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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi .
Un député libéral a parlé du manque de confiance dans la présidence et a déclaré que les yeux de la nation étaient fixés sur nous. Je pense comme lui que c'est la situation à la Chambre.
Les gens qui suivent le débat, à la maison, doivent se poser des questions au sujet du groupe de députés réformistes qui se léchaient les plaies tout à l'heure en manifestant leur indignation. Cela m'a rappelé, lorsque j'étais enfant, le combat de lutte en cage que Gilles « The Fish » Poisson avait perdu au Texas contre « Killer » Kowalski. Après, il s'était plaint d'avoir été traité injustement.
Il s'agit de questions sérieuses, mais elles deviennent parfois surréalistes. Je crois que les gens, dans leur salon, se demandent de quoi nous discutons au juste parce que nous semblons parfois être dans une bulle, coupés de la réalité des travailleurs et de leur lieu de travail.
Je vais parler de ce projet de loi en donnant des exemples concrets. Je vais m'attarder plus précisément à la façon de mettre en oeuvre un tel projet de loi. C'est très bien de parler de l'importance d'une convention internationale sur les règlements des différends relatifs aux investissements, puisque nous avons des tas d'exemples de différends de cet ordre et que nous devons imposer une norme rigoureuse.
Au cours des dernières années, certaines tendances très troublantes ont pris forme, notamment en ce qui a trait au chapitre 11 de l'ALENA. Les députés du Nouveau Parti démocratique vont voter contre ce projet de loi, car nous sommes préoccupés par le manque de transparence, d'accessibilité et de reddition de comptes.
Lorsqu'il est question de protéger les investissements à l'étranger et au Canada, il faut assurer le respect de la primauté du droit. Nous croyons certes que le droit est un principe directeur, mais il y a un certain nombre de principes juridiques qui doivent être appliqués. Il y a des mécanismes de résolution des différends qui semblent contourner certains principes juridiques fondamentaux.
En cas de poursuite devant les tribunaux, les parties concernées doivent être en mesure d'en parler. C'est un principe de droit fondamental. Le chapitre 11 de l'ALENA ne reflète pas ce principe. L'entente multilatérale sur les investissements de 1997 non plus. Les jugements doivent être transparents. Pourtant, il n'y a rien dans ce projet de loi sur le CIRDI qui rende obligatoire la divulgation des preuves et des décisions.
Un des principes juridiques les plus fondamentaux est l'obligation de transparence et de divulgation, de sorte que les preuves puissent être examinées publiquement et non à huis clos. Il y a une énorme différence entre un jugement rendu par un jury composé de pairs dans une communauté et un jugement rendu à huis clos par quelques copains.
Je vais donner un exemple précis et expliquer comment, à mon avis, les choses se dérouleront en vertu du chapitre 11. Je veux ainsi montrer ce qui se produirait si nous appliquions le principe à plus grande échelle. Cet exemple est l'action en justice de 350 millions de dollars d'un certain Vito G. Gallo contre le gouvernement du Canada. J'ai lu sa demande d'arbitrage déposée aux termes du chapitre 11 de l'accord de libre-échange. J'ai lu la revendication de M. Gallo d'un bout à l'autre. C'est très intéressant. Je suis plutôt bien renseigné sur cette affaire.
Il affirme qu'il est le seul propriétaire de la société 1532382 Ontario Inc., qui est constituée en vertu des lois de l'Ontario. Sur ce point, je suis d'accord avec lui. Je suis également d'accord avec lui lorsqu'il affirme que la mine Adams, une ancienne mine de fer, est située à dix kilomètres au sud-est de Kirkland Lake. C'est dans ma circonscription. Cependant, je doute de la véracité de la plupart des preuves qu'il a présentées au groupe d'arbitrage des différends.
Cela nous ramène à la question qui est contenue dans le projet de loi et qui porte sur la nécessité de divulguer pleinement les preuves. Par exemple, dans sa revendication, M. Gallo affirme qu'il est propriétaire de la mine Adams et qu'il dirige le projet de décharge qui y est envisagé.
Je trouve cela très intéressant. Nous devons revenir un peu sur l'histoire de ce site. En 1990, Dofasco a fermé la mine Adams. C'était une mine de fer dans ma circonscription, et sa fermeture a entraîné la perte de nombreux emplois bien rémunérés. On s'est ensuite demandé si on pouvait utiliser le site comme décharge. Cela présentait toutefois certains problèmes, car 360 millions de litres d'eau souterraine traversaient ce site chaque année.
À cette époque, les propriétaires étaient Notre Development, une petite entreprise de North Bay, et la ville de Toronto, qui était une partenaire. La ville de Toronto a payé la plupart des frais initiaux. C'étaient les contribuables de Toronto, et non les investisseurs, qui ont payé les études.
Les études étaient fondées sur un concept non démontré appelé « confinement hydraulique ». D'après elles, 360 millions de litres d'eau souterraine, qui, selon les gens de ma circonscription, alimentaient toute la ceinture agricole de la vallée en aval, traversaient le site chaque année. On avait formulé la théorie selon laquelle des tuyaux seraient installés et, pendant 1 000 ans, l'eau souterraine du Nord de l'Ontario servirait à éliminer l'équivalent de 20 ans de déchets. C'était perçu à l'époque comme un plan farfelu, mais la ville de Toronto a quand même payé des études pour concrétiser ce projet.
