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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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42e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 047

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 3 mai 2016




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

VOLUME 148
NUMÉRO 047
1re SESSION
42e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 3 mai 2016

Présidence de l'honorable Geoff Regan


    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

(1000)

[Français]

Le vérificateur général du Canada

    J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport du printemps 2016 du vérificateur général du Canada.
    Conformément à l'alinéa 108(3)g) du Règlement, ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent des comptes publics.

[Traduction]

Réponse du gouvernement à des pétitions

    Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à quatre pétitions.

Les comités de la Chambre

Pêches et océans

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent des pêches et des océans, qui porte sur l'étude du Budget principal des dépenses pour l'exercice 2016-2017.

[Français]

La Déclaration canadienne des droits

     — Monsieur le Président, j'aimerais remercier la députée de Desnethé—Missinippi—Churchill River qui donne son appui à ce projet de loi. Celui-ci demande que l'on modifie la Déclaration canadienne des droits pour reconnaître à tous un logement adéquat à un prix raisonnable et sans obstacle injustifié.
    Avoir un toit sur la tête, c'est fondamental pour le bien-être. Une personne qui vit dans la rue ne sait pas où elle va coucher ce soir-là, si elle va manger, où elle va pouvoir se réfugier par grand froid. Elle a beaucoup plus de difficulté à se trouver un emploi et vit en général une très grande précarité. Les résultats se font ressentir sur sa santé physique et mentale.
    Au Canada, au moins 235 000 personnes vivent cette situation chaque année. Le Canada a reconnu le droit au logement à l'international; il doit aussi le reconnaître dans ses propres lois fédérales.

     (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

(1005)

Loi sur le logement sûr, adéquat, accessible et abordable

     — Monsieur le Président, cette fois, j'aimerais remercier ma collègue de North Island—Powell River qui donne son appui à ce projet de loi important.
    Ce projet de loi demande au gouvernement d'établir une stratégie pancanadienne du logement. Le Canada est le seul pays du G8 à ne pas en avoir.
    Le gouvernement actuel mentionne une stratégie, mais le processus pour mettre en place ladite stratégie est crucial. La consultation des provinces, territoires, municipalités, collectivités autochtones et des groupes en logement n'est pas suffisante. Il est trop facile de les consulter et ensuite d'ignorer les recommandations qui ne font pas l'affaire du gouvernement.
    Il faut plutôt travailler en partenariat pour arriver à une entente satisfaisante et assez flexible pour répondre aux besoins variés de nos différentes régions.

     (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

[Traduction]

Loi sur la non-discrimination génétique

    — Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur de proposer que le projet de loi S-201, Loi visant à interdire et à prévenir la discrimination génétique, soit lu pour la première fois. Je tiens à remercier mon collègue, le député de Madawaska—Restigouche, de son appui à cet égard.
    Ce projet de loi vise à créer une loi sur la non-discrimination génétique qui interdirait à tous les fournisseurs de services d'obliger une personne à subir un test génétique ou à en communiquer les résultats. Il prévoit également une procédure de traitement des plaintes pour les employés fédéraux qui se voient imposer des mesures disciplinaires à cause de tests génétiques et ajouterait les caractéristiques génétiques aux motifs de discrimination interdits en vertu de la Loi canadienne des droits de la personne. Les mesures de protection prévues dans le projet de loi permettraient aux Canadiens de profiter des avancées médicales dans le domaine des tests génétiques sans crainte de représailles à leur endroit ou envers leur famille. Le projet de loi permettrait aux Canadiens d'avoir les outils nécessaires pour être en meilleure santé.

    (La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la première fois.)

Pétitions

Les droits de la personne

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter une pétition électronique demandant au gouvernement fédéral d'instituer une enquête judiciaire indépendante sur le traitement des détenus afghans par le Canada depuis 2001. Lancée par Craig Scott, ex-député de Toronto—Danforth et professeur à la faculté de droit Osgoode Hall, cette pétition est signée par plus de 700 Canadiens qui réclament une enquête sur les faits ainsi que sur la conduite et les décisions des autorités canadiennes. Les pétitionnaires veulent également que soit publié un rapport établissant si le Canada s'est conformé au droit international en matière de droits de la personne. Le gouvernement aura 45 jours pour fournir une réponse écrite à la pétition déposée aujourd'hui. Je sais que de nombreux Canadiens espèrent qu'il prendra ces préoccupations au sérieux.

L'aide médicale à mourir

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui deux pétitions, l'une signée par des gens de ma circonscription et de la région avoisinante, l'autre signée par des résidants de la Colombie-Britannique, de Sherbrooke, au Québec, de St. Catharines et d'autres régions de la péninsule du Niagara. Tous les pétitionnaires demandent au gouvernement de rédiger un projet de loi comportant des mesures de protection adéquates pour les personnes vulnérables, en particulier celles qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale, préservant la liberté de conscience des travailleurs de la santé et des établissements de soins et mettant les jeunes de moins de 18 ans à l'abri du suicide assisté par un médecin.

La sécurité publique

    Monsieur le Président, comme cette semaine est la Semaine de la responsabilisation de l'Iran sur la Colline, il est opportun que je prenne la parole aujourd'hui pour présenter une pétition lancée par la Coalition canadienne contre le terrorisme et signée par des dizaines de Canadiens qui demandent au gouvernement de maintenir la République islamique d'Iran sur la liste des États soutenant le terrorisme, conformément à l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États.
(1010)

[Français]

Le logement

    Monsieur le Président, vous ne serez peut-être pas surpris d'apprendre que j'ai ici une pétition au sujet du logement qui demande au gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces, les territoires, les municipalités, les partenaires communautaires et d'autres acteurs, de maintenir et d'élargir le droit au logement et l'investissement fédéral dans le logement social. Cela inclurait le renouvellement du financement des ententes à long terme. Certaines sont déjà terminées et les gens se retrouvent dans le besoin. J'ai quelques centaines de signatures de personnes qui demandent au gouvernement de porter une attention particulière à cela.

[Traduction]

La sécurité publique

    Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter. La première porte sur le même sujet que la pétition présentée par mon collègue de Parry Sound—Muskoka. Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada de continuer de désigner la République islamique d'Iran comme étant un pays qui appuie le terrorisme, conformément à l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États, tant et aussi longtemps que le régime iranien continuera de parrainer le terrorisme.

La justice

    Monsieur le Président, les signataires de la deuxième pétition invitent la Chambre des communes à adopter un projet de loi qui reconnaîtrait l'enfant à naître en tant que victime distincte lorsque celui-ci est blessé ou tué lors de la perpétration d'un acte de violence contre sa mère, de sorte que des accusations puissent être portées à l'égard de deux crimes plutôt que d'un seul.

La conduite avec facultés affaiblies

    Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par des électeurs de Langley, en Colombie-Britannique. Ces gens estiment que les lois en matière de conduite avec facultés affaiblies sont trop clémentes et qu'elles doivent être modifiées. Ils demandent au Parlement de faire en sorte que l'infraction de conduite avec facultés affaiblies causant la mort devienne un homicide involontaire coupable commis au volant d'un véhicule automobile. Ils croient que les personnes reconnues coupables ne devraient pas avoir le droit de conduire et qu'une peine obligatoire minimale de cinq ans devrait être imposée à ceux qui tuent quelqu'un parce qu'ils ont conduit en état d'ébriété.

Questions au Feuilleton

    Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui aux questions nos 75 et 77.

[Texte]

Question no 75 --
M. Mark Strahl:
     En ce qui concerne le « Rapport spécial sur le saumon sauvage de l’Atlantique dans l’Est du Canada » préparé par le Comité consultatif sur le saumon de l’Atlantique du ministère des Pêches et des Océans: a) quelles analyses scientifiques le ministère des Pêches et des Océans a-t-il menées pour chacune des 61 recommandations que contient le rapport; b) quelles recommandations indiquées en a) ont été mises en œuvre, en totalité ou en partie; c) combien a coûté la mise en œuvre des recommandations indiquées en b), à la fois pour les coûts récurrents et les coûts non récurrents; d) quand les autres recommandations du Comité consultatif sur le saumon de l’Atlantique sont-elles prévues être mises en œuvre, en totalité ou en partie?
L’hon. Hunter Tootoo (ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, Lib.):
    Monsieur le Président, en réponse à la partie a) de la question, une analyse initiale de toutes les recommandations a été entamée par des scientifiques et des experts du ministère des Pêches et des Océans afin de déterminer les preuves scientifiques disponibles, les activités en cours, les points de vue des intervenants, ainsi que les rôles et les responsabilités des diverses autorités.
    En réponse à la partie b) de la question, une analyse plus détaillée du rapport est en cours. L'examen initial indique que les recommandations reflètent, dans une large mesure, un bon nombre des activités en cours du ministère à l'appui de la conservation du saumon. À ce titre, beaucoup d'entre elles sont déjà mises de l'avant ou le seront en 2016 et sur une base continue par la suite. Parmi les points saillants, on compte ce qui suit: a) examiner la Politique de conservation du saumon atlantique sauvage en collaboration avec un membre du Comité consultatif du saumon atlantique — cet examen permettra d'aborder un certain nombre de recommandations clés formulées dans le rapport; b) poursuivre les efforts du ministère visant à réduire la pêche internationale par l'entremise de forums comme l'Organisation pour la conservation du saumon de l'Atlantique Nord (OCSAN), particulièrement les pêches au large de l'ouest du Groenland; c) poursuivre l'engagement avec la France (Saint-Pierre-et-Miquelon) afin de réduire ses prises et réitérer le fait que le Canada aimerait que la France participe à l'OCSAN; d) créer des occasions de travail collaboratif avec des chercheurs universitaires, des organisations non gouvernementales et des chercheurs du secteur privé dans le but de déceler et d'établir des priorités et d'encourager les possibilités de collaboration et de partage des renseignements concernant la recherche sur le saumon sauvage de l'Atlantique; e) mobiliser les provinces et les Premières Nations en ce qui concerne les recommandations liées à leurs intérêts et à leurs instances; f) explorer l'utilisation possible d'innovations dans les domaines des technologies et du renseignement afin d'améliorer et de renforcer les efforts de mise en application; g) utiliser le cadre de l'approche de précaution et ses divers éléments pour déterminer les niveaux de prises; h) collaborer avec des groupes comme le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) sur la recherche scientifique concernant la composition des pêches de stocks mélangés et les estimations génétiques; et i) poursuivre l'évaluation des approches annuelles et pluriannuelles de gestion des stocks au cas par cas et province par province, dans le cadre d'ateliers et de processus de consultations annuels.
    Concernant la partie c) de la question, le rapport du Comité consultatif ministériel sur le saumon de l'Atlantique et ses recommandations concordent généralement avec le programme de travail actuel de Pêches et Océans Canada pour la conservation du saumon sauvage de l'Atlantique. À ce titre, on s'attend à ce qu'un bon nombre des recommandations puissent être mises en œuvre progressivement, à court et à long terme, dans les limites des ressources ministérielles existantes.
    Au sujet de la partie d) de la question, le ministère prendra des mesures afin de mettre en œuvre les recommandations dans le cadre de son mandat, lorsque ces recommandations sont appuyées par les meilleurs renseignements scientifiques disponibles. Dans certains cas, le ministère élaborera et examinera des options pour déterminer la meilleure voie à suivre pour mettre en œuvre la recommandation. Il est entendu que dans certains cas d'autres ministères, instances et partenaires peuvent jouer des rôles principaux et de soutien en ce qui a trait aux mises en œuvre. En ce qui concerne les recommandations comme celles portant sur la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles (ASR), le ministère continuera à collaborer avec des partenaires et groupes autochtones, tout en veillant à ce que l'accès à la pêche ASR ne soit pas compromis indûment.
Question no 77 --
L'hon. Gerry Ritz:
     En ce qui concerne la ministre du Commerce international et les négociations en cours avec les États-Unis sur le bois d’œuvre: a) à quel moment les négociations officielles ont-elles commencé en vue d’un nouvel Accord sur le bois d’œuvre; b) combien de séances de négociation ont eu lieu à ce jour; c) quelles personnes ont participé aux négociations au Canada, aux États-Unis et ailleurs?
L’hon. Chrystia Freeland (ministre du Commerce international, Lib.):
    Monsieur le Président, en réponse à la partie a) de la question, l’Accord sur le bois d’œuvre résineux est au centre de l’attention depuis que je suis entrée en fonction le 4 novembre 2015.
    Les négociations et les discussions entre les responsables d’Affaires mondiales Canada et les responsables du Bureau du représentant américain au Commerce ont eu lieu sur une base régulière. Je soulève régulièrement cette question auprès de mes homologues aux États-Unis et, en collaboration avec mon secrétaire parlementaire, je continue de mener de vastes consultations auprès des intervenants nationaux, y compris les représentants de l’industrie et les gouvernements provinciaux, afin de m’assurer de l’atteinte d’un résultat qui profitera à l’ensemble du Canada.
    Lors de la visite d’État du 10 mars 2016 à Washington D.C., le premier ministre et le président américain ont exprimé publiquement leur intérêt à l’égard d’un accord à long terme. Les deux leaders ont chargé leurs ministres d’explorer intensivement toutes les options et de remettre un rapport dans un délai de 100 jours sur les principaux éléments qui nous permettront d’aborder la question du bois d’œuvre résineux.
    En ce qui a trait à la partie b) de la question, les discussions comprennent des appels téléphoniques réguliers et des rencontres régulières en personne. En plus des réunions bilatérales tenues à Washington D.C., j’ai également tenu des réunions bilatérales et discuté de la question avec mes homologues américains pendant mes séjours à Davos, en Suisse, et à Nairobi, au Kenya.
    En ce qui concerne la partie c) de la question, outre moi-même, divers employés et responsables du ministère du Commerce international ont participé à ce dossier, notamment: Christine Hogan, sous-ministre du Commerce international; Kirsten Hillman, sous-ministre adjointe intérimaire, Secteur des négociations et des accords commerciaux; Martin Moen, directeur général, Direction générale de l’Amérique du Nord et de l’investissement; Aaron Fowler, directeur, Direction du bois d’œuvre résineux; Gilles Gauthier, ministre, Affaires économiques, ambassade du Canada aux États-Unis d’Amérique; Colin Bird, ministre conseiller, Politique commerciale et économique, ambassade du Canada aux États-Unis d’Amérique; Michael Owen, avocat principal et directeur adjoint, Direction du droit des services d’investissement; Alexander Monchez, agent principal de la politique commerciale, Direction du bois d’œuvre résineux; et Zachary Archambault, agent principal de la politique commerciale, Direction du bois d’œuvre résineux.
    Lorsqu’il traite les documents parlementaires, le gouvernement applique la Loi sur la protection des renseignements personnels et les principes de la Loi sur l’accès à l’information. Certains renseignements concernant les noms des délégués étrangers n’ont pas été communiqués, car il s’agit de renseignements personnels ou leur divulgation pourrait porter atteinte à la conduite des affaires internationales.

[Traduction]

Questions transformées en ordres de dépôt de documents

    Monsieur le Président, de plus, si les questions nos 74, 76, 78, 79, 82 et 83 pouvaient être transformées en ordres de dépôt de documents, les documents seraient déposés immédiatement.
    Le Président: D'accord?
    Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 74 --
M. Mark Strahl:
     En ce qui concerne l’engagement pris par Pêches et Océans Canada dans son Rapport sur les plans et priorités de 2016-2017 en vue de faire augmenter la quantité d’aires marines et côtières protégées à cinq pour cent d’ici 2017 et dix pour cent d’ici 2020, en partie en favorisant la désignation des récifs spongieux des détroits d’Hécate et de la Reine Charlotte, de la zone Anguniaqvia niqiqyuam, du banc de Sainte Anne, du chenal Laurentien et du banc des Américains à titre d’éventuelles Zones de protection marines (ZPM) aux termes de la Loi sur les océans: a) comment le choix de ces cinq zones a-t-il été fait; b) quelles sont les analyses scientifiques qui ont été réalisées concernant le choix de ces cinq zones; c) quelles sont les activités que Pêches et Océans Canada propose d’interdire dans chacune des zones désignées; d) quel impact économique la désignation de ces zones à titre de ZPM devrait-elle avoir; e) est-ce que Pêches et Océans Canada a mené des consultations auprès de ceux qui pourraient subir les contrecoups économiques de la désignation de ces nouvelles ZPM?
    (Le document est déposé)
Question no 76 --
M. Scott Reid:
     En ce qui concerne la Division E de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), dans la province de la Colombie-Britannique, de 2011 à 2015 inclusivement: a) combien des véhicules suivants étaient équipés de défibrillateurs externes automatisés (DEA), ventilés par année, (i) tous les véhicules, (ii) véhicules de patrouille, (iii) véhicules de supervision, (iv) véhicules marins, (v) autres véhicules; b) pour chaque territoire de compétence et détachement de la GRC, ventilés par année, (i) combien de véhicules étaient équipés de DEA, (ii) à combien d’occasions des véhicules de la GRC ont été déployés en réponse à des appels visant principalement la réception d’assistance médicale, (iii) à combien d’occasions des agents de la GRC ont été les premiers intervenants des services d’urgence à arriver sur les lieux lorsque l’appel visait principalement la réception d’assistance médicale, (iv) quel est le nombre total d’occasions où le DEA d’un véhicule de la GRC a été utilisé, (v) en ce qui concerne les occasions où le DEA d’un véhicule de police a été utilisé, combien de sujets ont survécu, (vi) quel est le nombre total d’occasions où un agent de la GRC a tiré de son arme à décharge électrique (ADE), (vii) quel est le nombre total d’occasions où le DEA d’un véhicule de la GRC a été utilisé après qu’un agent de la GRC a tiré de son ADE; c) quels sont les coûts annuels associés aux ADE des véhicules de police et à quoi servent ces coûts, ventilés par année; d) quel a été le coût financier de tous les ADE visés en a); e) quels sont les lois, politiques et règlements qui gouvernent l’utilisation des DEA par la GRC en Colombie-Britannique?
    (Le document est déposé)
Question no 78 --
M. John Nater:
     En ce qui concerne les dépenses fédérales dans la circonscription de Perth—Wellington pour les exercices de 2011-2012 à 2015-2016, quels sont les subventions, prêts, contributions et contrats accordés par le gouvernement, ventilés par (i) ministère et organisme, (ii) municipalité, (iii) nom du bénéficiaire, (iv) montant reçu, (v) programme en vertu duquel la dépense a été effectuée, (vi) date?
    (Le document est déposé)
Question no 79 --
M. Blaine Calkins:
     En ce qui concerne la décision du gouvernement de réinstaller 25 000 réfugiés syriens: a) quelle est la valeur totale de l’argent versé à chaque réfugié à son arrivée au Canada; b) quelle est la valeur totale de l’argent que le gouvernement remet à chaque réfugié mensuellement; c) quelle est la date de fin prévue de l’aide financière du gouvernement à chaque réfugié; d) quel est le coût mensuel de l’hébergement temporaire pour tous les réfugiés; e) quel est le coût de toutes les subventions remises aux réfugiés syriens une fois qu’ils ont trouvé un logement permanent?
    (Le document est déposé)
Question no 82 --
M. Guy Caron:
     En ce qui concerne le programme PromoScience du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada pour l'année 2015: a) quels organismes ont reçu du financement; b) quel était le montant du financement reçu par ces organismes, au total et ventilé par organisme; c) d'où proviennent ces organismes qui ont reçu du financement, ventilé par ville?
    (Le document est déposé)
Question no 83 --
Mme Niki Ashton:
     En ce qui concerne le recours, par le gouvernement, à des services d’aide temporaire et à des contrats: a) avec quelles entreprises le gouvernement conclut-il des contrats pour obtenir des services d’aide temporaire, ventilées par ministère et organisme; b) quelle est la durée moyenne d’emploi des travailleurs temporaires, ventilée par ministère et organisme; c) quels sont les mécanismes utilisés par le gouvernement pour effectuer le suivi du travail des entrepreneurs dans l’ensemble des ministères et des organismes; d) combien d’employés temporaires ont été embauchés par le gouvernement, ventilé par (i) province et territoire, (ii) année, de 1999-2000 à ce jour; e) combien d’argent le gouvernement consacre-t-il en moyenne aux (i) employés temporaires, en termes d’équivalents temps plein annuels, par classification, (ii) employés permanents, en termes d’équivalents temps plein annuels, par classification; f) quel est le pourcentage des changements des dépenses consacrées aux services d’aide temporaire et aux salaires des employés nommés pour une durée indéterminée, des employés nommés pour une durée déterminée et des employés temporaires de 2008-2009 à 2014-2015 (en dollars non ajustés, année de référence 1999-2000); g) quelles sont les raisons fournies pour recourir à des services d’aide temporaire, ventilées par année, à compter de 2007-2008; h) quels ont été les pourcentages des contrats octroyés pour l’obtention de services d’aide temporaire pour chacune des catégories de coûts de moins de 20 000 $, de 20 000 $ à 60 000 $, ainsi que de plus de 60 000 $, ventilés par (i) motifs d’embauche, (ii) année, à partir de 2007-2008; i) quel est l’âge moyen des employés temporaires embauchés, ventilé par (i) région, (ii) ministère ou organisme, (iii) classification?
    (Le document est déposé)

[Traduction]

    Enfin, monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
    Le Président: D'accord?
    Des voix: D'accord.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 2 mai, de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, je suis ici aujourd'hui pour parler d'une question qui touche la vie de chaque Canadien — la façon dont nous mourons. Ce n'est pas une question dont nous aimons habituellement discuter, mais, compte tenu de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter, cette question figure maintenant à l'avant-plan du programme du gouvernement en matière de politique et de santé. Le 6 février 2015, la Cour suprême du Canada a déclaré à l'unanimité que l'interdiction de l'aide médicale à mourir prévue dans le Code criminel était inconstitutionnelle. Les modifications entreront en vigueur le 6 juin prochain. Tous les gouvernements sont en train de préparer une réponse.
    Les consultations auprès du public ont permis d'établir clairement que la mesure portant sur l'aide médicale à mourir jouit d'un appui généralisé. Selon un sondage Angus Reid dont les résultats ont été publiés plus tôt au cours du mois, 90 % des Canadiens interrogés estiment qu'une forme quelconque d'aide médicale à mourir devrait être autorisée. Le gouvernement prend au sérieux la décision de la Cour suprême du Canada.
    Il s'agit d'une question très délicate qui touche profondément tous les Canadiens, et nous comprenons que l'application de la nouvelle mesure législative devra faire l'objet d'un examen minutieux. C'est pourquoi le gouvernement a établi un cadre de travail fondé sur l'empathie, sur des mesures de protection appropriées à l'intention des Canadiens vulnérables et sur la nécessité d'offrir un choix. Les critères d'admissibilité, les mesures de sauvegarde de fond et de forme, ainsi que les recommandations relatives au suivi et à la production de rapports ont fait l'objet d'un examen exhaustif.
     Toutefois, je souhaite également qu’il soit clair que l’aide médicale à mourir n’est pas le seul choix pour une mort paisible dans la dignité. Peu importe l’opinion des gens quant aux enjeux concernant l’aide médicale à mourir, ils conviennent tous que nous devons améliorer les soins palliatifs. L'expression « soins palliatifs » désigne une approche multidisciplinaire aux soins de santé pour les particuliers et les familles qui vivent avec une maladie mortelle, ainsi que d'autres maladies. Les soins palliatifs visent à améliorer la qualité de vie grâce à la prévention et au soulagement des souffrances physiques et psychologiques, et les plans de traitement sont adaptés aux besoins du patient et de sa famille.
    Les rapports sur l’état des soins palliatifs au Canada suggèrent que la prestation des soins palliatifs et de fin de vie, ainsi que l’accès à ceux-ci, varient grandement dans l’ensemble du pays en raison des différences démographiques régionales, des besoins sociaux, de l’organisation des soins de santé et du niveau de financement.
    Lorsqu’on leur demande, la plupart des Canadiens indiquent qu’ils préféreraient mourir à la maison, en présence de leurs proches. Il faut clairement combler ce fossé et que tous les ordres de gouvernement tiennent compte des besoins et des désirs des Canadiens à la fin de leur vie, soit de recevoir les soins de compassion appropriés en temps opportun. Au fil des années, de nombreuses organisations ont soulevé à maintes reprises les lacunes en matière de soins palliatifs. De toute évidence, les Canadiens comptent sur leurs gouvernements pour corriger ces lacunes.
    Par le passé, les soins palliatifs au Canada étaient offerts principalement dans les hôpitaux par des spécialistes, et en grande partie à des patients atteints de cancer qui en étaient aux derniers stades de la maladie. Bien que beaucoup les associent encore aux hôpitaux et aux patients atteints de cancer exclusivement, les soins palliatifs peuvent être offerts à divers patients et dans divers milieux, y compris dans des établissements de soins de longue durée, voire à domicile.
    On estime que le système de santé est actuellement incapable de fournir des soins palliatifs à 70 % de ceux qui pourraient en bénéficier. Voilà pourquoi le gouvernement prend des mesures immédiates pour remédier à cette insuffisance et collabore avec les provinces et les territoires pour que plus de Canadiens aient accès aux options de soins qui sont adaptées à leurs besoins au moment où ils en ont besoin.
    Le gouvernement finance actuellement la Fondation Pallium du Canada pour appuyer la formation en soins palliatifs des travailleurs de première ligne du milieu de la santé. Cette initiative vient compléter une initiative antérieure appelée Aller de l'avant, qui vise à créer une approche palliative intégrée dans l'ensemble du système de santé et auprès d'un éventail de fournisseurs de soins et de milieux.
    Le gouvernement fédéral soutient également de nombreuses initiatives pour sensibiliser la population: éducation et formation des professionnels de la santé, pratiques nationales exemplaires, normes et recherche. Les investissements fédéraux dans la recherche approfondissent et élargissent également la compréhension des problèmes liés aux soins de fin de vie et la meilleure façon d'y remédier.
(1015)
    Le gouvernement fédéral a récemment annoncé qu'il affectera 14 millions de dollars sur deux ans à la Fondation canadienne pour l'amélioration des services de santé afin de soutenir la recherche appliquée sur les services de santé et les travaux de la Fondation en vue de rationaliser le système de santé, y compris en ce qui concerne les soins palliatifs. Dans le budget de 2016, le gouvernement s'est également engagé à faciliter l'accès aux prestations de compassion, tout en en rendant les modalités plus flexibles et plus inclusives pour les personnes qui prennent soin d'un proche gravement malade, et à assouplir les modalités d'accès aux prestations de congé parental afin de mieux tenir compte des situations familiales et professionnelles particulières.
    À l'instar des autres services de santé, la prestation de soins palliatifs relève principalement des provinces et des territoires. Même si chaque province et chaque territoire offrent des soins palliatifs et que certains gouvernements vont de l'avant en adoptant des cadres ou des stratégies, il y a de grands écarts au sein même des administrations et d'une administration à l'autre. Bon nombre de provinces et de territoires essaient d'intégrer les soins palliatifs à d'autres types de soins à l'échelle des établissements et des services. Néanmoins, la capacité des Canadiens d'accéder à des soins palliatifs demeure variable et dépend de l'endroit où ils vivent.
    Le gouvernement du Canada s'est engagé à élaborer des mesures non législatives pour favoriser l'amélioration d'une gamme complète d'options relativement aux soins en fin de vie. Dans les discussions avec les provinces et les territoires en vue de conclure un nouvel accord sur la santé, le gouvernement libéral s'est engagé à verser 3 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années pour améliorer les soins à domicile, y compris les soins palliatifs.
    Je crois fermement que mon expérience personnelle des soins de fin de vie n'est pas unique et qu'elle ressemble à celle de milliers de Canadiens. Je n'ai jamais oublié le décès de mon grand-père, John, de ma mère, Gaye, et de ma tante Babs. Ces personnes étaient des piliers dans ma vie. Ma mère et ma tante Babs m'ont appris l'enthousiasme, la détermination et le don de soi, mais aussi ce que signifie être femme. Elles ont toutes deux marqué profondément chaque jour de ma vie. Si je suis ici aujourd'hui, c'est grâce à l'héritage d'excellence qu'elles m'ont laissé.
    Ces deux femmes remarquablement fortes qui étaient dévouées à leur famille et à leur collectivité ont terriblement souffert des maladies qui les ont terrassées. J'ai appris ce que c'est que dormir par terre jour après jour parce qu'elles avaient peur d'être seules. J'ai appris à administrer de la morphine et de l'Ativan ainsi qu'à leur en donner davantage au moindre gémissement parce que cela voulait dire que leur corps était déchiré par la douleur.
    J'ai appris à monter et à baisser un lit d'hôpital. J'ai découvert l'importance des soins palliatifs et de l'accès à ceux-ci, mais j'aurais préféré ne jamais devoir appendre tout cela. J'ai également découvert que, pendant les derniers jours de leur vie, la douleur ne leur avait pas laissé un moment de répit. La dignité avait fait place à une terrible incertitude. Il n'y avait aucune noblesse dans toute cette souffrance. J'ai découvert la pitié.
    Je suis fière de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour exprimer mon appui à ce projet de loi essentiel. Non seulement il donne suite à la décision rendue par la Cour suprême du Canada en modifiant le Code criminel, mais il fournit aussi un excellent cadre pour faciliter l'adoption des changements nécessaires dans notre système de santé, conformément à la décision de la Cour.
    Le gouvernement a écouté les Canadiens. Le gouvernement a écouté les experts. Nous avons élaboré une approche qui, à notre sens, tient compte de leurs commentaires. Il est maintenant temps de faire adopter cette mesure législative afin que les particuliers, les familles et les professionnels de la santé puissent avoir plus d'options en matière de soins de fin de vie, y compris l'aide médicale à mourir.
(1020)
    Madame la Présidente, je tiens à remercier ma collègue d'avoir décrit son expérience avec sensibilité. Comme elle l'a dit, beaucoup de gens ont vécu des périodes difficiles de ce genre.
    J'ai une question à poser. Hier, la ministre a déclaré à la Chambre qu'un montant de 3 milliards de dollars était prévu pour les soins palliatifs; pourtant, il n'y a rien de tel dans le budget. La députée peut-elle expliquer d'où proviendront ces fonds et comment ils seront attribués?
    Madame la Présidente, le budget prévoit bel et bien un investissement de 3 milliards de dollars dans les soins à domicile. Comme la députée le sait peut-être, la ministre a parlé à plusieurs reprises, à la Chambre, de ses négociations avec les provinces et les territoires sur l'établissement de ce cadre pour les soins de santé en général partout au Canada.
    Comme je l'ai dit dans mon intervention, ce dossier relève principalement des provinces et des territoires, mais il incombe au gouvernement fédéral de collaborer avec eux pour trouver la façon optimale d'aller de l'avant, dans l'intérêt des Canadiens.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie la députée de son témoignage très émouvant par rapport à ce dossier.
    Aux paragraphes 13 et 14 de l'arrêt dans la cause Carter, la Cour suprême du Canada parle d'un choix cruel que doivent faire les patients de maladies dégénératives. En vertu du projet de loi actuel du gouvernement, ils ne peuvent pas, par exemple, donner des directives au préalable. Ils sont donc condamnés à choisir entre mourir prématurément ou souffrir le reste de leur vie, parce qu'ils ne peuvent pas donner les conditions dans lesquelles ils pourraient avoir accès à l'aide médicale à mourir.
    Pourquoi cette recommandation a-t-elle été rejetée par le gouvernement? La députée pense-t-elle que cela pourrait être modifié à l'étape de l'étude en comité?
(1025)

[Traduction]

    Madame la Présidente, il s'agit essentiellement de trouver le juste équilibre entre l'arrêt dans la cause Carter et les mesures prises par le gouvernement. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons consulté la population et les spécialistes. Le 6 juin s'en vient très vite, et nous avons trouvé la solution qui convient le mieux pour l'instant.
    La députée sait probablement que nous nous sommes engagés à étudier trois ou quatre autres aspects, dont la question des directives préalables. Je crois que nous nous sommes engagés à nous pencher sur la question. Je remercie la députée d'en face de ce qu'elle fait dans ce dossier.
    Madame la Présidente, bien des députés ont dit que le gouvernement n'imposait pas suffisamment aux différents établissements médicaux provinciaux une façon de mettre en oeuvre le projet de loi C-14. Les commentaires de ce genre me font penser à ceux qui se demandent comment appliquer les dispositions législatives sur les bouleversements climatiques dans les provinces alors que les gouvernements provinciaux ont déjà commencé à étudier la question.
    Compte tenu de ce que le Québec a déjà fait dans ce dossier, la députée pourrait-elle nous parler du rôle du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux quant à l'application du projet de loi?
    Madame la Présidente, le gouvernement fédéral a un rôle déterminant à jouer, en collaboration avec les provinces et les territoires. Les discussions avec les provinces et les territoires permettront de répondre à bien des questions. Les pratiques exemplaires du monde entier continueront d'être étudiées et de guider la mise en oeuvre du projet de loi.
    Je ne crois pas que le gouvernement fédéral doive être prescriptif. Son rôle consiste plutôt à aider les provinces et les territoires à élaborer un cadre stratégique correspondant à leur propre situation en leur fournissant les outils nécessaires. J'ai dit tout à l'heure que l'accès aux soins palliatifs dépend de la région où l'on vit. Les conditions géographiques sont parfois déterminantes. Il faut donc étudier les nombreuses options qui s'offrent à nous.
    Madame la Présidente, je suis reconnaissante de pouvoir ajouter ma voix à la discussion sur le projet de loi C-14, sur l'aide médicale à mourir.
    La Cour suprême du Canada a imposé ce qui me semble un délai insuffisant à la Chambre pour cette mesure législative parce qu'elle a conclu que le Code criminel du Canada est inconstitutionnel lorsqu'il érige en infraction le fait de causer la mort d'une personne qui consent à mourir ou d'aider une personne à mettre fin à ses jours.
    Je me suis entretenue la semaine dernière avec un électeur très inquiet qui fréquentait la faculté de droit lorsque la Charte a été édictée. Il a dit que les professeurs de droit à l'époque ont garanti à une classe de finissants troublés que ce qui se passe aujourd'hui ne se produirait jamais.
    Nous en sommes maintenant à un point où, en tentant de garantir les droits et les libertés individuels en vertu de la Charte, nous mettons en péril les droits et les libertés d'autrui. Il faudrait un mélange de sagesse et d'abnégation pour faire la part entre ce qui est préférable pour soi-même et ce qui est préférable pour autrui. Ce n'est pas parce que nous pouvons faire quelque chose que nous devons le faire.
    Or, si nous devons effectivement prendre une décision à ce sujet, je crois qu'il serait sage de jeter un coup d'oeil à ceux qui l'ont déjà prise et qui regrettent leur choix. Il faudrait pour ce faire tirer des leçons de l'histoire récente plutôt que de prétendre que ce que nous sommes en train de faire constitue une sorte de progrès, alors qu'il a déjà été prouvé ailleurs qu'il s'agit d'un recul.
    La Cour suprême a choisi de ne pas tenir compte de sa décision précédente à cet égard ni de la position des six différentes législatures qui ont rejeté l'aide au suicide. Il semble que la ligne droite n'est pas ce qui convient le mieux à la société et à la race humaine dans son ensemble, mais plutôt la dernière tendance progressiste, celle-là même qui exerce une telle pression sur notre façon de vivre et sur notre façon de percevoir la société.
    Je suis mariée à un pasteur et j'ai travaillé comme personne soignante dans des hôpitaux et des maisons de soins de niveau 4. J'ai travaillé dans un hôpital psychiatrique. J'ai été aide-éducatrice auprès d'enfants de la maternelle et d'élèves du secondaire ayant des besoins spéciaux.
     Je suis la fille d'un homme atteint d'Alzheimer, la grand-mère d'un petit-fils autiste qui se débrouille très bien; l'un de mes proches souffre d'une maladie mentale. Je suis moi-même très au fait des aléas de l'existence. Je crois personnellement que la vie est sacrée, de sa conception jusqu'à sa fin « naturelle », et que la protection des plus vulnérables de la société doit toujours être l'idée maîtresse qui détermine notre façon de gouverner et de faire des lois pour le Canada.
    Je partage ce point de vue avec les gens de ma circonscription et d'un peu partout au Canada qui m'en ont souvent parlé. Aujourd'hui, le débat qui se tient aux Communes doit être très équilibré et nous permettre de présenter les opinions de tous les Canadiens.
    La vie est difficile et la mort l'est aussi souvent pour la personne qui meurt et encore davantage, à certains égards, pour ceux qui accompagnent la personne à la fin de sa vie. Je crois que c'est aussi une dimension valable de la question.
    Malheureusement, le projet de loi C-14 causera beaucoup plus de douleur qu'il n'en apaisera. Légaliser une chose ne la rend pas morale pour autant. Les gens qui demandent l'aide d'un médecin pour mourir peuvent être motivés par divers facteurs n'ayant aucun lien avec leur état de santé. Ces facteurs peuvent faire en sorte que certaines personnes demandent de l'aide pour mourir alors qu'en fait, elles voudraient et mériteraient un meilleur traitement et des soins palliatifs.
    Soulignons que la loi belge sur l'euthanasie ne s'applique pas aux patients inaptes à prendre une décision et ne permet pas d'abréger délibérément leur vie. Le système de la loi sur l'euthanasie en Belgique, qui est calqué dans le projet de loi C-14, a fait l'objet d'abus et s'est révélé insuffisant pour surveiller le processus décisionnel.
    Par exemple, Raphael Cohen-Almagor, un défenseur des droits de la personne qui est titulaire de la chaire de politique à l'Université de Hull, est l'auteur d'un compte rendu de recherche publié dans le Journal of Medical Ethics. L'article s'intitule « First do no harm: intentionally shortening lives of patients without their explicit request in Belgium » et porte principalement sur les données publiées au sujet de la pratique consistant à causer la mort sans que le patient le demande en Belgique.
    Les données indiquent que cette pratique demeure courante et qu'elle entraîne chaque année plus de 1 000 décès prématurés sans qu'une demande ait été faite, soit 32 % des cas d'euthanasie. De plus, les médecins ont refusé de signaler presque la moitié de ces cas à l'organisme de surveillance même si la loi les oblige à le faire.
    Voilà un exemple montrant clairement qu'il manque, dans la loi, un mécanisme permettant à une tierce partie indépendante d'assurer une surveillance avant que l'on donne la mort à un patient. Force est de constater que, malheureusement, les mesures de sauvegarde prévues dans le projet de loi C-14 sont susceptibles d'être insuffisantes et inefficaces dans le monde réel.
(1030)
    En outre, le projet de loi C-14 s'applique aux personnes atteintes d'une maladie physique ou psychologique dont les problèmes de santé leur causent des souffrances persistantes et intolérables. Nous devons d'abord axer nos efforts sur l'amélioration de la qualité et de l'accessibilité des soins palliatifs comme moyen de soulager de façon humaine la souffrance, la solitude et la peur pour le patient en fin de vie, ainsi que d'encourager, de guider et de soutenir les proches au cours du processus naturel de fin de vie. Le projet de loi C-14 n'exige pas que l'on emprunte d'abord la voie des soins palliatifs, ni que le patient ait essayé d'autres traitements avant de demander l'aide médicale à mourir.
    De plus, je m'inquiète encore beaucoup pour les nombreux professionnels de la santé qui ont communiqué avec moi, car ils pourraient subir de graves conséquences s'ils refusent d'aider une personne à mettre fin à ses jours, pour quelque raison que ce soit. Personne dans ce pays ne devrait être obligé de soutenir ou de fournir un service qui va à l'encontre de sa conscience. La loi du gouvernement fédéral laisse les provinces s'occuper de cette question cruciale, ce qui peut donner lieu à encore plus d'interprétations du libellé général.
    Il faudrait mettre en place un système national structuré pour examiner les dossiers lorsque des médecins ou un organisme de soins de santé financé par l'État refusent, peu importe la raison, de fournir l'aide médicale à mourir que demande le patient.
    Par ailleurs, le projet de loi étend la portée des modifications du Code criminel aux médecins, aux infirmiers et aux infirmiers auxiliaires autorisés. Sa portée est plus vaste que toute autre mesure adoptée dans le reste du monde, ce qui rend impossible la création d'un système national transparent.
    Il faut tenir compte des effets psychologiques que le projet de loi C-14 pourrait favoriser. La laïcité des tribunaux s'appuie sur la prémisse que tout est déterminé par la société, avec comme résultat que le droit joue un rôle important dans l'évolution de l'éthique culturelle, façonne les attitudes culturelles envers certains comportements et a une incidence sur les normes morales. Les lois sur l'aide médicale à mourir laissent entendre que, dans certaines circonstances, le suicide est une issue raisonnable. Le problème, c'est que ce message sera reçu non seulement par ceux qui souffrent d'une maladie en phase terminale, mais aussi par ceux qui sont tentés de croire qu'ils ne peuvent plus continuer à vivre.
    Une étude menée par David Jones et David Paton a démontré que, dans d'autres États, la légalisation de l'aide à mourir a mené à une hausse du nombre total de suicides, avec ou sans aide. Cela nuit gravement aux efforts menés au sein des organismes et des programmes de prévention du suicide.
    En tant que porte-parole adjointe du Parti conservateur pour les anciens combattants et membre du comité des anciens combattants, je crois que la légalisation de l'aide au suicide ne ferait que rendre plus difficile la mise en oeuvre des services de santé mentale et des initiatives de prévention du suicide qui ciblent les personnes souffrant de troubles de stress post-traumatique.
    J'abonde dans le sens du député libéral de Winnipeg-Centre, qui a déclaré hier soir que le gouvernement devrait à tout le moins attendre de 5 à 10 ans avant de légaliser le suicide assisté, car il faut d'abord savoir quelles seraient les répercussions exactes de ce changement d'un bout à l'autre du pays. Ses préoccupations sont justifiées dans ce contexte où l'on cherche à apaiser les pensées suicidaires qui hantent les réserves du Canada.
    D'après une autre étude, publiée en 2011 dans Current Oncology, l'euthanasie a changé considérablement pendant les 30 ans qui ont suivi son adoption aux Pays-Bas. L'aide médicale à mourir conçue pour les malades en phase terminale s'est étendue aux personnes souffrant d'une maladie chronique; après les problèmes de santé physiques, le programme s'est étendu aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale, puis de détresse psychologique attribuable à l'état de santé mentale. Et maintenant, les personnes de plus de 70 ans simplement lasses de vivre peuvent choisir l'euthanasie.
    Dans la culture actuelle, l'euthanasie est perçue comme la solution normale, alors que les soins palliatifs sont de plus en plus présentés et perçus comme une option égoïste. C'est ce qu'on pouvait lire dans le Daily Mail, un journal du Royaume-Uni, le 24 septembre 2013.
    Bref, ce projet de loi ne toucherait pas seulement les personnes qui choisissent, de façon rationnelle et délibérée, de mettre fin à leurs jours. Il aurait des répercussions beaucoup plus vastes, notamment sur de grands groupes sociaux et sur les professionnels qui seraient tenus d'offrir ces services s'ils ne veulent pas mettre en péril leur droit d'exercer leur profession.
    En tant que législateurs, quelle doit être notre priorité lorsque nous sommes confrontés à un choix, comme c'est le cas ici? Parce que la Cour suprême du Canada nous a imposé d'adopter une mesure législative hautement controversée, malgré les piètres résultats obtenus dans d'autres pays; parce que le comité a choisi de gérer les témoins comme il le fait et a décidé de faire des recommandations dont la portée dépasse largement les exigences de l'arrêt dans la causeCarter; parce qu'il importe, avant tout, que le gouvernement fasse des soins palliatifs de qualité l'une de ses valeurs et de ses priorités, je ne peux pas, en toute bonne foi, appuyer le projet de loi C-14.
(1035)
    Madame la Présidente, je remercie la députée d'avoir exprimé son point de vue sur le projet de loi.
    Ma question porte sur la Cour suprême du Canada. Le jugement a été unanime; tous les juges de la Cour suprême ont indiqué qu'il fallait modifier la loi. Il y a un vide juridique depuis février dernier. La Cour suprême a d'abord imposé un délai d'un an pour légiférer sur la question et nous a accordé une prolongation par la suite. Si nous respectons la primauté du droit et la Cour suprême, nous devons adopter une nouvelle loi d'ici le 6 juin, sans quoi le vide juridique demeurera. Nous n'avons pas le choix. C'est notre responsabilité parlementaire.
    La députée convient-elle, à l'instar de nombreux députés, que nous avons bel et bien le devoir de répondre à l'arrêt de la Cour suprême? Reconnaît-elle que, même si le projet de loi n'est pas parfait, nous avons néanmoins cette responsabilité? Autant que je sache, le projet de loi répond à ce critère. Quel est le point de vue de la députée par rapport à cette responsabilité?
    Madame la Présidente, je suis ravie qu'on m'ait posé la question. D'ailleurs, je m'y attendais.
    J'ai le plus grand des respects pour notre Cour suprême. J'ai eu le privilège de prendre part à une séance d'orientation à cet endroit et d'assister à ses audiences. Ce n'est pas que je ne respecte pas l'institution et son rôle. Cependant, à titre de parlementaire, ma première responsabilité est à l'égard des Canadiens.
    J'estime que dans sa décision initiale de nous accorder un an pour élaborer une loi, la Cour suprême a fait fausse route. Le délai était trop court. Ensuite, je crois qu'elle a eu tort de n'accorder au gouvernement que quatre mois de sursis alors qu'il en avait demandé six.
    La situation canadienne est telle que nous ne pouvons pas nous permettre de nous tromper. Il est difficile de changer les choses en cours de route, comme mon collègue de ce côté de la Chambre l'a affirmé hier soir. Nous devons faire les choses dans les règles de l'art.
    Ma première responsabilité est à l'égard des Canadiens. Notre première responsabilité est de faire ce qu'il convient de faire, quelle que soit la pression qui pèse sur nous. Je ne suis pas avocate. Je sais que la Charte des droits et libertés contient une disposition de dérogation dont on ne devrait jamais abuser, mais peut-être que nous devrions l'envisager dans le cas qui nous intéresse.
(1040)
    Madame la Présidente, j'écoute avec grand intérêt le débat sur cette question très importante.
    Cependant, il semble y avoir de la confusion quant à ce que la Cour suprême nous a demandé de faire. Ce n'est pas une mesure optionnelle que nous prenons. Le gouvernement n'a pas l'option de présenter ou non ce projet de loi: il en a reçu l'ordre de la Cour. C'est ainsi que fonctionne notre Constitution.
    La députée a présenté une demande plutôt extraordinaire, en l'occurrence que le gouvernement invoque la disposition de dérogation. Je ne suis pas certain que cela serait possible dans ce cas. Je me demandais si la députée pourrait préciser sa pensée.
    Je ne suis pas avocate, madame la Présidente. Tout le monde le sait. Ce que je dis vient du coeur, et je parle au nom des Canadiens qui se soucient énormément de la responsabilité que nous avons d'en arriver à une décision. D'abord et avant tout, j'estime que notre première responsabilité est envers les Canadiens. Je comprends que la question n'est pas facile.
    Je dois être une politicienne, car je suis passée par toutes les étapes pour siéger ici aujourd'hui. Cela dit, j'en suis à un point dans ma vie où je ne songe pas à ma carrière et ne ressens pas le besoin d'agir comme certaines personnes à la Chambre voudraient que nous agissions. Je préfère en l'occurrence agir dans l'intérêt du Canada.
    Ailleurs dans le monde, des dispositions semblables ont été utilisées à très mauvais escient. Les membres du comité et des députés ont affirmé vouloir étoffer le projet de loi. La famille Carter est insatisfaite. La situation est on ne peut plus complexe; tâchons de ne pas prendre de décision hâtive.
    Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole pour appuyer le projet de loi  C-14, qui traite de l'aide médicale à mourir.
    Le gouvernement a écouté très attentivement les Canadiens et s'est attardé aux précieuses contributions du comité mixte spécial composé de députés et de sénateurs, du groupe externe d'experts, du groupe consultatif provincial-territorial d'experts et de nombreux autres intervenants au pays.
    Le projet de loi reconnaît de façon appropriée l'autonomie des Canadiens de choisir l'aide médicale à mourir, tout en protégeant les personnes vulnérables et en respectant l'arrêt dans la cause Carter de la Cour suprême du Canada.
    Mes observations se centreront sur les critères d'admissibilité et les garanties procédurales, qui sont au coeur du projet de loi.
    Comme l'a dit la ministre de la Justice, le projet de loi vise à aborder les questions soulevées dans l'arrêt dans la cause Carter. Le gouvernement s'est engagé à recueillir et à analyser les données probantes sur la façon dont l'aide médicale à mourir fonctionne en pratique et à étudier les résultats des études indépendantes sur d'autres questions qui n'ont pas été abordées dans l'arrêt dans la cause Carter, et qui le seront après l'adoption du projet de loi.
    Étant donné les questions sociétales et médicales fondamentales que soulève l'aide médicale à mourir au pays, il importe d'adopter une approche prudente. Les enjeux sont trop importants.
    Le projet de loi contient cinq critères d'admissibilité clés.
    Premièrement, il exigerait que la personne qui demande de l'aide médicale pour mourir soit âgée d'au moins 18 ans et capable de prendre elle-même les décisions touchant sa santé.
    Plusieurs des témoins entendus par le comité mixte spécial, dont les représentants de la Société canadienne de pédiatrie, ont fait remarquer que l'aide médicale à mourir soulevait des questions particulières dès qu'elle s'appliquait aux jeunes. Il est difficile d'évaluer la capacité d'un mineur à demander de l'aide médicale pour mourir, car les enjeux sont extrêmement élevés et les conséquences, irréversibles.
    Je signale par ailleurs que certains témoins ont aussi dit au comité qu'à l'heure actuelle, le Canada ne disposait pas de données pédiatriques permettant de savoir si des jeunes avaient demandé l'aide médicale à mourir ou si les pédiatres du pays seraient disposés à l'administrer. La prudence et le gros bon sens nous disent que cette question extrêmement délicate doit d'être étudiée plus en profondeur.
    Pour ce qui est de la capacité, les gens doivent être capables de confirmer leur choix au moment où l'aide médicale à mourir leur sera administrée. C'est donc dire que le projet de loi interdirait ce qu'on appelle communément les « demandes anticipées ».
    Les risques d'erreurs et d'abus seraient en effet trop grands pour que l'on permette à des patients incapables d'exprimer leur volonté de recevoir de l'aide pour mourir, car il se peut qu'une personne qui aurait déjà exprimé le souhait de mourir ait changé d'avis et souhaite désormais continuer à vivre.
    Autrement dit, les demandes anticipées priveraient les gens de leur droit de changer d'avis une fois qu'ils ont perdu leurs facultés.
    Dans l’approche proposée, on reconnaît également que les médecins et les professionnels de la santé ont souvent de la difficulté à interpréter et à appliquer d’autres directives touchant les preuves. Les demandes anticipées d’aide médicale à mourir seraient même plus complexes à administrer. Il faut clairement mener d’autres études et établir les faits justifiant les demandes anticipées.
    Le projet de loi prévoit également des critères d’admissibilité aux termes desquels on fait une demande volontaire d’aide médicale à mourir en donnant un consentement éclairé.
    Ces exigences relèvent du bon sens.
    L’aide médicale à mourir ne peut être une solution de rechange dans les cas où les patients pourraient préférer un traitement différent, mais qu'ils ne savent pas qu'il existe, et dans les cas où ils ne connaissent pas leur diagnostic ou l’évolution probable de la maladie. L’aide médicale à mourir ne doit pas non plus découler de pressions externes ou du sentiment que l’on a d’être un fardeau.
    De plus, le projet de loi exigerait que la personne soit affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables. La définition de ce terme comprend plusieurs éléments, notamment le fait que la maladie soit grave et incurable, que le malade se trouve dans une situation caractérisée par un déclin avancé et irréversible de ses capacités, que la maladie cause des souffrances persistantes et que la mort naturelle soit devenue raisonnablement prévisible compte tenu de l’ensemble de la situation médicale sans pour autant qu’un pronostic n’ait été établi.
(1045)
    Le projet de loi vise à permettre l'aide médicale à mourir dans le cas des Canadiens qui sont en fin de vie. Comme l'a indiqué la Cour suprême du Canada à divers endroits dans l'arrêt dans la cause Carter, l'aide médicale à mourir est semblable à des formes de soins de fin de vie, comme la sédation palliative ou le retrait d'un traitement vital. Cette définition vise à accorder aux médecins et aux infirmiers praticiens la souplesse nécessaire pour tenir compte de l'ensemble de la situation médicale d'une personne.
    Le projet de loi C-14 stipule clairement qu'il n'est pas nécessaire d'établir un pronostic précis quant à l'espérance de vie. En outre, une personne pourrait être admissible à l'aide médicale à mourir en raison de l'effet cumulatif de nombreux problèmes de santé ou de circonstances médicales qui, pris individuellement, ne sont peut-être pas mortels, mais qui, mis ensemble, font en sorte que la mort de cette personne est raisonnablement prévisible. Par exemple, les personnes se trouvant dans une situation médicale semblable à celle qu'ont connue Kay Carter, Gloria Taylor, Sue Rodriguez et les patients ayant obtenu une exemption constitutionnelle au Canada depuis la décision rendue par la Cour suprême en janvier dernier seraient toutes admissibles à l'aide médicale à mourir en vertu de cette mesure législative.
    L'aide médicale à mourir n'est cependant pas une solution à tous les problèmes de santé. La voir ainsi susciterait des risques inacceptables, en particulier pour les personnes vulnérables de notre société. Prenons l'exemple de quelqu'un qui souffre d'un handicap physique ou mental, mais qui est en bonne santé par ailleurs et dont la mort naturelle est encore loin. Rendre l'aide médicale à mourir accessible à cette personne risque de renforcer des stéréotypes négatifs sur la vie des personnes handicapées et pourrait laisser entendre que la mort est une solution de rechange acceptable aux handicaps ou aux problèmes de santé, quelle qu'en soit la gravité. Cela pourrait nuire à nos efforts pour combattre le suicide, un sérieux problème de santé publique touchant non seulement la personne qui s'enlève la vie, mais également sa famille, ses amis et l'ensemble de la collectivité.
    En outre, pour que les Canadiens puissent avoir la certitude que l'aide médicale à mourir est appliquée correctement, le projet de loi renferme des mesures de sauvegarde qui correspondent de façon générale aux recommandations du comité mixte spécial. Ainsi, les demandes devront être faites par écrit devant deux témoins indépendants, et un délai de 15 jours devra être observé entre le jour de la demande et celui où l'aide sera fournie afin que les personnes qui auront pris une décision trop hâtive puissent se raviser. En ce qui a trait à la période d'attente, une certaine souplesse est prévue dans les cas où la mort de la personne ou la perte de sa capacité à donner un consentement éclairé est imminente.
    Plus important encore, deux médecins ou infirmiers praticiens indépendants devront évaluer et confirmer l'admissibilité de la personne. Cette dernière aura aussi le droit de retirer sa demande d'aide médicale à mourir et pourra le faire jusqu'au moment où la procédure est censée avoir lieu. Ces mesures de sauvegarde permettront de protéger les Canadiens, mais elles ne seront pas contraignantes au point de restreindre l'accès à l'aide médicale à mourir.
    Enfin, le projet de loi prévoit que la personne doit être admissible à des soins de santé financés par l'État au Canada. Cette exigence a été instaurée pour que le Canada ne devienne pas une terre d'accueil pour les gens d'autres pays qui viendraient ici simplement pour avoir accès à l'aide médicale à mourir. Par contre, étant donné que les Canadiens déménagent souvent dans une autre province ou vont parfois vivre à l'étranger pendant de longues périodes, le projet de loi prévoit une exception; nous veillons ainsi à ce que ces personnes ne soient pas exclues simplement parce qu'elles doivent observer une période d'attente ou respecter une exigence concernant la résidence avant d'avoir accès aux soins de santé publics.
    L'aide médicale à mourir figure parmi les enjeux sociaux et juridiques les plus complexes de notre époque, surtout en raison du vieillissement de la population. Cela dit, le gouvernement s'est attaqué à cette question et il a écouté attentivement les divers points de vue exprimés par les Canadiens.
    Le projet de loi dont le Parlement est saisi aujourd'hui a été rédigé avec compassion et lucidité. Il s'agit d'une mesure législative mûrement réfléchie et reposant sur des principes, qui donne aux Canadiens la possibilité de choisir l'aide médicale à mourir, protège les personnes vulnérables et est conforme à la décision de la Cour suprême.
    J'invite tous les députés à appuyer ce projet de loi.
(1050)
    Madame la Présidente, les députés de l'autre côté ont, à au moins trois occasions, assimilé l'interruption de traitements médicaux à l'aide médicale à mourir. Il ne s'agit pas du tout de la même chose. Nous sommes tous d'accord, et ce, depuis de nombreuses années, qu'aucun patient n'est obligé de poursuivre les traitements visant à prolonger sa vie.
    Plus tôt aujourd'hui, une collègue du député a mentionné que le budget prévoit 3 milliards de dollars pour les soins à domicile et les soins palliatifs. Ce commentaire est inexact. Mon collègue pourrait-il corriger cette erreur?
    Enfin, mon collègue accepterait-il un amendement qui exigerait qu'une consultation en soins palliatifs soit offerte aux patients ayant demandé une aide médicale à mourir, de sorte que ces patients puissent avoir accès à la gamme complète de traitements et de formes de soutien qui est à leur disposition? Les personnes demandant une aide médicale à mourir assisteraient ainsi à une consultation en soins palliatifs avant que leur demande ne soit traitée.
    Madame la Présidente, je tiens à préciser tout d'abord que des fonds sont effectivement prévus dans le budget pour les soins à domicile. Le poste budgétaire pour les soins à domicile comprendrait des consultations concernant les soins palliatifs auprès de ceux qui administrent ces soins partout au pays, ainsi que les services de santé mentale. En fait, j'ai assisté ce matin même à une réunion avec la ministre de la Santé et la ministre de la Justice et j'ai eu la confirmation que des discussions à cet égard se poursuivent un peu partout au pays.
    En ce qui concerne la seconde question au sujet des soins palliatifs, la réponse simple est oui. Bien que nous soyons en train de réagir à un jugement de la Cour suprême et que nous nous efforcions de mettre en place une mesure législative qui offre un choix aux Canadiens, nous ne nous arrêterons pas là. Nous allons continuer de discuter de cette question avec des Canadiens partout au pays. Nous renforcerons ainsi les programmes avant que des particuliers prennent de telles décisions.
(1055)
    Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt l'intervention de mon collègue. Il a affirmé très clairement qu'il croyait que cette mesure législative serait conforme à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter.
    J'ai lu récemment une lettre réfléchie et éloquente écrite par Joe Arvay, l'avocat dans l'affaire Carter. Il ne partage pas du tout l'avis du député. Il souligne que, dans sa décision, la Cour suprême a très clairement précisé que l'aide médicale à mourir devrait être offerte uniquement aux personnes souffrant de problèmes de santé graves et irrémédiables. Or, le projet de loi irait plus loin et exigerait en plus que la mort soit raisonnablement prévisible. M. Arvay soutient qu'il s'agit d'une extension injustifiée et illégitime de la décision de la Cour suprême. Il fait valoir que le critère de la mort raisonnablement prévisible a été invoqué pendant le processus judiciaire et rejeté par tous les paliers des tribunaux.
    Mon collègue pourrait-il nous dire comment il croit que la mesure législative serait conforme à la décision de la Cour suprême quand elle contredit si clairement la liste des critères requis pour avoir accès à de l'aide médicale à mourir, qui a été dressée par la Cour?
    Madame la Présidente, je n'ai pas dit que le projet de loi serait conforme à la décision de la Cour suprême. J'ai dit qu'il comblerait le vide juridique que la Cour suprême a laissé sur cette question.
    Nous avons écouté les Canadiens. Ils nous ont dit haut et fort qu'ils voulaient un choix afin de pouvoir prendre la décision qui leur convient après avoir discuté de leur situation avec leur médecin, leur famille et leurs amis. Comme je l'ai dit dans mon intervention, la fin de vie devrait être prévisible et imminente, et la décision devrait être prise à la suite de discussions entre le médecin et la personne. La mesure législative appuierait les choix faits par tous les Canadiens.
    Madame la Présidente, pour commencer, j'aimerais souligner la délicatesse, la sensibilité et la courtoisie que requiert le sujet à l'étude. Le thème du présent débat, l'aide médicale à mourir, soulève des questions de la plus profonde importance, puisqu'il est question de vie ou de mort.
    Cela vient chercher nos plus profonds sentiments, non seulement en tant que parlementaires, mais aussi en tant qu'êtres humains. Cela fait appel à notre conscience, à notre moralité, à notre éthique, à nos valeurs, à nos philosophies, à notre spiritualité, à notre individualité et à notre dignité. Je crois que nous devons aborder ces questions avec la plus grande prudence, avec compassion et avec respect, car les Canadiens ont des opinions diversifiées et profondément ancrées sur le sujet, et toutes valent la peine d'être considérées et respectées.
    Le contexte du débat est clair: on craint la mort, la souffrance et la perte de contrôle. Grâce aux progrès de la médecine moderne, les gens peuvent et d'ailleurs doivent aujourd'hui envisager de vivre sans une qualité de vie acceptable, d'être en vie sans profiter de la vie, de posséder les fonctions physiques de base sans faculté, sans dignité et sans espoir.
    En même temps, nous craignons la diminution du caractère sacré de la vie, la possibilité que des personnes vulnérables soient victimes d'abus, et la possibilité de s'engager sur une pente glissante qui remet en question les principes fondamentaux de longue date visant la préservation de la vie humaine. Ce débat porte sur un affrontement fondamental entre deux valeurs: l'une se fonde sur l'instinct de vivre et de préserver la vie en toutes circonstances et l'autre se fonde sur le droit de contrôler notre mort inévitable à titre de partie intégrante de notre individualisme et de notre liberté personnelle.
    J'espère que nous allons aborder les questions de ce débat avec compassion et respect, comme il se doit, parce que nous devons tenir compte de façon simultanée des notions de mort dans la dignité et de vie dans la dignité. Personne n'a raison et personne n'a tort. Il faut seulement être prêts à faire des compromis, à faire preuve de compréhension et à aller de l'avant avec le plus de sagesse et de sensibilité possible.
    À bien des égards, nous avons eu un parcours malencontreux jusqu'ici. Nous sommes ici en vertu du processus judiciaire qui repose sur une analyse fondée sur les droits et une décision émanant du mandat d'un tribunal, de façon tout à fait légitime, en raison d'un argument fondé sur la Charte qui contestait les dispositions criminelles sous prétexte qu'elles violent les droits constitutionnels individuels.
    Nous ne sommes pas ici à la suite d'un débat fondé sur la foi, la conscience ou l'éthique. Bon nombre de Canadiens se sentent pressés par la situation et ont l'impression d'être privés d'une discussion en bonne et due forme qui aurait dû avoir lieu sur une question d'une aussi grande importance sur le plan social. Par conséquent, le débat ne porte pas sur la pertinence d'autoriser l'aide médicale à mourir, mais plutôt sur la meilleure manière de la baliser.
    Cependant, je trouve un certain réconfort en me disant que la Cour suprême du Canada est parvenue unanimement à cette décision, ce qui n'arrive pas souvent. Cela me rassure que les plus éminents juristes au pays aient la conviction que nous, en tant que parlementaires, pouvons et devons élaborer un système en vue de permettre aux Canadiens de demander et d'obtenir une aide médicale pour mettre fin à leurs jours dans des circonstances bien définies.
    Mes commentaires et mes réflexions porteront essentiellement sur deux sujets, soit les soins palliatifs et les principaux éléments du projet de loi. À titre de porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de santé, j'examine cette question du point de vue non seulement des valeurs, de l'éthique ou de la morale, mais aussi des soins de santé. À mon avis, les soins palliatifs doivent être l'un des aspects centraux du débat. Si nous voulons être honnêtes, nous reconnaîtrons que nous, en tant que nation, n'avons pas réussi à offrir l'éventail de soins en fin de vie de qualité dont les Canadiens ont besoin pour les rassurer et leur permettre de pleinement profiter de leur vie.
    La société canadienne a fait preuve de négligence et a tardé à mettre sur pied un système de soins palliatifs, ce qui est pourtant absolument essentiel compte tenu des problèmes de fin de vie dont nous sommes témoins. Nous devons faire de notre mieux pour créer des conditions où les Canadiens voudront recourir à l'aide à mourir uniquement dans des situations très rares, et nous devons pour ce faire prendre de nombreuses mesures préalables.
    Nous devons créer des programmes de gestion de la douleur pour avoir le plus de ressources possible afin que les patients soient relativement à l'aise, quels que soient leurs problèmes de santé et sans égard au fait qu'ils arrivent en fin de vie. Nous devons organiser un système de soins à domicile pour faire en sorte que les patients, particulièrement les aînés, puissent terminer leurs jours dans le confort de leur foyer, entourés de leur communauté, de leurs souvenirs, de leurs amis et des membres de leur famille.
(1100)
    Nous devons construire des unités de soins palliatifs partout au Canada pour permettre aux gens qui arrivent en fin de vie d'avoir un milieu de vie confortable, enrichissant, agréable et intéressant où le conjoint, les enfants, les membres de la famille et les amis peuvent se retrouver dans un cadre intime et respectueux. Les gens qui arrivent en fin de vie devraient recevoir les meilleurs soins médicaux qu'un pays développé comme le Canada peut déployer. Si nous investissons dans des soins palliatifs de niveau mondial, vraisemblablement peu de Canadiens demanderont l'aide à mourir.
    Quelle que soit notre position dans le présent débat, nous convenons tous, je crois, qu'il faut encourager les Canadiens à vivre pleinement leur vie. Ce projet de loi, le gouvernement et le récent budget ne reconnaissent pas la nécessité de mettre sur pied au Canada un système de soins palliatifs de niveau mondial et ne fournissent pas non plus les ressources nécessaires pour le faire. Les paroles ne suffisent pas; il faut passer à l'action. Nous, du Nouveau Parti démocratique, travaillerons sans relâche afin que le gouvernement accorde les ressources nécessaires pour établir, à l'échelle du Canada, un système de soins palliatifs de calibre mondial. Nous inciterons également les gouvernements des provinces et des territoires à collaborer pour que ce système soit à la portée de l'ensemble des Canadiens, quel que soit l'endroit où ils habitent.
    J'aimerais faire certaines observations extrêmement importantes.
    Je crois personnellement que les adultes capables ont le droit de choisir les conditions de leur décès si les critères définis par la Cour suprême sont réunis, c'est-à-dire qu'il faut que leurs problèmes de santé soient graves et irrémédiables et leur causent des souffrances qu'ils jugent intolérables. Le processus doit aussi être bien conçu et bien balisé pour que leur volonté puisse être établie avec certitude. Comme le projet de loi dont nous sommes saisis s'écarte de la décision rendue par la Cour, il doit être amendé.
    Si c'est bien vrai que la principale personne ayant obtenu gain de cause dans cette affaire, Mme Kay Carter, n'aurait pas pu obtenir d'aide médicale pour mourir si la mesure législative dont nous sommes saisis avait été en vigueur, nous faisons évidemment fausse route. J'estime qu'il faut faire preuve de beaucoup de prudence et agir de façon mesurée.
    J'ai écouté attentivement les propos des députés qui sont favorables à l'élargissement de l'aide médicale à mourir bien au-delà des paramètres prudents définis par la Cour suprême, mais je ne suis pas d'accord avec eux. Selon moi, il faut procéder avec prudence dans les dossiers délicats comme celui-ci. Les questions des mineurs matures, des souffrances psychologiques et du consentement anticipé s'accompagnent de considérations épineuses. Ce qui est le plus sage, selon moi, c'est de consulter pleinement les Canadiens avant de légiférer à ces égards. Nous passons d'une société qui impose depuis des siècles des sanctions criminelles dans les cas de suicide et d'aide à mourir, à une autre qui est en train d'élaborer un régime correspondant aux critères définis par la Cour suprême dans l'arrêt dans la cause Carter. Selon moi, cette mesure législative suffit pour le moment, et nous devrions plutôt veiller à ce que les principes de l'arrêt Carter soient bien inscrits dans la loi.
    En tant que père d'un enfant ayant des besoins spéciaux, je veux m'assurer que tous les Canadiens vulnérables sont entièrement protégés en la matière. Je comprends ceux qui craignent que nous nous engagions sur une pente glissante qui exposera les personnes vulnérables à des risques, et je conviens qu'il faut veiller à instaurer des paramètres rigoureux pour éviter une telle éventualité. J'estime que nous pouvons et devons bien nous assurer que les droits à la liberté de religion et de conscience du personnel médical et des établissements de soins sont protégés en tous points. J'estime également qu'il faut respecter le choix non seulement des Canadiens qui souhaitent exercer leurs droits en vertu de la Charte pour accéder à l'aide médicale à mourir, mais également celui des personnes qui choisissent de ne pas se mêler de telles questions en raison de leurs convictions religieuses ou de leurs valeurs. Il ne faut pas chercher à faire respecter les droits constitutionnels de quelques Canadiens au détriment de ceux d'autres Canadiens.
     Par ailleurs, j'estime que les établissements de santé confessionnels sont le prolongement direct des groupes confessionnels qui les parrainent et, à ce titre, ils incarnent des valeurs qui méritent assurément d'être protégées. Je suis convaincu que nous pouvons veiller à ce que tous les Canadiens aient accès aux droits prévus dans l'arrêt dans la cause Carter, tout en protégeant les droits tout aussi importants de ceux dont la conscience ne permet pas de participer à de telles activités.
    En fin de compte, j'ai la conviction fondamentale que nous, les parlementaires, pouvons et devons élaborer une mesure législative qui est le reflet de ce que sont véritablement les Canadiens: des gens qui chérissent les droits et les libertés individuels, qui se soucient réellement du bien-être de leurs semblables, qui sont compatissants et soucieux de justice et qui sont déterminés à faire en sorte que notre société soit régie par la primauté du droit, la sagesse et le respect de tous.
    Je ferai tout mon possible pour prôner ces valeurs tout au long du processus d'élaboration de cette mesure législative d'importance pour les Canadiens.
(1105)

[Français]

    Madame la Présidente, je voudrais d'abord remercier mon collègue de ses mots qui nous portent à réfléchir profondément sur le projet de loi C-14.
    Dans nos réflexions, il faudrait se rapporter au coeur même du débat sur l'affaire Carter et la décision de la Cour suprême. Dans un passage de la décision de nos juges de la Cour suprême dans l'affaire Carter, on dit que la forme actuelle des articles du Code criminel qui sont au coeur même de l'affaire Carter protège tellement les gens vulnérables qu'il s'agit presque d'une protection absolue, et que cette dernière nuit à certains Canadiens qui, eux, ne seraient pas vulnérables et voudraient avoir accès à l'aide médicale à mourir.
     En gardant cette réflexion de la Cour suprême en tête et en la transposant dans le projet de loi actuel, j'aimerais entendre ce que mon collègue en pense.
     Quelles sont ses réflexions par rapport aux gens qui ne sont pas vulnérables au sens de la Cour suprême, et comment ce projet de loi cadre-t-il avec ce fait?

[Traduction]

    Madame la Présidente, à maints égards, cette question touche au point central du sujet qui nous occupe, c'est-à-dire que la Cour suprême a clairement et prudemment statué qu'au Canada, les adultes capables atteints d'une maladie grave et irrémédiable devraient être en mesure de choisir de mettre fin à leurs jours et devraient disposer pour ce faire de l'aide de professionnels de la santé.
    Là où les choses se corsent, c'est lorsque l'on examine l'application de cette décision, lorsqu'il s'agit d'établir si des mineurs affichant une certaine maturité devraient être en mesure de se prévaloir des mêmes conditions, même s'ils ne sont pas vulnérables. Il faut penser aux personnes qui souffrent de problèmes psychologiques ou de santé mentale, et établir si ces conditions sont en elles-mêmes suffisantes pour cautionner l'accès à l'aide médicale à mourir, même si le patient n'est pas vulnérable. En dernier lieu, il y a la question du consentement préalable, un principe qui, je crois, reçoit l'assentiment de beaucoup de Canadiens, mais dont l'application pose de sérieux problèmes.
    À l'instar du gouvernement, je suis d'avis que nous devons procéder très prudemment avec ce projet de loi. Je suis conscient du fait que de nombreux groupes de défense des libertés civiles croient que le projet de loi aurait pu être plus englobant, et qu'il aurait dû permettre l'accès à l'aide médicale à mourir à des groupes qui ne sont pas visés pas l'arrêt dans la cause Carter. J'estime néanmoins que nous devons procéder avec prudence à cet égard. Compte tenu de la grande importance de ces questions et de l'intérêt que ces dernières suscitent chez les Canadiens, il vaut mieux procéder correctement que trop rapidement.
(1110)
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour son allocution et je le remercie spécialement pour sa détermination à protéger la liberté de conscience des travailleurs de la santé et des établissements médicaux. Je me demande s'il accepterait un amendement qui garantirait vraiment ces droits dans la mesure législative. Il est clair que la mesure législative propose une approche pancanadienne de l'offre d'aide médicale au suicide. Je pense qu'il est tout aussi important que nous ayons une approche pancanadienne de la protection de la liberté de conscience des travailleurs de la santé et des établissements médicaux.
    De plus, j'ai été heureux d'entendre qu'il voulait qu'on protège les personnes vulnérables. Quelques mesures de protection sont énumérées dans le projet de loi, à savoir qu'il doit y avoir des témoins indépendants et que le médecin doit être indépendant et ainsi de suite. Je me demande si mon collègue accepterait également un amendement qui intégrerait au régime un examen préjudiciel ou un type quelconque d'examen préalable qui garantirait que les témoins indépendants qui disent être indépendants, et les médecins, comprennent l'importance qu'il en soit ainsi.
    Madame la Présidente, j'aimerais remercier mon collègue pour ces commentaires réfléchis. Ils soulèvent aussi des questions fondamentales dont le comité discutera. Je ne pourrais pas être plus clair que je l'ai été dans mon allocution lorsque j'ai dit que j'estime que la liberté de conscience de ceux qui ne veulent pas donner d'aide à mourir, les médecins et les établissements médicaux, doit être expressément protégée. Je suis certainement ouvert quant à la forme que cette protection pourrait prendre, qu'elle soit dans la loi ou ailleurs, mais l'important est que le principe soit respecté.
    Quant à la seconde question du député sur les mesures de protection supplémentaires pour les personnes vulnérables, là encore, je suis entièrement d'accord avec lui pour dire que cela doit être un élément fondamental de cette mesure législative. Je serais disposé à envisager tout autre moyen qui pourrait fonctionner, que ce soit un amendement au projet de loi ou autre chose pour mettre en place cette protection.
    Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui concernant le projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir.
    À mon avis, c'est un projet de loi qui reflète bien l'état actuel de la réflexion au sein de la société. Il correspond au point de vue de la majorité des Canadiens et constitue une base solide pour asseoir les mesures futures. Il est conforme au principe de la valeur inhérente et égale de chaque vie et il respecte la dignité et l'autonomie de la personne, qui a le droit d'opter pour l'aide médicale à mourir pourvu qu'elle soit admissible et que des règles et des conditions bien définies soient respectées.
    Le projet de loi contient un long préambule et constitue un changement fondamental dans l'idée que nous nous faisons, nous, les Canadiens, du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne au Canada.
    J'avoue que ce n'est pas une question facile à aborder pour moi, mais elle est importante pour les gens de la circonscription de Davenport, que je suis honorée et fière de représenter. On ne parle pas souvent de la mort dans notre société. C'est un sujet qui nous rend nerveux. Alors, ce projet de loi, qui crée un cadre d'accès à l'aide médicale à mourir au Canada, pour les personnes admissibles, est un sujet particulièrement sensible.
    Je tiens à souligner qu'il y a une importante communauté catholique dans ma circonscription, que beaucoup de ses membres croient que seul Dieu peut décider du moment de notre mort et que nous devrions laisser cela entre ses mains. Or, il y a également plusieurs groupes, à Davenport, qui estiment que le projet de loi ne va pas assez loin. Compte tenu de l'heureuse diversité des opinions, j'ai invité les dirigeants communautaires à venir me rencontrer afin que nous discutions du projet de loi C-14 et qu'ils me fassent part de leurs préoccupations.
    J'ai dû rappeler à bon nombre d'entre eux que les neuf membres de la Cour suprême du Canada, en février 2015, ont décidé à l'unanimité d'annuler les articles du Code criminel qui interdisaient à quiconque, y compris aux médecins, de causer la mort d'une personne qui consent à mourir, ou d'aider une personne à mettre fin à ses jours. Je leur ai rappelé que la Cour suprême a statué que l'interdiction de l'aide médicale à mourir porte atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, et que cette atteinte ne respecte pas les principes de justice fondamentale.
    La Cour suprême a accordé au gouvernement une certaine période pour présenter une mesure législative. Il a jusqu'au 6 juin pour le faire, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Soit dit en passant, j'étais curieuse de savoir combien de fois la Cour suprême avait rendu un jugement unanime; elle l'a fait seulement 35 fois depuis 1979.
    Il ne faisait aucun doute que l'aide médicale à mourir allait devenir légale au Canada. Ce qui restait à déterminer, c'est le genre de projet de loi qui allait être présenté.
    L'arrêt de la Cour suprême a marqué un tournant important dans la façon dont notre société perçoit l'autonomie personnelle. Il a fait valoir que le sens de la dignité d'une personne est intimement lié à sa façon de percevoir sa qualité de vie. La décision de permettre aux Canadiens de recourir à l'aide médicale à mourir nous éclaire sur l'évolution du rôle de notre système de santé et sur le rôle du patient dans la prise de décision.
    Les Canadiens s'attendent à ce que les médecins et les infirmiers les soignent et les aident à maintenir leur qualité de vie. Cependant, quand cette qualité n'est plus accessible, les Canadiens veulent avoir l'assurance que les professionnels de la santé seront aussi là pour les aider lorsqu'ils décideront de mettre fin à leurs jours dans la dignité.
    Outre la consultation, j'ai reçu de nombreuses lettres de résidants de Davenport. Certains croient qu'on ne devrait pas du tout légiférer, d'autres pensent que le projet de loi n'en fait pas assez pour protéger la liberté de conscience des médecins ou les plus vulnérables, et d'autres encore craignent que le projet de loi n'aille pas assez loin, et que le gouvernement s'est fondé sur une interprétation trop étroite de l'arrêt de la Cour suprême. Je vais répondre à toutes ces préoccupations au cours des prochaines minutes.
     J'aimerais d'abord répondre à ceux qui ne croient pas qu'il y a lieu d'adopter une loi. Ce que bien des gens ne comprennent peut-être pas est que, si le gouvernement libéral n'adopte pas de nouvelle loi d'ici le 6 juin prochain, l'aide médicale à mourir sera légale pour autant qu'elle soit offerte dans le respect des considérations énoncées par la Cour suprême dans l'arrêt dans la cause Carter. Les Canadiens se retrouveraient alors sans cadre national et sans loi, ce qui, selon moi, créerait un désordre dans lequel quiconque pourrait interpréter l'arrêt Carter, et risquerait d'ouvrir la porte à des excès.
    En déposant le projet de loi C-14, le gouvernement libéral a délibérément élaboré une mesure législative qui respecte le plus scrupuleusement possible l'arrêt de la Cour suprême. Si la portée de ce projet de loi est étroite, c'est parce qu'il est destiné à n'être qu'une première étape et à donner un fondement adéquat à la mesure législative.
    La mesure législative ferait trois choses. Elle permettrait aux médecins, aux infirmiers et à ceux qui les secondent d'offrir une aide médicale à mourir aux patients admissibles sans risquer de faire l'objet d'accusations. Elle fournirait aussi des mesures de protection pour veiller à ce que ceux qui reçoivent une aide médicale à mourir y soient admissibles, donnent leur consentement éclairé et la demandent de leur plein gré. Enfin, elle jetterait les bases permettant à la ministre de la Santé de prendre des règlements afin de mettre en place un processus de surveillance et de déclaration de l'aide médicale à mourir.
(1115)
    Je prends un instant pour insister sur le premier point, car, comme je l'ai déjà dit, beaucoup de personnes m'ont écrit pour souligner que le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne protège pas la liberté de conscience des médecins. Je tiens à dire clairement que rien, dans le projet de loi, n'oblige un médecin ou un membre du personnel infirmier à fournir une aide médicale à mourir ou à renvoyer un patient à un autre professionnel. Cette mesure vise à trouver un juste équilibre entre l'accès à l'aide médicale à mourir et le respect des convictions personnelles des professionnels de la santé.
    Les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir sont également limpides. Il doit s'agir d'une personne d'au moins 18 ans, mentalement capable, qui fait volontairement une demande d'aide médicale à mourir et y consent de manière éclairée. Elle doit être atteinte d’une maladie, d’une affection ou d’un handicap graves et incurables; sa situation médicale doit se caractériser par un déclin avancé et irréversible de ses capacités; son état de santé doit lui causer des souffrances physiques ou psychologiques persistantes qui lui sont intolérables; et sa vie doit évidemment tirer à sa fin. Sa mort naturelle doit être raisonnablement prévisible compte tenu de l’ensemble de sa situation médicale.
    Le projet de loi renferme aussi plusieurs mesures de sauvegarde afin de garantir que le patient admissible donne son consentement en toute connaissance de cause. Sa demande d'aide médicale à mourir doit notamment être présentée par écrit et être signée par deux témoins indépendants. Deux médecins indépendants doivent aussi confirmer qu'il répond à tous les critères. Grâce à ces deux mesures, on saura avec certitude que les demandes d'aide médicale à mourir seront faites de manière réellement volontaire, qu'elles correspondront aux volontés du patient concerné et qu'elles ne seront pas le fruit de la coercition ou d'une quelconque forme de pression.
    De trop nombreux électeurs de ma circonscription m'ont dit qu'ils s'étaient sentis forcés d'abréger la vie d'un proche hospitalisé. Je leur répondais que le projet de loi y verrait puisque les patients doivent faire leur demande par écrit et que celle-ci doit être signée par deux témoins indépendants et être confirmée par deux médecins indépendants eux aussi.
    La deuxième exigence permet en outre de rassurer les médecins administrant l'aide médicale à mourir, qui n'auront pas besoin de se demander si ce qu'ils font est légal ou conforme aux connaissances et pratiques médicales raisonnablement acceptées.
    Pour être admissibles, les patients devront aussi observer une période d'attente de 15 jours, pendant laquelle ils pourront retirer leur demande à tout moment. Ils devront ensuite confirmer leur consentement juste avant que l'aide médicale à mourir ne leur soit administrée. Il s'agit selon moi d'un protocole rigoureux et de mesures de sauvegarde à toute épreuve.
    Par ailleurs, le projet de loi jette les bases qui permettront à la ministre de la Santé d'établir un processus pour encadrer le recours à l'aide médicale à mourir et en rendre compte. Nous devons nous assurer, à la satisfaction des Canadiens, que le système fonctionne comme voulu, c'est-à-dire en respectant l'autonomie des personnes admissibles et en protégeant les personnes vulnérables.
    Il est essentiel de maintenir la confiance du public et de faire preuve de transparence dans la mise en oeuvre de l'aide médicale à mourir. Le système d'encadrement et de reddition de comptes servira aussi à détecter tout problème ou toute conséquence imprévue.
    Grâce au système d'encadrement, nous aurons accès à des données canadiennes comparables et de qualité, de sorte que nous pourrons nous fonder sur les meilleures données possible lorsqu'il faudra discuter d'éventuels changements au régime d'aide médicale à mourir. Rappelons-nous en effet que la loi sera examinée dans cinq ans, ce qui pourrait entraîner des modifications fondées sur les données recueillies durant cette période.
    Que les personnes qui considèrent que le projet de loi est trop timide se rassurent: nous nous engageons à réaliser des études indépendantes sur trois questions fondamentales auxquelles la Cour suprême a choisi de ne pas répondre dans l'arrêt dans la cause Carter. Ces questions sont l'admissibilité des personnes âgées de moins de 18 ans, les demandes anticipées et les demandes d'aide médicale à mourir pour des motifs uniquement liés à la santé mentale.
    Il faut également mentionner que les soins palliatifs, qui permettent à tous les Canadiens de vivre le mieux possible jusqu’à leur décès, sont tout aussi importants pour le gouvernement. Hier encore, la ministre de la Santé est intervenue à la Chambre pour réaffirmer l’engagement qu’a pris le gouvernement de consacrer 3 milliards de dollars sur quatre ans aux soins à domicile.
    Avec ses homologues canadiens, la ministre travaille d’arrache-pied sur la prochaine version de l’accord sur la santé, et les soins palliatifs de qualité pour tous les Canadiens sont un élément névralgique de leurs délibérations.
    Je dois également mentionner que l’un des effets très positifs de la présentation de ce texte législatif est le vaste débat qui se tient à l'échelle du pays. Nous devons discuter pleinement de la question et bien la comprendre.
    Pour terminer, je tiens à saluer l’excellent travail que le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir a accompli sous la présidence éclairée de mon collègue le député de Don Valley-Ouest. Je tiens également à remercier la ministre de la Justice et la ministre de la Santé de l’excellent travail qu’elles ont accompli à l’occasion de la présentation du projet de loi.
    Le projet de loi C-14 se veut le fondement législatif qui nous permettra d’avancer. Il reconnaît la valeur inhérente et l’égalité de chaque vie humaine, et il respecte la dignité et l’autonomie de toute personne admissible à l’aide médicale à mourir selon des règles et des conditions bien définies. Il est adapté à la société canadienne contemporaine, et je l’appuierai.
(1120)
    Madame la Présidente, on parle encore de ces 3 milliards de dollars pour les soins palliatifs. Or, on ne les voit toujours pas dans le budget. Il y est question de soins à domicile, mais pas nommément de soins palliatifs. Est-ce que la députée pourrait tirer les choses au clair?
    Je comprends qu'il puisse régner une certaine confusion, madame la Présidente. Nous avons réaffirmé notre engagement. Nous avons fait une promesse et nous comptons toujours consacrer 3 milliards de dollars en quatre ans aux soins à domicile. La somme ne figure pas dans le budget de 2016, mais nous avons réaffirmé l'engagement de 3 milliards de dollars sur quatre ans.
    Qui plus est, la ministre a très clairement affirmé que les soins palliatifs de haute qualité pour tous les Canadiens sont parmi les questions clés qu'elle aborde en ce moment même avec ses homologues, les ministres provinciaux de la Santé de l'ensemble du pays. J'ai confiance et j'espère qu'une annonce sera faite en temps et lieu.

