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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 064 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 6 février 2013

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Nous commençons la réunion numéro 64.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    À la lumière des récentes annonces faites par le ministre concernant des changements à la haute direction des Forces canadiennes, je me demande si vous et le comité jugez qu'il est approprié d'offrir nos remerciements officiels à certaines personnes qui ont témoigné. Eh bien, en fait, à chacun d'entre eux: Devlin, Maddison et Donaldson. Ce dernier était ici lundi. Tous ont eu des carrières exemplaires. Tous ont aidé le comité à comprendre les militaires.
    Nous pourrions inclure une lettre pour féliciter ceux qui les remplacent et pour leur indiquer que nous avons hâte qu'ils comparaissent devant le comité afin de nous fournir des renseignements. Je me demande si cela serait convenable, si le comité accueillait favorablement l'idée d'envoyer des remerciements officiels accompagnés d'une deuxième lettre dans laquelle on féliciterait les nouveaux venus et leur souhaiterait la bienvenue au comité.
    Je propose qu'elle soit signée par vous, par M. Harris et moi — à titre de vice-présidents du comité — de façon à ce que ce soit un geste entièrement non partisan et que ce soit perçu comme tel.
    Je dirais que la motion est irrecevable. Elle est hors sujet. Il existe des façons de traiter de motions de ce genre, par l'intermédiaire de présentations écrites, dans les deux langues officielles, distribuées aux membres du comité.
    Toutefois, étant donné la bienveillance et la bonne volonté qu'exprime la motion, je serais ouvert, si le comité le souhaite, de donner mon accord...
    Monsieur Harris, sur ce rappel au Règlement.
    Monsieur le président, je suis un peu pris par surprise, même si on m'en a informé il y a quelques minutes, avant le début de la réunion.
    Je n'aurais certainement aucune objection à remercier ceux dont on a annoncé la retraite, à les remercier des services qu'ils ont rendus, même si je ne sais pas s'ils partent dès maintenant; donc, cela pourrait être un peu prématuré.
    Pour ce qui est des personnes nouvellement nommées, l'occasion se présentera lorsque les nominations auront été faites et que nous en serons informés, s'il s'agit de personnes nommées par le gouverneur en conseil. À ce moment-là, nous aurons l'occasion de les inviter au comité et de leur parler de leurs nouveaux rôles.
    Je ne vois aucun problème à remercier les personnes qui partent à la retraite, le Vice-chef d'état-major de la Défense et le commandant de l'armée, mais...
    Monsieur Alexander.
    Monsieur le président, je suis heureux d'appuyer la proposition — si vous êtes d'accord — de vous laisser tous les trois décider des personnes qui recevront de telles lettres et ainsi éviter de gaspiller davantage le temps du comité.
(1535)
    Nous avons consentement unanime pour envoyer des lettres de remerciements et des lettres de félicitations pour la retraite des généraux et des amiraux, puis pour poursuivre à partir de là. C'est ce que nous ferons. Merci.
    Sur ce, passons aux travaux dont nous sommes saisis, qui est l'étude du projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence.
    Aujourd'hui, nous accueillons M. Ian Holloway, qui est le doyen de la faculté de droit à l'Université de Calgary. Nous accueillons aussi M. Bruno Hamel, le président du Comité des griefs des Forces canadiennes. Nous entendons également, à titre personnel, M. Jean-Marie Dugas, lieutenant-colonel à la retraite et ancien directeur de la Direction du service d'avocats de la défense.
    Merci à tous de comparaître. J'espère que vous pourrez présenter vos déclarations préliminaires en moins de 10 minutes.
    Monsieur Holloway, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux membres du comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions au sujet de n'importe laquelle des dispositions du projet de loi à l'étude.
    J'ai pensé que la chose la plus utile que je pourrais probablement faire, c'est de vous parler un peu de moi-même, de mon point de vue sur la question et sur le contexte d'une mesure législative comme celle-ci.
    Comme le président l'a indiqué, je suis actuellement le doyen de la faculté de droit à l'Université de Calgary; auparavant, j'ai été le doyen de la faculté de droit à l'Université Western Ontario, pendant 11 ans. Je suis membre du barreau depuis maintenant 26 ans, et j'ai le titre de conseil de la Reine en Nouvelle-Écosse.
    Fait inhabituel pour quelqu'un qui comparaît devant vous, je crois, j'ai aussi passé 21 ans au sein des Forces canadiennes en tant que matelot, comme on le disait dans la marine, ou dans les termes d'aujourd'hui, en tant que militaire du rang. Pendant bien plus de la moitié de ma vie adulte, j'ai eu l'expérience d'être assujetti au Code de discipline militaire et au système de justice militaire. Cela me donne peut-être un point de vue différent de celui de gens qui viendront témoigner et qui pourraient avoir de l'expérience militaire, mais qui n'auraient pas le point de vue d'un non-gradé.
    D'après mon expérience des discussions que j'ai eues à ce sujet avec des gens qui ont principalement une expérience du monde civil, l'obstacle n'est pas tant dans les détails que dans la compréhension des contextes sociaux très différents avec lesquels le système de justice militaire doit composer.
    La raison d'être d'une société civile, la société dans laquelle nous vivons, est d'offrir la plus grande liberté possible et de limiter l'ingérence de l'État dans nos libertés individuelles.
    La raison d'être de la société militaire est de protéger la société civile. Pour ce faire, les Canadiens ont besoin d'un groupe de gens qui feront des choses qui sont contre nature. Si on leur en donne l'ordre, ils mettront leur vie en danger et, s'ils en reçoivent l'ordre légitime, ils tueront d'autres personnes sans qu'il y ait de recours juridique. Si l'ordre légitime de tuer une autre personne est donné, le militaire n'a d'autre choix que d'obéir à cet ordre. Pour un civil, cette façon de structurer une organisation sociale est tout à fait contre nature, mais à l'instar de toute société régie par la primauté du droit, c'est nécessaire. Il est nécessaire que la police nous protège de l'intérieur et nous avons besoin des forces pour nous protéger de l'extérieur.
    Le prix à payer pour demander aux membres des forces armées un engagement si peu naturel, c'est que nous devons être prêts à accepter que leurs valeurs puissent être différentes des nôtres, pas entièrement, mais profondément différentes à certains égards. Ils accordent une grande importance à la cohésion sociale et au maintien de la discipline interne et de l'ordre, des notions tout à fait étrangères aux civils. Lorsqu'on compare notre système judiciaire — le système judiciaire civil — au système de justice militaire, il nous est très facile de présumer que l'on compare des pommes aux pommes, alors que le fondement même de la société, de cette organisation sociale, est radicalement différent.
    J'ai eu l'occasion d'étudier le projet de loi et, à mon avis, il s'agit d'une tentative d'établir un équilibre avec les besoins pertinents des militaires qui sont nécessaires au maintien de leur capacité de combat et de leur efficacité. N'oubliez pas que même lorsque les militaires participent à des opérations de maintien de la paix, ils sont en mesure de le faire parce qu'ils constituent une force de combat. Il s'agit d'un équilibre entre les besoins des militaires pour le maintien de leur efficacité en tant que force de combat, un équilibre où l'on tente — autant que possible — d'offrir aux militaires, des gens qui font un formidable sacrifice pour nous, le plus de protection et de liberté possible correspondant au besoin de maintenir une force de combat.
(1540)
    Monsieur le président, c'était ma déclaration préliminaire. Comme je l'ai indiqué au début, c'est avec plaisir que je répondrai plus tard à vos questions ou à celles de tout membre du comité.
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant entendre le témoignage de M. Hamel. J'ai oublié de mentionner qu'il est aussi un lieutenant-colonel à la retraite et qu'il a servi pendant un certain nombre d'années. Il a été déployé en Bosnie et au Zaïre.
    Nous avons hâte d'entendre votre déclaration.

[Français]

    Monsieur le président, honorables membres, bon après-midi.
    Je suis heureux d'être ici pour répondre à vos questions sur le rôle du Comité des griefs des Forces canadiennes relativement au processus des griefs militaires, étant donné que certains des éléments du projet de loi C-15 nous touchent directement.
    Permettez-moi tout d'abord de vous donner un aperçu du comité.
    Le Comité des griefs des Forces canadiennes a entamé ses activités en juin 2000. C'est un tribunal quasi judiciaire indépendant du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes. En fait, le comité représente la seule composante externe du processus de règlement des griefs des Forces canadiennes.
    Depuis sa création, le comité a fait la preuve de son excellence en matière d'analyse et de résolution des griefs militaires. Il a développé une vaste expertise sur une multitude de sujets liés à l'administration des affaires des Forces canadiennes. En plus de l'examen des griefs individuels, notre travail nous permet également de déceler certaines tendances plus générales et des domaines de mécontentement que nous pouvons par la suite relayer aux officiers et cadres supérieurs des Forces canadiennes.
    Sur le plan législatif, le mandat du comité est d'examiner les griefs qui lui sont renvoyés conformément à la Loi sur la défense nationale et aux Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes.

[Traduction]

    Au niveau opérationnel, le président du comité est responsable de la répartition du travail entre les membres. Lorsqu’un grief lui est assigné, le membre est responsable de l’examen du dossier à titre de membre unique. Une fois l’examen achevé, le membre du comité soumet ses conclusions et recommandations à la fois au plaignant, ou à la plaignante, et au Chef d'état-major de la Défense. C'est à ce dernier que revient la décision finale concernant le grief. Le Chef d'état-major de la Défense n’est pas tenu d’adopter les conclusions et recommandations du comité, mais, s'il choisit de s'en écarter, il doit en expliquer les raisons par écrit.
    En ce qui concerne le projet de loi C-15, je me réjouis de constater que ce projet comprend un article permettant de remplacer le nom actuel du comité par celui de « Comité externe d'examen des griefs militaires ». Ce changement peut sembler anodin. Toutefois, il s'agit d'une modification importante, longuement souhaitée par le comité.
    Le comité a constaté en effet que son nom actuel contribue souvent à des malentendus et complications. Ce changement de nom contribuera à mieux faire comprendre le rôle particulier et unique pour lequel le comité a été créé. Il marquera également son indépendance institutionnelle tout en clarifiant son mandat. Dans son rapport présenté en décembre 2011, le juge LeSage a adhéré au raisonnement du comité et a soutenu le changement de nom du comité dans la recommandation 48 de son rapport.

[Français]

    Le projet de loi C-15 se voulant la réponse législative au rapport sur la justice militaire rédigé il y a plusieurs années par le regretté Antonio Lamer, ancien juge en chef de la Cour suprême du Canada, je voudrais ici réaffirmer le soutien du comité aux 18 recommandations incluses dans ce rapport et qui concernent le processus des griefs.
    Plusieurs de ces recommandation ont déjà été mises en oeuvre, alors que d'autres sont contenues dans le projet de loi C-15. Malheureusement, trois recommandations touchant directement les affaires du comité et qui visent à faciliter son travail n'y figurent toujours pas. Une des ces recommandations propose de permettre à un membre du comité de clore les dossiers qu'il a en main à l'expiration de son mandat. Une deuxième concerne l'octroi d'un pouvoir d'assignation au comité, alors que la troisième appelle à ce que le rapport annuel du comité corresponde à l'année financière plutôt qu'à l'année civile. Afin de mettre en oeuvre ces trois recommandations, des modifications à la Loi sur la défense nationale seront nécessaires.
    L'importance de ces trois recommandations ne peut être minimisée. Par exemple, les conséquences négatives du fait que les membres du comité ne peuvent pas achever l'examen des griefs qu'ils ont en main à l'expiration de leur mandat ont récemment nui directement aux activités du comité. En effet, à partir du moment où un dossier est reçu par le comité, il faut compter de deux à trois mois, en moyenne, pour qu'un membre du comité en finisse l'examen et formule ses conclusions et recommandations. De ce fait, l'automne dernier, j'ai été incapable d'assigner des griefs à trois de mes membres expérimentés du comité durant les trois derniers mois de leurs mandats respectifs, même si des dossiers attendaient d'être examinés.
(1545)

[Traduction]

    Je voudrais maintenant parler d’une question récurrente qui préoccupe le comité et qui est que seuls certains types de griefs sont renvoyés au comité pour examen. La Loi sur la défense nationale n’impose aucune restriction au renvoi de griefs au comité. Cependant, en vertu du règlement d'application de la loi, seuls les griefs appartenant à quatre types doivent être obligatoirement renvoyés au comité. Cela représente environ 40 p. 100 du total des griefs qui atteignent le dernier palier du processus. D'autres griefs peuvent également être renvoyés au comité pour examen sur une base discrétionnaire.
    En raison de ce règlement, ce ne sont pas tous les membres des Forces canadiennes, dont les dossiers arrivent au dernier palier, qui bénéficient d'un examen externe et indépendant de leur grief par le comité. Nous estimons que chaque militaire devrait, au dernier palier, pouvoir compter sur l'examen indépendant et externe de son grief par le comité, peu en importe le sujet. Il s'agit là d'une question d'équité et de transparence, deux autres préoccupations soulevées par le juge en chef Lamer dans son rapport.
    Aussi, vous êtes peut-être au courant que le dernier examen de Loi sur la défense nationale effectué l’année passée par le juge LeSage recommandait que tout grief qui n’a toujours pas été réglé à la satisfaction du plaignant, ou de la plaignante, devrait être examiné par le comité, une fois qu’il atteint l’autorité de dernière instance.
    Selon le juge LeSage, un examen par le comité fournirait au Chef d’état-major de la Défense une opinion plus équilibrée. Le comité partage ce point de vue et estime que si tous les griefs non réglés lui sont renvoyés pour examen, les membres des Forces canadiennes et le Chef d’état-major de la Défense bénéficieraient d’un examen indépendant et expert; la contribution du comité au processus des griefs n’en serait que plus grande.
    Le comité croit fermement aux avantages d’un nouveau modèle de renvoi des griefs, tel que soutenu par le juge LeSage. Le comité est optimiste à ce sujet et espère que les Forces canadiennes adopteront ce nouveau modèle et le mettront en oeuvre.

