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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 177

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 9 février 1999

VAFFAIRES COURANTES

. 1000

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams

. 1005

VLE CODE CANADIEN DU TRAVAIL
VProjet de loi C-470. Présentation et première lecture
VM. Richard Marceau
VPÉTITIONS
VLe projet de loi C-68
VM. Garry Breitkreuz
VLes droits de la personne
VM. Paul Szabo
VLes exportations d'eau en grandes quantités
VM. Nelson Riis
VLa loi instituant une taxe pour la paix
VM. Svend J. Robinson

. 1010

VL'Accord multilatéral sur l'investissement
VM. Svend J. Robinson
VLe groupe de travail MacKay
VM. John Solomon
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VM. Garry Breitkreuz
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VComptes publics
VM. John Williams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1015

VLES CRÉDITS
VJour désigné—Les ressources en eau douce
VM. Bill Blaikie
VMotion

. 1020

. 1025

VM. John Finlay
VM. John Solomon

. 1030

VM. Nelson Riis

. 1035

VAmendement
VM. Bill Blaikie

. 1040

VM. Dick Proctor
VM. Julian Reed

. 1045

. 1050

. 1055

VM. Bill Blaikie
VM. John Duncan

. 1100

VM. Charlie Penson
VM. Bill Gilmour
VMotion

. 1105

. 1110

VM. Dennis J. Mills

. 1115

VMme Jocelyne Girard-Bujold

. 1120

. 1125

VM. Dennis J. Mills

. 1130

VM. Rick Laliberte
VM. John Herron

. 1135

VM. Bill Blaikie

. 1140

VM. Dennis J. Mills
VM. Rick Laliberte

. 1145

. 1150

. 1155

VM. Pat Martin

. 1200

. 1205

VM. Myron Thompson
VMme Carolyn Bennett

. 1210

. 1215

VM. Nelson Riis

. 1220

VM. Lynn Myers

. 1225

VM. Charlie Penson

. 1230

. 1235

VM. Rick Laliberte

. 1240

VM. Rick Casson

. 1245

. 1250

. 1255

VM. John Duncan

. 1300

VM. Andrew Telegdi

. 1305

VL'hon. Charles Caccia

. 1310

VM. Svend J. Robinson

. 1315

VM. Bill Gilmour

. 1320

VMme Aileen Carroll

. 1325

VM. Peter Mancini

. 1330

VM. Bryon Wilfert
VM. Pierre de Savoye

. 1335

. 1340

. 1345

VM. Dennis J. Mills

. 1350

VM. Clifford Lincoln

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLA PRÉVENTION DES BLESSURES
VM. Gary Pillitteri
VLA FISCALITÉ
VM. Ted White
VLE LOGEMENT SOCIAL
VM. Roy Cullen
VLE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
VM. Guy St-Julien

. 1400

VLES ÉCHANGES ENTRE CALGARY ET QUÉBEC
VMme Val Meredith
VLES INTERPRÈTES DE LA CHAMBRE DES COMMUNES
VMme Carolyn Parrish
VLES DÉPENSES PUBLIQUES
VM. John Williams
VL'ÉDITION
VM. Dennis J. Mills
VLES SANS-ABRI
VMme Libby Davies
VL'AN 2000
VMme Susan Whelan

. 1405

VLA JUSTICE
VM. John Harvard
VLA CONGRÉGATION DES SOEURS DE LA CHARITÉ
VM. Antoine Dubé
VLES DÉPENSES PUBLIQUES
VM. John Herron
VLE PROGRAMME JEUNES ENTREPRISES MONDIALES
VM. Robert Bertrand

. 1410

VL'OFFICE NATIONAL DU FILM DU CANADA
VM. Mauril Bélanger
VLE DÉCÈS DE DENISE LEBLANC-BANTEY
VM. Michel Gauthier
VLE DROIT À LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE
VM. Maurice Vellacott
VLA DEVCO
VM. Peter Mancini
VL'AN 2000
VM. Jim Jones

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VL'ENQUÊTE SUR LES INCIDENTS DU SOMMET DE L'APEC
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Jim Abbott
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Jim Abbott

. 1420

VLe très hon. Jean Chrétien
VLES FUNÉRAILLES DU ROI DE JORDANIE
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Michel Gauthier
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Michel Gauthier
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES SANS-ABRI
VMme Alexa McDonough

. 1425

VLe très hon. Jean Chrétien
VMme Alexa McDonough
VLe très hon. Jean Chrétien
VLE KOSOVO
VM. David Price
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLA FISCALITÉ
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin

. 1430

VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VL'ENTENTE SUR L'UNION SOCIALE
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VLA FISCALITÉ
VM. Gerry Ritz
VL'hon. Paul Martin
VM. Gerry Ritz

. 1435

VL'hon. Paul Martin
VL'APEC
VM. Richard Marceau
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Richard Marceau
VL'hon. Lawrence MacAulay
VLE BUDGET
VM. Paul Forseth
VL'hon. Paul Martin
VM. Paul Forseth
VL'hon. Paul Martin
VLA CONDITION FÉMININE
VMme Caroline St-Hilaire
VL'hon. Hedy Fry

. 1440

VLE BOGUE DE L'AN 2000
VM. Eugène Bellemare
VL'hon. John Manley
VLA JUSTICE
VM. John Reynolds
VL'hon. Anne McLellan
VM. John Reynolds
VL'hon. Anne McLellan
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Dick Proctor
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1445

VM. Dick Proctor
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
VM. Jim Jones
VL'hon. John Manley
VM. Jim Jones
VLES AGRICULTEURS DU CANADA
VM. Larry McCormick
VM. Joe McGuire
VL'AN 2000
VM. Rahim Jaffer

. 1450

VL'hon. Marcel Massé
VL'AÉROPORT JEAN-LESAGE
VL'hon. David M. Collenette
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. John Solomon
VL'hon. Lawrence MacAulay
VL'INDUSTRIE DE L'ÉDITION
VM. Mark Muise
VL'hon. Sheila Copps
VREVENU CANADA
VMme Sophia Leung
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal

. 1455

VL'AN 2000
VM. Rahim Jaffer
VL'hon. Marcel Massé
VL'EXPORTATION DES RÉACTEURS CANDU
VMme Maud Debien
VL'hon. Sergio Marchi
VLES SANS-ABRI ET LA PAUVRETÉ
VMme Libby Davies
VL'hon. Alfonso Gagliano
VL'ÉDITION
VM. Mark Muise
VL'hon. Sergio Marchi
VLA FISCALITÉ
VM. Monte Solberg

. 1500

VL'hon. Paul Martin
VPRIVILÈGE
VLa société Devco
VM. Peter Mancini
VL'hon. Ralph E. Goodale

. 1505

VLe Président
VSanté Canada
VLe Président
VM. Randy White

. 1510

VL'hon. Allan Rock
VLe Président
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLa justice
VMme Eleni Bakopanos
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLES CRÉDITS
VJour désigné—Les ressources d'eau douce
VMotion
VM. Clifford Lincoln

. 1515

. 1520

VM. Peter Stoffer
VM. André Harvey

. 1525

VMme Karen Kraft Sloan

. 1530

VM. Jean-Guy Chrétien

. 1535

VL'hon. Charles Caccia
VMme Bev Desjarlais

. 1540

. 1545

VM. Jean-Guy Chrétien
VM. Paul Szabo

. 1550

VMme Libby Davies

. 1555

VMme Jocelyne Girard-Bujold

. 1600

VM. Paul Szabo
VM. John McKay

. 1605

. 1610

. 1615

VM. Jean-Guy Chrétien
VL'hon. Christine Stewart

. 1620

. 1625

. 1630

VM. John Duncan
VM. Bill Blaikie
VM. Jean-Guy Chrétien
VMme Louise Hardy

. 1635

VM. André Harvey

. 1640

. 1645

VM. Peter Stoffer
VM. Jean-Guy Chrétien

. 1650

VM. Bryon Wilfert
VM. Scott Brison

. 1655

. 1700

VMme Wendy Lill

. 1705

VM. Bryon Wilfert

. 1710

. 1715

. 1740

VJour désigné—Les soins de santé
VMotion

. 1750

(Vote 312)

VRejet de l'amendement

(Vote 313)

VRejet de la motion
VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLES MISSIONS MILITAIRES AU-DELÀ DES FRONTIÈRES CANADIENNES
VMotion

. 1805

(Vote 314)

VRejet de la motion
VLA STRATÉGIE D'EFFICIENCE ÉNERGÉTIQUE
VMotion

. 1815

(Vote 315)

. 1820

VLA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE
VProjet de loi S-11. Deuxième lecture
VM. John Herron

. 1825

VMme Eleni Bakopanos

. 1830

. 1835

VM. Jason Kenney

. 1840

. 1845

VMme Christiane Gagnon

. 1850

. 1855

VMme Louise Hardy

. 1900

. 1905

VM. Mark Muise

. 1910

. 1915

VM. Wayne Easter

. 1920

VMOTION D'AJOURNEMENT
VLes transports
VM. Bill Casey
VM. Wayne Easter

. 1925

VLe réseau routier
VM. Greg Thompson

. 1930

VM. Wayne Easter

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 177


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 9 février 1999

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


AFFAIRES COURANTES

 

. 1000 +

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à dix pétitions.

*  *  *

 

. 1005 + -

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

 

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) demande à présenter le projet de loi C-470, Loi modifiant le Code canadien du travail, la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (disposition prohibée d'une convention collective.

—Monsieur le Président, il me fait plaisir, aujourd'hui, de prendre la parole à la Chambre, afin de déposer un projet de loi visant à interdire les clauses orphelin dans toute disposition d'une convention collective qui peuvent se trouver dans trois lois, soit le Code canadien du travail, la Loi sur les relations de travail au Parlement et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Il s'agit de faire éliminer toute disposition discriminatoire qui touche surtout les jeunes et qui donne aux jeunes des conditions de travail moins bonnes que celles de leurs aînés.

(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

[Traduction]

PÉTITIONS

LE PROJET DE LOI C-68

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter 104 pages de pétitions signées par 2 355 citoyens inquiets de neuf provinces, y compris le Québec.

Le gouvernement a finalement réussi à unir le Canada d'un océan à l'autre et les Canadiens sont unis dans leur opposition à l'enregistrement des armes à feu.

Mes électeurs m'ont demandé de tenir un compte des pétitions demandant l'abrogation de la loi C-68. Depuis le mois d'avril dernier, j'ai présenté 1 855 pages de pétitions représentant un total de 43 265 signatures. Les pétitionnaires demandent qu'il soit mis fin au programme fédéral d'enregistrement des armes à feu qui coûte des milliards de dollars, qui ne réduira en rien l'utilisation d'armes à feu à des fins criminelles, qui n'est pas un moyen efficace de lutter contre les crimes avec violence au Canada, qui compromet des milliers d'emplois et auquel s'opposent la majorité des policiers et les habitants de quatre provinces et de deux territoires représentant plus de 50 p. 100 de la population canadienne.

Il est intéressant de faire remarquer que nous recevons de plus en plus de pétitions en provenance du Québec.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter au nom de Canadiens venant notamment de ma circonscription, Mississauga-Sud, une pétition concernant les droits de la personne.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que les violations des droits de la personne sont monnaie courante dans un grand nombre de pays, et plus particulièrement en Indonésie. Ils font également remarquer que le Canada est reconnu dans le monde comme le grand défenseur des droits de la personne. Ils prient donc humblement le Parlement de continuer à dénoncer ces violations des droits de la personne et de chercher à faire en sorte que les responsables soient traduits en justice.

LES EXPORTATIONS D'EAU EN GRANDES QUANTITÉS

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole pour présenter, aux termes de l'article 36 du Règlement, des pétitions signées par des habitants de toute la Colombie-Britannique qui demandent au gouvernement de prendre des mesures pour assurer la souveraineté du Canada sur ses eaux et d'interdire l'exportation massive d'eau vers les États-Unis.

À venir jusqu'à présent, 29 215 habitants de la région de Kamloops ont signé cette pétition ou une pétition semblable.

LA LOI INSTITUANT UNE TAXE POUR LA PAIX

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer ce matin des pétitions qui traitent de deux sujets. La première a été signée par des habitants de l'Alberta et de la Colombie-Britannique qui soulignent que la Loi constitutionnelle de 1982 garantit la liberté de religion et de conscience dans la Charte canadienne des droits et libertés.

 

. 1010 + -

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'instituer une taxe pour la paix en adoptant un projet de loi d'initiative parlementaire qui reconnaît le droit des objecteurs de conscience de ne pas payer une partie des dépenses militaires et qui engage le gouvernement à appliquer cette portion des recettes fiscales, qui autrement serait réservée au budget militaire, à des fins pacifiques, notamment à la sensibilisation à la paix, à l'aide aux victimes de la guerre, à des causes humanitaires et écologiques et au logement.

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, la seconde pétition que je veux déposer a trait à l'AMI, l'Accord multilatéral sur l'investissement. Les pétitionnaires se disent très préoccupés des répercussions de l'AMI sur la souveraineté du Canada et demandent au Parlement de tenir compte des conséquences que pourrait entraîner la signature de cet accord. Ils demandent de tenir un débat à ce sujet à la Chambre des communes et de laisser les Canadiens prendre la décision à ce sujet dans le cadre d'un référendum national.

LE GROUPE DE TRAVAIL MACKAY

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux d'intervenir au nom de nombreux électeurs de Regina—Lumsden—Lake Centre et d'autres Canadiens de tout le pays. Cette pétition touche les recommandations du groupe de travail MacKay.

Cette pétition est signée par des gens de Beauval, Strasbourg, Regina, Lanigan, Earl Grey, Duval et un certain nombre d'autres collectivités. Les pétitionnaires sont très inquiets du rapport du groupe de travail MacKay qui recommande que les banques se lancent dans le secteur de l'assurance. Ces gens appuient les courtiers d'assurance indépendants du Canada. Ils ne veulent pas que les banques se substituent aux membres de l'Association des courtiers d'assurance indépendants. Ils demandent au Parlement de rejeter totalement les recommandations du groupe de travail MacKay touchant l'entrée des banques sur les marchés des assurances sur les biens et les risques divers. Ils exhortent fortement les parlementaires à ne pas céder aux pressions des banques dans ce dossier.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le 11 mars 1998, j'ai fait inscrire la question no 84 au Feuilleton. Elle demande combien de crimes avec violence ont fait l'objet d'une enquête par la GRC et combien d'entre eux ont comporté l'utilisation d'armes à feu, enregistrées ou non. Conformément à l'article 39 du Règlement, j'ai demandé une réponse écrite dans les 45 jours. Mes électeurs attendent depuis 335 jours.

Le commissaire de la GRC m'a écrit le 6 juillet 1998 au sujet de la réponse qu'il avait donnée à la question no 84. La GRC a donné sa réponse au gouvernement il y a 218 jours.

J'ai invoqué le Règlement à ce sujet le 28 octobre et, à nouveau, le 7 décembre. Le secrétaire parlementaire a répondu alors qu'on mettait la dernière touche à cette réponse.

La question no 84 est la question inscrite au Feuilleton qui attend une réponse depuis le plus longtemps. Pour la troisième fois, quand le gouvernement va-t-il donner à mes électeurs la réponse de la GRC à cette importante question?

M. Peter Adams: Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. Il a effectivement soulevé l'affaire auprès de moi auparavant et j'y ai jeté un coup d'oeil la dernière fois. La réponse était en cours d'élaboration. Je puis l'assurer que je vais m'enquérir aujourd'hui même de ce qu'il advient de la réponse à la question no 84.

Le vice-président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

M. Peter Adams: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis désolé de devoir vous interrompre, sachant bien que c'est une occasion importante, mais un député de l'opposition officielle a demandé le consentement unanime de la Chambre pour revenir aux rapports des comités.

Le vice-président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que nous revenions à la période de présentation des rapports émanant des comités?

Des voix: D'accord.

*  *  *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

COMPTES PUBLICS

M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le 21e rapport du Comité permanent des comptes publics au sujet du chapitre 10 du Rapport du vérificateur général présenté en septembre 1998, qui porte sur la Commission canadienne des droits de la personne et le comité du Tribunal des droits de la personne. Conformément à l'article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale à ce rapport.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1015 + -

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LES RESSOURCES EN EAU DOUCE

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) propose:  

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces, imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, et devrait présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Je suis très heureux de prendre la parole sur cette motion aujourd'hui, au nom de mon caucus. Je vais la lire encore une fois à la Chambre:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces, imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, et devrait présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Je partagerai mon temps de parole avec le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys.

Cette motion est très importante. De ce côté-ci de la Chambre, et surtout au NPD, nous avons bon espoir que, un jour, le Parlement déclarera, peut-être à l'unanimité, son appui à cette motion. Ce serait un moment historique. Pour la première fois, à ma connaissance, le Parlement aurait dit clairement qu'il doit agir rapidement en imposant un moratoire, qu'il doit faire vite et présenter un projet de loi à ce sujet en plus d'adopter une politique nationale plus générale sur l'eau, qu'on n'a jamais eue malgré les promesses des libéraux à cet égard.

Le Parti libéral, au gouvernement et dans l'opposition, s'est maintes fois engagé à présenter une politique nationale sur l'eau visant à interdire l'exportation de grandes quantités d'eau douce du Canada, mais il n'a encore rien fait. Nous avons posé la question à la Chambre, jeudi dernier, et nous n'avons eu aucun engagement, que ce soit à l'égard du projet de loi ou du moratoire.

Cette motion force le gouvernement—du moins nous l'espérons—à se pencher sur les besoins dans ce domaine et à se joindre à nous, et peut-être à nos collègues des autres partis à la Chambre des communes, pour faire une déclaration ferme, aujourd'hui 9 février 1999, au sujet des intentions du Canada concernant l'exportation d'eau douce et surtout au sujet de l'exportation de grandes quantités d'eau douce et des transferts entre bassins hydrographiques.

L'eau est une question sur laquelle les Canadiens s'entendent. L'eau est aussi canadienne que le hockey, la GRC et le castor. Nous voulons nous assurer que ce qui s'est produit avec le hockey et la GRC ne se produira pas au sujet de l'eau. Nous savons que le hockey a été exporté au Sud et que, à toutes fins pratiques, il s'est américanisé. Nous n'avons plus de prise sur cette exportation, et le hockey n'est plus ce qu'il était. Nous savons que la GRC a vendu ses droits à Disney.

Faisons de l'eau notre dernière croisade. En ce qui a trait à nos ressources d'eau douce au moins, veillons à ce que le Canada fasse preuve de force morale et de détermination. Ce qui s'est passé sur tellement d'autres aspects de la politique canadienne, notamment ceux des ressources naturelles et de la culture, ne doit pas se répéter ici. C'est l'objet de la motion dont nous sommes saisis.

Cette motion est très importante et j'exhorte le gouvernement à l'étudier sérieusement. En se penchant sur notre amendement, il aura peut-être aussi l'occasion de réfléchir à ses faiblesses dans de tels dossiers. Une faiblesse des libéraux, entre autres, est leur penchant pour les accords sur le commerce international et l'investissement, surtout ceux contre lesquels ils avaient fait campagne et qu'ils avaient promis de ne pas signer.

 

. 1020 + -

Supposons que le gouvernement se prononce en faveur de cette motion et que les libéraux se félicitent de leur détermination à interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce. Nous ne voudrions pas, dans trois, cinq ou dix ans, entendre de la part des libéraux le genre de propos qu'ils tiennent aujourd'hui sur les lois concernant les magazines et les brevets des médicaments. Bien sûr, ils reconnaissent avoir été opposés aux mesures législatives visant à prolonger les brevets des médicaments et favorables à celles visant à protéger l'industrie canadienne de l'édition de magazines, mais ils soutiennent maintenant le contraire sous prétexte que le Canada est partie à l'ALENA et membre de l'OMC. Les positions qu'ils défendaient hier ne tiennent plus aujourd'hui. Il ne faudrait pas accorder d'importance à leur opposition vigoureuse contre la prolongation des brevets ni à leur appui ferme en faveur de la culture canadienne. Ce sont des victimes innocentes. Ils sont à la merci de ces accords sur le commerce. Bien sûr, ce sont les libéraux eux-mêmes qui avaient signé un bon nombre de ces accords, notamment ceux de l'ALENA et de l'OMC.

Nous en avons assez de cette impuissance qu'ils s'infligent eux-mêmes. C'est pourquoi nous avons l'intention de proposer un amendement demandant au gouvernement d'aller au-delà de la motion initiale et de dire si, oui ou non, les libéraux auraient la force morale de refuser, au nom des Canadiens, d'être partie à un accord international qui nous oblige à exporter de l'eau douce en grandes quantités contre notre gré.

J'attends le débat avec impatience. J'ai hâte d'entendre les interventions de mes collègues sur cette question. J'ai hâte de savoir ce que les libéraux vont dire pour voir si c'est seulement une expression de bonne volonté et de bonnes intentions qui, une fois de plus, seront contrées par la mentalité défaitiste qui a assailli les gouvernements canadiens précédents qui auraient bien voulu faire quelque chose, mais qui en étaient empêchés par les accords commerciaux qu'ils avaient signés.

Par ailleurs, nous proposons cette motion car nous savons qu'un débat beaucoup plus large est nécessaire dans ce pays, pas uniquement sur les exportations d'eau, mais sur la gestion de cette ressource en général. Il ne s'agit pas uniquement de l'exportation de l'eau, même si la motion se limite à cet aspect, mais également de l'absence de politique nationale sur l'eau en général. Il s'agit de l'absence de détermination de la part de ce gouvernement, et des autres, à s'assurer que l'eau, même si elle n'est pas exportée, demeure dans le domaine public. Il s'agit d'empêcher que l'eau soit privatisée, comme dans tant d'autres pays, et traitée comme une denrée au même titre que le pétrole, le gaz, le blé et bien d'autres.

Aux yeux des Canadiens, l'eau est tout autre chose. Pour eux l'eau revêt une dimension, non seulement nationale, mais également écologique, qui ne devrait pas être menacée par le fait d'être considérée comme une denrée ordinaire.

À ceux qui disent, à raison au sens géopolitique, mais à tort quant au principe, que l'eau sera le pétrole du XXIe siècle, nous disons non. Nous ne voulons pas que l'eau soit traitée comme le pétrole. Nous ne voulons pas que l'eau soit traitée comme n'importe quelle autre ressource naturelle exploitée à des fins commerciales.

Nous espérons, par le biais de la motion que nous proposons aujourd'hui, joindre notre voix à celle des gens qui oeuvrent en dehors du Parlement, entre autres le Conseil des Canadiens qui, je crois, est réuni aujourd'hui en conférence et donnera plus tard une conférence de presse sur l'eau. Nous espérons susciter un débat national sur la conservation de l'eau, sur une politique nationale de l'eau et sur la gestion de l'eau, de même que sur la dimension environnementale du dossier de l'eau.

Cela dit, nous ne devrions pas nous livrer à l'exportation de grandes quantités d'eau douce du Canada. Nous devrions également admettre, en tant que pays, que nous ne pouvons pas nous engager à ne pas nous y livrer pour la noble raison que notre pays se soucie de sa ressource en eau, qu'il tient à la conserver rigoureusement et qu'il est donc en position de faire la leçon aux autres pays en matière de conservation de l'eau. Nous ne sommes malheureusement pas dans une telle position.

 

. 1025 + -

Nous ne pouvons pas être satisfaits de nous-mêmes à cet égard. Admettons que, non seulement nous ne voulons pas exporter d'eau, mais que nous devons également traiter l'eau que nous gardons à l'intérieur de nos frontières beaucoup mieux que nous ne le faisons actuellement et la conserver.

Il y a tous ces aspects à prendre en considération. Il y a la dimension environnementale. Il y a la dimension du secteur public et du secteur privé. Il y a les accords en matière de libre-échange et d'investissement qui pourraient nous empêcher d'interdire l'exportation d'eau en grandes quantités.

J'ai hâte d'entendre les autres députés de mon parti et ceux des autres partis aborder ces aspects aujourd'hui. J'espère qu'en fin de compte, nous pourrons nous dire que c'est aujourd'hui que nous sommes entrés dans une nouvelle ère quant à l'attitude du Parlement et du pays à l'égard de nos ressources en eau douce, et que le gouvernement a enfin décidé de passer à l'action dans ce dossier.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt les propos de mon collègue d'en face. Je partage son point de vue sur bien des choses, en tout cas sur la conservation, l'importance de l'eau dans notre environnement, et le fait que nous ne devons pas être trop satisfaits de nous-mêmes. Selon moi, nous sommes loin d'assurer une gestion satisfaisante de nos ressources en eau.

Nous possédons environ 25 p. 100 de l'eau douce du monde, mais notre population est infime. Je sais que mon collègue est compatissant et qu'il se soucie de tout le monde, et aussi de la place du Canada dans le monde. Je voudrais qu'il me dise comment tout cela finira selon lui. Allons-nous dresser des remparts? Allons-nous installer des mitrailleuses? Allons-nous arrêter les rivières de couler vers le sud? Qu'allons-nous faire lorsque d'autres pays auront besoin d'eau douce, ce qui arrivera dans quelques années ou un peu plus tard, tandis que nous avons toutes les réserves?

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, le député soulève une excellente question. C'est précisément pour cette raison que le gouvernement devrait légiférer et que nous devrions nous donner une politique nationale sur les ressources en eau. Si le gouvernement présentait des propositions à la Chambre des communes, s'il faisait quelque chose, nous pourrions discuter de ces questions.

Selon moi, il ne faut pas présumer que nous serions prêts, en toute circonstance, à céder au type d'exigence morale que le député évoque. Nous devons élaborer un régime qui nous permettrait de faire des exceptions lorsque des gens ont besoin de notre eau, au lieu de simplement souhaiter l'obtenir. Mais nous sommes loin d'en être là. Le problème qui se pose en ce moment, c'est que nos ressources en eau sont vulnérables à cause des accords commerciaux et de l'absence de politique nationale sur la question.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, je ferai de brèves observations avant de poser une question à mon collègue, le député de Winnipeg Transcona.

Je félicite le député d'avoir proposé cette motion, ainsi que la députée du Yukon qui l'appuie et le caucus néo-démocrate qui tente de nouveau d'attirer l'attention de la population sur cette question et de solliciter l'appui et le consentement de la Chambre des communes pour l'initiative qu'il propose.

Les Canadiens ne sont pas sans savoir que la vie sur notre planète tient à trois éléments: la terre, l'air pur et l'eau.

Je tiens à ce que les députés et les gens qui suivent le débat comprennent bien qu'il existe des accords internationaux régissant les rivières et les autres cours d'eau qui s'écoulent vers le sud. Comme nous avons signé ces accords, nous devons permettre à un certain volume d'eau de s'écouler vers ces bassins et le statu quo sera préservé. Il n'est pas question d'ériger des barrages, même si cette motion est adoptée. L'eau continuera de couler librement.

Ce qui nous inquiète, c'est le sort de nos grandes sources d'approvisionnement en eau. Je conviens avec le député de Winnipeg Transcona que nous devrions gérer nos ressources. Nous devrions les préserver. Nous devrions recycler l'eau. Nous devrions la réutiliser comme le font bien d'autres pays. Nous n'avons pas assez mis l'accent sur le recyclage et la réutilisation.

La question que je veux poser est très importante aux yeux des Canadiens, car elle a trait non seulement à nos cours d'eau, mais à tous les autres aspects de nos accords commerciaux. Dans tous les accords commerciaux qu'ils ont conclus, que ce soit l'ALENA ou les accords conclus dans le cadre de l'OMC, les États-Unis d'Amérique ont fait inscrire une disposition relative à l'intérêt public, selon laquelle l'administration américaine peut prendre des décisions passant outre aux accords commerciaux si elle juge qu'il est dans l'intérêt des États-Unis de le faire.

 

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Le député peut-il nous dire comment la modification que nous proposons sera accueillie et s'il faudra, oui ou non, aller plus loin et faire inscrire dans nos accords commerciaux une disposition relative à l'intérêt public du Canada comme les États-Unis l'ont fait?

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, nous ne croyons pas que le Canada devrait adhérer à quelque accord international qui l'obligerait à agir contre sa volonté, notamment lorsqu'il s'agit de ses ressources en eau douce. Je pense que c'est bien clair.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, je tiens moi aussi à féliciter le député de Winnipeg—Transcona d'avoir présenté cette motion aujourd'hui.

Nous dirons peut-être un jour que ce moment a été historique. Pour la première fois, le Parlement du Canada affirmera qu'il considère que l'eau ne se compare à aucune autre ressource naturelle au Canada et qu'il entend lui accorder une priorité toute particulière qu'il n'a pas accordée aux autres ressources naturelles.

Il est juste de dire qu'une des principales sources de conflit au début du XXIe siècle sera l'accès à l'eau douce. Nous comprenons que le Canada a un rôle relativement exceptionnel à jouer à cet égard, car il renferme le plus vaste réservoir d'eau douce du monde, soit 9 p. 100 du volume mondial. Sur les près de 200 pays qui existent actuellement, seulement trois, dont le Canada, auront à l'avenir un approvisionnement suffisant en eau potable.

L'enjeu est crucial pour nous. Comme l'a signalé mon collègue, le député de Winnipeg—Transcona, il est absolument impérieux de mettre en place au plus tôt une politique réfléchie et stratégique en ce qui concerne l'eau douce. Nous demandons aujourd'hui au Parlement fédéral d'envoyer un message très clair aux personnes qui voudraient exporter de grandes quantités d'eau douce vers d'autres pays comme si c'était un produit commercial. Nous demandons un moratoire immédiat sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et des mesures législatives immédiates pour protéger les ressources en eau douce du Canada et affirmer notre droit souverain de préserver ces ressources critiques pour les générations futures.

Nous savons jusqu'où les États sont prêts à aller pour s'assurer l'accès au pétrole. Des guerres ont été faites là-dessus dans diverses régions. Reconnaissons-le: l'eau est beaucoup plus précieuse que le pétrole et cela, même de nos jours où nous traitons cette ressource de façon plutôt cavalière. Aujourd'hui, un litre d'eau coûte plus cher qu'un litre de pétrole. Et pourtant, le Canada est probablement au nombre des pays où l'on gaspille cette ressource plus que partout ailleurs dans le monde sauf aux États-Unis. Les Américains gaspillent plus l'eau que nous et nous venons donc au deuxième rang.

Comme nous avons beaucoup de ressources d'eau douce, certains demandent pourquoi nous n'en vendrions pas. Après tout, nous vendons toutes les autres ressources. Des intérêts étrangers ont accès à toutes les richesses naturelles du Canada sauf une. Comme mon collègue l'a signalé, pourquoi ne prenons-nous pas position en tant que pays et ne disons-nous pas que c'en est assez, que l'eau est différente du pétrole, du charbon, de la morue, du bois d'oeuvre et du blé, qu'elle est la ressource de vie elle-même. On peut vivre sans manger pendant sept ou huit semaines, mais on ne peut pas se passer d'eau plus que quelques jours. C'est la vie elle-même. Il faut dire clairement aujourd'hui que le Canada n'a pas de ressources excédentaires d'eau douce à exporter. Cela n'existe pas les surplus d'eau dans un écosystème. La vie le long d'un cours d'eau et de son bassin hydrographique est le produit tant des crues que des décrues. Si on les modifie, on modifie le cours d'eau.

Le détournement des eaux d'une rivière à saumon aura pour effet d'empêcher l'inondation de vieilles frayères le long de la rivière. En prélevant de l'eau à l'embouchure d'un cours d'eau, on en enlèvera à l'estuaire, l'un des secteurs biologiques produisant le plus d'éléments nutritifs vitaux sur terre. Il est clair que l'eau n'est pas une ressource comme les autres et qu'elle requiert une protection et une stratégie spéciales pour son utilisation dans l'avenir.

Mon collègue a fait valoir qu'étant donné que notre pays possède 9 p. 100 des réserves d'eau douce du monde, il est essentiel que nous adoptions dès que possible une politique en matière d'eau.

 

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Il n'y a pas un seul Canadien le moindrement sensé qui pense que nous ne devrions pas faire cela et ne pas le faire rapidement.

Ne perdons pas de vue le fait qu'aujourd'hui pourrait être le début du mouvement vers l'adoption d'une stratégie en matière d'eau pour le XXIe siècle dans notre pays. L'adoption d'une motion à la Chambre ne suffira toutefois pas. La volonté doit être présente également. En 1989, la Chambre a adopté à l'unanimité une motion en vue de l'éradication de la pauvreté d'ici l'an 2000. Hélas, les choses ont empiré depuis. Nous avons beaucoup de chemin à parcourir avant d'atteindre cet objectif.

Je le répète, il est juste de dire que nous voulons faire avancer cette cause. Nous voulons faire en sorte que l'eau de notre pays soit préservée pour les générations futures. Soyons réalistes, si une localité américaine commence à dépendre de l'eau du Canada, on peut imaginer ce qui se produira si, dans l'avenir, on décide de cesser de l'approvisionner. On peut remplacer le bois par des produits en provenance d'un autre pays ou par un autre matériau de construction. Il n'y a toutefois aucun substitut à l'eau. L'eau est une ressource stratégique. C'est une ressource indispensable à la vie.

Par rapport à l'eau, le Canada n'a pas très bonne réputation. Au Canada, il y a plus de projets de détournement de cours d'eau que n'importe où ailleurs dans le monde. Nous avons 600 barrages et 60 grands projets de détournement qui transfèrent l'eau entre différents bassins. La plupart s'inscrivent dans de vastes projets hydroélectriques. Nous nous sommes montrés plus disposés à modifier l'écosystème de cours d'eau et de lacs à des fins commerciales. À cet égard, le bilan d'aucun autre pays ne se rapproche du nôtre. Comme l'a dit mon collègue, le député de Winnipeg—Transcona, lorsqu'il s'agit de s'occuper des eaux douces de notre pays et d'assurer leur préservation et leur conservation, le Canada affiche un bilan qui est loin d'être reluisant. C'est peut-être aujourd'hui le début d'une nouvelle ère et d'une nouvelle tendance pour ce qui est de préserver et de conserver l'eau du Canada pour l'avenir.

Un certain nombre de personnes ont parlé des nombreux accords internationaux que nous avons signés et qui rendent difficile l'adoption de dispositions législatives qui protégeraient les Canadiens, leur environnement, leur ressources aquatiques et leur santé. Je veux revenir sur la question des MMT dont nous avons été saisis récemment; malgré les efforts des représentants élus désireux de préserver et de protéger la santé des Canadiens en adoptant un projet de loi interdisant les MMT, le gouvernement a fait marche arrière à cause des pressions qu'il sentait de la part des États-Unis, du fait des accords que nous avons conclus.

Je voudrais proposer un amendement à la motion étudiée aujourd'hui, en cette journée de l'opposition. Je propose:  

    Qu'on modifie la motion en ajoutant entre les mots «hydrographiques» et «afin», ce sui suit: «, et ne devrait être partie à aucun accord international qui nous oblige à exporter de l'eau douce contre notre volonté».

Le vice-président: Le débat porte sur l'amendement.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser à mon collègue.

Il a parlé des accords commerciaux et a proposé un amendement à la motion qui porte sur les accords internationaux, dont les accords commerciaux font partie. Il saura que le gouvernement a souvent dit que l'ALENA ne s'applique pas aux exportations d'eau. Pourtant, si c'est le cas, et si c'est là la position officielle adoptée par les trois gouvernements en cause, pourquoi est-ce si difficile d'amener le gouvernement canadien à faire des démarches auprès de ces autres gouvernements en vue de la signature d'un protocole d'entente qui préciserait de façon non ambiguë que l'ALENA ne s'applique pas aux exportations d'eau et qui aurait la même valeur juridique que l'ALENA, afin de tirer la situation au clair une fois pour toutes?

 

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Le fait que le gouvernement canadien ne semble pas disposé à demander la signature d'un tel protocole d'entente international nous amène à penser que l'ALENA s'applique d'une façon ou d'une autre aux exportations d'eau douce en grandes quantités. Autrement, pourquoi le gouvernement hésiterait-il tant à demander la signature d'un protocole d'entente non ambigu affirmant le contraire?

Je me demande si mon collègue voudrait faire quelques remarques au sujet du refus des libéraux de demander la signature d'un tel protocole d'entente.

M. Nelson Riis: Monsieur le Président, il serait juste de dire que beaucoup de juristes ont soutenu que certains produits ont été exclus d'accords comme l'ALE et l'ALENA. La bière, les billes de bois et la culture ont été nommément exclues, ce qui laisse supposer que tout le reste est inclus. L'eau embouteillée a également été mentionnée.

Il est clair que, une fois l'eau mise dans un contenant pour la vente, elle devient un produit. Que le contenant soit un navire, un canal, un pipeline ou peu importe, les Canadiens craignent que le texte actuel d'accords internationaux comme l'ALENA ne protège pas notre eau. Je suis d'accord avec le député lorsqu'il dit que si tous les pays le veulent, nous devons protéger notre eau.

Reconnaissons-le, le nord du Mexique, particulièrement dans la région des maquiladoras, qui est une immense zone industrielle née sous l'impulsion de l'ALENA, et le sud-ouest américain, que l'on appelle la ceinture de soleil et où on retrouve de grandes industries et de grosses populations liées au secteur agricole, manquent d'eau. Il est clair qu'ils sont en train d'épuiser leurs réserves d'eau douce. Les puits et les rivières s'assèchent et chaque once d'eau de surface est utilisée ou se retrouve au centre de batailles juridiques.

À mesure que ces populations augmentent, elles se tournent tout naturellement vers le Canada, où elles espèrent venir chercher leur eau, le moment venu. Il est capital que nous ayons en mains le plus grand nombre d'atouts possible lorsque les négociations commenceront.

Certains soutiendront que nous pouvons adopter des lois fédérales et provinciales interdisant les exportations massives d'eau, mais les accords commerciaux entre trois États souverains l'emportent sur les lois nationales provinciales ou locales.

Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour que les futures générations de Canadiens disposent d'eau en quantité suffisante et c'est pourquoi la motion d'aujourd'hui a été soumise à la Chambre des communes.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, un de nos vis-à-vis s'est dit préoccupé par les exportations d'eau et le partage de cette ressource avec d'autres parties du monde. Je me demande si le député peut préciser en quoi la motion se rapporte à l'exportation de grandes quantités d'eau.

M. Nelson Riis: Monsieur le Président, je suis d'accord avec mon collègue. Nous reconnaissons qu'il existe présentement à petite échelle des ententes sur le partage de l'eau entre le Canada et les États-Unis. On n'a qu'à penser à Coutts, en Alberta, et à Sweet Grass, au Montana, ainsi qu'à d'autres endroits dans le pays.

Toutefois, il faut aussi reconnaître que ce sont les États-Unis qui gaspillent le plus d'eau que tout autre pays au monde. On cultive aux États-Unis des terres qui ne devraient pas l'être. Les piscines sont pleines à ras bord d'un bout à l'autre de Los Angeles. Les pelouses sont verdoyantes dans tous le sud de la Californie. On trouve un lave-auto à tous les trois pâtés de maisons.

Le jour n'est pas tellement lointain où les États-Unis manqueront d'eau parce qu'ils en ont tant abusé. Ce pays pollue ses ressources hydriques et les utilise à mauvais escient. Nous tenons simplement à signifier clairement que nous ne constitueront pas une solution de rechange facile.

M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat de ce matin et j'approuve certes cette motion.

Certains des échanges qui se sont déroulés jusqu'à maintenant me portent à penser qu'une des raisons pour lesquelles les gouvernements antérieurs n'ont pas pris au sérieux le problème de l'eau tient à la méconnaissance du problème ou à la méconnaissance personnelle de l'état des ressources hydriques au pays.

 

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À titre d'exemple, mon collègue de ce côté-ci de la Chambre a laissé entendre que le Canada possède 25 p. 100 des réserves mondiales d'eau douce. Il a aussi été mentionné qu'elles sont de 9 p. 100 et, selon mes notes, elles atteignent les 20 p. 100. Ces variations sont l'indice d'un manque de clarté du message.

Il est manifeste que l'eau constitue une ressource renouvelable. Grâce au cycle de l'eau, nos réserves d'eau se renouvellent continuellement mais, comme on dit, on ne se rend pas compte de l'importance de l'eau tant que le puits ne s'est pas tari. Cette année, dans la province d'Ontario, les puits se sont taris. Certains d'entre eux ne sont toujours pas utilisables. Les agriculteurs de ma circonscription doivent acheter de l'eau pour leurs bestiaux ou conduire ces derniers dans d'autres fermes où les puits dispensent de l'eau.

L'Ontario a enregistré cette année la pire sécheresse de l'histoire des relevés météorologiques dans cette province. Cela nous montre l'importance d'être très sensible à la façon dont nous gérons les eaux et à l'importance que nous accordons à cette ressource.

À ce jour, il a été très difficile de convaincre les municipalités et les ingénieurs qui constituent les réserves d'eau domestique de conserver cette ressource. On s'est toujours contenté de trouver de l'eau en grande quantité sans se préoccuper de sa conservation. Pourtant, nous disposons de nombreuses techniques qui pourraient nous aider non seulement à conserver l'eau mais à sensibiliser les Canadiens à la nécessité de protéger cette ressource.

Les préoccupations exprimées par les députés sont tout à fait fondées. L'eau constitue une priorité nationale et mondiale. Les Canadiens sont convaincus que nous ne devons pas exporter de grandes quantités d'eau du Canada. Il existe déjà des pénuries dans le monde à l'heure actuelle. L'emplacement des réserves d'eau revêt une importance primordiale. Il est possible qu'on fasse appel aux ressources en eau du Canada dans l'avenir.

Des raisons environnementales, plus que toutes autres, nous dictent de protéger nos bassins versants et la santé des écosystèmes. Le gouvernement a déjà pris des mesures et continue d'agir, au nom de tous les Canadiens, pour préserver ce qui constitue l'une de nos plus précieuses ressources.

Une voix: Où est le projet de loi?

M. Julian Reed: Soyez patients. Non seulement le gouvernement fédéral a-t-il pour politique, depuis 1987, de s'opposer aux déplacements de grandes quantités d'eau par bateaux-citernes, détournements ou autres formes de transferts entre bassins, mais nos partenaires provinciaux se sont également dotés ou élaborent en ce moment des politiques ou des mesures législatives pour protéger les eaux naturelles contre la commercialisation au-delà de leur utilisation actuelle. Les Canadiens peuvent être certains que le Canada ne s'apprête aucunement à exporter de grandes quantités d'eau.

Il y a les compétences fédérales et les compétences provinciales en matière de préservation de l'eau; je vais essayer d'expliquer ce qui les distingue. Le gouvernement fédéral assume une responsabilité particulière à l'égard des eaux limitrophes et transfrontalières, le long de la frontière canado-américaine. Cette responsabilité, notre gouvernement comme ceux qui l'ont précédé, en remontant jusqu'à la signature du Traité des eaux limitrophes en 1909, l'ont prise très au sérieux; notre gouvernement a même annoncé qu'il avait l'intention de demander, comme le proposait notre ami, aux États-Unis s'ils seraient d'accord pour faire un renvoi à la Commission mixte internationale.

Nous menons des consultations auprès des provinces pour nous assurer que ce renvoi à la CMI donnera des résultats qui seront profitables à tous les gouvernements. Nous avons bon espoir que la commission formulera des recommandations judicieuses, comme elle l'a fait en 1977, lors du renvoi sur le projet de dérivation Garrison, en 1985 lors du renvoi sur les pratiques de dérivation et d'exploitation non rationnelle dans le réseau des Grands lacs, et en 1997 lors du renvoi sur le débordement de la rivière Rouge. Nous serons bientôt en mesure d'annoncer le mandat de la commission.

 

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Des préoccupations légitimes ont été exprimées au sujet des obligations commerciales. Il y a une poignée de détracteurs qui soutiennent que, en signant l'Accord de libre-échange nord-américain, le Canada a, du coup, cédé aux multinationales le contrôle qu'il exerçait sur nos ressources en eau. Le député a demandé que le gouvernement intervienne sans délai. J'affirme catégoriquement, et publiquement, que la gestion des ressources canadiennes en eau n'est ni soumise aux caprices de multinationales ni réglée par l'ALENA. L'eau est un bien public.

Rien dans l'ALENA n'empêche le Canada de prendre des dispositions en vue d'interdire la commercialisation de nos ressources en eau. Ces principes ne datent pas d'hier; ils ont été établis dans l'Accord général de 1947 sur les tarifs douaniers et le commerce. Je signale au député de l'opposition que la déclaration conjointe, faite en 1993 par les gouvernements du Canada, du Mexique et des États-Unis après la signature de l'ALENA, disait ceci:

    À moins que l'eau sous quelque forme que ce soit ne soit commercialisée et ne soit devenue un bien ou un produit, celle-ci n'est pas un bien ou un produit.

Cela peut sembler une évidence, mais celle-ci mène à la seconde partie de la phrase, qui dit que l'eau qui n'est pas un bien ou un produit «n'est pas visée par quelque entente commerciale que ce soit, y compris l'Accord de libre-échange nord-américain». La même déclaration affirme ensuite notre souveraineté sur les eaux en disant que:

    Rien dans l'ALENA n'oblige l'une des parties à l'ALENA à exploiter son eau à des fins commerciales, ou à commencer à exporter son eau sous quelque forme que ce soit.

Rien ne nous oblige à exporter de l'eau, particulièrement en grosses quantités. Ceci nous amène à la dernière précision fournie dans la déclaration de 1993:

    L'eau qui se trouve dans son état naturel, c'est-à-dire dans les lacs, les rivières, les réservoirs, les aquifères, les plans d'eau et autres endroits semblables, n'est pas un bien ou un produit, n'est pas vendue et, par conséquent, n'est pas et n'a jamais été assujettie aux dispositions de quelque entente commerciale que ce soit.

Le Canada ne prend pas de l'eau qui se trouve dans son état naturel pour l'emballer en grosses quantités aux fins de vente. Nous n'approuvons pas la commercialisation de l'eau en grosses quantités, quelle que soit la raison.

Nous avons choisi de mettre de l'eau en petites quantités dans des bouteilles et de la vendre. Toutefois, l'impact global de telles expéditions est très minime comparé à l'effet net d'exportations à grande échelle. Compte tenu de ce qui précède, nous allons bientôt annoncer des mesures visant à empêcher que l'eau ne soit retirée de son état naturel pour être transformée en un bien. J'espère que tous les députés appuieront ces initiatives.

Les provinces ont aussi une responsabilité. Nous avons consulté les provinces, particulièrement au cours de la dernière moitié de l'année dernière. D'après la Constitution, ce sont les provinces qui sont responsables de la gestion de l'eau sur leurs territoires respectifs. Ce sont les autorités provinciales qui peuvent décider, pour une raison donnée, d'accorder des permis d'extraction de l'eau. Or, nos partenaires provinciaux s'opposent aux échanges entre bassins, d'où la pertinence de la politique fédérale de 1987. Les provinces ont convenu que la bonne gestion des ressources en eau est d'abord et avant tout un enjeu environnemental.

Ces consultations avec les provinces nous auront par-dessus tout permis de constater l'urgence, pour les gouvernements, d'adopter une approche collective en matière de protection de l'eau avant que de trop nombreuses erreurs ne soient commises.

Nous avons été impressionnés par le degré de consensus qui s'est fait avec les provinces autour de ces questions. Nos mesures s'appuieront sur des principes généraux et bien établis, refléteront les préoccupations exprimées par toutes les provinces et tous les territoires et auront pour objet non seulement les exportations mais également la gestion globale de nos ressources en eau.

 

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Une telle approche est prudente et justifiée. Pour ce faire, nous devons collaborer non seulement avec les provinces et les territoires, mais également avec notre allié le plus proche sur la scène internationale, les États-Unis, avec lequel nous partageons les Grands Lacs, la plus vaste ressource en eau douce au monde.

Le vice-président: Je suis désolé de devoir interrompre le député mais son temps de parole est écoulé. Il pourra résumer ses propos à la période des questions et observations.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suppose que le député a, sans le vouloir, évoqué les raisons de notre inquiétude au sujet de l'ALENA.

Je ne saurais dire si la déclaration de 1993 est en quelque sorte la combinaison d'une tautologie et d'une situation sans issue. Quoi qu'il en soit, il n'est pas très rassurant d'entendre dire que l'eau ne sera pas traitée comme un bien sauf si on peut l'exploiter à des fins commerciales.

C'est précisément ce qui nous inquiète. Nous ne voulons pas qu'elle soit exploitée à des fins commerciales. Si cela devait se produire et si l'eau devait être visée par l'ALENA, il serait impossible de revenir en arrière. Commencer à exploiter l'eau en grosses quantités à des fins commerciales, c'est commettre un acte irréversible. Dès lors, les autres parties à l'ALENA pourraient arguer que l'eau est un bien et doit donc être traitée comme toutes les autres marchandises.

Ce que nous reprochons à l'ALENA, ce n'est pas que l'eau n'y soit pas traitée comme un bien, mais que si elle devait l'être, elle serait visée par l'accord.

Nous voulons une disposition stipulant que l'eau, qu'il s'agisse de l'eau naturelle ou de l'eau exploitable à des fins commerciales, est exemptée. Nous ne voulons pas que l'eau soit exploitée à des fins commerciales mais nous pensons par ailleurs qu'un accord qui dit que l'eau serait traitée comme un bien si elle venait à l'être n'est pas bon. Le député ne semble pas comprendre ce que nous reprochons à l'ALENA.

M. Julian Reed: Monsieur le Président, il semble bien que l'on se soit préoccupé de toute cette question en 1993 et que l'on ait tenté de déterminer à quel moment l'eau peut être considérée comme un bien. Je ne vois pas la nécessité d'apporter des modifications à cet effet à l'ALENA puisqu'il n'y a rien dans cet accord qui oblige l'exportation d'eau.

C'est aux Canadiens de décider si l'eau potable en bouteille constitue un bien ou non. Il n'y a rien dans l'ALENA qui exige qu'on apporte des modifications. Je ne sais comment m'exprimer plus clairement. Il n'y a rien dans l'entente à ce sujet.

Il est bien certain que nous nous préoccupons de l'avenir de l'eau. Le gouvernement prend des mesures à cet effet. Je suis persuadé que le député sera d'accord avec la déclaration qui sera faite, très bientôt nous l'espérons. Toutefois, l'eau n'est pas visée par l'ALENA.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, dans son exposé, le député a parlé de consultations avec les provinces. Il a souligné qu'il y avait un consensus entre les provinces et que toutes s'opposent aux échanges entre bassins. Il n'a pas précisé cependant si elles s'opposent aussi à l'exportation de l'eau en vrac.

Le député pourrait-il nous donner des précisions sur la position des provinces à ce sujet?

M. Julian Reed: Monsieur le Président, je ne suis pas certain de pouvoir m'exprimer plus clairement. Les provinces sont toujours opposées aux échanges entre bassins. Nous nous sommes entendues avec elles et elles partagent nos préoccupations à ce sujet. Je ne sais pas ce que je pourrais dire d'autre à ce sujet.

 

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M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais demander au député ce qu'il pense des affirmations contenues dans le livre rouge de 1993 dans lequel le Parti libéral a déclaré qu'avant de signer l'ALENA, il profiterait de l'occasion pour corriger les lacunes existant dans l'Accord de libre-échange initial.

Un certain nombre de libéraux qui siègent parmi nous ont déclaré publiquement que l'une des lacunes résidait dans le fait que le Canada n'avait obtenu aucune protection de ses eaux et que cela ferait partie de toute entente.

Pourquoi le gouvernement libéral n'a-t-il pas profité de l'occasion pour corriger ces lacunes avant de signer l'accord?

M. Julian Reed: Monsieur le Président, je voudrais apporter deux ou trois précisions si vous le permettez. Mon collègue m'a interrogé sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et cela relève de la compétence du gouvernement fédéral. J'aurais dû le savoir dès le départ.

Le fait est, que dans l'ALENA, il n'y a aucune disposition à cet égard. Oui, il y avait des craintes tout à fait légitimes à ce sujet, car nous ne voulons pas exporter de grandes quantités d'eau douce. Cependant, après avoir examiné l'ALENA, on s'aperçoit qu'il n'y a aucune disposition en ce sens.

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais remercier la Chambre de me donner l'occasion de parler de cette motion.

La motion a été amendée. En partie, le libellé original se lisait ainsi:  

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces, imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques...

L'amendement dit ceci:

      et ne devrait être partie à aucun accord international qui nous oblige à exporter de l'eau douce contre notre volonté...

On revient ensuite au libellé initial de la motion:

      ...afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Évidemment, notre eau est une question hautement prioritaire pour nous tous. La gestion de l'eau a un effet direct sur notre secteur agricole, notre développement économique régional, notre infrastructure rurale, notre développement durable, notre environnement et peut-être aussi sur notre économie.

Le Parti réformiste est d'accord sur le principe de base de cette motion. C'est la souveraineté qui est en jeu, et nous sommes d'accord pour dire que la Chambre doit prendre des mesures pour protéger et contrôler notre eau. Je crois que tous les partis à la Chambre sont d'accord là-dessus. Toutefois, selon moi, c'est la façon de traiter le problème qui est en jeu, dans ce débat.

La motion ne propose qu'une solution temporaire qui ne réglerait pas le problème que connaît maintenant le Canada à cause de l'attitude du premier ministre. Un moratoire temporaire sur l'exportation de grandes quantité d'eau donnerait un peu de temps au gouvernement pour négocier une solution permanente. Ce qu'il faut, c'est une modification de l'ALENA précisant que l'entente ne s'applique pas à l'eau.

Il est intéressant de noter que, avant que les libéraux prennent le pouvoir, à l'époque où le gouvernement Mulroney négociait l'ALENA, les libéraux s'opposaient à ce projet et avaient exprimé leurs préoccupations au sujet de la protection de l'eau.

Au cours de la campagne électorale de 1993, le premier ministre avait promis qu'il renégocierait l'ALENA pour qu'elle ne puisse s'appliquer à l'exportation de grandes quantités d'eau.

Le 19 novembre, le premier ministre avait insisté en ces termes: «L'eau et l'Accord de libre-échange nord-américain ne se mélangent pas. L'eau demeurera sous l'autorité du gouvernement du Canada, je puis le garantir.»

