SINT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 22 mars 2000
La présidente (Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.)): Mesdames et messieurs, je déclare ouverte la séance du Sous-comité du commerce, des différends commerciaux et des investissements internationaux.
Nous avons l'honneur, aujourd'hui, d'accueillir des membres du Forum pour jeunes canadiens.
Bienvenue, mesdames et messieurs.
Le sous-comité est chargé d'examiner, entre autres, les relations économiques entre le Canada et l'Europe. Nous devons trouver des moyens d'accroître nos échanges.
On a beaucoup parlé de mondialisation. Or, il ne faut pas oublier que les échanges comptent, à l'heure actuelle, pour 42 p. 100 du produit intérieur brut du Canada. Même si les États-Unis demeurent pour l'instant notre principal partenaire commercial, nous devons, en tant que comité, essayer de trouver des moyens d'accroître nos échanges.
• 1540
Je vous souhaite donc à tous la bienvenue. J'espère que vous
allez trouver les exposés intéressants. Nous avons le grand plaisir
d'accueillir de nouveau M. Keyes, premier vice-président,
international, de la Chambre de commerce du Canada. Je tiens à
préciser qu'il était l'un des premiers témoins invités par le
comité. Toutefois, il n'a pu présenter son exposé parce que la
sonnerie d'appel a commencé à retentir pour je ne sais quelle
raison. Il recomparaît donc devant nous. Nous accueillons également
M. Randolph, président de l'Institut du vin canadien.
Bienvenue, messieurs, et merci d'être venus.
Monsieur Keyes, vous avez la parole.
M. Robert Keyes (premier vice-président, International, Chambre de commerce du Canada): Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant d'avoir accepté de me rencontrer aujourd'hui.
Le sujet sur lequel se penche le comité comporte de multiples facettes, et je pourrais en parler longuement. J'ai préparé un document de 17 pages, mais je n'en ferai pas la lecture. Je vais tout simplement vous en donner les grandes lignes, et nous pourrons peut-être ensuite avoir une discussion.
Permettez-moi d'abord de vous fournir quelques données statistiques. Vous en avez déjà reçu des témoins qui ont comparu lors de la réunion qui a été interrompue, et des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères. Les exportations canadiennes vers l'Europe ont augmenté d'environ 36 p. 100 entre 1993 et 1998. Elles ont marqué une légère hausse en 1999, d'après les chiffres fournis pour la période allant jusqu'à la fin novembre. Les investissements en provenance de l'Europe sont très importants, et nous espérons que les échanges commerciaux suivront la même tendance que ceux-ci. Toutefois, il est possible que ces investissements servent, du moins en partie, à favoriser les échanges intereuropéens et non à accroître les exportations de produits en provenance du Canada. C'est difficile à dire.
Nous avons effectué récemment une étude sur les obstacles à l'investissement auxquels sont confrontées les entreprises canadiennes à l'échelle internationale. D'après les résultats de celle-ci, il n'y aurait aucun problème du côté de l'Europe, comparativement à d'autres régions du monde.
Donc, nos chiffres, en termes réels, sont peut-être à la hausse, mais il reste que notre déficit commercial avec l'Europe ne cesse d'augmenter. En fait, l'écart continue de croître.
Dans le même ordre d'idées, la part de l'EU dans les exportations totales canadiennes n'a pas augmenté, mais elle est demeurée stable pour ce qui est des exportations vers les pays autres que les États-Unis. Il y a donc baisse des deux côtés.
Faut-il considérer cela comme une bonne ou une mauvaise nouvelle? J'aimerais penser qu'il s'agit là d'une bonne nouvelle. Manifestement, nos résultats à l'exportation sont avant tout attribuables à nos échanges avec nos partenaires de l'ALENA. Toutefois, nos échanges avec l'Europe ont augmenté en chiffres absolus, et englobent un plus grand nombre de produits de haute technicité à forte valeur ajoutée que dans le passé. L'arrivée du commerce électronique et l'essor qu'ont connu les entreprises canadiennes dans ce secteur sont donc de bon augure pour l'avenir.
J'ai jeté un coup d'oeil rapide sur certaines statistiques des échanges entre les États-Unis et l'UE et entre l'UE et l'Australie, et j'ai constaté que les tendances sont les mêmes que celles enregistrées au Canada. Donc, notre situation n'est pas unique. L'Europe s'occupe de ses intérêts, et les partenaires de l'ALENA s'occupent des leurs.
Il serait peut-être utile de passer rapidement en revue les questions qui figurent dans la note d'information. Passons à la première qui porte sur la présence et les activités du Canada en Europe, et la promotion des entreprises canadiennes.
Il semble acquis et fondé de dire que le Canada devrait être plus présent en Europe. Or, cet objectif semble difficile à atteindre. D'après la note d'information du comité et le rapport qu'a déposé le Sénat l'automne dernier, les cadres d'entreprise européens connaissent bien mal le Canada.
Il est plutôt simpliste de dire que le Canada est souvent perçu comme un satellite des États-Unis, que tout ce qu'il a à offrir, ce sont de grands espaces, des montagnes, des arbres, du poisson et rien d'autre. On est très mal renseigné au sujet de l'économie canadienne.
• 1545
Or, les entreprises qui cherchent à s'implanter à l'étranger,
elles, sont fort bien informées. Elles font leurs devoirs. Comme il
y a tellement d'information qui circule dans le monde, on ne
devrait pas attacher d'importance aux stéréotypes, même si ce n'est
pas le cas, et il ne devrait pas y avoir de déficit d'information.
En fait, il y a plutôt de nos jours surcharge d'information. Et la
concurrence est vive. Donc, je crois que nous devons nous faire
entendre et nous tailler une place dans les nombreux débouchés qui
existent.
Il y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte: mentionnons la concurrence au chapitre des investissements, la structure des entreprises, les filiales, les mandats de production, les liens, les systèmes de réglementation, les règles commerciales, la taille des marchés. Ce sont tous des facteurs qui doivent être pris en considération.
Il est également simpliste de laisser entendre, comme on le fait dans la note d'information, que les cadres d'entreprise canadiens connaissent mal le marché européen. Cela me donne à penser qu'on néglige systématiquement de faire en sorte que l'information soit disponible.
D'après mon expérience, que j'ai surtout acquise dans le secteur des ressources naturelles, le milieu des affaires est souvent mieux renseigné que le gouvernement sur les débouchés qui existent. Et les délais d'exécution, la qualité de l'information... le monde évolue tellement rapidement... l'arrivée de l'Internet et de différents moyens de communication. L'information est là.
Pourquoi notre part relative du marché européen diminue-t-elle? De nombreuses entreprises canadiennes préfèrent essentiellement concentrer leurs activités sur le marché nord-américain. La proximité géographique, l'ALENA, l'existence de liens Nord-Sud très solides—voilà pourquoi nos échanges et nos investissements avec les États-Unis sont si importants.
Toutefois, nous nous trouvons devant un dilemme. D'une part, il est dangereux de dépendre de façon si étroite des États-Unis pour nos échanges et nos investissements. D'autre part, il est vrai qu'il est beaucoup plus simple de transiger avec d'autres pays dans le contexte de l'ALENA. Voilà le problème auquel nous sommes confrontés. De plus, si elles ont à choisir, les entreprises vont préférer poursuivre leurs activités de croissance en Amérique du Nord plutôt qu'en Europe.
