Que, de l’avis de la Chambre, tous les députés devraient être autorisés à voter librement sur toutes les questions de conscience.
-- Monsieur le Président, ma motion sous-entend d'importantes modalités que je prie la Chambre de bien vouloir appuyer. Premièrement, elle doit s'appliquer à tous les députés, quel que soit leur rang ou leur rôle à la Chambre ou au sein de leur parti, et à toutes les questions dont la Chambre est saisie, que celles-ci soient présentées par le biais d'une motion ou d'un projet de loi d'initiative parlementaire ou encore d'un projet de loi, d'une motion ou de toute autre mesure législative d'initiative ministérielle. Deuxièmement, les députés doivent être autorisés à voter librement, c'est-à-dire sans répondre à un ordre ou à une demande du chef du parti, du leader parlementaire, du whip ou de toute autre personne dans la hiérarchie du parti, de voter d'une certaine façon, sous peine de se voir imposer la censure ou une forme de sanction. Troisièmement, il doit en être ainsi pour toutes les questions de conscience.
Ce qui constitue une question de conscience peut susciter des désaccords et de longs débats. Je suis toutefois certain que parmi ces questions se trouvent celles touchant la vie et, plus précisément, l'acte d'y mettre un terme, du moment de la conception jusqu'à celui de la mort naturelle. Le fait de mettre fin ou non à la vie — que ce soit avant la mort naturelle, avant que l'être humain soit pleinement formé ou pendant qu'il a le potentiel de le devenir, ou à tout autre moment — est assurément une question de conscience.
À mon avis, toute question d'ordre moral, éthique ou relevant des croyances religieuses qui fait appel à notre sens intime du bien et du mal est une question de conscience. Le droit à la liberté de conscience est reconnu par toutes les conventions internationales sur les droits de la personne. Selon l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, que l'Assemblée générale des Nations Unies a adoptée le 10 décembre 1948, « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ». La conscience est indubitablement souveraine et doit le demeurer.
En fait, on peut lire ce qui suit au sujet des libertés fondamentales à l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés, communément appelée la Charte: « Chacun a les libertés fondamentales suivantes: a) liberté de conscience et de religion ». D'autres libertés fondamentales qui nous sont chères sont également énoncées dans cet article: la liberté d'expression, la liberté de presse, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association. En fait, les premiers mots du préambule de la Charte canadienne des droits et libertés pourraient soulever des questions de conscience liées à l'interprétation des lois ou même de certains aspects qui relèvent de la Charte. Ces mots, « Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit », pourraient faire en sorte que la primauté du droit et la suprématie de Dieu entrent parfois en conflit.
En ce qui concerne les questions de conscience, c'est sir Thomas More qui a le mieux résumé la situation lorsqu'il a décidé de respecter la loi divine telle qu'il la percevait, au lieu d'obéir aux hommes; le plus important, c'était de ne pas aller à l'encontre de sa conscience. Bien entendu, on lui a coupé la tête et on l'a exhibée sur le pont de Londres; c'est le prix qu'il a dû payer pour ne pas aller à l'encontre de ce que lui dictait sa conscience.
Un courriel envoyé au député de , le chef du Parti libéral du Canada, par d'anciens députés libéraux, qui a été rendu public, explique bien la situation lui aussi. Voici un extrait de ce courriel:
Nous, soussignés, anciens députés libéraux, sommes préoccupés par votre récente déclaration selon laquelle les gens ayant un certain point de vue sur une question morale, une question de conscience, pourront seulement se présenter comme candidats libéraux s'ils acceptent de mettre leur conscience de côté quand ils entrent à la Chambre des communes et de voter comme vous le dictez, même si cela va directement à l'encontre de leurs croyances fondamentales.
À la Chambre, le Parti conservateur a, à maintes reprises, permis des votes libres, et c'est ce qu'il faut faire. Dans l'article 7 de l'énoncé de politique du parti, il est précisé très clairement que le Parti conservateur croit au rétablissement de la responsabilité démocratique à la Chambre des communes en permettant le vote libre. On y indique que tous les votes devraient être libres, sauf les votes portant sur le budget, pour des raisons évidentes, ainsi que sur le Budget principal des dépenses et les principales initiatives gouvernementales.
En ce qui concerne les votes sur des questions d'ordre moral, le Parti conservateur reconnaît que ses membres ont des convictions personnelles profondes qui peuvent diverger; il reconnaît le droit des députés d’adopter des positions en consultation avec les électeurs de leur circonscription et de voter librement.
Deux décisions de la Cour suprême, plus précisément l'arrêt Lee Carter, et al. c. Procureur général du Canada, et al., qui portait sur l'aide médicale à mourir, et l'arrêt Morgentaler, ou R. c. Morgentaler, portant sur l'avortement, donnent l'exemple de sujets qui devraient être soumis à un vote libre si la Chambre en était saisie. Dans chaque cas, la cour s'est fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés et a fait connaître à la Chambre son interprétation de l'application de la Charte.
L'arrêt Carter faisait principalement référence à l'article 7 de la Charte, qui se lit comme suit:
Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale.
L'arrêt indique qu'il faudrait une mesure législative autorisant le recours à une aide médicale à mourir quand une personne adulte capable consent clairement à mettre fin à sa vie et est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables — y compris une affection, une maladie ou un handicap — lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition. Je ne suis pas nécessairement d'accord avec la façon dont la cour interprète l'article 7, mais c'est ce qu'elle a déclaré, et le Parlement doit agir en conséquence.
Le type de projet de loi, les dispositions qu'il contient et les opinions des députés peuvent varier. Il arrive sûrement à beaucoup de députés de sonder leur conscience afin de déterminer s'ils doivent appuyer ou non un projet de loi, un autre projet de loi ou une troisième solution de compromis. Quand la question est mise aux voix, cependant, ils devraient pouvoir voter librement.
