Je vous remercie de vous joindre à nous pour la première vraie rencontre de notre comité cette session-ci.
Comme tout le monde le sait, le comité du commerce nous a confié la tâche de nous pencher sur certaines dispositions de la loi portant mise en oeuvre de l'accord de libre-échange qui doit être approuvé par la Chambre.
Nous avons convenu la semaine dernière de convoquer un certain nombre de témoins, et nous avons la chance de recevoir aujourd'hui des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du ministère des Ressources naturelles.
Mesdames et messieurs, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
Nous recevons Steve Verheul, de même que Zachary Archambault et Nicola Waterfield, qui relèvent du ministère des Affaires étrangères, ainsi que Jeff Labonté, qui représente les Ressources naturelles.
Je ne perdrai pas mon temps à vous expliquer la procédure, puisque vous la connaissez probablement tous déjà aussi bien, voire mieux que les autres personnes assises à cette table. Je vous remercierai donc simplement de vous joindre à nous aujourd'hui.
Chaque ministère a jusqu'à 10 minutes pour une déclaration préliminaire. Je crois que ce sont les fonctionnaires des Affaires étrangères qui ouvriront le bal.
Monsieur Labonté, vous devrez attendre la fin de la période de questions pour présenter votre propre déclaration.
Monsieur Verheul, je présume que c'est vous qui commencerez. La parole est à vous.
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Bonjour, monsieur le président, messieurs et mesdames les membres du Comité. Nous vous remercions de votre invitation et nous sommes heureux de nous présenter aujourd'hui devant le Comité. Nous répondrons avec plaisir à vos questions sur l'Accord Canada—États-Unis—Mexique après mon allocution.
L'ACEUM a été signé le 30 novembre 2018 au terme de 13 mois d'intenses négociations qui ont mobilisé un large éventail de dirigeants et d'intervenants et qui ont mis à profit les liens étroits tissés entre les représentants des gouvernements fédéral et provinciaux. L'accord a permis d'obtenir plusieurs résultats clés qui ont contribué à renforcer l'intégrité du marché nord-américain, à préserver l'accès du Canada aux marchés américain et mexicain et à moderniser certaines dispositions de façon à refléter notre économie moderne et l'évolution du partenariat nord-américain.
Le 10 décembre 2019, après plusieurs mois de discussions intensives avec nos homologues américains et mexicains, les trois pays de l'ALENA ont signé un protocole d'amendement visant à modifier certaines dispositions de l'accord initial relatives au règlement des différends entre États, au travail, à l'environnement, à la propriété intellectuelle et aux règles d'origine dans le secteur de l'automobile. Même si ces modifications sont en bonne partie le résultat de discussions aux États-Unis, le Canada a participé de près aux négociations de fond pour s'assurer qu'elles allaient dans le sens des intérêts canadiens. Tout au long des négociations, nous avons consulté de près les entreprises canadiennes, les associations canadiennes, les syndicats, la société civile et des groupes autochtones, dont les avis ont largement contribué au résultat final.
Pour vous mettre en contexte, il faut se rappeler que les discussions sur la modernisation de l'ALENA étaient particulières, et ce, pour plusieurs raisons. D'abord, parce que c'était la première renégociation à grande échelle d'un accord de libre-échange du Canada. Habituellement, les partenaires d'un accord de libre-échange visent à libéraliser le commerce. Dans ce processus, les États-Unis avaient, dès le début des négociations, pour objectif de « rééquilibrer » l'accord en leur faveur. De plus, le président Trump avait à maintes reprises brandi la menace de se retirer de l'ALENA s'il était impossible de trouver une solution satisfaisante.
La position de négociation initiale des États-Unis comprenait des mesures peu conventionnelles. Parmi celles-ci, notons: le démantèlement complet du système canadien de gestion de l'offre; l'élimination du mécanisme binational de règlement des différends commerciaux pour les droits antidumping et compensateurs; un mécanisme de règlement des différends qui aurait rendu l'accord totalement inapplicable; une exigence de 50 % de contenu américain pour les automobiles, ce qui aurait décimé notre secteur automobile; la suppression de l'exception culturelle; un chapitre sur les marchés publics qui aurait retiré l'accès aux marchés prévu dans l'ALENA et ainsi désavantagé le Canada par rapport à tous les autres partenaires d'accords de libre-échange des États-Unis; une clause de résiliation automatique de l'accord après cinq ans, appelée « clause d'expiration ».
