INST Rapport du Comité
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CHAPITRE 3 : LE TRIBUNAL DE LA CONCURRENCE
Organisation et composition du Tribunal Le Tribunal de la concurrence a été créé en 1986 lorsquon a procédé à une réforme en profondeur du droit de la concurrence canadien et remplacé la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions par la Loi sur la concurrence. Le Tribunal est une cour spécialisée à la fois en matière déconomie et en matière de droit, qui entend et tranche toutes les demandes présentées sous le régime des parties VII.1 et VIII de la Loi sur la concurrence (en ce qui concerne notamment les fusions, labus de position dominante et dautres pratiques commerciales susceptibles dexamen). Organisme décisionnel indépendant de tout ministère, le Tribunal se compose dau plus quatre membres provenant de la magistrature et dau plus huit autres membres. Les membres juristes sont choisis parmi les juges de la Section de première instance de la Cour fédérale, les autres étant nommés par la gouverneur en conseil sur la recommandation du ministre de lIndustrie. Le Tribunal examine des questions complexes déconomie et de droit, et il rend des décisions qui ont une incidence non seulement sur les droits et le bien-être économique des parties, mais également sur les entreprises et les consommateurs au Canada et de létranger. Afin de pouvoir résoudre ces questions, le Tribunal est investi des mêmes pouvoirs quune cour supérieure darchives, y compris le pouvoir dentendre des preuves, de convoquer des témoins, dordonner la production et la consultation de documents, dassurer lexécution dordonnances et, de façon générale, de faire ce qui est nécessaire pour exercer sa compétence. Toutes ces procédures visent un seul objectif : permettre au Tribunal de recueillir les preuves dont il a besoin pour rendre une décision judicieuse et équitable sur les faits du litige. Le Tribunal ne rassemble pas déléments de preuve; il sen remet plutôt aux parties (ou, habituellement, à leurs avocats), pour assembler et présenter les preuves dont il a besoin pour rendre une décision. Les parties produisent leurs éléments de preuve, chacune essayant de démontrer quelle a raison. Les parties ont également loccasion de « tester » les preuves de la partie adverse lors dun contre-interrogatoire. Ce système appelé le modèle « adversatif » ou « contradictoire » est utilisé de manière courante par les tribunaux canadiens et dautres organismes darbitrage. Dans le système « adversatif » du Tribunal, le commissaire de la concurrence est lune des parties et il engage des procédures en présentant une demande au Tribunal. Par conséquent, le Tribunal et le Bureau fonctionnent de manière totalement indépendante lun par rapport à lautre. Il ny a aucun partage des ressources ni consultation sur les instances en-dehors du processus officiel de règlement des différends. De fait, cette stricte séparation des fonctions est jugée essentielle pour préserver lintégrité du processus décisionnel. Le Comité est au courant que dautres administrations (notamment lUnion européenne) utilisent un modèle différent, en vertu duquel les rôles denquêteur et darbitre sont fondus en un seul. Le Comité est davis que notre modèle actuel est adéquat, compte tenu à la fois de la dynamique fonctionnelle de notre système de droit et des exigences liées à la Charte canadienne des droits et libertés. En outre, la séparation des fonctions au sein du système adversatif donne généralement des résultats sensés et équitables. Néanmoins, le système peut savérer passablement lent et lourd sur le plan de la procédure. Sans compter que les instances sont souvent rendues plus complexes par la présence de parties et dintervenants multiples, ainsi que par la présentation de requêtes interlocutoires sur des questions de procédure. Les affaires contestées portent souvent sur des considérations économiques très complexes, par exemple la définition du marché, lemprise sur le marché, les barrières à lentrée, etc. Les parties font souvent appel à de nombreux experts pour mettre en lumière toutes les facettes du débat économique. Ces experts peuvent produire des rapports et présenter au Tribunal des preuves qui feront lobjet dun contre-interrogatoire. Dans une certaines mesure, à tout le moins, les coûts élevés des instances dont est saisi le Tribunal sont attribuables à ce qui semble une tendance croissante à engager de plus en plus dexperts. Par ailleurs, certains témoins ont fait observer que les témoins experts ont de plus en plus tendance à intercéder en faveur de leurs clients, cest-à-dire à affirmer des conclusions de droit plutôt que de se cantonner à leur rôle qui est daider le Tribunal à juger correctement des faits. Le Comité est particulièrement conscient du fait que les frais élevés des procédures engagés devant le Tribunal peuvent décourager les petites et moyennes entreprises de soumettre à ce dernier des causes légitimes. Peu déléments de preuve ont été présentés au Comité sur les attributions des dépens, mais le Tribunal semble disposer dun vaste pouvoir discrétionnaire à cet égard; de fait, le Tribunal nest aucunement obligé dattribuer les dépens. Le public aurait peut-être intérêt à disposer dune politique explicite sur le sujet. Par conséquent, le Comité recommande :
De nombreux témoins qui ont comparu devant le Comité, tant dans le contexte de létude de juin 2001 qui a mené au Rapport intérimaire que lors de nos tables rondes récentes, ont exprimé un certain mécontentement à légard du processus darbitrage. Par contre, ils nont pas hésité à dire que, dans lensemble, le système est très efficace et ne nécessite aucune réforme majeure. Deux des problèmes invoqués étaient le temps nécessaire pour les mesures de redressement provisoires et pour rendre les décisions. En outre, beaucoup considèrent que les coûts liés à linstruction dune affaire par le Tribunal sont prohibitifs, ce qui est attribuable en partie, semble-t-il, à une démarche trop procédurière de communication préalable ainsi quaux longues listes de témoins experts que les parties peuvent appeler à témoigner. Pour ce qui est de la critique selon laquelle le Tribunal ne prend pas assez rapidement des mesures de redressement provisoires, le Comité prévoit que ce problème sera réglé en grande partie grâce aux nouveaux pouvoirs dont le projet de loi C-23 investit le Tribunal, à larticle 103.3 de la Loi. Ces nouveaux pouvoirs permettront