Dans le même ordre d'idées, dans la décision Morgentaler, la cour a essentiellement déterminé que les dispositions du Code criminel sur l'avortement en vigueur à l'époque violaient les mêmes droits issus de l'article 7. Elle a également déclaré que le Parlement, et non la cour, a la prérogative ou l'obligation de présenter des mesures législatives visant à concilier ce droit avec les droits issus de la Charte qui protégeraient les droits de l'enfant à naître. En effet, l'article 1 de la Charte dit ce qui suit:
La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique.
Les droits sont donc sujets à condition. Il est clairement indiqué que, lorsqu'on a recours à la Charte, il faut concilier les divers intérêts, ou à tout le moins les prendre en considération.
À la page 38 de l'arrêt Morgentaler, la juge Wilson dit:
Quant au point précis du développement du foetus où l'intérêt qu'a l'État de le protéger devient « supérieur », je laisse le soin de le fixer au jugement éclairé du législateur, qui est en mesure de recevoir des avis [...] de l'ensemble des disciplines pertinentes. Il me semble cependant que ce point pourrait se situer quelque part au cours du second trimestre.
Elle s'est fondée purement sur la Charte, alors je crois que l'on peut affirmer sans crainte que la protection de l'enfant à naître est une question liée à la Charte et s'appliquant à l'enfant à naître qui nécessite la prise de mesures législatives par le Parlement. Elle n'a donné aucune précision au sujet de la tout autre question de savoir si l'enfant à naître est visé par le terme « chacun » utilisé à l'article 7, de sorte que cet enfant jouirait d'un droit indépendant à la vie au titre de cet article.
Nul doute que les députés ont à coeur des questions telles que celle-ci, qui sont des questions qui ont trait à la vie. Certains estiment que la vie est sacrée et qu'ils ne devraient pas être tenus de se prononcer en faveur d'une mesure législative qui va à l'encontre de leur conscience si cette mesure vise à enlever la vie ou permet d'enlever la vie après la conception, et ce, avant la mort naturelle. Ce sont des prises de position nettes, mais, quand il s'agit de questions qui ont trait à la vie, certaines positions peuvent se situer quelque part entre les deux extrêmes, où des députés honnêtes, sincères et bien intentionnés auront de la difficulté, j'en suis certain, à prendre une décision et auront des points de vue différents. Cependant, tous devraient être libres de voter selon leur conscience.
Le fait de permettre aux députés de voter librement présuppose que les députés ayant des points de vue, des convictions et des croyances religieuses divergents ont le droit de se porter candidats à une charge publique et d'être élus. Dire, comme l'a fait le chef du Parti libéral, le député de , que quiconque ne partage pas le point de vue communément appelé « pro-choix » ne peut pas se porter candidat à la charge de député ou ne peut pas pas voter librement sur ce sujet, va totalement à l'encontre de cette motion et de la Charte des droits et libertés. En effet, cela va à l'encontre des fondements de la démocratie au sein de laquelle les problèmes devraient être débattus librement puis être mis aux voix.
La définition de « Parlement », que j'ai tirée de l'ouvrage How Parliament Works, de John Bejermi, vient du mot parler. Par conséquent, le « Parlement » ou cette Chambre est un lieu de rencontre où les représentants du peuple peuvent parler, discuter, critiquer, argumenter et exprimer leurs opinions publiquement sur toutes les affaires de l'État.
Au Canada, nous avons un système appelé « gouvernement parlementaire ». Il est regrettable que, en raison des positions adoptées par les chefs, comme celui du Parti libéral, une partie de la presse, les médias et d'autres, nous ne puissions pas avoir un débat raisonnable sur ces questions, avec les points de vue opposés, sans que cela soit perçu comme étant quelque chose d'inhabituel, d'inacceptable ou de mauvais goût. C'est vraiment malheureux. Il faut que cela change. Pendant trop longtemps nous avons eu l'impression que les questions difficiles ne devraient pas être proposées, débattues ou discutées au Parlement, souvent simplement parce que nous avons des opinions bien arrêtées sur le sujet et ne voulons pas entendre les opinions des autres. Ce n'est pas cela la démocratie.
Pour ce qui est des questions de conscience, rien ne devrait pousser un député à voter contre ce que lui dicte sa conscience. Si l'on force les députés à franchir cette ligne, on les force aussi à trahir leurs convictions, leurs principes et ce en quoi ils croient. J'irais même jusqu'à dire qu'il est évident que personne ne devrait être obligé de faire cela. La conscience d'une personne est intouchable et inviolable, personne ne devrait y porter atteinte. Si l'on oblige des députés à piétiner leurs propres convictions, leurs opinions et leurs votes n'auront plus la même valeur. Comment pourra-t-on leur faire confiance? Je crois que la plupart des Canadiens et des électeurs s'attendent à ce que les députés s'expriment librement et défendent leur position, même s'ils ne sont pas toujours d'accord avec eux. Si la majorité des électeurs ne partagent pas l'opinion de leur député, ils devraient en élire un autre.
À vrai dire, nous ne devrions pas avoir à soulever sans cesse ce genre de question. Il devrait y avoir des règles à cet égard. Pour ma part, j'aime bien la règle qui permet de déterminer si un projet de loi d'initiative parlementaire ou une motion comme celle que j'ai présentée peut faire l'objet d'un vote. La question a-t-elle déjà été abordée au cours de la session? Si ce n'est pas le cas, le projet de loi ou la motion peut faire l'objet d'un vote. Ainsi, une nouvelle session peut donner lieu à de nouveaux débats.