On a également tendance à croire, à tort ou à raison, que les marchés européens sont difficiles à pénétrer, qu'ils font partie de l'ancien monde protectionniste et bureaucratique, que les obstacles sont nombreux. Le Canada et les gouvernements de l'UE se doivent de contrer ces perceptions. Autrement, les entreprises vont aller s'implanter là où elles pensent que les débouchés sont les meilleurs.
D'ailleurs, c'est ce qu'elles ont fait. Elles se sont installées ailleurs, et non pas en Europe, à cause des obstacles tarifaires et autres auxquels elles ont été confrontées. Il existe en effet d'autres formes d'obstacles: les procédures douanières, l'étiquetage, les exigences d'agrément, les exigences sanitaires et phytosanitaires, les règlements, la structure des systèmes de distribution. Il y a toute une série d'obstacles. En effet, les barrières non tarifaires peuvent causer beaucoup de tort dans un contexte commercial moderne. Non seulement peuvent-elles empêcher l'entrée sur le marché d'une entreprise, et nous allons bientôt entendre parler du vin, mais elles peuvent également dissuader une entreprise de tenter de pénétrer un marché si elle a l'impression qu'elle n'y arrivera pas... on fait surtout allusion ici aux entreprises. Elles n'ont pas l'endurance voulue pour le faire.
Donc, je pense qu'il appartient au comité, dans le cadre de son étude, de recueillir des renseignements sur les barrières précises qui empêchent peut-être les entreprises de s'implanter en Europe. Il faut régler ces questions en priorité, non pas attendre qu'un accord commercial général soit conclu.
En fin de compte, ce ne sont pas les pays qui font des échanges ou des investissements, mais les entreprises. C'est le secteur privé qui fait tout le travail. Les gouvernements, eux, doivent établir les règles qui permettront de favoriser et d'encourager ces échanges et investissements.
Les gouvernements peuvent jouer un rôle important sur le plan de l'information, mais ce sont les entreprises qui, au bout du compte, vont prendre la décision de s'implanter là où les débouchés sont les plus intéressants. C'est ce que veulent leurs actionnaires et leurs conseillers financiers. Elles doivent s'implanter là où elles pourront rentabiliser leurs investissements. Et si elles choisissent d'investir près de chez elles, elles ne devraient pas s'en excuser.
Passons maintenant à la question du renforcement des liens commerciaux. Vous savez peut-être qu'une table ronde Canada-Europe a été organisée par plusieurs entreprises canadiennes et européennes implantées à Bruxelles, en vue de promouvoir le dialogue entre les entreprises du Canada et de l'UE. Quelques réunions ont déjà eu lieu. Nous avons évalué la formule, et nous essayons de trouver des entreprises de part et d'autre de l'Atlantique qui sauront défendre la cause d'un renforcement des liens commerciaux et de faire avancer l'initiative.
• 1550
La Commission de l'UE, la mission canadienne à Bruxelles et
des fonctionnaires du MAECI, à Ottawa, nous ont été d'un grand
soutien. Mais nous essayons toujours de mettre au point une formule
adéquate. Nous essayons de trouver un moyen d'encourager les
entreprises à prendre les rênes de cette initiative. Nous
poursuivons nos efforts en ce sens.
Peu importe ce que décident les participants à la table ronde, les entreprises petites et moyennes auront voix au chapitre, parce que c'est ce secteur, notamment celui des services, qui, au Canada, connaît la plus forte croissance. Jusqu'ici, la table ronde visait surtout les grandes entreprises de sorte qu'il a été difficile pour les petites entreprises de se faire entendre.
Je tiens à ajouter, avant d'aller plus loin, que j'ai rencontré, la semaine dernière, certains de mes homologues européens. Je leur ai demandé si, aux yeux de l'Europe, le Canada pesait lourd. Je veux tout simplement vous expliquer le processus que nous suivons et le genre de questions qu'on nous pose. J'ai reçu plusieurs réponses. D'abord, nous sommes perçus comme un satellite des États-Unis. L'attention est surtout centrée sur les États-Unis, dont nous constituons une sorte de prolongement vers le Nord. De plus, les États-Unis constituent une porte d'entrée au Canada. Ils n'ont pas été en mesure d'identifier des produits, des entreprises ou des services canadiens qui pourraient s'avérer utiles dans le contexte européen.
Je leur ai également posé une question sur leur centre d'intérêt. Ils nous ont dit que nous nous concentrions sur l'ALENA, et qu'ils se concentraient sur l'UE. Étant donné l'élargissement de l'UE vers Europe de l'Est, c'est là qu'ils vont concentrer leurs efforts.
Quand j'ai évoqué la possibilité de conclure un accord commercial à grande échelle, ils se sont montrés peu enthousiastes. Il sera difficile de leur faire accepter cette idée.
Or, ces personnes connaissent fort bien le milieu des affaires, mais je veux tout simplement vous faire part des réponses que j'ai reçues parce que cela a un impact sur le sujet à l'étude.
La deuxième question que vous avez posée portait sur les priorités commerciales du gouvernement d'un point de vue géographique. Les fonctionnaires sont mieux placés que moi pour répondre à cette question. Toutefois, je peux vous dire que nous devons accorder la priorité aux relations que nous entretenons avec notre principal partenaire commercial. Nous avons abordé la question des priorités géographiques avec notre comité des affaires internationales. Ce dernier a reçu les résultats d'une étude effectuée auprès de nos membres, qui révèle que, au titre des priorités, l'ALENA-États-Unis arrivent au premier rang, suivis de l'Europe, de l'APEC et de l'Amérique latine. Nous savons qu'Équipe Canada devait, dans le cadre de son prochain voyage, se rendre en Europe. On a maintenant décidé qu'elle se rendra en Chine. J'espère que l'Europe demeurera quand même sur la liste de destination d'Équipe Canada.
Pour ce qui est de savoir si les activités actuelles de promotion des échanges sont efficaces, je crois qu'il faudrait poser la question aux fonctionnaires et non aux gens d'affaires. Je tiens tout simplement à préciser que le gouvernement a réduit les ressources qu'il consacre à la promotion des échanges, et que cela a un impact sur la présence et la visibilité du Canada en Europe. Cela empêche également nos missions commerciales de transmettre des renseignements sur les débouchés qu'offre le Canada.
J'ajouterais que l'UE est très active sur ce front au Canada, sauf qu'elle a constaté que ses efforts n'ont pas suscité beaucoup d'intérêt auprès des gens d'affaires canadiens. Par exemple, elle a organisé récemment un colloque en vue d'informer les entreprises canadiennes sur les répercussions de l'euro. Seulement 35 entreprises y ont participé. Elle a également organisé un colloque sur la façon de faire des affaires au Canada, et seuls 50 participants y ont assisté. Comment expliquer ces résultats? Ils sont peut-être le fait d'un manque d'intérêt. Il se peut aussi que les entreprises canadiennes qui veulent s'implanter en Europe ont déjà tous les renseignements en main et qu'elles agissent en conséquence. Nous ne le savons pas.
Je tiens également à préciser—et j'ai déjà eu une discussion sur notre présence au Japon—que nos activités de promotion du tourisme nuisent peut-être aux efforts que nous déployons en vue de sensibiliser l'Europe au profil économique sans cesse changeant du Canada. Nous mettons l'accent sur les grands espaces, l'eau propre, les paysages, les forêts, la faune, les Autochtones, qui sont tous des thèmes très populaires. Toutefois, est-ce que cela nuit aux impératifs économiques d'une société évoluée, qui se caractérise par ses produits de haute technicité et ses technologies de fabrication de pointe, qui pratique le commerce électronique? Comment pouvons-nous concilier ces efforts pour éviter—et ce n'est qu'une hypothèse—qu'ils ne se neutralisent?
