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SFIS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité sur le déséquilibre fiscal du comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 18 avril 2005




¾ 0810
V         Le président (M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ))
V         M. Jon Gerrard (MAL et chef de l'opposition, Parti libéral, Assemblée législative du Manitoba)

¾ 0815

¾ 0820
V         Le président
V         Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC)
V         M. Jon Gerrard
V         Mme Joy Smith
V         M. Jon Gerrard

¾ 0825
V         Mme Joy Smith
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         M. Don Bell (North Vancouver, Lib.)
V         M. Jon Gerrard

¾ 0830
V         M. Don Bell
V         M. Jon Gerrard
V         M. Don Bell
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ)

¾ 0835
V         M. Jon Gerrard
V         M. Guy Côté

¾ 0840
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD)

¾ 0845
V         M. Jon Gerrard

¾ 0850
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         M. Don Bell
V         M. Jon Gerrard
V         M. Don Bell
V         Le président
V         M. Guy Côté
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis

¾ 0855
V         M. Jon Gerrard
V         Le président
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger (ministre des Finances, gouvernement du Manitoba)

¿ 0915

¿ 0920

¿ 0925

¿ 0930
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         L'hon. Greg Selinger

¿ 0935
V         Mme Joy Smith
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         M. Don Bell
V         M. Rory Molnar (à titre personnel)

¿ 0940
V         L'hon. Greg Selinger
V         M. Don Bell
V         M. Rory Molnar
V         L'hon. Greg Selinger
V         M. Don Bell
V         L'hon. Greg Selinger

¿ 0945
V         Le président
V         M. Guy Côté
V         L'hon. Greg Selinger
V         M. Guy Côté
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         L'hon. Greg Selinger

¿ 0950
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         L'hon. Greg Selinger

¿ 0955
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         L'hon. Greg Selinger
V         Mme Joy Smith
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         M. Don Bell
V         L'hon. Greg Selinger

À 1000
V         M. Don Bell
V         L'hon. Greg Selinger
V         M. Don Bell
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis

À 1005
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         M. Jim Eldridge (conseiller spécial pour les relations intergouvernementales , ministère des Finances)

À 1010
V         Le président

À 1015
V         M. Jim Eldridge
V         Le président
V         M. Guy Côté
V         Le président
V         L'hon. Greg Selinger

À 1020
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         M. Don Bell
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         L'hon. Greg Selinger

À 1025
V         M. Jim Eldridge
V         Le président
V         Le président
V         M. Stuart Murray (MAL et chef de l'opposition officielle, Parti progressiste conservateur , Assemblée législative du Manitoba)
V         Le président
V         M. Stuart Murray

À 1055

Á 1100

Á 1105
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         M. Stuart Murray
V         Mme Joy Smith

Á 1110
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         M. Don Bell

Á 1115
V         M. Stuart Murray
V         M. Don Bell
V         M. Stuart Murray
V         M. Don Bell
V         Le président
V         M. Guy Côté

Á 1120
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis

Á 1125
V         M. Stuart Murray

Á 1130
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         M. Stuart Murray
V         Mme Joy Smith
V         Le président
V         Mme Joy Smith
V         Le président
V         M. Gerald Hawranik (porte-parole en matières financières, Parti Progressiste Conservateur, Assemblée législative du Manitoba)

Á 1135
V         Le président
V         M. Don Bell
V         M. Stuart Murray

Á 1140
V         M. Don Bell
V         Le président
V         M. Guy Côté
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis

Á 1145
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         Mme Joy Smith

Á 1150
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         M. Don Bell
V         M. Stuart Murray
V         M. Don Bell
V         M. Stuart Murray
V         Le président
V         M. Guy Côté
V         M. Stuart Murray

Á 1155
V         Le président
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président
V         M. Stuart Murray
V         Le président










CANADA

Sous-comité sur le déséquilibre fiscal du comité permanent des finances


NUMÉRO 014 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 18 avril 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¾  +(0810)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ)): Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue au Sous-comité sur le déséquilibre fiscal.

[Français]

    Bienvenue à M. Gerrard.

[Traduction]

    Je n'en suis pas à ma première visite à Winnipeg. En effet, je me rappelle être venu ici, il y a vingt ans, pour participer au débat sur la Convention du Nid-de-Corbeau. Ce fut une discussion très musclée, et plus particulièrement pour un représentant de la ville de Québec. Je suis persuadé que les choses vont se passer plus en douceur aujourd'hui.

    Vous disposez de 15 minutes pour faire votre déclaration. Après quoi, les membres du comité de tous les partis de la Chambre des communes poseront leurs questions.

[Français]

    Bienvenue, monsieur Gerrard. La parole est à vous.

[Traduction]

+-

    M. Jon Gerrard (MAL et chef de l'opposition, Parti libéral, Assemblée législative du Manitoba): Bonjour. Bienvenue au Manitoba.

    J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue à tous les membres du comité dans notre belle province. Vous avez entrepris des travaux qui sont très importants pour le Manitoba et le Canada. En effet, il se pourrait bien que la réunion d'aujourd'hui, et celles que vous allez tenir d'un bout à l'autre du pays jettent les bases de la nouvelle approche en matière de péréquation et sur d'autres aspects du déséquilibre fiscal au Canada.

    Je m'adresse à vous en tant que chef du Parti libéral du Manitoba et membre de l'assemblée législative pour la circonscription de River Heights. Je suis le chef provincial depuis six ans et demi, et je siège à l'assemblée législative depuis cinq ans et demi. J'ai en outre été député de la circonscription de Portage—Interlake de 1993 à 1997, ainsi que secrétaire d'État à la science et à la technologie ainsi qu'à la diversification économique de l'Ouest, en 1996 et 1997. Je peux donc vous parler en toute connaissance de cause des aspects tant fédéraux que provinciaux de cette situation.

    En vous souhaitant la bienvenue au Manitoba, je suis particulièrement fier de souligner le rôle joué par Stuart Garson, qui a été le premier ministre libéral du Manitoba, de 1942 à 1948, parce qu'il a joué un rôle important dans la mise en place de l'actuel système des transferts de péréquation. M. Garson était avocat de formation et possédait un flair particulier en matière de finances. Il est devenu le trésorier provincial, un poste que l'on assimilerait aujourd'hui à celui de ministre des Finances, en 1936. C'était durant la Dépression, et les finances du gouvernement du Manitoba étaient mises à rude épreuve et arrivaient difficilement à répondre aux obligations de l'époque.

    Peu après sa nomination à titre de trésorier provincial, il a persuadé le premier ministre de l'époque, M. Bracken, de lui permettre de demander à Ottawa de venir examiner l'état des finances du Manitoba, et d'évaluer dans quelle mesure il conviendrait d'apporter des modifications à la relation fédérale-provinciale qui existait alors.

    Ottawa a réagi en envoyant à Winnipeg trois jeunes membres du service de la recherche de la Banque du Canada, en janvier 1937. Comme l'a rapporté plus tard Jack Pickersgill, qui participait à l'exercice pour le compte du gouvernement fédéral, cet examen réalisé par la Banque du Canada a marqué un moment décisif dans les relations fiscales et intergouvernementales entre le fédéral et les provinces, des relations qui sont au coeur de notre discussion d'aujourd'hui. À leur retour à Ottawa, les représentants de la Banque du Canada ont fait valoir que le gouvernement provincial ne pouvait faire davantage, et qu'il avait un urgent besoin d'une aide financière temporaire pour s'acquitter de ses responsabilités courantes et pour éviter d'avoir à répudier sa dette.

    L'examen a permis au Manitoba de recevoir une aide temporaire, et a joué également un rôle central dans la mise sur pied, en 1937, de la Commission royale des relations entre le Dominion et les provinces. Cette commission fut présidée par le juge en chef N.W. Rowell, et par la suite, par Joseph Sirois, et elle est mieux connue sous l'appellation de commission Rowell-Sirois. M. Garson a rédigé le mémoire destiné à la commission Rowell-Sirois, et a participé à toute une série de négociations qui se sont poursuivies durant quelques années avec le gouvernement fédéral et les autres provinces, négociations ayant débouché sur les accords fiscaux entre le Manitoba et le gouvernement fédéral en 1942 et 1946 et qui ont réellement constitué les précurseurs de l'actuel système de transferts de péréquation.

    Jack Pickersgill, qui représentait le gouvernement fédéral lors des négociations a fait la déclaration suivante sur la situation ainsi que sur Stuart Garson :

Durant la Dépression, une initiative politique s'est fait jour au Manitoba, une initiative qui a débouché sur la péréquation des recettes provinciales. Sans la péréquation, l'unité canadienne n'aurait pas survécu. Plus qu'aucun autre homme public, Stuart Garson mérite le titre de « père de la péréquation » et du nouveau fédéralisme dynamique qui nous a évité, jusqu'ici, de sombrer de nouveau dans les « années noires ».

    À une autre occasion, M. Pickersgill a déclaré en outre :

Après être devenu premier ministre du Manitoba, M. Garson a joué un rôle constructif lors de la conférence fédérale-provinciale sur les négociations sur le partage des recettes fiscales, un rôle qui s'est révélé plusieurs fois réellement décisif. Sans un système viable de partage des recettes fiscales fédérales-provinciales et de péréquation, il est difficile d'imaginer comment le Canada aurait pu éviter la désintégration. C'est pourquoi, à mon avis, il faudrait que M. Garson figure parmi les sauveurs de la Confédération. Le partage des recettes fiscales au moyen de la péréquation est son plus noble monument.

    En tant que Manitobain et que Libéral, je suis très fier du rôle qu'a joué Stuart Garson dans les événements ayant conduit à la mise sur pied des transferts de péréquation qui sont actuellement si importants pour tant de provinces au Canada. Je pense que toutes les provinces, à l'exception de l'Ontario, ont bénéficié à un moment ou à un autre, de transferts de péréquation. Il est clair que ces transferts ont joué un rôle plus considérable dans des provinces comme la Saskatchewan, le Manitoba, le Québec et les Maritimes.

¾  +-(0815)  

    À titre d'exemple, dans les documents du budget de cette année, nous constatons que pour l'exercice financier 2004-2005, qui vient tout juste de se terminer, les transferts de péréquation du gouvernement fédéral au Manitoba se sont chiffrés à 1 699 000 000 $, et durant la même période, les recettes totales de la province se sont établies à 8,2 milliards $. Par conséquent, les transferts de péréquation ont représenté 20,7 p. 100 de toutes les recettes de la province pour l'exercice 2004-2005. Il ne fait aucun doute que ces transferts sont extrêmement importants pour offrir aux Manitobains les services qui leur reviennent.

    Du point de vue du Manitoba, j'aimerais insister sur trois points. Premièrement, depuis quelques années, le gouvernement fédéral apporte d'importantes modifications de dernière minute au montant des fonds de péréquation destinés à la province. Pour une province comme le Manitoba, il n'est pas évident de devoir effectuer un rajustement de 100 millions $ ou plus en fin d'exercice. Évidemment, il serait avantageux de mettre sur pied un système qui permettrait de calculer avec plus de précision les montants de péréquation en début d'année, ou six mois avant la fin de l'exercice, plutôt que d'avoir à composer avec des chiffres qui fluctuent autant en fin d'exercice.

    Deuxièmement, on entend parfois s'exprimer des inquiétudes au sujet du budget du Manitoba durant les périodes où l'économie se porte particulièrement bien par rapport aux autres provinces. Malheureusement, nous avons eu tendance à tirer de l'arrière par rapport au reste du Canada ces dernières années, et c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons besoin des transferts de péréquation et en bénéficions. Ce que je dirais, c'est qu'il n'existe pas de moyen parfait de réduire les transferts de péréquation lorsqu'une économie provinciale améliore ses résultats, mais je pense que c'est une question importante sur laquelle le comité devrait se pencher. Nous pouvons en constater les effets dans certaines autres provinces en ce moment. De toute évidence, s'il devait y avoir un changement majeur dans le système de transferts de péréquation, et que ce changement entraîne une baisse des revenus pour le Manitoba, alors il faudrait prévoir une période d'ajustement. Si l'économie manitobaine se porte particulièrement bien, et si les montants en provenance de la péréquation baissent radicalement, alors il faudrait s'assurer que le Manitoba n'en souffrira pas, et surtout si ces baisses se produisent soudainement.

    Peu importe le système que l'on décidera de mettre en place dans le futur, il serait important de prévoir certaines mesures de protection dans l'éventualité où les transferts de péréquation diminueraient brusquement.

    Et le troisième point que j'aimerais aborder, dans le domaine des transferts de péréquation, est celui de l'amélioration du processus de reddition de comptes concernant la manière dont les sommes reçues par le Manitoba ont été dépensées. Je suis convaincu que cette obligation de rendre compte est importante pour améliorer la nature des discussions au sujet des transferts et pour nous assurer de la poursuite du programme de transferts de péréquation. Naturellement, il n'est pas question de rendre compte de chaque cent dépensé.

    À mon avis, il est important de se remémorer la Constitution de 1982 qui stipule que les programmes de transferts de péréquation doivent permettre aux provinces d'atteindre deux objectifs. Le premier consiste à offrir aux citoyens du Manitoba des services publics d'une qualité sensiblement comparable à celle qui existe dans les autres provinces. Le deuxième consiste à offrir aux citoyens du Manitoba des services publics à un niveau de fiscalité sensiblement comparable à celui qui existe dans les autres provinces.

    Je pense que le programme de transferts de péréquation comporte également un troisième objectif qui, même s'il n'est pas inscrit dans la Constitution, est néanmoins implicite dans le programme, et c'est celui que le Manitoba devienne une province « bien nantie » qui n'aura plus besoin de transferts de péréquation—et, bien entendu, c'est notre plus profond désir.

    Donc, une partie importante de l'obligation de rendre compte d'une province devrait se traduire par une explication devant ses citoyens de la manière dont ces transferts de péréquation ont été utilisés en vue d'atteindre ces trois objectifs. Une autre partie de l'obligation de rendre compte du gouvernement provincial pourrait être de fournir un bref relevé de l'utilisation des fonds de péréquation—à titre d'exemple, tant pour les soins de santé, tant pour l'éducation.

    En un sens, tout ce dont on a besoin, c'est de préciser le montant des transferts de péréquation affecté au budget de chaque ministère provincial. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aller plus loin, mais je suis convaincu de la nécessité de mettre en place un minimum de responsabilisation. Permettez-moi de vous donner un exemple. Il y a plusieurs années, le gouvernement du Manitoba criait sur tous les toits que le gouvernement fédéral ne contribuait que pour 14 ou 16 p. 100 du financement des soins de santé. Ce chiffre avait été établi à partir du transfert spécifique du gouvernement fédéral en matière de soins de santé, et il n'incluait aucune composante des transferts de péréquation.

¾  +-(0820)  

    Le chiffre présenté alors reposait sur le fait que pas un cent sur les centaines de millions de dollars transférés au Manitoba dans le cadre des transferts de péréquation n'était utilisé pour les soins de santé. C'est ridicule, parce qu'une partie importante des sommes provenant des transferts de péréquation sont en fait utilisées pour les soins de santé. Pour ceux qui connaissent ces faits, il était évident que le gouvernement néo-démocrate de Gary Doer se couvrait de ridicule en essayant de suggérer que le gouvernement fédéral ne contribuait que pour 14 ou 16 p. 100 aux dépenses du Manitoba en matière de soins de santé.

    Évidemment, une part considérable des fonds de péréquation étaient affectés aux soins de santé, mais en ne le reconnaissant pas, on a créé une controverse. Cette controverse n'a rendu service à personne, parce qu'on se lançait des chiffres à la figure à tout venant. Elle n'a servi en fin de compte qu'à miner la crédibilité des déclarations faites dans les sphères politiques. Aussi, je pense que si nous voulons un programme qui donne des résultats, il est important de nous assurer de disposer de chiffres honnêtes et clairs.

    Un autre exemple que je pourrais donner est celui de la construction des autoroutes. Depuis des années, les gouvernements manitobains affirment que les sommes investies dans la construction routière correspondent assez bien aux montants de la taxe provinciale sur les carburants. Cette position est désormais entérinée dans une loi. La position de la province est essentiellement que pas un cent provenant des transferts de péréquation du gouvernement fédéral ne sera dépensé dans la construction d'autoroutes. C'est là un choix d'un gouvernement en particulier, et c'est de bonne guerre, mais pour pouvoir véritablement parler de responsabilisation, il est important de savoir quels ministères bénéficient des transferts, et de voir comment ces paiements correspondent aux exigences constitutionnelles visant à s'assurer que ces sommes servent à offrir à la population des services publics à des niveaux de qualité et de fiscalité sensiblement équivalents à ceux des autres provinces.

    À mon avis, une responsabilisation accrue va jouer un rôle important dans l'avenir de ce programme. Elle est importante pour toutes les provinces et pour le gouvernement fédéral. Et elle est importante pour les citoyens du Manitoba.

    Il existe bien entendu tout un éventail d'autres programmes fédéraux à part les transferts de péréquation qui sont destinés à corriger le déséquilibre fiscal, mais plutôt que d'aborder ces programmes, je préfère m'arrêter ici afin de laisser aux membres du comité du temps pour poser des questions.

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Gerrard.

    Nous allons commencer. Vous êtes très discipliné. Ça paraît que vous venez d'Ottawa aussi.

[Traduction]

    Madame Smith, vous avez les cinq premières minutes.

+-

    Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC): Merci, monsieur le président.

    Pourriez-vous élaborer un peu sur la question de la reddition de comptes et nous dire avec plus de précision ce que vous recommandez en termes de comptabilité générale, c'est-à-dire combien de dollars ont été affectés à tel et tel ministère? Ne souhaiteriez-vous pas que l'on décrive plus précisément l'utilisation ayant été faite de ces montants au sein même des ministères?

+-

    M. Jon Gerrard: Non, je ne pense pas qu'il soit utile d'aller plus loin.

    En revanche, je pense qu'il est nécessaire de présenter un relevé général de l'utilisation des sommes et d'expliquer en quoi elles ont permis d'atteindre l'objectif qui consiste à offrir des services à des niveaux de qualité sensiblement comparables, et à des niveaux de fiscalité sensiblement comparables, ainsi que le troisième objectif qui est à mon avis implicite dans le programme, et qui est le désir de faire en sorte que la province devienne une province « bien nantie » et de décrire les moyens d'y parvenir.

+-

    Mme Joy Smith: Dans le même ordre d'idées, vous utilisez des mots comme « sensiblement comparables », mais j'aimerais que vous nous donniez plus de précision en ce qui concerne les chiffres. Lorsque vous dites qu'une province ou un pays jongle avec ces chiffres, ayant moi-même une formation en mathématiques, ça me rend un peu mal à l'aise. Lorsque vous parlez de niveaux de fiscalité sensiblement comparables et de l'incidence sur le public, pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par « sensiblement comparables »? Qu'est-ce que cela veut dire pour vous, en tant que chef du Parti libéral?

+-

    M. Jon Gerrard: Eh bien, offrir des services publics à des niveaux de qualité et de fiscalité « sensiblement comparables », c'est la formulation qui est utilisée dans la Constitution, donc le mot « sensiblement » est présent. Je pense que dans le processus de reddition de comptes, il y a la capacité de la province d'expliquer ce qu'elle entend par « sensiblement comparable », même si les divers partis politiques sont susceptibles d'avoir des perspectives différentes sur le sujet.

    Au Manitoba, les taux d'imposition sur la propriété foncière sont relativement élevés, par exemple. L'une des raisons qui expliquent cette situation est que l'on prélève à même les impôts fonciers d'importantes sommes pour l'éducation. Nous avons aussi des taux d'imposition plus élevés pour certains impôts, comme les cotisations sociales, que dans les autres provinces. Les taux ne seront jamais précisément les mêmes, mais il me semble que les provinces doivent au moins être responsables et rendre compte des efforts consentis pour atteindre des niveaux de qualité et de fiscalité raisonnablement comparables.

    C'est important, non seulement du point de vue de la reddition de comptes à l'égard du système, mais aussi du point de vue économique. Si la province veut donner l'image d'une administration en pleine croissance et si elle souhaite attirer des industries et des habitants, il est important de ne pas afficher des taux d'imposition sur le revenu et des taux d'imposition sur les sociétés beaucoup plus élevés que dans les autres provinces. Parce qu'alors il ne serait pas rentable, par exemple, d'installer des sièges sociaux d'entreprises dans certaines provinces qui affichent des taux plus élevés de certains impôts sur les sociétés—par exemple, les cotisations sociales. Sur le plan économique, cela rendrait beaucoup moins intéressant pour les sociétés de venir installer leur siège social au Manitoba, par exemple. Et surtout dans le monde planétaire dans lequel nous vivons, il devient encore plus important, si l'on veut atteindre la prospérité, de même qu'une qualité de vie élevée, de pouvoir instaurer des niveaux de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

¾  +-(0825)  

+-

    Mme Joy Smith: J'aurais une autre petite question. Pourriez-vous nous expliquer comment les paiements de transfert devraient être ciblés très précisément dans certains domaines? Lorsque vous parlez des soins de santé, du financement des soins de santé, votre mémoire ne se fait pas très rassurant à ce sujet. Pourriez-vous élaborer un peu sur la question?

+-

    M. Jon Gerrard: Il est important que le système de transferts de péréquation demeure un système de transferts global. Je vais être très franc avec vous, d'accord? Je pense que la reddition de comptes dont on a besoin, c'est celle de la province envers ses citoyens. Cette reddition de comptes permet de se faire une meilleure idée de ce qui se passe. Je pense qu'il est très important que les provinces aient la capacité de faire des choix, et que le gouvernement fédéral, en effectuant ses transferts de péréquation, ne vienne pas limiter les choix des provinces au-delà de ce qui est prévu dans la Constitution—qui est justement d'offrir des services publics à des niveaux de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

[Traduction]

    Monsieur Bell, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Merci.

    Merci, monsieur Gerrard.

    Vous avez la chance d'avoir la double perspective d'un membre du Parlement fédéral et aujourd'hui, d'un chef de l'opposition dans une assemblée législative provinciale.

    L'un de vos points portait sur la reddition de comptes et la reconnaissance. Aussi, ai-je raison d'en déduire que vous suggérez que la reconnaissance au moins de la reddition de comptes globale—pas nécessairement dans les détails, mais par ministère au moins, de l'existence des fonds du gouvernement fédéral, des fonds de péréquation, qui sont injectés dans la province ou qui lui profitent—pourrait favoriser un programme de péréquation d'une plus grande envergure, ou pourrait stimuler la volonté du gouvernement fédéral, dans la mesure où l'on reconnaîtrait que des fonds en provenance du fédéral sont versés aux provinces?

+-

    M. Jon Gerrard: Je pense qu'il est important que tout le monde reconnaisse, en un sens, la part en dollars de la participation du gouvernement fédéral dans la prestation des soins de santé, dans toutes les provinces. Lorsqu'une province affirme que la contribution du gouvernement fédéral n'est que de 14 ou 16 p. 100, et que le fédéral conteste et réplique que sa contribution est plutôt de l'ordre de 30 ou de 35 p. 100, on ne fait que créer une controverse stérile. Évidemment, nous pourrions tous profiter d'un système où il y aurait un peu plus d'honnêteté. Cela faciliterait la discussion et nous empêcherait de nous lancer dans une guerre des chiffres.

    L'élément important dans ce raisonnement, c'est qu'il faut reconnaître la contribution apportée par le gouvernement fédéral; c'est très important pour assurer la survie de ce programme. Du point de vue de l'administration fédérale, il faudrait que la province fasse preuve d'intégrité dans ses actions et ses déclarations. Par ailleurs, il serait très utile qu'elle fasse preuve d'une plus grande responsabilisation dans ses rapports sur l'utilisation des sommes qui lui ont été versées.