[Français]

    Madame la Présidente, bien sûr, le débat sur l'aide médicale à mourir est très important.
    Bien que le projet de loi arrive très rapidement, il y a des modifications à y apporter, notamment à certaines définitions qui sont un peu vagues. Depuis le début, on entend parler de mort naturelle raisonnablement prévisible. Or les médecins ne s'entendent même pas sur ce que cela veut dire. Le gouvernement n'a pas non plus réussi à définir ce qu'est une mort raisonnablement prévisible.
    La députée peut-elle nous informer à ce sujet? Y aura-t-il des clarifications à l'étape de l'étude en comité pour rectifier le tir? Plus il y a d'incertitude, plus il sera difficile pour les professionnels de rendre des décisions claires et de s'assurer qu'il n'y a aucun abus.
(1125)

[Traduction]

    Madame la Présidente, il existe une liste très claire. Cette liste, le fruit d'une réflexion approfondie, contient les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir. Afin de protéger les patients, nous exigeons que deux médecins indépendants émettent une opinion identique. Ainsi, chacun des médecins disposés à aider un patient à mourir aura l'assurance que ses gestes sont conformes à la loi et aux connaissances et compétences médicales raisonnables. Ensemble, ils permettent d'éviter que l'un d'eux fasse une interprétation inadéquate de la liste des critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir.
    Madame la Présidente, je veux d'abord féliciter ma collègue de son excellent exposé sur une question très difficile qui, de toute évidence, préoccupe chacun de nous à la Chambre.
    Une chose que j'entends continuellement de la part de citoyens de Humber River—Black Creek, c'est que les aînés ont le sentiment que leur famille ne veut pas les voir mourir à petit feu et se demandent comment ils sont protégés. Nous savons que toutes les réponses sont ici, mais le défi est de les communiquer et de donner confiance aux Canadiens.
    J'aimerais savoir comment ma collègue prévoit s'assurer que les gens de sa circonscription comprennent quels sont les critères à satisfaire avant que le moindre geste puisse être posé pour mettre fin à la vie d'une personne.
    Madame la Présidente, cela me tracasse beaucoup. Je veux organiser un énorme effort de communication. J'ai le sentiment que les gens ne savent pas qu'une décision a été rendue par la Cour suprême et qu'une loi doit être adoptée.
    Mon objectif est d'accorder une série d'entrevues à divers journaux locaux et à diverses stations de radio locales pour m'assurer d'éduquer autant que possible les gens sur la question.
    Madame la Présidente, j’aimerais dire d’emblée que la prière dite par notre Président ce matin, comme chaque matin, qui nous a rappelés à notre devoir de bons législateurs au service des Canadiens, a eu une signification tout à fait particulière pour moi, et sans doute aussi pour beaucoup de mes collègues.
    Je tiens à remercier mes collègues et les députés d’en face des discours qu’ils ont prononcés à propos de cette question très sérieuse qui participe à la fois de l’éthique, de la morale, du droit et de la religion. Même si je ne suis pas d’accord avec tous les arguments qui ont été défendus jusqu’à présent, je ne doute pas un seul instant que les députés qui les ont présentés l’ont fait avec tout le sérieux, toute la sincérité et tout le respect dont ils sont capables.
     Malheureusement, je n’ai pas le temps de parler de tous les aspects de ce projet de loi qui me préoccupent. Je mentionnerai à titre d’exemple, sans toutefois m’y limiter, celui que ma collègue, la députée de Lethbridge, a exposé avec une grande éloquence, à savoir l’influence délétère que le projet de loi va avoir sur les mentalités, en réduisant la valeur intrinsèque de la vie à une mesure de la capacité ou de la fonction d’une personne, plutôt que de sa propre valeur et de sa propre dignité, et en encourageant des Canadiens qui n’auraient jamais envisagé de se suicider à le faire.
    Comme l’a dit le député de Scarborough—Guildwood, le projet de loi va susciter, dès son entrée en vigueur, des pressions pour qu’on aille plus loin, ce qui est très inquiétant.
    Le danger dont on n’a pas suffisamment parlé est celui qui menace les groupes vulnérables.
    Comme je l’ai dit, étant donné que mon temps est limité, je vais me concentrer sur deux aspects du projet de loi, mais encore une fois ce ne sont pas mes deux seules préoccupations. Premièrement, je regrette que nous n’ayons pas pu avoir davantage de discussions sur les soins palliatifs avant la préparation de ce projet de loi. Deuxièmement, nous avons tous le devoir, en qualité de députés, de veiller au respect et à la protection de la liberté de conscience des médecins et du personnel soignant.
    Avant de développer ces deux points, j’aimerais faire un bref récapitulatif des événements qui nous ont amenés jusqu’ici.
     Il y a à peine six ans que nous avons discuté de la même question et que nous avons rejeté le projet de loi C-384, un projet de loi d’initiative parlementaire qui avait été présenté par un ancien député. Je rappelle que c’était la deuxième fois que cet ancien député présentait le même projet de loi d’initiative parlementaire. La première fois, il s’agissait du projet de loi C-407.
    Je me suis opposé à ces deux projets de loi et je l’ai dit clairement, non seulement parce que c’est ma conviction personnelle, mais aussi parce que je suis fermement convaincu que ces projets de loi ne respectaient pas l’obligation morale que nous avons, en qualité de parlementaires, de protéger les personnes vulnérables et de protéger la dignité intrinsèque de tout être humain.
    Les projets de loi C-384 et C-407 comportaient de graves lacunes parce qu’ils prêtaient le flanc à des conséquences tout à fait indésirables et qu’ils nous entraînaient sur une pente très glissante, comme l’ont dit ici de nombreux députés à propos du dilemme éthique qui se poserait aux familles, aux médecins et aux travailleurs de la santé.
     J’ai les mêmes réserves aujourd’hui. Pourquoi n’a-t-on pas mis davantage l’accent sur les soins palliatifs?
    Ne vaudrait-il pas mieux renforcer les soins palliatifs et les soins de fin de vie afin que les Canadiens ne soient pas amenés à penser que l’euthanasie ou le suicide assisté sont la seule option ou la meilleure option à leurs souffrances?
     N’est-il pas de notre devoir de défendre la valeur et la dignité de la vie humaine?
    Dans ma collectivité de Hamilton, nous avons des organisations formidables comme l'Emmanuel House et le Dr. Bob Kemp Hospice, qui s’emploient quotidiennement à améliorer la fin de vie des malades. Je sais que des centres de soins palliatifs font un travail exceptionnel dans toutes les collectivités du pays.
     Il est vrai que la décision de la Cour suprême dans l’affaire Carter nous oblige à faire face à une nouvelle réalité, à savoir que nous devons respecter sa décision au sujet des droits garantis par la Charte de ceux qui se trouvent dans une grande détresse, tout en assurant le respect de la dignité de la vie. Je trouve cependant fort regrettable que nous n’ayons pas examiné la possibilité de développer les soins palliatifs et d’investir dans la construction de centres de soins, avant ou pendant l’élaboration de ce projet de loi.
     Même si, dans sa réponse à la décision de la Cour suprême dans l’affaire Carter, le gouvernement fédéral mentionne la nécessité d’offrir toute une gamme d’options pour les soins de fin de vie, il n’a pratiquement rien fait de concret, si ce n’est de le mentionner dans une réponse qui n’est pas un texte législatif.
    Cela n’est pas acceptable, et je crois que tous les Canadiens sont du même avis.
    Il y a bien eu une vague référence à un accord pluriannuel sur la santé, qui offrirait notamment l’option des soins à domicile et des soins palliatifs, mais de cela il n’a été question ni dans le discours du Trône, ni dans le budget.
     Et pourtant, si l’engagement était sérieux, pourquoi n’a-t-il pas été accompagné de financement?
     Voilà ce qui fait défaut. Si nous voulons vraiment autoriser l'aide médicale à mourir, par respect des droits garantis par la Charte, nous autres parlementaires avons alors le devoir, tout comme le gouvernement du Canada, de prendre d’abord des mesures pour renforcer les soins palliatifs.
(1130)
    C’était là la conclusion de deux études menées par le Sénat, que j’avais eu l’occasion de citer en 2010 lorsque j’ai dénoncé le projet de loi C-384. Il y a eu d’abord, en 1995, le rapport du Comité sénatorial spécial sur l’euthanasie et l’aide au suicide, qui était intitulé « De la vie et de la mort » et qui comprenait un certain nombre de recommandations visant à améliorer l’accès aux soins palliatifs, la qualité des soins, et la formation des professionnels de la santé.
     En 2000, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, de la science et de la technologie a publié un autre rapport intitulé « Des soins de fin de vie de qualité: chaque Canadien et Canadienne y a droit », lequel recommandait lui aussi une stratégie précise et une grande amélioration des soins de fin de vie, ainsi que des services de soutien pour les aidants naturels, des soins à domicile, de la recherche et de la surveillance.
    Cela me fend le cœur, et c’est sans doute la même chose pour tous les députés ici présents, de savoir que des gens souffrent. Pas plus tard que l’été dernier, en pleine campagne électorale, j’ai vu mon plus jeune frère succomber aux ravages d’un cancer lymphatique, et j’ai grandement apprécié les soins, la compréhension et la compassion de tout le personnel d’Emmanuel House, le centre de soins palliatifs où il a fini ses jours.
     Je sais que le projet de loi tente de répondre aux besoins des personnes qui ont abandonné tout espoir. Pourtant, je crois qu’il y a, la plupart du temps, de meilleures façons de soulager leurs souffrances. Nous avons le devoir de recourir au maximum aux soins palliatifs, pour donner une lueur d’espoir et une certaine mesure de confort et de paix à ceux qui souffrent à la fin de leur vie et à leurs familles, qui souffrent elles aussi. Je le répète, je crois que cette discussion aurait dû avoir lieu avant le dépôt du projet de loi.
     Le dernier point que je veux aborder aujourd’hui a déjà été soulevé par d’autres députés, je le sais, mais permettez-moi de réitérer leurs préoccupations. Je veux parler de la protection du droit des médecins à agir suivant leur conscience et, honnêtement, du droit des autres professionnels de la santé et fournisseurs de soins qui font partie des équipes médicales et qui pourraient se trouver devant une situation devenue possible en raison du projet de loi.
    Premièrement, je ne crois pas que l’on puisse douter de la nécessité d’offrir des mesures de protection claires et incontestables à ceux qui refusent d’intervenir pour des motifs d’ordre éthique, moral ou religieux. Pour ces questions de vie ou de mort, ce n’est pas seulement ce qu’il convient de faire, c’est la seule chose à faire.
     Deuxièmement, je crois que pour envoyer un signal important au milieu médical, aux familles, aux personnes qui souffrent et à tous les Canadiens, ces mesures de protection de la conscience des médecins doivent figurer dans le projet de loi lui-même, et non pas seulement dans le préambule. Le projet de loi doit faire mention d’une mesure punitive pour quiconque tenterait d’exercer des pressions pour forcer ou contraindre une personne à aider quelqu’un à s’enlever la vie.
    Je vous remercie de m’avoir permis de vous faire part de ces réflexions. Je sais que tous les députés de la Chambre vont réfléchir très sérieusement, sonder leurs cœurs et prier pour réussir à déterminer ce qu’il convient de faire de ce projet de loi. J’espère sincèrement que nous poursuivrons nos discussions avec une extrême prudence. Que Dieu bénisse le Canada.
(1135)
    Madame la Présidente, j’aimerais relever deux ou trois points.
     Premièrement, bien sûr, le projet de loi nous a été présenté à la suite d’une décision unanime de la Cour suprême du Canada, ce qui signifie qu’il incombe à tous les députés présents à la Chambre de faire ce que moi-même et la majorité considérons comme la façon responsable d'agir, soit adopter le projet de loi. Nous avons une échéance fixée au 6 juin. On s’attend évidemment à ce que le projet de loi soit renvoyé tôt ou tard à l’étape de l’étude en comité, et c’est l’objet de ma question.
     Le député a mentionné l’importance des amendements qui pourraient être apportés au projet de loi. Le gouvernement du Canada est tout à fait prêt à écouter toutes les idées, suggestions et exposés à l’étape du comité, et je me demande si le député a quelque chose à ajouter sur l’importance d’examiner le projet de loi en comité en temps opportun, pour que le comité soit en mesure d’intervenir et d’améliorer le projet de loi. Je suis convaincu que le député constatera que le gouvernement est disposé à améliorer le projet de loi. Personne, de ce côté-ci, ne s’oppose à ce que le projet de loi soit renforcé et amélioré.
     Je reconnais également l’importance de soumettre le projet de loi au Sénat, toujours compte tenu de cette échéance du 6 juin. J’aimerais que le député nous explique ce qu’il juge important de faire pour terminer sans délai l’étape de la deuxième lecture, afin que nous puissions travailler en comité, et qu’il nous donne ses suggestions concernant l’examen en comité et la façon de mener le processus à bien d’ici le 6 juin.
    Madame la Présidente, je crois que c’est exactement pour cette raison que le débat est non seulement émotif, mais aussi d’une très grande intensité. Le fait est que cette échéance du 6 juin nous est imposée alors que nous étudions une très grave question. C’est de la vie humaine que nous parlons, ici. C’est une question que la province de Québec a examinée pendant 6 ans. La Belgique a mis dix ans à étudier la question. Ici, pourtant, nous devons l’examiner dans un délai extrêmement serré, et je comprends que le temps presse.
     Cela dit, je pense que les libéraux, avant de déposer le projet de loi, auraient dû respecter leurs propres principes, ceux qu’ils ont mentionnés dans leur programme électoral et qui devaient faire partie du projet de loi, sinon même le précéder, pour que tous les Canadiens aient un meilleur choix et qu’ils aient tous la possibilité d’aller quelque part où ils seraient entourés d’amour ou, pour ceux qui n’ont pas de famille, dans un endroit où ils pourraient être soulagés de leurs douleurs et être entourés de gens qui prendront bien soin d’eux jusqu’à leur tout dernier souffle. Cela ne figure pas dans le projet de loi.
     J’aurais voulu que les libéraux acceptent de veiller à ce qu’une partie des sommes qu’ils allouent à l’infrastructure soit destinée à la construction de centres de soins palliatifs, et qu’ils aient déjà entamé des négociations avec les provinces pour déterminer quels montants seront spécifiquement alloués aux soins palliatifs pour améliorer le service, plutôt que de tout verser dans le trésor des provinces sans même songer à aider les personnes qui en ont besoin.
(1140)

[Français]

    Madame la Présidente, les conservateurs siégeant au comité spécial ne se sont pas entendus. En effet, quatre d'entre eux ont eu une opinion dissidente par rapport à celle du comité. Ils ont exprimé avec éloquence leurs préoccupations, y compris la nécessité d'offrir aux Canadiens de meilleurs soins palliatifs. Ils ont cité l'importance de prendre des mesures pour élargir l'accès aux soins palliatifs dans le cadre de l'initiative touchant l'aide médicale à mourir.
    Mon collègue voudrait-il nous donner quelques précisions à ce sujet, et nous dire quelles mesures concrètes peuvent être prises par le gouvernement pour donner accès à des soins palliatifs de qualité à un plus grand nombre de Canadiens et Canadiennes en fin de vie?

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’en ai mentionné quelques-unes, mais j’ajouterai que je prends très au sérieux la séparation des pouvoirs. Si certains de mes collègues ont cru m’entendre proposer que le gouvernement fédéral impose un régime quelconque relativement à l’administration des services de santé, qui est de compétence provinciale, je leur affirme que ce n’est pas le cas.
    Je disais que, certainement, le gouvernement libéral actuel a déjà agi de façon irresponsable en engageant des milliards à d’autres fins. Je pense que dans ce très important dossier il aurait pu prendre une partie des fonds qu’il a déjà alloués à l’infrastructure pour les destiner à la construction de centres de soins palliatifs. Il devrait ensuite indiquer très clairement, dans le cadre des discussions qu’il tient déjà avec les provinces au sujet d’un accord sur la santé, que toute augmentation éventuelle des fonds sera basée sur une saine reddition de comptes relativement à l’amélioration de l’accès aux soins palliatifs dans l’ensemble du pays.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement l'ensemble de mes collègues.
    J'ai participé, hier, aux auditions du comité. C'est la première fois que je vais avoir l'occasion de prendre la parole à la Chambre.
    Je ne dispose que de 10 minutes, mais d'entrée de jeu, je voudrais signifier que tout le monde ici est bienveillant. Tout le monde veut le bien des personnes en fin de vie et veut le meilleur pour elles. Toutefois, ce n'est pas parce qu'on a la volonté d'être bienveillant qu'on est nécessairement bienfaisant. On ne fait pas nécessairement le bien lorsqu'on porte atteinte à l'autonomie et à l'autodétermination d'une personne.
    Au sens moral du terme, la dignité d'une personne est liée au respect de son autodétermination. C'est la base conceptuelle à partir de laquelle le débat doit se faire. Hier, en comité, j'ai entendu qu'il fallait juger la dignité d'une personne en fonction de son affection; on se demande si elle porte des couches ou non et on se dit que c'est bien effrayant. Seule la personne elle-même peut décider de la qualité de sa vie et on ne peut pas comparer une vie à une autre.
    En guise d'introduction, parce que le projet de loi C-14 se fonce beaucoup sur une partie de la loi québécoise, je voudrais situer les fondements de cette loi. À la demande des médecins spécialistes du Québec et d'autres groupes de la société civile, à l'automne 2009, l'Assemblée nationale du Québec a créé un espace de délibération, afin de permettre aux citoyens de se prononcer sur une question on ne peut plus intime pour la personne, avec un grand P, de l'humain, soit celle de sa propre fin de vie.
    Dès cet instant, le statu quo n'était plus possible pour les parlementaires québécois. Le 5 juin 2014, soit cinq ans plus tard, l'Assemblée nationale adoptait le projet de loi no 52 intitulé « Loi concernant les soins de fin de vie », dont l'aide médicale à mourir est un des volets.
    Sur le fond, cette réflexion reposait sur deux prémisses. D'abord, ma mort comme ma vie m'appartiennent. Ensuite, l'autonomie consacrée en droit par le principe de l'autodétermination, et sa règle corollaire en contexte biomédical, soit le consentement libre et éclairé, n'étant jamais remise en question tout au long de notre vie, même en situation de fragilité ou d'urgence extrême, pourquoi en serait-il autrement en fin de vie?
     Pourquoi un mourant en phase terminale de sa vie n'aurait-il plus le droit à l'autodétermination de sa personne, et au nom de quoi? Y a-t-il un moment plus intime et singulier dans la vie d'un être humain que celui de sa propre mort? Que peut-on souhaiter de mieux à la personne de l'humain que de franchir le seuil de la mort en toute sérénité et en toute quiétude, sans avoir peur de souffrir et sans souffrance? N'est-ce pas ce qu'on souhaite tous et ce qu'on peut souhaiter de mieux à l'être humain?
    La force du consensus issu de la démarche québécoise a été d'inscrire ces prémisses dans un continuum de soins, qui a fait en sorte de ne plus opposer deux réalités dans l'histoire de cette problématique: les soins palliatifs à l'encontre de l'euthanasie. Pourquoi renvoyer dos à dos les soins palliatifs et l'euthanasie? Cette question est en filigrane de plusieurs interventions de mes collègues conservateurs, parce que, contrairement au Québec, nous n'avons pas fait ici le débat sur le droit de mourir, qui était associé, à l'époque, à l'euthanasie passive.
(1145)
    Il a fallu combattre pour obtenir le droit de mourir. À l'époque, des médecins paternalistes allaient vers le curatif, et les gens mouraient de la chimiothérapie et non de leur cancer. Au cours de l'histoire, nous sommes passés de l'euthanasie passive aux soins palliatifs. L'être humain a donc acquis le droit de mourir.
    Les soins palliatifs, c'est l'accompagnement global vers la mort. Ce concept datant de 1967 est né en Angleterre, grâce à Cicely Saunders. Pourquoi une demande d'aide à mourir émergeant d'un bon processus d'accompagnement vers la mort devrait-elle être considérée comme un échec? Le processus de mort est déjà amorcé et il est irréversible.
    Il est possible qu'une personne, un beau matin, dise volontairement qu'elle est prête à lâcher prise. Il est aussi possible que ce ne soit pas le cas et qu'elle ait la volonté de continuer, de mourir à petit feu. La loi québécoise n'empêche aucunement l'un ou l'autre, parce qu'elle a inscrit les soins de fin de vie dans un continuum de soins.
    Depuis plus de 30 ans, les soins palliatifs étaient considérés comme étant la seule solution pour mourir dans la dignité en fin de vie. Or on s'est aperçu que cela ne répondait pas à tous les besoins. Dans la plupart des cas, les demandes de mort émergent d'une dynamique de soins palliatifs. Il est très rare qu'une personne qui reçoit son diagnostic d'un médecin qui lui dit ne pouvoir rien faire pour elle demande tout de suite une injection. Si c'est le cas, tout dépend de l'état de développement du cancer. On pourrait lui fournir quelques antidépresseurs et lui demander de régler sa fin de vie. Il y a des choses à faire avant de mourir.
    Un des écueils du projet de loi C-14 est qu'il assimile sous le même vocable de l'aide médicale à mourir deux réalités. L'une est couverte par le Québec, soit l'euthanasie et les soins de fin de vie, qui comprennent les soins palliatifs; l'autre est le suicide assisté. Ce choix induit une confusion conceptuelle qui est à l'origine de l'impasse de nos débats.
    Le suicide assisté, ce n'est pas l'euthanasie. La différence réside dans le fait qu'on peut être en phase terminale d'une maladie dégénérative sans être en situation de mort imminente. Une personne peut souffrir énormément sans toutefois être dans une situation de mort naturelle vraisemblablement prévisible.
    La Cour suprême a commandé aux législateurs que nous sommes d'encadrer le suicide assisté. Voici ce qu'elle nous dit, en vertu de l'article 7:
    Dans la mesure où ils prohibent l’aide d’un médecin pour mourir que peuvent demander des adultes capables affectés de problèmes de santé graves et irrémédiables qui leur causent des souffrances persistantes et intolérables, l’al. 241b) et l’art. 14 du Code criminel privent ces adultes du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne que leur garantit l’art. 7 de la Charte. Le droit à la vie entre en jeu lorsqu’une mesure ou une loi prise par l’État a directement ou indirectement pour effet d’imposer la mort à une personne ou de l’exposer à un risque accru de mort. En l’espèce, la prohibition prive certaines personnes de la vie car elle a pour effet de forcer certaines personnes à s’enlever prématurément la vie, par crainte d’être incapables de le faire lorsque leurs souffrances deviendraient insupportables.
(1150)
     C'est à cela qu'on est convié, et c'est cela qu'il faut régler.

[Traduction]

    Madame la Présidente, nous avons beaucoup débattu de la loi elle-même. Cependant, le débat comporte un élément important: la préoccupation exprimée ce matin au sujet des soins palliatifs. J’ai souligné hier, et je le répète aujourd’hui, que nous vivons dans une fédération et que nous devons reconnaître, en abordant la question des soins palliatifs, que cette préoccupation hante tous les Canadiens, où qu’ils vivent au pays. Qu’ils résident en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse, au Québec ou au Manitoba, les gens se préoccupent profondément des soins palliatifs.
     Mon collègue ne convient-il pas que les organes fédéraux sont responsables de collaborer avec leurs homologues provinciaux afin de fournir les meilleurs soins palliatifs aux personnes de toutes les régions du pays parce que c’est ce que veulent tous les Canadiens?

[Français]

    Madame la Présidente, bien que les soins palliatifs aient été identifiés comme étant la solution pour mourir dans la dignité, ils ont été malheureusement très peu ou pas assez accessibles.
    Je dis cela dans le sens global de ce que cela devrait être. Il ne s'agit pas de mettre le malade dans un lit, dans un corridor, où on le laisse mourir. Il s'agit de soins globaux d'accompagnement. Cela prend un personnel spécialisé et un contrôle adéquat de la douleur, ce qui parfois n'était pas permis. En effet, les gens ne donnaient pas les doses nécessaires, car ils pensaient qu'une dose pouvait entraîner la mort.
    Or le Québec a réglé cela. Cette province a réglé la question des soins de fin de vie en soins palliatifs. Les soins de santé sont de compétence provinciale et le Québec est un chef de file en la matière. Je pense qu'il faudrait introduire dans ce projet de loi une disposition d'équivalence pour que la loi fédérale ne puisse pas créer de dédoublements et ainsi changer l'économie interne de la loi québécoise.
(1155)

[Traduction]

    Madame la Présidente, je crois qu’au début de son intervention, mon collègue a expliqué en quoi consiste la dignité, en ajoutant que chaque personne doit en décider pour elle-même. Si on décide qu'on a de la dignité, alors on en a et si on décide qu'on n’a pas de dignité, alors on n’en a pas. Je trouve la définition du député plutôt troublante. D’abord, aucun régime d’aide au suicide proposé, ni ici ni ailleurs, ne définit la dignité d’une façon si subjective. Le régime proposé insinue qu’une personne qui a des symptômes physiques ou psychologiques peut être très digne, alors qu’une personne qui n’a aucun de ces symptômes peut ne pas faire preuve de dignité. Il me semble que dans cette loi et ailleurs, la définition de « dignité » repose sur ces marqueurs externes.
     J’aime ce que mon collègue de Portneuf—Jacques-Cartier a dit hier de la dignité, qui est inhérente à tous les êtres humains, parce que si nous considérons la dignité aussi subjectivement que le fait ce député, je ne sais pas comment nous pourrons encore prévenir le suicide. Si une personne affirme, quelles que soient les circonstances dans lesquelles elle se trouve, qu’elle n’a pas de dignité, alors comment allons-nous essayer de la convaincre que la dignité est inhérente à sa personne et que, par conséquent, elle ne devrait pas s’enlever la vie? Je me demande ce que le député pense des répercussions que sa définition de « dignité » aura pour quiconque se trouve dans une situation tellement difficile qu’il ou elle désire s’enlever la vie.

[Français]

    Madame la Présidente, je trouve dommage que mon collègue conservateur confonde suicide et suicide assisté.
    Dans le cas du suicide, il y a réversibilité de l'état de l'individu, tandis que dans le suicide assisté, on est dans une situation de maladie grave et irrémédiable, ainsi que de souffrances intenses qui ne peuvent pas être renversées. C'est fondamental.
     D'autre part, ce que j'ai dit, c'est que ce n'est pas parce qu'on veut le bien et qu'on veut être bienveillant, qu'on fait le bien. Quand on porte atteinte à l'autonomie et à l'autodétermination d'une personne, on n'est pas bienfaisant. C'est quand on porte atteinte à l'autonomie d'une personne que l'on porte atteinte à sa dignité. La dignité d'une personne repose sur sa capacité d'autodétermination, et cela ne disparaît pas lorsqu'on est en situation de vulnérabilité.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je suis heureux de participer aujourd’hui à ce débat sur le projet de loi C-14. La Chambre a toujours suivi un principe important: il est essentiel d’édifier les lois sur des fondements solides. Or, ce projet de loi ne repose pas sur une base solide.
     La décision que la Cour suprême a rendue il y a des années dans l’affaire Rodriguez était très claire. Cependant, il y a à peine plus d’un an, comme il arrive à tant d’autres décisions et à tant d’autres directions, la Cour suprême a annulé sa décision. Tout irait bien si elle avait eu de très bonnes raisons de le faire, mais la raison qu’elle a donnée était très intéressante. La Cour suprême a attribué cela à une erreur de perception. Les juges ont expliqué qu’ils en sont arrivés à ces conclusions en constatant un changement de l'ensemble des faits législatifs et sociaux. Je m’inquiète, et plusieurs autres avec moi, de ce que nos lois — ainsi que l’interprétation des droits que la Charte nous garantit — dépendent des opinions d’un très petit groupe de personnes. Je m’étendrai sur l'ensemble des faits législatifs et sociaux dans quelques minutes.
    De mon point de vue, ce n’est pas une amélioration. Bon nombre de mes collègues des deux côtés de la Chambre se sont exprimés sur le projet de loi C-14, certains y étant favorables, d’autres opposés. Certains éléments sont absents dans le projet de loi et c’est pourquoi nous devons poursuivre notre débat. J’ai entendu quelques commentaires concernant l'échéancier, à quel point il était serré, et la nécessité d'adopter la mesure. Ces pressions nous empêchent en fait de consacrer le temps voulu à la discussion et à une analyse un peu plus poussée.
    Le projet de loi ne définit pas clairement le terme « irrémédiable ». Avoir un problème de santé irrémédiable est pourtant un critère d’admissibilité à l’aide médicale à mourir.
     Je m’inquiète de voir que les infirmiers praticiens pourront participer à ce processus, et non seulement les médecins. Des gens se demandent même pourquoi le personnel médical doit participer à ce processus. Ils se demandent s’il ne serait pas possible d’exécuter cet acte ailleurs qu’à l’hôpital, de sorte que lorsqu’une personne doit aller à l’hôpital pour y recevoir des soins de santé, elle n’ait aucune crainte de recevoir le contraire.
     Les personnes qui participent à un acte d’euthanasie feront l’objet d’une exemption pénale, mais aucune mesure de protection n’est prévue à l’égard des personnes qui refuseront d’y participer. De vives inquiétudes ont été exprimées au sujet de ce qu’on appelle la liberté de conscience et l’absence de protection à cet égard.
     Le projet de loi demeure également flou au sujet des troubles psychologiques et la manière dont ils seront pris en compte. Beaucoup de gens se préoccupent également de voir que l’évaluation de la vulnérabilité est absente du projet de loi. Il faut pourtant prendre le temps de voir si une personne est soumise à des pressions ou si elle se trouve dans un état de vulnérabilité qui l’a peut être incitée à prendre une mauvaise décision.
    Certains ont demandé la tenue d’un examen judiciaire préalable. Le projet de loi n’en fait pas mention.
     Il y a également un flou concernant la collecte de données. Cela a posé problème à certains égards. Est-ce que les données recueillies seront pertinentes? Quelqu’un sera-t-il responsable de maintenir un registre de données pertinentes sur le déroulement de ce processus?
     Beaucoup ont déploré l’absence d’engagement clair au sujet des soins palliatifs. Un député ministériel vient justement de soulever ce point. Durant la campagne électorale, les libéraux ont pourtant pris un engagement à cet égard. Ils disaient que cela relevait de leur compétence et ont promis de verser trois milliards de dollars pour les soins palliatifs. Maintenant qu’ils sont au pouvoir, ils prétendent que cela ne relève pas de leur compétence. On dirait que les libéraux essaient de se dérober à leurs responsabilités dans ce domaine.
    Qu'on me permette de revenir à la décision de la Cour suprême. La Cour a renié son ancienne position. Elle l’a renversée et nous a laissé le champ libre en ce qui a trait au suicide assisté ou à l’aide à mourir. La seule chose que la Cour suprême a dit dans la décision Carter, c’est que la personne devait donner son consentement et qu’elle devait être atteinte de problèmes de santé graves et irrémédiables lui causant des souffrances persistantes et intolérables. Quand nous regardons cela de près, nous constatons qu’elle laisse le champ tout à fait libre.
    Comme je l'ai dit plus tôt, un bon projet de loi doit avoir des bases solides, et je ne crois pas que ce soit le cas ici en raison du jugement de la Cour suprême. Le projet de loi se base sur l'arrêt dans la cause Carter, et cela peut difficilement être considéré comme une assise solide pour rédiger un bon projet de loi.
    Je présume que nous ne réglerons pas la question aujourd'hui et que nous y reviendrons à une autre étape du projet de loi. Cependant, j'aimerais prendre quelques minutes pour discuter brièvement du récent jugement de la Cour suprême dans l'affaire Carter c. Canada. C'est évidemment un jugement très controversé qui porte sur un sujet délicat pour bon nombre de Canadiens, parce que les deux camps ont des convictions bien ancrées.
(1200)
    La Cour suprême a reconnu que l'interdiction de l'aide au suicide constituait généralement un exercice valide de la compétence en matière de droit criminel conférée au gouvernement fédéral. Il a également été convenu que la loi allait trop loin et qu'elle ne s'appliquait pas dans le cas d'un adulte capable affecté de problèmes de santé graves consentant à mettre fin à ses jours. Je trouve cette décision troublante pour diverses raisons.
    Premièrement, la Cour suprême n'a pas tenu compte du consensus parlementaire. Dans sa décision, elle expliquait que le changement par rapport à sa position précédente dans l'affaire Rodriguez c. Colombie-Britannique était nécessaire en raison de l'ensemble des faits législatifs et sociaux différents. Or, ce prétendu ensemble de faits différents ne tient pas compte du consensus parlementaire clair et inchangé contre le suicide assisté.
    Entre 1991 et 2012, neuf projets de loi d'initiative parlementaire ont été présentés à la Chambre des communes visant à modifier le Code criminel pour décriminaliser le suicide assisté ou l'euthanasie. Six ont été mis aux voix et ils ont tous été rejetés. Lors de son examen de l'ensemble des faits législatifs, la Cour suprême a tenu compte de l'évolution législative en Belgique, en Suisse, en Oregon, dans l'État de Washington et aux Pays-Bas, mais pas du bilan législatif du Parlement du Canada.
    Deuxièmement, la Cour suprême a statué qu'il n'existait pas de consensus dans la société canadienne sur cette question. Dans sa décision, la juge Smith de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, qui a entendu l'affaire Carter c. Canada en première instance, a écrit ce qui suit: « En ce qui concerne l'aide médicale à mourir, après appréciation de l'ensemble de la preuve, j'estime qu'il n'existe pas de consensus social clair dans un sens ou dans l'autre. » Il est donc évident que, quelles que soient les conséquences des changements dans l'ensemble des faits législatifs et sociaux, elles ne comprennent pas un consensus clair au sein de la population canadienne.
    Cette absence de consensus n'a pas changé au cours des 22 années qui se sont écoulées depuis l'arrêt dans la cause Rodriguez, dans lequel la Cour suprême a déclaré: « On ne peut conclure à l'existence d'un consensus en faveur de la décriminalisation du suicide assisté. S'il se dégage un consensus, c'est celui que la vie humaine doit être respectée. »
    De toute évidence, la Cour a conclu à l'absence d'un consensus parmi les pays occidentaux. Tout en insistant sur le fait que l’ensemble des faits législatifs et sociaux avait changé depuis sa dernière décision sur cette question, la Cour suprême a admis que l’aide médicale à mourir demeurait néanmoins une infraction criminelle dans la plupart des pays occidentaux. Elle a tout de même choisi de se ranger aux côtés de la minorité de pays qui autorisent cette pratique.
    Je crois que la Cour a mal interprété l'objectif du Parlement derrière la prohibition de l'aide au suicide. Dans son jugement, la Cour suprême accorde beaucoup de poids à l’objectif poursuivi par le Parlement au moyen de l’alinéa 241b) et de l’article 14 du Code criminel, qui prohibent l’aide à mourir. De l’avis de la Cour, ces dispositions ont été adoptées à seule fin de réaliser l’objectif de l’État qui consiste à protéger les personnes vulnérables. Or, dans l’arrêt Rodriguez, la Cour avait défini l’objectif de cet article comme n’étant pas seulement de « protéger la personne vulnérable », mais également de « préserver la vie ».
    La Cour suprême a écrit ce qui suit: « On ne conteste pas, dans le présent pourvoi, la validité et l’opportunité générales de l’alinéa 241b) puisqu’il répond à l’objectif du gouvernement de préserver la vie et de protéger la personne vulnérable. » Cette position a été réaffirmée à plusieurs reprises.
    En insistant sur le fait que, dans l'arrêt dans la cause Carter, l'unique objet de l'article 241 était de protéger la personne vulnérable, la Cour suprême a été en mesure de conclure que la prohibition s'applique à des personnes qui n'entrent pas dans cette catégorie et que des personnes n'ont pas besoin d'être protégées par celle-ci. La Cour a conclu que la loi actuelle avait une portée excessive et qu'elle était totalement disproportionnée par rapport à ses objectifs. Elle a aussi ajouté que le Parlement devait mettre en place des mesures de protection pour faire en sorte que les personnes qui souhaitent vraiment être euthanasiées puissent avoir accès à ce service.
    Cette interprétation bafoue l'intention du Parlement de préserver la vie. Si on avait pleinement tenu compte de l'objectif de ces articles du Code criminel, plutôt que de s'en tenir à la protection des personnes vulnérables, le résultat aurait été très différent, selon moi.
    Je veux soulever un dernier point avant que mon temps de parole ne soit écoulé. En réalité, la cour laisse au patient le soin de définir le terme « irrémédiable ». En effet, la cour a décidé qu'un état irrémédiable n'obligeait pas le patient à subir un traitement qu'il jugeait inacceptable. Autrement dit, même si un traitement existe, l'état du patient est considéré comme irrémédiable si celui-ci refuse le traitement.
    Je tenais à exprimer mes craintes. Je pense toutefois que nous reviendrons sur certains points soulevés par la Cour suprême, de même que sur la confusion qui existe entre le droit à mourir et le droit à la vie ainsi que sur d'autres questions.
(1205)
    Monsieur le Président, je souligne que la Cour suprême du Canada a déclaré à l'unanimité que les Canadiens qui endurent des souffrances intolérables ont le droit de demander de l'aide pour y mettre fin. Nous respectons le jugement de la Cour suprême du Canada et nous nous attendons à ce que tous les députés fassent de même.
    Il ne s'agit pas de déterminer si l'aide médicale à mourir devrait exister au Canada, mais plutôt de décider comment la rendre disponible. La question débattue d'aujourd'hui est délicate et il est important de reconnaître que nous avons jusqu'au 6 juin pour la régler. Il serait inacceptable que les députés censés représenter les Canadiens de partout au pays n'arrivent pas à le faire. Nous avons l'obligation de combler le vide juridique créé par l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
    Le député va-t-il au moins reconnaître que nous devons adopter une loi? Y a-t-il des amendements possibles qui rendraient le projet de loi plus acceptable pour le député?
    Monsieur le Président, c'est exactement mon point. C'est la cour qui nous a menés jusqu'ici, et l'échéance est la sienne.
    Comme l'a fait valoir une de mes collègues plus tôt, l'échéance nous empêche d'aborder ces questions de façon suffisamment approfondie. Nous n'avons pas discuté des conséquences de la décision de la Cour suprême. Nous n'avons pas pris le temps d'en discuter.
    Le gouvernement a présenté, sous pression, une mesure législative que de nombreuses personnes jugent inadéquate. Une des choses qui me préoccupe grandement, et j'en ai parlé plus tôt, c'est le manque de protection de la liberté de conscience.
    De nombreux membres de la communauté des personnes handicapées sont très inquiets du manque de protection de la vulnérabilité. Ils ne veulent pas que s'installe une pression sociale qui ferait en sorte que les gens se sentent obligés de prendre part à cette activité.
    Ce sujet soulève de nombreuses questions. L'échéance qui nous a été imposée ne nous aide pas à les aborder et à les régler.
    Monsieur le Président, concernant la question de mon collègue du côté du gouvernement, je partage cette inquiétude: nous semblons devoir combler un vide juridique en raison de la décision de la Cour suprême, c'est bien vrai.
    Toutefois, de façon réaliste, si nous n'adoptons pas une mesure législative d'ici le 6 juin, date donnée par la Cour suprême, alors nous serons dans la position insoutenable du vide législatif. Il n'y aurait aucune disposition sur l'aide à mourir. La Cour suprême a déterminé que les dispositions du Code criminel qui régissent cette question sont inconstitutionnelles et a suspendu l'application du jugement jusqu'en juin seulement.
    Mon collègue a-t-il des idées sur la façon dont nous pourrions établir une mesure législative appropriée et aussi éviter une situation insoutenable, soit un vide législatif au Canada?
(1210)
    Monsieur le Président, il importe de souligner que nous sommes ici aujourd'hui pour discuter et débattre de cette question, et que nous l'abordons dans les délais impartis. Nous essayons de bien faire notre travail et d'établir des lignes directrices et des mesures de protection liées à cet enjeu.
    La réalité, c'est que ce ne sont pas tous les Canadiens qui appuient le suicide assisté et l'euthanasie au pays. Cette décision n'a pas été prise par les élus, par les députés à la Chambre, qui sont ici pour représenter le peuple; elle a été prise par la Cour suprême du Canada. La Cour suprême du Canada a décidé que l'aide médicale à mourir était un droit garanti par la Charte au Canada et que nous devons donc adopter une mesure législative sur le sujet.
    Cela dit, le Parlement du Canada doit prendre le temps de bien faire les choses afin de trouver une solution convenable pour les Canadiens.
    J'aurais voulu mentionner plusieurs choses. La première, c'est que les pays qui ont pris des mesures en lien avec cet enjeu constatent qu'ils sont sur une pente glissante. Nous devons aussi discuter de cet aspect, mais les députés n'en font pas mention.
    Monsieur le Président, c'est un privilège pour moi de prendre la parole dans cette enceinte pour appuyer le projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir.
    J'appuie le projet de loi, non seulement parce qu'il a été prescrit par la Cour suprême du Canada, mais aussi pour des raisons très personnelles. Je crois que cette mesure législative, cette politique, respecte les droits des Canadiens qui sont aux prises avec des souffrances intolérables. Elle respecte leur droit de mourir paisiblement.

[Français]

    Je me lève aujourd'hui pour me prononcer en faveur de ce projet de loi sur l'aide médicale à mourir. Ce n'est pas parce que la Cour suprême a décidé d'invalider la législation pénale qui interdit l'aide médicale à mourir, mais plutôt pour des raisons très personnelles.

[Traduction]

    Pour commencer, dans le projet de loi, il est question d'aide médicale à mourir, et non d'aide médicale au suicide. Je définis le suicide — et je crois que c'est une définition communément acceptée par la société — comme l'acte de s'enlever la vie intentionnellement, sans que la mort soit imminente. Le projet de loi C-14 prévoit des conditions précises qui permettent à une personne d'être admissible à l'aide médicale à mourir. L'une d'elles, bien entendu, est l'imminence réelle de la mort pour cette personne.
    Je crois donc qu'il faut dorénavant cesser de parler de suicide, parce que la question à l'étude n'a clairement rien à voir avec le suicide tel que nous l'entendons communément. J'estime également qu'il n'y a pas lieu de faire des parallèles avec la très triste et tragique épidémie de suicides qui frappe les communautés autochtones d'un bout à l'autre de notre grand pays. À mes yeux, il s'agit d'une tout autre paire de manches. On ne devrait pas comparer les deux.
    La question de l'aide médicale à mourir suscite un débat très personnel et très émotif. Pour ma part, cette question m'a amené à faire une longue réflexion personnelle. Comme beaucoup de Canadiens et comme beaucoup d'autres parlementaires, j'ai vu un trop grand nombre de mes proches et amis souffrir inutilement de douleurs atroces, alors que la mort était imminente.
    J'ai vécu une expérience très personnelle le 2 août dernier, le jour du déclenchement des élections, lorsque ma mère est décédée. Elle avait 96 ans et elle vivait seule depuis 20 ans. Au cours des cinq dernières années de sa vie, elle était alitée dans une maison de santé, en proie à des douleurs.
    Ma mère était très pratiquante et avait un rapport spécial avec Dieu. Elle priait tous les jours. Elle me reprochait de ne pas aller à l'église aussi souvent que je l'aurais dû. Au cours des 20 dernières années de sa vie, sa santé physique s'était détériorée, mais elle avait gardé l'esprit vif et entendait encore très bien. Dans ses 10 dernières années, elle m'a fait part de son désir d'arrêter de vivre. Les progrès de la médecine lui avaient permis de prolonger son existence, mais sa qualité de vie avait considérablement diminué. Les cinq dernières années, elle était confinée au lit et, les quatre dernières années, des masses et des tumeurs malignes étaient apparues sur tout le bas de son corps. Comme elle souffrait de douleurs constantes, un protocole de gestion de la douleur avait été mis en place. En femme forte qu'elle avait toujours été, ma mère a continué à respirer, à prier et à espérer que Dieu vienne la chercher. Elle a continué ses prières et a gardé espoir pendant des années.
    Ma mère était saine d'esprit. C'était une pratiquante qui était en paix avec Dieu. Des membres de la famille, des religieuses et un prêtre lui rendaient fidèlement visite. Ces gens lui apportaient du réconfort, mais elle continuait à me dire qu'elle souhaitait mourir en paix et en douceur. Elle souhaitait trouver un moyen de mettre fin à l'insoutenable souffrance physique qui la tenaillait et qui ne pouvait plus être gérée en dépit des soins qu'on lui prodiguait. J'aurais aimé qu'elle ait un tel choix et j'estime qu'elle aurait dû l'avoir.
    À mon avis, le projet de loi ne va pas assez loin. J'aurais préféré que les personnes qui éprouvent des souffrances persistantes et intolérables et dont l'état de santé ne pourra jamais s'améliorer puissent recourir à l'aide médicale à mourir moyennant les conditions strictes prévues dans le projet de loi.
    Cependant, je comprends également que cette mesure législative change le paradigme de façon si profonde que nous devrons réexaminer la question dans l'avenir. La loi sera améliorée et des données probantes seront recueillies. J'espère que certains mythes seront déboulonnés et qu'on favorisera la dignité humaine, l'autodétermination et la liberté de choix.
(1215)

[Français]

    Ce choix est à la base de nos discussions aujourd'hui. Nous souhaitons offrir ce choix à ceux et celles qui, dans leurs derniers moments sur terre, souffrent de problèmes de santé graves et irrémédiables dont la souffrance physique est intolérable. Ce n'est pas un débat sur le suicide. C'est un débat visant à assurer la dignité de la personne mourante. Tout au long de notre vie, nous faisons des choix sur les soins que nous recevons. Il est déplorable qu'à la fin de notre vie, ce choix nous soit enlevé.

[Traduction]

    Il est vrai que la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter c. Canada rend nécessaire l'adoption d'une loi sur l'aide médicale à mourir. Je crois que beaucoup de députés ont indiqué que l'échéancier était loin d'être idéal. Aurais-je préféré que nous disposions de six mois de plus pour les débats, les consultations et les discussions avant d'adopter le projet de loi? Évidemment que j'aurais préféré cela. Je crois que tous les parlementaires fédéraux auraient préféré qu'il en soit ainsi.
    Quoi qu'il en soit, aux yeux de certaines personnes, le projet de loi ne va pas assez loin, tandis que d'autres personnes sont totalement opposées à l'assistance médicale à mourir. J'en ai beaucoup discuté avec les gens de ma circonscription.

[Français]

    Je représente la circonscription de Saint-Boniface—Saint Vital. Il y a beaucoup de catholiques dans ma circonscription et ils ont tous fait part très clairement de leur point de vue.

[Traduction]

    Quelle que soit leur position dans ce débat, tous veulent garantir la protection et le respect de la dignité des personnes. La notion de dignité, dont il a souvent été question au Parlement canadien, a un caractère hautement individuel. Le parcours de la personne, ses croyances et son état de santé déterminent le sens qu'elle donne à la dignité et, j'ajouterais, à son droit de disposer d'elle-même.

[Français]

    Mourir dans la dignité est un choix personnel qu'il faut respecter. Ce projet de loi est nécessaire. En tant que société, nous devons nous assurer que les meilleurs soins possibles sont disponibles pour tous nos concitoyens et nos concitoyennes.

[Traduction]

    Nous vivons un moment important de notre histoire, où la consultation a joué un rôle important dans le passé et jouera encore un rôle important à l'avenir. Je félicite le gouvernement d'avoir effectué de vastes consultations au Canada et à l'étranger pour que le projet de loi défende la liberté des gens de faire leurs propres choix tout en protégeant les plus vulnérables et en respectant les convictions personnelles des fournisseurs de services de santé.
    Je félicite aussi le gouvernement d'avoir pris le temps de continuer les consultations et la discussion très importantes à propos des mineurs matures, des personnes atteintes de maladie mentale et des personnes qui voudraient pouvoir donner leurs instructions à l'avance.
(1220)

[Français]

    De plus, j'appuie entièrement l'engagement du gouvernement quant à une gamme complète d'options de soins de fin de vie de qualité, y compris les soins palliatifs, un domaine dans lequel l'Hôpital St-Boniface, dans mon comté, est un chef de file. Ce projet de loi établit des mesures responsables visant à favoriser une approche uniforme de l'aide médicale à mourir à l'échelle du Canada. Il reconnaît la valeur inhérente et l'égalité de chaque vie humaine.

[Traduction]

    Le projet de loi établit un cadre régissant l'aide médicale à mourir dans l'ensemble du pays. Il prévoit en outre un examen après cinq ans. C'est un projet de loi équilibré, responsable et empreint d'une grande compassion qui s'applique à des problèmes très difficiles et très personnels.
    Monsieur le Président, je remercie le député de son allocution et je le félicite surtout d'avoir eu le courage de nous faire part de son expérience personnelle et des interactions qu'il a eues avec des personnes mourantes. Ses témoignages nous aident à avoir une meilleure perspective.
    Malheureusement, à cause du manque de soins palliatifs au Canada, il arrive souvent qu'une personne croie ou se fasse dire que ses souffrances ne peuvent pas être allégées, alors qu'elles le pourraient. C'est pourquoi j'estime qu'il faut accorder plus importance aux soins palliatifs et à la gestion de la douleur.
    Ma question porte plus particulièrement sur les soins palliatifs dans le contexte de la mesure législative dont nous sommes saisis. Le gouvernement s'est engagé — pas dans le budget de cette année, mais un jour — à investir dans les soins palliatifs. La plupart des députés jugent que c'est une bonne chose. Le problème, c'est que certaines personnes n'ont pas accès à des soins palliatifs de qualité. Or, aucune disposition du projet de loi n'oblige à ce que des soins palliatifs soient offerts avant d'envisager l'aide médicale à mourir ou l'euthanasie.
    Le député serait-il favorable à l'amendement qu'une association de médecins offrant des soins palliatifs a proposé ce matin au comité et selon lequel il faudrait que les gens aient accès à des soins palliatifs et qu'ils ne choisissent pas l'euthanasie pour la seule et unique raison qu'ils n'ont pas accès à de tels soins.
    Monsieur le Président, je suis allé à maintes reprises visiter l'hôpital de Saint-Boniface qui se trouve dans ma circonscription et j'ai parlé abondamment avec l'archevêque de Saint-Boniface. Il ne fait aucun doute pour moi que les soins palliatifs occupent une très grande place dans toute cette question.
    Après l'élection, nous nous sommes engagés à dépenser trois milliards de dollars sur quatre ans pour améliorer les soins à domicile, lesquels sont liés de près aux soins palliatifs. Nous devons également croire ce que dit la ministre lorsqu'elle affirme que les soins palliatifs sont la priorité absolue de son mandat à titre de ministre de la Santé. Les soins palliatifs reposent en grande partie sur des partenariats conclus avec les autres administrations publiques du pays.
    Je conviens que les soins palliatifs doivent être améliorés et que nous devons augmenter les budgets qui leur sont consacrés. Je suis d'accord avec cette idée.
    Monsieur le Président, je félicite mon collègue pour son brillant discours et pour la sensibilité dont il fait preuve. Je suis d'accord avec la distinction qu'il fait entre le suicide et l'aide à mourir. C'est une distinction importante que tous les parlementaires auraient avantage à garder à l'esprit.
    J'ai deux brèves questions à lui poser. Premièrement, il a parlé des soins palliatifs. Je suis le porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de santé. J'ai examiné de près le budget du gouvernement et j'ai pu constater que les 3 milliards de dollars pour les soins à domicile promis par le gouvernement durant la campagne électorale n'y figurent tout simplement pas. J'aimerais que mon collègue me dise ce qu'il pense de cela et comment il croit que nous serons en mesure d'édifier un système de soins palliatifs de calibre mondial si le gouvernement n'est pas disposé à fournir les fonds nécessaires.
    Deuxièmement, la décision de la Cour suprême affirme clairement que l'aide à mourir devrait être accessible aux personnes atteintes d'une maladie grave et irrémédiable. Or, le projet de loi dont nous sommes saisis fixe d'autres critères d'admissibilité qui vont au-delà des instructions de la Cour suprême, comme la nécessité d'être en mesure de constater que la mort est facilement prévisible. Cela se traduit par la situation saugrenue où Mme Carter, la plaignante dans cette affaire, n'aurait vraisemblablement pas été en mesure d'avoir accès à l'aide à mourir, malgré le fait qu'elle ait eu gain de cause. J'aimerais savoir si mon collègue a quelque chose à dire sur cet aspect du projet de loi.
(1225)
    Monsieur le Président, je pense que le député conviendra que le projet de loi qui est présenté, et qui sera adopté, marque un changement profond de paradigme en la matière. D’aucuns pensent qu’il va trop loin, d’autres qu’il ne va pas assez loin. Mais la réalité, c’est qu’il marque un changement profond de paradigme sur la question de l’aide médicale à mourir. Il fera l'objet d'un examen dans cinq ans, et je pense que l’on aura amplement l’occasion de l’améliorer. Je suis convaincu que ce sera le cas.
     Pour ce qui est de l’engagement en matière de soins palliatifs, il est clair qu’il y a un montant de 3 milliards de dollars de prévu sur quatre ans. J’étais assis ici même lorsque la ministre de la Santé a pris l’engagement d’améliorer le service des soins palliatifs au cours des quatre années à venir.

[Français]

    Monsieur le Président, rarement dans la vie d'un parlementaire est-on appelé à débattre d'un sujet d'une si grande importance, d'un enjeu qui commande autant de gravité, de rigueur, de sensibilité et de compassion.
     À cet égard, je veux d'abord saluer le professionnalisme de toutes mes consoeurs et de tous mes confrères de la Chambre qui, depuis le début de l'étude du projet de loi C-14, ont fait fi de la partisanerie et font de ce débat davantage une discussion qu'un débat à proprement parler.
    La question qu'il nous incombe d'aborder aujourd'hui en est une qui, inévitablement, soulève des passions sincères et touche une corde sensible pour tous, tant ici à Ottawa que d'un océan à l'autre. La question de l'encadrement de l'aide médicale à mourir demande de trouver l'équilibre entre, d'une part, la mise en oeuvre d'un droit dont les conséquences sont sans appel et, d'autre part, la protection des personnes vulnérables face à ce droit.
    De quel droit s'agit-il? Il s'agit du droit, pour une personne adulte capable qui y consent librement et qui est affectée d'une maladie grave et irrémédiable dont les souffrances lui sont intolérables, d'expirer au moment voulu, avec l'aide et le soutien médical nécessaires. Il s'agit là d'un droit que garantit l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui prévoit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne. Il s'agit là d'un droit qui a été reconnu à l'unanimité par la Cour suprême du Canada, le 6 février 2015, dans l'affaire Carter. Il s'agit là d'un droit qui protège la vie, parce que l'interdiction tous azimuts du Code criminel à l'article 14 et au paragraphe 241b) d'aider un autre à se suicider ou de le lui conseiller avait pour effet que les personnes atteintes de maladie grave et irrémédiable se voyaient forcées de mettre fin à leurs jours dans l'anticipation et la crainte que l'évolution de leur maladie ne les en rende incapables et que leurs souffrances ne deviennent insupportables.
    De par son caractère absolu, l'interdiction généralisée de l'aide médicale à mourir privait donc des personnes d'une partie de leur vie dont elles auraient pu autrement souhaiter jouir. Il s'agit là aussi d'un droit qui protège la liberté et la sécurité de la personne.
     Comme l'explique la Cour suprême au paragraphe 66 de l'arrêt dans la cause Carter, en niant à une personne le droit de demander l'assistance d'un médecin pour mourir, le Code criminel privait ces personnes « de la possibilité de prendre des décisions relatives à leur intégrité corporelle et aux soins médicaux ». Ce faisant, la loi empiétait sur leur liberté. L'absence de cette option faisait que les Canadiennes et les Canadiens étaient contraints de subir des souffrances intolérables, ce qui empiétait aussi, de fait, sur leur droit à la sécurité de leur personne.
     Même si la Cour suprême a reconnu que l'aide médicale à mourir est un droit que garantit la Charte à son article 7, les droits ne sont pas absolus. Ils peuvent être balisés et restreints, selon le principe énoncé dans l'affaire Oakes, qui se fonde sur l'article 1 de la Charte, soit les principes de l'atteinte minimale et d'un objectif gouvernemental important.
    Or c'est à travers ce prisme qu'il nous faut analyser le projet de loi C-14. Alors qu'on doit donner aux personnes qui ont des souffrances graves et irrémédiables le moyen et le droit de mourir dans la dignité, ce droit n'est pas absolu, et l'on doit également protéger les personnes vulnérables ou inaptes à consentir de manière éclairée, ou encore qui pourraient être l'objet de pressions indues.
    D'entrée de jeu, je veux préciser que ma position risque d'évoluer, alors que je continue d'entendre mes collègues et mes concitoyens et que je poursuis ma réflexion sur le sujet.
    Cependant, il m'apparaît que d'exclure de la portée de cette loi les mineurs et les personnes souffrant de maladies mentales est une bonne chose. Eu égard aux mineurs, je pense, comme plusieurs députés de la Chambre et comme l'Assemblée nationale du Québec au terme de ses travaux, que cela aurait posé des questions quasiment insolubles en matière de consentement, pour reprendre l'expression utilisée par mon collègue conservateur de Louis-Saint-Laurent.
    Quant aux personnes souffrant de maladie mentale, je crois également qu'en l'absence d'un consentement entier et éclairé, le caractère sacré de la vie doit primer et que, comme un tel consentement est pratiquement impossible à obtenir dans les circonstances, il est plus prudent d'exclure les personnes souffrant de maladie mentale du giron de la loi.
    En revanche, je crois que certains éléments du projet de loi suscitent des questions. Premièrement, le caractère raisonnablement prévisible de la mort que veut introduire le gouvernement, alors qu'il ne faisait pas partie de l'arrêt dans l'affaire Carter, soulève des questions.
    La Cour a reconnu que le fait de ne pas pouvoir faire appel à l'aide médicale à mourir peut provoquer, chez une personne, des souffrances intolérables et que, conséquemment, cela empiète sur son droit à la sécurité de la personne.
    Aussi, il me semble qu'une personne qui souffre d'une maladie grave et irrémédiable mais qui n'est pas en fin de vie, comme c'est malheureusement le cas de plusieurs au Canada, se voit ainsi privée du droit à la sécurité et l'intégrité de la personne.
    Je crains qu'avec cet ajout, un des appelants de l'affaire Carter n'aurait pas eu accès à l'aide médicale à mourir. Je ne suis pas certain non plus qu'une telle restriction constitue, tel qu'on l'a vu dans l'affaire Oakes, une atteinte minimale à un droit garanti par la Charte.
(1230)
    Deuxièmement, bien que je sois conscient de la nécessité d'avoir des protections robustes et que le projet de loi en comporte plusieurs, ce qui est par ailleurs une bonne chose sans l'ombre d'un doute, il y a une protection dont je doute. Il s'agit de la disposition qu'on retrouve à l'alinéa 241.2(3)h). Celle-ci stipule que, immédiatement avant l'administration de l'aide médicale à mourir, un patient doit réitérer son consentement libre, éclairé et entier.
    Or, dans les faits, pour obtenir ce consentement, il faudrait que les médecins cessent d'administrer un médicament tel que de la morphine, qui atténue les douleurs du patient, afin de pouvoir obtenir ce consentement entier. Je crains que, par cette disposition, on place des personnes dans des souffrances excessives au moment même où elles désirent quitter en douceur les souffrances qui les accablent.
    Troisièmement, je n'étais pas convaincu que le consentement anticipé soit une bonne chose, mais j'ai été éclairé par les lumières de mes collègues. Bien que je ne sois toujours pas convaincu, je vois d'un bon angle la volonté du gouvernement d'étudier davantage cette question.
    Enfin, tout comme plusieurs de mes concitoyens, je crois que l'aide médicale à mourir doit s'insérer dans le contexte plus large des soins de fin de vie. À ce titre, je vois également d'un bon oeil la promesse d'investir 3 milliards de dollars sur quatre ans dans les soins à domicile.
    À l'image de ce projet de loi, je crois que c'est un pas dans la bonne direction, mais que ce n'est pas la destination ultime. Je voterai donc en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture, et j'encourage mes collègues à en faire autant.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j’ai deux questions complémentaires spécifiques à poser. Le député a fait allusion à l’engagement du gouvernement concernant les soins à domicile, mais il faut bien préciser qu’il y a une grande différence entre soins palliatifs et soins à domicile. Les soins à domicile sont ceux qui sont dispensés à un patient chez lui pour l’aider à conserver son autonomie — à des degrés divers — et les soins palliatifs sont dispensés aux mourants.
     Je me demande si le député pourrait préciser quel genre d’investissement nous verrons en matière de soins palliatifs, puisque ni l’un ni l’autre ne figurait dans le budget.
     Deuxièmement, je souhaite l’interroger sur le consentement concomitant, parce que ce qui me tracasse c’est que si l’on accepte d’intégrer les directives anticipées dans cette législation, nous aurions là un consentement très différent du consentement à des relations sexuelles. Dans ce dernier contexte, naturellement, c’est le consentement concomitant qui est exigé.
     Pourquoi placerait-on la barre plus bas en matière de consentement lorsqu’il s’agit pour quelqu’un de choisir de mourir plutôt que de choisir de s’adonner à une activité sexuelle?
    

[Français]

    Monsieur le Président, je vais répondre tout d'abord à la question de mon collègue concernant les investissements en soins à domicile et en soins palliatifs. À plusieurs reprises, j'ai entendu la ministre mentionner que les soins palliatifs constituaient une priorité du gouvernement, priorité essentielle sur laquelle elle entend tabler.
    L'engagement du gouvernement d'investir 3 milliards de dollars sur quatre ans dans les soins à domicile s'inscrit aussi dans le contexte où la plupart des gens qui reçoivent des soins à domicile sont souvent à la fin de leur vie. Je suis tout à fait d'accord avec le député: les soins palliatifs devraient être et sont une priorité du gouvernement.
(1235)

[Traduction]

     Pour ce qui est de la question du consentement, je ne sais pas encore que penser des directives anticipées, mais je pense qu’il existe une différence entre le consentement à des relations sexuelles et le consentement dans le cas de personnes qui savent qu’elles souffrent d’une maladie débilitante pouvant les empêcher de donner leur consentement à une étape ultérieure. La différence, me semble-t-il, est claire.
    Quoi qu’il en soit, je n’ai pas encore d’idée arrêtée sur le sujet. Je souhaite en entendre davantage sur les directives anticipées et je me réjouis que le gouvernement ait décidé d’approfondir la question.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai apprécié l'intervention de mon collègue.
    Hier, le Barreau du Québec est venu dire que le projet de loi en vertu du critère de mort naturelle vraisemblablement prévisible ne respectait pas l'arrêt dans la cause Carter et ne respectait pas non plus le droit à la vie selon l'article 7. Ainsi Mme Carter n'aurait pas eu accès à l'aide médicale à mourir, à moins d'interpréter la mort naturelle vraisemblablement prévisible en fonction de l'âge, ce qui serait une discrimination absolument non nécessaire ici.
    J'aimerais savoir ce qu'en pense mon collègue.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son excellente question.
    Comme je l'ai mentionné dans mon discours, c'est une opinion que je partage avec le Barreau du Québec. Je crois que le caractère raisonnablement prévisible vient ajouter un critère qui n'était pas dans l'arrêt dans la cause Carter. Malheureusement, il place des personnes qui souffrent de maladies graves et incurables, et pour qui la souffrance est intolérable, dans des situations où, si elles ne sont pas en phase terminale, ne peuvent pas se prévaloir de l'aide médicale à mourir.
     C'est un aspect du projet de loi avec lequel j'ai des difficultés, personnellement. Tout de même, je pense que c'est un pas dans la bonne direction. C'est pourquoi j'exhorte les députés de la Chambre à appuyer le projet de loi en deuxième lecture pour qu'il soit renvoyé en comité.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Louis-Hébert de son discours très clair sur un enjeu très personnel pour plusieurs d'entre nous.
    Ces histoires personnelles sont partagées d'une manière ou d'une autre par la majorité de nos collègues ici, à la Chambre, qui participent à ce débat.
    Dans mon cas, ma grand-mère n'était plus capable d'enseigner le ski alpin à la fin de sa vie. Après l'avoir enseigné pendant près de 70 ans, elle s'est mise à tomber jusqu'à ce que ses blessures soient trop graves pour y survivre.
    On ne peut pas dire que cela relevait de l'aide médicale à mourir ou de l'aide au suicide. Je trouve cette circonstance inacceptable. Il faut remédier à ce manque de dignité.
    Mon collègue est-il préoccupé par le vide légal qui se créerait si ce projet de loi n'était pas adopté dans les délais prescrits?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. En effet, nous devons éviter ce vide juridique aux Canadiens.
    C'est pourquoi je crois que c'est une bonne chose de voter pour ce prudent projet de loi. C'est un pas dans la bonne direction, et il pourrait aller encore plus loin.
    Au Québec, on a tenu ce débat pendant des années. Au Canada, on l'entame, et je crois qu'il devra se poursuivre au cours des prochaines années. D'ailleurs, le projet de loi prévoit que la loi devra être revisitée au cours des cinq premières années.
    Alors, il faut effectivement avoir ce débat, mais il faut absolument présenter une loi aux Canadiens avant le 6 juin 2016.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je souhaite aujourd’hui prendre la parole au sujet du projet de loi C-14.
     Comme nous le savons, le projet de loi C-14 est la réponse du gouvernement à la décision rendue par la Cour suprême en février dernier dans l’affaire Carter. La Cour a donné au gouvernement 16 mois au total pour élaborer la législation, raison pour laquelle nous débattons aujourd’hui à la Chambre de ce projet de loi.
     J’ai pu constater avec plaisir que ce projet de loi incorporait de nombreuses recommandations présentées par mes collègues conservateurs dans leur rapport dissident par rapport au rapport du comité mixte spécial sur la question. Toutefois, je ne pense pas que le projet de loi soit satisfaisant dans sa forme actuelle.
     J’ai trouvé instructifs les discours de mes collègues, et je suis sensible à la passion dont chacun a fait preuve dans la discussion sur le projet de loi C-14 à la Chambre. En fait, j’ai procédé à mes propres consultations avec les différentes parties intéressées de ma circonscription, Richmond-Centre, et j’ai hâte de vous en faire part.
    Nous avons reçu beaucoup de suggestions et commentaires sur ce projet de loi, tant de ceux qui trouvent qu’il est trop restrictif que de ceux qui trouvent qu’il ne l’est pas assez. Je suis agréablement surprise de l’intérêt manifesté par le public pour ce projet de loi, et je voudrais continuer à encourager mes concitoyens de Richmond-Centre qui n’ont pas encore exprimé leur point de vue sur la question à m’écrire ou à écrire mon bureau.
    À l'étape de la deuxième lecture, mon vote fera l'objet d'une mûre réflexion et sera fondé sur tous les renseignements disponibles, dont ceux recueillis lors des consultations que j'ai faites auprès des parties concernées dans ma circonscription.
    Je veux d'abord parler de quelques-unes de mes expériences personnelles. Lorsque j'étais ministre d'État aux Aînés, j'ai eu l'occasion de travailler avec de nombreux groupes voués à la protection des droits des personnes les plus vulnérables et à la qualité des soins palliatifs. La triste réalité, c'est que beaucoup d'aînés n'ont pas accès à des soins de fin de vie efficaces. Ils sont plutôt victimes de maltraitance et ils font souvent l'objet de pressions pour les amener à prendre des décisions afin qu'ils ne soient pas un fardeau pour leur famille. C'est tragique. Il est absolument essentiel que nous veillions à la mise en place de mesures de protection des aînés contre la maltraitance.
    L'une des mesures permettant de protéger les aînés contre l'exploitation financière, une forme malheureusement très courante de maltraitance à l'égard des aînés, consiste simplement à interdire à tout témoin indépendant de tirer un avantage financier du testament ou de la succession d'une personne qui demande l'aide au suicide. C'est ce que recommandent des citoyens que j'ai rencontrés récemment. Ils ont souligné le fait que, dans le projet de loi, les témoins indépendants qui doivent signer le document afin que le patient puisse bénéficier du suicide assisté doivent simplement savoir ou croire qu'ils ne sont pas bénéficiaires de la succession testamentaire de la personne qui fait la demande. Encore une fois, ce n'est tout simplement pas suffisant.
    Dans ma circonscription, Richmond-Centre, je suis un membre actif du Club Rotary de Richmond. Ce club a joué un rôle clé dans la construction du premier centre de soins palliatifs à Richmond. C'est là où les autres membres du club Rotary et moi avons pu constater les avantages des soins palliatifs de qualité. La vie est précieuse à toutes les étapes. Ce qui me préoccupe surtout, en ce qui concerne l'aide au suicide, c'est qu'elle va tout simplement compliquer les décisions en fin de vie. Les personnes qui sont malades ou qui ont besoin de soins supplémentaires se considéreront comme un fardeau et choisiront de mettre fin à leurs jours plutôt que de causer davantage de soucis aux membres de leur famille.
(1240)
    Nous devons plutôt soutenir les aidants naturels et montrer que chaque vie est précieuse.
    Comme d'autres l'ont fait remarquer, le budget ne prévoit pas de fonds pour les soins palliatifs. C'est tout à fait inacceptable. Le dossier est en passe de devenir une question d'accès à la mort plutôt que d'accès à la vie. Il est absolument essentiel que le gouvernement s'engage à renforcer les soins palliatifs et incite les gens à se tourner d'abord vers ces soins, qui permettent véritablement de mourir dans la dignité, alors que le suicide assisté par un médecin constitue une mort forcée.
    L'année dernière, j'ai eu l'occasion de rencontrer les représentants d'organismes comme le Conseil des Canadiens avec déficiences. Nous avons parlé de leurs préoccupations et de la nécessité de protéger les personnes ayant des déficiences. Récemment, ils ont pu témoigner devant le comité mixte spécial pour exposer leur point de vue sur une mesure législative possible. Fort inquiet des recommandations formulées par le comité, le Conseil des Canadiens avec déficiences a déclaré: « Nous craignons que l’approche permissive du Comité ne mette les personnes vulnérables en danger. »
    Nous ne pouvons faire fi des besoins des personnes les plus vulnérables de notre société. Afin que tous les Canadiens soient protégés, il est fondamental que la mesure législative reflète les préoccupations de groupes comme le Conseil des Canadiens avec déficiences.
    J'aimerais partager quelques-uns des commentaires que j'ai entendus d'électeurs de ma circonscription au cours des derniers mois. Je souligne que le fait que je répète ces commentaires à la Chambre aujourd'hui ne signifie pas que je les endosse tous. Je veux plutôt donner un aperçu de la diversité des commentaires que j'ai reçus. Je sais que, pour une élue, cela est risqué, car je pourrais être citée hors contexte; toutefois, il est de mon devoir de veiller à ce que ces voix soient entendues.
    Un thème principal qui est ressorti de mes consultations est que le projet de loi C-14 décriminaliserait seulement l'aide médicale au suicide fournie par des médecins.
    J'ajouterais que cette mesure n'aurait aucune répercussion sur la Loi canadienne sur la santé ni ne la modifierait, pas plus qu'elle ne chargerait les provinces de fournir cette aide dans le cadre des services couverts par leur régime d'assurance-maladie. Dans ma province, la Colombie-Britannique, c'est le MSP, le Medical Services Plan.
    En général, il semble y avoir beaucoup de confusion quant à savoir si c'est un acte médical que les gouvernements provinciaux fourniraient, et s'ils le paieraient.
    Un groupe d'intérêts particuliers a dit souhaiter invoquer la disposition de dérogation pour maintenir les anciennes dispositions du Code criminel. Ce groupe a dit estimer que la terminologie désignant ce qui constitue une maladie terminale est une pente glissante et que la douleur insupportable pourrait être allégée par des soins palliatifs de qualité. Ayant réalisé que ce n'était généralement pas une approche réaliste avec le gouvernement actuel, il a aussi mentionné qu'il souhaitait une bonne protection qui permettrait aux fournisseurs de soins de santé et aux établissements médicaux d'agir selon leur conscience.
    Il y avait bien d'autres commentaires, mais je n'ai que 10 minutes pour prononcer mon allocution, alors je répète que j'ai été ravie des manifestations d'intérêt sur le projet de loi C-14 que nous avons reçues de la part de groupes d'intervenants et de citoyens engagés. Je déciderai de mon vote après avoir donné aux gens de Richmond-Centre le plus de temps possible pour me faire part de leurs commentaires.
    J'aimerais clore mon allocution en vous racontant une petite histoire. Nous avons beaucoup de professionnels de la santé dans la famille. Même un certain nombre des plus jeunes souhaitent devenir médecins ou infirmiers plus tard. Lorsque je demande à mes jeunes nièces et neveux pourquoi ils veulent être médecins, ils me donnent invariablement la même réponse toute simple: « Je veux sauver des vies. »
(1245)
    Monsieur le Président, la députée se préoccupe de l'accès à l'aide médicale à mourir par rapport à l'accès à l'aide médicale à vivre. Dans le cadre de l'échéancier que nous suivons, celui qui nous a été imposé par l'arrêt dans la cause Carter, c'est précisément l'accès à l'aide médicale à mourir dont il est question. Je ne crois pas que quiconque à la Chambre s'oppose à envisager la possibilité d'offrir des soins palliatifs.
    Pour moi, la liberté de vivre est très semblable à la liberté de religion et tout aussi importante. La liberté de religion compte la liberté de pratiquer sa religion comme bon nous semble, tout comme elle prévoit la liberté de ne pas pratiquer. La liberté de vivre comprend la liberté de rester en vie, mais aussi le droit fondamental de ne plus vivre. Ce dernier n'est pas un droit qui devrait s'exercer à la légère, et il est extrêmement important d'avoir des processus en place, comme le propose le projet de loi conformément à la décision Carter.
    Je crois que la société et le Parlement ne devraient ménager aucun effort pour faire en sorte que la vie de chaque personne soit aussi agréable que possible. Dans les faits, c'est une des principales obligations du gouvernement. Je crois qu'il revient à la personne en fin de vie — et à elle seule — de choisir de mettre fin à ses jours.
    Ma collègue est-elle d'accord pour dire que la meilleure façon pour nous de défendre la vie est de faire adopter ce projet de loi dans les délais prévus afin d'éviter un vide juridique, même si cela signifie qu'il faille revoir la question à une date ultérieure?
(1250)
    Monsieur le Président, je sais que je ne suis pas la seule à dire que la Cour suprême ne nous a pas laissé assez de temps. C'était impossible que nous puissions étudier les données et les faits, consulter les Canadiens et rédiger un texte législatif pondéré, réfléchi et judicieux en seulement 16 mois. Je trouve inacceptable qu'on nous demande d'adopter un projet de loi sous prétexte qu'il fait l'affaire ou que le temps presse. Ce n'est jamais notre responsabilité que d'expédier l'adoption d'une mesure législative. Nous représentons les électeurs de notre circonscription et nous avons le devoir de faire du Canada un endroit meilleur et sûr.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai une réaction un peu mitigée par rapport au discours de la députée conservatrice.
    D'une part, les conservateurs se plaignent de ne pas avoir disposé de suffisamment de temps pour débattre la question. Comme chacun le sait, ce sont les conservateurs qui se sont opposés à une motion de l'opposition visant à créer un comité multipartite pour analyser l'arrêt dans la cause Carter. Cela aurait permis de commencer l'étude du dossier sur l'aide médicale à mourir. Ils ont donc contribué à retarder le débat et les études entourant la question.
    D'autre part, je suis d'accord avec la députée lorsqu'elle dit qu'on a besoin d'avoir plus de soins palliatifs et qu'il faut accorder des ressources financières pour ces soins. Beaucoup de gens souhaitent arrêter de souffrir, mais ils ne veulent pas nécessairement mourir tout de suite et avoir recours à l'aide médicale à mourir. Ils désirent surtout arrêter de souffrir.
    Aujourd'hui, les libéraux se disent prêts à accorder 3 milliards de dollars sur quatre ans. Toutefois, il n'y a pas d'échéancier.
    J'aimerais savoir ce que la députée a à dire par rapport à cela.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai entendu les libéraux affirmer qu'ils y consacreraient 3 milliards de dollars sur quatre ans. Or, il n'y a rien là-dessus dans le budget. Si l'argent n'est pas dans le budget, où est-il? La dernière chose à faire, ce sont de vaines promesses. Le gouvernement doit tenir les promesses qu'il fait et prendre des mesures concrètes.
    Je remercie ma collègue du NPD d'avoir souligné l'importance des soins palliatifs. Nous disons toutes les deux que ces soins doivent faire partie des options en fin de vie. La seule option qui s'offre aux patients ne devrait pas être la mort forcée.
    Monsieur le Président, ma collègue a parlé du prétendu engagement libéral concernant les soins palliatifs, mais la situation est pire qu'elle ne le dit, parce que le gouvernement a parlé de soins palliatifs ou de soins à domicile. Quelqu'un faisait remarquer, plus tôt, que ce n'est pas parce que les soins palliatifs peuvent être offerts à domicile qu'il s'agit de la même chose. Les soins à domicile englobent une panoplie de soins essentiels qui n'ont rien à voir avec les soins palliatifs.
    Selon moi, nous devons nous occuper des soins palliatifs. Et pas avec une mesure distincte, dans un avenir indéterminé, mais tout de suite, avec la mesure législative à l'étude. Le comité fédéral qui avait été mis sur pied par l'ancien gouvernement a clairement dit qu'on ne pouvait pas considérer qu'une personne avait consenti à l'euthanasie ou au suicide assisté si on ne lui avait pas au préalable offert de recevoir des soins palliatifs.
    J'aimerais savoir ce que la députée en pense.
    Monsieur le Président, il y a effectivement une différence très nette entre les soins à domicile et les soins palliatifs.
    Les soins palliatifs visent à aider les proches, les amis et la famille de la personne atteinte d'une maladie en phase terminale qui s'attend à mourir. Ils aident ces gens à vivre la période de fin de vie de façon positive; c'est donc une bonne option de fin de vie. Ce n'est pas comme les soins à domicile, qui ne consistent qu'à aider les aînés à se lever et à faire leur lavage, leur vaisselle et d'autres choses. Il y a une nette différence entre les soins à domicile et les soins palliatifs, en particulier ceux offerts dans les centres de soins.
    Monsieur le Président, je suis ravie de prendre la parole au sujet du projet de loi C-14, qui mettrait en place un cadre législatif fédéral afin d'autoriser l'aide médicale à mourir partout au Canada.
    Comme nous l'avons constaté, l'aide médicale à mourir est une question qui touche profondément tous les Canadiens. En tant que parlementaires, nous devons tenir compte d'une foule de points de vue sur cette question complexe. Je sais que nous prenons tous cette responsabilité très au sérieux.
    Le processus a évidemment été déclenché le 6 février 2015, avec la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter c. Canada. La cour a conclu à l'unanimité que les lois pénales qui interdisent l'aide médicale à mourir vont à l'encontre de la liberté et de la sécurité de la personne en privant les personnes gravement et irrémédiablement malades du droit de prendre des décisions relatives à leur intégrité corporelle et aux soins médicaux, ce qui les oblige à subir des souffrances persistantes et intolérables.
    La cour a également conclu que les lois privent certaines personnes de la vie, car elles ont pour effet de les forcer à s’enlever prématurément la vie, par crainte d’être incapables de le faire lorsque leurs souffrances deviennent insupportables. La cour a admis que l'interdiction criminelle de l'aide à mourir vise à atteindre un objectif législatif réel et urgent: protéger les personnes vulnérables contre toute incitation à se donner la mort dans un moment de faiblesse.
    Cependant, la cour a conclu que la création d'un régime permissif comportant des garanties adéquatement conçues et appliquées peut protéger les personnes vulnérables contre les abus et les erreurs, et que l'interdiction absolue va plus loin que nécessaire pour atteindre son objectif. La cour a, à juste titre, laissé au Parlement le soin d'élaborer ce nouveau régime.
    Le projet de loi propose, en réponse à l'arrêt dans la cause Carter, un nouveau cadre législatif concernant l'aide médicale à mourir. Il prévoit notamment les mesures de sauvegarde demandées par la Cour afin de réduire les risques d'erreurs et d'abus.
     La Cour suprême n'a pas défini le terme « problèmes de santé graves et irrémédiables », mais le projet de loi le fait d'une manière en accord avec ce genre de situations. Ainsi, pour qu'une personne soit admissible à l'aide médicale à mourir, sa situation médicale doit se caractériser par un déclin avancé et irréversible de ses capacités; elle doit être atteinte d’un problème de santé grave et incurable; son état de santé doit lui causer des souffrances intolérables, et sa mort doit être devenue raisonnablement prévisible compte tenu de l’ensemble de sa situation médicale.
    L'existence de cette mesure pourra réconforter les Canadiens; ils sauront qu'une aide est accessible s'ils souffrent intolérablement et voient leurs capacités s'effriter alors que leur vie tire à sa fin.
    Comme plusieurs députés qui se sont déjà prononcés sur cette mesure législative épineuse, j'ai vécu une expérience qui donne toute sa pertinence à ce débat. Ma mère, Eleanor Anderson, a passé plus de 10 ans en fauteuil roulant après avoir été victime d'un grave accident cérébrovasculaire à 69 ans. Elle a dû réapprendre à marcher, à parler, à manger, à tout faire. Quand elle a été frappée par un autre accident cérébrovasculaire 5 ans plus tard, elle s'est battue encore une fois. Mais elle perdait un peu plus d'elle-même chaque fois.
    Elle refusait de se sentir impuissante. Pendant toutes les années au cours desquelles elle s'est déplacée en fauteuil roulant, ma mère a fait de son mieux pour tout faire par elle-même, que ce soit se vêtir, charger le lave-vaisselle ou simplement essuyer le comptoir de la cuisine. Pendant toutes ces années, elle n'a jamais voulu de notre commisération.
    Malgré sa ténacité, ma mère savait qu'un jour, elle ne pourrait plus se battre. Elle a indiqué très clairement à mon père, à mon frère et à moi-même que, lorsqu'elle ne pourrait à peu près plus faire autre chose que s'aliter, elle voulait qu'on la laisse mourir paisiblement. Ce que nous redoutions tous s'est bien sûr produit.
    Ma mère a continué d'avoir de petits accidents vasculaires cérébraux, perdant à chaque fois un peu plus de sa mobilité et de ses capacités fonctionnelles, de sorte qu'à un moment donné, elle n'a plus été en mesure de s'asseoir dans son fauteuil roulant, de parler ou même de manger. Nous n'étions même pas certains qu'elle nous reconnaissait encore. Elle retirait si souvent la sonde d'alimentation qui la gardait en vie que les médecins ont voulu en insérer une dans son estomac. Ma mère ne voulait pas vivre de cette façon, et nous avons donc refusé cette solution. Nous avons dû accepter qu'elle nous quitte. Les médecins ont convenu que c'était pour le mieux et qu'elle ne vivrait que quelques jours.
    Nous avons demandé qu'elle soit transférée dans un autre hôpital afin d'y recevoir des soins palliatifs. Paradoxalement, on nous a dit qu'elle ne pouvait pas être déplacée, car elle ne survivrait pas; elle mourrait en route. Il nous a donc fallu la laisser dans ce lit d'hôpital et la regarder mourir lentement de faim.
(1255)
    Elle a vécu encore 12 jours, et sa mort a été tout sauf paisible. C’est l’expérience la plus atroce que j’ai vécue; rien ne nous avait préparés à cette mort. Ma mère aurait convenu, je le sais, que cette loi est un pas dans la bonne direction. Elle aurait voulu pouvoir exprimer sa volonté de mourir dans la dignité. Toutefois, elle aurait voulu également que sa famille respecte ses vœux.
    Douze ans plus tard, mon père, qui avait attrapé une infection, m’a dit: « Tout ce que je veux, c’est fermer les yeux et ne plus me réveiller. » C’est exactement ce qui est arrivé. Il est parti deux jours après, comme il l’avait souhaité. Beaucoup de gens n’ont cependant pas cette chance, et c’est à eux que nous prêtons notre voix.
    Dans son discours à la Chambre, la ministre de la Santé, Jane Philpott, a déclaré:
[...] que chaque personne et que chaque situation est unique. Les patients ont toutefois beaucoup de choses en commun: l'espoir de mourir sereinement, la volonté d'être respectés, le souhait que leur autonomie et leur dignité soient respectées par leur famille et le personnel soignant.
    Mme Philpott a ajouté que son expérience de médecin généraliste avait renforcé son sentiment que nous devons…
(1300)
    À l'ordre, s'il vous plaît. J’essaie de ne pas interrompre les députés lorsqu'une telle situation se produit. Cependant, le Règlement indique que nous ne devons pas prononcer le nom d’autres députés dans cette enceinte, y compris lorsque l’on cite un ministre. Je sais que cela ne s'applique pas en l'occurrence, mais même si le nom d'un député figure dans une citation, par exemple, il faut éviter de le nommer. Si la députée veut bien remplacer le nom de la ministre par son titre ou le nom de sa circonscription, elle peut continuer.
    Monsieur le Président, la ministre a ajouté que son expérience de médecin généraliste lui confirme que nous devons « respecter les principes sur lesquels se fondent les soins palliatifs ainsi que le droit des patients à prendre leurs propres décisions sur les soins qu'ils souhaitent recevoir quand la fin de leur vie approche ».
    Plus tôt cette année, la ministre a rencontré à Vancouver les ministres de la Santé provinciaux et territoriaux afin de lancer des discussions au sujet d'un nouvel accord pluriannuel sur la santé. Par l'intermédiaire de cet accord, le gouvernement fera des investissements considérables totalisant 3 milliards de dollars afin d'offrir aux Canadiens des soins à domicile plus nombreux et de meilleure qualité. Nous nous attendons à ce que le soutien pour les soins palliatifs dans divers contextes — où les patients peuvent recevoir les soins continus dont ils ont besoin et qu'ils méritent à la fin de leur vie — fasse partie des priorités futures. Il ne fait aucun doute que les gens en fin de vie devraient obtenir les soins dont ils ont besoin. Nous voulons que tous les Canadiens aient accès aux meilleurs soins possible.
    Les enjeux liés à ce domaine sont complexes. Cependant, je crois fermement que le projet de loi C-14 établit un juste équilibre entre les droits concurrents et les objectifs politiques.
    J'exhorte les députés à l'appuyer.
    Monsieur le Président, ma question pour la députée porte sur le concept d'examen préalable par une autorité juridique compétente. J'ai notamment des réserves sur l'absence totale de mécanisme permettant de garantir le respect de critères juridiques complexes, dont certains devraient, selon moi, être précisés. Certains députés ont proposé une solution qui semble convenir à au moins un député ministériel, soit de faire intervenir non seulement une autorité médicale, mais aussi une autorité juridique capable de confirmer si, dans les circonstances, les critères sont satisfaits ou non. Ce serait une bonne façon de garantir que les personnes vulnérables, celles qui ne consentent pas à la procédure ou qui ne répondent pas aux critères, ne sont pas contraintes de se faire euthanasier ou de recevoir de l'aide au suicide en contravention de la loi.
    La députée ne convient-elle pas qu'un amendement prévoyant une sorte d'examen préalable par une autorité juridique compétente permettrait d'améliorer efficacement le projet de loi?
    Aux termes des dispositions à l'étude, monsieur le Président, deux professionnels de la santé indépendants sont tenus d'évaluer l'état de santé du patient. Si j'ai bien compris, le député dit que nous devrions aller encore plus loin en faisant également intervenir un juriste dans le processus. Je pense qu'il y a lieu d'en discuter, certainement à l'étape de l'étude en comité. C'est pour cela que j'espère que le projet de loi passera à la prochaine étape.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son discours.
    Ce sujet touche nos valeurs et notre façon de vivre.
    Au cours des derniers jours, le Barreau du Québec a affirmé que le projet de loi, s'il était adopté tel quel, serait inconstitutionnel. Qu'en pense ma collègue?
(1305)

[Traduction]

    Il va sans dire, monsieur le Président, que c'est une décision que chacun d'entre nous devra prendre compte tenu de l'information disponible, notamment ce que le comité a révélé jusqu'à présent, ce qui se passe dans l'ensemble du pays et certainement ce qui vient de se passer au Québec. Je pense qu'il nous incombe à tous de rester à l'écoute et de garder l'esprit ouvert.
    Monsieur le Président, je remercie la secrétaire parlementaire du ministre des Transports de nous avoir fait part de son expérience personnelle, car cela nous aide à mieux comprendre la complexité de la question.
     Nous avons entendu de nombreux commentaires, aujourd’hui et hier, au sujet de l’équilibre à établir entre les mesures de sauvegarde et le respect de ce droit. La députée pourrait peut-être préciser un peu les mesures de sauvegarde qui la rassurent le plus dans le projet de loi.
    Monsieur le Président, les mesures de sauvegarde sont nécessaires, parce qu’il y a dans la société des personnes vulnérables que nous devons protéger. Par conséquent, il importe de prévoir diverses mesures de sauvegarde.
     Chaque personne qui s’approche de la mort fait une expérience différente. Je pense qu’il nous faut des mesures de sauvegarde, et certainement des mesures distinctes selon les situations.

[Français]

    Monsieur le Président, qu'est-ce que ma collègue répond aux gens qui disent que même Mme Carter ne pourrait pas bénéficier de l'aide médicale à mourir, selon le projet de loi qui a été déposé?

[Traduction]

    Monsieur le Président, c’est un aspect qui selon moi mérite discussion. Certaines personnes disent qu’elle aurait satisfait aux quatre critères. C’est un aspect dont je pense qu’il est nécessaire de débattre.
    Évidemment, nous parlons du cas de Mme Carter, mais les situations diffèrent en fin de vie d'une personne à l'autre. Je suis toutefois convaincue que le projet de loi lui aurait permis d’obtenir une aide médicale à mourir.

[Français]

    Monsieur le Président, je trouve extrêmement important de prendre la parole aujourd'hui ou lors d'autres journées de débat sur le projet de loi C-14.
    Comme mes collègues le savent probablement, je suis une professionnelle de la santé. Je travaille d'ailleurs encore quelques fois par mois à l'hôpital, principalement aux soins intensifs de l'urgence. C'est important pour moi. Les soins en lien avec la fin de vie sont un élément important. C'est d'ailleurs pourquoi j'avais appuyé une motion présentée lors de l'ancienne législature par mon collègue deTimmins—Baie James et qui portait sur une stratégie nationale de soins palliatifs.
    Pour commencer mon discours, j'aimerais me rapporter au jugement de la Cour suprême pour souligner deux ou trois points que je trouve particulièrement importants dans le cadre de cette discussion. On y dit:
    
[...] la prohibition [de l'aide médicale à mourir] prive certaines personnes de la vie car elle a pour effet de forcer certaines personnes à s’enlever prématurément la vie, par crainte d’être incapables de le faire lorsque leurs souffrances deviendraient insupportables. [...]
    