De plus, l'administration américaine avait pris une mesure sans précédent, soit imposer des droits de douane sur l'acier et l'aluminium en provenance du Canada en invoquant de prétendues menaces à la sécurité nationale, mais sans aucune justification. L'administration américaine avait également lancé une enquête qui aurait pu aboutir à l'imposition de droits de douane sur les automobiles et les pièces importées du Canada.
Face à cette situation, le Canada a mené de vastes consultations auprès des Canadiens sur les objectifs du processus de modernisation de l'ALENA. Se fondant sur les vues exprimées et notre expertise interne en matière de politique commerciale, le Canada s'est fixé trois grands objectifs: préserver les dispositions importantes de l'ALENA et l'accès aux marchés américain et mexicain; moderniser et améliorer l'accord dans la mesure du possible; rendre l'accès aux marchés des États-Unis et du Mexique encore plus sûr et stable pour les entreprises canadiennes.
Résultat, le Canada a réussi à préserver les engagements tarifaires pris dans l'ALENA, notamment le traitement en franchise de droits pour les produits énergétiques. Nous avons conservé les dispositions prévues au chapitre 19 (mécanisme fondé sur des groupes spéciaux binationaux pour régler les différends en matière de droits compensateurs et antidumping). Nous avons aussi préservé l'admission temporaire des gens d'affaires; l'exception culturelle, et le règlement des différends entre États, qui s'est même amélioré grâce aux négociations.
Dans le domaine de l'automobile, des modifications ont été apportées au régime des règles d'origine afin d'encourager l'utilisation d'un plus grand nombre d'intrants en provenance du Canada, notamment en augmentant les exigences en matière de teneur en valeur régionale pour les automobiles et les pièces automobiles et en supprimant les incitations à produire dans des pays à faible coût. Associées à l'exemption de quotas des éventuels droits de douane américains de l'article 232 sur les automobiles et les pièces automobiles, garantie dans le cadre du résultat final, ces nouvelles règles d'origine pour le secteur automobile encourageront la production et l'approvisionnement en Amérique du Nord, ce qui constitue un résultat important pour nos secteurs de l'acier et de l'aluminium.
Au chapitre de la modernisation de l'ALENA, les disciplines sur le commerce des marchandises et l'agriculture ont été modernisées, notamment en ce qui concerne l'administration et les procédures douanières, les obstacles techniques au commerce et les mesures sanitaires et phytosanitaires. S'y ajoute un nouveau chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation, qui encourage la coopération et protège le droit du gouvernement à réglementer dans l'intérêt public, y compris pour assurer la santé et la sécurité.
Les engagements en matière de facilitation du commerce et de procédures douanières ont été modernisés pour le XXIe siècle afin de faciliter les échanges transfrontaliers, notamment par le recours à des processus électroniques qui réduiront les formalités administratives des exportateurs et leur permettront d'économiser de l'argent. Des disciplines nouvelles et modernisées sur les obstacles techniques au commerce dans des secteurs clés sont conçues pour réduire au minimum les obstacles pour les Canadiens qui font des affaires aux États-Unis et au Mexique, tout en préservant la capacité du Canada de réglementer dans l'intérêt public. L'accord comprend également des obligations modernisées sur le commerce frontalier des services et les investissements y compris dans les domaines des services financiers et des télécommunications, en plus d'un nouveau chapitre sur le commerce numérique.
En ce qui concerne le travail et l'environnement, nous avons fait d'importants progrès en concluant des chapitres ambitieux qui sont pleinement intégrés à l'accord et garantissent que les lois nationales ne seront pas contournées afin d'obtenir un avantage commercial indu.
Les résultats comprennent également un mécanisme d'application spécial qui fournira au Canada un processus amélioré permettant d'assurer la mise en œuvre efficace des réformes du travail au Mexique, particulièrement en ce qui concerne la liberté d'association et la négociation collective.
