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39e LÉGISLATURE, 2e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 019

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 19 novembre 2007




Emblème de la Chambre des communes
CANADA

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 142
NUMÉRO 019
2e SESSION
39e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le lundi 19 novembre 2007

Présidence de l'honorable Peter Milliken


    La séance est ouverte à 11 heures.

Prière



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires]

(1100)

[Traduction]

La Loi sur les aliments et drogues

    — Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord remercier Mme Elspeth Ross, qui est associée au réseau de prévention du syndrome d'alcoolisation foetale du Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario. Les mots me manquent pour décrire tout le travail qu'elle a accompli pour venir en aide aux familles et aux enfants touchés par le syndrome d'alcoolisation foetale, ainsi que pour aider les parlementaires à comprendre les conséquences dévastatrices de l'alcool.
    L'alcool est la drogue la plus consommée et celle dont on abuse le plus dans le monde et pourtant, au Canada, l'alcool est le seul produit de consommation qui peut être nocif s'il est mal utilisé, mais dont l'étiquette ne met pas en garde contre les risques qu'il présente.
    Par ailleurs, la loi actuelle ne traite pas l'alcool comme une drogue ni comme un produit qui, de toute évidence, comporte d'importants risques pour la santé et la sécurité publiques. Chaque année, l'alcool joue un rôle dans des milliers de décès prématurés, de blessures évitables et de cas de lésions cérébrales congénitales. L'alcool fait augmenter les risques de cirrhose du foie, de cancer, de maladie cardiovasculaire et respiratoire, d'homicide, de suicide, d'accident de voiture, de bateau et de motoneige, de chute, d'incendie et de noyade.
    De plus, la consommation excessive d'alcool accroît l'incidence des maladies mentales et des crimes, et réduit la productivité des travailleurs. Il s'ensuit des pertes dévastatrices de vies humaines et un coût économique annuel se chiffrant dans les milliards de dollars.
    L'ingrédient actif des boissons alcoolisées est l'alcool éthylique, communément appelé éthanol, dont l'effet ressemble beaucoup à celui de l'éther. Comme un agent anesthésique, il endort le cerveau. C'est aussi un dépresseur du système nerveux central qui ralentit les fonctions organiques telles que le rythme cardiaque et la respiration.
    De petites quantités d'alcool peuvent susciter un sentiment de bien-être et de relaxation, mais de grandes quantités peuvent causer l'intoxication, la sédation, la perte de conscience, des dommages au cerveau, des maladies mentales ou physiques et même la mort.
    L'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale, ou ETCAF, est une expression qui décrit les divers effets que la consommation d'alcool de la mère pendant sa grossesse peut avoir sur son enfant. Ces effets peuvent prendre la forme de déficiences physiques ou intellectuelles, de troubles d'apprentissage et du comportement, souvent plusieurs de ces effets à la fois.
     Les personnes atteintes de l'ETCAF ont souvent des troubles d'apprentissage, de la mémoire, du champ de l'attention, de la capacité de résoudre des problèmes, de l'élocution et de l'audition; elles présentent un risque élevé d'avoir des difficultés scolaires, des démêlés avec la justice ainsi que des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie et des troubles mentaux. L'ETCAF englobe le syndrome d'alcoolisation foetale caractérisé par un retard de croissance, des déformations du visage et des troubles du système nerveux central.
    Des enfants qui ne présentent pas tous les symptômes du SAF peuvent être atteints d'une autre forme de l'ETCAF, et leurs troubles peuvent être tout aussi graves que ceux des enfants atteints du SAF. Aucune limite sûre quant à la quantité d'alcool que peut consommer une femme enceinte ni période pendant laquelle la consommation d'alcool ne présente pas de danger pour elle n'ont pu être établies.
     Le syndrome d'alcoolisation foetale est souvent décrit comme la plus grande cause d'arriération mentale au Canada et aux États-Unis. Il est vrai que le SAF est plus fréquent que la trisomie et le spina bifida, mais il n'est pas la cause de l'arriération. Du seul fait que la consommation d'alcool pendant la grossesse en est la seule cause, le SAF peut être évité complètement si la future mère s'abstient de consommer de l'alcool pendant sa grossesse.
    L'abstention d'alcool pendant la grossesse doit devenir une norme sociale, mais comme la moitié des grossesses ne sont pas planifiées et que la période pendant laquelle le foetus est le plus à risque se situe entre les 15e et 22e jours de la grossesse, si une femme est en âge de procréer, qu'elle est sexuellement active et qu'elle n'utilise pas de moyens de contraception, elle devrait s'abstenir de boire pour ne pas risquer de faire du tort à un enfant éventuel.
    Le projet de loi C-251 s'inspire notamment d'un rapport du Comité de la santé datant de juin 1992. Il est intitulé «Syndrome d'alcoolisme foetal-Une tragédie évitable» et l'on y recommandait d'apposer des étiquettes de mise en garde sur les contenants de boissons alcoolisées pour rappeler aux consommateurs qu'il peut être dommageable pour le foetus de consommer de l'alcool pendant la grossesse.
     La Chambre remarquera que le projet de loi ne comprend en fait qu'une seule disposition, qui laisse délibérément au gouverneur en conseil le soin de fixer les exigences précises relatives à l'étiquetage. C'est donc le règlement du projet de loi qui précisera le libellé, la forme et la taille de l'étiquette et autres détails nécessaires à la mise en application de la mesure législative. Ce sont les responsables de Santé Canada qui m'ont recommandé de procéder ainsi afin de disposer de la souplesse et de la latitude requises pour répondre aux préoccupations et aux suggestions de l'industrie.
(1105)
    Je sais que les responsables de la santé sont en pourparlers avec diverses parties intéressées et j'espère vraiment que les industries concernées seront prêtes à collaborer avec Santé Canada et à participer à une stratégie nationale de réduction des méfaits de l'alcool.
    À la suite d'une conférence d'experts, tenue à Régina l'été dernier, un communiqué de presse a été émis sous le titre suivant: « Les médecins, les juges et les avocats s'accordent pour dire qu'il faut en faire plus pour diminuer les risques d'alcoolisation foetale. » Une citation en particulier a retenu mon attention. Le docteur Gideon Koren, professeur et directeur du programme Motherisk à l'hôpital pour enfants de Toronto a dit ceci: « Il est certain que nous ne faisons pas ce que nous devrions faire [...] Comparativement à certaines autres maladies, tant les maladies du coeur et les accidents vasculaires cérébraux que le cancer, la volonté d'agir est quasiment inexistante au sein de la société. »
    Voilà l'opinion d'un éminent professionnel de la santé qui, auparavant, appuyait la position de l'industrie des boissons alcoolisées au sujet de l'étiquetage. Il a changé d'avis. Ce que nous faisons est inefficace. Il a également dit: « Santé Canada estime qu'environ 1 p. 100 des Canadiens, soit 300 000 d'entre eux, sont atteints de cette maladie sous une forme ou une autre [...] Cela veut dire que, chaque année, un nouveau-né sur cent en est atteint, ce qui représente 4 000 nouveaux cas et entraîne des coûts énormes. »
    La dernière fois que j'ai parlé de ce projet de loi, en mai dernier, j'ai dit au comité que 20 pays imposaient déjà les étiquettes de mise en garde pour les contenants de boissons alcoolisées. Il s'agit notamment des pays suivants: l'Arménie, l'Islande, le Portugal, l'Espagne, l'Inde, le Japon, la République de Corée, Taïwan, la Thaïlande, le Mexique, les États-Unis, le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras, l'Argentine, le Brésil, la Colombie, l'Équateur, le Venezuela et le Zimbabwe.
    Certains changements ont eu lieu depuis et je tiens à en informer la Chambre. Cependant, permettez-moi tout d'abord, de parcourir quelques coupures de presse que j'ai choisies. Le 4 septembre 2007, il n'y a pas si longtemps, l'Afrique du Sud annonçait une nouvelle réglementation visant les contenants de boissons alcoolisées rendant obligatoire l'affichage de messages sur les effets néfastes de la consommation d'alcool. Le ministère concerné a déclaré que la réglementation entrerait en vigueur au cours des 18 mois suivants, dans le cadre d'une campagne de promotion d'un mode de vie sain.
    En Irlande, le 14 octobre 2007, il n'y a pas très longtemps, on a rendue obligatoire l'apposition sur les contenants d'alcool d'étiquettes de mise en garde concernant les dangers de la consommation d'alcool durant la grossesse. Il faut signaler que Drinks Manufacturers Ireland, DMI, l'organisation qui chapeaute l'industrie de l'alcool, a confirmé hier qu'elle acceptait l'étiquetage de mise en garde qui s'appliquera à tous les contenants d'alcool vendus dans la république. L'étiquette contiendra l'image d'une femme enceinte et d'une ligne rouge diagonale ou un avertissement écrit.
    Également, le 14 août, l'Union européenne demandait que l'on fasse figurer sur les bouteilles, les étiquettes de bouteilles et les cannettes un message concernant les dangers de l'alcool pour les femmes enceintes et pour les conducteurs d'automobiles.
    Voyons maintenant ce qui se passe en Tasmanie. Le 2 juillet 2007, le commissaire à l'enfance, Paul Mason, y a déclaré que les femmes en âge de procréer ne devraient pas boire de l'alcool si elles étaient enceintes. Il préconise l'étiquetage des contenants d'alcool de manière à avertir les femmes des risques liés à l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale, qui touchent 5 800 habitants de la Tasmanie. Il a ajouté qu'aucun niveau de consommation d'alcool durant la grossesse n'était sûr.
    Et qu'en est-il de la Nouvelle-Zélande? Ce pays a étudié la question au cours des deux dernières années, et son comité de la santé formule les recommandations suivantes: tout d'abord, une mesure législative ou des normes qui exigeront l'étiquetage obligatoire de tous les types d'alcool, pour rappeler aux femmes le danger de la consommation d'alcool durant la grossesse; deuxièmement, des mesures pour faire connaître les conséquences néfastes sur la santé de la consommation d'alcool durant la grossesse, y compris des mesures de vulgarisation concernant l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale; troisièmement, des mesures de surveillance et de recherche accrues visant l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale et l'application immédiate de mesures d'intervention liées aux résultats de cette recherche; enfin, l'adoption d'une politique incitant les femmes à ne boire à aucun moment durant la grossesse.
(1110)
    Qu'en est-il en Australie? Depuis ma dernière intervention à la Chambre sur ce projet de loi, l'Australie a déclaré, le 17 juin, que tous les produits alcoolisés porteront des étiquettes de mise en garde qui établiront le lien entre la consommation occasionnelle excessive d'alcool et les dommages au cerveau, si les nouvelles mesures de sécurité sont adoptées. La fondation de réadaptation et d'éducation sur l'alcool a déclaré ce qui suit: « L'Australie connaît une épidémie d'intoxication. Nous ne buvons pas plus qu'il y a 10 ans, mais nous buvons différemment. » L'organisme fait ici référence aux cuites. Il a également ajouté: « Il ne s'agit pas d'une solution parfaite, mais ce doit être un des moyens à notre disposition pour faire comprendre aux gens que l'alcool n'est pas un produit inoffensif. »
    De plus, en Australie, selon des estimations, la moitié des gens atteints de l'ETCAF se retrouveront dans une institution de soins, dans un établissement de santé mentale ou en prison. L'Australie dépense plus de 13 millions de dollars par jour pour les personnes atteintes de l'ETCAF, que ce soit pour les soins de santé, les soins institutionnels, la santé mentale, les services de justice et d'autres services. L'adoption de mesures immédiates permettrait non seulement de réduire ces coûts, mais aussi d'améliorer la vie des enfants, des familles et des collectivités.
    Enfin, tournons- nous vers le Royaume-Uni. Sous Tony Blair, le Royaume-Uni s'est récemment doté d'une stratégie nationale de réduction des méfaits de l'alcool. On peut lire ce qui suit dans le sommaire du document:
    Selon l'analyse provisoire de l'unité des stratégies, l'abus d'alcool coûterait actuellement environ [40 milliards de dollars canadiens par année] [...] Ce coût comprend: 1,2 million d'incidents de violence (à peu près la moitié de tous les crimes violents); 360 000 incidents de violence conjugale (près du tiers) liés à l'abus d'alcool; l'augmentation des comportements antisociaux et la peur du crime -- 61 p. 100 de la population estime que la violence liée à l'alcool est en hausse; des dépenses de [200 millions de dollars canadiens] pour des traitements spécialisés liés à l'alcool; plus de 30 000 admissions à l'hôpital pour le syndrome de dépendance alcoolique; jusqu'à 22 000 décès prématurés par année; dans les période de pointe, jusqu'à 70 p. 100 des admissions aux services des accidents et des urgences; jusqu'à 1 000 suicides; jusqu'à 17 millions de jours de travail perdus en raison d'absences attribuables à l'alcool; de 780 000 à 1,3 million d'enfants touchés par les problèmes d'alcool de leurs parents; l'augmentation du nombre de divorces -- les mariages où il existe des problèmes d'alcool sont deux fois plus susceptibles se terminer par un divorce.
    C'est assez convaincant. Le Royaume-Uni cherche à promouvoir la conformité volontaire, comme le Canada.
    Permettez-moi de donner quelques statistiques. La dernière fois que j'ai cité des statistiques, 67 p. 100 des Canadiens étaient en faveur des étiquettes de mise en garde, selon une étude commandée par Décima et Santé Canada.
    Nous avons les résultats d'un nouveau sondage maintenant. C'est un sondage Environics effectué pour l'Agence de la santé publique du Canada et dont les résultats ont été publiés en mai 2006, juste après mon allocution sur la mesure visant à fournir de l'information sur les risques liés à la consommation d'alcool. Lors du sondage, un nombre effarant de gens ont dit approuver l'initiative visant à donner de l'information sur les risques que présente la consommation d'alcool durant la grossesse.
    Quels sont les chiffres? Quelque 87 p. 100 ont dit approuver les étiquettes de mise en garde, 97 p. 100 des Canadiens approuvent la publicité gouvernementale, 95 p. 100 approuvent les mises en garde dans la publicité de boissons alcooliques, 85 p. 100 approuvent les mises en garde dans les bars et discothèques et 80 p. 100 approuvent les mises en garde dans les restaurants.
    En très grande majorité, les Canadiens sont en faveur des étiquettes et des messages sur les risques importants associés à la consommation d'alcool. Le moment est maintenant venu pour le Parlement d'agir.
    Si nous pouvions empêcher ne serait-ce qu'un faible pourcentage des problèmes causés par la consommation inconsidérée d'alcool, grâce aux économies réalisées au chapitre des programmes sanitaires et sociaux, de la justice pénale et de la sensibilisation, cela serait beaucoup plus rentable qu'une stratégie nationale de réduction des méfaits causés par l'alcool. Plus important encore, nous pourrions éliminer tant de misère et de souffrances et c'est là l'essence d'une société capable de compassion.
    Les députés voudront savoir si les étiquettes fonctionnent? Ce n'est pas la bonne question. Les étiquettes apposées sur les bouteilles de boissons alcooliques devraient être considérées comme une déclaration du gouvernement canadien selon laquelle, consommé sans discernement, l'alcool est un produit nocif et le Canada compte faire le nécessaire pour veiller à ce que nous ayons une véritable stratégie de réduction des méfaits de l'alcool très bientôt.
(1115)
    Monsieur le Président, j'aimerais remercier le député d'avoir soumis cette question au Parlement de nouveau. Nous avons abordé cette dernière pas plus tard que lors de la dernière législature. Nous l'avons présentée au Comité de la santé, qui a mené une étude approfondie sur les répercussions que de telles étiquettes auraient sur le comportement.
    C'était réellement très intéressant. Mon collègue de Yellowhead parlera bientôt. Il était le président du Comité de la santé à l'époque, et il aura plus le temps d'expliquer ce qui s'est produit. La majorité des témoignages que le Comité a entendus laissent entendre que l'apposition d'étiquettes de mise en garde ne réduirait pas la consommation dangereuse d'alcool parmi les groupes particulièrement à risque, comme les personnes qui conduisent en état d'ébriété ou les femmes qui continuent à boire lorsqu'elles sont enceintes.
    Il n'y pas de preuve qu'en raison des étiquettes de mise en garde, les gens prennent moins de risques relatifs à la consommation d'alcool. Au contraire, l'initiative pourrait enlever des ressources précieuses aux programmes qui fonctionnent.
    Nous devons faire preuve de bon sens. La priorité des buveurs occasionnels ne consiste pas à lire les étiquettes, mais à boire. Toutes les personnes qui sont allées dans un bar ont vu que les gens utilisent des verres qui ne sont pas étiquetés et qu'ils ne prennent pas le temps de lire les étiquettes.
    La dernière fois, le Comité de la santé, y compris les députés libéraux, ont rejeté le projet de loi parce qu'il y a des meilleures solutions que celle suggérée par le député. Je me demande si le député pourrait expliquer pourquoi les membres de son parti ainsi que les autres députés ont voté contre ce projet de loi pendant la dernière session.
    Monsieur le Président, le député ne comprend tout simplement pas le dossier. Il veut parler d'étiquettes et de la question de savoir si les étiquettes en elles-mêmes permettent de résoudre tous les problèmes.
    Ce que j'ai dit à la fin de mon allocution, et il est dommage qu'il n'ait pas écouté, c'est que nous avons actuellement des boissons alcoolisées qui ressemblent à des produits bénins, à des produits agréables. Or, nous avons clairement la preuve, et le député ne l'a pas réfutée, que ces produits sont dangereux. L'alcool peut causer des dommages s'il est mal utilisé, mais on ne nous fait aucune mise en garde à cet égard.
    Si une étiquette est apposée sur un contenant de boisson alcoolisée, il s'agit d'une déclaration, d'une indication et d'un symbole adressés à tous les Canadiens pour les informer que ce produit peut être dommageable s'il est mal utilisé. Il s'agit donc du point de départ de tous les autres programmes de promotion, de sensibilisation et de réduction des dommages. Ils ne peuvent être mis en oeuvre qu'une fois qu'on a déclaré que l'alcool est un produit dangereux. Le député devrait le savoir.
(1120)
    Monsieur le Président, je remercie le député de Mississauga-Sud de son travail dans ce dossier. Il s'agit certes d'un dossier important pour tous les Canadiens.
    Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, la question n'est pas de savoir ce que disent les données scientifiques et l'opinion publique, car cela est connu depuis bien des années. Nous savons depuis des lustres qu'apposer des étiquettes sur des bouteilles donne en fait des résultats et que les Canadiens appuient cette initiative.
    Le problème que nous avons aujourd'hui, c'est de savoir si le député de Mississauga-Sud peut engager ses collègues, les députés libéraux, à faire davantage que ce qu'ils ont fait la dernière fois que nous avons étudié cette question. En effet, il y a six ans, ils ont appuyé à l'unanimité ma motion en faveur des étiquettes, puis ils n'ont rien fait à cet égard lorsqu'ils étaient au pouvoir.
    Il en va de même du gouvernement conservateur. Les libéraux et les conservateurs disent une chose un jour et font ensuite autre chose. La vraie question est celle-ci: quelles garanties le député peut-il nous donner que ses collègues agiront différemment cette fois par rapport à il y a six ans?
    Le député de Mississauga-Sud sera intéressé de savoir que son temps de parole est écoulé, mais que je lui permets de répondre très brièvement.
    Monsieur le Président, je dois dire qu'il y a dans cette enceinte des députés qui fondent leur vote sur les mauvaises raisons. Certains députés qui siègent au Comité de la santé ont voté en tenant compte du fait qu'il y a une brasserie dans leur circonscription.
    Je ne parle pas de cela. Il est question des députés de votre parti qui ont voté en faveur, mais qui n'ont rien fait.
    On parle des députés qui ont voté de cette façon. Je peux uniquement dire que les conservateurs ont voté contre le rapport du Comité de la santé qui recommandait une stratégie exhaustive de réduction des méfaits causés par l'alcool. Ils se sont prononcés contre cette mesure législative. Je sais qui ne souscrit pas à ce projet de loi: les conservateurs. Ils devraient avoir honte.
    Monsieur le Président, c'est un privilège pour moi de faire des observations sur le projet de loi que le député de Mississauga- Sud a présenté. Il travaille très fort sur ce dossier depuis de nombreuses années. Après avoir été soulevée à la Chambre à maintes reprises, la question a été renvoyée deux fois au Comité de la santé. Je me penche plus particulièrement sur la dernière fois où le comité en a été saisi, lorsque je présidais le comité et que j'ai pu voir quels étaient exactement les mérites de cette mesure législative.
    J'estime important que nous comprenions que l'ETCAF, l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale, est un problème très sérieux au Canada et qu'il faut s'y attaquer de façon très exhaustive. Ces troubles ne constituent pas un problème simple; ils dévastent des familles, et les coûts qu'ils entraînent sur les plans humain et sanitaire constituent un poids pour notre système de soins de santé et notre système judiciaire.
    Quand on se penche sur l'ETCAF, on peut s'imaginer le sentiment d'un parent qui, à cause de sa consommation d'alcool, a un enfant affligé de ce handicap. Les parents se sentent terriblement coupables de savoir que, sans le vouloir, ils ont nui à leur enfant et ont provoqué chez lui un handicap à cause d'un comportement qui aurait certainement pu être évité.
    Nous devons vraiment régler ce problème en faisant beaucoup plus que placer une étiquette sur une bouteille d'alcool. Je vais expliquer pourquoi nous devons nous attaquer au problème de façon beaucoup plus sérieuse et énergique.
    Je vais illustrer mon propos en prenant comme exemple la saison de la chasse au gros gibier qui est maintenant en cours et à laquelle s'adonnent de nombreux Canadiens. Les chasseurs savent qu'il est très facile de se laisser attirer hors de la piste du gros gibier par des traces de lapin dans la neige. C'est un peu ce que nous faisons avec ce projet de loi: si le chasseur choisit de traquer le lapin, il est tout de même en train de chasser, mais il ratera son véritable objectif, soit nourrir sa famille pendant l'hiver. J'y reviendrai dans quelques instants.
    À mon avis, ce projet de loi est une chasse au lapin et non une chasse au gros gibier. Pourtant, ce dossier est bien plus qu'un lapin et doit être abordé de manière exhaustive. Il ne suffit pas de placer une étiquette sur une bouteille pour régler le problème.
    Je dirais au député que nous devons examiner les témoignages que le comité de la santé a entendus en nous demandant si l'idée de placer une étiquette sur une bouteille fonctionnerait ou non. De nombreux témoins nous ont parlé des problèmes et de l'efficacité d'une étiquette sur les bouteilles. Un nombre appréciable de témoins — il ne serait pas juste de parler d'une majorité — ont dit qu'une étiquette sur une bouteille d'alcool ne changerait pas sensiblement le niveau de consommation d'alcool pendant la grossesse.
    En fait, des statistiques sur la consommation d'alcool ont été publiées depuis que ce projet de loi, et un projet de loi semblable, je crois que c'était le projet de loi C-206, en 2005, ont été présentés. Depuis le début des années 1990, 90 p. 100 des Canadiens qui consomment de l'alcool se disaient conscients de l'effet négatif d'une forte consommation d'alcool sur le foetus. Ce pourcentage a beaucoup augmenté depuis. À l'heure actuelle, 99 p. 100 des Canadiens savent que l'alcool est néfaste pour le foetus.
    Si nous nous contentons d'apposer une étiquette sur les bouteilles pour informer le public des problèmes que l'alcool peut causer à la femme enceinte, cette information n'aura pas plus d'impact que celle qui est déjà disponible. Le message doit aller plus loi et être plus percutant. Il faut des solutions plus énergiques. Le message transmis à la mère doit préciser qu'en cas de grossesse, toute consommation d'alcool risque d'avoir des conséquences graves pour l'enfant.
    Le Comité permanent de la santé a examiné la question. Son rapport est intitulé en partie « Un seul c'est déjà trop », ce qui laisse entendre que le message doit être plus percutant qu'une simple étiquette sur une bouteille, où il est écrit que la consommation d'alcool pendant la grossesse nuit au foetus. Nous devons faire en sorte que le message aille beaucoup plus loin.
(1125)
    Une personne de ma circonscription est venue me voir. Elle travaille avec des femmes dont les enfants sont nés avec un trouble du spectre de l'alcoolisation foetale. Nous avons discuté longuement de la situation, de l'impact sur les personnes touchées et de la façon de régler le problème beaucoup plus efficacement.
    Nous avons parlé de l'adoption d'un programme global, ainsi que des mesures qui devaient être mises en oeuvre. Le député qui a présenté ce projet de loi suggère simplement d'apposer une étiquette sur les bouteilles, et que cela permettrait d'amorcer un plan global.
    La personne qui est venue me voir m'a parlé de son expérience auprès d'enfants souffrant du TSAF, ainsi que de leurs mères. Selon son expérience, la meilleure façon de combattre ce fléau est de faire en sorte que les mères qui ont déjà eu un enfant atteint du TSAF ne se retrouvent pas dans cette situation pour les prochains. Pour y arriver, il faut que la personne soit encadrée le mieux possible afin de pouvoir compter sur un mécanisme de soutien.
    Le problème, ce n'est pas seulement le fêtard de fin de semaine qui force la dose sans être conscient des dangers. Le problème, c'est plutôt la consommation excessive et régulière d'alcool. C'est un comportement fréquent dans les réserves des Premières Nations ou dans les familles dysfonctionnelles, dont les membres ne peuvent tout simplement plus se passer de ce produit. Ils n'ont pas la chance de pouvoir compter sur un mécanisme de soutien qui leur permettrait de régler leur problème.
    Cette personne qui est venue me voir propose que, pour avoir un plan complet, nous collaborions avec les gouvernements provinciaux afin de nous attaquer au TSAF et assurer la prestation des soins de santé dans une optique globale. Nous devrions nous assurer de faire tout ce que nous pouvons pour soutenir ces gens afin qu'il n'y ait plus de TSAF.
    Quand nous avons examiné cette mesure législative, nous avons aussi constaté qu'investir des sommes importantes dans l'apposition d'étiquettes aurait un effet négatif sur certaines petites et moyennes brasseries. Cela les obligerait à utiliser autrement des fonds qu'elles avaient déjà prévus pour lutter contre le problème. L'apposition d'une étiquette sur une bouteille, ce qui n'atteint pas vraiment l'objectif, aurait un effet négatif sur cette industrie, sur ces entreprises et sur les contribuables.
    Cela me préoccupe vraiment. Des gens pourraient demander pourquoi nous ne mettons pas d'étiquette sur les bouteilles. Ils pourraient demander quel mal cela pourrait bien faire. Le mal que cela pourrait faire, comme le gouvernement précédent l'a fait pour tant de choses, c'est de croire que poser un petit geste pour la bonne cause revient à régler le problème. C'est comme un chasseur de gros gibier qui traque plutôt le lapin et croit que tout ira bien une fois qu'il l'aura capturé.
    C'est une façon tout à fait inappropriée de voir les choses. Toute cette question est beaucoup trop grave pour que nous nous imaginions qu'il suffit d'apposer une étiquette sur une bouteille pour résoudre le problème. La dernière fois que nous nous sommes penchés sur la question en comité, le député avait apporté des bouteilles qui venaient des États-unis et d'autres pays pour nous montrer les étiquettes qui y étaient apposées. Elles étaient tellement petites qu'il fallait presque une loupe pour pouvoir lire ce qui y était écrit. Toute personne se trouvant dans une pièce sombre, ayant de la difficulté à lire ou ayant bu quoi que ce soit n'aurait même pas vu l'étiquette et en aurait encore moins compris l'importance.
    Je pense au tabac, par exemple. Nous avons adopté un programme d'étiquetage très audacieux et percutant pour tenter de convaincre les gens d'arrêter de fumer. Je ne suis toutefois pas persuadé, et les statistiques ne me convainquent pas non plus, que le seul fait d'apposer de telles étiquettes sur les paquets de cigarettes change vraiment quoi que ce soit. Ce qui a changé les habitudes à l'égard de la cigarette au pays, c'est l'interdiction de fumer dans les lieux publics et la pression des pairs qui a rendu très démodé le fait d'allumer une cigarette en présence d'autres personnes, et surtout d'enfants. Pour ce qui est du TSAF, nous devons faire en sorte que le fait de consommer de l'alcool alors qu'on pourrait attendre un enfant devienne tout aussi démodé.
    Je pourrais vous parler également des répercussions négatives que de telles mesures pourraient avoir sur cette industrie, sans raison valable, mais mon temps de parole est presque écoulé et je tiens à dire que nous devons nous pencher sérieusement sur la mesure législative présentée à la Chambre et traiter la question avec vigueur. Nous ne devons pas nous contenter de masquer le problème. Nous devons prendre des mesures audacieuses et efficaces pour les Canadiens.
(1130)
    C'est la raison pour laquelle je n'appuierai pas cette mesure législative. Bien que les intentions du député soient bonnes, ce projet de loi n'apporte pas de solution efficace au problème.

[Français]

    Monsieur le Président, je vous remercie de me donner la parole ce matin. Le projet de loi C-251 du député de Mississauga-Sud relance le débat portant sur le projet de loi C-206 du même député. De fait, cela relance le débat sur l'étiquetage de la mise en garde sur les bouteilles d'alcool au sujet de la consommation d'alcool.
    Je voudrais rappeler que 200 pays rejettent cette idée et que, dernièrement, la Nouvelle-Zélande a rejeté cette idée après tout un débat.
    Il faut se poser des questions: cela est-il un moyen efficace pour atteindre les différents publics cibles et l'apposition de ces étiquettes sur les bouteilles pose-t-il problème?  Soulignons que lorsqu'on parle de consommation d'alcool, on parle de consommation excessive d'alcool. Plusieurs intervenants du milieu scientifique, qui font de la recherche sur la consommation d'alcool, affirment que l'étiquetage de la mise en garde sur les bouteilles d'alcool serait peut-être alarmiste. Cette opinion n'est peut-être pas partagée, et on le constate ici, en cette Chambre, ce matin. Plusieurs intervenants s'exprimeront encore sur ce sujet, cependant, la perception est différente selon les intervenants. Il s'agit de savoir comment nous, les intervenants, voulons apporter une contribution pour cibler ceux et celles qui sont touchés par l'alcoolisme foetal, par exemple les femmes et les enfants, ceux qui conduisent leur automobile en état d'ébriété ou ceux qui mettent en péril leur santé.
    À mon avis, il faut vraiment faire une réflexion en profondeur. Est-ce le meilleur moyen pour contrer cet abus d'alcool qui a des répercussions dans la vie des individus? Je veux être bien claire: il ne s'agit nullement de nier les effets de la consommation excessive d'alcool sur la grossesse par exemple, ou, comme je le disais plus tôt, sur la conduite automobile ou sur la santé. Et il ne s'agit pas non plus de nier que ces effets sont parfaitement évitables. À notre avis, les deux mots clés pour lutter efficacement contre ce fléau sont: ciblage et rigueur.
    Plusieurs intervenants ont d'ailleurs jeté un éclairage là-dessus lorsque nous avons eu à prendre position à savoir si nous allions voter pour ou contre ce projet de loi. C'était par des actions sérieuses, fondées sur des données probantes et en profondeur.
    Par conséquent, il faut investir dans la recherche. Il faut que nos gouvernements appuient certaines recherches très ciblées pour contrer les récalcitrants qui abusent de l'alcool. À ce sujet, on en a fait énormément depuis 15 ans, et je vais vous donner un exemple des répercussions de l'abus d'alcool au Québec. Tout le monde sait évidemment que l'abus d'alcool pose problème. Des statistiques existent. Des sondages ont été menés auprès de la population du Québec, notamment. On serait quand même surpris de savoir que plus de 85 p. 100 des abuseurs d'alcool comprennent les causes de l'effet de l'alcool sur la santé.
    Comme je le disais, il faut pouvoir joindre ceux et celles qui sont les plus vulnérables et mieux comprendre les comportements. Il y a aussi des récalcitrants qui sont imperméables à tout, même aux campagnes de sensibilisation. À mon avis, c'est là la meilleure façon de contrer l'abus d'alcool. Mais c'est également important que les gouvernements s'impliquent, comme je le disais plus tôt.
    Au Québec, on a créé l'association Éduc’alcool qui a demandé une recherche sur les aspects sociaux de la santé et de la prévention à des scientifiques du Groupe de recherche sur les aspects sociaux de la santé et de la prévention, qui s'intéressent depuis 15 ans à cette problématique.
    Or, de concert avec un groupe de l'Université de Montréal, ce groupe de recherche sur les aspects sociaux a fait une analyse de toutes les recherches disponibles sur ce sujet et a constaté que, lorsqu'il est combiné à d'autres outils et méthodes d'information, l'étiquetage de la mise en garde pourrait être efficace pour augmenter la notoriété du phénomène auprès de certains consommateurs.
(1135)
    Cependant, ces mesures ne sont pas efficaces pour changer les comportements ou pour diminuer les niveaux de consommation. Elles sont totalement inefficaces.
    Tout un groupe de recherche a fait une analyse des différentes recherches qui étaient disponibles. Ces gens ont également demandé à de multiples centres au Canada et à l'étranger de fournir les données dont ils disposent. Au total, plus d'une centaine de recherches ont été soumises à ce groupe, le GRASP, qui les a passées en revue.
    Personnellement, ce qui m'a interpellé, c'est la deuxième partie puisque c'est à cela qu'il faut s'attaquer. Ces recherches mentionnent qu'apposer un étiquetage de mise en garde ne serait pas efficace pour changer les comportements ou pour diminuer les niveaux de consommation, et que c'est totalement inefficace lorsqu'il s'agit d'atteindre les plus gros consommateurs, c'est-à-dire les groupes cibles, dont les femmes enceintes et le foetus. Bien évidemment il y a des conséquence sur la santé et le comportement des enfants. J'ai donc accordé beaucoup d'importance à cet ensemble de recherches. Il ne s'agit pas d'une recherche mais de plusieurs recherches.
    Je vais maintenant parler d'Éduc’alcool, au Québec. Les objectifs poursuivis par cet organisme sont d'éduquer le grand public, particulièrement les jeunes qui consomment, et promouvoir la modération, car la plupart des gens boivent avec modération. Beaucoup de campagnes ont été faites par l'intermédiaire de publicités dans les journaux et à la télévision. Ces campagnes ont été très ciblées et il y en a une dizaine au Québec. Si le temps me le permet, je parlerai de quelques-unes. Ces campagnes concernaient tous les groupes cibles, soit les jeunes, les femmes, les étudiants dans les universités, dans les collèges, au primaire et au secondaire.
    On constate aussi que les conducteurs sont un groupe cible qu'il faut aussi viser. Les différents partenaires de la santé se sont associés à ces différentes campagnes de publicité. L'Association des brasseurs du Canada s'est aussi associée à une fondation mise sur pied pour contrer ce phénomène de l'alcoolisme.
    Éduc’alcool a voulu aussi établir le contexte historique et culturel qui entoure la consommation d'alcool. On sait qu'il existe un contexte historique et culturel. Les Premières nations sont très ciblées par la question de l'alcoolisme foetal. Pourquoi donc ne pas intervenir dans des milieux très ciblés? Certains scientifiques ou ceux qui ont fait des recherches sur ce problème disent que le fait d'apposer une étiquette donnera peut-être l'image que le problème est moins grand et qu'à force de voir cette étiquette, le but visé ne sera peut-être pas atteint.
    Au Québec, on a investi beaucoup d'argent à ce sujet. Éduc’alcool a investi 20 millions de dollars pour éduquer les Québécois, susciter des actions et mobiliser des partenaires. On pourrait aussi additionner le temps d'antenne gratuit à la télévision qui a souvent été mis à sa disposition. Des actions ont également été posées dans des endroits publicitaires. Si on calcule le tout, ces actions représentent une valeur d'au-delà de 60 millions de dollars. Et cela donne des résultats.
    Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas être vigilant et qu'il ne faut pas appuyer la recherche. En effet, étant donné que nous serons contre ce projet de loi, on pourrait dire que cela ne nous interpelle pas à un autre niveau. Toutefois, on veut peut-être travailler différemment par des campagnes de sensibilisation et par des fondations indépendantes qui pourraient être mises sur pied. On peut aussi interpeller ceux qui produisent ces produits alcoolisés pour savoir comment ils peuvent intervenir pour montrer aux gens que l'alcool est nocif pour la santé quand on en prend trop. Il est nocif lorsqu'on conduit une voiture. Ce sont tous ces groupes qu'il faut aller chercher pour contrer cette tendance à trop boire de l'alcool, et il y a aussi des effets bénéfiques sur la santé quand on prend moins d'alcool.
(1140)
    J'aurai peut-être quelques...
    Reprise du débat.
     L'honorable députée de Winnipeg-Nord a la parole.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je saisis l'occasion d'exprimer mon point de vue sur l'importante question que constitue l'étiquetage des produits alcoolisés en vue de réduire la consommation d'alcool chez les femmes enceintes et de prévenir la conduite avec facultés affaiblies. La consommation d'alcool nuit à la santé.
    Je remercie le député de Mississauga-Sud, qui a présenté ce projet de loi. Il ne peut probablement pas influencer ses collègues lors du vote sur la mesure, mais il est important que le Parlement demeure saisi de la question.
    La Chambre a été saisie de cette question il y a plus de 20 ans. C'est Jim Karpoff, le député néo-démocrate représentant Surrey-Nord à l'époque, qui a été le premier à proposer au Parlement qu'on appose des messages de mise en garde sur les produits alcoolisés de manière à s'attaquer aux problèmes liés à l'alcool. Plusieurs autres députés lui ont emboîté le pas, notamment le député de Mississauga-Sud et un député néo-démocrate qui a présenté une motion à la Chambre le 23 avril 2001 préconisant qu'on étiquette les produits alcoolisés afin d'alerter les femmes enceintes sur le fait que la consommation d'alcool durant la grossesse met à risque leur nouveau-né d'être atteint du syndrome d'alcoolisation foetale.
    La Chambre a donné un appui presque unanime à cette motion. En effet, 217 députés l'ont appuyée et 11 s'y sont opposés. Comme mon collègue de Mississauga-Sud l'a signalé, c'set à cause des activités de l'industrie des boissons alcoolisées dans leurs circonscriptions que ces 11 députés s'y sont opposés. Il n'en demeure pas moins que 217 députés provenant de tous les partis à la Chambre ont appuyé cette motion explicite et peu coûteuse. Ils l'ont appuyée parce qu'elle est sensée et qu'elle ajoute un outil à l'arsenal visant à prévenir les problèmes liés à la consommation d'alcool.
    Nous avons des données scientifiques. Nous savons qu'il y a un lien entre la consommation d'alcool, la grossesse et le syndrome d'alcoolisation foetale. Nous avons des données scientifiques sur la conduite avec facultés affaiblies. L'alcool au volant fait de plus en plus de morts et de blessés parce que des personnes aux facultés affaiblies conduisent leur véhicule. Je tiens à ajouter que ce n'est pas le fait seulement de gens qui prennent une cuite d'un soir. Il y en a qui oublient. Ces gens prennent un verre sans réfléchir aux conséquences que peut avoir leur geste. Il est essentiel de rappeler aux simples citoyens les dangers de la conduite avec facultés affaiblies, et il est tout aussi essentiel de rappeler aux femmes enceintes, bien qu'elles le sachent, que la consommation d'alcool, ne serait-ce que d'un seul verre, pendant leur grossesse, met à risque leur nouveau-né d'être atteint du syndrome d'alcoolisation foetale ou des troubles du spectre de l'alcoolisation foetale.
    C'est ce que nous faisons dans tous les domaines. Il est absolument ridicule d'entendre la diatribe des conservateurs voulant que l'étiquetage ne fonctionne pas. Quel argumentaire condescendant, fallacieux et superficiel! Je n'en ai jamais entendu de pareil, et tout cela, parce que cette bande de conservateurs n'est rien d'autre qu'une troupe de porte-parole des vendeurs d'alcool. Ils ont appris exactement les mêmes répliques que l'Association des brasseurs du Canada et que tous les autres acteurs de l'industrie de l'alcool. Il n'y a absolument rien là-dedans qui ait une seule once de bon sens. Personne ne prétend dans cette enceinte que l'étiquetage est une panacée contre la consommation d'alcool pendant la grossesse ou contre la conduite avec facultés affaiblies, mais c'est tout de même un message important qui constitue une mesure utile.
    Même si nous ne parvenions ainsi qu'à aider une seule personne, ne serait-ce pas déjà un bon résultat? N'est-ce pas la raison pour laquelle nous sommes ici? Ne devons-nous pas nous efforcer de remédier une personne à la fois aux graves problèmes qui affligent notre société? N'est-il pas souhaitable d'empêcher le syndrome d'alcoolisation foetale de faire une victime de plus, qui en souffrira la vie durant et qui coûtera de 1,5 à 2 millions de dollars chaque année à notre économie? N'est-il pas en soi valable de vouloir se montrer solidaire des mères et des pères qui ont perdu un jeune enfant ou un adolescent parce qu'une personne a pris le volant après avoir consommé de l'alcool? Ne devons-nous pas nous réjouir de pouvoir faire un petit pas? C'est ce que nous faisons constamment, à d'autres égards.
    Quand on achète une tasse de café, il y a un avertissement sur le contenant qu'on emporte avec soi. Le marchand prévient les gens que le café est très chaud et peut les brûler. Est-ce que cette pratique pose problème? J'aimerais que le secrétaire parlementaire du gouvernement conservateur me le dise. Nous savons bien que nous pouvons nous faire mal en nous répandant dessus du café brûlant. Pourtant, le marchand prend la peine de nous le rappeler. Il s'agit d'un rappel salutaire. Et, que dire des robinets que nous ouvrons dans les lieux publics? Des affiches nous avertissent des dangers de l'eau chaude.
(1145)
    Il en est de même avec les pancartes qui nous avertissent de la présence d'un chien méchant. Nous savons que les chiens peuvent mordre, mais nous posons quand même ces pancartes, parce qu'elles nous rappellent qu'il y a un problème si un chien mord une personne. Autrement dit, elles nous incitent à la prudence. C'est exactement la même logique dans le cas de la consommation de boissons alcoolisées.
    Les femmes enceintes ne comptent-elles pas?
    Mme Dawn Black: Les enfants ne comptent-ils pas?
    Mme Judy Wasylycia-Leis: Les enfants ne comptent-ils pas? Pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures? Il est normal de prévenir les gens du danger posé par un cerf-volant près de lignes électriques, du danger posé par un café chaud ou par un chien qui peut mordre. Pourquoi ne serait-il pas normal d'avertir les gens des risques posés par la consommation d'alcool pendant la grossesse, ou relativement à la capacité de conduire un véhicule automobile?
    Cette mesure ne coûte rien au gouvernement. Elle exige seulement d'avoir le courage et la volonté de tenir tête à l'industrie des boissons alcoolisées. C'est le seul obstacle. Tous les autres pays du monde sont en train de prendre une telle mesure. Nous venons d'entendre parler de l'Irlande, de la Finlande, de la France et de nos Territoires du Nord-Ouest. Cette mesure n'a rien d'insolite. C'est la chose normale et logique à faire, et il n'y a absolument rien qui justifie que les conservateurs s'opposent au projet de loi.
    Par ailleurs, les libéraux n'ont pas raison non plus de constamment se lever afin de défendre cette mesure, de dire qu'il faut l'adopter, pour ensuite ne rien faire à chaque fois qu'ils reprennent le pouvoir. L'hypocrisie des libéraux est inqualifiable.
    Combien y a-t-il eu de ministres de la Santé depuis 2001, année où la motion du NPD a été adoptée presque à l'unanimité à la Chambre? Il y en a eu cinq, dont quatre étaient des libéraux. En cinq ans de gouvernement libéral, y a-t-il eu un ministre de la Santé qui s'est levé pour dire que son gouvernement allait prendre cette mesure, qu'il n'avait pas peur de l'industrie brassicole au Canada, qu'il n'avait pas peur de l'industrie des boissons alcoolisées, et qu'il allait se tenir debout? Non. Ils ont tous débité les mêmes balivernes qu'on entend maintenant des conservateurs, rien que des âneries, des propos qui n'ont absolument aucun bon sens. Il n'y a rien de logique ou d'intelligent dans ce qu'ils ont dit.
    Nous ne disons pas que c'est la grande solution, que nous ne devrions pas prendre d'autres mesures comme travailler avec des femmes enceintes, communiquer des messages aux médecins, rédiger des documents qui éduquent les gens, publier des annonces et mettre des messages sur les emballages et les sacs en papier aux magasins d'alcool. Nous ne disons pas que cela réglera tous les problèmes. Nous disons que c'est une petite mesure que les Canadiens désirent. En effet, plus de 95 p. 100 des Canadiens reconnaissent que cette solution vaut la peine.
    Pourquoi les députés du Parti conservateur ne peuvent-ils pas tenir tête à l'industrie de l'alcool et faire quelque chose de raisonnable? Cette mesure ne leur coûterait pas un sou et les contribuables n'en feraient pas les frais. Personne n'en souffrirait, mais elle pourrait sauver des vies.
    Au Canada, nous n'avons pas d'étiquettes de ce genre sur nos bouteilles. Pourtant, nos voisins, les États-Unis, ont ces étiquettes depuis plus de 10 ans. Toutes les fois que nous voulons exporter nos produits aux États-Unis, nous devons apposer des étiquettes sur nos bouteilles, mais nous ne le faisons pas au Canada. Nous ne voulons pas nous conformer à cette norme internationale, car nous sommes des lâches quand vient le temps de tenir tête à l'industrie de l'alcool.
    N'est-il pas temps que nous fassions finalement ce qui s'impose dans cette Chambre et que nous écartions tous les groupes d'intérêt, les gens qui donnent aux députés de l'argent pour financer leurs campagnes électorales notamment et les gens qui ont peur de tenir tête à l'industrie du vin, de l'alcool et de la bière? N'est-il pas temps que nous demandions simplement à l'industrie d'agir de façon responsable, en prenant une excellente mesure tout à fait normale et sensée qui permettra de sauver des vies?
(1150)
    Monsieur le Président, je n'appuierai pas le projet de loi. Le député ne s'en étonnera pas puisque je ne l'ai pas appuyé la dernière fois.
    Ne voulant pas qu'on m'accuse de me lancer dans une diatribe ou de raconter n'importe quoi, je vais tenter d'exposer l'approche plus raisonnable et mieux définie que nous devrions à mon avis adopter par rapport au problème du syndrome d'alcoolisation foetale, une approche qui, à la lumière des recherches effectuées, est tout indiquée.
    Je veux dire très clairement quelque chose à ceux qui laissent entendre que les députés prennent position en fonction d'intérêts économiques ou d'autres intérêts directs. Même si ce n'était pas souhaitable, je pensais que nous étions censés représenter tous ces intérêts, ceux des intervenants d'un secteur donné ou encore des consommateurs de ce secteur-là, et essayer d'établir un équilibre entre tous les intérêts de nos électeurs et collectivités.
    Il faut donc mettre une chose au clair. Si on nous proposait un programme exhaustif fondé sur de la recherche approfondie, je l'appuierais, sûrement comme la plupart des députés raisonnables, et l'industrie concernée assumerait une grande partie du coût du programme.
    Nous appuierions certainement une façon plus efficace, si elle existe, de sensibiliser les gens, de façon percutante, aux dangers de la consommation excessive d'alcool. Il nous faut un programme qui puisse transmettre ce message aux jeunes et aux gens de tout âge.
    On a beaucoup parlé de recherche. Comme beaucoup, j'ai constaté, après avoir lu les recherches effectuées au Canada et aux États-Unis, que l'apposition d'étiquettes de mise en garde sur les bouteilles d'alcool n'a d'incidence ni sur la conduite en état d'ébriété ni sur la consommation d'alcool pendant la grossesse. Ces étiquettes mettent en garde les gens contre deux choses qu'ils savent déjà: l'alcool et la conduite ne font pas bon ménage et la consommation d'alcool pendant la grossesse peut nuire à l'enfant à naître.
    Selon un sondage mené auprès de Canadiens et effectué par Ipsos Reid en 2005, plus de 99 p. 100 des femmes canadiennes en âge de procréer savent qu'elles ne devraient pas consommer d'alcool pendant la grossesse. Parallèlement, presque tout le monde reconnaît qu'il ne faut pas conduire en état d'ébriété.
    Par conséquent, si nous éparpillons nos efforts et que nous dépendons trop de cette approche graphique, nous rejoindrons les gens qui n'ont pas besoin d'être convaincus. En fait, cette approche n'aura pratiquement aucun effet. Ce n'est pas la voie à suivre.
    Le problème n'est pas que les Canadiens ignorent les risques qui sont liés à la consommation d'alcool. Le problème est plutôt que certaines personnes décident de conduire en état d'ébriété ou prennent de l'alcool durant une grossesse même si elles connaissent les risques. Nous ne convaincrons pas ces personnes avec des étiquettes de mise en garde. Il faut créer des programmes et des services et cela coûte cher. Il ne s'agit pas de programmes ou de travaux de recherche qui ne sont que de la poudre aux yeux. Il s'agit d'aider ces gens à obtenir le soutien professionnel dont ils ont besoin pour remédier aux problèmes que les députés de tous les côtés de la Chambre ont très bien expliqués.
    Les études ont révélé que les étiquettes de mise en garde n'ont aucun effet sur la consommation d'alcool de la minorité de personnes qui, malheureusement, continuent à conduire en état d'ébriété ou à boire pendant la grossesse. Permettez-moi de citer des statistiques pertinentes. Elles viennent de chercheurs renommés de l'Hôpital pour enfants malades, chercheurs dont les travaux portent sur le syndrome d'alcoolisation foetale.
(1155)
    Selon le docteur Ernest Abel, qui a plus de 30 années d'expérience en recherche sur le syndrome d'alcoolisation foetale, la sensibilisation accrue aux étiquettes de mise en garde relatives à l'alcool n'a pas modifié le comportement aux États-Unis. M. Abel a découvert que certains ont la perception que les risques associés au fait de ne pas tenir compte des mises en garde sont faibles, ce qui mine la motivation à respecter celles-ci et entrave le changement de comportement.
    Le docteur Abel recommande par ailleurs des programmes ciblant précisément les femmes ayant le plus de risque d'avoir des enfants avec des anomalies prénatales. À son avis, ces programmes seraient beaucoup plus efficaces pour sensibiliser les personnes à risque dans la société que les vastes programmes publics, telles les étiquettes de mise en garde.
    Une série d'études menées par une autre chercheure, la docteure Janet Hankin, a permis de constater que les étiquettes n'avaient aucun effet mesurable sur la consommation d'alcool pendant la grossesse.
    Même le département de la Santé et des Services sociaux des États-Unis, dans un rapport de 2000 présenté au Congrès sur l'alcool et la santé, faisait remarquer que, selon la recherche, les étiquettes de mise en garde n'avaient aucune incidence sur les femmes enceintes qui sont des buveuses excessives et, par conséquent, les plus à risque.
    Au Canada, on a réduit grandement l'incidence de l'alcool au volant, mais pas à l'aide d'étiquettes de mise en garde. On y est plutôt parvenu à l'aide de programmes destinés à modifier l'attitude de la société à l'égard de la conduite en état d'ébriété ainsi que grâce à des programmes d'intervention visant ceux qui conduisent souvent en état d'ébriété. Les résultats de ces efforts sont éloquents.
    Ces deux dernières décennies, le taux d'incidents de conduite avec facultés affaiblies rapporté par la police a diminué de 57 p. 100 au Canada et il continue de diminuer. Aujourd'hui, ce sont surtout ce que l'on appelle des buveurs invétérés qui conduisent leur véhicule avec les facultés affaiblies. Selon la Fondation de recherches sur les blessures de la route, ces conducteurs ne représentent que 4 p. 100 de tous les conducteurs au Canada, mais ils sont responsables de 92 p. 100 de tous les déplacements en véhicules automobiles avec les facultés affaiblies. Malheureusement, les avertissements sur les étiquettes ne changeront pas le comportement de ces conducteurs. Ils ont besoin d'une intervention plus directe, comme des dispositifs anti-démarrage liés à l'alcoolémie et des lois plus rigoureuses.
    La même chose est vrai du syndrome d'alcoolisation foetale. Des mises en garde sur les étiquettes ne suffisent pas. Nous avons constaté dans le cas de la consommation d'alcool et de la conduite de véhicules automobiles et dans le cas des cigarettes et du tabac en général que les avertissements sur les étiquettes ne constituent pas un programme d'intervention ni un régime complet qui a des effets absolus.
    Il y a des coûts en cause et nous le savons. Cependant, les coûts n'entrent pas en jeu dans le cas des étiquettes si nous savons qu'elles seront lues. Comme notre collègue l'a déjà mentionné, on utilise habituellement des verres dans les bars. Ce qu'il faut, c'est mettre l'accent sur les interventions d'échelle et de qualité nécessaires en recherche et sous forme de programmes visant précisément ceux qui, manière de parler, vivent le problème. Nous avons constaté que les étiquettes ne constituent pas une solution complète.
    Je crois personnellement que le gouvernement doit continuer de travailler en partenariat avec les intervenants et l'industrie afin de toucher les gens qui continuent de boire et de conduire et les femmes qui boivent pendant leur grossesse. Malheureusement, les faits au Canada et aux États-Unis montrent que les avertissement sur les étiquettes ne constituent pas un programme complet. Nous devrions plutôt axer nos efforts sur les programmes visant directement les buveurs à haut risque, soit ceux qui sont le plus susceptibles d'abuser de l'alcool.
    Pour ces raisons, je n'appuierai pas le projet de loi, mais je félicite tout de même mon collègue de Mississauga-Sud pour ses efforts visant à garder cette question à l'avant plan des préoccupations du public.
(1200)

