis sûr, que les criminels profitent trop souvent du bénéfice du doute. Certaines de nos structures concernant les infractions et l'emprisonnement ne sont pas en accord avec ce que pense la population canadienne. En tant que député, je dessers une région où se trouvent deux installations correctionnelles, une nouvelle pour les femmes à Truro, en Nouvelle-Écosse, construite en 1993, et celle de Springhill, qui est un établissement correctionnel multisécuritaire.
Le Service correctionnel du Canada est probablement un des plus gros employeurs de ma circonscription. Il joue un très grand rôle dans ma circonscription et tout le monde est touché par le Service correctionnel du Canada et son impact. Il travaille de concert avec plusieurs de nos institutions, dont le collège communautaire de Springhill. Il nous fournit toutes sortes de renseignements et les collectivités lui en transmettent également. On peut vraiment parler d'un effort communautaire. Je crois que dans toute collectivité possédant un établissement correctionnel un lien s'impose entre les deux.
Voilà pourquoi j'ai récemment suggéré que le centre de formation correctionnelle que propose le solliciteur général soit établi à Springhill, à proximité de la prison principale. Cela cadrerait parfaitement avec les compétences des gens du milieu. Cela cadrerait parfaitement avec les installations existantes. Le collège communautaire de Springhill serait des plus heureux de concevoir un programme d'études qui permettrait de contribuer à la formation des agents de correction de partout au Canada.
L'établissement de Springhill est devenu le centre de réception pour tous les prisonniers des provinces atlantiques. Quand un prisonnier entre dans le système, on l'envoie d'abord à Springhill. C'est Springhill qui décide s'il doit être envoyé dans une institution à sécurité maximale, moyenne ou minimale. Les prisonniers sont ensuite transférés selon la décision qui a été prise. Tous les prisonniers passent par Springhill, ce qui en fait un endroit idéal pour le centre de formation correctionnelle proposé par le solliciteur général.
Si on choisissait Springhill, cela permettra sans nul doute d'épargner beaucoup d'argent aux contribuables puisque les installations existent déjà, de même que le programme de formation, le personnel et les connaissances techniques. Tout est en place. J'appuie entièrement la proposition du solliciteur général relativement au nouveau centre de formation. Je recommande fortement qu'il soit installé dans la communauté de Springhill.
Il y a un troisième point qui me pose des problèmes dans le domaine de la justice, bien que je ne sois pas le porte-parole de mon parti en matière de justice. Mes préoccupations sont celles d'un simple député. L'un des dossiers les plus frustrants et complexes dont il m'a été donné de m'occuper est celui du meurtre de James Mills. Ce meurtre a eu lieu le 24 juillet 1991.
J'ai eu l'occasion de participer à ce dossier à titre de député. La famille de la victime a vécu un calvaire horrible, subissant douleurs et frustrations depuis maintenant sept ans parce que justice n'a jamais été rendue. Personne n'a jamais été reconnu coupable de ce meurtre. Le ministère de la Justice n'a jamais fourni de renseignements qui auraient pu permettre aux Mills de comprendre pourquoi leur fils a été assassiné alors qu'il était incarcéré au pénitencier de Renous au Nouveau-Brunswick. Il était alors sous les soins et la garde de Service correctionnel Canada. Il a été assassiné et personne n'a jamais payé pour ce meurtre. Aucune accusation n'a été portée. Dans un cas de ce genre, je me dois de m'occuper de questions qui relèvent de la justice.
James Mills a été assassiné alors qu'il était incarcéré le 24 juillet 1991. Cela dénote très certainement une certaine défaillance dans le système entre Service correctionnel Canada et la GRC dans tout le processus d'enquête et dans l'évolution de l'affaire. On a souvent voulu fermer le dossier et le faire oublier. Nous avons réussi à le faire resurgir plusieurs fois. À maintes occasions, nous avons rencontré les représentants du Service correctionnel du Canada. Nous avons rencontré des représentants de la GRC de tous les niveaux hiérarchiques, des paliers supérieurs et subalternes. Nous avons rencontré le commissaire du Service correctionnel du Canada. Nous avons rencontré le ministre à maintes occasions et, malgré cela, nous n'avons pas l'impression d'avoir progressé le moindrement en vue d'élucider ce crime.
La famille Mills n'a jamais pu tourner la page. Les parents n'ont jamais pu dire que quelqu'un avait été tenu responsable de la mort de leur fils.
Il y a probablement une demi-douzaine de personnes qui ont assumé les fonctions de solliciteur général depuis que le meurtre s'est produit, et le crime n'est toujours pas élucidé.
L'actuel solliciteur général a certainement été beaucoup sur la sellette dernièrement pour avoir tenu, à bord d'un avion, des propos qu'il aurait dû garder pour lui. Le solliciteur général actuel a vraiment déployé beaucoup d'efforts pour nous aider à élucider le meurtre de James Mills. Personnellement, je trouve qu'il a été au-delà de ce que son devoir lui dictait parce qu'il a su témoigner de la compassion à la famille de James Mills. Je lui suis reconnaissant de ce qu'il a fait, même si nous ne sommes pas plus près de tourner la page.
Je demande au solliciteur général de continuer à exercer des pressions afin que la justice soit saisie de cette affaire, que la GRC termine son enquête et que le dossier soit transféré au procureur général du Nouveau-Brunswick. Si celui-ci estime que des accusations devraient être portées, j'espère qu'il les portera sans tarder. Sinon, j'espère que le gouvernement du Canada présentera ses excuses à la famille Mills. Je le prie instamment de le faire.
