propose que le deuxième rapport du Comité permanent du commerce international, présenté le mercredi 1
er avril 2009, soit adopté.
-- Monsieur le Président, je suis heureux de proposer, au nom du Nouveau Parti démocratique, l'adoption du deuxième rapport du Comité permanent du commerce international aujourd'hui à la Chambre.
Comme les députés le savent, nous discutons de politique commerciale depuis plusieurs mois, et nous avons vu certains des aspects les plus fâcheux de la politique commerciale du gouvernement actuel.
Je suis heureux de dire que, malgré certains différends que nous avons eus dans le passé en matière de politique commerciale, le Comité permanent du commerce international a eu la possibilité de discuter du rapport en mars dernier. Ce rapport porte sur les dispositions du chapitre 11 et les dispositions concernant les relations entre les investisseurs et l'État qui figurent dans l'Accord de libre-échange nord-américain.
Le deuxième rapport dit très simplement ce qui suit:
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 31 mars 2009, le comité recommande: au gouvernement de défendre énergiquement le Code de gestion des pesticides du Québec, dans l’affaire opposant Dow Agroscience au Gouvernement du Canada afin de garantir le droit du Québec de légiférer et d’adopter des règlements dans l’intérêt public.
Les auteurs du rapport demandent essentiellement à notre gouvernement national de défendre énergiquement le droit du Québec d’adopter des règlements dans l’intérêt public. Il s'agit, dans ce cas, d'interdire l'utilisation d'un produit chimique qui a des répercussions très clairement négatives sur l'environnement et la santé, à savoir le 2,4-D.
Toutefois, ce rapport et cette disposition de l'ALENA ont des répercussions beaucoup plus vastes. On parle ici des répercussions qu'ils ont, par l'intermédiaire des dispositions du chapitre 11, sur tout gouvernement. En effet, les dispositions du chapitre 11 ont des répercussions sur le gouvernement du Québec et ceux de la Colombie-Britannique, de Terre-Neuve-et-Labrador, de l'Ontario, de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba et sur l'ensemble des autres provinces, territoires ou municipalités du Canada.
Nous devons avons une discussion à cet égard, et nous espérons que le Parlement appuiera ce rapport important. Le Comité permanent du commerce international a rédigé ce rapport parce qu'il était préoccupé par le fait que la société Dow Chemical s'attaquait au droit du Québec d’adopter des règlements dans l’intérêt public. C'est le Québec qui est ciblé aujourd'hui mais, demain, cela pourrait être la Colombie-Britannique.
En tant que représentants démocratiques de la Chambre des communes, nous devons convaincre le Parlement de dénoncer clairement les puissantes compagnies étrangères qui s'attaquent aux entités démocratiques et au droit de celles-ci d'adopter des règlements en matière de sécurité, de santé et d'environnement dans l’intérêt public.
Je suis heureux de dire que ce rapport découle des audiences que le NPD a été en mesure d'obtenir dans le cadre de la réunion du Comité permanent du commerce international sur les pesticides 2,4-D et sur l'attaque de Dow Agroscience contre le droit du Québec d’adopter des règlements dans l’intérêt public.
C'est ce que nous avions demandé au début du mois de mars. Je suis heureux de dire que nous avions l'appui de la majorité des membres du Comité permanent du commerce international. Nous avons tenu ces audiences et, après celles-ci, nous avons présenté le rapport avec l'appui du Bloc québécois et du Parti libéral. Il a été adopté, et il a maintenant été soumis au Parlement aux fins de discussion.
[Français]
Les séances d'information et les témoignages que le NPD a pu obtenir devant le Comité permanent du commerce international sont effectivement l'aspect le plus important. Je vais citer à quelques reprises quelques-unes des interventions que nous avons eues au sein du comité qui parlaient justement de cette attaque de Dow AgroSciences contre le gouvernement du Québec.
Il faut le dire encore une fois, ce n'est pas seulement le Québec qui est visé par les dispositions du chapitre 11 de l'ALENA auxquelles le NPD s'oppose depuis longtemps. Toutes les provinces, tous les territoires, toutes les municipalités au Canada peuvent être touchés par ces dispositions du chapitre 11.
Plusieurs témoins ont comparu devant le comité. Les témoignages de ces témoins ont été fortement utiles pour la présentation du rapport dont on discute aujourd'hui. Il y a d'abord eu M. Steven Shrybman, qui agit comme avocat-conseil pour le Conseil des Canadiens, le plus grand groupe de citoyens au Canada. Plus de 100 000 membres partout au pays sont impliqués dans le Conseil des Canadiens. M. Shrybman a dit ceci:
En vertu du Chapitre 11 de l'ALENA, des intérêts privés — des investisseurs et des entreprises — des autres parties à l'ALENA, soit les États-Unis et le Mexique, peuvent présenter une demande de dommages-intérêts pour toute violation présumée. Nous allons étudier le cas d'une revendication contre le Canada — où un gouvernement canadien, qu'il s'agisse du gouvernement fédéral, d'une province ou d'une administration municipale —, découlant d'une mesure prise par le gouvernement en question que l'investisseur privé ou l'entreprise américaine, par exemple, considère une violation des contraintes vagues et mal définies du Chapitre 11.
C'est justement cela. Ces investisseurs privés ont le droit de s'attaquer aux réglementations faites dans l'intérêt public et c'est cette attaque, surtout de Dow AgroSciences, qui a fait en sorte que le Comité du commerce international a décidé d'inciter fortement le gouvernement à défendre les intérêts du Québec et de toute autre province contre l'utilisation du chapitre 11, justement pour attaquer cette réglementation.
Il y a eu aussi M. Hugo Séguin, coordonnateur Choix collectifs chez Équiterre, une organisation québécoise bien connue. Il a dit ceci concernant ce différend avec Dow AgroSciences — je dirais plutôt une attaque de Dow AgroSciences contre le droit du Québec de légiférer dans ses propres domaines dans l'intérêt des gens du Québec:
Le Code de gestion des pesticides du Québec est en vigueur depuis 2003. L'interdiction de 20 ingrédients actifs dans les pesticides est en application depuis 2006. Par exemple, le Code de gestion des pesticides s'applique à des zones gazonnées, notamment des zones utilisées plus fréquemment par des enfants. Les études de santé publique semblent démontrer que les enfants sont exposés à davantage de risques pour leur santé lorsqu'ils jouent dans des parcs, dans des cours d'école ou dans des cours de garderie.
C'est sur cette base, poursuit M. Séguin, que le Québec a justifié son action en raison des risques et des menaces pour la santé publique. Soit dit en passant, le Québec n'est pas la seule instance dans le monde à interdire le 2,4-D ou un certain nombre de pesticides. C'est aussi le cas de la Norvège, du Danemark, de la Suède et de l'Ontario où un certain nombre de pesticides sont maintenant interdits, dont le 2,4-D.
C'est cela le problème. Le Québec a pris ses responsabilités. Le gouvernement du Québec a décidé, pour protéger les enfants, qu'il fallait nécessairement interdire l'usage du 2,4-D. Elle n'est pas la seule juridiction au monde à interdire le 2,4-D. Plusieurs autres juridictions le font, dont l'Ontario. Même si l'Ontario est derrière le Québec dans ce domaine, il avance dans la même direction que le Québec. Par conséquent, Dow AgroSciences pourrait peut-être s'attaquer aux décisions prises par le gouvernement de l'Ontario, comme elle l'a fait contre les actions du gouvernement du Québec. Cependant, des pays comme la Norvège, le Danemark, la Suède ont aussi décidé d'interdire l'usage du 2,4-D.
Mais ces pays ne sont pas gouvernés par les dispositions du chapitre 11. Alors, les compagnies n'ont pas justement ces façons qu'elles peuvent utiliser pour attaquer ces décisions prises dans l'intérêt public par les gouvernements élus démocratiquement.
C'est là le problème, et c'est pour cela qu'on propose aujourd'hui l'adoption de ce rapport. Cela touche justement les municipalités, le Québec, l'Ontario et les autres provinces qui vont vouloir mettre en place la législation pour justement interdire des produits comme le 2,4-D.
[Traduction]
Voilà le problème fondamental. N'importe quelle entreprise peut, essentiellement, invoquer certaines dispositions du chapitre 11 pour s'opposer aux décisions prises démocratiquement par un gouvernement démocratique pour le bien des gens qu'il représente.
Il est important de noter que, lors des pourparlers entourant l'ALENA, les États-Unis se sont, immédiatement après la signature de l'accord, distancés des dispositions du chapitre 11, ce super chèque en blanc permettant au secteur des entreprises de contester les initiatives gouvernementales.
Les dispositions relatives aux relations investisseur-État et leur incidence à long terme rendaient manifestement les États-Unis et d'autres pays très mal à l'aise. Il est intéressant de noter — et cela revient à une question fondamentale — que les dispositions du chapitre 11 ne se retrouvent dans aucun des autres accords commerciaux que les États-Unis ont conclus depuis l'ALENA. Ces dispositions, ce chèque en blanc accordé au secteur des entreprises et qui permet de contester les règlements en matière de santé et de sécurité qui sont pris dans l'intérêt du public, ont depuis été pondérées dans tous les accords commerciaux américains. Aucun autre accord commercial américain ne prévoit un tel chèque en blanc.
Les États-Unis ont donc fait marche arrière. Ils ont dit que ces dispositions étaient beaucoup trop vastes, qu'elles donnaient beaucoup trop de pouvoir et de contrôle au secteur des entreprises. Au lieu de cela, les États-Unis ont précisé clairement dans les dispositions ultérieures concernant les relations investisseur-État que les règlements en matière d'environnement, de santé et de sécurité, les décisions prises dans l'intérêt public par toute assemblée démocratique, ne peuvent être contestés en vertu du chapitre 11 ou de toute disposition concernant les relations investisseur-État.
Le Canada est le seul pays du monde qui a inclus de telles dispositions concernant les relations investisseur-État, qui donnent ni plus ni moins un chèque en blanc aux entreprises, dans chacun des accords commerciaux généraux qu'il a signés depuis l'ALENA. Je vais répéter, car ce point est d'une importance fondamentale. Alors que les autres pays ont fait marche arrière, nous sommes tombés dans le précipice. Les accords soumis à la Chambre contenaient tous des dispositions du type de celles contenues au chapitre 11, qui donnent un chèque en blanc aux PDG d'entreprises qui veulent contester les décisions prises dans l'intérêt public.
Un seul parti à la Chambre des communes a défendu le droit des citoyens de prendre des règlements dans l'intérêt public par l'entremise de leurs représentants démocratiquement élus. Un seul parti n'a cessé de dire que ces dispositions concernant les relations investisseur-État, rejetées par les États-Unis depuis l'ALENA et par tous les autres pays de la planète, sont un élément négatif, insoutenable et irresponsable des accords commerciaux que le Canada a signés.
C'est pourquoi, au cours des deux dernières décennies, depuis la signature de l'ALENA et la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, les néo-démocrates n'a jamais raté une occasion de dénoncer à la Chambre les dispositions contenues au chapitre 11. Nous l'avons fait pour une raison fort simple: quand nous incluons dans une accord des dispositions concernant les relations investisseur-État, quand nous donnons ainsi un chèque en blanc au secteur des entreprises, il est clair que le droit d'un gouvernement démocratiquement élu d'adopter certaines mesures législatives sera contesté.
Ce qui est plus important encore, c'est l'effet que cela a sur les mesures législatives avant même qu'elles ne soient présentées. Nous avons entendu au cours de discussions aux niveaux municipal et provincial sur les répercussions possibles du chapitre 11 que, parfois, les gouvernements hésitent à prendre des mesures d'intérêt public, craignant que les dispositions concernant les relations investisseur-État ne puissent être invoquées par des entreprises qui estiment qu'on a porté atteinte à leur droit de réaliser des profits.
Ce qui me ramène à la question du 2,4-D dans le cadre de laquelle, je le répète, tout le monde s'est entendu pour dire que nous devons défendre énergiquement le droit du Québec de présenter cette mesure législative dans l'intérêt du public pour protéger nos enfants. Comme je l'ai dit, les témoins se sont montrés très clairs sur le sujet. En tant que membres d'un comité du commerce, j'espère d'ailleurs bien obtenir l'accord du Parlement, nous disons que le gouvernement canadien se doit de défendre énergiquement le droit des assemblées législatives provinciales, le droit de l'Assemblée nationale, le droit des municipalités, le droit des organismes démocratiquement élus de mettre en place une mesure législative qui soit dans l'intérêt du public.