Nombreux sont ceux qui affirment que le Parlement devrait utiliser la disposition de dérogation prévue à l'article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés, selon laquelle une loi ou une disposition peut prendre effet indépendamment d'une disposition de l'article 2 ou de l'article 7 de la Charte. Bien que cette option existe, il s'agit à mon avis d'un mécanisme qui doit être utilisé avec parcimonie et seulement dans des circonstances exceptionnelles. Cela étant dit, on ne peut pas choisir uniquement les parties de la Charte qui nous plaisent et mettre les autres de côté.
Chose intéressante, le député de et chef du Parti libéral a été prompt à présenter une motion mise aux voix le 24 février 2015 et demandant à la Chambre de reconnaître la décision prise par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Carter. Dans cette affaire, la cour avait statué que l'interdiction de l'aide médicale à mourir violait un droit prévu à l'article 7 de la Charte des droits et libertés et déclaré qu'il incombait au Parlement de répondre à sa décision.
Je n'ai pas constaté la même vigueur et le même empressement de sa part pour demander à la Chambre de répondre à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Morgentaler, selon laquelle il incombait au Parlement de préciser à quel moment l'intérêt qu'a l'État de protéger l'enfant à naître se manifeste et devient supérieur.
Le député a demandé qu'un comité spécial soit mis sur pied selon les paramètres habituels et qu'il fasse rapport le plus rapidement possible à la Chambre. Pourtant, lorsque le député de a présenté une motion qui demandait également qu'un comité spécial de la Chambre soit convoqué pour examiner les dispositions du Code criminel prévoyant à quel moment un enfant devient un être humain et qu'il fasse rapport à la Chambre, le député de et chef du Parti libéral a voté contre cette motion.
J'ai trouvé quelque peu hypocrite que le député de et chef du Parti libéral, d'une part, affirme qu'il faut s'assurer de respecter la Charte ainsi que les droits et privilèges qu'elle confère lorsqu'il est question de la liberté de choix et, d'autre part, vote contre la protection d'un droit ou d'un privilège que confère la Charte avec lequel il n'est pas d'accord, comme ce fut le cas lorsque le tribunal a dit qu'il revient au Parlement de légiférer pour protéger les droits des personnes à naître. On dirait qu'il respecte les décisions de la Cour suprême lorsqu'elles lui plaisent, mais qu'il ne respecte pas la Cour suprême et la Charte lorsque les décisions ne lui plaisent pas. Or, en matière de droits protégés par la Charte, on ne peut pas être sélectif, sauf si on est prêt à faire appel à la clause dérogatoire.
C'est un point que les anciens députés libéraux ont très bien fait valoir dans le courriel qu'ils ont adressé au député de et chef du Parti libéral, où on peut lire:
Deuxièmement, puisque votre directive isole expressément et exclusivement l'opposition à l'avortement, elle est manifestement discriminatoire envers un groupe précis, les gens qui sont contre l'avortement, et personne d'autre, notamment ceux qui pourraient être favorables ou défavorables, par exemple, au suicide assisté. Nous estimons que cette discrimination porte manifestement atteinte à l'esprit, sinon à la lettre, des paragraphes 2 a) et 2 b)de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantissent respectivement à quiconque, même aux députés libéraux, la « liberté de conscience » et la « liberté de pensée, de croyance [...] et d’expression ».
À mon avis, nous devons cesser de croire que certains sujets ne doivent pas être abordés dans le cadre des débats. Nous devrions accepter que les mesures législatives puissent aller de l'avant, convenir que c'est précisément ici, dans cette enceinte, qu'il faut prendre des décisions difficiles, et accepter le fait que les députés peuvent être tenus de prendre des décisions selon leur conscience lorsqu'ils décident d'appuyer ou non une position particulière. Dans l'intérêt de la démocratie, de la justice et de la bonne gouvernance, nous voulons que tous les députés puissent voter librement sur ces questions, sans contrainte. J'espère que tous les députés, et pas seulement mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, jugeront approprié d'appuyer la motion M-590, et je m'attends à ce qu'ils le fassent.
Cette motion est simple et sans ambiguïté. De toute évidence, les députés devraient être autorisés à voter librement sur toutes les questions de conscience. Je pense que cette motion arrive à point nommé, non seulement à cause de la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter, mais aussi à cause de la décision qui a été rendue dans l'affaire Morgentaler après de nombreuses années; à ce jour, les parlementaires ne sont toujours pas parvenus à aborder cette question, que ce soit directement ou indirectement.
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Monsieur le Président, je suis bien contente d'avoir l'occasion de m'exprimer aujourd'hui au sujet de la motion M-590 proposée par mon collègue de .
Il reste seulement trois semaines avant l'ajournement du 41e Parlement, donc ce discours est probablement un de mes derniers. Comme mon collègue qui parraine cette motion, je ne solliciterai pas un autre mandat auprès des gens de ma circonscription en octobre prochain. Cette intervention est donc pour moi un moment très spécial. Quoi de plus approprié pour clore en beauté qu'un débat tout philosophique?
Je me permets de relire ce que propose la motion M-590:
Que, de l’avis de la Chambre, tous les députés devraient être autorisés à voter librement sur toutes les questions de conscience.
J'ai cru apercevoir dans les journaux que mon collègue de juge que cette motion est la simplicité même ou, en anglais, quite straightforward, et qu'il ne prévoit pas d'opposition à celle-ci, ni au sein du gouvernement ni au sein de l'opposition. Je tiens à le détromper, tout en le rassurant. Le libellé de la motion M-590 est certainement très court mais il n'est aucunement simple, not straightforward in the least. Cependant, et malgré cela, je suis bien déterminée à appuyer cette motion, et je crois que mes collègues en feront de même, selon ce que, bien sûr, leur dictera leur conscience.
