STFC Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON TAX EQUITY FOR CANADIAN FAMILIES WITH DEPENDENT CHILDREN OF THE STANDING COMMITTEE ON FINANCE
SOUS-COMITÉ SUR L'ÉQUITÉ FISCALE POUR LES FAMILLES CANADIENNES AVEC DES ENFANTS À CHARGE DU COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 27 mai 1999
Le président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)): Conformément à la motion adoptée le 17 mars 1999 par le Comité permanent des finances, le sous-comité reprend son étude sur l'équité fiscale pour les familles canadiennes ayant des enfants à charge.
J'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue ce matin à M. Ron Chaplin, président du Comité d'action politique ainsi qu'à M. Todd Armstrong et Marion Steele qui représentent le groupe Égalité pour les gais et les lesbiennes.
J'ai également le plaisir d'accueillir ce matin Mme Nancy Rosenberg, agente supérieure de la direction de l'égalité du Syndicat canadien de la fonction publique.
Bienvenue au comité. Vous allez sans doute être les derniers témoins et nous l'espérons, les plus importants, comme on dit.
La formule normale consiste à donner à chaque groupe une période de cinq à dix minutes pour présenter un exposé, de façon à avoir suffisamment de temps pour que les membres du comité puissent ensuite poser des questions.
Je vous souhaite donc la bienvenue à tous et je vais demander aux représentants de EGALE de commencer. Merci.
M. Ron Chaplin (président, Comité d'action politique, Égalité pour les gais et les lesbiennes): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, permettez-moi de vous remercier d'avoir eu l'amabilité de nous inviter à prendre la parole devant vous ce matin.
Je m'appelle Ron Chaplin et je suis le directeur du comité d'action politique d'EGALE, le sigle pour l'organisme Égalité pour les gais et les lesbiennes, Equality for Gays and Lesbians Everywhere. Notre organisme a été fondé ici à Ottawa en 1986 et il se consacre à la lutte pour l'égalité des gais et des lesbiennes devant la loi, en particulier pour tout ce qui relève du gouvernement fédéral. Nous avons comparu à ce titre devant de nombreux comités parlementaires et tribunaux gouvernementaux et nous avons présenté des observations aux tribunaux. Notre conseil d'administration national est composé de représentants des différentes régions du pays.
Notre organisation dépend des centaines de bénévoles qui travaillent pour nous et qui nous accordent leur appui financier. Nous sommes venus ici ce matin en tant que bénévoles. Nous disposons d'un budget très modeste et nous n'avons qu'un seul employé. Je devrais ajouter, puisque le comité s'intéresse aux aspects fiscaux, que notre organisme n'est pas un organisme de charité enregistré, parce que nous avons choisi l'action politique. Les dons que versent nos partisans à EGALE ne leur donnent droit à aucune déduction fiscale.
Je suis accompagné ce matin de Todd Armstrong et Marion Steele. Ce sont tous les deux des parents qui vivent avec des partenaires du même sexe et qui vont vous parler de l'impôt fédéral et du système de transfert et de la façon dont ces aspects touchent les couples de gais et de lesbiennes.
À la fin de l'hiver, nous avons remarqué avec beaucoup d'intérêt, en suivant les débats de la Chambre des communes, que de nombreux députés reprochaient au régime fiscal canadien de traiter de façon inéquitable les divers types de familles. Cette situation nous préoccupe également. La mission d'EGALE consiste à veiller à ce que le principe de l'égalité devant la loi soit appliqué à tous les Canadiens, en particulier aux gais et aux lesbiennes.
• 0915
L'exposé que nous allons vous présenter ce matin s'inspire des
trois principes suivants.
Premièrement, le régime fiscal et le système de transfert devraient traiter de façon équitable toutes les familles, en aidant les parents à donner à leurs enfants ce dont ils ont besoin, tant sur le plan matériel qu'affectif.
Deuxièmement, l'intérêt de l'enfant devrait toujours être le critère déterminant.
Troisièmement, personne ne devrait se voir privé de la protection et du bénéfice de la loi, quelle que soit son orientation sexuelle. Cela comprend les enfants des couples de gais et de lesbiennes.
Dans notre exposé, nous n'allons pas parler de la situation des parents homosexuels. Nous n'allons pas examiner, par exemple, l'effet qu'a le régime fiscal actuel sur les parents célibataires ou divorcés. Les autres témoins vous ont certainement parlé de ces groupes. Nous allons principalement traiter ce matin de la question des couples de gais et de lesbiennes qui élèvent des enfants. Il est peu probable que les témoins que vous avez entendus jusqu'ici aient abordé leur situation et nous pensons que les choses que nous allons vous dire ce matin vont très certainement vous surprendre.
Enfin, je tiens à vous expliquer pourquoi nous ne pouvons pas chiffrer le nombre des personnes concernées par cet aspect. Tous les sondages qui cherchent à évaluer le nombre des gais et des lesbiennes au Canada sont très suspects, sans parler des évaluations du nombre des enfants qui sont élevés par des parents homosexuels. Je dois reconnaître que les données que le ministère des Finances ou Statistique Canada pourrait vous fournir à ce sujet seraient certainement aussi fiables que celles que nous pourrions vous communiquer.
Il n'est jamais facile d'élever des enfants, mais les couples homosexuels font face à des défis particuliers parce que, dans l'ensemble, le droit ne reconnaît pas ce type d'union, même si la situation évolue quelque peu.
Selon les tribunaux, la Charte des droits et libertés accorde aux gais et aux lesbiennes la même protection et le même bénéfice de la loi, c'est ce qu'ils ont déclaré à plusieurs reprises. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont lentement adopté des modifications législatives pour donner effet à ces décisions. Il arrive toutefois que les obligations qui existent dans une province ou un territoire ne sont pas reconnues ailleurs. Il demeure que tant que les gouvernements fédéral et provinciaux n'auront pas procédé à une réforme globale de notre régime fiscal et de notre droit familial, ces anomalies vont continuer à compliquer la vie des parents homosexuels et à nuire aux enfants qu'ils élèvent.
Je sais que nous sommes les derniers témoins à prendre la parole et je suis sûr qu'on vous a déjà parlé de l'effet que peuvent avoir sur les parents qui ont des enfants les diverses dépenses fiscales et les transferts. Permettez-nous de vous exposer rapidement comment ces programmes touchent les couples homosexuels. Les personnes qui m'accompagnent ici ce matin, M. Armstrong et Mme Steele, vous expliqueront au cours des questions comment ces programmes les touchent concrètement.
Tout d'abord, il y a la prestation fiscale pour enfants. Normalement, cette prestation est versée au parent qui reste à la maison. Ce n'est pas nécessairement le cas pour les couples homosexuels. La prestation fiscale pour enfants est accordée au parent qui a la garde légale des enfants concernés, ce qui, dans une relation homosexuelle, peut vouloir dire l'un des partenaires ou les deux. C'est normalement le partenaire qui a le revenu le plus faible qui demande la prestation, parce que celle-ci est imposable et il n'est pas possible, bien entendu, de demander en même temps la déduction pour les frais de garde d'enfant.
Deuxièmement il y a le supplément de la prestation nationale pour enfants. La plupart des couples homosexuels étant considérés comme deux célibataires qui cohabitent, de nombreux parents gais ou lesbiens ont droit aux prestations de l'aide sociale. Nous notons en passant que le supplément de la prestation nationale pour enfants, qui a été introduit en 1998 officiellement pour aider les enfants vivant dans la pauvreté, est récupéré en Ontario auprès de tous ceux qui reçoivent des prestations familiales. Pour ces personnes, ce supplément n'est pas un transfert concernant la prestation pour enfants mais plutôt un transfert fédéral- provincial.
Troisièmement, il y a la déduction des frais de garde pour enfants. Pour les couples hétérosexuels, seul le partenaire qui a le revenu le plus faible peut déduire ces frais du revenu qu'il a gagné. Pour les couples homosexuels, l'un des parents ayant la garde d'enfants peut demander la déduction. En fait, il y a des parents homosexuels qui déduisent les sommes versées à leur partenaire qui s'occupe de leurs enfants. Revenu Canada nous a informé que cela était tout à fait normal, pourvu que le parent qui reste à la maison inclue ce revenu dans sa déclaration d'impôt. Les couples hétérosexuels ne peuvent procéder de cette façon.