    Et en leur laissant subir des souffrances intolérables, elle empiète sur la sécurité de leur personne.
    Je trouve important de mentionner que le jugement de la Cour suprême souligne l'obligation de l'État d'agir sur la souffrance que vivent les gens. Il importe aussi de comprendre la distinction entre la souffrance et la douleur. La douleur est une réaction physiologique à un stress, à une blessure, par exemple. La souffrance, quant à elle, se rapporte au vécu émotif.
    Prenons l'exemple d'un événement très douloureux, comme l'accouchement. Étant donné que cela est associé à un vécu émotif positif, la naissance d'un enfant, cet événement n'occasionne pas nécessairement de souffrance, mais il occasionne son lot de douleurs importantes.
    Une personne peut aussi avoir une blessure somme toute assez mineure, mais à cause du vécu émotif qui y est relié, cela peut être extrêmement souffrant pour elle. Je pense que c'est important de bien faire cette distinction.
    Pour ce qui est de la douleur comme telle, de nos jours, nous avons d'excellents moyens thérapeutiques pour la soulager. Des opiacés ont longtemps été utilisés, mais il existe aussi maintenant des pompes analgésiques contrôlées par les patients. Nous pouvons même offrir une sédation palliative continue, similaire à ce que les patients reçoivent aux soins intensifs lorsqu'ils sont intubés, qui permet de s'assurer qu'ils ne ressentent aucune douleur. Il y a plusieurs méthodes extrêmement efficaces pour soulager la douleur, en plus des méthodes non pharmacologiques. Nous avons une bonne panoplie de traitements à offrir à des patients qui vivent de la douleur.
    En ce qui concerne spécifiquement la souffrance, qui est liée à un vécu émotif, comme la fin de vie ou le diagnostic de fin de vie par exemple, il est possible de la soulager autrement qu'en offrant une aide médicale à mourir. Dans ce cas-ci, on peut recourir aux soins palliatifs. Le projet de loi s'adresse d'ailleurs à une clientèle adulte atteinte d'une maladie, d'une affection ou d'un handicap grave incurable, dont la situation est caractérisée par un déclin avancé et irréversible de ses capacités et dont la mort naturelle est devenue raisonnablement prévisible.
    Nous comprenons bien que l'on parle ici de gens en fin de vie, soit la clientèle visée par les soins palliatifs. Les soins palliatifs ont justement pour but de traiter la souffrance du patient ainsi que de la famille. Au moyen de soins palliatifs, on veut s'assurer de bien entourer les gens et de les aider à traverser le processus de deuil et les épreuves que la maladie apporte.
(1310)
    On veut éliminer toute douleur, mais on veut aussi accompagner la famille.
    On peut parler de soins palliatifs optimaux lorsqu'on ne soigne pas seulement le patient, mais l'entièreté de la famille, afin que l'expérience de la mort se vive de la manière la plus douce qui soit. Or, en offrant d'abord l'aide médicale à mourir, alors que les soins palliatifs offerts au pays ne sont pas optimaux, on fonctionne à l'envers.
    Lorsque les maisons de soins palliatifs sont sous-financées et qu'elles doivent courir après des dons chaque année, elles ne sont pas en mesure d'offrir des soins palliatifs optimaux. La plupart d'entre elles peuvent seulement accueillir des patients dont la mort est prévue dans moins de trois mois. Or le processus de la maladie est souvent beaucoup plus long, et les gens ont besoin de beaucoup plus d'accompagnement.
    Par ailleurs, dans plusieurs régions rurales, les lits en soins palliatifs sont réservés par l'intermédiaire d'unités de médecine chirurgicale. Cela fait en sorte que les infirmières qui s'occupent des patients en soins palliatifs doivent aussi s'occuper de sept ou huit autres patients. Ainsi, il n'y a pas de réponse rapide, on n'accorde pas le temps voulu aux familles et l'expérience de la mort n'est pas vécue de la façon souhaitée.
    Pour les gens qui n'ont pas assez de ressources ou qui ne souhaitent pas vivre leur mort à la maison, l'hôpital est malheureusement souvent la seule autre ressource, lorsque les lits en soins palliatifs ne sont pas disponibles. Cette expérience n'est pas la plus facile. Elle peut causer des souffrances, car les patients n'ont pas tout le soutien qu'ils méritent.
    Au cours des dernières années, on a fait beaucoup d'efforts pour sortir certains phénomènes naturels des hôpitaux. Entre autres, on a mis sur pied des maisons de naissance, en se disant qu'il serait plus intéressant pour les mères de vivre la grossesse et l'accouchement un peu plus naturellement, lorsqu'il n'y a aucune complication médicale, dans un autre cadre que celui de l'hôpital.
    On a fait la même chose avec la mort, qui est un processus naturel. On a sorti ce phénomène des hôpitaux afin de rendre cette expérience beaucoup plus positive, dans un autre cadre que le cadre médical de l'hôpital.
    Les maisons de soins palliatifs essaient d'éliminer toute trace des hôpitaux. Elles ont des lits d'hôpitaux, mais elles essaient d'utiliser les couvertures des patients, d'avoir de grandes fenêtres et de leur faire oublier le fait qu'ils ne sont pas à la maison.
    Malheureusement, malgré tous les efforts des maisons de soins palliatifs, elles manquent souvent de fonds. Par exemple, la Maison du bouleau blanc, dans ma circonscription, compte quatre lits, dont seulement deux sont subventionnés. Elle doit donc courir après les dons pour maintenir ses deux autres lits. Elle a une grande pièce idéale avec de grandes fenêtres et une douche, mais c'est la seule chambre qu'elle a pu aménager selon sa conception d'une chambre de soins palliatifs idéale.
    Ces gens ne peuvent pas se payer des infirmières. Le personnel qui y travaille est donc composé d'infirmières auxiliaires extrêmement dévouées. Toutefois, elles ont des limitations légales. Pour cette raison, on a dû mettre à jour les protocoles concernant les médecins qui travaillent avec les maisons de soins palliatifs, afin de s'occuper des patients adéquatement.
    Alors, on pourrait combler plusieurs lacunes et éviter des souffrances aux patients. Si une personne qui reçoit un diagnostic de fin de vie sait qu'elle va recevoir des soins de qualité lorsque son état empirera, elle ne cherchera peut-être pas à s'enlever la vie prématurément. On aura ainsi préservé le droit à la vie.
    Cependant, tant qu'on n'agit pas sur les soins palliatifs, on travaille à l'envers. On ne peut pas permettre de renverser la conception du modèle médical lié à la vie pour permettre l'aide médicale à mourir si nos soins palliatifs ne sont pas optimaux ni accessibles à l'entièreté de la population, peu importe où les gens demeurent, même si c'est en région éloignée.
(1315)
    Comme mon temps de parole est écoulé, je répondrai avec plaisir aux questions de mes collègues.
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'Abitibi—Témiscamingue d'avoir beaucoup parlé des soins palliatifs.
    Comme elle le sait peut-être, je faisais partie du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, et on a beaucoup parlé des soins palliatifs. On a aussi traité du fait que, pour certaines personnes, ce n'est pas assez. Même si elles ont accès aux soins palliatifs, elles veulent avoir le droit à l'aide médicale à mourir.
    La députée pourrait-elle m'aider à trouver des idées pour les gens qui veulent obtenir de l'aide médicale à mourir? Ils ne demandent pas de soins palliatifs, ils veulent l'aide médicale à mourir.
    Selon elle, quelles sont les sauvegardes qu'on devrait avoir pour eux afin de leur accorder ce droit?
    Monsieur le Président, comme je l'ai dit dans mon discours, on a choisi d'exclure du projet de loi C-14 les gens qui ne sont pas en fin de vie.
    Dans certains cas, on voudrait peut-être l'aide médicale à mourir. L'exemple qui me vient en tête est celui des traitements d'hémodialyse. Ce genre de traitement est assez contraignant, et il exige beaucoup de temps. Il est possible qu'après 10, 15 ou 20 ans, on soit épuisé par ce que cela exige et qu'on veuille arrêter les traitements. N'importe quel patient a le droit de refuser un traitement. Le fait de refuser le traitement fera en sorte que la personne va mourir à court terme. Toutefois, si elle continue de recevoir son traitement, cela n'entraînera pas la mort. Sa fin de vie ne sera donc pas nécessairement prévisible. Elle risque donc de se retrouver exclue du projet de loi. Des personnes veulent peut-être l'aide médicale à mourir, mais certaines d'entre elles seront exclues du projet de loi, tel qu'il est rédigé présentement. Il faudrait que ce soit corrigé.
    À mon avis, on doit accorder la priorité aux soins palliatifs. Permettre l'aide médicale à mourir n'a aucun sens, si on n'est pas rendu à un stade où les soins palliatifs sont vraiment optimaux.
(1320)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie la députée de ses commentaires éloquents, et en particulier en ce qui a trait à l’importance des soins palliatifs. Nous constatons que le NPD reconnaît dans une certaine mesure le bien-fondé de ce que nous soutenons, soit l’importance des soins palliatifs et de la protection du droit de conscience. Nous avons même entendu les libéraux, dans certains cas et de différentes façons, dire que ces aspects sont eux aussi importants.
     Je pense qu’il nous faut veiller à ce que le projet de loi fasse état de ces questions, que nous garantissions le droit aux soins palliatifs et le droit de conscience. Le gouvernement nous a assurés qu’il reconnaissait aussi l’importance de ces questions, alors inscrivons-les dans le projet de loi, pour que les Canadiens et ceux d’entre nous qui doivent se prononcer sur le projet de loi aient la certitude que ces droits seront protégés.
     La députée reconnaît-elle qu’il nous faut apporter des amendements précis au projet de loi, et pas seulement prendre des engagements financiers distincts, mais bien apporter des amendements en bonne et due forme au projet de loi, pour veiller à ce que tous aient accès aux soins palliatifs et à ce que le droit de conscience soit protégé?

[Français]

    Monsieur le Président, à mon avis, c'est effectivement un non-sens de garantir le droit aux personnes de recevoir l'aide médicale à mourir, sans toutefois garantir le droit de recevoir des soins palliatifs optimaux et de qualité. Les deux options doivent être sur la table.
     La personne qui reçoit un diagnostic sévère de cancer, par exemple, pourrait se voir offrir l'aide médicale à mourir. Elle sait que cette option est sur la table. Toutefois, les soins palliatifs ne sont peut-être pas accessibles dans sa région. Elle serait obligée de s'expatrier et de vivre l'expérience de la mort loin de sa famille. Ce n'est pas un choix complet qu'on lui offre. Si on veut vraiment être conséquents avec ce que l'on met sur la table, les deux droits doivent être garantis aux patients en situation de fin de vie.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est en effet un sujet difficile pour la majorité des Canadiens. Le suicide assisté est certainement lourd de conséquences. Nous croyions que la loi était suffisante, mais nous nous retrouvons aujourd'hui dans cette situation en vue de trouver des solutions de rechange parce que la Cour suprême a décidé que la loi n'était pas suffisante.
    J'aimerais parler de certains enjeux, mais je ne dirais pas que ce sont les plus importants à mes yeux. Je parlerai de ceux-ci un peu plus tard. Cependant, j'aimerais traiter de certains enjeux dont il n'est pas beaucoup question. Le premier se trouve à la page 11 du projet de loi et porte sur la « présomption ». Je vais citer le projet de loi:
    Pour l’application de la présente loi, le membre des forces qui a reçu l’aide médicale à mourir est réputé être décédé en raison de la maladie, de l’affection ou du handicap pour lequel il a été jugé admissible à cette aide [...]
    À la page suivante, où il est encore une fois question de la « présomption », le projet de loi dit:
    Pour l’application de la présente loi, le militaire ou le vétéran qui a reçu l’aide médicale à mourir est réputé être décédé en raison de la maladie, de l’affection ou du handicap pour lequel il a été jugé admissible à cette aide [...]
    Je mentionne cela aujourd'hui en tant qu'ancien membre du comité des anciens combattants, qui a étudié la question du trouble de stress post-traumatique et la situation des anciens combattants qui ont subi des traumatismes liés à la guerre ainsi que de parents qui ont subi des traumatismes et qui sont atteints de trouble de stress post-traumatique en raison de la guerre. Je suis extrêmement préoccupé au sujet de cet article du projet de loi, car des familles pourraient s'en servir pour régler certaines situations. Des militaires pourraient décider d'y avoir recours afin d'assurer la sécurité financière de leur famille et de subvenir à ses besoins.
    Cet article ouvrirait une porte qui, auparavant, était fermée pour les militaires. Il ne fait aucun doute que nous respectons les militaires qui se sont enlevé la vie, mais ce qui m'inquiète, c'est que cet article ouvrirait la porte toute grande et que, en quelque sorte, il en ferait un exercice légitime, qui pourrait permettre aux familles de recevoir des prestations. Nous devrions chercher de nouvelles façons de venir en aide aux membres des forces et aux anciens combattants qui souffrent de trouble de stress post-traumatique au lieu de les inciter à mettre fin à leurs jours.
    La deuxième question que je voudrais aborder, et qui me paraît être un argument plus important, concerne l’idée de contrainte, laquelle peut prendre plusieurs formes. Comme nous l’avons entendu de la bouche de plusieurs médecins qui sont mes amis, et d’infirmières également, un médecin peut-il contraindre une infirmière à administrer un médicament pour accélérer la mort? Un patient peut-il contraindre un médecin à lui administrer un médicament pour accélérer sa mort? Une personne âgée peut-elle se sentir contrainte de mettre un terme à ses jours afin d’alléger le fardeau financier qu’elle représente pour sa famille? Une personne âgée peut-elle se sentir contrainte de mettre un terme à ses jours afin de libérer une place à l’hôpital?
    À mon avis, cela suscite toutes sortes d’arguments. Je vais d’abord parler du cas où un médecin contraint une infirmière à poser de certains gestes. Le projet de loi évoque le fait que les médecins ont la liberté d’agir conformément à leurs croyances religieuses ou conformément au principe selon lequel la vie est sacrée, et qu’ils ne veulent pas contribuer à y mettre fin. La plupart d’entre nous savent très bien que la Cour suprême peut être instrumentalisée. Un citoyen a la possibilité de s’adresser à la Cour suprême si un médecin lui refuse ce service.
    Si un médecin refuse d’aider une personne à mettre fin à ses jours, l’affaire se retrouvera certainement devant un tribunal, surtout si ce projet de loi est adopté dans sa forme actuelle. Les médecins pourraient alors devoir rendre des comptes, surtout si la loi stipule qu’ils ont la responsabilité de fournir ce service aux citoyens canadiens. De même, si les médecins se sentent contraints de fournir ce service, et c’est ce que nous ont dit les médecins qui ont comparu devant le comité, il faut savoir que ce ne sont pas les médecins qui font la piqûre ou qui administrent le médicament mortel. Cette obligation est transmise à un autre membre du personnel médical, généralement une infirmière, et cette personne sera contrainte par un médecin d’administrer le traitement ou le médicament qui accélère la mort. Ce sont des questions extrêmement complexes, et lorsque le moindre maillon de la chaîne cède, on risque de se retrouver devant un tribunal. C’est donc un membre du personnel médical qui sera contraint d’administrer le traitement ou le médicament.
(1325)
    Je vais maintenant parler de la contrainte plus générale qui s’exerce sur les personnes âgées et sur ceux qui sont malades. Mes parents sont des personnes âgées; mon père a 82 ans et ma mère a 72 ans. Je ne voudrais surtout pas qu’ils pensent qu’ils sont un fardeau pour notre système. Ils ont travaillé toute leur vie. Encore aujourd’hui, mon père fait de la menuiserie dans son atelier. Il paie ses impôts. Une personne âgée ne devrait pas en arriver à penser qu’elle doit mettre un terme à ses jours parce que le système de soins de santé a besoin que des places se libèrent ou parce qu’il est tout simplement devenu trop cher.
    J’aime mes parents, mais ce n’est pas nécessairement le cas dans toutes les familles. Tous les enfants ne s’entendent pas aussi bien que moi avec leurs parents, et il y a des frictions dans certaines familles. Est-ce qu’à cause de ces frictions, certaines personnes âgées seront amenées à mettre fin à leurs jours parce qu’on leur fait sentir qu’elles sont un fardeau pour notre société? Bien sûr, ce sont des hypothèses, mais avec 30 millions d’habitants, c’est le genre de situation qui va se poser au Canada, si ce n’est déjà le cas. Même si cela n’est qu’une hypothèse, je trouve cela extrêmement préoccupant.
    Récemment, il a beaucoup été question des suicides à Attawapiskat et du suicide en général, mais aussi des sentiments qui entourent toute la question du suicide. Je ne pense pas qu’on puisse dorer la pilule. On appelle cela la fin de la vie, d’autres groupes utilisent des termes différents, mais c’est toujours du suicide et de la mort d’une personne dont il est question.
     Je suis très préoccupé à l’idée de ce qui pourrait arriver. Imaginons la situation de personnes estimant ne plus avoir leur place dans ce monde. Elles vont voir un médecin qui, après avoir pris connaissance de leurs évaluations psychiatriques, estime qu’il est justifié de mettre fin à leurs jours. Ce qui m’inquiète, c’est que cela ouvre tout grand la porte à l’acceptation du suicide comme manière plus ou moins acceptable de vivre cette vie ou d’y mettre un terme. Cela me préoccupe énormément.
     Enfin, j’expliquerai pourquoi je ne pense pas que nous ayons à nous trouver dans cette situation. Cela se résume à la disposition de dérogation. Je parlais avec un juge dans l’avion qui me ramenait chez moi, à Vancouver. Je lui faisais la remarque qu’en tant que députés, nous sommes évalués tous les quatre ans, soit lors des élections. On voit beaucoup de visages différents ici. Les Canadiens nous ont évalués. Certains ont pu revenir, d’autres non. On voit de nouveaux visages. Ils sont arrivés ici parce que le peuple s’est exprimé.
     Mais pour l’appareil judiciaire de ce pays, quel genre de vérification fait-on? Ce juge de la Cour suprême m’a répondu qu’il existe un système de vérification: la disposition de dérogation.
     Je sais qu’en présence d’une aussi grande diversité, le seul fait d’essayer de donner à ce genre de loi ne serait-ce qu’une forme acceptable constitue un travail remarquable, mais nous avons déjà une loi. Les 338 députés de la Chambre des communes sont là pour promulguer des lois. La Cour suprême, elle, a la tâche de maintenir ces lois. Je crains cependant qu’il n’y ait usurpation de notre pouvoir par la Cour suprême. Je mets au défi le gouvernement d’examiner cela. Il doit vérifier si nous avons déjà une loi ou non. Beaucoup d’entre nous acceptent la loi pour ce qu’elle est. Plutôt que de tenir une discussion sur la réforme et la réécriture de ce qui existe déjà, il conviendrait de revenir en arrière et de réfléchir très sérieusement à la question.
    Je suis tout à fait d’accord avec la plupart des personnes ici présentes pour dire que les soins palliatifs au Canada doivent être grandement améliorés. Nous avons tous parlé avec beaucoup de fougue du caractère sacré de la vie. Après tous, nous avons tous été créés égaux.
    Il reste que nous devrions réfléchir sérieusement à la possibilité de revenir au libellé antérieur de la loi, comme les Canadiens nous ont demandé de le faire, ou d'assurer le maintien des lois existantes, qui ont été adoptées par nos prédécesseurs à la Chambre. Nous devons faire honneur à ce lieu. Ce lieu est celui où nous adoptons des lois. Il ne s'agit pas seulement des 338 députés que nous sommes. Nous avons été envoyés ici pour représenter plus de 30 millions de personnes. La voix de ces personnes doit être entendue haut et fort.
     Il est très difficile de tenir un tel débat en ces lieux. Il existe des deux côtés des enjeux qui nous tiennent beaucoup à cœur, quel qu’en soit l’aspect, mais nous devons envisager avec grand sérieux d’assurer le maintien des lois déjà en place.
(1330)
    Monsieur le Président, je souligne que les juges de la Cour suprême ont pris une décision unanime et que cela en dit long. Par conséquent, je mets le député en garde en ce qui concerne l'utilisation de la disposition de dérogation.
    Comme le député accorde apparemment beaucoup d'attention à cet aspect de la question, je précise que pourraient recourir à l'aide médicale à mourir seules les personnes qui remplissent les conditions suivantes: être un adulte mentalement capable; être dans un état avancé de déclin de ses capacités; souffrir d'une maladie ou d'un handicap grave et incurable; et endurer des souffrances persistantes et intolérables causées par la maladie ou un handicap; et savoir que sa mort est raisonnablement prévisible, compte tenu de sa situation médicale.
    Il est préférable d'avoir un projet de loi que de ne pas en avoir. Le député a exprimé des préoccupations particulières à l'égard de cette mesure législative. Je lui suggère fortement d'en faire part au comité permanent pour voir s'il est possible de régler certains des problèmes qui l'inquiètent.
    Monsieur le Président, le fait que le député m'ait parlé indique qu'il exerce le droit des citoyens qui l'ont élu à titre de représentant. D'après la taille de sa circonscription, il doit représenter environ 100 000 personnes. Personnellement, je représente 107 000 personnes. Si sept ou neuf personnes ont préséance sur une assemblée élue qui représente 30 millions de personnes, nous sommes alors en désaccord sur les chiffres.
    Le député a parlé de certaines définitions. Qu'on me corrige si j'ai tort, mais nous sommes tous dans une phase de déclin. Nous arriverons tous au bout du chemin un jour ou l'autre. Je crains qu'une définition si ouverte ne s'applique à tous les habitants de la planète. Je répète encore une fois qu'une définition si large ouvre la porte aux abus.
(1335)
    Monsieur le Président, j'ai vraiment du mal à comprendre les conservateurs qui ne cessent de proposer le recours à la disposition de dérogation. Le député pourrait-il nous en dire davantage sur la façon dont il envisage une telle possibilité?
    Tant qu'à évoquer cette possibilité, j'aimerais que le député nous explique comment il envisage le recours à la disposition de dérogation afin de nous soustraire à l'arrêt de la Cour suprême.
    Monsieur le Président, je ne sais pas si le Parlement a déjà eu recours à la disposition de dérogation. Si quelqu'un a la réponse, j'aimerais la connaître. Quoi qu'il en soit, il faut faire preuve de beaucoup de prudence avant d'invoquer cette disposition.
    Ce que je veux dire, c'est qu'il faut que l'instance dirigeante qui représente les citoyens canadiens et qui légifère soit l'autorité suprême. C'est pour cela que la population nous a élus. L'avis de la magistrature ne change rien à nos responsabilités envers le Canada et les citoyens. C'est pourquoi je propose cette idée.
    Je n'ai pas souvenir que quelqu'un d'autre ait proposé le recours à la disposition de dérogation. C'est tout simplement mon opinion. Il faut toutefois que la Chambre reste un endroit sacré et que nous défendions le point de vue des Canadiens.
    Monsieur le Président, mon collègue a parlé de la disposition de dérogation et, de façon réaliste, cela serait un anathème pour le gouvernement actuel. Les libéraux semblent croire qu'on ne peut même pas s'opposer à la décision de la Cour suprême ou adopter un point de vue différent.
    Toujours est-il que le gouvernement doit accepter la responsabilité, à certains égards, d'aller beaucoup plus loin que la décision de la Cour. N'oublions pas entre autres la disposition sur la « croyance raisonnable, mais erronée », en vertu de laquelle une personne ayant enlevé la vie à un individu qui n'y avait peut-être pas consenti peut échapper à une poursuite si elle croyait raisonnablement, mais à tort, que les critères avaient été remplis. La Cour a déclaré que rien dans sa décision ne devrait empiéter sur la liberté de conscience. Pourtant, force est de constater que le projet de loi ne prévoit aucune protection de ce principe.
    Le gouvernement ne se contente pas de mettre en oeuvre ce que la Cour suprême lui a ordonné, il va beaucoup plus loin. Il doit assumer la responsabilité à cet égard. Qu'en pense le député?
    Monsieur le Président, je crois que le député fait allusion à l'arrêt dans la cause Carter. Nous avons relevé des problèmes liés au projet de loi à l'étude. Cette mesure législative dépasse de loin ce qui est proposé dans l'arrêt Carter.
    Encore une fois, j'implore le gouvernement de repenser le projet de loi et peut-être d'envisager de le diviser en différents thèmes de sorte que la liberté de conscience y soit garantie, c'est-à-dire qu'on ne force personne à poser des actes contre son gré.
    Les Canadiens se soucient profondément de cette question. J'espère que le gouvernement renverra le projet de loi au comité afin que celui-ci poursuive nos discussions et approuve, à tout le moins, certains amendements.
    Monsieur le Président, je propose:
    Que la question soit maintenant mise aux voix.
(1340)
    Monsieur le Président, je demanderais qu'on explique exactement le but de cette motion. Je ne comprends pas bien le but. Est-ce que cela signifie qu'on clôt le débat? Peut-être que vous pourriez répondre à cette question, monsieur le Président.
    Je comprends que c'est peut-être une nouvelle procédure pour certains. Cela fait certainement un bon moment que nous avons vu pareille chose à la Chambre.
    J'invite les députés, s'ils ont des questions sur cet élément de procédure, à s'adresser au Bureau. En gros, la motion demandant que la question soit maintenant mise aux voix n'empêche d'aucune façon la poursuite du débat. Nous débattons toujours et, maintenant, sur la motion.
    La députée de Moncton—Riverview—Dieppe a utilisé les 10 minutes dont elle disposait pour présenter cette motion à la Chambre. Il lui reste cinq minutes pour les questions et observations, après quoi, nous passerons au débat régulier et au prochain intervenant prévu.
    Voilà pour la question du député de Brantford—Brant. Nous passons maintenant à la réponse de la députée de Moncton—Riverview—Dieppe.
    Monsieur le Président, nous débattons ce projet de loi depuis un bon moment. La réponse simple est que nous voulons que ce sain débat continue, mais nous voulons aussi que le projet de loi soit renvoyé au comité pour qu'il puisse faire le travail nécessaire.

[Français]

    Monsieur le Président, si j'ai bien compris, on pose la question préalable. J'aimerais donc savoir s'il y a des inquiétudes en particulier, parce qu'on était d'accord pour continuer le débat ce soir et demain soir. Qu'est-ce qui a changé?
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de sa question.
    Cela n'empêchera en aucune manière le débat de continuer. On est même prêts à siéger ce soir et jusqu'à n'importe quelle heure du matin pour faire en sorte que chaque député de la Chambre ait le temps de débattre ce sujet très important pour tout le monde.
    Monsieur le Président, cela ne m'apparaît pas très clair comme façon de fonctionner.
    D'abord, aucun des leaders n'a été avisé. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement arrive soudainement avec cette question préalable, alors qu'il était prévu, selon la motion déposée par l'adjoint parlementaire, d'en discuter ce soir jusqu'à minuit et demain.
    Si cela ne change rien, pourquoi dépose-t-on cette motion de cette façon et sans avertir personne? Je voudrais dire qu'il y a déjà beaucoup de députés qui ne peuvent pas prendre la parole à la Chambre, y compris ceux de ma formation politique. Jusqu'à maintenant, je n'ai eu que 10 minutes de temps de parole, en tout et pour tout, au nom de ma formation. Je ne vois pas pourquoi on arrive avec cette question préalable cet après-midi, sans avertir personne.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question et de ses commentaires.
    Encore une fois, on reconnaît tous à la Chambre que le temps et la question à débattre constituent des enjeux très délicats. On a jusqu'au 6 juin pour agir. C'est pour cette raison qu'on veut offrir à tous les députés de la Chambre l'occasion de débattre ce projet de loi. On veut aussi s'assurer que le projet de loi se rend en comité pour étude. C'est très important pour que le travail se poursuive.

[Traduction]

    Monsieur le Président, la députée pourrait-elle confirmer que nous sommes conscients que la Cour suprême a décidé à l'unanimité que nous devions avoir adopté la mesure législative d'ici le 6 juin? Les députés pourront continuer d'en débattre. Des discussions et des négociations sont encore en cours pour permettre de débattre davantage de la question, et nous espérons que ce sera le cas. Il importe toutefois de reconnaître que le projet de loi doit franchir l'étape de l'étude en comité et être renvoyé au Sénat.
    La députée conviendra, je l'espère, qu'un gouvernement responsable doit assurer l'adoption du projet de loi dans les délais fixés, car la Cour suprême a décidé à l'unanimité qu'il fallait que ce soit fait d'ici le 6 juin.
(1345)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question et ses commentaires.
    C'est effectivement cela. Nous voulons encore une fois nous assurer que tous les députés de la Chambre vont avoir l'occasion de débattre de ce projet de loi. Toutefois, nous sommes aussi conscients que nous devons nous rendre à l'étape du travail en comité, puisque nous voulons que ce projet de loi soit adopté.

[Traduction]

    Monsieur le Président, malgré l'explication fournie par la députée et le leader du gouvernement à la Chambre, je dois dire qu'il s'agit là d'une interruption extraordinaire, même si les députés ont été assurés que le débat se poursuivrait. La députée doit sûrement savoir que le comité de la justice tient actuellement des séances prolongées qui commencent tôt le matin et se terminent tard le soir et qu'il entend encore des témoins. Même si nous modifions l'horaire et accélérons l'étude du projet de loi maintenant, le comité ne sera pas prêt plus tôt à examiner ce que nous lui enverrons.
    Je trouve ce qui se passe curieux, car c'est généralement aux leaders parlementaires de gérer l'organisation des travaux courants de la Chambre. Nous nous demandons encore pourquoi la députée a ainsi fait dévier le débat alors que le gouvernement nous a donné l'assurance qu'il se poursuivrait.

[Français]

    Monsieur le Président, encore une fois, nous voulons favoriser un débat sain à la Chambre et nous assurer que tous les députés vont avoir l'occasion et le droit de débattre de ce projet de loi. Effectivement, nous voulons nous assurer que le travail se rendra au comité, puisque nous avons quand même des dates à respecter.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je n’avais pas l’intention de parler de cette histoire de clôture du débat et de mise aux voix, mais je dois dire que c’est un cafouillage complet, et que l’on est en train de transformer en véritable farce ce qui devrait être un débat sérieux et important entre tous les députés. La plupart d’entre nous avons le droit d’avoir un vote libre sur cette question. Les libéraux sont en train de tourner en dérision la chambre, et cela ne m’impressionne pas du tout.
    Pour revenir sur la question dont nous sommes saisis, j’estime qu’il est important que nous ayons un véritable débat là-dessus. Je tiens à y participer, en mon nom et au nom de ceux que je représente, et je suis sûr que beaucoup d’autres députés veulent en faire autant.
    C’est un projet de loi extrêmement important pour notre pays, et bien sûr des membres de notre caucus conservateur se sont beaucoup démenés au cours des travaux qui ont précédé ce débat. Nous avions d’importantes réserves quant à la façon dont ce projet de loi devrait être formulé et nous les avons exprimées dans un rapport dissident du comité spécial mixte qui a examiné la question. Il est vrai que nous sommes nombreux à constater, avec un certain soulagement, que le projet de loi retient certaines recommandations du rapport dissident, comme les limites à respecter dans le cas de mineurs. Et bien entendu, nous sommes nombreux à reconnaître que, conformément à la décision de la Cour suprême, il faut que le projet de loi assure le respect de la dignité de la personne en fin de vie. Le texte dont nous sommes saisis nous pose toutefois certains problèmes, et je vais vous parler de ceux qu’il me pose personnellement.

[Français]

    Malheureusement, ce projet de loi ouvre la porte au suicide assisté pour les gens ayant des troubles mentaux et cela nous préoccupe.

[Traduction]

    Le projet de loi contient une disposition sur les souffrances psychologiques. C’est ouvrir grand la porte. Je me demande avec inquiétude comment cela va s’appliquer aux déficients mentaux. Comment va-t-on appliquer cette disposition dans la réalité? La disposition sur les souffrances psychologiques nous entraîne sur une pente très glissante. Je suis sûr qu’il y a une façon de modifier cette disposition, mais selon l’amendement proposé au Code criminel, il faut que, dans le cas de la personne qui fait une demande d’aide médicale à mourir, sa maladie, son affection, son handicap ou le déclin avancé et irréversible de ses capacités lui cause des souffrances physiques ou psychologiques persistantes qui lui sont intolérables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge acceptables. C’est la disposition qui me préoccupe, et en cela, je me fais l’écho de mes collègues qui l’ont dénoncée avant moi.
(1350)

[Français]

    Le Québec s'est doté de sa propre loi concernant l'aide à mourir. Dans la version québécoise, seules les personnes âgées de 18 ans et plus ayant des maladies physiques graves et incurables et dont l'état médical est caractérisé par un déclin avancé et irréversible peuvent demander une aide médicale à mourir.

[Traduction]

    Le médecin traitant doit s’assurer que son ou sa patiente consent expressément au suicide assisté par un médecin, notamment qu’il ou elle ne fait pas l’objet de pressions externes, et il doit lui fournir un pronostic complet de son état et des traitements possibles, avec les conséquences prévisibles. Selon la loi québécoise, le médecin doit également s’assurer que la personne maintient son consentement, en la rencontrant à différentes occasions, à intervalles raisonnables, compte tenu de son état. Je pense que ces garde-fous prévus par la loi québécoise sont tout à fait pertinents. J’estime qu’il faudrait avoir les mêmes dans la loi canadienne.
     L’autre chose qui nous préoccupe concerne la liberté de conscience des médecins et des établissements de soins.

[Français]

    Le droit de conscience du personnel médical nous inquiète grandement.

[Traduction]

     Comme le rappelle le rapport dissident, l’article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés garantit à tous les Canadiens la liberté de conscience et de religion. Il est clairement indiqué dans le rapport dissident que presque tous les témoins s’entendaient pour dire que les médecins qui refusent de participer à un suicide assisté pour des raisons de conscience ne devraient pas être tenus de le faire. Même si le projet de loi ne crée pas d’obligation directe relativement au suicide assisté, l’obligation d'aiguiller le patient vers un autre médecin enfreint l’esprit, et je dirais même la lettre, de l’article 2 de la Charte. Je crois donc qu’un tel régime est inutile et je constate que le Canada serait la première compétence au monde à exiger un régime d'aiguillage en bonne et due forme.
     Je crois qu’il existe des modèles qui protégeraient mieux les droits que la Charte garantit aux médecins tout en donnant accès au suicide assisté, mais le projet de loi actuel oblige les médecins qui, pour des raisons de conscience, s’opposent au suicide assisté à fournir de l’information à leurs patients sur la façon d’obtenir de tels services et à informer le gouvernement de la demande de ce patient. Je crois que cela est injuste pour les médecins, et que le projet de loi ne protège pas suffisamment leurs droits. Je crois en outre que les établissements de santé qui refusent de faciliter le suicide et d’offrir des services connexes devraient être exemptés, conformément à la décision de la Cour suprême selon laquelle les aspects individuels et collectifs de la liberté de religion et de conscience protégée par la Charte sont indissociables.
     Dans ma province, l’Ontario, la politique actuelle du Collège des médecins et chirurgiens prévoit l’obligation non seulement d'aiguiller le patient, mais aussi de fournir le service conformément aux normes de soins en cas d’urgence. Par conséquent, adopter le projet de loi sans y inscrire la protection de la liberté de conscience signifierait que l'aide médicale à mourir figurerait dans les normes de soins et serait assujettie à la politique actuelle du Collège des médecins et chirurgiens de l’Ontario. C’est donc dire que, dans ma province, on pourrait obliger un médecin à participer à ce processus même contre sa volonté. Il s’agit là d’une grave préoccupation pour moi et pour les médecins de ma circonscription.
    Il faudrait aussi se demander si le projet de loi respecte l’arrêt dans la cause Carter et résisterait à une contestation fondée sur la Charte. Je pense que nous avons motif de croire que tel ne serait pas le cas. Je le demande à mes collègues: si nous ne pouvons pas adopter un projet de loi qui résisterait à une contestation en vertu de la Charte, pourquoi nous donnons-nous la peine de suivre tout ce processus? C’est un manque de respect à l'égard du processus législatif.
     J’espère que le gouvernement, dans la suite du processus, acceptera des amendements pour veiller à ce que tous les droits protégés par la Charte soient respectés, qu’il s’agisse de ceux des médecins et du personnel médical ou de ceux des personnes vulnérables. Nous avons le devoir, face aux Canadiens, de bien faire les choses dès le premier essai, pour protéger la liberté de conscience des médecins et des professionnels de la santé tout en respectant les paramètres de l’arrêt dans la cause Carter.
(1355)

[Français]

    Les Canadiens et les Canadiennes s'attendent à un travail acharné de notre part et à ce que nous nous assurions que celui-ci est bien fait.

[Traduction]

    Je tiens à dire que l'autre point soulevé par mes collègues est important. Où sont les 3 milliards de dollars pour les soins palliatifs? Il n'en est pas question dans le budget. Comme on dit parfois, dans l'univers politique comme dans la vie en général, le diable est dans les détails. D'où viendra l'argent nécessaire? Comment sera-t-il affecté? Il est absolument essentiel que le gouvernement agisse concrètement dans le dossier des soins palliatifs.
    Voilà qui met fin à mes observations sur le projet de loi, mais je voudrais dire que les manigances qui ont eu lieu avant que je prenne la parole sont tout à fait inacceptables dans un débat libre et démocratique sur une question de conscience pour de nombreux députés, pour tous les députés. Je m'oppose à ce que la motion soit présentée ainsi. Je m'oppose à la procédure employée par le gouvernement, qui essaie de mettre fin aux débats et d'empêcher des députés de faire valoir leur position et celle de leurs électeurs.
    Monsieur le Président, des modèles novateurs sont appliqués un peu partout Canada pour intégrer les approches relatives aux soins palliatifs dans divers milieux, y compris à domicile; incorporer la planification des soins; préparer davantage de services de santé; inclure plus de fournisseurs de soins palliatifs; tenir compte de l'importance des aidants naturels issus de la famille et des amis et répondre à leurs besoins; et tirer parti des autres bonnes pratiques en vigueur dans l'ensemble de notre grand pays.
    À part les soins palliatifs, que le député a mentionnés à la fin de ses observations, quels autres services faisant partie des pratiques existantes au pays le député recommanderait-il que nous joignions à ce programme?
    Monsieur le Président, je remercie le député de sa question réfléchie. En effet, en tant qu'ancien ministre provincial et ministre fédéral de la Santé, je pense qu'il est important que nous trouvions des moyens d'intégrer et de coordonner les soins que nous offrons aux gens. Il a tout à fait raison.
    Je tiens cependant à mentionner au député que lorsque j'ai consulté les gens de l'infrastructure des soins palliatifs, dans ma circonscription, ils n'étaient pas vraiment enchantés à la perspective d'être associés à l'aide médicale à mourir. Ils considèrent les soins palliatifs comme un lieu de dernier repos, un lieu d'espoir et de réconfort, plutôt qu'un endroit où la priorité serait le débat sur l'aide médicale à mourir.
    Je pense que nous devons faire attention. Nous avons besoin de plus de soins palliatifs; toutefois, nous avons aussi besoin d'un processus qui nous permettra d'arriver à la bonne conclusion et de favoriser les bons éléments du système de soins de santé.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Parry Sound—Muskoka de ses observations.
    La motion qui vient d'être présentée ne vise peut-être pas à limiter le débat et les commentaires provenant de ce côté-ci. Dans le cadre du débat et de la discussion que nous avons depuis hier, nous avons aussi entendu des opinions dissidentes de la part des députés ministériels. Peut-être que la motion ne vise pas seulement à étouffer le débat de ce côté-ci, mais également du côté des députés ministériels.
    Je me demande si mon collègue a la même impression.
    La même idée m'a traversé l'esprit. Initialement, j'étais censé intervenir à 15 h 20, ce qui est encore loin. Force est de conclure que les députés libéraux ont décidé de ne pas prendre la parole pendant les périodes qui leur étaient réservées. Peut-être que le projet de loi génère de profondes dissensions au sein du caucus libéral. Peut-être qu'il n'est pas aussi populaire que le pensaient les manipulateurs de l'autre côté de la Chambre et que ceux-ci cherchent maintenant à clore le débat, non seulement pour faire taire les députés de ce côté-ci de la Chambre mais les leurs également. Tout cela est scandaleux.

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Le tournoi d'unihockey féminin

    Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour souligner un événement sportif de calibre mondial qui aura lieu dans la circonscription de Baie de Quinte.
    Du 4 au 8 mai, Belleville accueillera fièrement le tournoi d'unihockey féminin pour les joueuses de moins de 19 ans. Plus de 400 athlètes provenant de 15 pays différents participeront au premier tournoi disputé en Amérique du Nord.
    L'événement générera des retombées de 3,8 millions de dollars pour la localité. Il mettra en évidence la puissance des athlètes féminines et la popularité croissante de l'unihockey à l'échelle mondiale. Soulignons qu'on espère voir l'unihockey devenir un sport olympique en 2024.
    L'appui de la collectivité envers le tournoi a été inspirant. En tant que député de Baie de Quinte, je souhaite la bienvenue à tous les visiteurs étrangers et la meilleure des chances à l'équipe canadienne.
(1400)

[Français]

Portneuf—Jacques-Cartier

    Monsieur le Président, lors de mon passage à l'ouverture de la 13e édition du Festival de films pour l'environnement de Portneuf, j'ai mentionné que je ferais une déclaration afin de faire connaître encore plus cet événement unique de ma circonscription.
    Les circonstances m'obligent à partager ce temps en raison de l'incendie de dimanche dernier, qui a grafigné le visage du centre-ville de Saint-Raymond de Portneuf. En premier lieu, j'aimerais m'adresser aux victimes de ce sinistre et leur assurer mon appui le plus complet. Je veux qu'elles sachent que mes pensées les accompagnent dans cette épreuve.
    J'aimerais féliciter le service d'incendie de la Ville ainsi que les pompiers des autres municipalités avoisinantes pour leurs interventions, ce qui a permis de limiter les dégâts. Je donne un coup de chapeau au maire, M. Daniel Dion, qui a été un bon leader dans les circonstances. La bonne nouvelle, c'est qu'il n'y a aucune victime.
    Je connais la force de caractère des citoyens de Saint-Raymond. Ils ont toujours démontré qu'ils sont capables de se retrousser les manches et de se mobiliser pour faire face à ce genre de situation. Nous sommes une communauté solidaire et nous nous remettrons ensemble de cette épreuve.

[Traduction]

Ingénieurs sans frontières Canada

    Monsieur le Président, depuis 16 ans, Ingénieurs sans frontières Canada aide les personnes des pays en voie de développement à se servir de la technologie pour améliorer leur sort.
     Ingénieurs sans frontières Canada a été fondé en 2000 lorsque deux diplômés en génie de Waterloo ont griffonné un énoncé de mission sur une serviette en papier d'un café. L'organisme n'avait pas d'argent, pas de personnel et aucune ressource. Aujourd'hui, il figure parmi les organismes de développement les mieux respectés au Canada.
     Le 17 mai, je recevrai dans mon bureau de la Colline une délégation de jeunes leaders d'Ingénieurs sans frontières Canada. Nous parlerons du soutien que les gens de ma circonscription, Don Valley-Nord, peuvent apporter à l'innovation sociale au Canada et de l'aide qu'ils peuvent offrir pour mettre fin à la pauvreté endémique qui frappe l'Afrique.
     Ingénieurs sans frontières Canada est un organisme qui mérite notre soutien.

[Français]

La Journée mondiale de la liberté de la presse

    Monsieur le Président, je suis très fier de me lever aujourd'hui à la Chambre des communes pour souligner la Journée mondiale de la liberté de la presse. Nous sommes chanceux, au Canada, d'avoir une presse libre. Ce n'est malheureusement pas le cas de tous les citoyens du monde entier.
    Encore aujourd'hui, plusieurs doivent se battre pour obtenir la liberté de parole et, par le fait même, la liberté de la presse. Je ne peux passer sous silence, aujourd'hui, le courage et la détermination de Mme Ensaf Hahidar, citoyenne de Sherbrooke et épouse du blogueur Raif Badawi qui, rappelons-le, est toujours et depuis trop longtemps emprisonné en Arabie saoudite pour avoir tout simplement exprimé son opinion. Elle est à Ottawa aujourd'hui pour souligner cette occasion.
    C'est donc en cette journée bien particulière que j'aimerais rappeler à mes collègues parlementaires et aux Canadiens qu'il est de notre devoir et de notre responsabilité non seulement de protéger les droits fondamentaux sur notre territoire, mais également d'agir en tant que leaders sur la scène internationale, afin de promouvoir et de garantir ces mêmes droits partout sur la planète.
    Bonne Journée mondiale de la liberté de la presse!

[Traduction]

Le don de moelle osseuse

    Monsieur le Président, Noor Deol est né à Brampton. Comme la majorité des garçons, pendant son enfance, il était plein d'énergie et d'optimisme pour l'avenir. Malheureusement, en 2010, Noor a reçu un diagnostic de cancer; plus précisément, il a appris qu'il avait la leucémie lymphoblastique aiguë.
    Le cancer de Noor s'est révélé très agressif et la chimiothérapie n'a pas été efficace. Noor a maintenant besoin d'une greffe de moelle osseuse.
    Depuis plus de cinq ans, la famille de Noor lance des appels désespérés, tant au Canada qu'à l'étranger, afin de trouver un donneur compatible. Le problème, c'est que même s'il y a 350 000 donneurs inscrits au registre au Canada, 71 % sont d'origine caucasienne, mais seulement 4,8 % sont originaires de l'Asie du Sud. Les personnes les plus susceptibles d'être compatibles avec Noor sont les hommes de l'Asie du Sud qui sont âgés de 17 à 35 ans.
    Comme beaucoup d'autres personnes, je prie pour Noor, et j'exhorte tous les Canadiens et les gens partout dans le monde à s'inscrire auprès de OneMatch ou d'une organisation similaire à l'étranger. Une fois inscrits, les gens n'ont qu'à prélever un frottis buccal. C'est un processus simple et sans douleur. Ils pourraient ainsi sauver la vie de Noor Deol et l'aider à retrouver une bonne santé.
(1405)

La santé visuelle

    Monsieur le Président, mai est le Mois de la santé visuelle. Étant donné que 75 % des cas de déficience visuelle peuvent être évités s'ils sont détectés et traités rapidement, j'aimerais présenter quelques données sur ce que ce problème coûte aux Canadiens et expliquer pourquoi il est urgent que le gouvernement passe à l'action dans ce dossier.
    Au Canada, un enfant d'âge scolaire sur quatre a un problème de vision. La perte de la vision coûte au Canada 19,1 milliards de dollars, ou 550 $ par habitant, soit davantage que les coûts combinés du diabète et du cancer. Ce problème a des répercussions sur l'ensemble de l'économie. Les personnes qui vivent avec une perte de la vision sont plus susceptibles de présenter un taux d'absentéisme élevé et un taux d'emploi faible, de perdre des revenus, de prendre une retraite précoce et de mourir prématurément.
    Malgré les coûts effarants liés à la déficience visuelle, les libéraux n'ont ni plan ni argent pour promouvoir la santé visuelle. Alors que des pays comme l'Australie et le Royaume-Uni élaborent des stratégies pour promouvoir la santé visuelle et prévenir les cas de cécité évitables, le Canada reste les bras croisés.
    J'exhorte tous les députés à se joindre à moi pour réclamer que le gouvernement libéral joue un rôle structurant dans la promotion de la santé visuelle.

[Français]

Bombardier

    Monsieur le Président, je profite de l'occasion, aujourd'hui, pour m'adresser aux gens de mon comté, Thérèse-De Blainville, qui me questionnent pour savoir s'ils peuvent compter sur le gouvernement pour venir en aide à Bombardier. Je veux les rassurer et rassurer l'ensemble des Canadiennes et des Canadiens, plus particulièrement ceux du Québec, en leur disant que notre gouvernement reconnaît l'importance de l'industrie aérospatiale, et donc de Bombardier, pour notre pays.
    Notre gouvernement est engagé dans des négociations avec Bombardier, afin d'obtenir les meilleurs résultats, pour Bombardier et pour les Canadiennes et les Canadiens à la fois.
    À cet égard, je dois souligner le travail de tous mes collègues députés du Québec, mais aussi de ceux du reste du Canada. Nous travaillons avec détermination et vigueur pour appuyer le gouvernement afin de soutenir l'industrie aéronautique, les entreprises et les travailleuses et les travailleurs qui y sont engagés.

[Traduction]

La Commission de développement économique de l'Est de l'Ontario

    Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre aujourd'hui pour souligner l'excellent travail qu'accomplit la Commission de développement économique de l'Est de l'Ontario. Cet organisme, qui compte plus de 125 membres, représente toutes les collectivités de l'Est ontarien, y compris celles de ma circonscription, Northumberland—Peterborough-Sud. Il est dirigé par un conseil d'administration bénévole et une petite équipe de gestion, dont les membres sont à la tribune aujourd'hui.
    La Commission de développement économique propose un modèle d'intervention économique idéal dans le contexte actuel, un modèle simple et souple qui s'adapte admirablement aux changements rapides. La Commission mise sur les partenariats, la collaboration et l'action collective. C'est un organisme citoyen dont le puissant réseau est dédié à la revitalisation économique de la région. Elle s'emploie à conserver les entreprises déjà sur son territoire, à en attirer de nouvelles et, plus important encore, à créer de l'emploi.
    Je remercie la Commission de développement économique de l'Est de l'Ontario et j'espère qu'elle poursuivra son excellent travail.

La sensibilisation au cancer de l'ovaire

    Monsieur le Président, le cancer de l'ovaire est le cancer féminin le plus mortel au Canada. On estime que 2 800 femmes recevront ce diagnostic cette année et que 1 750 d'entre elles décéderont des suites de la maladie; nous perdrons ainsi chaque jour cinq mères, filles ou soeurs au cours de la prochaine année.
    Il n'existe pas de test de dépistage, et les symptômes peuvent être facilement confondus avec ceux de maladies moins graves. C'est pourquoi le cancer de l'ovaire est habituellement décelé à un stade très avancé. Ces faits sont troublants parce que la plupart des Canadiens ne sont pas au courant des risques que pose ce cancer.
    Cancer de l'ovaire Canada a lancé une campagne afin de sensibiliser davantage les Canadiens au cancer de l'ovaire. Il y a un besoin urgent de fonds pour la recherche. C'est pourquoi j'exhorte le gouvernement fédéral à investir dans la recherche, afin que les femmes qui luttent contre cette maladie disposent des outils dont elles ont besoin pour la vaincre.
    Je vous demande de contribuer à la sensibilisation en vous joignant à moi le 8 mai prochain, Journée mondiale du cancer de l'ovaire.

[Français]

La Journée mondiale de la liberté de la presse

    Monsieur le Président, en cette Journée mondiale de la liberté de la presse, on se doit d'honorer le rôle vital que la presse indépendante joue pour favoriser la démocratie dans le monde.
    La liberté journalistique assure la reddition de comptes et encourage la transparence au sein des gouvernements. Elle est au coeur de toute démocratie saine et dynamique.

[Traduction]

    Nous ne pouvons pas tenir notre liberté pour acquise; nous devons respecter et maintenir la liberté de la presse tant au Canada qu'à l'étranger. Les journalistes font trop souvent l'objet de censure, de harcèlement, d'intimidation et même de violence dans l'exercice de leur rôle essentiel au nom de leurs concitoyens.
    Au Canada, la liberté d'opinion et la liberté d'expression, y compris la liberté de presse, sont heureusement enchâssées dans la Charte canadienne des droits et libertés.
(1410)

[Français]

    Ce sont là des valeurs qu'il faut partager et le Canada doit déployer tous les efforts possibles pour promouvoir la liberté de presse partout dans le monde.

[Traduction]

    Les journalistes doivent être libres de rapporter les faits sans crainte de répercussions. Nous devons faire tout en notre pouvoir pour les appuyer dans leur démarche.

La sensibilisation au cancer de l'ovaire

    Monsieur le Président, c'est un plaisir d'accueillir à Ottawa des représentants de l'organisme Cancer de l'ovaire Canada, dont certains comptent parmi mes amis et voisins. Ils sont à Ottawa aujourd'hui pour faire valoir l'importance de la recherche visant à lutter contre le cancer de l'ovaire.
    Chaque année, 2 800 Canadiennes reçoivent un diagnostic de cancer de l'ovaire; 55 % d'entre elles meurent de cette maladie dans les cinq années suivantes. Comme il n'y a pas de test de dépistage et que les symptômes ressemblent à ceux de maladies moins graves, le cancer de l'ovaire est généralement diagnostiqué trop tard.
    Le taux de survie après cinq ans n'est que de 45 % dans le cas du cancer de l'ovaire. Quand le cancer est détecté et traité avant d'avoir pu se propager, le taux de survie après cinq ans augmente de façon phénoménale pour atteindre 92 %. La recherche axée sur le dépistage et le traitement précoces est donc essentielle.
    Au nom des nombreuses Canadiennes atteintes d'un cancer de l'ovaire, de leur famille et de leurs amis, je vous invite à joindre vos efforts aux miens pour aider Cancer de l'ovaire Canada à faire mieux connaître cette cause le 8 mai prochain, à l'occasion de la Journée mondiale du cancer de l'ovaire.

L'antisémitisme

    Monsieur le Président, B'nai Brith Canada vient juste de publier son rapport des incidents d'antisémitisme annuel au Canada, et les résultats sont alarmants.
    Bien que le niveau d'antisémitisme soit resté relativement constant au cours des cinq dernières années, la nature des agressions a changé. Si les graffitis, les croix gammées grossièrement dessinées, la profanation des sites sacrés et les agressions violentes sont à la baisse, l'antisémitisme sur les médias sociaux a toutefois connu une hausse fulgurante.
    La vérification indique que les médias sociaux rejoignent un auditoire beaucoup plus vaste que les anciens types de propagande haineuse et que les messages ainsi diffusés sont beaucoup plus difficiles à supprimer une fois qu'ils ont été publiés. Les conclusions de B'nai Brith sont semblables à celles du rapport du service de police de Toronto qui révèle que les juifs continuent de représenter le groupe de victimes le plus ciblé dans cette ville.
    L'antisémitisme n'a pas sa place au Canada. J'appelle tous les députés à se joindre à moi pour condamner ce type de propagande haineuse pernicieux.

L'antisémitisme

    Monsieur le Président, depuis plus de 30 ans, B'nai Brith publie chaque année un rapport des incidents d'antisémitisme afin de sensibiliser la population à cette réalité et de faire connaître divers moyens de mettre un frein à cette forme de haine et d'intolérance contre les juifs.

[Français]

    L'antisémitisme était répandu et visible en 2015. Il y a eu plusieurs attaques violentes autour du monde, sans distinction, à divers endroits, autant dans les synagogues que dans les marchés publics et dans les rues.

[Traduction]

    Ici au Canada, 1 277 actes antisémites ont été recensés, et leurs auteurs se tournent de plus en plus vers Internet pour diffuser leurs messages haineux auprès d'un plus vaste public.
    Avoir des préjugés contre un groupe, c'est avoir des préjugés contre tous les groupes.
    Je félicite B'nai Brith de contribuer ainsi à combattre la haine en misant sur la sensibilisation. J'invite tous les députés à lire le rapport annuel de 2015. L'antisémitisme doit être considéré comme un obstacle à surmonter tous ensemble, en misant sur nos valeurs communes, comme la diversité et l'inclusivité.

[Français]

L'industrie laitière

    Monsieur le Président, depuis très tôt ce matin, en raison de l'inaction du gouvernement libéral, quelques centaines de producteurs laitiers ont décidé d'ériger un barrage devant une usine de transformation de produits laitiers à Montréal. Cette manifestation spontanée de la part des producteurs démontre qu'ils sont vraiment à bout. L'inaction de ce gouvernement crée tout simplement une crise qui dégénère. Cela aurait pu être évité. Le seul responsable dans ce dossier est le gouvernement fédéral, car il ne fait toujours pas respecter les normes de composition du fromage.
    Le gouvernement nous dit depuis des mois et des semaines qu'il est en train de mener des consultations et de parler avec l'industrie. Pourtant, nous connaissons la solution. Elle est simple, elle ne coûte rien et elle peut être appliquée aujourd'hui. Nous savons que le gouvernement va malheureusement voter contre la motion déposée par le NPD, mais je demande sincèrement au gouvernement d'agir aujourd'hui pour faire respecter les normes canadiennes. Stoppons le lait diafiltré!
(1415)

[Traduction]

L'Iran

    Monsieur le Président, je suis fier des sanctions rigoureuses que le gouvernement conservateur avait imposées à l'Iran afin de le contraindre à renoncer à ses ambitions nucléaires. Les sanctions de la communauté internationale ont tellement ébranlé le régime iranien que, le jour où elles ont été levées, le président iranien, Hassan Rouhani, a déclaré qu'il y voyait l'ouverture d'une nouvelle page dans l'histoire du pays.
    L'Iran a presque toujours fait figure d'esprit malveillant au Moyen-Orient: en effet, le pays est un exportateur mondial de terrorisme, il soutient militairement le régime al-Assad en Syrie de même que le Hezbollah et le Hamas, en plus de menacer presque continuellement de rayer de la carte notre ami et allié, Israël. Encore en mars, un commandant du Corps des gardiens de la révolution islamique a déclaré: « Même s'ils construisent un mur autour de l'Iran, nous ne mettrons pas fin à notre programme de missiles. »
    Peu importe la forme que prendra leur plan, si les libéraux lèvent les sanctions contre l'Iran, ils renieront la position de principe qu'avait prise l'ancien gouvernement conservateur. Les faits parlent d'eux-mêmes: le régime au pouvoir à Téhéran viole sans vergogne les droits fondamentaux de ses propres citoyens et soutient le terrorisme dans l'ensemble du Moyen-Orient, en plus d'entretenir la haine contre Israël.
    Les conservateurs continuent de voir clair dans le jeu de l'Iran; voilà pourquoi ils préfèrent le juger sur ses faits et gestes que sur ses belles paroles.

La Semaine de la santé mentale

    Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de #Parlerhautetfort pendant la Semaine de la santé mentale, à l'appui de la santé mentale et du bien-être de tous les Canadiens.
    La santé mentale est souvent considérée comme secondaire par rapport à la santé physique. C'est faux. La santé mentale est essentielle à notre santé générale.
    Le gouvernement a souligné l'importance d'avoir accès à des soins de santé mentale. À titre d'aumônière dans les écoles secondaires, j'ai constaté comment la vie des gens était dévastée quand les services de santé mentale étaient inadéquats. De plus, chez les aînés et les Autochtones du pays, il y a un besoin criant de services de soutien en santé mentale.
    Lorsqu'on s'occupe de la santé mentale, cela contribue à renforcer les collectivités. La station radiophonique CHML d'Hamilton a amené des dizaines d'organisations à braquer les projecteurs sur la santé mentale en baignant, cette semaine, leur lieu de travail de lumières vertes. J'applaudis les efforts continus, et souvent héroïques, de tous les défenseurs de la santé mentale d'Hamilton, en Ontario, la ville d'où je viens.
    J'exhorte mes collègues de tous les partis à travailler de concert pour garantir que tous les Canadiens aient accès aux services et aux ressources en santé mentale dont ils ont besoin afin d'atteindre leur plein potentiel.

QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

[Traduction]

Les finances

    Monsieur le Président, tandis que le premier ministre exécutait une fois de plus des pompes pour les caméras hier, le ministre des Finances s'adonnait à toute une gymnastique verbale à la Chambre.
    Il a tenté d'expliquer comment un surplus sain légué par les conservateurs s'est transformé en déficit sous les libéraux. Il se trouve que nous sommes simplement « obsédés par cette histoire d'équilibre budgétaire ». Il a raison, et nous en sommes fiers.
    Ma question à l'intention du premier ministre est simple. A-t-il l'intention d'équilibrer le budget un jour?
    Monsieur le Président, je remercie la députée d'en face de me donner l'occasion de parler des Jeux Invictus et du travail extraordinaire que fait le gouvernement pour appuyer les anciens combattants et veiller à ce que tous les Canadiens aient l'occasion de souligner la bravoure, le courage et la force extraordinaires des anciens combattants canadiens.
    Évidemment, pour ce qui est de la croissance économique, nous avons indiqué clairement en campagne électorale que nous investirons dans les collectivités. Nous mettrons plus d'argent dans les poches des Canadiens de la classe moyenne et de ceux qui travaillent dur pour en faire partie, parce que la responsabilité financière et les budgets équilibrés sont effectivement importants.
    Monsieur le Président, nous avons tous entendu parler de la folie du mois de mars.
    Voici ce qu'ont fait les libéraux en mars, d'après les chiffres de leur propre budget. En un seul mois, ils ont pris les 7,5 milliards de dollars de surplus que nous leur avons laissés, les ont dépensés jusqu'au dernier sou, puis ont dépensé cinq autres milliards de dollars. C'est imprudent et irresponsable. Ce sont les Canadiens qui devront rembourser ces dépenses.
    Le premier ministre comprend-il qu'il ne s'agit pas de son argent? Cet argent appartient aux Canadiens.
    Monsieur le Président, est-il imprudent et irresponsable de baisser l'impôt de la classe moyenne et d'augmenter celui du 1 % le plus riche?
    Est-il imprudent et irresponsable de donner à neuf familles canadiennes sur dix une Allocation canadienne pour enfants plus généreuse, de faire plus pour les familles qui en ont besoin et moins pour les familles qui n'en ont pas besoin?
    Franchement, ce qui aurait été imprudent et irresponsable pour les Canadiens, cela aurait été de permettre que le gouvernement conservateur demeure au pouvoir ne serait-ce qu'une minute de plus après le 19 octobre dernier.
    Passons donc directement aux pompes.
    Monsieur le Président, le vrai rôle du premier ministre est d’essayer, au moins d’essayer, de contrôler les dépenses.
    Les faits sont là. Le directeur parlementaire du budget et le ministère des Finances conviennent que les conservateurs ont laissé un excédent budgétaire très confortable, que les libéraux ont gaspillé.
    Est-ce que le premier ministre comprend que ces milliards de dollars de dépenses doivent en fait être remboursés?
(1420)
    Monsieur le Président, je suis ravi de voir que la députée d’en face découvre ce qu’elle estime apparemment être le rôle du premier ministre.
    Le précédent premier ministre a augmenté la dette du Canada de 160 milliards de dollars, avec très peu de résultats concrets. En fait, pendant 10 ans, nous avons connu une croissance économique plus faible que nécessaire. Il y a eu un sous-investissement dans les infrastructures, les collectivités et les transports en commun.
    C’est la raison pour laquelle le gouvernement est déterminé à faire les investissements collectifs dont les particuliers et les entreprises ont désespérément besoin, tout en laissant plus d’argent à la classe moyenne et à ceux qui travaillent dur pour en faire partie.
    Voilà le rôle du premier ministre.

[Français]

    Monsieur le Président, dans les dernières années, le premier ministre précédent a dû faire face à la pire crise économique depuis la Deuxième Guerre mondiale. Heureusement que ce n'était pas le premier ministre actuel qui avait à gérer cette crise. Nous avons vécu des moments très difficiles et nous avons laissé la maison en ordre, avec un surplus de 7,5 milliards de dollars à la fin février.
    Hier, dans une envolée lyrique, le ministre des Finances a dit ceci: « De toute évidence, les députés d'en face sont encore obsédés par cette histoire d'équilibre budgétaire. » Présentement, des familles remplissent leurs déclarations d'impôt et doivent équilibrer leurs finances personnelles. Est-ce que le premier ministre peut comprendre que d'équilibrer un budget...
    Le très honorable premier ministre a la parole.
    Monsieur le Président, ce que les familles partout au pays comprennent, c'est que cela prend des investissements dans le transport collectif qui n'ont pas été faits depuis 10 ans. C'est pour cela que nous avons annoncé des investissements de 775 millions de dollars dans le transport collectif à Montréal. C'est pour cela que nous applaudissons les investissements potentiels dans le nouveau train léger à Montréal qui va aider les gens à se déplacer, des investissements à Edmonton, à Toronto et partout au pays. Le gouvernement précédent a refusé d'investir dans nos communautés. Il était temps que nous remettions des options et de la croissance pour les Canadiens à l'ordre du jour.
    Monsieur le Président, les affirmations du premier ministre peuvent être corrigées. C'est nous qui avons réalisé le dossier des projets à Edmonton dont il a parlé. Dans la région de Montréal, on a toujours travaillé en respectant les compétences provinciales et municipales, notamment en ce qui concerne le transport en commun. Nous avons livré le plus important plan d'infrastructure du pays en équilibrant le budget.
    Pourquoi le premier ministre est-il obligé de creuser des déficits pour faire ce que nous avons fait en équilibrant notre budget?
    Monsieur le Président, les conservateurs ont balancé le budget par la fenêtre!
    En réalité, nous avons fait les investissements nécessaires. Pendant 10 ans, il n'y a pas eu d'investissement dans le transport collectif, dans les infrastructures vertes et en ce qui concerne les problèmes liés aux changements climatiques.
     Les Canadiens ont élu un gouvernement prêt à investir dans l'avenir, dans la classe moyenne, pour qu'elle ait plus d'argent dans les poches, et dans les familles. Ce genre d'investissements favorisera la croissance qui n'a pas été stimulée pour les Canadiens au cours des 10 dernières années, à cause de l'ancien gouvernement.

L'industrie laitière

    Monsieur le Président, trêve de plaisanteries sur l'ancien gouvernement.
    Parlons plutôt du gouvernement en place. Dans le dossier du lait diafiltré, l'inaction du gouvernement libéral actuel est en train de faire très mal aux producteurs laitiers de partout au Canada. Ils ne peuvent plus emprunter et ils perdent des centaines de millions de dollars. Depuis six mois, les libéraux ne font rien.
    Vont-ils, oui ou non, appuyer la motion du NPD et se tenir debout pour appuyer nos fermes laitières familiales?
    Monsieur le Président, nous continuons d'appuyer le secteur laitier canadien.
     Nous parlons régulièrement avec les représentants du secteur pour comprendre les enjeux, faire en sorte d'accorder les compensations nécessaires par rapport à l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, ainsi que pour s'assurer de travailler avec eux à chaque étape, et ce, afin de garantir la protection de l'industrie. Nous nous sommes engagés à protéger la gestion de l'offre, et nous allons continuer de le faire.

L'Agence du revenu du Canada

    Monsieur le Président, continuer de parler ne va rien faire pour aider les fermes laitières familiales. Elles ont besoin d'action, et cette action revient tout simplement au gouvernement libéral qui en est responsable et qui doit appliquer les règles. Un point c'est tout. Pourquoi cette inaction? C'est inexplicable.
    Parlons d'un autre dossier pour lequel on vient en aide à une personne si elle est bien branchée. Aujourd'hui, en commission parlementaire, on a demandé que KPMG, qui a monté le fligne-flagne fiscal, soit tenu responsable.
    Les libéraux vont-ils, oui ou non, appuyer notre motion pour amener KPMG en commission parlementaire?
(1425)
    Monsieur le Président, comme tous les Canadiens, nous sommes préoccupés par les allégations de favoritisme au sein de l'Agence du revenu du Canada. C'est pour cela que nous travaillons étroitement avec la ministre et le ministère, afin de nous assurer que tous les Canadiens et que toutes les compagnies paient leur part d'impôt. Nous allons faire en sorte que ce soit fait maintenant et dans l'avenir.

[Traduction]

    Monsieur le Président, si le premier ministre est vraiment préoccupé par l'éventuel favoritisme, comme il vient de le dire, au sein de l'Agence du revenu du Canada, retiendra-t-il la la proposition du NPD de lancer une enquête sur le scandale impliquant KPMG?
    Les Canadiens s'opposent à ce qu'il y ait une loi pour les riches bien branchés et une autre pour tout le reste. Ce dernier exemple est tout aussi éloquent que celui de l'affaire Air Canada: « Vous avez enfreint la loi. Pas de problème. Les libéraux la modifieront pour vous rétroactivement si vous êtes riche et bien branché. »
    Les Canadiens veulent que la loi s'applique à tout le monde. Allons-nous faire enquête sur KPMG, oui ou non?
    Encore une fois, monsieur le Président, le NPD préfère jouer des jeux de procédure parlementaire au lieu de s'intéresser aux faits de l'affaire.
    Nous travaillons avec l'Agence du revenu du Canada. Nous veillons à ce que tous les Canadiens et toutes les sociétés paient leur juste part d'impôt.
    Nous savons que les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement fasse respecter les règles, et c'est exactement ce que nous comptons faire.

L'environnement

    Monsieur le Président, en parlant de procédure parlementaire, en comité aujourd'hui, les libéraux avaient l'occasion de voter avec nous pour obliger KPMG à communiquer les noms. Est-ce que les députés savent ce que les libéraux ont fait? Ils ont utilisé la procédure parlementaire pour l'éviter.
    Parlons des libéraux qui se désengagent de leurs responsabilités dans un autre domaine clé: les changements climatiques. Ils ont signé l'accord de Kyoto lorsqu'ils étaient au pouvoir la dernière fois puis ont obtenu des résultats parmi les pires au monde. Cette fois-ci, ils sont allés à Paris et ont dit que le Canada était de retour. Malheureusement, le Canada était de retour avec le plan des conservateurs.
    Pourquoi n'y a-t-il aucun plan de réduction des gaz à effet de serre au Canada? Les Canadiens veulent le savoir.
    Monsieur le Président, je n'étais pas en politique lorsque l'accord de Kyoto a été signé, mais le député d'en face était le ministre de l'Environnement de la province de Québec et est en partie responsable des échecs du passé.
    Aujourd'hui, toutefois, nous travaillons avec les provinces. Nous avons fait preuve d'engagement en matière de changements climatiques, au pays comme à l'étranger, et nous allons nous acquitter de nos responsabilités au nom des prochaines générations. Nous allons étudier les défis, mais aussi les possibilités, pour investir dans les technologies vertes et dans le véritable avenir de l'emploi au Canada.

Les finances

    Monsieur le Président, la semaine dernière, lorsque le ministre des Finances a été questionné au sujet de l'excédent constaté dans La revue financière, il a dit que son attention était ailleurs. Hier, pendant la période des questions à la Chambre des communes, le ministre s'est moqué du concept de la restriction des dépenses en déplorant que les conservateurs soient obsédés par cette histoire d'équilibre budgétaire. Le National Post a récemment mentionné que c'est probablement le premier excédent dont un ministre des finances ne veut pas parler.
    Voici donc ma question au ministre des Finances. Qu'est-ce qu'il y a de si effrayant à être responsable sur le plan financier?
    Monsieur le Président, notre priorité est d'investir dans la croissance de l'économie. Il y a six mois, les Canadiens ont choisi l'espoir plutôt que la peur. Ils ont choisi l'optimiste plutôt que le pessimisme. Ils ont choisi d'investir pour stimuler la croissance de l'économie au lieu d'équilibrer le budget au détriment des familles canadiennes.
    Tandis que les députés d'en face souhaitent faire comprendre aux Canadiens qu'ils ont pris la mauvaise décision, nous allons de l'avant en prenant les bonnes décisions. Nous avons choisi d'investir dans l'économie pour assurer un meilleur avenir aux Canadiens aujourd'hui et demain.
    Monsieur le Président, le ministre des Finances a aussi dit hier qu'il était convaincu que le Parti libéral prenait les mesures qui s'imposent, car elles assureront un avenir meilleur à ses enfants et à ses petits-enfants. Je suis heureuse pour eux, mais je m'inquiète pour les autres enfants du pays, qui ne pourront peut-être pas assumer les coûts élevés qu'entraîneront les emprunts du ministre. Le ministre vient peut-être de dire qu'il est à l'aise avec ses choix, mais, en réalité, il va dépenser sur le dos de nos enfants.
    Comment peut-on assurer un avenir meilleur à nos enfants en leur léguant une dette de plusieurs milliards de dollars?
(1430)
    Monsieur le Président, les députés d'en face souhaiteraient revenir à un passé qui était marqué par une faible croissance au pays. Quant à nous, nous souhaitons attirer l'attention sur les mesures que nous prenons aujourd'hui pour les enfants canadiens.
    Nous avons instauré l'Allocation canadienne pour enfants, qui aidera 9 familles sur 10 ayant des enfants. Cette mesure va les aider énormément; en moyenne, elles vont recevoir 2 300 $ par année.
    Nous allons adopter des mesures pour venir en aide aux Autochtones. Nous allons mettre en place des initiatives en matière d'éducation, assorties d'une somme de 3,5 milliards de dollars sur cinq ans, afin d'améliorer la situation des enfants autochtones au pays.
    Le gouvernement que nous formons est progressiste et il améliorera concrètement la qualité de vie des enfants d'aujourd'hui afin qu'ils aient un avenir meilleur.
    Monsieur le Président, la longue liste des promesses libérales comprend maintenant la transparence, grâce au ministre des Finances.
    Le directeur parlementaire du budget a sévèrement condamné le gouvernement pour le manque de transparence du budget. Le ministre refuse de reconnaître que le gouvernement conservateur a laissé un excédent. Nous savons que les libéraux ont ajouté autant de nouvelles dépenses que possible dans le budget de la dernière année. Comme le ministre souhaite vraiment faire preuve de transparence, je l'invite à dire aux Canadiens combien coûtent les folles dépenses annoncées en mars.
    Monsieur le Président, le député d'en face a droit à son opinion. J'ai eu l'occasion de sillonner le pays et d'entendre le point de vue des Canadiens. Ils semblent bien comprendre nos propositions budgétaires, et ils voient d'un très bon oeil les initiatives qui visent à aider les Canadiens aujourd'hui et dans l'avenir.
    J'ai également pris connaissance de l'opinion internationale. Le Financial Times affirme que le gouvernement du Canada donne une lueur d'espoir. Quant au Wall Street Journal, il déclare que le Canada prend les mesures qui s'imposent, conformément aux recommandations du FMI, pour faire croître l'économie. Nous améliorerons la situation des Canadiens aujourd'hui et dans l'avenir grâce à des mesures fiscales qui stimuleront la croissance économique à long terme.

La fiscalité

    Monsieur le Président, nous savons que les libéraux adorent parler de faits, alors jetons un coup d'oeil à certains faits. Leur décision d'abandonner les réductions d'impôt pour les petites entreprises coûtera à l'économie 2,2 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années. Je le répète: 2,2 milliards de dollars. Plus nous en apprenons sur le prétendu engagement des libéraux à l'égard des petites entreprises, plus nous nous rendons compte qu'il n'y a aucun engagement.
    Quand les libéraux feront-ils passer le taux d'imposition à 9 %, comme ils l'ont promis?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Nous savons que le taux d'imposition des petites entreprises est là pour aider celles-ci à croître et à créer des emplois, mais nous devons faire en sorte que le régime fiscal des petites entreprises soit équitable et qu'il soit utilisé à bon escient. Beaucoup trop de gens utilisent ce taux comme échappatoire pour éviter de payer de l'impôt sur le revenu des particuliers, impôt que les autres Canadiens paient chaque année. Cette échappatoire coûte aux contribuables plus de 500 millions de dollars par année. Nous devons régler le problème afin que ce taux d'imposition soit utilisé uniquement par les propriétaires de petites entreprises qui créent des emplois pour nos collectivités.

[Français]

Les finances

    Monsieur le Président, hier, le ministre des Finances y est allé d'une déclaration pour le moins surprenante, et je cite: « De toute évidence, les députés d'en face [ce sont nous autres] sont encore obsédés par cette histoire d'équilibre budgétaire. »
    Je peux assurer cette Chambre que, oui, nous sommes et nous serons toujours obsédés par l'équilibre budgétaire. C'est cela être responsable. Ce qui est sûr aussi c'est que ce ministre-là est obsédé par des déficits compulsifs, les uns après les autres.
    Le ministre peut-il se corriger et enfin reconnaître que c'est une erreur pour l'avenir du Canada d'avoir des déficits de cet ordre?
    Monsieur le Président, notre priorité est de faire des investissements. Il y a six mois, les Canadiens ont choisi l'optimisme, pas le pessimisme. Les Canadiens ont choisi de faire des investissements pour faire croître l'économie, pas d'avoir un budget équilibré à tout prix.
    Donc, nous allons faire des choix qui sont bons pour les Canadiens, qui vont faire croître l'économie canadienne, maintenant et dans l'avenir.
    Monsieur le Président, l'approche du gouvernement est une approche irresponsable. C'est clair, le ministre des Finances a perdu complètement le contrôle des dépenses publiques. Un déficit de 30 milliards de dollars et d'autres montants qui s'en viennent, c'est irresponsable pour la société actuelle, mais surtout pour nos enfants et nos petits-enfants qui vont payer pour les excès que le gouvernement fait actuellement.
    Quand le gouvernement va-t-il enfin prendre contact avec la réalité et arrêter d'endetter nos petits-enfants?
    Monsieur le Président, je veux parler des enfants au Canada. Avec nos mesures, ils seront dans une bien meilleure situation, maintenant et à l'avenir. Nous avons introduit l'Allocation canadienne pour enfants qui va aider 9 familles avec enfants sur 10, en leur accordant 2 300 $ de plus chaque année. L'avenir sera meilleur pour les enfants d'aujourd'hui parce que nous allons faire des investissements maintenant, pour eux.
(1435)

[Traduction]

La défense nationale

    Monsieur le Président, aujourd'hui, le vérificateur général a déclaré que le Canada traite ses réservistes comme des soldats de seconde classe. Ils sont mal financés, mal équipés et mal entraînés. En fait, nos réservistes ont été envoyés au combat sans avoir d'abord reçu l'entraînement adéquat pour les missions internationales. C'est tout à fait inacceptable.
    Le ministre prendra-t-il aujourd'hui l'engagement de donner aux réservistes l'entraînement dont ils ont besoin, de leur fournir l'appui auquel ils ont droit et de leur accorder le respect qu'ils méritent?
    Monsieur le Président, je remercie le député de se préoccuper de cette question. En fait, j'étais l'un des réservistes qui ont été déployés et qui ont reçu l'entraînement.
    Je peux assurer aux députés que nous acceptons toutes les recommandations du vérificateur général. Je voudrais aussi dire que les Forces armées canadiennes ont déjà commencé à améliorer l'entraînement lié aux opérations nationales et internationales, notamment en ce qui concerne le recrutement et le maintien de l'effectif de notre Force de réserve afin de jouer un rôle essentiel dans les opérations à l'échelle nationale et internationale.

[Français]

Les anciens combattants

    Monsieur le Président, le vérificateur général montre aujourd'hui que le gouvernement n'a pas mis en place les mesures adéquates pour aider les anciens combattants qui souffrent de stress post-traumatique.
    Le ministère ne gère pas le programme de médicaments en tenant compte de l'impact sur les vétérans. Pour une fois, les libéraux ne peuvent pas blâmer les conservateurs, car le budget libéral ne comportait pas un sou pour les services en santé mentale.
    Quand les libéraux vont-ils appuyer nos anciens combattants et investir dans leur santé mentale?

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous acceptons toutes les recommandations du vérificateur général et entendons y donner suite dans le cadre des programmes que nous offrons.
    On me recommande, dans ma lettre de mandat, d'axer mes efforts sur la prévention du suicide, le traitement du stress post-traumatique et les centres de santé mentale. Voilà précisément ce que nous ferons. Avec transparence et efficacité, nous offrirons des soins aux anciens combattants pour améliorer leur sort et aider leur famille.

Les dépenses ministérielles

    Monsieur le Président, la ministre du Commerce international prétend que son séjour complaisant en Californie avait pour but de défendre les intérêts d'entreprises canadiennes. Les courriels obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information brossent toutefois un tableau bien différent.
    Son personnel a fait des pieds et des mains pour mettre sur pied un programme et a prié les journalistes du LA Times de recevoir la ministre en entrevue. L'agent principal en politique étrangère et diplomatie Dan Pasquini a écrit dans un courriel qu'on venait de confier la responsabilité de ce séjour à son équipe.
    Pourquoi la ministre continue-t-elle de prétendre que ce séjour avait pour but de défendre les intérêts des entreprises canadiennes alors qu'il servait avant tout à flatter son amour-propre?
    Monsieur le Président, les conservateurs cherchent encore à inventer un scandale là où il n'y en a pas. Mon rôle consiste à défendre les intérêts du Canada aux États-Unis.
    En fait, pas plus tard qu'hier, j'étais à Washington à l'occasion d'une rencontre trilatérale sur le commerce avec mes homologues américain et mexicain. Il s'agit de mon sixième séjour aux États-Unis en six mois. Les Américains me disent que le Canada est enfin de retour à la table de négociations après une décennie d'absence.
    Je compte retourner aux États-Unis et faire ce que les conservateurs n'ont pas fait, c'est-à-dire favoriser le commerce, créer des emplois et défendre les intérêts de la classe moyenne.
    Monsieur le Président, dans un tête-à-tête avec le LA Times, le voyage de rêve de la ministre en Californie a été qualifié de « courte halte ».
    Le consul général du Canada à Los Angeles, James Villeneuve, a fait remarquer que cela ne semblait pas très clair.
    Le directeur général des communications d'Affaires mondiales Canada ne comprenait pas trop, lui non plus, et demandait dans des courriels ce que la ministre faisait à Los Angeles à part sa participation à l'émission de télévision de Bill Maher.
    Ce voyage était de toute évidence un voyage personnel organisé autour de son passage à une émission de télévision.
    Nous savons que les libéraux ont droit à ce qui leur est dû, mais les contribuables n'ont-ils pas droit à une réponse honnête au sujet du vrai but de la visite de la ministre à Los Angeles?
    Monsieur le Président, les conservateurs continuent de chercher à créer un scandale alors qu'il n'y en a pas. Mes apparitions dans les médias faisaient partie de ma visite officielle, tout comme ma participation à six tables rondes. C'est mon travail de faire la promotion du Canada dans le monde.
    Néanmoins, comme la question semble intéresser au plus haut point les députés d'en face, je leur rappellerai que leur propre chef, l'ex-premier ministre, a dépensé 50 000 $ des fonds publics pour se montrer dans les médias américains. Nous n'avons pas besoin d'aller jusque-là: on nous invite.
(1440)
    Monsieur le Président, le fond de l'histoire, c'est que la ministre du Commerce international devrait être franche avec les Canadiens. Elle déclare fièrement qu'elle était en Californie pour promouvoir les entreprises canadiennes, mais ses propres fonctionnaires n'ont été mis au courant du voyage que deux jours avant.
    La ministre dit qu'elle a rencontré le lieutenant-gouverneur de la Californie et un sénateur américain, mais ne mentionne pas que c'était à l'émission de fin de soirée de Bill Maher.
    Quand la ministre dira-t-elle franchement aux Canadiens qu'elle est allée à Hollywood pour satisfaire sa vanité personnelle, aux frais des contribuables?
    Monsieur le Président, contrairement aux conservateurs, nous savons que c'est le travail du gouvernement de promouvoir le Canada dans le monde.
    Lorsque je voyage pour promouvoir le Canada, je suis fière de parler dans les médias internationaux. Hier seulement, j'ai donné une interview à POLITICO à Washington.
    J'aimerais présenter une liste de quelques autres interviews que j'ai données comme ministre. J'ai donné une interview à MSNBC, au Wall Street Journal, au Washington Post, au LA Times et au Financial Times. J'ai donné trois interviews à la BBC. J'ai parlé à EU Trade Insights. J'ai parlé à La Libre, à Deutsche Welle — la télévision allemande —, à Bloomberg TV; au Handelsblatt...
    La députée d'Elgin—Middlesex—London a la parole.
    Monsieur le Président, il est clair que le personnel de la ministre a dû faire des pieds et des mains, à la dernière minute, afin de trouver des choses à faire en Californie pour justifier qu'elle donne une entrevue à une émission de fin de soirée de HBO.
    Puisque le personnel même de la ministre n'a été informé de sa visite à Los Angeles que deux jours à l'avance, comment les Canadiens sont-ils censés croire que la ministre s'y rendait à des fins officielles?
    La ministre du Commerce international a utilisé l'argent des contribuables pour servir ses intérêts personnels et non les intérêts des entreprises canadiennes. Quand remboursera-t-elle l'argent qu'elle a dépensé lors de ce voyage qui n'a servi qu'à satisfaire sa vanité?
    Monsieur le Président, les conservateurs tentent encore de créer un scandale alors qu'il n'y en a pas.
    Je vais faire part à la Chambre de quelques détails concernant les réunions d'affaires auxquelles j'ai participé en Californie. J'ai rencontré notamment James Haney, vice-président principal et directeur général de la banque City National, dont RBC a récemment fait l'acquisition; Greg Foster, chef de la direction d'IMAX; des représentants de Creative BC et de Trade and Invest BC; John Chiang, trésorier de la Californie; et Jeff Gorell, adjoint au maire.
    J'ai également assisté à une réception avec les Amis de la Colombie-Britannique, à une réunion avec des gens d'affaires de Los Angeles...
    Le député de Vancouver Kingsway a la parole.

La santé

    Monsieur le Président, un principe simple se trouve au coeur de notre système public de santé: personne ne devrait avoir à payer de sa poche pour recevoir des services de santé. Pourtant, des patients sont obligés, partout au pays, de payer des frais supplémentaires pour obtenir des services médicaux, et le gouvernement du Canada ne fait rien pour régler ce problème.
    Certains Canadiens sont tellement excédés par l'inaction des libéraux qu'ils ont intenté aujourd'hui une poursuite contre le gouvernement fédéral.
    Pourquoi la ministre ne fait-elle pas son travail? Pourquoi ne fait-elle pas respecter la Loi canadienne sur la santé et ne prend-elle pas immédiatement des mesures pour mettre fin à la tarification des services?
    Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je vois au respect de la Loi canadienne sur la santé, de même que notre gouvernement.
    Le gouvernement joue son rôle de chef de file à l'échelle fédérale dans le dossier des services de santé. Nous veillons à l'application de la Loi canadienne sur la santé, qui repose sur plusieurs principes, y compris l'accessibilité, c'est-à-dire que les Canadiens doivent toujours avoir accès aux services de santé selon leurs besoins, et non selon leur capacité à payer.
    J'oeuvrerai de concert avec les provinces et les territoires pour que les Canadiens jouissent toujours de cet accès.

[Français]

    Monsieur le Président, la facturation des frais accessoires en santé est un problème qui persiste depuis des années au Québec, et non, le gouvernement, ne fait rien pour y mettre fin.
     Maintenant, une vaste coalition de groupes, comprenant la FADOQ, l'Association médicale du Québec et la FIQ, doit poursuivre le gouvernement du Canada pour le forcer à appliquer la Loi canadienne sur la santé.
    La ministre va-t-elle jouer son rôle, faire respecter la loi et enfin mettre fin aux frais accessoires?
    Monsieur le Président, nous appuyons entièrement les principes de la Loi canadienne sur la santé, qui vise à ce que tous les Canadiens et Canadiennes aient un accès raisonnable à des services médicaux et hospitaliers médicalement nécessaires en fonction de leurs besoins et non de leur capacité à payer.
    Je suis engagée à travailler avec nos partenaires pour renforcer notre système de santé public et universel, tout en maintenant les principes de la Loi canadienne sur la santé.
(1445)

L'agriculture et l'agroalimentaire

    Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, et elle porte sur l'agenda du comité. Tous les députés de la Chambre savent que l'industrie laitière est un important moteur de l'économie canadienne.
     Le président du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire peut-il donc informer la Chambre de l'agenda du comité, en particulier en ce qui a trait au dossier du lait diafiltré?
    Monsieur le Président, je suis heureux d'informer mon collègue de Brome—Missisquoi que j'ai reçu un avis de motion de la part de la députée de Fundy Royal demandant au comité d'adopter un rapport qui reconnaît le soutien du gouvernement envers l'industrie laitière, qui reconnaît les impacts de l'importation du lait diaflitré et qui demande au gouvernement de rencontrer les représentants de l'industrie laitière au cours des 30 prochains jours, afin de trouver des solutions durables pour moderniser l'industrie.

[Traduction]

Les dépenses ministérielles

    Monsieur le Président, nous savons tous que la ministre du Commerce international s'est rendue à Los Angeles uniquement dans le but de passer à la télévision.
    Hier, lorsque le leader du gouvernement à la Chambre des communes a essayé de défendre le voyage aussi imprévu que futile de la ministre en Californie, il a déclaré ceci: « La ministre a conclu des ententes importantes lors de son séjour là-bas ». Si tel est bien le cas, la ministre déposera-t-elle immédiatement ces ententes importantes, qui doivent bien sûr être autre chose que des reçus de carte de crédit et la décharge qu'elle a signée pour participer à l'émission de Bill Maher?
    Monsieur le Président, les conservateurs essaient encore une fois de susciter une polémique imaginaire. J'ai déjà fait la liste des réunions d'affaires que j'ai tenues en Californie. Cependant, contrairement aux conservateurs, qui n'aiment pas les médias, nous savons que c'est notre travail de parler aux médias, au pays et à l'étranger.
    Je tiens à souligner que j'étais en compagnie d'importants partenaires du Canada sur la scène médiatique en Californie, j'ai nommé le sénateur Angus King, du Maine, et le lieutenant-gouverneur de la Californie, Gavin Newsom.
    Monsieur le Président, puisqu'ils ont tous participé à la même tribune télévisée, nous ne les considérerons pas à titre individuel.
    Soit la ministre a signé des accords importants, soit elle n'en a pas signé. Si elle en a signé, elle devrait les déposer immédiatement pour que nous puissions tous les consulter.
    Nous savons que les fonctionnaires de son ministère n'étaient au courant de rien, car ils ont produit plus de 500 pages de courriels en deux jours pour essayer de déterminer ce qu'elle faisait là-bas et pourquoi sa présence à cet endroit coûterait 20 000 $.
    Le leader du gouvernement à la Chambre va-t-il présenter des excuses pour avoir induit la Chambre en erreur hier si la ministre n'a pas signé d'ententes?
    Monsieur le Président, nous n'allons pas présenter d'excuses parce que la ministre du Commerce international voyage pour promouvoir les intérêts commerciaux du Canada aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Nous sommes fiers du travail qu'elle accomplit pour créer de l'emploi pour les Canadiens et veiller à ce que les entreprises canadiennes puissent soutenir la concurrence sur la scène mondiale. Elle continuera de voyager.

[Français]

Le commerce international

    Monsieur le Président, le leader du gouvernement à la Chambre des communes affirmait hier, à la Chambre, que la ministre du Commerce international avait conclu des ententes importantes lors de sa visite à Los Angeles.
    Serait-il possible de savoir lesquelles?
    Monsieur le Président, encore une fois, les conservateurs cherchent une histoire là où il n'y en a pas. C'est mon rôle de promouvoir le Canada à l'étranger.
     Vu que les députés de l'opposition sont si intéressés par cette question, je vais répéter en français qu'ils devraient se rappeler que c'est leur ancien chef qui a puisé 50 000 $ à même les fonds publics pour se payer une consultante pour trouver des entrevues américaines.

[Traduction]

    Nous n'avons pas besoin de payer des valets républicains pour qu'ils organisent des entrevues avec les médias...
    À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Lévis—Lotbinière a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, le gouvernement conservateur a conclu l'accord du Partenariat transpacifique, et nous sommes persuadés qu'un tel accord commercial permettra à plusieurs entreprises des régions du Québec de bénéficier des retombées économiques du PTP.
    À cet effet, le présent gouvernement peut-il rassurer les régions du Québec et confirmer qu'il gardera dans leur intégralité l'ensemble des mesures significatives pour le Québec?
(1450)
    Monsieur le Président, notre travail sur l'AECG ne laisse aucun doute quant à notre engagement envers le libre-échange.
    Toutefois, nous avons pris l'engagement de consulter les Canadiens sur le PTP. Notre gouvernement a fait des consultations sur cet accord à plus de 250 occasions différentes. À ce jour, aucun des pays membres n'a pas ratifié le PTP.
    Nous savons que les conservateurs ne croient pas au débat public, mais nous, oui.

[Traduction]

La condition féminine

    Monsieur le Président, en une seule journée, trois Canadiens sur quatre qui demandent de l'aide auprès d'un refuge pour victimes de violence familiale se la voient refuser. De nombreuses autres femmes qui fuient des situations de violence n'ont même pas accès à un refuge parce qu'il n'y en a tout simplement pas dans leur région. Le budget libéral n'assure pas un financement suffisant à cet effet et il ne prévoit aucune enveloppe pour un vaste plan d'action national.
    Nous devons régler le problème à la source. Le gouvernement entend-il adopter un plan d'action national et le financer adéquatement afin de mettre enfin un terme à la violence faite aux femmes?
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue d'en face de ses efforts inébranlables dans la lutte contre la violence fondée sur le sexe.
    Comme le sait la députée, nous prévoyons en effet créer une vaste stratégie fédérale pour mettre fin à la violence faite aux femmes. Qui plus est, nous sommes très fiers des investissements que nous avons faits en matière de refuges, de maisons de transition et de logements abordables. Ils auront une grande incidence sur les femmes et leur permettront de mener une vie sûre et productive. Les effets se feront sentir pendant des générations à venir.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, il y a six ans seulement, en 2010, la Chambre a appuyé à l'unanimité une motion du NPD qui réclamait la participation du Canada à la négociation d'une convention internationale sur les armes nucléaires et le lancement d'une initiative diplomatique canadienne de lutte contre la prolifération nucléaire.
    Le premier ministre a promis publiquement que le Canada reprendrait son rôle aux Nations unies et qu'il chercherait à obtenir un siège au Conseil de sécurité.
    Quels engagements, le cas échéant, le Canada a-t-il pris hier lorsque le ministre des Affaires mondiales et le premier ministre se sont réunis avec la haute-représentante pour les affaires de désarmement des Nations unies?
    Monsieur le Président, en effet, le Canada souhaite participer à tous les volets du processus de désarmement. C'est ce que j'ai dit à la haute-représentante.
    Notre approche vise à mettre l'accent sur le traité interdisant la production de matières fissiles pour les armes nucléaires. C'est la meilleure façon pour le Canada d'aller de l'avant et de réaliser des progrès aux côtés de ses alliés. Voilà sur quoi nous mettrons l'accent, et nous comptons sur la participation de tous les députés à l'égard de cet important dossier.