Le Parlement sert à voter des lois pour le Canada. Bien qu'une motion ne soit pas un ressort parlementaire qui déploie la même portée ou qui pèse la même gravité qu'un projet de loi, celle-ci doit quand même être proposée en langage légal. Quelle est donc la définition légale de conscience? Mon collègue a offert son interprétation personnelle pendant son discours, mais s'il faut se servir d'un concept comme celui de conscience, celui-ci ne peut pas se cantonner dans le repli incertain et relativiste d'une définition philosophique. Au contraire, il doit s'investir d'une substance légale établie, entendue par tous et clairement identifiable.
Quelle est donc la définition légale d'une question de conscience? On pourrait me répondre que tout être humain sait ce que c'est que la conscience, qu'elle est le propre de l'Homme et qu'on la reconnaît sans effort comme l'Homme reconnaît le beau ou le vrai. Chers collègues, c'est ce que disait Platon. Bien que la philosophie soit la chose la plus noble qui puisse occuper l'humanité, notre oeuvre ici est de gérer l'État fédéral canadien avec des lois justes et constitutionnelles et non pas d'ajouter une nouvelle page au corpus philosophique de l'Occident.
Pour que cette motion puisse être applicable et qu'elle possède une quelconque valeur pour l'exercice parlementaire qu'elle vise à améliorer, une définition légale du concept de conscience est donc essentielle. Sans elle, tout ceci devient du vent. Toutefois, cette définition légale, nous ne l'obtiendrons pas puisqu'elle n'existe tout simplement pas. Cela fait que la motion de mon collègue pourrait avoir ce qui suit comme motion équivalente: « Que, de l'avis de la Chambre, tous les députés devraient être autorisés à voter librement sur toutes les questions de beauté ». Bonne chance avec cela!
Nous avons donc le problème de la définition abstraite de la conscience. Même quand nous considérons la substance de la motion, nous nous butons à une autre interrogation. Sans vouloir offenser mon honorable collègue, j'ai le devoir de l'informer, et je me surprends qu'il ne le sache pas déjà, que les députés peuvent déjà voter librement. Nulle part dans les procédures de la Chambre il est mentionné que les députés doivent obligatoirement piler sur leurs valeurs ou leurs croyances lors de l'exercice du mandat que la population leur a confié. Nulle part.
C'est un peu gênant et je me désole de l'aveu public dont nous sommes témoins aujourd'hui, soit que pendant tous ses mandats, mon collègue n'a pas été informé par son parti qu'il pouvait voter selon sa conscience ou, le sachant, qu'il n'ait pas été appuyé par ses collègues conservateurs lorsqu'on leur tordait le bras et les forçait à se prononcer de façon contraire à leurs croyances.
Je sais que beaucoup de députés du Parti conservateur ont une vision résolument électorale du parlementarisme et qu'ils sont très attachés à la défense des valeurs personnelles ou locales au Parlement, quitte à être dysfonctionnels et à passer leur temps à se triturer l'âme dans des débats abstraits. Ils cachaient bien leur malaise, je le jure. Je n'ai pas remarqué que quiconque du côté du gouvernement souffrait d'une crise de conscience lorsqu'ils ont tous voté pour impliquer le Canada dans la guerre civile syrienne aux côtés de Bachar al-Assad. Mea-culpa, j'aurais peut-être dû être un peu plus attentive. Toutefois, moi, pendant ce temps, ma conscience m'étouffait et je pleurais sur le sort inhumain qui a fondu sur les gens en Syrie.
Pour ma part, je peux affirmer sans détour qu'à aucun moment pendant les quatre dernières années je n'ai souffert d'oppression au moment de voter. Je n'ai subi aucune pression indue et jamais quiconque n'a cherché à faire entorse à ma conscience, quelle que soit la nature de celle-ci. Le débat au sein de notre parti est vif et salutaire. Nous cherchons le compromis selon ce qui est souhaitable pour les Canadiens en général et pour chacun d'entre nous en particulier. Au NPD, notre approche est inclusive. Chaque semaine, nous nous rencontrons pour discuter des votes à l'ordre du jour et décider d'un commun accord la position que nous allons défendre. Chacun apporte sa pierre à cet édifice et chacun est libre d'exprimer son opinion.
Nous n'excluons jamais la possibilité d'un vote libre, mais dans la majorité des cas, mes collègues et moi arrivons à un consensus acceptable pour tout le monde.
Pour maintenir leur engagement envers le parlementarisme électoral, aux yeux et aux oreilles de leur base, les conservateurs se félicitent souvent de quelques votes dissidents parmi leurs rangs, lors de votes sur des projets de loi privés, comme si la dissension était une preuve d'inclusion ou de vigueur démocratique. Personnellement, cette incapacité à s'entendre entre eux ne m'apparaît pas comme un objet de fierté, bien au contraire. D'ailleurs, l'adhésion à une formation politique est aussi un acte de volonté et de libre arbitre. On se joint à un parti parce qu'il représente ses valeurs. Une fois élu, un député a le droit de voter comme il l'entend à la Chambre, et il a le devoir de communiquer à ses pairs les vues qu'il entretient sur les votes qui s'annoncent. Si un député vote de façon contraire à son parti et que des conséquences en découlent, cela n'existe qu'entre le député et le parti. Toutefois, ultimement chacun peut voter comme il le veut à la Chambre, et ce choix n'affectera pas sa position de député à la Chambre des communes.
Nous sommes tous des hommes et des femmes libres, avec une volonté propre et un libre arbitre. Notre devoir est de nous entendre et non pas de défendre aveuglément nos obsessions personnelles. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je crois que mes collègues néo-démocrates devraient appuyer cette motion, car finalement, nous sommes tous déjà libres.