• 1555
Concernant les initiatives entre gouvernements pour promouvoir
les échanges, l'important ici de savoir si l'idée de conclure un
accord de libre-échange avec le Canada est bien accueillie.
Certaines entreprises ont entrepris d'examiner les incidences de
l'accord entre l'UE et le Mexique pour voir s'il ne leur
permettrait pas d'avoir accès au marché mexicain. Il est encore
trop tôt pour le dire, mais je pense que nous devons réfléchir à
nos intérêts commerciaux et aux incidences de l'accord entre le
Mexique et l'UE.
Lors d'une rencontre qui a eu lieu à la mi-décembre entre les participants à la table ronde et deux ministres du Commerce représentant le Canada et l'Europe, soit MM. Pettigrew et Lamy, j'ai demandé à M. Lamy de nous dire ce qu'il pensait de l'idée de libéraliser les échanges entre le Canada et l'UE. Sa réponse n'était guère encourageante. Il a toutefois laissé entendre que si l'on parvenait à présenter de bons arguments en faveur d'une telle initiative, l'UE l'envisagerait. Or, rien n'a encore été fait de ce côté-là. Il a également précisé que la situation entre le Mexique et l'UE d'une part, et entre le Canada et l'UE d'autre part, était très différente, en ce sens que l'UE a accès au marché mexicain et que le Mexique lui sert de porte d'entrée en Amérique centrale et latine. De plus, l'UE entretient des liens plus étroits avec le Mexique qu'avec la Canada. Si le Canada veut promouvoir cette idée, il devra se rendre en Europe pour le faire. Ce sera à nous de présenter des arguments en faveur d'un tel accord.
Vous avez posé une question au sujet des frictions commerciales. Nous pouvons en débattre. Il en va de même pour l'élargissement de l'UE.
Pour ce qui est des subventions agricoles, ce sont là des questions difficiles et je ne suis pas un expert en la matière.
Pour terminer, je tiens à dire qu'il n'y a pas de réponses simples aux questions que pose le comité. Nous ne pouvons pas accroître du jour au lendemain nos échanges avec l'Europe ou avec n'importe quelle autre région du monde. Les choses ne se passent pas comme ça.
Toutefois, nous sommes confrontés à un problème inquiétant. D'une part, il y a le danger que présente une trop grande dépendance à l'égard du marché américain. Nous devrions chercher à diversifier nos échanges. D'autre part, les possibilités d'affaires abondent au sud de la frontière. La croissance enregistrée au cours des dernières années démontre que le Canada sait tirer parti de ces possibilités, et cette question doit, pour nous, demeurer prioritaire. C'est ce que disent nos membres.
Nous avons négocié un bon accès en Europe, mais on peut améliorer les choses. Il y a toujours des obstacles et des problèmes. Je pense que, si un accord entre le Canada et les États-Unis peut accroître l'accès et les échanges, il faut l'envisager sérieusement. N'attendons pas qu'une occasion se présente pour améliorer la situation à propos de certains problèmes et produits de base.
Je pense que je vais m'arrêter ici. J'attends avec intérêt vos questions et vos commentaires.
La présidente: Merci beaucoup monsieur Keyes.
Monsieur Randolph, nous allons vous laisser faire votre déclaration avant de passer aux questions. Soyez le bienvenu. La parole est à vous.
M. Roger Randolph (président, Institut du vin canadien): Voulez-vous que je fasse ma déclaration maintenant?
La présidente: Oui.
M. Roger Randolph: Bien. Merci madame la présidente.
Je tiens aussi à remercier M. Keyes parce que je peux dire que je suis d'accord avec une bonne partie de ce qu'il a dit et que son exposé est une excellente entrée en matière à ce que j'ai à vous dire à propos d'un secteur plus précis, celui de l'industrie du vin.
Le rapport des échanges commerciaux de vin entre l'UE et le Canada est de 400 pour 1. En effet, les importations européennes sont évaluées à 400 millions de dollars et nos exportations à 1 million de dollars. Je ne dis pas que nous sommes vraiment en mesure d'exporter nous aussi pour 400 millions de dollars de vin, mais nous croyons que les échanges pourraient être un peu plus équilibrés qu'ils ne le sont actuellement.
De plus, les subventions agricoles dont M. Keyes a parlé nous désavantagent considérablement, en faisant baisser les prix en Europe et au Canada. Le Canada a respecté tous ses engagements envers l'OMC, mais pas l'Union européenne, comme je vais l'expliquer plus tard.
• 1600
J'aimerais ajouter que les règles du jeu ne sont pas
équitables non plus parce que l'Union européenne a accès au marché
canadien sans accord, tandis que nous pouvons avoir accès au marché
de l'Union européenne seulement dans le cadre d'un accord.
L'industrie vinicole européenne est assujettie à une réglementation excessive et elle essaie d'imposer ses règles à tous les pays qui veulent conclure un accord bilatéral avec elle. Cette attitude nuit autant à la croissance des importations à destination de l'UE qu'à la croissance de ses exportations. En effet, la part de marché des exportations de vins européens a perdu plus de 20 points depuis la fin des années 80, presque toujours au profit des producteurs de vin du Nouveau Monde.
La croyance largement répandue voulant que la réglementation permette de produire les meilleurs vins a été démolie par la désormais célèbre dégustation à l'aveugle de vins français et californiens qui a eu lieu à Paris en 1976. Des Chardonnay et des Cabernet Sauvignon français et californiens ont été goûtés à l'aveugle par 15 des dégustateurs français les plus influents qui, à la consternation de leurs concitoyens, ont préféré les vins californiens, qu'ils soient rouges ou blancs. Malgré les hauts cris, la situation s'est répétée.
Le Nouveau Monde, dont fait partie le Canada, conçoit la vinification de façon moins normative, préférant plutôt combiner l'art à la technologie et l'innovation aux études de consommation. Les résultats sont spectaculaires. La Californie s'est maintenant taillée une place solide parmi les grands du vin. Aujourd'hui, le Sauvignon blanc de Nouvelle-Zélande est la référence pour tous les Sauvignon blancs, et c'est le vin australien Grange qui a ravi au Château Petrus le titre de vin ayant le plus d'exotisme et de concentration dans le monde. Les vins du Chili sont ceux dont la croissance est la plus rapide sur les marchés internationaux, et ils sont suivis de près par ceux de l'Argentine. Quant aux vins d'Afrique du Sud, depuis la fin de l'apartheid, leurs ventes recommencent à être à la hauteur de leur réputation. Les viticulteurs du Nouveau Monde sont invités partout, y compris dans les pays de l'Union européenne, donnant ainsi naissance à une nouvelle espèce, le viticulteur volant.
Depuis la révolution dans la fabrication du vin, le Canada accumule les médailles d'or et les doubles médailles d'or dans les foires vinicoles les plus prestigieuses du monde. C'est cependant la fabrication du vin de glace canadien qui procure au Canada le plus de succès et de reconnaissance. Le trophée Civart qui est décerné à la Vinexpo de Bordeaux tous les deux ans est peut-être le prix le plus prisé dans le milieu puisqu'il est attribué au meilleur de tous les médaillés d'or—c'est la crème de la crème, si vous voulez. Depuis leurs débuts, qui sont récents, les vins canadiens ont remporté deux fois ce prix. Les deux fois, les marchands de vin du monde qui assistaient à la foire se bousculaient au stand du Canada pour goûter le vin, mais aussi pour le vendre, le distribuer ou le négocier sur le marché de l'Union européenne.
