propose que le projet de loi , Loi modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (mesures de déjudiciarisation fondées sur des données probantes), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Madame la Présidente, avant la pandémie, j'ai présenté le projet de loi visant à décriminaliser la possession pour usage personnel de toutes les drogues, et cette mesure législative, le projet de loi , comme solution de rechange pour créer un cadre de déjudiciarisation visant à limiter le pouvoir discrétionnaire des policiers et des procureurs conformément aux principes fondés sur des données probantes.
C'est la crise des opioïdes qui m'a incité à présenter ces projets de loi. Alors que nous traversons la pandémie de COVID et que nous nous soucions, à juste titre, de la façon dont les divers ordres de gouvernement collaborent afin de nous protéger, il est important de ne pas oublier la situation tragique dans laquelle la crise des opioïdes a plongé tant de familles partout au pays.
Entre janvier 2016 et mars 2020, il y a eu 16 364 décès apparemment liés aux opioïdes, soit presque 11 par jour. Il y a également eu plus de 20 000 empoisonnements et hospitalisations liés aux opioïdes, ou 13 par jour. Les responsables de la santé publique ne font pas de mises à jour quotidiennes comme pour la COVID, mais peut-être qu'ils le devraient. C'est une crise de santé publique et c'est une tragédie.
Avant la pandémie, Statistique Canada affirmait que, pour la première fois en 40 ans, notre espérance de vie stagnait. Comme elle l'a déclaré:
L'espérance de vie à la naissance n'a pas progressé de 2016 à 2017, que ce soit chez les hommes ou chez les femmes. Il s'agit d'une première en au moins quatre décennies. Cette situation était en grande partie attribuable à la crise des opioïdes.
Nous savons que la crise a été exacerbée par la pandémie de la COVID-19. C'est nul autre que Santé Canada qui le dit:
Lorsque ces crises de santé publique convergent, les personnes qui utilisent des substances risquent d'être confrontées à l'accroissement d'un certain nombre de risques.
Il y a malheureusement un contraste frappant entre, d'une part, le comportement du gouvernement pour faire face à la pandémie, par la mise en pratique des conseils des experts de la santé publique et la mise en œuvre des mesures d'urgence, et, d'autre part, notre façon de gérer le problème de la mortalité liée aux opioïdes.
Je souhaite d'abord citer certains experts de la santé publique que nous avons su écouter au cours de la pandémie, mais que nous n'avons pas pris en compte dans la crise des opioïdes. L'administratrice en chef de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam, a appelé à un débat de société sur la question de la décriminalisation. L'administratrice en chef de la santé publique de la Colombie-Britannique, la Dre Bonnie Henry, a publié un rapport intitulé « Stopping The Harm », qui préconise explicitement la décriminalisation de ce type de drogues. Je cite:
Il est largement reconnu dans le monde entier que la guerre futile contre la drogue ainsi que la criminalisation et la stigmatisation des consommateurs de drogue qui résultent de cette guerre n'ont pas réduit la consommation de drogues, mais ont au contraire aggravé les problèmes de santé publique.
Pour le dire plus crûment: nos lois dépassées et inefficaces tuent des gens. Si nous adoptions des politiques fondées sur des données probantes, il n'y aurait pas d'approvisionnement illicite en drogues hautement toxiques. Voici un autre extrait du rapport de Bonnie Henry:
La consommation de substances existe sous différentes formes, qu'elle soit bénéfique, par exemple, dans le cadre d'activités sociales et de pratiques culturelles, qu'elle soit non problématique, par exemple, lorsqu'on en fait un usage récréatif ou occasionnel ou qu'elle soit problématique [et qu'elle aille jusqu'à provoquer] une dépendance chronique et la toxicomanie [...] en raison de la toxicité [...] il existe un risque considérable de surdose et de décès par surdose lié à la consommation de drogues illicites de quelque nature que ce soit.
La médecin hygiéniste de Toronto, la Dre Eileen de Villa, a également publié un rapport où l'on peut lire ceci:
Les données [...] montrent clairement la nécessité d'adopter une approche de santé publique à l'égard des drogues au Canada.
Elle demande ensuite au gouvernement fédéral de décriminaliser la possession de toute drogue pour usage personnel.
Les Nations unies et l'Organisation mondiale de la santé ont publié en 2017 une déclaration commune qui demandait aux pays d'intégrer des garanties contre la discrimination dans leur législation, leurs politiques et leur réglementation en matière de santé, notamment en révisant et en abrogeant les lois punitives qui ont des incidences néfastes avérées sur la santé et qui vont à l’encontre des données probantes établies en santé publique. Pour reprendre les mots de ces organisations, disons qu'il « s’agit notamment des lois qui pénalisent [...] la consommation de drogues ou leur possession en vue d’un usage personnel ».
Dans son rapport « Soutenir et non punir », l'Association canadienne pour la santé mentale indique ceci:
La criminalisation des personnes qui consomment des drogues illicites stigmatise l’usage de substances; elle favorise aussi un climat dans lequel les personnes ne se sentent pas à l’aise de faire appel à des services salutaires d’intervention et de traitement, et marginalise d’autant plus les personnes vivant dans la pauvreté [ou désavantagées sur le plan social].
Quant au Centre canadien sur les dépendances et l'usage des substances, il écrit ceci:
De plus en plus de données probantes indiquent que la décriminalisation serait un moyen efficace d’atténuer les méfaits de l’usage de substances et les répercussions des politiques et pratiques adoptées pour y réagir, particulièrement en ce qui concerne les conséquences des poursuites pénales pour simple possession.
Laissons de côté pour un moment l'avis des spécialistes de la santé publique et tournons-nous vers le système judiciaire. À l'ouverture des tribunaux, le juge Strathy, juge en chef de l'Ontario, a déclaré ceci:
On reconnaît de plus en plus que nous devons, en tant que société, réviser notre définition du « crime » et nous demander s’il ne faudrait pas plutôt considérer certaines infractions pénales comme des questions de santé et les régler par des moyens thérapeutiques. Ces derniers mois, le nombre de décès causés par la consommation d’opioïdes a monté en flèche, au point où l’Association canadienne des chefs de police et de nombreux hygiénistes en chef du Canada ont laissé entendre qu’après un siècle de prohibition des stupéfiants, nous devrions cesser de traiter la consommation et la possession simple de stupéfiants comme des infractions pénales et les considérer comme des problèmes de santé publique. Il faut chercher à savoir si ces problèmes et d’autres problèmes sociaux pourraient être mieux résolus de manière extrajudiciaire.
