Que le projet de loi C-13 soit modifié par suppression de l'article 23.
Que le projet de loi C-13 soit modifié par suppression de l'article 26.
Que le projet de loi C-13 soit modifié par suppression de l'article 47.
— Monsieur le Président, ce matin, nous avons débattu du projet de loi sur la prostitution. Cet après-midi, c'est au tour du projet de loi sur la cyberintimidation. Je suis presque tentée de commencer de la même façon. C'est aussi un projet de loi qui a attiré beaucoup d'attention, qui a fait beaucoup jaser et au sujet duquel j'ai reçu beaucoup de commentaires de la part de mes concitoyens, à Gatineau. Ces gens s'inquiétaient particulièrement des mêmes choses que moi. Cela me disait que j'étais sur la bonne voie quant à la position que le Nouveau Parti démocratique et moi avions prise dans le dossier.
Je pense que c'est important de réitérer que beaucoup de gens croient fermement en la parole du gouvernement et au fait que celui-ci peut changer positivement quelque chose dans leur vie, que ce soit des jeunes qui ont fait l'objet d'intimidation de toutes sortes, leurs parents ou tous ceux qui ont subi les répercussions de l'intimidation.
Comme nous le savons, le projet de loi a été conçu dans la foulée des situations dramatiques qui se sont produites dans la vie de certains Canadiens et Canadiennes. Des jeunes se sont suicidés. Le suicide est un problème qui peut survenir partout, que ce soit dans les forces armées ou dans la vie de tous les jours. L'intimidation n'est pas un concept qui est né aujourd'hui. Elle existe depuis des lunes. Je pense que nous devrions essayer de trouver de réelles solutions pour offrir de l'aide au lieu de faire de la politique.
Dès le départ, notre approche avait été de ne pas faire d'obstruction et de permettre au projet de loi de cheminer. Nous voulions nous assurer qu'une étude en profondeur se feraient en comité et que les nombreux témoins entendus pourraient donner leur vrai point de vue sur le projet de loi.
Le projet de loi s'appelle « projet de loi sur la protection des Canadiens contre la cybercriminalité » et il comporte 47 articles et 53 pages, mais on n'y traite même pas de cyberintimidation et de cybercriminalité. Il est plutôt question de distribution d'images, un aspect particulièrement étroit de la notion d'intimidation, qui fait partie du projet de loi C-13. Le reste touche à des choses aussi vastes que l'immunité aux fournisseurs de services Internet, la notion d'agent de la paix, fonctionnaire public, le vol de télécommunications, et j'en passe. Le projet de loi C-13 beurre pas mal épais.
Nous avons fait part de ces préoccupations au ministre procureur général du Canada. Nous estimions qu'il serait peut-être plus prudent de séparer le projet de loi en deux, de façon à ce que l'on puisse avancer rondement sur la question de distribution d'images qui n'avait pas de caractère polémique. Quant au volet plus particulier de l'atteinte à la vie privée, il y a des outils dont le ministre se fait fort de parler régulièrement, en disant qu'on ne peut pas faire l'un sans faire l'autre. C'est comme laisser croire qu'absolument aucun outil n'existe présentement, alors qu'il y en a. Nous voulions nous assurer que ce qu'on faisait à ce sujet était tout à fait raisonnable. Toutefois, le gouvernement a fait la sourde oreille à ce sujet.
Évidemment, les témoins sont venus dire exactement la même chose et que c'était une grande préoccupation. Beaucoup d'aspects du projet de loi rappellent le projet de loi C-30, même si le gouvernement a fait droit à certaines modifications et qu'il a réalisé qu'il ne pouvait pas pousser sa vision davantage. Il a quand même fait certaines concessions minimales. On a senti que le gouvernement a tenté d'aborder la cyberintimidation par le biais de la distribution d'images et des dossiers extrêmement médiatisés de Rehtaeh Parsons, d'Amanda Todd et d'autres jeunes qui ont commis le pire des gestes. En ne voyant pas de possibilité de se sortir de leur problème, ces derniers ont vu cela comme la seule solution. Cela me crève particulièrement le coeur.
On conviendra qu'il n'y a pas de sentiment plus terrible que de penser que mettre fin à ses jours est la seule voie d'évitement d'un problème ou la seule finalité. C'est la société entière qui faillit lamentablement à la tâche. À mon avis, le fait de prétendre que le projet de loi permettra de sauver des jeunes équivaut encore une fois à beurrer particulièrement épais.
Je ne tiens pas à revenir longuement sur la question, mais même la maman d'Amanda Todd disait aux membres du comité qu'elle ne voulait pas que l'on porte atteinte à la vie privée des gens pour mettre d'autres personnes en sécurité. Ce n'était pas nécessairement l'objectif. Encore une fois, on est devant le manque de transparence du gouvernement. J'ai envie de dire comme Sophia Petrillo-Weinstock dans l'émission Golden Girls: « Picture it ».
Le jeudi 12 juin était le dernier jour consacré à l'étude article par article du projet de loi . Le vendredi 13 juin, la Cour suprême du Canada rendait sa décision quant au dossier Spencer c. La Reine. Dans ce dossier, il était question de l'accès à des données personnelles par la police. Plusieurs témoins qui ont témoigné devant le comité disaient qu'il y aurait assurément une incidence. À tout le moins, il fallait avoir la prudence d'attendre la décision de la Cour suprême.
Certains pensent que le comité a simplement fait une étude de concept, mais ce n'est pas le cas. Ce que l'on fait, c'est de la législation. Le projet de loi du gouvernement contient 53 pages, et on les étudie. Par la suite, le comité a entendu les témoins au sujet des différents aspects du projet de loi qui les intéresse. Pour certains, c'était la distribution d'images, et pour d'autres, c'était l'atteinte a la vie privé et les moyens technologiques. On a entendu un panoplie de témoins intéressés par des aspects très différents.
Les gens qui s'occupaient de la partie liée à l'interception de données et à l'obtention de données sans mandat ou sans autorisation de la cour trouvaient important d'attendre l'arrêt dans l'affaire Spencer. Selon certains experts à la suite de son dépôt, l'arrêt du 13 juin contredisait certains aspects du projet de loi du gouvernement. C'est ce qu'on essayait d'éviter. On avait donc demandé d'attendre.
En comité, j'ai posé maintes fois demandé si on ne devrait pas attendre le 13 juin? Ne devrait-on pas lire la décision? Ne devrait-on pas avoir l'opinion des gens du ministère de la Justice qui pourraient nous expliquer la décision et préciser si, selon eux, cela aurait un impact ou non.
En droit, si on installe cinq avocats dans une salle, ils ne diront pas tous la même chose. À la Chambre, tout le monde n'est pas avocat. D'ailleurs, même quand on l'est, on n'est pas spécialiste de tous les sujets. C'est pour cette raison qu'on approfondit cette étude en comité, qu'on revient énumérer nos recommandations à la Chambre et qu'on vote en toute connaissance de cause.
Au moment où l'on se parle, mise à part mon opinion personnelle et le fait que plusieurs spécialistes disent que l'arrêt dans la cause Spencer contredit des pans du projet de loi, je suis inquiète. S'il y a bien un domaine dans lequel je ne veux pas qu'il y ait d'erreur flagrante, c'est bien dans celui de la justice. La justice doit être appliquée correctement et uniformément à tout le monde.
C'est tout cela qui fait que l'on a changé de position. On a appuyé le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, mais toutes nos craintes ont été confirmées lors de l'étude en comité du projet de loi du gouvernement.
Il semble que, au moyen du projet de loi, le gouvernement veuille faire du millage politique plutôt qu'apporter un changement en profondeur. La preuve est très évidente. Le fait est que le gouvernement a voté contre la motion de mon collègue de , soit contre la motion M-385 en matière d'intimidation. De plus, il n'a pas appuyé le projet de loi de mon collègue de , soit le projet de loi .
En somme, selon moi, tout cela est clair, net et précis.
Il y a aussi le projet de loi de mon collègue qui a fait une présentation à cet égard ce matin.
Cela m'indique que ce projet de loi est vraiment davantage politique que réel.
:
Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole aujourd'hui pour un discours au sujet du projet de loi . C'est un moment triste parce que nous avons ici un projet de loi avec toutes les fautes qu'il avait lors de la première lecture.
[Traduction]
Je tiens également à préciser que je regrette la décision du Président. Je comprends son raisonnement mais, pour ma part, j'aurais appuyé sans équivoque la demande du député d' voulant que l'amendement soit choisi. C'est une question importante d'identité de genre et de lutte contre la discrimination, et je trouve désolant que nous ayons laissé filer l'occasion d'en débattre à la Chambre des communes.
Il y a quelques instants le député de a très bien expliqué combien il est dommage que le projet de loi n'ait pas été divisé. Il ne fait aucun doute que l'adoption rapide de la motion aurait fait en sorte que nous nous retrouvions avec un projet de loi qui s'attaque concrètement à la cyberintimidation sans pour autant contenir des dispositions sur « l'accès légal », concept mieux connu par les Canadiens ordinaires comme de l'espionnage électronique par l'État au détriment de la vie privée des Canadiens.
Les nombreuses dispositions troublantes du projet de loi sur l'espionnage électronique ou l'accès légal nous empêchent d'adopter les dispositions qui s'attaquent à la cyberintimidation et que nous sommes tous disposés à appuyer. Mes observations vont donc porter sur les éléments du projet de loi qui auraient dû être extraits et traités séparément plutôt que d'être présentés comme si de rien n'était. Il s'agit des dispositions du projet de loi sur ce qu'on appelle l'accès légal.
Contrairement à ce que vient de dire le , les articles qui portent sur le dévoilement de renseignements personnels et de communications privées de Canadiens dans des circonstances beaucoup moins circonscrites que par le passé sont très préoccupants. Si ce n'était pas le cas, nous n'aurions pas eu de déclarations aussi fermes de la part de divers commissaires à la protection de la vie privée, comme l'ancienne commissaire fédérale à la protection de la vie privée, Jennifer Stoddart, et la commissaire à la protection de la vie privée de l'Ontario, la commissaire Cavoukian.
De nombreux experts en matière de protection de la vie privée se sont exprimés et ont dit que le projet de loi, comme tant d'autres présentés par le gouvernement conservateur, viole des droits conférés par la Charte, certainement notre droit à la vie privée. L'Association du Barreau canadien et la Criminal Lawyers' Association dénoncent fermement le projet de loi, soutenant que des changements modestes à certains articles pourraient le rendre acceptable. Or, les modifications proposées en ce sens ont toutes été rejetées au comité.
Voici un cas où, conformément aux nouvelles règles de procédure qui s'appliquent aux députés qui, comme moi, sont membres d'un parti comptant moins de 12 membres à la Chambre ainsi qu'aux indépendants, j'ai été invitée — je suppose que c'est le bon terme, mais « contrainte » me vient plus souvent à l'esprit —, en tant que députée de Saanich—Gulf Islands et chef du Parti vert, à comparaître devant divers comités à moins de 48 heures d'avis. J'ai présenté au comité une douzaine d'amendements au projet de loi pour tenter de faire corriger les articles dont nous demandons dorénavant la suppression. Encore maintenant, à l'étape du rapport, nous aimerions voir le projet de loi amélioré. Malheureusement, tous mes arguments ont été rejetés de même que tous les amendements proposés.
J'aimerais décrire brièvement nos principales préoccupations. Évidemment, certains points ont déjà été traités en profondeur par la députée de dans son explication assez irréfutable de ce qui cloche dans le projet de loi.
Les dispositions permettant aux entreprises de télécommunications de volontairement divulguer des renseignements personnels sans s'exposer à des poursuites sont inutiles. L'arrêt Spencer, plusieurs fois mentionné cet après-midi, ne laisse planer aucun doute sur le fait que le projet de loi va à l'encontre de la position de la Cour suprême. Nous devons éviter de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les entreprises de télécommunication de divulguer volontairement des renseignements sans mandat ou sans le genre de protection énoncée dans d'autres descriptions des conditions dans lesquelles ce type de renseignement peut être divulgué.
Le fait que des fonctionnaires de divers ordres de gouvernement puissent demander à obtenir de tels renseignements est, en soi, inquiétant. Le fait que les entreprises de télécommunication puissent les divulguer volontairement sans s'exposer à des poursuites est également inquiétant, car le nombre d'atteintes à la vie privée, sous prétexte de lutter contre la cyberintimidation, augmentera considérablement.