Le premier ministre a dit également: «Je vais veiller à ce qu'il en soit ainsi. C'est l'une des choses dont j'ai l'intention de discuter avec le président Clinton. Je veux que le Canada conserve la compétence de la gestion de ses propres eaux. Notre eau n'est pas à vendre et, si nous voulons la vendre, c'est nous qui en déciderons.»

 

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De toute évidence, les libéraux n'ont pas écarté la possibilité de vendre notre eau.

Notre premier ministre a dit qu'il avait un message pour le président Bill Clinton: «Je n'envisage aucunement que l'ALENA puisse donner aux États-Unis un accès illimité à l'eau du Canada. L'eau et l'Accord de libre-échange nord-américain ne vont pas ensemble.»

Ces propos font de belles citations, mais elle ne reflètent pas la réalité. Voilà pourquoi nous étudions cette motion à la Chambre. Le Canada n'a aucun contrôle sur ses ressources en eau. C'est limpide.

Le gouvernement Mulroney a soutenu dur comme fer que l'ALENA ne portait que sur les exportations d'eau en contenants et non sur des transferts ou des dérivations considérables, ce qui n'a jamais été abordé dans les négociations sur l'ALENA, a prétendu le gouvernement.

Il y a eu beaucoup de désinformation et de malentendus sur la question. Depuis que le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir, il nie que, lorsque le premier ministre a signé l'ALENA sans le renégocier pour y soustraire l'eau de manière expresse, le Canada ait perdu le contrôle sur ces ressources.

Pas plus que les conservateurs en 1988 les libéraux n'ont réussi à protéger notre eau en 1993.

Lorsque j'ai soulevé la question à la Chambre au cours de la dernière législature par une motion exhortant le gouvernement à prendre des mesures pour protéger la souveraineté du Canada sur ses ressources en eau, le gouvernement a refusé d'admettre que notre souveraineté avait été compromise.

Voici quelques faits. Notre porte-parole en commerce international prendra la parole un peu plus tard pour préciser certains des enjeux en ce qui concerne l'ALENA et l'Accord de libre-échange.

La Loi de mise en oeuvre de l'ALENA dit que rien ne s'applique à l'eau, sauf l'eau embouteillée, et l'eau n'est pas exclue de l'accord lui-même.

L'article 309 de l'ALENA interdit au Canada d'imposer des restrictions à la vente ou à l'exportation de marchandises à destination soit des États-Unis, soit du Mexique.

La seule exception autorisée par l'ALENA touche les billes de bois et le poisson non transformé. C'est à mon avis la solution au problème. Actuellement les billes de bois et le poisson non transformé en provenance du Canada ne sont pas assujettis à l'ALENA. Ils en sont exemptés. Si nous ajoutons l'eau à cette liste, nous aurons le contrôle que nous cherchons. C'est la réponse.

Par ailleurs, il est fort probable que si le gouvernement proposait une mesure législative interdisant l'exportation d'eau en grandes quantités comme le demande le NPD dans sa motion, cette mesure pourrait être contestée aux termes de l'ALENA. Elle pourrait être jugée par un groupe spécial de règlement des différends comme étant une entrave inacceptable aux forces du marché.

C'est un point délicat et c'est le problème que je vois dans la motion des néo-démocrates. Ils y disent qu'en interdisant l'exportation de grandes quantités d'eau douce, on réglera le problème. Mais le problème n'est pas là. Le problème c'est celui de la souveraineté, de la possession et du contrôle que les libéraux n'ont pas réglé en ce qui concerne l'eau. Réglons ce problème et on n'aura pas besoin de s'inquiéter du reste. Le contrôle provincial de la ressource permettra ensuite de régler l'autre question.

Si le Canada adoptait une loi interdisant l'exportation d'eau, il en ferait une denrée, et les dispositions de l'ALENA sur le traitement national entreraient alors en jeu. Les spécialistes prétendent que le Canada s'exposerait à des contestations en vertu des règles commerciales internationales si nous définissions explicitement l'eau comme une marchandise en l'incluant dans une mesure législative interdisant son exportation.

La ministre de l'Environnement a dit qu'elle voulait interdire les exportations d'eau par le truchement d'une mesure législative. Elle a toutefois mentionné qu'elle ne savait pas comment le gouvernement allait s'y prendre, simplement parce que, si on l'incluait dans une mesure législative, l'eau deviendrait alors une marchandise.

Il est souvent question de la déclaration trilatérale du premier ministre, du président Bush et du représentant du Mexique, selon laquelle nous aurions conclu un accord parallèle protégeant notre eau. Ce n'est pas le cas. L'accord parallèle prévoit simplement notre droit de ne pas exporter de l'eau en grandes quantités. Cependant, dès que nous le ferons, nous ne pourrons plus cesser ces exportations. Il n'y a rien de plus dans cet accord parallèle. Cela n'a rien à voir avec la solution au problème.

Pour que les Canadiens soient maîtres de leur eau, il n'y a qu'un seul moyen; le gouvernement fédéral doit négocier un accord parallèle pour exclure expressément de l'ALENA les exportations de grandes quantités d'eau.

 

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Le temps presse. Les Américains font face à des pénuries d'eau. Il y a eu au moins 13 propositions visant à détourner de l'eau des Grands Lacs vers les États-Unis. Il est évident que la situation est très instable; nous avons lu dans les journaux que des entreprises, telles que Sun Belt de la Californie, Nova Group de l'Ontario et McCurdy Group de Terre-Neuve, travaillent d'arrache-pied pour obtenir des permis. C'est le gouvernement qui doit régler le problème et le problème c'est que nous devons être maîtres de notre eau.

Cette motion soulève aussi des questions de compétence. En vertu de la Constitution, la gestion et la protection de l'eau, qui est une richesse naturelle, relèvent des provinces. C'est une responsabilité provinciale. Ce n'est que par le biais du commerce que le gouvernement fédéral peut s'ingérer dans ce domaine. Si la Chambre devait légiférer à cet égard, de toute évidence, il lui faudrait l'accord de toutes les provinces et, sauf erreur, cet accord n'est pas imminent.

J'invite le gouvernement libéral à agir concrètement pour protéger notre souveraineté sur notre eau. Je demande au premier ministre de négocier un accord parallèle qui exclut l'eau de l'ALENA, comme il l'a promis au cours de la campagne électorale de 1993, comme il en a toujours fait la promesse, promesse qu'il n'a pas tenue à ce jour.

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Madame la Présidente, je veux commencer par féliciter le Nouveau Parti démocratique d'avoir proposé la motion aujourd'hui à l'étude à la Chambre.

Ma première campagne électorale dans la circonscription de Broadview—Greenwood avait pour thème l'accord de libre-échange. Je me rappelle qu'environ une semaine après le début de la campagne, j'ai reçu un appel téléphonique d'un de mes associés de Houston, au Texas, qui était très proche de Clayton Yeutter, le négociateur de l'accord de libre-échange pour les États-Unis. Il m'a dit: «Dennis, Clayton Yeutter a passé sa vie à étudier la question de l'eau. Il y a même consacré sa thèse de doctorat à l'Université du Nebraska. La thèse a été publiée en 1961 dans la revue North American Water Management. En analysant cet accord de libre-échange, vous faites mieux de comprendre quelle est exactement la place de l'eau dans cet accord, car cet homme a consacré toute sa vie à cette question.»

J'ai pris la peine de me procurer la thèse de doctorat de Clayton Yeutter de l'Université du Nebraska. J'invite tous les députés à tâcher d'en obtenir une copie. C'est une thèse de 600 pages. Si jamais les députés avaient un doute quant à savoir si l'eau fait partie de l'accord de libre-échange, cette thèse de doctorat le dissipera. L'eau est en effet englobée dans l'accord de libre-échange.

Dans ma toute première intervention à la Chambre des communes, j'ai supplié le premier ministre Mulroney à l'époque d'obtenir de Ronald Reagan un protocole d'une page affirmant que l'eau est exempte de l'accord. Le gouvernement de l'époque ne voulait pas le faire. J'ai écrit plusieurs lettres à Clayton Yeutter pour lui demander de reconnaître que l'eau ne fait pas partie de l'accord de libre-échange. Il n'a jamais répondu à ces lettres. Je les conserve dans un dossier. Je sais également que quelqu'un a parlé récemment à Clayton Yeutter et qu'il est maintenant disposé à admettre publiquement que l'eau fait effectivement partie de l'accord de libre-échange.

Les Canadiens n'ont même pas un véritable inventaire de notre ressource en eau. Nous gaspillons tellement d'eau. Nous devrions nous interdire d'exporter ne serait-ce qu'un gallon d'eau avant d'avoir fait l'inventaire de cette ressource.

Je pose la question suivante au député, compte tenu du fait que nous n'avons pas fait l'inventaire de nos ressources en eau.

Imaginons que nous le fassions et que nous découvrions que nous en avons un surplus. Si l'on en mesurait la quantité convenablement, qu'on y fixait un prix en conséquence et que les Canadiens avaient la priorité en ce qui concerne leur utilisation, le député du Parti réformiste envisagerait-il la possibilité qu'on en vende? Je répète que cela ne se ferait qu'après l'exclusion de l'eau des dispositions de l'accord de libre-échange. Que penserait le député du partage et de la vente d'eau uniquement après que nous aurions pris le temps nécessaire pour en évaluer la quantité, province par province, région par région?

 

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M. Bill Gilmour: Madame la Présidente, la question de l'inventaire relève clairement des provinces. Ce sont elles qui possèdent et qui réglementent l'eau, et c'est à elles qu'il revient de décider de la quantité qu'elles possèdent et de l'utilisation qu'elles veulent en faire.

Le député a dit dans son intervention qu'il en avait appelé à l'ancien premier ministre Mulroney pour qu'il exclue l'eau des dispositions de l'ALENA. Le député a-t-il fait le même appel auprès du premier ministre actuel, puisque, étant maintenant ministériel, il peut faire en sorte que cela se produise? La question que nous débattons aujourd'hui est la mainmise sur nos ressources en eau. J'espère que le député demandera au gouvernement de régler le problème. Le député a cerné le problème. Il revient maintenant au gouvernement de le régler.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Madame la Présidente, permettez-moi, d'entrée de jeu, de lire une citation de Platon. Ce philosophe grec nous fait la démonstration sans équivoque de l'importance que nous devons accorder à cette richesse, et je cite:

    L'eau est la chose la plus nécessaire à l'entretien de la vie, mais il est aisé de la corrompre, car pour la Terre, le soleil, les vents, ils ne sont point sujets à être emprisonnés ni détournés, ni dérobés, tandis que tout cela peut arriver à l'eau qui, pour cette raison, a besoin que la loi vienne à son secours.

Cela nous démontre que la question de l'eau a inquiété l'humanité depuis des millénaires.

Le Bloc québécois ne peut appuyer la motion du NPD. Cette motion est un recul très important pour les provinces en matière de responsabilité sur les questions relatives à l'eau, car le NPD demande au gouvernement fédéral d'intervenir sur deux aspects, soit d'imposer un moratoire sur l'exportation d'eau douce en vrac et les transferts entre bassins, et de présenter un projet de loi pour interdire en permanence les exportations d'eau douce et les transferts entre bassins dans le but d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, préserver et conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Nous ne pouvons être d'accord avec une telle motion et un tel procédé qui empiètent sur les droits du Québec et des provinces de légiférer et de disposer elles-mêmes de cette ressource que constitue l'eau. Encore une fois, c'est le Québec et les provinces du Canada qui sont responsables de cette ressource et elles doivent le demeurer.

Un fait est certain, c'est que cette responsabilité doit être assumée par les provinces et elles doivent légiférer et gérer cette ressource en collaboration avec les intervenants régionaux, car ce sont eux qui connaissent très bien leur problématique, et ce sont eux qui sont près des réalités et des conséquences d'une bonne gestion quotidienne.

Selon l'article 109 de la Constitution du Canada de 1982, il est mentionné, et je cite:

    La propriété des terres et des ressources naturelles est dévolue à la Couronne provinciale.

Le Québec a le devoir de préserver le mieux possible cette richesse.

Durant mon exposé, je vais démontrer, par deux exemples concrets qui sont survenus dans ma région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, l'importance et la nécessité absolue que ce soient les intervenants les plus près possibles de la ressource, tels nos rivières, nos lacs et nos nappes souterraines, qui doivent en assumer la gestion et en être responsables.

 

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Au XXe siècle, les besoins en eau de l'humanité ont grandi de façon démesurée. À l'échelle mondiale, en 50 ans, la demande en consommation s'est multipliée par plus de quatre fois. Satisfaire nos besoins en eau est le défi auquel nous devons nous préparer pour les siècles à venir. Par conséquent, chacune des provinces a la responsabilité de bien gérer cette ressource en collaboration avec sa population, car un fait est établi: cette ressource va devenir l'or bleu de demain.

À titre indicatif, voici certaines orientations que les provinces pourraient se donner et où le gouvernement fédéral ne pourrait pas répondre à la commande: créer des structures, des fonctions et des responsabilités allant dans le sens d'une gestion intégrée des ressources en eau; reconnaître le statut d'utilisateurs d'eau de l'environnement pour les impliquer davantage et être capable d'identifier les besoins minimums en eau des écosystèmes aquatiques; développer des échanges d'information et des stratégies éducatives, afin d'améliorer la diffusion des informations, des résultats des projets de démonstration, des pratiques exemplaires, des études de cas et bien d'autres; élaborer des processus d'évaluation environnementale pour améliorer la base de connaissances sur la gestion des ressources en eau; et finalement, encourager la participation de la collectivité et lui conférer davantage de responsabilités et de pouvoirs dans le domaine de la planification et de la gestion des ressources en eau.

Tous ces éléments ont comme objectif de bien illustrer la nécessité que les provinces soient les maîtres d'oeuvre pour légiférer la ressource en eau.

L'eau appartient à tout le monde. Il faut la gérer intelligemment avec les bonnes instances gouvernementales. D'ailleurs, le gouvernement du Québec illustre bien, par des actions, sa responsabilité en ce domaine. Il vient d'annoncer une vaste consultation publique sur la gestion de l'eau au Québec. Cette consultation sera faite par le Bureau des audiences publiques de l'environnement, instance qui a démontré, hors de tout doute, son efficacité et son écoute pour répondre aux préoccupations de la population. Cet organisme est une des meilleures démonstrations de la réussite d'une consultation populaire à travers le monde.

Cette consultation de toutes les régions du Québec vise quatre grandes orientations fondamentales: améliorer les conditions de vie des Québécois et des Québécoises; répondre aux besoins sociaux et aux aspirations individuelles des citoyens et des citoyennes; respecter la qualité du milieu et la pérennité des ressources; et, finalement, agir avec la plus grande équité.

L'atteinte de ces orientations ne peut se faire sans privilégier quatre grands objectifs qui sont: assurer la protection de la santé publique, puisque l'eau est nécessaire à la vie, à la santé et au bien-être de la population; rechercher la pérennité de la ressource, car nous avons le devoir de léguer aux générations futures une eau de qualité en quantité suffisante pour qu'elles puissent assurer leur développement; mettre en valeur la ressource au plan social, environnemental et économique; et également, viser à concilier les usages dans une perspective de satisfaction des besoins légitimes.

Faire la promotion et la mise en valeur de l'eau, c'est aussi prendre conscience de la grande diversité de ses usages et des conflits que ceux-ci peuvent susciter.

Voilà une série d'objectifs qui illustrent bien que le Québec a les objectifs de se doter d'une politique sur l'eau par ses propres moyens, selon les préoccupations de la population du Québec. Cette ressource nous appartient et nous sommes entièrement maîtres de décider ce que nous voulons en faire.

En ce qui concerne les attentes du gouvernement du Québec de cette consultation, le ministre de l'Environnement, M. Paul Bégin, disait, et je cite: «En bout de piste, nous devons en venir à définir une politique de l'eau qui répondra à l'intérêt des Québécoises et des Québécois et qui visera à assurer la protection d'une ressource vitale du patrimoine humain.» Ce but ultime illustre très bien le désir des Québécoises et des Québécois de définir, selon leurs besoins, l'utilisation de cette ressource.

 

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De plus, lors d'un discours, le premier ministre du Québec a clairement énoncé que la gestion de l'eau devait prendre appui sur le développement durable, d'où la nécessité d'une gestion prudente et responsable. Cette gestion se doit d'être adaptée au service du citoyen et de répondre à ses besoins.

Ces déclarations et cette consultation, au Québec, sur l'eau va dresser un portrait très large de la future politique de l'eau du Québec. Le gouvernement du Québec s'oriente pour gérer de façon responsable une ressource aussi précieuse et indispensable.

J'aimerais vous lire une citation du 4 février 1998 du ministre des Affaires étrangères, M. Lloyd Axworthy, qui disait:

    Il nous faut maintenant déterminer les mesures et mécanismes les plus efficaces pour faire en sorte que le Canada puisse gérer efficacement ses ressources aquatiques. Cela suppose la participation très active des provinces, car elles ont, dans leurs champs de compétence, plein pouvoir sur les ressources aquatiques.

Les propos du ministre sont rassurants, compte tenu du fait qu'il n'y a pas très longtemps, le gouvernement fédéral, avec le projet de loi C-14 sur l'eau potable, venait s'immiscer de manière inacceptable dans les champs de compétence des provinces en édictant des normes nationales en matière de qualité de l'eau potable.

Il est clair, même pour le gouvernement fédéral, que nous devons protéger notre ressource sous l'égide de chacune des provinces, lesquelles détiennent les responsabilités de cette ressource.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Madame la Présidente, je tiens a féliciter la députée de Jonquière pour ses réflexions sur cette question très importante. Je que le Québec a plus évalué et étudié la question de l'eau que toute autre province canadienne.

Au fil des années, j'ai été stupéfait par l'engagement de la fonction publique à l'égard de cette question et par ses idées innovatrices sur la lutte contre la pollution et la sécurité de la ressource et ainsi de suite.

Je crois fermement que le Gouvernement du Canada doit parler au nom de tous les Canadiens. Il ne fait aucun doute que, même si l'on tient toutes les consultations du monde, nous devrons relever un jour le défi de la stabilisation des Grands Lacs. Les spécialistes canadiens des modifications climatiques s'entendent en général pour dire qu'il faudra tôt ou tard stabiliser les Grands Lacs.

Or, nous partageons les Grands Lacs avec les États-Unis. À mon humble avis, si nous nous décidions à stabiliser les Grands Lacs, les Américains devraient assumer leur partie du coût de cet exercice de stabilisation.

La députée de Jonquière convient-elle que le gouvernement fédéral doit au bout du compte décider de la stratégie et de la politique nationales de l'eau?

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame la Présidente, permettez-moi, avant de répondre à la question du député, de dire que je ne vois pas la raison pour laquelle le député fait cette observation. Présentement, nous parlons de l'eau potable, et à qui doit revenir le champ de compétence de l'eau potable.

 

. 1130 + -

À la proposition du NPD, je réponds en fonction de ce qui est prévu dans la Constitution du Canada. J'ai citée tout à l'heure le passage où il est stipulé que:

    La propriété des terres et des ressources naturelles est dévolue à la Couronne provinciale.

Je me fonde sur un traité constitutionnel qui dit, hors de tout doute, que la responsabilité de la gestion de l'eau potable revient aux provinces. En vertu de cela, les provinces peuvent se doter d'un mécanisme qui leur permettra de gérer leurs ressources à l'intérieur de leur territoire, et qui fera en sorte que chacun de leurs concitoyens soit vraiment bien protégé et qu'il soit vraiment partie prenante aux décisions.

[Traduction]

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Madame la Présidente, je demanderais à la députée de clarifier la terminologie du droit de riverain. Dans la jurisprudence qui s'est établie au Canada au fil des années, le droit de riverain est confondu avec les droits relatifs à l'eau. Comme le mot «riparian» vient du français, la députée saisit peut-être la différence qu'il y a entre le droit de riverain et les droits relatifs à l'eau.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame la Présidente, je m'excuse mais je n'ai pas très bien compris le début de la question de mon collègue. Est-ce qu'il pourrait la répéter, s'il vous plaît?

[Traduction]

M. Rick Laliberte: Madame la Présidente, en ce qui concerne une ressource nationale comme l'eau douce, que nous considérons d'une importance vitale, notre législation et notre jurisprudence emploient le mot «riparian», quoique celui-ci ne renvoie pas aux droits relatifs à l'eau. Il renvoie davantage aux rives et aux propriétés riveraines; il n'existe pas de jurisprudence au Canada sur les bassins d'eau douce et les droits qui s'y rattachent.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame la Présidente, pour ce qui est de la question de l'honorable député, j'aimerais lui dire ce que j'ai mentionné à mon honorable adversaire d'en face.

Au point de vue constitutionnel, la gestion de l'eau potable appartient aux provinces. Elles doivent légiférer pour permettre, comme je l'ai dit tout à l'heure, de répondre aux attentes de leurs concitoyens...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je m'excuse d'interrompre l'honorable députée, mais son temps de parole est écoulé.

[Traduction]

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Madame la Présidente, je suis très heureux d'avoir l'occasion ce matin d'aborder la motion d'opposition des néo-démocrates, qui exhortent le gouvernement fédéral à travailler en collaboration avec les provinces. C'est justement sur ce point que je veux insister. Je veux reprendre là où mon éminente collègue de Jonquière a laissé. Le gouvernement fédéral doit absolument reconnaître la compétence des provinces en matière d'eau. La gestion de l'eau relève des provinces et non du gouvernement fédéral.

Cela étant dit, le Parti progressiste conservateur appuiera l'objet de la motion, qui exhorte le gouvernement à imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques et à présenter une mesure législative à cette fin.

Dans le monde entier, il n'y a probablement aucun pays qui compte plus sur ses ressources naturelles que le Canada. Il nous incombe donc de créer un environnement très propice à l'implantation d'un certain nombre d'industries qui contribueront à faire rouler notre économie.

Je voudrais situer le débat dans son contexte. En janvier 1984, le gouvernement conservateur a mis sur pied un comité consultatif chargé de faire au gouvernement fédéral des recommandations concernant sa politique en matière d'eau. La commission Pearse, comme on l'appelait, a déposé, en 1985, son rapport qui devait servir de fondement à la «Politique fédérale relative aux eaux» que le gouvernement fédéral a diffusée en 1987. La politique précisait bien que le gouvernement fédéral n'appuierait pas l'exportation de grandes quantités d'eau douce ni les transferts entre bassins hydrographiques aux fins de l'exportation.

 

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En 1988, la population craignant de plus en plus que l'exportation de l'eau ne soit autorisée aux termes de l'Accord de libre-échange, le gouvernement conservateur a proposé le projet de loi C-156, Loi sur la préservation de l'eau au Canada, qui confirmait la position énoncée dans la politique fédérale relative aux eaux. Des élections ont été déclenchées et le projet de loi est mort au Feuilleton. Toutefois, à la reprise des travaux parlementaires, le gouvernement conservateur a préféré modifier la Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis pour explicitement exclure de l'accord l'exportation massive d'eau.

Le débat a de nouveau refait surface au cours des négociations relatives à l'ALENA. Encore une fois, le gouvernement a été forcé d'affirmer que l'accord n'obligerait pas les Canadiens à vendre de l'eau à leurs voisins américains. Michael Wilson, le ministre de l'Industrie et du Commerce international de l'époque, a dit à la Chambre, le 1er avril 1992: «Je peux affirmer catégoriquement qu'il n'y a pas eu et qu'il n'y aura pas de négociations concernant l'exportation d'eau à grande échelle.»

Néanmoins, pour calmer les nouvelles craintes des Canadiens, le gouvernement a promis d'ajouter un accord parallèle au moment de la ratification du traité avec les États-Unis et le Mexique, accord qui garantirait aux Canadiens la souveraineté sur leurs eaux internes. Charles Langlois, le secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie et du Commerce international à l'époque, a dit ce qui suit à la Chambre le 4 février 1993:

    En ce qui concerne l'exportation d'eau, la position du Canada est clairement énoncée dans la Politique fédérale relative aux eaux, adoptée en 1987. La Politique fédérale relative aux eaux interdit les exportations à grande échelle d'eau en provenance du Canada par le détournement des eaux de lacs ou de rivières. En outre, l'article 7 de la Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis précise clairement que l'accord ne s'applique pas à l'eau, à l'exception de l'eau emballée pour être bue ou emmagasinée dans des réservoirs. La loi en question est en vigueur depuis le 1er janvier 1989. De la même façon, l'Accord de libre-échange nord-américain n'inclut pas l'exportation d'eau à grande échelle; la loi de mise en oeuvre de l'ALENA comportera une clause particulière qui confirmera la souveraineté du Canada sur ses ressources en eau.

Le nouveau gouvernement libéral a reçu le crédit d'avoir conclu cette entente comme s'il avait été au pouvoir à ce moment-là. Les libéraux ont promis dans leur livre rouge de 1993 qu'ils concluraient d'autres accords avec les Américains pour confirmer la souveraineté canadienne sur ses eaux. Toutefois, ils en sont dans la sixième année de leur mandat et ils n'ont toujours pas présenté la moindre loi à cet égard.

L'ALENA et l'ALE garantissaient la non-exportation d'eau aux États-Unis ou dans tout autre pays, mais les choses ont changé. Les besoins en eau du monde ont augmenté de sorte qu'il est impératif de passer à l'étape suivante et d'adopter une loi en cette matière.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, je veux poser une question au député qui a expliqué clairement les intentions de son parti à l'égard de la motion principale. Je n'ai peut-être pas compris, mais il me semble que le député n'a pas dit ce que son parti pense de l'amendement selon lequel le Canada ne devrait pas être partie à un accord international qui nous oblige à exporter de grandes quantités d'eau douce.

Le député a tenu, au sujet de l'ALENA et de l'ALE, des propos qui ne m'étonnent pas de la part de quelqu'un dont le parti a été à l'origine de l'ALE et de l'ALENA. Je soutiens que son analyse de l'ALENA est erronée, et il est libre de soutenir qu'elle est juste.

Si son analyse se révélait erronée avec le temps, reconnaîtrait-il le bien-fondé de l'affirmation suivante, qui va à l'encontre de son analyse, mais qui cadre avec la mienne? Reconnaîtrait-il que, si l'on constatait ultérieurement que le fait d'avoir exporté de l'eau à des fins commerciales nous assujettissait aux conditions de l'ALENA et nous empêchait donc de mettre un terme à ces exportations, nous ne devrions plus être partie à l'ALENA?

 

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Je veux parler plus particulièrement des dispositions de l'ALENA qui ont trait à l'investissement, car les discussions d'aujourd'hui ont jusqu'à maintenant porté sur la question de savoir si l'ALENA nous empêcherait d'interdire les exportations ou d'y mettre un terme une fois que nous avons commencé à exploiter commercialement nos ressources aquatiques à des fins d'exportation; or, il se pourrait aussi que les dispositions de l'ALENA qui concernent l'investisseur empêchent le gouvernement canadien d'agir. Nous savons déjà qu'une entreprise de la Colombie-Britannique a intenté des poursuites contre le gouvernement canadien, en vertu de la disposition de l'ALENA sur l'intérêt de l'investisseur, à cause d'une interdiction provinciale.

Il y a maintes raisons de penser que le député pourrait se tromper à cet égard. Si le temps prouve qu'il a tort, serait-il disposé à appuyer le genre de mesure que nous avons recommandée dans notre amendement?

M. John Herron: Madame la Présidente, à mon avis, il ne serait pas dans l'intérêt du Canada d'être partie à tout genre d'accord qui nous forcerait à vendre quelque chose que nous ne voulons pas vraiment vendre, en l'occurrence des grandes quantités d'eau.

Pour ce qui est de l'ALENA sous sa forme actuelle, je vais citer les paroles du ministre des Affaires extérieures, qui a dit ceci à la Chambre la semaine dernière: «Le député sait que la Chambre a déjà discuté de la question de savoir si le Canada est tenu d'exporter de l'eau aux termes de l'ALENA. Évidemment, il n'est pas tenu de le faire.»

Je vais aussi citer une autre position, soit celle de Tom Hockin, ancien ministre d'État aux Petites entreprises et au Tourisme, qui a dit ceci à la Chambre le 17 septembre 1992: «Voici ce que prévoit l'ALENA: comme dans le cas de l'ALE, seule l'eau embouteillée comme une boisson dans des contenants est visée par l'ALENA. L'eau comme telle n'a pas fait l'objet de discussions lors des négociations avec les États-Unis et le Mexique.»

Pour ce qui est de dire si nous devrions nous retirer de l'accord de libre-échange en cas de différend commercial avec les États-Unis ou avec un autre pays au sujet de l'eau, je crois qu'une telle décision serait très mauvaise pour les Canadiens. Je signalerai au député que, si nous avons connu une forte croissance économique au cours des quelques dernières années, c'est en grande partie grâce à notre économie axée sur les ressources et les exportations. En 1988, soit avant le libre-échange, nos échanges commerciaux avec les Américains s'élevaient à environ 90 milliards de dollars. Aujourd'hui, ils dépassent largement les 240 milliards de dollars.

Le libre-échange a été très bon pour le Canada. Il a stimulé la croissance de notre économie. Toutefois, les Canadiens veulent s'assurer que nous maintenons notre souveraineté environnementale, notamment en ce qui concerne nos ressources en eau.

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Madame la Présidente, je signale au député de Fundy—Royal que Clayton Yeutter, qui a mené les négociations sur le libre-échange, a consacré toute sa vie à l'étude et à la planification de la gestion de l'eau en Amérique du Nord et que nous devrions de ce fait être sur nos gardes. Clayton Yeutter a maintenant déclaré que l'eau tombe effectivement sous le coup de l'accord de libre-échange, déclaration qu'il refusait de faire il y a dix ans.

Il est très important que la Chambre se penche sur cette question.

M. John Herron: Madame la Présidente, si le député et le gouvernement se préoccupaient à un si haut point de cette question, ils ont eu six ans pour présenter un projet de loi et ils ne l'ont pas fait.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Madame la Présidente, je suis très heureux d'avoir l'occasion de m'exprimer au sujet d'un dossier aussi crucial, soit celui de l'eau.

La motion dont nous sommes saisis enjoint le gouvernement fédéral de considérer que l'exportation de grandes quantités d'eau pourrait nuire grandement à l'écosystème de notre pays et lui demande d'intervenir dans ce dossier.

 

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Nous avons aussi noté que le gouvernement fédéral s'est peu à peu départi de certaines responsabilités et les a transférées aux provinces en invoquant le fait qu'il s'agit d'une ressource naturelle. L'eau diffère fondamentalement de toute autre ressource naturelle sur terre. Sans eau, il n'y aurait plus de vie.

Lorsque des pays veulent que nous leur fournissions des ressources en eau douce, nous devons nous demander si le transfert d'eau par l'homme suffira à approvisionner tous les habitants de la planète. Les transferts entre bassins hydrographiques exigeraient que l'eau soit acheminée par des voies terrestres qui, historiquement, n'ont peut-être jamais été des plans d'eau. Nous savons que, lorsque des secteurs sont inondés pour les besoins du développement hydroélectrique, la contamination au mercure de ces plans d'eau est une grande source de préoccupation. L'aspect environnemental ainsi que la protection des écosystèmes et de la santé humaine doivent se retrouver au coeur du débat.

Que l'on regarde sur une carte géographique ou que l'on survole le nord du Canada dans un petit avion, on voit le Canada comme une source inépuisable d'eau douce. J'espère que les députés savent voir au-delà de ce mirage, car c'en est bien un. Les ressources en eau qui nous ont été données sont très limitées. Nous devons chérir ce trésor et l'exploiter selon les principes du développement durable pour le bien des futures générations. Nous devons penser dans une optique collective.

La motion porte également sur la souveraineté du Canada sur l'eau. Avant que tout accord commercial concernant l'eau soit même envisagé, il faut régler entre nous la question de la responsabilité sur l'eau.

On vient de me rappeler, madame la Présidente, que je partage le temps dont je dispose avec le député de Winnipeg-Centre.

Je veux donner un petit cours au secrétaire d'État sur l'origine et le sens du mot Winnipeg. Winnipeg vient du mot cri Winnipek, qui signifie eau sale. Si vous jugez que les sources de notre eau sont polluées, imaginez un peu ce que nous avons fait aux cours d'eau du reste du continent pendant notre révolution industrielle.

Une voix: La winnipegisation de l'Amérique du Nord.

M. Rick Laliberte: La winnipegisation de l'Amérique du Nord. Je mets la Chambre des communes au défi de dire clairement qui est responsable de l'eau au Canada. Lorsque le Canada négociait des traités avec les peuples autochtones, la question de l'eau n'était pas précisée. Il existe une histoire orale des négociations de traités. Je vais lire un passage d'un rapport «Aski pago», qui signifie la terre seule. Daniel Mackenzie pose la question:

    Lorsque la terre a été vendue, qu'est-ce qui a été vendu au juste? Lorsque les traités ont créé des obligations, est-ce qu'elles ne se rapportaient qu'à la terre ou est-ce qu'elles visaient aussi les lacs et les rivières?

 

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Rien dans un traité ne dit que l'eau fait l'objet d'un transfert, d'une négociation ou d'une vente. Les gens tirent leur subsistance principalement de l'eau et de la terre, mais les traités ne font aucunement mention de l'eau.

L'eau était considérée comme la source de vie pour toutes les nations et tous les peuples. La propriété de l'eau était tenue pour acquise et il allait de soi que tous avaient accès à cette eau. Lorsqu'on commence à parler de transferts entre bassins hydrographiques, d'exportations de grandes quantités d'eau, de tout le concept de l'écosystème et de l'impact, nous contrevenons aux obligations établies en vertu des traités.

Songez aux possibilités qu'offre la notion de développement durable. Le défi pour notre pays consiste à établir un juste équilibre entre notre environnement et nos besoins socio-économiques. L'eau va jouer un rôle important dans notre avenir.

Si nous commençons à transférer de l'eau dans des régions telles que le sud-ouest, qui est aux prises avec la désertification, les scientifiques prédisent qu'il s'ensuivra des bouleversements climatiques. On a d'ailleurs pu constater que c'est le cas. Si nous agissons de façon prématurée et que nous transférons de l'eau, cette mesure ne répondra pas nécessairement aux besoins des populations urbaines et croissantes du sud, ou des populations urbaines des pays qui ont besoin de nos exportations.

Il s'agit de voir comment on peut assurer notre survie au Canada. À une époque où un nombre de plus en plus grand de personnes émigrent dans notre pays pour s'y installer, elles doivent y trouver un lieu de vie. Nous ne pouvons pas abandonner avec insouciance les ressources en eau dont nous disposons.

La Chine sera le premier pays du monde à littéralement restructurer son économie pour faire face à son problème de pénurie d'eau. Certains pays sont en train d'apporter des changements. Nous avons des exemples de villes dans certains pays qui éprouvent de très graves problèmes parce que leur eau ne peut plus être utilisée. Une commission des Nations Unies sur le développement durable a constaté que l'utilisation de l'eau augmente deux fois plus vite que la population.

Il est vrai que nous ne manquons pas d'eau au Canada, mais nous ne ménageons certes pas ce bien précieux que nous avons. La compétence en cette matière revêt une importance capitale. Il y a des collectivités dans le nord du pays, des collectivités autochtones pour la plupart, où il n'y a ni eau courante ni station d'épuration des eaux parce que les intérêts économiques et commerciaux de la région ne le permettent pas.

Nous avons la chance de produire de l'eau douce non contaminée dans ce pays. En ce qui concerne la compétence fédérale, un revirement s'est produit au début des années 90, quand Environnement Canada a commencé à réduire les budgets alloués aux sciences de l'eau et aux recherches dans ce domaine. Dans le contexte de nos engagements envers les autochtones, les provinces et le palier fédéral, nous devons examiner notre obligation d'assurer à chacun l'accès à de l'eau douce et l'étendue de notre champ de compétence en matière de ressources en eau. La Loi sur le transfert des ressources naturelles du Manitoba stipulait en 1930 qu'il fallait tenir compte des terres et des eaux traditionnellement exploitées à des fins sociales et économiques.

Ce débat sur l'eau est loin d'être terminé. Il nous fournit l'occasion d'examiner la compétence fédérale en la matière et d'imposer un moratoire sur l'exportation d'eau et les transferts entre bassins hydrographiques.

 

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M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de cette question, qui fait l'objet d'un débat opportun et tout à fait crucial. C'est une question qui me préoccupe beaucoup.

Étant originaire de la province du Manitoba, je mentionnerai, d'entrée de jeu, que mon expérience personnelle et les connaissances que j'ai acquises m'ont permis de constater les effets que peut avoir le déplacement d'eau à grande échelle, d'un bassin à un autre.

J'ai moi-même été témoin, lorsque je travaillais comme menuisier dans des projets hydroélectriques, du détournement des rivières Nelson, Churchill et Burntwood, pour alimenter en eau des barrages hydroélectriques. J'ai vu la dévastation causée par l'inondation des territoires utilisés pour constituer un grand réservoir et les effets que cela a eus sur les communautés autochtones. C'est ce qui me vient tout d'abord à l'esprit à l'occasion du débat actuel.

Je voudrais faire part à la Chambre d'une anecdote qui fait ressortir la totale fixation des générations pour le déplacement d'eau à grande échelle. Je cite le Manitoba en exemple aussi parce que le premier ministre de la province est ingénieur. La thèse qu'il avait rédigée en génie proposait d'avoir recours à des explosions nucléaires pour faire sauter la vallée de la rivière Rouge, afin de détourner les eaux du lac Winnipeg et en inverser le cours, aussi invraisemblable que cela puisse sembler, pour pouvoir exporter l'eau vers les États-Unis.

Je parle ici d'histoire récente. Ces faits se sont produits au milieu des années 60. La population a été saisie de la question. À l'époque, les universitaires envisageaient des projets qui, aujourd'hui, semblent presque comiques. C'était tout à fait dérisoire. Des gens sérieux envisageaient de détourner des eaux, peu importe les conséquences pour l'environnement ou pour les générations futures.

Contrairement à ce qu'affirmait Brian Mulroney en 1986, je crois que les réserves en eau du Canada ne sont pas à vendre. Nos ressources en eau potable sont une ressource publique, non pas privée.

En mai dernier, le ministre des Affaires étrangères a promis de prendre des mesures pour protéger les ressources en eau du Canada à la suite de l'indignation qu'avait provoquée, dans l'opinion publique, la nouvelle voulant que des entreprises soient sur le point d'exporter de grandes quantités d'eau vers des marchés étrangers. Nous avons attendu, mais en vain, des mesures qui auraient eu pour effet d'apaiser les craintes des Canadiens. Aussi, le Nouveau Parti démocratique a-t-il d'autant plus raison de présenter, à ce moment-ci, une motion d'opposition qui soulève cette question cruciale.

L'érosion de nos ressources en eau douce entraînera l'érosion de la confiance du public. Il appartient à la génération actuelle de Canadiens de protéger cette précieuse ressource. Je n'insiste ici pas tant sur la valeur marchande que sur le fait qu'il s'agit, comme l'orateur précédent l'a dit, d'un bien qui vaut bien plus que la valeur en dollars qu'on pourrait lui attribuer, vu les répercussions sur la santé de l'accès à l'eau douce pour toute collectivité florissante.

La rareté grandissante de l'eau et la destruction de l'écosystème aquatique à l'échelle planétaire provoquent une crise mondiale de l'eau. On ne saurait trop insister sur le fait que presque tous les pays, notamment les nations en développement, sont confrontés au problème de l'accès à l'eau douce.

Et il ne s'agit pas seulement des pays en développement. La principale pression qui pèse sur le Canada vient bien sûr du Sud, de notre principal partenaire commercial, qui connaît de graves problèmes d'eau. Il ne faudrait pas s'étonner que les Américains s'intéressent à toute idée qui soit de nature à atténuer ces problèmes.

Les eaux du Colorado se tarissent avant même d'atteindre l'océan. Ce cours d'eau, un des plus grands de l'Amérique du Nord, est fortement mis à contribution et ses ressources sont exploitées à un point tel qu'il se dessèche avant de se jeter dans l'océan. Face à l'explosion démographique de la Californie, sa population est prête à s'emparer de toute idée, aussi saugrenue qu'elle puisse paraître à nos yeux de Canadiens, qui lui fasse miroiter l'accès à une ressource qui, pour l'instant, est encore abondante chez nous.

Je me souviens d'une des idées qu'entretenait Wacky Bennett, un autre premier ministre sous lequel j'ai vécu quand j'habitais la Colombie-Britannique. Il avait des idées pour le moins contestables sur le chapitre de l'eau. Wacky, le père, l'original, caressait l'idée—farfelue s'il en fut—d'inonder la vallée Skagit. Il voulait dériver l'eau pour inonder la vallée de la rivière Skagit. Les députés qui connaissent la Colombie-Britannique savent très bien l'entreprise que représente la dérivation d'un énorme réseau hydrographique pour amener les eaux aux États-Unis, au marché insatiable qu'est la Californie.

 

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On n'arrête pas d'émettre de telles idées. C'est vraiment inquiétant. Les partisans du marché libre, souvent les gouvernements de droite, sont prêts à faire n'importe quoi pour faire de l'eau un bien commercialisable. Il est très préoccupant d'entendre le ministre du Commerce international dire que l'eau sera le pétrole de demain.

Chaque fois que de telles pensées nous agitent, nous sommes à la merci de tous ces gens qui aimeraient que l'eau soit un bien marchand, qui voudraient l'inclure dans des accords de libre-échange, qui aimeraient en quelque sorte avoir un mécanisme implicite, une sorte de mécanisme de ventes liées. Si nous acceptons un accord de commerce parce que certains éléments nous intéressent, nous allons finir par devoir partager notre eau, peut-être bien plus que nous ne le voulions ou que nous l'avions envisagé.

Je pense que les deux exemples que j'ai donnés seraient désastreux pour le bien être des Nord-Américains, soit recourir à des explosions nucléaires pour faire sauter la vallée de la rivière Rouge et dériver les eaux du lac Winnipeg pour inonder la vallée de la Skagit. Ce ne sont là que deux projets. De tous les temps, des projets de ce genre ont été proposés. Dans l'histoire récente en tous les cas.

En 1959, T.W. Kierans, de Sudbury, a proposé un projet de ce genre. Le GRAND project comme on l'a appelé, prévoyait un grand remplissage et le développement d'un canal dans le Nord. Kierans proposait d'endiguer les rivières alimentant la baie James et d'installer une série de pompes pour faire remonter le débit fluvial en amont au-dessus de la ligne de partage des eaux entre l'est et l'ouest et jusque dans les Grands lacs.

C'était un projet de restructuration majeur. Comment peut-on être assez arrogant pour utiliser les techniques modernes pour modifier de façon irréversible l'écoulement de l'eau, la ligne continentale de partage des eaux? Imaginez un peu les conséquences qu'un tel projet pourrait avoir pour l'écosystème. Nous parlons d'études d'impact sur l'environnement. Nous n'avons jamais envisagé un projet d'une telle envergure.

En 1964, le général McNaughton, président de la section canadienne de la Commission mixte internationale a parlé du projet du North American Water and Power Alliance, qui prévoyait aussi d'inonder le sillon des Rocheuses.

Et maintenant, il y a des gens qui veulent inonder la vallée de la Skagit et le sillon des Rocheuses pour constituer un immense réservoir pour l'Amérique du Nord, pour encore une fois alimenter les États-Unis et le Mexique en eau.

Quand on entend des personnes dignes de confiance, des scientifiques reconnus propager des idées comme celles-là, il n'est pas étonnant de constater que les Canadiens se regroupent pour tenter de se protéger.

En ce moment même, le Conseil des Canadiens se trouve à Ottawa pour discuter de ce sujet, pour faire part de ses craintes que l'eau douce pourrait bien devenir un produit commercialisable et que nous pourrions nous retrouver liés par les accords de libre-échange à des rapports touchant l'eau qui ne nous satisfont pas entièrement et que nous ne sommes pas prêts à régler.

Voyons comment nos accords de libre-échange nous lient en ce qui concerne le mazout domestique, par exemple. Certaines dispositions de l'ALENA et de l'ALE stipulent que, si le Canada est à court de ce combustible, il doit continuer à le vendre au même rythme à ses partenaires du sud. Nous redoutons que la même chose ne se produise pour l'eau douce.

Il y a quelques petites choses qu'il ne faut pas perdre de vue. Il y a une crise mondiale de l'eau. Des sociétés géantes ont hâte de se servir de l'eau pour en tirer des bénéfices en satisfaisant les besoins du monde, et notre gouvernement ne s'est pas encore soucié d'énoncer clairement notre politique, en ce qui concerne le commerce international de l'eau en grandes quantités ou la dérivation d'eau entre bassins hydrographiques.

J'espère que tous les partis accueilleront favorablement cette motion d'opposition. Nous pourrons alors aborder avec confiance toute nouvelle alliance commerciale: l'eau ne sera pas au nombre des denrées négociables que nous sacrifions.

 

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M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Madame la Présidente, j'ai une brève observation à formuler à l'intention du député.

Je reviens quelques années en arrière. En fait, je soupçonne que cela s'est passé longtemps avant la naissance du député. Je n'étais pas très vieux moi-même, mais je me souviens d'une histoire mettant en cause le Colorado, le Nouveau-Mexique et le Texas au sujet du Rio Grande, une rivière qui a sa source au Colorado et qui coule vers le sud, traversant les autres États. Cette rivière fournit une source d'eau grandement nécessaire, tant pour la consommation que pour l'irrigation, parce que les fermes de la région dépendent de l'irrigation.

Dans les années 40, je crois, le gouvernement du Colorado a décidé de construire ce qu'on avait appelé un réservoir continental. Il avait alors élevé des digues en amont du Rio Grande en vue de conserver une grande partie des eaux abondantes du printemps pour redistribuer cette réserve tout au long de l'année, dans le cadre d'une entente qu'il tentait de mettre au point.

Je me souviens que cela avait provoqué des sentiments très forts. Je n'ai jamais rien vu qui ait suscité des réactions aussi vives. Les gens étaient prêts à prendre les armes et à partir au combat. Ils étaient prêts à tout pour cette réserve d'eau.

Je pense surtout aux affluents qui ont leur source au Canada et qui se jettent dans les États-Unis. Le député peut-il me dire jusqu'à quel point le Canada devrait détenir des pouvoirs sur une ressource naturelle telle que l'eau, si elle coule jusque dans d'autres régions du monde, et surtout aux États-Unis? Quel genre de pouvoirs devrions-nous avoir sur l'eau, dans un tel cas? S'il croit que nous devrions avoir des pouvoirs incontestables, comment pourrions-nous les appliquer sans créer de perturbations d'ordre affectif, ce qui ne peut manquer de se produire si l'on essaie de contrôler une source d'eau?

M. Pat Martin: Madame la Présidente, je pense que c'est une question très raisonnable et un très bon exemple.

Je pense que des relations ont été établies en ce qui concerne les droits relatifs à l'eau, même dans des municipalités rurales, quand, par exemple, un ruisseau traverse plusieurs propriétés. À aucun moment, les propriétaires ne sont autorisés à arrêter le débit pour créer une retenue, un lac ou un réservoir sur leur terrain.

Les droits relatifs à l'eau donnent lieu à des ententes négociées. Déjà dans la Magna Carta, il est question des droits relatifs à l'eau. Je ne pense pas que notre motion porte précisément sur le libre mouvement des cours d'eau d'un pays à l'autre. Nous y parlons plus particulièrement de la vente de grosses quantités d'eau et des transferts entre bassins pour forcer l'eau à couler de façon artificielle dans un autre bassin.

Pour répondre à la question du député, qui est très légitime, je dirais que je pense qu'il existe pour l'eau des traités internationaux tout comme il existe des traités entre provinces. L'exemple le plus pertinent qui me vient à l'esprit est le projet de détournement de la rivière Garrison, dans le sud du Manitoba, à la demande des agriculteurs du Dakota du Nord. La rivière fait de nombreux méandres le long de la frontière entre le Dakota du Nord et le Manitoba et la traverse à plusieurs reprises.

Les agriculteurs du Dakota du Nord, qu'inquiétait la pénurie d'eau, voulaient réaliser du côté américain un projet de dérivation de la rivière Garrison qui aurait asséché la rivière du côté canadien. On a mis le holà à ce projet après des négociations très acrimonieuses entre la province et l'État.

Je suis confiant car je sais que nous avons les moyens de négocier le libre mouvement des cours d'eau d'un pays à l'autre. Notre motion ne porte pas spécifiquement sur le mouvement naturel des cours d'eau.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Waterloo—Wellington.

Habituellement, lorsque je parle de l'identité des Canadiens, je fais allusion à notre régime de santé. Aujourd'hui, je suis heureuse de pouvoir parler de ce qui constitue vraiment notre patrimoine, à savoir, des lacs propres et des rivages rocheux.

 

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La présente discussion est une réaction bienvenue aux efforts qu'a entrepris le gouvernement fédéral, au cours de la dernière année, pour revoir et mettre à jour la politique fédérale de 1987 sur les ressources en eau. L'été dernier, nous avons amorcé un dialogue avec tous les organismes provinciaux et territoriaux, en mettant l'accent sur la gestion des ressources en eau et sur l'élaboration d'une stratégie fédérale concernant l'eau douce. Les provinces et les territoires se sont dits disposés à collaborer avec nous pour trouver des solutions à tous les enjeux qui concernent les ressources en eau douce. Leur participation est importante, puisqu'ils sont responsables au premier chef de la gestion de l'eau au Canada.

Le gouvernement du Canada reconnaît la priorité que les Canadiens accordent à des ressources en eau et à des écosystèmes propres, productifs et sûrs. Il reconnaît qu'il doit faire preuve de leadership. Nous estimons que la gestion des eaux relève non seulement des gouvernements, mais aussi de tous les Canadiens. Le dialogue que nous tenons à la Chambre aujourd'hui favorise une participation, une décision, un engagement et une action collective sur toute la gamme des préoccupations liées à cette question.

Je voudrais situer la discussion dans le contexte des abondantes ressources en eau douce dont nous bénéficions d'un bout à l'autre du pays et de tous les défis que nous devons relever à cet égard.

La stratégie sur les ressources en eau que propose le gouvernement fédéral portera principalement sur les enjeux où nous pourrons renforcer la collaboration et relever plus efficacement les défis qui se présentent à nous dans la gestion de notre héritage. Elle présentera un aperçu de l'état des ressources en eau douce au Canada, un examen de la politique fédérale appliquée ces dix dernières années, ainsi qu'un survol des objectifs, des principes et des stratégies du gouvernement fédéral et un résumé des enjeux et des orientations.

En rédigeant la motion, le député a certes été frappé par l'ampleur, la profondeur et la complexité des questions que suscite aujourd'hui la politique canadienne sur l'eau douce. J'espère que nous convenons tous que ces questions sont beaucoup plus vastes et subtiles que la simple question des exportations de grandes quantités d'eau.

La position du Canada est unique. Nos cours d'eau assurent un riche approvisionnement en eau. Nos fleuves déversent dans la mer presque 10 p. 100 des ressources renouvelables mondiales en eau. Nos lacs couvrent plus de 7 p. 100 de la superficie de notre pays, et nos terres humides, presque 15 p. 100. Nous avons de nombreux besoins d'eau. Essentielle à la vie, l'eau est utilisée pour irriguer les surfaces cultivées ou permettre l'existence des poissons, de la faune, de l'élevage du bétail, de la pêche commerciale, des loisirs, du tourisme, des transports, des activités de fabrication, ou la vie humaine dans les villes ou les habitations. D'une façon générale, nos industries et notre population sont installées le long de cette bande étroite au nord de la frontière américaine. La plupart de nos cours d'eau coulent vers le nord vers l'océan Arctique.

Les Canadiens ne forment pas un groupe qui excelle dans la gestion de l'approvisionnement en eau. Ils utilisent chacun plus de 300 litres d'eau par jour à des fins domestiques, soit deux fois plus que la moyenne en Europe. Mais la situation s'améliore. Les fabricants font des progrès vers une utilisation efficiente de l'eau. Dans les industries de la sidérurgie et des pâtes et papiers, la nouvelle technologie, le recyclage et les méthodes plus efficientes réduisent considérablement la quantité d'eau utilisée aux fins de production.

En tant que représentants élus et gardiens des ressources naturelles du Canada, nous devons réussir à préserver et à améliorer nos précieuses ressources en eau pour les transmettre à nos enfants et nos petits-enfants. Des députés de l'opposition ont exprimé des craintes aujourd'hui concernant l'approvisionnement en eau potable et les réseaux d'égout dans nos villes. C'est une question qu'il faut traiter dans le contexte général de la gestion de l'eau. L'infrastructure nécessaire pour fournir l'eau potable et traiter les eaux usées dans les villes canadiennes relève avant tout des provinces, des territoires et des municipalités. Ils font face à des défis importants. La demande d'eau augmente alors que les revenus tirés de l'eau n'augmentent pas au même rythme que les coûts. Les Canadiens viennent au deuxième rang dans le monde en ce qui concerne la consommation d'eau par habitant et ne paient que la moitié des coûts d'approvisionnement en eau. Au cours des dix prochaines années, les coûts d'entretien de cette infrastructure devraient varier entre 40 à 70 milliards de dollars.

La politique fédérale sur l'eau est claire sur cette question depuis 1987. Nous voulons nous assurer que les Canadiens ont facilement accès à de l'eau potable sûre et propre et protéger nos eaux douces contre la pollution causée par les systèmes d'égouts municipaux. Nous avons également travaillé par l'entremise du Conseil canadien des ministres de l'Environnement sur un plan tendant à encourager une plus grande efficience quant à l'utilisation de l'eau au niveau municipal.

Une des meilleures façons de protéger nos eaux est de réduire la demande. Les Canadiens doivent commencer à prendre des mesures pour conserver cette précieuse ressource. Depuis quelques années, le gouvernement fédéral consacre plus de 700 millions de dollars à l'amélioration des systèmes d'adduction d'eau et d'égouts dans les collectivités canadiennes.