[Français]

    Finalement, au cours des débats à la Chambre des communes au sujet du projet de loi C-15, j’ai noté que plusieurs honorables parlementaires s'intéressaient à la composition du comité, certains suggérant que 60 % de ses membres devraient n’avoir aucune expérience au sein des Forces canadiennes.
    Bien que la désignation des membres du comité soit la responsabilité du gouverneur en conseil, je voudrais, en ma qualité de président, profiter de l'occasion pour partager avec vous certaines de mes expériences et vous faire part de mes inquiétudes à ce sujet.
    L’indépendance du comité est essentielle. C’est ce qui lui permet d’assumer son mandat. Le comité ne fait partie ni des Forces canadiennes ni du ministère de la Défense nationale. Il a été créé par un texte législatif et, comme je l'ai déjà mentionné, ses membres sont nommés par le gouverneur en conseil. Le président du comité, ses vice-présidents et ses membres sont nommés à titre inamovible, et non pas à discrétion, pour un mandat de quatre ans qui est renouvelable. Le président est le premier dirigeant du comité. Il supervise et dirige le travail et le personnel de l’organisation.
    Finalement, en tant qu’administrateur général, le président rend compte au ministre responsable du portefeuille et au Parlement, et veille à ce que le comité soit efficace et remplisse bien son mandat. Toutes ces dispositions déjà en place constituent, à mon avis, autant de mesures garantes de l’indépendance du comité.
    Cela dit, l’indépendance du comité doit être protégée et préservée. Comme je l’avais mentionné lors de ma précédente comparution devant vous en février 2011, à mon avis, la loi en vigueur n’offre pas une telle protection au comité. En effet, le paragraphe 29.16(10) de la Loi sur la défense nationale prescrit qu’un officier ou un militaire du rang peut être nommé, en détachement, comme membre du comité.
    Une des raisons fondamentales de la création du comité était de fournir un examen externe, tant au chef d’état-major qu'aux membres des Forces canadiennes qui soumettent un grief. Si un membre en service actif des Forces canadiennes est nommé membre du comité, l’indépendance du comité vis-à-vis de la chaîne de commandement sera en danger. Dans son rapport, le juge LeSage a recommandé de s’abstenir de nommer des membres actifs des Forces canadiennes comme membres du comité. J'approuve cette recommandation.
    J’espère que, grâce au travail des honorables membres de ce comité, un consensus sera atteint durant l’examen du projet de loi C-15 pour que ce paragraphe soit éliminé de la Loi sur la défense nationale. Cela contribuerait grandement à garantir que les griefs sont examinés de manière indépendante par une organisation externe aux Forces canadiennes.
(1550)

[Traduction]

    En ce qui concerne la composition du comité, après quatre ans en tant que président, je peux témoigner sans hésiter qu’avoir une expérience militaire constitue un atout au sein de ce tribunal spécialisé qu’est le Comité des griefs des Forces canadiennes. Cependant, je crois également qu’il y a de la place pour la diversité parmi les membres du comité. En fait, dans son rapport, le juge LeSage recommande que — je cite — « les membres nommés au Comité des griefs soient des personnes provenant de tous les horizons, notamment des personnes qui n’ont pas d’antécédents militaires ».
    Sachant que le mandat du comité porte exclusivement sur l’examen des griefs militaires, j’estime que ce serait une erreur d’exclure des candidats potentiels en raison d’un précédent service militaire, ou simplement parce que le quota établi a été atteint.
    Il ne fait aucun doute que le fait d’avoir une expérience militaire et de connaître les Forces canadiennes, une organisation complexe, dynamique et unique, constitue un atout. Comme c’est le cas pour plusieurs tribunaux, comités et commissions spécialisés, l’expérience et la connaissance de la profession à l’origine des actes, décisions ou omissions qui sont l’objet d’un examen, sont considérées des atouts, voire des exigences d’emploi.
    Il n’est pas inhabituel que des personnes appartenant à une profession en examinent d’autres au sein de cette même profession. Cela doit s’appliquer également à la profession des armes. Les membres du comité ayant une expérience au sein des Forces canadiennes comprennent le langage, la structure, le mode opératoire et la culture de la profession. Leurs connaissances leur permettent de comprendre les problèmes auxquels les plaignants et les plaignantes font face et de saisir le contexte dans lequel les arguments sont présentés et dans quelle perspective ils le sont. Leur expérience leur permet de poser des questions concluantes et de questionner les bonnes personnes.
    À mon avis, avoir une certaine expérience militaire, surtout si tous les griefs non résolus, indépendamment de leur nature, sont renvoyés au comité pour examen, doit être considéré comme un atout et non pas comme un empêchement ou une limitation d’emploi.
    De plus, imposer un quota pourrait retarder le processus de nomination sachant que les questions de droit du travail et de l’emploi, ainsi que les lois réglementaires dans un contexte militaire, pourraient ne pas être attrayantes pour plusieurs personnes, surtout dans le cas de membres à temps partiel. En fin de compte, je pense que la décision du gouverneur en conseil de nommer un membre du comité doit être prise en fonction de la compétence, de l’expérience et des connaissances. Seuls les meilleurs candidats devraient être nommés, indépendamment de leur expérience précédente. Les membres des Forces canadiennes, le Chef d’état-major de la Défense et les citoyens canadiens n’en méritent pas moins.

[Français]

    Monsieur le président, en guise de conclusion, je dirai que le comité accueille favorablement le changement de nom proposé par le projet de loi, qu'il croit aux avantages d'un examen des griefs par le comité au dernier palier, qu'il demande l'élimination du paragraphe législatif permettant à des membres des Forces canadiennes en service actif d'être nommés membres du comité et qu'il soutient la diversité dans sa composition tant que les compétences ne sont pas compromises.
    Je vous remercie de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui. Je répondrai à vos questions plus tard. Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Dugas.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, je tiens à vous remercier de m'avoir invité à discuter de ces modifications à la Loi sur la défense nationale. C'est un honneur pour moi. Je vais essayer d'être à la hauteur.

[Traduction]

    Cette année, ce sera le 10e anniversaire du rapport Lamer. De très bons principes fondamentaux ont été énoncés dans ce rapport. M. Lamer a indiqué qu'à moins d'une très bonne raison expliquant les différences entre la Loi sur la défense nationale et le Code criminel, la loi devrait alors correspondre le plus possible au Code criminel.

[Français]

    Dans le cadre de cette comparution, j'ai l'intention d'être bref.
     Trois points sont extrêmement importants, à mon avis, et je vous suggère d'y accorder votre attention.
(1555)

[Traduction]

    Je ne vois rien qui justifie que seulement des membres de certains grades des Forces canadiennes soient admissibles à siéger au comité de la cour martiale. Si vous examinez l’article, nous ne traitons pas les officiers de la même façon que les simples soldats. En vertu du Code criminel, ces simples soldats, avec les mêmes gens impliqués — comme vous le savez, il peut arriver des cas où une cour martiale et un tribunal civil possèdent une juridiction concurrente, et un haut gradé serait, par exemple, accusé d’agression ou d’agression sexuelle — pourraient être appelés à faire partie du jury. Par contre, dans les Forces canadiennes, ils seraient exclus, ou on le leur interdirait. Si ces mêmes soldats sont accusés d’une infraction, selon ma lecture du projet de loi, il n’est pas possible qu’un autre simple soldat compose le comité, parce que les membres doivent au moins avoir le grade de sergent.
    Encore une fois, je souligne qu’il n’y a aucune raison qui justifie une telle distinction.
    Ensuite, en ce qui concerne la Loi sur la Défense nationale et le processus, contrairement à une cour pénale civile, aucun parti n’a son mot à dire sur la composition du comité. Il n’y a pas de processus de contestation. Il y a un processus informel qui permet aux partis d’examiner les membres, mais c’est seulement en cour martiale.
    Je crois comprendre qu’il serait possible d’en faire quelque chose. Il faut aborder la situation d’une autre manière, parce qu’il arrive que la cour martiale ait lieu très loin. Cependant, avec la technologie moderne, je propose que l’administrateur de la cour martiale ait des responsabilités à l’égard de la poursuite et de la défense concernant le processus de sélection. Des membres sont nommés à un comité de la cour martiale, mais nous ne savons pas comment ils ont été choisis.

[Français]

    On dit aussi que le processus est fait de façon aléatoire, mais en fin de compte, il est plus ou moins bien expliqué.
    Enfin, en tant qu'ancien directeur de la Direction du service d'avocats de la défense des Forces canadiennes, je note que, même s'il est bien que le mandat de quatre ans soit renouvelable, ce renouvellement est encore une fois laissé à la discrétion des autorités.
     De par son rôle, le directeur de la Direction du service d'avocats de la défense va un peu à l'encontre de l'organisation. En effet, compte tenu de toutes les modifications, des différentes cours et des motions reliées à des modifications probables à la Loi sur la défense nationale, il peut faire l'objet d'une certaine animosité. C'est la nature humaine.
     En me fondant sur mon expérience, je suggère encore une fois que le renouvellement du mandat du directeur de la Direction du service d'avocats de la défense se fasse à sa demande, plutôt qu'en vertu d'une décision de l'administration.
    Je vous remercie. Je suis ouvert à vos questions.