• 0920
Quatrièmement, il y a la déduction pour le conjoint. C'est
habituellement le parent qui travaille et dont le conjoint élève
les enfants à la maison qui demande cette déduction, qui n'est
toutefois pas accordée aux couples homosexuels.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Excusez-moi, monsieur le président. Je crois que les points quatre et six sont identiques. Il n'y a pas de déduction; il y a simplement un crédit d'impôt non remboursable pour le conjoint.
M. Ron Chaplin: Vous avez raison.
Cinquièmement, il y a la déduction pour équivalent de personne mariée. Les parents célibataires, veufs ou divorcés ayant des enfants à charge peuvent demander cette déduction, tout comme les parents homosexuels, peu importe qu'ils aient un emploi ou non est qu'ils vivent avec un partenaire ou non. Seul le parent qui a la garde d'un enfant peut demander cette déduction.
Je vais laisser de côté le point numéro six, comme le suggère M. Szabo, et passer au point numéro sept, l'assurance-emploi. Seules les mères biologiques ont droit aux prestations de congé de maternité prévues par le programme de l'assurance-emploi, et ce programme est donc appliqué aux gais et aux lesbiennes de la même façon qu'aux autres. Cependant, les unions homosexuelles n'étant pas reconnues, les prestations de conjoint prévues par le programme d'assurance-emploi ne peuvent être accordées aux partenaires homosexuels. De la même façon, étant donné que la plupart des provinces n'autorisent pas l'adoption d'un enfant par deux adultes qui cohabitent sans être mariés, les prestations d'adoption de l'assurance-emploi ne sont pas accordées au partenaire homosexuel, même si les deux partenaires ont obtenu la garde conjointe d'un enfant en vertu d'une ordonnance judiciaire.
Huitièmement, l'allocation de retrait du Régime de pensions du Canada. Seul le parent biologique ou adoptif peut demander cette indemnité et non pas le partenaire du même sexe.
Neuvièmement, il y a les prestations de pension. La Loi de l'impôt sur le revenu et la Loi sur le Régime de pensions du Canada définissent le terme «conjoint» dans l'optique des couples hétérosexuels, de sorte que les prestations en cas de décès prévues par les régimes de pension publics et privés ne sont habituellement pas versées aux partenaires de même sexe. Cet aspect touche toutes les personnes homosexuelles qui cotisent à un régime de retraite mais cela complique considérablement la tâche des parents homosexuels qui veulent assurer la sécurité financière de leurs enfants, en cas de décès prématuré d'un des parents.
Pour ceux qui suivent dans le mémoire, je vais ajouter ici quelques remarques.
Je parlerai d'un dixième aspect, le REER du conjoint. Pour les couples hétérosexuels, le conjoint qui travaille a le droit de déduire de son revenu certaines sommes versées par son partenaire hétérosexuel dans un REER. Les couples homosexuels n'ont pas la même possibilité.
Onzièmement, le transfert libre d'impôt du REER. Pour les couples hétérosexuels, en cas de décès d'un des conjoints, les fonds se trouvant dans un REER peuvent être transférés libre d'impôt au conjoint survivant. Cela n'est pas possible dans le cas du décès d'un partenaire du même sexe.
Enfin, sous la rubrique «Autres», nous aimerions simplement faire remarquer que, comme les autres couples, les parents homosexuels choisissent souvent de travailler à la maison dans leur propre entreprise de façon à pouvoir mieux s'occuper de leurs enfants. Lorsque nous avons relu le compte rendu des autres témoignages présentés au comité, nous avons noté que ces témoignages traitaient des inégalités auxquelles faisaient face les travailleurs indépendants pour ce qui est de la sécurité qu'offrent les régimes d'assurance-emploi et de pension du Canada. Nous voulons simplement réitérer les commentaires qui vous ont déjà été faits.
• 0925
En conclusion, vous avez pu constater, d'après nos
commentaires de ce matin, que le fait de refuser le statut de
couple aux parents homosexuels a diverses répercussions. Bien
souvent, les parents hétérosexuels ont accès à des prestations ou
à des possibilités qui ne sont pas offertes aux parents
homosexuels. Dans au moins deux types de situations, les couples
homosexuels peuvent toutefois obtenir des indemnités qui ne sont
pas accordées aux parents hétérosexuels.
Ce matin, nous vous avons exposé très franchement les avantages et les désavantages de la situation actuelle. En fin de compte, il demeure que le droit ne traite pas de façon équitable les parents homosexuels. Les membres de EGALE estiment que cela n'est pas juste. Nous estimons en outre que ce traitement est contraire à la Charte canadienne des droits et libertés, qu'il existe depuis bientôt de 20 ans, et qui est donc inconstitutionnel.
Nous avons également montré dans ce bref exposé que le fait qu'une loi traite de façon inéquitable certaines personnes peut modifier la portée des lois qui les traitent de façon équitable. Mardi soir, la Chambre des communes a adopté le projet de loi C-78, qui accorde aux partenaires homosexuels certaines prestations de pension de la fonction publique. Cependant, la Loi de l'impôt sur le revenu ne contient aucune disposition concernant les couples homosexuels et la plupart des régimes de pension privés n'offrent pas ce genre de prestations.
Il est certes encourageant de constater que les gouvernements tant fédéral que provinciaux ont décidé de corriger certaines dispositions législatives inéquitables à notre égard mais nous trouvons démoralisant de constater que ces réformes procèdent de façon ponctuelle. Tant que ces lois ne seront pas réformées globalement, nos enfants feront face à des difficultés financières que ne connaissent pas ceux des autres familles.
Nous sommes impatients de lire votre rapport et nous vous promettons de veiller à ce que les réformes proposées traitent toutes les familles de la même façon.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président. Nous ferons de notre mieux pour répondre à toutes vos questions.
Le président: Merci, monsieur Chaplin.
Je demande maintenant à Mme Nancy Rosenberg de faire sa présentation.
[Traduction]
Mme Nancy Rosenberg (agente supérieure, Direction de l'égalité, Syndicat canadien de la fonction publique): Bonjour. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie de nous avoir invité à vous présenter notre point de vue sur ces questions.
Je représente le Syndicat canadien de la fonction publique qui est mieux connu sous le sigle anglais CUPE. Notre syndicat est le plus important syndicat au Canada. Nous représentons des travailleurs de l'ensemble du secteur public, ce qui comprend les municipalités, les conseils scolaires, les hôpitaux, les sociétés de services publics, les services sociaux, etc., d'un bout à l'autre du pays. Nous représentons également les éducateurs du secteur des garderies.
Bien entendu, nos membres sont souvent également des parents et des travailleurs et nous sommes aux prises quotidiennement avec les défis que pose le fait de combiner ces deux rôles. Nous représentons tous les types de structure familiale possibles, y compris les familles homosexuelles.
J'aimerais dire quelques mots au sujet du contexte général de ce débat avant d'aborder plus précisément le mandat qui a été confié au comité. Il est important de ne pas oublier le contexte dans lequel nous examinons ces questions.
Les membres de notre syndicat, comme toutes les familles canadiennes, font face à un marché du travail qui offre peu de possibilités d'emploi. Il y a les emplois marginaux, les revenus familiaux qui diminuent et la pauvreté des enfants qui augmente. Voilà le contexte dans lequel nous vivons. La plupart de nos membres doivent lutter pour réussir à gagner leur vie. Voilà quel est le contexte général.
Lorsque nous parlons du travail non rémunéré, sujet qui a été abordé pendant plusieurs semaines devant votre comité, j'aimerais faire la remarque suivante. Il ne faut pas oublier, et je suis sûre que l'on vous l'a déjà dit, que tous les parents qui s'occupent de leurs enfants ne sont pas rémunérés; tous les parents le font. Les mères qui travaillent ne se contentent pas de se reposer lorsqu'elles arrivent chez elles après leur journée de travail. Les mères qui travaillent consacrent beaucoup de temps non rémunéré à s'occuper de leurs enfants à la maison, comme le font les mères et les pères qui restent chez eux pour élever les enfants, tout comme le font également les pères qui travaillent. C'est bien sûr les mères qui accomplissent le gros de ce travail, comme nous le savons. Cela est peut-être en train d'évoluer un peu.
