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Monsieur le Président, ce projet de loi est important. Il l'est pour tous les Canadiens et aussi pour les résidants de ma circonscription, Oxford, dans le Sud-Ouest de l'Ontario.
Je prends la parole pour appuyer le projet de loi . Le gouvernement présente cette mesure afin de proposer plusieurs changements fondamentaux au système correctionnel et à la mise en liberté sous condition, afin que tous continuent d'être en sécurité dans nos rues et nos collectivités, ce qui devrait d'ailleurs être l'objectif de tous les députés à la Chambre.
En vertu des modifications proposées, la protection de la société serait le principe fondamental régissant le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Ces changements moderniseraient le régime disciplinaire et accroîtraient la responsabilité et la responsabilisation des délinquants relativement aux gestes qu'ils posent. Ils permettraient aussi aux victimes d'avoir accès aux renseignements qu'elles exigent et qu'elles méritent d'obtenir.
Ces modifications ne sont pas le fruit du hasard. Elles prennent appui sur les initiatives déjà en cours pour renforcer le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Par conséquent, il peut être utile de comprendre le contexte qui a entraîné ces modifications et de voir comment celles-ci visent à poursuivre la réforme du système correctionnel.
Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement s'est engagé à faire en sorte que le système correctionnel atteigne deux objectifs interdépendants, c'est-à-dire permettre aux délinquants d'obtenir l'aide dont ils ont besoin pour réintégrer la société à titre de citoyens respectueux des lois — ce qui est important — et veiller à ce que les Canadiens se sentent en sécurité dans leurs maisons et leurs collectivités.
En 2007, dans le cadre de l'engagement que nous avons pris de protéger les familles et les collectivités canadiennes, notre gouvernement a mis sur pied un groupe d'experts indépendant chargé d'étudier les plans d'activités, les priorités et les stratégies du Service correctionnel du Canada.
Le groupe a formulé 109 recommandations regroupées sous cinq thèmes: la responsabilité des délinquants, l'élimination de la drogue dans les prisons, les infrastructures physiques, l'employabilité et l'emploi, ainsi que l'élimination de la libération d'office et son remplacement par la réduction méritée de peine. Dans ses recommandations, le groupe d'experts traite expressément des préoccupations des victimes et des besoins des délinquants aux prises avec des troubles mentaux.
Dans le budget de 2008, Le gouvernement a prévu 478 millions de dollars, sur une période de cinq ans, pour mettre en oeuvre un bon nombre des recommandations du groupe d'experts. Nous avons fait des progrès énormes dans des secteurs clés. Je vais en mentionner deux en particulier, à savoir les drogues et les troubles mentaux.
Le groupe a insisté sur le fait qu'il fallait redoubler d'efforts afin de faire disparaître la drogue des prisons. Le gouvernement a réagi en annonçant en août dernier une nouvelle stratégie anti-drogue visant à faire disparaître la drogue des prisons fédérales. Cette stratégie permet au Service correctionnel du Canada d'élargir significativement le programme de chiens détecteurs de drogue dans toutes les prisons fédérales, d'accroître ses capacités en matière de collecte de renseignements sur la sécurité dans les établissements et les collectivités environnantes, d'acheter des équipements de sécurité pour les établissements fédéraux à sécurité maximale et moyenne et d'accroître le périmètre de sécurité autour des établissements.
Le gouvernement prend aussi des mesures pour régler un problème qui contribue grandement à la consommation de drogues dans les prisons: en l'occurrence, la présence de gangs dans nos prisons.
Le groupe a aussi insisté sur le fait qu'il fallait s'attaquer aux maladies mentales puisque le nombre de délinquants souffrant de maladies mentales a augmenté de 71 p. 100 depuis 1997. En effet, on constate que presque 26 p. 100 des délinquantes et 12 p. 100 des délinquants souffrent d'une maladie mentale grave quand ils échouent dans le système carcéral. C'est un point essentiel dans l'ensemble du dossier que nous devons comprendre. De toute évidence, il faut que les délinquants soient en bonne santé mentale pour que leur retour dans la collectivité soit une réussite.
Grâce à l'initiative de santé mentale dans la collectivité, le gouvernement a déjà fait beaucoup pour que les délinquants sous surveillance communautaire obtiennent l'aide dont ils ont besoin. Plus de 900 membres des services communautaires ont reçu de la formation sur la santé mentale et le Service correctionnel du Canada s'est lancé dans un projet pilote dont l'objectif est de fournir des traitements spécialisés en santé mentale aux délinquantes qui purgent leur peine dans la collectivité.
Il reste cependant encore beaucoup à accomplir dans la lutte contre la consommation de drogue en prison et contre les maladies mentales. C'est pour cela que le gouvernement a l'intention de continuer à améliorer les outils et les techniques qui permettent de détecter la drogue. Le projet de loi porte précisément sur la nécessité qu'il y a d'élargir les programmes et les services de santé mentale dans les établissements et les collectivités pour permettre aux délinquants de réussir leur retour dans la collectivité et d'assurer la sécurité au sein de nos collectivités.
Le groupe indépendant a également souligné que la réadaptation est une responsabilité que partagent le système correctionnel et le délinquant.
Pour accroître la reddition de comptes, le projet de loi prévoit l'établissement, pour chaque délinquant, d'un plan correctionnel qui fixe les objectifs du délinquant en ce qui a trait à son comportement, à sa participation aux programmes et à l’exécution de ses obligations découlant d’ordonnances judiciaires. Il propose également de mettre en place de nouvelles mesures pour inciter les délinquants à participer à l’établissement de leur plan correctionnel.
Le projet de loi à l'étude aujourd'hui vise aussi à moderniser le régime disciplinaire dans les pénitenciers fédéraux, par exemple en punissant tout comportement irrespectueux, intimidant et agressif de la part des délinquants, y compris le fait de lancer une substance corporelle. Les délinquants seraient tenus de respecter à la fois les personnes et les biens.
Qui plus est, le projet de loi renforcerait l'obligation pour les délinquants d'obéir à toutes les règles et conditions régissant leur mise en liberté. S'ils ne respectent pas les règles, le projet de loi permettrait aux policiers d'intervenir. Par exemple, les policiers pourraient procéder à l'arrestation sans mandat de tout délinquant qui semble avoir violé les conditions de sa libération conditionnelle. Ce sont des changements que les policiers et les groupes représentant les victimes réclament et nous sommes fiers d'acquiescer à leur demande.
Je veux m'attarder un peu aux droits des victimes, qu'on oublie trop souvent.
Le projet de loi permettrait aux victimes d'obtenir de l'information sur les raisons de l'absence temporaire ou du transfèrement d'un délinquant. Elles pourraient aussi se renseigner sur les programmes auxquels les délinquants participent ou ont participé et les infractions disciplinaires graves qu’ils ont commises. De plus, le projet de loi octroierait aux victimes le droit d’intervenir lors des audiences de la Commission nationale des libérations conditionnelles.