[Traduction]

    Merci. Nous vous sommes reconnaissants de votre exposé.
    Nous allons entamer nos séries de questions de sept minutes.
    Monsieur Harris, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins d’être venus témoigner et de nous faire part de leurs opinions et de leurs expériences.
    Il s’agit d’un projet de loi complexe, parce qu’il renferme beaucoup d’articles. Certains articles portent sur les rapports, comme Ian Holloway l’a mentionné, à savoir la nature de la justice militaire en tant que système distinct.
    À mon avis, nous reconnaissons l’importance dans le contexte militaire d’avoir un système disciplinaire qui répond aux besoins opérationnels. Comme M. Holloway l’a rappelé, dans un cas extrême où le meurtre fait partie d’une obligation qu’une personne doit remplir, je suis certain que vous sous-entendez, monsieur Holloway, que si l’ordre est illégal, la personne doit refuser d’obtempérer. Ce n’est pas noir ou blanc. Il y a des nuances de gris. Vous avez tous été dans l’armée. Vous pourriez nous faire part de votre opinion à cet égard.
    Parmi les réserves que nous avions soulevées à ce sujet à l’occasion du présent projet de loi et du projet de loi C-41, il y a la question du casier judiciaire consécutif à une infraction d’ordre militaire. Comme nous le savons, il y a beaucoup de cas. Nous savons que la procédure pour certains nouveaux procès est dépourvue de garanties procédurales qui seraient normalement attendues devant une cour civile. Or, nous avons des gens qui se retrouvent avec un casier judiciaire. Il y a des dizaines d’infractions. Selon les derniers chiffres du JAG, j’ajouterais qu’il y a environ 2 500 infractions par année pour une force relativement petite composée de 65 000 membres de la Force régulière et de 20 000 réservistes, et la majorité des infractions sont jugées par procès sommaire. Ce n’est que pour une année. Après 5 ou 10 ans, quel est le pourcentage des membres des Forces canadiennes qui ont servi, qui ont fait l’objet d’une telle discipline — à raison — et qui se retrouvent avec un casier judiciaire pour lequel il n’y a aucun pardon possible? Il est maintenant possible de demander la suspension de son casier judiciaire. Est-ce qu’il y a quelque chose qui cloche à ce sujet? Ne devrions-nous pas essayer de trouver une façon de corriger la situation?
    Je vous pose les questions à tous, parce que je sais que vous aviez un grade inférieur, monsieur Holloway, et que d’autres ont servi en tant qu’officiers. Il y a donc divers points de vue.
(1600)
    En fait, j’ai un petit commentaire. C’est ainsi depuis longtemps, et c’est très malheureux. Vous soulevez un très bon point. Vous remarquerez que nous avons au fil des ans dans les Forces canadiennes ce que nous appelons une fiche de conduite. Les membres qui étaient libérés et qui avaient été reconnus coupables d’une infraction devaient en gros ouvrir un casier judiciaire, s’ils voulaient obtenir leur pardon. Certaines infractions étaient très mineures et elles n’auraient normalement pas fait l’objet d’accusations si elles avaient été commises dans le monde civil. Votre point est extrêmement valide. Il faudrait vraiment que ce soit à l’intérieur d’un cadre où c’est clairement mentionné que les officiers ne peuvent pas faire l’objet d’accusations pour des infractions qui pourraient donner lieu à la création d’un casier judiciaire.
    Y a-t-il d’autres commentaires?
    Je ne peux malheureusement pas contribuer à la discussion, parce que les questions d’ordre disciplinaire ne font pas partie de mon mandat. Je ne m’occupe pas du tout de ces questions.
    Nous en avons discuté la dernière fois que j’étais ici, monsieur Harris, et je suis d’accord avec vous. En fait, je crois que le projet de loi accomplit justement ce que vous venez de dire, à savoir que dans la majorité des infractions qui peuvent être jugées uniquement par procès sommaire, cela n’entraînera pas la création d’un casier judiciaire. Dans le cas des infractions qui donneront lieu à la création d’un casier judiciaire, selon ce que j’en comprends, le militaire accusé a une décision à prendre. Il peut choisir d’être jugé par une cour martiale. Je suis relativement sûr que le projet de loi aborde la préoccupation que je vous ai entendu soulever la dernière fois et que vous venez de nouveau de soulever.
    Je ne veux pas vous corriger, mais des modifications ont été apportées la dernière fois en vue de réduire de manière considérable le nombre d’infractions pouvant donner lieu à la création d’un casier judiciaire. Malheureusement, la présente modification ne faisait pas partie du projet de loi C-15 lorsqu’il a été présenté à la Chambre des communes. Nous revenons, pour ainsi dire, à la case départ, et nous avons cette discussion, même si on semble sous-entendre qu’il y aurait peut-être une modification dans l’avenir.
    Le ministre ne s’était-il pas engagé auprès de vous à le présenter de nouveau? Je ne sais pas. Mes renseignements me proviennent de ce que je lis dans les journaux. Vous êtes plus au courant que moi.
    Je vous dis seulement que dans le projet de loi C-15 dont le comité est chargé de l’examen, parmi les six ou huit modifications proposées la dernière fois, il n’y en a qu’une qui faisait partie du projet de loi lorsqu’il a été présenté à la Chambre des communes.
    Je crois que l’essentiel est que l’accusé ait le droit de décider d’être jugé par une cour martiale; je ne peux pas dire que c’est dans tous les cas où une infraction pourrait donner lieu à la création d’un casier judiciaire, mais c’est dans la majorité des cas.
    Permettez-moi de vous poser une question que j’ai posée à beaucoup d’autres. Vous étiez un simple soldat et non un officier. Des 2 500 infractions par année, de 60 à 80 sont jugées par une cour martiale.
    Si quelqu’un vous dit « Jeune homme, nous allons vous accuser d’une telle infraction. Vous avez une décision à prendre. Vous pouvez décider d’être jugé par une cour martiale ou vous pouvez vous présenter devant le commandant qui s’en occupera cet après-midi et vous aurez probablement... », combien de gens dans de telles circonstances, et faites abstraction de votre diplôme en droit et de tout le reste... Par exemple, lorsqu’un simple soldat se fait pincer à faire quelque chose, se trouve en état d’ivresse, trouble l’ordre public, est absent sans permission, combien de soldats choisiront d’être jugés par une cour martiale?
    Les données nous indiquent qu’il y en aurait très peu, mais un officier divisionnaire bien formé expliquera tout cela, parce qu’avant de prendre la décision, le soldat est rencontré par son officier divisionnaire qui lui expliquera le tout, y compris les conséquences des divers choix.
    Cependant, à cette étape des procédures, il n’est pas possible d’avoir accès aux services d’un avocat. Les décisions qui sont prises dans de telles circonstances le sont après qu’une personne vous a dit: « Vous avez une décision à prendre, soldat. Vous pouvez régler le dossier cet après-midi ou demain matin ou vous pouvez aller... »
    Sauf votre respect, je crois que vous sous-estimez la qualité de nos officiers subalternes au Canada. Ils sont formés pour conseiller les soldats, les marins et les membres de l’Aviation royale canadienne des conséquences de leur choix. À mon avis, il n’est pas adéquat d’avoir une telle attitude dédaigneuse à leur égard.
(1605)
    Le temps est écoulé.
    Monsieur Alexander, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J’ai des questions pour chacun d’entre vous, si le temps le permet. Merci à tous de votre présence. Il s’agit d’une importante mesure législation, et nous vous sommes reconnaissants de votre expertise.
    Monsieur Dugas, vous avez dit que, selon vous, les simples soldats devraient pouvoir siéger au comité de la cour martiale. Vous avez donné des exemples de précédents et des arguments provenant du système de justice civile. C’est évidemment pourquoi nous sommes ici aujourd’hui. Les progrès dans le système civil influent sur le système de justice militaire, mais ce dernier a tout de même des caractéristiques qui lui sont propres.
    Je vous rappelle que l’ancien juge en chef Lamer a demandé dans son rapport l’élimination ou la diminution de la distinction entre les grades des membres du comité de la cour martiale. Notre proposition actuelle dans le projet de loi permettrait aux sergents d’y siéger, mais pas aux simples soldats, ce qui réduirait énormément la distinction possible entre les grades.
    L’argument qui nous a été présenté lors de l’élaboration du projet de loi était que cela correspondait vraiment à l’esprit du système de justice militaire, à savoir de rendre justice tout en accordant une attention particulière à la discipline, à la morale et à la cohésion au sein de la chaîne de commandement de l’armée en tant qu’entité distincte avec des responsabilités spéciales.
    En dépit de votre propre opinion, ne convenez-vous pas que la proposition à cet égard dans le projet de loi C-15 répond à la recommandation formelle exprimée par le juge Lamer dans son rapport?
    Je serais certainement prêt à dire qu’il a laissé une certaine latitude. J’ai passé deux jours et demi avec M. Lamer lorsqu’il est venu à Montréal et à Valcartier pour interviewer des gens. Il était aussi au courant qu’il s’agissait d’importantes modifications.
    Voilà pourquoi j’ai premièrement abordé les questions au sujet desquelles il a dit que s’il n’y a aucune raison de faire abstraction du Code criminel et de ses procédures, nous devrions nous approcher aussi près que...
    Je suis insatisfait de l’article, parce qu’il n’y a aucune raison... J’en ai déjà discuté. J’ai été directeur des services d’avocats de la défense durant près de huit ans, et je n’ai jamais rencontré une personne qui m’a dit qu’il y avait une raison pour ne pas inclure les simples soldats. Comme je l’ai déjà mentionné, il s’agit d’une situation bizarre. Le même soldat armé que nous envoyons à l’étranger pour défendre la population canadienne, le Canada et nos valeurs, s’il était dans le monde civil, pourrait faire exactement le même travail, et il aurait droit de le faire.
    Je suis d’accord avec ce que vous dites, et je serais peut-être même prêt à accepter que pour certaines infractions un simple soldat ne puisse pas siéger au comité. Néanmoins, je ne comprends toujours pas pourquoi nous traitons différemment les grades. Encore une fois, il y a peut-être une raison. Personne ne m’en a donné une, et je n’en vois aucune. J’ai examiné la question. Nous avons remis en question beaucoup de dispositions dans le passé, et cela se retrouve ici, parce qu’encore une fois il s’agit d’un élément que nous avons remis en question. Encore une fois, je ne vois rien qui l’explique. Je suis désolé.
    Par contre, nous convenons que le présent projet de loi devrait réduire la distinction entre les grades.
    Monsieur Hamel, j’ai une question concernant votre proposition, à savoir de permettre aux membres du comité de clore les dossiers qu’ils ont en main à l’expiration de leur mandat.
    Nous sommes évidemment au courant de la recommandation. Nous l’examinons certainement. Convenez-vous qu’une modification comme celle proposée par le juge Lamer et celle que vous avez proposée aujourd’hui pourrait avoir des répercussions ailleurs au sein du gouvernement en tant que précédent et que le gouvernement devrait l’analyser et en tenir compte en vue de déterminer la façon de formuler la mesure législative?
    Merci de votre question.
    Monsieur le président, de nombreux tribunaux ont actuellement une telle disposition dans leur loi habilitante. Je ne connais pas le numéro de la recommandation par coeur, mais le rapport LeSage a aussi fait la même recommandation concernant la CPPM.
    À nos yeux, c’est principalement une question de faire le bon choix et de prendre la bonne décision. Ce ne serait pas juste pour un plaignant, un membre des Forces canadiennes, que son dossier soit assigné à un membre du comité comme un juge et que tout d’un coup ce juge n’en soit plus un et que le dossier ne soit pas clos. En tant que président, je devrais assigner de nouveau le dossier à un autre membre du comité, ce qui signifierait évidemment des retards supplémentaires. Étant donné que chaque membre du comité est indépendant, il n’accepterait jamais les conclusions ou les recommandations d’un collègue. Il en tiendrait peut-être compte, mais il devrait repartir à zéro, ce qui occasionnerait des retards pour le soldat.
(1610)
    D’après moi, nous sommes tous d’accord avec vous pour dire que dans un tribunal il y a une certaine façon de faire, mais dans les tribunaux quasi judiciaires, les tribunaux indépendants comme le vôtre, il y a une variété de pratiques. Ne convenez-vous pas qu’il y a d’autres tribunaux fédéraux où de telles prolongations ne sont pas permises?
    Il y a des tribunaux où de telles dispositions n’existent pas. Cependant, je vais seulement réaffirmer que

[Français]

pour le bien-être d'un membre des Forces canadiennes, il est injuste d'imposer cela.

[Traduction]

    En fait, même pour le comité d’imposer... J’ai eu les mains liées durant trois mois; je ne pouvais pas assigner de dossiers à trois membres du comité. Ils étaient là, et je ne pouvais pas les utiliser. Il s’agissait de ressources précieuses. Ils auraient pu aider à réviser certains dossiers de soldats et à faire des recommandations auprès du chef d’état-major de la Défense. Dans le cas d’un remboursement ou d’une remise de 100 000 $, c’est beaucoup d’argent qui doit de nouveau faire l’objet d’un examen.
    Bref, c’est une question d’équité envers tout le monde. Nous ne sommes pas un tribunal. Nous le savons. Néanmoins, en toute justice envers les soldats et le chef d’état-major de la Défense, ils méritent une décision rapide.

[Français]

    Nous avons bien compris votre point de vue, mais pouvez-vous confirmer au comité que plusieurs autres recommandations que vous avez formulées sont liées au rapport du juge LeSage, rapport qui a été présenté au Parlement en juin 2012 et que le gouvernement est toujours en train d'étudier?

[Traduction]

    Oui. Je confirme que ces trois recommandations excellentes du juge Lamer traînent depuis déjà un bon moment. Depuis que je suis président, je milite pour leur adoption. Les recommandations sont encore à l’étude, mais des gouvernements successifs les ont acceptées. Elles ont toutes été approuvées, mais pas dans le cadre de projets de loi successifs.