On pourrait croire que les ventes de vins de glace canadiens ainsi primés auraient fait merveille. Bien, elles sont florissantes ailleurs dans le monde, mais pas au sein de l'Union européenne. En fait, aucune bouteille de vin de glace canadien ne peut être vendue dans les pays de l'Union européenne. Même si le Canada et nos partenaires commerciaux de l'UE sont tous membres de l'OMC et même si le Canada a rempli ses obligations aux termes de tous les accords de l'OMC, notamment celles concernant les aspects des droits à la propriété intellectuelle, les mesures sanitaires et phytosanitaires, la nation la plus favorisée et le traitement national, l'UE s'entête à interdire l'accès du vin de glace canadien sur son territoire en vertu d'une définition technique qui, je dois le dire, n'est même pas respectée dans le cas de nombreux autres vins sucrés vendus en UE. La position de l'UE au sujet du vin de glace du Canada est indéfendable, point à la ligne, et il n'y a pas de mais ou de si qui tienne.
Pour ce qui est des exportations d'autres vins primés à destination de l'UE, le Canada est sur la liste de minimis, ce qui veut dire que nous pouvons exporter jusqu'à un millier d'hectolitres sans avoir à répondre aux exigences du régime de l'UE sur l'importation des vins. Cela permet ainsi à l'Union européenne d'interdire les exportations de vins canadiens sur son marché pratiquement comme bon lui semble.
Il y a des aspects techniques du régime d'importation de l'UE auxquels le Canada s'oppose fondamentalement parce qu'ils assurent à l'Union européenne un contrôle de fait sur les pratiques viticoles canadiennes, ce que nous n'accepterons jamais.
• 1605
Qu'est-ce que le Canada a fait pour changer la situation?
Depuis 10 ans, nous invitons l'UE à la table des négociations.
Jusqu'à maintenant, elle a refusé de dépasser le cadre des
discussions informelles, malgré l'intervention du ministre de
l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lyle Vanclief, et de son
homologue européen, Franz Fischler, qui ont tous les deux fait
savoir en septembre de l'an dernier à leur équipe de négociation
qu'ils voulaient que les choses aient progressé dans six mois,
c'est-à-dire d'ici mars 2000. L'équipe de négociation du Canada
rencontre celle de l'Union européenne à Bruxelles les 27 et 28 mars
pour proposer un accord de reconnaissance mutuelle sur la
vinification et l'étiquetage.
Cet accord sur le vin est à bien des égards l'aboutissement d'une initiative du gouvernement et de l'industrie du Canada qui a donné lieu au regroupement des producteurs de vin du Nouveau Monde, c'est-à-dire du Canada, de l'Argentine, de l'Australie, du Chili, de la Nouvelle-Zélande, de l'Afrique du Sud, des États-Unis et de l'Uruguay. Ce groupe s'est réuni tous les six mois depuis deux ans, dans ces différents pays, pour élaborer un accord de reconnaissance mutuelle fondé sur la confiance, la compréhension et l'approbation des pratiques de vinification et d'étiquetage de chaque pays.
Ce qui est pire encore, l'Union européenne et ses États membres subventionnent l'industrie vinicole de façon à fausser les échanges commerciaux à toutes les étapes, du vignoble à la table du consommateur. Nous ne nous faisons pas d'illusion sur les chances de succès de l'accord de reconnaissance mutuelle que nous proposons. En fait, compte tenu des antécédents de l'Union européenne, nous croyons qu'il est voué à l'échec et que nous serons finalement forcés de demander à un groupe spécial de l'OMC de se prononcer sur nos vins spécialisés.
Quoi qu'il en soit, plus généralement, nous avons vraiment le sentiment que les accords de reconnaissance mutuelle sont probablement un bon moyen d'accroître l'ensemble des exportations du Canada à destination de l'UE. Pour améliorer nos échanges commerciaux avec l'UE, il est toutefois essentiel de corriger les déséquilibres causés par les subventions faussant les échanges que l'Union européenne verse à toutes ses industries agricoles.
Merci madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup monsieur Randolph.
M. Marceau sera le premier à poser des questions.
[Français]
Avez-vous des questions à poser?
M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Oui, merci. Messieurs les témoins, merci d'être venus. Vous voyez, ils étaient venus pour vous voir vous, et pas nous.
Madame la présidente, je demanderais d'abord à nos deux témoins s'il leur est possible de nous laisser leurs notes après leur témoignage. Peut-être que le comité pourrait les faire traduire pour nous aider. D'accord, merci.
[Traduction]
La présidente: Vous pouvez les remettre à la greffière qui les fera distribuer dans les deux langues.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci à vous deux, messieurs Keyes et Randolph, pour vos présentations qui étaient fort intéressantes. Je voudrais commencer par vous, monsieur Keyes, parce que j'ai beaucoup de questions à vous poser.
[Traduction]
M. Robert Keyes: La présidente regarde l'heure.
[Français]
M. Richard Marceau: Je vais m'en tenir au temps qui m'est imparti. On va être très gentils. Il n'y a pas de médias. Vous me semblez un peu fataliste, monsieur Keyes. L'impression que j'ai de votre témoignage, c'est que vous nous dites qu'on a le plus grand marché, le marché le plus riche au monde juste à côté de nous et que la majorité des Canadiens ont des liens économiques, politiques et linguistiques assez forts avec États-Unis, et que c'est normal. Ce sont des choses de la vie.
Est-ce qu'on se raconte des histoires ici? Est-ce qu'on brasse des idées pour rien? Ne devrait-on pas plutôt se dire qu'il faut se concentrer sur les États-Unis et que si, de façon incidente, on peut percer le marché européen, ce sera tant mieux? Comme les État-Unis sont juste à côté, profitons-en le plus possible, et ainsi va la vie, C'est un peu l'impression que j'ai. Est-ce que je me trompe?
M. Robert Keyes: Non, je ne pense pas que vous vous trompez. Je ne crois pas être fataliste. Comme vous dites, nos voisins représentent un très grand marché et c'est sur lui que nous allons nous concentrer. Les gens d'affaires et le gouvernement nous disent que c'est leur priorité. Surtout dans le cas des petites entreprises, il est tout à fait naturel qu'elles cherchent des occasions d'affaires près de chez elles et non au loin.
Comme je l'ai dit dans mon exposé, cependant, pour un pays, la diversification et la croissance sur tous les autres marchés sont grandement souhaitables. Mais on ne peut pas s'attendre à ce que les échanges doublent du jour au lendemain rien qu'en appuyant sur un bouton. En bout de ligne, ce ne sont pas les pays qui font les échanges, mais les entreprises.
[Français]
M. Richard Marceau: Le comité étudie la question des relations Canada-Union européenne, et c'est très intéressant. J'ai lu hier la réponse du gouvernement au rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international sur la Zone de libre-échange des Amériques, et il me semble que le gouvernement fait de la Zone de libre-échange des Amériques une priorité beaucoup plus grande que les rapports économiques entre l'Europe et le Canada. Pensez-vous que les organismes gouvernementaux devraient faire plus d'efforts du côté de l'Amérique latine que du côté de l'Europe?
[Traduction]
M. Robert Keyes: C'est difficile de répondre à cette question au sujet des priorités. J'ai participé à une mission très fructueuse d'Équipe Canada en Amérique latine. Beaucoup de portes et de débouchés s'ouvrent là-bas. C'est un marché en pleine croissance qui connaît une révolution technologique et offre des occasions d'affaires incroyables dans le domaine technique, ce qui explique le succès des compagnies canadiennes sur ce marché. Le remplacement des technologies conventionnelles offre de formidables débouchés.