Enfin, les résultats font progresser les intérêts du Canada en faveur d'un commerce inclusif, y compris par une plus grande participation des femmes et une meilleure prise en compte des intérêts des peuples autochtones, notamment en prévoyant une exception relative aux droits des autochtones.
Il y a quelques autres résultats intéressants aussi.
Concernant les secteurs de la gestion de l'offre, rappelons que les États-Unis ont demandé explicitement et publiquement le démantèlement complet du système canadien de gestion de l'offre. En fin de compte, nous avons préservé les trois piliers clés de ce système et n'avons accordé qu'un accès minimal aux États-Unis. Le gouvernement a exprimé clairement sa volonté d'accorder une compensation complète et équitable aux agriculteurs pour leurs pertes d'accès au marché.
En matière de propriété intellectuelle (ou PI), certains résultats nécessiteront la modification du cadre juridique et politique actuel du Canada dans certains domaines. Par exemple, il faudra établir des mécanismes d'application des droits de PI afin de permettre la prise de mesures d'office par les autorités frontalières contre les produits soupçonnés d'être des produits de marque contrefaits ou des produits pirates, qui sont en transit, et prévoir des infractions pénales pour le détournement non autorisé et délibéré de secrets commerciaux.
Dans d'autres domaines, le Canada dispose de périodes de transition pour mettre en œuvre ses engagements. Ainsi, le Canada aura 2 ans et demi après l'entrée en vigueur de l'accord pour remplir son obligation d'assurer la protection du droit d'auteur pendant la vie de l'auteur puis une période de 70 ans suivant son décès (le Canada assure actuellement une protection pendant la vie de l'auteur puis une période de 50 ans).
En vertu du protocole d'amendement, les parties ont convenu de supprimer l'obligation d'assurer la protection des données durant 10 ans en ce qui concerne les médicaments biologiques, ce qui signifie que le Canada n'a pas besoin de modifier son régime actuel dans ce domaine.
En ce qui concerne les obligations propres au domaine de l'énergie, l'accord répond à une demande de longue date de l'industrie canadienne visant à résoudre un problème technique lié à l'utilisation de diluant, un liquide à base de pétrole qui est souvent ajouté au pétrole brut pour qu'il circule bien dans les pipelines. Ce problème entraînait auparavant l'imposition de droits et d'autres frais pouvant atteindre 60 millions de dollars par an pour les entreprises canadiennes.
Il vient aussi remédier à une source de préoccupations pour certains Canadiens en supprimant la « clause de proportionnalité sur l'énergie ». Il reconnaît également qu'il est dans l'intérêt des parties d'harmoniser les normes de performance et les procédures d'essai en matière d'efficacité énergétique.
Le Canada et les États-Unis ont également convenu d'une lettre d'accompagnement bilatérale sur la coopération énergétique et la transparence. Cette lettre contient des dispositions qui contribueront à procurer plus de certitude et de transparence aux intervenants canadiens dans le processus d'autorisation de leur participation au secteur énergétique aux États-Unis. Par exemple, le Canada et les États-Unis ont convenu de publier des renseignements, notamment sur le processus de demande, tout paiement monétaire à verser et les délais pertinents liés à ces autorisations.
En conclusion, j'aimerais souligner que nos objectifs pour ces négociations ont été éclairés par les priorités et intérêts du Canada, par un dialogue suivi avec les provinces et les territoires ainsi qu'avec un large éventail d'intervenants.
Voilà qui conclut mon allocution. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Merci.
D'abord et avant tout, j'aimerais vous remercier, vous et votre équipe. La dernière année ou les deux dernières années ont probablement été très difficiles, et nous en sommes à la dernière ligne droite pour ratifier cet accord.
Premièrement, j'ai un avis de motion à vous remettre. Je vous le lirai, puis en ferai circuler une copie. Il semble que le Président de la Chambre ait refusé une demande de débat d'urgence sur le projet Teck Frontier, donc voici ma motion:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des ressources naturelles entreprenne immédiatement une étude de l'annulation du projet minier Teck Frontier; que les témoins soient entre autres le ministre des Ressources naturelles et des représentants de Ressources naturelles Canada; que l'étude comprenne au moins cinq rencontres; et que ces rencontres soient télévisées.