• 0930
Mais il est vrai que tous les parents travaillent sans être
rémunérés. Si l'on décide de valoriser ce travail, il faudrait
valoriser toutes les personnes qui font ce genre de travail, et non
pas uniquement celles qui ne travaillent pas à l'extérieur pendant
certaines périodes.
Pour ce qui est des structures familiales, le mandat du comité, de la façon dont il a été formulé au départ, je ne sais pas comment vous l'avez interprété mais j'espère que vous l'avez interprété de façon plus large qu'il n'était formulé initialement, consistait à examiner les différents types de familles et l'effet qu'avaient sur elles le régime fiscal et le système de transfert.
Il est important de ne pas oublier que les structures familiales sont diverses et changeantes, que ce soit pendant toute la durée de l'existence de la famille, ou pendant les années où les parents élèvent des enfants. La réalité est très diverse; il arrive que la mère reste à la maison pour élever les jeunes enfants et retourne ensuite au travail par la suite. Ces alternances peuvent être plus ou moins longues selon les familles.
En outre, les structures familiales ne sont pas statiques, elles évoluent. Elles évoluent avec la présence d'enfants et en fonction de la situation du marché du travail. Il y a des familles où les deux parents travaillent mais où l'un d'entre eux est mis à pied, la famille devient alors une famille où il n'y a qu'un seul revenu et un des parents qui reste à la maison, non pas par choix, mais à cause de la situation du marché du travail, sur laquelle les parties n'exercent aucun contrôle. Il peut aussi se produire un divorce ou une séparation, ce qui amène la famille à passer de deux à un revenu, avec un parent à la maison et devenir une famille monoparentale. Toutes ces choses ne sont pas statiques, elles évoluent.
Compte tenu du fait que les structures familiales ne sont pas statiques et compte tenu du marché du travail actuel, il est dangereux d'isoler certains éléments du régime fiscal et il est même dangereux d'examiner le régime fiscal sans tenir compte des autres éléments. Le traitement fiscal des différentes structures familiales ne constitue lui-même qu'une petite partie d'un ensemble beaucoup plus vaste.
Il faut élaborer des lignes directrices cohérentes qui accordent un soutien à toutes les familles ayant des enfants à charge, à toutes les familles, quel que soit le statut professionnel de ses membres.
Des lignes directrices de ce genre devraient comprendre, selon nous, trois principaux éléments.
Tout d'abord, elles devraient prévoir une amélioration notable des conditions de travail de façon à aider les parents à s'acquitter de leurs obligations professionnelles et familiales. On pourrait améliorer, par exemple, les congés parentaux, les congés de maternité, les congés parentaux, pour les parents adoptifs, les parents homosexuels, et les autres. Tous les parents qui essaient d'élever des enfants ont besoin que l'on renforce ce type d'indemnité.
Deuxièmement, il faudrait également adopter des mesures fiscales. Je ne prétends pas que le régime fiscal n'a aucun rapport avec la discussion, mais ce n'est qu'un élément parmi trois. Ces mesures fiscales devraient viser à aider tous les parents et tous les enfants.
Troisièmement, l'élément central d'une politique familiale cohérente serait la mise sur pied d'un système de garderie et d'éducation global et intégré. Je suis sûre que l'on vous a déjà fait cette suggestion. J'espère que de nombreux témoins vous l'ont faite parce que finalement, la meilleure façon d'aider toutes les familles ayant des enfants et tous les enfants est de leur offrir un système de garderie qui soit de bonne qualité, accessible et financé par le gouvernement fédéral.
• 0935
Je suis sûre que vous avez entendu cette suggestion à
plusieurs reprises, parce que cela fait longtemps que le mouvement
syndical propose ce genre de choses, tout comme le mouvement de
défense des droits des enfants et les organisations du même genre.
Nous en parlons depuis longtemps. Mais il faut encore le répéter.
C'est encore la meilleure chose à faire, et de loin, et il faut
donc l'examiner très sérieusement.
Cela s'applique également bien sûr aux parents qui sont en mesure de faire un choix et qui décident d'élever leurs enfants à la maison. Les garderies ne sont pas uniquement faites pour les parents qui travaillent. Ces familles pourraient également profiter énormément d'un tel système. L'éducation des jeunes enfants, notamment ses effets et ses résultats, a fait l'objet de nombreuses études, et je suis sûre que vous les connaissez. Je sais que d'autres témoins vous en ont parlé. On a étudié la performance scolaire en fonction de l'éducation donnée aux jeunes enfants et ces études indiquent que, quelle que soit la situation socio- économique de la famille, et la situation professionnelle de la mère, les enfants qui participent à ces programmes réussissent beaucoup mieux à l'école.
Lorsque l'on parle de valoriser le travail non rémunéré et de valoriser le sacrifice que font les mères qui restent chez elles pour élever leurs enfants, on retrouve souvent dans ce débat un thème sous-jacent qu'il conviendrait d'aborder ouvertement, et dont nous devrions parler ouvertement. Le thème sous-jacent est l'hypothèse de base implicite selon laquelle les garderies ne sont en fait qu'un pis-aller et que rien ne peut remplacer une mère pour élever les enfants. Il est évident que cette façon d'élever ses enfants est un choix tout à fait valide mais on semble en déduire que, d'une certaine façon, les garderies sont une solution de rechange institutionnelle pour les personnes qui n'ont pas les moyens de faire autrement. Cela fait toujours partie des hypothèses de base que l'on retrouve dans ce genre de débat.
Le président: Excusez-moi, madame Rosenberg. Vous avez déjà parlé pendant 10 minutes et vous n'êtes même pas rendu au milieu de votre exposé; je vous demanderais donc de conclure en trois ou quatre minutes, si cela est possible.
Mme Nancy Rosenberg: Bien sûr.
Le président: Merci.
Mme Nancy Rosenberg: Il faut écarter l'idée voulant que les garderies ne sont pas une bonne solution pour élever les enfants. Pour nous, des services de garde de qualité et accessibles à tous constituent la meilleure solution. Cela est bon pour les enfants. C'est également bon pour les mères, c'est-à-dire pour les femmes. Cela aide les femmes à s'intégrer au marché du travail. Cela est bon pour la société et toute la société en profite.
Dans notre mémoire, nous mentionnons certaines études que vous connaissez déjà et qui ont examiné les services de garderie du point de vue des coûts et des avantages. Les conclusions de ces études sont tout à fait favorables à un tel système.
Pour ce qui est des aspects fiscaux, il est faux d'affirmer que la déduction pour frais de garde d'enfant, qui a été débattue ici, constitue de la discrimination contre les familles à revenu unique. C'est un élément d'équité fiscale. Nous y voyons une dépense liée à l'emploi. C'est une dépense que doivent assumer les familles où les deux parents travaillent. C'est pourquoi la Loi de l'impôt sur le revenu tient compte de ces frais et cela est normal.
Cela dit, il n'est pas sûr que la déduction des frais de garde soit une bonne mesure fiscale. Elle contient un élément d'équité fiscale mais ce n'est pas la façon dont nous procéderions. Là encore, elle ne favorise aucunement le développement de l'enfant. Cette mesure ne favorise aucunement les services de garderie de qualité. Elle n'a aucun de ces effets. Compte tenu des études qui démontrent les résultats positifs qu'entraîne la fréquentation de services de garderie de qualité, il nous semble que seules les politiques qui favorisent la prestation de tels services devraient être retenues.
• 0940
On ne peut offrir des services de garderie par le biais d'une
déduction fiscale. Il ne paraît pas souhaitable d'utiliser le
régime fiscal pour offrir des services de garderie. Nous
préférerions que l'on supprime cette déduction pour frais de garde
mais qu'on utilise les fonds ainsi économisés pour mettre sur pied
un programme général de garderie et d'éducation pour les jeunes
enfants.
Pour ce qui est de la prestation fiscale pour enfants, nous préférerions que l'on rétablisse les allocations familiales, en les fixant à un niveau qui permette réellement de couvrir les frais qu'entraînent les enfants. Nous préférons les programmes universels. Cependant, compte tenu de la façon dont cette question a évolué au cours des années, nous estimons que la prestation fiscale pour enfants représente un compromis acceptable. Cette prestation soulève certains problèmes précis, auxquels il faudrait remédier, mais le mécanisme lui-même nous paraît acceptable.