Il est important de citer quelques cas relevant du chapitre 11, parce qu'ils montrent les répercussions que peut avoir le chapitre 11 et parce qu'ils expliquent pourquoi le NDP pense, comme Barack Obama, que l'ALENA doit être renégocié. La portée des dispositions contenues dans le chapitre 11 doit être fortement réduite; en effet, elles n'étaient simplement pas appropriées à l'époque, ne le sont toujours pas aujourd'hui et ne permettent pas non plus la mise en place du genre de politiques que les Canadiens veulent.
Dès que l'ALENA a été mise en place, la société Ethyl, une entreprise américaine de produits chimiques, a intenté une poursuite contre le gouvernement canadien parce que ce dernier avait interdit le MTT, un additif pour l'essence. Le MMT est une neurotoxine. Personne ne nie les effets flagrants de cet additif sur la santé. Cependant, c'est parce que le gouvernement canadien a interdit l'utilisation du MTT que les dispositions du chapitre 11 ont été mises en oeuvre. Les contribuables de tout le pays ont dû verser 13 millions de dollars pour régler l'affaire à l'amiable. Et tout ça, pour un produit dont on sait que c'est une neurotoxine. Le gouvernement a agi de manière responsable en en interdisant l'utilisation pour éviter ses effets toxiques sur la santé, mais à cause des dispositions du chapitre 11, les contribuables canadiens ont dû indemniser cette même entreprise qui fabrique un produit dont les effets toxiques sur la santé sont connus.
Qu'est-ce qui cloche dans tout cela? L'ALENA contient des dispositions qui obligent les contribuables à indemniser de mauvaises compagnies qui fabriquent un produit dommageable pour la santé. Qu'est-ce qui ne va pas? On récompense ainsi un mauvais comportement. C'est comme si l'on disait à un meurtrier: « Nous allons vous dédommager parce que nous sommes obligés de vous mettre en prison. » C'est tout à fait absurde.
C'est pourquoi le NPD répète depuis des années que, lorsque ces dispositions relatives aux différends investisseur-État refont surface, il faut renégocier l'ALENA. Nous devons revoir notre approche fondamentale en matière de politiques commerciales, notamment en supprimant les dispositions du chapitre 11 du modèle utilisé pour tous nos accords commerciaux globaux.
C'est un problème fondamental. C'est un problème auquel doit faire face le Québec lorsqu'il tente de légiférer et d'interdire un produit toxique, le 2,4-D, ce que conteste la société qui le fabrique. C'est aussi un problème avec lequel sont aux prises les autres gouvernements provinciaux placés dans la même situation. C'est un défi pour notre gouvernement fédéral.
Les dispositions du chapitre 11 de l'ALENA ont un effet négatif sur les politiques d'intérêt public. Le NPD est d'avis que l'ALENA doit être renégocié. Nous sommes d'accord avec Barack Obama là-dessus. Nous croyons que les dispositions relatives aux différends investisseur-État doivent disparaître de l'ALENA.
:
Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur la motion à l'étude. Nous avons effectivement discuté de la question du chapitre 11 au Comité du commerce international. Nous avons entendu bon nombre de témoins sur les dispositions contenues dans ce chapitre et certaines des causes qui pourraient être présentées en rapport avec Terre-Neuve-et-Labrador et le Québec.
Un gouvernement provincial a déjà pris position sur une question de réglementation des pesticides dans sa juridiction. Nous appuyons ce gouvernement provincial dans ce dossier, et je crois et espère sincèrement que le gouvernement en fait autant.
Nous avons très brièvement discuté de la question du chapitre 11 au comité, mais nous devons approfondir la question. Je me souviens du jour où j'ai pris la parole pour exhorter mes collègues à prévoir une plus longue étude sur la question du chapitre 11.
Le chapitre 11 est basé sur le principe du traitement national qui est un principe raisonnable. En fait, il est au centre des ententes commerciales. Il est essentiel d'assurer une certaine protection, par le truchement de la règle du traitement national, pour nous assurer que les sociétés canadiennes qui investissent dans des pays avec lesquels nous avons des ententes commerciales ne fassent pas l'objet de discrimination de la part de ces derniers. Cela pourrait se faire, par exemple, dans le domaine des acquisitions ou dans celui des règlements.
Nous savons maintenant que les mesures protectionnistes peuvent avoir des effets pernicieux sur le Canada et les sociétés canadiennes et nous voyons bien ce qui se passe chez nos voisins du sud avec la politique d'achat aux États-Unis et certaines autres dispositions du même genre. Il est évident que nous devons adopter des dispositions spéciales en vue de protéger les sociétés, les travailleurs, les investisseurs et les retraités canadiens dont la stabilité du revenu et des économies de retraite dépend de la protection accordée aux investissements qu'ils ont faits dans les sociétés canadiennes qui font des affaires à l'étranger.
Je crois que la plupart des Canadiens et des députés reconnaissent que la règle du traitement national a sa raison d'être. Nous devons nous assurer que les intérêts des investisseurs, des sociétés et des travailleurs canadiens sont protégés dans les pays avec lesquels nous signons des ententes commerciales.
Toutefois, pour que nous puissions protéger nos travailleurs, nos sociétés et nos investisseurs dans ces pays, nous devons également assurer un niveau de protection semblable aux sociétés de ces pays qui font des affaires au Canada. Il y a un compromis et des concessions à faire à ce niveau, mais c'est un principe auquel nous croyons.
Le chapitre 11 et plus précisément les dispositions concernant les relations entre l'investisseur et l'État qui y sont contenues sont des points importants. Il est aussi important, toutefois, de pouvoir déterminer si les dispositions du chapitre 11 permettent de protéger les intérêts du Canada. Comment les autres pays traitent-ils la question du traitement national dans leurs accords commerciaux? Ce sont des points importants sur lesquels nous devons nous pencher.
J'ai parlé à certaines personnes qui ont participé à la négociation de l'ALENA, des personnes qui sont très clairement en faveur de l'ALENA et des principes du libre-échange, mais qui estiment également que le chapitre 11 présente certains écueils.
Comment affronter ceux-ci? Comment rouvrir le débat sur le chapitre 11? Devrions-nous rouvrir le dossier de l'ALENA étant donné la montée du protectionnisme américain? Voilà d'importantes questions à poser à la Chambre. Malgré les lacunes que présentent le chapitre 11, la plupart des Canadiens s'entendraient pour dire que, dans l'ensemble, l'ALENA et l'ALE ont été bénéfiques pour les Canadiens, ont créé des emplois pour les Canadiens et ont stimulé la concurrence pour les Canadiens.
Reste à savoir comment aborder les dispositions concernant les relations entre l'État et les investisseurs, le principe du traitement national et le chapitre 11 de l'ALENA.
C'est un examen important non seulement du point de vue de nos accords en vigueur et de notre Accord de libre-échange nord-américain, mais aussi du point de vue de la négociation des accords commerciaux futurs et de la façon dont nous abordons le principe du traitement national. C'est une tout autre question que la renégociation éventuelle du chapitre 11 et de l'ALENA au moment où les États-Unis intensifient leurs mesures protectionnistes. Il est entièrement possible que nous adoptions une approche différente à l'égard de certains éléments des accords commerciaux à l'avenir, notamment le traitement national, et il peut y avoir de meilleures façons de protéger les intérêts canadiens et de renforcer notre capacité de défendre le droit des gouvernements national et infranationaux d'adopter des politiques, environnementales ou autres, pour protéger nos citoyens tout en améliorant les relations commerciales. Je pense qu'il est important de débattre de ces questions.
À mon avis, nous n'avons pas eu autant de succès que nous l'aurions dû dans certaines contestations. Est-ce en raison des défauts du chapitre 11 ou est-ce parce que le gouvernement fédéral n'a pas engagé suffisamment de ressources ou apporté suffisamment de soutien dans ces contestations? Assurons-nous un soutien suffisant à la position canadienne lors de contestations fondées sur le chapitre 11? J'ai entendu des experts des échanges commerciaux affirmer que le ministère de la Justice ne consacrait pas suffisamment de ressources à ces causes et ne soutenait pas assez les gouvernements des provinces et des territoires lorsqu'ils font une contestation. Cela est important. C'est une des raisons pour lesquelles nous constatons des échecs hors de proportion. Le gouvernement fédéral n'aide pas bien les gouvernements des provinces et des territoires à défendre leurs intérêts et leur capacité de protéger leurs citoyens.
Dans certains cas, des mesures législatives ont été mal rédigées sans tenir compte du chapitre 11. Elles ont été conçues pour l'époque d'avant l'ALENA, mais elles ne font pas l'affaire compte tenu de la rigueur exigée par le chapitre 11 de l'ALENA. Nous devons nous assurer, en rédigeant des lois fédérales et provinciales ou des arrêtés municipaux, que le ministère de la Justice et celui du Commerce international collaborent avec les autres ministères fédéraux susceptibles d'initier des contestations ou travaillent avec les autres ordres de gouvernement pour que les lois soient conformes aux dispositions de l'ALENA, notamment au chapitre 11.
Toute notre approche en cette matière doit être examinée à partir du début. Si un gouvernement provincial ou une administration municipale a l'intention de présenter une mesure législative, sur l'environnement, par exemple, nous devrions nous assurer que ce gouvernement ou cette administration a accès à l'expertise des ministères fédéraux de la Justice et du Commerce international pour que son texte puisse résister à une contestation fondée sur le chapitre 11 de l'ALENA. La formulation des dispositions est cruciale.
Et dans les cas où les lois sont appliquées en conformité du chapitre 11, nous devrions offrir aux gouvernements provinciaux et aux administrations municipales l'entière collaboration des avocats des ministères de la Justice et du Commerce international.
Premièrement, est-ce que nous faisons tout ce que nous pouvons à l'échelon fédéral pour aider les autres ordres de gouvernement à concevoir des lois et des règlements conformes au chapitre 11? Deuxièmement, les aidons-nous suffisamment à surmonter les obstacles lorsqu'ils se présentent?
Je dirais que, dans les deux cas, le gouvernement fédéral n'en fait pas assez. Nous devons prendre les devants. Le gouvernement fédéral n'assure tout simplement pas la participation efficace des gouvernements provinciaux à certains de ces dossiers. Par exemple, depuis sept mois, les États-Unis s'attaquent aux emplois et aux exportations du Canada par l'entremise de leurs politiques d'achat aux États-Unis au moment même où le Canada perd des emplois à un rythme jamais vu, mais les seules manifestations de leadership au Canada viennent des gouvernements provinciaux.
Je félicite les gouvernements provinciaux d'avoir comblé ce vide, d'avoir été à la hauteur et d'avoir fait preuve de leadership dans ce dossier. En fait, ce dont nous avons besoin, c'est de leadership et de collaboration de la part du fédéral. Je suis convaincu que bon nombre de mes collègues d'en face admettraient que le conservateur n'a pas tissé de liens très solides avec les premiers ministres et les gouvernements des provinces.
En cette période de crise économique mondiale et de recrudescence du protectionnisme chez nos voisins du Sud et ailleurs, il est primordial que notre premier ministre et notre gouvernement prennent les devants, établissent des stratégies et collaborent avec les gouvernements provinciaux et les administrations municipales. Je crois que le problème vient en partie du fait que le gouvernement fédéral conservateur n'est pas conscient de l'importance de la collaboration avec les provinces sur ces questions.
J'ai fait mention de la deuxième question plus tôt. Il faut se demander comment traiter les dispositions actuelles du chapitre 11 de l'ALENA. J'estime que le Comité du commerce international devrait étudier le chapitre 11 en profondeur. Il faut consacrer suffisamment de temps à l'étude de ce chapitre pour bien le comprendre.
Ensuite, il faut se demander, une fois qu'on saura en substance quoi faire différemment s'il fallait négocier l'ALENA de nouveau, s'il serait dans l'intérêt du Canada de rouvrir l'ALENA en plein contexte protectionniste. Il faudrait que nous ayons beaucoup à gagner d'une réouverture de l'ALENA dans le contexte actuel, parce que, autrement, le risque serait très grand.