Dans la même veine, je tiens à signaler que le gouvernement s'affaire à créer un comité consultatif national des victimes d'actes criminels, qui présenterait le point de vue des victimes sur les questions touchant le système correctionnel. Par exemple, il tiendrait le gouvernement au courant des questions émergentes liées aux victimes et veillerait à ce qu'on tienne compte des préoccupations des victimes dans la recherche, les lois et les politiques en matière de criminalité.
Le gouvernement est déterminé à transformer notre système correctionnel. Nous avons déjà pris d'importantes mesures pour donner suite aux recommandations du groupe indépendant, et le projet de loi dont nous sommes saisis est la suite de cet important travail.
J'exhorte tous les députés à appuyer sans réserve ce projet de loi pour les délinquants, qui doivent assumer une plus grande part de responsabilité à l'égard du succès de leur réinsertion dans la collectivité, pour les victimes d'actes criminels, qui méritent d'avoir une voix plus forte au sein du système correctionnel, pour les agents de correction, qui ont le droit de travailler dans un milieu sûr, et pour tous les Canadiens, qui méritent de se sentir en sécurité dans leurs foyers et dans leurs collectivités.
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Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole à la Chambre pour parler de ce sujet.
L'affaire qui a, au cours des dernières années, probablement le plus sensibilisé la population aux problèmes en milieu carcéral, surtout pour les personnes qui ont des problèmes de santé mentale, est sans doute celle d'Ashley Smith. À l'époque, Ashley avait 17 ans. Son crime? Elle avait lancé une pomme à la tête d'un facteur et volé un CD.
Ashley est entrée dans notre système pénitentiaire, où elle a été gardée en isolement pendant 11 mois. On n'a jamais diagnostiqué de maladie mentale chez elle et, pourtant, elle a été constamment surveillée en cas de suicide, en isolement dans sa cellule, dans différentes prisons. Elle a été incarcérée dans plusieurs établissements.
Lorsque j'étais à l'établissement Grand Valley, à Kingston, j'ai eu l'occasion d'être dans la cellule dans laquelle Ashley est décédée. Il est incroyablement tragique de penser qu'elle y est morte pendant que des gardiens de prison, qui avaient pour consigne de ne pas entrer dans sa cellule, exerçaient une surveillance. Ashley s'est asphyxiée, après 11 mois d'incapacité totale de notre système carcéral de s'occuper de ses problèmes et 11 mois d'incarcération pour un crime anodin.
Cette effroyable tragédie est en soi extrêmement malheureuse, non seulement pour la famille d'Ashley, mais aussi pour tous les Canadiens du fait que ce genre de chose puisse ce produire au Canada. Ce qui est encore bien plus triste, c'est que l'Enquêteur correctionnel nous dit que cela est symptomatique d'un phénomène qui se produit chaque jour dans des prisons de tout le pays.
La réalité, c'est que les personnes qui ont des problèmes de santé mentale sont confrontées à un système qui les laisse complètement tomber. Plus souvent qu'autrement, elles sont placées en isolement parce que le système ne peut leur fournir les services dont elles ont besoin pour améliorer leur état.
Par exemple, lorsque j'étais à St. John's, j'ai eu l'occasion de visiter l'établissement Her Majesty's Penitentiary et ses cellules d'isolement. Dans une minuscule cellule, à peine plus grande qu'une penderie, il y avait deux personnes, dont l'une, m'a-t-on dit, souffrait d'un grave problème de santé mentale et se flagellait, se frappait. Dans cette cellule, une autre personne, étendue par terre, se couvrait la tête avec une couverture pour étouffer le bruit.
Après avoir été témoin de cette scène, je me suis demandé comment quelqu'un pouvait se remettre sur pied dans un tel environnement. Comment cette personne, qui de toute évidence souffrait d'une maladie mentale, pouvait-elle se remettre sur pied coincée dans une cellule aussi petite et isolée du reste du monde? D'ailleurs, il y a un peu plus de trente minutes, des professionnels de la santé mentale sont venus témoigner devant le comité pour dire que la pire chose pour une personne atteinte d'une maladie mentale, c'est de se retrouver emprisonnée, loin de toute interaction avec les autres.
Malheureusement, la réalité est que nos prisons sont utilisées comme des hôpitaux, mais elles ne disposent pas d'infirmières ou de médecins qualifiés pour traiter ce genre de patient. D'ailleurs, les gardiens de prison ne reçoivent à peu près aucune formation sur la façon d'aborder les détenus qui souffrent d'une maladie mentale, ce qui signifie qu'ils n'ont pas les compétences nécessaires pour les aider.
Évidemment, toute cette souffrance inutile est terrible, mais n'oublions pas que ces individus passent directement de l'isolement cellulaire à la liberté, ce qui veut dire que le risque de récidive dans leur cas est extrêmement élevé. Cette pratique est tragique, non seulement en raison des répercussions qu'elle a sur les personnes atteintes d'une maladie mentale, mais aussi pour la population en général. À cause d'elle, les taux de récidive montent en flèche et nos collectivités sont moins sécuritaires, plus dangereuses.
En quittant l'établissement Her Majesty's Penitentiary, un des responsables des services correctionnels m'a confié qu'après avoir visité les lieux, l'ancien ministre conservateur de la Sécurité publique, en réponse à une question des médias sur les conditions des détenus, a répondu: « C'est un bon élément dissuasif. Personne ne voudra être emprisonné ici ».
Si l'on croit qu'une personne atteinte d'une maladie mentale a la capacité de s'arrêter et de réfléchir aux conditions épouvantables qui existent dans une prison avant de commettre son crime, c'est qu'on ne comprend absolument rien à la nature du problème, ce qui fait qu'une telle personne se retrouvera dans cet environnement et deviendra une récidiviste chronique.
Dans d'autres endroits, comme en Californie, le taux de récidive est au-delà de 70 p. 100. Cela devrait nous faire réfléchir. En Californie, sur dix contrevenants condamnés à des peines d'emprisonnement, sept récidiveront. Au Canada, le taux de récidive est de 36 p. 100. Pourquoi le taux de récidive est-il aussi élevé en Californie? Parce que les détenus qui ont des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie, j'y viendrai plus loin dans mon discours, n'ont pas accès à des programmes et à des services et qu'ils sont incarcérés dans des établissements surpeuplés, ce qui ne peut qu'exacerber les problèmes existants. Ces délinquants purgent des peines pour des infractions mineures, mais lorsqu'ils sont libérés, ils sont devenus des criminels endurcis prêts à récidiver.
On oublie souvent que les détenus sont un jour libérés, même si on augmente la durée des peines. En effet, plus de 90 p. 100 des détenus réintégreront la société. La question est de savoir dans quel état nous voulons qu'ils soient lorsqu'ils sont libérés.
