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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 038 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 2 juin 2009

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons, en cette 38e réunion de notre comité, notre étude sur la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada.
    Je voudrais prendre quelques instants pour remercier nos témoins d’être venus ce matin. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir pris du temps, malgré votre programme chargé, d’assister à une réunion à 8 heures du matin dans le centre-ville de Toronto. Je ne sais pas d’où vous êtes partis, mais je n’avais qu’à descendre quelques étages, et je peux vous assurer que cela n’a pas été facile. Je suppose donc que cela a été encore moins facile pour vous.
    Vous savez probablement que nous avons déjà tenu des audiences à Halifax, à Moncton et à Montréal. Nous sommes à Toronto pour deux jours, hier et aujourd’hui. Cet automne, nous irons dans l’Ouest. Comme je l’ai dit, nous sommes à la recherche d’idées et de suggestions sur ce qui fonctionne bien à l’échelle communautaire et sur les choses que nous pourrions recommander au gouvernement pour réduire la pauvreté. Nous avons entendu beaucoup de témoins jusqu’ici. Les deux derniers jours ont été très chargés, mais très productifs en fonction des témoignages que nous avons reçus.
    Je voudrais remercier M. Hughes pour hier soir. Je n’ai pas pu être là à cause d’engagements antérieurs, mais je sais que votre organisation fait un travail remarquable. Nous avons travaillé ensemble sur un certain nombre d’initiatives. Encore une fois, merci d’avoir accueilli les membres du comité dans vos locaux pour leur permettre de prendre connaissance de quelques-unes de vos grandes réalisations.
    Monsieur Langille, nous allons commencer avec vous, puis nous poursuivrons avec les autres. Si d’autres témoins arrivent dans les prochaines minutes, ils auront leur tour à la fin. Nous nous efforcerons d’être souples. Nous vous accordons environ cinq minutes pour présenter un exposé. Ma minuterie s’arrêtera à cinq minutes, mais je ne vous interromprai pas immédiatement. Je vous demande quand même d’essayer de vous en tenir à cette période. Nous passerons ensuite aux questions et réponses.
    David, je vous souhaite la bienvenue. Vous êtes coprésident de l'Ontario Coalition for Social Justice. La parole est à vous. Vous avez cinq minutes.
    Bonjour. Je voudrais vous remercier tous de m’avoir donné cette occasion. Vous serez peut-être heureux d’apprendre que je n’ai pas apporté une autre liste de référence en matière de politique.
    L’Ontario Coalition for Social Justice regroupe des organisations provinciales, des syndicats et des groupes communautaires travaillant à la promotion de la justice sociale et économique en Ontario.
    Comme vous le savez sans doute, l’économie ontarienne est durement touchée par une récession mondiale qui fait suite à des années de restructuration des marchés mondiaux. Dans la province, beaucoup de gens sont aux prises avec des mises à pied, du travail à temps partiel et des agences de travail temporaire et doivent donc travailler davantage pour gagner moins. La classe moyenne est en train de rétrécir à mesure que les emplois sont délocalisés ou supprimés et que le travail est donné à contrat. Les riches s’enrichissent, tandis que des gens de plus en plus nombreux craignent de n’être plus qu’à deux chèques de paye de l’expulsion de leur logement et de la faim. La pauvreté n’est plus à la marge; elle commence à toucher les gens ordinaires.
    Il est triste reconnaître que les Ontariens ont besoin de l’aide du gouvernement fédéral pour affronter la crise économique actuelle. Ce n’est pas seulement parce que notre secteur manufacturier et notre secteur forestier sont durement touchés. Lors de la Grande Dépression des années 1930, le gouvernement fédéral a dû assumer de nouvelles responsabilités sociales lorsque les gouvernements provinciaux et les administrations locales n’ont plus eu les moyens d’affronter la situation.
    Ainsi, la stratégie de réduction de la pauvreté annoncée par le gouvernement de l’Ontario était largement tributaire de dépenses du gouvernement fédéral. Le principal élément de la stratégie consiste en une promesse de majorer la prestation ontarienne pour enfants au cours des deux prochaines années, mais cela dépend du soutien fédéral.
    D’après Dennis Raphael, auteur de Poverty and Policy in Canada: Implications for Health and Quality of Life, quatre grands facteurs déterminent l’incidence de la pauvreté: le niveau du salaire minimum, le niveau des prestations d’aide sociale, la réglementation qui permet aux travailleurs de s’organiser et d’obtenir des conventions collectives et la disponibilité de services abordables de garde d’enfants.
    Raphael note que le gouvernement McGuinty n’a pas pris de mesures pour aider les travailleurs à faible salaire à s’organiser, n’a pas relevé le salaire minimum au-delà du niveau de l’aide sociale et n’a pas fourni les services abordables de garde d’enfants dont nous avons besoin. Ainsi, non seulement la stratégie ontarienne de réduction de la pauvreté dépend-elle du financement fédéral, mais le gouvernement de l’Ontario déclare qu’il ne peut pas atteindre ses objectifs si l’économie n’est pas en croissance, alors que les gens ont besoin d’aide aujourd’hui plus que jamais.
    La pauvreté est mesurée en termes relatifs. Elle dépend de la façon dont les revenus sont répartis entre les gens. Il n’est pas nécessaire d’avoir un miracle économique ou une riche économie pour faire une répartition plus équitable. Des naufragés qui dérivent dans un canot de sauvetage peuvent partager les rares provisions dont ils disposent, mais une répartition plus équitable nécessiterait que les riches acceptent d’en avoir un peu moins pour que les autres en aient suffisamment. À mesure que notre économie sombre, je crois que l’analogie avec le canot de sauvetage est de plus en plus pertinente.
    Voilà pourquoi votre travail est si important. Nous comptons sur vous pour appuyer les appels lancés en faveur d’une réforme du système d’assurance-emploi et d’une révision complète du Régime de pensions du Canada. Il faut que le gouvernement fédéral aide toutes les personnes qui perdent leur emploi durant cette récession et qui ont payé des primes en pensant qu’elles étaient assurées en cas de mise à pied. Imaginez ce qui se passerait si une compagnie d’assurance privée acceptait leurs primes, mais refusait de payer en cas de sinistre. Ce serait un scandale qui ferait tomber des têtes. Les mêmes attentes existent à l’égard des régimes publics. En cas de ralentissement économique, nous attendons davantage de notre gouvernement, pas moins.
    Les gouvernements précédents ont relevé le défi dans des périodes comme celle-ci, aussi bien au Canada qu’ailleurs. Nous sommes un pays riche. Nous avons dépensé des milliards pour soutenir le secteur financier et l’industrie automobile. Les gens pauvres méritent autant sinon plus d’attention. Il ne suffit pas de fixer des objectifs et des délais, puis d’offrir des promesses vides sans rien de concret. Nous voulons que le gouvernement fédéral aide les gens à faire la transition entre la pauvreté et la sécurité économique.
    Je voudrais juste prendre quelques instants pour vous mettre en garde contre un piège. Tout le monde préconise une approche globale et nous rappelle qu’il n’y a pas de solution unique, mais je crains fort que la recherche de moyens globaux tenant compte de toutes les possibilités nous empêche de nous rendre compte que certaines approches donnent de meilleurs résultats que d’autres.
    Je crois que Hugh Segal a exprimé une idée remarquable au forum social de Calgary en disant qu’on croit souvent que la pauvreté a mille causes différentes et que nous avons tendance à investir un peu d’argent pour atténuer chacune de ces causes, ce qui aboutit en définitive à des résultats insignifiants. Cette dispersion des efforts est attribuable à différents motifs, que j’énumère ici, mais que je ne lirai pas. L’important, c’est qu’après avoir consacré des années et des années au développement communautaire, je ne peux pas recommander une approche communautaire de la réduction de la pauvreté.
(0810)
    Il y a quelques exemples de réussite dans la lutte contre la pauvreté au moyen de telles approches locales, mais ces réussites sont plutôt rares. Elles dépendent du leadership de quelques personnes exceptionnelles, de quelques rares sociétés qui ont un sens très poussé de la responsabilité sociale et d’administrations locales prêtes à collaborer. On ne peut pas s’attendre à de tels succès dans toutes les collectivités, ni même dans la plupart d’entre elles. Ces exemples n’offrent pas un modèle stable qui puisse survivre au départ de quelques dirigeants charismatiques. L’approche communautaire n’a pas réussi à réduire la pauvreté lors de la grande crise des années 1930. En fait, le gouvernement fédéral a dû intervenir lorsque les municipalités, les églises locales et les sociétés de bienfaisance du pays ont été dépassées et n’étaient plus en mesure d’organiser les secours.
    Mais trêve de pessimisme. Examinons maintenant ce qui marche. Les pays nordiques sont ceux où on trouve le moins de pauvreté, le moins d’inégalité, la meilleure santé et les meilleurs indicateurs sociaux ainsi que les économies les plus productives et les plus prospères du monde. La Suède a de fortes collectivités et compte sur ses municipalités pour dispenser les services sociaux les plus complets qu’on puisse imaginer, mais elle ne leur laisse pas la responsabilité de financer ces services. Les collectivités locales ne peuvent pas garantir des salaires décents et des taux d’emploi élevés. Seul un gouvernement central fort a le pouvoir d’affronter les grandes sociétés et de veiller au maintien de la justice sociale parmi les citoyens.
    L’Ontario Coalition for Social Justice est fière d’avoir commandité un documentaire qui sortira bientôt, Poor No More, dans lequel Mary Walsh emmène quelques Canadiens ordinaires en Europe pour voir comment certains pays combattent la pauvreté. Le documentaire pose la question suivante: S’ils peuvent réduire la pauvreté, pourquoi pas nous? Permettez-moi, à titre de chef de production de ce film, de vous parler de quelques observations que j’ai faites au cours d’un récent voyage en Irlande et en Suède.
    Nous avons été bien inspirés de nous concentrer sur les travailleurs pauvres, car le nombre de personnes gagnant de faibles salaires constitue le meilleur indicateur de l’incidence de la pauvreté dans un pays. Autrement dit, les pays qui tolèrent un pourcentage élevé de travailleurs mal rémunérés sont plus susceptibles que les autres d’avoir des taux élevés de pauvreté. Au Canada, le groupe qui court le plus grand risque de tomber dans la pauvreté est celui des personnes seules en âge de travailler: plus de 30 p. 100 des membres de ce groupe sont pauvres. En fait, 25 p. 100 des membres de la population active du Canada ont des emplois à faible salaire. C'est l'un des pourcentages les plus élevés parmi l’ensemble des économies avancées. Ce pourcentage représente environ 5 millions de personnes. L’une des révélations les plus surprenantes du documentaire est contenue dans une déclaration d’un ancien ministre suédois des Services sociaux, qui affirme qu’il n’y a pas de travailleurs pauvres en Suède.
    Je n’ai probablement pas le temps de vous présenter les grandes lignes du modèle suédois ou du modèle irlandais ou de vous parler de ce que j’ai vu dans ces deux pays.
    Me reste-t-il une autre minute ou moins?
(0815)
    Moins.
    Très, très brièvement, voici quelques-unes des leçons que nous avons apprises.
    Le régime fiscal joue un rôle capital dans la réduction de la pauvreté. Les Suédois que nous avons rencontrés étaient tous d’accord pour payer des impôts élevés parce qu’ils estiment qu’ils en tirent de nombreux avantages. Par ailleurs, le chef de la délégation étudiante irlandaise était le premier de sa famille à profiter d’études universitaires gratuites, mais il se bat maintenant pour empêcher le gouvernement de rétablir les frais de scolarité parce que les recettes fiscales actuelles du pays ne suffisent plus, les taux d’imposition étant trop bas.
    Enfin, il faut que je dise que les syndicats contribuent à la réduction de la pauvreté, que les partenariats dépendent des pouvoirs relatifs des partenaires et que la politique compte, comme vous le savez très bien sans doute.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous, David.
    Nous allons maintenant passer à M. Hughes, qui représente le programme Pathways to Education Canada.
    David, je vous souhaite encore une fois la bienvenue. Merci encore pour hier soir.
    Je voudrais remercier les membres du comité de m’avoir donné l’occasion de leur présenter cet exposé. Je voudrais également vous remercier d’avoir choisi d’étudier le problème très réel et très pressant de la pauvreté au Canada.
