Passer au contenu
;

AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 24 février 2000

• 0907

[Traduction]

Le président (M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.)): Mesdames et messieurs les membres du comité, mettons-nous au travail. Nous avons quorum pour entendre les témoins.

Juste avant de vous donner la parole, madame Alarie, je rappelle que la semaine prochaine nous recevrons la Société du crédit agricole. La semaine suivante, nous sommes en vacances, et la semaine après le congé, le vérificateur général viendra témoigner au sujet du chapitre 11. À la reprise des travaux, nous entrons officiellement dans ce qu'on peut appeler la saison du budget. J'ai demandé au ministre de l'Agriculture de comparaître à deux reprises et j'espère qu'il pourra venir à deux reprises. Il a déjà confirmé la date du 4 avril pour le Budget des dépenses. J'espère toutefois qu'il sera en mesure de se joindre à nous avant cela pour parler des programmes de sécurité et autres.

En outre, nous recevrons la visite d'Andy Mitchell, le ministre responsable du Développement rural.

Madame Alarie, la parole est à vous.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le président, avant de se quitter le 17 décembre, notre comité avait adopté une motion selon laquelle il devait convoquer des témoins afin que nous puissions étudier tous les aspects des biotechnologies, soit les organismes génétiquement modifiés.

Depuis que cette motion a été adoptée, aucune réunion du sous-comité n'a été tenue et je n'ai entendu parler de rien à cet égard. Ma liste de témoins est déjà dressée et je serais prête à commencer à entendre ces témoins demain matin. Je me demande où nous en sommes face à cette volonté qu'avait exprimée le Comité de l'agriculture.

[Traduction]

Le président: Nous allons passer aux témoins sans tarder, mais d'abord nous devons régler quelques détails. J'espère que nous allons y parvenir.

• 0910

Comme vous le savez, madame Alarie, j'avais dit depuis longtemps que notre comité et le Comité de la santé entreprendraient une telle étude. Ce n'est pas moi qui ai choisi d'adopter la motion car je savais pertinemment que le gouvernement allait procéder à un examen. L'annonce officielle en sera probablement faite dans un ou deux jours. J'ai déjà vu des lettres de la main du ministre Vanclief et de M. Rock, le ministre de la Santé.

L'étude sera entreprise par le Comité de la santé auquel se joindront des membres du Comité de l'agriculture. Tous les députés libéraux de notre comité seront invités à siéger au Comité de la santé pour participer à cette étude. Il en sera de même de votre parti, du Parti réformiste et des conservateurs. Si vous voulez prendre part à cette étude, madame Alarie, vous le pourrez en siégeant au Comité de la santé.

À mon avis, nous n'avons qu'à attendre que le Comité de la santé entreprenne cette étude, avec la participation du Comité de l'agriculture, et nous n'aurons pas à aller de l'avant avec notre motion ni à y donner suite; le travail se fera. Est-ce que ça répond à votre question?

[Français]

Mme Hélène Alarie: Non, monsieur, vous n'avez pas répondu à ma question et je ne suis pas satisfaite de votre réponse. C'est une promesse que j'entends depuis le début octobre. On est toujours supposé former un comité. De semaine en semaine, vous aviez retardé ma motion jusqu'à la date limite du 17 décembre, lorsque nous avons ajourné nos travaux pour le congé des Fêtes. On me donne toujours la même réponse.

Je ne comprends pas qu'on veuille être subordonné à un autre comité. Sachez que tout ce que veux, c'est que la lumière soit faite. En attendant, il y a une profusion de comités et de groupes qui sont créés à l'intérieur du gouvernement. J'ai l'impression qu'on essaie de gagner du temps pour noyer le poisson. Mais il y a des questions majeures qui se posent en agriculture, en santé et en environnement.

Je suis bien consciente que cette motion a été adoptée contre votre volonté. Il faut croire qu'il y a du monde qui se préoccupe de ce qui se passe en agriculture au pays. Il y a une urgence agricole, il y a une urgence pour l'agriculture biologique, il y a une urgence pour le choix des agriculteurs et il y a une urgence pour le commerce international. Doit-on attendre que le Comité de la santé soit prêt à nous inviter par la porte d'à côté et accepter qu'on n'ait même pas la possibilité de choisir nos témoins? Votre réponse ne me satisfait pas du tout. Elle n'est pas du tout appropriée à ma motion non plus.

[Traduction]

Le président: Eh, bien, il va falloir que vous soyez un peu plus patiente, madame Alarie. Ça va arriver. J'ai parlé au président du Comité de la santé ce matin. Il m'a dit que le ministre de la Santé était en train de rédiger le communiqué de presse pour annoncer l'étude, elle va avoir lieu. Faites preuve d'un peu plus de patience.

Monsieur Casson.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le président, Je me fais l'écho des propos de Mme Alarie. Je pense que l'enjeu est énorme pour l'agriculture et que le Comité de l'agriculture doit prendre l'initiative dans ce dossier. Si nous combinons les deux comités, nous aurons un énorme comité, et je pense que vous savez d'expérience ce qui se passe dans ce cas-là. Ça devient difficile à contrôler. On ne peut pas...

Le président: Le comité ne comptera pas plus de membres que n'importe quel autre comité.

M. Rick Casson: Vous avez dit que tous les libéraux et tous les autres membres du comité qui le désiraient pourraient siéger au Comité de la santé.

Le président: En fait, ils devront sélectionner les membres du comité qui fera l'étude. Ils ne seront pas 32.

M. Rick Casson: Comment le comité sera-t-il structuré alors? Est-ce que...

Le président: Attendez l'annonce du Comité de la santé, d'accord?

M. Rick Casson: Je pense qu'il serait de beaucoup préférable que notre comité fasse sa propre étude sur les OGM et leurs répercussions sur nos producteurs, et qu'il soumette son rapport au gouvernement.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le président, j'aimerais quelques précisions. Dois-je comprendre d'après votre conversation que, lorsqu'un comité adopte une motion, si elle n'a pas l'heur de plaire au président, le comité n'y donne pas suite? Est-ce comme ça que les choses vont se passer désormais à ce comité?

Le président: Vous pouvez interpréter les choses comme vous voulez, monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Je vous demande des éclaircissements, monsieur le président. Si le comité adopte une motion...

Le président: Je viens juste de vous donner des éclaircissements.

M. Rick Borotsik: Ce que vous dites donc, c'est que si une motion est adoptée et que le président ne l'approuve pas, on n'y donnera pas suite?

Le président: Monsieur Borotsik, j'avais dit avant Noël que, selon toute vraisemblance, la motion qui avait été adoptée serait inutile. On ne va pas faire deux fois la même étude, monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, ce comité a adopté une motion. On n'y a pas donné suite...

Le président: Je le sais.

M. Rick Borotsik: Je vous demande, monsieur le président, si à l'avenir quand ce comité adoptera des motions que le président n'aime pas, est-ce qu'on y donnera suite?

Le président: Ce que je vous ai dit, monsieur Borotsik, c'est qu'avant Noël, quand nous avons adopté cette motion, il était très vraisemblable que nous nous retrouverions avec deux motions en même temps. On ne peut donner suite qu'à une seule d'entre elles puisqu'elles sont similaires.

• 0915

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, avec tout le respect que je vous dois, nous avons eu ce même débat et cette même discussion quand la motion a été adoptée. Comme l'a dit M. Casson, c'était l'intention et la suggestion du comité que, vu l'importance de cet enjeu pour l'agriculture, c'était à notre comité de prendre l'initiative du débat et pas forcément...

Le président: Quelle est votre définition d'initiative, monsieur Borotsik?

M. Rick Borotsik: Je suggère qu'il serait facile pour le comité...

Le président: J'espère que vous accepterez de siéger au comité et que vous y ferez preuve de leadership.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, qui a décidé que ce serait le Comité de la santé plutôt que celui de l'agriculture?

Le président: Murray?

M. Rick Borotsik: S'il vous plaît, qui a décidé que ce serait le Comité de la santé plutôt que celui de l'agriculture?

Le président: Monsieur Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): À titre de précision, Rick, nous sommes déjà passé par là. À l'heure actuelle, Rick, l'opinion publique est d'avis que... C'est quelque chose dont nous devons être très conscients en ce qui concerne le dossier des OGM, l'étiquetage et tout le reste. Si nous, le Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire, décidons de tout faire nous-mêmes, nous serons perçus par l'opinion publique comme ayant un intérêt direct.

Une voix: Oh, non.

M. Murray Calder: Non, c'est vrai. C'est vrai. Par contre, si deux comités s'y mettent, le Comité de la santé et le Comité de l'agriculture, et que l'étude est fait par un comité conjoint, cette perception s'estompe. En fait, elle disparaît.

C'est l'un des arguments que j'ai toujours avancés en faveur de la création d'un comité conjoint pour faire cette étude. Peut-être aurions dû nous y prendre plus tôt pour le constituer, mais ça s'en vient. Il y a des deux côtés des questions d'ordre logistique qui ont entraîné quelques problèmes d'organisation, mais les choses sont en tain de prendre forme. Nous pourrions aller de l'avant, mais quand nous serons en plein dedans, l'exercice n'aura plus sa raison d'être. Je veux éviter ça puisqu'il est prévu qu'on va constituer un comité justement à cette fin.

Le président: Je ne pense pas qu'il soit inutile d'en dire plus long là-dessus. Nous avons des témoins qui attendent.

Je vous donne la parole et nous passerons ensuite aux témoins.

[Français]

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Je comprends, monsieur le président, que vous soyez mal à l'aise que cette discussion-là soit tenue devant les témoins, mais elle doit se faire.

On voit qu'on tente encore une fois d'obliger le Comité de l'agriculture à abdiquer ses responsabilités en voulant le fusionner avec le ministère de la Santé, ce qui est difficile à comprendre. Il y a 100 députés à la Chambre des communes qui ont voté pour qu'un projet de loi sur l'étiquetage soit débattu et il y a actuellement au Québec 40 000 signataires qui réclament la même chose.

Oui, je sais, comme le disait mon collègue M. Calder, que la perception dans le public veut que la santé et l'agriculture fonctionnent de pair. Mais, à ce que je sache, les aliments transgéniques partent de l'agriculture. Ils partent de graines; cela passe par la base. Je considère qu'on devrait avoir le leadership dans ce dossier. Je crains, monsieur le président, que si on fusionne et qu'on essaie de créer une structure mixte avec le Comité de la santé, on ne perde notre leadership. La bataille se fait actuellement au niveau de l'agriculture. La santé pourra venir plus tard.

Il faut reconnaître que c'est Mme Alarie qui a ouvert les yeux à l'ensemble de la députation à la Chambre des communes, qui a sonné l'alarme face aux conséquences des aliments transgéniques et génétiquement modifiés et qu'elle est agronome, monsieur le président. Il ne faut pas ignorer ces faits. Vous devriez retourner auprès de votre leader et de votre parti afin de tenter de renverser cette décision-là pour répondre véritablement à la motion qui a été déposée le 17 décembre.

On n'a toujours pas une réponse qui corresponde à la motion qui a été déposée. Je voudrais que vous considériez à nouveau cette décision. Advenant que la décision ne soit pas renversée, il faudrait que lors d'une prochaine séance, vous soyez en mesure de nous dire quand notre étude va débuter, parce que plus on retarde, plus le mal se fait. Plus on retarde, plus la population est inquiète. Plus on retarde, plus les consommateurs sont inquiets.