¾  +-(0830)  

+-

    M. Don Bell: Durant tous nos déplacements aux quatre coins du pays, nous avons entendu des témoins nous dire qu'il était important que les paiements de péréquation ne deviennent pas un frein au développement de l'économie. À Regina, par exemple, le taux d'imposition est tel qu'il ne serait pas rentable de développer les ressources naturelles locales, parce que l'on perdrait un montant équivalent en paiements de péréquation.

    Vous êtes en train de suggérer que l'on mette en place un programme de mise en oeuvre ou de retrait graduel, afin que les provinces soient encouragées à développer leurs ressources.

+-

    M. Jon Gerrard: À mon avis, il est clair que lorsqu'une province améliore sa situation économique, elle ne devrait pas perdre les recettes fiscales qu'elle obtient à partir des transferts de péréquation. Il devrait toujours y avoir un bénéfice net pour la province.

    Je n'ai malheureusement pas la capacité ou le personnel de recherche nécessaires pour peaufiner les méthodes qui vous donneraient ces renseignements, mais je pense que ce qui est important, c'est le principe que si une économie provinciale s'améliore, elle devrait continuer d'enregistrer un bénéfice net. C'est-à-dire que si la Saskatchewan obtient 100 millions $ en recettes pour du nouveau pétrole, on ne devrait pas tout simplement soustraire 100 millions $ de la péréquation.

    Votre comité possède les compétences nécessaires et la capacité d'effectuer cette recherche et de faire des suggestions sur les moyens de mettre ce principe en application. Selon moi, il s'agit d'un principe fort important.

+-

    M. Don Bell: Voici ce à quoi je voulais en venir : avant de devenir député sur la scène fédérale, en tant qu'élu municipal et résidant d'une province, en l'occurrence la Colombie-Britannique, je n'avais jamais réellement réalisé l'ampleur de la contribution du gouvernement fédéral. La raison pour laquelle je m'intéresse à votre suggestion voulant que l'on détermine l'origine de certains fonds ou du moins que l'on reconnaisse l'existence de ces fonds dans l'ensemble, est que je ne pense pas que le grand public réalise à quel point la péréquation est un facteur, et que ces fonds proviennent du gouvernement fédéral.

+-

    M. Jon Gerrard: Vous avez absolument raison, sur toute la ligne. L'un des merveilleux avantages de faire partie du système canadien, que ce soit au Manitoba, au Québec, dans les Maritimes ou en Saskatchewan, c'est que pratiquement toutes les provinces ont bénéficié de la péréquation. Il est important que les citoyens reconnaissent certains avantages qui découlent de la collaboration dans le processus de péréquation, et il est important pour nous de faire en sorte que tout ce système soit un peu mieux compris qu'il ne l'était dans le passé.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell. Nous entamons une autre série de questions.

[Français]

    Monsieur Côté, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.

    Merci beaucoup pour votre présentation, monsieur Gerrard.

    D'entrée de jeu, j'avoue avoir quelques réticences concernant ce que vous nous présentez, à savoir la reddition de comptes sur la façon dont les paiements de péréquation sont utilisés. Dites-moi si je fais fausse route quelque part. Les paiements de péréquation sont présentement versés dans le fonds consolidé de chaque province et inscrits dans les revenus généraux. Naturellement, on a tendance à prendre comme exemple la santé, puisque c'est une question importante. Or, si un nombre donné de millions de dollars sont dépensés dans ce domaine, que cet argent provienne directement des taxes du Manitoba ou de la péréquation a peu d'incidence.

    Je ne sais pas quel pourcentage du budget du Manitoba représente celui de la santé, mais grosso modo, 20 p. 100 du revenu de la province provient de la péréquation. Je me disais en vous écoutant qu'en fin de compte, même si tout l'argent provenant de la péréquation était consacré à la santé, ce dernier n'en serait pas pour autant mieux dépensé, puisque les revenus de l'État seraient alors tout simplement dépensés dans d'autres secteurs.

    Procéder de cette façon ne rendrait-il pas la gestion des finances du Manitoba moins flexible? Pour utiliser un exemple un peu extrême, imaginons qu'un gouvernement souligne le fait que seulement 30 p. 100 de la péréquation est consacré au domaine de la santé. Or, qu'il s'agisse de 30 p. 100, 40 p. 100 ou 90 p. 100 a peu d'incidence, puisque les revenus de l'État seront tout simplement consacrés à d'autres budgets.

¾  +-(0835)  

[Traduction]

+-

    M. Jon Gerrard: Pour commencer, votre question visait en partie à déterminer si cela restreindrait la marge de manoeuvre du gouvernement du Manitoba. Je dirais que la réponse est non, parce que c'est le gouvernement du Manitoba qui décide dans quels secteurs il a l'intention de dépenser. Autrement dit, le fédéral ne devrait pas tenter de dicter dans quelle proportion ces fonds devraient être investis dans les soins de santé ou ailleurs. Ces fonds devraient faire partie d'un mécanisme de financement global; ils devraient être transférés en bloc sans restrictions, pour ainsi dire, de la part du gouvernement fédéral.

    C'est le gouvernement provincial qui devrait prendre les décisions sur la manière dont il entend dépenser ces dollars, et il ne devrait pas être tenu de produire un relevé très détaillé, mais seulement un aperçu, une vue d'ensemble. Et cette vue d'ensemble sera importante. Prenons l'exemple des soins de santé. Le budget pour les soins de santé au Manitoba dépasse de beaucoup les 3 milliards $. Nous recevons un certain montant par l'entremise du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, et du transfert de l'argent destiné à la santé, qui se chiffre à un peu moins d'un milliard de dollars, peut-être à 700 millions ou quelque chose d'approchant. Mais, comme nous recevons des transferts de péréquation qui, l'an dernier, se sont chiffrés à environ 1,7 milliard $, et qu'une certaine proportion de ce montant est destinée aux soins de santé... Il est peu probable que ce soit la totalité du montant. Si ce montant était réparti de la même manière que le reste des fonds du gouvernement fédéral sont dépensés, on pourrait évaluer à quelque 700 ou 800 millions de cette proportion. Mais, cela a une incidence importante sur la contribution globale du gouvernement fédéral en matière de soins de santé au Manitoba, ainsi qu'une influence majeure sur la capacité du Manitoba de fournir de meilleurs soins de santé à ses citoyens.

    Donc, ma suggestion n'aurait aucune incidence sur la marge de manoeuvre de la province. La province continuerait d'avoir la possibilité de prendre ces décisions, mais elle devrait simplement produire un relevé sur les grands secteurs de dépenses, sans entrer dans les détails, et cela nous permettrait d'asseoir une plus solide base de discussion et de compréhension de l'utilisation des dollars de péréquation, ainsi que de la manière dont ils contribuent au bien-être de la population du Manitoba, par exemple.

[Français]

+-

    M. Guy Côté: Je ne suis pas convaincu de cela. À mon avis, même si 0 p. 100 des paiements de péréquation était transféré dans le domaine de la santé, le secteur n'en serait pas moins financé: le financement proviendrait simplement d'autres sources. Il reste que sur le plan politique, il faudrait justifier qu'aucun fonds provenant de la péréquation n'est consacré au secteur de la santé.

    On parle beaucoup de la péréquation. Au cours des audiences que nous avons tenues un peu partout au pays, beaucoup de nos témoins ont expliqué qu'au cours des 20 dernières années — et particulièrement au cours des 10 dernières —, le système de péréquation avait été un peu détourné de son objectif, qui est inscrit dans la Constitution. On a souligné entre autres que cela s'était produit assez récemment par le biais d'ententes particulières. Plusieurs personnes disent qu'on devrait retourner à la norme des 10 provinces.

    Considérez-vous, en ce qui a trait au Manitoba, que l'actuelle façon de calculer la péréquation est satisfaisante pour la province ou qu'un certain nombre d'améliorations devraient être apportées à ce système?

¾  +-(0840)  

[Traduction]

+-

    M. Jon Gerrard: Essentiellement, concernant votre question à savoir si la méthode de calcul actuelle des transferts de péréquation fonctionne raisonnablement bien pour le Manitoba, je pense que la réponse, en général, est oui. Il est clair que le Manitoba a été un bénéficiaire important des transferts de péréquation. Les problèmes que j'entrevois, en adoptant le point de vue du Manitoba, c'est qu'il arrive parfois que l'on procède à des changements de dernière minute d'une ampleur considérable. Lorsque l'on établit un budget, il n'est pas toujours facile de procéder à des rajustements de dernière minute, et c'est la raison pour laquelle il serait très utile de disposer d'un plus long préavis avant de connaître les chiffres.

    Deuxièmement, je vais vous donner un exemple : durant l'inondation de 1997, certains citoyens de la vallée de la rivière Rouge ont remis leurs déclarations sur le revenu en retard. Il y a eu moins de recettes cette année-là, et l'année suivante, il y a eu une hausse. La péréquation a fonctionné en fournissant davantage de transferts durant l'année où les recettes avaient diminué légèrement, et moins l'année où ces recettes ont légèrement grimpé. En fait, la péréquation a fonctionné plutôt bien au Manitoba pour ce qui est de stabiliser les recettes de la province, et d'aider la province à offrir ses services publics. Aussi, je pense qu'en règle générale, du point de vue du Manitoba, la péréquation a fonctionné assez bien, et vous allez probablement entendre le même son de cloche de la part des autres chefs, et des autres témoins par la suite.

    Il y a cependant deux domaines précis où je pense qu'il faut intervenir. Le premier consiste à accorder un plus long préavis, et l'autre tourne autour de la possibilité de se constituer un coussin en prévision des années où il risquerait d'y avoir une diminution soudaine des transferts de péréquation.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Côté.

    Merci de nous accueillir chez vous, madame Wasylycia-Leis.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.

    Je vous souhaite la bienvenue à Winnipeg. Il y fait très beau, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Merci, monsieur Gerrard, de votre exposé, de votre mémoire ainsi que de votre vibrant plaidoyer en faveur du programme de péréquation qui est au coeur de nos discussions. Merci également de vos références à Stuart Garson, qui a joué un rôle actif à l'époque de la commission Rowell-Sirois. La situation à l'époque était semblable à celle que nous vivons aujourd'hui, c'est-à-dire une crise du fédéralisme fiscal. Et la raison d'être de notre comité est précisément de s'attaquer à cette crise.

    J'aimerais vous entendre dire si vous pensez qu'il existe réellement un déséquilibre fiscal. C'est le premier but de notre comité—déterminer s'il en existe un, dans quelle mesure, et comment corriger la situation.

    Permettez-moi d'aborder vos commentaires concernant les transferts de fonds en matière de soins de santé. Je suis sûr que les représentants du gouvernement qui vous suivent, de même que notre ministre des Finances, relèveront le défi de répondre à vos commentaires concernant la réaction du Manitoba à la baisse dans les transferts pécuniaires. Mais je pense qu'il me revient de vous dire que les commentaires du premier ministre Doer, comme quoi le gouvernement fédéral n'assumerait que 16 p. 100 de la totalité des dépenses en matière de santé, ont été repris par tous les premiers ministres, de tous les partis politiques, d'un bout à l'autre du pays. C'est une position qui a été adoptée par les gouvernements conservateurs, les gouvernements libéraux, les gouvernements péquistes, de même que les gouvernements néo-démocrates lorsque les transferts de fonds ont été réduits de façon arbitraire par le gouvernement fédéral dans son budget de 1995.

    Notre dernière visite a été dans la ville de Québec où le ministre des Finances du gouvernement libéral québécois a présenté un excellent exposé. Il nous a rappelé que les transferts généraux aux provinces, en proportion des recettes du gouvernement fédéral, ont chuté de 26,8 p. 100 en 1983, à 23 p. 100 en 1993, et à 13 p. 100 en 1998. Aujourd'hui, nous sommes revenus à un pourcentage d'environ 18 ou 19 p. 100.

    L'existence d'un déséquilibre est reconnue aux quatre coins de ce pays. La population sait que le gouvernement fédéral en réduisant les transferts de fonds à la santé et à l'éducation postsecondaire, de même qu'en modifiant les règles du jeu entourant l'assurance emploi, de sorte que davantage de personnes se sont vues forcées de se tourner vers les régimes d'aide sociale provinciaux, a joué un rôle important dans le déséquilibre fiscal que nous vivons aujourd'hui. Nous essayons précisément de tirer cette situation au clair en faisant ce voyage d'un bout à l'autre du Canada.

    Voici mes questions. Reconnaissez-vous qu'il existe un déséquilibre fiscal? Êtes-vous d'accord avec tous les gouvernements provinciaux qui exigent du gouvernement fédéral qu'il contribue à hauteur de 25 p. 100 au financement des soins de santé et à l'éducation? Êtes-vous d'accord avec toutes les provinces qui ont réclamé, en 2003, une modification de la formule de péréquation—il s'agirait d'une norme en 10 points—qui engloberait toutes les provinces et toutes les recettes fiscales? Et enfin, étant donné vos remarques comme quoi l'on devrait laisser tomber la péréquation lorsque la situation économique d'une province s'améliore, que pensez-vous des ententes particulières intervenues entre le gouvernement fédéral libéral et la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve et Labrador et maintenant, peut-être même l'Ontario?

¾  +-(0845)  

+-

    M. Jon Gerrard: Je vais d'abord répondre à votre remarque concernant la part du fédéral dans le financement des soins de santé au Manitoba qui, en ce qui concerne le Transfert canadien en matière de santé et services sociaux, a chuté à un niveau de 14 à 16 p. 100. Mais, si l'on tient compte de la totalité du financement fédéral en matière de santé au Manitoba, lorsque l'on considère les transferts de péréquation—et une part importante des transferts de péréquation—ainsi que les dépenses directes du gouvernement fédéral dans les soins de santé au Manitoba, surtout dans les communautés des Premières Nations, qui se chiffrent à plus de 400 millions $ en ce moment, alors en réalité, la part du fédéral dans le financement des soins de santé au Manitoba n'est pas de 14 ou de 16 p. 100, mais devrait plutôt atteindre les 30, 40 ou 45 p. 100. Vous avez peut-être raison pour l'Ontario, qui n'a pas reçu de transferts de péréquation, et où la part de financement du fédéral a été de 14, 15 ou 16 p. 100, mais au Manitoba, la situation est différente.

    Je pense que toute cette situation a donné lieu à des échanges disgracieux et est à l'origine d'une bonne dose de scepticisme chez les citoyens. Lorsque l'on ne s'entend pas sur la contribution qui est apportée par les divers ordres de gouvernement, on crée une situation où la crédibilité des politiciens en général est inutilement remise en question, une situation qui ne donne rien de bon pour le fédéralisme, rien de bon pour le programme de péréquation et rien de bon pour le Manitoba.

    Si vous voulez continuer à dénigrer le programme de péréquation en laissant entendre qu'il ne contribue pas au financement des soins de santé au Manitoba, libre à vous. Mais, à mon avis, ce n'est pas une lecture exacte de la situation. Si nous voulons de meilleurs programmes de péréquation, je suggère que l'une des choses qu'il faut améliorer c'est justement la reddition de comptes, et cette reddition de comptes doit s'améliorer chez toutes les parties en cause.

    Existe-t-il un déséquilibre fiscal? Je pense qu'il est important de reconnaître que les écarts entre les provinces sur le plan fiscal sont pris en compte de diverses manières. Il y a bien sûr les transferts de péréquation, mais le gouvernement fédéral utilise aussi son pouvoir de dépenser pour venir en aide aux provinces qui subissent des catastrophes, pour venir en aide aux provinces qui doivent effectuer des dépenses majeures en immobilisations—nous l'avons vu avec le canal d'évacuation des crues, par exemple—ainsi que pour aider des provinces dans d'autres secteurs en versant des contributions importantes dans des installations telles que le Centre scientifique canadien de santé humaine et animale. Il y a des centres de recherches semblables dans les autres provinces.

    Le gouvernement fédéral peut utiliser, devrait utiliser et il utilise ses pouvoirs d'application des ressources pour venir en aide aux provinces de diverses manières. La péréquation est évidemment la pierre angulaire de cet effort, mais elle n'est pas le seul élément.

    Bien entendu, étant donné la manière dont notre pays a été constitué et dont les pouvoirs ainsi que les pouvoirs d'imposition ont été répartis, il est clair que dans certains domaines cette répartition donne lieu à des échanges musclés et permanents pour que les provinces puissent s'acquitter de leurs responsabilités. Mais elles ont aussi l'obligation de rendre des comptes sur la prestation de ces responsabilités.

¾  +-(0850)  

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Wasylycia-Leis.

    C'est à vous, madame Smith.

[Traduction]

    Vous pouvez poser une brève question et obtenir une réponse tout aussi brève, parce qu'il nous reste encore huit minutes.

+-

    Mme Joy Smith: Merci, monsieur le président.

    Je ne suis pas tout à fait sûre que vous ayez répondu à ma question. Pensez-vous qu'il existe un déséquilibre fiscal, ici au Manitoba? Il y a eu des compressions dans l'éducation postsecondaire; il y a eu des compressions dans divers domaines. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la question, et nous faire des suggestions sur les moyens de régler ce problème? Comme vous l'avez dit, nous voulons faire du Manitoba une province bien nantie, et non une province démunie. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

+-

    M. Jon Gerrard: Du point de vue du Manitoba, il est très clair qu'il existe un déséquilibre fiscal. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous recevons 1,7 milliard $ en paiements de péréquation, parce que nous ne percevons pas de recettes fiscales comparables à celles d'autres provinces. Nous dépendons des mesures du gouvernement fédéral pour corriger ce déséquilibre fiscal, et plus particulièrement de la péréquation. Nous éprouverions de sérieuses difficultés, au Manitoba, si nous devions nous en sortir sans la péréquation; cela ne fait aucun doute. Ce programme est très important pour corriger cette situation.

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

    Monsieur Bell, vous avez deux minutes pour la question et la réponse.

+-

    M. Don Bell: Merci.

    En ce qui concerne la question des municipalités et du financement, un sujet qui m'intéresse, pensez-vous que des programmes comme le « nouveau pacte » et les recettes produites par la taxe sur l'essence qui circulent et sont ciblées peuvent être utiles?

    On a suggéré que ces fonds soient affectés à des fins particulières, comme lors de l'annonce ayant été faite vendredi en Colombie-Britannique, où avec la collaboration de la province, ces fonds seront versés aux municipalités pour répondre à leurs besoins en matière d'infrastructure, de transport et autres. Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez de ces programmes?

+-

    M. Jon Gerrard: Bien sûr. Je pense que l'initiative du gouvernement fédéral et le lien avec la taxe sur l'essence, qui devrait générer davantage de revenus pour les municipalités, est un excellent exemple d'une mesure positive prise par le gouvernement fédéral en vue de soutenir les municipalités. Nous constatons également que des provinces sont disposées à subventionner les municipalités en leur cédant des pouvoirs d'imposition. À long terme, je pense que nous obtiendrons de meilleurs résultats en laissant les municipalités assumer plus directement la responsabilité de lever des impôts et de dépenser de l'argent, plutôt que de dépendre autant des transferts.

+-

    M. Don Bell: Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell.

    Monsieur Côté, deux minutes.

[Français]

+-

    M. Guy Côté: Merci beaucoup.

    Dans le cas du Manitoba, vous dites qu'il y a un déséquilibre fiscal. Le Parti libéral du Manitoba reconnaît-il ce phénomène? Ce n'est pas tout à fait clair dans votre présentation.

[Traduction]

+-

    M. Jon Gerrard: Il est évident qu'il existe des disparités sur le plan des recettes fiscales entre les provinces. Il existe un déséquilibre fiscal en ce qui concerne la capacité des diverses provinces de produire des recettes dans les circonstances actuelles. Ces déséquilibres ont toujours varié d'une province à l'autre. À un moment donné, certaines se sont trouvées dans une meilleure situation économique que d'autres.

    En ce qui a trait au déséquilibre fiscal, nous pouvons compter sur les principaux transferts de péréquation. Ces transferts sont très importants pour permettre au Manitoba d'offrir des services publics convenables. La péréquation est un programme vital, et il sert à corriger le déséquilibre fiscal. Nous avons besoin de la péréquation ou d'un programme semblable. C'est très évident.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Côté.

    Madame Wasylycia-Leis, s'il vous plaît.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Si vous me permettez rapidement de revenir sur le déséquilibre fiscal, je constate que vous n'avez pas vraiment retenu l'hypothèse de l'existence d'un déséquilibre fiscal au pays aujourd'hui.

    Permettez-moi d'attirer votre attention très rapidement sur les transferts de fonds en matière de soins de santé, étant donné que vous semblez résolu à mettre tous vos oeufs dans le même panier, et à mon avis c'est là le véritable problème que nous devons affronter aujourd'hui en ce qui concerne les menaces à notre régime d'assurance-maladie. Regrouper les transferts de fonds, les paiements de péréquation et les points d'impôt dans le même panier à titre de moyen visant à nous permettre de sauver le régime d'assurance-maladie n'est pas la bonne solution. Je pense qu'au contraire il faut séparer les transferts de fonds, parce qu'ils sont le ciment qui sert à lier ensemble les morceaux de notre régime d'assurance-maladie. La diminution du montant des transferts est l'une des raisons qui expliquent la recrudescence de la privatisation dans les autres régions du pays, et heureusement, pas encore au Manitoba.

    Voici ma question. Si vous ne reconnaissez pas l'existence d'un déséquilibre fiscal, est-ce que vous acceptez à tout le moins qu'il devrait y avoir une augmentation dans les transferts de fonds pour les soins de santé afin que l'on revienne à une situation où le partage des frais suivrait une répartition de 25-75, avec des conditions à la clé afin que les principes du régime d'assurance-maladie puissent être sauvegardés?

¾  +-(0855)  

+-

    M. Jon Gerrard: Je ne suis pas d'accord.

    Premièrement, je dis qu'il existe un déséquilibre fiscal et qu'en conséquence, nous avons besoin de programmes tels que la péréquation pour le corriger.

    Deuxièmement, en 1995, lorsque le gouvernement fédéral a entrepris la lutte contre le déficit, l'une des mesures qui a été retenue fut d'augmenter les transferts de péréquation. On avait reconnu à l'époque que pour chaque dollar investi dans le transfert canadien en matière de santé et de services sociaux, le Manitoba obtiendrait de 3 à 3,50 $ par tranche de 100 $. Dans un transfert de péréquation, selon les années, le Manitoba pourrait obtenir autant que 5 à 10 $ par tranche de 100 $. Afin qu'une province démunie comme le Manitoba puisse obtenir de l'aide financière du gouvernement fédéral, on a trouvé qu'il était plus efficace d'augmenter les transferts de péréquation que d'augmenter le transfert canadien en matière de santé et de services sociaux. Par conséquent, la décision a été prise d'aider des provinces moins bien nanties comme le Manitoba de préférence afin de leur fournir un soutien concernant les problèmes de recettes fiscales. À l'époque, on avait considéré que c'était un moyen d'obtenir de l'aide financière pour les soins de santé au Manitoba.

    Et c'est pourquoi il est très important que l'on reconnaisse la valeur des transferts de péréquation et que l'on rende des comptes à leur sujet, notamment en présentant un relevé général des secteurs où on les a investis. Il n'est pas nécessaire de présenter un relevé détaillé.

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Wasylycia-Leis.

    Monsieur Gerrard, au nom de tous les membres du comité, je vous remercie pour votre excellente présentation ainsi que pour votre contribution aux travaux du sous-comité. Toutes vos suggestions seront prises en compte. Encore une fois, merci de nous accueillir à Winnipeg.

    Nous allons maintenant prendre une pause de cinq minutes, de façon à permettre aux autres invités de s'installer.

¾  +-(0858)  


¿  +-(0907)  

[Traduction]

+-

    Le président: Bienvenue, à vous tous.