En 1997, une commission ontarienne des évaluations environnementales s'est penchée là-dessus. À cette époque, le premier ministre Mike Harris, qui était considéré comme très favorable au dépotoir, a modifié la Loi sur les évaluations environnementales de la province. Il l'a modifiée de manière draconienne.
Nous nous sommes soudainement retrouvés avec une évaluation environnementale à la portée limitée concernant ce qui allait être le plus important projet de dépotoir de l'histoire du Canada, voire de l'Amérique du Nord. Le projet a été assujetti à une évaluation environnementale à la portée très réduite; on s'est penché seulement sur la faisabilité des modèles informatiques fournis par le promoteur. À l'époque, on a fait abstraction de la contamination des eaux souterraines et du risque possible pour le milieu environnant.
Le projet a été accepté en raison d'une évaluation à la portée très limitée, mais 2 des 12 ou 13 puits posaient problème. On se demandait sérieusement si cela prouvait la théorie du dépotoir ou non. Je fournis cette explication seulement à titre de contexte pour que tout le monde saisisse ce que je veux dire à propos de l'accord multilatéral sur l'investissement que nous sommes en train d'examiner.
La ville de Toronto a reculé et décidé de ne plus faire partie des promoteurs. Ainsi, elle n'était plus le promoteur clé, mais un client possible du site. Tout au long du processus, c'était une entreprise ontarienne qui soumissionnait un contrat municipal. Rien n'avait jamais indiqué qu'il pouvait s'agir d'un projet international.
En 2000, la ville de Toronto s'est retirée du projet à cause d'importantes questions de responsabilité. Personne ne voulait assumer la responsabilité de garantir que les pompes d'un site non prouvé fonctionneraient pendant 1 000 ans. La ville a aussi reculé parce que c'était probablement la plus grande mesure de désobéissance civile de l'histoire de l'Ontario.
Les gouvernements fédéral et provincial savaient très bien que la nation algonquine avait établi, à première vue, un droit ancestral non éteint à cet endroit. De nombreuses questions se posaient, sans compter la menace éventuelle liée aux eaux souterraines provenant de ce site non prouvé.
La ville de Toronto n'était pas prête à assumer la responsabilité. La société Canadian Waste Services, qui était le nouveau partenaire, a également reculé. Il n'y avait donc plus de clients pour le site. Si nous examinons les dossiers des sept dernières années, peu importe ce qui est arrivé avec le Michigan, la ville de Toronto n'a cessé de répéter: « Nous ne retournerons jamais à ce site. Peu importe, nous n'y retournerons jamais. » C'était un site sans client.
Puis en 2002-2003, une nouvelle entreprise a vu le jour: 1532382 Ontario Inc. Elle se présentait comme le nouveau promoteur. Qu'est-ce que cette entreprise? Nous ne le savons pas vraiment.
J'ai en main le profil de la société. De quelle autorité relève la société 1532382 Ontario Inc.? De l'Ontario. De quelle autorité relevait-elle antérieurement? Cela est sans objet. Type de société: société ontarienne par actions. Quelle est son adresse légale? Bureau 101, Don Mills, Ontario. Son adresse postale: 225, chemin Duncan Mill, bureau 101, Don Mills, Ontario. Si vous ne voyez pas là un profil d'investisseur international, vous êtes comme moi, monsieur le Président.
À la page 2 de ce misérable rapport on apprend que Brent W. Swanick est l'administrateur de la société. Il habite au 104, chemin Yorkminster, à North York, en Ontario. Il n'y a pas de premier administrateur. Type de dirigeant: président. Et il s'agit d'un résidant canadien.
Rien sur ce misérable rapport de deux pages n'indique qui est derrière cette société à numéro ontarienne, une société qui a choisi un site abandonné, qui n'a pas de clients, en fait qui n'en aurait probablement pas un seul. Cette société soumet une offre pour un marché municipal. Une société à numéro ontarienne soumet une offre dans le cadre d'un appel d'offres de la province de l'Ontario pour l'obtention d'un marché municipal. La seule réponse que cette société a pu obtenir de la ville de Toronto, c'est que celle-ci ne ferait pas d'affaires avec elle.
L'entente reposait sur deux aspects clés, qui sont soulevés dans la contestation aux termes du chapitre 11 de l'ALENA. Tout d'abord, l'entreprise a demandé un permis de prélèvement d'eau en 2003. Deuxièmement, elle a fait une demande auprès du ministère des Ressources naturelles pour acheter 2 000 acres de terres de la Couronne au prix de 22 $ l'acre, un prix scandaleusement bas, à notre avis. J'ai même participé au lancement d'une campagne d'offres à l'échelle locale, par laquelle nous avons déclaré notre intention de faire une surenchère de 5 $ ou 10 $ de plus l'acre. Il y avait là un principe fondamental. Lorsque la province de l'Ontario se dessaisit de biens fonciers de la Couronne, elle doit le faire avec toute la diligence qui s'impose et porter le processus à la connaissance du public. Il n'est pas acceptable que cela se fasse en catimini.
