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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 18 avril 1994

LES DOUANIERS

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LES MOTIONS DE CENSURE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES LANGUES OFFICIELLES

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA JUSTICE

LA DICTÉE DES AMÉRIQUES

L'EAU POTABLE

LE DAKOTA OJIBWAY TRIBAL COUNCIL

LE MULTICULTURALISME

LES SOINS DE SANTÉ

LE PROJET MINIER DE LOUVICOURT

LA BOSNIE

LE FÉDÉRALISME

L'ENVIRONNEMENT

LE CHEF DU PARTI ÉGALITÉ

LES LANGUES OFFICIELLES

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 3154

LE SERVICE JEUNESSE

LA SCHIZOPHRÉNIE

LES ARMES À FEU

QUESTIONS ORALES

LES CASQUES BLEUS CANADIENS EN BOSNIE

L'ÉDITION

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3155
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3156

L'EMPLOI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3156
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3156
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3156

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3157
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3157
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3157
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3158

LE PLAN D'ACTION POUR LES JEUNES

    M. Gauthier (Roberval) 3158
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3158
    M. Gauthier (Roberval) 3158
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3158

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

LE CHÔMAGE

    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 3159
    M. Martin (LaSalle-Émard) 3159
    M. Lavigne (Beauharnois-Salaberry) 3159
    M. Martin (LaSalle-Émard) 3159

LES PRODUITS DU TABAC

LES LANGUES OFFICIELLES

L'IMMIGRATION

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT

    M. Harper (Simcoe-Centre) 3160
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3160
    M. Harper (Simcoe-Centre) 3161
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3161

L'UKRAINE

LES CONTRATS DE PUBLICITÉ ET DE SONDAGE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3161
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3161

LES AFFAIRES INDIENNES

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3162

L'HORMONE DE CROISSANCE STB

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3162

LES PÊCHES

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

AFFAIRES COURANTES

LOI SUR LA FAILLITE

    Projet de loi C-237. Adoption des motions portant présentation et première lecture 3163

PÉTITIONS

LA RÉDUCTION DU BUDGET MILITAIRE

LE BILINGUISME

LES CARTES DE TUEURS

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES LANGUES OFFICIELLES

    Reprise de l'étude de la motion 3165
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 3169
    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 3172
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3178
    M. Bernier (Gaspé) 3191
    Report du vote sur la motion 3192

3127


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 18 avril 1994


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

Le vice-président: Il y a consentement unanime pour que le ministre du Revenu national fasse ici une déclaration, n'est-ce pas?

Des voix: D'accord.

LES DOUANIERS

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je remercie tout particulièrement la députée de Mission-Coquitlam de me laisser prendre la parole en premier aujourd'hui au lieu de poursuivre ses observations sur sa motion.

Ce n'est certes pas de gaîté de coeur que je prends ici la parole au nom de Revenu Canada et du gouvernement pour exprimer mes plus sincères condoléances aux familles des deux douaniers qui ont péri dans un tragique accident, en fin de semaine, au Nouveau-Brunswick.

Il s'agit de l'inspecteur David Moore et du surintendant Jim Finnamore, tous deux de Perth-Andover.

Ils ont été emportés samedi soir par une crue soudaine de la rivière Aroostook.

Je tiens à bien préciser qu'ils n'ont fait preuve d'aucune négligence ni commis aucune erreur. S'ils ont perdu la vie, c'est parce qu'ils se souciaient beaucoup de la sécurité des autres douaniers placés sous leur commandement.

En bref, les faits tels qu'on les connaît à l'heure actuelle sont les suivants. Le poste de douane de Tinker's Road, qui est à une quinzaine de kilomètres de celui de Perth-Andover, était menacé samedi soir par la crue des eaux. Même si les inspecteurs en poste à Tinker's Road leur avaient dit que la situation était satisfaisante, MM. Moore et Finnamore ont décidé d'aller s'en rendre compte sur place. Je signale qu'ils étaient extrêmement consciencieux et absolument déterminés à faire tout leur possible pour assurer la sécurité de leurs subordonnés.

À proximité du poste de Tinker's Road, ils ont rencontré un agent de la GRC et plusieurs employés du gouvernement provincial qui contrôlaient la crue des eaux. En fait, un agent de la GRC les a accompagnés pour le reste de leur court trajet.

Au poste de Tinker's Road, MM. Moore et Finnamore se sont entretenus avec les deux douaniers alors en service. Après avoir examiné la situation, les quatre hommes ont conclu qu'il n'y avait pas de danger immédiat d'inondation à ce poste de douane. Les deux hommes ont alors quitté le poste en compagnie de l'agent de la GRC et ont repris la route qu'ils avaient empruntée moins d'une demi-heure auparavant pour retourner à Perth-Andover. C'est à ce moment-là que la tragédie s'est produite.

(1105)

Il y a eu rupture soudaine de la glace qui s'était accumulée sur la rivière, et un torrent d'eau a déferlé sur la route longeant la rivière au moment même où le véhicule transportant les trois hommes passait à cet endroit. Emporté par le torrent, le véhicule a piqué dans le fossé et s'est retrouvé presque totalement submergé. Les trois hommes ont toutefois réussi à grimper sur le toit du véhicule. L'agent de la GRC est resté là, mais les deux agents de douane ont essayé de regagner la terre ferme. Malheureusement, ils ont échoué dans leur tentative.

Peu de temps après, des recherches ont été entreprises pour retrouver les trois disparus. L'agent de la GRC a été retrouvé vers minuit et conduit à l'hôpital. On a poursuivi les recherches dans l'obscurité pendant trois heures encore, mais en vain.

Hier matin, on a repris les recherches dès le lever du jour. On a d'abord trouvé le corps de M. Moore puis, peu de temps après, celui de M. Finnamore.

C'est toujours difficile de perdre un être cher, mais encore plus lorsque cela se produit soudainement par suite d'une série d'événements inexplicables.

David Moore laisse dans le deuil son épouse, Kelly. Quant à James Finnamore, il laisse dans le deuil son épouse, Frances, et ses trois enfants, Tamara, Brent et Peter.

J'ai parlé hier aux deux veuves pour leur offrir mes plus sincères condoléances et leur dire que le ministère allait faire tout en son pouvoir pour les soutenir et les aider à traverser cette période très difficile.


3128

David Moore travaillait pour Revenu Canada depuis six ans, et James Finnamore comptait presque 18 ans de service au ministère. Nous avons perdu deux bons hommes, deux fonctionnaires consciencieux et dévoués dont le but premier dans leur vie professionnelle était de bien servir les Canadiens. Ils manqueront beaucoup à leurs parents ainsi qu'à leurs collègues, qui étaient aussi des amis.

Je sais que tous les députés de la Chambre voudront se joindre à moi, après que les porte-parole des autres partis auront fait leurs déclarations, pour garder un moment de silence. Cela nous donnera l'occasion de réfléchir à cet événement tragique et de penser à ces deux hommes qui sont morts en servant leur pays.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, vous me permettrez d'être bref et sobre. La députation du Bloc québécois s'associe entièrement aux propos que vient de tenir l'honorable ministre du Revenu. Nous désirons exprimer toute notre sympathie aux familles et aux amis de MM. David Moore et Jim Finnamore.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, à l'instar du ministre et du député du Bloc qui ont exprimé les condoléances de leurs partis, je tiens à dire le regret et la sympathie qu'éprouvent les réformistes par suite de la mort tragique de l'inspecteur David Moore et du surintendant Jim Finnamore.

Ayant grandi au bord de la rivière Saskatchewan Sud, je connais par expérience la beauté et les avantages de nos cours d'eau, mais aussi les risques qui y sont associés. Dans ma jeunesse, un employé de mon père s'est noyé et je me souviens du choc, du chagrin et de la douleur que tous les gens de la place ont ressentis.

J'ai aussi visité la région de Perth-Andover et je garde un vif souvenir du paysage et de la beauté que présentent la vallée de la Saint-Jean et les collines dans l'ouest du Nouveau-Brunswick. J'ai rencontré là-bas des gens que cet accident afflige sûrement, mais je suis convaincu que tous les membres de la collectivité sauront apporter le réconfort et l'appui nécessaires à Kelly Moore et à Frances, Tamara, Brent et Peter Finnamore, et à tous ceux que ce deuil frappe.

Au nom de mes collègues, je rends hommage à la vie de Jim Finnamore et de David Moore, et j'offre nos sympathies et nos prières à tous leurs proches.

Le vice-président: Levons-nous et observons un moment de silence.

[Note de l'éditeur: La Chambre observe un moment de silence.]


3128

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

(1110)

[Traduction]

LES MOTIONS DE CENSURE

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait permettre aux députés de représenter pleinement les opinions de leurs commettants sur son programme législatif et sur ses plans de dépense en adoptant pour règle que la défaite d'une mesure gouvernementale, même s'il s'agit d'une dépense, n'entraîne pas automatiquement la défaite du gouvernement à moins d'être suivie par l'adoption d'une motion en bonne et due forme.
-Monsieur le Président, je compte profiter du temps qui m'est alloué pour expliquer l'objet de ma motion, afin que les députés comprennent clairement de quoi il retourne avant de voter.

Il s'agit d'une motion qui fera l'objet d'un vote, comme l'a décidé le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Ce sera la première fois, d'après ce que mes recherches m'ont permis de constater, que les députés auront l'occasion de se prononcer sur la question de la confiance et, par extension, sur celle du vote libre.

Je discuterai également de l'historique des votes à la Chambre, qui a toujours été marqué par la discipline de parti, c'est-à-dire par l'obligation de respecter la ligne du parti. Je ferai part de l'expérience d'autres pays comme la Grande-Bretagne, où les whips ont vu leur rôle s'assouplir considérablement.

Selon mes recherches, les simples députés d'Australie et de Nouvelle-Zélande-où la discipline de parti est moins rigoureuse qu'au Canada mais plus qu'en Grande-Bretagne-ont des moyens concrets d'influencer les politiques de leur parti.

Je conclurai en commentant les critiques qui sont à l'encontre des votes libres à la Chambre des communes. Je dois dire que ces critiques me surprennent, étant donné l'appui manifesté à cette question au cours des deux dernières législatures. La première fois que j'ai soulevé cette question, le 21 janvier dernier, le député de Broadview-Greenwood ne partageait pas mon avis. Plus récemment, à une réunion du Comité de la Chambre des communes chargé de la procédure et des affaires de la Chambre, les arguments que m'a opposés le député d'en face m'ont étonnée.

Je crois qu'il faut en parler et qu'il faut apaiser les craintes à cet égard afin que tous les députés appuient cette motion d'une même voix. En soi, la motion porte sur trois questions: l'assouplissement de la convention sur la confiance, la libéralisation des votes à la Chambre et la représentation des intérêts des électeurs.

Par assouplissement de la convention sur la confiance, je veux dire que seuls les votes qui seraient clairement qualifiés de votes de confiance entraîneraient la démission du gouvernement en cas de rejet de la motion. Depuis bon nombre d'années, nous avons entretenu à la Chambre le mythe que le gouvernement ne peut pas


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perdre de votes. S'il perd, il doit démissionner, ce qui, ou bien conduit au déclenchement d'élections, ou bien oblige le gouverneur général à voir si quelqu'un d'autre peut former un gouvernement.

Nous savons tous que, sur le plan logique, c'est une aberration. Pourtant, c'est la pratique suivie à la Chambre et ma motion donnerait un sens plus étroit à la notion de confiance. Cela aurait pour effet de rendre les députés, surtout les simples députés du côté ministériel, plus libres face à la discipline de parti, ce qui les amènerait parfois à voter à l'encontre de la position gouvernementale officielle.

En fait, la motion aurait des effets bénéfiques pour les députés ministériels et aussi pour les députés de l'opposition. Les ministériels se sentiraient plus libres d'aller à l'encontre de la position de leur parti parce que la perte d'un vote ne se traduirait pas par la défaite du gouvernement. Une fois cette façon de voir comprise par la direction des partis, les députés qui voteraient à l'encontre de la position de leur parti ne seraient pas exposés à un châtiment ou à une mesure disciplinaire. De même, les députés de l'opposition se sentiraient libres de voter en faveur d'une motion gouvernementale de temps à autre. Le gouvernement ne peut pas toujours avoir tort. Même le gouvernement actuel. Nous, de l'opposition, devons l'admettre et, de temps à autre, donner notre appui à une mesure gouvernementale, même si nos chefs tentent de nous en dissuader. Je veux également qu'il soit bien clair que je parle ici de votes plus libres dans un sens large, et pas de votes libres autorisés par les chefs des partis.

(1115)

Enfin, pourquoi, ou plutôt quand, un député ne respecterait-il pas la discipline de parti? Je dis dans ma motion «pour permettre aux députés de représenter pleinement les opinions de leurs commettants». C'est là un exemple, mais il y a d'autres cas. Je veux cependant m'arrêter à la représentation de l'opinion des électeurs parce que la position du Parti réformiste sur la question ne semble pas être comprise. Je veux être très claire.

Contrairement à ce qui s'est passé lors de certaines élections antérieures, nous avons vu, au cours de celles de 1993, que les trois partis actuellement reconnus à la Chambre avaient expliqué avec force détails aux Canadiens quelles seraient leurs positions sur les grandes questions d'actualité à l'automne 1993.

C'est sur la base de ces plates-formes que les Canadiens se sont prononcés le 25 octobre et nous croyons que, sauf exception, les députés doivent respecter la position de leur parti lorsqu'ils ont à se prononcer sur des questions abordées au cours de la dernière campagne électorale. Cependant, j'estime que le livre rouge du Parti libéral reste un ouvrage théorique et pompeux auquel il manquait un plan de mise en oeuvre, ce qui laisse beaucoup de latitude face à la position du parti. Mais je ne suis pas ici pour discuter des politiques libérales.

Je veux surtout faire comprendre que des questions toutes nouvelles se présenteront, des questions qui n'ont pas été abordées dans les programmes des partis. Deux de ces questions me viennent immédiatement à l'esprit: la contrebande des cigarettes et la redistribution des circonscriptions électorales. Sur ce genre de questions, les députés devraient se sentir moins enclins à soutenir aveuglément la ligne du parti.

En plus de rompre la discipline de parti pour représenter l'opinion de leurs électeurs, les députés pourraient également exprimer leurs propres opinions fondées sur le simple bon sens que le simple député peut vouloir faire triompher sur la question en discussion.

On a l'impression que si les députés sont libérés de la discipline de parti, il en résultera un chaos marqué par une imprévisibilité complète dans le système. Comme les députés voteront n'importe comment, pense-t-on, le Parlement ne pourra pas fonctionner et le pays deviendra ingouvernable.

Ce n'est pas du tout à cela que veut mener la motion à l'étude. Elle ne fait que reconnaître que les députés peuvent parfois voter à l'encontre de la position officielle sans craindre de représailles de la part de la direction de leur parti, car le gouvernement ne pourra pas tomber. Le soleil continuera de se lever à l'est, et les intérêts des Canadiens seront mieux servis par leurs représentants. N'est-ce pas ce que nous sommes tous venus faire ici, servir les Canadiens dans toute la mesure de nos moyens?

J'ai assez parlé de la teneur de ma motion. Je voudrais maintenant parler de l'historique de la question, dont la problématique est apparue longtemps avant que la plupart d'entre nous ne viennent siéger ici à la Chambre. Elle origine d'un sentiment de mécontentement décelé chez les Canadiens à l'occasion d'un sondage d'opinion commandé en 1983 à Gallup par le Groupe canadien des études des questions parlementaires.

À la question de savoir comment les députés devraient se comporter quand ils ont à voter, 49,5 p. 100 des répondants estimaient que les députés devraient voter selon leur propre jugement. Par contre, l'opinion selon laquelle le député devrait voter conformément à la ligne du parti a trouvé bien peu d'appui, car seulement 7,9 p. 100 des répondants à l'échelle nationale souhaitaient voir les députés être fidèles à la position officielle de leur parti.

L'exaspération que les Canadiens ont exprimée lors de ce sondage à l'égard des députés fidèles à la ligne du parti s'est traduite dans le rapport de 1985 du Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes. Le comité estimait que «le but de la réforme de la Chambre des communes en 1985 est de faire que les députés redeviennent de véritables législateurs et qu'ils retrouvent un rôle de premier plan dans la formulation des politiques». C'est un changement d'attitude qui devait surtout permettre de réaliser cet objectif. Il s'agissait pour cela d'assouplir le principe de la confiance en autorisant les députés à voter à l'occasion à l'encontre de la ligne du parti sans crainte de faire tomber le gouvernement ou de subir des représailles de la part de la direction du parti.

Le rapport du comité McGrath était très clair sur la question du principe de confiance et des votes libres. Le comité déclarait:


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«Une fois élus, les députés sont autorisés par la loi et par la Constitution à agir de façon indépendante. À la Chambre, ils peuvent s'exprimer et voter comme ils l'entendent. S'ils veulent dévier de la ligne tracée par leur parti, ils sont libres de le faire, à condition d'en accepter les conséquences politiques.»

(1120)

Ce sont ces risques politiques que le comité McGrath voulait réduire le plus possible, au moyen de ses recommandations. Le comité a ensuite décrit la situation idéale: «La discipline rigide ne va guère de pair avec la philosophie d'un parti politique démocratique, et les députés de tous les partis devraient avoir une latitude raisonnable qui reste par ailleurs compatible avec la loyauté au parti.»

C'était le terrain d'entente que le comité a cherché et que tente d'établir la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui. La loyauté envers le parti politique est nécessaire, mais pas la loyauté aveugle; elle doit s'accompagner de la possibilité de voter occasionnellement contre la position officielle du parti.

Le comité McGrath a formulé cinq observations sur le principe de la confiance, dont celle-ci:

Dans un parlement où le parti au pouvoir a une majorité importante, la question de la confiance a, en fait, été décidée par l'électorat. À moins d'un revirement complet des loyautés ou d'un bouleversement politique, la confiance dans le gouvernement est d'ores et déjà acquise. Aussi le parti au pouvoir et les autres partis doivent-ils avoir la sagesse de permettre aux députés d'exercer leur jugement sur bien des questions. Le recours trop fréquent aux whips et aux motions de confiance enlève de leur valeur à ces institutions importantes.
Nous avons la chance que deux membres de comité fassent encore partie de l'actuelle législature: le député de Winnipeg Transcona et le ministre des Affaires étrangères. J'espère que tous deux auront le temps de participer au débat sur cette motion avant qu'elle soit mise aux voix.

Récemment, en avril 1993, le Comité de la gestion de la Chambre a recommandé ceci:

Il faudrait sensibiliser davantage les députés au principe de la confiance et aux observations du Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes. À de rares exceptions près, les motions émanant du gouvernement devraient être considérées comme un vote de confiance uniquement lorsqu'elles sont expressément libellées comme telles par le gouvernement.
Le comité, qui comprend de nombreux députés réélus au sein de cette législature, dont le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, la ministre de la Santé et le député de Saint-Léonard, a toutefois prévu avec réalisme la répercussion de cette recommandation. Il a dit:

La discipline de parti était extrêmement forte dans le régime parlementaire canadien, peut-être plus forte que dans de nombreux autres régimes. Le comité appuie l'idée de libéraliser les votes à la Chambre, mais nous craignons de créer des attentes démesurées. Il ne s'agit pas d'une question de procédure. En fin de compte, c'est à chaque député et au Parlement que la décision revient.
Pourquoi certains groupes de députés qui ont fait partie de législatures précédentes estimaient-ils si important d'assouplir le principe de la confiance et de libéraliser davantage les votes? Je crois que c'est parce qu'ils avaient bien compris l'humeur de la population canadienne.

À l'ère de l'information, le public est mieux renseigné sur les institutions politiques et le travail de ceux qui en font partie. Il est donc moins disposé à suivre sans remettre en cause l'orientation proposée par les représentants élus. Les citoyens s'attendent que leurs représentants soient bien informés et défendent les intérêts supérieurs de leurs électeurs. Ce public éclairé n'obéit pas avec la même docilité que par le passé aux orientations proposées. La réaction des Canadiens au moment du référendum sur l'Accord de Charlottetown montre très bien qu'ils refusent de faire confiance les yeux fermés.

Le public s'attend aussi que ses représentants élus feront preuve du même discernement. Les électeurs ont l'impression qu'on fait fi de leurs droits lorsque le député doit, sous la menace de lourdes conséquences pour son avenir politique, voter d'une manière qui ne leur semble pas aller dans le sens de l'intérêt public. On assimile le manque d'indépendance dans les votes et le manque d'influence dans l'élaboration des politiques. Ceux qui ont part au processus politique soutiennent que le simple député exerce son influence au caucus ou dans des rencontres privées avec les ministres. Cela n'est plus satisfaisant pour le public.

Le public réclame que ses vues soient prises en considération plus souvent que tous les quatre ou cinq ans, aux élections. Il veut que ce souci pour son opinion se manifeste publiquement et qu'on agisse en conséquence. Cette manifestation publique, c'est souvent le vote du député.

En Grande-Bretagne, les députés ont pu faire preuve d'une grande indépendance, et le régime de gouvernement responsable ne s'y est pas effondré. Entre avril 1972 et avril 1979, le gouvernement britannique a essuyé la défaite 65 fois. Ces défaites ont été importantes, car elles ont aidé à détruire le mythe selon lequel toute défaite du gouvernement menaçait de l'empêcher de se maintenir au pouvoir.

Ces défaites ont aussi influencé le comportement des députés qui ont suivi, car elles ont établi un précédent. Les députés de tous les partis se sont montrés plus réticents à accepter les diktats du parti sur la politique et les votes. Ceux qui ont défié les whips ont appris qu'ils pouvaient le faire sans risquer de véritables sanctions, ce qui les a incités à le faire plus souvent. D'autres ont suivi leur exemple.

(1125)

Au Canada, la pratique du vote libre est plus limitée. Cependant, dans les années 1960 et 1970, nous avons connu des gouvernements qui ont perdu des votes sans démissionner.


3131

Par conséquent, j'ai déterminé que l'assouplissement des règles relatives à la confiance et au vote libre a fait l'objet de recommandations d'au moins deux comités parlementaires formés de députés dont un grand nombre siègent toujours à la Chambre. En outre, il y a au moins un autre gouvernement qui a adopté cette pratique sans conséquences bien graves. Le gouvernement responsable existe toujours, tout comme les partis politiques. Ceux-ci ne sont pas considérés comme inutiles et, ce qui importe davantage, la population exerce une vraie influence sur l'élaboration des politiques, par l'entremise de ses représentants à la Chambre des communes.

Je voudrais maintenant répliquer à certaines critiques formulées à l'encontre de l'assouplissement des règles relatives à la confiance et au vote libre. D'aucuns prétendent que la pratique du vote libre aurait des effets néfastes sur le bien-être des partis politiques. Les partis politiques sont une composante essentielle du système politique, plus particulièrement au moment des élections, pour l'élaboration des politiques et le soutien que le chef peut accorder aux candidats. En outre, entre les élections, les partis politiques peuvent émettre des reçus aux fins de l'impôt pour les contributions.

On ne le dira jamais assez, la tenue de votes libres n'aura pas d'effets néfastes ni sur l'existence des partis, ni sur leur capacité de concilier des points de vue divergents. La tenue de votes libres n'aura pas pour effet que les députés voteront toujours d'une manière imprévisible. Comme je l'ai dit au début de mon discours, sur les questions où la plate-forme du parti est claire, les députés devraient voter en faveur de la position du parti. Par contre, sur les sujets ne figurant pas dans la plate-forme du parti, les députés devraient avoir le droit de voter librement.

D'aucuns prétendent aussi que le gouvernement fera l'objet de critiques s'il présente un projet de loi et dit aux députés qu'ils peuvent voter contre sans que cela constitue un vote de défiance. On dira que le gouvernement gaspille du temps de la Chambre avec un projet de loi auquel il ne tient pas vraiment.

J'estime au contraire que le gouvernement fera l'objet de félicitations, et non de critiques, pour avoir permis aux élus de participer au processus d'élaboration des politiques. Trop souvent, les gouvernements ont considéré la Chambre des communes comme faisant partie du décor et n'ont fait appel à elle que pour la forme pour la tenue de votes cruciaux, avant de reprendre leurs pratiques dictatoriales.

D'autres estiment que la tenue de votes libres aura pour effet que le gouvernement ne pourra prendre de décisions difficiles parce que les députés refuseront de donner leur accord à des décisions impopulaires. Certes, la possibilité de se dissocier de son parti pourrait compliquer la tâche des partis politiques dans la prise de décisions impopulaires, mais cela représente également un défi à relever pour le gouvernement, soit celui de convaincre la population de la nécessité de toute décision impopulaire. Cela pourrait également forcer les partis politiques à être le plus francs possible et à tout couvrir dans leur plate-forme électorale pour que la population n'ait pas de surprises après les élections.

Un autre argument que l'on avance souvent est qu'il existe pour un député d'autres façons de manifester son mécontentement envers les dirigeants de son parti qu'en votant contre son parti à la Chambre des communes. À prime abord, cela peut paraître vrai, mais, en réalité, les députés ont très peu de moyens d'exprimer leur mécontentement.

Par exemple, il faut beaucoup de temps pour qu'un projet de loi d'initiative parlementaire devienne loi, et ce, dans les meilleures circonstances. Quant à la période des questions, la liste des questions étant contrôlée par les dirigeants du parti, un simple député ministériel peut difficilement manifester son désaccord. Il pourra se voir autoriser une question difficile, mais c'est tout.

Les critiques concernant l'assouplissement des règles relatives aux votes de confiance et aux votes libres ne sont tout simplement pas valables. Ce qui est valable, c'est d'avoir le courage politique nécessaire de permettre aux députés de voter plus librement. C'est au gouvernement de donner l'exemple sur ce point. Cela étant dit, les partis d'opposition doivent s'entendre pour que les membres de leur parti puissent manifester leur désaccord, de sorte que tous les députés soient libres d'exprimer une opinion qui n'est peut-être pas celle des dirigeants de leur parti. Cela exige un changement d'attitude et du courage politique. Néanmoins, si cela permet à un plus grand nombre de députés de jouer réellement un rôle dans la politique officielle, le temps consacré aux efforts en vue d'assouplir la discipline de parti aura valu la peine.

J'attends avec impatience le débat sur cette motion que j'invite tous les députés à appuyer, car elle montre aux Canadiens que nous n'avons pas peur de nous faire taper sur les doigts par les dirigeants de notre parti si nous choisissons de nous démarquer, comme nous l'avons déjà fait, de l'esprit de parti parce que nous pensons ou agissons différemment et que nous voulons contribuer de façon substantielle à l'élaboration d'une politique officielle qui tienne compte des besoins de tous les Canadiens.

(1130)

Le vice-président: Compte tenu des déclarations faites plus tôt, l'heure réservée aux initiatives parlementaires sera prolongée jusqu'à 12 h 8.

Je demanderais à tous les députés de bien vouloir faire référence à leurs collègues qui se trouvent encore à la Chambre en précisant leur circonscription ou leur titre, au lieu de les désigner par leur nom.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra): Monsieur le Président, le discours réfléchi de la députée de Mission-Coquitlam m'a malheureusement rappelé un récent film intitulé Retour vers le futur.

Les idées du Parti réformiste au sujet de la Constitution paraissent tout à fait dépassées et semblent tirées de livres d'avant 1914. Sans vouloir être désobligeant envers la députée de Mission-Coquitlam, j'aurais préféré entendre l'autre Jennings. Je fais ici référence à celui que vous et moi connaissons, monsieur


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le Président, et qui a brièvement enseigné à l'Université de Colombie-Britannique avant d'acquérir une réputation plus illustre dans un autre pays. Je parle en effet de sir Ivor Jennings.

Il était généralement reconnu, dès les années 1920 et 1930, partout dans l'ancien Empire britannique et dans le Commonwealth que la défaite d'un gouvernement sur une mesure n'aboutissait pas nécessairement à sa démission, mais soulevait plutôt un jugement qualitatif.

Ainsi, je rappellerai à la Chambre qu'au printemps de 1968, lorsque le gouvernement Pearson a été défait accidentellement parce que certains députés ne s'étaient pas présentés à temps à la Chambre, on n'a pas jugé nécessaire d'exiger la démission du gouvernement.

J'étais apparu à la télévision nationale avec le chef néo-démocrate de l'époque et d'autres, et nous étions arrivés à la conclusion que la priorité acceptée par le Canada n'exigeait pas la démission automatique du gouvernement.

En 1979, le gouvernement du premier ministre Clark a été défait, comme je le disais, à cause d'une erreur dans le décompte. Je crois que le whip du parti avait omis de faire le compte des voix dans les rangs ministériels et ceux de l'opposition. M. Clark avait conclu à la nécessité de démissionner. Il s'était rendu à la résidence du gouverneur général et ce dernier aurait tenté de lui faire accepter le fait que les précédents n'exigeaient pas la démission.

Comme on le sait, la demande de dissolution faite par M. Clark n'a pas été acceptée immédiatement, le gouverneur général lui ayant suggéré de retourner au Parlement. Il lui a cependant téléphoné par la suite.

Je veux simplement démontrer par là que la question de confiance n'est plus interprétée comme elle l'était au XIXe siècle. Il s'agit plutôt de porter un jugement qualitatif, et je trouverais regrettable que le Parti réformiste ne se soit pas suffisamment documenté au sujet des usages parlementaires canadiens.

Le premier ministre a rappelé à juste titre, au cours d'une déclaration à la Chambre des communes le 20 janvier, que la Chambre des communes n'était pas constituée d'un groupe de députés indépendants élus isolément. Nous formons une équipe. L'adoption des lois est un processus complexe qui repose sur des concessions mutuelles, des échanges et la discussion. Il s'agit d'un exercice dialectique dynamique.

Si je prends comme exemple ma propre expérience, bien que je sois député depuis peu, je reçois les opinions de mes électeurs en tant que député. Je communique leurs points de vue aux députés de mon groupe provincial. Nous nous réunissons une fois par semaine. Nous tenons également une rencontre régionale hebdomadaire avec les députés des quatre provinces de l'Ouest. Nous participons également aux réunions du caucus national où nous discutons et faisons des concessions mutuelles. Il y a aussi les comités constitués de représentants de tous les partis politiques. Voilà comment se déroule de nos jours le processus législatif! Les députés ne participent pas simplement par leur vote, car s'ils agissaient ainsi, ils ne voteraient pas en connaissance de cause.

Le processus législatif dynamique moderne exige de la participation et des concessions mutuelles pendant l'élaboration des lois. C'est ainsi qu'on influe sur le contenu des lois et, à mon avis, c'est ainsi que nous devons concevoir notre rôle de député dans une société moderne.

C'est dire que le droit constitutionnel est en pleine évolution. Malgré les bonnes intentions de la députée de Mission-Coquitlam, il est risqué de vouloir légiférer sur les conventions constitutionnelles. La vie des conventions constitutionnelles n'a pas été logique. Elle n'a pas été assujettie à des lois et tient de l'expérience. C'est un processus d'essais et d'erreurs. À mes yeux, ce qui fait l'intérêt de la façon dont les lois sont élaborées aujourd'hui, c'est que tous les partis collaborent au sein de comités où ils sont tous représentés. Pour ne citer que les deux comités où je siège, les députés du Parti réformiste y ont travaillé considérablement et d'une manière constructive, ce dont je me suis réjouis, et je constate les modifications apportées à des mesures qui auraient été bien différentes quant à leur forme et à leur contenu.

(1135)

Cela ne veut pas dire que les députés ne représentent pas leurs électeurs ou ne représentent pas entièrement les vues de leurs électeurs. Tout député qui n'agit pas ainsi n'assume pas le rôle qui est le sien aujourd'hui, c'est-à-dire consulter régulièrement ses électeurs, faire connaître leurs vues au groupe provincial, prendre la parole aux réunions tant régionales que nationales et participer aux débats au sein des comités représentant tous les partis.

Telle est la vie du Parlement de nos jours, tel est l'art de faire des lois. Il n'en était pas ainsi en 1914, car il a fallu attendre que l'autre Jennings rédige ses beaux ouvrages. Ces ouvrages ont été étudiés au Canada et ont inspiré nos usages.

J'inviterai le Parti réformiste à se joindre à nous pour façonner l'avenir et accepter les changements apportés, plutôt que d'essayer de légiférer et donc d'édulcorer, voire d'interrompre un processus déjà en pleine évolution créatrice.

M. Bob Mills (Red Deer): Monsieur le Président, j'estime que le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis aujourd'hui est peut-être un des plus importants que nous aurons à examiner au cours de cette 35e législature.

Je pense que nous reconnaissons tous qu'il y a quelque chose qui cloche dans cette institution et c'est pourquoi nous devons réexaminer le fondement même de son fonctionnement.

Tout d'abord, nous devons tenir compte de ce que disent les gens. En faisant tout simplement l'autruche et en ne les écoutant pas, nous leur rendons un mauvais service. Les gens ont perdu confiance dans cet endroit. Ils estiment qu'ils envoient leur député à Ottawa et qu'il se fait engloutir ici. Nous avons parfois appelé cela la «fièvre d'Ottawa», mais peu importe. Il n'en demeure pas moins que des messages transmis à partir d'Ottawa se rendent jusqu'à la circonscription, alors que le contraire est rarement vrai.


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Les résultats des élections ont probablement constitué une bonne indication de ce genre de choses.

Que dire des députés comme tels? Eh bien, ils arrivent ici et suivent la discipline de parti. Il y a peu de place pour la libre-pensée. Leur présence à la Chambre diminue. Je pense que M. Fisher, lorsqu'il s'est entretenu avec notre caucus avant notre arrivée ici, a bien décrit la situation lorsqu'il a dit que la plupart des députés ou bon nombre d'entre eux deviennent de bons travailleurs de circonscription. En réalité, on leur donne le bénéfice du doute en jugeant qu'ils travaillent probablement dans leur circonscription, puisqu'ils ne travaillent décidément pas ici.

Quoi qu'il en soit, nous devons donc tenter de découvrir où sont les réponses. Certains pensent qu'elles se trouvent dans les travaux des comités, tandis que d'autres estiment qu'il vaut mieux suivre la discipline de parti, sous peine d'être expulsé. À mon avis, des votes plus libres constituent une solution à au moins une partie de ce problème. On l'a déjà reconnu dans le discours du Trône en 1991. On avait dit que des votes plus libres constituaient assurément une façon d'améliorer les choses.

Le fameux livre rouge de 1993 laissait entendre que les députés devraient pouvoir voter plus librement et compter davantage au sein des comités et à la Chambre. Ainsi, bien des gens ont examiné la question des votes plus libres, mais cela ne s'est pas encore concrétisé.

Alors, pourquoi en sommes-nous arrivés à cette conclusion? Pourquoi nous sentons-nous ainsi? Je crois que nous pouvons peut-être en examiner les raisons un peu plus à fond. La première réside probablement dans les travaux des comités. On dit, et je l'ai dit aussi, qu'il est possible de changer les choses au cours des travaux des comités, sans qu'il soit nécessaire de s'en tenir à cette vieille notion de discipline de parti.

(1140)

Je sais que des discussions ont eu lieu dans les comités. Au sein de notre comité, nous avons organisé un colloque de deux jours pour que nous puissions examiner les points d'intérêt pour notre comité et pour que les membres puissent connaître la position réelle des députés qui faisaient partie de ce comité.

En fait, je pense que nous allons retourner aux phases organisationnelles du comité. Ici, il aurait fallu que nous examinions des points tels que le mérite et la province d'origine des membres du comité, et nous demander si la représentation régionale était juste. Nous avons constaté que le whip du parti ou son adjoint avaient décidé que les députés du Bloc devaient être vice-présidents de chaque comité.

Le fait que toutes les régions du Canada soient représentées ou non n'avait aucune importance. Nous avons examiné le budget des dépenses. Encore une fois, la position du parti est ressortie très clairement. Je suppose que lorsque nous ferons nos rapports, ce sera encore la position du parti majoritaire qui l'emportera en raison, notamment, de la majorité détenue par ce parti et de l'appartenance du président et du vice-président.

Les députés de l'opposition n'auront pas vraiment d'autre choix que de présenter un rapport minoritaire qui sera lu ou non, qui sait. Quelle en est l'utilité, alors? À quoi cela sert-il de travailler si fort au sein des comités? Examinons la situation de la Chambre.

À la Chambre, les députés siègent et écoutent. Ils reconnaissent les excellentes idées qui sont exprimées ici, les recherches valables qui sont faites et les discours remarquables qui sont prononcés par tous les partis. Cependant, cela compte-t-il vraiment puisque nous devons toujours voter selon la discipline de parti? Le meilleur exemple de cela est la fois qu'une modification a été présentée à une motion afin d'exclure le Sénat des comités mixtes permanents.

Les électeurs ont sûrement déjà envisagé cette possibilité. La plupart des députés y ont déjà pensé. Pourtant, comme toujours, nous avons voté selon la discipline de parti. Nous n'avons pas pu voter librement. Nous n'avons pas pu dire ce que nous pensions vraiment ou ce que les Canadiens pensaient réellement. Nous avons plutôt pensé à l'image du parti.

Comment pouvons-nous instaurer une fierté nationale et amener les Canadiens à faire confiance aux politiciens, si nous nous conformons toujours à la discipline de parti? Comment devrions-nous procéder alors? Comment devrions-nous voter sur les projets de loi? Nous devrions écouter les discours. Comme je l'ai dit, la qualité est sûrement là. Nous devrions réunir nos comités et examiner en profondeur les questions, les détails, les faits et les solutions. Ensuite, nous devrions les transmettre à tous les députés pour qu'ils soient bien renseignés.

Nous devons faire participer les habitants de nos circonscriptions. Nous devons aller les rencontrer et tenir des assemblées publiques, et cela, dès le début. Nous devrions organiser des blitz téléphoniques, parler à la télévision et diffuser des bulletins parlementaires qui ne soient pas que de la propagande politique ni une présentation d'éléments que le député juge intéressants, mais des sommaires d'information valables, qui veulent vraiment informer l'électorat.

Le niveau de communication qui s'est établi entre la population et les députés m'impressionne vraiment. Les gens ont pris la peine de réfléchir. Ils s'attendent vraiment à ce que leur député exprime leur volonté, et qu'il ne se contente pas de suivre la ligne du parti. Les députés sont en mesure de voir pourquoi bon nombre de politiciens et de Canadiens ont perdu confiance dans notre système.

D'après ce que je peux voir, selon la procédure du Parlement, on saurait tout de suite au moment de la présentation d'un projet de loi s'il ferait ou non l'objet d'un vote de confiance. Les comités présenteraient donc un rapport détaillé sur les projets de loi en cause. Des députés prendraient la parole et les autres les écouteraient, parce que les discours seraient vraiment importants. Les discours des députés prendraient alors tout leur sens.

Les députés doivent pouvoir communiquer avec leurs électeurs. Finalement, au moment du vote, la motion pourrait être adoptée, modifiée ou rejetée, et rien de cela n'aurait de conséquences néfastes pour le gouvernement. Mais pour y arriver, il faudrait rééduquer un certain nombre de personnes.

(1145)

Premièrement, nous devrions rééduquer les médias. Ils ne pourraient plus considérer chaque rejet d'un projet de loi comme un rejet du gouvernement. Ils devraient voir plutôt l'avantage que confère la possibilité de présenter autant d'avis différents.

Le gouvernement ne devrait pas non plus voir les votes comme une lutte à gagner. À l'inverse, quand un projet de loi serait rejeté, l'opposition ne devrait pas en profiter pour constamment


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lui remettre sa défaite sous le nez. Il faudrait plutôt envisager cette procédure comme une mesure constructive pour notre pays.

Les gens devraient bien se rendre compte que les députés qu'ils élisent ont vraiment leur mot à dire dans les affaires du pays. Par conséquent, je crois qu'ils se montreraient plus prudents dans leur choix et prendraient garde de désigner quelqu'un en qui ils peuvent avoir confiance pour représenter leurs idées, et non pas seulement celles du parti.

La libéralisation des votes permettrait aux députés de mieux exprimer le point de vue de leurs électeurs et de rapprocher le gouvernement des gens. Certains pouvoirs exécutifs entièrement détenus par le Cabinet passeraient aux mains des véritables représentants du peuple à la Chambre. Les députés seraient ainsi tenus de rendre des comptes beaucoup plus serrés, parce qu'ils ne pourraient plus se contenter d'invoquer la ligne du parti quand ils voteraient à l'encontre des souhaits de leurs électeurs. Les députés devraient toujours être tenus de respecter les voeux de leurs électeurs.

Je crois que nous avons grandement sous-estimé la capacité qu'a l'électorat de s'engager plus à fond, de s'informer davantage et de participer à une démocratie directe. La forme plus complexe que nous avons donnée à notre gouvernement nous a valu un déficit de 500 milliards de dollars et d'autres graves problèmes. Une démocratie directe et plus libre pourrait nous éviter de tels problèmes.

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest): Monsieur le Président, j'aimerais remercier la Chambre qui me donne l'occasion de parler de la motion M-89 de la députée de Mission-Coquitlam. Permettez-moi tout d'abord d'exprimer mon désaccord avec la position de son parti sur la question de la confiance.

Je voudrais traiter des trois points présentés par la députée, soit premièrement l'assouplissement de la convention sur la confiance, deuxièmement l'historique de la question et troisièmement, les aspects relatifs à la libéralisation des votes.

D'abord, en ce qui concerne l'assouplissement de la convention sur la confiance, s'il ressort une seule conclusion de 300 années de réflexion politique, c'est bien qu'il n'existe pas une seule et unique interprétation exacte de la notion de confiance. Selon le Parti réformiste, la confiance ne devrait entrer en jeu que dans le contexte de votes formels. À mon avis, c'est là une erreur de pensée.

La députée dit dans ses observations: «ils se sentiraient libres de voter en faveur d'une motion gouvernementale de temps à autre». Elle parlait, je présume, des députés de l'opposition. J'ai demandé au greffier du Bureau de m'indiquer quel a été le nombre de votes jusqu'à maintenant, depuis le début de la 35e législature. Nous avons voté 31 fois depuis le début de la présente législature et, depuis le premier jour des travaux à la Chambre, pas une seule fois n'a-t-on voté à l'encontre du parti chez les réformistes.

Des voix: Bravo!

M. Keyes: Et j'en vois qui applaudissent! Eh bien, je félicite ce parti de sa solidarité à l'égard de son idéologie et de ses idées sur ce que devraient être le comportement et l'apparence de ce pays.

Pour ce qui est de l'historique de la question, comme tous mes collègues de cette Chambre, j'ai le privilège de servir mes électeurs. Je me sens particulièrement honoré de servir les électeurs de Hamilton-Ouest. Ils connaissent Stan Keyes et savent ce qu'il représente. Ils savent ce qu'il ne tolère pas et connaissent ses croyances profondes et ses convictions les plus inébranlables.

(1150)

La députée d'en face se trompe lourdement si elle pense que je peux, ou que qui que ce soit d'autre de ce côté peut être aveuglément persuadé, car si j'appuyais un objectif du gouvernement allant à l'encontre des principes bien connus que je défends, je serais la risée des gens et il me serait inutile de me représenter. Je rappelle à la députée de Mission-Coquitlam que j'ai été réélu.