    Je voudrais vous parler d’un programme passionnant, Pathways to Education, qui s’attaque aux causes profondes et à l’un des pires symptômes d’un phénomène qui empêche nos jeunes de se préparer en vue d’un emploi satisfaisant et de faire des études postsecondaires.
    La crise du décrochage que nous connaissons au Canada est évidente, compte tenu de ce que nous savons. Les études montrent que les décrocheurs tendent à avoir des taux de pauvreté élevés et à compter le plus sur l’aide sociale. Ils ont tendance à être chômeurs ou à gagner de faibles salaires, ce qui fait qu’ils paient peu ou pas d’impôts. Les décrocheurs sont plus susceptibles de commettre des crimes et de menacer la sécurité de nos quartiers, imposant donc une lourde charge à notre système de justice. De plus, ils sont plus susceptibles d’être malades, de devenir toxicomanes et, dans le cas des décrocheuses, de tomber enceintes dans l’adolescence et d’augmenter ainsi la charge de notre système de santé.
    Pathways to Education cherche à combler le fossé entre nantis et défavorisés en réduisant le taux de décrochage des jeunes à risque à l’école secondaire et en les préparant à des études postsecondaires et à un emploi satisfaisant. En investissant dans nos jeunes les plus vulnérables et dans leurs collectivités, nous réduisons les effets nuisibles de la pauvreté. En même temps, nous préparons de meilleurs étudiants, de meilleurs employés et de meilleurs citoyens pour l’avenir. C’est le meilleur rendement sur l’investissement que toute collectivité et tout gouvernement puissent obtenir, un rendement qui se traduira par une société plus saine, plus prospère et plus compétitive.
    La solution Pathways se fonde sur quatre piliers qui, ensemble, assurent aux étudiants un soutien complet. Ces piliers sont jugés essentiels pour aider les étudiants à terminer leurs études, à réussir la transition vers le monde du travail et à devenir des membres productifs de la société.
    Le premier pilier est un programme de tutorat dans le cadre duquel des bénévoles donnent des cours particuliers dans les matières de base. Le deuxième est un programme de mentorat. Des bénévoles organisent des activités collectives de mentorat destinées à améliorer les aptitudes sociales et à aider les jeunes à planifier leur carrière. Le troisième pilier consiste en conseils. Des membres du personnel offrent du soutien individuel pour aider les étudiants à réussir à l’école, à la maison et dans la collectivité. Le quatrième pilier comprend différentes options de financement. L’aide financière permet de surmonter les obstacles qui empêchent les étudiants de terminer leurs études et d’offrir des encouragements à court et à long terme.
    Pathways to Education forme des partenariats avec des organismes locaux de collectivités dans le besoin afin de les aider à acquérir les connaissances et les capacités nécessaires pour mettre en œuvre le programme. Pathways signe aussi des contrats avec les étudiants, les parents et les écoles afin de définir des attentes et des objectifs clairs et de favoriser la responsabilité partagée pour le succès de l’étudiant et de la collectivité.
    Les résultats du programme sont assez exceptionnels. En effet, il a joué un rôle clé dans la réduction du taux de décrochage dans le quartier torontois de Regent Park de son niveau de départ de 56 p. 100 à son niveau actuel de moins de 10 p. 100. Ayant réussi à persuader 92 p. 100 des étudiants admissibles du quartier à s’inscrire, le programme a permis à 80 p. 100 de ceux qui l’ont suivi d’entreprendre des études postsecondaires, quadruplant ainsi le taux de départ de 20 p. 100.
    Les diplômés de Pathways inscrits dans des établissements postsecondaires poursuivent leurs études dans une proportion quatre fois plus élevée que la moyenne nationale. Pensez-y. Ces étudiants qui, il n’y a pas si longtemps, avaient relativement peu de chances de finir l’école secondaire — avec tous les coûts que cela comporte pour la société — sont quatre fois plus nombreux à poursuivre leurs études que ce n’était le cas auparavant. Ils restent à l’école. Autre statistique intéressante: le pourcentage de ceux qui restent dans leur établissement postsecondaire est très nettement supérieur à la moyenne nationale.
    Par conséquent, les retombées du programme se mesurent à l’importance du rendement social sur l’investissement.
(0820)
    En 2006, le Boston Consulting Group a examiné le programme Pathways to Education et a conclu que pour chaque dollar qui y a été investi, la société a obtenu un rendement de 25 $. Ce chiffre se base sur des hypothèses assez modestes tenant compte de l’accroissement des recettes fiscales et de la baisse des coûts sociaux liés à la santé, au chômage et à la justice pénale.
    Nous avons un problème au Canada. Dans le cas de l’Ontario, le taux de décrochage est en moyenne de 23 p. 100. Au Québec, il est de 30 p. 100. Nous travaillons dans des collectivités de tout le pays et avons des discussions avec de nouvelles collectivités qui veulent mettre en œuvre leur propre programme Pathways parce qu’ils ont des taux de décrochage atteignant 60 et 70 p. 100. L’une des collectivités avec laquelle nous avons des discussions a un taux de décrochage de 78 p. 100.
    Combien cela coûte-t-il à ces gens? Quel mal fait-on à ces jeunes qui sont expulsés du système scolaire ou qui le quittent? Et, ce qui est encore plus important, quel est le coût pour la collectivité?
    Le modèle Pathways to Education se base sur le concept de la « succession » dans la collectivité: nos collectivités les plus vulnérables, celles qui connaissent les taux les plus élevés de pauvreté n’ont actuellement pas de vrais chefs. Elles n’ont pas un système d’éducation permettant de former les chefs de l’avenir, les futurs professionnels et les futurs éducateurs dont elles ont besoin.
    Grâce à des programmes comme Pathways to Education, nous commençons maintenant à voir une nouvelle génération d’étudiants, une nouvelle génération de jeunes qui, non seulement gagnera mieux sa vie et améliorera le sort de sa collectivité, mais qui aidera aussi les membres de la famille, les frères, les sœurs et les parents à mieux s’intégrer au Canada.
    Ce que nous savons de nos étudiants, c’est qu’au départ, à Regent Park, seuls 7,9 p. 100 d’entre eux se sont identifiés comme Canadiens, les autres appartenant à différentes autres cultures. Les résultats obtenus à nos autres sites ontariens et québécois n’étaient que légèrement différents: seuls 11 p. 100 des étudiants se sont dits Canadiens. Leurs familles, ayant à affronter les obstacles de la langue, de l’intégration culturelle, etc. ne participent pas à la société canadienne comme elles le devraient, comme elles pourraient le faire et comme elles auront à le faire si elles veulent améliorer leur sort et celui du pays.
    Nous croyons fermement que c’est seulement en investissant dans des programmes comme Pathways to Education, des programmes communautaires qui tiennent compte des facteurs de risque associés à la pauvreté, que nous réussirons vraiment à changer de cap et à créer une société plus saine, plus sûre et plus prospère.
    Je serai maintenant très heureux de répondre à vos questions.
(0825)
    Merci, David.
    Nous passons maintenant à Adam Spence, qui représente l’Association ontarienne des banques alimentaires.
    Adam, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour. Au nom de l’Association ontarienne des banques alimentaires et de nos 120 membres, je voudrais vous remercier de m’avoir donné l’occasion de m’adresser à vous. L’importance de votre travail et du leadership que vous manifestez est aussi grande aujourd’hui qu’elle l’était il y a au moins une génération.
    Nous sommes aux prises, en première ligne, avec les effets dévastateurs du ralentissement économique. La demande pour nos services est en progression très rapide. Depuis le printemps dernier, le nombre d’Ontariens qui recourent aux banques alimentaires a grimpé de plus de 20 p. 100. Nous desservons déjà plus de 320 000 personnes par mois dans la province. Malheureusement, il est presque certain que la pauvreté s’étendra et s’aggravera en Ontario jusqu’à ce qu’une reprise robuste et soutenue puisse se manifester. Si les taux de chômage et de pauvreté suivent les mêmes tendances qu’au cours des récessions précédentes, on peut s’attendre à ce qu’un nombre d’Ontariens pouvant atteindre un demi-million aillent rejoindre les rangs des pauvres dans les deux prochaines années.
    Nous avions dans le passé de meilleurs mécanismes pour soutenir nos voisins en période de crise économique. Malheureusement, des programmes essentiels tels que l’assurance-emploi ne protégeront pas beaucoup des Ontariens qui perdent leur emploi. Lors de la dernière récession, dans l’ensemble, les deux tiers des Ontariens étaient admissibles à l’assurance-emploi. Cette fois-ci, seuls 32 p. 100 le sont. Par conséquent, des dizaines de milliers de chômeurs sont obligés de recourir à des sources de soutien plus précaires, allant des organismes de bienfaisance à l’aide sociale.
    Il est fondamentalement injuste que tant d’Ontariens n’aient pas à manger à leur faim et que de nombreux autres seront dans la même situation dans un proche avenir. Réduire la pauvreté n’est pas seulement un impératif moral. Il y a de bonnes raisons économiques d’agir.
    La pauvreté coûte extrêmement cher. Compte tenu des coûts accrus en santé et en justice pénale, des coûts intergénérationnels et des pertes de productivité, la somme des coûts publics et privés de la pauvreté au Canada se situe entre 72,5 et 86,1 milliards de dollars par an. Le manque à gagner fédéral et provincial au chapitre des recettes fiscales s’élève à 25 milliards de dollars. Par conséquent, les investissements consacrés à la réduction de la pauvreté ont un taux de rendement très appréciable.
    Les transferts directs aux Ontariens et aux Canadiens à faible revenu constituent un investissement judicieux parce que ces gens ont tendance à utiliser leur argent pour acheter des biens et des services locaux. Par exemple, l’effet relatif sur le PIB de paiements directs de transfert à des Canadiens à faible revenu est de 35 p. 100 supérieur à celui des paiements destinés aux Ontariens les plus nantis. De même, les investissements consacrés à la construction et à la réfection de logements sociaux, à la garde d’enfants et à des programmes d’intervention précoce tels que Pathways to Education ont un important rendement économique.
    De puissants motifs militent en faveur de la réduction de la pauvreté. Nous croyons donc qu’il est temps pour le gouvernement fédéral d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie nationale de réduction de la pauvreté ayant un objectif ambitieux. Nous croyons que l’objectif universel devrait être de réduire la pauvreté de moitié d’ici 2020, en insistant sur les formes les plus graves de la pauvreté. L’objectif universel devrait être exprimé en fonction de la mesure de faible revenu.
    De plus, le gouvernement fédéral devrait établir des objectifs de soutien alignés sur des secteurs tels que le logement, l'éducation, l’inclusion financière, l’emploi, l’entreprise, l’énergie et la santé ainsi que des objectifs de soutien alignés sur l’endroit et la population, y compris les quartiers et les collectivités, les néo-Canadiens, les chefs de famille monoparentale, les Premières nations, les personnes handicapées et les enfants. Ces objectifs de soutien pourraient être conçus sur le modèle des objectifs du Millénaire pour le développement et mesurés d’après le revenu, l’inclusion sociale et le dénuement.
    De même, cette stratégie nationale devrait être axée sur des programmes robustes et améliorés touchant tous ceux qui vivent dans la pauvreté grâce au soutien du revenu, au logement social et aux services de garde d’enfants. Cela représente une approche horizontale ciblant l’étendue de la pauvreté. Les réformes du soutien du revenu devraient comprendre des majorations adaptées des prestations fédérales pour enfants et de la prestation fiscale pour le revenu du travail, un nouveau système national de soutien du revenu des personnes handicapées et un système d’assurance-emploi plus équitable et plus accessible.
    Au-delà de ces éléments de base, vous devriez également envisager un certain nombre de solutions novatrices, comme une stratégie verticale ciblant les plus pauvres et comprenant des obligations de logement social, des zones d’initiatives spéciales et des centres alimentaires communautaires.
    En prenant pour modèle des programmes réalisés aux États-Unis, le gouvernement fédéral devrait accorder aux fournisseurs de logements sociaux une aide financière pour leur permettre d’émettre des obligations afin de réunir le capital nécessaire au financement des projets de construction. Le gouvernement devrait également accepter de financer à long terme l’intérêt couru sur ces obligations. Le fournisseur de logements rembourserait ensuite la valeur nominale des obligations grâce au produit de la vente des logements ou aux loyers perçus jusqu’à l’échéance. Cela réduirait considérablement le coût public des logements sociaux et en accélérerait la construction.