Évidemment, c'est une conversation que nous devrons avoir un peu plus tard, parce que ce n'est qu'un avis de motion.
J'enchaînerai donc tout de suite avec mes questions.
Comme vous le savez, nous formons le comité des ressources naturelles, et il n'y a vraiment qu'une toute petite partie de la loi qui nous a été renvoyée.
Je viens de la Colombie-Britannique, et pour moi, l'un des plus grands irritants en matière de commerce depuis des années, c'est la situation entourant le bois d'oeuvre. Y a-t-il quoi que ce soit qui empêchait le gouvernement d'en faire une priorité au même titre que le genre ou d'autres priorités? Quand le gouvernement a amorcé les négociations, aurait-il été possible pour lui d'en faire un objectif prioritaire?
:
Merci, monsieur le président.
Madame, messieurs, bienvenue à la Chambre des communes. Je suis vraiment heureux de pouvoir vous entendre et je vous suis très reconnaissant pour votre labeur. J'aimerais souligner par votre entremise la contribution exceptionnelle de tous les membres de notre équipe qui ont participé à ces pourparlers complexes et très pointus.
Je vois derrière vous un fonctionnaire avec un document énorme. C'est assez impressionnant. Cela me rappelle les paroles célèbres de John Crosbie qui a déjà dit avoir signé une entente, mais ne pas l'avoir lue parce que le document était un peu trop lourd. C'est aussi M. Crosbie qui a dit qu'il vendait des dictionnaires, mais qu'il ne les lisait jamais. Voilà des propos intéressants.
[Français]
Je vous remercie tous. Je tiens à rappeler à ce comité qu'à titre de parti du libre-échange, nous sommes évidemment en faveur du libre-échange et des ententes qu'ils soient positifs pour le Canada.
Rien n'est parfait en ce monde — on le reconnaît —, mais nous tenons quand même à rappeler que plusieurs de nos députés se sont rendus à Washington au cours des dernières années pour plaider la cause du Canada; que nos deux chefs — que ce soit notre chef intérimaire, l'honorable ou l'actuel —, au nom de notre parti de l'opposition officielle du Canada, ont plaidé la cause du Canada lors de ces rencontres.
[Traduction]
Je veux parler de l'aluminium. Comme vous le savez, c'est un enjeu très important pour le Québec. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le secteur de l'aluminium n'est pas sorti gagnant de ces négociations.
[Français]
La situation a bien changé depuis le premier traité de libre-échange de 1988. Chacun le reconnaît. Chacun sait qu'à l'époque, le Mexique n'était pas le port de destination des produits chinois.
[Traduction]
C'est toutefois la réalité avec laquelle nous devons maintenant composer.
J'aimerais vous dire à quel point tout le monde est préoccupé par le fait, et chacun le reconnaît, que cet accord n'est pas très bon pour nous et pas très bon pour nos producteurs d'aluminium, tout particulièrement au Québec où l'on produit l'aluminium le plus écologique au monde.
Mes questions sont plutôt simples.
[Français]
Comment nos entreprises peuvent-elles s'assurer que les produits chinois, qui seront littéralement dompés au Mexique, peuvent être considérés de la même façon que les produits environnementaux qui sont produits au Québec?
Nous avons des échanges très intéressants. Je vous suis vraiment reconnaissante d'avoir pu être des nôtres malgré le très court préavis. C'est la première occasion que j'ai, en ma qualité de parlementaire, de vous remercier tous pour l'important travail que vous avez accompli au nom des Canadiens et de l'industrie canadienne. Il va de soi que nous l'apprécions vivement.
Vous avez parlé des améliorations apportées à cet accord, notamment dans le but de le moderniser. C'est ce que nous serons certes tous à même de constater dans différents secteurs. Il a également été question des acquis réglementaires que le Canada a réussi à conserver dans certaines industries, et ce, malgré une très forte résistance de la part des États-Unis. Comme pour n'importe quel accord, on pourra toujours se demander s'il n'aurait pas été possible de faire encore mieux dans certains secteurs.