L'Iran

    Monsieur le Président, la vérité éclate enfin au grand jour. On a appris aujourd'hui que les pourparlers entre le gouvernement libéral et l'Iran pour rétablir les liens diplomatiques sont bien amorcés.
    Malgré les hauts cris que le ministre a jetés hier à la Chambre pour nous convaincre que l'Iran allait rester sur la liste des États qui soutiennent le terrorisme, il ne fait aucun doute que le gouvernement du Canada fait tout en son possible pour normaliser ses relations avec Téhéran. Le gouvernement semble résolu à céder aux demandes odieuses de ce régime.
    Comment le gouvernement peut-il négocier avec un État qui soutient le terrorisme?
    Monsieur le Président, sous l'ancien gouvernement, le Canada était le seul à opposer un siège vide aux nombreuses nations dont il n'aimait pas le régime, ce qui n'était pas la bonne approche. Tous nos alliés nous demandent de mettre fin à cette pratique, et c'est ce que nous allons faire pour l'Iran.
    Afin de réaliser des progrès en matière de droits de la personne et d'assurer une meilleure protection de nos intérêts et de ceux de nos alliés, y compris Israël, le Canada va reprendre le dialogue avec l'Iran en ouvrant grand les yeux et en procédant par étape.
    Monsieur le Président, en février, le ministre des Affaires étrangères et la ministre du Commerce international ont annoncé que le Canada allait rétablir les échanges commerciaux avec l'Iran.
    Hier, le ministre nous a dit que les libéraux n'avaient aucune intention de rayer l'Iran de la liste des États qui soutiennent le terrorisme.
    Comment croit-il être en mesure de concilier ces deux positions diamétralement opposées? Peut-il nous donner une idée du moment où il pense être en mesure de s'asseoir pour parler affaires avec ses vis-à-vis iraniens qui soutiennent le terrorisme et se moquent des droits de la personne?
(1455)
    Monsieur le Président, tous les jours, semaine après semaine, l'Iran reçoit divers représentants gouvernementaux et du monde des d'affaires. Ces personnes défendent leurs intérêts nationaux en Iran en gardant l'oeil ouvert pour s'assurer que le programme nucléaire iranien ne sera pas utilisé à des fins militaires. Je crois que c'est la bonne approche. Nos alliés avaient raison de procéder de la sorte, et le Canada a l'intention de leur emboîter le pas.
    Monsieur le Président, la foi baha'ie a été fondée en Iran, mais les baha'is de ce pays doivent faire face à une grave persécution sous forme d'exécutions et de destruction de lieux sacrés.
    Nous sommes bien au fait de l'attitude belliqueuse de l'Iran, mais la répression envers la population iranienne et les efforts déployés expressément pour écraser la communauté baha'ie font également partie du bilan de ce gouvernement atroce et nous commandent d'agir.
    Après avoir éliminé le Bureau de la liberté de religion, il y a plus d'un mois, que fera le gouvernement pour les minorités religieuses et ethniques de l'Iran?
    Monsieur le Président, je partage l'inquiétude de mon collègue au sujet des atrocités dont il a parlé. Cependant, j'aimerais lui poser la question suivante. Comment le Canada peut-il apporter son aide s'il n'est pas sur le terrain? Comment le Canada peut-il offrir son soutien sans ambassade?
    À la fin des années 1970, n'était-il pas bon que le Canada ait une ambassade à Téhéran lorsqu'il a fallu aider les otages américains? Pouvons-nous tirer des leçons de notre histoire?

[Français]

Le développement international

    Monsieur le Président, la semaine dernière, nous avons appris qu'un hôpital syrien qui recevait un soutien de la part du Canada a été la cible d'une attaque à la bombe. Il est clair que de tels actes sont inacceptables et constituent un affront au droit qu'ont toutes les femmes et tous les hommes du monde.
    La ministre du Développement international peut-elle informer la Chambre de la réaction de notre gouvernement en ce qui a trait à cet événement odieux?
    Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord avec mon collègue. Cette attaque est totalement inacceptable, comme toutes celles qui visent les médecins, les travailleurs humanitaires et les femmes et les enfants qui sont là parce qu'ils ont besoin de soins.
    Notre gouvernement condamne fermement ces violations du droit humanitaire international. C'est pourquoi le ministre des Affaires étrangères et moi-même avons annoncé hier que le Canada coparrainait la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies sur la protection du personnel médical et des hôpitaux. Cette résolution a été approuvée à l'unanimité, ce matin, au Conseil de sécurité des Nations unies.

[Traduction]

L'agriculture et l'agroalimentaire

    Monsieur le Président, les éleveurs canadiens produisent un boeuf sain et de première qualité qui n'a pas son égal dans le monde. Certains groupes aux intérêts particuliers ont attaqué l'industrie canadienne au cours des dernières semaines et des derniers mois, et certains restaurants ont même cessé de servir du boeuf canadien.
    En tant que Canadien qui a grandi sur une ferme, je n'irai plus manger dans ces restaurants. Je me demande si le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, en face, fera de même et s'engagera à appuyer l'agriculture canadienne.
    Monsieur le Président, je puis assurer à mon collègue que le gouvernement appuie l'agriculture. La salubrité du boeuf canadien est certifiée selon un processus fondé sur la recherche scientifique. Nous produisons un boeuf sain et de première qualité qui n'a pas son égal dans le monde. C'est l'aliment le plus sain que nous puissions manger; les Canadiens sont donc en sécurité et devraient en consommer.

[Français]

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, alors que nous célébrons aujourd'hui la Journée mondiale de la liberté de la presse, Raif Badawi est toujours détenu par les autorités saoudiennes pour avoir critiqué leur régime.
     On oserait croire que notre gouvernement remuerait ciel et terre pour le faire libérer. Toutefois, en entrevue, le premier ministre a dit qu'il ne fallait pas pousser trop vite ou trop fort et qu'il fallait être discret. Il ne veut pas s'impliquer personnellement dans le dossier.
    On est rapide sur la gâchette pour approuver des transactions avec l'Arabie saoudite, mais quand vient le temps de faire respecter les droits de la personne, là, cela ne presse pas.
    Comment le gouvernement veut-il expliquer cela à la femme de M. Badawi, qui est à Ottawa aujourd'hui?
    Monsieur le Président, mon collègue demande si nous essayons d'utiliser tous les moyens en notre possession et si nous remuons ciel et terre pour aider M. Badawi et le faire libérer, lui qui n'a rien fait de mal.
    Oui, c'est ce que nous faisons. Dans l'objectif de réussir, mon collègue comprendra que je ne donnerai pas d'informations additionnelles.

[Traduction]

Le patrimoine canadien

    Monsieur le Président, bien des films canadiens ont été acclamés à l'échelle internationale au cours de la dernière année. Un bon exemple est le film financé par Téléfilm Canada, Room, récompensé aux prix Écrans canadiens et aux Oscar.
    Room est une coproduction audiovisuelle Canada-Irlande régie par un traité. Il met en vedette l'acteur canadien Jacob Tremblay et a été écrit par l'auteure canadienne d'origine irlandaise Emma Donoghue, qui vit maintenant à London, en Ontario, ville qui fait partie de ma circonscription.
(1500)

[Français]

    La ministre du Patrimoine canadien peut-elle expliquer ce que le gouvernement du Canada fait pour encourager le talent artistique sur la scène mondiale?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son importante question.

[Traduction]

    Nous croyons en l'importance de mettre le talent canadien en valeur dans le monde entier; voilà pourquoi nous appuyons l'industrie cinématographique. Un exemple de notre soutien est notre nouveau traité de coproduction avec l'Irlande, qui fera en sorte que nous puissions connaître des réussites semblables à l'avenir.

[Français]

    Notre budget de 2016 proposait des investissements historiques en matière de soutien à la culture, et voilà pourquoi nous allons poursuivre nos efforts afin de promouvoir notre culture ici et à l'étranger.

[Traduction]

Les relations intergouvernementales

    Monsieur le Président, grâce au soutien de la Canadian Constitution Foundation, M. Gerard Comeau a obtenu gain de cause devant les tribunaux, si bien que les Canadiens pourront traverser au Nouveau-Brunswick avec de la bière d'autres provinces.
    De nombreux constitutionnalistes affirment que cette affaire finira inévitablement par se retrouver devant la Cour suprême. Les autorités disent que les lois sur l'alcool sont toujours en vigueur malgré cette décision. Les consommateurs méritent d'avoir de la certitude, et le plus tôt sera le mieux. Le gouvernement a-t-il l'intention de porter l'affaire devant la Cour suprême?
    Monsieur le Président, c'est un développement très positif que nous avons observé en ce qui concerne l'alcool et son transfert d'une province à une autre. Voilà pourquoi je travaille très étroitement avec mes homologues provinciaux et territoriaux à un accord sur le commerce intérieur, accord exhaustif qui réduirait, voire éliminerait, les barrières et s'attacherait aux questions de conformité à la réglementation.
    L'idée est ici d'assurer notre croissance et de créer des occasions permettant aux entreprises et aux personnes de réussir au Canada. En conséquence, nous continuerons de négocier un accord sur le commerce intérieur pour régler cette question.

[Français]

L'industrie laitière

    Monsieur le Président, le Québec compte la moitié des fermes laitières au Canada. L'importation du lait diafiltré fait mal chez nous. Chaque semaine qui passe, on parle des pertes en milliers de dollars. C'est l'économie de nos régions qui est en péril. Eh bien, par solidarité avec nos producteurs, le député de Chicoutimi—Le Fjord s'est même versé un sac de lait en poudre sur la tête. Il faut le faire! Pourtant, à la Chambre, il n'y a pas un geste pour défendre nos producteurs et il n'y a rien pour régler leur problème. Qu'est-ce que ça va prendre pour que les élus du Québec qui sont au gouvernement commencent à représenter leurs concitoyens, le ok de Toronto?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je peux assurer à mon collègue que le gouvernement est favorable à la gestion de l'offre et qu'il est bien au fait des inquiétudes de l'industrie au sujet du lait diafiltré qui entre dans la fabrication du fromage.
    Nous tentons de trouver une solution réaliste qui fera l'affaire de tous les acteurs du secteur laitier du Canada. Je suis d'ailleurs très content que la députée de Fundy Royal ait donné avis aujourd'hui qu'elle proposera une motion autorisant le comité de l'agriculture à étudier diverses pistes de solution.
    Nous nous occupons de ce dossier.

[Français]

L'industrie aérospatiale

    Monsieur le Président, la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada que veut dénaturer le gouvernement, c'était une promesse faite au Québec en 1989. L'intention du législateur était claire: protéger les emplois à Montréal.
    Je le sais, parce que je siégeais au gouvernement lorsque cette loi a été adoptée. À l'époque, c'était le caucus québécois du gouvernement qui s'était battu pour qu'on protège notre industrie aéronautique.
    Quand les 40 députés libéraux du Québec de ce gouvernement vont-ils enfin se lever et défendre l'industrie aéronautique du Québec?
    Monsieur le Président, bien sûr, nous défendons l'industrie aéronautique au Québec et partout au Canada. Comme on le sait, la décision du gouvernement du Québec et du Manitoba de mettre fin à leurs litiges avec Air Canada nous a permis de moderniser cette loi. C'est un pas important dans la bonne direction. Cela va empêcher des litiges à l'avenir. De plus, cela va mettre Air Canada dans une position où elle peut être plus compétitive face à ses rivales.
    Je rappelle à mon collègue qu'il y a encore, pour le Québec, le Manitoba et l'Ontario, des obligations d'embaucher des employés d'Air Canada pour l'entretien.

[Traduction]

    Monsieur le Président, pendant la période des questions, le premier ministre a laissé entendre que c'était la faute du Québec si les libéraux fédéraux n'avaient pas respecté les engagements pris à Kyoto. J'aimerais avoir le contentement unanime de la Chambre pour déposer un document montrant que les émissions de gaz à effet de serre ont diminué chaque année au Québec pendant que j'étais ministre de l'Environnement et qu'elles ont augmenté...
    Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour déposer ce document?
    Des voix: Non.
    Le Président: Il n'y a pas consentement unanime.

Initiatives ministérielles

[Travaux des subsides]

(1505)

[Français]

Travaux des subsides

Motion de l'opposition — L'industrie laitière canadienne

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 avril, de la motion.
    Comme il est 15 h 5, conformément à l'ordre adopté le jeudi 21 avril 2016, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion de la députée de Berthier—Maskinongé relative aux travaux des subsides.
(1515)
    (La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)

(Vote no 45)

POUR

Députés

Aboultaif
Albas
Albrecht
Allison
Ambrose
Angus
Arnold
Ashton
Aubin
Barlow
Barsalou-Duval
Beaulieu
Benson
Bergen
Berthold
Blaikie
Blaney (North Island—Powell River)
Blaney (Bellechasse—Les Etchemins—Lévis)
Block
Boucher
Boudrias
Boulerice
Boutin-Sweet
Brassard
Brosseau
Brown
Calkins
Cannings
Caron
Carrie
Chong
Choquette
Christopherson
Clarke
Clement
Cooper
Cullen
Davies
Deltell
Diotte
Doherty
Donnelly
Dreeshen
Dubé
Duncan (Edmonton Strathcona)
Dusseault
Duvall
Eglinski
Falk
Fast
Finley
Fortin
Généreux
Genuis
Gill
Gladu
Godin
Gourde
Hardcastle
Harder
Hoback
Hughes
Jeneroux
Johns
Jolibois
Julian
Kelly
Kent
Kitchen
Kmiec
Kwan
Lake
Lauzon (Stormont—Dundas—South Glengarry)
Laverdière
Lebel
Leitch
Liepert
Lobb
Lukiwski
MacGregor
MacKenzie
Maguire
Malcolmson
Masse (Windsor West)
Mathyssen
May (Saanich—Gulf Islands)
McCauley (Edmonton West)
McColeman
McLeod (Kamloops—Thompson—Cariboo)
Miller (Bruce—Grey—Owen Sound)
Moore
Mulcair
Nantel
Nater
Nicholson
Nuttall
Obhrai
O'Toole
Pauzé
Plamondon
Poilievre
Quach
Raitt
Ramsey
Rankin
Rayes
Reid
Rempel
Richards
Ritz
Saganash
Sansoucy
Saroya
Scheer
Schmale
Shields
Shipley
Sopuck
Stanton
Ste-Marie
Stetski
Stewart
Strahl
Stubbs
Sweet
Thériault
Tilson
Trudel
Van Kesteren
Van Loan
Vecchio
Viersen
Wagantall
Warawa
Warkentin
Watts
Waugh
Webber
Weir
Wong
Yurdiga
Zimmer

Total: -- 142


CONTRE

Députés

Aldag
Alghabra
Alleslev
Amos
Anandasangaree
Arseneault
Arya
Ayoub
Badawey
Bagnell
Bains
Baylis
Beech
Bennett
Bibeau
Bittle
Blair
Boissonnault
Bossio
Bratina
Breton
Brison
Caesar-Chavannes
Carr
Casey (Cumberland—Colchester)
Casey (Charlottetown)
Champagne
Chan
Chen
Cormier
Cuzner
Dabrusin
Damoff
DeCourcey
Dhaliwal
Dhillon
Di Iorio
Dion
Drouin
Dubourg
Duclos
Duguid
Duncan (Etobicoke North)
Dzerowicz
Easter
Ehsassi
Ellis
Erskine-Smith
Eyking
Eyolfson
Fergus
Fillmore
Finnigan
Fonseca
Foote
Fragiskatos
Fraser (West Nova)
Fraser (Central Nova)
Freeland
Fry
Garneau
Goodale
Gould
Graham
Grewal
Hajdu
Hardie
Harvey
Hehr
Holland
Housefather
Hussen
Hutchings
Iacono
Joly
Jones
Jordan
Jowhari
Kang
Khalid
Lametti
Lamoureux
Lapointe
Lauzon (Argenteuil—La Petite-Nation)
LeBlanc
Lebouthillier
Lefebvre
Lemieux
Leslie
Levitt
Lightbound
Lockhart
Long
Longfield
Ludwig
MacAulay (Cardigan)
MacKinnon (Gatineau)
Maloney
Massé (Avignon—La Mitis—Matane—Matapédia)
May (Cambridge)
McCallum
McCrimmon
McDonald
McGuinty
McKay
McKenna
McKinnon (Coquitlam—Port Coquitlam)
McLeod (Northwest Territories)
Mendès
Mendicino
Mihychuk
Miller (Ville-Marie—Le Sud-Ouest—Île-des-Soeurs)
Monsef
Morneau
Morrissey
Murray
Nault
O'Connell
Oliphant
Oliver
O'Regan
Ouellette
Paradis
Peschisolido
Peterson
Petitpas Taylor
Philpott
Picard
Poissant
Qualtrough
Ratansi
Rioux
Robillard
Rodriguez
Rota
Rudd
Ruimy
Rusnak
Sahota
Saini
Sajjan
Samson
Sangha
Sarai
Scarpaleggia
Schiefke
Schulte
Serré
Sgro
Shanahan
Sheehan
Sidhu (Mission—Matsqui—Fraser Canyon)
Sidhu (Brampton South)
Sikand
Simms
Sohi
Sorbara
Tabbara
Tan
Tassi
Tootoo
Trudeau
Vandal
Vandenbeld
Vaughan
Virani
Whalen
Wilkinson
Wilson-Raybould
Young
Zahid

Total: -- 171


PAIRÉS

Aucun

    Je déclare la motion rejetée.

[Traduction]

Le Code criminel

[Initiatives ministérielles]

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, et de la motion portant que la question soit maintenant mise aux voix.
    À l'ordre, s'il vous plaît. J'invite les députés qui souhaitent discuter entre eux à aller derrière les tentures ou dans l'antichambre.
    J'informe la Chambre qu'en raison du vote par appel nominal différé, la période consacrée aux initiatives ministérielles sera prolongée de neuf minutes.
    Nous reprenons le débat. Le député de Scarborough—Agincourt a la parole.
    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-14, présenté dernièrement par le gouvernement en réponse à l'arrêt dans la cause Carter.
    Je tiens à affirmer, d'entrée de jeu, que j'appuierai ce projet de loi bien qu'il m'inspire certaines réserves. J'expliquerai ce qui motive mon appui et ce qu'une future législature pourrait faire pour aller encore plus loin.
    J'aborderai trois thèmes pendant les 10 minutes dont je dispose pour contribuer à cet important débat. L'enjeu dont nous discutons est parfois chargé d'émotion pour les parlementaires. J'expliquerai, grâce aux trois thèmes choisis, pourquoi j'appuie ce projet de loi à cette étape-ci.
    En premier lieu, je parlerai des aspects moraux soulevés par bon nombre de députés et de Canadiens. En deuxième lieu, je m'attarderai sur le devoir qui nous incombe, en tant que parlementaires, quand il est question de la constitutionnalité d'une mesure législative ou lorsque cette constitutionnalité est contestée devant les tribunaux. En troisième lieu, je profiterai des derniers instants de mon intervention pour exprimer quelques idées personnelles sur cette question qui me touche directement.
    Je tiens tout d’abord à remercier les nombreux électeurs de ma circonscription de Scarborough—Agincourt qui sont intervenus sur le sujet, qui est chargé d’émotions, et je dois dire que l’immense majorité des électeurs qui se sont adressés à moi s’opposent au projet de loi C-14. Ils le font surtout pour des raisons morales, car ils estiment que permettre l’aide médicale à mourir équivaut essentiellement à autoriser un meurtre.
    Lorsque j’en ai discuté avec eux, j’ai indiqué clairement que le Parlement se trouve dans l’obligation de donner suite à la décision concernant l’affaire Carter. Si le Parlement ne présente pas une quelconque législation en la matière, les dispositions de l’article 14 et de l’alinéa 241b) deviendront caduques à la date du 6 juin. Nous ne retrouverions essentiellement dans un vide juridique. Il est donc important que l’aide médicale à mourir soit régie par un cadre réglementaire.
    En passant de la question morale à celle de la responsabilité des parlementaires, je tiens à souligner que le volet moral est très important et qu’on en a d’ailleurs débattu à la Chambre, mais en tant que parlementaires, nous devons tout d’abord nous assurer que les lois que nous présentons passent le test constitutionnel. Lorsque la Cour suprême du Canada rend un verdict d’inconstitutionnalité pour des motifs de compétence ou des motifs liés à la Charte, le Parlement se doit de réagir. C’est ce que le gouvernement fait à mon avis en présentant le projet de loi C-14 dans un délai très serré. C’est peut-être la raison pour laquelle on a décidé de proposer une loi relativement restrictive.
    Je comprends donc pourquoi la ministre de la Justice et la ministre de la Santé, entre autres, ont apporté une contribution précieuse à cet égard en faisant en sorte que le projet de loi réponde aux critères constitutionnels fixés par la Cour suprême du Canada. À mon avis cependant, il ne va pas nécessairement assez loin.
    Je veux rendre hommage à tous les ministres, ainsi qu'au grand nombre d'autres intervenants et de Canadiens, qui ont contribué au débat. Je tiens à signaler que le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, coprésidé par le sénateur Ogilvie et le député de Don Valley-Ouest, a fait un travail incroyable. Je souhaite rendre hommage à tous les députés ayant participé aux travaux de ce comité.
(1520)
    Je désire souligner les contributions du comité externe fédéral, du Groupe consultatif provincial-territorial d’experts, de même que des nombreux intervenants et Canadiens ayant participé à ce débat très difficile.
    J'aimerais cependant signaler que bon nombre de mes concitoyens ont non seulement exprimé des inquiétudes au sujet du projet de loi mais que, dans certains cas, ils nous ont demandé d'envisager d'invoquer l'article 33 de la Charte, à savoir la disposition de dérogation, qui permet de déroger à la Charte. Je crois qu'il s'agit d'une façon plus subtile de dire qu'ils s'opposent au projet de loi et que les parlementaires devraient envisager de passer outre aux droits conférés par la Charte à certaines personnes en invoquant ou en utilisant la disposition de dérogation.
    Je dirais aux gens ayant exprimé une telle opinion que nous devons agir avec beaucoup de précaution, surtout quand nous risquons d'empiéter sur des droits qui sont protégés par la Charte canadienne des droits et libertés. Je soutiens respectueusement qu'il est important de respecter les critères énoncés à l'article 1 et qui ont été exposés dans l'arrêt Oakes, qui porte sur la disposition de dérogation se trouvant dans la Charte.
    D'après l'arrêt Oakes, il y a essentiellement trois critères à respecter par rapport à la disposition de dérogation législative, sans quoi il ne serait pas possible d'invoquer l'article 1. Je soutiens que les mêmes principes s'appliquent à l'exercice de la dérogation législative aux termes de l'article 33. En gros, les trois critères sont les suivants: il doit y avoir un lien rationnel, le moyen choisi doit être de nature à porter le moins possible atteinte au droit en question et il faut tenir compte des effets nuisibles et salutaires de toute restriction imposée en vertu de l'article 1.
    En général, les restrictions appliquées en vertu de l'article 1 ne satisfont pas au deuxième critère, c'est-à-dire que l'atteinte n'est pas aussi minimale que possible. C'est ainsi que ce critère prévu à l'article 1 a été utilisé dans l'arrêt dans la cause Carter, dans lequel la Cour suprême a conclu que l'interdiction absolue de l'aide médicale à mourir qui était proposée ne satisfaisait pas au critère de l'atteinte minimale. Après avoir examiné l'analyse du juge de première instance, la Cour a souscrit à sa position en ce qui concerne l'application de l'article 1.
    En ce qui concerne le recours à l'article 33, comme je l'ai déjà mentionné, le Parlement, la Chambre des communes, n'a jamais invoqué l'article 33 en vue de permettre une dérogation législative, et j'estime que nous aussi devrions nous montrer extrêmement prudents. Voilà le critère que les parlementaires doivent appliquer afin de déterminer s'il y a lieu de recourir à la dérogation législative.
    Comme je l'ai mentionné précédemment, le projet de loi a été présenté afin de nous permettre de respecter le délai très court accordé par la Cour suprême pour donner suite à sa déclaration d'invalidité des articles 14 et 241 du Code criminel du Canada. Nous avons jusqu'au 6 juin pour y arriver.
    Comme je l'ai indiqué, je compte appuyer le projet de loi, mais je tiens également à soulever quelques points supplémentaires que le Parlement devrait étudier à l'avenir. Ils sont énoncés très clairement dans le rapport du comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes.
    Premièrement, le projet de loi ne s'attaque pas à la question des directives anticipées. Je compatis au sort des Canadiens qui pourraient vouloir s'en prévaloir, notamment les personnes atteintes de maladies comme la SLA; même si elles se portent relativement bien dans un premier temps, elles seront incapables de donner leur consentement lorsqu'elles approcheront de la fin de leur vie. À mon avis, il y a lieu d'envisager la création d'un cadre réglementaire bien défini visant à permettre le consentement anticipé.
(1525)
    De plus...
    Je suis désolée, mais votre temps de parole est écoulé. Vous pourrez profiter de la période des questions et observations pour conclure.
    Madame la Présidente, si j'interviens à ce moment-ci, c'est en partie pour donner à mon collègue la chance de terminer son idée. Je crois qu'il avait presque terminé.
    Je me demandais en outre si, ce faisant, il pourrait également parler d'un point qu'il a soulevé en parlant des directives anticipées, le dernier sujet qu'il a abordé. Il a mentionné les personnes qui souffrent de SLA. Or, la jurisprudence de la Cour suprême en la matière est entièrement fondée sur des cas de personnes atteintes de SLA qui approchent de la mort de manière très atypique, c'est-à-dire que, habituellement, leurs facultés intellectuelles sont complètement intactes alors que leur corps ne répond plus du tout.
    Selon moi, les directives anticipées visent principalement la situation contraire, où le corps de la personne fonctionne bien, mais où les facultés intellectuelles ne sont plus là, l'exemple le plus évident étant les personnes atteintes d'Alzheimer ou d'une autre forme de démence.
    Si le député pouvait parler de cela tout en terminant son idée, je lui en serais reconnaissant. Quoi qu'il en soit, j'aimerais vraiment entendre le reste de ce qu'il a à dire.
(1530)
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa générosité.
    Je voulais simplement parler de la question des mineurs matures, et dire que cela me pose problème et que je me demande si les mesures de sauvegarde sont appropriées. C'est un autre point qui me préoccupe.
    Revenons à la question qu'a posée mon collègue au sujet de la SLA ou d'autres problèmes de santé qui n'affectent pas le corps, mais plutôt l'esprit et peuvent empêcher une personne d'exprimer son consentement. Une fois de plus, je crois que la solution réside dans le cadre réglementaire associé au consentement anticipé.
    De toute évidence, une personne qui sait qu'elle perdra ses facultés intellectuelles à un certain point devrait exprimer son souhait très clairement et sans réserve pour respecter le cadre établi, et deux médecins devraient confirmer qu'un consentement exprès a été donné. Ce consentement serait associé à des directives claires et à une situation précise dans laquelle la personne souhaiterait qu'un médecin l'aide à mourir.
    À mon avis, la mise en place d'un tel cadre permettrait de répondre aux préoccupations du député.
    Madame la Présidente, le député de Scarborough—Agincourt a fait un discours très pondéré sur la question.
     J'ai la chance de savoir que la plupart des électeurs de ma circonscription appuient ce projet de loi parce qu'ils attendent depuis longtemps qu'on fasse preuve de compassion en autorisant l'aide médicale à mourir. Je tiens à féliciter mon collègue de voter en faveur de ce projet de loi, alors qu'il sait que les électeurs de sa circonscription sont majoritairement contre.
    J'aimerais donc lui donner un peu plus de temps afin qu'il puisse nous expliquer ce qu'il a l'intention de leur dire pour les convaincre qu'il agit ainsi parce que la Charte des droits et libertés l'exige.
    Madame la Présidente, je voudrais présenter mon dernier argument, qui est personnel.
    Je dois me prononcer non seulement en qualité de parlementaire, mais aussi à titre de député qui a appris récemment que son cancer était revenu. Il se peut donc, selon l'évolution du traitement, que je décide un jour ou l'autre de me prévaloir de cette option. Ce n'est pas quelque chose que j'aimerais envisager, ce n'est pas un choix que je j'aimerais faire, mais c'est une réalité à laquelle je devrai peut-être faire face.
     Nous devons avoir une conversation franche avec les électeurs de notre circonscription. En fait, je félicite mon collègue de Victoria, qui a proposé de faire avec moi une conférence dans ma circonscription, pour expliquer les conséquences pratiques de ce projet de loi. Parallèlement, nous avons besoin de savoir quelles sont les objections des Canadiens.
     Au final, je tiens à dire que lorsqu'il n'y a pas de consensus sociétal sur une question en particulier, nous devons avant tout nous assurer que le projet de loi que nous voulons adopter est constitutionnel et qu'il n'empiète pas sur les droits des Canadiens.

[Français]

    Madame la Présidente, avant de prendre part au débat en deuxième lecture sur le projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir, je désire dédier toutes mes bonnes pensées aux personnes confrontées au choix douloureux de fin de vie et à leurs proches.
    Tous reconnaissent que l'aide médicale à mourir est une question complexe, délicate et infiniment personnelle. Depuis que la Cour suprême a rendu sa décision dans l'affaire Carter l'année dernière, les Canadiens et les Canadiennes ont pris part à la discussion d'un bout à l'autre du pays. La question continue aussi de faire l'objet de débats et de réflexions approfondies dans le monde entier.
     Je veux faire part à mes collègues de quelques observations sur ce qui se fait ailleurs dans le monde. Presque partout, enlever la vie de façon délibérée ou aider quelqu'un à mettre fin à ses jours constituent des crimes graves punissables par de lourdes peines. Comme bon nombre le savent, le Canada n'est pas le seul à légiférer pour autoriser l'aide médicale à mourir.
    L'Oregon, Washington, le Vermont et la Californie sont des exemples près de nous. Un peu plus loin, la Colombie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg disposent de régimes législatifs autorisant une forme ou une autre d'aide médicale à mourir. À ces endroits, les règles se ressemblent en ce qui concerne les mesures de sauvegarde, le contrôle et les rapports, qui figurent toutes dans le projet de loi C-14.
    Nommément, les demandes d'aide médicale à mourir doivent être présentées volontairement et par écrit par le patient et, dans bien des cas, en présence de témoins indépendants. Un deuxième avis d'un médecin indépendant doit être sollicité et un certain délai doit s'écouler entre le jour de la présentation de la demande écrite et le jour où l'aide médicale à mourir est fournie.
    Quant à elle, la Colombie dispose d'un processus d'approbation unique pour les demandes d'aide médicale à mourir. En effet, dans chaque hôpital, des comités interdisciplinaires évaluent des demandes et appuient les patients et leur famille tout au long du processus.
    Presque tous les régimes examinés comportent des systèmes de contrôle obligatoires dans le cadre desquels des comités indépendants recueillent des données pour assurer un suivi de la situation. Des rapports publics périodiques sur l'aide médicale à mourir sont ainsi publiés.
    Contrairement aux méthodes de sauvegarde et de contrôle relativement uniformes prévues dans les diverses lois, il existe des différences quant à la forme de l'aide médicale à mourir autorisée et aux circonstances médicales dans lesquelles l'aide médicale à mourir est autorisée. Les différences en matière d'admissibilité à l'aide médicale à mourir, de même que la façon dont cette aide peut être fournie, s'inscrivent dans un continuum.
     D'un côté, on retrouve les quatre États américains qui ont édicté des lois et que j'ai mentionnés: l'Oregon en 1997, Washington en 2008, le Vermont en 2013 et, plus récemment, la Californie en 2015. Dans ces États, une personne mentalement capable âgée d'au moins 18 ans peut obtenir l'aide d'un médecin pour mourir, pourvu que sa demande soit volontaire et que cette personne soit atteinte d'une maladie terminale, c'est-à-dire une maladie incurable et irréversible médicalement confirmée, et qui, de l'avis raisonnable d'un médecin, entraînera la mort dans moins de six mois.
    Dans les États américains, seul un médecin peut prescrire une substance que le patient administre lui-même pour mettre fin à ses jours au moment de son choix. C'est ce qu'on appelle communément le suicide assisté par un médecin. L'euthanasie volontaire, où le médecin administre une substance causant la mort du patient, est expressément interdite. On ne peut pas non plus y présenter une demande anticipée.
    En Colombie, une résolution ministérielle a été élaborée en réponse à deux décisions de sa cour constitutionnelle. Elle contient des critères d'admissibilité semblables à ceux des États américains.
(1535)
    Elle limite l'admissibilité aux adultes atteints d'une maladie incurable, qui est définie comme étant une maladie grave, progressive et irréversible, ou une pathologie qui entraînera la mort à plus ou moins brève échéance. Elle exige que le pronostic de la personne soit de six mois et que le décès se produise à brève échéance. Contrairement aux États américains, la Colombie n'autorise que l'euthanasie. Un médecin doit administrer la substance qui causera la mort du patient.
    À l'autre extrême de ce continuum, on retrouve la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. Dans ces trois pays, les patients peuvent avoir accès à une aide médicale à mourir s'ils ressentent des souffrances physiques ou psychologiques intolérables ou insupportables, occasionnées par une grave maladie incurable, et s'il n'y a aucune possibilité d'amélioration. Il n'est pas nécessaire que les patients admissibles soient mourants ou qu'ils soient atteints d'une maladie mettant leur vie en danger. Le suicide assisté par un médecin et l'euthanasie volontaire sont donc autorisés dans ces pays.
    Alors que l'aide médicale à mourir n'est offerte qu'aux adultes au Luxembourg, des mineurs aussi jeunes que 12 ans peuvent demander l'aide médicale à mourir, avec le consentement de leurs parents, aux Pays-Bas. En Belgique, les adultes et les mineurs émancipés peuvent demander l'aide médicale à mourir dans des circonstances similaires. En 2014, la Belgique a élargi l'admissibilité pour inclure des enfants de tout âge, mais seulement si leur décès est susceptible de survenir à court terme et s'il s'agit d'une souffrance physique.
    Les expériences et les leçons tirées des pays du Benelux ont été examinées de près. Par exemple, aux Pays-Bas, la loi autorise des demandes pour des patients qui n'ont plus la capacité d'exprimer leurs souhaits. Par contre, la recherche porte à croire que les médecins ne sont généralement pas prêts à pratiquer l'euthanasie sur de tels patients.
    Des réflexions ont également lieu sur l'expérience des pays du Benelux en ce qui a trait aux patients qui éprouvent des souffrances insupportables découlant uniquement d'une maladie mentale. Cette question demeure très controversée. Les données montrent une tendance à la hausse du pourcentage de personnes qui ont recours à l'euthanasie pour le seul motif de la maladie mentale. Par contre, des experts commencent à exprimer leurs inquiétudes quant au fait que l'aide médicale à mourir dans un tel contexte est de plus en plus banalisée. Par exemple, en Belgique, des personnes ont été euthanasiées en raison de souffrances insupportables découlant de situations telles que la dépression, l'anorexie, la cécité, la crainte d'une déficience ou d'une souffrance ultérieure, ainsi que la peine engendrée par la perte d'un être cher.
    Beaucoup craignent qu'une accessibilité aussi large quant à l'aide médicale à mourir puisse présenter des risques réels pour des personnes isolées ou souffrant de solitude, ou pour celles ne disposant d'aucun soutien social, économique ou communautaire. Elle pourrait aussi renforcer les préjugés concernant la qualité de vie des personnes malades, âgées ou handicapées.
    Notre gouvernement a cherché à tirer des leçons des expériences des autres juridictions. Le gouvernement s'est engagé à continuer à examiner les questions de portée plus générale et il continuera à observer ce qui se fait ailleurs dans le monde en ce qui concerne l'aide médicale à mourir.
    J'appuie le projet de loi C-14, mis en avant par notre gouvernement. Pour les patients visés par sa portée, cette loi, une fois en vigueur, allégera la souffrance humaine et permettra de mourir dans la dignité.
(1540)

[Traduction]

    Madame la Présidente, mon collègue a parlé au début de son intervention des pays qui autorisent le suicide assisté. Les gens semblent croire que la plupart des pays autorisent cette pratique, mais en réalité, moins de 3 % des habitants de la planète vivent dans un pays qui autorise le suicide assisté.
    J'aimerais toutefois poser une question sur la terminologie utilisée dans ce projet de loi, à savoir « l'aide médicale à mourir ». Le projet de loi ne fait pas de distinction claire entre le suicide assisté et l'euthanasie volontaire. C'est sans doute, en partie, parce que nous préférons un langage édulcoré, mais il faut savoir que, dans les endroits qui autorisent le suicide assisté, le nombre de décès attribuables à cet acte médical ne représente que 0,3 % de tous les décès. En revanche, dans les endroits qui autorisent l'euthanasie volontaire, le nombre de décès attribuables à cet acte médical représente 3 % de tous les décès, soit 10 fois plus.
    Je me demande si mon collègue serait favorable à un amendement au projet de loi qui stipulerait que, dans la mesure du possible, lorsque le patient en a la capacité, c'est l'option du suicide assisté qui doit prévaloir, afin que les patients s'administrent eux-mêmes le médicament que le médecin leur a prescrit.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Mon collègue a parlé de certaines statistiques et de certaines données numériques, ce que j'apprécie. Je dis cela avec beaucoup d'égard, et sans aucun élément de dérision. Toutefois, on n'est pas dans une situation où il y a des cotes d'écoute et où l'on doit évaluer les quantités et les chiffres. Ici, la question porte sur la souffrance humaine. D'ailleurs, ne perdons pas de vue que l'exercice est commandé par une décision de la Cour suprême basée sur la Charte. La situation actuelle n'est plus acceptable.
    Par mon explication, je cherchais à démontrer qu'il y a des situations pour lesquelles on a été beaucoup plus permissifs et nous avons de grandes hésitations et que, dans d'autres cas, on l'a été beaucoup moins, et on a maintenant des interrogations. On a cherché à faire quelque chose qui permet de s’attaquer aux problèmes soulevés par la Cour suprême, tout en répondant aux données qui sont devant nous et qui ont trait à la souffrance humaine.
(1545)
    Madame la Présidente, nous tenons aujourd'hui un débat crucial et très important. Il touche tout le monde, et il suscite à la fois des espoirs et des craintes légitimes chez les gens de nos communautés.
    En plus d'écouter tous les experts, le NPD veut que le projet de loi du gouvernement soit à la hauteur de l'arrêt dans la cause Carter de la Cour suprême. En ce moment, on a des doutes à ce sujet. Par exemple, aux paragraphes 13 et 14, la Cour suprême parle du choix cruel que doivent faire des patients atteints de maladies dégénératives. Mettront-ils fin à leurs jours tout de suite ou attendront-ils le moment où ils ne seront plus capables de le faire?
    Le comité multipartite avait proposé une recommandation, pour que ces gens puissent inscrire à l'avance leurs dernières volontés quant à leur fin de vie, sachant qu'ils s'en vont irrémédiablement vers ce genre de situation. Malheureusement, la recommandation du comité multipartite ne se retrouve pas dans le projet de loi du gouvernement. Mon collègue accepterait-il d'amender le projet de loi en ce sens pour l'améliorer?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    Je dois souligner un élément qui importe et qui est plein de signification. Nous tous, dans la vie, sommes confrontés à des choix, et nous les faisons, mais quand vient le moment de poser le geste conséquent avec notre choix, nous avons la possibilité de nous raviser. D'ailleurs, nous exerçons souvent ce droit.
    La situation soulevée par mon collègue en est une où une personne ne pourra pas se raviser. Voilà pourquoi ce choix n'a pas pu être retenu par le gouvernement. Une personne fait un choix, mais lorsqu'elle y est confrontée, on ne peut pas lui demander si elle a décidé de se raviser ou de remettre son choix en question.
    Les personnes sont souveraines et le choix leur appartient. C'est ce choix que le gouvernement a décidé d'accepter.
    Madame la Présidente, je ne saurais vous dire à quel point je me sens privilégié de participer à cet échange. J'utilise à bon escient le mot « échange » parce que dans nos travaux qui s'échelonnent jusqu'à minuit depuis quelques jours, je vois qu'il s'agit vraiment d'un échange fait dans le but de rechercher la meilleure solution possible, et non pas d'un débat partisan.
    Ce type de sujet, qui arrive à quelques rares occasions dans l'histoire, sera très certainement, le jour où je me retirerai du monde politique, un souvenir marquant du temps que j'y aurai passé.
    Dans l'étude d'un projet de loi, on doit à la fois, bien sûr, avoir une approche rationnelle et intellectuelle, basée sur des faits et sur la science, mais avec un tel sujet, on ne peut pas faire exception non plus de nos expériences personnelles et, pour plusieurs, de la dimension de foi qui accompagne la vie et la qualité de la vie.
    En reculant de quelques décennies à peine, il aurait été impensable que nous ayons un débat sur la question portée par le projet de loi C-14. Or, aujourd'hui, il est incontournable que nous ayons ces échanges, afin de répondre aux préoccupations de nombreux concitoyens sur la qualité de la vie.
    Notre société est donc en constante évolution, et pour des raisons évidentes et parfois bien fondées, nos institutions démocratiques seront toujours un peu en retard sur cette sensibilité populaire. Les voeux de la majorité ne sauraient toutefois être le seul guide de nos décisions, car si nos institutions démocratiques ne protègent pas les minorités, je me demande bien qui le fera.
    Il y a de ces rendez-vous avec l'histoire qui marque la vie d'un Parlement, et c'est exactement ce à quoi nous sommes conviés à la suite du jugement dans l'affaire Carter. Conscients que le temps nous presse et nous manque à la fois pour traiter d'une question aussi vaste et aussi complexe, nous avons tout de même la chance de pouvoir compter sur l'expérience québécoise qui, très certainement, peut devenir source d'inspiration et de réponse à nombre de questions que nous portons.
    Aujourd'hui, forts de cette expérience québécoise, de nos expériences personnelles et de nombreuses interventions provenant d'organismes ou de concitoyens de nos circonscriptions respectives, nous sommes appelés à prendre la meilleure décision possible quant à la façon d'offrir une aide médicale à mourir, car il ne s'agit pas de savoir si oui ou non cette aide devrait exister.
    En effet, la Cour suprême a déjà tranché au moyen de l'arrêt dans l'affaire Carter. Ce jugement unanime, faut-il le rappeler, parle fort au nom de celles et ceux qui ont mené la lutte depuis plusieurs années afin de pouvoir mourir dans la dignité. Il nous appartient donc de légiférer pour baliser cette aide de façon à ce que les droits garantis à chacun par la Charte soient respectés.
    Bien que ce projet de loi soit très imparfait, j'avoue qu'au moment où on se parle je vais voter en faveur du projet de loi, afin qu'ensemble, nous nous donnions la possibilité de le parfaire en proposant des amendements pertinents lors de l'étude en comité.
    Je continuerai en parlant d'une expérience très personnelle, parce que je pense que c'est la meilleure voie pour aborder cette question. Jusqu'à tout récemment, la vie m'avait plutôt épargné de tout problème de santé important. Or, tout récemment, lors d'un épisode de pierre au rein relativement bénin et qu'on traite facilement, j'ai été confronté aux difficultés liées à une attente de six heures pour obtenir un médicament capable de soulager la souffrance que j'avais à ce moment-là.
    De plus, en racontant cet événement à quelques personnes de mon entourage, dont plusieurs avaient vécu une expérience similaire, j'ai découvert à quel point les gens éprouvaient une compassion sincère et rapide face à la souffrance.
    Bien que ce problème ait été relativement mineur, cet événement m'a quand même permis, pour la première fois, de ressentir dans mon corps la douleur qu'avait pu subir mes propres parents, tous deux décédés du cancer, et que j'ai accompagnés le plus longtemps possible lors de leur passage dans une maison de soins palliatifs. Pour eux, nul doute que leur souffrance était persistante et intolérable, et que leurs problèmes de santé étaient graves et irrémédiables; ils répondaient en tout point aux balises établies par la Cour suprême.
    Dans cette maison de soins palliatifs, on avait bien compris, et on le comprend encore bien aujourd'hui, que personne ne devait souffrir en attendant la mort lorsque les moyens de les soulager existent, et ce, même si les médicaments auront, dans un bon nombre de cas, pour effet secondaire de précipiter la mort.
(1550)
    Je peux d'ailleurs dire que l'apaisement que je pouvais lire sur le visage de ma mère ou de mon père milite grandement en faveur de mon penchant à appuyer ce projet de loi et à tenter de l'améliorer.
    De ce fait, une véritable stratégie nationale en matière de soins palliatifs devrait accompagner ce projet de loi. À mon avis, les 3 milliards de dollars promis par les libéraux lors de la campagne électorale pour les soins à domicile auraient dû trouver place, en tout ou en partie du moins, dans le dernier budget présenté à la Chambre. Or il n'en est rien.
    Si le cancer peut frapper à tout âge et souvent sans espoir de guérison, il existe bon nombre de ressemblances avec plusieurs autres diagnostics qui ont pour effet d'emprisonner une personne dans des souffrances intolérables et permanentes, mais qui ne se traduisent pas nécessairement par une fin de vie.
    Voilà pourquoi je suis aussi troublé par le fait que le gouvernement n'ait pas appuyé son projet de loi sur le libellé des conditions dictées par le jugement de la Cour suprême qui, rappelons-le, disait en gros que les Canadiens majeurs, capables de consentir et éprouvant des souffrances persistantes et intolérables en regard d'un problème de santé grave et irrémédiable, ont ce droit protégé par la Charte d'obtenir l'aide médicale à mourir. Voilà l'essence de l'affaire Carter qui a donné naissance au projet de loi C-14 sur lequel nous échangeons aujourd'hui.
    Que tente-t-on de faire aujourd'hui avec ce quatrième critère ajouté par le gouvernement et selon lequel la mort naturelle doit être devenue raisonnablement prévisible? J'avoue à la Chambre que dans mon esprit du moins, cela sème la confusion. En effet, les termes sont difficilement définissables, dans le but probablement louable de rechercher le plus large consensus, consensus qui existe toutefois déjà dans la société. Si ce n'était pas le cas, nous ne serions pas en train de débattre ce projet de loi. En outre, la Cour suprême n'aurait probablement pas tranché dans le même sens si elle n'avait pas senti l'évolution de cette société.
    Nous nous apprêtons donc à repousser le processus par un critère aussi flou et obligatoire, parce que la loi nous dit que pour avoir accès à l'aide médicale à mourir, la personne doit absolument remplir les quatre critères définis dans la loi. Les trois premiers critères sont facilement compréhensibles, alors que le quatrième est d'un flou artistique consommé.
    Par ce quatrième élément, que j'espère voir disparaître lors de nos discussions en comité, on s'apprête à repousser dans la cour des personnes souffrantes l'obligation de repartir en croisade pour démontrer l'inconstitutionnalité de la loi et nous ramener exactement là où nous sommes aujourd'hui. Si nous y sommes, faisons le travail jusqu'au bout et correctement. Entendons-nous pour faire en sorte que ce projet de loi respecte la Constitution, qu'il ne soit pas contesté par la suite et que celles et ceux qui souhaitent y avoir recours puissent enfin passer à l'action.
    D'autres questions demeurent pratiquement sans réponse, d'où l'importance du travail en comité qui viendra, je l'espère, après une adoption en deuxième lecture. Comme nous le soulignions dans notre opinion complémentaire annexée au rapport, le gouvernement doit adopter une approche fondée sur les principes suivants pour légiférer en matière d'aide médicale à mourir: la protection des personnes vulnérables; la prise en compte des préoccupations éthiques de tous les professionnels de la santé; la garantie d'un accès égal à l'aide médicale à mourir; l'objection consciente des professionnels de la santé; et le respect des juridictions.
    Le temps file, alors je conclurai en disant que le travail du NPD dans ce dossier — et je le sens très bien en écoutant mes collègues et tous les membres de ce Parlement — , c'est de clarifier les dispositions ambiguës du projet de loi, renforcer le projet de loi pour éviter les contestations fondées sur Ia Charte, et exiger des engagements plus fermes a l'égard des soins palliatifs et des services de soutien en santé mentale pour protéger les Canadiens les plus vulnérables.
    Je suis prêt à répondre aux questions de mes chers collègues.
(1555)

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'aborderai la question sous un angle différent. On a beaucoup entendu parler d'un autre aspect du problème: celui des soins palliatifs. Je pense qu'il serait souhaitable d'entendre davantage de commentaires à ce sujet.
    Je connais les antécédents du député et, en particulier, son affiliation politique. Étant donné que le gouvernement d'Ottawa doit collaborer avec les différents ordres de gouvernement pour que les services offerts soient de même valeur dans toutes les régions du pays, je me demande si le député a des choses à dire sur l'importance d'investir dans les soins palliatifs. Il se peut que, dans certains cas, au moment de prendre cette décision, les gens se demandent quels soins palliatifs ils ont à leur disposition. Le député a-t-il quelque chose à dire à ce sujet?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    À plusieurs endroits dans le projet de loi C-14, la limite à tracer entre les champs de compétence fédéraux et provinciaux en matière de santé est délicate. À partir du moment où l'on parle de soins palliatifs, on parle des soins de santé et on est dans la cour des provinces.
     Cela n'empêche pas le gouvernement fédéral de jouer un rôle de leader, notamment à l'aide de ses transferts en santé, afin que, dans le continuum des soins de fin de vie, les soins palliatifs soient dispensés équitablement partout au Canada. Bien sûr, cela doit être fait dans le respect de nos partenaires que constituent les législatures provinciales et territoriales.
(1600)
    Madame la Présidente, c'est un peu drôle d'entendre les députés du gouvernement dire que les soins palliatifs constituent une priorité pour le gouvernement, alors que celui-ci n'a rien prévu à cet égard dans le budget.
    Mon cher collègue peut-il nous aider à réconcilier ces deux notions?
    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question. Malheureusement, cela m'amène à donner une réponse un peu teintée de partisanerie, alors que je souhaitais l'éviter dans le cadre de ce sujet.
    C'est le type de réponse que nous donne ce gouvernement depuis son arrivée il y a six mois. On nous a parlé éminemment de réductions d'impôt pour la classe moyenne, alors que ces réductions ne toucheront pas ceux qui gagnent 45 000 $ ou moins. Ceux-ci ne feront toujours pas partie de la classe moyenne.
    On dit une chose et on en fait une autre. Toutefois, ce que la population retient, ce sont les actions. Effectivement, lors de la campagne électorale, on a promis d'investir 3 milliards de dollars dans les soins à domicile, qui sont très vastes. Une partie de cette enveloppe budgétaire aurait très certainement pu être attribuée aux soins palliatifs et être incorporée dans ce projet de loi.
    Toutefois, sur les 3 milliards de dollars promis, aucun sou n'a été investi dans le dernier budget pour quelconque forme de soins à domicile. C'est comme si on avait tout simplement repoussé à plus tard cette partie importante. Compte tenu du vieillissement de la population au Québec et au Canada, il est urgent de s'attaquer à ces questions cruciales.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je ne peux pas dire que je me réjouis de participer à cette discussion, car je pense que c'est un sujet difficile et délicat pour les parlementaires et les Canadiens que nous sommes. J'aimerais toutefois commencer par remercier les électeurs de Humber River—Black Creek, qui ont été nombreux à trouver le temps de communiquer avec mon bureau ou à venir me voir pour me faire connaître leur point de vue, même si beaucoup étaient en larmes, me relatant des événements survenus dans leur propre famille ou m'exposant les inquiétudes qu'ils avaient au sujet du projet de loi C-14. Comme toujours, j'apprécie la rétroaction des électeurs et leur participation active au débat qui se déroule ici, car ils savent qu'il va avoir un impact sur leur vie.
    Inévitablement, l'aide médicale à mourir est une question très difficile pour la plupart des gens. C'est une question très personnelle, très émotive, et même spirituelle, et je comprends tout à fait les difficultés et les appréhensions qu'elle suscite chez un grand nombre de personnes.
    Moi aussi, comme d'autres, je me suis tourmentée au sujet de ces décisions. J'ai été, par exemple, profondément troublée en prenant connaissance du rapport du Comité spécial mixte sur l'aide médicale à mourir, en particulier parce qu’il y est question de la possibilité que des mineurs puissent avoir accès à l'aide médicale à mourir. J'ai également été troublée à l'idée que les médecins qui, pour des motifs légitimes de foi ou de conscience, s'opposent à l'aide médicale à mourir puissent être contraints à y prendre part malgré leurs convictions personnelles. Ces deux points auraient suffi, à mes yeux, à rendre le projet de loi clairement inacceptable.
    Heureusement, le projet de loi C-14 cherche à atteindre l'équilibre, à trouver la meilleure approche, celle qui accorde aux patients mourants aux prises avec des souffrances intolérables le choix d'une mort paisible et qui protège les personnes vulnérables. Je me demande encore si nous avons fait le meilleur travail possible. Je sais que le comité a travaillé très fort et qu'il a passé de longues heures à entendre les témoignages. Je suppose que j'essaie de voir s'il y a moyen d'encore améliorer le projet de loi. Je dois toutefois reconnaître que notre délai est extrêmement serré et que la Chambre se doit d'en tenir compte, sans quoi il n'y aura aucune protection pour qui que ce soit.
     L'arrêt de la Cour suprême et les échéances parlementaires de la dernière année se sont conjugués pour nous imposer cette contrainte de temps que personne ne souhaitait. Cela ne change en rien la situation où nous nous trouvons actuellement, pas plus que le rejet du projet de loi C-14 entraînerait la levée de l'interdiction actuelle de l'aide médicale à mourir. Le fait demeure que la Cour suprême a statué à l'unanimité que les Canadiens aux prises avec des souffrances intolérables ont le droit de demander de l'aide pour y mettre fin.
     La question qui se pose à nous n'est pas de savoir si nous procéderons, mais bien comment nous procéderons. À mon sens, il ne s'agit pas d'une question politique, et je ne pense pas que cela en soit une pour qui que ce soit à la Chambre. Comme mes collègues, je me suis penchée sur cette question en tant qu'individu, en tant que fille, en tant que mère, en tant que grand-mère et en tant que personne qui a vu beaucoup d'amis être aux prises avec les difficultés complexes, onéreuses et émotives que pose une maladie terminale.
     Les soins palliatifs, les congés parentaux, les congés pour raisons familiales et les soins à domicile, s'ils ne sont pas directement visés dans le projet de loi C-14, doivent faire, et font, partie de la discussion. En écoutant les débats, il m'apparaît clairement que les députés envisagent cette question dans une perspective holistique. Je suis heureuse d'entendre de nouveau pendant le débat que le gouvernement est résolu à promouvoir des services de fin de vie de qualité et qu'il continuera de travailler avec les provinces et territoires afin d'améliorer les soins palliatifs pour tous. Cela signifie que nous nous engagerons avec les provinces et territoires à soutenir la mise en place d'un système de surveillance pancanadien pour recueillir et analyser les données, suivre les tendances et produire des rapports publics sur l'aide médicale à mourir. Voilà qui aide à nous rassurer que l'approche du gouvernement est marquée par la prudence et la recherche d'équilibre.
    Il me faut aussi signaler la confirmation donnée par le secrétaire parlementaire, soit que le gouvernement travaillera avec les provinces et territoires en vue d'examiner divers mécanismes pour coordonner les soins de fin de vie donnés aux patients souhaitant une aide médicale à mourir, tout en respectant les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé.
(1605)
    C’est important parce que l’on répondrait aux préoccupations exprimées par de nombreux membres du milieu médical.
    J’ai une très bonne raison d’en parler. Les Canadiens veulent que les libertés religieuses soient protégées pour tous, y compris pour les médecins. Les Canadiens s’attendent également à ce que leur gouvernement respecte et défende la Charte des droits et libertés. C’est ce qu’on viserait à faire avec le projet de loi C-14, tout en prévoyant des garanties pour protéger les personnes vulnérables.
    Je le répète, la Cour suprême du Canada a décidé à l'unanimité que les Canadiens qui souffrent ont le droit à l'aide médicale à mourir. Cela veut dire que la question dont nous sommes saisis n’est pas de savoir si nous allons agir, mais comment nous allons agir. Après les nombreuses consultations et les travaux approfondis du comité, le gouvernement propose un cadre qui tient compte des différents intérêts, y compris de l'autonomie personnelle en fin de la vie, de la protection des personnes vulnérables et du droit à l'objection de conscience.
    L'aide médicale à mourir, telle qu'elle est appréhendée dans le projet de loi C-14, ne serait accessible qu’à ceux qui répondent aux conditions suivantes: des adultes mentalement capables qui sont dans un état de déclin avancé et irréversible des capacités, qui ont une maladie, une affection ou un handicap grave et incurable qui leur cause des souffrances intolérables et dont la mort est devenue raisonnablement prévisible compte tenu de l'ensemble de la situation.
    Pour moi, ce n'est pas seulement un débat sur la prolongation de la vie et cela ne doit pas être exclusivement une décision sur la mort. Dans les cas où la fin de la vie est proche, le tribunal a parlé et le Parlement doit maintenant donner suite. Nous savons quelles seront les conséquences de ne rien faire, c’est pourquoi nous devons agir.
    Afin que j’apporte mon appui au projet de loi C-14, je dois être sûre que le gouvernement aura la volonté ferme et inébranlable de continuer à soutenir des services de fin de vie de qualité et qu’il collaborera avec les provinces et les territoires pour améliorer les soins palliatifs. Je le répète, les soins de fin de vie ne se limitent pas à l'aide médicale, ils englobent bien d’autres choses aussi.
     Rappelons-nous le Dr Low à Toronto et son appel par vidéo pour mettre fin à sa propre vie. Rappelons-nous de Sue Rodriguez. Nous avons tous ces cas en mémoire. Est-ce que j’ai le droit de décider qui va mourir ou qui va vivre ou qui devrait supporter de terribles souffrances? Que ferais-je si mon mari avait la sclérose latérale amyotrophique et me suppliait de mettre fin à sa vie parce qu'il ne pouvait pas supporter la douleur? Ai-je le droit de dire non? Mais je crois aussi que c’est le droit de Dieu de nous appeler tous.
     Le projet de loi C-14 tente de résoudre un problème très difficile pour nous tous et pour les Canadiens. Confions-le à un comité. Voyons si nous pouvons le rendre plus fort et l’améliorer pour mettre l'accent sur les soins palliatifs et sur les médicaments qui élimineraient la douleur afin que les gens souffrent moins et que personne n’ait à prendre cette décision.
(1610)
    Madame la Présidente, j’ai écouté très attentivement la députée et je tiens à la remercier pour son discours. Elle a mentionné le docteur Don Low, un microbiologiste qui est mort des suites d’un cancer du tronc cérébral. Elle a parlé de ses souffrances. De fait, il n’éprouvait pas de douleurs et il est mort dans les bras de son épouse huit jours après avoir figuré dans cette vidéo. Toutefois, il aurait été admissible au suicide assisté parce qu’il était en fin de vie. Il ne souffrait pas physiquement, mais il souffrait, et quand nous lui avons demandé de quoi il souffrait, il a dit que c’était d’avoir perdu le contrôle de ses fonctions corporelles.
     Hier soir, à la séance du comité de la justice, quelqu’un nous a dit qu’un adulte qui porte une couche et est atteint de démence est dans un piètre état. Ma belle-mère, une personne merveilleuse, était atteinte de démence et était dans la même situation, mais je ne considérais pas qu’elle inspirait la pitié. Est-ce que la députée juge qu’une personne atteinte de démence et qui porte une couche vit dans la souffrance et fait pitié?
    Madame la Présidente, cette personne peut fort bien inspirer la pitié. Cela n’équivaut pas à dire qu’elle souhaite mettre fin à ses jours parce qu’elle est dans un piètre état. À nos yeux, bien des gens sont dans un piètre état quand nous les regardons. Cela n’équivaut pas à dire qu’ils veulent nécessairement mettre fin à leurs jours. Nous n’aimons sans doute pas voir leurs souffrances et constater qu’ils sont dans un piètre état, comme le disait le député, mais eux n’en sont pas nécessairement conscients. Nous essayons donc de trouver le juste milieu.
     Je déteste penser qu’une personne puisse souffrir au point de demander à ce que l’on mette fin à ses jours. J’aimerais pouvoir rendre cette personne le plus confortable possible et l’aider dans toute la mesure du possible. Je ne veux pas que de nombreuses personnes trouvent leur vie si misérable qu’elles veulent y mettre fin. Le projet de loi C-14 prévoit une foule de conditions. Il faudra obtenir deux avis. Il y a toute une liste de critères. La procédure ne serait donc pas lancée à la légère. Évidemment, tout dépend du point de vue.
    Je ne veux pas que cela soit facile, et je ne pense pas que le projet de loi C-14 rend les choses faciles. Il tente de trouver le juste milieu, un équilibre qui permettra aux patients de prendre une décision si jamais leur situation devient intenable. Mon voisin de banquette pourrait se trouver dans une telle situation.
     Que dirait le député si on le lui demandait et que la personne répondait aux conditions? Je l’ignore.
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de ses commentaires et de sa volonté de regarder la situation en face et de reconnaître que nous devons trouver un moyen de progresser et que le gouvernement doit être prêt à accepter des amendements et à veiller à ce que nous trouvions une solution convenable pour que les gens puissent avancer de façon positive.
     La députée a en outre parlé de ceux qui ont fait part de leurs convictions et de leurs opinions. Évidemment j’en ai moi aussi recueilli dans mon bureau.
     Un aspect me paraît important, et j’aimerais savoir ce qu’elle en pense. Je veux parler de l’inclusion de dispositions qui protègent les fournisseurs de soins de santé. Pour bien des gens, la décision est prise en fonction de leur foi. Nous devons protéger leurs droits et veiller à ce que le projet de loi en fasse mention, pour que ces personnes et celles qui les appuient soient rassurées et sachent que leurs droits sont protégés.
    Madame la Présidente, un élément fondamental du projet de loi est certainement le respect des droits et des libertés de tout le monde, y compris des professionnels de la santé qui devront aider les personnes qui satisfont aux critères établis par le projet de loi C-14. En ce qui concerne ces aspects, ils devront le faire. Toutefois, les professionnels de la santé ont également le droit d'être protégés, et le projet de loi doit s'assurer de protéger leurs droits.
(1615)

[Français]

Message du Sénat

    Avant de reprendre le débat, j'ai l'honneur de faire savoir à la Chambre que le Sénat a transmis un message à la Chambre, pour l'informer qu'il a adopté le projet de loi S-208, Loi instituant la Journée nationale des produits du phoque, qu'il soumet à l'assentiment de la Chambre.

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, et de la motion portant que la question soit maintenant mise aux voix.
    Madame la Présidente, c'est toujours un plaisir de prendre la parole à la Chambre pour débattre des questions de l'heure, même si c'en est une dont je n'aurais jamais choisi de débattre à la Chambre. Cette question a fait l'objet de nombreux débats. Chaque fois, cela s'est soldé par un rejet; chaque fois, j'en étais soulagé.
    Je tiens à remercier les nombreux électeurs de Battle River—Crowfoot qui ont communiqué avec moi au sujet de la question du suicide assisté. Comme je l'ai mentionné, cette question a été soulevée à de nombreuses reprises, et les électeurs que je représente ont chaque fois exprimé haut et fort leur opposition à l'égard du suicide assisté.
    Il y en a certains qui ne sont pas d'accord et qui sont prêts à permettre l'aide médicale à mourir dans des circonstances bien définies, mais la grande majorité des électeurs de Battle River—Crowfoot et, j'ose dire, la majorité des Canadiens ne veulent pas autoriser le suicide assisté au pays. Pourquoi? Pour être bien honnête, nous avons vu ce qui s'est passé ailleurs, comment cela a débuté et où c'est rendu maintenant. Je ne suis pas certain que la voie que nous suivons est bien différente.
    Un électeur de Bashaw, en Alberta, m'a envoyé une lettre, et un paragraphe de cette lettre résume bien la manière dont les choses semblent se dérouler. Je vais citer la lettre:
    Nous souhaitons que les étudiants prennent des décisions responsables à propos de toutes sortes de questions, allant de leurs activités sexuelles à leur choix de carrière, et qu'ils évitent de s'automutiler. En même temps, nous leur disons que nous ne sommes que des animaux évolués qui n'ont aucun dessein éternel. Nous parlons du respect qu'il faut éprouver pour les aînés dans les réserves, mais, en tant que société, nous discutons de la façon d'aider les aînés à s'enlever la vie. Nous encourageons les jeunes à se tenir loin de la drogue et à éviter de consommer de l'alcool de manière excessive. Puis, nous discutons de la façon de légaliser la marijuana.
    Maintenant, le gouvernement libéral veut nous forcer à adopter un projet de loi qui légaliserait l'aide au suicide. À la Chambre, nous devrions plutôt parler des soins palliatifs et des soins prodigués en fin de vie. Avons-nous entendu parler de ces questions ou vu un article à ce sujet dans le budget? Non, pas un mot là-dessus.
    Nous devrions fournir des fonds pour offrir des soins palliatifs à notre population vieillissante dans les villes et les localités rurales du pays, ainsi que pour améliorer ces soins. Le gouvernement conservateur précédent avait entamé la consultation à ce sujet. À la suite de l'arrêt dans la cause Carter, de nombreux Canadiens ont présenté des mémoires. Il s'agit d'une question difficile pour les familles qui, partout au pays, doivent faire face à des situations semblables. C'est une question très controversée, qui revêt une très grande charge émotive.
     De nombreux Canadiens considèrent que la décision de la Cour suprême dans l’affaire Carter c. Canada constitue un autre exemple d’activisme judiciaire. Ce sentiment était exprimé dans nombre des lettres que j’ai reçues à mon bureau de circonscription. La Cour a annulé les dispositions du droit criminel qui interdisaient le suicide assisté. De nombreux Canadiens étaient en faveur des dispositions interdisant le suicide assisté. C’est un très petit groupe qui réclame ce droit, une infime minorité, mais la Cour suprême a accordé à ces groupes d’intérêts ce qu’ils demandaient.
     Je crois que le gouvernement libéral s’est dérobé à sa responsabilité d’éduquer les Canadiens sur l’objet de nos discussions. Il n’a pas suffisamment consulté les particuliers, les groupes ou les spécialistes. Aujourd’hui encore, au milieu de la discussion, une discussion saine et productive, les libéraux ont tenté d’y mettre un terme. Les libéraux n’ont pas tenu compte de tout l’éventail des intérêts dans le projet de loi C-14, par exemple la défense des libertés religieuses. La députée qui a pris la parole avant moi a mentionné les droits de conscience des médecins et des fournisseurs de services de santé, et bien des gens réclament des mesures de sauvegarde pour protéger les personnes vulnérables. Le projet de loi n’adopte pas une attitude compatissante et il ne tient pas compte de tous les intérêts pertinents.
     Je ne pense pas que le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir a suffisamment poussé son étude. Le Québec s’est penché sur la question pendant six ans. D’autres pays l’ont examinée pendant des années. Toutefois, la Cour a donné au Canada seulement quelques semaines pour en discuter. Le comité n’a pas examiné ce qui s’était passé dans d’autres compétences où la mesure a été adoptée. Le comité mixte spécial a écouté les groupes favorables à l’euthanasie. Il a reçu des groupes favorables à l’euthanasie à trois occasions distinctes.
    Une voix: Trois fois.
     L’hon. Kevin Sorenson: Trois fois, madame la Présidente, des groupes favorables au suicide assisté sont venus témoigner, mais le comité n’a accueilli aucun des groupes qui s’opposent à l’euthanasie.
(1620)
     Maintenant, le gouvernement nous affirme que le comité de la justice, au cours de ses audiences, permettra les amendements. Les libéraux disent que le comité peut adopter des amendements et mieux définir des concepts comme la liberté de conscience ou préciser ce qui se passera si un médecin refuse d’aider quelqu’un à se suicider. Le comité peut se pencher sur l’expression « décès raisonnablement prévisible » ou sur la question du consentement préalable. Toutefois, je n’ai aucune confiance dans ce comité dominé par les libéraux qui examinera le projet de loi C-14.
     Aujourd’hui, les libéraux veulent adopter précipitamment le projet de loi et le renvoyer au comité. J’ai siégé à de nombreux comités et j’en ai présidé. Je sais que la liste des témoins peut être manipulée. Je ne crois pas que le comité s’intéressera au point de vue du Canadien moyen. Je ne crois pas que les milieux religieux du Canada auront même l’occasion de venir témoigner. Je pense que nous verrons un comité dominé par les libéraux qui rejettera tous les amendements susceptibles de modifier le projet de loi.
     Nous savons que c’est ce qui s’est passé au sein du comité spécial mixte précédent. C’est pourquoi l’opposition officielle a dû déposer un rapport dissident qui s’oppose aux conclusions du comité. Nous avons dressé la liste des problèmes qu’il faut régler. Je me réjouis que certaines de ces questions soient traitées dans le projet de loi C-14.
    Au Canada, mais pas seulement au Canada, on ne fait rien pour les gens qui n’ont jamais fréquenté la mort ou les mourants. Beaucoup d’entre eux sont terrifiés par la perspective de mourir. C’est la grande inconnue. Ils craignent que la mort ne leur réserve des souffrances et des douleurs intolérables. On n’en sait rien.
     Les spécialistes en soins palliatifs nous disent que le corps humain sait trouver son équilibre. Le corps humain est tout à fait capable de s’arrêter tout seul de fonctionner; le but des soins palliatifs est d’aider chaque personne dans ce processus, avec compassion.
     Ma fille et mon épouse sont toutes deux infirmières. Elles ont été au chevet de mourants et se sont occupées d’eux avec compassion, en veillant à neutraliser leur douleur, ou à la réduire au minimum dans certains cas.
     Ce sont les provinces qui trancheront certaines des questions abordées dans le projet de loi. Comme nous le savons, les services de santé sont de compétence provinciale. Le gouvernement le sait et il tente de se laver les mains d’une partie des problèmes. En fait, le gouvernement libéral sait très bien que le projet de loi va soulever toute une série de problèmes quand on va passer à l’étape suivante et essayer d’obtenir l’unanimité de la part des provinces et territoires.
     Le gouvernement a déjà indiqué qu’il continuera d’étudier la question du suicide assisté. On a aussi entendu dire que nous allions continuer d’étudier la question des mineurs matures. Est-ce qu’ils pourront un jour recevoir une aide au suicide? Et les personnes souffrant de maladie mentale? Le gouvernement compte étudier cette possibilité, de même que les demandes anticipées.
     Nous savons que nous marchons sur une pente glissante. La plupart d’entre nous pensons que le projet de loi C-14, dont nous débattons d’aujourd’hui, propose des paramètres durables; mais qu’arrivera-t-il demain? Si certaines personnes ont le droit de faire appel à un médecin pour se suicider maintenant, pourquoi pas les autres? Combien de temps faudra-t-il aux tribunaux pour s’attaquer à ce dossier et pour changer ce qui nous semble acceptable aujourd’hui? Je crois que cela inquiète les députés des deux côtés de la Chambre. Ce qu’on nous propose ne suffit pas: il faut répondre à ces questions avant d’aller plus loin.
    Dans le projet de loi, il y a des éléments préoccupants que l’on doit régler en comité. Les Canadiens doivent avoir la garantie que l’aide médicale à mourir sera offerte uniquement aux adultes capables de 18 ans et plus. Nous devons instaurer des mesures pour protéger les personnes vulnérables et pour confirmer leur capacité à décider si elles veulent vivre ou se faire tuer. Nous devons protéger la liberté de conscience des médecins, et ça, c’est l’élément crucial.
     Il faut protéger la liberté de conscience des médecins, des infirmiers et des autres professionnels de la santé qui s’opposent à l’aide médicale à mourir. Une fois que le projet C-14 aura force de loi, si l’on ne garantit pas cette liberté de conscience, l’euthanasie et le suicide assisté feront partie intégrante de la norme de diligence.
(1625)
    J’aurais dû parler plus vite, parce qu’il me reste encore cinq pages. C’est une question qui me tient à cœur. Je crois que la vie est une chose sacrée.
    Madame la Présidente, je tiens à rassurer mon collègue d’en face, dans notre groupe nous avons pris toutes ces préoccupations très au sérieux.
     Il est souvent fait mention de nos motifs politiques. Nous n’avons d’autre motif politique que de satisfaire à la demande de la Cour suprême et de présenter un projet de loi d’ici le 6 juin. Nul ne peut prédire le résultat de l’étude en comité. Nous abordons cette question, je crois, de façon honnête, équitable et honorable.
     Je pose la question suivante. Qu’y a-t-il jusqu’à maintenant dans le projet de loi qui laisse croire que nous allons forcer quelqu’un à faire une chose à laquelle il répugne? Y a-t-il quelque chose dans le projet de loi qui indique que nous allons obliger des gens à poser des gestes contre leur gré, que ce soit prendre un quelconque médicament pour mettre fin à leurs jours ou fournir un tel service?
    Madame la Présidente, je ne crois pas avoir beaucoup insisté sur les motifs du gouvernement dans mon discours. Nous comprenons tous que le gouvernement agit ainsi parce que la Cour suprême a pris une décision et nous a ordonné de la mettre en œuvre. Je ne dis pas qu’il agit pour des motifs politiques. Pardonnez-moi si c’est l’impression que j’ai pu donner. Ce n’était certainement pas mon intention.
    Je demeure toutefois sceptique. Je suis très heureux d’entendre le député déclarer qu’il croit de bonne foi que le comité adoptera des amendements et que nous entendrons des témoins de tous les horizons. Honnêtement, j’ai vu où le processus a été fermé précédemment. Nous avons vu ce qui s’est passé au comité mixte. Le comité n’a pu entendre qu’un groupe de témoins très limité.
    Pour ce qui est de l’autre question du député, soit…
    Nous devons passer à une autre question. Nous en sommes aux questions et observations. La députée d’Essex a la parole.
    Madame la Présidente, il s’agit d’une question à laquelle nous devons tous faire face, nos électeurs, nos parents, nos amis.
     Le député a parlé des soins palliatifs et du fait qu’aucun montant n’a été alloué à ces services dans le budget. Je crois qu’un solide réseau de soins palliatifs est le pendant naturel du projet de loi.
     Le député pourrait-il nous dire comment un engagement de la part du gouvernement libéral pourrait garantir que les citoyens auront accès à des soins palliatifs quand ils arriveront à la fin de leur vie?
    Madame la Présidente, je le répète, la population canadienne est vieillissante. De plus en plus de gens vivent plus longtemps. Les soins de santé et la médecine, pour ne nommer que ceux-là, permettent de prolonger la vie.
    Nous devons en être conscients, et nous devons nous demander à quoi ressemblera la situation dans 10 ans. Nous devons commencer, dès maintenant, par prendre un engagement plus ferme à l'égard des soins palliatifs; ainsi, quand des décisions comme celle-ci s'imposeront, les gens auront des solutions de rechange. Bien franchement, si j'avais lu dans le budget que le gouvernement comptait désormais se concentrer sur les soins palliatifs en raison de l'arrêt dans la cause Carter, je n'aurais pas manqué d'applaudir.
    Le gouvernement précédent avait entamé des consultations sur les soins palliatifs. En fait, la chef de l’opposition, qui était alors ministre de la Santé, avait entrepris des consultations sur les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, les soins palliatifs et les soins à long terme. Là encore, nous avions hâte de prendre part à ce genre de débat.
    Évidemment, tout le monde veut avoir l'assurance de vivre ses derniers jours aussi confortablement et aussi humainement que possible, comme il se doit dans une société comme la nôtre.
(1630)
    Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera lors de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Montcalm, L'aide médicale à mourir; l'honorable député de Regina—Lewvan, L'assurance-emploi; et l'honorable députée de London—Fanshawe, Le commerce international.
    Nous reprenons le débat. La députée d'Edmonton Strathcona a la parole.
    Madame la Présidente, parmi les principaux aspects qui sont au coeur du débat sur le projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir, on trouve la décision rendue en février 2015 par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter. Celle-ci invalide les articles du Code criminel qui interdisent l'aide à mourir parce qu'ils vont à l'encontre des droits constitutionnels garantis par l'article 7 de la Charte des droits et libertés, selon lequel « chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ».
    La Cour a conclu que les dispositions du Code criminel sont invalides dans la mesure où elles interdisent l'aide médicale à mourir à un adulte capable qui est affecté de problèmes de santé graves et irrémédiables — qu'il s'agisse d'une maladie ou d'un handicap — lui causant des souffrances persistantes et intolérables, et qui a clairement consenti à mettre fin à ses jours.
    La Cour a ensuite suspendu la déclaration d'invalidité pour une période d'un an et elle a finalement accordé au gouvernement fédéral actuel un sursis de quatre mois, qui prendra fin le 6 juin prochain, date où les infractions du Code criminel seront frappées de nullité.
    De toute évidence, nous devons prendre des mesures pour que les droits garantis par la Constitution et par la Charte soient respectés.
    De plus, il importe de tenir compte des recommandations formulées par le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, qui regroupait des représentants de tous les partis. Ce comité créé par le gouvernement avait pour mandat d'examiner le rapport produit par le comité externe ainsi que les options de réponse législatives proposées par l'ancien gouvernement conservateur et de formuler des recommandations en vue d'établir le cadre d'une réponse fédérale qui serait conforme à la Constitution, à la Charte et aux priorités du Canada.
    Les recommandations du Comité sont fondées sur les témoignages d'un grand nombre de témoins et l'étude de mesures législatives semblables adoptées dans le monde, y compris au Québec.
    Le Comité a examiné de nombreux aspects cruciaux, dont les suivants. Doit-on définir un critère d'âge? Comment la loi protégera-t-elle les personnes vulnérables? La loi doit-elle tenir compte des directives médicales anticipées? La loi doit-elle imposer une période d'attente? La loi doit-elle autoriser les professionnels de la santé à refuser d'offrir de l'aide médicale à mourir pour des questions de conscience? Quelle est la terminologie exacte à utiliser? Quelles sont les compétences respectives des autorités fédérales et provinciales? Comment garantirons-nous l'égalité d'accès à ces services médicaux? Faut-il élargir l'accès aux soins palliatifs, notamment en créant une stratégie nationale, comme le réclame le NPD?
    Nous avons un défi à relever: nous devons déterminer si le projet de loi C-14 répond clairement et adéquatement à ces enjeux.
    Il s'agit d'un sujet extrêmement personnel et émotif pour tous les députés et, à vrai dire, pour tous les Canadiens qui sont confrontés à un choix entre la vie et la mort. Des membres de ma famille immédiate ont connu une fin de vie très difficile. Ma soeur cadette a souffert pendant une longue période avant son décès, même si elle a bénéficié de soins palliatifs. Ma soeur aînée a, quant à elle, vu sa qualité de vie grandement diminuée pendant de trop nombreuses années parce que seul un centre de soins de longue durée pour personnes âgées pouvait accueillir des patients plus jeunes souffrant d'une maladie chronique.
    Nos gouvernements doivent tenir leurs promesses d'élargir les soins palliatifs à tous et de mettre des logements à la disposition des personnes handicapées ou atteintes d'une maladie chronique. L'accès à de tels soins et services constitue certainement un droit garanti en vertu de la Charte.
    J'ai attentivement réfléchi aux lettres que m'ont fait parvenir mes électeurs et aux conversations que j'ai eues avec eux sur l'aide médicale à mourir. Les gens ont exprimé une grande variété de points de vue et de perspectives sur la question. Je suis toutefois déçue de constater que de nombreuses personnes avec lesquelles je me suis entretenue ne comprennent pas entièrement ce qui est en jeu. Par ailleurs, je dénonce le fait qu'on leur ait fourni des renseignements erronés au sujet des répercussions de la décision de la Cour suprême; je vise en particulier les opposants à l'adoption d'une loi sur l'aide médicale à mourir visant les personnes en phase terminale.
    J'ai tenu une réunion dans ma circonscription en compagnie de mon collègue le député de Victoria, qui est coprésident du comité mixte spécial, pour donner aux gens l'occasion de comprendre le contexte entourant le projet de loi C-14, notamment la décision de la Cour suprême, le rapport du comité mixte spécial et le projet de loi lui-même.
    Mon point de vue a grandement été influencé par mes rencontres avec un électeur gravement atteint de sclérose latérale amyotrophique à évolution rapide. Il était déjà incapable de parler et il souhaitait désespérément être en mesure d'avoir de l'aide à mourir au moment qu'il estimerait approprié pour quitter ce monde.
    Certains électeurs de ma circonscription m'ont dit craindre que le projet de loi ne limite le droit des Canadiens de demander de l'aide pour mourir, alors que d'autres redoutent que cette mesure augmente les risques pour les personnes handicapées. La vaste majorité des gens qui m'ont fait part de leur point de vue, notamment à l'occasion de l'assemblée publique que j'ai organisée, estiment que le projet de loi ne va pas assez loin pour respecter la décision de la Cour suprême, qui exige la protection des droits garantis aux Canadiens en vertu de la Constitution et de la Charte.
(1635)
    Comment le projet de loi C-14 répond-il à ces besoins et préoccupations fondamentaux? Le projet de loi définit les paramètres généraux de la décriminalisation de l'aide médicale à mourir ainsi que le concept du droit d'accès. Cependant, au lieu de donner suite aux recommandations du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir concernant l'adoption des conditions claires et précises établies par la Cour suprême pour déterminer l'accès à l'aide médicale à mourir, le projet de loi propose de nouveaux critères d'admissibilité contraignants et franchement insensés. Pensons en particulier à l'exigence voulant que la mort naturelle soit raisonnablement prévisible. Peut-on vraiment dire d'un être humain que sa mort naturelle n'est pas raisonnablement prévisible?
    La famille Carter, sur qui porte la décision de la Cour suprême, a vigoureusement condamné ces critères supplémentaires. Pire encore, de nombreux juristes ont affirmé qu'ils n'offrent aucune sécurité juridique et qu'ils obligeraient inévitablement les patients vivant déjà dans la souffrance à retourner devant les tribunaux, à voyager à l'étranger ou à se suicider. Aucune de ces options ne représente une solution humanitaire ni ne permet de veiller au respect de nos droits garantis par la Constitution et la Charte.
    J'aimerais rapidement vous lire un extrait d'une lettre que j'ai reçue d'une concitoyenne:
    Il y a 19 ans, ma mère de 87 ans a succombé au cancer après avoir passé trois semaines dans d'atroces douleurs, nous suppliant de mettre fin à son agonie. Le projet de loi sur l'aide médicale à mourir tombe 19 ans trop tard, mais au moins il épargnera de telles souffrances à d'autres en pareille situation. Malheureusement, il exclut toutes les personnes dont la mort n'est pas imminente, mais dont les problèmes de santé leur causent des souffrances intolérables. Il faut rectifier le tir avant d'adopter la loi.
    La deuxième préoccupation dont on m'a beaucoup parlé concerne l'absence de dispositions sur les directives anticipées dans le projet de loi C-14. J'ai appris, lors de mes discussions avec des représentants albertains, que cette question préoccupe grandement les Albertains, bon nombre d'entre eux ayant la fausse impression que leurs directives personnelles s'appliquent aux interventions médicales. De nombreux habitants de ma circonscription m'ont prié de demander l'ajout de ce droit. Voici l'extrait d'une lettre que j'ai reçue:
    Je souhaite avoir la possibilité de donner des directives anticipées qui préciseront les circonstances dans lesquelles je souhaiterais qu'on mette fin à ma vie. Je n'aurai peut-être pas la capacité physique ou mentale d'exprimer mes désirs si je me trouve dans ce contexte. Si le projet de loi est adopté sans les amendements proposés, ma seule option sera alors de me rendre dans la vallée fluviale une nuit où il fait 30 degrés sous zéro et de mourir gelé. Ce geste sera évidemment une source de stress pour ma famille, ma collectivité et pour les policiers qui devront chercher ma dépouille.
    D'autres personnes craignent que la loi n'interdise pas aux hôpitaux et aux autres établissements de refuser l'accès à l'aide médicale à mourir en raison de leurs croyances religieuses. Bien qu'elles acceptent qu'on accorde ce droit de refus aux médecins, elles sont fermement convaincues que ces derniers devraient avoir l'obligation de renvoyer le patient à un autre médecin, de préférence dans le même établissement. Une telle décision serait dictée par la compassion, vu la situation très pénible de la majorité des personnes qui demanderaient ces services.
    Tandis que le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir a convenu qu'il devait y avoir une période d'attente entre la demande et la prestation des services, beaucoup de gens s'opposent au délai d'attente de 15 jours qui est fixé dans le projet de loi C-14. Il serait de loin préférable que la durée de l'attente soit déterminée par le médecin, au cas par cas. Je peux dire d'expérience que d'exiger d'un proche qu'il continue d'endurer de fortes douleurs pendant plus de deux semaines après avoir pris la décision de cesser de se battre équivaut à ni plus ni moins qu'une peine cruelle et inusitée, ce qui viole certainement les droits garantis par la Charte.
    Le projet de loi protégera les médecins et les personnes handicapées. Mais il n'accorderait pas clairement aux Canadiens le droit de déterminer leur propre sort à l'intérieur de paramètres raisonnables. Il est également décevant de constater que le gouvernement actuel n'a pas prévu dans son budget l'argent promis pour offrir des soins palliatifs à tous les Canadiens.
    Je voterai pour le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, afin qu'il soit étudié par un comité. Cependant, j'implore le gouvernement de voir à ce que nos objections ainsi que les objections exprimées par les gens de nos circonscriptions et de l'ensemble du Canada soient prises en compte par les membres des deux comités, qui entreprennent simultanément leur étude. J'implore le gouvernement d'examiner attentivement et en toute équité les amendements qui seront recommandés.
(1640)
    Madame la Présidente, la députée a terminé son allocution en parlant de soins palliatifs et en demandant au gouvernement de prendre un engagement à cet égard. Nous devons parfois insister sur le fait que nous avons déjà pris un engagement considérable en ce qui concerne l'avenir des soins palliatifs. Contrairement à ce que les conservateurs pourraient affirmer, le budget en tient compte. Il suffit de le lire. S'ils ont perdu leur exemplaire, je serai heureux de leur en fournir un autre.
    Ma question a trait au fait que la ministre de la Santé s'est engagée à collaborer avec les intervenants provinciaux et les autres pour mettre au point un programme pancanadien de soins palliatifs. J'aimerais que la députée nous fasse part de ses observations. N'est-elle pas d'accord que le gouvernement doit collaborer avec les provinces, qui sont chargées d'administrer les soins de santé, qu'il s'agisse notamment de soins palliatifs, de soins à domicile ou de soins fournis par des travailleurs indépendants, et que c'est en fait ce que nous constatons aujourd'hui?
    Madame la Présidente, la question du député me donne l'occasion de soulever le point suivant. Le gouvernement fédéral n'est pas tenu de discuter avec les provinces et les territoires dans les domaines où il est directement responsable des services médicaux; je pense entre autres aux militaires, aux Premières Nations, aux Métis et aux Inuits. Que dirait-il de commencer par offrir l'accès à des soins palliatifs à tous ceux dont le gouvernement est directement responsable?
    Madame la Présidente, mon collègue a signalé qu'il était fait mention des soins palliatifs dans le budget; je lui demande de m'indiquer la page où cela se trouve. J'aimerais le vérifier. Je peux dire où, dans leur programme, les libéraux ont précisé qu'ils investiraient immédiatement 3 milliards de dollars dans les soins palliatifs, mais je ne vois rien à ce propos dans le budget.
    Toutefois, ce que je voudrais surtout savoir, c'est si ma collègue est d'avis que nous pourrions insérer dans le projet de loi un amendement selon lequel toutes les personnes qui demandent l'aide médicale à mourir devraient au moins faire l'objet d'une consultation en soins palliatifs avant de passer à l'acte?
    Madame la Présidente, je regrette, mais je ne suis pas d'accord, parce que nous savons que moins de 15 % des Canadiens ont accès à des soins palliatifs. Ce serait essentiellement un moyen de refuser aux gens l'accès à l'aide médicale.
    Même si ma soeur a reçu des soins palliatifs, la situation comportait de nombreux aspects. Par exemple, elle n'a pas pu voir de psychologue ni de sociologue, bien qu'un travailleur social ait été disponible au centre de cancérologie. Comme elle n'avait pas besoin d'intervention médicale directe, on l'a renvoyée du centre. Même avec des soins palliatifs, sa maladie lui causait une douleur intolérable. La douleur est une expérience bien personnelle; même si le personnel médical et soignant était extraordinaire, ma soeur avait tellement mal qu'on ne pouvait pas la toucher.
    Je ne peux pas accepter une telle condition. Je suis cependant d'avis que le gouvernement a une obligation et je pense qu'il aurait été bien que l'ancien gouvernement conservateur finance les soins palliatifs.

[Français]

    Madame la Présidente, je veux remercier ma collègue de son discours très touchant et humain qui traitait de cas concrets.
    Ma question touche la particularité des personnes qui ont une maladie dégénérative. Le comité mixte spécial avait recommandé que ces personnes, pendant qu'elles ont encore la capacité légale de prendre des décisions, puissent dicter leurs dernières volontés au moyen de directives préalablement écrites. À un certain moment, elles perdent la capacité d'exprimer leur volonté sur leur fin de vie. Le comité avait fait cette recommandation et cela n'a pas été retenu par le gouvernement.
    Est-ce un amendement qui pourrait être intéressant pour bonifier le projet de loi?
(1645)

[Traduction]

    Madame la Présidente, je l'ai mentionné directement pendant mon allocution. S'il est un sujet qui préoccupe grandement les électeurs de ma circonscription, c'est bien le droit de donner des directives anticipées. Ils en ont d'ailleurs parlé à maintes et maintes reprises. Au cours du dialogue ouvert que j'ai parrainé dans ma circonscription, nombre d'électeurs ont été horrifiés d'apprendre d'un avocat qui était présent que, même s'ils croyaient pouvoir donner des directives anticipées, celles-ci ne concernaient que leur situation financière.
    J'ai, depuis, parlé au médecin qui est aussi député à l'Assemblée législative de l’Alberta et qui s'intéresse à la question, et j'espère qu'entre les gouvernements fédéral et provincial, nous offrirons cette possibilité. C'est le seul choix que puisse nous dicter la compassion.