[Français]

    La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée, et la motion est reportée au bas de l'ordre de priorité au Feuilleton.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 26 octobre, de la motion portant que le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (certificat et défenseur) et une autre loi en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    La dernière fois que nous avons étudié le projet de loi C-3, il restait quatre minutes au secrétaire parlementaire du ministre de la Sécurité publique. Le secrétaire parlementaire a la parole.
    Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de terminer mes observations sur le projet de loi C-3. Comme je l'ai dit précédemment, il s'agit d'une mesure fondamentale qui permettra au gouvernement actuel d'assumer son obligation et sa responsabilité de protéger les Canadiens de personnes voulant venir au Canada qui constitueraient une menace grave pour notre pays. La mesure tient compte également des réflexions de la Cour suprême sur cette question et des recommandations aussi bien du comité de la Chambre des communes que de celui du Sénat qui se sont penchés sur la Loi antiterroriste.
    Certaines des personnes qui viennent au Canada constituent une menace grave pour notre pays. Bien qu'il s'agisse d'une petite minorité, nous devons nous en soucier. Certaines de ces personnes ont commis des crimes graves à l'étranger et ont des liens avec des organisations terroristes. Il se peut que, en venant au Canada, leurs intentions ne soient pas innocentes. Il se peut que ces individus viennent ici pour continuer à commettre des crimes ou pour gagner d'autres personnes à leur cause. Le Canada ne doit pas devenir un refuge pour ces gens-là.
    Au cours des 20 dernières années, des certificats de sécurité ont été délivrés 28 fois à l'endroit de non-Canadiens accusés d'être des terroristes, des extrémistes ou des espions. Les certificats de sécurité constituent un instrument essentiel aux fins de la sécurité nationale. Le certificat de sécurité délivré le plus récemment l'a été pour espionnage, et la menace qui pesait sur les Canadiens a cessé d'exister lorsque l'individu concerné est retourné dans son pays d'origine.
    Permettez-moi de rappeler à nouveau la très grande importance du certificat de sécurité. Le certificat de sécurité vise non pas la détention, mais plutôt le renvoi du Canada de citoyens non canadiens du fait qu'ils représentent une menace à la sécurité publique et à la sécurité nationale. Il vise des individus qui sont interdits de territoire selon nos lois sur l'immigration.
    Le projet de loi C-3 fait partie de l'effort d'ensemble du gouvernement visant à assurer la sécurité nationale et la sécurité publique. Il continuera d'empêcher les personnes interdites de territoire de rester au Canada, tout en garantissant que les droits des personnes assujetties à un certificat de sécurité seront protégés comme il se doit.
    Nous avons le privilège de vivre dans un pays où les valeurs que sont la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit jouissent d'un grand respect. Lorsque notre gouvernement apprend que ces valeurs sont mises en péril, il agit. C'est la raison pour laquelle nous avons accueilli favorablement la décision de la Cour suprême du Canada sur cette question et souhaitons mettre en oeuvre le projet de loi à l'étude pour y donner suite.
    La Cour suprême a offert au gouvernement la possibilité de modifier la loi, à condition qu'il le fasse avant le 23 février 2008. Soyons clairs. Si nous n'adoptons pas ce projet de loi avant février 2008, tous les certificats de sécurité qui sont actuellement en vigueur seront annulés. Nous ne pourrons plus faire appel au processus de certificats pour détenir des suspects, leur imposer des conditions de libération ou encore justifier leur inadmissibilité au Canada. Cette situation présenterait une menace sérieuse pour la sûreté des Canadiens et la sécurité du Canada.
    Cela signifie que tous les certificats de sécurité existants devront retourner à la case départ et être à nouveau renvoyés aux ministres pour qu'ils les examinent. Chaque nouveau certificat signé devra être renvoyé encore une fois au tribunal, qui se prononcera sur son caractère raisonnable.
    L'adoption du projet de loi C-3 est essentielle pour assurer la pérennité du processus relatif aux certificats de sécurité prescrit par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Nous voulons continuer d'encourager les gens de partout dans le monde à venir s'établir au Canada. Nous voulons attirer des personnes qui enrichiront notre tissus social diversifié et abriter celles qui ont connu ce que le monde a de pire à offrir, et leur donner un nouveau sentiment d'espoir et d'optimisme envers l'avenir. Toutefois, notre principale priorité demeure la protection des Canadiens. Il est du devoir des Canadiens et de la communauté internationale d'empêcher les individus dangereux de commettre des crimes de terrorisme.
    Pour ce faire, nous devons continuer d'agir selon les valeurs clairement canadiennes que sont la justice, l'équité et le respect des droits de la personne. Le projet de loi C-3 nous aidera à mieux réaliser ces objectifs. J'exhorte tous les députés à l'appuyer.
(1205)

[Français]

    Monsieur le Président, dans la cause Charkaoui, la Cour suprême a suggéré plusieurs amendements à la procédure pour accorder l'ordonnance d'expulsion que demandent les certificats de sécurité. Cela devient une ordonnance d'incarcération quand on ne peut pas expulser quelqu'un vers un autre pays. Actuellement, c'est le cas de ceux qui sont depuis longtemps en prison au Canada, en vertu des certificats de sécurité.
    La Cour suprême voulait tout de même laisser quelque chose à la décision des législateurs, pour briser l'habitude de ces derniers de toujours soumettre des lois à la Cour suprême en vue de savoir si elles sont constitutionnelles ou pas. À quelques reprises au cours des dernières années, la cour a démontré qu'elle était un peu fatiguée que le Parlement ne prenne jamais ses responsabilités et laisse la cour prendre les décisions difficiles. Or là, elle nous en a laissé une difficile. D'ailleurs, elle a dit que nous étions obligés de réviser cette décision tous les six mois.
    Pendant combien de temps allons-nous réviser ces décisions, dans le cas où, effectivement, on ne peut pas expulser un individu vers un autre pays sans mettre sa vie en danger ou sans qu'il soit vraisemblablement soumis à la torture? Pourquoi n'a-t-on pas apporté de réponse à cette question que la cour nous a laissée?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le projet de loi C-3 traite des deux questions sur lesquelles la Cour suprême s'est penchée, questions qui nécessitaient qu'on apporte des changements selon la décision de la Cour suprême. Ces questions sont l'examen des certificats de sécurité et le rôle du défenseur.
    C'est ce dont il s'agit dans ce projet de loi. Il ne s'agit pas d'autres questions plus vastes. La Cour suprême a jugé que le processus était raisonnable et conforme à notre Charte. Le projet de loi C-3 porte précisément sur les deux questions que la Cour suprême a examinées et renvoyées au Parlement.
    Monsieur le Président, nous avons plusieurs préoccupations à l'égard du projet de loi C-3. Nous croyons qu'une personne qui prépare un attentat terroriste au Canada devrait en fait être jugée, déclarée coupable et punie ici, au Canada, et non simplement expulsée vers un autre pays.
    Certaines parties de ce projet de loi sont controversées. Tout le processus lié aux certificats de sécurité implique des audiences secrètes, la détention sans accusation ou sans déclaration de culpabilité, la détention sans qu'on sache quelles accusations sont portées contre une personne et quelles preuves on a à l'appui de ces accusations. Il y a aussi la détention pour une période indéterminée et l'absence d'un processus d'appel.
    Lorsque le projet de loi précédent a été jugé inconstitutionnel, le gouvernement a apporté un changement en créant la fonction de défenseur. Certains pays ont essayé ce processus, mais sans succès. En fait, un défenseur très en vue au Royaume-Uni, comptant sept années d'expérience dans ce domaine, a démissionné pour protester contre l'inefficacité du processus.
    J'aimerais demander au député du parti ministériel comment, selon lui, le défenseur apportera un élément de justice dans ce processus qui a été jugé inefficace au Royaume-Uni.
(1210)
    Monsieur le Président, la députée a formulé beaucoup d'allégations, dont certaines n'ont vraiment rien à voir avec la question dont la Chambre est saisie aujourd'hui.
    Pour plus de précision, j'espère que la députée comprend que nous ne discutons pas du cas des personnes accusées au Canada d'un crime commis au Canada. Nous parlons des gens qui se trouvent au Canada sans en avoir le droit, et qui sont jugés pour des crimes qu'ils pourraient avoir commis ailleurs. Ce sont des gens qui risquent d'appartenir à une organisation terroriste. Il ne s'agit pas de crimes commis au Canada.
    Le projet de loi C-3 traite de questions qui, selon la Cour suprême, devaient être révisées par le Parlement. C'est ainsi que ces modifications ont été présentées. Je pense qu'elles répondent aux besoins, étant donné les circonstances et l'objectif visé par la mesure.
    La députée a parlé des défenseurs de certains autres pays où il y a un processus de défense particulier. Ce n'est pas la même chose. Nous croyons que le processus que nous proposons répond bien aux besoins du Canada et des Canadiens. Nous gardons à l'esprit qu'il importe d'assurer la sécurité du Canada.
    Monsieur le Président, le député a, sans aucun doute, expliqué l'objet du projet de loi. J'ai une question. Le député a peut-être examiné toutes les recommandations de différents comités de la Chambre et du Sénat, ainsi que du comité du Royaume-Uni. Je crois que ce dernier était un comité mixte chargé des questions juridiques, qui a exprimé des préoccupations concernant le système de défenseurs que nous sommes sur le point d'adopter.
    Le député peut-il nous dire quelles sont les recommandations des différents comités du Sénat et de la Chambre, au Canada, qui se trouvent maintenant inscrites dans la mesure législative et quelles sont celles qui ne s'y trouvent pas et pourquoi?
    Monsieur le Président, le député pose une excellente question. Ce que je peux lui dire, c'est que les députés ministériels ont examiné toutes les recommandations concernant le défenseur formulées par le Comité de la sécurité publique et il y avait aussi, je pense, une recommandation du Comité de l'immigration.
    Nous avons retenu celles que nous estimions les meilleures pour répondre aux besoins du Canada et des Canadiens. Je sais que j'ai déjà mentionné qu'on trouve ce genre de défenseurs dans un grand nombre de pays. Tous sont quelque peu différents et uniques, selon les besoins perçus. Je pense que ce processus répond suffisamment bien aux besoins actuels au Canada.

[Français]

    Monsieur le Président, je serais intéressé à savoir — et probablement l'êtes-vous aussi — ce que le gouvernement a prévu pour soutenir ces avocats spéciaux. Car dans ce projet de loi, rien ne concerne les services de soutien, comme les services de secrétariat ou d'assistance, dont ils pourraient avoir besoin pour étudier des rapports qui, comme vous le savez, sont considérables et qui, dans certains cas, peuvent être consignés sur un millier de pages.
    Comment se fait-il qu'il n'y ait rien dans le projet de loi du gouvernement qui concerne le soutien qui devrait être apporté à ces avocats si la mesure entre en vigueur?

[Traduction]

    Monsieur le Président, il est impératif que ces dispositions entrent en vigueur, sinon, il ne sera plus possible de garder en détention les personnes qui représentent vraiment une menace grave pour le Canada, qu'il s'agisse de terrorisme ou d'espionnage industriel, comme dans le dernier cas. Je pense qu'il incombe aux députés d'adopter rapidement le projet de loi de sorte que cette disposition ne soit pas invalidée par la Cour suprême au début de 2008.
    Si le député lit le jugement de la Cour suprême et le contenu de cette mesure législative, il constatera que, en fait, tous ces problèmes seraient réglés, non pas que tous les cas seront définis à la perfection dans une quelconque loi, puisque ce n'est jamais le cas, mais cela suffit pour le Canada et ses besoins. Ce qui importe, c'est la sécurité des Canadiens, qu'il s'agisse, comme je l'ai dit, de terrorisme ou d'espionnage industriel. Il est donc important que nous adoptions rapidement ce projet de loi.
(1215)
    Monsieur le Président, de toute évidence, le gouvernement a élaboré ce projet de loi en réaction à la décision que la Cour suprême a rendue dans l'affaire Charkaoui. La Cour suprême a statué que la non-divulgation d'éléments de preuve était préjudiciable aux droits de la personne dans une mesure dépassant le niveau d'acceptabilité. La Cour suprême a donc suspendu cette disposition jusqu'en février 2008. Elle s'est également penchée sur la différence de traitement entre les non-résidants du Canada et les résidants permanents du Canada et elle a examiné la question de la détention pour une période indéterminée. Cette décision était très importante.
    Ces dispositions sont très importantes. Il ne fait aucun doute que, pour assurer la sûreté et la sécurité des Canadiens, notre société doit parfois se pencher sur le cas de personnes qui viennent de l'étranger et qui possèdent peut-être des antécédents que nous ignorons. À un certain moment, l'État est mis au courant de ces antécédents, et nous voulons protéger notre société contre des actes de violence et des choses de ce genre. Ces dispositions sont donc importantes. Les directives que la Cour suprême a données sont également très importantes. Le projet de loi répond essentiellement aux préoccupations qu'a exprimées la Cour suprême. Je veux aborder trois ou quatre éléments de sa décision.
    La Cour suprême a examiné les divers systèmes en place au Canada et dans d'autres pays et a conclu que nous devions modifier ces dispositions et que nous pouvions adopter n'importe quel de ces systèmes ou élaborer un système permettant une divulgation significative des renseignements à la personne traduite en cour. Dans ce projet de loi, le gouvernement a importé essentiellement en bloc du Royaume-Uni la notion de défenseur qui, dois-je l'ajouter, a fait l'objet de critiques de la part d'un comité mixte des lords et des Communes au Royaume-Uni.
    Il vaut la peine d'examiner la question sous cet angle, car nous pourrions nous apercevoir que le projet de loi que le gouvernement a présenté répond aux préoccupations de la Cour suprême, mais qu'il ne dissipe pas certaines des autres préoccupations. Permettez-moi de dire tout de suite que nous appuierons ce projet de loi à cette étape-ci pour qu'il soit renvoyé à un comité, mais pendant son étude au comité, quelques modifications permettront peut-être de l'améliorer.
    Pour en arriver à son jugement dans le cas de l'affaire Charkaoui, la Cour suprême a examiné le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, ou CSARS, comme on l'appelle au Canada, notre propre comité. La cour l'a examiné d'un oeil favorable et a déclaré que le système conçu par le CSARS au sujet de la divulgation de renseignements, celui-ci ayant accès à tous les renseignements, et au sujet des droits de la personne visée par le CSARS, respectait les intérêts en matière de justice naturelle de cette personne tout en maintenant la confidentialité des renseignements.
    Le CSARS existe depuis de nombreuses années et jamais aucun renseignement de nature délicate n'a été divulgué par inadvertance, que ce soit à la personne concernée ou au public. C'est là une des meilleures approches que le gouvernement aurait pu adopter. Notre système maison qu'est le CSARS aurait pu être combiné au système de certificats de sécurité, mais le gouvernement a préféré le système de défenseurs du Royaume-Uni.
(1220)
    La Cour suprême a ensuite examiné la Loi sur la preuve au Canada. Selon cette loi, tout participant qui, dans le cadre d’une instance, est tenu de divulguer, prévoit divulguer ou s’attend à ce que soient divulgués des renseignements qu’il croit sensibles ou potentiellement préjudiciables doit aviser le procureur général de la possibilité de divulgation. Ce dernier peut alors demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance interdisant la divulgation des renseignements.
    La cour a ensuite examiné l'affaire Arar, dans le cadre de laquelle on a eu recours à l'amicus curiae relativement aux demandes fondées sur la confidentialité et on a instauré un système selon lequel l'information était vérifiée et traitée de façon appropriée.
    La cour a examiné la commission sur l'immigration et le système de défenseurs du Royaume-Uni. Le gouvernement a importé certains éléments de ce système dans le projet de loi. Malheureusement, ce système lui-même est devenu l'objet d'un examen minutieux et de nombreuses critiques de la part de divers comités et experts au Royaume-Uni, ainsi que de certains défenseurs de ce pays. Le Comité mixte de la Chambre des communes et de la Chambre des lords sur les droits de la personne a également sévèrement critiqué ce système dans un rapport rendu public en juillet dernier.
    Quoi qu'il en soit, les comités de la Chambre et du Sénat ont fait rapport sur certaines de ces questions. Lorsqu'ils ont procédé à l'examen requis par la loi de la Loi antiterroriste, les comités se sont également prononcés sur les certificats de sécurité. Le comité de la Chambre et celui du Sénat ont estimé nécessaire de contester les prétentions du gouvernement qui affirme que le secret s'impose, notamment en ce qui concerne les renseignements secrets présentés au juge qui doit se prononcer sur le caractère raisonnable du certificat de sécurité. Les deux comités ont conclu que la personne visée devrait avoir le droit de choisir un défenseur inscrit sur une liste d'avocats ayant obtenu une habilitation de sécurité. Si je ne m'abuse, dans un des rapports, on propose la constitution d'un groupe de défenseurs financé par le gouvernement mais indépendant de celui-ci.
    Les comités ont fait plusieurs autres recommandations, notamment qu'on modifie la loi pour rendre inadmissible dans les procédures toute information obtenue sous la torture, pour accélérer l'examen de la détention d'un ressortissant étranger en vertu d'un certificat de sécurité et pour donner le droit d'interjeter appel auprès de la Cour d'appel fédérale de la décision d'un juge de la Cour fédérale concernant le caractère raisonnable d'un tel certificat.
    Les trois points que j'ai mentionnés sont abordés dans le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, mais pas de façon satisfaisante. Permettez-moi d'exposer certaines de mes préoccupations à cet égard.
    En ce qui concerne la divulgation, le projet de loi prévoit uniquement la communication de certains renseignements au défenseur. Il n'y a pas de mécanisme pour permettre à ce dernier de savoir si on a fourni toute l'information ou le dossier complet au juge et, par conséquent, s'il est lui-même au courant de tous les faits. Il n'y a pas non plus de mécanisme, et partant, pas de base qui permette au défenseur de demander au juge de lui fournir plus d'information parce que ce dernier ne saurait même pas s'il y en a davantage.
(1225)
    L'information fournie au juge est ensuite transmise, à la discrétion du juge, au défenseur. Par contre, ni le défenseur, ni le juge ne peut aller au-delà de cette information, à moins que le juge sache qu'il existe de plus amples renseignements.
    Par conséquent, bien que le CSARS, l'agence que nous avons créée au Canada et à laquelle nous avons toujours recours, détiennent l'ensemble des faits, ce projet de loi ne garantit pas que le juge chargé de l'affaire ait un jour accès au dossier complet. C'est possible, mais le projet de loi n'offre aucune garantie. C'est une lacune du projet de loi.
    Il y a aussi la question de l'accès continu du défenseur à la personne visée. Selon le projet de loi prévoit, le défenseur recevra un résumé de la preuve, pourra ensuite parler à la personne visée, et enfin obtenir du juge toute l'information disponible. Par la suite, le défenseur ne pourra plus communiquer avec la personne visée sans avoir la permission du juge.
    Notre expérience avec le CSARS nous a permis de constater qu'aucun conseiller ayant fait l'objet d'une vérification de sécurité n'a causé de divulgation involontaire. Notre expérience nous permet aussi de conclure que les défenseurs, puisqu'il existe un processus de vérification de sécurité les visant, doivent jouir d'une certaine liberté et ne pas avoir à demander la permission au juge chaque fois qu'ils veulent parler à la personne visée.
    Il y a actuellement une disposition autorisant le défenseur à demander la permission d'avoir des contacts supplémentaires avec la personne visée, mais le simple fait d'avoir à présenter une telle demande au juge rend le processus contraignant et limitatif. Si possible, il faudrait remédier à cela. S'il est le moindrement possible d'améliorer le projet de loi, tous les partis devraient travailler en ce sens lorsque la mesure législative sera renvoyée au comité. En fin de compte, l'objectif de tous les parlementaires est de faire en sorte que, dans un pays libre et démocratique, nous puissions établir le meilleur système possible pour traiter jusqu'aux cas les plus difficiles, comme ceux dont ces tribunaux sont saisis.
    Il y a ensuite la question bien concrète de la sélection et du soutien des défenseurs. Le projet de loi ne dit rien sur la manière de les sélectionner. Il devrait y avoir dans le projet de loi un système qui garantit un processus de sélection des défenseurs ou de groupes de défenseurs indépendants du gouvernement. Le projet de loi ne prévoit rien pour cela.
    Le projet de loi devrait également prévoir un fonds indépendant du gouvernement, mais constitué par lui pour payer les défenseurs. Cette mesure ferait en sorte que les défenseurs n'auraient pas l'impression de travailler sous les ordres du gouvernement ou de devoir tenir compte de ce que pense le gouvernement parce qu'ils ont été choisis avec la participation du gouvernement ou parce qu'ils sont rémunérés par le gouvernement de temps à autre. Il nous faut inclure dans le projet de loi un processus de sélection indépendant du gouvernement, peut-être avec la participation du Barreau canadien ou d'autres ONG et par un représentant du pouvoir judiciaire. C'est important.
    Il est également important de constituer un fonds indépendant où les défenseurs pourraient puiser de temps à autre. Ce fonds serait constitué par le gouvernement, mais resterait indépendant de lui.
(1230)
    Ensuite, je crois qu'il est important que les personnes touchées puissent choisir le défenseur de leur choix parmi ceux qui ont obtenu une habilitation de sécurité. Je ne crois pas que le juge devrait jouer un rôle dans la nomination d'un défenseur. Le projet de loi manque de clarté à cet égard.
    Je ne crois pas qu'une autre personne devrait avoir le droit d'imposer un défenseur particulier à une personne se retrouvant devant un juge. Si la personne décidait de ne pas exercer son droit de choisir son défenseur, comme cela se fait normalement devant les tribunaux, c'est le tribunal qui choisirait un défenseur sur la liste. Cependant, il devrait être clairement mentionné dans le projet de loi que la personne a le droit de choisir son défenseur sur la liste des défenseurs présélectionnés.
    Selon un principe très important de notre système de justice, lorsqu'une liste existe, les personnes peuvent choisir, même si leur choix reste limité. Dans un tel cas, elles devraient être libres de choisir X ou Y plutôt que d'être prises avec A ou B parce que le juge ou quelqu'un d'autre l'a décidé. C'est très important.
    J'estime que la relation entre le défenseur et la personne visée est aussi très importante. Nous reconnaissons qu'ils ne peuvent pas avoir une relation avocat-client, pour des raisons évidentes. Toutefois, parallèlement, nous devons aussi protéger le défenseur; celui-ci ne doit pas avoir un devoir de confidentialité ni de divulgation envers le gouvernement.
    Nous sommes d'accord pour dire que le défenseur n'entretient pas un lien avocat-client avec la personne visée. Nous ne voulons pas que le défenseur ait à divulguer de l'information qu'il ne pourrait divulguer à la personne visée. Cependant, nous devrions aussi avoir la garantie que le défenseur ne se retrouvera pas dans une position où il doit relever du gouvernement et lui divulguer de l'information qu'il pourrait avoir obtenue en communiquant avec la personne visée. Cette garantie devrait fonctionner dans les deux sens. Il importe de protéger ce droit au silence qu'a la personne visée, soit directement ou indirectement.
    Enfin, j'en arrive à la question des éléments de preuve obtenus sous la torture. Dans le projet de loi, il est question d'éléments de preuve dignes de foi ou appropriés, si je me souviens bien. Qu'on me corrige si je me trompe. Il s'agit du genre d'éléments de preuve que le juge devrait admettre dans ces enquêtes. Rien n'empêche expressément l'utilisation d'éléments de preuve obtenus sous la torture ou pouvant avoir été obtenus sous la torture. J'estime que nous pouvons faire mieux que ce qui se trouve dans le projet de loi.
    Nous pouvons interdire expressément l'utilisation de renseignements obtenus sous la torture, peu importe où dans le monde. Nous voulons un système de justice qui fasse l'envie de tous à l'échelle internationale et nous ne pouvons y prétendre si nous n'interdisons pas expressément les éléments de preuve obtenus sous la torture. Nous pouvons le faire indirectement en employant des termes comme « dignes de foi » et « appropriés », mais il ne fait aucun doute, à mon humble avis, que les éléments de preuve obtenus sous la torture ne sont pas appropriés et ne devraient jamais servir dans ce genre d'enquête où il n'y a aucune garantie de divulgation complète, même à la personne visée.
(1235)
    J'admets qu'il y a des gens que nous ne voulons pas sur notre territoire. Nous pouvons nous sentir menacés par eux. Nous pouvons craindre pour notre sécurité et c'est ce qui explique nos gestes à l'égard de ces personnes. Toutefois, nous avons l'obligation, conformément aux principes de justice de notre pays, de ne pas tomber dans les pièges où sont tombés d'autres pays, là où les éléments de preuve obtenus...
    Questions et observations. Le député de Marc-Aurèle-Fortin a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, je voudrais poser une question à l'orateur qui vient de nous exposer son point de vue. Je constate que plusieurs des recommandations qu'il a faites sont pareilles à celles que nous avions l'intention de faire, nous aussi. Ce n'est d'ailleurs pas étonnant, parce que ces recommandations ont été faites par plusieurs personnes versés dans la question qui se sont exprimées à ce sujet.
    Je m'aperçois cependant que l'une des préoccupations du gouvernement est le délai dont il dispose pour faire adopter la présente loi, sans quoi elle deviendrait caduque. Je voudrais demander à l'orateur précédent s'il croit vraiment que, bien que la loi ne soit pas parfaite — il serait d'ailleurs étonnant qu'elle le soit —, il y a tout de même un moyen, avec la collaboration des représentants de l'opposition, de présenter une loi amendée beaucoup plus juste dans les délais requis par la Cour suprême?

[Traduction]

    Monsieur le Président, les questions de ce genre ne sont pas de nature partisane. Nous collaborons tous pour accroître la sûreté et la sécurité des Canadiens.
    Dans cet esprit, des amendements légitimes peuvent être apportés rapidement. Sans amoindrir les points forts du projet de loi, certains amendements contribueraient à renforcer et à améliorer la mesure législative dans l'intérêt de toutes les personnes concernées. Cependant, nous avons l'obligation d'agir d'ici février 2008, si nous le pouvons.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai remarqué dans les discussions sur les certificats de sécurité que nous utilisons hélas un mauvais titre. La majorité des gens qui commencent à discuter de cette question, qui est d'ailleurs très complexe et qui apparaît dans des textes divers et fort mal écrits, amorcent rapidement des débats qui sont incorrects vis-à-vis ce qu'est véritablement un certificat de sécurité.
    J'avoue que je n'ai pas encore trouvé une meilleure façon de nommer ce sujet, mais il faut bien comprendre que les certificats de sécurité sont une partie d'une procédure par laquelle deux ministres, qui ont estimé qu'un étranger — mais jamais un citoyen canadien — représente un danger pour le Canada, s'adressent à la Cour fédérale afin qu'elle émette un ordre d'expulsion. Ainsi, l'essence même de la procédure, qui est prévue par ce qu'on appelle les certificats de sécurité, est d'avoir une sanction quasi judiciaire d'une cour pour que cette personne soit expulsée du Canada. Retenons toujours qu'il s'agit d'une procédure d'expulsion et non d'un procès.
    D'ailleurs, le droit des Canadiens de vivre au Canada et d'y revenir est consacré par la Charte et s'applique à tous les citoyens canadiens. Cette procédure n'est donc prévue que pour les étrangers. En fait, tous les pays du monde reconnaissent que c'est un droit des pays souverains de recevoir sur leur territoire, de façon discrétionnaire, les gens qui le veulent et, par conséquent, d'expulser ceux qu'ils ne veulent pas, pour quelque raison que ce soit. Généralement, si on désire les expulser — surtout dans un pays comme le nôtre qui a été bâti sur l'immigration et qui continue à vouloir être bâti sur l'immigration —,  on expulse ceux qu'on estime dangereux.
    On obtient généralement ces informations par l'entremise des services de sécurité. Il faut bien comprendre que les services de sécurité ne sont pas des services de police. La fonction des services de sécurité est d'évaluer les dangers et d'informer le gouvernement de ces dangers afin qu'il prenne des mesures. Par essence même, les services de sécurité fonctionnent d'abord sur des soupçons, sur des hypothèses posées et des vérifications qui sont faites. Dès lors, ils élaborent les scénarios des situations les plus dangereuses pour informer le gouvernement en fonction des décisions qu'ils prendront. Ce ne sont pas des policiers.
    Lorsque les policiers enquêtent sur un crime, ils commencent sans doute à émettre des hypothèses et à établir une liste de suspects. Parfois, l'enquête leur démontre que certains de ces suspects n'ont pas commis le crime sur lequel ils sont en train d'enquêter. Toutefois, au cours de leur enquête, ils sont toujours soucieux de chercher à savoir quelle preuve sera éventuellement faite, de conserver ces preuves et de ne poursuivre que lorsqu'ils pensent que cette preuve établira la culpabilité de la personne qu'ils croient, hors de tout doute raisonnable, être coupable d'avoir commis un crime.
    Il faut bien comprendre que dans ces cas-ci, ce n'est pas un procès. Remarquez que comme c'est le cas de bien des pays qui ne nous ressemblent pas, on aurait pu ne pas demander à un juge d'évaluer la conviction que cette personne est dangereuse en fonction des informations communiquées au ministre de la Sécurité publique par les services de sécurité.
    Dans les pays qui nous ressemblent, c'est d'ailleurs le cas des pays du Commonwealth et de l'Europe de l'ouest en général, on demande de s'adresser à un juge. Comme le désir n'est pas de punir mais plutôt d'expulser la personne, le fardeau de preuve n'est pas le même.
    Beaucoup de gens nous demandent pourquoi ne pas les condamner si nous avons la preuve que ces personnes sont dangereuses.
(1240)
    Effectivement, dans certaines circonstances, si l'on a la preuve que ces personnes sont dangereuses et qu'elles ont commis un crime, la meilleure solution est de les accuser et de les traduire devant les tribunaux. Toutefois, il s'agit ici de cas de personnes que l'on veut pas non pas punir, mais expulser.
    D'ailleurs, le gouvernement défend souvent sa position en disant que les personnes incarcérées ici le sont dans une prison à trois murs. « A three wall prison », dit-on. Cependant, il existe des gens pour qui le quatrième côté de la prison est un précipice. Si, effectivement, on les sort de cette prison qui n'a que trois murs, ils risquent la mort ou, encore, ils risquent d'être expulsés dans un pays où ils seront torturés. Cela va pour ceux qui sont incarcérés ici en vertu de certificats de sécurité; les autres sont expulsés.
    Il y a eu un cas, d'ailleurs, cet été. Le secrétaire parlementaire du ministre de la Sécurité publique en a parlé dans son discours. Les gens s'en souviendront peut-être. L'individu en question avait beaucoup de monnaie de différents pays dans ses poches. Les services de sécurité, les ministres et la cour ont estimé qu'il était dangereux, alors il a été expulsé. Ceux qui restent ici, c'est parce qu'ils risquent la mort ou sont en danger d'être soumis à des sévices graves s'ils sont envoyés ailleurs. On ne peut donc les envoyer nulle part.
    Dans ces circonstances exceptionnelles — et cela reste exceptionnel —, combien de temps durera une incarcération? C'est une réponse que le gouvernement n'a pas voulu donner. La réponse qu'apporte la cour, en vertu de la loi, est que, à tout le moins, cette incarcération ou ses motifs devraient être révisés tous les six mois.
    On a peu utilisé les certificats de sécurité. Toutefois, depuis le 11 septembre, les services de sécurité manifestent cette crainte. Ils ont conclu que certaines des personnes avaient été envoyées aux États-Unis pour mener une vie parfaitement normale, sans devoir garder aucun contact avec des organismes de sécurité, et qu'un jour, on les a appelées pour leur demander de participer à une opération quelconque. Ils sont même convaincus que plusieurs d'entre ceux ayant participé à cette opération ne savaient pas exactement ce qu'ils allaient faire, mais étaient prêts à participer à une opération illégale de terrorisme. C'est ce qu'on a appelé les cellules dormantes. Et cette crainte des cellules dormantes fait que, aujourd'hui, on a eu tendance à utiliser un peu plus les certificats de sécurité qu'on ne l'avait fait par le passé.
    Nous sommes donc conscients des limites de la procédure actuelle et des raisons qui la sous-tendent. Je dois dire que, personnellement, ayant lu les raisons données par les juges, je suis convaincu que les certificats de sécurité demeurent nécessaires pour des cas tout à fait exceptionnels. Cependant, notre procédure doit tout de même correspondre à nos principes de droit.
    Évidemment, les juges devaient décider de cela seuls. Ils ont eux-mêmes manifesté un certain inconfort quant à cette procédure qui se fait en l'absence d'avocats. Celui qui a le mieux exprimé cet inconfort est le juge Hugessen. Il disait, dans une conférence qu'il a donnée et qui est citée abondamment dans les textes de jurisprudence:
    Je peux vous le dire parce que nous [les juges de la Cour fédérale] en avons parlé, nous détestons cela. Nous n’aimons pas devoir siéger seuls, entendre une seule partie et examiner les documents produits par une seule partie, essayer de voir par nous-mêmes ce qui cloche dans la cause qui nous est présentée et comment les témoins qui comparaissent devant nous devraient être contre-interrogés. Si j’ai appris une chose dans la pratique du droit... c’est qu’un bon contre-interrogatoire exige une préparation très soigneuse et une bonne connaissance de sa cause. Par définition, les juges n’ont pas cela… Nous n’avons aucune connaissance autre que ce qui nous est présenté, et quand cela nous est présenté par une seule partie, nous ne sommes pas bien placés pour évaluer ce qui nous est présenté.
(1245)
    Ensuite, les juges n'aimaient pas être seuls à décider de cela.
    À mon avis, le projet de loi que présente le gouvernement fait beaucoup pour soulager l'inconfort des juges, mais il ne démontre aucunement le même souci que les juges eux-mêmes ont démontré dans la poursuite de l'équité dans ce processus.
    Par exemple, on fait le strict minimum sur la création du nouveau poste d'avocat spécial et également sur la question des appels. L'appel ne sera accordé que si le juge, qui a entendu la représentation du gouvernement et de l'avocat spécial, maintient l'ordonnance d'expulsion ou d'incarcération. Si la personne ne peut pas être expulsée ailleurs, il n'y a d'appel que sur une question de droit et d'intérêt général que le juge lui-même expose.
    Il est certain que pour la personne concernée, ce n'est pas très rassurant de savoir que la personne qui confirme son expulsion est celle qui rédige l'avis d'appel. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement est allé aussi loin. Un pareil fardeau n'existe nulle part dans notre droit. Même quand la Couronne n'a d'appel que sur une question de droit, c'est encore les avocats de la Couronne qui rédigent l'avis d'appel.
    À mon avis, le gouvernement aurait dû en profiter pour revoir en profondeur la procédure des certificats de sécurité. Il aurait dû aussi tenir compte de l'expérience des avocats spéciaux dans d'autres pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Angleterre. Il aurait dû aussi tenir compte de notre propre expérience dans le cas d'avocats spéciaux qui sont justement ceux qui représentent certaines personnes qui portent plainte contre les agissements des services canadiens de sécurité.
    Très justement, le député qui m'a précédé rappelait que ces avocats peuvent rester en contact avec la personne qui a porté plainte, donc qui se plaint des services de sécurité. On leur donne des informations secrètes et il n'y a jamais eu une plainte que ces avocats aient communiqué ces secrets au plaignant.
    Notons d'abord que l'avocat spécial est traduit en français par « défenseur ». C'est un titre absolument inapproprié. L'avocat spécial n'est pas le défenseur. Il est important aussi de réaliser qu'il n'a pas l'obligation d'avoir le secret professionnel. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi on ne lui a pas permis cela. Cela veut dire que la personne concernée peut se douter que l'avocat qui va la rencontrer pour lui exposer sa cause pourrait, si elle fait des aveux, voir ceux-ci être retenus contre elle.
    Je ne vois aucune utilité d'empêcher que la règle existe, soit que l'avocat spécial doive garder secrètes les confidences qui lui sont faites par la personne concernée. C'est difficile à dire quelle sera la défense, parce qu'il n'est pas là pour la défense. Il est là pour donner un autre point de vue.
    Je crois aussi qu'il aurait fallu répondre à la question que la cour laisse en suspens, à savoir combien de temps allons-nous garder ces gens contre lesquels on n'a pas de preuves qu'ils ont commis de crimes. On n'a pas de preuves qu'ils ont conspiré pour commettre des actes criminels. En effet, s'ils avaient conspiré pour commettre des actes criminels, la solution est de les accuser et de les amener devant les tribunaux. On a simplement que des raisons de penser qu'ils seraient ici pour commettre éventuellement des actes terroristes.
(1250)
    Pendant combien de temps? Cela ira de six mois en six mois. Cela durera-t-il dix ans ou vingt ans? Dans certains cas, cela a déjà duré huit ans, au maximum.
    Eu égard à ce projet de loi qui nous est présenté, j'ai l'impression que le gouvernement cherche à faire le minimum de ce que la cour demande. Ce faisant, il a pris un gros risque. D'abord, je suis absolument certain que la question reviendra tôt ou tard devant la Cour suprême. Également, la Cour suprême risque d'estimer que les mesures prises sont insuffisantes et qu'il y a encore des choses contraires à la Constitution. Même dans le cas contraire, comprenons bien que la Charte des droits et libertés est une charte de droits fondamentaux. Dans un pays comme le nôtre, nous voulons certainement que les citoyens aient plus que des droits fondamentaux. Par exemple, en ce qui concerne l'équité procédurale, lors d'une procédure dont dépend une incarcération, l'incarcération pour un temps indéfini serait l'une des pires punitions. Pire que cela, il y a la punition pour meurtre.
    Donc, nous pourrions apporter une série d'amendements, sans aucun danger, tout d'abord pour que soient livrés les secrets des services de sécurité qui ne devraient pas l'être. De même, la loi n'atteint pas son but qui est d'expulser du Canada des étrangers qui représentent véritablement un danger pour la sécurité du pays.
    Nous avons donc l'intention de voter en faveur du principe du projet de loi.
    Le gouvernement a raison quand il dit que nous devons répondre à la cause Charkaoui. Nous devons répondre à l'ordonnance de la Cour suprême d'améliorer le processus, mais nous devrions en profiter pour faire en sorte qu'il ne soit pas nécessaire d'amender ce projet de loi dans quatre ou cinq ans. Le gouvernement devrait avoir l'humilité de reconnaître que sa proposition n'est pas parfaite et que, dans une démocratie, le débat parlementaire est essentiel pour atteindre un juste équilibre. En effet, ce que l'on recherche, c'est un équilibre entre la nécessité d'assurer la sécurité et le respect de certaines valeurs procédurales d'équité.
    Nous allons donc proposer plusieurs amendements. L'orateur qui m'a précédé représente un parti qui a déjà été au pouvoir et qui a utilisé ces certificats de sécurité. Ce député a suggéré plusieurs amendements. Le fait, justement, que ce parti ait utilisé ces certificats dans le passé démontre pertinemment que ces améliorations ne mettent pas en danger l'atteinte de la sécurité.
    On devrait clairement éliminer toute preuve obtenue sous la torture et déclarer qu'un avocat spécial doit le secret professionnel à la personne concernée. Les personnes concernées devraient avoir le choix des avocats ayant un statut de sécurité, à même la liste du ministère de la Justice.
    On doit corriger le terme français « défendeur » qui est non seulement inapproprié, mais qui induit en erreur. De même, la décision est tellement importante — il s'agit d'une incarcération pour une durée indéterminée dans le cas où on ne peut pas expulser la personne vers un pays où elle ne risque pas la peine de mort ou la torture — que le fardeau de la preuve doit être important. Le juge doit être convaincu hors de tout doute raisonnable. On devrait aussi s'assurer que les avocats spéciaux ont les ressources nécessaires pour exercer leurs fonctions. On devrait aussi établir qu'ils aient droit à toutes les informations concernant la personne en cause, et non seulement à certaines informations.
(1255)
    Également, le droit d'appel devrait être élargi.
    Nous pourrions améliorer cette loi et l'adopter rapidement, comme le veut le gouvernement.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je viens de la région du BlackBerry. Si vous pensez au BlackBerry, cela vous fera penser à ma circonscription, Kitchener—Waterloo.
    Je remercie le député pour ses propos et je lui citerai ici les paroles du chef adjoint du Parti libéral. Dans son livre intitulé The Lesser Evil: Political Ethics in an Age of Terror, il dit ceci:
    La transparence dans tout processus où la liberté humaine est en jeu ne fait que définir la démocratie. Le problème n'est pas de définir où se trouve la ligne rouge, mais bien de la faire respecter. Une démocratie où la plupart des gens ne votent pas, où de nombreux juges accordent une importance indue aux décisions de l'exécutif et où le gouvernement refuse un examen contradictoire transparent de ses mesures a peu de chance de maintenir le juste équilibre entre la sécurité et la liberté. La guerre au terrorisme n'est pas seulement un défi pour la démocratie; c'est aussi une interrogation de la vitalité de sa capacité d'examen contradictoire.
    J'ai passé pas mal de temps à réfléchir à cette question. L'approche que nous avons entreprise est fondamentalement boiteuse. Comme nous le savons, le certificat de sécurité remonte à avant la Charte des droits et libertés et avant la Loi antiterroriste. En fait, il existe sous cette forme depuis 30 ans en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    Nous nous affairons à débattre à la Chambre une mesure visant à modifier ce processus, alors que certaines parties de la Loi antiterroriste font actuellement l'objet d'un débat au Sénat. Ces deux mesures législatives vont de pair. Nous devrions vraiment tenir compte des implications des deux projets de loi.
    Il y a une question à laquelle nous, les parlementaires, devrions répondre. Faisons un examen empirique des mesures prises depuis le 11 septembre 2001, ce jour fatidique qui nous a forcés à légiférer à la hâte pour lutter contre le terrorisme. Évidemment, cela s'est ajouté à ce qui existait déjà. Nous devons chercher à voir si nous avons amélioré la sécurité des Canadiens. Et avons-nous amélioré la sécurité du reste des habitants de cette planète ou avons-nous aggravé la situation?
    Je demande cela aux députés parce que, en temps de crise où nous avons besoin de la Charte des droits et libertés, nous avons l'habitude de supprimer ces droits. Ma question...
(1300)
    À l'ordre, s'il vous plaît. Je m'excuse, mais le député a déjà pris trois minutes et demie pour poser sa question. Le député de Marc-Aurèle-Fortin a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, je retiens les explications que l'orateur a données pour justifier sa question. Sa question fondamentale est de savoir si nous avons effectivement amélioré la sécurité grâce aux mesures que nous avons prises. Personnellement, je ne le crois pas. Je reconnais que ceux qui affirment que c'est le cas ne pourront jamais en apporter la preuve, puisque, justement, nous avons continué à vivre en sécurité.
    Il n'y a qu'à penser aux erreurs commises dans l'affaire Arar. J'essaie de suivre de loin la cause à Toronto de cette seule conspiration pour laquelle des gens ont été poursuivis en vertu de la Loi antiterroriste. Or, il semble que les accusés sont en train d'être libérés les uns après les autres. Je ne sais pas quand nous verrons la fin de cette affaire. Par conséquent, je ne crois pas que les mesures prises aient amélioré la sécurité.
    De toute façon, je crois que la lutte contre le terrorisme s'effectue par le travail des agences de sécurité, par l'accumulation systématique et par l'interprétation de petites informations qui viennent à former un tout. C'est pourquoi j'aime bien l'expression anglaise intelligence agency, parce que l'idée est justement de comprendre les relations entre les éléments grâce à son intelligence. C'est par ce travail que nous assurons notre sécurité, et non par des lois. Le terrorisme a toujours été illégal. Je ne connais pas un acte terroriste qui puisse être considéré comme légal et je ne crois pas que ces lois aient apporté beaucoup. C'est la même chose pour le peu d'utilisation qu'on a fait des certificats de sécurité.
(1305)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis depuis peu la porte-parole néo-démocrate en matière de sécurité publique et je suis heureuse que le projet de loi C-3 soit le premier au sujet duquel je prends la parole à ce titre.
    La protection du public sert essentiellement à garantir la qualité de vie des Canadiens, ce qui nous tient tous à coeur, indépendamment de nos allégeances politiques. Les néo-démocrates estiment que la qualité de vie, c'est un juste équilibre entre la liberté et la sécurité. Or, dans l'élaboration de leur projet de loi C-3, les conservateurs se sont une fois de plus montrés incapables de trouver un équilibre.
    Cette mesure n'améliore pas la sécurité des Canadiens, comme le député d'en face vient de le mentionner, je crois; ce qu'elle fait, par contre, c'est porter atteinte à nos libertés fondamentales. Voilà pourquoi le NPD s'oppose au projet de loi C-3, et nous espérons que les autres partis de l'opposition feront de même.
    Nous avons deux grosses réserves en ce qui concerne les certificats de sécurité. Premièrement, c'est tout simplement un mauvais moyen de lutter contre les activités de terroristes présumés, étant donné que ce ne sont pas les organisateurs d'actes terroristes qui sont punis. En vertu des certificats de sécurité, les terroristes présumés sont renvoyés dans leur pays d'origine. Y a-t-il quelqu'un chez les conservateurs ou ailleurs qui croit que la sécurité des Canadiens s'en trouvera accrue?
    Nous, néo-démocrates, jugeons que le terrorisme constitue un crime grave. Il ne s'agit pas d'une activité licite, mais bien criminelle, et ceux qui s'y livrent devraient s'exposer à des conséquences graves. Quiconque au Canada planifie des actes terroristes devrait être appréhendé, inculpé, déclaré coupable et emprisonné. Voilà comment améliorer la sécurité au Canada.
    Lorsque le secrétaire parlementaire du ministre de la Sécurité publique a parlé de ce projet de loi, il a dit que les certificats de sécurité constituaient un instrument important pour assurer la sécurité publique. Mais, comment les Canadiens peuvent-ils être mieux protégés si les personnes soupçonnées de terrorisme sont tout simplement expulsées du pays, ce qui leur permet de poursuivre leurs activités, ou du moins leurs prétendues activités?
    Le secrétaire parlementaire a aussi dit dans son discours que le gouvernement souhaitait la même chose que les Canadiens: protéger le public au pays. Je pense que le secrétaire parlementaire et le gouvernement conservateur sont un tantinet déconnectés de la réalité. C'est le NPD qui souhaite la même chose que les Canadiens. Nous voulons que les terroristes soient arrêtés et incarcérés. Voilà ce qui protégerait le public canadien.
    L'approche des conservateurs en matière de sécurité nationale, qui consiste à balayer la poussière sous le tapis, ne suffit tout simplement pas. Le gouvernement aime durcir le ton quand vient le temps de parler de sécurité publique, mais lorsqu'on y regarde de près, on s'aperçoit que les conservateurs ne font que soigner leur image devant les caméras de télévision pour convaincre les Canadiens de leur donner la majorité qu'ils cherchent si désespérément à obtenir.
    La sécurité nationale du Canada ne doit pas être réduite au rang de simple accessoire d'une mise en scène politique. Le NPD croit que les conservateurs devraient joindre le geste à la parole. Qu'ils fassent donc le choix courageux d'abandonner ce mécanisme défaillant qu'est le certificat de sécurité et qu'ils aient recours aux lois de notre pays pour punir les terroristes.
(1310)
    Le terrorisme est un crime. Les terroristes sont des criminels, et les autorités devraient s'employer énergiquement à les poursuivre en vertu du Code criminel du Canada, plutôt que d'avoir recours aux procédures prévues dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Il me semble profondément troublant que l'expulsion des terroristes soit la meilleure solution qu'ait pu trouver le gouvernement pour maintenir la sécurité au pays.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, le NPD a deux grandes réserves au sujet du projet de loi C-3. Le deuxième problème concernant les certificats de sécurité est qu'ils minent sérieusement les valeurs fondamentales du système de justice canadien. N'oublions pas que le maintien de la sécurité publique consiste à trouver le juste équilibre entre la liberté et la sécurité. Or, ce projet de loi est tout aussi loin du juste équilibre que le mécanisme qui existait avant la décision de la Cour suprême.
    Avec le projet de loi C-3, les conservateurs essaient d'établir, autour des certificats de sécurité, un mécanisme qui ne viole pas la Charte, mais qui, de l'avis de nombreux experts, risque lui aussi d'être contesté devant la Cour suprême et jugé invalide par celle-ci.
    Les certificats de sécurité minent notre système de justice en contournant le droit à une procédure équitable, qui est fondamental dans n'importe quelle démocratie. Les conservateurs ont décidé d'essayer de bricoler une loi libérale fondamentalement viciée, mais ce bricolage ne sera pas suffisant pour régler le problème. Les personnes visées par un certificat de sécurité risquant de subir des conséquences très graves, la procédure doit être balisée de solides garde-fous. Ce projet de loi ne protège pas suffisamment les libertés civiles.
    Il y a de lourdes conséquences à être nommé dans un certificat de sécurité, notamment la perte de liberté, l'expulsion et, possiblement, le renvoi vers la torture. Le droit à la défense pleine et entière, le droit de connaître les allégations formulées contre une personne et l'occasion de répondre à ces allégations sont des principes reconnus de justice fondamentale, mais ces droits n'existent pas dans le processus des certificats de sécurité.
    De même, le juge qui préside peut être saisi d'éléments de preuve cruciaux en l'absence des détenus et de leurs avocats, ce qui est tout simplement inacceptable. Même si ces éléments ne sont pas révélés aux détenus ou à leurs avocats, le juge peut examiner la preuve pour déterminer si le certificat est raisonnable. Les détenus risquent de ne jamais être informés des raisons pour lesquelles ils sont expulsés du Canada. Il n'ont alors aucune occasion de contester ces raisons.
    Les conservateurs essaieront de dire qu'ils ont fait le ménage dans le fouillis dans lequel les libéraux ont laissé les certificats de sécurité en introduisant un défenseur dans le processus, mais nous savons déjà que le défenseur à lui seul n'est pas la solution à tous les problèmes fondamentaux que présentent les certificats de sécurité.
    La Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni ont également recours aux défenseurs, mais, dans ces deux pays, le processus comporte aussi de graves lacunes. Le Royaume-Uni est souvent cité en exemple par les tenants de la modification plutôt que de l'abolition du système des certificats de sécurité. Cependant, ces procédures, lorsque les preuves de nature sensible sur le plan de la sécurité ne sont pas révélées et qu'un défenseur a le droit d'assister et de participer aux séances à huis clos, ont fait l'objet de plusieurs jugements rejetant les limites imposées arbitrairement.
    Comme les lords d'appel du Royaume-Uni ont rejeté les dispositions du processus le 31 octobre dernier, il est évident que le système comporte des lacunes. Ian Macdonald, un défenseur ayant plus de sept ans d'expérience dans le système britannique, a démissionné parce que le gouvernement britannique n'a pas réussi à corriger ces problèmes. Les conservateurs le savent. En effet, M. Macdonald a même témoigné devant le Comité de la sécurité publique pour dire ce qu'il pense du processus des défenseurs.
(1315)
    MM. Craig Forcese et Lorne Waldman ont présenté une excellente critique du projet de loi C-3. Je veux souligner l'excellent travail qu'ils ont accompli pour s'opposer à ce système boiteux. Selon leur analyse, que je serais heureuse de remettre au ministre de la Sécurité publique, même si je soupçonne qu'il l'a eue entre les mains et a choisi de n'en pas tenir compte, Forcese et Waldman concluent qu'un certain nombre de lacunes nuiront aux défenseurs.
    Il est intéressant de constater que quelques-unes de ces lacunes ont été mentionnées à la Chambre par le parti de l'opposition libérale. Si j'ai bien compris, les libéraux appuieront le projet de loi malgré toutes ces lacunes que leur porte-parole en matière de sécurité publique a énumérées tout à l'heure.
    Les auteurs de cette analyse ont critiqué le projet de loi C-3 parce qu'il ne permet pas la divulgation complète et qu'il ne permet pas aux personnes détenues et à leur avocat de connaître toute l'information pertinente qui sera utilisée pour les incriminer. Ils disent que les conservateurs ont tort de ne pas permettre aux défenseurs de rester en contact avec le détenu pendant toute la durée du processus. Il reprochent au gouvernement de ne pas s'être fermement opposé à l'utilisation d'information obtenue sous la torture aux fins des certificats de sécurité.
    Le NPD est convaincu qu'un système qui nie le droit à une réponse complète et à une véritable défense ne peut pas être corrigé par de simples modifications de la procédure.
    Comme je l'ai dit au début de mon intervention, le NPD s'oppose fermement aux certificats de sécurité. Nous espérions que les autres partis de l'opposition à la Chambre feraient de même. J'ai été très déçue d'entendre les libéraux dire qu'ils n'empêcheraient pas l'adoption de cette mesure. Ce n'est pas ce qu'on pourrait appeler un appui retentissant.
    J'ai été choquée de l'apprendre, puisque le caucus libéral était divisé sur cette question par le passé. Cela montre encore une fois la situation au Parlement.
    Nous avons une minorité conservatrice qui se livre à toutes sortes de manoeuvres politiques dans un effort désespéré pour devenir majoritaire, et une opposition libérale qui a peur de son ombre, tellement qu'elle fera n'importe quoi pour éviter le déclenchement d'élections. Les libéraux s'abstiennent de voter ou brillent par leur absence, et vont maintenant jusqu'à voter en faveur d'une mesure législative que bon nombre d'entre eux désapprouvent fondamentalement, après avoir présenté une longue liste des imperfections de cette mesure.
    On dirait que les libéraux ont formé le gouvernement tellement longtemps qu'ils ne savent plus comment faire le travail de l'opposition. Ils devraient peut-être s'inspirer du NPD. C'est un parti qui ne craint pas de s'opposer aux conservateurs quand ils entraînent le Canada dans une voie qui n'est pas la bonne.
    Permettez-moi de terminer en résumant pourquoi le NPD s'oppose au projet de loi C-3. Nous voterons contre ce projet de loi parce que le Code criminel nous offre déjà tous les outils dont nous avons besoin pour assurer notre sécurité nationale tout en respectant notre Charte canadienne des droits et libertés.
    Si les conservateurs voulaient vraiment assurer la sécurité publique, ils puniraient les personnes soupçonnées et reconnues coupables d'actes terroristes au lieu de se limiter à les expulser.
    Le NPD s'oppose également au projet de loi C-3 parce qu'il mine les valeurs canadiennes de base. Le fait d'inclure des personnes pouvant agir à titre de défenseur dans le processus des certificats de sécurité ne répond pas de façon adéquate aux préoccupations concernant le droit à l'application régulière de la loi.
(1320)
    Quoi qu'il en soit, même si toutes les libertés civiles étaient protégées par ce projet de loi, les certificats de sécurité prévus par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui, comme il a été mentionné il y a quelques instants, existent depuis très longtemps, ne seraient pas la bonne façon de faire face aux menaces à la sécurité nationale.
    Malheureusement, du fait que les libéraux ont choisi d'appuyer le projet de loi C-3, il va sans doute être adopté et envoyé au Comité de la sécurité nationale pour y être étudié. Si cela se produit, le NPD fera tout en son pouvoir pour faire en sorte que ce projet de loi cause le moins de dégâts possibles. Mais que ce soit clair pour nos collègues de la Chambre et les Canadiens qui nous regardent aujourd'hui, le projet de loi C-3 va dans le mauvais sens.
    Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord avec ma collègue d'en face en ce qui concerne le processus des certificats de sécurité et le fait que des gens peuvent être emprisonnés indéfiniment dans le système actuel. Bien sûr, dès que ces derniers acceptent de retourner là où le gouvernement veut les envoyer, ils sont libérés. Je vois mal comment la sécurité peut être ainsi accrue, parce que si ces gens posent une menace ou un danger, ils peuvent revenir au Canada ou organiser ce genre d'activités ailleurs.
    La députée pourrait-elle nous dire ce qu'elle pense d'un autre aspect très troublant, soit le nombre d'erreurs judiciaires qui ont été commises dans notre pays malgré un processus qui respecte la Charte, qui tient compte des rigueurs du droit pénal, où les audiences sont publiques et où il faut prouver la culpabilité au-delà de tout doute raisonnable?
    Bien des noms viennent à l'esprit, les cas les plus connus ont mis en cause, entre autres, Donald Marshall, Guy Paul Morin et Stephen Truscott. Nous avons aussi tous entendu parler de l'affaire Coffin. Nous avons aussi entendu parler d'autres cas qui font surface actuellement à cause des renseignements erronés fournis par un pathologiste et de la trop grande importance qui leur a été accordée.
    Ma question pour la députée est la suivante: si nous faisons toutes ces erreurs judiciaires malgré un système des plus rigoureux, quelles sont alors les probabilités de faire de telles erreurs dans un système où les normes sont très basses, où les procès se font à huis clos, où l'information n'est pas connue et où les gens ne peuvent se défendre?
    Monsieur le Président, c'est une question très importante. Même dans les cas où il est évident que les avocats de la défense ont obtenu toutes les preuves que l'on peut croire disponibles pour préparer la cause de leur client, il arrive que nous fassions des erreurs et le député en a soulevé quelques-unes.
    Pourrions-nous vraiment arriver à condamner davantage de personnes, même dans les cas dont parle le député qui ne portent pas sur des présumés terroristes? Une peut-être. Si les avocats devaient se présenter en cour tout en sachant qu'ils n'ont en main que certains renseignements que quelqu'un d'autre a estimé être pertinents dans la cause de leur client, je suis persuadé que bon nombre d'entre eux refuseraient de défendre une telle cause parce qu'ils ne pourraient préparer adéquatement la défense.
    Cela ne fait donc qu'accroître le potentiel d'erreurs puisque les avocats n'auront pas accès à tous les renseignements disponibles. De plus, il est très troublant de voir que l'on compte nommer un défenseur pour faire le pont, mais que ce dernier ne pourra pas parler de ce qu'il a vu aux personnes en cause ou à leur avocat. Cela accroîtra également les risques d'erreurs.
(1325)