Dans un rapport qu'ils ont publié récemment, MM. Stewart et Jackson disent que le gouvernement navigue sans boussole et qu'il a pris une route qui mène à la catastrophe, comme on l'a déjà vu, en ce qui concerne le système correctionnel. Nous suivons la voie qu'on suivie les Américains au début des années 1980, lorsque les républicains croyaient que la seule façon d'éradiquer la criminalité était d'incarcérer de plus en plus de criminels. Ce qui s'est produit aux États-Unis se produira au Canada: l'augmentation continue de la population carcérale se traduira par une augmentation du nombre de criminels, coûtera des milliards de dollars de plus et en fin de compte rendra nos collectivités beaucoup moins sûres qu'elles ne le sont actuellement.
Au Canada, de 12 à 20 p. 100 de la population masculine en milieu carcéral a de graves problèmes de santé mentale. Les chiffres sont encore plus élevés dans le cas des femmes. Au moins un quart des femmes incarcérées ont de graves problèmes de santé mentale.
Cela m'amène à parler de la toxicomanie. On ne pense pas souvent aux causes de la criminalité, mais plus souvent qu'autrement la toxicomanie constitue le premier pas dans la voie sinistre de la criminalité et des problèmes qui en découlent. Selon Don Head, le commissaire du Service correctionnel, au moins 80 p. 100 des criminels incarcérés actuellement au Canada ont des problèmes de toxicomanie. La toxicomanie est à la source de l'incarcération de la majorité des détenus. Pourtant, on ne fournit pas à ces détenus les services dont ils ont besoin pour briser le cycle mortel de la toxicomanie, de la criminalité et de la violence.
Plus souvent qu'autrement, les toxicomanes doivent assouvir leur dépendance et, de ce fait, ils commettent d'abord de petits larcins qui nuisent considérablement aux collectivités mais qui ne sont que le début du parcours plus sombre dans lequel ils s'engagent. Ils font des introductions par effraction pour payer la drogue qu'ils consomment. À Vancouver particulièrement, où le taux de toxicomanie est nettement plus élevé qu'ailleurs au Canada, les infractions contre les biens ne cessent d'augmenter.
On ne se demande pas ce qui arrive à l'individu qui s'introduit par effraction chez les gens. Il s'agit peut-être d'un jeune de 18 ou 19 ans qui s'introduit dans une maison pour y voler des choses qu'il revendra pour payer sa prochaine dose. Plus souvent qu'autrement, ce contrevenant est placé en détention préventive. La peine est purgée dans un établissement surpeuplé où les conditions sont déplorables et où on n'offre absolument aucun programme ou service.
J'ai souscrit aux mesures adoptées par la Chambre pour mettre fin à la pratique qui consiste à créditer deux voire trois jours pour chaque journée passée en détention préventive. Toutefois, il faut pas s'y tromper, si on abolit cette pratique, il faut également améliorer les conditions dans les établissements de détention provisoire, un point c'est tout. Lorsqu'un individu aux prises avec un problème de toxicomanie passe du temps dans un établissement carcéral surpeuplé avec d'autres toxicomanes et des criminels, il en ressort pire qu'au moment de son entrée. Nos prisons sont en train de devenir des usines de production de criminels.
L'autre jour, M. Jones, le directeur général de la Société John Howard du Canada, a cité les propos d'un expert qui a déclaré que nos prisons sont comme des écoles de gladiateurs où les jeunes -- généralement des jeunes hommes -- deviennent des criminels endurcis et apprennent comment commettre des infractions graves. En fait, M. Jones a déclaré que la direction que prend le gouvernement et son programme de lutte contre la criminalité, notamment en ce qui a trait aux prisons, est contraire aux données recueillies, à la logique, à l'efficacité, à l'histoire, à la justice et aux principes humanitaires.
Voilà des paroles qui ont une très grande portée lorsqu'on sait que leur auteur s'occupe de détenus jour après jour. M. Jones est d'avis que le programme du gouvernement défie toute logique et va à l'encontre des données recueillies et de l'expérience accumulée. Il fait valoir que de telles mesures ont déjà été appliquées auparavant et ont échoué lamentablement.
Que faut-il faire? Quelle est la bonne approche pour lutter contre ces problèmes? Premièrement, nous devons investir à l'échelle locale. Personne ne sait mieux comment lutter contre la criminalité dans un milieu que les gens du milieu eux-mêmes. À Summerside, sur l'Île-du-Prince-Édouard, j'ai pu me rendre compte moi-même du travail fait par le comité local de prévention du crime. Toute la population locale s'est solidarisée au sein de ce comité, de la police aux organismes sans but lucratif, comme le Club garçons et filles, l'Armée du Salut et la chambre de commerce. Ils se sont donné la main pour trouver des moyens de résoudre les problèmes de criminalité auxquels ils doivent faire face dans leur milieu. Ils ont préparé un plan.
Malheureusement, on leur a coupé les vivres. Imaginez un peu. Alors que le gouvernement conservateur dit vouloir faire de la lutte contre la criminalité sa priorité, le budget de prévention de la criminalité au pays a été réduit de plus de la moitié depuis que ce gouvernement est au pouvoir. Des groupes comme le Club garçons et filles me disent qu'ils ont moins d'argent pour leurs programmes, et non davantage. Ils me disent qu'ils ne reçoivent pas d'argent pour leurs programmes locaux et, plus troublant encore, que le financement restant est accompagné de directives nationales mal adaptées à leur milieu local.
J'ai entendu le même son de cloche de la part du conseil de prévention du crime de Kitchener lorsque je m'y suis rendu. J'ai eu l'occasion de parler avec ces gens de leur plan judicieux pour combattre la criminalité dans leur ville, plan qui a été élaboré avec une dose incroyable de réflexion. Ils sont frustrés par-dessus tout de voir qu'on réduit le financement qui leur est accordé pour la prévention, qui est pourtant le moyen le plus économique de lutter contre le crime. Lorsque les gens de Kitchener et d'ailleurs au pays reçoivent encore de l'argent pour prévenir la criminalité, ils reçoivent en même temps des édits en provenance d'Ottawa qui ne sont d'aucune utilité dans leur milieu. Ils se font dire qu'ils doivent entrer dans le moule qu'on a conçu pour eux. Ça n'a pas de sens. Les populations locales doivent pouvoir élaborer leurs propres solutions.
Ceux qui se demandent à quel point la réduction du financement des efforts de prévention du crime à l'échelle locale est importante devraient savoir que, pendant la dernière année où les libéraux étaient au pouvoir, le Conseil national de prévention du crime appuyait plus de 509 projets dans 261 collectivités, à hauteur de près de 60 millions de dollars. Aujourd'hui, ce financement a été réduit de plus de 50 p. 100. Les conservateurs ont sabré le financement chaque année depuis qu'ils sont au pouvoir, à un point tel qu'il y a actuellement 285 projets de moins et que le financement atteint à peine 19 millions de dollars. On peut bien parler d'une stratégie pour le système carcéral, mais il ne faut pas oublier que les conservateurs suivent le modèle républicain, qui est un échec total, en matière de prisons, et qu'ils réduisent le financement des programmes qui empêchent des gens de se retrouver en prison. C'est une politique totalement contraire au bon sens.