La première option, c'est que des accusations soient portées, que justice soit faite et que des peines soient prononcées contre les personnes appropriées.
Ceci nous ramène au projet de loi C-251, la raison pour laquelle nous sommes ici. À mes yeux, ainsi qu'à ceux, comme je l'ai dit, d'autres personnes qui m'appuient dans ma circonscription, le projet de loi C-251 a beaucoup de sens. Il dit essentiellement que les infractions sexuelles doivent être traitées différemment par rapport aux autres infractions.
Il dit que, si d'autres infractions sont commises en même temps que l'infraction sexuelle, la peine pour l'infraction sexuelle doit être purgée dans sa totalité, qu'elle doit être purgée complètement et non de façon concurrente de sorte que l'auteur d'une infraction sexuelle ne puisse pas être libéré plus tôt. Je pense que cela est très sensé et je suis certainement en faveur.
La deuxième partie du projet de loi dit la même chose pour les meurtriers. Prenons le cas de James Mills, peut-être que la personne qui a tué James Mills purgeait déjà une peine d'emprisonnement pour un autre meurtre. Si elle est condamnée en vertu des règles en vigueur, cela ne va pas la dissuader de commettre un autre meurtre, et puis un autre et encore un autre.
En revanche, si elle est traduite en justice et reconnue coupable, elle sera condamnée à une peine consécutive à celle qu'elle est en train de purger, et non à une peine concurrente.
À Renous, un détenu a tué un autre détenu. En vertu des règles de la prison, s'il est condamné, il n'aura pas plus de temps à purger. Il n'y a aucun facteur de dissuasion. Le détenu n'a aucune raison de ne pas tuer. En revanche, aux termes du projet de loi C-251, il sera condamné à une peine consécutive et cela le dissuadera de commettre d'autres crimes.
Ce projet de loi montre à quel point le gouvernement connaît mal les Canadiens. Les habitants de ma circonscription réclament des peines plus sévères, non pas des peines moins sévères. Ils veulent que les criminels coupables de crimes à caractère sexuel ou d'homicide restent en prison pendant toute la durée de leur peine. Ils ne veulent pas de peines concurrentes, mais des peines purgées successivement, et voilà ce que le projet de loi prévoit. J'appuie ce projet de loi et je suis sûr que mes électeurs l'appuient sans réserves.
Il semble que la politique actuelle veuille que les détenus soient autorisés à sortir de prison dès que possible, au plus tôt.
Je ne m'y oppose pas dans les cas d'infractions sans violence, si les détenus donnent des signes de réadaptation, une certaine volonté de mieux se comporter, d'améliorer leur mode de vie et de jouer un rôle dans nos collectivités.
Quant aux crimes de violence, je ne crois pas qu'il doive y avoir d'exceptions. Les peines ne devraient pas être purgées concurremment, mais l'une après l'autre. J'appuie le projet de loi à fond.
Le gouvernement devrait s'intéresser à des projets de loi comme celui-ci au lieu de faire enregistrer les fusils de chasse et les carabines. Cela n'a aucun sens pour mes électeurs, dans le nord de la Nouvelle-Écosse. Ils veulent que les auteurs de crimes de violence purgent intégralement leur peine.
Nous voulons mettre l'accent sur cet élément du système de justice. Dans ma circonscription, nous ne voulons pas de l'enregistrement des fusils de chasse et des carabines. J'appuie donc le projet de loi C-251, et je tiens à féliciter la députée de Mississauga-Est de l'avoir proposé.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur ce projet de loi et de manifester mon appui à ma collègue, la députée de Mississauga-Est. Elle travaille sans relâche depuis longtemps pour veiller à ce que sa proposition ne soit pas mise de côté.
Permettez-moi tout d'abord de citer ce que disait la députée au sujet d'un projet de loi similaire étudié au cours d'une législature antérieure: «Il m'a été trop souvent donné de faire la connaissance de victimes qui sont de plus en plus nombreuses à se rendre compte qu'elles sont aussi les victimes du Parlement. Qu'elles aient perdu des enfants, un père ou une mère ou encore un conjoint, elles ont toutes perdu confiance dans les tribunaux, dans la Commission des libérations conditionnelles, et surtout dans le Parlement.» Je crois que le Parlement peut changer les choses. Perdre confiance dans le Parlement doit être une expérience très décevante, c'est le moins qu'on puisse dire. Tous les députés à la Chambre sont convaincus qu'ils peuvent changer les choses, sinon, ils ne seraient pas ici.
Ma collègue a consacré beaucoup d'efforts à la rédaction de son projet de loi au cours de la législature actuelle et de la précédente. Le temps est venu de lui redonner confiance dans le Parlement. Le temps est venu d'examiner cette mesure législative avec tout le respect qu'elle mérite.
La circonscription de Oak Ridges que je représente se transforme. De la petite ville à vocation assez rurale, où tout le monde se connaissait, elle est devenue un centre urbain. Les problèmes associés à la criminalité et à la justice en milieu urbain commencent à surgir.
Le chef de police de ma région n'a informé que le nombre de meurtres au premier et au deuxième degré est à la hausse, de même que le nombre d'agressions sexuelles. Il dénombre entre autres d'horribles actes de violence familiale, où des maris étranglent leurs femmes, les battent et les poignardent. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.