[Français]

    Monsieur le Président, j'aurais trois questions à poser à la députée, et je le ferai rapidement.
    Finalement, il n'y a pas beaucoup de choses qui nous séparent, sauf la conclusion sur la deuxième lecture qui est radicalement différente. Fondamentalement, je crois que la députée a compris que la différence entre notre position est la sienne, ce sont les cellules dormantes.
    Croit-elle aussi qu'il existe dans le monde d'aujourd'hui des organisations terroristes qui entraînent des gens et les envoient dans des pays démocratiques avec l'ordre de rester tranquilles, de mener une vie exemplaire en attendant qu'un jour ils soient contactés pour devoir poser un acte terroriste de concert avec d'autres personnes? Ils n'auraient encore rien fait d'illégal, mais un jour, ils le feraient.
    Croit-elle que les services secrets puissent connaître ces gens — par exemple, grâce à l'infiltration de personnes à l'intérieur de ces sites d'entraînement —, dont on ne peut effectivement pas révéler le nom parce que cela risquerait de les mettre en grand danger? Donc, il faut connaître leur version.
    Personnellement, c'est une des choses qui me convainc. Cette situation me convainc au sujet des certificats de sécurité. Bien que je n'aime pas la procédure, étant de formation juridique et ayant d'ailleurs été avocat de la Défense pendant la majorité de ma carrière, c'est ce qui me convainc de la nécessité qui existe, mais qui doit être limitée.
    Toutefois, malgré le fait que la députée soit contre, est-elle prête à collaborer pour améliorer la procédure des certificats de sécurité, de chercher de concert avec nous à l'améliorer pour la rendre le plus fair  et le plus équitable possible, comme le sont d'ailleurs MM. Waldman et Forcese qu'elle a cités?

[Traduction]

    Monsieur le Président, y a-t-il des cellules partout au pays? Je n'en suis pas absolument certaine, mais je crois que c'est le cas.
    Je crois avoir entendu mon collègue dire un peu plus tôt qu'il aimait bien le terme anglais « intelligence », au sens de renseignements. Ce processus de collecte de renseignements éveille l'attention de nos services de sécurité quant à l'existence de ces personnes. Toutefois, si elles vivent une vie exemplaire au Canada et qu'elles ne violent aucune loi, peut-être est-ce parce qu'elles ont changé d'opinion ou qu'elles ont renié leurs anciennes convictions. Je ne sais pas.
    Toutefois, je suis d'avis que l'on contreviendrait gravement aux principes de notre Charte des droits et libertés en faisant intrusion dans la résidence d'une personne qui vit une vie exemplaire au pays et qui n'a commis aucun crime. Par contre, si ces personnes commettent des actes illégaux ou si l'on peut prouver qu'elles planifient de tels actes, nous devons bien sûr les arrêter et les accuser d'activités criminelles.
    Le simple fait que l'on ait ajouté des éléments aux certificats de sécurité pour tenter d'améliorer un système imparfait ne suffit pas à me convaincre d'appuyer ce projet de loi à ce moment-ci.
    Monsieur le Président, ma collègue a exposé de façon éloquente les raisons pour lesquelles le Nouveau Parti démocratique s'opposera à ce projet de loi bancal. Comme elle l'a dit, le processus concernant les certificats de sécurité mine des valeurs canadiennes fondamentales du fait qu'il permet la détention sans mise en accusation et qu'il empêche les personnes accusées de prendre connaissance des accusations portées contre elles ou d'en examiner la teneur.
    Elle a ajouté que le projet de loi n'offrait aucun outil que ne prévoyait déjà le Code criminel. Dans son ouvrage intitulé The Shock Doctrine: The Rise of Disaster Capitalism, l'auteure canadienne Naomi Klein avance certaines raisons pour lesquelles les gouvernements néo-libéraux, comme le gouvernement actuel, offrent ce type de solutions extrêmes à des problèmes qui sont peut-être réels, précisant qu'il s'agit de solutions qui nous éloignent des principes démocratiques de base.
    La députée peut-elle dire ce qu'elle pense de cela et indiquer pourquoi, selon elle, le gouvernement conservateur propose cette solution en lieu et place du Code criminel dans sa forme actuelle?
(1330)
    Monsieur le Président, je crois que c'est la façon la plus simple de tenter de donner suite à l'ordre de la Cour suprême relativement au respect de la Charte. Je ne crois pas que cette mesure résistera à une contestation fondée sur la Charte. Je suis convaincue que l'adoption de cette mesure donnera lieu à une contestation et que les tribunaux n'y verront pas là une mesure qui protège les citoyens.
    Comme le porte-parole libéral en a parlé plus tôt, il y a d'autres exemples, où, dans le cadre du processus du CSARS, le conseil a en main toute l'information voulue. Il n'y a jamais eu de cas où un juriste a commis une erreur pour avoir divulgué trop de renseignements. Un juriste expérimenté pose habilement ces questions. Par conséquent, je crois qu'il s'agit de la façon la plus simple de procéder.
    Si la période pendant laquelle le Parlement a été prorogé avait été moins longue, nous aurions peut-être eu l'occasion d'examiner de façon plus approfondie s'il n'y avait pas une meilleure solution. Malheureusement, nous en avons été empêchés par un gouvernement qui ne souhaitait pas reprendre ce débat à la Chambre.
    Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat concernant cet important projet de loi. Le projet de loi C-3 aurait de larges répercussions aussi bien sur notre système de protection des immigrants et des réfugiés que sur notre capacité d'assurer notre sécurité nationale.
    Une fois de plus, le Canada agit comme chef de file dans ce domaine. Comme mes collègues l'ont déjà dit, la raison d'être de la mesure coule de source. Le gouvernement a la responsabilité fondamentale de défendre la sécurité publique et la sécurité nationale du Canada. Cela est primordial. Comme nous le savons, nous devons disposer d'instruments pour protéger les Canadiens. La sécurité et la sûreté du pays ont une importance capitale.
    Parallèlement, nous reconnaissons la nécessité de garantir les valeurs fondamentales du Canada que sont la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit. Par conséquent, il faut arriver à un équilibre délicat entre ces deux exigences, et j'estime que le projet de loi à l'étude le fait.
    Protéger la sécurité nationale veut dire protéger notre qualité de vie, ce qui englobe également le respect des droits de tous les Canadiens. Ainsi, l'équilibre délicat dont j'ai parlé exige que nous protégions notre sécurité nationale et la sécurité des personnes en intervenant le moins possible, selon les circonstances, à l'encontre de droits et libertés des personnes.
    Il est crucial de promouvoir parallèlement la sécurité nationale et les libertés civiles pour bâtir au Canada une société vigoureuse et ouverte. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté le projet de loi C-3.
    Dans sa décision, la Cour suprême du Canada a reconnu que le gouvernement avait la responsabilité de protéger les Canadiens des terroristes et d'autres non-citoyens qui constituaient une menace grave et qu'il pouvait être opportun pour lui de recourir aux certificats de sécurité pour atteindre cet objectif. Également, elle a déclaré que le processus du certificat de sécurité devait être modifié pour assurer une meilleure protection des droits des particuliers assujettis à un tel certificat.
    La Cour suprême a fourni au gouvernement d'excellentes pistes de réflexion sur cette question tout en énonçant diverses possibilités. Par ailleurs, le gouvernement a pu bénéficier du travail des comités parlementaires qui l'ont étudiée.
    Je vais maintenant me pencher sur les recommandations du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, qui a étudié les centres de détention et les certificats de sécurité. J'ai eu pour ma part l'occasion de visiter le centre de détention de Kingston. J'ai pu parler aux détenus et prendre connaissance de leurs inquiétudes.
    Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a notamment recommandé que le gouvernement respecte la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Charkaoui c. Canada et qu'il modifie la loi pour prévoir la nomination d'un défenseur devant la Cour fédérale pour déterminer le caractère raisonnable de tout certificat de sécurité. C'est exactement ce qui est prévu dans le projet de loi.
    La deuxième recommandation portait que le défenseur devrait être un avocat qui détiendrait une habilitation de sécurité appropriée et qui serait nommé pour représenter les intérêts de la personne visée par le certificat et pour contester les éléments de preuve confidentiels ou secrets présentés par le gouvernement. Le projet de loi donne suite à cette recommandation.
    Finalement le comité a dit que le processus mis en place et faisant appel à un défenseur devrait, sous réserve de considérations liées à la sécurité nationale et en affectant le moins possible les droits des détenus, permettre aux détenus de prendre connaissance de ce qui leur est reproché, en les informant et en leur permettant de contester les faits ou de se défendre. Là encore, le projet de loi autorise cette démarche.
    Le comité a aussi recommandé que le gouvernement institue une politique selon laquelle des accusations portées en vertu du Code criminel constitueraient la méthode privilégiée de traiter les résidents permanents ou les étrangers soupçonnés de participer à des activités terroristes, d'y contribuer ou d'en faciliter l'exécution. Toutefois, il existe une distinction entre, d'une part, un acte criminel et l'intention requise pour que cet acte soit criminel et, d'autre part, une personne qui n'en est pas rendue là, mais qui posera un danger potentiel à la sécurité nationale ou à la sécurité des personnes. Par conséquent, ces deux types d'actes doivent être traités séparément l'un de l'autre.
    Je vais essayer d'expliquer un peu pourquoi les certificats de sécurité sont essentiels à la sécurité de tous les Canadiens.
    Premièrement, les certificats de sécurité sont nécessaires afin de protéger les Canadiens contre les individus qui sont interdits de territoire au Canada. Permettez-moi de donner une brève description du processus de délivrance d'un certificat de sécurité. Ce processus existe depuis plus de 20 ans dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et dans d'autres lois.
(1335)
    Contrairement à ce que prétendent certains députés, seulement 28 certificats ont été délivrés depuis 1991. Sur ces 28 certificats, six sont toujours en vigueur. Dix-neuf personnes ont été expulsées du Canada et la Cour fédérale a déterminé que trois certificats étaient déraisonnables. Ces chiffres montrent bien que les certificats de sécurité sont délivrés relativement peu souvent, et seulement quand la situation l'exige.
    Quand on pense qu'environ 95 millions de personnes entrent au Canada tous les ans, dont 260 000 immigrants, il est évident que les certificats sont utilisés très rarement et seulement dans des circonstances exceptionnelles.
    Un certificat de sécurité ne peut être délivré qu'à l'endroit de ressortissants étrangers ou de résidents permanents qui ne sont pas admissibles au Canada pour des raisons de sécurité, pour atteinte aux droits de la personne ou aux droits internationaux, ou encore pour avoir participé à des crimes graves ou à des activités criminelles organisées. Il ne s'agit pas de délits mineurs. Nous parlons de cas graves de violation des droits humains ou internationaux, de crimes graves ou de crime organisé. Voilà le groupe et la catégorie de personnes dont il est question.
    Ces certificats ne sont délivrés que dans les cas où les renseignements nécessaires pour déterminer l'admissibilité de la personne au Canada sont confidentiels ou protégés parce qu'ils risquent de porter atteinte à la sécurité nationale ou à celle d'une personne. À un certain point, la sécurité nationale et celle des particuliers doivent avoir préséance sur les droits individuels tout en interférant le moins possible avec ces derniers. C'est l'idée derrière le projet de loi.
    Ceux qui sont inadmissibles au Canada pour d'autres raisons font l'objet d'une mesure de renvoi, mais dans la plupart de ces cas, les renseignements nécessaires ne sont pas confidentiels. Afin de protéger ces renseignements et éviter qu'ils ne soient divulgués, dans l'intérêt de la protection de la sécurité des Canadiens, ces personnes ne sont pas visées par des certificats de sécurité puisque leur dossier ne contient aucun renseignement délicat pour la sécurité. Par conséquent, dans de nombreux cas, en fait dans la majorité des cas, tous les renseignements sont divulgués et la question ne se pose même pas.
    À la première étape de la procédure liée à un certificat de sécurité, le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration examinent le cas à la lumière de l'information qui leur est fournie, notamment les renseignements de sécurité. Les deux ministres doivent signer le certificat pour le valider. Ils ne signent pas sans tenir compte de l'information qui leur a été présentée. Il faut l'aval de deux ministres avant que le certificat ne soit renvoyé à un juge de la Cour fédérale chargé de tenir une audience pour établir si le certificat est raisonnable. Cette façon de procéder assure une certaine protection à la personne visée, mais d'autres mesures de protection sont également prévues.
    Pendant les procédures judiciaires, le gouvernement fédéral peut présenter au juge des renseignements classifiés. Cette information n'est communiquée ni à la personne visée, ni à son avocat. Cependant, le tribunal fournit à la personne mise en cause un résumé non confidentiel de la preuve pour qu'elle soit raisonnablement informée des motifs entourant l'établissement du certificat. Ce résumé donne une explication passablement détaillée de la preuve qu'elle doit contester ou à laquelle elle doit répondre. Si le juge établit que le certificat est raisonnable, celui-ci devient alors une mesure de renvoi.
    Durant l'audience sur le caractère raisonnable du certificat ou une fois qu'il a été jugé raisonnable, la Cour fédérale évalue généralement le risque et le danger que court la personne visée pour décider si elle doit être renvoyée du Canada. Il s'agit notamment d'établir si, une fois de retour dans son pays d'origine, la personne est susceptible d'être torturée ou soumise à d'autres traitements cruels ou inusités. Ce type d'enquête fait également l'objet d'un examen par la Cour fédérale. Le Canada n'a jamais sciemment renvoyé des personnes qui couraient un risque substantiel de torture.
    Comme les députés peuvent le constater, avant que le gouvernement ne recoure à un certificat de sécurité, de nombreuses personnes examinent les faits et interviennent pour assurer l'intégrité du processus.
    Dans la décision rendue en février dernier dans l'affaire Charkaoui, la Cour suprême du Canada a déclaré qu'il fallait resserrer certains aspects du processus entourant le certificat de sécurité pour donner aux personnes mises en cause davantage de possibilités de contester les accusations du gouvernement.
    Aujourd'hui, j'expliquerai aux députés pourquoi, dans certains cas particuliers, on invoque ce processus prévu dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés plutôt que les dispositions du Code criminel. J'ose espérer que mes explications aideront les députés à comprendre le caractère crucial d'une telle mesure et à quel point il est important de voter en faveur du projet de loi C-3.
(1340)
    Le processus relatif aux certificats de sécurité n'a pas les mêmes objectifs que les poursuites criminelles.
    Permettez-moi de dire d'entrée de jeu que les instances en immigration et les instances criminelles ne doivent en aucun cas être considérées interchangeables. Elles remplissent chacune un objectif qui leur est propre et la marche à suivre dans chaque cas a évolué au fil du temps de façon à convenir à chacune.
    Les instances criminelles visent à condamner et, advenant une condamnation, une peine décidée par le tribunal est imposée. C'est ce qui se produit lorsqu'on soupçonne un crime ou que les gestes ou intentions d'une personne constituent une infraction à la loi canadienne. Or, il peut arriver qu'une personne n'en soit pas là, mais qu'elle présente néanmoins une menace pour la sécurité du pays ou la sûreté d'une personne.
    Le processus relatif aux certificats de sécurité a pour but d'expulser du Canada les personnes qui n'y sont pas admissibles, mais il ne comporte aucun volet punitif. La décision d'intenter ou non des poursuites criminelles ou d'expulser une personne du Canada doit être prise en fonction de chaque cas. Il ne faut jamais présupposer du recours qui sera invoqué.
    Chaque décision doit être prise à l'issue d'une évaluation indépendante des faits, des circonstances et du contexte. Comme je l'ai déjà dit, avant de recourir au processus relatif aux certificats de sécurité prescrit par la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, il faut déterminer si la personne en cause est admissible au Canada et, par conséquent, si elle est passible de renvoi. Lorsque c'est le cas, il y a nécessairement des renseignements sensibles qui ne peuvent pas être divulgués pour des raisons de sécurité nationale ou pour protéger d'autres personnes.
    Je souligne encore une fois que ces cas mettent en cause des personnes qui sont d'une façon ou d'une autre impliquées dans des activités liées au terrorisme, au crime organisé ou à des crimes graves ou encore qui portent atteinte à des droits humains ou internationaux. On n'invoque pas ce processus simplement parce qu'on juge qu'une personne n'est pas admissible au Canada.
    En revanche, on intente seulement des poursuites criminelles lorsque, à l'issue d'une enquête indépendante menée par la police, les preuves indiquent qu'il y a matière raisonnable à condamnation et que le poursuivant juge qu'il est dans l'intérêt du public de porter des accusations. La décision d'intenter ou non une poursuite relève de la compétence indépendante du poursuivant et les questions en cause sont différentes dans les deux cas.
     Il existe d'autres différences entre les deux: les droits et les garanties qu'elles confèrent. Le gouvernement estime qu'il ne serait pas correct de choisir un type de procédure plutôt que l'autre pour s'assurer que des dispositions particulières de la Charte ou d'autres garanties s'appliquent ou ne s'appliquent pas.
    Certains droits, comme le droit d'être présumé innocent et le droit à un procès avec jury, par exemple, ne conviennent qu'aux procédures pénales, tandis que d'autres, comme le droit à un procès équitable, sont d'application plus générale. Toute question quant aux droits ou aux garanties applicables doit dépendre de la nature de la procédure et le gouvernement estime que la nature de la procédure doit être fonction des faits et du contexte de chaque affaire.
    En ce qui a trait au processus d'établissement du certificat de sécurité proprement dit, un juge impartial est saisi de l'affaire et il y a une disposition pour le processus de mise en accusation. Ce dernier point est amélioré par l'introduction du défenseur dans la procédure, comme le propose le projet de loi.
    Comme le voient les députés, chaque système sert à une fin fondamentale distincte. Le gouvernement croit qu'il ne faut pas confondre les deux ou les voir comme étant interchangeables et qu'il ne serait pas indiqué de privilégier un type de procédure.
    Permettez-moi de vous expliquer ce qu'apporte le projet de loi.
    Il prévoit un défenseur pour défendre les intérêts de l’intéressé dans le cadre de certaines instances où la preuve est entendue en son absence et en celle de son conseil et à huis clos. Le défenseur peut contester les affirmations du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile à l’égard de la confidentialité de la preuve et, d’autre part, la pertinence, la fiabilité et la suffisance de celle-ci ainsi que l’importance qui devrait lui être accordée. Il peut en outre présenter au juge ses observations, contre-interroger les témoins et exercer, avec l’autorisation du juge, tout autre pouvoir nécessaire à la défense des intérêts de l’intéressé.
    C'est beaucoup plus que ce que permettait précédemment la loi. La nouvelle mesure législative permet de vérifier et d'évaluer la preuve, de mener des contre-interrogatoires et de contester la preuve, comme le ferait un avocat de la défense dans une affaire ordinaire. Elle permet également à un juge d'intervenir.
(1345)
    Une autre différence dont j'aimerais parler est le volet du processus des certificats de sécurité qui porte sur la détention. Ce n'est pas la même chose que l'incarcération dans le système de justice pénale. L'incarcération imposée comme peine au criminel est un outil de punition et de réhabilitation. Ce genre de punition est appliqué selon les faits établis lors de la condamnation et se fonde sur des principes de détermination de la peine, dont la proportionnalité entre la durée de l'emprisonnement et la gravité de l'infraction commise.
    Par contre, la détention en attendant le renvoi est fondée sur une évaluation périodique du risque pour le public ou pour la sécurité nationale. Il ne s'agit pas d'une mesure punitive et elle n'a aucune fonction de réhabilitation. Autrement dit, les personnes visées sont détenues jusqu'à ce qu'elles quittent le pays. L'objectif est leur renvoi du Canada. Les personnes visées par des certificats de sécurité sont libres de quitter le Canada et de retourner dans leur pays d'origine n'importe quand.
    Dans sa décision sur l'affaire Charkaoui, la Cour suprême a réitéré que la détention était appropriée en vertu de nos lois sur l'immigration, y compris, au besoin, la détention prolongée. Plus précisément, la Cour suprême a déclaré que de longues périodes d'incarcération n'enfreignent pas la Charte des droits et libertés, en autant que le processus permette une évaluation régulière et tienne compte des facteurs liés à chaque cas.
    La décision de la Cour suprême vient préciser les garanties applicables prévues par la Charte et les exigences quant à l’exercice de contrôles périodiques vigoureux de la détention . Ce projet de loi respectera ces exigences.
    Le projet de loi C-3 consacre le fait que les ressortissants étrangers auront les mêmes droits à l'examen des motifs de détention que les résidents permanents, soit dans les 48 heures suivant l'arrestation et au moins tous les six mois par la suite. Je crois que le Canada est à cet égard un chef de file par rapport aux autres pays. Même si le certificat de sécurité est rarement utilisé, c'est un outil absolument essentiel dont nous devons disposer pour la sécurité nationale.
    J'ai mentionné plus tôt certaines statistiques qui démontrent à quel point ce processus est utilisé avec parcimonie au Canada. Sur les millions de personnes admises au Canada, seules quelques-unes ont fait l'objet de certificats de sécurité.
    L'utilisation peu fréquente de ce processus ne signifie aucunement qu'il n'a pas sa place dans nos efforts de sécurité nationale. Il ne faudrait pas du tout croire que nous pouvons traiter ces cas autrement. La Cour suprême a confirmé l'utilisation générale des certificats de sécurité et reconnu que l'une des responsabilités les plus fondamentales d'un gouvernement consiste à assurer la sécurité et la protection de ses citoyens. C'est primordial.
    En fait, en retardant d'un an l'entrée en vigueur de son jugement, la Cour suprême a donné au gouvernement fédéral et, au bout du compte, au Parlement l'occasion de modifier la loi afin de pouvoir garder les certificats de sécurité comme outils de sécurité publique, et c'est ce que nous avons fait.
    Le temps commence à manquer pour modifier la loi. Elle sera invalidée si le Parlement n'adopte pas le projet de loi C-3 d'ici février 2008. Les individus visés par un certificat de sécurité remporteront sans aucun doute leur demande d'annulation de ces certificats. Cela signifie qu'ils ne seront plus détenus ni soumis à quelque condition de libération que ce soit, ce qui pourrait poser de graves risques pour la sécurité publique. Cela signifie aussi que nous perdrons un outil nous permettant d'être en sécurité.
    On a réellement besoin des certificats de sécurité et du processus qui s'y rattache. Même si certains députés croient que nous pouvons nous occuper efficacement de ces cas par des poursuites au criminel, c'est tout simplement faux, car il s'agit de deux questions totalement différentes.
    J'espère que cette explication du rôle des poursuites au criminel contribuera à amener les députés à voter en faveur du projet de loi. Les certificats de sécurité et les poursuites au criminel n'ont pas les mêmes buts, les mêmes processus ni les mêmes résultats. Il est impossible de les interchanger.
    Nous devons maintenir notre capacité de renvoyer du pays les personnes inadmissibles qui posent une grave menace aux Canadiens. Qu'il s'agisse d'un espion étranger, d'un terroriste, d'un membre d'une organisation violente du crime organisé ou d'une personne qui a commis des atrocités odieuses au chapitre des droits de la personne à l'étranger, on ne peut permettre à ces personnes de demeurer au Canada. Ce serait un peu comme fermer la porte de l'écurie une fois que les chevaux se sont enfuis. Nous ne faisons pas cela. Nous ne laissons pas la porte ouverte. Nous devons surveiller la porte.
    Grâce au projet de loi C-3, nous pourrons continuer de défendre notre société contre ces menaces importantes. J'encourage les députés à montrer qu'ils veulent vraiment protéger les Canadiens contre les personnes qui présentent une menace en votant en faveur du projet de loi.
(1350)
    Je réitérerai que le projet de loi en soi contient une série de mesures de protection qui, selon moi, fournissent aux particuliers la sécurité nécessaire sans compromettre la sécurité nationale.
    Le rôle du défenseur serait de protéger les intérêts du résident permanent ou du ressortissant étranger dans certaines instances. Ce rôle consiste donc à protéger ces intérêts. Le défenseur peut contester les affirmations quant au besoin de divulgation ou de confidentialité. Il peut contester la pertinence, la fiabilité et la suffisance de l'information ou de la preuve ainsi que l’importance qui devrait leur être accordée. Il peut présenter des observations orales et écrites. Il peut contre-interroger les témoins et exercer, avec l’autorisation du juge, tout autre pouvoir nécessaire à la défense des intérêts du résident permanent ou du ressortissant étranger. Cela couvre de nombreux aspects.
    Monsieur le Président, je pense que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il revient au gouvernement de protéger les citoyens du pays. Quiconque complote pour perpétrer un attentat terroriste devrait être traduit devant la justice, condamné et puni. À nos yeux, il ne suffit pas de l'expulser dans un autre pays. Je me demande si le député pense qu'une personne contre laquelle pèsent des accusations devrait avoir le droit de connaître et d'examiner les preuves recueillies contre elle.
    Monsieur le Président, la députée confond encore une fois la procédure pénale et une instance en immigration visant à protéger le pays contre les gens qui y viennent et qui y constituent un danger.
    Dans une procédure pénale, on accuse une personne d'avoir commis un crime, c'est-à-dire d'avoir violé la loi, ou encore on compte l'en accuser. Il ne s'agit pas du même enjeu sur le plan de la sécurité que dans le cas d'un étranger qui vient au Canada ou qui souhaite y venir. Un étranger a le droit de quitter le pays quand il veut. Il n'a pas le droit d'y venir s'il a des antécédents criminels graves, s'il constitue une menace pour la sécurité ou s'il a déjà été associé à des activités de nature terroriste.
    Cela dit, le défenseur mettrait dans la balance, d'une part, le droit de la personne visée de savoir ce qui est retenu contre elle ainsi que, d'autre part, la capacité, pour la société, de se protéger contre le danger éventuel. Le défenseur pourrait vérifier les preuves, les soupeser, contre-interroger les témoins et présenter devant le juge ses arguments sur la question de la confidentialité de l'information. Il me semble qu'un avocat, les ministres du gouvernement fédéral et un juge de la Cour fédérale seraient mieux placés pour décider de ce qui ne peut pas être divulgué que la personne elle-même qui est susceptible de constituer un danger pour le pays.
    Nous sommes à la recherche du juste équilibre, j'en conviens, et nous proposons à ce titre un mécanisme particulier qui permettra à la personne de savoir ce qui pèse contre elle, d'examiner les preuves et de les vérifier dans les limites prescrites, ce qui lui permettra de protéger son propre intérêt sans mettre en péril la sécurité nationale.
(1355)
    Monsieur le Président, après avoir écouté le secrétaire parlementaire et entendu bien des débats sur cette question, de même que sur la Loi antiterroriste, je ne peux m'empêcher de penser à la Première et à la Seconde Guerre mondiale. À cette époque, pour des raisons de sécurité nationale, nous avons interné des ressortissants de l'empire austro-hongrois et bien des Canadiens d'origine ukrainienne. Nous avons également interné des Italiens des Canadiens d'origine japonaise et d'autres encore, toujours au nom de la sécurité.
    Comme les députés le savent, nous en sommes arrivés à un règlement avec les Canadiens d'origine japonaise, qui ont été indemnisés pour les injustices du passé, et nous avons également fait une démarche à l'égard des Canadiens d'origine ukrainienne.
    Le secrétaire parlementaire devrait répondre à la question suivante. Il dit souvent que c'est en vertu de la Loi sur l'immigration que nous emprisonnons des personnes pour une durée indéfinie et qu'elles sont alors placées devant une alternative qui n'en est pas une. En effet, si elles retournent dans leur pays d'origine, elles risquent d'être torturées ou tuées. D'autre part, il fait la différence entre ce processus et les poursuites en vertu du Code criminel, où des éléments de preuve sont disponibles et où les accusés ont le droit de faire appel avant qu'il ne soit possible de les incarcérer pour une longue période. Le député ne peut manquer de comprendre la contradiction dans ces deux approches. Je lui saurai gré de bien vouloir répondre.
    Précisément, monsieur le Président. On a parlé de l'épisode sombre de l'histoire que les Hongrois ont vécu. Lorsque les Canadiens d'origine ukrainienne ont été internés, le processus en question n'existait pas et ne s'appliquait donc pas. Les choses se seraient passées différemment s'il avait existé.
    Premièrement, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre de la Sécurité publique doivent examiner les renseignements et autres éléments de preuve, afin d'établir la pertinence du cas.
    Deuxièmement, un juge de la Cour fédérale se penche sur l'affaire pour s'assurer qu'elle n'est pas futile ou frivole. Il faut qu'elle soulève une question grave relativement à la sécurité du pays ou à une personne qui met notre sécurité nationale en danger. On ne peut agir sur un coup de tête. Si ce processus avait existé en ce temps-là, les choses se seraient passées différemment.
    Le processus permet à un défenseur d'intercéder pour l'intéressé et de plaider sa cause afin que, en fin de compte, un parfait équilibre soit atteint pour assurer la protection de l'intéressé. En vertu de certaines dispositions, le juge peut autoriser le défenseur à avoir recours à un arsenal assez important de moyens, dont ceux communément employés dans les procès au criminel; le défenseur peut notamment contre-interroger les témoins, contester l'exactitude des faits et vérifier si la preuve est suffisante, tout ce qui permet de s'assurer que la preuve est bien établie, que les faits correspondent à la réalité.
    Je pensais avoir clairement fait la distinction, dans mon premier discours, entre la procédure en matière criminelle et celle qui s'applique dans ce cas-ci. Quoi qu'il en soit, il existe une distinction.
    Je suis désolé d'interrompre le secrétaire parlementaire, mais le moment est venu de passer aux déclarations de députés. La période réservée aux questions et aux observations se poursuivra lorsque la Chambre reprendra l'étude de cette question.
    Le député de Yellowhead a la parole.

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Déclarations de députés]

(1400)

[Traduction]

Opération Enfant Noël

    Monsieur le Président, j'aimerais rendre hommage à une jeune femme de ma circonscription, Kristena Burkin, âgée de 16 ans, qui a réussi à donner un tout nouveau sens à la fête de Noël pour des centaines d'enfants cette année.
    L'initiative Opération Enfant Noël est bien connue au Canada. Les membres de diverses familles, églises, organisations et écoles se réunissent une fois par année pour remplir des boîtes à chaussures de produits d'hygiène, de jouets et de vêtements pour des enfants de deux à 14 ans. Ces boîtes sont ensuite transmises à des enfants moins favorisés de partout au monde.
    Je suis fier de rendre hommage à Kristena aujourd'hui. Elle a donné du temps et de l'argent à cette cause et elle a obtenu la collaboration des gens de Fox Creek pour aider à remplir 477 boîtes à chaussures cette année seulement.
    En remerciement de son dévouement envers Opération Enfant Noël, Kristena a été choisie cette année pour aller distribuer ces boîtes à des enfants dans le besoin. Elle se rendra en Argentine en décembre prochain.
    Je tiens à féliciter Kristena de contribuer à apporter de la joie et de l'espoir dans la vie des enfants et de servir de modèle à tous les Canadiens.

Les droits de l'enfant

    Monsieur le Président, le Canada a signé la Convention relative aux droits de l'enfant en mai 1990, et il l'a ratifiée le 13 décembre 1991. La convention énonce des droits fondamentaux visant à protéger tous les enfants et à affirmer leur droit à la survie et à la protection contre toute forme de mauvais traitements ou d'exploitation.
    En cette Journée mondiale pour la prévention des abus envers les enfants, j'exhorte le gouvernement à s'engager à faire plus pour protéger les enfants au Canada et pour respecter la convention signée il y a presque 18 ans.
    Le gouvernement doit aussi s'engager à s'occuper de la crise qui affecte le bien-être des enfants des Premières nations. Le nombre des enfants des Premières nations qui sont touchés est en hausse et, jusqu'à maintenant, la réaction du gouvernement a été déplorable. En fait, le gouvernement préfère nier sa responsabilité et imputer le blâme à d'autres.
    Il est extrêmement désolant que l'Assemblée des Premières Nations et la Société de soutien à l'enfance et à la famille des Premières nations du Canada aient dû porter plainte à la Commission canadienne des droits de la personne, relativement au manque de fonds pour le bien-être des enfants des Premières nations.
    Cette situation est inacceptable. Le gouvernement doit agir maintenant et je l'exhorte à le faire.

[Français]

Nicolas Beauchamp et Michel Lévesque

    Monsieur le Président, deux soldats québécois n'ont pas pu terminer leur mission en Afghanistan. En effet, ils ont été tués samedi dernier. Il s'agit du caporal Nicolas Beauchamp, de la 5e Ambulance de campagne de Valcartier, fils de Robert Beauchamp, conseiller municipal de Saint-Marcel-de-Richelieu, et de Nicole Robidoux, tous deux résidants de ma circonscription, ainsi que du soldat Michel Lévesque, de Rivière-Rouge, du Royal 22e Régiment.
    Un interprète afghan y a aussi perdu la vie et trois autres soldats ont été blessés. Ce sont donc 73 soldats qui ont laissé leur vie en Afghanistan depuis le début de la mission.
    Mes collègues du Bloc québécois et moi-même offrons nos plus sincères condoléances aux familles éprouvées. Après cet autre événement, nous souhaitons que ce gouvernement prenne enfin une décision éclairée à propos de cette guerre.

[Traduction]

L'énergie

    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur, tout comme le gouvernement libéral qui l'a précédé, n'a pas su adopter une politique énergétique mettant l'accent d'abord et avant tout sur les besoins du Canada. Notre avenir est devenu précaire d'abord en raison de l'ALENA, puis de l'Initiative nord-américaine de la sécurité énergétique et enfin, du Partenariat pour la sécurité et la prospérité.
    Le premier ministre affirme que le Canada est une superpuissance énergétique et, pourtant, tout ce qu'il fait, c'est apaiser les multinationales pétrolières et gazières et se plier à la volonté des États-Unis.
    L'Office national de l'énergie se joint aujourd'hui aux premiers ministres des provinces et aux dirigeants d'entreprise canadiens pour demander que le Canada élabore une stratégie énergétique nationale. Dans son nouveau rapport, l'office dit:
    Le plan ainsi produit doit être bien intégré à l’échelle régionale, tenir compte des enjeux environnementaux et de croissance économique, et être élaboré avec la participation des Canadiens.
    Le monde est aux prises non seulement avec de graves perturbations climatiques, mais également avec le spectre d'un sommet dans la production pétrolière et des demandes énergétiques massives des pays en développement. La plupart des pays exportateurs d'énergie agissent désormais dans leur intérêt supérieur. Que fait le Canada? Pourquoi dilapidons-nous...
    Le député de Roberval—Lac-Saint-Jean a la parole.