De plus, ces 2 000 acres faisaient l'objet d'une revendication territoriale de la nation algonquine. Les Algonquins sont intervenus en disant qu'ils n'avaient pas été consultés et qu'ils auraient dû l'être. Par conséquent, le gouvernement de l'Ontario a été obligé de retarder la vente des terres de la Couronne jusqu'à ce que cet aspect soit réglé.
Il était également très pertinent à l'époque de déterminer si le permis de prélèvement d'eau aurait dû être accordé. Le 12 août 2003, M. Ken Howard, le principal expert en hydrogéologie de la province de l'Ontario, a été invité à étudier le dossier. C'est également M. Ken Howard qui a eu à se pencher sur le dossier de Walkerton et qui a joué un rôle clé dans la formulation des recommandations visant les mesures législatives à adopter dans le sillage du rapport concernant l'affaire Walkerton.
Il a étudié le processus d'évaluation environnemental concernant la mine Adams. Selon lui, la décision d'émettre un certificat pour cet emplacement était fondé sur les résultats des forages 98-1 et 98-2. Selon ses conclusions, les résultats de forage comportaient de graves lacunes et le directeur de la direction générale des approbations a approuvé le site d'enfouissement en se fondant sur des données qui n'avaient pratiquement aucune valeur scientifique et qui, de fait, ne valaient rien.
Nous n'allons rien trouver de tout cela dans la présentation de ce mystérieux Vito Gallo. Nous n'allons rien trouver non plus au sujet des questions soumises à l'attention du tribunal de l'ALENA concernant cette revendication territoriale intéressant les Première nation ou concernant le fait que le plan suscitait beaucoup d'opposition ou le fait qu'il n'y avait pas de client. Mais cela n'a peut-être aucune importance. Sous la rubrique du chapitre 11, une mystérieuse société à numéro comparaît devait un tribunal et déclare vouloir se prévaloir d'un mécanisme de règlement des différends, sans que toutes ces informations ne soient présentées et que l'intérêt public ne soit défendu.
L'autre point que je trouve vraiment intéressant, c'est que je n'ai jamais entendu parler de Vito Gallo. Évidemment, ce n'est peut-être pas un phénomène rare. Il existe beaucoup de gens dont je n'ai jamais entendu parler, mais au fil des ans, j'ai entendu parler de beaucoup des intervenants dans le dossier de la mine Adams parce que je l'ai suivi de près.
Par exemple, j'avais bien entendu parler du groupe Cortellucci, du sud de l'Ontario. Dans l'édition du 9 mai 2003 du Toronto Star, on a indiqué que c'était le principal propriétaire de la mine Adams. En fait, M. Mario Cortellucci a donné des montants d'argent considérables au gouvernement conservateur par l'entremise du clan Cortellucci. Toutefois, je ne soulève pas cette question pour le moment parce je ne veux pas être partisan. Je le signale simplement à titre de question d'intérêt secondaire. Quand le Toronto Star a demandé à M. Cortellucci s'il était en réalité le propriétaire de la mine Adams à ce moment là, il a dit qu'il n'était qu'un parmi une douzaine d'investisseurs.
Maintenant nous avons une situation où il est question d'une société à numéro. Nous ne savons pas de quoi il s'agit, sinon que c'est une société de l'Ontario qui est dirigée par un administrateur de l'Ontario. Nous n'avons peut-être aucune pièce d'identité pour le prouver, mais cet homme prétend être un Américain qui bénéficie d'un droit d'entrée international toutes ses autres approches ayant failli. On ne sait pas qui d'autre est concerné dans l'affaire.
Nous savons que le groupe Cortellucci a été identifié. En 2003, la compagnie Canadian Waste Services a entamé une action concernant la propriété de la mine. L'action n'a jamais mentionné le nom de Vito Gallo, mais la Notre Development Corporation et le groupe Cortellucci ont été mentionnés. En fait, on y fait référence à l'entente Cortellucci.
On croirait qu'il incomberait au gouvernement du Canada de découvrir qui se cache derrière cette société à numéro avant que nous versions 350 millions de dollars à Vito.
Nous ne savons pas si l’on a fait preuve de toute la diligence voulue. Tout ce que nous savons, c’est que, en 2003-2004, cette société à numéro a essayé de poursuivre le gouvernement de l’Ontario après avoir été contrainte de cesser ses activités quand le gouvernement libéral provincial a révoqué son permis à la suite de plusieurs faits importants, le premier étant le dépôt de nouvelles preuves, et le second, les conclusions de l’enquête sur le drame de Walkerton. C’est qu’en Ontario, au XXIe siècle, nous n’utilisons pas nos eaux souterraines pour éliminer des déchets. Ce n’est vraiment pas une bonne idée. L’Ontario a jugé que ce n’était d’ailleurs pas plus acceptable au XXe siècle, ni même au XIXe. Nous n’utilisons pas notre nappe phréatique pour nous débarrasser de nos déchets. Par conséquent, le gouvernement a suspendu le permis, non pas uniquement pour cet emplacement, mais pour n’importe quel emplacement de ce genre en Ontario, en vertu du principe selon lequel il ne faut pas utiliser les bassins hydrographiques pour y jeter nos déchets.