    Nous avons l'honneur d'accueillir M. Greg Selinger, ministre des Finances, du gouvernement du Manitoba.

[Français]

    Bienvenue au Sous-comité sur le déséquilibre fiscal.

[Traduction]

    Vous disposez de 15 minutes pour nous présenter votre déclaration préliminaire. Après quoi les membres du comité de tous les partis à la Chambre des communes vous poseront des questions à tour de rôle.

    Merci beaucoup d'être venu et de contribuer à nos travaux.

[Français]

+-

    L'hon. Greg Selinger (ministre des Finances, gouvernement du Manitoba): Merci, monsieur le président. Nous sommes très heureux que votre sous-comité soit ici, à Winnipeg, aujourd'hui.

[Traduction]

    Le sujet à l'ordre du jour, c'est-à-dire le déséquilibre fiscal, est à mon avis l'un des enjeux les plus importants de notre pays, parce qu'il détermine réellement la capacité des divers ordres de gouvernement de répondre aux besoins de leurs citoyens. Je suis accompagné aujourd'hui de mon sous-ministre aux Finances, Ewald Boschmann; de celui qui s'occupe de toutes les questions entourant les transferts de fonds, Rory Molnar; et également de Rob Balacko qui effectue aussi passablement d'analyses techniques ainsi que l'un de nos vétérans, Jim Eldridge qui s'est occupé durant de nombreuses années des relations fédérales-provinciales et qui a été greffier du conseil exécutif. Son expérience précieuse nous permet de remettre les choses dans leur contexte historique. Nous répondrons avec plaisir à toutes vos questions sur la situation passée, présente ou même future de ce programme.

    Nous avons préparé une présentation à votre intention. Je vais la parcourir rapidement et faire certains commentaires. Je pense que vous en avez tous reçu une copie.

    Premièrement, nous faisons valoir l'argument très simple que la réussite du Canada en tant que pays est intimement liée à sa capacité de gérer ses accords fiscaux internes. La diversité structurelle de notre pays crée des défis importants. Même si nous ne sommes qu'une seule nation, il reste que le potentiel au chapitre des ressources naturelles varie considérablement. Par conséquent, on assiste aussi à une variation considérable de la capacité fiscale, parce que les ressources naturelles sont les réserves des provinces.

    Par exemple, l'année dernière, l'Alberta a tiré 32 p. 100 de ses revenus des ressources naturelles, tandis que la Colombie-Britannique et la Saskatchewan retiraient chacune environ 12,5 p. 100 de leurs revenus de la même source, et toutes les autres provinces canadiennes ont tiré 2 p. 100 ou moins de leurs revenus de leurs ressources naturelles. On peut déjà voir pointer la question du déséquilibre fiscal. Si en Saskatchewan, 12,50 $ par tranche de 100 $ proviennent des revenus du pétrole et du gaz ainsi que de la potasse dont les prix sont déterminés sur le marché mondial, et si au Manitoba, même avec nos abondantes ressources hydrauliques, nous ne tirons que 2 p. 100 de nos recettes des ressources naturelles, on peut en déduire que cette situation crée une pression énorme sur les provinces dont les ressources naturelles sont insuffisantes pour garantir leur compétitivité par rapport aux autres provinces, sans avoir à prélever des impôts trop élevés ou à restreindre indûment les services publics à leurs citoyens

    D'autres données démographiques viennent expliquer la question du déséquilibre fiscal, des données comme le vieillissement, l'immigration, la croissance dans les populations des Premières nations, la mondialisation, les changements dans la structure des échanges, les changements dans les règles régissant le commerce mondial, ainsi que l'importance croissante du savoir en tant que produit négociable et à titre d'intrant dans les processus de fabrication. Les prix de l'énergie sur les marchés internationaux continuent de grimper en flèche, ce qui a une incidence sur les déséquilibres fiscaux que l'on constate d'un bout à l'autre du pays. Le rendement des provinces importatrices d'énergie est limité par les coûts élevés de la dépense en énergie, notamment dans des provinces comme l'Ontario, alors que les provinces exportatrices d'énergie récoltent des bénéfices en raison de la remontée des prix à l'échelle internationale.

    Le défi que doit relever notre fédération consiste à remettre en perspective le déséquilibre fiscal qui s'est installé ces dernières années et à le ramener au point d'équilibre. Les outils de gestion dont nous disposons pour venir à bout du déséquilibre fiscal ont besoin de renouvellement. Le processus a besoin d'être renforcé. Nous avons l'intention aujourd'hui de vous proposer quelques mesures concrètes sur les moyens d'y arriver. Nous pensons en effet que toutes les solutions que l'on pourrait envisager en vue de corriger le déséquilibre fiscal devraient reposer sur un ensemble de principes rigoureux ainsi que sur les renseignements les plus précis et les plus à jour possibles afin que les responsables puissent analyser de façon éclairée l'ampleur du déséquilibre fiscal et les moyens de l'éliminer.

    À la page 4, je décris les principes directeurs qui devraient régir les accords fiscaux. Je suis sûr que vous avez déjà exploré ce terrain auparavant. Ces principes comprennent notamment le caractère suffisant et la durabilité—il arrive parfois que l'on sacrifie la suffisance à la prévisibilité, et à notre avis il s'agit d'un mauvais compromis au bout du compte—l'équité, l'efficacité, la transparence et l'obligation de rendre compte. Par suffisance, on entend le fait que les ressources sont suffisantes pour répondre aux besoins des Canadiens, pour permettre aux provinces d'offrir des services publics à des niveaux sensiblement comparables de qualité et de fiscalité, peut-être pas exactement les mêmes, mais sensiblement les mêmes. Par équité, on entend la possibilité d'offrir ces niveaux comparables. Par efficacité, on entend la possibilité de mettre en place un ensemble d'accords fiscaux qui n'entraînent pas de distorsion dans les décisions d'affaires ou personnelles en fonction du déséquilibre fiscal. L'Alberta, par exemple, possède une économie très dynamique. Nous ne voulons pas que ce soit le seul endroit où les jeunes aient envie d'aller s'installer. Nous voulons qu'ils aient la possibilité d'aller vivre dans toutes les provinces du pays, et d'avoir la possibilité d'y mener une vie décente et d'y avoir des perspectives d'emploi décentes.

    Enfin et surtout, la transparence et l'obligation de rendre compte afin que chaque ordre de gouvernement fournisse des renseignements clairs sur les dépenses effectuées à l'aide du financement—j'ai remarqué que vous aviez eu une conversation à ce sujet, tout à l'heure—et que les provinces assument la responsabilité de leurs décisions en matière de financement ou de prestation des services.

    La portée du déséquilibre fiscal tourne habituellement autour de deux termes assez obscurs. Il est très difficile d'obtenir un clip sonore les mentionnant si vous êtes un élu abordant le déséquilibre fiscal vertical ou horizontal, mais il reste que ces termes nous aident à comprendre les enjeux.

    Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux est le principal outil utilisé pour s'attaquer au déséquilibre fiscal vertical, qui correspond à la capacité des provinces responsables des services à forte croissance comme la santé et l'éducation de disposer de ressources financières suffisantes pour pouvoir les assurer. Ainsi, le gouvernement fédéral perçoit 67 p. 100 de tous les impôts sur le revenu des particuliers, et il laisse le reste aux provinces; mais les provinces sont responsables des programmes à forte demande et à coûts élevés, comme l'assurance-médicaments, les soins à domicile, les soins de santé en général ainsi que l'éducation postsecondaire.

    D'un autre côté, la péréquation est le principal outil destiné à corriger le déséquilibre fiscal horizontal, et le problème à cet égard correspond à la capacité des provinces d'offrir, encore une fois, des services publics à des niveaux de qualité comparables. On se retrouve avec la situation où l'Alberta, d'un côté de la balance, possède une capacité fiscale de 136 p. 100 supérieure à celle de l'Île du Prince-Édouard, à l'autre extrémité de la balance. Cette situation ne facilite pas beaucoup les choses à certaines provinces qui souhaitent demeurer dans la course et offrir aux citoyens des conditions sensiblement comparables.

    En ce qui concerne le déséquilibre fiscal vertical, nous aimerions faire deux ou trois commentaires. Le gouvernement fédéral possède les ressources les plus importantes, mais il se trouve que les responsabilités d'assurer les programmes sont surtout de la compétence des provinces. Le coût rattaché au respect des obligations constitutionnelles est supérieur à la capacité des provinces de générer des recettes.

    Le Conference Board du Canada a publié un rapport très utile à cet égard. Ce rapport montre que, dans les années qui viennent, le gouvernement fédéral—et il le reconnaît lui-même—dégagera des excédents croissants, alors qu'au total, les provinces continueront de se débattre pour maintenir leur équilibre budgétaire. Ce déséquilibre sur le plan de la responsabilité et des ressources a suscité énormément de conflits depuis les 25 dernières années. Des conflits qui sont loin d'être réglés, et certains témoignages que vous avez entendus de la part des autres provinces et ceux que nous ferons nous-mêmes viendront expliquer pourquoi.

    Ce conflit a été exacerbé par les décisions unilatérales et ponctuelles du gouvernement fédéral de modifier les règles du jeu concernant les transferts, de manière à limiter ses risques financiers et ses obligations. Ces décisions ont placé les provinces dans une situation telle qu'elles n'ont eu d'autre choix que de venir se plaindre de n'avoir pas été consultées lors du processus de décisions.

    Certains disent qu'en fin de compte, ce sont les recettes du gouvernement fédéral. Je pense qu'il est important de souligner que les gouvernements provinciaux ont abandonné leur marge fiscale au gouvernement fédéral à l'époque de la Deuxième Guerre mondiale afin que le fédéral ait le champ libre pour orchestrer l'effort de guerre. Cependant, le gouvernement fédéral ne leur a jamais rendu cette marge fiscale une fois la guerre terminée. Il leur a rendu plutôt des programmes spéciaux, des programmes à frais partagés. Donc, les provinces ont agi en toute bonne foi en abandonnant leur capacité fiscale, et elles l'ont récupérée durant un certain temps avec des programmes à frais partagés à 50 p. 100. Puis ces programmes ont graduellement été plafonnés et réduits, avec pour résultat de laisser les provinces se débrouiller avec les responsabilités sans la marge fiscale, qui elle est demeurée entre les mains du gouvernement fédéral.

    On peut donc voir qu'il y a un décalage entre les responsabilités rattachées aux programmes et les ressources disponibles, et que ce déséquilibre relatif aux programmes est exagéré ou même exacerbé, comme vous le verrez à la page 7, par les exigences liées à la croissance des programmes. Il y a un petit graphique à la page 7 qui vous donne une idée des défis que les gouvernements provinciaux doivent affronter. Les provinces, au total, commencent à dépasser le gouvernement fédéral pour ce qui est de l'ampleur des programmes qu'elles offrent. Le programme de la santé, bien entendu, est le plus imposant avec 40 p. 100, et il subit des pressions extrêmement fortes.

    Le seul programme fédéral important à subir des pressions est celui de la sécurité de la vieillesse, et comme vous pouvez le voir sur le tableau, il représente somme toute une part assez modeste de la totalité de ses responsabilités en matière de programmes. À l'échelle des provinces, la pression la plus forte s'exerce sur les programmes de santé. Ces programmes représentent en effet 40 p. 100 de notre budget. On peut voir que la sécurité de la vieillesse, qui subit une certaine pression de croissance représente une très petite part des responsabilités fédérales avec environ 5 p. 100. Donc, on constate une pression de croissance de 5 p. 100 contre une pression de croissance de 40 p. 100, ce qui représente une différence majeure—pour le même groupe de population, les personnes âgées.

    Même s'il est aussi vrai que les coûts du service de la dette du gouvernement fédéral sont plus élevés que ceux des provinces et des territoires, il reste qu'étant donné la manière dont le gouvernement fédéral a structuré ses budgets, on constate que cette dette s'est retrouvée considérablement réduite, et particulièrement en pourcentage du PIB. Cette dette ne représente plus que 30 p. 100 du PIB aujourd'hui. Dans la plupart des provinces, même si le ratio de la dette par rapport au PIB a diminué dans la plupart des cas, il reste que ces ratios sont encore supérieurs à 30 p. 100 du PIB.

¿  +-(0915)  

    À la page 8, sur le graphique illustrant les excédents prévus pour le gouvernement fédéral, vous verrez que même dans ses propres calculs, ces excédents continuent de croître. Le gouvernement fédéral a sous-estimé ses excédents six fois sur sept, pour un total de 60 milliards $, une somme qui n'est pas négligeable. Au Manitoba, nous avons fait valoir que si l'on n'est pas en mesure de déterminer cet excédent, il sera impossible d'en débattre au Parlement ou à l'assemblée législative; ce qui revient à dire que cet excédent est à l'abri du regard scrutateur du public et des examens tant qu'il n'est pas constaté, et puis soudainement, il est appliqué sur la dette, et il n'y a pas moyen de discuter à savoir si cela devrait être la première priorité pour l'utilisation de ces ressources. À la lumière des expériences passées, on entretient de sérieux doutes quant à la possibilité que l'on ait encore fait preuve d'une prudence exagérée dans les futures prévisions sur le montant des excédents, et cela se pourrait fort bien.

    Passons maintenant à l'accord sur la santé de 2004, ce fut l'une des rares occasions où les provinces et le gouvernement fédéral en sont venus à une décision unanime : durant le dernier cycle de discussions, tous se sont entendus sur la nécessité de conclure un nouvel accord sur la santé. Cet accord a permis d'obtenir une augmentation considérable au cours de la prochaine décennie, et il comporte un certain caractère de durabilité grâce à une clause d'indexation. Pour la première fois, il a fait en sorte que la contribution fédérale aux grands programmes sociaux soit supérieure en dollars par habitant à ce qu'elle était lorsque le gouvernement a amorcé son mandat; le tableau suivant le montre bien. Il faut remonter jusqu'en 1995-1996 pour voir le gouvernement fédéral apporter une contribution aussi élevée qu'elle l'est aujourd'hui—et même alors, cette contribution n'a jamais atteint le sommet d'aujourd'hui. De 1995-1996 à 2004-2005, la part de la contribution fédérale aux grands programmes sociaux a toujours été inférieure à celle de 1995-1996. Ce n'est qu'au cours de cette dernière année 2004-2005, que le fédéral a réellement entrepris le rattrapage par rapport aux compressions qui avaient été faites vers le milieu des années 90. Cette situation explique facilement que les provinces aient dû absorber un fardeau beaucoup plus lourd, tout en recevant une contribution inférieure de la part du gouvernement fédéral.

    Ce fut un bon accord, au sens où tout le monde était présent autour de la table, et que l'on en est venu à un consensus. On s'est rapproché de l'objectif consistant à ramener la contribution du fédéral aux soins de santé à environ 25 p. 100, puisque cet accord ajoute trois points de pourcentage à la part de financement assurée par le fédéral. Une bonne partie du financement des soins de santé provient des services votés; l'accord ne porte pas sur les transferts ponctuels dont nous avons bénéficié, dans une large mesure, et qui pour la plupart prennent fin au bout de trois ou quatre ans, laissant la province se débrouiller avec ses problèmes. Ces transferts ponctuels sont à l'origine de grandes frustrations. Je me rappelle qu'il y a seulement deux budgets de cela, le fédéral avait annoncé un programme d'immunisation vraiment intéressant et sans doute très valable, mais le financement ne portait que sur trois ans. Au bout des trois ans, on ne cesse pas de vacciner les enfants; il faut continuer à le faire. Donc, ce programme est retombé entièrement sur les épaules des provinces.

    En ce qui concerne la contribution du gouvernement fédéral aux soins de santé, vous pouvez voir sur le tableau ce que l'accord fédéral-provincial a produit sur le plan de la durabilité, puisque le financement a légèrement augmenté à cet égard. Même si on se situe toujours en-deçà de l'objectif de 25 p. 100 avancé par les premiers minisres, il reste que les choses se sont améliorées.

    Cependant, il y a eu un prix à payer, et ce prix a été que l'accord s'est amélioré au détriment du financement de nos programmes sociaux et de l'éducation postsecondaire. On n'a tout simplement pas tenu compte de la recommandation du rapport Romanow qui suggérait d'atteindre cet objectif de 25 p. 100 du financement des soins de santé sans pour autant retirer quoi que ce soit au financement de l'éducation postsecondaire et des services sociaux. Malheureusement, le gouvernement fédéral n'a pas suivi cette recommandation, et il a décidé de piger 2,7 milliards $ dans l'enveloppe des services sociaux et de l'éducation postsecondaire pour les transférer dans celle de la santé. Donc, la contribution du gouvernement fédéral à tous les transferts aux provinces en matière de santé est désormais de 62 p. 100. C'est plus que la moyenne historique, mais ce choix a eu pour effet de laisser la contribution à l'éducation postsecondaire et aux services sociaux bien en-deçà du taux historique de contribution, ce qui a entraîné des problèmes importants à ce chapitre. Vous pouvez voir sur le graphique de la page 14 la part de la contribution qui est de l'argent frais et celle qui provient d'une compression dans les transferts.

    Peut-être que cela pourrait sembler une argumentation auto-référentielle, mais on pourrait faire valoir que les provinces ont dû combler le vide laissé par la diminution dans les ressources affectées à l'éducation postsecondaire et aux services sociaux. Donc, c'est en réalité des fonds provinciaux qui ont été transférés dans l'enveloppe de la santé, sous le couvert d'une contribution du gouvernement fédéral. On pourrait avancer cet argument, parce qu'il est possible de montrer que le transfert provient du remplissage à même les ressources provinciales. Je ne fais ce commentaire que pour illustrer que ce transfert de ressources a réellement entraîné un coût pour les provinces, un coût qui a été déchargé par le gouvernement fédéral sur les épaules des gouvernements provinciaux.

¿  +-(0920)  

    Dans sa présentation, le gouvernement du Québec a fait valoir un point très intéressant. Il a montré en effet que les contributions égales par habitant ont des effets très défavorables sur certaines provinces en ce qui a trait à la satisfaction des besoins des bénéficiaires des services sociaux. En effet, si une administration comporte davantage de bénéficiaires d'aide sociale, alors il est clair que les contributions par habitant se révèlent moins intéressantes dans cette administration que dans les autres provinces où moins d'habitants ont besoin de ce type d'aide. On constate donc une certaine inégalité à cet égard aussi que les représentants du Québec ont soulignée, et je trouve qu'ils ont avancé un argument très valable.

    Pour ce qui est du transfert à l'éducation postsecondaire, il est passé d'environ 15 p. 100 du FPÉ à 7 p. 100 avec le Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Autrement dit, il a chuté de plus de 50 p. 100. C'est vraiment exorbitant dans une société planétaire où le savoir est en passe de devenir la clé de la réussite future.

    Maintenant, le gouvernement fédéral a adopté d'autres mesures en ce qui concerne les prêts étudiants et les ressources qui aident à stimuler la demande pour l'éducation postsecondaire. Autrement dit, davantage de personnes souhaitent avoir accès à l'éducation postsecondaire. Aussi, on a pris des mesures valables à cet égard, mais on a en réalité nui à la capacité des institutions de fournir cet enseignement en diminuant leurs ressources de moitié. On a donc stimulé la demande, puis on a réduit la capacité des institutions d'offrir le savoir, l'enseignement, ainsi que les environnements dans lesquels les personnes peuvent développer de nouvelles méthodes pour favoriser la prospérité économique et la prospérité individuelle dans le monde. Il existe donc un déséquilibre dans ce domaine, et il faut s'en occuper.

    Pour ce qui est des services sociaux, je sais qu'il y a des spécialistes à cette table, mais il vaut la peine de faire valoir qu'il fut un temps, dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada, le RAPC, où le risque lié aux coûts pour la plupart des citoyens vulnérables de notre société était partagé à parts égales. Actuellement, en mettant fin au RAPC dans le budget Martin de 1995-1996, le gouvernement fédéral a réellement laissé les provinces assumer 100 p. 100 du risque d'un repli économique. Pour tous les nouveaux bénéficiaires d'une forme quelconque d'aide sociale, 100 p. 100 des coûts rattachés à chaque nouveau cas sont à la charge des provinces. Cette situation leur impose un énorme fardeau.

    En fait, je pense que cela représente un fardeau considérable et même insupportable pour les provinces dans une situation où un repli économique sévère et prolongé se maintiendrait. Nous n'avons pas encore vécu cette situation, ou du moins pas depuis 1995-1996, mais nous avons connu quelques baisses. Nous avons eu la chance de récupérer assez rapidement de ces baisses, mais l'histoire foisonne de ces épisodes de repli économique. La prochaine fois que cela surviendra, les provinces vont plonger dans le déficit pour venir en aide à leurs citoyens ou alors elles vont opérer des compressions dans leurs programmes, ou dans le soutien des programmes, au moment où ils en auront le plus besoin.

    Si on combine cela aux réductions apportées à l'assurance emploi, on peut voir que les provinces subissent un assaut sur deux fronts. Le programme d'assurance emploi est restreint et il n'y a plus de régime d'assistance publique, ce qui a pour effet d'imposer un fardeau encore plus lourd aux provinces. Je pense que c'est un élément qu'il faut garder à l'esprit. La plupart des gens ne parlent plus jamais du RAPC, mais c'était pourtant l'un des meilleurs outils que nous avions au pays pour venir en aide aux personnes dans le besoin dans les moments de repli économique.

    Maintenant, en ce qui concerne le déséquilibre fiscal horizontal et la péréquation, ces deux concepts ont été introduits pour la première fois en 1957. Le gouvernement fédéral avait réalisé que la valeur des paiements qu'il fournissait aux provinces n'était pas la même pour toutes. C'est le seul transfert inscrit dans la Constitution. Je suis sûr que vous connaissez déjà cette formulation, mais je vais quand même la répéter :

Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation propres à donner aux gouvernements provinciaux des revenus suffisants pour les mettre en mesure d'assurer les services publics à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

    Le paragraphe 36(1), que l'on passe habituellement sous silence, est important lui aussi. Il parle d'un transfert qui servirait à promouvoir l'égalité des chances et le développement économique et qui devrait fournir à tous les Canadiens des services publics essentiels sensiblement comparables.

    Le nouveau régime de péréquation du gouvernement fédéral a été mis en place tout juste l'automne dernier. Il prévoit effectivement une aide financière accrue à court terme. Cependant, il laisse place à beaucoup d'incertitude, en raison de ce nouveau comité fédéral qui ne comporte aucun représentant des provinces par suite d'une décision unilatérale du fédéral. Nous avons suggéré un certain nombre de très bons candidats qui, à notre avis, auraient pu améliorer la crédibilité de ce comité. Mais ils ont malheureusement été rejetés par le gouvernement fédéral parce que l'on n'a pu obtenir l'unanimité. Pouvez-vous imaginer quelle serait la situation si le gouvernement fédéral devait attendre d'obtenir l'unanimité au Parlement pour pouvoir aller de l'avant? Ce serait la paralysie totale. La majorité de provinces avaient toutefois recommandé des personnalités qui nous semblaient très capables, à la fois sur le plan de la formation et de l'expérience en administration publique.

    Nous en sommes arrivés à un accord à l'automne. Ce n'était pas un accord parfait. Et en fait, il comportait d'importantes lacunes de base. Néanmoins, il offrait une certaine stabilité en prévision d'une diminution importante dans les transferts de péréquation, puisque cette diminution était à prévoir étant donné l'utilisation de la formule des cinq provinces qui est déjà en place malgré ses imperfections.

