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FEWO Rapport du Comité

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Opinion dissidente du NPD

Étude du FEWO sur les pratiques prometteuse pour mettre fin à la violence faite aux femmes

Mai 2015

INTRODUCTION

Les néo‑démocrates croient que des mesures immédiates s’imposent pour s’attaquer aux taux élevés de violence faite aux femmes au Canada. Malheureusement, le rapport du Comité permanent de la condition féminine, Pratiques prometteuses pour prévenir la violence envers les femmes et les filles, passent sous silence des recommandations et des témoignages très importants entendus tout au long des audiences.

Les taux de violence ont connu une baisse au Canada, mais ceux de la violence faite aux femmes demeurent élevés. Les néo-démocrates sont consternés par le refus du gouvernement conservateur  de reconnaître le problème de la violence envers les femmes au pays. Le gouvernement est fermement résolu à ne pas travailler avec l’opposition, les spécialistes, les organismes ou les particuliers, dont bon nombre sont comparus devant le Comité dans le cadre de cette étude.

Les membres néo-démocrates du Comité reconnaissent qu’il est important d’applaudir, d’appuyer et d’encourager les pratiques prometteuses en matière de lutte contre la violence faite aux femmes, mais ils tiennent à attirer l’attention sur le fait qu’il existe encore des causes systémiques de cette violence. Ces obstacles empêchent les femmes de faire des choix et de profiter des occasions qui se présentent à elles, ce qui a pour effet d'élargir l’écart entre les sexes.

Les néo-démocrates savent que les causes de la violence sont complexes et que la solution doit reposer sur une approche globale. D’ailleurs, un grand nombre de témoins ont indiqué qu’une politique fragmentée n’est pas utile et peut même empirer la situation. Par ailleurs, bien qu’heureux d’avoir pu participer à cette étude, les néo-démocrates estiment que le rapport n’est pas pleinement représentatif des témoignages. Les témoins ont souvent recommandé un plan d’action national et une enquête sur les femmes autochtones disparues et assassinées, mais ces deux points ne figurent pas dans le rapport officiel. Les néo-démocrates sont désolés que le rapport ne présente pas une synthèse des témoignages et ne soit pas représentatif des recommandations entendues par le Comité dans le cadre de son étude.

PLAN D’ACTION NATIONAL

Un grand nombre de témoins ont exigé un plan d’action national pour combattre la violence faite aux femmes au Canada. Un tel plan servirait à combler les lacunes touchant les services et le système judiciaire, à coordonner les politiques et les services d’une administration à l’autre, ainsi qu’à améliorer la collaboration entre les différents paliers de gouvernement, la société civile, les survivantes et les premiers intervenants[1]. En outre, des témoins ont demandé au gouvernement de mettre en place les ressources humaines et financières nécessaires à la mise en œuvre d’un tel plan[2].

Selon plusieurs intervenants, le plan d’action national doit prévoir des engagements et objectifs précis, des mécanismes de prévention efficaces, des mécanismes d’intervention universels pour toutes les survivantes, l’examen des pratiques en matière d’application de la loi et de justice, la collecte de données fiables et les ressources humaines et financières nécessaires à la mise en place de ces mesures[3]. Lise Martin, directrice générale, Réseau canadien des maisons d’hébergement pour femmes, a proposé que le plan d’action mettre l’accent sur quatre grands thèmes : les mécanismes de prévention, les interventions en politique sociale, les interventions juridiques et les interventions touchant les services[4] Lana Wells, titulaire de la chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale à la faculté de service social de l’Université de Calgary, est d’avis que le plan d’action doit être adapté aux facteurs de risque propres à certains groupes de la population, comme les femmes autochtones et les réfugiées[5]

Le Comité a également entendu que le plan d’action doit être le fruit de consultation avec toutes les parties intéressées, y compris les intervenants de première ligne, les survivantes, les organisations non gouvernementales et communautaires, ainsi que les hommes et les alliés[6].

Les témoins ont clairement indiqué que le plan d’action doit être complet et intégré. Ils ont exigé des mesures législatives et réglementaires efficaces, un processus sécuritaire et efficace de signalement pour les femmes et les filles, l'élaboration de politiques fondées sur des données statistiques, du personnel bien soutenu et formé, l'établissement de partenariats à l'échelle du gouvernement et des groupes locaux, des conseils scolaires, des commissions de police et des agents de police, de même que des refuges et des spécialistes qui sont légion au pays.[7] 

FEMMES AUTOCHTONES DISPARUES ET ASSASSINÉES

En refusant de tenir une enquête nationale sur les femmes et les jeunes filles autochtones disparues et assassinées, en dépit des recommandations en ce sens de la Commission canadienne des droits de la personne, d’Amnistie Internationale, de tous les premiers ministres canadiens, d’organismes et de spécialistes internationaux, le gouvernement envoie aux femmes et aux jeunes filles autochtones le message que leur vie ne compte pas.