Les changements atmosphériques sont une autre question qui attire l'attention de la population. Les changements atmosphériques causés par l'homme, y compris le changement climatique, l'appauvrissement de la couche d'ozone et la pollution risquent d'avoir des répercussions extrêmement importantes sur la santé et la viabilité des écosystèmes. Une concentration accrue de gaz à effet de serre peut jouer un rôle dans l'accroissement de la fréquence des inondations, des tornades, des fortes tempêtes et d'événements semblables.

 

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Tout cela pourrait réduire nos approvisionnements en eau douce propre, productive et sûre dans diverses régions du pays.

Le gouvernement va continuer de coordonner et d'effectuer des recherches sur les répercussions des changements atmosphériques sur nos eaux douces. L'engagement du gouvernement fédéral à l'égard de la recherche sur nos ressources en eau se reflète dans le volet sciences, impacts et adaptation du Fonds d'action sur le changement climatique. Ce fonds, qui a été créé dans le budget de 1998, prévoit des dépenses de 50 millions de dollars par année au cours des trois prochaines années.

La pollution est une autre question importante. Il suffit de regarder nos lacs et nos rivières au Canada, sans parler de se baigner ou de consommer de l'eau potable, pour s'apercevoir que la pollution est une préoccupation très urgente. Depuis quelques années, des lois fédérales, ainsi que des programmes comme la stratégie fédérale de prévention de la pollution, ont permis dans une certaine mesure de prévenir l'accroissement de la pollution.

De plus en plus, une gestion dynamique des substances toxiques répond aux préoccupations canadiennes au sujet de la protection de la santé publique. Le gouvernement fédéral entend bien voir des mesures législatives fermes et des programmes efficaces pour protéger la santé humaine contre toutes les formes de pollution, surtout celles qui menacent l'eau potable.

Le gouvernement fédéral collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour réaliser des progrès dans le domaine de la prévision des inondations et il offre de l'information et des services en ce qui concerne les alertes météorologiques, afin d'accroître notre capacité de prévision du temps.

Voilà donc le contexte global dans lequel la motion dont nous sommes saisis doit être examinée. La politique et les programmes du gouvernement fédéral relatifs à nos ressources en eau douce comportent de nombreux aspects tout aussi importants et urgents que l'exportation de grandes quantités d'eau.

Je prendrai quelques instants pour parler des transferts entre bassins hydrographiques qui semblent inquiéter l'opposition. Il est clairement énoncé dans la politique fédérale relative aux eaux que le gouvernement fédéral n'appuie pas, en principe, les transferts entre bassins hydrographiques à cause de leurs répercussions possibles sur l'intégrité sociale, économique et environnementale de nos bassins. D'ailleurs, la plupart des régimes provinciaux de gestion de l'eau respectent ce principe.

Quand on songe aux répercussions possibles des transferts entre bassins hydrographiques, il faut penser au transfert et à la contamination biotique, à la fragilité de nos écosystèmes, surtout des écosystèmes du Nord qui sont très vulnérables aux moindres changements et très lents à se rétablir, si jamais ils y parviennent, aux préoccupations des premières nations, dont le mode de vie est intrinsèquement lié aux cycles d'abondance de l'eau, à la dégradation des ressources en eau dont disposent les localités en aval et de la perte de certains avantages récréatifs et commerciaux.

Encore une fois, je félicite le député d'avoir amorcé à la Chambre le dialogue sur cette question importante. Toutefois, les lois et les règlements qui s'imposent doivent tenir compte de tous les grands aspects de la question. Il faut éviter les mesures législatives fragmentaires.

Nous devons travailler en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, qui sont les premiers responsables de la gestion des ressources en eau du Canada.

Ce débat tombe à point nommé. Nous pouvons appuyer certains éléments de la motion à l'étude, ceux qui exhortent le gouvernement fédéral à collaborer avec les provinces et les territoires et à interdire les transferts entre bassins hydrographiques. Le gouvernement fédéral continue de travailler avec les provinces et les territoires pour protéger, préserver et conserver nos ressources en eau douce pour les générations futures.

Nous optons pour une méthode globale qui nous permettra d'examiner la demande et les pressions environnementales exercées sur les bassins hydrographiques du Canada. Nous inviterons les Canadiens que la question intéresse à participer, au printemps, à l'élaboration d'une stratégie fédérale de gestion de l'eau douce. J'attends avec impatience la tenue d'un vaste débat sur toutes les questions qui portent sur une bonne stratégie fédérale de gestion de l'eau douce.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Madame la Présidente, la députée a parlé du contexte dans lequel la motion d'aujourd'hui est présentée, et je pense aussi que toute cette question dépasse largement la portée de la motion. À un certain nombre d'occasions, la députée a parlé de la coopération qui est nécessaire entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires.

La députée pourrait-elle nous dire si elle voit une place pour les autochtones dans cette coopération et ce processus de consultation? Reconnaît-elle que, dans les faits, même si certains prétendent que l'eau est une ressource renouvelable, elle ne l'est peut-être pas? Si l'on perturbe l'écosystème ou les bassins hydrographiques, on pourrait se retrouver dans la situation où l'eau n'est plus une ressource renouvelable. Je pense au cas de la mer d'Aral.

Mme Carolyn Bennett: Madame la Présidente, l'été dernier, j'étais au Nunavut et j'ai constaté la valeur que les gens de là-bas accordent à l'eau et à quel point cette ressource est importante dans leur quotidien; j'ai aussi constaté que, dans l'optique internationale, ils estiment que le Canada a le devoir de faire en sorte que tous les pays nordiques et polaires s'occupent de leurs ressources aquatiques. Je suis donc tout à fait d'accord avec le député.

 

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Je pense effectivement que la consultation des premières nations est un aspect extrêmement important des prochaines mesures que le gouvernement prendra dans le cadre du processus de consultation et je crois que les autochtones participeront au processus.

Le député a raison. Nous devons rappeler quotidiennement à l'ensemble des Canadiens qu'il ne faut rien tenir pour acquis. Nous pouvons ruiner cette ressource. Nous devons toujours nous occuper prudemment de nos ressources les plus précieuses et il est effectivement incorrect et téméraire de parler de ressource renouvelable si nous n'en prenons pas soin.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, le moment est bien choisi pour discuter à la Chambre de cette motion concernant les exportations d'eau.

Je prends la parole pour appuyer la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui, invitant le gouvernement à travailler en coopération avec les provinces pour imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, et à présenter une mesure législative pour renforcer ce moratoire. Cela me paraît très important.

Les Canadiens se préoccupent beaucoup de cette ressource vitale, car la demande mondiale en eau augmente continuellement et cette tendance ne va probablement pas s'arrêter dans un avenir rapproché. Nous devons prendre maintenant des mesures pour veiller non seulement à ce que nos ressources nationales en eau soient protégées pour nous préparer à la demande à venir, mais pour veiller également à ce qu'en temps d'abondance nous gardions le contrôle sur nos ressources en eau de manière à ne pas endommager les écosystèmes dont nous dépendons tous.

Plusieurs députés ont mentionné aujourd'hui le rôle vital que l'eau joue dans notre vie. On ne saurait trop le souligner. Nous ne pouvons pas vivre sans eau, c'est évident. L'eau est source de vie non seulement pour les êtres humains mais aussi pour les plantes et les animaux ainsi que pour l'ensemble de nos écosystèmes complexes.

À bien des égards, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation privilégiée, car environ 20 p. 100 des ressources en eau douce du monde se trouvent à l'intérieur de nos frontières. Il semblerait à première vue que nous n'avons pas grand souci à nous faire pour ce qui est de protéger notre eau contre la commercialisation par des investisseurs canadiens ou étrangers. Après tout, puisque nous possédons tant d'eau, il paraît raisonnable de dire que nous pourrions en vendre pour accroître notre assiette fiscale ou en donner à ceux qui en ont besoin.

Cela paraît peut-être trop raisonnable. En réalité, cela n'est pas aussi simple. Le privilège s'accompagne d'une responsabilité. Nous comprenons tous en termes les plus fondamentaux ce que représente l'eau dans notre vie de tous les jours, pour l'agriculture et pour l'industrie, mais nous ne comprenons pas parfaitement comment l'eau alimente tous les mécanismes vitaux. Si nous abusons de notre privilège, nous risquons de négliger nos responsabilités.

Nous possédons tellement d'eau sous tellement de formes différentes: des glaciers, des marais, des lacs parmi les plus grands au monde et des nappes aquifères. Ces différentes formes sont liées entre elles, mais nous ne comprenons pas très bien comment. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de prendre des décisions dont nous ne percevons pas toutes les répercussions. L'incidence cumulative de nombreuses ponctions d'eau, en vue ou non de l'exportation, préoccupe beaucoup tous les Canadiens.

Dans une étude qu'elle a menée en 1985, la Commission mixte internationale fait maintes fois ressortir cette question en rapport notamment avec les Grands Lacs. Diverses entreprises d'exportation à l'incidence apparemment négligeable risqueraient de créer des pressions en vue d'ouvrir les Grands Lacs et d'autres plans d'eau à d'autres entreprises commerciales. Les conséquences sont certes imprévisibles.

[Français]

Nous devons protéger notre eau. C'est notre devoir de continuer à développer des techniques avancées dans la gestion et la conservation de l'eau, les ressources globales de l'eau tendant vers l'épuisement et les autres pays cherchant du leadership de la part du Canada.

[Traduction]

Nous pourrons mieux jouer notre rôle à cet égard à l'avenir si nous prenons maintenant des mesures pour protéger nos ressources en eau douce pour les générations futures. Les députés ici présents ont beau débattre aujourd'hui de la meilleure façon d'interdire à l'avenir la ponction de grandes quantités d'eau douce, à des fins d'exportation ou non, il importe que tout débat public sur cette question cruciale débute dans la vérité.

Comment pourrais-je être plus clair? Le Canada n'est pas à la veille d'ouvrir les vannes.

 

. 1225 + -

Tout d'abord, pour des simples raisons économiques. Le Canada n'exporte pas de grandes quantités d'eau douce à l'heure actuelle parce que cela n'est pas viable au plan économique. L'expédition par navire-citerne, pipe-line ou par d'autres moyens est prohibitive par suite du coût élevé du transport et de l'infrastructure et de la faible valeur du produit à l'heure actuelle. Des entrepreneurs continuent d'explorer et de proposer des initiatives d'exportation, mais on n'est pas prêt d'en trouver une qui soit rentable. Parmi les rares initiatives qui fonctionnent, aucune ne vise des fins commerciales. Elles se limitent à partager de l'eau traitée avec quelques localités américaines voisines et, dans quelques cas, à expédier par camion de petites quantités d'eau souterraine vers les États-Unis.

Nous ne nous attendons pas à une poussée des exportations d'eau ni maintenant ni dans un proche avenir. En l'absence de la menace immédiate d'une poussée des exportations d'eau, voire d'une légère hausse de celles-ci, il est essentiel que nous abordions cette question très complexe d'un point de vue responsable en gardant à l'esprit que les besoins en eau de la planète pourraient augmenter considérablement un de ces jours. Nous devons veiller à prendre des mesures dès maintenant afin de garantir la protection de notre environnement pour les générations à venir. Nous devons résister aux tentations d'électoralisme et aux solutions temporaires.

Une approche globale qui reconnaît des responsabilités partagées en matière de gestion des eaux est exactement ce qu'il nous faut. Nous devons travailler de concert avec nos partenaires territoriaux et provinciaux, entre autres, à la mise au point d'une stratégie globale permettant de régler le problème du premier coup. Nous devons veiller à ce que les mesures interdisant les exportations eau à grande échelle ne frappent pas par erreur les utilisations actuelles d'eau, comme l'eau embouteillée.

L'exportation de produits à valeur ajoutée comme l'eau de source embouteillée est rentable. Il existe peu de preuves montrant que l'interdiction des exportations à faible échelle puisse se justifier pour des motifs écologiques. Les exportations d'eau embouteillée s'élèvent à 240 millions de litres par an et sont évaluées à 173 millions de dollars environ.

Il y a quelques instants, j'ai mentionné une deuxième raison pour laquelle les Canadiens ne devraient pas trop s'inquiéter que les multinationales n'attendent que le moment de pomper toute l'eau de nos lacs au point de les assécher. Grâce, en bonne partie, à la Constitution canadienne, les provinces ont assumé leurs responsabilités en matière de gestion de l'eau. Le gouvernement fédéral est responsable des eaux frontalières, en vertu du traité de 1909 sur les eaux frontalières. Les provinces sont responsables des eaux se trouvant sur leur territoire.

Dans le cadre des consultations qui ont eu lieu l'été et l'automne derniers, le gouvernement fédéral a discuté avec les provinces du réseau sans cesse grandissant de politiques, de lois et de règlements qui sont en place ou qui sont sur le point d'être mis en oeuvre pour interdire les transferts entre bassins hydrographiques et le prélèvement de grandes quantités d'eau à l'intérieur des limites des provinces. Six des dix provinces ont déjà ou cherchent à adopter des lois, des règlements ou des politiques concernant les exportations d'eau ou le prélèvement de grandes quantités d'eau des bassins hydrographiques. Par exemple, dans l'ouest du Canada, la loi de la Colombie-Britannique sur la protection de l'eau interdit qu'on sorte de l'eau de la province sauf dans des contenants de 20 litres ou moins ou en vertu des contrats existants de transport d'eau par camion-citerne.

La modification de 1996 à la loi sur l'eau de l'Alberta est entrée en vigueur avec la promulgation du règlement d'application le 1er janvier 1999. Cette loi empêche l'exportation d'eau non traitée sans approbation législative spéciale. Le Manitoba s'oppose aux transferts entre bassins hydrographiques. La Saskatchewan a récemment annoncé qu'elle continuera de présenter des mesures législatives concernant le prélèvement de l'eau de ses bassins hydrographiques. L'Ontario a une nouvelle politique empêchant le transfert de l'eau de ses bassins hydrographiques, y compris les Grands Lacs. Elle a annoncé récemment son intention de prendre des règlements pour assurer le respect de cette politique. Le Québec effectue actuellement un examen public de sa politique en matière d'eau. Quant à la Nouvelle-Écosse, elle diffusera bientôt une stratégie de gestion des ressources en eau.

Nous avons toutes les raisons de croire que les provinces régleront la question des exportations d'eau. Nous savons que cela se produira très prochainement. Ces nombreux mécanismes législatifs sont déjà en place ou le seront sous peu. Il semble clair que l'appui à l'égard de la motion à l'étude aujourd'hui s'étendra bien au-delà de cette Chambre, ce qu'il est important de souligner. Je suis impatient de voir le résultat du vote qui aura lieu plus tard aujourd'hui afin que nous puissions régler rapidement cette très importante question. Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine, et je serai heureux d'y participer.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur une motion d'opposition présentée par le NPD. L'objectif général de la motion, c'est essentiellement de protéger la souveraineté du Canada sur son eau. Je ne saurais appuyer la voie choisie par le NPD pour ce faire, mais je crois qu'aucun Canadien ne s'opposerait à l'idée que le Canada doit avoir le contrôle de ses eaux. Nous devons décider ce que nous ferons de notre eau et peu importe ce que nous décidons, les Canadiens doivent passer au premier rang de nos préoccupations.

 

. 1230 + -

Le Parti réformiste appuie depuis longtemps l'idée que les Canadiens doivent détenir la souveraineté sur leurs réserves d'eau. Nous avons déclaré que nous aurions aimé modifier l'accord de libre-échange canado-américain et l'ALENA pour refléter cette position. Malheureusement, cela ne s'est pas fait et il faut se demander pourquoi.

En 1988, lorsque le gouvernement conservateur a négocié l'accord de libre-échange avec les États-Unis, la question de l'eau n'a pas été abordée. On s'est donc demandé si l'eau était visée par l'accord. Cela a suscité de grands débats.

Entre la signature de cet accord et les négociations de l'ALENA, ces débats se sont poursuivis et on aurait pu remédier à une situation ambiguë découlant de l'accord de libre-échange lui-même.

Le premier ministre actuel a déclaré à plusieurs reprises que l'eau ne serait visée par aucun accord qu'il signerait. Dans le livre rouge des libéraux, il est dit que l'ALENA donne l'occasion de corriger les défauts de l'accord de libre-échange avec les États-Unis. D'après certaines paroles prononcées à l'époque par le premier ministre, on peut présumer qu'il jugeait que l'eau n'était pas suffisamment protégée.

Je vous lis quelques citations du premier ministre pour confirmer ce que j'avance. Le 19 novembre 1993, le premier ministre déclarait:

    L'eau et l'Accord de libre-échange nord-américain sont deux choses distinctes. L'eau demeure sous le contrôle du gouvernement canadien. Je peux vous en donner l'assurance.

Je ne crois pas que ce soit le cas et je vous expliquerai pourquoi dans un moment.

Quelques jours auparavant, il avait déclaré:

    Tant que je serai premier ministre, je n'autoriserai pas d'exportations de grandes quantités d'eau et je ne conclurai pas avec d'autres pays des accords commerciaux bilatéraux qui obligent le Canada à exporter de l'eau.

Penchons-nous un moment sur ce qu'il a effectivement obtenu. Au moment des négociations de l'ALENA, le gouvernement libéral a déclaré qu'il ne signerait pas cet accord à moins qu'il ne comprenne une entente relative à la main-d'oeuvre et à l'environnement. Nous pouvons penser, d'après les commentaires du premier ministre, que celui-ci allait expliquer pourquoi il ne signerait pas l'ALENA à moins d'obtenir aussi une exemption précise à l'égard de notre eau.

Il a obtenu une exemption à l'égard des billes brutes et du poisson non transformé, mais, pour une raison ou pour une autre, les exportations possibles de grandes quantités d'eau douce n'ont pas été incluses. Il a conclu un accord parallèle qui n'est pas suffisant et qui n'aborde pas le problème étant donné qu'il s'agit d'une annexe qui ne fait pas partie de l'accord proprement dit.

Voici ce que dit cet accord parallèle.

    L'ALENA ne prévoit aucun droit aux ressources en eau naturelle de l'une ou l'autre partie à l'accord. À moins que, sous une forme ou l'autre, elle ne fasse l'objet de commerce et ne soit devenue une marchandise et un produit, l'eau n'est pas visée par les dispositions de quelque accord commercial que ce soit, y compris l'ALENA. Et aucune disposition de l'ALENA n'oblige les signataires à exploiter cette eau à des fins commerciales ni à commencer à exporter de l'eau sous une forme ou sous une autre.

L'extrait essentiel de l'accord parallèle dit que «À moins que l'eau ne fasse l'objet de commerce et ne soit devenue une marchandise et un produit...»

Qu'est-ce que cela signifie? Quand les États-Unis ou le Mexique peuvent-ils demander de l'eau au Canada? Comme nous le savons, l'eau est de compétence provinciale. En principe, n'importe quelle province peut dire qu'elle souhaite exporter de l'eau, mais je ne crois pas que cela arrive. Ce ne serait pas suffisant.

 

. 1235 + -

Il suffit que l'eau devienne un bien marchand. Cela pourrait être fait au pays par des entreprises canadiennes. Nous ne pouvons pas dire alors que des entreprises américaines ou mexicaines ne peuvent avoir accès à une nappe d'eau donnée.

Le premier ministre a laissé filer l'occasion. Il a déclaré qu'il voulait protéger la souveraineté du Canada sur ses réserves d'eau douce, mais il n'a pas obtenu la reconnaissance de cette souveraineté. Il a obtenu un accord parallèle qui prévoit essentiellement que lorsque des grandes quantités d'eau sont commercialisées à l'intérieur du Canada, toutes les parties à l'ALENA et à l'Accord de libre-échange pourront y avoir accès.

Voyons comment cela pourrait se réaliser. Plusieurs provinces ont proposé des projets à cette fin. Si une province décidait de vider un lac de ses eaux pour les vendre à une société canadienne, ce serait suffisant pour déclencher le mécanisme prévu par l'accord. En effet, les dispositions de non-discrimination de l'ALENA interdisent alors à la province d'empêcher des sociétés américaines ou mexicaines d'accéder à cette ressource.

Ce n'est peut-être pas une mauvaise chose en soi, mais n'essayons pas de duper la population. Nous n'exerçons aucune souveraineté, aucun contrôle sur nos ressources en eau en vertu de l'accord qui lie le Canada au Mexique et aux États-Unis. Cette souveraineté n'existe tout simplement pas. La seule façon d'empêcher l'exportation de quantités d'eau est de coopérer avec les provinces pour leur faire prendre conscience que si l'eau d'une source donnée est commercialisée, des sociétés étrangères pourront aussi y avoir accès.

Il est important d'appuyer la motion présentée par le Nouveau Parti démocratique si nous voulons permettre au Canada d'exercer le contrôle de ses ressources en eau. Nous devons établir un plan d'action et ce serait une façon de le faire. Les provinces ne sont pas obligées de délivrer un permis à une société pour mettre en place une industrie nationale d'exportation des eaux. Les provinces ont le droit d'accepter ou de refuser l'accès à leurs ressources en eau, tout comme elles le font pour les projets d'exploitation forestière. Dans les zones d'aménagement forestier en Alberta ou en Colombie-Britannique, le gouvernement provincial a le droit de permettre à une entreprise d'exploiter une certaine quantité d'arbres à l'intérieur de ces zones. Les provinces n'ont toutefois pas le droit de refuser l'accès aux ressources à des sociétés américaines ou mexicaines si une société canadienne a obtenu ce droit d'accès.

Nous devons faire preuve de prudence à l'égard de cette disposition. N'essayons pas de duper la population. Ce sera pour nous la seule façon de contrôler nos ressources en eau.

J'ignore ce que la ministre de l'Environnement compte inclure dans la mesure législative qu'elle présentera dans quelques semaines, mais il me semble que la coopération fédérale-provinciale s'impose si nous voulons demeurer maîtres de nos eaux.

Il est important que les Canadiens restent maîtres de leurs eaux. Nous devons pouvoir décider de ce que nous ferons de notre eau. Je n'irai pas jusqu'à dire que les Canadiens ne verront pas un jour le besoin de vendre de l'eau mais, à mon avis, nous n'en sommes pas là.

C'est une question chargée d'émotion. On embouteille de l'eau à des fins commerciales, soit. Mais les transferts entre bassins hydrographiques sont une toute autre chose et ils effraient la population. J'exploite une ferme en Alberta. Je sais ce qui peut se produire quand on modifie des cours d'eau. C'est une question chargée d'émotion.

Il importe que nous nous penchions sérieusement sur la motion qu'a présentée aujourd'hui le Parti néo-démocrate. Nous appuierons la motion principale et nous encourageons les autres à nous suivre dans cette voie de façon à faire ressortir la nécessité d'une collaboration entre le gouvernement fédéral et les provinces si nous voulons conserver la maîtrise de nos eaux.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président, la compétence en matière d'eau occupait une grande place dans le discours du député. J'ai parlé, lors d'un discours précédent, de la compétence en matière de droits d'accès à l'eau pour les autochtones. J'aimerais que le député nous fasse part de son point de vue sur cette question.

 

. 1240 + -

La motion porte que «le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces», mais il semble y avoir des questions non résolues en ce qui concerne les obligations issues des traités qui ont présidé à l'acquisition du pays et les droits d'utilisation des ressources.

L'eau est une préoccupation de premier plan, tout comme le sont un grand nombre de droits ancestraux dont on a parlé récemment.

M. Charlie Penson: Monsieur le Président, que je sache, l'eau est une ressource naturelle; l'eau relève par conséquent de la compétence des provinces en vertu de la Constitution canadienne.

S'il existe des inquiétudes dans le domaine dont parle mon collègue, il faut en discuter à l'échelon provincial pour voir s'il ne serait pas possible d'en arriver à une entente.

M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, en ce qui concerne la compétence, il y a aussi la question des droits souverains du Canada quant aux ressources en eau douce du pays.

Que pense le député de l'idée de privatiser l'exploitation de certaines sources d'eau situées sur un terrain municipal, que l'eau provienne de puits ou d'aquifères? Je sais que tout le monde a présumé que les administrations municipales et locales étaient chargées de gérer l'eau et avaient compétence en la matière, mais dans certaines provinces, on a récemment privatisé l'eau et les services sanitaires.

Que pense le député de ce mouvement vers la privatisation de ces sources d'eau, qui risque inévitablement d'avoir des répercussions sur l'eau douce?

M. Charlie Penson: Monsieur le Président, je suis bien au courant de la question de l'eau souterraine et des principales sources d'eau pour les Canadiens. Ce dossier est très important.

Dans ma circonscription, Peace River, beaucoup de mes voisins sont des agriculteurs. Il y a aussi une industrie pétrolière qui utilise de l'eau douce provenant d'aquifères pour récupérer plus de pétrole de leurs champs pétrolifères.

La question qui vient d'être soulevée est très importante. Nous devons avant tout nous assurer de protéger les approvisionnements en eau destinés aux résidences, puisque l'industrie a accès à d'autres sources d'eau.

L'eau salée provenant d'aquifères peut aussi servir à inonder les champs pétrolifères, de telle sorte qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser de l'eau douce. C'est un dossier qui me préoccupe.

Il y a dans ma région un certain nombre de personnes dont les puits sont en train de se tarir ou dont le niveau d'eau est en train de baisser. C'est probablement parce que l'industrie en pompe l'eau depuis une centaine d'années. L'industrie ne devrait pas avoir accès à nos aquifères d'eau douce, qui ont pris des siècles pour produire la qualité d'eau que nous avons actuellement.

Il faut être très prudent pour ce qui est de permettre à l'industrie de se servir de l'eau potable. Celle-ci est une ressource précieuse dont la production exige beaucoup de temps. L'industrie devrait pouvoir utiliser l'eau à ses fins, mais seulement l'eau non potable, de façon à ne pas faire concurrence aux besoins en eau potable des Canadiens.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de me lever aujourd'hui pour parler de la question du contrôle de nos ressources en eau.

Je viens d'une région explorée par Palliser qui, à son retour dans son pays, avait déclaré qu'elle était inhabitable, qu'on ne pouvait y vivre. Poutant, nous y habitons et nous en avons fait un jardin d'éden où poussent des cultures spécialisées.

 

. 1245 + -

Nous y avons fondé des villes, des bourgs et des villages. Nous avons une base agricole solide et diversifiée, et tout ça grâce à l'irrigation.

Ma circonscription est unique; en effet, la rivière Oldman traverse Lethbridge, puis Medicine Hat, avant de couler vers l'est puis le nord pour aller se jeter dans la baie d'Hudson. La rivière Milk, qui traverse le sud de ma circonscription, coule vers le sud et se jette dans le golfe du Mexique.

L'eau est un élément étrange, qui prend diverses formes, et qui joue un rôle important dans nos vies. En fait l'eau nous est indispensable. C'est la ressource naturelle la plus importante. Ce n'est pas une ressource comme les autres; elle est unique car sans elle nous ne pouvons pas vire. On pourrait apprendre à se passer de charbon. On pourrait apprendre à se passer de bois et probablement de métaux précieux. La technologie actuelle nous permet d'être moins dépendants des ressources naturelles brutes, mais elle ne nous permet pas de vivre sans eau.

Bien que chaque foyer canadien paye tous les mois sa facture d'eau, il est impossible de mettre un prix sur la valeur de l'eau douce pour les êtres humains, les plantes, les animaux et les écosystèmes.

Au Canada particulièrement l'eau revêt une certaine mystique. Elle a le pouvoir de susciter des émotions très fortes chez les Canadiens, tant sur le plan intellectuel qu'émotif. Il n'est donc pas étonnant que, lorsqu'elle est menacée, ils réagissent vivement. Nous sommes ici aujourd'hui pour parler des raisons qui sont la cause de ces émotions fortes. Nous sommes ici pour discuter de l'avenir de notre ressource la plus précieuse, ressource qui est menacée.

Mes collègues néo-démocrates ont présenté une motion demandant qu'on prenne des mesures immédiates pour que le Canada demeure maître de ses ressources en eau. La motion amendée dit ceci:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces, imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, et devrait présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques, et ne devrait être partie à aucun accord international qui nous obligerait à exporter notre eau contre notre volonté, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Je suis heureux que nous ayons enfin la possibilité d'examiner cette question à la Chambre, je regrette seulement qu'il ait fallu tant de temps pour en arriver là. Le gouvernement libéral a maintes et maintes fois promis de présenter une mesure législative afin de protéger nos ressources en eau. Mais on attend toujours.

En 1993, l'actuel premier ministre avait promis qu'il obtiendrait une exemption spéciale aux termes de l'ALENA. Des exemptions ont déjà été obtenues dans le cas des billes brutes, des industries culturelles et de certains produits du poisson.

En novembre 1993, le premier ministre a garanti aux Canadiens que notre eau n'était pas à vendre, que le gouvernement garderait le contrôle de l'eau, que l'eau n'était pas à vendre, que si nous désirions la vendre, c'était nous qui déciderions.

Nous savons tous que l'ALENA a été signé alors qu'il ne prévoyait aucune exemption en ce qui concerne l'eau. Le problème est que la question de l'eau n'a jamais été bien examinée. On ne lui a jamais accordé l'importance voulue durant les négociations, on ne lui a jamais accordé l'importance qu'elle représente aux yeux des Canadiens.

En mars 1996, le député de Kamloops avait présenté un projet de loi visant à interdire l'exportation d'eau par transfert entre bassins hydrographiques. C'est durant le débat sur ce projet de loi que le secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale a dit à la Chambre que le gouvernement libéral consultait les Canadiens, que le gouvernement était en train d'examiner ses programmes et sa législation ayant trait au soutien des ressources en eau du Canada. Il avait promis que, après cet examen, on pourrait traiter la question de l'eau dans une perspective globale, notamment par des mesures législatives sur l'exportation de l'eau. Depuis la fin de ce débat, il y a plusieurs années, nous n'avons rien vu venir en fait de mesure qui protégerait la souveraineté du Canada à l'égard de ses eaux.

Le 15 mai 1998, le député de Davenport a demandé à la ministre de l'Environnement si elle prévoyait présenter un projet de loi interdisant l'exportation de grandes quantités d'eau douce. On lui a alors assuré qu'il n'avait pas de raisons de s'inquiéter parce que la présentation d'un projet de loi concernant nos eaux était prioritaire pour son gouvernement.

Encore une fois, en octobre, quand on a posé des questions au gouvernement à propos de la politique nationale sur l'eau, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères avait assuré à la Chambre que l'eau était une question de première importance pour le pays et que son gouvernement présenterait une stratégie détaillée à l'automne sur cette question. Depuis l'automne, je n'ai pas vu de stratégie détaillée et encore moins de mesure de protection de notre ressource la plus précieuse, l'eau douce.

 

. 1250 + -

Avec le temps, la question du contrôle de l'eau douce est devenue de plus en plus importante. Nous avons vu ces derniers temps des pays étrangers adopter des mesures en ce qui a trait à nos ressources en eau douce.

Le gouvernement s'est toujours montré incapable de protéger les intérêts des Canadiens. Je suis très inquiet de l'avenir de nos ressources en eau douce. Nous savons tous que le Canada a d'importantes réserves d'eau douce et qu'il possède 25 p. 100 des réserves mondiales d'eau et 9 p. 100 des ressources renouvelables. J'aimerais présenter certains scénarios, donner des exemples de ce qui est arrivé dans le monde et expliquer certaines des propositions qui ont été faites dans le domaine de l'eau douce.

Au cours du dernier siècle, bon nombre des guerres qui ont eu lieu au monde ont eu rapport au pétrole. Le pétrole a toujours été considéré comme une des ressources les plus précieuses, valant plus que son pesant d'or. Au cours de la crise du pétrole, dans les années 1970, nos économies ont presque été anéanties parce qu'elles n'avaient plus accès à du pétrole à bon marché.

Nous disposons d'une ressource qui est encore plus précieuse que le pétrole. Il s'agit de l'eau douce. On estime que la consommation mondiale d'eau douce double à tous les vingt ans. D'ici 2025, près des deux tiers de la population mondiale connaîtront des problèmes d'approvisionnement en eau.

Les États-Unis sont le plus gros utilisateur d'eau par habitant au monde. Une bonne partie de la pression qui a été exercée pour nous faire exporter de l'eau douce provient des États-Unis. Aussi, certains scénarios ont été proposés pour étude, dont celui d'une entente nord-américaine sur l'eau et l'électricité visant à détourner le cours supérieur du Yukon, de la Skeena, de la rivière de la Paix, du Fraser et du Columbia pour emmagasiner l'eau dans l'immense sillon des Rocheuses avant de l'envoyer vers les États-Unis assoiffés. Le canal Grand est un autre mégaprojet d'ingénierie visant à détourner des cours d'eau canadiens pour alimenter l'industrie américaine. J'aimerais également ajouter qu'un député libéral a demandé la tenue d'études sur la faisabilité de certains de ces plans.

Alors qu'il y a des mouvements de populations et que les sécheresses deviennent plus graves, l'eau devient de plus en plus un sujet de discussion. En donnant ces exemples, je tiens simplement à préciser qu'il est plus important maintenant que jamais dans notre histoire de protéger le pouvoir de gérer nos ressources en eau douce dans l'intérêt des Canadiens. Nous avons besoin d'une politique globale sur l'eau, une politique négociée avec les provinces pour veiller à ce que le Canada et les Canadiens continuent de contrôler leur eau.

Les provinces ont reçu le contrôle des ressources naturelles aux termes de notre Constitution. Le gouvernement fédéral est responsable, pour sa part, du commerce international. Il est donc essentiel que le gouvernement fédéral entreprenne immédiatement des pourparlers avec les provinces afin d'établir une politique claire et globale.

Le Parti réformiste appuie la protection du droit souverain du Canada sur ses eaux et ses cours d'eau. Il reconnaît que le Canada est placé dans une position particulière en tant que gardien de ressources en eau douce et qu'il faut, pour préserver notre patrimoine national, protéger la qualité de nos eaux, afin de maintenir la biodiversité, de protéger la santé et la sécurité, de protéger la qualité de vie des Canadiens et de favoriser un développement économique réfléchi. Il est regrettable que le gouvernement ne partage pas ce point de vue.

Il est vrai qu'on ne parle pas précisément de l'eau dans l'ALENA. Nous permettons l'exportation d'eau en bouteilles. Cependant, on reconnaît quand même dans un accord parallèle que l'eau, sous sa forme naturelle, dans les lacs et les cours d'eau de notre pays, n'est pas considérée comme un bien. Les experts en commerce craignent que cet accord parallèle n'aille pas assez loin. Mon collègue de Peace River a mentionné plus tôt que nous devions rouvrir l'ALENA dans le cadre de discussions trilatérales et exiger que l'eau soit assujettie à la même exemption que celle accordée à d'autres ressources naturelles.

Le gouvernement et, en fait, le premier ministre, ont promis à tous les Canadiens qu'ils allaient protéger nos eaux. Le premier ministre a garanti que nos eaux demeureraient sous le contrôle du gouvernement canadien qui les administrerait dans l'intérêt des Canadiens. Ce n'est pas le cas. Il n'a pas rouvert l'ALENA et n'a pas obtenu l'exemption pour l'eau douce. En bref, il n'a pas bien protégé nos ressources en eau douce. Le défaut de promulguer les lois voulues entraîne un certain chaos et une certaine confusion et, comme nous pouvons le constater, des contestations de notre souveraineté sans parler des poursuites de centaines de millions de dollars.

Il est temps que le gouvernement agisse immédiatement pour protéger nos eaux douces. Il est temps de joindre le geste à la parole.

M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, le député exhorte certainement le gouvernement fédéral à agir et à réexaminer les compétences en matière de ressources en eau.

 

. 1255 + -

Je voudrais souligner, aux fins du compte rendu et pour la gouverne du député, que la législation canadienne en matière de ressources en eau semble inclure les dispositions de la common law sur les droits des riverains, lesquelles interdisent la propriété de l'eau à son état naturel. La politique sous-jacente, c'est que le grand public a le droit d'utiliser l'eau dans une mesure raisonnable, par exemple, pour la pêche et la navigation.

Ce n'est que lorsque l'eau est contenue ou contrôlée par une personne qu'on peut la qualifier de bien personnel. L'eau de piscine et l'eau en bouteille constituent des exemples de biens personnels qui peuvent désormais être vendus. Le droit canadien n'indique pas à qui appartient l'eau à son état naturel.

Nous pouvons jeter un coup d'oeil aux eaux de surface et aux nappes d'eau de surface. Nous savons que les rivières coulent et que les lacs retiennent l'eau qui vient des rivières. Mais en ce qui concerne les eaux souterraines, les couches aquifères, les propriétaires de terres non adjacentes à ces eaux n'ont aucun droit de propriété sur ces eaux. Cependant, lorsque l'eau souterraine est régie par la règle de la capture, un propriétaire foncier peut utiliser autant d'eau souterraine qu'il peut capturer. C'est ce que prévoit le droit canadien.

Lorsque nous utilisons le terme juridique capturer, est-il question d'eau contenue ou contrôlée? Cette question soulève une grande préoccupation au sujet de la privatisation et des achats éventuels de nos ressources en eau. Notre eau est soit souterraine, soit de surface. Voilà la difficulté avec laquelle les Canadiens doivent composer.

À moins que le gouvernement fédéral n'agisse et ne clarifie ces compétences, ces responsabilités et ces droits, nous naviguerons en eaux inconnues, pour ainsi dire, lorsque le prochain millénaire arrivera, car nous ne protégeons pas les ressources en eau pour les générations de Canadiens qui suivront.

À mon avis, il faut relever le défi dès maintenant.

M. Rick Casson: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Rivière Churchill d'avoir posé cette question. Nous passons beaucoup de temps ensemble au comité de l'environnement; je comprends ses préoccupations et j'apprécie son expérience touchant les questions environnementales de même certes que les questions autochtones et leur rapport avec l'environnement. Certaines des révélations du député nous en ont appris beaucoup sur la façon dont les autochtones considèrent l'environnement et l'action réciproque qu'il a avec leur vie. Les observations du député expriment certainement bien l'objet du débat d'aujourd'hui.

Nous possédons une ressource importante, synonyme de vie pour tout ce qui existe. Faute d'une gestion convenable de cette ressource, de nombreux scénarios et différentes lois entrent en jeu. Certains pensent qu'après la construction d'un barrage, le lac qui se forme derrière le barrage constitue un réservoir. Une fois le barrage érigé, est-ce que cette eau se trouve dans un réservoir? Peut-elle alors être traitée de façon différente? Les aquifères sont traités de façon différente.

Nous devons certainement prendre le temps d'y réfléchir, et le gouvernement doit prendre le temps de se réunir avec les autorités provinciales pour y réfléchir et résoudre le problème. C'est ce que nous avons réclamé, mais cela ne s'est pas fait. Cette inaction a ajouté à la confusion et a avivé l'inquiétude des Canadiens. Les Canadiens veulent avoir le contrôle sur leur eau, purement et simplement, à une majorité écrasante. Très peu d'enjeux peuvent exciter les émotions autant que les discussions au sujet de l'eau.

Au cours des 20 années où j'ai participé activement à la vie politique municipale, l'assainissement de l'eau et l'approvisionnement en eau pour les habitants de nos localités ont toujours figuré au sommet de la liste des priorités de toutes les localités canadiennes. Pour veiller à ce que nous ayons de l'eau pure et pour veiller à ce que nous conservions notre souveraineté en la matière, nous devons inciter le gouvernement à entreprendre l'élaboration d'une politique de l'eau.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, comme mon collègue l'a fait observer, pour la plupart des Canadiens, l'eau est une question qui soulève beaucoup d'émotion. Nous sommes très sensibles à notre réputation de coupeurs de bois et de porteurs d'eau.

Les grumes non traitées font l'objet d'une exception dans l'ALENA. Ne serait-il pas parfaitement normal que ce soit la même chose pour l'eau?

 

. 1300 + -

La question a été traitée dans l'intervention, mais je voudrais pousser le débat un peu plus loin. Une contradiction est nettement apparue ce matin, en ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral et des provinces dans tout le dossier de l'exportation d'eau en grandes quantités. Le secrétaire parlementaire a soutenu que la question était de compétence fédérale. Chose certaine, il y a encore des permis en vigueur aujourd'hui, car des provinces ont délivré des autorisations d'exporter de grosses quantités d'eau douce.

Que pense mon collègue du rôle des provinces, dans cette optique-là?

M. Rick Casson: Monsieur le Président, ma province, l'Alberta, a adopté récemment une loi sur les ressources en eau pour exercer un contrôle et résoudre les questions que nous avons soulevées. Au fond, même si le secrétaire parlementaire a dit que c'était une compétence fédérale, il n'en est rien. Les provinces doivent participer dès le départ à l'élaboration de la politique.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, l'eau est sans contredit un des sujets qui retiendront le plus l'attention à l'avenir. On commence à le comprendre. Le député a parlé des eaux souterraines.

Il faut rappeler que plus de 90 p. 100 de l'approvisionnement mondial en eau douce vient de nappes phréatiques qui sont, en définitive, des cours d'eau qui s'écoulent lentement dans le sol. Bien des gens pensent que cet approvisionnement vient des lacs, des rivières et des glaciers, mais il y en a 90 p. 100 qui vient des nappes phréatiques liées à des lacs et des rivières selon le cycle hydrologique.

Il est très important de déterminer qui est responsable de quoi. En Ontario, c'est le gouvernement provincial qui accorde les permis pour soutirer de l'eau. Dans le cas des Grands Lacs, cela se fait en vertu de traités internationaux, mais le fait est que le bassin hydrographique relève de la compétence des provinces. Il relève aussi du fédéral et d'États américains parce que, comme je l'ai dit, les nappes phréatiques sont des cours d'eau qui se déplacent lentement.

J'en arrive ainsi à un autre point très important dans le débat. La protection des nappes phréatiques exige une très grande vigilance de notre part. Il arrive fréquemment que des nappes phréatiques fournissant une eau potable d'excellente qualité soient contaminées et, quand cela se produit, il faut de nombreuses décennies avant que des solutions soient mises au point.

J'adresse ma question au député du Parti réformiste qui est intervenu dans le débat sur l'eau. Il a parlé des gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral. Convient-il qu'il nous faudrait presque une conférence très importante sur le sujet afin d'établir...

Le vice-président: À l'ordre s'il vous plaît. La période des questions est écoulée. Le député de Lethbridge peut répondre brièvement.

M. Rick Casson: Monsieur le Président, il va sans dire que des discussions devraient avoir lieu à un haut niveau, au niveau le plus élevé possible étant donné l'importance de la question.

 

. 1305 + -

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, il ne me semble que juste de reconnaître à ce stade-ci du débat qu'il y a consentement unanime pour appuyer la motion à l'étude aujourd'hui, surtout parmi ceux qui croient au rôle que le gouvernement du Canada doit jouer pour protéger les intérêts des Canadiens dans toutes les provinces.

Il semble toutefois régner une certaine confusion quant à un rapport quelconque qui existerait entre l'eau et l'ALENA. Certains intervenants qui m'ont précédé auraient l'impression que l'eau est visée par l'ALENA. Il serait donc souhaitable de dissiper ce malentendu une fois pour toutes, car il ne fait que miner la position du Canada devant les États-Unis et ses partenaires dans le cadre de l'ALENA.

Il n'est nullement question de l'eau dans l'ALENA, exception faite de l'eau embouteillée. Plus vite nous dissiperons ce malentendu, mieux ce sera, car il ne faut pas laisser entendre à la Chambre que l'eau est visée par l'ALENA. Seule l'eau embouteillée y est mentionnée, comme s'en rendraient compte tous ceux qui prendraient le temps de lire la partie pertinente de l'ALENA.

Par conséquent, tout débat sur cette question qui laisserait l'impression que nous devons réviser l'ALENA ne contribuerait à long terme, qui sait même à court terme, qu'à affaiblir la position du Canada, car les propos qui sont tenus au Parlement ont certainement du poids.

La motion, qui est fort louable, met l'accent sur les échanges commerciaux et c'est de là que viennent les pressions exercées à l'heure actuelle. Il est toutefois rafraîchissant de lire ce que la British Columbia Wildlife Federation a écrit il y a une quinzaine d'années et qui est repris dans «Vers un renouveau: Rapport définitif de l'Enquête sur la politique fédérale des eaux», rapport d'une commission d'enquête instituée en 1983, sous le gouvernement Trudeau. Voici ce qu'il dit:

    La question dépasse largement la protection de l'habitat du poisson, l'irrigation ou le développement énergétique, les emplois ou les loisirs. C'est une question fondamentale par rapport à l'ensemble de la condition humaine.

Voilà comment l'eau est décrite. Il est important d'insister sur le point que fait valoir la B.C. Wildlife Federation, puisqu'elle l'a si bien exprimé.

Il y a aussi les rapports que les Canadiens entretiennent avec l'eau. Nous avons entendu ce matin des interventions très passionnées sur cette question, et je voudrais ajouter à celles-ci un extrait qui figure à la page 130 de la version anglaise du rapport «Vers un renouveau». Voici:

    L'eau inspire aux Canadiens des sentiments particuliers. De prime abord, il semble déraisonnable de s'opposer à l'exportation d'une ressource renouvelable comme l'eau tout en appuyant les exportations de ressources non renouvelables comme les minéraux, le charbon et le gaz naturel. L'explication réside, du moins en partie, dans la valeur patrimoniale particulière que de nombreux Canadiens associent à nos ressources aquatiques.

J'insiste sur l'expression «valeur patrimoniale», car elle est extrêmement importante. Ces paroles inspirées sont celles de M. Pearse, qui a dirigé les travaux de la commission, qui a fait rapport au gouvernement conservateur en 1985 et dont les recommandations n'ont toujours pas été mises en oeuvre.

À l'époque, M. Pearse a recommandé une foule d'initiatives stratégiques liées à l'eau, dont des mesures de sécurité concernant l'eau potable, des programmes de recherche, des ententes intergouvernementales et des dispositions concernant les exportations d'eau.

À ce point-ci de la discussion, il convient de dire que le message fondamental du rapport de la commission d'enquête était, pour reprendre les paroles de Peter Pearse:

    Nous devons protéger l'eau comme un élément clé d'un environnement sain et gérer efficacement l'utilisation que nous en faisons comme s'il s'agissait d'une ressource économique.

 

. 1310 + -

Il s'est assurément déjà écoulé beaucoup de temps. Les députés de l'opposition l'ont signalé. Le moment est venu de prendre une décision à cet égard, non seulement selon les termes de la motion mais au-delà, de manière à englober la qualité et la conservation de l'eau et le concept de sécurité.

Nous devons redéfinir la sécurité. Nous devons nous éloigner graduellement du concept qui se limite à la sécurité militaire et le remplacer par un concept qui intègre les ressources naturelles. L'eau occupe assurément une place importante dans le sentiment de sécurité dont toute société a besoin pour le présent comme pour l'avenir.

Plusieurs demandes d'exportation d'eau ont déjà été faites ces derniers mois: une en Ontario, une en Colombie-Britannique et une autre, tout récemment, à Terre-Neuve. Il m'apparaît évident que le gouvernement fédéral doit agir et exercer le leadership nécessaire.

En juillet dernier, un panel interministériel de fonctionnaires représentant les Affaires étrangères et Environnement Canada ont débattu de la question de l'eau à Toronto. Le sujet a déjà fait l'objet de travaux importants au sein des ministères. Le moment est venu d'amener la question sur le plan politique.

En fin de compte, comme l'indique la motion, la décision qui sera prise devra affirmer le droit souverain des Canadiens. Les parlementaires et le gouvernement canadien ont donc un rôle de premier plan à jouer à cet égard.

La question de la qualité de l'eau mérite une attention plus marquée que cela n'a été le cas jusqu'à maintenant. Ces dernières années, la confiance des Canadiens dans la qualité de l'eau potable a diminué, comme en témoignent les ventes de plus en plus nombreuses de filtres à eau, d'eau en bouteilles, etc. Il court au sein de la population une impression, qui n'a pas encore été dissipée, selon laquelle la qualité de l'eau a diminué. C'est pourquoi nous devons intervenir à cet égard, en rétablissant la confiance des gens ou en prenant des mesures pour améliorer la qualité de l'eau, dont l'approvisionnement relève des municipalités.

La question de l'addition de chlore refait surface périodiquement dans les rapports de la Commission mixte internationale. Dans l'un de ses rapports, il y a trois ans, la commission a fait état de ses préoccupations au sujet des effets de cette substance sur la santé des humains. Il s'agit d'une question très délicate, car nous sommes tous conscients des avantages de l'utilisation du chlore comme désinfectant dans l'eau. Nous avons cependant reçu des signaux dont nous devrons tenir compte si notre préoccupation première, et je suis sûr que c'est le cas de tous les députés, est la qualité et la salubrité de l'eau.

On m'a fait savoir que je partageais mon temps de parole avec la députée de Barrie—Simcoe—Bradford. Je me conformerai donc à cette exigence et présumerai que mon temps de parole est terminé.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, je remercie le député de Davenport d'appuyer la motion.

Je tiens aussi à exprimer une préoccupation au sujet de la question qu'il a soulevée à propos de l'ALENA et des répercussions de l'ALENA sur les exportations de grandes quantités d'eau douce.

 

. 1315 + -

Le très distingué député siège ici depuis longtemps. Il sait que l'incidence possible de l'ALENA suscite de sérieuses questions à l'heure actuelle. Il y a eu un certain nombre de contestations de la part d'entreprises américaines qui veulent profiter de ce qu'elles prétendent être les dispositions de l'ALENA en ce qui a trait à l'exportation de grandes quantités d'eau douce.

À en juger par les poursuites judiciaires qui ont été entamées, par la société Sun Belt, par exemple, qui réclame plus de 100 millions de dollars de dommages conformément aux dispositions de l'ALENA, le député ne conviendra-t-il pas que, même si le Canada, les États-Unis et le Mexique croient vraiment que l'ALENA ne s'applique pas aux exportations d'eau douce, il pourrait fort bien y avoir un protocole d'entente ayant la même force et le même effet que l'ALENA lui-même rien que pour clarifier tout malentendu?

Sans cela, un harcèlement et des poursuites judiciaires continus sont évidemment toujours possibles. Compte tenu de cela, le député serait-il prêt à appuyer l'amendement et la motion principale?

L'hon. Charles Caccia: Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir soulevé une fois de plus la question de l'ALENA et de l'eau.

Je pourrais prétendre que la lune est faite de fromage gorgonzola et réclamer que cela soit infirmé par un protocole d'entente. Après avoir lu à plusieurs reprises les parties de l'ALENA qui couvrent l'eau, je suis convaincu que la seule allusion à l'eau porte sur l'eau embouteillée. Si des entreprises des États-Unis veulent prétendre le contraire, cela les regarde.

Cependant, je ne pense pas que nous devrions tomber dans le piège de ceux qui voudraient nous faire croire que l'eau est menacée par l'ALENA, car cela ne ferait que renforcer cette notion. Le texte est clair. Il n'y est question que d'eau embouteillée. Il est inconcevable que le Canada ait signé un accord menaçant l'eau. Je ne pense pas qu'un gouvernement sensé accepterait cela.

Par conséquent, je redis ce que j'ai déjà dit. La motion devrait être rejetée et ne devrait jamais être représentée au cours de la présente législature parce qu'elle ne fait que donner du poids aux arguments des personnes à l'extérieur du Parlement qui voudraient faire croire aux Canadiens que l'eau est incluse dans l'ALENA.

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le député de Davenport ne comprend pas. Puisque l'eau n'est pas spécifiquement exclue, elle est donc incluse. Le problème, c'est que l'eau est incluse. Les billes de bois et le poisson non conditionné sont exemptés des dispositions de l'ALENA parce que ces produits sont expressément mentionnés.

Ce que nous voulons, c'est que l'eau soit ajoutée à la liste des produits exclus. Nous voulons soustraire l'eau à l'ALENA. Puisque l'eau n'est pas expressément exclue, elle est par le fait même incluse. C'est le problème auquel nous nous attaquons aujourd'hui.

L'hon. Charles Caccia: Monsieur le Président, il peut y avoir une longue liste d'articles qui ne sont pas expressément exclus et que l'on souhaiterait exclure. Cependant, l'accord ne fait que ce qu'il dit qu'il fait. Si l'accord précise l'eau embouteillée et rien d'autre, il me semble que c'est très clair.

 

. 1320 + -

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, c'est une question importante que nous débattons aujourd'hui, une question qui touche de très près ma circonscription, celle de Barrie—Simcoe—Bradford, qui est actuellement confrontée à la nécessité de préserver l'un des principaux lacs de l'Ontario, le lac Simcoe.

Le Canada est un pays riche en eau. Nous sommes les gardiens de 9 p. 100 des ressources mondiales d'eau douce. Mais, dans le contexte de la motion à l'étude, il est important que les députés se rendent compte que l'exportation n'est qu'une des facettes de la gestion de cette ressource vitale.

Même si les Canadiens bénéficient de normes parmi les plus élevées dans le monde pour ce qui est de la qualité de l'eau, la pollution demeure un problème important dans certaines de nos étendues d'eau. Dans certaines régions, les gens ne peuvent pas se baigner ou manger le poisson qu'ils pêchent ou boire l'eau sans qu'elle ait été purifiée.

La qualité de l'eau douce et de l'eau salée au Canada est affectée par trois grandes sources de pollution, soit les substances toxiques, les excès de substances nutritives et la sédimentation. Les substances toxiques de source industrielle, agricole ou domestique sont d'importants polluants dans nos eaux. Ces substances comprennent les éléments traces de BPC, de mercure, de dioxines, de furanes et de certains pesticides. Certaines de ces substances s'accumulent dans la chaîne alimentaire au lieu de se décomposer dans l'environnement.

Ces substances entrent dans nos eaux de diverses façons, dont les sources industrielles comme l'exploitation minière et la sidérurgie, les accidents comme les déversements de pétrole ou de produits chimiques, les sites contaminés comme les mares de goudron de Sydney, en Nouvelle-Écosse, les eaux usées municipales, et les polluants atmosphériques venant du Mexique, des États-Unis et de l'Europe qui se déposent au Canada sous forme de neige ou de pluie.

Les excès de substances nutritives comme l'azote et les éléments phosphorés proviennent principalement des eaux d'égouts urbains et des eaux de ruissellement des fermes contenant des fertilisants et des matières animales. Ces substances nutritives peuvent causer une croissance excessive des plantes aquatiques qui, lorsqu'elles meurent et se décomposent, causent l'épuisement de l'oxygène dissous et tuent les poissons.