Le juge en chef a fait référence aux chefs de police. En juillet 2020, l'Association canadienne des chefs de police a produit un rapport dans lequel elle demande la décriminalisation et l'adoption de politiques fondées sur des données probantes relativement aux drogues. Le rapport dit ceci: « Bien que les forces policières du Canada exercent leur pouvoir discrétionnaire quand il s'agit d'accusations pour possession et qu'elles tiennent compte d'éléments comme la présence de comportements nuisibles et la disponibilité de services de traitement, la loi n'est pas appliquée de manière uniforme d'une collectivité à l'autre. »
Le rapport dit aussi ceci: « Nous devons adopter des approches novatrices pour freiner la tendance actuelle et réduire les surdoses qui se produisent partout au pays. Arrêter des gens pour simple possession de drogues illicites s'avère inefficace. »
Ce ne sont pas mes paroles, mais celles des chefs de police du pays, qui disent que cela s'avère inefficace.
Le rapport ajoute ensuite ceci: « Les recherches réalisées dans des pays qui ont eu l'audace de choisir une approche axée sur la santé plutôt que sur l'application de la loi pour contrer l'usage problématique de drogues font état de résultats positifs. »
Quand j'ai parlé au chef de police de Waterloo, Bryan Larkin, je lui ai dit que j'estimais moi aussi qu'il fallait agir à l'échelle nationale, mais si jamais rien n'était fait dans l'immédiat, les municipalités — Vancouver et Toronto, par exemple — seraient-elles prêtes à demander une exemption au gouvernement fédéral? Il m'a répondu que cette façon de faire aurait aussi l'appui des chefs de police. La Ville de Vancouver a demandé officiellement au gouvernement fédéral de décriminaliser la possession simple sur son territoire. Le gouvernement devrait respecter sa volonté et accéder à sa demande.
Les chefs de police tiennent aussi compte de ce qui se fait ailleurs. Je propose que nous fassions de même. Commençons par le Portugal, qui a décriminalisé la possession de drogue pour usage personnel en 2000. Depuis, la consommation de drogue n'a pas vraiment changé, mais le nombre de morts par surdose, lui, a chuté. Quant aux problèmes liés à la consommation de stupéfiants, ils n'ont pas connu d'augmentation substantielle. Par contre, le nombre de personnes qui ont fait des démarches pour arrêter de consommer a augmenté de 60 %, et c'est ce qui est vraiment important.
En plus de faire tomber les préjugés, la décriminalisation risque d'inciter les gens à faire le nécessaire pour se débarrasser de leurs dépendances, justement parce que les préjugés à leur endroit seront moindres. Cela permettrait également d'éliminer les injustices raciales qui caractérisent les lois sur les drogues.
Si on examine l'évolution des lois sur les drogues, on se rend compte qu'elle est marquée par le racisme. Le rapport du Comité spécial du Sénat sur les drogues illicites expose en détail les attitudes racistes qui ont amené le gouvernement à criminaliser certaines drogues, y compris la crainte entretenue, à une certaine époque, à l'égard des Canadiens d'origine chinoise.
Comme le Réseau juridique VIH du Canada l'a écrit récemment:
Pour la période allant de 2014 à 2019, la police canadienne a procédé à plus de 540 000 arrestations pour des infractions liées aux drogues; 69 % de ces arrestations étaient pour simple possession. Il est troublant que les membres de la communauté noire et d'autres communautés racisées du Canada doivent faire face de façon démesurée à des accusations, à des poursuites et à des peines de prison pour des infractions liées à la drogue, et qu'ils se voient ainsi privés de leur droit d'être traités de manière équitable et sans discrimination par le système de justice pénale, de leur droit ne pas être arrêtés et détenus de façon arbitraire, de leur droit à la sécurité et de leur droit de bénéficier des normes les plus rigoureuses en matière de santé. Dans le rapport qu'elle a publié il y a plus de 20 ans, la Commission sur le racisme systémique dans le système de justice pénale en Ontario a conclu que « [l]es personnes décrites comme noires sont les plus surreprésentées parmi les détenus accusés d'infractions en rapport avec les drogues [...]
Pour dire les choses plus simplement, nous craignons différentes drogues aujourd'hui parce que nous avons craint des gens différents par le passé. Bien que nous avons fait évoluer le cadre législatif pour que sa portée s'étende au-delà des formes évidentes de racisme et de xénophobie, son application continue de refléter une injustice raciale.
Le gouvernement a maintenant pris certaines mesures. Les centres de consommation supervisée sont devenus plus courants, et 40 centres ont été approuvés. Tout récemment, le Service des poursuites pénales du Canada a mis à jour ses lignes directrices, qui prévoient explicitement que, « [e]n général, une poursuite pénale pour la possession d’une substance contrôlée [...] ne devrait être envisagée que dans les cas les plus graves » en ce qui concerne l'usage personnel au titre de l'article 4 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.
Le gouvernement fédéral a mis en œuvre des projets pilotes visant à fournir un approvisionnement en produits plus sûrs et en a financé d'autres, y compris ici, dans l'Est de South Riverdale. Il a dépensé des centaines de millions de dollars pour combattre la crise des opioïdes en adoptant une approche axée sur la santé publique. Je pense notamment aux 150 millions de dollars prévus dans le budget de 2018 pour élargir les options de traitement et aux millions de dollars qui ont été consacrés au lancement d'une campagne nationale de sensibilisation du public pour mettre fin aux préjugés à l'égard des personnes qui consomment des drogues. Ces mesures sont incontestablement louables.
Prenons un instant pour réfléchir. Le gouvernement fédéral dépense des millions de dollars pour éliminer les préjugés à l'égard des personnes qui consomment de la drogue, mais il refuse de supprimer l'infraction criminelle qui perpétue ces préjugés plus que tout autre politique. C'est de la dissonance cognitive en action, et cela coûte des vies.