¿  +-(0925)  

    Donc, cet accord offrait une certaine stabilité, mais c'était au détriment de la suffisance. Depuis le début, les transferts de péréquation ont correspondu à environ 1,1 p. 100 du PIB. Même avec la mise en place de ce programme, ils ne représenteront plus qu'environ 0,8 p. 100 du PIB. Donc, il comporte plus de stabilité, mais à un niveau insuffisant. Il conserve la norme dépassée des cinq provinces, et il exclut 50 p. 100 des frais d'utilisation du financement de base, une recommandation de longue date sur laquelle s'entendent toutes les provinces. En effet, elles recommandent depuis longtemps la protection de la totalité des recettes et la norme englobant les dix provinces. Je me rappelle même que Mike Harris était en faveur de cette approche à Victoria, il y a quelques années; donc nous en étions venus à un consensus à l'échelle du pays là-dessus.

    En ce qui concerne le nouveau régime fédéral, l'indexation à 3,5 p. 100 signifie en réalité que la péréquation va continuer de diminuer en proportion des contributions du gouvernement fédéral, ou des exigences du budget fédéral, et qu'elle finira par devenir de moins en moins importante.

    Il y a un problème avec le programme de péréquation. Qui en bénéficie le plus? Il est étonnant que les avantages soient répartis de façon aussi inégale; il est difficile de voir où est l'équité dans sa conception même. C'est un véritable problème. On peut s'attendre à ce que les provinces soient très mécontentes si elles n'arrivent pas à comprendre pourquoi certaines provinces reçoivent moins que d'autres.

    Pour ce qui est de la réforme de la péréquation, des étapes successives seront nécessaires pour transformer l'actuel système. Mais les fondements théoriques du programme sont sains et ne devraient pas être abandonnés. Nous pensons que le concept de la péréquation tel qu'il est inscrit dans la Constitution est solide, mais que c'est la mise en application qui laisse à désirer.

    Voici donc nos recommandations. Nous devrions réévaluer les responsabilités de chaque ordre de gouvernement, de même que leur autorité fiscale, et tenter de déterminer si les provinces dotées de programmes à forte croissance possèdent l'autorité fiscale suffisante pour répondre à leurs besoins. Nous recommandons que le Transfert canadien en matière de programmes sociaux soit divisé en deux. Un transfert pour l'éducation postsecondaire, et un autre pour les services sociaux, et que l'on y ajoute un transfert séparé pour toutes les mesures requises pour l'enseignement préscolaire, le développement du jeune enfant et les garderies. Tous ces programmes devraient se trouver dans la même enveloppe. Et il faudrait prévoir une autre enveloppe pour l'enseignement postsecondaire, une autre pour les services sociaux et encore une pour les soins de santé. Ainsi, on pourrait commencer à mettre en place des systèmes de reddition de comptes concernant la manière dont ces fonds sont affectés et à quelles fins.

    Le programme de péréquation proprement dit a besoin d'être amélioré, et surtout sur le plan de la suffisance, afin qu'il devienne plus complet, et non moins complet. Cela signifie que l'on doit se pencher sur la norme—et passer de la norme englobant cinq provinces, à celle qui englobe les dix provinces, comme on l'a déjà fait dans le passé—et assurer la protection de la totalité des recettes.

    L'autre aspect est celui de la sensibilité. Le problème avec le nouveau programme c'est que même s'il offre de la stabilité, il n'est pas influencé par le contexte. Si une province devait se retrouver dans de sérieux problèmes, soit à la suite d'une erreur comptable ou d'événements comme ceux du 11 septembre, le programme ne produira pas de nouvelles ressources en vue de compenser pour ce nouveau problème. Il offre toujours les mêmes caractéristiques, et ce, même si les provinces se retrouvent avec une assiette fiscale réduite, ce qui va totalement à l'encontre du principe des transferts. On pourrait même faire valoir que nous n'avons plus de programme de péréquation. Nous avons plutôt un transfert global appelé péréquation, mais qui n'a pas pour résultat d'offrir des conditions égales. On passe à côté.

    En conclusion, je déteste faire des comparaisons avec le monde du sport, mais la tentation était trop forte. Certains d'entre nous ne lisent pas seulement la section des actualités, et on a appris que la Ligue nationale de hockey se débat avec la question du partage des revenus, afin de trouver un moyen de rendre la situation plus juste pour tout le monde dans la ligue. Nous sommes persuadés que s'il y avait eu un système équitable en place, un système semblable à celui dont nous sommes en train de parler pour le pays, nous n'aurions pas perdu les Nordiques ou les Jets. Il y aurait eu davantage de participants canadiens dans la Ligue nationale de hockey. Si on examine n'importe quelle ligue sportive prospère, on constate que les ligues font un certain nombre de choses pour s'assurer de demeurer concurrentielles. Elles utilisent le repêchage qui donne l'avantage à l'équipe ayant affiché la plus mauvaise fiche au cours de l'année précédente. Elles ont un calendrier qui est juste pour toutes les équipes. Elles imposent même dans certains cas des plafonds salariaux ou ce qu'elles appellent une taxe de luxe, si certains paient beaucoup trop. Et par ailleurs, toutes les équipes qui sont prospères ont mis en place un mécanisme de partage des revenus.

¿  +-(0930)  

    Il n'y a rien d'idéologique dans cette façon de procéder. Personne n'oserait affirmer que les propriétaires d'équipes sportives se situent à gauche du spectre politique, et pourtant tous ont reconnu qu'il était dans leur intérêt commercial que la ligue soit concurrentielle, d'accroître le marché, de stimuler la compétitivité des équipes, de favoriser la création d'un meilleur produit sur le terrain et de se doter de la capacité dynamique de demeurer progressifs et dans le marché de leurs activités dans l'avenir.

    Si les responsables du sport professionnel, qui sont des gens d'affaires et non des élus, sont capables de le faire, alors pourquoi les élus ne pourraient-ils pas opter pour la même approche? Cette approche en effet permettrait d'égaliser les chances à l'échelle du pays, et de se doter d'une fédération dynamique où la population est traitée équitablement, et elle garantirait une croissance et une prospérité futures grâce à une population éduquée et à des services sociaux suffisants financés équitablement dans toutes les régions du pays.

    Sur ce, je vais conclure et je vous remercie de m'avoir invité. Merci beaucoup.

[Français]

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Selinger.

[Traduction]

    Vous ne voulez pas dire que nous allons devoir aligner nos salaires sur ceux des joueurs?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Je ne pense pas que cette idée a de l'avenir sur le plan politique.

+-

    Le président: Madame Smith, vous avez cinq minutes.

+-

    Mme Joy Smith: Merci.

    Merci de votre exposé. Il était très clair et je pense que vous avez fait valoir des arguments très valables, ici, ce matin, monsieur Selinger, dans ce domaine.

    Maintenant, il y a une chose sur laquelle j'aimerais que vous donniez plus de précisions. À plusieurs reprises, le gouvernement fédéral a annoncé des excédents dont le montant s'est révélé de beaucoup inférieur à la réalité. Pourriez-vous nous expliquer quelle est l'incidence de cette pratique sur toutes les provinces du pays, et en particulier sur le Manitoba?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Comme je l'ai dit tout à l'heure, la première conséquence est que l'utilisation de ces excédents n'a fait l'objet ni d'un examen ni d'un débat sur la place publique. Ils sont littéralement balayés du programme politique fédéral parce qu'ils ne sont pas connus avant la fin de l'exercice et que, à ce moment, ils sont dépensés avant même que le Parlement puisse en discuter.

    La deuxième conséquence est le financement insuffisant de programmes comme ceux de la péréquation et du défunt Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, devenu le Transfert canadien en matière de programmes sociaux et le Transfert canadien en matière de santé. On a toujours prétendu que le Canada n'avait pas les moyens d'augmenter le financement de ces programmes, mais la cause réelle est la sous-estimation des revenus année après année. On parle de 60 milliards de dollars d'arriérés et de 31 milliards au moins pour l'avenir, sinon plus.

    Tant et aussi longtemps que les excédents seront soustraits au débat public, le gouvernement continuera de prendre des décisions unilatérales concernant l'utilisation de l'argent, sans égard à ce qu'en pense la population. À mes yeux, c'est un véritable affront au processus démocratique. J'irais même jusqu'à dire que c'est l'une des causes du déficit démocratique au Canada.

¿  +-(0935)  

+-

    Mme Joy Smith: Ce matin, nous parlons du déséquilibre fiscal, dont vous avez fait un exposé très brillant dans votre intervention.

    J'aimerais que vous développiez plus avant sur la question du programme de péréquation. Si on compare les provinces entre elles, il ressort très nettement que la Saskatchewan reçoit sa très large part des crédits. Par contre, le Québec, la Colombie-Britannique et le Manitoba, notamment, se retrouvent tout au bas de l'échelle fiscale. Pourriez-vous donner plus de détails sur votre assertion concernant le programme de péréquation...

    Votre tableau démontre bien la baisse soutenue, jusqu'à la disparition éventuelle du programme de péréquation. D'un côté, on brandit des chiffres hypothétiques sur les excédents, qui font en sorte que les provinces ne savent plus où donner de la tête pour faire fonctionner les programmes et les politiques sociaux, ce qui est le cas notamment du Manitoba. Et de l'autre côté, le gouvernement fédéral s'approprie une large part des recettes fiscales, ce qui fragilise les assises financières réelles pour élaborer les programmes. Pour en revenir au programme de péréquation—pourriez-vous préciser votre point de vue sur les redressements qui s'imposent pour mieux servir les provinces?

    Pour dire le vrai, je crois que les annonces politiques et autres sornettes sont vides de sens si les gens n'obtiennent rien de concret et si l'argent manque pour faire fonctionner les programmes ou si des programmes utiles sont voués à disparaître en moins de deux ou trois ans. C'est la réalité actuelle partout au pays.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Je vais faire un lien entre votre deuxième question et le premier point que vous avez soulevé. La sous-estimation de la capacité fiscale du gouvernement fédéral s'est traduite par d'énormes surplus sur lesquels le public n'a jamais pu se prononcer. Au lieu de prévoir le paiement de transferts fiscaux calculés à long terme selon le budget principal, le gouvernement fédéral a opté pour des ententes uniques ou ponctuelles, ou les deux. Résultat : un fatras d'activités en cours, dont il est difficile de dégager des principes de fond de justice et d'équité, ni même d'efficacité.

    Par exemple, le fédéral a transféré de l'argent aux provinces pour leur permettre de réduire les listes d'attente dans le système de santé, mais ces paiements sont ponctuels et seront rapidement épuisés. Si toutes les listes d'attente ont disparu d'ici là, les provinces devront assumer l'entière responsabilité du suivi. J'ai cité plus tôt l'exemple des programmes d'immunisation. Qu'est-ce qui empêcherait le gouvernement fédéral de financer son propre programme d'immunisation national ou pancanadien sur une base permanente? Les avantages seraient incommensurables, tant du point de vue des économies réalisées que sur le plan de la santé de la population.

    À mon avis, les ententes particulières ont créé de très graves problèmes. Toutes les provinces veulent signer leur propre entente. Toutes ont concocté leur propre argumentaire pour justifier qu'elles en avaient besoin. Nous assistons à des querelles et à des duels à n'en plus finir. Le sens d'une citoyenneté partagée s'effrite peu à peu, ce qui est tout à fait malheureux selon moi. Il en résulte un contexte politique très houleux à l'échelon du fédéral.

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. Bell. Vous avez cinq minutes.

+-

    M. Don Bell: Merci.

    J'ai beaucoup apprécié les aspects historiques de votre allocution. À la diapositive 10, qui traite des principaux transferts fédéraux en matière de programmes sociaux, vous remontez jusqu'en 1995, année où les libéraux sont arrivés au pouvoir. Pouvez-vous nous donner les chiffres pour la période précédente? En connaissez-vous l'ampleur? Est-ce que Jim, votre historien, pourrait vous en informer? J'aimerais savoir si ces chiffres étaient supérieurs à ceux que nous voyons pour 1995. Vous affirmez que nous sommes revenus à des montants supérieurs à ceux de 1995. J'aimerais simplement savoir si ces montants étaient plus ou moins élevés. Est-ce que le mouvement à la baisse était déjà amorcé?

+-

    M. Rory Molnar (à titre personnel): Je crois que les montants étaient à la baisse. L'année précédente, ils étaient à peu près au même niveau, mais la dégringolade avait commencé au milieu des années 80 déjà.

¿  +-(0940)  

+-

    L'hon. Greg Selinger: Même si le gouvernement fédéral prétend que les montants absolus sont plus élevés, ils sont moindres en dollars réels—c'est-à-dire corrigés en fonction de l'inflation. Par rapport à la totalité du budget fédéral, ils ont baissé. Dans les faits, même si les montants en dollars réels ont monté, la proportion par rapport au total peut avoir baissé. C'était le cas alors, et c'est encore le cas maintenant.

+-

    M. Don Bell: À la diapositive 20, sur le nouveau programme fédéral de péréquation, vous affirmez qu'à l'expiration de la loi en vigueur, l'ajustement des paiements de péréquation sera inférieur à la croissance du PIB—une hausse de 3,5 p. 100 est prévue dans le programme. Selon vous, quel devrait être ce taux pour qu'il y ait stabilité ou croissance?

+-

    M. Rory Molnar: Il faudrait rajuster le niveau à 1,1 p. 100 du PIB, si la norme des 10 provinces est rétablie. Pour maintenir ce niveau de 1,1 p. 100, le taux devrait être de 4,5 à 5 p. 100 pour suivre la croissance du PIB.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Cet aspect est primordial. Si on établit le facteur de progression à partir de la base actuelle, qui est insuffisante, on n'y arrivera pas. Il faut l'augmenter à 1,1 p. 100 avant de fixer le facteur de progression qui permettra de maintenir ce niveau.

+-

    M. Don Bell: J'ai une autre question, que j'ai posée à la plupart des témoins. Elle concerne les transferts aux municipalités, le domaine dont je suis issu. La Fédération canadienne des municipalités maintient que les gouvernements municipaux devraient être considérés comme constituant le troisième ordre de gouvernement.

    J'ai remarqué que l'une de vos dernières diapositives traitent de la réévaluation des responsabilités conférées à chacun des ordres de gouvernement, de même que de leurs pouvoirs en matière fiscale. Je ne crois pas que vous avez inclus les municipalités, mais j'aimerais savoir si votre gouvernement a pris position pour ce qui est du rôle ou du nouveau modèle de municipalités? Je fais référence à la nouvelle entente négociée, dont l'élément clé est l'augmentation des crédits versés aux municipalités pour les aider à améliorer leurs infrastructures. La taxe sur l'essence est un exemple.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Tout d'abord, je précise que j'ai été moi-même conseiller municipal, et que je sais bien de quoi vous parlez. Je me souviens qu'alors, je me plaignais moi aussi du manque de ressources. J'entends donc bien votre remarque.

    Le Manitoba a signé un accord unique. Nous sommes la seule province canadienne à avoir signé ce que nous appelons un accord provincial-municipal sur le partage des recettes fiscales. Chaque année, nous partageons avec les municipalités une partie des impôts sur le revenu des sociétés et des particuliers. Nous avons également partagé les hausses des recettes avec les municipalités depuis les années 70. Aucune autre province ne le fait.

    Qui plus est, nous avons révisé le programme cette année, un exercice qui a abouti à l'élargissement de l'assiette du partage des recettes provinciales. Nous donnons maintenant aux municipalités l'équivalent de 3 cents sur la taxe sur l'essence. Ce transfert était gelé depuis des années, et il devait servir pour le transport en commun et d'autres types d'infrastructure. Nous avons converti ce transfert gelé en équivalence de la taxe sur l'essence. En outre, le Manitoba est l'une des seules provinces à partager les recettes des appareils de loterie vidéo. En janvier dernier, nous avons décidé de partager une partie des recettes des casinos avec la ville de Winnipeg, la seule où il se trouve des casinos.

    Notre province est sans doute celle où le partage de l'assiette fiscale avec les municipalités est le plus généreux au Canada—le partage touche l'impôt des particuliers, des sociétés, les recettes des appareils de loterie vidéo, la taxe sur l'essence et sur les casinos. Nous sommes des pionniers en matière de partage des recettes fiscales.

    Notre seule réserve concernant le transfert des revenus de la taxe sur l'essence aux municipalités seulement est la suivante : qui paie pour les routes qui relient les municipalités et les villes entre elles? Ces coûts sont imputés entièrement aux provinces, qui ne recevront aucune partie des taxes sur l'essence du gouvernement fédéral. Les taxes sur l'essence prélevées au Manitoba—j'ai moi-même promulgué la Loi sur l'obligation redditionnelle concernant la taxe sur l'essence, qui oblige à rendre compte de l'affectation de chaque dollar provenant de la taxe sur l'essence dépensé dans la province pour améliorer les infrastructures, les routes, et ainsi de suite. Cette loi nous a permis de constater que la province dépense plus qu'elle ne reçoit en taxe sur l'essence. Par conséquent, si les recettes de la taxe sur l'essence sont partagées—loin de nous l'intention de priver les municipalités de ressources—, nous demandons simplement qu'une partie de l'argent soit consacrée aux routes qui relient les villes et les marchés. Si l'argent sert uniquement dans les villes et les municipalités, et qu'on néglige le réseau qui les relie entre elles, à quoi bon? Tout le réseau, à la grandeur du pays, doit être modernisé, y compris la Transcanadienne, y compris également les autoroutes qui vont du nord au sud et d'est en ouest.

    C'est notre seule réserve, que j'ai soulevée dans mon discours sur le budget cette année. Nous avons gratifié nos municipalités d'une hausse de 8 p. 100 des recettes cette année, et de 15 p. 100 pour le transport en commun, mais ce n'est pas une excuse pour nous soustraire à nos obligations. Nous avons affirmé également que nous remettrions chaque cent de taxe sur l'essence reçu du fédéral aux municipalités, sans aucune retenue. Cependant, nous sommes convaincus que le gouvernement fédéral devrait en retour participer à la modernisation de l'infrastructure qui nous relie tous ensemble.

¿  +-(0945)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell.

    Monsieur Côté.

[Français]

+-

    M. Guy Côté: Merci, monsieur le président.

    Monsieur le ministre, merci de votre excellente présentation. Je voudrais en profiter pour souligner le travail que vous avez fait. Non seulement vous nous donnez une belle perspective historique et décrivez bien la situation actuelle, mais vous nous présentez aussi un certain nombre de solutions au problème du déséquilibre fiscal. Pour cela, je voudrais vous remercier.

    J'ai une question toute simple à vous poser. Dans un des tableaux que vous nous avez présentés, il est question des bénéfices de la dernière entente sur la péréquation. Les sommes accordées dans le cadre des ententes particulières avec Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse sont-elles intégrées à ce tableau? On sait que ces ententes particulières augmentent substantiellement la capacité fiscale des deux provinces. Les signes de tête m'indiquent que cela n'est probablement pas intégré. Dans quelle mesure cela changerait-il ce tableau?

+-

    L'hon. Greg Selinger: C'est une bonne question, et je vous en remercie. Ce n'est pas intégré à ce tableau, mais il ne fait aucun doute que si on l'y intégrait, le déséquilibre serait encore plus marqué. On a un tel tableau et on pourra le déposer plus tard, si vous le voulez. Dans ce tableau, on parle simplement du programme de péréquation existant. À part cela, il y a la dimension des ententes particulières qui aggrave le déséquilibre fiscal au pays.

+-

    M. Guy Côté: Monsieur le président, c'est tout. Merci.

+-

    Le président: Pour votre gouverne, je dirai que lors de notre passage à Québec, la semaine dernière, le ministre des Finances évaluait à 3 818 $ par personne, à Terre-Neuve-et-Labrador, la valeur de l'entente de cette province avec le gouvernement fédéral sur les ressources pétrolières extracôtières. Ce montant s'ajouterait aux 169 $.

    Madame Wasylycia-Leis.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Avant de poser mes questions, je propose que, à l'issue de la présente série, nous entendions l'exposé de M. Eldridge. Je sais qu'il a une vaste expérience du domaine de la péréquation, ce qui pourrait nous faire économiser un peu de temps sans doute. Nous devrions profiter de ses connaissances pendant que nous l'avons sous la main. Si c'est possible, je propose de lui accorder quelque chose comme dix minutes, après quoi nous pourrons entamer une autre série de questions.

    Merci.

[Français]

+-

    Le président: Madame Wasylycia-Leis, vos désirs sont des ordres. Je suis certain que les collègues y consentiront.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Que pourrais-je demander de plus? Je vous remercie.

    Merci énormément, monsieur Selinger, de cette présentation. J'aimerais tout d'abord aborder la très vaste question du déséquilibre fiscal, que le gouvernement fédéral persiste à nier. Nous avons souvent tourné autour du pot, mais nous semblons incapables de trouver une véritable direction.

    J'ai l'impression que cette confusion vient justement du genre de propos tenus par le leader libéral, M. Gerrard, qui selon moi mélange tout. C'est peut-être ce que fait le gouvernement fédéral—en essayant de nous convaincre que, si on examine les transferts en matière de santé, les points d'impôt et les paiements de péréquation, les provinces comme le Manitoba s'en tirent très bien, merci. Où est le problème? Il a même été jusqu'à dire—je ne sais pas si vous l'avez entendu—que votre gouvernement s'était couvert de ridicule en prétendant que la part fédérale des soins de santé avait baissé à 16 p. 100. C'était il y a quelques années. Je lui ai fait remarquer que c'était en fait le point de vue de toutes les provinces et de toutes les parties intéressées.

    J'aimerais vous entendre sur cette question. Nous devons trouver moyen de convaincre le gouvernement qu'il y a déséquilibre, sans quoi nous ne trouverons pas de solutions viables. Pouvez-vous nous parler de cette fâcheuse tendance à tout mélanger, ainsi que de la différence entre le déséquilibre vertical et le déséquilibre horizontal?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Merci de poser la question.

    Selon moi, on nous sert une incroyable purée en escamotant la différence fondamentale—je sais à quel point c'est ennuyant—entre déséquilibre vertical et déséquilibre horizontal. C'est pourquoi nous avons divisé notre présentation en deux parties.

    Le déséquilibre vertical est attribuable au transfert du pouvoir fiscal des provinces au fédéral, alors que les provinces conservent la compétence constitutionnelle sur les programmes sociaux les plus coûteux, ceux-là mêmes qui permettent à nos citoyens de rester en santé, combatifs et instruits. C'est ce qui est à l'origine du Transfert canadien en matière de santé, une mesure qui réunit le financement des établissements postsecondaires, des services sociaux et de la santé dans une seule enveloppe, réduite de 39 p. 100. Une partie des compressions a été renflouée dans le cas de la santé, au détriment toutefois de l'éducation postsecondaire et des services sociaux. Il faut envisager distinctement le déséquilibre entre les responsabilités et les ressources, qui sont insuffisantes, et qui est attribuable au transfert du pouvoir fiscal au gouvernement fédéral qui remonte à loin en arrière.

    Le deuxième enjeu a trait au renforcement de la capacité des gouvernements provinciaux à offrir des niveaux comparables de services globaux moyennant des niveaux d'imposition comparables ou sensiblement semblables. Si on superpose ces deux éléments, on obtient une hausse des deux montants en dollars absolus, des hausses encore plus prononcées pour certaines provinces, suivant les rajustements apportés à leurs paiements de péréquation précédents. Cependant, en dollars relatifs—en proportion du budget fédéral—, on constate que le gouvernement fédéral ne prend plus aucun risque à l'égard des programmes les plus gourmands et qu'il a réduit le pourcentage des paiements de péréquation par rapport à la croissance de ses revenus.

    Par conséquent, le gouvernement fédéral a dans les faits généré ses surplus fiscaux sur le dos des provinces et des citoyens des régions. Ils ont été trompés sur toute la ligne—que ce soit en matière de péréquation, de santé, de services sociaux, d'éducation postsecondaire. Le fédéral a été on ne peut plus agile en matière de compressions, mais ce sont les provinces qui en portent le fardeau.