En ce qui concerne le troisième point de la députée, celui des votes plus libres, je dirais que depuis le début de la 35e législature, les députés du Parti réformiste réclament du gouvernement qu'il prenne pour principe de «ne pas se considérer défait par le rejet d'une motion gouvernementale, même si elle est de nature financière, à moins qu'une telle motion ne soit suivie par l'adoption d'une motion de défiance».

Cela est lié, bien sûr, au désir du Parti réformiste de voir le système fédéral canadien évoluer davantage vers la démocratie directe. Le Parti réformiste prétend depuis longtemps que cette démocratie directe doit se manifester par des référendums exécutoires, un mécanisme de destitution et des votes libres à la Chambre des communes. Regardons un peu cela.

Cette fin de semaine, le parti de la députée, le troisième à la Chambre des communes, a fait une petite expérience de démocratie directe et selon un journal d'Ottawa: «Le chef du Parti réformiste, Preston Manning, a appris que la démocratie ne suit pas toujours la voie prévue. Hier soir, la majorité des spectateurs d'une réunion politique télévisée a voté en faveur du suicide sous contrôle médical.» Et M. Manning de dire: «Il faut prendre garde de ne pas faire d'interprétation simpliste des résultats.»

Et alors, que dire de la façon simpliste, superficielle et ultra-rapide dont l'argument avait été abordé par les deux côtés. Il est très facile d'organiser une séance télévisée, de présenter un argument en faveur et un argument contre un point donné, puis de demander aux gens de téléphoner pour dire de quel côté ils penchent. Il leur suffit de prendre le téléphone, si toutefois ils peuvent se permettre d'avoir un appareil à boutons plutôt qu'à cadran. Évidemment, nous excluons ainsi je ne sais combien de Canadiens qui n'ont pas les moyens d'avoir le téléphone ou alors qui ont un appareil à cadran et qui ne peuvent participer à la démocratie en direct, de sorte que nous prenons une décision à partir d'arguments qu'une partie de la population présente en appuyant sur tel ou tel bouton pour signifier son accord ou son désaccord.

Dans ces conditions, on se demande comment empêcher l'application d'une manoeuvre pour fausser les résultats. Nous savons comment cela se produit. Certains d'entre nous avons été témoins d'une telle manoeuvre au cours du débat sur l'avortement et nous avons vu comment on vient à bout d'une organisation en faisant tour à tour valoir ses propres arguments. Tout


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dépend de la présentation, de sorte que celui qui l'emporte est souvent celui qui consacre le plus d'argent au processus. Voilà justement le point faible dans les idées des réformistes.

La décision sera-t-elle prise par la personne qui téléphone au cours d'un certain week-end et sera-t-elle fondée sur tous les faits présentés, ou sera-t-elle prise par suite d'une déclaration particulièrement émouvante et convaincante?

Nous entendons certaines interventions à la Chambre où les députés font valoir de solides arguments avec une grande éloquence et, quand le sujet est délicat, notamment s'il est question de vie ou de mort, les députés savent quel type d'arguments il convient de présenter. Nous le savons, mais si un député intervient avec plus de fougue, cela ne veut pas dire que son argument est meilleur et qu'il faut absolument se prononcer en sa faveur. Autrement dit, on ne doit pas refuser d'entendre un autre député sous prétexte que les arguments du député qui vient de parler sont indiscutablement les plus convaincants. Cette politique est dangereuse.

(1155)

Pour obtenir des votes libres, les réformistes accepteraient que le gouvernement n'ait pas à prouver qu'il a la confiance de la Chambre sauf lorsque la Chambre doit se prononcer sur une motion de défiance officielle. En retour, les députés pourraient voter comme ils l'entendent sur toute question, sachant qu'ils ne seraient pas assujettis à la discipline de parti.

Selon les réformistes, ces deux pratiques permettraient aux députés de mieux représenter leurs électeurs, surtout quand ces derniers ont clairement indiqué leur désaccord face à la position du parti du député sur une question donnée.

Selon le chef du Parti réformiste, le choix du député placé dans cette situation est clair, puisqu'il dit: «En mettant les choses au pire, la volonté des électeurs doit primer sur les opinions personnelles du député ou sur celles de son parti.» Le chef réformiste ajoute: «Je ne dis pas que les députés sont des machines et qu'ils n'ont qu'à rentrer chez eux la fin de semaine pour consulter leurs électeurs et revenir se prononcer en conséquence. Entre un député et ses électeurs, il doit y avoir un dialogue.»

Le premier ministre et le leader parlementaire du gouvernement ont indiqué qu'il serait souhaitable qu'il y ait un plus grand nombre de votes libres à la Chambre. Bien sûr, nous n'avons pas pour autant accepté l'interprétation que donnent les réformistes du vote libre. Tout en ne s'opposant pas catégoriquement à l'opinion des réformistes, le premier ministre et le leader parlementaire du gouvernement ont tous deux indiqué qu'il y avait depuis longtemps de bonnes raisons pour que le gouvernement considère la notion de défiance d'une façon plus générale.

Par exemple, au sujet du mandat accordé à la Chambre aux dernières élections, le premier ministre a déclaré: «La Chambre, ce n'est pas un groupe de députés indépendants élus séparément. Nous sommes membres d'un parti et nous avons un programme à observer. Ce programme est énoncé dans notre livre rouge et nous allons le mettre en oeuvre.»

Nous sommes ici en tant que membres d'un parti. Notre vote n'est pas individuel, mais collectif. C'est l'expression de ce que nous croyons être dans le meilleur intérêt de nos électeurs, de nos circonscriptions, de notre province et de notre pays. Voilà notre rôle à la Chambre.

Il ne faut pas laisser cette motion miner le processus démocratique en place dans notre pays. Je suis certain que mes électeurs ne l'accepteraient pas.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, lorsqu'il est question de votes libres au cours du présent débat, il ne faut pas oublier qu'il n'est pas toujours nécessaire qu'un balancier oscille d'un extrême à l'autre.

Ce que nous recherchons tous au cours de la présente législature, et l'élément qui distinguera probablement cette législature de la précédente, c'est un plus grand équilibre à la Chambre. Je crois que le gouvernement s'est donné du mal pour atteindre cet équilibre et offrir à l'opposition et aux simples députés libéraux l'occasion d'exprimer leur point de vue.

Je me souviens en particulier des premiers jours de la session, où nous, les nouveaux députés, étions très nerveux. Cependant, dès le début, nous avons eu l'occasion de participer à un ou deux débats très importants. Cela a contribué à créer chez nous un sentiment d'appartenance. Nous avions l'impression de vraiment participer et d'accomplir quelque chose de concret ici.

Aujourd'hui, nous avons à débattre de cette notion de vote libre. Avant d'aborder la nature même du vote libre, nous devrions peut-être réfléchir à une ou deux questions. Il y a tout d'abord le bilan de notre parti à la Chambre des communes.

Comme l'a souligné à juste titre l'orateur précédent, il y a quelque chose de paradoxal dans le fait que nous parlons de la nécessité de tenir plus de votes libres, puisque nous avons tous voté de la même façon à la Chambre.

Je devrais dire, en fait, que tous les membres de chacun des partis ont voté de la même façon. Cela doit s'expliquer du fait que nous avons tous été élus en fonction de programmes fondés sur une certaine idéologie dont nous faisons la promotion. Il est donc raisonnable de présumer que nous serons logiques et que, après avoir expliqué notre idéologie au Parlement, nous voterons conformément aux principes qui nous ont valu d'être élus à la Chambre des communes.

(1200)

J'ai découvert aussi au cours d'entretiens avec des députés qui siègent ici depuis beaucoup plus longtemps que moi que, très souvent, le seul fait de faire partie de l'opposition suppose que l'on vote contre toute mesure qui est mise aux voix. L'opposition a donc pour rôle de s'opposer au gouvernement, de contrebalan-


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cer le gouvernement afin de s'assurer que celui-ci pèse bien toute sa politique.

Le gouvernement jouit ici d'une majorité très considérable qui se reflète dans les comités. Notre rôle en tant que députés consiste, comme on l'a déjà dit, à essayer d'influencer le gouvernement à l'égard de son programme. Toutefois, le fait est que c'est le programme du gouvernement qui sera adopté ici.

Il n'est donc pas question de tout changer, mais bien de créer un climat permettant aux députés de faire preuve de discernement et cela, non seulement à la Chambre et au comité, mais surtout avant, lorsqu'une mesure n'est encore qu'une idée dans la tête de quelqu'un, lorsque la politique est élaborée, avant que le capital politique ne s'organise d'une façon telle que toute modification devient un vote de confiance dans le gouvernement ou la personne responsable.

C'est pour cela que notre pays en est où il est à l'heure actuelle. Il importe peu, chers collègues, que chacun d'entre nous ne puisse pas avoir toujours raison. C'est justement ce qui est formidable ici. Nous sommes 295 à la Chambre et nous sommes infiniment plus sages collectivement que le plus sage et le plus brillant d'entre nous.

Nous en sommes rendus au point ici où, chaque fois que le chef émet une idée qui semble bonne, nous nous efforçons tous de justifier ce qu'il a dit, même s'il s'agit d'un lapsus. Car, Dieu nous vienne en aide, nous ne pouvons tolérer que cette personne n'ait pas toujours raison, car alors elle ne serait peut-être pas qualifiée pour diriger.

Je ne vise ici aucun parti en particulier. C'est tout aussi vrai de mon parti que des autres. Il nous faut être vigilants et faire attention à cela. Cela tient de la nature humaine. Cela se voit en affaires, en politique, partout.

Notre vrai travail à tous, c'est de dire à nos dirigeants: «Pensez-vous vraiment que c'est ce que nous devrions faire? Je sais que nous nous sommes engagés dans cette voie et que le projet de loi est déjà rendu à l'étape de la deuxième lecture, mais ne croyez-vous pas que ce serait bon de le modifier?» Notre travail exige que nous ayons toute la flexibilité, la sagesse et la liberté nécessaires pour pouvoir changer d'idée en cours de route. Nous devons apprendre au fur et à mesure que nous acquérons de l'expérience.

Notre expérience ici a été plutôt amusante jusqu'à maintenant. Comme nous avons dit à quelques reprises que nous aimerions avoir des votes plus libres à la Chambre, chaque fois qu'il y a un vote, les députés d'en face surveillent attentivement pour voir lequel d'entre nous sera le premier à ne pas voter du même côté que le parti. Je puis vous dire que nous sommes impatients d'être les premiers à ne pas voter du même côté que notre parti. Je sais que nous devrons le faire tôt ou tard, autrement vous ne cesserez jamais de nous harceler à ce sujet. Nous allons certainement le faire tôt ou tard.

Toutefois, la réalité est que nous devons respecter les principes qui nous ont amenés ici au départ. L'expérience que nous acquérons est importante. Elle est certainement très importante pour moi. Je n'ai pas honte d'admettre que beaucoup des idées préconçues que j'avais au sujet de la Chambre ont changé depuis mon arrivée ici parce que je vois comment les choses fonctionnent et j'apprends des choses nouvelles chaque jour, comme c'est le cas aussi de nombreux députés d'en face, j'en suis certain.

(1205 )

Je vais terminer mon discours en citant des paroles qui, à mon avis, revêtent une importance particulière pour la Chambre, des paroles que nous ne devrions jamais oublier. Il y a deux personnes dont les noms sont souvent mentionnés à la Chambre; une de ces personnes est évidemment le célèbre Edmund Burke. Dans sa lettre aux électeurs de Bristol, Edmund Burke discrédite la notion de démocratie représentative. Il est plutôt en faveur de la démocratie par délégation, notion selon laquelle, chaque fois qu'il y a des élections, les électeurs décident pour qui voter et, après le vote, la personne qu'ils ont choisie se retrouve au Parlement, pour le meilleur ou pour le pire, pendant quatre ans, ou jusqu'aux prochaines élections.

Les députés d'en face devraient savoir que cette fameuse lettre aux électeurs de Bristol a été écrite autour de 1776 et qu'elle concernait le traitement réservé aux patriotes britanniques, qui étaient des marins accusés de piraterie. Ils ont été capturés, ramenés en Angleterre et détenus là-bas pendant trois ans. Ils ont eu droit à un procès juste et équitable, pour ensuite être pendus. M. Burke ne trouvait pas que c'était là une bonne idée, et il l'a dit. Cependant, ses électeurs trouvaient que c'était une bonne idée, et ils l'ont dit. Il a donc écrit une lettre aux électeurs de Bristol, dans laquelle il disait ceci: «Vous n'avez pas seulement mon corps, mais aussi mon esprit. Et si vous n'aimez pas ce que je fais, balancez-moi à la fin de mon mandat.»

Fait intéressant, ses électeurs l'ont effectivement balancé à la fin de son mandat, mais il s'est fait réélire dans une autre circonscription qui était gagnée d'avance.

L'autre personne que je voulais citer, Thomas Paine, est un contemporain d'Edmund Burke. Thomas Paine était le conseiller de Thomas Jefferson et a aidé à rédiger la célèbre Déclaration d'indépendance. Dans son ouvrage intitulé The Rights of Man, il a écrit que la plus grande tyrannie est de prétendre gouverner même après sa mort et que chaque génération a le droit et la responsabilité de gouverner pour son époque, mais ne devrait pas prendre des décisions qui lient les générations futures, pas plus que la génération actuelle ne devrait être liée par les décisions prises par les générations antérieures.

Ainsi, pour conclure ce débat, je demanderais aux députés de tenir compte du fait que notre génération jette les bases sur lesquelles les générations futures fonderont leurs décisions. Si nous relâchons les règles de discipline, ce sont tous les parlementaires qui en profiteront, et nous n'aurons plus à nous préoccuper d'aller tous dans un sens ou dans l'autre.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je dispose de deux minutes. Je m'efforcerai donc d'être succinct.

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Je pense que la motion part d'un bon sentiment, mais elle contient quelques défauts. Je ne peux donc pas y donner mon appui.

Permettez-moi de mentionner quelques-uns de ces défauts, car ils soulèvent quelques questions très importantes. Par exemple, quelqu'un a dit que le gouvernement faisait accepter ses mesures. Bien sûr, et c'est normal. Puisque le gouvernement détient la majorité à la Chambre des communes il a la responsabilité morale de faire ce qu'il avait promis de faire.

On a déclaré que la démocratie directe était importante. Je crois que la plupart d'entre nous sommes d'accord avec cela. Cependant, nous ne devons pas laisser la démocratie directe se substituer à l'exercice de leur jugement par les députés dûment élus.

Les dangers de la démocratie directe sont évidents. Par exemple, le parti d'opposition qui a présenté la motion a vécu très récemment- hier soir seulement-une expérience de démocratie directe. Le chef de ce parti a déclaré qu'il appuierait peut-être la démocratie directe, mais qu'il fallait s'assurer que le système ne comporte pas de failles. Cela illustre mes propos.

Par ailleurs, nous savons que si un élément d'un budget est modifié, cela se répercute sur d'autres éléments du budget. On ne peut tout simplement pas modifier certains éléments d'un budget sans s'arrêter aux répercussions que cela peut avoir sur le reste.

J'imagine que j'ai encore le temps d'aborder un dernier point. La motion, si elle était adoptée, risquerait de conduire à une certaine forme de chantage par des minorités.

(1210)

Le vice-président: L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément à l'article 93 du Règlement, la motion retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

_____________________________________________


3137

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait:
(a) modifier la Loi sur les langues officielles de manière à refléter le principe du «bilinguisme territorial», soit que le français devrait être la langue prédominante au Québec et l'anglais la langue prédominante dans les autres provinces, et que les minorités de langues officielles devraient avoir accès aux services du gouvernement fédéral dans leur propre langue dans toute partie du pays où cela est justifié par la demande publique locale;
(b) continuer de faciliter l'usage de l'anglais et du français dans les débats et autres travaux du Parlement, dans les procès-verbaux et les journaux du Parlement, dans les tribunaux fédéraux, et en tant que langue de la législation fédérale; et
(c) éviter de dépenser de l'argent sur les aspects de la langue qui tombent sous la compétence exclusive des provinces.
-Monsieur le Président, en proposant cette motion et avant que nous entamions le débat, je voudrais faire remarquer une chose à tous ceux qui ont déjà leur opinion toute faite.

Beaucoup seront tentés de réagir automatiquement en se disant que si un député réformiste intervient dans un débat concernant la Loi sur les langues officielles, ce qu'il dit doit être inacceptable. Or, le fait est que la Loi sur les langues officielles ne donne pas de bons résultats. Cependant, que vous soyez favorables à la Loi sur les langues officielles et donniez carte blanche pour son application puisque vous la jugez bonne, ou que vous estimiez qu'il faut la modifier, je vous demanderais de vous donner la peine d'écouter ce que nous allons dire au cours du débat, sans juger d'avance. Abordons la question en songeant à ce qui est bon pour le Canada et pour les Canadiens.

Je pose aujourd'hui en principe que la Loi sur les langues officielles n'a pas donné de bons résultats. Elle constitue un facteur de division pour le pays et son application est trop coûteuse. Ce n'est pas seulement moi, le député de Nanaïmo-Cowichan, qui l'affirme. Chacun des commissaires aux langues officielles y a trouvé à redire. La Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme en était venue à la même conclusion, tout comme les gens d'un peu partout au Canada, de même que le Bloc québécois, de même que les gens ordinaires aussi bien du Québec que de la Colombie- Britannique. Nous y trouvons tous à redire. Qu'allons-nous faire pour y remédier?

Je vous invite donc à bien écouter les interventions que nous entendrons cet après-midi et, ce faisant, à réfléchir à la question de savoir comment nous pourrions faire mieux.

Reportons-nous maintenant en arrière; j'espère vous brosser un tableau en rappelant seulement. . .

Le vice-président: Le député aurait-il l'obligeance d'adresser ses propos à la présidence et non directement à ses collègues, en évitant d'utiliser le pronom «vous».

M. Ringma: Je m'y emploierai de toutes mes forces, monsieur le Président.

Examinons donc collectivement l'histoire en tâchant de voir comment nous pourrons améliorer la situation. En 1608, Champlain fonda la Nouvelle-France. En 1752, l'Acadie fut conquise par les Britanniques, et nous avons vu là le premier et le plus horrible cas d'intolérance linguistique. Dès qu'ils eurent conquis l'Acadie, les Britanniques en chassèrent tous les Acadiens, en disant: «Nous n'avons pas besoin de votre langue. Nous n'avons pas besoin de vous. Dehors!» Et ce fut le pire cas que nous ayons connu. Historiquement, la situation s'est donc améliorée, du moins de ce point de vue.

(1215)

La Nouvelle-France a été conquise en 1759, et les Britanniques ont vraiment amélioré les conditions par rapport à celles qui


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existaient à cette époque-là. Ils ont accepté de tolérer non seulement le français, mais aussi la religion. Dans une perspective historique, il convient de rappeler que la religion a fait partie de l'équation linguistique.

Plus tard, en 1774, l'Acte de Québec a confirmé les droits des francophones et des catholiques. En 1791, la loi constitutionnelle prévoyant la création d'une assemblée législative pour le Bas-Canada est adoptée et, parce que le français devient la langue législative, pour la première fois, les francophones deviennent fondamentalement plus actifs sur la scène politique.

Entre 1820 et 1840, les problèmes recommencent. La minorité anglophone, qui croît alors rapidement, inquiète l'assemblée majoritairement francophone du Bas-Canada. Une série de mesures législatives intolérantes sont donc adoptées à l'égard des districts et des Cantons de l'Est auxquels on refuse le droit d'être représentés, et on impose une taxe d'entrée aux immigrants venant de la Grande-Bretagne.

Entre 1837 et 1838, nous connaissons de véritables problèmes, y compris une sorte de rébellion ouverte qui dégénère presque en guerre. Il importe de souligner que, de 1840 à 1880, comme la proportion des anglophones et des francophones s'équilibre, les gens se sentent un peu moins menacés. La situation est donc calme durant ces 40 ans, jusqu'en 1880.

De toute évidence, c'est ce qui a permis l'adoption de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en 1867. La situation est tellement calme qu'il n'est presque pas fait mention de la langue dans cette loi. Les gens n'y trouvent rien à redire. Bien entendu, l'article 133 de la loi garantit l'usage des deux langues au Parlement, à l'Assemblée législative du Québec et dans la législation.

Ce que j'essaie d'expliquer, ce sont les hauts et les bas que nous avons connus au Canada ainsi que les émotions qui s'ensuivirent. De 1880 à 1920, comme la proportion de francophones-on peut même dire de catholiques-est à la hausse au Canada, les Canadiens anglais et les protestants commencent à craindre de se retrouver dans une situation minoritaire.

Aussi, l'une après l'autre, les provinces adoptent des lois restreignant les droits des francophones et des catholiques en matière d'éducation: le Nouveau-Brunswick, en 1871; l'Île-du-Prince-Édouard, en 1874; le Manitoba, en 1890, puis à nouveau en 1916; et l'Ontario, en 1912. L'Ontario n'a pas de quoi être fière de son règlement 17 adopté en 1912. C'est la mesure législative la plus restrictive de l'histoire canadienne au chapitre de l'éducation. En vertu de ce règlement, il était illégal pour tout enfant francophone d'être éduqué dans sa langue au-delà de la troisième année. Cela n'a rien de réjouissant, mais cela montre bien l'effet de balancier.

Quelle a été la situation par la suite? De 1920 à 1960, on peut dire que la stabilité a de nouveau régné en matière linguistique. Mais à quoi assistons-nous au Québec en 1963? À la montée du nationalisme. D'accord? Il devait y avoir une réaction. Lester Pearson a donc mis sur pied la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, qui a publié six volumes, achevant son oeuvre en 1971.

Cette commission a appuyé le bilinguisme territorial, ce dont je vais parler en détail dans quelques minutes. Le bilinguisme territorial est en fait un compromis entre le principe de la territorialité et celui de l'individualité. Soit dit en passant, les conclusions de cette commission sont pour l'essentiel compatibles avec les principes que les réformistes préconisent officiellement aujourd'hui.

(1220)

L'esprit qui anime la réflexion de cette commission tient dans la citation suivante: «Un pays bilingue n'est pas un pays dont tous les habitants doivent nécessairement parler deux langues; c'est un pays dont les principales institutions, tant publiques que privées, doivent dispenser leurs services dans les deux langues, à des citoyens qui peuvent fort bien, dans l'immense majorité, être des unilingues.» Réfléchissez-y. Ce n'est pas mal.

En 1969, la première Loi sur les langues officielles a été adoptée, et c'est là-dessus que portent nos critiques aujourd'hui. Vingt-cinq ans après, elle suscite encore du mécontentement.

La Loi sur les langues officielles favorise le principe de l'individualité, car les droits individuels des groupes linguistiques minoritaires doivent être respectés aussi largement qu'il est politiquement possible, avec pour résultat que la lourde obligation de respecter ces droits retombe sur les populations majoritaires et, bien entendu, sur les contribuables.

Il est clair que, en faisant adopter cette loi, Pierre Trudeau a fait un geste qu'il estimait juste et généreux. Il a dit et répété que les objectifs de justice et d'unité nationale étaient inséparables, et cela se comprend. Mais la conception technocratique qu'il se faisait de la société se retrouve aussi dans la loi, un de ses éléments clés étant la création d'un poste de bureaucrate suprême de la langue, celui de commissaire aux langues officielles. Nous sommes en 1969.

En 1972, le Québec, craignant que la langue française ne perde du terrain, se dit qu'il fait mieux de légiférer. Cela nous donne le projet de loi 22, Loi sur les langues officielles du Québec.

En 1977, le gouvernement Lévesque fait adopter la loi 101. Ces deux lois, la loi 22 et la loi 101, deviennent très connues, pas toujours favorablement, partout au Canada.

Puis, vient 1982. Il s'agit d'une date très importante, car la Charte des droits et libertés donne un recours aux personnes lésées par les lois 22 et 101 et leur permet d'en appeler de ce que j'appellerai une injustice de la législation québécoise.

En 1988, enfin, le gouvernement Mulroney abroge l'ancienne Loi sur les langues officielles et en fait adopter une nouvelle, celle qui est maintenant en vigueur. Elle étend la portée du bilinguisme officiel, peut-être trop.

Je voudrais maintenant définir le bilinguisme territorial, car c'est en fait ce dont nous parlons ici. C'est un compromis entre les souhaits et les préoccupations légitimes des minorités linguistiques et les préoccupations légitimes des majorités linguistiques. C'est l'un des quatre principes différents, mais clairement liés, conçus pour l'élaboration d'une politique linguistique équitable.

Il s'agit d'abord du principe de l'individualité. C'est vraiment Pierre Trudeau qui s'est fait le défenseur de ce principe. Il croyait que, pour être juste, le système devait fournir des services dans les deux langues officielles à quiconque le demandait où que ce soit au Canada. C'est ce que nous essayons de faire au


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Canada aujourd'hui et il faut bien se rendre à l'évidence: cela ne fonctionne pas et cela coûte trop cher.

Vient ensuite le principe de la territorialité, qu'il ne faut pas confondre avec le bilinguisme territorial dont il sera question plus tard.

Le principe de la territorialité veut que les droits linguistiques soient territoriaux et non transférables. Dans le cas du Canada, cela veut dire que quiconque vit au Québec devrait vivre et travailler en français et quiconque vit dans les autres provinces devrait vivre et travailler en anglais.

(1225)

Ce principe a été appliqué avec succès en Suisse, mais ne fonctionnerait pas au Canada parce que nos minorités linguistiques au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Ontario sont beaucoup plus importantes que dans les cantons suisses.

Nous en venons ensuite au bilinguisme territorial, à ne pas confondre avec le principe de la territorialité. Comme je l'ai dit, ce type de bilinguisme a d'abord été proposé par la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme, puis adopté par le Parti réformiste. Il s'agit essentiellement d'un compromis entre les extrêmes que sont le principe de la territorialité et le principe de l'individualité.

En vertu du bilinguisme territorial, les droits et les services linguistiques ne seraient accordés qu'aux minorités suffisamment importantes pour survivre à long terme. Les plus petites minorités n'obtiendraient pas tous les services à cause du fardeau que cela représente pour la majorité, qui doit payer pour tout cela, fardeau qui est supérieur aux avantages qu'en retire la minorité.

Ce modèle a été appliqué avec succès en Finlande pour le traitement de la minorité suédoise. S'il était appliqué au Canada, seules les importantes minorités francophones de l'est et du nord-est de l'Ontario ainsi que les Acadiens et la minorité anglophone de l'ouest de Montréal pourraient exercer la totalité des droits linguistiques accordés aux minorités. Le reste du pays serait unilingue.

Le quatrième principe de la politique linguistique est ce qu'on pourrait appeler le bilinguisme asymétrique que préconise le Bloc québécois où l'on accorderait de généreux droits linguistiques universels aux francophones hors Québec, mais très peu aux anglophones vivant au Québec.

On justifie cette asymétrie en disant que le français est en voie de disparition au Canada et ne pourra survivre sur un pied d'égalité avec l'anglais que s'il reçoit un traitement juridique préférentiel. La plupart des Canadiens anglais n'en reviennent pas que l'on défende une telle position. Néanmoins, beaucoup croient que c'est la seule politique linguistique qui soit juste et valable.

Nous nous retrouvons donc dans une situation qui offusque le Canada et que nous devons examiner collectivement. J'invite la Chambre à écouter attentivement les propos des députés qui vont prendre la parole et à faire preuve, envers tous, d'un esprit à la fois critique et constructif. Que pouvons-nous faire pour être justes et assurer des services appropriés à tous dans le pays, là où le nombre le justifie? Voilà une expression à la mode: «Là où le nombre le justifie». Cependant, elle n'est pas toujours comprise de la même façon. Je pense qu'il faudrait que nous apportions la précision suivante: «Là où le nombre le justifie et quand nous pouvons nous le permettre».

Nous devons examiner tous ces points. Je demanderais aux députés de voir l'aspect positif des discours qui vont suivre. Nous devons penser à ce qui s'est fait jusqu'à maintenant, jusqu'à cette minute même. Il y a eu des pas en avant et des pas en arrière. Quand un groupe devient plus fort, l'autre s'affole et commence à présenter des mesures législatives restrictives. Ça n'augure rien de bon. Essayons d'établir un certain équilibre et de rester ensemble.

C'est tout, monsieur le Président. Je demanderais à tous les députés d'envisager sérieusement d'adopter cette motion qui vise à modifier les langues officielles afin de refléter le principe du bilinguisme territorial.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, je vous remercie de me permettre de faire des commentaires. J'ai eu l'occasion de rencontrer le député de Nanaïmo-Cowichan, que j'ai toujours considéré comme une personne raisonnable jusqu'à aujourd'hui.

(1230)

Aujourd'hui, je trouve que le député de Nanaïmo-Cowichan est loin d'être raisonnable. J'ai plus que du dédain d'une telle personne qui semble vouloir détruire notre pays. Il semble vouloir détourner ou contourner toute l'histoire du Canada.

Comme francophone de l'Ontario de la quatrième génération, et comme personne d'une minorité, les propos du député du Parti réformiste me semblent abominables. Pour lui, la question de la langue est une question financière, du moins, c'est ce qu'il dit. Mais ce qu'il semble suggérer, c'est que les groupes majoritaires devraient piétiner, éclabousser les minorités. Il parle de la langue française au Québec et de la langue anglaise ailleurs.

Pour les francophones hors Québec, quelles aspirations peut-on avoir? Comment peut-on vivre dans notre pays, le pays que M. Ringma a probablement adopté, ou ses parents, il y a déjà quelque temps? Comment peut-on vivre ici? Que dois-je penser d'un député du Parti réformiste qui attaque ma langue de façon sournoise, moi qui suis un Bellemare vivant ici depuis le XVIIe ou le XVIIIe siècle et où ma parenté, mes ancêtres se sont battus tout d'abord pour la France et ensuite pour la Grande-Bretagne, qui ont défendu des institutions canado-britanniques? On s'est battus dans les grandes guerres. On s'est battus contre les États-Unis pour protéger notre pays. Nous voulons faire partie du Canada, mais selon le député du Parti réformiste, on n'a aucun droit d'en faire partie, à moins qu'on se fasse assimiler et qu'on devienne, comme dans mon cas, un anglophone.


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Le député a parlé de générosité. Est-ce qu'il sait vraiment ce que ça veut dire que d'être généreux? Est-ce qu'il sait vraiment de quoi il parle lorsqu'il parle d'éducation au Québec et hors Québec? Est-ce qu'il comprend vraiment le pays? Il nous compare et il nous cite les exemples de la Suisse et de la Belgique. Est-ce qu'il comprend réellement notre pays?

En somme, je vais terminer parce que je ferai un discours un peu plus tard, mais je dois dire au député du Parti réformiste que ce n'est pas un complet foncé qu'il aurait dû porter aujourd'hui pour venir parler, mais un cloak blanc.

M. Ringma: Monsieur le Président, je trouve que c'est vraiment triste. C'est triste en maudit! Au tout début, j'ai essayé d'expliquer aux gens, mais il faut écouter. J'ai dit ce qu'on propose. Il est évident que certains des députés n'ont pas écouté du tout pour m'attaquer ainsi en disant que je veux détruire le Canada. C'est une insulte! Il faut dire aussi que c'est abominable qu'on dise que je veux m'attaquer à la langue française. C'est faux.

(1235)

Je vous défie, monsieur le Président, vous et ceux qui n'ont pas écouté, de trouver ces mots-là. Lorsque vous lirez le hansard demain, ou même les bleus cet après-midi, vous verrez que nous faisons un effort pour garder le Canada uni, pour conserver les droits des francophones et les droits des anglophones au Québec. Nous voulons que tous conservent leurs droits mais sans que cela nous coûte trop cher.

M. Jean Landry (Lotbinière): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question. Comment les députés du Parti réformiste expliquent-ils le déclin économique des francophones hors Québec et quelle politique proposent-ils afin d'en réduire l'écart?

M. Ringma: Monsieur le Président, il m'est bien difficile d'expliquer pourquoi le niveau de vie des francophones diminue; je ne suis pas économiste et je n'en connais pas la raison. Tout est question d'argent.

Peut-être que cela est dû au fait que notre économie est en baisse et est actuellement très précaire. Les gouvernements étrangers regardent la sitation du Canada et pensent probablement qu'il y a un problème entre le Québec et le reste du Canada. Il y a aussi le fait qu'on considère que le Québec est trop sévère avec les anglophones. Actuellement il y a beaucoup de sorties d'argent, l'économie en souffre et le Québec aussi je suppose.

C'est tout ce que je peux donner comme explication sur cette question.

[Traduction]

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, même après avoir prêté une oreille très attentive au député, j'ai bien peur que ce qu'il a proposé ne soit pas très limpide.

Si j'ai bien compris, il a rejeté la politique linguistique territoriale prévoyant que tout le Québec soit francophone et le reste du Canada anglophone, mais, en même temps, il a semblé proposer un bilinguisme territorial qui, selon lui, autoriserait l'application des dispositions de la Loi sur les langues officielles aux minorités de l'est et du nord de l'Ontario, du nord-est du Nouveau-Brunswick, ainsi que du West Island de Montréal et, pour le reste du Canada, l'unilinguisme.

Si j'ai compris, il a donc rejeté le bilinguisme officiel pour toutes les régions de l'Ouest, y compris le Manitoba. Il l'a rejeté pour l'Estrie, où j'ai grandi dans Sherbrooke et à laquelle je suis resté si attaché. Il l'a rejeté pour la Gaspésie. Il l'a rejeté pour l'Outaouais, Aylmer et le comté de Papineau, et ainsi de suite. Ai-je bien compris?

Si c'est bien ce qu'il propose, ce n'est pas aussi grave qu'une politique territorialiste qui ferait en sorte que toutes les provinces, à l'exception du Québec, seraient de langue anglaise, mais ça s'en approche. Je voudrais être tout à fait sûr que c'est bien ce qu'il propose, car l'expression «là où le nombre le justifie», ça semble représenter des garanties exceptionnellement larges, plutôt que d'exclure les minorités francophones vivant dans diverses régions du Canada et les minorités anglophones habitant depuis fort longtemps certaines régions du Québec. Je songe en particulier à la Gaspésie et à l'Estrie.

M. Ringma: Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je réponds à la question qui me semble des plus légitimes.

Je n'ai fait que donner des exemples. Loin de moi l'idée d'exclure des régions comme Saint-Boniface, près de Winnipeg, la Gaspésie, Aylmer ou d'autres. Il s'agissait simplement d'illustrer le genre de bilinguisme territorial dont nous devrions parler. Et je pense que nous devrions aborder la question en détail.

Le fond du problème, et le député l'a mentionné, c'est l'expression «là où le nombre le justifie». C'est ce que la loi dit actuellement et c'est ce qui nous vaut tous ces problèmes. C'est comme si on adoptait la politique de l'Association canadienne des municipalités où un nombre est prévu, disons 10 ou 5 p. 100, et qu'on l'appliquait à l'ensemble. Si l'expression «là où le nombre le justifie» est inappropriée, alors, arrêtons des chiffres précis et convenons collectivement de protéger les droits linguistiques des minorités.

(1240)

[Français]

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, au momemt même où dans cette Chambre l'importance des langues officielles est remise en question, je suis heureux de pouvoir dissiper certains malentendus et de rendre justice aux faits. Les questions touchant les langues officielles ont toujours été délicates. Elles soulèvent les passions, elles font l'objet de rumeurs, de mythes et sont très peu souvent abordées d'un point de vue rationnel. J'aimerais donc aujourd'hui donner l'heure juste au sujet des langues officielles et nourrir le débat de quelques réflexions.

Permettez-moi d'abord de faire aussi un survol historique pour bien établir les principes fondamentaux qui régissent toute la politique canadienne en matière de langues officielles. Les langues officielles au Canada prennent racine à la fois dans le passé et dans le présent. Comme le français et l'anglais se côtoient depuis plusieurs siècles déjà, la Loi sur les langues officielles et la politique qui la sous-tend ne représentent pas en elles-mêmes un concept nouveau, mais sont la manifestation du


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respect qu'avaient les Pères de la Confédération envers la notion d'association.

En effet, dès la naissance de notre pays sont jetées les bases sur lesquelles reposent la notion des langues officielles. Jugeant cette notion essentielle à la survie de la Confédération, les premiers artisans de celle-ci adoptent en 1867 la Loi constitutionnelle dont l'article 133 reconnaît à tous le droit d'utiliser le français ou l'anglais dans les débats et la publication des lois et des documents du Parlement du Canada et de la législature du Québec ainsi que devant les tribunaux fédéraux et québécois.

Je tiens à mentionner ici que la politique actuelle sur les langues officielles tire directement sa source du cadre fixé par cette loi.

[Traduction]

Les premières dispositions prévoyant le paiement d'une prime aux candidats capables de rédiger dans les deux langues officielles du Canada étaient contenues dans une loi de 1888 modifiant la Loi sur le service civil. La prime au bilinguisme qui est encore versée aujourd'hui aux employés dont les fonctions exigent une connaissance des deux langues officielles n'est accordée qu'à30 p. 100 des fonctionnaires. La plupart des employés de la fonction publique ne sont pas bilingues et ne doivent pas automatiquement, contrairement à la croyance publique, devenir bilingues pour pouvoir occuper d'autres emplois.

À la fin du XIXe siècle, les grandes institutions fédérales ont graduellement commencé à reconnaître la dualité linguistique nationale. Dans les provinces, cependant, la situation était bien différente, en particulier en ce qui concerne l'éducation. Malgré le caractère très controversé de la question linguistique à l'origine, l'ouverture d'esprit démontrée par la fonction publique fédérale à l'égard des langues officielles ne semble pas s'être propagée aux provinces.

Les politiciens de l'époque n'ont pas démontré autant de sagesse que les Pères de la Confédération et n'ont pas respecté l'esprit de la Confédération dans les domaines de la langue et de l'éducation. Les communautés minoritaires de langue française ont dénoncé cette situation et ont tenté d'y remédier par la suite.

En 1927, je le mentionne en passant, le premier timbre-poste bilingue a été émis pour souligner le 60e anniversaire de la Confédération, et cette pratique est devenue la norme par la suite.

(1245)

La création du Bureau de la traduction du gouvernement fédéral, en 1934, a changé la face de la fonction publique du Canada. Toutefois, le principe général établissant que tout citoyen a le droit de recevoir des services du gouvernement fédéral dans la langue de son choix et que la fonction publique générale doit refléter la composition de la société canadienne n'a été reconnu officiellement qu'en 1960, à l'occasion de la publication du rapport Heeney et du rapport de la Commission royale sur le bilinguisme et le biculturalisme.

[Français]

La Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme constitue un point tournant au chapitre des langues officielles. Elle fait remarquer que le Canada traverse alors la crise la plus importante de son histoire. Aussi recommande-t-elle, entre autres, que les gouvernements contribuent à l'essor des communautés de langue officielle en situation de minorité et que la fonction publique soit bilingue, tant pour ce qui est de la prestation des services qu'en ce qui concerne la langue de travail.

Dans la foulée des recommandations émises par la Commission royale, le gouvernement adopte alors, en 1969, la Loi sur les langues officielles, faisant de l'anglais et du français les langues officielles du Canada.

J'aimerais apporter ici une précision à ce sujet, particulièrement après avoir entendu les remarques de notre collègue du Parti réformiste.

[Traduction]

La loi ne visait pas à rendre tous les Canadiens bilingues, mais plutôt à reconnaître l'égalité de l'anglais et du français dans la fonction publique. La loi prévoyait également des services dans les deux langues, afin que le gouvernement puisse mieux comprendre le public et être mieux compris de lui. Quoi qu'on en dise, la situation est encore la même aujourd'hui. Personne ne veut forcer qui que ce soit à parler l'anglais et le français.

Les progrès rendus possibles par l'adoption de la Loi sur les langues officielles ne se sont pas réalisés sans difficultés. La loi a cependant donné des résultats très positifs. Les francophones ont été les premiers à tirer profit de la loi, qui déclarait que le français et l'anglais, langues officielles, sont l'essence même de l'identité canadienne et qu'il est important de promouvoir leur épanouissement dans toutes les provinces et territoires canadiens. À mon avis, cette déclaration représente un progrès sans précédent.

Après son adoption en 1969, la Loi sur les langues officielles s'est graduellement implantée au niveau provincial. Ainsi, la même année le Nouveau-Brunswick adoptait à l'unanimité une résolution qui déclarait la province officiellement bilingue. Nous célébrons cette année le 25e anniversaire de la loi.

Quelques années plus tard, d'autres provinces ont suivi, assouplissant leur législation et rendant aux Canadiens francophones le droit à l'éducation dans leur langue, ce qui, comme je le disais, leur avait été interdit au tournant du siècle, en particulier au Manitoba.

[Français]

Au cours des années 1970, les Canadiens et les Canadiennes manifestent de plus en plus leur désir de vivre dans une société ouverte et tolérante, soucieuse de donner à chacun et à chacune la responsabilité de vivre dans sa culture et dans sa langue. Les


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jeunes, par exemple, démontrent un intérêt croissant pour l'apprentissage de la langue seconde, qu'ils perçoivent comme un enrichissement personnel et culturel.

Grâce à ce vent de changements qui souffle sur le pays, il devient possible de faire un pas de plus vers la promotion des langues officielles, si bien qu'en 1982 la Charte canadienne des droits et libertés consacre le caractère officiel des langues française et anglaise dans la Constitution. Elle reconnaît dans l'article 23 le droit à l'instruction élémentaire et secondaire dans la langue de la minorité et, on l'a dit tout à l'heure, là où le nombre d'enfants le justifie, ce qui représente encore aujourd'hui l'un des acquis les plus précieux pour les communautés linguistiques qui voient dans l'éducation le meilleur moyen d'assurer leur développement.

Cet article visait entre autres à réparer les injustices historiques qui avaient été commises dans certaines provinces à l'endroit des communautés francophones en situation de minorité.

[Traduction]

De nombreuses questions ont cependant suivi la promulgation de la Charte. Qu'entendait-on par: «Là où le nombre le justifie»? Cela voulait-il dire que les communautés de langue officielle ont le droit de gérer leurs propres écoles? Quelle était la portée réelle de l'article 23? Les parents francophones se sont adressés aux tribunaux pour trouver les réponses à leurs questions et, à partir de ce moment-là, la gestion de leurs écoles est devenue leur cri de ralliement.

(1250)

Dans le sillage de la Charte, le gouvernement fédéral a décidé, en 1988, de mettre à jour la Loi sur les langues officielles et a confié au Secrétariat d'État le mandat de favoriser le développement et la vitalité des communautés linguistiques minoritaires et de promouvoir l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. Ce mandat m'incombe maintenant en tant que ministre du Patrimoine canadien.

Au cours de ces mêmes périodes, le jugement de la Cour suprême a confirmé le droit des francophones de gérer leurs propres écoles. Pourtant, malgré le jugement clair de la Cour suprême, les pressions constantes des communautés francophones et les offres d'appui répétées du gouvernement fédéral, plusieurs provinces ont été lentes à prendre des mesures pour respecter leurs obligations constitutionnelles.