Je vais expliquer ce que fait le projet de loi . Pour commencer, j'ai proposé le projet de loi et le projet de loi C-236 en même temps. Le projet de loi C-235 supprime simplement l'infraction criminelle pour possession simple, conformément aux recommandations des experts en santé publique et aux données probantes à l'étranger, selon lesquelles la possession simple pour usage personnel ne devrait pas constituer une infraction criminelle.
Bien que le retrait complet de la possession de drogue pour usage personnel de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances soit l'approche que je préfère — et elle est certainement appuyée par les experts —, en fin de compte, un projet de loi d'initiative parlementaire permet seulement de proposer des modifications précises à la législation. Il est très important pour moi que cette discussion se poursuive au comité et que nous modifiions la loi.
Ainsi, le projet de loi propose une modification législative plus modeste. Il vise à éliminer les préjugés et à mettre un terme à la criminalisation et à l'incarcération inutiles des personnes qui consomment de la drogue. L'idée est d'obtenir l'appui du gouvernement pour parvenir à ces fins.
En termes simples, le projet de loi met en place un cadre de déjudiciarisation fondée sur des données probantes qui obligerait les policiers et les procureurs à considérer si, au lieu de porter des accusations, il est préférable de donner un avertissement à la personne dans le besoin, de la renvoyer à un organisme de santé publique ou à un autre fournisseur de services ou de privilégier des mesures de rechange à l'incarcération. Le projet de loi a été élaboré conformément au modèle de déjudiciarisation de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
À l'instar des nouvelles lignes directrices pour les procureurs, le projet de loi vise à ce que les policiers et les procureurs tiennent compte des données probantes dans l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire. Si le projet de loi est adopté, ce pouvoir discrétionnaire devra être exercé en respectant un ensemble de principes directeurs. Je pense qu'ils sont importants, alors je vais tous simplement les citer:
a) la consommation problématique de substances doit être abordée principalement comme un enjeu social et de santé;
b) les interventions doivent reposer sur des pratiques exemplaires fondées sur des données probantes et viser à protéger la santé, la dignité et les droits de la personne des consommateurs de drogues ainsi qu’à réduire les méfaits pour ceux-ci, leurs familles et leurs collectivités;
c) l’imposition de sanctions pénales pour la possession de drogues à des fins de consommation personnelle peut accroître la stigmatisation liée à la consommation de drogues et est incompatible avec les données probantes établies en matière de santé publique;
d) les interventions doivent cibler les causes profondes de la consommation problématique de substances, notamment en favorisant des mesures comme l’éducation, le traitement, le suivi, la réadaptation et la réintégration sociale;
e) l’utilisation de ressources judiciaires est plus indiquée dans le cas des infractions qui présentent un risque pour la sécurité publique.
La criminalisation de la possession de drogues à des fins de consommation personnelle ne fait que causer du tort aux personnes que nous disons vouloir aider. Non seulement la criminalisation est inefficace, mais elle aussi mortelle. Il nous faut une nouvelle approche. Il faut que nous agissions en fonction des données probantes pour sauver des vies.
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Madame la Présidente, je remercie mon collègue de d'avoir présenté le projet de loi et d'avoir remanié la version qu'il a présentée précédemment. En tant que conservateurs, nous sommes ouverts à une discussion sur ce sujet.
Je ne pense pas qu'un seul député doute du fait que la crise des opioïdes sera le principal problème de santé auquel le Canada sera confronté dans les années à venir. Même une fois que la pandémie de COVID sera enrayée — j'ose espérer que ce sera lorsque les vaccins seront accessibles aux Canadiens au début de la nouvelle année —, les ramifications et les conséquences de la pandémie ainsi que ses répercussions sur les Canadiens se feront sentir pendant longtemps.
Nous avons vu la crise des opioïdes exploser et atteindre des proportions qu'aucun d'entre nous n'aurait jamais pu prévoir. Prenons ma propre province, l'Alberta. Le nombre de décès par overdose d'opioïdes entre janvier et juin y a triplé par rapport aux premier et deuxième trimestres de l'année dernière. Les implications de la pandémie de COVID et la croissance de la crise des opioïdes qui en résulte représentent un problème que nous devons tous comprendre en tant que parlementaires. Nous devons commencer à nous y attaquer avec des solutions concrètes et de véritables partenariats entre les différents ordres de gouvernement. Il ne s'agit pas d'une question partisane. Tous les députés veulent trouver un moyen d'aider les Canadiens à se rétablir.
Lundi, le Comité permanent de la santé a entendu le témoignage d'une médecin. Elle est venue nous parler de la crise des opioïdes en Colombie-Britannique et du fait que cette province enregistre des niveaux records de morts par surdose d'opioïdes. La Colombie-Britannique est peut-être l'épicentre de la crise, mais comme mon collègue de l'Atlantique vient de le dire, celle-ci s'étend maintenant à l'ensemble du pays. Aucun segment de la population n'est à l'abri des répercussions de la crise.
J'applaudis mon collègue d'avoir présenté ce projet de loi et d'avoir précisé qu'il n'est pas question ici de légaliser la drogue. Je suis d'accord avec lui quand il dit que ce n'est pas l'objectif recherché. Le projet de loi n'a pas pour but de légaliser la drogue ni même de la décriminaliser. Il a pour but de favoriser les traitements et le rétablissement. Malheureusement, je trouve qu'il manque certaines choses et que certaines dispositions pourraient être resserrées. Espérons que mon collègue acceptera quelques amendements et que nous pourrons chercher tous ensemble à améliorer sa mesure législative si jamais elle est renvoyée à un comité.
J'aimerais revenir sur les propos comme quoi les gouvernements provinciaux conservateurs s'opposeraient aux services de traitement de la toxicomanie et de rétablissement. Le premier ministre Jason Kenney de l'Alberta a nommé Jason Luan ministre de la santé mentale et des dépendances; c'est d'ailleurs l'un des premiers gouvernements provinciaux dans l'histoire du Canada à avoir un ministre responsable de la santé mentale et des dépendances. Il a financé plus de 4 000 nouvelles places dans les centres de traitement dans la seule province de l'Alberta. Il n'y a pas de complot conservateur remettant en question l'utilité des services de traitement et de rétablissement. Mon collègue a tout à fait tort à ce sujet.