    J'aimerais souligner un argument du Québec : dans les temps les plus difficiles, les dépenses du gouvernement fédéral ont subi une légère hausse—un peu moins de 2 p. 100—, mais les transferts aux provinces ont chuté de façon spectaculaire.

    Bref, du côté du fédéral, on ne cesse d'annoncer des hausses en dollars absolus, en prétendant que les provinces se plaignent le ventre plein. C'est sans doute l'essence de la démonstration du chef libéral, le tiers parti au Manitoba. Mais son argument porte à faux. Il doit en venir à comprendre que la péréquation relève d'une obligation constitutionnelle visant l'équité horizontale, et que le gouvernement fédéral a la responsabilité de compenser sa capacité fiscale supérieure en octroyant des paiements de transfert aux provinces dont les programmes sont les plus exigeants.

¿  +-(0950)  

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Étant donné que nous formons le comité chargé du déséquilibre fiscal, nous échoit-il selon vous de formuler des recommandations afférentes tant au déséquilibre vertical qu'au déséquilibre horizontal, afin de régler les problèmes de la péréquation et ceux des transferts en argent?

    Sur ce dernier point, certaines provinces ont fait valoir qu'il vaudrait mieux recommander l'augmentation de la capacité fiscale au lieu de chercher à régler le déséquilibre par des versements d'argent—par exemple, en affectant une partie des recettes de TPS aux provinces, en augmentant les points d'impôt. Je m'interroge sur le bien-fondé de cette proposition par rapport aux programmes nationaux. À mon avis, les transferts pécuniaires peuvent être maintenus sans pour autant ignorer les besoins du Québec et le caractère distinct de cette province, mais j'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Il est vrai que la Commission Séguin, voilà plusieurs années, avant que M. Séguin ne devienne ministre des Finances du Québec, avait recommandé le transfert de la TPS aux provinces. Cependant, si on adoptait une telle mesure, le transfert ne pourrait équivaloir simplement au montant de taxes prélevé dans chacune des provinces. Il faudrait égaliser les versements, sans quoi on creuserait encore les inégalités. Bref, peu importe les modalités, on ne pourra jamais faire abstraction de la notion de péréquation, pour que le système soit juste.

    Une voix: Mais il n'y a plus de péréquation.

¿  +-(0955)  

+-

    L'hon. Greg Selinger: C'est exact, il n'y a plus de péréquation. Jim pourra élaborer sur ce thème.

    On ne pourrait pas tout simplement transférer les montants de TPS prélevés dans chaque province, parce que celles où ils sont moins élevés obtiendraient moins, alors que celles où ils sont les plus élevés obtiendraient plus, ce qui creuserait encore plus les inégalités. Les transferts devraient être calculés selon le concept de la péréquation.

    Vous avez par ailleurs soulevé la question de la possibilité pour le fédéral de conserver ses prérogatives de rendre les transferts conditionnels. Jusqu'ici, nous y sommes toujours parvenus en assurant une assez grande souplesse des modalités. Nous tenons au respect des principes de l'universalité dans des domaines comme la santé et l'éducation de la prime enfance, mais nous avons toujours tenu également à ce que les provinces, le Québec surtout, restent maîtres d'oeuvre pour adapter les mesures à leurs propres cadres administratifs, en concevant les programmes à leur gré.

    Si nous voulons conserver un État fédéral, nous devons nous assurer d'être liés par différents éléments, que ce soit la Charte des droits et libertés ou bien notre système de santé universel. Les modalités de prestation sont déjà uniques à chaque province. Chacune y va de sa propre façon de faire, légèrement différente des autres, mais toutes visent un objectif unique : que leurs citoyens aient accès à des soins de santé quand ils en ont besoin. Nous voulons tous, à mon avis, que notre système soit complet et universel. Nous devons trouver le moyen d'y arriver en respectant les caractéristiques historiques des provinces comme le Québec et de son besoin de reconnaissance, tout en nous assurant que toutes les provinces soient tenues responsables devant leur population du respect des principes universels qui façonnent notre pays.

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Wasylycia-Leis.

    Nous reviendrons plus tard à la question-fleuve que vous voulez poser à M. Eldridge sur la péréquation.

[Traduction]

    Madame Smith, vous avez trois minutes.

+-

    Mme Joy Smith: J'aimerais revenir brièvement à la question des municipalités. J'ai lu dans le journal que le premier ministre de la province craignait que les ententes prises avec le gouvernement libéral ne meurent dans l'oeuf. L'article du journal n'était pas tout à fait limpide. Pourriez-vous nous expliquer un peu ce qu'il voulait dire?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Je précise tout d'abord que mon seul pouvoir est de lire les journaux, tout comme vous. Je crois que le premier ministre voulait tout simplement dire que le Parlement a beaucoup de chats à fouetter présentement et que, s'il n'adopte pas ces projets de loi, s'il retourne aux urnes, il faudra attendre longtemps avant que les délibérations reprennent et qu'on puisse régler les dossiers en suspens. Certains d'entre nous, sinon tous ceux qui sont présents ici, avons connu des périodes de transition à la Chambre, qui se traduisent par le report de tout ce qui était sur le point d'aboutir, pour une année ou deux parfois s'il y a changement de gouvernement. Les perdants sont toujours les citoyens.

    Je croix que le premier ministre voulait simplement dire qu'il y avait beaucoup de projets en cours avec le gouvernement fédéral, dont les ententes de partage des coûts et d'autres projets plus précis comme la construction de canaux évacuateurs ou d'un musée sur les droits de la personne, le programme d'éducation de la prime enfance, de garderies, de péréquation, et quoi encore. Tous ces programmes doivent être adoptés, même s'ils ne sont pas parfaits. Il vaut toujours mieux avoir de la matière à améliorer que de n'avoir rien à mettre sur le métier, de revenir à la case départ, en situation de crise.

    L'argument du premier ministre, si tant est que je puisse parler à sa place, était qu'il faut régler ces dossiers au plus vite.

+-

    Mme Joy Smith: Je suis plutôt d'accord. Je dois dire cependant que la fiche du gouvernement au pouvoir laisse plutôt songeur, particulièrement pour ce qui est des programmes de péréquation. Je me souviens également des annonces de subventions au musée des droits de la personne. Je sais à quel point le premier ministre et la population manitobaine tiennent à leur musée des droits de la personne. Nous voulons qu'il soit construit, et nous sommes assez contents des annonces. Nous voulons tout simplement que les choses se fassent, comme vous l'avez dit.

    Cela étant dit, quel serait le plus grand bénéfice à espérer d'un système de péréquation judicieux? Le représentant libéral a évoqué brièvement tout à l'heure les modifications de dernière minute aux règles, ce qui a été cause de constantes frustrations. Votre présentation d'aujourd'hui était extrêmement bien articulée, truffée de vérités rarement abordées. C'est exactement ce que nous voulons faire comprendre sur ce qui est le mieux pour notre province et notre pays.

    J'aimerais beaucoup entendre vos commentaires à ce sujet.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Le plus important, et de loin, est de recadrer le régime de la péréquation en tenant compte des principes de base, de lui donner une assise inspirée des principes qui rallieront l'ensemble de la population canadienne, et d'adopter un mécanisme ou une formule qui donneront vie à ces principes d'une façon qui permet à tous de comprendre les liens entre la formule et les principes qu'elle dessert. Il s'agirait tout simplement de rétablir la norme des dix provinces, en incluant tous les revenus. C'est sans doute le plus important dans l'immédiat.

    Si le gouvernement fédéral soutient qu'il n'a pas les moyens de tout régler en même temps, comme il nous l'a si bien dit dans le passé, nous continuons de lui rétorque qu'il faut revenir à la norme des 10 provinces, d'englober tous les revenus, et d'appliquer la formule par jalons—en commençant par 85 ou 90 p. 100 de la norme, qui serait haussée chaque année compte tenu de la capacité de payer du fédéral, qui a toujours été sous-estimée. Il faut faire attention de ne pas adopter une attitude du tout ou rien. Il faut s'aligner sur des principes justes, forger le mécanisme qui permettra de soutenir ces principes, et faire en sorte de l'appliquer correctement d'année en année. Je crois que la population pourrait de nouveau faire confiance à la capacité de traitement équitable de la fédération.

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

    Monsieur Bell, vous avez trois minutes.

+-

    M. Don Bell: Merci.

    Vous avez mentionné la question des ententes particulières, et vous avez cité les programmes d'immunisation en exemple, parmi d'autres. Les ententes particulières n'ont-elles pas leur raison d'être, ne sont-elles pas incontournables pour palier les difficultés particulières d'une province sur le plan économique, en raison de circonstances qui lui sont propres? Je pense notamment à la crise de la vache folle et à bien d'autres.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Un programme de péréquation conçu selon les règles de l'art éliminerait l'obligation de recourir à des ententes particulières parce que ses mécanismes intrinsèques seraient souples et adaptables. Si la norme des 10 provinces est fixée à 100 $, et que tout à coup une petite province tombe sous la barre des 100 $ à cause d'une crise agricole ou d'une catastrophe naturelle, la norme prévoit la compensation automatique du manque à gagner.

    Nous avons eu un exemple avec l'erreur comptable du fédéral. L'affaire a suscité un énorme débat. J'ai moi-même passé des heures à en discuter avec le ministre des Finances alors en poste, M. Martin. Nous accusions une perte de 165 millions de dollars, jusqu'à ce que je reçoive un coup de téléphone m'annonçant que la perte était en fait attribuable à une erreur comptable du fédéral. Peu de temps après, on nous annonçait que nous leur devions 700 millions de dollars parce que le fédéral nous avait trop donné d'argent pendant 10 ans. Ce à quoi nous avons rétorqué que le coup était difficile à encaisser pour une petite province comme la nôtre, et que nous aurions beaucoup de peine à rembourser. Nous avons immédiatement ajouté : « Comme nos revenus vont baisser à cause de votre erreur, vous avez l'obligation d'en tenir compte dans les calculs de la péréquation. »

    Nous nous sommes battus pour que le principe soit respecté. Nous nous inspirions du précédent créé par Mike Wilson qui, au début des années 90, dans une situation similaire, avait avancé un montant de péréquation en compensation. Immédiatement donc, nous avons recouvré 70 p. 100 de la somme par la voie du montant compensé de péréquation. Le problème s'en est trouvé réglé en partie, et nous avons pu négocier des modalités de remboursement justes pour le gouvernement fédéral et pour notre province. Je suis donc convaincu qu'un programme de péréquation judicieux permettra de parer aux tragédies ou aux circonstances difficiles pour une région ou une province donnée.

À  +-(1000)  

+-

    M. Don Bell: J'ai une question sur un acronyme : est-ce que FMM veut dire « federal minister's meeting »?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Non, FMM veut dire « first ministers' meeting ».

+-

    M. Don Bell: C'est ce que je voulais dire, « first ministers' meeting ».

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell.

[Français]

    Avant de céder la parole à Mme Wasylycia-Leis pour qu'elle puisse poser à M. Eldridge sa question-fleuve sur la péréquation, monsieur le ministre, j'aimerais vous poser une question qui est peut-être en dehors du débat actuel, mais qui y est reliée. Il s'agit de la situation du secteur agricole au Manitoba. C'est une de mes grandes préoccupations à cause de mes fonctions passées au sein de l'Union des producteurs agricoles.

    Je parlais tout à l'heure avec votre collègue de l'Assemblée législative du Manitoba, M. Gerrard, du fait que j'étais venu ici en 1982, lors du débat sur l'Entente du Nid-de-Corbeau. Dans le passé, il y a eu plusieurs tentatives de diversification de l'économie du Manitoba. En particulier, certains sont passés du secteur des céréales à celui de la production animale. Comment les producteurs d'animaux vivent-ils le fait qu'à l'heure actuelle, ils sont victimes, partout au Canada mais particulièrement dans l'Ouest, de la maladie de la vache folle et de l'embargo décrété par les Américains?

    Deuxièmement, les prix des céréales ne sont pas ce qu'ils devraient être, à cause des subventions massives des Américains, entre autres, et des Européens qui entraînent une dépréciation des prix au niveau international. Comment vivez-vous cette crise? Comment le gouvernement du Manitoba arrive-t-il à soutenir les producteurs agricoles?

+-

    L'hon. Greg Selinger: C'est une bonne question. On a réorganisé nos ministères. On a fusionné le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation et l'ancien ministère du Développement rural. Maintenant, on a une vision différente pour chaque région, chaque ville, chaque municipalité et la campagne. On envisage toutes les possibilités pour développer l'économie, pas seulement l'agriculture mais aussi l'énergie éolienne, l'éthanol, et on cherche à stimuler le secteur touristique. On établit un plan économique pour les régions rurales qui veulent développer, retenir leurs jeunes et accroître leurs possibilités de développement dans l'avenir. L'immigration fait aussi partie de cela. Beaucoup d'immigrants viennent au Manitoba maintenant. On a un programme pour cela. Beaucoup de ces immigrants iront à la campagne aussi, pas seulement dans des grandes villes comme Winnipeg ou Brandon.

+-

    Le président: Que représente le milliard de dollars annoncé la semaine dernière par M. Andy Mitchell pour les producteurs céréaliers du Manitoba?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Je crois que c'est autour de 200 millions de dollars. Il ne fait aucun doute que c'est un avantage. Il y a encore beaucoup de pression.

+-

    Le président: Oui, parce que c'est pour les pertes passées et non pas...

+-

    L'hon. Greg Selinger: Absolument.

+-

    Le président: Merci, monsieur le ministre.

[Traduction]

    Madame Wasylycia-Leis, vous pouvez poser votre question sur la péréquation à M. Eldridge.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

    J'ai des tonnes de questions mais, auparavant, est-ce que nous ne devons pas octroyer le temps nécessaire à M. Eldridge de nous présenter son exposé, après quoi nous lui poserons nos questions? Est-ce possible?

À  +-(1005)  

[Français]

+-

    Le président: Ce sera pour le plus grand bénéfice de tous les collègues autour de la table.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: D'accord.

    Sur la question de la péréquation, il me semble que voilà quelques années, si j'ai bien compris—je crois que c'est ce que le ministre a dit—, les provinces étaient assez d'accord pour qu'on adopte une nouvelle formule, la norme des dix provinces, incluant tous les revenus, y compris les revenus du pétrole et du gaz, et d'autres ressources naturelles. Les provinces ont préparé le terrain—leur entente de cinq ans venait à échéance—à l'adoption d'une formule raisonnable qui réglait les problèmes connus et nous permettait d'aller de l'avant.

    Le gouvernement fédéral a jugé que les provinces demandaient trop et les a forcées, je crois—avec le fusil sur la tempe—à accepter une entente temporaire. C'est pourquoi nous voilà maintenant aux prises avec un modèle bancal, fût-il temporaire, et un gouvernement fédéral forcé à signer des ententes parallèles qui lui coûtent certainement autant sinon plus que ce que lui aurait coûté l'application depuis le début de la norme de dix provinces.

    Je ne crois pas exagérer en disant que le pays est en pleine crise, tentant désespérément de maintenir un programme si important pour notre identité nationale et de faire en sorte que toutes les régions soient traitées avec une certaine équité, en ayant accès à des services équivalents, sur la base d'une capacité équivalente.

    Ma question, très large je l'admets, est la suivante : Comment en sommes-nous arrivés là? Quelles erreurs historiques doit-on éviter de répéter? Comment régler le problème maintenant?

    Il est question d'élection fédérale, et je ne crois pas que le Parlement arrivera avant à un consensus sur la question de la péréquation. Je sais que Joy est très optimiste aujourd'hui, mais je ne crois pas que son parti a beaucoup fait pour favoriser l'amélioration du programme de péréquation jusqu'ici. D'autres provinces, l'Alberta notamment, vont dans un sens qui nous amène tout droit vers le modèle « du plus fort gagne ».

    Je suis assez inquiète en pensant à notre avenir. Je sais que c'est assez difficile, mais j'espère néanmoins que vous pourrez nous éclairer un peu.

+-

    M. Jim Eldridge (conseiller spécial pour les relations intergouvernementales , ministère des Finances): Merci beaucoup.

    Je vais demander au ministre et à tous ceux qui le désirent d'apporter leur grain de sel s'ils le jugent à propos.

    Je tiens tout d'abord à souligner que mon expérience de ce dossier remonte à très loin. J'ai été employé du ministère des Finances entre 1968 et 1982, puis j'ai été nommé SMA en 1973. J'ai donc baigné dans le dossier de la péréquation pendant toute ma carrière, et j'ai participé à maints sous-comités. J'étais du comité qui a pondu le libellé de la Constitution qui est encore en vigueur à ce jour. J'ai aussi contribué à la rédaction de l'accord de Charlottetown qui n'a pas été adopté, et à bien d'autres documents. J'ai donc une perspective appréciable de ces accords, dont je pourrai vous parler si vous le souhaitez.

    Fait intéressant, le paragraphe 36(2) fait maintenant partie de la Constitution à cause notamment des lourdes menaces qui pesaient sur le régime de la péréquation 25 ans en arrière. Les provinces qui y tenaient le plus soutenaient avec verve et force que si le régime de la péréquation n'était pas enchâssé dans la Constitution, elles rejetteraient en bloc les propositions sur la table.

    À mon humble avis, le programme fédéral actuel déroge sensiblement des prescriptions du paragraphe 36(2). Le ministre l'a lui-même suggéré ce matin. Jusqu'où cette dérogation ira-t-elle? Tout dépendra en partie des recommandations du groupe fédéral d'experts, créé par le ministre Goodale, concernant les allocations et les examens périodiques, notamment.

    Toutefois, suivant les dires du ministre, que je lui ai moi-même mis en bouche, le régime actuel peut difficilement être assimilé à un régime de péréquation. Malgré l'étiquette, il s'agit purement et simplement d'un régime de subventions. Il est fermé. Il ne tient aucun compte des variations dans la capacité fiscale. Il pourra retrouver une certaine souplesse si les experts recommandent qu'il en soit ainsi, et si le gouvernement fédéral donne suite à la recommandation. Cependant, pour le moment, nous avons devant les yeux un régime diamétralement opposé à ce qu'il était en 1967, année où la norme nationale moyenne a été adoptée, et à ce qu'il était en 1982, année où le paragraphe 36(2) a été ajouté à la Constitution.

    Certaines forces à l'oeuvre à cette époque continuent d'agir : les ressources naturelles à coût élevé et non renouvelables. Le prix de l'huile compte parmi les principaux moteurs des crises qui bousculent ce programme. Comment régler la crise? Malheureusement, je n'ai pas de remède facile.

    L'un de mes collègues, que me succédera cet après-midi, Ron Neumann, est l'un de nos grands maîtres à penser canadiens en matière de péréquation. Je vous invite à lui prêter une oreille très attentive parce qu'il jouit d'un immense respect partout au pays. Peut-être vous donnera-t-il une ordonnance. Tout ce que je peux dire pour l'instant est que votre comité joue un rôle essentiel. Comme le gouvernement fédéral a choisi de désigner un groupe d'experts complètement indépendant des provinces, vous êtes devenus, selon ce que j'en pense, la seule tribune nationale équilibrée pour discuter de ce dossier. Je vous exhorte à faire tout votre possible pour être entendus, non seulement sur la question du déséquilibre fiscal vertical, mais également sur le volet horizontal du déséquilibre.

    Il est arrivé, à quelques occasions au cours des années, que le consensus se fasse sur le rétablissement de la norme de dix provinces. Parfois fragile, le consensus survenait souvent dans des réunions portant sur d'autres questions—les nouvelles ententes sur la santé et d'autres questions—, mais c'est cette norme qui a présidé à l'enchâssement du paragraphe 36(2).

    Je crois que le sujet a été soulevé ce matin par M. Gerrard, quand il nous a demandé ce qu'on entendait par « sensiblement comparables » dans la Constitution. Je vais tenter une réponse toute personnelle : je dirais que les termes utilisés dans la Constitution sont inspirés en grande partie de la raison d'être de la norme de dix provinces qui est actuellement en vigueur.

À  +-(1010)  

    J'étais membre du petit comité qui avait été chargé de la rédaction et d'offrir diverses solutions de rechange. Il reste encore plusieurs membres du comité au sein de diverses administrations. Nous étions retournés à la formulation de l'honorable Mitchell Sharp, qui avait proposé la norme de dix provinces à la Chambre des communes en 1966, je crois, et qui a été adoptée en 1967. Sa déclaration concernant les niveaux de services et de fiscalité sensiblement comparables se retrouve à deux ou trois endroits. Les provinces n'étaient pas vraiment unanimes sur le traitement précis du régime dans le Constitution. À cette époque, on pensait que c'était le meilleur mécanisme possible et que peut-être, je dis bien peut-être, il pourrait servir à mesurer les résultats.

    Que veut dire au juste « sensiblement comparables »? C'est difficile à dire, mais une chose est certaine : si l'Alberta ne prélevait aucune taxe sur les ventes alors que Terre-Neuve imposait une telle taxe—qui s'élevait à quelque chose comme 12 ou 14 p. 100 à l'époque—, est-ce que le critère «sensiblement comparable» était rempli? Probablement que non. Il faut en arriver, se dirent les fonctionnaires, à nous rapprocher aussi près que possible de quelque chose de mesurable, et voyons si nous réussissons à faire approuver le régime. Et ils y sont arrivés. Je peux vous tracer un bref historique des circonstances ayant mené au libellé de la Constitution.

    Je partage les inquiétudes de Judy. La situation est sérieuse, et ce que nous propose actuellement le gouvernement fédéral est très loin d'un régime de péréquation tel qu'on le conçoit normalement.

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Eldridge, tout à l'heure, vous avez parlé du groupe d'experts. Ce groupe d'experts a un mandat très restreint. Il n'a pas à proposer de réforme en profondeur de la formule de la péréquation. Il n'a pas à examiner, par exemple, les normes véhiculées par les provinces depuis un certain nombre d'années. Son mandat fondamental est d'examiner de quelle façon, à partir de l'an prochain, le gouvernement fédéral va distribuer aux provinces le montant de péréquation préétabli sur la base du versement de 2001-2002, indexé de 3,5 p. 100 par année et avec un plafond.

    Nous avons déploré cela — je pense que le NPD et les conservateurs aussi l'ont fait — puisque sans réforme en profondeur, on perd l'essence même de la péréquation. Vous avez d'ailleurs mentionné que c'était devenu une subvention préétablie et que cela n'avait plus rien à voir avec la recherche d'une certaine équité, d'une certaine uniformité entre les provinces pour offrir des services comparables, et ainsi de suite.

    Comment pouvez-vous viser cet objectif, en ayant un programme plafonné à partir duquel la répartition pour l'année prochaine est faite sur des bases qui demeurent inconnues? Comment peut-on ajuster tout cela pour tenir compte du véritable potentiel fiscal des provinces? Je suis moins optimiste que vous en ce qui concerne le travail du groupe d'experts. D'ailleurs, j'en connais quelques-uns qui n'ont jamais touché, de quelque façon, à la péréquation. Vous êtes probablement, monsieur Eldridge, l'une des sept personnes au Canada qui comprennent les tenants et les aboutissants de la péréquation.

À  +-(1015)  

[Traduction]

+-

    M. Jim Eldridge: Monsieur le président, je connais également des membres du groupe d'experts, et ils ont toute ma confiance sur le plan de la compétence et de l'intégrité. Toutefois, je suis tout à fait d'accord avec vous pour ce qui est des limites qui leur sont imposées. Néanmoins, je m'inscris en faux sur un point : je pense qu'ils pourront se pencher sur certains des enjeux plus larges, et que les provinces ne manqueront pas de les forcer à le faire. Ce qui est moins certain est l'oreille qu'ils nous prêteront. Je sais qu'ils ont la compétence pour juger de la convenance des modalités; qu'ils ont la compétence pour juger de la souplesse du régime de répartition, de la pertinence de maintenir le régime fiscal représentatif, etc. Ils disposent d'une chance en or d'examiner ou de réexaminer les grands enjeux, mais il reste à savoir s'ils saisiront cette chance et si leurs recommandations, peu importe leur tournure, seront prises en compte.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Eldridge.