Le 9 septembre 1995, un homicide au sein d'une famille a été commis. Le mari a étranglé sa femme. Il a plaidé non coupable. Après avoir été reconnu d'homicide involontaire, il a passé cinq ans en prison.
Le 17 décembre 1995, dans ma circonscription, un gendre a battu son beau-père à mort, et il a essayé de tuer un autre membre de sa belle-famille de la même façon. Il a plaidé non coupable. Après avoir été reconnu coupable de meurtre au deuxième degré, il a été condamné à 16 ans de détention.
Le 23 janvier 1997, il y a eu un autre homicide de ce genre. Un jeune délinquant a poignardé sa mère à mort. Il a plaidé coupable et après avoir été reconnu coupable d'homicide involontaire, il a été condamné à six mois de garde en milieu fermé et quatre mois de garde en milieu ouvert.
Un autre problème dans ma circonscription réside dans les vols avec violation de domicile lorsque des gens sont suivis puis attaqués dans leur propre maison. Il y a même un cas où deux délinquants ont pénétré dans la maison pour voler les propriétaires et ont ensuite tailladé la victime qui est morte après avoir perdu tout son sang. Cela s'est produit le 18 février 1997. Ils ont plaidé coupables. Après avoir été déclaré coupable d'homicide involontaire, le jeune délinquant a été condamné comme un adulte à six ans et demi de détention. Le délinquant adulte a été condamné, pour sa part, à une peine d'emprisonnement de sept années et demie.
Je tiens à signaler que l'un des objectifs du projet de loi est de réduire la façon inhumaine dont on traite les familles des victimes. Qui parmi nous ne se rappelle pas de la situation horrible vécue par les victimes et les familles de Clifford Olson, de Paul Bernardo et de Denis Lortie?.
La moitié de toutes les personnes reconnues coupables de meurtre au deuxième degré au Canada qui sont condamnées à perpétuité sont libérées après moins de 12 ans. Denis Lortie, qui a tué trois personnes avec une arme automatique, a été libéré après n'avoir purgé que 11 ans de détention.
Je ne peux qu'imaginer tout ce que les familles ont dû traverser. Elles méritent notre compassion et elles méritent que les peines reflètent vraiment la gravité des crimes commis. Il ne devrait pas y avoir de réduction de peine.
Les récidivistes coupables de ces crimes ne devraient pas purger toutes leurs peines en même temps et être ensuite libérés. Les criminels devraient purger leur peine au complet pour chaque crime commis.
Je n'ai aucune hésitation à souscrire à des peines consécutives pour les violeurs et les tueurs en série. Je crois qu'il faut infliger des peines sévères et que celles-ci doivent être purgées en totalité et de façon consécutive. Si on impose trois peines à un individu, il faut les additionner, et l'individu doit les purger de manière consécutive.
Je pense que nous réussirons ainsi à rétablir la confiance de la population dans notre système de justice, dans la détermination de la peine et dans le Parlement. Nous devrions être fiers d'envoyer un message clair au système de justice. Notre message devrait être clair et concis. Les Canadiens veulent que les criminels soient traités de manière non équivoque.
Selon le document intitulé Sentencing in Canada, «des recherches ont montré que, pour certaines infractions, à tout le moins, il y a des écarts injustifiés dans les peines infligées au Canada. Ainsi, des chercheurs ont constaté qu'on a imposé, pour des infractions similaires, des peines dont la gravité a varié d'une condamnation avec sursis à une peine d'emprisonnement de 13 ans.» C'est inacceptable. Nous devrions donner au système de justice des instructions claires et non équivoques.
Une peine devrait être infligée pour chaque crime particulier et pour chaque victime. Chaque peine devrait être purgée en totalité.
En appuyant ce projet de loi, nous permettrons à tous les Canadiens d'avoir confiance en leur Parlement, y compris à la députée de Mississauga-Est.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, au nom des électeurs de Surrey-Centre je vais me prononcer sur le contenu du projet de loi C-251.
Le projet de loi prévoit l'imposition de sentences consécutives pour l'auteur d'une agression sexuelle qui a commis une autre infraction basée sur les mêmes faits ou qui purge à ce moment-là une autre sentence.
Le projet de loi prévoit également que la personne condamnée à l'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au premier ou au deuxième degré n'est pas admissible à la libération conditionnelle avant d'avoir purgé, en plus du temps d'épreuve prévu pour le meurtre, le tiers—jusqu'à concurrence de sept ans —de la peine prévue pour une autre infraction basée sur les mêmes faits ou de la peine qu'elle purge déjà. Dans le cas de récidive de meurtre, le temps d'épreuve s'additionne pour chaque meurtre.
Mes électeurs et moi ne pouvons pas croire qu'il y est quelqu'un à la Chambre qui s'oppose à l'esprit et à l'objet du projet de loi. Une des premières motions que j'ai présentées à la Chambre en tant que nouveau député allait dans le même sens que le projet de loi C-251. Ma motion M-23 demandait à la Chambre de faire en sorte que, lorsqu'une personne est reconnue coupable d'infractions criminelles multiples, elle devrait être condamnée à des peines consécutives. Ma motion avait une portée encore plus large que le projet de loi C-251.
Je tiens à féliciter la députée de Mississauga-Est d'avoir présenté son projet de loi, qui instaurerait une mesure de vérité dans la détermination de la peine.
Nous, de ce côté-ci de la Chambre, réclamons depuis de nombreuses années la vérité dans la détermination de la peine. Sans cela, nous perdons confiance dans notre système de justice pénale.