[Français]

Le Festival de contes et légendes

    Monsieur le Président, le 10 novembre dernier, j'ai eu le privilège d'assister à un festival extraordinaire, le Festival de contes et légendes du Saguenay--Lac-Saint-Jean, à Dolbeau-Mistassini. Lors de cet événement, nous avons eu la chance d'entendre et de voir différents conteurs amateurs et professionnels.
    J'attirerai toutefois l'attention de mes collègues sur un spectacle qui m'a particulièrement fasciné, soit celui des élèves du programme arts-études de l'École secondaire des Chutes.
    C'est à la suite de mois de travail que ces jeunes ont présenté le conte intitulé Julien et l'araignée, mis en scène par les élèves et écrit par la professeure Marie-Claude Tremblay.
    Depuis trois ans, cette école offre la chance à une trentaine de jeunes d'évoluer au sein d'un programme arts-études au sein duquel différents cours sont offerts, comme les arts plastiques avec Mme Roberge, le théâtre avec Mme Tremblay et la musique avec Mme Gauthier.
    Félicitations à la Commission scolaire du Pays-des-Bleuets, à l'École secondaire des Chutes, à son directeur M. Dufour et sa directrice adjointe Mme Bouliane, au Festival de contes et légendes et, surtout, aux élèves qui nous ont présenté cette magnifique pièce.
(1405)

Madeleine Lee

    Monsieur le Président, c'est avec honneur que je tiens à offrir mes meilleurs voeux à Mme Madeleine Lee à l'occasion de son 100e anniversaire de naissance qui a eu lieu le 3 novembre dernier.
    Résidante d'Edmundston, Mme Lee est certes une personne remarquable qui a investi temps et énergie avec sa famille et ses amis. En plus de lire le journal quotidiennement, Mme Lee adore regarder les matchs de hockey à la télévision. D'ailleurs, elle continue toujours d'encourager son équipe favorite, les Canadiens de Montréal.
    Comme bien d'autres, j'ai été inspiré par le courage et l'énergie remarquables de Mme Lee et par sa générosité de coeur.
    En cette unique et joyeuse occasion, les citoyens de Madawaska—Restigouche se joignent à moi pour souhaiter à Mme Lee un bel anniversaire, en espérant que cette dernière conserve une bonne santé et continue à nous charmer par sa force de vivre et sa dignité pour de nombreuses années à venir.
    Bonne fête, Mme Lee.

[Traduction]

Ying Hope

    Monsieur le Président, c'est avec tristesse que nous avons appris la mort récente de M. Ying Hope.
     Canadien d'ascendance chinoise, fils de tailleur à Victoria et membre d'une famille de huit enfants, Ying Hope était un pionnier. Il a été le premier Canadien d'ascendance chinoise élu à la commission scolaire de Toronto et au conseil municipal de Toronto. Après avoir occupé un poste d'ingénieur au projet du Avro Arrow, Ying Hope a été élu au conseil scolaire de Toronto en 1964, dont il devint le président en 1967. Il a été élu conseiller municipal de Toronto en 1969.
    Il a fait du mentorat auprès d'innombrables jeunes, dont moi-même, et j'ai eu le privilège de travailler avec lui lors de campagnes électorales lorsque j'étais étudiant à l'Université de Toronto.
    Il n'a ménagé aucun effort pour que les immigrants chinois obtiennent réparation relativement à la taxe d'entrée qui leur avait été imposée et aux lois qui les avaient empêchés de devenir des citoyens à part entière. L'an dernier, le premier ministre a reconnu les efforts qu'il a faits et que d'autres ont faits aussi dans ce sens en leur présentant des excuses complètes pour l'exclusion et les mauvais traitements dont ces immigrants ont fait l'objet.
    Au nom du gouvernement du Canada, j'offre mes condoléances à la famille de M. Hope. Ying Hope était un grand Canadien. Le Canada a perdu un grand citoyen.

[Français]

Tom Desaulniers

    Monsieur le Président, en août 2006, le destin cruel a touché une famille de Victoriaville lorsqu'un automobiliste est venu heurter le véhicule de Tom Desaulniers, âgé de 22 ans. Le deuil a été insoutenable puisqu'il s'est passé une année entière avant d'enfin connaître le déroulement de cette nuit funeste.
    Caporal dans l'armée canadienne, Tom a laissé un souvenir tangible de son passage parmi nous. Défenseur de valeurs qui nous sont chères, le jeune militaire venait, ironie du sort, de compléter une mission de six mois en Afghanistan. Fier de ses racines, Tom y a même fait flotter le drapeau du Québec pendant quelques heures. Sa carrière écourtée ne l'a pas empêché de remplir sa mission avec ardeur et générosité.
    En visite sur la Colline aujourd'hui, sa famille et ses proches peuvent enfin retrouver la paix recherchée en mémoire de celui qui oeuvrait à aider les autres à retrouver le chemin de la paix. En effet, en mémoire du caporal Tom Desaulniers, sa mère Louise a représenté la mère canadienne lors de la récente cérémonie du jour du Souvenir, à Victoriaville. Tom en est sûrement très fier.

[Traduction]

Le secteur de l'élevage

    Monsieur le Président, il y a quatre ans et demi, le 20 mai, j'étais dans mes pâturages en train d'inspecter mes vaches lorsque j'ai appris que les Américains avaient fermé leur frontière à tous les bovins et ruminants du Canada à cause de l'ESB. C'est un jour que nous n'oublierons jamais.
    Enfin, à partir d'aujourd'hui, les bovins et les bisons nés le 1er mars 1999 ou après cette date peuvent de nouveau être exportés, mais aujourd'hui, les choses ne sont plus les mêmes. Nous savons que l'annonce d'aujourd'hui n'est pas la panacée à tous les problèmes de l'industrie. Nous reconnaissons que les exportateurs canadiens de bétail sont confrontés à des désavantages concurrentiels et à des tracasseries administratives de la part des Américains, que des préjudices énormes ont été causés et que les protectionnistes américains continuent à faire planer la menace de poursuites.
    Malgré tout, aujourd'hui, nous voyons la situation sous un jour positif. Un autre marché s'est enfin rouvert aux producteurs canadiens, y compris à ceux qui élèvent des reproducteurs. Au Canada, les mesures de protection et d'éradication sont inégalées, comme c'est le cas du système d'identification de l'industrie.
    Je suis fier de dire que nos producteurs de bétail sont les meilleurs au monde.

Fred C. Stinson

    Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui afin de rendre hommage à Fred C. Stinson, avocat, ancien combattant, diplomate et ancien député, qui est récemment décédé.
    Fred Stinson est né à Toronto en 1922. Après avoir obtenu son diplôme de l'Université Trinity, il est devenu membre de la Marine royale du Canada. C'est à cette époque que son rendez-vous avec l'histoire a commencé. De 1940 jusqu'à la fin de la guerre, Fred Stinson a participé courageusement à des opérations d'escorte de convois dans l'océan Atlantique. Bien que la menace des U-boot fût toujours présente, Fred était reconnu parmi ses collègues comme un marin courageux et sympathique.
    En tant que député fédéral, il a été élu deux fois pour représenter la circonscription de York-Centre. Il a participé activement aux débats sur l'Avro Arrow et a tenté en vain de convaincre le premier ministre Diefenbaker de ses mérites.
    Fred a été envoyé aux Nations Unies en tant que membre de la délégation canadienne et a été témoin direct du célèbre incident où Nikita Khrouchtchev a frappé sur une table à l'aide de l'un de ses souliers.
    Quand sa carrière publique s'est terminée, Fred a aidé à fonder la Société Churchill pour l'avancement de la démocratie parlementaire.
    Je sais que, alors que nous rendons hommage à Fred Stinson, les députés se joindront à moi pour présenter nos condoléances à sa famille et à ses amis, Robert et Anneli Jaeggin.
(1410)

L'exploitation des enfants

    Monsieur le Président, pas plus tard que la semaine dernière, la police d'Edmonton a révélé qu'elle faisait enquête sur deux réseaux de traite des personnes soupçonnés de faire partie d'un réseau international où se retrouveraient des centaines de jeunes enfants canadiens. Ces derniers mois, deux touristes pédophiles canadiens ont été arrêtés pour s'en être pris à des enfants à l'étranger.
    L'exploitation des enfants dans le monde est un crime horrible auquel il faut mettre fin.
    Je suis fière que notre gouvernement et notre premier ministre aient adopté une position ferme contre la traite des personnes et l'exploitation des enfants. Le Canada a déjà fait de grands progrès dans la lutte contre la traite des personnes et l'exploitation des enfants et je sais que notre gouvernement continuera de lutter contre cette injustice.
    J'ai hâte de travailler avec le ministre de la Sécurité publique, le ministre de la Justice et la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration afin de pousser notre travail plus loin dans ce dossier.
    Ensemble, nous pouvons mettre fin à la traite des personnes. Ensemble, nous pouvons mettre fin à l'exploitation sexuelle des enfants.

Les crimes commis avec une arme à feu

    Monsieur le Président, il y a eu trois fusillades en moins d'une semaine à Coquitlam. Une de celles-ci a eu lieu en plein jour. Les familles dans ma collectivité s'inquiètent, avec raison, de la recrudescence de la violence, surtout à la lumière de l'effectif insuffisant de la GRC à Coquitlam.
    Les conservateurs ont promis d'embaucher 1 000 agents supplémentaires de la GRC et 2 500 agents de police municipaux il y a plus de deux ans, mais ils ne se sont toujours pas exécutés.
    Ces fusillades contribuent à l'augmentation du nombre de crimes commis avec une arme à feu dans l'ensemble du Canada. Il faut que nous nous attaquions à cette question. J'appuie l'imposition de peines plus sévères pour les crimes commis avec une arme à feu. Cependant, à elles seules, les peines plus sévères ne régleront pas le problème. Le gouvernement doit aussi investir dans la prévention et les services de police. Un plan exhaustif est essentiel à la protection des collectivités canadiennes.
    Je demande instamment au gouvernement de tenir la promesse qu'il a faite il y a déjà très longtemps et d'embaucher plus d'agents de police. Je lui demande de le faire immédiatement.

La fondation Vitanova

    Monsieur le Président, c'est cette année le 20e anniversaire de la fondation Vitanova, un organisme de lutte contre la dépendance aux drogues qui offre un éventail de services aux personnes, aux familles et à l'ensemble de la collectivité. Cet organisme s'occupe de prévention en plus de fournir des services de traitement, de réadaptation et de suivi.
    Mais la fondation Vitanova fait encore bien plus. Elle a bâti sa réputation sur des valeurs fondamentales comme la confiance, le respect et la compassion. Elle fait office de nouveau foyer pour les toxicomanes à qui elle donne une chance de commencer une nouvelle vie. Littéralement, son nom peut se traduire par « nouvelle vie », et c'est bien cela qu'offre la fondation Vitanova à ceux qui comptent sur son aide.
    Je veux profiter de l'occasion pour rendre hommage à la fondatrice de Vitanova, Mme Franca Damiani Carella, et à son président, Michael Federico, ainsi qu'aux dévoués employés et bénévoles de l'organisme, qui ont offert soins, conseils et espoir aux milliers de personnes dont la vie a été changée pour toujours grâce à l'aide et au soutien dont elles ont bénéficié chez Vitanova.
    Au nom du Parlement du Canada, je félicite la fondation Vitanova pour ces 20 années de fiers services à la collectivité.

[Français]

La condition féminine

    Monsieur le Président, le mépris et l'arrogance dont fait preuve la ministre du Patrimoine canadien, de la Condition féminine et des Langues officielles n'ont d'égal que son impuissance à défendre les dossiers de la condition féminine auprès de ses collègues du Cabinet ministériel.
    La ministre prétend qu'il faut être au pouvoir pour agir. Elle est au pouvoir et elle ne fait rien. Qu'a-t-elle fait pour empêcher Femmes et Droits de fermer ses portes? Qu'a-t-elle fait pour présenter une loi proactive sur l'équité salariale? Qu'a-t-elle fait pour rétablir les critères d'origine du Programme de promotion de la femme de Condition féminine Canada? Qu'a-t-elle fait pour rétablir le Programme de contestation judiciaire? Rien, absolument rien.
    C'est pourquoi j'informe la ministre que la vérité n'a pas besoin de micro pour se faire entendre. Elle n'a besoin que de personnes convaincues de la légitimité de leurs revendications, et j'en suis. C'est à ce titre que je continuerai de m'insurger et de hurler le mécontentement de toutes les femmes qui sont bâillonnées et qui sont lésées par les politiques rétrogrades de ce gouvernement. Je le ferai jusqu'à ce que nous ayons gain de cause.
(1415)

[Traduction]

La coupe Grey

    Monsieur le Président, j'informe la Chambre que Toronto sera envahie la fin de semaine prochaine. Les mordus de football des Prairies se retrouveront à Toronto où, pour la première fois, deux équipes de leur région se disputeront le plus grand prix du football canadien, la coupe Grey.
    Hier, les Blue Bombers de Winnipeg ont battu les Argonauts de Toronto, remportant ainsi la finale de l'Est, même après avoir perdu leur quart-arrière.
    Dans l'Ouest, les Roughriders de la Saskatchewan ont remporté une victoire étonnante aux dépens de l'équipe de la Colombie-Britannique. Des centaines d'amateurs les ont chaleureusement accueillis à leur retour à Regina à 1 h 30 ce matin.
     Pour soutenir leur équipe, les Saskatchewanais s'apprêtent à arborer le vert et le blanc sur la scène nationale de la façon habituelle: visages peints, drapeaux, chapeaux, déguisements et même quelques casques en forme de melon d'eau. Et contre Winnipeg, il y aura probablement quelques banjos également.
    Ce match a toutes les allures d'un classique. Il ne reste qu'à scander « Allez, Riders! »

La Loi sur la lutte contre les crimes violents

    Monsieur le Président, en tant que parlementaires, nous avons le devoir de créer des lois afin de protéger tous les citoyens du Canada. C'est pourquoi je prends la parole aujourd'hui pour dénoncer l'hypocrisie de certains députés de l'opposition.
    Comme en témoignent les délibérations du Comité législatif chargé du projet de loi C-2, la Loi sur la lutte contre les crimes violents, mes collègues et moi sommes stupéfaits des incessantes volte-face du Parti libéral. Pendant la dernière campagne électorale, les libéraux avaient promis des peines plus sévères, mais, maintenant, ils font preuve d'un laxisme absolu en matière de criminalité.
    Il y a dix ans, l'ancien gouvernement a imposé vingt peines d'emprisonnement minimales pour les crimes liés aux armes à feu. Pourtant, les députés de ce même parti ont fait obstruction à l'ancien projet de loi sur les peines minimales obligatoires au comité et à la Chambre, et ce, durant un total de 414 jours civils.
    Quand les partis de l'opposition vont-ils comprendre que les Canadiens n'ont pas envie de badiner avec la sécurité de leur famille? De toute évidence, l'opposition ne se soucie pas du tout des personnes à qui les crimes liés aux armes à feu coûtent le plus cher: les victimes.
    Tandis que les libéraux ne sont tout simplement pas à la hauteur, nous assumons, pour notre part, notre responsabilité qui est de protéger les Canadiens contre les crimes violents.

[Français]

Jean Lemire

    Monsieur le Président, l'UQAR, à l'occasion de sa collation des grades annuelle, a remis à Jean Lemire un doctorat honoris causa récompensant plus de 20 ans de travail en biologie marine.
    À bord du Sedna IV, Jean Lemire a mené une expédition de documentation sur les changements climatiques en Antarctique. En 430 jours d'aventures et de découvertes, il a suscité rêves et questionnements chez celles et ceux qui ont suivi son périple.
    Ses documentaires remportent de nombreux prix tant au Québec qu'ailleurs. Ils inspirent toute une génération d'éco-citoyens.
    Je salue le courage et les visées de M. Lemire. Il nous invite tous et toutes à explorer notre conscience environnementale. Selon ses propres mots, « se battre pour ses valeurs profondes n'a pas de prix, même politique ». Cette Chambre se doit d'écouter et d'entendre un homme qui a traversé les océans, d'un pôle à l'autre, en nous livrant un message non équivoque quant à la fragilité de notre planète et à notre responsabilité tant collective qu'individuelle à son égard.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

[Français]

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, le 30 avril dernier, alors que j'interrogeais le premier ministre sur des allégations graves de torture en Afghanistan, il a répondu de son siège: « [...] il n'y a pas de preuves quant à ces allégations. » Sept mois plus tard, nous savons que ce que le premier ministre a dit était faux. Le gouvernement avait des preuves.
    Puisque le premier ministre a pu induire la Chambre en erreur sur quelque chose d'aussi grave que la torture, peut-il nous dire pourquoi les Canadiens devraient le croire sur quoi que ce soit?
    Monsieur le Président, pour commencer, j'aimerais profiter de cette occasion pour offrir mes sincères condoléances aux proches du caporal Beauchamp et du soldat Lévesque qui ont été tués par des talibans, vendredi passé. Nos pensées et nos prières se joignent à leurs collègues, à leurs amis et à leur famille en ces moments si difficiles. Leurs actions ont apporté de l'espoir au peuple afghan et de la fierté à la population canadienne.

L'affaire Airbus

    Monsieur le Président, puisque le premier ministre a induit la Chambre en erreur sur les allégations de torture, ne chercherait-il pas à faire la même chose dans l'affaire Mulroney, quant au moment où il a vu les lettres de M. Schreiber, quant aux raisons pour lesquelles le ministère de la Justice a interrompu son enquête interne ou quant à l'extradition de M. Schreiber?
    Ne cherche-t-il pas à induire la Chambre en erreur dans l'affaire Mulroney comme il l'a fait pour la torture?
(1420)
    Monsieur le Président, le chef du Parti libéral a tort. Il y a des preuves des allégations dans un cas que nous avons appris récemment, il y a deux semaines. Le ministre des Affaires étrangères a expliqué ce cas à la Chambre des communes. Nous travaillons avec le gouvernement de l'Afghanistan sur l'arrangement qui existe pour enquêter sur cette situation et la régler.

[Traduction]

    Monsieur le Président, la tromperie doit cesser: camouflage dans le dossier de la torture et camouflage dans l'affaire Mulroney. Le premier ministre va-t-il cesser de tout camoufler? Acceptera-t-il de témoigner sous serment à l'enquête sur l'affaire Mulroney?
    Monsieur le Président, comme le gouvernement l'a déjà dit, le mandat de l'enquête sera établi de façon indépendante par le professeur Johnston. Je ne sais pas s'il acceptera la position du chef actuel de Parti libéral, qui veut une enquête illimitée, ou celle de l'ancien chef du Parti libéral, qui ne veut pas d'enquête publique du tout, ou celle du futur chef du Parti libéral, qui dit qu'il devrait y avoir une enquête publique limitée. Je suis certain qu'une de ces positions énoncées par des libéraux sera adoptée.
    Ce que je peux dire, c'est que lorsque le chef de l'opposition fait des allégations de grandes conspirations et s'abstient ensuite de voter pour maintenir le gouvernement au pouvoir, personne ne prend ses allégations au sérieux.

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, les députés de ce côté-ci de la Chambre se joignent aux députés d'en face pour exprimer nos plus sincères regrets par suite du décès de ces braves soldats. Mais ces soldats, et tous nos militaires, méritent qu'on sache la vérité, et la question ici est la franchise du gouvernement.
    En avril, le gouvernement est resté sur sa position en ce qui concerne la torture, soit qu'il n'avait rien vu, n'avait rien entendu et ne savait rien. Toutefois, nous savons maintenant, d'après des documents de la Cour fédérale, qu'il savait la vérité depuis le début. Il a induit le Parlement et les Canadiens en erreur. Cela est injuste envers nos militaires en mission en Afghanistan.
    Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas dire la simple vérité...
    Le très honorable premier ministre a la parole.
    Monsieur le Président, permettez-moi, encore une fois, de répondre à cette question. Le député a tort. Comme le gouvernement l'a déjà dit, nous avons appris au cours des deux dernières semaines qu'il y avait des preuves d'abus dans un cas récent. Cette affaire fait l'objet d'une enquête, conformément à l'entente que nous avons avec le gouvernement afghan.
    Les soldats et les représentants du gouvernement du Canada en Afghanistan assument leurs responsabilités en tout temps et travaillent avec leurs collègues afghans en vue d'assurer le meilleur comportement et le respect le plus complet des obligations internationales. Nous devrions être fiers de tous ces gens.

[Français]

    Monsieur le Président, les documents rendus publics en Cour fédérale la semaine dernière laissent entendre que le Canada transfère des personnes mineures aux autorités afghanes.
    Cette pratique serait en violation de la Convention relative aux droits des enfants. Nous les transférons dans un système de prisons qui fait l'objet d'allégations de torture!
    Comment le gouvernement peut-il justifier le transfert des enfants et quand va-t-il mettre fin à cette pratique?

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme dans tous les cas de transfert, les Forces canadiennes respectent le droit international, y compris la Convention de Genève. Nous prenons cette affaire très au sérieux.
    En mai dernier, nous avons amélioré l'entente conclue par le gouvernement précédent. Nous avons maintenant une entente améliorée qui permet de mieux suivre ces détenus et d'assurer une meilleure surveillance. Nous continuons de travailler avec le gouvernement afghan pour améliorer sa capacité.

[Français]

    Monsieur le Président, depuis le printemps dernier, le gouvernement a entre les mains des rapports internes qui indiquent qu'on pratique la torture dans les prisons afghanes. Pourtant, cela fait des mois que le gouvernement nie avoir de telles informations. C'est inadmissible pour un gouvernement qui ne cesse de prêcher la transparence!
    Pourquoi le premier ministre nous a-t-il caché pendant des mois que des prisonniers transférés aux autorités afghanes étaient torturés? Pourquoi avoir induit la Chambre en erreur?
(1425)
    Monsieur le Président, les faits sont clairs et tout à fait différents de ceux du chef du Bloc.
    La réalité est que nous avons un arrangement avec le gouvernement de l'Afghanistan pour ce qui est de la surveillance et des visites des prisonniers pris par le Canada.
    Récemment, nous avons découvert un cas où il y a des preuves des allégations. Ce cas fait l'objet d'une enquête de la part du gouvernement de l'Afghanistan, et nous sommes en communication avec lui pour nous assurer qu'il respecte ses responsabilités.
    Monsieur le Président, chaque fois qu'on posait des questions à ce sujet, on nous accusait de prendre la défense des talibans. Hamid Karzaï — j'imagine qu'il n'est pas un taliban — nous dit qu'il y avait de la torture. C'est bien beau d'avoir une entente, mais on ne l'applique pas, et le président de l'Afghanistan nous a dit qu'il y a avait de la torture!
    Le premier ministre s'aperçoit-il qu'il y a violation de la Convention de Genève et que la seule chose qu'il doit faire, c'est de décréter un moratoire sur le transfert de prisonniers dès maintenant?
    Monsieur le Président, au contraire, le président Karzaï a indiqué clairement qu'il s'oppose à la torture, qu'il travaille à assurer que cela n'existe pas en Afghanistan.
    Nous avons un arrangement avec son gouvernement pour enquêter sur n'importe quel incident où il y a des preuves. Cet arrangement fonctionne bien, et nous continuons de travailler avec nos homologues afghans pour régler ce problème et pour enquêter sur les cas qui existent.

La défense nationale

    Monsieur le Président, le ministère de la Défense nationale invoque des questions de sécurité pour éviter de rendre publique la base de données contenant les noms de fournisseurs qui font des contrats en Afghanistan. La politique du ministère à cet égard nous paraît bien arbitraire parce que certains noms de cette même liste apparaissent sur le site Internet du ministère.
    Les critères de sécurité varient donc selon que l'on considère la base de données ou que l'on considère le site Internet. Je demande au ministre de la Défense nationale de nous expliquer pourquoi il en est ainsi.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je ne suis pas sûr si le député se plaint parce qu'il y a trop d'informations ou parce qu'il n'y en a pas assez.
    Le site web contient des renseignements sur les contrats. Notre processus de sélection des fournisseurs pour certains contrats est très rigoureux. Nous faisons preuve de diligence raisonnable, en Afghanistan et ailleurs, à cet égard. Je ne vois pas ce qui inquiète le député.

[Français]

    Monsieur le Président, le secret dont le gouvernement entoure l'attribution de ces contrats nous fait craindre le pire. Il est fort possible que cet argent puisse être détourné de son objectif.
    Qu'attend le ministre pour rendre publique la liste complète des fournisseurs, de ceux qui font des contrats en Afghanistan, de sorte que cet argent soit attribué à de bons projets et non à certains seigneurs de la guerre, par exemple?

[Traduction]

    Monsieur le Président, comme je l'ai dit, nous avons un processus d'attribution des contrats, tant pour l'équipe de reconstruction provinciale que pour le Centre provincial de coordination interarmées de Kandahar ou encore pour l'équipe de conseillers stratégiques à Kaboul. Nous suivons un processus très rigoureux pour déterminer qui satisfait aux conditions des contrats afin qu'ils se conforment à toutes les lois afghanes applicables.
    Je le répète, le député semble un peu confus quant à la raison de ses plaintes. Les contrats attribués sont affichés sur le site web. Il n'est pas inhabituel pour les Forces canadiennes d'attribuer des contrats de sécurité à des sociétés privées.

La Gendarmerie royale du Canada

    Monsieur le Président, la plupart des Canadiens ont vu la terrible vidéo montrant Robert Dziekanski qui est atteint par un pistolet à impulsion électrique à l'aéroport international de Vancouver. Je suis sûr que les députés se joindront à moi pour exprimer nos condoléances à la famille ainsi qu'à la communauté polonaise du Canada et d'ailleurs.
    Cependant, cette affaire soulève des questions très graves qu'il faut poser au premier ministre.
    Premièrement, a-t-on demandé à la GRC de cesser d'utiliser les pistolets à impulsion électrique en attendant une enquête complète sur la politique d'utilisation de cette arme? Deuxièmement, va-t-on instaurer un programme de perfectionnement avant que les agents de la GRC puissent se servir à nouveau de ces pistolets?
    Monsieur le Président, j'aimerais joindre ma voix à celle du chef du NPD. Ce que nous avons vu était très troublant pour nous tous, à mon avis, et nous aimerions également offrir nos condoléances à la famille.
    Comme le député le sait, le gouvernement n'intervient pas dans les activités opérationnelles de la Gendarmerie royale du Canada. Cela dit, des enquêtes sont en cours. Nous les suivrons de près et nous examinerons aussi les autres options et les autres mesures pouvant se révéler nécessaires en l'occurence.
(1430)
    Monsieur le Président, il n'existe pas de règles nationales. Il n'y a pas de politique nationale régissant l'utilisation des pistolets à impulsion électrique et autres prétendus dispositifs dits non meurtriers comme celui-là.
    Le premier ministre refuse de nous dire si on a demandé à la GRC de ne plus utiliser ce genre de pistolet dans l'intervalle. Ma question est simple: pourquoi pas?
    On pourrait poser bien d'autres questions et je suis certain qu'on les posera au cours des prochaines semaines. Toutefois, une chose est claire. Il devrait au moins y avoir un programme de perfectionnement mis en place immédiatement pour veiller à ce que cela ne se reproduise pas.
    Pourquoi le premier ministre n'appuierait-il pas une proposition aussi simple?
    Monsieur le Président, comme le premier ministre l'a dit et comme je l'ai dit la semaine dernière à maintes reprises, quiconque a vu la vidéo a été choqué et attristé. Tout le monde a vu les éléments troublants.
    On procède à un certain nombre d'examens à l'heure actuelle. Quatre jours après l'incident, il y a environ un mois, j'ai demandé qu'on lance un examen immédiatement. Vendredi, le Centre canadien de recherches policières, organisme indépendant et distinct de la GRC, a aussi annoncé qu'il est en train de réaliser un examen très approfondi. La GRC procède à un examen.

L'affaire Airbus

    « J'ai toujours voulu faire carrière en politique et c'est grâce à Brian Mulroney que j'ai pu le faire. » Monsieur le Président, ce sont là les paroles du ministre de la Justice actuel.
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Le député d'Ajax—Pickering a la parole.
    Puisque cela le met en joie, je répète. « J'ai toujours voulu faire carrière en politique et c'est grâce à Brian Mulroney que j'ai pu le faire. » Ce sont là des paroles prononcées par le ministre de la Justice actuel, le même ministre qui doit décider si le témoin clé dans l'enquête sur Mulroney reste au Canada ou part, s'il témoignera ou s'il sera extradé avant de pouvoir le faire.
    Compte tenu de ce conflit d'intérêts évident, est-ce que le ministre de la Justice se retirera du dossier et laissera une autre personne qui ne doit pas sa carrière à M. Mulroney prendre la décision cruciale?
    Monsieur le Président, tout d'abord, je dirai que je dois ma carrière politique au bon peuple de Niagara Falls, de Niagara-on-the-Lake et de Fort Erie, qui a eu la bonté de m'envoyer au Parlement.
    Cela étant dit, je prends mes responsabilités de ministre de la Justice et de procureur général du Canada très au sérieux. Conformément à la pratique suivie par d'autres ministres de la Justice, je ne commenterai pas les dossiers d'extradition.
    Monsieur le Président, cela dépend de l'audience et de la tenue ou non d'une enquête publique. Tenir une enquête publique sans le témoin clé serait une farce, une campagne de relation publique inutile, et cela ne pourrait absolument pas faire éclater la vérité. Pourtant, le gouvernement refuse d'utiliser son pouvoir et de s'assurer que M. Schreiber témoigne. À moins d'être forcé de prendre le parti de la justice, le gouvernement prend toujours celui de M. Mulroney.
    Puisque le ministre de la Justice, aux prises avec de nombreux conflits, refuse d'assurer la valeur de l'enquête, est-ce que le premier ministre gardera M. Schreiber au Canada jusqu'à ce qu'il témoigne ou doit-il lui aussi son poste à M. Mulroney?
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit, il ne convient pas de commenter les dossiers d'extradition.
    Cependant, pour ce qui est de l'enquête publique, le premier ministre a lancé un processus raisonnable. Je crois qu'il convient de laisser le professeur Johnston formuler ses recommandations en vue de la tenue de l'enquête publique. Je crois que la plupart des Canadiens jugeront que c'est satisfaisant et raisonnable.

[Français]

    Monsieur le Président, après avoir caché les allégations de M. Schreiber et après avoir ordonné à ses députés de ne pas parler à son mentor, Brian Mulroney, le premier ministre a brisé ses propres règles.
    À l'occasion d'un dîner la semaine dernière, le premier ministre a rendu hommage à M. Mulroney: « Je suis fier de dire que notre gouvernement poursuit l'oeuvre du premier ministre Brian Mulroney. »
    Pourquoi le premier ministre a-t-il fait fi de ses propres directives?
(1435)

[Traduction]

    Monsieur le Président, dès qu'une allégation officielle sous serment a été soumise, il y a environ une semaine, le premier ministre a mis en place un processus, que la plupart des Canadiens jugeront raisonnable j'en suis certain, dans le cadre duquel le professeur Johnston doit se pencher sur la question et établir les paramètres de l'enquête publique. La plupart des Canadiens appuient cette mesure.
    Monsieur le Président, il est dommage que le premier ministre n'ait pas jugé bon d'y assister personnellement. On y a servi une longe de chevreuil du lac Harrington dans son jus. Était-ce également au menu lorsque le premier ministre a reçu M. Mulroney au lac Harrington, ou lorsque M. Mulroney, à l'époque où il était premier ministre, y a lui-même reçu M. Schreiber.
    Puisque le Bureau du Conseil privé était au courant de ces allégations depuis des mois et qu'il recevait sans cesse des documents à cet égard, pourquoi le premier ministre a-t-il encore une fois rendu un hommage public à M. Mulroney?
    Monsieur le Président, ma collègue n'a peut-être pas bien compris ma réponse la première fois, mais je répète qu'un processus a été mis en place et que M. Johnston a été chargé de se pencher sur les allégations faites sous serment.
    M. Johnston peut établir les paramètres de l'enquête comme il l'entend. C'est une personne d'excellente réputation et bien en vue partout au pays et nous pouvons nous fier à lui pour établir correctement les paramètres de cette enquête publique.

[Français]

Le rapport Paillé

    Monsieur le Président, le temps donné à David Johnston pour établir le cadre de la future commission d'enquête sur l'affaire Mulroney-Schreiber est beaucoup trop long. Ce gouvernement n'est visiblement pas à l'aise avec des échéances serrées. J'en prends pour preuve l'enquête sur les sondages qu'il a confiée à Daniel Paillé.
    Plus de sept mois après sa nomination, on n'a toujours pas vu son rapport. On nous promettait ce rapport pour septembre. Par la suite, on nous a dit pour la fin d'octobre, le début de novembre. Quand verra-t-on ce rapport?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je crois avoir bien compris le député. Il a dit: « Quand verra-t-on ce rapport? » Il me semble que nous devons d'abord le préparer. Ce serait la première étape à suivre dans ce processus.
    Encore une fois, le premier ministre a confié au professeur Johnston le mandat d'établir les paramètres d'une enquête publique. Il faudrait que l'enquête suive son cours avant que le député ne s'inquiète de la teneur du rapport.

[Français]

    Monsieur le Président, il est question du rapport de Daniel Paillé sur les sondages. C'est normal qu'on n'ait pas de réponse puisque le ministre des Travaux publics siège au Sénat, pas en cette Chambre.
    Le secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics peut-il nous dire quand nous recevrons une copie du rapport déposé par Daniel Paillé?

L'environnement

    Monsieur le Président, samedi, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat a rappelé aux décideurs politiques que le climat se réchauffe à un rythme accéléré, ce qui aura des effets importants pour les pays nordiques comme le Canada. Le Secrétaire général des Nations Unies a déclaré que l'impact était — et je cite — « si grave et si généralisé que seule une action globale et urgente pourra faire quelque chose. »
    À la veille de la conférence de Bali où commenceront les travaux pour donner suite à Kyoto, quelle position entend défendre le gouvernement, lui qui a abandonné les objectifs de Kyoto pour faire plaisir à ses amies les pétrolières?
    Monsieur le Président, le gouvernement va prendre la même position que ce rapport qui a été l'inspiration pour de vraies actions pour le gouvernement du Canada, pour tous les pays du monde et pour les Nations Unies. Ce rapport dit qu'on doit agir. C'est quelque chose qu'on n'a jamais vu pendant 13 longues années, quand le Parti libéral était au gouvernement et alors que le Bloc québécois n'a jamais rien fait pour l'environnement ni pour le Canada.
    Monsieur le Président, pendant 13 ans, si le parti gouvernemental nous avait écoutés, nous serions rendus plus loin dans la lutte contre changements climatiques.
    Le GIEC affirme que l'on peut stabiliser les émissions de GES à partir de 2015 si — et je cite — « une action politique exceptionnellement rapide et vigoureuse est prise par tous les pays. » Le plan du ministre ne répond en rien aux craintes de ces experts.
    Le ministre se rend-il compte que ses discours creux ne seront pas suffisants pour inverser les choses et qu'il lui faudra beaucoup plus pour convaincre ses partenaires à Bali, le 3 décembre prochain?
(1440)
    Monsieur le Président, on est en train d'agir, avec de vraies actions. C'est ce que ce gouvernement a appuyé, et appuyé fortement. Nous ne faisons pas seulement des études ou des conférences internationales, mais nous posons de vraies actions ici, au Canada. Pour la première fois dans l'histoire du Canada, on agit, on réglemente les grandes entreprises. C'est quelque chose qui n'était jamais arrivé pendant les 13 longues années du gouvernement précédent, appuyé par le Bloc québécois.

[Traduction]

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, à cause de ce camouflage pitoyable par le Cabinet conservateur, le Canada viole sciemment la Convention de Genève.
    Le premier ministre et ses marionnettes ont tenté de cacher des rapports faisant expressément état d'actes de torture. Nous savons aujourd'hui que des actes de torture sont commis en Afghanistan.
    Comme si cela ne suffisait pas, des documents montrent également que le Canada aurait transféré des enfants soldats. Avons-nous transféré des adolescents à la prison de Sarpoza? Avons-nous envoyé des enfants soldats à l'ancien directeur pédophile Mohammad Nadir?
    Monsieur le Président, je suis quelque peu étonné d'entendre le député de Bourassa affirmer catégoriquement que nous étions au courant d'actes de torture. Des enquêtes sont en cours au sujet de ces allégations.
    En ce qui concerne son observation au sujet du transfert d'adolescents, nous avons une politique rigoureuse en place. Les Forces canadiennes en Afghanistan ont des directives claires sur la marche à suivre, et elles doivent traiter les jeunes détenus avec un soin particulier. Par exemple, tout adolescent détenu par les Forces canadiennes est séparé de tout détenu adulte qui peut se trouver dans le centre de détention en même temps.

[Français]

    Monsieur le Président, il s'agit de l'article 31. Non seulement quand on les arrête, on doit les transférer de façon expéditive aux autorités afghanes, mais on doit s'assurer que cela fonctionne bien.
    Il faut être sérieux. On parle du respect des conventions internationales, de la réputation du Canada dans le monde, de la sécurité même de nos troupes en Afghanistan et dans les autres missions. Les conservateurs ont tenté de cacher la vérité. Maintenant, on sait qu'il y a de la torture. Ce sont seulement eux qui pensent qu'il n'y a pas de torture; tout le monde sait qu'il y en a.
    Quand allons-nous arrêter le transfert des prisonniers et demander à l'OTAN de prendre le leadership et de s'occuper des prisonniers de guerre en Afghanistan? Quand?

[Traduction]

    Ce qui est pitoyable, monsieur le Président, c'est l'horrible fixation du député et son indignation morale feinte au sujet du transfert des prisonniers talibans.
    Bien que nous comprenions parfaitement la nécessité de respecter nos obligations internationales et d'aider à améliorer la capacité des Afghans de s'occuper des prisonniers transférés, ce qui est absolument odieux, c'est la fixation du député, car il sait que les mains des talibans sont souillées par le sang de soldats canadiens et d'Afghans innocents.
    Monsieur le Président, d'abord, nous n'avons aucune leçon à recevoir des députés d'en face lorsqu'il s'agit d'appuyer nos troupes.
    Le gouvernement...
    Des voix: Oh, oh!
    À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Richmond Hill a la parole.
    Le gouvernement a caché pendant près d'un an des rapports faisant état de mauvais traitements à l'endroit des détenus. Il a dit à la Chambre que nos questions n'étaient absolument pas fondées.
    Nous avons vu les rapports du ministère des Affaires étrangères. Nous avons vu les rapports d'Amnistie internationale. Ils confirment les allégations de mauvais traitements.
    Le ministre peut-il dire à la Chambre sur quelles preuves il se fonde, le cas échéant, pour justifier ses affirmations selon lesquelles il n'y aurait pas eu de victimes de mauvais traitements? Le fardeau de la preuve est...
    Monsieur le Président, les libéraux n'ont pas à se vanter de leur bilan. Quand nous sommes arrivés au pouvoir, les rangs des Forces canadiennes étaient clairsemés. Le moral n'y avait probablement jamais été aussi bas. Nos soldats avaient été envoyés en Afghanistan avec du matériel qui ne convenait pas. La procédure de transfert des détenus laissait à désirer et il a fallu l'améliorer.
    Ce sont autant de vérités que les députés de l'opposition refusent d'accepter. Ils prennent la parole pour dénigrer la mission et les procédures établies, alors que tout cela était boiteux d'avance.
(1445)
    À l'ordre, s'il vous plaît. Tâchons d'être un peu plus disciplinés. J'ai de la difficulté à entendre les questions et les réponses.

[Français]

    L'honorable député de Richmond Hill a maintenant la parole.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le chef d'état-major de la Défense contredit le ministre, ce qui n'a rien d'inhabituel. Il devrait peut-être lui parler.
    Nous parlons de vies humaines. Tout ce que fait le gouvernement, c'est répéter lamentablement les mêmes interventions préparées d'avance, alors que les faits montrent clairement que les droits de la personne ne sont pas respectés.
    Qu'est-ce qu'il faudrait pour que le gouvernement réagisse? Quand le gouvernement conservateur mettra-t-il un terme au transfert des détenus et trouvera-t-il une solution permanente qui puisse être appliquée à l'échelle de l'OTAN?
    Monsieur le Président, pour la gouverne du député d'en face, je tiens à préciser que j'ai parlé ce matin au chef d'état-major de la Défense. Nous communiquons assez régulièrement.
    Quant à ce que prétend le député, c'est justement pour défendre les droits de la personne que nous sommes en Afghanistan. Le fait est que les jeunes filles ne pouvaient pas aller à l'école et que les femmes ne pouvaient pas voter, et encore moins participer au processus démocratique. C'est justement pour ces raisons que nous sommes présents aujourd'hui en Afghanistan.
    Grâce à l'incroyable travail des militaires du Canada et de nos alliés de l'OTAN, la situation est dix fois meilleure qu'auparavant sur le plan des droits de la personne.

La frontière canado-américaine

    Monsieur le Président, pendant des décennies, les collectivités des deux côtés de la frontière canado-américaine ont dépendu l'une de l'autre dans les situations d'urgence. Les autorités frontalières canadiennes et américaines on toujours respecté cet arrangement.
    Récemment, cependant, des agents frontaliers américains ont retardé des intervenants en cas d'urgence. Dans ma région, ils ont retenu à la frontière l'ambulance qui amenait à l'urgence d'un hôpital de Detroit un militant communautaire respecté qui avait survécu à deux crises cardiaques. Les agents frontaliers américains sont allés trop loin, et cela doit cesser.
    Le ministre de la Sécurité publique va-t-il dire à la Chambre quelles sont les mesures que prend le gouvernement pour s'assurer que les intervenants en cas d'urgence n'auront plus à subir un tel délai inutile dans l'avenir?
    Monsieur le Président, mon collègue a raison d'évoquer les liens de longue date qui unissent les Canadiens et les Américains dans les situations de crise et de besoin. Ceux-ci ont pu traverser rapidement les frontières et s'aider mutuellement dans les situations d'urgence.
    Nous avons soulevé plusieurs questions relativement à l'Initiative relative aux voyages dans l'hémisphère occidental, une loi américaine qui a des conséquences inattendues à cause de la façon dont elle est interprétée à la frontière. J'ai communiqué avec la secrétaire d'État relativement à cette question précise ainsi qu'avec le département de la Sécurité intérieure.
    Nous avons fait part de nos préoccupations. La situation ne doit plus se répéter, elle doit cesser.

L'affaire Airbus

    Monsieur le Président, les modalités de règlement de la poursuite en diffamation de Brian Mulroney ont été violées par le leader du gouvernement à la Chambre et par le 18e premier ministre lui-même. Les Canadiens veulent ravoir leurs 2,1 millions de dollars, bien qu'ils soient peut-être disposés à accepter un peu moins si le remboursement est effectué en espèces. Nous ne voulons pas attendre la tenue d'une enquête publique qui pourrait bien ne jamais avoir lieu.
    Le gouvernement a-t-il entrepris des démarches pour récupérer notre argent ou, à tout le moins pour faire enquête sur la violation des modalités du règlement conclu avec Brian Mulroney?
    Monsieur le Président, la semaine dernière, les néo-démocrates demandaient une enquête publique. Ils disent maintenant qu'ils ne peuvent attendre la tenue d'une telle enquête. Le gouvernement a accepté sans tarder de tenir une enquête publique, dont le mandat sera défini par M. Johnston. Je pense que nous devrions attendre afin de voir ce qu'il va recommander.
    Monsieur le Président, l'enquête publique pourrait ne jamais se tenir. Par ailleurs, les modalités liées au versement fait à M. Mulroney en 1997 stipulaient clairement que celui-ci convenait qu'il n'y avait pas eu ingérence ou vendetta politique dans le cadre de l'affaire Schreiber.
    Or, l'intéressé dit maintenant que certaines personnes « poursuivent leur vendetta », tandis que le leader du gouvernement à la Chambre dit: « C'est le gouvernement libéral précédent qui a lancé une vendetta politique contre un de ses ennemis et il a dû payer pour cela. »
    Les modalités de règlement qui avaient été convenues ont été violées. Pourquoi attendre? Le gouvernement peut d'ores et déjà amorcer le processus de réclamation du montant de 2,1 millions de dollars. Nous voulons ravoir notre argent, et nous le voulons maintenant.
    Monsieur le Président, encore une fois, les députés se souviendront que, la semaine dernière, les néo-démocrates exigeaient une enquête publique. Je vois qu'ils ont été un peu déçus d'obtenir ce qu'ils demandaient. Nous avons nommé une tierce partie indépendante qui est en train d'étudier l'affaire et qui va fixer les paramètres de l'enquête publique. Je pense qu'il faut laisser les choses suivre leur cours.

La Gendarmerie royale du Canada

    Monsieur le Président, beaucoup de questions sont encore sans réponse en ce qui concerne la mort tragique de Robert Dziekanski. Ce dernier est arrivé à Vancouver vers 16 heures le 13 octobre, mais, pour une raison qu'on ignore, il n'a pas franchi les douanes avant minuit. Il a attendu des heures sans recevoir d'aide.
    Comment cela a-t-il pu se produire? Pourquoi l'Agence des services frontaliers du Canada n'a-t-elle rien dit à ce sujet?
(1450)
    Monsieur le Président, nous sommes nous aussi préoccupés par ce qui est arrivé à cette personne. Voilà pourquoi nous avons demandé des réponses et pourquoi au moins trois enquêtes indépendantes visent actuellement à établir ce qui s'est produit.
    Nous voulons que tout soit mis en oeuvre pour qu'une telle tragédie ne se reproduise plus jamais. Des efforts intensifs sont actuellement déployés pour trouver des réponses et j'invite le député d'en face à la patience pendant que se déroulent les enquêtes qui nous permettront de faire la lumière sur ce qui s'est produit.
    Monsieur le Président, au lieu d'expliquer le rôle de l'Agence des services frontaliers du Canada, le ministre de la Sécurité publique s'est plaint en fin de semaine que, comparativement à la tragédie Dziekanski, la population ne s'insurge pas suffisamment contre les dommages causés par les conducteurs ivres.
    L'alcool au volant est un grave problème, mais pourquoi le ministre détourne-t-il l'attention de ce qui est arrivé à M. Dziekanski? Pourquoi remet-il en question la légitimité des préoccupations des Canadiens et pourquoi n'a-t-il pas lancé un examen public national indépendant et exhaustif sur l'utilisation du pistolet à impulsion électrique au Canada?
    Monsieur le Président, je dirai, pour être gentil, qu'il s'agit là d'une des distorsions délibérées les plus regrettables que j'ai entendues depuis longtemps au sujet d'un grave accident.
    J'ajouterai en ce qui concerne les pistolets à impulsion électrique et ce qui s'est produit dans ce tragique accident que la Colombie-Britannique a été la première province à introduire ces pistolets et à encourager leur utilisation. Cela s'est produit pendant que le député en question était procureur général et que l'utilisation de ces pistolets suscitait beaucoup de préoccupations.
    Nous avons exprimé des inquiétudes concernant l'utilisation des pistolets à impulsion électrique. Le député a introduit ces pistolets dans sa province sans remettre ces derniers en question. Nous soulevons des questions à leur sujet.