La sédimentation, un problème que nous avons dans le lac Simcoe, est une augmentation de la quantité de particules solides présentes dans l'eau, augmentation causée principalement par les activités humaines comme l'agriculture, l'exploitation forestière et la construction. Le dépôt de sédiments peut étouffer les aires de nutrition et de ponte des poissons et tuer les organismes aquatiques.

[Français]

La pollution de l'eau a des conséquences sur notre santé, notre environnement et notre économie. Il est reconnu que quelques-unes des substances toxiques que nous retrouvons dans l'eau causent le cancer. D'autres représentent une menace pour les systèmes reproductifs et immunitaires et ont déjà été dépistées dans le lait maternel de certaines mères. La santé de tous les Canadiens est menacée, mais plus particulièrement celle des jeunes enfants, des aînés et des autochtones du Nord qui dépendent des animaux sauvages locaux comme source d'alimentation.

La pollution réduit la valeur de l'eau aux yeux des industries et hausse le coût d'utilisation ménagère de cette ressource. La valeur économique de l'eau douce canadienne utilisée par les particuliers et les entreprises est estimée être entre 15 et 20 millions de dollars par année.

[Traduction]

Le Canada a fait des progrès dans la lutte contre une foule d'importants problèmes de pollution de l'eau. Par exemple, il y a 30 ans, le lac Érié était largement considéré comme mort à cause de la présence excessive de nutriments provenant des déchets municipaux. Aujourd'hui, quelques-unes des espèces fauniques habitant initialement le lac sont revenues, et la pêche commerciale a repris.

Des améliorations récentes de la qualité de l'eau se sont traduites par une baisse des niveaux de DDT détectés dans le lait maternel des mères du sud de l'Ontario et du Québec depuis le début des années 70.

Les usines de pâte ont réduit les rejets de dioxines et de furanes depuis 1988 par suite d'une réglementation fédérale et provinciale plus sévères en matière d'effluents papetiers. Nombre de secteurs de récolte de crustacés et de coquillages et de poisson de fond de la Colombie-Britannique que nous avons fermés à cause des polluants ont été rouverts. Des initiatives relatives à l'écosystème de plusieurs importants bassins hydrographiques ont contribué à l'amélioration de la qualité de l'eau. Dans le cadre du plan d'action du Saint-Laurent, la pollution causée par 50 industries prioritaires a été réduite depuis 1988. Dans le cadre du plan d'action des Grands Lacs, le port de Collingwood, en Ontario, a été restauré. Le plan d'action du Fraser s'est traduit par la réduction de 90 p. 100 de l'émission des produits chimiques toxiques servant à la préservation du bois.

 

. 1325 + -

[Français]

Le traitement des eaux usées a également évolué. Par exemple, des systèmes de traitement ont été installés par des municipalités et traitent jusqu'à 75 p. 100 des eaux usées au Canada. Par le biais de son programme d'infrastructures, le gouvernement fédéral a donné 700 millions de dollars aux communautés pour les aider à mettre sur pied et à améliorer leurs infrastructures traitant l'eau et les eaux usées.

[Traduction]

Le gouvernement du Canada s'attaque maintenant aux préoccupations relatives à la qualité de l'eau à l'aide de diverses mesures, y compris le renouvellement de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, la LCPE, et l'élaboration d'une stratégie fédérale en matière d'eau douce.

La ministre de l'Environnement et le Comité permanent de l'environnement sont engagés dans le processus de l'élaboration d'une nouvelle LCPE qui doit améliorer les mesures d'application aussi bien que le contrôle des polluants toxiques et autres. La stratégie en matière d'eau douce se fonde sur la nécessité de travailler de façon coopérative avec les provinces et les territoires afin de mieux intégrer les dimensions environnementale, économique et sociale de la gestion de l'eau douce.

Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, l'industrie et les collectivités collaborent également afin d'adopter des mesures de lutte contre les pires produits toxiques et les pires polluants, d'élargir la participation des entreprises canadiennes et d'établir des normes nationales.

Le Canada a réduit nettement la pollution de ses cours d'eau, mais l'avenir continue de présenter d'énormes défis, au fur et à mesure que les problèmes environnementaux gagnent en importance et en complexité. La demande mondiale de pesticides et de produits chimiques fabriqués est en hausse. Le nombre des substances toxiques ou soupçonnées de l'être continue de croître.

L'enjeu consiste pour le Canada à continuer à encourager la coopération internationale, en particulier en ce qui concerne les métaux lourds et les polluants organiques rémanents. Sur le plan intérieur, il nous faut continuer à favoriser le leadership et l'établissement de partenariats avec les collectivités, l'industrie et les gouvernements provinciaux et territoriaux. C'est cependant le gouvernement fédéral qui doit assurer le leadership et prendre l'initiative d'établir le cadre législatif qui assurera la protection des ressources canadiennes en eau.

C'est en adoptant cette vaste démarche et non en centrant notre attention uniquement sur les exportations d'eau que nous pourrons offrir aux Canadiens l'eau saine dont ils ont besoin. À ce stade crucial, j'appuie la motion présentée qui précise que le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces et les territoires, imposer immédiatement un moratoire sur les transferts entre bassins l'exportation de grandes quantités d'eau douce.

Les transferts entre bassins hydrographiques peuvent avoir une influence néfaste sur le bien-être socio-économique des personnes qui y habitent. Dans la collectivité dont je viens, près du lac Simcoe, le bassin hydrographique a d'énormes répercussions sur les gens. C'est là le principal problème dont nous parlons aujourd'hui.

Cette mesure devrait être adoptée en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. J'ai encouragé l'adoption de ces politiques avec mes collègues et je le fais de nouveau en Chambre aujourd'hui.

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je sais gré à ma collègue de ses commentaires. Il me fait tout particulièrement plaisir de l'entendre signaler que les mares de goudron de Sydney, entre autres, constituent un sujet de préoccupation. Je compte bien que des fonds seront consacrés à remédier à ce problème dans le budget.

Les commentaires de la députée prouvent qu'elle est bien informée; ils font ressortir l'importance que prend l'eau douce à mesure qu'elle se raréfie, compte tenu des problèmes environnementaux et du contexte environnemental global qu'elle a décrits.

 

. 1330 + -

La députée serait-elle en faveur d'interdire l'exportation d'eau douce en provenance du Canada?

Mme Aileen Carroll: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et je partage sa vive inquiétude à l'égard du grave problème avec lequel on est aux prises en Nouvelle-Écosse. Celui-ci n'est pas sans évoquer le Love Canal; certains d'entre nous sont assez vieux pour s'en souvenir, je crois.

Je le répète, j'appuie la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui prévoit l'imposition d'un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques. Je pense que c'est un début. Cela nous donne le temps de nous préparer à prendre des dispositions législatives.

Il n'en tient qu'à nous de prendre l'initiative, mais il conviendrait également de perpétuer le sentiment qu'a suscité l'accord sur la politique en matière de santé et programmes sociaux que nous venons de signer avec les provinces et d'en respecter l'esprit dans cette entreprise fort louable.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, je félicite ma collègue pour son intervention. Celle-ci a insisté sur deux aspects qui, selon moi, sont très importants.

Le premier est évidemment le fait qu'il s'agit d'une question qui touche l'environnement. L'autre est l'importance de cette question pour les Canadiens et le rôle que ceux-ci sont appelés à jouer, notamment au niveau municipal.

Ma circonscription est située dans la région de la moraine d' Oak Ridges, une région très fragile de l'Ontario où des études ont été réalisées pour trouver une solution aux problèmes des eaux, notamment celles du cours supérieur de la rivière Don.

Il y a quelques années, quelqu'un a prédit que les conflits au XXIe siècle seraient liés à l'eau, que l'eau serait la priorité. J'appuie sans réserve les propos qui ont été formulés aujourd'hui par les députés de tous les partis à la Chambre.

J'aimerais que la députée nous dise, relativement à cette question, qui touche de toute évidence le gouvernement fédéral, les municipalités et le secteur privé, quels éléments elle juge essentiel à une stratégie fédérale en matière d'eau douce.

Mme Aileen Carroll: Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député quant à la nécessité de collaborer avec nos vis-à-vis au niveau municipal, parce que, dans le quotidien, ceux-ci sont peut-être les plus près de ces questions.

À cet égard, je veux faire allusion au lac Simcoe, un lac ontarien très grand et très important dont le bassin hydrographique est extrêmement touché par la croissance et le développement liés à l'urbanisation mais aussi à l'activité agricole et industrielle.

Comme le député l'a mentionné, il est essentiel que l'élaboration d'une stratégie en matière d'eau douce se fasse en étroite collaboration avec nos partenaires municipaux et provinciaux, de façon à cerner et à traiter les questions auxquelles ceux-ci font face de façon quotidienne, par suite des problèmes au niveau des bassins hydrographiques.

Une stratégie globale en matière d'eau douce doit traiter de l'imposition d'un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, mais elle doit aussi avoir une portée plus large. Nous allons nous pencher sur une mesure législative qui est en train d'être élaborée relativement à la mise en oeuvre d'une stratégie fédérale en matière d'eau douce, en partenariat avec nos homologues provinciaux.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur la motion présentée à la Chambre aujourd'hui relativement à la commercialisation de l'eau.

Avant de parler de commerce, j'aimerais parler d'environnement. L'eau, on sait très bien ce que c'est, parce qu'on en a besoin tous les jours. On en a besoin dans notre alimentation, on en a besoin pour notre hygiène.

 

. 1335 + -

Mais ce n'est pas la seule façon que nous utilisons l'eau. L'eau se trouve dans l'environnement sous forme de rivières, de lacs ou d'océans. Si on parle d'eau potable, on parle de l'eau qui n'est pas salée, on parle de l'eau qui n'est pas celle des océans, on parle de l'eau des rivières, des lacs et des fleuves.

D'où vient cette eau? Elle vient de la pluie. La pluie suit le versant des montagnes et des coteaux pour former de ruisseaux qui alimentent des rivières. Les rivières vont former des lacs et les lacs vont à leur tour se déverser dans de nouvelles rivières. Tout cela se dirige vers un fleuve et, éventuellement, vers l'océan.

Si l'on perturbe la manière dont ces eaux circulent, nous modifions la façon dont sont irriguées les parties du pays qui reçoivent ces eaux. Si nous modifions la façon dont les eaux s'écoulent vers l'océan, nous modifions éventuellement la salinité même de certaines parties de l'océan.

Or, l'eau ne sert pas uniquement à irriguer ou à étancher notre soif. Elle sert aussi à transporter la chaleur. Au niveau des océans entre autres, les différences de salinité dans l'eau vont permettre aux courants marins de transférer la chaleur du sud vers le nord, là où les eaux se refroidissent, vont vers le fond de l'océan et retournent vers le sud.

Ceci crée un équilibre thermique sur la planète et des modifications à grande échelle. Des quantités d'eau douce qui s'écoulent vers l'océan, vers une partie particulière et spécifique de l'océan, modifieraient les salinités et pourraient avoir des conséquences importantes sur le climat de la planète. Ainsi, lorsqu'on parle de transfert entre bassins versants, on parle spécifiquement et carrément de mesures qui pourraient affecter l'écoulement de l'eau douce vers l'océan ou vers les océans. Les conséquences de tels transferts pourraient dépasser considérablement tout ce que nous serions en mesure de prévoir.

C'est donc avec la plus grande prudence, seulement sur le plan de l'ingénierie, qu'on devrait songer à modifier le cours de l'écoulement des eaux d'un bassin vers un autre.

Le Bloc québécois partage les préoccupations qui ont été énoncées par un grand nombre de députés de cette Chambre depuis que ce débat a débuté aujourd'hui. Cependant, nous devons ici toucher à l'aspect de la commercialisation. C'est là où le Bloc québécois a peut-être des préoccupations qui ne sont pas celles de tous les députés de cette Chambre, particulièrement ceux et celles qui ne viennent pas du Québec.

Lorsqu'on parle de commercialisation de l'eau, nous voyons l'eau comme une ressource naturelle qu'il est possible d'exploiter et non plus comme une composante de notre environnement. J'ai déjà traité de la question de l'environnement et il ne faut pas la perdre de vue.

Néanmoins, parlons de la portion exploitation de la ressource naturelle. L'eau, en petites quantités, peut être déplacée relativement facilement pour satisfaire les besoins de nos civilisations. Ainsi, les municipalités vont s'approvisionner dans un lac pour amener l'eau courante dans chacun des foyers. À la campagne, nous voyons des gens creuser des puits artésiens à quelques dizaines ou centaines de pieds sous terre pour extraire de l'eau de la nappe phréatique afin de pourvoir à leurs besoins d'alimentation et d'hygiène. Ceci constitue de petits transferts.

Mais si ces petits transferts se multiplient, les conséquences peuvent être dramatiques. Par exemple, au sud-ouest des États-Unis, les fermiers et les municipalités se sont approvisionnés à la nappe phréatique en quantité considérable de manière à irriguer les champs et à satisfaire leurs besoins.

 

. 1340 + -

La nappe phréatique s'est abaissée et est en train de s'assécher. On voit donc que nous devons traiter la ressource naturelle qu'est l'eau avec une très grande circonspection.

L'eau n'est pas quelque chose qui se renouvelle si rapidement et si facilement. Aujourd'hui, il pleut, il y a de l'eau en abondance. L'année prochaine, il pleuvra peut-être moins, peut-être que les neiges seront moins abondantes, le niveau des lacs va baisser. Nous devons donc être prudents avec les questions d'eau, mais cela demeure une ressource naturelle renouvelable.

Donc, la question qui se pose, c'est qui a la responsabilité, au quotidien, de gérer le bon usage de cette ressource? Je crois que dans l'ensemble des provinces et au Québec, on a vu les municipalités mettre en place une réglementation pour s'assurer qu'on utilise l'eau potable d'une façon respectueuse. Plusieurs municipalités ont déjà des compteurs s'assurant de la quantité d'eau qui est consommée, que le consommateur ou la consommatrice est conscient de cette quantité et, question de minimiser une facture, on voit à ne consommer que les quantités nécessaires.

D'autres municipalités ont des règlements sur l'arrosage. On arrose côté pair tel jour, côté impair tel autre jour. Pourquoi fait-on cela? Pour rationaliser l'usage d'une ressource naturelle qui n'est pas illimitée.

On voit aussi les municipalités respecter l'environnement par le traitement des eaux usées. On ne rejette pas dans la nature, que ce soit sur le plan domestique ou le plan industriel, des eaux usées qui contiennent, en suspension, des matières nuisibles à l'environnement. Qui est responsable de voir à la mise en place de telles mesures? Qui est responsable de voir à ce que ces mesures soient respectées? À ce que je sache, ce sont les provinces qui ont cette responsabilité.

Bref, la ressource naturelle que constitue l'eau peut être utilisée sur un plan commercial, industriel ou municipal dans le respect d'une réglementation mise en place et appliquée par les provinces et par le Québec.

Or, aujourd'hui, nous avons devant nous une motion qui indique clairement que le gouvernement fédéral devrait pourvoir à une réglementation, à une application de mesures pour le meilleur usage de notre eau douce et potable.

Je suis bien conscient de l'importance de prendre soin de cette ressource naturelle que constitue l'eau. Mais en même temps, j'ai un dilemme: jamais le fédéral n'a eu à s'impliquer pour assurer aux collectivités la jouissance de la ressource en eau que chacun et chacune possède. Ce sont les provinces, et le Québec, qui se sont préoccupées de mettre en place des mesures de conservation, de prévention, de filtrage, de rétablissement de la qualité de l'eau. Bref, les provinces et le Québec ont toujours assumé leur responsabilité dans ce domaine. Alors, qu'est-ce que le fédéral vient faire aujourd'hui dans la question?

Si on parle de négocier un traité comme celui de l'ALENA, de négocier des amendements et des accords internationaux, je comprends que le gouvernement de la fédération, en concertation avec les provinces, puisse recevoir un mandat de faire des représentations sur le plan international. Cela s'est fait par le passé, et cela se fera, sans aucun doute, dans l'avenir que nous pouvons percevoir.

Mais si on parle de décider de la commercialisation de la ressource naturelle, je pense que le gouvernement fédéral n'a pas de rôle à jouer en ce domaine. Le Québec, d'ailleurs, depuis plusieurs années, s'intéresse à la question, et au moment même où on se parle, ce sujet est déjà à l'ordre du jour depuis de nombreux mois au Québec.

Le gouvernement fédéral, tout d'un coup, comme ça, se réveillerait, s'agiterait autour de la question, sans se rendre compte, finalement, que d'autres ont eu cette excellente idée bien avant lui, justement parce que c'était leur responsabilité et non pas celle du gouvernement fédéral.

 

. 1345 + -

Vous me permettrez, tout en partageant les préoccupations de nos amis du Nouveau Parti démocratique, de différer d'opinion quant à la responsabilité de voir aux aspects commerciaux de l'utilisation de cette ressource naturelle. Par conséquent, nous devrons, nous, du Bloc québécois, voter contre cette motion qui, pour l'essentiel, aurait comme conséquence de priver le Québec de ses droits historiques en matière de gestion des eaux et de les remettre au gouvernement fédéral qui, à toutes fins pratiques, ne s'en est jamais vraiment occupé.

Je fais d'ailleurs remarquer que si le gouvernement fédéral avait voulu jouer un rôle utile en la matière, c'est déjà il y a 50 ou 60 ans qu'il aurait dû le faire, en prévenant la pollution des Grands Lacs qui ont amené, tout le long du fleuve Saint-Laurent, une pollution honteuse qui a transformé le fleuve, pendant un certain nombre d'années, en un gigantesque égout.

Je me rappelle, dans mon jeune âge, m'être baigné à la plage du Foulon, à Québec. Il y avait 5 000 personnes, tous les beaux jours d'été, qui allaient à la plage du Foulon. Il y avait de jolies plages de sable, l'eau était d'une qualité tout à fait suffisante pour permettre la baignade. À peine 10 ou 15 ans plus tard, cette eau était rendue un égout public. Et, vous l'aurez compris, ce n'était pas la ville de Québec qui contribuait à toute cette pollution, elle nous venait des Grands Lacs, ça descendait.

Aujourd'hui, avec des accords internationaux, tant du côté américain que de celui de l'Ontario, cette pollution a été considérablement réduite. Peut-être que d'ici 10, 15 ou 20 ans, nous pourrons espérer revoir un fleuve qui permettra une baignade de façon sécuritaire, sans dangers hygiéniques.

Comme on le voit, le fédéral n'a pas vraiment un bon dossier en matière de protection de notre environnement, en regard des eaux douces, des eaux potables. Je vois mal aujourd'hui qu'on présente une motion comme si le sauveur de la planète et du pays, et du Québec, serait ce gouvernement-ci, à Ottawa. Les provinces ont su assumer leur rôle par le passé. La Colombie-Britannique a déjà mis en place des mesures, le Québec met en place des mesures. Bref, pourquoi cette Chambre se penche-t-elle sur une motion dont la responsabilité en la matière relève en réalité des provinces?

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Monsieur le Président, je me rappelle très bien la première question que j'ai posée à la Chambre. C'était il y a 11 ans et elle s'adressait au ministre conservateur de l'Environnement de l'époque, qui est aujourd'hui le premier ministre du Québec.

Ma première question avait trait au défi que représentait pour le gouvernement national la dépollution des points névralgiques dans les Grands Lacs, y compris le fleuve Saint-Laurent. Je m'en rappelle comme si c'était hier: s'adressant à la Chambre des communes, M. Bouchard a courageusement et fièrement proclamé la responsabilité du gouvernement canadien dans la résolution des problèmes observés dans les points névralgiques des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. M. Bouchard n'a jamais décliné la responsabilité du gouvernement canadien dans la résolution des problèmes liés à l'eau.

J'estime que le gouvernement national ne saurait s'absenter de ce débat et encore moins refuser de jouer un rôle majeur à l'échelle nationale. Quant à l'affirmation des bloquistes selon laquelle l'inventaire et la gestion de nos ressources en eau relèvent des provinces, je m'y opposerai jusqu'à ma dernière heure.

J'ose croire que l'histoire montrera qu'au fil des ans le gouvernement canadien, la population canadienne, et pas seulement le Québec mais aussi l'Ontario, ont dépensé des centaines et des centaines de millions de dollars, et cela, non seulement pour réclamer une partie de nos ressources en eau, mais également pour mettre en place l'infrastructure appropriée pour les maximiser grâce aux infrastructures, aux subventions et aux programmes municipaux.

 

. 1350 + -

Le NPD a saisi la Chambre d'une motion. Tâchons donc de l'examiner dans une perspective de collaboration entre gouvernement national et provinces.

J'exhorte les députés du Bloc québécois à éviter l'esprit de clocher et à ne pas faire bande à part. Ces cours d'eau franchissent les frontières provinciales dans les deux sens. Nous partageons les Grands Lacs. Je veux faire valoir aux députés bloqistes que la question de l'eau est un enjeu national. Le gouvernement du Canada doit avoir un rôle à jouer et des responsabilités à assumer à cet égard et le Bloc devrait l'encourager à assumer ces fonctions.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Monsieur le Président, si le gouvernement du Canada avait, à une certaine époque, soit il y a 40 ans et non pas il y a 11 ans, pris des dispositions appropriées pour s'assurer que nos voisins des États-Unis ne rejettent pas leurs eaux usées dans les Grands Lacs de façon à polluer notre Saint-Laurent, qui est l'épine dorsale du développement québécois, on n'aurait pas le niveau de pollution qu'on connaît aujourd'hui.

Mais ce n'est pas ce que le gouvernement fédéral a fait, il y a 40 ans ou il y a 30 ans. Je ne suis pas surpris qu'il y a 11 ans, devant la question qui était posée—mais je n'ai pas le libellé de la question ni de la réponse—qu'on se soit préoccupés du rôle important que le gouvernement fédéral devait jouer pour négocier avec les Américains un respect de la qualité de nos eaux. D'ailleurs, la même question se pose face aux pluies acides. Le gouvernement fédéral avait et a toujours un rôle à jouer pour négocier sur le plan bilatéral avec les Américains à ce sujet.

[Traduction]

Au sujet des cours d'eau du Québec, le député disait que l'eau coule dans les deux sens. Je suis désolé, mais au Québec, ce n'est que dans un sens. Elle coule vers nous.

[Français]

Historiquement, le Québec a pris ses responsabilités en matière de gestion des eaux depuis 400 ans. Alors, la leçon que mon collègue essaie de nous donner, à savoir que le Canada a un rôle grandiose à jouer pour nous montrer comment bien faire ce que lui a historiquement fait mal, alors que nous avons pris des mesures pour arriver à de bons résultats, la leçon ne tient pas. Les eaux du Québec appartiennent au Québec.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souligner à mon collègue du Bloc québécois que je trouve cela bien malheureux qu'il ait introduit une notion d'esprit de clocher, encore une fois, dans une motion qui se veut beaucoup plus large et qui parle du gouvernement fédéral et des provinces. Je lui souligne que dans les années 1970, lorsqu'il y avait un important programme fédéral pour établir l'assainissement des eaux au Canada, la seule province qui n'a pas profité de ce programme, c'est le Québec.

Le Québec a été la dernière province—et j'en sais quelque chose, parce que j'étais ministre de l'Environnement du Québec—à établir un programme d'assainissement des eaux. De venir dire que c'est une affaire purement fédérale ou purement provinciale, que le Québec est pur comme la Vierge et que le fédéral a toutes les responsabilités, c'est encore une fois cette même histoire de toujours vouloir trouver des querelles, de toujours blâmer les autres, de ne jamais se regarder soi-même.

C'est bien malheureux, parce que cette question de l'eau dépasse de beaucoup l'esprit de clocher. C'est une question qui définit le cycle qui nous fait face. On devrait la regarder de façon beaucoup plus large et essayer de s'associer à une motion qui ne parle pas seulement du gouvernement fédéral, mais qui veut que le gouvernement fédéral s'associe à toutes les provinces pour apporter une politique commune relative à l'eau. Je pense que c'est la clé de tout.

M. Pierre de Savoye: Monsieur le Président, ce n'est pas un esprit de clocher. La motion qui est devant nous est très claire. On dit que le gouvernement devrait établir un moratoire immédiat sur l'exportation en vrac d'eau. Ensuite, on dit: «en collaboration avec les provinces». La collaboration devrait venir avant la motion. On devrait vérifier avec les provinces, et avec le Québec, si un moratoire est nécessaire, désirable et souhaitable.

 

. 1355 + -

Or, on met la charrue devant les boeufs, et parce que l'on proteste devant cette charrue qui est devant nos boeufs, on dit qu'on a l'esprit de clocher. Non, mais on sait lire entre les lignes et on sait protéger le Québec.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA PRÉVENTION DES BLESSURES

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, selon une étude publiée récemment, les coûts socio-économiques des blessures involontaires au Canada sont stupéfiants.

Cette étude nous apprend que chaque année, 47 000 Canadiens sont partiellement handicapés à vie à la suite de ces blessures. Dans la seule région de Niagara, les accidents de la route ont fait cette année plus de trente morts.

Le responsable du service de santé publique de la région de Niagara m'a écrit pour me dire que les habitants de Niagara Falls devraient se récrier face à ces chiffres d'autant plus que 90 p. 100 de ces accidents sont prévisibles et évitables.

Il est nécessaire que nous reconnaissions et que nous réglions ce problème dont les conséquences sociales et économiques sont absolument terribles. Je me joins aujourd'hui à tous ceux et celles qui réclament la mise en place d'une stratégie nationale pour la prévention des accidents. Nous devons prendre des mesures afin de réduire les coûts que ces accidents entraînent pour les Canadiens et afin de sauver des vies humaines.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, je viens de recevoir dans mon courrier électronique le message suivant: «Alerte à la fraude. Les personnes qui reçoivent une enveloppe d'une organisation qui s'appelle Revenu Canada devraient se méfier de son contenu.

Ce groupe semble se livrer à un véritable racket. Il prétend que les destinataires lui doivent de l'argent pour le financement des opérations essentielles du gouvernement. Les fonds servent en fait à financer une liste interminable de programmes sociaux absolument inefficaces et qui n'ont ni rime ni raison.

Revenu Canada entretient des rapports avec une entreprise un peu véreuse appelée Régime de pensions du Canada, dont on sait que les retenues sur les chèques de paie servent à financer le même type d'activités douteuses du gouvernement financées par Revenu Canada à l'origine de tout ce gaspillage.

Si Revenu Canada sollicite des fonds, n'oubliez pas que ce n'est pas lui qui est à l'origine de tout ce racket que sont les impôts annuels, mais que c'est le cabinet du ministre des Finances. Il est temps que nous le tenions responsable d'escroquer chaque année des milliards de dollars à tous ces Canadiens qui travaillent dur pour leur argent.»

*  *  *

LE LOGEMENT SOCIAL

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Il a répondu récemment à une intervention forte et unie du caucus libéral de l'Ontario en assurant que les coopératives d'habitation financées par le gouvernement fédéral ne seraient pas incluses dans le transfert prévu au gouvernement de l'Ontario de la gestion des ressources consacrées au logement social.

Quelque 21 000 familles et particuliers de l'Ontario verront donc la gestion de leur demeure rester entre les mains du gouvernement fédéral.

Dans ma circonscription d'Etobicoke-Nord, les membres des coopératives Comfort Living, Summerlea Park et West Humber Community sont très fiers de leur mode de vie communautaire et ils félicitent le ministre de protéger leurs coopératives.

Comme tous les autres membres de coopératives en Ontario, ils seront désormais plus tranquilles en sachant que leurs demeures sont entre bonnes mains.

*  *  *

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, le 2 février dernier, le gouvernement canadien annonçait un investissement de près de un million de dollars dans les régions du Québec, dans le cadre du Programme de partenariat rural canadien. De cette somme, 475 000 $ seront consacrés à la réalisation de 11 projets régionaux au Québec.

Notre gouvernement a à coeur le renforcement des collectivités rurales et désire aider les citoyens à tirer parti des nouvelles opportunités du développement économique et de l'emploi.

Voilà le genre d'actions préconisées par notre gouvernement, lesquelles ont des effets directs dans les milieux concernés. Nous souhaitons poursuivre cette collaboration avec le plus grand nombre de collectivités rurales, aussi bien au Québec que dans le reste du Canada.

*  *  *

 

. 1400 + -

[Traduction]

LES ÉCHANGES ENTRE CALGARY ET QUÉBEC

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, la fin de semaine dernière, j'ai eu le plaisir de participer au Carnaval de Québec. J'aimerais souligner à la Chambre que j'ai constaté que l'amitié et la bonne humeur permettent d'affronter les températures froides.

J'ai remarqué qu'il y avait un bon nombre de gens de Calgary à Québec. J'ai appris par la suite que les villes de Calgary et de Québec avaient conclu une entente en vue de promouvoir l'échange d'informations dans les domaines de la science, de la technologie, de l'économie et du tourisme.

Ces deux villes ont également renouvelé une entente existante relativement à un programme d'échange pour les jeunes. Cette entente réunit tous les éléments qui pourraient favoriser de meilleures perspectives pour l'unité nationale au pays: bonne volonté, communications directes et, par-dessus tout, absence du gouvernement fédéral libéral dans le processus.

*  *  *

LES INTERPRÈTES DE LA CHAMBRE DES COMMUNES

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Monsieur le Président, il y a 40 ans, le 16 janvier 1959, la Chambre des communes a pris une mesure innovatrice en offrant des services d'interprétation simultanée en anglais et en français, permettant ainsi aux Canadiens de suivre les débats dans la langue de leur choix.

Aujourd'hui, je voudrais rendre hommage aux personnes qui nous accompagnent depuis ce jour-là.

J'exhorte tous les députés de la Chambre à se joindre à moi pour souligner la contribution inestimable de nos interprètes. Ils nous permettent de transmettre nos idées et tout ce qui nous passionne, dans les deux langues officielles, de même qu'en langage gestuel.

Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et le Bureau de la traduction peuvent être fiers de compter des gens aussi professionnels parmi leurs employés. Leur travail remplit le Parlement de fierté.

Félicitations à tous nos interprètes. Congratulations.

*  *  *

LES DÉPENSES PUBLIQUES

M. John Williams (St. Albert, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelque chose qui cloche avec le gouvernement lorsque le ministère de la Défense nationale dépense 1 000 $ pour un tricycle. C'est un exemple des dépenses insensées que j'ai signalées dans mon dernier rapport sur le gaspillage. Il montre que le système est passablement pourri. Les contribuables méritent mieux.

Les contribuables seront furieux d'apprendre que le ministère des Affaires étrangères a dépensé 113 000 $ pour de la porcelaine Royal Doulton et qu'un amiral a reçu une note d'hôtel de 120 000 $, pendant que certains de nos soldats faisaient la queue devant des banques d'alimentation.

Enfin, le gouvernement consacre 4 000 $ au programme provincial de drapeaux. Il veut ainsi promouvoir l'unité nationale, ce qui est très bien, car s'il continue de dépenser ainsi, les Canadiens se retrouveront tous ensemble dans la pauvreté.

*  *  *

L'ÉDITION

M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-55 est indispensable au succès continu de l'industrie canadienne des revues.

La publicité est la source la plus importante de revenus pour les éditeurs de périodiques canadiens. Ces revenus leur ont permis d'encourager la carrière de certains de nos chroniqueurs sociaux et de nos personnalités littéraires les plus en vue.

Sans les revues canadiennes, comment les premières oeuvres des poètes et des auteurs canadiens en herbe trouveraient-elles un auditoire? Les grosses maisons d'édition étrangères publieraient-elles les poèmes d'une future Margaret Atwood ou la chronique historique d'un futur Jacques Lacoursière?

Les revenus publicitaires permettent aux éditeurs canadiens d'offrir un vecteur à des milliers de photographes, de journalistes et d'éditorialistes canadiens. Ces revenus contribuent à payer le salaire de nombreux créateurs canadiens.

Donner aux éditeurs étrangers un accès illimité au marché canadien des services de publicité entraînerait la mort de cette industrie, industrie qui joue un rôle vital dans la promotion de la littérature, de la photographie et de la pensée politique de ce pays. C'est ce qui est en jeu dans le projet de loi C-55.

*  *  *

LES SANS-ABRI

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, hier, des Torontois ont tenu une vigile à la mémoire d'un sans-abri connu uniquement sous le nom de Al, qui est mort sur une bouche d'air chaud en face de Queen's Park.

Pendant le mois de janvier, j'ai sillonné le Canada et j'ai pu voir de mes propres yeux les effets dévastateurs de la politique délibérée de ce gouvernement en vue d'éliminer les logements sociaux. Combien de victimes faudra-t-il encore? Combien de personnes devront mourir avant que le premier ministre réagisse à cette crise?

Plus de 400 organisations et 10 maires appuient l'appel urgent du comité de secours de Toronto demandant que la situation des sans-abri soit déclarée catastrophe nationale.

Des autocars pleins de sans-abri et de pauvres ont quitté Toronto il y a quelques heures à destination de la colline du Parlement dans l'espoir de rencontrer le premier ministre. Sa réponse? Il n'en est absolument pas question. C'est un scandale.

J'aimerais savoir si le premier ministre aura le courage de rencontrer les pauvres et les sans-abri qui seront ici demain. Se rendra-t-il sur les lieux de cette catastrophe nationale pour constater de ses propres yeux l'étendue du désastre? Ce gouvernement n'a-t-il pas la moindre compassion?

*  *  *

L'AN 2000

Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine est dédiée à la préparation à l'an 2000. Hier j'ai eu le plaisir de présenter le 13e rapport du Comité permanent de l'industrie sur l'état de préparation du Canada dans plusieurs secteurs clés de l'industrie.

 

. 1405 + -

Le comité a constaté qu'au Canada, la plupart des individus, des entreprises et des établissements sont au courant du bogue informatique que risque de causer le passage à l'an 2000. Toutefois, de nombreuses PME n'ont encore pris aucune mesure à cet égard. Si ce n'est déjà fait, les entreprises devraient commencer à effectuer des tests dès maintenant, car elles pourraient être tenues entièrement responsables de leur inaction. Elles doivent élaborer des plans d'urgence et de reprise des activités, afin de garantir leur rentabilité dans le nouveau millénaire.

De l'aide est offerte aux organisations qui ne savent par où commencer. «L'an 2000—Première étape» est un programme conjoint d'Industrie Canada et de la Banque Canadienne Impériale de Commerce, qui offre aux PME canadiennes un service adapté afin de les aider à franchir la première étape importante pour se préparer à l'arrivée de l'an 2000.

Si tout le monde se prépare pour le pire en espérant que tout aille pour le mieux, nous pourrons entrer dans la nouvelle année et le nouveau millénaire en poussant un soupir de soulagement.

*  *  *

LA JUSTICE

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, un article paru dans un journal du week-end m'a causé une vive inquiétude.

Selon cet article, le juge en chef de la Cour suprême du Canada, Antonio Lamer, aurait laissé entendre que, dans des affaires portant sur des crimes motivés par la haine, les juges évitent parfois de rendre des décisions impopulaires pour éviter d'être l'objet de critiques acerbes de la part de la population. Je peux comprendre les observations du juge Lamer. Personne n'aime se faire honnir publiquement. Toutefois, j'exhorte nos magistrats à résister aux invectives auxquelles nous ont habitués les députés réformistes.

Un élément fondamental de notre système judiciaire est l'indépendance des juges, qui doivent rendre des décisions selon leur compréhension de la loi. Il ne peut y avoir de compromis, même face aux actes irresponsables du Parti réformiste.

La décision controversée rendue récemment sur la pornographie juvénile a offensé de nombreux Canadiens, y compris moi-même, mais un appel a été interjeté. Ce n'est pas le moment de perdre confiance en nos juges. Il faut respecter la primauté du droit.

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[Français]

LA CONGRÉGATION DES SOEURS DE LA CHARITÉ

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, nos livres d'histoire oublient ou minimisent souvent la contribution des femmes à l'évolution de la société.

C'est pourquoi j'aimerais souligner l'apport important à la société que nous devons à la détermination de soeur Marcelle Mallet qui a fondé, il y a 150 ans, la Congrégation des soeurs de la Charité de Québec et, il y a 140 ans, le Couvent de Lévis, maintenant l'école Marcelle-Mallet.

L'histoire de la Congrégation a été marquée par toutes ces femmes qui, à Lévis et ailleurs, ont instruit nos filles et, depuis quelques années, nos fils. On doit les en remercier, mais elles n'ont pas fait que ça. Elles ont aussi visité des prisonniers, apporté du soutien à des sinistrés et soigné des malades. Elles ont nourri des pauvres, protégé des orphelins et hébergé des personnes âgées.

À titre du député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, je remercie les soeurs de la Charité pour ce qu'elles ont fait et ce qu'elles continuent de nous apporter.

*  *  *

[Traduction]

LES DÉPENSES PUBLIQUES

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, nous reprenons ce soir le débat sur le projet de loi S-11, qui modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite, ce qui contribuera à mettre fin à la discrimination dont souffrent nos concitoyens les plus marginalisés. Les libéraux ont fait savoir qu'ils n'appuieront pas le projet de loi.

Alors que de nombreux Canadiens n'ont pas le luxe d'avoir un logement décent ou la possibilité d'ouvrir un compte bancaire, le cabinet du premier ministre a consacré l'année dernière la somme énorme de 7,5 millions de dollars de l'argent des contribuables fédéraux à des dépenses de voyage, somme auprès de laquelle les 465 000 $ qu'a coûté le voyage tant critiqué de M. Mulroney en Russie ont l'air de simple argent de poche.

Un examen des comptes publics révèle que le premier ministre a dépensé 1,3 million de dollars pour un voyage en Italie en mai dernier, accompagné d'une suite de 58 personnes. Un voyage d'un jour et une nuit à New York a coûté un peu plus de 175 000 $ au Trésor public pour couvrir les dépenses du premier ministre accompagné de 18 conseillers.

Ce flagrant mépris pour les contribuables doit cesser. J'exhorte le premier ministre à réfléchir à l'usage qu'il fait de notre argent.

*  *  *

LE PROGRAMME JEUNES ENTREPRISES MONDIALES

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais profiter de l'occasion pour vous signaler un projet spécial en cours de réalisation dans le Pontiac.

La SADC du Pontiac à Campbell's Bay, en partenariat avec les Industries Davidson Inc. et avec Jeunes entreprises du Canada, offre une occasion exceptionnelle aux étudiants de l'école secondaire Pontiac de Shawville. Des étudiants vont simuler une entreprise internationale en formant une coentreprise en collaboration avec des étudiants d'une école de Jakarta, en Indonésie.

Le programme Jeunes entreprises mondiales est un nouveau programme dynamique du niveau de l'école secondaire qui enseigne la valeur de l'entreprise et des relations commerciales internationales. Grâce à cette expérience d'affaires intensive, les étudiants acquièrent les habiletés pratiques nécessaires pour fonctionner sur le marché des affaires d'aujourd'hui.

Les échanges d'étudiants sont un élément du programme et servent à promouvoir la compréhension interculturelle.

Je me permets de souhaiter la plus cordiale bienvenue et nos félicitations aux trois visiteurs étudiants de Jakarta et à leurs parrains étudiants de l'école secondaire Pontiac.

*  *  *

 

. 1410 + -

L'OFFICE NATIONAL DU FILM DU CANADA

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, à l'instar de tous les Canadiens, je tiens à féliciter l'Office national du film du Canada pour la 63e nomination aux Oscars qu'il a reçue aujourd'hui de l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences, dans la catégorie du documentaire court, pour sa production intitulée Sunrise Over Tiananmen Square.

Réalisé par Shui-Bo Wang, ce court film d'animation jette une lumière personnelle sur la série d'événements qui ont mené au matin de juin 1989 où les troupes gouvernementales ont ouvert le feu sur une manifestation étudiante, à Beijing. L'artiste chinois Shui-Bo Wang était au nombre des étudiants qui ont occupé la place Tiananmen pendant près d'un mois. Le film a été produit pour l'Office national du film par Don McWilliams, Barrie Angus McLean et David Verrall.

Nous devrions aussi nous enorgueillir de ce que l'Office national du film recevra un prix de réalisation technique, plus tard, ce mois-ci. Ce prix récompensera le travail des scientifiques de l'Office national du film, MM. Zwaneveld et Gasoi, qui, en collaboration avec des confrères du secteur privé, ont mis au point une technique postproduction connue sous le nom de DigiSync Film Keykode Reader.

Le Président: Le député de Roberval a la parole.

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE DENISE LEBLANC-BANTEY

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, Denise Leblanc-Bantey, une femme d'envergure, ardente militante du mouvement souverainiste et de l'avancement de la condition féminine, nous a quittés hier. Le Bloc québécois aimerait lui rendre hommage et ainsi atténuer un peu la tristesse qui nous a envahis à l'annonce de sa disparition.

Fille de pêcheurs, enseignante de profession, Denise a été élue députée des Îles-de-la-Madeleine pour la première fois à l'Assemblée nationale le 15 novembre 1976. Elle a su insuffler un vent de fraîcheur en politique, comme on en a le secret aux Îles. Réélue en avril 1981, elle devint ministre de la Fonction publique et responsable de la Condition féminine.

L'ayant côtoyée à l'Assemblée nationale du Québec, je peux témoigner qu'au-delà de ses fonctions de députée et ministre, fonctions qu'elle a remplies avec un dynamisme et une dignité hors du commun, elle restera, pour plusieurs, la femme exemplaire qui aura su marier la rigueur, l'enthousiasme et l'humanité dans sa vie publique comme dans ses relations personnelles.

Merci, Denise, et au revoir.

*  *  *

[Traduction]

LE DROIT À LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.):Monsieur le Président, comment a-t-on pu violer les droits d'un certain nombre d'infirmières canadiennes? Des infirmières ont perdu leur emploi pour avoir refusé de participer à des avortements ou à des actes d'euthanasie.

La liberté de conscience et la liberté de culte sont depuis longtemps reconnues au Canada. Comment cela a-t-il alors pu se produire? Les médecins ont le droit de ne pas participer à des avortements ou à des actes d'euthanasie. Pourquoi pas les infirmières? C'est un cas flagrant de discrimination.

J'ai présenté le projet de loi C-461 à la Chambre et je demande à mes collègues et à la Chambre de l'appuyer. Ce projet de loi vise à protéger le droit des professionnels de la santé de refuser de participer à des actes médicaux tels que des avortements ou des actes d'euthanasie.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, des professionnels de la santé sont congédiés au Canada parce que la loi n'est pas suffisamment explicite quant à leur liberté de conscience. Ce projet de loi protégera cette liberté de façon explicite.

*  *  *

LA DEVCO

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, quatre syndicats représentant les employés de la société Devco ont rencontré le président de la société le 3 février 1999 pour discuter de nombreux détails. À la fin de la réunion, la Devco a remis aux syndicats les listes des employés qui auront droit à une pension de retraite et de ceux qui n'y auront pas droit.

Les listes montrent que, sur les 1 184 employés qui ont de longs états de service, des centaines ne toucheront pas de pension. On en compte 852 dans la liste de l'UMWA, 86 dans celle du SCFP, 86 dans celle des TCA et 60 dans celle de l'AIM.

M. Drake, président de l'UMWA, a déclaré: «Nous croyons que cette lutte doit être reconnue dans tout le Canada comme une lutte raisonnable portant sur des demandes formulées par des personnes raisonnables, qui souhaitent obtenir une indemnisation juste.» Nous sommes d'accord.

*  *  *

L'AN 2000

M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, vendredi dernier, j'ai organisé un petit-déjeuner d'information sur le problème de l'an 2000 dans la circonscription de Markham. Une centaine de personnes y ont assisté pour apprendre comment certaines des sociétés canadiennes les plus avancées s'attaquent au problème. Après avoir écouté Gary Baker, du groupe de consultants Arthur Andersen, Al Aubry, d'IBM, ou Rod Morris, de la CIBC, les participants sont repartis convaincus que, dans l'ensemble, le secteur privé est prêt à affronter le bogue du millénaire.

Malheureusement, le gouvernement fédéral ne peut pas donner les mêmes assurances. D'après le rapport le plus récent du vérificateur général, des systèmes importants du gouvernement étaient encore exposés à des risques en juin dernier. Le vérificateur général a également conclu que certains services essentiels du gouvernement risquaient d'être interrompus au début de l'an 2000.

 

. 1415 + -

Comme c'est la semaine de sensibilisation au problème de l'an 2000, j'exhorte le gouvernement fédéral à suivre l'exemple du secteur privé et à prendre des mesures plus énergiques et plus efficaces pour que les Canadiens puissent compter avec confiance sur le maintien des services publics indispensables.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'ENQUÊTE SUR LES INCIDENTS DU SOMMET DE L'APEC

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, regardez qui est à la période de questions aujourd'hui. Je suppose qu'il a eu un préavis de 24 heures.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre s'il vous plaît. Je demanderais à la députée de ne pas parler de présence.

Mme Deborah Grey: Certainement, monsieur le Président. Je ne veux même pas poser de question au sujet de cette affreuse erreur de jugement, alors je vais en poser une sur un autre sujet.

Hier, une nouvelle note de service portant la mention «secret, pas de copies» a été mise à la disposition de la commission d'enquête sur les incidents du sommet de l'APEC par le Bureau du Conseil privé. On y cite les propres paroles du premier ministre promettant de faire le nécessaire pour empêcher les manifestants canadiens de mettre le président Suharto dans l'embarras.

Le premier ministre persiste-t-il à dire qu'il n'a joué aucun rôle dans l'organisation des mesures de sécurité pour le sommet de l'APEC?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répondu à cette question maintes et maintes fois depuis l'automne dernier. Une enquête est en cours, et la commission examinera tous les faits.

Le gouvernement collabore avec la commission. Nous mettons tous les documents et toutes les personnes nécessaires à la disposition de cette commission afin qu'elle puisse faire son rapport.

Je répète ce que j'ai déjà dit: je n'ai jamais discuté de sécurité avec quiconque ayant eu un rôle à jouer dans l'organisation des mesures de sécurité pour cette réunion.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il y a une nouvelle note de service, de nouveaux renseignements ont été rendus publics hier à Vancouver. Savez-vous où est situé Vancouver, monsieur le Président? En hélicoptère, c'est à 20 minutes au sud de Whistler.

On y cite ce que le premier ministre a dit. Il a supplié Suharto de venir. Il a promis qu'il ferait le nécessaire pour réprimer les manifestants. Il s'est même vanté de l'avoir déjà fait pour le premier ministre de Chine. Le chat est sorti du sac.

Pourquoi le premier ministre s'entête-t-il à refuser de reconnaître sa responsabilité même si nous avons maintenant des preuves de sa participation?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, on fait enquête sur l'incident. La commission entendra tous les témoins et examinera ce qui s'est passé à Vancouver pour voir si les policiers ont agi de façon appropriée ou non.

Si elle doit poser plus de questions, nous lui avons dit que tout le monde à mon bureau et au sein du gouvernement était à sa disposition. Laissons la commission examiner les faits et ne tirons pas de conclusions avant de connaître les faits, contrairement à la députée.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il n'y a vraiment qu'un seul témoin qui pourrait probablement raconter toute l'histoire.

Dans toutes les questions importantes, que ce soit l'enquête sur les incidents en Somalie, l'hépatite C, la pornographie juvénile et le sommet de l'APEC, le premier ministre est toujours plus soucieux de sauver les apparences que de faire ce qu'il faut. Jusqu'où est-il prêt à aller? S'il est cité à comparaître devant la commission, va-t-il aussi refuser d'y aller?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée devrait attendre que la commission fasse son travail. J'ai dit à la Chambre et je répète que la GRC a la réputation d'être un service de police très efficace au Canada. La commission examine si la GRC a agi de façon appropriée dans cette affaire.

Nous avons dit que nous offririons notre entière collaboration au juge qui préside la commission afin qu'il connaisse tous les faits et qu'il puisse informer le public. J'ai toujours dit et je répète que, dans le passé, lorsque nous avons reçu des visiteurs au Canada, y compris à la réunion du G7 à Halifax, la GRC a fait de l'excellent travail.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, en parlant de la commission et du juge, ce dernier a recommandé que les étudiants soient financés afin de rendre le processus équitable.

Le solliciteur général a eu 24 heures de plus pour examiner la demande. Je sais qu'il s'agit d'une question très épineuse, mais je vais quand même la lui poser de nouveau. Accordera-t-il du financement aux étudiants, oui ou non?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné à mon collègue hier, j'ai reçu une lettre. Dès que je l'aurai examinée avec mon personnel, je la rendrai publique.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, de toute évidence, le solliciteur général n'est pas en mesure de répondre à cette question fort épineuse. Je vais donc la poser au premier ministre.

 

. 1420 + -

Étant donné que le juge Hughes demande que les étudiants soient financés afin de rendre le processus équitable, le premier ministre peut-il nous dire si les étudiants obtiendront du financement du gouvernement, oui ou non?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le solliciteur général a déjà très bien répondu à la question.

*  *  *

[Français]

LES FUNÉRAILLES DU ROI DE JORDANIE

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre a la fâcheuse habitude de ne pas admettre qu'il puisse faire une erreur. Hier, le Bloc lui a donné le bénéfice du doute, mais les faits sont accablants.

Pour tenter de masquer son erreur de jugement, le premier ministre a invoqué des problèmes de temps pour excuser son absence des funérailles du roi de Jordanie. Ce faisant, il a commis une autre erreur de jugement, car les faits sont mesurables.

Comment le premier ministre peut-il expliquer, aujourd'hui, qu'il ait préféré le ski à son devoir d'État?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député doit savoir que le ministère de la Défense a informé mon bureau et moi-même qu'il ne pouvait prendre les dispositions nécessaires pour m'amener aux funérailles à temps.

Nous avions tout prévu, il y avait déjà une équipe du Bureau du premier ministre sur place mais, malheureusement, comme il y a eu moins de 24 heures entre le décès et les funérailles, il était impossible pour l'armée canadienne de m'amener sur les lieux.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, les États-Unis avaient été prévenants et prévoyants face à un départ précipité, même que trois anciens présidents ont fait partie de la délégation accompagnant le président Clinton.

Je demande au premier ministre s'il n'a pas commis sa première erreur de jugement jeudi, en partant faire du ski, plutôt que de rester ici, à Ottawa, quand le monde entier savait que le roi était à l'article de la mort?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si j'avais eu un Boeing 747, comme le président Clinton, j'aurais pu me rendre directement sans arrêt.

Toutefois, le premier ministre du Canada n'a pas un appareil à sa disposition qui lui permet de voyager à travers le monde. L'honorable député devrait peut-être présenter une motion pour qu'on achète un avion de Bombardier, un Global Express, qui peut faire cela. Si l'opposition me demande d'en acheter un, je serai heureux d'étudier le projet.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, depuis deux jours, le premier ministre tente d'expliquer son erreur de jugement de ne pas assister aux funérailles du roi Hussein par un manque de temps.

Comment le premier ministre peut-il avancer une excuse aussi grossière, alors que les députés libéraux, membres de la délégation canadienne qui s'est rendue là-bas, avaient été prévenus dès vendredi et étaient en attente, à Ottawa, pour un départ rapide vers la Jordanie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, depuis la semaine dernière, nous étions préparés à la possibilité de funérailles d'État, et il avait été prévu que nous devions avoir les délais nécessaires de telle façon que je puisse m'y rendre.

Cependant, vu que les funérailles ont eu lieu en moins de 24 heures, il était impossible pour l'armée canadienne de m'amener où je voulais aller, et j'avais pris des dispositions pour pouvoir m'y rendre.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre avait tellement pris de dispositions pour s'y rendre que l'opposition a été avertie à 8 heures, et le premier ministre, à 10 heures, heure d'Ottawa.

Le premier ministre n'admettra-t-il pas que de toute cette affaire, la seule chose qui soit parfaitement claire, c'est que la décision de ne pas se rendre en Jordanie était prise avant même son départ pour Vancouver? Qu'il le dise donc.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation du député est absolument fausse, parce qu'au cours de la fin de semaine, j'ai été en communication constante avec mon bureau, et il était prévu que je puisse me rendre là-bas.

Par contre, on n'avait pas prévu que les funérailles auraient lieu en moins de 24 heures suivant le décès du roi Hussein.

*  *  *

[Traduction]

LES SANS-ABRI

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre était trop occupé à dévaler les pentes de ski pour assister aux funérailles du roi Hussein. Nous apprenons maintenant qu'il est trop occupé pour rencontrer une délégation de sans-abri canadiens qui seront à Ottawa, demain. Le premier ministre est trop occupé pour penser à la situation désespérée de centaines de milliers de sans-abri au Canada.

Quel sport le premier ministre invoquera-t-il comme excuse cette fois?

 

. 1425 + -

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée aime essayer de faire des attaques personnelles.

Pour ma part, j'ai interrompu mes vacances pour aller aux funérailles des Inuits qui sont décédés lors d'une avalanche au Nouveau Québec. La journée même où on avait attenté à ma vie, j'ai pris l'avion pour me rendre aux funérailles du premier ministre Rabin.

J'avais tout prévu pour me rendre aux funérailles du roi Hussein, mais l'armée canadienne m'a dit que je ne pouvais pas m'y rendre. Quant aux délégations, nous avons des ministres qui sont là pour recevoir les gens. Il y a un processus bien connu et ils suivent la filière.

Le Président: Le leader du Nouveau Parti démocratique a la parole.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, pour le premier ministre, l'hiver, c'est amusant: c'est la saison du ski, du patin, de la planche à neige, etc. Pour les sans-abri du Canada, l'hiver, c'est l'enfer: c'est la saison où il faut se blottir dans les entrées, dormir sur des grilles d'évacuation d'air chaud, faire la queue aux soupes populaires.

Les sans-abri ne sont pas des personnages imaginaires. Ce sont des hommes, des femmes et des enfants bien réels. Le premier ministre reconsidérera-t-il sa décision? Ira-t-il constater la situation de ses propres yeux, afin que le gouvernement offre enfin un répit aux victimes du drame humain...

Le Président: Le premier ministre a la parole.