[Français]

Dans le but de stimuler le dialogue et d'encourager les provinces qui assument la responsabilité de l'éducation à agir dans le dossier de l'enseignement de langue française, le gouvernement fédéral adopte des mesures concrètes, en vue d'appuyer la mise en oeuvre de la gestion scolaire et de l'enseignement postsecondaire en français.

Cette initiative a entraîné, notamment, la réalisation de plusieurs projets de gestion au pays et la création du réseau de collèges communautaires tant attendus par les francophones de l'Ontario.

Aussi, même si nous traversons actuellement une période économique difficile, le gouvernement canadien a-t-il décidé d'épargner des récentes coupures budgétaires la question de la gestion scolaire, de sorte que les conseils scolaires puissent enfin prendre leur envol.

Nous espérons que la gestion des écoles de langue française par les francophones devienne sous peu réalité et travaillons très fort en ce sens.

Le progrès que nous avons accompli en matière de promotion de diffusion et d'enseignement des langues officielles sont notables, entre autres en ce qui concerne la reconnaissance juridique de leur statut.

Ce n'est donc pas le temps de reculer, car beaucoup reste à faire. Les minorités sont toujours vulnérables, mais les minorités parlant une de nos langues officielles à l'intérieur de chaque province fournissent un apport indispensable à notre identité et à notre unité nationale. Elles méritent que notre gouvernement les soutienne.

Le ministère du Patrimoine canadien subventionne 350 groupes qui oeuvrent à l'épanouissement des communautés de langue officielle au pays. Ces groupes apportent un appui direct aux communautés et forment des éléments dynamiques de notre société.

En collaboration avec nous, ils travaillent dans presque toutes les sphères d'activités, allant de l'alphabétisation à l'économie, en passant, bien sûr, par l'éducation.

En vertu des ententes de collaboration signées avec chacune des provinces et chacun des territoires, le gouvernement fédéral aide également les gouvernements à dispenser l'enseignement dans la langue de la minorité.

Cela se traduit en réalité, par exemple, par la construction de nouveaux établissements d'enseignement pour les francophones, tels que la Cité collégiale, à Ottawa, et l'École de droit de l'Université de Moncton, par la création de nouveaux programmes d'enseignement en français, et par la formation de conseils scolaires autonomes.

Il faut dire que sans l'appui du gouvernement fédéral dans le dossier de l'éducation, les provinces devraient assurer la totalité des coûts que comportent de telles réalisations.

En outre, les crédits alloués par le gouvernement fédéral aident plus de 2,7 millions d'étudiants à apprendre le français ou l'anglais, langues secondes, ce qui comprend 300 000 étudiants inscrits au cours d'immersion en français.

Des sondages révèlent même que trois Canadiens sur quatre veulent que leurs enfants apprennent le français ou l'anglais en tant que langue seconde.

[Traduction]

Pourquoi tant de parents et d'enfants canadiens veulent-ils apprendre la langue seconde pendant que nous discutons ici de la pertinence de promouvoir les langues officielles dans notre pays? C'est parce qu'ils y voient un net avantage. En période de changement économique, les pays ne peuvent tout simplement


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pas s'isoler, et la dualité linguistique constitue un atout indéniable.

(1255)

Ayant oeuvré dans le milieu de la diplomatie et des relations internationales, je peux vous assurer que remettre en question toute la politique des langues officielles revient à ignorer la réalité du monde d'aujourd'hui. Les marchés se joignent pour former de vastes blocs économiques qui établiront les règles du jeu à venir. Des progrès réalisés dans la technologie de l'information, comme la rediffusion par satellite, ont radicalement changé la notion d'espace et de temps.

Le succès de notre pays est étroitement lié à notre capacité de communiquer dans les langues d'autres peuples et d'apprécier leurs cultures. Dans un monde constitué d'environ 200 pays et où sont parlées quelque 6 000 langues, le Canada n'est pas le seul à avoir plus d'une langue officielle. Le fait d'avoir deux langues officielles qui sont répandues dans le monde-le français est la langue officielle dans pas moins de 25 pays, l'anglais dans 33-ne peut être qu'à notre avantage.

Outre l'enrichissement qu'elle apporte sur le plan personnel, la connaissance des deux langues officielles permet à notre pays d'être mieux à même de nouer des relations commerciales avec divers pays. Il n'est pas étonnant que nos principaux concurrents-comme le Japon et l'Europe-attachent une importance croissante à l'enseignement de langues secondes dans leurs écoles. Ils sont en train de se préparer au monde moderne. Ne devrions-nous pas en faire autant?

La question des langues officielles ne se limite pas exclusivement aux aspects financiers. Comme l'atteste notre histoire, la dualité linguistique est l'une de nos caractéristiques fondamentales en tant que société. Si l'on considère que 96 p. 100 de la population a pour langue première le français ou l'anglais, on ne peut nier la coexistence de ces deux langues principales dans notre pays.

En cette période de compressions de dépenses, certains se demandent si l'on ne devrait pas tout simplement abolir la politique des langues officielles. D'autres s'entêtent à mettre l'accent sur le coût de cette politique sans tenir compte de sa valeur réelle.

[Français]

Pour ma part, je suis fermement convaincu qu'il nous faut plus que jamais promouvoir l'usage et la diffusion des deux langues officielles et faire en sorte qu'elles soient enseignées partout au pays. Le développement des communautés en situation de minorité, tout comme d'ailleurs celui de notre pays, passe par l'éducation. Il faut donc que tous les efforts, l'énergie et le temps consacrés à la mise en oeuvre de la gestion scolaire portent fruit.

Par le truchement de mesures spéciales en matière de gestion et d'enseignement postsecondaire, nous avons fait progresser les questions prioritaires pour les communautés francophones et nous entendons poursuivre dans cette voie. Nous travaillerons également à favoriser le développement économique des communautés francophones, ce qui nécessitera la participation d'autres ministères et d'autres organismes.

J'ai l'intention de faire appel à mes collègues pour promouvoir les langues officielles, tâche qui m'est confiée à titre de ministre du Patrimoine canadien. Il faut renouveler le partenariat avec les communautés de langue officielle et moderniser notre approche. Je m'interroge finalement quant à la possibilité d'explorer d'autres avenues encore relativement méconnues qui offriraient aux communautés des possibilités quasi infinies pour se tailler une place non seulement sur la scène nationale, mais également dans le concert des nations. Je pense, par exemple, à l'autoroute électronique et à tout l'espace des télécommunications.

Pourquoi ne pourrions-nous pas tirer parti de cette autoroute, notamment pour étendre et diversifier les services éducatifs aux francophones des régions éloignées? Ce potentiel technique ne pourrait-il pas servir à créer un réseau, un espace électronique francophone destiné aux francophones? Ce sont là des questions que je compte approfondir avec mes collaborateurs et mes collègues. Je veux regarder l'avenir, je veux regarder comment nos langues officielles peuvent contribuer à l'épanouissement et au développement du Canada. Mais je suis déjà convaincu que de posséder deux langues officielles constitue un atout indéniable pour notre culture et notre présence dans le monde.

(1300)

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, le Parti réformiste nous propose aujourd'hui une motion, et pour le bénéfice de la population qui nous écoute, j'aimerais maintenant en refaire lecture et ensuite commenter un certain nombre d'aspects qui m'apparaissent particulièrement importants et sur lesquels je crois que chacun et chacune doit se faire une opinion. La motion se lit comme suit:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait:
a) modifier la Loi sur les langues officielles de manière à refléter le principe du «bilinguisme territorial», soit que le français devrait être la langue prédominante au Québec et l'anglais la langue prédominante dans les autres provinces, et que les minorités de langues officielles devraient avoir accès aux services du gouvernement fédéral dans leur propre langue dans toute partie du pays où cela est justifié par la demande publique locale;
b) continuer de faciliter l'usage de l'anglais et du français dans les débats et autres travaux du Parlement, dans les procès-verbaux et les journaux du Parlement, dans les tribunaux fédéraux, et en tant que langues de la législation fédérale; et
c) éviter de dépenser de l'argent sur les aspects de la langue qui tombent sous la compétence exclusive des provinces.
Monsieur le Président, lorsque cette motion nous a été présentée par le Parti réformiste, l'orateur à ce moment a mentionné, et je le cite:

[Traduction]

-la Loi sur les langues officielles n'est pas efficace.

[Français]

Je suis d'accord avec cet énoncé. Effectivement, je crois même que le commissaire aux langues officielle lui-même l'a souligné, c'est-à-dire que cette loi ne donne pas tous les résultats qu'on serait en droit d'attendre.


3144

Le député réformiste a aussi ajouté, et je le cite: «Cette loi. . .

[Traduction]

-elle est une source de division et coûte cher.

[Français]

Ma sainte foi, au Québec nous ne ressentons pas que cette loi crée une division ou une dissension. Je regrette que le député réformiste, lui, perçoive une telle dissension, une telle division, et sans doute pourrait-il ultérieurement nous expliquer en quoi il a perçu ceci. Il a aussi dit qu'il s'agissait d'une loi trop dispendieuse.

Or, nous savons que le commissaire aux langues officielles nous révèle que cette loi coûte trois dixièmes de 1 p. 100 des dépenses fédérales totales. Si on est inférieur au tiers de 1 p. 100, à quel niveau faut-il descendre encore pour être acceptable à l'honorable député réformiste?

J'aimerais aussi souligner ou remettre dans les faits une affirmation de l'orateur réformiste. Il a dit «le Bloc québécois est favorable à l'asymétrisme». Or, la position du Bloc québécois est claire: le bilinguisme doit être assuré dans l'ensemble des institutions fédérales. Par ailleurs, il est un certain nombre d'obligations envers le bilinguisme qui se doivent d'être assurées au niveau des provinces. Ici, le Bloc québécois, pas plus qu'aucun autre parti, n'a de prise sur la volonté des provinces.

Permettez-moi à ce moment de souligner, parce que la coïncidence est excellente, que le Nouveau-Brunswick fête aujourd'hui ses 25 ans de bilinguisme.

Une voix: C'est vrai!

M. de Savoye: Effectivement, je vous remercie pour cet assentiment.

(1305)

Cependant, malgré tout ce bilinguisme que nous avons au pays depuis 1969, malgré cette bonne volonté de bilinguisme, il faut quand même se rendre compte-et le commissaire aux langues officielles nous le mentionne-que l'accès aux services fédéraux en français n'est pas toujours à la hauteur des besoins. Les francophones hors Québec doivent non seulement pouvoir obtenir des services dans leur langue, de la part des organismes fédéraux, ils doivent aussi en recevoir de la part des organismes provinciaux, et voilà bien souvent où le bât blesse.

Je me permettrai ici de citer, M. Jean Dufresne, dans un article du Journal de Montréal qui disait: «M. Goldbloom, dans son franc parler, mais avec toute la mesure d'un homme qui me donne envie de m'exprimer un jour dans un français aussi admirablement maîtrisé que le sien, reconnaît que les services fédéraux en français se sont détériorés au point où, dans certaines régions, les francophones ne se donnent même plus la peine de s'en plaindre. Ainsi en Colombie-Britannique et dans les Prairies, les doléances ont-elles chuté de moitié l'an dernier.M. Goldbloom attribue ce phénomène à la frustration ressentie par la clientèle devant le peu de progrès accompli par diverses institutions». Et il conclut ainsi: «Pas flatteur comme constat.»

Permettez-moi d'ajouter que ce n'est pas seulement en Colombie-Britannique ou dans les Praires que le bât blesse. Dimanche, dans mon comté, je rencontrais M. Duval de Cap-Santé qui me remettait un certain nombre de talons de chèque de l'assurance-chômage, entre autres choses. Et je le constate, je lis:

[Traduction]

«UI benefit statement, date 3003, 1994, from federal tax, Quebec tax», etc. Tout est en anglais. À Cap-Santé, pour M. Duval.

[Français]

Le bât blesse vraiment beaucoup. Le bilinguisme dans la fonction publique nous permet de constater des chiffres qui nous laissent plus que songeurs. Par exemple, le nombre de postes bilingues au Québec, en faisant exclusion de la région de la Capitale nationale, est de 15 500; dans la région de la Capitale nationale proprement dite, le nombre de postes bilingues est de 39 500; quant au reste du Canada, le nombre de postes bilingues est de 8 800. Vous me direz que ceci représente une proportion des francophones et des anglophones telle qu'on la retrouve géographiquement d'un océan à l'autre. Eh bien justement, non!

Voyez-vous, il y a 900 000 anglophones au Québec, et au Québec, en faisant abstraction de la région de la Capitale nationale, il y a 15 500 postes bilingues. Il y a cependant 968 000 francophones hors Québec, soit 68 000 de plus qu'il y a d'anglophones au Québec, et pour ces gens, nous n'avons que 8 800 postes bilingues, soit à peine un peu plus de la moitié que ce qu'on retrouve au Québec. En gros, cela signifie que les francophones hors Québec n'ont droit qu'à 57 p. 100 des services auxquels les anglophones au Québec ont droit. Et cela, ce n'est pas moi qui l'invente, c'est le rapport du commissaire aux langues officielles qui me donne les chiffres, je ne fais que vous les livrer.

Permettez également que j'ajoute un autre constat du commissaire. Aux Affaires extérieures, 44 p. 100 des francophones disent rédiger leurs travaux en anglais et 85 p. 100 d'un échantillon d'employés, interrogés par le commissaire, affirment que les réunions se tiennent uniquement, ou presque, en anglais. En effet, le bilinguisme ne se porte pas très bien, monsieur le Président.

(1310)

En fait, avec les chiffres que je viens de vous citer, on peut constater que le gouvernement, par sa manière de concevoir et d'appliquer ses missions en matière de bilinguisme, ne bilinguise dans les faits que le Québec. Et très simplement, nous pouvons voir qu'une vaste majorité des postes bilingues au Canada se retrouvent au Québec et dans la région immédiate de la Capitale nationale. On parle, à ce moment-ci, de 55 000 postes bilingues dans cette région du Québec et de la Capitale nationale, contre 8 800 pour le reste du pays. Le bilinguisme, c'est au Québec qu'on le retrouve.

J'aimerais, pour poursuivre, parler d'éducation.

L'éducation, on le sait, est du ressort des provinces et quoique le Canada ait édicté, au niveau de la Charte canadienne des droits et libertés, un certain nombre d'obligations en termes du respect au droit linguistique des langues pour les minorités, nous devons constater que plusieurs provinces ne sont pas encore à la hauteur.


3145

Disons, entre autres, que ces droits ont été clarifiés par deux jugements de la Cour suprême, en 1990 et en 1993. Mais disons aussi que cela fait déjà dix ans que ces droits appartiennent à la Charte; cela fait donc déjà dix ans que les provinces auraient dû livrer la marchandise.

Mais non, il a fallu que les francophones hors Québec se battent pour obtenir la reconnaissance de ces droits et actuellement, à tout le moins en Ontario, on sait que la situation n'est pas encore réglée, elle n'est pas encore très claire.

Quant aux provinces qui plus récemment-et je parle du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta-quant à ces trois provinces qui plus récemment, ont enfin légiféré en la matière, permettez, que j'exprime le voeu que s'il leur a pris dix ans pour aboutir à une loi qui soit conforme à la Charte, j'espère que cela ne prendra pas encore dix ans avant que les réalités concrétisent la volonté de la législation qui vient d'être adoptée.

J'aimerais dire un mot sur l'Ontario. Le président de l'Association canadienne-française de l'Ontario, M. Jean Tanguay, disait récemment: «La communauté est en état de crise et le rapport du commissaire ne le reflète pas.» Il ajoutait: «Malheureusement, le gouvernement de l'Ontario demeure hors la loi»-ce sont ses paroles, je le cite-«. . .demeure hors la loi en matière de gestion scolaire et ce, de façon consciente.»

Le député libéral d'Ottawa-Vanier, sur le réseau TVA le 23 mars dernier, abondait dans le même sens: «On a demandé la gestion de nos écoles, parce que cela va de pair avec la gestion normale. On ne l'a pas encore en Ontario, et cela fait 30 ans que l'on a fait la demande, continuellement.»

Le bilinguisme, au Canada, se porte mal, mais ce n'est pas parce que la loi, ce n'est pas parce que la Charte ne prévoit pas que les choses devraient bien se porter, c'est qu'il y a une résistance quelque part.

J'aimerais préciser une chose à l'orateur du Parti réformiste qui, lors d'une question qui lui était posée tout à l'heure concernant l'écart salarial entre les francophones et les anglophones, n'a pas été en mesure, et il l'avouait lui-même, de trouver une réponse solide.

Nous savons que l'écart de revenu entre les francophones et les anglophones hors Québec ne cesse de s'agrandir. Au Québec, cet écart, au contraire, s'est incroyablement rétréci. Alors, pourquoi y a-t-il un écart et pourquoi hors Québec, continue-t-il de s'agrandir?

Et bien voici. On peut constater, en partie, que c'est dû au fait que les minorités francophones ne contrôlent pas la gestion de leurs écoles primaires et secondaires, parce que l'on sait que la formation est un des points d'appui les plus importants pour réussir dans la vie. À partir du moment où nos minorités francophones hors Québec ne peuvent pas avoir accès à un enseignement dans leur langue maternelle, automatiquement elles n'ont plus droit à cette égalité des chances que leurs concitoyens de langue anglaise, eux, possèdent.

(1315)

Cet écart n'est pas mince. En 1977, il était de 4,4 p. 100 en faveur des anglophones. Non seulement il n'est pas demeuré stable, il s'est accru à 10,3 p. 100 en 1992, et ça, c'est une tragédie.

J'aimerais aussi parler d'une déclaration que l'honorable premier ministre a faite en cette Chambre la semaine dernière. Notre premier ministre disait, en parlant des souverainistes du Québec: «Lorsqu'ils auront atteint leur objectif de faire la séparation, il y aura un million de francophones qui perdront probablement leur langue française.» Regrettables propos. Les francophones n'ont pas des droits parce que le Québec existe, les francophones hors Québec ont des droits qui sont les leurs, abstraction faite du Québec. Ces gens, ces citoyens et ces citoyennes d'expression française ont une culture qui leur est propre, qui leur appartient et qui ne dépend nullement de l'existence ou de la non-existence d'un Québec souverain. Je m'aperçois que certaines personnes, cependant, ne sont pas en mesure d'apprécier les droits de ces minorités.

Croyez-moi, les Québécois et les Québécoises sont tout à fait partisans de la culture française dans l'ensemble de l'Amérique du Nord et plus particulièrement d'un océan à l'autre au Canada et dans toutes les provinces où on retrouve ces communautés qui, à travers les années, ont su s'établir, s'épanouir. Elles méritent, elles font plus que mériter, elles ont le droit d'être appuyées par ce gouvernement.

Je mentionne que les forces souverainistes du Québec ont déjà annoncé, quant à elles, une politique généreuse à l'égard de sa minorité anglophone. Je considère également malheureux que le commissaire aux langues officielles croie que le Canada anglais éliminerait les droits des Canadiens français hors Québec si le Québec devenait souverain.

En ce moment, vous comprendrez qu'il devient d'autant plus important que le Québec accorde un appui sans condition à toutes les minorités francophones du reste du Canada si le gouvernement fédéral venait à abdiquer son devoir en la matière.

Pour terminer, j'aimerais adresser quelques questions au Parti réformiste. Dans le cas où la politique actuelle du bilinguisme serait abolie, comme le Parti réformiste le propose, quelles sont les politiques que ce parti proposerait pour que les francophones hors Québec bénéficient des mêmes droits, privilèges, garanties et respect que ceux que possèdent les anglophones du Québec? Seraient-ils en faveur du respect de l'autonomie de gestion scolaire pour les francophones hors Québec? Que proposent-ils comme alternative au respect et au soutien aux organismes francophones hors Québec si le gouvernement évitait de dépenser de l'argent sur les aspects de la langue qui tombent sous la compétence exclusive des provinces?

J'ai exprimé un certain nombre de faits, j'ai soulevé un certain nombre de questions. Je crois que si le Parti réformiste veut aller au bout de son propos, il se doit de proposer plus qu'un avis de motion, il se doit de proposer une solution respectueuse de l'ensemble des minorités linguistiques au Canada, qu'elles soient francophones ou anglophones.

(1320)

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, j'ai de la difficulté, parfois, à me contenir lorsque j'entends certains des propos des gens d'en face.


3146

Tout d'abord, le député prétend que le rapport du commissaire aux langues officielles stipule que la Loi sur les langues officielles ne fonctionne pas. Rien n'est plus faux.

Je suis sûr que tous les Canadiens et les Canadiennes qui regardent, aujourd'hui, les délibérations de la Chambre des communes à la télévision savent que le commissaire aux langues officielles est un ombudsman. C'est son rôle d'indiquer les failles où il y en a, et dans toute société il y en aura toujours; c'est son rôle de les identifier. Son objet n'est pas de condamner le gouvernement, ni le gouvernemet précédent, ni qui que ce soit, mais d'améliorer le système.

Tout comme le député d'en face, à la période des questions orales, soulève des questions à la Chambre des communes, non pas pour dire, j'espère, que tous ceux et celles qui siègent sur les banquettes du Parlement sont des êtres infâmes, mais bien pour améliorer le système et pour rendre ce Parlement plus efficace. Eh bien, comme lui, le commissaire aux langues officielles fait la même chose, et tout cela, pour rendre la loi meilleure et non pas pour la condamner, disons-le.

Dans un deuxième temps, j'aimerais bien que le député d'en face m'explique ses mathématiques. Il choisit d'escompter les fonctionnaires qui oeuvrent dans la région de la Capitale nationale en ce qui a trait aux services dans la langue minoritaire. N'est-il pas au courant que, à part le rôle national qu'ont les fonctionnaires de la capitale nationale, ils administrent aussi les programmes sur le plan régional? Par exemple, dans un rayon d'à peu près 100 kilomètres de cette ville hors Québec demeurent la moitié de tous les francophones en Ontario, peut-être 150 0000. Ils ne sont pas desservis à partir des bureaux régionaux ailleurs, ils sont desservis à partir des bureaux ici, à Ottawa. Lorsque le député décide d'extraire artificiellement ceux et celles qui oeuvrent à Ottawa, qu'est-il en train de faire aux chiffres?

Finalement, en ce qui à trait à l'avenir des francophones hors Québec, on n'a pas à être un avocat de Baie-Comeau pour comprendre que ce ne sont pas seulement les droits des francophones qu'il faut protéger. C'est ça d'abord, oui, mais également, c'est la masse critique qui nous a gardés vivants comme entité dans ce pays. Je suis Franco-Ontarien et je considère, en mon for intérieur, que dans mon pays, le Québec a été un outil important pour la survivance de ma langue. Il faut être réaliste et savoir cela.

Aux États-Unis, il n'y a pas de Québec avec sa masse critique. Est-ce que les francophones ont survécu? Non! C'est de la nostalgie en Louisiane et ce n'est rien du tout ailleurs aux États-Unis, nonobstant qu'à l'origine, il y avait plus de francophones aux États-Unis qu'il y en avait ici au Canada. Pourquoi? Parce qu'il n'y avait pas la masse critique, ni la masse proportionnelle. C'est ce que le premier ministre veut dire, que les francophones du Québec sont importants pour la survivance de nous tous au Canada. Les francophones du Québec ont également contribué à cette différence qui fait que nous, les Canadiens, ne sommes pas des Américains. Nous leur devons ça. Nous sommes un pays différent, en grande partie grâce à eux. Ceux qui prétendent qu'on peut extraire ça du Canada et que tout va rester pareil, c'est faux. Et never mind d'être politiquement correct, disons la vérité, parce que c'est ça.

M. de Savoye: Monsieur le Président, vous me permettrez de répondre à ces propos. D'abord, j'ai beaucoup de respect pour la solidarité, avec sa culture, que manifeste mon collègue d'en face. Je n'ai cependant pas beaucoup de respect pour ses compétences en mathématiques.

Prenons son premier propos. Effectivement, le Québec est certainement, pour l'ensemble des francophones hors Québec, un point d'appui important, et il continuera de l'être, à moins qu'il y ait une volonté féroce, que je ne ressens pas, du gouvernement du Canada de s'y opposer.

(1325)

Maintenant, pour l'aspect mathématique, la région de la Capitale nationale n'est pas exclusivement celle d'Ottawa, ça comprend, ne vous en déplaise, une partie de l'autre côté de la rivière qui s'appelle Hull et Gatineau. Mais vous le saviez, monsieur le Président, j'en suis convaincu. Lorsqu'on dit des fonctionnaires qui occupent des postes bilingues ici, à la fonction publique, dans la région de la Capitale nationale, qu'ils servent une clientèle ontarienne, franco-ontarienne, je présume, j'espère, qu'ils servent aussi une clientèle québécoise. Sinon, il y aurait vraiment un abus dans les chiffres.

Cela dit, lorsque j'ai comparé le Québec avec le reste du Canada, j'ai bien pris la peine, et je le répète, de dire que je comparais la partie du Québec qui excluait celle de la capitale nationale avec le reste du Canada en excluant la région de la Capitale nationale. Je compare donc des pommes avec des pommes et des oranges avec des oranges. Mais je comprends que l'honorable député a peut-être avantage à vouloir détruire la réalité. Et, mon Dieu, oublions ce qui est politiquement correct et disons les choses comme elles sont. Nous, on donne 57 p. 100 plus de services aux anglophones du Québec que le reste du pays ne le fait vis-à-vis de ses minorités francophones.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours du député de Portneuf, qui réussit toujours à bien rassembler ses idées et à les présenter de manière captivante.

Le député de Portneuf croit-il que la réalité française ait l'ombre d'une chance de survivre hors Québec au même degré qu'elle le fait aujourd'hui si le Québec décide de se séparer? Pourquoi le reste du Canada devrait-il alors traiter les minorités francophones hors Québec différemment de toute autre minorité linguistique? En l'absence du Québec, pourquoi devrait-il accorder un traitement différent à cette minorité?

Je voudrais aussi demander au député de Portneuf de commenter le fait que nous nous sentons obligés de représenter et de respecter la langue de la minorité francophone, particulièrement dans l'Ouest. En réalité, dans ma ville, la langue de la minorité francophone se place en troisième, quatrième, même en cinquième position, après l'ukrainien et le chinois maintenant. Comment devrions-nous traiter ces minorités par rapport au français et à l'anglais?

J'aimerais aussi faire un commentaire sur la disparité des revenus dont a parlé le député, la différence entre le revenu des francophones du Québec, qui ont vu leur revenu augmenter au


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cours des dernières années, et celui des francophones hors Québec. Je me demande si cela ne pourrait pas être partiellement attribuable à l'essor du milieu des entrepreneurs francophones au Québec et à l'exode des anglophones.

En dernier lieu, je voudrais enfin commenter l'ironie de cette leçon sur les droits linguistiques des minorités qui nous est donnée dans le reste du Canada, qui a été témoin de la mise en application de la Loi 101 au Québec. On sait la rancoeur et l'incrédulité que cette loi a générées partout ailleurs au Canada. Il est certainement ironique de recevoir une telle leçon de compréhension.

[Français]

Le vice-président: Avant de donner la parole à l'honorable député de Portneuf, je dois dire que je dois lui donner autant de temps qu'en a pris l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest.

[Traduction]

M. de Savoye: Je suis surpris qu'on me demande comment nous croyons que tel ou tel aspect pourrait fonctionner. Ce n'est pas nous qui avons présenté la motion, c'est le Parti réformiste. Ce sont eux qui devraient nous dire comment les choses fonctionneraient pour les collectivités francophones hors Québec.

(1330)

Comment le Parti réformiste s'assurera-t-il que ces collectivités francophones puissent continuer à vivre et que leurs membres puissent obtenir de bons emplois et de bons salaires? Ce sont eux qui devraient donner ces réponses.

Ce que nous disons, c'est que, une fois souverain, le Québec continuerait à soutenir les collectivités francophones d'un océan à l'autre et augmenterait même ses efforts pour les défendre. Nous l'avons dit maintes et maintes fois. Je ne vais pas vous expliquer pourquoi je crois que ces gens s'en sortiront. Ils ont déjà surmonté d'immenses difficultés. On peut espérer que si les lois du Canada continuent à appuyer le bilinguisme et si-et seulement si-elles sont appliquées correctement, ce qui n'est pas le cas actuellement, ces collectivités pourront se suffire à elles-mêmes.

Cependant, je le répète, ce n'est pas à moi de répondre à ces questions. Les réformistes ont présenté une motion. Laissons-les nous dire quels seront ses effets, dans la vraie vie, pour les collectivités francophones d'un bout à l'autre du Canada-à moins qu'ils veuillent tout simplement les éliminer.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, avant de commencer mon discours, je voudrais faire une observation qui résulte de ce que disait en conclusion le député précédent, lequel disait qu'un Québec souverain s'occuperait de sa politique linguistique d'un océan à l'autre.

Si le Québec devient une nation souveraine, il n'aura pas à se soucier des océans, il n'aura à s'occuper que de la petite côte du Saint-Laurent.

La motion présentée aujourd'hui montre que le Parti réformiste, en tant que parti fédéraliste, se préoccupe du Québec, du français et de notre politique linguistique d'un océan à l'autre, en espérant que le pays continuera de s'étendre d'un océan à l'autre.

Les objectifs de la Loi sur les langues officielles sont conçus pour faire en sorte que les habitants de la province de Québec et les francophones du reste du pays puissent participer à la vie nationale et profiter, dans leur langue, de tout ce qu'offre le pays. C'est pour cela que je désire en parler car, malheureusement, la loi sur les langues que nous avons ne fonctionne pas.

En 1968, le premier ministre de l'époque, M. Trudeau, indiquait dans le discours du Trône la nécessité de créer une certaine justice linguistique et de contrer ce que l'on percevait comme un début de séparatisme québécois. M. Trudeau disait:

Vous serez [. . .]invités à étudier des mesures relatives [. . .]à la citoyenneté, aux symboles nationaux, aux organismes culturels, [. . .].Certaines de ces propositions viseront le redressement des torts, tandis que d'autres offriront des possibilités longtemps refusées. Ensemble, elles illustrent l'interdépendance essentielle entre la justice et l'unité nationale.
Malheureusement, il n'a pas adopté les recommandations de la commission sur les langues qui préconisaient le bilinguisme territorial. Il a au contraire opté pour un bilinguisme personnel. Comme je l'ai dit, c'était pour contrer le séparatisme québécois que l'on voyait percer de nouveau. Il ne pensait certainement pas, en 1968, que 25 ans plus tard le premier ministre serait en face de 54 députés dont la mission serait de faire sortir le Québec de la Confédération. Cela démontre aussi que la Loi sur les langues officielles n'a pas fonctionné.

Il faut apporter des changements pour faire en sorte qu'ils restent parmi nous, qu'ils ne partent pas avec armes et bagages, et c'est ce que 52 d'entre nous veulent faire.

La langue est source de division. Dans la situation multiculturelle et multilingue que nous connaissons, c'est probablement l'aspect qui nous divise le plus, et d'ailleurs, ce n'est pas propre au Canada, nous voyons cela partout au monde. Une grande partie des tensions qui se manifestent aujourd'hui dans l'ex-Yougoslavie sont à la fois raciales, ethniques et linguistiques. Les divisions et le démantèlement de l'Union soviétique aboutissent au nationalisme et à la formation de groupes ethniques et linguistiques. Le monde entier est aux prises avec des problèmes linguistiques.

(1335)

Au Canada, nous pensions pourtant avoir assez de maturité pour travailler ensemble et réaliser une certaine harmonie. Nous avons cru pouvoir collaborer pour venir à bout des difficultés. Malheureusement, il est impossible de légiférer les moeurs et la façon de penser d'une population.

Reconnaissons donc que, si nous voulons vivre en harmonie en ce qui concerne les questions linguistiques, il nous reste un


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chemin difficile à parcourir. Nous devons ensemble convaincre les Canadiens qu'ils doivent tous adhérer au bilinguisme.

Le français et l'anglais sont présents au Canada depuis longtemps, soit depuis 1608 et l'arrivée de Samuel de Champlain. Depuis, le français et l'anglais ont dominé tour à tour. Il y a eu une alternance et, par suite d'événements historiques, c'est l'anglais qui domine aujourd'hui. De nos jours, nous reconnaissons toutefois que les droits des francophones doivent être reconnus au Canada et nous voulons qu'ils le soient.

Nous voulons nous assurer que les francophones ont leur place au Canada. Nous voulons changer la Loi sur les langues officielles pour qu'après les prochaines élections, il n'y ait plus 54 députés à la Chambre qui veulent détruire le pays et exiger la séparation du Québec. Nous devons garantir qu'il y a à la Chambre 295 députés engagés à travailler ensemble et à rester unis.

Après s'être penché sur le problème, le Parti réformiste a conclu qu'il fallait revenir à la commission formée dans les années 1960 et à son rapport voulant qu'il y ait un bilinguisme territorial. Le bilinguisme personnel ne fonctionne évidemment pas puisque nous avons ces 54 députés à la Chambre aujourd'hui.

Reconnaissons que nous pouvons changer le système pour mieux travailler ensemble. Francophones ou anglophones, tous les Canadiens doivent être libres de parler leur langue. Nous refusons de forcer l'un à parler la langue de l'autre s'il s'y oppose, sans quoi il y aura inévitablement un effet de ressac.

Nous devrions aussi tenter de désarmorcer la polémique entourant les langues. De 1867 jusqu'en 1969, le Canada n'avait presque pas de législation en matière linguistique. Nous devrions revenir au principe selon lequel il vaut mieux avoir le moins de lois possible dans ce domaine et à celui qui met l'accent sur l'harmonie et le désir de faire mieux fonctionner les choses. Voilà pourquoi nous, les réformistes, proposons que la question de la langue relève des provinces plutôt que du gouvernement fédéral. Que chaque province décide quelle langue est parlée sur son territoire, tout en tenant compte de la nécessité de fournir des services dans la langue parlée par la population, que ce soit le français, l'anglais ou les deux, lorsque la demande le justifie.

Nous avons donc décidé de proposer cette motion aujourd'hui pour élever le débat et aborder la question avant que les 54 députés du Bloc québécois n'aient le temps d'accorder leurs flûtes et de quitter le pays, car à ce moment-là nous nous retrouverons sans aucune politique linguistique.

Si les 54 députés du Bloc québécois réalisent la séparation du Québec, ils laisseront en plan des milliers de Canadiens français dans le reste du pays, qui n'auront plus aucun appui et se sentiront abandonnés par les Québécois. Ce sera un très mauvais service à leur rendre. J'incite donc les Québécois à redoubler d'ardeur pour veiller à ce que le fédéralisme fonctionne au lieu de plier bagage.

Nous avons investi de grosses sommes au fil des ans. Même M. Spicer, le premier commissaire aux langues officielles, a déclaré qu'il faudrait peut-être faire les calculs et additionner tout ce que cela coûte. Il a dit:

Il serait sûrement préférable de mieux tenir les comptes. Sans de meilleurs chiffres, ceux qui s'occupent de la réforme linguistique auront sans cesse à aborder la question des coûts. Toujours confrontés à la même polémique, ils resteront incapables de rejeter de savoureuses estimations comme. . . «trois milliards de dollars par année pour le bilinguisme». Il semblerait plus raisonnable de rassembler tous les postes linguistiques, de préciser l'objectif de chacun, d'en additionner les coûts, aussi terrible en soit la somme, d'ajouter 10 p. 100 pour les frais indirects et inhérents, puis de publier et de défendre la chose comme étant le prix, élevé mais nécessaire, à payer pour être Canadien. . .
(1340)

Voilà ce que disait il y a déjà plusieurs années de cela le premier commissaire aux langues officielles, M. Spicer. Aujourd'hui, on entend toutes sortes de statistiques. Le coût est-il de deux milliards, de quatre milliards de dollars? Nous ne le savons pas.

Ce que nous savons, c'est que nous versons 50 millions de dollars annuellement en primes à des fonctionnaires qui parlent les deux langues, que cela soit ou non une exigence de leur poste. Nous savons que nous engloutissons des centaines de millions de dollars dans d'autres aspects de la politique linguistique, à savoir la traduction, les conseils bilingues, 200 millions de dollars pour l'éducation. Cela s'additionne, mais combien cela coûte-t-il en tout? Nous l'ignorons.

M. Spicer a dit il y a déjà plusieurs années qu'il fallait faire le total et dire aux Canadiens que c'était le prix à payer pour sauver l'unité de notre pays.

Je l'ai dit maintes fois et je le répète: le Parti réformiste souhaite que le Canada demeure uni et qu'une politique linguistique unisse tous les Canadiens dans la compréhension les uns des autres. La politique actuelle des langues officielles ne fonctionne pas et doit être modifiée. Voilà pourquoi nous soulevons aujourd'hui cette question.

Entendons-nous sur une nouvelle structure. Ne faisons pas comme le Bloc québécois en lui disant de partir s'il ne peut pas l'accepter. Disons au Bloc québécois de ne pas faire l'égoïste et de ne pas abandonner l'extraordinaire expérience qu'est le Canada.

Nous avons dit au chef de l'opposition et aux autres membres du Bloc québécois de définir avec nous un nouveau fédéralisme. Ils ont refusé. Si un référendum doit avoir lieu au Québec, disent-ils, il donnera le choix entre le fédéralisme actuel ou la séparation. Ils ne veulent pas essayer de faire en sorte que cette expérience qu'est le Canada fonctionne. C'est extrêmement malheureux pour les 27,5 millions de Canadiens, y compris les Canadiens français et notamment les Québécois français qui veulent que le Canada demeure uni.


3149

Il est extrêmement important que nous mettions au point une nouvelle loi de telle sorte que, après les prochaines élections, le Canada soit gouverné par un gouvernement réformiste majoritaire et qu'il n'y ait plus de Bloc québécois.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations.

Au début d'une nouvelle législature, le député conviendra, je crois, que nous devons nous faire un point d'honneur de fonder nos déclarations sur la vérité et sur des analyses raisonnées, et de ne pas nous contenter de discours creux.

Le député a déclaré à plusieurs reprises au cours de son intervention que la présence du Bloc québécois au Parlement était attribuable à la politique des langues officielles. À cela, je répliquerai que la présence du Bloc, comme celle du Parti réformiste, est attribuable à l'incapacité du gouvernement conservateur de garder la confiance du peuple. Elle n'a absolument rien à voir avec la Loi sur les langues officielles.

Le député, et un autre avant lui, ont cité plusieurs cas où la langue avait été à l'origine de dissensions et d'incidents regrettables dans le passé. Par exemple, la déportation des Acadiens a été mentionnée.

À mon avis, la déportation des Acadiens n'avait rien à voir avec la langue. Il s'agit d'un événement survenu au XVIIIe siècle que l'on qualifierait aujourd'hui de nettoyage ethnique. Les Acadiens n'ont pas été déportés parce qu'ils parlaient français, mais parce qu'ils avaient une religion différente et parce que, sur le plan économique et militaire, ils constituaient un handicap dans la Nouvelle-Écosse de l'époque.

De plus, si le député recherche dans l'histoire des exemples de la forme d'impartialité dont le Parti réformiste se targue, il découvrira que la langue anglaise elle-même et le peuple anglais ont fait montre d'une très grande tolérance pour le français. Tout au long du moyen-âge et des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, et même encore au XIXe siècle, il n'était pas rare que les membres des classes sociales supérieures, si l'on peut dire, et des gens éduqués en Angleterre et dans les possessions britanniques parlent français. En fait, cette tolérance pour l'autre langue a persisté tout au long du XIXe siècle. Le député rend la langue responsable de maux auxquels elle est étrangère. Fondamentalement, la langue n'est qu'une forme de communication. Mieux nous connaîtrons la langue de l'autre, mieux nous comprendrons l'autre et mieux nous pourrons surmonter le type de tribalisme qui est peut-être caractéristique du genre de principes défendus par le Bloc. Le Bloc représente un groupe de gens auquel j'appartiens moi aussi: des Canadiens.

(1345)

La langue nous permet d'établir des contacts les uns avec les autres et je crois que, en tant que Canadiens, nous devons tout faire en notre pouvoir pour que le plus grand nombre de nos concitoyens aient la possibilité de parler nos deux langues.

M. Williams: Monsieur le Président, d'une certaine façon, je crois que le député devrait être de notre côté et rédiger des discours de réformistes, car nous sommes d'accord avec lui à bien des égards.

Il ne fait pas de doute, quant à moi, que la politique linguistique actuelle du Canada est en quelque sorte responsable du fait que les 54 députés du Bloc québécois sont ici aujourd'hui.

En 1968, comme je l'ai dit, il y avait des divisions au Canada. On voulait faire régner la justice linguistique dans le pays.M. Trudeau, qui était premier ministre à l'époque, a tenté de résoudre le problème en présentant une loi sur les langues. Il est allé à l'encontre des recommandations de la commission qui parlaient de «bilinguisme territorial» et a mis de l'avant la notion de «bilinguisme personnel». Si M. Trudeau croyait que le séparatisme existait en 1968, il n'avait aucune idée de ce que le terme séparatisme allait signifier ici même, à la Chambre, en 1994.

Le député a également montré comment la langue anglaise tolère le français et les autres langues dans le monde. Je crois que c'est vrai. En tant que réformistes et en tant qu'anglophones, nous faisons notre possible pour que tout le monde se sente bien au Canada, d'un océan à l'autre. Nous demandons seulement d'être traités de la même façon en tant que Canadiens par les habitants du Québec qui, parce qu'ils estiment avoir été quelque peu négligés, pensent qu'ils devraient se séparer du reste du pays, ce qui détruirait leur économie et peut-être aussi l'économie canadienne.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, le député a dit que le Bloc québécois ne voulait pas voir réussir l'expérience que représente le Canada. À la lumière de certains des propos qu'a tenus le député réformiste en parlant de «domination de l'anglais au Canada» et en disant que «les côtes du Québec se limiteront aux rives du Saint-Laurent», je me demande si le député ne cherche pas à accélérer la séparation du Québec plutôt qu'à essayer de cicatriser des blessures et si le Parti réformiste n'a pas pour objectif d'encourager le Québec à se séparer plutôt qu'à vivre dans un pays qui sait faire des compromis et qui possède deux langues officielles.

M. Williams: Monsieur le Président, les faits parlent d'eux-mêmes. Soixante-quinze pour cent des Canadiens sont anglophones et 25 p. 100 sont francophones. Chez nos voisins du sud, on compte 250 millions d'anglophones. Si le Québec se sépare pour former un pays indépendant, il ne sera plus qu'une île francophone dans un océan d'anglophones en Amérique du Nord. Il sera isolé dans un vaste océan sans aucun allié. Aucun groupe d'anglophones ne sera prêt à l'aider. S'il veut protéger sa langue et son économie, il ferait beaucoup mieux d'appartenir à un grand ensemble comme le Canada que de rester seul de son côté. En effet, s'il se sépare et s'il croit qu'il va préserver le français sans absolument aucun allié, il va finir par être submergé complètement par les forces culturelles du reste de l'Amérique du Nord.