Il vaut la peine d'examiner les statistiques aux États-Unis à la fin des années 1970 et, surtout, au tout début des années 1980. En 1981, les taux d'incarcération aux États-Unis et au Canada étaient semblables. Au Canada, il y avait 91 personnes incarcérées par 100 000 habitants. Aux États-Unis, il y en avait 243 par 100 000 habitants. Le chiffre était plus élevé, mais tout de même semblable. En 2001, le taux d'incarcération au Canada avait légèrement augmenté — 101 personnes incarcérées par 100 000 habitants. Aux États-Unis, il était de près de 700 par 100 000 habitants, soit 700 p. 100 du taux canadien. Pendant la même période, c'est-à-dire entre 1981 et 2001, le taux d'incarcération aux États-Unis, par rapport à celui du Canada, a grimpé de 500 p. 100.
Comment la situation a-t-elle évolué aux États-Unis? Qu'est-il arrivé aux taux de criminalité avec violence et aux taux de criminalité en général pendant cette période? Fait étonnant — ou peut-être pas si étonnant que cela si on comprend vraiment la nature de la criminalité —, les réductions de la criminalité au Canada et aux États-Unis ont été presque identiques. Toutes ces incarcérations supplémentaires, ce taux sept fois plus élevé que celui du Canada, n'ont pas rendu les collectivités américaines plus sûres que les collectivités canadiennes.
On a d’ailleurs fait valoir qu’en raison des conditions et du stress qui règnent dans les prisons, une population carcérale importante et permanente augmente le taux de récidive et de criminalité. À mon avis, il n’est vraiment pas logique de consacrer des milliards et des milliards de dollars à quelque chose qui aggrave la situation au lieu de l’améliorer, comme nous en avons la preuve.
Ce que nous devrions faire dans nos prisons semble assez évident. Quand j’ai rendu visite aux chefs de police des différentes régions du pays, à Calgary, Edmonton, Vancouver, Toronto et au Cap-Breton, ils n’ont cessé de répéter que nous devons trouver un moyen de rompre le cycle de la toxicomanie. Une des recommandations qui ont été faites à Calgary est que nous ayons des prisons où les gens pourront purger leurs peines, mais où ils pourront aussi recevoir un traitement.
Les parents de jeunes délinquants m’ont dit qu’ils seraient prêts à dénoncer leurs propres enfants, à les conduire eux-mêmes jusqu’à la porte de la prison et demander qu’ils soient incarcérés s’ils savaient que leurs enfants y obtiendraient l’aide dont ils ont besoin. Mais ils savent que lorsque les jeunes sont envoyés dans ces établissements, leur état s’aggrave encore.
Nous savons aussi que nous devons former ceux qui travaillent en première ligne, par exemple les gardiens de prison, pour qu’ils sachent reconnaître les problèmes de santé mentale et y faire face. Nous devons veiller à ce que ceux qui sont conduits dans nos prisons soient diagnostiqués à leur arrivée lorsqu’ils souffrent de troubles mentaux et à ce qu’ils reçoivent les soins voulus afin qu’une fois libérés, ils puissent vraiment aller mieux.
Je souligne que nous avons toujours appuyé des peines sévères pour des crimes graves. Bien entendu, ceux qui commettent des crimes graves doivent se voir infliger des peines sévères. Le problème est que les conservateurs attendent qu’il y ait des victimes. Ils attendent qu’un crime grave soit commis avant de faire quoi que ce soit. C’est seulement une fois que le mal est fait qu’ils parlent des solutions.
Nous disons qu’une fois que le mal est fait, que la situation est devenue terrible, effectivement, il faut imposer des peines sévères et nous nous sommes prononcés en faveur de cela. Toutefois, avant que cela n’arrive, il y a de bien meilleures façons de remédier à la criminalité, que ce soit dans les prisons, grâce à la prévention ou en prenant d’autres mesures.
La dernière chose que je dirais concerne directement notre police, les hommes et les femmes sur qui nous comptons pour assurer la sécurité dans nos collectivités. Nous savons que lorsque la police est proactive et communautaire, elle joue un rôle énorme dans la réduction de la criminalité. Il est particulièrement inquiétant de voir que le gouvernement a trahi la police. C’est la police elle-même qui le dit. En fait, l’Association canadienne des policiers considère que le gouvernement l’a trahie en rompant sa promesse d’engager 2 500 nouveaux policiers.
Dans son discours à Vancouver, le a promis d’accorder à la GRC la parité salariale avec les autres forces de police. Le a même signé un contrat avec la GRC, un contrat qu’il a ensuite déchiré. Le gouvernement n’a même pas pu accorder à la GRC la parité salariale avec les autres forces de police, ce qui aura d’énormes répercussions négatives sur le recrutement.
L’autre chose extrêmement insultante que le gouvernement a faite à la GRC est qu’il a contesté son droit à la négociation collective. Les membres de la GRC sont actuellement devant les tribunaux à ce sujet alors que toutes les autres forces policières du pays bénéficient de ce droit.
Il y a quatre ans, le gouvernement libéral a présenté un projet de loi pour moderniser les techniques policières, pour donner aux policiers les outils dont ils ont besoin pour poursuivre les criminels qui se livrent à la cyberfraude et à la pornographie juvénile. Nous avons proposé cette mesure en 2005. Le gouvernement actuel s’est abstenu d’y donner suite pendant quatre longues années et quand il l’a finalement présentée, c’était à la dernière minute, à la fin d’une session, si bien que nous n’avons même pas pu en débattre avant l’automne. On constate donc, quatre ans plus tard, que le gouvernement a laissé tomber la police.
Pour conclure, la façon dont le gouvernement aborde le système correctionnel et la criminalité n’est pas la bonne. Sa politique a des effets négatifs sur la criminalité et la police et il est temps que nous adoptions une approche intelligente et équilibrée qui s’attaquera aux causes profondes de la criminalité pour assurer la sécurité de nos collectivités.
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Monsieur le Président, c'est un projet de loi très important qui est soumis à l'attention de la Chambre des communes. On y retrouve, je le dirai d'emblée, des propositions avec lesquelles je suis entièrement d'accord et d'autres cependant au sujet desquelles nous avons certains doutes. Une chose est certaine, il faut l'étudier en comité. Si ce projet n'avait pas été présenté, je pense que cela aurait constitué une sérieuse lacune de la part du gouvernement.