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux est responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Il a fait une déclaration il y a quelques jours et de nouveaux crédits ont été alloués, au cours des dernières semaines, pour régler ce problème. J'espère que l'honorable députée prendra le temps de regarder les faits avant de faire des accusations tout à fait gratuites, comme elle aime constamment le faire.

*  *  *

LE KOSOVO

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, on a appris ce matin que les négociations de paix au sujet du Kosovo sont en difficultés.

Est-ce que le premier ministre a consulté le ministre de la Défense nationale, avant l'annonce qu'il a faite en Suisse, pour savoir si oui ou non le Canada pourrait déployer des troupes entraînées et équipées au Kosovo?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque j'étais à Davos, j'ai indiqué que le Canada serait disposé à participer s'il y avait lieu.

Je n'ai pas pris d'engagement. J'ai dit que nous serions prêts à considérer une participation au Kosovo, comme nous l'avons fait dans la partie de l'ancienne Yougoslavie qui a des problèmes. L'OTAN n'a pas pris de décisions. Des négociations ont lieu présentement à Rambouillet, près de Paris, et nous attendons les résultats avant de prendre une décision.

[Traduction]

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, en réponse à ma question d'hier au sujet du Kosovo, le ministre de la Défense nationale a dit que le Canada n'a pas été officiellement invité à envoyer des troupes terrestres.

Le Canada a-t-il été invité officieusement à envoyer des troupes terrestres au Kosovo? Le cas échéant, qui a fait cette demande et quand a-t-elle été faite?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit hier que le commandement militaire de l'OTAN élaborait des plans préliminaires et qu'il est possible qu'une force de maintien de la paix soit présente au Kosovo s'il y a un accord en ce sens, dans le cadre des pourparlers de paix qui se tiennent actuellement à Rambouillet, en France. Le cas échéant, le Canada examinera certainement le rôle qu'il pourrait jouer à cet égard.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, sous ce ministre des Finances, les Canadiens paient davantage et reçoivent moins, et c'est un fait. Depuis 1993, les Canadiens ont vu leurs impôts augmenter de 38 milliards de dollars.

Cette année, le ministre des Finances leur arrachera 38 milliards de dollars de plus qu'il y a cinq ans. Pendant ce temps, les comptes d'épargne des Canadiens ont diminué de 38 milliards de dollars.

Comment le ministre peut-il affirmer qu'il diminue les impôts alors qu'il puise 38 milliards de dollars dans les comptes d'épargne et les portefeuilles des contribuables tous les ans?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il ne fait pas de doute que les recettes que le gouvernement tire des impôts sur le revenu des particuliers ont augmenté. Elles ont augmenté parce que, depuis un an, 526 000 emplois ont été créés. Voilà pourquoi. Depuis un an, 200 000 emplois ont été créés pour les jeunes Canadiens, dont 44 000 le mois dernier. L'économie canadienne tourne à plein régime et c'est parce que le secteur privé du pays exerce son activité dans un climat...

 

. 1430 + -

Le Président: Le député de Medicine Hat a la parole.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, remarquez comment le ministre des Finances n'a pas répondu à la question. Il l'a éludée.

Pourquoi le ministre prétend-il diminuer les impôts quand on sait que ces derniers continuent d'augmenter, et qu'ils sont maintenant supérieurs de 38 milliards de dollars à ce qu'ils étaient il y a cinq ans? Les impôts ont été haussés 38 fois depuis que ce ministre est en poste. Comment peut-il prétendre une telle chose? Comment peut-il dire aux Canadiens qu'il diminue les impôts pendant que tout ce que nous obtenons, ce sont des réductions dans le domaine de la santé? Comment fait-il?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député a brandi le spectre des réductions dans la santé.

Je lui demanderais de faire deux choses. D'abord, je lui demanderais d'attendre le budget, qui sera déposé mardi prochain.

Ensuite, je lui demanderais de répondre à la question qui lui a été posée hier. Où trouvera-t-il les 7 à 16 milliards de dollars de compressions que son parti préconise dans son plan fiscal? Comment les réformistes vont-ils justifier cela et quand diront-ils aux Canadiens que ce qu'ils veulent faire en réalité, c'est comprimer les pensions, la péréquation et les soins de santé? Ils veulent détruire le tissu même du pays, tel est leur objectif.

*  *  *

[Français]

L'ENTENTE SUR L'UNION SOCIALE

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales a déclaré, hier, que c'était le gouvernement du Québec qui avait refusé d'inclure la notion de société distincte dans l'entente sur l'union sociale, une entente, rappelons-le, que le Québec n'a pas signée.

Au lieu de s'agiter comme il le fait depuis le début dans ce dossier, au lieu de menacer d'imposer tout de même cette entente au Québec contre sa volonté, le ministre ne devrait-il pas vérifier auprès du premier ministre si ce dernier est d'accord avec lui pour priver le Québec de sa juste part des fonds, comme il menace de le faire depuis quelques jours?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, les risques que nous nous trouvions dans une situation de désaccord du style de celui que vient de mentionner le député, comme le premier ministre du Québec hier, sont de beaucoup amoindris du fait que le gouvernement du Canada s'est engagé à respecter l'entente-cadre sur l'union sociale qui va accroître de beaucoup notre capacité de travailler en commun pour tous les Canadiens.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales, pour se venger du Québec qui n'a pas signé sa proposition sur l'union sociale, menace de le priver de fonds.

Comment le ministre peut-il affirmer qu'il se sent lié par la motion gouvernementale sur la société distincte, alors qu'il se livre à du chantage pour faire entrer le Québec dans le même moule que toutes les autres provinces?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je ne m'en fais pas du tout avec ce type de question, parce que je suis très confiant que plus le débat progressera, plus on se concentrera sur le contenu de l'entente.

Je pourrais peut-être citer une seule clause, et j'invite le député à réfléchir sur cette clause: «un gouvernement provincial qui, en raison de sa programmation existante, n'aurait pas besoin d'utiliser l'ensemble du transfert pour atteindre les objectifs convenus, pourrait réinvestir les fonds non requis dans le même domaine prioritaire ou dans un domaine prioritaire connexe.»

*  *  *

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, voici de quoi ramener le ministre des Finances sur le plancher des vaches.

Sous son administration, les impôts ont augmenté de 38 milliards de dollars et le financement des soins de santé a été réduit de 16 milliards. Nous savons que les contribuables méritent mieux que cela.

Quand le ministre des Finances mettra-t-il fin à ses impôts élevés et à ses compressions dans les budgets de la santé?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, pour tenir un débat éclairé sur la politique fiscale, il importe que chaque parti politique expose ses positions.

Dans le budget de la semaine prochaine, nous présenterons les nôtres, comme nous l'avons fait dans le dernier budget, qui comportait des réductions de sept milliards de dollars.

Le Parti réformiste a déclaré qu'il allait réduire les impôts de beaucoup, mais sans préciser où il ferait des coupes pour payer ces réductions. Le Parti réformiste doit à la population canadienne des explications sur ses intentions, qu'elles soient cachées ou pas.

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Nous sommes ici pour discuter de vos politiques, pas des nôtres. Nous y viendrons bien assez vite.

Le Président: Je prie le député de s'adresser à la présidence.

M. Gerry Ritz: Monsieur le Président, comment le ministre des Finances peut-il justifier ses petits tours de passe-passe et forcer les Canadiens à payer davantage pour obtenir moins?

Son héritage est le suivant: 38 hausses d'impôt, des compressions radicales dans la santé, 180 000 personnes sur les listes d'attente. Quand cela cessera-t-il?

 

. 1435 + -

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, ou bien le programme du Parti réformiste et ses réductions d'impôts sont réelles, et dans ce cas, il devra y avoir des réductions des dépenses, ou bien les chiffres réformistes sont tout à fait farfelus.

La seule question qui se pose maintenant aux Canadiens, c'est de savoir si le Parti réformiste a un véritable programme ou s'il est perdu dans les nuages.

Le Président: Je demande à tous les députés de choisir soigneusement leurs mots.

*  *  *

[Français]

L'APEC

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre a toujours dit que la Commission des plaintes du public contre la GRC pourrait faire toute la lumière sur ses implications dans l'affaire de l'APEC.

Or, en décembre dernier, la présidente de la Commission déclarait, et je cite: «Le premier ministre ne fait pas partie de mon mandat».

Comment le premier ministre a-t-il pu répéter à maintes reprises que la Commission pouvait enquêter sur son implication, alors que la présidente de cette Commission confirme le contraire?

[Traduction]

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la Commission des plaintes du public contre la GRC examine les plaintes qui lui sont présentées par des civils contre la GRC et c'est exactement ce que la commission fait.

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, des documents secrets révèlent que le premier ministre a discuté avec l'ambassadeur indonésien des préoccupations de sécurité et de confort du dictateur Suharto.

Le premier ministre aurait même vanté l'expérience canadienne dans la gestion de telles visites politiquement sensibles.

Comment le premier ministre a-t-il pu prétendre qu'il n'a jamais discuté avec l'entourage de Suharto de questions relatives à sa sécurité et son confort, quand des documents secrets dévoilent exactement le contraire?

[Traduction]

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a déclaré à maintes reprises à la Chambre que ses ministres et lui collaboreront pleinement avec la Commission des plaintes du public contre la GRC et c'est ce que fera le gouvernement.

*  *  *

LE BUDGET

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances pousse les hauts cris au sujet des idées des réformistes pour mieux nous faire oublier sa piètre performance, mais il ignore absolument tout de la liberté économique.

Depuis qu'il est en fonctions, le ministre a puisé 38 milliards de dollars de plus dans les poches des Canadiens et a porté un dur coup au régime de soins de santé.

Ma question est simple et directe: Pourquoi le ministre promet-il d'alléger les impôts alors qu'il s'apprête à les augmenter? Les Canadiens vont-ils obtenir de véritables réductions d'impôts cette année?

L'hon. Paul Martin (LaSalle—Émard, Lib.): Attendez le budget.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, les députés le savent bien, le ministre des Finances affirme que tout va pour le mieux, mais pendant ce temps la fiscalité frappe durement les Canadiens moyens.

Il y a autre chose. Depuis 1993, le ministre a récupéré en impôts 155 p. 100 des augmentations de salaire qu'ont obtenues les Canadien. Comme s'il ne suffisait pas que les Canadiens paient pour leurs augmentations de salaire, le ministre veut maintenant s'en prendre à leurs économies.

Ma question au ministre est simple: Les Canadiens vont-ils, oui ou non, payer moins d'impôt cette année?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous avons annoncé des baisses d'impôt dans le dernier budget. Nous en ferons autant dans le prochain.

Le député ne s'en est probablement pas rendu compte. Peut-être a-t-il oublié de lire le budget.

*  *  *

[Français]

LA CONDITION FÉMININE

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, la réorganisation du Programme de promotion des femmes s'est faite au détriment des femmes.

En effet, Condition féminine Canada a décidé d'abolir le volet de soutien de son programme, ce qui prive les centres de femmes du Québec et du Canada de milliers de dollars.

Alors que la stratégie de financement de soutien des centres de femmes donne d'excellents résultats à long terme, la secrétaire d'État à la Condition féminine s'engage-t-elle, pour le bien des femmes, à faire marche arrière et à rétablir sur-le-champ ce financement?

[Traduction]

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, les ONG féminines au Canada reçoivent depuis de nombreuses années l'aide du programme de promotion de la femme. Une campagne pour l'égalité a demandé au gouvernement d'accorder une aide financière accrue et nous examinons actuellement la question. Nous serions disposés à accroître l'aide financière.

Toutefois, ce qu'il faut retenir au sujet du programme de promotion de la femme, c'est qu'il a réussi à faire autant avec le budget qui lui avait été accordé. Aucun programme pour les femmes n'a été annulé au Canada jusqu'à maintenant en raison du financement des programmes.

*  *  *

 

. 1440 + -

[Français]

LE BOGUE DE L'AN 2000

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Il ne reste que 325 jours avant la fin du siècle et le public s'inquiète de plus en plus des effets possibles du bogue de l'an 2000.

[Traduction]

Les députés sont au courant de ce que fait le gouvernement pour nous préparer à l'an 2000 et sensibiliser les entreprises aux mesures à prendre.

Le ministre responsable de la consommation a-t-il oublié les consommateurs canadiens?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il reste 325 jours avant l'an 2000 et ce n'est pas très long. Nous n'avons pas oublié les consommateurs.

Le gouvernement distribue cette semaine des brochures dans tous les foyers canadiens, afin d'informer les consommateurs canadiens des précautions à prendre en prévision du changement de millénaire. Certains appareils seront affectés, mais beaucoup ne le seront pas.

Je souligne, à cet égard, le travail accompli par le Comité de l'industrie, qui a publié cette semaine son deuxième rapport sur le bogue de l'an 2000. C'est une autre façon importante de s'assurer que le Canada soit l'un des pays les mieux préparés...

Le Président: Le député de West Vancouver—Sunshine Coast a la parole.

*  *  *

LA JUSTICE

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Justice.

À Montréal, deux hommes sont reconnus coupables d'un viol brutal. À Ottawa, une femme est reconnue coupable d'avoir assassiné sont mari en l'atteignant de deux balles à la tête. À Ottawa, un homme est reconnu coupable du meurtre de sa mère. Qu'ont ces crimes en commun? Leurs auteurs sont tous rentrés chez eux au lieu d'aller en prison.

Quand la ministre de la Justice va-t-elle modifier la loi de façon que les personnes reconnues coupables de ces crimes violents aillent en prison au lieu de rentrer chez elles?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, car je l'ai dit à la Chambre à diverses occasions, cinq causes venant de tribunaux d'appel différents seront entendues ce printemps par la Cour suprême du Canada.

S'il semble que la loi doive être modifiée une fois que ces causes auront été entendues, je puis assurer à la Chambre que je ferai apporter les modifications nécessaires

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, il est temps que la ministre laisse tomber la théorie et qu'elle affronte la réalité.

Les personnes reconnues coupables de ces crimes violents rentrent chez elles. Cela ne signifie pas qu'elles sont enfermées chez elles. Elles vont aujourd'hui au cinéma dans leur quartier. Elles vont faire leurs emplettes.

Quand la ministre de la Justice va-t-elle adopter les mesures que lui imposent ses fonctions et faire en sorte que ce qui est survenu à Ottawa en fin de semaine dernière ne se reproduise jamais ailleurs au Canada?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député dit qu'il est temps de passer à l'action.

Il est membre du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. En avril 1998, j'ai demandé par écrit au comité permanent d'analyser le processus de détermination de la peine. Je lui ai demandé un avis et des commentaires sur la mesure dans laquelle la loi, s'il y a lieu, doit être modifiée. Depuis ce temps, je n'ai pas eu le moindre signe de vie. J'attends toujours.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, sur les 13 militaires qui ont reçu le vaccin contre l'anthrax alors qu'ils étaient en poste au Koweït l'année dernière, 8 ont encore des grosseurs visibles sur le bras à la suite des injections, certaines sont aussi larges que des pièces de un dollar.

Les 13 militaires et leur famille ont également des grosseurs à la gorge. Tous craignent pour leur santé et leur sécurité à cause des effets secondaires dont ils commencent seulement à entendre parler. Ces hommes et ces femmes veulent des réponses directes qui pourraient les aider à faire face à la peur de l'inconnu qu'ils éprouvent.

Quand le ministre de la Défense nationale va-t-il éclairer ces Canadiens en fournissant les renseignements les plus à jour disponibles?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis désolé d'entendre que certaines personnes éprouvent encore des problèmes à cet égard. Je suis persuadé que les membres de notre profession médicale dans les Forces canadiennes vont faire tout en leur pouvoir pour aider les intéressés.

La grande majorité des gens qui ont reçu le vaccin contre l'anthrax n'ont éprouvé aucun problème. Chez les militaires américains qui ont reçu le même vaccin, un très petit pourcentage de gens ont eu une réaction.

Nos médecins ont jugé que le vaccin était sûr. Étant donné les dangers qui existaient dans le golfe à l'époque, il convenait de vacciner nos militaires.

 

. 1445 + -

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, le caporal-chef Dennis Biden est un militaire décoré qui fait partie des Forces canadiennes depuis 19 ans. Il affirme qu'il ne fera plus jamais confiance à ses supérieurs depuis qu'il a appris qu'on lui avait injecté en connaissance de cause le vaccin périmé contre l'anthrax.

Ce père de deux enfants veut savoir si le ministère de la Défense nationale savait que le vaccin était périmé. Avant de l'administrer, le gouvernement canadien savait-il qu'on en avait modifié l'étiquette? Savait-il que certaines fioles renfermaient de la moisissure? A-t-on effectué des tests préliminaires sur le vaccin? Le ministre va-t-il voir à ce que les gens qui ont été forcés de recevoir ce cocktail chimique soient admissibles à une pension pour raisons médicales, car on ignore tout des effets à long terme qu'il pourrait avoir?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, on a répondu à toutes ces questions et je pense que le député connaît fort bien la réponse.

Personne n'a reçu quoi que ce soit de périmé ou contenant de la moisissure, ou qui pourrait être dangereux pour la santé. On a testé tous les vaccins à plusieurs reprises et des professionnels de la santé ont dit être d'accord pour qu'on administre ces vaccins.

*  *  *

LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA

M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, Yvon Duhaime, qui a caché aux fonctionnaires fédéraux qu'il avait un casier judiciaire, a l'habitude de ne payer ni ses dettes ni ses impôts et a empoché le premier versement de sa subvention fédérale.

Bref, il ne répond à aucun des critères d'admissibilité à une aide fédérale, mis à part le fait qu'il a acheté un hôtel appartenant au premier ministre et à ses amis. Nous savons déjà que les entrepreneurs qui ont travaillé à l'agrandissement de l'hôtel n'ont pas été payés.

Le ministre de l'Industrie peut-il garantir à la Chambre que Duhaime utilise les 615 000 $ qui lui ont été prêtés pour agrandir l'hôtel et non pour rembourser des dettes personnelles?

Le Président: Je pense que la première partie de la question est recevable, mais je ne vois pas comment le ministre pourrait répondre à la seconde partie.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Je suis d'accord, monsieur le Président.

Ce que nous savons, c'est que le prêt a été accordé selon les formalités établies. C'est un prêt commercial qui fait partie d'un plan de financement comprenant des fonds prêtés par le secteur privé. Il n'y a pas que la Banque de développement du Canada qui a avancé de l'argent pour ce projet. Le prêt est garanti par une hypothèque sur la propriété. Il a été consenti au taux commercial.

Si le député voit un inconvénient à ce que la Banque de développement prête aux hôtels, il devrait en faire part au comité.

M. Jim Jones (Markham, PC): Monsieur le Président, un Canadien ordinaire ne pas prêterait 100 $ à Yvon Duhaime et ne lui accorderait certainement pas 800 000 $ en prêts et subventions aux frais des contribuables. D'ailleurs, les Canadiens ordinaires ne dépensent pas l'argent des autres en voyages grandioses. Les Canadiens ordinaires n'ont pas de postes politiques bien rémunérés à offrir aux membres de leur famille.

Je demande à notre premier ministre de luxe, qui a coupé avec plaisir le ruban...

Le Président: Le député de Hastings—Frontenanc—Lennox and Addington a la parole.

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LES AGRICULTEURS DU CANADA

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a annoncé en décembre que le gouvernement du Canada accordera 900 millions de dollars aux producteurs pour les aider à traverser la crise que connaît actuellement le secteur agricole.

Où sont les chèques?

M. Joe McGuire (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député a parfaitement raison. En décembre dernier, nous avons annoncé un programme national d'aide d'urgence de 900 millions de dollars.

Dans l'intervalle, les provinces accordent des fonds aux agriculteurs qui sont dans le besoin, car les paiements que nous ferons seront fondés sur les déclarations de revenu.

À la conférence sur la sécurité nationale qui aura lieu les 23 et 24 février, à Victoria, le ministre annoncera les derniers détails du programme. Les formulaires de demande seront disponibles en mars et les paiements définitifs seront effectués en juin, que les provinces participent ou non.

*  *  *

L'AN 2000

M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, selon une récente vérification effectuée par Développement des ressources humaines, il y aurait une chance sur dix que des prestations indispensables aux aînés soient compromises en raison du bogue du millénaire.

Récemment, le ministre de l'Industrie a lancé une campagne de relations publiques sur le bogue de l'an 2000, en disant aux Canadiens qu'ils n'avaient pas besoin de se faire des réserves de lait en poudre.

 

. 1450 + -

Quand le ministre de l'Industrie prévoyait-il nous parler des effets potentiellement désastreux du bogue de l'an 2000 sur les services essentiels destinés aux aînés, problème qui risque de les laisser sans un sou?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, les systèmes essentiels à la mission du gouvernement sont évalués régulièrement. Ceux qu'a mentionnés le député l'ont déjà été et on nous a dit qu'ils fonctionneraient parfaitement bien. Il ne faut donc pas nourrir les craintes, surtout parmi les aînés, car ils recevront leurs chèques de pension du gouvernement fédéral.

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[Français]

L'AÉROPORT JEAN-LESAGE

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, l'aéroport Jean-Lesage est une infrastructure importante pour le développement économique de la région de Québec.

Pourtant, le gestionnaire de la cession de l'aéroport, M. Daniel Paiement, a récemment déclaré que le gouvernement du Canada n'a aucun objectif précis ni obligation quant à la rentabilité future de l'aéroport.

Le ministre des Transports partage-t-il l'interprétation que fait son fonctionnaire de la situation: «aucun objectif précis de rentabilité»?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il existe une politique pour les aéroports nationaux, et cette politique fonctionne bien. Nous sommes maintenant en discussion avec les gens de la Ville de Québec au sujet de l'avenir de cet aéroport, et je pense que cet aéroport aura un grand avenir.

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[Traduction]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, la GRC est à cours de personnel, il lui manque 400 agents. Dans sept ans, plus de la moitié de ses 16 000 membres auront droit à la retraite, mais il n'y a pas le moindre cadet inscrit à l'École de la GRC, à Regina.

La semaine dernière, le solliciteur général a déclaré qu'il donnait à la GRC tous les moyens dont elle a besoin pour lutter contre le crime. Quelles mesures le solliciteur général entend-il prendre pour qu'il y ait suffisamment d'agents de la GRC qui utilisent ces moyens pour combattre la criminalité? Pourrait-il nous garantir qu'il y aura assez de fonds dans le budget pour redresser la situation dangereuse qui se dessine en matière de protection policière?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, sans dévoiler les dispositions du budget, je dirai que les responsables de la GRC et moi avons discuté avec les représentants du Conseil du Trésor des difficultés de financement de la GRC. Nous allons veiller à ce que la GRC forme ses agents comme elle l'a toujours fait.

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L'INDUSTRIE DE L'ÉDITION

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, depuis des mois, les Canadiens se font dire que les États-Unis prendront peut-être des mesures de représailles contre le Canada à cause de la présentation du projet de loi C-55. Les États-Unis menacent d'imposer des sanctions contre des industries canadiennes, notamment dans les secteurs du bois d'oeuvre et de la sidérurgie. Les hésitations du ministre du Commerce international face à ces menaces ont soulevé de réelles craintes dans les industries canadiennes.

La ministre du Patrimoine canadien pourrait-elle assurer aux Canadiens que le projet de loi C-55 est une mesure à toute épreuve capable de résister à toute contestation des États-Unis auprès de l'OMC ou en vertu de l'ALENA? De même, pourrait-elle confirmer que ce projet de loi est conforme à la Charte canadienne des droits et libertés?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député et son parti, et en fait la plupart des partis représentés à la Chambre, pour leur appui ferme et inébranlable à l'égard du projet de loi C-55.

Le gouvernement est d'avis que ce projet de loi respecte toutes nos obligations nationales et internationales.

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REVENU CANADA

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national. Personne n'aime payer de l'impôt. Nous présumons que le système est juste pour chacun des contribuables canadiens. Qu'a fait le ministre pour s'assurer que le régime fiscal est bien équitable envers chacun d'entre nous?

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes tous conscients de l'importance de l'équité. C'est pourquoi j'ai lancé, en mars dernier, un examen du régime qui visait à en assurer l'équité envers tous les Canadiens.

Ce matin, j'ai lancé un plan d'action en sept points qui doit faire en sorte que le régime fiscal soit équitable pour tous les Canadiens et que nous assurions de meilleurs services et une plus grande équité.

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. 1455 + -

L'AN 2000

M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, selon les propres rapports de vérification du gouvernement, il y a une chance sur dix pour que le bogue de l'an 2000 paralyse des services essentiels, et nous venons tout juste d'entendre le ministre dire que le gouvernement cherche une solution à ce problème.

Quelles garanties le ministre peut-il donner aux Canadiens âgés que le bogue de l'an 2000 ne les empêchera pas de bénéficier des services essentiels qui leur sont dispensés?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, le gouvernement accorde une très grande importance aux systèmes qui concernent les personnes âgées, en particulier ceux qui assurent le traitement de leurs chèques de pension, et il a pris les dispositions nécessaires. Le ministère du Développement des ressources humaines a consacré des millions de dollars à l'examen de ces systèmes. Il a fait savoir qu'ils seraient prêts et fonctionneraient adéquatement le 1er janvier de l'an 2000.

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[Français]

L'EXPORTATION DES RÉACTEURS CANDU

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

En décembre dernier, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international rendait public un rapport qui recommandait, et je cite: «Que le Parlement mène une étude distincte et approfondie sur l'utilisation ici au pays et l'exportation à l'étranger de la technologie nucléaire civile du Canada.»

Qu'attend le ministre du Commerce international pour décréter un moratoire sur l'exportation des réacteurs CANDU, jusqu'à ce que toute la lumière soit faite sur les dangers que constitue l'utilisation du nucléaire?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il a été démontré que les réacteurs Candu utilisent une technologie de pointe que non seulement nous désirons exporter, mais que nous jugeons suffisamment fiable pour nous-mêmes au Canada.

Nous avons fait la promotion de la technologie Candu. Cette technologie est sûre, mais également abordable et assurément supérieure à toute autre technologie actuelle. Elle constitue certainement une solution de rechange à l'utilisation du charbon, cette source d'énergie polluante qui est encore utilisée dans de nombreux pays et qui ne contribuera certainement pas à régler l'importante question du changement climatique.

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LES SANS-ABRI ET LA PAUVRETÉ

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, il y a quelques heures à peine, des autobus bondés ont quitté Toronto en direction d'Ottawa avec à leur bord des pauvres et des sans-abri qui désirent rencontrer le premier ministre. Toutefois, le premier ministre a carrément refusé de les rencontrer.

Qu'est devenue la compassion des libéraux? Est-elle disparue en même temps que les logements sociaux? Les Canadiens veulent savoir pourquoi le premier ministre ferme les yeux sur la clochardise et la pauvreté qui sévissent au pays et pourquoi le gouvernement se montre sans pitié envers les plus nécessiteux et les abandonne.

La situation est urgente. Que compte faire le premier ministre?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la députée parle de la compassion des libéraux. Nous avons contribué la somme de 300 000 $ au rapport Ann Golden. La SCHL s'est engagée à verser 750 000 $ à la recherche sur les sans-abri. Elle a offert de l'assurance hypothécaire à l'abri familial d'urgence Woodgreen Red Door, un abri de 50 lits pour les sans-abri de Toronto. La SCHL appuie activement un partenariat entre les gouvernements et le secteur privé visant à créer des logements abordables pour régler les problèmes que connaissent les sans-abri. En tout, 2 800 unités de logement ont été construites en 1998 et 3 000 autres le seront cette année.

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L'ÉDITION

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, depuis des mois, les Canadiens entendent parler de la possibilité de représailles américaines contre le projet de loi C-55 du Canada.

Les États-Unis ont menacé d'imposer des sanctions contre un certain nombre de nos industries, dont celles du bois d'oeuvre et de l'acier. Le ministre du Commerce international a parfois hésité devant ces menaces, ce qui a suscité de la crainte dans les industries canadiennes.

Le ministre du Commerce international peut-il donner aux Canadiens l'assurance que le projet de loi C-55 est une mesure à toute épreuve, capable de résister à toute contestation auprès de l'OMC ou en vertu de l'ALENA, ou bien s'agit-il d'une mesure semblable au projet de loi sur le MMT?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, non seulement le député a quelque chose dans son eau, mais il a aussi les oreilles bouchées, puisque la ministre du Patrimoine a répondu à cette même question à l'instant.

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LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, les impôts augmenteront cette année de 2,4 milliards de dollars. Nous le savons de façon certaine. Le ministère des Finances fait circuler des chiffres qui...

Des voix: Oh, oh!

 

. 1500 + -

Le Président: À l'ordre. Je veux entendre la question.

M. Monte Solberg: Aucune manière, monsieur le Président.

Les impôts augmenteront cette année de 2,4 milliards de dollars, alors que le ministère des Finances prétend qu'il les réduira de 2 milliards. Cela veut dire que la situation des Canadiens empirera encore cette année, pour la sixième fois d'affilée sous le régime du ministre des Finances actuel.

Comment le ministre justifie-t-il la réputation qu'il s'est attribuée de réducteur d'impôts alors que les impôts augmenteront une fois de plus cette année?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dit très clairement dans le dernier budget, comme nous le dirons dans le prochain et dans chacun des budgets à venir, que nous ferons baisser les impôts. En plus de cela, nous allons préserver le système de santé. Nous allons en outre investir dans la productivité et dans la recherche et le développement, soit les forces mêmes de notre économie moderne. Nous allons donner aux Canadiens les outils dont ils ont besoin pour triompher au cours du XXIe siècle.

Le Président: J'entendrai maintenant deux questions de privilège, suivies d'un rappel au Règlement.

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PRIVILÈGE

LA SOCIÉTÉ DEVCO

Le Président: La semaine dernière, le député de Sydney—Victoria a soulevé la question de privilège au sujet du ministre des Ressources naturelles.

Pour remettre les choses dans leur contexte, je crois qu'une assemblée avait eu lieu dans sa circonscription ou à proximité de celle-ci, qu'il avait été incapable de s'y rendre et qu'un membre de son personnel n'avait pas été autorisé à y assister. Est-ce exact?

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, il s'agissait, dans ma circonscription, d'une séance d'information à huis clos sur l'annonce concernant la Société de développement du Cap-Breton. C'est tôt le matin que j'ai été informé de la tenue de cette assemblée. J'ai pris des dispositions pour me trouver dans ma circonscription. Je crois savoir que des journalistes ont été autorisés à assister à la séance d'information à huis clos, mais pas les membres de mon personnel.

Le Président: Je remercie le député. Comme le ministre dont il est question est ici présent, il pourrait peut-être répondre.

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, je veux répondre à la plainte que le député de Sydney—Victoria a déposée lundi dernier, après la période des questions. Elle concernait deux événements distincts qui sont associés à l'annonce des projets du gouvernement au sujet de la Société de développement du Cap-Breton.

Je ne suis pas bien placé pour en parler, car je n'ai personnellement participé à aucun des deux événements. Toutefois, des personnes présentes m'ont assuré de l'exactitude des faits.

La première question soulevée par le député avait trait au moment de l'annonce. Le 27 janvier, à environ neuf heures, le député de Sydney—Victoria et la députée de Bras d'Or—Cape Breton étaient dans la salle d'attente de mon bureau, à l'immeuble de la Confédération. La députée de Bras d'Or—Cape Breton avait entendu dire qu'une annonce serait faite dans les deux ou trois prochaines semaines au sujet de la société Devco. Un membre de mon personnel a dit aux députés qu'une annonce était imminente, qu'elle aurait lieu plutôt tôt que tard.

En fait, plus tard ce jour-là, soit le 27 janvier, à environ 17 heures, le Bureau du Conseil privé a confirmé qu'il m'autorisait à faire une annonce sur l'orientation future de Devco.

 

. 1505 + -

Afin d'éviter toute confusion, permettez-moi de répéter la chronologie de cette journée. Le 27 janvier, vers neuf heures du matin, mon personnel a informé les deux députés qu'une annonce était imminente et qu'elle aurait lieu dans les plus brefs délais. Vers 17 heures, ce jour-là, soit environ huit heures après la conversation entre mon personnel et les deux députés, mon bureau a reçu un appel du bureau du Conseil privé qui nous informait que nous étions autorisés à faire une annonce. Comme nous étions désireux de mettre fin à l'incertitude dans laquelle était plongée la population du Cap-Breton, il a été décidé de faire l'annonce le lendemain.

La deuxième question concerne la séance d'information à l'intention des médias qu'ont donnée de hauts fonctionnaires le jour même de l'annonce. Mon bureau a avisé un des membres du personnel au bureau du député de Sydney—Victoria que la séance d'information à l'intention des médias s'adressait, comme son nom l'indique, aux médias. Son bureau a également appris qu'il recevrait une copie des dossiers d'information avant la tenue de la conférence de presse au cours de laquelle l'annonce serait faite. Des exemplaires de ces dossiers ont été livrés aux bureaux de la colline du Parlement et aux bureaux de circonscription du député de Sydney—Victoria et de la députée de Bras d'Or—Cape Breton. Comme mon bureau l'avait promis, ces dossiers d'information sont parvenus avant le début de la séance d'information pour les médias.

Mais le point à retenir, c'est que les médias et les députés de Sydney—Victoria et de Bras d'Or—Cape Breton n'ont pas été les seuls à recevoir cette information avant la tenue de la séance d'information pour les médias. Pendant que des fonctionnaires informaient les médias, j'ai personnellement rencontré des chefs syndicaux et d'autres personnes, mais surtout, des mineurs et leur famille, pour leur expliquer l'annonce imminente et répondre à leurs questions. Je puis confirmer que la députée de Bras d'Or—Cape Breton était présente dans la pièce pendant cette discussion avec les mineurs et les autres personnes, et le député de Sydney—Victoria ainsi que son personnel auraient fort bien pu être présents eux aussi. Les deux députés ont assisté à la conférence de presse pendant laquelle l'annonce elle-même a été faite.

Il est clair que nous avons vraiment essayé de traiter tout le monde équitablement et convenablement dans des circonstances très difficiles et chargées d'émotivité. Il est certain que personne n'a voulu causer quelque préjudice que ce soit.

Le Président: La question a été soulevée par le député et il a exposé ses arguments à la Chambre. Il est toujours triste de ne pas réussir à intégrer dans nos vies mouvementées tout ce que nous souhaiterions. Le député semble se plaindre de ce que ni lui ni son personnel n'a pu assister à la rencontre mentionnée. Le ministre a fourni une explication. C'est une interprétation des faits.

Je pense qu'il ne s'agit pas d'une question de privilège.

SANTÉ CANADA

Le Président: Je m'adresse au whip du Parti réformiste, qui m'a envoyé une note pendant la période des questions, au sujet d'une question de privilège soulevée par le député de Macleod. Dans cette question de privilège, il était expressément question du ministre de la Santé, qui est maintenant présent à la Chambre.

Voici mon problème. Dans le passé, j'ai dit que les deux députés visés devraient être présents à la Chambre au même moment; or, pour une raison ou une autre, le député de Macleod n'est pas ici aujourd'hui. Même si nous avons demandé au ministre de la Santé d'être présent, je crois que, conformément aux précédents, nous devrions attendre qu'il puisse répondre directement au député de Macleod. À moins d'indication contraire ou d'unanimité, telle est ma décision.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, en ce qui concerne vos observations, je serais très heureux, avec le consentement unanime de la Chambre, de remplacer le député de Macleod, de suivre le débat et de me pencher sur la question.

Le Président: Comme tous les députés le savent, avec le consentement unanime de la Chambre, nous pouvons faire ce que nous voulons dans cette enceinte. Nous donnons-nous la permission d'entendre une réponse du ministre de la Santé sur la question de privilège? Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

 

. 1510 + -

Le Président: Je donne maintenant la parole au ministre de la Santé. Est-ce qu'il comprend le point soulevé dans le cadre de la question de privilège?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, vous êtes très gentil.

Je remercie nos vis-à-vis de soulever cette question. Ils ont porté à mon attention, il y a quelques jours, un communiqué de presse qui a quitté mon bureau relativement à la formation d'un comité du Parti libéral sur une question. Le communiqué de presse a été imprimé, de façon inappropriée, sur le papier à en-tête de Santé Canada. Cela aurait dû être fait sur le papier à en-tête de mon bureau de circonscription ou de mon bureau de député. Je remercie le député d'avoir porté cela à mon attention et à l'attention de la Chambre. Il a raison. On aurait dû utiliser l'autre papier à en-tête et je déplore que cela n'ait pas été fait.

Je veux que la Chambre sache que j'ai demandé au député de Waterloo—Wellington d'examiner cette question, car nous sommes très inquiets de l'usage du tabac chez les jeunes. En fin de compte, j'espère que les députés reconnaîtront que cette question, et la façon dont nous remédions au problème, est bien plus importante que la question du papier à en-tête.

Le Président: Si je me rappelle bien, le principal problème résidait dans le fait que cette annonce avait été faite sur du papier à en-tête du ministère. C'était la raison d'être de la question de privilège.

Or, le ministre de la Santé dit maintenant que c'était une erreur. Si je comprends bien, il a déclaré que c'était une erreur et il veut remédier à cette situation de son mieux.

Je ne voudrais pas faire dire au ministre ce qu'il n'a pas dit, mais fondamentalement, il a présenté des excuses. Est-ce exact?

L'hon. Allan Rock: Monsieur le Président, c'est exact.

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Le Président: Rapidement, je vous en prie. Ce rappel au Règlement devra être si bref que j'aurai à peine le temps de me rasseoir.

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, je voudrais simplement dire que je remercie le ministre de cela. Ce communiqué de presse a également été affiché sur le site Web de Santé Canada. En d'autres termes, il est sur Internet. Je voudrais seulement qu'on me garantisse qu'on l'a enlevé de là également.

J'accepte les excuses du ministre et je l'en remercie.

Le Président: Le ministre de la Santé pourrait-il nous dire ce qu'il en est relativement au site Web?

L'hon. Allan Rock: Monsieur le Président, je vais demander qu'on retire le communiqué du site Web et qu'on l'enregistre à l'endroit approprié.

Le Président: Très bien. Cette question est réglée et je n'aurai pas à rendre une décision là-dessus.

*  *  *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA JUSTICE

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement aujourd'hui pour clarifier la réponse que j'ai donnée hier à une question du député de Wild Rose. Puis-je continuer?

Le Président: Si c'est une clarification, elle doit être brève. Vous n'amorcez pas de débat, faites donc votre mise au point maintenant.

Mme Eleni Bakopanos: Monsieur le Président, hier, le député de Wild Rose a posé une question relativement à deux cas de condamnation de délinquants autochtones. J'ai dit que ces deux causes étaient en appel devant la Cour suprême du Canada alors qu'il existe en fait deux autres causes. Il y a eu une certaine confusion quant aux causes étant devant la Cour suprême aux termes de l'alinéa 718.2e). L'une des causes, R. c. Gladue, a été entendue et a été prise en délibéré alors que l'autre, R. c. Wells, est également liée à une peine d'emprisonnement avec sursis et n'a pas encore été entendue.

En outre, je tiens à souligner que les juges ayant prononcé les sentences ont clairement déclaré que, même s'ils avaient tenu compte des origines autochtones des délinquants, ce facteur n'avait pas influencé la détermination des peines.

Une voix: C'est bien déplorable.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je pense que la députée a fait sa mise au point. Le reste est matière à débat.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LES RESSOURCES D'EAU DOUCE

 

La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Madame la Présidente, de toutes les questions déterminantes pour le prochain siècle et même le prochain millénaire, l'eau sera sans contredit la plus importante.

 

. 1515 + -

Toutes les 60 secondes, nous perdons 50 hectares de forêt dans le monde. Autrement dit, tous les ans, nous perdons 30 millions d'hectares de forêt, soit bien plus que le double de la superficie de la Nouvelle-Écosse. En conséquence, le désert gagne du terrain au rythme de 10 millions d'hectares par année, soit presque la superficie de la Nouvelle-Écosse.

Le Programme des Nations Unis pour l'environnement, le PNUE, a montré, par ses statistiques, que si on mettait ensemble toutes les terres du monde transformées en déserts, on obtiendrait un désert d'une superficie égale à celle de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud réunies. Voilà qui nous donne une idée de l'immensité du défi de l'eau.

Nos forêts sont en train de disparaître. Le désert gagne du terrain à une vitesse exponentielle. Nos cours d'eau s'ensablent et s'assèchent. Notre nappe d'eau souterraine diminue à une vitesse ahurissante. Pour toutes ces raisons, les ressources en eau d'un pays sont devenues son bien le plus précieux, sa ressource la plus inestimable.

Nombre d'entre nous croient, à tort, que nos ressources en eau sont immenses au point d'être inépuisables.

[Français]

Nos ressources en eau douce, il faut le rappeler, ne forment qu'une infime partie des ressources aquatiques totales de la planète. En effet, les ressources en eau salée représentent 97 p. 100 et plus des ressources de la planète. Seulement 3 p. 100 sont des ressources en eau douce. Et même ces ressources en eau douce, ces ressources qui nous sont visibles, celles de nos lacs, de nos rivières, de nos cours d'eau, qui nous semblent si vastes, si inépuisables, sont seulement une toute petite partie de toutes les ressources en eau, dont la très grande majorité gît sous le sol, sous forme de nappe phréatique.

La réalité, aujourd'hui, c'est que la nappe phréatique, dans beaucoup des États américains, est complètement désuète, surtout dans les États de l'ouest et du sud-ouest. La nappe phréatique a été sévèrement entamée chez eux.

Plus les ressources en eau, dans certains des États américains, diminuent, plus les États-Unis lorgnent nos ressources à nous, au Canada. Certaines entreprises, ici même, y voient une occasion commerciale en or.

[Traduction]

Et donc, la pression croît afin que le Canada et ses provinces vendent leurs ressources en eau à des fins commerciales et de profit. Ceux qui sont prêts à vendre et à acheter nos ressources en eau vous diront que nous avons la chance d'être l'un des pays à avoir les ressources en eau les plus prolifiques du monde, ce qui est vrai. En fait, le bassin du Saint-Laurent et des Grands Lacs représente à lui seul environ 20 p. 100 de toute l'eau douce de surface du monde.

Je pense qu'il faut mettre les choses en perspective. J'aimerais prendre l'exemple du bassin du Saint-Laurent et des Grands Lacs pour vous montrer l'utilisation excessive, l'abus que nous faisons de notre eau. Chaque jour, nous tirons 665 milliards de gallons d'eau du Saint-Laurent et des Grands Lacs, soit 2,5 billions de litres. Cela équivaut à remplir d'eau 19 millions de super-wagons citernes d'une longueur de 65 pieds chacun et d'une capacité de 34 000 gallons. Ces super-wagons citernes mis bout à bout représenteraient une longueur de 237 000 milles, soit 9,5 fois le tour de la terre à l'équateur.

Ces statistiques qui nous dépassent nous donnent une idée de l'utilisation excessive que nous faisons des ressources d'un seul bassin jour après jour.

 

. 1520 + -

Nous devrions souligner à nouveau que l'eau douce est de loin la plus importante de toutes nos ressources naturelles. J'appuie mon collègue de Davenport quand il affirme que l'ALENA n'a rien à voir dans tout cela. L'ALENA comporte des dispositions sur l'eau en bouteille. On ne doit pas se sentir obligé de demander la permission des États-Unis pour protéger nos ressources en eau douce.

Je félicite le parrain de cette motion. Nous ne pouvons à aucun prix sacrifier nos ressources en eau pour l'exportation, que ce soit sur une grande, une moyenne ou une petite échelle. À titre de parlementaires et de Canadiens, nous devons envoyer un message clair aux Américains et à tous ceux qui voudraient vendre notre eau à profit, à tous ceux qui voudraient mettre sur pied des projets de grands et de petits canaux et d'exportation de grandes quantités d'eau et leur faire savoir que nos ressources patrimoniales ne sont pas à vendre. Elles ne sont à vendre à aucun prix, ni aujourd'hui, ni demain, ni après-demain, ni par la suite.

C'est la raison pour laquelle j'appuie cette motion. Nous devons prendre immédiatement des mesures pour protéger nos ressources en eau douce. C'est pourquoi j'appuierai cette motion lorsque viendra le temps de voter.

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, ma question s'adresse au député et à son collègue de Davenport, pour lesquels j'éprouve beaucoup de respect car ils font du très bon travail au sein du Comité de l'environnement.

Le député affirme que nous n'avons pas à nous inquiéter de l'ALENA pour ce qui est des exportations de grandes quantités d'eau ou de la vente de notre eau. Nous avons récemment perdu une cause devant un tribunal. En fait, nous ne l'avons pas perdue. Nous avons cédé dans l'affaire du MMT et nous avons donné 13,5 millions de dollars US à Ethyl Corporation. Nous avons été impuissants à interdire, à l'intérieur de nos frontières, un additif au carburant à base de manganèse qui est en fait une neurotoxine.

Le député et son parti sont-ils si confiants quant à l'issue des poursuites intentées devant un tribunal de la Californie contre le gouvernement de la Colombie-Britannique? Car je suppose, d'après les prévisions du député, que le tribunal donnera raison à la Colombie-Britannique ou au gouvernement fédéral, qui empêchent les exportations de grandes quantités d'eau de cette province.

M. Clifford Lincoln: Madame la Présidente, l'affaire du MMT était tout à fait différente. La décision a été rendue par un tribunal du commerce fédéral-provincial. Le fond de l'affaire était l'interdiction du commerce interprovincial du MMT, ce que le tribunal a déclaré inacceptable.

Dans le cas de l'eau, il est clair que cette question ne se pose pas. Il est également clair que l'ALENA, comme mon collègue de Davenport l'a très bien expliqué, ne fait pas référence à l'eau, sauf à l'eau embouteillée. Le fait que l'eau embouteillée soit expressément mentionnée, et pas l'eau sous toute autre forme, signifie que l'intention des rédacteurs n'était pas d'inclure l'eau sous une autre forme que l'eau embouteillée.

Il me semble que l'on cherche à inclure dans l'ALENA quelque chose qui ne s'y trouve pas. Il me semble aussi que c'est une question extrêmement importante pour nous, plus importante que tout le reste, et que nous devons donc agir. Nous devons produire une loi. Nous devrions affirmer aux États-Unis que l'eau fait partie de notre patrimoine naturel. L'eau nous appartient. Elle est notre ressource. Nous avons parfaitement le droit de la protéger et c'est ce que nous allons faire. Je crois sincèrement que c'est ce que nous devons faire.

[Français]

M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Madame la Présidente, il me fait plaisir de féliciter mon collègue, avec qui j'ai eu l'occasion de travailler dans le cadre du Parc national marin. Je pense qu'il a fait un travail constructif.

 

. 1525 + -

J'aimerais lui demander quelques éclaircissements sur la question des juridictions municipales, provinciales et fédérales. Dans ma perspective, il n'y a pas de dossier plus supraprovincial, supranational ou continental que celui des eaux douces.

Pourrait-il commenter sur la question du respect des juridictions? Ce dossier, je pense, doit nous conduire à un partenariat très serré.

M. Clifford Lincoln: Madame la Présidente, je suis entièrement d'accord avec le député de Chicoutimi. En fait, le sens de la motion est que toute la question de la protection de l'eau touche naturellement toutes les juridictions.

On ne peut pas penser à l'eau comme relevant de la juridiction d'un gouvernement ou d'un autre. Tous les gouvernements doivent travailler ensemble—c'est le sens de la motion—dans une interaction plus rapprochée entre les provinces et le gouvernement fédéral. C'est dans ce sens que je lis la motion et que je l'appuie. Je pense que toutes les municipalités doivent y prendre part aussi.

Je suis entièrement d'accord avec lui, que c'est là une question de partenariat au plus haut niveau, et que c'est cela, le sens de la motion.

[Traduction]

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Madame la Présidente, nul ne peut nier le sentiment de joie de vivre et de regain de vie que procure une pluie d'été après une longue période de sécheresse. Je me rappelle qu'étant jeune, alors que j'étais vêtue d'une légère robe d'été et que je courais dans ma rue, j'ai été inondée par la pluie qui tombait du ciel. J'ai encore présente à la mémoire la joie que m'a procurée cette douche rafraîchissante.

J'ai grandi à Port Arthur, qui fait maintenant partie de la ville de Thunder Bay, le long des rives du plus grand lac d'eau douce au monde, le lac Supérieur. Le soir, bien emmitouflée dans mes couvertures, j'entendais les cornes de brume qui guidaient les navires qui arrivaient dans le port ou qui en partaient. Je jouais sur la plage et je nageais avec mes cousins et cousines dans les eaux froides et vivifiantes de ce lac Supérieur. En compagnie de mon père et de ma mère, je marchais dans le port et j'observais les voiliers qui glissaient le long de sa surface d'un bleu crayeux, leur petite voile blanche triangulaire gonflée par toute la force du vent.

L'eau est inextricablement liée à toutes les forces qui créent et soutiennent la vie. L'embryon humain se développe, bien à l'abri, dans le sein rempli d'eau de sa mère. Notre corps est constitué à 70 p. 100 d'eau.

Les économies saines doivent compter sur de l'eau potable saine. Nous avons besoins d'eau pure pour faire pousser nos aliments, pour fabriquer nos produits et pour extraire les ressources minérales et les métaux du sol.

Nous avons besoin des voies navigables que nous offrent cette formidable ressource naturelle pour expédier les aliments que nous cultivons et les produits que nous fabriquons. Ces voies navigables deviennent des aires de jeu naturelles, fréquentables en toutes saisons, où nous pouvons nous amuser, nous rafraîchir et nous livrer à des activités individuelles, familiales et collectives.

Dans la circonscription de York-Nord, que je représente, le lac Simcoe a apporté des bienfaits économiques, sociaux, récréatifs et spirituels à tous les gens qui ont habité sur ses îles, sur ses rives et à l'intérieur de son bassin hydrographique. Depuis les Chippewas de Georgina Island, la première nation dont cette région est le territoire ancestral, jusqu'aux plus récents immigrants et visiteurs à être venus au Canada et dans cette région, le lac Simcoe est d'une importance cruciale pour le bien-être futur de York-Nord.

Certains pensent que le Canada a de l'eau en surabondance. Il est vrai que le Canada a un cinquième des ressources mondiales en eau douce. Toutefois, le Canada ne doit pas vendre son eau. L'eau est un bienfait, et les Canadiens sont chanceux de pouvoir bénéficier de ressources naturelles abondantes. Cependant, nous ne devons pas tenir notre patrimoine naturel pour acquis.

Nous nous laissons prendre au piège en pensant que l'eau est une ressource renouvelable. N'oublions jamais que seulement 1 p. 100 de l'eau des Grands Lacs se renouvelle chaque année. Le reste de cette eau, soit 99 p. 100, provient de la dernière fusion glaciaire il y a 20 000 ans et s'est renouvelée graduellement au fil du temps.

L'eau n'est pas une ressource illimitée. Elle est limitée. Nous devons non seulement surveiller la quantité d'eau que nous utilisons, mais aussi protéger notre eau contre la contamination.

 

. 1530 + -

La consommation mondiale d'eau double tous les 20 ans, ce qui est deux fois plus rapide que le taux de croissance de la population. Les Canadiens à tous les niveaux doivent prendre des mesures pour conserver l'eau et en réduire la consommation.

Les gouvernements peuvent faire preuve de leadership et encourager les entreprises et les particuliers à faire une utilisation plus judicieuse de l'eau grâce à de nouvelles méthodes de production, au recyclage des eaux usées, à l'installation de toilettes à débit d'eau restreint, et ainsi de suite. Des substances toxiques provenant de la terre et de l'atmosphère entrent dans notre écosystème aquatique, compromettant la qualité de l'eau.

Des mesures législatives sévères pour contrôler les substances toxiques sont cruciales si nous voulons donner de l'eau potable sûre aux Canadiens et aux industries canadiennes. Le Canada a besoin d'une stratégie fédérale durable relativement aux ressources en eau.

L'Association canadienne du droit de l'environnement et Great Lakes United, dans un document récent intitulé «The Fate of the Great Lakes: Sustaining or Draining the Sweetwater Seas», ont présenté une première étape fondamentale pour la préservation du bassin des Grands Lacs. Cette stratégie est conçue pour le bassin des Grands Lacs, mais elle comporte des éléments utiles pour une stratégie fédérale de l'eau.

Le plan devrait comporter une stratégie de conservation de l'eau; des mesures pour réduire l'impact de l'agriculture, de l'électricité et de l'industrie minière sur les niveaux et les débits d'eau; des lignes directrices pour amener les collectivités à ne pas dépasser les réserves d'eau disponibles et la recherche de moyens d'éviter l'impact négatif de la privatisation des services d'aqueduc, du libre-échange et du détournement des eaux.

Aujourd'hui, les membres d'un grand nombre de groupes d'intérêt public se réunissent à Ottawa, à l'occasion de ce qu'ils appellent le Water Watch. C'est le lancement d'une initiative majeure pour amener la population à prendre conscience des enjeux. J'encourage tous les députés et tous les Canadiens qui suivent le débat à surveiller le déroulement de cet événement.

Tous les niveaux de gouvernement devraient adopter la stratégie que je viens de présenter en rendant ces mesures obligatoires et en modifiant les lois, règlements et programmes pour garantir la réalisation de la stratégie de l'eau.

La motion dont la Chambre est saisie demande au gouvernement d'imposer un moratoire sur l'exportation de l'eau et les transferts entre bassins hydrographiques et de présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures. J'exhorte tous les députés à appuyer cette motion.

Les Canadiens s'attendent à ce que le gouvernement fédéral préserve notre patrimoine naturel. La diminution des réserves d'eau est inacceptable, que ce soit en raison d'une utilisation excessive ou à cause de la pollution. L'eau n'est pas un produit qu'on peut vendre pour stimuler l'économie.

L'eau du Canada nous appartient à tous. Nous avons le devoir de la conserver et de la protéger. C'est ce qui nous est donné en partage, en tant que peuple.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, dans notre écosystème, outre les vivants, nous reconnaissons quatre non-vivants. Ces quatre non-vivants, tous les habitants de cette planète se doivent de se les partager.

On a bien sûr l'air, l'eau, le sol et la lumière. Concernant l'air et la lumière, il faut admettre qu'on n'a pas un grand contrôle sur eux. La preuve est qu'une catastrophe peut se produire en Russie et qu'on peut en subir ici les conséquences trois ou six mois plus tard. C'est ce qui est arrivé avec la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, où la radioactivité s'est répandue dans le Nord canadien et où les animaux ont été victimes de la chaîne alimentaire désastreuse.