Je répète que je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question partisane; pas du tout. Tous les gouvernements du Canada à tous les niveaux s'efforcent de trouver des façons de s'attaquer au problème avec des moyens limités. Le problème avec le projet de loi d'initiative parlementaire de mon collègue, c'est son manque de rigueur et de mécanismes de reddition de comptes.
En fait, le projet de loi évoque ce qui se passe déjà dans la plupart des services de police un peu partout au Canada. En 2016, le gouvernement libéral a donné aux services de police une directive leur demandant de cesser d'arrêter les gens et de les traduire en justice pour possession simple, et de nombreux services de police ont déjà obtempéré. Beaucoup d'agents de police ne vont pas arrêter quelqu'un ni le judiciariser simplement parce qu'il possède une petite quantité de drogue. Finalement, le projet de loi ne fait qu'officialiser une pratique déjà officieusement en vigueur à l'échelle du pays.
Le projet de loi ne met pas suffisamment l'accent sur le rétablissement, et il manque beaucoup de rigueur et de mécanismes de reddition de comptes à cet égard. Essentiellement, le projet de loi donnerait deux options à un agent de police lorsqu'une personne n'a pas encore été accusée. On peut l'accompagner à un centre de rétablissement pour se faire traiter, mais seulement si la personne le souhaite. Si elle refuse, c'est la fin de la discussion. Elle peut encore faire l'objet d'accusations, mais il n'y a aucun mécanisme de reddition de comptes ni aucune obligation de suivre un traitement.
J'espère que le député sera prêt à intégrer cet amendement afin que le projet de loi ait plus de mordant et de responsabilisation, en rendant obligatoires le rétablissement et le traitement dans les cas de dépendance aux opioïdes.
Je suis d'accord avec lui quand il dit qu'il s'agit d'un problème de santé mentale et, comme je l'ai mentionné au début de mon allocution, je considère que c'est le plus grave problème de santé mentale que le Canada ait connu à ce jour, et qu'il sera probablement inégalé dans l'avenir. Nous devons trouver des solutions et leur consacrer des ressources. Je sais que mon collègue a parlé de la position de l'Association canadienne des chefs de police. Il dit vrai quand il affirme que l'association est favorable à la décriminalisation des drogues illicites, mais avec une réserve qu'il a omis de mentionner.
La réserve est que les provinces doivent avoir les ressources nécessaires, ce qui, selon le rapport, n'est pas le cas pour l'instant. Par conséquent, l'association n'appuie pas vraiment la décriminalisation de toutes les drogues illicites, ce que le projet de loi ne prévoit pas non plus d'ailleurs. Le rapport fait toutefois ressortir la nécessité de mettre l'accent sur le rétablissement, ce que le projet de loi ne prévoit pas. Je sais que le député a fait marche arrière par rapport à la décriminalisation en faisant des propositions qui pourraient servir de point de départ. Toutefois, il manque encore certains éléments. Je tiens à le redire, dans les faits, la police met déjà en œuvre certaines mesures.
L'autre élément que j'espère que le député sera prêt à accepter ne porte pas sur le rétablissement obligatoire, mais sur l'interaction entre les agents et les citoyens. Les agents peuvent noter le nombre de fois qu'ils en ont discuté avec une personne et qu'ils lui ont offert des options de rétablissement, mais ce ne serait pas admissible si cela se rendait devant les tribunaux. Par exemple, disons que j'ai intercepté M. Untel et que, à de nombreuses occasions, je lui ai donné deux options, soit d'être conduit devant un tribunal ou de se faire traiter. Encore une fois, la décision appartient à M. Untel. S'il dit non, alors ce choix n'est plus viable.
Cependant, j'aurais pu avoir 17 000 conversations semblables avec M. Untel, mais si ces conversations étaient admissibles en cour, si jamais il était conduit devant un tribunal, on pourrait dire que nous avons eu cette discussion à plusieurs occasions, qu'on lui a offert de se faire traiter et qu'il a toujours refusé. Donc, la seule option serait de le faire passer par le système de justice. Je pense qu'il faut que cet élément soit inclus dans le projet de loi.
Il faut également tenir compte du fait que ces drogues sont dangereuses. Cela ne fait aucun doute. Elles tuent des Canadiens de tous les milieux, et je sais que nombre de députés en ont été témoins personnellement. Je sais que dans une collectivité autochtone de ma circonscription, il y a eu en un mois 18 décès liés à une surdose de fentanyl. Un trop grand nombre de mes amis et connaissances ont perdu des proches. J'ai moi-même perdu un ami avec qui j'ai joué pendant de nombreuses années dans une ligue de hockey senior. Je ne veux plus avoir ce genre de conversation. Il doit y avoir une solution, mais il faut qu'il y ait des conséquences.
Je sais que, dans un cas de possession simple, on peut prendre en considération les soins en santé mentale et la désintoxication, mais il faut de lourdes conséquences pour ceux qui font le trafic de ces drogues, les narcotrafiquants qui tuent ces Canadiens. Nous devons aussi prévoir de lourdes conséquences ainsi que suffisamment de ressources pour que l'Agence des services frontaliers du Canada puisse veiller à ce que ces drogues, plus particulièrement le fentanyl, ne soient pas importées au Canada. En raison de la COVID-19, il y a des restrictions visant les voyages, mais nous voyons maintenant une plus forte concentration de poisons et de toxines dans les drogues qu'on trouve au pays. Il faut qu'il y ait des conséquences.
Pour conclure, j'espère que mon collègue sera ouvert à l'idée d'apporter des amendements et de discuter de ces questions, mais en ce moment, il nous sera difficile d'appuyer ce projet de loi s'il n'inclut pas certains de ces éléments de reddition de comptes ainsi que des mesures suffisamment rigoureuses pour imposer un processus de désintoxication et de réadaptation.
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Madame la Présidente, ce projet de loi va dans le sens de ce qui se fait déjà au Québec.
Selon nous, la déjudiciarisation est une bonne chose. Il est entendu que vivre en société implique le respect d'un certain nombre de règles établies par la société et dotées d'un encadrement juridique, et que les gens qui ne respectent pas ces règles sont sanctionnés. Nous sommes d'accord sur ce point. Ainsi, quelqu'un qui fait du trafic de drogue doit être assujetti au système pénal et doit, s'il est trouvé coupable, écoper d'une peine d'emprisonnement.