[Français]

    Madame la Présidente, dans les interventions de mes collègues, il y a parfois une présomption, on dirait, de malfaisance en ce qui a trait au système de santé. Quand on invoque l'argument de la pente glissante, c'est comme si on considérait que les intervenants en santé ne doivent pas d'abord et avant tout, pour être engagés, être bienveillants et bienfaisants. Si ce n'est pas le cas, ils devraient être remerciés et congédiés. Je trouve particulier que l'on ait si peu de considération pour les intervenants dans le milieu de la santé.
    Nous avons beaucoup parlé des personnes vulnérables. Ces personnes sont précisément celles que la Cour suprême a voulu protéger. La Cour suprême indique que des personnes atteintes de maladies dégénératives, qui ont une affection grave et irrémédiable, qui vivent des souffrances intolérables, devraient effectivement pouvoir avoir accès à l'aide médicale à mourir, en vertu de l'article 7. Il est assez impressionnant de voir que ce sont tous les droits dans l'article 7 — le droit à la vie, le droit à la liberté et le droit à la sécurité de la personne — qui sont touchés par la prohibition totale.
    Or ce sont les gens dans une situation de grande et d'extrême vulnérabilité que la Cour suprême a voulu protéger. On invoque la protection des gens qui sont vulnérables, mais de qui et de quoi parle-t-on? Comme si, lorsque quelqu'un entre dans un continuum de soins de fin de vie, on lui donnait le choix d'entrée de jeu entre une injection ou des soins de confort. Il y a là une présomption qui ne devrait pas exister.
    D'autre part, l'objet sur lequel la Cour suprême demande au législateur de se pencher, c'est l'encadrement du suicide assisté, c'est-à-dire, toutes ces personnes dont la mort naturelle n'est pas vraisemblablement prévisible. Ce ne sont pas de soins palliatifs dont ces gens ont besoin. Ce dont ils ont besoin, c'est d'une loi qui encadre les dispositions leur permettant justement d'avoir accès à une mort dans la dignité, en vertu de leur seule volonté, en respect de leur autodétermination. C'est cela, le fond du débat.
    Or, le Barreau du Québec est venu nous dire hier en comité que le projet de loi C-14 ne respectait pas l'arrêt dans la cause Carter. De plus, l'avocat de la famille Carter nous a dit la semaine dernière que Mme Carter n'aurait pas eu droit à l'aide médicale à mourir. En vertu de quoi le gouvernement peut-il prétendre qu'elle y aurait eu droit? Ce fut la réponse en comité de la ministre de la Santé et de la ministre de la Justice. Ont-elles obtenu un avis extérieur?
    Le Barreau du Québec vient de dire que ce projet de loi, en vertu de ce critère totalement flou de « mort naturelle vraisemblablement prévisible » va faire en sorte que cette loi va devenir un nid à contestations. J'espère que toutes les énergies que nous sommes en train de mettre dans ce débat ne vont pas aboutir strictement à des contestations judiciaires sans fin. Il y a donc une lumière rouge qui a été allumée par le Barreau du Québec hier et par l'avocat de la famille Carter. Le projet de loi dit aux personnes qui ont une maladie dégénérative et qui ont des souffrances extrêmes qu'elles ne peuvent pas faire une demande anticipée.
(1650)
    Les personnes qui sont affectées de maladies dégénératives, que ce soit la sclérose en plaques, la SLA ou d'autres maladies cognitives, ne sont pas suicidaires. Elles veulent vivre le plus longtemps possible, jusqu'au moment où leur condition va devenir pour eux intolérable. Ce n'est pas à nous ni à quiconque de décider ce qui est tolérable ou non pour une personne en matière de souffrance. Au nom de quoi et de qui pourrait-on faire cela?
    Il faut donc justement protéger ces gens-là d'une souffrance extrême et d'une société qui, au fond, essaie de décider à leur place.
    Alors si Kay Carter n'avait pas accès à l'aide médicale à mourir et si on ne permet pas une demande anticipée dans le cas des maladies dégénératives, c'est comme si le projet de loi faisait une discrimination quant aux maladies et aux affections graves et irrémédiables que peuvent avoir les gens.
    La ministre dit que Kay Carter aurait effectivement eu droit à l'aide médicale à mourir en vertu du critère de la mort naturelle vraisemblablement prévisible. Cela aurait été décidé en fonction de quelle prévisibilité? Serait-ce en en vertu de son âge? J'espère que nous ne pensons pas à faire de la discrimination en fonction de l'âge. En effet, la sténose spinale peut se vivre de façon absolument intolérable à 52, à 62 ou à 82 ans. L'âge n'est donc pas un critère.
    Si nous voulons faire un travail sérieux, nous devons absolument encadrer et amender le projet de loi pour y intégrer la demande anticipée.
    D'autre part, il faut retirer le critère de mort naturelle vraisemblablement prévisible. Effectivement, même dans une situation aussi claire qu'une demande de mort en soins palliatifs, je le répète, cette mort n'est pas une mort naturelle. Oui, le processus de la mort est irréversible. Le mourant veut mettre fin au processus irréversible de la mort à petit feu. Cette décision lui revient, comme il pourrait aussi ne pas le vouloir. Il a le libre choix.
    Toutefois, à partir du moment où on prétend que cette personne devra nécessairement prendre une décision imposée, on sort du débat. Ce n'est pas cela. J'entends des députés dire que c'est effrayant et qu'il faut investir dans les soins palliatifs. Je l'ai dit ce matin, les soins palliatifs sont importants, et la loi québécoise règle cela, entre autres. Alors que fait-on du suicide assisté? Ces gens-là ne sont pas dans une situation qui requiert des soins palliatifs. Ils n'en ont pas besoin et nous n'avons pas besoin d'investir dans les soins palliatifs pour régler leur problème. Il faut tout simplement respecter leur droit à l'autodétermination.
    C'est pour cela qu'il faut absolument une demande anticipée. Ce que veut la personne, c'est ne pas franchir une étape sans avoir l'assurance qu'on va prendre soin d'elle. Ce n'est pas nous qui allons décider à sa place, c'est elle qui décide.
    Bien sûr, parfois, il y a des gens qui souffrent d'insomnie. En effet, cela peut se passer l'instant d'une nuit. Le soir on se couche et tout va bien, et le lendemain matin, quand on se lève, on a franchi un cap. Pour cela, il faut amender le projet de loi. Il faut aussi l'amender en vertu d'une disposition d'équivalence, comme je le disais ce matin.
    Au Québec, le débat a duré six ans. La loi québécoise encadre très bien la mort en fin de vie et il serait inacceptable que le projet de loi actuel vienne en changer l'économie. Voilà pourquoi nous tenons à ces modifications au projet de loi.
(1655)

[Traduction]

    Madame la Présidente, je ne pensais pas poser de question, mais je ne pouvais pas rater cette occasion.
    J'aimerais poser une question à ma collègue concernant les directives anticipées. Disons qu'une personne signe pareille directive lorsqu'elle reçoit un diagnostic de démence, par exemple, et qu'elle change d'idée par la suite. Cependant, une fois que cette personne n'est plus lucide, elle est incapable de signer une demande, si bien qu'elle doit s'en tenir à la directive. La députée ne se préoccupe-t-elle pas du fait que des gens pourraient mourir inutilement s'ils profitent de la vie dans leur état actuel, mais ne croyaient pas que ce serait le cas au moment de signer la directive anticipée? Je ne voudrais pas qu'une personne innocente meure en raison d'une directive anticipée car, pour moi, ce serait une personne de trop. J'aimerais que ma collègue se prononce sur ce point.

[Français]

    Madame la Présidente, ni mon collègue ni moi ne sommes des praticiens de la santé. Je ne suis pas médecin, je ne suis pas chercheur en maladie dégénérative.
    La chose que je sais, pour avoir pratiqué longtemps dans le domaine de la bioéthique, c'est que les gens qui en sont atteints veulent que la société leur permette de ne pas vivre dans la souffrance extrême. Il y a toujours des moyens de communiquer. Il y a des gens qui peuvent se définir des codes. Par exemple, certains ont écrit des livres avec leurs paupières. On peut inscrire sa demande anticipée, et on peut dire, par code, qu'un signe donné signifie « oui ». Avant d'y arriver, j'espère qu'on aura pris les dispositions qui s'imposent. Il y a moyen d'encadrer la demande anticipée, au lieu de penser qu'on va aller au-delà de la volonté des gens.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'aborderai aujourd'hui ce qui risque fort d'être l'une des questions les plus cruciales de la présente législature. Je sais que le débat s'annonce très difficile, car le suicide assisté et l'euthanasie sont deux sujets profondément émotifs, à la fois pour nous députés et pour nos électeurs.
    Premièrement, je tiens à dire que je suis soulagé de voir que le projet de loi C-14 répond à certaines des préoccupations qui ont été soulevées par mes collègues conservateurs et des citoyens de partout au pays.
    Les recommandations qui figuraient dans le rapport du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir étaient profondément troublantes et allaient bien au-delà des paramètres établis par la Cour suprême dans l'arrêt dans la cause Carter. Mes collègues conservateurs et moi-même avons fait écho à de nombreux Canadiens et avons fait connaître les réserves que suscitaient à nos yeux les recommandations lourdes de conséquences qui se trouvaient dans le rapport et avons pressé le gouvernement libéral d'assortir son projet de loi de mesures de sauvegarde aussi strictes que possible.
    Les électeurs de ma circonscription voyaient d'un mauvais oeil certaines de ces recommandations, qu'ils jugeaient trop vagues et trop vastes. Comme bon nombre de mes collègues conservateurs, je trouvais important d'en discuter avec mes concitoyens, et c'est pourquoi j'ai organisé plusieurs assemblées publiques un peu partout dans ma circonscription. En fait, je voulais absolument connaître l'opinion des habitants du Sud de l'Alberta concernant l'aide médicale à mourir.
    Cela étant dit, je voulais aussi faire connaître certaines des recommandations susceptibles de se retrouver dans la mesure législative dont la Chambre serait saisie. S'il est clairement apparu dès le départ que la vaste majorité des Canadiens étaient favorables à l'aide médicale à mourir, je crois malgré tout que la vaste majorité des personnes qui y sont favorables ne savaient pas trop ce que la loi allait renfermer.
    Je crois que, dans l'esprit de ces gens, l'aide médicale à mourir se limitait aux adultes souffrant d'une maladie physique en phase terminale. C'est d'ailleurs ce qui est très vite ressorti des assemblées publiques que j'ai organisées dans ma circonscription, qui pouvaient attirer de 30 à 300 personnes, dont de nombreux médecins pratiquant en milieu rural. La quasi-totalité des participants — qu'ils soient favorables ou non à l'aide médicale à mourir — ont été choqués, en lisant les recommandations du comité mixte spécial, de constater ce qui aurait pu se retrouver dans le projet de loi.
    Ces gens ne s'attendaient assurément pas à ce que l'aide médicale à mourir soit offerte aux mineurs matures et aux personnes atteintes d'un trouble de santé mentale. Ils s'attendaient par contre à ce qu'on prévoie des protections pour les médecins exerçant leur liberté de conscience et des lignes directrices très rigoureuses concernant les directives anticipées. Depuis que j'ai tenu ces assemblées publiques et sensibilisé les habitants de ma circonscription sur la question, je reçois des centaines de courriels et de lettres de personnes qui s'inquiètent vivement des ramifications possibles du projet de loi C-14.
    En général, la population de Foothills souhaite que le projet de loi protège les plus vulnérables de la société et je crois qu'il en va de même pour les Canadiens. Je me réjouis de voir que certaines craintes que nous avons soulevées ont été prises en compte dans le projet de loi C-14, qui ne touche pas les mineurs matures et les personnes souffrant d'un trouble de santé mentale. Il est toutefois précisé dans le projet de loi que ces questions seront étudiées. Il est donc tout à fait possible que la loi s'applique éventuellement aux mineurs matures et aux personnes souffrant d'un trouble de santé mentale.
    D'autres points n'ont cependant pas été abordés, comme la protection des médecins exerçant leur liberté de conscience et les soins palliatifs, dont il a été question à maintes reprises durant toutes les réunions que j'ai organisées. Bon nombre des habitants de ma circonscription estiment que les soins palliatifs ont toujours été plus ou moins négligés par la loi.
    Dans ma circonscription, nous avons la chance d'avoir un centre de soins palliatifs, le Foothills Country Hospice. J'ai visité cet établissement à maintes reprises et discuté avec des patients et des membres de leur famille. J'ai compris en leur parlant que cet établissement est un véritable cadeau du ciel et qu'il est devenu un élément merveilleux et important de notre collectivité.
    La mise en oeuvre de programmes de soins palliatifs accessibles, uniformes et efficaces partout au pays appuierait les personnes en fin de vie. Malheureusement, les soins palliatifs ne sont pas offerts uniformément à la grandeur du pays. Le rapport recommandait que les soins palliatifs fassent partie intégrante de la loi sur l'aide médicale à mourir. Je suis tout à fait d'accord avec cette recommandation.
    Si nous décidons d'adopter une mesure législative sur l'aide médicale à mourir, les soins palliatifs devront en constituer l'un des éléments fondamentaux. Toutefois, le budget de 2016 ne fait aucune mention des soins palliatifs et ne prévoit pas de fonds destinés à un programme national en la matière.
    Les résidants de Foothills ont aussi insisté très fortement sur la nécessité de protéger la liberté de conscience des médecins et des autres professionnels de la santé. La vaste majorité des résidants de ma circonscription sont d'avis que personne ne devrait être obligé de fournir l'aide médicale à mourir si celle-ci est contraire à ses croyances et à son éthique personnelles. En outre, presque toutes les personnes avec lesquelles j'ai parlé ont aussi reconnu que les médecins qui décideront d'aiguiller vers un autre médecin des patients qui recherchent une aide médicale à mourir seront aussi confrontés à un dilemme éthique.
(1700)
    Dans ma circonscription, Foothills, les villages ont un ou deux médecins, et parfois aucun. Imposer à des médecins en milieu rural d'offrir une aide médicale à mourir les place dans une situation très délicate dans ces collectivités. Ils doivent avoir le choix, et nous devons jouer un rôle structurant pour le leur donner. Nous ne pouvons pas refiler ce fardeau aux provinces ou aux collèges provinciaux de médecins et de chirurgiens. Les médecins de partout au Canada ont besoin de notre appui et de notre leadership, qui devraient se refléter dans le projet de loi C-14.
    En outre, nous devons prévoir une structure pour soutenir les médecins qui offrent une aide médicale à mourir. Ils pourraient éprouver des problèmes de santé mentale, comme c'est actuellement le cas au Québec. Nous devons nous assurer qu'il existe des programmes de soutien pour les médecins souffrant d'éventuelles blessures émotionnelles et mentales pour avoir offert une aide médicale à mourir. Les Canadiens veulent trouver un équilibre sain entre les droits de la personne qui demande une aide médicale à mourir et ceux du médecin, à qui la Charte garantit le droit de ne pas participer à cette procédure si elle est contraire à ses principes moraux, éthiques ou religieux.
    La Cour suprême a été mentionnée à quelques reprises dans ma circonscription. Les résidents sont exaspérés qu'elle s'avise de dicter une loi aux parlementaires. Les Canadiens comprennent que nous élisons des députés pour adopter des lois et que la Cour suprême est là pour juger de la constitutionnalité de ces lois. Cependant, ils ne comprennent pas pourquoi la Cour suprême, un organe non élu, dicte maintenant une loi aux députés élus de la Chambre des communes et pourquoi elle leur impose un échéancier aussi déraisonnable pour l'élaborer. Mes électeurs, tout comme, je crois, de nombreux Canadiens, sont contrariés — à juste titre — que ce soit ainsi que la question de l'aide médicale à mourir a été mise de l'avant.
    Qu'est-ce que cela a à voir avec le présent débat? Ce renversement du processus a eu pour effet de forcer les parlementaires et les Canadiens à suivre un échéancier déraisonnable afin d'élaborer, à toute vapeur, une mesure législative complexe qui garantit non seulement la protection des droits de toutes les personnes concernées, mais aussi la sécurité des personnes les plus vulnérables. Pour tenir cette conversation et ce débat public, nous avons simplement besoin de plus de temps qu'on nous en accorde actuellement.
    Généralement, à la fin de mes interventions dans un débat, j'invite mes collègues de la Chambre à voter en faveur ou contre le projet de loi dont nous débattons. Aujourd'hui, je ne le ferai pas. J'estime qu'il faut d'abord et avant tout demander à la Cour suprême de nous accorder plus de temps. Le projet de loi dont nous sommes saisis porte sur l'une des plus importantes décisions que nous prendrons en notre qualité de parlementaires, et je crois sincèrement que cette décision ne devrait pas être prise dans un délai qui nous a arbitrairement été imposé. Les conséquences de cette mesure législative sont irréversibles. Si nous faisons un mauvais choix maintenant, cela pourrait entraîner la mort d'une personne qui n'aurait pas dû mourir. Les Canadiens, quelle que soit leur position sur la question, méritent mieux. En fait, ils méritent que nous fassions de notre mieux.
    Le gouvernement a failli à la tâche dans ce dossier en ne contestant pas le délai imposé par la Cour suprême. Le Québec a mis plus de six ans à élaborer une mesure législative similaire sur la question. Ici, nous essayons de faire l'exercice en six mois. L'élaboration de ce genre de mesure législative ne devrait pas s'échelonner sur quelques semaines, mais plutôt sur le mandat complet d'un gouvernement.
    En tant que parlementaires, pouvons-nous honnêtement dire que nous avons eu l'occasion de consulter tous les intervenants et de nous entretenir avec eux? Pouvons-nous vraiment affirmer que les Canadiens ont eu suffisamment de temps pour bien comprendre les ramifications de ce projet de loi et qu'on leur a donné assez de temps pour qu'ils expriment leur point de vue à leurs représentants élus respectifs?
    Dans sa décision, la Cour suprême a clairement statué que nous aurons droit à l'aide médicale à mourir. En tant que député, ce qui m'importe le plus ici, c'est de m'assurer que le projet de loi C-14 prévoit suffisamment de mesures de sauvegarde pour protéger les membres les plus vulnérables de notre société: les enfants, les personnes handicapées, les personnes ayant des troubles de santé mentale et les aînés.
    Chaque député peut-il regarder ses électeurs dans les yeux et leur dire qu'il a fait preuve de toute la diligence voulue en l'espace de quelques semaines seulement? Pouvons-nous dire avec confiance que le projet de loi comporte des mesures de sauvegarde appropriées pour protéger ceux qui ont besoin de notre appui et de notre aide? Étant donné le peu de temps qui nous a été imparti, je ne peux tout simplement pas faire une telle affirmation.
    Malheureusement, il semble que le gouvernement ne compte pas demander de prolongation. D'ailleurs, il ne fait même plus intervenir ses députés dans le débat. Nous sommes saisis d'une des questions les plus importantes que nous aurons à aborder en tant que parlementaires, et pourtant les libéraux ne participent même pas au débat. Ils réduisent au silence les Canadiens qui veulent désespérément en parler.
    J'espère que nous aurons tous l'occasion, dans le temps qu'il nous reste, de parler à nos concitoyens, d'obtenir leurs commentaires et de les sensibiliser davantage aux conséquences du projet de loi. Je sais que les gens de ma circonscription sont extrêmement partagés à ce sujet. J'espère que les autres partis à la Chambre suivront l'exemple des conservateurs et que nous aurons tous droit à un vote libre pour nous exprimer au nom de nos concitoyens.
(1705)
    Madame la Présidente, je sais qu'on se plaint que nous ne permettons pas au débat d'avoir lieu sur cette question, mais nous avons certainement fait preuve de courtoisie et donné l'occasion à tous les députés qui voulaient participer de le faire.
    L'échéance du 6 juin nous est imposée par la Cour suprême. Le gouvernement et la ministre de la Justice ont demandé une prolongation, mais la Cour suprême la leur a refusée et a décidé que le Parlement devait répondre à l'arrêt dans la cause Carter au plus tard à l'échéance du 6 juin.
    Je demande à mon ami comment nous pourrions contourner le problème de l'échéance imposée l'année dernière, alors que son parti était au pouvoir. Le gouvernement est demeuré les bras croisés à ce moment-là.
    Madame la Présidente, nous nous réjouissions de voir notre collègue de retour dans cette enceinte.
    Je suis conscient du problème de l'échéancier serré, mais le gouvernement libéral avait la possibilité de demander une autre prolongation. Pouvons-nous dire en toute honnêteté que nous sommes en mesure d'accomplir la tâche qui nous incombe en quelques semaines, alors que les autres Parlements ont mis des années à y arriver? Il est plus important de bien nous acquitter de cette obligation que de respecter une échéance quelconque imposée par la Cour suprême.
    Après les élections, le gouvernement libéral a demandé une première prolongation et a obtenu quatre mois. Il aurait dû contester cette décision avec toutes ses ressources. Il aurait dû dire que ce délai additionnel n'était tout simplement pas suffisant. Personnellement, je ne suis pas capable d'accepter les conséquences qui en découlent. C'est horrible à dire, mais les erreurs que nous risquons de commettre pourraient avoir des conséquences fatales, et je n'ai pas envie de les avoir sur la conscience.
(1710)
    Madame la Présidente, dans son discours enflammé, le député de Foothills a mentionné une question que des habitants de ma circonscription ont aussi soulevée et qui, d'après moi, préoccupe les Canadiens. Il s'agit des objections de conscience des professionnels de la santé. Durant les travaux du comité multipartite, le NPD a clairement recommandé au gouvernement de ne jamais obliger les travailleurs de la santé à offrir l'aide médicale à mourir et de prévoir des protections juridiques pour ceux qui s'exposent par leur décision à des injustices.
    Les néo-démocrates s'inquiètent du fait que ces protections ne sont pas inscrites directement dans le projet de loi, même si le gouvernement promet d'en traiter bientôt par l'intermédiaire de mesures non législatives. Nous allons obliger le gouvernement à tenir parole.
    Je pose la question suivante à mon collègue: votre parti a-t-il l'intention d'obliger le gouvernement à tenir parole?
    Je rappelle aux députés qu'il faut adresser les questions à la présidence et non aux autres députés.
    Le député de Foothills a la parole.
    Madame la Présidente, la protection de la liberté de conscience des professionnels de la santé est certainement l'un des principaux points soulevés dans ma circonscription; on veut qu'ils puissent décider d'eux-mêmes et qu'ils ne soient pas obligés d'offrir l'aide médicale à mourir. C'est là je crois le point de vue que nous essayons tous de faire valoir. Il reste tant de questions à régler.
    La députée d'en face affirme que nous avons eu de nombreuses occasions de débattre du sujet. Six ou sept de mes collègues espéraient intervenir ce soir, mais comme le gouvernement applique la clôture au débat, ce sera peut-être impossible.
    Madame la Présidente, pendant nos délibérations, de nombreux cris du coeur ont été exprimés. Bien des députés réclament aussi le renvoi du projet de loi au comité pour qu'il puisse être amendé. J'ai vraiment l'impression que le projet de loi interpelle la plupart des Canadiens parce que, comme l'a dit le député, il concerne des êtres chers — mères, pères, soeurs, frères — qui ont une maladie incurable et qui sont maintenus artificiellement en vie.
    Selon le député, quels amendements judicieux pourrait-on présenter au comité si le projet de loi y était renvoyé?
    Madame la Présidente, le plus sûr serait de rendre le projet de loi le plus rigoureux et le plus strict possible. L'arrêt dans la cause Carter parlait d'adultes capables atteints d'une maladie terminale. La mesure législative aurait dû se limiter à cela.
    À mon avis, les troubles psychologiques ne doivent pas être un facteur sous-jacent, et il ne faut pas étudier la question des mineurs matures. Nous ne devrions pas commencer par là. Ce qu'il faut, c'est restreindre au maximum la mesure législative et la rendre la plus stricte possible, car si nous allons trop loin, il sera impossible de revenir en arrière. Il faut absolument restreindre la question aux adultes capables qui sont atteints d'une maladie terminale.
    Madame la Présidente, je vais m’efforcer de respecter mon temps de parole, et j’espère être en phase avec vous.
    Je suis heureuse d'avoir la possibilité d’intervenir au sujet du projet de loi C-14, qui modifie le Code criminel ainsi que d’autres lois, et qui, pour la première fois dans l’histoire du Canada, rendrait légal le recours à une aide médicale pour mettre fin à ses jours.
     Il ferait aussi en sorte qu'il est légalement possible, pas seulement pour un médecin, un infirmier praticien ou un membre de la communauté médicale, mais aussi pour un aidant, une personne extérieure au milieu médical, de tuer toute personne aspirant à mettre fin à ses jours, si les conditions énoncées dans le projet de loi sont remplies.
    C’est une question d’une extrême gravité que nous avons devant nous, et il ne fait pas de doute qu’elle fera époque. C’est quelque chose qui passera à l’histoire.
     Je souhaite consacrer un peu de temps à différentes choses. Je voudrais commencer par rappeler pourquoi et comment nous en sommes venus à ce point, puis revenir sur certaines des choses dont vient de parler mon collègue à l’instant. La Cour suprême du Canada a décidé, il y a tout juste un peu plus d’un an, que tout Canadien, en vertu de la Charte des droits de la personne, a droit à une aide médicale à mourir. La Cour nous a donné un an, laps de temps très court, pour mener à bien nos discussions, nos consultations, et présenter un projet de loi.
     Je veux saisir l’occasion d’exprimer non seulement ma frustration, mais aussi la préoccupation de nombre de mes concitoyens de ma circonscription et d’ailleurs au Canada, au sujet de quelque chose qui semble se reproduire continuellement. La Cour suprême est certes habilitée à prendre ces décisions dont les conséquences pour la société canadienne sont énormes et durables. Malheureusement, ce qui se passe, c’est que les Canadiens ont le sentiment, de plus en plus généralisé, qu’ils n’ont plus leur mot à dire dans ces questions, qu’il s’agisse de la mort assistée, la question qui nous occupe actuellement, ou de la légalisation de la prostitution, sur laquelle nous nous sommes penchés au cours de la dernière législature.
     Nous sommes également témoins du fait que des lois adoptées tant à la Chambre qu’au Sénat sont invalidées par la Cour suprême du Canada. Nous l’avons vu au cours des dernières années et même au cours des dernières semaines.
    J'estime que le temps est venu pour le gouvernement de recourir aux instruments à notre disposition pour rééquilibrer un tant soit peu notre processus. Nous avons, dans notre démocratie, un pouvoir législatif et un pouvoir exécutif, et tous deux ont des comptes à rendre à l’électorat. Nous avons également un pouvoir judiciaire, qui est un précieux élément de cette démocratie, mais qui est devenu, selon moi et selon les habitants de ma circonscription, déséquilibré. Mes concitoyens ont le sentiment qu’il y a neuf personnes, pas très loin d’ici, à Ottawa, qui prennent des décisions très importantes, au sujet desquelles les Canadiens n’ont pas leur mot à dire.
     L’instrument que nous avions lorsque les conservateurs étaient au pouvoir est la disposition de dérogation. Je tiens à dire que, selon moi, nous pourrions être amenés à y avoir recours dans l'intérêt des Canadiens, et je sais que le gouvernement dispose maintenant de quatre ans et que beaucoup de choses peuvent se produire.
     Au point où nous en sommes, cependant, la Cour suprême a rendu sa décision, ce que nous respectons au plus haut point. Quand bien même nous pourrions être en désaccord avec ce que dit un juge ou un ensemble de juges, au Canada, nous respectons la loi et nous nous y soumettons.
     Mon collègue a évoqué le fait que les libéraux auraient pu demander davantage de temps. Je suis d’accord avec lui, cela aurait pu être fait, mais nous sommes maintenant saisis d'une mesure législative et nous devons décider de l’adopter ou non.
     Je ne peux pas appuyer ce projet de loi, parce qu’il est déficient à bien des égards. Mes concitoyens n’ont pas eu suffisamment de temps pour en discuter et participer au processus. Il a déjà été fait mention d’un certain nombre des préoccupations que soulève le projet de loi, et j’insiste pour réitérer mon inquiétude devant l’insuffisance de mécanismes visant à protéger les personnes vulnérables ou faciles à manipuler.
     Dans mes fonctions précédentes, j’ai travaillé avec beaucoup de personnes handicapées qui possédaient toutes sortes d’habiletés. Dernièrement, j’ai rencontré une personne qui, bien qu’atteinte d’une déficience intellectuelle, est quelqu’un de très intelligent et de très compétent. Cet homme m’a dit: « Il arrive qu’on profite de nous quand nous achetons un nouveau téléphone. Nous sommes tellement faciles à manipuler ». Et il a ajouté: « Ça m’inquiète de penser que quelqu’un pourrait encourager certains d’entre nous à vouloir mourir; c’est facile de nous manipuler ». Le projet de loi prévoit très peu de protection pour les Canadiens vulnérables.
     Comme nous l’avons déjà mentionné, cette mesure législative ne prévoit non plus aucune protection, ou si peu, pour les médecins, le personnel infirmier, les autres praticiens de la médecine et les établissements hospitaliers, pour qui tuer un être humain va à l’encontre de leur conscience. Le gouvernement fédéral a le devoir de protéger le droit à la liberté de conscience. Ce projet de loi gagnerait à être renforcé par la protection de ces droits.
(1715)
     En outre, le libellé du projet de loi est flou et ambigu quant aux délais d’attente, aux personnes autorisées à signer au nom du patient et à la vérification qu’il conviendrait d’effectuer pour savoir si quelqu’un tire un avantage financier du décès d’une personne qui reçoit de l’aide médicale à mourir.
     Il y a plusieurs préoccupations de taille. Il faut plus de temps pour corriger les lacunes en matière de protection des personnes vulnérables et de droit à la liberté de conscience.
     Enfin, j’aimerais glisser quelques mots sur ma propre expérience de travail en soins palliatifs. J’ai été bénévole en soins palliatifs pendant un certain nombre d’années et je peux vous dire que d’être là, aux côtés de ces personnes en train de franchir la dernière étape de leur vie, c’est une chose qui vous marque pour longtemps.
     Il existe cependant une foule d’idées fausses sur ce qu’est réellement le suicide assisté, la mort assistée. Le week-end dernier, une amie me disait: « Candice, si un jour je suis dans un état végétatif, je veux absolument qu’on tire sur le cordon. Je ne veux à aucun prix être maintenue en vie dans cet état ».
    Je lui ai dit: « Ce dont tu parles n’est pas du suicide assisté. Au Canada, une personne a le droit de faire un testament biologique contenant une “ordonnance de ne pas réanimer”, elle a le droit de refuser tout traitement médical ». Ces droits sont déjà inscrits dans la loi, et tout Canadien peut s’en prévaloir. Il y a quelques années, même le premier ministre a dit que son père atteint d’un cancer avait refusé tout traitement médical. C’est un droit pour tous les Canadiens.
    Ce n'est pas du tout de cela qu'il est question aujourd'hui. Ce n'est pas cette décision que nous sommes forcés de prendre à la sauvette. Ce n'est pas au sujet de cette décision que les Canadiens sont floués et ne peuvent malheureusement pas s'exprimer et encore moins voter. Cette question devrait être suffisamment importante pour que les Canadiens aient leur mot à dire. Nous ne parlons pas du refus d'être maintenus en vie artificiellement. Nous ne parlons pas non plus de sédation palliative.
     Ma sœur est décédée il y a neuf ans d'un cancer. Certains membres de ma famille ont dit: « Elle est morte parce que le médecin lui a donné beaucoup de morphine pour calmer ses douleurs. » Non, ce n'est pas la morphine qui a causé sa mort. Elle est morte du cancer. La sédation palliative n'est pas une aide au suicide.
     Je trouve cela ironique, mais très triste en même temps. La semaine dernière, j'ai terminé ma campagne #308conversations. Il s'agit d'une initiative lancée par la Commission de la santé mentale du Canada. C'est une idée extraordinaire consistant à engager 308 conversations — à l'époque il y avait 308 députés, maintenant nous sommes 338 — visant à prévenir le suicide et à trouver des façons dont les personnalités publiques, les professionnels de la santé et les intervenants auprès des jeunes peuvent mieux s'outiller pour prévenir le suicide.
    J'ai organisé ces rencontres. Près de 70 personnes y ont participé, des personnes résolues à prévenir le suicide dans la circonscription de Portage—Lisgar. Avant de partir, je leur ai dit: « Les amis, je retourne maintenant à Ottawa pour participer à un débat sur la façon dont nous pouvons aider des gens à se suicider. »
     C'est une question très délicate. Ce n'est pas une question que nous pouvons régler en disant simplement: « Voilà, d'un côté, nous ne voulons pas que ces personnes meurent parce que ce sont des jeunes qui sont victimes d'intimidation sur Internet. Nous allons tout faire pour qu'elles ne se suicident pas; mais de l'autre côté, si une personne est atteinte d'une maladie mentale et n'a plus rien à espérer de la vie, nous allons l'aider à se suicider. »
     C'est une erreur et je ne pense pas qu'on puisse aisément concilier ces deux points de vue. Je crois que nous devons en discuter et mettre en place des mesures de protection.
     Les soins palliatifs sont très importants. Ils donnent de l'espoir aux gens. Diverses études révèlent que, lorsque les malades en phase terminale ont la certitude qu'ils mourront sans douleur, ils choisissent la vie et laissent Dieu décider du moment de leur mort.
     Nous sommes tous d'accord, je pense, pour dire qu'il faut aider les gens et leur donner espoir, qu'ils soient atteints d'une maladie mentale ou d'une maladie en phase terminale; nous leur donnons espoir et nous essayons de soulager leur souffrance. Je ne vois pas comment nous pourrions considérer la mort comme une porte de sortie honorable. Nous ne voulons pas que nos proches pensent qu'il serait plus honorable de choisir la mort. Nous sommes tous d'accord sur ce point, je pense. Choisissons la vie à chaque étape du chemin. Choisissons la vie.
(1720)
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue, la députée de Portage—Lisgar, de sa contribution.
    J'aimerais revenir sur ce qu'elle disait au début de son intervention, quand elle parlait de la possible application de l'article 33 de la Charte. De fait, j'avais moi-même abordé cette question dans le cadre de mes commentaires, quand j'ai traité précisément de l'utilisation de cet article. Évidemment, jusqu'ici le Parlement n'a jamais eu recours à l'article 33, quelle que soit la disposition législative. J'hésiterais à l'invoquer, puisque nous parlons de situations où les tribunaux se sont déjà prononcés et que certains droits individuels garantis par la Charte des droits et libertés seraient alors assujettis à la disposition dérogatoire prévue à l'article 33.
     La députée de Portage—Lisgar sait-elle s'il existe un critère particulier qui pourrait s'appliquer et qui permettrait d'aider les députés à évaluer quand il serait opportun d'invoquer l'article 33?
     J'avais proposé que nous utilisions des critères similaires à ceux prévus à l'article 1, pour porter le moins possible atteinte aux droits garantis par la Charte.
    Madame la Présidente, ce sont là de graves questions.
    Comme l'a dit mon collègue, aucune législature n'a eu recours à la disposition de dérogation. Ce sont des discussions que nous souhaiterions ne jamais tenir, car elles ont un caractère plutôt négatif. Même aujourd'hui, si le gouvernement actuel devait en parler dans un contexte quelconque, il y aurait sans doute des réactions négatives. On a un peu l'impression de manquer à la rectitude politique juste à en parler. Nous devrions en parler, que ce soit officieusement ou officiellement. Quel serait le critère? Personnellement, je pense qu'il faudrait entre autres que, si un gouvernement décide d'invoquer la disposition de dérogation, il s'engage à soumettre la question à l'électorat, ce qui donnerait une protection supplémentaire.
     Ce sont là de bonnes questions. Je n'ai pas de réponses précises. Je sais simplement que les électeurs ont de moins en moins l'impression d'avoir leur mot à dire puisqu'on ne leur a même pas demandé leur opinion sur le suicide assisté pendant la campagne électorale. Certains d'entre eux croient encore que la sédation palliative est une forme de suicide assisté, ce qui n'est pas le cas. Il doit être possible de mieux signaler aux Canadiens que leur opinion compte et que notre système a lui aussi des pouvoirs, de sorte qu'aucun élément de notre régime démocratique est plus puissant que l'autre.
(1725)
    Madame la Présidente, nos collègues du parti ministériel ont insisté sur l'importance de ce débat et de la discussion, mais ils ont fait dans ce dossier la même chose que dans les autres. Ils ont pointé un doigt accusateur vers l'ancien gouvernement, affirmant qu'il n'avait rien fait, et rappelé à quel point il s'agit d'une question importante. Plus tôt aujourd'hui, toutefois, le gouvernement actuel a tenté de mettre un terme au débat. Voici ce qui m'inquiète. Le gouvernement a limité la discussion tout au long du processus, que ce soit au comité spécial ou dans le cadre du débat d'aujourd'hui.
     En renvoyant le projet de loi au comité, parce que c'est ce qui va arriver qu'on le veuille ou non, la députée croit-elle, au vu de tout ce que le gouvernement a fait jusqu'à maintenant, que le comité tiendra des consultations ouvertes et équitables sur ce projet de loi alors que le gouvernement nous conseille de simplement lui faire confiance et de le croire quand il affirme que les droits seront protégés? La députée éprouve-t-elle les mêmes inquiétudes que moi relativement à ce que nous avons vu par le passé?
    Madame la Présidente, généralement, je suis la première à lancer des flèches partisanes à mes collègues. Je suis convaincue que certains députés ministériels veulent rapidement mettre fin au débat et passer à autre chose. Cela dit, j'ose croire que certains députés du Parti libéral, qui font partie du caucus libéral, ont des inquiétudes semblables aux nôtres, et j'espère qu'ils se feront entendre.
    Je sais que de nombreuses personnes ont mentionné que le gouvernement en poste veut que les députés d'arrière-ban aient davantage leur mot à dire et puissent exercer une plus grande influence au sein du gouvernement. Par conséquent, j'espère qu'ils communiquent avec les électeurs et qu'ils se rendent aussi compte qu'il s'agit d'une question très complexe et importante. J'espère que les députés pourront voter librement. Ensuite, j'espère qu'ils recommanderont fortement aux autres membres de leur caucus de consacrer suffisamment de temps à l'étude de cette question et de tenir compte des amendements proposés.
    Dans ce cas-ci, nous misons sur l'intégrité et la force des députés d'arrière-ban libéraux; nous souhaitons que chacun puisse faire valoir son point de vue comme il se doit auprès des députés qui occupent les premières banquettes et qui veulent que les choses progressent rapidement. C'est ce que j'espère.
    C'est vraiment difficile. Ce n'est facile pour personne. J'ose croire que les députés d'arrière-ban et le gouvernement sont animés des meilleures intentions qui soient.
     Monsieur le Président, conformément à l'article 26(1) du Règlement, je propose:
     Que la Chambre continue de siéger au-delà de l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien pour étudier le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), à l'étape de la deuxième lecture.
(1730)
    Que les députés qui s'opposent à la motion veuillent bien se lever.
    Et 15 députés ou plus s'étant levés:
    Le vice-président: Plus de 15 députés s'étant levés, la motion est retirée d'office.

    (La motion est retirée.)

Avis de motion d'attribution de temps

    Monsieur le Président, il n'a pas été possible d'arriver à un accord visé aux paragraphes 78(1) ou 78(2) du Règlement en ce qui concerne l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois (aide médicale à mourir).
    En vertu des dispositions du paragraphe 78(3) du Règlement, je donne avis que, à la prochaine séance de la Chambre, un ministre proposera une motion prévoyant pour les délibérations à cette étape un certain nombre de jours ou d'heures.
    Monsieur le Président, je pense avoir une suggestion plus raisonnable pour la gestion du temps qu'il reste pour débattre du projet de loi C-14. Par conséquent, je demande le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion suivante:
    Que, nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le mardi 3 mai 2016, la Chambre continue de siéger au-delà de l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien pour étudier le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), à l'étape de la deuxième lecture, et que, lorsque plus aucun député ne se lèvera pour prendre la parole ou que à minuit le même jour, selon la première éventualité, le débat soit réputé ajourné, et la Chambre soit réputée ajournée jusqu'au prochain jour de séance.
    Le leader de l'opposition à la Chambre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?
    Des voix: D'accord.
    Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?
    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

    Comme il est 17 h 37, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires]

[Traduction]

Le Code criminel

     propose que le projet de loi C-247, Loi modifiant le Code criminel (détecteur passif), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    — Monsieur le Président, je suis fier de prendre la parole au sujet de mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-247. S'il est adopté, le projet de loi C-247 empêchera des blessures et des décès causés par la conduite en état d'ébriété, qui continue de causer des tragédies épouvantables qui pourraient être évitées partout au Canada. Plus précisément, le projet de loi C-247 aura un effet dissuasif et augmentera le nombre d'arrestations en permettant l'utilisation de détecteurs passifs d'alcool lors de contrôles routiers pour repérer les conducteurs ivres. Je présenterai bientôt les détails de cette proposition.
    En outre, le projet de loi C-247 renommerait le crime de « conduite avec capacités affaiblies causant la mort », qui s'appellerait désormais « homicide au volant » causé par des capacités affaiblies. La nouvelle appellation indiquerait une plus grande responsabilité morale en cas de conduite avec capacités affaiblies, tout en préservant le pouvoir discrétionnaire des juges d'adapter les peines aux circonstances.
    Cette modification découle d'une proposition appelée la loi de Kassandra présentée en 2015 par le député conservateur de Langley—Aldergrove. Je suis reconnaissant qu'il ait appuyé la présentation du projet de loi C-247 et je suis heureux que nous puissions travailler ensemble au-delà des lignes de parti pour empêcher la conduite avec facultés affaiblies pour le bien de tous les Canadiens.
    La conduite avec facultés affaiblies touche les citoyens de toutes les circonscriptions à l'échelle du pays. Ma circonscription, Mississauga—Streetsville, n'y fait pas exception. L'été dernier, les citoyens de Mississauga—Streetsville ont perdu un homme très important dans la communauté à cause de cela. C'était un leader, un enseignant, un mentor, mais avant tout, un père et un mari. Par respect pour sa famille, je vais m'abstenir de le nommer.
    Hélas, un soir de juillet 2015, un camion piloté par un chauffeur ivre est venu le heurter par-derrière alors qu'il était à vélo, et il a été déclaré mort sur les lieux de l'accident. Comme enseignant au niveau secondaire, il a passé des années à instruire et à inspirer les jeunes de ma circonscription. Ses anciens élèves et les gens qui le connaissaient m'ont parlé de l'influence positive qu'il avait sur ceux qui l'entouraient. Je crois comprendre qu'il a incité de nombreux étudiants à faire des études postsecondaires.
    Sa vie a été tragiquement interrompue par un conducteur en état d'ébriété, par quelqu'un qui avait choisi de mettre la vie d'autrui en danger plutôt que d'appeler un taxi. À cause de sa mort, cinq enfants ont été privés de leur père, et une femme, de son mari. Des étudiants ont perdu leur enseignant, et des jeunes ont perdu leur mentor, cette personne qui aurait pu les aider à faire de bons choix de vie.
    Peu de temps après avoir été élu, j'ai reçu un courriel d'une citoyenne que cette mort avait grandement peinée et qui s'inquiétait du fait que des tragédies absurdes comme celle-là continuent de se produire à un rythme alarmant dans notre pays. Elle m'implorait d'agir. C'est donc ce que je compte faire avec le projet de loi C-247.
    Comme je l’ai dit, si on l’adopte, le projet de loi évitera des blessures et des décès dus à la conduite avec facultés affaiblies. Il y parviendra grâce à deux mesures visant à augmenter la dissuasion et le taux d’arrestation. La première mesure autorise les policiers à utiliser le détecteur d'alcool passif lors de contrôles routiers aléatoires. Que signifierait ce changement?
     Actuellement, au Canada, les services policiers dressent des barrages routiers pour contrôler au hasard l’état des conducteurs. En Ontario, par exemple, il y a le programme RIDE, pour Reduce Impaired Driving Everywhere. Dans le cadre de ce programme, les agents demandent un alcootest s’ils ont des motifs raisonnables de croire que le conducteur a consommé de l’alcool, en se fiant à l’apparence et à l’odeur. Cependant, selon un rapport publié en 2009 par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, on arrête une fraction seulement des personnes qui conduisent en état d’ébriété.
    Le projet de loi C-247 augmenterait le taux d’arrestation et accroîtrait la dissuasion en autorisant les policiers à utiliser un détecteur d’alcool passif aux barrages routiers ou quand ils décident d’arrêter une voiture parce qu’ils ont des motifs raisonnables de croire que son conducteur est ivre. On place l’appareil près du visage du suspect et, si on obtient un résultat positif, on aurait un motif suffisant de demander un alcootest au moyen d’un ivressomètre homologué.
    Je suis sûr que l’utilisation du détecteur d’alcool passif lors des contrôles routiers aléatoires sera jugée conforme à la Charte. Je le crois parce que, dans l’arrêt Dedman c. La Reine, la Cour suprême a conclu que les interceptions aléatoires dans le cadre du programme RIDE en Ontario sont constitutionnelles parce que la conduite automobile est « une activité qui nécessite un permis, c'est-à-dire assujettie à une réglementation et à un contrôle en vue de la protection de la vie des personnes et de la propriété ». La conclusion juridique qu’on peut en tirer, c’est que la conduite automobile est une activité autorisée, en vertu d’un permis, mais qui est soumise à des limites raisonnables à cause du risque qu’elle représente pour les autres usagers de la route. L’utilisation du détecteur d’alcool passif, en ce sens, est une limite raisonnable qui est beaucoup plus efficace pour arrêter les conducteurs ivres que les méthodes de détection utilisées actuellement dans les contrôles routiers.
     Le groupe Mothers Against Drunk Driving Canada a appuyé le projet de loi C-247 et vanté les mérites du détecteur d’alcool passif. Le directeur général de MADD Canada, Andrew Murie, estime que l’utilisation du détecteur d’alcool passif par les policiers réduira considérablement le nombre de conducteurs ivres sur nos routes. Selon lui, ce projet de loi d’initiative parlementaire permettra à la police de maximiser la technologie disponible pour détecter les personnes ivres interceptées lors d’un contrôle routier. Il a ajouté que MADD Canada apprécie les efforts déployés pour réduire le nombre d’accidents, de blessures et de décès attribuables à l’alcool.
(1735)
    Permettez-moi maintenant d’évoquer la seconde mesure incluse dans le projet de loi C-247. Comme je l’ai indiqué, le crime de « conduite avec capacités affaiblies causant la mort » serait remplacé par le crime d’« homicide commis au volant d’un véhicule automobile ». Ce changement reflète une plus forte culpabilité morale, ce qui est approprié. La décision de prendre le volant d’un véhicule quand on est ivre témoigne d’un manque total de considération pour les autres, et les conséquences tragiques en sont prévisibles. La condamnation doit être à la mesure de cette culpabilité.
    Pour donner un exemple récent de l’état actuel du droit, Marco Muzzo vient d’être condamné à dix ans de prison pour avoir tué trois enfants et leur grand-père. Cette tragédie est la suite directe de sa décision de prendre le volant avec un taux d’alcoolémie près de trois fois plus élevé que la limite autorisée.
     Selon le Code criminel du Canada, il y a homicide quand une personne, directement ou indirectement, par n'importe quel moyen, cause la mort d'un être humain. La conduite en état d’ébriété causant la mort serait une forme d’homicide coupable parce qu’elle est moralement et légalement répréhensible. Dès qu’une personne ivre prend le volant, elle met la vie des autres en danger. Les mots ont du poids, ils ne sont pas vides de sens, et cette culpabilité doit se refléter dans le droit canadien. J’ajoute que le changement proposé préserve la discrétion judiciaire d’adapter la peine aux cas particuliers.
    La proposition, qui est de nommer le crime de conduite avec capacités affaiblies causant la mort pour ce qu’il est vraiment, soit un homicide commis au volant d’un véhicule automobile, a initialement été déposée sous le titre de loi de Kassandra en mémoire de Kassandra Kaulius, de Surrey, en Colombie-Britannique, une jeune fille de 22 ans victime d’un chauffard dont les facultés étaient affaiblies. Le député conservateur de Langley—Aldergrove a déposé la loi de Kassandra sous la forme du projet de loi C-652 à la législature précédente, et je suis heureux qu’il ait appuyé le projet de loi C-247.
    La semaine dernière, j’ai eu l’occasion de rencontrer les parents de Kassandra, Markita et Victor. Quand je leur ai parlé de mon allocution d’aujourd’hui, Victor a souligné que le 3 mai marque le jour même où leur merveilleuse fille de 22 ans a perdu la vie, il y a maintenant cinq ans.
    Kassandra a toujours été une fille joyeuse et enthousiaste qui aimait le sport. Ses parents se souviennent qu’à trois ans déjà, elle courait partout dans le jardin en faisant des joutes sportives avec ses frères et sœurs. Sa passion pour les sports n’a fait qu’augmenter en vieillissant. Elle faisait partie de l’équipe de volley-ball, de basket-ball et de balle molle de son école secondaire. Elle a fini par recevoir des bourses aux étudiants-athlètes. Elle rêvait de devenir enseignante.
     D’une part, ce projet de loi nous vient d’un enseignant qui savait inspirer ses élèves et qui leur a été enlevé injustement. D’autre part, une partie de ce projet de loi porte le nom d’une jeune femme qui rêvait de devenir enseignante et qui a perdu injustement la vie.
     Je tiens aussi à mentionner l’organisme Families For Justice. Markita et Victor ont travaillé très fort pour fonder cet organisme qui vise à sensibiliser la population à la conduite avec facultés affaiblies. Ils ont recueilli plus de 100 000 signatures pour appuyer leur cause. J’admire beaucoup les efforts qu’ils ont faits pour offrir du soutien et des services de counseling aux familles qui ont perdu un proche.
    Il ne m’est pas nécessaire de rappeler à la Chambre les ravages que font les personnes qui prennent le volant avec des facultés affaiblies. Selon l’organisme MADD, la conduite avec facultés affaiblies demeure la première cause des décès criminels au Canada. Ce crime tue presque deux fois plus de personnes chaque année que toutes les catégories d’homicide combinées.
     En 2010, la conduite avec facultés affaiblies a causé environ 1 082 décès, 63 281 blessures et des dommages financiers et sociaux s’élevant à 20,62 milliards de dollars. Soulignons également que, selon Statistiques Canada, 53 % des victimes adultes avaient entre 18 et 35 ans. Autrement dit, le Canada a perdu de jeunes esprits qui auraient façonné l’avenir de notre pays.
     De plus, le bilan de la lutte contre la conduite avec facultés affaiblies au Canada n’est pas brillant par rapport à ceux d’autres pays industrialisés. Des millions de Canadiens s’obstinent à conduire après avoir consommé de l’alcool, convaincus qu’ils ne risquent pas vraiment de se faire arrêter.
    Selon les résultats d’un examen mené sur 15 pays, le Canada est le deuxième pays où l'alcool cause le plus d’accidents mortels. De plus, une étude de Transports Canada a révélé que sur huit pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques, le Canada affiche le taux de facultés affaiblies le plus élevé chez les conducteurs tués dans un accident. Le Canada affiche aussi, parmi 13 pays, le taux d’accidents de la circulation mortels dus à l’alcool le plus élevé par rapport au nombre total d’accidents routiers mortels.
    Bien que les programmes de tests d’haleine sélectifs marquent un grand progrès dans la lutte contre la conduite avec facultés affaiblies, la majorité des conducteurs qui ont bu avant de prendre le volant ne sont pas détectés en passant aux contrôles routiers. Selon l’organisme MADD, sur les quatre à cinq millions de conducteurs qui passent par un contrôle routier chaque année, moins de 1 % subit un test d’haleine effectué à l’aide d’un appareil de dépistage approuvé.
     C’est pourquoi la mesure principale que contient mon projet de loi, l’autorisation d’utiliser des détecteurs d’alcool passifs, est essentielle et se fonde sur des données probantes. Ces appareils détectent la présence d’alcool et en indiquent le volume approximatif dans l’haleine du conducteur en analysant l’air ambiant qui entoure sa bouche.
(1740)
    Cet appareil contient aussi une pompe qui aspire l'air au-dessus d'un senseur qui détecte l'alcool et qui donne un relevé en quelques secondes.
    Les détecteurs d'alcool passifs représentent un moyen facile, fiable et non intrusif de contrôler efficacement un grand nombre de conducteurs dans un minimum de temps, ce qui, au final, sauvera davantage de vies année après année.
    Les détecteurs d'alcool passifs existent depuis un certain temps. La technologie n'est pas nouvelle, mais il s'agissait cependant, à l'origine, d'unités autonomes. Il importe de signaler, lorsqu'il est question de détecteurs d'alcool passifs, que nous discutons simplement, pour l'essentiel, d'une fonctionnalité incorporée à beaucoup d’appareils de détection approuvés qu'utilisent déjà les agents de la paix. Autrement dit, l'autorisation expresse du détecteur d'alcool passif permettra vraisemblablement aux agents de continuer d'utiliser les appareils actuels, ce qui optimisera les outils qu'ils ont déjà en main.
     Comme le disait Robert Solomon, professeur de droit à l'Université Western: « [...] rien n'empêche actuellement les policiers canadiens d'utiliser les détecteurs d'alcool passifs ».
    Quoi qu'il en soit, il serait utile de modifier le Code criminel pour autoriser explicitement les policiers à utiliser les détecteurs d'alcool passifs. On établirait ainsi une norme nationale qui, au bout du compte, diminuerait la confusion attribuable à l'existence de 13 différentes autorités et pratiques provinciales et territoriales en matière d'application de la loi. Les policiers seraient aussi plus enclins à utiliser les détecteurs d'alcool passifs si la loi leur en conférait expressément le pouvoir. De plus, la publicité entourant l'adoption d'un programme national de détecteurs d'alcool passifs et le fait que les policiers appliqueraient désormais des méthodes de détection plus perfectionnées augmenteraient la perception qu'ont les conducteurs du risque de se faire prendre, ce qui, à la longue, aurait un effet dissuasif.
     Au cours des derniers mois, j'ai consulté de nombreux agents et chefs de police partout au pays. Il est évident que l'idée de donner plus d’outils à la police fait très largement consensus.
    En conclusion, le Parlement doit s'attaquer plus efficacement au problème de l'ivresse au volant. Mon projet de loi a pour but non seulement de modifier notre perception des infractions de conduite avec facultés affaiblies, mais également de réduire le nombre de décès et de blessures grâce à la technologie moderne. Il est à espérer que l'adoption du projet de loi C-247 contribuera à décourager l'alcool au volant afin de protéger les Canadiens, leurs familles et nos collectivités.
    J'ai bien hâte de voir ce projet de loi renvoyé au comité et je suis réceptif aux amendements qui pourraient être proposés.
(1745)
    Monsieur le Président, je tiens d'abord à féliciter mon collègue de son premier projet de loi d’initiative parlementaire et aussi des efforts sincères qu’il déploie pour combattre l'alcool au volant.
     Le député et moi-même représentons la même ville, Mississauga, où le Service de police de la Région de Peel mène souvent des programmes RIDE. Le député expliquerait-il en quoi le projet de loi aiderait le Service de police de la Région de Peel à lutter contre l'alcool au volant?
    Monsieur le Président, l'utilisation de détecteurs d'alcool passifs permettrait non seulement d'accélérer le programme RIDE, mais aussi de prendre des mesures plus précises. On pourrait utiliser le détecteur d'alcool passif intégré à un appareil de dépistage actuellement approuvé pour essentiellement détecter avec plus de précision la présence d'alcool dans l'air ambiant à hauteur du visage du conducteur. Parce que cette vérification serait plus précise et plus rapide, les policiers pourraient contrôler davantage de conducteurs et, ainsi, arrêter ceux qui sont éventuellement en état d'ébriété.
    Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de son premier projet de loi d'initiative parlementaire.
    Le député en a peut-être traité dans son discours et cela m'a échappé, mais pourrait-il nous dire quels autres pays utilisent ce dispositif? L'utilisation de cette nouvelle technologie par les services de police a-t-elle donné lieu à des contestations constitutionnelles ou judiciaires?
    Monsieur le Président, à ma connaissance, on l'utilise aux États-Unis, en particulier en Californie. Je crois que des détecteurs semblables sont également utilisés en Australie.
    J'ignore s'il y a eu des contestations judiciaires à ces endroits, mais je crois que l'utilisation du détecteur d'alcool passif résisterait à une contestation fondée sur la Charte, comme je l'ai indiqué dans mon discours, en raison de l'arrêt Dedman c. La Reine, dans lequel on indique grosso modo que c'est une limite raisonnable, car la possession d'un permis de conduire est essentiellement un privilège, et que la volonté d'assurer la sécurité d'autrui constitue un motif raisonnable d'empêcher une personne de conduire.
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député. C'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur puisque j'ai perdu un frère, il y a longtemps, à cause de l'alcool au volant.
    J'ai moi-même présenté quelques projets de loi d'initiative parlementaire; il faut suivre le processus, rédiger la mesure législative et rencontrer les parties concernées. Le député a mentionné l'organisme Mothers Against Drunk Driving. Y a-t-il d'autres organismes, y compris peut-être des services de police ou des associations de policiers, qui sont en faveur de l'utilisation de cet appareil? Le député pourrait-il également éclairer la Chambre à ce sujet?
    Monsieur le Président, je suis désolé d'apprendre la perte que le député a subie. Comme il l'a souligné, Mothers Against Drunk Driving appuie le projet de loi. J'ai parlé à plusieurs services de police. Comme je n'ai pas encore obtenu leur appui de façon officielle, je préfère ne pas les nommer pour l'instant, mais je les consulte. J'espère obtenir leur appui bientôt.
(1750)
    Monsieur le Président, je tiens à féliciter mon collègue de l'excellent travail qu'il a réalisé afin de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire qui semble jouir d'un appui assez vaste, que ce soit à la Chambre ou ailleurs. Je crois comprendre que le député est ouvert à la possibilité d'apporter des amendements.
    J'aimerais que le député explique de quelle façon la technologie ajoute souvent une nouvelle corde à l'arc des policiers, si je puis m'exprimer ainsi, afin de rendre les rues plus sûres.
    Monsieur le Président, nous devrions toujours tirer profit de l'évolution technologique. Comme je l'ai souligné, le détecteur d’alcool passif existe depuis très longtemps, mais il s'agissait auparavant d'un dispositif autonome. Il est maintenant intégré aux appareils de détection approuvés qu'emploient de nombreux organismes.
    C'est un outil qui est à leur disposition et il n'est pas utilisé actuellement. Cet outil technologique est à leur disposition, et nous devrions l'utiliser pour arrêter les conducteurs ivres.
    Monsieur le Président, c'est un privilège de prendre la parole à propos du projet de loi C-247.
    Je tiens tout d'abord à féliciter le député de Mississauga—Streetsville de son discours enflammé. Bien qu'il me soit impossible d'appuyer ce projet de loi pour des raisons que j'expliquerai dans un instant, je reconnais les bonnes intentions qui l'inspirent et la noblesse des objectifs que poursuit le député.
    La conduite avec facultés affaiblies est la principale cause de décès attribuable à un acte criminel au Canada. Cette situation est tout simplement inadmissible en 2016. Cela dit, il faut reconnaître que la conduite avec facultés affaiblies a considérablement diminué au cours des dernières décennies. Depuis 20 ans, on note une baisse du pourcentage de décès survenus dans des accidents de la route et impliquant un conducteur aux facultés affaiblies. Ce pourcentage peut avoir parfois augmenté d'une année à une autre, mais la tendance est clairement à la baisse. Bien qu'il soit trop tôt pour célébrer, ces résultats montrent l'effet positif de la combinaison de mesures déployées au cours des dernières décennies, axées sur la sensibilisation de la population, le travail policier et les changements législatifs.
    Néanmoins, il demeure que des personnes continuent de conduire avec les facultés affaiblies et qu'elles font des ravages sur les routes. Ce sont des personnes comme Johnathan Pratt. En 2011, celui-ci a tué trois jeunes hommes à l'extérieur de Beaumont, en Alberta. M. Pratt avait un taux d'alcoolémie trois fois supérieur à la limite légale et conduisait à 199 kilomètres à l'heure sur une autoroute lorsqu'il a embouti un véhicule dans lequel se trouvaient les jeunes hommes, qui sont morts écrasés.
    Il y a également Roger Walsh, qui a tué une femme en fauteuil roulant alors qu'il conduisait avec les facultés affaiblies. C'était la 19e fois qu'il était reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies.
    La grande majorité des Canadiens comprennent que la conduite avec facultés affaiblies est dangereuse, illégale et tout à fait répréhensible. La grande majorité des Canadiens comprennent ces faits. Ils en tiennent compte et prennent la décision de ne pas conduire lorsque leurs facultés sont affaiblies.
    Cependant, certaines personnes choisissent de conduire alors que leurs facultés sont affaiblies. Ces personnes ne correspondent pas à un profil particulier. Dans de nombreux cas, ce sont des gens qui conduisent rarement ivres ou qui choisissent de le faire un soir fatidique et qui, en fin de compte, causent des blessures ou qui causent la mort de personnes sur la route. Une grande partie du problème, toutefois, ce sont les personnes qui conduisent en état d'ébriété de façon régulière et répétée et qui font des ravages sur nos routes.
    La question que nous devons poser en tant que parlementaires est la suivante. Quelles mesures devons-nous prendre pour remédier au problème que pose un nombre relativement faible de personnes qui causent énormément de douleur, de morts et de blessures sur nos routes? La réponse, c'est que nous devons faire en sorte que ces contrevenants répondent de leurs actes par tous les moyens légaux. Malheureusement, certaines lois à l'heure actuelle ne sont tout simplement pas efficaces à cet égard.
(1755)
    C'est pourquoi j'étais très heureux de voir mon collègue, le député de Bellechasse—Les Etchemins—Lévis, présenter le projet de loi d'initiative parlementaire C-226, qui contient des mesures importantes visant à tenir responsables de leurs actes les conducteurs qui se rendent coupables d'infractions graves liées à la conduite avec facultés affaiblies. Le projet de loi imposerait des peines minimales obligatoires aux personnes qui conduisent avec facultés affaiblies et sont responsables de la mort d'autres personnes. Il ferait passer de 10 ans à 14 ans la peine pour la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles. Il permettrait aussi d'imposer des peines consécutives dans le cas de conduite avec facultés affaiblies causant de multiples pertes de vie afin que toutes les victimes soient prises en considération.
     Malheureusement, je crois que, contrairement au projet de loi C-226, le projet de loi  C-247 ne tient pas les personnes qui conduisent en état d'ébriété de façon régulière et répétée suffisamment responsables de leurs actes. Le projet de loi C-247 ne va pas assez loin sur ce plan, mais il imposerait un contrôle aléatoire du taux d'alcool à l'aide de détecteurs passifs. Je reconnais certes que le projet de loi C-226 ne prévoit pas de détecteurs passifs, mais j'ai certaines réserves à propos de toute forme de contrôle aléatoire du taux d'alcool.
    Ce type de contrôle contreviendrait certainement aux articles 8 et 9 de la Charte. On peut certainement soutenir que les manquements à ces articles peuvent être justifiés par l'article premier de la Charte. Je crois qu'il y aurait des chances raisonnables que cela se produise. Cependant, la question est de savoir dans quelle mesure ces contrôles réduiraient le nombre de conducteurs en état d'ébriété et de morts sur nos routes. Les avis sont partagés à cet égard.
    En fait, selon certains corpus de données statistiques, ce type de test n’est pas plus efficace pour réduire la conduite avec facultés affaiblies que les outils actuellement utilisés par les organismes d’application de la loi, tels que les contrôles routiers. Ces dernières années, la ville d’Edmonton a utilisé un moyen qui s’est avéré très efficace, en diffusant des affiches qui invitaient les gens à signaler au 911 les conducteurs en état d’ébriété. Je pense donc que nous devrions envisager des solutions autres que les tests d’haleine aléatoires. Qui plus est, je crois que cette loi n’est tout simplement pas suffisante pour sanctionner les délinquants les plus dangereux.
    Pour toutes ces raisons, j’ai le regret de ne pas appuyer ce projet de loi. Je félicite toutefois le député qui l’a présenté, car cela donne lieu à un débat sur un sujet important dont le Parlement doit continuer de se saisir.
(1800)

[Français]

    Monsieur le Président, je tiens à préciser que j'appuierai le projet de loi présenté par mon collègue libéral. Nous considérons que c'est un outil pour mieux détecter l'alcool, mais il reste que le problème d'alcool au volant est beaucoup plus complexe que cela. C'est donc une mesure parmi plusieurs autres qui doivent être mises en place pour mieux détecter l'alcool au volant.
    Le projet de loi permettrait aux policiers d'utiliser des détecteurs passifs d'alcool. En quelque sorte, ce sont des bandes de couleur rapprochées, qui détectent la présence d'alcool dans l'air ambiant. Pour qu'un policier puisse procéder à un alcootest, il doit avoir un soupçon qu'il y a eu consommation d'alcool. On parle de consommation d'alcool, ce qui veut dire qu'il ne doit pas nécessairement soupçonner que la personne est en état d'ébriété, mais seulement qu'il y a eu consommation d'alcool. Il peut ainsi procéder à un alcootest.
    Par conséquent, cette bande ne sera pas utilisée comme preuve, mais elle va lui donner l'outil suffisant pour pouvoir procéder à l'alcootest, et peut-être ainsi détecter davantage de gens qui ont bu de l'alcool. Cela pourrait peut-être contribuer à la prévention de l'alcool au volant. Chaque année, trop de familles sont victimes de l'alcool au volant. C'est pour cela qu'on ne doit pas se priver des outils disponibles. Par ailleurs, on doit aller beaucoup plus loin dans la prévention de l'alcool au volant. Il y a beaucoup de facteurs à considérer. Quand il s'agit des régions rurales, il y a toutes les questions d'infrastructure, de transports en commun ou d'organismes qui organisent, par exemple, des services de raccompagnement.
    Lorsqu'il y a peu d'options de rechange pour que les gens puissent retourner à la maison après une soirée, cela peut malheureusement avoir un impact négatif sur la sécurité routière. Il faudra explorer ces aspects. Une statistique a révélé que cela peut prendre jusqu'à trois ans avant que quelqu'un qui conduit en état d'ébriété soit détecté par les forces policières.
    Par exemple, dans nos régions rurales, les personnes qui boivent peuvent décider d'utiliser des petites routes de campagne peu fréquentées pour retourner à la maison, afin d'éviter les contrôles routiers. Il y a aussi des gens qui consomment de l'alcool le matin. Déjà à midi, ces personnes peuvent être en état d'ébriété. Souvent, les barrages routiers se font le soir. Cela ne nous permet pas nécessairement de détecter toutes les personnes susceptibles d'avoir les facultés affaiblies. En outre, ce n'est peut-être pas la première chose à laquelle on pense lorsqu'on intercepte quelqu'un qui aurait, par exemple, omis d'effectuer un arrêt obligatoire à 11 heures le matin.
    En utilisant l'outil en question, nous pourrions peut-être détecter davantage de ces gens. C'est donc un bon outil, mais il faut faire beaucoup plus pour dissuader les gens de conduire avec les facultés affaiblies. Bien sûr, quand on augmente le risque d'une arrestation, soit le risque de se faire prendre, cela peut avoir un impact sur le nombre de conducteurs aux facultés affaiblies, mais on peut faire beaucoup plus.
    Malheureusement, il y a des gens qui récidivent régulièrement. C'est très difficile d'en venir à bout. On voit aussi des cas où il n'y a aucun doute sur l'état de la personne. Quand ces personnes décident de conduire avec les facultés affaiblies et qu'ils ne causent pas de blessures à autrui, les conséquences ne sont malheureusement pas si grandes pour eux. Cela peut donc s'étirer sur une très longue période de temps et, par conséquent, la sécurité de la population est à risque pendant cette même période.
    Par conséquent, il faut vraiment adopter une approche plus éclairée et examiner le problème d'alcool au volant dans sa globalité.
    Comme je l'ai dit, nous allons appuyer la mesure présentée par mon collègue, mais c'est une petite mesure parmi un ensemble beaucoup plus grand de mesures qui doivent être mises en place pour réussir à faire diminuer le problème de l'alcool au volant.
(1805)
    Dans ma circonscription, le taux de personnes qui conduisent avec les facultés affaiblies n'est pas proportionnel à la population. Par exemple, dans la MRC du Témiscamingue, qui a la plus petite population parmi les quatre MRC que je représente, on trouve davantage de cas d'alcool au volant. C'est aussi la MRC qui a le territoire le plus étendu, et il y a très peu de services de taxi.
     Ville-Marie est la principale ville de la MRC du Témiscamingue, et je crois qu'il y a un seul taxi qui dessert son territoire. De plus, il ne travaille pas le soir. Cela démontre qu'il y a un manque d'infrastructure. Il n'y a pas de services de taxi parce que la demande n'est pas assez importante, et il n'y a pas non plus d'organisme local qui fournit des services raccompagnement. Cela peut entraîner des gens à prendre des risques qu'ils ne devraient pas prendre. Localement, on fait beaucoup de sensibilisation. On essaie de faire comprendre aux gens qu'ils doivent planifier leur retour avant même de commencer à boire. C'est un travail constant.
    Les organismes qui visent à prévenir l'alcool au volant devraient être appuyés davantage, surtout dans les régions rurales, où les gens disposent de peu d'alternatives. On ne peut pas leur dire de prendre l'autobus, de marcher ou de prendre leur bicyclette. C'est tout simplement impensable. Par exemple, il y a des gens qui demeurent à 30 kilomètres de la ville. C'est très difficile. Même en taxi, ce n'est pas évident.
    Alors, en matière d'alcool au volant, il faut avoir une meilleure stratégie que les détecteurs passifs. Il faut mieux comprendre la situation et prendre le temps de parler avec les gens sur le terrain. Il faut discuter avec les gens qui ont été reconnus coupables de conduite avec facultés affaiblies, afin de déterminer ce qu'ils auraient pu faire pour éviter de prendre le volant. Il faut apprendre des erreurs du passé pour prévenir la perte de vies. Ce n'est vraiment pas facile.
    En tant que soignante, j'ai déjà reçu en pleine nuit une personne inconsciente à l'hôpital qui, quelques minutes plus tôt, était au volant de sa voiture avec plus de deux fois la limite potentiellement mortelle d'alcool dans le sang. Quand on voit des gens dans cet état-là, on ne parle plus de personnes en état d'ébriété, mais plutôt de gens qui sont saouls comme des bottes — je m'excuse pour l'expression.
    Quand on est témoin d'une telle situation, on ne peut qu'espérer que davantage d'efforts seront déployés pour régler le problème de l'alcool au volant. Cela fait des années que cela perdure, et je ne crois pas qu'on y arrive en y allant pièce par pièce. Il faut avoir un plan global. J'espère qu'un tel plan sera déposé et qu'on fera un grand pas vers l'avant en matière de prévention de l'alcool au volant.
    Il ne faut pas oublier qu'une grande partie de la population canadienne a perdu un proche à cause de l'alcool au volant. J'espère que mes enfants ne seront jamais exposés à ce danger, que je vais pouvoir leur offrir des infrastructures et que je vais leur apprendre à être responsables quant à leur consommation d'alcool. J'espère que davantage de vies ne seront pas ainsi perdues et que davantage de familles ne seront pas brisées.
    Cela m'a fait plaisir de m'exprimer. J'ai hâte de suivre l'étude en comité et j'espère qu'un plan beaucoup plus complet suivra.
(1810)

[Traduction]

    Monsieur le Président, c’est pour moi un très grand honneur et un plaisir de prendre part à la deuxième lecture du projet de loi C-247 présenté par le député de Mississauga—Streetsville.
    Je commencerai pas féliciter le député de Mississauga—Streetsville pour la passion et l’engagement qu’il manifeste à propos de ce très grave problème de société.
    Lui et moi avons eu le privilège de nous entretenir des soucis que suscite chez lui la conduite avec facultés affaiblies et des diverses approches qu’il a proposées pour lutter contre ce phénomène. Il m’a rapporté certaines histoires, comme il l’a fait aujourd’hui concernant le décès de Kassandra, mais d’autres motifs l’ont poussé à présenter ce projet de loi et je tiens à le féliciter pour sa passion et son dévouement à cette cause importante.
    On ne saurait trop insister sur l’incidence sociale de la conduite avec facultés affaiblies au Canada. On connaît les statistiques, mais il est important de voir par quelles conséquences elles se traduisent dans les familles et les collectivités du pays.
    Chaque année en moyenne, près de 1 500 Canadiens périssent parce qu'un Canadien a décidé de prendre le volant d'un véhicule motorisé sous l'influence de l'alcool. Autrement dit, en moyenne, près de quatre personnes par jour perdent la vie; toutes les localités canadiennes et presque toutes les familles canadiennes ont été secouées par cet effroyable crime. Comme on l'a déjà mentionné, la conduite avec facultés affaiblies est la principale cause de décès attribuable à un acte criminel au Canada.
    Comme l'a fait remarquer mon collègue, le député de St. Albert—Edmonton, la situation s'est améliorée dans les dernières décennies dans la mesure où le comportement en question est condamné plus sévèrement par la société et le nombre de conducteurs aux facultés affaiblies a diminué, mais il reste encore tant de travail à faire.
    Il est important de réfléchir aux raisons pour lesquelles la situation s'est améliorée. Je commençais ma carrière de policier en 1979 lorsque Toronto a lancé son premier programme de dépistage routier, le programme RIDE, suite au grand succès qu'il a connu dans sa localité d'origine, Etobicoke. Mes jeunes collègues policiers et moi avaient l'ordre d'arrêter des véhicules au hasard afin de déterminer si leur conducteur était en état d'ébriété.
    Ce programme avait deux objectifs très importants. Le premier objectif était de détecter les gens qui conduisaient avec les facultés affaiblies et de les tenir responsables de leurs actes. Le deuxième objectif, et celui qui avait peut-être le plus d'impact et le plus d'importance, était de dire très clairement à quel point la société condamnait la conduite avec facultés affaiblies et à quel point la société, la police et les instances judiciaires prenaient au sérieux cette infraction. Le programme a également inculqué davantage à la population qu'il s'agit d'un crime, un crime contre lequel nous lutterions efficacement, un crime dont nous augmenterions la probabilité de détection et dont les conséquences seraient plus certaines, seraient considérables et seraient suffisamment graves pour décourager ce comportement criminel.
    D'autres outils et technologies ont amélioré l'efficacité de ces interventions routières. Par exemple, il y a de nombreuses années, des appareils de détection utilisés sur les lieux de l'infraction ont été mis au point pour permettre aux policiers de faire subir un test aux personnes qu'ils soupçonnaient raisonnablement d'avoir consommé de l'alcool avant de prendre le volant d'un véhicule.
    Si je le puis, je vais expliquer un peu à mes collègues la procédure. J'ai acquis tout de même assez d'expérience en vérifications ponctuelles routières dans le cadre du programme RIDE en tant que policier à Toronto. Je crois que cela fait 20 ans que je passe la veille du jour de l'An en bordure de la route avec d'autres policiers à arrêter des véhicules.
    Lors de ces vérifications au hasard, l'agent de police demande au conducteur de s'arrêter, fait certaines observations et pose certaines questions. Parmi les observations, l'agent de police tentera de détecter si le conducteur présente une odeur d'alcool, a les yeux vitreux ou a des difficultés d'élocution. On demandera à ces conducteurs s'ils ont bu de l'alcool.
    Si, d'après ses observations, un agent de police soupçonne le conducteur d'avoir consommé de l'alcool — et il faut que ce soit des soupçons raisonnables, pas de simples soupçons, mais pas non plus des motifs raisonnables et probables —, il est autorisé à obliger le conducteur à passer un alcootest, et les résultats de ce test peuvent entraîner d'autres conséquences, dont je vais parler. Toutefois, comme les agents de police arrêtent des milliers de véhicules en une soirée, la possibilité de déterminer si une personne a consommé de l'alcool est plutôt limitée.
(1815)
    D'après l'expérience des agents de police du pays qui procèdent à ces vérifications au hasard, les gens n'admettent pas avoir consommé de l'alcool ou les signes de consommation ne sont pas évidents. Nous savons que de nombreuses personnes passent sous le radar, malgré le très grand nombre de ressources déployées et les grands efforts réalisés pour améliorer nos communautés. Pour ceux d'entre nous qui ont travaillé dans les rues de nos communautés et vu le carnage, l'impact de l'alcool au volant sur les familles et des milliers de personnes qui ont perdu un proche, il est évident que nous devons en faire plus.
    Le système judiciaire actuel traite près de 60 000 causes criminelles associées à la conduite avec facultés affaiblies chaque année. En plus de cela, des dizaines de milliers de personnes sont blessées parce qu'une autre personne a décidé de conduire après avoir bu. Il faut en faire plus. Le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par mon ami de Mississauga—Streetsville donne un outil de plus aux autorités policières pour faire leur travail.
    Le projet de loi C-247 propose de modifier le Code criminel afin d'autoriser expressément la police à utiliser au bord de la route un appareil que l'on appelle détecteur passif, ou détecteur d'alcool passif, afin de mieux repérer les conducteurs aux facultés affaiblies. Ces appareils peuvent détecter la présence d'alcool dans l'air ambiant. Il n'est pas nécessaire que le conducteur souffle dans une machine. Le détecteur passif peut inciter l'agent de police à avoir des motifs raisonnables de soupçonner que le conducteur a les facultés affaiblies; il lui demande alors de subir un alcootest sur place.
    Il y a à peine deux semaines, le député de Bellechasse—Les Etchemins—Lévis a aussi présenté un projet de loi d'initiative parlementaire, dans lequel il a formulé des propositions très importantes. De nombreux députés, tous partis confondus, sont intervenus à la Chambre pour dire qu'il faut en faire plus afin d'éliminer la conduite avec facultés affaiblies. Je pense que le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis aujourd'hui s'inscrit tout à fait dans ce contexte. Il s'agit d'un autre outil important qui pourrait nous aider à assurer la sécurité de nos collectivités.
     Nous savons depuis toujours qu'un certain nombre de mesures permettent de réduire la criminalité dans notre société. Une des choses les plus importantes que nous puissions faire comme société, c'est d'accroître les probabilités d'intercepter et de condamner ceux qui choisissent de commettre un crime. Nous savons que l'infraction de conduite avec capacités affaiblies passe souvent inaperçue, même sur les sites de dépistage routier où les agents de police arrêtent les voitures au hasard. Nous savons que le projet de loi d'initiative parlementaire augmenterait les probabilités d'interception.
    Nous savons également qu'il importe de renforcer la condamnation sociétale de la conduite avec capacités affaiblies. Nous pouvons y arriver par la sensibilisation du public, c'est-à-dire en renseignant la population sur les risques et les conséquences de la conduite avec capacités affaiblies. Je peux donner un exemple qui montre comment la probabilité accrue d'interception et de conséquences a réellement permis d'améliorer la sécurité de nos collectivités.
     Dans plusieurs provinces, les conducteurs de moins de 21 ans sont tenus de respecter la règle de zéro alcool au volant, faute de quoi leur permis est suspendu. La probabilité de subir des conséquences à la suite d'une activité de dépistage routier a eu un effet très considérable sur les conducteurs de moins de 21 ans d'un bout à l'autre du pays dans leur décision de ne pas prendre le volant après avoir bu. Cette approche a changé les attitudes sociales des jeunes à ce sujet et elle a amélioré la sécurité sur nos routes. Toute mesure que nous pouvons prendre pour inciter les gens à ne pas conduire en état d'ébriété contribuera à la sécurité routière.
    Dans le peu de temps qui m'est imparti, je voudrais également parler de l'autre élément important du projet de loi C-247, qui propose de changer le nom de deux infractions de conduite avec capacités affaiblies, à savoir l'infraction de conduite avec capacités affaiblies causant la mort et l'infraction d'alcoolémie supérieure à la limite de 80 causant la mort. En effet, il est proposé de les renommer « homicide au volant causé par des capacités affaiblies ». Je crois qu'il y a lieu d'examiner ces deux recommandations. J'ai hâte de pouvoir renvoyer cette question au comité de la justice pour plus ample discussion.
(1820)
    Selon moi, il est très important que la Chambre fasse tout en son pouvoir pour réagir aux tragédies qui frappent les familles et les collectivités à cause de la conduite avec capacités affaiblies.
    En terminant, je profite de l'occasion pour féliciter le député de Mississauga—Streetsville de son engagement, et je tiens à l'assurer de notre volonté de tout faire afin de rendre nos routes plus sûres pour nos citoyens.
    Nous reprenons le débat. Le député de Bellechasse—Les Etchemins—Lévis a la parole.
    Monsieur le Président, je remercie le député de Scarborough-Sud-Ouest d'avoir pour ainsi dire témoigné de son expérience sur le terrain. J'ai eu le privilège de le rencontrer pour la première fois ici même à Ottawa lors d'une cérémonie en l'honneur de ceux qui ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions. Dans le cadre de ce très important débat sur la conduite avec facultés affaiblies, le député fait certainement profiter la Chambre de son expérience.
    Je tiens également à saluer le député de Mississauga—Streetsville qui a présenté ce projet de loi d'initiative parlementaire. Le député de Scarborough-Sud-Ouest a déclaré que cette mesure législative donnera à la police un outil additionnel. La Chambre des communes s'emploie à donner plus d'outils aux forces de l'ordre pour réduire les décès causés par la conduite avec facultés affaiblies.
    Dans son intervention, le député a fait mention de l'autre partie de ce projet de loi d'initiative parlementaire, qui vise à changer le nom de cette infraction qui figure déjà au Code criminel. La conduite avec facultés affaiblies constitue la principale cause de décès qui figure dans le Code criminel. Cela me fait penser à une expression.

[Français]

    En français, on dit qu'il faut  appeler un chat un chat.

[Traduction]

    En anglais, on dit « we have to call a spade a spade. »
    Le député pense-t-il que, en 2016, les Canadiens sont prêts à accuser d'homicide une personne qui blesse ou qui tue quelqu'un parce qu'elle a pris la route de son plein gré alors que, de toute évidence, elle enfreignait la première exigence du code de la route qui consiste à avoir un permis de conduire et à être en pleine possession de ses moyens? Selon le député, la société canadienne est-elle prête à considérer comme un homicide la mort causée par la conduite avec facultés affaiblies?
    Nous reprenons le débat. Nous en sommes à l'heure réservée aux initiatives parlementaires en vertu du Règlement. Une période de questions et observations de cinq minutes suit l'exposé de présentation du parrain du projet de loi.
    Ceci dit, j'ai donné la parole au député de Bellechasse—Les Etchemins—Lévis lorsque nous avons repris le débat, car c'était une période réservée à son parti. Il dispose d'au plus 10 minutes s'il souhaite poursuivre ses observations. Le secrétaire parlementaire n'aura pas la possibilité de répondre, mais si le député souhaite poursuivre, il dispose d'encore 7 minutes et demie pour faire valoir son argument.