au Tribunal de rendre une ordonnance provisoire afin dempêcher certaines pratiques anticoncurrentielles. Le critère du droit pour la délivrance de lordonnance est très faible le commissaire na pas à démontrer que la concurrence sera irrémédiablement compromise, mais simplement que quelquun sera probablement éliminé en tant que compétiteur, ou quune personne subira vraisemblablement un revers important pour ce qui est de sa part du marché ou de ses revenus, ou un autre préjudice irrémédiable. Le Comité croit que le fait daccorder un redressement provisoire ou définitif pour le simple motif quun compétiteur perd des revenus (ce qui ne cesse de se produire et ne constitue pas, en soit, la preuve dune activité anticoncurrentielle) est une mesure qui sécarte considérablement du principe important et bien établi selon lequel la Loi sur la concurrence vise à protéger la concurrence elle-même, et non les compétiteurs. Toutefois, le redressement dont il est question ici est temporaire et vise à aider le commissaire à empêcher quun compétiteur ne subisse un préjudice immédiat et irréparable, cest-à-dire quil soit éliminé du marché. Ainsi, bien quune ordonnance provisoire puisse à loccasion savérer inefficace en protégeant un compétiteur non concurrentiel, cet effet sera de toute façon temporaire. Au bout du compte, le commissaire ou le demandeur devront quand même prouver les éléments de fond de larticle pertinent afin dobtenir une ordonnance définitive. Néanmoins, le Comité craint que le fait dabaisser ainsi la barre pour le redressement provisoire peut amener le commissaire à réclamer de telles mesures dans des cas dont le bien-fondé est douteux, ce qui serait nuisible à la concurrence. Dans une poursuite normale au civil, cela risque moins de se produire car la partie réclamant linjonction va en justice en sachant que si elle perd en dernier recours, elle devra payer des dommages-intérêts à lautre partie à cause du préjudice résultant de linjonction. Cette règle vise à forcer la partie qui réclame linjonction à bien examiner la validité de sa demande. Toutefois, cet important facteur de dissuasion ne semble pas exister dans la Loi sur la concurrence. En outre, même si elle existait, une telle règle ne produirait pas nécessairement leffet escompté, car les dommages-intérêts payables par le commissaire à la partie lésée seraient puisés dans les deniers publics et non dans le portefeuille du commissaire (comme ce serait le cas pour un plaideur privé dans une action normale au civil). Dans ces conditions, presque rien ne dissuade le commissaire de réclamer une ordonnance provisoire, ce dernier nayant guère à rendre de comptes quant à sa décision de présenter une telle demande. Outre la question du temps nécessaire pour les mesures de redressement provisoires, il y a celle du temps nécessaire pour les mesures définitives, c'est-à-dire lordonnance finale du Tribunal. Dans laffaire dont est actuellement saisi le Tribunal par suite de lallégation du commissaire concernant un abus de position dominante par Air Canada, nous constatons que les mesures provisoires nont pas tardé. Toutefois, le règlement définitif ne semble pas pour demain. Le commissaire a rendu une ordonnance en vertu de larticle 104.1 le 12 octobre 2000, et il la prolongée pour une période supplémentaire de 30 jours le 31 octobre 2000. Puis, le Tribunal la prolongée de nouveau jusquau 31 décembre 2000. Le Comité sinquiète de constater que laudience ne doit pas débuter avant lautomne 2002. Justice différée est justice refusée. Nous croyons que le règlement de cette question est important pour tous les Canadiens. En raison des enjeux considérables des affaires traitées, le Tribunal sefforce dassurer aux plaideurs une équité procédurale suffisante. L«équité procédurale » sentend des droits et obligations inhérents au droit dune partie à lapplication régulière de la loi (« due process », comme on le dit aux États-Unis) dans un cadre darbitrage quasi judiciaire. À tout le moins, léquité procédurale correspond normalement au droit dune partie de donner sa version des faits à un arbitre impartial (cest-à-dire sans parti pris), et au droit de sattendre à ce que cet arbitre agisse en conformité des lois applicables. Sil nagit pas conformément à ses compétences légales, la partie devrait pouvoir demander un contrôle judiciaire (cest-à-dire un réexamen du dossier) à une cour de justice. La question essentielle qui sapplique à cette notion est la suivante : jusquoù va léquité procédurale? Donne-t-elle à larbitre (en loccurrence le Tribunal) la possibilité détablir des règles limitant la portée de linterrogatoire préalable, ou le délai imparti à cet égard? Quen est-il des délais impartis pour la présentation dune argumentation? Ou des limites au nombre de témoins experts quon peut appeler à témoigner? De fait, peut-on « arrondir les coins » sans empiéter sur les droits des parties? En veillant à léquité procédurale, le Tribunal veut sassurer que les parties qui comparaissent devant lui peuvent présenter leur cause de manière adéquate. Traditionnellement, chaque partie a le droit de déterminer quelle est la meilleure façon de procéder à cet égard et, en règle générale, les cours sont réticentes à intervenir sauf en cas de nécessité absolue. Pour ce qui est de la protection procédurale, on ne peut pas dire quil existe de réponse définitive à la question : « quest-ce qui est suffisant? » De manière générale, plus les enjeux sont considérables pour les parties, plus ces dernières devraient être protégées sur le plan de la procédure. Par exemple, une instance pouvant mener à un emprisonnement devrait offrir la meilleure protection possible (cest-à-dire celle dune cour pénale, avec les procédures pénales, les règles de la preuve pertinentes et le fardeau de la preuve « hors de tout doute raisonnable »). À lautre extrémité, les affaires de moindre importance au civil (p. ex., des décisions touchant lattribution de permis) comporteraient une protection procédurale beaucoup moins rigoureuse. Toutefois, de « petits enjeux » pour une grande société peuvent constituer de très « gros enjeux » pour une petite entreprise. Il sensuit que la protection procédurale doit également répondre aux préoccupations des petites entreprises. Il nest guère facile de déterminer ce qui est suffisant en matière déquité. Par exemple, il semblerait raisonnable davancer quune personne a le droit dêtre avertie si une instance judiciaire