Cependant, on peut contrôler l'eau et le sol. Lorsque ma distinguée collègue dit que le Canada est, en totalité, le gestionnaire de son eau, je m'excuse, car dans la région de Chicoutimi, la nappe phréatique fait partie d'une richesse naturelle.

 

. 1535 + -

Or, les richesses naturelles, n'en déplaise à qui que ce soit, sont de juridiction provinciale. On ne viendra pas, cet après-midi, sous prétexte qu'il faut préserver l'eau, qu'il faut partager l'eau, s'arroger, encore une fois, une juridiction de compétence dite provinciale.

J'aimerais que la députée, qui siège au Comité permanent de l'environnement, précise sa pensée sur la gestion de l'eau, la gestion de la nappe phréatique.

[Traduction]

Mme Karen Kraft Sloan: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question. Il fut un membre très actif du Comité permanent de l'environnement et du développement durable pendant la session précédente. Je pense qu'il est important de noter, comme je l'ai fait dans mon discours, que nous devons penser non seulement à la quantité d'eau que nous devons préserver, mais aussi à la qualité de cette eau.

J'ai parlé des polluants atmosphériques et autres. Ces polluants et autres substances toxiques pénètrent dans les écosystèmes et dans la nappe phréatique. Comme le sait fort bien le député, une récente décision de la Cour suprême a confirmé le rôle du gouvernement fédéral dans le contrôle des substances toxiques, affirmant que c'était un domaine de compétence fédérale. Nous sommes bien informés et nous savons tous que la pollution ne connaît pas de frontière.

Nous voulons garantir la qualité de l'eau de la nappe phréatique pour que les Canadiens, que ce soit dans leur foyer, au travail ou à la ferme, puissent avoir accès à de l'eau de qualité, de l'eau en provenance de la nappe phréatique. La nappe phréatique, comme l'a si bien dit le député, est la responsabilité du gouvernement fédéral puisque la Cour suprême du Canada a reconnu clairement qu'il était responsable de la gestion des substances toxiques.

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Madame la Présidente, je félicite la députée pour la réponse qu'elle a fournie au député de Charlevoix et pour son magnifique discours.

La députée a parlé de l'importance de la qualité de l'eau. Je me demande si elle ne voudrait pas s'expliquer davantage sur la façon dont on pourrait améliorer la qualité de l'eau en ce moment.

Mme Karen Kraft Sloan: Madame la Présidente, selon une étude menée récemment sur les attitudes face à l'environnement dans divers pays, une très grande partie de la population est en faveur d'une loi sur l'environnement qui serait assez forte pour assurer la protection de nos écosystèmes et notre santé.

Ce n'est pas qu'au Canada qu'il y a des citoyens éclairés, il y en a un peu partout dans le monde.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je suis désolée, votre temps de parole est écoulé.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Madame la Présidente, je partagerai mon temps avec ma collègue de Vancouver-Est.

Je suis heureuse de prendre part au débat sur la motion du Nouveau Parti démocratique en vue d'interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce. Cette question revêt une grande importance pour moi et pour mes électeurs de la circonscription de Churchill, comme pour tous les Canadiens d'ailleurs.

L'une des plus importantes ressources de la région de Churchill est sans contredit l'eau douce. Ma circonscription est bien connue pour ses lacs et ses rivières d'eau claire. Cela fait partie de nos meilleures attractions touristiques. Des milliers de campeurs, de vacanciers, de chasseurs et de pêcheurs nous rendent visite chaque année. Nos eaux sont également à la base notre industrie de pêche commerciale.

La santé de nos lacs et de nos rivières est le pivot central de cette importante industrie. Les lacs et les rivières ont également un grand rôle à jouer dans le mode de vie de bon nombre de mes électeurs autochtones. Ils comprennent eux aussi les graves dommages environnementaux qu'entraîneraient les exportations de grandes quantités d'eau douce.

Je suis très déçue de voir que le gouvernement libéral n'a encore rien fait pour protéger nos réserves d'eau. C'est d'ailleurs cette inertie qui a poussé le Nouveau Parti démocratique à présenter cette motion à la Chambre.

 

. 1540 + -

Ce n'est pas comme si le gouvernement libéral ne savait pas que cette question allait venir sur le tapis. En mai dernier, le ministre du Commerce international a dit que l'eau d'aujourd'hui était le pétrole de demain. Nous savons tous que nous pouvons nous passer de pétrole, mais nous ne pouvons pas nous passer d'eau. Je trouve révélateur que le gouvernement assimile l'eau à une marchandise comme le pétrole plutôt que de la considérer comme un élément vital.

Pendant des années, le gouvernement a assuré aux Canadiens que l'Accord de libre-échange nord-américain ne viserait pas l'eau. Nous voyons à présent que c'est faux. Une compagnie américaine a intenté une action en vertu de l'ALENA parce qu'une loi de la Colombie-Britannique interdit l'exportation de grandes quantités d'eau. Au moins, la Colombie-Britannique a une loi qu'elle peut invoquer. Le gouvernement libéral n'a rien fait au niveau fédéral pour protéger nos ressources en eau. Il a laissé le Nouveau Parti démocratique de la Colombie-Britannique se débattre tout seul pour protéger nos ressources en eau douce.

La question est de savoir si nous allons traiter l'eau comme un bien commercialisable. Certains partisans du marché libre vous diront que tout devrait être un bien. Le Nouveau Parti démocratique n'a rien contre le marché libre. Toutefois, nous pensons que le marché libre ne devrait pas s'appliquer dans le cas de certaines choses. Il y a des choses que la société devrait choisir de traiter différemment et ne pas abandonner aux caprices du marché.

Je suis sûre que les Canadiens sont d'accord là-dessus. Par exemple, la plupart des Canadiens estiment que le marché libre ne devrait pas s'appliquer aux médicaments. Pour reprendre ce qu'a dit un cinéaste, Michael Moore, si le marché libre s'appliquait à toute chose, la General Motors vendrait du crack. C'est une chose qui peut sembler étrange à dire, mais cela montre que le marché libre ne s'applique pas à certaines choses. La société a décidé que les médicaments ne devaient pas être accessibles sur le marché libre et le gouvernement a élaboré les lois nécessaires en ce sens.

Les soins de santé sont un autre élément que les Canadiens ne veulent pas qu'on considère comme un produit. Il suffit de regarder vers les États-Unis pour constater à quel point il serait catastrophique de traiter les soins de santé comme un produit de consommation. Des millions d'Américains sont privés de la sécurité qu'offre l'assurance-santé. Le régime de santé américain fait également s'envoler en fumée l'argument selon lequel le marché libre est toujours plus efficace qu'un régime public. Toutes proportions gardées, les Américains dépensent plus que les Canadiens pour les soins de santé. Pourtant, les Canadiens bénéficient d'une protection universelle. Notre régime public de santé nous coûte moins cher et s'étend à toute la population. Le mythe selon lequel le marché libre est automatiquement plus efficace ne tient pas.

Les Canadiens estiment avec raison que les soins de santé sont un droit. Ils devraient être accessibles à tous, et non seulement à ceux qui ont les moyens de les payer sur le marché libre. C'est le principe qui a motivé le fondateur du Nouveau Parti démocratique, Tommy Douglas, lorsque, à titre de premier ministre de la Saskatchewan, il a mis sur pied le premier régime de santé au Canada.

Nous, du Nouveau Parti démocratique, estimons que l'eau douce, tout comme les soins de santé, ne devrait pas être considérée comme un produit. À l'instar des soins de santé, l'eau est essentielle à la vie. Nous en avons tous besoin pour survivre. Nous l'utilisons pour arroser nos cultures et pour élever les animaux que nous mangeons. Les observations du ministre du Commerce, qui a comparé l'eau au pétrole, montrent que le gouvernement ne voit pas les choses de la même façon. Le ministre semble penser que l'eau est un produit.

Il serait catastrophique de retirer de grandes quantités d'eau de notre écosystème. Nos forêts et les habitats du poisson en seraient endommagés. Ces habitats sont essentiels à nos industries du tourisme et de la pêche commerciale. Surtout, nous ne pouvons pas prédire comment l'exportation de grandes quantités d'eau à partir de notre écosystème influencera les rythmes de précipitation et les conditions atmosphériques au Canada. Si j'étais un agriculteur des Prairies, cela me préoccuperait beaucoup.

Notre écosystème ne peut perdre de si grandes quantités d'eau. Si le gouvernement voulait vraiment protéger l'eau et l'environnement, il se prononcerait en faveur de notre motion et il s'empresserait de présenter les mesures législatives nécessaires. Les Canadiens en ont assez de se faire dire que nous avons les mains liées par les accords commerciaux. Nous avons vu de nombreuses concessions de la part du gouvernement. Il a cédé pour ce qui est de la protection des magazines canadiens et dans le dossier du MMT.

Chaque fois, il montre du doigt les accords commerciaux en disant: «Ce n'est pas de notre faute. Nous devons respecter nos traités.» C'est la faute du gouvernement. Si nos accords commerciaux doivent l'empêcher de faire ce qu'il doit faire pour les Canadiens, il ne devrait pas signer ces accords. Je suis totalement d'accord avec les accords commerciaux, mais il faut agir avec bon sens et éviter de signer des accords qui annulent le pouvoir de nos gouvernements élus démocratiquement. Si le gouvernement ne défend pas la souveraineté du Canada, qu'il cède la place à d'autres.

Quand j'entends le gouvernement libéral dire qu'il faut respecter nos accords commerciaux, je ne peux m'empêcher de penser aux traités avec les premières nations, traités qui sont aussi légitimes que les accords commerciaux conclus avec d'autres pays, comme les États-Unis. C'est plus fort que moi, j'y vois deux poids et deux mesures. Le gouvernement libéral traite ses traités avec les autres pays comme s'ils étaient gravés dans la pierre, mais il n'hésite pas à mettre de côté les traités avec les autochtones quand il le veut. Il est intéressant de mentionner que nos traités avec les premières nations comprennent des droits et des titres de propriété sur les ressources en eau, mais que cela s'applique non seulement aux réserves, mais à toutes les utilisations traditionnelles de la terre.

 

. 1545 + -

Cette motion est l'occasion pour le gouvernement de faire ce qui s'impose. Il a l'occasion de protéger l'environnement, de dire que l'eau est essentielle à notre environnement et qu'elle n'est pas une marchandise à vendre. J'exhorte les députés de tous les partis à appuyer cette motion qui est si importante pour l'avenir du Canada.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, la députée de Churchill s'oppose fermement à la vente d'eau douce.

Dans ma circonscription, il y a plusieurs sites où on vend de l'eau. Évidemment, ce n'est pas le détournement d'un fleuve, ce n'est pas un lac que nous allons assécher, j'en conviens, c'est une ressource naturelle. Or, toutes les parties en sont satisfaites, le producteur, c'est-à-dire le propriétaire de la ferme où on puise l'eau et les compagnies qui acquièrent cette eau d'une qualité exceptionnelle. Tout le monde est heureux dans ce marché. Et je n'exagère pas, je pense.

Si on demandait, par exemple, aux gens de l'Alberta de cesser de vendre du pétrole sous prétexte que cela ne se reproduit pas à l'intérieur, que dans le sous-sol, il y a une quantité x, et une fois qu'on aura épuisé cette quantité x, il n'y aura plus de pétrole dans le sous-sol, si on arrivait avec une motion semblable, il faudrait interdire la vente ou l'extraction de pétrole, le garder seulement pour soi. Je pense que ce ne serait pas tellement intelligent, car nous, de l'est du Canada, importons du pétrole.

Certains pays manquent d'eau. Nous, nous en avons, semble-t-il, plus de 20 p. 100 de cette eau potable, et on va dire: «On la garde uniquement pour nous, peu importe ce qu'on nous offre en retour.» Je rappelle qu'il y a un extrême, mais il y a aussi l'autre extrême.

Je me demande si la députée de Churchill pourrait nous dire jusqu'où on pourrait aller dans sa motion.

[Traduction]

Mme Bev Desjarlais: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question. De toute évidence, ce qui nous préoccupe en l'occurrence, c'est que l'eau en général soit traitée d'une manière logique. Nous sommes contre l'exportation et le déplacement de grandes quantités d'eau. Personne n'a dit qu'il fallait interdire l'exportation d'eau embouteillée.

Ce qui nous préoccupe vraiment, c'est que les exportations d'eau deviennent telles qu'il faudra prendre des mesures afin d'interdire l'utilisation de pipelines pour le transport de l'eau à l'extérieur du Canada. Pendant l'intersession, j'ai séjourné très brièvement en Arizona, et j'y ai vu des milliers de Canadiens qui profitaient du climat. Mais ces milliers de Canadiens disaient qu'ils reviendraient au Canada parce qu'il finit par faire trop chaud là-bas. Ils m'ont aussi parlé de l'utilisation de l'eau. Il n'y en a presque plus lorsqu'on arrive à la frontière du Mexique. Si nous acceptons d'expédier de l'eau vers une région et qu'elle est toute utilisée, il n'y en aura pas assez pour tout le monde.

Il faut être raisonnable. Personne ne prétend que, si des gens meurent de soif, le Canada doit refuser de les aider. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Nous réprouvons l'utilisation de l'eau comme moyen de faire de l'argent, comme moyen de satisfaire la cupidité. Il s'agit par exemple du propriétaire d'un secteur qui vendrait son eau au plus offrant, et pourquoi? Pour que quelqu'un puisse s'offrir une piscine de plus. Voilà ce qui nous préoccupe. Nous nous préoccupons de l'exportation d'eau du Canada pour des choses qui ne sont pas des nécessités.

On ne peut pas prétendre que les Canadiens ne se montreraient pas compréhensifs si des pays ou des gens manquaient d'eau. Le Canada n'est pas un pays intraitable, mais nous disons que nous devons protéger nos ressources.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, rien dans l'ALENA n'oblige le Canada à transformer l'eau dans son état naturel en un bien.

 

. 1550 + -

La gestion des eaux est une responsabilité que se partagent les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral s'occupe en particulier des eaux frontières, essentiellement les Grands Lacs, et des eaux limitrophes le long de la frontière canado-américaine, tout cela aux termes du Traité des eaux limitrophes de 1909.

La position du gouvernement n'a pas varié. Nous l'avons annoncée en 1988 et l'avons réitérée en 1993. Nous la défendons encore aujourd'hui. Le gouvernement a consulté les provinces et les territoires et nous continuerons de veiller à protéger nos eaux. La députée contestera-t-elle ces faits?

Mme Bev Desjarlais: Madame la Présidente, je ne crois pas que nous soyons complètement convaincus que l'ALENA protège nos eaux. Il ne fait aucun doute que le gouvernement a cédé dans le dossier du MMT. Il n'a pas attendu la décision finale avant d'en venir à un règlement. Cela explique pourquoi les Canadiens craignent ce qui pourrait survenir avec leurs eaux.

Je ne veux pas attendre le jour où l'on nous dira: Désolés, mais l'ALENA ne protège pas vos eaux. Pourquoi ne pas prendre de mesures pour veiller à la protection de nos eaux? Le gouvernement fait beaucoup plus confiance à l'ALENA que moi.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, je suis très fière de prendre part aujourd'hui au débat sur la motion que le Nouveau Parti démocratique a présentée. C'est une motion très importante, comme plusieurs députés l'ont déjà fait remarquer.

La motion demande au gouvernement d'imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver nos ressources en eau pour les générations à venir. Le sujet est de toute évidence très important, et il est important qu'on en débatte à la Chambre.

En écoutant l'intervention de ma collègue néo-démocrate, la députée de Churchill, je comprends que, dans sa circonscription du nord du Manitoba, l'eau est quelque chose de très important en tant que ressource, en tant que mode de vie, en tant qu'élément de l'environnement et en tant qu'élément de l'histoire de la province.

Je représente une circonscription très urbaine. L'eau n'est pas un sujet qui figure tous les jours à l'ordre du jour. J'ai affaire à des problèmes de toxicomanie, de sans-abri et de pauvreté. Pourtant, quand je dis à mes électeurs de Vancouver-Est qu'il est important d'avoir une volonté nationale à l'égard de la très précieuse ressource que l'eau représente, ils sont tout à fait d'accord.

Je ne suis certes pas une spécialiste en la matière, et beaucoup d'entre nous à la Chambre non plus. Cependant, nous comprenons fondamentalement en tant que Canadiens que l'un des traits qui font que le Canada est un pays extraordinaire et un des traits dont nous sommes très fiers, c'est notre environnement naturel.

En tant que Canadiens, nous croyons très fermement que l'un des objectifs et un des rôles du gouvernement fédéral consiste à préserver et à protéger les ressources naturelles dont notre pays est doté. Nous sommes les gardiens de ces ressources pour les générations à venir.

Voilà pourquoi la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui est très importante. Elle est à débattre aujourd'hui parce que nous n'avons malheureusement pas de politique nationale de protection de cette ressource. Voilà pourquoi nous débattons aujourd'hui de cette motion.

Nous avons certes entendu les députés d'en face, les députés libéraux. Nous avons entendu maints débats, maintes promesses et maints slogans électoraux voulant que la ressource naturelle qu'est l'eau douce sera protégée par la loi et par la politique nationale.

Nous attendons toujours de voir cela. C'est une véritable tragédie. J'espère que, à la faveur de la motion que nous débattons aujourd'hui, on reconnaîtra que cette question est désormais très critique.

Je suis très fier que le gouvernement de ma province, la Colombie-Britannique, ait eu le courage de promulguer une loi pour protéger la ressource très précieuse qu'est l'eau douce. Cette loi est contestée dans le cadre de l'ALENA par une société étrangère qui réclame quelque 300 millions de dollars de dommages au gouvernement de la Colombie-Britannique.

Il importe beaucoup que nous, parlementaires et décideurs, convenions clairement qu'il devrait y avoir une loi nationale, qu'il devrait y avoir immédiatement un moratoire pour empêcher l'exportation de grandes quantités d'eau douce.

 

. 1555 + -

Mais il faut aussi prendre des mesures pour montrer que nous appuyons la mesure législative qu'a promulguée la Colombie-Britannique. Il nous faut une mesure de ce genre dans tout le pays. Nous avons déjà entendu aujourd'hui au cours du débat que les différents partis préconisent différentes mesures à l'égard de cette question.

Nous, du Nouveau Parti démocratique, disons que cette question est au coeur même de ce qui fait un pays souverain. Elle est au coeur même de ce que cela veut dire pour des gouvernements élus démocratiquement de pouvoir promulguer une politique publique sur des questions comme les soins de santé ou la gestion et la protection de l'eau douce. Voilà de quoi retourne le débat d'aujourd'hui.

Je crois que les Canadiens seraient d'accord pour dire que nous ne pouvons pas nous permettre de continuer dans cette voie où, essentiellement, l'eau de notre pays est à vendre, où la situation varie d'une province à l'autre pour ce qui est de la délivrance de divers permis et de la possibilité d'exporter de grandes quantités d'eau, où le choix de légiférer ou non sur cette question est laissé à la province.

Nous avons besoin du leadership de la Chambre. Nous avons besoin du leadership du gouvernement fédéral pour montrer très clairement une volonté de donner suite de façon concrète à ce qui a été dit maintes et maintes fois. C'est une question qui préoccupe le public.

Le Conseil des Canadiens, dont les membres représentent des groupes très divers d'un bout à l'autre du Canada, a fait de cette question un de ses enjeux clés. Dans un numéro récent de Canadian Perspectives, il a publié un très bon article intitulé «Our Water's Not for Sale», de Maude Barlow:

    Avant que cette affaire n'aille plus loin, nous avons besoin d'un débat public au Canada. Selon moi, l'eau est un bien public. Elle appartient aux gens. Personne n'a le droit de se l'approprier ou d'en tirer profit aux dépens de quelqu'un d'autre. Un approvisionnement adéquat en eau propre pour les besoins quotidiens des gens est un droit fondamental de la personne, et la meilleure façon de protéger ce droit est le contrôle des ressources en eau par le secteur public.

J'appuie entièrement cette position et j'exhorte le gouvernement à présenter la mesure législative qu'il a promise à cet égard.

J'espère que nous aurons un vote unanime à la Chambre des communes aujourd'hui. J'ai entendu des députés de tous les partis qui ont participé à ce débat et je crois que nous comprenons l'importance de cette question. Nous devons unir nos efforts dans ce dossier, représenter les intérêts des Canadiens et protéger l'avenir de notre environnement. Nous devons être prêts à défendre cette ressource et non pas la traiter comme un bien qui peut être vendu pour réaliser de gros profits.

Nous devons choisir la solution honorable et dire que les intérêts publics ont préséance sur les intérêts privés. Les intérêts publics veulent que nous protégions les ressources en eau.

J'exhorte tous les députés à la Chambre à donner leur appui de principe à cette motion. J'invite les députés libéraux à se demander pourquoi leur gouvernement n'a pas encore présenté le projet de loi en question et à considérer cette motion comme une première étape vers un engagement véritable, afin que nous prenions les mesures législatives nécessaires pour réaliser l'objectif de cette motion, soit la protection de cette ressource. J'exhorte tous les députés à appuyer la motion.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Madame la Présidente, la députée du Nouveau Parti démocratique a raison de dire que le gouvernement fédéral n'a fait, par le passé, que de beaux discours. Il a parlé, mais il n'a rien fait au sujet de l'exportation de l'eau potable. Il n'a rien fait pour protéger la qualité de l'eau, cette ressource vitale du patrimoine humain.

C'est pour cela que je me sens très mal à l'aise avec la motion qui est présentée aujourd'hui à la Chambre par le Nouveau Parti démocratique. Après que tout ait été dit, on a constaté que ce gouvernement n'a rien fait. Il y a des provinces, comme la Colombie-Britannique, qui ont légiféré pour l'exportation de l'eau. D'autres provinces ont fait en sorte que tout ce qui touche leur eau potable et douce fasse l'objet d'une loi, qu'elles soient responsables de cette question. Cette motion donnerait le pouvoir au gouvernement souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ces ressources en eau douce pour les générations futures.

 

. 1600 + -

Je m'excuse, mais je pense que présentement, ce que dit cette motion, c'est: «Vous avez fait ce que vous aviez à faire, vous, les provinces, alors, maintenant que le train est en marche, laissez le gouvernement canadien embarquer dans le train et prendre le contrôle de ce que vous avez fait.»

J'espère que ce n'est pas ce que la motion veut dire, mais c'est ainsi que je l'interprète.

[Traduction]

Mme Libby Davies: Madame la Présidente, je remercie la députée de ses observations et de sa question.

Je veux rappeler l'intention de la motion présentée par le Nouveau Parti démocratique. Cette motion demande clairement que le gouvernement, en collaboration avec les provinces, impose immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce, ainsi de suite. Je pense que nous sommes très conscients du fait que, de nos jours, nous devons concevoir un fédéralisme coopératif qui réponde aux besoins des provinces. C'est pourquoi la motion a été libellée ainsi.

Je ne crois pas que cette motion ait été présentée parce que, tout d'un coup, nous avons remarqué qu'il y avait un problème. Cette question fait l'objet d'un débat public depuis très longtemps. Il y a des groupes environnementaux, des organisations, des particuliers et même des députés libéraux et d'autres allégeances qui ont fait campagne pour inculquer une volonté nationale de préserver cette ressource précieuse. La motion n'est pas quelque chose que nous avons inventé aujourd'hui.

Toutefois, je signale que la situation est très critique en Colombie-Britannique en raison des allégations de la Sun Belt, qui s'en prend en fait au gouvernement de la province. Il est très important que la réponse à cela se fonde sur une politique nationale, mais malheureusement, nous n'en avons pas. C'est très important, afin que les provinces n'aient pas à essayer de régler ce problème chacune de son côté.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, la députée doit savoir que l'affaire de la Sun Belt ne concerne pas notre droit de gérer les eaux canadiennes.

J'aimerais poser une brève question à ma collègue. Elle sait sans doute que le gouvernement n'est pas favorable à l'exportation de grandes quantités d'eau douce et que, de fait, la motion appuie la politique actuelle du gouvernement au sujet de l'exportation d'eau.

La députée affirme-t-elle que la motion vise tout simplement à réaffirmer la position que le gouvernement a déjà adoptée?

Mme Libby Davies: Madame la Présidente, premièrement, l'affaire intéressant la Sun Belt concerne l'eau et la gestion de cette ressource dans l'intérêt public. Ce cas soulève des questions très sérieuses au sujet des genres d'ententes commerciales que nous avons signées, comme l'ALENA, qui menacent notre capacité de nous doter de politiques publiques dans ces domaines. C'est pourquoi je réfute l'hypothèse énoncée par la députée.

Pour ce qui est de la présumée existence d'une politique, si le Canada possédait déjà une politique applicable, comment expliquer le genre de situations qui se produisent? En vérité, il n'existe pas de loi nationale, bien que le gouvernement libéral en ait promis une.

Si le député croit qu'il existe effectivement une loi, je présume qu'il appuiera la motion avec enthousiasme et s'assurera que la loi soit présentée.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion à l'étude.

Je me trouvais récemment à Washington où certains de mes collègues et moi avons pu nous entretenir avec l'ambassadeur, M. Chrétien, au sujet de cette question. J'ai trouvé son point de vue intéressant.

 

. 1605 + -

Il a fait valoir, avec raison, que dans certains États américains, un litre d'eau coûte plus cher qu'un litre d'essence.

Lorsque nous parlons de l'eau, nous engageons toutes sortes de conversations émotives, où se manifestent le sentiment national et toute l'importance que nous accordons à cette ressource. Or, l'ambassadeur faisait valoir que l'eau est d'ores et déjà considérée comme un produit, une marchandise monnayable. L'eau est achetée et vendue comme un produit et nous serons de plus en plus obligés de la considérer comme tel.

Il convient de souligner l'ironie du fait qu'un litre d'essence ou d'huile de charbon ou de mazout correspond à un litre d'un produit qui a été extrait du sol, transporté et consommé, un peu comme un litre d'eau est transporté et consommé. Par conséquent, la question à trancher est la suivante: quelle est la différence importante entre un litre d'eau et un litre de tout autre produit?

Comme d'autres orateurs l'ont évoqué pendant le débat, la différence réelle tient au fait qu'un litre d'eau est un produit essentiel à la vie. C'est là la distinction entre un litre d'un produit à base de ressources naturelles, un produit qui est extrait du sol, transporté et consommé, et l'autre produit.

J'insiste sur le fait que l'eau est un produit qui continuera à faire l'objet de différends commerciaux et qu'elle constitue une ressource limitée.

Nous entretenons au Canada certaines illusions. Nous occupons environ 7 p. 100 de la superficie de la masse terrestre et nous possédons près de 9 p. 100 des ressources mondiales en eau douce. Cette situation serait intéressante si nous nous arrêtions là, mais il y a lieu de signaler que 60 p. 100 de ces ressources en eau coulent vers le nord, tandis que 90 p. 100 de notre population habitent dans le sud. Donc, en réalité, 90 p. 100 de notre population n'ont accès qu'à environ 40 p. 100 de notre eau.

Compte tenu de la dissémination et de la concentration de la population, cet approvisionnement devrait être suffisant, mais c'est là un sujet qui prête à discussion. Nous possédons plus de ressources en eau que de nombreux autres pays mais, néanmoins, nous n'avons pas d'eau à gaspiller. Nous n'avons pas d'eau à donner. Nous n'avons pas d'eau qui se prête à une utilisation correspondant à une mauvaise gestion de la ressource.

Comment devrions-nous en tant que Chambre répondre à la motion dont nous sommes saisis:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait, en collaboration avec les provinces, imposer immédiatement un moratoire sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce et sur les transferts entre bassins hydrographiques, et devrait présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques et ne devrait être partie à aucun accord international qui nous oblige à exporter de l'eau douce contre notre volonté, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

Je demande à mes collègues ministériels de se reporter à la déclaration conjointe des gouvernements du Canada, des États-Unis et du Mexique à la suite de la conclusion de l'ALENA, en 1993, qui se lit comme suit:

    À moins que l'eau, sous une forme quelconque, ne soit entrée dans le circuit commercial et ne soit devenue un bien ou un produit, elle n'est pas visée par les dispositions d'un accord quelconque, y compris l'ALENA.

Rien dans l'ALENA ne saurait obliger une partie contractante à exploiter ses eaux à des fins commerciales ou à commencer à exporter de l'eau sous une forme quelconque, et je souligne l'expression «sous une forme quelconque». Si je comprends bien, cette disposition vise les transferts de quantités importantes.

La déclaration conjointe stipule en outre que le Canada et toutes les parties contractantes conservent la souveraineté sur leurs eaux.

L'eau dans son état naturel—dans les lacs, les rivières, les réservoirs, les aquifères, les bassins, etc.—n'est pas un bien ou un produit, ce qui constitue une distinction essentielle dans le cadre de ces accords commerciaux. Ce n'est ni un bien ni un produit. L'eau n'étant pas commercialisée, elle n'est pas et n'a jamais été sujette aux dispositions d'un accord commercial quel qu'il soit. Rien ne nous force à exporter de grandes quantités d'eau.

 

. 1610 + -

Je suppose que la distinction réside dans le fait que l'eau est une ressource essentielle à la vie. C'est une ressource bien différente de toutes les autres ressources.

Je me reporte au texte de l'ALENA, mais je précise également qu'il s'agit d'un domaine de compétence partagée. Généralement, à cette étape-ci de mes discours, j'ai tendance à m'en prendre au gouvernement de l'Ontario, car je suis en profond désaccord avec ce gouvernement dans bien des domaines. Cependant, dans ce cas particulier, je crois que le gouvernement ontarien avance dans la bonne direction.

Au départ, il n'a pas vraiment réfléchi. Il a donné un permis d'exportation dans le cadre de ce qui est connu sous le nom de projet Nova. Il était prêt à exporter de l'eau et ne voyait rien de mal à cela.

Mais beaucoup de gens n'étaient pas de cet avis. Des représentants des gouvernements des États-Unis, tant au niveau des États qu'au niveau fédéral, se sont opposés à cela. Des députés fédéraux leur ont emboîté le pas.

Le gouvernement de l'Ontario a immédiatement retiré le permis. Il s'est engagé dans un processus d'examen public afin d'établir des modalités de délivrance des permis qui soient conformes à la Loi sur les ressources en eau de l'Ontario, laquelle stipule: «Ce règlement a pour objet d'assurer la conservation, la protection ainsi que l'utilisation et la gestion judicieuses de l'eau de surface de l'Ontario, puisque les ressources en eau de l'Ontario sont essentielles au bien-être environnemental, social et économique à long terme de la province.»

L'article 3 précise les éléments qu'un organisme de réglementation doit prendre en considération eu égard aux permis d'exportation. Ces éléments sont: la protection des fonctions naturelles de l'écosystème; la consommation d'eau par les ménages; le bétail et les autres utilisations; les approvisionnements municipaux en eau; l'eau souterraine qui peut avoir un impact sur l'extraction proposée de l'eau de surface ou qui peut s'en ressentir; les autres utilisations actuelles et prévues; si la délivrance du permis est dans l'intérêt public; d'autres éléments que le directeur peut juger bon de prendre en considération.

Voilà, à mon avis, un règlement intelligent qui mérite l'appui de la Chambre et du gouvernement. La résolution du gouvernement de l'Ontario mérite d'être appuyée, une affirmation que je n'aurais jamais cru faire à la Chambre.

Le Canada n'est partie prenante à aucun accord l'obligeant à exporter de grandes quantités d'eau. Il n'est partie à aucun accord dans le cadre de l'ALENA. Il n'est partie à aucun accord hors du cadre du l'ALENA. En fait, les dispositions sur la gestion conjointe voulant que la Commission mixte internationale agisse dans l'intérêt du bassin par opposition à celui de chaque pays sont bien protégées.

L'Ontario a fait quelque chose de très intelligent. Il s'est engagé dans la protection du bassin hydrographique. De ce fait, le bassin ne peut faire l'objet d'aucun accord commercial.

En résumé, l'eau est un produit. La pression monte. L'eau continuera d'être un produit et nous devons en être les gardiens avisés. Les initiatives en matière de compétence prises par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux sont, à mon avis, de sages initiatives.

 

. 1615 + -

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, Lavoisier, ce savant du XVIe siècle, disait: «Rien ne se crée et rien ne se perd dans la nature.» Sur la planète, il y a une quantité d'eau, et cette quantité est toujours stable. Rien ne se crée et rien ne se perd.

Mon collègue de Chicoutimi me rappelait, tout à l'heure, le déluge du Saguenay ainsi que le déluge qu'a connu le Manitoba. Ce n'est pas parce qu'il a plu beaucoup au Saguenay et au Manitoba, qu'il y plus d'eau sur la planète. S'il y en a plus une année à Chicoutimi, il y en aura moins à Washington, moins à Tel Aviv ou moins à Paris.

Ce que la planète possède en eau—ou en glace, bien sûr—elle le possédait il y a x années, et elle possédera la même quantité dans x autres années. On appelle cela le cycle de l'eau, et Lavoisier avait vulgarisé en disant cette petite phrase fort simple: «Rien ne se crée et rien ne se perd.»

Je pose une question à mon collègue de Scarborough-Est, et je ne prendrai pas le Québec à titre d'exemple, je vais prendre Terre-Neuve. Vous avez sûrement vu les chutes Churchill. Le nombre de mètres cubes d'eau qui y coule par seconde est astronomique. Or, si Terre-Neuve avait la possibilité de remplir un immense bateau d'eau en vrac et d'aller la vendre à New York, par exemple—on dit qu'à New York, un litre d'eau se vend plus cher qu'un litre d'essence—alors, ce serait fort payant pour la province de Terre-Neuve. Ce serait plus payant de vendre de l'eau que de vendre du pétrole.

Si on se fie à ces allégations, Terre-Neuve n'aurait pas la possibilité d'agir ainsi. Si on n'enlève, non pas un camion, mais un bateau d'eau dans la rivière Churchill qui se jette dans l'océan Atlantique, cela ne prive rien, et l'eau va revenir éventuellement à l'océan Atlantique à partir de New York, parce que je le rappelle, rien ne se crée et rien ne se perd dans la nature.

Évidemment, je vais m'opposer, moi aussi, à ce qu'on fasse des détournements majeurs de rivières et qu'on assèche des lacs, mais lorsqu'on prend des exemples aussi simples que ceux-là, je ne vois pas pourquoi on priverait la vente d'eau en vrac, qui n'appauvrit aucunement l'écosystème.

[Traduction]

M. John McKay: Madame la Présidente, la question du député présente une certaine logique et nous devons donc la considérer de façon neutre et logique. Il est vrai que le volume de l'eau reste toujours constant dans l'environnement. Il peut être dans un endroit ou dans un autre ou encore déplacé ou mal utilisé.

La réponse à celui qui demande pourquoi pas, si les gens de Terre-Neuve peuvent faire un peu d'argent, où est le problème, renvoie à une autre loi de la physique qui dit que toute action entraîne inévitablement une réaction. Je ne crois pas nous puissions enlever de grandes quantités d'eau sans devoir nous attendre à une réaction quelconque dans l'écosystème.

Les règles du gouvernement de l'Ontario dans ce domaine sont sensées. Elles traitent de tout le bassin hydrographique et de la façon dont les ruisseaux, les rivières et les lacs sont touchés par l'enlèvement de grandes quantités d'eau.

Je crois que c'est la réponse à cette question très logique. En principe, il ne devrait pas y avoir de problème, mais si on retire constamment de grandes quantités d'eau, cela entraînera inévitablement une réaction quelconque. Ce n'est pas comme si on remplissait le navire une seule fois. Ça se répète encore et encore.

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec grand plaisir que je prends part au débat d'aujourd'hui. Le Parlement se doit de débattre de grandes questions nationales et le sujet d'aujourd'hui, l'eau douce, est certainement d'importance nationale.

L'eau est très importante pour chacun d'entre nous. Au Canada, nous devons apprendre à prendre soin de cette ressource. L'eau douce est une ressource primordiale qui a toujours eu une grande valeur et dont on dit qu'elle est source de vie. L'eau revêt une signification spirituelle et sacramentelle pour les Chrétiens et pour les disciples de beaucoup d'autres religions et croyances.

 

. 1620 + -

Jour après jour, l'eau douce entretient notre vie et notre santé. Nous comptons sur l'eau pour produire notre nourriture, pour le transport, les loisirs, le tourisme et à des fins commerciales. Le son, la vue, le goût et le toucher de l'eau propre nous procurent une sensation de bien-être.

Pour les Canadiens, l'eau douce a une importante valeur tant réelle que symbolique. Neuf pour cent des ressources renouvelables du monde en eau douce et vingt pour cent des ressources du monde en eau douce, y compris l'eau venant des glaciers et de la calotte glacière, se trouvent au Canada. Nous sommes fiers de nos magnifiques lacs, de nos puissantes rivières, de nos chutes majestueuses et de la beauté de notre patrimoine naturel qui entoure nos ressources en eau.

Et pourtant, même au Canada, nos abondantes réserves d'eau sont quotidiennement exposées à une myriade d'influences et d'activités extérieures. Elles vont du traitement imparfait des eaux usées à la génération d'hydroélectricité, en passant par les activités industrielles, la pollution et les effets du changement climatique y compris des inondations et des périodes de sécheresse qui ont des effets dévastateurs sur les êtres humains. Par ailleurs, la façon dont, à titre individuel, nous traitons nos ressources en eau douce est une question qui mérite réflexion.

Les Canadiens arrivent au deuxième rang pour ce qui est de la consommation d'eau par habitant et pourtant ils ne payent que la moitié du coût de l'approvisionnement en eau. Au cours des 10 prochaines années, le coût d'entretien de cette infrastructure au Canada atteindra entre 40 et 70 milliards de dollars, selon les estimations. Donc, en tant que gardiens de nos réserves d'eau douce, nous devons gérer cette ressource judicieusement, pas seulement pour nous mais aussi pour nos petits-enfants.

Le gouvernement fédéral mène plusieurs projets de rétablissement, de conservation et de protection de grands bassins d'eau douce du Canada. Les initiatives en cours se concentrent sur le fleuve Saint-Laurent, les Grands Lacs, le fleuve Fraser et le bassin de Géorgie. Il y a le Programme d'action des zones côtières de l'Atlantique et l'initiative concernant l'écosystème des rivières du Nord, en Alberta et dans les Territoires du Nord-Ouest.

Une étude des bassins des rivières du Nord a fourni de l'information sur l'action cumulative du développement des rivières de la Paix, Athabasca et des Esclaves. La nouvelle initiative concernant l'écosystème des rivières du Nord n'en est qu'à l'étape de la conception et portera essentiellement sur les régions arctiques du Canada.

Ces initiatives reposent sur le principe que nous ne pouvons pas gérer l'eau simplement comme une ressource ou un secteur d'activité. Nous devons adopter un méthode intégrée fondée sur un écosecteur, qui s'attache à toutes les sources de pression sur la qualité et la quantité de l'eau.

Chacune de ces initiatives s'intéresse aux besoins et priorités d'une région pour chaque bassin d'eau douce. Elles favorisent les partenariats réunissant tous les secteurs et encouragent la participation communautaire. Chacune d'elles aboutit à la mise au point d'un plan d'action conçu en fonction du bassin pour régler les enjeux environnementaux complexes, en particulier la détérioration de la qualité de l'eau qui menace la santé des êtres humains et de l'environnement dans ces régions.

Grâce à ces programmes, nous avons constaté une réduction de 96 p. 100 des effluents toxiques de 50 grandes installations industrielles le long du Saint-Laurent, la réduction des niveaux de contamination par des polluants donnés dans les Grands Lacs, la dépollution de ports contaminés comme celui de Collingwood, et l'adoption des meilleures pratiques et de plans de prévention de l'environnement dans beaucoup d'entreprises et d'industries le long du fleuve Fraser.

[Français]

Les bassins hydrographiques sont bien plus que des lacs ou des rivières. Ce sont des écosystèmes entiers dont les territoires drainent leurs eaux vers un cours d'eau ou un bassin de drainage commun. Un seul bassin hydrographique, comme celui des Grands Lacs par exemple, peut embrasser un vaste segment du paysage canadien car, outre les lacs eux-mêmes, il comprend tous les cours d'eau et leurs affluents.

Que ce soit par canal, par navire, par camion-citerne ou par aqueduc, le prélèvement d'eau en grande quantité d'un bassin hydrographique a un impact direct important sur les ressources hydriques et sur l'environnement.

Les prélèvements en grande quantité peuvent nuire à la santé d'un bassin hydrographique. Il est important de mieux comprendre les effets immédiats et cumulatifs de ces prélèvements et la façon d'améliorer la gestion de nos ressources en eau douce. En revanche, le prélèvement de petites quantités d'eau, pour la mise en bouteilles par exemple, ne présente pas le même genre de danger.

[Traduction]

L'extraction de vastes quantités d'eau risque de changer l'environnement en modifiant les habitats des espèces locales et en introduisant de nouvelles espèces exotiques qu'on ne trouve pas normalement dans cet écosystème. Ces modifications de l'écosystème pourraient également avoir une incidence sur les modes de vie et de travail des Canadiens. Partout, les ressources en eau subissent des pressions croissantes, dues à l'urbanisation, les activités industrielles et la simple croissance démographique sur la planète.

 

. 1625 + -

Le changement climatique a un effet sur la quantité d'eau et en détermine la qualité. Comme l'eau est une ressource renouvelable, elle est vulnérable aux conséquences éventuelles du changement et de la variabilité climatiques. Nous avons déjà vu ce qu'il advient des ressources en eau lorsque les précipitations sont insuffisantes ou que les températures moyennes augmentent au cours d'une période prolongée.

Récemment, le débit de la rivière des Outaouais, qui se jette dans la voie maritime du Saint-Laurent, a baissé de 50 p. 100 au-dessous des niveaux normaux, en raison d'un climat plus chaud que d'habitude, l'automne dernier. Dans le port de Montréal, l'eau a baissé à des niveaux jamais vus depuis 30 ans. Les répercussions sur le transport fluvial ont été immédiates.

Juste avant les fêtes, le Citizen d'Ottawa a signalé que l'industrie maritime perdait plus d'un million de dollars par semaine en tarifs marchandises.

[Français]

Comment nous préparer à faire face à des impacts que nous n'avons pas complètement définis? C'est par la recherche. L'eau constitue un problème important qui transcende le volet des sciences, des impacts et de l'adaptation du Fonds d'action des changements climatiques, le FACC.

Ce fonds, créé par le budget fédéral de 1998, montre bien la ferme intention du gouvernement fédéral d'effectuer des recherches sur les ressources en eau du pays: 50 millions de dollars y seront affectés chaque année pendant les trois prochaines années.

Ce fonds nous permettra de mieux comprendre les données scientifiques de base qui appuieront le processus réfléchi et inclusif qui élabore la Stratégie nationale de mise en oeuvre. Ces données contribuent à faire participer des particuliers à l'effort national qui vise à penser mondialement et à agir localement. Cela accélérera la mise au point et la mise en place d'un plus grand nombre de technologies respectueuses du climat.

[Traduction]

Les inquiétudes que suscitait l'eau douce ont poussé le gouvernement fédéral à élaborer une politique à cet égard, il y a plus d'une décennie. Il est temps de mettre à jour cette politique et d'y inclure la gamme complète des questions qui menacent notre nappe phréatique, dont le retrait de grandes quantités d'eau.

Il faut aussi penser à de nombreux autres programmes et stratégies, allant des manières d'améliorer la qualité de l'eau du Saint-Laurent, du Fraser et des Grands Lacs jusqu'aux initiatives venant des gens de la base.

Pour vraiment s'attaquer au problème de l'eau, il faut une action encore mieux coordonnée au niveau national. À l'échelle internationale, le gouvernement fédéral est chargé de voir aux affaires ayant trait à l'eau, notamment la loi internationale sur le Traité des eaux limitrophes. À l'échelle nationale, le gouvernement fédéral joue un rôle important au niveau des pêches, de la navigation et de l'eau sur les terres fédérales.

Les provinces sont les premières responsables de la gestion de l'eau à l'intérieur de leurs frontières.

[Français]

Cette façon de voir, orientée sur l'écosystème, sous-tend l'approche que nous suivons en élaborant les stratégies environnementales. Cette approche essentiellement holistique est plus efficace car elle vise les causes plutôt que les symptômes.

Le ministre des Affaires étrangères et moi-même décrirons les grands traits d'une nouvelle stratégie visant à protéger et à gérer les bassins hydrographiques canadiens.

Avec les provinces et les territoires, nous nous pencherons sur les principales questions relatives à l'eau au Canada. Avec notre voisin américain, nous étudierons les problèmes touchant les eaux frontalières par le biais de la Commission mixte internationale.

Le Canada n'exporte pas de grandes quantités d'eau douce actuellement. Mais, ces dernières années, il y a eu plusieurs propositions d'exportation d'eau en grande quantité par aqueduc, citernes ou canaux de dérivation.

[Traduction]

Certains appuient ces idées dans certaines régions, disant que l'eau y est abondante. En fait, nous n'avons pas assez de données scientifiques et techniques sur les effets à long terme de tels retraits, que ce soit sur une base ponctuelle ou cumulative.

L'eau étant un élément, il faut que nous adoptions une approche exhaustive fondée sur la collaboration, si nous voulons protéger et bien gérer cette ressource. Si nous faisions moins que cela, nous ne donnerions pas aux Canadiens l'assurance que nos réserves d'eau sont protégées pour nos enfants et les générations futures.

 

. 1630 + -

Je crois que les Canadiens veulent ardemment gérer et protéger nos réserves d'eau et que tous les secteurs de compétence au Canada peuvent collaborer pour interdire le retrait de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques, y compris les exportations d'eau, afin d'affirmer le droit souverain du Canada de protéger, de préserver et de conserver ses ressources en eau douce pour les générations futures.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je regrette de devoir interrompre la ministre, mais son temps de parole est écoulé.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Madame la Présidente, j'ai une très brève question à poser. Est-ce que, dans ses consultations avec les provinces, le gouvernement a obtenu un consensus de toutes les provinces sur l'exportation de grandes quantités d'eau douce?

L'hon. Christine Stewart: Madame la Présidente, des consultations avec les provinces se déroulent depuis plusieurs mois au niveau des fonctionnaires de mon ministère, et j'ai moi-même eu des rencontres avec mes homologues provinciaux. Nous avons eu des discussions en profondeur.

Nous avons les mêmes préoccupations d'un bout à l'autre du pays, et nous comprenons qu'il est nécessaire d'étudier et d'analyser le sujet, de protéger nos ressources en eau douce et de veiller à ce que nous ayons le pouvoir d'empêcher l'exportation de grandes quantités d'eau douce.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, la ministre pourrait peut-être nous dire une chose ou deux. Elle a parlé de consultations avec les provinces. Est-ce que les consultations auxquelles s'adonnent ses fonctionnaires comportent un volet de consultation avec les autochtones, dont beaucoup ont manifestement un intérêt dans les ressources en eau?

Deuxièmement, la ministre veut-elle dire à la Chambre que les députés ministériels ont l'intention d'appuyer la motion, et en particulier la motion principale?

L'hon. Christine Stewart: Madame la Présidente, je n'ai pas pu terminer mon intervention, mais je devais dire en terminant que le gouvernement et moi appuyons la motion.

Pour répondre à la première question du député, oui, nous avons l'habitude de le faire à mon ministère. J'ai demandé à mes fonctionnaires de consulter les autochtones chaque fois que possible dans le cadre de l'élaboration de nos politiques.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, dans son discours, la ministre de l'Environnement a dit qu'il y avait eu, dans le passé et présentement, plusieurs propositions sur la table concernant la vente ou l'achat massif d'eau en vrac.

Est-ce que la ministre pourrait nous faire part de ces propositions dont elle a eu vent?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart: Madame la Présidente, le député est sûrement au courant des propositions très publiques qui ont été faites vers la fin de l'année dernière et de la demande, en particulier, de Nova qui voulait prélever de l'eau du lac Supérieur. Une autre société voulait prélever de l'eau à Terre-Neuve. Une troisième voulait en prélever en Colombie-Britannique.

Depuis que nous avons amorcé nos discussions, plusieurs provinces ont pris les mesures nécessaires pour adopter des lois, des règlements et des politiques concernant l'exportation de grandes quantités d'eau provenant de leur province.

Nous avons donc accompli beaucoup de travail ensemble, de crainte de voir les demandes de ce genre se multiplier. Si nous n'avons pas de politiques, de règlements et de lois pour nous protéger, la situation pourrait vite nous échapper.

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Madame la Présidente, je suis ravie d'entendre la ministre parler de l'Arctique. Je ne sais pas si la ministre y est allée, mais l'Arctique a une végétation très luxuriante et ses ressources en eau sont abondantes.

 

. 1635 + -

Les Gwich'in donnent leur propre nom de Gwich'in à l'eau. Aux termes de la Constitution, les territoires ne jouissent pas du même statut que les provinces, ce qui les rend plus susceptibles d'être exploités, étant donné également le fait qu'il n'y a pas beaucoup d'habitants pour s'opposer à l'exportation de l'eau.

Je demanderais à la ministre de confirmer la protection dont jouissent les habitants, les terres et les eaux du Nord canadien.

L'hon. Christine Stewart: Madame la Présidente, le gouvernement fédéral est conscient des ressources énormes en eau douce qui se trouvent dans le Grand Nord canadien et des inquiétudes que nourrissent les habitants du Nord en ce qui concerne leur eau douce.

Le gouvernement fédéral s'apprête à accorder aux territoires les mêmes pouvoirs que les provinces pour qu'ils puissent réglementer et contrôler leurs eaux.

M. Myron Thompson: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois comprendre que la ministre n'aura pas assez de temps pour répondre, mais, étant donné qu'elle est ministre et que nous avons rarement l'occasion de poser des questions sur ces sujets, je demande le consentement unanime pour prolonger la période de questions de cinq ou dix minutes.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime pour prolonger de cinq minutes la période de questions?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Cumberland—Colchester—Les transports; le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest—Le réseau routier.

[Français]

M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Madame la Présidente, je tiens à dire, en premier lieu, que notre parti va appuyer cette motion, non pas parce que nous trouvons que la motion est très rigoureuse ou très clairement définie, mais parce qu'on la considère comme une motion qui constitue un cri d'alarme sur la question de l'eau douce.

Je pense que le but premier de la motion, c'est tout simplement de tout mettre en oeuvre pour que dans l'ensemble du pays, on puisse avoir un plan de gestion efficace pour la gestion de l'eau douce.

Ce qui est un peu difficile à accepter, c'est le fait que la motion de notre collègue du NPD donne l'impression que la vie commence aujourd'hui avec cette motion. Je tiens à souligner à mes collègues du NPD qu'il y a des efforts considérables qui ont été faits au cours des dernières décennies—non pas il y a 100 ans, mais au cours des dernières décennies—parce que c'est quand même une réalité. Les parlementaires, comme leurs concitoyens, évoluent à un rythme normal. Les problèmes arrivent, on en prend conscience, et on développe des méthodes pour les régler.

Le gouvernement actuel et les gouvernements précédents sont intervenus dans la protection de la faune et de la flore, entre autres, dans le dossier du Traité sur les pluies acides. On s'est rendu compte qu'on assistait à une destruction massive de cette réalité. C'est un accord qui a été signé par l'ancien gouvernement, et je pense que cela a porté fruits. On l'oublie parfois trop facilement.

Dans le domaine du Plan d'action Saint-Laurent, je peux dire qu'il y a eu des dizaines de millions de dollars d'investis pour la protection de nos cours d'eau, particulièrement le fjord du Saguenay, entre autres, où on pouvait voir des bancs complets de crevettes qui ont été inondés par la pollution industrielle. Il y a des changements qui se font tranquillement, mais à un rythme acceptable.

Je ne pense pas qu'il faille aborder cette motion comme une motion doctrinaire qui va tout régler. Absolument pas. Il faut aborder cette question avec réalisme, sans exagération. Il y a des choses qui ont été faites dans le passé.

Nos collègues du NPD mettent tout sur la question de l'Accord de libre-échange. Il y a eu des témoignages aujourd'hui qui confirment que l'Accord de libre-échange protège cette dimension, protège notre pays contre l'exportation massive d'eau douce.

 

. 1640 + -

J'aurai l'occasion plus tard de lire des extraits de discours qui, à l'époque, ont été prononcés pour assurer la protection de l'eau douce par le traité de libre-échange et aussi par le traité de l'ALENA.

Dans cette proposition, il y aussi un peu de mesquinerie et un manque de solidarité. L'eau douce, c'est une propriété canadienne et c'est aussi une propriété internationale. Mon collègue de Frontenac—Mégantic faisait allusion tantôt à toute la dimension commerciale des ressources qui sont renouvelables. Je pense qu'il faut mettre en commun un plan de travail qui va nous permettre d'avoir un plan de gestion efficace—il faut le souligner la proposition le dit bien—en collaboration avec les provinces.

Il est important que nous ne soyons pas, au préalable, fermés à toute commercialisation possible. On ne sait jamais ce que l'avenir nous réserve. Actuellement, on vit des situations qui nous apparaissent comme pouvant devenir potentiellement dramatiques à travers le monde. C'est le cas chez nos voisins immédiats. Quand on en est aux premiers balbutiements d'un plan de gestion, on ne peut pas dire: «On ferme complètement la porte à tout appui à d'autres pays qui ont un manque flagrant au niveau d'autres ressources».

Est-ce qu'on pourra développer un jour des techniques de dessalaison des mers? Peut-être que oui. Peut-être que non.

On doit établir un plan de gestion efficace. Dans cet esprit-là, il n'y a pas de juridiction possible. C'est un objectif qu'on doit se fixer comme pays. C'est même un objectif continental qu'on doit se fixer. Il n'y a rien de plus évident qui dépasse les juridictions municipales, provinciales, nationales et continentales que la mise en place d'un plan de gestion qui va nous permettre de mieux gérer nos ressources sur une grande échelle.

