SC38 Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité sur le projet de loi C-38 (partie III) du Comité permanent des finances
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 31 mai 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Mesdames et messieurs, bonsoir. Nous avons déjà dépassé de plus d'une minute l'heure prévue pour l'ouverture de la séance. Nous avons le quorum et une liste de témoins à entendre.
Nous accueillons aujourd'hui M. Tony Maas, directeur du Programme d'eau douce au Fonds mondial pour la nature. Nous accueillons aussi, en tant que représentant de l'Office national de l'énergie, M. Robert Steedman, spécialiste en chef, Environnement; M. Warren Everson, vice-président principal, Politique, à la Chambre de commerce du Canada; Mme Rachel Forbes, avocate-conseil à l'interne, qui représente la West Coast Environmental Law Association et, enfin, M. Geoff Smith, directeur des Relations gouvernementales qui représente l'Association canadienne de l'électricité.
Vous avez chacun 10 minutes pour nous présenter un exposé, après quoi nous passerons aux questions.
Mes chers collègues, j'ai voulu être généreux dans la répartition du temps de parole, mais nous allons devoir ce soir même nous pencher sur notre projet de rapport et allons donc devoir achever à l'heure prévue cette partie de la séance.
Monsieur Maas, êtes-vous prêt?
Nous allons nous en tenir à l'ordre dans lequel vous avez été présentés. C'est la séquence prévue par l'ordre du jour.
Monsieur Maas, vous avez donc 10 minutes.
Je tiens en premier lieu à vous remercier, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité de m'avoir invité à prendre la parole pour vous parler de la partie 3 du projet de loi C-38, projet de loi portant exécution de certaines dispositions du budget.
Je m'appelle, effectivement, Tony Maas et je suis directeur du Programme d'eau douce au Fonds mondial pour la nature (Canada). Nous sommes, comme vous le savez sans doute, une des plus grandes et des plus anciennes organisations canadiennes de conservation. Nous avons des collaborateurs et des antennes dans toutes les régions du pays. Je tiens à préciser que notre action se fonde sur des données scientifiques et que notre mission consiste à trouver des solutions.
Pour vous donner une idée de notre activité, je voudrais évoquer très rapidement notre programme d'eau douce. Notre objectif est de protéger et de restaurer les écosystèmes aquatiques afin que nous puissions, nous et les générations à venir, continuer à profiter des nombreux avantages qu'ils nous procurent, qu'il s'agisse d'eau potable, de moyens de récréation, ou de l'habitat qu'ils offrent au poisson et à la sauvagine.
Compte tenu de ces quelques précisions et de mon domaine de spécialisation, j'entends, si vous le voulez bien, essentiellement m'en tenir aux modifications que le projet de loi C-38 propose d'apporter à la Loi sur les pêches.
La Loi sur les pêches est généralement tenue pour un des plus puissants moyens juridiques que les Canadiens aient de protéger le poisson et son habitat, dont, naturellement, l'eau indispensable à la survie du poisson, une eau qui soit donc saine, qui ne fasse jamais défaut et qui soit en quantité suffisante pour assurer la survie de l'habitat. C'est, bien sûr, cette même eau que nous consommons, dans laquelle nous nageons et dont nous nous servons à des fins récréatives. Non seulement cette loi permet-elle de protéger le poisson et son habitat, mais elle renforce la sécurité des ressources en eau dont nous dépendons tous.
Cette loi est-elle en son état actuel parfaite, et la manière dont elle est administrée est-elle à l'abri de toute critique? Ce n'est pas, selon moi, le cas. De nombreuses améliorations pourraient en effet y être apportées, mais d'après moi, ces améliorations concernent essentiellement la manière dont elle est appliquée et non le principe de base qui est la protection du poisson et de son habitat. Or, ce principe est plus important que jamais car les espèces de poisson en péril sont de plus en plus nombreuses, et nos rivières, nos lacs et nos terres humides sont de plus en plus mis à mal.
Permettez-moi de faire état de trois inquiétudes que nous inspirent les modifications que le projet de loi C-38 se propose d'apporter à la Loi sur les pêches. On envisage, en premier lieu, d'en restreindre la portée et de n'y soumettre que les pêches commerciales, récréatives et autochtones. La mise en place d'un système fondé sur une classification des rivières et des lacs selon qu'ils méritent ou non d'être protégés veut nécessairement dire que la loi va en laisser un certain nombre sans protection aucune. Cela veut-il dire, par exemple, que les voies d'eau situées dans les régions sauvages où n'est pratiquée ni une pêche commerciale, ni une pêche récréative ou autochtone, seront exclues des mesures de protection? Qu'en sera-t-il des ruisseaux que l'on tente actuellement de restaurer dans l'intérêt de la pêche récréative? Des efforts considérables sont actuellement engagés, y compris par notre organisation, et des sommes importantes affectées afin de restaurer les grands écosystèmes et pérenniser la pêche sportive et récréative.
Les termes « commerciale », « récréative » et « autochtone » sont définis dans le projet de loi C-38, mais sans que le texte ne fournisse aucun détail quant aux fondements scientifiques ou à la procédure décisionnelle permettant de déterminer les pêches et les voies d'eau en question. Il est donc très difficile d'évaluer les conséquences des changements proposés et les résultats qu'entraînera leur mise en oeuvre.
Nous sommes très préoccupés également par le fait qu'on propose de modifier la raison d'être de l'interdiction qui est actuellement la détérioration et la destruction de l'habitat. Les membres du comité connaissent bien cette disposition communément appelée DDP de l'habitat. Le critère que l'on se propose d'instaurer est celui du sérieux dommage, défini comme étant « la mort de tout poisson ou la modification permanente ou la destruction de son habitat ». C'est dire qu'on passe du critère de précaution fondé sur l'avis des spécialistes concernant les incidences que pourrait avoir tel ou tel projet à un critère qui ne répond actuellement à aucune définition scientifique, en l'occurrence le critère du dommage sérieux et permanent. Je ne dis pas que ces nouveaux termes ne pourraient pas faire l'objet d'une définition scientifique, mais je considère qu'en matière de gestion et de protection des ressources naturelles telles que les pêches, et les écosystèmes qui leur sont indispensables, une définition claire des fondements et critères scientifiques doit précéder toute refonte des dispositions législatives et des politiques applicables et non pas être dégagée a posteriori.
Et, enfin, notre troisième préoccupation provient des exemptions et des délégations de responsabilité. Les dispositions du projet de loi qui prévoient l'exemption de certains ouvrages, entreprises et activités, ainsi que de certaines pêches ou voies d'eau, risquent de saper sérieusement l'influence des experts scientifiques de la fonction publique, qui ont pourtant toutes les connaissances nécessaires pour évaluer correctement l'impact d'un projet et pour apprécier la sensibilité des différents cours d'eau et habitats.
Pour ce qui est de la délégation, il serait d'après moi préférable d'oeuvrer de concert avec les provinces et les territoires afin de renforcer l'efficacité des mesures de mise en oeuvre des dispositions de la Loi sur les pêches. J'ajoute que de nombreux accords de délégation permettent actuellement aux provinces et aux territoires — et, en ce qui concerne l'Ontario, aux autorités de conservation — d'administrer les autorisations actuellement prévues dans la loi. Je ne vois pas très bien quelles sont, aux termes des changements proposés dans le projet de loi C-38, les nouvelles responsabilités que l'on envisage de confier aux provinces et aux territoires et, ce qui importe plus encore, il n'est pas clair que les provinces et les territoires — et, en ce qui concerne l'Ontario, les autorités de conservation — ont actuellement les moyens, en ces temps d'incertitude économique, d'assumer de nouvelles responsabilités si on ne leur accorde pas en même temps de nouveaux moyens.
Mais ce qui me préoccupe davantage dans les nouvelles mesures de délégation qui sont envisagées c'est la possibilité de voir déléguer à des entreprises ou à des promoteurs le pouvoir d'autoriser des projets susceptibles d'avoir des incidences néfastes sur le poisson et sur son habitat. Ce serait laisser le loup entrer dans la bergerie. Les autorisations en cause devraient relever uniquement d'organismes gouvernementaux qui, par définition, se prononcent en fonction de l'intérêt général.
Permettez-moi, pour terminer, d'ajouter quelques observations concernant la manière dont on envisage de modifier la Loi sur les pêches. J'ai rappelé, au départ, que notre organisation a pour objectif la recherche de solutions. Or, le succès des solutions que nous proposons dépend essentiellement des efforts que nous faisons pour tisser et entretenir des liens souvent délicats, et pour nouer des partenariats qui transcendent les clivages et appellent une participation de la société civile, du gouvernement et, ce qui est plus important encore, du commerce et de l'industrie.
Or, je considère que la manière dont on se propose de modifier la Loi sur les pêches, et plus généralement la réglementation environnementale par le biais d'un projet de loi budgétaire omnibus, risque de saper sérieusement les progrès très sensibles accomplis au cours des 20 ou 30 dernières années afin de nouer, entre l'industrie et les ONG, des partenariats efficaces. Les entreprises — du moins celles avec qui il nous est donné de travailler — reconnaissent combien il est important pour elles de renforcer toujours davantage l'acceptabilité sociale de leurs activités.
Or, une législation environnementale efficace est un des fondements de cette acceptabilité sociale. Une telle législation permet en effet à l'industrie d'exercer ses activités en sachant qu'elle bénéficie du soutien des Canadiens dans la mesure où les divers gouvernements assurent une protection stricte de notre environnement. Je considère qu'en amenuisant ces protections, on nuit à la viabilité de l'action des entreprises canadiennes.
Permettez-moi d'insister sur un dernier point. La mise en oeuvre plus efficace des dispositions de la Loi sur les pêches n'exige aucunement les modifications très considérables que se propose de lui apporter le projet de loi C-38. Il s'agit essentiellement d'améliorer les mesures de gestion, et ces améliorations pourraient intervenir sans cette refonte de la loi. C'est pourquoi je vous demande, vous, mesdames et messieurs membres du comité, d'user de votre influence afin que la refonte des dispositions de la Loi sur les pêches soit scindée du projet de loi C-38. Il convient que les changements souhaitables soient apportés de manière opportune mais réfléchie dans le cadre d'une concertation entre les diverses parties intéressées et en fonction des données scientifiques disponibles. Il nous faut, en effet, unir nos efforts afin de parvenir à des solutions qui vont permettre de protéger et de restaurer nos remarquables pêches du poisson d'eau douce ainsi que les habitats et écosystèmes qui leur sont indispensables.
Je vous remercie de votre attention et c'est très volontiers que je répondrai à vos questions.
Merci, monsieur Maas.
Nous passons maintenant la parole à M. Robert Steedman, représentant l'Office national de l'énergie. M. Steedman, vous avez 10 minutes.
Merci, monsieur le président et honorables députés, de me donner l'occasion de me présenter devant vous aujourd’hui et d’appuyer votre examen de la partie 3 du projet de loi C-38.
L’Office national de l’énergie a pour raison d’être de réglementer, dans l'intérêt public canadien, les pipelines, la mise en valeur des ressources énergétiques et le commerce de l’énergie. Il est responsable envers le Parlement et lui fait rapport par l’intermédiaire du ministre des Ressources naturelles. Il réglemente la construction et l’exploitation des oléoducs, gazoducs et productoducs interprovinciaux et internationaux de même que les lignes internationales de transport d’électricité. Il réglemente aussi l'exploration et la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières dans les régions pionnières et les zones extracôtières non assujetties à des accords de gestion fédéraux ou provinciaux. La surveillance réglementaire de l’Office s’applique à des pipelines qui parcourent le pays en tout sens sur une distance de 71 000 kilomètres et à des lignes internationales de transport d’électricité qui s’étendent sur quelque 1 400 kilomètres. Les projets énergétiques qui ne débordent pas des limites d’une province ne relèvent pas de la compétence de l’Office.
L’Office tient les sociétés qu’il réglemente responsables de la sécurité de leurs installations et de la protection de l’environnement qui les entoure. Ses programmes sont conçus de manière à assurer l’efficacité des sociétés en matière de gestion de la sécurité et de protection de l’environnement à toutes les étapes du cycle de vie d’un pipeline — de la conception, en passant par la construction et l’exploitation, jusqu’à la cessation d’exploitation.
À nos vérifications et inspections de conformité se greffe la recherche de systèmes de gestion pouvant servir d’assise solide à une culture de sécurité omniprésente, soutenue vigoureusement par la haute direction de l’organisation, rigoureusement documentée, connue de tous les employés et constamment mise en pratique sur le terrain.
En vertu de la fonction de conseil que lui confère la Loi sur l’Office national de l’énergie (Loi sur l’ONÉ), l'Office surveille et analyse toutes les questions qui relèvent de sa compétence et fournit des renseignements et des avis dans les domaines de l'offre, du transport et de l'utilisation d'énergie à l'intérieur et à l'extérieur du Canada.
L’Office tient une audience publique pour toutes les demandes visant la construction de pipelines dont la longueur est supérieure à 40 kilomètres et pour diverses autres questions concernant la réglementation de l’énergie. Lorsque l’Office évalue un projet, il considère tous les facteurs reliés à l’intérêt public, y compris les effets sur l’environnement.
Nous avons une expérience considérable en ce qui a trait à l’étude des effets possibles sur l’environnement, dans le cadre de nos décisions de réglementation, et nous effectuons des évaluations environnementales en vertu de la Loi canadienne sur les évaluations environnementales (LCÉE) depuis son entrée en vigueur en 1995. Au cours des dernières années, l’Office a mené environ 30 évaluations environnementales préliminaires par année. Bon nombre de ces évaluations préliminaires s’inscrivaient dans une audience publique. L’Office a dirigé des études approfondies et des commissions d’examen en application de la LCÉE, toutes reliées à des audiences publiques tenues en vertu de la Loi sur l’ONÉ.
L’Office national de l’énergie a le mandat, les processus et la capacité nécessaires pour mener des évaluations environnementales inclusives, rigoureuses sur le plan technique et transparentes pour le public pour toutes les installations qu'il réglemente. L’ONÉ compte parmi son personnel environ 50 spécialistes de l’environnement, de l’aspect socioéconomique, des terres et de la participation des parties prenantes, et environ 40 spécialistes en sécurité et en génie. L’Office réglemente les installations tout au long de leur cycle de vie. Les projets approuvés sont assortis de conditions environnementales, que nous surveillons et appliquons même après l’évaluation environnementale — dès l’approbation du projet, pendant la construction et l’exploitation, jusqu’à la cessation d’exploitation.
Tout au long de la durée de vie d’un projet, nous surveillons les activités afin que la société gère et exploite les installations de manière à assurer la sécurité, la sûreté et la protection de l’environnement. Notre programme de vérification de la conformité inclut des activités de vérification, de construction et d’inspection de sécurité, ainsi que des réunions sur la conformité, des évaluations d’exercices d’urgence et des enquêtes.