est entamée contre elle. Il nous semble injuste en effet quune poursuite judiciaire puisse aller de lavant et quune ordonnance soit rendue contre quelquun sans que cette personne en ait été informée ou ait eu la possibilité de réagir. De fait, le droit dêtre informé est un principe important que les tribunaux civils ont souvent réitéré. Pour cette raison, les tribunaux nautorisent généralement les demandes faites sans avis (ex parte) que dans des circonstances exceptionnelles. Toutefois, si lon pousse un peu plus loin lidée du « droit à un avis », la situation devient un peu moins claire. Premièrement, donner « avis » dune procédure na aucune signification si la personne ainsi avisée (le défendeur) ne peut rien faire pour influer sur le résultat de linstance. Pour que le droit à lavis ait une signification ou une utilité quelconque, on doit au moins avoir la possibilité dagir sur lissue du recours. On crée cette possibilité en permettant au défendeur de contester la preuve sur laquelle le requérant entend sappuyer. Pour cela, le défendeur doit pouvoir dune certaine façon « découvrir » largumentation du requérant, de sorte que la communication préalable devient nécessaire. Et quadvient-il si une partie refuse de divulguer linformation réclamée par lautre? Il faut quil y ait un moyen dobliger les parties à divulguer leur preuve documentaire. De même, une procédure doit exister pour que les parties puissent régler leurs différends quant à la marche à suivre appropriée. Cela seffectue au moyen de motions. Une décision doit être rendue sur chacune de ces motions, en fonction de sa valeur intrinsèque. En outre, le défendeur devrait avoir la possibilité de présenter des éléments de preuve en son propre nom, ce qui lobligera vraisemblablement à engager des témoins experts. Il sensuit que le simple droit à un avis peut donner lieu à toute une ramification de droits réels et procéduraux. Le processus adversatif produit des résultats généralement justes et équitables, mais souvent à un coût très élevé. Compte tenu des principes de léquité procédurale, le Tribunal cherche plutôt à élargir les protections quà les restreindre. Cela signifie que, normalement, les parties disposent de la période qui leur est nécessaire pour clore la question « en temps et lieu », sans que le Tribunal ne soit trop directif. De même, les parties sentendent souvent sur un calendrier pour le déroulement des activités, la production de documents, etc., et ces cadres daction peuvent nécessiter beaucoup de temps dans les cas compliqués. Le Comité partage les préoccupations de ceux qui trouvent que les procédures du Tribunal sont longues et onéreuses. Les intervenants ont indiqué plusieurs secteurs où elles pourraient être améliorées :
À lheure actuelle, le Tribunal a le pouvoir, en vertu de larticle 16 de la Loi sur le Tribunal de la concurrence, dadopter (sous réserve de lapprobation du gouverneur en conseil) des règles dapplication générale régissant la pratique et la procédure devant lui. À lheure actuelle, ces règles sont énoncées dans les Règles du Tribunal de la concurrence11, qui définissent un code complet de procédures pour larbitrage des conflits dont est saisi le Tribunal, y compris les mesures concrètes que les parties doivent prendre et le délai à lintérieur duquel elles doivent lêtre. Les mesures en question englobent léchange de plaidoiries, la communication préalable, la conférence préparatoire à laudition, le redressement provisoire, les demandes des intervenants, les motions interlocutoires et laudience elle-même. |
Vous devriez envisager douvrir le système afin de permettre aux participants un meilleur accès au Tribunal. Je trouve extrêmement ironique que dans une loi consacrée à la concurrence, le commissaire ait un monopole ou quasi-monopole au chapitre de laccès. [John Rook, Osler, Hoskin & Harcourt, 65:10:45]
Dans lensemble, presque tous les travaux du Tribunal ont trait à la partie VIII, en particulier les fusions. On doit se rappeler quen vertu des modifications de 1986, les fusions ont été décriminalisées et placées sous la compétence exclusive du Tribunal de la concurrence [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:10]
Le Tribunal na pas énormément dexpérience. Il a été créé en 1986 et na réellement commencé à fonctionner quen 1987. Ce nest quen 1990 quil a instruit les premières contestations relatives à des fusions. Il na pas eu tant daffaires à juger. Comparativement à lexpérience des États-Unis ou même de lUnion européenne, nous navons pas eu énormément de causes, de sorte que limportance de chacune se trouve amplifiée. [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:10] Lorsquil est question de tronquer les procédures ou dinstaurer des procédures spéciales pour le Tribunal, nous ne devrions pas oublier quil est question ici de litiges commerciaux dans un certain domaine. Nous avons beaucoup dexpérience dans notre système judiciaire, sinon dans notre Tribunal, sur la façon de gérer ces affaires, et nous disposons de différents modèles, non seulement au Canada, mais dans dautres administrations comme les États-Unis, où lon a commencé à gérer les litiges commerciaux de manière plus efficace et plus efficiente. [Robert Russell, Borden, Ladner & Gervais, 59:09:10]
Dans toute la réflexion au sujet du genre de processus que nous voudrions avoir au Tribunal, typiquement, il y a lidée dimposer un modèle de procès traditionnel à part entière. Ce genre dactivité dapplication nest pas approprié dans un contexte de droit public. [Jack Quinn, Blake, Castles & Graydon, 59:12:30]
Jai été lun des seuls à déplorer le caractère formel et judiciaire de la procédure suivie par les juges de ce tribunal. Je préférerais un tribunal du type administratif, qui pourrait rendre les décisions plus rapidement sur la base davis dexperts. [Neil Campbell, McMillan Binch, 59:11:25]
[U]ne bonne application de la loi, sur le plan des procédures formelles, dépend en partie dune rationalisation et amélioration des procédures du Tribunal de la concurrence, sans pour autant priver la partie incriminée de ses moyens de défense. [ ] Une structure de type tribunal administratif, tribunal expert, serait beaucoup plus utile. [Neil Campbell, McMillan Binch, 59:11:25]
[L]es décisions du Tribunal prennent beaucoup trop longtemps [ ] La plus récente affaire de consentement, pour laquelle il y a eu des déclarations de faits convenues et un degré élevé de collégialité entre les avocats de part et dautre, a demandé environ 18 mois, et ce sur la base du consentement. Il fallait compter 18 à 20 mois pour une fusion. [Stanley Wong, Davis & Company, 59:11:30]
