Le processus législatif / Étapes
Étape du rapport : pouvoir du Président de choisir les amendements; amendements ayant fait l’objet d’un vote en comité
Débats, p. 5057–5058
Contexte
Le 6 mai 2014, Elizabeth May (Saanich—Gulf Islands) invoque le Règlement au sujet de l’étude, par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, d’amendements au projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et modifiant certaines lois en conséquence. Mme May soutient qu’un ordre adopté par le Comité exigeant que toutes les questions restantes nécessaires pour disposer de son étude article par article du projet de loi soient mises aux voix d’ici une certaine échéance contredit un ordre précédent du Comité. Elle avance que cela a empêché les députés de partis non reconnus de faire des observations sur leurs amendements avant que le Comité ne les mette aux voix. Comme c’est le cas, Mme May soutient que certaines de ses motions d’amendement devraient être choisies par le Président pour examen à l’étape du rapport, même si le Comité s’est déjà prononcé à leur sujet. Après avoir entendu d’autres députés, le Président prend l’affaire en délibéré[1].
Résolution
Le Président rend sa décision le 7 mai 2014. Il déclare que le Comité était en droit d’imposer un temps limite au débat sur l’étude article par article du projet de loi, même si cela a empêché Mme May de défendre toutes ses propositions d’amendements. Le Président ajoute que les décisions concernant la conduite de ses travaux relèvent exclusivement de la responsabilité du Comité. Il conclut que l’imposition par le Comité d’une échéance au débat ne suffit pas à justifier que la présidence choisisse les amendements de Mme May, qui ont fait l’objet d’un examen et d’un vote, en vue d’un examen à l’étape du rapport.
Décision de la présidence
Le Président : Avant de parler du choix et du regroupement des motions à l’étape du rapport du projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et modifiant certaines lois en conséquence, j’aimerais revenir sur le rappel au Règlement soulevé le 6 mai 2014 par l’honorable députée de Saanich—Gulf Islands.
Je remercie la députée de Saanich—Gulf Islands d’avoir soulevé la question ainsi que le leader du gouvernement à la Chambre, le leader à la Chambre de l’Opposition officielle et les députés de Toronto—Danforth, de Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, et de Winnipeg-Nord de leurs commentaires.
La députée de Saanich—Gulf Islands s’est dite préoccupée par le fait que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a adopté une motion portant que les questions restantes, qui sont nécessaires pour disposer des travaux relatifs à l’étude article par article du projet de loi soient mises aux voix à une heure précise, ce qui revient dans les faits à fixer une échéance pour la fin du débat. Elle a affirmé que cette motion contredisait une motion antérieure du Comité, adoptée le 29 octobre 2013, qui autorise les députés n’appartenant pas à un parti reconnu à faire des observations relativement aux amendements qu’ils proposent avant que ceux-ci soient mis aux voix au comité. Or, l’échéance qui a été imposée a eu pour effet d’empêcher la députée de faire des observations au sujet de ses amendements, comme la motion du 29 octobre 2013 l’y autorise. Pour cette raison, la députée de Saanich—Gulf Islands a fait valoir que les amendements de fond, même s’ils ont déjà été mis aux voix par le Comité, devraient être choisis aux fins du débat à l’étape du rapport. Plusieurs députés ont ensuite pris la parole pour appuyer le rappel au Règlement de la députée de Saanich—Gulf Island.
Dans sa réponse, le leader du gouvernement à la Chambre a avancé deux arguments principaux. Premièrement, il a rappelé à la Chambre que le pouvoir du Président en ce qui a trait au choix des motions à l’étape du rapport se limite à déterminer si celles-ci ont déjà été présentées à l’étape du comité ou auraient pu l’être. Deuxièmement, il a signalé que l’échéance fixée par le Comité s’applique de la même manière à tous les députés et qu’il n’est donc pas exact d’affirmer que les députés indépendants ou n’appartenant pas à un parti reconnu sont pénalisés plus que les autres à cet égard.
En l’occurrence, il convient de rappeler à la Chambre en quoi consistent les pouvoirs du Président en ce qui concerne le choix des amendements à l’étape du rapport. Pour remettre les choses en contexte, je renvoie les députés à une déclaration faite le 21 mars 2001 par le Président Milliken, à la page 1991 des Débats de la Chambre des communes, qui établit les lignes directrices sur lesquelles je me base pour m’acquitter de ma responsabilité à l’égard du choix des motions à l’étape du rapport. Le Président Milliken a précisé clairement sa pensée lorsqu’il a déclaré :
[...] je recommande fortement à tous les députés et à tous les partis de se prévaloir pleinement de la possibilité de proposer des amendements à l’étape du comité afin que l’étape du rapport retrouve sa vocation originale, celle de permettre à la Chambre d’étudier le rapport du comité et le travail accompli par celui-ci [...]