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Monsieur le Président, je suis content d'intervenir au sujet de la motion d'aujourd'hui. Je tiens d'abord à dire, au nom du Parti libéral, que les libéraux sont libres de voter comme ils l'entendent sur les projets de loi d'initiative parlementaire. Cette tradition existe aussi dans bien d'autres partis. Le chef libéral, le député de , a très clairement dit que la Charte est au coeur même des convictions libérales. Comme nous le disons depuis longtemps, les libéraux la défendront toujours. C'est le Parti libéral qui est à l'origine de la Charte.
Je tiens à rappeler que le chef libéral, dont le parrain du projet de loi a beaucoup parlé dans son allocution, prêche par l'exemple. En juin 2013, il a annoncé le programme Parlement ouvert, qui visait à ce que les frais de déplacement et d'hébergement des parlementaires soient publiés tous les trimestres. Je me souviens des longues heures que mon personnel y a consacrées. Il a fallu employer des ressources et faire des dépenses supplémentaires pour divulguer les frais de déplacement et d'hébergement.
Le Bureau de régie interne a aussi fait un effort de transparence. Nous avons élargi les vérifications de gestion de la Chambre des communes et du Sénat, et élaboré, en collaboration avec le vérificateur général, les lignes directrices publiques qui serviraient pour les prochaines vérifications.
Les libéraux croient que l'ouverture et la transparence sont des piliers de nos institutions démocratiques, et c'est la raison pour laquelle, comme je viens de l'expliquer, nous sommes devenus, en octobre 2013, le premier caucus à la Chambre des communes à publier ses dépenses en ligne.
Les Canadiens réclament de l'ouverture et de l'honnêteté de la part de leurs représentants élus, et non des secrets, de la méfiance et des scandales.
Le Sénat, en raison d'un favoritisme et d'une partisanerie extrêmes, en est arrivé à mal servir les intérêts des Canadiens. C'est la raison pour laquelle notre chef a pris une mesure ferme le 29 janvier 2014, lorsqu'il a annoncé que le caucus libéral national ne comprendrait désormais que les députés et n'inclurait pas les sénateurs nommés.
Je me souviens très bien de cette journée et je me rappelle avoir pensé que le chef était très courageux. J'ai été un peu surpris, car on ne m'en avait pas parlé auparavant, mais c'était très courageux. C'est un exemple clair d'initiative sur la question du Sénat et du rôle que le Sénat devrait jouer et de ce qu'il est possible de faire pour l'améliorer afin qu'il serve mieux les Canadiens.
Notre chef a aussi annoncé qu'un futur gouvernement libéral mettrait en place un processus de nomination des sénateurs ouvert, transparent et non partisan. Notre chef a fait plus en un seul jour pour réformer le Sénat que le en une décennie.
Lors de notre convention de février 2014, nous avons adopté une motion sur une réforme démocratique globale qui contribuera à rétablir la confiance en notre démocratie. Cette motion comprend plusieurs éléments, que je tiens à énumérer: des mises en candidature ouvertes et démocratiques; moins de votes dictés au Parlement et davantage de votes libres, ce qui implique que les députés assument la pleine et entière responsabilité de leurs décisions; un contrôle parlementaire plus rigoureux des finances publiques, ce qui inclut notamment une échéance annuelle pour la présentation du budget; la cohérence comptable entre les budgets des dépenses et les comptes publics; un système de vote plus clair sur les budgets des dépenses; la présentation d’une analyse de coûts pour accompagner tout projet de loi du gouvernement; l’obligation d’obtenir tout d’abord l’approbation du Parlement lorsque le gouvernement envisage d’emprunter de l’argent; un directeur parlementaire du budget totalement indépendant et doté des ressources adéquates; un processus d’accès à l’information plus efficace, comprenant des protections contre toute ingérence politique; un système impartial pour repérer et éliminer le gaspillage de deniers publics en publicité partisane; l’imposition de limites réfléchies au recours aux travaux secrets des comités, aux projets de loi omnibus et à la prorogation, afin qu’ils ne soient pas utilisés abusivement par le gouvernement à des fins partisanes à court terme.
Sur ce point, la première chose que j'ai constatée sur-le-champ en tant que député qui en est à son premier mandat, c'est à quel point le gouvernement ne respecte pas le rôle du Parlement en ayant recours à ces mesures.
La résolution que nous avons adoptée comprend aussi d'autres éléments: un financement et un pouvoir d’enquêter et d’appliquer la loi suffisants pour garantir qu’Élections Canada a les capacités nécessaires pour éliminer toute fraude électorale; la divulgation proactive des dépenses des parlementaires, comme je l'ai déjà mentionné, des Bureaux de régie interne plus transparents, et de meilleures règles d’audit; un Sénat réellement indépendant qui ne soit pas basé sur la partisanerie ou le favoritisme; un engagement à lancer un processus multipartite, auquel participeront des spécialistes et des citoyens, dans le but de déposer au Parlement, dans un délai de 12 mois, une étude et des recommandations concernant des réformes électorales.
Voilà ce que dit la résolution adoptée lors du congrès du Parti libéral au début de 2014.
En mars 2014, nous avons présenté une motion de l'opposition pour mettre en application la divulgation proactive des frais de déplacement et d'accueil de tous les députés par l'administration de la Chambre des communes. Cette motion a été adoptée à l'unanimité.
En juin 2014, le a déposé au Parlement un projet de loi sur la transparence visant à réaliser des changements que je voudrais énumérer.
Premièrement, la loi exigerait que les réunions du Bureau de régie interne de la Chambre des communes soient normalement publiques. Aujourd'hui, les députés décident des règles qui régissent leurs dépenses sans être soumis à un examen public suffisant. Le Parti libéral a commencé à réclamer que cette façon de faire change en 2013, dans son plan pour un Parlement ouvert.