Nous pensons toutefois que ce n'est pas la panacée. Au bout du compte, ce que nous souhaitons, ce n'est pas de mettre le plus de gens possible en prison, mais de vivre dans une société respectueuse des droits de chacun, dans laquelle il fait bon vivre et où tous les gens adoptent et respectent les différentes règles que nous nous sommes données.
Encore une fois, si certains crimes doivent être punis sévèrement, d'autres infractions devraient faire l'objet d'un processus différent. Au Québec, on croit beaucoup en la réhabilitation, en l'éducation de ces personnes.
Le projet de loi cible une situation particulière: un policier arrête une personne et découvre qu'elle est en possession de drogues, mais à des fins de consommation personnelle et non dans le but d'en faire le trafic.
Évidemment, cette situation n'est pas souhaitable. Les drogues ont un effet terrible sur la santé des individus qui en prennent, mais également sur la famille, les amis et l'ensemble de la société dans laquelle vit la personne qui consomme des drogues. Il faut donc tenter de modifier ce comportement.
Plutôt que d'envoyer cette personne en prison, on va tenter d'appliquer des mesures de déjudiciarisation et de réinsertion sociale. Il existe différentes possibilités. Comme je le disais, on le fait déjà au Québec avec les jeunes contrevenants. Par exemple, un jeune qui va commettre une infraction dans un dépanneur va peut-être recevoir comme sanction d'aller travailler dans ce dépanneur. S'il a fait des graffitis sur un mur, sa sanction sera peut-être de nettoyer le mur ou de repeindre l'intérieur du dépanneur.
Le contrevenant va donc recevoir une sanction qui va l'éduquer et lui donner le goût de ne plus commettre le geste répréhensible, ce qui est mieux que de se retrouver en prison pour ne plus commettre ce geste.
Bien qu'emprisonner quelqu'un pendant deux ou trois ans pour un crime relié aux drogues puisse parfois effectivement convaincre cette personne de ne plus jamais prendre de drogues, il arrive la plupart du temps que cette personne risque fortement de récidiver. En effet, la personne risque de s'être construit un scénario de victimisation, de s'être sentie exclue de la société, jugée, et, quand elle va sortir de prison, elle va garder les mêmes mauvaises habitudes et fréquenter le même milieu, qui lui est néfaste.
Si, au lieu d'envoyer cette personne en prison pendant un, deux ou trois ans, on adopte pour elle des mesures qui ne sont pas de nature judiciaire, mais qui visent à lui faire comprendre les effets négatifs de sa consommation sur sa propre santé, ainsi que sur sa conjointe ou son conjoint, sur ses enfants, sur l'ensemble de la famille et de son milieu, on ne réussira peut-être pas tout le temps. Cependant, si l'on réussit ne serait-ce que dans 15 %, 20 % ou 30 % des cas, ce sera déjà beaucoup mieux que ce qui se fait actuellement. On aura amélioré notre société, on aura pris toutes les mesures possibles pour que ces individus, non seulement modifient leur comportement, mais le fassent de leur plein gré, en ayant pris conscience des effets néfastes du comportement qu'ils avaient avant.
Pour ces raisons, je pense que c'est un projet de loi qui mérite qu'on l'étudie, ne serait-ce qu'en comité. Il y aura sûrement des amendements à y apporter. J'ai remarqué tantôt qu'il y a des problèmes de traduction, notamment au nouvel alinéa 10.1b) qui est proposé: la version anglaise indique « reduce harm to those individuals », alors que dans la version française, on parle de « réduire les méfaits », une mauvaise traduction selon moi.
Il y a de petites coquilles comme celle-là qui vont devoir être corrigées. Il faudra peut-être des modifications à certains autres égards sur le fond. Cependant, une chose est certaine, le projet de loi mérite d'être étudié et d'être adopté pour améliorer la vie de l'ensemble des gens avec lesquels on vit dans la société.
Plus tôt, on a parlé de stigmatisation. Je vais donner des exemples. Il est certain qu'une personne qui passe un, deux ou trois ans en prison et qui se cherche un emploi une fois libre va être obligée de dire qu'elle sort de prison. Naturellement, cela ne l'aidera pas à décrocher un travail. Si cette personne ne trouve pas de travail, elle risque de chercher d'autres sources de revenus. C'est donc un cercle vicieux dont elle ne sortira jamais et l'on pourrait finir par encourager ce que l'on souhaiterait décourager, ce qui est à éviter.
Il y a aussi évidemment les questions de santé. On parle souvent de consommation de drogues, ce qui n'est pas légal. Les personnes qui consomment ne le font pas au grand jour et se cachent souvent. Elles utilisent des seringues qui ne sont pas désinfectées ou qui le sont mal, elles partagent d'autres supports pour consommer de la drogue, ou elles partagent des drogues qui sont parfois composées de substances plus nocives que ce qu'elles devraient être.
Certains pensent qu'il faut réglementer, mais je crois qu'il faudrait plutôt essayer de trouver une façon d'aider ces personnes au lieu de les punir. Si j'avais un enfant ou un autre membre de ma famille qui avait un problème de consommation de drogue, je souhaiterais pouvoir l'aider à en comprendre les effets négatifs et à se convaincre de changer de comportement afin de connaître plus de bonheur. Or, si je veux cela pour ma famille, je le veux aussi pour tout le monde. Je nous encourage donc à voter en faveur du projet de loi C-236.
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Madame la Présidente, ce débat arrive à point nommé, comme tous les députés le reconnaîtront sûrement. Nous ne traversons pas seulement une pandémie, mais aussi une crise de surdoses que la pandémie a encore intensifiée. Depuis 2016, plus de 16 000 personnes sont mortes d'une surdose au Canada. Plus de 449 d'entre elles vivaient dans ma communauté, dans le Sud de l'île de Vancouver.
C'est un énorme fardeau pour les familles de ma circonscription. Des familles ont perdu un être cher, qu'il s'agisse d'un père, d'une mère, d'un frère, d'une sœur ou d'un enfant. Pire encore, dans le Sud de l'île, le nombre de décès par surdose est presque deux fois plus élevé cette année, pendant la pandémie, que l'an dernier. Je sais que cette même tendance se répète dans l'ensemble du pays.