C’est alors que cette société à numéro, 1532382 Ontario Inc., a poursuivi le gouvernement de l’Ontario, ce qui était son droit. Ce sont des investisseurs. Ils ont intenté une poursuite de 300 millions de dollars contre le gouvernement de l’Ontario. Mais, à ce que je sache, cette cause n’a pas eu de suite. Rien n’a semblé se produire.
Nous savons qu’il y a eu des négociations avec certains des investisseurs sur la question de savoir si l’on devait accepter un dédommagement. Or voilà qu’il y a tout juste quelques mois, Vito G. Gallo a dit que la mine lui appartenait, qu’il était l’ayant droit direct de tous les bénéfices qui ont pu s’accumuler, en remontant jusqu’à l’époque où la ville de Toronto assumait le coût des activités en question.
Nous n’avions aucun moyen de savoir exactement à quel moment Vito Gallo avait acquis des intérêts dans la mine Adams. Nous ne savons pas si Vito Gallo en est l’unique propriétaire, s’il n’est qu’un parmi cent, dix ou cinq investisseurs. Ce que nous savons, c’est que cette entreprise, dont il dit être propriétaire en tant qu’investisseur américain, est une société à numéro ontarienne. C’est une société à numéro ontarienne qui a soumissionné en vertu de règles provinciales pour un contrat municipal d’enfouissement de déchets conclu dans la province de l’Ontario. Quoi qu’il en soit, il n’y avait rien d’international là-dedans. Et pourtant, voilà que cette personne s’adresse maintenant à un tribunal de l’ALENA pour y réclamer un dédommagement de 350 millions de dollars, et les contribuables canadiens n’y auront même pas d’avocats pour faire comparaître des témoins.
On s’attendrait à ce que, si c’est le droit commercial international qui est ici en cause, avec sa jurisprudence et ses règles de responsabilité et d’équité, cette prétendue équité ait pour conséquence de donner à un gouvernement national le droit d’adopter des lois judicieuses. Dans les cas où une mesure législative cause préjudice à une entreprise, il y a une procédure de prévue. Cependant, le gouvernement peut avoir des motifs impérieux d’intervenir, en l’occurrence pour faire entendre des témoignages, comme celui de M. Howard.
Un autre expert dont j’aimerais vous parler, c’est Larry Jensen, le géologue provincial responsable de la région de Kirkland Lake. Il a passé 40 ans à étudier les failles de la mine Adams.
J'ai trouvé cela extrêmement étrange lorsque j'assistais à l'audience sur l'évaluation environnementale et j'ai examiné les cartes des experts qui montraient toutes les lignes de faille. Elles étaient très vagues. Elles étaient pratiquement inexistantes. En fait, ce n'était pas les cartes de M. Jensen; ces cartes remontaient aux années 1950.
Je vais conclure ici. Larry Jensen a été le géologue provincial de la région de Kirkland Lake pendant 40 ans. Il étudiait quotidiennement la mine Adams. Il a dit que la proposition concernant la mine Adams était:
[...] une catastrophe imminente, peut-être pas pour les habitants de Kirkland Lake, mais pour toutes les populations et la faune au sud et au sud-est, dans la région de Timiskaming et au-delà, jusqu'à l'embouchure de la rivière des Outaouais — une région des centaines de fois plus vaste que Toronto.
Lorsque nous disposons d'éléments de preuve comme ceux-là, selon la jurisprudence, tous les éléments de preuve doivent être présentés. Le premier qui doit être présenté dans tout mécanisme de règlement de différends internationaux, c'est le nom des personnes qui se cachent derrière cette société à numéro et qui exigent 350 millions de dollars des contribuables canadiens.
Tant que nous ne verrons pas le sort que réservera aux relations avec les investisseurs la nouvelle protection conférée par la convention internationale et empêchant ce genre d'activités d'entraver le droit canadien, nous n'appuierons aucun projet de loi comme celui-ci. Nous faisons notre travail à la Chambre et dans notre assemblée législative provinciale pour protéger l'intérêt de la population.
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Monsieur le Président, d'entrée de jeu, je confirme que le Bloc québécois appuie en principe le projet de loi C-53. Je peux tout de suite suggérer aussi à mon collègue du NPD de présenter en comité les ajustements nécessaires qui pourront le satisfaire.
L'adoption de ce projet de loi permettra au Canada de ratifier la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres États et d'adhérer au Centre international de règlement des différends relatifs aux investissements.
Compte tenu que je ferai sûrement référence, bien sûr, au Centre international de règlement des différends relatifs aux investissements et que ce nom est un peu long, je l'appellerai tout simplement le Centre pendant mon allocution.
Le projet de loi C-53 intègre dans le droit interne les exigences de la convention, notamment pour assurer le respect des sentences arbitrales et accorder les immunités dont doivent jouir le Centre et son personnel.
Le Centre a été créé en 1965 par la Banque mondiale en vertu du Traité de Washington. Il y a 156 pays qui en sont actuellement membres. Le Centre est chargé d'arbitrer des différends entre un État et un investisseur étranger. Ces conflits peuvent être de deux ordres: premièrement, des différends relatifs au respect d'accords bilatéraux de protection aux investissements étrangers et, deuxièmement, des différends relatifs à des ententes entre des gouvernements et des investisseurs étrangers. Ce sont des ententes du type de celles que le gouvernement du Québec conclut régulièrement en suscitant des investissements étrangers sous promesse, par exemple, de fourniture d'électricité à un prix convenu.