La prestation est trop faible, elle ne dure pas suffisamment longtemps. Les familles à revenu faible et moyen n'en retirent pas tout ce qu'elles devraient. Il faut donc changer certaines choses. Il y a également le fait que les provinces déduisent cette prestation de l'aide sociale, ce qui fait que les familles très pauvres n'en retirent aucun avantage. Ce sont manifestement là des problèmes graves qu'il conviendrait de corriger.
Pour ce qui est de l'imposition sur une base individuelle ou familiale, nous nous opposons absolument à ce que l'on modifie notre régime fiscal pour passer à un système fondé sur le revenu familial ou sur le revenu du ménage. Il est évident qu'un tel changement aurait des répercussions très graves sur la participation des femmes au marché du travail. Les propositions de ce genre se basent sur l'idée que les femmes ont accès au revenu familial, ce qui n'est pas nécessairement vrai. Un tel système porterait atteinte à l'autonomie financière des femmes qui est un aspect très important et qui ne peut être maintenue qu'avec un système d'imposition basé sur le revenu personnel.
Mon temps est écoulé et je vais donc m'arrêter ici. Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Epp, vous avez la parole. Nous allons utiliser des périodes de six minutes.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Merci, madame la présidente.
Le président: Monsieur le président.
M. Ken Epp: Excusez-moi. Pourquoi ai-je dit cela? Je n'en sais rien. Je devais sans doute penser aux mères qui sont ici. Vous feriez une excellente mère.
Le président: Merci.
Des voix: Oh, oh!
M. Paul Szabo: Il vous reste quatre minutes.
Des voix: Oh, oh!
M. Ken Epp: Madame Rosenberg, j'aimerais vous poser quelques questions au sujet de votre exposé. Vous avez dit quelque chose au sujet de ces hypothèses de base. À la page 4, on peut lire:
-
On semble tenir pour acquis qu'il n'est pas bon de faire garder les
enfants, que les services de garderie constituent un pis-aller.
Pourquoi affirmez-vous ceci? Lorsque les gens disent qu'ils aimeraient que les parents qui le souhaitent puissent rester à la maison pour élever leurs enfants, pourquoi est-ce que cela voudrait dire que cette solution est inférieure à des services de garderie institutionnels? D'où prenez-vous cette idée?
Mme Nancy Rosenberg: Comme je l'ai déjà dit, le choix que fait une mère d'élever elle-même ses enfants à la maison me paraît tout à fait légitime et c'est une solution à laquelle je suis tout à fait favorable. Ce genre de choix me paraît parfaitement légitime.
Je faisais allusion au fait que, dans ce genre de débat, dans la discussion, on entend souvent ce genre d'hypothèse implicite. Je ne dis pas que cela vient uniquement du fait qu'il y a des gens qui choisissent de rester à la maison ou que le gouvernement a décidé de favoriser d'une façon ou d'une autre un tel choix. Cette hypothèse implicite ne découle aucunement de ces deux éléments. Ce n'est pas ce que je dis. Je parle de la discussion. D'une façon générale, dans ce genre de discussion et de débat, lorsque nous parlons au cours de réunions comme celle-ci, dans les médias, par exemple, on constate que cette hypothèse joue un rôle.
M. Ken Epp: Mais dans le paragraphe suivant, vous dites:
-
Ce que ne reconnaît pas ce genre de mythologie, c'est le fait que
les services de garderie de bonne qualité donnent d'excellents
résultats.
De quelle mythologie parlez-vous? Lorsque vous parlez de «mythe», vous semblez dire qu'il s'agit d'un conte de fée imaginé.
Le président: Monsieur Epp, je crois que Mme Rosenberg dit que les partisans de ces solutions opposées soutiennent que leur solution est la meilleure.
M. Ken Epp: Non, ce n'est pas ce qu'elle dit.
Le président: C'est ce qui ressort de son témoignage. C'est ce que j'ai compris. Il est tout aussi faux d'affirmer que la meilleure solution est d'élever soi-même ses enfants que de dire que la meilleure solution, ce sont les services de garderie. Voilà le mythe auquel elle fait allusion.
De toute façon, laissons-la...
M. Ken Epp: Très bien, mais vous parlez de mythologie et d'hypothèses et vous dites également que «toutes les études le démontrent». J'ai vu des études dont les conclusions sont contraires. De quelles études parlez-vous? Pourriez-vous nous mentionner les études qui démontrent qu'il est préférable qu'un enfant fréquente une garderie que de rester à la maison? Avez-vous des études sur ce point?
Mme Nancy Rosenberg: Non, je ne dis pas qu'il est meilleur d'élever les enfants dans les garderies qu'à la maison. Il y a par contre des études qui ont démontré, par exemple, que la participation à des programmes d'éducation pour les jeunes enfants est reliée à de bons résultats scolaires par la suite, quelle que soit la situation professionnelle de la mère. Voilà ce que je dis.
Il peut s'agir d'une mère qui demeure au foyer mais dont l'enfant participe à un programme d'éducation préscolaire, disons trois matins par semaine, ou si la mère travaille, l'enfant suit un programme de jour. Dans les deux cas, les études ont démontré que la participation de l'enfant à ces programmes a un effet positif sur le développement de l'enfant. Voilà ce que je dis.
Quelle que soit la situation professionnelle des parents, il est bon que les enfants puissent suivre des programmes préscolaires. C'est pourquoi j'ai dit que la principale raison pour laquelle nous sommes favorables à ce genre de système, c'est qu'il bénéficie à toutes les familles, y compris à celles où la mère a décidé de rester à la maison.
M. Ken Epp: Mais c'est votre hypothèse et vous dites que les études ont démontré que... Je ne connais aucune étude qui ait démontré cela et j'aimerais savoir à quelles études empiriques vous faites allusion.
Mme Nancy Rosenberg: Très bien. Je vais vous les envoyer. Je n'ai pas ces études avec moi mais oui, il existe de nombreuses études qui ont démontré cela. Je vais vous les envoyer. Aimeriez- vous que je le fasse?
M. Ken Epp: Envoyez-nous simplement une liste de ces études, nous pourrons facilement les obtenir.
Mme Nancy Rosenberg: Très bien, je le ferai.
M. Ken Epp: Mais je ne connais pas ces études.
Mme Nancy Rosenberg: Moi, oui.
Le président: Une dernière question, alors.
M. Ken Epp: D'accord.
La dernière question que j'aimerais vous poser, parce que mon temps de parole est écoulé, est la suivante. J'aimerais obtenir une réponse précise. Prenons deux familles qui vivent côte à côte, la famille A et la famille B. Pensez-vous vraiment qu'il est normal que la famille dont un des parents travaille pour subvenir aux besoins de sa famille paie davantage d'impôt que la famille d'à côté où les deux parents travaillent? C'est ce que j'ai compris de votre exposé. Vous dites que cela est juste. À la page 6, tout en bas, vous dites qu'il ne faut pas faire de différence.
Mme Nancy Rosenberg: Oui.
M. Ken Epp: Vous dites:
-
Nous nous opposons absolument à ce que l'on adopte un régime fiscal
basé sur le revenu familial ou sur le revenu du ménage.
Là encore, j'émets une hypothèse et je vous demande de me préciser certaines choses. D'après cette affirmation, vous dites que le régime actuel est juste, même si la famille à revenu unique paie davantage d'impôt que la famille où les deux parents travaillent pour obtenir le même revenu. Vous dites que cela est juste.
Mme Nancy Rosenberg: Je dis qu'un système basé sur le revenu personnel est la solution que nous préférons parce qu'elle favorise l'autonomie financière des femmes.
• 0950
Tout d'abord, les femmes n'ont pas toujours accès à l'argent
gagné dans la famille. Il ne faut pas croire que ce soit toujours
le cas. Deuxièmement, avec un système d'imposition basé sur le
revenu familial, le deuxième travailleur, habituellement la femme
qui gagne un revenu le plus souvent plus faible, est imposé au taux
d'imposition de son mari, c'est-à-dire à un taux d'imposition plus
élevé, qui est habituellement celui du mari. Cela représente un
obstacle considérable pour le deuxième travailleur. Cela constitue
un obstacle très difficile à franchir pour une femme. Si elle
travaille et gagne 30 000 $ par an et que ce revenu est ensuite
imposé au taux applicable à un revenu de 70 000 $, cela représente
un obstacle énorme à sa participation au marché du travail.