Le député parle des rives nord du Saint-Laurent; c'est un fait que c'est tout ce qui resterait au Québec. Il vaut beaucoup mieux


3150

reconnaître les faits comme ils sont que de tergiverser et laisser les Québécois ou les 54 députés québécois qui préconisent la séparation marcher sur les pieds des libéraux.

(1350)

C'est parce qu'on leur a marché sur les pieds si longtemps que notre pays se trouve maintenant en péril. Reconnaissons donc le problème, attaquons-nous-y avec détermination et réglons-le une fois pour toutes.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, c'est à bon escient que je ne suis pas intervenu immédiatement parce que je voulais écouter un peu les commentaires de part et d'autre sur l'allocutation que le député du Parti réformiste vient de faire. Je pense qu'on interprète de toutes sortes de façons, on galvaude vraiment l'explication des 54 députés du Bloc québécois dans cette Chambre. Je pense qu'il y a des députés qui vivent dans une espèce de serre chaude, déconnectés complètement de la réalité.

Je voudrais demander au Parti réformiste, entre autres au député qui vient de faire l'allocutation, où étaient-ils au moment de l'Accord du lac Meech, où étaient-ils au moment de l'Accord de Charlottetown lorsque le Canada anglais a dit non au Québec à deux reprises? Où étaient-ils à ce moment-là? Peut-être qu'ils vont comprendre le pourquoi de la présence du Bloc québécois ici, dans cette Chambre, 54 sur 75 qui viennent prôner, qui viennent défendre les intérêts du Québec et promouvoir la souveraineté du Québec.

Également, parce qu'on dévie un peu de la motion présentée par le Parti réformiste au niveau du bilinguisme, c'est bien beau dire et avancer toutes sortes d'hypothèses, toutes sortes d'explications, mais dans son discours, je n'ai jamais compris, je n'ai jamais entendu quels moyens concrets-on parle de si le Québec se sépare, et je pense que de part et d'autre, ils sont en train de parler comme si c'était un fait accompli, que le Québec était séparé, mais qu'est-ce que vous allez faire avec les francophones? Je comprends le Parti réformiste qui dit: Nous, on va accueillir tout le monde chez nous et on va traiter les minorités, et on va bien les traiter en plus, quoi que ce soit, mais ils n'ont jamais parlé de moyens concrets. Quels moyens concrets le Parti réformiste va-t-il mettre à la disposition des francophones hors Québec au moment où le Québec sera souverain?

[Traduction]

M. Williams: Monsieur le Président, la question mérite une réponse. Nous travaillons très fort pour que le Québec demeure au sein du Canada. Nous proposons une nouvelle façon d'administrer la politique des langues officielles au Canada. Nous garantirons ainsi que les Canadiens d'un océan à l'autre désireux de parler le français puissent le faire.

La meilleure solution, c'est de s'assurer que tout le monde, y compris les 54 députés bloquistes qui veulent défendre les intérêts de leurs électeurs, peut travailler et s'exprimer dans la langue de son choix dans ce grand pays qu'est le Canada.

Le président suppléant: Le temps prévu pour les questions et observations est écoulé. Reprise du débat. Si je ne m'abuse, la secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien veut partager son temps.

[Français]

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, nous débattons aujourd'hui d'une proposition du Parti réformiste demandant notamment que l'on modifie la Loi sur les langues officielles pour faire en sorte que le français soit la langue prédominante du Québec et que l'anglais soit la langue prédominante ailleurs au pays. La proposition ajoute que les services fédéraux devraient être disponibles dans la langue officielle de la minorité là où il y a une demande importante.

De toute évidence, cette proposition nous vient de quelqu'un qui connaît mal la Loi sur les langues officielles ou de quelqu'un qui cherche à donner à la population une image déformée du contenu et de l'esprit de la loi.

[Traduction]

Qui, du Parti réformiste ou d'un autre parti, peut nier que le français est la langue prédominante au Québec? Qui peut nier que l'anglais est la langue prédominante en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario ou à Terre-Neuve?

Non seulement la Loi sur les langues officielles ne fait rien pour changer cela, mais elle le reconnaît. Elle le reconnaît en garantissant aux minorités de langues officielles l'accès aux services gouvernementaux fédéraux dans leur propre langue, là où la demande le justifie. Voilà en gros ce que préconise cette motion, et c'est ce que la loi prévoit déjà. Qu'y a-t-il de nouveau? Peut-être n'est-ce qu'une nouvelle tentative pour attiser le ressentiment et le mécontentement parmi les Canadiens?

Je recommande aux députés du Parti réformiste de mieux se renseigner sur la politique des langues officielles s'ils souhaitent la tenue de débats intéressants, fondés sur des faits et non pas simplement sur des rumeurs et des idées fausses. Ils devraient peut-être lire la brochure intitulée Mythes et réalités pour déterminer si leurs affirmations tiennent du mythe ou de la réalité. Peut-être alors cesseront-ils de se battre contre des moulins à vent et conjugueront-ils leurs efforts à ceux du gouvernement pour résoudre nos véritables problèmes.

(1355)

[Français]

Mais la position du Parti réformiste sur la question des langues officielles fait plus que trahir leur manque de connaissance de la politique du gouvernement. Elle prouve que le Parti réformiste comprend très mal la nature de l'identité canadienne. Nous savons tous que les députés du Bloc québécois veulent briser le Canada en réalisant la séparation du Québec. C'est clair. Le Bloc vit comme il peut ses propres contradictions, mais il n'y a pas d'ambiguïté sur son option fondamentale.

3151

Sans le savoir, le Parti réformiste nous propose également de briser le Canada. Il veut briser le Canada en s'attaquant aux valeurs canadiennes et aux grandes politiques qui nous unissent, comme les langues officielles et le multiculturalisme.

[Traduction]

Comme des apprentis sorciers, nos amis d'en face aimeraient bien abandonner des politiques établies de longue date ainsi que des solutions pratiques, et ce, en faisant complètement abstraction des terribles conséquences que cela aurait sur l'unité et l'identité canadiennes.

Notre devoir, à titre de parlementaires, c'est de renforcer l'unité, pas l'uniformité. Nous devons faire en sorte que, dans notre pays, les nombreuses façons d'être des Canadiens soient respectées.

La langue et la culture sont des questions délicates dans toute société. Elles touchent directement la façon dont les gens se définissent eux-mêmes ainsi que leur place dans la société.

Les débats publics ne reflètent pas toujours la réalité.

[Français]

Les Canadiens et les Canadiennes souhaitent des politiques qui traduisent les valeurs canadiennes que sont le dialogue, la compréhension, l'équité et le respect mutuel des politiques fondées sur une définition de la citoyenneté qui embrasse à la fois les droits et les responsabilités. Des politiques qui encouragent tous les Canadiens à prendre leur place au sein d'une identité canadienne pluraliste.

Mais, ne nous attachons pas trop aux étiquettes comme multiculturalisme, pluralisme, diversité, bilinguisme, dualité linguistique, langues officielles, au-delà des minorités, des nuances sémantiques sur lesquelles les gens ne s'entendent pas nécessairement. Ces termes ont tous un point commun: ce sont des solutions made in Canada. Les Canadiens et les Canadiennes ont cherché à élaborer des politiques qui reflètent les divers aspects de notre société et les défis auxquels elle doit faire face.

Ces politiques très canadiennes ont servi et servent encore de modèle à d'autres, mais elles sont nées chez nous au Canada.

[Traduction]

La raison d'être de notre politique des langues officielles est claire. L'une des caractéristiques qui définissent le Canada est la présence de deux grands groupes linguistiques. Une proportion de 98,8 p. 100 de Canadiens parlent l'anglais ou le français, et ce sont les principales langues dont tous les Canadiens font usage dans la vie quotidienne.

L'utilisation de l'anglais et du français à titre officiel dans les institutions gouvernementales remonte même avant la Confédération. Il est difficile d'étudier notre pays sans reconnaître l'importance de ces deux langues dans notre société.

Environ le quart des Canadiens ont le français comme langue officielle principale, et les trois quarts l'anglais. Dans les deux groupes linguistiques, la majorité est unilingue. Sept pour cent ou plus de 1,5 million de Canadiens vivent dans des provinces où leur première langue officielle est minoritaire.

La valeur qu'on attache aux langues ressort clairement des sondages d'opinion, car trois parents sur quatre veulent que leurs enfants apprennent la deuxième langue officielle.

C'est ainsi que de très nombreux parents ont inscrit leurs enfants dans des programmes d'immersion française.

Le Président: Il reste environ quatre minutes à la députée, et elle aura la parole à la reprise du débat.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


3151

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Paul Steckle (Huron-Bruce): Monsieur le Président, récemment, une petite collectivité très unie de ma circonscription a été secouée par le meurtre brutal de l'une de ses membres, Mlle Joan Heimbeker, de Clifford, en Ontario.

Ses parents ont perdu une fille, la collectivité, une amie, et la société, une brillante jeune vedette en puissance.

La récente série de crimes violents qui ont été perpétrés d'un bout à l'autre du pays a ébranlé celui-ci que l'on croyait pourtant sûr et amical. En tant que parlementaires, nous devons prendre des mesures concrètes pour garantir que la loi soit assez sévère pour prévenir ce genre de crimes.

Nous devons reconnaître la souffrance et l'angoisse des familles des victimes et leur faire justice rapidement, mais équitablement, afin qu'elles puissent recommencer à vivre sans l'être cher qu'elles ont perdu.

Les Canadiens s'attendent de leur gouvernement qu'il adopte les dispositions législatives qui s'imposent pour que le système judiciaire soit adapté aux réalités d'aujourd'hui. La société doit avoir la certitude d'être bien protégée des individus violents et que la justice punit sévèrement les criminels violents.

Il faut envisager d'imposer de nouveau le châtiment corporel comme moyen de dissuasion pour prévenir ces atrocités.

* * *

[Français]

LA DICTÉE DES AMÉRIQUES

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, je me joins aux gens de mon comté pour féliciter M. Jacques Sormany, professeur de biologie et de mathématiques au Collège de Chicoutimi, proclamé gagnant de la Dictée des Amériques le


3152

26 mars dernier dans la catégorie Seniors professionnels.M. Sormany est l'un des quatre champions qui ont réussi avec succès les écueils de la dictée élaborée par Antonine Maillet.

Les trois autres champions sont: Daniel Albert dans la catégorie Juniors; Ronald Cawthorn dans la catégorie Seniors, français langue seconde; Vincent Renaud, d'Ottawa, dans la catégorie Seniors amateurs.

Deux cents participants, répartis en quatre catégories, en provenance du Québec, du Canada, de l'Amérique latine et des États-Unis prenaient part à cet événement. Nous sommes fiers de la performance remarquable de M. Sormany.

* * *

[Traduction]

L'EAU POTABLE

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, à qui incombe la responsabilité de s'assurer que les Canadiens et, en l'occurrence, les habitants de la Colombie-Britannique reçoivent des informations exactes et sérieuses sur leur eau potable et les méthodes de désinfection employées?

Est-ce les municipalités qui informent les commissions régionales des eaux du Grand Vancouver, interviennent et contrôlent les poisons déversés dans nos réseaux hydrographiques? Est-ce la province et l'office régional des eaux du Grand Vancouver qui contribuent à l'intervention forestière dans nos bassins hydrographiques et augmentent ainsi la quantité de sédiments et de matières organiques dans l'eau que nous buvons et qui ont valu à nos bassins hydrographiques de porter un nouveau nom, soit la concession de ferme forestière no 42?

Est-ce le gouvernement fédéral, le ministère de l'Environnement et le ministère des Pêches et des Océans qui pourraient décider d'interdire le chlore et tous les composés chlorés qui se sont déjà révélés très toxiques pour le poisson? Est-ce nos ministres de la Santé qui devraient être au courant des nombreux rapports de recherche montrant que les cas de cancer et de maladie cardiaque s'intensifient depuis que l'on met du chlore dans nos bassins hydrographiques?

Les Canadiens veulent avoir des réponses franches et honnêtes en ce qui concerne le partage des responsabilités.

* * *

LE DAKOTA OJIBWAY TRIBAL COUNCIL

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir informer la Chambre qu'un service de police complet sera bientôt à l'oeuvre dans les communautés relevant du Dakota Ojibway Tribal Council, au Manitoba, grâce à la mise en oeuvre d'un arrangement provisoire qui a été conclu dans le domaine policier.

Les communautés relevant du DOTC n'avaient plus de service de police complet depuis la dissolution de leur propre corps de police, survenue il y a cinq mois. Ce service provisoire de police comprendra des agents de la GRC, ainsi que d'anciens agents de la GRC travaillant sous la direction générale de la GRC.

L'entente provisoire restera en vigueur jusqu'à ce qu'un accord permanent fasse l'objet de négociations entre le gouvernement fédéral, le Manitoba et le Dakota Ojibway Tribal Council.

Je tiens à remercier le solliciteur général du Canada, le ministre de la Justice du Manitoba, de même que le Dakota Objibway Tribal Council pour les efforts qu'ils ont consentis. Cet arrangement n'aurait pas été possible sans leur bonne volonté et leur collaboration.

* * *

[Français]

LE MULTICULTURALISME

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, partout dans le monde, dans l'ex-Yougoslavie, en Afrique centrale, en Extrême-Orient, nous voyons des ethnies s'entre-déchirer parce qu'elles rejettent les différences de langue, de religion ou de culture.

(1405)

C'est justement le droit à la différence qui constitue le pilier de la liberté, et c'est grâce à la tolérance et au bon accueil des différences qu'on mesure la grandeur d'un pays.

[Traduction]

Au nom de mon collègue de Don Valley-Nord, j'invite tous les députés à célébrer leur amour de ce pays en participant à la cérémonie de citoyenneté qui aura lieu demain, le 19 avril, à 13h40, dans le hall, juste en face de la Chambre des communes. Je veux parler ici du Hall d'Honneur.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, hier marquait une décennie de réalisations sociales remarquables au Canada.

Le 17 avril 1984, la Loi canadienne sur la santé recevait la sanction royale et garantissait l'accessibilité aux soins de santé à tous les citoyens.

Aujourd'hui, nous continuons de chérir les cinq principes qui ont servi de fondement à cette loi: l'universalité, l'accessibilité, la transférabilité, l'intégralité et l'administration publique.

Pourtant, il est nécessaire de contrôler les coûts et de continuer de fournir un financement adéquat, de favoriser l'utilisation efficace et efficiente des ressources et de mieux comprendre les facteurs déterminants de la santé.

Il y a dix ans, un gouvernement libéral triomphait de la menace double de l'utilisation d'un ticket modérateur et de la facturation d'honoraires supplémentaires. Aujourd'hui, avec le Forum national sur la santé qui est présidé par le premier ministre, le gouvernement libéral devra encore une fois triompher et relever les nouveaux défis avec une vigueur renouvelée.


3153

Nous devons réussir, parce que nous croyons aux cinq principes de base de l'assurance-maladie. Nous devons réussir, parce que le régime d'assurance-maladie est une force pour l'unité nationale. Nous devons réussir, parce que c'est ce que les Canadiens attendent de nous.

* * *

[Français]

LE PROJET MINIER DE LOUVICOURT

M. Bernard Deshaies (Abitibi): Monsieur le Président, selon la Commission de la construction du Québec, le projet minier de Louvicourt, en Abitibi, constitue présentement le plus important projet industriel au Québec.

Le projet Louvicourt, près de Val-d'Or, est en voie de devenir la plus importante mine souterraine de cuivre au Québec. Il s'agit d'un investissement évalué aux environs de 300 millions de dollars nécessaires jusqu'au parachèvement de la construction de la mine. Le rodage du concentrateur débutera en juillet prochain, tandis que le circuit sous terre sera opérationnel en octobre 1994.

Au nom de tous les gens de mon comté d'Abitibi, je tiens à féliciter les partenaires Aur-Novicourt-Teck et toutes les personnes impliquées dans ce projet qui créera de l'emploi pour des centaines de travailleurs et stimulera l'économie de notre région.

* * *

[Traduction]

LA BOSNIE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, le week-end dernier, les Canadiens ont été soulagés et heureux d'apprendre que 16 des 17 Casques bleus canadiens qui étaient gardés en otages par les forces serbo-bosniaques ont été relâchés.

Cependant, nous sommes encore très mécontents et insatisfaits de ces tactiques et nous demandons aux dirigeants serbo-bosniaques d'ordonner la libération immédiate des autres Casques bleus qui ont été pris en otages.

Nous demandons également aux dirigeants serbo-bosniaques de respecter les ententes de cessez-le-feu qui visent à mettre fin aux hostilités à Gorazde et aux abords de cette ville et de venir à la table de négociations en étant disposés à trouver une solution pour rétablir la paix en Bosnie.

Les Canadiens ne veulent pas prendre parti sur la situation en Bosnie et n'imputent le blâme à aucun groupe en particulier. Ils estiment, cependant, qu'il est temps que ces trois communautés ethniques se réunissent et négocient avec franchise et de bonne foi pour mettre fin aux hostilités et construire une paix durable.

* * *

LE FÉDÉRALISME

M. David Iftody (Provencher): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rappeler qu'il y a douze ans hier, le 17 avril 1982, se tenait sur la pelouse du Parlement la cérémonie du rapatriement de la Constitution.

Il y a quelques jours, pas plus tard que vendredi dernier, lors d'une cérémonie qui se tenait à la résidence du gouverneur général à Ottawa, le premier ministre signait avec l'Île-du-Prince-Édouard une modification à la Constitution.

Le fédéralisme est bien vivant au Canada et se porte bien. La cérémonie de vendredi en est un nouvel exemple.

La beauté de la Constitution et, à vrai dire, du fédéralisme est que s'y trouvent incorporés les principes du pluralisme, de la diversité et de la tolérance de notre société actuelle.

Je félicite aujourd'hui les Canadiens. Le fédéralisme et la Constitution représentent la vraie nature et la volonté de cette grande nation et de son peuple.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Charles Caccia (Davenport): Monsieur le Président, cette semaine marque la Semaine de la terre qui se terminera le 22 avril par le Jour de la terre. C'est le temps de célébrer la planète Terre, ses écosystèmes et les formes de vie qui l'habitent.

Nous devrions profiter de cette occasion pour réfléchir aux moyens à prendre en vue de prévenir la pollution et de gérer nos ressources naturelles afin de pouvoir léguer à nos enfants et à nos petits-enfants une planète saine et des ressources gérées de manière à assurer un développement écologiquement durable. On nous rappelle souvent que tous ces facteurs sont étroitement liés et qu'à long terme, nous nous nuisons à nous-mêmes en ne protégeant pas la qualité du sol, de l'eau et de l'air.

(1410)

La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement a été claire sur ce point et a publié un document intitulé Programme Action 21 à l'intention des décideurs afin qu'ils gardent cela à l'esprit toute l'année et pas seulement cette semaine. Nos actions doivent être guidées par l'idée qu'il n'existe qu'une seule planète où nous pouvons vivre. C'est ainsi que chaque jour doit être celui de la Terre.

* * *

[Français]

LE CHEF DU PARTI ÉGALITÉ

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, les médias du week-end nous rapportent que selon le chef du Parti Égalité, Ottawa devrait tout faire pour empêcher le Québec d'accéder à la souveraineté, y compris par le recours à une intervention de l'armée, et cela, même après une victoire du référendum sur la souveraineté.

Nous unissons nos voix aujourd'hui pour dénoncer ces propos honteux, irresponsables et anti-démocratiques.

Le droit à l'autodétermination du Québec n'est plus à reconnaître, pas plus d'ailleurs que le caractère pacifique, légitime, légal et démocratique de chacune des étapes qui mènent actuellement le Québec vers l'accession au statut d'État souverain.

[Traduction]

Nous comptons que tous les députés de la Chambre se joindront à nous pour dénoncer vigoureusement cette attitude qui va


3154

totalement à l'encontre d'une des valeurs les plus profondément respectées au Canada: le respect de la démocratie.

* * *

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, nous avons commencé à débattre à midi, aujourd'hui, d'une motion visant à modifier la Loi sur les langues officielles.

La motion proposée par le Parti réformiste n'a pas pour but d'éliminer le bilinguisme ou d'abolir la Loi sur les langues officielles, mais seulement d'assurer une mise en oeuvre plus pratique et plus rentable de cette dernière.

Nous nous rendons compte que cette question est une vache sacrée pour les libéraux puisqu'ils sont les auteurs de cette loi. Toutefois, nous demandons au gouvernement de laisser de côté ses préjugés et d'écouter nos arguments en toute justice et avec objectivité.

Le premier ministre dit souvent à la Chambre que les réformistes sont opposés au bilinguisme officiel et veulent l'éliminer. C'est tout simplement faux. Nous sommes seulement contre le fait de vouloir, comme l'ancien et l'actuel gouvernements, le mettre en oeuvre à n'importe quel coût.

Je demande aux députés d'en face d'écouter attentivement ce que nous avons à leur dire aujourd'hui à ce sujet et d'oublier la rhétorique. . .

Le Président: Le temps de parole du député est écoulé. Le député de Fredericton-York-Sunbury.

* * *

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Monsieur le Président, aujourd'hui, nous soulignons le 25e anniversaire de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick.

Nous, au Nouveau-Brunswick, sommes fiers de nous distinguer par le fait que notre province est la seule officiellement bilingue au Canada.

[Français]

Pendant les 25 dernières années, un grand progrès a été fait en fournissant des services gouvernementaux dans chaque langue officielle, dans chaque communauté linguistique. Nous percevons chaque jour les avantages culturels, éducatifs, sociaux et économiques que cette différence nous offre.

[Traduction]

Étant parents anglophones de deux jeunes enfants, ma femme et moi regardons nos garçons grandir dans un milieu où il est normal de connaître les deux langues officielles et d'embrasser les deux cultures.

Je sais que beaucoup se joignent à moi pour féliciter le Nouveau-Brunswick de ses 25 années consacrées à la promotion et au leadership en matière de lois sur les langues officielles au Canada.

LE SERVICE JEUNESSE

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface): Monsieur le Président, le livre rouge le disait et nous l'avons fait. Nous avons adopté une stratégie d'emploi des jeunes qui comprend le Service jeunesse, un programme de stages, un programme d'emplois d'été, la stratégie d'apprentissage à l'intention des jeunes et l'amélioration du programme des prêts aux étudiants.

[Français]

Je demande à tout le monde ici d'applaudir cette initiative qui donnera plus d'emplois et un meilleur avenir à la jeunesse du Canada.

* * *

[Traduction]

LA SCHIZOPHRÉNIE

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour féliciter les membres du club Rotary d'Ottawa-Ouest de leur don généreux en faveur de la recherche sur la schizophrénie.

Ils suivent l'excellent exemple du Dr Michael Smith, qui a fait don de la moitié de son prix Nobel en espèces, soit 250 000 $, pour la recherche sur la schizophrénie. En son honneur, notre ministre de l'Industrie avait annoncé qu'il ajouterait 775 000 $ à ce montant.

La schizophrénie frappe un Canadien sur cent, habituellement à la fin de l'adolescence ou au début de la vingtaine. Quarante pour cent d'entre eux tenteront de se suicider et 10 p. 100 y parviendront. Les autres occuperont un lit sur 12 dans nos hôpitaux, vivront dans la rue ou représenteront un taux disproportionné de la population carcérale. Pourtant, on ne reçoit pour la recherche sur la schizophrénie qu'une fraction minime des fonds consacrés à de nombreuses autres maladies moins répandues.

(1415)

J'arbore aujourd'hui cet iris, symbole qu'adoptera bientôt la Société canadienne de schizophrénie pour favoriser une meilleure sensibilisation et une plus grande recherche dans ce domaine.

* * *

LES ARMES À FEU

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, les lobbyistes qui sont contre les armes à feu voudraient nous faire croire que la Grande-Bretagne a réussi à désarmer et à soumettre ses habitants. Selon eux, une législation rigoureuse sur le contrôle des armes à feu est efficace.

Il y a quelques semaines, je discutais avec un marchand d'armes écossais qui me disait que la Grande-Bretagne était submergée d'armes illégales et qu'il était beaucoup plus facile et rapide de s'en procurer dans des pubs que de les acheter dans des établissements commerciaux puisqu'on évite ainsi les taxes de vente et d'importation.

3155

D'après un article publié hier dans le Sun d'Ottawa, la même situation est en train de se profiler au Canada.

Le ministre de la Justice devrait durcir le ton à l'égard des criminels et cesser de méditer sur son intention de harceler et d'intimider encore davantage des millions d'honnêtes Canadiens qui possèdent ou voudraient posséder des armes à feu.

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QUESTIONS ORALES

[Français]

LES CASQUES BLEUS CANADIENS EN BOSNIE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Tous ont accueilli avec soulagement la libération des 16 Casques bleus canadiens pris en otage jeudi dernier par les forces serbes près de Visoko en Bosnie.

Toutefois, cette nouvelle est assombrie par l'annonce simultanée de la progression des chars serbes sur Gorazde, de même que par l'intensification des bombardements sur cette enclave musulmane.

Le ministre a-t-il obtenu les garanties suffisantes pour la sécurité des Casques bleus canadiens en Bosnie, en particulier de leurs collègues qui ont pris la relève à l'emplacement même du poste d'observation de Visoko, où ils ont été séquestrés jeudi dernier.

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je pense que tous les députés en cette Chambre se réjouiront de cette excellente nouvelle de fin de semaine selon laquelle après des négociations les soldats canadiens ont été finalement libérés.

Je peux assurer l'honorable chef de l'opposition que les soldats canadiens, tout comme les autres soldats d'autres pays qui servent sous les Nations Unies, sont dans des situations difficiles, en particulier lorsque les parties en présence ne veulent pas respecter les ententes de paix qu'ils ont négociées.

Je rappelle à cette Chambre que, dans plusieurs régions de l'ex-Yougoslavie, des ententes de paix ont été négociées, et les Casques bleus qui y sont maintiennent la paix et le bon ordre. Malheureusement, encore dans certains régions, les accords ne sont pas respectés, ce qui provoque des difficultés. C'est pourquoi nous redoublons nos efforts afin d'amener toutes les parties à respecter une paix globale sur tout l'ancien territoire de l'ex-Yougoslavie.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, est-ce que le ministre peut nous dire ce qu'il en est maintenant de la situation qui prévaut à Gorazde, alors que les Serbes ont intensifié leurs bombardements et engagé leurs chars dans la ville? Peut-il nous dire aussi si l'ONU a finalement obtenu les garanties requises pour la sécurité des hélicoptères qu'elle utilise pour évacuer les blessés?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, c'est une situation qui évolue d'heure en heure. Aux dernières informations, il semblait qu'un accord de principe avait été accepté par les Serbes bosniaques et qu'une paix relative reviendrait dans cette partie.

Au moment où je vous parle, je ne peux vous dire quelle est la situation présente. Donc, il y a des négociations intensives qui se poursuivent. Je peux informer cette Chambre qu'il y aura un débat cet après-midi au Conseil de sécurité des Nations Unies et que, ce matin, les ambassadeurs auprès de l'OTAN se sont réunis pour un séance de breffage sur la situation sur le terrain.

(1420)

Il est évident que l'objectif que nous poursuivons est d'amener toutes les parties au conflit à s'entendre et à respecter un plan de paix pour l'ensemble de l'ex-Yougoslavie.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, est-ce que le ministre convient que la progression des chars serbes sur Gorazde et la violation du cessez-le-feu par l'artillerie serbe sont susceptibles de compromettre le déroulement des pourparlers de paix?

[Traduction]

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, il ne fait aucun doute que les opérations des Serbes bosniaques comportent de grands risques. De véritables efforts sont déployés en vue d'obtenir la participation et la collaboration des Croates et des Musulmans pour réaliser des progrès vers la paix.

Des interventions ont eu lieu aux plus hauts niveaux avec la participation du représentant russe, du représentant américain et, bien sûr, du représentant des Nations Unies.

Nous faisons tout ce que nous pouvons pour convaincre les Serbes qu'ils ont eux-mêmes intérêt à participer aux négociations de paix. Nous espérons qu'ils comprendront qu'il y va de l'intérêt de tous, eux-mêmes y compris, de s'asseoir à la table afin de négocier une paix totale applicable partout dans l'ex-Yougoslavie.

* * *

[Français]

L'ÉDITION

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Dans son édition publiée aujourd'hui, le magazine MacLean's fait état de nouvelles révélations concernant la transaction de Ginn Publishing qui impliquent, cette fois-ci, l'actuel ministre des Finances.

On y apprend en effet que le ministre a participé à une réunion avec ses collègues de l'Industrie et du Patrimoine avant que le gouvernement n'autorise la vente de Ginn Publishing. Or, le ministre, par l'intermédiaire de son holding Nellmart Ltd. est propriétaire de trois salles de cinéma à Vancouver et les loue au réseau Famous Players, filiale canadienne de Paramount Communications.

Le ministre des Finances confirme-t-il qu'il a participé, le 16 février dernier, à la rencontre sur cette transaction avec ses collègues du Patrimoine et de l'Industrie, deux jours avant que le gouvernement n'autorise la vente de Ginn Publishing à Para-


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mount et ce, alors que le ministre a des liens d'affaires directs avec Famous Players, filiale de Paramount?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, j'ai lu l'article auquel la députée a fait référence. Je tiens à dire de façon catégorique que je n'ai jamais discuté de la transaction Ginn avec le ministre des Finances avant de prendre connaissance de l'article aujourd'hui. J'ai tenu à lui confirmer que mon adjoint avait été mal cité dans l'article. Il n'y a eu aucune discussion de ce genre.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, il n'en demeure pas moins que c'est le porte-parole du ministre qui est cité et il dit, je cite: «Martin participates in a meeting over the Ginn deal between Manley and Dupuy. Qui dit vrai? Bill Milliken, le porte-parole, ou le ministre?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je crois que la députée a mal compris ma dernière réponse.

[Français]

Le porte-parole a été mal compris par le journaliste. Il n'y a pas eu une telle réunion, et il n'y a pas eu de discussions entre le ministre du Patrimoine, le ministre des Finances et moi-même. Cela ne s'est jamais produit.

* * *

[Traduction]

L'EMPLOI

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je suis certain que tous nos concitoyens veulent que leur gouvernement leur laisse un héritage dont tous les Canadiens, particulièrement les jeunes et les générations à venir, seront fiers. Mais de ce gouvernement libéral, comme de ses prédécesseurs, ils n'hériteront que d'une dette accrue, d'une fiscalité plus lourde et d'un chômage chronique.

(1425)

Le meilleur programme de création d'emplois pour les jeunes Canadiens consisterait à réduire la dette de façon à redonner confiance aux investisseurs et aux consommateurs et à alléger les impôts.

Ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Pourquoi le gouvernement ajoute-t-il à la dette en créant une poignée d'emplois temporaires qui lui coûtent 10 000 $ chacun, au lieu d'encourager la création de véritables emplois?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, vendredi, nous avons annoncé diverses initiatives.

En sortant de la réunion, j'ai été accosté par plusieurs jeunes qui font partie d'un regroupement de jeunes de la rue, à Ottawa. Ils m'ont demandé de venir les rencontrer parce que notre annonce leur redonnait un peu d'espoir et le sentiment que quelqu'un s'intéressait enfin à leur sort et essayait de les aider à retourner sur le marché du travail.

Le député devrait peut-être partager ce sentiment de compassion et s'intéresser à ces jeunes qui, depuis des années, n'arrivent pas à percer sur le marché du travail et qui pourtant ne demandent que ça. Notre gouvernement veut les y aider.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, rien n'est plus décevant pour les jeunes que les faux espoirs.

Ramasser des feuilles ou peindre des enseignes sont des activités valables, mais les emplois créés par le Service jeunesse sont à très court terme tandis que la dette créée par le gouvernement est à long terme, tout comme le fardeau fiscal et le chômage que le Parti libéral laissera en héritage aux jeunes. Ce faux programme de travail correspond à la mentalité des années 1970. Je n'aurais pas été surpris d'entendre de la musique disco ici à la Chambre.

Le ministre du Développement des ressources humaines peut-il nous dire si les programmes de création d'emplois des années 1970 ont jamais créé d'emplois permanents? Peut-il nous dire combien d'emplois permanents ont disparu à cause des impôts élevés et des hauts taux d'intérêt résultant d'un quart de siècle de déficits conservateurs et libéraux?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, le député parle de programmes qui reflètent une mentalité des années 1970. Je dirais que la question du député reflète une mentalité du dix-neuvième siècle.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, il est très décevant de ne pas recevoir de réponse à sa question quand l'on cherche à défendre les intérêts des jeunes Canadiens et à créer un climat d'espoir pour eux.

Je remarque que le ministre a distribué des tee-shirts et des casquettes portant la mention Service jeunesse, de très belles casquettes faites de toile, de daim et de cuir. J'aimerais savoir combien ont coûté ces articles et combien de jeunes, le cas échéant, ont trouvé de l'emploi dans la fabrication de ces souvenirs.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, il est très vrai que nous voulons que les jeunes qui participent au Service jeunesse s'identifient au Canada.

Ils fournissent un service à la collectivité. Au nom des Canadiens, ils participent à l'amélioration de l'environnement, fournissent des soins aux enfants des centres-villes, élaborent des


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projets qui rendront de grands services et contribueront au mieux-être des gens de ce pays.

Nous croyons qu'à notre époque, il est encore plus important que les jeunes Canadiens se sentent fiers de leur pays; il n'y a rien de mal à ce qu'ils portent la feuille d'érable sur leur poitrine.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Face à l'ampleur des critiques que soulèvent et les intentions et la façon de procéder du gouvernement fédéral dans sa réforme des programmes sociaux, le ministre du Développement des ressources humaines a dû annuler la conférence fédérale-provinciale qui devait avoir lieu aujourd'hui même à Ottawa. De plus, l'impasse perdure entre Québec et Ottawa dans le dossier de la formation de la main-d'oeuvre.

Le ministre confirme-t-il que c'est parce que d'autres provinces, en plus du Québec, se sont vivement opposées et aux orientations et à la façon de procéder du gouvernement, qu'il a dû annuler la conférence fédérale-provinciale à la sauvette, fait rare sinon unique, et ce, sans avoir préalablement avisé le premier ministre?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la députée n'est pas au fait de l'histoire récente.

Pour commencer, les premiers ministres se sont rencontrés fin décembre et ont convenu qu'il fallait procéder à un examen de la politique sociale. Depuis lors, nous avons eu deux rondes importantes de réunions avec les ministres de tous les gouvernements provinciaux, en janvier et en mars. Il y a eu entente sur des parties importantes.

La raison pour laquelle nous n'avons pas tenu la réunion d'aujourd'hui, c'est que certaines provinces voulaient plus de temps. Il me paraît logique et raisonnable, face à un processus aussi important et aussi complexe, de donner plus de temps aux parties qui le demandent, car nous souhaitons leur coopération.

(1430)

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Compte tenu du fossé qu'il essaie de camoufler, qui sépare les positions de son gouvernement, celles de certaines provinces et celles du Québec, et face à l'annulation-ce n'est pas un mince événement que d'annuler à la dernière minute une conférence fédérale-provinciale; de mémoire de conférencier, cela ne s'est pas vu souvent-, le ministre s'engage-t-il à revoir son projet de réforme des programmes sociaux de façon à rendre cette réforme conforme aux aspirations et revendications traditionnelles du Québec?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la députée devrait lire quelques livres sur les relations fédérales-provinciales au cours des 120 dernières années. Si elle pense que c'est un précédent, ce n'en est pas un, il s'en faut. Toute conférence fédérale-provinciale doit contenir un certain nombre de possibilités de changement.

De plus, ce n'est pas une annulation, mais un report. Nous avons demandé à nos représentants de se rencontrer pour échanger des renseignements sur les domaines qui exigent plus de temps, c'est tout.

Je dirais à la députée que sa tentative et celle de son parti pour faire croire à une grave crise n'est qu'un autre effort de leur part pour essayer de miner le fédéralisme.

Des voix: Bravo!

M. Dale Johnston (Wetaskiwin): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

La semaine dernière, plusieurs de ses homologues provinciaux se sont plaints que le ministre n'était pas intéressé à une véritable consultation en ce qui a trait aux réformes sociales. Ils ont laissé entendre qu'il essayait d'imposer ses idées plutôt que d'en obtenir de nouvelles.

Le ministre a-t-il déjà en tête une proposition qu'il entend présenter aux provinces? Si oui, pourquoi fait-il semblant de chercher des idées par la voie de la consultation?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, j'aimerais bien en savoir plus et je demande au député de déposer les noms des ministres provinciaux qu'il cite. Les ministres provinciaux me téléphonent et je leur ai parlé vendredi dernier. Aucun d'eux ne s'est jamais plaint que nous essayions de leur imposer quelque chose.

S'il veut porter des accusations de ce genre et attribuer des propos aux ministres provinciaux, le député a le devoir envers la Chambre de déposer les rapports sur lesquels il se fonde.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire.

Le ministre a-t-il vraiment à coeur de collaborer avec les ministres provinciaux au sujet de la réforme sociale, ou le processus de consultation n'est-il qu'une duperie?


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L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la réponse à la première partie de la question est oui. La réponse à la deuxième partie est non.

* * *

[Français]

LE PLAN D'ACTION POUR LES JEUNES

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, alors que nous apprenions vendredi que le refus du Québec de participer à la conférence fédérale-provinciale sur les programmes sociaux était une des raisons principales ayant amené le ministre du Développement des ressources humaines à annuler lui-même la conférence, celui-ci annonçait peu après son programme jeunesse.

Le ministre reconnaît-il que son programme en six volets a été conçu uniquement par ses fonctionnaires, ici à Ottawa, sans se soucier du champ de compétence des provinces, sans se soucier de l'unanimité qui a cours au Québec et sans se soucier du gaspillage qui résulte des nombreux dédoublements qui existent déjà dans ce domaine?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, la déclaration de l'honorable député n'est pas exacte. En effet, nous avons eu une réunion il y a un mois où nous avons discuté de toutes les initiatives pour la jeunesse avec les ministres provinciaux. À ce moment-là, nous avons établi un processus de consultation avec les provinces. Ainsi, l'honorable député n'est pas exact dans sa déclaration, et je demande des excuses.

(1435)

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, avant d'ajouter plusieurs nouveaux programmes dans le domaine de la jeunesse, le ministre ne convient-il pas que le Québec administre déjà plusieurs programmes dans ce secteur en particulier, notamment le Programme de jeunes volontaires, par exemple? Est-ce que le ministre a pris soin, avant de poser ces gestes, d'évaluer le coût exact des chevauchements qu'il vient lui-même d'imposer par son nouveau programme?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, il y a plus de 400 000 jeunes Canadiens au chômage.

Il me semble que tout effort, qu'il vienne d'un gouvernement local, provincial ou fédéral, devrait être accueilli avec satisfaction, et non avec agressivité.

Nous avons consulté les provinces pour mettre au point des moyens de collaborer et éviter le chevauchement. Vendredi, nous avons annoncé un programme national qui intéressera des Canadiens d'un océan à l'autre et qui fera voyager des jeunes d'un bout à l'autre du Canada et leur montrera à quel point notre pays est grand.

C'est pour cette raison que le programme est si différent de ceux qu'offrent exclusivement les provinces. C'est un programme national ayant des objectifs à la grandeur du pays et une perspective pancanadienne.

Si le député représentait un autre parti et une autre idéologie, il serait le premier à applaudir à nos efforts pour collaborer avec les provinces en vue d'aider les jeunes.

* * *

LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Vu l'intérêt qu'il prête à la sécurité publique, le premier ministre n'est sûrement pas sans savoir qu'il y a environ 1 000 criminels faisant face à une mesure d'expulsion qui se promènent dans les rues de Toronto. Pis encore, 400 autres prisonniers sur le point d'être libérés font l'objet de mesures d'expulsion.

La protection de la population inquiète beaucoup les Torontois et l'ensemble des Canadiens. Quelles mesures le premier ministre entend-il prendre pour veiller à ce que ces prisonniers soient expulsés dès leur libération?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, premièrement, l'information est inexacte.

Il n'y a pas 400, mais bien 200 prisonniers qui font l'objet actuellement d'une mesure d'expulsion. Ils sont en train de purger leur peine en prison et au terme de leur détention, le ministère de l'Immigration respectera le processus établi et veillera à ce qu'ils soient renvoyés dans leur pays d'origine.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Une question supplémentaire, monsieur le Président.

L'arriéré dans ce domaine s'explique notamment par la pénurie d'agents d'expulsion. Je crois comprendre qu'on est incapable pour l'instant de donner suite à environ 24 000 mesures d'expulsion.

Le premier ministre ou la secrétaire parlementaire du ministre de l'Immigration peuvent-ils expliquer à la Chambre pourquoi le ministre de l'Immigration ne réduit pas les tracasseries administratives au lieu de mettre à pied le tiers des agents d'expulsion en service à Toronto?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, encore une fois, je tiens à assurer à la députée que le ministère de l'Immigration respecte la loi et le processus établi. La députée n'a pas à s'inquiéter, le ministre et les agents de son ministère s'occuperont en temps opportun du nombre de personnes à expulser.


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[Français]

LE CHÔMAGE

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Une étude menée par un groupe d'experts sur les coûts économiques du chômage, pour le compte du Forum québécois pour l'emploi, nous apprend que le chômage a provoqué un manque à gagner de 32 milliards de dollars pour la société canadienne. De plus, l'étude démontre que le Canada a un chômage plus élevé que la plupart des pays industrialisés.

Le ministre confirme-t-il la conclusion de l'étude selon laquelle la diminution récente du taux de chômage serait due avant tout à une réduction du nombre de personnes à la recherche d'un emploi et non à la création d'emplois?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il n'y a pas de doute, et d'ailleurs nous l'avons dit nous-mêmes, qu'il y a eu une réduction dans le domaine des demandes d'emplois, ce qui a vraiment créé la diminution qu'on a eue dans les chiffres.

Il faut quand même dire que pendant le mois le plus récent, on a créé 48 000 emplois, et dans les deux derniers mois, 114 000 emplois, ce qui est quasiment un record des cinq ou six dernières années. Alors, nous sommes très fiers de ce record. Ceci étant dit, pour ce qui est de la citation reliée à l'énorme coût du chômage, le député a entièrement raison.

(1440)

D'ailleurs, pour nous, c'est une des raisons pour lesquelles, contrairement au Parti réformiste, la baisse du déficit passe non seulement par les coupures, mais par la création d'emploi. C'est la meilleure façon de nous donner vraiment un déficit et une situation financière qui soient adéquats.

M. Laurent Lavigne (Beauharnois-Salaberry): Monsieur le Président, quand le ministre entend-il proposer une véritable stratégie de relance de l'emploi? Reconnaît-il qu'en refusant d'appliquer dès maintenant la réduction du taux de cotisation à l'assurance-chômage à 3 $, il retarde d'un an les 40 000 emplois qu'il avait proposé de créer, en 1995, par cette mesure dans son budget?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je veux dire en même temps, et c'est d'ailleurs pour cela que notre approche est très équilibrée, qu'il faut baisser le déficit pour créer de l'emploi, pour créer une stabilité économique dans le pays.