    La même stratégie devrait également comprendre des investissements dans des zones d’initiatives spéciales situées dans des collectivités ayant des taux élevés de pauvreté et de chômage, conformément au modèle de renouveau communautaire et de zones d’habilitation utilisé aux États-Unis. Le gouvernement fédéral pourrait offrir aux entreprises des zones choisies des crédits d’impôt pour leur permettre d’engager de nouveaux employés ainsi que des abattements de capital pour l’achat de matériel ou la construction de bâtiments.
    Enfin, la stratégie devrait comprendre des investissements pour la création de centres alimentaires communautaires dans les collectivités et les réserves isolées afin de contribuer à la protection de la culture locale, de lutter contre la faim, de rendre abordables les aliments sains non traditionnels et de favoriser la création d’entreprises d’exportation de produits alimentaires. Nous appuyons actuellement un projet de ce genre dans la Première nation de Sandy Lake.
(0830)
    Cette collectivité a un taux de diabète qui se classe parmi les trois les plus élevés du monde. Les prix des produits alimentaires y sont excessivement élevés, les taux de pauvreté et de chômage sont épouvantables et les conditions de logement comptent parmi les pires du pays. Toutefois, grâce à la résistance de la population, à ses connaissances, à ses dirigeants et à une abondante production locale de produits alimentaires, cette collectivité peut aspirer à un avenir meilleur.
    Nous croyons avoir des arguments solides et un certain nombre d’excellentes idées pour réduire la pauvreté au Canada. Il ne reste plus qu’à mobiliser la volonté politique nécessaire pour agir.
    Je vous remercie.
    Merci, Adam.
    Nous allons maintenant passer à Debbie Douglas, de l’Ontario Council of Agencies Serving Immigrants. Je voudrais souhaiter la bienvenue à Debbie et Edna. Nous avions remarqué votre absence au début de la réunion.
    La minuterie est réglée à cinq minutes. Je ne vous interromprai pas à la fin de cette période. Je veux juste vous donner un point de repère pour la lecture de vos notes.
    Debbie, nous sommes heureux de vous voir. La parole est à vous.
    Je vous remercie. J’ai été surprise de constater que j’étais parmi les derniers à prendre la parole. C’était peut-être une bonne chose d’arriver en retard.
    Nous appuyons beaucoup des initiatives mentionnées par mes collègues autour de la table. Je présente en fait un exposé conjoint au nom de la campagne The Colour of Poverty.
    L’OCASI, ou Ontario Council of Agencies Serving Immigrants, ainsi que la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic sont les membres fondateurs de cette campagne. Vous êtes donc au courant de beaucoup des problèmes qu’affrontent les Canadiens à cause de la pauvreté, mais je me concentrerai dans cet exposé sur la pauvreté racialisée.
    Je ne suis pas sûre que mon document vous a été distribué, mais je voudrais vous donner une idée des organismes qui ont contribué à cette campagne. Je dois dire que nous avons l’appui du gouvernement l’Ontario ainsi que d’organisations caritatives telles que l’Atkinson Charitable Foundation, qui nous aident à faire des recherches et à réfléchir à ces enjeux.
    La campagne The Colour of Poverty est une initiative s’étendant à l’ensemble de la province. Elle fait intervenir des particuliers et des organisations qui travaillent à la création de capacités communautaires pour s’attaquer à la racialisation de plus en plus marquée de la pauvreté et à l’intensification correspondante de l’exclusion sociale et de la marginalisation des collectivités racialisées de l’Ontario.
    Les gens sont souvent surpris de constater qu’à titre de directrice exécutive du plus important organisme canadien qui s’occupe d’immigrants et de réfugiés, je consacre beaucoup de mon temps à parler des collectivités racialisées. Permettez-moi donc de préciser les choses. Quand je parle de collectivités racialisées, je parle non seulement de nouveaux venus, mais aussi des communautés noires du Canada, qui vivent dans le pays depuis sept générations, des collectivités des Premières nations, des gens de couleur qui sont canadiens et font partie de notre pays ainsi que des nouveaux immigrants et des réfugiés.
    Notre réseau s’efforce d’élaborer des stratégies, des initiatives et des outils concrets pour encourager les pauvres et ceux qui vivent dans des collectivités à risque à participer au débat sur les politiques. Nous croyons qu’il est possible d’élaborer des plans d’action plus cohérents et plus efficaces et des stratégies créatives mieux coordonnées pour collaborer avec les analystes de politiques et les organismes publics tels que votre comité, ainsi qu’avec des groupes antipauvreté et de défense de la justice sociale, comme ceux que représentent mes collègues ici présents, et des partenaires des universités. Nous cherchons à travailler ensemble pour remédier aux inégalités ethno-raciales structurelles et systémiques qui se manifestent de plus en plus, partout dans la province.
    L’OCASI compte plus de 200 organismes membres qui aident les immigrants et les réfugiés. Ils comprennent de nombreux organismes traditionnels ainsi que des organisations ethniques. Ils comprennent des organismes de service, mais aussi des organismes de défense et de promotion de la justice sociale. L’OCASI est l’un des membres fondateurs du CERIS, qui fait partie de notre projet Metropolis. Le Canada est un intervenant de premier plan, sinon un chef de file, du projet international Metropolis, qui s’occupe d’immigration et d’urbanisme.
(0835)
    En écoutant mes collègues, j’ai pensé à l’une des raisons pour lesquelles nous avons créé la campagne The Colour of Poverty. La pauvreté n’est pas insensible à la couleur. Au Canada, il est évident que race et pauvreté sont liées. Il est établi que le fossé entre riches et pauvres se creuse de plus en plus en Ontario. Ce qu’on sait beaucoup moins, c’est que ce fossé touche beaucoup plus profondément les membres des groupes racialisés: Autochtones, membres des Premières nations et communautés de couleur. Il y a au Canada une forme particulière de racisme anti-noir. Notre gouvernement national l’a admis en 2001 à Durban. Nous n’avons rien fait pour remédier à ce problème. C’est certainement une chose à laquelle nous devons prêter attention, surtout parce que le phénomène se manifeste ici, en Ontario, quoique nous soyons également inquiets au sujet d’endroits tels que la Nouvelle-Écosse.
    La racialisation croissante de tous nos grands indicateurs sociaux et économiques peut être constatée non seulement dans les statistiques du revenu et de la richesse, mais aussi dans un certain nombre d’autres facteurs, comme les inégalités en santé et en éducation, les taux de décrochage, les occasions d’emploi, la surreprésentation des groupes en cause dans les emplois mal rémunérés, instables et sans prestige, les logements malsains et l’itinérance, la réapparition forcée des enclaves résidentielles racialisées, la multiplication des incidents et les disparités ethno-raciales dans les activités policières ainsi que la surreprésentation des hommes autochtones et des femmes de couleur dans les populations carcérales.
    Tout cela découle de la longue exclusion sociale et économique des groupes racialisés de la société dite traditionnelle. Vous en avez probablement entendu parler, mais nous pouvons vous citer beaucoup d’études qui confirment ce fait, comme l’étude de Centraide du Grand Toronto sur la pauvreté par code postal, l’étude de la Société d’aide à l’enfance de Toronto sur la pauvreté parmi les enfants de la région métropolitaine, l’étude du groupe People for Education sur les écoles urbaines et de banlieue de l’Ontario, ainsi que l’étude de 2008 sur les causes de la violence chez les jeunes qu’a commandée le gouvernement de l’Ontario et qu’ont rédigée l’honorable Alvin Curling et l’honorable Roy McMurtry. Cette étude dit que le racisme s’aggrave et s’enracine parce que l’Ontario ne fait rien pour le combattre.
    Je crois que la réduction de la pauvreté doit commencer par la reconnaissance du fait que race et pauvreté sont intrinsèquement liées. Compte tenu des réalités et des conclusions de ces études, il est impératif que les dirigeants politiques de tous les niveaux discutent de la réduction, sinon de l’élimination de la pauvreté en prenant directement des mesures pour remédier à une pauvreté de plus en plus racialisée ou autrement caractérisée.
    Nous avons un certain nombre de recommandations, auxquelles je vais passer tout de suite parce que je vois que le temps presse.
    Premièrement, nous croyons que le gouvernement fédéral doit reconnaître l’existence d’obstacles systémiques à l’inclusion et d’une discrimination raciale persistante en prévoyant, dans l’ensemble de ses lois, programmes et politiques publiques, des moyens de mesure des résultats sur le plan de l’équité raciale. Des ministères tels que Citoyenneté et Immigration Canada ont adopté des analyses sexospécifiques de toutes les politiques d’immigration. Nous souhaitons que tous les organismes fédéraux adoptent des analyses semblables fondées sur la race.
    Deuxièmement, nous recommandons que le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership en élaborant une stratégie nationale de réduction de la pauvreté ciblant les personnes les plus vulnérables et les plus systématiquement exclues sur le plan racial et comportant des calendriers et des objectifs mesurables.
(0840)
    Durant la période de l’initiative du secteur bénévole, qui s’est située entre 1999 et 2002, je crois, nous avions demandé que, dans tous les ministères, les sous-ministres soient jugés en fonction des mesures prises en matière de race, de sexe, de capacités et d’âge. À titre de responsables de la bureaucratie gouvernementale, ils doivent être évalués d’après les résultats obtenus dans ces domaines, qui doivent en même temps faire partie intégrante de l’action du gouvernement national.
    Troisièmement, nous recommandons que le gouvernement fédéral renonce à quelques-unes des mesures de réduction des impôts qu’il a prises jusqu’ici afin d’être en mesure de réserver davantage de fonds à la prestation de services et de programmes en faveur des gens qui vivent dans la pauvreté. Nous sommes très inquiets de l’absence d’une stratégie nationale de logement. Nous sommes très inquiets de l’absence d’une stratégie nationale de garde d’enfants. Nous parlons non pas de programmes à coûts partagés, mais des mesures que doivent prendre les paliers les plus élevés de gouvernement grâce à l’argent des contribuables pour construire des logements et offrir des services de garde d’enfants, puisque ce sont surtout les femmes, et particulièrement les femmes de couleur, chefs de famille monoparentale qui sont pauvres, afin qu’elles puissent mieux participer à la population active.
    Nous avons un certain nombre d’autres recommandations. Je crois que mes collaborateurs vous ont transmis notre mémoire. Je suis donc sûre que vous l’avez par écrit.
    Je vous remercie du temps que vous m’avez accordé. Je suis prête à répondre à vos questions.
(0845)
    Merci beaucoup, madame Douglas.
    Nous écouterons maintenant Edna Toth, du Peel Poverty Action Group.
    Edna, je vous souhaite la bienvenue.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Le Peel Poverty Action Group se compose surtout de gens à court d’argent. Nous sommes déjà au fond du baril et ne craignons donc pas la récession économique. Notre situation ne peut pas s’aggraver, mais nous pourrions être de plus en plus nombreux.
    Tout ce dont la région de Peel a besoin, tout ce qu’elle vous demande, c’est une part équitable de l’assurance-emploi, une part équitable d’un programme national de logement, une part équitable d’un programme national de garde d’enfants et une part équitable des fonds attribués aux soins de santé. Beaucoup de ces choses existent déjà, mais nous en voulons une plus grande part parce que notre région se développe et que les efforts déployés n’étaient pas à la mesure de l’augmentation de la population.
    En ce qui concerne l’assurance-emploi, Peel a perdu 77 000 emplois entre mars 2008 et mars 2009. Environ un quart d’entre eux appartenaient au secteur manufacturier, la plus grande partie du reste se situant dans la construction et les métiers. Le bureau local d’assurance-emploi reçoit jusqu’à 800 demandes par jour. Il envisage d’ouvrir le soir et le samedi pour répondre à la demande. Quelque 700 travailleurs du secteur de l’automobile vivant à Peel arriveront bientôt au terme de leur période de prestations et seront obligés de s’adresser à l’aide sociale. Pourtant, les chômeurs de Peel et de la zone 905 de la région métropolitaine obtiennent 4 630 $ de moins de prestations d’assurance-emploi que la moyenne des chômeurs des autres régions du Canada. De toute façon, près de 80 p. 100 des gens de Peel n’ont pas accumulé suffisamment d’heures de travail pour être admissibles aux prestations, ce qui touche particulièrement les femmes et ceux qui commencent à travailler à temps partiel.