On peut avoir des plans établis sur une grande échelle mais, règle générale, cela nous incite à avoir des interventions locales qui sont efficaces dans nos municipalités. Je me souviens que dans les années 1980, il y avait le programme d'assainissement des eaux. Malheureusement, il y a beaucoup de municipalités au Québec qui n'ont pas pu tirer profit du plan national d'assainissement des eaux à cause de toutes sortes de considérations. Mais Dieu sait que c'est important qu'un plan comme celui-là ait été mis en vigueur dans nos municipalités, non pas sans difficultés, tant au niveau du financement qu'au niveau technique. D'ailleurs, ce n'est pas encore terminé.

On doit accepter cette motion comme étant un objectif très louable de travailler en concertation avec tous les niveaux de juridiction pour mettre en place quelque chose de sérieux et d'intelligent, sans fermer la porte à une entraide continentale ou internationale parce qu'on ne sait pas ce que l'avenir nous réserve.

Il est également important que le gouvernement puisse être en mesure de réagir positivement à cette question parce qu'il y a des changements majeurs qui surviennent. Actuellement, nous n'avons pas les paramètres qui nous permettent de prévoir les changements climatiques à venir. Il semblerait que ces changements climatiques sont plus accélérés qu'on ne l'avait prévu. C'est donc une raison de plus pour que l'on incite le gouvernement à intervenir rapidement dans un secteur qui apparaît crucial pour notre avenir.

J'ose espérer, comme on l'a fait entre autres pour le plan d'action du Saint-Laurent et pour la création d'un parc national chez nous, que, dans l'élaboration d'un plan qui va être national, provincial et aussi continental, on puisse être en mesure de faire cela sans avoir de chicanes qui vont nous faire perdre du temps. J'ai vu souvent d'énormes pertes de temps dans les négociations fédérales-provinciales et, à la fin, ce sont nos concitoyens qui écopent.

Il me faisait plaisir de voir les membres du gouvernement actuel confirmer que l'Accord de libre-échange nord-américain garantissaient une protection absolue contre des exportations massives d'eau douce. J'étais heureux d'avoir cette confirmation de la part des collègues du gouvernement qui ont voté contre l'accord de libre-échange.

 

. 1645 + -

En 1988, toute la campagne électorale s'est faite sur ce thème: les Américains vont venir vider nos lacs, ce sera affreux. Pourtant, à l'époque, nous avions la confirmation que les seules négociations qui avaient été prises en considération dans le cadre des négociations, c'était l'exportation d'eau douce, mais dans des contenants très limités.

Cela illustre le fait qu'en politique, souvent, il y a beaucoup de démagogie. On doit vivre avec cela. Sur une moyenne et une longue période, l'histoire finit par donner raison à ceux qui ont négocié cet accord de bonne foi.

J'ai une citation, pour réagir à la position de l'époque, de M. Wilson, qui était ministre de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie, et ministre du Commerce extérieur, qui disait ceci: «Permettez-moi de répéter ce que stipule expressément l'Accord de libre-échange, et qui vaudra aussi pour l'Accord de libre-échange nord-américain. Il demeure entendu que ni la présente, ni l'Accord ne s'appliquent aux eaux, eaux s'entendant des eaux de surface et souterraines.»

M. Wilson poursuivait: «Ce que j'ai dit dans ma première réponse décrit la position et la politique du gouvernement du Canada relativement à l'exportation de l'eau. L'exportation d'eau en bouteilles est autorisée. L'exportation d'eau en grande quantité, en particulier la dérivation des eaux, ne l'est pas.» C'était pourtant clair à l'époque.

Somme toute, nous allons appuyer cette motion, qui est une motion de principe qui lance un cri d'alarme sur l'importance d'avoir un plan de gestion, en collaboration avec tous les autres niveaux de gouvernement, et je remercie mes collègues de l'avoir soumise à la Chambre.

[Traduction]

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, je remercie le député conservateur de l'appui qu'il donne à la motion du NPD.

Si le député croit que l'ALENA nous protège contre l'exportation d'eau en grosse quantité parce que le Canada a un droit souverain sur ses ressources en eau, pourquoi croit-il que les États-Unis, et surtout la Californie, ont intenté des poursuites de 220 millions de dollars contre la Colombie-Britannique? La province a interdit l'expédition d'eau par navire citerne.

Je cite de nouveau l'affaire du MMT dans laquelle le Canada a capitulé et versé 13,5 millions de dollars américains à une société étrangère et autorisé l'utilisation, à l'intérieur de nos frontières, de l'additif MMT, qui est une neurotoxine. Je présume que la Californie et les sociétés qu'on y trouve s'attendent à trouver une échappatoire ou un moyen juridique pour intenter des poursuites contre le gouvernement du Canada.

D'après ce que dit le député, je voudrais m'assurer qu'il n'y a pas de stratagème juridique et que, au fond, ces gens-là ne font que de l'esbroufe.

[Français]

M. André Harvey: Madame la Présidente, l'Accord de libre-échange a été signé, tout comme l'a été l'Accord de libre-échange nord-américain. Un tribunal est là pour arbitrer nos litiges. À ce que je sache, cette entente commerciale existe. Depuis 10 ans, à ce que je sache, la baie James et les Grands Lacs n'ont pas été transférés à Las Vegas.

L'important, c'est de se tourner vers l'avenir. Nous avions des garanties légales dans le cadre de l'Accord. Mais actuellement, selon l'esprit de la motion, il est important pour le Canada de tout mettre en oeuvre pour avoir un plan de gestion efficace pour la gestion de l'eau douce. C'est une ressource qui n'est pas illimitée.

Il ne faut pas oublier que c'est 3 p. 100 de l'ensemble des réserves de la planète. Cela veut donc dire que nous avons à peu près le quart de 1 p. 100 de ces réserves. Cela mérite d'être géré avec efficacité, mais ce doit être fait en consultation avec tous les gouvernements locaux, tant municipaux que provinciaux, et le gouvernement fédéral évidemment, qui a, dans cela, un rôle de coordination qui me paraît essentiel.

Il n'y a rien de plus communicant que les eaux. Il n'y a rien de plus au-delà des juridictions que cette question, et on doit faire appel à la bonne foi de tous les intervenants.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, pour fins de comparaison, je tiens à rappeler à mon collègue de Chicoutimi que si on compare la planète à un pamplemousse, un grain, un pois, serait l'équivalent de toute l'eau de la planète, un seul pois. Ce n'est pas beaucoup, comparé à un pamplemousse.

Et de ce pois, 98 p. 100, c'est de l'eau salée, et seulement 2 p. 100, de l'eau douce. De ces 2 p. 100 d'eau douce, 20 p. 100 se retrouvent au Canada, dont un très gros pourcentage au Québec.

 

. 1650 + -

Le député de Chicoutimi se dit d'accord avec la motion du Nouveau Parti démocratique, parce que c'est une question de principe et que l'eau, il faut en prendre soin, c'est vital. Tout le monde est d'accord là-dessus.

Cependant, je demande au député de Chicoutimi s'il serait d'accord pour aller jusqu'à saper dans des champs de juridiction des provinces, dont le Québec—et le député est Québécois—pour satisfaire la motion du Nouveau Parti démocratique. Alors, j'attends la réponse de mon collègue et ami de Chicoutimi.

M. André Harvey: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Frontenac—Mégantic qui a toujours des questions très pertinentes, et je prends plaisir, d'ailleurs, à le côtoyer quotidiennement à la Chambre.

Concernant cette question, effectivement, cela m'apparaît incontournable, parce que ce dossier, dans le cadre des négociations, tout en respectant les juridictions respectives des différents niveaux de gouvernement, fait appel au sens commun ainsi qu'à une notion qui est très chère à mes collègues du Bloc québécois, la notion du partenariat pour l'atteinte d'objectifs importants pour nos concitoyens.

C'est dans cet esprit que tous les gouvernements doivent travailler en concertation pour être en mesure d'apporter une solution globale. Cela ne touche pas seulement le comté de Chicoutimi, ou le comté de Frontenac—Mégantic, ou le Québec ou l'Ontario, cela touche tous les Canadiens et tous les habitants de cette planète.

Donc, il faut se parler, et il n'y a rien de plus interdépendant que les notions environnementales sur cette terre. Je pense qu'il faut faire appel au gros bon sens pour être en mesure d'en arriver à des résultats intéressants.

[Traduction]

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Madame la Présidente, je me réjouis de l'attention que l'on porte aujourd'hui à la protection des ressources d'eau douce du Canada. Je me réjouis aussi beaucoup de ce que cette préoccupation aille au-delà du commerce potentiel de nos ressources d'eau douce. Je veux parler en général de la façon dont nous gérons nos bassins hydrographiques et en particulier de la nécessité d'empêcher les transferts entre bassins hydrographiques.

En effet, le bassin hydrographique est considéré comme l'unité écologique fondamentale dans la protection et la conservation de nos ressources d'eau douce. Les transferts ou les ponctions de grandes quantités d'eau, à des fins d'utilisation ailleurs au Canada ou d'exportation, risquent d'avoir des répercussions importantes sur la santé et l'intégrité de nos bassins hydrographiques. Il importe que les Canadiens s'assurent ensemble d'adopter une approche globale et respectueuse de l'environnement en vue de protéger leurs ressources et leurs bassins hydrographiques.

L'eau est un élément essentiel de tout écosystème, depuis les fonctions vitales qu'assument les lacs, les rivières et les ruisseaux jusqu'au rôle du cycle hydrologique pour le soutien de l'eau sous ses diverses formes.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je regrette de devoir interrompre le député. Je crains d'avoir commis une erreur. Je n'avais pas vu le député du Parti conservateur dont c'était le tour de prendre la parole. Si vous le voulez bien, il parlera pendant dix minutes, puis nous poursuivrons.

La parole est au député de Kings—Hants. Mes excuses.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Madame la Présidente, nous comprenons que vous puissiez faire une erreur à l'occasion; c'est tout à fait normal.

Je m'excuse auprès du député libéral qui, sans le vouloir, prenait la place d'un conservateur, ce que les libéraux semblent avoir fait souvent depuis 1993. Cela étant dit, ce ne sera pas toujours le cas, et c'est pourquoi les libéraux peuvent bien profiter de leur place au soleil à ce moment-ci.

La motion dont nous sommes saisis est d'une importance cruciale. C'est très positif que les néo-démocrates aient présenté cette motion pour un important débat aujourd'hui et pour un important débat à l'avenir sur la question de l'eau, plus précisément sur la question des exportations de grandes quantités d'eau douce.

Au premier coup d'oeil, j'ai certaines réserves à l'égard de cette motion. Je vais citer ce que dit précisément la motion. Elle dit que le gouvernement «devrait présenter une mesure législative pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques».

 

. 1655 + -

Mon parti et moi-même sommes prêts à appuyer cette motion. Nous voulons être certains qu'un débat sur cette très importante question aura lieu ici même, à la Chambre des communes.

Nous croyons que le gouvernement devrait présenter une mesure législative afin qu'il y ait un débat sur cette question à la Chambre des communes, afin que nous puissions débattre en profondeur cette question des plus importantes. Cela étant dit, je crois que nous aurions tous besoin de plus amples renseignements avant de pouvoir appuyer cette mesure législative que le gouvernement présenterait pour interdire les exportations de grandes quantités d'eau douce et les transferts entre bassins hydrographiques.

Nous appuierons la motion à l'étude aujourd'hui en raison de l'importance de ce débat. Cela dit, si un projet de loi est effectivement présenté, nous voudrions alors avoir la possibilité de discuter à fond de ses avantages et de ses inconvénients.

Quelqu'un a signalé tout à l'heure, et je pense qu'il est très important de le reconnaître, que le Parti progressiste conservateur a pris des dispositions pour protéger nos eaux douces dans le cadre des négociations sur l'ALENA. Pendant les échanges qui ont eu lieu plus tôt entre le député néo-démocrate et celui de mon parti, il a été question du caractère sacré de l'eau et de la protection des eaux en vertu de l'ALENA.

En réalité, les négociations et les accords commerciaux sont un processus continu et non pas statique. Quand un accord commercial est conclu, tout ne s'arrête pas là. Il y a des négociations et des pourparlers constants non seulement entre les pays, mais aussi entre les gouvernements sous-nationaux d'un État souverain comme le Canada. Il s'agit aussi d'une question importante dont il faudra discuter plus en profondeur à la Chambre lorsqu'un projet de loi à ce sujet sera déposé. Il faudra discuter des pouvoirs qui ont trait aux eaux canadiennes ainsi que du rôle des gouvernements sous-nationaux par rapport aux compétences et à la conservation de l'eau.

L'eau est une denrée unique. De toute évidence, elle est plus essentielle à la vie humaine que toute autre denrée et certainement que toute autre denrée exportable.

Il ne s'agit pas seulement d'une question d'ordre commercial; c'est aussi une question d'environnement, voire de politique étrangère. En cette ère de l'après-guerre froide où les affaires étrangères sont de plus en plus complexes, où l'État-nation est en déclin, l'eau va devenir—qu'on le veuille ou non—une source de conflits dans l'avenir. Dans le passé, c'était le pétrole ou une autre ressource naturelle. Mais l'eau est appelée à jouer un rôle plus important dans notre politique étrangère et dans les conflits dans le monde.

À une époque où on parle plus de sécurité humaine que de sécurité nationale, l'eau joue certainement un rôle dans les deux. Telles sont les questions dont il faudra discuter sérieusement. Ce genre de débat doit se tenir tant au sein des comités, comme ceux de l'environnement, du commerce et des affaires intergouvernementales, qu'à la Chambre.

Le fait est que les États-Unis et le Canada ne manquent pas de pommes de discorde. Mentionnons la bière, le blé, le bois d'oeuvre, les magazines, qui sont toutes des questions commerciales faisant l'objet de différends actuellement. Le Canada dispose certes de 20 p. 100 des réserves d'eau douce du monde, la plus grande partie étant formée des Grands Lacs. Le reste s'écoule librement dans trois océans. D'autre part, les États-Unis disposent d'un dixième de nos réserves d'eau douce, mais comptent près de neuf fois plus d'habitants, dont un grand nombre vit dans le sud-ouest, cette région pittoresque au climat sec; or, tous ces habitants ont besoin d'eau.

Il ne fait pas de doute que des pressions croissantes s'exercent sur le Canada pour qu'il exporte de l'eau en grandes quantités. Ces tentatives ont évidemment soulevé l'opposition des écologistes aussi bien que celle du gouvernement du Canada et des nationalistes canadiens. Naturellement, cette question a été portée devant les tribunaux dans le contexte de nos engagements face au commerce international.

La dernière bataille que se livrent l'entreprise Sun Belt Water de la Californie et la Colombie-Britannique n'est qu'un autre exemple du genre de négociations et de conflits juridiques que l'on aura dans le cadre de l'ALENA.

 

. 1700 + -

Nous devons toujours nous attendre à ce que ces situations surgissent régulièrement.

Il est très important que nous ne rejetions pas d'emblée les exportations d'eau. Selon certaines estimations, 60 p. 100 de nos réserves d'eau douce sont gaspillées. Il suffit de passer un hiver pluvieux à Vancouver pour se rendre compte que nous avons un approvisionnement impressionnant en eau douce. Une bonne partie de notre eau va se perdre dans les océans.

Il est évident que le cas de l'eau est particulier. C'est ce que soutient Maude Barlow, du Conseil des Canadiens. Elle et le conseil croient que rien ne devrait faire l'objet de commerce. Elle et son organisation croient que le commerce, peu importe sous quelle forme, ne peut en aucun cas bénéficier aux Canadiens. Je suis en total désaccord avec eux là-dessus.

Nous appuyons la motion à l'étude aujourd'hui parce que nous estimons que le débat est important. Cependant, nous n'appuierons pas l'amendement parce qu'il dit clairement que le Canada ne devrait être partie à aucun accord international qui nous obligerait à exporter de l'eau douce contre notre volonté. Le mot obliger, en soi, est ambigu.

Je ne crois pas qu'il y ait un seul député ici qui connaisse tous les faits nécessaires pour prendre une décision aussi radicale. Il faut un débat sur la question.

Comme dans bien des dossiers semblables, le gouvernement hésite, se traîne les pieds et temporise. Des occasions d'exporter de l'eau se manifestent. À Gander, Terre-Neuve, les entreprises McCurdy, auparavant une société de construction, proposent de remplir des pétroliers avec de l'eau puisée dans le lac Gisborne et de la faire parvenir aux gens qui meurent de soif en Asie. Il y a aussi des enjeux en Colombie-Britannique.

Il existe une perspective économique, mais nous ne pouvons nous en prévaloir si elle met en péril la politique de notre pays en matière d'environnement. C'est là une chose qu'aucun député ne voudrait faire.

Nous ne pouvons dissocier les arguments économiques des arguments concernant l'environnement. L'attitude contraire a mené au fil des ans à une dégradation de l'environnement. Il est très important que ces deux secteurs, ceux de l'économie et de l'environnement, soient inextricablement liés dans les politiques gouvernementales. Nous devons nous attacher à ces questions.

Nous appuierons la motion, mais non l'amendement. Nous sommes impatients de tenir à la Chambre des communes un débat en bonne et due forme au sujet de cette question environnementale et économique très importante.

Lorsque ce débat aura lieu, nous espérons pouvoir aborder toutes les sphères d'influence, y compris notre politique étrangère, notre politique en matière d'aide étrangère et nos obligations envers les gens dans un contexte de sécurité humaine et non uniquement dans une perspective de sécurité nationale. Nous souhaitons aussi être capables de traiter très sérieusement d'un problème qui pourrait très facilement devenir un enjeu politique plutôt qu'une question de politique gouvernementale.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Madame la Présidente, j'aimerais demander au député ce qu'il pense de la question de la contrainte. Cela fait partie de l'amendement dont nous sommes saisis.

J'aimerais savoir comment il décrirait toute la récente affaire du MMT. La société Ethyl a intenté contre le gouvernement une poursuite en dommages au sujet de la loi qui interdisait l'utilisation du MMT et elle a eu gain de cause.

J'ai l'impression que le gouvernement fédéral a entièrement capitulé face à l'ALENA et qu'il a été contraint de capituler en raison de la nature des accords commerciaux auxquels le Canada a adhéré.

 

. 1705 + -

Le mot contrainte est fort, mais nous devons commencer à employer des mots semblables compte tenu des événements qui se sont produits sur les marchés et devant les tribunaux.

M. Scott Brison: Madame la Présidente, je remercie la députée de sa question. Elle est très importante. Deux aspects de la politique gouvernementale sont en cause ici. L'un est la Loi nationale sur l'environnement, présentée par l'actuel ministre du Commerce lorsqu'il était ministre de l'Environnement et l'autre concerne la politique commerciale. Ce sont deux aspects distincts.

Selon moi, la Loi sur le MMT présentée par l'actuel ministre du Commerce était mal conçue et n'était pas en mesure de résister aux rigueurs de l'ALENA et aux questions concernant le traitement national.

Le traitement national est un aspect fondamental des accords commerciaux et des obligations du Canada en vertu de l'ALENA. Toutefois, le traitement national signifie tout simplement que nous sommes obligés d'appliquer aux sociétés étrangères au Canada le même traitement qu'à des sociétés canadiennes.

Si une loi est conçue de manière à s'appliquer à des sociétés canadiennes de façon non discriminatoire, par exemple pour protéger l'environnement, elle serait acceptable en regard de l'ALENA. Toutefois, une loi qui ciblerait expressément une société étrangère pourrait être jugée irrecevable. C'est pourquoi nous devons faire preuve d'une plus grande rigueur lorsque nous élaborons des lois, afin qu'elles puissent être à la hauteur des critères qui régissent le traitement national et des questions afférentes. Je crois qu'il s'agissait d'une mauvaise loi, mal conçue et qui n'était pas à la hauteur.

En définitive, la question du traitement national se résume à une chose fondamentale. Si nous ne permettons pas à une société canadienne d'adopter un comportement nuisible à l'environnement, nous ne le permettrons pas davantage à une société étrangère. C'est une question de traitement national. La pollution et les éléments extérieurs touchant l'environnement ne connaissent pas les frontières nationales.

Je ne vois pas comment, et aucun opposant à la libéralisation du commerce n'a pu m'en convaincre, le traitement national peut menacer notre environnement si une loi canadienne est conçue de manière à respecter les exigences des accords commerciaux que nous avons signés et dont les Canadiens ont bénéficié.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Madame la Présidente, Je suis heureux qu'on attire aujourd'hui l'attention de la Chambre sur la protection des ressources en eau douce du Canada.

Je constate avec plaisir que cette préoccupation va au-delà des possibilités commerciales qu'offrent nos ressources en eau, car on parle aussi de la façon de gérer nos bassins hydrographiques et plus particulièrement, de la nécessité de prévenir des transferts d'eau entre bassins hydrographiques.

En fait, le bassin hydrographique est reconnu comme l'unité écologique fondamentale dans la protection et la conservation de nos ressources en eau. Le transfert de grandes quantités d'eau, aux fins d'utilisation ailleurs au Canada ou à des fins d'exportation, pourrait avoir des répercussions importantes sur la santé et l'intégrité de nos bassins hydrographiques.

Il est important que les Canadiens travaillent ensemble pour veiller à aborder d'une façon globale et écologique la protection de nos ressources en eau et de nos bassins hydrographiques.

L'eau est une partie essentielle de tous les écosystèmes, qu'il s'agisse du rôle joué par les lacs et les cours d'eau pour ce qui est d'assurer la vie ou du rôle du cycle hydrologique pour conserver l'eau sous diverses formes.

L'accès à des approvisionnements adéquats d'eau potable est essentiel à notre santé, à notre qualité de vie et à notre compétitivité. Une grande partie de notre économie et de nos emplois est liée directement ou indirectement à nos réserves d'eau, qu'il s'agisse de l'agriculture, de l'exploitation forestière, du développement industriel, du tourisme ou du secteur récréatif.

Comme nous possédons 9 p. 100 des réserves renouvelables d'eau potable du monde, il nous est facile de supposer que le Canada possède de très grandes quantités d'eau. Étant donné que les terres émergées du Canada représentent environ 7 p. 100 de la superficie mondiale totale, il ne semble pas excessif que notre pays détienne 9 p. 100 des ressources en eau du monde.

 

. 1710 + -

Lorsqu'on songe au déséquilibre dans la distribution géographique des ressources en eau, la question de l'abondance devient plus pertinente. En effet, 60 p. 100 de l'eau du Canada coule vers le Nord alors que 90 p. 100 de la population et la plupart des activités industrielles du Canada se trouvent dans un rayon de 300 kilomètres de la frontière canado-américaine, où les ressources en eau sont de plus en plus en demande et où certaines régions sont polluées et peu sûres.

En plus de ces variations géographiques quant à l'abondance d'eau, le Canada fait également face à d'importantes variations temporelles dans la disponibilité de l'eau. Par exemple, la rivière Rouge, dans le sud du Manitoba, peut avoir un débit variant entre un mètre cube à la seconde et 2 700 mètres cubes à la seconde. Le bassin hydrographique des Grands Lacs, où vivent neuf millions de Canadiens et 33 millions d'Américains, est à son plus bas niveau depuis 15 ans.

Outre ces variations à court terme, on s'attend à ce que les changements climatiques entraînent des modifications importantes au niveau de la disponibilité en eau dans différentes régions du pays. Par conséquent, même si le Canada semble posséder de vastes ressources hydriques, il y a des endroits au pays qui souffrent d'une pénurie d'eau ou qui vont en souffrir.

Il faut donc adopter une stratégie afin que les ressources en eau soient gérées et protégées pour les générations futures. Il est clair que les transferts entre bassins hydrographiques qui nécessitent une intervention humaine pour transférer de grandes quantités d'eau entre des bassins sont susceptibles d'avoir la plus grande incidence aux niveaux social, économique et environnemental.

Toutefois, nous ne pouvons ignorer les autres moyens de prélever de grandes quantités d'eau, comme par exemple les navires-citernes ou les pipelines, qui peuvent cumulativement avoir le même impact sur les bassins hydrographiques que les transferts à grande échelle entre bassins.

C'est la raison pour laquelle la question du prélèvement de grandes quantités d'eau, y compris aux fins d'exportation, doit absolument être examinée dans son ensemble, de façon à ne pas trouver des solutions à des problèmes particuliers, au détriment d'une approche plus globale.

Au cours des 30 dernières années, les préoccupations concernant les exportations de grandes quantités d'eau du Canada sont devenues plus marquées principalement en raison des propositions faites pour détourner de grandes quantités d'eau vers les États-Unis, afin de régler des problèmes de pénurie d'eau ou de favoriser le développement agricole, industriel et urbain de régions des États-Unis dont les approvisionnements en eau sont limités.

Il convient de mentionner quelques-uns de ces mégaprojets. L'une des plus importantes propositions de transfert d'eau sur le continent, et probablement la plus connue, est le North American Water and Power Alliance Project, dans les années soixante. Ce projet prévoyait la dérivation d'eau en provenance de l'Alaska, du nord-ouest du Canada et de bassins hydrographiques entourant la baie d'Hudson et la baie James vers les régions arides de l'ouest des États-Unis, des Prairies et du nord du Mexique.

Un autre mégaprojet, le Grand Recycling and Northern Development Canal, aurait transformé la baie James en un lac d'eau douce par la construction d'une digue entre la baie James et la baie d'Hudson et la retenue des rivières qui se jettent dans la baie. On aurait inversé le courant des rivières pour acheminer l'eau vers les Grands Lacs et, de là, vers d'autres destinations en Amérique du Nord.

Tout en ayant le potentiel de créer des emplois et des investissements au Canada à court terme, à long terme, ces mégaprojets ne bénéficieraient pas à la société canadienne.

La politique fédérale de 1987 relative aux eaux conseille la prudence en ce qui concerne les transferts entre bassins hydrographiques et préconise des solutions moins controversées telles que la gestion de la demande et la conservation de l'eau.

Les exportations que l'on propose à l'heure actuelle se feraient par bateaux-citernes qui puiseraient l'eau dans les lacs et les cours d'eau—c'était le cas du projet d'exportation d'eau du lac Supérieur vers les marchés asiatiques dont on a entendu parler l'an dernier—ou encore par camions-citernes ou par canalisations transportant de l'eau de surface ou souterraine.

Non seulement l'aspect économique des exportations d'eau a clairement changé en ce qui a trait aux investissements nécessaires, mais notre compréhension de la portée et de l'ampleur à long terme des effets sociaux et environnementaux possibles des exportations a également évolué. Comme je l'ai déjà dit, les prélèvements d'eau en grandes quantités, y compris les exportations, doivent être considérés d'un point de vue historique.

Ce qui me conduit à réitérer ma deuxième préoccupation, à savoir que nous traitions de façon globale l'ensemble des questions touchant l'eau douce au lieu de nous limiter à un seul aspect, l'exportation.

J'appuie la motion. Je pense qu'une approche globale est ce que les Canadiens méritent et c'est ce qu'ils auront.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est 17 h 15, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

[Traduction]

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

 

. 1715 + -

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le vote suivant porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion, telle que modifiée est adoptée.)

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je demande maintenant le consentement unanime de la Chambre pour considérer qu'il est 17 h 30 de sorte que nous puissions passer à la tenue des votes prévus pour ce soir.

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Convoquez les députés.

 

. 1740 + -

Après l'appel du timbre:

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Les Canadiens qui ont suivi le débat toute la journée à la télévision devraient savoir que la motion dont nous avons discuté aujourd'hui et l'amendement proposé par le NPD ont été adoptés à l'unanimité par la Chambre il y a quelques minutes. Une déclaration vient donc d'être faite au sujet des exportations d'eau.

JOUR DÉSIGNÉ—LES SOINS DE SANTÉ

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 4 février, de la motion et de l'amendement.

Le Président: Conformément à l'ordre adopté le jeudi 4 février 1999, la Chambre procède maintenant au vote par appel nominal différé sur l'amendement à la motion des crédits.

 

. 1750 + -

(L'amendement, mis aux voix, est rejeté.)

Vote no 312

POUR

Députés

Abbott Alarie Anders Asselin
Bachand (Saint - Jean) Bellehumeur Benoit Bergeron
Bernier (Tobique – Mactaquac) Borotsik Breitkreuz (Yellowhead) Breitkreuz (Yorkton – Melville)
Brien Brison Cadman Cardin
Casey Casson Chatters Chrétien (Frontenac – Mégantic)
Crête de Savoye Debien Desrochers
Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Duceppe Dumas Duncan
Elley Epp Forseth Gagnon
Gauthier Gilmour Girard - Bujold Godin (Châteauguay)
Gouk Grewal Grey (Edmonton North) Guay
Guimond Hanger Harris Hart
Harvey Herron Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom
Jaffer Johnston Jones Kenney (Calgary Southeast)
Konrad Lalonde Laurin Lebel
Lefebvre Loubier Lowther Lunn
Marceau Marchand Mark Martin (Esquimalt – Juan de Fuca)
Mayfield McNally Meredith Mills (Red Deer)
Morrison Muise Obhrai Pankiw
Penson Perron Picard (Drummond) Plamondon
Price Ramsay Reynolds Ritz
Rocheleau Scott (Skeena) Solberg St - Hilaire
Stinson St - Jacques Strahl Thompson (New Brunswick Southwest)
Thompson (Wild Rose) Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis) Turp
Vellacott White (Langley – Abbotsford) White (North Vancouver) Williams – 96


CONTRE

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Bakopanos Barnes
Beaumier Bélair Bélanger Bellemare
Bennett Bertrand Bevilacqua Blaikie
Blondin - Andrew Bonin Bonwick Boudria
Brown Bryden Bulte Caccia
Calder Cannis Caplan Carroll
Catterall Cauchon Chamberlain Chan
Chrétien (Saint - Maurice) Clouthier Coderre Collenette
Comuzzi Copps Cullen Davies
Desjarlais DeVillers Dhaliwal Dion
Discepola Dockrill Dromisky Drouin
Duhamel Easter Eggleton Finestone
Finlay Folco Fontana Fry
Gagliano Gallaway Godfrey Goodale
Graham Grose Guarnieri Hardy
Harvard Hubbard Ianno Iftody
Jackson Jennings Jordan Karetak - Lindell
Karygiannis Keyes Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast)
Knutson Kraft Sloan Laliberte Lastewka
Lavigne Lee Leung Lill
Lincoln MacAulay Mahoney Malhi
Maloney Mancini Manley Marchi
Marleau Martin (LaSalle – Émard) Martin (Winnipeg Centre) Massé
McCormick McDonough McGuire McKay (Scarborough East)
McLellan (Edmonton West) McTeague McWhinney Mifflin
Milliken Mills (Broadview – Greenwood) Minna Mitchell
Murray Myers Nault Normand
Nunziata Nystrom O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Pagtakhan Paradis Parrish Patry
Peric Peterson Pettigrew Phinney
Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri Pratt Proctor
Provenzano Redman Reed Richardson
Riis Robillard Robinson Rock
Saada Scott (Fredericton) Sekora Serré
Shepherd Solomon Speller St. Denis
Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) St - Julien
Stoffer Szabo Telegdi Thibeault
Torsney Ur Valeri Vanclief
Volpe Wappel Whelan Wilfert
Wood – 161


«PAIRÉS»

Députés

Axworthy (Winnipeg South Centre) Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bigras Bradshaw
Byrne Canuel Charbonneau Dalphond - Guiral
Fournier Gray (Windsor West) Harb Longfield
Ménard Mercier O'Brien (Labrador) Proud
Sauvageau Venne


 

Le Président: Je déclare l'amendement rejeté. Le prochain vote porte sur la motion principale.

[Français]

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, je crois qu'il y a le consentement unanime de la Chambre pour appliquer le résultat du dernier vote à la motion principale dont la Chambre est présentement saisie.

[Traduction]

Le Président: La Chambre est-elle d'accord pour procéder de cette manière?

Des voix: D'accord.

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, je suis d'accord. Je voudrais seulement que le nom du député de Souris—Moose Mountain soit ajouté à ceux des réformistes.

Le Président: Il sera ajouté.

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

Vote no 313

POUR

Députés

Abbott Alarie Anders Asselin
Bachand (Saint - Jean) Bailey Bellehumeur Benoit
Bergeron Bernier (Tobique – Mactaquac) Borotsik Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton – Melville) Brien Brison Cadman
Cardin Casey Casson Chatters
Chrétien (Frontenac – Mégantic) Crête de Savoye Debien
Desrochers Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Duceppe Dumas
Duncan Elley Epp Forseth
Gagnon Gauthier Gilmour Girard - Bujold
Godin (Châteauguay) Gouk Grewal Grey (Edmonton North)
Guay Guimond Hanger Harris
Hart Harvey Herron Hill (Prince George – Peace River)
Hilstrom Jaffer Johnston Jones
Kenney (Calgary Southeast) Konrad Lalonde Laurin
Lebel Lefebvre Loubier Lowther
Lunn Marceau Marchand Mark
Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) Mayfield McNally Meredith
Mills (Red Deer) Morrison Muise Obhrai
Pankiw Penson Perron Picard (Drummond)
Plamondon Price Ramsay Reynolds
Ritz Rocheleau Scott (Skeena) Solberg
St - Hilaire Stinson St - Jacques Strahl
Thompson (New Brunswick Southwest) Thompson (Wild Rose) Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis)
Turp Vellacott White (Langley – Abbotsford) White (North Vancouver)
Williams – 97


CONTRE

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Bakopanos Barnes
Beaumier Bélair Bélanger Bellemare
Bennett Bertrand Bevilacqua Blaikie
Blondin - Andrew Bonin Bonwick Boudria
Brown Bryden Bulte Caccia
Calder Cannis Caplan Carroll
Catterall Cauchon Chamberlain Chan
Chrétien (Saint - Maurice) Clouthier Coderre Collenette
Comuzzi Copps Cullen Davies
Desjarlais DeVillers Dhaliwal Dion
Discepola Dockrill Dromisky Drouin
Duhamel Easter Eggleton Finestone
Finlay Folco Fontana Fry
Gagliano Gallaway Godfrey Goodale
Graham Grose Guarnieri Hardy
Harvard Hubbard Ianno Iftody
Jackson Jennings Jordan Karetak - Lindell
Karygiannis Keyes Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast)
Knutson Kraft Sloan Laliberte Lastewka
Lavigne Lee Leung Lill
Lincoln MacAulay Mahoney Malhi
Maloney Mancini Manley Marchi
Marleau Martin (LaSalle – Émard) Martin (Winnipeg Centre) Massé
McCormick McDonough McGuire McKay (Scarborough East)
McLellan (Edmonton West) McTeague McWhinney Mifflin
Milliken Mills (Broadview – Greenwood) Minna Mitchell
Murray Myers Nault Normand
Nunziata Nystrom O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Pagtakhan Paradis Parrish Patry
Peric Peterson Pettigrew Phinney
Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri Pratt Proctor
Provenzano Redman Reed Richardson
Riis Robillard Robinson Rock
Saada Scott (Fredericton) Sekora Serré
Shepherd Solomon Speller St. Denis
Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) St - Julien
Stoffer Szabo Telegdi Thibeault
Torsney Ur Valeri Vanclief
Volpe Wappel Whelan Wilfert
Wood – 161


«PAIRÉS»

Députés

Axworthy (Winnipeg South Centre) Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bigras Bradshaw
Byrne Canuel Charbonneau Dalphond - Guiral
Fournier Gray (Windsor West) Harb Longfield
Ménard Mercier O'Brien (Labrador) Proud
Sauvageau Venne


 

Le Président: Je déclare la motion rejetée.

[Français]

M. Louis Plamondon: Monsieur le Président, juste avant le vote, je veux m'assurer que lorsqu'il a été question de la motion du député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys, le Greffier ou la Présidence ait bien entendu que j'avais dit «avec dissidence» pour le vote sur la motion qui précédait le dernier vote. Il m'a semblé que la Présidence ait dit «adoptée», mais c'était plutôt «adoptée avec dissidence». C'est ce que j'ai dit lorsque j'étais à mon siège, et je veux m'assurer que la Présidence ait bien entendu.

Le Président: Nous allons revenir sur cette question après les autres votes.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LES MISSIONS MILITAIRES AU-DELÀ DES FRONTIÈRES CANADIENNES

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 4 février, de la motion.

Le Président: Conformément à l'ordre du jeudi 4 février 1999, la Chambre passe maintenant au vote différé sur la motion M-380 des initiatives parlementaires.

La Chambre a entendu la motion. Nous procéderons au vote rangée par rangée. L'auteur de la motion sera à ma gauche, et il sera le premier à voter, puis nous procéderons de la façon habituelle pour les initiatives parlementaires, d'abord à ma gauche, à partir de la dernière rangée, puis à ma droite, toujours à partir de la dernière rangée, avec les députés qui sont pour la motion.

 

. 1805 + -

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

Vote no 314

POUR

Députés

Abbott Alarie Anders Asselin
Bachand (Saint - Jean) Bailey Bellehumeur Benoit
Bergeron Blaikie Breitkreuz (Yellowhead) Breitkreuz (Yorkton – Melville)
Brien Caccia Cadman Cardin
Casson Chatters Chrétien (Frontenac – Mégantic) Crête
Davies de Savoye Debien Desjarlais
Desrochers Dockrill Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Duceppe
Dumas Duncan Elley Epp
Forseth Gagnon Gauthier Gilmour
Girard - Bujold Godin (Châteauguay) Gouk Grewal
Grey (Edmonton North) Guay Guimond Hanger
Hardy Harris Hart Hill (Prince George – Peace River)
Hilstrom Jaffer Johnston Kenney (Calgary Southeast)
Konrad Laliberte Lalonde Laurin
Lebel Lefebvre Lill Lincoln
Loubier Lowther Lunn Mancini
Marceau Marchand Mark Martin (Esquimalt – Juan de Fuca)
Martin (Winnipeg Centre) Mayfield McDonough McNally
Meredith Mills (Red Deer) Morrison Nunziata
Nystrom Obhrai Pankiw Penson
Perron Picard (Drummond) Plamondon Proctor
Ramsay Reynolds Riis Ritz
Robinson Rocheleau Scott (Skeena) Solberg
Solomon St - Hilaire Stinson Stoffer
Strahl Thompson (Wild Rose) Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis)
Turp Vellacott White (Langley – Abbotsford) White (North Vancouver)
Williams – 105


CONTRE

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Bakopanos Barnes
Beaumier Bélair Bélanger Bellemare
Bennett Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand Bevilacqua
Blondin - Andrew Bonin Bonwick Borotsik
Boudria Brison Brown Bryden
Bulte Calder Cannis Caplan
Carroll Casey Catterall Cauchon
Chamberlain Chan Clouthier Coderre
Collenette Comuzzi Copps Cullen
DeVillers Dhaliwal Dion Discepola
Dromisky Drouin Duhamel Easter
Eggleton Finlay Folco Fontana
Fry Gagliano Gallaway Godfrey
Goodale Graham Grose Guarnieri
Harvard Harvey Herron Hubbard
Ianno Iftody Jackson Jennings
Jones Jordan Karetak - Lindell Karygiannis
Keyes Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson
Kraft Sloan Lastewka Lavigne Lee
Leung MacAulay Mahoney Malhi
Maloney Manley Marchi Marleau
Martin (LaSalle – Émard) Massé McCormick McGuire
McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West) McTeague McWhinney
Mifflin Milliken Mills (Broadview – Greenwood) Minna
Mitchell Muise Murray Myers
Nault Normand O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Pagtakhan Paradis Parrish Patry
Peric Peterson Pettigrew Phinney
Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri Pratt Price
Provenzano Redman Reed Richardson
Robillard Rock Saada Scott (Fredericton)
Sekora Serré Shepherd Speller
St. Denis Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland)
St - Jacques St - Julien Szabo Telegdi
Thibeault Thompson (New Brunswick Southwest) Torsney Ur
Valeri Vanclief Volpe Wappel
Whelan Wilfert Wood – 151


«PAIRÉS»

Députés

Axworthy (Winnipeg South Centre) Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bigras Bradshaw
Byrne Canuel Charbonneau Dalphond - Guiral
Fournier Gray (Windsor West) Harb Longfield
Ménard Mercier O'Brien (Labrador) Proud
Sauvageau Venne


 

Le Président: Je déclare la motion rejetée.

*  *  *

LA STRATÉGIE D'EFFICIENCE ÉNERGÉTIQUE

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 5 février 1999, de la motion.

Le Président: Conformément à l'ordre adopté le vendredi 5 février 1999, le prochain vote par appel nominal porte sur la motion no 300, étudiée en tant qu'initiative parlementaire.

Nous commencerons sur la gauche, par l'auteur de la motion, et nous entendrons les rangées d'en arrière pour revenir vers l'avant. On procédera de la même manière de l'autre côté.

 

. 1815 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 315

POUR

Députés

Abbott Adams Alcock Anders
Anderson Assad Assadourian Augustine
Bailey Bakopanos Barnes Beaumier
Bélair Bélanger Bellemare Bennett
Benoit Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand Bevilacqua
Blaikie Blondin - Andrew Bonin Bonwick
Borotsik Boudria Breitkreuz (Yorkton – Melville) Brison
Brown Bryden Bulte Caccia
Cadman Calder Cannis Caplan
Carroll Casey Casson Catterall
Cauchon Chamberlain Chan Chatters
Clouthier Coderre Collenette Comuzzi
Copps Cullen Davies Desjarlais
DeVillers Dhaliwal Dion Discepola
Dockrill Dromisky Drouin Duhamel
Duncan Easter Eggleton Elley
Epp Finlay Folco Fontana
Fry Gagliano Gilmour Godfrey
Goodale Graham Grewal Grey (Edmonton North)
Grose Guarnieri Hanger Hardy
Harris Hart Harvard Harvey
Herron Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Ianno
Iftody Jackson Jaffer Jennings
Johnston Jones Jordan Karetak - Lindell
Karygiannis Kenney (Calgary Southeast) Keyes Kilger (Stormont – Dundas)
Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Konrad Kraft Sloan
Laliberte Lastewka Lavigne Lee
Lefebvre Leung Lill Lincoln
Lowther Lunn MacAulay Mahoney
Malhi Maloney Mancini Manley
Marchi Mark Marleau Martin (Esquimalt – Juan de Fuca)
Martin (LaSalle – Émard) Martin (Winnipeg Centre) Massé Mayfield
McCormick McDonough McGuire McKay (Scarborough East)
McLellan (Edmonton West) McNally McTeague McWhinney
Meredith Mifflin Mills (Broadview – Greenwood) Mills (Red Deer)
Minna Mitchell Muise Murray
Myers Nault Normand Nunziata
Nystrom Obhrai O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Pagtakhan Pankiw Paradis Parrish
Patry Penson Peric Peterson
Pettigrew Phinney Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri
Pratt Price Proctor Provenzano
Ramsay Redman Reed Richardson
Riis Ritz Robillard Robinson
Rock Saada Scott (Fredericton) Scott (Skeena)
Sekora Serré Shepherd Solberg
Solomon Speller St. Denis Steckle
Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Stinson St - Jacques
St - Julien Stoffer Strahl Szabo
Telegdi Thompson (New Brunswick Southwest) Thompson (Wild Rose) Torsney
Ur Valeri Vanclief Vellacott
Volpe Wappel Whelan White (Langley – Abbotsford)
White (North Vancouver) Wilfert Williams Wood – 212


CONTRE

Députés

Alarie Asselin Bachand (Saint - Jean) Bellehumeur
Bergeron Brien Cardin Chrétien (Frontenac – Mégantic)
Crête de Savoye Debien Desrochers
Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Duceppe Dumas Gagnon
Gallaway Gauthier Girard - Bujold Godin (Châteauguay)
Guay Guimond Hubbard Lalonde
Laurin Lebel Loubier Marceau
Marchand Perron Picard (Drummond) Plamondon
Reynolds Rocheleau St - Hilaire Tremblay (Lac - Saint - Jean)
Tremblay (Rimouski – Mitis) Turp – 38


«PAIRÉS»

Députés

Axworthy (Winnipeg South Centre) Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bigras Bradshaw
Byrne Canuel Charbonneau Dalphond - Guiral
Fournier Gray (Windsor West) Harb Longfield
Ménard Mercier O'Brien (Labrador) Proud
Sauvageau Venne


Le Président: Je déclare la motion adoptée.

[Français]

Au sujet du rappel au Règlement, j'ai posé la question à la Présidente qui était ici et elle ne l'a pas entendu. Mais je vais m'informer, je vais examiner le hansard, je vais écouter ce qui s'est passé à la télé et je vais revenir à la Chambre le plus tôt possible, possiblement demain.

M. Louis Plamondon: Monsieur le Président, je pense qu'on peut régler assez facilement la question. Je présume que cela pourrait se faire avec le consentement unanime de la Chambre. Cela ne change pas grand-chose, mais c'est que toute la journée, nous avons parlé contre la motion et nous votions contre la motion, cela va de soi. Alors, j'ai dit «avec dissidence», mais j'étais placé à l'arrière et peut-être qu'on ne m'a pas entendu.

Pourrais-je avoir le consentement unanime et dire que la motion a été adoptée avec dissidence simplement?

[Traduction]

M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne pense pas qu'il puisse y avoir consentement unanime.

Si on demandait le consentement unanime pour reprendre tout le débat sur la motion de l'opposition et sur l'amendement, soit. Mais le fait est que nous ne sommes pas intervenus tel que prévu pour demander un vote sur la motion et l'amendement parce que nous avions l'impression qu'il y avait consentement unanime, qu'aucune opposition ne s'était manifestée, même si la motion a été critiquée pendant toute la journée.

Si on veut récrire l'histoire, il faut aller à la case départ et tout recommencer.

Le Président: La personne qui occupait le fauteuil tout à l'heure n'a pas entendu les mots «avec dissidence». Elle ne les a pas entendus. Je vais donc en conclure qu'ils n'ont pas été entendus, à moins que vous me donniez le temps de consulter le hansard ou d'écouter ce qui s'est dit à la télévision, puis je reviendrai. Nous pourrions ensuite réexaminer la question à la Chambre afin de voir ce qui s'est vraiment passé.

Si la Chambre y consent, voilà ce que je propose de faire. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

 

. 1820 + -

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): À l'ordre, s'il vous plaît. Comme il est 18 h 20, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

*  *  *

[Traduction]

LA LOI CANADIENNE SUR LES DROITS DE LA PERSONNE

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 17 novembre 1998, de la motion: Que le projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Madame la Présidente, je suis heureux de parler des mérites du projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Ce projet de loi, co-parrainé par ma collègue, la députée de Shefford, a été présenté à l'origine au Sénat par ma collègue du Parti conservateur, la sénatrice Erminie Cohen.

J'ai eu la chance de prendre la parole à propos de plusieurs projets de loi très importants depuis mon élection en juin 1997. Je suis très heureuse de le faire dans le cas de ce projet de loi particulier car il porte sur ce qu'il y a probablement le plus important, les droits de la personne.

La sénatrice Cohen vient d'une province où il est traditionnel de défendre les questions se rapportant aux droits de la personne. Gordon Fairweather, l'ancien député de Fundy—Royal, la circonscription que je représente, a été le premier commissaire aux droits de la personne.

John Humphreys, le principal auteur de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies, est bien connu dans le monde entier; il est né et enterré dans la ville de Hampton, qui fait aussi partie de ma circonscription.

Comme les habitants du Nouveau-Brunswick, la sénatrice Cohen comprend la crise qu'entraîne la fermeture d'usines locales pour les familles canadiennes et la communauté en général. Certaines familles doivent faire des sacrifices qu'elles n'avaient jamais pensé devoir faire un jour. Elle est au courant de la fermeture de la mine Potocan et des emplois qui risquent d'être perdus chez Lantic Sugar. Il s'agit là de travailleurs canadiens dont l'avenir est incertain.

Je ne crois pas que l'on puisse s'étonner que la sénatrice Cohen ait présenté ce projet de loi. Le projet de loi S-11 montre bien le grand souci qu'elle a pour les autres. Je connais la sénatrice Cohen depuis plusieurs années. Je connais également la députée de Shefford. Ce sont deux personnes sensibles qui veulent s'assurer que nous faisons tout ce que nous pouvons pour les gens qui se trouvent en marge de la société.

Le projet de loi vise à garantir l'accès aux outils de base dont les gens ont besoin pour retomber sur leurs pieds. On cherche à protéger la fierté et la dignité des gens, quelles que soient les difficultés auxquelles ils doivent parfois faire face.

À l'heure actuelle, la Loi canadienne sur les droits de la personne interdit la discrimination fondée sur la race, la religion, la nationalité ou l'origine ethnique, la couleur, le sexe, l'état civil, la situation de famille, la déficience, l'état de personne graciée et l'orientation sexuelle. En précisant tous les groupes vulnérables du Canada, on met cruellement en lumière l'absence de la condition sociale dans la liste des sujets de discrimination contenus dans cette loi adoptée il y a 22 ans. Sept des dix provinces canadiennes interdisent la discrimination fondée sur la condition sociale, l'origine sociale ou les sources de revenus dans leur loi sur les droits de la personne.

Dans leur revue de la façon dont le Canada respecte le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels signé en 1976, les Nations Unies ont souligné que notre grand pays avait une très mauvaise note pour ce qui est de protéger les droits des pauvres. En tant que parlementaires, nous avons la chance d'agir et de corriger cette situation tragique en appuyant le projet de loi S-11. Il est grand temps que le Canada adopte une loi fédérale en ce sens.

Le 10 décembre, nous avons célébré le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Comme je l'ai déjà souligné, c'est un document qui a été préparé par un concitoyen du Nouveau-Brunswick, un ancien électeur de ma circonscription de Fundy—Royal, John Humphreys.

 

. 1825 + -

La Déclaration dit essentiellement que tous les êtres humains, sans distinction aucune, naissent libres et égaux en dignité et en droits. Il vaut la peine de le répéter. Tous les êtres humains, sans distinction aucune, naissent libres et égaux en dignité et en droits.

Il est honteux que la propre loi du Canada sur les droits de la personne ne respecte pas pleinement les objectifs et le dessein de ce document important, qui a été rédigé par un Canadien.

Le 50e anniversaire de cette déclaration connue mondialement a également marqué la fin de la première année de la Décennie des Nations Unies pour l'élimination de la pauvreté. Cependant, au Canada, la pauvreté continue d'être un des plus grands obstacles à l'égalité. Il faut agir dès maintenant.

Un enfant canadien sur cinq vit dans la pauvreté. Nous reconnaissons que, lorsque des enfants sont pauvres, c'est parce que leurs familles sont pauvres. En tant que Canadiens, nous avons la chance de vivre dans un pays riche, mais les gens marginalisés sont dans le besoin tant physiquement que psychologiquement.

Dans ma circonscription, nous tentons de répondre aux besoins physiques des pauvres, grâce à des programmes de provisions alimentaires dirigés par de merveilleux organismes de bienfaisance comme le Sussex Sharing Club, la Lakewood Headstart Association, le Kennebecasis Valley Food Basket, Chipman Community Care, le Minto Community Ressource Centre et le Hampton Food Basket. Je suis très fier de l'esprit communautaire qui existe dans la circonscription de Fundy—Royal.

Le projet de loi S-11 examine cette lacune de notre Constitution et vise à aider les pauvres à surmonter les préjugés négatifs qui ont un effet sur leur bien-être psychologique. Il encourage la dignité humaine, essence même de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies.

Même si les lois provinciales traitent des droits des démunis dans les domaines relevant de leur compétence, la Loi canadienne sur les droits de la personne porte sur les questions relevant du gouvernement fédéral, comme les banques, le logement et les télécommunications. De nos jours, il arrive trop souvent que les démunis soient privés de logement ou ne puissent ouvrir des comptes de banque.

Le projet de loi S-11 ne prévoit pas de statut spécial pour les démunis. Il ne renferme rien que les autres Canadiens ne possèdent déjà. On peut appuyer cette mesure sans crainte. Pourtant, je crois comprendre que le gouvernement n'a pas l'intention de l'appuyer. À la place, il promet de revoir complètement la loi sur les droits de la personne pour voir s'il y aurait lieu de la modifier.

Cette promesse est sur la table depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux et aucune mesure législative n'est prévue à cet égard. La sénatrice Cohen et la députée de Shefford ont décidé d'agir maintenant.

En tant que parlementaires, nous représentons tous les électeurs et c'est pourquoi nous devons appuyer ce projet de loi. Si nous décidons de ne pas le faire, nous sommes loin de la grande autorité morale dont le premier ministre aime tant parler.

En 1989, le gouvernement progressiste conservateur a pris une mesure courageuse et convaincante, et il a réussi à faire adopter à l'unanimité une résolution visant à éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. Depuis, les Canadiens sont malheureusement encore loin de cet objectif à cause des compressions massives effectuées par le gouvernement actuel dans les paiements de transfert aux provinces.

Nous pouvons aujourd'hui annoncer aux Canadiens que la discrimination fondée sur la condition sociale ne sera plus tolérée. Ne ratons pas cette occasion.

Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je tiens tout d'abord à préciser que, contrairement à ce que certains ont pu affirmer, la ministre de la Justice appuie fortement l'objet du projet de loi S-11 et le souhait exprimé par le député, qui réclame des mesures concrètes pour aider les pauvres au Canada.

Il est tout à fait inadmissible qu'une personne au Canada se voie refuser des services, un logement ou un emploi simplement parce qu'elle est pauvre. C'est tout à fait inadmissible aux yeux du gouvernement.

Tous les Canadiens sont fiers, et à juste titre, de la protection dont jouissent leurs droits fondamentaux. Nous croyons fermement en la valeur inhérente et à la dignité de chaque membre de notre société. Si nous voulons vraiment protéger les pauvres, autant bien le faire.

Le gouvernement annoncera bientôt une réforme exhaustive de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cette réforme nous donnera l'occasion d'étudier très attentivement la meilleure façon d'améliorer la protection des droits fondamentaux des pauvres au Canada.

Si nous tenons à bien protéger les droits fondamentaux de tous les Canadiens, nous devons agir de façon réfléchie et raisonnée. Nous devons déterminer quels droits doivent être protégés et comment nous pouvons les protéger dans le secteur fédéral. À notre avis, la meilleure façon d'y parvenir est d'examiner la Loi canadienne sur les droits de la personne dans son ensemble.