Lorsque nous jugeons qu’une société ne remplit pas ses obligations réglementaires, nous utilisons différents outils pour faire respecter nos décisions, assurer la sécurité et protéger l’environnement. Ces outils peuvent aller de la demande verbale à la poursuite au criminel. Il peut s’agir également d’ordonnances visant l’arrêt des travaux ou la modification des activités d’une installation.
Si les modifications proposées à la loi sont adoptées, l’Office s’en tiendra au cadre révisé. L’Office continuerait à appliquer un processus d’évaluation environnementale et d’examen de la réglementation indépendant, juste et accessible pour les grands projets pipeliniers. Il recommanderait des conditions visant à assurer la sécurité du projet pour la population et l’environnement.
Les modifications à la loi portent sur les délais fixés pour l’évaluation réglementaire de l’Office, et donnent au gouverneur en conseil la responsabilité d’approuver ou non la délivrance de certificats pour les pipelines. Les délais proposés correspondent au rendement habituel de l’Office, et des outils sont fournis pour faire face aux imprévus. À l’heure actuelle, l’Office prend la décision, mais il faut une ordonnance du gouverneur en conseil avant de pouvoir délivrer un certificat pour un projet. Avec les modifications proposées, le gouverneur en conseil prendrait la décision au lieu de simplement approuver la décision de l’Office. En outre, si l’Office ne recommandait pas l’approbation d’un projet, l’analyse et les conditions recommandées seraient transmises au gouverneur en conseil pour la décision finale.
Merci de m’avoir permis de passer en revue le mandat et la démarche de réglementation de l’Office national de l’énergie. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions maintenant.
Monsieur Steedman, je vous remercie.
Nous passons maintenant la parole à M. Warren Everson, vice-président principal, Politique à la Chambre de commerce du Canada.
Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole devant vous. Étant donné l'heure tardive, et le nombre de séances de nuit auxquelles vous avez pris part cette semaine, peut-être suis-je plus heureux que vous de me trouver ici. Cela dit, je vous remercie de l'occasion qui nous est ainsi donnée de vous présenter notre point de vue et je vous félicite de votre assiduité. J'ai lu le procès-verbal de vos délibérations au cours de la semaine et vous avez manifestement réussi à susciter un débat vigoureux.
La Chambre de commerce du Canada est une grande organisation, la plus grande association professionnelle de notre pays. Nous avons plus de 700 adhérents directs et notre réseau de chambres de commerce représente presque 200 000 commerces et entreprises actifs sur l'ensemble du territoire. Ce n'est pas pour me vanter que je dis cela, mais simplement pour rappeler que nos politiques sont définies à l'issue de résolutions adoptées lors de nos assemblées annuelles. La crédibilité de notre association est liée à ces résolutions approuvées par les représentants de la masse de nos adhérents.
Permettez-moi d'employer les quelques minutes qui me sont accordées pour situer un peu le contexte. Nous pourrons, j'en suis certain, aborder les détails de la partie 3 lors des questions.
En février, la Chambre de commerce du Canada a publié une étude sous le titre « Les 10 obstacles à la compétitivité ». Cette étude est le fruit d'une concertation avec nos adhérents. Nous avons identifié, parmi les principaux obstacles, l'inefficacité de la bureaucratie gouvernementale. Nous affirmons, depuis longtemps, que la réglementation est défectueuse, inefficace à l'extrême et qu'elle est sans nécessité source de doubles emplois qui nuisent à la compétitivité de l'économie canadienne sans pour cela vraiment contribuer à la protection de l'environnement.
Le système d'évaluation fédérale affecte un large éventail d'entreprises canadiennes dans tous les secteurs d'activité et dans toutes les régions du pays. Cela ne touche donc pas seulement tel ou tel secteur d'activité. Je précise que certains de nos adhérents du secteur des énergies renouvelables estiment qu'ils bénéficiaient sensiblement d'une refonte des dispositions applicables.
Le Canada a besoin d'un système de réglementation environnementale qui permette de réaliser un double objectif. D'abord, il faut, bien sûr, assurer la protection de l'environnement, de la santé publique et de la société dans son ensemble. En matière de réglementation environnementale, la chambre fait depuis longtemps des propositions en ce sens. D'après nous, en effet, la réglementation environnementale est une des pierres angulaires de la compétitivité de nos entreprises, et n'entrave en rien leurs activités. J'espère que vous en êtes convaincus. La chambre estime, en effet, qu'une réglementation efficace entre pour beaucoup dans la compétitivité de nos entreprises. Il suffit de regarder au-delà de nos frontières pour voir que certaines des économies les plus compétitives au monde — la Suède, la Suisse, Singapour et la Finlande — sont soumises à une réglementation très stricte. Nous ne sommes donc pas du tout opposés à la réglementation, mais nous souhaitons qu'elle soit à la fois efficace et compétente.
Il faut, deuxièmement, que le système offre, tant aux promoteurs qu'aux opposants, des procédures qui soient à la fois prévisibles et expéditives. Il est clair, sur ce plan, que le système actuel est loin de donner les résultats voulus. Selon un rapport publié par le Forum économique mondial en 2011, la bureaucratie gouvernementale inefficace est notre enjeu le plus grave. Si nous décidions, en reportant à zéro, de concevoir une nouvelle procédure d'examen, personne je pense n'opterait pour le système — c'est-à-dire deux gouvernements souverains, égaux en autorité, qui procèdent chacun à une évaluation indépendante, généralement sans se consulter.
Dans un mémoire présenté cet hiver à l'ACEE, le gouvernement de Colombie-Britannique s'en est pris aux inefficacités liées à l'existence de deux registres environnementaux, de deux jeux d'exigences distinctes en matière de consultation du public, et de deux rapports techniques distincts. La Colombie-Britannique a rappelé que depuis 1995, elle s'est, conformément à sa propre législation, prononcée sur 115 certificats d'évaluation environnementale et qu'une évaluation environnementale a été ordonnée dans 50 p. 100 des cas. Ce n'est que dans un seul dossier, que l'évaluation du gouvernement fédéral a contrarié celui de la province. Cette situation entraîne un gaspillage ridicule. Or, vous avez, en tant que parlementaires, la possibilité d'y remédier.
J'ajoute que les promoteurs ne sont pas les seuls à s'insurger contre cela. Dans un mémoire présenté dans le cadre de l'examen de la LCEE, Jamie Kneen de Mines Alerte Canada, a qualifié le système actuel de « bouillie pour les chats ». Selon lui, « cela explique que le public et les groupes communautaires se demandent pourquoi ils devraient s'en faire et recommencer à nouveau si le processus manque à ce point d'uniformité [...] ».
J'ai souvent l'occasion d'avancer cet argument lors de discours prononcés devant notre réseau de chambres de commerce. Les opposants à un projet sont généralement des associations communautaires ne disposant que de minces ressources. Leur action dépend souvent du bénévolat. Les interminables procédures d'évaluation ne sont pas dans leur intérêt non plus.
Outre l'incompétence qui marque l'administration de la loi, il y a l'incertitude. Toby Heaps, de Corporate Knights, a écrit en février que:
Il existe plusieurs obstacles à la construction d'une voie pancanadienne pour le transport à haute vitesse d'énergie propre, avec le nombre nécessaire de sorties nord-sud, mais le plus gros obstacle est la bureaucratie. L'installation des réseaux indispensables s'enlise à ce point dans les méandres de la bureaucratie au point où les retards mettraient à l'épreuve la patience des pharaons qui ont construit les pyramides — celui qui entame un projet a très peu de chances en effet d'être là pour le voir aboutir.
C'est une situation que notre pays ne peut plus tolérer. Les incidences d'une telle inefficacité entravent l'activité dans tous les secteurs.
Vous savez sans doute que le pétrole et le gaz comptent pour 27 p. 100 du capital investi à la bourse et que plus de 40 p. 100 des titres cotés en bourse sont des valeurs minières. Il y a énormément de gars qui se préoccupent aucunement de l'avenir de ces industries, mais dont la prospérité dépend essentiellement de notre réussite. Ils ne savent peut-être pas que les pensions de retraite qui leur sont versées par les divers gouvernements, ou par des institutions privées, ou leurs régimes de retraite sont liés à la réussite du secteur des ressources naturelles. En tant que parlementaires, vous, par contre, en êtes parfaitement conscients.
Je remarque que cette semaine vous avez également recueilli le témoignage de la Fédération américaine du travail. Chris Smillie a témoigné devant vous. Il vous a dit les conséquences que l'incertitude entraîne pour la formation des travailleurs. Cette année, la Chambre de commerce a lancé un grand projet de formation de la main-d'oeuvre. Les collèges communautaires sont nombreux à nous faire part des conséquences qu'entraîne pour eux l'actuelle incertitude. Ils ne peuvent, en effet, pas offrir de programmes de formation tant qu'ils ne savent pas que leurs étudiants auront des chances raisonnables de trouver un emploi. C'est ainsi qu'ils attendent, et qu'ils continuent d'attendre et pendant ce temps-là des générations entières d'étudiants viennent s'informer, voient un peu les perspectives qui leur sont offertes, et s'orientent vers une autre carrière. C'est tout à fait regrettable, et le Canada ne saurait supporter encore longtemps cette situation car notre industrie a besoin de travailleurs.
Parmi nos adhérents, des dizaines de milliers d'entreprises estiment elles aussi que l'incertitude nuit à leurs perspectives d'avenir, nuit à leurs fournisseurs, aux ingénieurs, aux transporteurs et aux constructeurs. Il n'y en a pas une qui souhaite voir affaiblir la réglementation, mais toutes souhaitent la voir améliorer.
Je vous remercie.
Merci, monsieur Everson.
Nous passons maintenant la parole à Mme Rachel Forbes de la West Coast Environmental Law Association. Vous avez 10 minutes.
Je vous remercie de l'occasion que vous me donnez ce soir de prendre la parole devant vous.
Je représente la West Coast Environmental Law Association. Établie en Colombie-Britannique, notre organisation s'est donné pour tâche d'analyser et de promouvoir le droit de l'environnement. Nous sommes une des plus anciennes organisations canadiennes spécialisées en droit de l'environnement et nous apportons un soutien juridique aux habitants de la Colombie-Britannique, les aidant à se faire entendre sur les grandes questions touchant l'environnement. Nous oeuvrons depuis des décennies pour promouvoir l'adoption, en Colombie-Britannique et dans le reste du Canada, d'une vigoureuse législation sur l'environnement. Je précise que West Coast Environmental Law a participé à la rédaction de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous appartenons depuis des années au Caucus de planification et d'évaluation environnementale, et nous faisons partie de l'ancien comité consultatif de la réglementation. Nous prenons une part active à cette procédure d'examen, d'abrogation et de remplacement de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, depuis l'examen auquel le comité permanent a procédé l'automne dernier.
Je ne souhaite pas répéter des choses que vous avez déjà entendues, car je sais qu'au cours des derniers jours de nombreux exposés vous ont été présentés. J'entends donc commencer en disant que nous reprenons à notre compte les mémoires qui vous ont été présentés par certains de vos témoins, y compris MinesAlerte Canada, l'Assemblée des Premières Nations, Écojustice, et le Fonds mondial pour la nature (Canada). Sans doute y a-t-il d'autres mémoires auxquels nous pourrions souscrire en partie.
En ce qui me concerne, je souhaite insister essentiellement sur trois questions. Nous avons en fait une recommandation principale à adresser au comité. En tant que juristes, nous avons naturellement formulé plusieurs autres recommandations au cas où le comité n'entendrait pas retenir celle-là. Si je comprends bien, les quatre piliers du plan de développement responsable des ressources adopté par le gouvernement sont la mise en place de procédures d'examen plus prévisibles et plus expéditives, la réduction des doubles emplois dans le cadre des procédures d'examen, une solide protection de l'environnement et une meilleure concertation avec les peuples autochtones. Nous y serions pour notre part favorables dans le contexte d'un cadre réglementaire d'évaluation environnementale efficace et d'une réglementation environnementale ayant l'envergure nécessaire. Or, je ne pense pas que la partie 3 du projet de loi C-38 réponde à ces objectifs et, dans certains cas, elle y fait même, selon nous, obstacle.
Nous estimons en effet que la partie 3 va en fait diminuer la protection accordée au poisson et aux espèces en péril. Avec ce nouveau système d'évaluation environnementale, moins complet en fait que le système actuel, le gouvernement fédéral va non seulement écarter de nombreux règlements, mais renoncer au rôle important qu'il jouait jusqu'ici, et renoncer aussi à mettre en oeuvre une réglementation plus intelligente. D'après nous, les dispositions envisagées accordent au cabinet et aux ministres de larges pouvoirs de décision qui ne sont, semble-t-il, soumis à aucun contrôle et qui vont nuire à la reddition de comptes et réduire les chances que le public aura de participer aux décisions et d'exercer à leur égard un certain pouvoir de surveillance.
Nous est-il possible de continuer à oeuvrer dans le sens de ces quatre objectifs sur lesquels nous semblons être essentiellement d'accord, mais que nous envisageons de manière différente? Nous pensons que oui, mais il faudra pour cela modifier sensiblement la procédure législative en cours et réécrire entièrement les dispositions inscrites à la partie 3. C'est le sens de notre première recommandation. Personne ne sera surpris d'apprendre que nous souhaitons que le sous-comité recommande au Comité des finances de retirer intégralement la partie 3 du projet de loi C-38. Nous recommandons en outre qu'il soit procédé à de nouvelles études scientifiques et juridiques, afin de mieux cerner les faits, et que soit menée, de manière transparente et approfondie, une concertation sur les modifications concernant l'évaluation environnementale et les autres règlements touchant l'environnement, y compris les pêches et les espèces en péril. Il faudrait notamment pour cela se pencher sur le règlement, les annexes et autres renseignements auxquels je ne pense pas que le public ou les parlementaires aient actuellement accès.
Une fois achevées ces études et cette concertation — qui, je tiens à le préciser, exigeraient qu'on leur consacre plusieurs mois et non pas seulement quelques semaines — des projets de loi distincts pourraient être déposés devant la Chambre selon une procédure normale et légitime en laquelle les gens puissent avoir confiance, cette confiance ayant pour effet de légitimiser les résultats, quel que soit en définitive la teneur du projet de loi et des dispositions législatives qui finiront par être adoptées. D'après moi, la procédure suivie jusqu'ici, et l'examen de la LCEE sont défectueux. Jamie Kneen vous a parlé de cela l'autre soir en disant qu'il conviendrait de confier à un comité permanent le soin de se pencher sur la manière dont la question a été traitée devant le comité permanent, sur les rapports dissidents et sur toute la controverse qui s'est achevée par l'abrogation des dispositions de la loi et leur remplacement en dépit du bon sens par le biais d'un projet de loi budgétaire où elles n'ont pas leur place. Il convient, d'après moi, de revenir sur ce qui a été fait et de repartir sur un bon pied quelle que soit par ailleurs la teneur des dispositions adoptées et des opinions exprimées à leur égard.