[Français]

    Votre temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Monsieur McKay, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Merci à chacun d’entre vous.
    Je trouve que M. Holloway a très bien expliqué ce qui différencie un système de justice civile d’un système de justice militaire. À cet égard, je pense que c’était très utile. En fait, cela établit un critère. Le critère porte sur les présentes modifications et toute autre modification législative; il se fonde sur la prépondérance de la preuve ou sur la preuve hors de tout doute raisonnable. Indépendamment du critère choisi, qu’est-ce qui explique les différences dans le système? À l’instar du commentaire du juge Lamer, à moins qu’il y ait une très bonne raison d’être différent, le système devrait être le même.
    Je pose ma question à MM. Holloway et Dugas. Donc, en appliquant ce critère, en ce qui concerne la constitution d’un jury d’une cour martiale, il me semble que le gouvernement a opté pour une approche à mi-chemin. Nous pouvons décider que seuls les capitaines peuvent siéger comme jurés pour le procès d’un capitaine, ou que des militaires de tout grade peuvent siéger comme jurés pour le procès d’un militaire de n’importe quel grade.
    En abaissant le seuil au grade de sergent, on fait abstraction d’une grande partie de la population. Bref, monsieur Holloway, expliquez l'argument du gouvernement.
    Premièrement, il ne s’agit pas d’un procès devant jury. Les membres des comités de la cour martiale ne sont pas chargés de constater les faits, comme le sont les membres d’un jury. Le rôle du comité diffère de celui du jury d’un procès civil. Il peut sembler pédant de le mentionner, mais il est essentiel de le savoir pour comprendre la façon dont une cour martiale est censée fonctionner. C’est également l’un des défis qu’il faut relever pour pouvoir comparer notre système à celui de la Grande-Bretagne ou de l’Australie. Nous utilisons peut-être les mêmes titres, mais ils peuvent avoir une autre signification. Voilà la première chose que je vous dirais.
    Je ne suis pas certain que notre système actuel de procès civils devant jury soit particulièrement glorieux. Une ancienne plaisanterie soutient que les gens qui déterminent votre culpabilité ou votre innocence sont ceux qui sont trop stupides pour éviter d’être jurés.
(1615)
    Je ne crois pas que nous allons aborder cette question.
    Je suis certain que nous n’allons pas l'aborder, mais si vous laissez entendre que le système canadien de procès devant jury, dans sa forme actuelle, représente le summum…
    Ce n'est peut-être pas l'étalon-or, mais c'est la norme en vigueur.
    C'est la norme, mais je suppose que je soutiens que, pour participer efficacement à une cour martiale, un membre doit être en mesure d’analyser une situation dans son ensemble. N’oubliez pas que le système de justice évolue dans un contexte de discipline, de cohésion des unités et d’efficacité au combat. Les participants doivent donc être un peu aguerris et avoir travaillé pour les forces pendant un certain temps.
    Si un soldat fait partie des forces depuis 15 ans, n’est-il pas capable de…?
    Il n’y aucun soldat…
    Je sais. Selon le système, il n’y en aura pas, mais vous soutenez qu’un soldat au service des forces depuis 15 ans, ne sera pas en mesure de…
    Il n’y a plus de soldats de ce genre au Canada, sauf s’ils ont été rétrogradés. Le grade approprié serait peut-être caporal-chef ou adjudant-maître, mais je ne suis pas certain qu’un soldat en service depuis deux ans, 18 mois ou moins possède le degré d’expérience militaire requis.
    On ne fait pas appel à eux pour la même raison que les sous-lieutenants et les élèves-officiers ne siègent pas aux comités des cours martiales.
    Lieutenant-colonel Dugas, j’aimerais connaître votre réaction.
    Je ne suis pas sûr de comprendre pourquoi on dit que le rôle des membres des comités n’est pas le même que celui des jurés. J’ai visité les deux salles, et j’ai constaté que leur rôle était parfaitement identique. En fin de compte, ils constatent les faits, et ils déterminent si une personne est coupable.
    J’aime votre approche, car j’ai rencontré des soldats qui ont choisi de conserver ce grade jusqu’à ce qu’ils deviennent caporaux, parce qu’ils souhaitaient demeurer sur la même base étant donné que leur famille et leurs enfants étaient établis là-bas. J’ai rencontré des soldats et des caporaux-chefs qui sont titulaires d’une maîtrise, mais qui sont heureux là où ils sont, parce que les gens de leur coin ne tirent pas parti de leur maîtrise. Il y a des gens merveilleux là-bas.
    Je ne comprends pas pourquoi il faut avoir travaillé pour les forces pendant trois ans pour être en mesure de rendre une décision concernant les faits d’une affaire qui n’a rien à voir avec l’armée.
    Malheureusement, je dispose de très peu de temps.
    Permettez-moi de changer de sujet et de parler pendant un moment du comité et des trois questions qui vous intéressent.
    Le fait que vous ne soyez pas en mesure d’entendre des causes ou de rendre des décisions pendant les trois derniers mois de votre nomination me semble être un incroyable gaspillage de ressources. L’argument du gouvernement, tel qu’il a été exposé par le secrétaire parlementaire, semble tenir essentiellement au fait que c’est la façon dont les autres comités fonctionnent. Il se peut que leur façon de fonctionner soit incorrecte.
    Y a-t-il d’autres raisons impérieuses pour empêcher un membre du comité qui prend sa retraite de conclure les dossiers qu’on lui a attribués?
    Lorsque j’ai comparu en 2011, l’un des arguments qui ont été avancés par l’un des membres était que cela pourrait être considéré comme un mécanisme permettant aux membres de prolonger indéfiniment leur service au sein de l’organisation. Je suis totalement en désaccord avec ce point de vue en ce sens que, premièrement, tous les membres du conseil ne savent pas… nous parlons seulement des dossiers qui auraient été attribués aux membres avant la fin de leur mandat. Donc, techniquement parlant, dans le cas de notre comité, cela entraînerait une prolongation d’au plus, deux ou trois mois. Par conséquent, si mon mandat prenait fin aujourd’hui et qu’une décision n’avait pas encore été rendue relativement à l’une de mes causes, mon mandat pourrait être prolongé automatiquement de deux ou trois mois.
    Cet argument me semble plutôt faible, malgré tout le respect que je dois à la personne qui l’a avancé.
    J’ai été étonné d’apprendre que vous n’exercez pas le pouvoir d’assignation. Pourquoi est-ce le cas?
    Le pouvoir d’assignation est un autre problème qui n’a pas encore été résolu. Des discussions à ce sujet sont en cours. Selon la loi portant sur les Forces canadiennes et le ministère de la Défense nationale, le ministère est obligé de nous fournir essentiellement tout ce dont nous avons besoin. Par conséquent, la situation n’est pas problématique. Nous obtenons tout ce que nous demandons, parfois facilement et parfois un peu plus tard. Mais nous nous débrouillons toujours pour obtenir ce dont nous avons besoin pour trancher une affaire, c’est-à-dire pour fournir au CEMD nos conclusions ou une recommandation.
    Toutefois, le problème tient essentiellement au fait que les Forces canadiennes et le ministère ne peuvent pas nous aider à obtenir l’information requise lorsque les gens ne sont plus au service des Forces canadiennes. Si nous cherchons à nous procurer un renseignement que possède un membre à la retraite, comme nous n’avons pas le pouvoir d’assignation, nous sommes forcés de tenir une audience et d’inviter ce membre à témoigner, à défaut de nous présenter devant les tribunaux. Si la personne ne comparaît pas devant nous ou refuse de fournir l’élément de preuve requis, il nous faut alors nous adresser aux tribunaux pour obtenir un jugement qui peut être exécuté. Il est simplement question d’avoir accès à l’outil adéquat, au besoin. Nous ne voulons pas détenir ce pouvoir pour citer à comparaître des membres des FC. En ce qui les concerne, il nous suffit de tenir une audience. Nos relations avec eux nous permettent d’obtenir les renseignements voulus. Le pouvoir d’assignation est surtout requis pour les cas que j’ai décrits précédemment.
    L’an dernier, dans le cadre d’une affaire, j’ai passé très près d’avoir à tenir une audience dans le seul dessein d’obtenir un renseignement. J’ai décidé de ne pas le faire, parce qu’il s’agissait du plaignant et que je me suis dit que, dans ce cas en particulier, s’il ne voulait nous aider à obtenir gain de cause, je n’allais pas tenir une audience pour si peu. Mais s’il s’était agi d’un témoin, j’aurais été forcé de tenir une audience. La tenue d’une audience est un processus qui demande beaucoup temps et qui est coûteux.
    Selon la loi, je dois travailler efficacement et aussi rapidement que possible pour remplir une partie de mon mandat. Le pouvoir d’assignation atténuerait le problème que nous rencontrons lorsque nous sommes forcés de tenir une audience et de nous adresser éventuellement aux tribunaux pour obtenir la soumission d’un élément de preuve au comité. Voilà la raison pour laquelle nous cherchons à détenir ce pouvoir.
(1620)
    Votre temps de parole est écoulé, et nous devons passer à l’étape suivante. Nous allons maintenant amorcer nos séries d’interventions de cinq minutes.
    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Holloway, pourriez-vous formuler des observations concernant les dispositions de détermination de la peine du projet de loi C-15? À votre avis, représentent-elles une modification constructive du système de justice?
    Je le pense. Comme de nombreuses institutions canadiennes, le système nous a été légué par le Royaume-Uni. Toutefois, depuis ce temps, notre histoire s’est éloignée de la leur. Je pense que la plupart des gens qui participent au système ont une vague idée de ce en quoi consiste l’efficacité au combat et les autres questions dont j’ai parlé. Pour ce qui est de clarifier les principes de la loi en vertu desquels les gens sont accusés et reconnus coupables d’infractions militaires, je pense que c’est très utile. Cela les rend plus concrets. Pour être franc, cet effort donnera aux tribunaux, qui pourraient bien finir par examiner ces modifications, de meilleurs critères pour évaluer la justesse du système militaire.
    D’accord.
    Monsieur Holloway, pouvez-vous nous expliquer comment les amendements proposés qui ont une incidence sur les juges militaires renforcent le système de justice militaire?
    Pour être précis, madame Gallant, parlez-vous des dispositions relatives à l’âge de la retraite et à l’inamovibilité des juges militaires?
    Mme Cheryl Gallant: Oui.
    M. Ian Holloway: Certains marins et soldats ordinaires étaient préoccupés par le fait que les juges étaient susceptibles d’être promus ou mutés dans les années à venir. Ils craignaient que ces nominations dépendent de la mesure dans laquelle les juges satisfont leurs supérieurs. Il s’agit de la même inquiétude que le lieutenant-colonel Dugas a exprimée.
    En séparant complètement, il y a quelques années, le corps de juges militaires des officiers hiérarchiques de la direction générale du juge-avocat général, on a fait un pas dans la bonne direction. Toutefois, les gens étaient toujours préoccupés par le fait que la pension d’un juge dépendait de la durée de son service et que si ce dernier rendait un jugement défavorable, on pourrait le renvoyer plus tôt et compromettre ainsi sa pension.
    Le fait d’avoir fixé la date de la retraite est, en principe, un changement très positif. La dernière fois que j’ai comparu devant vous, je crois que c’est, encore une fois, M. Harris qui m’a demandé pourquoi l’âge de la retraite était 60 ans au lieu de 75 ans, soit l’âge auquel les juges nommées en vertu de l’article 96 de la Loi constitutionnelle prennent leur retraite. Je pense que c’est parce que les juges militaires doivent parfois se rendre sur le terrain des opérations, contrairement aux juges civils. Certaines cours martiales canadiennes sont tenues à l’étranger. Les juges militaires doivent être prêts à chausser des bottes, à enfiler un lourd sac à dos et à être déployés. Encore une fois, pourquoi avoir choisi 60 ans, plutôt que 59 ou 61? À un moment ou à un autre, il faut prendre une décision. Il me semble que les raisons mentionnées plus tôt justifient d’avoir choisi un âge différent de 75 ans.
    Monsieur Holloway, au cours de votre déclaration préliminaire devant le comité, dans le cadre de l’étude du projet de loi C-41, vous avez déclaré — et je paraphrase en ce moment — que le but du système de justice militaire était de préserver la cohésion des unités et de garantir que des jeunes hommes et des jeunes femmes se placent volontairement dans des situations extrêmement périlleuses pour la simple raison que quelqu’un leur en a donné l’ordre. Vous avez fait un peu allusion à cela aujourd’hui.
    Pouvez-vous expliquer davantage cette déclaration?
    Bien sûr.
    En ce moment, nous sommes en train de ramener nos troupes d’Afghanistan. Voilà un exemple dans lequel de jeunes Canadiens, qui ont été élevés de la même manière que vos enfants, ont été placés dans des situations complètement contre nature.
    Premièrement, on leur a dit qu’ils se rendaient dans un endroit où des gens tenteraient de les tuer, et ils n’ont pu faire autrement que d’y aller. Puis une fois là-bas, bon nombre d’entre eux ont vécu, servi et combattu dans des conditions qui sont étrangères à la plupart des Canadiens. Ils n’ont pas pu faire autrement et, dans l’ensemble, ils ont fait du bon travail et n’ont pas déserté. Contrairement à l’armée américaine, l’armée canadienne n’a pas connu de désertion à grande échelle. Nos femmes et nos hommes ont fait ce qu’on leur demandait. Ils ont fait du bon travail dans l’ensemble, et ils l’ont fait parce qu’ils ont foi en ce système.
    C’est bien beau de se remémorer la Seconde Guerre mondiale, ou même la guerre de Corée, mais il s’agissait de générations différentes qui avaient d’autres sortes d’attentes. L’Afghanistan était, à mon sens, une épreuve. Les jeunes d’aujourd’hui ont été testés, et il s’avère qu’ils ont été tout à fait à la hauteur.
    Je pense que les Forces canadiennes se sont montrées tout à fait à la hauteur. Nous avons appris des choses, et nous avons commis des erreurs. Si jamais, Dieu nous en préserve, nous sommes forcés d’entreprendre de nouveau ce genre de missions, je pense que nous ferons encore mieux. Si la cohésion des unités s’est parfois fissurée, le moral de nos troupes n’a pas été brisé, et il n’y a pas eu de désertions massives. Nos hommes et nos femmes se sont acquittés de leurs fonctions d’une manière dont tous les Canadiens peuvent être fiers.
(1625)
    Merci beaucoup. Votre temps de parole a pris fin.