L'adhésion du Canada n'aura aucun impact sur les provinces et le Québec, sinon qu'elles pourront elles aussi prévoir le recours au Centre lorsqu'elles concluront des ententes avec des investisseurs.
Quant aux traités bilatéraux qui lient le gouvernement fédéral, ils prévoient déjà le recours à l'arbitrage du Centre, mais par l'intermédiaire du mécanisme complémentaire d'arbitrage plutôt que par un mécanisme régulier qui n'est accessible qu'aux pays qui ont ratifié la Convention.
En fait, la seule chose que l'adhésion du Canada au Centre changera, c'est qu'il pourra intervenir dans les négociations visant à amender la Convention ou les règlements du Centre et qu'il aura l'assurance de pouvoir participer à la nomination des tribunaux d'arbitrage. Il y aura donc une participation direct au Centre.
En définitive, le Centre n'est qu'un tribunal. Or, le problème n'est pas le tribunal, mais les mauvais traités de protection des investissements que conclut le Canada.
Le Bloc québécois appuie la conclusion d'accords de protection d'investissements en autant que ce soit bien sûr de bons accords.
Il est tout à fait normal qu'un investisseur, avant d'effectuer un investissement, cherche à s'assurer qu'il ne se fera pas dépouillé de son bien et qu'il ne sera pas victime de discrimination. C'est cette situation que les accords de protection des investissements étrangers visent à encadrer.
Le phénomène n'est pas nouveau. Le premier accord connu qui comporte des dispositions relatives à la protection des investissements étrangers a été conclu entre la France et les États-Unis en 1788, soit il y a plus de deux siècles.
On compte aujourd'hui plus de 2 400 accords bilatéraux de protection des investissements dans le monde. Si on y ajoute les conventions fiscales qui traitent du traitement fiscal accordé aux investissements et aux revenus étrangers, cela fait environ 5 000 traités bilatéraux qui concernent les investissements étrangers.
Le Bloc est en faveur de la conclusion de tels accords et reconnaît qu'ils favorisent l'investissement et la croissance. Ces accords reposent à peu près tous sur les mêmes principes.
Premièrement, il y a le respect du droit de propriété, indépendamment de la nationalité du propriétaire. Deuxièmement, il n'y a pas de nationalisation sans juste et prompte compensation financière. Troisièmement, il y a l'interdiction de traiter un bien situé sur son territoire, différemment selon l'origine de son propriétaire et, en dernier lieu, il y a la libre circulation des capitaux issus de l'opération et de la disposition de l'investissement.
Dans tous les cas, en cas de non-respect, les États peuvent soumettre les litiges relatifs au respect de l'accord devant un tribunal international d'arbitrage. Dans la majorité des cas, un investisseur peut soumettre lui-même le litige devant un tribunal international, mais seulement après avoir obtenu le consentement de l'État. Dans bien des cas, cet arbitrage international que l'accord prévoit se fait devant le centre. Y adhérer, comme le prévoit le projet de loi , c'est aussi adhérer à l'ordre international dans le domaine des investissements.
Dans les accords de protection des investissements qu'ils concluent, seul deux pays, le Canada et les États-Unis, accordent systématiquement aux investisseurs le droit de s'adresser directement aux tribunaux internationaux. Il y a là une dérive. En permettant à une entreprise d'évoluer en marge du contrôle de l'État, on lui accorde le statut de sujet du droit international, un statut qui appartient normalement aux gouvernements. Les accords que le Canada conclut contiennent un certain nombre de dérives semblables, qui accordent aux sociétés multinationales des droits qu'elles ne devraient pas avoir et qui limitent le pouvoir de l'État de légiférer et d'intervenir pour le bien commun.
Faisons référence au chapitre 11 de l'ALENA sur les investissements. Ce dernier prévoit qu'un litige puisse se retrouver devant le centre. Or, ce chapitre est un mauvais accord, à trois égards: la définition d'expropriation, la définition d'investisseur et la définition d'investissement.
La définition d'expropriation est tellement floue que la moindre mesure gouvernementale — sauf une mesure fiscale générale — peut être contestée par un investisseur étranger si elle diminue les profits qu'il tire de son investissement. C'est ainsi qu'un plan de mise en oeuvre de l'Accord de Kyoto, qui ferait payer cher les grands pollueurs que sont les entreprises pétrolières, pourrait être contesté en vertu du chapitre 11 et entraîner une compensation gouvernementale. Les pétrolières albertaines sont en effet majoritairement contrôlées par des intérêts américains. Le chapitre 11 ouvre la porte aux poursuites les plus abusives.
La définition d'investisseur est tellement large qu'elle inclut n'importe quel actionnaire. C'est ainsi qu'à peu près n'importe qui peut poursuivre l'État et chercher à obtenir une compensation relativement à une mesure gouvernementale qui aurait pour effet de diminuer les profits d'une entreprise.