D'après nous, c'est le seul moyen d'assurer que les dispositions envisagées font l'objet d'un examen qui non seulement repose sur des données scientifiques, mais qui se défend juridiquement. Je sais que certains membres de votre sous-comité souhaitent s'écarter, lors de la rédaction du rapport, des arguments qu'il leur est suggéré d'avancer et du discours convenu qu'il leur est demandé de tenir. Nous sommes pour notre part tout à fait favorables à un tel parti. Ce qui m'inquiète c'est l'actuel manque de faits, de données scientifiques et de dispositions juridiques qu'exige la rédaction d'un rapport qui entend se fonder sur les faits. J'ai évoqué tout à l'heure les règlements et les annexes dont nous n'avons pas eu connaissance. Nous n'avons pas eu beaucoup de détails quant à la manière dont tout cela va être mis en oeuvre, et j'estime que si les dispositions envisagées sont effectivement mises en oeuvre, cela va entraîner une grande incertitude. Certains ont également évoqué les conséquences qu'une telle incertitude va avoir sur les promoteurs. Quelles en seront les conséquences pour le public? Au niveau des Premières Nations? Les délais ne sont pas fixés de manière précise, la procédure à suivre demeure incertaine, et les fonctionnaires se trouvent sans doute eux-mêmes en pleine incertitude. Je pense qu'il faudrait donc que tout cela fasse l'objet d'une réflexion plus approfondie.
Dans l'hypothèse où le sous-comité n'adopte pas notre première recommandation, nous lui demanderions de suspendre l'adoption de la partie 3 en attendant que l'on puisse prendre connaissance des règlements et annexes et les examiner comme il se doit. D'après moi, le règlement dont personne n'a eu connaissance, celui qui concerne la liste des projets, revêt une importance essentielle si l'on veut comprendre les incidences juridiques, scientifiques, pratiques, économiques et commerciales des dispositions du projet de loi. Il serait vraiment dommage de voir ce règlement présenté à la dernière minute, et intégré aux nouvelles dispositions sans avoir fait l'objet d'une concertation préalable.
Nous avons formulé, dans un même ordre d'idée, une autre recommandation qui tend à accroître la transparence et à renforcer la reddition de comptes pour l'ensemble du processus. L'année dernière, le gouvernement du Canada a adhéré au Partenariat pour un gouvernement transparent, partenariat international dans le cadre duquel il s'est engagé à respecter l'obligation de rendre des comptes, à assurer la transparence et à promouvoir un dialogue ouvert sur les grandes questions du jour. Certes, le gouvernement a fait des progrès sur le plan de l'information ouverte, mais dans le cadre du processus en cours, en ce qui concerne l'examen et la révision de la réglementation environnementale, de nombreuses choses vont à l'encontre de l'objectif affiché. S'il s'agit d'inspirer confiance au niveau du processus en cours, à la fois dans l'optique des organisations environnementales et du point de vue de bon nombre de promoteurs, il est clair que les dispositions envisagées suscitent au contraire une grande controverse. Beaucoup de gens s'intéressent à la question. Il nous faudrait être mieux informés, en connaître les fondements et savoir pourquoi le dossier est traité en urgence. Dans la mesure où il y a effectivement urgence, comment se fait-il que rien n'ait été fait plus tôt, en l'occurrence lors de l'examen de la LCEE?
Puis, une dernière recommandation importante serait que la rédaction des dispositions touchant l'évaluation environnementale et des règlements sur l'environnement prenne en compte les 10 grands principes d'un robuste droit de l'environnement, tels que formulés au mois de février par West Coast Environmental Law et certains de nos partenaires. Ces principes comprennent notamment la mise en oeuvre d'une réglementation intelligente. Nous avons publié ces principes en février car nous savions qu'on se proposait de modifier les règles applicables aux évaluations environnementales. Nous sommes en train d'établir, pour ce projet de loi, une fiche de rendement indiquant dans quelle mesure les nouvelles dispositions respectent ou non les principes en question. D'après nous, ce n'est pas le cas, mais nous pourrions, je pense, davantage nous inspirer de ces principes, dont une meilleure participation du public, l'occasion pour les peuples autochtones de jouer le rôle qui leur revient et une approche de l'environnement fondée sur le concept de durabilité... La durabilité écologique figure en première place car la nouvelle LCEE de 2012 est marquée par la compartimentalisation et ses rédacteurs ne semblent pas comprendre ou respecter le fait que nous vivons dans des écosystèmes qui forment un tout. Ce que je viens de dire ne s'applique pas seulement à la LCEE de 2012, mais aux autres dispositions du projet de loi.
Vous pourrez voir, à la lecture de mon mémoire, que nous avons formulé 10 recommandations concernant de petits changements que nous souhaiterions voir apporter à la partie 3 du texte dans l'hypothèse où les dispositions qui y figurent actuellement sont adoptées. Il s'agit, par exemple, de permettre à l'Office national de l'énergie de conserver son indépendance, de retirer les modifications qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur les pêches, et de repenser les dispositions en question. Nos recommandations portent également sur les espèces en péril, les permis et le fait que, selon nous, il conviendrait, en matière d'évaluation environnementale, de ne pas écarter l'actuel mode de déclenchement au profit d'une liste de projets. Nos recommandations concernent en même temps d'autres éléments.
Je pense être à court de temps, non? Je peux donc continuer? Bon.
Vous devriez, en outre, prévoir dans le cadre de la procédure d'évaluation environnementale, des délais qui s'imposeraient aux promoteurs et non seulement aux autres parties prenantes. Cet aspect-là nous paraît en effet très problématique car d'après nous ce sont souvent les promoteurs qui retardent le processus lorsqu'on leur demande de fournir des compléments d'information ou lorsqu'ils sollicitent de nouveaux délais. Dans la mesure où l'on prévoit des délais, nous souhaiterions qu'ils s'appliquent au même titre à toutes les parties intéressées.
Merci, madame Forbes.
Le dernier exposé va nous être présenté par M. Geoff Smith, qui représente l'Association canadienne de l'électricité.
Monsieur Smith, si j'ai bien compris, vous allez nous présenter la première partie de votre exposé, après quoi M. Terry Toner prendra la relève et répondra aux questions.
Monsieur Smith, vous avez 10 minutes.
Merci, monsieur le président.
Il est souvent dit que les ressources naturelles forment l'armature de l'économie canadienne, mais il est rare d'évoquer le rôle essentiel qui revient à l'électricité dans la vie quotidienne. Jour après jour, les membres de l'ACE génèrent, transportent et distribuent du courant électrique à ses clients industriels, commerciaux, résidentiels et institutionnels situés dans les diverses régions du pays. L'énergie que nous générons, que nous transportons et que nous vendons est indispensable tant au fonctionnement de nos habitations, de nos hôpitaux, de nos aéroports et de nos commerces qu'au développement de nos ressources.
Fondée en 1891, l'ACE compte parmi ses adhérents les grands services publics d'électricité, qu'il soit de propriété publique ou qu'ils appartiennent à des investisseurs privés, ainsi que les opérateurs provinciaux, les négociants en électricité et plus de 40 entreprises représentant les divers maillons de la chaîne de valeur du secteur de l'électricité. Cela comprend les entreprises de technologie, les fabricants de compteurs, de câbles et de transformateurs électriques, ainsi que les domaines du droit, de la finance, de la construction et de la consultation.
Le rôle indispensable que l'électricité joue dans notre société est évident, mais la plupart des Canadiens trouvent tout à fait normal la commodité et la fiabilité dont ils bénéficient. Sans doute est-ce dû à la fiabilité de notre secteur, dont nous sommes effectivement très fiers. Le courant électrique est à chaque instant à portée de la main.
Moins connus encore sont un certain nombre de détails concernant le réseau électrique du Canada. Imaginez un moment que je suis Alex Trebek et qu'on en est à la joute finale du jeu télévisé Jeopardy! Le sujet du jour est l'électricité. L'indice fourni est le suivant: le pourcentage d'électricité produite au Canada à partir de sources non émissives. La réponse est qu'au Canada plus de 80 p. 100 de l'électricité provient de sources non émissives telles que la force hydraulique, le nucléaire et, de plus en plus, des sources renouvelables telles que l'énergie éolienne, l'énergie solaire ou l'énergie marémotrice.
À l'avenir, la demande à laquelle va devoir répondre notre secteur d'activité sera source d'innovation, dont une utilisation plus propre des carburants fossiles et la construction de nombreux autres moyens de génération y compris ceux qui font appel au gaz naturel, à l'énergie éolienne, à l'énergie solaire, à l'énergie marémotrice et autres énergies produites localement. Tout cela devra bien sûr s'accompagner des infrastructures nécessaires au transport et à la distribution. J'ajoute que l'électricité va également aider d'autres secteurs de l'économie à réduire leurs émissions. Je veux bien sûr parler des véhicules électriques et de l'ensemble du secteur des transports.
Je précise que si le réseau électrique est fiable, il prend de l'âge et va devoir lui-même être renouvelé et remplacé. Le Conference Board a récemment publié un rapport estimant à 347 milliards de dollars les investissements que cela exigera entre 2011 et 2030. Il paraît opportun qu'au moment même où la transformation de notre réseau électrique et de son infrastructure va exiger de lourds investissements, le gouvernement procède, dans le cadre du projet de loi C-38, à la modernisation de la législation sur l'environnement.
Les adhérents de l'ACE sont acquis à une conception de la durabilité qui tient compte des considérations environnementales, sociales et économiques d'une approche globale de la gestion des impacts sur l'environnement. Le programme de développement électrique durable mis en place par l'ACE en est la preuve. Il s'agit d'une initiative qui s'impose à l'ensemble du secteur et qui mesure le rendement des entreprises dans les trois domaines qu'intéresse la durabilité. Les résultats font l'objet d'une vérification indépendante, et le programme est lui-même orienté par un groupe consultatif public composé de personnalités canadiennes et présidé par l'honorable Mike Harcourt. Ce programme montre à quel point les adhérents de l'ACE se sont engagés à assurer la pérennité des approvisionnements en électricité.
Notre comparution devant votre sous-comité va de pair avec l'exposé que nous avons présenté en septembre au Comité des finances. Dans le cadre des consultations prébudgétaires, nous avions formulé un certain nombre de recommandations concernant la Loi sur l'évaluation environnementale, la Loi sur les espèces en péril et la Loi sur les pêches dans le but de faciliter les investissements qu'exige le renouvellement de notre réseau. Cela nous amène plus précisément au sujet de cette séance, les changements prévus à la partie 3 du projet de loi C-38.
Je suis accompagné aujourd'hui par Terry Toner. Terry est le directeur des services environnementaux de la Nova Scotia Power, entreprise du groupe Emera. C'est lui qui préside le groupe de travail de l'ACE sur la gérance de l'environnement. Il est en outre vice-président de plusieurs groupes de travail que nous animons en coopération avec nos collègues de l'Association canadienne de l'hydroélectricité, chargés de se pencher sur les dispositions de la Loi sur l'évaluation environnementale et sur la Loi sur les espèces en péril.
Je vais maintenant demander à Terry de vous fournir davantage de détails.
Depuis l’entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, le monde, l’économie, la société, la législation sur l’environnement et les politiques applicables en ce domaine ont considérablement évolué. Les gouvernements provinciaux ont affiné leurs lois et leurs règlements non seulement en réponse aux nouvelles situations, mais également pour alléger les procédures d’examen.
Le gouvernement fédéral a fait adopter la Loi sur les espèces en péril, et a mis en œuvre de nombreuses politiques y compris la politique sur les terres humides. Les spécialistes de l’administration se sont dotés d'outils tels que le cadre de gestion des risques, une approche écosystémique et les normes et pratiques exemplaires afin de mieux gérer leurs activités au jour le jour. Jusqu'au dépôt du projet de loi C-38, la législation fédérale, par contre, n’avait pas suivi. Cette législation était en effet marquée par des doubles emplois et des délais excessifs, tout cela entraînant des coûts supplémentaires, des retards et l'incertitude, sans vraiment profiter à l’environnement.
Dans certains cas, les procédures d’autorisation réglementaire et les délais de construction faisaient qu’entre le début d’un projet et le raccordement au réseau, plus de 10 ans passaient, dont quatre consacrés aux procédures fédérales d’évaluation environnementale. Des retards intervenaient souvent avant même le début de la procédure d’examen. Dans le cadre du système actuel, il faut parfois un temps étonnamment long pour que se mobilisent les fonctionnaires fédéraux des divers organismes et ministères appelés à intervenir, voire pour qu’ils décident s’ils entendent prendre part à l’exercice, et si oui, pour qu’ils fournissent les éléments de départ tels que le cadre de référence de l’évaluation.
Les changements prévus à la partie 3 du projet de loi C-38 représentent un progrès qui va permettre aux différents projets de bénéficier de procédures qui leur conviennent mieux. C’est le terme « adapté » qui vient à l’esprit. On sait maintenant plus clairement qui va mener les grandes évaluations environnementales et on constate une plus grande cohérence au niveau des responsables — l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, l’ONÉ, et la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Sous réserve de certains critères qui ont été définis, et dans certaines circonstances, lorsque la situation s'y prête, une évaluation peut également être menée en vertu de procédures provinciales. Le nouvel intérêt porté à l’évaluation environnementale des grands projets relevant des compétences fédérales va permettre une meilleure affectation des ressources notamment aux projets d’intérêt national. Les dispositions actuelles resteront applicables à bon nombre de projets plus simples. Je parle là, par exemple, de la Loi sur les pêches.
Les économies que vont permettre de réaliser les changements apportés par le projet de loi C-38 ne vont en rien diminuer les efforts et les activités menées par les membres de l’Association canadienne d’électricité pour protéger l’environnement lors de la conception, de la construction et du fonctionnement d’un projet. La concertation avec le public est en outre essentielle et les entreprises d’électricité y veillent en permanence car ces consultations constituent un élément important de la procédure d’approbation. Nos entreprises engagent déjà avec le public un dialogue au sujet de projets éventuels, avant même que ne soient entamées les procédures d’évaluation fédérales ou provinciales. La nature de notre activité a entraîné chez nous le développement d’une culture de la consultation. Presque tout ce que fait un service public d’électricité exige dans une certaine mesure que le public soit consulté, qu’il s’agisse d’homologation des tarifs, de planification intégrée des ressources, de la consultation ou des relations quotidiennes avec la clientèle et les diverses parties intéressées. Nous faisons tout pour éviter les erreurs.
De concert avec l’Association canadienne de l’hydroélectricité, l’ACE a cerné un certain nombre de domaines dans lesquels les procédures pourraient être améliorées, soit par les dispositions du projet de loi, soit par des règlements ultérieurs. Je cite à cet égard une meilleure harmonisation des conditions d’évaluation environnementale et des conditions dans lesquelles sont délivrées les autorisations nécessaires, ainsi que le pouvoir du ministre de modifier de son propre chef les conditions applicables au vu de nouvelles données.