Globalement, le projet de loi fait plus de place aux victimes, cherche à responsabiliser davantage les détenus et diminue le caractère automatique du régime des libérations conditionnelles. Ces trois points se retrouvent dans le discours du Bloc québécois depuis longtemps. Nous avons même élaboré et rendu public un plan d'action en ce sens il y a plus de deux ans.
En effet, le Bloc québécois estime que le fait d'impliquer les victimes dans le processus des libérations conditionnelles est de nature à favoriser leur processus de « guérison » tout autant que de renforcer leur confiance dans le système judiciaire dans son ensemble. S'il peut s'établir des relations entre les délinquants repentants et les victimes de crime, je pense qu'on a là un progrès très net vers la réhabilitation.
De même, favoriser la responsabilité ou faire naître cette qualité chez un délinquant nous semble une importante façon de favoriser sa réinsertion dans la société civile. Sans ce sentiment de responsabilité, comment pourra-t-il conserver un travail ou s'acquitter de ses obligations envers ses proches ou encore honorer ses engagements financiers, notamment envers le propriétaire de son logement ou les compagnies de services publics?
Enfin, autant le Bloc est défavorable aux automatismes menant en prison, aux peines minimales, au retrait des sentences alternatives, autant il est également défavorable au principe des libérations automatiques. Nous réclamons d'ailleurs, depuis longtemps, que ces libérations se fassent au mérite.
Cependant, je sais que des critiques ont été émises, notamment dans un rapport de l'Université de la Colombie-Britannique. Ainsi, nous nous assurerons que le projet de loi réglera bien les problèmes qu'il doit régler et qu'il n'en créera pas de nouveaux.
Voilà donc sommairement pourquoi le Bloc québécois est favorable au principe du projet de loi . Cependant, nous avons de sérieuses objections à présenter à certaines des mesures qu'il contient.
Le 16 juin 2009, le a déposé aux Communes le projet de loi. Le titre abrégé est Loi sur le renforcement du système correctionnel fédéral, dont nous aurons à traiter prochainement.
Le projet de loi modifie la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition pour atteindre un certain nombre d'objectifs: d'abord, préciser que la protection de la société est le critère prépondérant appliqué par le Service correctionnel du Canada dans le cadre du processus correctionnel et, dans tous les cas, par la Commission nationale des libérations conditionnelles et les commissions provinciales.
Je signalerai que toutes les réformes apportées dans le passé avaient pour objectif prépondérant la protection de la société. On s'entend tous là-dessus. Il faut toufois s'entendre sur la méthode à utiliser. Nous croyons que, effectivement, la réhabilitation des délinquants, lorsqu'elle est possible doit être poursuivie et qu'il s'agit de la meilleure façon de protéger la société.
Le projet de loi prévoit également d'octroyer aux victimes le droit d'intervenir lors des audiences sur l'éventuelle libération conditionnelle des délinquants, un principe avec lequel nous sommes également d'accord; d'autoriser le Service correctionnel et la Commission nationale des libérations conditionnelles à communiquer aux victimes le nom et l'emplacement de l'établissement où les délinquants sont transférés, les motifs du transfèrement, les programmes auxquels les délinquants participent ou ont participé, les infractions disciplinaires graves qu'ils commettent et les motifs de leurs absences temporaires ou de leur renonciation à une audience.
Personnellement, je crois que, encore là, c'est une bonne mesure à plusieurs points de vue. S'il peut s'établir, je dirais, une certaine empathie de la part du délinquant envers les victimes, si le délinquant sait que les victimes qu'il a faites seront tenues au courant de ses progrès ou de ses échecs pendant son temps d'incarcération, j'ai l'impression que cela peut avoir une influence sur lui.
Très souvent, les délinquants ont commis des crimes parce qu'ils ne voyaient pas les victimes qu'ils ont faites. Évidemment, il y a des cas exceptionnels qui manquent totalement d'empathie à l'égard d'autrui. On les appelle les psychopathes. Cependant, ce que démontre notre expérience, c'est que la majorité de ceux qui sont en prison sont plutôt des mésadaptés sociaux. Le fait qu'ils prennent conscience qu'ils ont fait des victimes, qu'ils doivent faire quelque chose pour essayer de réparer leur geste quand c'est possible, et que ces victimes les regardent occasionnellement ou sont informées de leurs progrès, cela peut jouer, pour ceux qui le voudront bien, dans le sens de la réhabilitation.
Le texte du projet de loi se poursuit ainsi:
b) prévoir que le plan correctionnel comprend le niveau d’intervention du Service à l’égard des besoins et des objectifs du délinquant en ce qui a trait à son comportement, à sa participation aux programmes et à l’exécution de ses obligations découlant d’ordonnances judiciaires;
c) inclure parmi les infractions disciplinaires l’intimidation, la présentation de fausses réclamations et le fait de lancer une substance corporelle;
À une certaine époque, ce n'était que cracher, mais des détenus se sachant atteint du VIH-sida ont même voulu lancer du sang sur les gardiens. Ce sont là, évidemment, des actes inadmissibles pour lesquels on doit agir promptement, ce qui ne veut pas dire d'ailleurs qu'on ne peut pas reprendre par la suite un processus de réhabilitation.
Voici d'autres objectifs:
f) uniformiser la façon de décider des cas d’inadmissibilité à la procédure d’examen expéditif [on en reparlera];
g) prévoir la suspension automatique de la libération conditionnelle ou de la liberté d’office des délinquants qui sont condamnés à une peine d’emprisonnement supplémentaire et l’examen de leur cas par la Commission nationale des libérations conditionnelles dans le délai réglementaire;
h) autoriser tout agent de la paix à arrêter sans mandat le délinquant pour toute violation d’une condition de sa mise en liberté.
Nous reparlerons de cela lorsque nous étudierons le projet de loi en détail. Jusqu'à présent, c'était la prérogative des agents de probation qui suivaient les délinquants à l'extérieur que d'émettre des mandats, ce qui leur permettait, à certains moments donnés, dans le cas d'infractions mineures, de donner un sévère avertissement plutôt que d'interrompre immédiatement la libération conditionnelle.
Pensons que ce genre de choses peut être exécuté dans des milieux, dans des terreaux où il y a beaucoup de délinquance. Souvent, certains délinquants reprochent à la police de trop les surveiller. On a beaucoup entendu cela à Saint-Michel durant la dernière année. On en est plus conscient. Cela rappelle aussi ce qu'on entendait aux États-Unis dans des secteurs où la criminalité est beaucoup plus élevée, où il y a véritablement des problèmes de gangs de rues et où des actions communautaires sont tout de même faites pour les régler. L'intervention intempestive des policiers pour des infractions mineures n'est peut-être pas la plus appropriée pour garder un climat favorisant la paix publique et des conditions moins propices au développement de la criminalité.