Malheureusement, on aimerait beaucoup baisser la cotisation de l'assurance-chômage immédiatement, mais il va falloir trouver l'argent pour le faire et cela nécessitera la réforme de l'assurance-chômage proposée par mon collègue, le ministre du Développement des ressources humaines.

Quand vous regardez le budget, au point de vue des programmes d'apprentissage, si au lieu de vous obstiner à vous opposer aux programmes de mon collègue, tels que le programme de création d'emplois pour les jeunes ou le programme de la formation des travailleurs plus âgés, vous vouliez coopérer avec nous, on pourrait créer beaucoup plus d'emplois.

* * *

[Traduction]

LES PRODUITS DU TABAC

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

Les jeunes femmes fument beaucoup plus que les jeunes gens. C'est d'autant plus inquiétant que nous savons désormais que les fabricants américains des produits du tabac ajoutent à leurs cigarettes quelque 600 produits chimiques, dont 13 sont reconnus dangereux pour la santé.

Quelles mesures la ministre entend-elle prendre pour s'assurer que les fabricants des produits du tabac canadiens renseignent la population sur les additifs que contiennent leurs produits?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, la députée soulève une question qui intéresse tous les Canadiens.

Tous les Canadiens ont le droit de savoir ce que contiennent les produits du tabac qu'ils consomment, ce qui entre dans leurs poumons et ce qui se dégage autour d'eux dans l'atmosphère lorsqu'ils fument.

Je suis déterminée à faire toutes les pressions possibles auprès des compagnies canadiennes pour qu'elles aussi dévoilent la liste des ingrédients qui entrent dans la fabrication de leurs produits. Si elles ne le font pas, les Canadiens pourront tenir pour acquis que les 599 ingrédients qui entrent dans la fabrication des cigarettes américaines se trouvent aussi dans les cigarettes canadiennes.

* * *

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Nous essayons encore de savoir le véritable coût du programme des langues officielles au Canada. Le commissaire a déclaré que les Forces canadiennes avaient consacré 35 millions de dollars au bilinguisme au cours du dernier exercice financier. Le ministère évalue ces coûts à 47 millions de dollars et ajoute qu'il se pourrait qu'ils soient plus élevés que cela.

Le ministre admettra-t-il que le gouvernement ignore le coût réel du bilinguisme et adoptera-t-il un système précis pour déterminer ce coût?

Le Président: Le débat d'aujourd'hui porte sur le sujet de la question du député. Cependant, j'autorise le ministre à y répondre s'il le désire.

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, tous les chiffres sur les dépenses engagées par le gouvernement du Canada au titre des langues officielles sont contenus dans le rapport du commissaire aux langues officielles. Je peux indiquer la page si c'est nécessaire. Les chiffres sont tous là.


3160

Si le député prend le temps de les additionner, il verra que l'ensemble de la politique des langues officielles a coûté 601 millions de dollars en 1993-1994.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je réplique simplement à la réponse du ministre. En réponse à la première question que j'ai posée sur le sujet à la Chambre, la semaine dernière, le ministre a dit que nous ne savions pas exactement combien coûtait la politique des langues officielles. Je me demande comment nous allons faire pour déterminer ce coût.

En 1975, le premier commissaire aux langues officielles, Keith Spicer, déclarait: «Il semblerait plus logique de regrouper toutes les dépenses au titre des langues officielles, d'additionner les terribles sommes, puis de publier et de défendre le total.»

Deux décennies plus tard, nous ne savons toujours pas quel est le coût réel de la politique des langues officielles. Devrons-nous attendre encore deux décennies avant que la suggestion deM. Spicer soit adoptée?

(1445)

Le Président: Je crois que le député a terminé sur une question. Le ministre du Patrimoine canadien a la parole.

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je n'ai jamais dit que nous ignorions le coût du programme des langues officielles. Si le député veut une ventilation des coûts, la voici: 297 millions de dollars pour les services, 292 millions pour la promotion des langues officielles et 12 millions pour le commissaire aux langues officielles. Soit, au total, 601 millions de dollars.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Récemment, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a confirmé que le gouvernement s'engageait à revoir la situation de 4 500 ressortissants chinois dont le statut de réfugié politique avait été refusé, mais qui avaient été autorisés à demeurer au Canada en raison de la situation des droits de la personne en Chine. Ces ressortissants sont susceptibles d'être déportés, avec les conséquences négatives que l'on sait pour leur sécurité personnelle.

Compte tenu que la répression de toute forme de dissidence a augmenté en Chine, comme le soulignait Amnistie internationale, le ministre est-il conscient qu'en procédant à la déportation de ces ressortissants chinois, on met en péril la vie de ces personnes?

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, le ministre est très conscient des problèmes qui existent en ce qui concerne les droits de la personne dans le monde entier. Personne au Canada ne sera renvoyé dans un pays où sa sécurité sera menacée.

Le ministre a promis que bon nombre de ces cas seront réglés définitivement d'ici l'été. On tiendra compte avant tout de deux facteurs, soit le respect des droits de la personne et la sécurité de ces gens.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Est-ce que le premier ministre est conscient qu'en vertu d'un décret adopté récemment par le gouvernement chinois, ces ressortissants pourraient être passibles, dès leur retour en Chine, de peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à deux ans et qu'ils s'exposent à des amendes pouvant représenter jusqu'à une année de salaire?

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je tiens à assurer encore une fois au député que le ministre est très au courant des problèmes qui existent en Chine. Son ministère continue de surveiller la situation.

Encore une fois, comme le ministre lui-même l'a dit à plusieurs reprises, nous ne renverrons pas de gens dans des pays où leur vie ou leur liberté seraient menacées.

* * *

LES NOMINATIONS FAITES PAR LE GOUVERNEMENT

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Il y a moins de six mois, les Canadiens faisaient dérailler définitivement le train du favoritisme conservateur. Le gouvernement libéral semble maintenant avoir lancé son propre train. Trois libéraux viennent en effet de trouver une planque: un directeur de campagne, l'agent officiel d'un ministre et une candidate défaite.

Les libéraux avaient pourtant promis dans leur livre rouge de mettre fin à la pratique conservatrice d'accorder des nominations à leurs amis politiques. Le premier ministre peut-il expliquer aux Canadiens pourquoi il a violé cette promesse?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous avons fait plusieurs nominations vendredi. Certains postes ont été accordés à des libéraux. Nous avons nommé lieutenant-gouverneur un homme qui avait siégé à l'Assemblée législative de la Saskatchewan durant de nombreuses années et qui est le premier agriculteur à accéder à ce poste depuis près de 50 ans.

Nous avons nommé une femme qui avait effectivement été candidate aux élections pour le Parti libéral. C'est une avocate. Nous l'avons nommée au conseil d'administration de la Société du port de Québec, où elle habite. C'est une femme très compétente. Je n'ai pas d'excuses à faire à ce propos.

D'après M. Gallup, 55 p. 100 des gens sont libéraux à l'heure actuelle. Devrions-nous déclarer 55 p. 100 de la population canadienne inapte au service du gouvernement canadien?


3161

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, le premier ministre essaie de justifier le favoritisme en utilisant l'argument fallacieux que Brian Mulroney avait rendu célèbre: «Tous mes amis sont compétents.»

Si le premier ministre tient vraiment à mettre fin au favoritisme politique, s'engagera-t-il à rendre le processus de nomination transparent et à le soumettre à l'examen public?

(1450)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, bon nombre des postes à pourvoir sont annoncés, et les gens peuvent poser leur candidature. Si le député en avait le courage, il devrait dire lesquelles de ces trois personnes sont dépourvues des compétences nécessaires pour occuper les postes qui leur ont été offerts.

On ne peut pas être injuste envers quelqu'un parce que ce dernier croit en la démocratie et tâche de faire élire un parti. Qui se plaint que j'ai nommé un ancien ministre conservateur ontarien juge en chef de l'Ontario? Personne n'est intervenu pour m'en féliciter. Qui se plaindra que j'ai nommé ambassadeur notre ancien Président? C'est un homme compétent, même s'il a été élu à la Chambre sous la bannière conservatrice. Je n'ai pas à m'en excuser. Je n'écarterai cependant pas quelqu'un qui a eu le bon sens de voter libéral.

* * *

L'UKRAINE

M. Walt Lastewka (St. Catharines): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Maintenant que l'Ukraine s'est donné un nouveau Parlement et qu'elle cherche des moyens de renforcer son infrastructure et son économie, quelle sorte de relations le gouvernement canadien entretiendra-t-il avec elle, dans le cadre de sa politique étrangère?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je tiens d'abord à remercier le député de m'avoir donné préavis de sa question. Je le remercie de même que tous les Canadiens qui ont assisté avec lui aux élections en Ukraine à titre d'observateurs. Un certain nombre de parlementaires, sénateurs ou députés, et de représentants de divers organismes ukrainiens au Canada étaient disposés à donner de leur temps pour assister, sur place, au passage de ce pays à la démocratie. Je crois qu'il y a lieu de féliciter ceux qui se portent volontaires en pareilles circonstances.

Pour répondre plus précisément à la question du député, je peux lui donner l'assurance que le Canada s'est engagé à coopérer avec les autorités de l'Ukraine pour l'aider à devenir une société plus démocratique, pour l'amener à pratiquer une économie de marché et, bien entendu, pour accroître nos échanges commerciaux et nos bonnes relations avec elle.

[Français]

LES CONTRATS DE PUBLICITÉ ET DE SONDAGE

M. Réjean Lefebvre (Champlain): Monsieur le président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le Cabinet a adopté des directives quant à la façon dont le gouvernement accordera les contrats de publicité ou de sondage.

En vertu de ces règles, un ministre pourra accorder un contrat selon sa discrétion à une agence de publicité ou à une maison de sondage, sans se voir imposer la soumission la plus basse.

Doit-on comprendre de la nouvelle directive émanant du Cabinet, que le gouvernement s'apprête à gaspiller les fonds publics pour favoriser, à sa discrétion, les amis du Parti?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le président, aucune directive n'a encore été émise. La question est encore devant le Cabinet et lorsque nous serons prêts, nous déposerons les directives à ce sujet.

M. Réjean Lefebvre (Champlain): Monsieur le président, ma deuxième question s'adresse encore au premier ministre.

En refusant d'adopter des règles étanches quant à l'octroi de contrats à des agences de publicité ou à des maisons de sondage, doit-on comprendre que le gouvernement considère que le favoritisme libéral est moins malsain que le favoritisme conservateur?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le président, il est évident que sa question supplémentaire a été écrite avant de se lever en Chambre. Comme je viens de le dire, les règles ne sont pas encore établies de façon définitive.

Donc, la première réponse s'applique aussi à la deuxième question.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre de la Justice.

Selon l'ébauche du rapport de la vérification effectuée par Deloitte et Touche sur la Metis Society of Saskatchewan, les procès-verbaux des réunions de cet organisme auraient été altérés, et ses membres n'ont pu obtenir de voir ce compte rendu.

Qu'est-ce que le ministre entend faire à propos de ces irrégularités? Comment va-t-il faire respecter la loi?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, la vérification n'est pas encore terminée et le rapport n'a pas été rendu public. Je crois qu'il sera publié à la fin du mois, et je commenterai à ce moment-là. Je ne pense pas qu'il convienne de le faire avant qu'il ne soit rendu public et que les députés ne l'aient en main.


3162

(1455)

Il semble que des informations sur cette vérification se retrouvent, au moins en partie, dans le domaine public. Je déplore ces fuites sur une vérification qui n'est pas terminée et dont le rapport n'a pas été publié.

Je puis dire à la Chambre que le ministère de la Justice fait enquête pour s'assurer que cette fuite n'est pas attribuable à une personne travaillant au ministère et relevant de son autorité.

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Le financement de base de la Metis Society of Saskatchewan est fourni par le ministère du Patrimoine canadien. Le ministre peut-il donner l'assurance à la Chambre que la société ne recevra pas de fonds pour l'exercice 1994-1995 tant que l'enquête ne sera pas finie et que le problème de mauvaise gestion financière ne sera pas résolu?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, une vérification est en cours. Il serait prématuré de nous prononcer sur le comportement de ce groupe tant que nous n'aurons pas les résultats en main.

* * *

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre et porte sur une clarification.

Il y a quelques semaines, le premier ministre a fait une déclaration sur les droits de la personne et le commerce qui a surpris nombre de Canadiens. Il a semblé dire que la politique du Canada variait suivant le pays avec lequel nous commerçons. Autrement dit, si c'est la Chine, le Canada est beaucoup trop petit pour avoir la moindre influence. Par contre, s'il s'agit d'Haïti ou de la Somalie, nos principes ne seraient pas les mêmes. En d'autres termes, dites-moi quel est votre pays, et je vous dirai quels sont mes principes.

Le premier ministre sait que la politique canadienne date d'une trentaine d'années, depuis l'époque du très honorable John Diefenbaker, et que tous les gouvernements subséquents l'ont adoptée.

Je voudrais que le premier ministre nous dise quelle est exactement la politique actuelle du Canada.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous avons une politique de protection des droits de la personne et nous soulevons cette question dans tous les pays avec lesquels nous commerçons.

Quant à la question mentionnée par le député, nous participons à tout embargo commercial international quand il y en a. Cependant, quand il n'y en a pas, nous avons des relations commerciales à maintenir. C'est ce que j'essayais d'expliquer. Si le député n'a pas compris, c'est ça que j'ai dit.

Nous protestons auprès de la Chine. Nous ne sommes pas satisfaits du respect des droits de la personne là-bas. Nous l'avons toujours dit. Mais nous voulons quand même faire des affaires avec la Chine.

À mon avis, il est important de maintenir des relations commerciales avec ces pays-là non seulement parce que cela est économiquement avantageux, mais encore parce que plus les pays en cause s'ouvriront à l'extérieur, plus les droits de la personne finiront par y être mieux respectés.

Le député a soulevé le cas d'Haïti ou de la Somalie. Quand un embargo international a été imposé à l'encontre de ces pays-là, le Canada a participé. En fait, nous respectons toujours les embargos et nous sommes toujours les derniers à les maintenir.

Par exemple, pour ce qui est de l'Afrique du Sud, nous avons appuyé le gouvernement précédent, qui n'est malheureusement plus guère représenté à la Chambre.

* * *

[Français]

L'HORMONE DE CROISSANCE STB

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. La semaine dernière, le Comité permanent de l'agriculture demandait à l'unanimité au gouvernement de décréter un moratoire d'un an sur la commercialisation de l'hormone de croissance STB. Ce moratoire reflète le voeu de tous les organismes agricoles et de toutes les associations des consommateurs du Canada.

Le premier ministre s'engage-t-il à se rendre à la requête unanime du comité et à entreprendre les démarches nécessaires pour que le gouvernement décrète un moratoire d'un an sur la vente de la STB?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, cette question a été posée à plusieurs reprises au ministre de la Santé, elle y a répondu. Si le Comité a adopté un rapport unanime à ce sujet, le ministre de l'Agriculture en tiendra compte. S'il s'agit d'un problème qui relève de la ministre de la Santé, elle en tiendra compte elle aussi et fera rapport à cette Chambre en temps et lieu.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. Nous attendons avec impatience l'annonce de nouvelles mesures d'aide pour les pêches de la côte est, mais, en attendant, plusieurs problèmes exigent une attention immédiate sur la côte ouest.

(1500)

Ainsi, en 1989 et 1990, du chloramine, un produit chimique utilisé à titre expérimental comme désinfectant secondaire a causé la mort de poissons à Fergus Creek, Surrey.

3163

Le ministre est-il prêt à interdire l'utilisation de chloramine par le district régional du Grand Vancouver afin de protéger le saumon et d'autres espèces aquatiques?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question et je tiens à l'informer que, juste avant la période des questions, j'ai rencontré à mon bureau des représentants du AFAWU de la Colombie-Britannique afin de discuter d'une vaste gamme de questions concernant cette province.

En ce qui concerne la question du député, je ne peux lui répondre, faute de documentation suffisante, mais j'examinerai la question. Je tiens à ce qu'il sache que toute pratique représentant une menace grave pour l'habitat et le poisson fera l'objet d'une enquête et sera interdite, si le problème est aussi sérieux qu'on le dit.

* * *

[Français]

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Il y a plusieurs communautés francophones hors Québec. Par exemple, dans ma circonscription de Saskatoon-Humboldt, les francophones de Saint-Isidore-de-Bellevue et de Vonda ont travaillé très fort pour établir des conseils scolaires.

[Traduction]

Le ministre peut-il me dire si les francophones de la Saskatchewan et de partout ailleurs au Canada peuvent compter sur le gouvernement pour protéger leur langue et leur culture?

[Français]

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, en octobre 1993, le gouvernement fédéral signait une entente spéciale relative à la mise en oeuvre de la gestion scolaire avec la Saskatchewan, entente qui chiffrait la contribution du fédéral à quelque 22 millions de dollars sur six ans.

En plus de ces mesures spéciales, le gouvernement fédéral a contribué à peu près 3,6 millions de dollars pour 1993-1994 par l'entremise d'une entente bilatérale avec cette province pour l'enseignement dans la langue de la minorité.

Enfin, le gouvernement appuie aussi le développement de la communauté fransaskoise de façon plus générale par l'entremise d'une entente Canada-communautés de 10 millions sur trois ans, et d'une entente cadre avec le gouvernement de la Saskatchewan pour les services de traduction de la province et la création d'un office de coordination des affaires francophones. Les Fransaskois sont bien traités.

[Traduction]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale la présence à la tribune de l'honorable Wammuhamadnoor Matha, premier vice-président de la Chambre et dirigeant de la délégation Thaï.

Des voix: Bravo!

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, un ministre qui répondait à une question a mis un député au défi de déposer un document. Si le ministre le veut toujours, j'ai ici ce document et je peux le déposer.

Il s'agit d'un article du Globe and Mail qui cite Tony Silipo, ministre ontarien des Services sociaux et communautaires, qui a déclaré ce qui suit: «De nombreux ministres provinciaux ont dit très clairement à M. Axworthy au cours de notre dernière rencontre. . .»

Le Président: S'il y a consentement unanime de la Chambre, un simple député peut déposer un document. La Chambre consent-elle à l'unanimité au dépôt du document?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Il n'y a pas consentement.

_____________________________________________


3163

AFFAIRES COURANTES

(1505)

[Français]

LOI SUR LA FAILLITE

M. Pierre de Savoye (Portneuf) demande à présenter le projet de loi C-237 intitulé Loi modifiant la Loi sur la faillite (priorité des créances).

-Monsieur le Président, nous le savons tous, le fruit du travail qui s'appelle le salaire est une chose sacrée. Or malheureusement, lorsqu'une entreprise fait faillite, le salaire passe avec les autres créances et n'est pas privilégié à ce moment d'aucune manière particulière, ce qui fait donc qu'effectivement, en cas de faillite, des travailleurs sont privés de ce qui leur est normalement dû, c'est-à-dire leur salaire.

Le projet de loi que je propose a pour but de modifier la priorité de paiement des créances lors d'une faillite d'un employeur, de sorte que les gages, salaires et le fonds de pension d'un employé, jusqu'à concurrence de 9 000 $, soient payés, de préférence à toute autre catégorie de créanciers.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)


3164

PÉTITIONS

LA RÉDUCTION DU BUDGET MILITAIRE

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de présenter à cette Chambre une pétition lancée en octobre dernier par une coalition de 24 organisations de la région Mauricie-Bois-Franc, à l'initiative du comité de Solidarité tiers monde de Trois-Rivières.

Cette pétition que j'ai en main démontre que 275 organismes de partout à travers le Québec, par résolution de leur conseil d'administration, ont endossé les demandes de la coalition. Cela signifie que plus de 350 000 Québécois et Québécoises, non seulement appuient la réduction substantielle du budget militaire, mais demandent que ces sommes soient investies dans la lutte à la pauvreté, les emplois, la santé, l'éducation, l'environnement, l'aide au tiers monde et la réduction du déficit.

On m'a également remis plus de 6 600 cartes signées par autant de gens de mon comté, de ma région et du Québec faisant la même demande au premier ministre du Canada. Ces cartes ne répondant cependant pas aux normes de la Chambre pour un dépôt officiel, je veux assurer les pétitionnaires que je me ferai un plaisir d'expédier le tout au bureau du premier ministre dans les jours qui viennent.

Je tiens à féliciter et à saluer le comité de Solidarité tiers monde de Trois-Rivières pour son initiative éminemment louable et humanitaire.

LE BILINGUISME

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, conformément au Règlement de cette Chambre, je vous présente cette pétition provenant de 29 personnes de ma circonscription qui veulent un référendum sur la question du bilinguisme officiel au Canada.

Ces gens ont l'impression que nous dépensons beaucoup trop d'argent sur la politique du bilinguisme dans ce pays. Je ne partage pas du tout leur point de vue, mais j'ai quand même l'honneur d'accomplir mon devoir démocratique en informant la Chambre de tous les commentaires de mes commettants et commettantes.

M. Plamondon: Monsieur le Président, c'est le genre de pétition qu'on a déjà dénoncé. Si le député est d'accord qu'il les dépose, mais s'il n'est pas d'accord, qu'il ne les dépose pas. Le Règlement le lui permet. C'est encore de l'hypocrisie, ça!

Des voix: Oh, oh!

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît! J'accorde la parole au député de Simcoe-Nord sur le même rappel au Règlement.

M. DeVillers: Monsieur le Président, il est de mon devoir de présenter les commentaires de mes commettants. C'est mon devoir et je peux le faire.

Le vice-président: J'accorde la parole à l'honorable député de Richelieu encore une fois sur le même rappel au Règlement.

(1510)

M. Plamondon: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. L'article du Règlement dit très bien que si on n'est pas d'accord avec des pétitions, on n'a aucun besoin de les déposer. Ou bien on est pour, ou on est contre. Quand on est contre, on les retourne ou on demande à un député qui est pour de les déposer. On ne fait pas comme il fait: Je dépose la pétition mais je suis contre. Qu'il se tienne debout. Il est pour ou il est contre.

Le vice-président: Afin d'être juste envers tous les députés, encore une fois, c'est la dernière fois pour ces interventions. L'honorable député de Simcoe-Nord a la parole.

M. DeVillers: Monsieur le Président, c'est bien clair que je suis contre, mais. . .

M. Plamondon: Dépose-la pas!

M. DeVillers: Ce n'est pas une question de devoir que de les déposer en conformité du Règlement, mais je trouve que c'est mon devoir démocratique de présenter les points de vue de mes commettants et commettantes.

[Traduction]

LES CARTES DE TUEURS

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition à laquelle je souscris.

Elle porte sur la demande d'interdiction de la vente de cartes de tueurs, comme on les appelle, qui sont collectionnées au Canada. Comme la plupart des gens le savent maintenant, car plusieurs autres pétitions ont été présentées à cet égard, ces cartes montrent la photo du tueur en question et décrivent les actes qu'il a commis. Personnellement, je trouve cela fort répugnant, mais je pense qu'on tente par là de présenter cette répugnance sous des couleurs séduisantes et de l'idéaliser auprès des jeunes.

Je suis certain que les tueurs, s'ils sont en prison, sont flattés à l'idée que quelqu'un s'intéresse à leurs méfaits. Cependant, je ne sais vraiment pas comment nous pouvons laisser cette situation se perpétuer dans un pays civilisé. On tente de désensibiliser les jeunes à ce genre de choses. Je m'y oppose farouchement et j'implore le gouvernement d'adopter une mesure législative qui interdirait l'étalage, la vente ou l'échange de cartes de tueurs dans notre pays.

[Français]

M. Fillion: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Pour faire suite au dernier député qui vient d'intervenir, j'aimerais poser la question suivante à la Présidence: Dans le recours au Règlement qui a été fait tantôt lors du dépôt de la pétition, est-ce que la Présidence est prête à examiner la loi et à apporter certaines précisions pour les députés qui sont nouveaux, qui ne connaissent pas entièrement les règles de cette Chambre? Est-ce

3165

que vous pouvez prendre le temps d'examiner cette question et nous dire si vraiment le député qui a déposé la pétition a agi selon le Règlement ou non? J'aimerais connaître l'opinion de la Présidence à ct effet. Elle peut prendre le tout en délibéré.

Le vice-président: Je pense que la question est réglée. Mais comme le député a posé la question très raisonnablement, je vais y réfléchir et je vais donner une réponse à la Chambre aussitôt que possible.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

(Les questions auxquelles une réponse verbale est donnée sont marquées d'un astérisque.)

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Affaires parlementaires)): Monsieur le Président, je suggère respectueusement que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: La Chambre est-elle d'accord pour que toutes les questions soient réservées?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


3165

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES LANGUES OFFICIELLES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Le vice-président: Je crois qu'il reste quatre minutes à la secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien.

[Traduction]

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, un grand nombre de parents inscrivent leurs enfants à des programmes d'immersion en français. Les inscriptions ont donc augmenté à un rythme phénoménal au cours des dix dernières années. On a également assisté à des augmentations importantes dans d'autres écoles qui offrent des programmes de français langue seconde à l'extérieur du Québec et des programmes d'anglais langue seconde au Québec.

Selon le dernier recensement, à la suite de ces programmes, le niveau de bilinguisme chez le groupe des 15 à 25 ans est passé de 16 à 23 p. 100 en seulement 10 ans.

(1515)

L'importance des langues officielles se traduit également dans le désir des anglophones et des francophones minoritaires d'avoir accès à un enseignement public de qualité dans leur langue, ce qui est indispensable au maintien de leur vitalité. Le gouvernement du Canada a aidé et continue d'aider à élaborer un système d'éducation dans la langue officielle minoritaire partout dans le pays.

[Français]

L'identité canadienne est le miroir de ce que nous sommes. Elle doit donc tenir compte de la population autochtone, de la dualité linguistique, de notre dimension multiculturelle et de notre diversité régionale. Il importe que le Canada soit le miroir de l'ensemble de ses citoyens. La notion de l'appartenance au Canada ne s'applique pas seulement à ceux qui ont eu la chance de naître ici, mais aussi à ceux pour qui le Canada est une terre d'adoption.

Notre idée de la citoyenneté doit aussi englober les valeurs que nous partageons et celles que nous voudrions que les autres nous attribuent. L'égalité et le respect de la diversité font partie intégrante de la vision commune que nous avons du Canada et des éléments vitaux de notre identité.

[Traduction]

Le débat public porte tellement sur les aspects qui nous divisent qu'il néglige souvent ceux que nous avons en commun, dont nos engagements civiques de base qui consistent à bâtir nos collectivités. Cette notion de civisme comprend non seulement un statut juridique, mais surtout notre engagement à promouvoir activement les valeurs fondamentales que nous partageons et dont nous sommes fiers en tant que citoyens canadiens.

[Français]

Comment pouvons-nous nous attaquer à l'édification d'un sentiment commun de l'identité canadienne? À mon sens, cela ne peut se faire dans l'isolement. Les tensions qui existent ne peuvent être surmontées que si tous les Canadiens possèdent une connaissance et une compréhension adéquates des réalités fondamentales de leur pays et des aspirations des communautés canadiennes.

Ce n'est pas par hasard que la langue et la culture sont des thèmes qui reviennent souvent dans la société canadienne. Aucun parlementaire, aucun gouvernement ne peut se permettre d'ignorer ces questions. Il faut les aborder ouvertement, dans la transparence. Il y a certainement des ajustements à apporter dans l'application de la politique des langues officielles et encore des progrès à faire, comme le soulignait la semaine dernière le commissaire aux langues officielles.

Le débat public devrait porter sur ces améliorations. Le débat devrait porter sur des faits concrets et non sur la défense de mythes, d'incompréhensions et d'exagérations. La proposition du député est basée sur ces incompréhensions et ces exagérations.

Je suis heureuse d'avoir pu prendre part à ce débat et exposer l'importance de notre politique des langues officielles sur l'identité canadienne. Je ne doute pas que, placée devant les faits, cette Chambre rejettera la propositon que nous étudions aujourd'hui.

Le vice-président: Nous en venons à la période de cinq minutes de commentaires et de questions. Comme il n'y a personne qui se lève, on passera maintenant au débat avec le ministre de la Justice, pour dix minutes.


3166

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, j'attendais avec impatience le moment de participer au débat d'aujourd'hui, en ma qualité de ministre devant assumer la responsabilité législative de la Loi sur les langues officielles et de débattre la motion visant à la modifier qu'a proposée le député d'en face.

La Loi sur les langues officielles n'est pas une loi ordinaire. Elle prévoit des mesures de protection qui figurent dans la loi suprême de notre pays. Elle assure un équilibre entre, d'une part, de nobles principes et, d'autre part, leur application pratique. Comme la Cour d'appel fédérale l'a déclaré, cette loi appartient à la catégorie privilégiée des lois quasi constitutionnelles qui correspondent aux grands objectifs de notre société. Bref, la Loi sur les langues officielles reflète à la fois la Constitution et le compromis socio-politique qui en découle.

Dans le cadre de ce débat, nous ferions bien de nous pencher sur la nature fondamentale de la loi, sur le fait que le Parlement a déjà fait beaucoup pour qu'elle soit moderne, tournée vers l'avenir, souple et adaptée aux besoins changeants des Canadiens à une époque où tout change. Il ne faudrait pas adopter à la légère des amendements qui pourraient menacer l'équilibre que la mesure législative maintient entre les principes constitutionnels et leur interprétation raisonnable, des amendements qui pourraient être contestés devant les tribunaux.

(1520)

[Français]

La première Loi sur les langues officielles, celle de 1969, a fait l'objet d'une longue carrière de réformes et de renouveau au milieu des années 1980, qui se concrétisèrent par l'adoption de la nouvelle Loi sur les langues officielles par le Parlement, en 1988.

Notre parti, qui avait présenté la première Loi sur les langues officielles lorsqu'il formait le gouvernement, a pleinement appuyé la réforme de 1988.

Cette réforme avait quatre principaux objectifs.

Premièrement, de faire en sorte que les dispositions de la loi soient conformes aux droits linguistiques prévus aux articles 16 à 20 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Deuxièmement, de mettre en place un cadre législatif plus souple pour la mise en oeuvre de ses principes constitutionnels d'une manière juste, raisonnable et pratique pour le développement de politiques et de programmes connexes.

[Traduction]

Comme mon prédécesseur, le ministre de la Justice d'alors, l'a déclaré au moment de proposer la loi de 1988 à l'étape de la deuxième lecture, il fallait procéder à une réforme de notre politique en matière de langues officielles. Le Parlement se devait d'harmoniser les dispositions de la Loi sur les langues officielles de 1969 avec celles de la Charte des droits et libertés.

En tant qu'actuel ministre de la Justice, responsable donc, dans un certain sens, de la garde légale de la Loi sur les langues officielles, je crois qu'il m'appartient d'examiner de concert avec les députés de la Chambre quelques-uns des principes directeurs de la loi relativement à la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

L'approche de la Loi sur les langues officielles est essentiellement axée sur le bilinguisme institutionnel. C'est une approche fonctionnelle selon laquelle les organismes gouvernementaux doivent s'organiser pour être en mesure de fournir à la population des services dans les deux langues officielles et de permettre aux fonctionnaires de travailler dans la langue officielle de leur choix.

[Français]

Les trois premières parties de la loi découlent directement des exigences constitutionnelles que le Parlement et les tribunaux du Canada ont respectées depuis la Confédération.

La Cour suprême du Canada a affirmé que l'objectif de ses dispositions était d'assurer «aux francophones et aux anglophones l'accès égal aux corps législatifs, aux lois et aux tribunaux».

[Traduction]

Je ne peux donc qu'applaudir à cette partie de la motion de l'opposition qui demande à la Chambre de décider que le gouvernement continue de faciliter l'usage de l'anglais et du français dans les débats et les travaux du Parlement, ainsi que dans les tribunaux, et en tant que langues de la législation fédérale.

Le ministère de la Justice a la responsabilité particulière de veiller à la qualité de la rédaction de textes législatifs qui doivent faire également foi dans les deux langues officielles et de s'assurer que les représentations faites devant les tribunaux fédéraux en mon nom, en tant que procureur général du Canada, le soient dans la langue officielle choisie par la partie non gouvernementale.

[Français]

La quatrième partie de la Loi sur les langues officielles traite du droit constitutionnel du public canadien de communiquer avec les institutions fédérales et de recevoir les services dans la langue officielle de son choix.

[Traduction]

L'article 20 de la Charte prévoit expressément que le public a, au Canada, droit à l'emploi du français ou de l'anglais pour communiquer avec le siège ou l'administration centrale des institutions du Parlement ou du gouvernement du Canada, ou pour en recevoir les services.

L'article 20 prévoit également que le public a le même droit à l'égard de tout autre bureau de ces institutions là où l'emploi du français ou de l'anglais fait l'objet d'une demande importante ou là où l'emploi du français et de l'anglais se justifie par la vocation du bureau.

En termes simples, nous avons tous, en tant que Canadiens et membres de la population au Canada, le droit constitutionnel de traiter avec le gouvernement national dans la langue officielle de notre choix, que ce soit avec ses bureaux de l'administration centrale ou avec ses autres bureaux partout au Canada, partout où l'emploi de l'une et l'autre langue se justifie par la vocation du bureau ou là où l'emploi du français et de l'anglais fait l'objet d'une demande importante.


3167

(1525)

Je tiens à souligner qu'il ne s'agit pas seulement d'un droit des minorités linguistiques, mais de tous les Canadiens, qu'ils fassent partie de la majorité anglophone hors Québec, de la majorité francophone du Québec, de la communauté francophone hors Québec ou de la communauté anglophone du Québec. Ces droits fondamentaux figurent dans les obligations institutionnelles énoncées dans la Loi sur les langues officielles et dans les règlements sur les services au public.

[Français]

La nouvelle loi et sa réglementation sur les services au public ont une approche bureau par bureau qui est à la fois conforme aux exigences de la Constitution et plus souple et efficace dans le but d'assurer la fourniture des services dans les deux langues là où le besoin se voit concentré.

[Traduction]

La motion qui vise à modifier le Loi sur les langues officielles limiterait les situations où les services fédéraux seraient offerts aux minorités linguistiques dans leur propre langue aux situations «où cela est justifié par la demande publique locale». Les critères de la loi et les règlements d'application visent déjà, en grande partie, à répondre aux besoins locaux. Cependant, il ne revient pas aux membres des groupes minoritaires linguistiques de «justifier» la demande.

Une importante concentration des groupes linguistiques minoritaires, sur le plan des chiffres et de la proportion, suffit, la plupart du temps, pour justifier la prestation de services fédéraux dans les deux langues, en vertu de la loi, et éviter les frais administratifs qu'entraîne la nécessité de mesurer la demande à chaque bureau. Cela aide aussi à enterrer le problème qui existe depuis longtemps de respecter la promesse faite dans la loi. Dans le passé, les demandes des communautés minoritaires ont souvent été réprimées parce qu'il n'y avait pas de services bilingues, et il n'y avait pas de services bilingues parce que la demande était peu élevée.

Cela m'amène à commenter la partie de la motion de l'opposition qui voudrait que l'on modifie la loi pour refléter la philosophie du «bilinguisme territorial». Si l'on veut, par cette notion de bilinguisme territorial, refléter la prédominance du français au Québec et de l'anglais dans les autres provinces, je dirais que la loi reflète déjà cette prédominance, jusqu'à un certain point qui me semble adéquat.

Cependant, si l'on cherche à en arriver à un unilinguisme territorial où l'anglais et le français ne seraient pas seulement les langues prédominantes mais les langues exclusives, à toutes fins utiles, j'estime que cela contrevient non seulement aux principes fondamentaux de la loi mais aussi à la réalité canadienne.

[Français]

J'ai déjà souligné qu'à l'égard des services fédéraux offerts au public, le principe des services bilingues n'était pas absolu et que sa mise en oeuvre variera en fonction des facteurs démographiques et autres. À l'égard des services internes offerts aux employés fédéraux et la langue dans laquelle les fonctionnaires effectuent leur travail, l'article 16 de la Charte garantit l'égalité des langues officielles quant «à leur usage» dans les institutions fédérales. Ce grand principe d'égalité se traduit sous forme d'obligations institutionnelles dans la cinquième partie de la loi.

Dans la région de la Capitale nationale et dans certaines régions désignées, surtout la région de Montréal et le Nouveau-Brunswick, les institutions fédérales doivent veiller à ce que leurs milieux de travail soient propices à l'usage des deux langues officielles.

[Traduction]

En dehors des régions désignées, les responsabilités des institutions fédérales sont essentiellement de maintenir de justes pratiques dans la langue minoritaire.

En conclusion, je dirais que je considère la Loi sur les langues officielles comme un instrument utile et valable pour la protection et la promotion de la dualité linguistique canadienne. Des modifications allant à l'encontre des principes de cette loi et susceptibles de porter atteinte aux fondements constitutionnels ne serviraient aucun objectif utile et détourneraient nos énergies des vraies questions de l'heure.

La Loi sur les langues officielles prévoit qu'elle soit réexaminée de façon régulière par un comité du Parlement et c'est à ce niveau que nous devrions travailler pour faire en sorte que les principes de la loi soient appliqués conformément aux meilleures pratiques.

J'encourage donc les députés à rejeter cette motion et je les remercie de leur attention.

(1530)

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, je me demande si le ministre de la Justice serait d'avis que la Loi sur les langues officielles et la Charte canadienne des droits et libertés protègent adéquatement les droits des minorités linguistiques au pays. Si tel est le cas, comment se fait-il qu'au Québec les lois 22, 101 et 178 prises ensemble créent une injustice que les Nations Unies ont condamnée, tant au regard du Canada qu'au regard de la province de Québec? Et nous n'avons toujours pas réglé le problème engendré par les lois en place.

M. Rock: Monsieur le Président, en prenant la défense de la loi dans sa forme actuelle, j'ai parlé du compromis social et politique qui a donné lieu à celle-ci. Je crois qu'au Canada, tant en ce qui concerne cette loi que dans bien d'autres domaines, il faut avant tout assurer un contrôle constant de ce compromis afin


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de garantir qu'il réponde aux besoins de la société tout en demeurant toujours conforme à nos principes sous-jacents.

Pour répondre directement à la question qui m'a été posée, je ne peux parler au nom des assemblées législatives de certaines provinces qui ont vu les choses différemment et ont cru bon d'adopter leurs propres lois linguistiques de temps à autre. Je peux dire qu'en notre qualité de gouvernement national et de Confédération, nous défendons cette loi qui reflète les principes nationaux de l'esprit national.

Bien sûr, elle découle d'un compromis et n'est pas parfaite, mais, du moins jusqu'à ce jour, elle demeure le meilleur outil jamais mis au point pour refléter la dualité linguistique du pays et satisfaire les impératifs de justice résultant de la nécessité de fournir aux Canadiens des services dans les deux langues officielles au moment et à l'endroit où ils sont requis.

Je ne réponds peut-être pas aussi directement que j'aimerais le faire à la question de mon collègue. Je ne peux parler au nom de l'Assemblée législative du Québec et dire pourquoi elle a, à l'occasion, adopté ses propres lois linguistiques. Je peux simplement affirmer que, d'un point de vue fédéral, la Loi sur les langues officielles dans sa forme actuelle correspond bien à la vision du présent gouvernement sur la cohabitation des deux langues officielles au Canada.

M. Ringma: Monsieur le Président, ce que j'essayais d'obtenir c'est peut-être une admission de la part du gouvernement fédéral, en la personne du ministre de la Justice, qu'il a manqué à son devoir à l'égard de Gordon McIntyre dont le cas a été porté devant les Nations Unies. Dans le cadre de la décision des Nations Unies, le gouvernement canadien a failli à ses obligations en ne critiquant pas la législation québécoise à cet égard.

M. Rock: Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord. Le gouvernement canadien a rempli toutes ses obligations en la matière. Il a fait connaître sa position au comité des Nations Unies qui était saisi de cette affaire et je ne doute pas qu'il en ait tenu compte.

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre): Monsieur le Président, au nom du whip du Parti réformiste, j'informe la Chambre que, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, les membres de notre parti partageront leur période d'intervention.

À titre de préambule, avant de me lancer dans le vif du sujet, j'aimerais dire que, lorsqu'on veut faire des changements, qu'ils soient d'ordre législatif, organisationnel ou autre, il faut d'abord reconnaître la nécessité de procéder à de tels changements. Il faut se rendre à l'évidence que les choses ne sont pas exactement comme elles devraient l'être.

Je vais tenter de démontrer cet après-midi que la politique fédérale en matière de langues n'a pas atteint son objectif principal, à savoir l'unification du Canada. Je prétends que c'est exactement l'inverse qui s'est produit.

(1535)

Comment? Je vais aborder la question sous deux angles. Le premier, c'est que la politique fédérale en matière de langues est injuste. Et le deuxième, c'est qu'il est impossible ou presque d'en faire respecter les dispositions.

Quels sont les motifs qui me poussent à dire que la politique fédérale en matière de langues est injuste? Nous employons le mot justice pour décrire ce qui est bien et équitable. Ce terme recouvre l'interaction entre droits et obligations. Par droit, on entend l'attente légitime de se voir traiter d'une façon donnée par les membres de la société et ses institutions. Une obligation est le devoir qu'ont les particuliers et les institutions de traiter les autres comme ils s'y attendent.

La politique linguistique du Canada ne se fonde pas sur un tel concept de la justice. C'est plutôt le résultat de la domination des forts sur les faibles, selon l'endroit où l'on vit au Canada. L'idée que la justice n'est rien de plus que la défense des intérêts personnels des forts a été réfutée avec succès par Platon, il y a très, très longtemps.

Ce sont les premiers ministres Pearson et Trudeau qui ont eu la bonne idée de rétablir la justice longtemps attendue au Canada. M. Trudeau, par exemple, parlait souvent et avec éloquence de la société juste. En même temps qu'une société juste, ces deux premiers ministres voulaient établir l'unité nationale. La politique linguistique est l'instrument qu'ils ont choisi pour arriver à leurs fins.

Cependant, à partir du début, chaque fois que le principe de la justice entrait en conflit avec le principe de l'unité, on oubliait la justice. Ainsi, le gouvernement fédéral a adopté une position contradictoire. D'une part, il a subventionné les minorités francophones hors Québec et les minorités anglophones au Québec. D'autre part, il était réduit à la même époque à aider silencieusement l'unilinguisme francophone imposé au Québec.

Une position aussi contradictoire est injuste et, à long terme, elle risque de nuire à l'unité nationale. La politique du gouvernement fédéral est donc devenue décousue, confuse et, dans l'ensemble, contre-productive.

Ajoutons à l'injustice flagrante de cette politique le fait qu'on a tenu les Canadiens dans l'ignorance de la politique fédérale, et l'on comprend quelles ont été les conséquences de cette ignorance. Quand on garde les gens dans l'ignorance des politiques du gouvernement qui les concernent, on risque de favoriser la suspicion, le ressentiment, les préjugés et, ultimement, la haine.

Certaines de ces attitudes commencent à se manifester. Si nous voulons unir le Canada, nous devons avoir une politique linguistique juste, et nous devons dire ce qu'il en est aux Canadiens.