En ce qui concerne les modifications que le projet de loi C-38 propose d’apporter à la Loi sur les pêches, l’ACE estime qu’il s’agit de changements souhaitables puisqu’on continue à insister sur la protection du poisson et de son habitat. Il s'agit d'orienter les efforts du MPO davantage vers les pêches commerciales, récréatives et autochtones, c’est-à-dire les secteurs que la loi visait à l’origine. Le projet de loi prévoit des mécanismes permettant de profiter pleinement des normes et pratiques exemplaires, met l’accent davantage sur une gestion globale, insiste essentiellement sur la notion de dommages permanents, retient une approche écosystémique et définit, en matière de gestion des pêches, des objectifs généraux. Le texte retient le concept de zones écosensibles, ce qui va permettre de protéger les zones qui en ont le plus besoin. Les dispositions envisagées encouragent en outre les partenariats et les idées nouvelles.
Nous souhaitons pouvoir participer à la rédaction des règlements assurant la mise en œuvre des changements prévus dans le projet de loi. Les adhérents de l’ACE sont d’accord que les changements que la partie 3 du projet de loi C-38 propose d’apporter à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, la Loi sur les pêches et la Loi sur les espèces en péril pourraient améliorer sensiblement les procédures réglementaires applicables aux installations électriques, et abréger les délais d’autorisation des projets en cours de développement.
Monsieur Toner, je vous remercie.
Nous allons maintenant passer aux questions et aux réponses. Dans une première série de questions, les membres du sous-comité auront jusqu’à sept minutes chacun. Je vais demander à nos témoins d’être aussi concis que possible, afin que nous puissions poser un maximum de questions et obtenir un maximum de réponses.
Je vais maintenant passer la parole à Mme Ambler qui va donc disposer de sept minutes.
Merci, monsieur le président. Je tiens également à remercier nos témoins d’avoir répondu à notre invitation. Mes questions s’adressent à M. Everson.
Dans l’ensemble du pays, les chambres de commerce se sont prononcées en faveur des dispositions de ce projet de loi et de notre plan de développement responsable des ressources. Pourquoi avons-nous à agir sans attendre pour améliorer le cadre réglementaire du Canada afin d'attirer des investissements et faire en sorte que les projets de développement des ressources puissent être menés à bien? Autrement dit, lorsque de grands projets s’enlisent en raison de l’inefficacité du cadre réglementaire, quelles peuvent être les incidences au niveau de la création d’emplois et des investissements?
Je crois pouvoir dire que tous ceux qui se disent favorables aux nouvelles dispositions font valoir que tout retard intervenant dans une réponse, notamment dans le cadre d’une évaluation, nuit aux investissements, à l’emploi et au développement, que la réponse soit, par ailleurs, favorable ou défavorable.
Nous ne souhaitons pas, je crois, qu’un projet reçoive le feu vert s’il est néfaste pour l’environnement, mais plus il y a de retards, plus le marché va chercher ailleurs un lieu pour investir, que ce soit ailleurs au Canada, ou dans un autre pays.
Le représentant de l’association de l’hydroélectricité a fait valoir qu'en général la procédure d’autorisation d’un projet hydroélectrique peut prendre jusqu’à quatre ans, et qu’entre temps les investisseurs peuvent décider d'investir dans un autre mode de production d’énergie, même s'il est moins propre.
Il nous paraît évident, qu’à l’heure actuelle le Canada a l'occasion parfaite d’exploiter pleinement et de façon professionnelle ses ressources naturelles et que cela revêt pour notre économie une importance essentielle.
Comme vous le venez vous-même de le faire, Perrin Beatty, président et directeur général de la chambre de commerce compte une bureaucratie inefficace parmi les 10 obstacles à la compétitivité de notre économie. Il a évoqué les longues procédures d’examen, et les doubles emplois qui, selon lui, ne sont dans l’intérêt de personne.
Je tiens également à vous demander si, en tant que représentant d’une organisation nationale, vous êtes d’accord avec mes collègues de l’autre bord pour dire que lorsque l’économie de l’Ouest du pays va bien, c’est nécessairement au détriment de l’économie de nos régions du Centre? Ou pensez-vous plutôt que l’abondance des ressources naturelles qui caractérise nos diverses régions veut dire que l’investissement dans des projets de mise en valeur peut profiter à bien des secteurs de notre économie, et à de nombreuses régions, sinon à toutes?
Je suis entièrement d’accord avec la seconde partie de votre question.
D’après moi, il faut que le Canada convienne de l’importance essentielle que l’industrie du pétrole et du gaz revêt dorénavant pour notre économie. D’après mes calculs, le secteur énergétique pèse presque deux fois plus que le secteur de l’automobile. Il est facile, dans l’Est du Canada, d’y voir quelque chose qui profite essentiellement aux régions de l’Ouest, mais plus je m’informe, plus je me rends compte que l’activité de ces secteurs a des incidences sur l’ensemble du pays et dans tous les domaines d’activité.
Nos adhérents se préoccupent beaucoup de la question des ressources humaines et des aptitudes professionnelles. Il n’y a actuellement pas, dans l’Ouest du Canada, pas assez de gens pour répondre aux besoins du secteur énergétique, et encore moins aux besoins des autres secteurs d’activité qui en dépendent. Il convient par conséquent d’adopter, à l’échelle nationale, une stratégie de formation de la main-d’œuvre adaptée au secteur des ressources naturelles.
Je serai plus bref dans mes autres réponses, mais je tiens à apporter une petite précision. Il y a quelques semaines, je me trouvais à Terre-Neuve. Depuis que je suis né, cette province a toujours souffert du sous-emploi, mais c’est maintenant le contraire qui est vrai. On y trouve de vastes projets d’exploitation des ressources naturelles qui vont non seulement fournir de l'emploi aux habitants de la province, mais exiger l’arrivée de nombreux immigrants.
L’Île-du-Prince-Édouard prévoit, parmi d’autres grands projets, le passage à l’énergie éolienne qui à terme devrait, je crois, répondre à 40 p. 100 de ses besoins. Tout au long de la côte atlantique, on observe des projets de mise en valeur des gisements de gaz et de pétrole.
Il y a la région appelée « le cercle de feu », le Plan Nord, enfin aucune région du pays qui ne soit pleinement impliquée dans l’exploitation efficace et économique de ressources naturelles.
Je vous remercie des exemples que vous avez cités. Je suis sûre que vous pourriez en nommer beaucoup d’autres.
Comment décririez-vous l’importance que vos adhérents accordent à la protection du patrimoine environnemental du Canada?
Le réseau des chambres de commerce, qui représente toutes les régions du pays, ne cesse d’affiner ses politiques en matière de protection de l’environnement et de sauvegarde du patrimoine naturel. Je crois pouvoir dire que notre organisation adhère aux mêmes valeurs que l’ensemble de la population canadienne, estimant qu'en matière d’évaluation environnementale, il convient tout de même d'éviter les doubles emplois.
Je n’ai en tête aucun exemple d’une entreprise qui nous ait contactés pour dire qu’il faudrait adopter des règlements moins stricts. Le mécontentement provient presque toujours de la manière dont la réglementation est appliquée.
Dans quelle mesure les dispositions de la partie 3 du projet de loi C-38 vont-elles affecter l’activité de vos adhérents et les moyens qu’ils ont de créer des emplois?
Ce que j’aimerais savoir c’est si vous voyez dans ce projet de loi certains inconvénients. Ou les nouvelles dispositions contiennent-elles un certain nombre d’éléments qui vont réellement aider vos adhérents à créer des emplois? Je vais m’en tenir à cela.
J’en ai évoqué deux.
Il faut éliminer les doubles emplois dans les procédures appliquées par les divers gouvernements. Les doubles emplois qu’entraîne le système actuel nous rendent ridicules.
Il est, dans l’intérêt de toutes les parties, essentiel de fixer des délais plus précis. Rachel disait tout à l’heure qu’il faudra que les promoteurs respectent eux aussi les délais. Je pense qu’il est dans l’intérêt de tous de savoir que les décisions vont devoir être prises rapidement, sur la base des informations indispensables.
Nous avons publié des éditoriaux dans lesquels nous précisons que ce projet de loi n’est pas là pour rendre la vie facile aux promoteurs. Les nouvelles procédures seront davantage comparables à un procès, alors qu’à l’heure actuelle la procédure se déroule par petites étapes, chacun pouvant à loisir apporter à son projet les changements qui lui paraissent indiqués.
Certains pensent que les nouvelles dispositions ne font que réduire les délais, mais en fait nous instaurons des délais alors qu’il n’y en avait pas auparavant. Je tiens pour acquis que le délai de deux ans prévu pour les grands projets va aider les entreprises canadiennes dans leur ensemble, et vos adhérents en particulier.
Je vous remercie, madame Ambler.
Nous allons maintenant passer la parole pour sept minutes à M. Chisholm.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos témoins de nous présenter leurs points de vue et de nous faire profiter de leurs connaissances.
Il y a maintenant 13 heures que je participe à cette séance, au cours de laquelle j’ai entendu des témoignages très intéressants. Je ne pense avoir entendu personne dire quoi que ce soit contre les quatre principes de développement des ressources au niveau de la simplification des procédures applicables, c’est-à-dire l’instauration de procédures prévisibles et expéditives, l’élimination de certains doubles emplois et l’allégement des formalités, le renforcement de la protection de l’environnement et le besoin d’une authentique concertation avec les Autochtones. Je ne crois avoir entendu personne s’opposer à ces principes.
Il existe actuellement un processus. Or, il faut que ce processus offre l’occasion de débattre et de discuter de la manière dont va se dérouler un projet de développement. Il y a, ainsi, les promoteurs — M. Toner, et d’autres — qui viennent présenter un projet et puis il y a les autres que le projet va affecter et qui, eux aussi, font état d'un certain nombre de données scientifiques qu’ils souhaitent voir prendre en compte. Il y a donc discussion dans le cadre d’une procédure officielle qui permet de décider de la marche à suivre. Il nous faut faire en sorte que cette procédure soit simplifiée et que les intérêts de chacun puissent être pris en compte.
Il y a différents intérêts et différents points de vue quant à la manière de protéger les biens communs et ces points de vue doivent pouvoir s’exprimer pleinement. J’estime, cependant, que le processus actuellement en cours repose uniquement sur un rapport de force. En effet, de manière unilatérale le gouvernement propose de modifier 70 textes législatifs, dont certains vont avoir d'extraordinaires incidences. Je parle notamment de la Loi sur les pêches, de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale et de certaines autres lois. On cherche à imposer ces changements par le biais d’un projet de loi omnibus dont nous sommes autorisés à discuter pendant 12 heures. Nous en avons déjà discuté pendant 2 heures, et cela fait donc, au total, 14 heures.
Ce n’est vraiment pas un bon exemple de la manière dont nous allons à l’avenir parvenir à départager les divers intérêts en présence car, selon moi, les changements unilatéraux que l’on se propose d'apporter par le biais de ce texte, ne tiennent aucunement compte de ce qui s’est dit ici et ne répondent qu’à un seul point de vue. Cette manière d’agir ne donne pas un bon exemple, car cela veut dire que nous nous orientons vers un système uniquement fondé sur le pouvoir.
M. Toner — et je ne le cite que parce qu’il est originaire de la Nouvelle-Écosse — et d’autres promoteurs vont venir proposer des projets, d’autres s’interrogeront au sujet de ces projets mais, en dernière analyse, la décision sera prise par le ministre ou par le cabinet.
Je suis effaré. Compte tenu de cette manière de procéder, comment continuer à insister que nous allons devoir travailler de concert, coopérer et protéger nos ressources naturelles par des décisions fondées sur des données scientifiques. Chacun souhaite que nos procédures soient efficaces et expéditives. Mais pourquoi ne pas tenter de résoudre ces problèmes ensemble au lieu d’appliquer ce processus qui ne repose que sur le pouvoir, car en définitive rien ne sera réglé entre le camp des promoteurs et le camp des opposants?
Que va-t-il se passer, d’après vous, lorsque le premier projet sera proposé conformément aux nouvelles dispositions? Ne pensez-vous pas qu’il y aura de l’incertitude? Ne pensez-vous pas qu’il y aura de l’opposition? Ne pensez-vous pas qu’il y aura des retards? Je dis cela simplement au vu de ce que nous venons de vivre. Cela me préoccupe énormément.
Je vais maintenant me taire et poser une question. Je suis désolé.
Des voix: Puis-je répondre?
M. Robert Chisholm: Je souhaite demander à M. Maas et à Mme Forbes de nous dire quelque chose du mécontentement qu’a provoqué cette manière de procéder. C’est pour cela que j’ai dit ce que j’ai dit.
Les gens — et je n’entends pas par cela les personnes qui ont participé à cette séance — qui sont favorables aux nouvelles mesures ont eu accès aux renseignements nécessaires mais ceux qui n’y sont pas favorables n’ont pas bénéficié d'un tel accès et cela a suscité chez eux un grand mécontentement.
J’aimerais par conséquent vous demander, à vous qui vous interrogez au sujet de cette manière de procéder, et des dispositions du projet de loi, de nous dire quelque chose des préoccupations que vous inspire cette manière de faire. J’espère qu’il vous reste quelques minutes pour cela.
Monsieur Maas.
Volontiers, et très brièvement.
Je crois qu’il convient d’insister, comme je le disais dans mon exposé, sur la manière dont on cherche à introduire ces changements. Cette manière semble supposer que les associations comme la nôtre ou d’autres groupes œuvrant dans le même secteur d’activité, n’ont ni les moyens ni la volonté de discuter avec des représentants de l’industrie et d’engager avec toutes les parties intéressées un dialogue raisonnable fondé sur des données scientifiques.
Or, ce n’est pas du tout le cas. Nous sommes pour notre part en contact permanent avec de nombreuses associations professionnelles dont celles qui ont pris la parole devant vous au cours des derniers jours. Nous travaillons en étroite collaboration avec elles, parfois dans le cadre de partenariats officiels tels que ceux que nous avons noués avec les organisations du secteur forestier. Dans l’ensemble du pays, nous entretenons un dialogue permanent avec les entreprises d’énergie hydroélectrique.
J’estime qu’il y aurait une autre manière de procéder et que si nous nous en tenions à une application régulière de la loi, nous obtiendrions un bien meilleur résultat.
Vous avez selon moi parfaitement raison de dire que ceux qui sont favorables aux nouvelles dispositions ont eu accès aux renseignements pertinents, ce qui n’est pas le cas de ceux qu’on croyait opposés aux nouvelles mesures. Qui sont, effectivement, les groupes qui ont accès à ces renseignements? Quelle est la nature de l’accès qui leur a été accordé? Par quelle procédure légitime a-t-on accordé un tel accès à certains, mais pas à d’autres?
Comme Tony Maas vient de le dire, tout cela nous a appris quelque chose. Comme vous le disiez, personne ne s’oppose à ce que l’on rende les procédures applicables plus efficaces et plus productives. Nous sommes tous d’accord sur ce point. Nous avons nous-mêmes constaté le défaut d’efficacité. Nous avons réfléchi aux diverses manières de procéder et nous avons aussi des idées quant au moyen de procéder de manière plus conciliante, moins en force.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos témoins d’avoir répondu à notre invitation.
