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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 13 juin 1994

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

    Projet de loi C-207. Étude à l'étape du rapport 5185

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

    La présidente suppléante (Mme Maheu) 5185

MOTION D'AMENDEMENT

    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 5186
    Rejet de la motion 5189
    Motion d'adoption 5189
    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 5189
    Adoption de la motion 5189
    Motion portant troisième lecture 5189
    M. Gauthier (Ottawa-Vanier) 5189
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi 5189

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 11 h 37 5189

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 12 h 02 5189

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-35. Motion portant deuxième lecture 5189

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE DÉCÈS DE M. ARTHUR ANDREW

LES ARMES À POSSESSION RESTREINTE

CERTAINS PROPOS TENUS À LA CHAMBRE

LE DEUXIÈME FESTIVAL INTERNATIONAL DU CERF-VOLANT

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 5206

L'ORGANISATION POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

LES FINISSANTS DES ÉCOLES SECONDAIRES

LE MULTICULTURALISME

    Mme Dalphond-Guiral 5206

LA FAMILLE

LA SEMAINE NATIONALE DES TRANSPORTS

LE MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT

LE DÉCÈS DU RABBIN MENACHEM MENDEL SCHNEERSON

LES LANGUES OFFICIELLES

LA FAMILLE

LE CANADA ATLANTIQUE

LE PARTI LIBÉRAL

LES STAGIAIRES DU MICHIGAN

QUESTIONS ORALES

LA SITUATION EN HAÏTI

    Mme Stewart (Northumberland) 5209
    Mme Stewart (Northumberland) 5209
    Mme Stewart (Northumberland) 5209

LE BOIS D'OEUVRE

LA FAMILLE

LA PRÉSENCE DES CASQUES BLEUS EN EX-YOUGOSLAVIE

LA FISCALITÉ

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5211
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5211

LA SITUATION DE LA FEMME

    Mme Gagnon (Québec) 5211
    Mme Gagnon (Québec) 5212
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5212

LA FAMILLE

LA MIL DAVIE

LE FESTIVAL FRANCO-ONTARIEN

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5214
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5214

L'EMBALLAGE DES CIGARETTES

    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 5214
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 5214

LA THAÏLANDE

L'IMMIGRATION

HAÏTI

    M. Mills (Red Deer) 5215
    Mme Stewart (Northumberland) 5215
    M. Mills (Red Deer) 5215
    Mme Stewart (Northumberland) 5216

LES AFFAIRES INDIENNES

LA PUBLICITÉ ANTITABAC

LES DÉPENSES SOCIALES

    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 5216
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5216

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

QUESTION DE PRIVILEGE

LE CODE RÉGISSANT LES CONFLITS D'INTÉRÊT

    M. Harper (Simcoe-Centre) 5218

AFFAIRES COURANTES

LES DÉCRETS DE NOMINATION

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-41. Adoption des motions portant présentation et première lecture 5218

PÉTITIONS

LES COMMUNICATIONS

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

LE SERVICE POSTAL

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 5219

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

LES JEUNES CONTREVENANTS

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

L'AVORTEMENT

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Speaker (Lethbridge) 5219

LE SRI LANKA

LE SUICIDE ASSISTÉ

L'AVORTEMENT

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'AVORTEMENT

LA PROTECTION DES TÉMOINS

LES JEUNES CONTREVENANTS

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'ÉTHANOL

LES CARTES DE TUEURS

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-35. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 5221
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 5224
    Mme Kraft Sloan 5227
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi et renvoi à un comité 5227

LOI DE 1994 SUR LA CONVENTION CONCERNANT LES OISEAUX MIGRATEURS

    Projet de loi C-23. Étude à l'étape du rapport 5227
    Motion d'approbation 5227
    Adoption de la motion 5227
    Motion portant troisième lecture 5227
    M. Chrétien (Frontenac) 5231
    Mme Kraft Sloan 5237
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi 5240

LA LOI SUR LA FAUNE DU CANADA

    Projet de loi C-24. Étape du rapport (avec une proposition d'amendement) 5240
    Projet de loi C-24. Motion portant approbation 5240
    Adoption de la motion 5240
    Motion portant troisième lecture 5240
    M. Chrétien (Frontenac) 5247
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi 5247

LA LOI SUR L'ACCISE

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

MOTIONS D'AMENDEMENT

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5249
    Rejet de la motion 5250
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5252
    Rejet de la motion 5252
    Motion d'approbation 5252
    Adoption de la motion 5252

LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS TERRITORIALES DES PREMIÈRES NATIONS DU YUKON

    Projet de loi C-33. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture 5252

LOI SUR LE RÈGLEMENT DE LA REVENDICATION DES DÉNÉS ETMÉTIS DU SAHTU

    Projet de loi C-16. Étude à l'étape du rapport 5254
    Motion portant approbation 5254
    Adoption de la motion 5254
    Motion portant troisième lecture 5254
    Report du vote sur la motion 5263

5185


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 13 juin 1994


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LOI SUR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-207, tendant à modifier la Loi sur le vérificateur général (rapports), dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

La présidente suppléante (Mme Maheu): La motion no 1 sera débattue et mise aux voix.

MOTION D'AMENDEMENT

M. Richard Bélisle (La Prairie) propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-207, à l'article 1, par substitution, à la ligne 11, page 1, de ce qui suit:
«prévus au paragraphe 8(1)-au moins trois».
M. Boudria: Madame la Présidente, je suis en train de me demander si celui qui a proposé la motion est en fait ici aujourd'hui, et si ce n'est pas le cas, si on pouvait traiter de ce dossier, parce que je crois qu'on a discuté d'une négociation. Et avant de trancher là-dessus, on pourrait peut-être établir ce fait.

M. Bélisle: Madame la Présidente, le projet de loi C-207, présenté en première lecture le premier février dernier par le député d'Ottawa-Vanier, prévoit à l'article 1 que le vérificateur général prépare à l'intention de la Chambre des communes au moins un rapport annuel. Le même projet de loi prévoit également, à l'article 4, que le vérificateur peut déposer toute étude d'un sujet, conformément à la présente loi, devant la Chambre des communes, aussitôt qu'il a fini de l'établir.

Le Comité des comptes publics a procédé, à la suite de la deuxième lecture, à l'étude du projet de loi. La secrétaire parlementaire du Conseil du Trésor a proposé à ce Comité des comptes publics les amendements suivants, qui ont été adoptés avec dissidence par le Comité.

Le vérificateur général prépare, à l'intention de la Chambre des communes, un rapport annuel. Il peut également préparer à son intention, outre les rapports spéciaux prévus au paragraphe 8(1), au plus trois rapports supplémentaires par année. C'est le principal amendement qui avait été proposé par la secrétaire parlementaire au Comité des comptes publics.

Pour ce qui est des rapports supplémentaires, le vérificateur général adresse au Président de la Chambre des communes un préavis circonstancié de tout rapport qu'il entend soumettre, en vertu du paragraphe 1. Et ensuite, de façon séquentielle, le rapport supplémentaire, toujours selon l'amendement de la secrétaire parlementaire, serait soumis au Président de la Chambre le 30e jour suivant le préavis en question ou à l'expiration du délai plus long qui y est indiqué.

(1110)

Un troisième amendement a également été proposé à l'article 3, paragraphe 8.(1) et concerne la présentation d'un rapport spécial. La formulation est la suivante, et je cite:

8.(1) Le vérificateur général peut adresser un rapport spécial à la Chambre des communes sur toute affaire d'une importance ou d'une urgence telles qu'il estime qu'elle doit immédiatement faire l'objet d'un rapport.
Cet article 3 est remplacé par ce qui suit:

telles qu'elle ne saurait, à son avis, attendre la présentation du prochain rapport, en vertu du paragraphe 7.(1).
Il s'agit de l'amendement qui avait été proposé au Comité des comptes publics par la secrétaire parlementaire.

Depuis l'existence de la loi actuelle, qui date de 17 ans, le paragraphe 8.(1) touchant aux rapports spéciaux n'a jamais été utilisé par le vérificateur général.

D'autre part, le vérificateur général, lors de son témoignage au Comité des comptes publics, le 26 mai dernier, déclarait, et je cite: «Un amendement permettant au Bureau de déposer un rapport trois ou quatre fois par an me permettrait de faire ce que j'ai l'intention de faire. Il existe des questions qui ne peuvent attendre un mois ou deux pour être signalées et, pour ce cas, le paragraphe 8.(1) de la loi actuelle peut toujours être invoqué en cas d'urgence réelle» mais, dans les faits, cet article-là n'a jamais été utilisé au cours des 17 années d'existence de la loi.

Pourquoi ne pas simplifier toute cette mécanique qui découle de l'amendement de la secrétaire parlementaire au Conseil du Trésor qui, outre le rapport annuel qui continuera d'être déposé, y ajoute la possibilité d'au plus trois rapports supplémentaires seulement?


5186

Je l'ai déjà dit en Chambre, la demande du député d'Ottawa-Vanier, lors de la période de questions du 20 janvier dernier, de permettre au vérificateur général d'augmenter la fréquence de ses rapports était la 16e intervention du genre depuis le 18 juillet 1980. Il y avait eu 16 interventions depuis juillet 1980; il y en a eu une 17e entre-temps. Il est temps qu'on passe à l'action dans le cas de ce projet de loi.

La dette du gouvernement fédéral, additionnée à celle des provinces, équivaut actuellement au seuil critique de 91 p. 100 du PIB national. De plus, selon l'économiste John Richards, auteur d'une étude de l'Institut C.D. Howe, les mesures annoncées par le gouvernement libéral pour réduire le déficit seront probablement vouées à l'échec. Selon M. Richards, il est hautement probable que l'actuel programme de lutte contre le déficit n'atteigne même pas les objectifs les plus modestes contenus dans le livre rouge des libéraux.

Dans ce contexte d'endettement, ayant atteint un seuil critique et ayant un programme de lutte au déficit plus qu'incertain, pourquoi ne pas donner les coudées plus franches au vérificateur général et favoriser un mode de publication des travaux et un mode d'intervention de ce dernier plus souples et plus fonctionnels.

Pourquoi encarcaner le nombre de publications du vérificateur général dans un rapport annuel auquel ne s'ajouteraient, à long terme, que trois rapports supplémentaires?

Je propose, afin de donner plus de marge de manoeuvre et de latitude d'action au vérificateur général, l'amendement qui a été déposé ce matin, à savoir:

Qu'on modifie le projet de loi C-207, à l'article 1, par substitution, à la ligne 11, page 1, de ce qui suit: «prévus au paragraphe 8.(1)-au moins trois».
Avec cet amendement, le vérificateur général aurait la possibilité de publier au moins trois rapports supplémentaires, ce qui n'exclurait pas qu'il pourrait en publier quatre ou cinq, éventuellement, ou encore plus, ce qui permettrait au vérificateur général de continuer à publier son rapport annuel, auquel pourrait s'ajouter trois rapports supplémentaires ou plus, selon la situation.

Cela éviterait un «étapisme» inutile d'avoir à amender la loi dans deux ou trois ans afin de permettre un nombre plus élevé de rapports supplémentaires, si le vérificateur général le jugeait utile à ce moment-là, et rejoindrait l'esprit du projet de loi intitial du député d'Ottawa-Vanier qui n'imposait pas de plafond au nombre de rapports du vérificateur général.

Le projet du député n'impose qu'un minimum de rapports annuels; l'amendement de la secrétaire parlementaire impose un plafond de trois rapports supplémentaires ajoutés au rapport annuel; et l'amendement que je propose aujourd'hui rejoint le projet du député d'Ottawa-Vanier en n'imposant pas de maximum de rapports, c'est-à-dire pas de plafond, mais, d'autre part, en exigeant cependant un minimum plus élevé que dans le cas du projet du député d'Ottawa-Vanier, c'est-à-dire un minimum de trois rapports supplémentaires, donc une base plus élevée, qui s'ajouteraient au rapport annuel qui continuerait d'être publié.

(1115)

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier): Madame la Présidente, je vais prendre la parole très brièvement sur cet amendement qui, en fait, oblige le vérificateur général du Canada à faire un minimimum de trois rapports, plus son rapport annuel.

Nous avions considéré cette disposition lorsque le projet de loi a été rédigé et nous l'avons rejetée à ce moment-là parce que, à mon avis, il faut laisser le vérificateur général du Canada libre de ses actions, libre à lui de décider quand il déposera ses rapports, et ne pas lui imposer un minimum de trois.

Qu'arrivera-t-il si pour des raisons absolument extra-parlementaires, des facteurs exogènes à son activité comme vérificateur, il y avait une année électorale en cours? On peut facilement comprendre qu'il sera impossible pour lui de présenter trois rapports minimums et son rapport annuel. Cela me laisse un peu perplexe de voir que le Bloc québécois veut absolument lui imposer trois rapports additionnels à son rapport annuel.

L'idée originale du projet de loi C-207 était de permettre une plus grande transparence, une plus grande liberté d'action, et qui plus est, une meilleure imputabilité envers les Canadiens et les Canadiennes des comptes publics qui sont approuvés par cette Chambre.

Je ne vois pas pourquoi on devrait imposer au vérificateur général trois rapports minimums. J'aurais préféré qu'on s'en tienne au projet de loi original qui était de laisser le vérificateur général décider quand, comment et pourquoi il fait ses rapports, et ne pas lui imposer un minimum de trois rapports annuels.

Je ne peux pas appuyer cet amendement.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Madame la Présidente, j'appuie l'amendement du député de La Prairie relativement au projet de loi C-207 qui prévoit que l'article 1 soit modifié afin que le vérificateur puisse faire au moins trois rapports supplémentaires par année.

En prévoyant la possibilité pour le vérificateur de faire plus d'un rapport par année, on lui donne une plus grande latitude et c'est un voeu que nous exprimons fermement. L'amendement, dans son libellé, fixe un minimum.

L'amendement proposé n'est pas limitatif. Il prévoit que le vérificateur général pourra faire au moins trois rapports supplémentaires. Il pourra en produire plus, mais il aura un plancher. Je ne crois pas qu'il soit sage de mettre en place un changement de cette nature et de procéder en indiquant un nombre restreint de rapports supplémentaires.


5187

Ce qui fait la force du vérificateur général, c'est sa crédibilité. Vouloir lui donner de la latitude, c'est aussi lui donner l'espace pour réaliser pleinement son mandat.

Procéder au changement d'un rapport annuel à la pluralité des rapports, c'est répondre à un désir depuis longtemps exprimé. La modification proposée à l'article 7 de la Loi sur le vérificateur général a été recommandée en quatre occasions par le Comité des comptes publics et à une reprise par le Comité sénatorial des finances. Le vérificateur général souhaite ce changement.

Avec la périodicité, l'information sera fractionnée et nous parviendra dans un délai plus court, ce qui, de toute évidence, se traduira par des économies.

Ainsi, le vérificateur général pourra faire rapport à la Chambre des communes immédiatement après avoir terminé une vérification approfondie d'un ministère ou d'un organisme fédéral, plutôt que d'attendre le dépôt de son rapport annuel. Les parlementaires pourront ainsi avoir accès à l'information plus rapidement et agir dans de meilleurs délais.

(1120)

L'amendement proposé donne beaucoup d'ouverture au vérificateur général et lui accorde la flexibilité nécessaire. Pourquoi opter pour un plafond? Qu'est-ce qui dicte cette méfiance? On dit: Donner et retenir ne vaut.

Si l'on considère que le vérificateur général a besoin de produire plus d'un rapport annuel par année, et ceci semble être un fait avéré, pourquoi, d'autre part, contraindre le vérificateur général à la production d'au plus trois rapports supplémentaires?

Au surplus, le phénomène de la périodicité des rapports reflète la tendance que l'on peut observer d'un point de vue comparatif. Mentionnons à titre d'exemple l'Angleterre, l'Allemagne, la Suède, l'Australie, la Nouvelle-Zélande. Tous ont adopté cette mesure. Nous ne nous écartons pas d'une sacro-sainte norme et ne faisons pas cavalier seul.

Le rapport du vérificateur général de 1993 a plus de 700 pages. La périodicité permet de répondre à une meilleure ventilation de l'information au cours de l'année et non pas seulement qu'à la fin de l'année. Ceci correspond à un besoin d'efficience, d'efficacité et de transparence. L'activité de vérification qu'exerce le vérificateur général atteste de l'utilisation des fonds publics. Ceci répond à un besoin impérieux. Quand on parle de transparence, il n'y a pas de demi-mesure.

Tout le monde est pour la vertu, mais quand vient le temps d'agir, on tiédit et on nous propose de limiter le nombre de rapports supplémentaires. Il s'agit ici de compromission. Depuis 1980, on a tenté, à maintes reprises, de modifier la Loi sur le vérificateur général, mais sans succès.

Il semble difficile de passer aux actes et de donner au vérificateur général la latitude voulue. Visiblement, on se heurte à la résistance. On se donne bonne conscience en discourant, mais on s'empresse de fixer des limites et d'encadrer ce qu'on appelle la transparence. Il n'y a pas de place ici pour les calculs mesquins. Le vérificateur général, chien de garde du gouvernement, ne doit pas être muselé.

Le Bloc québécois définit positivement le rôle du vérificateur général. Il ne s'agit pas de lui imposer des limites, mais de lui accorder la marge de manoeuvre dont il a besoin pour exercer ses activités.

Le projet de loi du député d'Ottawa-Vanier prévoyait, à l'origine, à l'article 1, que le vérificateur général puisse faire au moins un rapport, alors que le texte que nous avons actuellement stipule qu'il peut préparer au plus trois rapports supplémentaires par année. Donc, on tente d'imposer des limites. On serre la vis. Après les beaux énoncés de principe, on les tord et les libéraux affichent leurs intentions véritables.

Le vérificateur général assure la probité dans la gestion des fonds publics. Il est apolitique. Dans le contexte actuel, participer à l'adoption de mesures qui permettraient de maximiser la possibilité d'économies ne peut être rejeté du revers de la main.

Le bureau du vérificateur général procède à des vérifications et nous gagnons à connaître les résultats dans un laps de temps plus court. Le libellé de l'amendement va donc en ce sens et prévoit l'avènement de rapports supplémentaires. Le vérificateur général possède déjà le pouvoir d'adresser un rapport spécial à la Chambre.

(1125)

L'article 8(1) se lit comme suit:

Le vérificateur général peut adresser un rapport spécial à la Chambre sur toute affaire d'une importance ou d'une urgence telle qu'elle ne saurait, à son avis, attendre la présentation d'un rapport annuel.
Mais depuis 1977, il ne s'est pas servi de cette loi. Le député d'Ottawa-Vanier proposait d'adoucir la teneur de la règle dans son libellé original. Le texte qu'il nous a soumis renvoit plutôt à l'exigence du texte actuel qui fixe la barre trop haute. Si haute qu'on se demande si elle ne pourra jamais être franchie puisqu'en 17 ans, le vérificateur général n'a jamais utilisé cette prérogative.

Les impératifs de gestion d'un État moderne commandent des moyens nouveaux pour tendre vers une plus grande transparence et c'est ce que nous soumettons. Pour exercer ses fonctions, le vérificateur général a besoin d'une plus grande marge de manoeuvre. La complexité de la tâche, la visibilité du travail effectué par son bureau est focalisée dans les jours qui suivent la production de son rapport. Cela dure à peine une semaine ou deux et ensuite c'est oublié.

Donc, nous avons besoin, et je vous dis que les arguments militent en faveur de la périodicité, de lui donner la chance d'en produire plus qu'un de ces rapports. Nous pensons qu'une telle assertion mérite un libellé large.

[Traduction]

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Madame la Présidente, je suis très heureuse d'avoir l'occasion d'exposer mon opinion à la Chambre sur le projet de loi visant à modifier la Loi sur le vérificateur général. J'ai suivi de très près les discussions portant sur la question de savoir quand et comment le vérificateur général fait rapport au Parlement.


5188

[Français]

Depuis 1980, le Comité des comptes publics et le vérificateur général ont à diverses reprises recommandé que la Loi sur le vérificateur général soit modifiée de sorte que des rapports plus fréquents soient déposés devant le Parlement. Des recommandations ont été faites en 1984, 1986, 1988 et 1993.

[Traduction]

M. Kenneth Dye, l'ancien vérificateur général, et M. Desautels, le vérificateur actuel, ont appuyé les modifications à la Loi qui permettraient au vérificateur général de déposer un rapport aussitôt qu'il a fini de l'établir.

Les deux vérificateurs généraux ont examiné les avantages de cette méthode et ont déclaré que le fait d'augmenter la fréquence des rapports permettrait de mieux équilibrer la charge de travail au sein du Bureau du vérificateur général et, partant, d'accroître l'efficacité de ce dernier, même si on ne sait pas encore dans quelle mesure.

Cette modification a ceci d'avantageux qu'elle permettrait au Parlement et au Comité des comptes publics d'examiner les rapports du vérificateur général avec plus de célérité.

Des mesures correctives pourraient être prises plus rapidement, et le Parlement serait mieux placé pour intervenir. Ce sont là des avantages incontestables.Toutefois, il convient de signaler qu'il n'est pas question ici des rapports qui traitent des affaires urgentes.

L'article 8 de la Loi sur le vérificateur général autorise déjà le vérificateur général à faire rapport à la Chambre sur toute affaire d'une importance ou d'une urgence telles qu'elle ne saurait, à son avis, attendre la publication du rapport annuel.

[Français]

Cette disposition de la loi permet donc au vérificateur général d'informer le Parlement à temps de toute question urgente. Or, aucun vérificateur général n'a encore eu recours à cette disposition. À quoi cela tient-il?

[Traduction]

On a également laissé entendre que le fait d'accroître la fréquence des rapports permettra au Comité des comptes publics de mieux exécuter son mandat. En effet, le Comité pourra obliger les ministères et les fonctionnaires à mieux rendre compte de leurs décisions au Parlement et aux contribuables canadiens.

Par exemple, les fonctionnaires convoqués devant le Comité des comptes publics seront vraisemblablement les mêmes que ceux qui ont pris part à la vérification, ce qui n'était pas toujours le cas dans le passé. Encore une fois, il s'agit là d'un objectif admirable que tous les députés devraient appuyer. Nous devons examiner de près toute mesure qui peut contribuer à améliorer le travail de cet important comité.

Toutefois, la question la plus importante que nous devons nous poser aujourd'hui est la suivante: quel impact ce projet de loi aura-t-il sur l'efficacité du Bureau du vérificateur général?

(1130)

Le vérificateur général doit son efficacité à l'indépendance dont il dispose et à la crédibilité qui en découle. Nous ne voudrions pas souscrire à des modifications proposées à la loi qui compromettraient l'indépendance du vérificateur général.

Le vérificateur général reconnaît l'importance de celle-ci. Il s'agit d'une composante essentielle de l'énoncé de mission de son Bureau. Le Bureau du vérificateur général procède à des vérifications et à des examens indépendants qui fournissent au Parlement de l'information, des garanties et des conseils objectifs. Nous favorisons la responsabilité et un meilleur mode de fonctionnement de l'appareil gouvernemental.

Il ne s'agit pas de débattre de l'importance et de la nécessité du travail accompli par le vérificateur général et le Comité des comptes publics, mais de la meilleure utilisation possible de ces outils importants. Voilà la question.

La question du dépôt immédiat des rapports a été discutée à la Chambre et on a alors fait remarquer très pertinemment que les conclusions du vérificateur général ont été plus positives au cours des dernières années et que celui-ci a signalé dans son rapport annuel de suivi que des progrès avaient été réalisés en ce qui a trait à la résolution des problèmes relevés dans les rapports précédents. Des améliorations sont apportées à la gestion ministérielle et signalées par le vérificateur général.

Le dépôt immédiat des rapports de vérification permettra au Parlement de les recevoir rapidement mais ne réglera toutefois pas à lui seul le problème de l'opportunité.

[Français]

La nature même du processus de vérification explique partiellement le problème. En effet, une vérification complète au sein du ministère peut prendre jusqu'à deux ans. Je sais que le vérificateur général travaille à la résolution de ce problème.

[Traduction]

Il faudrait aussi se rappeler que les conclusions de la vérification font l'objet de discussions avec les gestionnaires au fur et à mesure de leur formulation. Ces derniers s'attaquent aux problèmes à mesure que les leur signale le vérificateur. Des mesures correctives sont en général mises au point bien avant que le vérificateur général ne dépose son rapport au Parlement.

Je crois que le vérificateur général serait heureux d'annoncer que tous les problèmes ont été réglés. Il faisait remarquer dans l'un de ses rapports que la plus grande satisfaction professionnelle, pour lui et pour ses collègues, n'est pas la divulgation d'une erreur, d'un gaspillage et d'une perte, mais la certitude que la direction a remédié à des situations qui laissaient à désirer.

5189

Le gouvernement dispose de mécanismes pour donner suite aux observations du vérificateur général. Qui plus est, comme je l'ai déjà dit, la Loi sur le vérificateur général contient des dispositions qui autorisent le vérificateur général à adresser un rapport à la Chambre sur toute affaire urgente.

Cette loi est une mesure législative très importante. Elle est indispensable au processus de reddition des comptes qui intervient entre le gouvernement et le Parlement et la population canadienne. Il s'agit toutefois d'une loi qui est considérée comme très efficace. Les contribuables canadiens sont heureux de pouvoir compter sur un organisme de surveillance indépendant et efficace.

Je me pose une autre question au sujet des modifications proposées à la loi actuelle. Je crains que le vérificateur n'en vienne à être utilisé comme enquêteur à court terme dont les services seraient réclamés par les comités de la Chambre et par d'autres pour réagir aux controverses partisanes. Les pressions exercées pour que le vérificateur accepte de faire enquête sur des préoccupations de cette nature pourraient entraîner une charge de travail insupportable à son Bureau. Cette charge de travail supplémentaire pourrait compromettre le dépôt obligatoire de ses rapports exhaustifs .

Pour résumer, j'aimerais insister sur le fait que la prudence s'impose lorsqu'il s'agit de modifier la Loi sur le vérificateur général. Nous devrions vérifier si nous disposons de tous les éléments. Nous devrions connaître toutes les conséquences tant néfastes que bénéfiques.

Permettez-moi de dire pour terminer que l'amendement proposé ici à l'étape du rapport est inapproprié. On demande avant tout le dépôt obligatoire de rapports trimestriels plutôt que d'un rapport annuel plus raisonnable assorti de rapports supplémentaires à mesure que les vérifications sont terminées.

Le vérificateur général s'oppose à cette tâche additionnelle qui l'oblige à publier un nouveau rapport à trois autres reprises pendant l'année qu'il soit prêt ou non. L'amendement risque de n'être qu'un inutile gaspillage étant donné les fluctuations du cycle de vérification.

[Français]

Le vérificateur général s'oppose à cet amendement, parce qu'il ne devrait pas être obligé de faire des rapports quand il n'est pas prêt à les faire. Il faut lui donner sa liberté, tel que prévu dans la loi.

[Traduction]

J'exhorte tous les députés à rejeter cet amendement. Merci, madame la Présidente.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis les non l'emportent.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est rejetée.)

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier) propose que le projet de loi soit adopté.

(La motion est adoptée.)

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier) propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la troisième fois et adopté.)

SUSPENSION DE LA SÉANCE

La Présidente suppléante (Mme Maheu): Comme la Chambre n'a pas d'autres affaires à traiter, nous allons suspendre les travaux jusqu'à midi.

(La séance est suspendue à 11 h 37.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 12 h 02.


5189

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) propose: Que le projet de loi C-35, Loi constituant le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Madame la Présidente, il se passe quelque chose de très bizarre ce matin. Pour ceux qui nous regardent à la télévision, j'ai presque eu droit à une ovation de la part de mes amis réformistes. Je les remercie de la généreuse et aimable coopération dont ils font preuve aujourd'hui. Je remercie le porte-parole du Parmi réformiste d'avoir proposé la deuxième lecture et d'avoir fait preuve d'une certaine souplesse en proposant que l'on passe en comité plénier, ce à quoi le Bloc québécois s'oppose pour des raisons que j'aimerais savoir.

Le projet dont la Chambre des communes est saisie aujourd'hui est relativement court, simple et important. Il ne compte que 6 pages et 22 articles.


5190

[Français]

Son but est très clair: la création d'un ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

[Traduction]

L'un des engagements que notre parti a pris pendant la campagne, c'est que l'immigration ne relèverait pas du ministère de la Sécurité publique.

(1205)

Cette mesure remonte aux derniers moments d'un gouvernement désespéré que les Canadiens ont jugé bon de remplacer. Ce qui a consterné le premier ministre, moi-même ainsi que tous les députés libéraux, ce n'est pas la mesure comme telle, mais l'affront qu'elle faisait à tous ceux qui sont venus ici comme immigrants et qui font maintenant partie intégrante de la famille canadienne grâce à leur citoyenneté canadienne. Le rattachement de l'immigration à la sécurité publique ne rendait pas justice au vrai rôle que l'immigration a joué dans ce pays.

C'est vrai qu'il y a des cas d'abus. C'est vrai qu'il y en a qui revendiquent le statut de réfugié sans y avoir droit. Ils sont tout, sauf ça. C'est vrai qu'il y en a qui présentent des demandes multiples d'aide sociale. Nous essayons de remédier à ce problème en concluant des protocoles d'entente avec les administrations municipales d'un bout à l'autre du pays. Nous avons ces problèmes, mais montrez-moi un ministère qui ne soit pas confronté à des problèmes d'abus. Montrez-moi un système d'assurance-chômage, un régime de pensions d'invalidité, un système de sécurité sociale dont on n'abuse pas.

C'est regrettable, mais divers programmes font l'objet d'abus. C'est regrettable, mais cela fait partie de la nature humaine non seulement dans ce pays mais partout dans le monde. En fait, comparé aux autres systèmes du monde, notre système se distingue par sa clarté et son intégrité.

Il s'agit d'une minorité de cas qu'il ne faudrait pas généraliser. C'est pourquoi j'ai été, comme mon parti, offensé par la décision de rattacher l'immigration à la sécurité publique. Le premier ministre a promis que, s'il était élu, cette décision serait renversée. Fidèle à sa parole, il a inclus dans son Cabinet un nouveau ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Nous avons poursuivi notre travail malgré tout, mais le projet de loi qui confère une existence juridique à mon ministère est à l'étude aujourd'hui. Il donne effet aux changements annoncés par le premier ministre le 4 novembre 1993 et il incarne les principes contenus dans le livre rouge.

Le projet de loi structure de façon cohérente et sensée le mandat et les fonctions du gouvernement dans le domaine de la citoyenneté et de l'immigration. Chose plus importante, il modernise et simplifie l'administration gouvernementale de manière à répondre aux besoins des Canadiens et à nous donner les outils nécessaires pour traiter de façon efficace la multitude de questions complexes liées à la citoyenneté et à l'immigration.

Le premier ministre l'a dit à maintes occasions. Notre parti a déclaré haut et fort que l'immigration était un outil pour bâtir notre pays. C'est un outil qui, au fil des ans, a aidé à bâtir un Canada moderne. L'immigration fera également partie de notre avenir. C'est à nous qu'il incombe de décider comment nous en servir et comment l'adapter aux phénomènes actuels qui ne sont pas ceux d'antan. L'immigration est un élément absolument vital de notre pays.

Il y a aussi la citoyenneté, mais on la perd facilement de vue parce que l'immigration est un sujet si émotif et que les médias s'intéressent de toute évidence davantage aux questions d'immigration qu'aux questions de citoyenneté. J'ajouterais que les médias font souvent mauvaise presse à l'immigration. C'est toujours la mauvaise nouvelle qui fait la une ou qui passe en premier aux bulletins de la radio et de la télévision. C'est ainsi qu'on couvre l'actualité. Les mauvaises nouvelles, ça rapporte, mais comme il faut parler des faits plutôt que de la fiction, il faut faire comprendre au public que l'accumulation de ces cas regrettables ne définit pas le véritable enjeu.

(1210)

Les médias font parfois la couverture de l'immigration comme celle des avions. Ils parlent des avions uniquement lorsqu'ils n'atterrissent pas. Ils ne s'intéressent pas à ceux qui atterrissent en toute sécurité; pourquoi devraient-ils le faire, se disent-ils. Nous nous sentons donc mal lorsque les avions n'atterrissent pas; nous adressons nos condoléances aux familles des victimes. Nous essayons de tirer les leçons de l'accident d'avion. Nous essayons de savoir s'il s'agit d'une erreur du pilote ou si un des moteurs ou une des ailes, ou autre chose, n'a pas fonctionné, comme il le fallait. Nous étudions tout cela et essayons d'empêcher qu'un autre accident ne survienne.

En notre qualité de députés, nous ne nous promenons pas toutefois dans cette Chambre ni dans tout le pays pour alarmer nos concitoyens au sujet d'un accident malheureux, car nous savons qu'il y a mieux à faire. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des avions atterrissent dans les aéroports prévus, sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En fait, les statistiques sont là pour montrer que les avions sont plus sûrs que les voitures. Les députés ont évidemment la responsabilité de tirer les leçons de telles erreurs, mais ils doivent également renvoyer l'image globale, le contexte de ces accidents et atterrissages d'avions.

La question que je pose à mes collègues est la suivante: Ne devrions-nous pas faire la même chose, lorsque nous parlons de la question émotive de l'immigration? Je pense que si. Je pense qu'il est important que nous le fassions. Cela ne veut pas dire que nous laissons de côté tous les cas négatifs et que nous n'en tirons pas les leçons.


5191

Je me propose de déposer un projet de loi avant l'ajournement de la Chambre pour l'été, au sujet des cas particuliers dont il a été fait mention dans les journaux, qui en ont fait voir de toutes les couleurs aux Canadiens, à l'opposition et oui, je l'admets, au ministre lui-même. Nous en tirons les leçons et apportons les modifications qui s'imposent de manière que ces lois soient aussi infaillibles que possible, empêchant quiconque d'en profiter ou d'en abuser.

La citoyenneté fait également partie de mon mandat. J'aimerais dire aux députés que la citoyenneté nous permet de réaliser l'immigration. Il est tout naturel que le premier ministre ait regroupé la citoyenneté et l'immigration, étant donné qu'au moment de l'arrivée des immigrants au pays et de leur assimilation, c'est le processus de la citoyenneté et de leur transformation comme Canadiens qui prend le dessus. Il suffit de devenir citoyen canadien pour ne plus être immigrant.