La situation n'est plus aussi florissante en Asie à la suite de la crise financière dans la région, mais à long terme...
Il y a tellement de possibilités partout qu'il faudrait idéalement aller partout. Mais c'est impossible. Nous devons concentrer nos efforts d'une certaine façon. La ZLEA est tributaire non seulement des forces du marché mais aussi de futurs accords commerciaux qui pourront être avantageux un jour. Le Canada songe à engager des discussions avec le Costa Rica en vue peut-être de conclure un accord. Cela pourrait nous ouvrir l'accès à d'autres pays d'Amérique centrale. On peut aussi se demander où ces pays doivent figurer sur notre liste de priorités.
Des gens ressentent un certain épuisement parce que nous sommes partout à la fois et nous sommes peut-être sur le point d'entreprendre une ronde de négociations multilatérales à l'OMC. Qu'est-il réaliste de faire? Il y a aussi l'ALEE qui s'annonce. Il est important d'accorder une attention particulière à nos relations avec les États-Unis, qui sont notre plus grand marché et notre principal partenaire commercial, mais il est bien difficile de dire que l'on doit choisir entre les deux, négliger un plus que l'autre ou que l'un doit avoir la priorité sur l'autre.
Dans le milieu des affaires, certaines entreprises vont privilégier l'Amérique latine et ne pas s'intéresser à l'Europe. D'autres, par contre, vont plutôt accorder la priorité à l'Europe et pas à l'Amérique latine. Donc il n'est pas facile de répondre à votre question.
M. Richard Marceau: À mon avis, il n'y a pas de réponse simple dans le domaine des négociations commerciales. Selon vous, l'arrivée de l'euro facilite-t-elle la vie des gens d'affaires?
[Traduction]
M. Robert Keyes: Bien, l'euro existe. Malheureusement, il est en baisse. Je pense qu'au départ les marchés financiers s'attendaient à ce que l'euro talonne presque le dollar américain. Or, en fait, à cause de la situation économique, l'euro a continué de glisser et ne semble pas encore montrer de signes importants de raffermissement.
Les transactions effectuées en euros ne sont pas encore nombreuses. On négocie encore en se servant des devises de chaque pays.
[Français]
M. Richard Marceau: Pensez-vous que cela va faciliter la vie des gens d'affaires?
[Traduction]
M. Robert Keyes: C'est possible, mais je pense que personne ne comprend encore très bien ce que la valeur relative de l'euro va représenter dans chaque pays.
Un très gros joueur n'a pas encore adopté l'euro. En effet, la livre anglaise se classe probablement au troisième rang des devises les plus échangées dans le monde, et cela n'aide pas l'euro à s'implanter. En principe, je pense que oui. L'euro devrait aussi permettre de faciliter les comparaisons entre les pays européens. Cette devise va permettre d'établir un système d'équivalence qui va peut-être éclairer les gens.
[Français]
M. Richard Marceau: C'est un peu l'équivalent du test du Big Mac que l'économiste fait, je suppose.
[Traduction]
M. Robert Keyes: Effectivement, c'est le test du Big Mac.
[Français]
M. Richard Marceau: Étant donné que le Canada est considéré par plusieurs gens d'affaires, selon votre témoignage, comme un simple appendice des États-Unis, pensez-vous que s'il y avait de nouveaux arrangements monétaires entre le Canada et les États-Unis, il serait encore plus facile d'attirer des investissements en disant qu'il y a non seulement une zone de libre-échange, mais aussi une stabilité monétaire? On sait que le Canada se sert déjà de son appartenance à l'ALENA comme d'un avantage pour attirer les entreprises européennes qui voudraient s'établir au Canada afin d'exporter vers les État-Unis et aussi au Mexique, mais principalement aux États-Unis. S'il y avait une zone monétaire unique en Amérique du Nord, est-ce que cela nous aiderait?
[Traduction]
M. Robert Keyes: Beaucoup de problèmes sont associés à la monnaie commune, surtout sur le plan de la politique et de la souveraineté. Nous ne verrons pas cela avant longtemps. Une véritable union douanière dans le cadre de l'ALENA offrirait peut-être plus d'avantages qu'une zone monétaire unique.
Nous avons un accord de libre-échange avec le Mexique, mais il ne s'agit pas vraiment de libre-échange; le commerce est encore très administré. Il y a une libéralisation, mais il y a encore beaucoup d'obstacles, de problèmes et de règles commerciales dont il faut discuter. L'ALENA ne se compare pas du tout à ce qui se passe en Europe, loin de là.
La présidente: Nous allons peut-être nous arrêter ici pour y revenir plus tard.
Madame Sgro.
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Ma question s'adresse à M. Keyes et à M. Randolph. Qu'est-ce que le gouvernement peut faire de plus pour accroître la concurrence et les débouchés? Sommes-nous trop optimistes? Comme M. Marceau, je pense qu'ils sont pessimistes, mais il faut aussi être réalistes et tenir compte des règles actuelles et de ce que nous pouvons faire pour améliorer les échanges. Est-ce simplement une question de temps, de débouchés à trouver?
M. Robert Keyes: On peut aller du général au particulier, mais le rôle du gouvernement consiste à bien établir les règles et le cadre et à créer des conditions favorables. Il ne s'agit pas seulement des conditions pour les échanges et les investissements internationaux, mais aussi des conditions à l'intérieur du pays.
Mes collègues européens estiment que le climat aux États-Unis est beaucoup plus favorable pour les entreprises et les investissements qu'il ne l'est au Canada. D'après eux, nous avons encore beaucoup de choses à régler. C'est pourquoi nous restons dans l'ombre de nos voisins du Sud.
• 1620
Nous ne devons pas nécessairement être pessimistes, mais il
faut voir de façon réaliste les nombreux obstacles qui se trouvent
sur notre chemin, toutes ces petites choses qui finissent par
décourager les entreprises. Il n'y a pas seulement la question des
tarifs douaniers. Il y a aussi tous ces petits aspects techniques,
et ce dont M. Randolph a parlé. Ce sont de véritables obstacles et
il faut se concentrer là-dessus. Mettons le doigt dessus,
examinons-les en détail et essayons de trouver des solutions. S'il
faut s'adresser à l'OMC, faisons-le. Mais essayons de régler ces
problèmes de façon bilatérale.
L'OMC est l'étape ultime qui est à la fois compliquée et coûteuse. Il y a sûrement des mesures à prendre pour régler ces obstacles de façon bilatérale. Soyons réalistes; nous ne pouvons pas simplement appuyer sur un bouton pour faire changer les choses du jour au lendemain. C'est un long processus qui prend du temps.
Mme Judy Sgro: Que pouvons-nous faire pour accélérer le processus?
M. Robert Keyes: Votre rapport pourrait examiner en détail certains problèmes qui nuisent à la croissance des entreprises. Présentez des solutions pratiques et établissez l'ordre de priorité des mesures que le gouvernement pourrait envisager. Ne vous en tenez pas seulement à des généralités, mais essayez d'examiner des aspects précis par secteur, d'après ce que les témoins vous diront, comme dans le cas du vin.
La présidente: Monsieur Randolph.
M. Roger Randolph: Merci.
Je suis d'accord avec tout ce que M. Keyes a dit. Nous essayons depuis 10 ans d'ouvrir les portes de l'Union européenne au vin de glace canadien. Nous sommes plutôt épuisés de faire des démarches à l'amiable, si je puis dire. Pour nous, il ne nous reste plus qu'à nous adresser à un groupe spécial.