Je voudrais demander à Mme Forbes si la Cour suprême du Canada ayant jugé que la Constitution ne permet pas de transférer du MPO au gouvernement de la Colombie-Britannique les compétences en matière d’aquaculture, elle pense que les dispositions qui tendent à transférer aux provinces la gestion des pêches lui paraissent acceptables?
Vous faites, je crois, allusion au jugement rendu par les tribunaux de Colombie-Britannique dans l’affaire Alexandra Morton. La compagnie en cause dans cette affaire était Marine Harvest.
Vous ne savez peut-être pas qu’en Colombie-Britannique les centres de pisciculture étaient un peu comme l'enfant de parents divorcés qui n’arrêtent pas de se chamailler. Personne ne savait vraiment ce qui se passait. Certains des centres se trouvaient à terre, et relevaient par conséquent du ministère de l’Agriculture de Colombie-Britannique. D’autres, situés en mer, relevaient des compétences fédérales.
Alexandra Morton, une scientifique qui depuis des dizaines d’années se spécialise dans ce domaine, intenta une action en justice. La cour a décidé qu’aux termes de la Constitution, les provinces n’avaient aucune compétence en matière de pisciculture, domaine qui relevait exclusivement des compétences fédérales. Toute réglementation provinciale dans ce domaine est donc contraire au paragraphe 91(12) de la Constitution.
Je sais que la délégation aux provinces de pouvoirs en matière de pêche soulève d’autres difficultés notamment dues au fait que les diverses provinces ont des manières différentes de réglementer ce domaine. Il y a, au Canada, de nombreux types de cours d’eau, et de nombreuses espèces de poissons, ce qui fait qu’il y a de nombreux types d’élevage. Si nous souhaitons instaurer, dans l’ensemble du Canada, une procédure à la fois uniforme et prévisible, je ne vois vraiment pas comment on y parviendra en déléguant les compétences en ce domaine aux divers organismes relevant des provinces et des territoires.
J’ajoute que cela pourrait par ailleurs très bien soulever des problèmes d’ordre constitutionnel.
Merci, madame Forbes.
Pourriez-vous nous dire, en outre, comment l’abrogation de la LCEE, et l’accent dorénavant mis sur les pêches commerciales, récréatives et autochtones, s’accordent avec l’évaluation de la biodiversité et des écosystèmes?
J’ai voulu, dans le cadre de mon exposé, faire ressortir que la partie 3 du projet de loi C-38 se caractérise par un manque de respect et de compréhension du fait que nous habitons un écosystème. Le fait de catégoriser les divers types de poissons, ceux notamment qui ont une valeur commerciale ou culturelle, ne tient aucun compte du fait que ces poissons dépendent eux-mêmes d’autres poissons, d’autres espèces végétales et aquatiques, et du bon état de l’écosystème que nous habitons.
Prises dans leur ensemble, les modifications proposées à la partie 3, et notamment celles qui concernent la nouvelle LCEE, et les modifications apportées à la Loi sur les pêches ainsi qu’à la Loi sur les espèces en péril, résultent d'un point de vue parfaitement hermétique, comme si chaque projet pouvait se cantonner dans sa petite case sans avoir la moindre incidence sur ce qui se passait à l’extérieur. Ce n’est pas tenir compte, comme il conviendrait de le faire, des incidences cumulatives. Nous ne tenons aucun compte de la biodiversité. Nous ne tenons aucun compte des écosystèmes.
À terme, cela pourrait en fait aider l’industrie. Il nous faut, si nous souhaitons pouvoir continuer à en profiter, sauvegarder nos ressources. Si nous souhaitons que l’agriculture et les industries d’extraction puissent continuer à utiliser l’eau, il nous faut pérenniser nos approvisionnements.
C’est dire qu’il nous faut penser la situation dans sa globalité et comprendre les incidences réciproques.
Je vais poser à M. Steedman trois questions très brèves. Je lui demande simplement de me répondre par oui ou par non.
En ce qui concerne l’ONÉ, entend-on donner aux nouvelles dispositions un effet rétroactif au mois de juillet 2010, oui ou non?
On craignait, en effet, qu’elle ait un effet rétroactif. Je vous remercie de cette précision.
Je reviens maintenant à Mme Forbes. Le grand chef Atleo a dit que la non-reconnaissance des droits issus des traités est une source de profonde inquiétude. Le projet de loi C-38 a suscité de vives réactions de la part de nos Premières nations. Il y a deux jours, le grand chef Atleo nous a dit ne pas savoir ce que le gouvernement entendait faire pour améliorer la concertation avec les peuples autochtones, outre les 1,5 million de dollars prévus pour cela.
L’Union of B.C. Indian Chiefs a rédigé une lettre ouverte dans laquelle elle affirme ne pas accepter la demande d’observations qui lui a été adressée concernant le projet de règlement d’application de la LCEE de 2012. Elle affirme contester vigoureusement la demande que lui adresse le gouvernement fédéral de faire part de ses observations sur le projet de règlement... en raison du manque de concertation avec les Premières Nations, faisant valoir qu’elle n’entend pas participer à ce processus défectueux car elle n’entend en aucune manière le légitimer.
Cela continue.
L’Union of B.C. Indian Chiefs appelle le gouvernement à procéder à une refonte réglementaire des dispositions sur l'environnement afin de respecter les titres ancestraux, les droits des peuples autochtones et les droits issus des traités, et à prendre des engagements en ce sens auprès des peuples établis dans les diverses régions du pays.
Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?
D’après moi, la concertation avec les Premières Nations ne peut pas vraiment être soumise à des délais fixes.
Je reconnais que, de manière générale, une évaluation environnementale peut être menée dans certains délais, mais il y a en l’occurrence des facteurs inconnus et des variables. La science elle-même comporte des facteurs inconnus et des variables.
Pour ce qui est de la concertation avec les peuples autochtones, chaque groupe autochtone a des intérêts qui lui sont propres et qui doivent être cernés et examinés en particulier. Je pense pouvoir dire que la plupart des groupes autochtones, du moins ceux de Colombie-Britannique, sont constamment sollicités pour présenter des observations sur les divers et nombreux projets qu'on envisage de lancer sur leurs territoires. Ces demandes émanent des responsables de l’évaluation environnementale ou de personnes qui souhaitent nouer des partenariats. Or, les diverses commodités n'ont tout simplement pas les moyens de répondre à ces multiples demandes. Il est absurde de leur dire qu’il leur faut dans un délai de 30 jours se prononcer sur 10 projets différents dans le cadre d’un processus où leur gouvernement n'a pas voix au chapitre. Une municipalité se refuserait à le faire et, pourtant, nous demandons aux gouvernements des Premières Nations de le faire. Je suis d’accord avec les observations présentées à cet égard par le chef Atleo et par l’Union of B.C. Indian Chiefs. À leur place, je n’y serais pas moi-même favorable.
Je vous remercie, madame Duncan et madame Forbes. Votre temps de parole est épuisé.
Nous passons maintenant à la deuxième série de questions, chacun disposant de cinq minutes.
La parole passe à Mme Rempel. J’aimerais savoir si vous entendez partager votre temps de parole.
Merci, monsieur le président.
Madame Forbes, vous nous avez dit que vous avez une certaine expérience en ce domaine et que vous souhaiteriez pouvoir participer au processus. Je me félicite par conséquent de votre présence ici. Je voudrais passer directement aux dispositions du projet de loi. Selon vous, ce projet de loi va entraîner des incertitudes, notamment au niveau des délais qui s’imposent aux promoteurs et aux participants. Aux termes du paragraphe 54(2):
Le décideur est tenu de faire la déclaration dans les 24 mois suivant la date où il a renvoyé, au titre de l’article 38, l’évaluation environnementale du projet pour examen par une commission.
Selon vous, ce changement au niveau des délais entraîne-t-il davantage d’incertitude que les délais précédents, ou moins?
D’après moi, les nouveaux délais apportent une plus grande certitude. Ce que je voulais dire c’est que dans le cadre du processus actuel, il y a davantage d’incertitude car les promoteurs peuvent provoquer des retards, problème que la nouvelle LCEE ne règle pas puisque les délais prévus ne s’appliquent pas aux promoteurs.
Mais la décision doit dorénavant être rendue dans un délai de 24 mois. Pourquoi cela créerait-il plus d’incertitude que les dispositions antérieures?
Si vous pouviez m'indiquer un article qui dit que les promoteurs doivent répondre en fournissant des renseignements supplémentaires dans un délai donné, ou qu'ils doivent fournir suffisamment de renseignements au départ pour éviter que le comité d'examen ne soit obligé de communiquer avec eux pour obtenir d'autres études scientifiques et d'autres renseignements qui lui manquent — ou qu'ils peuvent demander un délai si leur situation économique n'est pas favorable, je serais heureuse d'en prendre connaissance.
L'article 54 parle des délais et des exigences qui s'y rattachent — les principes de base étant l'intégralité et la profondeur de l'examen. Comment pourrait-il y avoir moins de certitude chez certains participants si le comité d'examen doit rendre sa décision en moins de 24 mois? Il y a désormais un délai clair.
Merci
Poursuivons. Vous avez aussi parlé de l'incertitude du financement. Le commissaire à l'environnement nous a dit que 94 p. 100 des projets soumis à une évaluation en application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale sont réputés avoir peu ou pas d'impacts environnementaux. Il a aussi dit que si nous réaffections les ressources consacrées à ces évaluations à des projets de plus grande envergure, nous aurions des évaluations plus solides. Le gouvernement a aussi reconduit le financement au titre de la LCEE au même niveau, en plus d'augmenter les fonds destinés à l'évaluation de projets. Diriez-vous qu'il s'agit là d'un financement incertain?
Je ne crois pas avoir dit quoi que ce soit au sujet du financement dans le mémoire que j'ai présenté.
Poursuivons. Monsieur Everson, vous avez fait des remarques sur le World Economic Forum qui a dit que la bureaucratie était un obstacle à la croissance et vous avez parlé des pénuries de main-d'oeuvre et du besoin de formation, et de l'investissement des fonds de pension dans des entreprises du secteur de l'énergie, etc. Diriez-vous que ces affirmations sont peut-être révélatrices d'un besoin de certitude et que, par conséquent, les éléments qui précèdent font partie des raisons pour lesquelles on se rue pour obtenir une certitude à l'égard des délais afin de garantir que ces projets puissent être évalués?
Absolument, et je ne pense pas que la ruée est si grande. Je crois que cette question se pose au Parlement depuis deux ou trois décennies.
Diriez-vous peut-être que l'affirmation de Mme Forbes qui s'interroge sur l'urgence d'apporter ces modifications est fausse?
En ce qui concerne la question de l'accès qui a été soulevée, le comité des finances aura eu 50 heures d'étude et nous y aurons consacré 18 heures. On me dit que le comité des finances a dû annuler quelques réunions parce que nous n'avons pas réussi à avoir des témoins. Au cours de l'examen législatif de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, nous avions eu deux mois de témoignages. Au cours de nos audiences, nous avons reçu les porte-parole d'associations qui représentaient plus de trois millions d'emplois canadiens. nous avons entendu des représentants du milieu universitaire, du domaine du droit, d'organisations autochtones et d'organisations non gouvernementales du domaine de l'environnement.
Madame Forbes, diriez-vous que ce n'est pas là une preuve d'accès?
Je brosserais un tableau de l'examen septennal de la LCEE très différent du vôtre. De fait, il y a eu un témoin d'un groupe environnemental et un témoin de l'Assemblée des Premières Nations et il y a eu plusieurs témoins de l'industrie. Je pense que vous avez dit que vous avez tenu des réunions sur deux mois, mais il s'agissait de très brèves réunions, dont un grand nombre ont eu lieu à huis clos. Nous avons été invités à témoigner, puis désinvités. La question a été posée 36 heures avant que le comité termine ses travaux.
Saviez-vous que le processus était ouvert et que n'importe qui au Canada pouvait soumettre un mémoire par écrit, que nous avons étudié des dizaines et des dizaines de ces mémoires?
Nous le savions, mais je peux vous dire que la plupart des Canadiens ne le savaient pas. Il n'y a eu aucun effort de sensibilisation.
Bien.
Merci, madame Forbes.
Merci, madame Rempel. Votre temps est écoulé.
Monsieur Anderson, vous avez cinq minutes.
Merci.
Madame Forbes, vous avez aussi mentionné que le processus manquait de légitimité. Après presque une centaine d'heures d'étude en comité parlementaire, si j'ai bien compté, qualifieriez-vous d'illégitime un comité parlementaire qui s'est penché sur ces questions pendant plusieurs mois — la plus grande partie de la session parlementaire en cours — incluant des consultations sur le budget, des mémoires écrits et le processus parlementaire?
Oui, parce que l'examen de la LCEE, cette loi qui a été promulguée il y a je ne sais plus combien de décennies de cela, n'est pas la même chose que l'examen d'une loi entièrement nouvelle qui renverse carrément le processus.
Et vous qualifieriez d'illégitime un examen législatif septennal, prévu dans la Loi et dont les gens ont été informés par un comité parlementaire.
Je crois qu'il y a des façons différentes d'exécuter un examen et je crois que la façon dont il a été...
Mme Michelle Rempel: Merci. Mon temps...
Mme Rachel Forbes: ...exécuté en 2011 n'était pas légitime.
Merci.
Monsieur Steedman, je veux vous poser quelques questions sur les modifications de la Loi sur l'Office national de l'énergie. Nous avons parlé un peu ici des délais. Je me demandais si vous pourriez nous en parler un peu. Quels nouveaux délais sont prévus à l'égard des examens de l'ONE?
Un délai total de 18 mois est prévu pour les audiences relatives aux installations, c'est-à-dire les oléoducs et les lignes de transmission. L'Office national de l'énergie aurait 15 mois pour mener à terme son processus. Les trois derniers mois seraient réservés au gouverneur en conseil pour qu'il fasse sa part.
Le ministre peut prolonger le délai d'au plus trois mois. Le Cabinet pourrait le prolonger davantage sur la recommandation du ministre.
Pouvons-nous vous demander d'expliquer un peu le processus décisionnel et son déroulement, simplement pour que cela figure au compte rendu?
L'ONE tiendrait une audience publique qui traiterait des considérations environnementales, économiques et sociales, comme il le fait toujours. Dans notre jargon, c'est l'évaluation de l'intérêt public. Elle est factuelle. Elle est entièrement transparente, comme un tribunal d'archives. Le processus est fondé sur un énoncé préalable très clair des exigences relatives au dépôt de mémoires.
L'ONE recueillerait ses données probantes. Il tiendrait une audience, en accordant une aide financière aux participants. Il produirait un rapport renfermant des recommandations qu'il transmettrait au gouverneur en conseil pour que ce dernier lui ordonne de délivrer un certificat, de rejeter la demande ou de revoir le rapport.
D'accord. Pouvez-vous me parler un peu des mesures d'exécution? Je crois qu'il y a de nouvelles dispositions relatives à l'exécution. Pouvez-vous les passer en revue et nous parler un peu des changements et, à mon sens, des améliorations à cet égard?