L'immigration est un processus qui, à un moment donné, cesse, pour laisser la place à la citoyenneté qui fait que nous sommes tous des citoyens canadiens. Il se peut que nos origines soient différentes. Je peux être né en Argentine de parents canadiens et pourtant j'ai connu le même système scolaire que les enfants des députés présents aujourd'hui; nous parlons le français ou l'anglais, peut-être mal, mais nous le parlons malgré tout et nous avons joué au hockey dans les mêmes rues. Nous avons eu les mêmes problèmes, parce que nous jetions des boules de neige aux autres dans la cour de récréation. Mes origines culturelles sont différentes. Suis-je un meilleur Canadien pour autant? Absolument pas. Suis-je pire? Absolument pas.

La citoyenneté nous permet de réaliser l'immigration. Elle nous le permet d'autant plus que j'ai demandé au comité permanent chargé de formuler une nouvelle Loi sur la citoyenneté, d'examiner, entre autres, les responsabilités, les obligations et les valeurs inhérentes à la citoyenneté canadienne.

Pourquoi? Pour deux raisons. D'abord, lorsque nous débattons de l'immigration, nous parlons souvent des droits, le droit de faire une demande, le droit à la réunion des familles, le droit de faire défendre nos droits dans le cadre d'une demande du statut de réfugié, le droit d'être considéré avec humanité et avec compassion; des députés de cette Chambre me présentent d'ailleurs quotidiennement des instances de cette nature. La question des droits est vitale, ce qui est parfaitement légitime. Il y a un lieu pour défendre les droits et les faire respecter.

Lorsque nous parlons de la citoyenneté toutefois, je pense que le débat devrait s'orienter correctement et se concentrer sur les responsabilités et les obligations de tout nouveau citoyen canadien qui doit s'engager à protéger nos foyers et nos droits. Quelles valeurs de la citoyenneté canadienne voulons-nous que les nouveaux immigrants embrassent, chérissent et respectent? Tout en appréciant l'identité culturelle de nos ancêtres, notre pays fait preuve de maturité lorsqu'il est dit, par exemple: «Monsieur Marchi, nous ne vous demandons pas d'abandonner vos valeurs culturelles, car nous ne pouvons effacer ce que vous avez été pendant 30 ans». Même l'ancienne Union soviétique avec toutes ses armées et ses chars n'a pu l'effacer. Au moment de l'effondrement de l'Union soviétique, nous avons vu la culture, l'ethnicité et la religion prendre leur essor. Où se cachaient-elles à l'époque de l'Empire soviétique? Elles étaient toujours vivantes, car il est impossible de les effacer de la réalité de la vie.

(1215)

Nous faisons preuve de maturité, en tant que pays, lorsque nous formulons une politique officielle en matière de multiculturalisme qui existait certainement bien avant que M. Trudeau ne la précise en 1971.

Il existe aussi une caractéristique complémentaire: lorsque l'on vient au Canada, on doit également embrasser ce qui est canadien et ce qui est l'essentiel de la vie au Canada.

Pourquoi le serment que nos citoyens doivent prêter mentionne-t-il le respect des devoirs de la citoyenneté, alors que nulle part dans notre Loi sur la citoyenneté ou ailleurs, ces devoirs, ces obligations, ces responsabilités ne sont définis? On se demande ensuite pourquoi certaines choses vont mal.

J'aimerais pouvoir être en mesure de proposer un projet de loi dans cette Chambre au cours de l'automne, lorsque le comité aura terminé son étude et présenté son rapport, pour parler de tout ce qui favorise l'unité. Cela aiderait non seulement le nouveau venu à comprendre la société canadienne, mais aussi cela permettrait de donner à tous les Canadiens l'assurance que les gens qui viennent ici pour devenir Canadiens sont prêts, comme les immigrants du passé, à construire leur vie, à faire des sacrifices, à payer des impôts, à souffrir et à se réjouir des victoires canadiennes.

J'aimerais, en tant que ministre, pouvoir non seulement remettre un certificat de citoyenneté ou adresser des félicitations aux nouveaux citoyens, mais aussi leur remettre une charte des responsabilités et des obligations. Je formule le même voeu pour ceux qui me suivront, ainsi que pour les députés qui sont appelés à assister aux cérémonies de citoyenneté.

Essayons de nous attarder sur ce point, bien que cela soit difficile. Quelle va être la longueur d'une telle charte, s'il faut y inclure toutes les responsabilités et obligations? Nous devons évidemment saisir l'essentiel. Quelles sont les valeurs de la citoyenneté canadienne? Il est assez difficile de les définir et parfois, cela peut donner lieu à un débat semant la discorde. Je pense que globalement le débat sera unificateur, surtout à un moment même où, au cours des prochains mois, nous entendrons beaucoup parler des éléments négatifs de notre pays et de l'échec du fédéralisme.

Lorsqu'on élimine tous ces problèmes quotidiens et que l'on parle de la citoyenneté canadienne, comme je l'ai fait dans le cadre d'émissions de radio et de télévision, ainsi que dans des tribunes avec des Canadiens, on s'aperçoit qu'il s'agit d'une force absolument positive et édifiante. Personne, malgré les problèmes que nous avons dans nos arrière-cours, est prêt à renoncer à la citoyenneté canadienne. Tout le monde admet que le passeport canadien est le meilleur au monde. Tout le monde reconnaît que l'une des difficultés de l'immigration réside dans le fait que des millions de personnes, littéralement, souhaitent s'installer dans notre pays.


5192

Ce qui est le plus difficile pour moi, c'est de ne pas pouvoir acquiescer aux demandes que me présentent des députés: «Pourquoi votre ministère a-t-il rejeté cette personne?»; nous avons un système de points, ou: «Pourquoi n'a t-il pas obtenu un visa de visiteur?» Le fait que beaucoup de gens demandent à venir ici montre bien que la situation est bonne dans notre pays et que nous devons la protéger et l'encourager.

Notre pays ne peut pas devenir la patrie de tous et c'est la raison pour laquelle notre programme d'immigration se doit d'être sélectif. C'est un aspect naturel du programme. Nous sélectionnons les candidats à l'immigration pour servir l'intérêt de notre pays; nous devons cependant faire également preuve de compassion pour que notre politique en matière d'immigration puisse également sauver nos frères et nos soeurs qui le méritent et qui recherchent simplement une vie que vous et moi avons adoptée ou que nous avons automatiquement reçue. Le nouveau ministère sera responsable, entre autres, des demandes d'immigration, de l'établissement des niveaux d'immigration, des relations fédérales-provinciales concernant les programmes d'immigration, des visas, des réfugiés, de l'application de la Loi, des services d'établissement, des demandes de citoyenneté de la promotion de la citoyenneté. Nous changeons la façon dont nous envisageons et appliquons la citoyenneté dans ce pays.

(1220)

Il n'y aura plus de juges de la citoyenneté, parce que le système leur imposait des contraintes de temps et d'argent excessives. Il y avait 10 000 personnes, tous les mois, qui atteindaient d'obtenir leur citoyenneté.

Dans ma région métropolitaine de Toronto, certaines personnes ont attendu presque deux ans et demi, entre le moment où elles ont présenté leur demande et celui où elles ont prêté serment, pour avoir leur citoyenneté. C'était absurde. Les juges de la citoyenneté devaient procéder au cas par cas. Comme 95 p. 100 de toutes les demandes étaient approuvées, j'ai conclu que ce système nous coûtait beaucoup trop cher, en temps et en argent. Nous avons donc opté pour un processus administratif de type scolaire, c'est-à-dire un test écrit plutôt qu'un test oral. Nous allons également appliquer des normes et des règles uniformes dans toutes les régions du pays.

Nous ne perdons pas de vue non plus les cérémonies de remise des certificats de citoyenneté, auxquelles tous les députés ont participé ou auront l'occasion de participer, je l'espère, parce qu'il s'agit d'un hommage si émouvant et qu'elles nous aident à nous faire une meilleure idée de l'immigration. Pourquoi? Parce qu'elles n'auront plus lieu devant un tribunal, mais dans un auditorium.

Dans la circonscription du député de Carleton-Gloucester, les cérémonies avaient eu lieu dans un auditorium, devant les élèves, les parents, les contribuables, les policiers, la GRC et les médias locaux. Les voisins de ces citoyens assistaient à la cérémonie.

Ces personnes qui nous mettent mal à l'aise, voilà comment nous désignons parfois les nouveaux venus. Sont-ils comme nous? Qui sont-ils? Ils étaient là, sur l'estrade, en train de jurer fidélité à notre pays. Quel beau témoignage! C'est notre premier ministre, notre gouvernement qui encourage la tenue de ces cérémonies dans les communautés, et il ne s'agit pas d'une exception, mais d'une règle.

Ces cérémonies ne seront plus présidées par des juges de la citoyenneté qui, pour la plupart, ont fait un merveilleux travail. Personne ne les blâme, absolument pas. C'était le système qui devait être changé. Au lieu de juges de la citoyenneté, nous allons maintenant demander aux récipiendaires de l'Ordre du Canada de présider, à titre bénévole, ces cérémonies. Cela permettra de leur donner plus de panache, plus de visibilité.

Par exemple, le premier jour de la Semaine de la citoyenneté, nous avons organisé une cérémonie spéciale à l'Université de Toronto. Il y avait là trois récipiendaires de l'Ordre du Canada avec nous: Knowlton Nash, June Callwood et Maureen Forrester. Ces trois personnes sont mieux connues que le ministre, sans parler des juges de la citoyenneté. Les gens connaissent Knowlton Nash depuis 30 ou 40 ans. Pendant des années, la dernière chose à laquelle ils pensaient avant d'aller se coucher, c'était à Knowlton Nash. Soudainement, Knowlton Nash est là, sur l'estrade, en train de faire la promotion de la citoyenneté. Est-ce que la présence de récipiendaires de l'Ordre du Canada ne témoigne pas de l'importance de la citoyenneté? Je pense que oui.

Le 1er juillet, des cérémonies auront lieu pour la première fois à Halifax, sur le quai 21, notre équivalent de l'Île Ellesmere, de la statue de la liberté. Des millions d'immigrants sont arrivés par le quai 21. Les fils et les filles de la deuxième et de la troisième générations y retournent lorsqu'ils visitent la Nouvelle-Écosse. Ils se rendent au quai 21, dont ils ont entendu parler de leur père ou de leur mère. C'est notre statue de la liberté. Nous allons tenir une cérémonie de remise des certificats de citoyenneté sur le quai 21. Nous allons également tenir une cérémonie à Toronto et, pour la première fois, il y aura là des récipiendaires de l'Ordre du Canada, car nous tenons à montrer aux gens que les changements que nous avons apportés sont en train de se concrétiser.

Citoyenneté et immigration vont de pair. C'est pourquoi le nouveau ministère aura pour tâche principale de rehausser les valeurs, les obligations et les responsabilités rattachées à la citoyenneté, que j'ai mentionnées plus tôt.

Ce mois-ci marque également le 125e anniversaire de notre programme d'immigration. Fait intéressant, ce n'est pas la première fois que le gouvernement se lance dans un débat sur la création du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il y a presque 45 ans aujourd'hui, le premier ministre Saint-Laurent formait le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Donc, avec ce projet de loi, nous tirons en fait des leçons de notre histoire, de notre passé, où nous devons parfois aller puiser notre inspiration.

(1225)

J'aimerais citer brièvement un passage du discours qu'a tenu M. J. Coldwell à la Chambre, il y a 45 ans. Il n'était pas un libéral, mais il était l'un des plus grands parlementaires de son époque. Le 26 novembre 1949, M. Coldwell a dit, et je cite: «À mon sens, il est sage de confier au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration les problèmes intéressant les deux services en question. . . Or il importe non seulement de bien accueillir les nouveaux venus mais aussi de leur enseigner la valeur de la citoyenneté canadienne et de leur faire comprendre ce que le Canada représente pour eux.»


5193

Comme M. Coldwell, je suis immigrant et citoyen canadien. Je comprends donc fort bien la valeur et l'importance de ces mots.

Tous les députés admettent la nécessité de revoir notre politique de l'immigration et d'étudier son rôle à long terme dans le développement du pays. Nous sommes tous conscients du besoin d'améliorer le système d'immigration. La question nous préoccupe tous. Certains volets du système fonctionnent très bien, alors que d'autres doivent de toute évidence être revus.

C'est l'une des raisons pour lesquelles notre politique s'étale sur dix ans, car l'établissement des seuils d'immigration ne devrait pas être un exercice annuel. Je ne crois pas que l'on puisse décider de l'immigration à court terme car l'immigration au Canada, notre pays, est un investissement à long terme. On ne s'établit pas en six mois. On ne peut s'attendre qu'au bout d'une demi-année ou d'une année, l'immigrant s'est intégré à la société canadienne. Nous savons qu'il lui faudra une génération. Nous savons qu'à l'accueil, le pays fait, dans une certaine mesure, les frais de l'intégration. Toutefois, à mesure que l'immigrant s'intègre, il rembourse cet argent, au point de payer plus que le prêt initial. Dès lors, le pays est gagnant, sur le plan économique, social et culturel.

C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles nous procédons à une consultation plus vaste. Nous ne pouvons élaborer une politique décennale sans inviter les Canadiens à prendre part au processus. L'époque où nous fixions les seuils d'immigration sans inviter les instances municipales à la table est bel et bien révolue. Pourquoi ne pas inclure les municipalités? Après tout, les maires, les présidents de conseil et les conseillers municipaux se plaignent de n'avoir jamais été informés des niveaux approuvés pour cinq ans. Ils ne savaient pas combien d'immigrants leur ville ou village aurait à accueillir et ne pouvaient donc pas planifier en conséquence.

Je me suis rendu, la semaine dernière, à Winnipeg où avait lieu la réunion de la Fédération canadienne des municipalités. J'y ai donné l'engagement ferme du premier ministre et du gouvernement qu'elles feraient dorénavant partie de l'exercice. Nous n'étions pas obligés de le faire, mais une action sensée n'est jamais inutile.

Pourquoi exclure les commissions scolaires qui se plaignent, elles aussi, de ne pas être informées du nombre d'enfants nés d'immigrants ou de réfugiés qu'elles devront accueillir? Impossible pour elles de planifier, d'avoir les ressources voulues. Nous avons donc inclus les commissions scolaires dans nos consultations.

Les syndicats et les mouvements ouvriers diront, eux aussi, que ces consultations les intéressent en raison du nombre de leurs membres qui sont au chomâge. Ils nous demanderont combien de personnes nous prévoyons laisser entrer au pays, quelles seront leurs compétences, si nous favoriserons les métiers, la haute technologie ou la nouvelle économie et à raison de quel pourcentage. Autant les avoir tout de suite à la table!

Pour la première fois depuis longtemps, nous élargissons le processus de consultation et donnons aux gens la possibilité d'en suivre le déroulement. Le processus n'a pas été aussi ouvert depuis 1976, lorsqu'un autre ministre de l'Immigration a publié un livre vert et a consulté la population avant de proposer des modifications, des modifications importantes à la loi. Nous espérons l'imiter, et nous avons déjà commencé à le faire.

Nous invitons aussi le grand public à y prendre part. Déjà, cinq assemblées publiques sont prévues un peu partout au pays. La première, à laquelle je serai présent, a lieu ce soir, à Montréal. De plus, huit groupes d'étude ont été formés pour examiner des questions particulières.

(1230)

Nous avons dix groupes qui travaillent de concert avec des Canadiens sur dix questions précises que 50 de leurs compatriotes de toutes les couches de la société ont jugé primordiales.

Tous les députés ont reçu de mon bureau une trousse visant à les renseigner, à les informer et à les orienter sur la façon dont ils pourraient tracer la voie dans leur propre circonscription et prendre contact avec les Canadiens, les organisations non gouvernementales, les avocats, les groupes de défense. Lorsque nous avons ouvert le débat, nous avons bien sûr pris des risques. Est-ce qu'il n'en est pas toujours ainsi pour n'importe quoi? Bien sûr parce que lorsqu'on ouvre le débat, on s'expose à toute la gamme de problèmes et on ne fait pas cela dans le but de se faire bien voir.

Si nous faisions cela uniquement dans le but de nous faire bien voir, ce serait suicidaire vu que les consultations auxquelles nous nous sommes livrés en octobre sont les plus exhaustives que l'on puisse avoir, puisqu'il s'agissait d'élections générales.

Notre gouvernement est majoritaire. Nous disposons d'un livre rouge que nous suivons de sorte que nous aurions pu dire que nous sommes sur la bonne voie. Nous ne nous adonnons pas là à un simple exercice de relations publiques; personne ne nous pousse à agir ainsi. Nous voulons agir ainsi parce que nous avons la ferme conviction que c'est la chose à faire, que si vous laissez des choses se tramer et n'en tenez pas compte, elles prendront de l'ampleur et vous n'aurez plus aucune prise sur elles. Vous serez alors aux prises avec un problème.

L'objectif de ce gouvernement est de bien gouverner, d'ouvrir la voie et d'être une source d'inspiration. Pour ce faire, il doit apaiser les craintes des Canadiens, s'attaquer aux problèmes et y trouver des solutions.

Je crois qu'en consultation nous pouvons remédier à la situation. Des gens me disent que je devrais fermer la porte aux immigrants. Pourquoi continuer à accueillir d'autres immigrants, me disent-ils, lorsque mon François et ma Julie ne peuvent pas trouver du travail? De quel droit gardez-vous la porte ouverte?

Je ne veux pas demander à Mme Tremblay et à M. Durand de me ficher la paix en leur disant: J'ai pris ma décision. C'est le livre rouge. Notre gouvernement est majoritaire. Qui êtes-vous? Je ne serai pas ce genre de ministre parce que nous ne pouvons nous offrir un tel luxe. Parce que M. ou Mme Tremblay, lorsqu'ils parlent de François ou de Julie, aiment François et Julie tout autant que nous aimons nos propres enfants. S'il y a une chose que nous avons entendue pendant la campagne électorale, c'est


5194

que les parents ont eu la vie assez facile au Canada, mais qu'ils s'inquiètent vraiment pour leurs enfants, pour leur avenir, leur éducation et leur carrière. S'il y a une chose que j'ai entendue dans ma circonscription, c'est que les gens ont été assez secoués et qu'ils craignent qu'il en soit de même pour leurs enfants. Ils ont peur pour eux étant donné la situation économique.

Ainsi Mme Durand et Mme Tremblay s'inquiètent par amour pour leurs enfants. J'aime mon Adrianna autant qu'ils aiment leur François et leur Julie et c'est la raison pour laquelle je ne dirai jamais à ces parents de me ficher la paix.

Je ne ferai pas non plus ce que certains sont disposés à faire, c'est-à-dire embrasser Mme Tremblay en lui disant: «Vous avez absolument raison. Si votre fils ou votre fille n'a pas d'emploi, il est évident que je devrai fermer la porte.»

Je ne serai pas non plus ce ministre, malgré le respect que je porte à cette dame. Ce que je préfère dire comme ministre, c'est ceci: «Mme Tremblay, M. Durand, le temps est venu de nous parler. Le temps est venu de regarder ensemble les faits. Le temps est venu de rompre le pain, de regarder les faits, de nous demander si les immigrants aideront votre fils ou votre fille ou leur feront du tort, si c'est l'économie qui est à l'ordre du jour.»

Je peux demander à une Mme Smith et à un M. Jones à Toronto s'ils pensent que les immigrants nous volent nos emplois ou s'ils en créent. Toronto est dans un creux économique depuis quelques années et je crois que beaucoup de gens diraient qu'ils nous volent des emplois parce que l'économie a porté un dur coup à presque toute la région métropolitaine et que nous en sortons.

Je suis assez réaliste pour savoir qu'ils me répondront que les immigrants peuvent nous coûter des emplois. Si j'allais à Vancouver, dans la région du pays d'où vient le secrétaire d'État aux Affaires internationales, et si je demandais à un Canadien s'il pense que les immigrants créent des emplois ou qu'ils nous les volent, ils me répondraient certainement: «Monsieur Marchi, vous voulez rire. Regardez Vancouver. Regardez la Colombie-Britannique.»

(1235)

L'une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas entendu parler de récession ici, ce sont les immigrants, les immigrants investisseurs de l'Asie du Pacifique, par exemple.»

Le Canadien à Vancouver et le Canadien à Toronto ne peuvent pas avoir tous les deux raison. Il doit y avoir une réponse générale et je sais que cela dépend du nombre d'immigrants dans une catégorie donnée, de l'endroit où ils vont et des compétences qu'ils ont. C'est pourquoi c'est plus qu'une affaire de chiffres. S'agit-il de 250 000 ou des 150 000 dont parlent les réformistes? Je voudrais savoir où ils seront prêts à couper. Ils ne me le disent pas.

Mais mettons cet argument de côté, car il y a cet autre jeu des chiffres. Combien y a-t-il d'immigrants dans la catégorie de la famille par opposition à la catégorie des indépendants, dans la catégorie des réfugiés par opposition à celle des étudiants et à toutes les autres catégories?

Ces deux Canadiens ne peuvent pas avoir tort ou raison de façon générique. J'espère pouvoir trouver un terrain d'entente avec Mme Smith. Pour ma part, je crois que, dans l'ensemble, les immigrants créent de l'activité économique que ce soit en achetant un produit et en amorçant la reprise par la consommation, ce qui ne s'est pas encore produit dans notre pays et ce qui doit se produire pour que la reprise économique soit complète; ou encore en dépensant leurs épargnes chez nous, ou encore en créant des entreprises.

Je suis convaincu que dans l'ensemble, et la plupart des études le confirmeront, «nous avons encore du travail à faire sur ce plan», l'immigration crée de l'activité économique. Si nous arrivons à trouver un terrain d'entente, nous pourrons peut-être mettre fin au réflexe de fermer la porte aux immigrants chaque fois que l'économie va mal.

Nous pourrons peut-être également réserver aux partisans de cette école le même sort qu'ont connu ceux qui croyaient que la Terre était plate. Si quelqu'un croyait qu'elle était ronde, on songeait à l'emmener au loin: bien sûr que la Terre était plate, puisque, si l'on regardait au loin, au delà de la dernière habitation, au bout de la route, il n'y avait plus rien. Comment s'imaginer que la Terre était ronde alors qu'on marchait sur un beau tapis vert et plat, à la Chambre des communes.

On avait tort. Beaucoup d'idées préconçues circulent: elles ne contribuent pas à la nation. Elles ne donnent pas d'élan, elles ne créent pas de richesse. Nous le savons, et c'est le but de l'exercice.

Si un député rencontrait Mme Untel et M. Tout-le-monde, il constaterait qu'ils ont l'esprit ouvert, qu'ils sont tolérants. Le pays n'est pas moins tolérant. Voyez ce qui s'est produit en 25 ans dans les pays où l'on mesure le chomâge et l'immigration. Il faut bien sûr s'attendre à des hauts et à des bas. Mais arrêtez-vous à la moyenne. Ne me citez pas le pire scénario. Ne faites pas comme les médias et ne me donnez pas uniquement des mauvaises nouvelles.

J'avoue que la tolérance baisse en période de récession économique. Par contre, je demanderais aux députés de voir quelle est la tolérance lorsque l'économie va bien. Si l'on veut parler d'un scénario, il faudra aussi parler de l'autre, puis faire la moyenne avant de juger du niveau de tolérance des Canadiens.

J'ai la profonde conviction que les Canadiens ont l'esprit ouvert et qu'ils sont tolérants. Ils veulent connaître les faits. Ils n'aiment pas les abus. Ils ne le devraient d'ailleurs pas. Il ne faudrait pas faire preuve de tolérance à l'égard de ceux qui n'ont rien à faire ici, mais tel ne devrait pas être le cas de la politique dans son ensemble. Je crois en ce genre de tolérance.

J'ai devant moi des notes que mes fonctionnaires ont préparées, mais je ne vais pas les lire, puisque j'ai essayé aujourd'hui de faire ressortir l'essentiel de mon ministère.


5195

Je vais terminer sur une note très personnelle. Peut-être ne devrais-je pas le faire, mais tant pis. En 1984, je me suis battu pour obtenir une investiture et cette bataille a été l'une des plus rudes pour certains d'entre nous. Nous avions commencé à 19 h un lundi soir, pour terminer à 3 h 30 le mardi matin, au troisième scrutin. Nous nous sommes alors rendus dans notre restaurant italien préféré, chez Tony, pour fêter jusqu'à six heures du matin. Je suis ensuite rentré chez moi prendre une douche avant de me mettre en quête d'un bureau pour ma campagne, étant donné que des libéraux se battaient encore entre eux, parce que leur candidat avait décidé, trois jours après le début de la campagne, de ne pas se présenter.

Nous avons tous eu des prises de bec avec les conservateurs cette année-là; certains d'entre nous ont survécu, mais la campagne a été difficile. J'étais tellement gonflé à bloc, comme n'importe qui après une investiture, que je me suis rendu dans la région la plus difficile de ma circonscription, celle des conservateurs, à l'extrémité sud.

(1240)

Avec mon épouse, nous avons voulu aller de porte en porte après avoir trouvé un bureau pour ma campagne. À la première maison, c'est un homme d'une soixantaine d'années qui a ouvert: «Que puis-je faire pour vous?» J'ai répondu: «Bonjour, je suis Sergio Marchi et je suis votre candidat libéral. Je voulais simplement vous saluer en espérant obtenir votre confiance pour cette élection». Il me répondit: «Comment vous appelez-vous?» Je dis: «Sergio Marchi». Il me dit: «Quel genre de nom est-ce?» Je répondis: «C'est un nom canadien. Mes parents sont Canadiens et je suis Canadien, je suppose donc qu'il s'agit d'un nom canadien». Il me répondit: «Ne vous moquez pas de moi. D'où vient ce nom?» Je lui dis: «Je suis né en Argentine. Mes parents sont d'origine italienne et nous sommes venus ici en 1959». Il poursuit: «Mes parents sont morts depuis 25 ans et s'ils pensaient que je voterais un jour pour un député italien, ils se retourneraient dans leur cercueil.»

Je me suis tourné vers mon épouse et celle-ci a cru que j'étais tombé sur la tête, mais nous avons pensé tous les deux la même chose sans le dire: «C'est la première porte à laquelle nous frappons et voilà l'accueil que l'on nous réserve. Nous devons passer par là pendant une campagne.»

Comme je suis un Canadien entêté de descendance italienne, plutôt que de suivre les conseils que nous donnent les organisateurs lorsqu'une situation de ce genre se présente et d'aller frapper à une autre porte, de ne pas perdre de temps, je suis resté là.

Je suis resté là et je lui ai demandé: «Pour qui allez-vous voter?» Il a répondu: «Ce n'est pas de vos affaires.« J'ai rétorqué: «Vous avez tout à fait raison, mais j'ai perdu votre vote, alors quelle différence?» Il m'a dit: «Je vais voter conservateur.» Je lui ai alors demandé: «Savez-vous qui est le candidat conservateur?» Il m'a répondu: «Non.» Je lui ai ensuite demandé: «Voulez-vous que je vous donne son nom?» Il a répondu: «Oui». Je lui ai dit: «Il s'appelle Frank DiGiorgio.» Il m'a regardé et m'a dit: «Vous vous croyez bien malin, n'est-ce pas?» J'ai ajouté: «Non, monsieur, c'est la vérité.» Il a poursuivi: «Pour la première fois de ma vie, je vais voter socialiste.» Je lui ai alors dit: «Connaissez-vous le nom du candidat socialiste de votre circonscription?» Il a répondu: «Non.« Je lui ai dit: «Je vais vous le dire.« Il a répondu: «Je ne veux pas le connaître». Je lui ai alors dit: «Je vais quand même vous le dire». Il s'appelle Bruno Pasquantonio. Il n'y a pas plus italien que cela. Ainsi à moins de voter communiste ou de ne pas voter, accordez-moi cinq minutes.

Il m'a invité ainsi que mon épouse à prendre le thé et j'ai commis ma seconde erreur. Nos organisateurs nous disent de ne pas accepter de telles invitations et de poursuivre notre route. Nous sommes entrés à l'intérieur et nous avons passé 10 minutes à discuter.

Savez-vous le plus beau de cette histoire? Il s'agit d'une histoire vraie. Lorsque nous avons quitté cette maison pour aller à la porte suivante, nous avons vu sur la pelouse de cet homme une pancarte qui disait: «Votez pour Sergio Marchi, libéral, York-Ouest». Ce n'est pas le fait qu'il avait une pancarte du Parti libéral. Ce qui s'est passé lorsque je me suis arrêté au premier endroit, c'est l'histoire de notre ministère aujourd'hui. Une fois qu'il a constaté que je n'étais pas étrange, que j'avais fréquenté l'école de l'endroit, que je parlais anglais, que j'étais tout à fait correct, il a dit: «Installez une pancarte sur mon terrain.»

Voilà le genre de discussion que je veux avoir avec Mme Smith et M. Jones, parce que si j'étais allé cogner à la deuxième porte, j'aurais dit du mal de la première personne qui m'a insultée. Toutefois, nous sommes restés là à discuter. Il a installé la pancarte de mon parti. C'est ça, être Canadien. C'est ça, la tolérance. On ne l'avait toutefois pas cru dans un premier temps.

Voilà pourquoi nous avons décidé de mener des consultations de ce genre. La citoyenneté et l'immigration vont de pair et c'est une formule qui a fonctionné pour notre pays. Personne ne croit que le pays cessera de grandir à la fin de cette journée. L'édification d'un pays est un cheminement long et lent et l'immigration est un outil parmi d'autres qui nous aidera à façonner et à bâtir un Canada encore meilleur pour nous tous. C'est donc un privilège et un honneur pour moi de proposer ce matin l'adoption de ce projet de loi en deuxième lecture.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Madame la Présidente, je prends aujourd'hui la parole dans le cadre du débat sur le projet de loi C-35 constituant le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

(1245)

Ce projet de loi modifie également plusieurs lois, dont la Loi sur l'accès à l'information, la Loi sur le ministère du Multiculturalisme et de la Citoyenneté, la Loi sur la Commission de l'emploi et de l'immigration, la Loi sur la gestion des finances publiques, la Loi sur l'immigration, la Loi sur le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, la Loi sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la rémunération du secteur public et la Loi sur le traitement.

Comme vous le voyez, madame la Présidente, il s'agit d'une loi administrative assez complexe. Le ministre vient de nous signaler qu'il avait pris la décision de transférer l'immigration de l'ancien ministère de la Sécurité publique au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il s'agissait d'une décision arbitraire du Parti conservateur prise en juin 1993. Au sein du Bloc, nous avons dénoncé cette décision du Parti conservateur, à l'époque, parce qu'on associait l'immigration et les immigrants à des actes criminels constituant probablement une atteinte à la


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sécurité de l'État. Nous nous sommes fortement opposés à cette décision de l'ancienne première ministre, Mme Kim Campbell.

Face à la vaste réorganisation du nouveau gouvernement du Parti libéral et à la complexité de ce projet de loi, nous aurions aimé que le gouvernement, et en particulier le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, nous soumettent un document explicatif et détaillé de ce projet de loi.

Nous voterons contre ce projet de loi en deuxième lecture, car il y a certains articles que nous ne pouvons pas accepter. Par exemple, l'article 4 du projet de loi qui établit que «les pouvoirs et fonctions du ministre s'étendent de façon générale à tous les domaines de compétence du Parlement et liés-et je souligne le mot liés-à la Citoyenneté et à l'Immigration».

Il nous semble qu'il s'agit d'un article trop large et trop vague. Nous voudrions que la compétence du ministre soit définie d'une façon claire et précise. En tout cas, nous voulons éviter que le ministre abuse de ce pouvoir et qu'il y ait dédoublement avec d'autres ministères et agences du gouvernement.

Nous souhaitons surtout que le ministre respecte scrupuleusement le champ de juridiction des provinces en matière d'immigration. Nous avons déjà dénoncé l'intrusion du ministre dans les centres d'orientation et de formation pour les immigrants confiés au Québec. Nous ne permettrons jamais que le ministre intervienne dans le domaine de l'éducation, un champ de compétence exclusif des provinces.

Une autre objection majeure à ce projet de loi se trouve à l'article 5 qui stipule que «le ministre peut, avec l'approbation du gouverneur en conseil, conclure avec une province, ou l'un de ses organismes-et je souligne le mot organismes-ou un groupe de provinces ou avec des gouvernements étrangers ou organisations internationales un accord visant à faciliter la formulation, la coordination et l'application des politiques et programmes relevant de sa compétence».

Nous ne sommes pas d'accord pour inclure dans la loi le mot «organismes». C'est dangereux. Il faut que le gouvernement fédéral négocie et signe des ententes avec les gouvernements provinciaux dont relèvent ces organismes. Avec un tel mot, le gouvernement fédéral pourrait court-circuiter l'autorité des provinces, chose que nous ne pouvons pas accepter.

(1250)

Un autre article que nous ne pouvons accepter dans sa forme actuelle, c'est l'article 10 modifiant l'article 4 de la Loi sur le ministère du Multiculturalisme et de la Citoyenneté qui stipule que:

Les pouvoirs et fonctions du ministre s'étendent d'une façon générale à tous les domaines de compétence du Parlement liés, au Canada, au multiculturalisme et à l'identité canadienne.
De plus, l'article 11 ajoute la fonction de promouvoir la compréhension de l'identité canadienne. Cette disposition n'existait pas dans la législation actuellement en vigueur. Pourquoi vouloir l'ajouter à ce moment-ci, sinon pour contrecarrer la montée du mouvement souverainiste au Québec? De plus, les responsabilités respectives qu'auront à cet égard le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et celui du Patrimoine canadien ne sont pas départagées clairement.

Madame la Présidente, vous n'êtes pas sans ignorer que l'unité canadienne constitue un sujet qui divise profondément le Québec et le Canada anglais, le parti gouvernemental et l'opposition officielle. Pourquoi vouloir inclure cette disposition controversée dans un projet de loi dont le seul objectif devrait être celui de structurer juridiquement le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration?

Nous voterons contre le projet de loi en deuxième lecture et nous souhaitons qu'il soit déféré pour étude au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.

Je profite de cette occasion pour dénoncer, encore une fois, le ministre pour avoir lancé son show sur l'identité canadienne, alors que le Bloc québécois a fait élire les deux tiers des députés du Québec, à la veille d'élections provinciales que le Parti québécois va gagner et à la veille également d'un référendum qui aura lieu en 1995.