[Français]
Le président: Monsieur Cardin, je vous accorde six minutes.
M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): J'aimerais d'abord remercier nos témoins de leurs présentations.
Madame Rosenberg, le mandat de notre comité nous porte à croire qu'il y a iniquité fiscale entre les familles canadiennes qui ont un revenu et celles qui en ont deux. Vous avez dit d'emblée que vous croyiez que ce n'était pas le cas. On ne dit pas nécessairement qu'il est équitable qu'une famille dans une situation ou une autre paie plus d'impôt, mais qu'il n'y a pas iniquité parce que l'impôt est basé sur un système individuel.
[Traduction]
Mme Nancy Rosenberg: Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris la question. J'ai dit que la déduction pour frais de garde d'enfant n'était pas inéquitable. Est-ce bien sur ce point que porte votre question?
[Français]
M. Serge Cardin: Le mandat qu'on a confié à notre comité consiste à identifier les iniquités, lesquelles sont inexistantes selon vous et votre organisation. Vous semblez dire qu'il n'y a pas iniquité au niveau du traitement fiscal d'une famille qui a un revenu ou deux, ou au niveau des frais de garde d'enfants lorsqu'un des parents reste à la maison.
Je voulais simplement répéter vos propos afin que vous puissiez confirmer que je les ai bien saisis. J'adopte d'ailleurs à peu près la même position que vous.
Vous avez toutefois porté à notre attention deux faits importants relativement au travail non rémunéré et à la reconnaissance de ce travail. Selon vous, comment pourrait-on reconnaître le travail non rémunéré effectué à la maison? Vous dites qu'il faut valoriser l'ensemble du travail non rémunéré. Quelle solution pourriez-vous nous proposer?
[Traduction]
Mme Nancy Rosenberg: Pour répondre à votre premier commentaire, je dirais que non, je ne pense pas que notre régime fiscal traite de façon inéquitable les familles où il y a un travailleur et celles où il y en a deux. La déduction pour frais de garde d'enfant est une dépense légitimement reliée à l'emploi. Là encore, comme je l'ai dit, nous ne pensons pas que cela soit une bonne politique fiscale. Ce n'est pas le mécanisme que nous utiliserions pour aider les familles. Nous préférerions plutôt aider les familles en leur offrant des services de garderie. Mais nous ne pensons pas que notre régime fiscal actuel soit discriminatoire à l'endroit de ce genre de familles.
Pour ce qui est de votre deuxième question, non, je suis désolée, je n'ai pas d'idée géniale sur la façon de valoriser le travail non rémunéré. Cela me paraît important. Nous faisons tous beaucoup de choses sans être rémunérés. Il est très important que cela soit reconnu et valorisé. Il faut souvent choisir entre le temps et l'argent, et il est difficile d'avoir les deux.
Pour ce qui est des propositions que j'ai présentées, je dirais qu'un système de garderie serait très utile. Les congés de maternité, les congés parentaux, les congés d'adoption, ou les congés de maternité et parentaux, pourvu qu'ils soient plus généreux et offerts aussi bien aux parents adoptifs qu'aux parents homosexuels, aideraient les gens à concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle. Mais pour ce qui est de la valorisation du travail non rémunéré, je n'ai pas de suggestion précise à faire à ce sujet.
M. Serge Cardin: Je n'ai malheureusement pas eu le temps de lire tout votre document, mais j'ai remarqué que vous y traitiez des allocations familiales. Vous souhaitez que l'aide donnée à la famille avec des enfants à charge soit surtout orientée vers les enfants et qu'on leur accorde donc une allocation familiale qui serait universelle et dont le montant serait augmenté.
[Traduction]
Mme Nancy Rosenberg: Oui, nous aimerions que l'on revienne à un programme universel de ce genre, absolument. Cela ne veut pas dire que la prestation ne pourrait pas être réduite pour les revenus les plus élevés. Lorsque je dis «universel», je n'écarte pas nécessairement cette possibilité. Mais le fait de remettre un chèque tous les mois à la personne qui s'occupe des enfants me paraît une excellente chose. Elle avantage toutes les familles de différentes façons. Les familles à revenu élevé peuvent mettre de côté cet argent pour l'éducation de leurs enfants, les familles à faible revenu peuvent utiliser cet argent pour acheter la nourriture et des vêtements pour leurs enfants. Dans un cas comme dans l'autre, cela profite à toutes les familles. C'est une allocation qui profite à tous les enfants.
Pour lutter contre la pauvreté chez les enfants, oui, je dirais que cela est préférable aux déductions fiscales. Ce serait préférable à la déduction pour frais de garde d'enfant, par exemple. Il n'y a qu'une très petite minorité de gens qui peuvent effectivement profiter de cette déduction. Les personnes à revenu élevé en profitent davantage que les autres. Cela est déduit du revenu de la personne qui gagne le moins, de sorte que ce sont les familles où les deux parents gagnent des revenus élevés qui profitent le plus de cette déduction. Les familles à faible revenu n'en profitent pas.
À cause du manque de services de garderie offerts à un coût raisonnable, les familles utilisent souvent des garderies qui ne fournissent pas de reçus, qui ne font pas partie du système des garderies réglementées. Ces familles ne peuvent utiliser la déduction pour frais de garde d'enfant.
C'est un ensemble de mesures disparates. Un système universel d'allocations familiales où chaque famille ayant des enfants recevrait tous les mois un chèque serait différent. Cela profiterait à toutes les familles.
[Français]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cardin.
[Traduction]
Je vous rappelle qu'avec l'ancien système des allocations familiales, si vous êtes favorable à cette solution, il fallait déclarer à titre de revenu les allocations familiales. Il y avait donc une certaine récupération.
Mme Nancy Rosenberg: Oh, vous avez raison.
Le président: Elles étaient imposables.
[Français]
Michelle, s'il vous plaît.
[Traduction]
Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or—Cape Breton, NPD): Merci.
Nancy, j'aimerais vous poser une question qui se rapporte à ce qu'a dit M. Epp au sujet de la mythologie. J'ai utilisé l'expression «hypothèse de base». Parmi les études que vous avez manifestement examinées, en avez-vous vues qui démontraient qu'il était avantageux pour les enfants d'avoir accès à des services de garde de qualité, qu'ils soient fournis à la maison ou par un tiers?
Mme Nancy Rosenberg: Oui, j'ai vu plusieurs études qui démontraient cela. C'est le facteur qui joue le rôle le plus important pour ce qui est de l'avenir de l'enfant; les premières années sont les plus importantes. Oui, je possède certaines études et comme je l'ai dit à M. Epp, je vais les transmettre au comité.
Mme Michelle Dockrill: Je suis une de ces mères qui travaillent et je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que l'on semble partir du principe qu'il est préférable pour l'enfant d'être élevé par un parent à la maison. C'est pourquoi j'aimerais beaucoup voir ces études. J'en ai vu quelques-unes mais j'aimerais beaucoup voir celles que vous possédez.
Mme Nancy Rosenberg: Très bien.
Mme Michelle Dockrill: J'ai une dernière question. Je vais d'abord m'adresser à M. Armstrong et à Mme Steele, et, Nancy, vous pourrez ensuite me donner vos commentaires.
• 1000
Certains témoins ont parlé d'avantages, de désavantages et de
situations injustes. Bien évidemment, il s'agit là d'une question
complexe qui varie selon la structure familiale, comme Ron l'a fait
clairement ressortir aujourd'hui. Je me demande ce que vous en
pensez. Pour remédier à ces inégalités, devrions-nous utiliser des
mesures correctives axées sur l'activité des parents ou axées sur
les enfants? Comme vous l'avez fait remarquer ce matin, les
structures familiales varient énormément ici et si l'on corrige
certaines inégalités qui touchent certaines structures familiales,
nous allons créer inévitablement d'autres inégalités.
Qu'en pensez-vous? Devrions-nous axer ces mesures sur l'enfant, comme Nancy l'a dit, en mettant sur pied un programme universel, peut-être une sorte d'exemption pour enfant à charge? Je prends l'exemple des allocations familiales.