La Loi a toujours prévu des sanctions pénales, soit par mise en accusation soit par procédure sommaire, assorties d'amendes substantielles. L'ONE ne le fait pas directement, il le ferait par l'intermédiaire du ministère de la Justice.
Le projet de loi confère à l'ONE le pouvoir d'infliger des sanctions pécuniaires administratives. C'est un nouvel outil. Ces sanctions visent à favoriser la conformité. Dans notre échelle des mesures de conformité, qui va de l'envoi d'une demande de conformité à l'arrêt des activités de l'installation ou à des poursuites criminelles, les sanctions administratives pécuniaires fourniraient un moyen relativement rapide d'imposer une amende à quiconque a violé la Loi ou une condition d'une approbation.
Il me reste environ une minute.
Monsieur Everson, de nombreux témoins nous ont dit — en général, des personnes qui ont pris le temps d'étudier le projet de loi — qu'il fallait modifier le régime d'évaluation environnementale et qu'il fallait le faire de la bonne façon. On nous a dit que le principal changement ne concernait pas les résultats. Il n'y aurait donc pas d'allégement de la rigueur, des exigences ou du résultat. Les changements en question touchent le processus.
Je suppose que ma question est celle-ci: n'est-il pas vrai que le processus était le véritable problème?
S'ils étaient ici, je crois que la plupart de nos membres vous diraient que la différence entre les responsables de la réglementation des provinces et de l'administration fédérale, si différence il y a , ce serait que ceux des provinces sont un peu plus énergiques. Nous croyons qu'il y a simplement un degré lamentable de chevauchement; le fait qu'ils reproduisent le processus nous apparaît comme un gaspillage tragique des ressources environnementales et du capital humain dont nous disposons. Sous ce rapport, c'est certain qu'il s'agit d'un projet de loi très désiré parmi nos membres et nous exerçons depuis longtemps des pressions pour l'obtenir.
Je crois que le projet de loi est le fruit des nombreux commentaires formulés au fil des ans et des défis que nous avons analysés.
Vous êtes donc satisfait de l'accès que vous avez, vous sentez que vous avez eu un accès suffisant en ce qui concerne votre participation...
Monsieur Anderson, votre temps est écoulé.
Merci monsieur Smith.
Nous allons poursuivre.
[Français]
Madame Quach, vous disposez de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence.
J'aimerais poser des questions à M. Maas. On parle beaucoup des répercussions du projet de loi C-38 sur l'évaluation environnementale. En effet, ce projet de loi prévoit déléguer les responsabilités aux provinces, sous prétexte qu'il y aurait du chevauchement. Toutefois, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale nous a appris aujourd'hui, par l'entremise d'un document interne, qu'en fait, il n'y aurait pas de chevauchement.
Dans ce cas, quels seraient les risques encourus? Le fédéral transfère ces responsabilités aux provinces alors qu'il n'y a pas de normes uniformes. Cela crée beaucoup de problèmes de prévisibilité. Qu'en pensez-vous?
[Traduction]
Eh bien, ma boule de cristal est aussi efficace que celle de n'importe qui d'autre, je ne peux donc que faire des conjectures, bien sûr.
Au sujet de la Loi sur les pêches, il est important de reconnaître qu'il existe déjà de nombreux accords entre les provinces et l'administration fédérale sur l'administration de la Loi sur les pêches fédérale et c'est la même chose par rapport aux responsables de la conservation.
La question qui me vient est double. Premièrement, lorsqu'on envisage de déléguer d'autres pouvoirs aux provinces, on peut s'interroger sur l'autorité juridique, l'autorité constitutionnelle des provinces de gérer les pêches parce qu'il s'agit d'une compétence fédérale au plan constitutionnel.
D'un point de vue beaucoup plus pragmatique, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, il y a de très graves problèmes de ressources, que ce soit dans le secteur privé, là où je travaille, ou dans le secteur public.
Si les responsabilités doivent changer, je me sentirais beaucoup plus en sécurité et beaucoup plus séduit par ces changements si nous avions une quelconque analyse de l'ampleur des lacunes par rapport à la capacité d'intervenir et de protéger les ressources en eau pour les pêches et une certaine indication d'où les ressources proviendront pour les combler.
[Français]
Merci.
Je vais poursuivre. Il pourrait y avoir des risques relativement aux ressources, c'est-à-dire des risques de contamination potentielle puisqu'on laisserait les provinces gérer cela ou l'industrie elle-même se gérer, ce qui est complètement insensé.
Comment cela pourrait-il affecter négativement l'économie? On n'arrête pas de dire qu'il faut être productif, qu'il faut être concurrentiel, mais si on exploite toutes les ressources n'importe comment, va-t-il en rester dans trois générations? Les gens seront-ils encore en santé? Comment cela peut-il affecter l'économie?
[Traduction]
Une fois encore, la réponse à la dernière partie de votre question est: il faudra voir.
À titre d'organisation, nous sommes très disposés à participer à une conversation constructive sur la façon d'améliorer l'efficacité et l'efficience de l'administration de la Loi sur les pêches fédérale. Cependant, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je ne vois aucune raison d'apporter des modifications radicales.
L'une des principales difficultés que j'éprouve pour comprendre ce qui pourrait se produire, ou même pour faire des hypothèses à ce sujet, tient au fait qu'il y a tellement de termes non définis. Si nous reconnaissons qu'il y a un processus réglementaire à suivre et un engagement du ministre Ashfield à solliciter et à consulter les parties concernées — dans une déclaration écrite qu'il a faite, je crois —, il est très difficile de même commencer à se faire une idée, en particulier dans les échéanciers très courts qu'on propose, des définitions complètes de termes qui ne sont pas courants dans le cadre actuel de la gestion des pêches, comme « dommages sérieux » et « dommages permanents ».
Le jeu n'est plus du tout le même. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je suis tout à fait convaincu que la communauté scientifique serait disposée à s'attaquer à cette question, notre organisation y comprise, mais je crois que ces définitions devraient précéder la promulgation du projet de loi.
[Français]
J'ai une dernière question, qui porte sur la Loi sur les pêches. Le gouvernement a aboli plus de 1 000 postes au ministère des Pêches et des Océans cette semaine. On a aussi appris que des spécialistes en toxicologie, responsables de la surveillance de la pollution des cours d'eau, seront mis à pied ou relocalisés.
Croyez-vous que le projet de loi C-38 va contribuer à la protection de ces lacs et rivières ou qu'il va faire empirer la situation? Que devrait contenir ce projet de loi pour améliorer la situation?
[Traduction]
Dans une sorte d'autre boulot connexe, si vous voulez l'appelez ainsi, je fais partie d'un groupe, le Forum for Leadership on Water, ou FLOW en bref. En 2007, nous avons publié un rapport intituléChanging the Flow dans lequel nous faisions état, même à cette époque, de la tendance à la baisse sur deux ou trois décennies de la capacité scientifique du gouvernement fédéral de suivre et d'exécuter des recherches scientifiques. Les récentes réductions de l'effectif du MPO et d'autres organismes ne sont qu'une glissade de plus dans cette direction et elles soulèvent des préoccupations importantes au sujet du rôle que la science peut et devrait jouer dans la prise de ces décisions.
Merci madame Quach. Votre temps est écoulé.
Nous laissons la parole à M. Allen, pour au plus cinq minutes.
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, et je remercie nos témoins d'être ici.
Je vais concentrer mes questions sur l'Association canadienne de l'électricité. J'aimerais obtenir des précisions par suite d'une question que M. Anderson a posée.
Monsieur Smith, dans votre déclaration préliminaire, vous avez évoqué la façon dont vous avez présenté vos suggestions au sujet des modifications du processus réglementaire dans le cadre de la consultation prébudgétaire. Cela faisait-il partie d'une table ronde? Était-ce dans un mémoire soumis au ministre des Finances ou au moyen du système en ligne que tous les Canadiens peuvent utiliser?
Ce serait probablement toutes ces réponses. Nous tirons parti de toutes les possibilités offertes au grand public et, bien entendu, nous demandons de rencontrer le personnel des ministres et les parlementaires à tous les niveaux et les fonctionnaires. Si nous avons une occasion de présenter nos recommandations, nous essayons d'en tirer parti.
Merci beaucoup.
Monsieur Toner, vous avez parlé d'environ 347 milliards d'investissements qu'il faut consacrer au réseau d'électricité entre 2011 et 2013 pour remplacer une partie de l'infrastructure vieillissante et ces sortes de choses et vous dites qu'actuellement, il faut compter 10 ans à partir du début d'un projet jusqu'à l'intégration de l'ouvrage au réseau dans certains cas.
Cela étant, pouvez-vous nous donner des exemples de la façon dont ce problème est pris en compte dans le projet de loi à l'étude. J'aimerais particulièrement comprendre l'impact sur notre réseau de distribution de l'électricité et sur l'infrastructure vieillissante si nous n'avons pas une réglementation plus efficace, plus intelligente?
La deuxième partie de ma question est celle-ci: à votre avis, y a-t-il moins de rigueur dans ce projet de loi que dans les exigences en vigueur à l'égard de l'approbation de projets?
Je répondrai d'abord à la deuxième question en disant simplement que nous ne pensons pas qu'il y a moins de rigueur. Bien sûr, les gens peuvent l'interpréter à leur guise et nous ne prévoyons pas procéder de façon moins rigoureuse pour nous acquitter de nos responsabilités et prendre en compte les préoccupations sociales, environnementales et économiques.
Comme nous l'avons exposé dans notre mémoire, les consultations prévues avec les parties concernées et la mobilisation des Premières nations bien à l'avance constituent des orientations très importantes. Toutes nos entreprises le font pour tenter de faire de leur mieux pour accélérer la possibilité de conclure des accords solides, même avant que les processus arrivent au forum réglementaire — et c'est pour nous une pratique courante. Donc, l'industrie l'a fait. Nous croyons que c'est la bonne chose à faire.
Les conséquences par rapport aux changements que nous devrons subir comme secteur pourraient être considérables. Manifestement, les grands projets attirent le plus l'attention mais il faut exécuter de nombreux projets de taille moyenne et de petits projets qui donnent du travail au quotidien. Nous sommes en faveur d'harmoniser le processus de façon à ce que les examens nécessaires aient lieu et même que nous fassions participer des experts scientifiques compétents et que les gens aient une chance d'exprimer leurs préoccupations et leurs problèmes. Cependant, nous croyons qu'étant donné le nombre de projets nécessaires pour remplacer une partie de notre infrastructure de transmission vieillissante à la grandeur du pays... Au cours des dernières années, nous avons vu des exemples de problèmes qui sont survenus sous ce rapport et l'obtention de la permission d'exécuter des projets de transmission est l'un des défis auxquels nous faisons face. Par ailleurs, le remplacement de notre parc pour satisfaire aux exigences environnementales en matière d'émissions va aussi engendrer un changement relativement substantiel par rapport au type de production d'énergie que nous avons actuellement.
Si les échéanciers devaient être maintenus tels quels, à votre avis, y a-t-il des risques pour notre réseau de distribution et la stabilité de notre système électrique?
À notre avis, il y a des risques et comme l'intervenant précédent l'a dit, le risque est difficile à évaluer. Nous l'évaluons tous les jours par rapport à la fiabilité de notre système et chez certains de nos principaux services publics au Canada, une part énorme de l'infrastructure est en service depuis longtemps. Un délai de 6 ou 10 ans pour mettre ces projets en marche mettrait ces infrastructures en danger.
Quand vous parcourez la liste de vos membres et que vous examinez leur profil, combien de vos membres sont des entreprises privées et combien sont des sociétés d'État comme NB Power ou Hydro-Québec, ou d'autres? Pouvez-vous me donner un chiffre approximatif? Je vous pose cette question parce que lorsqu'il est question du processus d'approbation, nous voulons nous assurer que la règle du « un projet, un examen » s'applique et il se pourrait qu'une partie du processus soit confiée aux provinces.
À votre avis — je pose cette question en pensant à l'hydroélectricité —, y a-t-il un risque de conflit si l'on confie à la province la responsabilité de faire son propre examen d'un service public d'électricité qui est une société d'État?
La première question que vous avez posée concerne le profil de nos membres. Bien sûr, plusieurs de nos membres sont des sociétés d'État — BC Hydro, Manitoba, Saskatchewan, Nouveau-Brunswick, OPG et des parties de Terre-Neuve —, mais plusieurs de nos membres sont des sociétés privées. Nova Scotia Power en serait une, comme bon nombre des services d'électricité en Alberta et quelques autres services publics d'électricité à la grandeur du pays, Fortis par exemple. La réponse est donc que nous avons un mélange.
Nous ne voyons pas de problème à ce que l'administration provinciale joue un rôle substantiel dans ces projets parce qu'aujourd'hui, bon nombre de nos projets sont assujettis à des processus contrôlés par la province. Les provinces ont des lois solides et nous les respectons. Nous croyons que nous proposons de bons projets, des projets sûrs et responsables au plan environnemental.
Monsieur Everson, vous avez cité le rapport du World Economic Forum sur la compétitivité. Je le connais bien. En citant le rapport, vous avez dit aussi que le fardeau réglementaire est le principal problème à l'égard de la compétitivité du Canada.
Je veux signaler à mes collègues que cette citation est tirée d'une section du rapport qui fait état d'un sondage d'opinion mené auprès de cadres supérieurs. Cette conclusion est fondée sur des perceptions et non sur des données scientifiques. Le sondage a été effectué en ligne et l'échantillon n'était constitué que de 98 personnes.
Voici la traduction d'une citation tirée du corps du rapport sur la compétitivité du Canada, au sujet du principal problème sous ce rapport:
Comme nous l'avons souligné depuis quelques années, le fait d'augmenter le potentiel de perfectionnement et d'innovation du secteur privé, grâce à un accroissement des dépenses en R-D et à la production de produits et de services à un niveau plus élevé dans la chaîne de valeur, améliorerait la compétitivité et le potentiel productif du Canada à l'avenir.
Seriez-vous en accord avec cette partie du rapport? Un simple oui ou non serait suffisant.
Merci.
Donc, étant donné que de nombreux grands projets d'exploitation pétrolière impliquent l'exportation de ressources premières plutôt que de produits à valeur ajoutée, cela semble une stratégie particulièrement peu judicieuse si nous voulons augmenter notre compétitivité.
Madame Forbes, seriez-vous d'accord avec moi sur ce point?
Étant donné que du point de vue de la compétitivité, la production de produits à valeur ajoutée serait préférable, diriez-vous que la stratégie actuelle qui consiste à exporter toutes nos matières brutes est peu judicieuse?
Oui, et je crois que c'est une stratégie à très court terme. Je crois que la partie 3 ne prend pas en compte les coûts à long terme qui sont un élément du problème que pose cette stratégie.
Je veux revenir sur un point que madame Rempel a semblé mal saisir d'après votre réponse précédente. Si j'ai bien compris, vous avez dit que la LCEE de 2012 prévoit des délais pour tout le monde, sauf le promoteur.