Le bureau aurait encore le droit de se réunir à huis clos, par exemple, pour discuter de questions personnelles et confidentielles. Ce motif est souvent invoqué pour tenir des réunions de comité à huis clos, tout comme une réunion peut aussi se tenir à huis clos parce qu'il y sera question de contrats.
La deuxième partie du projet de loi sur la transparence aurait modifié l'article 2 de la Loi sur l’accès à l’information, soit l'article qui définit l'objet de la loi, de manière à ce que toutes les données et les informations du gouvernement soient non seulement accessibles, mais automatiquement disponibles sous forme de documents informatisés.
Juste avant que je prenne la parole, j'ai discuté avec un statisticien qui a essayé de télécharger les données produites par les stations météorologiques du Canada et qui avait de la difficulté à le faire à partir des données stockées par Environnement Canada. Cette personne a dû obtenir de l'aide d'un employé de Santé Canada afin d'extraire les données météorologiques d'Environnement Canada, et il a quand même trouvé des lacunes dans les données de ce ministère.
Il est très important de faire en sorte que les données et les informations soient facilement accessibles sous forme de documents informatisés.
Troisièmement...
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Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre part à la discussion d'aujourd'hui sur la motion M-590 et de revenir au sujet dont elle traite. Comme on le sait, elle porte sur les votes libres lorsqu'un sujet est une affaire de conscience. Tous les députés conviendront avec moi qu'il s'agit d'un sujet important et que les Canadiens veulent savoir où se situe chaque partie à cet égard.
Dernièrement, de nombreuses motions d'initiative parlementaire portent sur le déroulement des travaux de la Chambre des communes et le comportement des députés, et mon collègue, le député de , poursuit la tendance. Je le félicite d'avoir proposé une motion qui va aussi droit au but. Il s'agit probablement d'une des motions les plus directes qu'il nous a été donné de débattre depuis longtemps au Parlement.
Elle va comme suit:
Que, de l'avis de la Chambre, tous les députés devraient être autorisés à voter librement sur toutes les questions de conscience.
J'aimerais consacrer le temps qui m'est alloué aujourd'hui à faire l'historique du vote libre au Parlement et à dresser le bilan du gouvernement en la matière.
J'ai une brève observation à formuler au sujet de la motion même. Étant donné notre système de gouvernement responsable et l'importance du principe de confiance, il importe de souligner que la distinction essentielle qu'a faite le député de en limitant la motion aux questions de conscience. Personne ne peut nier l'importance de la solidarité du parti dans les questions qui engagent la confiance de la Chambre, étant donné l'ampleur des conséquences.
À l'opposé, les questions de conscience sont celles qui font le plus appel à la responsabilité des députés en tant que représentants élus. J'espère que personne ne remet en cause l'importance que la liberté de vote revêt dans ces cas particuliers. Certaines motions d'initiative parlementaire dont nous avons été saisis traitaient de la conduite des travaux à la Chambre et du rôle des députés. La motion à l'étude touche l'un des aspects cruciaux de notre travail : le vote.
Lorsque j'ai étudié brièvement la motion pour la comparer à celles dont nous avons débattu durant la session, j'ai remarqué une nette différence, dont je parlerai dans un instant.
Depuis le début de 2014, la Chambre des communes a adopté la motion M-428 du député de sur la mise en oeuvre d'un système de pétitions électroniques. Nous avons également adopté la motion M-431 du député de , concernant le processus de sélection des présidents des comités de la Chambre, de même que la motion M-489 du député de , au sujet de l'élection du Président de la Chambre des communes.
Toutes ces motions ont quelque chose en commun: elles ont toutes nécessité un examen du Règlement, des règles qui gouvernent la Chambre des communes. Comme les députés le savent, le Règlement repose sur un ensemble équilibré de principes et de traditions parlementaires et reflète les intérêts de tous les députés. Il décrit en détail comment les pétitions doivent être présentées ou comment les présidents des comités doivent être sélectionnés, entre autres.
La différence que j'ai remarquée entre la motion M-590, dont nous débattons aujourd'hui, et les autres trois motions que je viens de mentionner se rapporte au Règlement de la Chambre des communes. En effet, si on examine attentivement le Règlement, on constate qu'on n'y fait pas du tout allusion aux votes libres. Tel qu'il est indiqué à la page 576 de l'ouvrage d'O'Brien et Bosc, La procédure et les usages de la Chambre des communes:
Aucune règle ni aucun article du Règlement ne définit ce qui constitue un vote libre à la Chambre des communes [...] De façon simple, on peut dire qu’un vote libre a lieu lorsqu’un parti décide que ses députés ne sont pas tenus de respecter la ligne du parti sur une question particulière, ou que celle-ci ne relève pas de la politique du parti et que ses députés sont libres de voter comme ils l’entendent.
Ce que nous pouvons conclure de cette omission, et ce que les Canadiens devraient savoir, c'est qu'il incombe à chaque parti de décider s'il va respecter le principe des votes libres et quand il va s'en servir.
Comment se fait-il alors que chaque parti ait eu recours aux votes libres à la Chambre? Comme je l'ai mentionné dans mon introduction, dans notre système de gouvernement responsable, je soupçonne que tous les partis s'entendent sur la nécessité de respecter une certaine discipline de parti quand sont mises aux voix des questions comme, par exemple, le budget principal des dépenses. Ce sont traditionnellement des questions de confiance. Cela dit, dans quelles circonstances les députés ont-ils pu jouir d'une certaine liberté de vote? Passons quelques exemples en revue.