    Le Peel Poverty Action Group demande au gouvernement de porter les prestations d’assurance-emploi au niveau qui existe ailleurs au Canada et de réviser les périodes d’admissibilité.
    Un programme national de logement pourrait atténuer la pénurie de logements abordables dans la région de Peel. Nous avons 13 500 familles inscrites sur la liste d’attente. Certaines pourraient avoir à attendre 20 ans pour avoir un logement qu’elles puissent se permettre. Je crois que cette liste est la plus longue et que les périodes d’attente sont les plus importantes de toutes les municipalités de l’Ontario, sinon du Canada. Entre-temps, les refuges pour les sans-abri acceptent des familles avec des enfants, qui doivent alors changer d’école et subir tous les bouleversements qu’entraînent des déménagements fréquents. De leur côté, les parents doivent s’éloigner de leur lieu d’emploi, de leurs amis, de leur famille et de leur groupe de soutien.
    Peel a des plans prêts à réaliser concernant 441 logements, qui pourraient être construits aussitôt que le gouvernement fédéral libérera les fonds.
    Le Peel Poverty Action Group demande au gouvernement d’élaborer un programme national de logement destiné à fournir tout de suite des logements abordables. De plus, vous pourriez peut-être envisager de réinvestir l’argent que la SCHL reçoit en remboursement des prêts hypothécaires.
    Un programme national de garde d’enfants contribuerait très sensiblement à la réduction de la pauvreté chez les enfants et à leur protection contre les effets négatifs du ralentissement économique actuel. Le Québec offre des places en garderie à 7 $ par jour — je suis certaine que vous en avez beaucoup entendu parler — et soutient qu’il a réduit de moitié la pauvreté chez les enfants depuis qu’il a lancé ce programme en 1997, également en période de récession. Dans la région de Peel, un programme réservé aux mères chefs de famille monoparentale a montré que les services garantis de garde d’enfants permettent aux femmes de gagner un meilleur revenu, de retrouver leur confiance en elles-mêmes et de devenir autonomes.
    Le Peel Poverty Action Group demande au gouvernement de mettre en œuvre un programme national de garde d’enfants offrant des services de garde de qualité à un prix abordable.
    La région de Peel ne reçoit pas un financement suffisant pour ses services de santé. Les gens qui vivent dans la pauvreté — ils représentent 167 000 des 1,2 million de résidants de la région — sont statistiquement plus susceptibles d’être malades. Le financement des soins de santé ne tient compte ni de la population ni de la pauvreté. Le financement par habitant doit être mis en œuvre dans les six prochaines années, mais nous avons besoin de ces fonds tout de suite.
    La santé mentale est un énorme problème qui touche de nombreux itinérants et des milliers d’autres qui souffrent de troubles chroniques ou occasionnels. Le manque de financement occasionnera des difficultés à l’avenir parce que les soutiens nécessaires ne sont pas en place au moment où on en a besoin. Par conséquent, les coûts des soins de santé ne cessent pas de grimper au fur et à mesure du vieillissement de la population, sans parler des problèmes de mise en vigueur de la loi causés par les jeunes atteints de troubles mentaux qui n’ont pas accès à l’aide dont ils ont besoin.
    Le Peel Poverty Action Group exhorte le gouvernement à accélérer la transition au financement par habitant pour que les services locaux de santé publique et les groupes sans but lucratif puissent faire leur travail. Nous ne voulons pas voir davantage de jeunes à risque jetés en prison.
    C’était l’exposé que je voulais présenter au nom du Peel Poverty Action Group.
(0850)
    Très bien, vous avez réussi à vous en tenir aux cinq minutes prévues. Merci beaucoup. Vous êtes la seule membre de ce groupe à l’avoir fait.
    Nous allons maintenant commencer la période des questions avec Mme Minna. Vous avez sept minutes.
    C’est vraiment très peu, mais j’essaierai de m’en accommoder.
    Tout d’abord, je voudrais remercier tous les témoins de leur présence aujourd’hui.
    Je tiens à noter qu’il n’y a rien, dans ce que vous avez dit, que la plupart de mes collègues et moi ne puissions pas appuyer. Comme beaucoup d’entre vous l’ont dit, il ne reste plus qu’à agir.
    Je crois que les sujets les plus souvent abordés par la plupart d’entre vous comprennent la réforme de l’assurance-emploi, la garde d’enfants, la majoration du salaire minimum, le logement, l’éducation et l’alphabétisation, l’augmentation des prestations pour enfants et l’infrastructure sociale. Nous avons besoin de systèmes de soutien dans les collectivités, de revenus de base pour les personnes handicapées et de ce que j’appelle des économies sociales. C’était ma liste de souhaits.
    Les aînés.
    Les aînés sont compris dans le soutien du revenu. Oui, vous avez raison, j’aurais dû mentionner les aînés en particulier. En tout cas, c’est ce que je vois.
    Monsieur Langille, vous avez dit que nous ne pouvons pas attendre que tout soit parfait pour commencer. Pour ma part, je commencerai simplement avec cette liste, puis je mesurerai les résultats au fur et à mesure. Ainsi, nous commencerions au moins à fournir des logements, des services de garde d’enfants, un salaire minimum décent, un salaire vital pour les gens et ainsi de suite. Voilà ce que je ferais.
    J’aimerais maintenant aller davantage dans les détails. Madame Douglas, je voudrais vous dire que j’ai déjà été présidente de COSTI pour que vous sachiez que je comprends bien ce que vous faites. J’y reviendrai dans quelques instants.
    Monsieur Hughes, je voudrais vous demander ceci. Votre programme est basé à l’école secondaire, n’est-ce pas? Comme je n’ai que très peu de temps, une réponse par oui ou non me suffirait. Vous avez affaire à des élèves du secondaire, et non du primaire.
    Nous intervenons au niveau secondaire et aussi lors de la transition au postsecondaire.
    D’accord. Compte tenu des difficultés que nous avons dans les écoles primaires — il est maintenant question d’avoir une école afrocentrique — et du fait que cela ne peut être qu’une solution à court terme et qu’il y a beaucoup d’autres enfants ailleurs qui n’en profiteront pas, est-ce que votre programme est adaptable au niveau primaire? Nous avons de grands problèmes à ce niveau. Les enfants arrivent au niveau secondaire après avoir vécu ces problèmes.
    On nous pose souvent cette question. Il n’y a pas de doute que certains principes de notre programme peuvent facilement s’appliquer et devraient en fait être appliqués au niveau primaire. La raison pour laquelle nous avons concentré nos efforts sur le secondaire, c’est que nos données ont révélé que la 9e et la 10e année sont celles où on enregistre les plus grands taux de décrochage. Nous savons aussi que c’est dans ces deux années que les étudiants ont le plus de tentations ou de distractions pouvant les détourner de l’école.
    Oui, ils passent tous par la 9e année parce que cela fait partie du processus.
    C’est exact. Je crois que cela a à voir aussi avec leur âge et l’étape de leur vie par laquelle ils passent à ce moment-là.
    Compte tenu de l’expérience que j’en ai avec l’une de mes nièces, je me demande s’il ne vaut pas mieux commencer en 7e ou en 8e année, justement à cause de cette transition à la 9e... Je me demande combien d’enfants décrochent en 9e année. De toute façon...
    Je devrais vous dire que nous inscrivons des étudiants de la 8e année. Nous établissons un premier contact à ce stade pour les aider à faire la transition à la 9e année, puis pour les préparer au niveau postsecondaire.
    Vous faites un travail extraordinaire. Je vous remercie.
    Monsieur Langille, vous recommandez dans votre mémoire une révision du RPC. Je vous prie de me dire rapidement ce que cela signifie car j’ai une autre question à poser à Mme Douglas.
    Je ne crois pas que je m’appesantirai là-dessus parce que je ne suis pas un spécialiste du Régime de pensions du Canada. Cette question me préoccupe personnellement parce que j’appartiens au groupe de Canadiens qui n’ont aucun régime de pension. J’espère que le gouvernement voudra bien intervenir très rapidement pour renforcer le RPC. Je n’ai pas d'économies placées dans un REER.
    D’accord. C’était là que je voulais en venir. En fait, notre ancien ministre des Finances en avait convenu avec moi dans le milieu des années 1990, sauf qu’il n’a jamais été disposé à travailler avec moi pour changer les choses. Les REER ne marchent tout simplement pas pour le Canadien moyen. Nous le savions tous depuis longtemps. Nous dépensons d’énormes montants au sommet, mais cela ne fait pas l’affaire.
    Nous avons besoin d’une réforme complète des pensions, sans compter que les régimes privés et les régimes d’entreprise sont en train de devenir, dans une certaine mesure, une chose du passé. De plus, certains régimes ne sont plus en mesure de faire face à leurs obligations. Je n’ai pas l’intention d’en dire davantage à ce sujet. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Cette question fait l’objet ces jours-ci de discussions très animées au sein de mon caucus... Il ne s’agit pas du caucus de mon parti. C’est simplement mon groupe d’amis et quelques collègues. Quoi qu’il en soit, c’est ce qui se passe. Je le vois depuis un certain temps. Nous avons essayé d'agir il y a quelque temps, mais quand les choses vont bien, tout le monde voit la vie en rose.
    Je vais changer de sujet, mais je suis tout à fait d’accord avec vous.
    Madame Douglas, j’ai quelques petites choses à vous dire très rapidement. Je suis tout à fait d’accord avec vous au sujet des aspects race et sexe de la pauvreté. Je l’ai constaté depuis longtemps, en fait depuis les années 1980 quand je travaillais pour COSTI. Il semble bien qu’il n’y aura des réactions que lorsque les choses se seront beaucoup aggravées. Le gouvernement doit intervenir partout à ce sujet.
    Le Comité permanent de la condition féminine ou plutôt le Parti libéral souhaitait qu’un commissaire à l’égalité des sexes relevant de la Chambre soit nommé. Peut-être devrions-nous donner un titre différent à cette personne pour être plus inclusifs.
    Voici la question que j’ai à vous poser. Le secteur du multiculturalisme est censé jouer un rôle de premier plan dans ce domaine. Il est censé collaborer avec les autres ministères et organismes pour mettre en évidence les questions que vous avez mentionnées et pour donner l’exemple dans les domaines de la santé, des ressources humaines, etc. Je me demande s’il y a des activités dans ce secteur. Travaillez-vous avec lui sur des projets quelconques?
(0855)
    Nous collaborons actuellement avec le Multiculturalisme parce qu’il fait maintenant partie de Citoyenneté et Immigration Canada. Le défi consiste à persuader le Multiculturalisme d’envisager un rôle allant au-delà de l’immigration.
    Il ne devrait pas faire partie de ce ministère.
    Je crois en fait que c’est une bonne idée de l’avoir placé là. Je crains simplement qu’il ne perde son horizon plus vaste et qu'il commence à considérer le multiculturalisme comme un enjeu qui intéresse uniquement les nouveaux venus, par opposition à l’ensemble des Canadiens.
    C’est la raison pour laquelle je crois qu’il ne devrait pas faire partie de ce ministère.
    Oui. Nous y faisons donc attention. Nous sommes un peu inquiets parce que cela fait huit ans que nous attendons la mise en œuvre. Ce n’est que très récemment que des fonds commencent à être attribués dans le cadre de ce qu’on appelle l’initiative des collectivités accueillantes. Nous commençons tout juste à nous occuper du problème et à élaborer une sorte de stratégie nationale.
    Par conséquent, oui, nous nous inquiétons beaucoup du multiculturalisme et de son rôle.
    Très bien. Je crois que mon temps est écoulé. Je vous remercie. J’ai essayé.
    Merci beaucoup.
    Juste avant de céder la parole à M. Ouellet, je voudrais noter qu’il posera ses questions en français. Par conséquent, si vous avez besoin d’interprétation, je vais vous accorder quelques instants pour mettre vos casques d’écoute. Ainsi, nous n’empiéterons pas sur son temps de parole. Dès que vous serez prêts, je vais donner la parole à M. Ouellet.
    Monsieur, vous avez la parole pour sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour et merci beaucoup d'être venus, ce matin. Je trouve que vos témoignages sont vraiment importants. Je vous remercie encore une fois, monsieur Hughes, pour la tournée d'hier et pour votre explication de ce matin. D'ailleurs, je vais d'abord m'adresser à vous. Votre explication, ce matin, était très claire, mais j'aimerais avoir une explication supplémentaire.
    Croyez-vous que Pathways to Education Canada devrait continuer à opérer avec l'aide du privé exclusivement, comme c'est le cas, ou si cela devrait devenir un programme gouvernemental, qui ne s'appliquerait pas uniquement à quelques communautés, mais à tout le monde partout au Canada? Pour le Québec, on pourrait tout simplement faire un transfert pour qu'il s'occupe de son programme lui-même.