L'absence de responsabilité et de surveillance est l'autre source de préoccupation. D'ordinaire, la police doit avoir une raison de suspecter quelqu'un. Dans ce cas-ci, la disposition est édulcorée.
Nous devons renforcer la surveillance lorsqu'il est question de la vie privée. En cette ère d'Internet, nous sommes plus conscients que jamais que, grâce aux percées technologiques et à Internet, l'État a aujourd'hui facilement accès aux renseignements privés des Canadiens — ceux que nous avions l'habitude de garder sous clé à la maison et qu'un étranger n'obtenait qu'en défonçant la porte et en fouillant dans nos classeurs — simplement en faisant pression sur une entreprise de télécommunication pour qu'elle les divulgue. C'est une menace importante au droit à la vie privée au Canada.
Ce projet de loi devrait-il être adopté dans sa forme actuelle? S'il était adopté, il porterait gravement atteinte à nos droits. Il entraînerait inévitablement des atteintes au droit à la vie privée des Canadiens.
Ce projet de loi a également fait l'objet de nombreuses critiques en raison de la quantité de titulaires de charge publique qui auraient accès à cette information. L'éventail est trop large.
Justin Ling, qui a un bon sens de l'humour, signait un article d'opinion dans le National Post, le 4 mai 2014. Malgré le ton blagueur, l'auteur arrive de manière éloquente à nous faire comprendre que la liste des titulaires de charge publique qui auraient accès aux renseignements personnels sur les Canadiens serait d'une longueur sans précédent et comprendrait même le maire actuel de Toronto. Cet homme vit certainement une tragédie personnelle, et nous lui faisons nos meilleurs voeux de prompt rétablissement, mais, comme M. Ling l'a bien fait comprendre à ses lecteurs, nous ne souhaitons pas que les renseignements personnels des Canadiens soient accessibles à un aussi grand nombre de personnes. La liste comprendrait bien entendu le Centre de la sécurité des télécommunications Canada, le SCRS ainsi qu'un grand nombre de titulaires de charge publique de toutes sortes, y compris les maires.
Les Canadiens espèrent, de la part de l'appareil de l'État, une surveillance, une reddition de comptes et un contrôle autrement plus serrés, et non un assouplissement des critères et des conditions à remplir pour avoir accès aux renseignements personnels des Canadiens.
Il y aura certainement un débat à ce sujet. Sachant que le député qui exerce actuellement les fonctions de se défendra et nous répondra que le projet de loi ne réduit aucunement le droit à la vie privée, je voudrais qu'il nous dise alors pourquoi de nombreux commissaires à la protection de la vie privée pensent le contraire. Si le projet de loi n'empiète pas sur les libertés civiles, pourquoi les principaux organismes juridiques et les experts juridiques du pays affirment-ils qu'il y a bel et bien empiétement?
Beaucoup de députés d'en face se décrivent eux-mêmes comme des libertariens. Ils ne font pas confiance à l'État. Ils se méfient des intrusions du gouvernement dans leur vie personnelle. J'ai une question pour eux: comment peuvent-ils avoir si radicalement changé d'opinion, au point d'être désormais des apôtre de Big Brother? Je me demande bien comment nous sommes arrivés à remplacer l'État providence par l'État inquisiteur. Si le gouvernement veut obtenir ces renseignements sur les Canadiens, faut-il qu'il mette en demeure les députés qui, comme moi, veulent défendre le droit à la vie privée de choisir entre se joindre à lui « ou aux adeptes de pornographie juvénile », pour reprendre la formule employée par Vic Toews dans cette enceinte, du temps où il était ministre? Allons-nous continuer de nous faire dire que, si nous défendons le droit à la vie privée des Canadiens, nous ne sommes pas prêts à en faire assez pour mettre fin à la cyberintimidation?
Il n'est pas encore trop tard pour scinder ce projet de loi et permettre aux députés de l'opposition d'appuyer fortement les mesures qui protégeront les personnes vulnérables contre l'intimidation. De grâce, tâchons de distinguer ces mesures de celles qui donneront à Big Brother un meilleur accès aux renseignements personnels. Ce projet de loi va trop loin, et les députés d'en face le savent.
:
Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à l'étape du rapport du projet de loi .
Le projet de loi fait trois choses. Il répond au besoin de protéger les victimes contre la distribution non consensuelle d'images intimes. Je pense que nous conviendrons tous qu'il s'agit d'un excellent objectif. Cependant, nous sommes en présence d'un projet de loi omnibus qui vise également à élargir les pouvoirs de la police.
Troisièmement, outre l'élargissement des pouvoirs de la police, le projet de loi vise à assurer l'immunité aux compagnies de téléphone et aux fournisseurs de services Internet qui divulguent de façon non consensuelle, secrète, sans mandat, mais légale, des renseignements sur leurs abonnés.
Aujourd'hui, je vais parler de chacun de ces trois aspects du projet de loi, ainsi que de l'arrêt Spencer, qui a modifié considérablement le contexte juridique au pays, et de l'orientation que nous devrions prendre dans la foulée de cette décision.
Le premier aspect du projet de loi ne prête vraiment pas à controverse. Je trouve toutefois troublant que nous soyons encore en train de débattre des dispositions de cette mesure législative qui visent à protéger les victimes comme Rehtaeh Parsons et Amanda Todd. Il s'agit des dispositions qui ont pour objet de criminaliser la distribution non consensuelle d'images intimes.
Les partis de l'opposition ont proposé d'adopter rapidement ces dispositions en scindant le projet de loi. Il est donc quelque peu troublant de constater que nous discutons aujourd'hui de ce projet de loi, qui a été présenté il y a dix mois, et que ces mesures n'ont toujours pas été adoptées. Certains députés sont prêts à leur donner force de loi immédiatement.
S'il en est ainsi, c'est parce que nous sommes saisis d'un projet de loi omnibus qui prévoit notamment l'accroissement des pouvoirs policiers. Dans ce projet de loi omnibus, on reprend les dispositions sur l'espionnage électronique qui avaient été présentées par Vic Toews. Il est troublant de constater que ces dispositions ont été incluses dans un projet de loi qui vise à protéger les victimes de crimes terribles.
J'aimerais lire le témoignage que Carol Todd, la mère d'Amanda Todd, a présenté au comité le 13 mai, pour que les députés sachent ce qu'elle pense de ce projet de loi omnibus. Voici ce qu'elle a déclaré devant le comité:
Les dispositions du projet de loi C-13 visant la cyberintimidation sont nécessaires pour que mes voeux se réalisent en tant que mère d'une victime de la cyberintimidation. Tout en applaudissant vos efforts de vous tous qui avez élaboré les articles sur la sextorsion, la pornographie de vengeance et la cyberintimidation dans le projet de loi C-13, je suis inquiète d'autres dispositions qui n'ont rien à voir avec cela et qui ont été ajoutées au nom d'Amanda, de Rehtaeh et de tous les autres enfants victimes de cyberintimidation.
Je ne veux pas que nos enfants soient de nouveau victimes de persécutions dues à la perte de leur droit à la vie privée. Certaines de ces dispositions qui admettent le partage de renseignements personnels de Canadiens au mépris d'une procédure équitable m'inquiètent. Nous sommes des Canadiens qui ont des droits civils et des valeurs fortes. Il faudrait exiger un mandat pour que tout renseignement personnel d'un Canadien soit transmis à quiconque, y compris aux autorités gouvernementales.
Nous devrions également demander des comptes aux compagnies de télécommunications et aux fournisseurs de services Internet qui font mauvais usage de nos données personnelles et confidentielles. Nous ne devrions pas être obligés de choisir entre la vie privée et la sécurité. Nous ne devrions pas devoir sacrifier le droit à la vie privée de nos enfants pour mettre ceux-ci à l'abri de la cyberintimidation, de la sextorsion et de la pornographie de vengeance.
Plus tard au cours de son témoignage, elle a déclaré ceci:
En mon nom personnel, je vous demande une chose: s'il y a moyen de retirer les dispositions controversées de cette loi qui vise à aider les Canadiens à éviter la souffrance vécue par Rehtaeh et mon Amanda, j'appuierai une telle démarche. Le projet de loi ne soulèverait plus une controverse et les dispositions liées à la vie privée qui ont fait l'objet d'une vaste opposition pourraient être examinées avec sérieux et avec soin.
Je ne veux pas que l'on s'ingère dans ma vie privée. Je ne veux pas que la vie privée de jeunes gens soit exposée. Je ne veux pas que des renseignements personnels soient exploités sans qu'une ordonnance de protection appuie les personnes visées. Je ne veux pas que l'on fasse du mal à un seul Canadien au nom de ma fille. Je veux que son héritage continue de donner espoir, de souligner nos différences et d'insuffler de la force à tous les jeunes gens partout dans le monde.
C'est en ces termes que Carol Todd, la mère d'Amanda Todd, nous demande d'agir comme il se doit, d'adopter rapidement les dispositions qui portent spécifiquement sur la cyberintimidation, et de prendre le temps de bien repenser les autres éléments.
Quant aux dispositions concernant la surveillance électronique, il s'agit simplement d'un nouveau chapitre dans la longue campagne qui vise à donner aux conservateurs le rôle de Big Brother.
En 2007, Stockwell Day a lancé un processus de consultation en ligne sur la divulgation obligatoire du nom et des données des clients. Quand cela s'est su, il a promis de ne pas autoriser d'accès aux données sans mandat. Cette promesse a été bafouée en 2009, quand le gouvernement conservateur a présenté son premier projet de loi en la matière. En effet, cette première version prévoyait 13 critères qui auraient obligé un fournisseur à divulguer les données personnelles d'un abonné sans mandat. Ce projet de loi est mort au Feuilleton au moment des élections. L'actuel leader du gouvernement à la Chambre était , à l'époque.
La version suivante du projet de loi, celle de Vic Toews, contenait seulement 6 critères plutôt que 13. Nous savons tous ce qu'il est advenu de cette mesure après que M. Toews ait lancé au député de que celui-ci pouvait se joindre « à nous ou aux adeptes de la pornographie juvénile ». Les dispositions de la mesure de permettant l'espionnage électronique ont soulevé un tel tollé que le ministre de la Justice suivant a promis de ne jamais les reprendre. Malgré cette promesse, 37 des 47 dispositions du projet de loi présenté par Vic Toews se trouvent dans la mesure que nous étudions maintenant.
Pour ce projet de loi, le gouvernement a retiré les dispositions les plus révoltantes de la version de concernant la divulgation sans mandat. Il a plutôt utilisé des moyens détournés. Au lieu d'insister sur la divulgation sans mandat, il a facilité l'obtention d'une divulgation sans mandat, en octroyant l'immunité à ceux qui collaboreront avec la police. On va même un peu plus loin dans un projet de loi actuellement étudié à l'autre endroit, en élargissant les personnes qui pourraient se prévaloir de cette disposition et les circonstances où on pourrait l'appliquer.
Un témoignage entendu le 6 mai devant le comité a été très révélateur. David Fraser, d'Halifax, un expert des lois sur la protection des renseignements personnels, a commenté ainsi le fait d'octroyer une telle immunité aux compagnies de téléphones.
Il a dit ceci:
[...] j'aimerais aborder très brièvement la question de l'immunité accordée aux fournisseurs de service en vertu du projet de loi. Je crois que cela pose de graves problèmes. À mon avis, ces dispositions ont été très astucieusement rédigées. On nous dit que cela est précisé simplement pour plus de sûreté, mais les choses vont plus loin que cela. Tout ce que nous savons nous indique autre chose.
Les dispositions énoncent que la personne qui communique des données qu'aucune règle de droit ne lui interdit de communiquer bénéficie de l'immunité en matière civile. Seuls le droit pénal et d'autres dispositions réglementaires établissent des interdictions concernant la divulgation de renseignements, mais il est possible de fournir de l'information qu'aucune règle de droit ne nous interdit de fournir, mais d'être tout de même exposé à une responsabilité civile. La responsabilité civile n'a pas été instaurée sans raison — il se peut qu'aucune règle de droit ne m'interdise d'emboutir accidentellement votre voiture avec la mienne, mais si je le fais, je devrai vous verser des dommages-intérêts pour le préjudice que je vous ai causé.