Pourquoi cela pose-t-il un problème?
C'est un problème parce que les dispositions ne sont pas appliquées de façon équitable. Je continue de croire que c'est un domaine d'incertitude. La Loi ne donne pas au grand public, aux Premières nations ou, potentiellement, aux fonctionnaires qui participent au processus, la même certitude qu'elle donne aux promoteurs.
Je veux revenir sur aux oléoducs, par rapport à cette idée de valeur ajoutée par opposition aux exportations de matières brutes. Si ces projets peuvent être soumis à un examen accéléré, les consultations en bonne et due forme avec des représentants des Premières nations, avec des simples citoyens et même avec des économistes pourraient ne pas avoir lieu. Des économistes pourraient s'opposer à ces projets parce que ceux-ci ne s'appuient pas sur des principes économiques solides à long terme, comme vous l'avez mentionné. Par ailleurs, étant donné que le pouvoir est confié à des politiciens plutôt qu'à des organes scientifiques, ces principes peu judicieux pourraient aboutir à des décisions qui supplantent des décisions de l'ONE.
C'est un problème, n'est-ce pas madame Forbes? L'organe scientifique se voit retirer ce pouvoir qu'on confère aux politiciens et au Cabinet. Pouvez-vous élaborer sur les problèmes que cela pose?
Je crois que cela discrédite le processus d'examen des projets d'oléoducs et de pétroliers dans son ensemble. Vous pourriez passez les 24 mois alloués à examiner un projet et des économistes, des chercheurs et des représentants des Premières nations — de fait, toutes les parties concernées — et l'ONE feraient une recommandation, puis le gouvernement pourrait faire exactement le contraire. Si vous parlez d'un gaspillage de ressources et de temps, en voilà un qui serait absolument énorme.
Étant donné les principes économiques peu judicieux d'un politicien bien décidé à croire que l'exportation de nos ressources naturelles brutes est la meilleure solution, contrairement à ce que tous les organes internationaux comme le World Economic Forum disent, ce délai de 24 heures dans lequel ce politicien traiterait tous les éléments d'un dossier en accéléré pourrait donner lieu à des décisions économiques, environnementales et sociales très mauvaises, n'est-ce pas?
Je suis d'accord avec vous. Par exemple le processus d'examen en cours du fameux projet d'oléoduc d'Enbridge Northern Gateway ne tient pas compte des coûts à long terme. Vous devez pensez aux fuites comme aux déversements. L'examen ne prend pas en considération les effets en aval. Nous n'examinons pas tous les coûts économiques, sociaux, culturels et environnementaux de ce projet. À mon avis, c'est un processus à courte vue. Je crois que c'est la raison pour laquelle beaucoup d'intervenants se sont déjà retirés du processus, car ils ne croient pas à sa légitimité.
Le projet de loi confère à l'ONE de nouveaux pouvoirs. Il pourra créer des infractions et imposer des amendes d'au plus 100 000 $ à une société. L'actuelle Loi sur l'ONE prévoit déjà la poursuite d'infractions au criminel.
Étant donné qu'une société accusée d'une violation ne peut être accusée d'une infraction, craignez-vous que ce changement affaiblisse l'application de la loi?
Je ne sais pas ce qui affaiblirait vraiment l'application de la loi. À mon avis, le règlement des déversements pose des problèmes plus importants. Qui paie pour les déversements? Qui en assume la responsabilité? Nous avons un gros problème par rapport aux fonds d'assurance-responsabilité nationaux et internationaux. De fait, ils ne couvrent pas les coûts qui découleraient d'un déversement important, que ce soit sur terre ou en mer. Il y a un déversement en cours et les contribuables vont devoir acquitter une grande partie des coûts du nettoyage. Il ne faut pas oublier non plus que le nettoyage est impossible pour une grande partie des déversements de cette nature. C'est un risque énorme qu'aucun renforcement des mesures d'application de la loi ou de sécurité ne peut vraiment réussir à gérer.
Merci beaucoup, madame Forbes.
Monsieur Nicholls, votre temps est écoulé.
Monsieur Kamp, vous avez la parole.
Merci monsieur le président et merci à nos témoins de comparaître aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris du temps dans vos horaires chargés.
Permettez-moi de m'adresser d'abord à monsieur Maas. Je veux être sûr de bien comprendre ce que vous dites. Êtes-vous d'avis que pour chaque plan d'eau dans lequel on trouve un poisson, cet habitat doit être protégé?
Seriez-vous étonné d'apprendre que cela n'a pas toujours été la position du gouvernement du Canada ou que cela n'a pas toujours fait partie de la politique-cadre du gouvernement du Canada?
Permettez-moi de lire un extrait de la politique qui est toujours en vigueur. La « Politique de gestion de l'habitat du poisson du ministère des Pêches et des Océans » de 1986 dit:
La politique porte sur les habitats dont dépendent directement ou indirectement les stocks ou les populations de poisson qui soutiennent des activités de pêche commerciale, sportive ou de subsistance, au profit des Canadiens.
Elle dit un peu plus loin:
En conséquence, conformément à cette philosophie, la politique ne doit pas nécessairement s'appliquer à tous les endroits où l'on trouve du poisson au Canada; elle sera appliquée où il le faut conformément aux responsabilités fédérales en matière de pêches.
Je veux vous entendre sur ce point, mais permettez-moi d'ajouter qu'un cadre décisionnel publié une dizaine d'années plus tard, en 1998, disait ceci au sujet de l'article 35 de la Loi, en ce qui concerne la façon dont il devait être interprété:
L'article 35 ne porte pas sur la protection de l'habitat du poisson pour le bénéfice du poisson mais sur celui des pêches.
Il est ensuite question des pêches, qu'elles soient récréatives, commerciales ou de subsistance pour les Autochtones.
Que pensez-vous?
...méritaient d'être protégés, ce qui est différent d'une discussion de la nature exacte de la politique-cadre en vigueur. J'ai dit qu'elle était loin d'être parfaite. Je suis pragmatique. Je suis conscient que nous n'allons pas protéger toutes les pêches ni tous les plans d'eau où il n'y a qu'un seul poisson. Nous devons pouvoir fixer des priorités et nous devons le faire en nous fondant sur la science, selon des critères clairs. Je ne vois aucun critère dans le projet de loi sur ce qui motive une décision de classer une pêche ou un plan d'eau comme une pêche commerciale, récréative ou de subsistance...
Je suis désolé de vous interrompre. J'ai peu de temps.
Nous sommes conscients nous aussi que nous n'avons pas les ressources pour protéger toutes les espèces aquatiques et l'habitat qui les fait vivre. Ce projet de loi met l'accent sur ce que cette politique-cadre dit au sujet de ces pêches, notamment ces pêches commerciale, récréative et de subsistance dont les Canadiens bénéficient.
Vous dites que c'est une politique peu judicieuse, ou lui donnez-vous votre appui?
Je dis que si je pouvais voir qu'une certaine substance sous-tendra les critères qui seront établis, ou le processus pour les établir — et c'est ce que vous dites, que les documents d'orientation actuels que vous avez en main sont les critères proposés en fonction desquels nous définirons ces pêches, alors... Je pense que nous espérons avoir une chance de participer à une conversation sur nos priorités à l'égard de l'investissement de ressources limitées de sorte que nous puissions élaborer des solutions concertées constructives.
Nous sommes impatients de le faire. Pour clarifier, je disais que c'est une interprétation de l'article 35 de la Loi, que tous semblent vouloir conserver. Dans les faits, nous enchâssons dans la Loi le point de mire de la politique en vigueur sur la protection des habitats qui constitue l'interprétation antérieure de l'article 35.
Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
Je sais en partie ce à quoi vous vous opposez. Laissez-moi voir si je peux trouver des éléments que vous aimez dans le projet de loi C-38. Il y a l'article 147 qui harmonise la Loi sur les pêches avec la Loi sur le contrôle d'application de lois environnementales. Il y aura donc des amendes plus salées, des amendes minimales et ainsi de suite. Hochez de la tête si vous aimez ça. Bien, il aime ça.
Il y a un article sur la création de conditions sujettes à des contrôles d'application à l'égard des autorisations ministérielles, parce que jusqu'à présent, nous n'avions pas le pouvoir légal de forcer quelqu'un à faire ce qu'il avait dit qu'il ferait lorsqu'il a obtenu l'autorisation. Croyez-vous que c'est une bonne idée?
Je vais devoir ajouter un autre choix de réponse: je ne suis pas familier avec cet élément du projet de loi de mise en oeuvre du budget.
Votre temps est maintenant écoulé.
M. Randy Kamp: Je commence à peine...
Le président: Je sais. Nous vous avons entendu à la période de questions aujourd'hui, donc nous savons que vous ne faisiez que commencer.
Monsieur Toone, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vais continuer là où M. Kamp s'est arrêté.
Monsieur Maas, revenons à la question des dommages sérieux. Que pensez-vous de l'idée que nous avons maintenant un concept qui semble essentiellement non défini et extrêmement discrétionnaire, à mon avis? Pouvez-vous élaborer sur où cette nouvelle définition pourrait nous mener?
Je ne peux même pas commencer à faire des conjectures. Une fois encore, il faut reconnaître ou comprendre que des choses seront définies dans la réglementation. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, ce que je pense de termes aussi fondamentaux, c'est que le fait de remplacer un terme que nous comprenons et que nous connaissons, essentiellement pour déterminer la validité d'une autorisation ou d'une interdiction, par un nouveau terme qui n'a pas encore été défini fait en sorte qu'il m'est très difficile de donner mon appui à ces changements. C'est simplement très difficile de le faire.
Je partage votre préoccupation. Je vous remercie.
Monsieur Steedman, je pourrais peut-être vous poser une question. En ce qui concerne les évaluations de l'ONE proposées dans le projet de loi, les parties intéressées seront définies comme les personnes « directement touchées par la réalisation du projet » ou les personnes qui possèdent « des renseignements pertinents ou une expertise appropriée ». Nous savons aussi qu'aux termes du projet de loi C-38, le ministre aura le pouvoir de dicter qui devra être considéré comme une personne directement touchée. Donc, le projet de loi lui confère le pouvoir de déterminer qui sera autorisé à parler, par exemple dans le cadre des examens de projets d'oléoduc.
Étant donné que le ministre en poste et son gouvernement semblent avoir mené des attaques sans précédent contre des groupes environnementaux, ce principe plutôt contraire à la démocratie m'inquiète vraiment beaucoup. Je me demande ce que vous pensez de la capacité du ministre de définir les personnes « directement touchées » et quelle est votre définition? Vous attendez-vous à entrer en conflit avec le ministre sur ce point?
Merci de me poser cette question.
D'après notre interprétation du projet de loi, il est assez clair qu'une formation de l'Office national de l'énergie chargée d'une audience portant sur des installations déterminerait qui sont les personnes directement touchées, selon les particularités de chaque cas. C'est ainsi que nous interprétons le projet de loi.
Donc, vous ne craignez pas que le ministre puisse simplement intervenir et décider pour vous qui sont les personnes directement touchées?
Ce n'est pas ainsi que vous interprétez le projet de loi.
Donc, si le ministre venait vous donner sa définition d'une personne « directement touchée », vous seriez à l'aise de lui dire que vous n'êtes pas d'accord avec lui et vous pourriez vous opposer à ce que le ministre vous a ordonné de faire.
Oui c'est vrai, ce serait la formation, mais je vous demande si, à votre avis, vous croyez que l'ONE pourrait dire non au ministre et si vous pourriez casser une décision du ministre en ce qui concerne sa définition d'une personne directement touchée.
Je crois qu'il y aura des gens très malheureux. Je crains vraiment que l'ONE soit désormais impuissant.
Madame Forbes, selon les articles 71 et 83 de la Loi sur l'ONE proposés, le ministre aura le pouvoir d'écarter ou de remplacer n'importe quel membre de la formation chargée de la demande au milieu d'un examen et désigner à sa guise un seul membre pour achever l'examen.
Quelles répercussions anticipez-vous à cet égard?
Comme avocate, je pense aux instances d'une cour. Par exemple à une instance, vous avez un juge et si l'affaire devient plus grave, vous avez trois juges. Vous avez ensuite cinq à neuf juges qui révisent les décisions des instances inférieures, parce qu'une formation plus nombreuse peut vous fournir d'autres analyses et d'autres points de vue sur des décisions difficiles à prendre.
Lorsqu'il est question de projets de plus grande envergure comme des oléoducs que l'ONE doit examiner, il a été très avantageux pour nous d'avoir plus d'une tête pour prendre des décisions. Si une seule tête décide qui est directement touché et formule isolément une recommandation à l'égard d'un projet qui pourrait toucher plusieurs provinces, des centaines de Premières nations et des milliers de cours d'eau, on place une énorme responsabilité sur les épaules d'une seule personne. Au bout du compte, cette responsabilité incombe au ministre de toute façon, donc cela n'a peut-être pas d'importance.
Nous sommes clairement en accord avec une formation de trois membres et l'inclusion d'un représentant des Premières nations dans chaque formation.
Le chef Atleo nous a dit plus tôt qu'il était tout à fait insatisfait des consultations sur le processus qui nous occupe aujourd'hui.
Je suis reconnaissante d'être ici et je crois que vous faites un bon travail en recueillant des témoignages très variés. La portée du projet de loi de mise en oeuvre du budget dans son intégralité, même seulement la partie 3, est si énorme et représente un tel changement d'orientation pour le Canada — et il est vrai que le gouvernement a dit que ce projet de loi changera l'orientation du Canada à bien des égards —, qu'il est difficile de parvenir à saisir le nombre de modifications qui seront apportées et leur sens véritable.
Merci madame Forbes. Nous avons largement dépassé une minute.
Nous sommes au-delà de six minutes maintenant, monsieur Toone. J'ai été très généreux. Je vous remercie de le reconnaître. Je blâme la présidence pour son manque d'équité.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Jean, à vous la parole pour cinq minutes, s'il vous plaît.
Merci monsieur le président et vous ne vous tromperiez pas en faisant l'hypothèse que nous vous blâmons tous en ce qui concerne l'équité.
Je fais partie du grand comité des finances et je dois vous dire que cela m'a bien amusé quand je suis arrivé ici pour la première fois. Je me suis bien gardé de dire quoi que ce soit quand j'ai entendu des commentaires comme « pas consulté convenablement » et « un nombre insuffisant d'heures consacrées à ce projet de loi ».
Pour parler franchement, je n'ai jamais consacré plus de temps à un projet de loi au cours de mes huit années comme député, et je crois que c'est effectivement le plus de temps qu'un comité ait jamais consacré à une loi de mise en oeuvre du budget depuis que je suis député, c'est sûr. Je veux donc remercier mes collègues pour toutes les heures qu'ils y ont consacrées. Aujourd'hui, nous n'avons pas eu suffisamment de témoins et nous avons donc dû annuler la réunion. Hier, nous avons dû faire de même. Nous écoutons beaucoup de Canadiens et comme vous le dites, il s'agit d'un groupe très varié. J'en suis heureux parce que je crois que l'enjeu est important, surtout parce qu'il représente une étape importante par rapport à certains textes législatifs.