[Traduction]

    Je vous remercie de vos observations.
    Tout d’abord, nous venons de lancer le programme au Québec, dans une collectivité de Montréal. Nous avons hâte de voir quels résultats nous obtiendrons.
    Quant à la question de savoir si le programme doit être gouvernemental ou dirigé par le gouvernement pour être mis en œuvre partout, je dois vous dire que je ne suis pas du tout de cet avis. Je crois que le programme peut s’étendre partout dans le pays tout en gardant son statut actuel d’entreprise caritative sans but lucratif financée tant par le secteur privé que par le gouvernement.
    Je crois que le programme comporte un élément très important qui va au-delà de l’aide que nous apportons aux étudiants. Le programme rapproche les collectivités. Son élément bénévole joue un rôle essentiel dans ce que nous faisons. Nous édifions des collectivités en même temps que nous assurons un nouvel avenir aux jeunes. Il y a une forme d’entreprenariat et d’innovation qui joue un rôle capital et qui découle du fait même que nous sommes une organisation sans but lucratif dirigée par des bénévoles. Cela nous permet de faire certaines choses qui pourraient ne pas être possibles si le programme avait un caractère gouvernemental.
    Par conséquent, je crois qu'il doit y avoir un fort partenariat entre le gouvernement et des organisations telles que Pathways to Education, mais je ne pense pas que le programme devrait être dirigé par le gouvernement.
(0900)