M. Ron Chaplin: Permettez-moi de faire une observation sur le plan des principes? Là encore, nous avons formulé très clairement les principes sur lesquels reposait notre mémoire. Nous pensons que l'intérêt de l'enfant est le critère essentiel mais nous pensons également, puisque nous vivons dans une société libre et démocratique dont les membres partagent certaines valeurs fondamentales, que les personnes les mieux placées pour prendre des décisions dans l'intérêt de l'enfant sont, dans la plupart des cas, les parents. C'est pourquoi nous pensons que le droit fiscal et le droit familial devraient être aussi souples que possible pour faciliter la prise en compte de l'intérêt de l'enfant et non pas faire de la sociologie appliquée pour influencer le type de familles que l'on veut favoriser.
M. Todd Armstrong (Égalité pour les gais et les lesbiennes): Je ne peux parler que de ce que je connais. J'ai deux fils qui sont très différents. Le premier est en bonne santé et l'autre a certaines difficultés intellectuelles et physiques. Ils ont des besoins très différents. L'éducation préscolaire a beaucoup apporté à mon fils aîné. Je suis resté à la maison avec mon plus jeune fils, parce qu'il n'aurait jamais pu s'adapter à ce genre de vie. Le système doit tenir compte du fait que c'est moi qui ai pris cette décision pour ma famille et pour mes enfants. Il nous faut un système qui puisse s'appliquer à mes deux enfants.
Mme Michelle Dockrill: Une précision. Ron a utilisé le mot «décision» et c'est bien ce que je veux dire. Je n'affirme pas que les parents ne devraient pas avoir le droit de prendre ce genre de décision. Je dis simplement qu'une fois que les parents ont décidé ce qui était dans l'intérêt de leurs enfants, le système devrait faciliter la mise en oeuvre de cette décision.
M. Todd Armstrong: Oui.
Mme Michelle Dockrill: C'est ce que je voulais dire. Je me demande si vous êtes partisan de ce principe.
M. Todd Armstrong: Tout à fait.
Mme Marion Steele (Égalité pour les gais et les lesbiennes): J'ai cinq enfants. Je dirige également une garderie agréée, et tout cela m'intéresse beaucoup. Je suis une mère qui travaille depuis des années.
Les besoins des enfants sont évidemment la grande priorité et ce sont les parents qui doivent prendre les décisions à ce sujet. Il faut arrêter de se demander qui sont les parents. Quelle que soit la structure choisie, ce sont les personnes qui élèvent les enfants qui doivent prendre les décisions pour eux.
Cela me semble un peu inutile. Cela devrait être la structure sociale de base. Le fait que mon partenaire soit une femme n'a rien à voir avec ce qui est dans l'intérêt de nos enfants et la meilleure façon de les élever.
Mme Michelle Dockrill: Nancy.
Mme Nancy Rosenberg: Oui, c'est évidemment l'intérêt de l'enfant qui doit demeurer la priorité. Cependant lorsque l'on parle de politique fiscale, il faut également tenir compte des femmes. Par exemple, selon que la base d'imposition est le revenu personnel ou le revenu familial, si l'on veut modifier le régime actuel dans un sens qui risque de porter gravement atteinte à l'autonomie financière des femmes et à leur capacité de travailler, alors c'est un élément important dont il faut tenir compte. Cela ne touche peut-être pas directement les enfants, mais ce genre de mesure peut avoir sur eux un effet considérable.
Cela dépend donc de la façon dont on envisage la chose, en tenant compte de ses effets directs ou indirects. Il est bon que dans une unité familiale, les femmes soient autonomes financièrement, cela est bon pour les enfants mais c'est un avantage indirect.
Le président: Merci, madame Dockrill.
Monsieur Herron, vous avez la parole.
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir sur quelques commentaires qu'a faits Mme Rosenberg. Elle a déclaré au sujet des allocations familiales que c'était un régime plus universel, que ce n'était pas un ensemble de mesures disparates, et que cela visait toutes les familles, quel que soit leur revenu. Je vous laisse avec cette mise en garde qui vous donne une idée du sujet sur lequel vont porter mes questions.
• 1005
Je suis satisfait de constater que c'est la question des
services de garde qui est ressortie des derniers commentaires, et
non pas celle du régime fiscal. En fin de compte, je n'ai aucune
difficulté à accepter la notion de choix, l'idée que ce sont les
parents qui sont les mieux placés pour décider comment ils vont
élever leurs enfants, que ce soit eux-mêmes qui le fassent ou des
tiers.
Cela dit, j'accepte aussi, comme beaucoup le feraient, très facilement l'argument d'après lequel les frais de garde d'enfant constituent une dépense liée à l'emploi. Notre régime fiscal permet de les déduire de façon à inciter les gens à travailler à l'extérieur. J'essaie de ne pas penser en termes d'homme et de femme parce qu'à notre époque, à l'ère de l'information, il est tout aussi facile pour les hommes que pour les femmes de progresser dans leur carrière.
C'est une dépense liée à l'emploi et cela s'exprime donc en termes de dollars.
D'un autre côté, quelle que soit la façon d'envisager la chose, il faut reconnaître que la famille à un seul revenu doit renoncer à de l'argent, à du comptant, si un des parents élève lui- même les enfants. C'est le choix que fait cette famille. Lorsque les parents examinent la question de ce point de vue, ils constatent qu'il y a une famille qui obtient un avantage financier pour la façon dont elle choisit d'élever ses enfants alors que l'autre, la famille à un seul revenu, n'obtient rien pour le choix qu'elle a fait à ce sujet. C'est donc l'argument qu'avance cette dernière famille au sujet de la déduction pour frais de garde d'enfant.
C'est une mesure partielle parce qu'elle n'est pas universelle. Il y a une famille qui est avantagée et l'autre pas. On pourrait donc soutenir, et j'aimerais savoir quelle serait votre réaction à cette suggestion, de mettre en place deux systèmes parallèles. On pourrait choisir la déduction des frais de garde pour enfants ou un crédit d'impôt remboursable de 700 $ ou 800 $. La famille à un seul revenu recevrait donc une somme de 700 $ ou 800 $ en espèces.
Ce montant a été calculé, comme M. Szabo l'a fait clairement remarquer au cours des audiences, en tenant compte du fait qu'un tiers seulement des familles déduisent des frais de garde d'enfant et qu'en moyenne, la déduction demandée est de 2 600 $, ce qui revient à une somme nette d'environ 700 $.
Cette solution ne serait pas tout à fait équitable mais elle aurait au moins le mérite de reconnaître le travail qui est effectué au foyer, dans une certaine mesure au moins. La personne qui élève ses enfants recevrait également un peu d'argent pour ses enfants.
Aimez-vous cette idée?
Mme Nancy Rosenberg: Pas vraiment.
M. John Herron: Pourquoi? Il s'agit encore d'un choix.
Mme Nancy Rosenberg: Oui, c'est un choix mais je ne considère pas qu'une de ces familles est avantagée et que l'autre ne l'est pas. La déduction pour frais de garde d'enfant n'est pas un avantage. C'est une dépense véritablement liée à un emploi. C'est une dépense que la famille où les deux parents travaillent est obligée d'assumer pour les enfants, de façon à subvenir aux besoins de la famille. C'est une dépense. Ce n'est pas une allocation. C'est pourquoi elle est reconnue par la Loi de l'impôt sur le revenu. Cela fait partie de la structure de cette loi.
Cette loi permet de déduire toute une série d'autres dépenses liées à l'emploi et je trouve significatif que personne ne demande de déduire ces autres frais, par exemple.
M. John Herron: Cette déduction se rapporte à notre débat. Il existe d'autres dépenses mais j'essaie d'examiner cette question dans la perspective des services de garde. En donnant davantage d'argent aux familles, on les incite à consacrer à leurs enfants une plus grande partie de leur revenu disponible.
• 1010
Je vais revenir sur la déclaration conjointe, et je sais que
vous n'aimez pas trop cette idée. Étant donné que les frais de TPS
ou la déduction de TPS, je ne sais pas quel est le terme exact,
sont calculés en fonction du revenu familial et que la prestation
fiscale pour enfants est également calculée de cette façon, étant
donné que la plupart des déductions sont aussi calculées de cette
façon, ne trouvez-vous pas un peu étrange que notre régime fiscal
soit basé sur le revenu personnel?