Il est évident qu'il n'a organisé ces consultations hâtives et prématurées sur la citoyenneté que dans le seul but de contrecarrer la lutte du peuple québécois. La révision de la Loi sur la citoyenneté ne constituait aucunement une priorité, ni du parti gouvernemental, ni des partis d'opposition. Une résolution à cet effet et la discussion lors d'un récent congrès du Parti libéral du Canada, tenu à Ottawa en mai dernier, n'ont soulevé aucun intérêt parmi les délégués.

Le ministre devrait par contre s'occuper de la solution des problèmes concrets, plus immédiats et plus urgents, comme c'est le cas de plus de 220 000 dossiers en retard de résidents permanents qui attendent parfois depuis plusieurs années pour obtenir leur citoyenneté et leur passeport canadien.

Nous dénonçons également l'intention du ministre de fermer le Bureau de la citoyenneté situé sur la rue Saint-Denis, au coin de Beaubien, à Montréal, et sa décision de centraliser et de transférer le service des visas en Ontario et en Alberta.

En plus de la citoyenneté, le deuxième volet du nouveau ministère, c'est l'immigration, une matière de juridiction partagée depuis la naissance de la Confédération en 1867, le tout, selon l'article 95 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, partagé entre le gouvernement fédéral et les provinces.

(1255)

C'est en 1869 que le Canada, alors peuplé de 3 millions d'habitants, se donna la première Loi sur l'immigration. Le 25 juin prochain, nous commémorerons, comme le ministre l'a dit tout à l'heure, le 125e anniversaire de cette première loi et des premiers programmes dans ce domaine.

Je voudrais ici rendre hommage aux 12 millions de nouveaux arrivants qui, depuis lors, sont venus se joindre au Canada. Ensemble, avec les Premières nations et les deux peuples fondateurs, ils ont bâti ce pays et ils continuent d'arriver de tous les coins du monde pour participer et ajouter leur apport très positif au développement économique, politique, culturel, social du Canada et du Québec.


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En ma condition d'immigrant moi-même depuis 20 ans et de critique du Bloc québécois en matière de citoyenneté et d'immigration, je leur dis que mon parti et moi-même valorisons au plus haut niveau leur contribution précieuse à l'édification de ce pays.

Nous pensons que l'immigration devrait être de compétence exclusive du Québec. Il a besoin de tous les pouvoirs en cette matière pour assurer son poids démographique et sa survie en tant que société distincte et comme seul État francophone en Amérique du Nord. C'est une revendication permanente du Québec, et vous le savez, madame la Présidente, aujourd'hui, nous avons notre propre ministère des Relations internationales, des Communautés culturelles et de l'Immigration.

Nous avons fait des progrès, mais cela est insuffisant face aux enjeux qu'a à relever le Québec. Depuis 1971, le Canada et le Québec ont signé des ententes en matière d'immigration. En 1971, ont été signées les ententes Cloutier-Lang; en 1975, les ententes Bienvenue-Andras.

La troisième et la plus importante, c'est l'entente Couture-Cullen, en 1978, durant le règne du gouvernement du Parti québécois. L'accord signé en février 1991 par les ministres McDougall et Gagnon-Tremblay augmente et précise les pouvoirs du Québec en matière d'immigration. En vertu de cette entente, le Québec a le pouvoir de sélectionner les immigrants indépendants désireux de s'établir dans la province.

En plus de la sélection des immigrants, le Québec s'occupe de leur intégration à la société québécoise et de la détermination des niveaux d'immigration à destination de la province. La francisation des immigrants, c'est le rôle des COFI.

Selon cet accord, le Canada reste responsable des normes et des objectifs nationaux relatifs à l'immigration, de l'admission des immigrants, ainsi que de l'admission du contrôle des visiteurs en ce qui concerne la criminalité, la sécurité et la santé, en plus du traitement administratif des demandes et de l'admission physique aux portes d'entrée au pays.

Le Québec est donc le responsable exclusif de la sélection, de l'accueil et de l'intégration des immigrants à destination de la province. Concernant les niveaux d'immigration, le gouvernement fédéral doit informer le Québec avant le 30 avril de chaque année des options à l'étude quant aux futurs niveaux d'immigration en les répartissant entre les diverses catégories d'immigrants.

Le Québec, quant à lui, doit faire connaître au Canada, avant le 30 juin de chaque année, c'est-à-dire dans quelques jours, dans quelques semaines, le nombre d'immigrants qu'il compte accueillir au cours de l'année ou des années à venir, en les répartissant également par catégories.

Il faut ajouter que la Loi sur l'immigration exige que le ministre consulte les provinces à propos des besoins démographiques, des questions de marché de travail et de l'établissement dans les régions.

(1300)

Un point très important de cet accord est que le gouvernement fédéral s'engage formellement à se retirer des services d'accueil, d'intégration linguistique et culturelle du programme de counselling et de placement à l'intention des immigrants.

Le gouvernement du Canada accorde une juste compensation au Québec pour de tels services. Ces compensations financières sont les suivantes: 75 millions de dollars pour l'année 1991-1992; 82 millions pour l'année 1992-1993; 85 millions pour l'année 1993-1994 et 90 millions pour l'année 1994-1995. Par la suite, les compensations correspondront au montant de base de 90 millions de dollars et augmenteront au même rythme que les dépenses fédérales en général.

Mais revenons à l'histoire. Désireux de développer le pays par l'industrialisation et la conquête de l'Ouest, le Canada alors recrute une abondante main-d'oeuvre étrangère, surtout des paysans chinois. On perce aussi les Rocheuses et on unit l'Est à l'Ouest par le chemin de fer. Ce mouvement migratoire, jusqu'à la Seconde Geurre mondiale, aura servi en pratique au seul hémisphère nord. Les immigrants sont en effet des Britanniques, des Américains, des Finlandais, des Italiens, des Russes, des Allemands, des Ukrainiens, des Juifs, des Français et des Polonais.

Cependant, après la Seconde Guerre mondiale, la décolonisation et les progrès enregistrés en matière de communication ont donné une ampleur nouvelle aux mouvements migratoires. Ces vagues migratoires d'ailleurs vont probablement s'amplifier dans les années à venir.

En 1990, le Fonds des Nations Unies pour les activités en matière de populatiion lançait un avertissement: la population mondiale augmentera d'un milliard d'habitants au cours de la présente décennie.

La plupart de ces habitants, et la plus féconde, vivent dans les pays en voie de développement. Beaucoup d'entre eux veulent aller vers des pays plus prospères et moins peuplés. Le Canada et le Québec sont des contrées de choix pour les candidats à l'immigration par leur richesse et leurs vastes étendues.

Le faible taux de fécondité de la population incite le Canada, et particulièrement le Québec, à recruter un nombre important d'immigrants. De plus, il faut souligner que nous perdons une partie de notre population par l'émigration. En gros, on considère que l'émigration représente le quart de l'immigration. Par exemple, on estime qu'au cours des années 1980, l'émigration vers l'Italie a dépassé l'immigration en provenance de ce pays.

Avec l'Accord McDougall et Gagnon-Tremblay, le Québec peut recevoir un nombre d'immigrants proportionnel à son poids démographique, plus 5 p. 100. Donc, le Québec pourrait accueillir, théoriquement, 30 p. 100 de l'ensemble des immigrants reçus au Canada.


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Dans les faits, le Québec a accueilli 47 532 ressortissants étrangers sur les 248 200 immigrants que le Canada a reçus durant l'année 1992. La part du Québec se situe donc à 19,2 p. 100, soit à peu près l'équivalent de la moyenne observée pour les cinq dernières années, qui était de 19,1 p. 100.

La discussion du projet de loi C-35 nous incite à examiner sommairement ce service gouvernemental, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui veut prendre sa structure légale, mais qui, dans les faits, a déjà dépassé le stade des premiers pas. Et ce que nous y voyons n'est guère encourageant.

(1305)

À cause de ses politiques timides, ambiguës et incohérentes, nous ne pouvons savoir dans quelle direction le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration s'en va. Il privilégie les consultations à n'en plus finir et tarde trop à prendre les décisions qui s'imposent. On lui a accordé jusqu'ici une période de grâce. Face à la gestion contestable, inefficace et parfois inhumaine des conservateurs, il avait suscité un certain espoir. C'est fini. Aujourd'hui, les critiques affluent de partout à l'égard de ses politiques incohérentes, notamment des avocats spécialisés en immigration, des organismes d'aide aux réfugiés, des groupes ethniques, des fonctionnaires, etc. Probablement que vous allez le constater ce soir, à Montréal.

Il a publié deux rapports qu'il avait lui-même commandés: le rapport Hathaway et le rapport Davis-Waldman. Les recommandations sont claires et précises. Mais le ministre ne sait pas quoi en faire. Il suspend les déportations, mais il ne dit pas ce qu'il va faire des 10 000 revendicateurs du statut de réfugié dont les demandes ont été rejetées par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR).

Mon bureau reçoit de nombreux appels à cet égard. Les fonctionnaires ne sont pas plus informés que nous. Dans l'intervalle, c'est l'incertitude complète chez les demandeurs d'asile. Quels dossiers seront révisés, par qui, quand, pour quels motifs? Personne ne le sait.

Un autre exemple d'incohérence: le ministre annonce qu'il envisage de soumettre les aspirants réfugiés au détecteur de mensonges, pour éviter les cas de fraude, ce qui, selon nous, serait illégal. Quelle idée farfelue!

Le ministre et les autorités de l'Immigration ont parfois une méconnaissance profonde du contexte politique extrêmement dangereux qui existe dans certains pays d'où originent les requérants d'asile, en plus, parfois, d'un manque de compassion. Je mentionne comme preuve le dossier de cette jeune femme enceinte qu'on a déporté le 23 février dernier, en lui administrant des sédatifs sans son consentement, dans son pays d'origine, le Zaïre, dévasté par une guerre civile larvée. J'ai dit au ministre, et je le répète: «Un cas d'une telle gravité mérite une enquête indépendante, parce qu'il s'agit d'un comportement indigne d'une société civilisée». Pourquoi le ministre refuse-t-il d'ordonner une telle enquête?

Il existe un autre domaine où la méfiance est érigée en système. En effet, l'on exige de plus en plus des personnes n'étant pas titulaires de passeport de se présenter à leur consulat ou ambassade respectifs pour en obtenir un, malgré le fait qu'ils aient déjà obtenu la reconnaissance du statut de réfugié. Vous savez, si on doit se rendre au consulat ou à l'ambassade du pays d'origine, la vie du réfugié pourrait être en danger, mais surtout la vie et la sécurité de la famille qui reste dans le pays d'origine.

De plus, je demande au ministre de soumettre toute nouvelle nomination de commissaires à la CISR au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Jusqu'à présent, aucune nomination n'a été examinée par ce comité, malgré les allégations de favoritisme dans certains cas.

Enfin, je tiens à dénoncer la décision du ministre de mener des consultations sur les niveaux et les politiques d'immigration pour les cinq prochaines années, à l'extérieur du Parlement, et au coût de plus de un million de dollars.

(1310)

C'est le rôle du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de s'occuper de ces consultations qui constituent une priorité pour l'opposition officielle et pour l'opinion publique au Canada et au Québec. Au sein du comité, tous les partis sont représentés, le parti gouvernemental, celui de l'opposition officielle et le Parti réformiste, ce qui n'arrive pas dans les différents groupes de travail que le ministre a formés, où le Bloc québécois est totalement absent. Ce n'est pas démocratique de mener ces consultations sans que l'opposition soit présente.

Pour tous ces motifs, nous voterons contre le projet de loi C-35.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Madame la Présidente, permettez-moi d'abord de dire que j'approuve la fusion des fonctions relatives à l'immigration et à la citoyenneté au sein d'un même ministère. Cette fusion était logique et nécessaire. Je suis heureux de constater qu'on procède avec célérité à la mesure visant à concrétiser cette fusion et qu'au lieu de faire valoir des objections, le député bloquiste qui vient de parler a manifesté son appui.

Je profite de l'occasion pour offrir mes meilleurs voeux de succès à celui qui deviendra officiellement sous peu ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je suis d'avis que le responsable de ce portefeuille doit pouvoir compter sur un appui solide, car sa tâche est lourde. Il lui faut aussi une grande dose de sagesse, d'application et de sollicitude, car, loin de se limiter à gérer des dollars et des cents, le ministère s'occupe de vies humaines. Il faut aussi penser que dans ce ministère, comme dans tous les autres qui forment le gouvernement, il faut suivre de près les engagements financiers et surveiller la façon dont l'argent est dépensé.

À titre de députés de l'opposition, nous devons rappeler au ministère de l'Immigration que toutes les dépenses doivent faire l'objet d'un examen minutieux et qu'il revient à chacun de faire sa part pour alléger le lourd fardeau de la dette et du déficit qui pèse sur le Canada. Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration doit aussi assurer l'équilibre entre les besoins du Canada et son engagement à l'échelle internationale. En effet, nous devons accueillir une partie des centaines de millions de migrants dans le monde qui veulent venir au Canada.

Depuis longtemps, les Canadiens sont réputés pour leurs sentiments humanitaires en matière d'immigration. Notre pays pos-


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sède un héritage peu commun du fait qu'il a été presque entièrement bâti par des vagues successives d'immigrants. Cet héritage est maintenant inscrit dans la conscience collective des Canadiens et fait même partie de l'image qu'ils ont d'eux-mêmes.

Cependant, la façon dont cet héritage se manifeste est très compromise de nos jours. La plupart des Canadiens reconnaissent volontiers les antécédents du Canada en matière d'immigration et ils considèrent précieuse la tolérance manifestée à l'égard des nouveaux arrivants, mais en même temps, ils ne comprennent pas l'orientation que suit le Canada en ce domaine depuis une dizaine d'années.

Ils ne peuvent plus considérer l'immigration comme un bienfait, car ils sont inquiets de la situation actuelle. C'est là un problème qui doit retenir l'attention du nouveau ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Un gouvernement qui refuse de se plier à la volonté de la majorité des électeurs, qui lui demandent de modifier de façon importante ses politiques, se prépare de durs lendemains.

Je félicite le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration pour sa nomination. Au nom des Canadiens, je lui souhaite bonne chance. J'ai toutefois le regret de lui signaler que certaines mesures du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration ont mal tourné. La politique d'immigration causait de grands problèmes au Canada il y a six mois et elle lui en pose de plus graves encore aujourd'hui.

Il y a six mois, certains affirmaient que le Canada accueillait trop d'immigrants. Il s'agit d'une déclaration très franche, je l'admets. Cette déclaration pourra même mettre de nombreux intervenants dans le domaine, comme on dit dans la jargon bureaucratique moderne, dans tous leurs états. C'est pourtant vrai. À l'heure actuelle, il y a trois grands pays d'accueil: le Canada, l'Australie et les États-Unis.

(1315)

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration aime beaucoup chiffrer les objectifs en matière d'immigration, alors, faisons de même. Chaque année, les États-Unis et l'Australie acceptent un nombre d'immigrants représentant environ 0,4 p. 100 de leur population. Cette année, comme le gouvernement nous le rappelle souvent, le Canada accueillera un nombre d'immigrants correspondant à 1 p. 100 de sa population, soit 2,5 fois plus d'immigrants par habitant que les autres grands pays d'accueil. Cela fait 2,5 fois plus d'immigrants par habitant chaque année.

Par ailleurs, le Parti réformiste estime que le Canada devrait accepter environ 150 000 immigrants par année. Parce que nous avons fait cette modeste proposition, notre collègue, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, nous accuse de tenir des propos incendiaires et d'être contre les immigrants. Revenons aux chiffres. Cent cinquante mille immigrants par année représentent environ 0,55 p. 100 de la population canadienne.

C'est donc dire que, si la politique du Parti réformiste était appliquée, le Canada accueillerait encore plus d'immigrants que tout autre pays du monde, et de loin. Parce que nous avons proposé ce petit rajustement, on nous a parfois accusés d'être contre les immigrants et de tenir des propos incendiaires. Qui tient des propos incendiaires? Est-ce le Parti réformiste en proposant que le Canada continue d'être le plus grand pays d'accueil au monde ou est-ce le ministre en prétendant que nous sommes opposés à l'immigration ou que nous avons des préjugés contre les immigrants? La réponse est claire.

On a dit aux Canadiens que les objectifs en matière d'immigration étaient fondés sur des faits et que certaines données prouvaient la nécessité d'accueillir un quart de million d'immigrants par année, mais nous attendons encore de voir ces chiffres. Où sont les chiffres? Ils n'ont pas encore été présentés à la Chambre ni au peuple canadien.

Tout ce que le ministre a trouvé pour appuyer la thèse de son gouvernement voulant que le Canada doive recevoir en immigrants l'équivalent de la population de Calgary au cours des trois prochaines années, c'est de déterrer un rapport publié en 1991 par le Conseil économique du Canada et cela, en dépit du fait que, dans la conclusion de ce rapport, on recommande un objectif de 175 000 immigrants environ pour cette année. On y déconseille en outre d'accueillir 250 000 immigrants par année ou plus parce que le Canada aurait du mal à en intégrer un tel nombre. Ce sont là les seuls faits que le ministre a pu produire.

Je me réjouis de constater qu'il y a moyen de trouver des faits et, si le ministre manque de données empiriques, je me ferai un réel plaisir de lui en fournir. Voici quelques faits. En 1979, la contribution économique des immigrants a chuté. D'habitude, les immigrants étaient plus instruits et mieux rémunérés que les Canadiens. Eh bien, cela n'est plus vrai. Les immigrants sont tellement nombreux qu'ils ont plus de mal que jamais à s'adapter sur le plan social et économique.

Le ministre dit qu'il faut renouveler une population vieillissante. Voici quels sont les faits. La population canadienne n'est pas en train de décliner. En fait, elle s'accroît et va continuer de s'accroître, immigration ou pas, jusqu'en 2026 où elle atteindra 30 millions d'habitants. Cela ne tient pas compte de l'immigration. Puis, elle amorcera un lent déclin jusqu'à ce qu'elle se stabilise à 18 ou 20 millions d'habitants dans un siècle environ. Le fait est que même dans le rapport démographique, il est dit que si le Canada veut vraiment augmenter sa population, il devra créer des stimulants à la fertilité, soit compter sur sa population plutôt que sur l'immigration.

Selon le ministre, seule l'immigration peut compenser la baisse démographique d'une population vieillissante. Encore une fois, les faits sont tout autres. Toutes les recherches démographiques effectuées jusqu'à maintenant démontrent clairement que l'immigration ne réglera jamais le problème du vieillissement de la population. Pourquoi? Parce que les immigrants deviennent vieux eux aussi. Des travaux de recherche ont clairement démontré que l'âge moyen des immigrants au Canada était d'environ quatre ans inférieur à l'âge moyen de la population née au Canada.


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En outre, ces recherches démontrent qu'en tentant d'abaisser l'âge de la population par l'augmentation du nombre d'immigrants, on ne réduira pas les pressions qui pèsent sur nos programmes sociaux. Le seul moyen de réduire cette pression consiste à accroître la productivité de tous les Canadiens et à hausser leur niveau de vie pour renouveler et enrichir l'assiette fiscale. Le vieillissement de la population a déjà atteint le niveau que connaîtra bientôt le Canada dans des pays comme le Royaume-Uni et la Suède et ces pays n'ont pas allégé les pressions sur leurs programmes sociaux en augmentant le nombre d'immigrants, mais en adoptant des mesures économiques réfléchies.

Ce ne sont là que quelques faits. Malheureusement, je ne crois pas que le ministre puisse nous présenter des faits pour appuyer la position du gouvernement qui affirme qu'il est vital pour le Canada d'accueillir 250 000 immigrants. Pourquoi 250 000? Pourquoi maintient-on des niveaux d'immigration aussi incroyablement élevés? Je l'ignore et je ne crois pas que les Canadiens le savent plus que moi. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a-t-il une réponse? Si oui, qu'il nous présente les données pour l'étayer.

Lorsque les niveaux d'immigration prévus ont été annoncés en février, une question a été soulevée au sujet du processus de sélection et elle reste entière. Le gouvernement a déclaré que sur les 250 000 immigrants accueillis au Canada cette année, 44 p. 100 seraient de la catégorie des indépendants, c'est-à-dire des immigrants retenus en raison de leurs compétences, de leur niveau d'éducation, de leur capacité de s'adapter rapidement au Canada et d'apporter une contribution positive à la société.

En fait, les propres chiffres du gouvernement révèlent que ces immigrants ne seront pas 44 p. 100, ni 40 p. 100, ni même 30 p. 100. En fait, ils ne seront que 15 p. 100 d'un quart de million d'immigrants cette année. Le ministre est arrivé à son chiffre douteux en additionnant aux immigrants indépendants leurs conjoints, leurs enfants et leurs parents qui profiteront du programme de réunification des familles.

Ce n'est pas ce à quoi nous nous attendons de la part d'un ministère qui nous dit que le ministre et le ministère veulent rendre le programme d'immigration plus transparent aux yeux de la population. Soyons honnêtes et présentons les faits tels qu'ils sont en réalité.

Le Parti réformiste veut redonner de la crédibilité à notre système de détermination du statut de réfugié. Le Canada devrait être fier du nombre d'immigrants qu'il accueille. Au cours des quelques dernières années, aucun autre pays sur la terre n'a accepté autant de réfugiés, en pourcentage de sa population, que le Canada. Toutefois, nous semblons avoir perdu le contrôle de notre système de détermination du statut de réfugié. Nous acceptons maintenant environ 70 p. 100 de tous les revendicateurs du statut de réfugié qui se présentent à nos frontières. À l'échelle mondiale, le taux moyen d'acceptation des réfugiés est de 14 p. 100. Cette année, nous accepterons environ 30 000 réfugiés.

Selon le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, il y aurait environ 60 000 personnes dans le monde entier qui répondent à la description d'un véritable réfugié. Selon ce même organisme, 35 000 de ces 60 000 réfugiés n'auraient pas trouvé un refuge sûr l'an dernier. Autrement dit, aucun pays n'était prêt à les accepter. Comment est-ce possible que le Canada accepte 30 000 réfugiés si les Nations Unies estiment que moins de 30 000 réfugiés ont été acceptés au total par l'ensemble des pays d'accueil dans le monde entier?

(1325)

Le fait est que seulement un faible pourcentage des gens que le Canada accepte comme réfugiés sont de véritables réfugiés. La majorité des gens à qui on accorde le statut de réfugié au Canada ne sont pas des réfugiés mais bien des migrants économiques. Ce sont des gens qui sont attirés par le Canada et qui veulent se faire une nouvelle vie ici. Nous ne pouvons certainement pas leur en vouloir pour cela, mais il reste que ce ne sont pas de véritables réfugiés. Ce ne sont pas des réfugiés authentiques.

S'ils veulent se faire une nouvelle vie au Canada, ils devraient pouvoir présenter une demande par la voie normale comme tous les autres immigrants. Laissons la place aux véritables réfugiés, aux gens qui se morfondent dans les camps, à ceux qui, selon les Nations Unies, sont dans la situation la plus désespérée. Ce sont eux qui ont vraiment besoin que nous les accueillions chez nous, qui méritent vraiment le statut de réfugié. Je veux parler ici de gens comme les Rwandais et les Bosniaques.

Le processus de détermination du statut de réfugié pour les revendicateurs de l'intérieur constitue un bourbier incroyablement onéreux. Quand le ministre dit que le Canada respecte ses engagements en matière humanitaire, cela ne colle tout simplement pas. Nous ne les respectons pas. Nous pourrions faire bien davantage avec beaucoup moins de ressources.

À la page 3-40 du Budget des dépenses de cette année du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, nous apprenons qu'il en coûte aux contribuables canadiens entre 30 000 $ et 50 000 $ rien que pour traiter une demande de statut de réfugié présentée au Canada. Il s'agit là de coûts directs. Quand on multiplie ce montant par le nombre de 16 000 personnes dont la demande de statut de réfugié présentée à l'intérieur de nos frontières a été acceptée, on en arrive à une facture oscillant entre 750 millions et 1,25 milliard de dollars pour les contribuables canadiens. Il est facile de mal comprendre de gros montants comme ceux-ci tant qu'on ne les a pas mis dans leur véritable contexte.

Je vais donc mettre ce milliard de dollars en perspective. Le budget total pour le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés se chiffrait l'an dernier à un peu plus d'un milliard de dollars. Ce montant a permis à l'ONU de rétablir ou de rapatrier cinq millions de réfugiés. Avec le même montant, le Canada en a rétabli 16 000. Il y a quelque chose qui ne va pas.

Le système de détermination du statut de réfugié représente une injustice de proportions colossales non seulement pour les contribuables canadiens qui doivent payer la note, mais aussi pour les dizaines de milliers de véritables réfugiés désespérés à l'étranger qu'il faut rayer de la liste pour faire place aux migrants


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économiques qui arrivent parmi certains réfugiés authentiques et qui revendiquent le statut de réfugié une fois au Canada.

Le ministre est conscient de ces faits. Il est très conscient également du tollé de protestation de la part des Canadiens à l'égard de certaines personnes que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié autorise à entrer au Canada ou à y rester quand elles font appel de leur ordonnance d'expulsion.

Il y a plusieurs semaines, à la Chambre, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a promis de se montrer dur à l'égard du système. Ce sont de belles paroles, mais elles ne correspondent pas à ses actes. Le ministre qui voulait se montrer dur doit rendre compte du bilan suivant à peine six mois après avoir assumé ses fonctions.

Le nombre des réfugiés de l'intérieur admis au terme du processus de détermination du statut de réfugié a grimpé en flèche, même en provenance de pays qui ne produisent pas de réfugiés.

Le ministre a nommé à la Commission plusieurs douzaines des membres les moins représentatifs qu'on y ait jamais vus. La vaste majorité d'entre eux ont été recrutés parmi les avocats ou les défenseurs des immigrants. Il est donc peu étonnant que le taux d'acceptation ait augmenté à ce point.

Il a présidé à l'élargissement de la définition de réfugié bien au-delà de ce qu'elle signifiait auparavant au Canada et bien au-delà de ce que l'ONU entendait par ce terme, dont elle avait pourtant établi la définition. Pour la détermination du statut de réfugié, il veut maintenant créer de toutes nouvelles dispositions en vertu desquelles il sera plus facile pour les demandeurs ayant essuyé un refus de demeurer au Canada pour des raisons humanitaires et des motifs de compassion. Tout cela dans un délai de six mois.

(1330)

Ce que le ministre dit vouloir faire relativement au système de détermination du statut de réfugié, c'est ce que souhaitent tous les Canadiens. Ils veulent un système juste, raisonnable et humanitaire, qui nous permette de nous occuper des véritables réfugiés. Nous voulons nous acquitter de nos responsabilités internationales, mais ce n'est pas ce que nous faisons actuellement.

Le ministre dit qu'il veut être plus sévère. C'est exactement ce qu'il faut. Notre système de détermination du statut de réfugié au Canada doit être plus sévère, de manière que nous puissions utiliser une plus grande part de nos ressources pour aider les gens qui ont le plus besoin d'aide, mais qui n'en reçoivent pas. Au lieu de cela, le système est à la remorque d'une énorme bureaucratie responsable de l'immigration et de la détermination du statut de réfugié. Il est à la remorque d'une légion d'avocats qui ont un gagne-pain plus que lucratif au détriment des contribuables et des véritables réfugiés.

Il y a quelques années, le Canada a entrepris la rédaction d'un traité sur le droit d'asile, traité qu'il souhaitait conclure avec les États-Unis. Ce traité reconnaîtrait que le Canada et les États-Unis sont l'un et l'autre des tiers pays sûrs pour ce qui est de l'asile. Il empêcherait les gens de magasiner un asile entre le Canada et les États-Unis. Il empêcherait ceux qui ont les ressources économiques pour voyager de passer par les États-Unis avant d'entrer au Canada et de se déclarer réfugiés.

Il ne s'agit pas d'une mesure sévère ou inhumaine. C'est le simple bon sens. Il faut mettre un terme à cette pratique. L'an dernier, plus de 7 000 personnes se sont rendues aux États-Unis avant de présenter une demande de reconnaissance du statut de réfugié au Canada. Cela a mis à rude épreuve notre système de détermination du statut de réfugié et a encore une fois limité notre capacité d'orienter nos ressources vers les réfugiés ayant le plus besoin de notre aide.

On a demandé au ministre de signer cet accord qui en est à l'étape de la rédaction depuis un certain temps déjà, mais il refuse. Il dit que tant que les États-Unis n'adopteront pas un système de détermination du statut de réfugié semblable au nôtre, il ne ratifiera pas ce traité. Je puis donner au ministre l'assurance que les Américains n'adopteront jamais notre système.

À l'échelle internationale, le Canada a la réputation d'accepter comme réfugiés presque tous ceux qui réussissent à se rendre ici. Cette année, près de 70 p. 100 de tous les demandeurs ont obtenu le statut de réfugié. Les États-Unis n'accepteront jamais d'adopter notre système. En fait, ils tiennent un discours bien différent. Les mêmes remarques valent pour l'Australie ou l'Europe.

Je ne crois pas que le ministre pourrait avoir à donner des leçons qui seraient à la satisfaction des pays européens, au chapitre de l'immigration. Il est temps que le Canada signe le traité avec les États-Unis. Il aurait dû le faire il y a longtemps. Il ne suffit pas de hausser le ton. Il faut agir.

Depuis que le ministère est à l'oeuvre, le ministre a promis de consulter les Canadiens sur la politique d'immigration. Il dépense un million de dollars pour des réunions dans des salles municipales et distribuer des questionnaires dans tout le pays afin de savoir ce que les Canadiens pensent de l'immigration. C'est du moins ce qu'il prétend.

En fait, le document publié à l'issue de la réunion de Montebello, où ce processus de consultation a été concocté, montre plus clairement les intentions du ministre. Dans le document, il est dit qu'il faut convaincre la majorité des Canadiens qui s'opposent aux niveaux actuels d'immigration qu'ils ont tort et que le gouvernement a raison. Il y est question de sensibiliser l'opinion, d'obtenir une participation constructive de la presse et de montrer les avantages de niveaux d'immigration extrêmement élevés. Ce qu'on qualifie de consultation n'en est absolument pas.

(1335)

Le Parti réformiste est en faveur de la participation du public aux débats nationaux sur des questions vitales. C'est nécessaire. Le ministre sait que les Canadiens veulent participer, et c'est pourquoi ce processus a été mis en place. Est-ce que c'est pour calmer les Canadiens? Pour leur faire sentir qu'ils ont leur mot à dire alors que l'objectif réel est de les exclure en contrôlant le dialogue? C'est une bonne question à poser.


5202

Inutile de dire que le Parti réformiste veut que tous les Canadiens se fassent entendre dans le débat sur l'immigration. Nous souhaitons même que les grandes questions d'immigration se règlent au moyen de référendums nationaux. Pourquoi n'y aurait-il pas des référendums sur le niveau d'immigration, sur le nombre d'immigrants, sur le processus de sélection? Ce serait facile à organiser, mais il n'y aura pas de vrai débat sur l'immigration sous le gouvernement actuel. Il y aura plutôt un mandat en matière d'immigration. Si les Canadiens ne le trouvent pas de leur goût, ils pourront assister à des cours de sensibilisation pour apprendre comment ils doivent concevoir l'immigration.

Le ministre a dit qu'il voulait élargir le rôle du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Ce qui s'est passé en fait, c'est que le comité a mis en veilleuse le travail important et s'est attaqué à un problème bidon. Il a décidé qu'il fallait remanier la Loi sur la citoyenneté. Il a décidé que le comité allait consacrer son temps précieux à l'étude de questions qui, de l'avis de tous, ne nécessitaient pas d'étude à ce moment-ci, encore moins s'il s'agissait d'une étude qui allait coûter des dizaines de milliers de dollars, qui monopoliserait le temps du comité pendant des semaines, qui ferait appel à Pierre Trudeau et à Dieu sait qui pour nous dire ce qu'est un Canadien.

Quelle perte de temps! Le comité devrait plutôt consacrer son temps à examiner les nominations très discutables à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Nous devrions examiner les répercussions que le plus haut niveau d'immigration du monde a sur le Canada. Nous devrions chercher à rendre le système de détermination du statut de réfugié plus efficace, plus humanitaire. Au lieu de cela, le ministre tient à redéfinir la citoyenneté canadienne. Est-ce raisonnable?

Nous avons appris à la Chambre que les immigrants ne sont pas soumis à des tests de dépistage pour le virus de l'immunodéficience humaine avant leur entrée au Canada. Ils sont soumis à des tests de dépistage de la tuberculose, du cancer, de la maladie du rein, de la syphilis, mais pas du SIDA.

Après cette révélation, le ministre a promis de se pencher sur la question et de prendre les mesures qui s'imposaient pour mettre à jour les exigences canadiennes en matière de tests médicaux. C'était il y a un mois. Quelles mesures ont été prises? Aucune, pas la moindre.

Une voix: Pas de comité?

M. Hanger: Pas d'amélioration. L'immigration a déjà beaucoup profité au Canada. Ce pourrait être encore le cas. Mais pour que l'immigration joue un rôle constructif, pour vraiment équilibrer les besoins du Canada et son rôle humanitaire dans le monde, nous devons mettre un peu de bon sens dans le débat. Nous devons prendre des décisions difficiles. Il ne suffit plus de tenir un langage musclé. Parler du recours au détecteur de mensonges ou ouvrir encore plus grandes les portes aux réfugiés de l'intérieur et nommer des gens non désintéressés à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, c'est le comble de l'hypocrisie. C'est recourir aux vieilles méthodes. Parler fermement, mais agir en sens opposé.

Les Canadiens s'attendaient à plus du gouvernement, beaucoup plus, mais ils n'ont eu droit qu'aux bonnes vieilles méthodes. Rien n'a changé. C'est même pire. Le regroupement des fonctions de l'immigration et de la citoyenneté au sein d'un seul ministère permettait de répondre aux attentes des Canadiens et de faire des modifications qui profiteraient tant aux nouveaux venus qu'aux Canadiens nés ici. Mais nous n'avons rien eu de tel. Les Canadiens souhaitent vivement des changements. Ils veulent que les niveaux d'immigration soient fixés d'après des cycles économiques et que le phénomène de l'immigration ait un effet positif sur l'économie. Ce n'est pas trop demander, n'est-ce pas? Les autres pays qui accueillent des immigrants fixent les niveaux d'immigration en fonction de leur économie. Pourquoi n'en ferions-nous pas autant?