Il est impératif de rationaliser et daméliorer très considérablement [la procédure du Tribunal]. [ ] LeTtribunal de la concurrence a entendu quatre affaires de fusion contestées. Le temps moyen mis par le Bureau à rendre une décision dans ces transactions était denviron huit mois et demi. La procédure du Tribunal [ ] a duré en moyenne 19 mois, du début jusquau jugement. [Margaret Sanderson, Charles River Associates, 59:11:20]
Sil existe un comité des règles, il nest pas nécessaire de rédiger tout un ensemble de règles, ce qui peut nécessiter jusquà cinq ans car il sagit dun domaine complexe. On modifie sans cesse les règles en fonction de lévolution de la loi, des procédures et de la technologie, de façon à sadapter. [Robert Russell, Borden, Ladner & Gervais, 59:09:35]
Les avocats réclament toujours davantage de protection, de mesures de sauvegarde, daudiences et de réexamen. [Jack Quinn, Blake, Castles & Graydon, 59:12:30] Peu imprte de quel côté nous nous trouvons dans une affaire, le résultat peut nous décevoir. Cest ce qui se passe dans le système judiciaire, mais personne ne propose jamais dabolir les cours ou de limiter leurs pouvoirs dans leur secteur de compétence. Il semble que nous ayons tendance, chaque fois que quelquun naime pas une décision du Tribunal, à dire immédiatement quil faudrait réduire son champ daction? [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:15]
La difficulté survient si nous insistons trop sur la pleine et régulière application de la loi, ce qui demande énormément de temps et pour laquelle nous avons ce modèle judiciaire. [ ] Vous vous demandez parfois si le processus a pour véritable objet de déterminer la vérité. Si nous pouvions régler ce côté-là des choses, cela ferait beaucoup pour régler les questions dindépendance et ainsi de suite. [Margaret Sanderson, Charles River Associates 59:12:00]
La tendance est toujours de dire, remanions un peu les règles de procédure du Tribunal et espérons que cela réglera le problème. Ce nest pas toujours vrai. Cela peut aider, mais il faut également une gestion des affaires agressive de la part du Tribunal. Par exemple, une affaire récente, mettant en jeu Air Canada, a été ajournée pendant six mois sans quaucune raison ne soit donnée. [George Addy, Osler, Hoskin & Harcourt, 59:11:30]
À mon avis, le Tribunal de la concurrence gère avec beaucoup defficacité sa charge de travail, et les affaires récentes dont il a été saisi en fournissent la preuve. Cela ne veut pas dire que certaines affaires ne sétireront pas en longueur; en fait, cela va se produire. Dans cette éventualité, je ne crois pas que le Comité devrait entreprendre un débat déchirant sur le processus. Cest dans la nature du contentieux. [John Rook, Osler, Hoskin & Harcourt, 65:10:45] |
11 | DORS/94-290, modifié par DORS/96-307; DORS/2000-198. |
Le Tribunal est au courant de ces critiques et il a
dépoyé, et déploie encore, des efforts constructifs en vue dy répondre. En
particulier, il a établi en 1997 un Comité de liaison Tribunal/Barreau formé de membres
du Tribunal, de membres de la Section du droit de la concurrence de lAssociation du
Barreau canadien et de lavocat général de la Section du droit de la concurrence du
ministère de la Justice (qui représente le commissaire de la concurrence). Le Comité de
liaison passe en revue les façons de procéder du Tribunal afin de déterminer sil
est possible de les raffiner et de les améliorer. Au moment de la rédaction du présent
rapport, on prévoyait loption dun certain nombre daméliorations sur le
plan de la procédure. Entre autres, on remplacera les modalités actuelles du processus
de communication préalable la partie du processus qui, depuis toujours,
nécessite le plus de temps et donne lieu au plus grand nombre de questions
interlocutoires par les procédures suivantes :
En outre, les nouvelles procédures permettront de déposer certains renseignements fournis par le défendeur comme éléments de preuve, plutôt que dobliger le témoin à se présenter en personne. Autre modification tout aussi importante, les nouvelles procédures sécarteront du modèle habituel qui permet aux parties de produire toutes leurs preuves dexpert à tour de rôle. Au lieu de cela, le Tribunal regroupera en comité les experts dune question particulière. Chacun exposera son point de vue dans une déclaration, laquelle fera ensuite lobjet dun contre-interrogatoire par les autres experts plutôt que par des avocats. Les avocats auront encore le droit dinterroger les experts, mais de façon limitée. Apparemment, on a utilisé cette approche en Australie et elle a donné de bons résultats. Le Comité est également au courant du fait que le Comité de liaison Tribunal/Barreau est en train de rédiger un document de travail sur la possibilité de créer des règles similaires concernant les fusions. Ces modifications porteraient sur lutilisation déquipement électronique pour le dépôt des documents et les audiences, la limitation du nombre des témoins appelés à témoigner et la fixation déchéances (au plus quatre mois à partir de la date du dépôt de lavis de requête) pour la délivrance des motifs et des ordonnances du Tribunal. Les nouvelles procédures visent non seulement à réduire le délai nécessaire pour régler le dossier, mais également à rendre la démarche moins incertaine, ce qui en fin de compte aidera les parties à administrer leurs affaires. Le Comité félicite le Tribunal pour ses réformes sérieuses et opportunes, et il lencourage à poursuivre le processus. Toutefois, le Comité tient à préciser que, lorsquon songe à imposer des limites au droit dune partie de faire valoir son point de vue complètement et équitablement, on doit toujours accorder une considération spéciale aux principes établis en matière déquité et de justice. Par exemple, si lon restreint le nombre de témoins quune partie peut appeler, ou le délai à lintérieur duquel les parties doivent terminer leur argumentation, on court toujours le risque de créer une injustice réelle ou apparente. Le Comité a évalué plusieurs options pour remédier aux lacunes perçues dans les façons de procéder du Tribunal. Par exemple, nous pourrions recommander que le gouvernement modifie la Loi sur le Tribunal de la concurrence de façon à imposer des limites procédurales aux travaux du