[Français]

L'environnement

    Monsieur le Président, hier, le ministre de l'Environnement a prétendu appuyer le travail des scientifiques de l'ONU sur les changements climatiques. En réalité, le gouvernement tente de cacher le fait qu'il a déjà abandonné la lutte contre les changements climatiques.
    Pourquoi les Canadiens devraient-ils croire que l'actuel gouvernement appuie le travail des scientifiques de l'ONU alors que le ministre n'accorde aucun nouveau financement à la recherche scientifique, n'a pas été informé sur les données scientifiques et a présenté un plan qui ne repose pas sur les données scientifiques?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je rejette catégoriquement la prémisse de la question du député. Notre gouvernement pose des gestes concrets pour lutter contre les changements climatiques, contrairement à ce qui s'est fait au cours des dix dernières années.
    La signature de l'accord de Kyoto a marqué le coup d'envoi d'un marathon de dix ans pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais le député et le Parti libéral sont partis dans le sens inverse. Nous travaillons d'arrache-pied pour nettoyer le gâchis que nous a légué le gouvernement précédent.
    Nous accueillons avec plaisir le rapport du groupe d'experts des Nations Unies. Ce rapport devrait, selon nous, être au programme des importants travaux de la prochaine conférence de l'ONU qui aura lieu en Indonésie.
    Monsieur le Président, les députés viennent d'entendre le ministre prétendre à tort que le gouvernement a un plan dynamique de lutte contre les changements climatiques, mais personne ne croit sérieusement en l'existence d'un tel plan. Selon tous les organismes qui se sont penchés sur le plan du ministre, de l'Institut C.D. Howe à la Deutsche Bank, son plan est faible, il est voué à l'échec et il va faire augmenter les émissions de gaz à effet de serre.
    Le rapport de l'ONU brosse un tableau précis des mesures à prendre pour faire face à la crise des changements climatiques. Le gouvernement va-t-il enfin présenter, comme le recommandent les scientifiques, un plan se fondant sur leurs conclusions plutôt que sur les illusions que se font les conservateurs?
    Monsieur le Président, examinons les faits. Les émissions de gaz à effet de serre sont actuellement à un niveau de 32,9  p. 100 supérieur à ce qu'il devrait être, à ce que les libéraux avaient promis à la communauté internationale. Par leur inaction, les libéraux ont entaché la réputation du Canada sur la scène internationale.
    Tout ce que le Parti libéral veut faire, c'est examiner, faire enquête, sonder, commander des rapports, analyser, débattre et étudier. Notre gouvernement, lui, pose des gestes concrets.
(1455)

[Français]

    Monsieur le Président, à plusieurs reprises, le président français a évoqué l'imposition par l'Europe d'une taxe sur le carbone. Le ministre français des Affaires étrangères a rappelé que cette taxe a pour objectif de faire en sorte qu'aucune entreprise nulle part dans aucun pays qui ne respecte pas le protocole ne bénéficie d'avantages. Le Canada fait partie des délinquants du Protocole de Kyoto.
    Le ministre de l'Industrie est-il conscient qu'en renonçant au Protocole de Kyoto pour favoriser les pétrolières, il risque de pénaliser tous les exportateurs, principalement les manufacturiers?
    Monsieur le Président, ce n'est pas du tout le cas. Le premier ministre, le président et le ministre de l'Environnement de la République française ont été très clairs: ces mesures ne sont pas pour le Canada.
    Monsieur le Président, si le Canada continue de contrevenir au Protocole de Kyoto, il ne pourra pas échapper à la taxe sur le carbone qui pénalisera surtout les exportateurs et les manufacturiers québécois, qui comptent pour 40 p. 100 des exportations canadiennes vers la France.
    Le ministre de l'Industrie va-t-il faire pression sur son gouvernement pour qu'il respecte les engagements du Canada et éviter de faire peser une menace additionnelle sur l'industrie manufacturière québécoise déjà en crise?

[Traduction]

    Monsieur le Président, le gouvernement tiendra son engagement de réduire de 20 p. 100, en chiffres absolus, les émissions de gaz à effet de serre au Canada d'ici 2020.
    J'accepte les critiques de la part du Bloc québécois à ce sujet puisque lui, au moins, s'est opposé au discours du Trône.
    Quand nous avons présenté la nouvelle politique, le Parti libéral s'est par contre tu et a permis son entrée en vigueur.

La justice

    Monsieur le Président, un Canadien est sur le point de mourir par injection létale et, aussi incroyable que cela puisse paraître, le gouvernement s'obstine à affirmer que la politique canadienne sur la peine de mort n'a pas été modifiée.
    Pendant presque 30 ans, la politique du gouvernement du Canada a consisté à intervenir afin de protéger les Canadiens qui risquaient la peine de mort à l'étranger.
    Le gouvernement demandera-t-il immédiatement au gouverneur du Montana d'épargner la vie d'un citoyen canadien condamné à mort? Ou bien admettra-t-il, comme le soupçonnent déjà les Canadiens, que le nouveau gouvernement du Canada appuie ouvertement la peine de mort?
    Monsieur le Président, la réponse à ces deux questions est non.
    Monsieur le Président, selon des informations troublantes, en Arabie Saoudite, une femme victime d'un viol collectif a maintenant été reconnue coupable par un tribunal saoudien et condamnée à 200 coups de fouet.
    La ministre de la Condition féminine pourrait-elle indiquer à la Chambre la réaction du gouvernement à cette nouvelle?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de cette très importante question. Au nom du gouvernement et, j'en suis certaine, de tous les Canadiens, qu'on me permette d'exprimer notre profond désarroi face à la peine imposée à une victime de viol collectif, à savoir 200 coups de fouet et six mois d'emprisonnement.

[Traduction]

    Il est inconcevable qu'une femme qui a été violée soit en plus soumise à une peine aussi barbare. Notre gouvernement fera savoir aux autorités saoudiennes concernées que nous condamnons ce châtiment.

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, le NPD a obtenu des documents qui prouvent que nos soldats ont reçu l'ordre de transférer tous les Afghans qu'ils capturent, y compris les enfants, à des prisons locales.
    Il ressort de documents dont la divulgation a été exigée la semaine dernière que, dans le procès du directeur de la prison de Sarpoza qui avait été accusé du viol d'un enfant, le juge a conclu que le fonctionnaire était innocent du fait qu'il aurait été « impossible pour un homme en état d'ébriété dans la cinquantaine de commettre un viol ».
    Quand le ministre a-t-il ordonné au Canada de cesser de transférer...
    Le ministre de la Défense nationale a la parole.
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit en réponse à une question précédente à la Chambre, je crois comprendre que le régime actuel de détention de l'Afghanistan prévoit des dispositions selon lesquelles les jeunes détenus sont séparés des autres.
    Pour ce qui est des détenus ou des prisonniers capturés par les Forces canadiennes, nous adoptons une pratique similaire. Ces détenus ne sont pas gardés à proximité des autres détenus.
    Le nouvel arrangement nous permet de mieux suivre les détenus et de vérifier leurs conditions de détention. Également, nous avons pris des mesures pour améliorer le système carcéral grâce à des contributions à la...
(1500)
    La députée de New Westminster—Coquitlam a la parole.
    Monsieur le Président, certains disent que la vérité est la première victime de la guerre. La seconde doit bien être la responsabilité.
    Le gouvernement conservateur a des méthodes semblables à celles de la Maison-Blanche et de l'administration Bush. L'emprisonnement des enfants et la mauvaise gestion des fonds de reconstruction nous renvoient directement à la doctrine Bush.
    Dans son empressement à prouver aux Canadiens que nous sommes en train de gagner la guerre, le gouvernement accorde des fonds sans obligation de rendre des comptes, à tel point que les seigneurs de guerre afghans font la queue pour obtenir des subventions du Canada et les obtiennent effectivement. Le ministre confirmera-t-il aujourd'hui à la Chambre que notre gouvernement accorde des subventions aux seigneurs de guerre?
    Certainement pas, monsieur le Président. À mon avis, la première victime du NPD se voit dans l'acharnement avec lequel ce parti défigure la réalité et fait un salissage en règle de la mission canadienne.
    La députée parle d'argent bien dépensé. J'estime que les Canadiens sont très favorables au fait d'améliorer l'éducation et les soins de santé. À l'heure actuelle, 80 p. 100 des Afghans ont accès aux services de santé de base, contre 9 p. 100 seulement d'entre eux auparavant. Des millions d'enfants sont maintenant à l'école, alors qu'ils ne l'étaient pas auparavant. Des Afghans ont accès au microfinancement et la démocratie gagne du terrain...
    La députée de Brampton-Ouest a la parole.

La justice

    Monsieur le Président, alors que le gouvernement conservateur tente d'induire la Chambre en erreur au sujet de sa position sur la peine de mort, les faits sont éloquents. Le gouvernement a décidé que notre pays ne coparrainerait plus une motion des Nations Unies demandant un moratoire sur la peine de mort, motion que le Canada appuyait depuis des années.
    Pourquoi le gouvernement n'appuie-t-il plus cette motion visant un moratoire, qui est conforme aux valeurs des Canadiens? Le gouvernement va-t-il modifier sa position et coparrainer la motion de l'ONU?
    En fait, monsieur le Président, nous appuyons la motion de l'ONU. La députée peut en être assurée.

L'agriculture et l'agroalimentaire

    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur écoute les agriculteurs d'un bout à l'autre du pays. Plus important encore, nous agissons. Nous ouvrons les frontières, nous défendons les intérêts des agriculteurs devant l'OMC et nous collaborons avec les provinces pour procurer aux familles agricoles l'aide dont elles ont besoin.
    Pas plus tard que la semaine dernière, les ministres de l'Agriculture du Canada se sont réunis pour discuter des éléments de Cultivons l'avenir, le nouveau cadre stratégique pour les agriculteurs du Canada. Est-ce que le secrétaire d'État à l'Agriculture peut nous dire en quoi les mesures du gouvernement conservateur actuel seront profitables pour les agriculteurs?

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son excellente question. En effet, le mois de janvier sera un bon mois pour tous les Canadiens. On paiera moins de TPS, moins d'impôt, mais les producteurs ont besoin de plus.

[Traduction]

    Les agriculteurs tirent le diable par la queue en raison de la force du dollar et du prix élevé de la nourriture pour les animaux. Heureusement, la semaine dernière, après une réunion fédérale-provinciale-territoriale des plus fructueuses, le ministre de l’Agriculture a annoncé que, en janvier prochain, les producteurs de bétail et d'autres producteurs commenceront à recevoir de l'aide fédérale s'élevant à 600 millions de dollars. Les députés ont bien entendu: 600 millions.

[Français]

    Oui, 600 millions de dollars, c'est cela livrer la marchandise, contrairement au Bloc et aux libéraux qui ne le veulent pas.

[Traduction]

Décision de la présidence

Les propos non parlementaires

[Décision de la présidence]

    J’aimerais maintenant revenir aux propos qu’ont échangés le député de Scarborough-Centre et le ministre des Anciens Combattants au cours de la période des questions du 1er novembre dernier. J’ai eu l’occasion d’examiner les débats de cette date.
    Le député de Scarborough-Centre a utilisé l’expression « intellectuellement malhonnête » à propos du ministre, qui a ensuite utilisé dans sa réponse le terme « hypocrite » à propos du député de Scarborough-Centre.
    Il revient au Président d’assurer le maintien d’un certain degré de civilité et de respect mutuel pendant le déroulement des débats, comme le veut l’usage de cette Chambre.

[Français]

    Il est précisé, à l'article 18 du Règlement:
    Aucun député ne doit parler irrévérencieusement du Souverain ou d'un autre membre de la famille royale, ni du Gouverneur général ou de la personne qui administre le gouvernement du Canada. Nul député ne doit se servir d'expressions offensantes pour l'une ou l'autre des deux Chambres ni pour un de leurs membres.
(1505)

[Traduction]

    De plus, l’ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes précise, à la page 526, que:
    Lorsqu’il doit décider si des propos sont non parlementaires, le Président tient compte du ton, de la manière et de l’intention du député qui les a prononcés, de la personne à qui ils s’adressaient, du degré de provocation et, ce qui est plus important ...
    Je souligne le « plus important ».
... de la question de savoir si oui ou non les remarques faites ont semé le désordre à la Chambre.
    À mon avis, les propos tenus par les honorables députés ont manifestement semé le désordre à la Chambre.
    Par conséquent, je demande au député de Scarborough-Centre et au ministre des Anciens Combattants de retirer leurs propos.
    Monsieur le Président, je retire mes propos parce que nous faisons toujours de notre mieux pour nous comporter selon les usages parlementaires. Mes propos étaient non parlementaires. Je les retire donc.
    Monsieur le Président, je voudrais moi aussi retirer mes propos. Dans le feu de l'action, nous avons tendance à nous laisser emporter, alors je retire mes propos.

[Français]

    J'aimerais profiter de cette occasion pour rappeler à tous les honorables députés que le public canadien regarde nos travaux avec attention et que je reçois régulièrement, de la part de membres du public, des messages exprimant les inquiétudes que leur cause le décorum de la Chambre.

[Traduction]

    Par conséquent, j'invite les députés à ne pas tenir de propos de nature à offenser ou à manquer de respect à leurs collègues. Il peut arriver que les députés ne soient pas d'accord les uns avec les autres, mais ils n'ont pas besoin d'exprimer leur désaccord par des qualificatifs blessants ou par des insultes personnelles qui ont comme unique résultat de semer le désordre et de priver les députés du respect qui leur est dû.

[Français]

    Je remercie le ministre des Anciens Combattants et l'honorable député de Scarborough-Centre du retrait de leurs paroles aujourd'hui.

[Traduction]

Recours au Règlement

Questions orales

[Recours au Règlement]

    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Pendant la période des questions, la députée de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine a cité un document datant de la semaine dernière dans lequel le premier ministre a fait l'éloge de M. Mulroney. Je demanderais que ce document soit déposé à la Chambre.
    Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour déposer le document?
    Des voix: D'accord.
    Des voix: Non.
    Le Président: Il n'y a pas consentement.

[Français]

    L'honorable députée de Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques désire invoquer le Règlement.
    Monsieur le Président, ma question s'adresse à vous directement. J'aurais cru qu'à la suite de la perte de deux soldats, nous aurions pris au moins une minute pour nous lever en souvenir de leur mémoire. Je pensais que c'était une tradition.
    Normalement, de telles reconnaissances sont établies en vertu d'un accord entre les leaders des partis à la Chambre. Je n'ai pas eu connaissance d'une telle demande aujourd'hui. Le premier ministre a fait ses remarques à ce sujet, et je crois que tous les députés ont bien apprécié cela.

AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

[Traduction]

La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

[Français]

Les délégations interparlementaires

    Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer le rapport de la délégation Canada-Europe concernant sa réunion de la Commission des questions économiques et du développement avec des représentants de l'Organisation de coopération et de développement économique, l'OCDE, ainsi que la troisième partie de la session ordinaire de 2007 de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Paris-Strasbourg-France, du 22 au 29 juin 2007.
    Ce fut intéressant et nos participations ont été actives, comme d'habitude.
(1510)

La Loi sur l'assurance-emploi

    — Monsieur le Président, cela me fait plaisir de présenter ce projet de loi d'une très grande importance pour les travailleurs et travailleuses canadiens.
    Le projet de loi concerne l'admissibilité à la formation. Le texte modifie la Loi sur l'assurance-emploi afin de permettre aux employés de bénéficier, chaque année, d'un maximum de cinq semaines de formation en vue de perfectionnement professionnel.

     (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

La Loi sur l'assurance-emploi

    — Monsieur le Président, j'aimerais remercier la députée de New Westminster—Coquitlam.
    Ce projet de loi vise à modifier la Loi sur l'assurance-emploi en ce qui concerne la majoration de la période de prestations en fonction de la hausse du taux régional de chômage. Le texte augmente la durée des périodes de prestations, en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi, en fonction de la hausse du taux régional de chômage.

     (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

La Loi sur l'assurance-chômage

    — Monsieur le Président, encore une fois, j'aimerais remercier la députée de New Westminster—Coquitlam.
    Ce troisième projet de loi demande au gouvernement des changements à l'assurance-emploi. Comme on le sait, j'ai déposé plus de trois projets de loi. Je pense en être rendu à mon onzième. Ce projet de loi demande au gouvernement des changements à l'assurance-emploi en modifiant la loi pour créer le Fonds en fiducie de l'assurance-chômage. Le texte rétablit l'ancien titre de la Loi sur l'assurance-emploi — pour lui redonner son vrai titre —, soit la Loi sur l'assurance-chômage.
    Le texte crée également le Fonds en fiducie de l'assurance-chômage dont la responsabilité incombe à la commission en remplacement du compte d'assurance-emploi qui fait partie du Trésor.
    On comprendra que les travailleurs et les travailleuses sont écoeurés de se faire prendre de l'argent sans qu'on le leur demande. Cet argent leur appartient. Ce projet de loi pourrait améliorer le compte d'assurance-emploi.

     (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

Pétitions

Les anciens combattants

    Monsieur le Président, je désire déposer une pétition provenant d'anciens combattants qui dénoncent la très pauvre qualité des services offerts par le ministère des Anciens Combattants, tels les avantages médicaux. Ils dénoncent aussi le fait que les anciens combattants ont de la difficulté à utiliser le service téléphonique automatisé et qu'ils ne peuvent pas parler à une personne pour se faire servir.
    Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement que le programme fourni aux anciens combattants soit révisé en fonction des anciens combattants.
(1515)

[Traduction]

Service Canada

    Monsieur le Président, cette pétition concerne la période d'attente obligatoire. Les pétitionnaires demandent que les travailleurs puissent toucher des prestations à compter du jour même où ils soumettent leur demande. Ils demandent également que soit rétabli un nombre adéquat de fonctionnaires au bureau local de Service Canada, de façon à ce que les demandeurs puissent avoir le choix de présenter une demande papier ou électronique et obtenir l'aide appropriée de fonctionnaires compétents.
    Les anciens combattants et les travailleurs qui ont perdu leur emploi se plaignent qu'ils ne bénéficient pas des services auxquels ils seraient en droit de s'attendre de Service Canada.

Le Soudan

    Monsieur le Président, à mesure que l'intérêt du gouvernement envers l'Afrique s'effrite, l'aide qu'il lui apporte s'effrite également. J'ai une pétition signée par un grand nombre de mes électeurs. Entre autres, ils aimeraient que nous nommions un envoyé spécial au Darfour, que nous rassemblions les factions rebelles, que nous trouvions une solution diplomatique et durable à la guerre, que nous augmentions l'aide, que nous soutenions la mission de maintien de la paix des Nations Unies, que nous fournissions des fonds supplémentaires afin d'appuyer les 3 000 troupes des Nations Unies qui sont actuellement là-bas ou qui sont sur le point d'être déployées et les troupes actuelles de l'Union africaine.

La Société canadienne des postes

    Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de présenter une pétition de la partie sud de Calgary, d'Okotoks et de la région avoisinante. Je demande à tous les députés d'appuyer cette pétition en faveur du projet de loi C-458, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes (documents de bibliothèque), qui vise essentiellement à protéger et à appuyer le tarif des livres de bibliothèque et à faire en sorte que celui-ci s'applique à la documentation audiovisuelle.

Le salaire minimum fédéral

    Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de présenter deux pétitions à la Chambre.
    La première et signée par des gens qui font remarquer que le salaire minimum fédéral a été éliminé en 1996 par le gouvernement libéral et qu'un salaire minimum de 10 $ l'heure frise le seuil de la pauvreté pour un travailleur seul. La pétition demande instamment au Parlement du Canada de veiller à ce que les travailleurs relevant de la compétence fédérale touchent un salaire minimum juste en adoptant le projet de loi C-375, présenté par la députée de Parkdale—High Park.

La taxe d'entrée imposée aux Chinois

    Monsieur le Président, la deuxième pétition demande des mesures réparatoires équitables et honorables pour les Chinois auxquels la taxe d'entrée a été imposée. Elle souligne avec insistance le fait que toutes les familles chinoises qui ont été assujetties à cette taxe, mais qui n'ont aucun ancêtre survivant ayant payé la taxe, ancêtre qui n'a lui-même pas de conjointe survivante, méritent une réparation convenable offerte dans le respect et la dignité. La pétition appuie les demandes de réparation fondées sur un seul certificat et une seule réclamation et demande au premier ministre ainsi qu'au Parlement de négocier de bonne foi avec les ayants droit des successions des familles en vue d'arriver à un règlement juste et satisfaisant.

Les fiducies de revenu

    Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de présenter, au nom de M. Shaun Alspach, une pétition concernant la promesse non tenue relativement aux fiducies de revenu.
    Les pétitionnaires rappellent au premier ministre qu'il avait promis de ne jamais imposer les fiducies de revenu et qu'il a rompu cette promesse en imposant un impôt punitif de 31,5 p. 100, qui a fait disparaître à tout jamais plus de 25 milliards de dollars de l'épargne-retraite durement accumulée par plus de 2 millions de Canadiens, pour la plupart des personnes âgées.
    Par conséquent, les pétitionnaires demandent instamment au gouvernement conservateur minoritaire d'admettre que la décision d'imposer les fiducies de revenu était fondée sur une mauvaise méthodologie et des hypothèses erronées, de s'excuser auprès de ceux qui ont perdu leur argent et, enfin, de supprimer l'impôt punitif de 31,5 p. 100 sur les fiducies de revenu.

L'amiante

    Monsieur le Président, je présente une pétition au nom de milliers de Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Ils soulignent à la Chambre que l'amiante est le produit industriel le plus meurtrier au monde et que, pourtant, le Canada continue d'en être l'un des principaux producteurs à l'échelle mondiale. Le Canada permet encore que l'amiante entre dans la composition de matériaux de construction, de textiles et même de jouets pour enfants. Récemment, le Sénat américain a adopté un projet de loi interdisant l'utilisation de l'amiante.
    Les pétitionnaires demandent donc au gouvernement d'interdire l'amiante sous toutes ses formes, de mettre fin à toutes les subventions gouvernementales liées à l'industrie de l'amiante et de cesser de bloquer les conventions internationales sur la santé et la sécurité visant à protéger les travailleurs contre l'amiante, notamment la Convention de Rotterdam.

Les prêts étudiants

    Monsieur le Président, je présente deux pétitions, dont l'une a été signée par des étudiants et leur famille. Parce que le régime d'aide financière aux étudiants est désuet, archaïque et ne répond pas du tout aux besoins des étudiants, la dette moyenne d'un étudiant au Canada est de presque 25 000 $. Les pétitionnaires demandent au ministre de s'assurer que l'examen du système de prêts étudiants au Canada s'attaque aux lacunes du système et les règle.
    Les pétitionnaires lui demandent également de créer un système de bourses d'études fondées sur les besoins afin de réduire le taux d'intérêt des prêts fédéraux, de nommer un ombudsman des étudiants, d'améliorer l'allègement offert aux étudiants au cours de la période de remboursement en élargissant les critères d'admissibilité à la disposition applicable aux étudiants ayant une invalidité permanente et de créer des normes canadiennes coercitives pour les agences privées de recouvrement des prêts étudiants, dont les pratiques frôlent le harcèlement.
    Ils demandent également qu'on modifie la limite à vie des prêts étudiants et qu'on réduise la période discriminatoire de deux ans pendant laquelle les prêts étudiants sont soustraits à la protection de la loi sur les faillites.
(1520)

Le Partenariat pour la sécurité et la prospérité

    Monsieur le Président, cette pétition porte sur ce qu'on appelle le Partenariat pour la sécurité et la prospérité, qui comprend plus de 300 initiatives d'envergure. Ce partenariat semble avoir pour but de fusionner nos politiques et pratiques de sécurité avec celles des États-Unis, laissant le Canada avec des politiques économiques, sociales, culturelles et environnementales moins autonomes et durables.
    Les pétitionnaires prient le gouvernement d'interrompre la mise en oeuvre du partenariat jusqu'à ce qu'il ait reçu un mandat démocratique à cet effet de la population du Canada. Ils exhortent le gouvernement à organiser un débat public transparent et responsable sur le processus, incluant des consultations exhaustives avec la société civile et un examen législatif en profondeur, comme l'a demandé le NPD.

Les visas de visiteur

    Monsieur le Président, je présente une pétition au nom des électeurs et des citoyens d'Ottawa.
    Les pétitionnaires demandent au Parlement de surseoir aux exigences de visa de séjour dans le cas de la République de Pologne. Ce pays est en effet membre de l'Union européenne depuis le 1er mai 2004. De plus, comme les citoyens canadiens n'ont plus besoin d'un visa de visiteur pour se rendre en Pologne, les pétitionnaires demandent qu'un accord de réciprocité soit conclu par le gouvernement du Canada.

Un refuge pour bébés

    Monsieur le Président, aujourd'hui, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par près de 50 citoyens de ma circonscription habitant notamment à Calgary, Delia, Drumheller, Hanna, Morrin, Morley, Munson, Rosedale, Standard, Three Hills et Stettler. D'autres signataires de la pétition viennent de Terre-Neuve; évidemment, ils n'habitent pas dans la circonscription de Crowfoot, mais ils y étaient de passage.
    Les pétitionnaires pressent le Parlement d'adopter une motion pour permettre aux collectivités d'offrir aux mères un refuge où elles pourraient abandonner leur bébé de façon légale, sûre et humaine, sans crainte de représailles.
    Les refuges en question assureraient la protection des bébés qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent habiter avec leur mère. Certaines mères qui vivent souvent dans la peur font parfois des choix peu judicieux parce qu'elles se sentent coincées.
    Ces pétitionnaires compatissants, dont je suis très fier de défendre la cause, affirment que même si ces mesures ne permettaient de sauver que quelques enfants, elles vaudraient la peine d'être prises.

Questions au Feuilleton

[Texte]

Question no 13 --
M. Dennis Bevington:
     En ce qui concerne le processus du Deh Cho: a) quelles sont les obligations du gouvernement en vertu de l’Entente sur les mesures provisoires des Premières Nations du Deh Cho; b) quelles sont les obligations du gouvernement en vertu de l’Entente provisoire sur la mise en valeur des ressources du Deh Cho; c) quelles sont les obligations du gouvernement en vertu du Plan d’aménagement du territoire Deh Cho?
L'hon. Chuck Strahl (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, PCC):
    Monsieur le Président, les réponses sont les suivantes:
    a) et b) L’article 7 de l’Entente-cadre des Premières nations du Dehcho stipule que le processus du Dehcho doit être transparent et ouvert. On peut consulter l’Entente sur les mesures provisoires et l’Entente provisoire sur la mise en valeur des ressources en ligne à l’adresse suivante: http://nwt-tno.inac-ainc.gc.ca/dehcho
    c) On trouve toute l’information pertinente relativement au Plan d’aménagement du territoire Dehcho dans l’Entente sur les mesures provisoires qui est affichée à l’intention du public à l’adresse suivante: http://nwt-tno.inac-ainc.gc.ca/dehcho
Question no 49 --
Mme Jean Crowder:
     En ce qui concerne la pêche du krill dans le détroit de Georgia: a) quelles études scientifiques a-t-on faites pour déterminer l’effet de cette pêche sur la migration du saumon du Pacifique; b) les auteurs de ces études font-ils des recommandations pour protéger la pêche du saumon du Pacifique et, si c’est le cas, quelles sont-elles; c) a-t-il été donné suite à l’une ou l’autre de ces recommandations et, le cas échéant, qu’a-t-on fait?
L'hon. Loyola Hearn (ministre des Pêches et des Océans, PCC):
    Monsieur le Président, les réponses sont les suivantes:
    a) Le krill, constitué d’euphausiacés, a été l’objet d’études exhaustives par relevés acoustiques et au chalut, tant dans le détroit de Georgia que sur la côte ouest de l’île de Vancouver. Ces études ont permis de confirmer que la pêche dont il est actuellement l’objet ne récolte qu’un faible pourcentage de sa biomasse ce que nous croyons ne compromet pas sa disponibilité comme proie du saumon et d’autres espèces. Par contre la récolte ne devrait pas être augmentée.
    b) et c) Les prises accessoires d’autres espèces dans le cadre de cette pêche sont faibles. Cependant, afin de minimiser encore plus la possibilité d’interaction avec les jeunes salmonidés, la saison de pêche a été tronquée. Elle a maintenant lieu de janvier au 31 mars plutôt que mai. En accord avec les conclusions de recherche, le plafond des prises est fixé à 500 tonnes métriques afin d’assurer qu’une quantité suffisante de krill est disponible comme proie, conformément à la politique sur les espèces fourrage. Le plan de gestion de krill prévoit également qu’aucune augmentation du quota ne sera considérée en l’absence d’un fondement scientifique solide, tel que proposé dans l’avis scientifique.
Question no 59 --
M. Yvon Godin:
     En ce qui concerne le Bureau du juge-arbitre, agissant dans le cadre de la Loi sur l’assurance-emploi: a) combien y a-t-il de juges-arbitres au Canada; b) combien de ces juges-arbitres sont-ils bilingues; c) où sont situés ces juges-arbitres bilingues; d) une fois qu’il a été établi qu’une cause devait se rendre devant un juge-arbitre, combien de temps s’écoule-t-il entre la demande initiale pour être entendu devant un juge-arbitre et la comparution devant un juge-arbitre pour, respectivement, les causes francophones et les causes anglophones?
L'hon. Monte Solberg (ministre des Ressources humaines et du Développement social, PCC):
    Monsieur le Président, les réponses sont les suivantes:
    a) Le gouverneur en conseil peut nommer, parmi les juges de la Cour fédérale, autant de juges-arbitres qu’il estime nécessaire pour l’application de la Loi sur l’assurance-emploi. De plus, la Loi sur l’assurance-emploi stipule que tout juge ou ancien juge d’une cour supérieure, d’une cour de comté ou de district ou nommé au titre d’une loi du Parlement ou d’une loi provinciale peut exercer les fonctions de juge-arbitre. À ce jour, nous comptons 42 juges-arbitres.
    b) De ces 42 juges-arbitres, 18 sont bilingues.
    c) Les juges-arbitres sont situés dans différentes localités au Canada et ils se déplacent à travers le pays pour entendre les dossiers d’appel d’assurance-emploi.
    d) La langue n’a aucune incidence sur la durée du processus pour entendre ces appels puisqu’on dispose de suffisamment de juges-arbitres bilingues pour couvrir la demande. La majorité, environ 85 %, des appels sont entendus dans un délai de six mois entre la date de la demande initiale et la date de comparution devant un juge-arbitre. Les dossiers d’appel pour lesquels l’audience n’est pas fixée dans les six mois sont des dossiers dont les appelants résident dans une région éloignée dans laquelle on ne tient des audiences qu’une fois l’an selon le volume des appels. Ce sont, entre autres, les régions de Whitehorse, Yellowknife et Sept-Îles.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
    D'accord?
    Des voix: D'accord.

Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (certificat et défenseur) et une autre loi en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Lorsque nous avons interrompu le débat à 14 heures, le secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration répondait à des questions et à des observations à la suite de son discours. J'imagine qu'il se lève pour répondre à la question ou à l'observation précédente.
    Monsieur le Président, il s'agissait d'une question en deux parties. J'ai répondu à la première, mais pas à la seconde. J'aimerais répondre au deuxième volet de la question du député de Kitchener—Waterloo. Je crois que le député s'inquiète du fait qu'un ressortissant étranger puisse être détenu indéfiniment en application d'un certificat de sécurité alors qu'une personne accusée aux termes du Code criminel purgerait une peine définie.
    Voilà qui révèle l'essence même de la distinction entre les deux. Dans le cas du Code criminel, l'accusation porte sur un acte criminel qui a été commis et la peine est proportionnelle au type de crime et à la durée qu'il est approprié de purger pour celui-ci. Cela diffère de la question qui nous occupe, c'est-à-dire la sécurité nationale et l'admission d'une personne au Canada. Un ressortissant étranger n'est pas admis au Canada s'il représente un risque pour la sécurité, s'il fait partie d'une organisation criminelle ou est un terroriste, ou si des données nous amènent à croire cela.
    Bien qu'il ne soit pas admis au pays, ce ressortissant étranger peut s'en aller à tout moment. L'unique raison de la détention est la protection de la sécurité du grand public. Ce n'est pas une mesure punitive. Ce n'est pas quelque chose de défini dans le temps. Ceci dit, le projet de loi prévoit qu'on amène la personne devant un juge de la Cour fédérale dans les 48 heures. S'il y a une ordonnance de détention pour protéger la sécurité publique, on l'examine tous les six mois tant que la personne est détenue. Toutefois la personne est libre de quitter le pays n'importe quand.
    C'est une distinction très importante. S'il existe un autre moyen de protéger la sécurité du pays, le juge est habilité à libérer la personne à certaines conditions, comme c'est arrivé à de nombreuses reprises. Ces conditions sont restrictives. Elles doivent l'être, car l'intérêt primordial est la sécurité des Canadiens. Voilà la différence et voilà pourquoi le projet de loi doit être adopté.
(1525)
    Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les commentaires que le député a faits sur ce projet de loi que je considère très raisonnable. Le député a tout à fait raison de dire que la sécurité des Canadiens devrait être la principale préoccupation de tout gouvernement.
    Le député pourrait peut-être nous préciser ce que fait la présente mesure législative pour assurer la mise en oeuvre de la décision prise par la Cour suprême du Canada concernant l'examen des motifs justifiant la détention à long terme de ces personnes? Qu'avons-nous fait pour tenir compte des préoccupations de la Cour suprême?
    Tout d'abord, monsieur le Président, je tiens à préciser que tous les cas de détention font régulièrement l'objet d'une révision à tous les six mois.
    Plus important encore, on a proposé la participation d'un genre de défenseur. Le présent projet de loi prévoit la nomination d'un défenseur ayant fait l'objet d'une enquête de sécurité et possédant une certaine expérience dans des cas de ce genre qui sera en mesure d'examiner les éléments de preuve, de déterminer si les renseignements obtenus devraient être classifiés ou non et s'il pourrait être délicat de les porter à l'attention du public. Le défenseur aurait le droit de contre-interroger des témoins et d'examiner les éléments de preuve présentés par le ministre. Ce projet de loi insiste sur la nécessité de protéger les intérêts de la personne dans la mesure du possible tout en tenant compte de la prépondérance de la sécurité des Canadiens et du pays.
    Le projet de loi établit les grands paramètres et prévoit un article qui précise que le défenseur peut, avec l'autorisation d'un juge, exercer tout autre pouvoir nécessaire pour protéger les intérêts du résident permanent ou de l'étranger.
    On y précise très clairement ce que le défenseur peut faire, soulignant que, dans le cadre d'une contestation des affirmations du ministre voulant que la divulgation de renseignements ou autres éléments de preuve porterait atteinte à la sécurité nationale ou à la sécurité d’autrui, le défenseur peut contester la pertinence, la fiabilité et la suffisance des renseignements ou autres éléments de preuve et l’importance qui devrait leur être accordée. Le défenseur peut également présenter au juge ses observations, oralement ou par écrit, à l’égard des renseignements et autres éléments de preuve fournis et peut participer à toute audience et contre-interroger les témoins.
    Tout cela me semble correspondre à ce qui se produit dans un tribunal ordinaire, dans le cadre d'une procédure pénale. C'est le genre de mesures qui doivent permettre de protéger les intérêts d'une personne dans la mesure du possible compte tenu des circonstances.
    Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat.
    Tout d'abord, je dois souligner que nous célébrons cette année le 25e anniversaire de la Charte des droits et libertés. Malheureusement, le gouvernement n'en a pas fait grand cas. Il n'en a pas informé les Canadiens, car il n'appuie pas vraiment la Charte des droits et libertés, qui a été adoptée le 17 avril 1982.
    D'une certaine façon, il est approprié que le débat d'aujourd'hui porte sur un projet de loi qui vise à modifier la loi sur les certificats de sécurité. En effet, cette loi, qui permet de détenir des gens pendant une période indéterminée sans qu'ils sachent de quoi ils sont accusés, est illégale depuis 25 ans.
    Depuis 25 ans, tous les gouvernements ont soutenu que le processus d'émission de certificats de sécurité était constitutionnel. Ce n'est que lorsque la Cour suprême a invalidé ce processus, en disant qu'il n'était pas satisfaisant, que les gouvernements et les bureaucraties qui les appuient l'ont admis.
    On parle de l'importance de la Charte des droits et libertés et on devrait peut-être y réfléchir un instant. Je serai bref, mais je veux ajouter ce facteur à l'équation. Il faut tenir compte de l'histoire et de l'évolution de notre pays.
    En de nombreuses occasions, nous avons pris des mesures très draconiennes à l'endroit de différentes personnes qui sont venues au Canada, que ce soit des Canadiens d'origine chinoise ou des Canadiens d'origine asiatique. Nous avons eu la taxe d'entrée imposée aux Chinois et la loi visant à restreindre l'immigration asiatique. Des Canadiens venus d'Ukraine et de l'Empire Autriche-Hongrie ont été internés.
    Permettez-moi de vous signaler un fait: un oncle de l'un de mes collègues, avec qui j'ai déjà siégé à la Chambre, a servi dans les Forces armées canadiennes au cours de la Seconde Guerre mondiale pendant qu'un autre de ses oncles a été interné et gardé en détention durant cette guerre. Je peux affirmer aux députés que mon collègue en avait gros sur le coeur.
    Comme on le sait, nous avons interné des Canadiens d'origine japonaise. Nous avons appliqué la politique de tolérance zéro pour les Juifs. Nous avons refusé l'entrée au SS St. Louis. Nous avons observé une politique d'immigration raciste jusqu'en 1977.
    Donc, quand je parle de l'importance de ce débat et de ce que la Charte représente, il est important de tenir compte de l'histoire. Je crois que c'est en raison de toutes ces injustices que la Charte des droits et libertés a été adoptée par la Chambre et promulguée.
    Elle reconnaissait que le Canada n'était pas la nation d'une majorité, mais le regroupement d'un grand nombre de minorités, au point où nous pouvons être du côté de l'opinion de la majorité un jour et nous retrouver très facilement du côté d'une minorité le lendemain. Essentiellement, nous sommes tous des minorités.
    La Charte énonce les droits fondamentaux. Rien n'est plus important au chapitre des droits fondamentaux que l'article 7 de la Charte, qui dit essentiellement que « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale. » La Charte contient sept autres articles sur la teneur de ces droits devant la loi. C'est là un élément très important de la convention qui unit les Canadiens. Je tenais beaucoup à souligner ce point.
(1530)
    C'est réellement regrettable que nous ne puissions pas étudier en même temps le projet de loi portant sur les certificats de sécurité, qui a été présenté à la Chambre, et le projet de loi modifiant la Loi antiterroriste, qui porte sur la détention préventive et les audiences d'investigation, parce que ce dernier a d'abord été présenté au Sénat. Je pense que nous aurions avantage à étudier ces mesures législatives dans une perspective d'ensemble.
    Je pense que ce serait à notre avantage, surtout dans le contexte des événements du 11 septembre, car beaucoup de nos loi semblent maintenant découler des attaques perpétrées contre le World Trade Center. Nous devrions prendre du recul et essayer de déterminer si les mesures prises par les gouvernements démocratiques de l'Occident et, bien entendu, par le reste du monde, ont eu pour résultat d'accroître la sécurité des Canadiens et de l'Occident ou si, au contraire, elles ont fait empirer les choses. Je crois qu'une telle réflexion profiterait non seulement aux députés, mais également à l'ensemble du pays.
    C'est pourquoi je trouve regrettable que le gouvernement ait présenté le projet de loi modifiant la Loi antiterroriste au Sénat alors que nous sommes en train d'étudier les dispositions concernant les certificats de sécurité à la Chambre des communes. J'estime qu'une approche globale aurait été préférable.
    Beaucoup de choses ont été dites sur l'une des raisons qui justifient ce projet de loi, c'est-à-dire la volonté de protéger les Canadiens. Lorsqu'il est question de la détention pour une durée indéterminée, il est très important que les Canadiens comprennent une chose. Si les détenus sont aussi dangereux que le gouvernement, les forces chargées de la sécurité et la bureaucratie le disent, alors il est important de comprendre que les personnes visées par un certificat de sécurité sont libres de partir à tout moment.
    Les détenus se comparent à de dangereux criminels. Les laisserions-nous partir comme bon leur semble si nous les considérions comme vraiment dangereux? C'est pourtant ce qui se produit dans le cas d'un certificat de sécurité. C'est comme si la personne visée pouvait sortir de prison quand elle le souhaiterait. Évidemment, le gouvernement ne parle pas du cas de ceux qui ne veulent pas échapper aux conditions inhumaines qui leur sont faites. Nombre d'entre eux préfèrent demeurer incarcérés indéfiniment parce qu'ils ont peur d'être torturés ou assassinés là où ils risquent d'être envoyés. Ils n'ont pas vraiment le choix.
    Toutefois, si on considère la question sous l'angle du danger que peuvent constituer les gens qui sont vraiment coupables d'avoir commis des attentats terroristes ou d'avoir comploté en vue d'en commettre, il est bien certain que nous gagnerions tous à les détenir en lieu sûr de manière à ce qu'ils ne puissent pas sortir comme bon leur semble.
    Je pense que cet aspect de la question est très important. J'ai fait valoir cet argument au sein du Comité de la citoyenneté et de l'immigration lorsque nous avons parlé des certificats de sécurité. J'ai dit que si nous avions la chance de capturer Oussama ben Laden, il ne serait certainement pas avantageux, ni pour nous, ni pour les autres, de le renvoyer dans les grottes de l'Afghanistan. Ce n'est pas ainsi qu'on améliorerait la sécurité ni au Canada, ni en Occident, ni dans le monde.
    Envisageons la question dans une perspective à long terme. J'y ai beaucoup réfléchi parce que j'ai vécu dans un régime totalitaire. Comme de nombreux députés le savent, je suis né à Budapest, en Hongrie. Il y a un endroit en Hongrie qu'il faut visiter. C'est le musée de la terreur, qui se trouve sur Andrásy utca, sur la rue Andrásy et qui conserve le souvenir de la terreur des nazis et des communistes.
    À l'endroit le plus dramatique du musée se trouve un mannequin dont la moitié représente une personne portant l'uniforme nazi avec la croix gammée. Lorsque le mannequin pivote sur lui-même, on voit une personne portant un uniforme soviétique. Le musée fait voir aux gens que le terrorisme des communistes et celui des nazis étaient aussi horribles l'un que l'autre, et c'est ce qui rend le musée si intéressant. Il n'y avait pas vraiment de différence. Les deux régimes n'ont été que les deux faces d'une même médaille. Les objets exposés dans le musée nous permettent de nous rendre compte que le terrorisme d'État peut être très dangereux.
(1535)
    Cependant, nous expulsons des personnes dans des pays comme ceux-là où l'on bafoue les droits de la personne et où la peine de mort sévit chaque jour. Lorsqu'on y réfléchit, on voit les choses différemment.
    Au Canada, six personnes font actuellement l'objet de certificats de sécurité. Cinq d'entre elles ont été libérées sous caution. Une est détenue dans une cellule du Centre de surveillance de l'Immigration à Kingston. Il y a un détenu. Or, la construction de ce centre a coûté 3,2 millions de dollars et son exploitation coûte 2 millions de dollars. Il me semble qu'il serait bien plus prudent de libérer cette personne sous conditions. Si le gouvernement croit la personne coupable, on devrait la garder sous surveillance plutôt que de dépenser tout cet argent.
    Le secrétaire parlementaire voudrait nous faire croire que les certificats de sécurité sont assortis de nombreuses mesures de protection. Il a indiqué que le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration doivent signer les certificats de sécurité avant qu'un juge soit saisi des affaires.
    Or, le 19 novembre 2002, le ministre de la Sécurité publique actuel a calomnié M. Maher Arar en le taxant de terroriste. C'est ce ministre, qui ne connaissait pas les faits et qui était porte-parole de l'opposition officielle, qui s'est levé pour porter de telles accusations. Il est évident que cela ne rassure pas quant à l'objectivité dont il fera preuve dans l'exercice de ses fonctions.
    Puis il y a la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration qui, j'ai le regret de le dire, ne connaît pas bien son portefeuille. J'ose dire que je n'ai pas grand confiance en son jugement.
    Il est inacceptable que le processus judiciaire soit aussi sévère, qu'il ne permette pas d'interjeter appel et qu'il interdise à une personne inculpée en vertu d'un certificat de sécurité de prendre connaissance des preuves présentées contre elles.
    Il faut aussi examiner le rôle que les diverses agences de sécurité ont joué. Je vais citer deux cas, car ils montrent comment les services de sécurité américains et le FBI ne sont pas au diapason de nos agences de sécurité.
    Prenons le cas de Maher Arar, que tous les Canadiens connaissent. Cet homme a subi l'enquête la plus complète qu'une personne ait eu à subir dans l'histoire du Canada. Il a été blanchi de toutes les accusations portées contre lui et lavé de tout soupçon , mais il est sur la liste d'interdiction de vol des États-Unis d'Amérique. C'est un cas.
    L'autre cas dont je vais parler, j'en ai pris connaissance en parcourant le rapport de l'Association des droits civils de la Colombie-Britannique, qui a fait un exposé devant les députés de la Chambre au sujet des certificats de sécurité et de la Loi antiterroriste. Il s'agit du cas d'Ernst Zundel, un individu nuisible et indésirable qui a fait l'objet d'un certificat de sécurité par souci de commodité. C'était commode. Pourtant, le gouvernement a plaidé, et le juge Blais l'a confirmé, que cet individu posait un risque pour la sécurité même si, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, on a découvert que le FBI avait conclu qu'il ne posait pas de risque pour la sécurité.
(1540)
    Nous avons ici les services de sécurité de deux démocraties, le Canada et les États-Unis, qui en viennent à des conclusions totalement différentes.
    On a beaucoup parlé du fait que cela ne s'appliquait qu'à des personnes n'ayant aucun statut au Canada ou qui résident au Canada, mais qui ne sont pas citoyens canadiens. Je rappelle à la Chambre qu'en 2002, un projet de loi sur la citoyenneté déposé ici prévoyait que les certificats de sécurité s'appliqueraient aux citoyens canadiens. Ces certificats devaient aussi être utilisés contre des citoyens canadiens. Je le dis pour montrer que nous pourrions, en fin de compte, être traités de la même façon que nous traitons ceux qui sont différents de nous, qu'ils soient résidents, immigrants ou visiteurs. J'invite tous les députés à réexaminer ce projet de loi sur la citoyenneté qui aurait soumis les citoyens canadiens au régime des certificats de sécurité.
    J'ai dit que c'est dans des moments de tension et de peur, comme à la suite des événements du 11 septembre ou en temps de guerre qu'il faut, plus que jamais, garantir les droits fondamentaux de la personne en vertu de la Charte.
    Il n'y a pas de problème lorsque tout va bien, mais dès que les choses se gâtent, il nous faut des garanties. C'est dans un contexte semblable que la décision avait été prise de se débarrasser des Canadiens d'origine ukrainienne. C'est aussi dans un tel contexte que des décisions racistes furent prises afin de se débarrasser des Canadiens d'origine japonaise, de leur imposer un processus inhumain, concernant lequel nous avons fini par leurs présenter des excuses.
    On fait beaucoup peur aux gens au nom de la sécurité. Il faut bien comprendre qu'en agissant de la sorte, nous minons notre propre sécurité. La meilleure façon de combattre la terreur consiste à bâtir un pays inclusif, auquel tous ont le sentiment d'appartenir. Il faut comprendre que les Canadiens viennent de toutes sortes de milieu et de toutes les régions du monde. Nous pouvons toujours trouver des exemples de personnes qui violent la loi. Il n'y a pas que les musulmans. Je rappelle aux députés que Timothy McVeigh était un chrétien. Il était caucasien. Après qu'il eut fait sauter l'édifice fédéral aux États-Unis, il n'y a pas eu d'enquête sur le christianisme.
    Chaque Canadien a intérêt à faire en sorte que le Canada ne devienne pas une société dans laquelle les gens sont ligués les uns contre les autres. Si ce devait être le cas, nous nous retrouverions dans une société comme celle des États-Unis, où O. J. Simpson ne pouvait tout simplement pas être déclaré coupable par un jury noir. Il y a des siècles de discrimination raciale derrière cet état de faits.
    Certains incidents troublants se sont produits dans notre pays. On peut songer aux débats sur les accommodements raisonnables au Québec. Prôner l'intolérance n'aide pas les choses et ne favorise pas la sécurité. Le premier ministre du Canada n'a pas favorisé la sécurité lorsqu'il était en Australie et qu'il a joué la carte de la scission et de la suspicion, lorsqu'il est intervenu dans le débat sur le port du voile au moment de voter, afin de détourner l'attention, qui était alors centrée sur le mode de financement des élections utilisé par le Parti conservateur.
    Si nous voulons que les gens vivent en sécurité au Canada, nous devons nous assurer que tous soient traités de façon égale et que l'on ne fasse pas de distinction entre la façon de traiter les immigrants et les citoyens, parce qu'agir ainsi serait inapproprié et improductif.
(1545)
    Monsieur le Président, avant de passer aux observations que je prévoyais faire, il faut que je dise qu'un grand nombre d'Afro-Américains et d'Afro-Canadiens aussi seraient certainement vexés s'ils savaient que, aux yeux du député, la justice compte peu pour eux et ils ne condamneraient pas l'un des leurs en se fondant sur les faits qui leurs sont présentés. C'est un triste constat. Je ne crois pas que cela ait été le cas et je trouve pareils propos insultants.
    Le député nous reproche souvent de ne pas célébrer l'anniversaire de la Charte. J'aimerais savoir s'il va fêter, en 2010, lorsque la Déclaration des droits aura 50 ans. Il s'agit, bien sûr, d'un document conservateur consacrant des droits que le député prétend défendre, des droits comme la liberté de parole, la liberté de religion, l'égalité des droits, le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne. Ce document consacre en outre le droit à la propriété, notamment le droit de jouir de ses biens, ce que ne fait pas la Charte des droits et libertés.
    J'aimerais que le député me dise plus précisément s'il croit que les droits des particuliers doivent dans tous les cas avoir préséance sur le droit à la sécurité de l'ensemble de la société canadienne. Là est vraiment la question.
    Le député est d'avis que la Charte des droits devrait s'appliquer à tous en tout temps, mais si c'est le cas, on n'arrivera jamais à assurer comme il faut la sécurité du public au Canada au moyen des certificats de sécurité, même si la Cour suprême du Canada n'a pas déclaré ces derniers contraires à la Charte. La Cour suprême a recommandé quelques modifications que le projet de loi vise justement à apporter pour que nous puissions assurer convenablement la sécurité des Canadiens.
    Le député veut faire de la Charte l'enjeu du débat. L'enjeu, ce n'est pas la Charte, mais la protection des Canadiens. J'aimerais beaucoup qu'il le comprenne.
(1550)
    Monsieur le Président, le député a soulevé plusieurs sujets.
    Permettez-moi de commencer par l'affaire O. J. Simpson. Tous les sondages menés à la suite de cette affaire ont révélé que, aux États-Unis, les Noirs estimaient qu'il était innocent et les autres pensaient qu'il était coupable. L'affaire a été sérieusement minée par le détective Fuhrman lorsqu'il s'est présenté au tribunal et a dit qu'il n'était pas question de racisme dans cette affaire et qu'il n'avait jamais été témoin lui-même d'activité raciste.
    C'est ce que je veux dire. C'est pourquoi nous devons avoir une société inclusive où il n'y ait pas eux et nous, mais nous, tous ensemble, logés à la même enseigne.
    Le député a dit que les certificats de sécurité n'étaient pas inconstitutionnels. La Cour suprême a statué que le certificat de sécurité était inconstitutionnel et elle a donné au gouvernement un an pour remédier à la situation. Je suis stupéfait que le député ne connaisse pas ce fait essentiel. Je lui demande de lire la décision. C'est incroyable. C'est bien là la mentalité des conservateurs.
    Il a évoqué la Déclaration des droits. Je vais célébrer la Déclaration des droits, tout comme j'ai célébré la Charte des droits. Je peux dire au député que, le 13 novembre, lorsque j'ai constaté que le gouvernement n'allait pas la célébrer, j'ai organisé une célébration dans la circonscription de Kitchener—Waterloo. Nous avons invité Justin Trudeau et nous avons célébré la Charte des droits et libertés. Le député voudrait peut-être en faire autant.
    Pour ce qui est de la sécurité, Benjamin Franklin, un des signataires de la Déclaration d'indépendance des États-Unis, a déclaré avec beaucoup d'à-propos que ceux qui renoncent aux libertés dans l'intérêt de la sécurité ne méritent ni la sécurité ni la liberté.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Kitchener—Waterloo pour son intervention dans le débat. Je tiens à exprimer le respect que je lui porte parce qu'il défend les libertés garanties dans la Charte. Je sais que c'est son cheval de bataille depuis qu'il est député. Je le félicite pour son travail à cet égard.
    Je tiens également à lui rendre hommage pour quelque chose qu'il m'a enseigné lorsque nous étions membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration et que nous avons étudié les propositions liées à la révocation de la citoyenneté. Il m'a appris que c'était là une tentative d'utiliser un processus inférieur, soit celui de la Loi sur la citoyenneté, pour lutter contre des activités criminelles majeures. L'exemple qui est revenu constamment, c'est que, pour pouvoir expulser des individus qui avaient commis des crimes de guerre épouvantables et avaient produit de faux renseignements en arrivant au Canada, nous devions pouvoir révoquer leur citoyenneté.
    Le député m'a montré que le recours à un tel processus inférieur pour traiter des activités criminelles aussi incroyablement graves que des crimes de guerre était inacceptable. Si nous voulions sérieusement nous attaquer aux problèmes créés par la présence de criminels de guerre au Canada, nous devions avoir une loi efficace sur le sujet pour pouvoir poursuivre ces criminels ici, au Canada, et non pas recourir à un processus inférieur prévu dans la Loi sur la citoyenneté. C'est exactement ce que vise le projet de loi à l'étude. Il recourt à un processus d'expulsion prévu dans la législation sur l'immigration pour punir des auteurs d'actes criminels graves comme des actes terroristes, des menaces à la sécurité nationale et de l'espionnage.
    Je me demande si le député peut se prononcer là-dessus. Reconnaît-il que, dans le projet de loi C-3, nous utilisons un processus inférieur pour nous occuper d'actes criminels très graves?
(1555)
    Monsieur le Président, j'apprécie certainement les observations du député. Nous semblons avoir les mêmes idées sur la Charte, les libertés civiles et les droits de la personne.
    J'aimerais dire au député qu'il est vrai que nous utilisons des exagérations afin de justifier des actions qui ne permettent pas vraiment de corriger le problème que le gouvernement tente de résoudre. Cette mesure législative n'a vraiment pas sa raison d'être.
    Je répète que si une personne représente une menace grave à la société dans ce pays, elle devrait être incarcérée. Nous avons d'autres façons de nous débarrasser de la personne, au lieu d'avoir recours à quelque chose d'aussi draconien que le certificat de sécurité, qui fait fi de la Charte des droits et libertés.
    Je dirai aux députés ici que je suis venu dans ce pays il y a 50 ans. Ma famille et moi avons traversé des champs de mines pour parvenir à la liberté. Nous savons ce que c'est que de vivre sous une dictature totalitaire. Nous savons que nous ne devons jamais prendre à la légère les menaces aux libertés civiles.
    Je veux revenir à mon point central en citant un autre Américain, George Washington, qui a affirmé que le prix de la sécurité était une vigilance éternelle. Nous devons également reconnaître que la vigilance éternelle signifie que nous devons défendre nos droits fondamentaux. Si nous ne le faisons pas, les gens peuvent faire valoir avec justesse qu'Oussama ben Laden et ses semblables nous ont fait tellement plus de tort parce que nous nous en étions fait à nous-mêmes.
    Si nous voulons lutter contre le terrorisme, nous devons avoir un plan cohérent. Nous n'allons certainement pas le combattre en libérant des personnes dangereuses et en les laissant retourner dans les cavernes de l'Afghanistan, du Pakistan ou d'ailleurs. Nous le ferons en les gardant derrière les barreaux pour les raisons qui nous ont amenés à les condamner.
    Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir de siéger au Comité de la citoyenneté et de l'immigration avec le député de Kitchener—Waterloo et d'autres députés. Je sais qu'il s'intéresse très sérieusement à ce dossier.
    Il a mentionné qu'il y a actuellement six personnes faisant l'objet de certificats de sécurité au Canada, dont cinq sont en liberté sous caution et une est incarcérée. Pourrait-il nous donner plus de détails sur la durée de séjour des personnes faisant l'objet de certificats de sécurité? Il a été démontré que cela a posé un problème par le passé.
    Monsieur le Président, la durée de séjour varie entre trois et sept ans, selon le moment où la personne est libérée. Cinq personnes ont été libérées et une seule est incarcérée. La seule raison pour laquelle l'homme est incarcéré est qu'il n'a pas de famille au Canada. Toutes sortes d'autres gens ont offert de se porter garants et il aurait pu être libéré sous caution lui aussi.
    Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion cet après-midi de débattre le projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (certificat et défenseur) et une autre loi en conséquence.
    D'entrée de jeu, je tiens à dire très clairement que je m'oppose catégoriquement à cette mesure législative et au processus des certificats de sécurité lui-même, qui, selon moi, devrait être aboli. C'est la position que je défends depuis mon arrivée ici. Il y a même au Feuilleton une motion inscrite à mon nom qui réclame l'abrogation des dispositions de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés portant sur les certificats de sécurité.
    Le projet de loi n'est rien d'autre qu'une tentative pour rafistoler un processus qui est fondamentalement boiteux et qui a été jugé inconstitutionnel par la Cour suprême du Canada.
    Le processus des certificats de sécurité fait partie de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Il se veut un processus d'expulsion accéléré permettant de renvoyer du Canada des non-citoyens, des résidents permanents et des visiteurs accusés d'activités criminelles graves liées à l'espionnage, à la sécurité nationale, aux terrorisme et au crime organisé.
    Cependant, ce n'est pas de cette façon que la disposition est utilisée. On l'utilise à des fins qui portent à conséquence et qui n'étaient pas envisagées lorsqu'on l'a intégrée à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. On fait appel à cette disposition pour contourner notre système de justice pénale. Elle sert à détenir des personnes sans procès et sans condamnation pour des périodes indéterminées. Elle sert à expulser des personnes qui risquent la torture ou la peine de mort dans d'autres pays. Elle sert à contourner les règles de la preuve et à autoriser le recours à des éléments de preuve secrets, ce qui prive l'intéressé d'un procès équitable. Elle sert également à priver les accusés du droit de connaître les éléments de preuve qui pèsent contre eux et à se défendre en conséquence devant un tribunal.
    Tous ces aspects sont graves et ils nous incitent à nous interroger sur le fonctionnement de notre système de justice, ici au Canada. Ils ont tous rapport aux combats difficiles que nous avons menés pour établir un système juste et équitable. Ce qui est proposé nous éloignerait d'un tel système.
    Au cours de la première session de la présente législature, le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a étudié le processus des certificats de sécurité dans le cadre d'un engagement que nous avions pris de nous pencher aussi bien sur les modalités de détention visant les immigrants en général que sur le processus des certificats de sécurité en particulier.
    Dans le cadre du 12e rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration intitulé « Les centres de détention et les certificats de sécurité », j'ai rédigé un rapport minoritaire au nom du Nouveau Parti démocratique. J'aimerais aborder divers points que j'y ai soulevés.
    J'y ai parlé de graves entorses à l'application régulière de la loi, qui ne doivent pas être tolérées dans une société libre et démocratique. J'ai déclaré que le processus des certificats de sécurité privait les résidents permanents et les ressortissants étrangers de la protection de l'article 9 de la Charte des droits et libertés, selon lequel « chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires ».
    C'était là le point de départ essentiel de mon opinion dissidente. J'estime que le processus des certificats de sécurité constitue une violation fondamentale de la Charte des droits et libertés. J'estime que c'est la raison essentielle pour laquelle la Cour suprême a jugé ce processus inconstitutionnel.
    Dans mon rapport minoritaire, j'ai fait valoir également que les questions touchant le terrorisme, la sécurité nationale, l'espionnage et le crime organisé devraient être traitées au moyen du Code criminel et non pas par une procédure d'immigration moins importante. J'ai fait valoir que, si le Code criminel ne peut lutter contre ce genre de crime, alors il faudrait le modifier en conséquence. À mon avis, cet aspect est central.
    Ce sont des crimes graves. Le terrorisme, les crimes qui portent atteinte à la sécurité nationale du Canada, les activités criminelles organisées et l'espionnage sont tous des affaires criminelles graves. D'ailleurs, il n'est pas évident de penser à d'autres crimes qui le sont davantage.
(1600)
    Ces crimes devraient être punis aux termes du Code criminel, et non à l'aide d'un processus d'expulsion. Ils méritent toute l'attention que notre système de justice peut leur accorder. J'estime que c'est en déposant des accusations en vertu du Code criminel du Canada que nous leur accorderons ce niveau d'attention.
    Dans mon rapport minoritaire, j'ai aussi parlé du fait qu'on devrait seulement faire appel à la détention prévue aux termes de la Loi sur l'immigration dans des affaires d'immigration, et ce, pour de très courtes périodes précédant l'expulsion légale des contrevenants au droit de l'immigration. Si l'expulsion n'est pas une option, il faut immédiatement envisager des solutions autres que la détention.
    On ne devrait pas faire appel à la détention prévue aux termes de la Loi sur l'immigration au lieu de porter des accusations en bonne et due forme et de tenir un procès pour des crimes graves liés au terrorisme, aux violations de la sécurité nationale, à l'espionnage et au crime organisé.
    Selon moi, la LIPR porte sur des questions d'immigration et les processus qu'elle prévoit devraient s'appliquer exclusivement au droit de l'immigration. Je crois fermement que quand nous invoquons la LIPR et ses dispositions pour détenir des gens qui ont été accusés de crimes graves liés au terrorisme, à la sécurité nationale, à l'espionnage et au crime organisé, nous circonvenons le Code criminel et nous nous prévalons d'un processus de moindre importance qui n'a jamais été conçu pour traiter les accusations et les allégations de ce genre.
    On ne devrait pas se servir d'un processus d'immigration pour s'attaquer à des crimes graves. J'estime que c'est la mauvaise chose à faire. On devrait seulement expulser ceux qui contreviennent au droit de l'immigration, et non ceux qui sont accusés de crimes graves.
    Je ne veux pas dire qu'une affaire criminelle grave n'influe pas sur les expulsions, mais nous ne devrions jamais utiliser les dispositions sur l'expulsion contenues dans la Loi sur l'immigration pour traiter une affaire criminelle. C'est pourtant ce que nous avons fait avec la question des certificats de sécurité.
    Dans le rapport minoritaire, il était également dit que, compte tenu de la gravité des crimes liés au terrorisme, il est impérieux que les accusés soient capables de préparer une défense complète et efficace. Cela n'est pas possible dans le contexte des certificats de sécurité parce que l'accusé et ses avocats ne connaissent pas les éléments de preuve qui pèse contre lui et ne peuvent pas les contester devant un tribunal.
    Je crois que c'est un critère absolument fondamental dans un système de justice criminelle juste et équitable. Contourner cette nécessité et pervertir le processus nie un élément fondamental de notre société que nous avons travaillé d'arrache-pied à élaborer et à perfectionner au cours des siècles. Il n'y a aucune excuse pour passer outre aux composantes fondamentales de notre système de justice pénale.
    Je disais également dans mon rapport minoritaire que le Canada ne devrait jamais expulser quelqu'un là où il risque la torture et qu'il doit respecter scrupuleusement la convention des Nations Unies contre la torture et les autres traitements ou châtiments cruels, inhumains ou dégradant. Les éléments de preuve obtenus par la torture ne doivent jamais devenir admissibles devant un tribunal canadien ni dans un autre processus juridique ou lié à l'immigration.
    Malheureusement, le système actuel des certificats de sécurité et, je crois, les dispositions du projet de loi à l'étude ne nous donnent pas les assurances voulues. Nous ne pouvons pas contre-vérifier les éléments de preuve et les allégations afin de déterminer d'où ils proviennent et comment ils ont été obtenus. Nous savons que toute information obtenue sous la torture n'a aucune crédibilité, que les gens qui sont torturés diront n'importe quoi pour se sauver et que les renseignements ainsi obtenus ne devraient jamais être admissibles dans quelque processus juridique que ce soit au Canada.
    Nous devons nous assurer que les garanties voulues font partie de tout processus juridique que nous envisageons. Je ne crois pas que la loi actuelle ou les propositions à l'étude nous offrent les assurances voulues.
    Le Canada doit également s'assurer, comme je le dis dans mon rapport minoritaire, que ceux qui planifient des actes terroristes sont jugés, condamnés et incarcérés et pas refilés à d'autres gouvernements par le processus d'expulsion. Je crois que le processus des certificats de sécurité crée un très grave problème.
    Ce processus permettra de condamner des gens ayant commis des crimes très graves ici, au Canada, et de les sortir du pays pour nous protéger contre eux, de les refiler à un autre pays. Ainsi, on leur permet de ne pas être punis pour ce qu'ils ont comploté au Canada. Je pense que nous nous dérobons complètement à nos responsabilités en tant que citoyens du monde. Nous manquons à nos responsabilités envers les Canadiens en permettant que les terroristes qui participent à des activités criminelles aussi graves et qui représentent une menace à notre sécurité nationale s'en tirent, d'une certaine façon, sans être punis.
(1605)
    Je pense que les renvoyer sans les avoir accusés et reconnus coupables de ces crimes graves va à l'encontre du bon sens. Pourquoi leur permettre de s'en tirer ainsi et de partir dans un pays où ils ne subiront peut-être jamais de procès pour ce qu'ils ont fait, et ne seront donc jamais punis? En tant que pays riche, si nous n'avons pas les ressources pour prouver ces graves allégations, pourquoi rejeter cette responsabilité sur un autre pays qui risque d'avoir encore moins de ressources et de capacités que nous? Cela n'a tout simplement aucun bon sens. C'est une autre raison qui m'amène à croire que ce processus est terriblement boiteux.
    J'ai formulé, dans le rapport minoritaire que j'ai ajouté au rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration sur les certificats de sécurité, des recommandations très précises, et je veux en parler dans le cadre de ce débat.
    Je recommande notamment que le recours aux certificats de sécurité soit aboli et que les articles 9 et 76 à 87 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés soient abrogés immédiatement.
    Je maintiens toujours que c'est ce que nous devrions faire au Canada. Nous ne devrions pas avoir recours à ce processus secondaire et inférieur pour traiter des affaires criminelles très graves. Si notre Code criminel pose des problèmes, nous devons régler ces problèmes et améliorer cette loi particulière.
    Ce que j'ai recommandé en second lieu, c'est que les éléments de preuve obtenus par la torture et présentés par des gouvernements, services de police et organismes de renseignement qui pratiquent la torture soient irrecevables dans tout tribunal de droit canadien ou dans le cadre de toute procédure ou enquête judiciaire ou pénale ou de toute procédure ou enquête en matière d’immigration ou de détermination du statut de réfugié. C'est une exigence absolument fondamentale.
    J'ai déjà expliqué à quel point les éléments de preuve obtenus par la torture ne sont pas dignes de confiance et combien il est immoral d'envisager d'admettre de l'information obtenue dans ces circonstances. Le Canada devrait éviter de faire quoi que ce soit qui autoriserait n'importe quel autre pays ou autre organisation de recherche de renseignements à utiliser de telles tactiques. Tout projet de loi que nous débattons ici devrait être clair à cet égard.
    La troisième recommandation que j'ai formulée dans le rapport minoritaire stipulait que la détention aux fins de l’immigration ne soit qu’une mesure à court terme utilisée immédiatement avant l’expulsion découlant d’infractions à la législation sur l’immigration. Je le répète, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés devrait relever du droit de l'immigration. Il ne doit pas s'agir d'un moyen détourné pour gérer de manière très inappropriée des questions pénales graves, comme le terrorisme ou les menaces à la sécurité nationale.
    Dans mon rapport minoritaire, j'appuyais plusieurs des recommandations formulées par la majorité dans le rapport du comité.
    La majorité a notamment recommandé que des accusations soient portées en vertu du Code criminel contre les résidents permanents ou les ressortissants étrangers soupçonnés de participer ou de contribuer à des activités terroristes. Le comité, je crois, a indiqué qu'il faudrait toujours privilégier l'utilisation du Code criminel. J'irais plus loin, mais j'ai appuyé cette recommandation.
    Le rapport majoritaire recommandait aussi de ne pas renvoyer de résidents permanents ni de ressortissants étrangers vers leur pays d'origine ou leur résidence habituelle si on a des raisons raisonnables de croire qu'ils risquent la torture ou la mort, ou encore une punition ou un traitement déraisonnable et cruel. Je crois que c'est une recommandation importante.
    Ces dernières semaines, nous avons vu que le gouvernement actuel était peut-être prêt à s'éloigner de l'engagement de longue date du Canada à ne pas déporter quelqu'un qui est passible de la peine de mort. Il pourrait bien être en train d'atténuer peu à peu l'opposition de longue date du Canada à la peine de mort. En effet, il y a un Canadien qui est condamné à mort aux États-Unis et nous n'essayons pas de faire commuer sa peine. Cette attitude va de pair avec le genre de projet de loi dont nous sommes saisis.
    Par surcroît, une autre recommandation majoritaire suggère que les services policiers et de renseignement aient les ressources appropriées pour faire enquête sur les allégations d'activités criminelles liées à la sécurité, au terrorisme, à l'espionnage et au crime organisé, et pour porter les accusations correspondantes en vertu du Code criminel.
(1610)
    J'estime que ces crimes sont tellement graves que les services de renseignement et les corps policiers canadiens doivent disposer de toutes les ressources nécessaires pour poursuivre efficacement les individus qui se livrent à ce genre d'activité.
    J'ai vivement appuyé cette recommandation et j'ai proposé lors de l'étude en comité qu'elle constitue un des principaux points du rapport. Il est inadmissible de faire preuve de laxisme à l'égard de crimes d'une telle gravité. Il faut réagir vigoureusement en présence de telles allégations, mais il faut le faire en respectant le système de justice pénale et sans le compromettre.
    Je note que le député de Windsor—Tecumseh, le porte-parole du NPD en matière de justice, a présenté un rapport minoritaire similaire concernant le processus entourant les certificats de sécurité, suite au rapport du Sous-comité de la sécurité publique et nationale sur la Loi antiterroriste. Le rapport du sous-comité s'intitulait Droits, restrictions et sécurité: un examen complet de la loi antiterroriste et des questions connexes.
    Le projet de loi C-3 dont nous sommes présentement saisis vise principalement à inclure des dispositions relatives à un défenseur, en l'occurrence un avocat nommé par le tribunal, qui serait informé de la preuve et qui agirait dans l'intérêt de l'accusé. J'estime que la mise en place ou l'intervention d'un défenseur est elle aussi une formule boiteuse. On a vu que le recours à un défenseur pose des difficultés considérables dans d'autres pays.
    Un défenseur du Royaume-Uni, Ian Macdonald, a exposé très ouvertement les problèmes entourant l'existence d'un défenseur dans ce pays. Je cite certains propos qu'il a tenus au sujet de son rôle de défenseur. Il a dit:
    Mon rôle a été changé pour accorder une fausse légitimité à une décision de détention indéfinie sans qu'aucune accusation, criminelle ou autre, ne soit portée ni qu'il y ait quelque jugement que ce soit.
    Voilà une réponse très sérieuse de la part de quelqu'un qui a évolué exactement dans le même genre de système qui est prévu dans le projet de loi C-3.
    En vertu du projet de loi C-3, le défenseur ne jouit que d'une capacité limitée de communiquer avec l'accusé au sujet des éléments de preuve dont il aurait pris connaissance. C'est une énorme lacune que de ne pas pouvoir contester les preuves, ce qui est un aspect fondamental de notre processus de justice pénale. Il y a un grave problème lorsque des allégations peuvent être transformées en éléments de preuve, quand on sait que ceux-ci constituent un élément fondamental de tout procès criminel dans ce pays, un élément pourtant absent de ce processus, une lacune que l'on retrouve également au Royaume-Uni et qu'a soulevée M. Macdonald. C'est toujours une lacune du projet de loi dont nous sommes saisis.
    En 2005, M. Macdonald a déclaré ce qui suit à un comité parlementaire britannique:
[...] vous disposez de toute une masse d'informations et d'évaluations sans être tenus de faire le moindre effort pour convertir celles-ci en éléments de preuve. Je pense que vous risquez de vous retrouver avec des renseignements médiocres et non fiables entre les mains.
    Dans notre système, nous devons également contester l'information présentée en cour en contre-interrogeant les témoins et en appelant d'autres personnes à la barre des témoins. Ces procédures sont impossibles dans le processus défini dans le projet de loi.
    M. Macdonald a résumé son rôle de défenseur en disant qu'il consistait à fournir « un semblant de respectabilité et de légitimité à un processus que je considère odieux ». C'est une condamnation très sévère de ce processus.
    En juillet dernier, le Comité mixte des droits de la personne du Parlement britannique a publié un rapport très cinglant, où le système britannique du défenseur est qualifié de « kafkaïen » et comparé à la Chambre étoilée. Ce n'est sûrement pas ce que nous voulons adopter comme modèle au Canada.
    Si le gouvernement avait été sérieux au sujet du processus de défenseur, il aurait pris très au sérieux un rapport publié au Canada l'été dernier par Lorne Waldman et Craig Forcese sur les certificats de sécurité. Les deux auteurs ont formulé un ensemble très détaillé de recommandations quant à la façon dont les certificats pourraient être utilisés. En fait, ils ont dit qu'il serait préférable d'avoir recours aux services du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité plutôt qu'au processus britannique du défenseur, que le gouvernement semble avoir copié.
    Je ne pense pas que le gouvernement ait vraiment tenté de régler les problèmes des certificats de sécurité car il n'a pas pris très au sérieux les recommandations de MM. Waldman et Forcese au moment de rédiger ce projet de loi.
    Six personnes sont encore sous le coup de certificats de sécurité au Canada. Hassan Almrei est encore incarcéré au Centre de surveillance de l'Immigration, à Kingston. Les cinq autres, Adil Charkaoui, Mohamed Harkat, Mahmoud Jaballah, Mohammad Mahjoub et Manickavasagam Suresh, sont tous soumis à de très sérieuses conditions de libération découlant du processus des certificats de sécurité. Pour les raisons que je viens d'expliquer, je pense que rien de tout cela n'est justifié.
(1615)
    Monsieur le Président, le député et moi avons eu l'occasion de rencontrer les gens qui sont détenus en vertu d'un certificat de sécurité. Nous avons également visité le Centre de surveillance de l'Immigration de Kingston. Lorsque je leur ai parlé, je n'ai pas eu l'impression d'être en présence de terroristes. Tous les gens impliqués les défendent ardemment. C'est un vrai crime que ces gens ne puissent pas prouver leur innocence ou s'adresser à un tribunal pour obliger les gouvernement à prouver ce qu'il avance. On laisse plutôt planer une ombre sur eux. C'était une observation.
    Est-ce que le député pourrait nous en dire plus sur certaines des difficultés des personnes qui sont détenues à l'établissement de Kingston et pense-t-il qu'il est correct de garder une personne en isolement presque tout le temps?
(1620)
    Monsieur le Président, j'ai de très sérieuses réserves au sujet de l'incarcération continue de Hassan Almrei au Centre de surveillance de l'Immigration de Kingston, la prison spéciale à sécurité maximale située sur le site de la prison à sécurité maximale Millhaven et construite pour garder les personnes détenues en vertu d'un certificat de sécurité. Il ne reste que M. Almrei à cette prison, ce qui soulève de très sérieuses questions sur l'isolement prolongé d'un détenu.
    Il ne s'agit pas ici du genre d'isolement punitif imposé aux prisonniers pour mauvaise conduite, dans le système correctionnel. Toutefois, ce système dans lequel il y a une seule personne détenue dans un établissement est tout à fait inapproprié. Cela ne devrait pas se produire.
    Je sais que le député de Kitchener—Waterloo l'a fait remarquer tout à l'heure. Je crois que M. Almreil reste le seul prisonnier à Kingston parce qu'il n'a pas de famille au Canada qui pourrait jouer le rôle de geôlier au nom du gouvernement du Canada et du peuple du Canada.
    C'est ce qui est arrivé aux cinq autre hommes qui ont été relâchés. Les conditions de leur libération sont tellement strictes qu'on a demandé à leurs femmes, dans tous les cas, d'être leurs geôlières, d'être en contact avec eux 24 heures par jour et de se porter totalement garantes d'eux au nom de tous les Canadiens. C'est sans compter les bracelets émetteurs, les caméras de sécurité et les employés de l'ASFC qui les suivent à la trace les rares fois où ils ont la permission de sortir de chez eux.
    Ce sont des conditions draconiennes qui imposent un stress considérable sur les relations et les familles de ces gens. Des enfants doivent vivre dans de telles conditions au Canada, ce qui est absolument inapproprié. Des enfants qui sont citoyens canadiens sont détenus à domicile à cause des gestes posés par leurs parents, dont on n'a jamais prouvé qu'ils étaient une menace pour le Canada. Ils n'ont jamais été accusés ou reconnus coupables de quelque crime que ce soit.
    J'ai été très clair quand j'ai parlé à M. Hassan Almrei et à d'autres. J'ai rencontré M. Almrei à de nombreuses reprises à Kingston et je lui ai parlé au téléphone. Je lui a dit que je n'avais aucune façon de vérifier s'il était une crapule ou un homme parfaitement innocent coincé dans une situation dont il n'est pas directement responsable.
    Je crois que personne d'autre au Canada ne le sait. Il n'a jamais été accusé ou reconnu coupable de quoi que ce soit de sérieux au Canada. Tant que la situation demeurera inchangée, je maintiendrai que je ne sais rien. Tout ce que M. Almrei a dit, c'est qu'il veut qu'on l'accuse, s'il a fait quoi que ce soit de répréhensible, afin qu'il ait la possibilité de prouver son innocence et que, s'il est déclaré coupable, qu'il aille en prison pour une durée conforme au crime commis.
    Il a été très clair, et ses sympathisants aussi. J'aimerais que la Chambre affirme aussi clairement l'importance d'agir conformément à notre système de justice pénale dans cette situation. Quand nous faisons une entorse au système pour une seule personne à propos de qui nous avons des doutes, c'est le système tout entier que nous compromettons.
    Comme la représentante américaine Barbara Lee l'a dit quand elle a voté contre la participation de son pays à la guerre en Irak: « Tâchons de ne pas devenir nous-même le mal que nous déplorons ». Dans les circonstances actuelles, je crois que c'est ce que nous faisons.
    Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le député de Burnaby—Douglas. Le député a siégé au comité quand j'en faisais partie, de 2004 à 2006, et nous avions examiné la question des certificats de sécurité.
    Nous avions alors entendu de nombreux témoins. Le comité avait traversé le Canada et il avait discuté de cette question et d'autres questions de citoyenneté et d'immigration. Nous n'arrivions pas à croire qu'au Canada des gens puissent être emprisonnés sans que des accusations n'aient été portées contre eux. Ils étaient simplement détenus pour des périodes indéterminées sans qu'aucune accusation n'ait été portée contre eux.
    Nous avions formulé dans le rapport du comité la recommandation que ces cas soient examinés pour que des accusations soient portées et que l'affaire puisse cheminer dans le système de justice pénale ou que ces personnes soient libérées et renvoyées dans un pays sûr ou un tiers pays.
    Le député peut-il nous dire ce que ses électeurs pensent du fait qu'on détient des gens pour des périodes indéterminées sans porter d'accusations contre eux et nous expliquer comment cela sert la démocratie aujourd'hui?
(1625)
    Monsieur le Président, quand je parle aux gens de ce que prévoit le processus des certificats de sécurité, ils sont surpris et horrifiés que ce genre de situation puisse arriver au Canada, que des personnes puissent être détenues pendant cinq, six ou sept ans ou subir la détention à domicile tout aussi longtemps sans avoir été accusées ou condamnées d'un crime grave au Canada.
    Tous ceux qui entendent parler de ces mesures sont choqués que ce genre de processus soit utilisé au Canada. Il est grand temps que nous nous penchions sur ce qui arrive dans ce processus.
    C'est injustifiable. Il n'a pas été démontré qu'on ne pouvait pas appliquer le Code criminel à ces crimes graves. Aucune poursuite n'a échoué. En fait, des citoyens canadiens sont actuellement accusés d'activités graves semblables en vertu du Code criminel, et ces cas cheminent dans le système judiciaire. Nous n'avons pas contourné tout le processus pour traiter ces cas. Nous ne devrions pas faire cela aux gens qui ont reçu le statut de résident permanent au pays. Ces gens ont droit aux mêmes protections que moi, en ma qualité de citoyen canadien.
    Je ne crois pas que les Canadiens soient intéressés à changer un tel processus juridique, à modifier tout notre système de justice pénale au nom d'un quelconque principe de sécurité, alors qu'il n'a jamais été prouvé que ces personnes menacent la sécurité du Canada.
    Nous devons le prouver et cette preuve doit être faite devant un tribunal. Par la suite, nous pourrons prendre des mesures sévères contre toute personne qui aura été reconnue coupable d'un tel crime et qui méritera alors d'y être soumise. D'ici là, il n'y a aucune excuse pour détenir indéfiniment une personne et restreindre sa liberté et celle des membres de sa famille pendant des années. Ce sont des mesures tout à fait inappropriées qui ne correspondent pas du tout à la mentalité et aux valeurs canadiennes.
    Certains souligneront sans doute que ces mesures n'ont été utilisées que 28 fois depuis qu'elles ont été adoptées et que seulement six personnes font actuellement l'objet d'un certificat de sécurité. À mon avis, ce sont six personnes de trop quand on parle d'une telle perturbation fondamentale de nos libertés et de notre système de justice pénale.
    Il n'y a absolument aucune excuse à tout cela, aucune preuve de la nécessité d'un tel processus. Tant qu'on ne me donnera pas de telles preuves, je continuerai d'exprimer mon désaccord. Je suis très fier de dire que les néo-démocrates se prononceront unanimement contre cette mesure législative qui ne tient pas compte de nos normes en ce qui touche le respect des valeurs fondamentales de notre système de justice pénale et des droits de la personnes pour lesquels nous nous sommes longtemps battus. Nous ne pouvons pas laisser faire cela sans rien dire.
    De notre côté de la Chambre, nous sommes prêts à monter aux barricades et à défendre ardemment l'importance du respect des droits de la personne pour le Canada et le reste du monde. Si nous acceptons de faire des compromis de ce genre, comment pouvons-nous exiger que les autres justifient les compromis qu'ils font sans cesse en matière d'équité et de droits de la personne?
    Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Richmond Hill, L'Afghanistan; le député de Nova-Ouest, L'affaire Airbus.
(1630)
    Monsieur le Président, je me réjouis d'avoir l'occasion de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-3, une mesure législative qui, de toute évidence, revêt une très grande importance non seulement pour nous tous en tant que parlementaires, mais également pour le Canada.
    Le projet de loi modifie la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés en ce qui a trait aux certificats de sécurité et à la création d'un poste de défenseur. J'ai écouté mon collègue de Burnaby et, connaissant les passions que ce sujet suscite chez lui, je me suis souvenue de la férocité avec laquelle il s'opposait à ce type de choses autrefois. Je dois dire que j'applaudis l'engagement du député, mais que je le perçois d'un oeil très différent.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis propose de modifier la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés afin de créer le poste de défenseur.
    Le rôle principal du défenseur serait de protéger les intérêts de toute personne visée par un certificat de sécurité en contestant la décision du ministre de la Sécurité publique de garder les renseignements confidentiels, ainsi que la pertinence et le poids de la preuve, ce qui est important. Nous n'avons pas manqué de signaler que certains éléments de la loi précédente nécessitaient des améliorations, et cela semble être un bon début.
    Le défenseur peut aussi présenter des observations au tribunal, oralement et par écrit, et contre-interroger les témoins du gouvernement. Ces responsabilités sont assumées lors de procédures judiciaires à huis clos. C'est très semblable au système britannique, comme mon collègue de Burnaby l'a souligné.
     Le rôle du défenseur est de défendre les intérêts de la personne visée dans le cadre de certaines instances où la preuve est entendue en son absence et en celle de son conseil ainsi qu'à huis clos. Manifestement, il s'agit de nouveaux domaines de compétence pour notre pays, mais ce sont des mesures nécessaires pour veiller à la protection des Canadiens au Canada.
    Le projet de loi prévoit aussi qu’un juge de la Cour fédérale entreprenne l'examen de la détention de toute personne visée par un certificat dans les 48 heures suivant le début de la détention. C'est aussi un élément très important du projet de loi, qui a pour but d'assurer que les éléments de preuve adéquats sont là et que les gens ne sont pas détenus aléatoirement, comme certaines personnes voudraient nous le faire croire.
    Quiconque est encore détenu six mois après la conclusion du premier examen peut présenter une demande pour un nouvel examen des motifs de sa détention continue. Tout ne se fait pas à huis clos. Les détenus pourront fournir des éléments de preuve et de se défendre eux-mêmes.
    Le projet de loi permet de contester devant la Cour d'appel fédérale le caractère raisonnable — c'est une expression clé du projet de loi — d'un certificat de sécurité, ou les résultats de l'examen de la détention d'une personne ou de sa libération sous certaines conditions, le cas échéant.
    Comme mon collègue de Burnaby l'a indiqué, certaines de ces conditions ne sont peut-être pas les meilleures, mais il ne faut jamais perdre de vue la sécurité du pays et celle des Canadiens, dans la mesure où le juge d'appel certifie que l’affaire soulève une question grave de portée générale.
    Le projet de loi permet aussi à un agent de la paix d'arrêter et de détenir une personne visée par un certificat de sécurité s'il a des motifs raisonnables de croire qu'elle a contrevenu ou est sur le point de contrevenir aux conditions de sa mise en liberté. C'est un élément très important du projet de loi. Ainsi, la personne pourra, sous certaines conditions, jouir d'un certain degré de liberté. Toutefois, si pour quelque raison que ce soit, un agent de police ou quelqu'un d'autre a des raisons de croire que la personne va peut-être chercher à s'enfuir, il pourra prendre les mesures nécessaires pour que la personne visée se trouve là où elle doit être.
    Le projet de loi C-3 permet aussi au ministre de demander l’interdiction de la divulgation de renseignements confidentiels dans le cadre du contrôle judiciaire de toute décision rendue au titre de la Loi et autorise le juge à nommer un défenseur pour défendre les intérêts de l’intéressé dans ce contexte.
    Pour situer les nombreux Canadiens qui regardent ce débat, du moins l'espérons-nous, la Cour suprême du Canada a rendu, le 23 février dernier, un jugement unanime selon lequel le processus utilisé pour déterminé le caractère raisonnable des certificats de sécurité viole l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés C'est pourquoi nous débattons actuellement de cette mesure législative.
(1635)
    Je dis toujours que plus nous prenons le temps d'examiner une mesure législative, meilleure elle sera. La Cour suprême a clairement indiqué que certains points devaient être examinés et revus. Je crois que cela ne pourra qu'améliorer cette mesure législative et la rendre plus solide et plus efficace.
    Nous savons aussi que personne ici ne souhaite que les droits des innocents soient bafoués au Canada. Je crois que lorsque le comité aura fini d'examiner cette mesure législative et l'aura renvoyée à la Chambre, elle sera beaucoup plus efficace, compte tenu de certaines préoccupations exprimées par mes collègues au sujet d'abus du processus.
    La Cour suprême a été très claire. Le gouvernement doit disposer d'un mécanisme permettant de renvoyer du Canada les individus qui posent un risque pour la sécurité nationale. Il est clair que la nécessité d'un mécanisme permettant le renvoi de personnes occupait une place importante dans la mesure législative d'origine. Je crois que les Canadiens veulent disposer d'un tel mécanisme.
    Le système actuel doit néanmoins être modifié. La cour trouvait particulièrement préoccupant le secret entourant la révision judiciaire, qui fait que les intéressés ne savent pas ce que le gouvernement leur reproche et ne sont donc pas en mesure de se défendre efficacement.
    On peut dire, je crois, que la cour n'était pas la seule à avoir des préoccupations en cette matière. Cela va assurément à l'encontre de beaucoup de ce à quoi l'on croit, au Canada, et la question du secret est très difficile à trancher.
    C'est une question d'équilibre. Il faut pouvoir assurer la protection de notre pays et répondre à nos préoccupations en matière de sécurité, mais sans oublier que nous sommes assujettis à une Charte consacrant des droits de la personne qu'il faut respecter. Nous voulons nous assurer que les choses seront faites comme il faut et que nous n'aurons aucune raison de rougir de honte parce que nous avons mal fait les choses dans des domaines aussi importants que les enjeux internationaux et les questions de sécurité.
    Nous, de ce côté-ci de la Chambre, avons bien accueilli, en tant qu'opposition officielle, la décision que la Cour suprême a rendue en février sur les certificats de sécurité, donnant au Parlement une année pour régler la question. Maintenant que l'année est presque écoulée, on commence à chercher une solution.
    Il est très dommage que le gouvernement ait mis si longtemps à nous présenter une nouvelle mesure législative que le Parlement risque maintenant de devoir adopter à toute vitesse pour qu'elle soit en vigueur avant la fin du délai prescrit, en février 2008, surtout qu'il s'agit d'une mesure importante. On en a débattu précédemment dans des circonstances extrêmement difficiles. Il est important de bien faire les choses et de pouvoir assurer la sécurité de notre pays sans violer les droits de la personne ni porter atteinte à d'autres droits.
    La Cour suprême a reconnu que la protection de la sécurité nationale du Canada et des sources de renseignements connexes constitue un objectif urgent et réel, mais elle a jugé que la non-divulgation d'éléments de preuve aux audiences d'investigation relatives à des certificats de sécurité enfreint nettement les droits de l'accusé. Je crois que, pour la plupart des Canadiens et la plupart d'entre nous, parlementaires, force est de reconnaître que nous avions justement des préoccupations en cette matière. Le défi consiste à trouver le juste équilibre.
    Autrement dit, le gouvernement doit mettre en oeuvre une solution de rechange qui empiète moins sur les droits de la personne, notamment en ayant recours à un défenseur agissant au nom des personnes visées tout en protégeant la sécurité nationale du Canada. Je reviens à la question de l'équilibre, qu'il nous est si important d'atteindre, pour nous tous.
    La procédure associée aux certificats de sécurité dans le domaine de l'immigration permet toujours la détention au Canada et l'expulsion à l'étranger des personnes soupçonnées de terrorisme ainsi que des réfugiés et des résidents permanents accusés de violations des droits de la personne ou de crimes graves. Je sais que la sécurité des Canadiens et du Canada constitue une priorité pour nous tous en tant que parlementaires.
    Le Parti libéral a l'intention d'appuyer le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Il votera pour le renvoi du projet de loi à un comité, qui pourra l'étudier en profondeur. Nous allons prendre le temps d'étudier le nouveau projet de loi, de lui apporter les améliorations nécessaires à l'étape de l'étude par le comité et, espérons-le, nous allons pouvoir quand même ne pas trop nous éloigner de l'échéancier fixé pour réaliser cette tâche.
    Beaucoup de députés devront par conséquent accomplir très rapidement une grosse somme de travail pour veiller à ce que le Canada s'acquitte de toutes ses obligations dans la lutte contre le terrorisme. C'est d'une très grande importance pour nous tous. Nous voulons nous assurer d'examiner la question sous toutes ses coutures.
    Nous ne voulons pas d'une loi qui ne répondrait pas à toutes les exigences et qui serait de nouveau contestée devant la Cour suprême, avec le risque que des dispositions soient de nouveau invalidées. Je pense qu'avec les travaux du comité qui s'annoncent sur ce projet de loi, nombre d'entre nous allons voir à ce que l'on atteigne le juste équilibre souhaité par l'ensemble des Canadiens.
(1640)
    Monsieur le Président, j'ai entendu la députée expliquer de façon très éloquente la situation telle qu'elle est à l'heure actuelle et ce qui est proposé. Il semble que nous soyons disposés à soumettre ce projet de loi au comité pour qu'il en approfondisse l'étude.
    Ce qui m'inquiète, c'est la délai auquel nous avons droit aux termes de la décision rendue. La Cour suprême a fait connaître sa décision en février 2007 et le 23 février 2008 vient vite, surtout lorsqu'on tient compte du congé des Fêtes et du fait que la Chambre ne reprendra ses activités qu'à la fin de janvier. La députée est-elle d'avis que nous aurons le temps de nous pencher sur toutes les solutions de rechange, de modifier la mesure législative et de la soumettre à la Chambre pour la troisième lecture?
    Monsieur le Président, je sais que mon collègue s'intéresse énormément à ce dossier. Pour répondre à sa question, ce sera difficile. Le délai est très court. Les parlementaires devront peut-être travailler en janvier si nous voulons respecter le délai de février 2008. Quoi qu'il en soit, je présume que ce ne sera pas la première fois que nous n'avons pas respecté un délai et que nous devrons demander une prolongation.
    Nous devrions nous rappeler que, pendant que nous avançons dans ce dossier, beaucoup de gens dans le monde regardent le Canada et ce que nous ferons du projet de loi. Veillerons-nous à ce qu'il respecte les droits de la personne, la Charte et tout ce qui est extrêmement important pour les Canadiens?
    Nous écoutons les préoccupations du député de Burnaby, et je suis sûre que tous les députés en ont également, mais nous ne sommes pas à l'aise avec le projet de loi précédent. Nous sommes probablement toujours mal à l'aise avec le projet de loi C-3, bien que nous reconnaissions que nous devons tous lutter contre le terrorisme. Le gouvernement doit se doter des moyens nécessaires pour prendre les mesures qui s'imposent afin d'assurer la sécurité de notre pays et de collaborer avec d'autres pays pour empêcher que le terrorisme ne continue.
    Il est crucial que nous renvoyions le projet de loi à un comité. Nous espérons qu'il sera adopté cette semaine et que le comité pourra commencer à l'étudier la semaine prochaine. Comme je connais les sentiments des parlementaires, je prévois qu'ils consacreront de nombreuses heures à l'étudier en tenant compte des interventions que feront sans doute un grand nombre de témoins.
    Le projet de loi constitue une amélioration du processus. La désignation d'un défenseur sera une bonne approche. Nous devons renvoyer le projet de loi à un comité, l'étudier et le ramener à la Chambre pour qu'il soit approuvé. Le plus tôt sera le mieux pour le Canada.
    Monsieur le Président, parmi les compromis, comme on pourrait les appeler, faits par le gouvernement conservateur quand il a présenté le projet de loi C-3, j'ai remarqué qu'il y aura désormais des défenseurs qui participeront à la procédure des certificats de sécurité. Le gouvernement affirme que cela sera suffisant pour garantir que quelqu'un défend les droits et répond aux préoccupations de la personne accusée et qu'au moins le défenseur sera informé de la nature des accusations et de la raison pour laquelle la personne est détenue.
    Toutefois, mon collègue de Burnaby—Douglas signale qu'au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande, où ils ont des défenseurs pour les personnes détenues, cette solution s'est révélée terriblement inadéquate. Au Royaume-Uni, un défenseur a récemment remis sa démission en signe de protestation et a affirmé qu'il croyait que son bureau était utilisé comme excuse pour détenir les gens injustement. Autrement dit, le défenseur a commencé à défendre les intérêts des gens détenus et a démissionné.
    Le parti de la députée est-il d'avis que la nomination d'un défenseur n'est pas un compromis adéquat permettant de faire valoir les droits des personnes détenues?
(1645)
    Monsieur le Président, le temps le dira. J'ose croire qu'on examinera le modèle britannique et le modèle néo-zélandais et qu'on en tirera des leçons. J'ose croire que, d'une manière ou d'une autre, on assurera que les droits des détenus revêtent une importance primordiale.
    Il ne s'agit pas d'ingérence de la part du gouvernement. Un défenseur indépendant devrait avoir accès à tous les éléments de preuve présentés pour garder la personne en détention. Si ce défenseur estime que les éléments de preuve ne répondent pas aux exigences en matière de preuve, on ne saurait laisser cette personne croupir dans une cellule, car nous avons des questions à poser, nous voulons savoir si elle constitue une menace pour le pays.
    Je ne peux que supposer que ces choses ne se font pas à la légère. En raison de mon expérience, je peux assurer à mon collègue qu'on ne signe pas facilement les certificats de sécurité. La responsabilité à cet égard est énorme.
    J'espère qu'on pourra tirer des leçons des modèles du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande de manière à assurer que le défenseur proposé dans le projet de loi a les outils, le pouvoir et la rigueur objective lui permettant d'intervenir pour dire au gouvernement et aux parlementaires que les éléments de preuve sont insuffisants et que les droits individuels sont violés lorsque c'est le cas. J'espère qu'on donnera une place prépondérante aux droits individuels. Nous ne voulons pas qu'on viole nos droits et nous ne devrions pas violer ceux des autres.
    J'espère qu'on tirera des leçons des modèles britannique et néo-zélandais, que le défenseur proposé ici sera encore meilleur et qu'on continuera d'examiner le projet de loi et de trouver des façons de l'améliorer.
    Monsieur le Président, sauf erreur, 18 personnes ont été accusées de terrorisme dans la région de Toronto. Les accusations avaient un caractère sensationnaliste. Le gouvernement a fait beaucoup pour gérer la diffusion de l'information dans ce dossier. Ces personnes n'ont pas été accusées en vertu des dispositions sur les certificats de sécurité, mais plutôt en vertu des articles du Code criminel qui portent sur les activités terroristes.
    Étant donné que cette rafle s'est produite dans la région de la députée, c'est-à-dire dans le Grand Toronto, celle-ci pourrait-elle nous fournir des renseignements sur ces 18 personnes?
    Monsieur le Président, les policiers dans nos grandes villes ont une responsabilité énorme, en ce sens qu'ils doivent prendre la bonne décision face à des activités criminelles et autres. Lorsqu'ils sont préoccupés par un groupe particulier, ils peuvent souvent consacrer jusqu'à 18 mois à ce groupe. Le simple fait que des personnes soient affiliées à un groupe ne signifie pas nécessairement qu'elles en font partie ou qu'elles sont des terroristes.
    Les policiers ont une tâche difficile. Nous avons une tâche difficile. C'est une question d'équilibre et de respect des droits individuels.
    Certaines de ces personnes ont été détenues puis relâchées, mais je pense qu'une fois que des personnes ont été détenues et qu'on leur a apposé cette étiquette, il est très difficile de s'en défaire. Je pense que ce stigmate risque de les marquer à vie. Il faut toujours être prudent avant de porter des accusations et s'assurer que l'on dispose de toute l'information nécessaire.
    En ce qui a trait au projet de loi C-3, notre comité aura l'occasion de se pencher sur les motifs justifiant le fait de détenir une personne et de la priver de ses libertés. Peut-être faudrait-il préciser davantage les motifs justifiant la détention d'une personne. C'est le genre de questions que le comité peut étudier, afin de s'assurer que cette mesure législative soit examinée de façon appropriée et qu'elle atteigne le but visé, qui est de faire en sorte que l'on combatte tous ensemble le terrorisme, que le Canada continue d'être un endroit sûr, et que nous fassions notre part dans la lutte contre le terrorisme international.
(1650)