Il ne fait aucun doute qu'il est urgent d'intervenir pour contenir la crise des surdoses. Je remercie le député de d'avoir tenté de présenter à la Chambre différentes façons de contrer ce problème. D'ailleurs, le projet de loi à l'étude aujourd'hui est l'une des deux mesures inscrites au Feuilleton par le député de . Comme je l'ai déjà dit, je comprends mal pourquoi il a choisi celle-ci plutôt que l'autre.
L'autre projet de loi est le projet de loi , qui s'attaque directement à la crise des surdoses de drogue en décriminalisant la possession de petites quantités de drogues illicites destinées à un usage personnel, afin de faire passer notre approche de la punition à la réduction des méfaits liés à la dépendance, une chose qui est nettement un problème de santé ou une maladie.
En fait, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le député de vient de prononcer un discours très éloquent à l'appui de son autre projet de loi, le projet de loi . Dans son discours, il a énoncé tous les arguments en faveur de la décriminalisation. Hélas, il a décidé de présenter l'autre projet de loi, une réponse à la crise qui rate complètement sa cible.
Je vais revenir aux détails du projet de loi dans un moment, mais je veux d'abord insister sur le fait que le NPD serait très heureux d'appuyer le premier projet de loi. Personnellement, je suis un tenant de la décriminalisation des drogues depuis des décennies, c'est-à-dire à l'époque où j'enseignais le droit pénal au niveau postsecondaire.
J'ai réclamé publiquement la décriminalisation des drogues pour la première fois en tant que conseiller municipal, à Esquimalt. À l'époque, on commençait à reconnaître l'ampleur de la crise des opioïdes. Certains se sont demandé pourquoi un conseiller municipal s'intéressait à la question. Ma réponse était simple. Lorsque des décès évitables surviennent et laissent des séquelles dans la collectivité, pourquoi ne pas emprunter la voie qui permet si clairement de réduire ces pertes?
L'ancienne députée néo-démocrate Libby Davies a soutenu ardemment la décriminalisation dès le départ à la Chambre. Elle a clairement fait connaître sa position en 2013, quand le gouvernement Harper cherchait à fermer InSite qui, à cette époque, était le seul centre d'injection supervisée au Canada.
Au congrès du NPD en 2018, les délégués ont adopté une résolution qui demandait qu'on mette fin à la criminalisation de la possession de drogue pour usage personnel. Je suis fier que mon parti ait été le premier au Canada à inclure la décriminalisation dans sa plateforme électorale. Il nous faut vraiment un projet de loi pour y arriver, mais le projet de loi n'est pas le bon.
Ce projet de loi ne fait que proposer des solutions de rechange aux accusations pour possession de drogue, alors que de telles mesures sont déjà en place dans la plupart des provinces. À mon avis, c'est une perte de temps que de se pencher sur le projet de loi et sur la déjudiciarisation, alors que la solution simple consiste à mettre fin aux accusations en décriminalisant la possession de drogue pour usage personnel.
Ce projet de loi n'aide en rien les personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanie à obtenir l'aide dont elles ont besoin sans craindre de se faire arrêter. Ce risque demeure. Le projet de loi ne s'attaque pas non plus aux véritables criminels, soit les trafiquants de drogues qui profitent de la dépendance des autres dans nos communautés. L'absence de leadership fédéral sur cette question a suscité des appels à l'aide répétés de la part des maires et des premiers ministres provinciaux.
En juillet dernier, le premier ministre de la Colombie-Britannique, M. Horgan, a écrit au pour demander que le gouvernement décriminalise la possession de drogue pour usage personnel. Il y a à peine quelques jours, j'ai discuté avec le maire de Vancouver et ancien député Kennedy Stewart. Comme il était frustré par l'inaction du fédéral dans la lutte contre la crise des opioïdes, il a décidé d'établir un plan novateur.
Il a demandé par lettre une exemption fédérale à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances pour décriminaliser les drogues dans les limites de Vancouver et ainsi permettre à la Ville de gérer efficacement les problèmes de santé publique causés par la crise des opioïdes. La résolution qu'il a présentée nomme un certain nombre de facteurs qui justifient la décriminalisation. Nombre d'entre eux ont été mentionnés dans le discours du député de .
Le maire Stewart a d'abord parlé du nombre très élevé de morts par surdose à Vancouver. Il a aussi décrit comment la COVID-19 aggrave la crise des surdoses en isolant encore plus les consommateurs de drogues au sein de la collectivité, en limitant l'accès aux services de réduction des méfaits et, comme nous l'avons constaté plus récemment, en augmentant la toxicité des drogues dans les rues.
Il a mentionné l'appui de l'Association canadienne des chefs de police, celui de la directrice de la santé publique de la Colombie-Britannique, la Dre Bonnie Henry, et celui d'organismes comme la Pivot Legal Society, à Vancouver, et le Réseau juridique canadien VIH/sida. Il a aussi conclu — et je crois que c'est un aspect qui vaut la peine d'être souligné à la Chambre — que la décriminalisation est une façon de s'attaquer à la crise des surdoses, mais que c'est aussi une composante essentielle de tout programme visant à éliminer le racisme systémique dans le système de justice canadien.
Pourquoi le projet de loi est-il si faible? On le décrit comme un cadre de déjudiciarisation fondée sur des données probantes. De telles mesures sont déjà en place, comme je l'ai dit, dans la plupart des provinces et des territoires. Il ne changera rien pour la personne qui refuse toutes ces options parce qu'elle sera toujours accusée et qu'elle se retrouvera toujours avec un casier judiciaire pour possession de drogue.
Le projet de loi comporte aussi quelques problèmes techniques. J'ai encore l'âme d'un professeur de justice pénale. Je doute que le projet de loi puisse s'appliquer en Colombie-Britannique, au Québec ou au Nouveau-Brunswick parce qu'il se modèle sur le système de l'Ontario, où la police porte des accusations, ce qu'elle ne fait pas dans ces trois autres provinces. Je me demande si le projet de loi tient compte de la réalité de la Colombie-Britannique, du Québec et du Nouveau-Brunswick. Je ne le crois pas.