[Français]

    Madame Moore, vous avez la parole.
    Monsieur Holloway, j'aimerais revenir sur la question de la procédure sommaire et sur l'article 75 du projet de loi C-15.
    Dans les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, soit les ORFC, concernant la procédure sommaire, on indique qu'avant de prononcer une sentence, le président de la procédure sommaire tient compte de plusieurs facteurs, tels que le nombre, la gravité et la fréquence des infractions, les problèmes familiaux et la situation financière de l'accusé. C'est donc dire que pour une même infraction commise par deux personnes du même grade, on ne peut pas s'assurer que la peine sera la même, en raison de la multitude de facteurs dont le président tiendra compte. Je ne m'objecte pas pour autant au fait qu'il faut tenir compte de ces facteurs.
    À l'article 75 du projet de loi C-15 ou même de sa version précédente, à savoir le projet de loi C-41, on se base sur la peine qui a été imposée à l'accusé pour déterminer s'il aura un dossier criminel ou s'il sera assujetti à avoir un dossier judiciaire après l'infraction. J'aimerais entendre vos commentaires là-dessus.
    Également, même quand on pense à l'amendement qu'il y avait eu avec le projet de loi C-41, parmi les articles de la Loi sur la défense nationale qui avaient été ajoutés, certains n'avaient pas été ajoutés à cet amendement. Par exemple, à l'article 98 de la loi, on parle d'une personne qui aggrave une maladie ou une infirmité. Cela n'avait pas été inclus dans l'amendement, pour ce qui est du projet de loi C-41.
    J'ai connu des gens qui ont été accusés et qui ont subi une procédure sommaire en vertu de l'article 98 parce que, par exemple, ils s'étaient fait une entorse à la cheville pendant un cours de chef qui était particulièrement difficile et qu'ils avaient demandé qu'on leur mette un bandage pour qu'ils puissent marcher dessus pendant trois jours, car ils n'avaient pas envie de reprendre leur cours qui était très difficile. Cela arrive fréquemment que des gens fassent ce genre de chose, en fonction de la mission. Comme cet article n'a pas été inclus dans l'amendement relatif au projet de loi C-41, l'accusé aurait été susceptible d'avoir un dossier criminel.
    Étant donné qu'il faut tenir compte de beaucoup de facteurs, j'aimerais savoir si, à votre avis, on ne pourrait pas avoir des libellés plus efficaces à l'article 75 du projet de loi, pour empêcher que des gens n'aient des dossiers criminels à la suite d'une accusation ou d'une procédure sommaire, laquelle ils n'auraient pas eue dans la vie civile pour une même infraction ou un même geste posé. Bien sûr, je comprends que vous formuliez un libellé juridique pour un projet de loi et que cela ne se fasse peut-être pas à la volée. Si vous voulez me soumettre des suggestions écrites par la suite, ce serait apprécié.
    J'aimerais entendre vos commentaires sur ce que je viens de dire.
(1630)
    Merci, madame Moore.
    Je regrette, mais il va falloir que je vous réponde en anglais. Mon français n'est pas assez bon pour rendre justice à votre question.

[Traduction]

    Je ne peux pas vous indiquer directement les raisons pour lesquelles certaines dispositions n’ont pas été incluses dans cette version de la loi. Je suis certain que les rédacteurs seraient en mesure de vous fournir ces renseignements.
    En ce qui concerne le principe selon lequel l’attribution d’un casier judiciaire dépend d’un certain nombre de facteurs, il ne diffère en rien de celui qui s’applique dans le système civil. Un juge civil a le pouvoir d’accorder une libération inconditionnelle ou une libération sous condition, de reconnaître quelqu’un coupable ou même de nier qu’il lui appartient de rendre un jugement, suivant l’ancien adage de minimis non curat lex. Dans le système actuel ainsi que dans celui qui est proposé, un juge militaire peut tenir entièrement compte des circonstances pour déterminer le degré de culpabilité morale d’une personne, la réaction appropriée de l’État et à la peine qu’il convient d’imposer, tout comme un juge civil. Je pense qu’en ce sens, le système civil et le système militaire sont complètement équivalents.

[Français]

    J'aimerais revenir sur les ORFC, car je veux être certaine d'avoir bien compris. Donc, en fonction de tous les facteurs, il n'y a aucune garantie que, pour une même infraction, la même peine sera imposée. Ai-je bien compris ce que sont les ORFC?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    D'accord. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Opitz.
    Merci, monsieur le président.
    Premièrement, je vous remercie tous du service que vous avez rendu à notre pays. Je sais que tout ce que vous avez fait pendant vos années de service influe sur tout ce que vous faites en ce moment. Notre comité apprécie vos compétences et, par conséquent, je vous en remercie infiniment.
    Monsieur Dugas, il a été mentionné plus tôt que les membres n’étaient pas en mesure de consulter un avocat avant de choisir de subir un procès sommaire ou une cour martiale. Pourriez-vous préciser s’ils ont le droit ou non de consulter un avocat?
    Oui, et je suis très heureux de pouvoir vous répondre. Lorsque mon collègue a répondu à l’autre question, il a manqué de temps.
    En fait, les services sont très accessibles maintenant. Je dois dire que s’il y a quelque chose de très accessible dans les Forces canadiennes, c’est l’information des membres en toute circonstance. Ils n’ont qu’à consulter le site Web pour trouver le numéro de téléphone. Je peux vous confirmer que tous les membres utilisent le numéro 1-800 non seulement à des fins disciplinaires, mais aussi à des fins administratives. Parfois, ils demandent ce qu’ils peuvent faire ou les services auxquels ils peuvent s’adresser. En fin de compte, ils ont toujours le choix, mais le service sera rendu par téléphone. L’avocat ne sera pas sur place. Je dois dire que c’est probablement l’un des meilleurs services offerts par les Forces canadiennes.
    Vous dites que tout cela peut se faire par la ligne 1-800, et pas nécessairement directement auprès d'un avocat. Je me souviens que lorsque j'étais officier désigné et que je conseillais aux gens de procéder de cette façon, il leur arrivait parfois de communiquer directement avec le juge-avocat général.
    Il fut un temps où les services n'étaient pas séparés. Quand j'étais à Valcartier, je pouvais plaider en cour martiale à Valcartier, défendre des causes ailleurs au pays ou dans le monde, ou encore être affecté à l'aide juridique un après-midi. Je devais seulement m'assurer de ne pas être en conflit d'intérêts dans les affaires qui m'étaient confiées. Mais à l'heure actuelle, à moins d'être sur la base militaire et d'être l'officier défenseur à la cour martiale, il n'y a pas d'accès direct...
    D'accord. J'ai un exemplaire des ORFC ici. À l'article 108.18, « Possibilité de consulter un avocat avant de faire un choix », on dit ceci:
(1) L’officier qui exerce son pouvoir de juger sommairement doit s’assurer que l’on donne à l’accusé qui fait un choix en vertu de l’article 108.17 (Demande de procès devant une cour martiale) l’occasion raisonnable de consulter un avocat relativement à cette question durant la période de temps qui lui a été accordée pour faire son choix.
(2) L’accusé n’assume aucun frais lorsqu’il consulte un avocat militaire en application de l’alinéa (1).
    Cet article est en vigueur depuis le 30 novembre 1997.
(1635)
    À moins que les pratiques aient changé depuis mon départ, « consulter » voulait dire entrer en contact avec un avocat, pas nécessairement en rencontrer un en personne.
    D'accord.
    Ceci dit, lorsque l'incident était suffisamment grave, il pouvait arriver que l'avocat soit présent.
    Mais si l'accusé le souhaite, il peut demander une rencontre en personne plutôt qu'une consultation téléphonique, n'est-ce pas?
    J'imagine que oui.
    D'accord.
    Monsieur, pourriez-vous nous parler un peu plus en détail de votre rôle en tant que directeur du service des avocats de la défense? Par exemple, quelles sont les qualifications requises pour le poste et quelles sont les fonctions y étant rattachées? Quel est le rôle exactement du directeur au sein du système de justice militaire? Je ne suis pas certain de bien comprendre.
    À l'époque, j'agissais aussi comme avocat en cour martiale. J'avais des clients et je défendais des accusés. Quand le système a été mis en place, je recevais normalement des appels d'accusés qui voulaient être représentés devant la cour martiale, puis mon rôle consistait ensuite à assigner au dossier un des avocats qui travaillaient avec moi, tant du côté de la réserve que des forces régulières. Puis, une fois le procès terminé, nous avions la responsabilité d'informer l'accusé, ou la personne trouvée coupable, de ses droits d'appel et de la façon de procéder. Nous nous chargions de la première étape du processus d'appel, puis le comité d'appel devait déterminer si les choses pouvaient se dérouler sous notre supervision, ou si le directeur du service des avocats de la défense pouvait payer les frais, ou bien si le client devait les payer de sa poche.
    J'avais aussi le mandat parfois d'engager des avocats de l'extérieur pour plaider en cour martiale, soit parce que nous manquions de personnel, soit pour éviter d'être en conflit d'intérêts.
    L'alinéa 11f) de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit une exception précise à l'égard du droit d'un procès avec jury, c'est-à-dire que les infractions relevant de la justice militaire doivent être soumises à un tribunal militaire. Monsieur, reconnaissez-vous qu'il est nécessaire d'appliquer des règles spéciales pour veiller à ce que les membres des cours martiales puissent être en mesure de remplir leur mandat sans entrave quand ils doivent traiter d'infractions au code de discipline militaire, à la lumière de leur propre expérience et au niveau de l'unité pour le maintien de cette discipline?
    Je suis tout à fait d'accord avec vous, oui.
    D'accord.
    Merci. Votre temps est écoulé.