(1340)

En fait, nous avons une province qui fixe ses niveaux d'immigration en fonction de ses priorités économiques, et c'est le Québec. À mon avis, l'actuel gouvernement a quelque chose à apprendre du Québec à ce chapitre.

Les Canadiens me disent que le Canada devrait accepter l'ensemble des immigrants, comme des immigrants indépendants, et pas seulement un infime pourcentage. Nous avons besoin d'immigrants. Nous avons besoin d'immigrants qui soient instruits, qui maîtrisent des techniques de pointe, qui soient capables de s'adapter rapidement afin de contribuer à la prospérité de notre pays. Ils nous ont choisis.

Ce n'est ni être déraisonnable ni faire preuve d'un manque de compassion de la part des Canadiens que d'exiger que les immigrants qui viennent au Canada soient choisis par le Canada. Le ministre le sait. Il a eu le temps de répondre ou de mettre en place une réforme qui aurait permis qu'un taux plus élevé encore d'immigrants soient triés sur le volet, mais il n'en a rien fait. On risque plutôt de voir le nombre des immigrants indépendants diminuer.

Il faut absolument que ce nouveau ministère réexamine à fond le système de détermination du statut de réfugié, qu'il procède à un examen qui soit davantage qu'un exercice de style spectaculaire et qu'une opération consistant à créer d'autres paliers de bureaucratie dans une optique de rationalisation. Le moment est venu de faire en sorte que le système concernant les réfugiés soit adapté aux moyens des contribuables canadiens et à l'obligation qui est faite au Canada par la communauté internationale pour qu'il accueille un plus grand nombre de réfugiés reconnus par l'ONU.

Les Canadiens veulent que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration procède à un tel examen et soit doté du pouvoir de rendre compte, comme l'actuel gouvernement l'a promis. Il s'ensuit que le comité devrait arrêter lui-même son programme, plutôt que le ministre ne lui en impose un, pour pas qu'il s'écarte de son mandat. L'immigration est en difficulté dans notre pays. Jamais un tel pourcentage de Canadiens ne s'étaient opposés aussi vivement à la politique en vigueur dans le domaine de l'immigration.

Le Financial Post de la fin de semaine a signalé que même les députés d'arrière-ban de l'actuel gouvernement manifestent leur indignation et leur mécontentement dans leur circonscrip-


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tion à l'égard de la politique d'immigration qui ne fonctionne plus.

Les Canadiens reconnaissent, à juste titre, que le système d'immigration ne fonctionne plus pour personne. Ça ne fonctionne pas pour le Canada. Ça ne fonctionne pas pour les immigrants. Le plus décevant dans tout ça, c'est que, ces six derniers mois, le ministre n'a pris aucune mesure valable pour régler les problèmes d'immigration. En fait, il les a aggravés en augmentant les niveaux, en relâchant le système relatif aux réfugiés, en nommant les mauvaises personnes à la CISR et en essayant d'amener les Canadiens à changer d'opinion.

Je tiens à dire au ministre que les Canadiens ne se laissent pas manipuler facilement. Il est temps qu'il commence à les écouter. Il est temps qu'il prenne des mesures valables, qu'il se montre plus rigoureux, comme il avait promis de le faire.

Je souhaite au ministre de réussir pour l'amour du Canada et pour l'avenir de l'immigration au Canada. J'espère que le ministre y parviendra. Cependant, je n'ose trop y croire, à en juger par la façon dont le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a fonctionné ces derniers mois.

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'informe les députés qu'à partir de maintenant, les discours sont de vingt minutes suivies de dix minutes pour les questions et observations.

(1345)

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Madame la Présidente, je suis enchantée de participer au débat. Même si le projet de loi n'a qu'un caractère administratif, il a néanmoins beaucoup d'importance.

Le gouvernement précédent avait transféré le ministère de l'Immigration dans le domaine de la sécurité publique, comme si, peut-être, nous avions à craindre pour la sécurité du Canada de la part des personnes qui viennent s'installer chez nous, qui choisissent de venir vivre ici ou qui cherchent refuge à partir de pays où la loi, l'ordre et la justice et les valeurs qui nous sont si chères au Canada n'ont peut-être pas autant de prix.

Nous croyons, de ce côté-ci de la Chambre, n'avoir rien à craindre de la part des personnes qui viennent s'installer chez nous pour diverses raisons et choisissent de vivre parmi nous. Nous sommes fiers que le Canada soit l'un des quatre seuls pays au monde à accueillir des gens de la sorte.

On bavarde de l'autre côté, aussi j'essaierai de parler encore plus fort. Le député de Calgary me dit qu'il me renvoie la pareille. Il devrait le faire de façon un peu plus vive. Je lui en serais peut-être reconnaissante.

Quoi qu'il en soit, le député de Calgary, qui est le troisième porte-parole de son parti pour les questions d'immigration et de citoyenneté, a soulevé un certain nombre de points. J'aimerais parler de ceux que j'ai trouvé offensants, car j'ai été offensée.

Je trouve offensant que le député ne considère pas la citoyenneté comme une chose importante au Canada. Je trouve offensant que dans cette magnifique institution historique, celle des Laurier, Macdonald et Trudeau, un représentant du peuple canadien vienne dire que la citoyenneté n'est pas importante ou que les personnes à qui on a demandé d'exprimer leur point de vue sur la révision de la Loi sur la citoyenneté ne sont pas importantes.

Je trouve une telle réponse surprenante. Je suis étonnée, compte tenu du dur labeur qui a été investi depuis quelques semaines dans la révision de la loi et qui continuera de l'être. Je suis étonnée et quelque peu déçue, je dirais même franchement très déçue. Comme le disait un ancien et illustre ministre à la Chambre, le regretté Angus L. Macdonald, lorsqu'il était premier ministre de la Nouvelle-Écosse, sans doute suffit-il simplement de voir d'où viennent pareils propos.

Je voudrais faire quelques autres observations. Tout d'abord, je suis tout à fait abasourdie par le nombre de réfugiés qui, selon le député, sont des réfugiés légitimes. Nous savons que les déplacements de populations dans le monde, les atrocités commises dans l'ancienne Yougoslavie, les problèmes qui règnent dans bien des pays de l'Afrique et les difficultés qu'entraînent les régimes totalitaires dans d'autres régions ont créé un nombre sans précédent de réfugiés.

À entendre le député, on pourrait croire que cela ne représente même pas une goutte d'eau dans l'océan. Ce n'est tout simplement pas le cas. Il y a plus de réfugiés dans un seul camp que le nombre donné par le député. J'estime qu'il devrait retirer ses propos, mais je lui laisse le soin de faire appel à son remarquable bon jugement.

Je suis également tout à fait ébahie par les pourcentages qu'il a mentionnés. On peut reprendre certaines citations, par exemple, sa très célèbre citation qui dit que même le diable peut citer l'Évangile. Le député prétend que les pourcentages de réfugiés que nous accueillons sont à un niveau sans précédent; or, s'il veut bien retourner seulement deux ou trois ans en arrière, il constatera que le pourcentage de réfugiés que notre pays a accueillis était de 12 p. 100 supérieur, je crois, à ce qu'il est à l'heure actuelle. Le Canada se situe assurément dans la norme.

Le député dit que la moyenne mondiale est de 14 p. 100; bien sûr, ce serait la moyenne mondiale si nous tenions compte de la multitude de pays qui n'accueillent aucun réfugié. Il semble que, ou bien la logique du député ou bien ses méthodes de calcul soient déficientes; comme ce ne serait pas aimable de ma part de dire cela, je ne le ferai pas.

(1350)

Je voudrais également parler de ce que le député a dit au sujet des gens qui viennent au Canada sans subir le test du VIH. Il a ajouté que, il y a quatre semaines, le ministre avait promis d'agir à cet égard. Le député devrait savoir-je pensais qu'il le savait, mais peut-être que non-que la loi et le règlement sur les questions médicales qui relèvent du ministre n'ont pas été modifiés depuis 40 ans.

Le député préconise peut-être que le gouvernement se lance dans le vide sans effectuer d'examen approprié avant de proposer des modifications à la loi, mais je veux qu'il soit bien clair que ni le ministre ni son ministère n'a l'intention de déposer une mesure législative à la Chambre avant qu'elle ne soit bien préparée et que la situation n'ait été bien examinée. C'est comme ça qu'un bon gouvernement travaille! Il nous garantit, quand nous présentons une mesure législative pour changer ce qui doit absolument


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être changé, que nous avons bien tenu compte de tous les éléments. Autrement dit, si nous procédons par étapes et que nous examinons dans l'ordre les points A, B, C et D, nous éviterons probablement les problèmes, alors que, si nous sautons de A à D, nous risquons de nous casser la figure, si je peux me permettre cette expression.

M. McClelland: Attention de ne pas vous faire mal.

Mme Clancy: Oh, non, nous ne nous ferons pas mal. Le député d'Edmonton sait très bien que cela n'arrivera pas.

Les chiffres et les statistiques que le député de Calgary a cités sont des plus inexplicables, surtout que je sais qu'il a reçu maintes fois des informations du ministère. Par exemple, la somme de 30 000 $ à 50 000 $ qu'il cite pour le traitement d'une demande de statut de réfugié au Canada est loin d'être exacte. C'est tellement loin de la réalité que c'en est presque ridicule. Si ce n'était que le député fait cette déclaration avec toute l'autorité que lui confèrent ses fonctions à la Chambre, le public pourrait penser qu'il a raison, si on ne rétablit pas la vérité, si on ne donne pas les vrais faits.

Cela me rappelle cette vieille blague: «Je sais en quoi je crois. Ne m'embrouillez pas avec les faits.» Les faits sont que, quand le traitement d'une demande coûte autant-les voilà qui s'agitent, calmez-vous, prenez du Prozac-quand le traitement d'une demande coûte autant, c'est que tous les recours ont été épuisés, y compris un appel à la Cour fédérale du Canada et toutes les démarches qu'un réfugié peut faire auprès de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Ce n'est pas la moyenne des cas. Ce n'est même pas près de la moyenne. Ce qui est particulièrement choquant, c'est que le député le sait et que, s'il ne le sait pas, il devrait s'informer.

Ce dont il est question officiellement aujourd'hui, c'est de la création du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Cette décision se fait attendre depuis longtemps et elle est extrêmement importante, car on rationalise et modernise le fonctionnement du gouvernement, afin de lui donner les outils nécessaires pour traiter de façon efficace toute les questions complexes de citoyenneté et d'immigration.

À ce sujet, il s'agit de rappeler à nos vis-à-vis qui, parfois, abordent la question de l'immigration avec, il faut bien le dire, une attitude pas très généreuse, que ce sont des questions extrêmement complexes et que nous vivons des temps très difficiles.

Dans le cadre de mes voyages un peu partout au pays depuis que j'ai eu l'honneur d'être nommée secrétaire parlementaire du ministre, je me suis entretenue avec beaucoup de personnes au sujet de l'immigration et j'en apprends beaucoup chaque fois que j'assiste à des assemblées publiques et que je rencontre des représentants d'organisations non gouvernementales, des gens qui vivent et travaillent en première ligne et s'occupent de l'établissement des néo-Canadiens dans notre pays. Je trouve édifiantes la générosité et la grandeur d'âme que l'on trouve dans les collectivités de tout le pays et je suis très impressionnée de voir que les Canadiens moyens croient en leur for intérieur que l'immigration a permis de bâtir notre pays, qu'elle est une bonne chose pour le Canada et que notre situation ne pourra que s'améliorer si nous continuons d'accueillir toujours plus d'immigrants. Nous sommes tous des immigrants dans cette enceinte, que nos ancêtres ou nous-mêmes soyons venus nous établir au Canada il y a 50 ans ou 200 ans ou encore, comme dans le cas de mon collègue de la région est de l'Arctique, il y a 5 000 ans, en provenance de l'Asie, en passant par le pont continental.

(1355)

Je regarde autour de moi de ce côté-ci de la Chambre maintenant et, juste devant moi, je peux voir des représentants de quatre groupes ethnoculturels différents. Dans ce coin, il y a trop d'Irlandais. Cependant, ce qui fait justement la gloire de notre pays et ce qui est merveilleux, c'est que nous venions siéger dans cette enceinte pour représenter tous les aspects du Canada, aussi diversifié soit-il, et que nous continuions de le faire. L'immigration est ce qui a donné sa force et sa diversité à notre pays et c'est grâce à elle qu'il demeurera fort, diversifié et uni.

Je crois qu'il est un peu triste de voir que certains de nos collègues ne veulent pas comprendre à quel point cette mosaïque est importante non seulement pour la prospérité du Canada, mais même pour sa survie. Nous ne sommes pas un pays tout blanc et rouge. Nous ne sommes pas un pays homogénéisé et un peu fade et ennuyant. C'est même parfois trop excitant de vivre ici, et parfois très stressant, mais heureusement pas au point d'être dangereux.

Toutefois, je ne crois pas qu'aucun de nous, du moins de ce côté de la Chambre, voudrait changer ce pays. Je ne crois pas qu'on voudrait modifier les conditions de notre vie quotidienne, malgré certaines remarques entendues à l'occasion. Malgré certaines déclarations qui ont été faites, je crois que nous comprenons, en notre qualité de Canadiens, à quel point la paix et la sécurité que nous connaissons en ce pays sont désespérément importantes pour notre réussite.

La gestion de l'immigration fait partie intégrante de tout cela. Le gouvernement a des convictions si fermes à ce sujet que le jour de son assermentation, le premier ministre a déclaré qu'il créerait un ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration avec son propre ministre et regrouperait ainsi toutes les activités relatives aux politiques et aux programmes qui appartenaient alors aux portefeuilles de la Sécurité publique et des Ressources humaines, de même que tous les programmes d'enregistrement et de promotion de la citoyenneté qui faisaient partie du ministère du Patrimoine canadien. Voilà le but de ce projet de loi.

Je voudrais aussi ajouter un commentaire relativement aux observations du député porte-parole de l'opposition officielle qui a parlé de la confusion due au chevauchement des services d'immigration, de citoyenneté et de multiculturalisme. Malgré tout le respect que je porte au député, je ne suis pas d'accord. Je suis en désaccord avec lui sur plusieurs points, mais particulièrement en ce qui a trait à la confusion. Oui, il y a des recoupements. C'est logique et prévisible car, bien sûr, il y a dans les trois secteurs des domaines qui se rejoignent.

5205

Je peux rassurer le député, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration d'une part, et le ministère du Multiculturalisme d'autre part, savent très bien où les politiques sont complémentaires et où elles se recoupent. Comme, par ailleurs, le gouvernement a pris des engagements certains dans tous ces secteurs, les politiques et les programmes avancent dans l'intérêt de tous les Canadiens d'un océan à l'autre.

Je pense que le député peut être rassuré, pour nous il n'y a pas de confusion. Le député de Calgary a aussi besoin d'être rassuré, mais dans une certaine mesure il a peut-être aussi besoin d'être réinformé sur les avantages de l'immigration pour le Canada. J'ai bien l'impression qu'il loupera quelque chose, comme député et comme Canadien, s'il continue à se faire cette fausse idée des avantages que l'immigration apporte au Canada. Je pense qu'il loupera aussi quelque chose s'il pense que, d'une façon ou d'une autre, le nombre de personnes qui viennent ici. . .

Le Président: C'est tellement bon qu'on vous laissera continuer après la période des questions.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


5205

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE DÉCÈS DE M. ARTHUR ANDREW

Mme Mary Clancy (Halifax): Monsieur le Président, je prends la parole pour rendre hommage à un très grand Canadien, l'ambassadeur Arthur Andrew.

Le regretté M. Andrew habitait Halifax et je suis fière de dire que je le comptais parmi mes amis. Il a fait carrière dans la promotion du Canada et des valeurs canadiennes. Il se décrivait comme un Canadien professionnel et c'est fort juste. Il a travaillé pendant 32 ans pour le ministère des Affaires extérieures où il a occupé des postes diplomatiques élevés dans le monde entier, en particulier le poste d'ambassadeur en Israël, en Suède et en Grèce. Il a été sous-secrétaire d'État adjoint aux Affaires extérieures pendant trois ans.

Après avoir terminé sa carrière aux Affaires extérieures, il a enseigné à la University of Kings College à Halifax. Tout en enseignant, il continuait de s'intéresser à la diplomatie et à la politique étrangère du Canada et il a publié de nombreux articles à ce sujet. Il était un des trois organisateurs originaux du pont aérien entre Halifax et l'Éthiopie, avec notre collègue le député de Don Valley-Ouest et Peter Dalglish.

Au nom de la Chambre des communes, j'aimerais présenter mes sincères condoléances à sa femme, Joyce, à ses filles, Stephanie et Victoria, et au reste de sa famille. C'était un très grand Canadien.

* * *

[Français]

LES ARMES À POSSESSION RESTREINTE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, un très grand nombre d'armes militaires et paramilitaires ne sont pas encore interdites aux citoyens canadiens et la possession des revolvers n'est restreinte que par l'obtention d'un certificat gratuit. Or, une majorité de Québécois et de Canadiens sont favorables à l'interdiction pure et simple de ces armes. Je crois qu'il faut interdire la possession des armes de type militaire, paramilitaire et la plupart des armes semi-automatiques.

Il est inacceptable que la Mini-Ruger 14, utilisée lors de la tuerie de Polytechnique, soit toujours une arme légale au Canada. Ce genre d'armes et autres ne peuvent pas être tolérées dans une société libre et démocratique.

Nous ne pouvons plus nous cacher de la réalité que représente le fléau des armes dans notre société. On ne peut plus ignorer non plus la contrebande des armements militaires et armes de toutes sortes que le gouvernement libéral préfère ne pas voir. Le temps d'agir, c'est maintenant.

* * *

[Traduction]

CERTAINS PROPOS TENUS À LA CHAMBRE

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Monsieur le Président, je tiens à présenter mes excuses à tous les députés, aux autochtones et aux habitants des provinces atlantiques que j'ai offensés par les propos que j'ai tenus ou qu'on m'accuse d'avoir tenus récemment.

La controverse suscitée par mes propos m'a appris qu'il n'est pas judicieux, dans le monde politique, d'utiliser en présence des médias les mêmes techniques que j'ai employées avec succès tout au long de ma carrière d'enseignant. À l'avenir, je prendrai bien soin de ne pas faire d'analogies trop crues pour illustrer les grandes conclusions de mon analyse.

Ce que je voulais surtout exprimer, c'est que les politiques du gouvernement sur l'aide aux démunis doivent être revues, parce qu'elles ne fonctionnent pas. Ces politiques ont créé une dépendance et des problèmes sociaux importants. Il faudrait aborder ces problèmes dans une perspective nouvelle.

Je suis désolé qu'on ait cité mes comparaisons hors contexte et qu'on ait faussé le sens de mes paroles en détournant l'attention de l'idée que, pour assurer le bien-être de tous les Canadiens, il est indispensable d'établir une discussion franche et ouverte.


5206

Les commentaires qu'on m'a faits donnent à penser qu'un très grand nombre de Canadiens espèrent vraiment qu'on puisse en discuter ainsi.

* * *

[Français]

LE DEUXIÈME FESTIVAL INTERNATIONAL DU CERF-VOLANT

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul): Monsieur le Président, du 2 au 5 juin dernier, la ville de Verdun a tenu le Deuxième Festival international du cerf-volant. Quinze pays étaient représentés. En plus, 54 invités spéciaux ont démontré leur talent. En tout, 200 cervolistes ont participé. Moi-même, je m'y suis amusé en tant que spectateur et en tant que cervoliste.

Un minimum de 150 000 spectateurs sont venus et tous étaient d'accord sur le fait que c'était un spectacle grandiose.

Je félicite M. Georges Bossé, maire de Verdun, pour son travail et Mme Sandra Carmichael pour son organisation. Mes félicitations vont aussi à l'équipe de 200 bénévoles qui ont démontré un esprit communautaire sans pareil.

L'atmosphère était fantastique et le festival a été un succès.

* * *

(1405)

[Traduction]

L'ORGANISATION POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe): Monsieur le Président, aujourd'hui, à l'occasion d'une conférence de presse tenue à Québec, le ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire et des représentants d'autres gouvernements ont annoncé que le Canada, le Québec et l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture organiseront un symposium international à Québec, du 11 au 13 octobre 1995, pour commémorer la création de la FAO, à Québec, il y a 50 ans.

Le Canada a joué un rôle prépondérant dans les travaux qui ont mené à la fondation de la FAO, ayant mis sur pied une commission qui était présidée par M. Lester B. Pearson. Cette organisation, qui comptait 42 membres en 1945, en a maintenant 171. Elle a réalisé des projets sur le terrain dans plus de 140 pays du monde.

Le 16 octobre 1995, ce sera le 50e anniversaire de la FAO. . .

Le Président: La parole est au député de Saint-Boniface.

* * *

[Français]

LES FINISSANTS DES ÉCOLES SECONDAIRES

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface): Monsieur le Président, de la part de tous les parlementaires, je veux féliciter les finissants de nos écoles secondaires partout au pays.

[Traduction]

Félicitations à tous nos élèves du secondaire. Quelle que soit la voie qu'ils décident de suivre, qu'ils continuent leurs études ou qu'ils se dirigent vers le marché du travail, nous leur offrons tous nos voeux de succès.

Qui dit fin des études secondaires, dit célébration et libations, et nous tenons à rappeler aux jeunes que la prudence est de rigueur. Quand on a bu, conduire devient dangereux; malheureusement, il est parfois difficile d'éviter de consommer de l'alcool. Si tel est le cas, il y a toujours le programme Safegrad.

Ce programme, qui est presque entièrement géré par les élèves, vise à réduire les risques d'accident en s'assurant que la consommation d'alcool ne se fasse pas au détriment de la sécurité.

[Français]

À tous les finissants, soyez prudents, de la part de tous les gens qui vous aiment beaucoup.

* * *

LE MULTICULTURALISME

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre): Monsieur le Président, le recteur de l'Université du Québec à Montréal, M. Claude Corbo, a dressé hier un constat d'échec. La politique canadienne sur le multiculturalisme, en renforçant les particularismes ethniques et culturels, amène les groupes d'immigrés vers le cul-de-sac d'une culture fragmentaire et d'une marginalisation prolongée.

Selon M. Corbo, la sollicitude déployée par le gouvernement fédéral à l'endroit des communautés ethniques et culturelles est suspecte. Il ajoute que cette politique, et je cite: «. . .risque d'accroître la minorisation ou encore la banalisation de l'identité québécoise. . .»

Il nous faut donc conclure au double échec de cette politique datant des années Trudeau. D'une part, elle ne favorise pas l'intégration des groupes minoritaires, d'autre part, malgré les visées inavouables de ses architectes, elle n'a pas réussi à banaliser l'identité québécoise.

* * *

[Traduction]

LA FAMILLE

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, la famille est d'une importance indéniable. Elle est essentielle au bien-être de la société canadienne, essentielle à l'épanouissement de nos enfants et à la préservation de notre sens de la justice, de nos valeurs et de nos convictions.

Étant donné l'importance du rôle de la famille dans la société, on ne peut permettre que l'État ou des groupes d'intérêts spéciaux réduisent ce rôle. Les familles doivent pouvoir continuer à élever leurs enfants selon leurs convictions et leurs moyens propres. Les programmes gouvernementaux devraient aider les parents à s'acquitter de leurs responsabilités envers leur famille, au lieu de les en empêcher; tout mouvement tendant à amoindrir le rôle de la famille doit être mis en échec.


5207

Il n'y a pas, au niveau fédéral, de porte-parole qui prenne clairement la défense des familles canadiennes. Mes collègues et moi-même avons l'intention de changer cela. Nous nous proposons de parler en leur nom et de suggérer des politiques nouvelles pour renforcer, encourager et protéger cette unité de base de la société qu'est la famille.

* * *

LA SEMAINE NATIONALE DES TRANSPORTS

M. John Maloney (Erie): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour souligner la Semaine nationale des transports qu'on a célébrée du 5 au 11 juin.

Le transport est un élément fondamental des affaires. Pas un jour ne passe sans que nous n'en ayons conscience. Le transport joue un rôle essentiel dans le cycle de la concurrence. Dans un monde où il est de plus en plus difficile de trouver des avantages, le succès repose en partie sur l'efficacité et sur le coût du transport intermodal.

Avec l'émergence d'une économie réellement mondiale, il est devenu essentiel, dans le secteur des transports, de prévoir l'évolution de la situation, à l'échelle nationale et internationale, et de s'y adapter.

Étant donné la demande de services intermodaux efficaces, dans le monde entier, quoi de plus approprié que d'avoir choisi comme thème de cette 25e Semaine nationale des transports «L'intermodal, la clé de l'avenir»?

(1410)

Nous pouvons être fiers du dévouement, du professionnalisme et du travail de tous les hommes et de toutes les femmes qui font tourner l'industrie du transport à longueur d'année.

* * *

LE MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT

M. Paul Steckle (Huron-Bruce): Monsieur le Président, je rappelle à tous les députés et à tous les Canadiens que samedi dernier, le 11 juin, c'était l'anniversaire du ministère de l'Environnement.

En seulement 23 ans, Environnement Canada a aidé énormément les Canadiens à mieux comprendre l'environnement et les conséquences de leurs interactions en ce domaine. Le ministère a élargi sa façon d'aborder les questions environnementales, de sorte qu'il ne s'arrête plus à des difficultés bien circonscrites, mais considère tout l'écosystème comme une unité d'éléments interdépendants.

Conformément à la quête par le Ministère d'un développement durable et au principe voulant que toutes nos actions se répercutent sur l'environnement, en tant que Canadiens, nous devons continuer à faire tout notre possible afin de préserver notre planète pour les générations futures.

* * *

LE DÉCÈS DU RABBIN MENACHEM MENDEL SCHNEERSON

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, ceux qui se préoccupent des valeurs humanistes et de la foi religieuse viennent de perdre une voix forte et un modèle avec le décès du rabbin Menachem Schneerson, chef spirituel du mouvement hasidique de Lubavitch.

Le rabbin Schneerson travaillait à partir de son quartier général à Brooklyn, mais il entretenait une vision sans frontières. C'était un esprit universel. Il pensait aux gens de tous les milieux et de partout dans le monde, et il parlait en leur nom.

Il a préconisé sans relâche la prière dans les écoles, tant chrétiennes que juives. Le mouvement qu'il a formé envoie aujourd'hui des représentants dans tous les centres juifs qui tentent d'améliorer la qualité de vie des juifs aussi bien que celle des autres.

Son départ marque la fin d'une époque. Je suis néanmoins convaincu que ce n'est pas la fin de l'idéal des valeurs juives et de l'esprit international dont il s'était fait le défenseur.

Je demande à tous les députés de se joindre à moi pour offrir nos condoléances à tous les membres du mouvement de Lubavitch et pour espérer que son exemple les aide à poursuivre son oeuvre.

* * *

[Français]

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bernard Deshaies (Abitibi): Monsieur le Président, le quotidien Le Droit de samedi dernier nous apprenait qu'un rapport déposé au Bureau du Commissaire aux langues officielles expose, une fois de plus, la vraie nature du fédéralisme canadien. Quant à lui, le premier ministre fait état d'un Canada idyllique où l'on peut librement s'exprimer en français d'un océan à l'autre. Cette vision s'étiole lorsqu'elle est confrontée à la réalité du travail quotidien de la fonction publique fédérale.

En effet, des fonctionnaires francophones croient qu'ils s'exposent à de lourdes sanctions, qu'il s'agisse d'isolement, d'exclusion ou de possibilités réduites d'avancement s'ils font valoir leur droit de s'exprimer dans leur langue maternelle. Le rêve d'un Canada bilingue était sans doute un beau rêve, mais l'on sait que la fonction publique n'est pas bilingue, les francophones y étant simplement tolérés. On sait aussi que l'on ne reconnaît pas le Canada comme étant l'union, sur une base d'égalité, de deux peuples fondateurs, puisque le Québec y est lui-même aussi toléré.


5208

[Traduction]

LA FAMILLE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, les principes du Parti réformiste visent à préserver et à renforcer la famille canadienne.

En réformant notre régime parlementaire et en remettant les leviers de la démocratie directe entre les mains des Canadiens, nous veillerons à ce que le gouvernement fédéral accorde plus d'importance aux valeurs familiales. Nous veillerons également à ce que les politiques nationales tiennent compte des intérêts de tous les Canadiens et de leur famille et non seulement des intérêts d'une élite près de nos têtes dirigeantes.

Grâce aux réformes qui seront apportées au régime fiscal et à l'économie, la charge fiscale sera réduite et nos familles n'auront pas à subir plus tard les conséquences de la poursuite des emprunts et du gaspillage.

Le Parti réformiste prône une politique fiscale où toutes les familles seraient traitées équitablement. Les modifications que nous proposons d'apporter au système judiciaire placeraient les droits des victimes et la protection de nos familles bien avant les droits des criminels, faisant de nos écoles et de nos rues des endroits où nos enfants pourront apprendre et jouer en toute sécurité.

Voilà les politiques sensées que les familles de toutes les régions du pays veulent et réclament.

* * *

LE CANADA ATLANTIQUE

Mme Elsie Wayne (Saint John): Monsieur le Président, j'avais l'intention aujourd'hui de demander au député réformiste de Capilano-Howe Sound de s'excuser pour les propos injurieux et inadmissibles qu'il a tenus à l'endroit des habitants du Canada atlantique.

Le Président: J'imagine que la députée veut compléter sa déclaration. Je voudrais de nouveau rappeler aux députés qu'ils ne doivent pas attaquer personnellement leurs collègues. Il faut, le cas échéant, s'attaquer aux idées de ses adversaires, mais je nous rappelle à tous qu'il ne faut pas attaquer personnellement ses collègues.

Mme Wayne: Depuis les premiers jours de la Confédération, les habitants du Canada atlantique ont grandement contribué à l'essor de notre pays.

(1415)

Je demanderais simplement aux députés qui se posent des questions sur la contribution du Canada atlantique de ne pas hésiter à s'informer auprès de leurs collègues avant de faire des déclarations comme celle que nous avons entendue à la Chambre.

Je suis très heureuse d'apprendre aujourd'hui que le député a présenté des excuses aux habitants de notre région, qui sont des gens merveilleux et très chaleureux.

* * *

LE PARTI LIBÉRAL

M. John Loney (Edmonton-Nord): Monsieur le Président, je suis ravi de pouvoir porter aujourd'hui à l'attention de la Chambre les résultats d'un sondage Angus Reid qui a été mené dans tout le pays il y a quelques jours.

On n'est pas étonné d'apprendre que la vaste majorité des Canadiens continue d'appuyer fermement le Parti libéral fédéral. Ce qui est très intéressant, c'est que pour la première fois depuis des décennies, le Parti libéral a aussi la faveur des électeurs de ma province, l'Alberta.

Des voix: Bravo!

M. Loney: Surtout parce que le premier ministre et son Cabinet ont tenu les promesses faites dans le livre rouge, le Parti libéral a l'appui et la confiance de 52 p. 100 des Albertains, comparativement à 40 p. 100 en avril dernier et à 25 p. 100 lors du scrutin d'octobre dernier.

Je félicite le gouvernement pour son beau travail et je l'encourage à continuer.

* * *

[Français]

LES STAGIAIRES DU MICHIGAN

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, cela fait dix ans cette année que j'ai le plaisir d'accueillir des jeunes stagiaires du Michigan, au sein de mon personnel à Ottawa. Tous les ans, pendant environ 6 semaines, ces étudiants américains me donnent, à moi et à d'autre députés de cette Chambre de tous les partis, un sérieux coup de main dans nos diverses tâches de parlementaires. Il faut dire que leur travail est aussi impeccable que leur comportement est exemplaire.

[Traduction]

Je tiens à rendre hommage ici à la coordonnatrice du programme, Mme Helen Graves, pour son magnifique travail. Mille mercis aux stagiaires de cette année, qui sont: David Backus, Caroline Borhani, Nancy Bortz, Thomas Corbin, Richard Frank, Matthew Hader, Stacie Littlebury, Kathryn Lloyd, Kathey Majid-Smith, Janice Smith-Scott, Craig Miller, David Mingus, Robin Mitchell, Sandra Nader, Dayna Robinson, David Rowe, Jalil Saad, Thomas Seely, Jonathan Shill, Susan Welsh, Christina Zina, Robert Entin, Stuart Sandler et Elizabeth Krug. Merci à tous ces jeunes. . .

Le Président: Je n'ai pas voulu interrompre le député, car il est évidemment important de citer tous ces noms, mais je demanderais aux députés de bien vouloir faire leur déclaration dans les délais prévus.

5209


5209

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA SITUATION EN HAÏTI

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, cette question s'adresse au premier ministre, à la vice-première ministre ou au ministre des Affaires étrangères.

La tension est montée d'un cran, maintenant que l'état d'urgence a été proclamé par le président fantoche Jonassaint. Cette décision de la junte militaire d'Haïti suit l'annonce du renforcement des sanctions commerciales, notamment la récente interdiction de liaisons aériennes à partir du 25 juin.

Je demande au gouvernement s'il peut reconnaître que l'interdiction d'établir des liaisons aériennes n'est pas la démonstration de l'échec du renforcement des sanctions économiques?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, je suis heureuse de répondre à la question du chef de l'opposition.

Le Canada a accepté de faire son possible pour renforcer les sanctions contre Haïti à ce moment-ci, ce qui veut dire notamment la cessation des vols commerciaux à destination d'Haïti. Air Canada cessera d'assurer la liaison avec Haïti à compter du 25 juin. Nous faisons de notre mieux pour que tous les Canadiens qui se trouvent actuellement en Haïti puissent quitter ce pays et nous leur avons conseillé de le faire.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, justement, nous savons qu'il y a entre 2 400 et 2 500 ressortissants canadiens présentement à Haïti. Je demanderais au gouvernement de nous dire quelles mesures il entend prendre pour garantir à cette Chambre que la totalité des ressortissants canadiens qui veulent évacuer Haïti pourront le faire avant l'échéance du 25 juin.