Tribunal; ou nous pourrions recommander que le gouvernement modifie la Loi afin dexiger que le Tribunal lui-même modifie ses règles afin de créer de telles limites. Toutefois, le Comité estime que la première option est problématique pour plusieurs raisons. Le Comité na ni expérience directe ni expertise particulière de la conduite des travaux du Tribunal. En outre, dans la Loi sur le Tribunal de la concurrence, il est clair que le Parlement avait lintention à lorigine de permettre au Tribunal de déterminer ses propres procédures, ce que ce dernier semble en train de faire de façon active. Pour ces raisons, le Comité ne considère pas quil est impératif de sécarter de ce modèle. La deuxième option serait dimposer au Tribunal lobligation de modifier les règles, tout en lui laissant la latitude de déterminer exactement dans quelle mesure. Mais, encore une fois, il est clair que le Tribunal possède déjà, en vertu de la Loi, la compétence nécessaire pour imposer une procédure de gestion des cas et quil examine activement des moyens de le faire. Finalement, le Comité croit que le Tribunal est le mieux placé pour énoncer les règles régissant son mode de fonctionnement. Pour cette raison, le Comité recommande : Équilibrer les facteurs incitatifs : Dommages-intérêts, frais de contentieux et amendes Lindemnisation que peut recevoir un requérant éventuel est un facteur dimportance critique lorsque vient le moment de décider dintroduire une instance devant le Tribunal. Avec ladoption du projet de loi C-23, le droit dintenter une action privée devant le Tribunal existera dans une certaine mesure, mais ce texte de loi est de toute évidence conçu davantage pour décourager plutôt quencourager un requérant à entamer des poursuites à titre privé. Labsence de recours en dommages-intérêts est lélément dissuasif le plus évident. Si lon refuse au demandeur ce qui, dans la plupart des affaires civiles, constituerait la mesure de redressement la plus importante, on peut raisonnablement sattendre à ce que cela ait une incidence sur la décision daller ou non de lavant avec une requête; autrement dit, est-ce que la solution (une ordonnance) vaut le temps, les efforts et les frais consentis? La possibilité de devoir verser des dommages-intérêts constitue aussi un important facteur dissuasif pour les comportements anticoncurrentiels. À lheure actuelle, la seule mesure dont peut profiter le requérant est une ordonnance du Tribunal, cest-à-dire une ordonnance de cesser et de sabstenir, ou, dans certains cas, une ordonnance de cession dactifs. Mais il ne peut réclamer de dommages-intérêts. Partout dans le monde, le droit de poursuivre en dommages-intérêts est un droit fondamental accordé aux demandeurs dans des poursuites au civil. Il est injuste que les requérants devant le Tribunal se voient refuser un droit fondamental de tout autre plaideur, cest-à-dire celui de réclamer la restitution des pertes subies du fait du comportement anticoncurrentiel dune autre personne. La justification prétendue de cette politique est que la possibilité dobtenir des dommages-intérêts provoquerait une avalanche de litiges comme cela sest produit aux États-Unis, ainsi que le départ du Canada dentreprises devant consacrer des sommes énormes à se défendre contre des poursuites vexatoires. Le Comité connaît très bien les nombreuses différences qui existent entre le Canada et les États-Unis pour ce qui est de lapplication des règles antitrust, et il est davis que ces différences sont si fondamentales quil ne sert à rien dessayer de les comparer. En plus de permettre le versement de triples dommages-intérêts au demandeur qui obtient gain de cause, la formule américaine prévoit dautres mesures qui encouragent lintroduction dinstances, par exemple des procès devant jury au civil et lattribution des dépens, qui favorisent dans la grande majorité des cas le demandeur. Pour cette raison, le Comité est fermement convaincu quil ny a aucun fondement à largument selon lequel la création dun droit à des dommages-intérêts dans les procédures du Tribunal aurait une incidence néfaste sur le climat des affaires. De fait, cest le contraire qui pourrait se produire. La création dun système où toutes les personnes et entreprises sont en mesure de protéger leurs droits et intérêts économiques aurait plutôt tendance à attirer linvestissement quà léloigner. Cette conclusion est corroborée par lexpérience des États-Unis où, malgré quon y trouve le régime antitrust le plus litigieux du monde, les investissements continuent daffluer dans le secteur commercial, davantage que partout ailleurs dans le monde. Du reste, largument nest pas confirmé par lexpérience des tribunaux civils ordinaires au Canada. Nos tribunaux accordent constamment des dommages-intérêts dans des causes civiles et il ny a absolument aucune raison de croire que la disponibilité de ce recours a entraîné une avalanche de litiges stratégiques à ce niveau. Pour la même raison, rien ne laisse croire que le fait dautoriser les requérants à réclamer des dommages-intérêts devant le Tribunal augmenterait considérablement les litiges, en particulier si laction donne lieu à une « simple réparation », correspondant à la perte véritable et prouvable. La menace de litiges stratégiques serait également écartée par les nouvelles règles du Tribunal concernant les frais ainsi que par son pouvoir de rendre des jugements sommaires et de refuser lautorisation de présenter une demande. Le Tribunal est formé de membres très expérimentés de la magistrature et dexperts en économie, qui ont certainement les compétences nécessaires pour évaluer des dommages-intérêts. Le Comité ne recommande aucunement les triples dommages-intérêts que peuvent réclamer les plaideurs aux États-Unis et qui seraient à lorigine de lénorme croissance de lindustrie des procès antitrust dans ce pays. Jusquà ce quon autorise les dommages-intérêts en vertu de la Loi sur la concurrence, il est probable que léquilibre des facteurs dincitation et de dissuasion ne pourra être optimal. Il est probable que certaines causes valables ne se matérialiseront pas à cause de limpossibilité dobtenir une telle compensation. Ces requérants potentiels décideront simplement que les mesures injonctives limitées que peut prendre le Tribunal ne compensent tout simplement pas les coûts élevés quimplique une procédure. Par conséquent, du point de vue du requérant, il est amplement justifié de créer un droit de poursuite en