[Français]

    Quel type de partenariat souhaitez-vous avec le gouvernement?

[Traduction]

    Oui. D’abord et avant tout, il faudrait que cette question figure parmi les priorités du gouvernement. Il s’agit de reconnaître que la solution des problèmes communautaires, du problème de la pauvreté et de l’intégration des néo-Canadiens passe par des programmes destinés à aider les jeunes des collectivités les plus vulnérables à faire la transition vers un emploi satisfaisant et des études postsecondaires. Il s’agit de reconnaître que c’est vraiment un domaine de causes et d’effets. Nous avons la possibilité de toucher ces jeunes assez tôt pour changer leur attitude envers leur collectivité, leur famille et leur propre vie. Nous avons besoin à cette fin d’une action nationale et d’une définition nationale des priorités.
    Je voudrais en premier lieu que le gouvernement inscrive cette question parmi ses priorités. Ensuite, il faudrait qu’il nous aide à recueillir des données. L’information disponible dans le pays au sujet des taux de décrochage, des réalisations scolaires et des disparités qui existent dans ce domaine est très insuffisante. De plus, la collecte et la coordination de cette information sont très difficiles.
    Il y a un vieil adage selon lequel si on ne peut pas mesurer une chose, on ne peut pas non plus la gérer. À l’heure actuelle, nous ne sommes pas en mesure de déterminer avec précision l’étendue du problème. C’est donc un autre domaine où nous pourrions bénéficier de l’aide...

[Français]

    Si vous me le permettez, j'aimerais revenir à la question de départ, qui portait sur le privé et le public. Ne pensez-vous pas qu'il y a un danger à ce que ce projet ne soit que dans les mains du privé? Cela voudrait dire que les décisions ne seraient plus prises par le gouvernement. M. Langille le disait plus tôt, on ne veut pas moins de gouvernement, on en veut plus.
    De votre côté, vous dites vouloir moins de gouvernement parce que l'entreprise privée est capable de régler les problèmes en éducation. Ne trouvez-vous pas qu'il y a une dichotomie entre les deux?

[Traduction]

    Oui. Tout d’abord, je veux dire que nous ne considérons pas ceci comme un problème d’éducation, et notre programme n’est pas une solution éducative. Pour nous, c’est un enjeu communautaire portant sur le temps que les étudiants ne passent pas à l’école. Voilà sur quoi nous concentrons notre temps et notre énergie. Cela les aide à finir l’école.
    Pour ce qui est de l’intervention gouvernementale, nous nous ne demandons pas mieux que de voir le gouvernement intervenir davantage au niveau du financement et des politiques, mais je crois que l’exécution du programme doit se fonder sur un contrat de partenariat prévoyant les paramètres de base qui garantissent que le programme aboutira à certains résultats.

[Français]

    Vous avez dit ce que je voulais entendre. Merci.
    Monsieur Spence, tout à l'heure, vous avez parlé d'un programme américain qui appuie la construction de logements sociaux. Pensez-vous qu'à l'heure actuelle, le grand problème au Canada est qu'on ne sait pas comment donner l'argent pour faire des logements sociaux? Ou est-ce simplement le fait que l'on ne donne pas d'argent pour les logements sociaux depuis 1993?