Les dispositions en matière d'immunité sont hautement problématiques, car le gouvernement tente de faire indirectement ce qui lui est impossible d'effectuer directement. C'est ce que la Cour suprême a conclu récemment dans l'arrêt Spencer. Voici ce que le gouvernement avait fait valoir à la Cour suprême du Canada:
[...] une personne est-elle en droit de s'attendre à ce que ses renseignements à titre d'abonnée soient protégés? Autrement dit, devrait-on exiger que la police obtienne une autorisation judiciaire pour déterminer l'adresse physique d'une connexion Internet et le nom d'un abonné avant qu'elle ne présente une demande d'autorisation judiciaire pour procéder à une fouille de ladite adresse physique?
La réponse à ces questions doit être « non » [...].
C'est l'argument que le gouvernement a présenté et que la cour a rejeté. La cour a jugé que le droit à la vie privée s'appliquait à ce type de renseignements et qu'il y avait eu violation de la Charte. Voilà qui change le contexte, de même que le débat. Il faut scinder le projet de loi.
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Monsieur le Président, je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de participer au très important débat sur le projet de loi , Loi sur la protection des Canadiens contre la cybercriminalité.
Le projet de loi prévoit des mesures pénales vigoureuses pour lutter contre la cyberintimidation. À l'instar de l'intimidation en général, la cyberintimidation est un phénomène social complexe, et tous les groupes de la société doivent se pencher sur la question. La plupart des cas d'intimidation ne sont pas de nature criminelle, et il ne sert alors à rien de faire intervenir le système de justice pénale. Nous savons pertinemment que la portée d'Internet, la vitesse à laquelle les renseignements peuvent être échangés et l'anonymat que le Web peut conférer ont exacerbé le problème de la cyberintimidation.
Ce problème ne peut pas être réglé simplement par l'adoption de nouvelles dispositions législatives qui prévoiraient tous les cas de cyberintimidation, mais cela ne veut pas dire qu'il est impossible de renforcer le droit pénal dans ce domaine. Voilà pourquoi le projet de loi constitue une réponse ciblée qui fait fond sur l'engagement général du gouvernement de lutter contre l'intimidation et la cyberintimidation.
Si les modifications proposées au Code criminel sont adoptées, une nouvelle infraction de distribution non consensuelle d’images intimes ainsi que des dispositions connexes seraient créées. Le deuxième grand objectif du projet de loi est de fournir à la police les outils lui permettant de lutter contre tous les crimes qui sont commis sur Internet ou qui nécessitent la production de preuves électroniques.
Tous les éléments du projet de loi vont logiquement ensemble; c'est l'évidence même. Avec les outils autorisés par la loi proposée, la police sera en mesure d'enquêter de manière plus efficace et efficiente sur les cas correspondant à la nouvelle infraction et les autres actes criminels commis par l'entremise d'Internet ou faisant intervenir des éléments de preuve électroniques.
En l'absence des nouvelles ordonnances de communication et de préservation proposées dans le projet de loi , aucun outil ne serait prévu au Code criminel pour rendre la préservation obligatoire et empêcher la suppression d'éléments de preuve importants. Il n'y aurait aucun outil conçu pour la communication de sous-ensembles précis de données de surveillance et de transmission, ni pour aider à retracer les communications au moyen d'une ordonnance visant de multiples fournisseurs. Sans ces outils, la capacité des forces de l'ordre de protéger les Canadiens contre la cybercriminalité et la cyberintimidation serait gravement réduite.
J'aimerais me concentrer aujourd'hui sur une disposition précise du projet de loi , le nouveau paragraphe 487.0195(2) du Code criminel, qui prévoit l'immunité en matière civile ou pénale pour les personnes qui aident volontairement la police. En gros, ce paragraphe modifie le paragraphe 487.014(2) actuellement en vigueur, promulgué en 2004 lors de la création de l'ordonnance de communication dans le Code criminel. Le paragraphe 487.014(2) a été conçu pour préciser que les nouvelles ordonnances de communication ne visaient pas à empêcher l'assistance volontaire lorsqu'aucune règle de droit ne l'interdit ainsi que pour confirmer les principes de droit existants selon lesquels une telle assistance n'entraîne aucune responsabilité en matière civile ou pénale.
Lorsque de nouveaux pouvoirs, tels que des ordonnances de communication, sont créés dans la loi, ils supplantent parfois les pouvoirs conférés par la common law. Ce n'était pas l'intention lorsque les ordonnances de communication ont été ajoutées au Code criminel en 2004, et ce n'est pas non plus l'intention derrière la mise à jour des dispositions relatives aux ordonnances de communication et l'ajout de pouvoirs de préservation proposés dans le projet de loi .
La capacité du public d'assister volontairement la police est essentielle à l'efficacité du maintien de l'ordre et fait partie intégrante du maintien de la sécurité publique. La police peut demander des renseignements sur une base volontaire dans de nombreuses situations, y compris les activités générales de maintien de l'ordre qui ne se rapportent pas nécessairement directement à une enquête sur un acte criminel. Par exemple, elle peut demander des renseignements afin de pouvoir communiquer avec les membres de la famille en cas d'accident.
Je tiens toutefois à préciser que le projet de loi n'instaure pas de nouveau pouvoir en lien avec l'aide fournie volontairement. Il précise simplement que tout pouvoir existant reste en vigueur, à condition qu'aucune règle de droit ne l'interdise. En outre, le projet de loi n'instaure aucune immunité supplémentaire en matière civile ou pénale, il confirme simplement l'immunité existante. Cette disposition confirme simplement le principe juridique existant selon lequel une entité autorisée par la loi à remettre des données à la police est dégagée de toute responsabilité civile ou criminelle pour les actes ainsi accomplis. Si une entité n'est pas autorisée, aux termes de la loi ou d'un contrat par exemple, à divulguer des renseignements, l'immunité ne s'applique pas.
Les modifications mineures au paragraphe 487.014(2) existant, proposées dans le projet de loi , visent avant tout à rendre la disposition plus transparente et plus compréhensible en précisant que l'immunité en matière civile et pénale prévue à l'article 25 du Code criminel, lequel porte sur la protection des personnes autorisées, s'applique non seulement dans le contexte des ordonnances de communication actuelles, mais également dans le contexte des nouvelles ordonnances de communication proposées dans le projet de loi . Les modifications proposées reflètent également l'ajout d'ordres et d'ordonnances de préservation au Code criminel.
La disposition existante, passée inaperçue lorsque la loi avait été adoptée en 2004, a été vivement critiquée dans la presse et lors des audiences du comité sur le projet de loi . En effet, on a rapporté, à tort, qu'elle permet à la police d'avoir accès aux renseignements personnels sans mandat et qu'elle ouvre grand la porte aux demandes de données adressées par la police au secteur privé.
En outre, certains ont demandé l'abrogation de cette disposition à la suite de l'interprétation qui en a été faite dans l'arrêt unanime R. c. Spencer rendu par la Cour suprême du Canada en juin 2014.
J'aimerais premièrement confirmer ce que le gouvernement n'a cessé de répéter, un point de vue partagé dans l'arrêt R. c. Spencer rendu par la Cour suprême du Canada: le paragraphe 487.0195(2) proposé ne crée pas de nouveaux pouvoirs de perquisition et de saisie. Deuxièmement, l'article proposé doit être maintenu pour protéger ceux qui continuent de fournir volontairement de l'aide à la police lorsque aucune règle de droit ne le leur interdit. Ce sont ces termes qui sont utilisés dans le projet de loi proposé.
Plus explicitement, dans l'arrêt R. c. Spencer, la Cour suprême du Canada a dit, au paragraphe 73, que les dispositions en vigueur sur l'immunité et la divulgation volontaire constituaient « [...] une disposition déclaratoire qui confirme les pouvoirs de common law permettant aux policiers de formuler des questions », comme l'indique les premiers mots de son libellé « Il demeure entendu que ». La décision indique clairement que le projet de loi ne crée pas, et n'a jamais créé, de nouveaux pouvoirs permettant à la police d'avoir accès à des données de télécommunications sans mandat judiciaire.
Dans l'arrêt R. c. Spencer, la cour a élargi les protections de la vie privée associées à l'information reliée à un protocole internet, ou adresse IP, dans certaines circonstances, retirant de ce fait cette information de celle pouvant être fournie volontairement. Toutefois, le tribunal n'a pas laissé entendre que les divulgations volontaires seraient dorénavant interdites. Elle a plutôt soutenu que l'information pouvait encore être fournie volontairement dans des circonstances contraignantes ou en vertu d'une loi qui n'a rien d'abusif ou s'il n'existe pas d'attente raisonnable en matière de respect de la vie privée. Cela laisse manifestement de la place pour que de l'information puisse être fournie volontairement et divulguée sans autorisation judiciaire préalable.
Comme l'arrêt R. c. Spencer permet encore d'aider volontairement la police dans ces situations, la clarification et la protection de l'immunité prévues au paragraphe 487.014(2) actuellement en vigueur et au paragraphe 487.0195(2) qui est proposé restent nécessaires.
Le projet de loi a été étudié en profondeur par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Le comité a amendé le projet de loi afin d'exiger un examen parlementaire des articles 487.011 à 487.02 du Code criminel — c'est-à-dire les nouveaux ordres et ordonnances de préservation, le nouveau régime d'ordonnances de communication et la disposition sur les ordonnances d'assistance — sept ans après l'entrée en vigueur de ces dispositions.
Je suis d'accord avec cet amendement et je l'ai dit au comité de la justice. Compte tenu de la nature très technique de ces réformes, je crois qu'un examen parlementaire serait utile pour déterminer si les réformes ont donné les résultats souhaités. Cet amendement pourrait aussi servir à atténuer certaines craintes exprimées par des défenseurs du respect de la vie privée, puisqu'il prévoit la possibilité de se pencher sur les répercussions de la mesure législative sur la protection de la vie privée.
En résumé, le projet de loi a été amélioré lors de son étude par le comité et mérite de devenir loi dans sa forme à l'étape de la présentation du rapport à la Chambre. Je recommande à tous les députés de le permettre en l'adoptant rapidement.
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Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens aujourd'hui à propos d'une motion que j'estime être de première importance. Je suis donc d'autant plus triste de devoir exprimer mon opposition au projet de loi .
Qu'on me permette de situer un peu le contexte. D'entrée de jeu, je tiens à féliciter mon collègue le député de d'avoir présenté le projet de loi , en 2013, dans la foulée des tragiques décès d'Amanda Todd et d'autres victimes de cyberintimidation, dont Rehtaeh Parsons, qui ont bouleversé le pays entier. Je dirais que l'émotion des Canadiens était palpable. Partout au pays — sur la côte Ouest, dans les Prairies et sur la côte Est — les familles canadiennes ont partagé la douleur des familles endeuillées.
Le projet de loi de mon collègue était plutôt raisonnable. Comme le savent les députés, les conservateurs ont alors eux aussi présenté un projet de loi à ce sujet, le projet de loi , par l'intermédiaire du ministre de l'époque, qui ne siège plus dans cette enceinte. Or, ce projet de loi a suscité un tollé sans précédent, surtout dans les médias sociaux. C'est celui qu'on avait surnommé, rappelons-nous, le projet de loi sur la protection des enfants contre les cyberprédateurs. Or, la réaction négative non seulement du NPD, mais aussi des défenseurs de la vie privée et de la population relativement à sa teneur a obligé le Parti conservateur à faire marche arrière.
Je me souviens des belles paroles tenues par le gouvernement lorsqu'il a décidé de retirer ce projet de loi malavisé qui représentait une atteinte absolue à la vie privée. J'ai moi-même entendu les ministériels s'engager à ce que toute tentative de moderniser le Code criminel ne prévoit pas les mesures contenues dans le projet de loi . Pourtant, nous nous retrouvons aujourd'hui avec le projet de loi .
L'opposition officielle appuie de bon coeur certaines dispositions de ce projet de loi. À maintes occasions, nous avons suggéré au gouvernement de le scinder s'il a sérieusement l'intention d'agir contre la cyberintimidation. Nous lui avons offert d'accélérer l'adoption du projet de loi par la Chambre. La loi serait déjà en vigueur.