Comme on peut le lire à la page 577 de l'ouvrage d'O'Brien et Bosc, on ne sait pas exactement quand le premier vote libre a eu lieu à la Chambre des communes, mais le premier tel vote digne de mention a eu lieu en 1946, dans le dossier des subventions laitières. Bien que la décision de s'opposer à l'intention du gouvernement d'éliminer les subsides laitiers ne soit pas nécessairement une question de conscience, elle a ouvert la voie aux votes libres sur plusieurs initiatives ministérielles clés dans les années 1960, 1970 et 1980. Le débat sur le drapeau national en 1964 s'est soldé en vote libre.
Dans le même ordre d'idées, comme l'a fait remarquer Ned Franks dans son article publié dans le numéro de novembre 1997 de Policy Options, les questions de la peine de mort et de l'avortement, présentées sous la rubrique des initiatives ministérielles, ont fait l'objet d'un vote libre par le Parti progressiste-conservateur et le Parti libéral au cours de ces trois décennies. Par exemple, maints votes libres ont eu lieu sur la peine de mort, notamment sur le projet de loi dont l'adoption mit fin à la peine de mort en 1967 et sur la motion rejetée qui cherchait à rétablir la peine de mort en 1987.
En général, les votes libres très médiatisés qui ont eu lieu depuis 1946 se limitent en grande partie aux questions de moralité et de conscience. Après les réformes importantes apportées aux initiatives parlementaires découlant du troisième rapport du comité spécial sur la Chambre des communes publié en 1985 — les dénommées réformes McGrath — il y a eu encore plus d'occasions de tenir des votes libres. Ces réformes ont donné lieu à une augmentation du nombre d'initiatives parlementaires présentées et débattues à la Chambre, entraînant une augmentation du nombre de votes libres. Mais surtout, ce sont les questions qui tiennent le plus à coeur aux députés et aux électeurs de leur circonscription.
Le gouvernement est assez fier du nombre record de projets de loi d'initiative parlementaire qui ont été adoptés sous sa direction. Je soutiens que le bilan du gouvernement en matière de votes libres, surtout dans les cas de conscience, est imbattable. Permettez-moi de citer deux exemples à l'appui.
Le projet de loi , présenté par mon collègue, le député d', proposait de modifier la Loi sur l'hymne national, en raison d'un problème de genre. Le vote à l'étape de la deuxième lecture sur le projet de loi présenté par le député d' sur l'identité de genre est un autre bon exemple. Le projet de loi a été adopté par le vote de 150 à 132 le 6 juin 2012, et 15 ministériels avaient voté différemment de la majorité de leur caucus.
Quelles caractéristiques de notre Parlement sont pertinentes dans le cadre de ce débat? Premièrement, notre système est calqué sur le modèle de Westminster, autrement dit sur les institutions parlementaires qui ont vu le jour au Royaume-Uni au cours des 800 dernières années. Le Parlement a le pouvoir législatif d'adopter des lois. Les mesures législatives doivent recevoir la sanction de chacune des parties constituantes du Parlement, à savoir la Chambre des communes, le Sénat et la Couronne.
Les pouvoirs exécutifs du gouvernement, autrement dit le pouvoir de mettre en oeuvre des politiques et des programmes gouvernementaux, sont officiellement conférés à la Couronne, mais ce sont en fait le et le Cabinet du parti au pouvoir qui les exercent. C'est le gouverneur en conseil, plus concrètement le gouverneur général, qui assume la fonction exécutive, en collaboration avec le premier ministre et le Cabinet et sur les conseils de ces derniers. Le rôle de l'exécutif est un aspect important du principe de gouvernement responsable, l'une des pierres angulaires des Parlements calqués sur le modèle de Westminster. Le premier ministre et le Cabinet doivent rendre des comptes et répondre de leurs actions à la Chambre des communes.
Autre caractéristique importante: le Parlement est la tribune du système de gouvernement représentatif. Les députés ont tous été élus par les électeurs d'une seule circonscription, qu'ils doivent représenter. En outre, règle générale, les députés ont fait campagne et ont été élus en tant que représentants d'un parti politique donné. Ils s'engagent donc envers leurs concitoyens et leur parti à respecter les objectifs généraux du parti qu'ils représentent.
Cela m'amène à parler d'un autre élément important de notre système parlementaire: la discipline de parti. Dans le cadre de cette pratique, on incite fortement les députés à respecter les positions du parti sur des questions d'une grande importance pour le parti. Cette pratique ne figure pas dans le Règlement, mais elle est essentielle puisqu'elle oblige le gouvernement en place à rendre des comptes. Elle permet aussi de faire connaître clairement à tous les Canadiens les positions de l'opposition officielle et des autres partis représentés à la Chambre. Somme toute, on forme des partis politiques pour atteindre des objectifs communs et pour faire respecter des valeurs fondamentales qui sont chères aux membres du parti. Pour que les partis puissent fonctionner, les députés doivent être solidaires et exprimer clairement la position du parti.
Je suis fier d'être membre d'un parti qui préconise l'adoption de politiques claires et qui défend les grandes valeurs canadiennes. Mon parti reconnaît que certaines questions sont d'une importance telle que les députés devraient avoir la liberté de voter selon leur conscience lorsqu'ils sont appelés à se prononcer sur celles-ci. Le gouvernement appuiera la motion, et j'ai bon espoir que tous les députés qui respectent le processus démocratique en feront autant.
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Monsieur le Président, j'ai eu l'occasion de parler de la motion, du moins en partie, lors du recours au Règlement, mais j'aimerais poursuivre ma réflexion.
Le débat de ce soir est très important, et je suis persuadé que les députés vont s'investir dans le débat.