Quant à la définition d'investissement, elle est tellement large qu'elle inclut même les profits qu'un investisseur espère tirer de son bien dans l'avenir. En cas d'expropriation, non seulement l'État se trouve donc forcé à verser la juste valeur marchande, mais il faut qu'il y ajoute le montant des revenus que l'investisseur comptait tirer dans l'avenir. À ce compte-là, il ne serait plus possible de nationaliser l'électricité, comme on l'a fait au Québec dans les années 1960.
Prenons l'exemple de SunBelt, une entreprise formée d'un actionnaire canadien et d'un actionnaire californien. L'entreprise a fermé ses portes lorsque le gouvernement de la Colombie-Britannique lui a retiré le droit d'exporter de l'eau en vrac qu'il lui avait accordé. L'actionnaire canadien, en s'appuyant sur les lois canadiennes, a reçu une compensation équivalant à la valeur de son investissement, soit 300 000 $. Quant à l'actionnaire américain, s'appuyant sur le chapitre 11 de l'ALENA, il a inclus dans sa réclamation l'ensemble des revenus potentiels dans l'avenir: 100 millions de dollars. Heureusement ou non, l'affaire s'est réglée hors cour moyennant un montant qu'on ignore.
Compte tenu des montants en cause, le chapitre 11 décourage toute mesure gouvernementale, particulièrement dans le domaine environnemental, qui aurait pour effet de faire diminuer les profits d'une entreprise de propriété étrangère.
Le mécanisme de règlement des différends permet aux entreprises de s'adresser directement aux tribunaux internationaux pour chercher à obtenir compensation, sans même avoir besoin du consentement de l'État. Peut-on imaginer qu'une multinationale puisse, de sa propre autorité, amorcer un conflit commercial entre deux pays? C'est pourtant cette situation absurde que permet le chapitre de l'ALENA sur les investissements.
Compte tenu de ces failles, le chapitre 11 de l'ALENA diminue la capacité de l'État à intervenir pour le bien commun et de légiférer sur le plan environnemental, et constitue une épée de Damoclès qui peut s'abattre à tout moment sur toute mesure législative et réglementaire qui aurait pour effet de diminuer le profit des entreprises.
En 2005, les États-Unis ont changé quelques-unes des dispositions de leur accord type de protection des investissements. En 2006, le Canada a fait de même. Comme les deux pays ont ainsi reconnu le caractère néfaste et abusif du chapitre 11 de l'ALENA, le moment est propice pour que le gouvernement entre rapidement en discussion avec ses partenaires américains et mexicains pour amender le chapitre 11 de l'ALENA.
Nous devons dire non aux mauvais accords de protection des investissements. En plus du chapitre 11 de l'ALENA, et malgré le fait que tous aient décrié son caractère abusif, le gouvernement a conclu 16 autres accords bilatéraux de protection des investissements étrangers qui en sont des copies conformes. Tous ces accords de protection des investissements étrangers sont mauvais et devraient être renégociés.
En 2006, le gouvernement a en quelque sorte reconnu que ces accords étaient mauvais. Copiant les modifications effectuées par l'administration Bush l'année précédente, le gouvernement conservateur a en effet apporté des modifications à son programme d'APIE pour en corriger certaines des lacunes les plus criantes.
Il a précisé la notion d'expropriation en spécifiant qu'une mesure gouvernementale non discriminatoire visant à protéger la santé, l'environnement ou à promouvoir un objectif gouvernemental légitime ne devrait pas être considéré comme une expropriation et ne devrait donc pas générer automatiquement une compensation. Il est trop tôt pour évaluer la portée réelle de cette précision mais, à première vue, elle semble être une amélioration.
Il a restreint la notion d'investissement en précisant que la valeur d'un bien équivaut à sa juste valeur marchande. Fini cette folie qui y faisait ajouter l'ensemble des profits potentiels que l'investisseur espérait tirer de son investissement. Quant au reste, l'accord type de protection des investissements continue d'être calqué sur le chapitre 11 de l'ALENA.
Le gouvernement doit continuer à améliorer cet accord type, notamment en ce qui concerne le mécanisme de règlement des différends. Les multinationales doivent revenir sous l'autorité de l'État, comme n'importe quel citoyen.
De plus, le gouvernement devrait soumettre à la Chambre les traités et accords internationaux avant de les ratifier. Au début de l'année, le gouvernement a émis un communiqué pour annoncer qu'il venait de ratifier un nouvel accord de protection des investissements étrangers avec le Pérou. C'est en lisant ce communiqué que les parlementaires et la population ont pris connaissance de cet accord. Jamais le Parlement n'en a été informé. Jamais il ne l'a approuvé. C'est complètement antidémocratique.
La plateforme électorale conservatrice à la dernière élection était pourtant claire: les conservateurs s'engageaient à soumettre, pour approbation, tous les traités et accords internationaux avant de les ratifier.
Depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs, le Canada a ratifié 24 traités internationaux.
Mis à part la modification au traité de l'OTAN, qui a fait l'objet d'un minidébat de dernière minute et d'un vote, aucun de ces traités internationaux n'a été soumis à la Chambre.
Aujourd'hui, les accords internationaux ont des impacts sur nos vies comparables à ceux que les lois peuvent avoir. Rien, absolument rien, ne justifie qu'ils soient conclus unilatéralement et en catimini par le gouvernement, en passant par-dessus la tête des représentants de la population.