Les membres néo‑démocrates du Comité ont appris de Claudette Dumont‑Smith, de l’Association des femmes autochtones du Canada, que les « [l]es femmes et les filles autochtones sont cinq fois plus susceptibles de subir la violence que tout autre groupe de la population canadienne. Souvent, cette violence n'est jamais signalée, notamment les agressions par les conjoints et d'autres formes de violence familiale. Les taux réels sont susceptibles d'être plus élevés que les taux officiels […] L'Assemblée des Premières Nations, l'Association des femmes autochtones du Canada, les Premières Nations, les organisations de femmes autochtones et les familles des femmes autochtones assassinées et disparues réclament depuis longtemps une enquête publique nationale sur la violence contre les femmes et les filles autochtones, y compris sur les circonstances de leurs meurtres et de leurs disparitions. Nous avons besoin d'une telle enquête, pas moins, pour examiner la question sous tous ses angles et trouver des solutions exhaustives ». [8]

Leah Gazan a livré un témoignage très solide, rappelant aux membres du Comité que Human Rights Watch, Amnistie internationale et l’ancien rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, James Anaya, ont condamné l’inaction du gouvernement canadien dans le dossier des femmes autochtones disparues et assassinées et « ont noté à l’unanimité la nécessité de mener une enquête nationale et de prendre immédiatement des mesures pour s’attaquer à la violence de niveau de crise faite aux femmes et aux jeunes filles autochtones ».

Mme Gazan a poursuivi en précisant ce qui suit : « Nous représentons 4,3 % de la population canadienne et, pourtant, nous contribuons à 16 % de tous les homicides signalés. À l’heure actuelle, le Canada n’est pas un endroit sécuritaire pour une femme ou une jeune fille autochtone. Un certain nombre de facteurs contribue à cet état de choses, notamment des taux élevés de pauvreté, une pauvreté dont souffrent plus fréquemment les femmes

autochtones, et des problèmes observés dans les systèmes censés assurer la sécurité des citoyens canadiens. » Elle souligne ensuite que le rapport de la GRC Les femmes autochtones disparues et assassinées : Un aperçu opérationnel national, publié en 2014, conclut à une surreprésentation des femmes et des jeunes filles autochtones qui dépassait les estimations de la GRC.

FINANCEMENT

Les membres néo‑démocrates du Comité ont souligné que les témoins ont été nombreux à condamner l’absence de financement stable et constant de la part de Condition féminine Canada pour les initiatives de lutte contre la violence envers les femmes.

Comme l’a expliqué un témoin :

« Ce projet‑ci durera deux ans, après quoi il sera terminé et ce sera la fin du projet. C'est ainsi que le financement fonctionne. Il est impossible de se prévaloir du même financement pour le même projet. » Gerry Mills 2015-02-05

Jane Doe a ajouté ce qui suit : « Tant que nous n'examinerons pas les différents aspects et le caractère systémique de l'agression sexuelle, tant que nous ne dépenserons pas d'argent et que nous ne prendrons pas le temps de le faire, les pansements que nous appliquons sur les plaies sociales continueront de tomber et un plus grand nombre de crimes seront commis. » – Jane Doe 2015-02-03

SERVICES DE GARDE

Bon nombre des témoins ont insisté sur la nécessité de créer une stratégie nationale en matière de services de garde parmi les mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre afin de s’attaquer à la violence contre les femmes.

Des témoins ont fait valoir que le gouvernement fédéral devrait « investir dans une stratégie nationale de protection de l’enfance, fondée sur les principes d’abordabilité, d’accessibilité et de soins de qualité », qui « subviendrait à la bonne santé des enfants pendant leur développement et améliorerait les choix des femmes qui souhaitent retourner sur le marché du travail ou sortir de relations malsaines ou de relations de violence ». [9]

Selon Ann Decter, de YWCA du Canada, « les études sur le programme québécois universel de garderies à faible tarif confirment que les garderies contribuent de façon considérable à faciliter l’accès des mères à l’emploi. D’après l’expérience du Québec, il serait difficile d’exagérer les répercussions positives de l’accès généralisé à des garderies à faible tarif pour les femmes qui élèvent seules leurs enfants ». [10]

SÉCURITÉ ÉCONOMIQUE DES FEMMES

Selon les membres néo‑démocrates du Comité, il est inefficace de lutter contre la violence faite aux femmes si on ne s’attaque pas aux inégalités entre les sexes, en particulier aux inégalités économiques. Comme l’un des témoins l’a souligné :

« Il faut que tous les ordres de gouvernement du Canada prennent position et proclament que, sous leur gouverne, ils ne toléreront aucune violence envers les femmes de la part des hommes. Nous devons nommer le problème et comprendre sa source, qui est le patriarcat et les inégalités auxquelles font face les femmes, et nous devons décider d’atteindre l’égalité totale des femmes dans la société.

Il faut également que nous agissions. Nous devons investir dans la prévention de la violence, l’éducation publique et des programmes de sensibilisation, et nous devons commencer cette éducation très tôt dans les écoles. » [11] 

CONCLUSION

Les membres néo‑démocrates du Comité ont apprécié le fait que de nombreux témoins, de tous les horizons et domaines de spécialisation, ont parlé de la nécessité de tenir de véritables consultations auprès des communautés, des spécialistes et des survivantes et de les mobiliser. Selon plusieurs témoins, les politiques actuelles marginalisent les femmes et les ciblent, elles et leurs communautés. Les néo‑démocrates sont d’avis que le gouvernement fédéral doit plutôt jouer un rôle important pour lutter contre la violence faite aux femmes et contre toutes les formes d’oppression fondée sur le sexe.