Pourtant, je vois encore le parti d'en face jouer avec une question très sensible. Il nous sert un projet de loi contenant de bonnes dispositions que nous souhaitons appuyer, mais il insère sciemment dans ce même projet de loi d'autres dispositions qui feront en sorte qu'il nous sera difficile de l'appuyer.
Le NPD ne craint jamais de se retrousser les manches lorsque vient le temps de débattre des enjeux ans cette enceinte. Il profite de tout le temps qui lui est accordé et intervient même régulièrement à la place du gouvernement, étant donné que celui-ci ne prend pas toujours la parole quand il en aurait le droit, y compris pendant les délibérations des comités. Pour que ce projet de loi soit acceptable et puisse être adopté par la Chambre, l'opposition a proposé 37 amendements, qui étaient tous raisonnables et auraient introduit un certain équilibre dans le projet de loi.
Il est choquant de constater que le gouvernement a constamment recours au même procédé dans ses projets de loi. Ce qu'il nous propose est à prendre ou à laisser. Il a rejeté toutes les propositions d'amendement.
L'Association du Barreau canadien est venue témoigner, elle aussi. Il ne s'agit pas d'un groupe radical, mais bien d'avocats. Elle a exprimé les mêmes objections que le NPD et que d'autres témoins. Ses représentants ont proposé d'apporter 19 amendements au projet de loi, mais aucun n'a été pris en considération.
Une fois de plus, les conservateurs essaient d'enfouir, dans un projet de loi, des dispositions conformes à la doctrine qu'ils souhaitent appliquer. À l'inverse, ils refusent d'étudier des projets de loi qui seraient absolument nécessaires.
Toute ma vie, j'ai travaillé comme enseignante. Je suis également mère de famille et grand-mère. Le monde a changé, et nos enfants passent beaucoup de temps sur Internet ou à se servir de leur téléphone cellulaire, quoique les adultes soient nombreux, eux aussi, à avoir le même comportement. Ils socialisent différemment.
Nous devons tâcher de moderniser notre conception de l'intimidation. Il ne s'agit plus uniquement d'un comportement observable dans les terrains de jeu, où des enfants se font intimider physiquement ou verbalement, en personne. La cyberintimidation peut se faire avec un certain degré d'anonymat. Nous avons pu constater les résultats tragiques de ce genre d'intimidation. Nous avons vu ses répercussions sur des jeunes.
Je suis navrée de parler contre un projet de loi qui comporte un élément que j'appuie. J'exhorte mes collègues d'en face à songer au fait que la composante du projet de loi portant sur la cyberintimidation pourrait être inscrite dans la loi rapidement. Il faut abandonner la position idéologique selon laquelle on ne peut pas adopter un projet de loi simple qui vise un seul problème sans y adjoindre une foule d'autres mesures visant à faire valoir son idéologie. Plus tard, cela donnera aussi aux députés d'en face l'occasion de dire que le NPD a voté contre ces mesures.
C'est vrai.
Oui, monsieur le Président, c'est vrai. J'ai entendu mes collègues le dire. Je me demande si c'est cela qui motive les députés d'en face lors de l'élaboration d'un projet de loi. Au lieu de s'attaquer à un problème comme la cyberintimidation et la protection des enfants, ils encombrent leurs projets de loi d'autres mesures juste pour pouvoir faire des déclarations politiques plus tard.
Encore une fois, dans ce projet de loi, les conservateurs essaient de cacher des aspects controversés de leur projet de loi raté sur l'espionnage électronique, et ils retardent l'adoption d'un projet de loi important qui protégerait les enfants. Il est temps d'arrêter ce petit jeu. Attaquons-nous au vrai problème.
Je ne suis pas la seule à le dire. C'est un sujet très émouvant pour moi. J'aimerais citer la mère d'Amanda Todd, Carol Todd:
Je ne veux pas que l'on s'ingère dans ma vie privée. Je ne veux pas que la vie privée de jeunes gens soit exposée. Je ne veux pas que des renseignements personnels soient exploités sans qu'une ordonnance de protection appuie les personnes visées. Je ne veux pas que l'on fasse du mal à un seul Canadien au nom de ma fille. Je veux que son héritage continue de donner espoir, de souligner nos différences et d'insuffler de la force à tous les jeunes gens partout dans le monde.
Je prie mon collègue d'en face de prendre la bonne décision en scindant le projet de loi pour que nous puissions aller de l'avant.
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Monsieur le Président, je suis contente de me lever à la Chambre pour la deuxième fois, afin de parler du projet de loi , qui porte sur la cyberintimidation.
Lorsque le gouvernement a fait l'annonce du projet de loi , visant à combattre la cyberintimidation, tout le monde a pensé que c'était une bonne idée. Enfin, le gouvernement avait peut-être une bonne idée! Tous les gens ici présent savent à quel point l'intimidation fait des ravages chez les jeunes. Les gens qui travaillent sur le terrain, les psychoéducateurs qui oeuvrent dans les écoles secondaires, les travailleurs de rue et tous ceux qui travaillent avec les jeunes savent à quel point l'intimidation peut briser des vies, des personnes ou des familles. Par exemple, certains cas ont été médiatisés, notamment celui de la jeune Rehtaeh Parsons. On sait jusqu'où peut malheureusement mener l'intimidation; elle peut mener jusqu'au suicide. À la Chambre, personne ne peut dire qu'il ne faut pas s'attaquer à quelque chose d'aussi important que l'intimidation.
Dans le premier discours que j'ai prononcé au sujet du projet de loi , j'ai mis l'accent sur la nécessité d'agir sur le terrain. Je peux d'ailleurs faire un parallèle avec le discours que j'ai justement prononcé ce matin au sujet du projet de loi . Les conservateurs utilisent souvent la justice en pensant pouvoir régler tous les problèmes inhérents à une situation donnée. Par exemple, dans le cas de la prostitution, les problèmes inhérents sont la pauvreté, l'exclusion ou la maladie mentale. C'est la même chose dans le cas de l'intimidation. Les facteurs inhérents à l'intimidation ne peuvent être réglés au moyen de la criminalisation.
Les dispositions du projet de loi , qui vise à criminaliser la distribution d'images intimes, sont un bon début. Cela rejoint justement le projet de loi de mon collègue de , qui vise à prévenir le genre de situations qui ont malheureusement mené au suicide plusieurs jeunes canadiens et canadiennes au cours des dernières années.
Lorsque l'on étudie le projet de loi un peu plus en profondeur, on réalise qu'il fait référence à divers sujets, allant de la cyberintimidation au terrorisme, en passant par les données financières bancaires, le télémarketing et le vol de service de télécommunication.
La majorité de ces dispositions ont peu de lien avec la cyberintimidation ou n'en ont pas du tout. Le projet de loi s'apparente à l'ancien projet de loi des conservateurs, qui visait justement à donner des pouvoirs d'accès aux données personnelles des Canadiens.
Le secrétaire parlementaire disait qu'on avait tenu un très long débat et qu'on avait fait l'étude en profondeur lors de l'étude en comité. Tout cela est merveilleux, sauf que tous les experts s'entendent pour dire que l'étude du projet de loi aurait dû être plus approfondie en ce qui a trait aux dispositions relevant de l'accès à l'information. C'est la raison pour laquelle nous avons demandé que le projet de loi soit divisé. Malheureusement, vu le manque de temps, les dispositions concernant la cyberintimidation n'ont pas du tout été étudiées, ou elles ne l'ont presque pas été. L'accent a été mis sur l'accès à l'information.
Il s'agit d'un sujet très important pour nos jeunes, et je trouve extrêmement dommage que le débat concerne strictement l'accès à l'information. Cela ne concerne ni les jeunes de nos écoles ni la jeune fille qui se fait intimider par des collègues de classe ou qui reçoit des messages Facebook haineux.
L'accès à l'information ne touchera jamais cette jeune fille, ou peut-être que ce sera malheureusement le cas, si le gouvernement veut avoir accès à ses données privées, ce qui serait très dommage. Cela ne va pas aider en ce moment les jeunes qui ont besoin que leur gouvernement agisse pour eux.
Plusieurs experts ont justement mentionné que le projet de loi , conjugué au projet de loi , pourrait justement avoir des répercussions extrêmement importantes sur l'accès à nos données privées, notamment sans mandat.
J'ai aussi posé plusieurs questions relativement à un mécanisme de surveillance. J'aimerais d'ailleurs préciser que les conservateurs ont refusé d'adopter un tel mécanisme. Ma collègue de a présenté un amendement pour que le ministère ait l'obligation de rendre compte au Parlement de l'utilisation de ce genre de pouvoir. J'aimerais souligner que l'article 184.4 du Code criminel a déjà été invalidé par le Cour suprême, non pas parce que le mécanisme permettait le partage de l'information obtenue sans mandat, mais plutôt parce que l'application de cet article ne prévoyait aucun mécanisme de surveillance ni de mécanisme de notification. Par conséquent, selon la Cour suprême, les gens mis sous écoute avaient leurs droits intrinsèquement violés parce qu'ils ne le savaient jamais. Au bout du compte, en n'ayant aucun mécanisme de surveillance, on donne aux policiers et au gouvernement, un pouvoir sans reddition de comptes. On s'entend alors qu'on donne un pouvoir quasi absolu au ministre et aux policiers d'avoir accès aux données des Canadiens.
La Cour suprême a été claire à ce sujet. J'exclus de mes commentaires le récent arrêt Spencer de la Cour suprême qui vient encore réitérer que les compagnies de télécommunications n'ont pas le droit de communiquer sans mandat les données personnelles des Canadiens. C'est une violation, et c'est inconstitutionnel parce qu'il n'y a pas de mécanisme de surveillance.
J'ai fait une comparaison avec l'article 188 qui n'a pas été invalidé par la Cour suprême. En effet, cet article contient la possibilité d'avoir accès à de l'écoute électronique sans mandat, sauf que cet article prévoit un tel mécanisme de surveillance. Le ministère a donc l'obligation de rendre des comptes au Parlement sur l'écoute électronique ou téléphonique sans mandat.
Selon la Cour suprême, il est clair que c'est inconstitutionnel. Malheureusement et c'est dommage, les conservateurs ont refusé d'adopter nos amendements sur la création d'un tel mécanisme de reddition de comptes. Déjà là, on voit qu'une partie du projet de loi se retrouvera probablement devant les tribunaux et contestée, ou même jugée inconstitutionnelle.
Quelles seront les premières victimes de cette contestation? Ma collègue de l'a répété à maintes reprises. Les premières victimes de l'incompétence conservatrice à rédiger des projets de loi et à faire de bons examens, ce sont les victimes d'intimidation. Les premières victimes ne seront ni les parlementaires, ni les avocats, ni les juges. Non, les premières victimes seront les victimes d'intimidation qui, malheureusement, devront attendre une contestation judiciaire — qui peut prendre des années, qui peut se rendre jusqu'à la Cour suprême — avant d'obtenir justice.
J'aimerais notamment pointer du doigt le fait que lorsque le a fait sa conférence de presse, il a dit que le projet de loi ne venait que légiférer sur un sujet spécifique, à savoir la cyberintimidation. Je pourrais faire référence à plusieurs articles qui le citent, disant que ce n'était pas un projet de loi omnibus et que son seul but était de légiférer en matière de cyberintimidation.
Dans le projet de loi, on retrouve par contre un article qui donne non seulement accès à ce genre de pouvoirs aux agents de la paix, mais aussi aux fonctionnaires publics. Plusieurs experts se sont alors demandés qui allaient avoir accès à ce genre de pouvoirs? Qui allait avoir accès aux données des Canadiens? Est-ce que ce sont seulement les policiers, dans des situations spécifiques, ou est-ce que ce sera les fonctionnaires publics de Revenu Canada dans d'autres situations?
Ce projet de loi est tellement mal rédigé, que malheureusement les premières victimes qui ne pourront pas obtenir justice seront victimes d'intimidation. Le gouvernement conservateur veut-il vraiment cela?
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Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui sur le projet de loi qui a déjà été discuté pendant trois heures aujourd'hui et qui revient de l'étude au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
Un travail de longue haleine s'est fait sur ce projet de loi. Je pense notamment aux plusieurs témoins qui ont été entendus. Je suis content de savoir que du bon travail qui s'est fait dans ce comité.
Par contre, le résultat de ce travail n'est peut-être pas celui auquel on s'attendait de notre côté. Malheureusement, il n'y a pas eu de modifications assez intéressantes pour que, de notre côté, on puisse appuyer ce projet de loi à l'étape du rapport.