Je suis aussi heureux d'entendre que le N.P.D. est intéressé à créer plus d'emplois au Canada. Bien entendu, cela m'apparaît important, d'avoir une valeur ajoutée qui se paie d'elle-même, dans les faits. Je veux simplement informer le député qu'étant donné l'excès actuel de capacité de raffinage aux États-Unis, l'industrie n'est pas compétitive et il serait donc très difficile pour un Canadien de faire un profit en raffinant une partie des matières brutes que nous avons ici, parce que le raffinage peut être fait à un coût beaucoup moindre dans le Sud — sans subvention publique, bien sûr, ce n'est pas vraiment mon style.
Je veux parler d'un point qui a été soulevé et auquel nous n'avons pas accordé assez de temps, à mon avis. Il s'agit de l'impact de ce projet de loi sur les Autochtones.
Je viens de Fort McMurray. Quand je m'y suis installé en 1967, il y avait 1 500 habitants. Aujourd'hui, il y en a environ 130 100. Une grande partie de ma famille est d'origine autochtone, elle vient de trois réserves de la région. J'ai été témoin de changements énormes au sein de ce groupe au cours des 10 à 15 dernières années puisque nous avons eu du développement économique dans la région et j'aimerais vous raconter l'histoire de mon neveu. Il a passé pas mal de temps en prison, il a vécu dans la rue pendant un certain temps et il est à part entière un Indien visé par un traité, de la bande indienne de Janvier. Aujourd'hui, à 33 ou 34 ans, il est père de cinq enfants et il a plus d'un million et demi de dollars en banque. Il a une entreprise très prospère, après trois ans, et c'est parce qu'à Fort McMurray, il y a une politique d'embauche pro-autochtone. Syncrude par exemple a une politique selon laquelle 15 p. 100 de son effectif doit être autochtone. Chez Suncor, c'est 8 p. 100 et 28 autres sociétés ont des politiques similaires d'embauche d'Autochtones parce que c'est très important pour eux.
Nous avons observé un changement énorme dans les collectivités qui nous entourent — il n'y a plus les problèmes chroniques d'alcoolisme et de toxicomanie qui étaient courant dans les années 1970 et 1980. La vie des habitants s'est énormément améliorée et en visitant d'autres endroits au Canada, je n'ai pas vu la même image de succès dans la vie des Autochtones. Je ne parle pas ici seulement de succès économique, je parle de succès dans la vie familiale, de succès à l'égard de leur qualité de vie générale.
Je veux parler particulièrement de la Chambre de commerce.
La Northeastern Alberta Aboriginal Business Association qui compte plus de 300 membres a l'énoncé de mission suivant:
En partenariat avec l'industrie, la NAABA fait la promotion de l'entreprise autochtone et multiplie les possibilités en soutenant le développement économique de la population autochtone de la région de Wood Buffalo.
Laissez-moi vous dire, les rapports entre les bandes autochtones et les Autochtones du Nord-est de l'Alberta sont très bons, ce qui contribue à l'énorme succès des Autochtones.
Voyez-vous la même chose dans le reste du Canada, dans les régions où il n'y a pas de développement économique et où la population compte un fort pourcentage d'Autochtones? Est-ce que vous constatez qu'ils entrent dans la population active et que leurs perspectives économiques et leur qualité de vie s'améliorent, ce qui est très important pour moi?
Eh bien, il y a beaucoup de raisons d'espérer. Je vous remercie de m'avoir posé cette question.
La question de l'accès et de l'intégration des populations autochtones à la population active est en soi une énorme préoccupation des membres de la Chambre de commerce, surtout dans les secteurs des ressources naturelles. Je pense que la plupart des membres de mon organisation diraient qu'ils sont reconnaissants d'avoir un texte législatif portant sur le processus de consultation des Autochtones, mais qu'ils ne croient pas forcément que la solution se trouve à Ottawa.
J'entends de toutes parts que la seule chose qui fonctionne pour forger de bonnes relations est de forger de bonnes relations. Vous devez être là: il s'agit d'être sur le terrain, sur une longue période et d'agir de manière à inspirer la confiance.
Pourtant, le gouvernement du Canada, de concert avec les provinces et en consultation avec les bandes et les dirigeants autochtones, peut leur fournir les bons outils. Laissez-moi vous dire que d'après ce que j'ai vu, les outils sont l'éducation; la fierté d'eux-mêmes qui en découle; et des emplois, qui font une énorme différence.
Qu'en pensez-vous?
Je suis tout à fait d'accord avec vous. Un débat fait rage, et je crois que le pays doit s'y attaquer, sur le caractère suffisant de l'aide aux études pour les Autochtones. Une fois que ce problème sera réglé, il y a aussi tout un lot de rapports culturels et sociaux qu'il faut démêler. J'ai vu une grande différence rien qu'au cours des dernières années chez les membres de mon organisation sous ce rapport.
Je serais d'accord avec vous. J'ai beaucoup d'amis autochtones qui ont des entreprises prospères là-bas.
Merci.
Je vous remercie monsieur Jean, c'est très apprécié.
Merci monsieur Everson.
Chers collègues, je n'ai pas l'habitude d'avoir les yeux rivés sur l'horloge au travail, mais voici la réalité. Selon notre horaire, cette partie de la réunion devrait se poursuivre jusqu'à 20 h 30. Nous avons terminé la deuxième série de questions et il nous reste environ sept minutes. Si nous voulons faire un troisième tour pour laisser chaque parti avoir au moins une autre chance de poser des questions, cela signifierait que nous aurions un peu plus de deux minutes chacun.
Est-ce que cela en vaut la peine, ou devrions-nous simplement lever la séance tout de suite?
Je sens que nous sommes prêts à poursuivre.
D'accord, dans l'ordre que nous avions établi, je vais donner la parole à M. Allen pour deux minutes et demie.
Merci beaucoup monsieur le président.
Je n'ai qu'une question très brève puis je sais que M. Kamp veut poser une question.
Je veux revenir à l'association de l'électricité. J'ai posé cette question à l'Association canadienne de l'hydroélectricité.
Les articles 20 et 21 proposés, qui figurent à l'article 136 de la loi de mise en oeuvre du budget, parlent des passes migratoires. Y a-t-il des préoccupations ou des problèmes à ce sujet? J'ai eu l'impression,d'après les réponses des représentants de l'Association de l'hydroélectricité, que cela les rend peut-être un peu nerveux.
Nous croyons qu'il serait possible de l'amender afin de prévoir un mécanisme pour prendre en compte les passes migratoires actuelles, ce qu'on ne semble pas avoir prévu dans le projet de loi.
Je crois qu'il y a un problème d'interprétation en vue et nous serions intéressés de connaître le dénouement.
Merci monsieur le président.
Tant Mme Forbes que M. Maas ont semblé un peu inquiets à l'idée que le projet de loi soit promulgué sans qu'ils puissent voir les règlements d'application — comme cela se fait presque toujours dans cet ordre, je m'étonne un peu de constater que cela les inquiète.
Dans le texte législatif qui nous occupe, nous avons une curieuse situation par rapport à l'article 35, le principal point de mire des critiques que suscite cette loi: nous modifions l'article 35, puis nous avons un paragraphe qui prévoit la révocation de l'article, mais à une date ultérieure, et cette date ultérieure dépend de la fin du processus réglementaire.
Est-ce que cela vous rassure?
Non, parce que l'autre amendement de l'article 35 qui est proposé est encore bien pire que l'amendement qui était proposé à l'origine dans le projet de loi de mise en oeuvre du budget.
Il réduit encore plus la protection de l'habitat du poisson prévue dans la Loi sur les pêches sur laquelle nous comptons et dont le gouvernement du Canada est responsable.
Vous allez donc vous réjouir de l'entrée en vigueur du nouvel article 35 qui englobe aussi l'article 32.
Eh bien vous n'aimez pas la version amendée qui sera là temporairement, vous allez donc vous réjouir quand le nouvel article 35 sera enfin en vigueur.
Non, je ne m'en réjouis pas. Je crois que tout cela est un recul de plusieurs décennies en matière de protection de l'environnement. On dénature une loi environnementale dont on a dit, je crois, qu'elle rejoint vraiment la plupart des gens.
Dans l'industrie, j'ai des amis qui bâtissent des ponts dans l'Okanagan. Il y a des pêcheurs dans ma famille et tous connaissent l'article 35. Ils savent ce que c'est, ils savent comment il fonctionne. On revient en arrière et on met à la poubelle toute la jurisprudence.
Merci.
Sur ce point, M. Kamp a essayé hier soir de convaincre M. Siddon, l'ancien ministre des Pêches que ce qu'ils font ressemble beaucoup ou est identique à ce que la politique et les définitions disaient en 1986. Bien sûr, M. Siddon a dit très clairement que ce n'est pas le cas, que c'est un processus et un changement — je crois qu'il a employé les mots « retors et angoissant »,
Nous n'avons pas beaucoup de temps, mais j'aimerais vous demander, madame Forbes, de parler un peu des raisons pour lesquelles vous entretenez le genre de préoccupations que vous avez exprimées au sujet des nouveaux concepts incorporés dans l'article 35 récemment amendé.
C'est probablement parce que c'est exactement ce qu'ils sont: de nouveaux concepts. Je crois que mon collègue a évoqué le fait que ce que ce processus a de particulier, c'est qu'une si grande partie de la substance est laissée au processus réglementaire, et cela touche également le point concernant la réglementation.
S'il est correct de prendre des règlements après avoir promulgué la loi, nous ne pouvons avoir aucune certitude au sujet de ce que la loi fait vraiment jusqu'à ce que nous sachions ce que ces termes veulent vraiment dire. Je ne peux pas dire avec certitude que c'est un recul des lois de l'environnement et que nous allons réduire la protection de l'habitat du poisson et la capacité de protéger nos pêches commerciales, culturelles et de subsistance pour les Autochtones à long terme.
Merci.
Mon dernier point, probablement. Il est intéressant que M. Jean ait dit que tout va bien pour les Premières nations. Nous avons entendu le grand chef l'autre soir nous dire qu'il était horrifié des modifications proposées dans ce projet de loi et qu'il n'y avait eu absolument aucune consultation avec les Premières nations et qu'aucune disposition de ce projet de loi ne prévoyait la tenue de consultations avec les Premières nations. Il s'est aussi interrogé sur la constitutionnalité de la délégation des pouvoirs aux provinces.
Madame Forbes, je sais que vous avez déjà travaillé avec des collectivités des Premières nations. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
Je suis d'accord. Je ne pense pas pouvoir entrer davantage dans les détails, je n'appartiens pas à une Première nation.
Je crois qu'il est dangereux de citer des cas particuliers de Premières nations à titre d'exemples de succès, parce que je suis encore moins à même de faire des généralisations à leur sujet que je suis à même de le faire concernant les Canadiens de race blanche ici présents. Nous venons manifestement de collectivités différentes et nous avons des intérêts différents et des valeurs différentes que nous protégeons.
Merci madame Forbes.
Merci monsieur Chisholm, votre temps est écoulé.
Madame Duncan, vous avez deux minutes et demie.
Merci monsieur le président.
Ma dernière question s'adresse à madame Forbes.
Stephen Hazell nous a dit que d'après son interprétation de la LCEE 2012, elle n'exige pas la présentation de preuves d'équivalence avant qu'une substitution par un processus provincial ait lieu.
J'aimerais connaître votre interprétation.
J'estime qu'il faut examiner plus à fond toute la question de la compétence provinciale-fédérale tout comme beaucoup d'éléments de ce projet de loi, à mon avis. En ce qui concerne l'analyse des lacunes et la substitution de processus, quelqu'un s'est demandé plus tôt qui allait combler les lacunes.
De fait, personne n'a la responsabilité légale de combler les lacunes et par conséquent, des choses passeront au travers des mailles du filet. Voilà le problème avec cet assemblage de réglementations provinciales: chaque règlement est différent. Règle générale, l'Ontario ne s'occupe que des projets gouvernementaux; l'approche de la Colombie-Britannique est fondée sur des limites et si un projet est confié à la Colombie-Britannique et qu'il n'atteint pas les limites établies dans la loi provinciale en vigueur, il n'aura pas à subir d'évaluation.
Personne n'a donc la responsabilité légale d'intervenir. Nous espérons que quelqu'un le fera, mais il se pourrait que personne ne le fasse. C'est un gros problème.
Savez-vous si l'efficacité du processus d'évaluation environnementale a été analysé dans chacune des provinces et dans chacun des territoires?
Oui, je sais qu'il y a eu des évaluations en Colombie-Britannique dans lesquelles j'ai repéré des problèmes systématiques par rapport aux consultations et aux limites. Nous avons une approche par liste de projets en Colombie-Britannique, qui ressemble beaucoup à celle que le gouvernement du Canada propose. Elle permet soit de prévoir différentes catégories de projets soit de laisser la possibilité au promoteur d'adapter son projet de telle façon qu'il ne déclenchera pas d'évaluation environnementale.
Merci madame Duncan.
Chers collègues, c'est tout le temps que nous avions pour ce groupe d'experts.
J'aimerais vous remercier, madame Forbes et messieurs Smith, Everson, Steedman, Mass et Toone d'avoir fait l'effort de venir à Ottawa pour nous faire profiter de vos connaissances et de votre expertise sur ce sujet des plus importants. Merci beaucoup du temps que vous nous avez accordé.
Chers collègues, c'est quelque chose que nous apprécions tous comme députés je crois. J'aimerais que vous vous joignez à moi pour remercier notre personnel qui nous a si merveilleusement secondés ici au cours des quatre dernières soirées.
Je veux remercier particulièrement nos greffiers: Jean-François Lafleur, Michelle Tittley, Julie Lalande Prud'homme et Jean-François Pagé, et les analystes qui ont été à nos côtés tout au long de l'exercice, c'est-à-dire Kristen Courtney, Penny Becklumb, Mark Mahabir et Brett Stuckey.
Les services de traduction ont été absolument phénoménaux et je ne parle pas seulement de l'interprétation simultanée mais aussi par rapport au lot de documents et de bleus qui ont été produits le lendemain, à partir de quatre heures après les réunions afin que nous puissions les consulter. J'aimerais remercier Dominique March, Josette Noreau, Nadine Chouinard, Catherine Richard, Denis Samson, Yvon De Repentigny, Paul-André Gravelle et Josée Deschênes. Si j'ai oublié quelqu'un, veuillez me pardonner.
Je remercie aussi le personnel qui s'est occupé de nous dans les salles de réunion, qui nous apporte des fiches et qui remplit sans cesse les pots d'eau, le personnel qui nous a nourris au cours de ces séances marathons. Ce fut pour nous un privilège absolu d'être ici et de bénéficier de vos services si compétents. Merci beaucoup.
Applaudissements
Le président: Chers collègues, nous allons suspendre nos travaux et nous passerons à l'examen du rapport.
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