Le projet de loi vise à réduire la criminalisation des toxicomanes grâce à la déjudiciarisation, qui existe déjà dans la majorité des autres provinces, comme je l'ai dit. Nous avons une solution simple juste sous nos yeux. Pour venir à bout de cette autre épidémie, le NPD recommande de prendre des mesures axées sur des politiques de santé judicieuses et fondées sur des données probantes. Il faut faire cinq choses pour les Canadiens.
Il faut déclarer, dès maintenant, un état d'urgence en santé publique à l'échelle nationale en lien avec la crise des opioïdes. Il faut des fonds fédéraux et un financement stable pour les sites de prévention des surdoses. Il faut améliorer l'accès à des traitements à la demande pour les personnes qui souffrent de dépendances. Il faut que la vente de drogues empoisonnées dans la rue cesse et que des drogues sûres soient accessibles comme solution de rechange médicalement réglementée aux drogues toxiques vendues dans la rue, par le crime organisé la plupart du temps. Il faut une enquête sur le rôle que les compagnies pharmaceutiques ont peut-être joué dans la crise des opioïdes en l'alimentant, et il faut demander aux entreprises qui ont profité de la crise des opioïdes une compensation financière significative.
Selon le projet de loi , c'est en se fondant sur des données probantes qu'on en est arrivé à la conclusion qu'il fallait des mesures de déjudiciarisation. Je dirais que ce n'est pas du tout là où nous nous en allons. Ces demandes et ces mesures sont fortement soutenues par les champions de la santé publique. La police et tous ceux qui s'intéressent vraiment à la santé publique disent que c'est d'une décriminalisation que nous avons besoin. La guerre contre la drogue a été manifestement un échec. Au lieu de montrer du doigt et de punir les Canadiens qui souffrent de toxicomanie, il est temps que le gouvernement fédéral fasse preuve d'audace et de compassion.
Alors que la crise des surdoses frappe toutes les familles canadiennes, une solution qui répond aux besoins des communautés les plus marginalisées au pays est requise d'urgence. Le fait que nous devions passer par un projet de loi d'initiative ministérielle et le fait que le gouvernement n'ait présenté aucun projet de loi et aucune réponse à la crise des opioïdes nous en dit long. Il faut un projet de loi. Le député de a fait un discours éloquent ce soir, comme je viens de le souligner, mais pas au sujet du bon projet de loi. C'est de son autre projet de loi qu'il faut parler.
Les Canadiens n'ont pas besoin du projet de loi . Les néo-démocrates n'appuieront pas un projet de loi qui ne fait pratiquement rien pour répondre à la crise des opioïdes. Il faut des mesures audacieuses immédiatement, mais malheureusement, il n'y en a pas dans le projet de loi C-236. Comme je l'ai mentionné, ce projet de loi ne fera que gruger du temps à la Chambre alors que ce temps pourrait être plus judicieusement consacré à la décriminalisation de la possession simple de drogue au Canada.
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Madame la Présidente, c’est un grand privilège et un honneur pour moi ce soir d’avoir appuyé la présentation du projet de loi et d’en parler.
Je tiens à remercier le député de pour son travail extraordinaire sur ce projet de loi et pour avoir incité la Chambre à prendre des mesures pour sauver des vies. Il n’arrive pas souvent que nous, députés, puissions poser des gestes qui sauveront des vies. Je pense que c’est ce que fera ce projet de loi, une fois qu’il sera adopté.
Je ne suis pas d’accord avec l’orateur précédent. Je crois que si une personne veut changer les choses au Canada, ce sera parfois de façon progressive, une étape à la fois. Je pense que ce projet de loi est important pour que nous examinions les moyens de redresser la situation, non pas pour en finir avec situation, mais pour continuer à la redresser. En bref, il est temps d’élaborer une approche de la toxicomanie axée sur la santé afin d'arrêter de pointer du doigt les toxicomanes. Il est temps de sortir le problème des dépendances et de la toxicomanie du système de justice pénale et de l’intégrer au système de soins de santé. Il est temps de donner aux Canadiens, qui se trouvent en difficulté à cause de leur dépendance et, oui, parfois à cause de leurs mauvais choix, une porte de sortie pour qu’ils puissent obtenir l’aide dont ils ont besoin plutôt que de s’enfoncer de plus en plus profondément dans le désespoir ou la mort.
En tant que ministre de l’Église unie travaillant avec les familles depuis un quart de siècle, j’ai déterminé que notre approche face aux drogues illicites au Canada ne fonctionne pas. Elle cause plus de tort que de bien et doit être modifiée. Ce projet de loi est une modeste tentative en ce sens, un premier pas pour voir si le fait d’éloigner les personnes du système de justice pénale et de les rapprocher du système de soins de santé apportera des changements positifs. Mon instinct me dit que ce sera le cas. C’est pourquoi je suis heureux d’appuyer ce projet de loi. J’invite tout le monde à l’appuyer et à ne pas laisser le mieux être l'ennemi du bien.
C’est une évidence que la consommation de drogues illicites au Canada persiste, malgré les lois, les activités policières, les poursuites pénales et les incarcérations. Faire des personnes qui consomment ces substances des criminels ne fonctionne pas. Il est temps de repenser notre approche. Ce projet de loi modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, qui prévoit des mesures de déjudiciarisation fondées sur des données probantes, est un premier pas intelligent et modeste dans la bonne direction.
L’inquiétude est réelle. Comme nous l’avons déjà entendu ce soir, le bureau du coroner de la Colombie-Britannique a récemment signalé que 162 personnes sont décédées d’une surdose de drogues illicites en Colombie-Britannique le mois dernier, soit une moyenne d’environ cinq décès par jour. Cette année, dans ma ville, Toronto, nous sommes en voie d’atteindre plus de 450 décès par surdose d’opioïdes, comparativement à environ 300 pour chacune des deux dernières années. Uniquement en octobre, Toronto a établi un record de décès par surdose en un mois.
La crise des opioïdes a tué plus de 16 000 Canadiens depuis 2016. La COVID-19 aggrave considérablement cette crise, une pandémie qui alimente une épidémie.
En 2020, l’Ontario se dirige vers 2 271 décès causés par les opioïdes, contre 1 500 en 2019. Ce sont de vraies personnes qui meurent, avec des vies, des rêves et des aspirations bien réels. Les familles, les proches et les amis sont détruits par cette perte.