[Français]

    Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-3. Il s'agit d'un projet de loi intéressant, parce qu'il met en relief et parfois en opposition des droits fondamentaux. Cela vient se confronter avec la sécurité, un domaine de plus en plus important au Canada comme ailleurs. Lorsqu'on dit qu'on peut priver des gens de leur liberté, qu'on peut les expulser, il faut toujours se demander si on ne va pas parfois un peu loin. Bien sûr, nous vivons dans un État de droit et nous vivons dans une société libre et démocratique.
    Ces types de certificats de sécurité sont-ils compatibles avec les concepts d'une société libre et démocratique, avec un État de droit, avec les chartes? Est-ce compatible? Après avoir regardé le projet de loi, nous y sommes favorables, surtout s'il n'y a pas d'abus. Jusqu'à maintenant, nous avons constaté qu'il n'y a pas eu d'abus. Depuis les attentats terroristes, seulement cinq ou six certificats ont été émis. Depuis 1991, j'ai constaté que 27 certificats de sécurité ont été émis. On ne peut donc pas dire que la société canadienne exagère. On ne peut pas dire qu'on émet des certificats de sécurité pour tout et pour rien. La décision d'expulser quelqu'un est une question sérieuse et je crois que les enquêtes qui sont faites font en sorte qu'on ne doive justement pas se tromper sur ces expulsions.
    En effet, nous sommes favorables aux certificats de sécurité. Cependant, je crois que le projet de loi peut être amélioré et c'est important qu'il le soit. À mon avis, c'est le rôle de l'opposition de faire en sorte qu'un projet de loi soit parfaitement adapté à la situation. Il faut non seulement qu'il n'y ait pas d'erreur, mais il faut une aide auprès de ces gens afin de s'assurer que leurs droits fondamentaux de liberté sont défendus et que leurs droits de se défendre sont défendus.
    Si je regarde le fonctionnement d'un certificat de sécurité, ce n'est pas tellement compliqué et c'est une mesure qui est assez rapide. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre de la Sécurité publique doivent signer. À partir de là, le tout est envoyé à la cour qui en fera toute l'évaluation. Lorsque la cour est saisie du certificat de sécurité, elle pourrait, par exemple, tenir des audiences à huis clos, parce que certaines informations peuvent parfois mettre en danger la sécurité du Canada ou de certains individus.
    Cependant, le problème est que c'est souvent fait en l'absence de la personne victime du certificat de sécurité. C'est donc la cour qui établit si, oui ou non, on émettra le certificat de sécurité en l'absence de ce qu'on pourrait appeler l'accusé. À notre avis, il faudrait changer certaines choses pour faire en sorte de donner, je ne dirais pas une défense pleine et entière, mais au moins de s'assurer qu'il n'y ait pas d'entorses trop grandes à la démocratie et au fait d'avoir le droit de se défendre comme tel.
    Il y a également un autre problème. Dès que la Cour fédérale accepte d'émettre un certificat de sécurité pour tel individu, il n'y a pas de processus d'appel. Non seulement la cour décide souvent en l'absence de l'accusé, mais en plus, il n'y a pas de processus d'appel. Je développerai un peu plus à ce sujet plus tard, parce que cela nous semble être un point où nous avons des réserves concernant toute la question des certificats de sécurité.
    Finalement, aussitôt que la Cour fédérale confirme que le certificat de sécurité peutr être émis, c'est l'extradition automatique et le renvoi de la personne. Il faut toujours spécifier que cela s'applique aux résidents permanents et également aux étrangers. Un citoyen canadien ne pourrait donc pas être dans le même bateau, parce que d'autres types de droits s'appliquent aux citoyens canadiens.
    Il y a eu des exceptions dans les différentes causes entendues par les cours de justice, comme par exemple le fait entre autres qu'on ne puisse pas extrader un individu lorsqu'on a la certitude qu'il sera torturé ou que sa vie pourrait être en danger dans le pays dans lequel on le renvoie.
    Il m'apparaît important de souligner comment s'exerce actuellement la procédure en regard du certificat de sécurité. J'aimerais expliquer certaines modifications que nous proposons.
(1655)
    Mon collègue a parlé plus tôt des avocats spéciaux. Il y a effectivement, en Grande-Bretagne et ailleurs, des expériences de recours à des avocats spéciaux. L'avocat spécial n'est pas un défenseur; c'est quelqu'un qui guidera l'individu accusé tout au long de la procédure et qui lui montrera comment se défendre: les faits rapportés sont-ils réels, la preuve est-elle fondée?
    À mon avis, c'est un appui important. C'est quelque chose qu'il faudrait retrouver dans la loi. En effet, on ne peut pas dire à un individu que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre de la Sécurité publique viennent de signer un certificat de sécurité le concernant, qu'on l'envoie en cour, où le juge, souvent sans même consulter l'accusé, décide que c'est fini et qu'il s'en va, sans processus d'appel. Cette façon de procéder m'apparaît un peu rapide et expéditive.
    Nous faisons des propositions justement pour nous assurer qu'il n'y aura pas d'erreurs. Même si l'on concède qu'il n'y a pas eu d'abus en vertu du certificat de sécurité, il serait important de peaufiner un peu plus le projet de loi.
    Il nous apparaît donc important de permettre à un avocat de défendre les droits d'un individu menacé d'expulsion. Il nous apparaît également important que l'on dévoile l'ensemble de la preuve à cet avocat spécial. Car jusqu'à maintenant, c'est un résumé de la preuve qui pourrait être présenté, alors que nous voudrions que ce soit la preuve complète.
    Cela ne nous poserait aucun problème. D'ailleurs, dans les agences qui contrôlent le SCRS et la GRC, les avocats sont aussi liés par le secret professionnel. Je ne verrais donc pas pourquoi on ne pourrait pas permettre à ce type d'avocats spéciaux liés par le secret professionnel d'avoir la preuve complète. Ainsi, ils seraient en mesure de mieux défendre l'accusé menacé d'extradition.
     Selon nous, c'est un geste que le gouvernement devrait poser. J'espère que mes collègues de l'opposition appuieront cette approche, de sorte que soit permise une défense complète et entière.
    Le droit d'appel pose un autre problème. Quelque chose me semble un peu exagéré. Je ne remets pas en cause la pertinence du juge de la Cour fédérale, ni son intégrité, ni son quotient intellectuel ou quoi que ce soit. Cependant, des erreurs juridiques peuvent se produire. Il n'y a personne d'infaillible. Qu'une personne décide ainsi et que sa décision soit sans appel, cela me semble exagéré. On joue avec la liberté d'un individu: on le retourne dans un pays, on lui refuse l'accès au nôtre, au Canada, on lui dit que c'est la décision du juge et que c'est fini. Il me semble qu'on a des preuves que cela ne fonctionne pas tout le temps.
    En ce qui concerne les gens qui sont en charge de l'immigration, j'ai constaté l'autre jour qu'on n'a pas encore de processus d'appel d'une décision d'un juge de l'immigration. Pour la personne qui se fera dire qu'elle ne peut plus rester chez nous et de s'en aller, il n'y a pas de processus d'appel non plus. Un tel processus serait pourtant une protection contre une potentielle et malencontreuse erreur. Dans les cas de gens que l'on va extrader, ce serait une erreur de trop. Le processus d'appel est important pour nous.
    Il y a aussi un autre aspect. Nous aimerions bien mettre un terme aux détentions illimitées. Cela me semble également exagéré. Un individu vit une grande insécurité à ce moment-là. C'est sûr que des soupçons importants peuvent peser contre lui, mais il ne faudrait pas que cela devienne un supplice à long terme non plus.
    On met quelqu'un en prison et on lui dit qu'on ne sait pas combien de temps il y sera, qu'on est en train de recueillir les preuves. Or les délais s'étirent toujours plus. Nous avons donc des réticences quant au fait que la durée des détentions soit illimitée. Par contre, nous ne savons pas encore si nous déterminerons une période quelconque. Quoi qu'il en soit, le seul fait de concevoir des délais illimités pour quelqu'un faisant l'objet d'un certificat de sécurité nous paraît exagéré. J'espère que nos collègues nous suivront lorsque nous proposerons des amendements à la loi.
    De plus, les arrestations sans mandat nous apparaissent être une question importante. Je décrivais plus tôt la procédure que l'on suit. Ce ne sont que les ministres de la Citoyenneté et de l'Immigration ainsi que de la Sécurité publique qui signent. Ensuite, cela va directement en cour et on procède à l'arrestation, et ce, sans mandat. Il s'agit pourtant d'une règle très importante de l'État de droit. Normalement, lorsqu'on emprisonne quelqu'un, il devrait y avoir un mandat contre lui. Il faudrait que ce soit la même chose pour ces personnes.
    C'est sûr qu'il existe un certain secret autour du certificat de sécurité et que, s'il y a des allégations de complot pour un attentat terroriste, par exemple, on n'est peut-être pas capable de fournir une preuve sur la place publique. Toutefois, il me semble qu'un juge pourrait examiner la situation, avant que l'on procède à l'arrestation, pour décider s'il y a suffisamment de preuves pour pouvoir arrêter l'individu et émettre le mandat. Ce n'est pas bien compliqué. Si l'on est capable d'obtenir des injonctions rapidement, dans l'espace de quelques heures, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas le faire dans ce type de délit en ce qui concerne le certificat de sécurité. Il s'agit donc d'une autre chose que nous proposerons.
    Nous voulons aussi modifier le fardeau de la preuve pour que le certificat de sécurité ne soit maintenu que si la cour est convaincue hors de tout doute raisonnable que l'individu représente une menace. Actuellement, cela se fait seulement sur la base du doute raisonnable. Il faudrait qu'on aille un petit peu plus loin. On joue souvent avec la vie d'un individu et il faudrait donc que ce soit hors de tout doute raisonnable, ce qui est plus fort encore que de décider en vertu d'un seul doute raisonnable. À l'étape du rapport, on fera probablement les amendements nécessaires afin d'atteindre ce concept.
    Enfin, à la lumière des périodes de questions orales des deux dernières semaines, à notre avis, il est certain que, dans la mesure où l'on sait qu'un individu que l'on déportera ou extradera subira la torture dans des pays qui la pratiquent, le projet de loi doit prévoir des dispositions qui interdisent cette extradition ou cette déportation. Ainsi, les gens pourraient subir un emprisonnement ici, au Canada. Il y a beaucoup de solutions, mais, décidément, on ne peut pas permettre la déportation d'individus alors qu'on est sûr qu'ils seront torturés ou même tués. Dans certains pays, sous certaines dictatures, les gens ne tiennent pas longtemps. Souvent, ces dictatures ne fonctionnent pas selon l'État de droit. Ce sont quelques personnes qui décideront de l'avenir de cet individu qui arrivera à l'aéroport.
    Il est donc important d'examiner l'ensemble du dossier et de s'assurer qu'il n'y aura pas de fautes qui puissent entraîner la mort ou la torture d'individus. J'espère que mes collègues seront reconnaissants au Bloc québécois d'apporter sa contribution dans ce dossier. Notre collègue responsable du dossier est un avocat réputé. Il s'agit de quelqu'un qui a réfléchi longuement à ces questions. C'est un excellent collègue qui a déjà été ministre de la Justice au Québec. Je prends toujours ses propos au sérieux. Tout à l'heure, il m'expliquait tout cela en détail. Il voulait que je prenne la parole et m'en a convaincu.
    Je reviens sur les propos que j'ai commencés. Nous vivons dans une société libre et démocratique. Nous vivons dans un État de droit et nous avons des chartes. Lorsqu'on fait entorse à ces concepts, quelle que soit la façon dont on le fera, il faut toujours faire attention. Notre exercice est donc raisonnable et, surtout, responsable. Nous sommes capables de vivre dans une société libre et démocratique, en État de droit.
(1700)
    Il faut s'assurer que lorsque la Chambre est saisie de projets de loi, ceux-ci ne sont pas trop touchés et ne deviennent pas boiteux à la longue.
    Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à répondre aux questions.
(1705)

[Traduction]

    Monsieur le Président, après avoir écouté les propos de mon collègue du Bloc québécois, il semble que le NPD est le seul parti à la Chambre qui s'oppose au projet de loi C-3 à cette étape. Les autres partis semblent disposés à autoriser son renvoi au comité où ils pourront s'attaquer aux choses qu'ils n'approuvent pas. J'aimerais que mon collègue nous explique certains de ses arguments.
    Je suis toujours choqué par les parties controversées du projet de loi C-3. Malgré le rejet de l'ancienne procédure par les tribunaux, la procédure actuelle des certificats de sécurité envisagée dans le projet de loi C-3 comprendrait encore des audiences secrètes; une détention illimitée sans accusation ou déclaration de culpabilité; le fait de détenir quelqu'un sans qu'il connaisse la preuve pesant contre lui, ce qui va à l'encontre des principes de la justice naturelle dans presque tous les pays développés que je connaisse; ainsi que l'absence d'un processus d'appel.
    Ce sont des raisons assez convaincantes de s'opposer au projet de loi, à mon avis. Mon collègue du Bloc, qui est un homme raisonnable et rationnel dont j'ai appris à respecter l'opinion au fil des années, ne semble pas suffisamment troublé par ces problèmes pour voter contre le projet de loi. J'aimerais lui demander comment il peu faire fi de toute rationalité et appuyer le projet de loi C-3.

[Français]

    Monsieur le Président, dans le fond, le raisonnement est assez simple. Plus tôt, j'ai mentionné que nous étions capables d'accepter les certificats de sécurité. Actuellement, dans bien des pays, des cellules dormantes attendent pour perpétrer des attentats terroristes. À un moment donné, il faut procéder.
    Finalement, mon collègue soulève exactement la même chose que moi, sauf que le NPD adopte une approche tactique un peu différente. Nous convenons de l'idée d'un certificat de sécurité, mais nous voulons apporter des changements au projet de loi proprement dit. Et, justement, nous voulons pouvoir faire ces changements au comité permanent. Tous les points qu'il soulève seront abordés au comité permanent, de sorte que nous puissions avoir une loi qui non seulement s'assurera de la sécurité des gens, mais aussi protégera les accusés.
    À nous aussi, l'absence de processus d'appel, le fait que les auditions puissent se faire sans la présence de l'accusé et le fait qu'il n'y ait pas d'avocats spéciaux pour le seconder ne nous plaisent pas. Le député a souligné toutes ces choses desquelles nous ne convenons pas.
    Toutefois, nous voulons adopter ce projet de loi en deuxième lecture, sur la base de son ensemble, en principe. Ensuite, nous voulons nous donner le temps d'en approfondir les aspects litigieux et faire en sorte que les amendements viennent compléter le tableau. Cela se fera probablement au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, ou peut-être celui de la sécurité publique et nationale, ou encore celui de la citoyenneté et de l'immigration.
    En ce sens, la position du Bloc québécois est responsable.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai entendu le député de Saint-Jean parler du projet de loi C-3 et j'ai aussi entendu la question posée par le député néo-démocrate.
    On dirait que le NPD croit que des amendements ne peuvent pas être apportés au comité. Je suis très surpris parce que je sais que le député a participé à d'autres comités où des amendements ont été apportés à des projets de loi. Je suis certain qu'il comprend le processus, qu'il sait que nous pouvons apporter des amendements. L'aide des partis de l'opposition est nécessaire si nous voulons renvoyer ce projet de loi au comité où nous pourrons le débattre et en corriger les défauts. Nous sommes tous d'accord pour dire que cette mesure législative est imparfaite et qu'elle a besoin de beaucoup d'aide, spécialement de l'aide du NPD.
    Le député de Saint-Jean a mentionné dans son discours qu'il n'aimerait pas que des gens soient expulsés vers certains pays. Je pourrais peut-être lui rafraîchir la mémoire au sujet de la disposition relative au tiers pays sûr. S'il y a des problèmes dans leur pays d'origine, le pays d'où ils sont venus, nous les enverrons dans un pays sûr qui n'est pas leur pays d'origine. Je suis également d'avis qu'on ne devrait pas expulser des gens vers un pays où ils seraient poursuivis et emprisonnés ou encore où leur vie serait menacée.
    Le député pourrait peut-être en dire plus long sur ce sujet et aussi sur l'idée de modifier le projet de loi à l'étape de l'étude en comité.
(1710)

[Français]

    Monsieur le Président, si je le pouvais, je donnerais le droit de réplique à mon collègue du NPD, mais c'est moi qui le défendrai.
    Je comprends tout de même qu'à un certain moment donné, un parti politique puisse adopter des positions qui ne soient pas conformes ou pareilles aux nôtres. On est en démocratie parlementaire. Le NPD a le droit de juger que ce qu'il pointe est tellement gros qu'il votera contre. Nous avons pris une approche différente, et mon collègue a parfaitement raison.
    En comité permanent, à l'étape du rapport, on apporte souvent des amendements. S'ils sont adoptés en comité, ils sont ramenés à une lecture subséquente à la Chambre. C'est la façon dont le projet de loi chemine et, à mon avis, il s'agit d'un bon système.
    En ce qui concerne les extraditions ou les déportations dans des pays qui pratiquent de la torture, nous en avons eu un exemple typique et difficile avec le cas de M. Arar. Il est bien évident que si l'on met la main sur une personne et que l'on décide qu'elle doit avoir un certificat de sécurité alors que la personne est syrienne, qu'elle est étrangère et qu'elle se trouve au Canada, j'aurais un problème avec le fait qu'on la déporte en Syrie. J'aurais un gros problème. Pourrait-on le déporter dans un autre pays plus amical? Je ne suis pas sûr si on ne se débarrasse pas du problème, ni comment un pays pourrait dire qu'il l'accueillera chez lui.
    Selon moi, la solution serait qu'il ait des peines d'emprisonnement ici, au Canada. Toutefois, il faut s'assurer, avant que l'on déporte quelqu'un, qu'il ne sera pas victime de torture et qu'il ne soit en danger de mort dans le pays où on le déportera. Que les peines de prison soient purgées ici même au Canada m'apparaît comme une solution qui peut être envisagée.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'apprécie de pouvoir prendre la parole sur ce projet de loi important. Tandis que je préparais mon intervention dans mon bureau, je pensais au fait que les Canadiens, en nous envoyant ici pour discuter à la Chambre, nous confient comme principale mission de protéger leur liberté, de faire en sorte qu'ils puissent vivre leur vie en sécurité et dans la dignité.
    Nous pouvons comprendre, jusqu'à un certain point, les réactions de notre voisin du Sud à la suite des attentats du 11 septembre. Nul doute que ces attentats étaient épouvantables et que leur bilan a été tragique, mais la réaction qui s'en est suivie, dans les premiers jours, n'aurait peut-être pas été aussi radicale si l'on avait eu le recul qu'on a aujourd'hui. Je soupçonne que, même à la Chambre, des députés s'inquiéteraient aujourd'hui en voyant les changements qui se sont produits ici.
    Nous avons entendu aujourd'hui, au cours de la période des questions, le ministre de la Justice parler du fait qu'il ne demanderait pas la clémence dans le cas d'un Canadien dans le couloir de la mort, aux États-Unis. Pourtant, nous en avons déjà discuté à la Chambre et nous avions jugé que le gouvernement ne devait pas être complice dans l'exécution d'un citoyen.
    Avec le recul, en revoyant ce qu'a fait le gouvernement minoritaire jusqu'à maintenant, on repense aux fois où il a adopté certaines positions ou refusé de respecter la volonté de la Chambre, et cela m'inquiète grandement. C'est presque une attitude digne des westerns américains où le méchant finit toujours pendu.
    J'insiste sur le fait que nous avons un gouvernement minoritaire et que c'est à la Chambre que nous devons prendre des décisions, mais avec le vote de tous les députés. Du point de vue du NPD, le projet de loi C-3 est très boiteux, en ce sens qu'il propose de petits changements pour régler le problème alors que la Cour suprême a déclaré que les certificats étaient inconstitutionnels. Nous croyons que c'est loin d'être suffisant, de la part du gouvernement, pour régler les problèmes soulevés par la Cour suprême.
    Beaucoup de Canadiens s'inquiètent de l'érosion des droits au Canada. J'y ai fait allusion tout à l'heure. Cela ressemble à l'érosion des droits qui s'est produite aux États-Unis. Les gens considèrent le projet de loi C-3 comme une menace à l'équilibre entre la liberté et la sécurité.
    Selon nous, les certificats de sécurité présentent deux lacunes considérables. Tout d'abord, ils permettent la détention et l'expulsion des personnes soupçonnées d'avoir commis des activités terroristes mais ne veillent pas à ce que ces terroristes présumés soient traduits en justice et emprisonnés s'ils sont reconnus coupables. Notre Code criminel est conçu à cette fin.
    Par conséquent, si nous tenons pour acquis que des activités terroristes ont lieu au Canada et nous expulsons les responsables présumés sans qu'ils n'aient été traduits en justice, cela signifie que nous n'avons aucune garantie que le terroriste présumé expulsé du Canada en vertu d'un certificat de sécurité cessera de présenter un risque.
    Il existe aussi une iniquité fondamentale en droit quand on pense que les certificats de sécurité ne peuvent être utilisés que pour détenir et expulser des résidents permanents ou des ressortissants étrangers, et que si des Canadiens sont accusés de terrorisme, ils sont arrêtés, accusés et punis en vertu du Code criminel du Canada.
    La première partie du Code criminel du Canada, qui porte sur l'application régulière de la loi, est censée protéger les droits et la sécurité des Canadiens. Entre autres, il faut que les Canadiens puissent regarder leur accusateur dans les yeux et voir les éléments de preuve accumulés. J'aimerais très clairement affirmer que les certificats de sécurité ne prévoient pas d'application régulière de la loi comme le prévoit le Code criminel.
    L'autre lacune que présentent les certificats de sécurité est qu'ils ne permettent pas de rendre justice et ne donnent pas l'occasion d'examiner en détail le comportement suspect afin de déterminer les risques qui pèsent sur les Canadiens. Quel est le risque, en réalité? Il faut que ce risque soit prouvé et exposé devant un tribunal afin de veiller à ce que les droits des particuliers soient protégés.
    Selon nous, le Code criminel est la meilleure façon de protéger la sécurité nationale tout en veillant à la protection de nos droits. En présentant le projet de loi C-3, le gouvernement nous donne l'impression qu'il propose une solution symbolique seulement pour donner suite à la décision de la Cour suprême à laquelle j'ai fait allusion plus tôt. Des experts m'ont confirmé que la nouvelle mesure sera elle aussi invalidée par la Cour suprême.
(1715)
    Le bricolage du gouvernement ne suffira pas à sauver cette mesure. En toute justice, également, nous estimons que la travail du comité ne pourra non plus la réchapper puisque c'est une mesure qui, à la base, est viciée.
    Toute mesure législative qui limite les droits ou qui ouvre la porte à leur violation peut avoir des conséquences terribles pouvant aller jusqu'à la perte de liberté et l'expulsion vers un pays où il est malheureusement très possible qu'une personne soit torturée. Au nom du respect des droits de la personne, ce genre de mesure législative ne doit pas aller de l'avant.
    Pensez-y un instant: une personne pourrait être détenue et expulsée du Canada sans même savoir pourquoi. Il est tout aussi horrible d'imaginer que l'absence d'une application régulière de la loi ne serait jamais ébruitée, pour les mêmes raisons. Les Canadiens ne sauraient jamais s'il y avait un risque ou quelle en était la nature. Également, sur le plan de la justice au sens strict, les personnes concernées n'auraient aucune occasion de réfuter les accusations qui pèsent contre elles.
    Poussés par la peur, nous serions donc disposés à laisser tomber l'application régulière de la loi et les droits démocratiques fondamentaux qui permettent aux intimés de confronter ceux qui les accusent, de connaître les éléments de preuve retenus contre eux et de s'en défendre. C'est même pire qu'un procès bidon. Dans ce cas, tout au moins, on sauve les apparences. Le projet de loi C-3 ne prévoit rien à cet égard.
    La mesure prévoit un défenseur dans le cadre du processus de sécurité. On fait appel à un défenseur au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande. Cependant, le processus proposé ne corrige en rien les lacunes que comporte le certificat de sécurité dans ces deux pays. Les audiences continuent d'être tenues en secret. Les sources d'information continuent d'être gardées secrètes. On ne se surprendra donc pas d'apprendre que, au Royaume-Uni, un défenseur ayant sept ans d'expérience, ait voulu protester récemment en donnant sa démission.
    Le Code criminel offre déjà les outils qu'il nous faut pour protéger notre sécurité nationale, tout en respectant la Charte des droits et libertés.
    Nous estimons également que les ressortissants étrangers et les résidents permanents doivent bénéficier des mêmes processus et se voir infliger les mêmes sanctions que les Canadiens.
    À nos yeux, les certificats de sécurité comportent deux problèmes. Tout d'abord, ils constituent une violation de la Charte et minent notre système de justice. En deuxième lieu, ils ne constituent pas l'outil approprié pour protéger la sécurité nationale. Même si les certificats de sécurité étaient jugés conformes à la Constitution, ils ne représenteraient pas une bonne stratégie pour lutter contre le terrorisme. C'est pour cela que le Code criminel existe.
     je le répète, ce ne sont pas les certificats de sécurité qui permettront de contrer les menaces à la sécurité nationale. Les personnes qui conspirent pour lancer des attaques terroristes contre le Canada devraient être jugées, condamnées et punies, et non pas tout simplement expulsées vers un autre pays à partir duquel elles pourront revenir au Canada ou, si elles sont coupables de terrorisme, conspirer ailleurs dans le monde, peut-être contre nos alliés.
    Le terrorisme, l'espionnage et le crime organisé sont des affaires sérieuses qui devraient toujours être traitées sous le régime du Code criminel et pas en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    Le processus des certificats de sécurité viole également les droits et mine les valeurs fondamentales de notre système de justice. C'est pourquoi ce processus a été invalidé par la Cour suprême et c'est pourquoi les gens que nous avons entendus, les experts dans le domaine, affirment que la mesure législative doit être rejetée.
    Assurer la sécurité du public consiste essentiellement à protéger la qualité de vie des Canadiens. Les néo-démocrates et les députés à la Chambre ont toujours été très préoccupés par l'équilibre entre la liberté et la sécurité.
    Nous nous opposons à la mesure législative en raison de ses graves défauts dont j'ai déjà parlé, mais aussi parce que nous n'avons aucune garantie que les personnes soupçonnées d'être des terroristes qui sont visées par des certificats de sécurité ne reviendront pas au Canada. Le NPD croit clairement que le Code criminel devrait être utilisé pour que justice soit rendue. « Justice » est un mot que nous n'entendons pas dans notre débat sur le projet de loi.
    On nous demande de pouvoir prendre quelqu'un dans la rue, de le détenir, de le mettre dans un avion et de l'envoyer à l'étranger sans lui donner le droit de tenter d'obtenir justice, d'être entendu par nos tribunaux, par sa collectivité et par sa famille et de pouvoir présenter sa propre défense.
(1720)
    Quatre des cinq personnes détenues ont maintenant été libérées. Elles portent un bracelet émetteur à la cheville quand elles se déplacent. Il conviendrait de réfléchir un peu aux restrictions que cela leur impose, même si cela est censé être moins pire que d'être détenu. Si l'une de ces personnes décide de se déplacer depuis l'avant jusqu'à l'arrière de la maison où elle se trouve, elle doit alors être accompagnée d'un membre de la famille. Si elle veut sortir dans le jardin, elle doit être accompagnée d'un membre de la famille.
    Si ces personnes veulent venir à la Chambre, elles doivent fournir au SCRS un itinéraire précis, indiquant les virages précis qu'elles emprunteront, et un horaire précis. Pourquoi donnerions-nous notre appui à une mesure qui limite à ce point les droits d'une personne dans ses allées et venues? Pourquoi nous placer, en tant que pays, dans une situation qui nous rend complices du genre de chose qui est arrivée à Maher Arar?
    M. Almalki a, tout comme M. Arar, été détenu pendant des mois dans un espace pas plus grand qu'un cercueil. C'est ainsi que son lieu de détention m'a été décrit. Quels contrôles sont exercés lorsqu'on expulse quelqu'un? Quelle est la filière de responsabilité nous permettant d'avoir l'assurance que cette personne ne sera pas torturée?
    Chaque jour, à la Chambre, il est question de l'Afghanistan, des prisonniers qui sont confiés aux autorités afghanes et des allégations de torture dans ce pays. Ces gens sont nos alliés. La Chambre n'a toujours été saisie d'aucun rapport en bonne et due forme expliquant ce qui s'est passé, qui assure le suivi et qui rend des comptes à qui.
    Si nous expulsons des gens — si nous les faisons littéralement monter à bord d'un avion en partance pour l'étranger — comment pouvons-nous nous attendre à ce qu'il y ait une ligne de responsabilité dans des pays où l'on pratique la torture? Il n'y en a pas. Tous les citoyens de notre pays et tous les ressortissants étrangers qui y vivent sont en droit d'attendre du gouvernement et de chacun de nous que nous protégions toutes les libertés qui existent dans notre pays. L'une de ces libertés, c'est celle de vivre à l'abri de la torture.
    Comme je l'ai répété à maintes reprises, y compris dans mes remarques aujourd'hui, ce à quoi on s'attend également, c'est d'avoir le droit de confronter son accusateur, de demander que justice soit faite, de prendre connaissance de la preuve qui pèse contre soi. Ce droit est cher à tous les Canadiens. Qu'est-ce qui a changé? J'ai parlé des changements de mentalité survenus aux États-Unis et de la migration de cette nouvelle mentalité vers le nord. Les choses ont changé au sein du gouvernement. J'ai parlé de cette attitude revancharde.
    L'équité et la justice n'ont pas changé dans l'esprit des Canadiens. Si nous discutons de ce projet de loi en profondeur avec eux, ils nous diront qu'ils n'en veulent pas et, à vrai dire, ils se demanderont comment nous avons même pu en arriver là.
(1725)
    Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue de Hamilton East—Stoney Creek. Il est clair que notre parti ne partage pas cet avis. Nous croyons que nous avons besoin d'une mesure de ce genre dans l'intérêt de la sécurité nationale.
    Pour ce qui est des défenseurs, le député a fait des comparaisons avec le modèle britannique. Je reconnais que certains ont souligné que ce système prévoyant la participation d'un défenseur ne donne qu'une illusion de respect du droit des détenus à une représentation équitable. Qu'est-ce qui le dérange autant dans ce système?
    Monsieur le Président, ce qui me dérange, c'est le fait que le défenseur n'a pas accès à tous les renseignements dont il aurait besoin. Les renseignements auxquels il a accès ne sont pas du domaine public. Il est clair que le système de certificats est inadéquat en ce sens qu'il n'assure pas l'application régulière de la loi tel que prévu dans notre Code criminel qui précise qu'une personne peut être publiquement informée des preuves qui sont retenues contre elle et y répondre publiquement
    Monsieur le Président, je me félicite des observations faites par le député au sujet du projet de loi C-3. Je reviendrai sur ce qu'il vient de dire concernant ce qui est peut-être une réaction exagérée du gouvernement canadien, autrement dit du gouvernement libéral précédent et du gouvernement conservateur actuel, à la suite des événements du 11 septembre et à l'égard de la menace du terrorisme.
    Un certain nombre d'exemples illustrent jusqu'à quel point le gouvernement de l'époque semble avoir eu une réaction impulsive face à une situation très difficile dont je ne voudrais en aucun cas diminuer l'importance. En effet, il a mis en oeuvre des initiatives qui créent davantage de problèmes qu'elles ne permettent d'en régler.
    Je présume que l'exemple le plus pertinent aujourd'hui est l'incident impliquant un pistolet à impulsion électrique qui est survenu la semaine dernière à l'aéroport de Vancouver. Pour beaucoup, le Canada est devenu une société favorable à l'adoption de ce genre d'armes, mais une société qui, par contre, n'est pas en mesure de mettre en place des services frontaliers convenables ni des services d'interprétation pour aider les étrangers qui arrivent dans notre pays.
    Comme les députés de Windsor l'ont fait remarquer, nous n'arrivons même pas à mettre en place des mécanismes grâce auxquels les ambulanciers et les pompiers pourraient traverser la frontière pour porter secours à une municipalité en péril. Le problème, c'est que nous sommes trop préoccupés par ces solutions impulsives, rapides et faciles qui ne donnent pas nécessairement les résultats escomptés et qui engendrent par contre beaucoup d'autres problèmes. Dans le cas qui nous préoccupe, il est question de priver des gens de leurs droits et libertés civils.
    Le député d'Hamilton-Est—Stoney Creek pourrait-il nous dire s'il a des observations à formuler sur cet aspect de la question?
    Monsieur le Président, c'est exactement ce que l'intervenant précédent a dit. Les événements du 11 septembre 2001 ont entraîné une érosion des droits fondamentaux. Compte tenu de l'horreur de ces événements et du fait que de nombreux Canadiens ont trouvé la mort dans les immeubles ciblés, je suis persuadé que les députés de cette Chambre ont eu le coeur aussi serré que les gens du monde entier en voyant les images de cette tragédie à la télévision. Nous ne pouvions pas faire abstraction de ces événements tragiques.
    D'autre part, littéralement des centaines d'années d'évolution en matière de droit et de Code criminel ont été mises de côté de façon presque anodine dans la mesure où les choses se sont passées tellement rapidement. Je suis très prudent quand je parle de la motivation qui animait les gens à l'époque, mais cela ne justifie pas le fait qu'on ait mis les acquis de côté. C'est dans cette enceinte qu'il faut défendre les droits fondamentaux des Canadiens. Il n'y a pas d'autre endroit pour le faire au Canada.
    Le fait que la Cour suprême se prononce contre une mesure législative indique que la Chambre doit examiner plus attentivement les projets de loi de cette nature avant de les adopter.
(1730)
    Monsieur le Président, dans son intervention, le député de Hamilton East—Stoney Creek a mentionné que les personnes expulsées du Canada ne connaîtront jamais la raison de leur renvoi. Il trouve cela choquant. Je signale au député que tous les pays ont le droit de refuser d'admettre un ressortissant étranger sur leur territoire. Je crois qu'un indésirable est désigné persona non grata. Tous les pays ont un tel droit à l'égard de l'entrée sur leur territoire et ils ne sont jamais tenus de fournir la raison pour laquelle ils refusent le droit d'entrée à une personne.
    En outre, le député a mentionné que les Canadiens ne sauront jamais quelle menace pesait sur eux. Il pourrait peut-être expliquer un peu plus en détail comment certains en arrivent parfois à jouer sur les deux tableaux.
    Monsieur le Président, la situation est très difficile, mais elle revient à une chose très fondamentale, à savoir le droit des démocraties du monde entier de dire qu'une personne a le droit de faire face à son accusateur et de connaître les éléments de preuve qui existent contre elle.
    À mon avis, les Canadiens ne veulent pas faire partie d'un pays qui arrête les gens dans la rue et qui les jette, menottes aux poings, à l'arrière d'une camionnette pour qu'ils disparaissent. Le mot « renvoi » explique ce qui se passe aux États-Unis. Il est toujours très intéressant de relever les mots à la mode. Les députés devraient examiner la signification de ce mot. Il s'agit d'un code qui signifie torture.
    Manifestement, dans une démocratie fragile, et toutes les démocraties sont fragiles, lorsque nous commençons à permettre à des gens de décider qui a davantage de droits que d'autres, nous nous mettons en danger et nous mettons notre pays en danger. La réalité est fort simple. Nous avons un Code criminel, qui comporte un ensemble de lois. Il est temps que nous recourions à ces lois.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai écouté l'allocution de mon collègue et j'aimerais lui rappeler que selon la nature des débats que nous avons aujourd'hui, le projet de loi C-3 semble recevoir en ce moment l'appui des autres partis et que le tout se déroule dans le pur respect d'un débat démocratique.
    J'aimerais aussi rappeler à mon collègue que le projet de loi C-3 est une réponse responsable aux requêtes de la Cour suprême. Cela exprime la volonté de notre gouvernement d'agir afin de trouver un équilibre entre préserver la sécurité des Canadiens et assurer les droits individuels.
    Au cours de son allocution, je n'ai pas entendu mon collègue proposer beaucoup de pistes de solution, alors qu'aujourd'hui, j'ai senti que beaucoup de députés étaient en mode solution afin d'apporter des suggestions visant à bonifier ou modifier le projet de loi.
    Selon mon collègue, qu'est-ce qui peut être fait dans le but d'améliorer le projet de loi?
(1735)

[Traduction]