Même la Commission d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme s'est montrée compréhensive sur la question des droits des minorités linguistiques. Elle voulait une politique qui serait essentiellement utilitaire, qui serait le plus utile possible pour le plus grand nombre de personnes. Elle rejetait l'idée que tous les Canadiens avaient le devoir d'être bilingues. On pouvait lire dans le rapport de la commission qu'un pays bilingue n'est pas


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un pays dont tous les habitants doivent nécessairement parler deux langues; c'est un pays dont les principales institutions, tant publiques que privées, doivent dispenser leurs services dans les deux langues, à des citoyens qui peuvent fort bien, dans l'immense majorité, être des unilingues.

Contrairement à cette position juste et équitable, la politique linguistique fédérale ressemble maintenant davantage à un bilinguisme asymétrique. Concrètement, dans le langage de tous les jours, cela veut dire qu'il faut protéger le français partout au Canada, surtout dans les collectivités où l'on trouve des francophones, sans donner les mêmes droits aux anglophones du Québec.

Cette politique donne lieu à des interprétations contradictoires: au Québec, la politique est asymétrique alors que, partout ailleurs au Canada, elle se justifie du point de vue utilitaire.

Le plus troublant dans tout cela, c'est qu'il n'y a pas de vision unique et complète du Canada et de son identité linguistique. Pour y parvenir, il doit y avoir une politique linguistique juste. Rappelons-nous que seul un gouvernement juste peut assurer la stabilité du pays.

J'en arrive à mon deuxième argument concernant la politique linguistique fédérale. À mon avis, la politique linguistique actuelle est difficile, sinon impossible, à appliquer.

(1540)

Arrêtons-nous sur le troisième objectif de la Loi sur les langues officielles de 1988, qui fait en sorte que la proportion de francophones et d'anglophones dans la fonction publique reflète la composition linguistique du Canada. On doit réaliser le niveau de représentation proportionnelle dans la composition générale de la fonction publique à tous les niveaux de responsabilité et dans tous les domaines de fonctionnement, en observant le principe du mérite dans les processus de recrutement et d'avancement.

Le ministre de la Justice vient tout juste de parler de l'application pragmatique de cette loi. Je doute que nous puissions réaliser cet objectif si le recrutement s'effectue uniquement selon le principe du mérite et si, dans certains cas, ce recrutement ne se fait que selon le critère linguistique.

Tout dernièrement, soit le 25 février dernier, le ministre de la Défense nationale a parfaitement illustré la difficulté d'appliquer la loi, en disant: «Le député saura que, d'ici 1997, un militaire qui aspire au rang de lieutenant-colonel devra être bilingue.» Ainsi, nous avertissons tout anglophone qui veut devenir général ou chef d'état-major qu'il doit être totalement et absolument bilingue.

Cela soulève deux problèmes. Premièrement, cet avertissement s'adresse-t-il uniquement aux anglophones ou aussi aux francophones, ou alors est-ce un autre exemple du bilinguisme asymétrique?

Deuxièmement, quelqu'un peut-il arriver à se déclarer parfaitement bilingue?

Une fois qu'on a tout dit et tout fait à l'égard de ces problèmes, je considère pour ma part que je veux un Canada uni, un pays où nous pouvons collaborer et nous respecter tous, peu importe dans laquelle des deux langues officielles, sans devoir nous contraindre mutuellement de devenir tous individuellement bilingues.

Notre pays est plus grand que chacun des individus qu'il contient. Il est plus grand qu'une province ou un territoire. Ce n'est qu'en garantissant la justice pour tous que nous assurons la stabilité de notre pays. Si nous devenons avides de pouvoir, si nous recherchons uniquement notre avantage ou un traitement spécial, comme ici en matière linguistique, nous détruirons notre pays.

Établissons une politique linguistique juste, qui associe le bon sens et la réalité. Ce sera une politique que nous pourrons nous payer et elle montrera au reste du monde ce que peut et doit être un pays.

Voilà l'objet de la motion dont nous sommes saisis. J'espère que le débat amènera chacun à adopter ce point de vue.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement l'intervention du député du Parti réformiste et je voudrais lui poser une question.

Auparavant, permettez-moi de faire un petit préambule. L'automobiliste qui traverse le Québec et qui met sa radio à n'importe quelle station radiophonique pourra entendre Anne Murray ou Gordon Lightfoot. Il entendra non seulement des artistes francophones, mais aussi des artistes canadiens-anglais.

S'il se promène à l'extérieur du Québec, dans n'importe quelle autre région du Canada, cet automobiliste ne pourra pas entendre d'artistes francophones, et ce, malgré les 1 400 ou 1 500 stations radiophoniques qui existent.

Puisque ces stations transmettent sur des ondes canadiennes, et non pas anglaises ou françaises, le député ne croit-il pas qu'il serait juste et approprié de pouvoir entendre des artistes canadiens sur toutes les stations radiophoniques du Canada?

M. Schmidt: Monsieur le Président, c'est évident. Je signalerai d'ailleurs au député qu'il peut entendre des chanteurs français à Kelowna, à Vernon et à Armstrong, toutes des petites villes de la Colombie-Britannique. On peut en entendre en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba.

J'invite le député à aller se promener dans ces provinces. Il n'aura qu'à écouter la radio pour constater ce fait.

(1545)

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, le député dit que la loi actuelle est injuste, notamment parce qu'elle n'accorde pas le même traitement aux anglophones du Québec qu'aux francophones hors Québec. Il dit que la Loi canadienne sur les langues officielles ne protège pas les anglophones du Québec comme elle protège les francophones hors Québec.


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Je suis un anglophone du Québec. À ma connaissance, aucune disposition de la loi ne favorise les francophones hors Québec plus que les anglophones du Québec. Je m'étonne que le député dise cela.

Ce n'est pas la loi fédérale qui nous pose un problème à nous, les anglophones du Québec. La loi fédérale protège et fait valoir nos droits. Nos problèmes ne viennent pas de la loi fédérale, mais des lois du Québec, notamment les lois 101, 178 et 22.

Je voudrais que le député dise à la Chambre en quoi la loi fédérale protège moins les droits des anglophones du Québec que ceux des francophones hors Québec. Je doute qu'il puisse le faire.

M. Schmidt: Monsieur le Président, le problème réside bien évidemment dans la loi 101.

M. Allmand: Ce n'est pas une loi fédérale.

M. Schmidt: C'est exact. Le fait est que le gouvernement fédéral ne fait rien pour empêcher une loi provinciale de violer les droits constitutionnels de certains Canadiens. Tel est le problème.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu): Monsieur le Président, je voudrais simplement demander aux députés s'ils seraient prêts à accepter la réciprocité, c'est-à-dire que les anglophones du Québec soient traités exactement comme les francophones à travers tout le Canada, à partir des droits des anglophones du Québec. Je suis certain que si les francophones hors Québec recevaient 25 p. 100 de ce que reçoit la minorité anglophone du Québec, ils seraient extraordinairement heureux.

Est-ce que l'idéal ne serait pas, et c'est ce que je demande au député dans le respect de son opinion, d'établir une forme de réciprocité? Tout droit brimé aux anglophones au Québec serait brimé aux francophones, mais tout droit donné aux anglophones du Québec serait également accordé aux francophones du reste du Canada. Est-ce qu'il serait d'accord là-dessus?

[Traduction]

M. Schmidt: Monsieur le Président, on ne peut pas répondre à cette question en peu de temps. C'est une question délicate, quoique bonne.

La réciprocité suppose que tous soient traités de la même manière et que cela puisse se faire en toute logique. Il demeure que la Cour d'appel de l'Ontario a fait savoir que l'expression «là où le nombre le justifie» s'appliquait à une douzaine de personnes. Ce tribunal a aussi dit que la seule façon de préserver les droits des francophones au sein du système d'enseignement était que les francophones élisent leurs propres conseils scolaires séparés.

Si la réciprocité signifie qu'on établisse un conseil scolaire séparé pour cinq ou dix personnes, les conseils scolaires vont proliférer et cela, à grands frais. Ce n'est là qu'un exemple parmi tant d'autres. Il faut payer les conseillers scolaires, les surintendants, le personnel d'administration, les professionnels, le soutien, etc.

La réciprocité n'est donc pas une question facile. Je suis d'accord en principe.

Le vice-président: La période des questions et observations est expirée.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke): Monsieur le Président, la motion que nous avons présentée aujourd'hui est fondée sur la réalité.

La réalité, c'est que la Loi sur les langues officielles est un échec total. Elle est une source de division. Elle coûte tellement cher qu'elle ne serait même pas réaliste si l'économie était prospère et si le Trésor débordait d'argent, ce qui n'est pas le cas actuellement.

L'un des aspects les plus curieux de la loi, c'est que personne ne l'a demandée. Le Québec ne l'a pas demandée, et le reste du Canada non plus.

Le Québec veut le français chez lui, et nous n'avons rien contre cela. Il veut avoir accès aux grandes institutions fédérales comme le Parlement et la Cour suprême en français, et nous n'avons rien contre cela. Il veut des services fédéraux en français, et nous n'avons rien contre cela dans la mesure où la demande est suffisante pour qu'il soit rentable d'offrir ces services.

(1550)

Étant donné que la majorité des Québécois ne se préoccupent pas du bilinguisme officiel et qu'une majorité encore plus importante de Canadiens dans le reste du pays sont contre, pourquoi dépensons-nous autant d'argent pour maintenir un programme qui ne fonctionne pas, qui coûte trop cher par rapport à nos moyens et que personne ne veut?

Il y a une théorie qui suit le concept de la première loi de la physique de Newton, soit qu'un objet en mouvement restera en mouvement jusqu'à ce qu'une force externe agisse sur lui. Autrement dit, le statu quo règne de façon absolue.

Dans la réalité, comme le programme prend de plus en plus d'ampleur, il semble que beaucoup de gens font passer leurs intérêts personnels avant toute autre considération et ne tiennent pas compte du fait que ce programme aurait dû prendre fin il y a longtemps.

Je voudrais parler de façon plus particulière aujourd'hui d'un certain aspect du programme d'application du bilinguisme. La question qui me préoccupe beaucoup est l'introduction de services bilingues dans le domaine du contrôle de la circulation aérienne. Cet aspect du programme d'application du bilinguisme coûte extrêmement cher, sans compter qu'il risque parfois de compromettre la sécurité des voyageurs canadiens.

Le contrôle de la circulation aérienne a principalement recours à deux types de services: la tour de contrôle, qui permet de contrôler la circulation aérienne à l'aéroport et près de l'aéroport, et le radar, qui permet de contrôler la circulation dans un espace aérien donné à l'aide d'instruments de bord.

La Loi sur les langues officielles oblige toutes les institutions fédérales à s'assurer que le public peut obtenir dans l'une ou


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l'autre des langues officielles tous les services offerts par les bureaux et les installations du gouvernement fédéral dans la région de la capitale nationale.

Ainsi, la tour de contrôle d'Ottawa est devenue complètement bilingue 16 heures par jour à partir de juin 1990 et 24 heures par jour à partir de mars 1991. Le coût de cette mesure a été et est encore exorbitant. Il devrait normalement y avoir 17 contrôleurs à la tour de l'aéroport d'Ottawa, mais en ce moment il n'y en a que neuf qui peuvent travailler. Une partie du problème provient du fait que tous les postes de contrôleur sont désignés «bilingue impératif», ce qui signifie que les candidats aux postes doivent être parfaitement bilingues avant même de poser leur candidature.

Je n'ai personnellement aucune objection à ce que l'on fournisse des services bilingues là où la demande est assez importante pour que ce soit rentable. Je l'ai d'ailleurs dit au début de mon intervention. Cependant, la définition de «demande suffisante» est un sujet à controverse qui mérite d'être examiné.

Avant de parler du besoin à la tour de contrôle, j'aimerais ajouter qu'il existe des services entièrement bilingues à la tour d'Ottawa et que l'implantation du bilinguisme est en cours au terminal aéroportuaire.

Voyons maintenant comment on évalue la demande et quels services sont nécessaires pour combler cette demande, si cette demande doit être comblée.

Des simulations ont été faites sur du matériel qui était à Hull, au service de la recherche et du développement. Avec un trafic aérien où 30 p. 100 des pilotes parlaient français, les choses se sont passées de façon acceptable avec un seul contrôleur bilingue. Cela donne un pourcentage qui pourrait nous servir de base dans l'élaboration des plans de dotation, pour peu que l'on puisse démontrer l'existence d'une demande. Quelle est l'importance de cette demande? À la tour d'Ottawa, les contrôleurs enregistrent toutes les demandes de service en français et le nombre optimum atteint est de 2 p. 100, soit un quinzième du volume de trafic dont un seul contrôleur bilingue peut s'occuper si l'on se fie à la simulation.

En passant, je mentionne que dans ce chiffre de 2 p. 100, il y a des pilotes d'Air Canada qui peuvent de toute évidence travailler en anglais. Il y a aussi une ligne aérienne dont le prochain atterrissage après Ottawa est Boston, ainsi que des pilotes de Transports Canada qui parcourent tout le Canada.

À mon avis, rien ne justifie que l'on fournisse un service de contrôle aérien bilingue dans la région d'Ottawa et, si un tel service est nécessaire, le poste bilingue unique prévu à l'origine suffit. On peut démontrer que ce poste suffirait pour le moment et pourrait absorber une très forte augmentation du trafic aérien à Ottawa.

Le coût de ce service bilingue n'est qu'une des préoccupations que suscite le programme, mais elle est de taille. En ce moment, le coût de la surdotation nécessaire pour mettre en oeuvre le programme de bilinguisme à l'aéroport d'Ottawa additionné au coût associé à l'absence des trois contrôleurs en formation pour doter les trois postes bilingues à combler totalise presque un million de dollars par année. Il y a des contrôleurs anglophones à Ottawa qui pourraient nous éviter ces coûts, mais ils ne sont pas admis dans la tour de contrôle parce qu'ils ne parlent pas français. Ces coûts ne sont que la pointe de l'iceberg.

En commençant, j'ai aussi parlé de mes préoccupations en matière de sécurité. C'est la façon dont on traite les contrôleurs anglophones pendant la mise en place, qui se fait de façon très douteuse, des services bilingues qui est à la source de ma préoccupation. On ne tient pas compte des droits des titulaires. On abandonne les plans initiaux de mise en oeuvre. L'avenir des contrôleurs s'en trouve compromis.

(1555)

Je voyage beaucoup par avion, comme la plupart des députés ici à la Chambre. Je ne voudrais pas subir une opération à coeur ouvert des mains d'un chirurgien que j'aurais giflé la veille. Pourquoi alors faisons-nous la même chose aux gens entre les mains desquels nous mettons notre vie chaque fois que nous nous envolons?

Ce n'est qu'un modeste exemple des problèmes causés par la Loi sur les langues officielles, mais il illustre bien à quel point la situation est en train d'échapper à tout contrôle.

Le temps est maintenant venu de remédier au problème. Il est temps que nous devenions la force extérieure qui mettra fin à l'application d'un programme qui n'a jamais fonctionné dans les intérêts de qui que ce soit.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international): Monsieur le Président, je n'ai pas su où le député voulait en venir jusqu'à ce qu'il arrive à sa conclusion.

Je tiens à apporter une rectification. La capitale s'est déjà déclarée ville bilingue. Il y a plus de 30 p. 100 de sa population qui parle les deux langues officielles. Plus de 1,1 million de personnes vivent dans la région de la capitale nationale et fréquentent son aéroport international, et je dirais que plus de 55 p. 100 d'entre elles parlent le français et l'anglais.

Le député essaie-t-il de me dire que si je suis un francophone qui vit du côté québécois et que je me rends à l'aéroport international, je ne devrais pas avoir le droit de parler à quelqu'un en français?

Je veux apporter une autre rectification. L'aéroport international d'Ottawa assure la liaison avec d'autres villes canadiennes et américaines, mais aussi avec certaines villes d'Europe. C'est un aéroport international.

Nous avons l'intention d'améliorer les services bilingues à l'aéroport international d'Ottawa. J'espère qu'un jour tous les aéroports de notre pays seront souples comme l'aéroport international d'Ottawa et qu'ils offriront le même genre de services que lui.

Personnellement, je ne suis ni Canadien français, ni Canadien anglais de souche. Je suis arrivé dans ce pays il y a quelques années et je dois dire que j'ai considéré comme une richesse et un


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honneur le fait de pouvoir parler le français, l'anglais, l'arabe et un peu l'italien. Quant au chinois, j'y travaille.

Non seulement le Canada doit être bilingue, mais il devrait même être trilingue, cela parce que des pays du monde entier sont en train d'adopter non pas une, ni deux, mais bien trois langues. Le député devrait aller en Europe pour s'en rendre compte. En Europe, la grande majorité des gens parlent au moins deux langues.

Le député veut-il dire que nous devrions refuser à la majorité des gens qui vivent dans la région de la capitale nationale le droit à des services en français, et aux autres, le droit à des services en anglais?

M. Gouk: Après ce contre-discours, je ne sais trop par où commencer.

Tout d'abord, je demanderais au député qui a posé cette question tortueuse s'il pense que 55 p. 100 des francophones de la région de la capitale nationale vont dans le cockpit lorsqu'ils voyagent par avion, se servent de la radio et commencent à conduire l'appareil à la place du pilote.

Les 2 p. 100 sont vérifiés, et c'est le chiffre optimal en ce qui concerne l'usage du français dans la région de la capitale nationale.

Je voudrais bien comparer mon passeport à celui du député. Je crois que je voyage au moins autant que lui et probablement beaucoup plus. L'anglais est la langue internationale de l'aviation.

Je n'ai pas d'objection à ce que les pilotes utilisent le français au Québec, puisque c'est la langue qui se parle là-bas. Je serais même d'accord pour qu'on assure le service là-bas. Mais nous assurons des services tellement plus importants que ce qui est nécessaire pour les gens qui en ont besoin que c'est carrément ridicule.

Puisque le député parle de faire respecter ce droit partout au Canada, il n'est pas étonnant que le budget soit absolument incontrôlable.

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Monsieur le Président, je voudrais simplement souligner que les propos du député sont quelque peu incohérents. Il a commencé par dire que l'un des problèmes engendrés par la Loi sur les langues officielles, c'est qu'elle sème la discorde. Je suis d'avis que s'il est une chose qui cause des dissensions, c'est de présenter des notions aussi bizarres comme des faits.

(1600)

À deux reprises, le député a affirmé que personne ne voulait de cette politique au Canada. Eh bien, il a tort, parce que moi j'y tiens. Et je ne suis pas le seul. Le député n'a qu'à venir au Nouveau-Brunswick pour voir combien de gens font la queue pour s'inscrire à des programmes d'immersion et d'apprentissage linguistiques. Dire que la politique est un échec, c'est faire fi de la réalité. Or, la réalité, c'est que depuis 25 ans un grand nombre de gens apprennent une deuxième langue, ce qu'ils n'auraient pu faire s'il n'y avait pas eu de politique sur les langues officielles.

On a dit à maintes reprises que la Loi sur les langues officielles forçait les gens à devenir bilingues, alors qu'en réalité c'est tout le contraire: elle permet aux gens de se faire servir dans leur langue sans avoir à être bilingues.

Si vous êtes Fransaskois, il n'est pas nécessaire que vous parliez anglais pour obtenir des services du gouvernement. Si vous vivez à Fredericton, au Nouveau-Brunswick, et que vous parlez français, vous n'avez pas à parler anglais pour obtenir des services du gouvernement. C'est ça la réalité. Il n'est pas nécessaire d'être bilingue. On peut se faire servir dans sa langue.

Enfin, il y a un autre argument qui est souvent donné et qui sème également la discorde. On parle du nombre de personnes qui sont servies grâce à cette loi et du coût de ce service. Dans ma province, le Nouveau-Brunswick, 250 000 Acadiens se font servir dans leur langue maternelle par le gouvernement fédéral. La loi garantit la prestation d'une bonne partie des services dans les deux langues officielles. Les coûts engagés ne sont pas excessifs par rapport au nombre de gens qui en profitent. C'est un argument qui sème la discorde. C'est un argument qui n'est pas fondé, et je demande au député de nous dire ce qu'il en pense.

M. Gouk: Monsieur le Président, le député n'a pas eu l'air d'apprécier mon utilisation de l'expression «source de division», mais il l'a lui-même utilisée plusieurs fois dans son discours.

J'ai dit, effectivement, que personne ne voulait cela, ce que le député conteste. Je suppose qu'il a raison. Je ne pense pas que l'on ne puisse jamais trouver l'unanimité absolue.

Je voudrais cependant lui signaler que d'après le dernier sondage que j'ai consulté, 63 p. 100 des Québécois interrogés n'approuvent pas le programme national de bilinguisme et ce pourcentage est plus élevé que dans le reste du Canada.

Le député pense que les gens sont en faveur du bilinguisme parce qu'ils suivent des cours de français. Qu'il sache que j'ai suivi des cours d'espagnol et de portugais et que je ne voudrais pas pour autant que le Canada fasse de ces deux langues les langues du pays. Son argument ne vaut pas grand-chose.

En ce qui concerne le fait que nul n'est tenu de suivre des cours dans les deux langues en raison des dispositions sur le service bilingue, qu'il en parle donc aux contrôleurs aériens, à Ottawa.

Mme Marlene Catterall (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor): Monsieur le Président, je voudrais préciser que je partagerai mon temps de parole avec le député de Carleton-Gloucester.

[Français]

Je vous remercie de m'inviter à prendre la parole au nom du président du Conseil du Trésor à l'occasion de ce débat. . .


3173

[Traduction]

. . .et de me permettre d'exprimer le point de vue du gouvernement du Canada, du gouvernement de tous les Canadiens, sur la motion qu'a présentée le député de Nanaïmo-Cowichan au sujet des langues officielles dans les institutions fédérales.

Tout d'abord, je voudrais dire que je suis un peu stupéfaite de la position qu'a adoptée le député dans cette motion, une stupéfaction que partagent, j'en suis certaine, beaucoup de députés de la Chambre et bien des Canadiens.

La motion semble dénoter quelque peu une mauvaise compréhension, peut-être délibérée, de l'objet et de l'esprit de la Loi sur les langues officielles et de ses règlements d'application. En fait, elle semble mettre en doute le fondement même de l'approche du Canada aux droits linguistiques et un des principes sur lesquels repose notre pays.

Pour que les députés d'en face le sachent clairement, l'objet principal de la Loi sur les langues officielles est de garantir l'égalité du statut des Canadiens français et anglais dans l'usage des deux langues officielles dans les institutions fédérales.

(1605)

La loi repose sur le principe du bilinguisme institutionnel, le principe selon lequel les institutions fédérales doivent être à même de servir les Canadiens et de communiquer avec eux dans la langue officielle de leur choix. En fait, la loi n'oblige ni les Canadiens anglophones à parler français, ni les Canadiens francophones à parler anglais. Par contre, les bureaux des institutions fédérales doivent pouvoir offrir des services bilingues dans les localités où la demande est suffisante pour justifier des services dans les deux langues officielles.

Il existe d'importantes distinctions pour quiconque veut s'attaquer à la question des langues officielles au Canada, notamment à la Loi sur les langues officielles.

[Français]

Le bilinguisme institutionnel ne signifie pas non plus que tous les employés des institutions fédérales doivent être bilingues. Il signifie plutôt que l'obligation de bilinguisme revient aux institutions fédérales. Il appartient en effet à ces institutions de prendre toutes les mesures requises pour faire en sorte que, partout où elles sont tenues de le faire aux termes de la législation, le public puisse être servi et recevoir l'information dont il a besoin dans la langue officielle de son choix.

[Traduction]

Le bilinguisme institutionnel signifie aussi que les Canadiens des deux groupes linguistiques peuvent obtenir un emploi et poursuivre une carrière dans la fonction publique fédérale dans la langue officielle de leur choix, tout en restant unilingues s'ils le désirent.

Ce sont là les principes de base du programme des langues officielles dans les institutions fédérales. Des principes simples et justes, reflétant les droits conférés aux Canadiens par notre Constitution. Des principes qui sont l'essence même de notre identité, de notre héritage culturel, l'essence même de la dualité linguistique canadienne, l'une des caractéristiques fondamentales de notre pays.

Ces principes garantissent aux Canadiens, anglophones ou francophones, le droit de recevoir de la part des institutions fédérales des services et des informations dans la langue de leur choix.

[Français]

Ces principes garantissent aux employés des institutions fédérales le droit de pouvoir travailler dans la langue officielle de leur choix, dans des circonstances et des régions bien définies par la loi, et ils permettent aux Canadiens des deux communautés linguistiques d'avoir des chances égales d'emploi et d'avancement dans les institutions fédérales.

Ces principes fondamentaux font partie intégrante des lois de ce pays. Les droits des Canadiens imposent aux institutions fédérales des obligations concomitantes, soit celles de respecter l'exercice de ces droits.

Le règlement sur les langues officielles en matière de communication avec le public et de prestation des services permet de rendre plus spécifiquement exécutoires certaines dispositions de la Loi sur les langues officielles.

Le règlement définit en effet dans quelles circonstances les bureaux des institutions fédérales sont tenus de servir le public dans les deux langues officielles. Ce peut être en raison de l'importance de la demande pour leurs services ou en raison de la nature même des services qu'ils offrent.

Le programme des langues officielles est l'instrument de mise en oeuvre de la législation sur les langues officielles par les institutions fédérales.

Je viens de vous exposer brièvement les grands principes qui sous-tendent ce programme. Je voudrais maintenant vous expliquer pourquoi ce sont, à mon avis, de bons principes.

[Traduction]

À mon avis, l'approche canadienne à l'égard des droits linguistiques a deux qualités fondamentales: elle est à la fois raisonnable et juste. Elle est raisonnable en ce sens qu'elle confère aux Canadiens le droit de recevoir des institutions fédérales des services dans la langue de leur choix, tout en limitant la portée de ces droits, notamment en définissant la demande. Elle est juste en ce sens qu'elle assure aux Canadiens un accès ouvert et facile aux services de leur gouvernement dans les deux langues officielles, permettant ainsi à la vaste majorité des Canadiens de recevoir des services dans la langue officielle de leur choix.

(1610)

L'approche canadienne se distingue aussi par son équité et sa pondération. C'est ce qui explique qu'il n'y a pas qu'une seule définition de ce qu'est une demande importante de services.

Les variations autorisées par le règlement d'application de la loi peuvent être fondées sur l'importance du service à fournir, par exemple lorsqu'interviennent des considérations de santé et de sécurité. Évidemment, chaque Canadien doit pouvoir comprendre en quoi consiste le service qui lui est fourni et il doit pouvoir communiquer.


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S'il s'agit des transports, qui peuvent concerner n'importe quel Canadien à tout moment, les personnes intéressées ont évidemment le droit d'être servies par le gouvernement dans la langue officielle de leur choix.

Je dirai brièvement, en terminant, que nous aurions pu retenir une approche différente et, comme certains le souhaiteraient, appliquer une règle simple fondée exclusivement sur le nombre. Ce n'est pas le choix que nous avons fait. Nous avons plutôt retenu comme critère la nécessité et l'importance du service.

Nous avons voulu demeurer fidèles au principe d'équité et à des règles qui permettent de répondre aux besoins dont je parlais plus tôt et que la loi doit combler. Il s'agit simplement de faire en sorte que les Canadiens puissent avoir accès aux services offerts par les institutions canadiennes.

Nous voulons que les Canadiens puissent travailler ensemble dans la langue officielle de leur choix, dans les mêmes institutions au sein des régions bilingues, comme le prévoit la loi. Le gouvernement s'est engagé à assurer une participation équitable des Canadiens des deux groupes linguistiques dans les institutions fédérales. Le gouvernement tient à ce que les institutions fédérales reflètent la présence des Canadiens anglophones et francophones, compte tenu du mandat et de l'endroit où se trouvent ces institutions.

L'approche canadienne, qu'il s'agisse des services au public, de la langue de travail ou d'une participation équitable, reflète les choix faits depuis les débuts de ce pays. Je me souviens de l'époque où, dans cette même ville, les francophones avaient peu de chances d'être embauchés par leur propre gouvernement et ceux qui l'étaient n'avaient aucune chance d'obtenir des promotions. Je crois dans l'équité en matière d'emploi, et c'est pourquoi je n'accepterais pas que ce genre de situation se reproduise dans ma communauté ou au Canada.

Je voudrais aussi parler du «bilinguisme territorial». Je crois que la territorialité a pris beaucoup trop d'importance dans ce pays depuis quelques années. Nous nous opposons beaucoup trop les uns aux autres et nous abordons les questions de politique gouvernementale dans une optique égoïste. Il est temps de prendre conscience que nos communautés doivent travailler ensemble à réaliser des objectifs communs. C'est ce qui donne au Canada son caractère unique et c'est ce qui fait que les Canadiens sont respectueux de leurs différences et fiers de ce qu'ils ont en commun.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je remercie la députée de ses observations et j'aimerais lui poser quelques questions.

D'abord et avant tout, j'aimerais qu'elle me dise ce qu'elle pense du fait que, dans une localité de ma circonscription, Kindersley, les abonnés de la télédistribution ne peuvent même pas comprendre une bonne partie des travaux parlementaires parce qu'ils se déroulent non pas dans la langue qu'ils comprennent tous, mais dans la langue adoptée par l'orateur à la Chambre.

Si l'on est bilingue, il n'y a pas de problème. Toutefois, les gens de ma circonscription qui captent la télévision par câble ne savent même pas ce que dit l'opposition officielle. En fait, nous n'obtenons même pas ce service dans notre région, ce qui nous permettrait de comprendre.

L'autre aspect a trait à l'environnement, et j'espère que tout le monde est conscient des économies considérables qui pourraient être réalisées si l'on fournissait les publications dans la langue demandée par le destinataire plutôt que toutes bilingues, ce qui nous oblige à utiliser deux fois plus de papier et à doubler les frais d'impression.

Je sais que la plupart des Canadiens préféreraient que ces documents soient publiés dans une langue ou dans l'autre, car ils n'en utilisent qu'une. J'aimerais que la députée se prononce sur les avantages, tant sur le plan environnemental que financier, qu'il y aurait à offrir des services dans la langue demandée et non dans les deux langues.

(1615)

Mme Catterall: Je dirais d'abord, monsieur le Président, que nous pourrions économiser énormément d'argent si nous décidions simplement d'abolir le gouvernement du Canada et de cesser complètement d'offrir des services aux Canadiens.

Nous pourrions économiser énormément d'argent si nous n'avions plus de service national de la poste ou de système national de transport. Or, il y a certains prix à payer pour respecter la nature même de ce pays, sa diversité et sa taille et, pour ma part, comme l'a déjà dit un Canadien célèbre, je suis heureuse de les acquitter.

Bien sûr, nous sommes toujours en quête de moyens pour réduire les coûts de mise en oeuvre de tout programme ou de toute politique. Le fait est que les coûts de prestation des services dans les deux langues officielles au Canada ont considérablement diminué ces dernières années. Je serais heureuse de connaître les vues du député à cet égard et d'en discuter avec mon ministre.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, il est peut-être difficile pour les députés du Parti réformiste qui vivent chaque jour en anglais de concevoir ce que ressentent les Canadiens français et les Canadiennes françaises qui n'ont pas toujours la possibilité de vivre en français.

Au Canada, on s'imagine mal que nos enfants, soit de langue anglaise, soit de langue française, ne puissent s'instruire dans leur langue maternelle ou soient obligés de participer à des activités sociales et culturelles et d'avoir accès aux services essentiels et à une formation professionnelle dans une langue autre que la leur. Or, pour plus de 1,6 million de Canadiens, les francophones hors Québec et les Québécois de langue anglaise, vivre dans sa propre langue n'est pas toujours acquis.

La langue française et la langue anglaise sont des éléments fondamentaux de notre identité canadienne. La langue est au coeur même de ce que c'est que d'être Canadien et ce, depuis le tout début de notre histoire. Dans les faits, près de 99 p. 100 des habitants de ce pays parlent français ou anglais. Cependant, près de deux millions de Canadiens et Canadiennes vivent dans des provinces et territoires où leur langue maternelle est minoritaire. La dualité linguistique est donc une réalité sociale fondamentale


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de notre pays et les Canadiens et les Canadiennes sont fiers de cette dimension qui nous distingue des autres pays, tels les États-Unis.

C'est pourquoi les communautés francophones dont je suis membre tiennent tant à ce que leurs enfants puissent conserver leur langue dans un environnement très majoritairement anglophone. Voilà aussi pourquoi les anglophones du Québec sont préoccupés par leur nombre décroissant et par la nécessité de préserver leurs institutions sociales, culturelles et scolaires.

[Traduction]

Ce sont des préoccupations que partagent quotidiennement de nombreux Canadiens membres d'une minorité linguistique. C'est également la raison pour laquelle le gouvernement fédéral appuie les efforts des groupes minoritaires pour changer les choses et prendre en main le développement et l'avenir de leur communauté.

On aurait du mal à imaginer comment on pourrait promouvoir l'usage du français et de l'anglais au Canada, sans en appuyer vigoureusement l'usage quotidien dans les collectivités.

C'est surtout par l'éducation que le gouvernement fédéral a contribué au développement des communautés minoritaires tout en respectant le fait que tout ce qui touche à l'éducation est du ressort provincial.

Lorsqu'en 1982, le Canada a adopté la Charte canadienne des droits et libertés, il a pris position en faveur des droits des minorités, et notamment de leurs droits linguistiques. L'article 23 de la Charte garantit aux communautés de langue minoritaire non seulement le droit à l'éducation dans leur langue mais aussi le droit de gérer leurs propres institutions.

Ces droits ont été précisés par deux décisions de la Cour suprême du Canada, à savoir la décision Mahé et la décision concernant les droits à l'éducation au Manitoba, en mars 1993.

En tant que citoyens canadiens, nous devons respecter ces droits. C'est pourquoi les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux collaborent pour que les anglophones du Québec et les francophones hors Québec puissent être éduqués dans leur langue et pour que tous les Canadiens puissent apprendre le français ou l'anglais comme langue seconde.

[Français]

De plus, le gouvernement fédéral a récemment élargi son champ d'activité à l'appui de l'éducation dans la langue de la minorité.

(1620)

Il a, en effet, adopté des mesures spéciales visant à aider certaines provinces à mettre en place des structures permettant à la minorité de gérer ses écoles, comme le prévoit l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, et à faciliter l'accès des francophones hors Québec à l'éducation postsecondaire en français.

Cet appui contribuera à offrir aux jeunes des minorités linguistiques, qui sont les adultes de demain, des chances égales de participer activement à la vie de notre pays et à son essor.

Dans ma province, par exemple, ces mesures spéciales que le gouvernement fédéral a adoptées auront permis la création d'un réseau de trois collèges de langue française, dont la Cité collégiale, ici même à Ottawa, qui remporte déjà d'énormes succès.

Les représentants de la communauté franco-ontarienne travaillent d'arrache-pied depuis des années à la mise en place de collèges dans leur région et le succès de la Cité collégiale confirme le besoin réel.

[Traduction]

L'importance de l'enseignement dans la langue minoritaire pour les minorités linguistiques est évidente. Comme l'avait fait remarquer la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme, l'absence d'un enseignement adéquat a empêché ces minorités de contribuer à part entière à la société canadienne. Nous commençons à peine à remédier aux effets de ces lacunes.

J'appartiens à une minorité francophone et je suis fier de mes origines. Le français est ma langue maternelle et celle de près de 978 000 personnes vivant à l'extérieur du Québec. En outre, l'anglais est la langue maternelle de 665 000 habitants du Québec. Cela représente une portion importante de la population canadienne. En fait, ces minorités sont plus nombreuses que la population de plusieurs provinces.

Les gens de minorités de langue officielle sont répartis dans tous les coins du pays. En ma qualité de Franco-Ontarien de quatrième génération, je suis fier d'affirmer que, seulement en Ontario, il y a un demi-million de francophones. Les Acadiens forment le tiers de la population du Nouveau-Brunswick, seule province officiellement bilingue du Canada. La plus grande minorité provinciale est celle des anglophones du Québec.

Nombreuses ou non, concentrées ou réparties sur de grandes étendues, ces minorités contribuent de manière importante à la société canadienne.

[Français]

La motion du Parti réformiste qui est devant nous aujourd'hui propose le bilinguisme territorial, que ses députés décrivent aujourd'hui comme unilinguisme territorial, comme nouvel aménagement linguistique au Canada, une sorte de «ethnic cleansing» à la manière du Parti réformiste. Cette solution territoriale, que l'on retrouve dans certains pays d'Europe, pourrait sembler attrayante à première vue. Pourtant, un examen plus poussé montre qu'elle ne correspond pas à la réalité régionale et démographique du Canada.


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Par exemple, contrairement à la Suisse et à la Belgique, où les groupes linguistiques occupent des territoires bien définis, les deux communautés linguistiques canadiennes sont disséminées à la grandeur du pays.

Notre pays a un réel intérêt à assurer que les communautés minoritaires de langues officielles participent pleinement à la vie sociale et économique de la société canadienne.

[Traduction]

Le Parti libéral a contribué plus que tout autre à la formation d'un Canada uni, d'un pays uni malgré sa diversité culturelle et linguistique. Nous continuerons d'oeuvrer en ce sens. Notre vision du pays veut que tous les francophones et anglophones soient considérés comme des citoyens canadiens de première classe, peu importe où ils vivent au Canada.

[Français]

Le Canada s'est développé grâce à la collaboration qu'ont apportée les deux grandes familles linguistiques et il continuera de se développer dans l'unité de la prospérité, aussi longtemps que nous aurons la sagesse de défendre ce qui nous unit et le courage d'éliminer ce qui pourrait nous diviser.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je suis heureux des observations du député de Carleton-Gloucester. Il est plaisant de voir qu'il s'est calmé. Du moins, j'ai eu l'impression que son discours venait du coeur.

Je voudrais citer au député quelques statistiques du recensement de 1991 et ensuite lui poser une question.

Naturellement, ma circonscription est quelque peu différente de la sienne. Il est possible que le bilinguisme tel qu'on le pratique en ce moment s'applique chez lui. Toutefois, dans Kindersley-Lloydminster où la population est de 63 871 habitants, 61 325 personnes ont dit, comme moi, parler l'anglais à la maison et 35 personnes, le français. Il y a aussi des langues non officielles, comme 130 personnes parlant le chinois, 40 l'espagnol et 1130 l'allemand, le groupe le plus important après l'anglais.

(1625)

Une autre statistique intéressante: 61 645 personnes ne parlent que l'anglais, tandis que personne ne parle que le français, selon ce recensement.

Je voudrais maintenant aller quelques pages plus loin, jusqu'à la circonscription de Saint-Maurice, au Québec, la circonscription du premier ministre. La population est de 75 185, dont 555 qui ont dit parler l'anglais à la maison et 73 370, le français. Très peu d'allophones: 10 hispanophones, 60 germanophones et quelques autres. De tous ces gens, 45 personnes seulement ne parlent que l'anglais et 61 405 ne parlent que le français.

C'est donc dire que la circonscription de Carleton-Gloucester est loin d'être représentative du Canada. Dans Kindersley-Lloydminster, par manque d'argent, on ferme des écoles et des hôpitaux, on réduit des services d'enseignement.

Je me demande si le député comprend le sentiment des gens qui voient fermer des services importants pour eux, en partie parce que l'on donne des services dans une langue officielle dont personne n'a besoin dans ma circonscription. Au nord de chez moi, il y a des autochtones qui étaient ici avant les anglophones et les francophones et dont la langue n'a pas de statut officiel.

Tout cela semble tout à fait injuste et inapproprié à l'aube du XXIe siècle. C'est pour cela qu'il faut aller de l'avant. J'aimerais que le ministre se rende compte de cela et prépare le Canada pour le siècle prochain au lieu de regarder en arrière, vers le XIXe siècle.

[Français]

M. Bellemare: Monsieur le Président, j'ai trouvé les propos du député de Kindersley-Lloydminster et leader en Chambre du Parti réformiste insensibles. Il nous a donné des statistiques et il nous a dit que, dans son comté, contrairement au mien, il y a très peu de francophones. Est-ce qu'il essaie de dire au Canada:

[Traduction]

On ne veut pas de français dans Kindersley-Lloydminster. Ou si vous êtes francophone, vous vous faites dire: «On se moque pas mal de vous et surtout n'osez pas poser de questions en français, notamment à votre gouvernement fédéral, même si c'est lui qui fournit les services.» Je me demande si cela traduit bien l'attitude du député, son dévouement pour le Canada et son désir de veiller au bien-être des minorités.

Il me semble que son attitude ressemble à celle de tous les autres députés réformistes qui sont intervenus jusqu'à maintenant dans ce débat. Il m'a demandé: «Comprend-il les sentiments des gens?» Comprend-il, lui, ce que signifie vraiment le terme «préjugé»? C'est une chose de nourrir des préjugés, mais toute autre chose d'en être la cible.

Permettez-moi de vous raconter une anecdote au sujet du premier emploi que j'ai obtenu à Ottawa. J'étais étudiant, j'avais 16 ans et j'occupais un emploi d'été. Un jour, j'ai oublié mon goûter. Je vivais au centre-ville. Je voulais appeler ma mère, parce que je savais qu'elle s'empresserait de prendre l'autobus pour venir me porter mon goûter. J'ai donc demandé à la secrétaire du bureau la permission de téléphoner à ma mère. Elle me l'a accordée.

J'ai donc appelé ma mère et je lui ai dit: «Maman, ne venez pas me porter mon goûter. Je l'ai oublié. C'est ma faute. J'irai moi-même le chercher. J'ai mon vélo. Ne vous en faites pas.» Au même moment, le surveillant de cette division du gouvernement fédéral m'a pris par le bras et m'a dit: «Jeune homme, que je ne vous reprenne plus à parler français dans mon bureau ou je vous congédie.»

Je me demande si le parti du député pense vraiment à ce qu'il dit. Je me demande si son parti pense vraiment à ce qu'il dit aux Canadiens français. Je pense que vous êtes tous une bande de bigots.


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(1630)

Le vice-président: Après avoir entendu l'anecdote que vient de nous raconter le député, je me demande s'il ne s'est pas laissé emporter dans le feu de la discussion et s'il accepterait de retirer l'expression qu'il vient d'utiliser et qui risque d'envenimer l'atmosphère à la Chambre.

M. Bellemare: Je m'excuse, monsieur le Président, mais je n'avais pas mon écouteur.

[Français]

Le vice-président: Alors, je vais me répéter. J'ai bien apprécié l'histoire qu'il vient de raconter, mais je me demande si le député est prêt à retirer le mot «bigot» qu'il a employé?

M. Bellemare: Monsieur le Président, je n'ai pas accusé les députés du Parti réformiste d'être bigots.

[Traduction]

Cette idée m'a traversé l'esprit et peut-être que ma langue a exprimé mes sentiments. J'en ai bien l'impression, de par leur comportement. On juge toujours un homme selon les gestes qu'il pose. C'est l'impression que j'ai.