[Français]

    Monsieur le Président, je ne voudrais pas abuser du temps de mes honorables collègues, mais je tiens à dire qu'il est possible de travailler à la Chambre de manière constructive pour faire avancer des projets de loi qui vont nous permettre de sauver des vies humaines.
    Je tiens à saluer le travail du nouveau député, qui a déposé un projet de loi de manière constructive. Celui-ci mérite d'être étudié et débattu en deuxième lecture.
    J'en profite aussi pour remercier mes collègues, tant ceux des provinces de l'Ouest que ceux de l'Ontario, qui ont également appuyé le projet de loi que j'ai déposé et qui avait aussi pour objectif de sauver des vies humaines.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c’est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour ajouter quelques réflexions sur le projet de loi d'initiative parlementaire. Essentiellement, je l’ai dit tout à l’heure sous forme de question, le député de Mississauga—Streetsville a réussi à déposer un projet de loi sur un grave problème qui sévit dans toutes les circonscriptions.
    Comme plusieurs députés le savent peut-être, je siège comme député depuis un certain nombre d'années. Mon collègue et moi, le député de Winnipeg-Centre-Sud, avons été élus pour la première fois en 1988. Je me rappelle avoir consulté les résidents que je représentais peu après mon élection, pour savoir quelles questions leur tenaient à cœur. Un des problèmes qui revenait toujours était l’alcool au volant.
    Voilà à peine plus de huit mois et quelques journées de séance que le député est parmi nous et il a déjà visé en plein dans le mille en se penchant sur ce grave problème qui touche toutes les circonscriptions. Je le félicite d’avoir mis le doigt sur ce problème d’une réelle importance. Il a présenté ce projet de loi, qui fera vraisemblablement l’objet d’un vote à la Chambre. Avec un peu de chance, nous verrons le projet de loi se rendre à l’étape de l’étude en comité. Je sais que le député est ouvert aux amendements et je crois qu’il y a de fortes chances qu'il y en ait qui soient présentées.
    Je souhaite ajouter quelques réflexions de mon cru en ce qui concerne le projet de loi.
     L’orateur qui m’a précédé, l’ancien chef de police de la région de Toronto, si ma mémoire est bonne, a parlé des attitudes sociales et du degré auquel la société a changé à cet égard. J’ai trouvé intéressant qu’il mentionne le fait que les premières campagnes de sensibilisation, les premiers contrôles routiers, remontaient à 1979.
    Avant 1979, je me revois à l’âge de 12 ou 13 ans, en 1975-1976, quand j’étais pompiste pour un concessionnaire automobile. Pas très loin de moi, les mécaniciens, en compagnie d’autres personnes, consommaient de l’alcool à qui mieux mieux et trouvaient tout naturel de prendre le volant par la suite. Personne n'en faisait cas, ce n’était pas du tout mal vu. En fait, quand j’étais au secondaire, on donnait même des surnoms à ceux qui s’étaient fait arrêter pour conduite en état d’ébriété, et ce surnom faisait référence au montant de l’amende payée.
     Que d’eau a passé sous les ponts. Quand j’assiste à des cérémonies de remise de diplômes, comme nous le faisons tous, je constate, depuis quelques années surtout, que ce sont les jeunes qui prennent des initiatives pour changer les comportements liés à l’alcool au volant. Nous voyons de plus en plus d’écoles secondaires locales promouvoir le programme « Finissants sans accident » au sein de nos collectivités. Les invités peuvent participer aux activités du bal, mais ils doivent signer un document, et si les jeunes savent qu’ils vont boire, ils doivent désigner un chauffeur. J’ai vu des dépliants sur le programme « Finissants sans accident », de véritables petits recueils des responsabilités. Au nord de Winnipeg seulement, que ce soit à la Sisler High School, au Maples Collegiate, à la R.B. Russell Vocational School ou à la St. John’s High School ou ailleurs, on reconnaît l’importance de changer les comportements. Ce changement s’est amorcé, je pense, à la fin des années 1970 et au début des années 1980, lorsque nous avons commencé à voir des corps policiers en imiter d’autres ou prendre les devants face à la nécessité de changer les attitudes sociales. Je lève mon chapeau à tous ces pionniers du changement.
     Comme on l’a trop souvent fait remarquer, chaque jour des centaines de personnes perdent la vie par la faute de l’alcool au volant. Quelle terrible façon de finir ses jours, parce que quelqu’un a stupidement décidé de conduire en état d’ébriété.
(1825)
     Nous devons chercher des moyens de corriger ce problème. Et je ne parle pas des milliers de Canadiens qui, chaque année, perdent un membre ou sont blessés dans des accidents de ce type. Quand nous parlons de ces victimes, nous ne pensons pas aux membres de leur famille qui ont perdu un être cher et qui sont eux aussi des victimes, ni aux personnes qui devront assurer les soins nécessaires aux blessés. Cela peut aller d’une jambe cassée à la paralysie.
     Les coûts ainsi imposés à la société sont énormes, que ce soit sur le plan social ou sur le plan économique. C’est pour cette raison que lorsque nous cherchons à adopter de bonnes politiques publiques, nous devrions nous efforcer de trouver des initiatives qui donneront vraiment des résultats.
     Si j’ai bien compris, le détecteur d’alcool passif auquel le député fait allusion aiderait les policiers à mieux repérer les conducteurs en état d’ébriété. C’est un objectif louable car, pour diverses raisons, il y a des gens qui ont encore de la difficulté à comprendre qu’il ne faut pas conduire en état d’ébriété. Nous avons ici une suggestion qui, par voie législative, pourrait avoir un véritable impact sur le problème de l’alcool au volant. En tant que législateurs, lorsque nous pouvons prendre des mesures pour régler des problèmes de cette nature, je crois que nous devons le faire.
    Quand j’ai posé ma question au député, j’ai mentionné le fait que nos corps policiers accomplissaient un travail fantastique pour assurer la sécurité dans nos rues et nos collectivités. Pour ce faire, ils disposent de divers outils. Le projet de loi propose d’ajouter un nouvel outil à leur panoplie.
     S’il nous faut examiner des façons de modifier la loi pour aider les policiers à rendre nos rues encore plus sûres, nous devrions le faire. C’est pour cette raison que je salue sans réserve les efforts du député.
     Le député a dit qu’il était prêt à envisager des amendements. J’ai hâte que le projet de loi arrive à l’étape de l’étude en comité, car j’espère qu’au bout du compte, nous aurons des collectivités plus sûres grâce à un député qui a voulu agir en proposant un projet de loi apte à sauver des vies et à améliorer la sécurité dans nos collectivités.
(1830)
    S'il le souhaite, le secrétaire parlementaire aura deux minutes pour terminer ses remarques lorsque la Chambre reprendra ses travaux sur cette motion.
    Le temps prévu pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulé, et l’article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, et de la motion portant que la question soit maintenant mise aux voix.
    Monsieur le Président, avant de commencer, je tiens à féliciter mes collègues qui ont siégé au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir. Lorsqu'une mesure législative de ce type est soumise à notre examen, nous siégeons toujours pendant de longues heures. Je tiens à remercier les membres du Parti conservateur pour le rapport dissident. C'est bon de voir qu'au moins une partie des idées qu'il contenait ont été intégrées au projet de loi.
    La Chambre se trouve dans une position où elle doit adopter un cadre réglementaire efficace pour ouvrir la voie à l'aide médicale à mourir. Je prends aujourd'hui la parole pour veiller à ce que ce nouveau cadre respecte les droits garantis aux médecins et aux patients par la Charte.
    Je crains que les propositions présentées par le gouvernement pour tenter d'harmoniser nos lois avec la Charte n'aient l'effet contraire. Je crois que nous risquons de déroger à la Charte en ne protégeant pas efficacement le droit des médecins d'exercer leur liberté de religion et de conscience.
    En outre, je crains que la promesse que le gouvernement a faite de revoir la mesure législative dans quelques années lui donne simplement l'occasion d'en élargir la portée.
    À titre de député de l'opposition officielle, je me sens obligé d'avertir la Chambre de ce qui, selon moi, risque de se produire si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle. Je crois que des décisions comme celle-là peuvent entraîner une dérive. C'est inévitable.
    Le gouvernement a choisi de renoncer à plusieurs recommandations controversées du comité mixte spécial, mais il est indéniable que les libéraux et les néo-démocrates du comité les approuvaient. C'est ce qui me porte à croire que le gouvernement élargira un jour, en temps opportun, la mesure législative dont nous sommes saisis afin d'y intégrer ces dispositions.
    L'arrêt de la Cour suprême est sans équivoque: l'aide médicale à mourir doit se limiter à une « personne adulte capable » qui « consent clairement à mettre fin à sa vie » et qui « est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables (y compris une affection, une maladie ou un handicap) lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition ».
    Je suis content que le gouvernement ait suivi certaines recommandations que mes collègues ont formulées dans le rapport dissident. Dans ce rapport, ils parlent du régime ayant actuellement cours au Québec: seuls les patients de 18 ans et plus souffrant d'une maladie grave et incurable et dont l'état est caractérisé par un déclin avancé et irréversible peuvent demander une aide médicale à mourir.
     En outre, au Québec, le médecin traitant doit s'assurer que le patient a clairement consenti à l'aide médicale à mourir, en vérifiant notamment qu'il n'a pas subi de pressions externes, et prononcer un pronostic exhaustif sur son état et les options de traitement possibles, ce qui comprend les conséquences probables.
     Les médecins du Québec sont libres d’agir selon leur conscience. S’ils ne veulent pas intervenir eux-mêmes, ils doivent orienter leurs patients vers un organisme indépendant qui trouvera un autre médecin. Deux médecins indépendants doivent confirmer que le patient satisfait à tous les critères énoncés dans la loi.
    Compte tenu du régime adopté par le Québec et du caractère irréversible du suicide assisté, nous devons admettre qu’en réalité, cette pratique est une forme de traitement qui met irrémédiablement fin à une vie humaine. Pour cette raison, nous devons faire preuve de la plus grande prudence et mettre en place des mesures efficaces de sauvegarde afin de prévenir tout recours abusif à ce système.
     Je crois comprendre que la ministre de la Santé a affirmé que les médecins ne pourront être poursuivis en vertu du projet de loi pour avoir refusé de répondre au souhait d’un patient à mettre fin à ses jours. Le silence du projet de loi à cet égard est troublant. En l’absence d’une mention précise au sujet du droit des médecins d'agir selon leur conscience, il ne faudra pas attendre longtemps, je pense, avant de voir des médecins poursuivis en justice pour avoir refusé de répondre au désir de mourir d’un patient.
     Là encore, tout en me réjouissant de constater que le gouvernement a décidé de ne pas inclure certaines recommandations formulées par le comité, je me dois d’exprimer mon opposition à ces recommandations avant que le gouvernement ne décide de les ajouter plus tard.
     Si je le fais, c’est parce que les citoyens de ma circonscription sont très préoccupés par cette question. J’ai reçu des dizaines de lettres et d’appels d’électeurs me mettant en garde contre les conséquences susceptibles de découler si jamais nous décidions d’ouvrir cette porte.
     J’aimerais dire un mot au sujet des membres les plus à risque de la société à l’égard du suicide assisté, c’est-à-dire les jeunes, les aînés et les personnes atteintes d’une maladie mentale.
     Dans le préambule du projet de loi, le gouvernement dit qu’il ouvre la porte à des mesures non législatives concernant des demandes de suicide assisté « dans les cas de demandes faites par les mineurs matures, de demandes anticipées et de demandes où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée ». Voilà ce qui me dérange le plus dans ce projet de loi.
     Ceux que les Libéraux appellent des « mineurs matures » sont des jeunes qui ne sont pas autorisés à acheter de l’alcool ni à voter, des jeunes assujettis à un système de justice pénale distinct de celui qui est applicable aux adultes.
     Des dizaines d’années durant, le gouvernement du Canada a affirmé que, même si tous les citoyens jouissent de droits constitutionnels, il existe des limites dites raisonnables à l’égard de certains droits. Ce que je veux dire, c’est que les droits d’une personne cessent de s’appliquer dès qu’ils entrent en conflit direct avec ceux d’une autre personne. Par conséquent, aucun droit constitutionnel n’a préséance sur un autre.
(1835)
     Maintenant que le droit au suicide assisté a été ajouté à la liste, je soutiens qu’il ne doit pas être accordé aux mineurs, ni maintenant, ni à une date ultérieure. Lorsqu’ils fixent l’âge de voter ou qu’ils adoptent la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, les gouvernements créent, en fait, un système distinct pour les jeunes qui ne sont pas encore des adultes. Ces distinctions se justifient par le fait, médicalement reconnu, que le cerveau humain atteint son plein développement seulement vers l’âge de 18 ans.
     En ce qui concerne l’approbation potentielle des demandes de suicide assisté pour lesquelles la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée, j’ai deux choses à dire. Premièrement, la Cour suprême n’a pas mentionné la maladie mentale dans sa décision. Deuxièmement, elle a affirmé que les personnes qui faisaient une demande de suicide assisté devaient être pleinement capables.
     J’aimerais maintenant poser une question au gouvernement. Lorsque, comme c’est souvent le cas, une prédisposition au suicide est un effet de la maladie mentale, comment les médecins sont-ils censés déterminer si un patient souhaite vraiment mourir ou si ce désir est simplement un effet de sa condition? Veut-on vraiment forcer les médecins à trancher?
    Un autre groupe de personnes qui, je le crains, pourraient être victimes d'exploitation dans ce système est celui des aînés. La maltraitance des personnes âgées constitue déjà au Canada un problème bien connu qu'il est difficile d'éliminer complètement, quelles que soient les mesures prises par le gouvernement. Le risque de se faire exploiter est pour les aînés une conséquence inévitable de l'accès au suicide assisté.
    Dans les pays où le suicide assisté est légal, il est arrivé que des personnes âgées demandent le service parce qu'elles avaient l'impression d'être un fardeau pour leur famille ou la société. D'autres cas sont encore pires: c'est la famille de la personne âgée qui a incité celle-ci à demander de l'aide pour se suicider. Nous ne pouvons pas permettre que cela fasse partie du système.
    Nous nous devons d'aider les aînés en leur fournissant un meilleur système de soins palliatifs.
    Au cours de la dernière campagne électorale, les libéraux ont promis d'investir 3 milliards de dollars dans les soins palliatifs. Pourtant, le budget présenté ne comportait rien à ce sujet. Comme un certain nombre de mes collègues ont soulevé la question dans leurs interventions, je ne m'y attarderai pas. Cela fait cependant partie de la tendance générale des libéraux à rompre leurs promesses électorales quand vient le temps de mettre en oeuvre leur programme de dépenses élevées dans de nombreux autres domaines.
    J'ai exprimé plus tôt ma crainte que le droit des médecins d'agir selon leur conscience et leurs convictions religieuses risque d'être supplanté par le nouveau droit accordé par la Cour suprême.
    J'ai lu des arguments comme quoi les médecins ne devraient pas avoir le droit de refuser un tel traitement, surtout ceux qui travaillent dans des régions éloignées. À ceux qui disent cela, je dirais que nous avons tous des droits garantis par la Constitution, parmi lesquels celui de pratiquer sa religion sans être entravé par le gouvernement. Toutes les grandes religions du Canada désapprouvent le suicide d'une manière ou d'une autre. Un grand nombre de médecins adhèrent à ces croyances religieuses et se conduisent en conséquence. Nous ne pouvons pas permettre que le droit à l'aide au suicide remplace le droit de pratiquer sa religion ou d'obéir à sa conscience.
    Je veux ajouter qu'il y a plusieurs maisons de soins infirmiers confessionnelles dans ma circonscription, comme ceux de Grimsby et de Vineland, ou encore le foyer United Mennonite. Le personnel se demande ce qui arrivera si les médecins refusent et s'il incombe à l'établissement d'exécuter la volonté des patients.
    Ce sont des points dont nous devons discuter davantage.
    À titre de parlementaires, nous devons veiller à ce que les mesures de protection adéquates soient en place pour empêcher l'exploitation du système. C'est la raison pour laquelle je me joins à mes collègues de ce côté-ci de l'allée pour déconseiller aux députés d'aller trop vite et trop loin sur cette question.
    Notre principal objectif ne devrait pas être d'accorder l'aide au suicide aux patients, mais de protéger les patients contre cette pratique. J'entends par là qu'il faut mettre en place un régime de réglementation rigoureux pour que seuls ceux qui ont une maladie incurable et qui sont voués à d'intolérables souffrances aient accès à ce traitement.
    Nous ne pouvons pas en faire une forme courante de traitement. Il faut que ce soit une solution de dernier recours.
    C'est de loin la principale raison pour laquelle les gens de ma circonscription ont écrit à mon bureau au cours des derniers jours. Je leur réponds ce que je suis en train de dire actuellement.
    Nous ne pouvons pas permettre à ce système de devenir la norme. Nous devons voir à ce que ce projet de loi protège d'abord et avant tout la vie humaine. Nous ne pouvons pas permettre que des mineurs, qu'ils soient matures ou non, aient accès à un système qui met leur avenir en péril. Nous devons collaborer avec les provinces et nous attaquer à la maladie mentale au lieu de faire du suicide une solution plus légitime. Nous devons aussi renforcer la collaboration dans le dossier des soins palliatifs.
    Je m'estime très chanceux. À Grimsby, il y a le centre de soins palliatifs McNally, qui bénéficie d'un appui considérable dans la collectivité. Je sais que, dans la région du Grand Niagara, il y a plusieurs établissements qui sont largement appuyés par la population. Ils offrent des soins aux personnes les plus âgées de notre société, ce qui réduit les risques de maltraitance des aînés. Je crois que c'est très important, et je suis conscient que ce ne sont pas toutes les régions du pays qui ont accès à de tels services.
    Nous devons, d'abord et avant tout, traiter ce dossier avec le même soin que nous attendrions de la part d'un médecin.
(1840)
    Monsieur le Président, toute cette démarche a mal commencé. Au Québec, le dialogue a eu lieu pendant des mois et des années. Il semble y avoir une certaine réticence au pays à parler de la fin de la vie. C'est un sujet de discussion qui met beaucoup de Canadiens mal à l'aise. Même entre membres d'une même famille, on n'en parle pas volontiers, sauf lorsque l'heure est venue. Les questions qui se posent engendrent des tiraillements et des déchirements parmi nous tous.
    Lorsque la Cour suprême a fait connaître sa décision, nous nous sommes joints aux libéraux, qui étaient alors dans l'opposition, pour suggérer la formation d'un comité spécial. Le gouvernement de l'époque a voté contre cette proposition et a perdu des mois précieux au cours desquels il aurait été possible d'entendre le point de vue d'un éventail plus large de Canadiens que ce que nous avons pu faire depuis les dernières élections fédérales. Néanmoins, tout cela est du passé, et nous voilà maintenant en train d'étudier le projet de loi.
    Le député nous a parlé de la liberté de conscience. C'est là-dessus que porte ma question. Nous remarquons qu'il en est question dans le préambule du projet de loi, mais pas dans les articles eux-mêmes. Il y a des personnes qui, dans la profession médicale, ne veulent pas fournir de l'aide médicale à mourir, que ce soit pour des motifs religieux, par conviction personnelle ou pour une autre raison. Pourtant, cette question n'est pas traitée dans les articles du projet de loi. Or, les parlementaires d'expérience savent bien que le préambule et les articles de loi n'ont pas le même poids.
    Mon ami, qui a lu le rapport du comité et le rapport dissident, pourrait-il nous dire pourquoi le gouvernement n'a pas inclus une mesure d'une si grande importance dans le corps même de ce projet de loi, qui aura une incidence sur une multitude de personnes?
(1845)
    Monsieur le Président, c'est l'une des préoccupations que j'ai entendues le plus souvent à mon bureau. J'ai mentionné tout à l'heure, dans mon discours, que j'ai reçu à mon bureau des aidants naturels de divers établissements religieux de soins infirmiers, qui ont de toute évidence une conception très consciencieuse de la vie et de son importance. Ils m'ont dit que, dans les petites collectivités, il n'y a pas beaucoup de médecins et pas autant d'options, et peut-être même pas de soins palliatifs. Si un médecin refuse de fournir ce service, qu'arrivera-t-il? Se pourrait-il que la responsabilité revienne à l'établissement de soins? C'est inquiétant.
    Pour répondre à la question du député, je dirais que c'est l'une des choses que nous devons améliorer. Nous devons nous assurer que cela ne figure pas seulement dans le préambule, mais aussi dans le libellé du projet de loi, afin qu'il y ait une protection pour ceux qui veulent agir selon leur conscience et selon leurs croyances.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son excellent travail sur cette question et de sa collaboration avec des établissements dans sa circonscription qui offrent d'excellents soins à bon nombre de Canadiens vulnérables, en particulier ceux qui sont en fin de vie dans des centres de soins palliatifs ou des centres d'hébergement.
    Ma question porte sur la protection des groupes vulnérables, notamment les personnes qui ont peut-être des problèmes psychologiques sous-jacents et qui n'ont peut-être pas la capacité de prendre des décisions. Le projet de loi prévoit qu'il faut deux témoins indépendants et deux médecins indépendants. C'est une grande amélioration par rapport à ce que nous pensions qui pourrait ressortir du rapport du comité. Or, il n'y a aucun système en place pour nous assurer de l'indépendance réelle de ces deux témoins et de ces deux médecins.
    Mon collègue appuierait-il un amendement en vue de prévoir un examen préalable, qui demanderait un examen judiciaire ou par un tribunal, pour confirmer la véracité des affirmations?
    Monsieur le Président, je remercie encore une fois le député de Kitchener—Conestoga de son excellent travail au sein du comité.
    Je serais tout à fait prêt à appuyer un tel amendement. Toutefois, je m'inquiète notamment de l'étendue du rapport. Même si je suis satisfait de ce que prévoit le projet de loi du gouvernement et que je suis conscient que ce n'est pas parfait, je me demande ce qui se passera dans l'avenir lorsque nous en examinerons les dispositions. Que se passera-t-il alors? Irons-nous encore plus loin?
    Comme nous en avons déjà été témoins par le passé, si nous ne rédigeons pas clairement le projet de loi, il devient très facile de repousser les limites et de dire que nous pensions que cela signifiait autre chose ou que nous pourrions aller dans une autre direction que ce qui avait été prévu au départ par les gens qui étaient là à l'époque.
    J'appuierais certainement une telle notion.
    Monsieur le Président, je dis souvent que je suis heureux de prendre la parole, car c'est vraiment un honneur que de prendre la parole à la Chambre des communes pour tenter, à notre façon, de représenter la formidable population des territoires. Toutefois, en cheminant vers le Parlement, ce soir, et en pensant au débat particulier qui nous occupe, je me suis rendu compte que le mot « heureux » n'était peut-être pas approprié. La raison en est que l'objet de notre débat touche à l'essence même des questions les plus difficiles que nous devons nous poser en tant que législateurs, en tant que Canadiens, en tant qu'amis et parents de ceux qui doivent faire face à l'incroyable tragédie qu'est la mort.
    Nombre d'entre nous ont peut-être ressenti une certaine nervosité ou peut-être même de la peur à l'idée de parler de cette période de l'existence, des soins en fin de vie, des soins palliatifs, ainsi que l'aide médicale à mourir et du suicide assisté.
    Je présume que l'on attend beaucoup de nous tous. Il faut reconnaître et comprendre cette grande responsabilité dont nous sommes investis, et approcher la discussion avec toute l'humilité qu'il nous est possible d'avoir. Chez certains d'entre nous, élus, l'humilité n'est pas toujours à portée de main. Il s'agit peut-être aussi de relayer les propos les plus sages de ceux qui connaissent ce sujet beaucoup mieux que nous.
    Nous disons souvent qu'il faut séparer notre vie personnelle de notre vie politique, que notre travail de législateurs nous demande simplement d'agir de la meilleure façon possible et selon la connaissance que nous avons du droit. On dit que nous devons mettre au point des mesures législatives qui seront défendables devant la Cour suprême et fidèles à l'opinion de nos concitoyens. Pourtant, pour un grand nombre d'entre nous, ce débat fait graviter ces deux vies l'une vers l'autre.
    Ce débat sur le projet de loi prend une dimension très personnelle pour ceux de nous qui y ont pris part — ou pour ceux qui le feront — et qui se remémorent les expériences qu'ils ont pu vivre auprès de membres de leur famille aux prises avec ces questions de fin de vie.
    La décision de la Cour suprême a été unanime, et le Parlement s'est vu donner une date limite pour mettre au point un projet de loi. La Cour suprême a invalidé les lois du Canada, selon la perception qu'elle en avait. Nombre de ces juges ont été nommés par le gouvernement conservateur précédent.
    Ce qui m'inquiète, et ce que nous constatons aujourd'hui, c'est que le gouvernement a tenté d'établir un juste équilibre. C'est ce que nous entendons souvent. Il a tenté de trouver une solution intermédiaire parfaite en ce qui concerne cette question, qui suscite une vive controverse. Même si je reconnais qu'il est très difficile d'élaborer une mesure législative sur un sujet aussi délicat, nous avons soulevé diverses préoccupations au comité spécial.
    Nous, les néo-démocrates, continuons d'exprimer nos préoccupations, même si nous appuyons le renvoi du projet de loi au comité; nous voulons entendre ce que les témoins ont à dire après avoir pris connaissance de la version définitive du projet de loi. Nous devons savoir s'il respecte la Constitution, s'il est utile et s'il répondra bel et bien aux attentes de la Cour suprême et des Canadiens.
    J'ai déjà mentionné par le passé que je déplore le fait que l'ancien gouvernement n'ait pas pu ou n'ait pas voulu, pour des raisons que j'ignore, entreprendre le travail nécessaire dans ce dossier, et ce, même si les directives de la Cour suprême étaient très claires. La Cour suprême a demandé au Parlement d'élaborer une nouvelle mesure législative sur cette question et de créer de nouvelles règles pour notre pays. Nous avons voulu faire adopter une motion à la Chambre des communes pour que le comité puisse entreprendre ses travaux et convoquer des témoins, mais les élections allaient avoir lieu six ou sept mois plus tard. J'ai eu l'impression que le gouvernement ne voulait pas vraiment aborder cet enjeu.
    Le gouvernement a proposé un processus qui n’a pas porté ses fruits, et nous avons maintenant le couteau sous la gorge. Nous siégeons tard. Le comité a fait un travail incroyable. Je tiens donc à remercier tous ses membres —  conservateurs, libéraux et néodémocrates —, qui ont œuvré inlassablement pour nous proposer des recommandations de la plus haute importance, dont certaines ont été intégrées au projet de loi, d’autres pas.
    Je sais que le coprésident libéral du comité s’est dit déçu à propos de certaines questions importantes. Or, le temps manque, et c’est malheureusement un peu de la faute du Parlement. Si nous avons travaillé dur à ce processus, il faudra peut-être le réviser ultérieurement.
    J’aimerais parler de certains moments et de certaines préoccupations soulevées. Si la protection de la liberté de conscience des médecins figure dans ce qu'on appelle le préambule du projet de loi, qui présente les aspirations qui sous-tendent la mesure législative, elle ne se retrouve pas dans le corps du texte. Pour les professionnels de la santé qui ont des croyances religieuses sincères et profondes qui les empêchent d’aider quelqu’un à mettre fin à sa vie, il nous faut trouver les mesures de protection les plus détaillées.
(1850)
    Je viens du Nord de la Colombie-Britannique. La question est totalement controversée. Des chefs religieux de diverses confessions et des personnes qui travaillent dans le domaine médical, en faisant preuve d'un talent et d’un dévouement incroyables, m’ont fait part de leurs graves inquiétudes. Ce que je vois dans la loi ne me permet pas de les rassurer.
    Nous avons unanimement adopté la motion présentée par le député de Timmins—Baie James en vue d'enfin nous doter d'une stratégie nationale de soins palliatifs. C’est le revers de la médaille. S’il y a la question gravissime de ce qui arrive à la fin de la vie, quels soins offrons-nous pendant tous les moments qui la précèdent? Quel type d’hommage, de respect et d’amour offrons-nous dans le cadre du système de santé, du merveilleux système public de santé qui est le nôtre?
     Depuis des années, différents gouvernements en parlent. Ils affirment que les soins palliatifs sont importants et qu'ils se soucient des aînés et des personnes malades. Malheureusement, il n'y a jamais rien de prévu dans les budgets. Nous ne voyons pas comment nous pouvons assumer cette tâche ensemble et offrir des soins palliatifs. À certains égards, le projet de loi C-14 constituerait une occasion d'enchâsser à tout le moins dans la loi l'obligation pour le pays de se doter enfin d'une stratégie nationale en matière de soins palliatifs. C'est décevant que l'on se contente de faire référence à une telle stratégie au lieu de la concrétiser pleinement et concrètement.
    Je suis également déçu parce que le comité a travaillé si fort. En tant que néo-démocrate, j'ai du mal à reconnaître le mérite d'un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes. Toutefois, je sais que de bons sénateurs ont abordé le processus en faisant preuve d'ouverture d'esprit. Ils ont travaillé sans relâche et ils ont présenté au gouvernement une série de recommandations concernant de nombreux problèmes soulevés, mais ces recommandations n'ont tout simplement pas été prises en compte.
    Cela m'amène à soulever une autre préoccupation. Des juristes et des experts en médecine nous ont dit que même Mme Carter n'aurait pas eu droit à une aide au titre du projet de loi. Celle-ci a dû soumettre sa cause à la Cour suprême. Elle a tellement souffert. Sa famille a vécu l'enfer lorsqu'elle a tenté d'obtenir les services qu'elle demandait et il lui a fallu s'adresser en fin de compte à la Cour suprême. Ce fut ardu, mais la famille de Mme Carter a fini par remporter sa cause.
    Je crains que le gouvernement, au lieu d'arriver à établir l'équilibre parfait entre les intérêts divergents dans ce dossier très délicat, ait complètement embrouillé le processus et ouvert la porte à des contestations futures devant les tribunaux. Nous avons également entendu le témoignage de certains avocats qui ont plaidé devant le tribunal. Ils ont affirmé que la mesure législative serait contestée presque immédiatement. Alors à quoi tout le travail a-t-il servi?
    Le comité s'est réuni pendant de nombreuses heures et a entendu des dizaines de témoins. Nous avons tenu compte de la décision très claire de la Cour suprême. Le résultat, c'est que nous avons maintenant un projet de loi qui se situe à peu près dans le milieu et qui ne satisfait pas vraiment l'un ou l'autre des camps, s'il n'y a bien sûr que deux camps dans le débat. Nous avons entendu de nombreux groupes, qui ont travaillé sans relâche sur ce dossier et même pendant des décennies dans certains cas, exprimer leur déception et leur insatisfaction. Heureusement, compte tenu de la façon de procéder du Parlement, le projet de loi pourra être corrigé.
    C'est la première véritable épreuve qu'affronte le nouveau gouvernement. C'est sa première mesure législative d'envergure constitutionnelle. C'est la première fois qu'il doit relever, dans un projet de loi, le défi que représente la Charte. Aura-t-il l'humilité, le courage et l'intelligence nécessaires pour relever ce défi d'une façon qui, en plus de satisfaire les tribunaux, satisfera les Canadiens qui souhaitent désespérément pouvoir mettre fin à leurs jours selon leurs désirs, alors qu'ils sont aux prises avec de terribles souffrances? Il m'apparaît dangereux de juger ces personnes et leur famille et de décréter, au moyen de critères de plus en plus serrés, qui aura accès à ces services. J'y vois de l'arrogance et un manque d'intelligence. En effet, ce serait ouvrir la porte, pendant encore des années, à des contestations devant les tribunaux. Ce serait nourrir, pendant encore des années, l'incertitude et les souffrances des familles déjà durement touchées par les terribles souffrances d'un proche qui se meurt.
(1855)
    Je tiens à féliciter de nouveau les députés qui ont participé aux travaux, particulièrement le député de Victoria, dont l'expertise juridique et la compassion ont enrichi notre conversation, et le député de Timmins—Baie James, qui a été le premier à signaler l'importance des soins palliatifs et la nécessité d'une stratégie. Chers collègues députés, nous devons nous appuyer sur nos convictions et trouver notre courage. Nous devons faire les bons choix. Nous devons relever le défi et faire ce qui est nécessaire sur le plan juridique et sur le plan moral.

[Français]

    Monsieur le Président, je tiens à féliciter mon collègue pour son allocution.
    Dans son discours, il a fait référence aux soins palliatifs. Si les hôpitaux et les établissements de santé offrent des soins palliatifs de qualité, cela aura aussi une influence sur la qualité de vie des gens qui sont en fin de vie. Que pense-t-il de cela? Les soins palliatifs ne seraient-ils pas aussi une réponse adéquate pour s'assurer que chacun peut vivre dans la dignité lorsqu'il arrive à la fin de sa vie? Quelle importance ont les soins palliatifs dans les soins de santé?
(1900)
    Monsieur le Président, je remercie mon cher collègue de sa question.
    En ce qui a trait aux soins palliatifs, toutes les études montrent les mêmes résultats. Le Québec est un exemple pour tout le pays, pas seulement par rapport à la question de la fin de vie, mais aussi par rapport aux soins palliatifs.
    Nous avons demandé au gouvernement libéral quel était son plan et où était l'argent. Sans argent, c'est difficile d'avoir une très bonne qualité de soins.
    Les questions réfèrent à un vide, qui existe ici. Les questions portent sur un côté seulement, et non pas sur les deux côtés. Que va-t-on faire pour les Canadiens? Quelle est l'offre du gouvernement pour les familles qui veulent des soins palliatifs pour eux-mêmes ou pour un membre de la famille?
    Je trouve cela triste, mais c'est aussi l'occasion de développer quelque chose de fort, de direct et de clair, de développer une stratégie nationale qui permettra d'avoir un système de soins palliatifs fort et moral.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis heureuse que le député ait abordé divers enjeux importants. Selon lui, aurait-il été possible de régler certains de ces points et de produire une mesure législative plus robuste si la Cour avait accordé plus de temps au Parlement?
    Monsieur le Président, ma collègue n’était pas parmi nous lors de la dernière législature. Il est difficile de répondre à sa question simplement parce que le gouvernement précédent a pris des décisions que nombre d’entre nous avons jugées fâcheuses sur le plan temporel. Je sais que le dossier dont nous traitons est terriblement sensible, qu'il peut être extrêmement délicat sur le plan politique et qu’il éveille des émotions intenses dans tous les camps, mais le gouvernement précédent a fait perdre du temps au Parlement, à tel point qu'il a fallu demander la prolongation du délai, ce que la Cour suprême n’aime pas beaucoup. Malgré tout, elle nous a accordé une année complète, mais nous avons dû demander encore plus de temps.
    Je suis partagé. Évidemment, nous aurions pu consacrer davantage de temps à ce dossier, mais on arrive à bien peu de choses dans la vie sans échéances. Nous avons besoin de cette pression pour faire aboutir les choses. Je reconnais que nous devons siéger de longues heures pour que tous les députés puissent s’exprimer, et que le comité s’astreint lui aussi actuellement à de très longues réunions. Nous avons entendu la ministre de la Santé et la ministre de la Justice hier. C’est là où nous en sommes.
    Ce que je crains — je ne pense pas que cela se produira, mais c’est une crainte légitime —, c’est que si nous poursuivons le travail sans tenir compte du délai actuel, nous nous retrouverons devant un vide. Il n'y aura carrément plus de loi. Quelle que soit sa position dans ce débat, je ne pense pas que ce soit un résultat acceptable simplement parce que le Parlement s'ajournera pour l’été et que, durant deux ou trois mois, rien ne viendra remplacer les dispositions législatives que la Cour a invalidées. Que dirons-nous aux professionnels de la santé? Que dirons-nous aux familles de personnes en fin de vie? Il n'y aura plus de règles.
     Ce n’est pas la première fois que la Chambre mène un débat épineux. Le Parlement a très mal géré la question de l’avortement et ne l’a jamais complètement réglée. Nous ne devons pas répéter l'erreur avec ce dossier. Nous devons trouver le courage de nos convictions et mettre toute notre intelligence et tout notre cœur pour trouver une solution.
    Monsieur le Président, je prends la parole pour aborder un sujet fort important, qui fait réfléchir, et qui touche de nombreuses familles canadiennes.
    L'an dernier, la Cour suprême du Canada a déterminé que l'interdiction actuelle de l'aide médicale à mourir qui se trouve dans le Code criminel était invalide sur le plan constitutionnel. Cette décision a forcé le gouvernement à revoir l'interdiction de longue date visant l'euthanasie et le suicide assisté au Canada.
    Le projet de loi C-14 a été présenté pour répondre à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter. L'arrêt dans la cause Carter énonce que les personnes adultes capables atteintes de problèmes de santé graves et irrémédiables leur causant des souffrances intolérables et ayant donné leur consentement éclairé ont le droit de recourir à l'aide médicale à mourir en vertu de l'article 7 de la Charte.
    Depuis cette décision, le gouvernement a formé le Comité mixte spécial sur l'aide à mourir et l'a chargé de faire des recommandations en vue d'une réponse législative. Dans le rapport principal du comité mixte spécial, les libéraux et les néo-démocrates ont recommandé un régime d'aide médicale à mourir très permissif, qui va au-delà des paramètres établis dans l'affaire Carter. Leur rapport initial recommandait que l'aide médicale à mourir soit offerte aux personnes qui souffrent de maladies terminales et non terminales, de même qu'aux personnes aux prises avec des souffrances physiques et psychologiques. Ce qui était le plus inquiétant, toutefois, c'était qu'on recommandait au gouvernement d'étudier ultérieurement les questions relatives à l'aide médicale à mourir pour les mineurs.
    Les recommandations et les dispositions proposées dans le rapport initial entraîneraient le Canada sur une pente glissante. Pour faire part de leurs craintes, les députés conservateurs ont signé un rapport dissident visant à circonscrire les effets des propositions les plus préoccupantes du rapport principal et à présenter un cadre plus fidèle à l'esprit de l'arrêt dans la cause Carter.
    Dans le rapport dissident, les députés soulèvent d'importantes questions dont le projet de loi pourrait traiter: le fait de limiter l'aide médicale à mourir aux adultes capables âgés de 18 ans et plus; les protections pour les personnes vulnérables, y compris une disposition exigeant la tenue d'une évaluation psychiatrique; l'absence de directives préalables; et la protection de la liberté de conscience des médecins. Le projet de loi C-14 tient compte d'un certain nombre de dispositions importantes du rapport dissident des conservateurs.
    Parmi les principales mesures de protection prévues dans le projet de loi C-14, mentionnons le fait de limiter l'euthanasie et le suicide assisté aux maladies physiques et d'imposer une limite d'âge pour ces procédures. Par contre, rien n'oblige les personnes admissibles à l'aide médicale à mourir à consulter un psychiatre pour déterminer si un trouble de santé mentale latent atténuerait leur capacité à donner un consentement éclairé.
    J'ai reçu énormément de lettres provenant des habitants de ma circonscription, à qui j'ai promis d'être à l'écoute et de me pencher sur tous les points importants soulevés.
    La situation fait en sorte que les grands malades se heurtent aux positions morales de leur famille. J'ai moi aussi été touché par les nombreuses histoires qu'on m'a racontées. De regrettés parents et amis m'avaient parlé de permettre une fin miséricordieuse à leurs souffrances, une position dans laquelle nous nous trouverons peut-être lorsque viendra notre heure.
    Je crains qu'à l'étape de l'étude en comité, on présente des amendements visant à assouplir le cadre législatif actuel ou qu'on ouvre la porte à une réglementation qui entraînera éventuellement la même permissivité. Cette crainte n'est pas sans fondement, car il en est question dans l'étude signée par le comité mixte spécial. Peut-être faudrait-il proposer des amendements pour énoncer un cadre législatif plus contraignant, de façon à assurer la protection des personnes les plus vulnérables.
    Les Canadiens, peu importe leur opinion dans le débat, s'inquiètent des répercussions futures du projet de loi. L'affaire Carter les oblige à accepter que dorénavant, cette décision difficile sera possible.
    Je tiens à répéter ce que mes collègues conservateurs ont dit dans les semaines qui ont précédé le présent débat: notre priorité en tant que parlementaires doit être de veiller à ce que toute nouvelle loi se conforme strictement à la décision de la Cour suprême, ni plus ni moins.
(1905)
    La plupart des Canadiens souhaitent que le gouvernement accorde la priorité à l'amélioration des soins palliatifs, puisqu'ils font partie intégrante des soins de fin de vie. Le comité mixte spécial et les parties intéressées, y compris l'Association médicale canadienne, sont unanimes: il faut une stratégie pancanadienne de soins palliatifs assortie d'un financement qui lui sera propre. S'il n'en tenait qu'aux Canadiens, une stratégie nationale de soins palliatifs serait prioritaire.
    Il faut par ailleurs tenir compte du droit à la liberté de conscience des professionnels de la santé. Pour certains, l'aide médicale à mourir va à l'encontre de leur code moral. Il serait injuste de forcer un médecin à agir contre ses convictions. Le serment de ne jamais être volontairement une cause de tort est fondé sur notre engagement à veiller les uns sur les autres et à prendre soin des plus vulnérables au moyen d'interventions médicales viables qui honorent le caractère sacré de la vie. De nombreux médecins et autres fournisseurs de soins ont soulevé cette préoccupation auprès de leur député ou du comité. Nous, les parlementaires, devons en tenir compte, dans leur intérêt.
    De dures leçons sont à tirer de l'expérience vécue ailleurs, notamment en Belgique. Après avoir légalisé l'euthanasie, le nombre de décès découlant d'une telle intervention s'est mis à augmenter d'année en année. On a permis le retrait de mécanismes de sauvegarde et l'euthanasie est maintenant accessible aux personnes qui vivent une détresse psychologique.
    Un des exemples les plus troublants de cette dérive s'est produit quand le Parlement belge a approuvé un projet de loi qui supprimait la limite d'âge pour l'aide médicale à mourir, une recommandation qui a été faite dans le rapport de notre comité mixte spécial. Pourtant, dans la mesure législative initiale adoptée par la Belgique des années auparavant, les mineurs n'avaient pas le droit d'obtenir l'aide médicale à mourir.
    Il s'agit là d'un véritable phénomène social. Nous ne pouvons pas permettre au Canada de s'engager sur cette pente glissante. Nous ne pouvons pas adopter des mesures législatives sur l'aide médicale à mourir qui sont permissives. Nous devons établir un cadre législatif restrictif, comme le dicte l'arrêt dans la cause Carter. Les Canadiens s'attendent à ce que nous présentions une mesure législative équitable et claire, mais nous devons éviter de bâcler les choses et de ne pas prévoir suffisamment de mesures de protection.
    J'exhorte mes collègues à tirer des leçons de ces dures réalités. Bien qu'il soit impératif que la Chambre adopte un projet de loi avant le 6 juin, il est tout aussi indispensable de nous assurer que ce dernier est efficace.
    Il est également vrai que de ne pas mettre en place une loi pour encadrer l'aide médicale à mourir est tout aussi irresponsable. En effet, sans cadre législatif complet, le Canada disposerait d'un ensemble disparate de protocoles provinciaux, ce qui créerait d'autres graves problèmes.
    Tâchons également de rester réalistes. Toutes les protections au monde n'empêcheront pas les personnes vulnérables d'être contraintes de donner leur consentement, et elles seront toujours à risque. En Belgique, il est arrivé que l'aide médicale à mourir soit administrée en l'absence de consentement explicite; rien n'empêche que cela se produise ici. Les décisions de vie ou de mort ne devraient jamais être faciles, et elles ne devraient jamais être prises par quelqu'un d'autre que soi.
    La vie est précieuse, traitons-là en tant que tel. Tâchons de toujours offrir des soins en premier lieu; cela dit, j'espère qu'une stratégie pancanadienne sur les soins de fin de vie sera également annoncée. La version actuelle du projet de loi contient trop peu de dispositions et de mesures de sauvegarde. Nous pouvons faire mieux. Nous le devons à nos électeurs.
    J'espère que si le projet de loi est renvoyé au comité, les parlementaires auront la chance de l'amender de manière à y inclure des mesures de sauvegarde resserrées.
    En conclusion, j'aimerais rendre hommage à mes amis et aux membres de ma famille qui nous ont quittés. Mon père et ma mère, Verna et Herman Dreeshen, étaient d'excellents modèles de compassion et de bonté lorsqu'ils étaient en vie. Dans leurs derniers jours, ils m'ont beaucoup appris sur la force de caractère, la foi et les réalités de la vie. Ils me manquent tous deux terriblement. Ils ont bénéficié de soins exceptionnels et nous avons eu l'occasion de parler.
    Je m'en souviens très bien: je siégeais à la Chambre depuis deux semaines lorsque mon père est mort. La première semaine nous avions élu un Président, et j'ai donc eu la chance de rentrer à la maison cette première fin de semaine et de lui parler des gens que j'avais rencontrés, comme Ken Dryden, que j'admirais sur la glace mais dont je ne partageais pas les idées politiques. Nous avons eu l'occasion de parler.
(1910)
     J’ai également eu la possibilité, lors de la période de relâche qui a suivi, de m’entretenir avec le premier ministre au sujet de ce qui se passait et des différentes questions de l’heure. Il est très important que j’aie pu lui communiquer ces renseignements dans la semaine qui a précédé son décès.
     Je dois dire à tous les Canadiens, à l’heure où nous sommes confrontés à cette triste réalité pour nous et pour nos êtres chers, qu’ils ne doivent pas oublier qu’ils seront toujours dans nos cœurs et dans nos prières.
(1915)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours.
    Je lui demanderais ce qu'il propose pour concilier le fait qu'on veut protéger les droits des médecins de pratiquer ou non ce service de fin de vie et le fait qu'on doit rendre ce service accessible à tous les Canadiens, d'un océan à l'autre.
    Que propose le député pour qu'on puisse concilier ces deux droits? Comment peut-on s'assurer que, peu importe où on se trouve au Canada, ce service sera quand même disponible, même si des médecins ou des personnes travaillant dans le milieu de la santé ne veulent pas donner ces soins? Comme on l'a souvent dit au cours de ce débat, cela doit se faire en respectant aussi le droit des médecins d'offrir ou non ces soins, selon leur conscience.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je ne suis pas certain d’avoir bien saisi tout le sens de la question, et vous voudrez bien m’excuser si je m’écarte quelque peu.
    Pendant des années, j’ai présidé le conseil d’un hôpital et la notion de l’éthique professionnelle des médecins et du personnel soignant est souvent revenue sur la table quand nous discutions avec nos homologues provinciaux. Nous en avons parlé à maintes reprises au conseil, avec différents médecins. Nous avons aussi parlé de rationalisation des ressources.
     J’estime que nous devons évidemment respecter les droits des professionnels. Nous ne voulons certainement pas dire que, si un médecin refuse de pratiquer ce genre de procédure, on pourra toujours en trouver un autre. Il faut veiller à ce que les protections soient en place, à ce qu’on tienne compte des évaluations psychiatriques et à ce qu’on respecte les droits du personnel soignant.
    Monsieur le Président, je voudrais que le député me parle de cette notion d’examen préalable. Les nombreux problèmes qui s’entrecoupent dans ce projet de loi risquent fort d’occasionner une crise à terme.
     Il contient des critères relativement ambigus et il n’exige pas la tenue d’examens juridiques préalables. Et puis, il est aussi possible pour toute personne qui souhaite prendre part à une procédure de suicide assisté ou qui souhaite que quelqu’un soit euthanasié, de faire la tournée des médecins jusqu’à trouver celui qui sera prêt à rendre le jugement souhaité. La plupart des médecins n’estimeront peut-être pas que la personne correspond aux critères énoncés, mais en cherchant bien, on pourra toujours trouver celui qui pense le contraire.
    Le député reconnaîtra-t-il avec moi qu’au vu de tous ces facteurs qui s’entrecoupent, il nous faut trouver une solution sous la forme d’amendements en vue de protéger les personnes vulnérables, que ce soit en adoptant un mécanisme d’examen juridique préalable ou toute autre mesure qui permettrait d’éviter ce genre de tournée des médecins? Le député pourrait-il reconnaître que des amendements s’imposent afin de protéger les personnes qui pourraient ne pas donner leur consentement et qui pourraient se sentir contraintes à l’euthanasie ou au suicide assisté à cause de tous les défauts dont ce projet de loi est émaillé?
    Monsieur le Président, nous estimons très important, entre autres choses, d’examiner la question de la violence faite aux aînés et le genre de pressions qu’on peut exercer sur ces personnes ou sur d’autres malades qui, en fin de vie, en viennent à penser qu’ils sont un fardeau pour leur entourage. Il faut veiller à les mettre à l’abri de toute pression qui pourrait les pousser à prendre une décision hâtive. Si nous constatons qu’il y a eu des pressions, il y aura forcément des conséquences sur le plan judiciaire.
    Il existe des lois qui protègent les aînés contre toute forme de violence et il faudrait évidemment tenir compte de cette réalité afin que le counseling ne serve pas à mettre précipitamment fin à la vie d’une personne par l’intervention du corps médical.
    Monsieur le Président, j'ai dit à de nombreux résidants de ma collectivité et aux membres de ma famille que, ce soir, je livrerais le discours le plus important de ma carrière de député. Je siège ici depuis huit ans et j'espère représenter mes concitoyens encore longtemps.
    Je vais parler des personnes les plus vulnérables, de mesures de protection concrètes et de la pente glissante sur laquelle nous entraîne le projet de loi C-14.
    Tout d'abord, je tiens à faire preuve de transparence totale. Mon fils de 29 ans a une déficience intellectuelle. J'ai tenu la main de ma mère lorsqu'elle a rendu l'âme dans la souffrance. J'ai vu un ami très proche souffrir d'une terrible maladie pendant deux ans avant de mourir.
    Plus tôt au cours du débat sur ce projet de loi, le député de Durham a prononcé des paroles qui ont retenu mon attention. Il a dit que nous sommes tous à la recherche d'un « sentiment de compassion pour les deux parties ». C'est essentiel.
    Je vais citer certaines personnes qui se sont exprimées sur cette question. Je devrais également signaler que, moi aussi, j'ai tenu des assemblées publiques. En fait, cette question a été soulevée durant la campagne électorale. J'ai alors exposé de manière très claire et très concise aux électeurs ma position à ce sujet.
    Je commencerai par citer la députée de Calgary Nose Hill, qui a indiqué dans son discours d'ouverture qu'il était question du « caractère sacré de la vie humaine » et qu'il s'agissait de « définir la moralité de notre pays ».
    Je veux également lire un extrait d'un message d'un homme hautement respecté, Jean Vanier, fondateur d'un organisme appelé L'Arche, et de Hollee Card, publié dans le Globe and Mail du 1er mars. Le voici:
     À L’Arche nous avons le privilège d’accompagner un grand nombre de personnes sur le chemin de la vie, pas seulement dans les moments où elles sont fortes et en santé, mais également dans les moments de fragilité et de faiblesse. De cette expérience nous avons appris beaucoup de choses.
    Essentiellement, nous avons appris que ce sont les plus fragiles d’entre nous qui sont les plus proches de leur humanité, de leur souffrance et de leur besoin d’être aimés. Ce sont eux qui nous montrent le chemin pour vivre en vérité et dans l’amour.
    Et plus loin:
    C’est pourquoi nous avons une obligation spéciale de garantir que les soins auxquels chacun de nous aura accès pendant toute sa vie, mais particulièrement au stade final de la vie, affirment à la fois notre dignité et notre humanité. Autrement nous diminuons notre gamme d’expérience pour ne garder que notre indépendance. Nous diminuons l’amour que nous pouvons partager, et la vulnérabilité que nous pouvons montrer les uns aux autres.
    Une culture si spartiate, en fin de compte, dévalue la vie. À la place, nous devons reprendre l’engagement de nous honorer et de nous accepter, nous-même et les autres, en trouvant des façons d’accepter nos fragilités, et le cours de la vie dans son entièreté.
    Les députés peuvent constater que le projet de loi C-14 compromet la situation précaire des personnes handicapées du Canada.
    L'avocat Hugh Scher, qui a milité pendant 25 ans dans ce domaine, a aussi écrit des choses intéressantes à tous les parlementaires. Je signale en passant qu'il dit au début de sa lettre qu'on ne l'a pas convoqué devant le comité, même s'il a conseillé chacun des partis à la Chambre dans ce domaine.
     Voici ce qu'il dit sur les mesures de sauvegarde:
    La surveillance judiciaire visant à faire respecter les obligations juridiques et à reconnaître les situations de vulnérabilité avant l'acte est essentielle pour pouvoir surveiller de façon efficace tout régime d'aide médicale à mourir.
    Il poursuit en disant ceci:
    L'obligation relative à la surveillance judiciaire ainsi qu'à la reconnaissance et à l'évaluation de la vulnérabilité avant l'acte au moyen d'un examen préalable est un aspect essentiel de tout régime d'aide médicale à mourir. Elle doit être mise en oeuvre par le Parlement en prévision de la possible instauration d'un régime d'aide médicale à mourir. Autrement, les Canadiens vulnérables courront de grands risques sans qu'il soit possible de les protéger.
(1920)
    En passant, le projet de loi C-14 ne prévoit pas de surveillance judiciaire qui permettrait d'assurer une telle protection.
    Certains disent que le projet de loi ne va pas assez loin. Prenons l'exemple de la Belgique et voyons comment la situation a évolué au fil des ans. En Belgique, dans 32 % des cas, il n'y a pas de demande ou de consentement préalable de la personne. Même si la loi l'exige, elle est ignorée et il n'y a pas de poursuite. Les chiffres depuis la présentation du projet de loi jusqu'à maintenant sont stupéfiants. Ce qui se passe dans cette société change. La société change et cela devient la norme. Les gens commencent à accepter l'idée que les choses sont ainsi.
    Un des problèmes du projet de loi C-14, c'est que, dans le préambule, il y a un énoncé qui permettrait d'envisager la possibilité d'étendre le recours au suicide assisté à d'autres situations, notamment dans le cas des mineurs matures et des personnes atteintes de maladie mentale. J'y vois un message codé qui dit que ceux qui veulent l'euthanasie ouverte à tous, la mort sur demande, ne doivent pas s'en faire, que c'est imminent. C'est là le message codé. Si nous regardons le rapport du comité spécial et ce qu'il a produit pour le Parlement, disant ce que ces gens aimeraient vraiment avoir, nous voyons que cela s'en vient. C'est écrit directement dans le préambule du projet de loi.
    Certains disent que cela prendra la forme d'un élargissement progressif de la portée de la loi, à laquelle on donnera des interprétations encore insoupçonnées au fil du temps. Les gens s'habitueront. La loi encouragera les patients à avoir recours à ces services dans un nombre croissant de cas de maladie et à des âges de plus en plus jeunes. On a observé un dangereux effet de contagion des lois sur le suicide assisté dans les pays du Benelux et aux autres endroits où de telles lois sont en vigueur depuis longtemps. L'enjeu est le caractère sacré de la vie humaine et la définition du sens moral de notre pays, comme la députée de Calgary Nose Hill l'a si bien dit.
    Voyons un instant la question de la liberté de conscience des professionnels de la santé dans les établissements. Cette question ne fait l'objet d'aucune disposition du projet de loi. Il nous faudrait l'amender pour y protéger la liberté de conscience. Lors de mes assemblées publiques, beaucoup de médecins ont indiqué qu'il leur était absolument essentiel de pouvoir exercer concrètement cette liberté et qu'ils songeraient à aller pratiquer dans un autre pays plutôt que de devoir fournir de l'aide à mourir. Ce point de vue concerne les professionnels de la santé en général.
(1925)
    Parlons maintenant des soins palliatifs. Les gens de ma circonscription et moi avons la grande chance de bénéficier des meilleurs soins palliatifs au pays. L'une des personnes qui a pris la parole au cours des assemblées publiques nous a dit avoir observé beaucoup de gens qui en étaient aux derniers moments de leur existence résoudre des problèmes entre leurs amis et au sein de leur famille, alors qu'ils n'en auraient pas eu la possibilité autrement. Ces gens ont bénéficié du meilleur environnement qui soit au moment de quitter ce monde.
    La Cour suprême nous oblige à légiférer alors nous devons faire en sorte que la loi soit aussi solide que possible. Nous devons protéger les plus vulnérables. Si une personne meurt à cause d'une loi mal rédigée dans ce pays, nous en serons tous responsables.
    Je suis heureux d'avoir pu prendre la parole ce soir.
(1930)
    Madame la Présidente, c'est peut-être un bon moment pour souligner que de nombreux députés ont pris la parole au sujet du projet de loi et que plusieurs ont relaté des expériences vécues qui nous ont beaucoup éclairés sur la question dont nous débattons. Je leur en suis très reconnaissant.
    Le député a fait référence à la Cour suprême du Canada. Nous devons reconnaître que les neuf juges de la Cour suprême ont pris la décision, et il faut que nous présentions le projet de loi. Nous le savons depuis plus d'un an. Beaucoup de travail a été effectué.
    Le projet de loi est maintenant à l'étape de la deuxième lecture. Les députés ministériels et ceux de l'opposition font preuve d'ouverture et ils sont capables de faire part de leurs réflexions et de leurs idées aux ministres responsables, ou du moins, d'en faire part au comité.
    Je me demande si le député reconnaît, d'abord et avant tout, que nous devons présenter un projet de loi, que la date limite est le 6 juin, que le projet de loi doit franchir l'étape de l'étude en comité, qu'il doit encore être étudié par le Sénat, que tous les parlementaires ont l'obligation de combler le vide créé par la Cour suprême du Canada, et que c'est précisément ce que le gouvernement du Canada est en train de faire.
    Madame la Présidente, nous faisons bien sûr tous face aujourd’hui à la réalité de la date butoir que la Cour suprême nous impose. À mon avis, cela est absolument inacceptable, et pourtant nous y voilà.
     Si les députés retiennent un fragment de mes interventions ce soir, ils devraient se rappeler le fait que le gouvernement et nous, les parlementaires, devons concevoir cette loi de manière à ce qu’elle protège autant que possible les Canadiens se trouvant dans toutes les circonstances possibles. C’est ce qu’a ordonné la Cour suprême; cette loi doit protéger les Canadiens, surtout les plus vulnérables.
     J’exhorte ce soir mes collègues parlementaires à prendre cela au sérieux, à apporter des amendements à ce projet de loi si cela s’avère nécessaire et à consacrer tout le temps voulu pour le faire correctement afin que pas une seule vie, pas une seule personne handicapée, pas une seule personne ne passent entre les mailles du filet.
    Voilà pourquoi nous avons éliminé la peine capitale dans notre pays: pour que personne ne soit exécuté à tort. Je demande la même faveur à mes collègues parlementaires.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de son discours.
    Comme plusieurs de ses collègues ont parfois insinué que ne rien faire ou utiliser la clause nonobstant était une option dans ce cas, le député peut-il à tout le moins confirmer que ne rien faire et laisser un vide juridique n'est pas une option?
    En tant que parlementaires, nous avons la responsabilité d'offrir une réponse. Nous ne devons pas insinuer que laisser les choses telles quelles serait responsable. Nous devons faire en sorte d'offrir ce qui est maintenant un droit en vertu de la Charte. Ne pas agir n'est pas une option. Les parlementaires doivent répondre et réagir. Dans le cas qui nous occupe, ils doivent répondre dans le temps qui leur a été imparti par la Cour suprême.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je vais plus ou moins revenir sur ce que je viens de dire. Je comprends que nous nous trouvons dans une situation dans laquelle un grand nombre d’entre nous auraient préféré ne pas se trouver.
     Toutefois, certains choix s’offrent à nous. Il y a la disposition de dérogation et nous pouvons nous en prévaloir. Nous verrons si ce Parlement décide de s’engager dans cette voie. Nous avons d’autres choix. Nous pouvons rejeter ce projet de loi et élaborer une autre mesure entre temps. Ces choix s’offrent à nous. Je ne soutiens pas nécessairement cela.
     Personnellement, je soutiens que nous nous trouvons dans cette situation et que nous devons aborder la question. Alors, faisons-le de la manière la plus restrictive possible afin que les personnes qui pourront se prévaloir de cette aide médicale à mourir ou de ce droit à l’euthanasie soient des exceptions. Protégeons la société comme nous avons toujours su le faire. Nous protégeons ici le caractère sacré de la vie.
(1935)
    Madame la Présidente, je prends la parole sur la question comme plusieurs de mes collègues l’ont fait tout au long de la journée.
    Nous nous trouvons devant une question extrêmement délicate qui préoccupe de nombreuses personnes et la société en général. Comme plusieurs de mes collègues, j’en ai discuté avec un grand nombre d’électeurs de ma circonscription ainsi qu’avec des professionnels de la santé, avec des médecins qui appuient cette notion et avec des médecins qui s’y opposent. Les préoccupations diffèrent d’un secteur à un autre. J’ai entendu des gens soutenir que nous devrions protéger les droits des médecins qui refusent de participer. J’ai entendu des électeurs s’opposer fermement à tous les types de mesures législatives pour des raisons morales. J’ai aussi parlé à des électeurs qui ont traversé une période extrêmement difficile aux côtés d’un proche qui souffrait intensément. Ces électeurs appuient l’adoption de cette loi.
    Cependant, les délais très serrés que la cour a accordés ont posé des difficultés à bien des égards. Bien que des consultations aient été menées dans un certain nombre de régions et de circonscriptions, il n'y a tout simplement pas eu assez de temps pour que la population de l'ensemble du pays puisse s'engager pleinement dans ce débat. D'ailleurs, au Québec, le processus a duré six ans. Parmi les options disponibles, nous devrions demander plus de temps à la cour afin de pouvoir réellement étudier ces questions complexes, consulter l'ensemble des Canadiens et obtenir l'avis des nombreux intervenants qui n'ont pas pu comparaître ou témoigner devant le comité.
    J'ai beaucoup de respect pour les députés qui ont travaillé au comité. Je sais que ce n'était pas une tâche facile pour eux. J'ai aussi du respect pour l'ensemble des députés pour qui ce débat a été vraiment éprouvant à bien des égards. Cependant, je suis vraiment très préoccupée à l'idée que ce projet de loi soit élaboré à la hâte.
    Je suis ravie de voir les recommandations de notre rapport dissident à propos des questions liées aux mineurs matures, aux personnes qui ont des problèmes de santé mentale et aux directives anticipées. Certaines ont été adoptées, d'autres pas. Cependant, il reste des questions non résolues en ce qui a trait à la protection de la liberté de conscience des médecins et des professionnels de la santé.
    La protection des personnes vulnérables doit véritablement être au coeur de la mesure législative et du cadre qui seront adoptés, comme mon collègue, qui a pris la parole juste avant moi, l'a si bien dit. Il faut également prévoir des mesures de protection pour les médecins et les professionnels de la santé qui ne veulent pas offrir l'aide médicale à mourir; ces mesures doivent être intégrées au projet de loi, et non être inscrites seulement dans le préambule.
    J'aimerais raconter une histoire qui est liée de près à cet enjeu. Je connais une jeune infirmière qui vient tout juste de terminer ses études et qui a récemment postulé un emploi d'infirmière. La personne qui l'a reçue en entrevue lui a demandé si elle serait en mesure de donner une injection à un patient qui a demandé de mourir. Cette jeune infirmière, qui venait tout juste de terminer ses études, a dit que non, elle ne pourrait pas faire une telle chose. Évidemment, elle n'a pas obtenu le poste. Je raconte cette histoire parce que j'estime que nous devons prévoir, dans la mesure législative, des mesures de protection pour les personnes qui ne veulent pas participer à l'aide médicale à mourir.
    Nous avons laissé tomber les Canadiens en ce qui concerne les soins de fin de vie et l'établissement d'un solide système de soins palliatifs et de soutien à cet égard. Nous devons offrir des soins palliatifs de haute qualité dans toutes les collectivités, dans toutes les provinces, à l'échelle du pays.
    J'ai reçu une lettre manuscrite d'une électrice de ma circonscription. À ce moment, je ne siégeais pas à la Chambre des communes.
(1940)
    Elle a écrit ceci:
    Saviez-vous qu'en juin 1995 le Comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide a conseillé au gouvernement de faire des programmes de soins palliatifs une priorité au moment de la restructuration du système de santé?
    C'était le projet de loi C-545, Loi concernant la prestation de soins continus aux Canadiens, un projet de loi d'initiative parlementaire. Elle a aussi souligné que seuls 30 % des Canadiens avaient accès à des soins palliatifs.
    Elle a ajouté:
    Pouvez-vous garantir que des soins palliatifs soient disponibles pour tous les citoyens du Canada avant que ces mêmes citoyens se voient offrir une aide médicale à mourir?
    C'est une question très pertinente, compte tenu du projet de loi dont nous débattons. Selon l'orientation que nous semblons vouloir adopter, nous devons mettre en place une stratégie nationale en matière de soins palliatifs. Nous devons envisager les soins de fin de vie comme un processus vers la mort, qui se situe dans le continuum global des soins. Ce n'est pas ce que nous faisons à l'heure actuelle. Je crois qu'il serait prudent de mettre en place de telles mesures et de tels plans parce que le projet de loi vise des personnes qui arrivent à la fin de leur vie.
    Comme je l'ai affirmé auparavant, j'estime que nous devons mettre en place un système rigoureux de soins palliatifs. Je crois également qu'un psychiatre ou un travailleur social doit faire partie du processus d'évaluation et qu'une consultation en matière de soins palliatifs doit être effectuée avant que le suicide assisté ne soit envisagé.
    La ministre de la Santé a déclaré à la Chambre hier qu'on consacrerait aux soins palliatifs 3 milliards de dollars sur 4 ans. J'ai été heureuse de l'apprendre. De toute évidence, il s'agit d'une décision de dernière minute, puisque le budget ne mentionne pas cette somme et ne parle ni de soins palliatifs ni de soins de fin de vie. Il faudrait rectifier cette grave lacune immédiatement.
    Dans la foulée du projet de loi à l'étude, nous devrons rapidement mettre en place une stratégie nationale en matière de soins palliatifs. Il s'agit d'un enjeu d'une grande complexité. Le projet de loi m'inspire plusieurs préoccupations. Il faut voir à ce qu'il protège la liberté de conscience des professionnels et le droit d'avoir accès à des soins palliatifs. Des amendements en ce sens doivent absolument être intégrés au projet de loi.
    Il est particulièrement préoccupant que le préambule offre la possibilité de fournir un jour ces services à des mineurs matures et à des personnes atteintes d'une maladie mentale. Bien que la Cour suprême ait donné au gouvernement le mandat d'élaborer une mesure législative sur l'aide médicale à mourir, elle ne nous a vraiment pas laissé assez de temps pour tenir des discussions approfondies avec la population canadienne. Un enjeu comme celui-là ne se règle pas à la va-vite. Il mérite une consultation et un débat réfléchis et respectueux, auxquels tous pourront participer.
    Madame la Présidente, la députée a prononcé un discours mûrement réfléchi, et je suis d'accord avec une bonne partie de ses propos. Je sais que plusieurs de nos collègues parlementaires répètent que, si nous n'adoptons pas ce projet de loi, le pays ne disposera d'aucune loi encadrant le suicide assisté.
    Je ne suis pas la seule à affirmer que le délai prévu par la Cour suprême est trop serré, que 16 mois ne suffisent vraiment pas pour examiner correctement les données, consulter les Canadiens et élaborer un projet de loi bien rédigé et bien réfléchi.
     En tant que législateurs, quelle est notre responsabilité?
(1945)
    Madame la Présidente, notre responsabilité consiste essentiellement à protéger les plus vulnérables. Il y a des mesures dans le projet de loi qui ne permettent pas cela. La Cour suprême nous a chargés de présenter un projet de loi, et il devrait s'agir du meilleur projet de loi possible. Je ne crois pas que nous avons mené suffisamment de consultations auprès de nombreux secteurs au pays. Je crois qu'il est trop tôt pour être au stade où nous en sommes maintenant.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de son discours.
    J'ai entendu à plusieurs reprises des députés dire qu'ils n'avaient pas eu suffisamment de temps, alors que la Cour suprême a rendu sa décision le 6 février 2015.
    Entre le moment où la Cour suprême a rendu sa décision et le moment où le nouveau gouvernement est entré en fonction, à la suite de l'élection du 19 octobre, plusieurs mois sont passés. Si on a enfin un projet de loi, c'est en raison des intentions du nouveau gouvernement et d'une extension du délai jusqu'en juin.
    Si les parlementaires avaient travaillé sur ce dossier dès le départ, cela aurait pu être réglé dans les délais prescrits par la Cour suprême. Ma collègue n'est-elle pas d'accord?

[Traduction]

    Madame la Présidente, quand la Cour suprême nous a donné ce délai, je crois que des consultations préliminaires avaient déjà commencé. Je sais aussi qu'il y a eu des élections. Je crois que cela a mis un terme à une grande partie du travail. Après les élections, c'est au nouveau gouvernement qu'il incombait désormais de poursuivre le travail sur le cadre législatif.
    Comme je l'ai dit, ce processus a duré six ans au Québec et dix ans dans d'autres pays. Même si nous poursuivions le travail sur cette question pendant 16 mois, ce ne serait toujours pas suffisant.
    Madame la Présidente, en réponse à une question, la députée a dit que sa principale responsabilité consiste à protéger les plus vulnérables.
    Ne se rend-elle pas compte que, si la mesure législative n'est pas adoptée, les personnes les plus vulnérables qu'elle veut protéger deviendront encore plus vulnérables en raison du vide juridique? La députée ne convient-elle pas qu'il est préférable d'adopter la mesure législative avant le 6 juin afin de protéger les gens vulnérables?
    Madame la Présidente, il y a de bonnes mesures législatives et des mauvaises. Nous examinerons donc comment le projet de loi et les amendements qui lui sont proposés protègent ou non les personnes vulnérables.
    Il y a encore beaucoup de travail à faire et d'amendements à apporter.
    Madame la Présidente, comme d'autres l'ont fait remarquer avant moi, nous débattons ce soir l'une des plus importantes questions de notre époque. Elle n'est pas seulement importante; elle est aussi très difficile. En fait, il s'agit plutôt d'un faisceau de questions et de décisions difficiles. Elle suscite de profondes préoccupations au Canada depuis des décennies, notamment lors de l'affaire Sue Rodriguez, il y a plus de 20 ans. Nous en discutons de nouveau en raison de l'arrêt dans la cause Carter, arrêt historique qui oblige le Parlement à légiférer pour légaliser et réglementer l'aide médicale à mourir.
    Comme c'est le cas de tous les députés, j’ai reçu d'innombrables lettres, courriels, coups de téléphone et interventions personnelles de toutes parts. Certaines personnes s'inquiètent que les restrictions prévues dans le texte de loi puissent les rendre inadmissibles à cette aide si elles avaient à y recourir un jour, alors que d'autres se soucient de ce que les médecins praticiens ayant des objections éthiques ne puissent opter pour la non-participation.
    De toute évidence, il nous faut une bonne loi qui énonce clairement les critères d'admissibilité à cette procédure, ainsi que les règlements de sa mise en application. Pour ces raisons, je suis généralement en faveur de la mesure législative qui a été présentée, mais j'estime qu'elle est déficiente à plusieurs égards.
     Nous devons nous assurer que ce projet de loi répond comme il se doit à l'arrêt de la Cour suprême. La dernière chose que nous voulons, c'est de prolonger les souffrances de grands malades en suscitant de nouvelles contestations judiciaires.
    Comme je l'ai mentionné, nous devons aussi garantir que les praticiens qui appliquent cette procédure bénéficient de toute la protection voulue quant à leur rôle et à leurs convictions morales. La semaine dernière, j'ai déposé à la Chambre une pétition en ce sens signée par un grand nombre d'habitants de ma circonscription.
     Nous devons, comme beaucoup d'entre nous l'ont fait valoir ce soir, veiller à ce que les personnes atteintes d'une maladie évolutive aient accès à des soins palliatifs appropriés. Elles ont besoin d'un accès aux soins palliatifs, au traitement de la douleur et aux soins à domicile de telle sorte que l'aide médicale à mourir ne soit pas mise en place simplement parce que d'autres mesures plus appropriées ne sont pas disponibles.
     En dernier lieu, nous devons nous assurer que cette procédure est uniformément disponible partout au pays.
     La nécessité de cette procédure est manifeste, ce que l'arrêt de la Cour suprême n'a fait que constater. Il y a plusieurs mois, l'un des électeurs de ma circonscription avait demandé d'y avoir légalement accès tant ses souffrances étaient grandes, sans attendre que nous prenions ici les mesures voulues. Il avait attendu tout le temps qu'ont duré les atermoiements du précédent gouvernement, mais il ne pouvait plus attendre. Il ne fait aucun doute, si nous n'adoptons pas ce projet de loi, que d'autres Canadiens aux prises avec des souffrances et des douleurs intolérables continueront de recourir à ce service par des voies juridiques plus compliquées.
    Vendredi dernier, j'ai rencontré un autre électeur de ma circonscription qui en est à un stade avancé de la sclérose en plaques progressive. Il m'a d'abord parlé du financement fédéral de la recherche sur les traitements expérimentaux de la sclérose en plaques. Comme il en est à un stade avancé de la maladie, il n'est pas admissible aux traitements expérimentaux, mais il tenait absolument à ce que d'autres puissent y accéder plus facilement à l'avenir. Cela dit, comme il est maintenant incapable de s'habiller, de se laver et même de se raser, il sent qu'il sera bientôt incapable de vivre dans la dignité. Il craint de ne pas être admissible à l'aide médicale à mourir étant donné que sa mort naturelle arrivera seulement dans plusieurs années et n'est pas « raisonnablement prévisible », comme le précise le libellé actuel du projet de loi. Beaucoup d'experts affirment que même Kay Carter, qui a saisi la Cour suprême de l'affaire, n'aurait pas été admissible à l'aide médicale à mourir selon les critères énoncés actuellement dans le projet de loi C-14.
    Ce même électeur m'a également expliqué combien l'évolution de sa maladie rend la vie difficile à sa femme. Il voudrait un accès accru aux soins à domicile ainsi que, plus tard, aux soins palliatifs afin de permettre à sa femme de se reposer. Mais l'accès à ces services est inégal selon les régions du Canada. Il nous faut absolument une stratégie nationale sur les soins palliatifs assortie d'un financement adéquat afin de veiller à ce que les patients obtiennent les soins dont ils ont besoin. Il est question de soins palliatifs dans le préambule du projet de loi C-14, mais c'est tout. Le gouvernement n'a dit mot au sujet des soins palliatifs dans le budget même s'il avait promis, durant la campagne, de consacrer 3 milliards de dollars aux soins à domicile.
(1950)
    Les soins palliatifs en établissement sont eux aussi insuffisants partout au pays, mais ils sont encore moins disponibles que les soins palliatifs en milieu hospitalier. Pour ma circonscription, le seul centre de soins palliatifs est situé à cinq heures de route de la limite est de la circonscription. J'ai rencontré une société de soins palliatifs à l'oeuvre à l'extrémité est de la circonscription. Elle a du mal à trouver des fonds pour un centre de soins palliatifs, même si le besoin pour un tel centre est clair et qu'il est évident que cela permettrait au système de santé local de réaliser des économies considérables. Ce niveau disparate de soins me préoccupe, car nous ne voulons pas que les gens choisissent l'aide médicale à mourir simplement parce qu'ils n'ont pas accès à une gestion adéquate de la douleur, à des soins palliatifs en milieu hospitalier, à des soins à domicile ou à des soins palliatifs en établissement.
    Enfin, j'aimerais parler des directives anticipées. De nombreuses personnes ayant une maladie progressive aimeraient fournir à leurs êtres chers et à leur médecin des instructions claires concernant leur sort au cas où elles deviennent incapables de donner ces instructions ultérieurement en raison de la détérioration de leur état physique. Le comité mixte spécial qui a étudié la question a recommandé de permettre les directives anticipées pour l'aide médicale à mourir moyennant certaines conditions. Toutefois, cette recommandation n'est pas incluse dans le projet de loi C-14. Certes, les directives anticipées devraient être claires hors de tout doute si on les utilisait, mais c'est une question à laquelle nous devons faire face.
    En terminant, je crains que les critères d'admissibilité énoncés dans le projet de loi ne correspondent pas à ceux énoncés dans l'arrêt de la Cour suprême qui nous a menés ici. Même si nous devons user de prudence pour protéger les membres les plus vulnérables de la société, de nombreux Canadiens, y compris le citoyen de ma circonscription que j'ai mentionné au début de mon intervention, souffriront encore plus qu'ils ne souffrent à l'heure actuelle si nous ne faisons pas bien notre travail.
    Je sais que le présent débat se poursuivra au comité et j'espère que nous remédierons à une partie des préoccupations soulevées par moi et par d'autres dans les quelques semaines qui restent d'ici la date butoir du 6 juin.
(1955)
    Madame la Présidente, j'aimerais savoir ce que pense le député de l'échéance. Nous avons entendu plusieurs commentaires au sujet de l'échéance et des contraintes de temps, qui auraient pu être évitées. Le gouvernement précédent a mis sur pied un groupe d'experts chargé d'étudier la question, qui devait faire des recommandations législatives précises.
    Toutefois, le nouveau gouvernement a enlevé au groupe d'experts le pouvoir de faire rapport sur les recommandations législatives, malgré les vastes consultations en cours. Il a ensuite entrepris un nouveau processus avec un comité spécial, mais il a attendu des mois après la publication du rapport du comité spécial pour agir. Nous nous retrouvons donc coincés dans le temps.
    Je crois qu'il ne faut pas jouer le jeu des libéraux. S'ils présentent un projet de loi ou un projet de loi modifié qui peut obtenir un large consensus à la Chambre et qui aborde des questions comme l'examen préalable et la protection de la liberté de conscience, alors nous serons en meilleure posture et nous pourrons faire avancer rapidement le projet de loi. Toutefois, le gouvernement a créé des contraintes de temps artificielles et non nécessaires et veut même imposer la clôture.
    Le député convient-il que le gouvernement devrait travailler de façon collaborative plutôt que d'imposer la clôture et de créer une échéance artificielle pour faire adopter le projet de loi?
    Madame la Présidente, je n'étais pas à la Chambre lors de la dernière législature, mais d'après ce que je comprends, de nombreux députés étaient d'avis que le groupe d'experts formé n'était pas tout à fait impartial et ne constituait peut-être pas la meilleure façon d'aller de l'avant. Il aura fallu plusieurs mois ne serait-ce que pour mettre sur pied le groupe d'experts. Si le gouvernement avait agi immédiatement, comme l'a fait le gouvernement actuel après les élections d'octobre, nous serions peut-être plus avancés.
    On a donné l'exemple du Québec, qui a pris six ans pour régler la question. Le Canada n'a pas eu le courage de faire face à la question il y a 20 ans. J'ai parlé de Sue Rodriguez dans mon discours. Si nous avions pris ces mesures...

[Français]

    Je demande aux députés de se lever pour poser des questions et de respecter ceux qui ont la parole pour faire un discours ou pour répondre aux questions.

[Traduction]

    Nous poursuivons les questions et les observations. Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement a la parole.
    Madame la Présidente, lorsque la Cour suprême a rendu sa décision, je me souviens que les deux partis de l'opposition, c'est-à-dire les libéraux et les néo-démocrates, ont exhorté le gouvernement à agir. En fait, une motion a été présentée à la Chambre afin de convaincre le gouvernement de l'époque de passer à l'action.
    Nous avons échoué, certes, mais l'important, c'est de reconnaître qu'il faut régler ce dossier rapidement. J'aimerais entendre les observations du député là-dessus.
    Madame la Présidente, je suis d'accord avec le député d'en face. Étant donné la situation, la meilleure façon de procéder est de voter en faveur du projet de loi et de le bonifier le plus possible en y apportant des amendements à l'étape de l'étude en comité.
    Dans le cas contraire, nous ne respecterons pas l'échéance et, comme d'autres l'ont souligné, nous nous retrouvons sans loi. En février dernier, un habitant de ma circonscription a décidé qu'il prendrait d'autres moyens juridiques pour obtenir de l'aide en l'absence d'une loi. Voilà ce qui se produira si nous n'agissons pas.
(2000)
    Madame la Présidente, le député parle d'une chose que bien des députés ont du mal à accepter, à savoir que nous pensons que le projet de loi ne va pas assez loin. D'autres jugent au contraire qu'il va trop loin.
    Certaines personnes pensent que le projet de loi ne va pas assez loin en ce qui concerne les directives anticipées, dont vous avez parlé. Comme nous le savons, le comité spécial multipartite a voulu régler cette question, et nous espérons que ce sera fait au comité.
    Pourriez-vous nous en dire davantage sur la question des directives anticipées?
    Je rappelle aux députés qu'ils doivent adresser leur question à la présidence.
    Le député d'Okanagan-Sud—Kootenay-Ouest a la parole. Je lui demanderais de répondre très brièvement.
    Madame la Présidente, bien des gens ayant une maladie progressive sont nettement en faveur des directives anticipées, mais la mesure législative doit rendre ces directives absolument claires. Nous devons nous assurer que c'est ce que ces gens souhaitent vraiment et qu'elles sont protégées par les mêmes mesures de sauvegarde que celles qui sont définies dans les présentes directives. Nous devons nous en occuper.
    Madame la Présidente, j'ai eu le bonheur d'arriver ici il y a 12 ans, élu par les résidants de Stormont—Dundas—South Glengarry. Je crois vraiment que la question dont nous sommes saisis est la plus complexe et la plus délicate que le Parlement ait eue à étudier depuis que je suis ici, à mon avis en tout cas.
    Je signale que je suis un catholique pratiquant et que, par conséquent, je vais certainement voter contre le projet de loi C-14. Pour moi, c'est une question d'ordre moral. Je crois fermement au caractère sacré de la vie. En fait, d'aussi loin que je me souvienne, j'ai enseigné que la vie est précieuse, surtout celle des êtres humains, mais aussi celle des animaux et des insectes. On m'a toujours appris que la vie est un don de Dieu et qu'il faut, de ce fait, la respecter.
    Ce n'est pas la seule raison pour laquelle je vais voter contre le projet de loi C-14. Comme il s'agit d'une question d'une importance fondamentale, j'ai pensé que je devais prendre le pouls de mes concitoyens à ce sujet. Je me suis donné la peine d'envoyer un sondage à 45 000 foyers de ma circonscription. Le résultat: 65 % des gens de Stormont—Dundas—South Glengarry sont contre le projet de loi C-14 et 35 % sont pour, moyennant certaines conditions. J'ai lu un grand nombre des observations formulées par les personnes de ce groupe et je puis affirmer que ces conditions sont assez strictes. On veut que l'accès à l'aide médicale à mourir soit très restreint.
    Je tiens à remercier le comité mixte. J'aurais aimé faire partie de ce comité, mais quand je pense à certains aspects de ses travaux, je suis content de ne pas avoir été choisi. Les membres du comité ont dû passer par toute la gamme des émotions. Je tiens à remercier tous les membres du comité de leur excellent travail, en particulier les députés conservateurs qui en ont fait partie, car ils ont publié un rapport dissident. Dieu merci, il existe un rapport dissident.
    Je dois féliciter le gouvernement d'avoir accepté certaines des propositions figurant dans le rapport dissident. Il s'agit notamment de réserver l'aide médicale à mourir aux adultes capables âgés d'au moins 18 ans. C'est très important. Si ce projet de loi devait être adopté, au moins, il contiendrait entre autres ce critère. L'autre proposition a trait aux mesures de protection pour les personnes vulnérables. Mon collègue, le député de Brantford—Brant, en a parlé. Son fils entre dans cette catégorie. Le rapport dissident fait aussi état de mesures de protection pour les médecins qui ne sont pas d'accord avec l'aide médicale à mourir. Dans ma circonscription, de nombreux médecins disent qu'ils ne peuvent pas appuyer cette mesure; ils croient toutefois qu'ils auront des problèmes s'ils agissent selon leur conscience.
    Comme bon nombre de mes collègues l'ont dit, nous devons adopter une loi sur cet enjeu. La Cour suprême du Canada nous a dit que nous devions le faire. Cependant, tâchons au moins de limiter les dégâts. Pour ce faire, nous devons mettre l'accent sur les soins palliatifs.
    Durant la campagne électorale, le Parti libéral a promis 3 milliards de dollars pour les soins de longue durée, y compris les soins palliatifs. Or, dans le budget, comme mes collègues l'ont déclaré, il n'y a pas du tout de fonds pour les soins de longue durée et certainement pas d'argent pour les soins palliatifs. Il n'y a rien à ce sujet dans le budget.
    Le comité mixte spécial et la plupart de ceux qui ont comparu devant ce comité, y compris l'Association médicale canadienne, ont parlé de la nécessité d'une stratégie pancanadienne pour les soins palliatifs, avec un financement spécial. Ils ont suggéré qu'un financement soit réservé pour les soins palliatifs si le projet de loi C-14 venait à être promulgué.
    Mes collègues libéraux sont à la Chambre. Ils vont tenir une réunion du caucus demain, comme nous. Il faudrait qu'ils discutent des fonds pour les soins palliatifs à cette réunion.
    Je me suis entretenu avec le directeur du centre de soins palliatifs de Cornwall aujourd'hui. Le centre de soins palliatifs de Cornwall est dans ma circonscription. Il y a environ huit ou dix ans, la communauté s'est mobilisée. Estimant que nous avions besoin d'un centre de soins palliatifs, nous avons recueilli des fonds. Nous avons maintenant un magnifique établissement de 10 lits qui accueille 100 à 150 patients par année.
(2005)
    Au fil de mes conversations et de mes lectures, j'avais entendu dire que des malades abandonnaient parfois les soins palliatifs. J'ai appelé directement le directeur de cet établissement et je lui ai demandé si c'était bien le cas. Il a répondu sans hésiter par l'affirmative.
    En moyenne, trois ou quatre personnes abandonnent les soins palliatifs chaque année. Parfois, ils abandonnent pendant une période allant de 6 à 24 mois. Imaginez ce qui se serait produit si certaines de ces personnes avaient choisi la solution prévue dans le projet de loi C-14.
    Je faisais de la lecture sur cette question, et j'ai vraiment été touché en plein coeur. Je voudrais citer un extrait de l'une de mes lectures, dont l'auteur est la coalition pour la prévention de l'euthanasie. Voici ce qui est écrit:
    Parmi les millions de mauvais diagnostics qui sont faits chaque année, beaucoup sont des diagnostics de maladie terminale. Nous le savons parce que nous voyons des milliers de personnes apparemment rétablies quitter les établissements de soins palliatifs chaque année.
    Des gens quittent ces établissements non seulement à Cornwall, mais aussi partout en Amérique du Nord et dans le monde. Nombreuses sont les personnes qui font mentir les pronostics de maladie terminale et qui vivent plus longtemps. Ted Kennedy a vécu une année de plus que prévu. John Norton, de Florence, au Massachusetts, a témoigné devant l'assemblée législative de l'État. Lorsqu'on lui a diagnostiqué une sclérose latérale amyotrophique, il aurait certainement eu recours au suicide assisté s'il avait pu. Heureusement pour John, sa famille et tous ceux qui l'ont connu, le suicide assisté ne faisait pas partie des politiques de l'État. Sa maladie a régressé, et 60 ans plus tard, il exhorte les gens à rejeter le suicide assisté. Ai-je besoin d'en dire davantage?
    Madame la Présidente, les députés de l'opposition parlent constamment d'un engagement à l'égard des soins palliatifs. En fait, oui, un engagement a été pris à cet égard; il en est question dans le budget. La ministre de la Santé a clairement indiqué que nous conclurons un nouvel accord sur les soins de santé.
    Pour être en mesure d'offrir le type de soins palliatifs que les Canadiens veulent et méritent, nous devons travailler en collaboration avec les provinces. C'est seulement de cette façon que nous pourrons offrir des soins palliatifs de qualité dans toutes les régions du pays.
    Le gouvernement s'est également engagé à consacrer des centaines de millions de dollars à l'amélioration des soins palliatifs. Nous sommes conscients de leur importance et nous savons quelles sont les attentes des Canadiens. Le député peut-il à tout le moins le reconnaître?
    Nous devrons convenir que nous ne sommes pas d'accord. Je comprends le point de vue du député au sujet du projet de loi. Par contre, à titre de parlementaires, il nous incombe d'adopter cette mesure législative. Il serait inapproprié de ne rien faire et de ne pas respecter la date butoir, qui a été fixée au 6 juin. Si nous n'agissons pas, encore plus de gens seront beaucoup plus vulnérables.
    Cela dit, le député ne convient-il pas que de véritables investissements sont faits pour garantir l'avenir des soins palliatifs, plus particulièrement si on compare le bilan du présent gouvernement au cours des neuf derniers mois au bilan de l'ancien gouvernement, qui a été au pouvoir pendant 10 ans?
(2010)
    Madame la Présidente, avec tout le respect que j'ai envers le député d'en face, j'aimerais qu'il me montre l'argent.
    Le programme électoral des libéraux prévoyait un investissement de 3 milliards de dollars, et on constate tout à coup qu'il ne figure pas dans le budget. Le député nous demande de faire confiance au gouvernement. Il dit que le gouvernement conclura une entente avec les provinces, et que l'argent sera là.
    À vrai dire, je crois que nous ne devrions pas adopter le projet de loi C-14 avant que les soins palliatifs soient en place. Nous avons appris l'histoire de l'homme qui a vécu pendant 60 ans. Imaginons ce qui serait arrivé s'il avait eu accès aux mesures sur l'aide au suicide prévue dans le projet de loi C-14. Cependant, nous devons parler du projet de loi C-14, qui porte sur un autre dossier.
    Comme je l'ai dit, avec tout le respect que j'ai pour le député, j'aimerais voir l'argent.

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue d'avoir parlé des soins palliatifs. Selon moi, c'est un des aspects importants qui n'a pas été assez soulevé ou discuté.
    Dans ce projet de loi, il y a un non-sens quand on arrive à dire que deux choix s'offrent à une personne qui a un diagnostic terminal. Or un des choix n'est pas optimal, donc on va lui offrir l'aide médicale à mourir. D'ailleurs, les soins palliatifs qu'on lui offre ne sont peut-être pas optimaux et même peut-être totalement absents.
    Beaucoup de maisons de soins palliatifs sont des OBSL. On peut donc les aider directement. Ces maisons doivent collecter des milliers de dollars chaque année pour réussir à offrir leurs services. Elles aimeraient avoir des chambres plus grandes pour pouvoir accueillir plus facilement la famille.
    Mon collègue est-il d'accord avec moi pour dire qu'il y a un non-sens au niveau du choix qu'on offre aux patients? Un de ces choix n'est pas optimal, donc la personne ne choisit pas la meilleure solution, mais la solution qui lui semble la moins mauvaise dans les circonstances qu'elle vit.
    Madame la Présidente, je suis d'accord avec ma collègue. Sa question est très pertinente.