Monsieur le président, vous avez tous les arguments en main pour réviser votre décision et répondre véritablement à la motion qui a été débattue ici même le 17 décembre dernier.

[Traduction]

Le président: Passons maintenant aux témoins.

M. Rick Casson: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: Oui, monsieur Casson.

M. Rick Casson: Monsieur le président, étant donné la situation dans laquelle nous nous trouvons et vu le fait que ce comité a adopté une motion en vue d'étudier cette question, je pense que nous devrions proposer une motion réaffirmant notre intention. Si elle est adoptée, mettons-nous au travail. Il est important que ce soit notre comité qui fasse cette étude. J'aimerais proposer une motion à cet effet.

Le président: Il faut que vous donniez un préavis de 48 heures, monsieur Casson.

• 0920

M. Rick Casson: Très bien, nous le ferons.

Le président: D'accord.

Madame Alarie, je pense que nous vous avons tous entendue. Nous comprenons très clairement votre position. Vous avez été très éloquente. Le fait est que cette étude va avoir lieu. Elle va avoir lieu, madame Alarie. Je sais que vous auriez aimé qu'elle commence il y a quelques semaines, mais ici les choses ne se passent pas toujours quand on le veut, mais ça va arriver.

[Français]

Mme Hélène Alarie: Monsieur le président, je pense que vous m'avez écoutée, mais que vous ne m'avez pas entendue. Je ne sais pas si en anglais, on fait la subtile différence.

[Traduction]

Le président: Je vous ai entendue très clairement, madame Alarie, très clairement.

[Français]

Mme Hélène Alarie: Alors, si vous m'avez entendue, vous devez avoir saisi qu'il y a trois points importants. Je ne parle pas à travers mon chapeau parce que c'est un sujet sur lequel je me penche depuis des mois et des mois. J'ai suivi tout ce qui s'est passé à Seattle, dans les comités où on parlait de ce sujet-là. Je suis allée à un colloque sur la biodiversité à Montréal. J'ai fait le tour des associations d'agriculteurs. Si je vous en parle, c'est que j'éprouve vraiment une inquiétude fondamentale et majeure, inquiétude qui devrait être partagée par tout le monde qui est ici aujourd'hui. Quand on parle de santé et d'agriculture, on oublie un morceau majeur, soit l'environnement. C'est un sujet dont on doit traiter sur trois plans différents.

Le plan premier, celui qui nous concerne, c'est l'agriculture. On se laisse toutefois damer le pion en noyant l'intérêt majeur qu'on doit avoir dans cela.

Je suis allée au Comité de l'environnement qui débattait d'un autre sujet, l'ARLA. Quand je suis arrivée là, il y avait des gens du domaine de l'agriculture biologique qui ont parlé comme s'ils venaient défendre leur point de vue concernant les OGM. Cela ne faisait pas partie des sujets que devait étudier ce comité, mais ils sont venus y comparaître parce qu'ils sont très préoccupés et qu'on est en état de crise. Nous, nous ne faisons rien.

Alors, si on a une conscience et si on est vraiment le Comité d'agriculture, monsieur le président, il faut que vous répondiez à ma motion dans les plus brefs délais.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie de ce conseil. Je pense que nous devrions...

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Ligar, Réf.): J'invoque le Règlement, monsieur Harvard. Pourrais-je faire une petite mise en garde à la lueur d'un autre dossier?

Quand nous avons étudié la question de la SBtr, le choix des témoins était très important. Nous nous sommes aperçus plus tard que Santé Canada n'avait pas coopéré à l'étude sur la SBtr avec la candeur dont elle aurait dû fait preuve. Si vous formez un comité conjoint avec le Comité de la santé, assurez-vous que vous aurez votre mot à dire sur le choix des témoins. Je pense que le succès de l'étude en dépendra...

Le président: Je suis sûr que, vu le dévouement de Mme Alarie à cette cause, elle siégera au comité et fera ce qu'il faut pour empêcher que ce genre de choses ne se reproduise.

Larry, ensuite il faut que nous passions aux témoins.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président. Je sais que je suis arrivé quelques minutes en retard, mais je veux souligner qu'il y a autour de cette table des gens qui sont conscients de l'importance de cet enjeu. Le secteur de l'agriculture est intervenu pour que, entre autres, nous protégions les producteurs. Je pense que nous pouvons avoir une influence sur la liste des témoins, et nous l'exigerons.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Quand le comité sera-t-il constitué et serons-nous invités à y siéger?

Le président: Oui, vous y serez invités. Vous serez certainement invités.

M. Rick Borotsik: Quand sera-t-il constitué?

M. Larry McCormick: Quand le temps sera venu, très bientôt.

Le président: J'espère que ce sera annoncé dans deux ou trois semaines, Rick. C'est ce que j'espère.

M. Rick Borotsik: Alors on peut s'attendre à ce qu'il soit constitué dans une semaine et à ce que les réunions commencent dans une semaine?

Le président: Oh, je ne pense pas que les réunions commencent dans une semaine.

M. Larry McCormick: Probablement la semaine après la semaine prochaine, Rick.

Le président: Je crois que le Comité de la santé en fera l'annonce officielle très bientôt. J'ai rencontré M. Myers ce matin et il m'a dit que le ministre est sur le point de faire une annonce.

Bon, passons aux témoins. Je crois qu'il pourrait y avoir un vote à 10 h 30. Nous allons essayer de tout concilier.

Du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, nous avons Suzanne Vinet, directrice générale intérimaire, Direction des politiques de commerce international, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés. Mon Dieu, Suzanne, il est bien long votre titre. Celui de Jean Saint-Jacques n'est pas aussi long. Il est seulement directeur des recours commerciaux. Il va falloir qu'on fasse quelque chose.

M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Mais lui, il n'est pas intérimaire.

Le président: Bien entendu, nous sommes ici pour parler des exportations de produits laitiers en vertu de l'OMC. Qui va commencer? Les femmes d'abord?

Mme Suzanne Vinet (directrice générale intérimaire, Direction des politiques de commerce international, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire Canada): Non, je cède la place à mon collègue. Je fais preuve de gentillesse.

Le président: Bon.

Jean Saint-Jacques (Directeur, Division des recours commerciaux, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international Canada): Place à ceux qui ont un titre court, monsieur le président.

• 0925

Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Nous vous avons fait passer des documents à titre d'information. L'un d'entre eux, qui est tiré du site Web des Affaire étrangères, retrace l'historique du différend et fait une mise au point de la situation. Dans un autre, nous avons regroupé des extraits de certains chapitres marquants de la décision de l'organe d'appel, qui est essentiellement la décision finale de l'OMC à laquelle nous devons nous conformer. Nous avons également remis au greffier le rapport de l'organe d'appel ainsi que le rapport du groupe spécial. Vu qu'ils sont très volumineux, j'ai pensé que vous n'en voudriez pas chacun un exemplaire. Nous vous avons également remis copie des lettres que nous avons envoyées au Conseil national de l'industrie laitière du Canada et aux Producteurs laitiers du Canada portant sur des propositions qu'ils avaient faites.

Si vous me le permettez, monsieur le président, ce que nous nous proposons de faire, c'est vous rappeler l'historique du différent et faire le point sur les consultations que nous avons eues avec la Nouvelle-Zélande et les États-Unis ainsi que sur l'entente à laquelle nous sommes parvenus avec ces pays. Mme Vinet parlera des consultations avec l'industrie nationale.

Pour remettre la question dans son contexte, soulignons que, aux termes de l'accord sur l'agriculture de l'OMC, les pays ont pris certains engagements concernant les subventions à l'exportation. En fait, à moins que les subventions qu'ils accordent à l'exportation de certains produits ne figurent sur leur liste d'engagements, ils ne peuvent en subventionner l'exportation. C'est différent de ce qui se passe pour les produits industriels, par exemple, dont il est interdit le subventionner l'exportation. Cela demeure possible pour les produits agricoles à condition de respecter certaines règles. Les subventions dont peuvent bénéficier certains produits sont sujettes à une limite quantitative et monétaire.

Le système mis en place par le Canada pour assurer l'approvisionnement en lait du secteur de la production de produits laitiers destinés à l'exportation reposait sur la Commission canadienne du blé et sur les offices provinciaux de commercialisation, qui étaient chargés entre autres d'approvisionner les transformateurs et de négocier les prix. Deux catégories de lait, appelées classes spéciales 5(d) et 5(e), étaient assorties de conditions précisant à quoi le lait pouvait servir. Il ne pouvait servir qu'à fabriquer des produits laitiers pour l'exportation. Il existe plusieurs autres classes pour le lait qui est utilisé à d'autres fins et destiné au marché interne. Ce n'est pas sur ces classes que porte le différend dont l'OMC a été saisie. Il ne concerne que les classes spéciales aux fins de l'exportation. Par ailleurs le lait est vendu à un prix inférieur au prix demandé sur le marché national.

Tant le groupe spécial que l'organe d'appel ont établi que la Commission canadienne du blé et les offices provinciaux de commercialisation étaient des organismes gouvernementaux et que, par conséquent, des organismes gouvernementaux participaient au transfert du lait, que le lait était vendu à un prix inférieur et qu'il devait être utilisé à des fins d'exportation, qu'il y avait donc transfert de ressource. Il ressort de ces constatations que le lait ainsi vendu constituait effectivement une subvention à l'exportation. L'analyse a prouvé que les produits qui bénéficiaient de cette subvention à l'exportation étaient exportés en quantités supérieures au plafond figurant sur notre liste d'engagements. Comme je le disais, on peut subventionner les exportations, à condition de ne pas dépasser ces plafonds. Malheureusement, nous les avons dépassés. Par conséquent, tous ces éléments font que notre système n'est pas conforme à nos obligations envers l'OMC. Il a donc été recommandé que le Canada modifie son système pour le rendre conforme.

Les membres de l'OMC disposent de délais raisonnables pour prendre des mesures correctives une fois qu'ils ont été jugés en contravention. Ce délais raisonnable peut être négocié, imposé par arbitrage, ou accepté par l'OMC. Généralement, la troisième option conduit à l'impasse car la partie perdante demande des délais fantaisistes et la partie gagnante dit non. Essentiellement, on a donc le choix entre parvenir à un accord ou aller en arbitrage. Nous avons soumis ce choix à l'industrie.

Je devrais mentionner que, pendant tout ce processus, qui a duré trois ans, nous avons consulté l'industrie et les provinces. Ces dernières ont envoyé des observateurs aux audiences à Genève puisque tant le fédéral que les provinces étaient parties prenantes dans ce différend.

• 0930

Revenons au présent; il est ressorti de nos consultations avec les intervenants que tout le monde était en faveur d'essayer de négocier une solution et d'essayer d'obtenir des délais pour mettre en place un système différent au lieu de se voir imposer une décision qui aurait pu être draconienne et être assortie de délais plus courts et peut-être de conditions que nous n'aurions pas aimées. Nous avons rencontré la Nouvelle-Zélande et les États-Unis après que la décision de l'OMC ait été acceptée par l'organe d'appel. Le 22 décembre, nous avons conclu une entente nous accordant un délai raisonnable pour mettre en oeuvre la décision. La décision porte essentiellement sur la manière dont nous devons modifier nos pratiques d'établissement du prix des produits laitiers.