Par le passé, le Bloc québécois a soumis des projets de loi pour restaurer la démocratie et assurer le respect des compétences du Québec et des provinces dans la conclusion des traités internationaux. Compte tenu du fait que le gouvernement s'était engagé à le faire, nous ne sommes pas revenus à la charge cette fois-ci.
Nous constatons pourtant, aujourd'hui, que la parole des conservateurs ne vaut pas très cher. Aussi, le Bloc québécois reviendra à la charge et fera des propositions pour restaurer la démocratie dans la conclusion des traités internationaux. Il faut que le gouvernement ait l'obligation de présenter à la Chambre tous les traités et accords internationaux qu'il doit signer avant de les ratifier. Il doit être obligé de publier tous les accords internationaux auxquels il est lié. Il faut avoir l'approbation de la Chambre et son vote, après l'analyse par un comité spécial chargé d'étudier les accords internationaux, au sujet de tous les traités importants avant que le gouvernement puisse les ratifier. Il faut aussi le respect des compétences du Québec et des provinces dans l'ensemble du processus de conclusion des traités, c'est-à-dire à l'étape des négociations, de la signature et de la ratification.
Pour conclure, le Centre international pour le règlement des différends relatif aux investissements est effectivement nécessaire pour faire en sorte que les États soient traités à leur juste valeur face aux sociétés multinationales. Il faut aussi faire en sorte que les accords que le Canada signe soient de bons accords, respectueux de l'ensemble des intervenants.
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Monsieur le Président, je m'oppose à l'adhésion à ce Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements et je vous dirai pourquoi.
Un rapport publié récemment en anglais sous le titre « Challenging Corporate Investor Rule » démontre que près de 70 p. 100 des cas soumis au centre de règlement, qui est en passant une institution de la Banque mondiale, ont été réglés à l'avantage de l'investisseur, obligeant le pays dans lequel l'investissement n'avait pas été fructueux à verser une compensation.
On peut y lire que dans 7 des 109 cas soumis au CIRDI, les revenus de l'investisseur étaient supérieurs au produit intérieur brut du pays contre lequel les poursuites avaient été intentées. Le cas que je vais vous décrire ici pourrait faire augmenter ce nombre. Ces pays en développement doivent verser des amendes qui sont grandement supérieures à leur produit intérieur brut.
Selon le Centre pour le développement du droit international de l'environnement, le processus d'arbitrage ne fait qu'accroître les problèmes. Voici l'un des cas les plus importants actuellement à l'étude au centre de règlement.
L'investisseur britannique Biwater Gauff, établi au Royaume-Uni, réclame 25 millions de dollars du gouvernement de la Tanzanie par suite de l'annulation par le gouvernement du contrat qu'il avait signé avec la société City Water Services en 2005 parce qu'elle n'aurait pas fourni d'eau potable à des millions de personnes à Dar es Salaam. La somme de 25 millions de dollars devant être versée à cette société britannique est faramineuse pour un pays aussi pauvre que la Tanzanie. Le gouvernement de la Tanzanie a mis fin au contrat de 10 ans qui avait été signé avec Biwater pour l'alimentation en eau dans cette ville seulement deux ans après le début des opérations en 2003. Que s'est-il passé? Le gouvernement de la Tanzanie a affirmé que la société n'avait pas réussi à fournir de l'eau propre comme elle s'était engagée à le faire.
On pourrait normalement croire que le fait d'engager une société privée pour offrir commercialement un service d'eau courante représente un changement radical par rapport aux services qui étaient offerts gratuitement dans ce pays depuis 1991. Pourquoi la Tanzanie a-t-elle décidé de privatiser son eau potable? C'était l'une des conditions imposées par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international pour que la Tanzanie puisse avoir droit à l'allégement de la dette dans le cadre de l'Initiative d'aide aux pays pauvres très endettés. De même, la Stratégie d’aide-pays adoptée en l'an 2000 par la Banque mondiale a forcé la Tanzanie à signer un accord de concession transférant ses biens à une société de gestion privée pour pouvoir avoir droit à des prêts annuels plus élevés.
Tout d'abord, comment ces pays pauvres si lourdement endettés se sont-ils endettés? Comme la Banque mondiale leur prêtait de l'argent à un taux d'intérêt extrêmement élevé, ces pays n'arrivaient pas à rembourser. C'est une situation absurde où les pays pauvres envoient plus d'argent aux pays riches. La Banque mondiale leur dit que pour qu'elle leur prête davantage d'argent, ils doivent privatiser leur eau.
L'investisseur britannique Biwater, qui a son siège social au Royaume-Uni, intervient alors et privatise les ressources en eau. La société dit aux pauvres gens en Tanzanie qu'elle leur donnera de l'eau propre, mais ne l'avait pas encore fait après deux ans d'activités là-bas. C'est à juste titre que le gouvernement a décidé de rompre le contrat, mais Biwater a saisi le centre international du différend. Dans 70 p. 100. des cas, les investisseurs ont gain de cause. Le centre international a des préjugés défavorables à l'égard de bon nombre de ces pays en développement.