C'est la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition qui fournit le cadre législatif du système correctionnel. Elle a déjà été promulguée en 1992, remplaçant une loi antérieure. En décembre 2007, le Comité d'examen indépendant du Service correctionnel a publié son rapport final contenant des recommandations à l'intention du gouvernement, même si l'objectivité de ce comité a été mise en doute par une étude de l'Université de Colombie-Britannique. On lui avait demandé de mener un examen des priorités opérationnelles des stratégies et des plans d'activités de du SCC. Il en était arrivé à 109 recommandations, regroupées sous cinq grands thèmes qui, essentiellement, reprenaient les objectifs dont j'ai parlé tout à l'heure.
Le gouvernement a officiellement donné suite aux recommandations dans le budget de 2008, en investissant 478,8 millions de dollars sur cinq ans pour entreprendre la réalisation de cette nouvelle vision du système correctionnel fédéral et de quelques-unes des recommandations clés formulées dans le rapport.
Je crois qu'il s'agissait là d'argent bien dépensé. C'est bien mieux que d'assurer l'augmentation considérable du recours à l'incarcération, qui est extrêmement coûteuse. Cette somme de 478 millions de dollars vaut au moins cinq fois ce montant en répression, soit 2,5 milliards de dollars.
Le gouvernement s'est engagé à adopter une nouvelle approche concernant le régime correctionnel, de manière à faire de la protection de la société le critère prépondérant appliqué aux services correctionnels et de la mise en liberté sous condition.
Tout le monde est en faveur du bien, mais il faut comprendre que la réhabilitation des délinquants est aussi l'une des meilleures formes de protection de la société. Si l'incarcération mène au développement des aptitudes d'un délinquant à commettre d'autres crimes sans se faire prendre, si elle développe la sensation que la communauté est injuste, on n'atteindra pas du tout ces objectifs. Les députés des deux côtés de la Chambre doivent donner, non pas le bénéfice du doute, mais l'assurance que nous avons tous le même objectif, même si nous avons des opinions différentes, qui est de diminuer la criminalité et de protéger la société.
Cette loi le fera dans quatre principaux domaines clés: améliorer le mode communication d'informations aux victimes — nous sommes entièrement d'accord avec cela —; accroître la responsabilité et les obligations des délinquants — nous sommes encore d'accord parce que la réhabilitation passe par la responsabilisation —; renforcer la gestion des délinquants et leur réintégration — en effet, il faut penser à cela, mais il faudra voir si cet aspect est bien servi par le projet de loi qui est devant nous —; moderniser le régime disciplinaire — à mon avis, cela doit effectivement être mis à jour.
En ce qui concerne l'amélioration du mode de communication d'informations aux victimes, le projet de loi propose de reconnaître clairement les intérêts des victimes d'actes criminels et le rôle qu'elles jouent dans le processus correctionnel et de mise en liberté sous condition. Les victimes et les défenseurs des droits des victimes ont exprimé leur insatisfaction à l'égard des dispositions actuelles et ont demandé que des améliorations soient apportées.
Par conséquent, le droit de la victime d'assister aux audiences de la Commission nationale des libérations conditionnelles (CNLC) sera enchâssé dans la loi. Je suis entièrement d'accord avec cela, même pour des raisons auxquelles les conservateurs n'avaient pas pensé. Il est bon que la personne qui demande une libération conditionnelle sache que les victimes seront là. Il est bon qu'elle soit consciente qu'elle a causé un tort à quelqu'un. À moins qu'il ne s'agisse de psychopathes qui n'ont absolument aucune empathie à l'égard des autres, cette reconnaissance joue un rôle dans les efforts de réhabilitation.
La loi sera donc modifiée de manière à élargir la gamme d'informations que le SCC et la CNLC pourront divulguer aux victimes. Ils seront notamment habilités à: fournir aux victimes les motifs de transfèrement du délinquant et les aviser à l'avance, dans la mesure du possible, des transfèrements vers des établissements à sécurité minimale; informer les victimes de la participation des délinquants au programme et de toute condamnation pour des infractions disciplinaires graves; faire part des raisons motivant une permission de sortir; transmettre aux tuteurs et aux soignants des personnes à charge des victimes décédées, malades ou incapables, l'information qui est transmise aux victimes.
Lorsque les délinquants retirent leur participation dans les 14 jours précédant l'audience, la commission peut procéder à l'examen de leur dossier et prendre des décisions à cet égard. Les victimes auront également la possibilité de demander les raisons de la renonciation du délinquant à vouloir se présenter à une audience.
Selon moi, il est bon que le délinquant soit averti que les victimes sont au courant de cela. S'il pense que cela peut avoir une influence lors de ses audiences devant la CNLC, cela lui permettra peut-être de faire un pas dans la bonne direction, de fournir la preuve qu'il change son comportement et qu'il a compris la gravité que représentait son crime pour les victimes.
Il ne faut pas penser seulement à la répression, mais aussi à la responsabilité des délinquants. Notre grand objectif dans le système correctionnel, sachant que ces gens-là sortiront, c'est de faire des efforts raisonnables pour les amener à changer leur comportement. C'est ce qui assure le mieux la sécurité du public, soit que lorsque les délinquants sortent, ils aient moins tendance à commettre d'autres crimes et qu'ils soient réhabilités.
L'autre mesure importante vise à accroître la responsabilisation des délinquants. C'est le début de la réhabilitation. La réadaptation des délinquants et leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois sont une responsabilité partagée entre le délinquant et les services correctionnels. La Loi sur les services correctionnels sera donc modifiée pour inclure les responsabilités des délinquants qui seront davantage incités à adopter une conduite qui démontre du respect pour les personnes et les biens.
Je parlerai peut-être un peu plus tard de l'article 38 que j'ai moi-même écrit lorsque j'ai refait le système correctionnel du Québec. C'est très difficile, si on n'est pas un légiste et si on ne peut pas passer tout notre temps à écrire des lois. Je m'en suis aperçu assez vite quand j'étais ministre, de même qu'ici. Cependant, je tenais effectivement à écrire cet article 38 de la Loi sur les services correctionnels québécois.
Je vais donc parler du modèle québécois de réduction des crimes par lequel une personne contrevenante peut mériter une réduction par le respect. Tout d'abord, je voulais que cet article 38 soit affiché dans la cellule de tous les détenus. Je me souviens encore dans quelle circonstance je l'avais écrit. J'étais avec mon chauffeur qui était un ancien gardien de prison et je voulais que cet article soit écrit de façon à ce que les détenus comprennent. Cela disait à peu près que le détenu pourrait obtenir une libération avant le terme de sa sentence. Il pourrait l'obtenir par le respect qu'il démontrerait à l'égard d'autres personnes, soit le personnel ou les autres détenus. Et là, on disait qu'il le pourrait en assistant au programme de réhabilitation qui lui serait proposé et en respectant les règlements de la prison.
L'idée du respect est fondamentale et je suis bien heureux de constater que le gouvernement ait repris cette idée dans ce cas-ci.
