Le processus législatif / Étapes
Étape du rapport : pouvoir du Président de choisir les amendements; importance exceptionnelle prétendue d’un amendement rejeté en comité
Débats, p. 7655–7656
Contexte
Le 22 septembre 2014, Randall Garrison (Esquimalt—Juan de Fuca) invoque le Règlement au sujet de sa motion d’amendement à l’étape du rapport du projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle. M. Garrison demande au Président de retenir sa motion en raison de son importance exceptionnelle, même si elle a été rejetée en comité. Sa motion d’amendement ajoute « identité de genre » à la définition de « groupe identifiable » du Code criminel. Il déclare qu’étant donné que la Chambre s’est déjà prononcée favorablement sur un article semblable dans le projet de loi C-279, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel (identité de genre) — un projet de loi d’initiative parlementaire qu’il parraine et qui en est à l’étape de l’examen en comité au Sénat —, la Chambre risque d’aller à l’encontre d’une décision déjà prise et se trouverait, dans les faits, à faire fi d’une partie du projet de loi C-279. Il ajoute que, compte tenu de la similitude des articles dans les deux textes législatifs et de la décision précédente de la Chambre d’adopter l’article semblable dans le projet de loi C-279, il estime qu’il est probable que le résultat d’un vote de la Chambre sur sa motion d’amendement du projet de loi C-13 serait différent du vote à l’étape du comité. Un autre député intervient et le Président suppléant (Barry Devolin) prend l’affaire en délibéré[1].
Résolution
Le Président rend sa décision plus tard au cours de la journée et déclare qu’il doit se fier à l’usage et être guidé par les impératifs de la procédure dans le choix des motions à l’étape du rapport. Il explique qu’il ne peut, par conséquent, choisir des motions à l’étape du rapport en fonction du résultat vraisemblable d’un vote à la Chambre, puisque cela pourrait aboutir à ce que l’étape du rapport ne doit justement pas être, c’est-à-dire une répétition de l’étape de l’examen en comité. Ne voyant pas de circonstances exceptionnelles, le Président ne choisit pas la motion d’amendement à l’étape du rapport de M. Garrison, la jugeant identique à l’amendement rejeté en comité.
Décision de la présidence
Le Président : Avant de rendre ma décision sur la sélection des motions à l’étape du rapport du projet de loi [C-13], Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle, j’aimerais aborder les préoccupations soulevées ainsi que l’information additionnelle apportée plus tôt aujourd’hui par l’honorable député d’Esquimalt—Juan de Fuca concernant la motion no 3, inscrite à son nom au Feuilleton des avis.
Je remercie l’honorable député d’avoir soulevé la question.
Comme il l’a lui-même indiqué, le député d’Esquimalt—Juan de Fuca m’a également écrit pour me demander de choisir sa motion à l’étape du rapport au motif qu’elle revêtait une importance exceptionnelle.
Je tiens à ce que le député sache que j’ai soigneusement examiné l’ensemble des circonstances ayant trait au contexte et au fond en l’espèce. Bien que chaque cas soit différent — et même s’il peut y avoir des circonstances exceptionnelles justifiant le choix de certaines motions à l’étape du rapport — ce sont ultimement les règles de procédure qui guident le choix des motions à l’étape du rapport.
L’ouvrage La procédure et les usages de la Chambre des communes, [deuxième édition], énonce le principe général ci-après qui gouverne le choix des motions à l’étape du rapport. À la page 783, il est écrit :
De façon générale, le Président s’emploie à prévenir tout débat à la Chambre qui soit une simple répétition de celui qui a eu lieu en comité. [...] le Président ne devrait normalement choisir que les motions d’amendement qui n’auraient pu être présentées en comité.
D’autres principes directeurs applicables au choix des motions à l’étape du rapport se trouvent aux articles 76(5) et 76.1(5) du Règlement[2]. Dans le nota suivant ces dispositions, il est écrit entre autres :
Le Président ne choisit une motion déjà rejetée au comité que s’il juge qu’elle a une importance tellement exceptionnelle qu’elle mérite d’être examinée de nouveau à l’étape du rapport.
Comme le montrent le fait qu’il ait d’abord écrit une lettre détaillée et le fait qu’il soulève à nouveau la question dans le cadre d’un rappel au Règlement, de toute évidence, le député d’Esquimalt—Juan de Fuca estime que les circonstances dans lesquelles le Comité a examiné sa motion d’amendement étaient exceptionnelles et que, pour cette raison, il doit revenir à la Chambre dans son ensemble de décider si le projet de loi C-13 doit être modifié de la façon qu’il propose. Bien que je comprenne ses arguments, je tiens à lui rappeler que la présidence ne peut prendre de décision quant au choix des motions en se fondant sur le résultat probable du vote.
Comme je l’ai mentionné dans une décision que j’ai rendue le 12 décembre 2012, à la page 13224 des Débats, au sujet d’un rappel au Règlement soulevé par le leader du gouvernement à la Chambre :
La présidence continuera d’être guidée dans chacune de ses décisions par les impératifs de la procédure, et elle ne compte nullement substituer ses prédictions quant au résultat probable d’un vote à l’expression, par la Chambre elle-même, de sa volonté.
Même si le député est convaincu que le résultat sera différent à la Chambre de ce qu’il a été en comité, ou que certains renseignements quant à la volonté de la Chambre sur une question donnée ont transpiré, cela ne suffit pas pour que la présidence conclue que des circonstances exceptionnelles justifient le choix de cette motion en particulier.
Je signale par ailleurs que le projet de loi C-279, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel (identité de genre), se trouve actuellement entre les mains d’un comité sénatorial. Les modifications qui y [sont] proposées n’ont pas encore été apportées au Code criminel. On peut supposer que, lorsque le moment sera venu, à une étape plus avancée du cheminement législatif des projets de loi C-279 et C-13, le Parlement choisira celle des deux approches qu’il préfère.
En ce qui concerne la pratique actuelle relativement à l’étape du rapport, je rappelle aux députés que, depuis 2001, elle a fait l’objet d’une évolution considérable afin que soit évitée la répétition de débats qui ont déjà eu lieu en comité. En conséquence, le Président est habilité à refuser de mettre aux voix des motions à l’étape du rapport lorsque cela reviendrait à reprendre les travaux qui ont déjà été faits en comité.
Je crains que, si je devais retenir la motion no 3 en m’appuyant sur les arguments avancés par le député, cela mènerait précisément à la situation que les usages encadrant l’étape du rapport ont pour but d’éviter, c’est-à-dire la répétition à la Chambre du débat qui a eu lieu en comité sur la question. Par conséquent, je dois informer le député que la motion no 3 ne sera pas retenue pour examen à l’étape du rapport.
Il y a neuf motions d’amendement inscrites au Feuilleton des avis en ce qui concerne l’étape du rapport du projet de loi C-13.
La motion no 3, comme il en a été question précédemment, et la motion no 6 ne seront pas choisies, car elles sont identiques à des amendements rejetés en comité.
Je vais maintenant soumettre les motions nos 1, 2, 4, 5 et 7 à 9 à la Chambre.
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[1] Débats, 22 septembre 2014, p. 7623–7625.
[2] Voir l’annexe A, « Dispositions citées : Règlement de la Chambre des communes », article 76(5), article 76.1(5).