Au sujet du vin de glace, l'obstacle technique auquel nous sommes confrontés est la définition que l'Union européenne donne du vin, et qui précise sa teneur en alcool. La teneur en alcool totale est la somme de la teneur en alcool réelle et de celle qui résulte de la fermentation du sucre résiduel du vin. La teneur en alcool des vins de glace canadiens dépasse la limite, mais c'est la même chose pour les Sauternes, les vins de glace allemands et autrichiens ainsi que le Tokay de Hongrie et, pourtant, on n'interdit la vente d'aucun de ces vins sur le marché européen. C'est un des problèmes.
Par ailleurs, il me semble que l'Union européenne est si prescriptive en matière d'agriculture qu'il est très difficile de parvenir à un genre d'accord bilatéral au sens traditionnel du terme. Alors que nous ne nous faisons pas d'illusions au sujet de l'accord de reconnaissance mutuelle, nous croyons toutefois que cette approche offre des possibilités pour d'autres domaines relatifs à l'agriculture.
Mme Judy Sgro: Quel est le problème? Si le vin de glace du Canada est équivalent à celui de l'Allemagne et à celui de certains des autres pays, pourquoi ne peut-on pas les convaincre d'ouvrir la porte au vin de glace canadien?
M. Roger Randolph: C'est exactement la question que nous posons. J'imagine qu'ils se sont arrangés pour obtenir des dérogations afin de pouvoir le faire. En ce qui concerne l'UE et le Canada, ils n'appliquent pas le principe du traitement national ni non plus les principes de l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires en vertu duquel on ne peut empêcher l'accès à un produit, à moins qu'il ne présente une menace pour la santé ou la sécurité.
Mme Judy Sgro: Pourquoi ne peut-on pas gagner cette bataille?
M. Roger Randolph: La seule façon de gagner consiste à saisir l'OMC de cette affaire.
Mme Judy Sgro: Qu'attendons-nous alors?
M. Roger Randolph: Eh bien, c'est la prochaine étape...
M. Robert Keyes: Vous ne voulez quand même pas...
M. Roger Randolph: ... à moins d'avoir exploré toutes les autres possibilités.
M. Robert Keyes: Exactement.
Mme Judy Sgro: Vous avez exploré toutes les autres possibilités.
M. Robert Keyes: Ce sont des mesures que l'on ne veut pas prendre à moins d'y être absolument obligé, car on arrive alors à une situation très polarisée.
La plupart des différends commerciaux n'arrivent jamais jusqu'à l'OMC. Ils sont réglés à l'avance. Des arrangements se font.
Mme Judy Sgro: Pour ce qui est des vins de glace, allons-nous trouver un arrangement avant de nous adresser à l'OMC?
M. Roger Randolph: Je ne suis pas très optimiste.
Mme Judy Sgro: Combien de temps allez-vous attendre avant de passer à la prochaine étape?
M. Roger Randolph: Eh bien, nous allons voir. Nous allons voir comment l'UE va réagir à la proposition MRA qui sera faite à la fin du mois, à Bruxelles. Nous voulons connaître cette réaction, mais je crains que si elle est aussi négative que nous le pensons, nous nous adresserons alors à un groupe spécial chargé de la question des vins de glace.
M. Robert Keyes: Je ne voudrais pas avoir l'air trop pessimiste, mais voyez ce qui se passe au sujet de la question des hormones du boeuf...
La présidente: J'allais justement poser une question à ce sujet.
M. Robert Keyes: ... où essentiellement—peut-être que j'exagère un peu—l'Europe a déclaré: «Très bien.» Le groupe spécial a dit: «Vous êtes coupables.» Ils ont répondu: «Très bien, dites ce que cela va nous coûter, allez-y, prenez des mesures de représailles, nous n'allons rien changer.» Même après les décisions du groupe spécial, vous n'obtenez pas toujours exactement les résultats que vous recherchez.
La présidente: Merci.
Avant de revenir à M. Marceau, peut-être pourrais-je simplement ajouter que c'est justement la question que j'allais poser; dans le cas des hormones du boeuf, nous sommes en train de penser à une indemnisation.
Monsieur Randolph, même si j'ai toujours apprécié le vin français, je suis tentée de le boycotter à jamais en fonction de ce que vous venez de dire.
Que pouvons-nous faire?
M. Roger Randolph: [Note de la rédaction: Inaudible]... une entente spéciale.
La présidente: L'objet de toute cette étude consiste à examiner comment nous pourrions augmenter nos échanges commerciaux. Après vous avoir écoutés, vous-même et M. Keyes, le cas semble quasiment désespéré, nous nous frappons la tête contre les murs, lorsque nous essayons d'augmenter nos échanges avec l'Europe.
J'aimerais vous demander si, en tant que pays n'appartenant pas à l'UE, nous pouvons espérer faire quoi que ce soit sur les marchés de l'Europe de l'Est et de l'Europe centrale? Pouvons-nous y favoriser les échanges de manière que, le jour où ces pays deviendront membres de l'UE, ils pourront avoir une influence sur les échanges et nous pourrons être en mesure de négocier un niveau d'entrée minimum? Quelle est la solution à cet égard qu'il faudrait privilégier au lieu d'abandonner la partie et de se rallier uniquement aux Américains? J'aimerais connaître votre point de vue à tous les deux.
M. Robert Keyes: C'est exactement la question de l'expansion en Europe de l'Est dont je n'ai pas parlé dans mon exposé. Je pense que cela offrira des opportunités. De toute évidence, le marché va s'élargir. Toutefois, dans certains de ces pays où nous avons un accès préférentiel, ne risquons-nous pas de perdre cet accès sous prétexte que ces pays seront assujettis aux règles de l'UE?
Au cours des négociations, il va falloir donc être très prudent et examiner les arrangements possibles, car nous risquons de perdre la partie, vu que ces pays seront alors membres de l'UE et que l'accès préférentiel dont nous bénéficions risquera d'être compromis.
La présidente: Monsieur Randolph.
M. Roger Randolph: Je suis d'accord avec ce que vient de dire M. Keyes.
Pour ce qui est du vin de glace, il faut dire qu'il s'agit d'un produit haut de gamme et que les opportunités qui existeraient dans les pays non occidentaux de l'UE seraient très limitées. Il ne serait tout simplement pas viable de dépenser de l'argent à ce sujet si l'on s'en tient à l'efficience.
La présidente: À part le vin de glace, qu'en est-il des autres vins? Est-ce de nouveau une question de proximité entre l'Europe et l'Europe de l'Est et l'Europe centrale?
M. Roger Randolph: Je crois que la proximité explique bien des choses. Les pays de l'Europe de l'Est sont, par tradition, non importateurs de vin. Il y a certainement un petit créneau dans cette région, j'imagine, mais là encore, que faire avec les ressources disponibles afin de...?
La présidente: Les États-Unis ont-ils la même expérience à propos du vin ou s'agit-il d'une expérience propre au Canada?
M. Roger Randolph: À l'échelle mondiale, le rôle du Canada est vraiment peu important. Une société américaine pourrait embouteiller en un jour ce que nous embouteillons en un an. Les économies d'échelles sont donc très différentes.
Pour revenir au point initial, même si les pays de l'Europe de l'Est s'intéressaient à essayer un produit aussi original que le vin de glace canadien, je crois que ce serait de façon très limitée. Nous n'avons tout simplement pas...
La présidente: Je vois que mon collègue expert en agriculture est ici.