Je pense tout de même que lorsqu'on établit un partenariat, quelle qu'en soit la structure, c'est un partenariat, c'est une équipe. Vous avez utilisé l'expression «autonomie financière» parce que vous ne savez pas si cet argent sera partagé également, mais je ne suis pas très à l'aise avec cette terminologie. Parce qu'en fin de compte, lorsque cet argent est réparti de façon égale, c'est pour les enfants. Je ne vois rien de mal à ce qu'on aide davantage les familles, pour ce qui est de la déclaration conjointe, pour que celles-ci puissent dépenser davantage pour leurs enfants.
Avez-vous des commentaires sur cet aspect?
Mme Nancy Rosenberg: Je suis désolée, je n'ai pas entendu votre dernière...
M. John Herron: Je dis que finalement, les déductions sont basées sur le revenu familial mais que nous imposons le revenu sur une base individuelle.
Dans votre section d), vous dites qu'on risque en procédant de cette façon de porter atteinte à l'autonomie financière des femmes. Je me place encore une fois du point de vue des services de garde. Je me dis que plus les familles disposent d'argent, plus ils vont dépenser pour leurs enfants. J'essaie de voir là une question reliée à la garde ou une question familiale, et non pas de me demander si cet argent sera partagé également entre les deux partenaires.
Je pense tout de même que dans le cas d'un partenariat, comme une famille, quelle que soit sa structure, c'est la solution à retenir.
Mme Nancy Rosenberg: Eh bien, d'après moi, cela ne règle pas le problème. Les parents dépenseront peut-être un peu plus d'argent pour les enfants mais il y a encore la difficulté de préserver l'autonomie financière des femmes, il y a le fait que cela constitue un obstacle à la participation des femmes au monde du travail. Je ne vois pas comment l'on pourrait mettre de côté ces aspects. Si les femmes qui gagnent habituellement un revenu plus faible sont imposées à un taux beaucoup plus élevé parce qu'on regroupe leur revenu avec celui de leur mari qui est plus élevé, cela cause un problème. Cela constitue un grave obstacle à la participation des femmes au monde du travail. Cela me paraît un élément essentiel.
Pour en revenir à votre question précédente, vous considérez que cette solution donne un peu plus d'argent à ce genre de structure familiale qui correspond à peu près à l'avantage qu'en retire l'autre type de famille. Pour moi, cela ne constitue pas un avantage. J'y vois simplement une dépense liée à l'emploi qui est remboursée en partie.
Mais comme je l'ai dit, et cela figure également dans notre mémoire, cette mesure a des effets pervers. Elle profite principalement aux familles à revenu élevé. Je ne suis pas venu ici pour défendre la déduction pour frais de garde d'enfant. Comme je l'ai dit, nous serions en faveur de la supprimer. Plutôt que de rechercher un moyen pour attribuer une somme de 700 $ ou 800 $ à l'autre type de famille, nous préférerions supprimer cette déduction.
Dans notre mémoire, nous citons l'étude de Cleveland et Krashinski. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de l'examiner mais cette étude porte sur les coûts et les avantages d'un programme de garderie. Les auteurs de l'étude examinent la possibilité de mettre sur pied un programme de garderie en utilisant les fonds provenant de la déduction pour frais de garde d'enfant, les subventions versées actuellement aux services de garderie, les allocations versées aux parents qui participent à des programmes de formation. Nous serions tout à fait en faveur d'un tel système.
En regroupant tous ces fonds, on fait passer de 7,9 milliards à 5,3 milliards de dollars, soit un pour cent du PIB, le coût qu'entraînerait la création d'un tel système. Cela est faisable. Cela permettrait de mettre sur pied un programme de garderie qui serait global et universel. C'est pourquoi nous appuyons cette proposition et nous ne sommes pas en faveur de modifier les déductions, de rajouter des crédits d'impôt, parce qu'au lieu de cela, on harmoniserait toutes ces mesures. Tous les enfants auraient accès à des services de garderie à un coût raisonnable, aussi bien les enfants qui sont élevés à la maison que les autres.
Le président: Merci.
Monsieur Paul Szabo, vous avez la parole.
M. Paul Szabo: Nancy, le comité a essayé de formuler certains principes qui guideraient les orientations que nous pourrions proposer.
Avec la complexité des structures familiales, les familles urbaines et rurales, les problèmes d'accès, de coûts, et ce genre de choses, et étant donné que le nombre des permutations et des combinaisons est très élevé, il est très difficile de répartir tout le monde en deux ou trois catégories. Cela pose toute une série de questions. Il est pratiquement nécessaire de reconnaître que ce sont les parents qui sont les mieux placés pour évaluer leur situation et choisir les arrangements qui leur conviennent le mieux pour élever leurs enfants. C'est un principe fondamental.
Par conséquent, nous devons adopter des politiques qui soient tout à fait neutres à l'égard des choix des parents et qui respectent ces choix. Cela vous paraît-il soulever des problèmes?
Mme Nancy Rosenberg: Pas du tout. Voyez-vous là deux principes généraux?
M. Paul Szabo: Oui.
Mme Nancy Rosenberg: Alors, pas du tout.
M. Paul Szabo: Très bien.
Je pense également que vous adoptez le point de vue des femmes lorsque vous parlez d'emploi rémunéré. Vous avez parlé des obstacles à l'emploi. J'ai compris, et n'hésitez pas à me corriger si je me trompe, que vous pensiez que c'est l'aspect financier qui constitue en fait le principal obstacle. Si, par exemple, les déductions pour frais de garde d'enfant et les mesures semblables n'existaient pas, il y aurait moins de femmes qui travailleraient.
Nous avons entendu des témoignages dignes de foi de la part des représentants de Développement des ressources humaines et de Richard Shillington. Il nous a monté un diagramme qui représentait le revenu du mari, au sens classique, par tranche de 10 000 $ jusqu'à 100 000 $ et plus, et sur l'axe des y, il y avait trois choix concernant la façon d'élever les enfants: les deux parents travaillent à plein temps, l'un travaille à temps plein et l'autre à temps partiel, et l'un d'entre eux s'occupe des enfants à temps plein. Il y avait donc trois scénarios.
Les données montrent que quel que soit le revenu du mari, les choix des parents sur ce point se répartissaient de la façon suivante: dans un tiers des cas, les deux parents travaillent à temps plein, dans un tiers des cas, l'un travaille à temps plein et l'autre à temps partiel, et dans le dernier tiers, un des parents reste à la maison pour s'occuper des enfants. Autrement dit, le choix des parents ne dépend pas du tout du revenu de la famille.
Cela contredit tout à fait ce que vous affirmez, et cela est fondé sur des données concrètes. Je crois que c'est Condition féminine qui avait dit que l'idée que seules les familles riches pouvaient se permettre d'avoir un des conjoints qui reste à la maison était un mythe. En fait, les données indiquent que ce n'est pas le cas. Je voulais vous signaler cet aspect et entendre vos commentaires, si vous souhaitez en faire.
Mme Nancy Rosenberg: J'ai en fait déjà vu ces données. J'ai vu les données de Richard. Lorsque je parlais des obstacles que rencontrent les femmes qui veulent un emploi rémunéré, je parlais en fait de l'imposition sur la base du revenu familial et non sur le revenu personnel.
M. Paul Szabo: Très bien, je comprends.
Mme Nancy Rosenberg: Qu'il y ait ou non des enfants. Nous pourrions parler des familles sans enfant, mais...
M. Paul Szabo: Je vais adresser mes autres questions aux représentants de EGALE.
Merci de votre exposé. Vous avez soulevé des points très intéressants. Je vais vous livrer rapidement mes commentaires et vous pourrez peut-être répondre aux aspects qui vous interpellent.
Pour ce qui est de la prestation fiscale pour enfants, à l'heure actuelle, la prestation diminue avec le revenu de la famille, pour les couples mariés. Les couples homosexuels ne sont pas visés par ces dispositions. Dans leur cas, si les deux conjoints ont la garde légale des enfants, ils peuvent demander que la prestation soit versée au partenaire dont le revenu est le plus faible, de façon à diminuer l'imposition de la prestation et donc, en augmenter le montant. De cette façon, les couples homosexuels sont favorisés par rapport aux couples mariés. Vous recevez un traitement au moins égal, voire supérieur, dans tous les cas de figure.