[Traduction]

     Je vais révéler une partie de ma vie personnelle. Ma première épouse est morte d'un cancer. Ce n'est pas une façon agréable de mourir. Lorsqu'elle était mourante, le spécialiste nous a téléphoné pour nous dire qu'on allait mettre fin à son traitement. Mon épouse a dit qu'elle ne voulait pas mourir. Le médecin a répondu que, en réalité, il n'y a jamais personne qui veut mourir.
    Mon épouse et moi en avions discuté. J'ai dit que Carol n'avait pas peur de mourir. C'était une femme très religieuse qui savait ce qui l'attendait dans l'au-delà, mais elle avait peur de souffrir, tout comme je craignais de la voir souffrir. J'en ai fait part au spécialiste.
    Il a pris les mains de mon épouse dans les siennes et lui a dit: « Carol, je vous promets que vous ne sentirez aucune douleur. Avec la bonne médication, il n'y a aucune raison de souffrir. Je vous promets, ainsi qu'à votre époux, que cette mort ne sera pas douloureuse. »
    Cela l'a rassurée.
    Madame la Présidente, je vais commencer par souligner la difficulté de la tâche qui nous incombe. La ministre de la Justice a assurément un défi de taille à relever. Il est clair que les Canadiens ont diverses croyances et des convictions profondes au sujet de la question dont la Chambre est saisie aujourd'hui. Je sais que la ministre de la Justice tente d'élaborer une loi qui assure un équilibre entre l'autonomie des personnes et les droits et responsabilités de l'ensemble de la société canadienne, tout en protégeant les personnes les plus vulnérables.
    On dit qu'on peut juger une société à la façon dont elle traite ses membres les plus faibles. Je crois que c'est vrai.
    Je dois admettre que le projet de loi me pose problème encore aujourd'hui. Il semble que la Cour suprême du Canada, avec l'arrêt dans la cause Carter, nous impose une multitude de zones grises. Je préfère que les choses soient clairement définies. J'aime quand c'est noir ou blanc.
    Je crois que les médecins ont pour mission de sauver des vies, et non de prendre des vies. Je crois que nous devrions, en tant que société, toujours lutter pour la vie et non contre elle. La Cour suprême du Canada en a toutefois décidé autrement et elle a ainsi privé les Canadiens de règles claires dans ce dossier.
    L'aide médicale à mourir est maintenant permise au Canada, et on nous a confié, en tant que parlementaires, la responsabilité de mettre en place une mesure législative.
    À cette fin, j'aimerais prendre quelques minutes pour faire part aux députés et au public canadien de mes réflexions sur la mesure législative proposée. Je me demande tout particulièrement si les règles et les règlements prévus dans la mesure législative sont suffisants pour protéger les Canadiens les plus vulnérables qui pourraient être encouragés à demander une aide médicale à mourir ou qui pourraient subir des pressions à cet égard.
    Soyons clairs, cette mesure législative est nettement mieux que ce qui avait été recommandé par le comité mixte spécial, mais il y a toujours quelques éléments qui me préoccupent.
    Le premier élément est le manque d'accessibilité à des soins palliatifs dans l'ensemble du Canada. À l'heure actuelle, seuls 30 % des Canadiens ont accès à des soins palliatifs. Sans accès à toutes les possibilités de soins de fin de vie, une personne n'est pas en mesure de prendre une décision éclairée en ce qui concerne sa façon d'aborder sa mort. Les soins palliatifs confirment que notre instinct naturel nous porte à préserver la vie et que la mort fait partie de l'expérience humaine.
    Les soins palliatifs permettent à une personne d'arriver à la fin de sa vie avec sa dignité intacte et dans un état de confort. Je suis très préoccupée par le fait que nous, en tant que membres d'une société, sommes disposés à investir des sommes considérables dans l'aide médicale à mourir avant de prévoir des fonds adéquats pour les soins palliatifs. Pourquoi accordons-nous plus d'importance à la mort qu'à la vie?
    Je me soucie aussi des gens qui acquièrent un handicap à un certain moment de leur vie. À titre de porte-parole pour les questions touchant les personnes handicapées, j'ai eu la chance de consulter de nombreux organismes de ma circonscription et de partout au pays, ainsi que de nombreuses personnes qui souffrent actuellement d'une invalidité. Leurs exemples m'ont inspiré les préoccupations dont je ferai part aujourd'hui aux députés.
    Les personnes qui ont acquis un handicap à un moment de leur vie m'ont toutes dit, sans exception, que l'adaptation à leur nouvelle réalité avait été marquée par une période d'intense dépression. Cette période a duré quelques jours pour certains, et plusieurs années pour d'autres. Ces gens m'ont toutefois transmis un message d'espoir car, bien que leur nouvelle vie soit différente depuis qu'ils se sont adaptés à leur handicap, ils ont retrouvé le goût de vivre, la joie et la dignité.
    Chacune de ces personnes est encore confrontée à de nombreux défis au quotidien. Plusieurs ont besoin d'aide pour accomplir des tâches de base, comme se nourrir ou se laver, et plusieurs doivent même composer avec des douleurs chroniques. Malgré cela, elles ont toutes appris à apprécier leur nouvelle vie et à vivre avec dignité, honneur et respect.
    Ces personnes m'ont fait comprendre que dans leur vie antérieure, elles n'avaient aucune idée qu'il était possible de donner un sens à son existence et de vivre dans la dignité tout en ayant un handicap. Adopter une telle optique leur a pris du temps, mais elles y sont arrivées malgré leur situation.
    C'est pourquoi je me réjouis du fait que la ministre de la Justice ait tenu son bout et refusé d'inclure le consentement préalable au projet de loi.
    La Cour suprême a défini le concept du consentement continu dans de nombreuses décisions passées. Il en est souvent question dans les procès d'agressions sexuelles, mais le principe s'applique également à la question qui nous occupe. Le juge de première instance et la Cour suprême ont tous les deux limité l'accès à l'aide médicale à mourir aux adultes capables qui consentent clairement à mettre fin à leur vie. Le consentement doit être donné tout au long de la procédure. Un consentement préalable ne tient pas pleinement compte du fait que l'appréciation de la personne par rapport à son état évolue tandis qu'elle s'adapte à sa nouvelle réalité. S'en tenir simplement à sa préconception de ce qu'elle deviendra ne permet pas de déterminer de façon fiable comment elle acceptera réellement son état dans le futur.
(2015)
    Il m'a fait plaisir d'entendre la ministre parler de la nécessité de protéger les personnes vulnérables. À raison, la Cour suprême a déterminé que l'intention des anciennes dispositions du Code criminel était d'empêcher les personnes vulnérables d'être incitées au suicide. La Cour a réaffirmé cette intention dans l'arrêt dans la cause Carter. Malheureusement, les personnes handicapées et celles atteintes de maladies dégénératives vivent bien trop souvent dans la pauvreté. Dans de telles circonstances, il faut compter sur les initiatives d'accès communautaire pour espérer vivre avec dignité.
    J'ai entendu des histoires tragiques de personnes qui, avec un peu d'aide communautaire comme des soins à domicile adéquats ou une aide aux transports, pourraient facilement vivre dignement. C'est seulement parce que ces personnes ont été laissées à elles-mêmes et vulnérables qu'elles ont demandé une aide au suicide. Elles voulaient mettre fin à des souffrances attribuables à leur condition sociale plutôt qu'à leur maladie. C'est la dure réalité. En l'absence de mesures de protection musclées, les personnes vulnérables sont susceptibles d'accepter l'aide à mourir pour des raisons sociales plutôt que médicales.
    C'est pour cette raison que tous les organismes d'importance à qui j'ai parlé au Canada qui interviennent auprès des personnes handicapées réclament un examen préalable des vulnérabilités sociales d'ordre non médical. Aucun examen de ce genre n'est prévu dans le projet de loi. J'estime qu'il est absolument essentiel d'inclure dans toute mesure que nous adoptons une disposition exigeant un examen préalable par une personne capable de décider si l'isolement, la dépression, les ennuis ou la pauvreté affaiblissent potentiellement l'aptitude de la personne concernée à prendre une décision éclairée au sujet de l'aide à mourir.
    Je félicite le gouvernement libéral d'avoir réintroduit dans le débat le concept selon lequel l'aide médicale à mourir doit seulement être considérée en cas de maladie mortelle. Je suis satisfaite de cette disposition. En tant que membre suppléante du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, j'ai entendu de nombreux députés et sénateurs de toutes les affiliations politiques affirmer que l'aide médicale à mourir devrait être offerte à toute personne qui, selon elle, éprouve « des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au regard de sa condition. »
    L'accent était mis sur l'expérience perçue par la personne plutôt que sur son état physique. Cette approche n'est fondée sur aucune donnée scientifique ni aucun diagnostic externe. Si on pousse la logique jusqu'au bout, ce prétendu critère permettrait à n'importe qui d'obtenir de l'aide à mourir sans avoir de comptes à rendre. Toutefois, rattacher l'aide à mourir à un diagnostic indépendant élèverait le processus au-delà de l'expérience relative de la personne en cause. C'est indispensable afin de réduire les risques de dérapage que cette mesure législative entraînerait inévitablement.
    Tous les étudiants ayant suivi un cours d'initiation à la politique savent que les lois sont considérées comme un contrat social au Canada. Quand une loi est invalidée, cela signifie, par extension, que tous les Canadiens soutiennent en partie un comportement qui était jusqu'ici interdit et qui ne l'est plus. La restriction de l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes d'une maladie pouvant raisonnablement causer la mort peut ne pas sembler établir une distinction très importante, mais elle jouera un rôle déterminant dans la société que nous bâtirons.
    Si nous sommes une société compatissante qui entend protéger les gens vulnérables, cela signifie que nous croyons que la société est capable d'ignorer les impulsions d'une personne quand il est établi qu'elles causeraient un préjudice à cette personne ou à quelqu'un d'autre. La motivation à sauver les autres est l'une des plus belles qualités des êtres humains. Si nous nous fondons sur l'expérience subjective de gens dont les souffrances perçues ne sont pas attribuables à une maladie mortelle pour leur ouvrir l'accès à l'aide médicale à mourir, cela transformerait radicalement le tissu social de notre société. Nous sommes une société qui lutte pour la vie et nous devons le demeurer.
    En tant que Canadiens, nous devons veiller à ne pas dire aux personnes qui vivent avec un handicap, qui ont besoin des autres pour les nécessités de la vie ou qui font face aux douleurs chroniques avec courage et détermination que leur vie n'en vaut pas la peine. Il est facile de perdre de vue les répercussions générales sur la société lorsqu'on se concentre seulement sur le concept postmoderne de vérité relative. Avec cette approche, il est impossible de tenter de convaincre une personne suicidaire que la vie vaut la peine d'être vécue. Toutefois, une vérité objective ne se dément jamais. Qu'une personne y croie ou non, c'est ainsi parce que la société a choisi d'y croire.
(2020)

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de son discours.
    J'ai l'impression qu'elle a peut-être perdu l'essence de l'arrêt dans l'affaire Carter, qui parlait spécifiquement du droit protégé en vertu de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. Ce droit est le droit à la vie, et le droit à la vie inclut aussi le droit de choisir ce qu'on fait de sa vie. C'était l'essence de l'arrêt dans l'affaire Carter.
    Ma collègue pense-t-elle que le projet de loi à l'étude permet de respecter à tout le moins l'essence de cet arrêt? Est-ce une réponse adéquate ou devrions-nous aller plus loin? Certains experts ont dit que, dans ce cas-ci, Mme Carter n'aurait peut-être pas été admissible elle-même à l'aide médicale à mourir.
    Ma collègue trouve-t-elle que c'est une réponse satisfaisante à l'arrêt dans l'affaire Carter? Cela va-t-il assez loin ou aurait-il pu inclure Mme Carter dans les services rendus en vertu de la Charte?
(2025)

[Traduction]

    Madame la Présidente, cette mesure législative traite du droit à la vie. C'est ce que visait l'arrêt Carter. Je trouve donc plutôt paradoxal qu'on parle de l'aide à mourir alors qu'il est question du droit à la vie. Nous, les Canadiens, en tant que société, avons toujours lutté pour la vie. Les médecins sont là pour préserver la vie. Ils prêtent serment et promettent de se battre pour sauver des vies. Je me dois donc de poser la question suivante: de quelle façon l'arrêt dans la cause Carter lutte-t-il pour la vie?
    Madame la Présidente, j'aimerais aborder un point dont ma collègue n'a pas parlé, soit la possibilité, pour un médecin, d'être rémunéré pour exécuter l'euthanasie. J'estime que cette procédure ne devrait être administrée que par pur altruisme. Par conséquent, le médecin ne devrait pas toucher d'honoraires ou d'avantage pour l'exécuter. Qu'en pense la députée?
    Madame la Présidente, le droit d'un médecin de toucher des honoraires pour cette procédure me préoccupe certainement. Un médecin prête serment de faire tout en son pouvoir pour lutter pour la vie, pour protéger la vie. Être soudainement rémunéré pour aider quelqu'un à s'enlever la vie semble contraire à ce serment. La rémunération du médecin pour enlever la vie risque peut-être de contribuer à un abus de la procédure à l'avenir et à l'absence de reddition de comptes de la part des médecins, ce qui signifie que l'on pourrait mettre fin prématurément à des vies sans le consentement direct des patients ou en l'obtenant par la coercition.
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de ses observations judicieuses et de l'excellent travail qu'elle fait pour les personnes handicapées.
    Je veux approfondir la question des soins palliatifs. Certains députés des autres partis ont dit que les soins palliatifs sont une bonne chose, mais que le présent débat porte sur l'euthanasie ou le suicide assisté et que nous pourrons parler une autre fois des soins palliatifs. Le comité consultatif nous a appris toutefois que ces deux aspects sont nécessairement liés. Si nous n'offrons pas de soins palliatifs, les gens seront plus enclins à demander l'euthanasie ou le suicide assisté, même si ce n'est pas ce qu'ils veulent vraiment. Par conséquent, nous devons donner aux gens la possibilité de recourir à des soins palliatifs efficaces pour qu'ils puissent véritablement exercer leur autonomie.
    J'aimerais qu'il soit expressément question des soins palliatifs dans le projet de loi. J'aimerais que le projet de loi garantisse le droit de recevoir des soins palliatifs pour que cette option s'offre aussi aux gens. La députée est-elle d'accord avec moi?
    Madame la Présidente, l'arrêt dans la cause Carter vise à protéger l'autonomie des gens afin qu'ils restent libres de leurs choix à la fin de leur vie. Par conséquent, pour garantir cette liberté de choix, il faut selon moi qu'ils aient accès à toutes les options de fin de vie. Les soins palliatifs sont certes essentiels.
    Madame la Présidente, je suis ravi d'avoir la possibilité de prendre la parole au sujet du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois.
    Le suicide assisté est une question sérieuse qui a de graves répercussions sur toute la société à court et à long terme. À la lumière de l'expérience de pays comme la Belgique et les Pays-Bas, qui ont légalisé le suicide assisté, nous savons avec certitude que les populations vulnérables, comme les aînés, les jeunes et les personnes aux prises avec la maladie mentale, seront inévitablement en danger.
    La légalisation du suicide assisté a aussi grandement miné la confiance du public dans le système médical de ces pays. C'est pourquoi je m'y oppose.
    Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-14 rend vulnérables certains groupes sociaux, n'assure aucune protection aux professionnels ni aux établissements, sape la crédibilité du système de santé et compromet l'important travail réalisé par les fournisseurs de soins pour aider les gens à vivre.
    J'exhorte les députés à faire preuve d'une grande prudence à l'égard de cette mesure législative et à en soupeser chaque mot afin que les plus vulnérables de notre société ne soient jamais en danger.
    Par le passé, la Chambre a débattu de la peine de mort, qui constitue une autre façon d'enlever la vie à autrui. La peine de mort a été rejetée, notamment parce que si on devait tuer une personne innocente, ce serait une mort de trop. Le même principe ne devrait-il pas nous guider dans notre débat ici aujourd'hui?
    Ray Pennings, cofondateur de Cardus, a souligné récemment l'importance de ce principe dans un éditorial. Voici ce qu'il a écrit:
    Si, dans une définition juridique, tous les mots comptent, le langage utilisé dans ce débat compte tout autant et s'inscrit dans un contexte plus large. En tant que société, comment percevons-nous l'autonomie personnelle et le fait d'enlever la vie à autrui? Comment faisons-nous la distinction entre, d'une part, un groupe d'adolescents qui, ayant conclu que la vie n'en valait pas la peine, concluent un pacte de suicide dans une réserve autochtone et, d'autre part, des citoyens atteints d'une maladie en phase terminale qui craignent d'être devenus un fardeau pour leur famille et la société et qui décident, eux aussi, que la mort est préférable à la vie?
    Le débat est loin d'être nouveau, mais il y a lieu d'établir des distinctions qui nécessitent de la prudence et un langage précis. Il est inquiétant de constater que le langage utilisé nous emmène dans la direction opposée.
    M. Pennings montre qu'on peut observer ce changement dans les deux arrêts de la Cour suprême. Dans l'arrêt Rodriguez de 1991, qui a maintenu la prohibition de l'aide au suicide, les expressions « aide au suicide » et « suicide assisté » apparaissent 93 fois. Cependant, dans l'arrêt dans la cause Carter de 2015, dans lequel la Cour suprême en est arrivée à une décision contraire, les expressions « aide au suicide » et « suicide assisté » ne sont utilisées que 16 fois, tandis que l'expression « aide médicale à mourir » figure 50 fois.
    En lisant la mesure législative dont nous sommes saisis, nous voyons que le terme « suicide assisté » n'y figure pas du tout. Le mot « suicide » n'apparaît que sept fois et la phrase « aide médicale à mourir » est utilisée 72 fois.
    En 20 ans, nous avons marqué des progrès. Nous sommes passés de la reconnaissance de la valeur et de la dignité de la vie, déployant des efforts pour dissuader les gens de commettre un suicide, à l'offre d'aide au suicide comme forme de soins de santé, ce qu'on appelle « de l'aide médicale à mourir ».
    Bien que je trouve bien des passages du projet de loi C-14 alarmants, je veux commencer par le changement de vocabulaire. Le terme « aide médicale à mourir » induit en erreur dans le contexte où il est utilisé dans le projet de loi. L'aide médicale à mourir ne consiste pas à aider les gens à choisir de mettre fin à leurs jours. L'aide médicale à mourir est ce que la communauté médicale appelle les soins palliatifs.
    Comme Canadiens, nous avons la chance de vivre dans un pays doté d'un excellent système de santé, avec de nombreux médecins qui veulent vraiment aider leurs patients à vivre une vie épanouissante et en santé. Lorsque la situation change et que les patients sont confrontés à une maladie incurable, les mêmes médecins utilisent leurs connaissances en médecine pour atténuer leur douleur et leur souffrance en leur prodiguant des soins en fin de vie. C'est là une réelle aide médicale jusqu'à ce que la personne meure.
    C'est la raison pour laquelle je crois que des amendements sont nécessaires pour corriger le détournement des réels soins de santé. Premièrement, le projet de loi C-14 devrait être amendé pour remplacer le terme « aide médicale à mourir » par « aide à mourir » tout simplement. On ferait ainsi la distinction entre le suicide assisté et les soins de santé.
    Deuxièmement, pour compléter le retrait du mot « médical » du projet de loi C-14, je recommande des amendements pour permettre la délivrance de permis à des personnes par le ministère de la Justice pour leur permettre d'aider des gens à mettre fin à leur vie. Cela éliminerait la nécessité d'y mêler la communauté médicale et toute préoccupation relative à la liberté de conscience des médecins. Les titulaires d'un permis, y compris les médecins qui souhaiteraient participer, pourraient faciliter le suicide et permettraient que le système de santé reste centré sur son objectif principal, qui est de fournir des soins de santé à tous les Canadiens.
(2030)
    Troisièmement, je crois que les dispositions du projet de loi C-14 sur l'admissibilité à l'aide au suicide doivent exiger que les personnes qui demandent une aide au suicide reçoivent d'abord des services de consultation ou des services psychologiques, et qu'un contrôle judiciaire soit effectué.
    Je crois que d'autres amendements sont aussi nécessaires, mais bon nombre d'entre eux ont déjà été soulignés par mes collègues. Je tiens à revenir à ce qui est réellement au coeur de ce débat: la nécessité de protéger les plus vulnérables de notre société et d'atténuer la souffrance des mourants.
    Cet aspect a été abordé par de nombreux députés de tous les partis. On ne peut et ne pourra jamais aider les gens à mourir dans la dignité en adoptant des mesures législatives sur l'aide au suicide. On ne peut le faire qu'en améliorant les soins palliatifs. Tous les Canadiens ont le droit de recevoir des soins de santé de qualité, et cela comprend des soins palliatifs de qualité.
    Voilà pourquoi j'ai appuyé une motion sur les soins palliatifs présentée par mon collègue du NPD, le député de Timmins—Baie James. Ce député a souligné à maintes reprises que le gouvernement n'a pris aucun engagement concret à l'égard des soins palliatifs.
    J'ai été récemment touché par un commentaire de ma collègue de l'autre Chambre, la sénatrice Betty Unger, qui a été infirmière et qui a écrit ceci:
     La Charte protège tout autant le droit d'obtenir des soins palliatifs que le droit de bénéficier d'une aide médicale pour mourir [...] la plupart des gens vous diront que quelque chose ne va pas du tout lorsqu'un gouvernement s'emploie davantage à garantir le droit des vivants de mourir que le droit des mourants de vivre.
    J'invite le gouvernement à nous montrer qu'il considère l'accès aux soins palliatifs comme un droit protégé par la Charte au même titre que l'accès au suicide assisté.
    Le suicide assisté et l'euthanasie constituent l'un des enjeux m'ayant incité à me présenter aux élections pour me faire élire député. C'est un enjeu qui préoccupe aussi un grand nombre de personnes de ma circonscription.
    Cette année, j'ai fait parvenir un sondage aux gens de ma circonscription sur le suicide assisté et l'euthanasie. Plus de 92 % d'entre eux ont indiqué qu'ils s'opposaient à l'idée d'offrir le suicide assisté à des enfants. La vaste majorité a aussi pris le temps d'exprimer son opposition au suicide assisté non seulement dans le cas des enfants, mais pour les personnes de tous les âges.
    Les gens de ma circonscription pensent en outre que la liberté de conscience des médecins doit être protégée. C'est le cas notamment de Michelle, qui a écrit ceci: « Les médecins font le serment de protéger la vie; on ne devrait pas exiger d'eux qu'ils mettent fin à une vie si le patient ou la famille fait ce choix. »
    L'opposition au suicide assisté dans ma circonscription transcende les partis politiques. Amy m'écrit ceci: « En tant que partisane du Parti libéral, je suis déchirée. Je comprends les arguments des deux camps. Cependant [...] on dirait qu'il est pratiquement question de légaliser le meurtre. »
    Au sujet de la douleur et de la souffrance, Maggie m'a écrit: « Ayant vu des amis et des membres de ma famille prendre des décisions au milieu de la douleur et du découragement, et ayant passé à travers une profonde dépression et une grande douleur émotionnelle, je sais qu'on ne prend jamais de bonnes décisions éclairées dans les périodes creuses de la vie. J'ai traversé une période où je voulais mettre fin à mes jours et j'ai connu ensuite des joies que je n'aurais jamais cru possibles. »
    Ma circonscription compte également 14 collectivités des Premières Nations dans le Nord de l'Alberta. Plus tôt cette année, durant les audiences du comité mixte spécial, le Dr Alika Lafontaine, qui est président de l'Association des médecins autochtones du Canada et qui travaille également dans le Nord de l'Alberta, a déclaré:
Ce que nous demandons dans les collectivités autochtones, ce n'est pas l'aide médicale à mourir. Cela existe déjà sous d'innombrables formes. Nous demandons l'aide médicale à vivre.
    Les médecins autochtones veulent aider les Autochtones à vivre, pas à mourir.
    Le Dr Lafontaine a aussi déclaré que les Autochtones n'ont pas été consultés concrètement et que la création d'un programme qui permet littéralement aux patients de mourir intentionnellement dans le système de soins de santé désintéressera et marginalisera encore plus les patients et les familles autochtones.
    Plus tôt cette année, j'ai posé la question à la ministre de la Santé, et elle a admis que le gouvernement libéral n'a pas consulté directement les organisations autochtones sur le projet de loi sur l'aide à mourir.
    Les dirigeants autochtones me disent: « Rien nous concernant ne se fera sans nous. »
    Je suis très préoccupé par les répercussions qu'aura la légalisation de l'aide au suicide sur les communautés autochtones.
    Enfin, la question de la souffrance est souvent soulevée lorsqu'on parle du suicide. On fait valoir que l'aide au suicide devrait être accessible à tous ceux qui souffrent, même les enfants. Ceux qui pensent ainsi affirment que vivre dans la douleur et la souffrance, ce n'est pas vivre dans la dignité et que, par conséquent, tous ceux qui souffrent devraient avoir accès à l'aide au suicide.
    Je ne suis pas du tout d'accord. La dignité des personnes n'est pas liée à leur situation; elle vient du fait même que ce sont des êtres humains.
(2035)
    Ce qui compte le plus, c'est que nos fournisseurs de soins de santé sont très compétents lorsqu'il s'agit d'aider les patients à gérer leur douleur. Même lorsqu'ils doivent prodiguer des soins palliatifs à des enfants, les médecins ne considèrent pas — j'insiste là-dessus — l'aide au suicide comme une solution.
    Le Dr Stephen Liben, directeur du programme de soins palliatifs pédiatriques à l'Hôpital de Montréal pour enfants, a dit ceci:
    Aucun enfant ne nous supplie de mourir maintenant. Ça n’arrive jamais [...] La dernière chose, et je dis bien la dernière chose dont j’ai besoin en tant que médecin en soins palliatifs, c’est d’une loi sur l’euthanasie. [...]
    Ce ne serait pas un outil de plus pour alléger leurs souffrances et ça ne ferait que rendre les choses plus confuses.
    Je ne peux pas appuyer le projet de loi C-14 en ce moment, mais si d'importants amendements étaient apportés en ce qui a trait à la protection de la liberté de conscience des travailleurs de la santé et au retrait des références aux soins de santé, j'envisagerais de changer d'avis.
(2040)
    Madame la Présidente, plus tôt, le député a mis l'accent sur certains termes, notamment sur l'emploi du mot « suicide ». Dans le résumé législatif qui a été fourni par le gouvernement, on trouve une définition du terme « aide médicale à mourir ». Je pense qu'il est important d'utiliser ce terme en particulier. Il est important, pour les Canadiens qui devront faire ce choix, que le mot « suicide » ne soit pas rattaché à cette situation, car c'est un choix qu'ils font à un moment de leur vie où ils sont aux prises avec de grandes souffrances et douleurs.
    Je tiens à souligner, à l'intention du député, qu'il existe deux définitions. Dans le premier cas, le médecin ou l'infirmier praticien autorisé administre une substance qui cause la mort de la personne. Dans le deuxième cas, qui est celui qu'il a mentionné, une substance est prescrite à la personne, et celle-ci se l'administre elle-même. Ce sont deux choses différentes, et c'est pourquoi le terme « aide médicale à mourir » a été proposé.
    Il a aussi parlé du milieu médical. L'Association médicale canadienne accueille très favorablement les solutions législatives et non législatives qui ont été présentées par le gouvernement fédéral. Ensemble, la mesure législative proposée et les engagements pris par le gouvernement fédéral, qui a manifesté son intention de travailler avec les provinces et les territoires, contribueront dans une large mesure à l'établissement d'un cadre sur l'aide médicale à mourir qui sera appliqué de manière uniforme par toutes les administrations au Canada.
    Nous nous trouvons à un moment décisif, et il n'est pas simplement question de savoir si nous, à la Chambre, estimons que cette mesure législative devrait être appliquée. Nous devons nous pencher sur les règles qui entoureront le processus.
    J'aimerais que le député parle des amendements qu'il aimerait voir présentés au comité.
    Madame la Présidente, la députée n'a pas compris que, ce que j'essayais de dire, c'est que les termes précis utilisés sont importants. Elle a laissé entendre que nous examinons actuellement deux aspects différents du projet de loi, et je reconnais que je n'ai parlé que de l'un d'entre eux, c'est-à-dire le suicide assisté. L'autre situation décrite dans le projet de loi est l'euthanasie. Je n'en ai pas parlé aussi souvent. Ce sont les deux termes qui correspondent aux situations que la députée a mentionnées. Même dans la définition contenue dans la mesure législative, aucun des deux termes n'est utilisé. Il est question d'une substance administrée par un professionnel de la santé ou d'une substance administrée par la personne elle-même.
    Ce que je veux dire, c'est qu'après 20 ans, il faut se demander où est rendue la discussion. Le temps a passé, et les termes utilisés ont changé.
    Je m'adresse à des écoliers dans ma circonscription. J'ai participé aux activités d'un groupe appelé CIVIX qui a organisé une activité dans le cadre de laquelle les écoliers peuvent rencontrer leur représentant élu local. Lorsque je m'adresse à eux, je leur dis que, dans le passé, lorsqu'une personne se préparait à se jeter d'un pont, on lui disait de descendre parce que sa vie avait de la valeur et que, maintenant, on cherche plutôt à l'aider en lui offrant de la pousser.
    Madame la Présidente, j'ai entendu les libéraux parler du financement qu'ils envisagent d'allouer aux soins palliatifs et déclarer qu'il s'agit d'un engagement. J'ai exprimé ma préoccupation à cet égard un peu plus tôt. En étudiant le budget, on constate qu'au-delà du facteur d'indexation de 6 % établi par les conservateurs, les augmentations de 3 % prévues pour 2016-2017 équivalent à 2,8 %.
    Par conséquent, en ce qui concerne le financement promis aux provinces pour assurer la bonne marche du système de soins de santé, le député croit-il que le gouvernement soit en mesure d'élaborer un régime de soins palliatifs qui répondra aux besoins des Canadiens?
    Madame la Présidente, le député me demande si je me fie au gouvernement pour qu'il règle le dossier des soins palliatifs. En lisant le projet de loi, je me rends compte à quel point j'ai peu confiance. Le budget ne fait nullement mention des soins palliatifs. Le projet de loi offrait une occasion de remédier à cela. Or, ni le projet de loi ni le budget ne traitent des soins palliatifs.

[Français]

    Madame la Présidente, je suis très heureux de participer au débat de ce soir, et je tiens à remercier tous ceux qui y participent. La discussion que nous avons aujourd'hui, et que nous tiendrons au cours des prochains jours et des prochaines semaines, est importante, afin d'en arriver à une solution d'ici la fin du délai qui nous a été prescrit par la Cour suprême du Canada. Nous avons obtenu une prolongation afin de réussir à accomplir le travail dans un temps limité.
    Tout d'abord, je tiens à rappeler pourquoi nous débattons d'un tel enjeu. Je trouve important de remettre nos discussions en contexte. La discussion que nous avons ce soir découle d'un arrêt de la Cour suprême du Canada, qui a donné au Parlement le mandat d'étudier la question et de proposer une solution législative.
    Dans sa décision, la Cour suprême du Canada a clairement invalidé deux dispositions du Code criminel. Maintenant, c'est à nous, en tant que parlementaires responsables, de trouver une solution au vide juridique qui prendra effet dès le 6 juin 2016. Cette discussion remonte à bien avant la décision de la Cour suprême du Canada. En effet, ce sont des décisions rendues par des cours inférieures qui ont mené à la décision finale de la Cour suprême du Canada. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici pour en discuter.
    Au départ, Mme Carter, que l'on connaît bien, et d'autres personnes se sont présentées devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique pour tenter de faire invalider les dispositions en question du Code criminel qui, jusqu'à maintenant, empêchent d'aider quelqu'un à s'enlever la vie. C'est à ce moment que le débat a commencé, et il a pris fin avec l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
    Je souhaiterais lire quelques passages de l'arrêt qui indiquent quel est le mandat des parlementaires. L'arrêt dans la cause Carter est historique. Le premier aspect qui rend cette décision historique, c'est que la Cour suprême du Canada a reconnu que la cour de la Colombie-Britannique avait le droit de revenir sur la jurisprudence qu'était l'arrêt dans la cause Rodriguez. La juge de première instance a alors décidé de changer la jurisprudence, parce que son jugement était en contradiction avec celui rendu dans un précédent dossier. Le jugement de la juge de première instance était aussi en contradiction avec un jugement de la Cour suprême du Canada. Il faut le dire, c'était un des importants sujets de discussion de ce dossier juridique. La juge avait-elle le droit de renverser la jurisprudence qui était jusqu'alors valide? C'est une question litigieuse. Le fait que la Cour suprême du Canada valide l'interprétation de la juge de première instance était historique. Les changements dans le contexte social, dans notre société, lui permettait de changer la jurisprudence. La Cour suprême du Canada a maintenu cela, et elle a agréé la décision. C'était aussi un élément historique parce qu'on reconnaissait que le droit à la vie incluait aussi le droit de disposer de sa vie. C'était la première fois qu'on avait une telle interprétation.
    Je vais maintenant citer un passage de l'arrêt de la Cour suprême du Canada.
(2045)

[Traduction]

    — En l’espèce, la prohibition prive certaines personnes de la vie car elle a pour effet de forcer certaines personnes à s’enlever prématurément la vie, par crainte d’être incapables de le faire lorsque leurs souffrances deviendraient insupportables.

[Français]

    Plus loin, il est mentionné:
(2050)

[Traduction]

    La prohibition de l’aide médicale à mourir porte atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne d’une manière non conforme aux principes de justice fondamentale.

[Français]

    Quand j'ai lu ces passages du résumé, j'étais moi-même surpris par l'interprétation qui avait été faite. J'approuvais cette interprétation, mais il faut avouer qu'à la première lecture, cela pouvait nous surprendre. C'est pourquoi ma collègue a parlé d'ironie. Néanmoins, il est tout à fait vrai que le droit à la vie inclut aussi le droit d'en disposer.
    Je me rappelle très bien du moment où la décision a été rendue, le 6 février 2015. C'était un vendredi après-midi, et j'étais à mon bureau de circonscription. La première chose que j'ai faite, c'était de lire le document. Je m'intéressais beaucoup au droit constitutionnel, mais aussi à ce sujet d'actualité et à ce débat de société.
    Au Québec, on a connu un débat semblable, au cours des dernières années. Alors, j'étais curieux de savoir ce que la Cour suprême allait dire. J'ai surtout été interpellé par le mandat qu'elle nous a donné dans sa décision, celui de rédiger de nouvelles dispositions législatives afin que le droit qui était reconnu par la Cour suprême soit accordé aux Canadiens.
    Par contre, j'ai été déçu qu'on n'entame pas la discussion dès les jours suivants. Je m'attendais à ce que cela se fasse rapidement, mais on a tardé à le faire. Je ne comprends pas pourquoi, puisqu'il s'agissait d'une décision historique et unanime de la Cour suprême. Cette décision interpellait directement les parlementaires, mais cela a pris beaucoup trop de temps avant que les choses se mettent en place. Nous l'avions dénoncé.
    Certes, un travail a été fait par des experts, mais cela a pris beaucoup trop de temps, encore une fois. Il est important de souligner cette lenteur. En tant que parlementaire, j'étais déçu que ce ne soit pas la première chose à l'ordre du jour du gouvernement, lorsque nous sommes revenus ici. Le gouvernement ne voulait tout simplement pas en parler. Oui, il a mandaté un panel, mais il refusait tout simplement d'en parler. Je trouvais cela déplorable.
    Maintenant, nous sommes devant un fait accompli, pour ainsi dire. La décision de la Cour suprême nous oblige à rendre ce service accessible, parce que c'est un droit constitutionnel. En tant que parlementaires responsables, nous ne pouvons pas rester les bras croisés. La Cour suprême nous a donné le mandat de nous assurer que ce nouveau droit constitutionnel est accessible et rendu aux Canadiens.
    En tant que parlementaires, il n'est pas question d'admettre du bout des lèvres qu'il s'agit d'un droit constitutionnel auquel chaque Canadien a droit et de restreindre le plus possible l'accès à ce service. C'est plutôt le contraire.
    Il est important de comprendre l'essentiel de la décision de la Cour suprême, c'est-à-dire que le droit à l'aide médicale à mourir est un droit constitutionnel protégé en vertu de la Charte. En tant que parlementaires, nous n'avons aucune raison de ne pas rendre ce service accessible à tous. J'implore donc tous mes collègues d'appuyer ce projet de loi pour l'envoyer en comité et possiblement l'améliorer, afin de s'assurer qu'il respecte la décision de la Cour suprême.
    En effet, la dernière chose qu'on veut, c'est d'avoir d'autres causes et d'autres délais pour des gens qui pourraient vouloir y accéder rapidement.
(2055)

[Traduction]

    Madame la Présidente, le député de Sherbrooke a tout à fait raison. La Cour suprême a rendu sa décision il y a plus d'un an. Le gouvernement conservateur a alors jugé nécessaire de prendre le temps qu'il faudrait pour faire les choses de la bonne façon. Quand il s'agit d'un projet de loi aussi crucial, il faut faire les choses correctement.
    Les libéraux hésitent depuis le 20 octobre. Ils ont affirmé vouloir faire les choses de la bonne façon. Ils ont beaucoup insisté là-dessus, mais ils n'ont présenté le projet de loi à la Chambre qu'il y a deux jours. De plus, ils limitent les discussions et le nombre de témoins.
    Le projet de loi sera renvoyé au comité. Y aura-t-il une consultation ouverte et équilibrée, d'après le député, alors que le gouvernement limite le débat et muselle les témoins, comme le montre la motion de clôture présentée aujourd'hui? Le député croit-il qu'il y aura une consultation honnête et équilibrée à l'étape de l'examen en comité?

[Français]

    Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question.
    En effet, il faut le faire de la bonne façon. Je suis d'accord avec cela. Une manière de ce faire est d'inviter des témoins et des experts à venir nous parler du projet de loi. Effectivement, un travail en amont a été fait par un comité multipartite qui a discuté de la question en général et des voies potentielles à notre portée.
     Présentement, il s'agit d'un travail de comité extrêmement différent, parce qu'on a un projet de loi et ses articles. C'est concret. Il s'agit donc d'un travail extrêmement important et il faudrait que les experts se prononcent là-dessus. En comité, on a déjà commencé à entendre parler des experts qui soulevaient des préoccupations importantes par rapport au projet de loi. Ils craignaient qu'il ne soit pas conforme à l'arrêt de la Cour suprême.
    C'est un danger, parce que si on veut faire le projet de loi comme il se doit, comme je l'ai dit tout à l'heure, la dernière chose qu'on veut, c'est d'avoir des années de recours juridiques par la suite. Si on veut faire les choses comme il le faut, on doit écouter les experts, les gens qui viennent au comité et en inviter le plus possible. Si on fait bien notre travail, les gens seront satisfaits et il n'y aura pas de recours juridiques pendant des années par la suite.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Sherbrooke de sa participation à ces échanges. Je sais qu'il lit les projets de loi, article par article, dans le moindre détail.
    Ma question porte sur les critères d'admissibilité au service. Si on examine le libellé du jugement de la Cour suprême dans l'arrêt dans la cause Carter, il me semble qu'on retrouve bien dans les trois premiers critères du projet de loi l'ensemble des éléments prévus par l'arrêt dans la cause Carter.
    Or le Parti libéral au pouvoir a cru bon, pour des raisons encore obscures, d'ajouter un quatrième critère où on parle d'une mort naturelle raisonnablement prévisible. J'avoue qu'en ce qui me concerne, c'est du flou artistique. Je me demandais si mon collègue avait réussi à décrypter le sens de ce quatrième critère.
    Rappelons que personne ne pourra avoir accès au service d'aide médicale à mourir, s'il ne remplit pas les quatre critères. Les trois premiers sont relativement objectifs et simples à comprendre. Or le quatrième est un fouillis monumental.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Trois-Rivières qui est tout à fait juste en affirmant qu'il y a des questions à se poser par rapport à la définition utilisée dans le projet de loi.
    Je m'explique mal comment les rédacteurs du projet de loi au ministère de la Justice sont arrivés à cette conclusion et où ils ont pris cette définition de « souffrance persistante et intolérable au regard de problèmes de santé graves et irrémédiables ». En fait, c'était dans l'arrêt de la Cour suprême. Après cela, le projet de loi utilise une définition différente. Il parle de mort naturelle raisonnablement prévisible.
    Je m'explique mal comment la ministre de la Justice peut aujourd'hui défendre son projet de loi et dire qu'elle n'aura aucun problème à faire le test de la Cour suprême et de l'arrêt dans la cause Carter, alors qu'on utilise des termes différents.
    La moindre des choses aurait été d'utiliser des termes similaires à ceux utilisés dans l'arrêt dans la cause Carter. Cela aurait certainement évité, encore une fois, des recours juridiques pour essayer de faire invalider la loi.
(2100)

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'aimerais dire, pour commencer, que j'ai eu l'occasion d'écouter une bonne partie du débat et je tiens à faire remarquer que, dans l'ensemble, le débat est très civilisé et sa teneur est excellente. Il se prête à un examen réfléchi d'un projet de loi très épineux sur un sujet très délicat. J'ai trouvé utile d'écouter le débat pour parvenir à certaines conclusions au sujet du projet de loi et de la question au sens large.
    Certains députés ont parlé de leur expérience personnelle, ce qui est bien naturel pour un sujet tel que celui-ci. Ma propre expérience est en quelque sorte non concluante. Plusieurs de mes proches ont vécu un long processus de déclin jusqu'à leur mort où il était clair qu'ils ne se rétabliraient pas et où ils ont enduré de grandes souffrances. Je dirais que, pour moi, les leçons tirées de ces différentes expériences sont contradictoires.
    Dans certains cas, j'ai vu des situations qui ont réellement exposé la valeur de rendre possible l'aide médicale à mourir en raison des grandes souffrances des gens qui savent que la mort s'en vient et qui préféreraient mourir dans la dignité et choisir les circonstances de leur mort pour pouvoir mourir entourés de leur famille, après avoir fait leurs adieux. J'ai également vu des situations qui mettent en évidence la vulnérabilité des personnes hospitalisées qui ne sont pas capables de défendre leurs propres intérêts, et l'importance, dans ces situations, d'avoir des membres de la famille qui peuvent le faire pour elles. J'ai aussi constaté à quel point il est important d'avoir des règles, en particulier dans le cas où l'aide médicale à mourir est accessible, pour faire en sorte qu'on n'exploite pas les personnes en situation de vulnérabilité.
    Ces cas, notamment un en particulier, m'ont appris que même avant la décision de la Cour suprême, il se prenait déjà des décisions sur la mort dans les hôpitaux canadiens et des conversations avaient lieu au sein des familles. À l'heure actuelle, ou plutôt avant que la Cour ne rende sa décision, ces conversations portaient sur le moment propice pour mettre fin à un traitement ou, pour être franc, pour commencer à priver le patient de nourriture. N'oublions pas que c'est une conversation qui avait déjà lieu avant la décision. Le récent jugement changera nécessairement le cours de ces conversations quelle que soit la décision que nous prenons ici, car la Cour suprême a affirmé que les Canadiens auront accès à l'aide médicale à mourir. Nous avons la tâche d'établir le cadre entourant la pratique ainsi que les règles la régissant. Nous ne pouvons trop insister sur ce point-là.
    En ce qui me concerne, deux types de considération distincts influent sur la décision que nous prenons à l'égard du projet de loi.
    Le premier est ce qu'on pourrait appeler les considérations de fond au sujet de ce que devraient être ces règles. Lorsqu'on tente de les établir, il est utile de connaître les valeurs ultimes qu'on souhaite voir dans la mesure législative. Je cherchais les mots et dans un mémoire présenté au Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir par la modératrice de l'Église unie, qui est mon église, je les ai trouvés. La présentation ne se voulait pas une prise de position par l'Église unie. À ce moment-là, et aujourd'hui encore, à ce que je sache, l'Église unie n'avait pas de position officielle à ce sujet. La modératrice a toutefois préparé une présentation et a cité un ancien modérateur de l'Église unie qui avait dit ceci:
    Pour les chrétiens, la vie est un don sacré de Dieu qu’il faut apprécier et protéger. Mais nous savons aussi que la vie et la mort font partie de tout l’ordre créé. La vie elle-même n’est pas absolue. Et la mort ne l’est certainement pas. Exprimer le caractère sacré de la vie consiste à affirmer le désir divin d’abondance de la vie pour l’ensemble de la création. Dieu est amour, et l’affirmation chrétienne est que l’amour de Dieu est le seul absolu. « Dans la vie, dans la mort, dans la vie après la mort, Dieu est avec nous  », dit notre credo.
    Donc, la tradition théologique de l’Église Unie n’est pas de laisser entendre que croire au caractère sacré de la vie signifie qu’il faut empêcher toute tentative de mettre un terme à la vie. Au contraire, nous sommes appelés premièrement à prêter attention aux peines des personnes confrontées à des décisions difficiles et à nous assurer qu’elles ne sont pas seules devant ces décisions; deuxièmement, nous devons faire confiance aux personnes qui ont des choix difficiles à faire à propos de leurs propres vies.
(2105)
    Je suis tout à fait d'accord pour dire que les meilleures décisions que nous pouvons prendre et les meilleures politiques que nous pouvons adopter sont celles qui permettent aux gens de prendre des décisions touchant leur propre vie. Il faut aussi veiller à ce qu'ils n'agissent pas seuls, qu'ils consultent leur famille ou des professionnels de la santé à ce sujet et qu'ils discutent avec eux de la façon de prendre des décisions que, de toute façon, ils seraient plutôt enclins à prendre. Nous avons entendu des récits de souffrances terribles et d'incidents qui peuvent arriver lorsqu'on interdit à des personnes de faire ce qu'elles veulent de leur vie.
    Il ne faudrait pas que des gens prennent ces décisions parce que les services ne leur sont pas adéquatement offerts ou parce que leur famille ou des professionnels de la santé exercent sur eux des pressions indues. Les mesures de protection prévues dans le projet de loi seront très efficaces pour soustraire les gens à ce genre de contrainte.
    Je crains que l'absence de dispositions sur les directives anticipées risque de mettre des gens dans des situations difficiles, où ils ne pourront pas discuter de ces enjeux. Ces situations pourraient aussi conduire prématurément à leur mort parce qu'ils font ce choix pendant qu'ils peuvent encore le faire ou prolonger inutilement leurs souffrances. J'aurais tendance à faire preuve de prudence en appuyant une forme limitée de directives anticipées, car je reconnais qu'il s'agit d'une question épineuse, que la meilleure façon de procéder n'est pas évidente et qu'on risque d'ouvrir une boîte de Pandore.
    Je suis d'accord avec la décision de ne pas étendre la portée de ce projet de loi aux mineurs.
    Je partage les inquiétudes exprimées par d'autres députés quant à l'absence de mesures permettant de protéger le droit des professionnels de la santé de refuser de participer à cette pratique pour des raisons de conscience. J'espère que le projet de loi sera amendé à l'étape de l'étude en comité afin qu'on puisse y inscrire des mesures de protection à cet égard.
    Le deuxième ensemble de facteurs à considérer qui, je crois, est très important pour nous en tant que législateurs, est le fait que, quoi que fasse le Parlement, l'aide médicale à mourir sera offerte. Ce n'est pas la décision que nous prenons ici. Cette décision a été prise par la Cour suprême. Nous sommes ici pour parler des conditions en vertu desquelles ce service sera offert. Il est crucial que les règles soient les mêmes partout au pays, que nous ayons un cadre fédéral qui s'applique uniformément, et que l'on ne se retrouve pas avec un assortiment de règlements différents d'une province à l'autre.
    Il est important que nous donnions aux professionnels du milieu médical, qui seront inévitablement appelés à aider des patients à mourir, la certitude que, ce faisant, leur carrière ne sera pas compromise et qu'ils ne risquent pas l'emprisonnement. Voilà pourquoi il est important de modifier le Code criminel pour leur donner cette certitude, et la Chambre est l'endroit où faire cela.
    En tant que législateurs, il nous incombe aussi de prendre les mesures qui s'imposent pour respecter le jugement de la Cour suprême et éviter des contestations judiciaires inutiles. Nous avons entendu des députés dire que peu importe ce qui arrivera, il y aura des contestations judiciaires. Toutefois, je pense qu'il y aura des contestations liées à des raisons évidentes. Par exemple, l'ajout d'un passage qui ne figure pas dans la décision de la Cour suprême, comme le passage sur la mort naturelle raisonnablement prévisible, pourrait empêcher celle qui s'est adressée à la Cour suprême pour avoir le droit de demander l'aide médicale à mourir de se prévaloir de ce droit. Je pense que c'est un motif de contestation évident. Nous commettrions une erreur si nous adoptions le projet de loi et que le service ne pouvait pas être offert à cette personne, alors que la Cour suprême a déterminé qu'elle y a droit.
    Je tiens à profiter du temps qu'il me reste pour mentionner que ces considérations ont une incidence sur le projet de loi. Cependant, ce sera une réalité au Canada, peu importe ce que nous ferons, et nous devons veiller à ce que les Canadiens puissent avoir accès à des soins palliatifs et à d'autres soins à long terme afin que l'aide médicale à mourir ne soit pas leur premier choix, ni même leur deuxième, ni même leur troisième; c'est un choix qui devra être fait après avoir étudié tous les autres choix raisonnables qui sont offerts, et il faudra veiller à ce que les gens aient le soutien et les ressources nécessaires pour avoir accès à tous ces choix.
    Cela dit, je tiens à souligner que j'appuierai le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, pour les raisons que j'ai mentionnées.
(2110)
    Monsieur le Président, je pense que le député d'Elmwood—Transcona a compris la valeur de l'arrêt de la Cour suprême. Les neuf juges ont décidé unanimement que le Parlement devait adopter une loi. Nous sommes impatients que le projet de loi passe à l'étape de l'étude en comité.
    J'aimerais faire une brève observation, parce qu'il est beaucoup question des soins palliatifs. Cette question tient vraiment à coeur au gouvernement et au premier ministre.
    Les députés qui viennent du Manitoba, comme moi, parlent de Riverview et du travail extraordinaire des nombreux professionnels de la santé qui offrent des soins palliatifs.
    Il est important qu'Ottawa collabore avec les provinces, fasse preuve de leadership et veille à ce que la population ait accès à des soins palliatifs. Il faut toutefois que les provinces et les territoires participent à la discussion. J'ai connu le père du député lorsqu'il était député fédéral et député provincial, au Manitoba. Je suis convaincu qu'il serait d'accord pour dire qu'il faut que les différents ordres de gouvernement collaborent davantage afin que les Canadiens puissent recevoir les soins palliatifs qu'ils souhaitent et auxquels ils ont droit.
    Le député ne convient-il pas qu'Ottawa doit continuer d'entretenir des relations avec les autres ordres de gouvernement pour que la population ait accès à des soins palliatifs de qualité?
    Monsieur le Président, évidemment, le fait est que pour offrir de meilleurs soins palliatifs au Canada, il faudra que le gouvernement fédéral collabore avec les provinces. Cependant, ce qui importe beaucoup dans une telle entreprise, c'est le leadership dont doit faire preuve le fédéral. Voilà le problème qui afflige depuis des décennies le système canadien de soins de santé: le leadership inexistant du gouvernement fédéral.
    Des députés ont parlé d'inclure les soins palliatifs dans la Loi canadienne sur la santé. Très bien, mais il est impossible d'appliquer cette loi à moins que le gouvernement fédéral ne finance véritablement les soins de santé au pays.
    Au cours des dernières décennies, la contribution du fédéral dans les soins de santé est passée, pour chaque dollar investi, de 50 ¢ à 17 ¢. Les conservateurs projetaient de la réduire encore davantage. Rien dans le budget des libéraux ne laisse croire que la contribution fédérale au financement des soins de santé cessera de diminuer.
    C'est bien que nous parlions de cette nécessité et je suis fier de le faire en tant que néo-démocrate selon qui le fédéral doit manifester son leadership dans le dossier de la santé en mettant de l'argent sur la table. Tant que le gouvernement ne se résoudra pas à faire cela, les améliorations que nous souhaitons tous voir apportées aux soins palliatifs ne se produiront pas. En tant que néo-démocrate, j'aimerais être témoin de cela dans toutes les facettes du système public de soins de santé.
    Monsieur le Président, j'ai beaucoup aimé l'intervention du député. Je ne sais pas si nous allons nous entendre aussi bien sur cette question que sur la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada , mais je trouve toujours ce qu'il dit intéressant.
    Le député a parlé de l'autonomie. Je veux aborder la question dans le contexte de l'architecture sociale du choix, c'est-à-dire des facteurs qui influencent un particulier et peuvent l'amener à faire des choix qu'il ne voudrait pas faire dans des circonstances idéales.
    Plus précisément, si nous voulons vraiment protéger l'autonomie dans la situation qui nous intéresse, je crois qu'il nous faut un excellent régime de soins palliatifs. Nous avons besoin d'un examen juridique préalable afin de vérifier si les critères sont respectés et de nous assurer que la personne n'est pas poussée à faire ce choix et que quelqu'un voit au respect des critères. Il nous faut aussi rendre le document plus clair afin d'empêcher les gens d'aller de médecin en médecin en s'appuyant sur des critères ambigus qui prêtent à toutes sortes d'interprétations.
    Le député conviendrait-il que ces propositions ne limitent pas le choix personnel, mais le protègent plutôt et permettent aux particuliers d'obtenir ce qu'ils veulent au lieu d'être poussés vers quelque chose qui ne correspond pas à ce qu'ils désirent vraiment?
    Monsieur le Président, je suis d'accord pour dire que les gens qui manquent de ressources peuvent en venir, pour cette raison, à faire des choix qu'ils ne feraient pas autrement. On ne peut pas dire qu'elles agissent alors par autonomie, et il est important de prévoir de tels cas. En fournissant aux gens des soins palliatifs en plus grande quantité et de meilleure qualité ainsi que d'autres options de services de santé, que ce soient des soins à domicile ou des soins de longue durée, on veille à ce que ces gens aient vraiment le choix et ne se sentent pas obligés de faire un certain choix.
    Je suis d'accord pour dire que le projet de loi peut être amélioré. Par exemple, ne prévoir que dans la réglementation la collecte de données sur l'aide médicale à mourir pose problème. Il est important d'essayer de créer un système de déclarations adéquat qui nous permettra d'examiner les effets de la loi après un certain temps. Certains détails du projet de loi, comme celui que je viens d'indiquer, pourraient certainement être améliorés par le comité.
(2115)
    Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole sur le sujet actuel. Les discussions que j'ai eues à ce sujet, avec les gens de ma circonscription, Lambton—Kent—Middlesex, sont parmi celles qui ont le plus touché des cordes sensibles, suscité la compassion et attisé les passions au cours de mes 10 années à exercer mes fonctions de député.
    Je commence par le contexte général. Le projet de loi C-14 vise à modifier le Code criminel afin de permettre l'aide à mourir. Une personne pourra alors en tuer une autre sans commettre un acte illégal. Bien franchement, j'en ai l'estomac noué. L'article 241 du Code criminel porte sur le fait de conseiller le suicide ou d'y aider. Voici ce qu'il dit:
    Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, selon le cas:
a) conseille à une personne de se donner la mort;
b) aide ou encourage quelqu’un à se donner la mort, que le suicide s’ensuive ou non.
    C'est un principe fondamental au Canada: on ne veut pas qu'une personne en aide une autre à se suicider.
    En février de l'année dernière, la Cour suprême du Canada a indiqué toutes les exemptions au Code criminel. Le Code criminel prévoit maintenant une exemption pour l'aide médicale à mourir pour que les médecins et le personnel infirmier ne puissent faire l'objet d'accusations. Il y a une exemption pour les personnes qui aident le praticien. Si le médecin le fait et qu'il est aidé d'un infirmier, ils sont exempts de toute accusation.
    Le pharmacien qui fournit le cocktail, qu'il soit injecté par un médecin ou préparé pour que le patient puisse se l'injecter, est exempt de toute accusation criminelle.
    Il y a une exemption maintenant pour une personne qui aide un patient. Personne ne commet d'infraction si elle fait quoi que ce soit à la demande explicite d'une autre personne.
    Dans l'ensemble, si une erreur est commise, aucune accusation ne peut être portée.
    Je trouve assez incroyable que d'un seul trait de plume, neuf juges aient décidé d'imprimer un virage à 180 degrés à la loi pénale du pays, faisant de ce qui était un crime un remède. Nous devons maintenant inciter des gens à enlever la vie à d'autres.
    Je trouve très hypocrite que nous parlions d'aide au suicide et d'aide à mourir à ce moment-ci. Nous aimons utiliser des mots rassurants pour qu'ils ne signifient pas vraiment que nous donnons, en réalité, le pouvoir à quelqu'un de tuer une autre personne. Or, c'est bien ce que nous faisons. C'est ce que la Cour suprême nous a dit que nous devions faire. Parallèlement à cela, nous avons une stratégie nationale de prévention du suicide.
(2120)
    Je ne sais pas trop où en est le gouvernement dans ce dossier, mais je trouve que les deux sont contradictoires. Mes collègues ont parlé des Premières Nations. Nous avons tous lu au sujet des problèmes. Nous sommes tous hors de nous et perturbés lorsqu'une personne se suicide, ou pis encore, lorsqu'un groupe de personnes se suicident collectivement.
    L'une des clés, à long terme, ce sont les soins palliatifs. Presque tout le monde le dit. Bon nombre de mes collègues ont parlé de leur expérience ou de celle d'une connaissance. Je ferai de même.
    Mes parents sont morts du cancer. Tous ceux qui connaissent une personne qui a eu le cancer des os savent la douleur qui accompagne cette maladie. Peut-être que, par contre, à l'époque où mes parents ont souffert du cancer et y ont succombé, il y avait de véritables soins palliatifs. Dans leur cas, il ne leur a jamais traversé l'esprit de demander une quelconque forme d'aide pour mettre fin à leurs jours, et encore moins de demander à leur médecin de leur fournir ou de leur donner la solution pour s'enlever la vie.
    Nous parlons beaucoup des soins palliatifs, des endroits où ils sont offerts et de la façon dont ils seront financés. Le parti au pouvoir dit qu'ils sont prévus dans le budget. C'est ce qu'a dit le député de Winnipeg. Cette information n'a pas été fournie. Nous savons qu'elle ne figure pas dans le budget. En lisant le préambule, peut-être qu'avec suffisamment d'imagination on pourra lire entre les lignes qu'il pourrait y avoir du financement pour ces soins. Il n'y a tout simplement rien. Ce n'est ni dans le projet de loi ni dans le budget. J'ai bien peur qu'il n'y ait qu'une seule personne qui en parle dans le vide.
    Nous devons tirer des leçons des autres pays comme la Belgique et les Pays-Bas. La Belgique a entamé ce processus il y a 15 ans. L'approche était très sécuritaire; il n'y avait pas de risque de dérapage pour les patients. Cependant, on estime aujourd'hui que 32 % de ces patients n'ont jamais accordé leur consentement pour être euthanasiés. Nous apprenons maintenant que ce chiffre augmente d'environ 47 % par année.
    Tandis que le financement des soins palliatifs diminue, les ressources pour répondre au désir d'éliminer la douleur — que pourraient combler les soins palliatifs — sont consacrées à l'aide au suicide.
    C'est très préoccupant. J'ai déjà mentionné les soins palliatifs. Par ailleurs, aucune disposition ne protège les médecins et le personnel infirmier. On ne prévoit pas non plus de protection pour les institutions dotées d'une conscience morale ou de normes d'éthique qui leur interdiraient d'agir. J'ai parlé à des médecins et à des infirmiers et infirmières. Une infirmière m'a demandé si tout cela était vrai. Je lui ai dit qu'il faudrait attendre de voir le projet de loi. Elle m'a répondu que si c'était vrai, elle se tiendrait loin de tout ça, qu'il lui serait impossible de tuer une personne ou de participer à son euthanasie. Un médecin qui a fait le serment de protéger les vies humaines a déclaré qu'il n'avait jamais fait le serment d'enlever la vie à des gens.
    Le gouvernement a-t-il une vision de l'avenir? L'enjeu est énorme, comme le montre cet extrait de la deuxième page du projet de loi:
[...] le gouvernement du Canada s’est engagé à élaborer des mesures non législatives visant à soutenir l’amélioration d’une gamme complète d’options de soins de fin de vie [...]
[...] demandes faites par les mineurs matures, de demandes anticipées et de demandes où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée.
(2125)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour la sincérité de ses propos et la candeur avec laquelle il les a présentés à cette honorable Chambre.
    J'aimerais que mon collègue nous explique, avec le plus de concision possible, le cheminement, la feuille de route, le parcours qu'il aurait entrepris après la lecture du jugement de la Cour suprême pour satisfaire cette décision, lui donner suite et s'y conformer?

[Traduction]

    Je n'ai pas entendu votre question, je suis désolé.
    J'invite le député à répéter sa question en restant bref et en s'adressant à la Présidence, dans la mesure du possible.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son allocution, ainsi que de la franchise et de la sincérité avec laquelle il a exprimé son point de vue. Je lui demande simplement, après avoir lu, analysé et étudié la décision de la Cour suprême et après y avoir réfléchi, de nous faire part de son avis quant à ce qu'il aurait fait pour se conformer à la décision dans le délai prévu.
    Monsieur le Président, je suis désolé, mais je n'ai pas entendu la question la première fois.
    Manifestement, l'objectif dans ce pays devrait être d'encourager les gens à choisir la vie et non la mort. J'estime qu'il faudrait un engagement concret pour garantir la prestation de véritables soins palliatifs dans ce pays.
    En outre, compte tenu de la décision de la Cour suprême, il faut établir clairement qu'il n'y aura jamais plus de discussions au sujet des mineurs et des personnes souffrant de maladies mentales. Nous devons être rigoureux et nous devons protéger le plus possible les personnes vulnérables, les aînés et les jeunes et nous devons veiller à ce que ceux qui ne se sentent pas à l'aise sur le plan moral ou éthique ne soient pas tenus d'exécuter une tâche que leur serment en tant que médecin les empêchait d'accomplir jusqu'au moment où la décision a été rendue.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa présentation. Je la trouve d'autant plus intéressante que ses propos s'éloignent passablement de ma pensée, et nos différences nous nourrissent les uns les autres.
    Deux éléments m'ont accroché dans sa présentation. D'abord, sur un trait de plume, la Cour suprême change la donne, en quelque sorte, alors que ce trait de plume est la conséquence d'une évolution de la société, selon moi. Le deuxième élément est cette espèce de dichotomie qu'il met entre les soins palliatifs et le suicide assisté, d'une quelconque façon.
    Je me demande si nous ne nous mettons pas un peu la tête sous l'oreiller quand nous parlons des soins palliatifs. Je pense par exemple à mon père qui était profondément religieux. Le jour où il a accepté consciemment que ma mère reçoive des doses de morphine pour soulager sa souffrance, il savait très bien que, par le fait même, il allait raccourcir son existence. Il s'agit là aussi d'aide médicale à mourir. À mon avis, c'est l'esprit même de ce projet de loi, soit faire en sorte que les souffrances qui peuvent être apaisées le soient, quitte à ce que cela ait une incidence sur la longueur de la vie.
    J'aimerais avec les réactions du député concernant ces propos.
(2130)

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous avons tenu de nombreux débats à la Chambre sur cette question ou sur des sujets s'apparentant à cette question. Pas plus tard qu'en 2010, la question de l'aide médicale à mourir a été abandonnée, pas de façon unanime, mais presque.
    Lorsque j'ai mentionné que le débat découle d'un simple trait de plume, j'étais sincère. Au cours de la dernière législature, personne n'a jamais envisagé de demander aux professionnels de la santé d'aider des patients à mourir. C'est par un simple trait de plume que le Canada a changé à tout jamais, car une fois qu'une personne est euthanasiée, on ne peut revenir en arrière.

[Français]

    Monsieur le Président, je tiens d'abord à féliciter tous les parlementaires d'avoir le courage de prendre part à ce débat délicat pour chacun d'entre nous.
    Selon le renvoi de la Cour suprême, il incombe à la Chambre le devoir de débattre du projet de loi C-14, qui porte sur l'aide médicale à mourir. La Cour suprême nous donne ainsi la lourde tâche et la responsabilité d'établir les balises de celle-ci, nous obligeant, par le fait même, à faire un examen de conscience sur la finalité de notre vie et de celle des citoyens que nous représentons.
    Pour ma part, il me sera difficile et déchirant d'être confronté au fait de devoir prendre cette décision pour autrui, autant qu'il me serait difficile de la prendre pour moi-même ou pour un de mes proches. Dans la finalité du débat, je crois que la loi, dans son ensemble, ne sera pas parfaite; elle sera seulement acceptable, compte tenu de tous les changements qu'elle apportera à notre façon de voir la vie, et cela, pour les générations à venir.
    Je ne voudrais pas m'éterniser sur les particularités de cette loi, mais simplement faire part à mes collègues des réactions, des émotions et surtout des inquiétudes que j'ai pu partager avec plusieurs personnes au sein de la population de Lévis—Lotbinière.
    Nous, députés du Parlement canadien, avons tous la chance d'avoir une relation de proximité avec nos concitoyens, grâce à de nombreux moyens de communication. C'est toujours un grand privilège et une marque de confiance indéniable que d'être l'oreille de confidences venant du coeur.
    J'ai pu observer une grande résilience, mais également, en contrepartie, une grande inquiétude face au projet de loi. J'utilise le mot « résilience » car, au Québec, le débat a été tenu sur une longue période et mes concitoyens ont accepté la voix de la majorité de l'Assemblée nationale, bien que ce ne soit pas à l'unanimité.
    L'inquiétude, pour sa part, vient de la mouture du projet de loi qui se réserve un sens et une interprétation plus large que celle exprimée par les voeux de la voix du Québec. Je garde espoir que le projet de loi final pourra calmer ces inquiétudes, à défaut de ne pouvoir les éliminer totalement.
    Fait étonnant, les discussions que j'ai eues avec mes concitoyens ont toutes débouché sur un autre enjeu très important, celui des soins palliatifs. Malheureusement, ces derniers ne sont pas accessibles pour l'ensemble de la population canadienne, et c'est là que le bât blesse. Pourquoi ne pas se concentrer sur la vie, sur le fait de vivre dans la dignité, comme le suggérait M. Sauveur Champagne, un de mes concitoyens, et sur notre qualité de vie lors de nos derniers jours? Des soins appropriés nous auraient peut-être évité ce débat.
    Il existe des soins médicaux de confort et un accompagnement adéquat de façon morale dont tous ne semblent malheureusement pas avoir pu bénéficier pour différentes raisons. Certaines personnes d'un naturel optimiste m'ont fait part du fait que l'aide médicale à mourir leur a fait prendre conscience de l'importance de la vie et d'en profiter pleinement avec ceux qu'on aime et qui nous entourent. C'est dans la nature humaine de saisir les meilleures occasions de vivre qui nous sont offertes.
    Je crois que la population est consciente de la grande fragilité de la vie et de la possibilité que nous avons de partager ensemble l'amour et l'amitié, de resserrer nos liens et de nous entraider pendant qu'il est possible de le faire.
(2135)
    Nous devons tous prendre conscience de la nécessité de trouver un équilibre entre notre temps personnel familial et le temps que nous pouvons allouer généreusement aux autres.
    D'autres personnes m'ont aussi signifié des dommages collatéraux associés au fait d'apprendre le décès d'une personne consentante à cette nouvelle réalité. Celle-ci laissera des séquelles dans notre société si elle n'est pas bien encadrée et acceptée puisqu'une partie de notre population est contre ce projet de loi; c'est contre leurs valeurs fondamentales, culturelles et religieuses.
    En tout respect, nous devons considérer l'opinion de cette partie tout aussi importante de la population, puisqu'elle a droit aussi à sa voix dans ce Parlement. D'autres, sur un plan plus personnel, vivent pleinement le cheminement d'un proche parent ou d'un enfant dans ce processus qui peut, à différents degrés, changer la perception de l'acte de choisir sa propre fin.
    Cela étant dit, ultimement, ce choix de fin de vie revient à l'individu lui-même, en fonction de ses convictions, de ses croyances et de sa condition physique. Je souhaite qu'il demeure ainsi un choix personnel respecté de tous parents, proches et amis, un choix non forcé par une influence externe.
    La question à se poser est celle-ci. Comment s'assurer qu'il n'y aura pas de dérapage? Il sera difficile de baliser correctement dans une loi un ensemble de cas personnels très différents les uns des autres. C'est pourquoi nous sommes plusieurs à nous douter d'ores et déjà que cette loi ne sera pas parfaite, elle sera seulement acceptable. Dans le contexte où les avancées médicales permettent de vivre plus longtemps, quel sera le degré de dignité, pour ceux qui y sont confrontés?
    Pour celles et ceux qui pourront profiter plus longtemps d'instants précieux, c'est souvent une chance inespérée de prolonger le cycle de la vie; pour les autres, la porte sera maintenant ouverte par ce nouveau choix qui semble aussi porteur d'espoir pour ceux qui ne veulent plus compter les jours.
    Personnellement, j'aurais apprécié attendre de vivre l'expérience du Québec pour une période de cinq ans, afin d'évaluer l'incidence de ce genre d'option de fin de vie. En tant que législateur, une étude exhaustive sur cette période de temps nous permettrait de prendre une décision mieux éclairée. Il m'apparaît avisé de faire les bons choix pour la sécurité canadienne et pour les générations futures. Toutefois, devant l'obligation de faire un choix aussi rapidement, cela ne sera pas le cas. Selon moi, nous vivrons toujours un doute à l'égard d'une loi qualifiée d'acceptable. L'histoire nous indiquera si ce changement de direction était souhaitable. Que Dieu nous protège.
    L'ensemble des parlementaires ici présents à la Chambre et au Sénat ajouteront un apport indéniable à ce débat. Nous devons tous, de façon rationnelle et morale, lui donner une orientation acceptable et cohérente avec les valeurs canadiennes, qui soit représentative des courants de pensée et qui respecte toutes nos communautés partout au Canada.
    Après ce débat, nous serons tous conscients que le Canada que nous avons connu ne sera plus le même, pour le meilleur ou pour le pire. Nous vivrons avec cette nouvelle loi; nous devrons nous assurer que son interprétation sera respectée selon nos propres balises.
    En terminant, la plus belle expérience pour en juger serait de permettre à tous les Canadiens de vivre un accompagnement en fin de vie pour comprendre toute la portée et la dimension humaine d'une mort imminente.
(2140)
    Cela permettrait également d'apprécier et de chérir cette personne, chaque seconde du don de vie, de profiter de sa sagesse et de ses riches enseignements qui l'ont profondément émue et transformée tout au long de sa vie, puisque c'est dans la nature humaine de toujours vouloir s'améliorer et de laisser un legs de notre passage à nos enfants, à nos proches et à nos meilleurs amis. Pour ma part, cette expérience a...
    Questions et commentaires.
    L'honorable député de LaSalle—Émard—Verdun a la parole.
    Monsieur le Président, j'aimerais d'abord remercier mon collègue de ses commentaires qui venaient du fond du coeur, et dont le fil conducteur était l'autonomie individuelle. J'ai fortement apprécié ses commentaires.
    Il y a plus de 25 ans, j'ai eu l'honneur de travailler avec une juge de la Cour suprême.
    Son prédécesseur avait laissé croire qu'avec the stroke of a pen, comme il l'a dit en anglais, la décision de changer la position canadienne basée sur la Charte canadienne des droits et libertés n'a pas été légitime.
    Partage-t-il l'opinion de son honorable collègue?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
    Je parlerai de mon expérience et de mon discours. Je vais en profiter pour terminer les 20 dernières secondes de mon discours.
    Pour ma part, cette expérience a profondément changé ma perception, et je peux dire que de laisser partir un de mes proches, c'est tout un geste d'amour et de compréhension. Devant l'inévitable, on trouve la force nécessaire pour l'accepter, pour le vivre dans une certaine paix et pour trouver les bons mots pour exprimer nos adieux de la façon choisie par chaque individu dans le respect et l'amour que chacun d'entre nous mérite. Que Dieu nous accompagne.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours.
    Il a mentionné qu'il aurait préféré avoir une période de cinq ans pour observer ce qui allait se passer au Québec. C'est vrai qu'au Québec, nous avons défriché le terrain dans ce dossier. J'en suis très fière, faisant moi-même partie de la circonscription de Jonquière, au Québec.
    Ce soir, même si l'heure est tardive, il y a peut-être des personnes qui sont souffrantes et des familles qui leur viennent en aide qui nous regardent. Ces gens ne peuvent pas se permettre d'attendre cinq ans. Ces gens souffrent.
    Que pense mon collègue du fait de laisser des gens dans une souffrance extrême, sans faire des règlements dans le cadre d'un projet de loi, comme nous en présentons un ce soir à la Chambre?
(2145)
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de sa question.
    Dans notre pays, le Canada, si toute la population avait accès à des soins palliatifs de qualité, nous n'aurions peut-être pas à tenir ce genre de débat ici ce soir. Présentement, le Québec a déjà enclenché ce processus; notre pays aurait pu avoir la chance de prendre le temps d'évaluer l'expérience du Québec, après cinq ans. Nous, les législateurs, aurions pu tirer des conclusions plus avisées face à une expérience québécoise au sein du Canada. Personnellement, j'aurais apprécié avoir eu la chance de le faire. Malheureusement, ce débat est trop précipité.
    Monsieur le Président, j'aimerais demander à mon collègue de parler des soins palliatifs. J'aurais l'occasion de parler à la Chambre dans quelques minutes, et je mettrai beaucoup l'accent sur cette option.
    Selon mon collègue, de quelle manière les investissements ou les apports gouvernementaux pourraient être faits pour améliorer les maisons de soins palliatifs et mettre en place de telles maisons partout au Canada?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.
    Personnellement, j'ai vécu l'expérience de perdre mon père, qui n'a pas eu la chance d'avoir de soins palliatifs. Voir un proche quitter sa famille dans une petite chambre, au fond d'un corridor, avec une chaise mal peinturée, qui avait peut-être 45 ans, sans aucun confort pour la famille, c'était triste à en mourir.
    Il serait juste et équitable que l'ensemble des Canadiens et leurs familles aient droit à un accompagnement décent ainsi qu'à une certaine dignité dans les dernières heures et les derniers jours de leur vie.

[Traduction]

    Monsieur le Président, avant de commencer mon discours, je tiens à dire aux gens de Fort McMurray que mon coeur et mes pensées sont avec eux. Ils quittent leur communauté ce soir. Quatre-vingt-mille personnes doivent évacuer. Elles luttent pour leur vie ce soir. Nous pensons à elles.
    Je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir). La question de l'euthanasie et de l'aide médicale à mourir fait l'objet d'un débat depuis de nombreuses années au Canada. Toutefois, il est devenu essentiel de régler cette question sensible depuis la décision dans l'affaire Carter c. Canada, qui a invalidé l'interdiction de l'aide médicale à mourir contenue dans le Code criminel et donné un an au Parlement pour présenter une nouvelle mesure législative.
    Cette mesure législative doit s'appliquer aux adultes capables éprouvant des problèmes de santé graves et irrémédiables leur causant des souffrances persistantes, et qui consentent clairement à mettre fin à leurs jours. Le projet de loi C-14 cherche à assurer l'application de l'article 7 de la Charte, qui garantit le droit de chacun à la vie, la liberté et la sécurité de sa personne. Le projet de loi propose une vaste gamme détaillée d'objectifs législatifs, de notions juridiques, de critères d'admissibilité pour les patients, d'exemption de responsabilité criminelle et de mesures de protection. Toutefois, comme l'expérience le montre, la question de la vie et de la mort est très vague. L'interdiction absolue de l'aide à mourir force les Canadiens éprouvant des problèmes de santé graves et irrémédiables à souffrir et à chercher de l'aide médicale à l'étranger pour mettre fin à leur vie.
    Il y a eu deux cas de ce genre au Canada: l'affaire Rodriguez et l'affaire Carter c. Canada. En outre, entre 1991 et 2010, environ six projets de loi d'initiative parlementaire visant à décriminaliser l'aide au suicide ont été présentés, mais aucun n'a été adopté. Dans l'affaire Carter c. Canada, la Cour suprême a déclaré:
     Bien que les opposants à la légalisation aient souligné le caractère inadéquat des garanties et la possibilité de dévalorisation de la vie humaine, une minorité s’est exprimée énergiquement en faveur d’une réforme, faisant ressortir l’importance de la dignité et de l’autonomie de la personne ainsi que la réduction limitée des souffrances par les soins palliatifs. Le Sénat s’est lui aussi penché sur la question, produisant un rapport sur l’aide au suicide et l’euthanasie en 1995. La majorité de ses membres s’est dite préoccupée par le risque qu’un régime permissif ouvre la porte à des abus et par la nécessité de respecter la vie. Une minorité de ses membres s’est prononcée en faveur d’une exemption de l’application de la prohibition dans certaines circonstances.
    Cette citation démontre bien que la question de l'aide médicale à mourir suscite la division; il y a un gouffre qui sépare les Canadiens. En ce qui me concerne personnellement, j'ai beaucoup de mal à me faire une opinion du projet de loi C-14. À l'instar de nombreux Canadiens, j'estime que personne n'est mis sur Terre sans raison. Nous pourrions débattre de la raison de notre existence pendant des jours, mais comme tous les autres êtres vivants, nous cherchons à vivre en nous adaptant à notre environnement. Insectes ou humains, tous doivent s'adapter pour survivre, pour vivre. La mort attend toute créature; certaines sont la proie d'une autre créature tandis que d'autres sont tuées par leur environnement ou par les intempéries, succombent à une maladie ou meurent de vieillesse. La plupart luttent pour la vie lorsqu'elles sont menacées. Il est dans la nature des humains de lutter pour la vie.
    Notre pays a participé à deux guerres mondiales où nos anciens combattants se sont battus pour améliorer nos conditions et nous donner la liberté. Combien d'entre eux auraient donné leur vie s'ils avaient su que, par la suite, les gens pourraient mettre un terme à la leur conformément aux dispositions du projet de loi C-14? Un certain nombre d'anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale m'ont dit que la mesure est inacceptable. L'est-elle vraiment? C'est là où j'ai du mal à trouver réponse à cette importante question morale. Honnêtement, je ne sais pas quoi en penser et mes sentiments sont partagés. Je vais développer ma pensée.
(2150)
    Mes deux parents sont morts du cancer, tout comme mes deux beaux-parents. J'ai vu mon père passer de 190 à 75 livres au moment de son décès. Il a souffert atrocement, de même que ma mère et mes beaux-parents. Ils se sont tous battus jusqu'à la toute fin. Bien qu'il était pénible d'assister à leur agonie, j'ai pris conscience de la nécessité de lutter pour la vie. C'est la première réflexion qui m'est venue à l'esprit: il ne faut pas abandonner avant la fin.
    Il y a quinze ans, mon épouse avec qui j'ai vécu 30 ans est morte du cancer. Je déteste le mot « cancer ». Tout comme moi, ma femme tenait à se battre jusqu'au bout. Je l'ai vue lutter pendant deux ans. De la radiothérapie à la chimiothérapie, s'il existait une probabilité qu'un traitement tourne mal, c'était le cas pour elle. Ces complications ajoutaient à ses souffrances. J'ai aidé ma femme tandis que son corps s'affaiblissait et que les fonctions de celui-ci échappaient à son contrôle.
    J'étais présent à son dernier souffle. Je suis une personne solide sur le plan émotif, mais, à la fin, après l'avoir vue tant souffrir, je n'en pouvais plus. Je souhaitais mettre fin à ses douleurs. Elle s'accrochait à la vie jour après jour, tandis que je me demandais à quoi il servait de tant souffrir.
    Nous nous étions entendus pour livrer ce combat ensemble. Seule une ordonnance de non-réanimation avait été signée. À la fin, j'aurais tout donné pour la libérer de ses souffrances et de ses douleurs. Finalement, c'est la morphine qui a joué ce rôle. Aujourd'hui, je me demande si le projet de loi C-14 est bon ou mauvais. Pendant la dernière semaine de vie de ma femme, j'aurais bien aimé qu'il y ait un projet de loi de ce type, car elle aurait pu mettre fin à ses souffrances et à ses douleurs. C'était il y a 15 ans. J'éprouve encore du chagrin lorsque je pense aux souffrances que ma femme a dû endurer, mais je suis aussi très fier qu'elle se soit battue pour rester en vie. C'est parce qu'elle s'est battue que nous avons pu passer une année de plus ensemble, et je suis très heureux d'avoir eu cette chance. Vais-je appuyer le projet de loi C-14 ou m'y opposer? Personnellement, je suis déchiré sur cette question.
    Je respecte les droits des particuliers et les droits que le projet de loi C-14 pourrait leur conférer, mais mon coeur me dit que nous devons nous battre pour rester en vie. Je suis heureux de pouvoir voter librement sur cette question. J'ai bien évalué les avantages et les inconvénients du projet de loi. C'est une décision difficile, mais je ne peux pas l'appuyer. Il y a beaucoup trop de zones grises. Betty Unger, une sénatrice de l'Alberta, a déclaré ceci: « Quelque chose ne va pas du tout lorsqu'un gouvernement s'emploie davantage à garantir le droit des vivants de mourir que le droit des mourants de vivre. »
    Cela dit, je crois que le gouvernement doit mettre l'accent sur les soins palliatifs plutôt que sur l'aide médicale à mourir. Je félicite ceux qui ont choisi de travailler dans ce milieu, et je sais que nous devons déployer beaucoup d'efforts pour améliorer les soins palliatifs. Parce qu'il n'y a pas assez de personnel dans ce domaine, bien souvent, les familles doivent offrir les soins de base.
    L'aide médicale à mourir est une question très délicate pour moi, et elle l'est aussi pour de nombreux députés. Si le projet de loi C-14 est adopté, je demande qu'on y intègre des mesures de sauvegarde rigoureuses afin de protéger les personnes vulnérables et le droit à l'objection de conscience pour ceux qui travaillent dans les établissements de soins de santé. Les députés, quelle que soit leur allégeance politique, ont des points de vue différents au sujet de l'aide médicale à mourir. Je suis heureux que notre parti reconnaisse qu'il s'agit d'un enjeu moral et qu'il autorise les députés à voter librement sur cette question fort délicate, qui fait appel à la conscience.
    Je remercie tous ceux qui ont fait un exposé sur le projet de loi C-14; ils m'ont aidé à prendre ma décision. Je voterai contre la mesure législative.
(2155)
    Monsieur le Président, je remercie le député pour son discours passionné, très personnel et profondément émouvant.
    Le député a parlé du respect des droits individuels et a souligné l’importance de lutter pour rester en vie jusqu’à la toute fin. Pourquoi ne pouvons-nous pas respecter aussi bien les droits individuels de ceux qui veulent combattre jusqu’au bout que de ceux qui souhaitent mettre fin à leur vie dans la dignité?
    Monsieur le Président, cela nous ramène aux positions de base. Pour ma part, j’estime que nous devons combattre pour rester en vie. Comme je l’ai dit plus tôt, je respecte les décisions de chacun, mais je crois que nous avons été créés pour vivre et pour nous battre afin de rester en vie. C’est ma position.
    Monsieur le Président, mon collègue a prononcé un discours qui vient du fond du cœur.
     Il m’a montré et m’a confirmé une chose que j’avais moi-même apprise en voyant mourir mes parents et mon frère: le processus de la mort, qui peut être plus court pour certains que pour d’autres, m’a tant appris sur le sens de la vie humaine. J'ai pu voir mes proches se battre pour vivre, comme mon collègue l’a dit, et j'en suis venu à mieux comprendre la souffrance.
     Mon collègue a mentionné les soins palliatifs. Plus tôt aujourd’hui, on a dit que le gouvernement précédent n’avait rien fait pour donner suite à la décision de la Cour suprême, mais je voudrais signaler encore une fois à tous les parlementaires et à tous les Canadiens que, en réalité, le Comité externe a produit un excellent rapport. Malheureusement, le gouvernement libéral a décidé de faire abstraction de ses recommandations.
     L’un des facteurs mis en évidence dans le rapport concernait l’extrême pénurie de possibilités en matière de soins palliatifs au Canada. Le rapport mentionnait que, sur un total de 77 000 médecins, nous n’avons actuellement que 51 spécialistes en soins palliatifs.
     Je voudrais demander à mon collègue son avis sur le besoin de meilleures options en soins palliatifs, en ce qui concerne non seulement la formation de médecins et d’autres fournisseurs de soins, mais aussi la création de centres, un peu partout dans le pays, où les gens pourraient recevoir des soins dans un environnement digne et affectueux.
(2200)
    Monsieur le Président, c’est vraiment triste de lire ce rapport. À part les 77 000 médecins mentionnés, je crois qu’il y a au Canada quelque 123 omnipraticiens spécialisés en soins palliatifs. Cela fait moins de 200 sur 77 000 pour tout le pays. C’est vraiment inacceptable.
    Voilà pourquoi il nous faut une stratégie nationale de soins palliatifs. Nous avons besoin de fonds spécialement réservés à ces soins pour former davantage de médecins et d’autres professionnels.
    Nous devons envisager la création de centres de soins palliatifs. Nous devons trouver l’argent nécessaire. Nous parlons d’infrastructures. Puisons donc dans cet argent pour construire des établissements à l’intention de ceux qui sont sur le point de mourir. Prenons soin d’eux et laissons-les s’éteindre dans la dignité et le respect.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de la sincérité de ses propos.
    À la lecture de la décision de la Cour suprême, je veux savoir si mon collègue aurait préconisé d'invoquer la clause nonobstant et ainsi passer outre à la décision de la Cour suprême.

[Traduction]

    Monsieur le Président, rien n'est sorti de mes écouteurs. Je n'ai pas entendu ce que le député a dit.
    Monsieur le Président, je demandais seulement à mon savant collègue s'il aurait préconisé d'invoquer la clause nonobstant de la Charte canadienne des droits et libertés pour passer outre à la décision de la Cour suprême.
    Monsieur le Président, je ne pense pas, non. Pas dans ce cas-ci.
    Monsieur le Président, je vais parler aujourd'hui du projet de loi C-14 et de l'aide médicale à mourir.
    Il s'agit d'une question complexe au sujet de laquelle il y a des opinions tranchées, d'un côté comme de l'autre. Certaines observations que je m'apprête à faire n'ont peut-être pas encore été exprimées depuis le début du débat, tandis que d'autres reprennent celles des députés qui ont parlé avant moi. Quoi qu'il en soit, elles expriment toutes l'opinion des gens de Calgary Confederation.
    Une électrice, Brenda Robinson, m'a fait parvenir une lettre dans laquelle elle écrit ceci: « Il est indéniable qu'il s'agit d'un point tournant au Canada dans ce dossier important. Bien des vies dépendent de ce que nos dirigeants mettront dans la loi. »
    Comme je l'ai dit, il s'agit d'une question complexe qui comporte de nombreuses facettes. Les gens qui ont suivi le débat au cours des derniers jours, les gens qui y assistent aux tribunes ou qui nous regardent à l'ordinateur, sur CPAC, peuvent choisir les dispositions du projet de loi qu'ils aiment ou pas, mais les députés, eux, pourront seulement voter pour ou contre le projet de loi. Nous savons qu'il sera adopté. Il doit l'être parce que la Cour suprême l'a exigé.
    Les députés ne le savent peut-être pas, mais je suis un ardent défenseur des soins palliatifs. À Calgary, mon adjointe de circonscription, Lou Winthers, a été fondatrice et directrice générale de l'Hospice Calgary. Mon regretté beau-père a été chef principal au Rosedale Hospice de Calgary. Pendant une grande partie de sa longue carrière, il a été chef principal dans de nombreux hôtels partout au pays. Il a passé ses dernières années à préparer des repas pour les pensionnaires en fin de vie de l'hospice de Calgary.
    Ma famille fait du bénévolat depuis de nombreuses années à l'Hospice Calgary. Je n'aurais jamais imaginé que, un jour, je devrais me battre pour que ma femme puisse avoir une place en résidence. J'ai constaté de mes propres yeux à quel point il est essentiel que, au Canada, nous disposions d'un bon système de soins palliatifs.
    Au cours de mon expérience à l'Hospice Calgary, j'ai pu aussi constater de mes propres yeux à quel point ces soins spécialisés sont terriblement sous-financés dans notre système de santé actuel. Nous devons améliorer la prestation de soins palliatifs tant pour les patients que pour leur famille. Je ne remercierai jamais assez le personnel de l'Agapé Hospice de l'appui qu'il nous a prodigué, à ma famille et à moi, il y a à peine quelques années. Je souhaite simplement que tous les Canadiens puissent bénéficier du soutien nécessaire et avoir accès à des soins palliatifs de qualité lorsqu'ils devront traverser l'un des épisodes les plus difficiles de leur vie. Nous devons et pouvons faire mieux. Il nous reste toutefois beaucoup de chemin à faire.
    J'ai reçu plus de correspondance sur cette question que sur n'importe quelle autre depuis que j'ai été élu député fédéral et au cours de mes 10 années à exercer les fonctions de député provincial en Alberta. Normalement, les lettres écrites à un député l'exhortent à appuyer un projet de loi ou à s'y opposer. Cependant, le caractère inévitable de ce projet de loi a induit des réactions d'un genre différent. Les gens de ma circonscription m'écrivent pour me suggérer des façons d'améliorer les choses et pour exprimer leurs objections concernant des dispositions bien précises. Il m'a donc été donné de lire des propos mûrement réfléchis et empreints d'une grande passion.
    Ken, qui habite dans ma circonscription, m'écrit ceci: « Même si, en raison de mes convictions personnelles, morales et religieuses, je suis personnellement contre toute forme d'euthanasie, je suis conscient qu'une loi sera probablement adoptée pour permettre cette pratique dans des cas extrêmes. Mais un grand nombre de dispositions du projet de loi actuel vont beaucoup plus loin et pourraient dans les faits créer une sorte de service accessible sur demande qui laisserait les plus vulnérables de la société sans protection. » La lettre de Ken est l'une des nombreuses lettres où des gens se disent inquiets au sujet des plus vulnérables de la société.
    Connie C., qui habite elle aussi dans ma circonscription, m'écrit pour me signifier avec passion son opposition à toute forme de suicide. Elle dit ceci: « Le décès de mon père s'est produit au terme d'une détérioration graduelle de son état de santé sur une période de quatre mois. Ce fut une épreuve difficile à traverser pour lui et pour ma famille. Cependant, nous avons pu vivre alors des moments très intenses ensemble, et je ne vois plus la mort du même oeil. Ce fut douloureux et difficile pour lui, mais le combat fait malheureusement partie intégrante de l'existence humaine [...] Le suicide met fin à l'existence humaine, et aucun médecin ne devrait avoir à mettre fin à la vie d'un être humain. » Voilà ce que Connie avait à dire.
(2205)
    En revanche, d'autres désirent avoir accès à l'aide médicale à mourir.
    Valerie m'a écrit ceci: « Mon père et d'autres membres de ma famille ont été atteints de démence, et je les ai vus oublier de se laver et de se brosser les dents et refuser de laisser les autres s'occuper d'eux. Mon père a passé les six derniers mois de sa vie dans un lit médicalisé à ne rien faire. Si je sombre dans la démence, je sais que je ne voudrai pas vivre comme cela. Si je n'ai pas accès à l'aide médicale à mourir, je veux trouver le moyen de mettre fin à mes jours pendant que je suis encore capable de prendre une telle décision. Je vous supplie de m'offrir une meilleur option si je suis frappée de démence. »
    Debra Lee, quant à elle, m'a écrit et a écrit à la ministre de la Justice en s'appuyant sur une expérience que peu de gens ont. Elle a travaillé comme infirmière pendant plus de 40 ans. Voici ce qu'elle a écrit: « J'ai vu beaucoup de gens mourir. Chez un grand nombre, les symptômes étaient bien gérés, mais certains ont connu de vives souffrances physiques et émotionnelles. Des personnes ont reçu des traitements invasifs qui ne pouvaient ni les guérir, ni alléger leurs souffrances. Néanmoins, au cours de ma carrière, j'ai observé pendant trop longtemps une culture de refus de la mort — les fournisseurs de soins, tout comme les malades et les membres de leur famille, avaient de la difficulté à accepter la mort. »
    Comme je l'ai dit plus tôt, la question est complexe.
    Une autre électrice, Catherine G., a surtout parlé de certaines parties précises de la mesure législative proposée qui, à son avis, devaient être améliorées. Elle trouve que les personnes vulnérables ne sont pas assez protégées. Elle a dit: « Je crois que l'aide médicale à mourir exposera un grand nombre de personnes âgées à la pire forme de maltraitance. Elles se sentiront forcées d'accepter parce qu'elles auront l'impression d'être un fardeau pour leurs proches. Nous devons prendre soin des personnes malades et des personnes âgées; les médecins ne doivent jamais tuer. »
    Un grand nombre de personnes se sont dites inquiètes pour les plus vulnérables de la société, mais certaines ont aussi écrit à propos de leur propre vulnérabilité.
    Tracey a écrit: « Aujourd'hui, ma mère, qui est à un stade avancé de la maladie d'Alzheimer, est lentement en train de mourir de faim. Comme ma grand-mère en a aussi été atteinte, il y a de fortes chances que je l'aie aussi. Sans aide au suicide, je serai forcée de me suicider dès que j'aurai reçu le diagnostic parce que je ne veux pas que mes enfants vivent ce que j'ai vécu et je ne veux pas souffrir comme ma mère. »
    Doug James, un autre électeur de ma circonscription, a fait écho à mes sentiments lorsqu'il a dit: « J'affirme qu'il vaut mieux que nous ayons une loi incomplète qu'aucune loi du tout et je suis certain qu'une autre mesure législative pourra être adoptée pour combler les lacunes. »
    Pour cette seule raison, je vais appuyer le projet de loi. Il ne s'agit pas d'un vote d'approbation pour le projet de loi ou les circonstances qui l'ont rendu nécessaire. C'est plutôt un vote pour reconnaître que, lorsqu'il s'agit d'une question aussi personnelle et délicate que la mort, il est préférable d'avoir diverses options, même si elles ne nous plaisent pas, même si nous n'y croyons pas. Il est préférable d'avoir un cadre juridique que rien du tout.
    Ma décision sera sans aucun doute bien reçue par certains et mal reçue par d'autres, mais je suis persuadé que les citoyens de ma circonscription tiendront compte de mon passé et de mes expériences, et qu'ils comprendront qu'à défaut d'une orientation claire de leur part, je vote en faveur du choix.
    En conclusion, je veux rappeler la profonde inquiétude exprimée par David MacPhail, qui m'a écrit: « Il devrait y avoir, dans le projet de loi, des mesures claires de protection de la conscience des professionnels de la santé et des établissements [...] Les gens ne devraient pas être forcés de participer contre leurs convictions profondes, soit en aiguillant les patients, soit en effectuant la procédure [...] Il n'est pas nécessaire que les médecins et les travailleurs de la santé dévoués mettent en péril leur carrière et risquent de faire l'objet de mesures disciplinaires simplement parce qu'ils veulent agir selon leur conscience. »
    Enfin, je tiens à rappeler que ce qui m'inquiète surtout, dans le processus de fin de vie, ce sont les soins palliatifs. Je mets au défi tous les députés d'aborder cette question avec autant d'énergie, de célérité et d'attention que nous en avons vues pour le projet de loi.
    Je crois que lorsque nous nous concentrons tous sur un but commun nous pouvons très rapidement atteindre des résultats remarquables. Espérons que nous accorderons la même importance à la question des soins palliatifs.
(2210)

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention cet autre discours.
    J'émets pratiquement le voeu qu'une fois ce débat terminé, nous nous rappelions à quel point nous avons des points communs dans notre humanité, ce qu'on oublie trop souvent dans la joute politique.
    Le député qui vient de faire son discours trouvera évidemment chez moi un appui inconditionnel en ce qui concerne les soins palliatifs. La question que j'aimerais lui poser, je me la pose pratiquement en même temps parce que dans plusieurs discours entendus aujourd'hui, y compris dans le mien, on relate très souvent une expérience qu'on a soi-même vécue face à la mort.
    Je me dis que le projet de loi auquel nous faisons face nous demande de changer de position et de prendre la place de celui ou de celle qui doit partir.
     Quand je pense à ma mère, qui a fini sa vie avec des doses de morphine qui la rendaient totalement inconsciente de ce qui se passait mais qui l'empêchaient de souffrir, je me demande, en tentant de me mettre à sa place, si elle n'aurait pas aimé pouvoir partir consciemment, entourée des siens, en sachant que l'aide médicale à mourir était là pour elle.