Je dois d'abord dire que ce projet de loi peut être assez touchant pour certaines personnes. Il peut toucher de près et peut être un sujet sensible pour certaines personnes parce qu'il y est question d'intimidation et on y parle souvent d'histoires touchantes et malheureuses qu'on a vécues et qui ont été discutées dans les médias. Il est essentiel de rappeler l'importance du travail qu'on fait en tant que parlementaires pour essayer de régler cette situation malheureuse qui mène parfois à des conclusions tragiques. L'intimidation est un problème de notre société qui a évolué au cours des dernières décennies. Évidemment, l'Internet est un des éléments qui ont changé le problème de l'intimidation parce qu'il est de plus en plus facile d'intimider en ligne puisque, aujourd'hui, on a accès à Internet si facilement avec nos téléphones cellulaires et nos ordinateurs.
Ce problème a évolué, et il est devenu très important pour nos jeunes, d'une part, mais aussi pour les adultes, d'autre part. En tant que parlementaires, nous devons discuter de ce problème et nous devons essayer de le régler, même si cela ne se fait pas de façon magique. Il faut tenir compte des causes inhérentes. Ma collègue de parle souvent des causes inhérentes. Il ne faut pas, non plus, penser que le fait de créer un acte criminel dans le Code criminel va régler le problème et que tout à coup plus personne ne va faire d'intimidation. Ce n'est jamais simple comme cela. Il est donc important qu'on en discute et qu'on discute d'autres façons de régler ce problème.
Nous avons aussi été un peu déçus du processus qui a mené à l'élaboration de ce projet de loi. On se souvient que le projet de loi avait aussi été présenté lors de la première session de cette 41e législature et qu'il avait été largement contesté par la société civile et par les différents partis politiques. Il est malheureux qu'on retrouve dans le projet de loi une partie de ce qui avait été largement rejeté dans le projet de loi C-30, c'est-à-dire toutes les portions concernant la surveillance électronique des Canadiens.
Mon impression est qu'on utilise le projet de loi et l'enjeu de l'intimidation, qui est un enjeu très important et sensible, pour venir intégrer certaines portions du projet de loi qui avait été largement contesté, comme je l'ai dit. Il avait d'ailleurs été abandonné par les conservateurs après le tollé qui avait suivi son dépôt. Il est dommage qu'on ait utilisé cette tactique et qu'on ait tenté de faire indirectement ce qu'on avait pourtant promis de ne pas faire et qu'on avait mis de côté. Il est dommage que cela se retrouve aujourd'hui dans le projet de loi .
On aurait pu régler rapidement cet enjeu, ou plus rapidement, à tout le moins. Je ne pense pas qu'on puisse régler le problème de l'intimidation du jour au lendemain. Toutefois, on aurait au moins pu aller dans la bonne direction.
Mon collègue de avait présenté un projet de loi intéressant. Malheureusement, il n'a pas reçu l'appui des conservateurs. Pourtant, une partie de son projet de loi se retrouve dans le projet de loi actuel des conservateurs. C'est un peu curieux.
Si je comprends bien, le semble avoir une certaine explication, selon laquelle il est bien beau de créer un acte criminel dans le Code criminel, mais il est aussi important de donner les pouvoirs d'enquête aux forces de l'ordre, soit aux policiers.
Je ne me souviens pas exactement à quel étape du processus lors de l'étude du projet de loi cela s'est passé — c'était peut-être le jour suivant son dépôt —, toutefois, entre-temps, l'arrêt dans la cause Spencer venait clarifier certaines choses. Malheureusement, le projet de loi est resté tel quel, à la lumière de cet arrêt, qui venait définir les limites qu'on peut poser à la surveillance électronique et à la divulgation par les fournisseurs de services Internet concernant le partage des données personnelles des Canadiens.
À mon avis, on aurait dû se conformer à l'arrêt dans la cause Spencer, mais ça n'a malheureusement pas été le cas. C'est la principale raison qui fait que nous nous opposons à ce projet de loi.
Je me permets de clarifier l'arrêt dans l'affaire Spencer rendu par la cour, qui concerne plus particulièrement le partage d'informations par les fournisseurs. Cet arrêt établissait clairement que les Canadiens avaient droit à l'anonymat sur Internet et que la police devait obtenir un mandat afin de retrouver les identités des internautes.
Par contre, le projet de loi crée un nouveau régime qui permet d'accéder à des renseignements personnels avec ou sans mandat. On vient ainsi ouvrir la porte à l'obtention de renseignements personnels sans mandat, alors que l'arrêt dans la cause Spencer a dit le contraire. Il précisait plutôt qu'un mandat était absolument nécessaire pour aller recueillir de l'information personnelle qu'on peut retrouver sur Internet sur un citoyen canadien.
Les fournisseurs de services Internet y ont accès. Ils peuvent trouver cette information et en faire part aux forces de l'ordre pour mener des enquêtes dans des dossiers d'intimidation, entre autres. L'arrêt dans la cause Spencer venait encadrer les limites de la possibilité d'aller chercher l'information en exigeant un mandat. Pourtant, le projet de loi ouvre la porte à l'obtention de renseignements personnels sans mandat.
En outre, cela se produit dans un contexte où on a de plus en plus de craintes par rapport à la surveillance électronique, car le gouvernement surveille de plus en plus nos faits et gestes. Il n'y a pas si longtemps, on voyait des groupes tenir des réunions pacifiques pour parler d'un enjeu ou se rencontrer dans la rue pour manifester. On sait que le gouvernement, avec ses milliers d'employés qui surveillent les Canadiens, allait surveiller ce que ces groupes faisaient dans des réunions tout à fait pacifiques ou des manifestations qui ne laissaient aucunement croire à la possibilité qu'il y avait un danger pour la sécurité du Canada.
Cela survient dans un contexte où on sent que le gouvernement a de plus en plus d'informations sur les citoyens. On doit aussi clarifier de plus en plus les limites de cette obtention de renseignements, de même que le droit des Canadiens à une vie privée.
Je serai heureux de répondre aux questions de mes collègues.
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Monsieur le Président, je suis heureux, dans une certaine mesure, de participer au débat à ce moment-ci, c'est-à-dire à l'étape du rapport.
Pour commencer, je tiens à féliciter mes collègues, notre porte-parole en matière de justice et les autres membres du comité de la justice et des droits de la personne, qui ont travaillé très fort à l'étude du projet de loi et qui ont présenté 37 amendements à l'étape de l'étude en comité pour essayer d'éliminer les parties les plus contentieuses de ce projet de loi afin que, par exemple, sa constitutionnalité ne soit pas indéfiniment contestée devant les tribunaux. Je sais qu'il leur a fallu beaucoup de temps et d'énergie, et de patience aussi, pour accomplir ce travail. Je veux qu'ils sachent à quel point je leur en suis reconnaissant.
Je tiens aussi à rappeler aux députés que le 17 octobre, il y a 11 mois, j'ai invoqué le Règlement pour exprimer certaines préoccupations relativement à mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi , qui criminalisait la distribution d'images intimes sans consentement. En dépit des déclarations du gouvernement dans le discours du Trône et de celles du ministre de la Justice de l'époque, qui disait appuyer le projet de loi en principe, je craignais que la mesure ne soit inscrite dans un gros projet de loi, un projet de loi controversé, et que son adoption ne soit retardée ou qu'elle n'ait pas lieu.
À ce moment-là, j'ai demandé le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi soit réputé avoir été lu pour la deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Je l'ai fait parce que tous les députés à la Chambre, les députés de tous les partis, ont dit qu'ils étaient favorables à l'idée d'obliger les gens à rendre des comptes et de modifier le Code criminel pour garantir que la distribution non-consensuelle d’images intimes soit considérée comme un crime et que les gens soient tenus responsables de tels actes. J'ai ensuite proposé une motion visant à renvoyer le tout au comité sans délai. C'est une situation grave qui a des répercussions sur les familles et sur la vie de certaines personnes à l'échelle du pays. Il faut s'y attarder dès maintenant. Nous avons la volonté de faire quelque chose. Il faut maintenant trouver le moyen d'agir.
Malheureusement, le gouvernement a rejeté cette idée.
C'est intéressant. Le gouvernement a ensuite présenté le projet de loi . Au départ, il abordait le même problème que le projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai présenté, mais un peu plus en profondeur, bien entendu. Cela dit, le gouvernement a ensuite fait exactement ce que je craignais et ce que beaucoup de députés craignaient. Il a repris un grand nombre d'éléments qui figuraient dans le projet de loi , qu'il avait dû retirer deux ans plus tôt parce qu'il avait été rejeté en bloc par les spécialistes de la protection des renseignements personnels et d'autres spécialistes partout au pays. Le gouvernement a jumelé ces éléments au projet de loi sur la cyberintimidation.
Lorsque le gouvernement a présenté le projet de loi, il était accompagné de parents de personnes qui se sont suicidées, qui se sont enlevé la vie à cause de la cyberintimidation, et il a déclaré son intention de s'attaquer à ce problème. Il n'a pas parlé des autres éléments du projet de loi.
Bien entendu, les familles et les défenseurs des droits des victimes de toutes les régions du pays espéraient vivement que le gouvernement aille de l'avant à cet égard. Ô surprise, comme c'est trop souvent le cas sous la direction des conservateurs, nous avons dû nous engager dans un débat très controversé. Nous en avons appris davantage sur le contenu réel du projet de loi, et les défenseurs des droits des victimes et les spécialistes de la protection de la vie privée partout au pays ont commencé à exprimer des préoccupations.
Même la mère d'une victime, qui était aux côtés du ministre lors de la présentation du projet de loi, a déclaré devant le comité que, bien qu'elle souhaite voir le Code criminel modifié de sorte que la distribution non consensuelle d'images intimes devienne une infraction criminelle assortie de conséquences, elle ne peut pas tolérer les éléments inacceptables de cette mesure, qui permettraient aux autorités de faire fi de la vie privée et d'avoir plus facilement accès aux données privées sur Internet.
Comme l'a expliqué la Cour suprême, dans la récente affaire Spencer, la Cour devait déterminer s'il fallait empêcher les fournisseurs de services Internet de divulguer le nom et l'adresse des clients. Elle a déclaré que les Canadiens avaient le droit de conserver leur anonymat sur Internet.
La mesure que nous étudions actuellement vise supposément à réduire la souffrance et la détresse des familles dont un membre a été victime d'une cyberintimidation sans pitié sur Internet. C'est ainsi que cette mesure a été présentée mais elle a, en fait, une portée beaucoup plus vaste.
J'ai parlé à un autre parent aujourd'hui. Je lui ai expliqué comment les choses se déroulaient et j'ai parlé des inquiétudes que nous inspire ce projet de loi. J'ai précisé que le NPD ne l'appuierait pas.
Il le savait déjà, à la lumière du travail que nous avons accompli par le passé, du soutien que j'ai offert, des démarches que nous avons menées avec d'autres personnes pour sensibiliser les gens à ce fléau qu'est le suicide des jeunes et tenter d'en venir à bout. Il est conscient de mon engagement. Il est troublé, lui aussi, par les dispositions qui vont à l'encontre de la protection de la vie privée. Je ne dirais pas qu'il m'a donné carte blanche, mais il comprend mes préoccupations. Il apprécie les efforts que j'ai déployés et que je déploie encore, de concert avec lui et d'autres personnes, pour régler ce problème.
Quoi qu'il en soit, nous sommes ici aujourd'hui. J'ai présenté ce projet de loi d'initiative parlementaire il y a un an et demi. Le problème a donc continué pendant cette année et demie; nous ne nous y sommes pas encore attaqués vraiment.
Je trouve parfois décourageant de voir qu'il semble impossible de faire avancer les choses à la Chambre sans créer toutes sortes de controverses, de rancunes, d'amertume et de conflits.
En ce moment même, alors que nous débattons, des citoyens travaillent à sensibiliser nos communautés aux méfaits de la cyberintimidation. Ils trouvent des façons de repérer les situations dans lesquelles les jeunes ou d'autres personnes commencent à se sentir dépressifs ou à penser au suicide.