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, il y a effectivement de 2 400 à 2 500 citoyens canadiens en Haïti. Beaucoup de ces gens ont toutefois une double nationalité, c'est-à-dire qu'ils sont à la fois citoyens canadiens et haïtiens.

Nous communiquons quotidiennement avec Air Canada afin de nous assurer que tous les citoyens canadiens qui veulent quitter Haïti pourront le faire. Aujourd'hui, Air Canada a dû annuler son vol prévu à destination d'Haïti à cause de menaces contre les transporteurs aériens. Elle verra cependant à ce qu'il y ait au moins deux vols additionnels pour permettre aux citoyens canadiens de sortir d'Haïti.

(1420)

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, nous savons que dix-sept pays différents ont récemment incité les États-Unis à dépêcher une force d'intervention militaire à Haïti.

Je demande au gouvernement s'il peut nous indiquer si le Canada refuse toujours cette option d'intervention militaire à Haïti, option qui est de plus en plus évoquée maintenant à Washington, et qui est apparemment la seule qui soit suffisante pour chasser la junte militaire et ramener le président Aristide.

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, je l'ai déjà dit, le Canada est partisan du renforcement des sanctions commerciales contre Haïti, ce qui inclut le gel des comptes bancaires haïtiens. Nous estimons qu'il faut laisser le temps aux sanctions de faire leur effet.

La semaine dernière, j'assistais à une réunion de l'Organisation des États américains à Belem, au Brésil, et la majorité des États membres croient aussi qu'il faut donner tout notre appui aux sanctions pour parvenir à une solution pacifique à la situation en Haïti et pour que le président Aristide puisse reprendre son poste légitime de président du pays.

* * *

[Français]

LE BOIS D'OEUVRE

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, dans Le Devoir de samedi, l'ex-conseiller juridique du Québec à Washington, M. Elliott Feldman, déclarait que les intérêts commerciaux étaient très mal défendus dans le dossier du bois d'oeuvre et que les négociateurs fédéraux se préoccupaient davantage de présenter coûte que coûte une position pancanadienne plutôt que de défendre les provinces qui n'ont rien à se reprocher sur le plan de leurs pratiques commerciales.

Alors, je pose ma question au ministre du Commerce international. Le ministre ne convient-il pas que dans le dossier du bois d'oeuvre, le gouvernement fédéral doit faire valoir que les producteurs québécois ne doivent pas être soumis aux lois compensatoires appliquées au Canada, car le Québec ne subventionne pas ses exportations?

[Traduction]

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international): Monsieur le Président, je fais remarquer que les événements abordés dans l'article de journal dont parle le député ont eu lieu avant l'arrivée au pouvoir des libéraux. Il m'est donc difficile de me prononcer sur les motifs du gouvernement de l'époque.


5210

Quant à la question du bois d'oeuvre, le gouvernement du Canada a appuyé la position des exportateurs québécois selon qui devrait y avoir des taux distincts. Malheureusement, le groupe spécial qui a déterminé que les pratiques canadiennes ne constituaient pas un droit compensateur a maintenu la décision du Département du commerce des États-Unis de ne pas exempter le Québec du droit national.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, le ministre ne convient-il pas que s'il acceptait de traiter techniquement le Québec comme un pays au sens de la Loi commerciale américaine, non pas au sens politique, il aurait fait épargner des dizaines de millions de dollars en droits compensatoires aux producteurs de bois de sciage québécois?

[Traduction]

L'hon. Roy MacLaren (ministre du Commerce international): Non, monsieur le Président.

* * *

LA FAMILLE

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Partout dans le monde et de tout temps, la jurisprudence a confirmé le sens général que nous attribuons à la famille. Les lois canadiennes reflètent aussi cette acception générale. Redéfinir la famille équivaudrait à modifier certaines des valeurs fondamentales les plus chères à notre culture.

Le ministre pourrait-il, au nom du gouvernement, donner une définition de la famille à la Chambre?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je crois que la députée devrait s'en remettre au dictionnaire, qui en donne une définition beaucoup plus fiable que celle que je peux lui fournir. Je puis toutefois lui donner l'assurance que les députés de ce côté-ci de la Chambre partagent son opinion sur l'importance de la famille. Elle motive ce que nous faisons et elle influence les politiques que nous élaborons. Renforcer la famille est un objectif fondamental du gouvernement.

(1425)

Pour ce qui est de la définition, nous sommes très heureux de souscrire à celle qui est généralement acceptée. Je recommande à la députée de consulter le dictionnaire si elle veut plus de détails sur la question.

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam): Le Canadian Law Dictionary donne la définition suivante: «Famille s'entend d'un homme et d'une femme vivant ensemble comme mari et femme, mariés ou non, et entretenant des relations permanentes, ou du conjoint survivant, et inclut les enfants des deux ou de l'un ou l'autre conjoint, naturels ou adoptés [. . .]et toute personne légalement apparentée à l'une ou l'autre des personnes susmentionnées».

Le Président: La présidence a un problème en l'occurrence, car la députée demande une définition et puis elle en donne une. Bien sûr, la présidence attend toujours qu'on finisse par poser la question, mais j'inviterais la députée à bien vouloir formuler ses questions de sorte qu'elles se rapportent aux responsabilités administratives du ministre concerné. Je demanderais à la députée de poser maintenant sa question.

Mme Hayes: Le ministre pourrait-il nous dire s'il accepte ou non la définition que l'on trouve dans le Canadian Law Dictionary?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, si c'est bien là ce que dit le Canadian Law Dictionary, je suis persuadé que cela convient tout à fait aux fins du dictionnaire.

Je suis persuadé également que l'anglais, comme la députée le sait très bien, est une langue belle et riche qui peut servir et s'adapter pour convenir aux contextes qui sont appropriés. La députée en tiendra sûrement compte.

Le Président: Je suis convaincu que nous avons des ministres qui peuvent discuter des nuances les plus subtiles de l'anglais, mais si on veut poser une question à un ministre en particulier, j'aimerais bien qu'elle se rapporte aux responsabilités administratives qui lui incombent au gouvernement.

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam): Monsieur le Président, le ministre a lancé il n'y a pas très longtemps un ballon d'essai en laissant entendre que le gouvernement libéral songeait à redéfinir la famille en lui donnant peut-être le sens de ménage.

Étant donné la gravité historique d'une telle redéfinition, le ministre s'engagera-t-il à tenir un vaste processus de consultations auprès des Canadiens avant d'entreprendre une tâche aussi monumentale?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je me rappelle avoir témoigné devant le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées et de m'être demandé, en réponse à une question, si le concept de relations serait pertinent aux fins des programmes gouvernementaux. J'ai parlé non pas de ménage, mais de relations, un terme, soit dit en passant, pour lequel il existe déjà une définition précise.

J'ai clairement dit en même temps que nous consulterions et écouterions les Canadiens en explorant les meilleurs moyens possibles d'offrir les programmes gouvernementaux essentiels en accord avec les principes de justice et d'équité.

* * *

[Français]

LA PRÉSENCE DES CASQUES BLEUS EN EX-YOUGOSLAVIE

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, jeudi dernier, après avoir rendu une visite aux Casques bleus canadiens à Visoko, en ex-Yougoslavie, le premier ministre a laissé entendre que le Canada pourrait procéder au retrait de ses Casques bleus, et je cite le premier ministre, «s'il n'y a pas volonté d'en venir à un accord de paix».


5211

Ma question s'adresse au premier ministre, à la vice-première ministre, au ministre des Affaires étrangères ou au ministre de la Défense.

Est-ce que le gouvernement peut nous confirmer l'intention de retirer les Casques bleus de l'ex-Yougoslavie si les négociations de paix ne progressent pas ou si l'embargo militaire est levé?

(1430)

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, toute décision serait prématurée, car, comme le député l'a laissé entendre dans sa question, il reste encore du temps pour que les discussions se poursuivent, et nous espérons qu'elles aboutiront.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg): Monsieur le Président, ma question complémentaire va s'adresser aux membres du gouvernement. Plutôt que d'inquiéter, comme en janvier dernier, une population civile qui, jusqu'ici a survécu en grande partie grâce à la présence et à l'aide des Casques bleus canadiens, comme a pu le constater le premier ministre lors de sa visite, et moi-même, pourquoi le gouvernement ne les rassure-t-il pas en maintenant la présence des Casques bleus et notre participation aux efforts de paix, et éviter ainsi que le conflit ne dégénère en violence et en massacre?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement n'a annoncé aucune modification en ce qui concerne notre contingent, mais je remercie le député de son appui pour les forces de maintien de la paix d'un Canada uni. Nous lui en sommes très reconnaissants.

* * *

LA FISCALITÉ

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Des millions de parents préféreraient s'occuper eux-mêmes de leurs enfants d'âge préscolaire à la maison, mais la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit des avantages fiscaux seulement pour les parents qui mettent leurs enfants en garderie, et non pour ceux qui sacrifient un revenu pour s'occuper des enfants à la maison.

Le gouvernement va-t-il rajuster sa politique fiscale pour accorder un traitement égal à la majorité des familles, qui préfèrent élever leurs enfants à la maison?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, cette question pourrait fort bien être étudiée, et très efficacement, dans le cadre du vaste examen en cours sur un large éventail de programmes sociaux. J'invite le député à exposer ses vues dans un mémoire qui pourra être pris en considération.

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, mon mémoire a été dûment présenté il y a deux semaines environ. J'espère que le ministre aura l'occasion de le lire.

Selon un sondage Angus Reid et CTV paru aujourd'hui, la plupart des parents préfèrent garder leurs enfants d'âge préscolaire à la maison. Cela confirme ce que nombre de mes collègues disent depuis le début. La réglementation fiscale fédérale actuelle fait en sorte qu'il coûte maintenant plus cher aux parents de garder leurs enfants à la maison que de les envoyer dans une garderie. Voici ma question: tous les parents devraient avoir le choix du genre de garde qui convient le mieux à leurs enfants.

Quand donc le gouvernement va-t-il arrêter de pénaliser les millions de parents qui préfèrent garder leurs enfants d'âge préscolaire à la maison?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, j'estime que le député a exprimé une sincère préoccupation au sujet de la force et de la valeur de la famille canadienne et qu'il a reconnu la grande diversité d'activités familiales.

Nombre de parents sont sur le marché du travail de nos jours. C'est un changement fondamental qui est survenu dans notre société, un changement très positif qui crée toutefois certaines pressions et certaines responsabilités qu'on peut mieux exercer s'il existe de bons services de garderie. Nous voulons garantir qu'il y ait un équilibre entre les intérêts de ceux qui décident de rester à la maison pour prendre soin de leurs enfants et de ceux qui les confient à une garderie. Comme le veulent les principes généraux de notre parti, nous voulons faire en sorte qu'il y ait un équilibre entre les points de vue et non en favoriser un au détriment de l'autre.

* * *

[Français]

LA SITUATION DE LA FEMME

Mme Christiane Gagnon (Québec): Ma question s'adresse à la secrétaire d'État à la Situation de la femme. En réponse à une question posée lundi dernier au sujet des subventions aux groupes de femmes canadiens et québécois, le secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines a déclaré que les délais relatifs à l'octroi de la subvention à la Fédération des femmes du Québec étaient dus au fait que leurs rapports d'évaluation étaient en retard.

Or, une représentante de la Fédération déclarait ce matin que l'ensemble des groupes de femmes au Canada attendent toujours leurs subventions.

La secrétaire d'État à la Situation de la femme peut-elle nous dire quand les neuf millions de dollars de subventions seront versés aux organismes qui s'occupent des intérêts des femmes canadiennes et québécoises?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme)): Je vous remercie pour la question, madame. D'après mes informations, l'argent est alloué, et c'est presque dix millions de dollars. S'il y a un retard à


5212

cet égard, je considère votre question comme importante et je vais l'étudier avec le ministre chargé de cette affaire.

(1435)

Le Président: Chers collègues, j'aimerais toujours que vous vous souveniez de moi et pour les questions et pour les réponses. Je suis toujours ici.

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, je désire poser une question additionnelle. Comment la secrétaire d'État chargée de la Situation de la femme peut-elle prétendre aider les groupes alors que plusieurs de ceux-ci doivent mettre à pied leurs employés à cause de la négligence du gouvernement dans ce dossier?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je suis certain que la députée va être ravie de savoir qu'en cette période de grandes restrictions budgétaires, où il a fallu couper dans tous les budgets, nous avons pris sciemment la décision de ne pas réduire les fonds des programmes s'adressant aux femmes et de les conserver intacts.

Je peux dire à la députée que, la semaine dernière, pendant que je ne préparais pas de réponses aux questions de ses collègues, j'étais occupé à signer les documents nécessaires pour que soient accordées des subventions aux groupes de femmes du Québec et du Canada. Je suis sûr que ces groupes recevront leurs subventions en temps utile. Nous avons d'ailleurs dit ce matin aux représentants du Comité canadien d'action sur le statut de la femme que les signatures nécessaires avaient été apposées et que le processus était enclenché.

* * *

LA FAMILLE

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, le 13 mai, le premier ministre a fait une déclaration à l'appui de l'Année internationale de la famille. Dans son discours, il a dit que son gouvernement approuvait la définition que les Nations Unies ont déjà donnée de la famille et qui porte que la famille est la plus petite démocratie au coeur de la société.

Le premier ministre suppléant pourrait-il nous dire comment il interprète cette définition de la famille?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je n'ai pas à expliquer les mots utilisés par le premier ministre. Ces mots parlent d'eux-mêmes et, en toute honnêteté, ils me semblent très justes.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, ces mots ne sont pas du premier ministre. Il a repris la définition que les Nations Unies ont déjà donnée de la famille.

Il y a d'autres façons d'interpréter ce terme, des façons qui sont beaucoup plus alarmantes. Il est important de savoir si le premier ministre suppléant approuve le fait que les parents devraient pouvoir contrôler le comportement de leurs enfants, les faire instruire, leur imposer une discipline raisonnable et leur transmettre leurs propres valeurs sans que l'État n'intervienne à cet égard.

Le premier ministre suppléant reconnaît-il que l'État n'a pas sa place dans les pouponnières de la nation?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, c'est une question qui soulève un débat trop long pour le temps que nous avons ici pendant la période des questions.

Qu'en est-il du rôle que joue l'État pour veiller à ce que les enfants mangent à leur faim, soient correctement vêtus et bien instruits? Qu'en est-il du rôle que joue l'État pour veiller à ce que les jeunes enfants soient à l'abri des mauvais traitements? On ne peut éluder ces questions, comme le député semble vouloir le faire.

* * *

[Français]

LA MIL DAVIE

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre, à la vice-première ministre, au ministre responsable politique du Québec, au ministre des Transports, au secrétaire parlementaire du ministre des Transports, au ministre responsable du Développement économique du Québec et ministre des Finances.

Le Québec a déjà fait plus que sa part dans la rationalisation des chantiers maritimes au Canada; la MIL Davie a aussi fait ses devoirs en présentant un nouveau plan d'affaires. Malgré tout, son carnet de commandes reste vide et le gouvernement fédéral tarde toujours à concrétiser ses intentions quant au contrat de construction d'un nouveau traversier pour les îles de la Madeleine. Le gouvernement parle sans cesse de remettre les Canadiens au travail. On a ici un dossier concret, prêt à démarrer.

Ma question est la suivante: Quand le gouvernement entend-il enfin prendre une décision pour la construction d'un nouveau traversier aux îles de la Madeleine et redonner ainsi un peu d'espoir à la région de Québec et aux travailleurs de la MIL Davie?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, comme le député le sait très bien, nous avons maintenant un plan d'entreprise pour la MIL Davie, qui n'a pas encore été accepté par les syndicats de la compagnie. Il y a toujours la nécessité d'attendre qu'un vrai plan d'entreprise soit accepté par les actionnaires et par les syndicats, plan qui sera la base de l'avenir de la MIL Davie avant que nous puissions dire en quoi consistera l'avenir de la MIL Davie.


5213

(1440)

Mais d'autre part, il est nécessaire de noter que la question du traversier dont mon collègue le ministre des Transports a parlé à plusieurs reprises dépend aussi du fait que l'on doit décider si l'on a vraiment besoin d'un traversier. Après cela, on pourra répondre aux autres questions.

Le Président: Chers collègues, quoiqu'il y ait des questions qui peuvent être posées à un, deux ou cinq ministres, ce n'est pas toujours nécessaire de les nommer tous. Peut-être pourrait-on se contenter de n'en nommer qu'un.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, avec tout le respect que je vous dois, je dois vous indiquer que je n'avais pas nommé, dans la litanie des ministres à qui je posais des questions, William Shakespeare.

Le ministre peut-il nous dire où en sont rendues les réflexions de son gouvernement à l'égard du projet de navire multifonctionnel Smart Ship qui pourrait contribuer à une relance des activités de la MIL Davie sur une base durable, et ainsi maintenir des milliers d'emplois dans la région de Québec?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, là encore, la question des Smart Ship, c'est un autre projet qui a été proposé. Il y a d'autres intérêts à ce sujet, et le ministre de la Défense n'a pas encore décidé si on en a besoin.

Je suis un peu confus face à l'attitude du Bloc québécois, et j'aimerais vous expliquer, monsieur le Président. Le député bloquiste de Richelieu a dit, et je cite: «L'octroi de ces contrats devra être basé, à mon avis, sur la libre concurrence et conséquemment sur le principe fondamental d'un système capitaliste du droit de faire des offres».

Je ne suis pas certain si les députés du Bloc appuient la position du député de Richelieu ou s'ils sont en train de demander au gouvernement de donner des contrats sans appels d'offres à la MIL Davie. Quelle est leur position?

* * *

LE FESTIVAL FRANCO-ONTARIEN

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien. Le Festival franco-ontarien présente sa 19e édition du 21 au 26 juin prochain. Le Franco attire 600 000 visiteurs avec des retombées économiques de 12 millions de dollars pour la région de la Capitale nationale.

Le ministre du Patrimoine est-il prêt à aviser cette Chambre, à huit jours près du Festival franco-ontarien, du montant de la contribution fédérale?

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je suis heureuse d'annoncer, au nom de mon collègue le ministre responsable du Patrimoine canadien, que le montant total de la subvention sera de 300 000 $, réparti sur deux années financières, soit 1994-1995 et 1995-1996; 180 000 $ iront aux activités de base du Franco et 120 000 $ seront consacrés à l'autofinancement.

Je rappelle à mes collègues que le début du Festival franco-ontarien est le 21 juin, ce qui coïncide à peu près avec la fin de la session, et est donc une excellente occasion de célébrer le succès de cette session parlementaire.

* * *

[Traduction]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

En Colombie-Britannique, la GRC représente la plus grande partie des services de protection. En vertu du projet de loi C-17, les salaires et la progression dans l'échelle salariale des agents de la GRC sont gelés pour deux ans. L'an dernier, les agents de la GRC ont effectué volontairement plus de 600 000 heures supplémentaires non payées, ce qui équivaut à 20 millions de dollars. Mille cinq cents agents de la GRC se sont rassemblés pour exprimer leur mécontentement et déclarer qu'ils refusaient de faire d'autres heures supplémentaires si le gel était maintenu.

Le solliciteur général pourrait-il dire à la Chambre comment il a l'intention de compenser ces 600 000 heures de service tout en assurant à la collectivité la plus grande protection possible?

(1445)

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le commissaire et moi sommes au courant des préoccupations de la GRC. Nous y sommes sensibles et essayons de trouver des solutions. Dans l'intervalle, le commissaire désigné, M. Murray, a dit que les membres de la GRC étaient des gens responsables et s'acquitteraient de leurs fonctions en temps voulu. Je pense que nous devons continuer de faire confiance au professionnalisme de la GRC en Colombie-Britannique et au Canada.

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, le ministre avait déjà promis de faire quelque chose pour la GRC. À présent, il laisse les choses s'envenimer au point de provoquer la rébellion dans les rangs.

La promesse non tenue au sujet de la grille salariale pourrait bien être le tournant décisif et amener les agents à défier la loi et à former un syndicat. Le ministre va-t-il admettre que la GRC est un cas spécial et va-t-il prendre les mesures manifestement requises avant que certains agents ne démissionnent?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, j'espère que le député reconnaîtra avec moi que si quelqu'un va respecter la loi, c'est bien la GRC et qu'il se joindra à moi pour veiller à ce qu'il en soit ainsi pendant que, ensemble, nous essayons de répondre aux préoccupations de certains membres de cette force de l'ordre.


5214

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre responsable du Développement régional au Québec.

Tout en multipliant les programmes, le ministre en conviendra, le gouvernement fédéral intervient de façon désordonnée en matière de développement régional. Le BFDR intervient dans l'ensemble des régions du Québec sans coordination avec le ministère du Développement des ressources humaines qui se prépare à fusionner les comités d'aide au développement des collectivités et les centres d'aide aux entreprises, autre intervenant du même gouvernement en développement régional.

Le ministre responsable du Développement régional ne convient-il pas qu'il serait de sa responsabilité de mieux coordonner l'intervention de son gouvernement, afin d'éliminer les chevauchements coûteux à l'intérieur même de son propre appareil administratif?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, nous sommes tout à fait d'accord qu'il faut éliminer les chevauchements et les dédoublements. C'est pour cela que le premier ministre a demandé au ministre du Renouveau de la fonction publique de vraiment évaluer chaque programme et chaque façon d'administrer les ministères, et cela, pendant que je suis en discussion avec le ministre des Ressources humaines pour vraiment accomplir ce but, c'est-à-dire coordonner nos efforts dans la province de Québec.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, le ministre ne convient-il pas aussi que les querelles de juridiction avec le ministre de l'Industrie et celui des Ressources humaines, justement, quant aux interventions en développement régional, rendent l'action de son gouvernement peu efficace en région et se traduisent par des millions de dollars en gaspillage, par manque de coordination?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, je peux vous assurer qu'il n'y a absolument pas de querelles entre moi et le ministre des Ressources humaines, moi et le ministre de l'Industrie, et d'ailleurs, il y a une coordination absolue de nos efforts et c'est pour cela que nous sommes si efficaces.

* * *

[Traduction]

L'EMBALLAGE DES CIGARETTES

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

Le projet qu'a formulé la ministre de légiférer au sujet des emballages neutres semble battre sérieusement de l'aile. Les députés de son propre parti qui sont membres du Comité de la santé ont déclaré au Toronto Star qu'ils n'appuieront pas le projet parce qu'il n'y a aucune preuve que cette mesure contribuera à réduire le tabagisme.

La ministre de la Santé affirme qu'elle se préoccupe des conséquences du tabagisme sur la santé. Si la santé des Canadiens lui tient vraiment à coeur, pourquoi la ministre ne rétablit-elle pas les taxes sur le tabac?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, nous nous préoccupons de la santé des Canadiens. Nous savons que la contrebande de cigarettes est une chose nuisible pour la santé et que les jeunes qui voulaient commencer à fumer pouvaient se procurer des cigarettes bon marché. Nous devions prendre des mesures et nous l'avons fait en mettant au point un programme très complet de lutte contre le tabagisme. Il s'agit d'un programme formidable qui vise, notamment, à examiner la possibilité d'utiliser des emballages neutres.

Étant donné que mon collègue a déjà travaillé dans le domaine médical, je suis consternée qu'il ne veuille pas examiner sérieusement toutes les mesures possibles pour inciter les jeunes à ne pas commencer à fumer.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, en tant que médecin, j'ai tenu compte de toutes les données qui nous ont été soumises et, jusqu'à maintenant, rien ne donne à croire que l'utilisation d'emballages neutres contribuera à réduire la consommation de tabac. Nous savons par ailleurs que, si les coûts augmentent, la consommation diminuera. Les priorités de la ministre ne semblent pas claires. Si elle veut réduire le tabagisme, il faut rétablir les taxes. Le gouvernement répète qu'il tient à ce que le Forum national sur la santé soit sur pied avant la fin de juin. Nous sommes le 13 juin. Je demande à la ministre, pour la quatrième fois à la Chambre, quel est le mandat du forum? Quel rôle joueront les provinces? Quand et où le forum aura-t-il lieu?

(1450)

Le Président: La présidence peut accepter une ou deux questions, mais pas trois ou quatre. La ministre pourrait peut-être répondre à une ou deux questions.

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je suis heureuse de répondre à toutes les questions que pourra me poser le député.

Au sujet des cigarettes, une fois que nous aurons surmonté le problème de la contrebande, nous envisagerons certainement de hausser les taxes. Nous l'avons déjà dit. En ce qui a trait au forum, nous continuons de travailler avec nos homologues provinciaux. Lorsque nous serons prêts, nous ferons connaître le mandat du forum.

* * *

LA THAÏLANDE

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, un récent article du Globe and Mail a brossé un tableau bouleversant du problème que pose la mauvaise gestion de l'argent des contribuables canadiens en Thaïlande. On y soutenait que des investisseurs privés thaïlandais profitaient largement des prêts de l'ACDI sans en rembourser un seul sou.


5215

Cet article laissait entendre que les nombreuses initiatives de l'ACDI en Thaïlande n'ont rapporté rien de satisfaisant au Canada. Que fait le gouvernement pour accroître l'imputabilité des activités de l'ACDI en Thaïlande et dans d'autres pays du tiers monde?

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique)): Monsieur le Président, cet article renferme certaines inexactitudes et des propos y ont été cités hors contexte. Par exemple, l'investisseur dont on parle est en train de rembourser son emprunt à temps.

L'imputabilité est primordiale pour les activités de l'ACDI, que ce soit en Thaïlande ou dans d'autres pays. L'agence surveille régulièrement ses projets pour s'assurer qu'ils sont bien gérés et que les fonds sont utilisés à bon escient.

Sur un plan plus général, l'ACDI prend des mesures pour répondre aux recommandations que le vérificateur général a faites dans son rapport. Elle applique un ensemble de mesures qui visent à rendre sa gestion plus efficace et à accroître son imputabilité.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, au premier ministre, à la vice-première ministre.

Selon des porte-parole de la communauté rwandaise du Québec, il appert qu'un immigrant d'origine hutu, Léon Mugesera, arrivé au Canada en août 1993 et présentement en stage à l'Université Laval, serait en partie responsable du massacre au Rwanda.

On affirme que M. Mugesera, avant son départ pour le Canada, avait incité ses compatriotes hutu à déterrer la hache de guerre et à décimer les familles tutsi.

Compte tenu des allégations sérieuses soulevées par l'Association des immigrants rwandais du Québec, le gouvernement peut-il nous faire part du résultat de l'enquête d'Immigration Canada sur le cas de M. Mugesera?

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, nous avons tous été horrifiés par les atrocités commises au Rwanda et par les récents communiqués qui en ont fait état.

Comme vous le savez, monsieur le Président, je suis dans l'impossibilité d'entrer dans les détails de ce cas précis puisqu'une enquête est actuellement en cours. Je tiens néanmoins à donner à la Chambre l'assurance que les graves allégations portées contre cette personne font l'objet d'une enquête d'Immigration.

La situation qui règne actuellement au Rwanda est telle qu'il est très difficile d'établir le bien-fondé de ces allégations. La personne en question a aussi le droit de s'expliquer. Je vous remercie.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, j'aimerais demander à la secrétaire parlementaire quelles sont les mesures prises par Immigration Canada afin d'éviter que les responsables de massacres puissent trouver refuge au Canada.

[Traduction]

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, comme le député le sait, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a exprimé à maintes reprises son opposition et sa profonde préoccupation face à des situations de ce genre.

L'affaire se poursuit et une enquête est en cours. Comme le ministre l'a promis, la Chambre sera saisie d'autres mesures législatives.

* * *

(1455)

HAÏTI

M. Bob Mills (Red Deer): Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, nous avons appris que les vols vers Haïti étaient interrompus, qu'on demandait aux Canadiens qui s'y trouvent encore de quitter Haïti et que plusieurs pays réclament maintenant une intervention militaire.

La ministre peut-elle nous dire clairement quelle est la position du Canada relativement à une intervention militaire en Haïti?

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, je ne peux que répéter ce que j'ai répondu la dernière fois qu'on m'a posé cette question. Le Canada s'est engagé à veiller à ce que les sanctions soient mises en application et à ce qu'elles aient le temps de produire entièrement leur effet avant que toute autre mesure ne soit prise. Le Canada n'envisage pas, pour le moment, et n'appuie pas d'autres mesures que le soutien total aux sanctions et c'est pourquoi nous annulons nos vols commerciaux vers Haïti et que nous renforçons nos sanctions commerciales contre les Haïtiens.

M. Bob Mills (Red Deer): Monsieur le Président, à mon avis, le problème, c'est que les sanctions n'ont aucun impact. En fait, les abus prennent progressivement de l'ampleur.

Je crois que les Canadiens désirent des réponses plus sérieuses à leurs questions au sujet des décisions prises. La principale inquiétude concerne le genre de nettoyage que les gardiens de la paix canadiens devront faire si effectivement une intervention militaire se produit.

Nous devons connaître la réponse à ces questions avant de prendre cette décision.


5216

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, il est vrai que, jusqu'à maintenant, les sanctions n'ont pas été aussi efficaces qu'elles auraient pu l'être, mais il est vrai aussi que nous n'avons pas eu l'occasion d'exercer des sanctions totales contre Haïti. Si on peut le faire et si l'on obtient la coopération de tous les membres de la communauté internationale, il est possible que les sanctions produisent l'effet voulu et qu'on puisse voir l'instauration pacifique d'un gouvernement démocratique en Haïti, y compris le retour du président Aristide.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, l'opposition officielle s'informait le 21 février dernier au sujet des responsabilités, du statut de M. Jerry Peltier au ministère des Affaires indiennes pendant la crise d'Oka à l'automne de 1990. Le ministre des Affaires indiennes n'était pas en mesure de nous fournir une réponse à cette question. Le ministre peut-il nous indiquer maintenant quelle était la nature du mandat de M. Peltier alors qu'il était fonctionnaire au ministère des Affaires indiennes pendant la crise d'Oka en 1990?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, comme l'a dit l'autre ministre, je ne sais pas si je peux réussir à savoir ce qu'en pensait l'ancien gouvernement ou ce qu'il faisait à ce propos.

Mon collègue a parlé de réponse à une question qu'il avait posée. Je lui ai répondu moi-même. Je lui ai donné une réponse par écrit. J'oublie les chiffres exacts, parce qu'il y a déjà quelques mois que j'ai envoyé cette lettre, mais on disait qu'un groupe d'Oka avait reçu environ 200 000 $. De cette somme, je crois qu'environ 50 000 $-je lui donnerai les chiffres exacts plus tard, bien qu'il les ait dans la lettre que je lui ai adressée-ont été versés à une société à numéro. Je n'ai aucune idée du rôle que M. Peltier a pu jouer en dehors de cela, mais je sais qu'il a participé à cette transaction. Je sais qu'il a contribué à la conclusion de cette entente. Pour en savoir plus long, il faudrait retracer ce que l'ancien gouvernement a fait à cet égard.

* * *

LA PUBLICITÉ ANTITABAC

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre des Services gouvernementaux.

J'ai entendu dire que la ministre de la Santé prévoyait lancer une nouvelle campagne publicitaire de 55 millions de dollars pour exhorter les gens à arrêter de fumer. Je crains que cet avantageux contrat de publicité soit attribué directement à la même agence de coordination du ministère de la Santé qui a vu son contrat renouvelé sans appel d'offres, il y a quatre mois.

Le ministre peut-il nous donner l'assurance que toutes les agences de publicité du Canada pourront présenter une soumission pour tous les contrats à venir?

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique): Monsieur le Président, la ministre de la Santé n'a présenté aucune demande à mon ministère au sujet de ce qu'avance le député.

* * *

LES DÉPENSES SOCIALES

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

La semaine dernière, à Paris, le ministre a dit que le gouvernement ne diminuerait pas les prestations de pension de la Sécurité de la vieillesse, ajoutant qu'elles aidaient à protéger le pouvoir d'achat des personnes âgées et qu'elles ajoutaient une certaine stabilité à leur revenu. Je me réjouis de cette déclaration.

Étant donné les compressions annoncées dans le dernier budget et celles qui suivront, comme l'a laissé entendre le ministre des Finances, le ministre pourrait-il expliquer pourquoi ce raisonnement justifiant qu'on ne touche pas à la pension de la Sécurité de la vieillesse ne s'appliquerait pas aussi aux Canadiens plus jeunes, incapables de trouver du travail, et qui n'ont pas de quoi vêtir et nourrir leurs enfants? La protection de leur pouvoir d'achat et la stabilité de leur revenu ne constituent-elles pas une raison suffisante pour leur épargner la réduction de leurs prestations?

(1500)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je vais répondre au député par un exemple. C'est grâce aux changements que nous avons apportés à l'assurance-chômage que nous avons pu réduire sensiblement le taux des cotisations.

Ainsi, à partir de début juillet, les travailleurs couverts par l'assurance-chômage auront dans leurs poches 230 $ de plus par personne. Cela représente un pouvoir d'achat important. Avec ça, ils pourront en acheter des vêtements d'enfants, des meubles et autres objets de consommation!

C'est la raison pour laquelle il faut que nous réduisions les cotisations, car non seulement cela crée des emplois, mais en plus cela laisse davantage d'argent entre les mains des consommateurs qui peuvent alors acheter des biens et des services canadiens.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte): Monsieur le Président, ces dernières semaines les médias et de nombreux chasseurs responsables ont fait état de plusieurs inquiétudes au sujet du contrôle des armes à feu.

Ma question s'adresse au ministre de la Justice. Pourrait-il réaffirmer à la Chambre, aujourd'hui, que ni lui ni son ministère


5217

n'ont l'intention de limiter davantage la possession et l'utilisation de carabines et de fusils de chasse par les chasseurs responsables? Pourrait-il nous dire si le cours de formation institué par le gouvernement précédent sera maintenu et s'il sera administré de façon très économique?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, l'objectif principal que nous poursuivons est l'amélioration de la sécurité et la réduction des crimes violents. Nous avons l'intention de nous concentrer sur la lutte au trafic d'armes. Nous allons surtout voir à l'application des lois existantes qui punissent déjà sévèrement les gens qui utilisent des armes à feu pour commettre des infractions criminelles.

Nous allons également envisager d'autres mesures, qui seront soumises au caucus, pour rendre notre société plus sûre. Comme le demandait le député, nous tiendrons compte des utilisations sportives des armes à feu.

Le Président: Chers collègues, le député de Vancouver-Sud demande à soulever une question de privilège.