L'été dernier, nous avons entendu la ministre de la Justice admettre à la Chambre que les Canadiens n'ont aucune confiance dans notre système de justice pénale. C'est ce qu'elle a dit. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, le disons depuis de nombreuses années parce que nous écoutons ce que les Canadiens nous disent.
Lorsque Bernardo a tué brutalement deux jeunes femmes, nous estimions qu'il devrait purger deux sentences consécutives. Clifford Olson a commis des meurtres multiples. Nous estimions qu'il devrait purger de multiples sentences consécutives. La justice ne doit pas seulement être rendue, elle doit aussi inspirer confiance. Voilà pourquoi les Canadiens ont besoin de voir restaurer leur confiance dans notre système de justice pénale.
Qu'est-ce que la ministre libérale de la Justice a fait pour restaurer leur confiance dans notre système de justice pénale? Absolument rien. Où sont les modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants? La ministre n'en a plus parlé depuis des mois.
Si nous adoptions aujourd'hui la mesure à l'étude, les criminels sauraient que, lorsqu'ils commettent des crimes, ils purgeront une peine correspondante.
Nous voulons tenir les criminels responsables de tous les crimes qu'ils ont commis et les punir en conséquence. C'est ce que propose la mesure à l'étude.
À Surrey, en Colombie-Britannique, d'où je viens, nous devons venir en aide à notre détachement de la GRC. Les libéraux laissent s'épuiser leur financement. Dans ma circonscription, la GRC rationne l'essence consommée par les voitures de patrouille. C'est incroyable. On croirait vivre sous le régime de la Loi sur les mesures de guerre. En temps de guerre, nous rationnons l'essence.
L'ancien premier ministre Trudeau a été le dernier libéral à invoquer la Loi sur les mesures de guerre, mais il l'a fait officiellement. L'actuel premier ministre dirige si mal notre pays que nous vivons sous le régime des mesures de guerre, sauf que le premier ministre ne l'avoue pas.
Le solliciteur général nous dit que la GRC peut nous donner les mêmes services qu'il y a 125 ans. Voilà ce qu'il a dit au cours de la période des questions, cette semaine. La GRC n'a pas rationné l'essence en 125 ans. Jamais en 125 ans, elle n'a été dans l'impossibilité de mener une enquête parce qu'elle manquait de personnel et de fonds.
Nous pouvons aider en épargnant à la GRC la tâche de s'occuper des récidivistes ou de leurs clients. Nous pouvons faire en sorte que les auteurs de crimes multiples purgent consécutivement des peines multiples. Nous n'avons pas à nous excuser de vouloir garder les récidivistes derrière les barreaux. Ils nous faut des peines sévères. Nous n'avons pas besoin des prisons libérales cinq étoiles.
Les libéraux devraient s'occuper des criminels qui retombent dans la criminalité. Au lieu de cela, le gouvernement cherche à hâter leur libération. Encore une fois, les libéraux ne font pas preuve de fermeté dans la lutte contre le crime. Ce gouvernement devrait avoir honte.
C'est ce même gouvernement qui, il y a deux semaines, a refusé à nos agences d'application de la loi le plein usage de la technologie des empreintes génétiques. Nos polices réclamaient l'usage de cette technologie, mais les libéraux ont dit non. C'est pour cela que de faux réfugiés vendent aujourd'hui de la drogue à nos enfants.
La députée de Mississauga-Est s'inquiète des victimes de crimes. Son projet de loi prévoit l'application de peines consécutives. Nous devrions tous appuyer ce projet de loi. Nous devrions regarder cette mesure objectivement et non politiquement. Tout député ou toute députée qui fait ce qui est correct devrait avoir notre appui. De notre côté nous avons le droit d'agir ainsi, et nous souhaiterions la même courtoisie de la part du côté gouvernemental.
Nous appuyons le projet de loi C-251 présenté par une députée libérale, parce que c'est une bonne chose à faire. Ce projet de loi contribuerait à la sécurité de nos rues. Il rétablirait une certaine sécurité publique. Les criminels seraient absents de nos rues pendant de plus longues périodes et cela protégerait les citoyens innocents. Cela protégerait les membres les plus vulnérables de notre société, les femmes, les enfants et les personnes âgées. Pourtant, les libéraux ne parlent pas de mesures concrètes pour protéger les Canadiens, rendre nos foyers et nos rues plus sûrs et réduire la criminalité par des mesures de dissuasion.
La population de Surrey-Centre veut que le gouvernement fédéral exerce un rôle de leader en étant stricte avec les criminels. C'est pour cela que nous appuyons ce projet de loi.
[Français]
M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-251, déposé par notre collègue de Mississauga-Est, est le fruit de beaucoup de travail de sa part pour en arriver à démontrer la nécessité d'apporter un amendement au Code criminel.
Elle a démontré, par des statistiques et des études, que des gens se sentent délaissés par le fait que le Parlement n'a pas voulu corriger cette lacune assez grave. Notre collègue avait trois objectifs avec la présentation de ce projet de loi, le premier étant d'apporter un élément humanitaire.
Par son travail, elle a eu l'occasion de rencontrer des membres des familles des victimes des crimes les plus affreux qu'on puisse imaginer. Ils lui ont relaté la souffrance morale générée dans leur famille et parmi leurs amis. Cela démontre qu'il y avait effectivement une lacune dans la loi. Certains crimes étaient tellement affreux, qu'ils ont eu un impact énorme sur les familles des victimes. Évidemment, les victimes ont perdu la vie, mais ensuite, c'étaient les familles qui souffraient.