En troisième lieu, il faut se demander comment mieux nous informer et mieux préparer nos négociateurs en vue de futurs accords commerciaux. De toute évidence, le traitement national est un élément central de tout accord commercial. Il faut simplement s'assurer que les entreprises canadiennes sont à l'abri de pratiques discriminatoires de la part de gouvernements étrangers. Cette question est importante pour les travailleurs, les investisseurs et les syndiqués canadiens dont les régimes enregistrés d'épargne-retraite dépendent des actions canadiennes investies dans des compagnies dans le monde entier.
Il faut veiller à protéger les investissements canadiens. La seule façon de s'en assurer est d'offrir une protection réciproque à l'égard de ces investissements. J'estime que quiconque comprend l'importance du commerce ne peut être en désaccord avec le principe du traitement national. Il faut donc chercher le meilleur véhicule et se demander quelles sont les meilleurs approches.
Je propose que lorsque le comité sera saisi de cette question, nous convoquions des témoins qui ont participé aux discussions entourant l'ALENA. Il faudrait entendre des gens comme Gordon Ritchie, qui a participé aux négociations de l'ALENA et qui a peut-être une idée de ce qui pourrait être fait différemment en termes de protection des investisseurs, de dispositions concernant les relations investisseur-État et de traitement national concernant les futurs accords commerciaux.
Je crois que le Comité du commerce international devrait également se pencher sur d'autres questions et ne pas se limiter aux dispositions concernant les relations investisseur-État. Il faudrait avoir une discussion approfondie sur la possibilité de traiter des questions comme l'environnement et le travail dans un chapitre à part entière plutôt que dans des accords parallèles.
Il n'est pas exact de dire que les accords parallèles n'ont aucune valeur. C'est tout le contraire. En fait, ces accords peuvent être très solides et comporter des avantages par rapport aux chapitres entiers, selon ce qui est stipulé d'un côté dans l'accord d'ensemble et, de l'autre, dans les accords sur la main-d'oeuvre et dans les accords parallèles.
Cependant, devrions-nous tenir compte de ce que font certains pays? Des pays préconisent pour certaines de ces questions une approche d'ensemble, soit un chapitre entier faisant partie intégrante d'un accord. Cette approche est-elle plus fondée que les accords parallèles contenant des dispositions musclées et efficaces pour en assurer l'application?
Certains spécialistes du commerce avec qui j'ai discuté sont d'avis que tout dépend de l'accord en question, des accords parallèles et du chapitre entier faisant partie intégrante de l'accord. Voilà le genre de question dont le comité devrait être saisi. Cependant, cela ne pourra se produire que si nous sommes capables de mettre de côté nos armes idéologiques.
Lorsqu'on leur pose la question, il en est certains qui répondent simplement qu'ils sont en faveur du libre-échange parce qu'ils s'identifient à la droite. D'autres répondent qu'ils sont contre le libre-échange parce qu'ils s'identifient au contraire à la gauche.
Je pense que le XXe siècle appartenait aux idéologues. Au XXIe siècle, les questions sont beaucoup plus complexes, les nouvelles occasions et les nouveaux défis qui attendent le Canada sont plus grands, plus effrayants sous certains aspects, mais aussi plus excitants. Par conséquent, nous devons mener un débat d'envergure, moins idéologique de nature que ceux du passé. Cela signifie que nous devons être prêts à nous pencher sur ces questions, non pas comme un néo-démocrate opposé aux accords de libre-échange ni comme un conservateur en faveur des accords de libre-échange, mais selon une approche plus évoluée, pour les examiner en profondeur et faire en sorte de préserver notre confiance dans le commerce.
Mais comment pouvons-nous renforcer nos accords commerciaux de façon à créer une meilleure gouvernance mondiale en matière de droits de la personne? Comment pouvons-nous renforcer nos accords commerciaux de façon à créer une gouvernance mondiale et multilatérale plus forte en ce qui a trait à l'environnement? Comment pouvons-nous assurer le traitement national et la protection de nos entreprises canadiennes lorsqu'elles investissent et qu'elles diversifient leurs intérêts ailleurs qu'aux États-Unis? Comment pouvons-nous faire en sorte qu'elles soient protégées tout en protégeant aussi le droit des gouvernements au Canada, national et infranationaux, de mettre en oeuvre des lois qui protègent les citoyens?
Ces questions sont toutes importantes et j'espère que c'est le genre de points dont le Comité du commerce international et la Chambre pourront discuter et débattre d'une manière plus ouverte et plus constructive, et moins idéologique et susceptible de semer la discorde, parce que ces considérations auront une grande incidence sur l'avenir de notre pays.
Le Canada connaît son premier déficit commercial en 30 ans. Nous sommes une petite économie ouverte qui compte sur le commerce extérieur pour préserver son niveau et sa qualité de vie, et voilà que nous achetons maintenant plus que nous vendons. C'est de mauvais augure.
Les accords commerciaux sont importants. Il faut diversifier nos relations commerciales à l'extérieur des États-Unis, de l'Amérique du Nord. Il faut renforcer nos relations commerciales avec l'Union européenne, l'Inde et la Chine. Cette année, la Chine connaît une croissance supérieure à 8 p. 100 et on s'attend à ce que cette croissance atteigne 8,5 p. 100 l'an prochain, grâce à des investissements énormes dans les infrastructures, les réseaux de trains rapides, les technologies propres, les sciences environnementales, les produits de base et l'énergie propre. Or, ce sont tous des secteurs dans lesquels le Canada peut être un chef de file et exceller. Il faut renforcer nos relations avec la Chine.
Pourtant, le a affiché son mépris à l'endroit de la Chine et il néglige l'Inde.
Nous, du Parti libéral, sommes d'avis qu'il importe de renforcer nos relations commerciales avec des pays comme la Chine et l'Inde, de diversifier nos relations commerciales et de miser sur le multiculturalisme, non seulement en tant que politique sociale, mais aussi comme stratégie économique fructueuse permettant de créer des alliances naturelles avec les économies dont la croissance est la plus rapide au monde.
Il s'agit de dossiers importants. Le Parti libéral est déterminé à s'en occuper de façon constructive, à protéger les emplois et les intérêts des Canadiens ici, et à étendre notre influence dans le monde.
:
Monsieur le Président, une société des États-Unis, en l'occurence Dow AgroScience, avait entrepris une poursuite en vertu du chapitre 11 de l'ALENA afin d'obtenir 2 millions de dollars en réparation, sous prétexte que le Code de gestion des pesticides du Québec violait son droit de vendre du 2,4-D au Québec.
Le Code de gestion des pesticides du Québec, adopté en 2003, est unique en son genre au Canada. Il établit des normes pour encadrer l'usage et la vente des pesticides au Québec. Il interdit notamment la vente de l'herbicide 2,4-D pour des raisons de santé publique. Le Québec a choisi d'interdire ce produit parce qu'il l'estime susceptible de nuire à la santé humaine et à l'environnement. Dans le doute, le principe de précaution doit s'imposer.
On se rappellera aussi que le député du Bloc québécois de avait questionné le ministre de l’Environnement afin de s'assurer de l'engagement du gouvernement à défendre le Code de gestion des pesticides du Québec. En effet, la position du gouvernement est très contradictoire. Alors que le déclare vouloir défendre la position du Québec dans ce dossier, de son côté, le déclare aux États-Unis que le Canada doit harmoniser ses politiques avec celles de leur gouvernement. Toujours selon mon collègue du Bloc le député de Rosemont—La Petite-Patrie, les agissements du ministre de l'Environnement, en plus de miner les efforts que je déployais alors en cette Chambre en tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de commerce international, nivelaient par le bas les exigences environnementales et favorisaient Dow Chemical Company au détriment du Québec.
Nous savons que Équiterre, Ecojustice et la Fondation David Suzuki, en collaboration avec d'autres groupes environnementaux, avaient préparé une pétition dans l'Internet qui permettait aux citoyens concernés de manifester leur appui au code. Évidemment, la réponse a été favorable à la protection de celui-ci.
Rappelons d'ailleurs que c'était l'objet de la motion que j'avais fait adopter pour les besoins de la cause, le 31 mars 2009, par le Comité permanent du commerce international. Cette motion stipulait que le comité:
[...] recommande au gouvernement de défendre énergiquement le Code de gestion des pesticides du Québec, dans l’affaire opposant Dow Agroscience au Gouvernement du Canada afin de garantir le droit du Québec de légiférer et d’adopter des règlements dans l’intérêt public.
Nous voyons donc très clairement deux éléments importants dans tout cela. Premièrement, il y a le chapitre 11 de l'ALENA, et deuxièmement, il y a le droit à la protection de la santé publique et le droit à la protection de l'environnement. Ces deux éléments s'opposent, c'est évident. Cela me rappelle les discussions nombreuses et souvent enflammées qui se sont tenues autour de ce qu'on appelait le PSP, le Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité. Toutes ces discussions visaient essentiellement à niveler vers le bas la réglementation d'à peu près toutes les sphères d'activité d'un gouvernement pour les mettre à un niveau à peu près comparable à celui des États-Unis. On a vu de nombreux exemples ou tentatives en ce sens.
Quant au chapitre 11 de l'ALENA, il a été fait et accepté par les négociateurs du Canada. Or on sait très bien que les négociateurs du Canada ont quand même une bonne réputation. Ce ne sont pas eux que je vise dans tout cela. Toutefois, ils négocient ce que le gouvernement veut et donnent ainsi une orientation aux négociations.
On se demandera toujours pourquoi ce chapitre 11 a été inséré dans l'ALENA, à l'époque, si ce n'est dans le but, essentiellement, de protéger les investissements des entreprises.
Dans le cas des États-Unis, c'était pour protéger les investissements de leurs compagnies au Canada et, pour le Canada, pour protéger ses investissements aux États-Unis. On voit ce que cela a donné. À un moment donné, il y a eu des poursuites de plus en plus importantes. C'est basé essentiellement, on le sait, sur la définition ou l'interprétation du principe de l'expropriation. On sait qu'il y a là-dedans des choses où il n'est pas nécessairement facile de tirer la ligne.
Au Québec et au Canada, une compagnie canadienne, suite à des changements de réglementation, n'a pas le même pouvoir d'intenter des poursuites qu'une compagnie étrangère qui opère au Canada. C'est quelque chose que de donner une liberté ou des droits supplémentaires à des entreprises étrangères de venir intervenir dans la gestion du Québec et/ou du Canada et d'imposer leurs visions des choses. On sait très bien que lorsque le gouvernement du Québec interdit l'utilisation de ce pesticide, une utilisation que je dirais plus domestique, effectivement, dans ces conditions, ce pesticide est beaucoup plus près de la population et peut, par conséquent, l'affecter plus facilement. Quand un tel pesticide est répandu dans de grands champs où il n'y a pas de densité de population ou pratiquement pas de population, ce n'est pas la même chose. Cependant, quand le gouvernement du Québec a légiféré, c'était dans le but de protéger l'environnement et la santé des citoyens.
On peut parler beaucoup du chapitre 11 en ce qui a trait aux investissements. Je vais y revenir. L'objectif des États-Unis est vraiment de diminuer ou d'abaisser les normes qui viennent les restreindre dans leur commerce. À ce moment-là, ils poursuivent allègrement le Canada et, en l'occurrence dans ce dossier-ci, le Québec
On sait, on le sent. On parle de libre-échange en même temps, mais la liberté de faire du commerce, comme disent les avocats, pour ouvrir une parenthèse, ressemble à ceci: quand ils font des lois, la liberté des uns s'arrêtent là où la liberté des autres commencent. Par conséquent, la liberté de faire du commerce devrait aussi s'arrêter là où la liberté de la santé et d'un environnement sain commence. Où trouver l'équilibre? Il y a des gens qui veulent faire de l'argent, qui sont prêts à vendre toutes sortes de choses. De toute évidence, ils ne font pas cette équation.
Dans ce dossier, je crois, et j'en suis même persuadé, que le gouvernement du Québec a raison et a le droit de légiférer et d'imposer des normes, des standards plus élevés. J'en suis convaincu, la population, le monde en général, s'en va vers des normes qu'on doit respecter d'un pays par rapport à un autre. Par exemple, on a eu à un moment donné des représentants de l'Union européenne au Comité du commerce international. Ils nous disaient que l'Union européenne avait interdit certains produits pour le nettoyage des vêtements. Naturellement, les autres pays ont fait des menaces et voulaient même intenter des poursuites. L'Union européenne s'est tenue debout. Quand un pays, en vertu de sa culture et de son intérêt — je parle de la santé de sa population et de son environnement — décide d'instaurer des normes de qualité, à ce moment-là, rien ne devrait interférer par rapport à cette décision d'un pays souverain. J'ai dit souverain, cela me fait penser que si le Québec était un pays souverain, probablement qu'on aurait adopter l'orientation d'instaurer des standards et on aurait demandé qu'ils soient respectés dans nos traités d'accords de libre-échange. Cela fait partie des éléments de négociations quand les pays se parlent.