Je vais moi aussi vous parler de l'aluminium. Je considère peut-être cet accord dans une perspective un peu différente de celle de certains de mes collègues, mais cela ne m'empêche pas de bien saisir la teneur des enjeux qui sont en cause. J'ai cru comprendre qu'il y avait un peu plus de 230 droits applicables à l'aluminium exporté aux États-Unis, et que vous êtes parvenus à obtenir l'élimination de ces droits. J'aimerais savoir quelles seront les incidences exactes pour notre industrie au Canada. Il faut assurément y voir une occasion de croissance pour ce secteur qui devrait voir ses ventes augmenter, et non diminuer.
Je sais que vous avez répondu à mon collègue concernant la garantie nous assurant qu'au moins 70 % de l'aluminium est originaire de l'Amérique du Nord. Cette question concernant le Mexique et les importations en provenance de la Chine est primordiale. Outre cette garantie de 70 %, j'aimerais savoir s'il y a d'autres dispositions dans l'accord qui pourraient permettre au Canada d'optimiser sa production d'aluminium et l'utilisation de ce produit par rapport à la situation actuelle.
Bien que nous ne visions pas une proportion de 100 %, et que l'origine ne soit pas nécessairement aussi précise que ce que nous recherchons, pouvez-vous nous dire comment ces deux modifications incluses dans l'accord pourraient favoriser la croissance future de l'industrie au Québec et au Canada en lui ouvrant de nouveaux débouchés?
:
La clause de proportionnalité est une disposition de l'ALENA qui existe depuis longtemps. Son interprétation varie selon les points de vue. Certains sont d'avis qu'elle contraint le Canada, d'une manière ou d'une autre, et qu'elle l'empêche, dans certaines circonstances, de vendre ses produits énergétiques à d'autres pays.
En fait, je pense que la clause est le fruit d'une demande des États-Unis que le Canada a acceptée lors des premières négociations. La clause prévoit la vente de nos produits énergétiques aux taux du marché. Ce que le Canada aurait perdu si la clause avait été invoquée, ç'aurait été la possibilité de vendre un produit au taux du marché à un partenaire particulier auquel nous aurions eu l'obligation d'en vendre une certaine proportion. La disposition était déjà fondée sur les marchés, ce qui signifie que le risque que les sociétés d'énergie et les producteurs canadiens couraient, c'était qu'ils aient accès à un marché sur lequel ils pourraient vendre leurs produits aux taux du marché. Si la clause avait été invoquée, il aurait tout simplement fallu qu'ils aient un partenaire commercial particulier.
Du point de vue canadien, la suppression de la clause signifie que tel n'est plus le cas. Bien sûr, nous vendons nos produits énergétiques aux taux du marché, et notre capacité d'exporter nos produits ailleurs dans le monde... La dynamique changeante de l'offre et de la demande à l'échelle mondiale entraîne une augmentation de la demande et de l'intérêt à l'égard des produits énergétiques canadiens. La place grandissante occupée par l'énergie propre et l'énergie à faibles émissions dans l'offre de produits et le coup de collier donné partout dans le monde pour remplir les engagements à ce chapitre ouvrent de nouveaux débouchés aux produits énergétiques canadiens, étant donné nos conditions de production, ainsi que nos régimes de gestion environnementale très rigoureux qui nous permettent de documenter et de contrôler notre production et de fournir des données très transparentes.
Le monde continuera à se mouvoir dans cette direction. Sans la clause de proportionnalité, nous serons en mesure d'exporter plus de produits dans le nombre d'endroits que nous voudrons, et la rentabilité de ces produits continuera à dépendre du marché. Par ailleurs, le coût du transport des produits a aussi une incidence sur la rentabilité. Normalement, il est légèrement moins coûteux de transporter un produit à un endroit rapproché qu'à un endroit éloigné. Les infrastructures nous permettent de transporter les produits jusqu'à différentes destinations. Les changements qui s'opèrent au sein de l'industrie entraînent aussi des changements dans la circulation des produits. Par exemple, nous avons augmenté nos importations d'énergie des États-Unis parce que la consommation de cette énergie coûte moins cher aux Canadiens et nous permet d'exporter plus de produits de différentes régions du pays aux États-Unis.