La décision nous est toutefois favorable sur un point. Je tenais à le mentionner car c'est paru dans les journaux et vous vous posez peut-être des questions à ce sujet. Nous imposions un contingent tarifaire sur les importations de lait de consommation pour l'usage personnel des consommateurs et nous limitions ces importations à 20 $ par personne. Le groupe spécial a jugé que cela n'était pas conforme à nos obligations. L'organe d'appel a renversé la décision du groupe spécial, mais a dit que la limite de 20 $ devait être supprimée. Donc, sur un élément que je trouve très important, la décision est allée en notre faveur.

Pour ce qui est de l'entente avec les États-Unis, qui figure à la fin de l'extrait de la page web, nous avons convenu avec eux et la Nouvelle-Zélande d'un calendrier de mise en oeuvre. Nous avons dit que, du point de vue législatif, nous ne pouvions pas nous engager à mener à bien toutes les étapes avant la fin de l'année parce que des modifications seraient probablement nécessaires tant au palier fédéral qu'au palier provincial. Elles seront sans doute de nature réglementaire et législative, mais nous n'avons pas encore une idée complète de ce que cela entraînera. Nous avons étudié ce que nous pouvions faire pour être en conformité si, du point de vue législatif, nous ne pouvons l'être qu'à la fin de l'année.

Comme je le disais, nous nous sommes engagés à ne pas dépasser certains niveaux de subventions à l'exportation, et ce dans plusieurs catégories. Essentiellement, ce sont le fromage, le beurre, le lait écrémé en poudre et d'autres produits laitiers. Il est ressorti de nos consultations avec l'industrie et les provinces que nous pouvons dès cette année respecter les limites pour trois des quatre catégories. Nous nous sommes donc engagés auprès des États-Unis et de la Nouvelle-Zélande à ne pas dépasser cette année les limites quantitatives pour le beurre, le lait écrémé en poudre et d'autres produits laitiers. Comme je le disais, le différend a toujours porté principalement sur les quantités que nous pouvons exporter, pas sur le niveau des subventions que nous accordons. C'était plus important pour eux.

La principale pierre d'achoppement est le fromage. Il nous était absolument impossible de respecter nos engagements cette année puisque nous avions déjà dépassé la limite. Nous avons donc négocié une limite de 20 000 tonnes de fromage subventionné que nous pouvons exporter durant la campagne en cours, qui se termine fin juillet.

Donc, tous ces éléments, plus les dispositions concernant les consultations—notre première consultation avec les États-Unis et la Nouvelle-Zélande a eu lieu hier—forment le gros de l'entente.

Nous travaillons de concert avec l'industrie pour voir quel genre de système on peut mettre sur pied au Canada pour remplacer celui qui a été jugé non conforme, et qui permettrait aux exportateurs canadiens d'exporter des produits laitiers sans que l'on considère qu'ils bénéficient de subventions à l'exportation.

Monsieur le président, si vous le permettez, j'aimerais maintenant passer la parole à Suzanne Vinet, qui va expliquer où en sont les consultation internes. Nous nous ferons un plaisir de répondre ensuite à vos questions.

Le président: Bien. Merci. Suzanne, soyez la bienvenue.

Mme Suzanne Vinet: Merci, monsieur le président.

Comme l'a dit Jean, dès que le groupe spécial a été saisi de cette affaire, nous avons collaboré étroitement avec les provinces et l'industrie. Depuis que nous avons reçu le rapport de l'organe d'appel et conclu l'entente avec les Américains et les Néo-Zélandais sur le calendrier de mise en oeuvre, la balle est dans le camp de l'industrie laitière qui doit trouver une nouvelle manière d'exporter ses produits sans subvention. Donc, chacun de leur côté, les producteurs et les transformateurs ont soumis des propositions au gouvernement fédéral pour qu'il les conseille quant à la compatibilité de ces dernières avec les décisions du groupe spécial.

• 0935

Depuis quelques semaines, nous collaborons très étroitement avec les regroupements de transformateurs et les regroupements de producteurs pour essayer d'établir des lignes directrices ou des principes de base à partir desquels ils pourraient élaborer un programme d'exportation qui leur permettrait d'exporter sans subvention.

Je pense que vous avez la copie des lettres que nous avons envoyées récemment, ces quinze derniers jours, aux transformateurs et aux producteurs, et dans lesquelles nous leur donnons des conseils au sujet des propositions qu'ils nous avaient soumises; nous les informons que, bien que leurs propositions soient de nature légèrement différente, elles contiennent des éléments à partir desquels, tant les producteurs que les transformateurs peuvent élaborer un programme compatible avec nos engagements envers l'OMC.

Leurs propositions présentent des différences essentielles. Bien que nous puissions leur donner des conseils sur les lignes directrices générales, la réalité est que l'élaboration des programmes d'exportation et leur mise en oeuvre relèvent des provinces. Donc, ce qui est en train de se passer est que, dans chaque province, les transformateurs et les producteurs travaillent en collaboration avec leurs représentants provinciaux pour essayer d'élaborer un programme d'exportation. Des négociations sont en cours depuis une quinzaine de jours, à des degrés différents, au niveau de toutes les provinces.

En Ontario, il s'est fait beaucoup de travail entre les producteurs et les transformateurs. Le gouvernement provincial anime ces discussions. Permettez-moi de dire que dans aucune des provinces ils ne sont encore arrivés à finaliser un plan ou un programme à nous soumettre pour que nous voyions s'il serait compatible ou non, mais sur certaines questions les travaux avancent relativement bien en Ontario et il y a eu de nombreux échanges de vues entre transformateurs et producteurs.

Au Québec aussi, les producteurs et les transformateurs sont en discussion depuis une quinzaine de jours, mais ils n'arrivent pas à se mettre d'accord sur le type de système qu'ils aimeraient voir dans leur province. Le gouvernement provincial participe pleinement à ces discussions.

À l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, les discussions portent sur la mise en place d'un système coopératif. Nous n'avons pas encore vraiment vu les détails de ce qu'ils proposent et je ne suis donc pas en mesure de commenter avec précision les progrès accomplis jusqu'à présent. Ce qui est certain, c'est qu'ils travaillent très fort à l'élaboration d'un programme d'exportation.

En Alberta aussi, les discussions vont bon train. Nous n'avons encore aucune précision sur le genre de programme qu'ils envisagent.

En Colombie-Britannique, au Manitoba et en Saskatchewan, des discussions ont eu lieu, mais d'après ce que nous savons, elles ne sont pas aussi avancées qu'en Ontario, au Québec ou dans les Maritimes.

À un moment donné, toutes ces propositions élaborées au niveau provincial devront nous revenir pour que nous puissions juger de leur compatibilité avec nos engagements.

Comme vous le savez tous, la majorité de la production se fait en Ontario et au Québec, et il est urgent pour l'industrie de mettre au point un programme d'exportation acceptable. La Commission canadienne du lait, qui est responsable de la délivrance de permis de production de lait pour l'exportation, a annoncé qu'à la fin du mois, elle ne délivrerait plus de permis car nous aurons atteint la limite des subventions à l'exportation à laquelle nous avons droit pour cette campagne.

Cela crée en quelque sorte une situation de crise dans l'industrie pour les exportateurs ou les transformateurs qui veulent continuer à exporter du fromage. Et c'est réellement dans le secteur du fromage qu'il y a énormément de problèmes à l'heure actuelle. S'ils veulent honorer leurs contrats ou reprendre les exportations, c'est très important pour eux. Les pressions sur l'industrie et les provinces pour qu'elles trouvent un programme acceptable dans les plus brefs délais sont énormes.

On peut donc voir que les producteurs et les transformateurs vont passer beaucoup de temps sur cette question dans les semaines à venir. Je pense qu'ils travaillent très fort pour essayer d'avoir un programme acceptable à proposer.

Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président: Bien. Merci beaucoup.

Nous allons débuter les questions avec M. Casson.

• 0940

M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

Monsieur Saint-Jacques, dans la lettre que vous avez envoyée à M. John Core, en date du 15 février, et dont nous avons copie, certains des éléments qui sont soulignés sont en fait des propositions qui vont ont été soumises par les Producteurs laitiers du Canada.

Le numéro 2, intitulé mécanisme de passation de contrats, a retenu mon attention. Je me demande si vous pourriez nous donner un peu plus de détails sur les discussions que vous avez eues avec eux. Il est question d'un babillard électronique. Les transformateurs y afficheraient des appels d'offres en quelque sorte, et les producteurs pourraient y répondre. Est-ce que ça serait un système national ou est-ce que chaque province aurait son propre système?

M. Jean Saint-Jacques: Les discussions ont lieu au niveau provincial. Nous ne savons pas s'il y aura 10 babillards différents ou si certaines provinces se regrouperont et n'en auront qu'un. Tout dépendra du résultat des discussions et des négociations au niveau provincial.

M. Rick Casson: Vous avez dit qu'il y avait une certaine urgence. Les provinces ont-elles un calendrier à respecter? Est-ce qu'il faut que tout se passe en bloc ou est-ce que certaines provinces pourront aller de l'avant plus rapidement que d'autres?

M. Jean Saint-Jacques: Nous n'avons pas de réponse à cette question. Je pense, comme l'a dit Mme Vinet, que l'arrivée à expiration de la limite de 20 000 tonnes que nous avons négociée pour le fromage exerce des pressions sur tout le monde pour trouver une solution très rapidement. Nous ne pouvons qu'espérer qu'ils terminent leur travail aussi rapidement que possible et les y exhorter.

M. Rick Casson: Vous ne savez pas si une province pourrait être autorisée à aller plus vite que les autres.

M. Jean Saint-Jacques: Ça se pourrait. Tout dépend du résultat des négociations au niveau provincial, et pour le moment nous ne sommes pas en mesure de dire si l'Ontario sera prête avant le Nouveau-Brunswick, ou le Québec avant l'Alberta. C'est impossible à prévoir.

M. Rick Casson: Merci.

Le président: Merci. Normalement, c'est au tour du Bloc québécois. Mais nos collègues du Bloc ne sont pas là.

Êtes-vous prêt, monsieur McCormick? Monsieur Borotsik, voulez-vous prendre la succession de Larry?

La parole est donc à vous Larry, nous passerons ensuite à Rick.

M. Larry McCormick: Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.

À en juger par les fax qui arrivent dans nos bureaux, en provenance des producteurs de lait et, de temps en temps, de particuliers qui ont étudié ces propositions, ainsi que des organisations, il semble que la perception soit—j'ai l'impression que c'est le mot qui revient le plus souvent—que vous—vous, nous—enfin nous collaborons plus étroitement, que nous sommes plus à l'unisson, avec les transformateurs qu'avec les producteurs laitiers. Je suppose que cela vient du fait que les transformateurs sont généralement de grosses sociétés internationales. Je me demande si vous pouvez me donner... Je suis sûr que vous pensez que cela s'adresse encore à vous—ou à nous, ou que sais-je.