Une autre organisation, le Centre pour le développement du droit international de l'environnement, affirme que la cause arbitrale dont je parle soulève de nombreux problèmes d'intérêt vital pour la collectivité locale en Tanzanie, de même que pour d'autres pays en développement qui ont privatisé leurs ressources hydriques et d'autres services d'infrastructure essentiels ou qui envisagent de le faire. Encore une autre organisation, l'Internationale des services publics, soutient que ce différend illustre à quel point il est difficile d'inclure des règles dans les accords d'investissement commerciaux, particulièrement si les accords comportent des dispositions permettant à l'investisseur de poursuivre le gouvernement hôte devant des instances internationales.
Un des problèmes inhérent à ce mécanisme de résolution des différends est que le public n'est pas en mesure de savoir comment les décisions sont prises. Le processus décisionnel n'est pas transparent. On ne sait pas exactement combien le gouvernement devra payer s'il perd la cause. Par conséquent, le public ne peut ni tenir un gouvernement ou une entité commerciale étrangère responsable, ni juger de la légitimité des décisions qui sont prises. Cela porte atteinte à la démocratie.
Par surcroît, le fait que la décision est prise par une organisation qui demeurera inconnue du public a de profondes conséquences. Cela éroderait gravement la souveraineté du Canada et les Canadiens n'auraient absolument rien à dire.
Plutôt que de nous précipiter, sans discuter avec nos groupes environnementaux publics et toutes les autres ONG, nous devrions examiner cette situation de très près.
Dans le cas de la Tanzanie, nous avons maintenant le Centre pour le développement du droit international de l'environnement, en Suisse, la Lawyers' Environmental Action Team, le Legal and Human Rights Centre et l'Institut international du développement durable qui produisent des lettres de soutien et aident la Tanzanie à défendre sa cause devant le centre de règlement des différends.
Plutôt que de nous précipiter, nous devrions nous assurer qu'il y a une amélioration des investissements internationaux, ce qui peut apporter des avantages importants aux pays en développement. Nous devons élaborer un cadre réglementaire global qui favorise activement le développement durable et garantit que les limites environnementales ne sont pas dépassées.
Nous devons créer le cadre réglementaire nécessaire à un investissement durable. Il nécessiterait une intervention aux niveaux régional, national et international.
Il nous faut des cadres qui donneraient aux pays hôtes la souplesse et les moyens nécessaires pour limiter les apports de capitaux qui minent leurs objectifs de développement durable, objectifs qui auront été fixés dans le cadre d'un processus transparent de consultations.
Au niveau international, il doit y avoir coopération entre États en consultation avec la société civile de sorte que les traités bilatéraux ou régionaux, actuels et futurs, permettent aux pays hôtes de fixer des normes environnementales minimales et d'interdire l'assouplissement de ces normes dans le but d'attirer des investissements.
Nous devons nous assurer que les obstacles juridiques empêchant d'intenter des poursuites contre des investisseurs étrangers et de faire respecter les décisions des tribunaux dans les pays d'origine sont levés. Nous devons nous assurer que des règlements exécutoires détaillés sont élaborés dans les secteurs d'activités économiques qui posent un risque pour l'environnement, par exemple, dans les secteurs des produits chimiques et des minéraux, et qu'on remédie aux pratiques commerciales restrictives, comme l'établissement des prix de cession interne, les encouragements à l'investissement, les pots-de-vin et la corruption.
Les pays d'accueil ou pays bénéficiaires, appuyés par une aide au développement et en consultation avec la société civile, devraient renforcer leurs structures de gouvernance environnementale et économique de manière à pouvoir attirer des investissements durables. Cela veut dire prendre les mesures nécessaires pour intégrer les objectifs environnementaux dans les politiques sectorielles clés, comme l'énergie, les transports et l'agriculture et élaborer une série de mesures intégrées qui concilient les droits des investisseurs et les besoins du public.
Il faudrait établir des mesures pour s'assurer que les investisseurs étrangers et les entreprises du pays divulguent toutes les incidences sociales et environnementales. Nous devrions aussi nous assurer que les activités liées à l'investissement soient couvertes par les lois et politiques environnementales, et assujetties au principe du pollueur-payeur.
Les pays d'origine ou pays investisseurs devraient créer des mécanismes pour obtenir les fonds supplémentaires requis pour financer des projets qui ciblent le développement durable. L'aide offerte aux investisseurs, par l'entremise, par exemple, d'organismes de crédit à l'exportation, devrait dépendre de la performance environnementale. On devrait fournir une aide au développement qui appuie les efforts déployés par les pays bénéficiaires pour exercer une bonne gouvernance environnementale et sociale.
Les entreprises devraient être tenues de respecter un code de conduite établi afin d'éviter que celles qui adoptent les meilleures pratiques environnementales ne soient pas mises en péril par des concurrents peu scrupuleux. Au minimum, les entreprises devraient suivre les lignes directrices actuelles de l'OCDE pour les multinationales.
Ensemble, ces mesures, et d'autres encore, devraient nous permettre de trouver un bon équilibre entre la protection des droits des investisseurs et la promotion du bien collectif. Une fois que ces mesures auront été mises en place, le Canada pourra peut-être alors discuter de la mise en oeuvre de la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres États. Faute de quoi, nous adhérerons prématurément à un mécanisme de la Banque mondiale qui nuit actuellement à beaucoup de pays en développement.