Nous avons une relation hautement intégrée. Une de nos priorités au chapitre de l'énergie est de maintenir l'intégration des systèmes énergétiques. Cette intégration est avantageuse pour les deux pays parce qu'elle nous permet de commercer dans les régions où il est le plus rentable de le faire, tout en renforçant notre résilience, surtout dans le secteur du transport d'électricité. Lorsqu'on commence à utiliser des énergies renouvelables à différents endroits au pays, la capacité de produire de l'électricité à partir de sources d'énergie hydraulique, qui sont beaucoup plus nombreuses au Canada qu'aux États-Unis, aide à soutenir le réseau américain. En contrepartie, à certains moments de l'année, le besoin en électricité du Canada augmente, et les États-Unis comblent ce besoin. Le niveau d'intégration entre les deux pays est très élevé.
Nous avons maintenu ce niveau d'intégration dans l'accord. C'était un des objectifs de l'équipe, étant donné le volume considérable d'énergie qui est échangé. C'est un de nos produits les plus importants sur le plan commercial, et le Canada a beaucoup à offrir au monde dans ce secteur. Je le répète, cet élément fait partie de l'accord. L'accord contient moins de contraintes liées au commerce de ces produits, ce qui augmente notre flexibilité et nos possibilités dans ce domaine.
:
Monsieur Verheul, je suis persuadé que vous allez me pardonner ma fixation sur l'aluminium, mais je veux y revenir.
On sait que, lors de la signature de la première entente, l'ALENA, l'un des premiers producteurs mondiaux d'aluminium était le Canada par l'entremise du Québec. Maintenant, on ne produit presque rien en comparaison avec ce que fait la Chine. L'accès au marché est donc essentiel pour l'industrie de l'aluminium. Une incompréhension s'est peut-être glissée dans l'Accord, et c'est le statut privilégié qu'a reçu l'acier, mais pas l'aluminium.
Là-dessus, lorsqu'on parle des 70 % de pièces qui doivent être produites en Amérique du Nord, on oublie de dire que les pièces d'acier doivent être coulées et fondues en Amérique du Nord, alors que ce n'est pas le cas pour les pièces d'aluminium. La statistique assez évocatrice à ce sujet vient du marché lui-même, puisque, de mai à juillet 2019, les exportations de jantes en aluminium en provenance de la Chine ont chuté de 60 %. Au même moment, celles qui proviennent du Mexique ont augmenté de 240 %. Aujourd'hui, on dit qu'elles oscillent autour de 260 %. Or le problème majeur, c'est que le Mexique ne produit pas d'aluminium. Comme on le sait très bien, c'est la Chine qui le lui fournit.
Si on n'arrive pas à boucher cette porte d'entrée de l'aluminium chinois, au bout de compte, l'industrie de l'aluminium du Québec est vouée à disparaître ou à perdre des parts de marché essentielles. Je voudrais que vous éclaircissiez cela. D'après ce que vous comprenez, le statut de l'aluminium dans l'Accord est-il semblable à celui de l'acier?
:
L'acier et l'aluminium sont certainement traités différemment.
La différence dans le traitement des deux matériaux est le résultat du protocole signé le 10 décembre. Comme vous le savez, une exigence a été introduite à ce moment-là, selon laquelle l'acier doit être fondu et coulé en Amérique du Nord pour respecter l'exigence de 70 % se rapportant à l'acier acheté par les constructeurs d'automobiles.
Or, il n'y a pas d'exigence semblable pour l'aluminium, qui n'a pas à être fondu et coulé en Amérique du Nord. Nous en avons fait la proposition, sans succès. Comme je l'ai déjà dit, nous ne considérons pas ce dossier comme clos. Nous allons surveiller de près les importations d'aluminium et nous sommes parfaitement au courant de la situation que vous avez décrite concernant la Chine. Si la tendance relative aux importations d'autres pays se maintient, nous allons défendre la position que l'aluminium doit être traité de la même façon que l'acier.
Plusieurs mesures antidumping applicables aux importations d'acier et d'aluminium en provenance de la Chine ont été mises en place. La surproduction et la surcapacité de la Chine dans ce secteur font aussi l'objet de discussions. Il y a également des discussions à ce sujet à l'échelle internationale.
Nous nous attaquons à la question sous différents angles, mais dans l'ensemble, le nouvel accord encourage davantage l'utilisation de l'aluminium dans la construction des voitures que l'ancien ALENA.