Mme Suzanne Vinet: En réalité, les transformateurs nous reprochent eux aussi de passer trop de temps avec les producteurs laitiers. Je pense donc que vous avez tout à fait raison de dire que c'est une question de perception. La vérité toutefois, c'est que nous collaborons très étroitement avec toutes les parties concernées. Nous nous sommes mis à leur entière disposition et nous prodiguons des conseils sur toutes les propositions qui nous sont soumises, qu'elles viennent de producteurs ou de transformateurs individuels, ou encore des organisations nationales ou provinciales représentant soit les producteurs soit les transformateurs, et nous continuerons à le faire. Nous allons continuer à collaborer très étroitement avec toutes les parties.

Ce dont il est très important de se souvenir ici est que, quel que soit le programme qui sera mis en place, il faut qu'il soit le fruit d'une entente entre les producteurs et les transformateurs. Le ministre de l'Agriculture et le ministère ont été on ne peut plus clair avec l'industrie: il faut que ce soit le fruit d'un accord entre les parties concernées. Nous sommes à la disposition de quiconque a une proposition à nous soumettre.

M. Larry McCormick: Merci.

Quand tout sera réglé, il sera très important que l'accord soit clair, et il le sera, car les autres groupes qui sont soumis à la gestion de l'offre le passeront au peigne fin, de leur propre point de vue.

• 0945

Nous avons d'autres groupes dans les cinq secteurs qui regardent tout ça d'un très mauvais oeil en termes d'exportation. Ils craignent une implosion plutôt qu'une explosion de toute la chose. Tout le monde suit l'affaire de très près.

Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci.

Rick

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

C'est une question très complexe et il est très difficile de s'y retrouver dans les accords commerciaux que nous avons avec l'OMC. Nous avons déjà fait l'objet de contestations à plusieurs reprises. Dans le cas des produits laitiers, en particulier, nous en sommes ressortis perdants.

Si j'en crois la documentation que vous nous avez remise, ce que se demandent les Producteurs laitiers du Canada, c'est essentiellement si, quand ils auront mis sur pied ce programme, dont ils pensent qu'il sera conforme aux règles de l'OMC, Ottawa les aidera à se défendre contre toute action intentée devant l'OMC?

Êtes-vous en mesure de dire au nom du gouvernement que vous défendrez devant l'OMC un programme similaire à ce qu'on vous a proposé jusqu'à maintenant si...

Mme Suzanne Vinet: Il est trop tôt pour savoir si nous aurons quelque chose à défendre.

M. Rick Borotsik: Je ne suis pas de cet avis, mais passons.

Mme Suzanne Vinet: Ils nous ont proposé des lignes directrices à partir desquelles ils peuvent essayer d'élaborer un programme. Une fois que nous aurons vu le programme en détail, nous serons en mesure de leur dire s'il est conforme ou non.

Nous allons donc continuer à collaborer très étroitement avec les producteurs et les transformateurs pour mettre au point quelque chose de compatible.

M. Rick Borotsik: Si vous me permettez d'ajouter mon grain de sel, monsieur Saint-Jacques, vous dites dans votre lettre que vous êtes à la disposition de l'industrie pour lui prodiguer des conseils en vue de l'élaboration d'un modèle de programme d'exportation. Vous ajoutez que par cette lettre vous ne donnez pas votre aval à la proposition qui vous a été soumise et que vous allez continuer à aider les Producteurs laitiers à élaborer le meilleur programme possible.

Où en êtes-vous dans ce processus, et pensez-vous sincèrement que vous pouvez élaborer un programme qui ne sera pas contesté devant l'OMC par les autres producteurs laitiers?

M. Jean Saint-Jacques: C'est certainement ce que nous visons et dans la lettre que j'ai envoyée aux Producteurs laitiers du Canada et au Conseil national de l'industrie laitière du Canada, je souligne que c'est à l'industrie, au palier provincial, de négocier un train de mesures.

Il pourrait être basé sur certains des paramètres qui figurent dans la lettre aux Producteurs laitiers du Canada ou sur ceux qui se trouvent dans la lettre au Conseil national de l'industrie laitière du Canada, lesquelles se veulent une réponse aux propositions qu'ils nous avaient soumises. Ça pourrait aussi être une combinaison des deux.

M. Rick Borotsik: D'accord. Monsieur Saint-Jacques, vous êtes évidemment très au courant des questions commerciales. Je vais vous poser une question très simple. Pensez-vous qu'on puisse proposer un modèle de programme d'exportation qui ne sera pas contesté devant l'OMC?

M. Jean Saint-Jacques: Je pense qu'il y en a probablement plusieurs.

M. Rick Borostik: Ces modèles seraient-ils fondés sur le système d'établissement des prix intérieur?

M. Jean Saint-Jacques: Je m'excuse, je ne suis pas sûr de bien saisir la question.

M. Rick Borotsik: Le système de doubles prix est ce qui nous pose un problème à l'heure actuelle. Est-ce que l'établissement des prix de notre lait, les niveaux de prix intérieurs, feraient partie du modèle en vigueur sur le marché des exportations?

M. Jean Saint-Jacques: La régulation de l'offre n'est pas la question qui nous intéresse. La régulation est une question tout à fait distincte et elle n'a pas été contestée à l'OMC.

La question est d'approvisionner les exportateurs en lait, sans subventions. Le fil conducteur de toutes ces propositions est l'établissement d'un contrat direct entre les transformateurs et les producteurs sans l'intervention d'organismes gouvernementaux qui vendraient le lait à un prix inférieur sur le marché des exportations. Il n'y aurait que le transformateur et le producteur, qui passeraient un contrat fondé sur leur propre intérêt économique, aux prix et aux conditions qu'eux fixeraient. Ce serait un système complètement distinct de la régulation de l'offre.

Selon une décision fondamentale prise par le groupe et l'organe d'appel, l intervention d'organismes gouvernementaux dans la transaction constituerait une lacune fatale.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, nous disposons de suffisamment de temps pour que je cède la période qui m'est impartie à M. Hoeppner, s'il désire poser des questions.

Le président: Nous disposerons peut-être d'assez de temps pour accorder une période à Jake.

M. Rick Borotsik: Je disais cela par gentillesse.

M. Jake Hoeppner: Tout le monde est très gentil à mon égard.

Le président: Comme il ne reste qu'une minute dans votre section, nous allons maintenant donner la parole à Rose-Marie.

• 0950

Mme Rose-Amrie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Rick a essentiellement abordé la question dans le sens que je souhaitais. Comme M. Core habite dans ma circonscription, je suis au courant de l'état de ces questions. D'ailleurs, je me suis entretenue avec lui hier soir.

Mon intervention porte sur ce que nous avons vécu relativement aux différends concernant les produits laitiers, le beurre, l'huile, le sucre et le reste. Comment pouvons-nous nous assurer que ce que nous mettrons en place, ou ce que vous dites que l'industrie provinciale doit mettre en place, ne conduise pas le gouvernement fédéral vers un obstacle infranchissable? Comment pouvons-nous éviter cela?

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur le président, nous consultons précisément un groupe de personnes très diversifié, afin de recueillir les opinions de tout le monde et les meilleures opinions possible.

Toute entreprise comporte ses risques. Nous examinons les éléments qui permettront de constituer un régime qui soit défendable devant l'OMC. D'après les éléments qui ont été portés à notre connaissance, nous croyons avoir ce qu'il faut pour y arriver. Tout sera dans les détails, cela ne fait aucun doute. C'est pourquoi nous avons insisté, dans nos lettres, sur certains éléments d'objectifs à poursuivre durant les négociations, afin de réduire les risques.

Mme Rose-Marie Ur: Nous sommes bien conscients que certains sont contre la régulation de l'offre. Ils vont sans doute chercher à dégager des éléments d'hypothèse négatifs pour faire discréditer tout le système. Nous devons tenir compte des aspects négatifs pour être prêts à parer les coups.

Mme Suzanne Vinet: Monsieur le président, toutes les parties aux consultations se sont entendues et engagées à faire en sorte que le système mis en place, quel qu'il soit, poursuive deux objectifs fondamentaux. Par ailleurs, le système de régulation de l'offre doit être protégé. Les décisions concernant la régulation de l'offre sur le marché intérieur continueront d'être prises au Canada. Sur le plan des exportations cependant, s'ils veulent assurer la croissance de leur secteur d'activité, les transformateurs devront se fonder sur le marché des exportations, si bien que l'autre principe concernant l'existence d'un accord à la grandeur de l'industrie oblige l'industrie à élaborer un programme d'exportation qui soit compatible avec les obligations du Canada en vertu de l'OMC.

Le défi, pour l'industrie, consiste essentiellement à créer un système qui permette aux transformateurs et aux exportateurs de bénéficier du système d'exportation tout en faisant en sorte que la régulation de l'offre sur le marché intérieur soit pleinement protégée. C'est cet aspect qui était tellement complexe dans les négociations entre les producteurs et les transformateurs. Il devaient s'entendre sur les freins et contrepoids à appliquer pour protéger ou imperméabiliser le système de régulation de l'offre sur le marché intérieur. Les propositions faites à ce jour indiquent qu'il y a des mécanismes autorisés par l'OMC qui permettront de le faire. C'est l'élément complexe des discussions.

Mme Rose-Marie Ur: Quelle est l'échéance?

Mme Suzanne Vinet: Nous devons respecter les échéances prévues dans les ententes signées avec les Américains et les Néo-Zélandais en ce qui concerne le lait en poudre, le beurre et d'autres produits. Nous ne pouvons pas exporter plus de 20 000 tonnes de fromage durant la campagne laitière en cours. Comme cette limite est déjà atteinte, il n'est pas du tout certain que les exportateurs puissent continuer d'exporter durant le reste de la campagne. Dans l'état actuel des choses, il semble bien qu'ils ne le pourront pas, à moins de trouver très rapidement un nouveau mécanisme.

En ce qui concerne la nouvelle campagne laitière, qui débute le 1er août 2000, nous devrons respecter les limites prévues, ce qui signifie qu'à compter de cette date nos exportations de fromage ne devront pas excéder 9 000 tonnes par année. Nous avons donc beaucoup à faire si nous voulons pouvoir exporter tous ces produits, y compris notre fromage. Nous devons nous doter d'un nouveau mécanisme d'exportation sans subventions très tôt cette année, et au plus tard le 1er août pour la prochaine campagne laitière et les campagnes subséquentes.

• 0955

Il y a beaucoup d'obstacles à surmonter si nous voulons que l'industrie laitière puisse participer au marché des exportations. Ces obstacles se manifestent d'ores et déjà dans les échéances à respecter. Le mieux serait que les producteurs, les transformateurs et les provinces conviennent le plus tôt possible d'un programme. Voilà ce qu'il en est. Dans l'hypothèse très négative d'une absence d'entente, en théorie les exportations ne pourraient pas excéder 9 000 tonnes par année pour le fromage, ce qui exclurait à toutes fins pratiques les transformateurs du marché de l'exportation. L'industrie subit donc de fortes pressions.

Le président: Merci beaucoup.

Ce sera maintenant au tour de M. Obhrai, suivi de M. Steckle, M. Hoeppner et M. Calder. Je crois qu'un vote aura lieu vers 10 h 30. Avec un peu de chance, nous pourrons terminer à temps pour la tenue du vote.