* * *

QUESTION DE PRIVILEGE

LE CODE RÉGISSANT LES CONFLITS D'INTÉRÊTS

M. Harbance Singh Dhaliwal (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège relativement à un fait qui me touche personnellement.

Les 2 et 3 juin, alors que je n'étais pas présent à la Chambre, le député de Simcoe-Centre a porté à mon égard des accusations graves qui, à mon avis, nuisent à ma réputation et m'empêchent de m'acquitter de ma tâche en tant que député. Mon vis-à-vis a mis en question mon respect du code sur les conflits d'intérêts.

Je voudrais mettre les choses au clair. Je suis déçu qu'avant de le faire, le député de Simcoe-Centre n'ait pas essayé de se mettre en rapport avec moi ou le sous-registraire général adjoint pour obtenir des éclaircissements. S'il avait pris le temps d'effectuer certaines recherches, il se serait aperçu que ses affirmations n'étaient pas fondées.

Dans les 30 jours suivant mon élection, je me suis entretenu avec le sous-registraire général adjoint pour savoir au juste ce que je devais faire pour me plier pleinement à ce code. J'ai ensuite pris les mesures voulues pour respecter ces exigences en démissionnant officiellement de mon poste de directeur et cadre de la société Dynamic, le 1er décembre 1993.

Je voudrais préciser qu'en fait, je n'étais pas tenu de démissionner avant le 5 avril 1994, soit 120 jours après ma nomination en tant que secrétaire parlementaire. Je l'ai fait car je souhaitais agir de façon responsable à titre de député.

J'ai reçu de M. Howard Wilson une lettre datée du 31 mars de cette année dans laquelle il se disait satisfait de la façon dont j'avais respecté les exigences du code fédéral sur les conflits d'intérêts. Voici ce qu'il disait: «Je suis heureux d'approuver les dispositions que vous avez prises pour vous plier aux exigences du code sur les conflits d'intérêts.» Avec le consentement unanime de la Chambre, je voudrais déposer la lettre que j'ai reçue.

Des voix: D'accord.

Le Président: Chers collègues, la présidence ne veut jamais mettre un terme au débat, bien entendu, surtout lorsqu'il s'agit d'une chose aussi importante que la question de privilège. Le député de Vancouver-Sud pourrait-il préciser à la présidence sur quoi porte son intervention au juste et en quoi cela nuit à sa capacité de servir ses électeurs dans cette enceinte?

(1505)

J'invite le député à être un peu plus précis.

M. Dhaliwal: Monsieur le Président, c'est mon honnêteté qui est en cause et je vais y arriver en reprenant seulement deux autres déclarations.

Le député de Simcoe-Centre a dit que le 24 mai, j'étais encore un cadre de Dynamic, ce qui est faux. Il a ajouté que j'habitais, à l'heure actuelle, à la même adresse que mon père et cela est également faux.

Qu'on sache que mon père ne vit pas avec moi; par ailleurs, comme cela se fait dans ma culture, je serais très honoré et heureux si c'était le cas. J'en serais ravi si mon père habitait avec moi.

M. Harper (Simcoe-Centre): J'invoque le Règlement, monsieur le Président.

Le Président: Est-ce sur la même question que le député soulève à l'heure actuelle?

M. Harper (Simcoe-Centre): Oui.

Le Président: En toute déférence à l'égard de mes collègues, à ce stade-ci, je ne vois pas vraiment matière à la question de privilège, mais peut-être que si nous entendions le point de vue de l'autre député en cause, nous pourrions en savoir plus là-dessus.

Même si je me réserve le droit d'entendre la conclusion du député qui a soulevé la question de privilège, je voudrais donner la parole au député de Simcoe-Centre.

L'hon. Herb Gray (Leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): J'invoque le Règlement, monsieur le Président.

J'interviens à titre de leader du gouvernement à la Chambre avec le plus grand respect pour vous et le poste que vous occupez. Il ne manque pas de précédents à la Chambre où des députés ont soulevé la question de privilège pour faire une déclaration et faire valoir leurs vues sur une situation les mettant personnellement en cause ou sur des affirmations à leur sujet qu'ils jugeaient inexactes.

5218

Je vous demande respectueusement, monsieur le Président, de suivre ces précédents et de permettre au député de Vancouver-Sud de terminer sa déclaration avant de donner la parole à quelqu'un d'autre.

Le Président: Avec votre permission, chers collègues, la présidence va entendre la conclusion du député de Vancouver-Sud. Nous passerons ensuite au député de Simcoe-Centre.

M. Dhaliwal: Monsieur le Président, le député a mis en doute mon intégrité. Il n'a pas avancé le moindre soupçon de preuve. Je demande au député de Simcoe-Centre de présenter des excuses pour avoir induit la Chambre en erreur et avoir répandu des informations fausses.

Le Président: Le député de Simcoe-Centre a la parole.

M. Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, les 2 et 3 juin, j'ai soulevé la possibilité d'un conflit d'intérêts relativement à une fiducie sans droit de regard organisée par le député de Vancouver-Sud pour son entreprise Dynamic Maintenance Limited, dont il est propriétaire à 50 p. 100 et qui a fait des transactions avec le gouvernement.

La question a été soumise au gouvernement à cause d'informations du domaine public qui se trouvent dans les dossiers du ministère des Finances et des Relations commerciales de la Colombie-Britannique au sujet des dirigeants et des administrateurs de cette société.

Selon les renseignements publics du dernier bilan annuel, exact au 24 mai, le député est un dirigeant de la société et son père et son beau-père en sont administrateurs.

L'adresse. . .

Le Président: À l'ordre. Je crois que le député de Simcoe-Centre a déjà donné cette information. La Chambre permettra peut-être au Président de revoir les déclarations qui ont été faites avant aujourd'hui et de rendre une décision demain.

Je demande au député de conclure.

(1510)

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, il semble que, depuis le lundi 6 juin, trois jours après que j'eus soulevé la question, le ministère de la Colombie-Britannique a reçu un avis selon lequel le père et le beau-père du député n'étaient plus administrateurs de la société.

Au lieu d'exiger une rétractation, le député devrait donner des réponses aux questions soulevées à propos de cette fiducie sans droit de regard.

Le Président: Chaque fois que des questions semblables sont soulevées, il va de soi qu'il y a des divergences d'opinion. La présidence va passer en revue tout ce que les députés de Vancouver-Sud et de Simcoe-Centre ont dit.

Je préfère ne pas rendre de décision maintenant, mais je me prononcerai le plus tôt possible.

_____________________________________________


5218

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES DÉCRETS DE NOMINATION

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites par le gouvernement.

Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont renvoyés d'office aux comités permanents énumérés dans la liste jointe.

* * *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, pendant que je suis debout, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à huit pétitions.

* * *

LE CODE CRIMINEL

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada) demande à présenter le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel (détermination de la peine) et d'autres lois en conséquence.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LES COMMUNICATIONS

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface): Monsieur le Président, j'ai ici une pétition dans laquelle des Canadiens invitent le gouvernement à demander au CRTC de restreindre la diffusion de diverses formes d'abus verbaux ou physiques, ou d'autres manifestations de violence.

Les pétitionnaires soulignent qu'il n'est pas nécessaire de téléviser des relations, un langage ou un comportement abusifs dans le but de distraire ou d'informer.


5219

Ils croient en outre que les nombreux efforts qu'ils font pour élever leur famille sont annulés par ces formes de comportement abusif qui sont présentées à la télévision ou dans d'autres médias.

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter une pétition au nom de certains de mes électeurs qui demandent au gouvernement de modifier la Loi sur le divorce afin de garantir aux grands-parents l'accès à leurs petits-enfants.

Presque tous les jours, je reçois des appels de grands-parents de toutes les régions du pays qui vivent des moments difficiles et n'ont pas accès à leurs petits-enfants. J'espère que tous les députés uniront leurs efforts pour corriger cette injustice.

[Français]

LE SERVICE POSTAL

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul): Monsieur le Président, je veux déposer une pétition signée par plus de 2 800 citoyens de Verdun qui veulent garder leur bureau de poste ouvert.

(1515)

Cette pétition vient s'ajouter à une autre sur le même sujet déposée le 17 mars dernier.

Mes commettants aiment le service professionnel qu'ils y reçoivent et aiment se rendre à cet endroit où on voit le drapeau du Canada flotter avec fierté.

[Traduction]

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre trois pétitions au nom d'électeurs qui exhortent le gouvernement à préserver les lois actuelles qui interdisent l'aide au suicide ou l'euthanasie.

En tout, 75 électeurs ont signé ces pétitions dans lesquelles ils déclarent que les médecins devraient travailler à sauver des vies et non à y mettre fin.

Je tiens à ce que mes électeurs sachent que j'abonde dans leur sens, car je crois, moi aussi, que le Parlement devrait conserver et faire respecter les lois actuelles concernant le suicide assisté par un médecin.

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke): Monsieur le Président, j'ai à présenter ici une pétition signée par plusieurs centaines d'habitants de Pembroke, Petawawa, Chalk River, Deep River, Stonecliffe et de nombreuses autres localités.

Le commerçant qui a organisé cette pétition, M. Frank Cirella, a été cambriolé trois fois et, chaque fois, par des jeunes contrevenants.

Les pétitionnaires demandent que la loi prévoie la publication du nom des jeunes contrevenants. Ils veulent qu'on abaisse l'âge limite où quelqu'un peut être poursuivi compte tenu de la gravité des délits criminels. Ils estiment que la loi doit punir beaucoup plus sévèrement les jeunes contrevenants.

Depuis que cette pétition a été signée, la nouvelle loi sur les jeunes contrevenants a été déposée à la Chambre des communes.

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je présente ici une pétition au nom de quelques-uns de mes électeurs qui demandent que notre Parlement n'abroge ni ne modifie l'article 241 du Code criminel et maintienne la décision qu'a prise la Cour suprême du Canada, le 30 septembre 1993, de rejeter le suicide assisté ou l'euthanasie.

J'approuve entièrement cette pétition que je présente à la Chambre.

L'AVORTEMENT

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je dépose ici un certain nombre de pétitions au nom de mes électeurs.

La première vise à demander au Parlement de modifier immédiatement le Code criminel afin d'étendre à l'enfant à naître la protection dont bénéficie tout être humain.

LE SUICIDE ASSISTÉ ET L'EUTHANASIE

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey): Monsieur le Président, la seconde pétition que j'ai à présenter vise à demander au Parlement de veiller à ce que les dispositions du Code criminel interdisant le suicide assisté soient appliquées énergiquement et que le Parlement ne modifie en rien la loi de façon à sanctionner ou à permettre le suicide assisté ou l'euthanasie passive.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter. La première porte 849 signatures et l'autre 236.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier le code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte canadienne des droits et libertés d'une manière qui permettrait de supposer que la société approuve les relations homosexuelles.

Au nom des pétitionnaires, je présente ces pétitions et je tiens à dire que j'appuie leur position.

LE SRI LANKA

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux présenter une pétition au nom d'électeurs de Parkdale-High Park.

Les pétitionnaires exhortent le gouvernement du Canada à intervenir immédiatement dans le conflit ethnique qui fait rage depuis une décennie au Sri Lanka. Ils affirment que les droits fondamentaux du peuple tamoul sont violés par les forces de sécurité du Sri Lanka et que les sanctions économiques imposées à la province septentrionale du Sri Lanka depuis trois ans et demi


5220

ont conduit à de graves pénuries de produits essentiels comme la nourriture, les médicaments et le carburant.

Les pétitionnaires exhortent le gouvernement du Canada a recourir aux bons offices des Nations Unies pour faire imposer un cessez-le-feu inconditionnel au Sri Lanka. Ils veulent aussi que les Nations Unies interviennent pour amener les parties à la table des négociations, pour faire suspendre immédiatement toute aide étrangère au gouvernement du Sri Lanka et, si nécessaire, pour imposer des sanctions tant que les hostilités et les violations des droits de la personne n'auront pas cessé.

(1520)

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis heureux de présenter une pétition signée par 62 personnes qui signalent que l'article 241 du Code criminel du Canada dit ceci: «Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, selon le cas: a) conseille à une personne de se donner la mort; b) aide ou encourage quelqu'un à se donner la mort, que le suicide s'ensuive ou non.»

Les pétitionnaires demandent à la Chambre des communes de ne pas modifier cette disposition du Code criminel. Je tiens à ce que mes électeurs sachent que j'appuie cette pétition et que je suis fier de la présenter.

L'AVORTEMENT

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux présenter trois pétitions au nom de certains de mes électeurs.

Dans la première, les pétitionnaires prient instamment le gouvernement de modifier le Code criminel pour protéger les enfants à naître.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton): Monsieur le Président, dans la deuxième pétition que j'ai à présenter, les pétitionnaires demandent au gouvernement d'interdire le suicide assisté.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton): Monsieur le Président, dans la dernière pétition que j'ai à présenter, les pétitionnaires s'opposent à ce qu'on accorde des avantages sociaux aux conjoints de même sexe.

L'AVORTEMENT

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je prends la parole en conformité de l'article 36 du Règlement pour déposer une pétition. Je suis heureux de présenter cette pétition au nom d'une quarantaine de mes électeurs, tous de la localité de Three Hills, en Alberta, qui veulent signaler le fait suivant aux députés à la Chambre: étant donné que la majorité des Canadiens respectent le caractère sacré de la vie humaine et étant donné que la vie humaine avant la naissance n'est pas protégée dans la société canadienne, les pétitionnaires demandent au Parlement de faire immédiatement le nécessaire pour offrir cette protection aux enfants à naître en modifiant le Code criminel de manière à assurer aux êtres humains non encore nés la protection dont jouissent les êtres humains à leur naissance. J'appuie cette pétition.

LA PROTECTION DES TÉMOINS

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter. La première porte environ 250 signatures d'habitants de tout le sud de l'Ontario et signale à la Chambre qu'il est absolument nécessaire de protéger les témoins et que l'État doit pouvoir aider à se réinstaller les témoins et les gens qui peuvent contribuer à la poursuite des criminels devant les tribunaux.

Les pétitionnaires demandent donc à la Chambre d'adopter le plus tôt possible le projet de loi C-206, que j'ai eu l'honneur de présenter à la Chambre, afin de donner un fondement juridique à un programme national de réinstallation et de protection des témoins.

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne les crimes violents et les jeunes contrevenants. Les pétitionnaires demandent au Parlement de reconnaître et de résoudre les problèmes soulevés dans la pétition et, notamment, de modifier le Code criminel du Canada ainsi que la Loi sur les jeunes contrevenants de manière à prévoir des peines plus lourdes pour ceux qui sont trouvés coupables de crimes violents. Je suis heureux de pouvoir dire que notre gouvernement a justement pris des mesures en ce sens.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, à la demande d'un collègue et au nom d'habitants de Victoria, en Colombie-Britannique, je présente une pétition demandant au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes du même sexe et, notamment, de ne pas modifier la Loi sur les droits de la personne de manière à y inclure l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de discrimination interdits.

L'ÉTHANOL

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'aimerais aussi présenter une pétition. Les pétitionnaires demandent humblement au Parlement de maintenir pour une période de dix ans l'exemption de taxe d'accise actuellement en vigueur pour l'éthanol entrant dans la composition de carburants mixtes, afin de faciliter ainsi l'établissement au Canada d'une industrie de l'éthanol qui soit solide et autosuffisante.

LES CARTES DE TUEURS

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je prends la parole pour présenter deux pétitions venant d'électeurs de la circonscription de York-Sud-Weston. Le pétitionnaires demandent au Parlement de modifier les lois du Canada en vue d'interdire l'importation, la distribution, la vente et la production de cartes

5221

de tueurs et d'aviser les fabricants de ces cartes que celles qui sont destinées au Canada seront saisies et détruites.

* * *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

(Les questions auxquelles une réponse verbale est donnée sont marquées d'un astérisque.)

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: Toutes les questions sont-elles réservées?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


5221

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-35, Loi constituant le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

(1525)

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, si je ne m'abuse, il me reste trois minutes, mais je vais quand même conclure rapidement, d'autant que les députés du tiers parti voulaient tellement entendre le reste de mon discours avant la période des questions. Je m'en voudrais de les décevoir.

En conclusion, ce projet de loi est donc, comme l'ont dit le ministre et d'autres députés tout à l'heure, fondamentalement d'ordre administratif, mais il est tout de même fort important. Il a pour objet de créer un nouveau ministère, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, où l'accent est mis non pas sur la sécurité publique, mais sur l'édification du pays.

Nous sommes ici pour remplir nos promesses du livre rouge. Nous estimons que l'immigration est un bon moyen d'y parvenir. Nous savons que la création du ministère en cause, dont le ministre a parlé et qui fait l'objet de ce projet de loi, profitera au Canada. Notre tâche consiste à édifier un Canada aussi fort et uni, d'un océan à l'autre, que possible.

J'appuie ce projet de loi qui suscite de grands espoirs pour l'avenir de notre grand pays.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, je voudrais tirer une chose au clair en ce qui concerne la position du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration sur les criminels qui ne sont pas citoyens canadiens.

Je voudrais qu'il soit parfaitement clair que je considère comme un honneur de siéger dans cette enceinte en tant que député et immigrant ayant obtenu sa citoyenneté il n'y a pas tellement d'années. Je considère comme un grand honneur d'avoir été choisi pour représenter les électeurs de ma circonscription.

L'une des choses qui préoccupent beaucoup les électeurs de Wild Rose a trait au cas de Charles Ng, qui a été retenu au Canada pendant un certain nombre d'années à grands frais, soit des millions de dollars à ce qu'on dit. En outre, plus récemment, une autre personne n'ayant pas la citoyenneté canadienne, a été trouvée coupable, à Calgary, du meurtre d'un policier dans ma circonscription; cette personne était un policier corrompu dans son pays d'origine et serait ici illégalement.

Lors d'une visite que j'ai faite récemment au pénitencier de Kingston, j'ai parlé à nombre de détenus qui n'ont pas la citoyenneté canadienne. Les institutions fédérales de Drumheller et de Bowden, dans ma circonscription, comptent un grand nombre de détenus n'étant pas citoyens canadiens. L'un d'eux a déclaré qu'il était venu au Canada parce qu'il était plus facile de pratiquer le trafic des stupéfiants au Canada que n'importe où ailleurs sur ce continent.

J'entends ce genre de choses. Ce qui m'inquiète, c'est le fait qu'il y ait au Canada des criminels dangereux qui purgent actuellement des peines de prison et d'autres qui attendent leur sentence. Ma question est la suivante: le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration appuierait-il l'idée de l'expulsion des personnes qui ont commis un crime grave au Canada et ne sont pas citoyens canadiens?

Mme Clancy: Monsieur le Président, je remercie le député de Wild Rose de son intervention et de ses questions. Nous sommes également ravis de compter parmi nous un immigrant devenu député. J'espère qu'il nous parlera plus tard de sa propre réussite et aussi de celle de nombreux autres néo-Canadiens comme lui.

Comme le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration l'a souvent dit, ce sont les catastrophes qui font souvent la une des journaux et dont on parle à la Chambre. On parle rarement des événements heureux. Je compte bien que le député fera une intervention à ce sujet.

(1530)

Le député sait, je pense, ou en tous cas devrait savoir, que le ministre a dit plus d'une fois à la Chambre et hors de la Chambre qu'il ne tolérait absolument pas les gens qui abusaient du système, les gens qui commettaient des crimes dans notre pays ou qui commettaient certains actes qui, au Canada, étaient considérés comme des crimes. Nous ne tolérerons pas ce genre de conduite.


5222

Je puis assurer au député que, comme le ministre l'a promis, une mesure législative sera bientôt présenter à la Chambre à ce sujet.

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais faire suite à ce que disait le député de Wild Rose. Je veux interroger le secrétaire parlementaire au sujet d'une déclaration qu'il a faite et qui ne me paraît pas claire. Je voudrais connaître son point de vue sur ce qui suit.

Si j'ai bien compris le député de Wild Rose, il a proposé que les criminels reconnus coupables soient expulsés. Si c'est bien le cas, sauf le respect que je dois au député, sa proposition n'a aucun sens. Elle équivaut, en effet, à dire que si une personne, qui n'est pas citoyenne canadienne, commet un meurtre et est reconnue coupable, sa seule peine consistera à être expulsée vers son pays d'origine. Cela n'a aucun sens.

Par ailleurs, si le député proposait plutôt que le gouvernement du Canada envisage d'expulser un criminel après que ce dernier a purgé sa peine pour un acte criminel qu'il a commis, c'est tout à fait différent.

Je me demande si le secrétaire parlementaire est d'avis, comme moi, qu'il serait insensé d'expulser immédiatement des criminels reconnus coupables, puisque d'autres personnes seraient ainsi tentées de venir au Canada pour y commettre des crimes, sachant qu'elles risquent seulement d'être expulsées.

Mme Clancy: Monsieur le Président, je remercie le député de Scarborough-Ouest, qui est mon collègue à la fois comme député et comme membre du Barreau. Le député a tout à fait raison. Le projet de loi qui va suivre sera évidemment conforme à tous les principes de l'application régulière de la loi.

Le député de Wild Rose suggère peut-être que nous économiserons de l'argent, mais bien que je ne lui prête pas d'intentions, il a de toute manière absolument raison de dire que nous agirions de façon ridicule en ouvrant toutes grandes les vannes aux gens qui viendraient au Canada et croiraient qu'ils peuvent faire à peu près tout ce qu'ils veulent. Ils pourraient cambrioler une banque et s'exposeraient uniquement à l'expulsion vers leur pays d'origine puisqu'il n'existe aucun processus réel qui permette de les juger, de les condamner et de les punir ailleurs.

En définitive, ce que nous voulons, c'est empêcher les gens d'abuser du système canadien d'immigration et de citoyenneté.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, j'aurais peut-être dû clarifier un peu mon observation. Ce dont je parle surtout, ce sont des gens qui viennent au Canada, qui commettent des crimes et qui sont recherchés désespérément dans leur pays.

Je songe notamment à Charles Ng. Pourquoi l'avons-nous hébergé et avons-nous dépensé des millions de dollars pendant six ans parce que nous ne voulions pas le renvoyer en Californie, où il est recherché pour environ 22 meurtres? Les détenus de Drumheller, par exemple, ont dit ouvertement que les peines d'emprisonnement au Canada n'étaient pas assez sévères. Ils préfèrent être incarcérés au Canada que d'être renvoyés dans d'autres pays, où les peines sont plus sévères.

Nous devrions analyser toute cette question et, s'il est financièrement plus avantageux pour le Canada de les renvoyer que de les garder en prison, nous devrions probablement songer à le faire.

Mme Clancy: Monsieur le Président, je comprends les sentiments du député. Lui et moi avons eu des discussions de ce genre sur d'autres questions.

On ne peut pas légiférer sur des cas individuels comme celui de Charles Ng. Il faut adopter une mesure législative de nature générale qui vise tout le monde. Nous ne pouvons pas créer une loi qui traite d'une situation en particulier, car il faudrait alors tout connaître. Nous ne pouvons pas non plus prévoir toutes les situations.

(1535)

Nous devons adopter des lois qui soient conformes à la Charte des droits et libertés, à notre droit pénal et ses précédents, à la common law britannique et sa croyance dans la justice et les voies régulières de droit, et faire de notre mieux en tenant compte de tout cela. L'adoption de lois et la philosophie qui se cache derrière le droit pénal, le droit de l'immigration, etc., ne sont pas dictées entièrement par des considérations financières.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, nous débattons aujourd'hui le projet de loi C-35, une mesure législative constituant le ministère de l'Immigration et de la Citoyenneté. Je ne suis pas contre la création de ce ministère. Il est néanmoins important que la Chambre se penche sur le mandat du ministère et sur ses modalités d'exécution. J'aimerais insister sur un aspect en particulier, le traitement des réfugiés.

Le Canada, avec l'appui de ses citoyens, s'est engagé à fournir un refuge sûr aux personnes qui, un peu partout dans le monde, risquent d'être tuées ou grièvement blessées dans leur pays d'origine. Il est sain que nous soyons fiers de pouvoir offrir cela.

Voilà pourquoi je ne veux pas débattre la question de savoir si nous devons continuer d'accueillir des réfugiés, car nous sommes en mesure de le faire et nous devons le faire. Je veux plutôt aborder le processus de détermination des personnes à qui nous devons ainsi venir en aide. Plus concrètement, je veux parler de l'acceptation des réfugiés de l'intérieur, c'est-à-dire ceux qui sont déjà au Canada, et de son incidence sur les réfugiés qui n'ont pas les moyens de venir au Canada avant de présenter une demande de revendication du statut de réfugié.

Ils sont littéralement des millions dans le monde à avoir un besoin extrême d'aide. Pendant que nous siégeons ici en toute sécurité et dans le confort total, beaucoup de ces gens connaissent la faim, la souffrance et même la mort. La plupart d'entre eux n'ont pas les moyens ou sont incapables de trouver refuge dans d'autres pays. Ils sont donc forcés d'attendre que les autres viennent les secourir sur place.


5223

Selon un rapport du comité exécutif du Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la population des réfugiés dans le monde atteignait le nombre stupéfiant de 19 millions, en 1992. Voici quelques chiffres à ce sujet que l'on trouve dans le même rapport: 420 000 réfugiés somaliens au Kenya; 80 000 Bhoutans au Népal; 250 000 réfugiés du Myanmar au Bangladesh et 280 Togolais au Bénin et au Ghana. Ce ne sont là qu'un petit nombre des nombreux habitants de la planète dont la vie a été ruinée et qui sont souvent réduits à la survivance. Et on n'entrevoit pas la fin. Le Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui est à bout de ressources, a dit, sur un ton sans appel, et je cite: «Le nombre des réfugiés continue de s'accroître inexorablement».

Face à ce besoin massif de refuges sûrs, le Canada s'est offert à accueillir quelque 30 000 réfugiés cette année. De ce nombre, environ la moitié des places sont réservées aux réfugiés de l'intérieur, ceux qui sont déjà au Canada. Bon nombre des demandeurs du statut de réfugié sont des réfugiés légitimes qui ont surmonté des difficultés incroyables pour trouver refuge chez nous.

Il faut aussi savoir qu'il y a, au Canada, un certain nombre de demandeurs du statut de réfugié qui ne sont pas des réfugiés légitimes et qui ne viennent dans notre pays que pour y trouver une vie meilleure. Cela se comprend, et nous devrions continuer de favoriser l'arrivée de personnes productives.

Selon la politique d'immigration actuelle, il y a bien au-delà de 200 000 places disponibles pour les personnes qui voudraient s'établir au Canada à titre d'immigrants, mais très peu de places pour les réfugiés. C'est pourquoi il est important que nous prenions des précautions spéciales lorsque nous établissons quels sont les demandeurs du statut de réfugié qui se trouvent dans notre pays et qui sont des demandeurs légitimes et quels sont ceux qui cherchent simplement à éviter les procédures d'immigration et à passer avant les autres en demandant le statut de réfugié.

Les Nations Unies ont émis un avertissement aux pays qui offrent l'asile aux réfugiés. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a déclaré que:

La distinction entre les personnes qui migrent volontairement et les réfugiés est extrêmement ténue, mais il importe néanmoins que les États puissent faire la distinction d'une manière juste et uniforme pour octroyer l'asile aux personnes qui en ont véritablement besoin et que le système de protection des réfugiés ne soit pas encombré par les demandes des immigrants qui sont motivées par l'argent.
(1540)

Je suis d'accord avec le Haut-Commissariat. Si nous continuons d'accepter un plus grand nombre de demandeurs du statut de réfugié qui se trouvent déjà au Canada, nous allons enlever des places aux personnes qui n'ont pas les moyens de venir au Canada avant de demander le statut de réfugié.

Les médias ont mis la main dernièrement sur un rapport confidentiel qui venait du cabinet du ministre de l'Immigration et qui faisait état de certains faits troublants. Premièrement, le taux d'acceptation de réfugiés qui présentent une demande lorsqu'ils se trouvent au Canada a grimpé depuis que le ministre a nommé de nouveaux membres à la Commission. Et il ne s'agit pas d'une petite augmentation. Le personnel même du ministre a dit qu'il s'agissait de «la première augmentation trimestrielle vraiment importante depuis la création de la Commission».

En fait, selon ce rapport, 67 p. 100 de tous les demandeurs du statut de réfugié qui se trouvent au Canada sont actuellement acceptés par la nouvelle Commission. Cela a permis à 4 855 demandeurs du statut de réfugié de demeurer au Canada. Près du tiers de l'objectif annuel total de 15 000 réfugiés a été atteint seulement au cours du premier trimestre de 1994. À ce rythme-là, on atteindra bien avant la fin de l'année l'objectif annuel du nombre de réfugiés qui présentent leur demande de statut alors qu'ils se trouvent déjà au Canada.

Que va-t-il arriver? Le ministre va-t-il augmenter le nombre de places disponibles pour les réfugiés au Canada même si les services que nous pouvons offrir aux Canadiens sont déjà mis à rude épreuve en raison de notre situation économique? Ou encore, la catégorie des réfugiés déjà au pays aura-t-elle de plus en plus d'importance, ces réfugiés prenant la place d'autres qui ne peuvent pas venir au Canada pour demander le statut de réfugié?

Si tous les demandeurs du statut de réfugié déjà au pays avaient vraiment peur pour leur vie, ce serait une chose. Mais la hausse du taux d'acceptation nous amène à conclure que la Commission de l'immigration applique moins sévèrement les critères d'acceptation, dans le cas des réfugiés déjà au pays. Le nouveau vice-président de la Commission du statut de réfugié a expliqué cette hausse de deux façons différentes, mais les faits révèlent autre chose.

L'une des explications, c'est qu'on applique un nouveau processus de rationalisation. Pourtant, le rapport qui a fait l'objet de fuites nous apprend ceci:

La proportion des demandes traitées en moins de quatre heures dans le cadre d'une audience complète suivant le processus normal a chuté de 60 p. 100, en 1993, à 53 p. 100 durant le premier trimestre de 1994.
On y lit aussi que:

Les nouvelles nominations à la SSR peuvent expliquer en bonne partie la baisse dans le pourcentage de demandes traitées en moins de quatre heures dans le cadre d'une audience normale.
Ce n'est pas ce qu'on peut qualifier de rationalisation.

La deuxième explication, c'est qu'un grand nombre de Somaliens et de Sri Lankais ont finalement obtenu une audience. On peut comprendre que les crises survenues récemment dans ces pays ait produit un grand nombre de réfugiés. Cependant, toujours selon le rapport, le taux d'acceptation des demandeurs déjà au pays a grimpé aussi rapidement, pour neuf pays d'origine sur dix. Les demandeurs du statut de réfugié venant de Chine, du Pakistan et d'Israël forment les groupes dont le taux d'acceptation est le plus élevé. Cette augmentation généralisée laisse supposer qu'un facteur autre que les récentes manifestations de violence dans les deux pays mentionnés ou que la prétendue rationalisation du processus explique la hausse du taux d'acceptation des réfugiés déjà au pays.

Je crois que nous nous devons à nous-mêmes, comme nous le devons aux millions de réfugiés légitimes de tous les pays de la terre, de ne pas employer des procédés qui laissent à désirer ni


5224

réduire les normes qui déterminent qui fera partie du nombre limité de réfugiés que le Canada peut aider.

Nous avons déjà élargi la catégorie des réfugiés légitimes; notre catégorie est maintenant la plus libérale de toutes celles des pays développés. Étant donné les restrictions budgétaires croissantes au Canada, et vu qu'il en coûte dix fois plus cher pour traiter les demandes de statut de réfugié ici qu'à l'étranger, il est peut-être temps de revoir les critères d'admission au Canada de personnes venant y demander le statut de réfugié. On devrait à tout le moins appliquer à la lettre les critères déjà en place.

Le cas récent de Pedro Hugo, terroriste reconnu, témoigne du laxisme de nos lois sur les réfugiés. Après avoir été retourné au Pérou et y avoir vécu pendant 18 mois, Hugo a été ramené au Canada, aux frais des contribuables, sous prétexte que la Commission avait commis une «erreur de jugement». Les contribuables canadiens, dont d'honnêtes immigrants travailleurs, ont dû payer pour faire venir Hugo en avion, le loger et lui fournir des services d'aide juridique avant que la Commission ne parvienne, pour la deuxième fois, à la conclusion évidente, c'est-à-dire que Pedro Hugo n'était pas un réfugié légitime.

(1545)

Étant donné qu'il existe à travers le monde quelque 19 millions de réfugiés dont la vaste majorité n'ont pas les moyens de venir au Canada pour réclamer sur place le statut de réfugié, nous avons le devoir moral de choisir avec soin les demandeurs de statut de réfugié de l'intérieur que nous autorisons à rester au Canada. Il est impératif de ne pas laisser une générosité mal placée influer sur la prise de décisions de ce genre. Chaque personne qui arrive ici, puis demande le statut de réfugié parce qu'elle veut profiter de meilleures conditions, ou parce qu'elle n'aime tout simplement pas vivre dans son propre pays, prend la place de quelqu'un qui se trouve dans une situation désespérée ou dont la vie est vraiment en danger.

Les décisions à prendre ne sont pas faciles, mais elles s'imposent. Sadako Ogata, haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, l'a déclaré lui-même: «Le réétablissement doit être fonction du besoin et non du désir.» Nous devons nous assurer d'admettre uniquement les véritables réfugiés.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais remercier ma collègue de Calgary-Nord de ses excellentes observations. Je pense que nous sommes tous d'accord ici pour reconnaître que le problème des réfugiés est très délicat, et même si je ne suis pas d'accord pour dire que le gouvernement a fait preuve de mollesse en ce qui concerne les réfugiés déjà au pays, je reconnais qu'ils ont un avantage par rapport à ceux qui sont encore à l'étranger. Je pense que nous devrions tous tenir compte de ce qu'elle a dit. Nous devons réellement essayer d'être aussi justes et impartiaux que possible.

L'observation que je voudrais faire porte sur une petite erreur qu'elle a faite dans son discours. Elle a parlé en commençant du ministère de l'Immigration et de la Citoyenneté. J'en ai pris note immédiatement car, bien sûr, l'objet du projet de loi est de créer le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Ce que je veux dire, c'est que la citoyenneté vient avant l'immigration dans la désignation du ministère.