On voit très bien dans la façon de négocier de plusieurs pays, qu'au départ, il y a des éléments non négociables. Ainsi, quand un peuple se respecte — comme le Québec le ferait s'il était souverain —, il y aurait des éléments qui seraient non négociables. Je suis bien sûr favorable au libre-échange et à la liberté du commerce, mais pas à n'importe quel prix. On doit s'imposer des limites et des standards.
Strictement au regard du chapitre 11, on sait que le Canada conclut fréquemment de mauvais accord. Or, ces accords constituent tout simplement une dérive. Ils permettent à des multinationales de poursuivre directement des gouvernements au sujet des politiques qu'ils élaborent. Ils considèrent que toute mesure qui diminue leurs profits, y compris une mesure sociale ou environnementale, peut équivaloir à une expropriation et nécessiter une réparation. Ils permettent aussi de poursuivre pour des montants tellement faramineux qu'ils empêchent parfois le gouvernement de travailler pour le bien commun.
Le gouvernement conservateur, qui veut laisser pleine liberté aux investisseurs étrangers et cesser de les encadrer, multiplie les négociations bilatérales pour conclure de tels mauvais accords calqués évidemment sur le chapitre 11 de l'ALENA et l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI, que tous décrient.
Or, les accords de protection des investissements ne sont pas obligés d'être aussi mauvais. Dans le monde, il n'y a que le Canada et les États-Unis qui en concluent de semblables. Le Bloc québécois est persuadé que le Québec ne copierait pas le modèle canado-américain d'accords et demande évidemment au gouvernement de changer sa politique. Les multinationales, comme tous les autres citoyens, doivent revenir sous l'autorité de l'État.
D'autre part, il est évident que nous sommes favorables à la protection des investissements. C'est normal. Une entreprise qui fera affaire dans un pays étranger, avant de partir avec ses biens, son argent et souvent avec des ressources humaines pour s'installer dans un pays, doit avoir un minimum de respect et de protection, mais pas au détriment de ce même pays où elle va s'installer, de sa population et de son environnement.
Évidemment, certains pays ont des lois ou des règlements trop faibles pour protéger leur population et leur environnement. C'est ce qui arrive souvent avec les compagnies minières canadiennes qui sont souvent d'origine étrangère. Ces dernières viennent s'installer au Canada parce qu'elles jouissent d'une protection sans bornes du gouvernement canadien pour ce qu'elles vont faire à l'étranger. Ces compagnies agissent un peu contre les droits du travail et un peu contre l'environnement, mais elles ne sont pas punies pour leurs actions que nous trouverions inacceptables ici au Canada et au Québec.
Nous sommes favorables à la protection des investissements étrangers. Nous sommes favorables à la protection des investissements de nos compagnies et, par le fait même, nous sommes également favorables à la protection des investissements, parce que pour n'importe quelle raison, une entreprise peut être expropriée.
Quand je parle d'expropriation, cela a un sens pour moi beaucoup plus large que tout simplement de dire que la compagnie ne pourra plus espérer faire des profits aussi importants qu'elle l'espérait au début quand elle est venue s'installer. On sait que les choses changent. L'expropriation qu'on voit souvent dans les municipalités, tant pour des biens qu'en vertu des actions qui découlent du gouvernement municipal, implique de dire à quelqu'un qu'il doit physiquement changer d'endroit pour telle ou telle raison. Bien sûr qu'il y a une compensation, mais ce n'est pas une compensation comme l'évaluent les entreprises étrangères qui viennent s'installer dans un pays et qui prétendent se faire dépouiller non pas des actifs qu'ils ont en main et qu'ils peuvent exploiter, mais de leurs gains futurs, probables et espérés.
Même les entreprises de chacun des pays respectifs ne peuvent pas le faire de cette façon. On dit que le chapitre 11 de l'ALENA est mauvais à trois égards.
Premièrement, la définition de l'expropriation est tellement floue que la moindre mesure gouvernementale, sauf une mesure fiscale générale, peut être contestée par un investisseur étranger si elle diminue le profit qu'il tire de son investissement. C'est ainsi qu'un plan de mise en oeuvre du Protocole de Kyoto qui ferait payer cher aux grands pollueurs que sont les entreprises pétrolières pourrait être contesté en vertu du chapitre 11 de l'ALENA et entraîner une indemnisation gouvernementale. Les pétrolières albertaines sont en effet majoritairement contrôlées par des intérêts américains. Le chapitre 11 ouvre la porte aux poursuites les plus abusives.
Deuxièmement, il y a la définition d'investisseur qui est tellement large qu'elle inclut n'importe quel actionnaire.
Et troisièmement, on retrouve la définition d'investissement sur laquelle je n'élaborerai pas car on m'a mentionné tout à l'heure qu'il ne me restait plus beaucoup de temps.
Je crois que ce qu'il importe de retenir, c'est qu'une nation qui se respecte, comme le Québec, qui serait souveraine, aurait des normes élevées de protection de sa population et de son environnement qui seraient non négociables dans un accord de libre-échange intelligemment préparé et conclu.
Je suis convaincu que la protection de la santé publique doit être d'une importance capitale parce qu'il est question de la santé des individus. L'utilisation doit être légiférée par les gouvernements qui sont, bien sûr, plus près de leur population, entre autres les municipalités, et appuyées dans ce cas-ci par le Québec.
On devrait de plus en plus voir une protection ajustée des investissements dans les accords que le gouvernement fera dans le futur et fait présentement, parce que ceux que le Canada fait présentement sont de mauvais accords. On est d'avis qu'il faut tout de même une protection des investissements, mais pas au détriment de la santé de la population et de l'environnement.
En conclusion, on voit malheureusement avec cet accord l'influence de ce qui a existé à un certain moment avec beaucoup d'effervescence de la part des grands négociateurs du Canada et des États-Unis, ce partenariat sur la sécurité et la prospérité. Il fallait avoir des normes à la baisse pour s'ajuster aux États-Unis afin d'atteindre la prospérité. Dans ce cas-là, ils sont frappés de plein fouet et ce n'est pas ce qu'on veut au Québec. On veut protéger la santé de la population et l'environnement. Lorsqu'il y a un doute, le principe de précaution doit s'appliquer. D'ailleurs, tous les groupes environnementaux le disent. C'est à nous de décider ce qui est bon pour nous et ce qu'on devrait défendre malgré le chapitre 11 qui présente de mauvais accords.
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Monsieur le Président, le premier point à l'ordre projeté des travaux d'aujourd'hui était le projet de loi sur l'accord de libre-échange avec la Colombie. Je sais qu'il s'agit d'un dossier qui intéresse beaucoup la Chambre et de nombreux Canadiens, en particulier ceux qui sont préoccupés par les violations des droits de la personne en Colombie et le bien-fondé de cet accord commercial.
À ceux qui viennent tout juste de syntoniser les travaux de la Chambre pour tenter de comprendre ce qui se passe ici, je vais expliquer brièvement que les membres des comités permanents font rapport à la Chambre. Dans son deuxième rapport, le Comité permanent du commerce international s'est prononcé au sujet d'un différend concernant un pesticide en vertu du chapitre 11 de l'ALENA. Ce comité a recommandé à la majorité que le gouvernement défende énergiquement le Code de gestion des pesticides du Québec, dans l’affaire opposant Dow Agroscience au gouvernement du Canada afin de garantir le droit du Québec de légiférer et d’adopter des règlements dans l’intérêt public.
C'est la recommandation qui a été faite à la Chambre. C'est une recommandation qui traduit l'opinion de la majorité des membres du comité. Je répète que c'est une majorité parce que les membres du côté ministériel n'ont pas appuyé le rapport. Ce sont les partis de l'opposition qui ont fait cette recommandation. Cela rappelle probablement les discours entendus ici au sujet de l'ALENA. Je sais que l'ALENA a surgi une fois ou deux dans le débat sur le différend concernant le bois d'oeuvre et dans d'autres débats qui ont lieu ici depuis assez longtemps.
Il a été démontré aux Canadiens à quel point le processus de règlement des différends peut être rigoureux, à quel point les choses peuvent prendre une tournure désagréable, et ils ont pu voir tout ce qui peut se produire, tous les mouvements d'argent ainsi que toutes les nuances et la complexité des arguments. La majorité des députés se sont opposés à l'accord, mais le gouvernement tenait à un règlement.
Il existe certainement une tendance qui suscite une certaine inquiétude. Quoi qu'il en soit, nous discutons du rapport, qui contient une recommandation du comité permanent. Le débat durera tant qu'il y aura des députés qui voudront parler ou trois heures au maximum et la motion sera mise aux voix. C'est bien de présenter des rapports à la Chambre, au gouvernement et au ministre, mais si nous ne demandons pas de réponse du gouvernement, si nous voulons simplement faire valoir un argument et ajouter ce rapport à la pile de rapports déposés ici, le gouvernement n'est pas tenu de donner une réponse formelle à la recommandation.
Les membres conservateurs du comité ont exprimé leurs points de vue et, à moins que l'on ne lise les délibérations des comités et n'examinions les questions en détail, la plupart ne connaîtront pas ces points de vue. Il s'agit d'une question très complexe et les enjeux sont très importants. Lorsque nous voyons ces rapports, il est intéressant de savoir que, si les députés ne demandent pas une réponse du gouvernement dans les 120 jours, cela signifie qu'ils ne veulent pas de réponse. Cela signifie que nous mettons tout dans le même bac et que, lorsque nous arriverons à la partie des affaires courantes sur les motions, quelqu'un pourra simplement demander l'adoption du rapport pour que nous en parlions.
C'est là que nous en sommes maintenant. J'aurais aimé qu'une réponse soit demandée au gouvernement à ce sujet parce que ce sont les députés ministériels qui se sont opposés à l'opinion majoritaire du comité. Nous allons débattre cette question. Nous passerons ensuite à l'accord avec la Colombie. Il y a d'excellents intervenants sur le libre-échange avec la Colombie qui vont parler de ce projet de loi. Donc, il est à espérer que nous y reviendrons très bientôt.
J'aimerais faire part aux députés de certaines des questions dont nous avons discuté. On a beaucoup parlé, entre autres, du chapitre 11 et de l'expropriation. Quel est le lien entre toutes ces questions? La meilleure chose que je puisse faire est de me reporter à une évaluation sur cette question réalisée par une chercheuse, Meg Sears. Titulaire d'un doctorat, Mme Sears est enquêteuse adjointe pour le Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario. Elle a rédigé un article fort intéressant qui aborde la question dont la Chambre est saisie aujourd'hui et que le comité a étudiée. Cette scientifique et rédactrice médicale voulait aider le comité dans son étude. Elle a examiné le processus d'évaluation des pesticides de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire du Canada, ou ARLA, comme l'ont appelée d'autres députés, ainsi que l'évaluation de l'herbicide 2,4-D, qui est le pesticide interdit au Québec.
Dow a contesté cette interdiction. Mme Sears a conclu que la contestation par Dow des limites d'utilisation du 2,4-D imposées par le Québec montre à quel point le droit du Canada de protéger ses citoyens contre l'exposition à des substances toxiques est compromis par le chapitre 11 de l'ALENA. C'est une déclaration très importante. Notre droit de protéger les Canadiens est contesté dans le chapitre 11 de l'ALENA. Il y a beaucoup d'information que je serai heureux de fournir aux députés que cela intéresse, mais j'aimerais passer tout de suite à sa conclusion relativement à cette question. Elle a dit:
La contestation par Dow de la réglementation québécoise sur le 2,4-D remet directement en question la capacité des Canadiens de prendre des mesures pour protéger la santé et l'environnement. Les accords commerciaux devraient amener les signataires à accroître la protection, et non l'inverse, c.-à-d. inciter les gouvernements à exposer leurs citoyens contre leur gré à des produits toxiques sous leur toit et dans leur quartier. Bien que cela déborde du mandat du Comité, il faut aussi s'interroger sur l'ampleur de la complicité de l'ARLA car le 2,4-D a été réinscrit sur la foi de données incomplètes et mal fondées et d'une interprétation inexacte d'information importante.