Je crois que ce point de vue humanitaire est extrêmement important et qu'il n'est pas négligeable. Souvent, ces gens ont senti que les membres de leur famille qui ont été victimes de ces crimes affreux ont été oubliés. Quand une sentence était prononcée, il s'agissait de sentences concurrentes. Cela veut dire tout simplement que si le criminel était condamné à la prison à vie, cela n'allait pas plus loin. Mais on sait qu'en vertu de la loi, ils peuvent demander une remise en liberté sous condition. Donc, après 15 ans, ils ont la possibilité de se retrouver en liberté.
Évidemment, c'est affreux pour les membres des familles des victimes.
Les statistiques, ainsi que l'étude de notre collègue, ont démontré que pour sept victimes sur 10, ce sont des crimes qui sont commis par des criminels qui ont déjà été emprisonnés pour des crimes affreux comme le meurtre et qui, après avoir recrouvré la liberté après 15 ans d'emprisonnement, ont commis un crime semblable. Très souvent, les victimes étaient des enfants ou des femmes.
Quand on voit des statistiques aussi terribles que celles-là, sept victimes sur 10 dû au fait qu'ils ont déjà été condamnés pour un crime semblable, on a raison de s'inquiéter et de dire que peut-être il serait nécessaire d'amender la loi. On ne peut pas se permettre de laisser des gens en liberté en sachant que le danger est assez élevé qu'ils vont commettre la même sorte de crime.
Je crois que la moindre des choses qu'on peut faire, c'est d'adopter, un amendement à la loi et faire en sorte que quand il y a des crimes aussi affreux et qu'il y a plusieurs victimes, on devrait mettre toutes les chances de notre côté et ne pas leur donner leur liberté. Ce sont souvent des crimes qui dépassent notre imagination.
La députée de Mississauga-Est a raison de croire que le temps est arrivé pour que le Parlement et les députés de cette Chambre se prononcent sur cette question. On n'a rien à perdre, mais tout à gagner, pour s'assurer qu'à l'avenir il n'y aura pas de victimes comme celles des dernières années. Il y a des gens qui ont recrouvré leur liberté et qui n'auraient jamais dû l'avoir.
Il n'y a pas grand-chose à ajouter à ce sujet. Notre collègue a fait son travail. Il y a beaucoup de gens qui se sont prononcés sur cette question. C'est évident qu'un amendement était nécessaire et, finalement, nous allons avoir l'occasion, d'ici quelque temps, de corriger une lacune assez grave.
[Traduction]
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre aujourd'hui la parole à la Chambre pour appuyer le projet de loi d'initiative parlementaire C-251, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. C'est avec une très grande détermination que la députée de Mississauga-Est a présenté cette mesure législative.
Ce projet de loi conférerait une certaine justice au système de détermination des peines au Canada et mettrait fin au laxisme dont bénéficient les violeurs et les meurtriers. L'adoption de cette mesure législative qui prévoit des peines consécutives pour les meurtriers et les violeurs en série, redonnera confiance dans le gouvernement aux victimes et aux familles qui pourront dormir paisiblement la nuit.
Les Canadiens comprennent que les objectifs de ce projet de loi sont de réduire la cruauté envers les familles des victimes, de redonner un peu de réalisme aux peines et de cesser de jouer avec la vie, en prenant le risque qu'un tueur en série ou un prédateur ne frappera pas de nouveau.
Les disparités qui existent au niveau de la détermination de la peine dans ce pays sont un argument solide en faveur du changement. Songez que la moitié des criminels reconnus coupables de meurtre au deuxième degré et condamnés à l'emprisonnement à perpétuité sont libérés après avoir purgé moins de 12 ans de leur peine. Denis Lortie, qui a assassiné trois personnes au moyen d'une mitrailleuse à l'Assemblée nationale du Québec, a purgé seulement 11 années de sa peine, soit environ trois ans et demi de détention pour chaque personne qu'il a tuée.
Au Canada, la prison à perpétuité ne veut pas dire à vie. On veut faire croire aux Canadiens qu'une fois qu'un meurtrier est envoyé en prison, il y reste. Ce n'est pas toujours le cas, ce ne l'a jamais été.
Des analystes disent que pour les mêmes faits reprochés, en tous les cas en ce qui concerne certaines infractions, les peines vont d'une condamnation avec sursis à 13 ans de prison. Il n'y a aucune uniformité d'un bout du pays à l'autre. C'est inquiétant.
Une étude sur la détermination des peines au Canada et les récentes tendances statistiques, rédigée par deux spécialistes réputés, Julian Roberts de l'Université d'Ottawa et Andy Birckenmayer, de Statistique Canada, révèle un fait ahurissant. On peut lire, dans le rapport sur cette étude, que:
Une des principales lacunes de l'actuel système de détermination de peines au Canada est qu'il n'existe aucun moyen systématique, à jour, accessible et permanent de savoir quels genres de sentences sont imposées.
Sans uniformité et sans précédents adéquats et bien connus en matière de détermination de peine, comment les Canadiens peuvent-ils avoir confiance dans leur système juridique? Le projet de loi à l'étude marque le début du changement.