[Traduction]

    Monsieur le Président, quand je repense à mon expérience et à celle de ma famille, je dois dire que nous avons tous ressenti un grand soulagement quand mon épouse est finalement décédée après tant de souffrance et de douleur. Je ne m'attarderai pas sur mon expérience, car je fondrais en larmes, ce que je me suis promis d'éviter.
    Au cours des derniers mois, nous avons tous pensé à des êtres chers décédés. Je suis conscient que nous avons tous une décision très difficile à prendre ici, et je respecte la décision de chacun. Je souhaitais simplement décrire ma position et indiquer comment je voterais.
    Monsieur le Président, il s'agit surtout d'une observation.
    Je tiens à remercier notre collègue de Calgary Confederation d'avoir partagé ses réflexions avec nous aujourd'hui. Il va sans dire que cette discussion éveille de vives émotions. Je remercie le député pour ses propos.
(2215)
    Monsieur le Président, je remercie le député de ses propos empreints de gentillesse.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses observations. J'aurais une question pour le député au sujet de l'examen préalable.
    Le projet de loi tente de prévoir quelques mesures de sauvegarde. Mais en l'absence d'un processus juridique, en l'absence de tout examen préalable confié à une personne dotée d'un pouvoir juridique, on ne dispose d'aucune méthode qui garantirait clairement le respect des critères. C'est l'une de mes principales préoccupations.
    Le député convient-il qu'une légère modification du projet de loi permettrait de prévoir un système d'examen juridique préalable, par exemple en remplaçant l'un des témoins par une personne dotée du pouvoir juridique nécessaire pour faire cette évaluation, ou en exigeant la tenue d'une audience judiciaire? Convient-il qu'on pourrait ainsi améliorer considérablement le projet de loi et la protection des personnes vulnérables?
    Monsieur le Président, je conviens qu'il y a beaucoup de travail à faire en ce qui concerne ce projet de loi. Ce n'est qu'une question de temps avant que cette question soit de nouveau renvoyée aux tribunaux, étant donné que certaines personnes réclament que des changements soient apportés à ce projet de loi. Cela prendra du temps. Je n'ai aucun doute que la Cour suprême aura d'autres décisions à prendre dans ce dossier.
    Actuellement, l'arrêt dans la cause Carter de la Cour suprême nous oblige à proposer ce projet de loi. C'est ce que nous faisons.
    Monsieur le Président, je crois pouvoir dire qu'il s'agit là du dossier le plus important dont nous allons débattre au cours de la 42e législature. Nous sommes en train de proposer de changer la façon d'offrir des soins de fin de vie aux Canadiens, mais cela va encore plus loin.
    Si le projet de loi est adopté, nous allons accorder à des agents de l'État de nouveaux pouvoirs qui leur permettront de mettre fin aux jours d'une personne. C'est une responsabilité sérieuse, et j'espère qu'aucun d'entre nous ne la prend à la légère. Ce qui est proposé marque un tournant fondamental dans la société canadienne et dans notre façon de nous percevoir en tant qu'humains. Après seulement quelques heures de débat, on nous demandera de changer une vision qui dure depuis des siècles. Nous allons demander à des médecins, qui ont fait le serment de ne pas se prendre pour Dieu, de faire exactement le contraire et d'être responsables de la mort de certains patients.
    Nous faisons cela sans consultation, sans demander à des médecins, des infirmiers et des pharmaciens s'ils sont prêts à assumer cette responsabilité. Ce n'est pas ce qu'ils ont appris à faire. Ce n'est peut-être pas ce qu'ils veulent faire, mais le Parlement prévoit de les y obliger.
    L'empressement avec lequel on nous demande de renverser des façons de penser et des pratiques qui datent de centaines d'années est indécent. Je comprends que la Cour suprême, lorsqu'elle a fixé ce délai, ne cherchait qu'à faire ce qu'elle croyait être la bonne chose. Je suis convaincu que les juges sont bien intentionnés et qu'ils se soucient véritablement du sort des personnes qui sont en phase terminale, qui souffrent et qui souhaitent mettre fin à leur vie, mais qui sont physiquement incapables de le faire.
    Je suis certain que je ne suis pas le seul à recevoir des appels, des lettres, des courriels et des observations de personnes qui s'opposent au projet de loi. Nombre de ces communications proviennent de personnes qui envisagent la question d'un point de vue religieux. D'après ce que je constate, les croyants, qu'ils soient chrétiens, musulmans ou juifs, croient sincèrement au caractère sacré de la vie, et ils estiment que l'État, en approuvant la soi-disant aide médicale à mourir, s'immisce dans un domaine qui va au-delà de ses compétences.
    Il me semble que nous, en tant que nation, devrions tenir un débat exhaustif sur la façon dont nous envisageons la vie et la qualité de vie, un débat qui devrait avoir lieu dans un contexte plus objectif que celui où un être cher souffre en raison d'une maladie incurable. On nous demande de faire un choix profondément troublant et on nous dit de le faire maintenant. Il ne faut pas beaucoup de talent pour prédire qu'il y aura beaucoup de confusion après l'adoption du projet de loi.
    Mais si on a l'option de tuer les patients pour une raison quelconque considérée acceptable, dans combien de temps ces raisons deviendront-elles plus souples? Qu'adviendra-t-il des gens sans famille qui drainent les ressources hospitalières? Ne serait-il pas dans l'intérêt financier de la société de mettre fin à leur vie?
    Comment allons-nous empêcher les familles de faire pression sur leurs aînés pour qu'ils demandent à mourir dans le seul but d'améliorer la situation financière de la nouvelle génération? Tant de questions demeurent sans réponse. Nous agissons à la hâte, ce qui nous amènera sans aucun doute à faire fausse route.
    Ce qui m'amène au projet de loi rédigé à la hâte dont nous sommes saisis ce soir. Il semble que le gouvernement ait décidé que la question même de l'aide au suicide ne mérite pas d'être débattue. Il semble qu'on ait déjà conclu, malgré les objections des croyants et de bien d'autres Canadiens, que la question est réglée. Même si on n'aborde pas les mérites, ou plutôt l'absence de mérite, de l'aide à mourir, il nous faut étudier le projet de loi et en combler les lacunes.
    Je suis extrêmement préoccupé par les mesures de protection — ou leur absence, devrais-je dire — prévues dans le projet de loi à l'intention de ceux qui, en toute conscience, ne souhaitent pas participer à la mort d'autrui. Simplement dit, le projet de loi ne protège pas adéquatement ces gens.
(2220)
    Qu'arrive-t-il lorsqu'un médecin refuse, en toute conscience, d'aider une personne à mettre fin à sa vie? Nous ne le savons pas. On nous dit que le droit à la liberté de conscience sera protégé, mais ce n'est pas exprimé clairement dans le projet de loi. Apparemment, ce sont les provinces qui devront se débrouiller avec cela ou quelqu'un d'autre qui établira les règles. On ne sait toutefois pas de qui il s'agit.
    Si j'étais médecin, je serais très mal à l'aise. Le projet de loi énonce que les médecins ne seraient pas passibles de poursuites s'ils mettaient fin à la vie d'une personne qui demandait l'aide médicale à mourir. Qu'arriverait-il aux professionnels de la santé qui refusent de mettre fin à la vie d'une personne? Quelles sanctions l'État leur imposerait-il s'ils se fiaient à leur conscience? Est-ce que l'État leur interdirait d'agir selon leur conscience et les forcerait à devenir des tueurs?
    Les partisans du projet de loi, j'en suis certain, nous dirons qu'aucune personne ne serait obligée de poser des gestes qu'elle juge contraires à l'éthique. Si c'est le cas, où est-ce écrit dans le projet de loi? On ne peut pas reprocher aux professionnels de la santé leur malaise si tout ce qu'on leur dit c'est « faites-nous confiance ».
    On ne discuterait peut-être pas de cette question si on aidait mieux les personnes en fin de vie. Qu'en est-il de l'engagement du gouvernement à accroître le financement des soins palliatifs, une promesse électorale qui n'a pas été abordée dans le budget de 2016?
    Le gouvernement avait promis de consacrer trois milliards de dollars pour les soins palliatifs et de longue durée, mais aucune somme n'a été versée. Notre pays ne devrait-il pas chercher des façons d'améliorer la qualité de vie des gens atteints de maladies graves, ou est-il simplement plus économique de les encourager à mettre fin à leur vie afin d'économiser de l'argent pour le système de santé? L'accès à des soins palliatifs adéquats jouerait un rôle essentiel dans la prise de décisions sur la fin de vie et encouragerait, dans bien des cas, les gens à ne pas s'enlever la vie.
    Quand nous parlons de conscience dans ces situations, le concept dépasse les droits des personnes. Il touche à la nature même de notre système de santé. Le gouvernement a-t-il songé au fait que bon nombre des hôpitaux dans notre pays ont été fondés par des organismes religieux et sont encore dirigés par eux, des groupes qui n'apprécieraient pas que le gouvernement leur ordonne de fournir des services auxquels ils s'opposent par principe? Est-ce qu'il s'agit d'une autre question que les provinces devront régler par elles-mêmes?
    Le gouvernement a-t-il l'intention d'obliger les professionnels de la santé des hôpitaux dirigés par des organismes catholiques ou l'Armée du Salut de participer à des actes médicaux qui sont contraires à leurs croyances les plus profondes? Quel est le droit le plus important, et comment le gouvernement procède-t-il à un choix? Quelle sorte de pression serait exercée pour forcer les personnes et les organismes à abandonner leurs croyances profondes?
    Le projet de loi dont nous sommes saisis comporte de graves lacunes. Il ne devrait pas être adopté tant qu'il n'aura pas été grandement amélioré, surtout en ce qui concerne la protection de la liberté de conscience des professionnels et des établissements de soins de santé.
(2225)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours.
    Mon intervention sera assez brève. Dans son discours, mon collègue a mentionné qu'il manquait de temps pour prendre une décision et que nous n'avions pas assez de temps pour étudier le projet de loi. J'aimerais lui rappeler que les conservateurs, lorsqu'ils formaient le gouvernement, n'ont rien fait au cours des mois qui ont suivi la décision de la Cour suprême. À cause de leur inaction, nous n'avons pas eu de temps pour mener des consultations, pour réaliser des études ou pour tout simplement débattre de cette question à la Chambre.
    Je crois que c'est maintenant que nous pouvons le faire car les jours que nous avons sont comptés. Je garde toujours en tête les gens qui souffrent et qui n'ont pas de moyen à leur disposition pour atténuer leurs souffrances, et je pense également aux familles.
    Je crois donc qu'il serait important d'adopter ce projet de loi en deuxième lecture pour y apporter des amendements, mais aussi pour avoir un bon projet de loi bien structuré, afin de protéger tant les personnes souffrantes que les plus vulnérables.

[Traduction]

    Monsieur le Président, au fond, le gouvernement précédent a manqué de temps. Nous devons avoir plus de temps, faire davantage de consultations, obtenir de meilleurs avis et nous assurer le concours de la population et des professionnels afin d'élaborer la meilleure mesure législative.
    Une telle question se présente une fois en 100 ans. Nous devons prendre bien soin de produire la meilleure mesure législative qui soit. Si nous devons mettre en place une loi, qu'on ne nous donne pas une période de six mois pour le faire. Nous sommes convaincus que le gouvernement obtiendrait un délai s'il le demandait au tribunal. Pourquoi précipiter les choses? Nous devrions bien étudier la question et élaborer la meilleure mesure législative qui soit.
    Monsieur le Président, je remercie le député de son excellente allocution et de son excellent travail. Il est mon voisin, dans la région d'Edmonton, et j'ai parfois l'impression qu'il connaît plus de monde que moi dans ma circonscription.
    Je veux aborder un cas précis qui a un rapport avec certaines des observations que le député a formulées. La Dre Nancy Taylor, dont j'ai déjà parlé, est médecin de famille et en soins palliatifs en Ontario. Elle a déclaré qu'elle abandonnait la profession parce que la politique du Collège des médecins et chirurgiens de l'Ontario et la présente mesure législative ne protègent pas la liberté de conscience.
    Cette décision cause un énorme problème d'accès pour ses patients et les gens de sa collectivité. Pourquoi pousser à quitter la profession des gens qui fournissent avec compassion et bonté les soins palliatifs nécessaires quand il y a déjà une pénurie? Que ceux qui veulent pratiquer l'euthanasie le fassent, mais protégeons ceux qui veulent fournir des soins palliatifs et permettons-leur de continuer à exercer leur profession en évitant de heurter leur conscience, ce qui les obligerait à partir.
    Monsieur le Président, le député m'enlève pratiquement les mots de la bouche, car je crains vraiment que les professionnels de la santé, les médecins qui consacrent leur vie aux études, soient forcés d'agir contre leur gré. C'est comme si quelqu'un leur donnait un pistolet et leur demandait de leur tirer dessus. Ils devraient alors commettre un crime simplement parce qu'on leur a dit de le faire. Ce n'est pas ce que nous souhaitons ici. Nous souhaitons adopter un projet de loi qui frisera la perfection. Nous pourrions y arriver si nous pouvions tenir plus de consultations et si nous disposions de plus de temps.
    Monsieur le Président, j'aimerais poser deux questions au député. Premièrement, il a dit que s'il était un médecin, il serait inquiet, car il serait forcé d'agir contre son gré. Je lui saurais gré de m'indiquer les dispositions du projet de loi qui forceraient des médecins à faire quoi que ce soit. Il n'y a absolument rien là-dessus.
    Il devrait aussi prendre connaissance de la position de l'Association médicale canadienne, qui appuie fermement le projet de loi.
    J'aimerais toutefois revenir aux commentaires voulant qu'il n'y ait pas assez de débat. La Cour suprême a rendu sa décision le 6 février 2015. Nous avons proposé une motion le 24 février. Le gouvernement de l'époque l'a rejetée. Si cette motion avait été adoptée, le comité aurait terminé ses travaux au plus tard en juillet. Entre le jour de la décision — le 6 février — et les élections, le gouvernement conservateur précédent n'a rien fait. Comment les conservateurs peuvent-ils maintenant nous dire qu'il faudrait plus de temps pour étudier le projet de loi?
(2230)
    Monsieur le Président, pour répondre à la première partie de la question, le projet de loi n'est pas clair. Il y a beaucoup de détails arbitraires. Je ne vais pas me présenter comme député et dire que quelqu'un m'a dit telle chose ou que l'association médicale nous a dit telle chose. Ce n'est pas ainsi que nous légiférons. Ce n'est pas ainsi que nous pensons.
    Il nous faut plus de temps. Nous devons assimiler. Nous devons comprendre parce que notre conscience doit nous guider et nous devons procéder avec prudence et de manière réfléchie.
    Monsieur le Président, je vais commencer ce soir par remercier les électeurs de ma circonscription qui m'ont écrit à ce sujet. Je suis député depuis près de 12 ans et, contrairement à d'autres députés, il y a des questions sur lesquelles on m'a écrit davantage. Toutefois, j'ai reçu pas mal de commentaires d'électeurs et, sans surprise, les avis diffèrent. Je tiens à exprimer ma gratitude parce que le processus démocratique ne fonctionne que lorsque tous participent, lorsque les citoyens expriment ce qu'ils estiment être les principes fondamentaux en jeu.
    Je veux aussi saluer spécialement une classe de l'école secondaire Bishop James Mahoney, où j'étais la semaine dernière. Nous avons discuté de ces questions très profondes. Les jeunes de onzième année y avaient beaucoup réfléchi. Ils avaient lu la mesure législative. Ils l'avaient étudiée, je dois malheureusement dire, plus attentivement que certains parlementaires qui pourraient avoir à voter dessus. Les élèves avaient compris et conclu clairement certaines choses sur ce dont il s'agit, parce peu importe comment un député votera sur ce dont nous parlons ce soir, cela demeure une question morale. Ce n'est pas que la plupart, voire toutes les questions, n'ont pas une dimension morale, mais c'est particulièrement le cas de celle-ci.
    Comme d'autres députés l'ont dit, il s'agit aussi d'une question très personnelle. Nous devrons tous affronter la mort, un jour.
    En parlant au téléphone, ma mère m'a rappelé aujourd'hui qu'il y a exactement un an, elle m'avait appelé pour me dire que ma grand-mère était mourante et qu'il fallait que j'aille la voir au centre d'accueil. Elle n'est pas morte ce jour-là, mais elle savait qu'elle était mourante. Je l'ai serrée dans mes bras. C'était un de ces moments particuliers où on commence à penser aux conséquences.
    Cette question a déjà fait l'objet d'un arrêt de la Cour suprême. Tout le monde a des devoirs envers sa famille, son pays, bref envers tout. J'estime que tous les députés, même ceux qui ne peuvent pas prendre la parole, ont le devoir de faire connaître leur position aux gens de leur circonscription.
    Il faut que les gens comprennent mon premier point. La loi est un instrument tranchant. Elle ne peut pas faire facilement la distinction entre des cas bien distincts. Elle est très difficile à appliquer dans des situations bien précises. Dans une situation comme celle-ci, où il est question d'une loi qui touche à la protection de la vie, il faut faire preuve d'une prudence absolue et prévoir des mesures de protection.
    Les sondeurs posent des questions. Ils demandent aux gens comment ils voteraient dans telle ou telle situation. Toutefois, si je peux être parfaitement honnête, aucun sondeur ne peut résumer la complexité ne serait-ce que d'une seule situation. Pourtant, en tant que législateurs, on nous demande de prendre une décision, d'en venir à une conclusion. Cela fait partie de notre travail.
    Étant donné que la loi est si directe et qu'elle ne peut pas faire de distinction dans les cas les plus subtils, et puisque les êtres humains sont précieux, nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la vie. C'est pour cette raison que, peu importe les restrictions qui ont été suggérées par les autres députés ce soir, je vais les appuyer. J'imagine que je serai l'un des rares députés à la Chambre à ne pas appuyer le projet de loi, mais je ne suis pas favorable au principe qui le sous-tend. Je suppose aussi qu'il y aura encore moins de députés qui seraient prêts, comme moi, à recourir à la disposition de dérogation afin de nous soustraire à l'arrêt de la Cour suprême.
    Toutefois, la question se résume au principe fondamental selon lequel le but de la société civile et le but du gouvernement, c'est de protéger la vie — la vie, la liberté et la propriété. Voilà ce que nous devons faire.
    Hier, je me suis rendu à une activité où un orateur parlait de la liberté et des enjeux qui y sont associés. Il a fait remarquer qu'au cours de l'histoire il y a eu différentes formes de gouvernement, mais que, dans la plupart des cas, il s'agissait de l'un des trois types suivants: un gouvernement familial, de clan, comme il y en a dans beaucoup de sociétés tribales africaines et comme celui du système de clan du Nord de l'Écosse; un système hiérarchique, comme les dictatures, ainsi que le système du Moyen-Âge avec l'empereur, le roi, les serfs, et cetera; ou un système d'engagement, où tous les membres de la société acceptent — bien que la loi les y contraigne parfois, c'est souvent par leur propre décision, leurs propres actions et leur engagement sur le plan moral —, d'être engagés, de faire partie de la collectivité et de soutenir leur voisin.
(2235)
    C'est un principe que nous devons comprendre. Dans un État régi par un ordre constitutionnel, les gens sont unis par un pacte social. Nous ne nous entraidons pas parce qu'une structure de pouvoir hiérarchisé nous oblige à le faire. Bien sûr, la police et les lois existent de même que les moyens d'arrêter les malfaiteurs. Toutefois, chacun d'entre nous a une responsabilité particulière envers ses concitoyens pour toute la durée de son existence, même dans les derniers instants avant de mourir. Il faut bien y réfléchir à toutes les situations, dans le cadre de notre débat sur le projet de loi actuel. Le pacte qui nous unit aux autres est à tout le moins un engagement à défendre la vie de nos concitoyens et des êtres humains en général.
    Au cours du mois dernier, dans la presse grand public, des articles ont paru sur des médecins au Québec. J'espère que c'est une histoire fausse, car les articles de ce genre contiennent souvent des exagérations, mais toujours est-il que des médecins auraient refusé de traiter des personnes ayant tenté de se suicider, même si elles pouvaient très bien être traitées. Le Collège des médecins du Québec a dû établir une ligne directrice disant que, si une personne se rend à l'hôpital, les médecins doivent la traiter, et non tenir pour acquis que cette personne veut mourir puisqu'elle a tenté de ce suicider. Si une personne ne répond pas aux critères établis dans la loi québécoise ou dans l'arrêt de la Cour suprême, elle doit être traitée. Les médecins ont une responsabilité et ont prêté serment de protéger la vie humaine. C'est le travail qu'un médecin doit faire à l'urgence d'un hôpital.
    Lorsque j'ai lu cet article, je me suis dit que nous devions comprendre que le comportement qui y est décrit est l'une des conséquences qu'aura l'adoption du projet de loi actuel. Peu importe le nombre de mesures de protection qui seront prises, des gens perdront la vie à cause de ce projet de loi. Je le répète, j'espère que l'histoire qui se serait passée au Québec ne nous a pas été bien racontée, mais si elle est véridique, des gens ont tenté de se suicider, ont crié à l'aide et, malheureusement, sont parvenus à s'ôter la vie, alors qu'on aurait pu les sauver.
    Il est tout à fait possible qu'en raison du débat politique actuel, de la décision de la Cour suprême et de la loi adoptée préalablement par une province, certains médecins aient choisi de ne pas intervenir. Quand il est question des souffrances qui inquiètent les gens, il faut savoir que, dans bien des cas, c'est à la peur, autant qu'à la souffrance, qu'ils souhaitent mettre fin quand leur vie s'achève. Il faut comprendre que, même quand notre vie tire à sa fin, le pacte qui nous lie à nos semblables demeure. Le projet de loi tente, de façon très pratique, de soupeser la vie et la souffrance.
    Il faut en être conscients et se demander combien de souffrance et de peur nous souhaitons affronter, et combien sont nécessaires en échange d'une vie humaine. Ce sont des décisions qu'il faut prendre, dans une société. La question n'a rien de morbide; elle est tout simplement réaliste. Nous établissons des limites de vitesse. C'est le genre de choses que nous faisons. Nous savons que nos gestes ont des conséquences. Nous ne pouvons pas rester éternellement enfermés dans une bulle.
    Voici où je veux en venir. Même si, à la fin de sa vie, une personne est assaillie par la peur ou la douleur — je précise que je ne doute aucunement de la sincérité, de l'intensité ou de la souffrance des personnes dans cette situation —, la décision qu'elle prend alors que la fin approche aura des répercussions sur d'autres gens. En raison des changements apportés à cette loi et des motivations qui la sous-tendent, certaines personnes subiront des pressions et perdront leur protection, comme le montre l'exemple québécois que j'ai donné. Il ne faut pas perdre cela de vue. La société civile et le gouvernement ont pour devoir ultime de protéger la vie. C'est ce que nous devons faire à tout prix.
    Je tiens encore une fois à remercier les gens de ma circonscription et mes collègues députés. Ma conscience me dicte toutefois de voter contre ce projet de loi. Je n'ai pas d'autre choix.
(2240)
    Monsieur le Président, je remercie le député de son discours très éloquent. De toute évidence, nos avis divergent sur la question, mais il est clair que le contenu de son discours a été mûrement réfléchi et très bien exprimé.
    Le député a parlé avec beaucoup de passion du caractère sacré de la vie. Si d'autres députés sont actuellement du même avis que celui qui vient de prendre la parole, le 6 juin, il n'y aura plus de dispositions pénales à l'égard de l'aide médicale à mourir, et les mesures de sauvegarde prévues dans le projet de loi C-14 ne seront pas inscrites dans la loi. On n'obligera pas deux médecins à donner leur avis sur un patient. La présence de deux témoins indépendants ne sera pas requise. Aucune demande signée ne sera exigée.
    Le Parlement doit se demander non pas s'il doit agir, mais comment il doit le faire, et la méthode proposée contient des mesures de sauvegarde qu'on ne pourra pas mettre en place si le projet de loi n'est pas renvoyé au comité.
    Compte tenu de ses convictions profondes sur le caractère sacré de la vie, le député pourrait-il parler de ce qui se produirait à partir du 6 juin si le projet de loi était rejeté?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses observations. Je comprends très bien son point de vue, et je soupçonne que c'est l'une des raisons pour lesquelles il représente l'opinion de la majorité des députés.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt — et encore une fois, je suis convaincu que je fais partie de la minorité —, je préférerais qu'on rejette entièrement le projet de loi et qu'on ait recours à la disposition de dérogation, que ce soit de façon temporaire, pour donner à la Chambre deux ou trois ans, ou le temps qu'elle juge approprié, pour étudier cette question, ou de façon permanente.
    Je signale au député qu'il est possible de présenter des demandes de prolongation. Je me rends compte que la Cour suprême ne les accueillerait pas favorablement, mais une prolongation est nécessaire. Nous pourrions avoir recours à la disposition de dérogation et présenter une mesure législative temporaire, qui serait en vigueur pendant un an ou deux, et par la suite, nous pourrions présenter une autre mesure législative dans le cadre de la législature actuelle. C'est une autre possibilité. Je pense que la Chambre doit examiner ces possibilités.
    Je le répète, je suis réaliste. Je comprends la situation et je soupçonne que je fais partie de la minorité.
    Monsieur le Président, je crois qu'il faut reconnaître que le délai qui nous est imposé est dans une large mesure un choix du gouvernement. Les libéraux ont retiré au groupe d'experts la tâche de présenter des recommandations législatives, ce qui aurait accéléré le processus. Ils ont eu l'occasion, dès que le comité mixte spécial a présenté son rapport, de présenter le projet de loi, mais ils ont tardé à agir. Maintenant, ils veulent qu'on se soucie du délai.
    Ils devraient proposer un meilleur projet de loi. Ils devraient régler le problème, puis on pourra ensuite collaborer afin de faire adopter le projet de loi rapidement. Il n'y a pas de critères clairs. Ils utilisent des termes comme « raisonnablement prévisible », qui ne sont ni des termes médicaux ni des termes juridiques. Le projet de loi ne contient aucun critère clair. S'il ne fait pas ce que le tribunal nous demande de faire, c'est-à-dire créer un système comprenant des mesures de protection rigoureuses, alors à quoi sert d'adopter le projet de loi? À quoi servira l'adoption d'un projet de loi qui n'apporte pas vraiment d'amélioration significative à la situation actuelle?
    Il faut rejeter le projet de loi et donner au gouvernement l'occasion d'essayer de nouveau.
    Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. Comme il s'agit davantage d'une observation que d'une question, je dirais que je le comprends et que nous avons des points de vue semblables sur la question. Comme c'est ma dernière occasion pour faire une observation, je vais en faire une dernière avant que le débat reprenne.
    Je n'ai pas mentionné que j'appuyais le droit à la liberté de conscience, et j'aimerais ajouter quelque chose à cet égard. Nous parlons souvent de droit à la liberté de conscience dans un contexte religieux. Le droit à la liberté de conscience est pour tous. Nos antécédents n'ont aucune importance, que nous soyons athées, croyants ou agnostiques, et quelles que soient nos convictions ou nos raisons.
    En raison du traumatisme qu'une personne pourrait subir si elle devait aider quelqu'un à mourir, pour cette simple raison, et même si la personne appuie le principe du projet de loi, il ne devrait y avoir aucune restriction à la liberté de conscience, peu importe le contenu du projet de loi.
(2245)
    Monsieur le Président, plutôt que de présenter mes arguments et dévoiler ensuite comment je voterai, je vais faire le contraire.
    D'entrée de jeu, je déclare que je voterai en faveur du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, de sorte qu'il sera renvoyé au comité, pour qu'on en discute les principes et le bonifie peut-être au moyen d'amendements.
    À l'étape de la troisième lecture, je voterai selon les volontés des électeurs de ma circonscription. Je suis en train de mener un référendum de circonscription par la poste. Il s'agit en fait d'un sondage conçu pour demander de la manière la plus impartiale possible comment les électeurs souhaitent voir leur député voter. Je procède ainsi parce que, lorsqu'il s'agit d'une question de conscience aussi fondamentale, le point de vue des électeurs est tout aussi valable que le mien, celui des autres députés ou celui des juges de la Cour suprême du Canada. Les électeurs guideront mon vote à l'étape de la troisième lecture.
    Aujourd'hui, mes observations portent sur la question sous-jacente qui est en jeu et dont le Parlement, les tribunaux et les décideurs du Canada, et de tous les autres pays du monde, doivent tenir compte dans le traitement des enjeux actuels relatifs à la vie et à la mort.
    À l'heure actuelle, et cela n'a pas toujours été le cas, la vie et le maintien de la vie coûtent cher, mais pas la mort. Cela n'a pas toujours été vrai.
    Toutes les personnes ayant lu les romans des soeurs Brontë savent que, au milieu du  XIXe siècle, et durant tous les siècles précédents, le maintien de la vie était relativement peu coûteux, en partie parce que la capacité des médecins de maintenir les gens en vie était si limitée. Le médecin allait voir le malade, lui faisait parfois une saignée s'il avait une simple fièvre, puis — du moins, c'est de cette façon que cela se déroule dans les romans — il conseillait à ses proches de se préparer au pire. La différence financière entre la vie et la mort était minime.
    Ce n'est plus le cas. Je veux le démontrer en parlant d'un problème de santé qui n'a rien à voir avec le débat sur l'euthanasie, l'aide au suicide ou l'aide à mourir, mais qui illustre bien à quel point la vie est dispendieuse dans un monde où les technologies et les produits pharmaceutiques se sont améliorés.
     Le mois de mai est le Mois de la fibrose kystique. Je connais quelqu'un qui souffre de cette maladie, et c'est un dossier dans lequel je m'investis maintenant avec ardeur. Chaque année, j'encourage les députés à porter une rose, et c'est ce que nous ferons tous mercredi prochain, en l'honneur des personnes atteintes de la fibrose kystique. Aujourd'hui, je porte l'épinglette pour la fibrose kystique.
    Un médicament introduit en 2012, appelé ivacaftor, et dont l'appellation commerciale est Kalydeco, transforme une maladie qui serait autrement mortelle en une maladie gérable, qui est problématique, mais non mortelle, pour les 4 % à 5 % de patients atteints de fibrose kystique qui ont la mutation delta-F508 du gène comportant la protéine CFTR.
    Ce médicament coûte très cher aux patients, à leur famille ou au système de santé, selon l'endroit où vit le patient. Il en coûte environ 300 000 $ américains par année pour accéder au Kalydeco. Les brevets sur les médicaments ont habituellement une durée de 20 ans. On peut présumer que, lorsque cela fera 20 ans, le coût chutera radicalement, mais pour l'instant, il est de 300 000 $ par année. Les députés peuvent faire le calcul: 300 000 $ multipliés par 20, cela signifie qu'il en coûte 6 millions de dollars pour garder une personne en vie.
     Cela en vaut largement la peine, mais le fait est que la vie est dispendieuse, alors que refuser de payer le traitement à même les fonds publics, comme c'est le cas dans certaines provinces, ne coûte pas cher. Cela coûte bien peu. Je ne veux pas insinuer que la compagnie pharmaceutique demande un prix déraisonnable ni aucune de ces questions connexes. Il en a coûté 458 millions de dollars à Vertex, la compagnie qui a créé ce médicament, pour le commercialiser. Mon observation est simplement que la vie est très dispendieuse et que maintenir quelqu'un en vie coûte cher. La mort ne coûte pas cher.
    Parlons maintenant de soins palliatifs. Bien sûr, il en coûte beaucoup moins cher de garder les gens en vie au moyen de soins palliatifs à la fin de leur vie. Toutefois, le fait est qu'il coûte encore moins cher de ne donner aucun soin. Cet aspect n'a pas de rapport avec la décision de la Cour suprême ni avec ce qui se trouve dans le projet de loi C-14 ou ce qui devrait ou non se trouver dans le projet de loi C-14. Il crée une dynamique où il y a un fort incitatif financier pour les décideurs de favoriser l'option la moins coûteuse, comme c'est le cas dans toute autre situation.
(2250)
    En l'occurrence, il semble que l'on encourage la gens à choisir la mort plutôt qu'à faire tout en leur pouvoir pour choisir la vie. Autrement dit, il y aura de puissants incitatifs à ne pas fournir de soins palliatifs.
    Dans les circonstances, la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Carter c. Canada aura vraisemblablement pour effet d'altérer la dynamique de manière à favoriser la mort en tant que solution au problème très coûteux qu'est le maintien en vie de personnes à qui l'on considère que la vie n'a plus rien à apporter.
    Afin d'expliquer la pertinence de mes propos, j'aimerais citer un extrait du discours qu'a prononcé à la Chambre la ministre de la Santé le vendredi avant la pause. J'ai eu la chance de lui poser une question par la suite. Elle a dit:
     Aujourd'hui, les Canadiens sont au courant de l'existence des soins palliatifs et en ont une connaissance générale. Cependant, certaines études ont révélé qu'une grande majorité, peut-être 70 % ou plus d'entre eux, n'y ont pas accès, tout particulièrement dans les régions rurales ou éloignées. Nombre de fournisseurs n'ont pas reçu la formation nécessaire pour offrir des services en soins palliatifs.
    Je pense qu'elle rapportait simplement ce qu'elle considère, avec raison, comme étant un fait. Cela dit, il ne faut pas grand-chose pour que l'aspect sinistre de sa déclaration se manifeste. Nous n'avons pas les moyens, ou plutôt les provinces n'ont pas les moyens, d'offrir des soins palliatifs, mais la mort est une façon moins coûteuse de faire en sorte que personne n'ait à vivre une vie insoutenable.
    Encore une fois, je ne crois pas qu'elle voulait être sinistre. Mais le sous-entendu est là. En lisant ses mots un peu différemment, on peut y voir un sous-entendu.
    Étant donné ce problème qui se présente à nous puisque nous pouvons prolonger la vie de façon beaucoup plus efficace qu'avant, mais que les fonds sont limités et qu'inévitablement il n'y en a pas suffisamment pour répondre à tous les besoins, si l'on posait un geste pour une raison qui semble noble sans bien y réfléchir, les conséquences pourraient être désastreuses.
    Pour défendre mon point, je vais m'appuyer sur l'un des meilleurs livres sur la politique publique que j'ai lus, Leçons sur les rapports entre le droit et l'opinion publique en Angleterre au cours du dix-neuvième siècle, par le grand Albert Venn Dicey.
    Au sujet de Lord Shaftesbury, un philanthrope et homme d'État bien intentionné, il a écrit une chose qui pourrait selon moi s'appliquer à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Carter c. Canada:
[...] le désir naturel d'un ardent philanthrope de soustraire à une souffrance immédiate toute personne incapable de se protéger elle-même contre l'oppression, et de le faire de la manière la plus pratique sans se demander si ce geste qui procure un soulagement immédiat aux personnes souffrantes [...] ne causera pas des maux d'une ampleur inimaginable.
    Le danger, c'est que le Parlement réagira comme M. Dicey avait averti qu'il le ferait. Il parlait du Parlement britannique et d'un siècle différent, mais cet avertissement s'applique bien à tout Parlement aux prises avec ce genre de situation.
    Je le cite:
[...] les lois adoptées pour répondre à une urgence ou à une demande particulière [...] influencent, à long terme, davantage les législateurs qu'une loi qui incarne ouvertement un vaste principe. Les lois adoptées de façon hâtive insèrent ou réinsèrent souvent, subrepticement, des idées qui ne seraient pas acceptées si elles étaient portées à l'attention du Parlement ou du pays.
    Cette mesure législative est présentée à la va-vite en réponse à une échéance artificielle imposée par la Cour suprême, qui poursuit un noble but mais qui, à mon avis, n'a pas examiné toutes les conséquences de ce qu'elle propose. Or, la jurisprudence de la Cour suprême du Canada en la matière est entièrement fondée sur des cas très atypiques, à savoir ceux de personnes atteintes de SLA qui sont en possession de toutes leurs facultés mentales, mais pas de leurs facultés physiques, et, à l'autre extrême, ceux de personnes atteintes d'Alzheimer qui, même si elles sont en assez bonne santé physique, ne sont pas en possession de leurs facultés mentales. Puis, il y a tous les cas entre les deux. Nous nous sommes servis de ces cas qui ont été portés à notre attention parce que c'est de cette façon que fonctionne le système judiciaire. Seules les personnes mentalement capables peuvent porter leur cause devant les tribunaux, et les tribunaux ont procédé à des généralisations qui pourraient donner lieu à une réaction hâtive susceptible d'entraîner l'inclusion dans notre loi d'un principe qui, comme M. Dicey l'a dit, pourrait avoir des conséquences inimaginables.
    Je demande que nous procédions avec beaucoup de prudence et que nous envisagions sérieusement la possibilité d'apporter des amendements au projet de loi au cours des semaines prochaines, lorsque nous passerons à l'étape de l'étude par le comité.
(2255)
    
    Monsieur le Président, j'aimerais que le député nous dise ce qu'il entend par échéance « artificielle ».
    La Cour suprême a fixé l'échéance au 6 juin. C'est l'échéance qu'elle a imposée après que nous ayons demandé la prolongation du délai. Le 6 juin, si une loi n'a pas été adoptée, il y aura de graves conséquences. J'ai un peu de mal à comprendre ce qu'il y a d'artificiel dans ce qu'a dit la Cour suprême.
    Ce n'est sûrement pas un manque de respect à l'égard de la Cour, mais cela doit vouloir dire quelque chose. Toutefois, je ne saurais dire de quoi il s'agit. Je pense que la Cour a été très claire.
    Monsieur le Président, j'aurais peut-être dû utiliser le mot « arbitraire » au lieu du mot « artificielle ».
    C'est une échéance arbitraire. Il n'y a rien de spécial le 6 juin, sauf que la Cour suprême a dit que c'est la journée où cette partie du Code criminel cessera simplement d'être en vigueur.
    La Cour suprême aurait pu agir comme la cour américaine; elle aurait pu tout simplement dire que cette disposition devenait sans effet sur-le-champ, un point c'est tout. Cela aurait engendré une réaction législative différente. Nous n'aurions pas agi hâtivement afin d'adopter le projet de loi à toute vapeur avant une certaine date n'eût été le fait que la disposition n'était pas invalidée avant une date précise et relativement approximative. Par conséquent, en ce sens, l'échéance est très arbitraire et artificielle.
    Tout au long de mes observations, j'ai essayé de faire comprendre que je ne souhaitais manquer de respect ni à la Cour suprême, ni aux personnes qui ont rédigé le projet de loi. J'ai simplement fait remarquer que le système en général répondait peut-être de manière sous-optimale au plus grand enjeu de santé de notre époque, à savoir que nous pourrions sauver de nombreuses vies, mais que nous n'avons pas les moyens financiers de sauver toutes les vies ainsi que nous pourrions le souhaiter. Nous n'avons pas fini d'entendre parler de cet enjeu.
    Monsieur le Président, toute la journée, il a été question de promesses extrêmement vagues sur les soins palliatifs ou la liberté de conscience des médecins, à laquelle le préambule fait vaguement allusion.
    J'aimerais que mon collègue nous dise si, à son avis, ces promesses ont de quoi convaincre les Canadiens de prendre leur mal en patience et de continuer à espérer un programme de soins palliatifs, alors que rien, dans le discours du Trône ou le budget, ne dénotait la moindre intention de donner suite à ces promesses.
    Selon moi, le projet de loi devrait être amendé afin que cela devienne une obligation, qu'à tout le moins une consultation ait lieu, après quoi les gens auraient accès à des soins palliatifs abordables. Le texte du projet de loi devrait aussi préciser que les travailleurs de la santé et les établissements de santé ne seront jamais tenus de participer d'aucune façon à l'aide au suicide.
    Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, j'ai discuté avec le député de Kitchener—Conestoga de sa proposition consistant à tenir obligatoirement des consultations sur les soins palliatifs avant de mettre en oeuvre le processus d'approbation, par les médecins et les infirmiers praticiens, des demandes d'aide médicale à mourir qui est prévu dans le projet de loi. Il s'agit d'une excellente proposition.
    Il y a une pénurie de ces professionnels au Canada. En fait, il m'est possible d'obtenir à l'instant une prescription par voie électronique de la part d'une personne se trouvant ailleurs. Il serait possible de créer une disposition pour cela et l'assortir d'un financement. À l'heure actuelle, aucun fonds n'a été accordé et je doute que le projet sur les soins palliatifs dont les ministériels ont parlé prévoie ce genre de consultation, qui serait préférable.
    Dans bien des cas, on conclura que les soins ne sont pas offerts dans une région donnée, mais au moins, les gens en seront informés. Par ailleurs, je crois que cela incitera les familles à réclamer des soins palliatifs de meilleure qualité et plus largement accessibles. C'est une excellente idée. Si elle n'est pas incluse dans le projet de loi à l'étude, elle devrait l'être dans un projet de loi modificatif ultérieur.
    Voici le problème en ce qui concerne le droit à la liberté de conscience. Certaines personnes seront obligées d'agir à titre d'agent de l'État ou quelque chose du genre étant donné que les tribunaux ont statué que le droit de demander qu'on mette fin à nos jours et le droit de mettre fin à sa propre vie font partie du droit à la vie prévu à l'article 7 de la Charte. Ces personnes auront donc l'obligation de fournir de l'aide. On ne peut pas priver une personne de ce droit. Étant donné que les médecins occupent une position créée par l'État qui leur confère un monopole en matière de soins de santé, ils pourraient se voir forcés de fournir l'aide à mourir, à moins qu'il en soit stipulé autrement dans le projet de loi, ce que j'espère.
(2300)
    Monsieur le Président, avant de commencer, j'aimerais remercier mon ami, le député de Yellowhead, de ses bons mots au sujet de Fort McMurray. La dévastation dans cette ville est ahurissante. Mes collègues de la Chambre se joindront sûrement à moi pour dire aux résidants de Fort McMurray que nos pensées et nos prières les accompagnent.
    J'ai déjà travaillé à Fort McMurray. En fait, le tout premier hôtel que j'ai géré vient d'être réduit en cendres. Je sais que les gens de cette ville vont compter sur notre soutien; ils savent aussi que tous les députés vont les appuyer.
    J'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi C-14. Il s'agit d'un enjeu très difficile pour de nombreux députés, et je suis reconnaissant des points de vue que j'ai entendus ici aujourd'hui et hier. Des députés s'opposent au projet de loi pour des raisons liées à leur foi, au droit ou à l'éthique, ou encore pour d'autres motifs. D'autres appuient le projet de loi et vantent ses mérites.
    Je respecte vraiment la contribution de chaque député au débat parlementaire et je tiens à exprimer ma gratitude aux membres du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. Il s'agit probablement de l'un des enjeux les plus difficiles, voire le plus difficile, que nous devrons étudier au cours de la présente législature.
    Nous connaissons tous quelqu'un qui est mort dans la souffrance, un être cher, un enfant, un collègue. Nous avons tous vu les ravages de la maladie sur le corps de personnes qui incarnaient, à nos yeux, la vie et l'espoir. Le cancer m'a enlevé deux de mes oncles les plus chers. L'un d'eux a passé sa vie dans la Marine royale canadienne et a terminé sa carrière au service du Canada comme commandant de la base des Forces canadiennes Esquimalt.
    Le commandant Larry Dzioba, comme tout commandant qui se respecte, était prêt pour la bataille qui s'annonçait. Il a combattu le cancer jusqu'à la fin et est resté autonome et en relative bonne santé jusqu'aux deux derniers jours de sa vie. J'attribue sa force à ses origines ukrainiennes et je pense qu'il voyait la douleur comme une chose qui devait être tolérée.
    Un autre de mes oncles, Michael McCauley, est décédé après des années de chimiothérapie et de radiothérapie. Il est décédé à la maison dans son lit, entouré de sa famille. Il a gardé sa dignité jusqu'à la toute fin.
    Un autre de mes amis très chers, Peter, est décédé du cancer du poumon il y a quelques années. Lui et moi avons travaillé ensemble au célèbre centre de villégiature Deerhurst, à Muskoka, avant qu'il y ait un pavillon, et nous avons plus tard travaillé ensemble à Edmonton. Peter est mort trois mois à peine après avoir reçu son diagnostic, mais sa famille et ses amis seront éternellement reconnaissants au personnel extraordinaire du Cross Cancer Institute à Edmonton, qui a veillé à ce qu'il passe ses derniers jours aussi confortablement que possible et dans la dignité.
    Malheureusement, beaucoup trop de Canadiens souffrent faute de soins palliatifs adéquats. Une étude effectuée en 2015 révèle qu'entre 15 % et 30 % des Canadiens ont accès à des soins palliatifs adéquats, mais même les pourcentages les plus élevés sont loin d'être suffisants.
    C'est là que le bât blesse, selon moi, en ce qui concerne le projet de loi C-14. Je cite un extrait du préambule du projet de loi:
    Attendu [...] qu’il est souhaitable d’adopter une approche cohérente dans tout le pays en matière d’aide médicale à mourir [...]
    Le gouvernement souhaite l'adoption d'une approche uniforme au Canada en ce qui concerne le suicide assisté, mais il ne parle pas du besoin d'un accès universel aux soins palliatifs. Les députés ont maintes fois souligné que l'accès aux services Internet à large bande constitue un droit de la personne, pourtant, rien n'est dit au sujet du droit aux soins palliatifs. Dans le budget de 2016, le gouvernement s'engage à élargir l'accès au réseau Internet à large bande, mais si on cherche le mot « palliatifs » dans ce budget, on reçoit le message « aucun résultat trouvé ». C'est honteux et scandaleux.
    La ministre de la Santé a dit que 3 milliards de dollars seraient affectés aux soins palliatifs dans l'ensemble du pays, sur une période de quatre ans, mais on ne trouve aucun détail à ce sujet. Le budget n'en parle pas du tout. Nous ne disposons d'aucune information sur l'utilisation de cet argent ou sa provenance.
    En fait, les 3 milliards de dollars sont probablement les mêmes 3 milliards de dollars que les libéraux ont promis au cours de la campagne électorale afin d'améliorer les soins à domicile. Ce n'est pas une enveloppe réservée exclusivement aux soins palliatifs, comme ils le prétendent maintenant. Elle est destinée aux soins à domicile.
    Il est alarmant de voir qu'en janvier, la ministre de la Santé a déclaré, juste avant une réunion avec les ministres provinciaux de la Santé, que la solution n'était pas nécessairement d'injecter plus d'argent. La somme de 3 milliards de dollars a été promise, pourtant, elle ne semble pas exister dans le budget. Selon le gouvernement, elle n'est peut-être pas nécessaire. Je dirais que pratiquement tous les médecins qui traitent des patients atteints d'une maladie terminale ne seraient pas d'accord.
    Il est primordial que le gouvernement nous indique immédiatement comment il s'assurera d'un accès égal pour tous aux soins palliatifs, partout au pays. Il est inconcevable que le gouvernement puisse présenter un projet de loi sur l'aide à mourir sans annoncer une stratégie détaillée pour empêcher les Canadiens atteints d'une maladie terminale de croire que le suicide avec l'aide d'un médecin est leur seule option.
    Le gouvernement a l'obligation morale de nous donner un aperçu de cette stratégie et d'y rattacher immédiatement un financement adéquat. Il ne suffit pas de débiter quelques rengaines et de trouver quelques bonnes formules accrocheuses dans l'espoir que tout cela soit oublié plus tard.
(2305)
    Le gouvernement n'a pas déployé tous les efforts nécessaires pour présenter un projet de loi bien réfléchi, car il était pressé de respecter la date butoir fixée par la Cour suprême. Il n'a pas commencé à consulter les provinces au sujet des diverses responsabilités qui leur incomberont désormais. Par exemple, l'Alberta examine cette question depuis cinq mois, mais il semblerait que le gouvernement n'a pas encore consulté cette province.
    Je pense que l'aide au suicide n'est pas une solution au problème complexe de la souffrance humaine, qu'elle soit physique, émotionnelle ou même spirituelle. Les percées médicales, plus précisément celles liées aux médicaments qui permettent de gérer la douleur, ont beaucoup aidé ceux qui souffrent à supporter la douleur et à conserver leur dignité. Ce qui est vraiment nécessaire, outre les percées médicales et les améliorations apportées aux soins palliatifs, c'est une volonté de jouer un rôle dans la vie des personnes qui souffrent. Il y a une solution aux problèmes de souffrance, et c'est l'amour, l'accompagnement et l'espoir de jours meilleurs, l'espoir qui nous donne la force de continuer.
    Outre mes objections philosophiques à l'égard de ce projet de loi, il y a bien d'autres facteurs plus concrets à considérer. L'un d'eux est le manque de formation sur les méthodes de soins destinées aux malades en phase terminale. Par exemple, une étude des programmes d'étude de la douleur préalables au permis d'exercice qui sont offerts par les facultés de médecine de 10 universités canadiennes révèle que de nombreux apprentis médecins reçoivent moins de formation sur la gestion de la douleur que leurs homologues en médecine vétérinaire. Par ailleurs, un sondage effectué auprès de plus de 1 100 médecins et infirmiers a révélé que ceux qui traitent un moins grand nombre de patients en phase terminale, et qui sont donc moins renseignés sur la gestion des symptômes, sont les plus susceptibles d'être en faveur de l'aide au suicide, alors que ceux qui ont le plus d'expérience en gestion des symptômes et en soins de fin de vie ont tendance à s'y opposer.
    Le Dr Max Chochinov, spécialiste réputé des soins palliatifs, fait valoir que la volonté de vivre est inversement proportionnelle à l'intensité de la douleur. Il a ajouté que la perte de dignité entraîne le désir de mourir, et le traitement de la douleur peut accroître le sentiment de dignité. 
    Je suis conscient qu'il y aura des médecins spécialistes de l'aide au suicide au Canada. Les tribunaux l'ont ordonné, et la société semble le réclamer. Cependant, la Chambre doit faire tout en son pouvoir pour protéger les plus vulnérables et établir que toute vie est précieuse avant de mettre en place une nouvelle loi.
    Le projet de loi C-14 comporte des lacunes qu'il faut combler avant son adoption. Comme beaucoup d'autres députés, je trouve décevant qu'aucune disposition ne protège les droits des médecins, du personnel infirmier et des autres professionnels de la santé qui, pour des raisons de conscience, ne veulent pas prendre part aux services d'aide médicale à mourir ni recommander ces patients à d'autres professionnels. Il faut en effet protéger leur droit de ne pas recommander quelqu'un.
    Voici ce qu'en dit mon médecin: « Si après avoir refusé de te prescrire un narcotique, je te dis à quel coin de rue t'en procurer et que tu te fais assassiner, je ne serai pas moins responsable de ta mort. » J'aime bien mon médecin: il n'y va pas par quatre chemins.
    Il ne suffit pas de laisser cette responsabilité aux provinces ou de prétendre qu'il n'y a pas à s'inquiéter parce qu'aucun professionnel de la santé n'a encore été forcé de poser certains gestes contre sa conscience. Les droits des professionnels de la santé doivent être respectés; ils doivent être enchâssés dans la loi fédérale. Notre société a toujours eu pour tradition d'aider les personnes souffrantes, de rester à leurs côtés, mais non de les tuer. Il faut rappeler l'importance de cette pratique, garder un grand respect envers la vie humaine, et reconnaître que les souffrances d'une personne ne diminuent en rien sa valeur intrinsèque.
    La vie est précieuse, et je crois que les lois de notre pays doivent en tenir compte. Dans l'Évangile de la vie, le pape Jean-Paul II s'est exprimé de façon très éloquente sur la question de l'aide au suicide. Il a déclaré que l'aide au suicide est un crime qu'aucune loi créée par des humains ne peut légitimer. Cependant, il a aussi ajouté qu'un parlementaire pourrait licitement apporter son soutien à des propositions destinées à limiter les préjudices d'une telle loi et à en diminuer ainsi les effets négatifs sur l'opinion générale et la moralité publique. En agissant ainsi, il n'apporte pas une collaboration illicite à une loi inique; il accomplit plutôt une tentative légitime et juste d'en limiter les mauvais aspects.
    L'aide médicale à mourir est déjà une réalité au Canada. Bien que je reconnaisse que le projet de loi C-14 contienne de nombreuses mesures de protection mentionnées dans le rapport dissident présenté par mes collègues conservateurs qui ont siégé au comité spécial, il s'agit toujours d'un mauvais projet de loi. Il ne prévoit pas l'obligation d'offrir aux patients en phase terminale tous les soins palliatifs et toutes les options possibles pour la gestion de la douleur. Il n'ordonne pas qu'un financement soit accordé et maintenu pour les soins de fin de vie. Il ne protège pas le droit à la liberté de conscience des professionnels de la santé. Au-delà de cela, le projet de loi C-14 ne prévoit pas de tentative légitime et juste de limiter les mauvais aspects du suicide. Voilà pourquoi je n'appuie pas le projet de loi.
(2310)

[Français]

    Monsieur le Président, ces discussions sur le sujet sont toujours intéressantes, même si l'heure avance.
    Encore une fois, j'ai été interpellé par le passage où mon collègue parle des médicaments qui existent pour soulager la souffrance dans le cadre des soins palliatifs. Toutefois, on ne peut pas faire abstraction du fait que ces médicaments précipitent la mort, et que très souvent ils rendent ceux qui les reçoivent absents de la réalité. On réussit à soulager leur souffrance physique, mais on atteint très certainement leur conscience.
    Je pense que le projet de loi nous invite à changer de rôle. Au lieu d'être l'accompagnant face à une personne en fin de vie, mettons-nous pendant quelques secondes dans la peau de celui ou celle qui va partir et qui peut-être, par le biais de ce projet de loi, pourrait faire le choix de partir, en toute conscience, entourée de ses proches, et vraiment pouvoir —  j'oserais presque dire — profiter de l'amour de ses proches dans ses derniers moments de vie. Je pense que c'est l'objectif visé ou un des objectifs visés par ce projet de loi. J'aimerais entendre ce que mon collègue en pense.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis plutôt d'accord avec mon collègue. Le fait est que nous ne disposons pas de soins palliatifs adéquats. Il parle d'une situation utopique dans le cadre de laquelle des soins palliatifs adéquats sont fournis et toutes les autres options sont offertes et disponibles, alors que ce n'est pas la situation que l'on constate à l'heure actuelle au Canada. À l'heure actuelle, seul un très faible pourcentage de personnes ont accès à cette option. Celles qui n'y ont pas accès pourraient donc affirmer qu'elles sont prêtes à mourir paisiblement, en toute conscience, étant donné qu'elles n'ont pas le choix puisque des soins adéquats ne leur seront pas fournis dans un mois.
     Je ne suis pas en désaccord avec mon collègue à cet égard, mais je crois que ce qu'il faut, c'est une gamme complète de soins palliatifs pour l'ensemble des Canadiens.

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son discours.
    Je suis préoccupé par la possibilité qu'une institution de soins de santé, dans son ensemble, refuse d'accorder ce service d'aide médicale à mourir, qui est maintenant un droit protégé par la Charte. Quel danger une telle prise de position de la part d'une institution entière poserait-elle? Les patients de cette institution ne seraient pas en mesure de se prévaloir de ce droit pourtant garanti par la Charte.
    Mon collègue partage-t-il cette préoccupation?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je l'ai dit très clairement dans mon discours. Je me soucie du fait que le projet de loi ne tienne pas compte de la liberté de conscience des fournisseurs de soins de santé. Il faut que le concept se voie accorder la plus haute importance dans le projet de loi avant que celui-ci ne soit mis aux voix. Les médecins, infirmiers et autres professionnels de la santé ne devraient pas être forcés d'aider une personne à se suicider à l'encontre de leur conscience et de leurs croyances.
    Monsieur le Président, j'ai une courte question sur le grand sujet de la protection des personnes vulnérables. Certaines dispositions du projet de loi donnent bel et bien l'impression de protéger les personnes vulnérables, mais aucune d'entre elles n'établit un régime d'examen préalable qui confirmerait l'indépendance du médecin ou des témoins. J'aimerais que mon collègue nous parle de la nécessité d'effectuer un examen préalable afin de veiller à la protection des personnes vulnérables contre la coercition, et à l'indépendance des témoins.
    Monsieur le Président, je trouve moi aussi qu'il faut resserrer les mesures de protection dans la loi, en ce qui concerne autant la liberté de conscience que l'indépendance des personnes qui prennent la décision. J'implore le gouvernement de travailler fort. Nous reconnaissons que, tôt ou tard, ce projet de loi sur l'aide à mourir ou l'aide au suicide sera adopté. J'implore mes collègues d'en face d'inclure dans la loi les droits des patients et l'examen indépendant.
(2315)

[Français]

    Monsieur le Président, si on me le permet, avant de commencer, je vais me joindre à mes collègues pour partager mes prières et mes pensées avec les gens de Fort McMurray, en Alberta, et avec tous les Albertains, puisque nous savons que plusieurs Québécois travaillent en Alberta. Les médias nous font part d'une tragédie incroyable qui se passe au moment même où nous sommes à la Chambre. Je veux m'assurer que tous sachent que nous sommes avec eux.
    Avant de prendre la parole sur cet important enjeu ce soir, j'ai beaucoup réfléchi. Ce n'est pas parce que je ne voulais pas en parler, ou encore parce que ce sujet ne m'était pas important, mais bien parce que cet enjeu est d'une complexité importante. Au Québec, plus de six années de travail, de réflexion et d'études furent nécessaires pour en arriver à un consensus, et malgré tout ce travail, il ne fait pas l'unanimité.
    La preuve de ce que j'avance, c'est que la majeure partie des maisons de soins palliatifs au Québec n'ont pas concédé le fait qu'elles devaient offrir cette option à leur clientèle en leurs murs. Alors, je me concentrerai sur cet aspect dans mes commentaires.
    Le comité mixte a proposé de mettre plus de moyens pour la mise en place de soins palliatifs afin d'améliorer l'accessibilité des soins partout au Canada. Je suis d'accord avec cette recommandation.
    J'ai eu l'occasion de visiter un centre de soins palliatifs l'an dernier, en allant voir mon beau-frère qui était en fin de vie. Ce soir, avant de m'adresser à la Chambre, j'ai aussi appelé une connaissance qui siège au conseil d'administration d'une fondation qui aide à financer ce genre de maisons dans mon comté. Cette connaissance m'a confirmé ce que j'avais constaté l'an passé, soit que la mission de ces maisons de soins palliatifs est de prendre en charge les personnes en fin de vie et non pas de mettre fin à leur vie. Ces maisons accompagnent les patients dans les dernières semaines, les derniers jours ou encore les dernières heures de leur vie. Les services et les accompagnements que les personnes elles-mêmes ainsi que leur famille reçoivent dans ces maisons sont essentiels pour eux et pour elles, afin qu'ils vivent leurs derniers moments dans la dignité de leur existence.
     Il m'apparaît important, lorsque nous nous apprêtons à adopter une telle loi, d'avoir du temps pour l'étudier et la mettre en place. Je ne trouve pas qu'il soit pertinent d'aller aussi rapidement pour des questions aussi importantes que sont la vie et la mort.
    Ma connaissance m'a aussi raconté qu'elle avait perdu un collègue de travail, il y a quelques semaines. Se sachant malade, et sachant aussi qu'elle était près de l'organisation de la maison, il lui avait dit qu'il voulait avoir la possibilité de recourir à la nouvelle loi québécoise pour les soins en fin de vie, et qu'il souhaitait ardemment y avoir accès. Les semaines passèrent et le temps vint où il dut entrer à la maison pour terminer ses jours paisiblement avec l'idée de se prévaloir de la nouvelle loi québécoise.
    Ma connaissance eut le loisir et surtout l'occasion de le visiter avant son dernier souffle, et ce dernier lui avoua qu'il ne voulait plus cette option parce qu'il appréciait tellement les soins et l'attention des membres et des bénévoles de la maison, qu'il voulait vivre jusqu'à son dernier souffle. Il avait parlé de cette option parce qu'il avait probablement peur: peur de souffrir, peur de ne plus avoir aucun contrôle, peur de faire souffrir sa famille. Toutes ses peurs étaient tout à fait légitimes.
    Cet exemple nous démontre qu'il est possible de vivre dans la dignité, accompagné des membres de sa famille, dans des milieux adaptés, avec des personnes présentes, attentionnées, et surtout compétentes, pour cette étape plus qu'importante dans la vie de tout être humain.
    Je vous parle de ces exemples, non pas parce qu'ils sont les miens, mais bien parce qu'ils font partie de tous ces exemples possibles, et aussi de toutes ces possibilités et probabilités de situations qui peuvent survenir.
    Mes collègues qui ont siégé au comité mixte ont travaillé très fort pour que certaines dispositions soient présentées dans le projet de loi, et j'aimerais les citer ici. Elles sont toutes aussi importantes les unes que les autres et surtout, elles représentent un minimum dans le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui.
    Nous avons donc retrouvé cinq points importants et nous avons insisté pour qu'ils soient dans le projet de loi. Il s'agit de prodiguer les soins uniquement aux gens majeurs. Ces soins ne sont donc pas disponibles pour les mineurs. Les soins ne doivent pas être autorisés pour les personnes souffrant de maladies mentales. Il faut protéger la conscience des médecins et obtenir le consentement à la fin de la vie seulement. Finalement, il faut améliorer les soins palliatifs.
(2320)
    Ce dernier point est, selon moi, une dimension importante du projet de loi. En effet, si des services comme ceux offerts par la Maison Desjardins de Rivière-du-Loup, dans mon comté, étaient disponibles partout au Canada, sachant que ces maisons sont importantes pour ceux et celles qui s'y impliquent et surtout pour ceux qui les utilisent, il sera important que le gouvernement investisse dans ces services et ces infrastructures partout au pays. Jusqu'à preuve du contraire, cela n'est pas prévu au moment où l'on se parle.
    Une autre de mes connaissances, à Montmagny, reçoit des traitements contre son cancer depuis de nombreuses années. Cette personne a décidé de mettre sur pied d'une maison de soins palliatifs dans la région de Montmagny et de L'Islet. Elle y travaille avec acharnement depuis des années. Une armée de bénévoles l'accompagne et la soutient dans la maladie ainsi que dans la mise en place de sa maison. Mon souhait est qu'elle pourra, le jour venu, profiter de tous les efforts qu'elle aura déployés pour cette maison. Pour aider la mise sur pied de ce type de maison, il est impératif que le gouvernement mette en place les conditions de réalisation pour aider les milieux à se prendre en main et à offrir des lieux pour permettre une fin de vie digne à tout être humain, et ce, partout au Canada.
    En réalité, c'est de la dignité humaine dont nous parlons ce soir à la Chambre. Il est impératif que les décisions qui seront prises dans le futur fassent en sorte que les soins en fin de vie soient disponibles partout au Canada. Cela est fondamental.
    En terminant, vendredi prochain, dans mon comté, mon collègue de Louis-Saint-Laurent et moi organiserons une soirée d'échanges et de discussions pour favoriser la compréhension de cet enjeu majeur. Sachant que nous avons été élus le 19 octobre dernier et compte tenu de la vitesse à laquelle tout se déroule actuellement, je considère que nous sommes dans une souricière du temps qui fait que nous ne sommes pas en mesure de prendre des décisions éclairées. Malgré tout, je voterai en faveur de la deuxième lecture, pour que le projet de loi soit renvoyé en comité et que nous puissions analyser les recommandations du comité.
    Cela ne veut pas dire que je voterai en faveur de la loi. Je m'engage à prendre une décision après avoir écouté les citoyens de mon comté. Je considère qu'il s'agit d'une décision fondamentale. Il n'y a aucun doute dans mon esprit: en tant que représentants des gens de nos comtés, nous devons être à leur écoute pour qu'ils puissent partager leurs points de vue. Les délais dans lesquels nous devons réagir au projet de loi sont extrêmement courts. Tout à l'heure, j'écoutais mes collègues et je me disais que la date du 6 juin est effectivement une date artificielle. Il y aura un 6 juin 2017, un 6 juin 2018 et ainsi de suite. J'imagine que nous devrions prendre le temps de véritablement penser la loi de façon à ce qu'elle soit la plus complète possible.
    Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention les propos de mon collègue.
    Je partage avec lui ce face à face avec la mort. Beaucoup de personnes, bien encadrées, dans des maisons de soins palliatifs, décident de vivre l'expérience jusqu'à la fin. Tant la loi québécoise que la loi canadienne que nous sommes en train d'étudier prévoient ce droit de retrait jusqu'à la toute dernière minute.
    J'aimerais avoir l'opinion de mon collègue sur ce qui suit. Il y a une différence majeure entre la loi québécoise et la loi canadienne qui est proposée. Dans la loi québécoise, l'accompagnement par un professionnel de la santé est obligatoire jusqu'à la toute fin. Cependant, dans la loi canadienne, on pourrait donner à un patient la médication létale et le laisser seul. Ce bout-là m'apparaît totalement impensable. On ne peut pas parler avec autant de compassion, comme on le fait depuis des heures, et s'imaginer que, dans un projet de loi, on puisse donner à quelqu'un la médication qu'il lui faut pour dire adieu à la vie, sans l'accompagner dans le processus.
    J'aimerais avoir les commentaires de mon collègue à ce sujet.
(2325)
    Monsieur le Président, je partage totalement l'avis de mon collègue.
    La loi au Québec a été pensée sur une période de six ans. Ce sont six années durant lesquelles il y a eu des études, des échanges entre les parlementaires et avec la population, et durant lesquelles des groupes de travail ont été mis en place. Nous avons environ six mois pour en faire autant, ici, au Canada.
    La loi telle qu'elle est présentée comporte des zones grises extrêmement dangereuses. Il nous faut absolument prendre le pouls de cette loi comme il le faut pour nous assurer que nous ne faisons pas d'erreur. Notre responsabilité en tant que législateurs est de prendre toutes les précautions à notre disposition pour nous assurer que la loi sera le mieux construite possible.

[Traduction]

    Monsieur le Président, mon collègue a dit qu'il serait plus heureux si l'on pouvait prendre six ans pour écrire ce projet de loi. Est-ce qu'il veut nous dire ce qui se passerait entretemps? Une personne de ma circonscription a déjà choisi de mettre fin à ses jours par des moyens légaux, avant que nous tenions cette discussion, parce que c'est ce qui s'offre à elle par l'entremise de la décision de la Cour suprême. Est-ce que le député veut faire un commentaire à ce sujet?

[Français]

    Monsieur le Président, pour ce qui est de la question du temps, reculons au moment où les législateurs de la province de Québec ont décidé de mettre en avant un tel projet de loi. S'ils s'étaient dit qu'ils devaient accélérer la cadence parce que des gens ne pourraient pas y avoir accès, cela n'aurait pas été la bonne façon d'agir, à mon avis.
    La bonne façon d'agir est de prendre le temps de nous assurer que la loi est la plus parfaite possible. Or ce n'est pas le cas au moment où on se parle. Pour répondre à la question de mon collègue, je pense qu'il faut véritablement prendre le temps de le faire. Le temps est un espace. Nous devons pouvoir échanger entre collègues et avec la population canadienne, parce que nous savons d'ores et déjà que, dans différentes régions du Canada, la perception de cette loi est totalement différente.
    Le Québec a été très innovateur dans son approche par rapport à ce genre de loi, et il est important que nous permettions une ouverture d'esprit par rapport à cette loi et une compréhension partout au Canada.

[Traduction]

    Monsieur le Président, étant donné l'orientation procédurale du gouvernement, je crois qu'il s'agit d'un des derniers discours de ce débat.
    Je tiens à souligner le ton du débat. Je sais que les députés des deux côtés de la Chambre ont parlé de façon polie, douce et respectueuse. Toutefois, j'aimerais quelque peu briser ce ton.
    Il s'agit de la plus importante question dont sera saisi le Parlement avant un long moment. Sans avoir recours aux attaques personnelles, je crois que s'il y a une question pour laquelle il faut se fâcher, c'est bien celle-là.
    Les erreurs que nous ferons dans ce projet de loi pourront entraîner la mort de certaines personnes qui ne seraient pas mortes autrement. Des personnes que nous allons oublier en raison de l'absence d'un examen préalable, qui subiront des pressions pour aller de l'avant en raison du manque de soins palliatifs et qui seront jumelées à des médecins prêts à passer à l'acte en raison des dispositions permettant le magasinage des médecins, même si leur médecin ou d'autres ont jugé qu'elles ne respectaient pas les critères de l'aide médicale à mourir.
    Ce soir, nous devrions être fâchés. Les Canadiens devraient être fâchés. En même temps qu'il parle gentiment et poliment de la nécessité de discuter de la mort et de la nécessité d'écouter, le gouvernement prend des dispositions pour clore le débat après seulement deux jours. L'invocation de la clôture dans ce cas-ci n'aura aucune incidence sur l'échéancier pour ce projet de loi. Nous le savons.
    Le comité de la justice est déjà en train d'étudier le projet de loi et des jours supplémentaires de débat ne l'empêcheraient pas de respecter l'échéancier déjà établi. Un vote ne changerait pas cela. Cela n'aurait aucune incidence sur l'échéancier. Pourtant, le gouvernement prend des dispositions pour clore le débat, ayant donné avis qu'il présentera demain une motion de clôture.
    Les Canadiens de toutes les opinions qui ont à coeur cette question, les Canadiens qui ont à coeur notre rôle important de législateurs pour examiner les projets de loi et en débattre à la Chambre, ces Canadiens devraient être fâchés de ce qui se produit à l'égard de ce projet de loi.
    L'absence de débat précieux augmente les risques considérables d'erreur dans le façonnement d'une loi qui, à mon avis, est déjà criblée de problèmes. Une erreur dans un dossier aussi important entraînera inutilement des pertes de vie.
    J'ai déjà parlé de mes préoccupations importantes relativement à ce projet de loi, mais pour récapituler rapidement, je dirais que cette mesure législative ne contient aucune mesure de protection concrète, car même les exemptions qu'elle prévoit sont pleines de failles. La disposition sur le consentement écrit exclut les personnes qui ne peuvent pas signer. Il serait possible de renoncer régulièrement à la période d'attente. La maladie mentale ne serait pas exclue.
    L'exigence voulant que la mort soit raisonnablement prévisible est trop ambiguë pour exclure qui que ce soit. Le critère exigeant la signature de deux médecins inviterait simplement à choisir soigneusement ses médecins. Même si elle ne se conformait pas aux critères déjà ambigus, une personne qui tuerait un patient contre son gré pourrait s'en tirer en prétendant qu'elle croyait raisonnablement, mais à tort, que les critères s'appliquaient.
    J'ai dit que nous avions la tempête parfaite: des critères ambigus et une disposition relative à la croyance raisonnable mais erronée qui signifie qu'il serait pratiquement impossible de poursuivre une personne qui tue un patient, et ce, même sans le consentement de ce dernier. Nous avons entendu les chiffres de pays qui ont un système semblable et les répercussions sur les patients qui ne donnent pas leur consentement.
    Toutes ces lacunes pourraient être comblées par des amendements. Un examen préalable par une autorité juridique compétente garantirait que ceux qui ne consentent pas ne soient pas forcés à passer à l'action. Des dispositions sur les soins palliatifs et la protection de la liberté de conscience protégeraient mieux l'autonomie des patients et protégeraient aussi l'autonomie des médecins.
    Nous pourrions discuter de ces modifications. Nous pourrions apporter ces modifications. Nous devons le faire.
    Ce soir, je souhaite aussi faire ce que d'autres députés ont fait, c'est-à-dire raconter des histoires et parler de la vie et de la mort.
    Mon histoire commence au début du siècle dernier, en Allemagne. Elle met en scène un médecin juif, Rudolf Kuppenheim, qui fut le premier membre de sa famille à fréquenter l'université. Un jour, il a reçu à son cabinet une petite fille appelée Gertrude, qui avait la diphtérie. À cette époque, pour traiter la diphtérie, on pratiquait généralement une petite incision dans la gorge pour aider l'enfant malade à respirer. La mère de l'enfant s'est opposée à ce traitement. Elle a refusé que le Dr Rudolf Kuppenheim pratique l'incision nécessaire, car cela laisserait une cicatrice. La mère croyait que cette cicatrice empêcherait sa fille de se marier.
(2330)
    Avec raison, Rudolf s'est mis dans une terrible colère. Il a réprimandé cette femme qui souhaitait ainsi mettre en danger la vie de sa fille. Peu importe les pressions sociales et les défis avec lesquels devait composer une jeune femme dans cette culture et à cette époque, la vie, la valeur et la dignité de cette fillette ne dépendaient pas de sa capacité de trouver plus tard un mari.
    Il se trouve que cette fillette a non seulement fini par se marier, mais elle a épousé le fils du médecin en question. Le couple a eu une fille, Ursula Lilly Kuppenheim, qui fut ma grand-mère.
    Elle a grandi dans une société qui l'a aussi privée de sa dignité. En tant qu'enfant à demi juive, elle a vécu les horreurs de l'Holocauste. Elle n'a réussi à quitter l'Allemagne qu'après la guerre. Sa mère s'est vue privée de sa dignité parce qu'il aurait pu être difficile de la marier. Elle s'est vue privée de sa dignité en raison de ses origines juives, mais les vicissitudes liées aux attitudes sociales n'ont jamais pu changer ce qu'étaient intrinsèquement ces deux femmes: des êtres humains.
    Rudolf Kuppenheim et sa femme se sont tragiquement enlevé la vie lorsque des agents de la Gestapo ont fait irruption chez eux. Le suicide est toujours une tragédie, mais je comprends que seulement deux choix s'offraient à eux: le suicide ou la mort par torture dans un camp de concentration. Aucune société juste ne force ses membres à faire un tel choix, mais, à l'époque, ma grand-mère a survécu.
    En 2006, ma grand-mère, ou Oma, comme on l'appelait, est décédée du cancer. Tout le monde meurt, mais ce n'est pas tout le monde qui vit vraiment. Passée d'un continent à un autre et de la persécution à la contribution généreuse, ma grand-mère a vraiment vécu.
    Elle nous a toujours dit qu'elle voulait mourir comme Abraham, Isaac et Jacob, qui n'ont pas souffert ni connu la maladie, du moins pas au moment de leur mort. Quand ils se sont rendu compte qu'ils étaient sur le point de s'éteindre, ils ont réuni leurs proches et leur ont fait leurs adieux. C'est ce qu'elle souhaitait, mais ce n'est pas ce qui s'est produit. Elle a souffert énormément.
    La souffrance fait partie de la condition humaine. Il est normal et légitime de chercher à souffrir le moins possible, mais il l'est tout autant de comprendre qu'un humain qui souffre n'en demeure pas moins un humain, qui ne perd ni sa valeur ni sa dignité. Ma grand-mère a conservé sa dignité de sa naissance à sa mort, même si on ne la lui a pas reconnue parce qu'elle était Juive ou malade.
    Les députés doivent comprendre que le soi-disant mouvement Vivre dans la dignité repose sur une vision fort dangereuse de l'humanité. Il voit les êtres humains comme des instruments ou des créatures expérientielles, dont la valeur se mesure à ce qu'ils font, ou à la qualité de leurs expériences, et non à ce qu'ils sont. Nous sommes en réalité des créatures dotées d'une valeur intrinsèque.
    Nous accordons de la valeur à la dignité humaine, non pas uniquement parce que les gens sont utiles, parce qu'ils aiment la vie ou parce qu'ils veulent qu'on leur accorde de l'importance. Nous accordons de la valeur aux êtres humains en raison de ce qu'ils sont. Nous sommes foncièrement conscients de la différence entre les droits des humains et ceux des animaux, entre les droits des êtres qui n'ont que des sentiments et des expériences et les droits des êtres qui ont une valeur intrinsèque. Cette tendance et cette présomption selon lesquelles les personnes malades ou handicapées n'auraient pas de dignité sont on ne peut plus erronées.
    Je tiens à conclure avec un dernier appel à tous les députés. Si des députés sont gravement préoccupés par ce projet de loi, qu'ils votent contre son adoption à l'étape de la deuxième lecture. Je sais que certains députés craignent la possibilité de créer un vide juridique, mais ce projet de loi propose de remplacer des critères ambigus par d'autres qui le sont tout autant. Il ne permet pas de créer le moindre mécanisme de contrôle. Il consiste essentiellement à remplacer un vide par un autre.
    Il y a une meilleure solution. Si les députés rejettent ce projet de loi, ou même si les résultats du vote sont plus serrés, le gouvernement aura l'occasion et même le devoir de proposer un projet de loi plus sérieux, et s'il prend davantage en compte certaines de nos propositions, alors nous pourrons tous travailler ensemble pour l'adoption rapide d'un meilleur projet de loi.
    Cependant, si nous ne faisons que donner notre accord simplement parce que nous voulons avancer, nous allons avaliser un projet de loi qui causera de véritables problèmes en matière de vie et de mort qui seront très difficiles à résoudre.
    C'est honteux, mais le gouvernement voudrait imposer la clôture au sujet d'une question d'une importance vitale, une question de vie ou de mort, après seulement deux jours de débat. Nous devons nous élever contre la clôture. Nous devons faire connaître notre position. C'est ce que j'ai fait et je demande aux députés de faire connaître la leur.
(2335)
    Monsieur le Président, mon collègue a parlé de la valeur intrinsèque d'une personne et de la valeur qui découle de ce qu'elle fait. J'aimerais parler du concept philosophique peu clair qu'est la valeur intrinsèque. Si nous voulons respecter la valeur intrinsèque d'une personne, il faut respecter son choix. Le choix de cette personne est important si nous voulons respecter la valeur intrinsèque de cet être humain.
    Si le député estime que la valeur intrinsèque d'une personne est si fondamentale, je me demande ce qu'il pense de l'autonomie de cette personne et de sa liberté.
    Monsieur le Président, permettez-moi de dire deux choses.
    Premièrement, l'idée de l'autonomie repose sur la prémisse de la valeur intrinsèque des êtres humains. Si une personne valorise les êtres humains, son désir de leur donner le choix ne sera évidemment pas le même. De plus, croire en la valeur intrinsèque de la vie humaine peut limiter les choix que l'on est disposé à envisager lorsque des gens souhaitent s'infliger un préjudice grave qui, d'une certaine manière, nie cette valeur intrinsèque. Le principe de l'autonomie repose sur le respect de la dignité humaine intrinsèque, qui doit être préservée dans tous les cas et en toutes circonstances.
    Les amendements que j'ai proposés ne dérogent aucunement au principe de l'autonomie en ce qui a trait à l'euthanasie ou au suicide assisté. L'examen préalable, la garantie de soins palliatifs, la protection de la liberté de conscience des médecins et des critères plus solides font partie des mesures permettant de nous assurer que les gens qui ont des idées suicidaires pendant de brèves périodes ne puissent pas avoir accès à ce prétendu service alors qu'en réalité, leur désir à long terme est de vivre. C'est ainsi que l'on préservera une conception plus solide de l'autonomie dans tous les cas.
    Quels que soient les points de vue des uns et des autres sur la question sous-jacente, tâchons de rassembler nos énergies afin de résoudre ces problèmes dans le projet de loi, de manière à protéger la dignité humaine et valoriser l'autonomie.
(2340)

[Français]

    Monsieur le Président, mon collègue propose d'améliorer le projet de loi, alors qu'il vient tout juste de demander à tous les députés de s'y opposer à l'étape de la deuxième lecture. Je ne comprends pas comment il peut concilier les deux affirmations.
    D'une part, il propose d'améliorer le projet de loi, et d'autre part, il nous demande de voter contre à l'étape de la deuxième lecture, afin de l'abolir et de permettre au gouvernement de déposer un nouveau projet de loi. C'est exactement ce qu'il a dit à la fin de son discours.
    Mon collègue pense-t-il qu'il est possible d'améliorer le projet de loi et d'éviter ainsi le vide juridique qui serait créé après le 6 juin, auquel il a fait allusion?
     Pour éviter cela, il faudrait au moins envoyer le projet de loi en deuxième lecture pour tenter de l'améliorer. Ensuite, en troisième lecture, on pourra l'évaluer à nouveau, et si mon collègue veut voter contre, il sera libre de le faire. Cependant, à l'étape de la deuxième lecture, il faut être responsable et l'étudier plus profondément, afin d'y apporter des changements tels que ceux qu'il vient lui-même de proposer.
    Si la majorité des députés rejettent le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, le gouvernement devra recommencer à zéro et nous revenir avec un nouveau projet de loi, et il deviendra encore plus difficile de respecter la date limite du 6 juin.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est une bonne question. Le délai est problématique. Si le projet de loi est adopté par une grande majorité à l'étape de la deuxième lecture, il sera renvoyé au comité et, lorsqu'il reviendra, il ne restera pratiquement plus de temps. Si le gouvernement choisit de ne pas apporter les amendements nécessaires, cela restreindra grandement le choix qu'il laissera aux députés.
    Je propose que nous nous opposions à cet effort d'intimidation du gouvernement. Opposons-nous aux gros problèmes que comporte ce projet de loi et rejetons-le à la présente étape. Le gouvernement a amplement le temps de présenter un nouveau projet de loi s'il travaille à obtenir un consensus considérable auprès des députés. Toutefois, si nous appuyons le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture et qu'il franchit cette étape, nous perdrons le temps nécessaire pour faire un examen plus fondamental.
    Bien sûr, le projet de loi peut être amendé au comité, mais les divers points que j'ai soulevés sont si importants que nous serions mieux de rejeter le projet de loi et de demander au gouvernement de revenir avec une bien meilleure version. C'est le seul moyen de communiquer clairement que les mesures de protection pour les personnes vulnérables sont essentielles pour éviter que ne meurent des gens qui ne devraient pas mourir. L'absence de ces mesures de protection dans le projet de loi est si fondamentale que nous devons rejeter le projet de loi jusqu'à ce qu'elles y soient incluses.
    Monsieur le Président, ces derniers jours, nous avons entendu de nombreux témoignages très émouvants à la Chambre. En voici quelques-uns. Je ne les reprendrai pas nécessairement mot pour mot, mais l'essentiel y est. C'est de loin la question la plus cruciale dont nous ayons été saisis à la Chambre depuis 10 ans. Un changement fondamental s'opère dans la société. On annule des siècles de réflexion; on écarte des milliers d'années de compréhension du don sacré de la vie humaine.
    Le député libéral de Winnipeg-Centre a déclaré:
    Il s'agit peut-être d'une autre étape dans le processus de relativisme moral dans lequel nous nous trouvons actuellement, mais même notre appareil judiciaire ne peut pas trouver un point d'équilibre entre les différentes sociétés qui constituent le Canada. Nous sommes dans une situation lamentable. Nous sommes vraiment entrés dans une nouvelle ère, l'ère du consommé-jeté où toutes les frontières commencent à s'effriter.
    Il poursuit:
    D’un point de vue autochtone, je ne peux pas appuyer le projet de loi, parce qu’il nous mène dans une direction où, selon moi, nous ne respectons pas les intérêts de tous les membres de notre société. Il ne nous permet pas de bien comprendre les besoins de tous les membres de la société canadienne et, au fond, il nous entraîne sur un terrain très dangereux et mal défini.
    Cette observation n'est pas vraie seulement pour les Autochtones; elle l'est tout autant pour la vaste majorité des Canadiens qui sont animés par la foi, qu'elle soit juive, musulmane, sikhe ou chrétienne.
    Je vais citer un extrait fort perspicace d'un blogue sur lequel je suis tombé aujourd'hui.
[...] dès la toute première phrase, le projet de loi sonne publiquement le glas de la foi abrahamique. La doctrine de l'autonomie qui se dégage de l'arrêt Carter et du projet de loi C-14 est un désaveu manifeste de ce type de foi, lui substituant une nouvelle foi dans l'Homme, tout à fait émancipé de Dieu. Nul besoin d'être de confession abrahamique pour le comprendre. Si, dans le prolongement de l'autonomie personnelle, le Parlement du Canada reconnaît un droit moral à déterminer le moment de sa propre mort et la manière dont elle arrivera ainsi qu'à mettre fin à une vie humaine, y compris la sienne même, il reconnaît nécessairement qu'une personne — et lui-même par extension puisqu'il se compose de personnes — n'est subordonnée en la matière à aucune autorité divine putative. Autrement dit, le préambule du projet de loi C-14 constitue la répudiation finale de celui de la Charte. « [L]es principes de justice fondamentale » s'appliquent désormais tout à fait indépendamment de la suprématie de Dieu. Le lien entre « la suprématie de Dieu et la primauté du droit » est délibérément rompu.
    Il cite ensuite Nietzsche:
    Que fîmes-nous en détachant cette terre de son soleil? Où l'emporte sa course désormais? Où nous emporte notre course? Loin de tous les soleils? Ne nous abîmons-nous pas dans une chute permanente? Et ce en arrière, de côté, en avant, de tous les côtés? Est-il encore un haut et un bas? N'errons-nous pas comme à travers un néant infini? L'espace vide ne répand-il pas son souffle sur nous? Ne s'est-il pas mis à faire plus froid? La nuit ne tombe-t-elle pas continuellement, et toujours plus de nuit? Ne faut-il pas allumer des lanternes à midi? N'entendons-nous rien encore du bruit des fossoyeurs qui ensevelissent Dieu? Ne sentons-nous rien encore de la décomposition divine? Les dieux aussi se décomposent. Dieu est mort. Dieu demeure mort. Et nous l'avons tué.
     Au cours des derniers jours à la Chambre, toute une gamme de positions ont été exprimées. J'aimerais tout d'abord affirmer combien je suis heureux que le gouvernement ait décidé de ne pas donner suite à toutes les recommandations qui figurent dans le rapport du comité mixte spécial à majorité libérale, décidant plutôt de tenir compte de bon nombre des observations du rapport dissident rédigé des membres du Parti conservateur, dont moi-même.
    Le projet de loi C-14 a beau représenter une grande amélioration par rapport au régime très permissif recommandé par le comité mixte, il est loin de protéger certains des Canadiens les plus vulnérables et, pour cette raison, je ne peux pas l'appuyer.
(2345)
    Premièrement, le gouvernement n'a pas pris l'engagement ferme de protéger la liberté de conscience des médecins et autres professionnels de la santé qui, pour toutes sortes de raisons, ne veulent pas participer, de près ou de loin, à la prestation de l'aide médicale à mourir — pas même en devant recommander un médecin disposé à participer.
    Bien qu'on puisse lire dans le préambule qu'il est « souhaitable d'adopter une approche cohérente dans tout le pays en matière d'aide médicale à mourir » et, plus loin, qu'on cherche à « respecter les convictions personnelles des fournisseurs de soins de santé », le projet de loi C-14 ne contient aucune disposition claire affirmant sans équivoque qu'aucun médecin et qu'aucun professionnel des soins de santé n'aura l'obligation de participer.
    Qu'en est-il, aussi, des établissements de santé et des centres de soins palliatifs qui, en raison des valeurs fondamentales qu'ils défendent, pourraient ne pas vouloir donner accès au suicide assisté? Qu'arrivera-t-il des centres de soins palliatifs qui tirent plus de 50 % de leur revenu de dons privés et qui dépendent en grande partie d'une armée de bénévoles et de donateurs, qui croient en la valeur inhérente et intrinsèque de la vie humaine? Si on obligeait ces institutions à se livrer à des suicides assistés, il serait tout à fait possible qu'elles perdent ces bénévoles et ces donateurs et qu'elles finissent par devoir fermer leurs portes. Le fait de ne pas garantir la liberté de conscience des médecins, des travailleurs de la santé et des institutions pourrait avoir cette conséquence tragique.
    Pour respecter les professionnels et les institutions qui offrent quotidiennement d'excellents soins de santé, nous devons apporter ces modifications au projet de loi C-14.
    Il faut aussi s'engager clairement à ce que les soins palliatifs soient une option concrète et viable. Donner accès au suicide assisté sans offrir des soins palliatifs accessibles, ce n'est pas donner la liberté de choisir.
     Je vais citer le Dr David Baker:
     Sans droit à des soins palliatifs, les Canadiens recevront bientôt une aide médicale à mourir financée par les deniers publics parce que des soins palliatifs ne sont pas disponibles. Cela contrevient, pour les aînés et les Canadiens handicapés, à l'article 7 de la Charte qui porte sur le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne et à l'article 15 de la Charte portant sur les droits à l'égalité.
    Un autre amendement important est nécessaire. Un système d'examen préalable doit être créé. Il faut mettre en place un système juridique qui fera en sorte qu'aucune pression ne soit exercée, que les deux témoins indépendants sont bel et bien indépendants et que les deux médecins indépendants sont bel et bien indépendants eux aussi.
    Voici ce qu'a déclaré le Dr Trudo Lemmens, titulaire de la Chaire de recherche en droit et en politique de la santé à la faculté de droit de l'Université de Toronto:
[...] certains critères d'admissibilité prêtent inévitablement à l'interprétation, ce qui rend encore plus problématique le fait qu'une évaluation de la compétence et le consentement éclairé par deux médecins soient perçus comme suffisants pour garantir la conformité. Je continue d'appuyer un système d'examen préalable, comme celui dont il est question dans la norme de personne vulnérable, qui a l'appui d'une coalition vaste et inclusive de groupes de défense de patients et de personnes handicapées, d'organisations de professionnels de la santé, d'établissements de santé et de particuliers de diverses confessions religieuses et diverses affiliations idéologiques.
    Bien que je m'oppose fondamentalement à l'enlèvement de la vie humaine à quelque moment que ce soit, si nous devons adopter un projet de loi à la Chambre des communes, si nous suivons cette voie, nous devons veiller à inclure dans le projet de loi des mesures de protection beaucoup plus rigoureuses.
(2350)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son intervention ainsi que de son travail de longue date à ce dossier.
    Je me demandais s'il pouvait reconnaître, ce soir, la liberté de choix qui serait disponible en vertu d'une hypothétique nouvelle loi. Tout de même, les gens en fin de vie ou dont la santé sera très fragile auront toujours le choix d'utiliser le service d'aide médicale à mourir, qui est maintenant un service protégé en vertu de la Charte. Ces personnes auront toujours le choix de le faire ou non et de continuer à vivre leurs jours comme ils le font aujourd'hui.
    Reconnaît-il que, même s'il y a un nouveau régime législatif, cela ne change rien au fait que chaque patient en fin de vie aura toujours le choix d'utiliser ce service ou pas? Cela respecte donc la conscience des personnes et de leur famille, mais aussi le choix et les droits des patients qui pourraient vouloir utiliser le service. Reconnaît-il que, sous un nouveau régime législatif, le choix demeurera toujours pour les patients et qu'on n'obligera personne à utiliser ces services?

[Traduction]

    Monsieur le Président, plusieurs de mes collègues ont souligné que, même si nous jouissons tous personnellement de la liberté de choix, lorsque nous mettons en oeuvre un régime comme celui que nous étudions aujourd'hui, nous ne faisons pas seulement un choix pour nous-mêmes; nous choisissons aussi d'obliger une personne, un professionnel de la santé, à participer à notre choix. Ce sont ces aspects qui posent problème depuis quelques jours à la Chambre.
    Il y a un point commun entre les inquiétudes que nous avons exprimées; nous estimons qu'il faut protéger le droit à l'objection de conscience des professionnels de la santé qui, pour une raison quelconque, ne veulent pas participer à l'aide médicale à mourir, que ce soit directement, en appliquant les dispositions d'une loi sur l'aide au suicide, ou en aiguillant le patient vers une personne qui, elle, accepterait de donner suite aux volontés de ce dernier.
(2355)
    Monsieur le Président, le député a mentionné que nous nous engageons dans une certaine voie et que nous n'aurons peut-être pas la possibilité de faire marche arrière. Il a dit que l'admissibilité est une question qui pourrait laisser place à l'interprétation. Je me pose des questions au sujet de certaines définitions que l'on trouve dans le projet de loi. Ce qui me dérange surtout, c'est le fait qu'il n'y a pas assez de définitions et que les choses ne sont pas claires. Je me demande si le député pourrait nous faire part de ses observations à ce sujet.
    À partir de quel moment les souffrances deviennent-elles intolérables? Est-ce au moment où personne d'autre n'éprouve des souffrances encore plus grandes? Est-ce que le seuil à partir duquel on considère que les souffrances sont trop élevées et on permet l'aide médicale à mourir aux personnes souffrantes va constamment changer et échapper à tout contrôle?
    Monsieur le Président, un député du Parti libéral, je crois qu'il s'agissait du député de Winnipeg-Centre, a expliqué l'autre jour que, conformément à leurs traditions, les Premières Nations tiennent toujours compte de l'effet qu'une décision aura sur les sept prochaines générations. C'est une approche empreinte de sagesse. On prend souvent des décisions rapides, sans penser à leurs conséquences à long terme. Nous avons tous fait l'erreur de prendre une décision à court terme sans penser avec soin à ses conséquences à long terme.
    La voie sur laquelle ce projet de loi nous entraîne m'inquiète grandement. Plusieurs députés des deux côtés de la Chambre ont parlé d'autres administrations qui ont adopté un système semblable à celui que nous envisageons, ou même un système plus restrictif dans certains cas. Au fil du temps, la portée de ces systèmes s'est énormément élargie, malgré des mesures de sauvegarde qui semblaient adéquates au départ. Ainsi, le nombre de personnes ayant recours à l'aide médicale à mourir est passé, en 15 ans, de 300 personnes à plus de 2 200 l'an dernier. C'était en Belgique, je crois.
    Comme le Canada compte trois fois plus d'habitants que la Belgique, si on multiplie ces résultats par 3, on voit que plus de 6 000 Canadiens pourraient mourir par suicide assisté en une année. Ce serait une véritable tragédie nationale.
    Monsieur le Président, je souhaite exprimer une préoccupation. Je constate que les députés de Kitchener—Conestoga et de Sherwood Park—Fort Saskatchewan sont intervenus à ce sujet à de nombreuses reprises. Je crains que les députés d'en face manquent de souffle et qu'ils se répètent. Peut-être qu'il manque d'intervenants conservateurs pour participer au débat. Je veux simplement faire remarquer à la Chambre que trouver de nouveaux intervenants constitue un problème dont les députés devraient peut-être discuter.
    Je doute qu'il s'agisse d'une question pertinente dans le contexte du débat en cours. Je donne la parole au député de Kitchener—Conestoga, qui semble vouloir répondre.
    Monsieur le Président, je suis très heureux d'aborder cette question parce que je sais que de nombreux députés de notre parti veulent toujours parler du projet de loi. En raison des manoeuvres procédurales qui ont été pratiquées aujourd'hui, nous nous demandions si nous allions pouvoir prendre la parole ce soir. Toutefois, maintenant que nous en avons l'occasion, nous avons dû faire quelques changements, mais d'autres personnes veulent encore parler du projet de loi.
    S'ils ont écouté nos commentaires, à mes collègues et à moi, les députés comprendront que nous ne nous répétons pas. Nous exprimons tout simplement nos préoccupations et nous n'aurions certainement pas eu le temps de le faire au cours des 10 minutes qui nous ont été accordées plus tôt.
    Je suis heureux d'avoir une autre occasion de parler de cette question essentielle ce soir. Il s'agit de la plus importante question dont le Parlement sera saisi, non seulement pour notre génération, mais aussi pour les générations de Canadiens qui suivront. Je veux pouvoir regarder mes enfants, mes petits-enfants et mes arrière-petits-enfants dans les yeux et leur dire qu'avec l'information dont je disposais, j'ai pris la bonne décision pour le Canada.
(2400)

[Français]

    Comme il est minuit, conformément à l'ordre adopté le mardi 3 mai 2016, le débat est réputé ajourné et la Chambre s'ajourne jusqu'à plus tard aujourd'hui, à 14 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
    (La séance est levée à minuit.)
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