J'exhorte le gouvernement du Canada à défendre le droit de tout gouvernement, quel qu'il soit, d'adopter des mesures pour protéger la santé et l'environnement, et à veiller à ce que dans l'ALENA, la santé des Canadiens ait préséance sur les profits des multinationales.
Cela est très, très important. Je félicite Meg Sears de son évaluation. Cette dernière souligne l'importance de la question et le fait que, même s'il s'agit seulement d'un rapport de comité, il n'en demeure pas moins qu'il ne doit pas être pris à la légère et que nous devons protéger le droit du Québec d'agir à sa guise.
Dans le cadre des questions que j'ai posées un peu plus tôt, j'ai souligné le fait que des interdictions semblables avaient été imposées à Toronto et à Halifax, mais qu'elles n'ont pas été contestées. S'il y a contestation fondée sur le chapitre 11 de l'ALENA relativement à l'interdiction au Québec, nous devons nous demander pourquoi la portée de cette contestation ne serait pas automatiquement étendue. Selon le mécanisme établi, peut-être que, si les plaignants ont gain de cause, toute contestation subséquente ailleurs dans le monde pourrait être traitée de façon accélérée.
Je voudrais aussi faire quelques remarques au sujet du chapitre 11 de l'ALENA. Dans cette enceinte, nous serons probablement saisis de questions sur l'ALENA tant et aussi longtemps que nous aurons un accord de libre-échange avec les États-Unis. D'autres députés ont déjà exprimé leurs préoccupations à propos des mesures protectionnistes adoptées aux États-Unis, précipitées par la conjoncture économique mondiale.
Nous pouvons comprendre que les pays veulent faire tout leur possible pour sortir leur économie de la crise. Par contre, ces pays comprennent également que nous avons partie liée avec nos partenaires commerciaux et que nous avons déjà des accords en place. Le fait de vouloir protéger et augmenter notre commerce intérieur de manière extrêmement énergique a une incidence notamment sur les échanges bilatéraux conclus dans des domaines qui relèvent de l'Accord de libre-échange nord-américain.
L'objet du chapitre 11 est de faciliter le mouvement des investissements en Amérique du Nord. C'est ça le véritable enjeu. C'est très compliqué. Il facilite ce mouvement en énonçant un ensemble de règles et de mesures disciplinaires garantissant aux investisseurs des pays de l'ALENA un climat d'investissement réglementé et prévisible. C'est le genre de choses qui se produisent généralement.
J'ai examiné le reste des notes d'information et je me suis rendu compte que c'est un labyrinthe complexe de rapports de réciprocité et qu'il faut être un expert pour vraiment bien comprendre. Je félicite les membres du comité qui ont réussi à saisir et à comprendre ce dossier, alors qu'il évolue constamment. Comme la plupart de nos lois, et même notre Constitution, c'est presque un document vivant. Chaque fois qu'il y a une autre contestation, un précédent est créé. Ce sont ce genre de choses qui influencent les décisions prises par le Canada et les provinces.
Le chapitre 11 prévoit également un mécanisme de règlement des différends qui pourraient survenir si des accusations de traitement discriminatoire étaient portées. En ce sens, le chapitre 11 empêche les gouvernements de prendre des mesures équivalentes à la nationalisation discriminatoire ou à l'expropriation d'un investissement étranger sans compensation à l'investisseur. C'est le coeur même de la contestation actuelle relative au pesticide 2,4-D.
Les gens devraient connaître un peu les éléments du chapitre 11 qui sont abordés dans le débat. Le chapitre 11 se divise en deux sections, A et B. La section A renferme les principales dispositions.
L'article 1102 porte sur le traitement national et stipule que chacune des parties à l'accord accordera aux investisseurs des autres parties et aux investissements qu'ils effectuent un traitement non moins favorable que celui qu'elles accordent, dans des circonstances analogues, à ses propres investisseurs et aux investissements qu'ils effectuent, en ce qui concerne l'établissement, l'acquisition, l'exploitation et la vente d'investissements.
L'article 1103 sera abordé. Il concerne le traitement de la nation la plus favorisée. Il prévoit qu'une partie ne peut accorder à un investisseur ou un investissement d'un pays qui n'est pas une partie à l'accord un traitement plus favorable que celui qu'elle accorde aux investisseurs et investissements d'un pays partie à l'accord.
La norme minimale de traitement est prévue à l'article 1105 et garantit l'application d'une norme minimale et absolue de traitement aux investisseurs des parties à l'accord conformément à des principes de longue date du droit international coutumier.
L'article 1110 concerne l'expropriation et il concerne particulièrement la question dont la Chambre est saisie par ce rapport. L'article 1110 prévoit qu'aucune des parties à l'ALENA ne peut, directement ou indirectement, nationaliser ou exproprier un investissement effectué sur son territoire par un investisseur d'une autre partie, sauf 1) pour une raison d'intérêt public; 2) sur une base non discriminatoire; 3) en conformité avec l'application régulière de la loi et 4) moyennant le versement d'une indemnité équivalant à la juste valeur marchande de l'investissement exproprié.
La plupart des membres du comité ont probablement passé pas mal ce temps à tenter de comprendre la signification de ces dispositions. Selon moi, c'est pour cela que nous avons tenu des débats très houleux dans cet endroit lorsqu'il a été question des contestations en vertu de l'ALENA, particulièrement les cas où le mécanisme de règlement des différends n'a pas semblé fonctionner.
Le point clé de l'article 1110, c'est la signification des mots « équivalant à l'expropriation ». C'est là où les choses deviennent subtiles. Il est bien établi dans le droit international que le terme « expropriation » ne renvoie pas nécessairement au transfert d'un titre de propriété. Un pays peut être considéré comme ayant exproprié une propriété si ses actions ont pour effet de réduire de manière importante le droit du propriétaire de récolter des avantages économiques, dont des profits réalisés sur cette propriété.
Les députés comprennent assurément que lorsqu'il est question d'expropriation dans ce débat, il n'est pas question d'expropriation au sens où on l'entend. En fait, il est question des droits touchés en l'espèce, dans la mesure où si le Québec interdit l'utilisation d'un pesticide donné, un autre pays de l'ALENA subira les effets de cette interdiction, car il ne pourra plus exporter au Canada des produits qui contiendront ce pesticide ou un autre semblable. Cela est subtil et c'est pour cela qu'on utilise le terme « expropriation ». En fait, on ne l'utilise pas dans le sens que nous lui connaissons.
À la section B du chapitre 11 sont énoncées les dispositions en matière de règlement des différends. Aux termes de ces dispositions, les investisseurs d'une partie à l'ALENA peuvent soumettre à l'arbitrage une plainte directe contre le gouvernement d'une autre partie. L'ALENA établit la procédure générale en matière d'arbitrage, stipulant que tout recours à l'arbitrage doit être fait en vertu de la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres États, la Convention du CIRDI, et du mécanisme complémentaire d'arbitrage du CIRDI ou des règles d'arbitrage de la Commission du droit commercial international de l'ONU.
Nous savons tous que le mécanisme de règlement des différends prévu au chapitre 11 n'est pas exempt de controverse. La procédure en question a été critiquée pour son manque de légitimité et de transparence. Elle ne prévoit qu'une forme limitée d'examen et aucune procédure d'appel. Cela représente tout un défi. Nous devons donc être très prudents lorsque nous nous saisissons de ces questions car, dans cette situation, sans possibilité d'appel, les décisions sont définitives et la procédure manque de rigueur.
Il est également important de noter que l'ALENA stipule qu'aucune décision du tribunal en vertu du chapitre 11 ne peut être invoquée comme précédent dans une contestation subséquente aux termes du chapitre 11. J'ai mentionné l'interdiction de ce pesticide par les villes de Halifax et de Toronto. Même si ces précédents ne peuvent être invoqués dans le traitement de la contestation apparentée dont le Québec fait l'objet, il ne fait aucun doute que les arguments et les preuves seraient utilisables, mais que la décision n'aurait aucune force contraignante. Autrement dit, aucune jurisprudence ne peut être constituée avec le temps. Chaque affaire est considérée comme unique.
Je remercie les députés qui ont transporté ce débat à la Chambre pour qu'elle prenne position. On peut cependant se demander pourquoi le gouvernement n'appuie pas la décision majoritaire qui a été prise au comité. Le gouvernement est tenu de rendre des comptes à la Chambre. Il doit répondre. Nous avons raté cette occasion. Les députés sont peut-être satisfaits d'avoir entendu les arguments du gouvernement sur le fond au comité et j'espère qu'ils seront disposés à les partager avec nous dans certains cas particuliers.
J'ai aussi soulevé le fait que lorsque le Québec à mis en place son interdiction, c'était sans justification scientifique. Cependant, comme je l'ai mentionné plus tôt, je vais conclure en rappelant que le rapport de Meg Sears précise que le gouvernement du Canada devrait défendre le droit de tous les paliers de gouvernement à mettre en oeuvre des mesures de précaution visant à protéger la santé et l'environnement de leurs citoyens.
Voilà les principaux arguments et la raison pour laquelle le comité a adopté cette position. J'espère maintenant que le gouvernement va répondre au rapport du comité.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du chapitre 11 et de l'ALENA en général.
Je suis toujours étonné de voir comment les défenseurs du libre-échange en vantent continuellement les mérites, affirmant que ceux qui travaillent dans les divers secteurs de notre économie d'un bout à l'autre du pays sont les bénéficiaires nets du libre-échange, qui a amélioré leurs conditions de vie, leur situation économique et leur bien-être social.
C'est ce qu'on répète inlassablement de ce côté-ci de la Chambre. J'ai entendu le député de tenir de tels propos ce matin, et j'entends aussi le gouvernement dire continuellement que c'est effectivement le cas. Par contre, personne ne suggère jamais qu'on jette un coup d'oeil aux statistiques. Pourquoi diable regarderions-nous les statistiques pour voir si c'est vrai? C'est beaucoup plus facile de simplement le dire. Ça a l'air merveilleux. Ça rassure les gens. Mais, si nous lisons les rapports de Statistique Canada pour la plus récente période, soit celle de 1989 à 2005, nous constatons que le contraire est vrai. La plupart des Canadiens n'ont pas prospéré depuis le libre-échange et l'ALENA. Ils ont plutôt régressé au plan économique.
Pourquoi dire cela aux Canadiens? Parce que cela montre qu'il ne faut pas négocier d'autres accords de libre-échange. C'est un mythe que de dire aux gens que c'est bon pour eux. C'est un peu comme dire à un enfant qui perd sa première dent que la fée va venir lui laisser un cadeau. Bien sûr que la fée vient pendant la nuit, mais c'est habituellement un parent qui laisse le cadeau, car la fée n'existe pas. Il faut cesser de parler de la fée dans le débat sur le libre-échange. Il est clair que la richesse moyenne de la vaste majorité des Canadiens a diminué et que la richesse moyenne d'un très faible pourcentage de Canadiens a augmenté.
Je vais lire les rapports de Statistique Canada sur ce qui est arrivé aux quatre quintiles inférieurs de l'échelle des revenus d'un bout à l'autre du pays.
Entre 1989 et 2005, le groupe au bas de l'échelle a vu son revenu diminuer de 14 p. 100. Cela veut dire que sa situation était pire en 2005 qu'elle ne l'était en 1989. Pourtant, le gouvernement libéral nous avait dit, et c'est maintenant le gouvernement conservateur qui le répète, que le libre-échange aiderait les gens. Les chiffres n'appuient cependant pas cette affirmation. Et je n'invente pas ces chiffres. Je n'ai rien d'une fée. Ces chiffres viennent de rapports de Statistique Canada auxquels tous les députés ont accès.
Comment s'en sont sortis les gens du deuxième quintile, ceux dont le revenu est toujours relativement faible? Un peu mieux que ceux du quintile inférieur, mais leur revenu a quand même diminué de 12 p. 100. Leur revenu a chuté de 12 p. 100 de 1989 à 2005, et pourtant les libéraux et les conservateurs répètent encore le mantra comme quoi le libre-échange améliore leur situation, qu'ils se portent mieux grâce à lui, malgré le fait que les chiffres prouvent le contraire.