    Monsieur Côté, vouliez-vous poser une dernière question à nos invités?

+-

    M. Guy Côté: Il s'agit plutôt d'un commentaire. Je trouve intéressant de le noter parce que dans le cadre de votre présentation d'aujourd'hui — et c'est un peu ce que l'on a entendu dans différentes provinces —, on constate encore une fois que dans le domaine de la péréquation, comme dans d'autres domaines, les décisions sont continuellement prises de façon unilatérale par le gouvernement fédéral. On doit faire face à une suite de décisions unilatérales, ce qui est une des causes de ce déséquilibre fiscal. La dernière entente sur la péréquation en est encore un bel exemple. Elle ne porte d'entente que le nom, puisque c'était à prendre ou à laisser.

+-

    Le président: Voulez-vous répondre à cela, monsieur Selinger? Je ne crois pas que ce soit à M. Eldridge de le faire.

+-

    L'hon. Greg Selinger: Vous avez raison. Les décisions unilatérales causent d'énormes problèmes dans les relations entre les provinces et le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral pense probablement qu'étant donné que c'est son revenu, la décision finale lui revient, mais historiquement, son revenu était partagé entre les provinces. C'était le cas pendant la Seconde Guerre mondiale. Un peu de sensibilité à cet égard serait à l'avantage du pays.

    J'aimerais aborder un autre élément. Avec le système de péréquation, comment mesurer la capacité des provinces? Quelques experts ont maintenant tendance à recommander un système de mesure à grande échelle. Ce n'est pas une mesure de capacité de taxation d'une province, c'est une mesure d'économie. Or, on ne taxe pas l'économie globalement, on taxe les revenus spécifiques. À mon avis, il est nécessaire de mesurer très précisément la capacité des provinces à offrir leurs services; il n'est pas souhaitable d'utiliser une mesure qui est simple, mais qui tient compte moins fidèlement de la capacité des provinces à offrir leurs services à partir de leurs revenus. Entre la simplicité et la précision, on choisit la précision.

À  +-(1020)  

+-

    Le président: Merci.

    Judy, voulez-vous poser une dernière question?

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Oui. Avons-nous 10 minutes?

+-

    Le président: Ah, Judy! Bien sûr que nous avons 10 minutes. Mais vous avez monopolisé, sur l'ensemble des témoignages, au moins 25 minutes. Si mes collègues le permettent, vous pouvez poser une question.

[Traduction]

    Êtes-vous d'accord?

+-

    M. Don Bell: Non. Laissez Judy poser une dernière question. Allez-y.

+-

    Le président: Une dernière question, madame Smith? Oui. Guy Côté? Oui.

[Français]

    Le temps vous appartient.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai deux questions.

    Vous avez évoqué le rôle central du comité. Je suis tout à fait d'accord. Seulement, je ne suis pas certaine que nous survivrons au gouvernement en place, étant donné l'intransigeance démontrée par les libéraux actuellement et les incertitudes entourant l'élection. J'aimerais revenir en arrière pour vous demander ce qui, selon vous, serait le plus aidant pour l'instant. Si nous soumettons un rapport dans les prochaines semaines, avant que l'appel aux urnes ne soit lancé, quelles recommandations essentielles devrons-nous y inclure en matière de déséquilibre fiscal?

    Ma deuxième question fait suite aux commentaires du ministre sur le déséquilibre vertical. Nous avons abondamment parlé de la santé, en oubliant quelque peu l'éducation. J'ai été estomaquée par vos statistiques. Je n'avais pas réalisé à quel point le gouvernement fédéral donnait peu en matière d'éducation.

    Nous avons obtenu un excellent survol de la situation de la part de Robin Boadway, que nous avons entendu la semaine dernière à Ottawa. Il s'est montré inflexible sur le fait que les réductions des transferts en matière de santé et d'éducation, que la perte du Régime d'assistance publique du Canada ont porté un coup fatal à nos principes fondamentaux, qu'elles nous ont fait descendre plus bas que ce qui était pensable dans ce pays. Il a également été très ferme en affirmant que le gouvernement fédéral, au lieu d'abolir les inégalités et de renflouer les diminutions dans les transferts, a préféré s'en remettre à des projets à la pièce qui sont soit d'envergure étroite, comme les bourses du millénaire, soit de durée limitée, ce qui signifie que le fédéral se retirera un jour et laissera le soin aux provinces de prendre le relais, ou encore qu'il leur demandera de partager les coûts. Tout d'abord, le fédéral impose ses compressions et remet le fardeau aux provinces, après quoi il propose de nouveaux programmes qui exigent encore plus d'investissements de la part des provinces.

    Ma question est la suivante : comment faire accepter l'idée que le fédéral, qui croule sous les surplus, doit augmenter ses transferts et distinguer les transferts en matière d'éducation et de programmes pour les enfants?

+-

    L'hon. Greg Selinger: Tous les sondages dénotent l'appui très large, partout au pays, au principe de la péréquation, et je crois que les appuis sont encore plus solides pour ce qui est de l'éducation postsecondaire. Il est largement admis que l'éducation est fondamentale à la réussite dans l'économie mondiale. Or, beaucoup d'experts vous l'ont rappelé je pense, les crédits sont passés de 15 à 7 p. 100. Je crois qu'il faut sensibiliser la population à cette réalité. Notre province compte s'attaquer à ce dossier, pour faire comprendre à quel point le financement de l'éducation postsecondaire est insuffisant. Ce sera l'un de nos chevaux de bataille.

    Invariablement, quand on parle de la norme de dix provinces ou du rétablissement d'un programme, quel qu'il soit, le fédéral répond qu'il n'en a pas les moyens. Or, si on revient aux principes de base et qu'on travaille selon une approche progressive, le fédéral n'a aucune excuse. Le Québec a également fait cette proposition, si je ne m'abuse : il faut restaurer immédiatement le financement de l'éducation postsecondaire et des services sociaux. Des transferts distincts? Je crois qu'ils seraient d'accord avec ce principe, pour des questions de reddition de compte. Il faudra par la suite procéder par hausses progressives, toujours dans une optique évolutive. Ainsi, le débat se fera autour du montant de l'augmentation, pour déterminer si le gouvernement dispose de fonds suffisants à cet égard, et non pas autour du respect des principes fondamentaux.

    Pour l'instant, nous sommes enchevêtrés dans ce qu'on pourrait qualifier de « particularisme aigu » à l'échelon du fédéral. Toutes ces ententes à la pièce créent une confusion et des mésententes sans précédent, qui nous empêchent de nous aligner sur les principes de base qui assureraient le bon fonctionnement des programmes.

À  +-(1025)  

+-

    M. Jim Eldridge: Certains de vos prédécesseurs avaient produit ce document, un rapport de comité parlementaire qui remonte à 1981. On y explique pourquoi la macroformule ne convenait pas pour atteindre les objectifs de la péréquation. Vos prédécesseurs l'ont fait, et vous devriez vous sentir tout à fait libres d'en faire autant.

    Qu'est-ce que le comité pourrait faire? Tout d'abord, faites-vous entendre partout où vous le pouvez afin que le résultat des travaux du groupe d'experts soit soumis à votre examen et de vous assurer d'être consultés aux étapes suivantes. Ne croyez pas que le régime qui sera établi par le gouvernement fédéral sera en place pour cinq, dix ans, ou plus. Il sera en vigueur pendant les deux prochaines années, plus ou moins. Si vous réussissez à vous immiscer dans le processus par après, ce sera un grand pas.

    Autre chose : à mon avis, vous devriez exhorter, presser le groupe d'experts et le gouvernement fédéral à s'engager à faire du paragraphe 36(2) le pivot central de leurs travaux. J'ai vu le mandat du groupe d'experts; on y trouve une référence large au paragraphe 36(2) dans le préambule, sans en faire toutefois un principe directeur. Comme on peut difficilement imaginer qu'une disposition constitutionnelle ne serve pas de fil conducteur, je vous invite à leur rappeler cette évidence.

    Par ailleurs, si vous êtes prêts à le faire, il serait souhaitable que vous défendiez le rétablissement de la norme de dix provinces et de la prise en compte de la totalité des revenus. Comme Greg l'a mentionné, une distinction nette entre les transferts en matière d'éducation postsecondaire et de services sociaux serait également souhaitable.

    Mais le plus important selon moi est que vous mainteniez l'intérêt pour ce dossier dans toutes les tribunes. C'est essentiel pour assurer l'examen juste d'un aspect de la Confédération aussi important que la péréquation. La péréquation échappe constamment au radar, sauf à celui de quelques rares personnes, ce qui ne lui enlève rien de son importance. Même si c'est un cliché, je répète que la péréquation est la pierre d'angle de la Confédération.

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Wasylycia-Leis.

    Je remercie mes collègues d'avoir travaillé partout dans l'harmonie depuis le début des travaux, mais particulièrement à Winnipeg.

    Monsieur Selinger, je vous remercie de votre participation. Soit dit en passant, vous avez un français impeccable, et c'est tout à votre honneur.

    Je remercie également M. Eldridge, un grand sage, M. Boschmann et M. Molnar de leur participation. Vous avez fait une contribution extraordinaire et bien documentée à nos travaux. Merci d'avoir contribué à l'élaboration de notre rapport avec des recommandations précises, sur la péréquation en particulier. Je pense que nous pourrons remplir notre mandat adéquatement.

    Merci infiniment. Je vous souhaite une bonne journée.

    Nous faisons une pause de 15 minutes. Nous reprendrons à 10 h 45.

[Traduction]

À  +-(1028)  


À  +-(1052)  

+-

    Le président: Bonjour à tous.

    Je suis très heureux de vous présenter M. Stuart Murray, chef de l'opposition officielle, ainsi que M. Gerald Hawranik, porte-parole en matières financières du Parti progressiste-conservateur. Le Sous-comité sur le déséquilibre fiscal vous souhaite la bienvenue.

    Vous aurez quinze minutes pour nous présenter votre exposé préliminaire, après quoi nous aurons deux séries de questions de représentants de tous les partis à la Chambre des communes sur cet enjeu clé.

    Monsieur Murray, merci beaucoup. Je vous souhaite la bienvenue.

+-

    M. Stuart Murray (MAL et chef de l'opposition officielle, Parti progressiste conservateur , Assemblée législative du Manitoba): Je vous remercie de me donner cette occasion de m'adresser au sous-comité.

    J'en profite pour vous souhaiter la bienvenue à tous dans notre merveilleuse province du Manitoba et dans la ville de Winnipeg.

    Tout d'abord, vous m'avez posé des questions sur l'étoile que j'arbore. Elle témoigne de l'immense sentiment de fierté, que partage le Canada tout entier et tous les partis politiques, à l'idée qu'un musée des droits de la personne sera construit ici même, au Manitoba. On nous a demandé à tous de décrocher les étoiles et de devenir partie prenante de l'aventure, et c'est pourquoi nous portons cette étoile. Je sais que vous allez nous emboîter le pas dès que vous pourrez mettre la main sur votre étoile.

    Sur ce, je peux entamer mon exposé.

    Monsieur le président, merci beaucoup.

[Français]

+-

    Le président: Avez-vous une étoile pour nous?

[Traduction]

+-

    M. Stuart Murray: Nous veillerons à vous en procurer une à chacun. J'en parlerai au comité, qui vous les enverra. Merci beaucoup.

    Je sais que votre horaire est très chargé ces jours-ci et que le gouvernement fédéral a beaucoup d'autres chats à fouetter. Il n'en demeure pas moins que ce thème est capital et tout à fait à propos, et je me réjouis de l'occasion qui m'est donnée. Je suis accompagné par le critique de mon parti sur les questions de finances, M. Gerald Hawranik.

    Il y a quelques semaines, le Comité permanent des finances de la Chambre des communes était informé de l'excellente situation de l'économie canadienne, qui permettra au gouvernement fédéral d'engranger quelque 22 milliards de dollars en excédents au cours des 3 prochaines années. On ne saurait rêver de moment plus propice pour parler de déséquilibre fiscal et pour enfin trouver une solution à long terme avantageuse pour notre Confédération et, de façon tout aussi primordiale, pour l'ensemble des contribuables canadiens.

    J'insiste parce que les contribuables canadiens sont les grands artisans de notre bonne fortune actuelle. La moindre des choses serait de leur demander quoi faire avec cette manne, ou s'il faut dépenser cette manne!

    J'aborderai quelques points aujourd'hui. Même si en apparence ils ne sont pas liés, ils se rejoignent à quelque part sous le grand parapluie de la compétitivité économique du Canada et de ses provinces.

    Nous devons en premier lieu porter un nouveau regard sur les retombées de la politique courante en matière de péréquation sur le développement des provinces. Selon nous, il faut vérifier si le programme de péréquation aide au développement d'économies provinciales plus diversifiées et plus concurrentielles.

    Par ailleurs, même si la nouvelle entente augmente le transfert des revenus de la taxe sur l'essence aux municipalités qui ont besoin de moderniser leurs infrastructures, le gouvernement fédéral n'a pas encore trouvé le moyen de régler la question à notre satisfaction. La vastitude de ce pays et la lourdeur de l'infrastructure nécessaire pour soutenir la croissance économique exigent des artères qui facilitent le flux des biens et des services. Or, présentement, elles sont plutôt un obstacle à ce flux.

    Enfin, nous pensons qu'il faut profiter de la conjoncture favorable de notre économie tant vantée par le gouvernement fédéral pour enfin régler les problèmes de taxe qui nuisent à la compétitivité de nos entreprises par rapport à celles d'autres pays. Tant que nous n'aurons pas comblé le gouffre de la prospérité entre le Canada et certains de ses concurrents, notre capacité à développer des économies du savoir et à endiguer l'exode des cerveaux vers les États-Unis et ailleurs sera très limitée.

    Je suis ravi de pouvoir discuter de péréquation et des problèmes qu'elle génère avec des représentants du gouvernement fédéral. Cette question est au coeur des préoccupations de bien des Manitobains et de beaucoup de témoins qui ont comparu devant le comité. À notre avis, le temps est venu de faire une analyse de fond du programme sous l'angle de la transparence, mais également de la nature changeante et évolutive des économies provinciales. Le programme doit agir comme un détonateur et non comme un étouffoir du développement économique des provinces.

    Le Manitoba reçoit des paiements de péréquation depuis 1957, année où le programme de péréquation a été institué. C'est une particularité rare, trop peu souvent mentionnée dans les publications de la province. Compte tenu du chemin parcouru et de la croissance économique certaine qu'elle connaît, on s'attendrait à ce que la province du Manitoba soit devenue moins dépendante de la péréquation, et non le contraire.

    En 1957, au début du programme, la péréquation était perçue comme une forme de subvention versée par le gouvernement canadien. Le 1,8 million de dollars de la péréquation représentait un faible 2,7 p. 100 des recettes de la province. Aujourd'hui, le Manitoba reçoit plus de 1,6 milliards de dollars en paiements de péréquation, soit presque 20 p. 100 des recettes provinciales. Ces recettes sont suffisantes pour financer les ministères manitobains de l'Éducation, de la Justice, des Transports, ainsi que des Services gouvernementaux pour toute une année. Elles doivent être suppléées par les transferts du fédéral en matière de santé et de programmes sociaux, entre autres, qui ensemble ajoutent presque 1,8 milliards de dollars, ou 34 p. 100 aux revenus du Manitoba. Malgré la croissance économique et démographique, le Manitoba n'a jamais tant dépendu de la péréquation.

    À notre point de vue, le régime de péréquation en vigueur n'est bon ni pour le Manitoba ni pour le Canada. Il a mis en sursis la réforme dont le gouvernement a grand besoin et ouvert la voie à des politiques douteuses qui font que notre province ne peut tenir tête à ses plus proches voisins.

    Les impôts au Manitoba sont parmi les plus élevés dans l'Ouest canadien. Notre dette est également la plus élevée per capita. Malgré la croissance récente, ces entraves rendent le Manitoba peu attrayant pour les entreprises et les particuliers. L'Institut C.D. Howe affirme que le régime de la péréquation freine la croissance économique parce que la hausse de l'assiette et des recettes fiscales réduit en bout de ligne les paiements de péréquation. Les provinces qui diminuent les impôts pour encourager les investissements du secteur privé perdront aussi au change en matière de péréquation. À l'opposé, le fait d'emprunter et d'accroître la dette pour soutenir le résultat net des provinces ne réduit pas les paiements de péréquation.

    Il est notoire que l'accroissement de la dette va souvent de pair avec des impôts élevés. Le processus prend d'autant plus de force que le régime actuel de péréquation pénalise les provinces dès lors qu'elles trouvent moyen d'augmenter leurs revenus autogénérés et d'utiliser cette croissance comme levier de réduction de la dette.

À  +-(1055)  

    Tout compte fait, le gouvernement fédéral récompense les provinces qui grossissent le solde de leurs cartes de crédit. Son régime pénalise les provinces qui tentent de rembourser ce solde. Ne faudrait-il pas aller dans l'autre sens?

    Cette question prend un sens critique au Manitoba, qui vient tout juste d'annoncer que sa dette dépassera les 20 milliards de dollars d'ici la fin de l'exercice courant. Malgré l'effort de remboursement, la dette poursuit sur sa lancée à la hausse.

    Il faut que le programme de péréquation aplanisse les inégalités. Soit, les provinces doivent recevoir de l'aide afin d'être en mesure d'offrir des services comparables à leurs consoeurs, mais cette aide ne doit pas nuire à la santé économique d'aucune d'entre elles.

    J'aimerais aborder, à l'instar d'autres témoins qui ont comparu avant moi, la question de la norme de cinq provinces comme base de calcul du potentiel fiscal des provinces. Nous abondons dans le même sens que ceux qui prônent le retour à la norme de dix provinces pour le calcul des paiements de péréquation à l'avenir.

    D'emblée, je suis perplexe devant une formule qui se fonde sur les revenus des cinq provinces du centre pour le calcul d'une norme nationale du potentiel fiscal. Il faut tenir compte de toutes les provinces pour établir une mesure nationale juste, qui reflète les variations selon les années de leur potentiel fiscal relatif.

    Le retour à la norme de dix provinces pourrait se traduire par l'augmentation des transferts de péréquation de certaines provinces, dont le Manitoba. On pourrait y remédier en rajustant la formule de calcul du régime fiscal représentatif. Quoi qu'il en soit, une norme de calcul de dix provinces sera toujours plus juste pour l'ensemble des participants.

    Pour ce qui est du transfert de la taxe sur l'essence, je suis ravi d'apprendre que vous êtes arrivés à Winnipeg aujourd'hui, parce que vous comprendrez d'autant mieux mes commentaires au sujet des besoins des municipalités au chapitre de l'infrastructure. Je suis certain que plusieurs d'entre vous auront remarqué la piètre qualité de nos routes entre l'aéroport et ici. Vous comprenez certainement mieux maintenant pourquoi nous crions si fort pour obtenir de l'aide pour améliorer les routes.

    Entendez-moi bien : je ne dis pas que nous sommes insatisfaits du nouvel accord financier. Le moindre cent de plus peut aider. Ce que je veux dire, c'est que le gouvernement fédéral n'aide personne qui utilise les routes puisque, sur le montant de taxes prélevées sur l'essence, il en retourne somme toute une très minime proportion aux provinces afin qu'elles satisfassent aux besoins en matière d'infrastructure.

    Le fédéral recueillera 5 milliards de dollars en taxe sur l'essence cette année. Or, seulement 600 millions seront transférés aux villes pour qu'elles améliorent leurs infrastructures.

    Le gouvernement fédéral a promis de partager la moitié des recettes fiscales de l'essence, mais il ne mettra pas cette promesse à exécution avant cinq ans. Alors que les municipalités se partageront à un moment donné 5 milliards de dollars, le fédéral recueillera plus de 20 milliards en recettes sur l'essence pendant la même période. Les villes obtiendront au mieux 25 p. 100 du gâteau, ce qui n'est pas si intéressant.

    Ces calculs ne tiennent même pas compte de la croissance inévitable de la taxe sur l'essence d'ici 2010, qui soit dit en passant a augmenté de 10 p. 100 ces 5 dernières années.

    Je vais maintenant parler des possibilités offertes en matière d'allégements fiscaux permanents. Avant de décider de ce que nous allons faire avec un excédent aussi important et dont l'ampleur ne cesse d'augmenter, nous devons au préalable nous souvenir de sa provenance. Peu importe où se trouve l'argent actuellement, il ne faut pas oublier qu'il vient des poches des contribuables canadiens. Dans cette optique, il est primordial de les récompenser pour leur dur labeur en leur concédant des allégements d'impôt intéressants et permanents.

    On a discuté des points d'impôt et de l'assouplissement de la marge fiscale des provinces comme moyens de garantir aux gouvernements provinciaux les ressources suffisantes pour fournir les services auxquels les contribuables ont droit. Apparemment, le transfert par le fédéral d'une marge fiscale aux provinces semble la solution la plus simple au déséquilibre fiscal. C'est sans doute vrai, mais j'oserais dire qu'elle n'irait pas dans le meilleur intérêt des parties.

    Quelques Canadiens ont parlé de la productivité et de l'écart croissant au chapitre de la prospérité entre les contribuables canadiens et les citoyens d'autres pays. Si très peu de Canadiens pourraient vous expliquer la notion d'écart de la prospérité, la plupart sont des spécialistes pour ce qui est des répercussions concrètes de cet écart. Ils savent très bien, quand ils examinent leur chèque de paye, qu'ils ne sont pas plus riches qu'il y a un an. Ils savent également que les annonces récentes de réductions des impôts au fédéral n'allégeront pas vraiment leur fardeau fiscal.

    Depuis les années 80, le revenu moyen des Canadiens a stagné, dans la plupart des cas. Selon la Rotman School of Management Institute for Competitiveness and Prosperity, l'écart entre les revenus des Canadiens et ceux des Américains dépasse les 7 000 $. Si on parvient à combler ce gouffre, les familles canadiennes moyennes auraient 15 000 $ de plus dans leurs coffres après impôt.

    Pour ce faire, il faudrait réduire les impôts à la fois des particuliers et des sociétés. Il faudrait également diminuer les obstacles à l'investissement.

    Nous savons que la création d'emplois—je ne parle pas uniquement d'emplois bien rémunérés et hautement spécialisés, mais de tous les types d'emplois—est au coeur de la prospérité des provinces. Si le Canada abaissait les obstacles à l'entrepreneurship, il deviendrait une destination de choix pour le démarrage de nouvelles entreprises, qui créeraient les emplois dont le pays a besoin pour assurer sa compétitivité. C'est essentiel pour le Manitoba, qui a beaucoup à offrir aux entrepreneurs qui cherchent un endroit pour s'établir, mais qui sont forcés de rebrousser chemin à cause des mesures fiscales rébarbatives.

    Si nous ne faisons rien pour stopper la croissance de l'écart de prospérité avec les États-Unis, nous allons confirmer la faiblesse des économies provinciales et augmenter la dépendance aux paiements de péréquation.

Á  +-(1100)  

    Pour ce qui est de nos recommandations, je voudrais tout d'abord remercier le comité de nous avoir invités, nous et l'ensemble de la population canadienne, à lui faire part de nos points de vue sur ce très important sujet. Nous espérons que nos décisionnaires en viendront à réaliser qu'il ne s'agit pas uniquement de transférer de l'argent entre divers ordres de gouvernement. Ce pourrait être beaucoup plus. Le gouvernement peut saisir cette occasion en or pour tirer profit de sa bonne fortune et du dur labeur des Canadiens pour bâtir un avenir dans lequel les provinces et l'ensemble du pays pourront jouir de périodes prolongées de croissance et de prospérité. C'est aussi une chance inouïe de récompenser les Canadiens, qui sont les grands artisans de cette prospérité soudaine du gouvernement fédéral.