Je trouve ironique et tragique que nous n'ayons aucune difficulté à imposer des peines consécutives dans les cas d'infractions aux règlements de stationnement ou d'excès de vitesse.
Comme l'a dit si souvent la députée de Mississauga-Est, si quelqu'un stationne illégalement dix fois, il paie dix contraventions. Il n'y a pas de rabais sur le nombre. La personne qui reçoit trois contraventions pour excès de vitesse devra payer trois amendes.
Le projet de loi applique les mêmes principes aux infractions graves. Il suffit de se rappeler le cas de Clifford Olson pour se sentir aussitôt obligé de voter en faveur du projet de loi C-251. Au cours de son audition dégoûtante en vertu de l'article 745 du Code criminel, l'été dernier, Olson a lu une lettre de son avocat lui conseillant de reconnaître tous les meurtres qu'il avait commis, ce qui lui permettait de tirer pleinement avantage des dispositions de la loi relatives aux peines concurrentes.
Nous ne devons pas accepter qu'Olson et d'autres prédateurs puissent se voir infliger des peines concurrentes et que le système judiciaire continue d'offrir des rabais sur la brutalité.
On a allégué à la Chambre que les peines concurrentes permettent d'arriver à un juste résultat sans qu'il soit nécessaire de réduire les peines pour les infractions individuelles. La réduction de peine accordée à l'auteur d'un viol ou d'un meurtre uniquement parce que la victime n'a pas été la seule victime du prédateur ne saurait être un juste résultat.
La situation est encore pire si les tribunaux dissimulent le fait qu'ils réduisent maintes fois les sentences en imposant des peines concurrentes. Ils devraient imposer des peines consécutives en cas de crimes aussi dévastateurs que le meurtre et l'agression sexuelle.
N'est-ce pas plus logique et plus humain de détenir, sous bonne garde et loin d'autres victimes éventuelles, les prédateurs qui ont tué ou agressé sexuellement plusieurs victimes? S'il faut plus d'espace dans les prisons, nous devrions élaborer des formes de châtiment et de réadaptation plus créatives pour ceux qui ont commis des infractions contre les biens ou des infractions commerciales.
Voici un argument probant. On dit souvent que la Commission nationale des libérations conditionnelles est un organisme décisionnel indépendant chargé d'assurer la sécurité publique. Dans les faits, il y a en moyenne un criminel en liberté conditionnelle qui commet un meurtre chaque mois. Comment les députés peuvent-ils tolérer cela? Comment pouvons-nous rester indifférents face aux victimes qui ont toutes les raisons de craindre la libération d'un prédateur et qui ne peuvent échapper au risque que le processus de libération conditionnelle donne libre cours à la sauvagerie de leurs assaillants?
Des peines consécutives pourraient aider la Commission des libérations conditionnelles à établir une distinction entre le niveau élevé de risques que présentent les violeurs et les meurtriers reconnus coupables de plusieurs crimes et les individus qui pourraient s'être rendus coupables d'un seul crime, au cours d'un seul incident.
À l'heure actuelle, on a complètement effacé toute trace des victimes dans le processus de détermination de la peine. On a affaire à une justice qui ne reconnaît pas la valeur de la vie, et dans lequel les tribunaux ont très peu d'égard pour la douleur, la souffrance et la mort de la deuxième, de la troisième ou de la onzième victime. Je suis d'avis que c'est tout à fait inacceptable. Mes électeurs sont d'avis que c'est tout à fait inacceptable. Les députés des deux côtés de la Chambre trouvent aussi la situation inacceptable.
J'aimerais croire que nous vivons dans un pays où le gouvernement est prêt à fait tout ce qu'il peut pour protéger les victimes contre des prédateurs comme Clifford Olson, Paul Bernardo ou Denis Lortie. Le projet C-251 nous permettra de le faire. La voix des Canadiens qui espèrent d'importantes modifications au Code criminel est de plus en plus forte tous les jours. Nous pouvons tous comprendre le besoin que ressentent les Canadiens de se sentir en sécurité. Toutefois, il est grand temps de passer aux actes. Il est temps d'adopter des modifications pour protéger la tranquillité d'esprit des gens de ce pays.
Je remercie la députée de Mississauga-Est d'avoir soulevé ces changements raisonnables et nécessaires et je la félicite des efforts qu'elle a déployés pour présenter ce dossier à la Chambre. Notre système de justice a grand besoin qu'on y apporte des modifications. J'appuie entièrement le projet de loi C-251 et j'encourage tous les députés de la Chambre à en faire autant.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-251. Je tiens à transmettre mes encouragements, mes remerciements et mon admiration à la députée de Mississauga-Est, qui a travaillé si fort pour arriver à présenter ce projet de loi. Si nous pouvions applaudir aujourd'hui, je suis sûr que nous le ferions, parce qu'elle a fait un travail remarquable pour présenter une proposition qui sera grandement bénéfique à la population canadienne, qui améliorera notre système judiciaire et qui rendra nos villes plus sûres.
La députée s'attaque à une question qui s'applique aux pires individus de la société, les plus agressifs, les délinquants violents, les meurtriers, les violeurs. La députée présente un projet de loi qui propose l'imposition de peines concurrentes, plutôt que des peines consécutives, pour les individus dont on a démontré qu'ils représentent un danger pour la société, qu'ils ont violé les droits fondamentaux d'une autre personne en commettant les agressions les plus atroces, que ce soit le meurtre ou le viol.