 

. 1830 + -

[Français]

Le gouvernement actuel est fier de ses réalisations dans le domaine des droits de la personne. Nous avons modifié la Loi canadienne sur les droits de la personne de façon à interdire la discrimination sur le fondement de l'orientation sexuelle et nous avons consacré, par voie législative, l'obligation d'accommodement pour toutes les victimes de discrimination.

Récemment, nous avons adopté une loi qui prévoit une aide plus importante aux personnes handicapées en leur assurant une plus grande intégration au système de justice pénale. Nous avons aussi accru l'indemnité accordée aux victimes de discrimination en matière des droits de la personne et apporté des améliorations à la structure du Tribunal des droits de la personne. Nous avons fait progresser la protection des droits de la personne au Canada.

En effet, les efforts de notre gouvernement visant à améliorer les droits des personnes handicapées ont récemment été reconnus. Lors d'un voyage du premier ministre aux États-Unis, on lui a remis le prix Franklin Delano Roosevelt, prix décerné au pays qui a le plus fait avancer les droits des personnes handicapées.

[Traduction]

Le gouvernement a amélioré la Loi canadienne sur les droits de la personne au moment où certains réduiraient ou aboliraient la protection offerte aux plus vulnérables au sein de notre société. La ministre de la Justice ne se contente pas de ces améliorations. Elle s'engage à réexaminer la loi dans son ensemble.

En septembre dernier, le vérificateur général a constaté, premièrement, que la loi actuelle devait être modifiée pour pouvoir mieux desservir les Canadiens et, deuxièmement, que les travaux de la Commission canadienne des droits de la personne devaient également être révisés afin que les plaintes puissent être traitées plus efficacement.

Certaines recommandations méritent d'être examinées de près. Nous reconnaissons que d'autres sujets de préoccupation doivent aussi être analysés. Voilà pourquoi la ministre de la Justice annoncera bientôt une réforme exhaustive. C'est parce que nous sommes en train de lancer l'examen que je dis qu'il faut laisser l'examen déterminer le meilleur moyen d'empêcher la discrimination contre les pauvres.

Il semble curieux que nous commencions l'examen des motifs illicites de discrimination conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne à la veille d'un examen plus approfondi de tous les aspects de cette mesure législative. Le simple ajout d'un nouveau motif de discrimination, qui est mal compris et qui ne donnera peut-être pas les résultats que nous escomptons tous, n'aidera pas les pauvres.

En l'absence d'une analyse approfondie de cette question très importante, une réponse exagérément simpliste risque de susciter des litiges à ne plus finir. Ce n'est pas ce que nous voulons tous. Nous voulons que la politique et les programmes soient modifiés de telle sorte que les membres déjà défavorisés de notre société ne soient pas encore plus défavorisés par des mentalités et des traitements qui ne respectent pas la dignité de tous les membres de la famille humaine.

Nous croyons qu'il serait responsable de la part du gouvernement d'élargir maintenant les motifs de discrimination établis afin de tenir compte des besoins réels des pauvres, mais nous ne proposons pas un seul instant qu'il ne faut pas s'assurer que la loi protège les pauvres. Par exemple, je suis bien au fait du rapport de la récente étude provinciale sur la clochardise, publié à Toronto et connu sous le nom de rapport doré, qui montre clairement la nécessité de s'attaquer à de nombreux problèmes qui assaillent les pauvres.

Au haut de la liste des problèmes qui assaillent les pauvres au Canada figure celui d'un logement à prix abordable. Je voudrais examiner ce problème en détail, car il a été invoqué par des sénateurs qui ont appuyé ce projet de loi et par nombre des témoins qui ont comparu devant le comité sénatorial.

La discrimination dans le secteur du logement pose sans aucun doute un grave problème. Et il faut le résoudre. Les personnes vivant de l'aide sociale, notamment les mères célibataires, séparées ou divorcées, ont beaucoup de difficulté à trouver un logement. Selon le rapport susmentionné, ce sont maintenant des familles entières qui sont sans abri.

Dans une décision sur le Code des droits de la personne rendue le 22 décembre 1998 dans l'affaire Kearney c. Bramale Ltd., une commission d'enquête de l'Ontario a remis en question les critères liés à la portion du revenu d'un particulier qui peut être consacré au logement. Ces critères ont été jugés injustes puisqu'ils limitaient indûment le faible stock de logements destinés aux pauvres. Il existe de grandes divergences au Canada dans les codes de droits de la personne et l'utilisation de la terminologie relative à la discrimination faite contre les pauvres.

En Ontario, par exemple, le Code des droits de la personne interdit la discrimination pour le motif que la personne en cause touche de l'aide sociale. C'est ce motif, en conjonction avec ceux du sexe, de l'état matrimonial, de la citoyenneté, du lieu de naissance et de la situation de famille, qui est utilisé dans l'affaire Kearney pour contester les critères de revenu utilisés par certains propriétaires dans le but de déterminer l'admissibilité à la location d'un logement, ce qui a pour effet que bien des démunis se voient refuser l'accès à un logement. Il convient de mentionner que le recours aux motifs liés à la condition sociale en Ontario se limite à l'occupation d'un logement et au logement.

Par comparaison, en Colombie-Britannique, la Residential Tenancy Act interdit la discrimination fondée sur la source légale du revenu. Or, il est intéressant de mentionner que ces deux provinces n'invoquent ce motif que pour interdire la discrimination dans le domaine du logement.

 

. 1835 + -

Qu'on me permette de continuer d'examiner la législation provinciale sur les droits de la personne relativement à cette question. En plus de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, dont j'ai déjà parlé, en Alberta, la Loi sur les droits de la personne et le multiculturalisme inclut les sources de revenu en tant que motif de distinction illicite. Le Manitoba et la Nouvelle-Écosse ont un motif appelé source de revenu. Terre-Neuve protège l'origine sociale. La Saskatchewan protège les bénéficiaires de l'assistance publique. Le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et l'Île-du-Prince-Édouard ne protègent aucun motif relié à la pauvreté directement. Le 9 décembre 1998, le Nouveau-Brunswick a présenté une modification à la Loi sur les droits de la personne pour ajouter la condition sociale.

Dans l'ensemble, on peut voir qu'il y a une diversité dans l'utilisation et l'application de l'expression «condition sociale». En général, cette expression est utilisée pour s'appliquer à des situations touchant le logement. Dans le secteur fédéral, il y a très peu de logements résidentiels à part les logements destinés aux militaires, aux agents de la GRC ou aux agents du service étranger.

Le fait d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite dans le domaine du logement n'est pas nécessairement une solution pratique étant donné que le logement est avant tout de compétence provinciale. En cela, il se pourrait que dans le contexte provincial, le motif qu'est la condition sociale puisse avoir de plus grandes répercussions.

[Français]

Le Québec est la seule province qui, à l'heure actuelle, interdit la discrimination sur le fondement de la condition sociale. C'est un motif qu'elle a ajouté aux textes législatifs en 1996. Il serait utile d'examiner les répercussions qui ont découlé de l'inclusion de ce motif au Québec.

Le terme «condition sociale» s'entend de la place qu'occupe une personne dans la société. Cette place est déterminée par divers facteurs, notamment les antécédents familiaux, l'emploi, le niveau d'instruction et la capacité physique. Le lien entre la condition sociale et la discrimination doit être prouvé. La relation de cause à effet doit être démontrée dans chaque cas.

Même au Québec, où la définition de «condition sociale» est plus large, la plupart des plaintes portent sur des cas où on refuse de louer un logement à une personne.

[Traduction]

Dans cette province, il y a eu quelques cas limités touchant l'emploi. Dans l'affaire Lambert c. Québec, ministère du Tourisme, le plaignant était bénéficiaire de l'assistance sociale. Il a participé à un programme de travail du gouvernement qui lui offrait moins que le salaire minimum. Le fait de permettre à un assisté social de recevoir moins que le salaire minimum a été jugé discriminatoire.

Tournons-nous maintenant vers la situation dans le domaine fédéral. Je le répète, il est moins possible de faire de la discrimination contre les pauvres dans le domaine du logement étant donné que c'est un domaine principalement de compétence provinciale. Cependant, il y a d'autres questions qu'on doit examiner dans le secteur fédéral.

Nous avons tous entendu les Canadiens se plaindre de situations qui peuvent se produire dans les secteurs des banques et des télécommunications, même si les banques ont apporté davantage de modifications récemment pour veiller à ce que les gens à faible revenu aient un meilleur accès aux services bancaires. Les groupes comme l'Organisation nationale anti-pauvreté prétendent qu'elles peuvent, dans certains cas, faire de la discrimination à l'endroit des pauvres. Je ne suis pas en mesure de juger du bien-fondé de ces accusations ni même d'en parler.

Cependant, avant que nous ne modifiions la loi, nous devons connaître la nature exacte du problème, savoir s'il est possible d'y remédier dans le cadre de la Loi sur les droits de la personne, et dans l'affirmative, comment. En d'autres termes, le gouvernement propose un examen complet de la Loi canadienne sur les droits de la personne afin de nous assurer que nous procédions de la bonne façon.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Madame la Présidente, lorsque j'ai constaté que la Chambre serait saisie de ce projet de loi, j'ai expressément demandé de participer au débat. J'ai immédiatement pensé que ce projet de loi réunit certaines des meilleures intentions et des pires idées qu'il m'ait été donné de voir dans un projet de loi dont nous sommes saisis.

Il n'est pas rare que de bonnes intentions et de piètres modalités d'exécution se trouvent mêlées dans un projet politique comme celui dont nous sommes saisis aujourd'hui, projet visant à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne de manière à interdire la discrimination fondée sur la condition sociale. Reste à savoir ce qu'on entend par cette expression.

Je suis contrarié par ce projet de loi qui émane de l'autre endroit, celui qui n'a pas de légitimité démocratique. Il émane d'une chambre remplie de types qui n'ont pas de comptes à rendre, qui ne sont pas élus et qui sont des amis du parti. Des douzaines de projets de loi d'initiative parlementaire ont été proposés par des députés de la Chambre, des députés qui sont élus et qui ont des comptes à rendre, des députés qui trouvent leurs idées auprès de leurs électeurs et non pas dans leur tour d'ivoire. Les projets de loi d'initiative parlementaire qui émanent de cet endroit doivent être examinés par un comité chargé de déterminer s'ils peuvent faire l'objet d'un vote, mais au lieu de donner à un député une des rares possibilités de présenter un projet de loi pouvant faire l'objet d'un vote, on a accordé cette chance à un sénateur, celui qui a présenté le projet de loi S-11.

 

. 1840 + -

À mon humble avis, c'est un motif suffisant pour s'opposer à ce projet de loi ou à toute autre mesure législative émanant d'une institution complètement absurde et anachronique qui aurait dû s'éteindre en même temps que le XIXe siècle d'où elle est issue.

À mon avis, tous les députés ou les Canadiens sont contre la pauvreté ou la discrimination injustifiée. Je suis certainement contre. Je préfère manifester ma compassion à l'égard des personnes moins bien nanties que moi sur le plan économique en participant à des activités de bienfaisance et en faisant des contributions personnelles. Je crois, comme nous l'a rappelé mère Térésa, que le mot compassion signifie littéralement partager la souffrance d'autrui. Il ne signifie adopter des lois remplies de bonnes intentions.

Quand je prends connaissance des intentions des proposeurs de ce projet de loi, quand j'entends la députée de Shefford dire, comme je crois qu'elle l'a fait en Chambre, que l'obsession du Canada à l'égard de la dette et du déficit montre que nous méprisons les pauvres, je trouve cette affirmation vraiment curieuse dans un pays qui a affecté je ne sais combien de milliards de dollars dans un contexte où les ressources sont rares, en taxant des familles qui en situation difficile, dont bon nombre se trouvent sous ce qu'il est convenu d'appeler le seuil de pauvreté. Dans le cadre de ce vaste projet de redistribution de la richesse, dire que les Canadiens méprisent les pauvres parce qu'ils veulent régler leurs dettes constitue une hyperbole choquante qui n'a pas sa place dans cette enceinte ou dans le cadre de ce débat.

Quel serait l'objectif du projet de loi? Je ne crois pas que quelqu'un le sache. J'ai lu les transcriptions du comité du Sénat qui a étudié le projet de loi S-11. On a demandé à chacun des témoins de définir ce qu'est la condition sociale. Il ne semble pas y avoir de consensus clair ni de définition précise.

Une chose est claire. Le fait d'empêcher le secteur public, le Parlement, d'exercer de la discrimination contre les gens sur la base de leur condition sociale aurait des conséquences très intéressantes, mais non souhaitées. Ainsi, un régime fiscal qui est présentement très progressif deviendrait un régime d'impôt à taux entièrement uniforme. À l'heure actuelle, la tranche de 1 p. 100 des gens qui ont les revenus les plus élevés, soit ceux qui déclarent un revenu supérieur à environ 150 000 dollars par année, représente environ 9 p. 100 des revenus déclarés au Canada, mais paye plus de 20 p. 100 des impôts.

Les lois fiscales actuelles exercent clairement une discrimination contre les gens sur la base du revenu. Les gens qui touchent les plus faibles revenus ne paient pas d'impôts, comme il se doit, à mon avis. Nous sommes donc devant un cas patent de discrimination fondée sur la condition sociale.

Les députés qui proposent le projet de loi veulent-ils que le projet de loi soit interprété de telle sorte que les lois fiscales et les prestations sociales canadiennes ne puissent plus établir une distinction en fonction du niveau de revenu?

Veulent-ils que la récupération des diverses prestations sociales soit éliminée et que les milliardaires aient droit aux mêmes prestations que les plus démunis? Probablement que non, mais ils n'ont pas abordé cet aspect de la question.

Que veulent-ils faire au juste? À mon avis, ils tentent d'imposer au secteur privé une idée égalitaire radicale, franchement socialiste qui trouve son origine dans le marxisme et vise à restreindre la liberté.

Nous venons d'entendre la secrétaire parlementaire dire que, si le projet de loi est adopté, il modifiera la façon dont les banques traitent avec les pauvres. Que veulent ces députés? Veulent-ils dire qu'une banque ou une institution financière serait contrainte par la loi, telle qu'interprétée par un tribunal des droits de la personne non élu et n'ayant de comptes à rendre à personne, de prêter de l'argent à une personne n'ayant aucun revenu, aucun actif et aucune possibilité de gagner un revenu ou d'acquérir des actifs?

 

. 1845 + -

Est-ce le but visé? Sinon, pourquoi ne pas avoir rédigé le projet de loi clairement?

L'absence de définition de condition sociale saute aux yeux. Est-ce tout simplement un oubli? Certainement pas. Il est clair que les promoteurs de cette idée égalitaire radicale veulent que leur loi soit interprétée de façon très large de telle sorte que nos amis les Solons en toge sur le banc puissent appliquer la loi comme ils l'entendent et lui faire dire ce qu'ils veulent.

En d'autres mots, les partisans d'une mesure législative potentiellement radicale comme celle dont nous sommes saisis ne veulent pas d'un débat démocratique sur les conséquences de leur loi. Ils veulent laisser les décisions entre les mains des juges.

Je vous renvoie à madame le professeur Martha Jackman, de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa, qui a témoigné longuement sur cette question devant le comité du Sénat en novembre 1997 et en mai 1998. Elle a fait des remarques fort intéressantes pour défendre l'absence de définition.

Elle dit ceci: «Je vous déconseille fortement de définir cette notion dans le projet de loi, parce qu'il serait anormal de procéder de la sorte. Il s'est, par exemple, écrit beaucoup de choses à propos du fait que la notion de race serait essentiellement artificielle.» Selon madame le professeur Jackman, qui représente la gauche radicale, nous avons la race, la religion et d'autres motifs dans les lois, et les tribunaux et les commissions ont passablement bien réussi à s'y retrouver.

Elle ajoute ce qui suit: «J'aimerais détourner le comité de l'idée de définir la notion de condition sociale dans le projet de loi, parce que, ce faisant, on figerait dans le temps la définition en question, ce qui irait à l'encontre de la façon dont on a abordé jusqu'ici les mesures législatives touchant les droits de la personne.»

Elle parle ensuite de l'affaire Vriend, en Alberta, où la Cour suprême du Canada a jugé que l'assemblée législative démocratique souveraine de l'Alberta avait violé la Charte des droits en n'incluant pas dans une de ses lois un motif qui est maintenant dans la Charte des droits. Autrement dit, les tribunaux ont décidé de légiférer dans l'affaire Vriend. Mme Jackman dit que, si nous adoptons cette modification concernant la condition sociale, bien que nos intentions soient bonnes, nous donnerons aux tribunaux le pouvoir de faire la même chose à l'égard de la condition sociale que ce qu'ils ont fait à l'égard de l'orientation sexuelle dans l'affaire Vriend.

Elle dit: «D'après les précédents, la reconnaissance d'un motif illicite aux termes des lois provinciales et fédérales traitant des droits de la personne est en soi un critère permettant de considérer analogue un motif illicite de même nature non mentionné dans la Charte.»

En réalité, elle se trouve à dire au Parlement de s'empresser d'adopter ce projet de loi afin que les tribunaux puissent s'en servir pour déclarer un nouveau motif illicite de discrimination protégé aux termes de la Constitution.

À mon avis, si les partisans de ce remède veulent qu'il soit enchâssé dans la Constitution, qu'ils le fassent directement, de façon honnête et transparente, en proposant une modification à la Charte des droits et libertés, et non pas par la porte de derrière en présentant ce projet de loi.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup de convictions et d'intérêt que je prends la parole aujourd'hui à la Chambre pour appuyer l'initiative de ma collègue de Shefford qui vise, par ce projet de loi, à modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne, de façon à inclure la condition sociale parmi les motifs de distinction illicite.

Il faut le constater, la pauvreté est le pire ennemi, non seulement du développement humain, mais aussi du développement social et économique, tout en constituant le plus retentissant échec de notre civilisation. Il faut bien le reconnaître, l'accroissement de la pauvreté s'érige en véritable honte à l'aube du troisième millénaire.

Si on reprend la motion de la députée de Shefford, elle se lit ainsi:

    Que le projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

On sait que la Loi canadienne sur les droits de la personne est une pièce maîtresse; elle protège contre la discrimination, et aussi, elle garantit les chances. Mais une de ses faiblesses est qu'elle ne reconnaît pas directement la pauvreté comme source d'inégalité. On sait que les chiffres sont accablants sur l'accroissement de la pauvreté et sur ce que cela signifie d'être pauvre au Canada.

 

. 1850 + -

Tous les jours, les titres des journaux sont là pour nous le rappeler, et je vous en cite quelques-uns: «La pauvreté gagne du terrain à Montréal»; «La région métropolitaine de Montréal est, de toutes les zones métropolitaines du pays, celle qui abrite le plus grand nombre de familles à faible revenu». On peut lire aussi: «À Saint-Georges, Moisson Québec distribue plus de 1 300 paniers de Noël». Voici un autre titre: «La rue pour refuge: des adolescents entre 14 et 25 ans vivent au jour le jour.»

On peut lire aussi, dans la région de Québec: «Moisson Québec: deux millions de kilos de bouffe—L'industrie agroalimentaire gère ses stocks beaucoup plus efficacement qu'avant, mais par contre, il faut parcourir plus de chemin pour réussir à trouver les denrées qui sont nécessaires». En voici un autre: «Les enfants pauvres de la Déclaration universelle des droits de l'homme.» Donc, tous les jours, les titres des journaux nous rappellent cette triste réalité.

Il est pour le moins étonnant que la Loi canadienne sur les droits de la personne ne reconnaisse pas la condition sociale comme motif illicite, car à titre de signataire de nombreux instruments internationaux et régionaux sur les droits de la personne, le Canada s'est engagé à garantir les droits qui y sont prévus aux Canadiens et Canadiennes sans distinction.

Dans plusieurs provinces, il s'est fait beaucoup de chemin pour, justement, inclure dans certains codes l'origine sociale comme motif illicite. On sait que Terre-Neuve interdit la discrimination fondée sur l'origine sociale. Le Code des droits de la personne de l'Ontario interdit la discrimination dans le domaine du logement, discrimination fondée sur le fait qu'une personne soit bénéficiaire de l'aide sociale. Le Code des droits de la personne de l'Alberta, du Manitoba et de la Nouvelle-Écosse interdit la discrimination fondée sur la source du revenu, et la Saskatchewan, sur la réception d'aide sociale.

Malgré que ces initiatives soient louables dans leur effort d'éliminer la discrimination basée sur la pauvreté, ces dispositions se limitent essentiellement au fait d'être bénéficiaire d'aide sociale.

Mais on sait très bien que l'on peut travailler et continuer d'être pauvre. C'est pourquoi nous avons raison d'être fiers de la loi québécoise qui, en cette matière, est la seule à intégrer le terme «condition sociale» sans en limiter l'étendue interprétative au seul fait d'être un assisté social. C'est pourquoi la Charte des droits et libertés de la personne du Québec est considérée, à juste titre, comme étant la plus progressiste et moderne.

En y regardant de près, les modifications proposées par le projet de loi S-11 constituent un alignement sur les lois provinciales et, de façon toute particulière, sur celle du Québec.

Avant d'aller plus loin, nous devons nous poser la question suivante: la situation de la pauvreté nécessite-t-elle une modification de la Loi canadienne sur les droits de la personne? Devant l'accroissement sans cesse grandissant de la pauvreté au Canada et l'inefficacité des politiques libérales pour corriger la situation, la réponse est claire: oui, et cela, dans les meilleurs délais.

En faisant un retour en arrière d'une dizaine d'années, on comprend pourquoi. Le 24 novembre 1989, la Chambre des communes adoptait à l'unanimité la résolution suivante:

    Que la Chambre témoigne de son souci pour le million et plus d'enfants canadiens qui vivent dans la pauvreté et s'emploie à réaliser l'objectif d'éliminer la pauvreté chez les enfants du Canada d'ici l'an 2000.

Curieusement, près de 10 ans plus tard, le nombre d'enfants pauvres a augmenté de 60 p. 100, pour atteindre un niveau record de 1,5 million d'enfants pauvres.

Plusieurs organismes dénonçant la pauvreté et analysant les différentes politiques du gouvernement libéral font état des décisions qui vont à l'encontre, justement, de l'élimination de la pauvreté au Canada, et déplorent et dénoncent aussi les orientations du gouvernement en matière de politique sociale. Que l'on pense au Conseil national du bien-être social, du Conseil canadien du développement social et de Campagne 2000.

Le Conseil national du bien-être social a dit, et je cite:

    La prestation fiscale canadienne pour enfants doit être complètement indexée en fonction de la hausse du coût de la vie à compter du 1er juillet 1999.

Donc, nous attendons toujours que ce gouvernement bouge. Dans un document rendu public le 7 décembre dernier et intitulé «Le Progrès des enfants au Canada», le Conseil canadien de développement social déplore que, et je cite:

      [...] les améliorations dans la vie des enfants et des jeunes au Canada ont été contrecarrées par des tendances sociales et économiques négatives.

 

. 1855 + -

Le Conseil blâme la mauvaise couverture des chômeurs et des chômeuses et demande également que soit augmentée «la contribution fédérale au Régime de la prestation fiscale canadienne pour enfants jusqu'à un total de 2,5 milliards de dollars annuels pour l'an 2000».

Il y a beaucoup de pain sur la planche pour ce gouvernement pour contrer la pauvreté au Canada. De plus, le Canada a été accusé d'obstruction, le 28 novembre dernier, par les représentants d'un comité des Nations unies qui examinait ses efforts pour réduire la pauvreté et les inégalités sociales. Les membres du comité ont exprimé leur insatisfaction devant l'imprécision des réponses à des questions spécifiques au sujet des sans-abri, les réductions de l'aide sociale via le Transfert social canadien et les autres problèmes sociaux.

Dans son rapport, rendu public le 4 décembre dernier, le comité de l'ONU blâme sévèrement le Canada devant la détérioration rapide des conditions de vie des Canadiens. Le Canada se classe non pas premier, mais au dixième rang en vertu de l'indice de développement humain des Nations unies.

Campagne 2000, un organisme voué à lutte contre la pauvreté, vient de publier son rapport de 1998 sur la pauvreté des enfants. Le constat est bouleversant. Le nombre d'enfants dans les familles dont le revenu est inférieur à 20 000 dollars a augmenté de 65 p. 100. Le nombre d'enfants vivant dans une famille où le chômage est chronique a augmenté de 33 p. 100. Le nombre d'enfants vivant dans des familles bénéficiant de l'aide sociale a augmenté de 51 p. 100. Le nombre d'enfants vivant dans des logements à prix inabordables a augmenté de 91 p. 100.

Malgré un tel état de fait et une telle unanimité, le gouvernement fédéral continue de prétendre que les mesures actuelles mises en place sont appropriées et répondent aux besoins des enfants ainsi que de leurs familles qui souffrent de la pauvreté.

J'aimerais bien illustrer pourquoi je pense que le gouvernement continue de prétendre que les mesures actuelles répondent aux besoins des enfants. Le ministre du Développement des ressources humaines, en réponse à une question que je lui posais à la Chambre, soulignait, et je cite: «Je voudrais rassurer les gens de cette Chambre que la pauvreté des enfants est une priorité et que l'ensemble de nos programmes vont dans ce sens». Mais au-delà de tous ces chiffres et de tous ces constats, il y a des femmes, des hommes et des enfants qui souffrent, et ce sont ces personnes qui doivent demeurer au coeur de nos préoccupations.

Quand on parle de pauvreté, cela veut dire avoir faim et ne pas savoir, à partir de la deuxième semaine du mois, comment on parviendra à se nourrir. Cela veut dire aller à l'école le ventre vide. C'est d'avoir froid et de devoir choisir entre un manteau pour l'un ou des bottes pour l'autre. C'est aussi voir mourir ses rêves et voir arriver Noël pour les autres et un panier de Noël pour soi.

La lutte à la pauvreté et aux injustices sociales a toujours été au coeur de mon engagement politique. Devant les effets dévastateurs de la pauvreté et le manque de volonté du gouvernement libéral pour y remédier, nous nous devons de multiplier nos efforts pour que cette Chambre s'engage à tout mettre en oeuvre pour corriger des injustices qui perdurent depuis trop longtemps.

Les présentes propositions de modification à la Loi canadienne sur les droits de la personne en constituent un jalon important. Et comme le mentionnait la Commission canadienne des droits de la personne dans son rapport annuel de 1997:

    Le temps est maintenant venu de reconnaître la pauvreté comme un enjeu des droits de la personne ici même au pays.

[Traduction]

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Madame la Présidente, je suis heureuse d'accorder mon appui au projet de loi S-11. Sans nécessairement approuver l'idée d'un Sénat ou la position du Parti progressiste conservateur, je suis néanmoins heureuse d'appuyer ce projet de loi.

Ce projet de loi concerne la Loi canadienne sur les droits de la personne. La protection des droits de la personne est l'expression de nos plus belles intuitions, de nos meilleurs souhaits, de nos plus beaux rêves et visions pour notre temps et pour l'avenir. Cette loi nous permettra de changer notre pays et de l'améliorer; nous renforcerons ce qui est déjà bon et apporterons à la loi les changements nécessaires pour la rendre meilleure et encore plus vivante.

Le Canada a toujours été un pays où il est possible de réussir sur la base du mérite, du travail et de la détermination. Ce pays nous offre tout ce qu'il faut. Peu importe que les gens soient pauvres. Nous avons des écoles publiques. Nous avons des soins de santé, des logements. Il est possible de tout faire dans ce pays. Il est vraiment choquant que l'on puisse considérer les pauvres comme un obstacle à la réalisation des rêves de quelqu'un.

 

. 1900 + -

En voici un exemple. Ma mère a eu 11 enfants. Trois sont morts. Mon père est décédé quand j'étais jeune. Nous vivions dans la pauvreté. Certains jours, nous ne mangions pas. Certains soirs, la maison n'était pas chauffée. Il est pénible de vivre dans le Nord dans une maison qui n'est pas chauffée, alors qu'il fait moins 30 ou moins 40 à l'extérieur. Je me trouvais avec tous mes frères et soeurs dans la même pièce, nous portions tous les manteaux disponibles, en espérant trouver de l'argent pour acheter de la nourriture ou du pétrole ou du bois pour chauffer la maison. La pauvreté n'est pas un mode de vie. Personne ne la choisit.

Ma mère faisait partie de la génération qui a connu la guerre et qui voulait des changements. Les gens de cette génération voulaient un pays sur lequel chaque enfant, pauvre ou riche, puisse compter. Des possibilités se sont offertes à eux. Ils ont lutté et ont changé les choses.

S'il n'y avait pas eu d'écoles publiques, je n'aurais pas eu accès à l'éducation. Si les écoles secondaires n'avaient pas été subventionnées, je n'aurais pas pu poursuivre mes études et je ne me serais certainement pas retrouvée députée à la Chambre des communes.

Si les Canadiens se montrent moins disposés à aider les pauvres, de plus en plus de leurs concitoyens naîtront pauvres et le resteront.

Depuis 10 ans, le revenu familial a diminué de 5 p. 100. En fait, 21 p. 100 des familles canadiennes ont un revenu faible, tandis que 60 p. 100 des mères seules sont pauvres. Le nombre d'enfants qui vivent dans la pauvreté a augmenté de 47 p. 100. Pour moi, ce ne sont pas seulement des paroles ou des statistiques. Je sais ce que cela signifie, et je sais ce qu'éprouvent les enfants qui vivent dans la pauvreté.

Si ma mère était encore vivante, je n'oserais jamais dire que nous étions pauvres, parce que cette situation engendrait un sentiment de honte. Ma mère éprouvait une honte terrible à l'idée de devoir aller demander de la nourriture pour nourrir ses enfants, mais elle n'avait pas le choix. Elle devait aller dans une banque d'alimentation. À l'époque, ce n'était pas le nom qu'on employait, mais c'était quand même une banque d'alimentation.

Il importe d'inclure la condition sociale dans les dispositions de la Loi sur les droits de la personne. C'est important parce que cela montre que nous nous préoccupons de la pauvreté dans notre pays. Nous nous en préoccupons assez pour inclure la condition sociale dans la loi et apporter un changement qui fera une différence pour les Canadiens.

Nous pouvons le faire. Je pense que tous les Canadiens souhaitent que nous le fassions. Nous voulons nous assurer de garantir les soins de santé, l'éducation et le logement. Nous voulons aider ceux qui sont temporairement en chômage, ceux qui perdent leur emploi, et faire en sorte qu'ils puissent toucher des prestations d'assurance-emploi lorsqu'ils en ont besoin, de façon à ne pas devoir compter sur l'assistance sociale et à ne pas perdre leur dignité pendant qu'ils sont en chômage. En effet, nous accordons une grande valeur au fait de travailler et de subvenir aux besoins de notre famille.

La pauvreté favorise la dépression, la malnutrition, la maladie et la mort prématurée. J'ai vécu dans la pauvreté, mais j'ai toujours eu un toit. Je ne peux imaginer ne pas avoir un chez-soi. Pourtant, nous voyons de plus en plus de gens qui n'ont nulle part où aller, qui n'ont pas de toit.

Suite aux changements survenus au Canada depuis une décennie, l'éducation devient de plus en plus hors de la portée des gens ordinaires, et c'est encore plus vrai dans le cas des pauvres.

Nous avons des écoles publiques où envoyer les enfants. Quelqu'un qui n'a pas les moyens d'acheter un manuel scolaire ou des chaussures de sport pour son enfant n'a certainement pas les moyens de lui acheter un instrument de musique ou un équipement de sport pour qu'il puisse participer à la vie sociale de la communauté.

C'est une question de droits de la personne. C'est une question de dignité. Même s'il existe peut-être des raisons de ne pas inclure dans la loi la condition sociale comme motif de distinction illicite—parce que cela prendrait trop de temps ou risquerait de se répercuter sur d'autres lois ou institutions—ça ne veut pas dire que nous ne devrions pas le faire.

Je sais que mon collègue réformiste a dit que nous pourrions forcer les banques à consentir des prêts aux personnes qui ne sont pas en mesure de les rembourser. Ce n'est pas le cas. Cela ne se produirait pas. En revanche, nous pourrions nous attendre à ce qu'une banque accepte d'encaisser le chèque d'un travailleur pauvre. Je connais plusieurs personnes dont les banques ont refusé d'encaisser les chèques.

Au Yukon, un bûcheron a reçu un chèque du gouvernement pour avoir livré du bois à des assistés sociaux. Cet homme reçoit un chèque du gouvernement. Ses vêtements de travail étaient déchirés et sales à cause de la nature de son travail. Il n'avait pas de compte bancaire et la banque a refusé d'encaisser son chèque. Pourquoi? Parce qu'il était pauvre. Il n'avait pas de compte en banque. Ils n'ont pas voulu encaisser son chèque. Pourquoi? Parce qu'il était pauvre. Heureusement, nous avons au Canada la chance d'avoir plus de gens riches que de gens pauvres, mais nos compatriotes s'appauvrissent de jour en jour. Nous devons modifier notre politique gouvernementale pour nous assurer d'éliminer les éléments qui causent la pauvreté et nous devons également reconnaître qu'il est indigne de vivre dans la pauvreté.

 

. 1905 + -

Nous ne devons pas accroître les souffrances de nos compatriotes, ni en paroles ni en actes. Si nous excluons les pauvres de notre Loi sur les droits de la personne, nous accroissons encore l'indignité dans laquelle ces pauvres gens se trouvent. Nous devons également nous rendre compte que les autochtones de notre pays sont les plus pauvres parmi les pauvres. Ces mesures nous permettraient de reconnaître leurs souffrances qui sont de beaucoup supérieures aux nôtres.

J'appuie donc cette motion et j'espère sincèrement que nous déciderons d'apporter des modifications.

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup de tristesse que je prends la parole à la Chambre pour débattre du projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite.

Je dis que c'est avec beaucoup de tristesse parce que, pendant qu'on discute des mérites de cette très importante mesure législative, des millions de Canadiens luttent toujours pour assurer leur subsistance dans des conditions misérables.

[Français]

S'inspirant de chiffres de 1996, le rapport de l'ONU indique que 17,6 p. 100 de l'ensemble de la population, dont 20,9 p. 100 des enfants, vit sous le seuil de la pauvreté, ce qui place le Canada au 10e rang parmi 17 pays industrialisés.

[Traduction]

Toutes divergences politiques mises à part, le fait est qu'il y a plus de 1,5 million d'enfants qui vivent dans la pauvreté au Canada. Pour un pays aussi riche, c'est absolument inacceptable d'avoir des résultats aussi terribles en matière de pauvreté.

[Français]

Le premier ministre dit lui-même que cette situation est inacceptable, mais il ne fait rien pour la changer. Je ne suis pas convaincu que le gouvernement comprend le danger qui existe dans une société où il y a tant de pauvreté parmi nos jeunes. Ces enfants font partie de notre avenir et si on ne trouve pas de solution à cette menace, on risque une génération de jeunes qui vont se trouver seuls, rejetés et pauvres.

[Traduction]

On sait très bien que les enfants nés de familles extrêmement pauvres ont beaucoup moins de chances de réussir que ceux qui ont eu le bonheur de grandir dans un environnement plus prospère.

[Français]

Pour ceux qui vivent dans la pauvreté à chaque jour, la possibilité d'un avenir florissant est presque impossible à saisir. À chaque jour, j'ai des appels d'individus qui souffrent de la pauvreté et il me semble que le problème s'accroît au lieu de se résorber.

[Traduction]

La pauvreté dans le pays a pris des proportions énormes au cours des quelques dernières décennies. Les banques d'alimentation, qu'on ne trouvait nulle part dans les années 70, se comptent actuellement par milliers et l'on en trouve dans 450 collectivités. Ce qui accentue le problème, c'est que la crise en matière de logements abordables et adéquats est désormais généralisée. Près de 400 000 Canadiens vivent dans des logements insalubres.

Tous les Canadiens méritent une chance égale de réussir dans la société. Ce n'est malheureusement pas ce qui se produit.

En dépit des caractéristiques souvent discernables de la pauvreté, il y a un autre obstacle qui est fréquemment moins discernable ou moins compris par les membres de la population en général, mais qui fait malheureusement partie de la vie quotidienne.

Je fais allusion à la discrimination répandue dont les pauvres sont victimes jour après jour. En plus de devoir endurer les épreuves matérielles qui accompagnent la pauvreté, les Canadiens pauvres doivent toujours se heurter à l'ostracisme et aux préjugés, notamment lorsqu'ils font affaire avec des institutions financières, comme la députée du NPD vient de le mentionner, et avec des entreprises et leurs employés, des fonctionnaires, le système juridique, les voisins, les étrangers et les médias.

 

. 1910 + -

Regardons les choses en face: notre société est souvent bien intolérante à l'égard des pauvres. C'est pourquoi le projet de loi S-11 est si important. La Loi canadienne sur les droits de la personne reconnaît que certaines personnes sont vulnérables, dans notre société, et qu'il faut les protéger contre la discrimination.

La Loi canadienne sur les droits de la personne interdit expressément la discrimination fondée sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'état civil, la situation familiale, les handicaps et l'orientation sexuelle.

Le projet de loi S-11 propose tout simplement que la pauvreté et les attributs qui y sont liés, comme le fait d'être assisté social, soient expressément reconnus comme un motif illicite de discrimination et que soit interdite la discrimination contre les pauvres dans les sphères de ressort fédéral.

Si nous ajoutons la condition sociale aux motifs illicites de discrimination, les articles 2 et 3.1 de la loi reconnaîtront enfin un énorme segment de notre société qui a été marginalisé. Il aura droit à la protection déjà accordée à d'autres groupes dans la société canadienne.

[Français]

Les pauvres, dans notre société, n'ont personne qui peut les protéger contre l'injustice d'une société qui veut trop souvent se fermer les yeux à la réalité de la pauvreté. Il est absolument nécessaire qu'on protège ces gens dans la Charte canadienne.

[Traduction]

Pas un jour ne passe, on dirait, où je n'entends pas des histoires horribles au sujet d'assistés sociaux qui sont injustement traités lorsqu'ils tentent d'obtenir des services essentiels. J'ai entendu dire que des banques à charte refusent d'encaisser les chèques d'aide sociale parce que les assistés sociaux n'ont pas assez de pièces d'identité. On a refusé à d'autres le droit d'ouvrir un compte bancaire.

Les propriétaires, les compagnies de services publics, le système juridique et même les médias pratiquent couramment la discrimination à l'encontre des pauvres en leur refusant des services ou en leur fournissant des services inadéquats.

La réponse de notre ministre de la Justice au projet de loi S-11? Attendons et voyons s'il n'existe pas d'autres problèmes dans la Loi canadienne sur les droits de la personne avant d'envisager l'ajout de ce motif illicite de discrimination, la condition sociale, à la Charte canadienne des droits et libertés.

Ceux qui vivent dans la pauvreté attendent depuis des années que le gouvernement mettent en oeuvre ces changements. Ils ne peuvent plus se permettre d'attendre que le gouvernement prenne la pauvreté au sérieux. Il faut agir maintenant pour essayer de corriger certains de leurs problèmes immédiats.

La solution du gouvernement consiste souvent à attendre et à approfondir son étude de la situation, en espérant qu'elle se réglera d'elle-même.

Tout dernièrement, la stratégie des libéraux est apparue, quand la ministre de la Justice a décidé de ne pas tenir compte des demandes qui lui ont été faites de renvoyer la décision sur la pornographie juvénile devant la Cour suprême du Canada. La ministre de la Justice préfère soumettre cette affaire à un long processus d'appel plutôt que de prendre la défense des enfants.

De même, le ministre fédéral de l'Agriculture savait qu'il y avait une crise du revenu agricole, quand il a été nommé à ce portefeuille il y a plus de 18 mois, mais il a décidé de ne rien faire jusqu'à ce que des milliers d'agriculteurs canadiens soient acculés à la faillite.

Ceux qui vivent dans la pauvreté ne peuvent se permettre d'autres retards de ce gouvernement insensible. Il faut agir immédiatement, si nous voulons redonner espoir aux démunis.

Le projet de loi S-11 a d'abord été présenté par le sénateur Cohen au Sénat, qui l'a adopté. Depuis, de concert avec la députée de Shefford, elle travaille diligemment avec les citoyens intéressés et d'autres députés de toutes les allégeances pour corriger cette énorme injustice qui pèse sur les membres les plus vulnérables de notre société.

Je demande à tous les députés de ne pas tourner le dos à ceux qui ont le plus besoin de nous. Aidons à protéger les millions de Canadiens qui vivent dans la pauvreté. Aidons à éliminer la discrimination actuellement fondée sur leur condition sociale, en appuyant le projet de loi S-11.

 

. 1915 + -

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, j'appuie la substance et l'esprit du projet de loi S-11, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'ajouter la condition sociale comme motif de distinction illicite.

Je crois que les rédacteurs du projet de loi S-11 on voulu protéger les pauvres et interdire la discrimination fondée sur la condition économique. Cela est louable et devrait avoir l'appui des députés. Comment pourrions-nous faire autrement?

Ce qui me préoccupe, ce n'est ni l'objet ni l'objectif du projet de loi S-11, mais sa formulation plutôt vague et confuse. Le simple emploi d'un terme extensible comme «condition sociale» embrouillera la loi et entraînera des litiges à n'en plus finir.

Imaginez les beaux jours que les avocats auraient avec une formulation de ce genre. Il y a peut-être trop d'avocats au Sénat. Je vais donner un exemple inspiré des observations du député conservateur. Celui-ci a accusé le gouvernement d'attendre et d'examiner la question. Ce n'est pas du tout le cas. Où était-il depuis 1993? Regardez les budgets et ce que nous avons fait dans ces budgets pour la formation, l'éducation et d'autres moyens d'essayer de régler ces problèmes.

Le député a mentionné la ministre de la Justice et la question de la pornographie juvénile. Nous, de ce côté-ci, croyons dans l'application régulière de la loi. Nous ne croyons pas qu'il faille recourir à la disposition de dérogation chaque fois qu'un juge rend un jugement ridicule.

Puis, le député a parlé du ministre de l'Agriculture et de la crise agricole. Cela n'avait pas grand-chose à voir avec le projet de loi, mais je crois devoir quand même le corriger. Le point que je veux faire valoir, c'est que l'expression «condition sociale» se prête à toutes sortes d'interprétations.

Les députés peuvent voir, à la lumière des explications que je viens de fournir, à quel point le député d'en face entrevoit mal les initiatives prises par le gouvernement.

Le ministre de l'Agriculture a agi très rapidement avant Noël. En fait, l'un des problèmes du ministre de l'Agriculture est lié au fait qu'il a du mal à convaincre le gouvernement progressiste conservateur du Manitoba de fournir sa part du financement, afin que les chèques puissent être remis aux agriculteurs.

M. Roy Bailey: Que dire de la situation en Saskatchewan?

M. Wayne Easter: Le député d'en face me demande de commenter la situation en Saskatchewan. Je crois comprendre que le premier ministre de la Saskatchewan a finalement accepté cet après-midi de payer sa part de 40 p. 100 du financement. Il faut se réjouir du grand pouvoir de persuasion de notre ministre de l'Agriculture et de notre premier ministre, qui l'ont convaincu de s'asseoir à la table de négociation et de prendre les mesures qui s'imposaient pour venir en aide à la communauté agricole.

Je veux revenir à la question qui nous intéresse ce soir, au projet de loi S-11. Je le répète, le simple fait d'utiliser un terme aussi peu précis que la condition sociale rendra la loi moins précise et entraînera une succession de litiges sans fin. Je veux insister sur ce fait.

Si nous tenons sincèrement à aider les pauvres et les défavorisés de notre société, nous devons créer des possibilités d'emploi. C'est ce que fait notre gouvernement. Nous devons réduire le chômage, C'est ce que fait notre gouvernement. Nous devons donner aux gens la chance de faire des études. À preuve, les deux derniers budgets. À preuve, le fonds des bourses du millénaire, si critiqué par les députés d'en face.

Nous devons dispenser à ces gens de la formation et leur fournir les choses essentielles à la vie si nous voulons qu'ils participent à notre société pleinement et à titre d'égaux. Dans nos dispositions législatives sur les droits de la personne, nous devons prévoir un recours pour les démunis qui sont traités de façon préjudiciable, de manière à les protéger adéquatement.

Cette année, nous célébrons le 50e anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme des Nations Unies. C'est un moment tout indiqué pour examiner nos dispositions législatives actuelles sur les droits de la personne et pour faire en sorte qu'elles protègent les plus vulnérables de notre société. Au Canada, nous avons honoré notre engagement envers la déclaration depuis 50 ans.

 

. 1920 + -

Que prévoit la déclaration au sujet des droits économiques? L'article 25 est ainsi libellé:

    Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.

Récemment, dans leur rapport sur l'indice du développement des droits humains, les Nations Unies ont attribué au Canada les meilleures notes et l'ont classé comme le meilleur pays où vivre, selon les données de 1995. Je crois que le Canada s'est aussi bien classé parce que les Canadiens prennent très au sérieux notre engagement par rapport aux droits de la personne.

Je pense, madame la Présidente, que vous m'indiquez que mon temps est écoulé. Je pourrai peut-être terminer une autre fois.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député disposera d'environ quatre minutes la prochaine fois que la Chambre sera saisie de ce projet de loi.

[Français]

La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES TRANSPORTS

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Madame la Présidente, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre des Transports. Elle fait suite à une question que j'ai posée à la Chambre au ministre et à laquelle il a répondu que la province de Nouvelle-Écosse et la province du Nouveau-Brunswick, en particulier, n'avaient pas violé un accord.

Depuis ce temps, grâce au programme d'accès à l'information, nous avons pris connaissance d'une autre lettre dans laquelle le ministre indique à la province du Nouveau-Brunswick qu'elle peut imposer des droits de péage sur cette route financée à l'aide de fonds fédéraux, moyennant le respect de deux conditions. La première est que la province doit toujours fournir un montant égal à la contribution du gouvernement fédéral. La deuxième est que les recettes découlant de ces droits de péage constituent une source de fonds supplémentaires qui doivent être consacrés exclusivement au projet en question.

J'ai transmis au secrétaire parlementaire un extrait du hansard qui attribue au ministre des Finances du Nouveau-Brunswick des propos selon lesquels il a toujours été clair que les fonds investis par la province dans ces tronçons de route seraient recouvrés. Ces propos contredisent totalement ceux de la lettre dans laquelle le ministre indique que la province doit fournir un montant égal à la contribution du gouvernement fédéral pour cette route. Il y a là une contradiction. La province a totalement contredit le ministre fédéral.

En ce qui concerne la deuxième condition, le ministre a dit que les recettes découlant des droits de péage doivent être consacrés exclusivement au projet en question. J'ai transmis là encore au secrétaire parlementaire un article de journal citant les propos du premier ministre du Nouveau-Brunswick. Il dit que les recettes tirées de ce projet iront au financement des soins de santé. On parle de 321 millions de dollars. Encore une fois, le ministre fédéral a dit que toutes les recettes tirées de l'autoroute devaient être réinvesties dans le projet. La province dit maintenant que ces recettes serviront à financer les soins de santé ou seront versées dans les recettes générales ou quelque chose du genre.

Je demande au secrétaire parlementaire s'il examinera cette lettre et les conditions absolument claires que le ministre a posées à la province du Nouveau-Brunswick pour l'établissement de postes de péage sur une autoroute financée par le gouvernement fédéral, soit que la province paie sa part, ce qu'elle ne fait pas, et qu'elle réinvestisse toutes les recettes dans le projet, ce qu'elle ne fait pas non plus.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, mon collègue a posé plus tôt une question au sujet des contribuables du Nouveau-Brunswick relativement aux péages sur les autoroutes et à l'utilisation des fonds recueillis.

Le député sait sûrement que, de ce côté-ci de la Chambre, nous enquêterons à fond sur toutes les informations que nous a données le député parce que nous voulons que nos propos soient clairs et bien structurés. Le député comprend certes la question.

En vertu de la Constitution du Canada, les routes sont de compétence provinciale.

 

. 1925 + -

En ce qui concerne la nouvelle autoroute reliant Fredericton et Moncton, le gouvernement fédéral a bien assumé une partie des coûts de construction de la route. Le Nouveau-Brunswick a choisi d'exploiter cette route dans le cadre d'un partenariat public-privé avec la Maritime Road Development Corporation en utilisant des péages.

Je ferai remarquer au député que le gouvernement du Nouveau-Brunswick a précisé que la contribution fédérale avait déjà été déduite du coût de base utilisé pour déterminer le montant des péages et le paiement provincial annuel pour le reste des coûts d'immobilisations. Effectivement, les fonds fédéraux ont réduit les coûts des immobilisations globaux de ce projet pour les contribuables du Nouveau-Brunswick.

Les préoccupations relatives aux péages et aux contributions fédérales méritent certainement une étude plus poussée. Nous en convenons. Transports Canada fait, comme d'habitude, preuve de leadership dans l'élaboration d'une future politique de péages si le gouvernement fédéral devait créer un nouveau programme routier national.

Cependant, en ce qui concerne les allégations du député concertant des dépenses fédérales ne convenant pas, je voudrais citer directement le rapport du vérificateur général: Nous avons constaté que toutes les ententes négociées reflétaient les directives du gouvernement en ce qui concerne les objectifs de programme ainsi que le niveau de financement et les ratios de partage des coûts à respecter pour la durée des ententes.

LE RÉSEAU ROUTIER

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Madame la Présidente, je parlerai du même sujet que le député et ma question s'adresse au même ministre. J'espère ne pas obtenir la même réponse du secrétaire parlementaire. Il élude la véritable question et ne dit pas ce qui est advenu des fonds fédéraux lorsque le Nouveau-Brunswick a violé l'entente. C'est une question importante et on n'y a pas répondu à la Chambre des communes.

La seule chose sur laquelle je m'entends avec le secrétaire parlementaire, c'est que le gouvernement fédéral examine les futures ententes. Il a admis que cette entente avait été violée. Il n'y a pas que la violation de l'entente qui m'ulcère.

L'entente a été conclue par l'ancien ministre des Transports, un certain Doug Young. Comme par hasard, cet homme est maintenant président de la Maritime Road Development Corporation, la MRDC. Son entreprise s'occupe maintenant de ce qui est véritablement une question constitutionnelle provinciale. Elle fixera le poids des véhicules et le montant des péages sur l'autoroute en question et définira le programme d'entretien de l'autoroute. Fondamentalement, le Nouveau-Brunswick a renoncé à ses responsabilités. Les fonctionnaires fédéraux se contentent d'approuver la situation et de protéger leur vieil ami, Doug Young.

C'est inacceptable parce que, au bout du compte, ce sont les citoyens, les contribuables du Nouveau-Brunswick qui devront payer davantage que s'ils avaient construit eux-mêmes l'autoroute. C'est ridicule.

Il y a également un autre problème sur le plan du transport. Un camion devra dorénavant payer 20 000 $ par année pour utiliser cette autoroute s'il doit la parcourir 365 jours par année. Cela représente une augmentation de 20 000 $ dans le coût d'exploitation d'un seul véhicule.

Le gouvernement fédéral s'est contenté d'autoriser cette société à instaurer des péages, une mesure tout à fait injustifiable. Nous demandons que la situation soit corrigée. Nous demandons également un peu de leadership à la Chambre de la part du ministre des Transports, qu'il annule cette entente et oblige le Nouveau-Brunswick à assumer ses responsabilités dans ce domaine.

C'est que les contribuables sont mis à mal deux fois plutôt qu'une. Celui qui emprunte la route à péage et le contribuable sont en effet une seule et même personne. Pourquoi devraient-ils payer deux fois pour emprunter le même tronçon de route? La seule raison pour laquelle ils devront payer deux fois, c'est que cet argent ira dans les poches arrière du copain Doug Young, l'ancien ministre des Transports, qui a préparé l'entente ici même, à la Chambre. Ces gens-là ont renié jusqu'à leur signature.

Le premier ministre du Nouveau-Brunswick a fini par admettre que cette entente générerait de l'argent. Où va-t-il aller? Il va aller dans ce qu'ils considèrent comme étant leur petite caisse bien à eux plutôt que de servir à payer cette route et à nous débarrasser de Doug Young et compagnie.

Tout ce que nous voulons c'est un peu de leadership au niveau fédéral. Les gens qui se lèvent dans cette Chambre pour prendre la défense de Doug Young ne comprennent pas comment fonctionne son autoroute à péage.

 

. 1930 + -

Une fois de plus, nous demandons au fédéral de faire preuve de leadership pour que des ententes de ce genre ne se reproduisent plus jamais. Il y a des limites à ce que l'on peut demander aux contribuables et cette affaire dépasse les limites avec la complicité d'un ministre des Transports qui n'ose pas tenir tête à son vieux copain.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, j'ai parfois l'impression que notre institution est censée être la Chambre de la raison, mais nous venons d'entendre toute une rodomontade au sujet d'un de nos anciens collègues. Le député d'opposition a employé le terme ridicule, mais les accusations qu'il lance sont effectivement ridicules. Il n'a aucun fondement pour porter de telles accusations contre cette personne.

Je vais citer de nouveau ce passage du rapport du vérificateur général:

    Nous avons constaté que toutes les ententes négociées reflétaient les directives du gouvernement en ce qui concerne les objectifs du programme ainsi que le niveau de financement et les ratios de partage des coûts à respecter pour la durée des ententes.

J'ai déjà dit, et je crois que c'est important, que nous sommes conscients du fait que nous ne voulons pas faire face à un système de péages routiers dans tout le Canada. Les préoccupations soulevées au sujet des péages et des contributions fédérales méritent une étude plus approfondie. Transports Canada élabore une politique future sur les péages au cas où le gouvernement fédéral devrait lancer un nouveau programme de réseau routier national.

Le député a prétendu que la société dont Doug Young est membre fait toutes les choses qui le contrarient. Je ne peux me rappeler de toutes. En fait, le gouvernement provincial décide du tracé, de la conception, de la construction, des normes, du processus d'appel d'offres et du financement, ainsi que du fonctionnement et de l'entretien par la suite.

Si le député laisse entendre dans ses observations que les péages créent des obstacles au commerce interprovincial, je tiens à lui dire que l'accord sur le commerce intérieur établit un processus aux termes duquel une province...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains que le temps prévu ne soit écoulé.

La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 33.)