C'est un point très important qui m'a frappé, car s'il y a une chose que j'aurais aimé changer dans le projet de loi c'est bien le titre; j'aurais voulu que l'ordre soit Immigration et Citoyenneté, car l'immigration est justement le corps de ce pays. Lorsque les immigrants arrivent, ils doivent être logés et nourris, et ils ont besoin de chaleur physique et humaine. Je dirais que la citoyenneté, c'est l'âme du pays. C'est ce que le pays donne pour satisfaire l'esprit et assurer le bien-être général.

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, je suis heureuse des remarques du député. Je peux lui dire que si j'ai inversé l'ordre des mots, c'est un lapsus. Cependant, je suis d'accord avec lui. L'immigration vient avant la citoyenneté et s'il veut proposer un amendement au projet de loi pour changer le nom, je serai heureuse de l'appuyer.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ma collègue a parlé des réfugiés qui sont à l'extérieur du Canada et de ceux qui viennent ici et demandent le statut de réfugié. Elle émet plusieurs réserves et des appréhensions, mais je voudrais lui dire qu'on a un système ici, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, où des commissaires sont appelés à déterminer qui est un véritable réfugié au sens de la Convention de Genève et qui ne l'est pas.

Je trouve parfois que ces appréhensions sont non fondées. Ensuite, je voudrais lui dire également que, dans tous les pays, des réfugiés se présentent à leurs portes, soit aux États-Unis ou en Europe, pour demander l'asile politique. Ce n'est pas un phénomène unique au Canada; c'est un phénomène qu'on retrouve un peu partout dans le monde. C'est pour cela que des organismes indépendants, autonomes sont appelés à trancher le litige, à savoir qui est un réfugié et qui ne l'est pas.

(1550)

[Traduction]

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, je reconnais certes la compétence de mon collègue dans ce domaine. Étant donné qu'il a été immigrant, il en sait probablement plus que moi sur certaines questions.

Je voudrais signaler qu'on se préoccupe du fait que le tiers des places disponibles dans le programme des réfugiés de l'intérieur était déjà comblé durant le premier trimestre de cette année. De deux choses l'une: ou bien très peu de réfugiés de ce genre seront admis au fur et à mesure que l'année avancera, car le contingent de cette catégorie sera atteint très rapidement, ou bien les réfugiés de l'intérieur prendront la place de réfugiés encore à l'étranger et soumis à des tensions très graves. Je pense qu'il s'agissait simplement de dire que nous devons bien nous assurer de parvenir à concilier ces deux intérêts contradictoires.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Selon moi, le projet de loi C-35, qui vise à regrouper les services de citoyenneté et d'immigration, constitue une initiative louable pour essayer de rationaliser les opérations et de réduire les chevauchements. Je ne peux qu'applaudir à cette décision et espérer qu'une fois


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ces deux ministères réunis, on pourra en rationaliser l'administration, accroître l'efficience et réaliser des économies importantes pour les contribuables, chose particulièrement importante en cette période de déficit systématique. À mon avis, ce projet de loi ne présente aucun problème véritable. Je pense que ce pourrait être une occasion en or d'examiner bon nombre de questions non réglées en matière d'immigration et de se pencher sur certaines des initiatives que le nouveau ministère devrait entreprendre.

Une des caractéristiques les plus remarquables de notre très beau pays réside dans notre mosaïque culturelle dont je suis très fier. Très peu de pays sont en mesure d'assimiler aussi bien un groupe hétérogène de gens venant du monde entier. En fait, tous les pays du monde sont représentés à l'intérieur de nos frontières. Nous avons réussi à créer un creuset de bien des nationalités en évitant le plus possible les conflits civils, les préjugés et l'intolérance. Cela nous a permis de parvenir à une culture riche profitant à tous les gens qui vivent au Canada.

En effet, notre exposition à des cultures, des religions et des groupes ethniques bien différents nous enrichit tous et engendre la tolérance. C'est peut-être cette tolérance et cette compréhension que nous semblons avoir en tant que Canadiens qui nous distinguent de pratiquement tous les autres pays du monde et nous donnent nos caractéristiques internationales bien particulières. C'est ce niveau unique de tolérance et de compréhension qui nous vaut d'être tenus en haute estime sur la scène internationale. Il ne fait aucun doute à mes yeux que l'immigration nous apporte beaucoup.

De nos jours, dans les années 1990, on parle énormément d'immigration. Souvent, on défend avec passion des points de vue divergents au sujet d'immigrants venus de milieux différents. On se demande si le nombre d'immigrants est trop élevé ou trop faible. Quant à leurs caractéristiques, ouvrons-nous la porte à trop d'immigrants et surtout à des immigrants ayant des caractéristiques indésirables dans ce pays? Quant aux pays d'origine, certains sont-ils mieux adaptés au mode de vie canadien que d'autres? Les immigrants sont-ils une bénédiction ou une plaie pour notre pays?

Ces questions sont encore plus pertinentes aujourd'hui et je pense qu'elles exigent une réponse urgente en raison du taux de chômage élevé, de l'incertitude de notre avenir économique, de l'évolution rapide des tendances économiques, et de la baisse générale du niveau de vie dont souffrent les générations actuelles, contrairement à celles qui les ont précédées.

La polémique devient plus passionnée et plus subjective au fur et à mesure que ces pressions sur la société canadienne augmentent. Les immigrants deviennent souvent des boucs émissaires sur qui on fait retomber la responsabilité de certains de ces problèmes. Dans l'intérêt des Canadiens, de leur pays et des immigrants, il est urgent de répondre à ces questions et de prendre le taureau par les cornes au lieu de chercher à esquiver les problèmes.

La politique de l'autruche ne paye pas. Il n'y a jamais eu de meilleur moment pour demander qu'on nous dise la vérité sur l'immigration. Combien d'immigrants devrait-on admettre? Quel type d'immigrants devrait-on choisir? Seules les statistiques nous le diront. Ne nous leurrons pas.

Tout d'abord, je pense qu'il serait utile de faire un bref historique de l'immigration au Canada. Comme je le disais plus tôt, les immigrants ont été une bénédiction pour ce pays, cela ne fait aucun doute. Je suis moi-même immigrant, très fier et très reconnaissant d'avoir été admis dans ce pays. En fait, j'aime penser que ce pays a été fondé par un grand nombre de races.

(1555)

Entre 1967 et 1978, la politique en matière d'immigration favorisait les immigrants très instruits, hautement qualifiés et spécialisés. Ils trouvaient rapidement du travail, leur revenu augmentait et dépassait même celui des Canadiens d'origine. Ils contribuaient au Trésor et ne causaient quasiment pas de perte d'emplois.

Après 1978, la politique a changé. Le niveau d'éducation des immigrants a baissé, leur revenu aussi, et ils sont entrés en concurrence avec les Canadiens sur le marché du travail, particulièrement les travailleurs non qualifiés en provenance des pays du tiers monde.

L'intégration se fait moins bien qu'auparavant. Les immigrants mettent aussi plus de temps à s'adapter. Cette adaptation dépend de diverses caractéristiques que présentent les immigrants, notamment de leur éducation, de leur langue et de leur âge, ainsi que de la nature de la société d'accueil, des compétences requises sur le marché du travail et de la mesure où le pays est disposé à les accueillir.

Depuis 10 ou 15 ans, au Canada, nous avons réduit la catégorie des immigrants indépendants, autrement dit, il y a moins de demandeurs qui sont retenus par suite d'un processus de sélection et qui ont eu une forte possibilité d'avoir un emploi, et nous avons augmenté le nombre d'immigrants aux fins de réunion des familles, c'est-à-dire que plus de personnes peuvent entrer au Canada uniquement parce qu'un membre de leur famille y habite déjà.

De 1967 à 1980, la politique en matière d'immigration était sûrement très satisfaisante, surtout en raison du processus de sélection que je viens de mentionner ainsi que de l'engagement de notre pays à se montrer tolérant à l'égard de la culture des minorités, des droits de la personne et de l'égalité des droits égaux pour tous.

Toutefois, les récentes tendances en ce qui a trait à la performance des immigrants sur le marché du travail indiquent certains problèmes. Diverses sources ont fait mention du taux de criminalité chez les immigrants et, en ce qui a trait aux services sociaux, on se demande s'ils représentent une charge ou un apport pour les Canadiens. Je n'ai pu consulter les données ou les renseignements à ce sujet, mais je crois qu'il est temps de faire face à nos problèmes, d'arrêter de chercher des boucs émissaires et de nous efforcer pour mieux servir les immigrants et les Canadiens.


5226

Si les immigrants éprouvent des difficultés et s'adressent trop souvent aux services sociaux, cela représente un problème à régler. La solution consiste peut-être à améliorer le processus de sélection, à définir quels sont les besoins économiques du Canada et à offrir aux immigrants des services mieux ciblés.

Il est temps aussi d'examiner les populations d'immigrants et de déterminer où elles en sont six mois, un an ou un an et demi après leur arrivée au Canada, pour voir si elles sont économiquement une charge ou un apport. En ces temps de déficit, notre pays ne peut tolérer que la pression sur nos services sociaux augmente. Comme je l'ai déjà dit, le Canada ne peut se permettre d'aider d'autres pays s'il ne connaît pas lui-même une économie solide et vigoureuse, un chômage peu élevé et une croissance raisonnable. Ce n'est qu'en ayant une économie forte chez nous que nous pourrons tendre la main à des pays moins favorisés pour stimuler leur essor économique et technique.

Aujourd'hui, à la Chambre, nous nous sommes aussi demandé combien d'immigrants violent la loi. Il serait prudent de le savoir, mais nous n'avons pas de statistiques là-dessus. Il faudrait en avoir. Autre point important, les personnes qui commettent des délits punissables au Canada devraient, une fois reconnus coupables, être automatiquement expulsées vers leur pays d'origine. Il est absolument injuste que les contribuables canadiens paient plus de 50 000 $ à 60 000 $ par année pour chaque personne qui purge une peine d'emprisonnement. À l'heure actuelle, 85 p. 100 des criminels qui sont susceptibles d'être expulsés restent au Canada. Il faut que cela cesse tout de suite.

Ce qui est injuste aussi, c'est qu'on permette à des personnes d'entrer au Canada expressément dans le but que leur enfant naisse en terre canadienne de telle sorte qu'il bénéficie automatiquement des droits et des privilèges associés à la citoyenneté canadienne. Autrement dit, la citoyenneté canadienne ne devrait pas être accordée d'office à l'enfant d'un étranger rien que parce qu'il est né au Canada.

Les immigrants et les citoyens canadiens bénéficieront d'une politique judicieuse en matière d'immigration.

(1600)

J'implore le ministre de lier l'acceptation d'immigrants non réfugiés, quels que soient leur race ou leur pays d'origine, aux besoins économiques de notre pays. Il ne faut pas non plus négliger nos obligations humanitaires conformément à la Convention de 1951 sur le statut de réfugié. Il faut resserrer la définition de la catégorie des réfugiés. Ce sont les réfugiés légitimes et les réfugiés indépendants qui pâtissent du fait que d'autres personnes invoquent de fausses raisons pour entrer au Canada.

Prenons exemple sur la Nouvelle-Zélande et l'Australie pour notre politique en matière de réunification des familles. Ces deux pays ont une politique judicieuse et juste pour tous les intéressés à cet égard.

Il faudrait faire passer le test du sida aux personnes qui souhaitent immigrer au Canada. On teste déjà les gens pour d'autres maladies infectieuses. Il n'y a aucune raison de ne pas les tester pour une maladie qui, tragiquement, est toujours mortelle.

Finalement, en ce qui concerne l'association de la citoyenneté et de l'immigration, je conseillerais au ministre de consulter un groupe privé qui se spécialise dans la rationalisation des ministères. Les Canadiens et le ministre auraient intérêt à bénéficier d'une telle expertise étant donné qu'il en coûte 50 000 $ par année environ pour traiter la demande d'un immigrant.

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais poser une petite question afin de clarifier certains propos tenus par le député. Il a parlé, je crois, de l'expulsion systématique des personnes qui sont reconnues coupables d'un acte criminel et qui ne sont pas citoyens canadiens. Je voudrais tirer les choses au clair et demander au député s'il a bien réfléchi à la question.

Permettez-moi de donner un exemple que je demanderai au député de commenter. Le député prétend-il que tout individu qui n'est pas citoyen canadien et qui est reconnu coupable d'un acte criminel au Canada devrait être immédiatement expulsé? Ou croit-il que cet individu devrait être expulsé après avoir purgé sa peine?

Supposons qu'une personne de l'État de Washington vienne au Canada pour effectuer un vol de banque à main armée. Si cette personne est appréhendée et reconnue coupable de vol à main armée en Colombie-Britannique, le député croit-il que la seule chose à faire est de renvoyer cette personne dans l'État de Washington? Ou le député croit-il que nous devrions attendre que cette personne ait purgé la peine imposée pour vol à main armée avant de l'expulser?

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, pour répondre au député, je dirai qu'une personne devrait être poursuivie devant les tribunaux afin que sa culpabilité ou son innocence soit établie. Si la personne est reconnue coupable, elle devrait être expulsée vers son pays d'origine en étant entendu qu'elle s'y verra contrainte de purger une peine proportionnelle au crime commis.

Mes électeurs m'ont dit qu'ils trouvent tout à fait injuste que les contribuables canadiens aient à payer jusqu'à 50 000 $ ou 60 000 $ par année pour garder ce genre de criminel dans un établissement pénitencier pendant toute la durée de sa peine. À mon avis, les contribuables canadiens n'ont pas à assumer ces frais.

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, je voudrais avoir certains éclaircissements. Je tiens à ce que le député sache que je n'ai aucun grief précis contre les immigrants qui commentent des crimes particulièrement graves. Cependant, si j'ai bien compris le député, il aimerait que l'on recueille certaines données sur les activités criminelles des immigrants au Canada. Je me pose des questions. Jusqu'où une telle mesure irait-elle? Quel usage certaines personnes pourraient-elles faire de telles données?


5227

Ce qui m'inquiète, c'est que si nous amassions de telles données, certaines personnes pourraient demander que l'on refuse l'entrée au Canada à certains groupes, par exemple, aux Iraniens, aux Haïtiens, aux Écossais ou à tout autre groupe. Les groupes qui commettraient proportionnellement plus de crimes que la moyenne se verraient interdire l'immigration au Canada tandis que ceux qui en commettraient moins que la moyenne seraient invités à venir s'installer ici. J'ai des réserves.

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, je comprends ce que dit le député. La dernière chose que je voudrais, c'est que l'on cause un préjudice quelconque à un groupe. Beaucoup de gens, dans les médias et ailleurs, ont dit que certains immigrants étaient des criminels et qu'ils ne devraient pas être autorisés à entrer au Canada.

(1605)

Je cherche des réponses, des réponses qui n'ont pas été fournies par le ministre de l'Immigration. Je crois qu'il est important que nous nous demandions si des criminels sont autorisés à venir s'installer au Canada et si des immigrants commettent des actes criminels au Canada. Nous pourrions peut-être trouver un moyen pour mieux identifier les personnes à risque avant qu'elles immigrent ou qu'elles commettent des crimes ici. Par exemple, si telle ou telle personne a un casier judiciaire dans son pays d'origine, nous pourrions peut-être utiliser ce renseignement pour protéger les Canadiens.

C'est à cela que je veux en venir. Je ne veux pas du tout que l'on instaure une forme de discrimination en fonction du pays d'origine, mais plutôt que, par souci de protection des citoyens canadiens, on fasse savoir avant qu'il vienne s'installer au Canada que, par exemple, quelqu'un a un passé criminel et est un criminel endurci.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, je suis heureuse de savoir que le député d'en face est lui-même un immigrant et un néo-Canadien et qu'il est donc sensible à la situation des autres néo-Canadiens. Je crois comprendre également que le député est médecin et je me demandais s'il a fait ses études de médecine au Canada.

Le député a dit plus tôt que nous devrions faire une analyse économique de ce que les immigrants apportent à notre pays, et j'aurais une question à lui poser à ce sujet. Si le député d'en face a fait ses études de médecine au Canada, ce qui coûte incroyablement cher aux contribuables canadiens, a-t-il pris la peine de calculer ce qu'il apporte lui-même à notre pays sur le plan économique?

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, j'ai quitté l'Angleterre pour venir au Canada à l'âge de huit ans. Ce que j'ai dit dans mon discours, c'est que nous devons déterminer si les personnes qui viennent s'établir dans notre pays deviennent dépendantes de nos services sociaux ou non.

Si je dis cela, c'est tout simplement dans le but de détruire certains mythes qui existent au sujet des immigrants. J'essaie d'aller au fond des choses. Je ne fais pas de déclaration sur ce que les groupes d'immigrants font ou ne font pas, mais je crois qu'il est important de déterminer si les immigrants dépendent de nos services sociaux ou non. S'ils dépendent de nos services sociaux, cela veut peut-être dire que quelque chose ne va pas dans notre système et que nous devrions trouver des façons d'aider ces immigrants afin qu'ils n'aient pas à dépendre des services sociaux et qu'ils puissent s'intégrer de façon plus productive à la société canadienne.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)

* * *

LOI DE 1994 SUR LA CONVENTION CONCERNANT LES OISEAUX MIGRATEURS

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-23, Loi mettant en oeuvre la convention pour la protection des oiseaux migrateurs au Canada et aux États-Unis, dont le Comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

(1610)

L'hon. John Manley (au nom de la ministre de l'Environnement) propose: Que le projet de loi, tel que modifié, soit agréé.

(La motion est adoptée.)

M. Manley (au nom de la ministre de l'Environnement) propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Clifford Lincoln (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, dans son oeuvre appelée The Living Planet, David Attenborough, le zoologiste britannique, raconte l'histoire d'un écosystème au large du Pérou qui est composé d'un groupe de deux îles, les îles Chincha et San Gallan où il décrit comment, il y a quelques décennies, quelque 5,5 millions d'oiseaux, un groupe de cormorans appelés les guanays. Ces guanays vivaient dans cet écosystème très riche et se nourrissaient de petits poissons, des anchois plus précisément, qui étaient dans cette région.

En même temps, les guanays produisaient, dans leurs excréments, du guano sur les îles qui servait à fertiliser les terres des Indiens et des autres. Les excréments tombaient dans la mer et nourrissaient le plancton qui, en même temps, nourrissait les anchois. Il s'agissait d'une balance parfaite pour l'écosystème.


5228

À un moment donné sont arrivés les fertilisants chimiques et les Péruviens ont décidé qu'il était plus facile d'aller acheter leur fertilisant au magasin que d'aller le chercher sur les îles. Donc, la nécessité des oiseaux diminuait. En même temps, puisque la nécessité des oiseaux diminuait, ils ont commencé à pêcher les anchois de plus en plus fréquemment. Dans une année, ils ont pêché 14 000 tonnes d'anchois. Le résultat, c'est que des centaines de milliers de guanays sont morts. La production de guano s'est éliminée. De plus, comme le plancton n'était pas fertilisé, les anchois sont presque tous disparus.

La morale de cette histoire véridique, c'est que l'écosystème maintient un équilibre naturel presque parfait. Lorsqu'on retire un maillon de la chaîne, la chaîne se brise complètement.

[Traduction]

Je suppose que c'est ce qui a incité le gouvernement à présenter le projet de loi C-23. Nous essayons de préserver l'écosystème en faisant notre possible pour préserver les espèces que nous avons au Canada. Je suis donc heureux d'avoir l'occasion de parler de ces modifications à la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. J'en profite aussi pour féliciter mes collègues de l'intérêt qu'ils ont manifesté à l'égard de cette question et pour les remercier d'avoir contribué à renforcer cette mesure législative, qui vise à protéger ces espèces importantes, lors de son étude au Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

La présentation de ce projet de loi à la Chambre à l'étape de la troisième lecture est une suite tout à fait logique à la Semaine de l'environnement. Le projet de loi C-23 s'inscrit dans le cadre des efforts actuels visant à améliorer la législation fédérale concernant les espèces sauvages et leur habitat, et notamment à modifier la Loi sur la faune du Canada. Ces modifications mèneront à la proclamation de la protection des espèces animales et végétales sauvages, à la réglementation du commerce international et interprovincial, de même qu'à des consultations préalables à des négociations avec les États-Unis dans le but de modifier la convention elle-même concernant les oiseaux migrateurs.

Le projet de loi C-23 a été présenté le 25 avril à la Chambre au nom de la ministre de l'Environnement. Il vise à remplacer et à abroger la Loi actuelle sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, qui a été promulguée il y a 77 ans, en 1917.

Au début des années 1900, l'exploitation des oiseaux avait provoqué une diminution massive de leur population, surtout dans l'est de l'Amérique du Nord. La Convention concernant les oiseaux migrateurs a donc été conclue en 1916 par le Canada et les États-Unis, engageant les deux pays à protéger les oiseaux migrateurs contre le massacre général et à maintenir leur population.

La Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs a été promulguée en 1917 pour mettre en application au Canada les termes de la convention par la réglementation de la chasse aux canards, aux oies et aux autres oiseaux considérés comme gibier et par la protection des oiseaux non considérés comme gibier.

(1615)

Les dispositions de la loi visent à réglementer la chasse aux oiseaux migrateurs, à interdire leur trafic et leur commerce, à contrôler leur utilisation au moyen de permis et à permettre la création de refuges à leur intention de façon à pouvoir contrôler et gérer des zones importantes pour la protection de ces oiseaux. Il existe actuellement 101 refuges pour oiseaux migrateurs au Canada, qui permettent de protéger environ 11,3 millions d'hectares.

La loi est cependant demeurée relativement inchangée depuis 77 ans, car on n'y a apporté que des additions ou des modifications mineures. Dans le contexte des années 1990, la gestion des ressources naturelles doit non seulement incorporer l'objectif environnemental, mais aussi répondre aux préoccupations sociales, culturelles et bien sûr économiques.

Les modifications proposées dans le projet de loi C-23 visent à assurer la survie des espèces d'oiseaux migrateurs de manière que les Canadiens puissent continuer d'en bénéficier. Elles traitent aussi de nos engagements internationaux concernant la saine gestion d'une ressource que se partagent divers pays et sont conformes aux objectifs de la Convention sur la biodiversité.

Cette convention est l'un des résultats les plus tangibles et importants du Sommet de la Terre qui s'est tenu à Rio il y a deux ans. Elle a été ratifiée par le Canada en décembre 1992 et elle exige que les pays réglementent ou gèrent les ressources biologiques de manière à assurer leur conservation et leur utilisation durable et qu'ils établissent un système de zones protégées pour préserver la biodiversité.

Une étude exhaustive de la réglementation d'Environnement Canada a été réalisée en 1993, y compris un examen des règlements adoptés en conformité de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. Une vaste gamme d'intéressés ont été consultés à ce sujet, dont des chasseurs, des spécialistes de l'agriculture, des taxidermistes, des agriculteurs, des membres de groupes de défense de l'environnement et de la nature, des représentants des autochtones, des chercheurs, des organismes provinciaux et territoriaux responsables de la faune, des pourvoyeurs et des représentants de l'industrie. À l'issue de cette étude, il a été recommandé de rationaliser davantage l'administration, de moderniser les procédures et de rendre les règlements plus facilement applicables.

D'autres démarches indépendantes du projet de loi actuel sont en cours en vue de modifier la Convention concernant les oiseaux migrateurs, de manière à tenir compte des droits des autochtones et de ceux qui sont issus de traités et à permettre la capture d'oiseaux et de leurs oeufs durant les périodes d'interdiction. Ce processus, qui prévoit de vastes consultations avec les organismes autochtones, mènera à des négociations avec les États-Unis, négociations visant à modifier la Convention. Entre-temps, il existe des dispositions particulières permettant la poursuite des activités traditionnelles de capture au printemps et au début de l'été, de manière à régler le problème de la capture des oiseaux migrateurs durant la saison d'interdiction.


5229

[Français]

L'élaboration des modifications à la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs a nécessité de vastes consultations sur la réglementation fédérale visant à protéger ces oiseaux.

Après la deuxième lecture, une autre chance de consultation relativement aux changements proposés s'est présentée lorsque le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a effectué un examen approfondi du projet de loi avec d'excellents commentaires de toute une gamme de témoins. Plusieurs changements qui avaient été proposés par le Comité ont été inclus et, par conséquent, j'ai confiance que le projet de loi reflète encore plus les intérêts de tous les Canadiens et servira à protéger efficacement les oiseaux migrateurs maintenant et dans l'avenir.

Beaucoup de ces modifications sont de nature administrative et sont conçues pour moderniser et clarifier les dispositions déjà existantes. Les changements les plus substantiels comprennent des amendes beaucoup plus élevées en cas d'infraction, une plus grande flexibilité de condamnation par la justice, une meilleure protection pour les oiseaux migrateurs et des procédures de mise en application rationalisées et des plus rigoureuses.

Le pouvoir législatif donné par le Parlement reflétera la valeur et les intérêts des Canadiens pour la protection de notre héritage faunique. Ils seront aussi compatibles avec les autres lois fédérales qui réglementent les ressources naturelles et l'environnement. Son application sera flexible tout en ayant un effet dissuasif important relativement aux activités illégales.

(1620)

[Traduction]

Le braconnage et la contrebande d'oiseaux migrateurs sont une activité lucrative en pleine expansion. La demande croissante d'espèces d'oiseaux migrateurs canadiens et de leurs oeufs accroît leur valeur et pourrait mettre certaines espèces en péril.

Est considérée comme une infraction grave aux termes de la loi une activité illégale qui est préjudiciable à la survie d'une espèce, par exemple, une activité qui vise une espèce menacée ou un grand nombre d'individus d'une espèce menacée ou autre.

Compte tenu de ces facteurs, le comité a décidé de prévoir pour ces infractions des peines bien plus sévères que celles qui étaient proposées dans la loi originale. Il faut rappeler que celle-ci date de 1917, qu'elle a maintenant 77 ans et que ce qui constituait autrefois une amende importante est complètement dérisoire aujourd'hui.

Pour les délits graves, l'amende maximale passera de 300 $, dans la loi actuelle, à 100 000 $ pour un particulier et à 250 000 $ pour une personne morale; de plus, le projet de loi prévoit des amendes plus élevées en cas de continuation ou de récidive.

Les tribunaux auront également plus de latitude dans l'imposition de peines au moyen d'ordonnances spéciales. Pareilles ordonnances peuvent être particulièrement efficaces dans le cas de lois environnementales où on peut forcer les personnes trouvées coupables à réparer les dommages causés, à payer pour la réparation, à éviter les activités risquant d'entraîner la récidive, à publier les faits liés à l'infraction ou à exécuter des travaux d'intérêt collectif.

Le projet de loi permet aux tribunaux de tenir compte non seulement de la nature de l'infraction, mais encore des circonstances particulières de la personne trouvée coupable. Autrement dit, il permet aux tribunaux d'imposer des peines constructives et créatives.

[Français]

En modifiant la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, on nous a donné l'occasion de nous tourner vers une possibilité d'avenir pour réagir contre les menaces aux oiseaux migrateurs. En accord avec la Convention sur la diversité biologique, le sperme, les embryons et les cultures de tissus d'oiseaux migrateurs sont maintenant assujettis à la loi. Les oeufs sont déjà protégés en vertu de la Loi. Même si dans ce domaine, il n'y a pas de menace immédiate pour les oiseaux migrateurs, les nouvelles utilisations de matériels biologiques continuent de se développer.

Plutôt que de les empêcher, la loi modifiée est conçue pour assurer que le développement ne compromette pas la conservation des oiseaux migrateurs et les nombreux avantages qu'ils apportent aux Canadiens. Les activités auxquelles sont associées les cultures de tissus, le sperme, les oeufs et les embryons d'oiseaux migrateurs seront réglementées et gérées par des programmes de permis.

[Traduction]

Comme je l'ai déjà dit, la gestion des ressources naturelles doit incorporer non seulement des préoccupations économiques et environnementales, mais également des valeurs sociales et culturelles. Les peuples autochtones du Canada ont vécu en harmonie avec la nature et sa faune pendant des siècles, voire des milléraires. Leur patrimoine et leur survie même sont liés à l'usage durable des ressources de la faune.

Les oiseaux migrateurs ont une signification particulière pour les peuples autochtones qui, de génération en génération, ont acquis un grand bagage de connaissances où se mêlent le respect des oiseaux eux-mêmes et leur exploitation durable.

En réponse aux témoignages de plusieurs témoins, le comité permanent a modifié le projet de loi initial pour mieux refléter les préoccupations des autochtones en incluant une clause de non-dérogation dans le projet de loi. Cette clause stipule: «Il demeure entendu que la présente loi ne porte pas atteinte aux droits-ancestraux ou issus de traités-des peuples autochtones du Canada visés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.»

À elle seule, cette disposition ne suffit pas pour garantir les pratiques traditionnelles des peuples autochtones du Canada. C'est pourquoi un autre processus est amorcé, ainsi que je l'ai déjà dit, pour garantir les droits ancestraux ou issus des traités des peuples autochtones de chasser les oiseaux migrateurs et de récolter les oeufs hors saison.


5230

(1625)

Les consultations avec les peuples autochtones, qui ont été intensives au cours des quatre dernières années, déboucheront sur des négociations avec les États-Unis dans le courant de l'année en vue de modifier la Convention sur les oiseaux migrateurs. Entre-temps, des mesures d'exécution spéciales permettant de poursuivre la récolte traditionnelle du printemps et du début de l'été sont en place pour résoudre la question de la fermeture de la saison de la chasse aux oiseaux migrateurs prévue dans la loi actuelle et dans la loi modifiée.

[Français]

Il faut noter que le Comité permanent considère qu'il est essentiel que le Parlement ait l'occasion d'étudier tout changement apporté à la Convention à la suite de ces négociations ou de toute autre négociation dans l'avenir. Pour cette raison, le Comité a ajouté une disposition dans le projet de loi C-23 qui exige que toute modification à la Convention soit présentée aux deux Chambres du Parlement et qu'il y ait un débat ici, à la Chambre des communes.

Plusieurs dispositions visant à améliorer et à renforcer les pouvoirs et capacités des mises en application sont incluses dans le projet de loi C-23. Ces dispositions comprennent l'autorité d'inspecter, de fouiller, de saisir, de confisquer et de disposer des articles saisis ainsi que d'autres dispositions compatibles avec le Code criminel, la Charte canadienne des droits et libertés et d'autres lois fédérales touchant l'environnement et les ressources naturelles.

Le ministre de l'Environnement peut aussi nommer des personnes ou des catégories de personnes comme gardes-chasse. Si ces personnes sont employées par une province, la nomination doit être acceptée par cette province.

[Traduction]

J'ai mentionné les mesures d'exécution à la fin de mon résumé des principales modifications qu'il est proposé d'apporter à la loi. La raison en est que cela soulève une question extrêmement importante pour la conservation de la faune. Ni le gouvernement fédéral, ni le gouvernement provincial, pas plus d'ailleurs, sous ce rapport, que les gouvernements des autres pays, ne peuvent espérer, chacun pour soi, pouvoir assurer efficacement la biodiversité. L'atteinte de cet objectif et des autres objectifs dans le domaine du développement durable passe par la collaboration et le partenariat.

Pour ce qui est de l'aspect pratique et de l'efficacité, la question du respect de la loi constitue un domaine où s'impose une approche intégrée, c'est-à-dire fédérale-provinciale. Il existe bien d'autres secteurs où cette méthode donne des résultats. En partageant les mêmes objectifs et les mêmes préoccupations, en comptant mutuellement sur les points forts de l'autre, dans le cadre d'un plan de coopération, on améliore sa performance environnementale.

Le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine est un excellent exemple de partenariat. Le plan, signé initialement en 1986, est une initiative qui vise à protéger et à améliorer l'habitat marécageux et des hautes terres sur le continent, afin de freiner le déclin de la sauvagine. D'abord axé sur la conservation de la sauvagine, le plan incorpore maintenant les avantages de la conservation de la biodiversité.

Le plan illustre la mise en oeuvre du développement durable en engageant les propriétaires de terrains privés et les secteurs des ressources pour qu'ils intègrent les pratiques de conservation des espèces sauvages au développement économique durable, notamment par des initiatives de conservation des sols et des eaux.

Les partenaires comprennent le gouvernement fédéral des États-Unis et les États américains, les ONG et, certes, toutes les provinces canadiennes. En outre, le Mexique est maintenant partenaire à part entière, de sorte que le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine est réellement un plan de conservation continental.

Le 9 juin dernier, la vice-première ministre et ministre de l'Environnement a signé une mise à jour du plan qui prolonge de cinq autres années l'engagement du Canada.

Comme la ministre l'a souligné, au cours des six dernières années, le plan a permis de stopper la destruction et la perte de l'habitat marécageux des oiseaux migrateurs. Notre objectif commun pour les cinq prochaines années est de mettre en réserve des aires de reproduction et, chaque année, d'admirer le ciel rempli de 100 millions d'oiseaux migrateurs.

[Français]

Cette approche coopérative offre des avantages pour plusieurs autres facettes de la conservation de la faune, dont certaines seront traitées à la troisième lecture de la Loi sur la faune du Canada.

Le projet de loi C-23, celui-ci, qui modifie la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, représente un pas en avant considérable envers la protection et la conservation des oiseaux migrateurs et envers le respect de nos engagements dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.

(1630)

[Traduction]

Cette année, trois autres espèces d'oiseaux ont été ajoutées à la liste des espèces menacées de disparition au Canada. En avril 1994, cette liste a été rendue publique et nous avons appris que le colin de Virginie, le râle élégant et le moucherolle vert y étaient inscrits.

Selon le Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada:

Cette année encore, nous désignons des espèces qui viennent surtout du sud de l'Ontario et de la région de l'Okanagan, en Colombie-Britannique. . .
Le comité souligne que, le grand problème pour de nombreuses espèces, c'est qu'elles n'ont plus d'habitats. Le moucherolle vert, par exemple, est un oiseau chanteur qui a besoin de vastes étendues de forêt, mais elles se font de plus en plus rares.

Un des membres du comité a déclaré:

Plus nous morcelions la forêt, plus la population de ces oiseaux diminuait, au point qu'il n'en reste maintenant plus que quelques douzaines de couples, ce qui constitue un niveau critique.