Monsieur Obhrai, vous avez la parole.

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je ne suis pas un spécialiste de l'agriculture. Je m'occupe plutôt de commerce international. Mes questions porteront donc plutôt sur un aspect plus général des accords commerciaux internationaux, à savoir la régulation de l'offre.

Vous disiez, monsieur, que l'office de commercialisation est considéré comme un organisme gouvernemental, d'où ma question. Où croyez-vous que le système de régulation de l'offre existera, à plus long terme? Vous dites qu'il s'agit d'une question intérieure et que vous tentez de la séparer du domaine de l'exportation. Pourtant, ces deux questions finiront inévitablement par être opposées l'une à l'autre. L'agriculture figurera à l'ordre du jour de la prochaine ronde de négociations de l'OMC et je suis certain que la question sera soulevée. Beaucoup d'analystes affirment que, vu l'état actuel des négociations, le système de régulation de l'offre sera éliminé à plus ou moins long terme. Dans ce contexte, vous pourriez peut-être me donner votre point de vue sur la situation à long terme et sur ce qui sera négocié lors de la prochaine ronde de négociations de l'OMC.

Mme Suzanne Vinet: Monsieur le président, dans le contexte de la question portée devant le groupe spécial et du travail que nous faisons avec les provinces, de même que dans le contexte de la prochaine ronde de négociations de l'OMC, il est très important de se rappeler qu'il appartient aux Canadiens de choisir la façon de commercialiser leurs produits sur le marché intérieur et que les règles de l'OMC ne s'appliquent pas dans ce cas. En ce sens, les règles de l'OMC ne s'appliquent pas à la régulation de l'offre chez nous, pas plus que ce cas porté devant le groupe spécial. Le groupe n'avait pas à établir si le système de régulation de l'offre sur le marché intérieur canadien était compatible avec les règles de l'OMC, car il s'agit de la commercialisation de nos produits chez nous.

Les règles de l'OMC s'appliquent à partir du moment ou nous exportons ou effectuons des transactions sur le marché des exportations, où nous devons honorer nos engagements internationaux. La question portée devant le groupe spécial portait sur la façon dont nous fixions les prix de nos produits laitiers sur le marché des exportations. La prochaine ronde de négociations portera aussi sur les règles commerciales. Si les exploitants de fermes laitières et les transformateurs de produits laitiers veulent demeurer présents sur le marché des exportations, ils devront se conformer aux règles que nous négocierons durant la prochaine ronde de l'OMC. Il demeure cependant très important de se rappeler que les règles de l'OMC ne s'appliquent pas à la régulation de l'offre sur le marché intérieur.

M. Deepak Obhrai: Ainsi, la régulation de l'offre ne sera pas un sujet qui échappera à la contestation dans les futures rondes de négociations?

Mme Suzanne Vinet: La régulation de l'offre sur le marché intérieur restera une question intérieure. Les discussions à l'OMC porteront sur des questions comme l'accès aux marchés, les subventions aux exportations et l'aide au marché intérieur.

M. Deepak Obhrai: Par conséquent, dans cette optique 80 p. 100 de notre lait sont assujettis au système de régulation de l'offre et 20 p. 100 sont exportés. Est-ce qu'on ne va pas avoir l'impression, dans les autres pays, que les exportations de lait sont subventionnées à tout coup?

Mme Suzanne Vinet: C'est ce que le groupe spécial devait déterminer. La question portait sur la façon dont étaient fixés les prix à l'exportation, au-delà du niveau auquel les subventions à l'exportation sont permises. On a jugé que cette pratique n'était pas conforme aux règles et nous avons perdu devant les groupes spéciaux. C'est pourquoi nous tentons de trouver un système qui nous permette d'exporter nos produits laitiers tout en respectant nos engagements auprès de l'OMC, c'est-à-dire en ne subventionnant pas l'exportation de ces produits. Cette question est au coeur des discussions entre les producteurs et les transformateurs.

• 1000

Les règles de l'OMC ne nous empêchent pas d'exporter parce que nous avons un système de régulation de l'offre. La question était déjà un vieux sujet de discussion au début de l'année, mais nous avons soulevé la question auprès des responsables de la tarification et nous avons laissé tomber la discussion au sujet de l'article 11. Rien ne nous empêche d'exporter. Les seules barrières sont les tarifs, tant que nous nous conformons aux règles de l'OMC. Nous pouvons exporter tant que nous tenons nos engagements.

M. Deepak Obhrai: Je trouve intéressant que vous disiez que l'avenir de la régulation de l'offre des produits agricoles est assuré parce qu'il s'agit d'une question intérieure. Cela va à l'encontre de ce que beaucoup d'autres affirment. Vous faites là une observation intéressante.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Obhrai.

Monsieur Steckle, vous avez la parole.

M. Paul Steckle: Je vous remercie de votre présence ce matin.

Un certain nombre de questions fondamentales me préoccupent. Le gouvernement actuel et ceux qui l'ont précédé tenaient beaucoup à accroître notre part du marché des exportations. Sur papier, cela paraît bien à la fin de l'année, mais les exportations n'ont pas enrichi nos agriculteurs pour autant.

Nous avons un système au Canada. M. Obhrai parlait de la régulation de l'offre, un système qui a bien servi les agriculteurs dans tous les secteurs où il a été appliqué. De fait, ces secteurs sont actuellement les seuls qui ne quémandent pas l'aide du gouvernement. Je crois que nous devrions tirer la question au clair. La régulation de l'offre est une affaire intérieure et nous devons pouvoir gérer nos affaires chez nous comme nous l'entendons. Comme le disait plus tôt la dame, ce sont les tarifs qui constitueront le facteur déterminant, et non pas le fait que nous avons un système intérieur qui puisse déplaire à quelqu'un à l'étranger.

Je suis toujours abasourdi de voir des agriculteurs qui, pour dépasser les limites du système et accéder au marché des exportations, approvisionnent les transformateurs à des prix inférieurs à leurs propres coûts de production pour que ces derniers puissent réaliser un profit marginal sur le marché mondial, alors que les agriculteurs eux-mêmes ne retirent aucun avantage et accusent des pertes. Pourquoi produire quelque chose à perte pour le reste du monde uniquement pour pouvoir dire, à la fin de l'année, que nos exportations ont encore augmenté? Ce genre de comportement m'étonnera toujours.

Vous vous demandez sans doute pourquoi je fais ce raisonnement. Nous ne nous sommes heurtés à aucune contestation tant que les producteurs laitiers n'ont pas voulu dépasser leurs quotas de production pour pouvoir exporter leur excédent de production. C'est là qu'ont commencé les contestations. Je ne comprends tout simplement pas pourquoi nous vendons encore plus de lait à Nestlé et à toutes ces grandes sociétés dans le monde, afin qu'elles puissent produire davantage et réaliser des profits pendant que les agriculteurs produisent à perte. Peut-être pourriez-vous m'expliquer pourquoi nous ne...

Je crois que nous devons tenter de vendre sur les marchés qui sont lucratifs pour nous, sinon il vaut mieux les éviter. Pourquoi perdre de l'argent? Pour mieux quémander l'aide du gouvernement? Je parle ici en tant qu'agriculteur. Je me demande pourquoi nous persistons à agir ainsi.

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur le président, la question qui se pose concerne la mise en place d'un système qui permette aux agriculteurs de choisir s'ils veulent ou non produire du lait pour que les transformateurs l'exportent. Les exploitants de fermes laitières réservent encore leurs quotas pour le marché intérieur. Ces quotas ne changent pas. Comme on l'a dit, la régulation de l'offre ne s'applique pas dans ce cas.

Si, toutefois, un agriculteur peut accroître sa capacité de production et accroître son revenu en produisant du lait pour une coopérative ou pour des sociétés comme Nestlé ou Neilsen, le mécanisme auquel nous nous intéressons et qui est à l'étude permettrait simplement aux agriculteurs de passer avec les transformateurs des contrats qui leur conviennent mutuellement. Je présume qu'un agriculteur qui ne réaliserait pas de profits ou qui produirait à perte déciderait de ne pas passer de contrat. Il s'agit donc essentiellement de mettre à la disposition des agriculteurs un système qui leur permette, s'ils le veulent, de produire du lait destiné à l'exportation.

M. Paul Steckle: Croyez-vous, monsieur Saint-Jacques, que l'on donne au mot subvention le même sens partout sur le marché mondial?

M. Jean Saint-Jacques: Il y a toute une gamme de subventions, monsieur le président. Il y a les subventions intérieures...

M. Paul Steckle: Mais est-ce qu'on donne au mot subvention la même définition au Canada qu'aux États-Unis, par exemple?

M. Jean Saint-Jacques: Oui.

• 1005

Mme Suzanne Vinet: L'accord sur l'agriculture conclu à la dernière ronde de négociation de l'Uruguay Round a justement permis d'établir des définitions pour les subventions à l'exportation et les subventions intérieures. Les subventions intérieures sont réparties en catégories. Il existe un éventail de subventions, réparties selon qu'elles créent une distorsion commerciale ou non, et divers engagements qui varient selon la nature de la subvention.

L'une des grandes réalisations de la dernière ronde de négociation est la reconnaissance de certains effets néfastes des subventions et de la nécessité de les assujettir à des mesures de restriction. La prochaine ronde de négociation visera à mettre en place des restrictions supplémentaires à l'endroit des subventions nuisibles qui ont été identifiées.

Dans le cas des subventions à l'exportation, les activités ne sont évidemment pas toutes nécessairement répertoriées. Cela fera partie du travail qui nous attend à la prochaine ronde de négociation; nous devrons poursuivre nos efforts pour nous assurer que tout le monde donne le même sens à toutes les mesures de discipline. Ce travail a débuté avec le dernier accord.

Il existe une compréhension commune des subventions et de leurs effets sur la production et le commerce. Le Canada aura pour objectif, durant la prochaine ronde, d'uniformiser encore plus les mesures de discipline afin de réduire les différences dans le façon dont les agriculteurs sont traités d'un pays à l'autre.

M. Paul Steckle: Je cède la parole à M. Hoeppner. Je veux entendre ce qu'il a à dire.

Le président: M. Hoeppner prendra la parole, puis ce sera au tour de M. Calder.

M. Jake Hoeppner: Merci, monsieur le président. J'aborderai la question dans la même optique que l'ont fait M. Steckle et mon ancien collègue, M. Obhrai.

Je suis stupéfié par la double norme que le gouvernement applique. Vous avez reconnu que dans le secteur des exportations, nous ne pouvons pas fonctionner sous un régime de monopole ou de contrôle des produits. Or, la Commission canadienne du blé adopte précisément l'approche opposée. Elle défend farouchement son monopole, alors que les agriculteurs pourraient vendre leur grain un ou deux dollars de plus le boisseau aux États-Unis.

M. Rick Borotsik: Pas à l'heure actuelle, Jake.

M. Jake Hoeppner: Ce fut le cas pendant des années.

M. Rick Borotsik: Mais plus maintenant, Jake.

M. Jake Hoeppner: Cela ne règle pas le problème pour les années à venir. Vous êtes allé dans l'Ouest et vous savez ce que les agriculteurs pensent de la Commission canadienne du blé.