L'un des parents à qui j'ai parlé est en train de traverser le pays pour rencontrer de jeunes étudiants du secondaire. Pour lui, la chose la plus gratifiante est de voir ces jeunes âgés de 12 ou 13 ans lui dire qu'ils reconnaissent l'existence du problème et ce qu'ils font pour le régler. Les étudiants lui parlent des mesures qu'ils prennent, parce qu'ils sont conscients du problème.
Voilà ce qui se passe dans les collectivités partout au pays. Les gens se rendent compte qu'ils doivent intervenir, parce que, malheureusement, les gouvernements ne sont pas à la hauteur de la tâche.
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Monsieur le Président, je prends la parole pour m'opposer au projet de loi , ce qui est dommage.
Comme bien des députés, j'avais de grands espoirs lorsque la Chambre a été saisie pour la première fois de la question de la cyberintimidation. Je souhaitais qu'on reconnaisse l'urgence des mesures à prendre pour contrer ce problème et qu'on tienne compte du risque de suicides, surtout lorsqu'on connaît les malheureux exemples de Rehtaeh Parsons, en Nouvelle-Écosse, et d'Amanda Todd, en Colombie-Britannique, qui se sont donné la mort.
En fait, nous avons réagi assez rapidement. Le député de a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire en juin 2013. Ce simple projet de loi ne comportait rien de superflu. Il aurait érigé en infraction le fait de produire ou de distribuer des images intimes d'une personne sans son consentement.
Hélas, malgré les efforts déployés pour que les députés adoptent le projet de loi à l'unanimité, le gouvernement a déclaré qu'il voulait étudier plus longtemps la question et réfléchir davantage à ce qu'il voulait présenter dans un projet de loi d'initiative ministériel. Lorsque le gouvernement conservateur a finalement présenté un projet de loi à la Chambre en novembre 2013, c'est-à-dire il y a presque un an, la portée de celui-ci était, comme d'habitude, beaucoup plus vaste que nécessaire. Ce projet de loi englobe bien des questions ayant fort peu à voir avec la cyberintimidation, voire rien du tout, notamment des restrictions sur le télémarketing et le vol de services de télécommunication, des dispositions sur le financement des activités terroristes et d'autres sur la divulgation de données par les institutions financières.
Nous sommes saisis d'un projet de loi dont la portée est beaucoup plus vaste, et qui reprend de nombreux aspects de l'ancien projet de loi C-30 des conservateurs, que l'opinion publique et les défenseurs du droit à la vie privée ont rejeté en bloc.
Moi qui ai travaillé en étroite collaboration avec le système de justice pénale pendant plus de deux décennies, je peux dire que j'ai de très sérieuses réserves quant à la volonté du gouvernement, toujours présente dans le projet de loi , d'élargir l'accès aux renseignements personnels, que ce soit avec ou sans mandat.
Le nivellement par le bas des nouvelles normes qui s'appliqueraient à l'obtention d'un mandat en vue de recueillir des renseignements personnels m'inquiète beaucoup. À mon sens, il n'est pas du tout justifié d'abaisser les critères en les faisant passer des « motifs raisonnables de croire » à une nouvelle catégorie concernant des soupçons raisonnables. Bien entendu, c'est pour cette raison que nous avons proposé un amendement visant à supprimer totalement cette disposition du projet de loi.
En fait, je crois que, malgré les discours que nous avons entendus de la part du , l'arrêt Spencer rendu cet été remet en question la constitutionnalité de plusieurs dispositions du projet de loi . Il s'agit d'une décision importante, qui empêche les fournisseurs de services Internet de divulguer volontairement aux autorités le nom, l'adresse et le numéro de téléphone de clients.
Chose inquiétante, le projet de loi aurait aussi pour effet de créer une nouvelle catégorie de personnes autorisées à avoir accès à nos renseignements personnels. On est passé d'un concept bien défini en droit, soit celui des agents de la paix — et nous savons de qui il s'agit —, à un nouveau concept flou, soit celui des « fonctionnaires publics ». S'agit-il des agents du fisc? Qu'entend-on exactement par « fonctionnaires publics »?
Lors des travaux du comité, nous avons proposé 37 amendements distincts dans le but de réduire la portée du projet de loi. Comme mon collègue, le député de , l'a dit avec éloquence tout à l'heure, nous tentions d'éviter que le projet de loi, une fois adopté, soit constamment contesté devant les tribunaux. Malheureusement, aucun de ces amendements n'a été adopté, et je ne crois pas non plus qu'ils le seront à l'étape du rapport.
J'aimerais revenir à l'une des dispositions qui, étonnamment, se trouvent dans le projet de loi . Je suis d'ailleurs très heureux que ce soit le cas. Pour une raison que j'ignore, le gouvernement a décidé de rouvrir les dispositions du Code criminel sur les crimes haineux à l'article 12 du projet de loi C-13. On peut y voir un lien avec la cyberintimidation et le fait que celle-ci peut prendre la forme de crimes haineux.
Je pense que c'était peut-être là l'objectif visé. Quoi qu'il en soit, j'ai été très étonné de constater que le gouvernement avait ajouté à la liste des groupes identifiables à protéger toute section du public qui se différencie des autres par l'origine nationale, le sexe, l'âge ou la déficience mentale ou physique. Il n'a cependant pas jugé bon d'ajouter l'identité de genre.
Pourtant, le 20 mars 2013, à 149 contre 137, la Chambre des communes avait accepté, lors d'un vote sur mon projet de loi d'initiative parlementaire, le , et avec l'appui de tous les partis, d'ajouter l'identité de genre à la liste des groupes protégés. Par conséquent, le gouvernement a choisi délibérément de ne pas inclure dans la liste des nouveaux motifs de protection un élément sur lequel l'ensemble de la Chambre s'était pourtant entendu.
C'est pourquoi plus tôt aujourd'hui j'ai proposé un amendement à l'article 12, le même que j'avais déjà soumis au comité de la justice. J'avais bon espoir que nous serions autorisés à examiner ce projet de loi à nouveau. J'ai proposé l'amendement à l'étape du comité afin que nous puissions corriger ce qui, selon moi, constituait une erreur dans le texte du projet de loi . Il aurait dû inclure l'identité sexuelle, précisément pour la raison que j'ai mentionnée, c'est-à-dire que nous nous étions déjà prononcés sur cette disposition à la Chambre des communes.
J'avais bon espoir à l'étape du comité. Après tout, deux députés sur cinq siégeant au comité de la justice avaient voté pour mon projet de loi d'initiative parlementaire. Par conséquent, je m'attendais, lorsque j'ai proposé l'amendement, à ce qu'il soit adopté au comité par un vote de six voix contre trois, parce que les députés avaient voté ainsi pour la même disposition figurant dans le projet de loi . Toutefois, au dernier moment, un député conservateur a changé son vote, et un autre député a été remplacé. Mon amendement a donc été rejeté par cinq voix contre quatre.
C'est pourquoi j'ai à nouveau inscrit mon amendement au Feuilleton et j'ai demandé au Président de prendre la décision inhabituelle de soumettre de nouveau l'amendement à la Chambre. Le Président a jugé que l'amendement ne satisfaisait pas au critère énoncé dans nos règles, qui aurait permis que l'amendement soit soumis à la Chambre dans le cadre du présent débat.
Le problème, ce n'est évidemment pas la décision de la Présidence, mais bien le fait pour le gouvernement, alors qu'il avait toujours professé sa neutralité relativement aux dispositions de mon projet de loi d'initiative parlementaire, d'avoir trouvé le moyen de se servir d'un projet de loi d'initiative ministérielle pour défaire la décision prise antérieurement par la Chambre, dans le cadre du débat sur le projet de loi , de protéger les Canadiens transgenres contre les crimes motivés par la haine. Voilà qui témoigne d'un manque de respect flagrant pour la volonté exprimée par la majorité des députés. Lorsqu'il est question de respecter les droits des Canadiens transgenres, il s'avère donc que le gouvernement n'est pas aussi neutre qu'il l'affirme, ce qui explique peut-être ce qui s'est produit avec la mesure législative dont il aurait pu être question aujourd'hui, le projet de loi C-279, qui se trouve actuellement au Sénat.
Ce qui nous amène à l'autre problème auquel on se heurte lorsqu'on cherche à protéger les Canadiens transgenres contre les crimes haineux: le Sénat. En effet, le projet de loi a déjà été soumis à deux reprises au Sénat. La première fois, c'était au printemps 2011. La Chambre l'avait approuvé, puis renvoyé au Sénat, mais celui-ci n'avait pas encore levé le petit doigt lorsque les élections ont été déclenchées. Le projet de loi est donc mort au Feuilleton du Sénat.
Comme je l'ai dit un peu avant, la Chambre des communes a adopté le projet de loi il y a un an et demi, le 20 mars 2013. Il y a un an et demi qu'il languit au Sénat. Je sais que le Sénat ne siège que trois jours par semaine, mais ça laisse tout de même bien assez de jours de séance pour traiter ce dossier. Justement, le projet de loi a été adopté à l'étape de la deuxième lecture en 2013. Autrement dit, il a été approuvé en principe. Alors je récapitule: la Chambre des communes a admis l'utilité du projet de loi, et le Sénat, en principe, en a convenu. Le projet de loi C-279 a donc été renvoyé au comité des droits de la personne, qui a tenu des audiences et l'a approuvé sans proposition d'amendement avant de le renvoyer au Sénat, sauf qu'il n'y a jamais eu de troisième lecture et de mise aux voix. La session a été prorogée, et il a fallu tout reprendre du début.
Encore une fois, la supposée neutralité du gouvernement relativement à la protection des Canadiens transgenres contre les crimes haineux est remise en question. Le projet de loi aurait pu être étudié rapidement au Sénat, et il avait déjà franchi toutes les étapes là-bas. Il aurait pu être renvoyé au comité des droits de la personne, ce qui aurait été plus simple encore, puis renvoyé prestement au Sénat, puisque ce comité avait déjà tenu des audiences sur ce projet de loi et en avait déjà terminé l'étude. Mais les têtes dirigeantes du gouvernement au Sénat ont décidé de confier le projet de loi à un autre comité, celui des affaires juridiques et constitutionnelles. Voilà un choix intéressant. Ce comité doit alors tenir de nouvelles audiences et, de surcroît, il s'agit du comité sénatorial le plus occupé, compte tenu du programme du gouvernement en matière de lutte contre la criminalité. Par conséquent, ce comité devra se pencher auparavant sur des projets de loi comme celui qui nous est soumis aujourd'hui, le projet de loi , le projet de loi , concernant les services sexuels, et le projet de loi , sur les centres d'injection supervisée. Le comité devra étudier tous ces projets de loi avant de commencer l'étude du moindre projet de loi d'initiative parlementaire.
Faut-il le répéter, le gouvernement se drape dans une prétendue neutralité qui a l'air factice lorsqu'on sait que ce sont les têtes dirigeantes du gouvernement au Sénat qui décident du parcours et du calendrier de l'étude du projet de loi. Le gouvernement a de plus en plus l'air de vouloir faire mourir le projet de loi au Feuilleton du Sénat, encore une fois.
Le dernier obstacle empêchant les Canadiens transgenres de bénéficier de la protection nécessaire contre les crimes haineux, et la véritable raison pour laquelle l'identité sexuelle n'a pas été incluse dans la définition des groupes protégés contre les crimes haineux, à l'article 12 du projet de loi , est le refus d'admettre non seulement que garantir des droits égaux aux Canadiens transgenres est une question de justice fondamentale, mais également qu'il est inévitable que ces droits leur seront garantis un jour ou l'autre et qu'il est urgent que nous agissions en ce sens.
Les Canadiens transgenres demeurent le groupe qui souffre le plus de discrimination au Canada. Par rapport aux autres groupes, ils sont plus susceptibles d'être victimes de crimes haineux et, plus troublant encore, de crimes haineux violents. Tout ce que demandent les Canadiens transgenres, c'est que leurs droits soient reconnus au même titre que ceux des autres Canadiens. Nous sommes en train de rater l'occasion, dans le projet de loi , d'accorder aux Canadiens transgenres une protection égale contre les crimes haineux.
Il fut un temps où tous les Canadiens n'étaient pas traités de manière équitable comme aujourd'hui. Il y avait des dispositions législatives qui semblent incroyables de nos jours. Autrefois, les Canadiens d'origine asiatique ne pouvaient ni voter, ni exercer une profession. À une autre époque, j'aurais pu, en tant qu'homosexuel, être jeté en prison, congédié, ou expulsé de mon logement. Heureusement, cette époque est révolue.