Donc, on pourrait en parler encore beaucoup plus longtemps de ce projet de loi. En général, nous sommes évidemment d'accord avec les objectifs poursuivis par le projet de loi. Nous croyons que dans bien des domaines, nous sommes d'accord avec les méthodes choisies. Cependant, il y en a certaines dont on pourra parler éventuellement lorsque nous étudierons le projet de loi en comité. J'espère que le gouvernement comprendra que les propositions que nous lui ferons visent à améliorer la loi et à atteindre de la meilleure façon ce que nous désirons tous, soit la protection de la société par la réhabilitation des délinquants.
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Monsieur le Président, c’est avec un grand plaisir que je parlerai aujourd’hui du projet de loi .
Les néo-démocrates souhaitent depuis longtemps qu’on lutte intelligemment contre la criminalité. Jour après jour, les conservateurs parlent de sévir contre les criminels, mais nous constatons qu’en fin de compte, leur approche ne donne pas de résultats, même pas ceux qu’ils espèrent.
Quand nous parlons de lutter intelligemment contre la criminalité, il s’agit par exemple de la façon dont nous voulons assurer la sécurité dans nos collectivités. Il suffit de voir ce qui se passe dans ma province, le Manitoba, pour constater que nous avions un problème de plus en plus grave de vols d’automobiles et que nous nous sommes attaqués intelligemment à la criminalité plutôt que sévèrement en mettant en place un système d’immobilisation qui a largement réduit le taux de vol d’automobiles au cours des deux dernières années. Nous avons constitué, au sein du service de police, un groupe ayant pour mission de cibler les voleurs d’automobiles, de les surveiller, de les pourchasser et de les arrêter à chaque occasion. En travaillant ensemble, nous avons obtenu d’excellents résultats à tel point qu’un certain jour, le printemps dernier, nous avons réussi à n’enregistrer aucun vol d’automobile au Manitoba. C’est ce que j’appelle lutter intelligemment contre la criminalité.
Nous devons évacuer l'idéologie. Si les conservateurs luttaient intelligemment contre la criminalité, ils s’inspireraient des résultats obtenus au Manitoba pour les vols d’automobiles. Ils s’inspireraient des autres résultats obtenus en Suède et en Europe de l’Ouest.
Les conservateurs devraient examiner ce qui se passe dans le monde pour trouver les pays où certains programmes fonctionnent bien et essayer de les adopter au lieu de s’inspirer de l’idéologie des États-Unis et d’adopter leur système des années 1980, de l’époque de Ronald Reagan. Ronald Reagan a construit des prisons privées enrichissant ainsi beaucoup de gens et il y a entreposé les détenus.
Ce serait acceptable si cela donnait des preuves d’efficacité. Toutefois, en fin de compte, le taux d’incarcération a explosé aux États-Unis où je crois que plus de 700 personnes sur 100 000 sont en prison. Au Canada, je pense que c’est 170. Je n’ai pas vu les chiffres de ces derniers jours, mais je ne pense pas me tromper de beaucoup. En Suède, la proportion n’est que de 80 pour 100 000 habitants. Ce sont là des différences très marquées entre les trois pays. Si les conservateurs croient dans les pratiques exemplaires comme ils devraient le faire, il faudrait qu’ils s’inspirent de ces pratiques exemplaires.
Dans ce contexte, comment les conservateurs peuvent-ils conclure que la solution consiste à suivre le système américain alors que les résultats vont à l’opposé de ce qu’ils recherchent? En fait, en Californie, le gouverneur a libéré des détenus parce que l’État ne pouvait pas les loger. Les prisons débordent. Le taux de criminalité est en hausse.
Le pays n’est pas plus sûr pour autant. En fait, d’après les chiffres que j’ai obtenus l’autre jour, il faut débourser entre 50 000 $ et 70 000 $ par année pour loger chaque détenu. Qu’obtenons-nous pour cet argent? Nous obtenons un criminel qui s’endurcit en prison parce que c’est une école du crime alors que l'emprisonnement avec sursis ne coûte que 1 000 $ contre 50 000 $ à 70 000 $. Le taux de récidive est de près de 50 p. 100. Je crois que ce taux est de 11 p. 100 pour ceux qui sont condamnés avec sursis. Le taux de récidive des personnes qui sont allées en prison était de 30 p. 100.
Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre. Si la surveillance coûte 1 200 $ à 1 300 $ par délinquant avec une probabilité de récidive deux fois moindre, tandis que la détention revient entre 50 000 $ et 70 000 $ avec un taux de récidive deux fois plus élevée que dans le cas de la surveillance, le choix n’est vraiment pas difficile à faire.
De toute évidence, les conservateurs devraient réexaminer ce dossier plutôt que d’adopter un système conçu pour leur procurer plus de voix au cours d’élections futures. Ils font des sondages sur toutes ces questions relatives au crime et savent donc ce que le public veut entendre. Quand les sondages leur donnent 10 points de plus dans une région donnée, ils mettent aussitôt les renseignements tirés du sondage dans un projet de loi qu’ils déposent à la Chambre. Voilà pourquoi nous sommes saisis d’autant de projets de loi modifiant le Code criminel.
Nous voulons adopter une approche intelligente et économique de la criminalité. S’il faut incarcérer des gens, assurons-nous de mettre en place dans les prisons des programmes pour les réadapter. Qu’a fait le gouvernement? Il a réduit les fonds qui devaient servir à financer ces programmes.
J’ai bien aimé écouter le député d’, aussi bien tout à l’heure que l’autre jour. Il n’avait pas tout à fait l’heure juste en ce qui concerne le projet de loi, mais il a présenté un excellent exposé sur la situation actuelle, sur ce que nous devrions chercher à faire et sur les moyens à adopter à cette fin. Nous devrions rejeter les approches idéologiques de type George Bush ou Ronald Reagan qu’on envisageait en Ontario. Les partisans de ces approches suivraient simplement le programme dans une optique idéologique. Ils feraient construire des prisons privées où ils entreposeraient les délinquants sans égard à la réadaptation, ce qui reviendrait à préparer des criminels endurcis en vue de leur réinsertion dans la société, où ils s’empresseraient de récidiver.
Le NPD est favorable à l’idée de donner aux victimes le droit de faire des déclarations aux audiences de libération conditionnelle. M’étant occupé d’assurance pendant les 30 dernières années, j’ai souvent eu affaire à des victimes de cambriolages qui, après l’arrestation des cambrioleurs, souhaitaient connaître le dénouement de l’affaire.
Il y a 20 ans, leurs efforts ne les menaient pas très loin. La police les rabrouait en leur disant de s’occuper de leurs affaires, de récupérer l’argent auprès de leur assureur et de ne pas s’en faire. La police ne se rendait pas compte que ces gens avaient été profondément affectés par des criminels qui étaient entrés chez eux et avaient violé leur intimité.