Vous avez dit qu'en ce qui concerne le vin, les subventions à l'agriculture posent un problème et que cela semble également toucher notre vin par opposition à tout le reste. Comment peut-on y remédier? Faudrait-il réduire les subventions à l'exportation au cours des prochaines négociations commerciales? Cela aiderait-il notre industrie vinicole?
M. Roger Randolph: Absolument, cela aiderait notre industrie vinicole. Plus nous pouvons réduire ces subventions... qui ne se rapportent pas uniquement aux exportations. Elles s'appliquent à tout le processus, à partir du vignoble, en ce qui concerne l'essouchement, jusqu'à l'entreposage, en passant par le stockage et la distillation. La somme de tout cela équivaut à 924 millions de dollars américains de subventions UE pour le vin; c'est le dernier chiffre que j'ai.
Par conséquent, oui, plus nous pouvons réduire ces subventions, plus nous avons la possibilité de faire concurrence.
La présidente: Monsieur Keyes.
M. Robert Keyes: J'aimerais simplement répondre à l'observation que vous avez faite au sujet du pessimisme qui se manifeste à propos de l'augmentation des échanges. Les échanges commerciaux prennent de l'ampleur en termes absolus; ce sont les chiffres relatifs qui ne sont pas aussi bons. C'est à cause de l'expansion du commerce intérieur au sein de l'ALENA et au sein de l'UE.
En termes absolus toutefois, nos échanges commerciaux continuent à prendre de l'ampleur. Il est à espérer que les investissements vont finir par donner lieu à plus d'échanges, mais cela prend du temps.
[Français]
La présidente: Monsieur Marceau.
M. Richard Marceau: Vous avez insisté, lors de votre présentation, pour dire que les gens d'affaires européens que vous avez rencontrés semblaient à tout le moins assez tièdes face à l'idée d'une entente de libre-échange avec l'Union européenne.
[Traduction]
M. Robert Keyes: [Note de la rédaction: Inaudible]... c'est tout du moins ce que je comprends.
[Français]
M. Richard Marceau: Peut-être qu'il me manque beaucoup d'éléments, mais je ne comprends pas pourquoi l'Union européenne voudrait avoir une entente de libre-échange avec le Mexique, un pays qui, bien qu'ayant un potentiel économique assez important, n'a pas le potentiel d'importation que peut avoir le Canada. Quel était alors l'intérêt des pays de l'Union européenne à faire une entente de libre-échange avec le Mexique, qui n'a pas d'accord de libre-échange avec d'autres pays d'Amérique latine, à moins que je me trompe, alors qu'ils sont tièdes envers le Canada qui, pourtant, a déjà une entente de libre-échange avec le Chili et, potentiellement, avec d'autres pays.
Comment expliquez-vous cela?
[Traduction]
M. Robert Keyes: Je pense que cela dépend de l'accès de certains marchés européens à l'Amérique centrale et à l'Amérique du Sud; ces pays européens passent par le Mexique et utilisent ce pays comme porte d'entrée vers le Sud.
C'est ainsi qu'on me l'a expliqué. Je n'ai pas de connaissances détaillées, mais c'est ainsi qu'on me l'a expliqué.
[Français]
M. Richard Marceau: Si, demain matin, M. Robert Keyes était ministre du Commerce international et qu'il était confronté au problème du commerce entre le Canada et l'Union européenne, que ferait ce nouveau ministre? Quelle entente chercherait-il à établir avec l'Union européenne—ou peut-être n'en chercherait-il pas—pour favoriser le commerce entre les deux entités?
M. Robert Keyes: J'imagine que je proposerais quelques initiatives.
La première consisterait à identifier clairement certains des obstacles qu'il est possible de surmonter et à s'y attaquer de manière très concrète et approfondie. Dans le domaine du vin, il s'agit des exigences en matière d'étiquetage, de distribution et même de la façon de calculer les tarifs douaniers.
J'en parlais justement l'autre jour avec un représentant de l'industrie des produits alimentaires: les tarifs douaniers des produits alimentaires à destination de l'Europe sont calculés en fonction de la norme CAF, tandis que les produits provenant de l'Europe sont calculés en fonction de la norme FAB, ce qui signifie que la valeur en douane des produits exportés vers l'Europe est supérieure et que, par conséquent, le tarif douanier est supérieur par rapport aux mêmes produits qui sont importés au Canada. Il y a donc un déséquilibre; il s'agit d'une question très simple, mais technique. Je pense qu'il faut s'attaquer à ces questions techniques en premier lieu. Il est inutile d'attendre la conclusion d'un genre d'accord multilatéral. Il faut s'attaquer à ces obstacles particuliers.
Deuxièmement, en matière de promotion et de sensibilisation, il faudrait continuer à faire ce que l'on fait et faire savoir que notre pays a changé. Nous ne sommes plus une économie basée sur les ressources naturelles seulement. Nous évoluons rapidement, nous avons une grande variété de produits, mais aussi de services, à offrir. Nous devons faire notre propre publicité.
[Français]
M. Richard Marceau: Est-ce qu'il me reste du temps?
La présidente: Oui.
M. Richard Marceau: Vous avez mentionné, monsieur Keyes, qu'il y avait non seulement un manque d'information sur le Canada en Europe, mais aussi un manque d'information sur l'Europe chez les gens d'affaires du Canada.
Si on accepte votre prémisse selon laquelle ce sont les gens d'affaires qui font du commerce et non pas les gouvernements, que peut faire un gouvernement pour favoriser une plus grande connaissance du potentiel économique, quand même assez exceptionnel, de l'Union européenne pour une entreprise du Canada? À part faire des beaux dépliants, comment faire pour que l'information se rende à Jos Bleau, homme ou femme d'affaires non seulement de Montréal, de Toronto et des grandes villes, mais aussi des petites et moyennes entreprises qui auraient des services ou des produits à vendre en Europe?
[Traduction]
M. Robert Keyes: Je crois que vous avez mal compris ce que je viens de dire. Je n'ai pas dit qu'il y a un manque d'information. Ce sont des idées reçues. Je ne pense pas qu'il y ait un manque d'information, mais au contraire, une surcharge d'information. Je crois que les entreprises canadiennes optent pour la solution de facilité; elles ne se tournent pas vers l'Europe, mais vers le Sud.
Le gouvernement fait un bon travail en matière d'information, qu'il communique le mieux possible. Vous savez toutefois qu'on ne peut pas forcer les gens. La concurrence existe bel et bien et il y a trop d'information et non pas un manque d'information.
[Français]
M. Richard Marceau: D'accord. Merci.
La présidente: Collègues, avez-vous des questions?
[Traduction]
Y a-t-il des questions?
D'accord, monsieur Calder.
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
En examinant rapidement certains des documents—veuillez m'excuser d'ailleurs d'être en retard, mais il y avait aussi une séance du Comité des transports—je vois que nos exportations actuelles à destination de l'UE représentent un million de dollars et nos importations, 350 millions de dollars. Il semble y avoir un important déséquilibre. Une des choses que nous reproche l'UE, c'est que nous utilisons certaines appellations comme champagne, porto ou sherry. Ne s'agit-il pas d'une classification du genre de vin? Quelle appellation utiliser autrement?
La présidente: Monsieur Randolph.
M. Roger Randolph: Nous avons en fait proposé, dans le cadre d'un accord bilatéral avec l'UE, de supprimer progressivement l'utilisation de ce que nous appelons les semi-génériques, qui sont par exemple le champagne canadien, le sherry canadien, le porto canadien, etc.; jusqu'à présent, nous n'avons pas réussi à convaincre l'UE de négocier les paramètres.