[Traduction]

    Je crois que le problème est double. D’une part, comme vous l’avez dit, il n’y a pas suffisamment de fonds publics pour financer la construction de logements sociaux au Canada. Il ne faut pas perdre de vue, par ailleurs, qu’il existe d’autres mécanismes de financement à part les fonds publics, comme les obligations pour le logement social.
    Ce n’est pas facultatif. Il est absolument indispensable que le gouvernement ait une stratégie nationale de logement prévoyant des investissements dans le logement social. Une telle stratégie aurait également un excellent taux de rendement. Elle donne aux gens un toit, un endroit où vivre. C’est déjà une excellente base pour réussir. De plus, au-delà des fonds publics, nous pouvons songer à fournir de l’argent pour appuyer un programme d’obligations pour le logement, sur le modèle de ce qui s’est fait aux États-Unis. Nous disposerions ainsi de fonds supplémentaires pour construire des logements.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Madame Toth, j'aimerais vous poser une question. Tout à l'heure, vous avec dit, avec raison, qu'il est bien important d'avoir des logements sociaux. Vous avez aussi dit que de l'argent dort à la SCHL. Cet argent n'est pas utilisé pour la construction de logements sociaux, mais il pourrait l'être.
    J'ai présenté un projet de loi qui visait à ce qu'on ait accès à cet argent et qu'on puisse le distribuer, en partie du moins, pour le logement social au Canada.
     Êtes-vous capable de me dire si vous savez pourquoi seuls les députés du NPD ont voté avec nous sur ce projet? Personnellement, je ne comprends pas, mais vous comprenez peut-être. Pourquoi est-ce ainsi?
(0905)

[Traduction]