Avec le temps, nous avons mis au point plus de programmes et reconnu davantage de droits aux victimes. Nous avons maintenant des services de consultation pour les victimes. Comme les gouvernements se succédaient -- du gouvernement Howard Pawley des années 1980 au Manitoba au gouvernement conservateur de Gary Filmon, puis au gouvernement néo-démocrate de Gary Doer --, nous avons assisté à une évolution des droits des victimes. Nous nous en félicitons. Nous avons travaillé très fort en faveur de ces droits, que nous continuons à appuyer. Ce qu’il nous reste à faire, c’est nous assurer que les victimes ne sont pas affectées outre mesure par ce qui leur est arrivé.
Le NPD défend les droits des laissés-pour-compte, des personnes vulnérables et surtout des victimes dans notre société. En fait, le taux de criminalité est particulièrement élevé dans un bon nombre de circonscriptions représentées par le NPD. Les néo-démocrates, peut-être plus que les autres députés à la Chambre, traitent souvent directement avec des personnes touchées par la criminalité dans leurs collectivités. Nous devons nous occuper d'électeurs qui nous téléphonent ou qui viennent nous voir, de gens que nous connaissons, qui ont peur et qui sont des victimes de la criminalité dans nos collectivités.
Il faut que les délinquants entendent eux-mêmes ce que les victimes ont à dire. Il faut qu'ils soient informés des conséquences de leurs crimes. Tout cela fait partie des initiatives de justice réparatrice, que nous appuyons vivement. Il faut que les victimes puissent se faire entendre, sinon elles deviennent des victimes une deuxième fois.
L'autre jour, un de nos députés de Halifax a décrit un cas dont il s'était occupé dans sa circonscription. Un de ses électeurs avait été victime d'un crime, et cette expérience s'était révélée traumatisante. Il aura fallu beaucoup de temps, mais nous sommes heureux de voir que la société souhaite maintenant que les victimes obtiennent justice.
Nous sommes aussi en faveur du droit des victimes d'avoir accès à des renseignements sur les délinquants. Comme je l'ai mentionné, il y a 20 ans, lorsque les gens essayaient de savoir ce qui se passait relativement à une introduction par effraction dans leur domicile, ils étaient tenus dans l'ignorance. On leur disait de se mêler de leurs affaires, que le système judiciaire allait s'occuper du cas. Les victimes ne pouvaient savoir ce qu'il était advenu du voleur qui s'était introduit dans leur maison, et elles ne pouvaient s'empêcher de penser que celui-ci était peut-être en liberté, ce qui pouvait parfois être le cas à ce stade. Il y avait aussi le risque que l'individu cherche à récidiver. Bref, il ne faut pas garder les victimes dans l'ignorance. Ces personnes devraient pouvoir obtenir tous les renseignements possibles.
Les gens me disent maintenant que les corps policiers leur communiquent des renseignements et les tiennent au courant de ce qui se passe dans leurs causes. Ils savent que l'individu qui s'est introduit par effraction a été capturé, qu'il a subi son procès à une certaine date, et ils connaissent la peine qui lui a été imposée.
Que ce soit grâce à des peines d’emprisonnement ou au service communautaire, nous savons que les victimes veulent voir les contrevenants faire des progrès. Elles ne veulent pas voir les contrevenants aller en prison et en sortir en criminels aguerris. Les victimes veulent savoir que les contrevenants sont réadaptés. Voilà pourquoi elles seraient très déçues de savoir que le gouvernement ne finance pas suffisamment les programmes de réadaptation des détenus.
Nous savons également que si un contrevenant est réadapté, il s'agit d'une étape très importante de la guérison de la victime. Tant et aussi longtemps que la victime voit que des efforts honnêtes ont été déployés en vue de réadapter la personne, elle se sentira mieux et aura une attitude saine à l'égard du système.
En définitive, le point essentiel, c'est la confiance de la population à l'égard du système. Nous devons avoir un système qui fonctionne et qui lutte contre le crime de façon intelligente, mais aussi un système dans lequel la population a confiance.
Qu'est-ce qui va arriver si les conservateurs instaurent leur meilleur des mondes rempli de prisons privées où on enferme les gens sans leur fournir de services de réadaptation? Au bout du compte, ces criminels sortiront continuellement de prison pour commettre d'autres crimes, et les conservateurs devront construire plus de prisons. Au bout de 20 ans, nous serons dans la même situation que la Californie. Il y aura des gens en prison, le taux de criminalité aura monté en flèche, nous ne serons pas davantage en sécurité, notre situation ne se sera pas améliorée et nous ferons comme la Californie. Cet État est en faillite et relâche les détenus en masse, parce qu'il n'a plus les moyens d'assumer les coûts d'exploitation des prisons.
Le projet de loi découle de la Feuille de route pour une sécurité publique accrue, publiée en 2007 et issue du travail du Comité d'examen du SCC . Le président du comité était Robert Sampson qui, soit dit en passant, était ministre de la Privatisation sous le gouvernement de Mike Harris. Lorsqu'il était ministre des Services correctionnels , il a préconisé la privatisation du système carcéral de l'Ontario. C'est comme demander au renard de surveiller le poulailler.
Nous serions plus soulagés et heureux de ce côté-ci si nous pouvions ne plus jamais penser à Mike Harris. Je déteste dire que le processus est terni par le spectre de Mike Harris, mais ce serait malheureusement le cas.
Les auteurs de la feuille de route n'on pas procédé à un examen attentif fondé sur des faits du système correctionnel canadien. Ils ont sélectionné les statistiques qui leur convenaient pour donner une image déformée des tendances de la criminalité. Ils ont fait fi de l'histoire de notre système carcéral, n'ont pas tenu compte des leçons apprises, et ont rédigé la feuille de route de façon à dire au gouvernement ce qu'il voulait entendre. Cela n'est guère flatteur pour notre système, et ce n'est pas un problème unique au gouvernement conservateur. Ce genre de chose peut se produire sous tous les gouvernements, que ce soit un gouvernement libéral ou néo-démocrate. Les membres de la fonction publique nous disent souvent ce que nous voulons entendre. Les consultants privés que nous engageons adaptent simplement le message. Ils apprennent ce que nous voulons entendre et, pour un prix très élevé, ils nous le disent.
Je signale que les experts du Service correctionnel ont contesté la feuille de route. Nous ne pensons pas que c'est la solution appropriée.
Avant de passer à la période de questions et réponses, j'ai un dernier point à soulever. Les conservateurs pensent que ce projet de loi est le fruit d'une bonne politique, mais j'aimerais souligner quelques-uns des privilèges que les conservateurs enlèvent aux prisonniers avec cette mesure. Ils éliminent le traitement des maladies mentales, que nous considérons tous d'une importance cruciale pour les prisonniers, et ils suppriment les programmes d'alphabétisation et de travail. Comment peut-on considérer ces choses comme des améliorations à notre système?