Ces principes ressortent également des notes d’interprétation qui accompagnent les articles 76(5) et 76.1(5) du Règlement[2]. Les auteurs de La procédure et les usages de la Chambre des communes, deuxième édition, élaborent davantage au sujet de ces principes lorsqu’ils écrivent, aux pages 783 et 784 :
[…] le Président ne devrait normalement choisir que les motions d’amendement qui n’auraient pu être présentées en comité.
J’aimerais rappeler aux députés que les lignes directrices pour le choix des amendements précisent qu’il faut déterminer, d’une part, si les amendements auraient pu être présentés en comité et, d’autre part, s’ils ont été rejetés par celui-ci. Dans le cas de l’étude en comité du projet de loi C-23, tous les membres du Comité ainsi que tous les députés indépendants intéressés ont eu la possibilité de présenter des amendements au Comité, et certains de ces amendements ont été rejetés. La députée demande maintenant à la présidence, en vertu de son pouvoir de choisir les amendements, de se prononcer sur la question de savoir si ces amendements ont reçu une attention suffisante de la part du Comité.
Il est évident que le Comité a décidé de procéder à l’étude du projet de loi C-23 d’une certaine façon. Une motion établissant le processus qui serait suivi a été proposée, débattue, puis adoptée. Au même titre que les modalités pour la présentation et la discussion d’amendements, le délai fixant le moment où prennent fin les débats a été établi par une motion du Comité. Ces décisions relèvent de la responsabilité exclusive du Comité. Je ne crois pas qu’il revienne à la présidence de mettre en doute la façon dont les comités décident de mener leurs travaux.
La députée me demande de choisir des motions pour étude à l’étape du rapport parce qu’elle n’a pas pu en débattre en comité. Ce faisant, elle a cité la décision que j’ai rendue le 12 décembre 2012, dans laquelle j’ai affirmé que je continuerais à choisir des motions de députés indépendants pour étude à l’étape du rapport jusqu’à ce que soit trouvée une méthode satisfaisante leur permettant de participer à l’étude article par article du comité. Je crois comprendre que la députée a jugé insatisfaisantes les occasions offertes par le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre relativement au projet de loi C-23. D’autres membres du Comité ont abondé dans le même sens en exprimant leur insatisfaction quant au fait que certains amendements n’ont pu faire l’objet d’un débat une fois échu le délai que s’était imposé le Comité. Cela dit, il m’apparaît clair que le Comité a examiné et mis aux voix tous les amendements que la députée me demande de choisir.
En 2006, le Président Milliken a dû se pencher sur une situation similaire concernant le projet de loi C-24, Loi de 2006 sur les droits d’exportation de produits de bois d’œuvre.
Le 6 novembre 2006, l’honorable député de Burnaby—New Westminster a invoqué le Règlement au sujet de la décision du Comité permanent du commerce international de limiter le débat et d’imposer un délai strict fixant le moment où prendraient fin les débats.
Bien que la situation fût différente dans la mesure où le député était membre du comité en cause, je crois que la réponse du Président Milliken, qui se trouve à la page 4756 des Débats, est instructive :
[...] je crois que les comités sont maîtres de leur propre procédure. Ils peuvent parfaitement bien adopter des règles sur la conduite de leurs propres travaux. [...] Le comité peut amender le projet de loi. Il a fixé des règles concernant la manière dont ces amendements seraient traités et la manière dont les députés aborderaient les questions soulevées par ces amendements. Il me semble que le comité pouvait très bien agir comme il l’a fait et qu’il a exercé ses pouvoirs tout à fait normalement.
Lorsque le projet de loi avait été repris à l’étape du rapport, le député de Burnaby—New Westminster avait présenté un grand nombre d’amendements qui avaient déjà été rejetés en comité et avait demandé à la présidence de les choisir au motif qu’ils n’avaient pas fait l’objet d’un débat en comité.
Dans une décision que j’ai rendue à titre de Président suppléant le 21 novembre 2006, qui se trouve à la page 5125 des Débats, j’ai refusé de les choisir et j’ai rappelé à la Chambre:
[...] la présidence choisira les motions modifiant un amendement qui ont été adoptées en comité, les motions qui apportent des modifications consécutives à un amendement adopté par le comité et les motions qui suppriment un article du projet de loi.
Ces cas-là mis à part, la présidence hésite à choisir des motions à moins qu’un député présente un argument convaincant quant à leur caractère exceptionnel.
Du point de vue de la présidence, conformément aux précédents, je ne vois pas en quoi l’imposition d’un délai fixant le moment où prennent fin les débats constitue un argument justifiant le choix pour étude, à l’étape du rapport, d’amendements qui ont déjà été présentés et rejetés en comité.
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[1] Débats, 6 mai 2014, p. 5008–5012.
[2] Voir l’annexe A, « Dispositions citées : Règlement de la Chambre des communes », article 76(5), article 76.1(5).