    En résumé, voici mes quatre recommandations : faire en sorte que le programme de la péréquation récompense à la fois les efforts des provinces pour améliorer leur santé fiscale et les Canadiens, en leur donnant des chances d'accès égales à des programmes de qualité, sans égard à leur lieu de résidence; améliorer la transparence du programme de péréquation en revenant à une norme de dix provinces pour le calcul de la capacité fiscale; s'engager à augmenter à long terme les transferts des revenus de la taxe sur l'essence aux municipalités, pour leur permettre de moderniser leurs infrastructures, ou encore à réduire cette taxe afin d'abaisser le fardeau fiscal des Canadiens; et faire une priorité de la réduction réelle des impôts des entreprises et des particuliers.

    Voilà. De nouveau, je vous souhaite la bienvenue au Manitoba et je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de livrer mes remarques.

Á  +-(1105)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Murray.

[Français]

    Madame Smith, vous disposez de cinq minutes.

[Traduction]

+-

    Mme Joy Smith: Merci.

    Merci pour votre exposé, très apprécié. Je me sens privilégiée de pouvoir discuter de ces questions avec vous ce matin.

    Vous le savez déjà, cet exercice d'examen du bien-être et des contraintes fiscales de la province du Manitoba vise à abolir sa réputation de province démunie». C'est ce que nous entendons partout au pays et, très honnêtement, j'ai une crise d'urticaire chaque fois que j'entends cette expression.

    J'aimerais avoir vos commentaires. Chaque année, le fédéral se vante de ses surplus, qui bon an mal an sont toujours supérieurs à ce qui a été annoncé, et de loin. Pouvez-vous nous parler des conséquences de cette attitude pour les gouvernements provinciaux, sur les programmes des provinces?

+-

    M. Stuart Murray: C'est une très bonne question, madame Smith.

    Je sens beaucoup de frustration autour de moi, particulièrement au Manitoba, où les gens ont l'impression d'être sur une pente descendante dans notre dépendance à la péréquation. Nous bâtissons notre budget selon les revenus générés dans notre province, en espérant obtenir plus de transferts de péréquation de la part du gouvernement fédéral. Bien entendu, beaucoup dépend de la situation en Ontario.

    Tout porte à croire que le fédéral manque de vigilance. Je viens du milieu des affaires. Dans ce milieu, nous faisons des budgets périodiques en faisant de notre mieux, et nous portons une attention particulière aux déficits et aux excédents. Si les surplus en venaient à dépasser la barre du raisonnable, comme nous l'avons vu dans les derniers budgets fédéraux, la question qui se poserait d'emblée serait la suivante : Qui est responsable?

    Dans un sens, nous ne pouvons que nous réjouir de pouvoir compter sur des revenus supplémentaires, mais cette situation nous pousse à nous demander... Je ne peux pas me prononcer au nom du gouvernement fédéral, mais il faut lui demander comment, quand les recettes prévues ont décuplé, il entendait dépenser le montant initial. Il avait sans doute des projets à cet égard. Cependant, quand les résultats dépassent les prévisions d'autant, il faut s'interroger sur le processus budgétaire. À mon avis, vous devez demander au gouvernement fédéral s'il n'a pas surfacturé les Canadiens. Un tel surplus ne dénote-t-il pas une vision erronée de la réalité?

    Je le répète, je me réjouis que nous soyons du côté de l'excédent plutôt que de celui du déficit. Cela n'empêche pas de nous demander s'il n'y a pas également des risques de tomber dans le négatif puisque nous pouvons aller si loin du côté des surplus? Cette perspective serait dévastatrice pour les provinces.

+-

    Mme Joy Smith: J'aimerais vous demander vos commentaires sur un autre sujet. Vous avez évoqué le fardeau fiscal. Je crois que nous nous sommes dessaisis d'une partie de l'impôt sur le revenu des particuliers pendant la Seconde Guerre mondiale—une partie assez imposante, en fait. Si je ne me trompe pas, le gouvernement fédéral ramasse quelque chose comme 57 p. 100 de nos impôts personnels sur le revenu.

    Je voudrais connaître vos commentaires sur deux choses : les provinces ont-elles tenté quoi que ce soit pour faire pression ensemble sur le fédéral afin de remettre en question cette purge de leurs revenus? À l'origine, il incombait aux provinces de s'occuper de leurs propres besoins, et nous ne sommes jamais revenus sur ce virage. Je ne comprends vraiment pas cette absence de volonté à faire cet exercice.

    Deuxièmement, je vous pose la question à tous deux, pour que vous puissiez mieux ventiler votre temps, quand nous parlons des avantages du nouveau programme fédéral de péréquation pour 2004-2005, il est intéressant de les examiner province par province. Il semble en effet que le Manitoba se retrouve plutôt au bas de l'échelle. Des provinces comme la Saskatchewan et l'Île-du-Prince-Édouard semblent s'en tirer beaucoup mieux. Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez de tout cela?

Á  +-(1110)  

+-

    M. Stuart Murray: Merci de poser la question.

    On pourrait penser que l'accord sur la santé, d'une durée de dix ans et signé par toutes les provinces, est le fruit d'une initiative des premiers ministres provinciaux. Or, il a été initié par le premier ministre canadien.

    Votre commentaire est tout à fait pertinent. Selon moi, ce qu'il faut faire... J'espère sincèrement que le comité, au cours du processus de consultation pancanadien, non seulement auprès des leaders politiques mais également des membres de la population qui contribuent à la prospérité du pays par leur travail acharné—j'espère que leur message pointera unanimement vers la nécessité de rendre le Canada compétitif... Même si ce sont des clichés, il faut penser aux contribuables avant tout. Cependant, nous ne le répéterons jamais assez, parce qu'il nous arrive à tous, à différents échelons des gouvernements, de penser à tort que nous pourrons toujours augmenter les impôts de quelqu'un, ou que si une province enregistre un énorme surplus, cela signifie que le fédéral fait bien son travail.

    À mon avis, nous devons revoir les taux d'imposition. Quand ils constatent les sommes excédentaires qui sont créées ou générées, tous les premiers ministres provinciaux doivent unir leur voix pour dire au premier ministre du Canada—pas nécessairement lors d'une réunion avec lui mais lors d'une réunion entre eux—qu'il est devenu nécessaire de travailler tous ensemble pour faire du Canada et, par ricochet, chacune des provinces, un environnement plus compétitif.

    Tout cela nous ramène à la question des points d'impôt et de la marge fiscale. En ma qualité de chef provincial, je peux affirmer que nous entretenons une très bonne relation avec la province du Manitoba et sa population, et qu'il est tout à fait essentiel d'augmenter les points d'impôt gérés par les premiers ministres provinciaux, pour qu'ils aient plus de contrôle et de pouvoir de décision en matière d'administration des fonds.

    Pour ce qui est du programme fédéral, oui, c'est l'une de nos principales préoccupations. Au Manitoba, nous nous trouvons de plus en plus pris à la gorge et dépendants des paiements de transfert du fédéral. J'ai discuté avec le premier ministre de la province du fait que la province est assurée de 80 p. 100 environ de son budget, et espérer que les 20 p. 100 restants seront comblés par le gouvernement fédéral.

    C'est une façon assez singulière d'administrer une entreprise, surtout si elle est en décroissance, comme c'est le cas de la Saskatchewan. Si on ajoute à cela le fait que le Manitoba est devenu la seule province démunie de l'Ouest canadien, les entreprises n'ont pas besoin de beaucoup d'autres explications sur la façon dont la province est administrée.

    Bref, nous sommes inquiets de cette dépendance sans cesse grandissante à l'égard des paiements de transfert du fédéral, alors que ce devrait être le contraire.

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

    Monsieur Bell, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Don Bell: Merci.

    Vos observations sur la nouvelle entente ont piqué ma curiosité. Vous avez parlé en détail des questions relatives à la taxe sur les carburants, mais si je comprends bien ce que vous avez dit initialement, le gouvernement fédéral n'a pas encore réglé la question comme vous le souhaiteriez. J'imagine que de votre point de vue, la moitié de ce qui a été promis aurait dû se matérialiser plus tôt; est-ce que je résume bien les choses?

    Je soulignerais que la FCM dont j'ai été administrateur au moment où nous avons entamé ces discussions il y a cinq ou six ans, avait demandé trois choses à ce moment-là. En fait, lors des dernières élections, le parti Conservateur fédéral a adopté trois cents pour commencer, ce qui devait toutefois englober ou remplacer les programmes d'infrastructure en place.

    En ma qualité de politicien municipal à ce moment-là, nous nous rendions compte que ce qu'offrait le Parti libéral fédéral correspondait en fait à cinq cents sur cinq ans, répartis de façon à donner deux cents à la fin du processus, mais cela devait s'ajouter à l'infrastructure, aux fonds municipaux verts, ainsi qu'aux autres programmes d'infrastructure en place. Ce programme semblait plus généreux que celui que nous avions demandé à la FCM, et plus généreux que celui offert par les autres partis.

    Je me pose des questions à ce sujet et je soulignerais que dans le cadre des discussions que nous avons eues, nous avons augmenté l'offre, si vous voulez l'appeler ainsi, jusqu'à un cent et demi la première année. Nous sommes donc arrivés à en proposer encore davantage au début du processus. Je peux vous dire qu'à cause de mes liens avec le gouvernement municipal, j'espère que nous allons en fait accélérer le versement d'une partie de ces deux cents prévus la cinquième année.

    C'est très important, j'en conviens avec vous, mais je me pose des questions au sujet de vos observations.

Á  +-(1115)  

+-

    M. Stuart Murray: Certainement, merci beaucoup monsieur Bell.

    Il est important de souligner que vous avez été politicien municipal, car je pense que vous comprendrez alors mes observations.

    Au Manitoba, nous nous adressons à l'AMM, l'Association of Manitoba Municipalities. Nous avons la possibilité de parler en tant que chefs de partis et de faire partie du processus. Il y a quelques années, les leaders provinciaux répétaient toujours la même chose, revenant constamment à la charge. Ils exigeaient que le gouvernement fédéral remette aux provinces une partie de la taxe sur les carburants.

    Je peux vous dire que je me suis probablement laissé emporter et que j'ai ainsi fait cette observation. Par la suite, plusieurs leaders municipaux m'ont encerclé en quelque sorte pour me dire de tout oublier et d'abandonner tout espoir, car cela n'allait pas arriver; nous avons déjà essayé et cela ne peut pas marcher.

    Je pense vous avoir dit qu'ils ont commencé quelque chose. Lorsqu'on voit les derniers chiffres, il y a lieu de s'inquiéter; je suis sûr qu'ils sont plus élevés que cela.

    Parlons quelques instants du Manitoba. Si je ne me trompe, le gouvernement fédéral obtiendrait 135 millions de dollars en taxe sur les carburants. Il suffit de conduire dans la province du Manitoba pour s'apercevoir que les routes sont en très mauvais état. J'imagine que ce devrait être une priorité du gouvernement fédéral. Je sais que lorsqu'on commence à aborder cette notion de recettes produites dans un poste budgétaire, on court toujours le risque de voir un poste de dépenses en regard. Une limite est peut-être souvent imposée puisque l'entité qui va en fait dépenser l'argent se fait toujours dire comment le dépenser, mais je prétends que l'infrastructure manitobaine est en très mauvais état. C'est l'observation que je ferais.

    J'imagine que le gouvernement fédéral, et M. Bell en particulier, se rendent compte à nouveau du fait que le montant des recettes prévues est toujours supérieur à la projection initiale.

    À mon avis, et je parle ici au nom des Manitobains, nous sommes une industrie de camionnage. Nous assurons le transport de bien des produits, comme les céréales. Beaucoup de nos gens, entrepreneurs et gens d'affaires au Manitoba, ne cessent de nous dire que nos routes sont en très mauvais état.

    Je serais ravi que le comité en fasse l'expérience directement car il ne suffit pas de me prendre au mot. Si vous en faites l'expérience, Gerald et moi-même participerons à l'équilibrage de roues que vous aurez à payer une fois que vous aurez conduit sur nos routes rurales. Même dans la ville, c'est un énorme problème.

    C'est la teneur de mes observations, monsieur Bell. Je crois que compte tenu des 134 millions de dollars, si pas plus, il faudrait, dans la province du Manitoba, davantage prêter attention aux réparations de l'infrastructure.

+-

    M. Don Bell: Vous voulez juste parler de l'augmentation plus rapide de ces chiffres au lieu de la période des cinq ans prévue actuellement, j'imagine?

+-

    M. Stuart Murray: Oui, et je crois que c'est la priorité. À mon avis, cette augmentation devrait se faire plus rapidement car, d'après ce que je peux observer—et vous pouvez ne pas être d'accord avec moi—les recettes sont là, selon le Trésor fédéral, vu que les recettes ont dépassé les prévisions initiales.

+-

    M. Don Bell: Me reste-t-il du temps ou non?

+-

    Le président: Nous allons avoir un autre tour de trois minutes par la suite.

    Monsieur Côté.

[Français]

+-

    M. Guy Côté: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Comme vous le savez, le sous-comité fait des consultations partout au Canada. Ces consultations sont presque terminées. Sans tirer de conclusions immédiates, un certain nombre d'éléments se répètent.

    Dans chaque province visitée, le déséquilibre fiscal est un problème structurel amplifié par certaines politiques du gouvernement libéral en place. Des termes reviennent souvent, notamment l'unilatéralisme des décisions du gouvernement fédéral. Nous avons tous à l'esprit la réduction radicale des paiements de transfert du milieu des années 1990 et les résultats dramatiques que cela a entraîné pour les provinces.

    Jusqu'à présent, tout le monde s'entend pour dire qu'il doit aussi y avoir une réforme en profondeur de la péréquation. La très grande majorité des intervenants ont mentionné l'importance de retourner à la règle des 10, c'est-à-dire à la moyenne de la capacité fiscale des 10 provinces.

    Tout à l'heure, vous sembliez plutôt favorable à un transfert, à tout le moins partiel, de champs de taxation ou de points d'impôt. Je vais à la pêche aux informations. J'ai eu cette réflexion en vous écoutant.

    Si le gouvernement fédéral devait procéder — je vais très loin dans ma réflexion — à une élimination complète des paiements de transfert aux provinces en échange à la fois de points d'impôt et de champs de taxation, à condition que la réforme soit axée sur la péréquation, qui jouerait exactement le rôle qui lui revient, cela ne serait-il pas une solution au problème du déséquilibre fiscal?

Á  +-(1120)  

[Traduction]

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup, monsieur Côté, pour cette question. Je vous félicite de nouveau. À mon avis, il est important de « sortir des sentiers battus ».

    Je prétends que la péréquation peut jouer un rôle conformément à celui prévu initialement. C'est à mon avis fort important. Il suffit de revenir à 1957 pour s'apercevoir que la péréquation a fait l'objet de nombreuses combinaisons et permutations. Si je comprends bien, on est passé de deux à cinq, puis à dix dans le but d'améliorer la situation. Il doit bien y avoir une façon de ne pas punir quelle que province que ce soit, par exemple, dont la population est moins importante, qui ne dispose pas de certaines des ressources. Je sais qu'au Manitoba, l'avenir est très prometteur en matière d'énergie électrique. Nous aimons parler de notre opportunité par comparaison au pétrole de l'Alberta, par exemple. Pourtant le Manitoba ne semble pas avoir la même capacité.

    Je ne veux pas faire d'observations gratuites devant le comité, mais je tiens à dire que les travaux de votre comité tombent à point nommé. Divers témoins vous parlent des questions liées au déséquilibre fiscal, des préoccupations au sujet de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador qui ont peut-être bénéficié d'un traitement particulier. Vous entendez toutes ces sortes d'allégations, si bien que vous commencez à vous demander si le gouvernement ne dresse pas une province contre l'autre? J'espère certainement que ce n'est pas l'intention de quelque premier ministre que ce soit que d'essayer d'obtenir des faveurs politiques en traitant des questions au cas par cas dans le but d'influencer les électeurs.

    Je pense qu'il est important de revenir à la question suivante : à quoi sert la péréquation avant tout? La péréquation était très importante au moment où elle a été prévue, car elle permettait aux provinces d'offrir des services de manière que tout Canadien, indépendamment de sa province de résidence, ne soit pas traité comme un citoyen de deuxième classe par rapport à d'autres. J'espère et je recommande donc que le comité, lorsqu'il commencera ses délibérations, examinera la situation de 1957. Pourquoi la péréquation a-t-elle été mise en place et quelles en étaient les valeurs fondamentales? Voyons également jusqu'à quel point nous nous sommes écartés de cet objectif en 2005, 2010 et plus tard. Je pense donc que vous soulevez un point très intéressant à ce sujet.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Côté.

    Madame Wasylycia-Leis, s'il vous plaît.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

    Merci, monsieur Murray et monsieur Hawranik.

    J'apprécie votre exposé, monsieur Murray, mais j'en retire toutefois un message ambigu au sujet de la péréquation. J'ai l'impression que vous n'appuyez pas chaudement le concept de la péréquation que vous considérez comme, en quelque sorte, un obstacle à la création d'une économie concurrentielle. Le fait que vous citiez l'étude du C.D. Howe Institute laisse supposer que la péréquation entrave la croissance économique et le fait que vous ne parliez pas de la nécessité absolue d'englober toutes les recettes dans le cadre de la norme des dix provinces, me laisse entendre que vous aimeriez sortir du système de la péréquation, si c'était possible.

    La contradiction que je vois ici, c'est que la péréquation existe et qu'elle est souhaitée, car il existe en fait une différence en termes de capacité financière des provinces. L'Alberta riche en pétrole et la Saskatchewan riche en ressources naturelles ont une capacité fiscale beaucoup plus grande que le Manitoba. La péréquation sert en fait à équilibrer les choses. Il ne s'agit donc pas de dire que le Manitoba a fait quelque chose de mal et que, par conséquent, il ne devrait pas avoir droit à la péréquation, tandis que l'Alberta et la Saskatchewan sont de grands planificateurs économiques et ont créé cette économie concurrentielle. À mon avis, l'avantage dont elles bénéficient doit être pris en compte dans le cadre de la péréquation.

    Si je ne me trompe, c'est Robin Boadway qui disait qu'on se retrouve finalement avec un système qui ampute en fait une bonne partie de l'objectif économique de la péréquation, si nous n'examinons pas l'ensemble des recettes et des ressources naturelles.

    Nous avons tous entendu les propos de Tom Courchêne qui a beaucoup parlé de cette question. Selon lui, l'Alberta est en mesure d'exploiter les recettes énergétiques qui lui tombent du ciel pour offrir un genre de paradis fiscal. C'est la raison pour laquelle nous avons le système de péréquation que nous examinons de près aujourd'hui. Nous voulons mettre en place une formule qui fonctionne, pour qu'il ne s'agisse pas uniquement d'une norme des dix provinces, mais une norme qui englobe en fait toutes les recettes et qui s'appuie sur le concept de la politique de la redistribution de la richesse, ce qui explique le soutien des Canadiens à cet égard, je crois.

    La question que je veux vous poser est la suivante : jusqu'à quel point êtes-vous prêt à préconiser un retour à la façon de faire qui prévalait en 1957, qui consistait à englober toutes les ressources et l'ensemble de la capacité fiscale, et à ensuite user du pouvoir du gouvernement fédéral pour en assurer la répartition équilibrée à l'échelle du pays?

Á  +-(1125)  

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup pour votre question, madame Wasylycia-Leis. Il est bon de vous voir dans votre ville natale.

    Ce que je veux dire me semble très clair. Lorsque vous examinez la façon dont la péréquation fonctionne aujourd'hui—vous parlez de l'Alberta riche en ressources, de la Saskatchewan riche en minéraux—il me semble que ce qu'on observe au Manitoba—et la raison pour laquelle je m'inquiète à ce sujet—c'est que l'on semble aller exactement à l'opposé des trois autres provinces de l'Ouest. La Colombie-Britannique—et son nouveau gouvernement—-commence maintenant à devenir une province riche, tandis que le Manitoba est à la traîne et devient la dernière province pauvre du lot.

    Ce qui m'inquiète, c'est que par rapport à la croissance enregistrée dans la province du Manitoba, on ne semble pas s'appuyer de moins en moins sur la péréquation, mais, apparemment, de plus en plus. Cela me prouve qu'il faut prévoir un changement à cet égard. Plus il y a de paiements de péréquation dans une province, comme au Manitoba, moins on cherche à devenir concurrentiel et moins il s'avère nécessaire de le devenir, d'essayer de stimuler la croissance, de produire plus de recettes, d'être plus compétitif. C'est ce que nous observons dans cette province qui affiche le taux d'endettement le plus élevé per capita au Canada.

    Je tiens à être très clair. Je suis convaincu qu'il faut traiter tous les Canadiens sur un pied d'égalité. C'est à mon avis fort important. Pour revenir aux observations de l'un de vos collègues, je pense que c'était ainsi qu'on interprétait le concept de la péréquation au Canada, en 1957.

    Ce que nous observons aujourd'hui, ce qui me préoccupe, et la raison pour laquelle je propose ces recommandations, c'est que peut-être nous avons besoin... Je mets au défi le comité d'examiner les diverses façons de définir ces quelque 30 éléments.

    De nouveau, j'ai dit très clairement que selon moi, le Manitoba est en quelque sorte entravé, car il dispose d'une ressource renouvelable, l'hydroélectricité. À mon avis, c'est une ressource naturelle très importante, et je ne sais pas si nous en tirons profit au même titre que ce qu'on observe dans certaines des autres provinces.

    Je suis de la Saskatchewan et je pense que l'honorable députée le sait bien. Lorsque j'examine les opportunités au Manitoba, je pense qu'elles sont beaucoup plus importantes que celles que nous pouvons observer dans la province de la Saskatchewan, en termes de croissance, pourtant, ce qui m'inquiète, c'est que l'on ne semble pas aller sur ce chemin. J'ai illustré dans mes observations que nous sommes passés de 1,8 millions de dollars de péréquation en 1957, soit 2,7 p. 100 de nos recettes provinciales, à 1,6 milliards de dollars de péréquation, soit près de 20 p. 100 de nos recettes provinciales et je n'y englobe pas les paiements de transfert au titre de la santé et des programmes sociaux. C'est la raison pour laquelle je souligne ce point. Je ne veux absolument pas laisser entendre qu'il faudrait l'interdire. Ce serait fort malheureux que vous interprétiez mes propos de cette façon, car ce n'est absolument pas ce que je veux dire.

Á  +-(1130)  

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai simplement l'impression que, d'après vous...

[Français]

+-

    Le président: Madame Wasylycia-Leis...

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Un autre tour de table?

+-

    Le président: Oui, merci.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: D'accord, désolée, je vais attendre mon tour.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Madame Smith, trois minutes.

+-

    Mme Joy Smith: Merci.

    J'aimerais vous demander de développer un peu plus ce que vous venez de dire au sujet des soins de santé. Je ne sais pas si vous avez entendu les observations faites un peu plus tôt, à savoir que les paiements de transfert dont bénéficie la province ne sont pas toujours transparents et ne doivent pas toujours faire l'objet de reddition de comptes. Ils se perdent dans la nature, en quelque sorte. Souvent, nous pensons autour de la table—la question a été soulevée un peu plus tôt et c'est une préoccupation très valable—qu'il faut rendre compte de ces paiements de transfert pour que les gens sachent exactement à quoi ils servent. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup.