Puisqu'il est antiparlementaire, je retire le mot français «bigot» qu'ils trouvent extrêmement injurieux. Cela tient-il à l'origine française du mot, à sa définition ou au fait que cette définition les gêne, je n'en sais rien.

Le vice-président: Je voudrais remercier le député qui a retiré ses paroles.

M. Hugh Hanrahan (Edmonton-Strathcona): Monsieur le Président, je commencerai par dire toute la colère que m'inspire l'utilisation par le député de l'expression «épuration linguistique» qui renvoie à «épuration ethnique».

On m'a déjà accusé comme réformiste d'appuyer une telle atrocité, ce qui est faux. Je tiens à dire officiellement que je suis Albertain et que ma fille, qui est aujourd'hui en 8e année, a toujours été en classe d'immersion française. Notre famille est fière qu'elle ait cette possibilité en tant que Canadienne.

Je vous ferai remarquer, toutefois, que ces classes d'immersion française coûtent 450 $ par écolier aux contribuables albertains. Je crois pour ma part que le coût additionnel de ces classes devrait être assumé par ceux qui en bénéficient, soit l'écolier ou ses parents.

Le député pourrait-il me dire ce qu'il en pense?

M. Bellemare: Monsieur le Président, le député réformiste s'oppose grandement à ce que je parle d'épuration ethnique. Je lui rappelle que c'est un député réformiste, soit le député de St-Albert, qui a soulevé la question lorsqu'il a dit que les problèmes dans le monde entier ont leur origine dans les ethnies et qu'il a fait allusion à ce qui se passe outremer à l'heure actuelle.

Si les problèmes ont leur origine dans les ethnies et si le Parti réformiste veut créer un Québec français et un English Canada, n'est-ce pas là sa version de l'épuration ethnique? S'il ne s'agit pas de cela, de quoi s'agit-il au juste?

Pour ce qui est de payer pour aller à l'école, le député veut-il dire que seuls ceux qui ont les moyens de payer ont le droit de s'instruire?

(1635)

Ils viennent se plaindre ensuite de ce qu'on ferme une école ici et un hôpital là. Ce n'est certes pas la faute de Klein. Mais de qui est-ce la faute? Faut-il blâmer la minorité linguistique?

Si des écoles ferment en Alberta et en Colombie-Britannique, faut-il blâmer la province de Québec, ou la Saskatchewan? Qui faut-il blâmer si ce n'est l'Alberta et la Colombie-Britannique? Non, c'est toujours une affaire de folles dépenses.

Ce que les réformistes voudraient, c'est que notre pays ferme boutique. Quel que soit le sujet à débattre-l'aide aux nécessiteux, l'assistance aux groupes minoritaires, le respect des langues officielles, le respect de notre pays-tout ce qu'ils proposent, c'est que le Canada, c'est que le gouvernement ferme boutique et que chacun rentre chez soi. C'est tout ce qu'ils veulent.

Le vice-président: J'apprécierais grandement que nous évitions d'employer des termes comme ceux que viennent d'employer les deux derniers orateurs. Comme vous le savez, lorsqu'un mot est jugé antiparlementaire, c'est généralement parce qu'il a un effet perturbateur. Le mot utilisé par le député n'a pas semblé perturber les députés réformistes, mais je demanderais quand même aux députés, compte tenu particulièrement de ce qui se passe dans le reste du monde, d'essayer d'éviter les mots trop chargés d'émotion qui ne font rien pour créer le climat de bonne volonté que les Canadiens souhaitent voir régner à la Chambre.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Je voudrais seulement poser une question au député. Je suppose que ce n'est pas évident pour tout le monde, mais nous essayons tous de trouver une meilleure solution pour le Canada. Je me rends compte que c'est un fait qui n'est pas accepté, et je ne sais pas ce que je peux faire pour apaiser certaines des inquiétudes du député.

Je vais donner un exemple qui montre qu'on va simplement trop loin avec la politique du bilinguisme. Il y a, dans ma circonscription, un électricien qui a essayé d'obtenir auprès d'Emploi Canada une liste des principaux entrepreneurs et des sites des principaux projets en Colombie-Britannique. Ce document existe et se trouve au bureau d'Emploi Canada en Colombie-Britannique. C'est un catalogue, un peu comme le catalogue de Simpsons-Sears, dans lequel sont énumérés des centaines et des centaines de sites, d'emplois, et ainsi de suite.

Lorsque l'électricien en question a appris l'existence de ce document, il s'est rendu au bureau d'Emploi Canada et a demandé un exemplaire de ce catalogue pour l'aider à chercher du travail. Il est sans emploi depuis plusieurs mois. On lui a répon-


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du, tout en brandissant le document devant lui, qu'il ne pouvait pas en obtenir d'exemplaire tant que le document ne serait pas offert dans les deux langues officielles.

Donc, au moment même où je parle, cet homme est assis chez lui à attendre que le catalogue soit traduit. Je sais bien que cela finira par se faire un jour, mais il faudra plusieurs semaines. En attendant, cet homme est là à ne rien faire et il me demande pourquoi il ne peut pas avoir ce document étant donné qu'il n'y a pas plus de 40 francophones unilingues dans ma circonscription.

Je sais bien que nous devons offrir des services à ces 40 personnes, mais devons-nous faire attendre les 70 000 autres, dont beaucoup sont à la recherche d'un emploi, qui veulent simplement avoir accès à ce document?

Le bilinguisme est un principe valable, mais il est poussé à l'extrême, au point où cette personne doit rester en chômage pendant qu'elle attend d'avoir accès à ce document.

[Français]

M. Bellemare: Monsieur le Président, je suis certain que c'était un lapsus linguae de la part du député du Parti réformiste, lorsqu'il a parlé du catalogue de Simpson Sears, parce que je suis sûr que l'Alberta est à la page et à jour, et qu'ils ont remarqué qu'aujourd'hui, il n'y a plus que Sears depuis au moins 20 ans.

Pour poursuivre les erreurs commises par le député, il a une petite idée, car il vient de s'apercevoir, en parlant à une personne en Alberta, des difficultés que les Canadiens peuvent avoir lorsqu'ils se rendent dans les bureaux fédéraux. Il nous annonce que la personne n'a pu obtenir un document en anglais, parce que le document en français n'était pas encore publié.

(1640)

Je lui présente mes excuses, mais le gouvernement fédéral a souvent des problèmes; il en a surtout eu au cours des huit dernières années. La politique du gouvernement fédéral, c'est de publier dans les deux langues officielles, afin de pouvoir desservir tout le monde. S'il connaît quelqu'un de sa région qui travaillait pour le fédéral qui disait n'avoir obtenu un document en anglais seulement, cette personne l'avait également en français parce que les deux sont toujours publiés en même temps. sont distribués seulement lorsqu'ils sont imprimés dans les deux langues, afin que les gens qui en font la demande puissent en avoir une copie, soit en anglais, soit en français.

Il a oublié de citer l'exemple d'un francophone qui fait la queue à un centre d'emploi et, lorsqu'il arrive au guichet, après avoir attendu une heure et demie ou deux heures-et ce sont des expériences que j'ai vues ou qui m'ont été rapportées-il se fait dire en anglais: Sorry, I do not speak French, but we do have a bilingual person working here and would you go back to the end of the line-ce qui veut dire qu'il devra encore attendre 45 minutes ou plus, afin que maybe, maybe, that particular agent va être disponible quand son tour arrivera.

Oui, c'est difficile de servir les gens dans les deux langues, mais ici au Canada, ce que nous voulons faire, c'est essayer de créer un endroit où l'ambiance soit telle, qu'on se sente fier d'être Canadien, qu'il soit agréable d'être Canadien. Ce sont des attitudes comme la vôtre qui ont écoeuré beaucoup de Québécois et nous ont envoyé des mécontents comme les députés du Bloc québécois.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, j'avais devant moi deux alternatives: ou bien je ne parlais pas du tout, ou bien j'essayais de parler avec mes tripes. J'ai choisi de parler avec mon coeur.

Ce qu'on a entendu depuis le début de ce débat me donne la preuve, hors de tout doute, que le Québec fait bien. C'est une démonstration évidente. Le Québec a donc bien fait d'entre-prendre sa marche vers la libération et vers la conquête de son pays.

Je sais que M. le député junior, à 35 kilomètres d'ici, va essayer de réagir, mais je vais lui demander, comme j'ai écouté attentivement toute la journée ou presque les débats des autres, j'espère bien qu'on me donnera le même droit et qu'on ne fera pas de commentaire pendant que j'ai la parole. On me posera des questions ou on fera des commentaires après.

Les langues officielles du Canada sont garanties par la Constitution. La Constitution garantit également le droit à l'instruction. Très bien. Mais que se passe-t-il pour nos minorités francophones hors Québec? Elles ont de la difficulté à avoir desécoles. . .

Monsieur le Président, vous serait-il possible d'intervenir pour éviter qu'on fasse des commentaire pendant que j'ai la parole?

Le vice-président: Je pense que si les députés de l'autre côté pouvaient rester silencieux pour quelques minutes, cela permettrait aux autres de pouvoir parler également.

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Je viens de parcourir le Canada d'un océan à l'autre. Je suis allée dans toutes les capitales du Canada, à l'exception de Charlottetown. J'ai rencontré les minorités francophones hors Québec. J'ai entendu des histoires abracadabrantes.

En Colombie-Britannique, on a fait croire à quelqu'un qu'il n'y avait aucun sténographe bilingue au Canada; il y en a 17 au moins à la cour de Montréal. On a demandé à quelqu'un d'accepter que son enquête préliminaire soit tenue en anglais avec la promesse qu'on lui traduirait les textes ensuite. Ensuite, on lui a dit que ça coûtait trop cher pour traduire les textes; 20 000 $, c'est trop cher. Quand le procès est arrivé on lui a dit: «Comme vous avez eu votre enquête préliminaire en anglais, vous êtes capable d'avoir votre procès en anglais.»

(1645)

J'ai reçu à mon bureau une foule d'informations, de coupures de journaux qui veulent me montrer comment la francophonie se porte bien en dehors du Québec. J'en ai seulement ramassé quatre avant de partir de mon bureau ce matin.

En Ontario, pour le recensement scolaire, on n'est malheureusement pas capable de corriger le formulaire. On titre: «Les


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photocopieurs sont incapables d'imprimer recto verso.» C'est la raison que le ministère a donnée aux francophones de l'Ontario.

En 1994, une année charnière pour les Franco-Ontariens, le vérificateur général de cette province reproche au ministère de l'Éducation de ne pas fournir des services de qualité aux francophones, et il mentionne que les services offerts aux francophones sont inférieurs. Notre ami le député de Carleton-Gloucester est cité ici: «Déplorant le manque de juges bilingues, six ans d'attente pour des causes civiles en Ontario, 1 400 procès qui attendent.»

Et la perle, c'est l'article de M. Vastel où on recherche des «égouts, bilingues de préférence». Je m'explique sur cette question. À Kingston, la ville où on veut installer le collège militaire parce que c'est bilingue, au Centre d'emploi de la main-d'oeuvre, on cherche un sewer-qui s'épelle s-e-w-e-r, au cas où je ne le prononcerais pas comme il faut, pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté-ce qui se traduirait en français par «couseur» ou «couseuse», mais on a écrit dans le texte «égout». N'est-ce pas intéressant!

Une autre situation. Tantôt, j'entendais quelqu'un de Saskatoon poser une question au ministre du Patrimoine. Alors, également vu au Centre d'emploi à Saskatoon, on recherche: Cook for menu in family style restaurant, traduit: «Faire cuire de menus dans famille coiffée de restaurant.» Ce sont quelques exemples de perles.

Pour revenir à des propos plus sérieux, bien qu'il faille se détendre un peu, on va parler des primes. Le bilinguisme, je l'admets, coûte cher. On a parlé des primes, par exemple, au bilinguisme. Est-ce qu'on sait que ces primes existent depuis 1888? En 1888, on a instauré des primes au bilinguisme: 50 $ pour tout fonctionnaire francophone qui était capable d'écrire une dictée en anglais ou pour tout fonctionnaire anglophone qui était capable d'écrire une dictée en français. Donc, la prime au bilinguisme a toujours été quelque chose que le Canada a voulu valoriser. En réalité, en dollars constants, 800 $ ne représentent pas grand-chose par rapport aux 50 $ qu'on donnait en 1888, seulement pour écrire une dictée. Là, on leur donne une prime pour qu'ils soient fonctionnels, pour qu'ils soient capables de répondre et de donner du service. Il me semble que 800 $, ce n'est pas beaucoup.

Si on veut couper dans le bilinguisme, à mon avis, ce n'est pas là qu'il faut le faire. Si on veut couper dans le bilinguisme, c'est dans la formation qu'il faudrait le faire. Si, pour avoir un poste, il faut être bilingue, il faut donc être bilingue avant d'être engagé, et non pas devoir inscrire la personne à des cours, puis à des cours, puis à des cours, de façon que ça nous coûte très cher. Sortir un fonctionnaire de son bureau et l'envoyer trois mois en immersion quelque part, au Château Frontenac, peut-être, pendant les vacances de Noël, ou peut-être à Toronto, s'il est francophone.

(1650)

Il m'apparaît invraisemblable, alors que depuis 25 ans que cette loi sur les langues officielles existe, qu'on paie encore des cours aux fonctionnaires unilingues. Si cela est une condition d'emploi, qu'ils soient bilingues au moment où ils obtiennent le poste. Je ne parle pas de donner un cours de rafraîchissement ou un cours de perfectionnement, cela n'est pas très dispendieux, mais donner la formation de base à un fonctionnaire unilingue, c'est trop cher. On économiserait rapidement. Si on prend le coût de la formation, plus l'administration du programme, on économiserait rapidement près de 96 millions de dollars par année. Ce n'est quand même pas insignifiant.

Je voudrais en appeler à l'imagination. Dans un article à paraître et qu'on m'a fait parvenir, le professeur Bouvier appelle ça la prime à l'ignorance versus la prime au bilinguisme. Il faut garder la prime au bilinguisme, qui est celle où un fonctionnaire bilingue donne son service de façon acceptable et reçoit la prime; quant à l'autre, on pourrait couper la prime à l'ignorance.

Dans le rapport qu'on vient de recevoir de M. Goldbloom, un article publié dans le Ottawa Citizen nous disait qu'il fallait voir dans ce rapport deux aspects: un aspect de jugement et un aspect d'avertissement. Un aspect de jugement, pourquoi? On nous rappelle, année après année, dans ce rapport, tout ce qui va bien et tout ce qui ne va pas bien au Canada. Il ne faut pas se faire d'illusions, la situation des francophones hors Québec n'est pas rose.

Quand on regarde ce qui permet à quelqu'un de garder sa langue, c'est de savoir qu'il puisse avoir accès à un service dans sa langue. Je me rappelle quand j'étais jeune et qu'on partait magasiner, on pouvait aller chez Dupuis Frères parce qu'on était sûr d'être servis en français. Si on dépassait la rue Saint-Laurent, c'était bien clair qu'il fallait demander à être servis en français, parce que ce n'était pas automatiquement acquis. On trouvait quelqu'un là qui nous répondait en anglais. Il a fallu qu'on occupe la rue Sainte-Catherine pour que les restaurants traduisent leurs menus en français. Ce sont de petites luttes, jour après jour, qui ont fait en sorte que le Québec a pris sa couleur francophone et française, de plus en plus.

J'écoutais attentivement le député de Nanaïmo, je crois, ce matin, qui faisait le premier exposé du côté du Parti réformiste, nous rappeler date après date les événements importants. Mais j'ai trouvé qu'il avait de drôles de trous de mémoire. Chaque fois que les lois adoptées au Québec favorisaient les anglophones, il les a passées sous silence. Il a seulement parlé des moments où les anglophones ont vécu des difficultés. Par exemple, la loi 101, la loi 178 sur l'affichage. Quand je suis allée au Canada, j'ai vu de l'affichage unilingue anglais partout, sauf dans les aéroports.

J'ai pris ma voiture à Calgary pour aller visiter le musée des dinosaures, les vrais, et je n'ai vu aucun signe sur les routes sauf des choses écrites en anglais, même pas de symboles internationaux. Même chose la semaine dernière à Terre-Neuve. Je n'ai rien vu d'autre que de l'anglais partout. Alors quand on viendra nous raconter qu'il y a eu des procès et des causes qui sont allées jusqu'aux Nations Unies parce que les pauvres petits Canadiens anglais sont maltraités au Québec, on repassera pour nous faire croire ça. Il faut venir au Québec voir comme c'est possible de vivre et en anglais et en français au Québec, c'est le seul endroit


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où c'est possible. Ce n'est pas possible ailleurs de vivre dans les deux langues; la seule place où c'est possible, c'est au Québec.

Je parle en termes de provinces. C'est bien sûr que si vous allez dans le nord de l'Ontario, il y a des villes qui sont 100 p. 100 francophones, je le reconnais, dans le nord de l'Ontario.

(1655)

Il y a des villes au Nouveau-Brunswick où les gens peuvent vivre en français, où ils vont trouver tout autour d'eux de l'anglais. Mais il y a des gens qui habitent dans les Prairies, des gens qui habitent dans l'Ouest canadien, des gens qui habitent dans les Maritimes et si leur nombre ne le justifie pas, ils n'obtiennent rien. On a vu ce qui a paru dans les journaux à Kingston, ils en sont peut-être à 4 999, il en manque encore un, je vais peut-être déménager là pour qu'ils puissent atteindre les 5 000 pour leur permettre d'avoir des services en français.

Ce qui me paraît extrêmement important, c'est qu'on puisse réaliser que le Canada, il ne faut pas se faire d'illusions, c'est un pays anglais. Quand vous êtes à l'étranger, et j'ai vécu 10 mois en portugais, quand je disais e esto Canadense, tout le monde m'adressait la parole en anglais. Il ne venait à l'idée de personne que je puisse être francophone. Quand je parlais français, ils disaient: «Ah, il y a du français là.»

Qu'on se présente dans toutes nos ambassades, sauf à Paris, et partout, d'abord, on nous adresse la parole en anglais. Arrêtons de faire les autruches; le Canada est un pays anglais. Une loi fut adoptée en 1969 par le gouvernement Trudeau, pourquoi? Pour mettre fin à la montée du nationalisme au Québec. C'était cela l'intention de M. Trudeau quand il a fait adopter sa loi en 1969. Il n'y avait pas d'autre intention que celle-là.

La Constitution de 1982, dont l'article 23 devait protéger les droits des minorités francophones hors Québec, entre autres, pour leurs écoles, même des jugements de la Cour suprême n'ont pas suffi à faire mettre cela en pratique. Il a fallu que Mme Landry, la ministre du Patrimoine canadienne, accorde 112 millions aux provinces. Et là, je comprends nos amis du Parti réformiste de trouver que cela coûte cher au fédéral, parce que les provinces ne prennent pas leurs responsabilités. Les provinces ne respectent pas la Constitution et le gouvernement fédéral n'a aucun moyen autrement que de donner 112 millions pour permettre aux provinces de respecter la population, la minorité de leur province.

Il m'apparaît extrêmement important qu'on réalise une autre chose. Il y a beaucoup de symboles qu'on utilise avec beaucoup de fierté dans ce pays, dont l'hymne national que nous avons, que nous partageons en commun pour l'instant, le «ô Canada», chanté pour la première fois le 24 juin 1980 et proclamé officiellement notre hymne national le 1er juillet 1980. Cet hymne national avait été composé par Calixa Lavallée, pour ce qui est de la musique, et on doit les paroles à M. Routhier. Je me rappelle très bien des débats qui ont eu lieu dans cette Chambre et ce serait même très informatif pour les députés de cette Chambre qui n'ont pas eu l'occasion de suivre ces débats-là, mais je me rappelle comment c'était difficile d'arriver à faire la version anglaise. Aujourd'hui, je rencontre des personnes qui sont de souche anglophone et qui sont étonnées de voir qu'on a changé les paroles de leur hymne national. Il faudrait quand même remettre les choses dans leur perspective. Le Canada part du Québec; c'est là qu'il a commencé de toute façon, le Canada, tant le pays, que l'hymne national. Il faudrait quand même rappeler que dans chacune des provinces, la majorité était francophone quand ils se sont intégrés à la communauté du Canada. Et si on avait, depuis le début, respecté les droits des francophones, on ne serait peut-être pas où on en est aujourd'hui.

Il y a aussi une dernière chose que je veux rappeler avant de m'asseoir, c'est que appartenir à un pays, ça coûte un prix. Ici, le Canada a décidé d'être bilingue. Si on trouve que cela coûte trop cher, on peut toujours déménager aux États-Unis. Ça coûte moins cher de vivre aux États-Unis. Mais décider de vivre comme des bilingues, ça coûte un prix qu'il faut payer. Cela m'apparaît extrêmement important et les Québécois sont aussi conscients que si cela coûte cher d'être Canadiens, ça risque peut-être de coûter un peu plus cher d'être Québécois, mais au moins, on aura tous nos outils pour nous développer comme on veut.

(1700)

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je suis personnellement déçue par le discours de la députée. Je suis sûre que les Canadiens doivent être étonnés par la position prise et l'opinion émise par le Bloc québécois sur les langues officielles.

J'aimerais poser une question. L'autre jour, la députée, critique du Patrimoine, a demandé, et je cite:

[Traduction]

«Quand commenceront-elles», entendant par là les provinces, «à traiter les Canadiens français aussi bien que les Canadiens anglais sont traités au Québec.»

[Français]

Son chef a répondu sur le même sujet, et je cite:

[Traduction]

«Le gouvernement du Québec n'en a pas fait assez; même les péquistes n'en ont pas fait assez. Le gouvernement fédéral en a certainement fait plus que le Québec. Je suis prêt à l'admettre», a-t-il dit.

[Français]

Monsieur le Président, pourquoi les députés du Bloc ne parlent-ils pas la même langue?

Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Je pense qu'on parle la même langue, monsieur le Président, mais je ne pensais pas que cela faisait l'objet du débat. Je suis très contente que la secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien me pose cette question, parce que je vais lui retourner ma déception.

S'il y a une chose qui me déçoit, c'est le discours du Parti libéral-mais je ne sais pas si j'ai le droit de dire ça ici-mais du gouvernement, plutôt. C'est pareil. Mais ce qui me déçoit, c'est ce discours, parce que M. le ministre s'est fait poser des questions plantées, deux questions piégées, décidées d'avance: une par la députée de Madawaska-Victoria et l'autre par une autre députée qui a parlé de Saskatoon aujourd'hui, où on vante les mérites du gouvernement qui ne coupe rien.

Les communautés francophones sont en grande difficulté. Le ministre s'était montré très sympathique aux communautés fran-


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cophones, mais les budgets ont été coupés. Des associations ont subi des coupes de 10 p. 100 l'an passé. Elles avaient prévu une coupe de 10 p. 100 cette année et on leur en a ajouté une autre de5 p. 100. Dans certains cas, cela voudra dire la fin de certaines associations, ou la mise à pied de plusieurs membres de leur personnel.

Quand on n'a plus d'association pour défendre nos droits, aussi bien dire qu'on ne leur donne aucune chance de se défendre, aucun outil pour se défendre. C'est là qu'elle est la vraie déception, et on tient un seul discours. La communauté francophone, nous la respectons, nous voulons travailler en partenariat lorsque le Québec sera souverain, et on va tout faire pour essayer de la défendre, tant et aussi longtemps qu'on sera dans le Canada. Mais on ne peut quand même pas aller donner les 5 p. 100 de budget que le gouvernement refuse de leur donner et qui leur sont indispensables. C'est cela la vraie vérité, monsieur le Président.

[Traduction]

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, je partage mon temps de parole avec le député de Saint-Boniface. Malheureusement, en dix minutes, nous n'aurons pas le temps, ni l'un ni l'autre, de répondre à tous les arguments qui ont été soulevés dans ce débat. Il y en a quelques-uns, en particulier, que j'ai trouvés inexacts ou trompeurs.

La motion du député réformiste de Nanaïmo comporte trois éléments. Premièrement, il propose de modifier la Loi sur les langues officielles pour assurer le droit au bilinguisme territorial. En gros, cela signifie qu'il y aurait une seule langue officielle au Québec, le français, et une seule dans le reste du Canada, l'anglais.

Bien qu'ils n'acceptent pas tous cette expression radicale qu'est le bilinguisme territorial, certains députés de son parti l'ont défendue. Le Parti réformiste ne s'est pas montré absolument uni sur cette question. Le député a dit que des services bilingues devraient être offerts dans l'est et le nord de l'Ontario, dans le nord-est du Nouveau-Brunswick et dans l'ouest de Montréal. Il a cité ces régions à titre d'exemples. Lorsque je l'ai questionné, il a dit que ces exemples n'étaient pas coulés dans le bronze, mais que cela nous donnait une idée du genre de bilinguisme territorial qu'il envisageait. Comme je le faisais remarquer dans ma question, cela laisserait sans services les anglophones des cantons de l'Est, les anglophones de Gaspésie et les anglophones de l'Outaouais. Cela laisserait aussi sans services les francophones du Manitoba, qui ont des droits historiques dans cette province, et les Acadiens de Nouvelle-Écosse.

(1705)

Ce dont nous parlons ici, c'est de l'interprétation de l'expression «là où le nombre le justifie». Le député du Parti réformiste l'interpréterait de façon tellement large qu'il serait très difficile pour une communauté minoritaire de se prévaloir des dispositions prévues. Son interprétation laisserait pour compte beaucoup plus de communautés de langue minoritaire que la nôtre.

Nous nous opposons à la première proposition de sa résolution, car nous estimons que le million de francophones à l'extérieur du Québec, en tant que citoyens canadiens, ont des droits qui doivent être protégés par la Loi et la politique sur les langues officielles, de même que ceux des quelque 800 000 anglophones du Québec.

Le deuxième point de sa résolution vise l'usage de l'anglais et du français au Parlement du Canada et dans les institutions qui relèvent de lui, ainsi que dans les tribunaux fédéraux. C'est déjà dans la loi et dans la politique en vigueur. Je ne vois pas ce que cette partie de sa résolution changerait. Je me trompe peut-être. Il n'a pas beaucoup parlé de cette partie.

La troisième partie de sa résolution nous demande d'éviter de dépenser de l'argent sur les aspects de la langue qui tombent sous la compétence des provinces. Il n'a pas commenté cette partie non plus. Si nous devions adopter une telle politique, cela voudrait dire qu'on éliminerait l'aide aux provinces pour l'enseignement dans la langue de la minorité et l'enseignement de la langue seconde, y compris les classes d'immersion. Ce ne serait pas une bonne chose.

L'argent que verse le gouvernement fédéral aux provinces pour l'enseignement de la langue seconde, y compris les classes d'immersion, et pour l'enseignement aux élèves de la minorité linguistique, n'est pas perdu. C'est une mesure qui contribue à l'unité nationale de notre pays, parce que plusieurs provinces ne seraient pas en mesure autrement d'assurer un enseignement adéquat dans la langue de la minorité.

Le député de Nanaïmo nous demande de garder l'esprit ouvert. C'est avec ouverture d'esprit que je participe à ce débat, mais je dois dire qu'après avoir écouté les députés de son parti, je constate que, dans l'ensemble, leur discours est confus et ambigu. Je ne dis pas que c'est le cas pour chacun d'entre eux. Je les ai tous écoutés. J'ai été présent durant tout le débat. Les réformistes ont présenté différentes versions de la situation. Certains d'entre eux proposaient des solutions qui étaient contraires à la résolution du député. Certaines de leurs propositions étaient vraiment rétrogrades. Elles représentaient un pas en arrière dans la protection des droits linguistiques des Canadiens, y compris des droits des minorités linguistiques.

En présentant sa motion, le député a dit que la loi ne fonctionnait pas bien et qu'il fallait donc la changer. Il a dit qu'elle était un facteur de division dans bien des cas, et qu'elle coûtait trop cher. Il a laissé entendre que les commissaires aux langues officielles étaient d'accord sur ce point.

C'est inexact. Il est vrai que, à l'occasion, et les rapports du commissaire aux langues officielles le montreront, les commissaires ont critiqué le gouvernement du Canada pour n'avoir pas respecté les dispositions de la loi ou parce qu'on avait relevé des erreurs dans son application. C'est le rôle du commissaire aux langues officielles de signaler tous les cas où le gouvernement du Canada aurait manqué à son devoir de faire respecter les principes de la loi.


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Que je sache, aucun commissaire n'a jamais critiqué les principes de la loi, ni la politique en général. En fait, tous étaient d'accord pour dire que, sans la loi, la situation serait bien pire au Canada, en ce qui concerne nos minorités linguistiques.

Pour ce qui est de savoir si la loi fonctionne bien ou pas, c'est assez relatif. Le fait est qu'on compte actuellement 162 000 francophones hors Québec inscrits dans 700 écoles primaires de langue française. Il y a 23 000 francophones hors Québec qui sont inscrits dans 45 collèges et universités, et 4 millions de Canadiens, ou 16 p. 100 de la population, qui parlent les deux langues officielles.

(1710)

Selon la deuxième critique du député, le prix est excessif. Encore une fois, je ne connais aucun commissaire aux langues officielles qui ait critiqué l'ensemble de la politique en disant qu'elle coûtait trop cher. Bien sûr, le commissaire actuel s'est interrogé sur le programme de primes et il a recommandé son abolition. Or, il n'a pas dit que la politique coûtait trop cher dans son ensemble.

Les commissaires ont remis en cause des détails de la politique et demandé leur révision, mais ils n'ont recommandé ni l'abolition ni la réduction de toute la politique.

En ce qui concerne les dépenses, il n'en coûte en fait que 20 c. sur chaque tranche de 100 $ des dépenses que le gouvernement consacre aux programmes. Le député réformiste saura que cela n'empêcherait pas la fermeture de nombreux hôpitaux dans sa circonscription. Le coût de la politique linguistique du Canada ne représente qu'un très faible pourcentage de notre budget total.

Enfin, le député soutient que la politique provoque la division. Encore là, je ne connais aucun commissaire aux langues officielles qui ait déclaré que la politique, que les principes de la Loi sur les langues officielles suscitent la division. C'est peut-être exact du fait que certains s'opposent aux principes de cette loi. Ils ont le droit démocratique de le faire, comme nous le constatons aujourd'hui. Toutefois, je doute que la division prenne sa source dans les principes de la loi. Elle provient uniquement de ce que certains ne reconnaissent pas les droits des minorités linguistiques.

Les sondages que j'ai vus-je ne voudrais pas perdre trop de temps là-dessus, mais il y en a plusieurs bien connus-indiquent que 60 à 75 p. 100 des Canadiens appuient la politique des langues officielles.

La Loi sur les langues officielles a pour objet de garantir légalement des droits linguistiques et d'assurer la justice linguistique aux deux collectivités de langue officielle au Canada, à savoir, le million de francophones qui vivent en dehors du Québec et les quelque 800 000 anglophones qui vivent au Québec. Mais la loi vise aussi à protéger les intérêts des six millions de francophones du Canada, y compris ceux qui vivent au Québec, parce qu'ils constituent une minorité au sein du Canada.

Cette loi repose avant tout sur le principe de la tolérance, de la compréhension et de la générosité. Je me réjouis que le gouvernement rétablisse le programme de contestations judiciaires parce qu'il est inutile d'inscrire des droits dans les lois si on ne peut s'adresser aux tribunaux pour les faire respecter.

La Loi sur les langues officielles n'oblige personne à devenir bilingue, mais j'ai entendu des députés réformistes déclarer à nouveau ici que le français leur était imposé de force. Aucune langue n'est imposée de force aux utilisateurs de services gouvernementaux. Il est vrai que pour fournir des services bilingues, il faut des gens qui parlent français et d'autres qui parlent anglais. En général, ce bilinguisme fait partie intégrante de nos institutions.

En passant, 70 p. 100 de tous les postes de l'administration fédérale sont unilingues, anglais ou français. Seulement 30 p. 100 des postes sont bilingues.

Je croyais avoir jusqu'à 17 h 15. J'avais écrit cette heure. Combien de temps me reste-t-il?

Le vice-président: Vous n'avez plus de temps.

M. Allmand: Je n'ai plus de temps sur un sujet aussi important?

Malheureusement, nous n'avons pas le temps de discuter de cette question importante comme elle le mériterait. J'avais encore beaucoup d'arguments à présenter. Je devrai y revenir un autre jour.

S'il vous plaît, inscrivez la motion à l'ordre du jour d'une autre séance pour que nous puissions tous en discuter à nouveau.

M. Darrel Stinson (Okanagan-Shuswap): Monsieur le Président, j'ai entendu le député prétendre que le Parti réformiste soutenait qu'on faisait avaler ce programme de force aux gens. Non, on l'impose plutôt comme un fardeau aux contribuables, au détriment des hôpitaux du pays. Il faut établir des priorités. Voilà tout ce que nous soutenons, de ce côté-ci de la Chambre.

Comment puis-je dire à mes électeurs qu'ils doivent attendre des mois avant de se faire hospitaliser et de subir des opérations, alors que l'argent des contribuables continue de financer le bilinguisme officiel? Ils ne le comprennent pas. Ce n'est pas une priorité là-bas. Il faut que la demande le justifie.

(1715)

M. Allmand: Monsieur le Président, les soins de santé sont bien sûr importants. Je ne dispose pas ici aujourd'hui des chiffres pour dire combien on dépense, aussi bien au palier fédéral qu'au palier provincial, pour les soins de santé, mais ce n'est probablement pas assez. Dire cependant qu'on peut sauver des hôpitaux de la fermeture avec le peu d'argent qu'on dépense pour notre programme de bilinguisme au palier fédéral, c'est induire les Canadiens en erreur et faire le jeu des fanatiques.


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Je ne dis pas que le député en est un lui-même, mais prétendre qu'on peut sauver le système de santé avec le budget dont nous disposons pour le programme des langues officielles, c'est déformer la réalité.

Je vais citer des exemples, et on pourrait les observer tout aussi bien au Canada anglais. Je connais une vieille personne anglophone, qui m'est proche, qui est allée se faire soigner à l'hôpital-en l'occurrence au Québec, mais ça pourrait arriver à un francophone à l'extérieur du Québec-et qui ne pouvait pas communiquer avec les infirmières ou avec les médecins dans cet hôpital parce que personne ne pouvait y parler anglais. Je sais qu'il existe de nombreux exemples analogues où des francophones vont à l'hôpital et ne peuvent recevoir de services en français; quand on essaie de décrire ses maux, ce n'est pas facile, même avec un médecin ou une infirmière qui parle sa propre langue.

Par conséquent, prétendre qu'il faut choisir l'un ou l'autre, les soins de santé ou les services dans les deux langues officielles, c'est induire les Canadiens en erreur. Les deux sont nécessaires au nom de la justice et de la politique sociale. On ne sauvera jamais un hôpital ou un programme important de soins de santé au Canada avec le tout petit budget que nous allouons au programme des langues officielles.

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, je veux simplement revenir sur quelques remarques qu'a faites le député. Une partie du problème, c'est le coût des langues officielles. En effet, nous ne savons pas à combien il s'élève.

On nous dit qu'il est de 601 millions de dollars par année ou qu'il représente 3 c. pour chaque tranche de 100 dollars. En fait, j'ai reçu du ministère de la Défense nationale de la correspondance qui dit ceci: «Voici notre évaluation des coûts, mais nous ne pouvons pas tout dévoiler en raison des règles et règlements du Conseil du Trésor.»

Nous avons l'impression qu'une bonne partie des coûts des langues officielles sont dissimulés d'une façon ou d'une autre. Nous aimerions vraiment les découvrir, et c'est peut-être une démarche que nous pouvons suivre au sein du comité mixte permanent.

L'autre remarque que je veux faire concerne la question dans son ensemble. Qu'essayons-nous de faire en examinant la Loi sur les langues officielles? Le député a parlé du caractère territorial; il s'est servi de l'exemple que j'ai donné et a dit qu'il n'allait pas assez loin. J'en conviens. Considérons que Saint-Boniface, Gravelbourg et Maillardville, tout près de New Westminster, sont des endroits où la demande le justifie. Nous devrions toutefois examiner la question, au lieu de rejeter d'emblée cette possibilité et de dire que la loi est excellente, que la plupart des gens l'appuient et qu'il est donc inutile de l'examiner.

Procédons par étape et examinons les conséquences d'une politique qui s'applique à l'ensemble d'entre nous.

M. Allmand: Monsieur le Président, sur le premier point, c'est-à-dire les coûts véritables, je suis d'accord avec lui. Si les chiffres que le gouvernement présente ne correspondent pas à la vérité, qu'on nous donne les coûts complets, car je ne pense pas que ce soit utile au débat que d'avoir diverses versions de ces données.

J'ignore si ces chiffres correspondent aux coûts réels, mais nous pourrons, au comité, arracher la vérité aux fonctionnaires. Je crois que nous devons connaître tous les coûts et alors nous pourrons nous faire une idée. Je suis cependant persuadé que, comparés à ceux d'autres programmes, ils représentent un pourcentage très faible, auprès des soins de santé, des services sociaux et ainsi de suite.

Le deuxième point concerne la définition exacte de la demande de services. Je siégeais au comité en 1968-1969, lors de l'étude de la première version de la loi. Nous y avons consacré presque toute une année. Je siégeais aussi au comité en 1988, lors de l'étude de la deuxième version. Nous avons étudié en long et en large les points que le député vient de soulever. À quel point la définition applicable aux groupes de langue minoritaire doit-elle être large ou au contraire restrictive? Faut-il desservir Gravelbourg, oui ou non? Faut-il tenir compte seulement de grandes régions comme l'est et le nord de l'Ontario et laisser de côté par exemple la collectivité acadienne de la Nouvelle-Écosse? Nous avons étudié tout cela pendant des mois en 1988.

(1720)

Le député et moi sommes tous deux membres du Comité des langues officielles et nous pourrons en discuter encore. Mais cela ne concerne pas l'essentiel de la loi, ses principes. Nous essayons de voir avec quel laxisme ou quelle rigueur il faut définir les populations qui recevraient le service: à quel endroit, pour des groupes de quelle importance? Nous aurons l'occasion d'en parler.

Mais cela devient aussi une question de justice. Prenons les cantons de l'Est. Aujourd'hui, on y trouve une majorité de francophones, mais les premiers Européens qui se sont établis dans cette région du Québec sont des anglophones qui ont fui les États-Unis pour venir dans des localités comme Cowansville, Knowlton et Frelighsburg. J'ai vécu là-bas, j'ai vécu à Sherbrooke. Les anglophones ont construit dans cette région une université, des collèges-Stanstead, Bishop's, Compton Hall, etc.-mais la région est maintenant surtout francophone. Faut-il abandonner ces gens, avec les droits que leur donne cette longue histoire? La question est très importante.

Nous avons étudié le problème, et nous le ferons encore.

[Français]

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, en tant que député francophone de l'Ouest canadien, c'est un plaisir et un honneur pour moi de m'exprimer sur cette proposition.


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Notre politique, c'est-à-dire la politique en vigueur en ce moment, en est une d'un Canada dans lequel les Canadiens et les Canadiennes d'expression française et d'expression anglaise peuvent se sentir chez eux, où qu'ils choisissent de vivre.

J'avais l'intention de parler exclusivement de la gérance de l'éducation française.

[Traduction]

Après avoir entendu certains propos, je ne puis m'empêcher de parler non seulement de l'aide du gouvernement aux écoles françaises et à l'enseignement postsecondaire en français, mais aussi de la proposition dont nous sommes saisis aujourd'hui.

Nombre de gens savent que la clé de la croissance des minorités linguistiques est une éducation de qualité. Le gouvernement a contribué à la gestion des écoles de langue des minorités. Ce droit est reconnu par la Charte. La gestion de ces écoles, sa réalisation, a exigé beaucoup d'efforts. La tâche n'est pas encore terminée, mais le gouvernement est prêt à accorder son aide.

Le point que je veux souligner, c'est que le développement des minorités linguistiques exige une éducation de qualité. On ne peut avoir la meilleure éducation possible si ce ne sont pas les gens eux-mêmes qui la gèrent, telle est la question fondamentale qu'il nous faut comprendre.

Il nous faut également comprendre que sans l'aide du gouvernement fédéral, cela n'aurait jamais pu être possible.

Il suffit d'examiner les réalisations provinciales en cette matière au fil des ans, pour se convaincre que les provinces, quel que soit le parti politique au pouvoir, n'ont pas été très généreuses. Bien au contraire, elles en ont fait le moins possible en dépit des nombreux jugements les enjoignant à en faire davantage. C'est pour ça que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer. Il a une importante responsabilité à remplir envers la population canadienne.

Les écoles d'immersion existeraient-elles aujourd'hui sans l'intervention du gouvernement fédéral? Qui gérerait les écoles? Y aurait-il des possibilités d'éducation postsecondaire en français si le gouvernement fédéral ne contribuait pas à leur financement?

Sans l'aide du gouvernement fédéral, nous aurions réalisé bien peu de choses.

[Français]

Je veux citer une partie d'un document que j'ai vu récemment, qui me paraît très utile, parce que je crois qu'il exprime ce que je viens de mentionner, et je cite: «L'aide du gouvernement fédéral a permis l'établissement et l'expansion de centres d'excellence pour les communautés francophones hors Québec. Par exemple, le Collège universitaire de Saint-Boniface, au Manitoba, est devenu le fleuron de l'enseignement supérieur en français dans l'ouest du pays. L'Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick, accueille, quant à elle, des dizaines de stagiaires de plusieurs pays francophones chaque année au Centre international de common law, en français. Son rayonnement a aujourd'hui largement dépassé les frontières canadiennes.»

(1725)

[Traduction]

Nous sommes plus riches, grâce à la présence de ces institutions, à une époque où les frontières entre les pays ne sont plus aussi importantes qu'elles ne l'ont été, à une époque où il est question de mondialisation des échanges, à une époque où, avec les autres pays, on ne parle plus seulement de développement économique, mais également de bien d'autres formes de développement.

Pour ma part, j'estime que nos communautés minoritaires, à vrai dire toutes les communautés linguistiques, sont un énorme atout pour notre pays.

Je voudrais toucher un mot de la proposition en soi. Plutôt que de m'attarder sur certains arguments invoqués, je me bornerai au bilinguisme territorial. Je crains le territorialisme. Le territorialisme est à l'oeuvre dans l'ancienne Yougoslavie. Cela me fait peur.

On dresse une tente pour l'un par-ci et une autre tente pour l'autre par-là. On installe les tribus dans leur camp respectif et, de temps à autre, celles-ci décident de ne plus se parler.

Le bilinguisme territorial, cela ne signifie-t-il pas le français au Québec et l'anglais dans le reste du Canada? N'est-ce pas une belle façon de maquiller la chose? N'est-ce pas reconnaître le fait que si cela se produisait, ces petites communautés vulnérables, très souvent très peu nombreuses, finiraient pas disparaître?

Une demande démontrable de la part de la population locale, qu'est-ce à dire? De quel pourcentage s'agit-il? Qui doit faire cette demande?

À Saint-Lazare, au Manitoba, il y a une école de langue française qui se trouve à plusieurs centaines de kilomètres de Winnipeg. Y a-t-il là une demande démontrable de la part de la population locale? En quoi consiste cette demande démontrable?