Les Canadiens trouvent inacceptable que quelqu'un qui a commis plusieurs viols ou plusieurs meurtres ne reçoive qu'une seule peine ou des peines à purger concurremment. Il est absolument incroyable que 13 p. 100 seulement des pédophiles, qui sont souvent des récidivistes, et 30 p. 100 des individus qui commettent des agressions sexuelles purgent des peines de deux ans d'emprisonnement ou plus. N'oubliez pas que tout détenu peut bénéficier d'une libération conditionnelle après avoir purgé seulement le sixième de sa peine. Il peut être libéré après quelques mois seulement, alors que ses victimes innocentes auront à vivre avec les séquelles de son agression pour le reste de leurs jours. Le projet de loi C-251 s'attaque à la racine de ce problème et prévoit une solution constructive pour assurer que nos rues soient sûres.
Je préviens le gouvernement qu'il devra s'assurer que ce projet de loi ne traîne pas au comité. Trop souvent, des projets d'initiative parlementaire vont au comité pour y être bloqués par le gouvernement. Le gouvernement empêche ces projets de loi d'être lus pour la troisième fois et d'être promulgués.
Ce serait un véritable travestissement de la justice si cela devait se produire avec le projet de loi C-251. Cela entraînerait un problème énorme et causerait une grave injustice à une députée, celle de Mississauga-Est, qui a travaillé fort à ce projet de loi. Elle a tellement travaillé pour que 166 députés de la Chambre appuient ce projet de loi. Que 166 députés l'appuient et qu'il soit renvoyé au comité pour y dépérir créerait un énorme problème. Nous surveillerons de très près le gouvernement et les ministériels pour nous assurer que cela ne se produise jamais.
Cette question illustre également un plus grand problème au sujet des initiatives parlementaires. Je sais que le leader de la Chambre, le whip du gouvernement et tous les autres députés ministériels qui ont le pouvoir de changer la situation sont très intéressés par les solutions créatrices qui permettent de rendre plus agréable et plus animée la période des initiatives parlementaires.
Les initiatives parlementaires constituent une des très rares occasions pour les députés de présenter des idées créatrices à la Chambre. Si le gouvernement continue d'empêcher que les initiatives parlementaires servent de moyen utile aux députés, cela enfreindrait les principes fondamentaux de la démocratie. Il nuirait à la capacité des députés de représenter leurs électeurs. Il empêcherait les Canadiens d'être représentés à la Chambre.
Le leader du gouvernement à la Chambre était très volubile et a présenté de nombreuses propositions créatrices lorsqu'il était dans l'opposition. Avec M. Dingwall et d'autres, il a rédigé un merveilleux document qui a été publié en 1992 et dans lequel ils présentaient des propositions extrêmement créatrices sur des façons d'améliorer les initiatives parlementaires.
Je sais que le leader du gouvernement écoute attentivement mes propos. Je l'invite fortement à s'inspirer des mots qu'il a lui-même écrits dans ce merveilleux document, qui visait à réformer les initiatives parlementaires et à rendre la Chambre plus démocratique et plus sensible aux besoins des simples députés et de la population. Je l'encourage à dénicher ce merveilleux document, à se présenter à la Chambre d'ici deux mois et à y instituer cette réforme.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu le libellé de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.
Après le timbre:
Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur la deuxième lecture du projet de loi C-251 et sur son renvoi à un comité.
Selon la pratique, le vote par appel nominal sera pris rangée par rangée, en commençant par le proposeur. Je demanderai ensuite aux autres députés qui sont en faveur de la motion et qui se trouvent du même côté de la Chambre que le proposeur de bien vouloir se lever. Ensuite, les votes de ceux qui appuient la motion et qui se trouvent de l'autre côté de la Chambre seront enregistrés. Les votes de ceux qui s'opposent à la motion seront enregistrés dans le même ordre.
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 245
POUR
Députés
Ablonczy | Adams | Alarie | Anderson |
Assad | Baker | Bélanger | Benoit |
Bergeron | Bertrand | Bigras | Blaikie |
Boudria | Brison | Cadman | Canuel |
Casey | Casson | Clouthier | Cullen |
Dhaliwal | Dromisky | Dubé (Madawaska – Restigouche) | Duncan |
Earle | Eggleton | Fournier | Gilmour |
Girard - Bujold | Goodale | Grewal | Guarnieri |
Hanger | Harb | Herron | Hill (Macleod) |
Hill (Prince George – Peace River) | Hilstrom | Hoeppner | Jones |
Jordan | Kilger (Stormont – Dundas) | Konrad | Lalonde |
Lastewka | Lee | Longfield | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Mahoney | Malhi | Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) |
Mayfield | McGuire | McNally | McTeague |
McWhinney | Meredith | Mitchell | Murray |
Myers | Obhrai | Pagtakhan | Pankiw |
Penson | Peric | Perron | Pratt |
Proctor | Proud | Richardson | Schmidt |
Stewart (Northumberland) | Stoffer | Strahl | Tremblay (Lac - Saint - Jean) |
Tremblay (Rimouski – Mitis) | Ur | Vanclief | Vellacott |
Wilfert – 81 |
CONTRE
Députés
DeVillers | Mancini | Robinson – 3 |
«PAIRÉS»
Députés
Axworthy (Winnipeg South Centre) | Bevilacqua | Caccia | Cardin |
Catterall | Desrochers | Duceppe | Fontana |
Gagliano | Gauthier | Guay | Ianno |
Laurin | Lincoln | Rocheleau | St - Hilaire |
Turp | Valeri |
Le président suppléant (M. McClelland): Je déclare la motion adoptée. En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
(Le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour mettre en doute l'ingéniosité dont le gouvernement a fait preuve dans le programme d'adaptation post-LSPA annoncé récemment.