J'ai eu bien de la chance, d'abord parce que les gens d'Inkster ont jugé bon de m'élire lors de plusieurs élections provinciales. J'ai pu être député à l'Assemblée législative du Manitoba pendant près de 19 ans. J'ai maintenant le grand privilège de siéger au Parlement du Canada à titre de député de Winnipeg-Nord, une circonscription environ quatre fois plus grande que celle d'Inkster. En effet, c'est un grand privilège, quel que soit le moment et le débat, de parler de questions qui comptent pour les gens que nous représentons, les Canadiens. Je suis très reconnaissant de pouvoir défendre leurs intérêts.
J'ai déjà participé à plusieurs débats sur la question qui nous occupe. Je me souviens d'un incident qui s'est produit à l'Assemblée législative du Manitoba lors d'un vote sur une question pour laquelle les députés étaient libres de voter comme ils l'entendaient. Trois députés étaient alors présents: le premier a voté pour, le deuxième a voté contre et le troisième s'est abstenu de voter.
Les votes libres surviennent beaucoup plus souvent que les gens ne le pensent, et j'estime que c'est une bonne chose. Je me souviens d'une conversation que j'ai eue avec des élèves du secondaire au sujet des votes, de ce que doivent faire les députés et des raisons pour lesquelles ils sont obligés de voter.
Les gens ne sont pas idiots, ils comprennent le système parlementaire et l'apprécient. À mon sens, c'est de loin le meilleur système au monde. J'ai peut-être un parti pris, mais je crois que c'est le système le plus efficace qui existe. Il faut toutefois tenir compte d'un certain nombre de choses.
En ce qui concerne ce groupe d'élèves que j'ai rencontré, nous avons eu une conversation très franche sur la façon dont les députés votent. Les députés doivent-ils voter selon une ligne de parti? Doivent-ils voter comme le voudraient leurs électeurs? Ou doivent-ils plutôt voter selon leur conscience? Si l'on examine chacune de ces questions, la réponse n'est pas aussi simple que certains voudraient le faire croire.
J'ignore combien de fois j'ai pris la parole à la Chambre pour parler de choses qui sont vraiment importantes pour moi. Il y a beaucoup de choses qui me tiennent à coeur. Je peux parler longuement de la pauvreté et de la négligence du gouvernement conservateur à cet égard.
Je poserais au parrain de la motion la question suivante. Si la question de la pauvreté me tient vraiment à coeur, n'est-ce pas là une question de conscience? Cela voudrait-il dire que les votes sur les questions liées à la santé ou à la pauvreté seraient fondés sur la conscience? Le député a donné un aperçu très limité des questions qui, à son avis, justifieraient que le vote se fasse selon la conscience. Devons-nous en déduire que les cas qu'il a cités sont les seuls à prendre en considération?
Je ne sais pas combien de fois j'ai eu l'occasion de parler de la santé. Cette question comporte une foule d'aspects différents, et plusieurs votes ont été tenus à ce sujet.
Un de mes collègues a fait allusion au budget. Qu'est-ce qu'un budget? C'est un document sur des décisions qui toucheront l'ensemble des Canadiens ou des personnes qui habitent au Canada. Le député ne serait-il pas d'avis qu'il s'agit là d'une question qui devrait être fondée sur la conscience?
Pour ce qui est des trois autres catégories, que fait-on des votes soumis à la discipline de parti? Cela fait partie des types de vote prévus dans le système parlementaire. Il serait très difficile de ne pas pouvoir compter sur l'appui de nos collègues parlementaires qui appartiennent au même parti politique lors de votes importants comme les votes sur le budget et les votes de confiance. Je puis assurer aux députés que le reconnaîtrait l'importance des votes de confiance, et je crois que même le parrain de cette motion serait d'accord. Il s'agit essentiellement de votes soumis à la discipline de parti. Cela fait partie des autres types de votes qui ont lieu fréquemment.
Il y a ensuite mon type de vote préféré, c'est-à-dire celui qui sert les intérêts de nos électeurs. Bon nombre de nos électeurs diraient que nous devrions voter comme eux voteraient. Si 75 % ou 80 % de nos électeurs disent que nous devrions voter d'une certaine façon, alors nous devrions le faire. Le député d'en face proposerait-il une approche semblable? Certains parlementaires pourraient préconiser ce genre d'approche.
Il y a des exceptions dans chacune de ces différentes catégories.
Nous avons eu une excellente discussion avec un groupe d'élèves du secondaire. Cependant, la question n'est pas aussi simple qu'elle semble l'être à première vue. Dans l'esprit de certains, nous ne devrions voter qu'en conformité avec la ligne de notre parti politique, un point c'est tout. D'autres sont d'avis que nous devrions voter en fonction de la volonté de nos électeurs. Par conséquent, si 80 % de nos concitoyens disent que nous devrions réduire les impôts de moitié, eh bien, c'est ce que nous devrions faire sans poser de questions. Il y aurait toutefois lieu de s'interroger sur les mécanismes ayant amené un pourcentage aussi élevé de personnes à demander une chose pareille.
De nombreuses personnes soutiendraient que nous devrions automatiquement voter en conformité avec la volonté de nos électeurs. Le même principe s'applique aux votes sur les questions de conscience.
J'aimerais beaucoup entendre ce que les autres députés ont à dire sur ces trois questions. Le chef du Parti libéral a été très franc à ce sujet. Le député de a énuméré une longue liste de choses que le chef du Parti libéral a fait connaître aux députés. Il s'agit, entre autres, de la nécessité que les projets de loi d'initiative parlementaire fassent l'objet de votes libres et de l'importance de documents comme la Charte des droits et libertés, qui protège les minorités.
Un court débat d'une heure ne nous permettra pas de parler de nombreuses autres questions. Ce serait formidable de pouvoir débattre davantage de ces choses. J'aime beaucoup le dossier de la réforme démocratique, comme les 3 000 délégués libéraux qui ont assisté au congrès à Montréal. Ils ont voté en faveur de changements...