Je suis déçu, parce que nous avions aujourd’hui l’occasion de dire que c’est à partir de maintenant qu’on ne peut plus s'imaginer comment les Canadiens transgenres ont pu se voir refuser les mêmes droits et protections que tous leurs concitoyens. Je sais que ce jour arrivera, et je continuerai de m'employer à le faire arriver le plus tôt possible.
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Monsieur le Président, c'est quand même avec beaucoup d'humilité que je me lève aujourd'hui à la Chambre, surtout après avoir entendu mes collègues experts en droit débattre du projet de loi . Je vais apporter ma contribution basée quelque peu sur mon expérience.
J'ai été enseignante pendant plusieurs années. J'ai eu la chance d'être en contact avec de nombreuses classes et de nombreux étudiants. Comme éducatrice, je me rends compte que dans ce monde moderne dans lequel nous vivons, l'éducation ou l'information a une place très importante. Présentement, les jeunes doivent s'adapter à une société qui évolue de façon exponentielle. Dans mes souvenirs d'enseignante, je me rappelle de la façon dont les étudiants se parlait parfois l'un à l'autre, entre jeunes garçons et jeunes filles. Parfois, cela me troublait parce que je trouvais que le langage utilisé imitait souvent ce qu'ils voyaient dans les médias, à la télévision et peut-être un peu partout, notamment dans la rue. Cela me troublait toujours d'entendre ce genre de langage entre les garçons et les filles. J'ai enseigné pendant plusieurs années et j'ai fait autre chose par la suite. Toutefois, c'est un souvenir qui m'a marqué.
On est dans une société où les médias sociaux et Internet ont pris une place très importante dans nos vies, comme dans celles des jeunes. Contrairement à moi, mes neveux et mes nièces n'ont pas connu un monde sans Internet. La protection de la vie privée était très importante à cette époque. Mes neveux et mes nièces sont élevés dans un monde où Internet occupe une place très importante. Ils sont nés avec Internet comme je suis née avec la télévision. On oublie parfois que même si on est dans notre bureau ou dans notre chambre devant un ordinateur, dès qu'on se branche à Internet, on n'est plus dans l'intimité de notre foyer. On est dehors en public. On est sur cette toile au vu et au su de tout un chacun.
C'est pour cela que mon collègue de avait mis en avant une stratégie contre l'intimidation et une façon de sensibiliser contre l'intimidation, voire contre la cyberintimidation.
Il faut toujours se rappeler qu'Internet est un outil absolument formidable de transmission d'informations, mais qu'il peut être utilisé à de mauvaises fins. D'un côté, il peut être un outil d'information extraordinaire, mais de l'autre, c'est un outil très puissant qui peut servir à l'intimidation. À ce moment-là, il faut savoir l'utiliser de façon très judicieuse. Pour moi, l'éducation et la prévention sont très importants. Il faut savoir comment utiliser un outil aussi puissant qu'Internet, comment se prémunir contre la cyberintimidation, comment connaître les moyens de pouvoir de le faire et quelles sont les ressources auxquelles on peut avoir recours en toute confiance quand on est victime d'intimidation.
En donnant l'information aux jeunes filles, aux jeunes garçons, aux femmes et à ceux et celles qui sont marginalisés, ou encore à ceux et celles qui souffrent d'intimidation, en leur donnant les outils pour s'en prémunir et un lieu sécuritaire pour pouvoir se protéger de ces attaques, on leur donne le pouvoir de contrer l'intimidation et la violence. Bien sûr, souvent, la sensibilisation, l'information et l'éducation ne suffisent pas. Cependant, c'est très important que, de prime abord, beaucoup de choses soient faites de cette façon-là.
Ce n'est pas facile de parler de l'intimidation parce qu'elle touche non seulement à l'être humain et à ses émotions, mais également à des souvenirs et à des choses qui nous sont arrivées. Je dois reconnaître que ce n'est pas toujours facile d'en parler.
Je suis également présidente du Comité permanent de la condition féminine. Récemment nous avons fait une étude sur les troubles de l'alimentation. Lors de cette étude, nous avons parlé de l'impact des médias sociaux et d'Internet. Encore une fois, la façon dont on projette l'image corporelle des êtres humains, et peut-être davantage des femmes, était très intéressante, tout comme la façon dont Internet et les médias sociaux exercent une pression incroyable sur les jeunes femmes et sur les femmes par rapport à cette image corporelle. Là aussi, il y a un travail à faire du côté des médias, des médias sociaux et d'Internet. Comment peut-on faire des discernements et savoir, qu'au bout du compte, cette image corporelle corresponde davantage à la réalité?
Encore une fois, comme plusieurs de mes collègues l'ont mentionné, le titre du projet de loi actuel est malheureusement trompeur. On parle ici de la . Or, comme dans plusieurs de ses projets de loi, le gouvernement inclut plusieurs éléments dans ce projet de loi, qui vont bien au-delà du problème de la cybercriminalité. On a mentionné, et je me permets d'insister là-dessus, que maintenant, on ne parle plus seulement d'agents de la paix, mais de fonctionnaires publics. On y donne la définition suivante: « Fonctionnaire public nommé ou désigné pour l’exécution ou le contrôle d’application d’une loi fédérale ».
Je trouve ces dépassement troublants. Encore une fois, je veux féliciter notre porte-parole en matière de justice et tous les membres de l'opposition officielle du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Ils ont présenté des amendements tout à fait raisonnables pour contrer les dépassements du projet de loi . Par exemple, ces amendements parlaient de modifier « soupçon raisonnable » pour « motif raisonnable », d'établir que le terme « agent de la paix », s'applique aux policiers et d'enlever le terme troublant de « fonctionnaire public », qui est mal défini et qui pourrait, encore une fois, occasionner des débordements. Ils proposaient également d'inclure un article pour obliger le ministre à faire un rapport à la Chambre des communes afin d'indiquer combien de demandes et d'ordonnances ont été déposées, et inclure un article.
Je veux encore une fois appuyer mon collègue d' concernant l'importance d'inclure un article sur l'égalité des genres afin de protéger les personnes transgenres de la cyberintimidation.
C'est un projet de loi auquel ont été ajoutées énormément de choses troublantes, chose qu'il n'y avait pas lieu de faire. C'est pour cette raison que l'opposition officielle ne pourra pas appuyer ce projet de loi.
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Monsieur le Président, hier soir, j'étais à Halifax avec un groupe d'amies, dont certaines sont féministes. Nous nous étions retrouvées pour discuter de choses et d'autres. J'ai mentionné que je prendrais la parole à propos d'un projet de loi aujourd'hui, et j'ai demandé si elles avaient des commentaires ou si certaines perspectives étaient peu représentées dans ce débat. Elles savaient toutes, instantanément, de quel projet de loi il était question.
L'histoire de Rehtaeh Parsons a touché tous les habitants de la Nouvelle-Écosse. Les Néo-Écossais ont tous été marqués de façon indélébile quand ils ont appris qu'une femme s'était suicidée à cause d'images d'elle-même diffusées sur Internet. Cette histoire a été le point de départ d'un dialogue sain et fructueux en Nouvelle-Écosse. Tout le monde participe à la discussion, et nous sommes toujours à la recherche de solutions. La province a mis sur pied un groupe de travail sur la cyberintimidation chargé de penser aux gestes que pourrait poser la province afin qu'une telle tragédie ne se reproduise jamais. Les débats sont enlevés, solennels et profondément sincères. Les gens prennent ce fléau au sérieux et considèrent qu'il faut trouver des solutions ensemble, en tant que communauté.
Donc, hier soir, j'ai dit à mon groupe d'amies que je prendrais la parole à propos de ce projet de loi. L'une des femmes m'a dit ceci: « Le problème que tu auras demain, c'est que les conservateurs ne s'intéressent pas vraiment aux problèmes. Ils veulent seulement faire avancer leur cause. S'ils trouvent une situation ou une affaire qui peut les aider à faire avancer leur cause, ils en tireront parti. » C'est exactement ce qui se produit ici, selon moi.
Cette question me tient à coeur pour bien des raisons. Elle me tient à coeur parce que Rehtaeh Parsons était membre de ma communauté, parce qu'elle a été violée et humiliée, et parce qu'elle croyait que la seule façon de mettre fin à cette humiliation, la seule option qui s'offrait à elle, était de se suicider.
Ce projet de loi me tient à coeur en tant que femme et personnalité publique qui comprend à quel point Internet a le pouvoir de nous blesser et de nous humilier. Il me tient à coeur en tant que féministe. Il me tient aussi à coeur en tant que législatrice parce que Rehtaeh Parsons n'est pas la seule victime. Je souhaite qu'une mesure législative soit mise en place pour prévenir la cyberintimidation. Je veux faire comprendre aux Canadiens que la distribution non consensuelle d'images intimes ne sera pas tolérée. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles ce projet de loi me tient à coeur.
Je sais que je parle pour tous mes collègues néo-démocrates quand je dis qu'il est nécessaire de mieux protéger les gens de tous les âges contre la distribution d'images intimes sans leur consentement. Il n'y a aucun différend à cet égard. Nous avons tous été fiers d'appuyer notre collègue, le député de , quand il a déposé son projet de loi. Il s'est efforcé de présenter une proposition équilibrée et raisonnable pour régler ce problème. Il a présenté le projet de loi , un projet de loi qui érigerait en infraction le fait de produire ou de distribuer des images intimes d’une personne sans son consentement. Nous sommes solidaires du député de . Les parents de Rehtaeh Parsons habitent dans sa circonscription. Il leur a donné l'assurance que nous trouverions un moyen de modifier la loi afin d'empêcher que ce type de tragédie ne se reproduise.
Toutefois, comme mon amie l'a dit hier soir, les conservateurs ne s'intéressent pas à cette question. Ils sont plutôt intéressés à faire avancer leur cause parce que le projet de loi , à savoir la mesure législative dont nous sommes saisis, va bien au-delà de ce que nous devons faire pour modifier la loi afin de prévenir la cyberintimidation. La portée de ce projet de loi est beaucoup plus vaste que celle du projet de loi présenté par mon collègue de .
Les députés se souviendront de la déclaration que l'ancien ministre de la Sécurité publique, Vic Toews, avait faite à la Chambre: « vous avez le choix de vous joindre à nous ou aux adeptes de pornographie juvénile ». Nous étions alors en février 2012. Ce fut un moment marquant pour moi à titre de députée, parce que la population a répondu rapidement et avec force. Les Canadiens ont clairement fait comprendre qu'ils n'accepteraient pas qu'un député tienne de tels propos.
Nous étions alors en février 2012, à l'époque où le gouvernement avait présenté un projet de loi portant le titre pompeux de Loi sur la protection des enfants contre les cyberprédateurs. Tout le monde a rejeté ce projet de loi: le NPD, les défenseurs du droit à la vie privée et le public. Le gouvernement, couvert de honte, a retiré le projet de loi; nous pensions alors ne plus jamais en entendre parler.
Or, nous voici ici, deux ans plus tard, et les conservateurs ont trouvé une façon de ramener la question sur le tapis. Ils ont trouvé l'instrument qui leur permettrait de faire adopter ces modifications. La mesure législative à l'étude est leur instrument. Ils ont saisi l'occasion. Ils utilisent deux tragédies, les morts d'Amanda Todd et de Rehtaeh Parsons, pour faire avancer leur programme. Quelle ne fut pas notre surprise de retrouver dans le projet de loi des éléments, oubliés depuis fort longtemps, du projet de loi présenté par le ministre Toews. La seule différence: les conservateurs utilisent aujourd'hui la cyberintimidation comme prétexte.
Mais quel est le lien entre les données financières des banques et la cyberintimidation? Qu'est-ce que les modifications proposées à la loi sur le financement des activités terroristes ont à voir avec les jeunes et la distribution non consensuelle d’images en ligne? Si les conservateurs essaient de prévenir la cyberintimidation, pourquoi diable est-il nécessaire de modifier les règles visant le télémarketing et le vol de services de télécommunications? Les conservateurs utilisent à très mauvais escient le privilège dont nous disposons à titre de parlementaires. C'est malhonnête, et ils abusent de la confiance que les Canadiens nous témoignent lorsqu'ils exercent leur droit de vote.