Cela semblera peut-être un peu bizarre venant de moi, mais je dois donner un certain mérite au gouvernement pour avoir au moins présenté une forme quelconque de programme d'adaptation post-LSPA alors que tout semblait indiquer qu'il ne ferait rien du tout.
Ce qui est malheureux, c'est que le nouveau programme ne fait pas grand-chose pour aider les gens qui ont été durement touchés par le ralentissement dans le secteur des pêches et par les politiques du MPO. Il ne fait aucun doute que des milliers et des milliers de pêcheurs et de travailleurs d'usine de transformation de poisson au Canada atlantique et au Québec ont été exclus du nouveau programme d'adaptation post-LSPA.
Le gouvernement n'a fait essentiellement que dresser certains groupes de pêcheurs contre d'autres. Durant les séances du comité au début de mai et en juin, j'avais imploré le ministre des Pêches et des Océans d'annoncer le programme pendant que la Chambre siégeait afin que nous puissions débattre la question à la Chambre des communes et non dans les médias.
Il avait dit qu'il tiendrait compte de ma demande, mais qu'il ne pouvait rien garantir. Malheureusement, il n'a pas donné suite à ma demande, et le programme a été annoncé à Terre-Neuve, ce qui a donné lieu à un échange plutôt énergique entre les travailleurs déplacés et les représentants du gouvernement qui étaient là pour annoncer le programme.
Le fin fond de l'histoire, c'est que les pêcheurs et les travailleurs d'usine ne veulent tout simplement pas de LSPA. Ils n'en veulent pas. Tout ce qu'ils désirent, c'est travailler.
J'ai donné un exemple parfait de cela aujourd'hui lorsque, pendant la période des déclarations, j'ai dit que la ville de Canso, qui a été une collectivité de pêcheurs active et auto-suffisante pendant plus de 400 ans, annoncera que, au début de janvier, elle devra déclarer faillite en raison des politiques du MPO.
Beaucoup de pêcheurs et de travailleurs d'usine de toute la côte atlantique et du Québec ont été exclus de tout programme d'adaptation. Un autre aspect de ce programme, ce sont les rachats de permis. Cette mesure est nettement insuffisante. Ce que le gouvernement a fait aux gens qui ont consacré leur vie à la pêche est absolument criminel, car ils n'obtiennent que des miettes.
En terminant, je dirai que nous n'avons pas d'entente avec les États-Unis sur le saumon du Pacifique parce que le ministre lui-même a déclaré que les États-Unis étaient une nation très puissante et que nous devions être très prudents dans nos négociations avec eux.
J'ai ici, sur mon pupitre, une preuve que les Îles Féroé, un pays très puissant s'il en est, ont convaincu le Canada de leur ouvrir la zone du cap Flemish, situé juste à l'extérieur de notre zone économique de 200 milles. Nous devons leur donner un accès supplémentaire aux crevettes. Ce quota de crevettes aurait dû être attribué aux Canadiens de Canso et de Mulgrave. Malheureusement, des centaines de gens perdront leur emploi parce que nous avons capitulé devant les Îles Féroé, cette grande puissance mondiale.
Il est tout à fait scandaleux que le gouvernement abandonne à ce point des milliers de Canadiens.
Mme Bonnie Brown (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique a été conçue pour veiller à ce que les personnes ayant perdu leur gagne-pain puissent subvenir à leurs besoins fondamentaux. Sur ce plan, la stratégie a été couronnée de succès. Plus de 40 000 personnes ont obtenu un soutien financier en temps opportun. La stratégie a également aidé quelque 15 000 travailleurs des pêches à se recycler dans d'autres industries.
Nous savons qu'il faudra attendre longtemps avant que les stocks de poisson soient reconstitués, si jamais ils le sont. Nous savons que les pêcheurs et leurs collectivités ont besoin d'outils et de programmes pour les aider à se construire une nouvelle vie à l'extérieur des pêches. Par conséquent, le 19 juin 1998, nous avons annoncé le versement d'un montant supplémentaire de 730 millions de dollars dans le cadre d'un programme appelé Mesures de restructuration et d'adaptation pour l'industrie du poisson de fond de l'Atlantique. Parmi ces mesures, on compte un paiement forfaitaire final, le rachat des permis, des allocations de retraite anticipée, une aide à la mobilité, des programmes en matière d'emplois et une subvention salariale.
Jusqu'à maintenant, nous avons approuvé 145 projets temporaires de création d'emplois à Terre-Neuve, qui procureront du travail à 1 645 Canadiens. En Nouvelle-Écosse, nous avons déjà approuvé six projets créant 78 emplois.
En guise de conclusion, je tiens à donner l'assurance au député que le gouvernement du Canada ne se soustrait pas à sa responsabilité envers la population de la côte est. Au contraire, il consacre des millions de dollars à la côte est et au Québec pour aider les pêcheurs et toutes les personnes touchées à s'adapter aux bouleversements économiques.
C'est pour cette raison que le gouvernement est toujours déterminé à veiller à ce que tous les Canadiens, y compris les pêcheurs et les travailleurs d'usine, puissent planifier leur avenir.
Le président suppléant (M. McClelland): La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 48.)