dommages-intérêts. Par ailleurs, les dommages-intérêts constitueraient un excellent agent dissuasif. La possibilité de devoir payer des dommages-intérêts créerait certainement pour les entreprises dominantes une motivation supplémentaire à sabstenir de pratiques anticoncurrentielles, le coût éventuel dun tel comportement sen trouvant haussé. Bien entendu, si la Loi était davantage respectée, le contribuable canadien économiserait les dépenses liées au fait que le Bureau est seul responsable de la faire exécuter. À lheure actuelle, une entreprise en position de dominance na guère dincitation à ne pas abuser de son emprise. Elle sait que le pire qui peut lui arriver, à la fin de linstance, est de faire lobjet dune ordonnance de cessation de son comportement anticoncurrentiel, et peut-être de devoir payer une partie des frais juridiques du requérant. Elle naura pas à verser des dommages-intérêts, peu importe les sommes que sa ou ses victimes pourront avoir perdu. Il suffit de comparer cela aux énormes profits que lentreprise abusive peut réaliser pendant que la cause est devant le Tribunal. Labsence de dommages-intérêts constitue pour elle une incitation très forte à prolonger le litige; ce faisant, elle fait bien entendu augmenter quelque peu ses propres frais juridiques, mais elle naccentue pas sa vulnérabilité du point de vue des dommages-intérêts. Entre temps, la victime de sa conduite continuera de subir des pertes (et sera de plus en plus pressée darriver à un règlement), tandis quelle-même continuera de toucher ses profits mal acquis sans sinquiéter de devoir un jour payer. Avec ladoption du projet de loi C-23, le Tribunal aura maintenant la possibilité dadjuger les dépens au plaideur qui obtient gain de cause. On sattend à ce que cette disposition ait également une incidence sur la décision dun éventuel requérant daller de lavant, bien quon ne puisse considérer quil sagit là dune forte incitation dans un sens ou dans lautre. En effet, léventualité de devoir assumer les dépens dun défendeur victorieux aurait tendance à dissuader un requérant qui nest pas fermement convaincu du bien-fondé de sa requête, tout comme, à nen point douter, la perspective dun recouvrement des frais aurait tendance à lencourager. Qui plus est, on prévoit que dans certains cas, à tout le moins, le Tribunal ne fera pas droit à une demande de permission de présenter une demande en vertu des articles 75 et 77, ce qui peut également dissuader un demandeur dengager une démarche. Le Comité a aussi constaté que les témoins étaient fortement en faveur dautoriser le Tribunal à imposer des sanctions administratives pécuniaires afin de décourager davantage les comportements anticoncurrentiels flagrants. La menace des dommages-intérêts constitue certainement un élément dissuasif efficace, mais limposition damendes serait un remède additionnel utile : 1) dans les situations où le versement de dommages-intérêts à lui seul ne serait pas suffisant; 2) si les victimes du comportement en question ne pouvaient être facilement identifiées, par exemple en cas de perte répartie parmi un grand nombre de consommateurs; 3) ou si la perte de chacun était trop minime pour que lattribution de dommages-intérêts soit une solution efficace. Afin dêtre efficaces, les sanctions administratives doivent être suffisamment lourdes pour décourager les pratiques anticoncurrentielles. De fait, pour prévenir un tel comportement à lavenir, la sanction doit être supérieure aux profits que lentreprise abusive peut réaliser grâce à son comportement anticoncurrentiel. Cest pourquoi il ne devrait pas y avoir de plafond à lamende éventuelle que le Tribunal peut imposer. Ce dernier devrait avoir toute la latitude voulue à cet égard, compte tenu des profits réalisés par la partie abusive et des autres facteurs quil juge pertinents dans les circonstances particulières de lespèce. En conséquence, la Loi doit instituer une combinaison optimale de mesures incitant à son observation et favorisant la matérialisation des causes valables. Deux options ont été présentées au Comité : 1. Que le gouvernement modifie la Loi sur la concurrence afin de permettre au Tribunal, outre les autres recours dont il dispose dans des poursuites au civil, dordonner dindemniser une partie au moyen de dommages-intérêts et dimposer des sanctions administratives pécuniaires en vertu de larticle 79, afin de décourager les pratiques anticoncurrentielles et de favoriser le règlement juste et rapide des instances dont il est saisi. 2. Attendre de voir quel sera limpact des réformes du projet de loi C-23 (cest-à-dire le droit privé daccès, les renvois) sur le fonctionnement du Tribunal et ses procédures. On ne peut dire avec certitude si la création du nouveau droit daccès privé ainsi que les nouvelles procédures du Bureau concernant les renvois et les jugements sommaires produiront effectivement le résultat escompté dencourager les litiges constructifs. Le Comité nest pas convaincu que ces réformes limitées permettront à elles seules détablir un juste équilibre. Pour cette raison, le Comité recommande :
Jurisprudence Encourager les causes légitimes Il y a un vaste consensus parmi les témoins sur le fait quil ny a tout simplement pas assez daffaires soumises au Tribunal. Cela ne revient pas à dire quil faut encourager les litiges comme une fin en soi; toutefois, le fait de porter des causes devant le Tribunal aura pour effet, au fil du temps, de développer une interprétation judiciaire qui servira à clarifier le sens de la Loi ainsi quà améliorer son observation et son exécution. Le défi des législateurs est détablir un système grâce auquel les causes légitimes seront portées devant le Tribunal. Parallèlement, il faut prendre garde de ne pas encourager les litiges à caractère frivole, vexatoire ou stratégique. Le Comité est convaincu que les nouveaux pouvoirs du Tribunal institués par le projet de loi C-23 sont bien conçus de manière à écarter les litiges futiles. Toutefois, il est loin dêtre évident que les réformes constitueront une incitation suffisante à soumettre au Tribunal les affaires bien fondées. Il ne fait guère de doute que de nombreux conflits pourront être réglés grâce au nouveau pouvoir du Tribunal dentendre des renvois12. En même temps, il est raisonnable danticiper que certaines affaires seront réglées par voie sommaire en vertu des nouveaux pouvoirs de jugement sommaire du Tribunal. Les affaires manifestement dénuées de fondement seront « tuées dans luf » grâce au droit du Tribunal de refuser la permission de présenter une demande. Le Comité sattend à ce que le nouveau droit daccès privé à larbitrage des différends en vertu des articles 75 et 77 créé par le projet de loi C-23 ajoute à la charge de travail du Tribunal, car des particuliers voudront obtenir sa protection lorsquils estiment faire lobjet de pratiques commerciales anticoncurrentielles. Toutefois, étant donné quil nest pas possible de réclamer des dommages-intérêts, le Comité ne sattend pas à lavalanche de litiges que certains opposants à laccès privé ont prédite. On prévoit néanmoins de fait, on espère que les parties prenantes utiliseront le texte de loi de bonne foi afin daffirmer leurs droits devant le Tribunal, de protéger leurs droits civils et, de façon plus générale, dassurer une saine compétition. |