Les gens du troisième quintile, eux, font partie de la classe moyenne inférieure. Comment s'en sont-ils tirés? Un peu mieux que le deuxième quintile étant donné qu'ils n'ont perdu que 6 p. 100 de leur revenu.
J'aurais assez de mal à convaincre mes voisins de consentir à un accord en vertu duquel leur situation serait moins intéressante dans 16 ans qu'elle ne l'est aujourd'hui. C'est exactement ce que nous avons fait aux Canadiens. Seize ans plus tard, le quintile inférieur a perdu 14 p. 100 de son revenu, le deuxième quintile, 12 p. 100 et le troisième quintile, 6 p. 100.
Enfin, la classe moyenne supérieure, elle, a vu son revenu augmenter d'un misérable 2 p. 100 en 16 ans.
Au bout du compte, qui a bénéficié de ces accords de libre-échange? Tiens tiens, ce sont les gens au revenu le plus élevé, qui n'avaient pas vraiment besoin d'améliorer leur situation de 1989 à 2005 puisqu'ils étaient déjà riches; leur revenu a augmenté de plus de 17 p. 100.
L'objectif de ces accords de libre-échange est plutôt clair. Il consiste à permettre à certains groupes au haut de l'échelle de s'enrichir alors que tous les autres sont laissés pour compte.
Les députés d'en face n'aiment pas ces chiffres. Pourquoi voudrait-on laisser entendre aux Canadiens que leur situation est meilleure, alors que ce n'est pas le cas? Pourquoi leur dirions-nous la vérité? Comment pouvons-nous leur faire accepter le libre-échange si nous leur demandons d'y adhérer en ajoutant qu'ils vont y perdre au change, si nous leur disons que c'est une bonne chose pour l'économie, mais pas pour eux personnellement, à titre de travailleurs au sein de cette économie?
Cette situation existe-t-elle parce que les travailleurs ne se forçaient pas assez? Le rapport révèle qu'en moyenne les travailleurs canadiens dont le revenu a diminué travaillaient plus d'heures. Ils perdaient du terrain sur le plan économique même en travaillant plus fort, même en travaillant plus d'heures et en étant séparés de leurs familles. En fait, ces travailleurs essayaient de compenser le fait qu'ils perdaient du terrain en travaillant davantage, mais leurs efforts étaient vains.
Qu'est-ce que nous constatons relativement à leur endettement? Malheureusement, étant donné que leur revenu diminuait, nous pouvions penser que leur ratio d'endettement par rapport au revenu du ménage augmenterait, et c'est exactement ce qui s'est produit. Dans les années 1980 qui ont précédé, soit à peu près jusqu'en 1986, l'endettement moyen des ménages a diminué. Toutefois, à compter de 1988-1989, une tendance à la hausse absolue s'est manifestée et persiste encore aujourd'hui. L'endettement se situe juste en dessous de 130 p. 100 du revenu du ménage, ou de son actif réel.
Lorsqu'on regarde la situation, on se demande si le sort des travailleurs s'est amélioré suite au libre-échange. À mon avis, les statistiques nous disent que toutes les belles promesses faites aux travailleurs canadiens ne se sont absolument pas réalisées. En fait, c'est plutôt le contraire qui s'est produit. Ces travailleurs ont vu leur revenu diminuer année après année, avec pour résultat qu'ils se sont endettés. Ils ont travaillé un très grand nombre d'heures afin d'essayer de subvenir aux besoins de leurs familles, mais leur pouvoir d'achat a diminué.
On continue de nous dire que le libre-échange est bon pour les Canadiens et que le chapitre 11 est nécessaire. Pourtant, c'est précisément l'élément qui prive les travailleurs, notamment de leurs droits et de leur capacité d'accomplir des choses. Ce chapitre fait le jeu des investisseurs, au détriment des travailleurs, et la situation perdure.
Je ne comprends pourquoi il en est ainsi. Selon moi, cette situation illustre clairement le fait que nous de défendons pas les intérêts des bonnes personnes. Nous parlons au nom d'un groupe d'investisseurs qui se situe tout en haut de l'échelle, un groupe dont les revenus n'ont pas diminué. Ces gens ont toujours connu du succès sur le plan financier. Nous avons oublié une réalité, ou nous n'en avons jamais pris conscience, à savoir que les choses ne vont vraiment pas bien pour tous ceux que nous représentons. Il faut penser à ces personnes lorsque nous élaborons des accords de libre-échange.
De quoi parle le chapitre 11 en fait? Il parle de la mise en place de règles. Un peu plus tôt, un collègue a parlé de règlement de différends. Il parlait de mettre en place des règles pour encadrer l'investissement en Amérique du Nord. Si des règles et des sanctions claires applicables à tous les pays étaient mises en place, les investisseurs pourraient profiter d'un bon climat d'investissement et être protégés. Par contre, le chapitre 11 ne parle pas de syndicats. Il ne parle pas d'environnement. Il ne parle pas de protection pour les travailleurs canadiens.
Il parle d'investisseurs étrangers qui recevront le même traitement que les investisseurs nationaux. Je pense que c'était probablement le cas pour la majorité des investissements qui étaient faits dans notre pays avant l'ALENA.
Quand j'étais enfant, j'ai appris à l'école qu'au canada, nous devions changer notre mentalité de filiale et bâtir nos propres entreprises canadiennes, et ce, à cause de tous les investissements étrangers qui affluent ici et parce que c'est un bon endroit. Cette réflexion découle certainement encore de notre certitude d'avoir d'abondantes richesses en ressources naturelles et en compétences et une main d'oeuvre de première classe qui est prête à faire sa part. Cependant, ce penchant pour une classe particulière d'individus appelé investisseurs demeure.
L'autre chose flagrante qui me sidère littéralement, c'est que si la Chambre fait quelque chose que les investisseurs jugent nuisible à leurs profits, ils portent l'affaire devant le tribunal. Il ne s'agit pas de leurs pertes véritables; on parle simplement de « bénéfices anticipés ». J'ai toujours pensé que je pourrais atteindre la taille de six pieds deux, mais cela n'a pas marché. Qui dois-je poursuivre? Mes parents, parce que je ne mesure pas six pieds deux?
Au chapitre 11 de l'ALENA, il y a une disposition qui permet à des entreprises de dire que nous avons établi un nouveau règlement de protection environnementale pour le bien de notre pays, ce qui est très bien pour nous, mais que cela réduit les gains qu'elles pensaient faire dans trois, quatre ou cinq ans. Comment savoir si ces entreprises existeront même encore dans trois, quatre ou cinq ans, sans parler du chiffre d'affaires qu'elles feront? Pourtant, en vertu de cet article ridicule, elles peuvent poursuivre le gouvernement canadien pour des pertes sur les bénéfices qu'elles pensent être en mesure de réaliser à l'avenir. On ne tient pas compte du fait que les dirigeants de ces entreprises peuvent commettre des erreurs entre-temps. Ces gens-là estiment qu'ils doivent pouvoir nous poursuivre sous prétexte qu'ils auraient pu gagner beaucoup d'argent à l'avenir.
Comment voulez-vous quantifier une chose pareille? Comment calculer le montant d'une hypothétique perte future? Personne n'a envie de perdre quelque chose dans la vie, mais on ne peut pas quantifier la semaine prochaine, l'année prochaine ou l'année suivante. Nul d'entre nous ne sait ce qui va se passer dans les cinq prochaines minutes. Cela fait partie de ce qu'on appelle la vie. C'est la grande surprise.
Prétendre qu'il y a une règle qui autorise des gens à décider qu'ils doivent être indemnisés pour des montants qu'ils pensaient pouvoir encaisser, c'est comme croire au Père Noël. J'ai l'impression que le chapitre 11 est quand même un peu plus sérieux. C'est une espèce de mythe. C'est comme les fables d'Ésope qu'on raconte aux enfants au lieu d'une décision fondée sur des règles, parce que c'est ce qu'on a dit. Les règles disent qu'on peut faire appel au tribunal mais que si l'on perd, tant pis. Et si le groupe d'arbitrage commet une erreur fondamentale? Tant pis. On ne peut pas dire qu'il y a eu une erreur, une erreur d'interprétation ou une simple lecture erronée des textes. Il n'est pas question de faire appel. Et on prétend s'appuyer sur des règles.
Tous mes collègues juristes qui connaissent très bien les procédures fondées sur des règles savent parfaitement que quand on rend une décision à un palier, il y a une possibilité d'appel parce que l'erreur est possible. Cela permet à la partie qui s'estime lésée par la décision de faire appel à un palier supérieur dans le cadre d'un régime fondé sur les règles. Mais ici il n'en est pas question. On ne sanctionne même pas des gens qui peuvent porter des accusations frivoles contre nous, quel que soit le sérieux de notre démarche.
Mes amis du Parti libéral ont parlé tout à l'heure de notre prospérité. Je vais vous parler de ce qui est arrivé aux employés de John Deere à Welland avec l'ALENA. L'entreprise a tout simplement filé. Est-ce que les employés ont pu la poursuivre parce qu'elle avait filé? Non. Est-ce que l'entreprise a fermé? Non. Est-ce que le travail qui s'accomplissait jusque-là à Welland a disparu? Non. Il est simplement parti ailleurs parce que c'était possible avec l'ALENA. On n'a versé aucune indemnité aux travailleurs et à la collectivité. L'entreprise n'a même pas eu le bon goût de s'excuser. Elle a simplement filé au Mexique en transférant une partie du travail aux États-Unis. Elle a abandonné ces travailleurs parce que les règlements le lui permettaient.
Pourquoi rédigerions-nous au Parlement des règles qui ne s'appliquent pas aux travailleurs, à nos citoyens, aux gens qui vivent ici et aux personnes que nous représentons? Je ne me suis pas fais élire par des grandes sociétés multinationales puisque celles-ci ne peuvent pas voter. Elles sont simplement des entités. Ce sont des personnes qui nous élisent pour que nous travaillions pour elles. Toutefois, dans le cadre de ces accords commerciaux, nous ne semblons pas travailler pour le compte de nos électeurs
Les données de Statistique Canada que j'ai citées plus tôt montrent clairement que les travailleurs canadiens ordinaires ont de plus en plus de difficulté à gagner leur vie et à soutenir le rythme. Ils perdent du terrain.
La principale question soulevée maintenant par le gouvernement et le Parti libéral porte sur les déclarations faites la semaine dernière en ce qui a trait à la loi sur les achats aux États-Unis. Cette loi est en vigueur depuis environ 40 ans, et peut-être même plus longtemps. Ceux d'entre nous qui vivent près de la frontière savaient ce qui était en train de se produire parce que les États-Unis n'étaient pas couverts par le chapitre 11 et qu'ils l'utilisaient exclusivement pour s'assurer qu'ils étaient les bénéficiaires nets. Ils le font encore de nos jours.
Au cours des années, j'ai parlé avec quelques politiciens locaux, que je considère comme des amis. Je défie tous les députés de la Chambre de poser la question suivante à leurs électeurs: « Quand je perçois vos impôts, aimeriez-vous que je dépense cet argent sur (a) vos voisins et vous; (b) les habitants de la Floride; (c) les habitants de l'Allemagne; ou (d) les habitants de la Colombie? ». Je suis absolument certain que 99,9 p. 100 des électeurs choisiraient la première réponse parce qu'il s'agit de leur argent.
Nous avons recueilli leur argent, et je suis sûr qu'ils nous diront que, toutes choses étant égales par ailleurs, nous devrions le dépenser pour eux parce que c'est pour eux que nous l'avons perçu. Cet argent a été recueilli au bénéfice de tous ceux qui vivent dans notre pays et qui en font un meilleur endroit où vivre.
Tout ce que nous avons entendu venant de l'ALENA est le bruit de succion qu'il fait en tirant hors du pays toute la richesse de la majorité des Canadiens. Une partie de cette richesse est transférée dans les poches des Canadiens plus aisés, mais une bonne partie sort tout simplement du pays. Un coup d'oeil à l'Ontario suffit pour le constater. Les activités industrielles disparaissent progressivement du Sud-Ouest de l'Ontario depuis l'adoption de l'ALENA, il y a 18 ans. Le processus s'est même accéléré ces derniers temps.