Je trouve vraiment étonnant que vous acceptiez l'idée d'appliquer le système de régulation de l'offre aux exportations sans aucun contrôle gouvernemental. Je ne crois pas que ça marchera. J'ai tenté de faire valoir auprès des ministres du Commerce international et de l'Agriculture que, compte tenu du système de production de grain actuel, nous devions coopérer avec les autres pays dans le cadre d'une réserve foncière ou d'un programme subventionné, ce qu'ils ont demandé pendant des années. Le gouvernement s'y refuse.

Pourquoi cette solution serait-elle efficace dans un cas et pas dans l'autre? J'aimerais bien avoir la réponse à cette question.

Mme Suzanne Vinet: Le groupe spécial chargé d'examiner la question des produits laitiers devait se pencher sur les pratiques d'établissement des prix des produits laitiers destinés à l'exportation et non pas sur l'existence d'un monopole, comme celui de la Commission canadienne du blé. Ce sont deux choses très différentes.

En ce qui concerne le groupe spécial sur les produits laitiers, la question portait sur le fait que les offices de commercialisation des produits laitiers faisaient figure d'organismes gouvernementaux en raison du pouvoir qu'elles ont de prendre certaines mesures à l'endroit du marché et de déterminer les prix. On a fait valoir qu'il s'agissait là de mesures gouvernementales qui assuraient des prix plus avantageux aux transformateurs et qu'elles constituaient des subventions à l'exportation.

Ce n'est pas ainsi que la Commission canadienne du blé fonctionne. La Commission...

M. Jake Hoeppner: Je suis abasourdi. La régulation de l'offre est très transparente. Elle permet de connaître le prix du produit et le coût de production. La Commission canadienne du blé n'offre pas autant de transparence. Aucun pays ne peut avoir cette information et la seule façon, pour les agriculteurs, de le savoir est de vendre eux-mêmes leur production sur le marché mondial, comme ils l'ont fait en 1993, 1994 et 1995. Mais on nous interdit maintenant l'accès à ce marché.

Comment expliquez-vous qu'on n'applique pas la même norme en ce qui concerne la régulation de l'offre et les producteurs de grain?

Mme Suzanne Vinet: Je crois qu'il appartient au ministre de répondre à cette question.

Des voix: Oh, oh!

Mme Suzanne Vinet: Du point de vue technique, il n'y a pas deux poids deux mesures, car il s'agit de deux choses différentes. L'établissement des prix des produits d'exportation par la Commission canadienne du blé est une question tout à fait différente de l'établissement des prix des produits exportés par les producteurs laitiers.

• 1010

M. Jake Hoeppner: Dans ce cas, seriez-vous d'accord pour dire que la Commission canadienne du blé devrait établir ses prix selon une formule similaire à celle du système de régulation de l'offre?

Le président: Jake, nous sommes ici pour discuter des exportations de produits laitiers.

M. Jake Hoeppner: Il s'agit tout de même de nourriture.

Le président: Oui, c'est de la nourriture.

M. Calder prendra la parole, puis ce sera au tour de Rick.

M. Murray Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je voudrais parler des mécanismes en cause, car le système de contrats se rapproche beaucoup d'une idée que j'avais avancée il y a environ un an et demi.

Au sujet de ce que disait M. Steckle, une des choses qui, au départ... N'oublions pas qu'une fois que nous aurons atteint ce stade, il y aura des transformateurs qui se prépareront aux échanges commerciaux internationaux. Monsieur Saint-Jacques, vous disiez que si les agriculteurs ne font pas de profits, il ne devraient pas passer à l'autre système. Les transformateurs vont eux aussi revenir et la question se pose actuellement dans l'industrie de la volaille. J'ai siégé à la commission de commercialisation pendant environ huit ans, et nous nous penchons sur la question à l'heure actuelle. Si les transformateurs ne trouvent pas le produit sur le marché intérieur, ils auront recours à d'autres sources d'approvisionnement. C'est la réalité.

Dans la déclaration de M. Steckle, la question est très pertinente. La question n'est pas que si les agriculteurs ne peuvent faire de profits, ils ne devraient pas adhérer. Les transformateurs vont le faire et s'approvisionner à d'autres sources.

Qui va contrôler les contrats? Comment seront-ils attribués aux transformateurs? Essentiellement, si on procède par contrats et que le système est administré de la façon dont il semble qu'il le sera, cela reviendra à appliquer un système de quotas aux transformateurs. Dans ce cas, prouvez-moi que j'ai tort.

Est-ce que la valeur du contrat correspond vraiment à la différence entre le prix intérieur et le prix international?

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur le président, ce sont là des questions fondamentales, auxquelles il faudra trouver des réponses dans le cadre de négociations provinciales. Je puis cependant affirmer que la proposition ne vise pas à établir un système de quotas. Un transformateur fait une soumission, les producteurs veulent l'approvisionner et ils le font. C'est tout.

Quant à savoir qui contrôlera l'organisme, la proposition qui nous a été faite portait sur un organisme sans lien de dépendance. Nous avons accepté, à condition qu'on prenne les dispositions voulues pour que l'organisme soit vraiment indépendant et que le système fonctionne de manière à prévenir toute apparence d'influence, de la part des «organismes gouvernementaux» sur les contrats.

M. Murray Calder: S'agit-il d'un organisme gouvernemental, d'un organisme dirigé par les agriculteurs ou d'un organisme constitué à la fois de représentants du secteur agricole et de l'industrie? De quoi s'agit-il?

M. Jean Saint-Jacques: Tout dépendra de l'issue des négociations provinciales. On a proposé d'en confier la gestion à un cabinet d'experts-comptables, comme Ernst & Young, ou de charger un tiers de rendre compte des relations...

Le président: Un office, en quelque sorte?

M. Jean Saint-Jacques: Non, il ne s'agirait pas vraiment d'un office de commercialisation et il vaudrait probablement mieux éviter d'inclure ce mot dans le nom de l'organisme.

Là encore, cet aspect devra être négocié par les provinces, car les structures varient considérablement d'une province à l'autre. Au Québec, ce sont les coopératives, et en Ontario il y a autre chose. Au Québec, on laisse davantage de place à la négociation des structures que ce n'est peut-être le cas en Alberta, en Colombie-Britannique ou dans les provinces de l'Atlantique. On ne peut pas prescrire une méthode qui s'appliquerait d'un océan à l'autre. La question relève des provinces et doit être débattue à ce niveau.

Le président: Les organismes pourraient-ils être regroupés et les revenus...

Je m'excuse, Murray.

M. Jean Saint-Jacques: Des contrats séparés.

M. Murray Calder: Un des critères que je voudrais voir retenus, quelle que soit la forme que prennent les organismes qui seront constitués, est la présence des agriculteurs comme éléments clés à la table. La force du système de régulation de l'offre a toujours reposé sur la participation directe des agriculteurs au processus d'établissement des prix.

M. Jean Saint-Jacques: L'important est que l'agriculteur vende le lait au transformateur sans ingérence d'organismes gouvernementaux. Quelqu'un a déjà proposé que l'administration du système soit confiée à des offices de commercialisation, mais nous avons refusé en disant que ça ne marcherait pas et qu'il fallait un organisme indépendant.

M. Murray Calder: Je n'irai pas plus loin pour l'instant.

M. Rick Borotsik: Très brièvement, monsieur le président...

Le président: D'accord, Rick, allez-y.

M. Rick Borotsik: En fait, M. Hoeppner veut savoir... Vous parliez de la possibilité de regrouper les revenus et nous parlions d'avoir recours à un facilitateur, peut-être Ernt & Young, ou quelque chose de ce genre. M. Hoeppner se demandait si la Commission canadienne du blé ne pourrait pas être responsable de l'ensemble des exportations.

Des voix: Oh, oh!

M. Rick Borotsik: Pas seulement les produits laitiers mais la volaille également. Le Canada est connu pour sa Commission canadienne du blé qui vend le grain et joue un rôle de supervision. Ce n'est qu'une suggestion. Vous pourriez peut-être examiner ce modèle.

• 1015

Je voudrais poser une question à Suzanne. Je voudrais approfondir, en quelque sorte, ce que vous disiez. Vous avez dit que notre quota de 20 000 tonnes de fromage sera réduit à 9 000 tonnes au début de 2001. Pouvez-vous expliciter? Pourquoi passons-nous de 20 000 tonnes à 9 000 tonnes, et comment faire pour accroître le quota?

Mme Suzanne Vinet: Il ne s'agit pas d'une réduction. C'est l'engagement que nous avons pris. En signant l'accord de l'Uruguay Round à l'OMC, nous avons accepté qu'une certaine quantité de produits laitiers destinés à l'exportation soient subventionnés et, à compter de 2001, le niveau est fixé à 9 750 tonnes.

M. Rick Borotsik: Comment ce quota est-il attribué aux transformateurs?

Mme Suzanne Vinet: On s'est fondé sur les quantités. La période de référence était 1986-1988, à la fin de l'Uruguay Round, et les calculs étaient fondés sur les dépenses, les subventions à l'exportation et les valeurs à la fin de la ronde. L'engagement que nous avons pris en vertu de l'accord était fondé sur ces données.

Nous avions donc droit à une certaine quantité par année. L'accord nous permet d'avoir recours aux subventions à l'exportation pour...

M. Rick Borotsik: Mais nous pouvons tout de même exporter au-delà de cette limite, sans subventions...

Mme Suzanne Vinet: À condition qu'il ne s'agisse pas d'exportations subventionnées.

M. Rick Borotsik: C'est ce à quoi je voulais en venir. Nous pouvons exporter plus de 9 750 tonnes, à condition que ce soit sans subventions.

Mme Suzanne Vinet: Nous conservons le droit d'exporter dans l'avenir selon les limites prévues dans l'accord, mais tout ce qui dépassera le niveau prévu par l'accord ne pourra faire l'objet d'aucune subvention.

M. Rick Borotsik: Je voudrais poser une dernière question sans savoir si je recevrai une réponse et sans vraiment m'attendre à en recevoir une, car il s'agit d'une question difficile à trancher.

Selon vous, serait-il préférable que les producteurs laitiers continuent d'oeuvrer à l'intérieur du système de régulation de l'offre intérieure et restent à l'extérieur du marché de l'exportation, comme Paul l'a suggéré, sans risquer ainsi d'affecter la régulation de l'offre et l'établissement des prix? Je sais qu'il est difficile de répondre à cette question. Libre à vous d'y répondre ou de ne pas y répondre.

Mme Suzanne Vinet: Les producteurs nous posent souvent la question. Il faut bien comprendre que c'est la raison pour laquelle les consultations et négociations qui ont cours actuellement entre les transformateurs et les producteurs sont si importantes, et nous avons expliqué les principes qui doivent être respectés.

M. Rick Borotsik: J'aurais aimé avoir votre opinion, Suzanne.

Mme Suzanne Vinet: Je crois que tant que nous pourrons appliquer les freins et contrepoids nécessaires pour conserver la régulation de l'offre en tant que programme intérieur, les transformateurs devraient avoir pleine latitude de profiter du marché de l'exportation. Ce sera la seule façon d'assurer la croissance de ce secteur d'activité dans l'avenir, car la demande de ses produits est très stable au Canada.