    Je crois que dans la province du Manitoba, les fonds prévus pour réduire les listes d'attente dont bénéficient les provinces en sont un exemple pertinent. Il est à mon avis risqué de fonctionner sans délai, sans limite. On en revient alors au fait que transférer des fonds à une province est une chose, mais que si ce transfert n'est pas affecté de manière précise à quoi que soit, ni ciblé, comme on a pu l'observer dans le cas du transfert de fonds prévus pour réduire les listes d'attente... Le gouvernement actuel a versé cette somme dans le fonds de stabilisation fiscale. Je pourrais bien sûr dire que je suis heureux de voir que l'argent a été mis quelque part au lieu d'être dépensé. Je dirais toutefois que le gouvernement actuel parle depuis six ans de la façon dont il va réduire les listes d'attente et pourtant l'argent est là et ne sert à rien de particulier.

    J'aimerais revenir sur l'observation que vous faites et qui, je crois, rejoint ce que disait M. Bell : il n'y a rien de mal à ce que le gouvernement fédéral travaille conjointement avec les provinces, pas unilatéralement, mais en partenariat, afin de voir où produire et placer les recettes. Je crois que cela doit provenir de la demande des premiers ministres provinciaux, car ce sont ceux qui sont les plus proches des électeurs et qui savent où dépenser les recettes. J'ose espérer, en cas d'excédent découlant des impôts payés par les Canadiens au gouvernement fédéral, que les premiers ministres provinciaux indiqueraient, ensemble, au gouvernement fédéral, ce qu'ils veulent faire de ces recettes pour qu'elles soient affectées là où il le faut. En effet, le fait de transférer de l'argent ne veut pas nécessairement dire qu'il va être bien dépensé et produire des recettes. Des occasions peuvent se perdre.

+-

    Mme Joy Smith: Vous permettez?

+-

    Le président: Allez-y, pour une minute.

+-

    Mme Joy Smith: Merci.

    Je me demande si l'on pourrait demander l'avis de M. Hawranik, dont les connaissances à cet égard sont très étendues. Avec tout le respect que je vous dois, permettez-vous d'accorder à Gérald quelques minutes pour qu'il puisse s'exprimer au sujet de ce dont nous venons de parler?

+-

    Le président: Monsieur Hawranik, allez-y, s'il vous plaît.

+-

    M. Gerald Hawranik (porte-parole en matières financières, Parti Progressiste Conservateur, Assemblée législative du Manitoba): Effectivement, j'aimerais faire une observation à cet égard.

    Stuart a indiqué un peu plus tôt qu'en fait, les fonds qui proviennent du gouvernement fédéral et dont bénéficie la province pour la réduction des listes d'attente, ont été versés dans le fonds de stabilisation fiscale. Le gouvernement fédéral devrait bien sûr s'en inquiéter, car si vous donnez de l'argent à une province pour réduire les listes d'attente, vous devriez vous attendre bien sûr à un résultat. C'est également une préoccupation de notre part.

    En ce qui concerne l'orientation indiquée, si vous donnez des fonds pour atteindre certains objectifs—et nous savons que le gouvernement fédéral nage dans l'argent—j'imagine alors que le gouvernement fédéral voudrait s'assurer que ces fonds servent à un but précis. Des contrôles doivent être prévus. Il ne s'agit pas simplement que le gouvernement fédéral donne de l'argent au gouvernement provincial tout en s'attendant à ce que la province remplisse ses obligations. À mon avis, tout le processus doit être assorti de contrôles pour faire en sorte que les provinces remplissent leurs obligations et que ce soit rentable. Vous attendez une performance de notre part et il faut certainement utiliser ces fonds là où il le faut.

    Merci, Joy, pour cette question.

Á  +-(1135)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Smith.

    Monsieur Bell, allez-y pour trois minutes, s'il vous plaît.

+-

    M. Don Bell: J'aimerais dire encore quelques mots au sujet de la taxe sur l'essence. C'est un sujet qui me tient à coeur. J'ai fait partie du comité du caucus qui s'est penché sur le modèle de répartition. Nous avons introduit un élément d'équité dans celui-ci—pour ne pas utiliser le mot péréquation—, parce que la répartition ne pouvait uniquement se faire par habitant. Il fallait, compte tenu des circonstances des provinces, assurer une répartition en fonction du nombre d'habitants ou des besoins. Les territoires, eux, recevraient un montant forfaitaire, un montant de base qui serait ensuite bonifié selon la formule établie. Donc, un certain degré de péréquation a été instauré, je suppose, pour tenir compte des besoins en infrastructure.

    Je peux dire, en tant qu'un des maires qui était là initialement, que le produit de la taxe sur l'essence devait strictement servir, au départ, à répondre aux besoins en matière de transport. Or, certaines collectivités ont fait valoir qu'elles avaient des besoins aussi bien dans le domaine des transports que dans celui des réseaux d'aqueducs et d'égouts. Voilà pourquoi nous avons décidé d'étendre le concept.

    Vous avez dit que le transfert de la taxe du gouvernement fédéral aux provinces constitue le moyen le plus simple de corriger le déséquilibre fiscal, sauf que cette façon de faire ne sert les intérêts de personne. Je suppose que vous préconisez cette approche plutôt qu'une réduction d'impôt. Vous avez parlé de la réduction de la dette, de l'importance de cette question pour les provinces. J'attire votre attention sur le fait que le gouvernement fédéral consacre un pourcentage exagérément élevé de chaque dollar aux frais de la dette fédérale, qui doit, elle aussi, être réduite. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.

+-

    M. Stuart Murray: Encore une fois, merci, monsieur Bell, et merci de cet élément d'information. En tant que maire d'une collectivité, vous connaissiez sûrement bien le dossier des infrastructures.

    Pour revenir à votre question, si je dis que le transfert de points d'impôt aux provinces constitue l'un des moyens les plus simples d'assurer la stabilisation des recettes, c'est parce que j'estime que la province est en mesure d'exercer un plus grand contrôle sur les domaines qui peuvent générer des recettes. Je ne veux absolument pas vous donner l'impression que la réduction de la dette n'est pas un objectif important. Cette question constitue un enjeu, comme je l'ai mentionné, pour le Manitoba.

    Je pense avoir commis une bévue, plus tôt, quand j'ai dit que nous avions la dette la plus élevée par habitat au Canada. Je voulais dire dans l'Ouest du Canada. Je désire présenter mes excuses au comité; je faisais allusion à l'Ouest du Canada.

    Au fur et à mesure que la dette augmente... La dette est un sujet que le grand public a beaucoup de difficulté à saisir. On peut assimiler cela aux cartes de crédit : quand on a atteint le maximum sur une carte de crédit, on essaie d'emprunter sur une autre carte, tout en essayant de réduire l'hypothèque et d'organiser peut-être un voyage. La dette qui ne cesse d'augmenter, les frais de service de celle-ci, c'est tout simplement de l'argent qui est versé aux marchés étrangers ou aux détenteurs de titres d'emprunt. Cet argent pourrait être consacré aux soins de santé, aux infrastructures, à l'éducation, des services que les Canadiens financent par le biais de leurs impôts. Les Canadiens sont prêts à payer leur juste part d'impôt, mais ils veulent, en contrepartie, des services. Or, quand une bonne partie de cet argent est consacré aux frais de la dette, on ne rend service ni aux travailleurs canadiens, ni aux travailleurs manitobains.

    Voilà pourquoi je formule cette suggestion, qui ne sera sans doute pas retenue, mais j'applaudirais—et de nombreux premiers ministres provinciaux feraient de même—le gouvernement fédéral s'il décidait de donner aux provinces une plus grande marge de manoeuvre fiscale et d'augmenter la valeur des points d'impôt. Je ne pense pas que cela va se produire, mais c'est ce que je voulais dire quand j'ai fait ce commentaire.

Á  +-(1140)  

+-

    M. Don Bell: Merci.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell.

    Monsieur Côté, vous disposez de trois minutes.

+-

    M. Guy Côté: Merci, monsieur le président.

    Je reviens aux paiements de transfert et à l'importance qu'ils soient ciblés. Je me fais probablement l'avocat du diable de votre point de vue, mais pour ma part, ce point de vue a beaucoup de sens.

    Le fait de cibler spécifiquement ces transferts ne cause-t-il pas des problèmes de transparence et de reddition de comptes? J'hésite toujours à prendre des exemples dans le domaine de la santé, parce que les besoins sont immenses partout. Cependant, à titre d'exemple et pour les besoins de la cause, disons qu'au Manitoba, de nouveaux équipements plus performants seraient importants pour réduire les listes d'attente. Dans une autre province, il pourrait s'agir d'un nombre accru d'employés.

    Ne serait-il pas plus profitable à cette démocratie que l'on donne un certain nombre de millions de dollars pour le domaine de la santé? Le gouvernement du Manitoba pourrait alors décider d'investir dans de l'équipement, par exemple, et il aurait à en répondre à sa population. Cela n'améliorait-il pas davantage la reddition de comptes que de recevoir de l'argent pour engager du nouveau personnel alors que là n'est pas le besoin?

    On pourrait trouver le même type d'exemple dans le domaine de l'éducation ou dans celui des routes. Ici, ce sont peut-être les routes entre les différentes municipalités qui nécessitent des investissements. Je sais qu'au Québec, en ce moment, ce sont les routes municipales qui nécessitent des investissements.

    Quelle est votre opinion à ce sujet?

[Traduction]

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup de la question. Elle est délicate.

    À mon avis, ce qui ne fait pas l'affaire des gouvernements, peu importe le palier, c'est cette attitude paternaliste qui consiste à dire, voici l'argent, mais avant de vous le donner, nous exigeons que vous remplissiez certaines conditions. C'est là un précédent très dangereux. Je dois me montrer prudent ici, car j'ai dit plus tôt que les infrastructures au Manitoba s'étaient tellement détériorées—c'est la même chose partout au Canada, mais je parle au nom du Manitoba—qu'on pourrait les comparer, par exemple, à une maison. Quand vous vendez une maison, vous vous assurez que la peinture a été refaite, que les tapis sont propres, ainsi de suite. Le problème, quand vous achetez une maison, c'est ce qui se trouve derrière les murs. Que cachent, en fait, les murs? Du zonolite? De vieux tuyaux, de vieux câbles? Allez-vous être obligé d'arracher les murs et de les refaire? Vous voulez savoir exactement ce que vous achetez, question à laquelle on ne peut pas toujours répondre dans ces circonstances.

    Donc, les infrastructures, à certains égards, constituent, pour le Canada, un problème particulier. Ce qui se dégage des discussions, dans une certaine mesure, c'est qu'ils essaient de venir en aide aux provinces en leur versant un petit pourcentage de la taxe sur l'essence. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de cibler tous les transferts. Par exemple, concernant le programme national de garde d'enfants, le gouvernement fédéral estime qu'il en faut un. Je pense que ce programme est très important, mais ce qui convient au Québec ne convient peut-être pas au Manitoba. Encore une fois, le Manitoba a déclaré qu'il n'avait pas l'intention de négocier avec des organismes à but lucratif, que cela ne ferait pas partie de leurs discussions, alors que l'Alberta a affirmé qu'elle entendait négocier avec tous ceux qui seraient prêts à fournir des places adéquates à un coût abordable, étant donné que ce sont les intérêts des enfants et des parents qui priment.

    Encore une fois, je sais que le sujet est très sérieux et qu'il faudrait peut-être en discuter plus à fond, mais je ne voudrais pas induire le comité en erreur en laissant entendre que le gouvernement fédéral devrait dire : voici l'argent, mais vous devez mettre sur pied un programme, vous devez faire telle et telle chose.

    Je reviens à ce que j'ai dit à M. Bell. C'est l'une des raisons pour lesquelles je propose que l'on transfère des points d'impôt aux provinces. Laissez les provinces décider. Le Canada est un grand pays. Chaque province est unique. Elles savent ce qu'elles doivent faire. Voilà ce que j'en pense.

[Français]

+-

    Le président: Merci, messieurs Murray et Côté.

    Madame Wasylycia-Leis, c'est à vous.

[Traduction]

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Sur ce point, il y a une question que se pose le comité : qu'en est-il du déséquilibre vertical? Vous proposez, en fait, que l'on améliore la capacité fiscale des provinces par le biais des points d'impôt. De nombreux experts nous ont dit qu'en agissant de la sorte, nous sonnerions le glas des programmes nationaux, nous n'aurions même pas de régime d'assurance-maladie, mais une série de régimes qui varieraient d'un endroit à l'autre.

    Je me demande si c'est vraiment là votre position, et comment vous réagissez au délestage de responsabilités que pratique le gouvernement fédéral depuis 10 ans : réduction des paiements de transfert au titre de l'éducation et de la santé qui totalisent des milliards et des milliards de dollars; démantèlement du Régime d'assistance publique du Canada; modifications apportées à l'A-E. Tous ces besoins doivent être pris en charge par un gouvernement provincial qui n'a pas autant de ressources que l'Alberta.

    Cela m'amène à mon dernier point. Vous êtes sans doute conscient du fait que le Manitoba n'a pas la même capacité fiscale que l'Alberta, qui est fortement tributaire des revenus pétroliers qui, eux, ne sont pas inclus dans la formule, ce qui lui permet de ne pas imposer de taxe de vente. Cette situation peut entraîner la création d'un paradis fiscal.

    Ma dernière question est la suivante. Dans certaines provinces, tous les partis ont voté en faveur d'une révision de la formule de péréquation, de la règle des 10 provinces, du mode de partage des recettes, y compris celles provenant des ressources naturelles. Est-ce que vous appuyez cette révision?

Á  +-(1145)  

+-

    M. Stuart Murray: L'honorable député a le tour de poser des questions très prudentes.

    Pour répondre à la dernière, j'entérinerais une initiative appuyée par tous les partis qui permettrait au Manitoba d'utiliser ses ressources—parce que nous avons la chance d'avoir une ressource renouvelable, soit l'hydroélectricité, qui profite non seulement à l'ensemble du Canada, mais également aux États-Unis.

    Nous devrions pouvoir... Vous avez parlé de l'Alberta. Je sais que, parfois, nous en faisons tout un complexe, que nous disons que nous ne pouvons faire telle ou telle chose parce que l'Alberta a du pétrole. En ce qui me concerne, je ne crois pas que nous devrions être pénalisés parce que nous avons la capacité d'utiliser une ressource renouvelable très importante. Le monde réclame différentes formes d'énergie, et nous en avons une qui existe en abondance. Si nous pouvions en tirer profit, alors bien sûr, j'appuierais une telle initiative.

    J'ai dit plus tôt que nous devons, au Manitoba, trouver un moyen d'être plus compétitifs, d'être moins tributaires de la péréquation au jour le jour, de jouer un plus grand rôle, au profit du Canada, au lieu de toujours compter plus sur la péréquation.

+-

    Le président: Merci, madame Wasylycia-Leis.

    Il nous reste huit minutes. Si possible, nous allons nous en tenir à des tours de deux minutes, ce qui équivaut à une question et réponse.

    Madame Smith.

+-

    Mme Joy Smith: Merci.

    Je voudrais clarifier une chose. Vous avez affirmé que le Manitoba devait essayer d'être moins tributaire des paiements de transfert, de la péréquation. On a également dit que le régime d'assurance-maladie n'aurait pas vu le jour, ainsi de suite.

    Je voudrais des précisions au sujet de ce que vous avez dit concernant les paiements de transfert au titre des soins de santé. Comme vous le savez, le gouvernement libéral, ou le gouvernement actuel, a versé des paiements de transfert aux provinces. Comme l'a mentionné un des témoins, plus tôt, on ne sait pas ce qui est advenu d'une partie des fonds. On ne sait pas où est allé l'argent.

    Vous avez dit que vous vouliez être moins tributaire de la péréquation. Est-ce que cela veut dire que vous voulez vous débarrasser du régime d'assurance-maladie, ou que vous voulez cibler les paiements afin qu'ils servent à renforcer le programme de soins de santé au lieu de disparaître dans le vide?

Á  +-(1150)  

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup, madame Smith.

    Je ne veux absolument pas me débarrasser du régime d'assurance-maladie, et laissez entendre une chose pareille serait de la folie. Ce que je dis, c'est que des fonds ont été versés au Manitoba et qu'aucune amélioration n'a été notée. On se demande où est allé l'argent. Or, s'il faut constamment verser encore plus d'argent, et encore plus d'argent...

    Je vais vous raconter une histoire anecdotique au sujet d'un type que je connais et qui s'affairait à construire une remise à bateaux. Il était en train d'installer quelques piliers, et devait verser du ciment dans l'eau. Il avait fait venir un camion qui n'arrêtait pas de déverser du ciment. Ils ont finalement décidé d'appeler le propriétaire pour avoir son avis. Il leur a dit d'arrêter et de voir où se situait le problème.

    On ne peut pas uniquement se contenter de dire qu'il faut verser encore plus d'argent dans le système. Il faut aussi voir comment est géré cet argent. C'est ce qui me préoccupe.

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Smith.

    Monsieur Bell, vous avez deux minutes pour les questions et les réponses.

[Traduction]

+-

    M. Don Bell: D'accord. Je vais revenir à la taxe sur le carburant.

    Vous avez laissé entendre, mais en utilisant des termes différents—vous avez parlé d'un petit montant—qu'il faudrait essentiellement accroître les paiements. Êtes-vous en train de dire que le gouvernement devrait verser plus de la moitié, plus de cinq cents le litre de la taxe sur l'essence, ou faites-vous tout simplement allusion au fait qu'il faudrait accélérer le rythme d'affectation de la taxe sur l'essence?

+-

    M. Stuart Murray: Monsieur Bell, encore une fois...

+-

    M. Don Bell: Reconnaissant que le gouvernement fédéral a des responsabilités en matière d'infrastructures pour ce qui est des autoroutes canadiennes.

+-

    M. Stuart Murray: J'en suis conscient. Toutefois, je reviens au fait que des surplus exponentiels ont été découverts par le gouvernement fédéral, des surplus plus élevés que ce qui avait été prévu.

    Encore une fois, je ne saurais trop insister sur le fait que le déficit d'infrastructure du Manitoba est tellement énorme que nous aimerions voir ce montant bonifié, et son versement, accéléré.

    Je sais que j'en demande beaucoup. J'en suis conscient. Ce n'est facile. Mais je pense qu'il faut en demander beaucoup, parce que quand vous circulez sur les routes du Manitoba... Je vais vous donner un petit exemple. Il y a des installations de meunerie dans la province qui ont de la difficulté à acheminer leur produit. Les camions ne peuvent franchir un pont. Ils doivent faire un détour d'une heure pour livrer la marchandise. Cela ne cadre pas du tout avec notre image de nation productrice. Nous devrions favoriser, et non pas empêcher, le transport de ce produit.

    Encore une fois, si je vous donne l'impression d'en demander beaucoup, c'est parce que notre déficit d'infrastructure est énorme.

[Français]

+-

    Le président: Merci, monsieur Bell.

    Monsieur Côté, vous avez deux minutes.

+-

    M. Guy Côté: Il s'agit plutôt d'un commentaire.

    On parle beaucoup des surplus non prévus de ce gouvernement. On se dit qu'il a peu de leçons à donner sur la gestion des comptes publics, lorsqu'on voit à quel point ses prévisions sont à côté de la réalité. L'an dernier — je donne ce chiffre de mémoire —, je crois que 10 milliards de dollars ont été dépensés sans avoir été budgétisés. Ce gouvernement a donc les moyens d'aider ses concitoyens, mais il ne le fait pas, à cause de sa mauvaise gestion.

[Traduction]

+-

    M. Stuart Murray: Je ne veux pas que les membres du comité pensent que je ne lis pas les journaux ou que je n'écoute pas les nouvelles. J'ai l'impression qu'il y a des élections à l'horizon.

    Encore une fois, et j'ai indiqué à tous les membres du comité... Le fait qu'il y ait un surplus, que ce soit au niveau provincial ou fédéral, nous amène à nous demander si c'est parce que nous en demandons trop des contribuables canadiens. Est-ce pour cette raison, entre autres, que nous avons des recettes excédentaires?

    Tous les Canadiens, j'en suis convaincu, sont d'avis qu'ils doivent payer leur juste part d'impôts. Ils s'attendent à ce que ces impôts leur donnent accès à des services. Ils éprouvent de la frustration quand ils constatent que les dépenses effectuées ne peuvent être justifiées, qu'il n'y a aucune transparence en ce qui a trait à l'utilisation des fonds. Ils se sentent frustrés.

    Quand vous investissez de l'argent dans une entreprise et que vous n'êtes pas satisfait des résultats, vous avez une option. Vous pouvez vendre les actions que vous détenez dans cette entreprise. Nous n'avons pas cette possibilité au Canada. Vous pourriez peut-être en faire un thème lors de la prochaine campagne électorale.

Á  -(1155)  

[Français]

+-

    Le président: Madame Wasylycia-Leis.

[Traduction]

    Il ne reste plus que deux minutes.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.

    Je ne suis toujours pas convaincue, monsieur Murray, que vous êtes prêt à défendre un programme de péréquation qui repose sur le principe de la redistribution, et qui prône l'égalité entre les provinces.

    J'ai l'impression que c'est avec beaucoup de réticence que vous appuyez la péréquation. Vous jugez qu'elle mine la capacité de la province, tout comme certaines personnes pensent que le soutien que nous accordons aux citoyens à faible revenu—nous les empêchons de contribuer à la société lorsque nous les aidons à traverser les moments difficiles. Nous essayons de nous éloigner de cette notion. En fait, la péréquation vise à atténuer les disparités réelles qui existent entre les provinces pour ce qui est de leur capacité à financer les services publics.

    Vous n'avez pas vraiment envisagé la péréquation sous cet angle, et je ne sais pas non plus ce que vous proposez comme solution pour modifier le système fiscal représentatif.

    Je reviens donc à ma question. Appuyez-vous le principe de péréquation, non pas en tant que mécanisme qui vise à répondre aux besoins des provinces moins nanties, mais en tant que stabilisateur entre les provinces et le gouvernement fédéral? Êtes-vous prêt à utiliser les outils de politique publique pour atténuer les disparités qui existent et assurer une certaine égalité et équité entre les provinces?

[Français]

+-

    Le président: Monsieur Murray.

[Traduction]

+-

    M. Stuart Murray: Merci beaucoup.

    Je tiens à dire à l'honorable député que je vais défendre les intérêts de ceux qui, sans le vouloir, se trouvent dans des situations difficiles. C'est dans ce but précis que nous jouons un rôle public. Tout le monde devrait être traité de manière équitable. Ceux qui sont moins fortunés ne le sont pas parce qu'ils l'ont voulu, mais parce que certains facteurs font qu'ils se retrouvent dans cette situation. Ceux d'entre nous qui sont en mesure d'agir devraient intervenir pour faire en sorte que tous les gens soient traités de manière équitable. C'est ce que vous allez faire, par l'entremise de ce comité.

    Il serait malheureux que l'honorable député pense que je ne suis pas prêt à me battre au nom des Manitobains, du Manitoba. J'insiste pour dire que c'est parce qu'il est tributaire de la péréquation que le Manitoba est moins compétitif. La péréquation, de manière générale, ne permet pas à notre province de devenir, comme c'est le cas des trois autres provinces de l'Ouest, une province bien nantie. C'est quelque chose que nous devons changer. Pour y arriver, nous devons être plus concurrentiels, non pas dépendre davantage de la péréquation.

-

    Le président: Merci, monsieur Murray. Merci, madame Wasylycia-Leis. 

    Au nom des membres du sous-comité, je tiens à vous remercier de votre contribution et...

[Français]

je voudrais vous remercier pour votre excellente présentation.

    J'informe les membres du comité que nous reprendrons nos travaux à 13 h 15.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

    La séance est levée.