[Français]

    Monsieur Larose, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Jean-Marie Dugas.
     Je vous remercie d'être parmi nous. C'est un honneur pour nous de vous recevoir.
    Je vais aborder la question des procès sommaires. Je pense que le contexte et la culture sont des facteurs importants. Un peu plus tôt, on a parlé de la qualité des officiers chargés d'informer les gens qui font l'objet d'un procès sommaire. Pour ma part, je ne suis pas d'accord. Je vais vous parler d'une expérience que j'ai vécue.
    En 1994, j'étais en formation à Shilo, à titre de recrue. J'y suis resté sept semaines. Le contexte était extrêmement difficile: très peu de sommeil, un entraînement intense, des températures de –30 oC, et j'en passe. Les instructeurs étaient absolument extraordinaires. Nous étions en présence de sous-officiers et d'officiers qui avaient l'expérience du combat et qui voulaient transmettre tout leur savoir pour que nous soyons bien entraînés.
     Un jour, un instructeur s'est même mis à pleurer parce que la situation le touchait. Il avait perdu un ami durant un combat. À un moment donné, nous avons eu une journée de congé, et quand nous sommes revenus,

[Traduction]

nous avons été accusés. Nous n'avions aucune idée de ce qui nous attendait. Nous étions très nerveux. Honnêtement, la seule chose à laquelle je pensais, et nous étions six en tout, c'est que nous voulions aller au Mexique, parce que nous ne savions carrément pas à quoi nous attendre. Quand l'officier nous a expliqué le processus, nous n'avons rien entendu. Il faut comprendre que nous étions fatigués et inquiets.
Je trouve un peu ironique qu'on parle de choix aujourd'hui. Je pense qu'il y a deux poids deux mesures. On dit que les forces armées canadiennes sont uniques, mais on s'attend quand même à ce que des êtres humains réagissent normalement comme si tout était parfait. Nous avons finalement comparu devant le commandant et avons été condamnés à trois jours de corvée. C'était une simple erreur. Je peux à peine imaginer ce que cela peut être pour ceux qui se retrouvent en situation de combat à l'étranger et que l'officier leur donne le choix.
    Je pense que le projet de loi C-15 est bon. Il permet de remédier à certains problèmes, mais pas à tous.

[Français]

    Croyez-vous que des améliorations devraient être apportées au projet de loi C-15 en ce qui concerne les procès sommaires? Je vous ai parlé de la situation que j'ai vécue, mais je pense que bien d'autres militaires en ont vécu de toutes sortes, dont vous-même, d'ailleurs.
(1640)
    Si vous entendez, par cet exemple, qu'il peut y avoir des abus relativement aux procès par voie sommaire, je vous dirai que c'était nettement plus susceptible de se produire auparavant que ça ne l'est maintenant, entre autres parce qu'au fil des ans, le Cabinet du juge-avocat général a augmenté le nombre d'officiers disponibles sur les bases militaires. Par exemple, à l'époque où j'étais à Valcartier, je m'occupais de la réserve de Valcartier et de celle de Bagotville, alors que maintenant, deux ou trois, voire quatre officiers sont affectés à Valcartier, un autre s'occupe de la réserve, et un autre encore de Bagotville. La quantité est différente et la possibilité d'accéder aux avocats l'est également.
    Vous ayez vous-même vécu une situation de ce genre, et c'est bien, en ce sens que ça vous aide à comprendre. Je vais vous donner un exemple.
    Lorsque j'étais à Chypre, un des procès-verbaux que je révisais — en effet, le juge-avocat intervient, au bout du compte — concernait le chauffeur d'un commandant adjoint qui avait brûlé un feu rouge. Or le commandant adjoint était assis aux côtés du chauffeur quand ça s'est produit. Il a été accusé par son adjudant-chef. En fin de compte, le commandant adjoint a été juge et partie dans cette histoire. Il n'y avait pas de malice dans cette situation. C'est simplement arrivé. Tout le monde s'est dit que, étant donné qu'il avait brûlé un feu rouge, il plaiderait coupable.
    Évidemment — et ça nous ramène à ce que nous disions plus tôt —, lorsqu'une personne dit à son commandant ou son commandant adjoint qu'elle ne fait pas confiance à son jugement, elle va en cour martiale, et quand elle réintègre l'unité, c'est toujours un peu difficile. C'est le sentiment qu'on a lorsqu'on parle aux gens par l'entremise de la ligne téléphonique sans frais.
    En ce qui concerne les améliorations, j'aurais tendance là aussi à vous renvoyer aux commentaires exhaustifs émis par Me Drapeau sur le sujet. Cette possibilité n'existe pas maintenant, mais la décision d'un commandant pourrait faire l'objet d'une révision. Je sais que c'est plus difficile, mais c'est faisable. Ça se fait dans le cas de la chaîne de commandement et ça pourrait se faire autrement, par exemple dans le cadre de la cour martiale. Par contre, ça exigerait un meilleur encadrement, ce qui impliquerait probablement, entre autres, l'enregistrement des procédures.
    Quelles mesures pourraient être prises pour que la situation soit améliorée encore davantage?
    À l'heure actuelle, il n'y a pas de règle de preuve, ou très peu. Je pense que ça devrait être mieux encadré. Le juge-avocat général a très bien préparé un genre de directive lors de la dernière réforme. Cependant, elle devrait peut-être faire partie des ORFC. Dans ce cadre, les choses doivent se faire dans un ordre donné et ça doit être respecté. Ça demanderait plus de détails. Évidemment, ces gens ne sont pas des juristes, mais des gens affectés aux opérations, et la plupart du temps, ils occupent des postes de commandant adjoint ou de commandant.
    On ne pourrait pas non plus alourdir le système en se rendant jusqu'au point où ça deviendrait une cour martiale, mais pour éviter de trop en imposer à nos commandants, un système de révision auprès de la cour martiale serait probablement souhaitable.
    Monsieur Larose, votre temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Poursuivons.
    Monsieur Chisu.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'avoir accepté l'invitation du comité. Je n'ai que trois questions à poser, une pour chacun d'entre vous.
     Monsieur Holloway, le gouvernement a indiqué qu'il allait modifier l'article 75, qui porte sur les casiers judiciaires. L'amendement exclurait des casiers judiciaires environ 95 p. 100 des déclarations de culpabilité par procédure sommaire.
    À votre avis, est-ce que cet amendement améliore le système de justice militaire? Pourriez-vous nous en dire un peu plus là-dessus et nous donner un exemple d'une déclaration de culpabilité par procédure sommaire qui figurerait au dossier criminel d'un militaire, mais pas d'un civil? J'ai fait mon droit militaire il y a longtemps, et je ne m'en souviens plus.
    Nous étions d'accord là-dessus, M. Harris et moi. Comme je viens de le mentionner, le service militaire apporte tout un lot de facteurs de stress anormaux, et tous ceux qui ont porté l'uniforme ont fait des choses qu'ils ont regrettées en situation de stress, et ils savaient peut-être même que c'était mal de le faire. Nous méritons d'être punis pour ces choses, et nous le sommes.
    Est-ce que cela signifie qu'on devrait nous empêcher d'entrer aux États-Unis? C'est une autre histoire. Je suis d'accord avec M. Harris sur ce point, c'est-à-dire que les infractions purement et strictement militaires ne devraient pas figurer dans un casier judiciaire.
    Pourriez-vous nous donner un exemple?
(1645)
    Bien sûr. Je vais vous donner un exemple extrême, puis je vais vous en donner un plus commun.
    Un exemple extrême serait un membre des forces qui dirait — pardonnez mon langage, hansard — « Allez au diable, je ne me couperai plus les cheveux! » Il serait accusé, condamné et puni pour cela. On présume qu’il sera au final libéré du service. Une telle attitude est fatale pour l’efficacité au combat et la cohésion de l’unité, entre autres choses, dans une organisation comme les Forces canadiennes, mais est-ce que cela mérite d’avoir un casier judiciaire à vie? Probablement pas.
    Est-ce qu’une infraction comme celle-là va mener à un casier judiciaire? Je vous pose la question parce que vous donnez un exemple extrême, mais on ne sait pas si cela va se retrouver dans un casier judiciaire.
    Je ne sais pas. Mais si le membre avait franchi un pas de plus et avait frappé la personne qui lui ordonnait de se faire couper les cheveux, cela lui vaudrait un casier judiciaire, et je ne suis pas certain que cela devrait être le cas.
    Mais s’il s’agit de voies de fait, c’est une infraction qui vaudrait à son auteur un casier judiciaire dans le monde civil également, n’est-ce pas?
    Je vous le demande parce que j’ai déjà été militaire, et je ne veux pas que les militaires soient traités différemment ou profitent d’un traitement de faveur par rapport aux autres citoyens. J’étais citoyen et j’ai servi mon pays. Ce n’est pas que le traitement était si différent dans la garnison. Pour les opérations, il y a les règles d’engagement, et vous savez très bien que c’est autre chose.
    Pouvez-vous nous donner quelques précisions? Quels amendements proposeriez-vous? Je pense que M. Harris faisait allusion à cela. Comment pourrait-on trouver un certain équilibre?
    Je dirais que si quelqu’un est accusé et trouvé coupable d’une infraction punissable en vertu du Code criminel, il serait approprié de l’inscrire à son casier judiciaire. Par contre, si quelqu’un est accusé d’une infraction purement militaire, je ne crois pas que ce soit justifié.
    Je ne veux pas faire le difficile, monsieur Chisu, mais à moins d’avoir une liste complète devant moi, et je serais heureux de la passer en revue point par point, je ne suis pas certain de pouvoir vous donner une réponse formelle. Je maintiens que les hommes et les femmes militaires commettent des erreurs en réaction à des situations anormalement stressantes, et un casier judiciaire ne devrait pas être la récompense pour avoir accepté de servir leur pays.
    J’ai une question pour M. Hamel.
    Une des propositions avancées durant le débat sur le projet de loi C-15 en deuxième lecture était d’imposer un quota sur la composition du Comité des griefs, précisant que 60 p. 100 des membres ne devaient pas avoir servi dans les forces.
    Le Comité des griefs est un tribunal administratif, et vous savez que j’ai participé à différents tribunaux administratifs. Le rôle d’un tel tribunal est d’appliquer son expertise à un ensemble de faits particuliers ou de faits de droit variés. Compte tenu de tout cela, pensez-vous qu’il serait logique d’imposer un quota afin d’exclure de la sélection des personnes qui ont des antécédents pertinents?
    Plus précisément, je vous demande pourquoi vous êtes en faveur de l’exclusion des membres des forces. Je crois comprendre d’après votre proposition que vous êtes contre l’idée de permettre aux membres des forces de siéger au comité.
    Merci de me poser la question, monsieur Chisu.
    Non, c’est plutôt le contraire. Je me suis peut-être mal exprimé, mais je considère que l’expérience militaire est un atout. Ce que j’ai voulu dire, c’est que je crois également à la valeur de la variété et de la diversité. Je ne pense pas avoir dit… Ce serait une erreur à mon avis d’imposer un quota. En tant que président, mon unique but est de recruter les candidats les plus compétents qui soient pour siéger au comité. Je crois qu’il serait inapproprié d’exclure des membres en fonction de leurs qualifications ou parce que le quota a été atteint. C’est mon opinion.
    Pour mettre les choses en contexte... Prenons une personne qui a été dans les cadets quand elle était jeune, simplement pour s'amuser ou pour décider si la vie militaire lui convenait ou non, et qu'elle a par la suite mené une brillante carrière au sein de différents tribunaux, eh bien cette personne pourrait ne pas être admissible à un poste au comité. De la même façon, quelqu'un qui a été réserviste pour payer ses études collégiales et qui n'a plus jamais par la suite servi dans les Forces canadiennes serait aussi exclu de la sélection, si on avait atteint le quota.
    Je pense qu'un militaire qui a un grief à déposer... Pour le chef d'état-major et pour le comité, mon seul objectif est d'aller chercher les meilleurs candidats disponibles. Si ce candidat a de l'expérience, qu'il en soit ainsi. Si le meilleur candidat disponible à ce moment-là n'a pas d'expérience, c'est très bien aussi. Mais à mon avis, il ne faut pas exclure de la sélection des candidats qui ont de l'expérience militaire. Je ne pense pas qu'ils soient couverts de goudron, et ils ne devraient pas être désavantagés. Je ne crois pas qu'il faut les exclure.
(1650)
    Merci, votre temps est écoulé.