Le secteur des produits laitiers ne pourra continuer de croître que s'il accède au marché de l'exportation. Je crois que nous pouvons mettre au point un système qui soit conforme aux règles de l'OMC concernant les exportations, tout en préservant la régulation de l'offre en tant que programme intérieur.

M. Rick Borotsik: Cela ne menace-t-il pas, jusqu'à un certain point, l'intégrité du système de régulation de l'offre?

Mme Suzanne Vinet: L'important est que nous administrions notre système d'exportation de manière à protéger le marché intérieur. Le défi sera de trouver la bonne combinaison.

Le président: Je vais maintenant permettre de courtes interventions. Nous entendrons d'abord Joe McGuire, puis Larry et de nouveau M. Steckle.

Joe, vous avez la parole.

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Merci, monsieur le président.

Chaque province peut-elle avoir un modèle distinct?

Mme Suzanne Vinet: Oui, chaque province pourrait décider d'avoir un modèle différent, car les règles de commercialisation relèvent de la compétence des provinces. Il n'y a rien dans les règles de l'OMC qui oblige toutes les provinces à avoir exactement le même système, mais le système choisi doit être conforme à nos obligations.

M. Joe McGuire: Quelle différence y a-t-il entre le modèle de l'Île-du-Prince-Édouard qui, d'après ce que je sais, n'a rien à voir avec les activités d'un office de commercialisation, et le modèle ontarien, que les Américains ont déjà jugé inacceptable? Pourquoi ne pouvez-vous pas créer un système unique qui s'appliquerait à l'ensemble du pays?

M. Jean Saint-Jacques: Les réalités politique et économique nous empêchent de le faire. L'Île-du-Prince-Édouard a opté pour une certaine façon de faire. Nous avons reçu des propositions de l'Ontario et nous avons demandé qu'une des propositions ne soit pas appliquée, car elle aurait conduit à la mise en place d'un système contrôlé par un office de commercialisation. Cela rejoint une question antérieure concernant le type de supervision. Le système doit être indépendant des organismes de commercialisation.

• 1020

M. Joe McGuire: Dans ce cas, pourquoi la province propose-t-elle un système si elle sait en partant qu'il n'est pas acceptable?

M. Jean Saint-Jacques: Je crois qu'il est dans la nature humaine de proposer un système qui s'inspire de ce qu'on connaît déjà et dont on connaît le fonctionnement. C'est, je crois, une tendance naturelle. Nous devons simplement examiner les propositions qui sont faites et voir si elles peuvent être à la base d'un système qui soit jugé conforme aux règles établies.

M. Joe McGuire: Sommes-nous encore loin d'un accord général à la grandeur du pays?

M. Jean Saint-Jacques: Des discussions provinciales sont en cours actuellement. Je crois que Mme Vinet y a fait référence. Nous nous attendons à ce que les provinces soient de plus en plus pressées de conclure une entente, mais aucune échéance précise n'a été fixée.

M. Joe McGuire: La campagne laitière débute en août. Est-ce que tout sera prêt à ce moment?

M. Jean Saint-Jacques: Si les exportateurs veulent commencer à exporter du fromage et même d'autres produits laitiers en plus grandes quantités, nous respecterons nos engagements concernant les autres produits. Si, toutefois, ils veulent faire grimper leurs exportations, et surtout s'ils veulent exporter plus de 20 000 tonnes de fromage, il faudra mettre en place un système conforme aux règles de l'OMC.

Le président: Très bien.

C'est maintenant au tour de Larry, puis ce sera M. Obhrai.

M. Larry McCormick: Merci, monsieur le président.

Je sais que Les Producteurs laitiers du Canada et ses homologues provinciaux doivent tenir les producteurs au courant, mais la question engendre des opinions bien arrêtées. Dans une région de l'est de l'Ontario, par exemple, un agriculteur élève 125 vaches laitières et son frère en possède une centaine. L'un croit qu'il devra exporter pour pouvoir survivre, alors que l'autre pense exactement le contraire.

Je crains bien que les Producteurs laitiers du Canada et les Dairy Farmers of Ontario, dans le cas de l'Ontario, ne parlent pas au nom de la majorité de leurs producteurs. Ces organismes parlent au nom des gros producteurs parmi leurs membres. Plus tard, si nous avons la volonté politique pour soutenir la gestion de l'offre et la protéger, nous nous en tirerons bien. Sans cette volonté politique, cependant, peu importe le parti au pouvoir ou qui dirige le gouvernement, la gestion de l'offre peut être condamnée avant son temps.

Je me demande simplement quelle obligation nous avons de tenir nos producteurs informés, car il me semble, encore une fois, que les dirigeants de ces organismes de producteurs laitiers ne parlent qu'au nom des gros producteurs, monsieur le président, et officiellement.

Le président: Madame Vinet, si nous érigeons ce que l'on pourrait appeler un mur étanche entre le secteur des exportations et celui de la gestion de l'offre, les producteurs auraient-ils besoin d'un quota national pour vendre à l'échelle internationale sur les marchés d'exportation?

Mme Suzanne Vinet: Avec la proposition à l'étude, il n'y aurait pas d'exigences. Certains producteurs pourraient s'établir sans un quota national...

Le président: Pas de quota du tout?

Mme Suzanne Vinet: ...et fonctionner uniquement sur les marchés d'exportation. C'est exact.

Le président: Monsieur Obhrai, suivi de Paul.

M. Deepak Obhrai: Merci.

Revenons à ce système interne d'approvisionnement et à l'exportation. Disons qu'un agriculteur peut vendre sur le marché intérieur 80 p. 100 seulement de ce qu'il produit dans le cadre du système de gestion de l'offre, et est supposé en vendre 20 p. 100 sur le marché étranger. Quand il vend à l'étranger au prix du marché, il le fait à un prix inférieur à celui qui a cours sur le marché intérieur.

À l'étranger, ne doit-on pas penser que cet agriculteur peut produire parce que le système de gestion de l'offre lui permet de garder son entreprise agricole en exploitation, et qu'il a la faculté de vendre ces 20 p. 100 de sa production parce que son entreprise fonctionne et qu'il peut faire du dumping sur le marché international? Quand on considère vraiment cela d'un point de vue commercial, n'a-t-on pas l'impression que le système de gestion de l'offre en général subventionne en quelque sorte les marchés d'exportation? Le président dit que l'on veut ériger un mur étanche, mais je ne vois pas comment on va le faire.

• 1025

M. Jean Saint-Jacques: Le mur étanche vise à assurer que l'établissement du prix sur le marché d'exportation se fasse sur la base d'un contrat entre le transformateur et le producteur. La différenciation des prix entre les marchés est autorisée sous le régime de l'OMC.

M. Deepak Obhrai: Elle est autorisée.

M. Jean Saint-Jacques: Oui. Il s'agit de savoir si cela donne lieu à du dumping ou pas, mais c'est une question totalement différente de celle à laquelle nous faisons face en l'occurrence. Cela constitue toujours un risque dans le commerce international.

M. Deepak Obhrai: Cette question ne finira-t-elle pas par surgir? Est-ce une possibilité?

M. Jean Saint-Jacques: C'est une possibilité. Nous avons eu d'innombrables cas de producteurs canadiens qui se sont fait accuser de pratiquer le dumping, et vice-versa dans le cas d'exportateurs vers le Canada. Cela se voit couramment dans le commerce international, malheureusement.

Le président: Paul.

M. Paul Steckle: Pour en revenir à mon autre raisonnement et le pousser plus loin, les consommateurs adorent acheter leurs aliments à bon marché, et nulle part au monde qu'ici ils peuvent les acheter moins cher. Ils finiront par se rendre compte qu'il existe un système de double prix: les agriculteurs sont prêts à vendre le lait à un prix inférieur à celui auquel ils le vendent aux consommateurs sur le marché intérieur. Ne nous trouvons-nous pas en quelque sorte à donner à penser aux consommateurs que, si nous pouvons produire une partie de notre lait à ce prix-là, nous pouvons peut-être tout le produire à ce prix-là, et donc qu'ils pourraient payer moins cher pour le lait?

Je pense que les producteurs des secteurs soumis à la gestion de l'offre se dirigent vers un véritable affrontement. Personne ici n'a défendu plus vigoureusement que moi la gestion de l'offre, même si le produit que je produis n'est pas assujetti à la gestion de l'offre. Je m'adresse peut-être au mauvais groupe de producteurs ce matin, mais je dirais à mes amis producteurs laitiers—et je le leur ai dit maintes fois—qu'ils feraient mieux d'examiner très attentivement s'ils veulent faire augmenter les profits des sociétés comme Nestlé ou s'ils veulent continuer d'offrir aux Canadiens un produit qui soit sain et abordable, sans cet élément de l'argument que j'expose. Tôt ou tard, ils seront confrontés directement à ce problème.

M. Jean Saint-Jacques: Cela se produit déjà dans le cadre du système des classes spéciales. Le lait est fourni à un prix très élevé dans le cas du lait de consommation, et à des prix moins élevés selon les utilisations qu'on en fait. Du côté des exportations, dans le cas de ces classes spéciales, le lait était fourni à un coût bien inférieur au prix du lait de consommation sur le marché intérieur. Nous songeons donc à mettre en place un système qui permette aux agriculteurs et aux transformateurs d'établir le prix eux-mêmes. Il pourrait être plus élevé ou moins élevé que les prix qui avaient cours pour les classes 5d) et 5e) dans le passé, mais il sera établi dans le cadre des transactions individuelles.

M. Paul Steckle: Je tiens à attirer l'attention sur une chose pour qu'elle figure au compte rendu, car il me paraît important de reconnaître les éventualités qui pourraient résulter de ce que nous tentons de faire aujourd'hui. Je ne vous accuse pas de quoi que ce soit. Il y a une chose cependant dont nous devons tous être conscients. Nous avons une industrie formidable au Canada, et je tiens à ce qu'elle croisse. Les exportations représentent un domaine où elle va croître, mais nous devons agir avec beaucoup de prudence. Je ne fais que signaler ce genre de choses afin que nous en soyons conscients.

Le président: Pour terminer, je pense que la plupart d'entre nous sommes favorables à la gestion de l'offre. Nous voulons que les producteurs fassent de bonnes affaires sur le marché intérieur—n'est-ce pas, Paul?—et pourtant nous voulons que notre marché étranger grandisse. Vous dites qu'un producteur n'aurait pas besoin d'un quota national pour entrer sur le marché international.

Entrevoyez-vous le jour où il y aura deux groupes, ou deux niveaux, d'agriculteurs? Les agriculteurs du premier groupe fonctionneront uniquement sur le marché intérieur, en fonction de quotas établis sous le régime de la gestion de l'offre, tandis que ceux de l'autre groupe fonctionneront dans le cadre d'un système de marché plus ouvert soumis à la pleine concurrence. Entrevoyez-vous une telle possibilité?

Mme Suzanne Vinet: Du point de vue de la politique de commerce international, ce scénario pourrait certainement se concrétiser, mais il incomberait aux producteurs de décider s'ils veulent s'établir uniquement pour le marché d'exportation ou non. Voilà le genre de décisions de gestion que les agriculteurs devront prendre individuellement.

• 1030

Le président: Désolé, je vous donne la parole dans une seconde, Rose-Marie.