M. Murray Calder: D'accord.
Les Européens semblent également avoir un problème à propos de nos normes de vinification, de la façon dont nous faisons le vin ici. Quels sont, d'après eux, ces problèmes? S'agit-il du genre d'herbicides ou de pesticides utilisés dans nos vignobles? Qu'est-ce que c'est?
M. Roger Randolph: L'UE a des problèmes à propos des pratiques de vinification de pratiquement n'importe quel pays qui n'est pas membre de l'UE. Aucune pratique utilisée au Canada, aux États-Unis, au Chili ou dans n'importe quel autre pays ne présente une menace pour la santé ou la sécurité. Cela devrait être la condition nécessaire à la conclusion d'un accord avec l'UE. Nous n'avons pas encore signé pareil accord, mais nous avons un accord de principe avec les pays producteurs du Nouveau monde, selon lequel nous acceptons et reconnaissons leurs pratiques de vinification dans la mesure où ils acceptent et reconnaissent nos pratiques de vinification comme étant de bonnes pratiques commerciales.
Nous espérons qu'une fois signé, cet accord servira de modèle pour l'UE.
M. Murray Calder: Eh bien, la production du vin au Canada est assujettie aux normes de santé, qui je crois, sont les meilleures au monde. Essentiellement, l'UE dit que nos normes de santé ne sont pas... les Européens critiquent nos normes de vinification en disant que les leurs sont meilleures.
M. Roger Randolph: Précisément.
M. Murray Calder: Pourrions-nous les attaquer à ce sujet et quelles seraient nos chances de gagner?
M. Roger Randolph: Cela dépend de l'issue de la rencontre prévue pour la fin du mois, à Bruxelles; ce sera notre prochaine étape, en fait.
M. Murray Calder: D'accord.
C'est ma dernière question, madame la présidente.
Au Canada même, l'industrie viticole prend rapidement de l'ampleur. Nous avons maintenant la VQA et je crois que les Ontariens commencent à se rendre compte de la qualité. Un des députés de la Chambre des communes a d'ailleurs remporté des prix. Bien sûr, le vin de glace et même les mélanges de vins de glace deviennent très populaires.
Y aurait-il un moyen de demander à nos magasins de distribution d'alcool—la RAO en Ontario par exemple—d'être un peu plus favorables à l'égard des marques canadiennes par rapport aux marques européennes—si les Européens nous causent un problème—sans pour autant déclencher un différend commercial?
M. Roger Randolph: Nous avons en fait tout récemment contacté non seulement la Régie des alcools de l'Ontario, mais aussi celle de la Colombie-Britannique, pour leur proposer une nouvelle façon de présenter les produits. Il suffit d'attendre et de voir ce qui va se produire.
De façon plus générale, l'industrie canadienne du vin s'est fixé l'objectif d'augmenter sa part du marché à 50 p. 100, part qui était la sienne avant le libre-échange, alors qu'aujourd'hui elle équivaut à 35 p. 100, après le libre-échange et ce, malgré de nombreuses améliorations—la création de la VQA, etc. Apparemment, ces deux régies d'alcool semblent vouloir nous aider à atteindre cet objectif.
M. Murray Calder: D'accord.
Pour ce qui est de la proposition relative à la présentation des produits, comment cela fonctionne-t-il? Les vins canadiens sont-ils présentés à l'avant, pour les achats par impulsion, ou est-ce un peu plus sophistiqué que cela? Comment cela fonctionne-t-il?
M. Roger Randolph: C'est ce que nous aimerions.
M. Murray Calder: D'accord.
La présidente: M. Keyes a dit au début qu'il devait partir assez tôt, par conséquent, y a-t-il des questions rapides à lui poser?
Monsieur Speller.
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): En fait, non, je n'ai pas de question à lui poser, j'en ai une sur le vin.
La présidente: D'accord. Nous allons donc laisser M. Keyes partir et continuer avec M. Randolph.
M. Robert Keyes: J'aimerais simplement dire que les membres du comité ont accès à mes notes. S'il y a d'autres questions, n'hésitez pas à me contacter; je pourrais de toute façon revenir. J'ai malheureusement un conflit d'horaire aujourd'hui, mais je suis très heureux d'avoir pu vous rencontrer pour débattre de ces questions. Bonne chance pour votre étude dont j'attends avec impatience les résultats.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Keyes.
M. Robert Keyes: Je vous en prie.
M. Bob Speller: En fait, j'aimerais parler à M. Keyes.
La présidente: Peut-être pouvons-nous poursuivre nos discussions en privé. Merci beaucoup d'être venu. Monsieur Randolph, aimeriez-vous conclure...
M. Roger Randolph: Oui, madame la présidente. J'aimerais simplement répondre à la question que vous avez posée précédemment, de façon plus vaste. J'ai simplement examiné la question au plan économique, à savoir que les économies d'échelle sont plus grandes aux États-Unis. Du point de vue politique toutefois, les États-Unis ont conclu des accords avec l'UE au début des années 80, appelés les accords sur le vin. Même malgré ces accords, les États-Unis doivent à l'occasion obtenir des dérogations pour plusieurs de leurs pratiques de vinification.
D'après nous, la raison pour laquelle les États-Unis réussissent davantage à obtenir ces dérogations s'explique simplement par la composition constitutionnelle des États-Unis par rapport à celle du Canada où c'est le gouvernement fédéral qui mène les négociations, mais où ce sont en fait les provinces qui prennent les décisions en matière d'importation, de commercialisation, de distribution, etc. C'est l'un des problèmes que nous devons également régler.
La présidente: Monsieur Randolph, pourriez-vous simplement m'expliquer ce que vous voulez dire par dérogation?
M. Roger Randolph: C'est un genre d'autorisation spéciale qu'il faut renouveler à l'occasion. Si, par exemple, nous pouvions obtenir une dérogation pour le vin de glace, elle pourrait se lire comme suit: «Le Canada a l'autorisation de vendre ses vins de glace à l'UE malgré le fait qu'ils ne répondent pas aux exigences de la définition». Il faudrait renouveler cette dérogation régulièrement.
La présidente: Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Désolé d'être en retard. J'ai entendu ce que vous avez dit au sujet de l'aspect provincial de la commercialisation. Cela est vrai dans beaucoup d'autres industries. Diverses industries ont d'ailleurs proposé ce qui suit au gouvernement fédéral: «Vous orchestrez ceci et nous déléguons certains pouvoirs, de façon non officielle, au gouvernement fédéral». Le gouvernement fédéral joue alors effectivement ce rôle. Pensez-vous que cela serait plus efficace dans nos tractations avec l'Union européenne dans ce domaine? Vous dites que cela revient à diviser pour régner.
M. Roger Randolph: Oui. Je pense qu'il existe probablement un moyen de faire admettre à l'UE que même si les décisions en matière d'importation et de distribution relèvent des provinces, il existe un mécanisme qui répond à ses exigences sans...
M. Alex Shepherd: Je demande en fait si nous ne sommes pas notre pire ennemi, vu que toutes les provinces se disputent entre elles au lieu d'envisager le tout globalement, l'objet de l'exercice consistant à obtenir une part du marché en Europe.
M. Roger Randolph: Je ne pense pas qu'il y ait trop de querelles internes entre les provinces à ce sujet, mais par contre, je crois qu'il faut apaiser certaines sensibilités en matière de compétence.
La présidente: Merci.
Monsieur Speller, avez-vous une question à poser à M. Randolph?
M. Bob Speller: Non, tout va bien.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Randolph. Vous nous avez certainement donné matière à réflexion. Merci d'être venu.
Collègues, je vous remercie de votre participation. La séance est levée.