En 2017, j’ai été approché par les indomptables Angie Hamilton et Louise White de Families for Addiction Recovery. Leur organisation travaille à aider les parents et les familles qui sont les premières personnes touchées par la toxicomanie. Leurs histoires personnelles et celles qu’elles m’ont racontées sur d’autres familles de partout au Canada m’ont poussé à me documenter davantage. Avec leur aide, j’ai organisé une table ronde réunissant 25 experts, dont des travailleurs de la santé, des médecins, des avocats, des universitaires et des représentants des forces de l’ordre et des groupes communautaires. J’ai ensuite organisé une assemblée publique, une réunion pour la collectivité de Don Valley-Ouest, puis une réunion avec le conseil des jeunes de ma circonscription pour leur demander leur avis sur ce problème urgent. Le verdict a été unanime. Le système actuel ne fonctionne pas. Les professionnels de la santé, les responsables de l’application de la loi, les experts en politique publique, les jeunes et les familles ont demandé des changements importants. Leurs demandes sont multiples. Ils veulent plus de ressources et de traitements sur demande. Ils veulent éliminer la stigmatisation. Ils veulent avant tout une approche fondée sur des données probantes et axée sur la médecine pour lutter contre la toxicomanie et la consommation de drogues au Canada.
Ces demandes ont été confirmées très récemment lors d’une assemblée publique virtuelle que j’ai organisée sur ce sujet dans ma circonscription. Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction: ouvrir des portes pour les personnes dont la vie est en danger.
À chaque entretien que j’ai eu avec des experts, des intervenants et des membres de la collectivité, le message a été fort et clair: une stratégie différente, une stratégie de santé publique, est nécessaire et c’est pourquoi j’appuie mon collègue, le député de , avec ce projet de loi.
Notre système actuel ne réduit pas la consommation de substances psychoactives illicites. Il entraîne une stigmatisation et réduit les chances de rétablissement. Il ostracise les personnes qui ont le plus besoin d’aide. Il fait du tort à ceux qui se trouvent au bas de l’échelle socio-économique et il érige des obstacles à l’engagement social, à l’emploi et au logement. Comme nous l’avons entendu, il cible les communautés ethniques.
Une autre option que la criminalisation est une stratégie de santé publique. Je tiens à être clair: le projet de loi ne décriminaliserait pas la possession de drogues pour usage personnel. Pour certains c’est un objectif, pour d’autres non. Ce projet de loi est un pas en avant en vue d’obtenir un important appui des deux côtés de la Chambre, afin que nous puissions apporter des modifications progressives et réfléchies à la loi et faire une différence dans la vie des gens.
Ce projet de loi créerait un cadre de déjudiciarisation fondé sur des preuves afin de garantir qu’avant que les agents de police ou les procureurs, selon l’administration, n’aillent de l’avant avec le port d’une accusation, ils doivent examiner s’il est suffisant de donner un avertissement, d’aiguiller une personne dans le besoin vers un organisme ou un fournisseur de santé publique, ou de trouver d’autres mesures que l’incarcération.
Nous avons de nombreux exemples de bons projets de déjudiciarisation dans ce pays. Le projet de loi serait l'occasion de faire preuve de bon sens pour donner aux agents d’application de la loi et aux procureurs un cadre juridique leur permettant de faire ce que, dans certains cas, ils font déjà, mais en tous cas, ce que je sais qu'ils veulent faire: envoyer les personnes en difficulté vers ceux qui peuvent les aider. Le projet de loi prend la consommation de drogue au sérieux, tient compte de la preuve et fait passer les gens en premier.
Je le répète. Si ce projet de loi ne va pas assez loin pour certains, il peut aller trop loin pour d'autres. Il ne décriminalise pas la drogue, mais est un encouragement à aller vers un traitement plutôt que vers la poursuite pénale, en offrant aux gens une chance de pouvoir en sortir et d’accéder au système de santé et d’obtenir l'aide dont ils ont besoin. Cela permettrait à la police, aux procureurs et aux juges de recommander un traitement plutôt qu’une poursuite pénale si les circonstances le justifient.
Je souligne que j'ai déjà participé à des projets de déjudiciarisation. Lorsque j’habitais à Whitehorse, j'ai collaboré avec la GRC à ses projets de déjudiciarisation.
Je me souviens d’un cas en particulier: un cambriolage survenu à l’Église Unie de Whitehorse, dans mon église. C'était juste après Noël, et l’église avait été cambriolée. Quelqu'un y était entré et l’avait vandalisée, notamment en volant l'enfant Jésus de la crèche qui se trouvait à l'avant de l'église. Les policiers sont venus me demander ce qui avait été volé, et j'ai répondu: « C’est Jésus qui a été volé ». Ils m'ont demandé si je pouvais décrire Jésus. J'ai répondu que c’était peut-être une question de foi ou de théologie, mais que le Jésus volé dans notre église était un petit Jésus en plastique qui se trouvait dans la crèche.
La police a trouvé l'auteur du vol. On m’a proposé de participer à une mesure de déjudiciarisation, et j'ai travaillé avec ce jeune homme. Je l’ai aidé pour qu’il puisse accéder au soutien dont il avait besoin pour nous assurer qu'il ne continuerait pas à voler des objets dans les églises. Il y a un an à peine, j’ai reçu un rapport indiquant que l’approche avait fonctionné. Au Canada, la déjudiciarisation au lieu du recours aux procédures formelles de justice pénale a fait ses preuves.
Au nom de Jésus, je tiens, ce soir, à demander instamment aux députés de la Chambre de renvoyer le projet de loi au comité où il pourra être discuté et amendé si nécessaire; les députés pourront y offrir leur expérience, leurs conseils et leurs idées et obtenir des avis judicieux de spécialistes du domaine et le projet de loi pourra être étudié et être considéré comme une réponse modeste face à une terrible tragédie: un pas vers la guérison de tous. Unissons-nous. Il s'agit d'une urgence de santé publique. Nous avons l’occasion de faire un petit pas dont l’effet sera réel.
C'est pour moi un honneur d'être ici ce soir. J'espère que tous les députés envisageront d'appuyer ce projet de loi extrêmement important.