On parle des coûts. Ce qui m'indigne le plus dans cette affaire, c'est qu'on doute que les coûts ne soient de beaucoup supérieurs aux 601 millions de dollars mentionnés. Au lieu d'attendre d'avoir la preuve, les réformistes misent sur les préjugés des gens qui pensent ainsi. Au lieu d'attendre les conclusions du comité, ils disent que cela n'est pas assez.

C'est la raison pour laquelle je déplore cette proposition. Elle est insidieuse, malicieuse et intellectuellement malhonnête. Elle mise sur les préjugés des gens.

Elle dit à la population: «Que voulez-vous? Nous sommes prêts à vous le donner, car nous voulons garder votre appui. Nous tenons à garder votre appui.»

Pourquoi redonner les langues aux provinces? Je vais vous dire pourquoi: parce que les réformistes connaissent le bilan de la plupart d'entre elles. Ils savent que les provinces n'ont pas été généreuses. Ils savent qu'avec le temps, elles réduiraient ces


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droits linguistiques; c'est là où il y a malhonnêteté intellectuelle. Ils le savent et ils tentent d'avancer cette position sans l'avouer.

Laisser entendre, comme on l'a fait auparavant, que le budget consacré aux langues officielles permettrait de garder les hôpitaux ouverts, c'est le comble de l'irresponsabilité. J'ai dit irresponsabilité, mais on pourrait utiliser d'autres termes.

Comme je l'ai déjà dit, on retourne à l'ancien tribalisme. Nous avons notre tribu, vous pouvez avoir la vôtre. Et vous savez que, dans chacune de ces tribus, nous l'avons vu, certains membres ont plus d'importance que d'autres.

Nous avons eu et avons encore un débat sur les langues officielles. Quelle sera la prochaine cible? Le multiculturalisme? L'autonomie gouvernementale des autochtones? De toute évidence, il y a des gens qui ont des préoccupations, je les partage avec eux, et je suis tout disposé à en parler, mais soyons honnêtes.

Je ne nie pas, je n'ai jamais nié, j'ai même écrit professionnellement à ce sujet: la Loi sur les langues officielles coûte de l'argent. Je l'ai dit. J'en ai exposé les coûts et je continuerai de le dire. Mais il faut situer les choses dans leur contexte. Il faut cesser de faire croire qu'elle est le remède miracle au déficit, à la dette et au maintien des hôpitaux. J'en ai assez d'entendre des stupidités de ce genre et je pense que beaucoup d'autres gens sont de mon avis.

Si le Parti réformiste du Canada s'intéresse réellement aux langues officielles, pourquoi ne regarde-t-il pas nos acquis et n'essaie-t-il pas de les préserver, au lieu de les détruire? Ils sont parmi les premiers à reprocher au Bloc de vouloir se séparer et détruire un pays. J'ai demandé aux bloquistes pourquoi ils ne nous aidaient pas à bâtir un pays meilleur, pourquoi ils ne restaient pas avec nous et ne nous aidaient pas à bâtir un pays meilleur. J'ai demandé aux réformistes pourquoi, au lieu de dénoncer les langues officielles, au lieu de perpétuer des mythes et de faire peur aux gens, ils ne faisaient pas preuve d'honnêteté intellectuelle?

(1730)

Pourquoi ne pas dire que si le gouvernement fédéral renonce à sa politique de langues officielles, ces petites communautés vont disparaître? Ces petites communautés sont fragiles. Avez-vous jamais vécu dans l'une d'elles? Savez-vous combien les gens ont du mal à préserver leur langue? Savez-vous combien de temps ils ont dû lutter pour la conserver? Savez-vous le prix qu'ils ont dû payer? J'en doute, car si vous le saviez. . .

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député sait très bien qu'il doit adresser ses remarques à la présidence. Si nous ne voulons pas que les députés emploient le «vous» dans cette assemblée, c'est pour éviter que les esprits ne s'échauffent. Le député veut-il bien s'adresser à la présidence?

M. Duhamel: Monsieur le Président, si les députés qui ont présenté cette motion avaient vécu le sort des minorités linguistiques, s'ils avaient connu ce qu'elles ont connu, ils n'auraient pas proposé cette motion.

Je le leur dis et leur demande, par votre intermédiaire, de mettre de côté leurs préjugés et d'examiner les moyens d'améliorer les choses. C'est bien sûr que l'on peut les améliorer. Il n'y a pas un programme gouvernemental qui ne puisse être amélioré. C'est bien sûr que l'on peut épargner de l'argent. Il n'y a pas un programme gouvernemental qui ne puisse être amélioré pour que l'on puisse faire une utilisation plus efficace des fonds.

C'est là-dessus que devrait se concentrer le débat. La question que nous devrions nous poser, c'est quel genre de Canada voulons-nous? Quelle sorte d'investissements sommes-nous prêts à faire dans nos minorités linguistiques et comment allons-nous nous assurer que les investissements que nous faisons sont suffisants non seulement pour les soutenir, mais aussi pour les aider à se développer?

[Français]

Monsieur le Président, je veux terminer avec un dernier commentaire. Comme mon collègue qui m'a précédé, j'aurais aimé avoir un peu plus de temps. Je demande simplement à mes collègues d'essayer de bâtir plutôt que de détruire.

[Traduction]

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan): Monsieur le Président, pour ce qui est de savoir si certains d'entre nous ont déjà fait partie de minorités, j'ai moi-même grandi à Vancouver. J'étais l'un de ces étrangers dont on disait: «Ses parents sont des étrangers. Qu'est-ce que ce nom de Ringma? Il a une consonance étrangère à mes oreilles.» J'ai peut-être appartenu à une minorité plus que quiconque à la Chambre.

Le dernier orateur parlait de malhonnêteté intellectuelle. Je peux dire qu'il y a eu un manque d'honnêteté intellectuelle de ce côté-là, alors qu'on nous a reproché de vouloir détruire la Loi sur les langues officielles au lieu de l'améliorer. C'est justement ce que nous tentons de faire. Nous proposons de modifier la Loi sur les langues officielles et non pas de l'abroger. Nous proposons de modifier la loi et d'en renforcer les éléments positifs.

On parle de malhonnêteté intellectuelle dans le débat actuel sur le bilinguisme. Qu'est-ce que ce sera la prochaine fois? Le multiculturalisme, les droits des autochtones? Les députés n'ont-ils pas le droit, l'obligation de parler de ces questions sans qu'on veuille les empêcher de le faire par des réactions émotives? Cette attitude est insensée. C'est justement là le rôle du Parlement. J'entends défendre mon droit de parler sur tous ces sujets. C'est mon devoir de le faire, quelque douloureux que ce puisse être.

Enfin, on met l'accent sur les mots «où cela est justifié par la demande publique locale» que renferme la motion. Je reconnais que ces dispositions ne sont pas faciles. Elles sont l'équivalent des mots «là où le nombre le justifie» que contient la loi actuelle. Nous devrions nous pencher ensemble sur cette question et préciser s'il doit y avoir 5 000 personnes, 10 p. 100 ou 2 p. 100 de la population et dans quelles circonstances. Soyons clairs, ne nous contentons pas de passer ces questions sous silence.


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(1735)

M. Duhamel: Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à m'assurer que le député qui vient de prendre la parole ne présente pas mes propos sous un jour trompeur. Je n'ai jamais dit que nous ne devions pas parler de ces questions, mais que nous devions en parler avec honnêteté intellectuelle. Je m'oppose tout à fait à ceux qui font valoir les coûts ou affirment que des hôpitaux ferment et que des personnes souffrent à cause de cela. Voilà ce que j'appelle de la malhonnêteté intellectuelle.

C'est celle qui invoque le bilinguisme territorial, le critère de la demande publique, et quoi encore. Je constate des différences importantes entre ce que dit le porte-parole et le discours que tiennent certains députés de son parti. Ils doivent décider s'ils disent la même chose et comment ils en parlent. J'ai constaté des différences importantes dans les discours que j'ai entendus aujourd'hui et je vais tenter de tirer ces choses au clair pour le cas où on m'accuserait d'avoir exagéré.

Enfin, selon le député j'aurais dit que nous ne devions pas parler de ces choses. Je n'ai évidemment pas dit cela. J'ai déclaré que nous devons améliorer les choses. Les mesures qui sont proposées aujourd'hui visent à détruire et non pas à améliorer les choses, parce que les provinces ne protègent pas les droits linguistiques des minorités. Si on examine la feuille de route des provinces, on se rend compte qu'elles n'ont pas protégé ces droits jusqu'à maintenant et c'est ce qui se passerait encore.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, c'est un sujet qui me tient à coeur. Les droits des francophones hors Québec sont intimement touchés par la Loi sur les langues officielles et cette loi-

[Traduction]

Le bilinguisme officiel au Canada est un échec complet. C'est un échec complet, cela ne fait aucun doute. Le Parti réformiste parle des coûts en dollars et en cents, mais ne dit pas un mot des coûts de l'échec du bilinguisme officiel au Canada sur le plan humain.

Certains députés parlent des droits fondamentaux, surtout les anglophones du Québec. S'il y a, au Canada, une communauté qui n'a jamais vu ses droits respectés, ce sont bien les francophones qui vivent à l'extérieur du Québec. Leurs droits ont été bafoués, malgré les garanties données dans la Constitution. Ces droits ont été abolis illégalement par toutes les provinces du Canada, sans exception, dès le début, après la Confédération. Seul le Québec a respecté les droits de la minorité de langue anglaise. Toutes les autres provinces du Canada ont aboli les droits des francophones chez elles.

[Français]

Le vice-président: Il faudrait répondre brièvement à la question, car le temps est déjà écoulé.

Le secrétaire parlementaire a la parole.

M. Duhamel: Monsieur le Président, je comprends très bien qu'il est vrai qu'il y a eu une perte énorme pour le Canada, le pays en entier, parce les communautés minoritaires des francophones hors Québec ont été négligées pendant des années. Il a fallu, à cause de ces négligences, faire des efforts supplémentaires pour essayer de les aider à rebâtir leur infrastructure.

Je comprends aussi qu'il ne sert pas à grand-chose de faire des comparaisons parce qu'on est tous pris avec nos préjugés, c'est-à-dire je préfère ma solution, vous préférez la vôtre, etc. Toutefois, lorsqu'on parle d'un sujet aussi délicat que celui-ci, j'aimerais qu'on regarde surtout la population et ce qu'on peut faire pour essayer de les aider à garder ce qu'ils ont eu lorsqu'ils sont nés, que ce soit la langue française, la langue anglaise ou les autres langues. Pour moi, comme Canadien, qui sent très fortement ses racines, je veux absolument que non seulement les francophones ou les anglophones, mais que tout Canadien et toute Canadienne puissent réussir à garder sa langue et sa culture et puissent en même temps travailler avec les autres, s'intégrer aux autres.

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je m'empresse d'entamer mon discours sans faire la moindre observation sur ce qui a été dit.

(1740)

Dans le rapport qu'il a présenté au premier ministre anglais, il y a un siècle, Lord Durham a déclaré que la marque du Canada était profonde et résistante. Il a décrit le Canada anglais et le Canada français comme étant deux nations en guerre au sein d'un même État. La regrettable réalité que nous ne pouvons nier, c'est qu'il y a toujours eu divers degrés de tension entre les deux groupes.

En raison de leur nombre, les anglophones se sont longtemps accaparé la part du lion en ce qui concerne le pouvoir politique au Canada. Par exemple, la fonction publique comptait très peu de francophones par rapport à leur nombre dans la population totale. Les services fédéraux n'étaient pratiquement pas offerts en français, ce qui était clairement injuste. À Ottawa, capitale nationale située à une heure et demie de distance de un million de francophones, bien des services n'étaient pas offerts dans les deux langues officielles.

Pendant près d'un siècle, il y a eu peu de réaction, mais le Québec a subi une transformation fondamentale après la Deuxième Guerre mondiale. Après avoir servi le pays avec noblesse, comme le géant qui dort, le Québec s'est éveillé et il a défini sa place en tant que partenaire privilégié au sein de la Confédération et les membres de son élite intellectuelle ont commencé à réclamer avec empressement des correctifs, lors de la révolution tranquille.

La tradition canadienne, c'est celle du compromis. Certains considèrent parfois à raison que c'est un signe de faiblesse, mais le compromis est généralement la voie de la paix et de la réconciliation. Le Rwanda est un pays qui ne consent aucun compromis. Nous espérons que la démocratisation de l'Afrique du Sud sera l'exemple d'un noble compromis.

Le gouvernement libéral a compris que le compromis était nécessaire pour que le Québec reste dans la Confédération et, sous la direction du premier ministre Pearson, le gouvernement


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fédéral a commencé à redresser la situation en partie en offrant des services en français et en recrutant plus de francophones.

Il a aussi adopté une loi du Parlement en 1969. La Loi sur les langues officielles avait pour but d'étouffer les velléités d'indépendance du Québec. Son architecte, Pierre Trudeau, a cherché à satisfaire les intellectuels du Québec en obtenant que les services fédéraux soient offerts dans les deux langues officielles d'un bout à l'autre du Canada. Le fait que des fonctionnaires fédéraux ne veuillent pas devenir bilingues ne plaisait pas à M. Trudeau. Le fait que la demande n'existe pas dans certaines régions ne l'intéressait pas. On n'a pas évalué le coût de cette aventure.

Vingt-cinq ans plus tard, que découvre-t-on? La loi a-t-elle atteint son but? Le Québec est-il satisfait? Maintenant qu'on dépense plus de 600 millions de dollars par année, le Québec est-il plus à l'aise dans la Confédération? Je ne le crois pas. Le Québec est plus près que jamais de la séparation et le Bloc québécois parle de la loi comme d'un échec.

Le 12 avril, le commissaire aux langues officielles a déposé un rapport qui décrit en détail non pas le bilinguisme des fonctionnaires fédéraux de tout le pays, ni la prestation des services dans les deux langues officielles, pas plus que la rentabilité de la politique. Non. Le commissaire décline toute une litanie de tribulations linguistiques dans tout le pays.

Beaucoup de bureaux désignés bilingues peuvent à peine livrer les services. Des bureaux où la demande est à peu près nulle se font houspiller par la police linguistique du commissaire parce qu'ils n'affichent pas leurs services dans les deux langues. Imaginez donc! Un centre d'emploi du Canada à Saskatoon s'est fait reprocher par le commissaire d'annoncer un emploi dans un français moins que parfait. Et cela après une seule plainte. Et à Saskatoon encore. Le commissaire a imposé la lettre de la loi à un bureau récalcitrant.

Permettez-moi de vous parler d'un petit bureau de poste situé à Sardis, en Colombie-Britannique, dans ma circonscription. Conformément à la Loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral doit offrir ses services dans les deux langues officielles partout où il y a une «demande importante». La loi ne contient pas de définition de l'expression «demande importante», mais elle définit un district bilingue comme étant une région où 10 p. 100 de la population parle la langue de la minorité.

En appliquant ce critère à ma région, il faudrait au moins 8 000 personnes de langue maternelle française pour que les services en français soient obligatoires. Après le dernier recensement, le gouvernement a déclaré qu'il y avait un nombre important de francophones ayant besoin de services bilingues dans le petit bureau de poste de Sardis.

Que signifie «demande importante» pour le gouvernement? Un virgule sept pour cent de la population se dit de langue maternelle française. Un virgule sept pour cent. Beaucoup moins que cela parle cette langue, c'est-à-dire leur langue maternelle. Comme si cela ne suffisait pas, jamais une seule demande de service en français n'a été présentée au bureau de poste. Pourtant, le service doit y être bilingue. Ce n'est là qu'un exemple d'une politique idiote qui commence à coûter excessivement cher si on additionne tous les cas du genre partout au Canada.

Pas étonnant que le bilinguisme coûte 660 millions de dollars par année-c'est le chiffre officiel. Ajoutez à cela l'inefficacité de l'administration, l'appareil d'exécution de la loi et les possibilités perdues et vous arrivez à un total bien supérieur à ce chiffre officiel.

(1745)

Selon une étude exhaustive faite par Scott Reid, «il semble raisonnable d'estimer ces frais généraux à environ 5 p. 100 de l'ensemble des coûts de dotation dans la fonction publique, soit 951 millions de dollars par année.»

Donald Savoie, universitaire canadien bien connu, estime cette proportion à 20 p. 100.

Ces coûts incroyables sont-ils vraiment nécessaires pour préserver l'unité canadienne? Les anglophones et les francophones ne sont-ils liés que par cette politique lourde et frustrante, par cette inefficacité et ce gaspillage? Pourquoi garder la politique du bilinguisme lorsque, après avoir essayé et dépensé pendant 25 ans, les gens n'en veulent plus?

S'il est vrai que la perte de la Loi sur les langues officielles pousserait le Québec à se séparer, c'est que cette loi doit être l'un des principaux piliers sur lesquels repose notre pays. Pourtant, nous avons survécu pendant un siècle sans cette loi. Le bilinguisme est-il vraiment essentiel à l'unité canadienne? Je ne le crois pas.

Le Canada va bien au-delà de cela. Le Canada possède les seuls éléments assez forts pour assurer l'unité de la nation. Ce ne sont pas les entraves de la Loi sur les langues officielles qui nous unissent, mais bien l'histoire, la diversité, les sacrifices, les éléments de culture, les valeurs et les espoirs que nous partageons, ces liens que nous avons dû resserrer au besoin en faisant preuve de générosité et de bonne volonté.

Toutes ces petites querelles au sujet de la langue ne peuvent pas rompre les liens fondamentaux qui unissent les Canadiens. Et, comme la tempête sur l'océan, les eaux profondes restent calmes sous les flots tumultueux.

Je suis désolé que le Bloc québécois, ainsi que d'autres intellectuels, aient créé une telle tempête au Québec. Même si les problèmes d'iniquité sont en grande partie réglés, les médias et les politiciens continuent de répéter depuis 20 ans que de grandes injustices persistent toujours. Ils ont claironné cette idée et fait de fausses promesses pour convaincre les gens de les suivre dans leur folie.

Et quel sera le résultat de leurs actions? Les Canadiens de tous les groupes en souffriront, et en particulier les Québécois.

Je m'interroge sur l'attitude des bloquistes qui, d'une part, se prononcent en faveur de l'unilinguisme au Québec et, d'autre part, affirment que, même si le Québec se sépare, le gouvernement fédéral devrait imposer le bilinguisme au Canada anglais. Cela ne témoigne pas de l'esprit de tolérance et de la générosité qui ont contribué à faire du Canada l'un des endroits où il est le


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plus agréable de vivre dans le monde. C'est là le genre d'ambition politique qui engendre la méfiance et la colère.

Au début de son rapport, le commissaire aux langues officielles a exprimé un grand principe lorsqu'il cite Montesquieu: «Une chose n'est pas juste parce qu'elle est loi, mais elle doit être loi parce qu'elle est juste.»

Le commissaire a dit que, dans sa forme, la loi doit être le reflet de la justice quant au fond. La loi reflète simplement une réalité sous-jacente. Je souscris entièrement à cette idée. Comme le prévoit notre motion, là où la demande est importante, il est tout à fait légitime que des services bilingues soient le reflet de cette demande. Mais la Loi sur les langues officielles essaie de modifier la réalité canadienne, de façonner un Canada différent, de créer une nouvelle réalité en imposant, d'un océan à l'autre, le bilinguisme à une population qui souvent n'en veut pas. C'est coûteux, abusif et inutile.

Le Parti réformiste ne s'oppose pas au bilinguisme. Tous les Canadiens gagneraient à apprendre une autre langue s'ils en ont envie. Les réformistes ne sont ni hostiles ni insensibles aux droits des minorités, mais ce n'est pas la Loi sur les langues officielles qui nous y rend favorables ou sensibles. À l'instar des autres réformistes, je souhaite que la loi reflète la réalité sous-jacente. À cette fin, il faut donner aux provinces les pouvoirs en matière de langue et utiliser ceux du gouvernement fédéral pour protéger toutes les minorités contre les injustices linguistiques.

Nous vivons dans un Canada en évolution. Actuellement, des millions de néo-Canadiens ne sont d'origine ni française, ni anglaise. Eux aussi méritent d'être pris en compte dans l'équation linguistique canadienne.

Le Parti réformiste du Canada veut en arriver à un nouveau compromis national; il veut tendre la main aux Canadiens français pour renforcer et rebâtir notre beau pays, non pas sur les bases artificielles et instables que sont la langue ou le caractère ethnique, mais sur des assises plus sûres, celles du respect mutuel, de la compréhension et de l'égalité de toutes les races, cultures et langues, sur le désir de paix et de prospérité plutôt que sur le pouvoir, la colère ou l'agitation.

C'est cette nouvelle vision du Canada que nous préconisons aujourd'hui. J'invite donc tous les députés à se joindre à nous dans cette grande aventure.

(1750)

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, j'ai enduré les débats tout l'après-midi, mais là, je sais que mon temps sera bref, mais je vais parler. Je vais essayer de parler calmement.

La Loi sur le bilinguisme officiel a été une tentative tardive de réparer des torts historiques graves et pour répondre tout de suite à la question, monsieur le Président, pour ne pas l'oublier, comme le disait un jeune Franco-Ontarien: «Ce que vous appelez unilinguisme français au Québec, on aimerait bien que ce soit le bilinguisme de l'Ontario.»

Venez voir la réalité des droits. Venez voir la réalité des droits dans les écoles, dans les services sociaux, dans les hôpitaux des anglophones et les débats du Parti québécois pour préserver ces droits. J'aimerais qu'au Canada, on fasse les mêmes débats pour préserver les droits quand le Québec sera parti. Je vais vous dire une chose, un débat comme celui-ci, aujourd'hui, cela ne va pas donner le goût à personne du Québec de rester dans ce pays-ci.

Il y a une dimension historique qui manque. Peut-être que je dois m'excuser que mes ancêtres soient arrivés vers 1647. Je dois m'en excuser, ils s'appelaient Tremblay et d'autres sont venus après. Je dois m'excuser qu'on ait bâti, à l'époque. Il s'agissait de Canadiens, les vrais, les premiers Canadiens, les «Canayens».

Ils ont, vous le savez, été partout sur le continent, comme ils ont exploré l'Ouest aussi, mais on n'a pas le temps de faire de l'histoire. Après la conquête, les «Canayens» ont été ramenés, arrêtés, pour une large part, sur les territoires du Québec, mais ils ont quand même, au fil des ans, continué à vouloir aller partout au Canada.

Je voudrais seulement citer un fait. En 1928, Le Devoir titrait que les Montréalais étaient inquiets, parce que les francophones, au lieu d'aller s'établir dans l'Ouest où il y avait des bonnes terres, s'en allaient aux États-Unis. C'est à raison de 10 000 par année, pendant cent ans, que les Canadiens français, des mères qui en avaient beaucoup, sont allés vers les États-Unis. Mais pourquoi pas vers l'Ouest? Parce qu'en 1928, ça coûtait 48 $ pour faire venir une famille de Liverpool et 928 $ pour la même famille, dix enfants et deux parents-dans ce temps-là, on n'y regardait pas-pour aller de la même distance, mais de l'Est vers l'Ouest.

Il faudrait voir que les Canadiens, les «Canayens», ont cherché désespérément à se faire une place dans ce pays avec leurs écoles, avec leur religion, mais qu'ils en ont été empêchés. Je dis donc que c'est une tentative tardive que M. Trudeau a voulu faire, sachant qu'au Québec, le mouvement était parti et que pour l'endiguer, cela ne serait quand même qu'un barrage de papier.

[Traduction]

M. Strahl: Monsieur le Président, il n'y avait pas vraiment de question à la fin de cela, mais j'ai certainement compris l'essentiel des propos du député. N'étant pas originaire du Québec, je peux tenter de comprendre certaines des doléances historiques des Québécois.

Dans l'ensemble, la culture et la langue françaises ont été assez bien préservées au Canada. Les francophones qui ont émigré aux États-Unis n'ont pu, pour la plupart, conserver leur langue et leur culture et ont été assimilés.

Comme je l'ai déjà dit plus tôt, des torts ont été commis par le passé. Il faut l'admettre et tenter d'y remédier le plus possible, ce que, de toute évidence, les Canadiens ont essayé de faire. Mais il


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faut éviter de faire une autre erreur qui consiste à redresser des torts du passé en exacerbant d'autres problèmes ailleurs.

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui tente d'aller au coeur de la question, soit celle de la prestation de services en français à l'extérieur du Québec là où le nombre le justifie et, aussi, de services en anglais au Québec là où la demande est suffisante.

Je donnerai l'exemple de ma province. En Colombie-Britannique, le français compte tout juste au nombre des dix langues les plus utilisées. Le chinois est, de loin, la deuxième langue la plus utilisée. Dans ma circonscription, les unilingues allemands et les personnes dont l'allemand est la langue maternelle sont 200 fois plus nombreux que les francophones.

(1755)

Je ne dis pas qu'il ne faut pas fournir des services dans une deuxième langue là où le nombre le justifie et là où nous avons les moyens de le faire. Dans ces cas-là, il faut fournir les services. Cependant, nous ne pouvons pas redresser tous les torts commis au début du siècle. Ce n'est pas pratique. J'estime que nous n'en avons pas les moyens. Et je ne pense même pas que nous réussirions à redresser les torts et que les gens s'en porteraient mieux. Si c'était le cas, nous aurions l'unanimité. Pour l'heure, la loi est en train de diviser la population.

Le vice-président: La période de questions et d'observations est terminée. Le député partageait son temps avec la députée de Calgary-Nord.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, mes collègues ont parlé assez longuement des problèmes que nous avons éprouvés au Canada à cause du bilinguisme officiel. Je voudrais pour ma part examiner l'application de cette politique dans la fonction publique.

Le dernier rapport annuel du commissaire aux langues officielles fait écho, comme presque tous les autres l'ont fait depuis le début du bilinguisme officiel, aux propos de Lester Pearson en disant que la Loi sur les langues officielles exige des institutions fédérales qu'elles assurent aux Canadiens anglophones et francophones des possibilités égales d'embauche et de promotion.

C'est là un objectif noble, et nous pouvons tous être d'accord. Mais il est difficile de concilier cet idéal avec la déclaration que le ministre a faite le 25 février: « Nous avertissons tout anglophone qui veut devenir général ou chef d'état-major qu'il devra être totalement et absolument bilingue. » Ces propos figurent à la page 1855 du hansard.

Le ministre a ajouté plus tard que les anglophones avaient davantage matière à s'inquiéter des exigences plus rigoureuses en matière de bilinguisme imposées aux officiers supérieurs.

Il semble assez clair et évident, d'après ces déclarations diamétralement opposées, que l'idéal et la réalité du bilinguisme sont deux choses bien différentes.

Je ne crois pas un instant que le ministre de la Défense favorise les francophones au détriment des anglophones, mais il fait face au problème de défendre un système qui a des faiblesses inhérentes.

C'est normal que plus de la moitié des 3 000 communications reçues par le commissaire chargé de veiller à l'application de la Loi sur les langues officielles consistent en des plaintes de tous genres.

En un mot, le bilinguisme officiel, dans sa version actuelle, ne marche pas. Ça ne marche ni pour les anglophones ni pour les francophones.

Le mot «bilingue» désigne une personne parlant couramment les deux langues officielles. Si l'on s'en tient à cette définition, il y a très peu de Canadiens qui peuvent prétendre être parfaitement bilingues, ce qui ne nous empêche pas, après 27 ans d'échec, de croire que cette politique finira par porter fruit si on redouble d'effort et y consacre encore plus d'argent.

À titre d'exemple, permettez-moi de vous signaler que bon nombre des députés des deux côtés de la Chambre, dont moi-même, ne pourraient pas occuper la presque totalité des postes supérieurs offerts aujourd'hui dans la fonction publique parce qu'ils n'ont pas une connaissance fonctionnelle de l'autre langue officielle.

Alors que beaucoup de députés ne sont pas bilingues, il est paradoxal qu'on s'attende à ce que quiconque veut monter dans la hiérarchie de la fonction publique parle couramment les deux langues.

La réalité, c'est que la plupart des Canadiens ne sont pas bilingues et que, très souvent, ceux qui prétendent l'être ne le sont pas davantage.

Le deuxième problème tient à ce que la désignation des postes bilingues est une pratique de plus en plus courante et souvent, comme mon collègue vient de le faire observer, dans des cas où la nécessité de services bilingues n'est pas évidente.

Un cas injustifié de désignation de postes bilingues dans la fonction publique a fait la une de l'Ottawa Citizen en 1991. En fait, huit postes avaient été désignés bilingues. Il s'est révélé que les huit employés n'avaient eu l'occasion de faire appel à leurs compétences linguistiques qu'une seule fois en deux ans: un anglophone avait fait une erreur en composant un numéro de téléphone et on avait réussi à acheminer son appel!

(1800)

L'exemple que je viens de donner n'est que l'une des preuves que bon nombre de postes, dans la fonction publique, sont inutilement désignés comme bilingues.

Il y a une autre option à la mise en oeuvre du bilinguisme officiel qui non seulement permettrait aux fonctionnaires de


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s'exprimer dans la langue de leur choix, mais aussi éliminerait la discrimination fondée sur la langue.

En 1977, en réponse au problème de la discrimination de fait contre les francophones, la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme a recommandé que la fonction publique soit réorganisée en deux hiérarchies parallèles formées d'unités de travail unilingues. Le français deviendrait la langue parlée par quelque 25 p. 100 des unités de travail et l'anglais, la langue parlée par les autres unités.

Il est important de préciser qu'il ne s'agissait pas d'un système de quotas parce que les anglophones auraient pu essayer d'occuper des postes dans les unités de langue française et vice versa. Cependant, dans chaque cas, les fonctionnaires auraient eu le droit et auraient été tenus de communiquer avec leurs collègues de travail dans la langue de l'unité de travail.

En gros, les fonctionnaires auraient été libres de décider s'ils étaient prêts ou non à faire l'investissement financier considérable qu'il fallait faire pour apprendre l'autre langue officielle. De toute façon, leur place aurait été assurée et ils auraient pu travailler dans la langue de leur choix. Non seulement ce choix aurait été laissé aux fonctionnaires, mais cela aurait permis d'économiser les coûts énormes des cours de langue parrainés par le gouvernement.

Cette proposition a été mise à l'essai dans le secteur privé et a connu un grand succès dans les compagnies bilingues. La plupart des postes peuvent être occupés par des personnes unilingues, francophones ou anglophones. Seuls quelques postes tremplins ont besoin d'être comblés par des personnes bilingues. Si ce modèle avait été adopté au moment de sa recommandation, il y a vingt-sept ans, nous aurions aujourd'hui la pleine égalité entre les deux langues et il n'y aurait pas de discrimination importante entre les personnes qui parlent l'une ou l'autre des langues officielles.

Cependant, M. Trudeau a décidé d'adopter un autre modèle dans lequel il fallait désigner, pour chaque poste, les compétences linguistiques requises. Comme on s'attendait à ce que les fonctionnaires francophones et les anglophones se côtoient, bon nombre de postes, dont tous les postes au-delà du niveau subalterne, devaient supposer des communications régulières entre francophones et anglophones.

Cela a inévitablement donné deux résultats très malheureux. Premièrement, l'anglais, qui dominait depuis toujours, a continué de dominer. C'est pourquoi presque toutes les réunions, dans la fonction publique, se déroulent encore aujourd'hui en anglais. Deuxièmement, il faudrait un nombre considérable de personnes bilingues pour occuper tous les postes de supervision puisque le règlement dit à présent que chaque employé doit être supervisé dans la langue de son choix.

C'est parce que les postes désignés bilingues se sont répandus comme une traînée de poudre qu'il y a eu cette tragédie. D'un côté, le système a permis d'accroître le nombre de francophones employés à Ottawa parce que les deux tiers des postes désignés bilingues dans la fonction publique sont occupés par des francophones. D'un autre côté, entre 60 et 70 p. 100 des francophones au Canada ne parlent pas anglais et les chances pour cette majorité de trouver un emploi dans la fonction publique ont été réduites en raison du système de désignation des postes bilingues.

En fait, entre 1974, année où cette politique a été introduite, et 1992, le nombre de postes dans la fonction publique ouverts aux personnes parlant seulement français est tombé de 34 000 à 25 000, une chute de 26 p. 100. Fait encore plus stupéfiant, l'incidence de cette politique au Québec où plus de la moitié des emplois dans la fonction publique sont ouverts exclusivement aux personnes parlant aussi bien le français que l'anglais.

Si la majorité des francophones se heurtent à la discrimination, la situation parmi les anglophones est encore pire. Près de 90 p. 100 des anglophones sont incapables de s'exprimer couramment en français. Ce qui veut dire que la plupart des Canadiens anglais ne peuvent prétendre qu'à des postes subalternes et s'élever au maximum au rang de major dans les forces armées. Résultat, la situation est dramatique.

Selon une enquête effectuée en 1990 par l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, plus d'un tiers des anglophones interrogés ont déclaré que la politique consistant à désigner des postes bilingues avait nui à leurs possibilités d'avancement par le passé. Plus de la moitié des personnes interrogées ont dit que, selon elles, cette politique allait nuire à leurs possibilités de promotion dans l'avenir. Près de 42 p. 100 ont déclaré qu'une fois au moins durant leur carrière ils n'avaient même pas pris la peine de postuler un poste, uniquement à cause des exigences linguistiques trop strictes.

(1805)

Autrement dit, le gouvernement fédéral a structuré sa réforme de telle sorte qu'il a réussi en même temps à augmenter la discrimination exercée à l'égard du francophone moyen et à créer une certaine discrimination à l'égard de l'anglophone moyen. Le Canada est probablement le seul pays à avoir ainsi réussi à exercer simultanément, et grâce à la même politique, une discrimination systématique contre ses deux principaux groupes linguistiques.

Pour sortir de ce pétrin, il faudra rejeter entièrement le système actuel et adopter enfin le système des sections francophones et anglophones proposé il y a 27 ans par la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. Le Nouveau-Brunswick a récemment adopté certains éléments de ce modèle pour son service linguistique provincial et il semble que les résultats soient excellents. Voilà ce que serait notre politique de bilinguisme territorial au sein de la fonction publique. Nous croyons qu'il est grand temps qu'Ottawa suive cet exemple.

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, j'ai suivi le débat tout l'après-midi et je tiens à dire très respectueusement que les députés du Parti réformiste ont fait preuve de malhonnêteté intellectuelle.

La députée de Calgary a déclaré ou laissé entendre il y a un instant que, parce que très peu de Canadiens étaient maintenant bilingues, la politique de bilinguisme du gouvernement canadien était un échec. Rien n'est plus faux, car la Loi sur les langues officielles de 1969 ne visait pas à rendre tous les Canadiens bilingues.

3191

Avant elle, le député de Fraser Valley-Est a déclaré qu'il n'était pas contre le bilinguisme et qu'il était d'accord pour que les Canadiens fassent l'apprentissage d'une langue seconde. Là encore, la Loi sur les langues officielles n'avait pas pour objet de rendre tous les Canadiens bilingues. Le gouvernement entend fournir des services bilingues aux groupes linguistiques fondateurs de ce pays.

Je trouve offensant que les députés emploient des mots. . .

Le vice-président: Le député a-t-il une question? Il y a deux autres députés qui veulent poser des questions ou faire des observations.

M. Harvard: Monsieur le Président, je formulerai ma question de la façon suivante. On a dit plus tôt que le Parti réformiste souhaitait qu'on définisse les priorités et qu'on réduise les dépenses liées à la Loi sur les langues officielles et à ses dispositions. Ma question est la suivante: le gouvernement fédéral a-t-il une priorité plus grande que celle de fournir des services en français aux quelque quatre millions de francophones unilingues du Québec et des services en anglais aux millions d'anglophones. . .

Le vice-président: À l'ordre, je vous prie. La parole est à la députée de Calgary-Nord.

Mme Ablonczy: Je serai brève, monsieur le Président.

Je voudrais tout d'abord dire que nous ne considérons pas nous non plus que la politique de bilinguisme officiel a pour objet de rendre les Canadiens bilingues. Je faisais toutefois remarquer qu'il fallait que cette politique assure une égalité des chances à tous les Canadiens voulant faire carrière dans la fonction publique et dans le secteur de la défense au Canada, mais qu'elle ne l'avait pas fait.

Deuxièmement, le député a demandé quelle plus grande priorité le gouvernement pourrait avoir que de veiller à ce que les services soient fournis aux deux groupes de langue officielle du Canada. Je voudrais faire remarquer au nom des plus de 12 millions de Canadiens dont la langue maternelle n'est ni le français ni l'anglais que le gouvernement doit répondre aux besoins de chacun des Canadiens et de tous les Canadiens.

Il est temps de reconnaître que le Canada est en train de changer. La plus grande priorité que je recommanderais au gouvernement d'adopter, c'est de faire preuve d'équité envers tous les Canadiens et d'assurer des services égaux à tous les Canadiens. Voilà la plus grande priorité que nous devrions nous donner.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, dans un premier temps, ce que je voudrais dire à la députée de l'Ouest, c'est que dans mon comté qui est Gaspé, au sujet de la proposition, environ 11 p. 100 de la population est anglophone et cela sur une étendue d'à peu près 7 heures de route en voiture.

(1810)

Si jamais on arrivait à dire la prédominance française, cela voudrait dire que les communautés anglophones qu'il y a dans mon coin se retrouveraient à toutes fins pratiques privées de services. Et là-dessus, même lorsque le Québec va devenir souverain, je serai le premier à me lever pour offrir aux gens de cette partie-là du Québec le droit de s'exprimer et de recevoir les services dans les deux langues.

La question que je voulais lancer aux gens du Parti réformiste est la suivante: Si l'objectif est d'économiser de l'argent, il y a des choses qui sont moins émotionnelles que celle-là pour arriver aux mêmes fins. Donc, est-ce que la députée serait intéressée à voter pour une résolution qui nous amènerait, par exemple, à éliminer les chevauchements? Je voudrais lui fournir comme exemple que juste au niveau de la formation professionnelle, only in training, on peut économiser 250 millions au Québec; pour le Canada, c'est un million. Tout à l'heure, on parlait d'un chiffre de 660 millions. Est-ce qu'elle serait prête à voter en faveur de l'élimination des zones de chevauchement des juridictions?

[Traduction]

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, je signale tout d'abord au député que, dans notre motion, nous proposons que les services soient offerts aux minorités de langue officielle dans leur propre langue dans toute région où on peut démontrer qu'il y a une demande locale. Il appartiendrait donc au gouvernement de juger si, dans la circonscription du député, où il y a 11 p. 100 d'anglophones disséminés sur un très grand territoire, il y a une demande significative. Ce serait certainement une demande plus importante que dans le cas cité par mon collègue qui vient de prendre la parole, car le groupe ne représente que 1,7 p. 100, mais le commissaire exige tout de même pour lui les services bilingues ou au moins l'offre de services bilingues.

Nous voulons éviter de faire de cette question une simple affaire de sous. Nous devons faire preuve de bon sens et tenir compte de la demande. Au lieu de dire: «Où pouvons-nous faire des compressions?», disons: «Avons-nous vraiment besoin des services?» «À quel endroit les Canadiens ont-ils besoin des services?» Nous pourrons ainsi faire des économies. Nous faisons cette proposition parce que des services sont assurés à des endroits où il n'y a pas de vraie demande, pas de besoins appréciables, ce qui est du gaspillage.

Cependant, j'estime qu'il faut aborder la question dans l'optique des besoins des Canadiens et pas simplement faire des comptes d'apothicaire.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, ce sera l'un des plus brefs discours de ma carrière. Je crois qu'il me reste trois minutes.

[Français]

Il me fait plaisir de participer cet après-midi à ce débat sur la Loi sur les langues officielles.

[Traduction]

Je ne suis pas d'accord avec cette idée du bilinguisme territorial.

3192

[Français]

Je représente une circonscription électorale en Ontario, dont la population est majoritairement anglophone. Dans la définition indiquée dans cette motion, le bilinguisme territorial aurait l'anglais comme langue de prédominance dans les autres provinces, donc dans la mienne. Ma circonscription est majoritairement francophone dans une province à très grande majorité anglophone. Près de 70 p. 100 de mes électeurs utilisent, comme moi, le français comme leur première langue. Alors, si le député dit que dans ce cas-là, ça devrait être au niveau de la circonscription, le bilinguisme territorial, encore cela ne marche pas. Que fait-on des communautés de ma circonscription, que fait-on de ces 35 000 anglophones de ma circonscription, avec une politique de ce genre?

[Traduction]

Il y a 35 000 anglophones dans ma circonscription. Si on appliquait le principe du bilinguisme territorial à l'échelle des circonscriptions électorales fédérales, ces anglophones se verraient nier leurs droits. Si on l'appliquait à l'échelle de la province, ce sont 65 000 personnes qui seraient privées de leurs droits. On voit à quel point cette proposition est inapplicable.

[Français]

J'aurais aimé, aujourd'hui, qu'on ait un débat tous ensemble pour critiquer, oui, les failles dans la Loi sur les langues officielles, car toutes les lois ont des failles, mais surtout pour voir comment on peut rendre la Loi sur les langues officielles afin qu'elle serve mieux la population canadienne, la population unilingue, parce qu'après tout, si la population est déjà bilingue, il n'est pas nécessaire d'avoir une loi sur les langues officielles.

Ce n'est ni le député de Québec-Est ni moi qui avons besoin de cette loi-nous sommes tous deux couramment bilingues-, mais c'est la population que l'on dessert qui a le droit d'être servie dans sa langue. C'est pour eux qu'il est important d'avoir une Loi sur les langues officielles, pas pour le député de Glengarry-Prescott-Russell personnellement, and not for my colleague who is also a Franco-Ontarian, sitting across the way, de la circonscription de Québec.

Alors, voyez, c'est cela que j'aurais aimé aujourd'hui, savoir comment on pourrait utiliser cette Loi sur les langues officielles pour unir les deux peuples fondateurs de ce pays et non pour le diviser. C'est là-dessus que j'aurais aimé faire mon débat aujourd'hui. Parlant de l'histoire de ces deux grands peuples, j'ai entendu une députée tantôt parler de ses ancêtres qui sont arrivés aux environs de 1640-les miens sont arrivés en 1680 à La Prairie-, et des autres députés qui sont soit des Néo-Canadiens arrivés il y a quelques années, comme certains collègues en cette Chambre, ou bien qui demeurent ici depuis presque toujours, comme dans le cas de nos confrères et consoeurs autochtones. Alors je regrette que l'on ait eu ce débat aujourd'hui, surtout avec cette tangente. Je l'aurais préféré autrement, inutile de le dire.

Le vice-président: Comme il est 18 h 15, il est de mon devoir, conformément à l'article 81(16) du Règlement, d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à l'expédition des travaux des subsides.

[Traduction]

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le whip adjoint a demandé que le vote soit reporté.

Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

[Français]

En conséquence, conformément à l'article 45(5)a) du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'à demain, à 17 h 30, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.

[Traduction]

Comme il est 18 h 18, le Chambre s'ajourne à 10 heures demain.

(La séance est levée à 18 h 18.)