Si nous avions été sérieux dans notre volonté de prévenir la cyberintimidation, nous aurions adopté la motion que de mon collègue néo-démocrate de avait présentée afin d'établir une stratégie nationale contre l'intimidation. Si nous avions vraiment l'intention de respecter notre engagement, nous aurions scindé le projet de loi il y a bien longtemps.
Je tiens à remercier ma collègue, la députée de , qui a travaillé d'arrache-pied sur le projet de loi: elle a conseillé les députés, effectué une analyse juridique et participé aux séances du comité. Elle a fait tout son possible pour faire scinder le projet de loi, car nous en appuyons certaines parties.
Ce serait une victoire retentissante pour nous de pouvoir dire que les parlementaires, unis dans leur désir de lutter contre la cyberintimidation, ont adopté le projet de loi à l'unanimité. Mais on a préféré nous présenter un projet de loi fourre-tout, et donc les néo-démocrates vont devoir s'y opposer. Nous allons devoir voter contre, ce que le gouvernement va retourner contre nous à des fins partisanes. Dieu merci qu'on ne puisse plus envoyer de dix-pour-cent dans d'autres circonscriptions, parce que je sais que les électeurs de la mienne en auraient reçu un disant: « Saviez-vous que la députée de Halifax s'oppose à ce qu'on protège vos enfants? »
Le projet de loi a été présenté à des fins partisanes. Il devrait être scindé. Nous avons essayé de le scinder. Nous avons également essayé de proposer des amendements. Ce ne sont pas des idées farfelues et compliquées que nous avons proposées pour améliorer le projet de loi, mais bien des solutions simples et élégantes. Il ne s'agit pas de changer toute la mesure, mais bien de changer un mot. Par exemple, nous voulons resserrer le critère juridique en remplaçant le segment « motifs raisonnables de soupçonner » par « motifs raisonnables de croire ». C'est un simple mot. Nous connaissons la solution. Il suffit de remplacer « soupçonner » par « croire », ce qui ferait une énorme différence. J'ai toujours des soupçons. Cela veut-il dire que je crois vraiment qu'il se passe quelque chose? Sûrement pas. C'est une grande différence juridique. La solution que nous proposons est élégante et simple. Nous l'avons proposée après avoir entendu les témoignages au comité, mais elle a été rejetée.
Lorsque mon collègue, le député de , a présenté son projet de loi en juin 2013, il a pris, comme je l'ai déjà dit, un engagement envers deux électeurs de sa circonscription, Glen Canning et Leah Parsons. Le député a accordé une entrevue à Tobi Cohen, journaliste sur la Colline du Parlement, le 22 juillet 2013. Il a dit à l'époque qu'il se fichait de savoir qui recevrait les félicitations tant que la mesure était prise, et qu'il espérait que le gouvernement présente un projet de loi parce que, comme nous le savons bien, les projets des loi d'initiative ministérielle sont adoptés beaucoup plus rapidement. Il a dit: « J'espère qu'ils ne vont pas chercher à inclure trop de choses dans un seul projet de loi. »
Peut-être que nous ne devrions pas laisser notre cynisme nous amener à prédire que ce genre de chose aura lieu, mais il semble que ce soit la façon de procéder ces jours-ci. Peut-être vais-je pouvoir soulever d'autres points lorsque je répondrai aux questions des députés.
Je trouve le projet de loi décevant. J'aurais vraiment aimé qu'on puisse collaborer dans ce dossier.
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Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de ma collègue d'. Elle s'est exprimée avec une éloquence que je ne pourrais égaler. Sa connaissance de la région d'Halifax, où l'histoire tragique de Rehtaeh Parsons a eu des répercussions non seulement sur la famille de cette dernière, mais aussi sur la société dans son ensemble, lui a permis de saisir toute la gravité de la situation.
Elle connaît bien les conséquences de l'intimidation: oui, certains vont jusqu'à se suicider, mais il y a aussi des milliers de personnes qui sont touchées par l'intimidation même si elles ne commettent pas ce geste extrême. Ces personnes vivent tous les jours avec les répercussions de l'intimidation: leur estime personnelle diminue et elles ont de la difficulté à mener une vie normale. C'est particulièrement vrai lorsqu'il est question de cyberintimidation.
Les recherches montrent que ce sont principalement les jeunes qui sont touchés par la cyberintimidation, plus précisément les jeunes femmes de 12 à 14 ans. Toutefois, on peut en être victime à n'importe quel âge. Les jeunes forment un groupe très vulnérable lorsqu'il est question de dénigrement et d'intimidation en ligne.
Le plus souvent, la cyberintimidation prend la forme de courriels menaçants ou hostiles. Ce phénomène touche environ les trois quarts des victimes. Quant aux propos haineux, ils visent environ la moitié des victimes. Selon les recherches, les jeunes de 12 à 14 ans sont les plus susceptibles d'être victimes de cyberintimidation, et les filles sont plus souvent touchées que les garçons.
La plupart du temps, il s'agit de jeunes femmes vulnérables, qui peuvent subir des torts graves sur le plan de la santé mentale. La cyberintimidation a des conséquences négatives sur les relations sociales, l'état affectif et les résultats scolaires de la victime. Elle provoque des sentiments de désespoir, d'isolement et de dépression, ainsi que des tendances suicidaires. Fait intéressant, les recherches ont révélé que les victimes et leurs bourreaux sont deux fois plus susceptibles de se suicider que les autres jeunes de leur âge.
Il y a des cas extrêmes. Le cas d'Amanda Todd en est un. Que je sache, l'individu responsable n'a pas encore subi son procès. Toutefois, c'était un prédateur qui sévissait sur Internet. Il a commis ce qui semble être un acte criminel grave et intentionnel. Par ailleurs, si l'on tient compte du fait que les intimidateurs sont deux fois plus susceptibles de se suicider, on peut dire que, eux aussi, sont aux prises avec des problèmes graves.
On a raison de considérer ces cas comme des affaires criminelles. Il s'agit d'individus qui se servent d'Internet pour causer intentionnellement des torts à autrui. On est aussi en présence d'un problème qui présente une autre facette, soit celle de la prévention. Nous devons aborder les cas comme s'il s'agissait d'actes criminels. Le député de a très rapidement proposé une solution. Toutefois, nous devons aussi établir une stratégie pour tenter de prévenir ce phénomène et de faire comprendre aux individus responsables la portée de leurs gestes et les torts qu'ils peuvent causer.
De ce côté-ci de la Chambre, nous avions réagi très rapidement à la situation, sur ces deux plans. Le député de avait présenté un projet de loi qui a soulevé les moqueries. Bon, il n'avait peut-être pas été ridiculisé, mais il s'agissait d'un court projet de loi qui portait directement sur le problème. Il cernait le problème et demandait aux députés de lutter contre celui-ci. C'était il y a un an et demi.
Lorsque le gouvernement veut adopter un projet de loi d'initiative parlementaire qui est conforme à ses impératifs politiques, il le fait. Il l'inscrit à l'ordre du jour et fait le nécessaire pour le faire adopter rapidement. Il aurait pu faire la même chose avec le projet de loi du député de , mais il s'en est gardé. Si le gouvernement était d'avis que ce n'était pas un projet de loi efficace ou qu'il n'en avait pas aimé pas le libellé, il aurait été facile d'apporter des correctifs nécessaires. Le ministère de la Justice regorge de gens compétents.
Nous nous retrouvons aujourd'hui avec un projet de loi omnibus, un projet de loi fourre-tout, comme d'habitude. Les conservateurs lui donnent un titre précis — c'est le projet de loi sur la protection des Canadiens contre la cybercriminalité —, mais en fait, il porte sur diverses autres choses. Il traite de toutes sortes de sujets disparates, comme la protection des fournisseurs d'accès Internet ou le vol de services de communication, qui n'ont rien à voir avec la question dont nous discutons.
Au lieu, pour une fois, de prendre le projet de loi, de le faire aboutir comme il se doit, le gouvernement a décidé de s'en servir, comme l'a expliqué ma collègue d', pour donner une deuxième chance au lamentable projet de loi avorté de l'ancien ministre de la Sécurité publique, l'homme qui a scandalisé les Canadiens avec sa déclaration et son approche. Le contenu de ce projet de loi relativement à l'accès légal est repris dans celui-ci. J'y reviendrai un peu plus tard.
Cependant, je m'intéresse davantage au refus du gouvernement de prendre au sérieux le sort des victimes de la cyberintimidation et de s'attaquer rapidement au problème, hors de toute controverse, comme il aurait pu le faire. C'est ce que les victimes, les familles, les enseignants et les chefs de file locaux de l'ensemble du pays espéraient, mais ce n'est pas ce que le gouvernement actuel leur a donné parce qu'il a d'autres objectifs. Il traite les dossiers de manière à joindre à de bonnes mesures un retour à des politiques qu'il n'a pas réussi à faire adopter dans le passé et qui ne répondent pas aux critères de conformité au cadre juridique général. Ces politiques sont contraires aux normes établies depuis de nombreuses années concernant le respect de la vie privée et diverses autres activités, comme l'obtention obligatoire d'un mandat pour pouvoir s'introduire dans la vie privée des gens, écouter des conversations privées ou obtenir des renseignements personnels.
Le gouvernement a malheureusement failli à la tâche.
Puis, l'occasion s'est présentée d'appuyer une motion présentée par un député de notre parti, motion qui réclamait l'établissement d'une stratégie nationale de lutte contre l'intimidation. Qu'est-ce que le gouvernement a décidé alors? Il a dit: « Non, nous ne ferons rien de tel. Nous n'appuierons pas cette motion. » Pourtant, il aurait été ainsi possible d'appuyer les écoles du pays dans l'optique de la prévention, pour qu'elles puissent essayer de résoudre les problèmes parmi les écoliers. Nous aurions pu aider les collectivités à lutter contre l'intimidation et nous aurions peut-être même pu offrir de la formation aux policiers et aux services de police. Bien franchement, ils n'ont pas toutes les réponses, eux non plus.
Bien que nous soyons heureux de la contribution qu'ont pu faire certains d'entre nous avant de devenir députés, nous savons qu'il reste beaucoup de travail à faire pour que les services de police du pays aient les outils leur permettant de collaborer avec nous. Nous avons besoin, pour ce faire, d'adopter un projet de loi, mais nous devons prendre le temps de l'étudier, et non procéder à la hâte. Nous devons en aborder l'étude en songeant au problème à résoudre. Beaucoup de Canadiens n'en reviennent pas que ce problème persiste, alors veillons à ce qu'il soit résolu le plus vite possible.
Cela m'amène à parler de l'autre partie du projet de loi. Comme je n'ai que deux minutes pour en parler, je ne répéterai pas — car ce serait évidemment impossible — tout ce que ma collègue, la députée de , a si bien expliqué dans son exposé à la Chambre et dans son travail au comité pour déterminer, avec les spécialistes, les lacunes du projet de loi qui propose une intrusion dans la vie privé des gens, puisqu'il se fonde sur l'utilisation du soupçon raisonnable plutôt que sur des motifs raisonnables et probables comme critère pour obtenir un mandat. C'est un élément que les spécialistes ont signalé, à l'instar de ma collègue de Gatineau. Elle a d'ailleurs fait un excellent travail et présenté plusieurs amendements raisonnables à cette partie du projet de loi, qui ont tous été rejetés par les députés d'en face.
Je pense que les Canadiens ne sont plus étonnés d'entendre dire que des projets de loi sont renvoyés à un comité de personnes responsables et raisonnables, que des spécialistes viennent donner leur avis quant à ce qu'il faut faire pour les rendre acceptables et que, lorsque des amendements sont présentés, pas un seul amendement raisonnable qui remédierait aux lacunes du projet de loi n'est adopté. Toutefois, nous en avons l'habitude et je pense que les Canadiens se sont habitués au fait que le gouvernement actuel a ses propres idées et qu'il n'est pas disposé à écouter qui que ce soit. Il veut simplement que les choses soient faites à sa façon.
Voilà ce qui cloche avec ce projet de loi. Nous aurions aimé pouvoir débattre ici d'un projet de loi qui ne soulève aucune controverse, qui réglerait le problème et sauverait peut-être de vies. C'est une question de vie ou de mort.