Les gens qui appuient énergiquement la gestion de l'offre devraient se demander si ce genre d'évolution du système mettrait ou non en danger le système de gestion de l'offre. Ai-je raison, Rose-Marie?

Mme Rose-Marie Ur: Je dois dire que je suis certainement une solide adepte de la gestion de l'offre, mais je puis voir venir le jour où l'on aura des agriculteurs fonctionnant hors quota qui commercialisent leur produit pour l'exportation uniquement. Nous verrons peut-être également des agriculteurs fonctionnant dans le cadre du marché intérieur qui voudront entrer eux aussi sur le marché étranger.

Comme vous le dites ici si souvent, on a beau dire que cela incombe aux producteurs, mais permettez-moi de vous dire que lorsqu'ils seront dans la merde—pardonnez-moi l'expression—ils viendront se plaindre au gouvernement en disant que c'est notre faute. Je pense donc qu'une certaine responsabilité incombe également au gouvernement à cet égard, et ce n'est pas là fourrer notre nez dans notre secteur agricole.

Je suis une agricultrice, moi aussi, mais je ne pense pas que nous puissions faire passer toute la responsabilité sur les épaules des agriculteurs. Nous devons faire preuve d'assez de responsabilité pour dire que nous ferions mieux d'avoir un système de freins et de contrepoids dans ce domaine et veiller à ce que les mesures que nous prenons ne nuisent pas à la gestion de l'offre. J'ai lu dans votre lettre ici que l'on peut produire pour le marché d'exportation sans avoir besoin d'un système de quota. Bon sang! je vois très bien ce qui va arriver en réalité. Je suis vraiment inquiète.

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur le président, ce n'est peut-être pas clair d'après la lettre, mais je dois mentionner qu'en ce qui concerne la proposition énoncée dans la lettre adressée à John Core, les éléments nous en ont été suggérés par les Producteurs laitiers du Canada. Ces éléments ne figurent pas dans la proposition parce que nous sommes allées leur dire qu'ils devaient faire ceci et cela. Nous avons dit aux intervenants dans ce secteur que, s'ils voulaient suggérer des propositions, ils pourraient nous les soumettre pour que nous les examinions. Nous l'avons fait. Mais, essentiellement, la lettre renferme une proposition émise par les Producteurs laitiers du Canada, et ce sont eux qui ont suggéré que l'on puisse produire hors quota. Je voulais simplement signaler cet aspect, monsieur le président.

Le président: Monsieur Calder.

M. Murray Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.

À ce propos, comme Mme Ur, je trouve inquiétant ce que vous proposez avec cette disposition à la rubrique de l'inscription: «La propriété d'un quota de production pour le marché intérieur ne serait pas un critère pour s'inscrire au programme ou participer à la commercialisation du lait pour l'exportation.» Cela revient à dire en fait qu'il y a deux catégories de producteurs laitiers au Canada: une catégorie de producteurs qui détiennent un quota de production pour le marché intérieur, et une catégorie de producteurs qui produisent du lait, avec le même investissement, mais pour le marché étranger. Si le marché étranger se détériore et que le producteur laitier n'arrive plus à joindre les deux bouts parce qu'il ne peut obtenir pour son lait un prix qui couvrirait ses coûts de production, il va immédiatement s'adresser à la commission du lait pour réclamer un quota parce qu'il est maintenant devenu un producteur laitier de deuxième catégorie.

Monsieur le président, j'estime vraiment nécessaire de convoquer John Core devant notre comité parce que j'aimerais entendre ce qu'il trouverait à répliquer à cette situation.

Cela peut semer la discorde et nuire énormément au système tel qu'il existe présentement, et cela m'inquiète.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, je voudrais faire une simple observation pour répondre à cela.

Il y a maintenant un cas dans d'autres systèmes de gestion de l'offre, notamment celui de la volaille au Manitoba, où une entreprise a été mise sur pied uniquement pour le marché d'exportation. Cela se fait dans d'autres systèmes de gestion de l'offre, et je suppose qu'il s'agit d'un ajout similaire, si l'on peut dire, à ce qui se produit dans ce système. Si donc vous voulez parler de crainte, monsieur Calder, vous qui êtes un producteur de volailles, vous pouvez constater que la chose se produit déjà dans votre secteur de gestion de l'offre.

M. Murray Calder: Bien franchement, je trouve que c'est une chose que nous devons examiner plus attentivement.

Mme Rose-Marie Ur: Je pense qu'on devrait convoquer John Core devant le comité.

M. Rick Borotsik: Votre secteur, monsieur Calder, a permis que cela se produise. Les responsables ont dit qu'il est possible d'investir dans le marché d'exportation. Ce genre de production se fait au Manitoba à l'heure actuelle, au rythme d'environ un demi-million de volailles.

M. Murray Calder: Je vais donc leur parler à eux aussi. C'est un sujet d'inquiétude.

M. Rick Borotsik: Et je comprends votre inquiétude. Tout ce que je dis, c'est que le modèle est déjà en place, et il se peut très bien qu'il soit en place dans le secteur laitier également.

M. Murray Calder: Et c'est dans cette circonscription têtue de Portage—Lisgar.

Le président: Monsieur Breitkreuz.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je veux simplement faire une brève observation, suivie d'une brève question. Je tiens également à signaler que cette question émane essentiellement de quatre électeurs qui suivent nos travaux aujourd'hui, dont deux de ma circonscription, Arlen et Lillian Kurtz.

• 1035

Il faut faire un grand investissement pour acquérir un bout de papier dans le cadre de ce régime, et ce bout de papier commence à avoir, comme c'est le cas maintenant, une valeur extrêmement élevée à cause de la politique du gouvernement. Les producteurs de grain craignent que la gestion de l'offre n'ait une incidence quand on s'engage dans des négociations internationales sous l'égide de l'OMC, car, dans nos efforts pour protéger le système de la gestion de l'offre, nous négligeons peut-être certains autres secteurs de l'agriculture qui souffrent gravement se mesures qui sont prises à l'étranger. À quel point estimez-vous que la gestions de l'offre peut avoir une incidence négative sur les négociations dans le secteur du grain quand on tente de faire réduire les subventions dans les autres pays?

Mme Suzanne Vinet: C'est le débat que nous avons tenu lors de la dernière série de négociations. Je dois dire que le processus de consultation que le gouvernement a entrepris depuis deux ans, pour en arriver à un consensus sur une position de négociation, a certainement contribué à mettre en lumière le fait qu'on n'a pas à avoir cette division entre les sensibilités aux importations et les intérêts pour les exportations. Je pense que la position de négociation actuelle du Canada, annoncée en août par le ministre de l'Agriculture, illustre vraiment le consensus qui s'est dégagé d'un bout à l'autre du pays sur certains des sujets de préoccupation que les producteurs ont en commun, qu'ils viennent du secteur de la gestion de l'offre ou de celui des céréales. À propos des subventions à l'exportation, par exemple, il y a consensus partout dans le pays et dans tous les secteurs de production pour que le Canada adopte parmi ses priorités pour la prochaine série de négociations l'élimination des subventions aux exportations.

Il existe donc beaucoup de points communs, tant dans le secteur de la gestion de l'offre que dans celui de l'exportation du grain, sur l'approche que le Canada doit adopter dans ces négociations. Il existe également beaucoup d'opinions communes sur la façon de traiter les subventions octroyées sur le marché intérieur qui ont des effets de distorsion sur les échanges.

M. Garry Breitkreuz: On a l'impression, dans les Prairies, que nous protégeons le système de gestion de l'offre au point de miner notre capacité d'exercer de vigoureuses pressions sur les pays qui subventionnent leur secteur des grains, surtout les pays européens, ce à quoi les Américains réagissent évidemment en en faisant autant. Est-ce que c'est ce qui se produit, à votre avis? Voilà essentiellement ma question.

Mme Suzanne Vinet: Ce n'est pas ainsi qu'on négocie. Nous n'arrivons pas à la table en disant que nous leur donnerons ceci s'ils nous accordent telle chose concernant les grains et ainsi de suite. Ce qui se passe en réalité, c'est que nous avons un accord qui présente certains problèmes que nous avons à résoudre, et c'est dans le contexte global de ces problèmes que nous négocions. Je le répète, je pense qu'il est très clair dans la position de négociation que les deux groupes de producteurs ont des intérêts très communs pour ce qui est de moderniser davantage certaines des règles au sein de l'OMC. Que ce soit en matière de subventions aux exportations ou de soutien intérieur, il existe un consensus parmi les divers secteurs de production.

M. Garry Breitkreuz: Merci, monsieur le président. Je pense que c'est un sujet qu'il vaut la peine de poursuivre.

Le président: Joe McGuire.

M. Joe McGuire: Je trouve curieux, monsieur le président, que M. Breitkreuz pose cette question maintenant, alors que son parti vient d'adopter une résolution favorable à la gestion de l'offre à leur... Maintenant, il essaie de dire que la gestion de l'offre...

Le président: À propos, quel est donc son parti?

Une voix: Nous ne savons pas très bien.

M. Joe McGuire: Eh bien, un des partis. Le successeur du Parti réformiste. J'irai jusque là. Or, les membres du parti ont accepté une résolution favorable à la gestion de l'offre...

M. Garry breitkreuz: Monsieur le président, puis-je répondre brièvement?

M. Joe McGuire: ...et maintenant il essaie de dire qu'il n'y est pas favorable.

Le président: Je pense qu'on entre dans des considérations politiques, chose qui ne se fait jamais ici.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le président, j'ai posé une question de bonne foi à nos témoins, et si l'on commence à faire un hochet politique de cette question...

Des voix: Oh, oh!

Une voix: Qui en fait un hochet politique? Descendez de votre cheval de bataille.

Le président: Bon, tout allait très bien jusqu'à ce qu'on entre dans des considérations politiques. Je le répète...

M. Garry Breitkreuz: Je n'ai jamais fait intervenir ces considérations.

Le président: Bien sûr que non.

Je vais terminer en demandant à l'un ou l'autre des deux témoins comment les Américains se comportent dans le dossier des exportations, des subventions, des limites, du dépassement des limites, et ainsi de suite.

Mme Suzanne Vinet: Ils respectent leurs engagements. Dans le cadre du travail que nous faisons actuellement au sein du comité sur l'agriculture et de façon bilatérale avec les États-Unis, nous suivons très attentivement l'état de la mise en oeuvre de l'accord par tous les principaux pays—par tous les pays, en fait—mais certainement par les États-Unis. Ils ont respecté leurs engagements.

Le président: Ils n'ont pas dépassé les limites?

• 1040

Mme Suzanne Vinet: Ils n'ont pas dépassé les limites.

Nous travaillons en très étroite collaboration avec eux chaque fois qu'ils annoncent de nouveaux programmes, quand il s'agit d'essayer de travailler avec eux dans le monde de l'agriculture, et nous surveillons attentivement ce que font les pays de l'Union européenne, et tous les pays respectent leurs engagements.

Le président: Merci beaucoup. Nous sommes heureux de vous avoir entendus. Je pense que la dernière fois que j'ai vu Suzanne, c'est dans une rue envahie par les gaz lacrymogènes à Seattle. Merci beaucoup.

La séance est levée.