• 1020
On nous a beaucoup parlé du supplément de la prestation
nationale pour enfants. Vous avez tout à fait raison.
Vous parlez de la déduction pour frais de garde d'enfant dans votre point numéro trois et vous mentionnez la déduction pour conjoint et la question de l'assurance-emploi. Avec le régime fiscal actuel, au moins tant qu'il ne sera pas modifié, les partenaires de même sexe ne sont pas considérés comme des conjoints et ils peuvent ainsi fractionner leur revenu, ce qu'ils font d'ailleurs.
J'ai calculé rapidement que, dans le cas d'un couple homosexuel ayant un enfant d'âge préscolaire dont ils ont la garde conjointe et où la personne qui travaille à l'extérieur gagne 67 000 $, par exemple, le partenaire qui reste à la maison pour élever l'enfant peut recevoir 30 000 $. Selon les témoignages que nous avons entendus, la valeur des services de garde rendus par un tiers pour cet enfant s'établit entre 25 000 $ et 30 000 $, un montant qui n'est pas déraisonnable. Vous pouvez donc verser 30 000 $ au partenaire qui reste à la maison et ce montant de 30 000 $ serait imposé au taux marginal le plus faible. Pour le revenu restant, le travailleur peut réclamer jusqu'à 7 000 $ de frais de garde d'enfant parce qu'il est réputé être un parent célibataire.
J'ai donc fait un rapide calcul et sous réserve de vérification, il semble qu'un couple homosexuel où l'un des partenaires reste à la maison pour élever les enfants paie entre 5 000 $ et 7 000 $ d'impôt en moins par rapport à un couple marié où l'un des parents resterait aussi à la maison.
En outre, puisque le couple homosexuel peut fractionner son revenu, le partenaire de ce couple qui reste à la maison a le droit de cotiser au RPC et à l'AE ainsi qu'à un REER, parce qu'il gagne un revenu, le partenaire lui versant un salaire. Il est clairement avantageux de cotiser au RPC et à l'AE et cela compense toutes les différences.
Je crois que vous représentez ici les partenaires du même sexe qui élèvent un enfant. Je dirais que la possibilité de fractionner le revenu pour que les deux partenaires reçoivent en fait un salaire, ainsi que la possibilité non seulement de réclamer la déduction pour frais de garde d'enfant mais également de cotiser au RPC, à l'AE et à un REER, annule en fait tous vos arguments. Vous avez le meilleur des deux mondes, c'est tout à fait vrai. Vous allez perdre beaucoup, je peux le dire, sur la plupart de ces points.
La déduction pour équivalent de personne mariée ou le crédit d'impôt non remboursable est neutre. Cela n'a aucun effet parce que cette mesure s'applique à toutes les personnes qui ont la garde d'un enfant, quelle que soit la nature de leurs relations.
Pour ce qui est de l'indemnité pour retrait du Régime de pensions du Canada, il n'est pas possible de choisir la personne qui peut en profiter. De toute façon, ce n'est pas une demande de déduction. Toute personne qui cotise au Régime de pensions du Canada y a droit et si cette personne gagne un salaire moindre pour pouvoir s'occuper d'un enfant, elle peut faire un ajustement. Vous serez donc pénalisés si vous faites la moyenne des revenus, parce que cela réduit votre prestation. Vous ne pouvez pas de toute façon vous prévaloir de cette possibilité.
Vous avez par contre tout à fait raison pour ce qui est des prestations de retraite en cas de décès.
Le REER du conjoint n'est pas un facteur déterminant, puisque vous pouvez fractionner le revenu et cotiser à votre propre régime de retraite. Le transfert de prestation en cas de décès a par contre un effet. Seul un «conjoint», tel que définit dans la loi, peut en profiter. Mais ce n'est pas une inégalité permanente dans la mesure où le transfert ne fait que reporter l'impôt, les fonds demeurant toujours imposables. Le transfert n'a pas pour effet d'éviter l'imposition de ces sommes. Vous perdez uniquement l'avantage qui consiste à reporter le paiement de l'impôt.
• 1025
Cela dit, vous avez soulevé des points intéressants et il
semblerait qu'en fin de compte un couple homosexuel gagnant
60 000 $ ou 67 000 $, qui a la garde conjointe d'un enfant, paie
environ 10 000 $ de moins d'impôt qu'un couple marié.
M. Ron Chaplin: J'aimerais commencer par dire que mes collègues vont peut-être demander à M. Szabo de leur remettre sa carte d'affaires à la fin de la séance.
Des voix: Oh, oh!
M. Paul Szabo: Je vais être obligé de faire votre déclaration d'impôt.
M. Ron Chaplin: Il offre d'excellents conseils aux parents homosexuels.
Nous reconnaissons dans notre mémoire que vous avez tout à fait raison. Le régime fiscal actuel favorise de plusieurs façons les couples homosexuels qui élèvent des enfants.
Nous sommes venus ici ce matin parce que nous pensons que ce système n'est pas équitable et nous pensons également à la stabilité et à la planification financières. Nous voulons insister ce matin sur le fait que nos législateurs, tant fédéral que provinciaux, changent certaines dispositions législatives, de façon ponctuelle, pour répondre aux décisions judiciaires concernant la portée de la Charte canadienne des droits et libertés. Pour nous, cela complique la planification financière. Pour une famille avec enfants, pour un couple gai ayant des enfants à charge, cet aspect est encore plus important.
Cela dit, mes collègues ont peut-être quelques commentaires à faire au sujet du fractionnement du revenu?
M. Todd Armstrong: Est-ce vous qui avez fait ma déclaration d'impôt?
Des voix: Oh, oh!
M. Paul Szabo: J'espère que vous êtes venu ici pour recommander que l'on modifie la loi pour que toutes les familles aient droit aux mêmes avantages.
M. Todd Armstrong: Eh bien, très franchement, je peux vous dire que c'est bien ma position.
Il est intéressant que vous ayez choisi ces chiffres parce qu'ils correspondent à peu près exactement à ma situation familiale et en fin de compte, c'est exactement ce que nous avons fait: nous avons fractionné notre revenu et en avons tiré toutes les conséquences.
Pour revenir à l'une des questions qui a été soulevée, il s'agit d'aider les familles et d'appuyer les choix qu'elles font pour élever leurs enfants. Cela nous place dans une situation où nous avons accès à une possibilité que ne peuvent pas utiliser de nombreuses familles, parce que cela reviendrait à perdre ce revenu, cette somme de 10 000 $.
Vous saisissez très bien ces choses. Vous pouvez vous occuper de mes impôts.
M. Paul Szabo: Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Est-ce que vous ou M. Armstrong pourriez m'expliquer comment l'on peut fractionner les revenus qui figurent sur une T-4?
M. Paul Szabo: Une T-4?
Le président: Oui. Comment fractionne-t-on un revenu?
M. Paul Szabo: Vous pouvez verser un salaire. Vous pouvez ainsi obtenir au moins 7 000 $, si vous êtes un travailleur autonome.
Le président: Ah, jusqu'à la limite de la déduction pour frais de garde d'enfant. C'est un maximum.
M. Paul Szabo: C'est un maximum mais si vous êtes un travailleur autonome, vous pouvez payer quelqu'un de façon à gagner...
Le président: C'est un autre aspect. Je pensais que vous disiez que n'importe qui pouvait fractionner le revenu figurant sur la T-4. Je ne pense pas que ce soit le cas.
M. Paul Szabo: Non, non.
M. Ron Chaplin: Non, il s'agit de rémunérer votre partenaire de même sexe parce qu'il s'occupe des enfants.
Le président: C'est exact, ce que les couples hétérosexuels...
M. Ron Chaplin: ... ne peuvent pas faire. C'est bien cela.
Le président: Merci.
Au nom de mes collègues, j'aimerais vous remercier d'être venus témoigner ici ce matin. Voilà qui termine notre liste de témoins. Nous allons maintenant siéger à huis clos pour examiner notre projet de rapport.
Encore une fois, merci beaucoup d'être venus ce matin.
[La séance se poursuit à huis clos]