[Français]

    Monsieur Brahmi, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Dugas.
    Lorsque nous avons parlé de la composition des jurys et du processus de sélection dans les cours martiales, j'ai eu l'impression que vous n'étiez pas tout à fait d'accord avec votre voisin concernant le fait que la composition ou la sélection d'un jury d'une cour militaire est différente de celle d'une cour criminelle qu'on retrouve dans le monde civil. Comme vous n'avez pas vraiment eu le temps d'expliquer votre point de vue par rapport à celui de votre voisin, je vous donne donc l'occasion de le faire.
    Mon désaccord ne portait pas vraiment sur la composition. Mon voisin disait que le rôle était différent. Selon moi, le rôle des membres d'un comité est exactement le même que celui des membres d'un jury dans une cour criminelle. Ils arrivent en cour, ils s'assoient, ils entendent la preuve et ils délibèrent pour déterminer si la personne est coupable ou non.
    Par contre, dans une cause criminelle, il y a une notion de grade qui entre en ligne de compte dans le processus de sélection des membres d'un jury, ce qui n'existe pas dans le monde civil.
    Effectivement, c'est un peu ce que j'exprimais tout à l'heure. Il s'agit de ma grande réserve sur la disposition actuelle, même si je suis d'accord pour dire qu'il s'agit d'une amélioration par rapport au processus antérieur. Ce n'est pas la première fois qu'on dit qu'il est impossible de faire certaines choses dans les Forces canadiennes. Pourtant, finalement, après que c'est fait, cela fonctionne très bien.
    Par exemple, on se demandait s'il était possible d'avoir une cour martiale en Afghanistan. On en a eu une dans une cause de meurtre. Cela démontre qu'il y a effectivement place à de l'amélioration.
    J'ai bien aimé un autre commentaire qui a été formulé précédemment et qui rejoint les positions que je défends, pour ce qui est de la sélection. Encore une fois, je ne doute pas de l'honnêteté de l'administrateur de la cour martiale, mais le processus n'est pas transparent. Tout est fait dans son bureau ou à partir de son ordinateur. Il y aura, selon le grade de la personne accusée, la présence obligatoire d'un général, d'un colonel ou d'un lieutenant-colonel, et on peut actuellement aller jusqu'au grade de capitaine. Toutefois, si on laisse cela à tous les soldats, les caporaux, les caporaux-chefs et même les sergents maintenant, on laisse plus de la moitié des membres des Forces canadiennes à l'écart.
    Le processus ne consiste pas à être jugé par ses pairs, même si le principe devrait être le même. On parle d'un processus un peu plus britannique où les officiers avaient le droit de regard sur à peu près tout ce qui se passait dans leur corps d'armée. Aujourd'hui, on est une force professionnelle, et, comme je vous le mentionnais, j'ai connu et je connais encore des gens qui ont des maîtrises. Certains ont même entrepris de faire des études doctorales. Pourtant, ils sont caporaux ou caporaux-chefs par choix, parce que la famille les a amenés à avoir une position plus sédentaire.
    Avez-vous des exemples où le processus de sélection du jury n'a pas été bien fait, justement à cause de ce problème dont vous parlez?
    Dans la cause du capitaine Semrau, rappelez-vous qu'une des requêtes qui avaient été faites en début de procès concernait le processus de sélection. Vous pouvez probablement retrouver dans les transcriptions de la cour qu'il s'agit d'un processus où on a passé à travers toutes les étapes.
    Encore une fois, le problème est qu'il n'est pas possible de connaître davantage les individus qui siègent, comme on pourrait le faire ailleurs par exemple, pour savoir s'il y a un intérêt ou non. Alors qu'on compte au maximum cinq membres de la cour, nous nous sommes retrouvés à quatre pour le reste de la durée du procès parce qu'il y avait une question d'absence pour cause de maladie dont nous n'avions pas été informés. Nous aurions probablement été beaucoup plus loin pour faire en sorte qu'un cinquième membre agisse à titre de remplaçant. Toutefois, il n'y avait aucun moyen pour nous de savoir que cette personne était absente pour des raisons médicales. Nous n'avons donc pas pu savoir si cette personne allait pouvoir siéger à la cour jusqu'à la fin. Le procès a duré quand même trois ou quatre mois.
    C'est ce que j'entends par le processus. Est-ce honnête? Y a-t-il eu une raison qui explique que nous n'ayons pas pu le faire?
(1655)
    Merci.
    J'ai une question pour M. Hamel au sujet de la composition du comité.
    Nous comprenons que vous soyez contre le fait de permettre à quelqu'un qui aurait un passé militaire de siéger à votre comité. D'un autre côté, comme vous l'avez dit dans votre allocution d'ouverture, le fait d'avoir un passé militaire permet de poser des questions plus pertinentes et d'avoir une meilleure compréhension des spécificités militaires.
    Comme cela est mentionné dans votre rapport, étant donné que certains cas sont donnés à un seul membre du comité, n'y a-t-il pas un risque qu'il y ait un traitement différent? Lorsqu'un seul membre du comité des griefs gère un cas, est-ce qu'il se peut qu'un civil gère ce cas différemment de quelqu'un qui aurait un passé militaire?
    Je vous remercie de votre question. C'est une excellente question.
    Cela fait partie du processus d'éducation ou de formation, si je puis dire, lorsqu'un nouveau membre est affecté au comité.
    En règle générale, les dossiers sont attribués à un seul membre. Cependant, lorsqu'un membre est en poste depuis peu, qu'il ait de l'expérience militaire ou non, le président va normalement attribuer le dossier à deux membres pour permettre à ce nouveau membre de bien comprendre. Il y a une période de formation.
    Par ailleurs, il faut comprendre que même si un membre siège seul, il est encadré par une équipe, un peu comme un juge qui dispose de greffiers. Il y a un conseiller ou une conseillère juridique pour chaque dossier. Nous avons également un chef d'équipe et un agent de griefs. Ces gens travaillent au comité depuis des années, ils ont de l'expérience. Nous avons des anciens militaires, des civils, des sociologues et des avocats qui ne travaillent pas en tant qu'avocats.
     Nous entourons bien les membres pour nous assurer que l'approche du comité démontre une certaine constance. Bien que chaque membre soit indépendant en ce qui a trait à ses décisions, il y a quand même une collégialité. De plus, les autres membres sont toujours disponibles, au cas où un membre aurait des questions. Nous mettons des procédures en place.
    À mon avis, c'est un atout. Cela ne doit pas être nécessairement un préalable. Je suis en faveur de la diversité, mais je ne suis pas favorable à un quota. Je favorise la meilleure personne, au meilleur moment, pour faire partie du comité afin d'obtenir la meilleure évaluation et la meilleure proposition au chef d'état-major de la Défense et le meilleur règlement possible pour les soldats dont les griefs font l'objet d'une révision par le comité.
    Je ne souhaite pas qu'il n'y ait que des civils ou que des anciens militaires. Je veux que l'on nomme la meilleure personne. Je suis opposé aux quotas.

[Traduction]