    Monsieur le Président, il me reste environ une minute et j'en profite pour dire très clairement que cette réaction de la part du gouvernement constitue une façon très mitigée de tenter de corriger une mesure très sérieuse que la Cour suprême du Canada a invalidée.
    De nombreux juristes de tout le pays affirment que ce projet de loi est déficient et qu'il sera également invalidé. Je dis très clairement que le gouvernement n'a pas fait son travail.
    Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends aujourd'hui la parole au sujet du projet de loi C-3, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et plus particulièrement au sujet de l'utilisation des certificats de sécurité.
    J'ai écouté le débat. Je crois qu'il s'agit d'un sujet très important. La Chambre tente aujourd'hui de concilier deux questions fondamentales. La première vise, bien entendu, la protection des citoyens. La deuxième vise la protection des libertés civiles fondamentales qui ont été accordées aux citoyens au fil des ans.
    Au sujet de cette conciliation, j'aimerais dire qu'il n'existe rien de plus important, pour quelque gouvernement que ce soit dans le monde, que la protection de ses citoyens. C'est pour cette raison même que les gouvernements ont été créés. Il y a des siècles de cela, les gouvernements ne se préoccupaient pas de routes, de santé, d'éducation ou d'émission de permis de conduire. Les gouvernements servaient fondamentalement à financer et à entretenir des armées destinées à protéger leurs citoyens respectifs.
    Nous avons toutefois beaucoup évolué depuis ces temps lointains. Nous nous retrouvons devant un principe très fondamental de la démocratie: une personne accusée d'un crime a certains droits fondamentaux. Selon moi, ces droits proviennent de la loi de l'habeas corpus, adoptée il y a plusieurs siècles, et selon laquelle aucun individu ne peut être détenu sans justification et doit comparaître en cour. C'est le principe de base de l'habeas corpus.
    Cette loi a évolué au fil des ans, à un point tel que les accusés doivent immédiatement être informés de la raison de leur détention. On doit leur dire de quoi ils sont accusés. On doit leur donner le droit d'avoir recours aux services d'un avocat, le droit de pouvoir être libéré sous caution immédiatement et, bien entendu, le droit d'être jugé de façon rapide, juste et équitable le plus vite possible.
    Ce sont des principes fondamentaux qui ont évolué avec notre société et qui font partie de nous. Tous les députés acceptent ces principes. Personne ne souhaite les abroger de quelque façon que ce soit.
    C'est de ces principes dont il est question dans la situation actuelle unique où le gouvernement du Canada vise des particuliers. Heureusement, on ne parle pas d'un grand nombre de personnes, mais cela importe peu. Le gouvernement du Canada doit être prêt à régler ces situations lorsqu'elles se présentent.
    C'est l'équilibre que la Chambre tente de trouver. Compte tenu des débats, des discussions, des questions et des observations auxquels nous avons assisté, les députés peuvent comprendre que la question n'est pas simple. Des deux côtés de l'équation, les points de vue sont solidement ancrés. Cela dit, il incombe à la Chambre des communes de trouver le juste équilibre.
    En 2001, peu après les événements du 11 septembre, le régime de certificats de sécurité est entré en vigueur et s'est appliqué tel quel pendant plusieurs années. En février dernier, la Cour suprême du Canada a invalidé les certificats de sécurité, disant qu'ils contrevenaient à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    La raison principale de cette décision était l'absence du droit d'être représenté par un avocat et l'absence de divulgation acceptable, ce qui allait à l'encontre de la notion d'équité. Dans ses commentaires, la juge en chef McLachlin a dit ce qui suit:
    Il se peut que, privée de ces renseignements, [la personne désignée] ne soit pas en mesure de corriger les erreurs, relever les omissions, attaquer la crédibilité des informateurs ou réfuter les faussetés.
    Donc, les certificats de sécurité ont été déclarés inconstitutionnels. C'était une juste décision. Il arrive que les décisions des tribunaux ne soient pas totalement justes, car elles plongent le droit et la législation dans le chaos. Dans ce cas précis, la Cour suprême du Canada a déclaré la loi inconstitutionnelle, mais a laissé un an au gouvernement pour la modifier.
(1740)
    Dans ses observations qui, je suppose, sont incidentes au fondement de la décision, la cour a fait allusion à d'autres pays — je crois qu'elle parlait de la Grande-Bretagne — qui pourraient servir de modèles au Canada dans la rédaction de mesures législatives constitutionnelles qui respecteraient les paramètres de la Charte canadienne des droits et libertés. Les certificats existent maintenant depuis cinq ou six ans et nous débattons encore la question. Il nous incombe de trouver le juste équilibre.
    Certains ont fait valoir qu'étant donné que les certificats de sécurité servent rarement, nous n'avons pas à les inclure dans la loi. Je me dissocie complètement de ces propos. J'ai un extincteur et des détecteurs de fumée, et je ne les ai jamais utilisés. J'ai aussi une police d'assurance-vie qui n'a pas encore servi. Le fait que je ne me sois jamais servi de ces choses ne m'incite pas à m'en débarrasser. Je me dissocie totalement de ce genre d'argument. Nous devons être prêts à affronter toute situation qui pourrait surgir et nous avons eu à réagir à quelques reprises dans notre pays. Nous devons viser un équilibre.
    Je voterai pour que ce projet de loi sont renvoyé au comité. Tous les députés, nous sommes actuellement 304 je crois, ont des opinions et des idéologies différentes. Le projet de loi C-3 n'est pas parfait. J'aurais probablement fait les choses différemment à certains égards, mais je crois qu'il faut très certainement le renvoyer au comité où 12 parlementaires pourront l'étudier et entendre des témoignages d'experts. Le comité pourra apporter des amendements et retourner le projet de loi à la Chambre pour le vote final. Je voterai en faveur du renvoi du projet de loi au comité pour cette raison.
    Je dois signaler que nous parlons d'une question de sécurité nationale et que, de mon point de vue, la partisanerie n'a pas sa place dans cette discussion. Il s'agit d'une question importante. Nous devons tous collaborer pour faire ce qui s'impose.
    La cour a été très juste, à mon avis, dans les directives qu'elle a données. Je lirai une autre citation. La cour fait allusion ici à d'autres pays qui devraient servir d'exemple et il en a été tenu compte dans les mesures législatives:
    Il ressort clairement des mesures mises en place par d'autres régimes démocratiques, et par le Canada lui-même dans d'autres situations relatives à la sécurité, qu'il est possible de concevoir des solutions qui protègent les renseignements de sécurité confidentiels, tout en portant moins atteinte aux droits des intéressés.
    Nous parlons de certificats émis dans des circonstances vraiment exceptionnelles et de cas exceptionnels de personnes qui ne sont pas admissibles dans ce pays pour des motifs de sécurité, qui ont prétendument violé les droits de la personne et des règles du droit international et sont mêlées à des crimes graves ou au crime organisé, ce qui n'est certainement pas chose très courante.
    Nous sommes en face de situations où la personne qui signe les certificats ne peut pas, pour des raisons de sécurité nationale, divulguer toute l'information à la personne visée par le certificat de sécurité. Lorsqu'une personne est accusée de meurtre et détenue, il va sans dire qu'elle est informée du nom de la victime et du moment et des circonstances du meurtre ainsi que de tous les faits entourant l'accusation. Dans le cas présent, cette information - et chacun peut comprendre la logique de ce raisonnement - ne peut pas et ne devrait pas être et, j'espère, ne sera pas divulguée à cette personne. C'est de l'information confidentielle et, si jamais elle était rendue publique, cela causerait certainement des problèmes.
    Le projet de loi C-3 exige un contrôle des motifs dans un délai de 48 heures, ce qui est certainement très raisonnable, à mon avis. Il y aurait un autre contrôle après six mois, si la personne détenue le voulait. Ces contrôles sont effectués par un juge de la Cour fédérale.
(1745)
    L'un des changements fondamentaux que ce document de loi apporte à la loi précédente concerne la nomination d'un défenseur. Cette personne doit remplir certaines conditions. Le défenseur doit être compétent et obtenir une habilitation de sécurité. Le défenseur a accès à de l'information qui constitue l'avis du gouvernement, ce qui permet un recours. Le défenseur a la possibilité de discuter de l'affaire avec la personne visée par le certificat de sécurité. Cette mesure législative simplifie la procédure. Elle confirme l'utilisation de ce que j'appellerais une preuve pertinente et fiable et ne prévoit pas de droit de contrôle des motifs de détention pour les ressortissants étrangers.
    Cette pratique est déjà utilisée à l'étranger. Je suis d'avis, encore une fois, que ce n'est pas une solution parfaite, car le défenseur ne pourra pas dévoiler toute l'information à la personne visée par l'ordonnance de détention, mais il est certain qu'elle tend vers l'équilibre nécessaire pour faire avancer les choses.
    Normalement, les personnes qui font l'objet de ces ordonnances de détention auraient le droit de rentrer dans leur pays. Toutefois, cela nous amène à une autre question très importante sur laquelle le comité devra se pencher. Il devra être établi clairement qu'on ne peut pas renvoyer une personne dans un pays où elle risque d'être torturée. Il faudra prévoir des mesures coercitives dans ce sens. On ne peut s'en remettre aux déclarations diplomatiques de certains pays affirmant qu'il n'y aura pas de torture. C'est un point très important. C'est une autre question d'équilibre. C'est en essayant de trouver ce que j'appellerais un équilibre très raisonnable qu'on peut voir toute la complexité de la situation.
    Comme je l'ai dit auparavant, je suis d'accord pour que la mesure soit renvoyée à un comité. Ce n'est pas une mesure parfaite. C'est un peu décevant, parce que la décision rendue en février 2007 nous donnait une année pour corriger le tir. Nous sommes saisis de ce projet de loi en décembre et nous le renvoyons à un comité. Le comité doit faire rapport à la Chambre. La mesure devrait être en vigueur en février 2008, ce qui nous donne très peu de temps. Comme il se fait tard, nous devons agir le plus rapidement possible.
    Ne serait-ce que de moi, j'entreprendrais le contrôle de la détention de la personne visée par un certificat après les 48 heures suivant le début de la détention. Plutôt que de laisser à la personne en détention le soin de demander un contrôle, je rendrais obligatoire ce contrôle à tous les trois ou six mois.
    Le projet de loi contient une disposition qui renforce l'obligation de rendre des comptes, puisqu'elle exige que le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre de la Sécurité publique signent les certificats de sécurité. Si jamais des dispositions de la loi n'étaient pas respectées, les ministres et les ministères qui soutiennent leurs actions seraient tenus responsables. Je crois que ces dispositions renforcent l'obligation de rendre des comptes.
    Voilà. Comme je l'ai dit, je vais appuyer le projet de loi. Si la Chambre décide de renvoyer la mesure au comité, j'espère que celui-ci l'étudiera prestement et le renverra à la Chambre dans sa forme finale.
    Nous avons affaire à des délais très serrés dans le cas de cette mesure. Nous espérons qu'elle entrera en vigueur en février 2008, ce qui nous laisse très peu de temps.
(1750)
    Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours éloquent et réfléchi, comme toujours, du député de Charlottetown. Je pense que j'exprime le voeu de tous ici en disant que j'espère que son assurance-vie ne commencera pas à être versée avant 40 ou 50 ans encore.
    Le député a parlé des défenseurs et a laissé entendre qu'il y aurait peut-être lieu de renforcer certains aspects du projet de loi. Ses préoccupations face à cette partie du projet de loi seraient-elles calmées s'il y avait des garanties strictes de financement adéquat pour les défenseurs et, de la même façon, des garanties strictes portant que toute l'information requise par le défenseur lui serait fournie dans un délai de 24 heures, afin que celui-ci dispose d'une certaine période de temps pour représenter le détenu de façon appropriée?
    Monsieur le Président, ce n'est pas une situation parfaite, mais il faut garder à l'esprit le fait que le processus prévu dans le projet de loi est fondamentalement différent de notre façon de concevoir l'application de la justice. La participation de défenseurs est inhabituelle en droit pénal ou en droit civil. Normalement, les personnes accusées d'avoir commis une infraction retiennent les services d'un avocat. Elles ne traitent pas avec un défenseur qui obtient des renseignements d'une autre source et qui ne peut leur communiquer ces renseignements. Cette façon de faire est inhabituelle, mais elle assure un certain équilibre. Toutefois, comme je l'ai dit, elle n'est pas parfaite.
    Pour ce qui est de la question du député, à savoir si un financement adéquat devrait être garanti, la réponse est oui, un tel financement est nécessaire, autrement le système ne fonctionnera pas.
    Par ailleurs, et cela est prévu dans le projet de loi, le système a été conçu de façon telle que la personne visée par un certificat de sécurité se verra remettre une liste de défenseurs qui, j'imagine, sera plutôt courte et en fait probablement très courte. La personne obtiendra probablement le défenseur de son choix, même si elle ne le saura probablement pas. C'était le deuxième volet de la question. Oui, il faut que cela se fasse. Autrement, tout le système ne sera qu'une farce. Par conséquent, il est à espérer que cette garantie soit prévue.
    Encore une fois, le financement, l'information et le choix sont tous des aspects importants et fondamentaux du processus.
    Monsieur le Président, je veux dire au député de Charlottetown que nous sommes franchement choqués que les libéraux soient prêts à appuyer un projet de loi comme celui-ci malgré leurs fortes réserves à son égard. Le député vient de répondre à une question en affirmant qu'il se préoccupait de certains éléments qui n'étaient pas inclus dans ce projet de loi, mais qu'il était prêt à espérer et à prier afin que ce projet de loi, qui a de sérieuses lacunes, produise de bons résultats. Il n'a pas paru se soucier des graves répercussions et incidences à long terme que ce projet de loi aurait sur les libertés et les droits individuels, deux choses auxquelles les libéraux me semblaient tenir beaucoup à une certaine époque. En effet, ils étaient fiers de leur bilan par rapport à la Charte des droits.
    Je veux soulever quelques préoccupations à propos de ce projet de loi et demander au député pourquoi il appuierait un projet de loi si imparfait. Il pourrait peut-être nous rassurer en nous disant que nous n'avons pas saisi quelque chose dans le projet de loi qui répond à ces préoccupations.
    Je sais que le NPD est le seul parti représenté aux Communes à s'opposer actuellement au projet de loi C-3, ce qui ne veut pas dire que nous ayons forcément tort et que les trois autres partis aient raison. À de nombreuses reprises, les conservateurs, les libéraux et les bloquistes ont fait front commun sur une question et défendu une mauvaise position. Nous nous trouvons actuellement dans une situation semblable. Nous sommes en train d'étudier à toute vapeur un projet de loi comportant des failles et nous ne pensons pas aux répercussions à long terme.
    Je sais que ce sont les libéraux qui ont initialement présenté ce projet de loi, dans le feu de l'action, après les attentats du 11 septembre 2001. Le gouvernement a alors proposé à la hâte des solutions rapides sans réfléchir aux conséquences qu'elles auraient sur d'autres éléments de la société canadienne. On pourrait s'attendre à ce que, désormais relégués sur les banquettes de l'opposition, les libéraux réfléchissent très sérieusement à la pertinence de la voie proposée, compte tenu notamment du jugement de la Cour suprême et des craintes exprimées par de nombreux organismes lors des audiences du comité au sujet du projet de loi.
    Il faut souligner que le projet de loi C-3 ne fait rien pour améliorer la sécurité des Canadiens, mais qu'il mine certaines libertés tout à fait fondamentales. C'est pourquoi nous nous opposons à ce projet de loi. L'emploi des certificats de sécurité signifie que des gens vont être accusés et expulsés du pays sans connaître les faits et sans que les détails leur soient présentés. Nous ne croyons pas que nous allons parvenir ainsi à résoudre le problème fondamental de la protection des Canadiens à l'ère du terrorisme, mais des droits et des libertés vont être violés.
    Nous ne croyons pas que les certificats de sécurité vont réduire le danger très sérieux qui nous menace. Nous avons besoin d'un gouvernement qui s'engage à mettre en oeuvre des services de sécurité frontalière adéquats, à former suffisamment le personnel de la GRC et à communiquer l'information nécessaire aux décideurs pour que nous puissions tous mettre la main à la pâte. En prenant un projet de loi pour violer les droits ...
(1755)
    Le député de Charlottetown a la parole.
    Monsieur le Président, tout d'abord, j'ai apprécié les commentaires de la députée de Winnipeg-Nord. Il est évident, d'après son discours, qu'elle n'est pas d'accord avec moi, mais c'est là l'avantage de cette institution. Nous avons des opinions différentes et faisons des commentaires différents.
    Dans un cas comme celui-ci, nous ne savons peut-être pas qui a raison et qui a tort, et nous ne le saurons sans doute à un moment donné à l'avenir. La députée a parlé de la loi de 2001 qui a été présentée en toute hâte. Cette loi était-elle parfaite? Non, elle a d'ailleurs été suspendue par la Cour suprême. Cependant, n'oublions pas que les choses nous apparaissent maintenant clairement, avec six ans de recul. Il serait facile pour nous de juger et d'évaluer des faits dont ne disposaient peut-être les gens qui ont rédigé le projet de loi à l'époque.
    Il est question d'équilibre, et la députée d'en face a son opinion. D'un côté, on veut accueillir tout le monde et ne bafouer les droits de personne, même s'il a été prouvé qu'il s'agit d'un terroriste, d'un criminel ou autre. De l'autre, on veut que le gouvernement puisse emprisonner pour une période indéterminée toute personne sur laquelle pèse le moindre soupçon. Ce sont là les deux extrêmes. Nous essayons de les concilier dans un projet de loi qui présente des concepts que nous n'avions jamais vraiment envisagés jusqu'à présent.
    Une fois de plus, il s'agit de trouver le bon équilibre et c'est pourquoi, à mon avis, cette mesure devrait être envoyée à un comité. Ce dernier devrait l'examiner, bien qu'il n'ait pas grand temps pour le faire, et nous présenter la meilleure mesure législative possible. J'espère qu'elle sera adoptée.
    Monsieur le Président, j'ai juste deux courtes questions à poser. Pour ceux qui se préoccupent des libertés civiles, pouvez-vous expliquer en quoi ce projet de loi est meilleur que le premier? Maintenant que le gouvernement semble avoir adopter comme politique de ne pas protéger contre la peine capitale les Canadiens qui se trouvent à l'étranger, vous avez parlé de renvoyer les Canadiens...
    À l'ordre. Je sais que le député est assis à côté de celui de Charlottetown, mais cela ne lui donne pas le droit de s'adresser directement à lui. Il doit poser ses questions en s'adressant à la présidence.
    Monsieur le Président, le député a parlé de renvoyer les Canadiens dans d'autres pays et je voudrais lui demander si cela le préoccupe.
    Monsieur le Président, pour répondre d'abord à la deuxième question, oui, cela me préoccupe. Je crois que c'est préoccupant pour la plupart des gens qui appuient ce projet de loi.
    Il s'est produit un incident très médiatisé, l'affaire d'un citoyen canadien qui a été envoyé dans un pays qui pratique la torture. Cela ne doit jamais se reproduire, et le comité doit garder cette question au sommet de ses préoccupations. Cette mesure comporte certaines dispositions en ce sens, mais nous devons l'examiner très soigneusement pour nous assurer que personne ne soit jamais expulsé vers un pays qui pratique la torture. Nous ne pouvons pas nous fier aux promesses des diplomates de certains pays sur cette question.
    Concernant les libertés civiles, l'objet de la première question du député, la disposition la plus marquante du projet de loi est celle qui crée la fonction de défenseur. C'est un concept qui nous est étranger, mais je crois comprendre que d'autres pays ont instauré un tel système avec succès.
    Ce n'est pas une disposition parfaite, mais je crois que c'est un pas dans la bonne direction. Je crois que c'est un effort pour équilibrer les principes fondamentaux dont nous traitons ici. On peut s'interroger sur le choix des défenseurs et le financement nécessaire. Ces défenseurs devront être compétents et, bien sûr, ils devront aussi satisfaire à des normes de sécurité. C'est toutefois un pas dans la bonne direction.
    Quand on lit la décision de la Cour suprême du Canada, on se dit que rien n'est jamais certain, bien sûr, et beaucoup d'experts ont des opinions divergentes. Certains experts ont émis l'opinion que cette mesure particulière, le projet de loi C-3, sera déclarée inacceptable par la Cour suprême du Canada. D'autres ont dit que ce ne sera pas le cas. Quoi qu'il en soit, quand on lit la décision de la cour, on a l'impression que cette mesure sera acceptable.
(1800)
    Monsieur le Président, le projet de loi C-3 concerne la façon dont la société compte aborder les attaques contre elle-même. Il me semble que, comme société, nous avons toujours une alternative. Nous pouvons répondre à une attaque par la peur et la panique ou nous pouvons y réagir en appliquant une croyance ferme dans les valeurs essentielles de notre société et en jugeant que ces valeurs nous protégeront et préviendront d'autres attaques.
    Après le 11 septembre en particulier, mais aussi à d'autres moments de notre histoire, comme pays et comme société, nous avons trop souvent choisi la première option. Nous nous sommes laissés guider par la peur et la panique et nous avons légiféré au lieu de protéger l'ensemble de la société. Cela a affaibli notre société. Nous le voyons bien avec les certificats de sécurité.
    Manifestement, je passerai la majeure partie de mon intervention à parler de ces certificats. Après le 11 septembre, il y a eu la Loi antiterroriste. À cette époque, le Canada a adopté une loi qui, d'après n'importe quelle analyse objective, n'était pas nécessaire. La législation en vigueur, c'est-à-dire le système de justice pénale, comportait déjà des dispositions pertinentes et les mesures en vertu de ce système nous protégeaient. L'histoire a prouvé cet argument au cours des cinq ou six dernières années, et en particulier au cours de la dernière ou des deux dernières années, lorsque des articles de la Loi antiterroriste ont été invalidés.
    La situation est semblable en ce qui concerne les certificats de sécurité, quoique ces derniers ont une particularité que nous n'avons pas encore vue avec la Loi antiterroriste.
    Avant de poursuivre, j'aimerais dire que, historiquement, nous avons pris certaines décisions très mauvaises. Celles-ci ciblaient souvent des communautés de notre société. Les communautés italo-canadiennes et germano-canadiennes ont été visées pendant les deux guerres mondiales. On a incarcéré un grand nombre de personnes pendant une bonne partie de ces guerres. Avec le recul, de manière objective, nous comprenons que ces personnes n'étaient pas une menace pour nous. Elles ne représentaient pas un problème de sécurité, mais nous les avons emprisonnées. Nous les avons éloignées de leurs familles et mises dans des camps de prisonniers pendant de longues périodes durant les deux guerres.
    Le plus tragique, c'est le sort que nous avons réservé aux Canadiens d'origine japonaise durant la Deuxième Guerre mondiale. Nous les avons privés de leurs biens et de leur liberté pendant toute la guerre sans les indemniser par la suite. C'est une tache sur l'histoire de notre pays.
    Pour ce qui est de la protection de la collectivité et de l'ensemble du Canada, je soutiens qu'il faut partir du principe que la société, que le système de justice pénale et que les systèmes de sécurité que nous avons bâtis sont plus que suffisants pour nous protéger.
    Ensuite, lorsqu'on nous donne ce choix, on nous dit toujours qu'il faut trouver un équilibre. Lorsque j'entends de tels propos, je frémis toujours parce que je sais ce qui va suivre. Lorsqu'il est question de chercher l'équilibre, on envisage en fait de supprimer des droits, des libertés civiles, de réagir sous le coup de la peur et de la panique plutôt que de se dire qu'en tant que société, sur une période de plus de 135 ans, nous avons bâti un système généralement capable de nous protéger.
(1805)
    Je reviens à la question des certificats de sécurité. Bien des gens que je connais pensent qu'il s'agit d'un produit de la Loi antiterroriste qui a fait suite aux événements du 11 septembre. Évidemment, ce n'est pas le cas. Les certificats de sécurité existent depuis près de 30 ans.
    Quand on jette un coup d'oeil à ces certificats, on constate que ce n'est qu'après les événements du 11 septembre qu'on en a vraiment abusé. Cela s'est produit principalement parce que, depuis, ils sont utilisés presque exclusivement, sauf dans le cas de M. Zundel, contre des musulmans qui correspondent au stéréotype qu'on se fait du terroriste. Je souligne l'idée du stéréotype du terroriste parce que, bien sûr, rien n'a été prouvé. Personne n'a même été accusé. Ces personnes sont simplement détenues.
    Je fais une petite rétrospective historique. Avant la tragédie du 11 septembre, on utilisait déjà les certificats. Il n'y a eu que quelques cas de détention prolongée. Seul un cas n'est pas encore réglé, mais en fait, le détenu dont il est question a été libéré sous condition et se trouve toujours au Canada parce qu'il ne peut retourner dans son pays d'origine sans risquer d'être torturé et probablement tué à cause de sa conduite à l'étranger. Il est donc encore au Canada et son cas a été soumis à la Cour suprême une fois et a fait l'objet de nombreux appels.
    Il est toujours au pays. Il n'a jamais été accusé, ni reconnu coupable de quoi que ce soit et il est toujours surveillé, même s'il vit dans la société. Cette affaire était plutôt abusive, mais celles qui ont suivi les événements du 11 septembre le sont encore plus.
    Je tiens à souligner que le système a changé après le 11 septembre parce que jusque là, nous avions ce que je considère comme de meilleures protections contre les recours abusifs à de tels certificats.
    Je dois dire que je m'opposais au recours à ces certificats à ce moment-là parce que je considérais que notre système de justice pénale suffisait amplement à régler les problèmes pour lesquels nous voulions appliquer les certificats.
    Toutefois, ce système permettait certainement plus sûrement de prévenir les abus. Il était utilisé par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et offrait plus de protection aux gens qui faisaient l'objet d'un certificat de sécurité, une protection plus conforme aux principes des libertés civiles et des droits de la personne au Canada. C'était loin d'être parfait, et je le répète, ce n'était pas nécessaire.
    Après le 11 septembre cependant, il est devenu très évident que nous utilisions ces pouvoirs presque exclusivement pour cibler des musulmans correspondant à un stéréotype bien précis.
    Il y a eu cinq cas depuis le 11 septembre, tous très semblables, de personnes qui ont été détenues pendant de longues périodes sans être accusées, et rien n'indique qu'elles finiront par être accusées au Canada. C'est loin d'être certain. Si ce sont des gens aussi violents qu'on le dit, s'ils constituent une menace aussi grave pour notre société, comment pouvons-nous, en tant que pays, les renvoyer? Se livreront-ils à des actes terroristes et violents dans l'autre pays?
    Dans bon nombre de cas, ces personnes sont au pays depuis très longtemps. Nous avons la responsabilité morale, si ce n'est juridique, de les garder ici et de les soumettre à notre système traditionnel de justice pénale. Bien sûr, nous ne l'avons pas fait.
    Il y a également eu certains cas où ces certificats ont été demandés et approuvés par nos propres ministres qui avaient le pouvoir de signature nécessaire pour le faire. Puis, il y a eu des batailles juridiques assez importantes devant la Cour suprême, et plus récemment devant la Cour fédérale en première instance, et à de nombreuses reprises devant la Cour d'appel fédérale.
(1810)
    Dans chacune de ces cinq affaires, sans exception, nous avons bien dû constater que les certificats sont inutiles puisque, sur le plan pratique, nous envoyons des gens dans des pays où ils font face à la torture ou à la mort. Or, nos tribunaux ont conclu que nous ne sommes pas disposés à agir de la sorte. Notre Cour suprême a laissé une très mince ouverture que nous pourrions exploiter à cet égard. Cependant, dans ces cinq affaires, nos tribunaux ont décidé que nous ne pouvions agir de la sorte, par crainte d'exposer des personnes à la torture ou à la mort.
    Nous sommes donc devant un dilemme. Ces personnes sont ici, au Canada. Nous déclarons que nous n'allons jamais les libérer, mais que nous n'allons jamais non plus les accuser ou les poursuivre. Voilà qui est tout à fait contraire à notre système de justice pénale traditionnel et qui le discrédite.
    Et maintenant, nous étudions cette mesure législative qui, en réalité, constitue une réaction au jugement rendu par la Cour suprême du Canada il y a environ dix mois. C'est l'une des affaires dont je viens de parler, justement, qui s'est rendue devant la Cour suprême. Dans sa décision à cet égard, la Cour suprême, après analyse de la loi habilitante visant les certificats, a décidé que nous ne pouvions continuer à appliquer le système tel qu'il est, puisqu'il constitue clairement une violation de la Charte des droits et libertés.
    Également, comme elle doit toujours le faire dans un deuxième temps, la Cour s'est demandé si ce genre de limitation des libertés civiles et des droits de la personne pouvait être autorisé dans une société libre et démocratie. Elle a répondu par la négative. Elle a déclaré que la loi et la pratique, dans leur forme actuelle, sont non constitutionnelles. La pratique est contraire aux exigences de la Charte et elle n'en est pas exonérée par la disposition de dérogation, celle de l'article 1 de la Charte, qui permet d'enfreindre les droits fondamentaux dans certaines circonstances exceptionnelles.
    La Cour a déclaré que cette pratique était illégale, non constitutionnelle et contraire à la Charte, et qu'aucune disposition d'exonération ne pouvait la rendre acceptable, et elle a donc enjoint le législateur de remettre l'ouvrage sur le métier et le rendre acceptable dans les 12 mois s'il le pouvait, sans quoi les certificats de sécurité seraient déclarés non constitutionnels et contraires à la Charte.
    L'échéance approche — en mars, je crois — et le gouvernement fait maintenant connaître sa réponse. J'ai trouvé que certains des autres députés qui, comme moi, ont lu le dossier juridique avaient un point de vue intéressant, mais mon interprétation est différente. On nous dit que le projet de loi C-3 corrige le problème en ajoutant le concept de défenseur.
    Ceux qui ont lu la décision de la Cour suprême et l'argumentation faite par les avocats des deux côtés comprendront, je crois, que le simple fait d'établir la fonction de défenseur, aux pouvoirs limités, ne satisfait pas aux exigences établies par la Cour suprême dans cette décision. Je dis cela pour deux raisons.
    La première est que l'argumentation présentée à cet effet par les avocats devant la Cour suprême était somme toute assez limitée. Il n'y a pas eu beaucoup de faits présentés au sujet du fonctionnement du système de défenseurs, notamment au Royaume-Uni, où le projet de loi C-3 prend une bonne partie de son inspiration. Mais certains renseignements étaient tout de même connus. On s'interrogeait sérieusement sur l'efficacité et le fonctionnement de ce système au Royaume-Uni. J'y reviendrai dans une minute.
    Donc, bien que ces arguments aient été présentés devant la Cour suprême, ils ne l'ont pas été de façon approfondie. Le compte rendu indique clairement que, pour la cour, c'était peut-être une façon de régler le problème. Je crois que c'est une interprétation fidèle de ce qu'elle a dit. La Cour suprême n'a certainement pas dit que le recours à des défenseurs était la solution au problème. Ce n'est pas ce qu'elle a dit. En fait, elle a indiqué très clairement que c'était peut-être, sans plus, une façon de corriger le fait que les certificats de sécurité contreviennent à la Charte.
(1815)
    Je sais que d'autres députés ont souligné cet aspect, mais lorsque nous examinons de près l'expérience du Royaume-Uni, il ressort clairement que plusieurs juristes ayant joué le rôle de défenseurs ont démissionné de leurs postes et expliqué publiquement les raisons de leur geste. Sir Ian Macdonald est sûrement le premier qui nous vient à l'esprit.
    Il a rédigé un texte très éloquent au moment de sa démission. Il y expliquait les raisons pour lesquelles il ne pouvait continuer de jouer le rôle de défenseur en toute bonne foi. Il a énuméré les problèmes qu'il avait rencontrés en tant que juriste et avocat de grande renommée. Il a accumulé une grande expérience dans le domaine. C'est un avocat très expérimenté. Il est aussi un avocat professionnel très expérimenté dans le système de justice pénale britannique.
    Il a fini par conclure que, s'il voulait être honnête avec lui-même, dans sa profession et dans son rôle professionnel, il ne pouvait plus continuer; il en était incapable. Malgré son immense talent, son expérience juridique dans le système de justice pénale, il n'était plus en mesure d'assurer le degré de protection auquel on est en droit de s'attendre. Il a parlé de l'Angleterre, mais ses observations auraient pu tout aussi bien s'appliquer au Canada. Il a démissionné.
    Je tiens également à souligner qu'à un certain nombre d'occasions, les défenseurs ont présenté des demandes au gouvernement au sujet de l'autorité et du mandat plus larges dont ils auraient besoin pour communiquer avec la personne visée par ce genre de système. La situation est différente au Royaume-Uni, mais il y a aussi dans ce pays une sorte de certificat de sécurité. Les défenseurs britanniques voulaient jouer davantage le rôle d'un avocat traditionnel en protégeant la personne dont on leur avait confié le dossier.
    Le Royaume-Uni, au milieu du processus, a dû prévoir de nouvelles ressources, car il n'en avait pas beaucoup; il a dû prévoir du personnel supplémentaire pour aider l'avocat et créer un bureau indépendant afin d'assurer une protection additionnelle.
    Même après cela, sir Ian Macdonald a déclaré qu'ils ne pouvaient pas le faire, que c'était fondamentalement inacceptable et essentiellement contre les concepts de base de la common law britannique, des libertés civiles et des droits de la personne. « Et si vous souhaitez établir cette imposture, a-t-il dit, je refuse d'en faire partie. » Il a démissionné.
    Je crois que la Cour suprême verra les choses de la même façon si le projet de loi est adopté. Il le sera probablement d'ailleurs, parce que les libéraux, comme ils l'ont fait si souvent dernièrement, se rangent du côté du gouvernement. Ce projet de loi sera probablement adopté.
    Mon parti votera contre. Je crois qu'en bout de ligne, quand la Cour suprême du Canada sera à nouveau saisie de l'affaire, elle dira qu'elle a maintenant vu comment le système fonctionne, comment la création du rôle de défenseur ne répond pas aux exigences de base de la Charte et ne protège pas les droits fondamentaux au pays, et elle rejettera ce projet de loi lui aussi.
    Je suis fier de dire que le NPD continuera de s'opposer à l'utilisation des certificats de sécurité. Nous devrions nous débarrasser complètement de ces certificats. Nous devrions croire en notre capacité de protéger nos citoyens en recourant à notre système de justice pénale actuel et avoir le courage de nos convictions. Toutes sortes de preuves montrent que nous avons raison d'avoir confiance et de croire en notre système. C'est la voie à suivre. Ce projet de loi ne devrait jamais être adopté.
(1820)
    Monsieur le Président, j'ai écouté les commentaires du député de Windsor—Tecumseh à ce sujet. De toute évidence, nous ne nous entendons pas sur le sort qui devrait être réservé au projet de loi C-3. Son parti semble croire que nous ne devrions pas poursuivre l'étude de cette mesure ni explorer d'autres avenues parce que le principe fondamental du projet de loi est déficient. Pour notre part, nous voulons renvoyer le projet de loi au comité, où des députés de chaque parti auront voix au chapitre et pourront l'amender de façon à le rendre convenable, afin qu'il puisse être appliqué aux détenus dans l'avenir.
    J'ai une question pour le député. J'aimerais savoir si, à son avis, il y a suffisamment d'instruments en place pour nous permettre d'identifier, avant leur arrivée au Canada, les aspirants à l'immigration qui sont des terroristes ou qui ont été impliqués dans des crimes de guerre dans d'autres pays. Croit-il que nous devrions consacrer plus de temps à l'examen de leur demande plutôt que de leur permettre de s'établir au Canada et de devoir émettre des certificats de sécurité par la suite?
    Monsieur le Président, nous pouvons analyser le processus par lequel les 19 terroristes ont commis les atrocités du 11 septembre, comme cela a été fait de façon très approfondie, et examiner le système des États-Unis, qui procèdent à des vérifications beaucoup plus rigoureuses des personnes voulant entrer sur leur territoire que nous ne le faisons dans le cadre du système canadien, ou du moins que nous ne le faisions à l'époque, puisque nous avons passablement renforcé nos mesures depuis ce temps.
    Je crois qu'il serait injuste en tant que parlementaires de dire aux citoyens canadiens que nous pouvons absolument leur garantir que nous sommes en mesure d'empêcher toute personne déterminée à commettre un acte terroriste ou violent d'entrer dans le pays. Il serait imprudent de notre part de le faire.
    Je tiens à répéter que nous avons passablement renforcé nos mesures en ce qui a trait aux personnes qui entrent dans notre pays depuis les événements du 11 septembre. Je crois qu'un certain nombre de ces dispositions ont été utiles; d'autres ne l'ont probablement pas été du tout.
    J'aimerais soulever un autre point afin de répondre à ce que le député a dit à propos de notre refus d'appuyer ce projet de loi. J'ai exercé le droit pendant 27 ans; je plaidais surtout devant les tribunaux, et, au début de ma carrière, je me suis surtout concentré sur le droit pénal. Je peux bien comprendre le désir d'utiliser des certificats de sécurité, mais mon expérience juridique pratique me dit qu'en tant qu'avocat, je ne pourrais jamais faire fonctionner ce système tout en préservant nos libertés civiles et nos droits fondamentaux.
(1825)
    Monsieur le Président, j'écoute le débat, auquel participent les trois partis de l'opposition, et je suis un peu étonné d'apprendre, à en juger par les commentaires, que le NPD est le seul parti qui s'opposera au projet de loi C-3 à ce stade-ci.
    Je veux demander à mon collègue, au cours des minutes qu'il nous reste pour débattre ce sujet aujourd'hui, si je comprends bien. Même si la Cour suprême a annulé les dispositions des années 1990 sur les certificats de sécurité, lorsque les conservateurs ont présenté de nouveau le projet de loi C-3, on trouvait encore les mêmes éléments controversés du processus de certificats de sécurité, comme les audiences secrètes, la détention sans accusation ou déclaration de culpabilité, la détention sans connaissance de la preuve contre la personne et l'absence d'un processus d'appel.
    Il me semble, et je demanderais à mon collègue de le confirmer, que c'est là un affront à la justice naturelle, quelle que soit la définition qu'on lui donne et dans quelque nation développée que ce soit. Pourrait-il se pencher sur certaines des raisons pour lesquelles le NPD ne peut pas appuyer ce projet de loi à ce stade-ci? Même si ce projet de loi peut être amendé, lorsqu'il sera étudié en comité, ces points à eux seuls justifient qu'on s'y oppose à l'étape de la deuxième lecture.
    Monsieur le Président, l'évaluation de mon collègue de Winnipeg est très juste. Le simple fait de prévoir un défenseur ne règle en rien les autres problèmes tels l'incarcération sans accusation ni déclaration de culpabilité et, à bien des égards, la remise en question du droit de garder le silence. Les gens doivent pratiquement rompre leur silence pour savoir pourquoi ils sont détenus. C'est une tournure intéressante. Il ne fait aucun doute que le projet de loi C-3 est une solution de fortune, et j'aimerais faire une observation à cet égard.
    Je crois que c'est le ministère de la Justice qui a demandé à un professeur de droit d'Ottawa et à un avocat en pratique privée spécialisé dans les dossiers de citoyenneté et d'immigration de mener une étude sur les certificats de sécurité. Ils ont préparé un rapport très détaillé de 50 ou 60 pages. Ils ont analysé les pratiques au Royaume-Uni, au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Outre le défenseur, ils ont dressé une longue liste des mesures qui pourraient être prises afin, peut-être, de rendre acceptable le système des certificats de sécurité. Le gouvernement n'a retenu que le pis-aller qu'est le défenseur. Le rapport était également très clair sur le fait que ce défenseur devait disposer de larges pouvoirs, mais presque rien n'a été fait à ce sujet.
    Nous en revenons aux motifs qui nous poussent à voter contre ce projet de loi. Il ne passera pas l'étape finale, lorsqu'il sera renvoyé à la Cour suprême.
    Monsieur le Président, pourquoi le député croit-il que le défenseur ne protégerait pas les libertés civiles et que cette solution serait inconstitutionnelle?
    Monsieur le Président, le temps qu'il me reste est une bonne indication de la valeur de la question, mais je ne pourrais pas rendre justice à mon ami de Yukon.
    À l'ordre. Le temps est écoulé.

MOTION D'AJOURNEMENT

[Motion d'ajournement]

    L'ajournement de la Chambre est proposé d'office conformément à l'article 38 du Règlement.

[Traduction]

L'Afghanistan

    Monsieur le Président, je prends la parole ce soir au sujet de l'Afghanistan et d'une question que j'ai posée devant la Chambre au cours de la présente session, au sujet de la rotation des troupes.
    La Chambre a adopté une motion disant que la mission de combat du Canada dans la province de Kandahar, en Afghanistan, se terminerait en février 2009.
    Le gouvernement n'en a pas avisé les partenaires du Canada au sein de l'OTAN, de manière à ce que la rotation s'effectue. En 2003-2004, nous avions une force militaire en Afghanistan. Nous avons avisé l'OTAN, et les Turcs sont venus nous remplacer. Le gouvernement ne semble pas vouloir procéder ainsi. Le ministre de la Défense nationale parle d'une prolongation éventuelle jusqu'en 2011. Le chef d'état-major de la Défense parle même de demeurer là-bas jusqu'en 2017.
    Il ne s'agit pas d'une mission uniquement canadienne. C'est une mission de l'OTAN. Or, sur les 26 pays membres de l'OTAN, seulement six pays se sont acquittés d'une mission consistant à rechercher activement le combat en Afghanistan.
    Le Parti libéral a affirmé très clairement que le Canada devrait cesser de jouer un rôle militaire en février 2009, ce qui ne nous empêcherait pas de jouer un autre rôle. Nous pourrions notamment former la police nationale afghane, qui en a bien besoin. Nous constatons entre autres qu'il y a des problèmes de corruption et que la sécurité n'est pas assurée dans les villages. Nous pouvons jouer d'autres rôles importants en Afghanistan, mais nous ne devons pas nous retrouver dans une mission de combat.
    En 2009, nous aurons connu la plus longue mission de combat à l'étranger de l'histoire du Canada. Nous ne pensons pas qu'il soit réaliste pour nous de continuer au-delà de février 2009.
    La question visait essentiellement à connaître la position du gouvernement.
    Premièrement, la date proposée à l'origine, en passant, était février 2009. Le gouvernement s'en tiendra-t-il à cette date?
    Deuxièmement, quand le gouvernement fera-t-il savoir à l'OTAN que notre rôle dans la mission de combat prendra fin en février 2009? Plus il attendra longtemps, plus il sera difficile de trouver des troupes pour remplacer les Canadiens.
    Finalement, qui parle vraiment au nom du gouvernement? Le ministre de la Défense nationale, le ministre des Affaires étrangères ou le premier ministre? À moins que ce ne soit le chef d'état-major de la Défense, qui parle de rester en Afghanistan jusqu'en 2017? Les Canadiens doivent savoir. Les Canadiens veulent une réponse. Ils veulent une réponse ferme.
    Il est plutôt ironique qu'un gouvernement qui a proposé février 2009 comme date se soustraie à l'engagement qu'il a lui-même pris à la Chambre, et que la majorité des députés ont appuyée, en disant qu'il se pourrait bien que ce ne soit pas février 2009, mais plutôt 2011, voire plus tard. C'est très important. Il nous faut savoir quelles sont les options réalistes.
    Notre parti est prêt à travailler avec d'autres à la formulation de propositions originales pour la période d'après février 2009. Je ne veux pas entendre le gouvernement dire que nous nous enfuyons ou d'autres insanités du genre. Nous sommes prêts à être en Afghanistan, mais pour y jouer un rôle différent et certainement pas pour aller au combat. Nous l'avons déclaré très clairement.
    Le gouvernement continue le combat. Il ne veut pas nous parler de ce qui arrive aux talibans kidnappés. Nous avons signé des protocoles internationaux sur le sujet. Si nous voulons parler de la primauté du droit, des droits de la personne et le reste, il nous faut respecter ces protocoles.
    Certes, nous ne voulons pas que quelque chose arrive à nos militaires. Nous ne voulons pas devoir présenter de condoléances, comme nous l'avons fait plus tôt à la Chambre aujourd'hui aux familles et aux amis des deux courageux soldats qui ont perdu la vie en fin de semaine.
    La question est très claire. Nous avons fixé février 2009 comme date limite. Le gouvernement doit faire savoir à l'OTAN qu'il faut instaurer une rotation. Il ne l'a pas fait. Quand le gouvernement informera-t-il l'OTAN, afin que la Chambre et la population sachent à quoi s'en tenir?
(1830)
    Monsieur le Président, je trouve paradoxal de voir les députés d'en face hésiter et tourner en rond lorsqu'ils soulèvent un problème. Ils parlent comme si rien ne s'était produit auparavant et comme si la situation ne s'était présentée que la veille.
    Je signale au député que c'est son gouvernement qui a envoyé nos troupes en Afghanistan. Aujourd'hui, il affirme que les libéraux n'ont rien à voir avec l'envoi de nos troupes là-bas. Pourtant, ce sont bel et bien les libéraux qui ont décidé d'envoyer les Forces canadiennes en Afghanistan.
    Le député a dit qu'il ne connaît pas le plan du gouvernement et qu'il ne sait pas ce que celui-ci envisage. Je ne comprends pas. Nous avons été on ne peut plus clairs dans le discours du Trône. Peut-être qu'à l'instar du NPD, vous l'avez rejeté avant d'en prendre connaissance ou peut-être ne l'avez vous même pas lu. L'intention du gouvernement est exposée très clairement dans le discours du Trône. Permettez-moi de la présenter de nouveau.
    C'est le Parlement qui se prononcera sur la prolongation de la mission canadienne en Afghanistan. Entre-temps, nos troupes y sont jusqu'en 2009. Le premier ministre a dit très clairement que c'est le Parlement du Canada, dont vous êtes députés habilités à voter, qui décidera si ...
(1835)
    À l'ordre. Le secrétaire parlementaire devrait savoir depuis le temps qu'il n'est pas permis de s'adresser directement aux gens d'en face en disant « vous » et qu'il doit s'adresser plutôt à la présidence.
    Je formulerai mes observations en m'adressant à vous, monsieur le Président. Pas de problème, je suis tout à fait d'accord. Ce n'est pas notre problème si les libéraux sont désorientés parce qu'ils ne sont pas capables de lire un discours du Trône aussi clair que celui-ci. C'est leur problème.
    Pour ce qui est de faire savoir à l'OTAN que nous comptons retirer nos troupes, le Parlement du Canada est lié jusqu'en février 2009 par un engagement clair qu'il a pris précédemment. L'OTAN le sait. Le ministre de la Défense nationale le répète chaque fois qu'il assiste à une rencontre à l'OTAN ou qu'il s'entretient avec le secrétaire-général. Il était justement à l'OTAN il y a trois semaines et il doit y retourner en décembre. L'OTAN est parfaitement au courant de notre position. En fait, nous sommes en dialogue constant avec les autres membres de l'OTAN afin de garantir le succès de la mission en Afghanistan.
    Je ne vois pas comment la reconstruction pourrait avoir lieu sans que la sécurité ne soit assurée. Même les libéraux en comprennent la nécessité; ils semblent cependant croire, pour une raison ou pour une autre, que nous pouvons nous charger de la reconstruction et laisser à quelqu'un d'autre le soin d'assurer la sécurité. Pourquoi voudrions-nous que quelqu'un d'autre assure la sécurité?
    Nos forces font partie de forces collectives. Le Canada est membre de l'OTAN. Un échec en Afghanistan aurait des répercussions dans le monde entier. Quel rôle l'OTAN pourrait-il ensuite jouer? Qui lui ferait confiance? Qui croira en l'engagement du Canada envers l'OTAN dans l'avenir, si nous ne le respectons pas?
    Il faut bien comprendre que la mission en Afghanistan est une mission de l'OTAN. Le Canada a toujours procédé ainsi. Je reviens tout juste de Corée. Nous avons fait la guerre en Corée à la demande de l'ONU. Notre mission en Afghanistan a pour objectif principal la reconstruction.
    J'aimerais signaler très clairement à mon ami d'en face que seul le premier ministre ou le ministre de la Défense nationale parle au nom du gouvernement du Canada, personne d'autre.
    Monsieur le Président, la réponse du secrétaire parlementaire montre très clairement que le gouvernement ne faisait que plaisanter lorsqu'il a parlé de février 2009. Il compte demander à la Chambre de voter sur une prolongation au-delà de février 2009. Il ne veut pas que d'autres pays membres de l'OTAN fassent le gros du travail.
    Il ne s'agit pas d'une mission canadienne. C'est une mission de l'OTAN. Nous ne pouvons être les seuls à faire le gros du travail, aux côtés des États-Unis, de la Grande-Bretagne et des Pays-Bas. Il est clair que le gouvernement estime que nous devons porter seuls le fardeau en Afghanistan, au lieu de dire qu'il faudrait procéder à un roulement. Cela s'est fait auparavant.
    Encore une fois, nous envisageons d'autres solutions en Afghanistan. Il est ridicule et totalement inconcevable pour le Parti libéral et moi d'accepter la notion selon laquelle les conservateurs se sont entendus sur février 2009, la date qu'ils ont proposée, et la Chambre a appuyé la motion, mais en fin de compte, ils disent aujourd'hui que nous devons être là-bas plus longtemps...
    Le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères a la parole.
    Monsieur le Président, permettez-moi d'assurer au député que nous nous entretenons constamment avec nos alliés de l'OTAN pour partager le fardeau de la reconstruction et de la sécurité en Afghanistan. Le ministre en a fait une priorité. Il s'entretient avec tous nos alliés de l'OTAN et ils comprennent tous qu'il s'agit d'une mission de l'OTAN.
    Je rappelle encore une fois au député que la Chambre, y compris le député probablement, a voté en faveur de la prolongation de la mission jusqu'en 2009. Nous avions dit avant ce vote que nous demanderions le consentement unanime de la Chambre pour prolonger la mission si cette prolongation était nécessaire, et son parti et lui auraient à ce moment-là le droit absolu de voter en faveur de la prolongation.

L'affaire Airbus

    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour donner suite à une question que j'ai posée à la Chambre le 1er  novembre. J'ai alors demandé au premier ministre d'ordonner une enquête publique complète dans l'affaire Mulroney-Schreiber et dans toute l'affaire Airbus. Il a catégoriquement refusé et choisi d'en rire, comme le reste de son gouvernement. Il a continué ainsi pendant deux semaines, jusqu'à ce que Brian Mulroney lui-même demande la tenue d'une enquête.
    Ce qui m'inquiète, c'est la manière dont le gouvernement actuel a géré ce dossier. Nous savons qu'il y a sept mois, le premier ministre a reçu une lettre de Karlheinz Schreiber dans laquelle il décrivait ses relations avec Brian Mulroney, l'échange d'argent, le moment où l'argent a été transféré et où les négociations ont eu lieu. Durant sept mois, le premier ministre n'a absolument rien fait.
    Nous parlons ici d'une lettre qui comporte des allégations d'infraction à des lois canadiennes, d'une lettre qui aurait dû être immédiatement transmise à la GRC. Lorsque le chef de l'opposition a reçu la même lettre, plusieurs mois plus tard, il l'a transmise à la GRC, qui a ouvert une enquête dans les 14 jours suivant la réception de la lettre.
    Karlheinz Schreiber a dit qu'il avait envoyé cette lettre à M. Mulroney lorsque ce dernier essayait d'obtenir de l'aide financière. On peut y lire ce qui suit:
    Lorsque vous cherchiez de l'aide financière, à l'été de 1993, j'étais là une fois de plus. Quand nous nous sommes rencontrés le 23 juin 1993 au lac Harrington, vous m'avez dit que vous croyiez que Kim Campbell gagnerait l'élection suivante. Vous m'avez aussi dit que [...] le projet Bear Head [un projet d'entreprise] devrait être déménagé dans la province de Québec, où vous pourriez m'être d'un grand secours. Nous avons convenu de travailler ensemble et j'ai fait en sorte d'obtenir quelques fonds pour vous.
    Nous avons appris depuis que les fonds en question étaient 300 000 $ en argent comptant, dont la première tranche de 100 000 $ a été versée alors que M. Mulroney était encore député fédéral. En fait, M. Mulroney était encore premier ministre en juin de cette année-là, et la résidence du lac Harrington est une résidence officielle du gouvernement.
    Lorsque cette lettre est parvenue au service de correspondance à l'édifice du gouvernement, présumément à l'immeuble Langevin, elle aurait normalement dû est envoyée au BCP, puis elle aurait logiquement due être transmise au CPM. Ensuite, lorsqu'une information aussi délicate est reçue, elle est normalement communiquée directement au premier ministre, ou au personnel de niveau supérieur, qui en informe le premier ministre.
    Toutefois, le premier ministre tente de nous faire croire que ce n'est pas ce qui s'est produit. Il veut nous faire croire que la lettre reçue de M. Schreiber a été traitée par des agents subalternes au Bureau du Conseil privé.
    Monsieur le Président, je vous invite à parler à des personnes qui, à un moment donné, ont travaillé au cabinet du premier ministre ou au BCP. Demandez leur comment une telle missive est traitée. Je pense qu'ils vous diront qu'ils ne marcheraient pas avec cette lettre, mais qu'ils courraient. Le contenu de cette lettre est très délicat, très grave, et il est absolument impossible qu'elle ait été traitée par des agents subalternes. Il se peut que le premier ministre ait été très mal à l'aise, comme lorsqu'il est allé prendre la parole au dîner honorant Brian Mulroney, peu de temps après cet événement. Toutefois, je ne pense pas qu'il ait cru un seul instant que tout cela allait devenir public.
    Si le premier ministre n'a pas obtenu cette information, je ne peux voir qu'une seule explication, à savoir qu'il a expressément demandé à ne pas recevoir cette information, de façon à pouvoir nier l'avoir reçue.
    Maintenant que nous avons toute l'information, je demanderais au gouvernement de s'assurer que le mandat de l'enquête publique défini par M. Johnston englobe toutes les activités du gouvernement actuel qui sont liées à l'affaire Schreiber-Mulroney.
(1840)
    Monsieur le Président, j'aimerais d'abord corriger certaines erreurs de fait. Mon collègue et tous ses collègues de ce côté de la Chambre persistent à présenter faussement la situation concernant la lettre envoyée par M. Schreiber.
    Mon collègue a dit, et je crois paraphraser correctement, que M. Schreiber a envoyé une lettre et que le premier ministre a reçu cette lettre. C'est absolument faux. M. Schreiber a peut-être envoyé une lettre, mais le premier ministre ne l'a jamais reçue et ne l'a jamais lue.
    Même si mon collègue semble incrédule quant à la façon dont cela aurait pu se produire et au fait qu'une lettre aussi importante ne se serait pas retrouvée sur le bureau du premier ministre, je me permets de lui rappeler que l'auteur de cette lettre fait l'objet de démarches d'extradition depuis huit ans. Il est menacé d'extradition vers l'Allemagne où il est accusé d'évasion fiscale, de fraude et de contrefaçon, pour ne nommer que certains des chefs d'accusation.
    Pourquoi un employé du BCP aurait-il fait parvenir au premier ministre une lettre écrite par un tel auteur? Cela aurait été insensé. C'est pourquoi les représentants du BCP ont affirmé clairement et publiquement qu'ils n'avaient pas fait parvenir la lettre au cabinet du premier ministre.
    Quand le premier ministre dit qu'il n'a jamais reçu et n'a jamais lu cette lettre, il dit l'absolue vérité. Mon collègue essaie de transformer cette affaire en chasse aux sorcières ou en campagne de dénigrement. Il essaie d'établir un lien entre le premier ministre actuel et l'affaire Schreiber-Mulroney, qui remonte à une quinzaine d'années.
    Cet incident serait survenu autour de 1993 ou 1994. C'est absolument absurde de la part de mon collègue de seulement laisser entendre que le gouvernement ou le premier ministre actuels pourraient être liés d'une quelconque manière à cet incident. Il n'y a aucun lien possible.
    Je signale encore une fois à l'intention de mon collègue qu'il y a une raison pour laquelle les premiers ministres ne voient pas les lettres de ce genre. Il faut tenir compte des auteurs de ces missives. Dans ce cas, il s'agissait d'une personne dont les antécédents étaient très douteux. C'est pourquoi cette lettre n'a jamais été remise au premier ministre.
(1845)
    Monsieur le Président, ce qui est intéressant, c'est qu'il n'y a pas très longtemps, j'ai lu, à la Chambre des communes, une lettre envoyée par la même personne et adressée au cabinet du premier ministre, ainsi qu'un accusé de réception, une lettre du cabinet du premier ministre indiquant que le premier ministre avait bel et bien reçu la lettre de M. Schreiber et que des copies des pièces jointes et de la lettre avaient été transmises au ministre de la Justice. Tout à coup, ils prétendent que, pour une raison ou une autre, le premier ministre n'a pas reçu la lettre en question.
    Il a commencé en disant que la lettre n'avait peut-être pas été envoyée, que M. Schreiber mentait. C'est possible, mais ce n'est pas ce que nous dit le Bureau du Conseil privé. Ce dernier ne nous a pas dit qu'il n'avait pas reçu la lettre. Le député a dit qu'elle n'avait pas été transmise au premier ministre.
    Si une lettre d'une nature si délicate n'a pas été transmise au premier ministre, c'est parce qu'on a dit aux gens de ne pas la lui envoyer. On savait ce que ces lettres pouvaient contenir. À mon avis, sauf preuve du contraire, le cabinet du premier ministre a effectué une opération de camouflage digne de ce nom.
    Monsieur le Président, je n'ai rien à ajouter lorsque je dis que les élucubrations des députés de l'opposition ne sont rien de plus qu'une campagne de salissage de leur part.
    Je signale à mon collègue que les fonctionnaires du Bureau du Conseil privé ont dit clairement et publiquement que la lettre en question n'a pas été transmise au premier ministre. Mon collègue laisse-t-il entendre que des fonctionnaires de longue date mentent ou ne disent pas la vérité? Est-ce ce qu'il avance?
    Il est évident que M. Schreiber a eu huit ans pour faire de telles révélations. Pourquoi ne les a-t-il pas faites avant? Pourquoi a-t-il attendu les tout dernier jours avant son audience d'extradition, le moment de la décision finale à son endroit, pour fournir ces nouveaux renseignements politiques prétendument explosifs?
    Il a agi de la sorte pour une seule raison. M. Schreiber essaie de faire tout en son pouvoir pour rester au Canada. C'est la seule raison pour laquelle il agit de la sorte.
    La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
     (La séance est levée à 18 h 48.)