[I]l faut être en mesure de dire aux parties : « Je veux des experts sur cette question-ci et sur cette question-là, et vous feriez mieux de trouver des experts dans ce domaine »; au lieu de dire : « Faites ce que vous voulez, faites ce que vous voulez, et vous pourrez ensuite répondre et vous pourrez répondre aussi ». Dans ce domaine, ce nest pas de cette façon que lon traite les affaires. Dans ce domaine, il faut être extrêmement agressif, poussant à la roue dès le premier jour où laffaire arrive au Tribunal. Le Tribunal peut faire cela sans quil soit nécessaire de modifier le processus. Chaque fois que vous avez une modification, cela crée davantage de jurisprudence sur son sens réel. Le cadre est assez bon pour que le Tribunal apporte ces changements. [Stanley Wong, Davis & Company, 59:12:20]
Je crois que des sanctions administratives et des dommages-intérêts sont des éléments nécessaires pour améliorer lefficacité de la Loi. À lheure actuelle, labus de position dominante peut sinterpréter comme suit : faites-le jusquà ce quon vous dise de ne plus le faire. Et quel en est le coût? Le conseil que nous devons donner est que ce nest pas illégal jusquà ce que le Tribunal en décide autrement. Bien entendu, les clients peuvent lire la même chose, cest-à-dire, faites-le jusquà ce quon vous dise non. [Robert Russell, Borden, Ladner & Gervais, 65:09:35]
Comme nous avons pu lobserver à lépoque des grands cartels, même une amende de 10 millions de dollars peut être insuffisante. Je sais que lorsque jétais au Bureau de la concurrence, dans un cas particulier, nous avions calculé que les prix excessifs atteignaient les centaines de millions de dollars, ce qui fait que même une amende de 10 millions de dollars naurait représenté quune fraction des profits. Si lon introduit une sanction administrative pécuniaire pour abus de situation dominante, je pense quon voudra en fait donner au Tribunal le plus de latitude possible afin quil impose une peine à sa discrétion. Il pourra ainsi la fixer à nimporte quel niveau. [Paul Crampton, Davies, Ward, Phillips & Vineberg, 65:10:55]
Historiquement, la législation
antitrust du Canada a surtout été axée sur lintérêt du public au chapitre de la
concurrence, plutôt que sur les intérêts privés des compétiteurs à titre individuel.
Si lon modifie la loi [
] de façon à donner à un plaideur le droit
dobtenir des dommanges intérêts, je crois que cela aurait des
répercussions très profondes [
] Je pense quinévitablement, le Tribunal
finirait par devenir une cour comme une autre, sauf quil sagirait dune
cour spécialisée. Il faut donc bien examiner sil est dans lintérêt du
public de faire évoluer la loi dans cette direction. [John Rook, Osler, Hoskin &
Harcourt, 65:10:55]
Je pense quil est nécessaire dexaminer de façon exhaustive ce que nous voulons faire [ ] En vertu du projet de loi C-23, il y a maintenant une amende de 15 millions de dollars dans la situation du transport aérien. Je pense quon va trop vite. Je sais quil y a toutes sortes de considérations politiques à prendre en compte, mais [ ] il faut examiner de manière plus générale les principes quon veut inscrire dans la loi relativement aux pratiques susceptibles dexamen [ ] Il ne sagit pas de déterminer ce quon peut faire pour arrêter les grandes entreprises. Une fois que ces sanctions seront en place, elles sappliqueront également aux petites entreprises. [Stanley Wong, Davis & Company, 65:10:15]
[
] si nous adoptons une approche holistique et
réfléchissons aux structures institutionnelles et aux incitations mises en place
[
] cela atténuera largement les problèmes de coût. [Margaret Sanderson,
Charles River Associates, 59:11:25] [N]ous devrions donc nous concentrer
[
] sur la question de savoir quels sont les instruments légaux justes et
économiquement indiqués, et la jurisprudence devrait découler de là. [Neil
Campbell, McMillan Binch 59:12:15] Le Parlement a érigé autour de ce droit daccès du public un certain nombre de barrières [ ] et il reste à voir si la méthode est applicable et sera utilisée [ ] Je ne vois pas trop ce qui pourrait inciter un plaideur privé à aller de lavant. [John Rook, Osler, Hoskin & Harcourt, 65:10:45]
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12 | Le Tribunal pourra entendre toute question de droit, question mixte de droit et de fait ou question de compétence, de pratique ou de procédure liée à lapplication ou à linterprétation des parties VII.1 (Pratiques commerciales trompeuses) ou VIII (Affaires que le Tribunal peut examiner), quune demande ait été présentée ou non en vertu de lune de ces parties. De même, le commissaire peut, de son propre chef, soumettre au Tribunal toute question de droit, de compétence, de pratique ou de procédure (mais non une question mixte de droit et de fait) liée à lapplication ou à linterprétation des parties VII.1, VIII ou IX (transactions devant faire lobjet dun avis, cest-à-dire les fusions). |
Au sujet des renvois, le Comité a entendu plusieurs
critiques du projet de loi C-23. Celui-ci stipule que le commissaire, de son propre chef,
ou les deux parties dun commun accord, peuvent soumettre au Tribunal toute question
de droit, question mixte de droit et de fait ou question de compétence, de pratique ou de
procédure. Le commissaire peut, de son propre chef, soumettre ces questions au Tribunal
(sauf une question mixte de droit et de fait), alors quune partie intimée ne le
peut pas. Ne trouvant aucune justification convaincante pour cette iniquité apparente, le
Comité recommande:
Le Comité na pas entendu beaucoup de témoignages sur le caractère adéquat ou non des ressources du Tribunal. Toutefois, certains témoins ont signalé une pénurie déconomistes dans certains cas, ce qui aurait entraîné des retards dans le traitement de dossiers. Nous prévoyons quune augmentation du budget actuel du Tribunal puisse être nécessaire afin de traiter les affaires soumises par des parties privées après ladoption du projet de loi C-23. On ne peut cependant déterminer lampleur de cette augmentation. Parallèlement, il est possible que le pouvoir de rendre des jugements sommaires et dentendre des renvois donne lieu à un plus grand nombre de règlements des différends sans quune audience complète ne soit nécessaire, doù une possible économie de ressources. Quoi quil en soit, le Comité est davis que le Tribunal lui-même est le mieux placé pour déterminer ses besoins en ressources et quon peut régler cette question au moyen du processus budgétaire actuel. Pour cette raison, le Comité ne croit pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si le budget actuel du Tribunal est suffisant. Le Comité a lintention de suivre les opérations du Tribunal dans le cadre de la surveillance quil exerce sur le fonctionnement de la législation canadienne en matière de concurrence. La Loi sur le Tribunal de la concurrence On a fait valoir au Comité que le paragraphe 12(1) de la Loi, dans son libellé actuel, ne reflète pas les pratiques du Tribunal. Cet article stipule que les questions de droit ne peuvent être résolues que par les membres juristes, alors que les questions mixtes de droit et de fait peuvent lêtre tant par les juristes que par les autres membres. Distinguer entre les questions de droit et les questions mixtes de droit et de fait présente souvent des difficultés, en particulier dans un régime législatif déterminé par léconomie et les forces du marché. En pratique, le Tribunal nempêche pas les autres membres dexprimer leur point de vue sur les questions de droit. De fait, dans un cas particulier, la Cour dappel a confirmé lopinion dissidente dun membre non juriste sur une question relevant de la compétence du Tribunal. Le Comité croit quil ny a aucune raison impérieuse de maintenir la distinction artificielle et quelque peu encombrante entre les questions de fait et les questions de droit, ou les questions mixtes de fait et de droit, dans les procédures du Tribunal. En conséquence, le Comité recommande :
Larticle 13 de la Loi sur le Tribunal de la concurrence crée un droit automatique dappel13 de toute décision ou ordonnance du Tribunal, y compris les ordonnances provisoires14. Il existe cependant une exception à ce droit automatique : un appel dune question de fait seulement ne peut être interjeté quavec la permission de la Cour. Cette formule reflète un principe quil est convenu dappeler la retenue judiciaire. Lidée qui le sous-tend est que le Tribunal, avec son expertise spécialisée et laudition complète de la preuve, est mieux placé que la Cour dappel pour établir les faits à partir déléments de preuve. Mais devrait-on étendre également aux questions de droit le principe de la retenue? |
Je pense quon appuie généralement lidée que les instances du Tribunal ne prennent pas plus de six mois du début à la fin, y compris une période de quatre mois pour rendre la décision et deux mois pour la rédiger. Mon sentiment est que le Tribunal lui-même est prédisposé à le faire et quil a de toute évidence besoin de la coopération des parties ainsi que de ressources suffisantes. Je crois comprendre que, par le passé, lun des problèmes liés aux retards était que les ressources juridiques étaient insuffisantes. [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:25] Je ne pense pas que lui jeter davantage dargent vienne régler le problème. Si nous conservions le modèle que nous avons aujourdhui [ ] vous pourriez avoir une situation comme laffaire de Superior Propane où le commissaire peut diriger dix économistes en tant quexperts. [ ] Je pense quil nous faut changer ce processus, sans quoi la quantité de ressources dont nous disposons à cette fin lemportera [ ] sur ce que le contribuable moyen considérerait comme étant un budget raisonnable, étant donné les objectifs très louables en matière de politique gouvernementale qui se font concurrence. [Margaret Sanderson, Charles River Associates, 59:12:35]
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13 | Devant la Section dappel de la Cour fédérale. |
14 | Toutefois, les ordonnances provisoires prévues à larticle 103.3 (projet de loi C-23) ne seraient pas sujettes à révision. |
Les membres juristes du Tribunal sont des juges de la
Cour fédérale. Il est évident pour le Comité quavec une telle somme
dexpérience et de connaissances juridiques, le Tribunal est extrêmement compétent
dans les questions de droit. De plus, il a été clairement démontré que les membres non
juristes du Tribunal pouvaient faire des observations judicieuses, et le font, sur des
questions de droit. Pour cette raison, le Comité croit que le principe de la retenue
judiciaire devrait sappliquer au Tribunal non seulement pour les questions de fait,
mais également pour les questions de droit dapplication générale et de droit
particulier aux dossiers de concurrence. Il importe de préciser que lobligation faite à une partie dobtenir la permission den appeler ne la prive pas de son droit dappel. Cela implique simplement que lappelant doit dabord convaincre la Cour dappel du bien-fondé de sa démarche. Si elle considère que lappel nest pas fondé, la Cour peut rejeter la demande de façon sommaire, sans quil soit nécessaire de procéder à une instance complète dappel. De cette manière, on pourrait abréger de nombreuses instances sans sacrifier les principes déquité procédurale. Par conséquent, le Comité recommande :
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À
lheure actuelle, il existe un droit automatique dappel, sauf à légard
des questions de fait. Je ne connais aucun avocat habile qui ne puisse à tout le moins
trouver une question mixte de fait et de droit pour interjeter appel. Je crois que cela
retarde inutilement le processus darbitrage étant donné que le Tribunal est censé
être une cour spécialisée. [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:15] Il ne sert à rien que le processus dappel soit aussi long surtout dans le cas des fusions étant donné que cela nempêche pas les fusions de se réaliser. En fait, on na jamais reporté une fusion pendant un appel. [Stanley Wong, Davis & Company, 65:09:15] |