J'apprécie que mes collègues aient parlé des règles et que le député ait soulevé le principe de précaution, qui est en fait une règle dans le domaine scientifique. Nous aimons respecter les règles et voir les faits d'un point de vue scientifique. En fait, les scientifiques invoquent le principe de précaution quand ils nous disent que nous ne devrions pas attendre que les gens tombent malades ou meurent. Si nous avons le sentiment que quelque chose ne tourne par rond, nous devrions prendre des mesures. C'est ce qu'exige le principe de précaution.
Dans le cas du Québec et du 2,4-D, le principe de précaution a été appliqué à l'échelle provinciale. Nous savons ce qui s'est passé au sud de la frontière, avec la loi privilégiant l'achat aux États-Unis et la réaction des gouvernements infranationaux. Les autorités des États et des villes ont dit clairement que l'ALENA ne s'appliquait pas à elles. Pourtant, de notre côté, nous sommes aux prises avec une multinationale disant au Québec qu'il doit respecter l'ALENA.
On constate un déséquilibre quand un pays signataire de l'ALENA dit qu'un gouvernement autre que national n'est pas assujetti à l'ALENA tandis que des villes comme Toronto, et d'autres, ou la province de Québec, sont réellement représentées par des gouvernements infranationaux, alors que le gouvernement du Canada n'a pas encore interdit la substance mais y travaille par l'intermédiaire de Santé Canada et de groupes de gestion des pesticides. Je trouve étrange que des multinationales pensent qu'il convient d'entamer des démarches contre le Canada si des gouvernements infranationaux leur font du tort mais que les gouvernements infranationaux des États-Unis ne doivent pas nécessairement faire l'objet de contestations.
C'est curieux, mais on en trouve de nombreux autres exemples. Je sais que les députés de la Colombie-Britannique en savent bien plus que moi à propos de la capitulation au chapitre du bois d'oeuvre, alors je leur laisse cette question.
Les contestations menées par des multinationales étrangères contre le Canada au sujet de substances que nous considérons comme dangereuses me paraissent navrantes. L'une de ces contestations concernait l'exportation des BPC. Sur les 18 contestations menées, six remettent en question les règles de protection de l'environnement, cinq visent les ressources naturelles du Canada et une porte sur son industrie culturelle. Donc, 14 contestations au total remettent en question des choses qui nous appartiennent en réalité et qui ne regardent pas les autres. Voilà ce que visent les contestations. Nous devons changer le chapitre 11 pour remplacer le libre-échange par le commerce équitable.
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Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi de participer à ce débat que j'estime être d'une importance critique en ce qui a trait à la souveraineté de notre pays et à l'avenir de nombreuses politiques publiques qui sont dans l'intérêt de tous les Canadiens. Je veux remercier mon collègue, le député de , qui a travaillé très fort pour s'assurer non seulement que cette question fort importante a pu être étudiée au comité auquel il siège en tant que porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de commerce, mais aussi que nous ayons tous l'occasion d'en débattre par le truchement de la motion d'adoption présentée aujourd'hui.
Je crois que c'est un député libéral qui a demandé plus tôt ce que nous cherchions à accomplir en tenant ce débat. Cela permet qu'une question souvent abordée en coulisse soit débattue ouvertement et publiquement par les parlementaires et que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays en soient informés du même coup. Cela nous donne une chance d'essayer de convaincre le gouvernement de prendre des mesures sur une importante question de politique publique au lieu de se cacher derrière les beaux discours sur le libre-échange, parce que c'est fondamental. Il doit prendre un moment pour évaluer les implications et les conséquences d'une politique en vigueur depuis 1994.
L'occasion de tenir ce débat nous vient sous la forme la plus sérieuse qui soit. La question concerne le droit d'un gouvernement dans notre pays, soit celui de la province de Québec, de légiférer sur ce qu'il estime être dans l'intérêt supérieur de la population en interdisant l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques. Cette question nous touche tous, car nous savons qu'il y a des gouvernements dans ce pays qui permettent l'utilisation du pesticide 2,4-D sur les pelouses à des fins esthétiques, sachant que cela peut avoir de graves conséquences sur la santé des enfants, des femmes enceintes et de bien d'autres personnes. Il est essentiel que nous nous penchions sur cette question non seulement pour des raisons de santé, mais aussi à cause de la nécessité de défendre le droit d'un gouvernement de légiférer sur ce qu'il estime être dans l'intérêt supérieur de la population.
Nous abordons cette question parce que nous avons un accord commercial qui permet à une société étrangère de s'attaquer à un gouvernement au Canada au sujet de politiques qu'il adopte au nom de l'intérêt public supérieur et en s'appuyant sur des données scientifiques. Aux députés qui prétendent qu'il s'agit d'un gouvernement qui prend une décision bon gré mal gré sans motif de préoccupation, sans songer aux données scientifiques, à ces députés, je leur dis qu'ils ont tort. En fait, le principe de précaution, qui est au cœur de cette question, est issu de la science. Selon ce principe, lorsque des connaissances scientifiques donnent à penser qu'un produit chimique ou autre ou une substance a, d'après des recherches préliminaires, un effet sur la santé et le bien-être de la personne, il s'agit d'un sujet d'inquiétude suffisant pour imposer un moratoire, pour interdire le produit jusqu'à ce que nous ayons une connaissance exhaustive, une compréhension complète.
Le simple principe de la précaution interdit de causer un préjudice. C'est le rôle du gouvernement de s'assurer que, au-delà de tout doute raisonnable, nos aliments, nos médicaments, notre eau, l'air que nous respirons sont salubres. Si un produit est mis au point et si nous apprenons qu'il risque de nuire à la santé ou au bien-être, c'est le travail du gouvernement de l'évaluer et d'imposer une période d'attente pour empêcher la diffusion d'une substance dangereuse jusqu'à ce que les fabricants du produit chimique ou de la substance puissent en prouver l'innocuité au-delà de tout doute raisonnable. Voilà le nœud du problème.
Nous sommes signataires d'un accord commercial qui permet à une société comme Dow AgroSciences de s'attaquer à un gouvernement au Canada à propos d'une politique qu'il a adoptée dans l'intérêt supérieur de ses administrés.
Le problème tient à une partie de l'ALENA, le chapitre 11, qui permet aux investisseurs étrangers de contester les décisions de gouvernements, que ce soit celui de la province de Québec ou celui du Canada. Une société commerciale peut contester notre droit de prendre des décisions fondées sur l'intérêt bien compris de tous les citoyens canadiens, où qu'ils vivent et quel que soit leur salaire.
Le chapitre 11 est l'un des éléments flagrants de l'ALENA qu'il faut revoir. Si notre débat peut donner quelque chose, que ce soit au moins un accord sur ce point. Peut-être pourrons-nous convaincre les conservateurs, avant la fin du débat, qu'il nous faut repenser le chapitre 11.
Mon collègue de a évoqué toute la gamme des problèmes que pose l'ALENA. Il a fait valoir un très bon point en disant que l'ALENA, dans son ensemble, n'a peut-être pas servi notre pays aussi bien que d'autres députés le prétendent, qu'il n'a pas été très avantageux pour les travailleurs et les familles ordinaires, malgré ce que les libéraux et les conservateurs prétendent depuis des années.
Il y a un très grand nombre de preuves qui donnent à penser que mon collègue pourrait bien avoir raison quand il dit que nous devrions étudier l'ALENA du point de vue du commerce équitable et déterminer si cet accord a réellement donné les résultats que les Canadiens avaient espérés.
Bon nombre d'études ont laissé entendre que l'ALENA causait certains problèmes. Nous ne devrions pas tenter de cacher ces problèmes tout simplement parce qu'il est soudainement mal vu de parler des problèmes que soulève l'ALENA. Nous devrions plutôt les définir et en discuter pour déterminer s'il y a lieu de s'inquiéter et si nous devrions réévaluer notre approche au commerce dans un tel contexte.
Le Centre canadien des politiques alternatives fait un travail extraordinaire à cet égard. Je crois qu'il n'y a personne à la Chambre qui remette le travail du centre en question lorsqu'il présente des études préparées par des gens comme Carlo Salas, qui est détenteur d'un doctorat en économie et qui donne actuellement des cours sur le développement régional au El Colegio Tlaxcala, en plus de faire partie du comité de direction de l'Instituto de Estudios del Trabajo de la ville de Mexico.
Je ne crois pas que nous remettrions en question les titres de compétence de Bruce Campbell, le directeur exécutif du Centre des politiques alternatives, ou le travail de Robert Scott, qui est détenteur d'un doctorat en économie et qui dirige les programmes internationaux de l'Economic Policy Institute.
Ces trois hommes ont fait une étude approfondie il y a quelques années en vue d'évaluer les répercussions de l'ALENA sur les travailleurs. Ils en sont arrivés à la conclusion que cet accord commercial avait été plus négatif que positif pour les travailleurs.
Je n'entrerai pas dans les détails, mais je parlerai de ce que mon collègue de a su clairement préciser puisqu'il a une connaissance directe et pratique de ces problèmes dans sa propre circonscription où les travailleurs ont perdu leurs emplois, ont été soumis aux caprices du marché et ne voient pas grand avantage à l'ALENA.
L'étude du Centre des politiques alternatives dont je viens de parler dit ce qui suit:
L'ALENA avait promis aux Canadiens une augmentation de la croissance économique, du revenu et de l'emploi pour tous les secteurs, toutes les régions et tous les groupes de revenus, la disparition du fossé de productivité qui nous sépare des États-Unis, la création d'une économie plus diversifiée, plus efficace et davantage basée sur le savoir ainsi qu'une économie qui permettrait de maintenir et de renforcer le généreux modèle social canadien.
Mais, les auteurs de l'étude constatent qu'on attend encore l'âge d'or que devait amener l'ALENA, selon les promesses faites à l'époque. Nous avons vu le changement qui s'est produit sur le marché du travail. Les emplois sont devenus précaires. Les gens doivent occuper plusieurs emplois pour gagner leur vie, et les syndicats qui essaient de protéger les emplois et les conditions de travail des gens sont menacés en vertu de l'ALENA.
Je pense maintenant en avoir assez dit sur l'ALENA en général puisque la question dont nous parlons aujourd'hui est en fait le chapitre 11 de l'ALENA, qui permet aux entreprises et aux investisseurs étrangers de contester les décisions des gouvernements.
Je ne dis pas, comme l'a indiqué mon collègue libéral, le député de , que nous devrions ignorer la règle du traitement national. Je ne remets pas du tout en question cette règle. Je pense en fait qu'il nous faut un mécanisme nous permettant de revenir à l'époque où le dialogue et les délibérations avaient lieu entre gouvernements, pour ce qui est du traitement national. Je ne pense pas qu'il y ait un seul auteur crédible au pays, en matière de politique économique et commerciale, qui ose soutenir qu'il est dans l'intérêt de quiconque parmi nous qu'un mécanisme permette à des entreprises étrangères de poursuivre les gouvernements. En fait, personne n'oserait soutenir que ce mécanisme est autre chose qu'un moyen de limiter l'exercice de la souveraineté nationale par le peuple. Les experts ont tous souligné les problèmes. Le Service d'information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque du Parlement nous a clairement expliqué que, pour qu'il y ait violation de la règle du traitement national, il faut pouvoir démontrer que la mesure en question est moins favorable à l'investisseur étranger qu'à l'investisseur du pays concerné et que les deux investisseurs se trouvent dans des circonstances semblables.
Frances Russell, qui a abondamment écrit sur ce dossier dans le Winnipeg Free Press et qui possède une grande expertise dans ce domaine, a exposé très clairement le problème dans un article du 5 mars 2008. Voici ce qu'elle écrivait:
Avant l'ALENA, les griefs des investisseurs privés étaient résolus par les gouvernements entre eux. Mais, l'ALENA autorise les investisseurs étrangers à poursuivre directement le gouvernement.
Et des poursuites, il y en a eu pour des dizaines de millions de dollars. Elles contestent le droit du peuple de se gouverner concernant l'environnement, la culture, l'agriculture, les ressources naturelles, les emplois, la santé et la sécurité. Le 1er janvier 2008, on dénombrait 49 poursuites des investisseurs contre les États en vertu de l'ALENA: 18 contre le Canada, 17 contre le Mexique et 14 contre les États-Unis. Jusqu'à maintenant, le Canada a versé 27 millions de dollars en dommages-intérêts et le Mexique, 18,7 millions. Les poursuites contre les États-Unis ont, jusqu'ici, toutes été rejetées.