     Monsieur Brahmi, c'est tout le temps que nous avions.
    Je prierais également les témoins de s'en tenir à des réponses brèves. Nous débordons du temps qui nous est alloué.
    Monsieur Norlock, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et par votre entremise, je remercie également les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adresse à M. Holloway. Je vais respecter les directives du président et vous demander d'être bref dans votre réponse, car on pourrait en discuter longtemps.
    Monsieur Holloway, vous avez parlé du système de justice militaire de l'Australie dans le témoignage que vous avez livré au comité concernant le projet de loi C-41. Vous avez dit, et je vais paraphraser, qu'il s'appuyait sur une approche beaucoup plus viscérale et beaucoup moins réfléchie que celle du Canada.
    Sachant que les anciens juges en chef Dickson et Lamer ont tous les deux mené des examens indépendants à ce sujet, tout comme le juge en chef LeSage en 2011, et qu'ils ont tous soutenu le système de justice militaire, est-ce que cela ne vous convainc pas davantage qu'ici, au Canada, nous avons pris le temps de réfléchir et de faire des recommandations qui conviennent à notre système de justice militaire? Les citoyens de ma circonscription, et la plupart des Canadiens j'imagine, aiment qu'on fasse des comparaisons entre nous et nos alliés. Vous l'avez fait avec l'Australie; je me demandais si vous pouviez faire de même rapidement pour les États-Unis et la Grande-Bretagne.
    Je ne suis pas certain de pouvoir établir des comparaisons avec les États-Unis.
    Pour ce qui est de la Grande-Bretagne, nos histoires ont pris des chemins différents. Il y a aussi un juge-avocat général au Royaume-Uni, comme ici, mais sa mission est tout autre. Ici, le juge-avocat général a entre autres le mandat de conseiller le gouvernement sur des questions relatives à la justice militaire. En Grande-Bretagne, son rôle est plus vaste que cela, et il consiste principalement à nommer les juges militaires. C'est un rôle très différent.
    Comme bien d'autres choses au Royaume-Uni, le système de justice militaire est mis à l'épreuve par le processus d'européanisation. La question de l'heure est de savoir si la Grande-Bretagne va demeurer au sein de l'Union européenne, et cela en raison des pressions qui sont exercées sur elle, de l'incompatibilité potentielle entre la common law et l'approche continentale, qui est appliquée par l'Union européenne.
    C'est une réponse brève.
(1700)
    Bien. Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Hamel. Le paragraphe 29.16(11) de la Loi sur la défense nationale exige qu'avant d'entrer en fonction, les membres du Comité des griefs prêtent le serment suivant:
Je, .........., jure (ou affirme) solennellement que j’exercerai fidèlement et honnêtement les devoirs qui m’incombent en ma qualité de membre du Comité des griefs des Forces canadiennes en conformité avec les prescriptions de la Loi sur la défense nationale applicables à celui-ci, ainsi que toutes règles et instructions établies sous son régime.
    Considérez-vous que tous les membres du comité prennent ce serment au sérieux? Je suis certain que c'est le cas, mais c'est une question rhétorique. D'après vous, il a-t-il une raison de croire que les anciens membres des Forces canadiennes qui prêtent ce serment avant de devenir membres du comité prennent cet engagement un peu moins au sérieux que des gens qui n'ont connu que la vie civile? Je fais ici référence aux conflits d'intérêts. Considérez-vous que les anciens membres des FC peuvent faire preuve d'objectivité dans le cadre de leurs fonctions au sein du comité?
    Merci de me poser cette question, monsieur le président.
    Cette question comprend un certain nombre de questions secondaires. Je tenterai d'être bref.
    La question de la partialité a été soulevée et débattue à la Chambre des communes. Je peux vous dire, à titre de membre du comité depuis quatre ans, que la question de la partialité, réelle ou perçue, n'a jamais été soulevée ni par un soldat dont j'examinais le grief, ni par une autorité des Forces canadiennes, dont la décision est également examinée, ni par un conseiller juridique représentant un membre des FC dans le cadre d'un processus de grief. Jamais elle n'a été soulevée.
    Celui qui rend une décision doit effectuer un test objectif quand la question de la partialité est soulevée. Au cours des quatre dernières années, je n'ai jamais eu à l'appliquer. Avant de venir ici, j'ai demandé à mon vice-président ce qu'il en était. Il occupe ses fonctions depuis huit ans. La question de la partialité, réelle ou perçue, n'a attiré son attention dans aucun dossier. Voilà qui est, en un certain sens, révélateur.
    Nous prêtons effectivement serment, un serment que nous prenons avec le plus grand sérieux. Si vous regardez la dernière page de mon exposé, vous verrez que j'y ai inclus des statistiques sur les cinq dernières années. Elles témoignent de la tendance relative aux pouvoirs et à la capacité de prise de décision du comité, car ce dernier prend des décisions, qui deviennent des recommandations.
    Quand un membre du comité entend une cause, il prend une décision. Vous constaterez que la tendance évolue en fait dans le sens inverse. Au cours des deux dernières années, 55 p. 100 des décisions du comité, fort de l'expérience militaire de ses membres, sont favorables en tout ou en partie au membre, alors que 45 p. 100 indique au chef que l'institution a bien agit. Les trois années précédentes, le rapport était inversé; c'était 55 et 45 p. 100.
    Globalement, le rapport est de 50-50, et notre rôle ne consiste pas à défendre le plaignant ou les FC. À titre de tribunal, nous prenons le serment au sérieux. Nous examinons les faits, appliquons les règles, les lois et la jurisprudence, arrivons à ce que nous croyons être la conclusion la plus appropriée et formulons des recommandations à l'intention du décideur. Il appert que notre rapport est près de 50-50, mais le fait qu'au cours des deux dernières années, ce rapport a été de 55 et de 45 p. 100 est révélateur.
     Je ne crois pas que l'expérience militaire d'une personne nuise à sa capacité d'être neutre. En fait, comme je l'ai souligné dans mon exposé, elle me permet, quand je pose des questions, de savoir où je vais. Je sais quoi demander et qui interroger. Je suis en mesure de déterminer si j'ai obtenu une réponse ou non et je n'ai pas peur d'insister, car je sais comment m'y prendre. Je suis aussi entouré d'une bonne équipe.
    Merci beaucoup.
    Le temps est écoulé.
    Vous avez la dernière question du deuxième tour, monsieur Strahl.
    Je donnerai mon temps à M. Alexander.
    Le président: Monsieur Alexander.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir à un point au sujet duquel je n'ai pas eu l'occasion de poser de question la première fois. Nous avons discuté, au cours d'échanges précédents, de la différence entre un jury civil et un comité de la cour martiale, mais je crois qu'il est particulièrement important que le comité et les Canadiens la comprennent. En fait, comme un de mes collègues l'a déjà souligné, la Charte reconnaît les comités de la cour martiale à l'alinéa 11f).
    Pour faire suite à votre réponse précédente, je me demande si vous pourriez nous rappeler la différence entre un jury civil et un comité de la cour martiale, et pourquoi cette nuance — ainsi que la différence de principe — est d'une importance si fondamentale pour comprendre le système de justice militaire. Ce dernier est protégé par la Charte et a été considéré exemplaire dans le cadre d'examens successifs et, en fait, de toutes les évaluations, internationales ou autres, dont nous avons entendu parler, même s'il exige tout de même une mise à jour cohérente et continuelle.
(1705)
     Merci, monsieur Alexander.
    Vous savez, les membres du comité ont tenu plusieurs fois de tels propos, passant du comité au jury, à la sélection des membres et ainsi de suite. Nous n'aimons peut-être pas ce qu'indique la Charte des droits, telle est la charte que nous avons. Elle officialise clairement le principe constitutionnel selon lequel une cour martiale diffère d'un jury civil. C'est donc avec tout le respect que je vous dois que je dis qu'il serait faux de croire que le travail consiste à déformer la constitution et le libellé limpide de l'article 11 de la Charte.
    Tout revient au principe à la base même de l'existence du système de justice militaire, qui ne se résume pas à optimiser la liberté individuelle. Cette tâche incombe à la société civile au Canada. L'objectif de la société militaire consiste à maintenir la cohésion, la discipline et la volonté des gens à s'exposer au danger; c'est différent de ce que nous attendons.
    Certains connaissent bien mieux que moi les rouages de la cour martiale. Je serais heureux de m'en remettre à eux. Mais au regard des principes fondamentaux du système de cours martiales, le simple fait d'affirmer qu'elles doivent être semblables à des jurys est ce que j'irais jusqu'à qualifier de contraire aux principes constitutionnels sur lequel notre pays de fonde.
    Merci.
    Monsieur Hamel, vous connaissez, comme le comité, je crois, le décret 2012-0861 pris le 19 juin 2012. Nos attachés de recherche nous ont rappelé les faits concernant les paiements à titre gracieux autorisés par le CEMD dans le contexte du processus de règlement des griefs.
    L'élément principal de ce décret est le suivant:
Le chef d’état-major de la défense peut autoriser le versement d’un paiement à titre gracieux à toute personne visée par une décision définitive rendue dans le cadre de la procédure applicable aux griefs établie en vertu de la Loi sur la défense nationale.
    Pourriez-vous nous expliquer comment ce changement, s'il reçoit évidemment l'aval du Conseil du Trésor, constituera, pourrait ou devrait constituer une amélioration du processus des griefs?
    Merci de me poser la question.
    Il n'y a aucun doute dans mon esprit que c'est une amélioration par rapport à la situation qui prévalait il y a quelques années. Je considère toutefois qu'il s'agit d'un progrès modeste et quelque peu limité.
    Je peux vous dire que depuis juin, car j'ai écouté ce que le juge-avocat général et le VCEMD ont dit l'autre jour, nous avons appliqué cette disposition deux fois jusqu'à présent. Dans deux dossiers, nous avons formulé des recommandations à l'intention du CEMD, lui indiquant que la disposition relative aux paiements à titre gracieux pourrait, selon nous, être utilisée dans deux causes. Ces deux affaires sont encore en instance, ce qui explique pourquoi aucune décision n'a encore été rendue. Je peux donc vous dire que nous nous sommes prévalus deux fois de la disposition.
    Je dois toutefois répéter qu'à notre avis, la disposition ne va pas aussi loin que la recommandation du juge en chef Lamer en ce qui concerne le droit d'effectuer des paiements financiers, en cas de tort, à titre gracieux. C'est un peu limité.
    Je ne suis pas avocat, mais d'après ce que je comprends du paiement à titre gracieux, si une règle ou un règlement s'applique, on ne peut pas s'en servir pour contourner le système ou combler un vide. Ainsi, si le Conseil du Trésor décide de limiter un certain avantage dans le DRAS, le paiement à titre gracieux ne peut servir à le remplacer, le restreindre ou le compenser. Il ne sert qu'en cas de circonstances exceptionnelles, en l'absence de tout autre recours.
    C'est donc un pas en avant. Il ne va pas aussi loin que ce que recommande l'ancien juge en chef Lamer, mais je ne peux dire que c'est un pas en arrière. En toute honnêteté, c'est un progrès. Nous avons appliqué la disposition à deux reprises.
(1710)
    Merci. Le temps est écoulé.
    Nous savons que la sonnerie d'appel retentira dans les 5 à 10 prochaines minutes. Nous devons également nous pencher sur les travaux du comité. Ainsi, je n'ai le temps d'accorder qu'une question par parti. Je demanderais à chaque intervenant de poser une question très brève.
    Monsieur Harris, pour le NPD.
    Merci, monsieur le président.
    Je dirais à Dean Holloway que je ne jouerai pas à l'avocat avec lui, malgré nos titres de juristes et de conseillers de la Reine. Je vous poserai toutefois une question au sujet de la Charte des droits, puisque vous avez abordé la question dans le contexte du droit au procès avec jury.
    Ce droit est exclu dans l'article 11 de la Charte des droits, à un seul alinéa, qui stipule que tout inculpé a le droit, « sauf s’il s’agit d’une infraction relevant de la justice militaire, de bénéficier d’un procès avec jury ». Vous ne pouvez obtenir un procès avec jury, mais cela implique, sur le plan juridique, que vous pouvez vous prévaloir de tous les autres droits prévus à l'article 11 ou dans le reste de la Charte.
    En conviendriez-vous?
    La question est assujettie à l'article 1.
    Tout, dans la Charte, est assujetti à l'article 1.
    Oui, mais...
    Attendez un instant. L'article 1 ne s'adresse pas aux militaires, mais à tout le monde. Vous admettriez donc qu'en prévoyant expressément l'exclusion d'un procès avec jury si la cour martiale intervient — et je vous ferai grâce de la phrase en latin, que nous connaissons tous —, et en l'acceptant, la Charte s'applique bel et bien.
    La Charte s'applique évidemment à tous.
    C'est ma question. Merci.
    Merci.
    Monsieur McKay.
    Pour en revenir à toute la question des paiements à titre gracieux que vous considérez peut-être comme un pas en avant, je vous ferais remarquer que c'est peut-être plus un pas de côté qu'un pas en avant. Si je regarde votre recommandation, elle indique ce qui suit:
Le comité a recommandé que le pouvoir conféré par la loi au CEMD en tant qu’autorité de dernière instance soit modifié de façon à lui déléguer des pouvoirs financiers appropriés. Cela lui permettrait de rendre une décision quant à la compensation financière lorsque cette forme de redressement est demandée.
    D'après ce que je comprends, et vous pourriez peut-être me corriger si je suis dans l'erreur, le CEMD peut suivre votre recommandation, prendre une décision et libeller un chèque.
    Qu'est-ce qui diffère avec le décret de juin dernier?
    Il y a deux éléments à prendre en compte. Il s'agit du rapport annuel de l'an dernier, et le décret relatif au paiement à titre gracieux par le CEMD n'avait pas encore été pris. Il faut donc tenir compte du fait que ce recours n'existait pas quand nous avons formulé cette recommandation.
    En outre, quand le CEMD conclut qu'un membre satisfait aux conditions du règlement, il ne libelle pas un chèque, mais il lui accorde un avantage. Il faut donc qu'il soit très clair que si la chaîne de commandement considère qu'un membre ne satisfait pas aux conditions et lui refuse un avantage, mais que le CEMD juge, à titre de décideur, que le plaignant satisfait aux conditions a, b et c, il lui permettra de se prévaloir de l'avantage. En fait, il a accordé l'avantage au membre. Il convient de faire la distinction.
    Dans les dossiers problématiques où le membre ne satisfait pas à la politique et on ne peut recourir au paiement à titre gracieux, mais où fondamentalement, il conviendrait de dédommager le membre, le CEMD ne peut agir. Voilà pourquoi je considère que la disposition ne va pas aussi loin que la recommandation de l'ancien juge en chef Lamer. Il peut autoriser le versement d'un paiement à titre gracieux quand rien d'autre ne s'applique, mais si une autre mesure intervient et que le membre ne satisfait pas aux conditions, alors qu'il faut lui apporter une aide financière, le CEMD ne peut que renvoyer l'affaire au Directeur des réclamations et des contentieux des affaires civiles pour que celui-ci examine et évalue la réclamation. Le CEMD ne peut...
    Et il refuse régulièrement de le faire. Il refuse tout.
    Il se peut que le membre ne satisfasse pas au règlement.
(1715)
    D'après ce que je comprends, il affiche un dossier parfait. Il refuse tout.
    Revenons en arrière. Qu'est-ce que ce changement a permis d'accomplir?
    Je vais vous donner un exemple. Il s'agit d'une affaire dont je me suis occupé et que je vous résumerai brièvement. Le membre ne satisfait pas à une certaine politique. C'est un réserviste qui n'a pu entrer en service. La politique ne s'applique pas à lui, étant donné que son service — que je qualifierai de contrat même si ce n'en est pas un — n'a pas commencé. Nous ne pouvons appliquer la politique du 30 jours dans ce cas particulier. Cependant, le membre n'a pu entrer en fonction, s'étant fait dire moins de 24 heures avant le début de son emploi que son entrée en service serait retardée. Ces faits nous permettent de dire que cette situation n'est pas couverte par la politique ou quoi que ce soit d'autre.
    Il n'y a pas d'autre recours possible, car un réserviste qui n'est pas en service n'est pas rémunéré. En pareil cas, nous pourrions accorder le paiement à titre gracieux en indiquant que comme aucune responsabilité ou tort n'avait été admis, il convenait d'accorder un montant donné au plaignant pour le dédommager du léger report qui lui est imposé. Voilà un exemple de situation où cette mesure législative pourrait vraiment aider un plaignant.
    Merci.
    La sonnerie d'appel a commencé à retentir. Nous savons qu'elle sonnera 30 minutes.
    Je demanderai au comité de consentir unanimement à poursuivre la séance.
    Nous permettrons à M. Alexander de poser une dernière question, puis nous déclarerons le huis clos.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais dire très brièvement que je suis fort impressionné — à l'instar de certains de mes collègues — par le degré de confiance générale que vous accordez tous au système de justice militaire et aux possibilités de le bonifier grâce au projet de loi C-15 et aux améliorations subséquentes. J'aimerais vous assurer que le gouvernement reste déterminé à modifier l'article 75 relatif aux casiers judiciaires, ce qui aurait pour effet d'éviter un procès sommaire pour environ 95 p. 100 des condamnations, si l'on se fie à un échantillon récent des procès résultant en un casier judiciaire.
    Comme nous entendons apporter cette amélioration nous aussi et que les recommandations de l'ancien juge LeSage font toujours l'objet d'un examen, conviendriez-vous que les modifications apportées au projet de loi C-15 constitueront une amélioration substantielle du système de procès sommaire? Je suppose que ma question s'adresse à Dean Holloway ou à M. Dugas.
    Certainement. C'est une amélioration formidable par rapport à ce que nous avons maintenant.
    Si je peux me permettre, je prendrai 10 secondes pour dire à quel point je suis fier de voir toute l'attention que vous avez mise à vos recherches. C'est pour cette raison que c'est toujours un plaisir de comparaître.
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier nos témoins d'avoir comparu aujourd'hui afin de nous aider à examiner le projet de loi C-15 et de nous faire part de leurs recommandations et conseils. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Je veux également vous remercier tous les trois de votre service militaire et des services rendus au pays. Merci des sacrifices personnels que vous avez faits en servant au sein des Forces armées canadiennes.
    Sur ce, je veux recevoir une motion pour suspendre la séance. Quand je donnerai un coup de maillet, je demanderai à tous ceux qui ne sont pas députés de quitter la salle.
    Quelqu'un veut-il présenter une motion pour suspendre la séance?
    Je la présente.
    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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