Deepa Mattoo l’a magnifiquement exprimé ainsi dans son témoignage : 

« C'est donc la recommandation que je ferais : traitons les femmes à leur juste mesure, parce que si nous ne les acceptons pas telles qu'elles sont et si nous ne reconnaissons pas leurs qualités de meneuses, nous ne rendrons pas service à notre pays. » - Deepa Mattoo 2015-02-05 12:10

PAR CONSÉQUENT, LES NÉO‑DÉMOCRATES PROPOSENT LES RECOMMANDATIONS SUIVANTES :

  • Que le gouvernement du Canada élabore, en collaboration avec les provinces, les territoires, les municipalités, la société civile et les Premières Nations, les Métis et les Inuits, un plan d’action national global contre la violence faite aux femmes qui comprendrait des ressources humaines et financières suffisantes et des objectifs clairs, des cibles mesurables et des échéanciers précis, tel que l’énonce la motion M‑444.
  • Que le gouvernement du Canada établisse une commission d’enquête nationale sur les disparitions et les assassinats de femmes et de jeunes filles autochtones, et que, dans la mesure du possible, des femmes autochtones participent à la conception, aux décisions, au déroulement et à la mise en œuvre de cette enquête.   
  • Que le gouvernement du Canada cr ée, en collaboration avec les provinces, les territoires et les communautés autochtones, un programme universel d’éducation de la petite enfance et de services de garde fondé sur des principes communs tels que l’abordabilité, l’accessibilité et la qualité à un tarif d’au plus 15 $ par jour par enfant.
  • Que le gouvernement prenne des mesures pour assurer la sécurité économique des femmes et des jeunes filles.  

[1]    Témoignages, 2 décembre 2014, 0930 (Carmela Hutchison, présidente, Réseau d’action des femmes handicapées du Canada); Témoignages, 27 novembre 2014, 0905 (Ann Decter, directrice, Plaidoyer et politiques publiques, YWCA Canada); Témoignages, 2 décembre 2014, 0905 (Alia Hogben, directrice exécutive, Conseil canadien des femmes musulmanes); Témoignages, 4 décembre 2014, 0900 (Lise Martin, directrice générale, Réseau canadien des maisons d’hébergement pour femmes); Témoignages, 4 décembre 2014, 0910 (Sharlene Tygesen, directrice générale, Ernestine’s

Women’s Shelter); Témoignages, 4 décembre 2014, 0920 (Lynn Ward, directrice générale, Armagh House); Témoignages, 3 février 2015, 1110 (Rosemary McCarney, présidente et chef de la direction, Plan International Canada Inc.); Témoignages, 5 février 2015, 1105 (Lana Wells, chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, Faculté de service social, Université de Calgary); Témoignages, 5 février 2015, 1130 (Deepa Mattoo, avocate-conseil à l’interne, South Asian Legal Clinic of Ontario).

[2]    Témoignages, 4 décembre 2014, 0910 (Sharlene Tygesen, directrice générale, Ernestine’s Women’s Shelter).

[3]    Témoignages, 4 décembre 2014, 0905 (Lise Martin, directrice générale, Réseau canadien des maisons d’hébergement pour femmes); Témoignages, 4 décembre 2014,0910 (Sharlene Tygesen, directrice générale, Ernestine’s Women’s Shelter).

[4]    Témoignages, 4 décembre 2014, 0945 (Lise Martin, directrice générale, Réseau canadien des maisons d’hébergement pour femmes).

[5]    Témoignages, 5 février 2015, 1105 (Lana Wells, chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, Faculté de service social, Université de Calgary).

[6]    Témoignages, 4 décembre 2014, 0905 (Lise Martin, directrice générale, Réseau canadien des maisons d’hébergement pour femmes); Témoignages, 4 décembre 2014, 0910 (Sharlene Tygesen, directrice générale, Ernestine’s Women’s Shelter); Témoignages, 4 décembre 2014, 0920 (Lynn Ward, directrice générale, Armagh House); Témoignages, 5 février 2015, 1105 (Lana Wells, chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, Faculté de service social, Université de Calgary).

[7] Témoignages, 3 février, 2015 (Rosemary McCarney, présidente et chef de la direction, Plan International Canada Inc.)

[8] Témoignages, 5 février 2015, (Claudette Dumont-Smith, directrice générale de l’Association des femmes autochtones du Canada)

[9] Témoignages, 5 février, 2015 (Lana Wells, chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, Faculté de service social, Université de Calgary)

[10] Témoignages, 27 novembre, 2015, (Ann Decter, directrice, Plaidoyer et politiques publiques, YWCA Canada)

[11] Témoignages, 19 février, 2015, Megan Walker, directrice exécutive du London Abused Women’s Centre