Ce n'est qu'un exemple de l'expertise et des travaux de recherche que l'on peut consulter, au sujet de l'effet du chapitre 11 sur le Canada et sur la capacité des dirigeants du pays de prendre des décisions qui sont dans l'intérêt de la population en général.
Cela est particulièrement évident dans le domaine des soins de santé. Et je tiens à insérer cette question dans le présent débat. Si nous permettons à Dow Agro de présenter une réclamation en dommages-intérêts au Québec et si le gouvernement du Canada s'en lave les mains et, au final, paie des dommages-intérêts, la porte sera ouverte à des demandes semblables de la part d'autres entreprises. Il ne s'agit pas simplement d'interdire l'usage des pesticides à des fins esthétiques. En fait, les répercussions se feront sentir sur le système de santé dans son ensemble.
Prenons le temps de réfléchir quelques instants aux pesticides. Je pense que cette question a été soulevée plus tôt, c'est-à-dire que se passe-t-il dans le cas de toutes les autres administrations, de la ville de Toronto et des autres municipalités qui ont interdit l'utilisation du 2,4-D sur les pelouses à des fins esthétiques? La question était la suivante: pourquoi a-t-on choisi le Québec, et pas les autres?
Je crois que la réponse est évidente. L'industrie a choisi l'État le plus avancé en espérant qu'advenant sa victoire, elle aurait les coudées franches pour agir de la même façon à l'encontre d'autres municipalités. Par conséquent, la porte est maintenant ouverte à la contestation de décisions sages rendues par des administrations locales dans l'intérêt des citoyens qu'elles servent.
Penchons-nous maintenant sur le vaste dossier des soins de santé. Selon moi, il est juste d'affirmer que, si l'ALENA avait été mis en place il y a 25 ans et que le chapitre 11 avait été en vigueur au moment de la création du régime d'assurance-maladie, celui-ci aurait probablement fait long feu.
Ce n'est pas uniquement mon opinion, c'est celle de nombreux experts au Canada. Je tiens à lire des extraits d'un chapitre d'un livre intitulé Medicare: Facts, Myths, Problems, Promise, publié sous la direction de Bruce Campbell et Greg Marchildon, du Centre canadien de politiques alternatives.
Le chapitre en question est signé par Scott Sinclair et s'intitule « Protecting Medicare from Foreign Commercial Interests ». Voici:
Mettant cette préoccupation en lumière, Jon Johnson, un des meilleurs avocats en droit commercial du Canada, a carrément affirmé devant la Commission Romanow que, si les dispositions de l'ALENA sur l'expropriation « et leur mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et les États avaient existé dans les années 1960, le système de santé publique que l'on connaît aujourd'hui n'aurait jamais pu voir le jour ».
Il continue:
Ce brusque rappel à la réalité nous fait prendre conscience que le pouvoir des traités commerciaux modernes — qui ont maintenant une portée qui va bien au-delà des questions commerciales traditionnelles jusqu'à entraver la capacité des gouvernements de limiter et de réglementer les intérêts commerciaux — doit être contenu afin de protéger l'avenir du régime d'assurance-maladie.
Les experts du domaine affirment que, si le chapitre 11 avait existé dans les années 1960, lorsque Tommy Douglas et d'autres avec lui se sont battus pour instaurer l'assurance-maladie, nous aurions probablement été incapables de mettre ce régime sur pied.
Remontons tout juste 25 ans en arrière, puisque c'est l'anniversaire de la Loi canadienne sur la santé, et pensons que nous n'aurions peut-être jamais pu adopter une loi aussi innovatrice si le traité commercial, avec son chapitre 11, avait existé.
Scott Sinclair ajoute encore ceci:
Les principes à la base du système d'assurance-maladie canadien entrent en contradiction avec l'orientation donnée par les traités commerciaux modernes. En instaurant un monopole d'État dans le domaine de l'assurance-maladie et en adoptant des règlements précisant qui peut fournir les services de santé et à quelles conditions, la Loi canadienne sur la santé et le régime d'assurance-maladie vont à l'encontre des traités sur la libéralisation du commerce et des investissements.
Nous pouvons le constater régulièrement. J'ignore combien de gens ici se souviennent du très vif débat que nous avons eu ici il y a six ou sept ans lorsque le gouvernement de l'Alberta a menacé de créer un hôpital privé en vertu de ce qui était alors le projet de loi 11. Nous prenions la parole chaque fois que nous en avions l'occasion pour tenter de convaincre le gouvernement libéral de l'époque qu'accepter l'ouverture d'un hôpital privé en Alberta ouvrirait la porte à des investisseurs de partout. Aujourd'hui, les libéraux sont de notre avis et conviennent avec nous que les dispositions visées menacent le droit d'un gouvernement canadien d'interdire l'utilisation du 2,4-D pour des raisons de santé.
Si seulement nous avions réussi à faire comprendre cela aux libéraux à l'époque, nous ne serions pas dans une telle situation. Malheureusement, il est trop tard. Nous disposons toujours de ce que certains considèrent comme étant le meilleur système de soins de santé au monde, lui qui est en grande partie administré publiquement de façon non lucrative. Il est vrai que le système subit une certaine privatisation, mais c'est l'ouverture, aussi petite soit-elle, envers cette privatisation qui nuit à notre capacité de conserver un système public non lucratif.
À preuve, et simplement pour revenir sur l'attaque que subit actuellement notre système en raison du chapitre 11, j'aimerais parler d'un dossier actuel Colombie-Britannique. Un entrepreneur en soins de santé de l'Arizona s'élève contre le gouvernement du Canada, car selon lui, on tente de contrecarrer ses plans visant à construire un centre de chirurgie privé dans la province, et il intente un recours de 155 millions de dollars contre le gouvernement du Canada.
Et ce n'est que la pointe de l'iceberg. Il y a tellement d'autres choses à dire sur le chapitre 11, et sur son impact sur les soins de santé et sur notre modèle de soins de santé. Nous devons faire preuve de vigilance en tout temps.
Je vais conclure en disant que tout gouvernement devrait avoir le droit de prendre les décisions qui sont dans le meilleur intérêt de ses citoyens, et que lorsque des investisseurs étrangers à la recherche de profits tentent de faire obstacle à ce droit et nous disent que nous leur refusons leur droit de faire des profits, mettant en danger au passage l'intérêt du public, nous ne servons les intérêts de personne.
Nous devons nous opposer fermement au chapitre 11 et trouver une façon de régler le conflit qui sévit actuellement au Québec.
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Madame la Présidente, j’ai écouté attentivement le discours de mon excellente amie de Winnipeg, pour qui j’ai beaucoup de respect.
Toutefois, je ne peux pas être d’accord avec elle sur cette question. Je vais d’ailleurs répondre à ses derniers propos en lui disant que la Chambre et les Canadiens devraient appuyer fermement le chapitre 11 et l’ensemble de l’ALENA pour des raisons très simples.
Premièrement, j’ai été déçu d’entendre la députée se reporter constamment au Centre canadien de politiques alternatives, comme si c’était sa seule source de données. Dans ces conditions, les arguments de la députée n’ont pas un fondement très solide, car tout ce que fait et tout ce qu’écrit le Centre canadien de politiques alternatives a déjà été fait et écrit auparavant. Toutes ses hypothèses sont coulées dans le béton. Il n’y a là aucune imagination. Le Centre ne fait absolument rien.
Voilà le contrepoint. Si j’utilisais le Centre comme seule source pour prononcer un discours, je crois qu’un certain nombre de députés seraient du même avis.
Le Centre canadien de politiques alternatives n’est pas une organisation assez sérieuse pour qu’il soit possible de fonder la politique publique sur son point de vue.
Cela étant dit, le chapitre 11 de l’ALENA étend un principe canadien qui existait déjà à nos partenaires commerciaux. La notion de traitement national existait bien avant l’ALENA. Il n’y aurait pas de différence dans le traitement, en vertu du droit canadien, des sociétés étrangères ayant des activités au Canada en l’absence du chapitre 11. Le traitement national est antérieur à l’ALENA.
Ce que font l’ALENA et le chapitre 11, c’est étendre à nos partenaires commerciaux la protection juridique et l’obligation de ne pas faire de discrimination fondée sur leur pays d’origine. Sans rien changer pour le Canada, le chapitre 11 a une très grande importance pour nos partenaires commerciaux.
De plus, le chapitre 11 protège les sociétés canadiennes dans leurs activités aux États-Unis et au Mexique en interdisant la discrimination fondée sur le fait qu’elles appartiennent à des Canadiens ou ont leur siège au Canada. Le chapitre 11 protège les Canadiens. Il étend l’application d’un principe canadien. C’est une importante valeur.
La députée dit que nous devons nous débarrasser du chapitre 11, mais c’est l’essence même de l’ALENA et du traitement égal. Dire que les entreprises canadiennes sont victimes de discrimination à cause du chapitre 11 me semble aberrant parce que la réalité est tout à fait à l’opposé.
Le traitement national des sociétés étrangères ayant des activités au Canada existait avant l’adoption du chapitre 11. Le chapitre 11 protège les entreprises canadiennes ayant des activités aux États-Unis et au Mexique en leur appliquant le principe auquel nous nous conformons à l’égard des sociétés étrangères travaillant au Canada. L’élimination du chapitre 11 aurait des effets très négatifs sur les sociétés canadiennes puisqu’elles pourraient alors être victimes de discrimination dans leurs opérations aux États-Unis et au Mexique.
La députée ne comprend-elle pas la situation?
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Madame la Présidente, quatre minutes, c'est peu pour parler d'un dossier aussi consistant.
J'aimerais d'abord remercier mon collègue de , qui a déposé cette motion en comité. Elle nous permet d'avoir ce débat à la Chambre des communes aujourd'hui et vise à protéger le Code de gestion des pesticides du Québec de certaines multinationales qui voudraient le contester en vertu du chapitre 11 de l'ALENA.
De ce côté-ci de la Chambre, on est là pour défendre les prérogatives du Québec et la réglementation québécoise. À cet égard, la motion déposée par mon collègue témoigne du fait que le Bloc est là pour défendre les lois québécoises, alors que de l'autre côté de la Chambre, on est encore à se demander si on doit protéger des lois qui ont été votées par des provinces lorsque ces lois risquent d'être contestées en vertu de ce chapitre 11.
C'est important pour le Québec. Ce code de gestion des pesticides est un exemple au Canada et a, jusqu'à maintenant, été repris par l'Ontario. Ce modèle, qui a été adopté dès 2003 au Québec, encadre et interdit un certain nombre de pesticides en vertu du principe de précaution. C'est en vertu de ce principe que le Québec a interdit, entre autres, le 2,4-D, un pesticide actuellement commercialisé et vendu par l'entreprise Dow AgroScience. Ce pesticide peut avoir des conséquences sur la santé des individus. Pour cette raison, le Québec a décidé de l'interdire. Malheureusement, certaines multinationales utilisent les dispositions du chapitre 11 pour contester la réglementation québécoise, alors que cette réglementation a été admise et a fait consensus à l'Assemblée nationale du Québec.
Qu'attend-on de ce gouvernement? On attend du qu'il se tienne debout sur la scène internationale, qu'il défende les prérogatives du Québec et qu'il défende la santé publique au Québec en protégeant cette loi qui a fait consensus à l'Assemblée nationale du Québec. Ce consensus de l'Assemblée nationale du Québec, repris par des organismes environnementaux du Québec et du Canada, risque de créer un précédent si le gouvernement continue de ne pas défendre la législation québécoise.
Il faut que le gouvernement se tienne debout sur la scène internationale pour défendre les prérogatives du Québec. Malheureusement, à plusieurs reprises, on a interrogé le et le , et ils ont refusé de nous en dire plus.
Or des faits démontrent que ce pesticide risque d'avoir des conséquences pour la santé. D'ailleurs, c'est contradictoire de la part d'un gouvernement qui a déposé il y a quelques années un projet de loi sur les pesticides. Pourtant, notre gouvernement dit vouloir protéger la santé de la population, mais il tente en même temps de mettre des bâtons dans les roues du Québec, entre autres, qui a adopté ce code de gestion.
En terminant, et c'est le sens de la motion qui a été déposée par le député de , on s'attend à ce que le se tienne debout et défende la législation québécoise devant des multinationales qui refusent d'appliquer le principe de précaution.