    Je regrette, mais je ne me rendais pas compte que cette question avait un aspect partisan. Je n’ai peut-être pas fait suffisamment de recherches sur le sujet.
    Quoi qu’il en soit, nous avons un certain nombre de problèmes locaux en ce qui concerne le logement. Le conseil régional de Peel définit la politique de logement. Les municipalités de la région — Caledon, Mississauga et Brampton — sont responsables de l’aménagement urbain. Elles peuvent décréter qu’il y aura des magasins à tel endroit, des maisons unifamiliales à tel autre, mais qu’il est interdit de placer les appartements en sous-sol à tel autre endroit. Toutefois, l’aménagement réel est fait par les promoteurs à qui le terrain appartient. Ils ont déjà investi d’avance. Les villes doivent placer les logements sociaux sur des petits bouts de terrain dont personne ne veut et qui, dans bien des cas, ne peuvent servir à rien d’autre. En réalité, ce n’est pas simplement un problème d’argent. Je comprends que les montants versés à la Société canadienne d’hypothèques et de logement en remboursement des prêts hypothécaires vont directement au Trésor, mais je n’ai pas vraiment examiné cette question.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    C’est maintenant au tour de M. Martin. La parole est à vous pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Edna, je dois vous dire que, quand je pense à la région de Peel, je ne l’envisage pas du tout comme un foyer de pauvreté. J’aurais plutôt tendance à penser au centre-ville ou au noyau central. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre organisation, sa composition et son historique?
    Notre organisation a été établie par le Conseil de planification sociale de Peel au terme d’un forum sur la pauvreté chez les enfants. C’était en 1997.
    Depuis, nous avons fait un certain nombre de choses. Nous avons réalisé une vidéo sur la pauvreté et l’avons fait circuler dans les écoles. Nous avons aménagé quelques jardins communautaires. Nous avons présenté des exposés au conseil sur des aspects particuliers, comme les soins dentaires, qui laissent beaucoup à désirer, surtout parmi les aînés et, bien sûr, les sans-abri. Notre organisation a eu d’autres activités. Elle a évolué vers un rôle de lobbying politique. Nous n’avons aucun revenu. Par conséquent, nous ne courons pas le risque de perdre notre financement parce que nous avons choisi d’appuyer un parti plutôt qu’un autre. En fait, nous ne l’avons pas fait. Nous essayons d’être aussi impartiaux que possible, même s’il nous arrive de montrer les dents quand des gens refusent d’agir comme nous croyons qu’ils devraient le faire. Nous pouvons nous montrer grossiers car nous ne craignons pas de perdre une subvention.
    Les gens que nous aidons sont les plus pauvres parmi les pauvres. Ce sont souvent des sans-abri qui ont des troubles mentaux. Nous avons aussi un certain nombre de travailleurs sociaux extrêmement dévoués, qui sont également membres du Peel Poverty Action Group et qui nous aident beaucoup de leurs conseils. Nous travaillons avec la région de Peel et ses comités de la part équitable et de la stratégie de lutte contre la pauvreté.
    Que pensez-vous de la racialisation de la pauvreté dans cette région?
    Les immigrants forment à peu près la moitié de la population de la région de Peel.
    Une voix: Ce sont surtout des gens de couleur.
    Mme Edna Toth: Je n’en suis pas sûre. Il y a 300 000 personnes originaires de l’Asie du Sud ainsi qu’un grand nombre de Noirs venant des Antilles. Ils nous parlent des difficultés qu’ils ont à trouver et à garder un emploi et de tous les autres problèmes découlant du fait qu’on dénigre souvent les gens de couleur.
(0910)
    La population augmente et continuera d’augmenter dans la région de Peel.
    C’est exact. Une trentaine de milliers de personnes s’ajoutent chaque année. La plupart sont des immigrants.
    Adam, vous avez dit qu’il serait possible de réduire la pauvreté de moitié d’ici 2020. Je trouve alarmant que nous ayons à attendre aussi longtemps. De toute évidence, les gens dont Debbie parle veulent qu’on agisse aujourd’hui ou demain. Ils ne veulent plus vivre dans la pauvreté.
    Comment choisirons-nous la moitié à tirer de la pauvreté et la moitié qui y restera? Nous avons beaucoup entendu parler des pauvres qui sont méritants ou qui ne le sont pas. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Est-il impossible de régler rapidement le problème de la pauvreté?
    Il n’est pas impossible de régler rapidement le problème de la pauvreté. C’est évidemment une question de volonté politique et de moyens à mettre en œuvre. Nous avons examiné les réalisations d’autres pays qui ont réussi à réduire la pauvreté au cours d’une certaine période. Compte tenu du fait que nous connaissons actuellement un important ralentissement économique, qui augmentera d’un demi-million le nombre des pauvres dans les deux prochaines années, je crois qu’il est raisonnable de se fixer comme objectif de réduire la pauvreté de moitié. Nous pourrions en fait prendre un engagement à cet égard. Vous pourriez même regarder les gens dans les yeux et leur dire que ce sera fait dans 10 ans. C’est possible. C’est tout à fait possible s’il y a une entente unanime entre tous les partis et si tout le monde accepte cet engagement. Théoriquement, il serait également possible d’éliminer la pauvreté d’ici 2020, mais d’après la stratégie que notre organisation a élaborée, nous croyons pouvoir la réduire de moitié dans cette période.
    Pour ce qui est du choix à faire, nous croyons qu’il faut cibler les plus pauvres. Nous concentrons nos efforts sur ceux que la pauvreté touche le plus durement. Si on considère un endroit comme la première nation de Sandy Lake, qui est aussi éloignée d’ici vers le nord que Miami l’est vers le sud, je ne crois pas que nous arriverons à éliminer en 10 ans la pauvreté qui y sévit. Il faudra une génération pour le faire. Les efforts de votre comité ne suffiraient pas, il faudrait que tout le gouvernement s'y mette. Il faudra l’engagement d’une génération pour réduire la pauvreté au Canada en vue de l’éliminer. J’aurai 50 ans avant que nous puissions dire que nous l’avons fait. Je crois que c’est un engagement extraordinaire, rien que de pouvoir dire cela.
    Voilà ma réponse.
    David, je regrette, mais je n’ai pas pu écouter votre exposé. J’ai cependant vu le documentaire que vous avez produit. Le documentaire insiste beaucoup sur la nécessité de permettre à plus de gens de s’organiser et d’accéder à la négociation collective. Cela aiderait à en sortir beaucoup de la pauvreté.
    Pouvez-vous nous en dire davantage? Nous n’avons pas entendu grand-chose à ce sujet jusqu’ici.
    Un peu partout dans le monde, les syndicats ont non seulement amélioré les salaires et les conditions de travail et obtenu des pensions et d’autres avantages pour leurs membres, mais ont aussi contribué à l’adoption de programmes sociaux, comme l’assurance-maladie, la garde d’enfants et les logements abordables. La recherche montre que plus le mouvement syndical est fort, plus les avantages obtenus sont généreux. Nous pouvons voir en Suède ce que les syndicats ont réussi à obtenir quand plus de 80 p. 100 des travailleurs sont syndiqués, y compris les gestionnaires du McDonald’s que nous sommes allés visiter. On peut voir tout cela dans notre documentaire.
    Il est également intéressant de noter, Tony, que beaucoup de pays européens ont eu des gouvernements qui ont étroitement collaboré avec le patronat et les syndicats. L’efficacité de ces partenariats dépend du parti au pouvoir et de la puissance des syndicats. En Irlande, nous avons trouvé un gouvernement qui collaborait étroitement avec les entreprises en envoyant promener les syndicats. En Suède, il y a une longue tradition de coopération entre les syndicats et le parti au pouvoir. Dans ce pays, tant les travailleurs que les employeurs ont profité de l’investissement dans le perfectionnement et l’acquisition de compétences... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]
    J’ai mentionné tout à l’heure que la politique compte. En Irlande, lorsque les entreprises étaient prospères, les travailleurs gagnaient des salaires élevés et la pauvreté avait reculé. Maintenant que l’économie est en sérieuse difficulté, les Irlandais veulent se débarrasser du gouvernement qui les a laissés dans une situation tellement précaire, sans un solide filet de sécurité ni un système d’assurance-maladie. En Suède, par contre, le partenariat social a été menacé quand les dirigeants du monde des affaires ont investi à l’étranger pour payer des impôts et des salaires moins élevés. C’est leur talon d’Achille. Maintenant que des élections s’annoncent, il reste à voir si les Suédois rééliront le présent gouvernement, qui insiste beaucoup sur les réalisations personnelles et la libre entreprise, ou s’ils choisiront un gouvernement qui leur donnera plus de sécurité dans une période de crise économique mondiale. Ce que je trouve fascinant dans ce pays, c’est que malgré les changements de gouvernement, tout le monde ou presque est partisan de l’État-providence. L’État-providence reste toujours intact.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Lobb, qui sera le dernier dans ce tour. La parole est à vous pour sept minutes.
(0915)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Spence, votre groupe approvisionne 320 000 Ontariens chaque mois en produits alimentaires. Je me demande si votre organisme doit s’assurer d’un certain contenu canadien dans les produits que vous distribuez.
    C’est une très bonne question. Nous n’avons pas un mandat particulier à cet égard. La majorité des aliments que nous distribuons vient du secteur manufacturier. Il s’agit donc de produits canadiens. Compte tenu de l’augmentation rapide de la demande qui, comme je l’ai dit, a grimpé de 20 p. 100 par rapport à l’année dernière, et de la diminution tout aussi rapide de la production de produits alimentaires dans la province — nous avons perdu 10 producteurs dans les 16 derniers mois —, nous avons été obligés de nous adresser aux exploitations agricoles locales de l’Ontario. Les agriculteurs ont été extrêmement généreux. Nous continuerons donc à les solliciter afin de répondre à la très forte demande que nous avons.
    En prenant les cinq dernières années, par exemple, comme période de référence, à combien s’élève en moyenne le nombre de vos clients? Est-ce qu’il se situe aux alentours de 320 000, ou bien est-ce moins que cela?
    Entre 2005 et 2008, le nombre a été relativement stable aux alentours de 320 000. Dans les 12 à 18 derniers mois, il a augmenté. Quelques banques alimentaires de Hamilton ont signalé des augmentations allant jusqu’à 26 p. 100. À Thunder Bay, c’est 36 p. 100. À Cornwall, nous avons atteint près de 40 p. 100. Aussitôt que la récession s’est manifestée, nous avons eu de grandes difficultés un peu partout, et pas seulement à des endroits comme Oshawa et Windsor. C’est vraiment partout.
    Madame Douglas, mon père a grandi dans une famille rurale très pauvre. En fonction de toutes les définitions actuelles, cette famille vivait vraiment dans la pauvreté. Elle a pourtant réussi à s’en sortir et à envoyer les enfants à l’école. C’est un excellent exemple de réussite. Dans ma circonscription — c’est le comté de Bruce, dans le sud-ouest de l’Ontario —, nous avons un important élément d’immigrants d’origine néerlandaise et allemande. Ces gens ont une éthique professionnelle exceptionnelle, comme la plupart des immigrants qui viennent au Canada.
    Au-delà des questions que vous avez abordées aujourd’hui et compte tenu du niveau éthique élevé de nos immigrants, avez-vous pensé à favoriser les investissements dans les petites entreprises afin d’encourager le travail autonome? De toute évidence, le problème du logement abordable est extrêmement important, mais, au-delà de cet enjeu, est-ce que votre groupe a des idées sur la façon de fournir du financement pour favoriser la croissance du travail autonome?
    Oui, mais il ne s’agit pas seulement de travail autonome. Il faudrait aussi appuyer les petites et moyennes entreprises. Nous savons qu’elles constituent les plus grands employeurs du pays. Le gouvernement devrait penser au microcrédit et encourager les institutions financières à l’envisager. Cela aiderait les gens à fonder leurs propres entreprises, à devenir autonomes et à engager d’autres personnes.
    L’une des choses que je ne voudrais pas perdre de vue dans cette conversation, c’est le lien qui existe entre toutes ces choses. Nous devons faire le lien entre la pauvreté et la race, les jeunes et les femmes. Quelles sont les stratégies qui ont fait leurs preuves ailleurs? Quelles sont les stratégies qui ont réussi dans le passé? Il y a aussi une question de volonté politique. Nous devons repenser notre identité, comme pays. Le microcrédit est une excellente idée pour accroître les prêts à faible taux d’intérêt. Je crois que nous devons faire attention pour que les collectivités racialisées ne soient pas les dernières engagées et les premières congédiées. Nous devons penser à des choses telles que l’équité en emploi au niveau provincial. Nous devons songer à des choses telles que le respect des contrats au niveau national et provincial. C’est seulement ainsi que nous pouvons assurer la plus grande participation des membres les plus vulnérables de notre économie.
(0920)
    Beaucoup des parents et grands-parents de mes amis, qui ont immigré au Canada, parlent de la grande difficulté qu’ils ont eue à apprendre l’anglais à leur arrivée dans le pays. Je me demande si le gouvernement peut en faire davantage pour aider les immigrants à apprendre la langue.
    En Ontario, le financement de la formation linguistique a été maintenu, bien que notre administration nationale actuelle ait réduit de 90 millions de dollars le financement du secteur en Ontario. Il est probable que nous ne récupérerons jamais cet argent. Le problème est dû en partie à une question de temps. Il ne faudrait pas limiter les services aux immigrants admis. Nous encourageons les gens à obtenir la citoyenneté, mais dès qu’ils deviennent citoyens, ils n’ont plus accès aux programmes financés.
    Nous savons que 50 p. 100 des demandeurs du statut de réfugié finissent par l’obtenir, mais tant qu’ils ne sont pas résidents permanents, ils n’ont pas accès aux services. Entre-temps, nous excluons des citoyens canadiens qui n’ont passé que trois ou quatre ans dans le pays. Ils n’ont plus droit aux services linguistiques parce qu’ils ont été naturalisés. En même temps, nous encourageons les immigrants à demander la citoyenneté. Il y a donc un décalage entre ce que nous souhaitons que les gens fassent et l’aide que nous leur accordons par la suite.
    Madame Toth, est-ce que la région de Peel a adopté un plan de développement futur imposant de consacrer, par exemple, 10 p. 100 des nouveaux fonds à des logements abordables?
    De plus, la province d’Ontario, avec sa Loi sur l’énergie verte, a supprimé beaucoup de mesures de zonage en faveur de l’énergie verte. Avez-vous des observations à formuler à ce sujet? Si les municipalités locales ne sont pas disposées à favoriser la construction de logements abordables, serait-il indiqué que la province établisse des règles de zonage conçues pour le faire?
    C’est une approche intéressante. Il y a eu des recherches sur ce qui se fait ailleurs. En Grande-Bretagne, par exemple, les grands promoteurs sont tenus de construire un certain nombre de logements abordables chaque fois qu’ils obtiennent l’approbation d’un lotissement. Je crois que Vancouver a adopté un régime de ce genre. On a également dit qu’il était appliqué en Californie. À ma connaissance, le conseil régional n’a pas reçu de rapport à ce sujet, mais c’est certainement une question qui vaut d’être examinée. Si elle impose un changement des pouvoirs, il faudra y penser. Pour moi, c’est vraiment une bonne idée.
    Merci beaucoup, monsieur Lobb.
    Je voudrais remercier les témoins. Nous vous sommes reconnaissants du travail que vous faites en première ligne. Merci pour votre travail et pour votre contribution d’aujourd’hui.
    Allez-y, monsieur.
    Je n’ai pas eu la possibilité de parler à M. Langille.
    Vous pouvez lui poser une question très rapidement.
(0925)

[Français]

    Monsieur Langille, vous avez dit avec raison — et tous les autres partagent cette opinion — que la pauvreté a une couleur, que la pauvreté a un sexe et que la pauvreté a un âge.
    Cependant, en ce qui concerne les taxes, vous n'avez que mentionné ces mots: « les taxes ». Ne pensez-vous pas que les taxes ont une classe sociale? Pourriez-vous élaborer un peu sur les taxes par rapport à la classe sociale?

[Traduction]

    Je crois que les impôts constituent l’un des principaux moyens de redistribuer la richesse. Ils jouent un rôle essentiel. Les gens qui préconisent des réductions d’impôt sont en fait ceux qui résistent à la redistribution des revenus. Si nous devons réduire la pauvreté au Canada, nous ne pouvons le faire qu’au moyen d’un régime fiscal fort, progressif et équitable. Je crois que c’est l’argument le plus important à avancer aujourd’hui. Sans ressources, nous ne pouvons pas réaliser grand-chose.
    Merci encore d’être venus aujourd’hui.
    La séance est levée.
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