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C'est ce qui se produit lorsque nous détruisons les habitats. Certains diront que ce projet de loi n'est pas vraiment important puisqu'il ne concerne que les oiseaux. Quelle importance peuvent bien avoir les oiseaux quand nous sommes en récession, quand les gens cherchent de l'emploi et que le Canada lutte contre une terrible crise économique? Eh bien, les oiseaux font partie d'un tout.

Nous devons voir notre patrimoine dans un contexte plus vaste, en tant que pays et en tant que peuple, et il ne peut y avoir de patrimoine sans la nature, sans tous les éléments qui la composent. Pouvons-nous imaginer le Canada sans oies blanches, sans faune, sans oiseaux? Notre patrimoine nous a été légué et nous sommes choyés. Nous devons nous efforcer tout particulièrement de conserver, de préserver et de maintenir notre patrimoine pour les générations futures.

Il y a des signes encourageants. Le faucon pèlerin, par exemple, avait presque disparu. Or, grâce aux efforts de bénévoles partout au Canada, au dévouement extraordinaire des services de la faune, notamment le Service canadien de la faune, cet oiseau a recommencé à se multiplier.

Nous devons nous décider à prendre très au sérieux les questions d'environnement, de qualité de la vie, d'écosystèmes, d'habitats qui abritent les oiseaux et la faune parce que ce sont des éléments essentiels de notre territoire, de notre mode de vie et de notre patrimoine. J'exhorte tous les députés à se joindre à moi et à appuyer le projet de loi à l'unanimité afin de renforcer notre détermination.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens cet après-midi sur le projet de loi C-23, immédiatement après le secrétaire parlementaire, l'honorable député de Saint-Louis au Québec. Ces dernières semaines, nous avons étudié le projet de loi C-23, Loi permettant de mettre en oeuvre la Convention pour la protection des oiseaux migrateurs au Canada et aux États-Unis.

(1635)

Des témoins sont venus devant le comité en grand nombre pour nous aider à mieux cerner le problème. Ces nombreux individus et organisations étaient tous des spécialistes qui nous ont appris beaucoup de choses. Il m'apparaît maintenant évident que cette loi, datant de 1917, avait grand besoin d'être rafraîchie.

Conscients de l'importance de protéger les oiseaux migrateurs pour éviter qu'ils ne deviennent des espèces en voie de disparition, nous, du Bloc québécois, n'avons aucune objection majeure à ce projet de loi comprenant des amendements proposés par le comité. Il s'agit tout simplement d'ajuster une loi désuète à notre réalité des années 2000. Comme on dit si bien par chez nous, vaut mieux prévenir que guérir. Donc, dès que la loi sera en vigueur, tous les oiseaux qui traversent le Canada seront protégés.

Vous pouvez vous imaginer ce que cela donne si certaines espèces seulement sont protégées. Or, vous voyez bien les chasseurs comme moi qui, de loin, voyant quelque chose qui vole, tirent dessus et plaident innocemment à tort ou à raison qu'ils croyaient qu'il s'agissait d'une autre espèce. Ou encore plus illogique, on protège les espèces qui sont menacées et les autres peuvent se faire canarder jusqu'à ce qu'elles deviennent elles aussi en voie d'extinction.

Nous pourrons aussi, avec les modifications de cette loi, couper l'herbe sous le pied des éventuels trafiquants de spermes, d'embryons et de cultures de tissu.

La convention sur la diversité biologique, ratifiée par le Canada en décembre 1992, a levé le voile sur ce que pourrait représenter le commerce de ces éléments. Il serait possible de créer des espèces hybrides pour expérimentation ou même de faire des expériences directement sur les tissus. La possession, l'achat ou la vente d'oiseaux migrateurs sont aussi rigoureusement interdits. En effet, il est maintenant stipulé dans la loi que nul ne peut avoir en sa possession un oiseau migrateur ou son nid, acheter, vendre, échanger ou donner un oiseau migrateur ou son nid ou d'en faire le commerce.

Or, ce sera fini dorénavant dans les salons ou encore dans les chalets d'été où on pouvait observer des trophées de chasse. Dans mon coin de pays, souvent on va dans les résidences d'été et on voit empaillés ces oiseaux aujourd'hui qui sont si rares. Ce temps, dorénavant, est passé.

Comme le député de Lachine-Lac-Saint-Louis l'a soulevé tout à l'heure, les amendes sont très élevées, le maximum, bien sûr, à un tel point que dans nos discussions en comité, je réfléchissais souvent à voix haute et je me disais «Les oiseaux migrateurs seront mieux protégés que nos enfants».

La loi prévoit aussi donner plus de pouvoir au ministre en ce qui a trait à la désignation de gardes-chasse avec ce projet de loi. Ici je cite:

6. (1) Le ministre peut désigner, individuellement ou par catégorie, les gardes-chasse jugés nécessaires au contrôle de l'application de la présente loi et des règlements.
Cette disposition m'a intrigué quelque peu, monsieur le Président.

(1640)

J'ai donc questionné des témoins au comité, pour savoir si la ministre pouvait, par exemple, nommer une association de chasse et de pêche, nommer les membres de l'association, en bloc, garde-chasse.

On m'a répondu que oui, mais que de telles associations pourraient avoir des pouvoirs restreints. J'avoue que cette disposition m'effraie un peu. Il est mal aisé, pour un simple citoyen, de se rendre sur le terrain d'un cultivateur pour lui dire qu'il enfreint la loi. Les risques sont grands qu'il se fasse tout simplement mettre à la porte d'un terrain privé.

Ma crainte est que dans des genres d'associations comme celles-ci, on rencontre parfois des gros bras et petite tête. Il pourrait, éventuellement, arriver qu'une personne nommée d'office garde-chasse sans trop de formation ou avec très peu de formation, mais possédant les gros bras, décide de jouer à la police.

Quand j'étais petit garçon, en 11e année, je me rappellerai toujours mon cours de vie sociale, vie politique et économique, dans lequel une phrase m'avait particulièrement frappé, dans laquelle on disait: «Au Canada, un pays libre, il vaut mieux voir 99 coupables en liberté que de voir un juste puni d'une façon


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injuste.» Alors, cela m'avait frappé et c'est ici une petite crainte, mais on va voter quand même en faveur du projet de loi C-23.

Cependant, c'est un fait reconnu qu'il manque des gardes-chasse pour faire appliquer la loi. Dans ce cas, admettons-le, qu'on décide qu'il est nécessaire, immédiatement, s'il en manque, de nommer des gardes-chasse civils, mais avec des pouvoirs vraiment retreints, pour nous assurer de faire respecter nos lois.

Il serait tout de même utile, selon nous du Bloc québécois, de prendre certaines mesures pour éviter que les gardes-chasse nommés en bloc puissent ne pas avoir les qualifications requises et perdre ainsi leur crédibilité. C'est pourquoi nous avions suggéré deux amendements au comité.

Le premier amendement visait à s'assurer que les personnes que la ministre désigne par catégorie aient au moins reçu une formation appropriée à l'exercice de leurs fonctions. Le deuxième amendement visait à rendre conditionnel la désignation d'une catégorie de personnes à l'approbation du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

Nos deux amendements, comme ça arrive régulièrement ici, à la Chambre des communes lorsque nous votons, ont été battus, mais je demeure convaincu qu'il serait important d'encadrer un peu plus ce genre de nominations, sans quoi ces dispositions pourraient être plus nuisibles qu'utiles.

J'aimerais maintenant, si vous me le permettez, attirer votre attention sur une présentation qui nous a été faite par M. Daniel Jauvin, qui est le président de l'Association des ornithologues du Québec. Cette association québécoise, qui regroupe plus de 30 clubs ou sociétés d'ornithologie, produit de nombreux mémoires touchant la protection des oiseaux et de leurs habitats.

Elle fait, notamment, de la recherche scientifique sur les oiseaux, et en particulier sur les espèces menacées. Cet organisme appuie le projet de loi, mais s'est néanmoins livré à un exercice fort intéressant. Ses membres ont vérifié la traduction dans l'annexe du projet de loi C-23, c'est-à-dire la convention.

(1645)

Selon ces experts de l'Association d'ornithologie, la terminologie française utilisée pour nommer les oiseaux est désuète. Ils ont donc proposé au Comité la terminologie utilisée par la Commission internationale des noms français des oiseaux publiée dans Noms français des oiseaux du monde. Cette terminologie est celle reconnue partout dans le monde. Les problèmes seraient de deux natures. Dans un premier temps, on a tenté de traduire intégralement de l'anglais au français. Résultat: des noms de genres ont été traduits par des noms d'espèces et, deuxièmement, l'Association croit qu'il manque toujours les noms d'un grand nombre d'espèces qui devraient y figurer, malheureusement.

En annexe de leur mémoire, ils nous ont même présenté une version adéquate de la traduction des articles 1 à 4 de la convention citée plus haut. Cette présentation a démontré qu'il est bon d'aller plus loin que la simple lecture des termes juridiques. Des problèmes de traduction de ce genre peuvent avoir des effets graves de répercussion sur la mise en application de la loi. Certaines espèces peuvent être incluses dans la version anglaise et exclues de la version française. On se retrouve alors devant des problèmes d'interprétation des lois qui ralentissent et compliquent l'application de la loi.

Un autre intervenant a grandement retenu mon attention et celle de mon collègue le député de Terrebonne, il s'agit de M. Daniel Lacombe qui est le secrétaire général de la Fédération québécoise de la faune. Cet organisme approuve les changements dans le texte de la loi en cause, bien sûr, mais déplore, cependant, le fait que toute la réglementation soit laissée au libre arbitre des fonctionnaires du Service canadien de la faune d'Environnement Canada. Monsieur Lacombe a de plus profité de l'occasion pour souligner qu'il est malheureux que des organismes comme le sien ne soient pas réellement consultés lors de l'élaboration des règlements. Il semblerait que le Service canadien de la faune se contente de les informer des nouvelles règles pour les années à venir. Puisque les organismes sont des utilisateurs de lois comme le projet de loi C-23, la moindre des choses serait, selon moi, de les consulter d'une façon régulière, efficace, honnête et sérieuse.

Pour illustrer les incohérences de ce processus, M. Lacombe nous a donné un bel exemple. Il nous a expliqué que la saison de chasse-je me l'explique encore très mal même si je vous donne la raison pour laquelle c'est ainsi-la saison de chasse débute une semaine plus tôt en Ontario qu'au Québec. Si on a décidé de débuter plus tard du côté québécois, c'est pour préserver les cheptels. Ce sont les mêmes oiseaux qui sont en Ontario et qui s'en viennent au Québec, mais, en Ontario, on peut débuter plus tôt parce qu'il y a des cheptels sédentaires. Autrement dit, il y a des oiseaux qui restent seulement en Ontario, ils ont compris, eux autres, qu'il y avait une ligne imaginaire et ils ne se rendent pas au Québec. Par contre, les oiseaux du Québec viennent voir leurs amis de l'Ontario et ils peuvent se faire bombarder une semaine plus tôt. C'est la raison officielle qu'on nous a livrée en comité.

Selon M. Lacombe, les cheptels migrateurs se mêlent aux autres et le résultat est le même en bout de ligne. Il déplore, par conséquent, que lorsqu'il y a des rencontres avec des fonctionnaires du Service canadien de la faune, il n'est pas possible de régler des problèmes comme celui-là puisque le but est de donner de l'information et non de les consulter.

(1650)

Or, ici, je me dois d'ouvrir une parenthèse concernant le Service canadien de la faune. J'ai reçu des documents de M. Gaétan Fillion, qui est le président de l'Association des sauvaginiers du Québec. Il s'élève, quant à lui, contre le manque de communication entre son organisme et le Service canadien de la faune. Je voudrais vous dire, monsieur le Président, que la Fédération québécoise de la faune n'est pas la seule à souffrir de ce problème qui semble, peut-être est-ce chronique seulement au Québec, mais qui semble persistant au Québec.

Nous pourrions donc profiter de ces témoignages dans le cadre de l'étude du projet de loi C-23 pour nous pencher sur le problème de la réglementation. Parlant de problème de réglementation, je pense que les fonctionnaires du ministère de l'Environnement devraient se pencher sur deux points majeurs. Bien sûr, il y a des oiseaux migrateurs qui sont en voie d'extinction, mais il y en


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d'autres qui polluent, qu'on retrouve en très grand nombre. Je pense, bien sûr, aux goélands.

À Daishowa la manufacture, l'usine Daishowa à Québec, ça leur a pris pratiquement deux ans pour avoir l'autorisation, non pas d'abattre les oiseaux, mais de détruire les nids, casser les oeufs. On évaluait à 170 000 couples les adultes en état de reproduction sur le site et cela causait de graves problèmes. Dans une réglementation sérieuse, quand on a des problèmes on les règle. En tout cas, moi, quand j'étais maire, si j'avais pris deux ans à prendre une décision aussi mineure, je ne serais pas demeuré maire longtemps. Ça c'est un exemple. Il faudra adoucir le processus pour que des solutions efficaces se prennent rapidement.

Un deuxième exemple, lorsqu'on protège la faune, il faut protéger leur habitat. Imaginez, monsieur le Président, un voilier d'outardes qui décideraient d'arrêter chez vous trois semaines. Vous n'avez pas le droit de leur faire peur. De toute façon, j'ai essayé, elles font un tour en demi-cercle et reviennent chez vous si elles ont décidé qu'elles épousaient votre terrain. Imaginez au bout de trois semaines quelle allure aurait votre pelouse. Qui va payer les dégâts, le savez-vous? Ce sera vous. Dans la loi, il n'y a rien pour dédommager. J'ai posé la question et le fonctionnaire m'a dit que le cultivateur pourrait voir son assurance-récolte. Effectivement, j'ai vérifié, l'assurance-récolte existe sauf que si le pauvre agriculteur n'a pas d'assurance-récolte, qui paie? C'est le pauvre agriculteur.

Je vous parle de cela parce que j'ai reçu des représentations à l'effet que dans la région de Montmagny-je ne sais pas quel truc on a utilisé-on a repoussé l'oie blanche. Elle s'est retrouvée dans le comté de Rimouski-Témiscouata. C'est beau les oies blanches, mais quand elles arrivent, 40 000 ou 50 000 oies blanches pour trois semaines à un mois, c'est beau lorsqu'elles arrivent, mais c'est beau lorsqu'elles repartent aussi.

M. Rocheleau: C'est comme la visite.

M. Chrétien (Frontenac): C'est comme la visite effectivement, comme le souligne le député de Trois-Rivières. Cela cause des préjudices graves et dans le projet de loi C-23, il n'y a rien pour donner une aide financière aux personnes qui sont dans l'obligation d'héberger pendant des périodes prolongées des animaux comme ceux-ci.

(1655)

J'espère que nos hauts fonctionnaires, sous la gouverne de la ministre de l'Environnement, se pencheront, soit dans la réglementation ou ailleurs, pour essayer d'arriver à des ententes pour que ce soit très efficace.

Donc, le législateur devrait profiter de l'expérience des utilisateurs pour rendre ces lois beaucoup plus efficaces. Il semble donc que nous irons de l'avant avec le projet de loi C-23, ce qui me paraît un pas dans la bonne direction en matière de protection des oiseaux qui immigrent chez nous. Mais comme on l'a souligné tout à l'heure, ce sont des ententes avec les États-Unis et le Mexique. Il faudrait les prolonger plus bas vers le Sud, parce que nous avons des oiseaux qui migrent très, très bas vers le Sud et on peut les protéger pour ne pas qu'ils se fassent tuer dans le Sud. Alors, ce sont des ententes qu'il faudra conclure d'égal à égal avec nos voisins.

Monsieur le Président, le Bloc québécois, je vous le rappelle, va donner son appui entier au gouvernement libéral pour l'adoption du projet de loi C-23.

[Traduction]

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, le projet de loi C-23 a pour but de remplacer la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs qui a été initialement adoptée en 1917 et qui est demeurée essentiellement la même depuis.

La loi initiale réglementait la chasse et l'utilisation des oiseaux migrateurs, interdisait leur trafic et leur commerce, contrôlait l'utilisation des oiseaux migrateurs au moyen de permis et prévoyait la création de sanctuaires de façon à pouvoir contrôler et à gérer les zones importantes pour la protection de ces oiseaux.

Elle était conçue pour protéger les oiseaux migrateurs contre les tueries sans discernement et pour maintenir leurs populations.

Le projet de loi sur les oiseaux migrateurs dont la Chambre est saisie aujourd'hui a pour but de remanier le style de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, de clarifier la portée de cette loi, les interdictions, les pouvoirs de réglementation, les dispositions administratives, ainsi que les dispositions concernant les infractions et les peines.

Les éléments principaux de ce projet de loi sont l'élargissement de la loi afin de tenir compte de tous les oiseaux migrateurs, l'extension des pouvoirs conférés par la loi aux agents chargés de faire exécuter les règlements sur la flore et la faune et l'augmentation des amendes.

La nouvelle loi assure le fondement législatif nécessaire pour contrôler la capture et les autres utilisations des canards, des oies et des autres espèces de gibier à plume, ainsi que pour protéger les oiseaux migrateurs. Elle prévoit la création de sanctuaires d'oiseaux migrateurs.

Outre la Loi sur la faune du Canada, la nouvelle Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, qui prévoit une pénalité maximale de 25 000 $ ou une peine de six mois d'emprisonnement-voire les deux en cas d'infraction grave-aura un effet plus dissuasif sur les activités comme la chasse illégale.

Le ministère fédéral de l'Environnement, au Canada, a pour mandat de gérer et de sauvegarder les oiseaux migrateurs et, en collaboration avec les provinces et les territoires, les autres espèces sauvages dont on pourrait se préoccuper à l'échelle nationale et internationale. En tant que membre de la communauté internationale, le Canada se doit d'aider à préserver et à protéger la faune et les réserves naturelles de faune, y compris les populations et les sanctuaires d'oiseaux.

Il est très important, pour la conservation de notre écosystème, de protéger et de sauvegarder les différentes populations d'oiseaux du Canada. Alors que notre population augmente et gagne des zones jadis inhabitées, quelque 70 p. 100 des 9 600 espèces d'oiseaux dans le monde connaissent un déclin et 1 000 espèces sont menacées d'extinction dans un très proche avenir,


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selon un rapport de Birdlife International, un groupe écologiste d'Angleterre qui tient des données sur la diminution des habitats et des espèces.

Ce qui est particulièrement inquiétant, abstraction faite des pertes directes qui se produisent, c'est que ce qui arrive aux populations d'oiseaux nous en dit long sur la santé de notre écosystème. Le Canada doit jouer un rôle de premier plan dans le mouvement pour la conservation et la protection des différentes espèces d'oiseaux et il doit, tout d'abord, se pencher sur les modifications qui ont été apportées à la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs.

(1700)

La conservation et la protection de notre environnement sont devenues une question politique et économique importante au Canada. Les sondages d'opinion montrent constamment que plus de 90 p. 100 des Canadiens s'inquiètent de la qualité de notre environnement. Ces mêmes sondages permettent en outre de savoir que les Canadiens sont divisés en ce qui concerne leur satisfaction face à la façon dont le gouvernement fédéral traite les questions environnementales délicates.

La semaine dernière, dans tout le pays, dans le cadre de la Semaine nationale de l'environnement, diverses activités ont donné l'occasion aux Canadiens de penser à des façons d'améliorer notre environnement. Cette semaine mettait l'accent sur la nécessité pour les gens d'être bien informés et d'agir.

Les décideurs du pays devraient en prendre bonne note. Les Canadiens sont de plus en plus conscients de l'importance de l'environnement pour notre société. En tant que membres de la classe politique, il nous incombe d'agir aussi prudemment et efficacement que possible afin de protéger notre environnement et nos réserves fauniques pour les générations futures.

La législation qu'applique le gouvernement n'est qu'un aspect, bien qu'important, de cette tendance vers une plus grande sensibilisation aux problèmes environnementaux.

Le Parti réformiste s'inquiète vivement de l'environnement du pays. À cet égard, et nous en avons fait l'un des principes que prône notre parti, nous croyons que l'identité de notre pays et sa vision pour l'avenir devraient se fonder sur l'importance suprême pour notre bien-être d'explorer, de mettre en valeur, de renouveler et de conserver nos ressources naturelles et notre environnement physique.

De façon générale, le Parti réformiste appuie les modifications apportées à cette loi après avoir eu l'occasion d'examiner les amendements possibles au comité. De nombreux groupes ont présenté des instances au comité et il s'est révélé possible d'apporter certaines améliorations au projet de loi.

Un des aspects de cette mesure qui plaît beaucoup à mon parti réside dans les dispositions plus strictes prévues pour l'application de la loi et les sanctions imposées. Même si ce projet de loi donne enfin plus de poids à la Loi actuelle sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, nous croyons qu'on pourrait en rendre l'application encore plus rigoureuse en augmentant les peines maximales prévues, comme on l'a proposé à l'étape du comité.

Une des modifications qui inquiète vivement mon parti est la partie de la loi qui donne au ministre plus de pouvoirs pour mettre en oeuvre des modifications à la Convention sans l'approbation du Parlement.

Durant les audiences du comité, on a jugé que le gouvernement n'avait pas tenu compte de cette préoccupation comme il le devait. En vertu de la loi actuelle, si le Canada et les États-Unis s'entendent sur une modification quelconque de la convention, pour que cette modification entre en vigueur au Canada, il faut que la loi soit modifiée et plus précisément, que l'annexe de la loi soit modifiée par une loi approuvée par le Parlement.

Toutefois, selon le projet de loi C-23, le processus de mise en oeuvre serait différent; les modifications de la Convention entreraient en vigueur sur simple décret ministériel et l'approbation du Parlement ne serait plus nécessaire.

Étant donné que le Canada veut renégocier la convention afin de tenir compte des droits issus des traités et des droits des autochtones à chasser les oiseaux migrateurs durant les temps prohibés et à récolter les oeufs, si le projet de loi C-23 est adopté, toute modification apportée à la Convention à cet égard pourrait donc être mise en oeuvre par décret.

Le Parlement n'aurait aucun rôle à jouer quant aux modifications éventuelles de la Convention. La mise en oeuvre de ces modifications se ferait plus rapidement en vertu du processus proposé dans ce projet de loi, mais le Parlement n'y prendrait part d'aucune façon.

Les réformistes sont d'avis que cette approche est fautive et qu'on devrait amender le projet de loi afin que les modifications de la Convention soient soumises au Parlement avant d'être ajoutées à l'annexe.

Nous croyons fermement à la protection et à la conservation de l'environnement et de la faune du Canada. Nous croyons aussi que ce projet de loi répond partiellement à certaines inquiétudes des Canadiens en ce domaine.

Je connais d'assez près une partie des amendements et j'aimerais attirer l'attention de la Chambre sur celle-ci. J'espère qu'après ma présentation, certains députés libéraux voudront bien aborder cette question.

Le 6 mai, notre leader à la Chambre m'a informé, en ma qualité de député chargé de suivre, pour notre parti, l'étude du projet de loi C-23 à la Chambre des communes, du fait qu'un représentant de la ministre de l'Environnement désirait me rencontrer pour que j'accepte de faire adopter le projet de loi immédiatement et de passer à l'étape de la troisième lecture.


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(1705)

Je n'étais que partiellement en faveur de cela. Autrement dit, j'avais l'impression que l'on faisait pression sur moi parce que je n'avais pas sérieusement envisagé la possibilité qu'il aille tout de suite à la troisième étape. Il y avait beaucoup de pression, comme s'en souviendra peut-être le secrétaire parlementaire de la ministre de l'Environnement ou le vice-président du Comité permanent de l'environnement en fonction ce jour-là.

Il y avait beaucoup de pression pour que l'on passe à la troisième lecture. J'ai résisté, car j'avais appris que l'on voulait proposer de légers amendements au projet de loi. N'étant pas avocat, je craignais de laisser passer quelque chose par erreur ou par ignorance. J'ai donc dit non. J'ai refusé mon consentement pour laisser le projet de loi aller en troisième lecture. C'était le 6 mai.

Le 26 mai, le Grand chef Matthew Coon-Come représentant le Grand conseil des Cris, a comparu devant notre comité. Il a attiré notre attention sur des renseignements concernant la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Dans la déclaration qu'il a lue au comité, il disait: «La convention que nous avons signée oblige le gouvernement du Canada et le Québec, à perpétuité, à respecter les droits des Cris et à remplir certaines obligations.»

Il ajoute: «C'est donc en nous appuyant sur notre traité que nous protégerons notre mode de vie. Plusieurs principes sont incorporés dans ces ententes. La cogestion des ressources en collaboration avec le gouvernement; des territoires de chasse familiaux; le système de réserve de castors; la reconnaissance et la formation de garde-chasse cris et enfin, la conservation, qui est le principe directeur primordial.»

Il disait aussi: «Ce projet de loi prétend régir la gestion et l'exploitation des oiseaux migrateurs par des dispositions de fonds, et des dispositions habilitantes. En effet, il s'agit de la loi mettant en oeuvre la Convention pour la protection des oiseaux migrateurs au Canada et aux États-Unis.

Je suis tout à fait prêt à accepter en totalité la déclaration du représentant des Cris. J'accepte ce qu'il a dit sans objection. Il ajoutait: «À la lumière de ce bref exposé de nos droits issus des traités, vous comprendrez sans doute notre consternation face aux dispositions de ce projet de loi dont votre comité a été saisi.»

Il ajoutait: «Comment est-ce possible qu'une loi émanant du Parlement du Canada en 1994, après les engagements solennels pris dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois, et qui traite des questions aussi essentielles pour l'identité, les moyens d'existence et la culture des autochtones, ne contienne pas la moindre mention des peuples autochtones, de leur dépendance à l'égard de la resssource, ni de leurs droits de l'exploiter? Nous trouvons cela, pour le moins, extraordinaire.»

De plus, il disait: «Nous n'invoquons pas simplement un droit législatif, ou une atteinte à une disposition du traité; nous ne plaidons pas non plus pour le respect de nos droits à n'importe quel coût pour l'environnement; comment ce projet de loi a-t-il pu, cependant, se rendre si loin, sans que nous ayons été consultés? Comment les auteurs de ces lois peuvent-ils faire fi de l'obligation constitutionnelle et législative du Canada de protèger les droits d'exploitation des autochtones? N'oubliez pas que les Cris chassent sur leur territoire depuis les temps immémoriaux.»

Il a ensuite exprimé son désarroi de ne pas avoir été consulté. J'ai alors demandé à l'avocat des Cris de me dire à quel moment ils avaient été informés ou inclus dans le processus. Il m'a dit que c'était le 16 mai, 10 jours après qu'un représentant de la ministre de l'Environnement eut essayé d'exercer des pressions pour que ce projet de loi soit adopté sans faire la moindre concession aux préoccupations des autochtones.

La question est d'autant plus délicate que la semaine dernière, un membre de notre parti a suscité la consternation et de vives inquiétudes par la façon dont il s'est exprimé sur le dossier autochtone. J'en suis très conscient. Je vais essayer d'aborder la question posément et j'espère que quelqu'un pourra y répondre.

(1710)

L'article 5 du projet de loi dispose que:

Sauf conformément aux règlements, nul ne peut, sans excuse valable:
a) avoir en sa possession un oiseau migrateur ou son nid;
b) acheter, vendre, échanger ou donner un oiseau migrateur ou son nid, ou en faire le commerce.
Ensuite, on peut lire à l'article 12:

Le gouverneur en conseil peut prendre les règlements qu'il juge nécessaires à la réalisation de l'objet de la présente loi et de la convention.
Les règlements peuvent notamment porter sur les règles de délivrance de permis de tuer, de capturer, de prendre, d'acheter, d'échanger, de donner, d'avoir en sa possession ou de faire le commerce des oiseaux migrateurs.

Le projet de loi réclame des peines telles que, par exemple, à l'article 13:

«Quiconque contrevient à l'article 5, au paragraphe 6(5) ou aux règlements commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 50 000 $ et un emprisonnement maximal de six mois, ou l'une de ces peines; ou, par mise en accusation, une amende maximale de 100 000 $ et un emprisonnement maximal de cinq ans, ou l'une de ces peines.»

L'an dernier, dans ma circonscription, un électeur a reçu une carte en plastique reconnaissant qu'il était Indien, ou son statut d'Indien-je ne connais pas très bien la terminologie employée. Fort de cette reconnaissance, il a fait 200 milles de route, s'est rendu à un poste d'alimentation et a tué un bélier superbe, affirmant qu'il avait le droit de le faire.


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Les députés ne doivent pas croire que je cherche à critiquer ou à injurier les Indiens. Je veux simplement soulever carrément la question, ouvertement et honnêtement: en vertu du projet de loi C-23, l'amende pouvant aller jusqu'à 100 000 $ pour possession d'un oiseau migrateur ou de son nid, ou pour avoir tenté d'acheter, de vendre, d'échanger ou de donner un oiseau migrateur ou son nid, ou d'en faire le commerce, dépend-elle des origines de la personne? Le paragraphe 2(3) nous apprend que: «Pour plus de certitude, rien dans la présente loi ne peut être interprété de manière à annuler un droit des autochtones du Canada, conféré ou non en vertu d'un traité, conformément à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.»

Cette disposition m'inquiète et me laisse perplexe quant à son application à long terme. Je crois que les propos tenus par le grand chef Matthew Coon-Come, lors de son témoignage devant le comité permanent, ont un certain bon sens. Si j'ai bien compris son témoignage, il a dit qu'il fallait examiner cette question en nous demandant quelle serait la meilleure façon de procéder.

Son point de vue sera sûrement différent du mien. Pour ma part, je dis que si quelqu'un tire sur un oiseau, cet oiseau est mort. Supposons qu'un ou deux membres de la nation enfreignent la loi, en vertu de quelle loi seront-ils poursuivis? Est-ce que moi ou le secrétaire parlementaire serons passibles d'une amende allant jusqu'à 100 000 $?

Je suppose que c'est la question qu'il faut finalement se poser. J'insiste en disant que le Parti réformiste approuve l'objet du projet de loi C-23. Nous voulons aller de l'avant et protéger les oiseaux migrateurs. Là n'est pas la question. De plus, nous voulons que l'on reconnaisse que les droits dont jouissent depuis longtemps les Cris et d'autres peuples autochtones entrent en ligne de compte. Je m'oppose toutefois à cet amendement particulier. Je comprends mal comment nous pourrons établir des règlements justes et équitable envers tous les Canadiens.

De même, en admettant qu'il soit possible que la reconnaissance des droits autochtones l'emporte sur les dispositions du projet de loi C-23, le fait d'inclure l'amendement ne représente qu'une déclaration de fait. Cependant, si c'est possible, je voudrais qu'on m'explique comment nous allons nous y prendre pour régler cette question.

(1715)

Le vice-président: On ne peut pas poser de questions ni présenter d'observations au premier tour, mais comme le député a manifestement posé des questions et présenté des observations au secrétaire parlementaire, celui-ci pourra y réagir avec le consentement unanime de la Chambre.

Y a-t-il consentement unanime pour que le secrétaire parlementaire réponde aux observations qui ont été présentées?

Des voix: D'accord.

M. Lincoln: Monsieur le Président, je voudrais répondre tout d'abord à deux questions.

La première a trait à la démarche. En toute justice pour la personne à laquelle le député fait allusion, soit le représentant de la ministre de l'Environnement, qui a proposé que la loi soit adoptée sans tarder, je puis dire, connaissant cette personne, qu'il n'y avait là aucune intention cachée de faire adopter la loi à toute vapeur.

Tout d'abord, la personne qui est chargée d'établir le programme de la ministre avait été informée que le calendrier prévu pour l'étude de la mesure législative se trouvait grandement écourté et elle était impatiente de voir ces deux projets de loi étudiés avant la fin de la session.

Plus, conformément à une étude des pouvoirs de réglementation et des règlements adoptés en 1993 par la ministre de l'Environnement et auxquels j'ai fait allusion dans mon allocution, des consultations vastes et approfondies avaient été menées, y compris concernant la Convention sur les oiseaux migrateurs, auprès de tous les intervenants intéressés par ce projet de loi, dont des représentants des autochtones.

D'autres modifications sont à l'étude depuis quatre ans au sujet de la convention elle-même avec la participation des autochtones. En toute impartialité, les conseillers de l'adjoint législatif de la ministre ont estimé pouvoir aller de l'avant parce que de vastes consultations avaient eu lieu depuis le début.

Comme le consentement nous a été refusé et comme nous avons découvert que nous aurions le temps, nous avons nous-mêmes reconnu qu'il valait mieux renvoyer l'affaire au comité. Je puis vous assurer, monsieur le Président, que la personne en question est entièrement d'accord.

Je peux assurer au député que le gouvernement n'avait aucune intention cachée et qu'il ne ressentait pas le besoin de faire adopter cette mesure à toute vapeur. Il ne cherchait qu'à faire avancer le processus, après avoir tenu compte des vastes consultations qui avaient eu lieu.

En réponse à la deuxième question sur les traités et les droits des autochtones consacrés dans la Constitution, nous voulons confirmer dans la loi la pratique actuelle en reconnaissant aux autochtones le droit de chasser quand la chasse est interdite aux autres. Cela ne signifie pas qu'ils ne seront pas passibles des pénalités prévues s'ils enfreignent une des dispositions de la loi. Cependant, la saison de chasse est toujours ouverte pour eux.

Cette tradition date de plusieurs milliers d'années. C'est une réalité que nous voulons reconnaître dans la loi. Les autochtones détiendraient ce droit, même s'il n'était pas consacré dans la loi. En faisant ce geste symbolique très important, que nous réclamait d'ailleurs le chef Coon-Come, nous voulons en quelque sorte garantir ce droit dans la loi. Toutefois, selon certains conseillers juridiques, que nous le fassions ou non, les droits des autochtones existent et doivent être reconnus dans la pratique courante. Donc, il s'agissait de décider si nous allions consacrer leur droit ou non, et nous avons conclu qu'il était important de le faire.


5237

(1720)

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, en commençant, je tiens à féliciter tous les membres du Comité de l'environnement et du développement durable pour tout le travail qu'ils ont fourni et pour l'intérêt qu'ils ont manifesté pour le projet de loi.

Le comité a entendu un certain nombre de témoins représentant des groupes de protection de la nature, des chasseurs et des pêcheurs, ainsi que des groupes d'autochtones. Tous seront directement touchés par l'issue de nos délibérations sur le projet de loi.

Pour certains, une mesure se rapportant aux oiseaux migrateurs peut sembler moins importante et moins médiatique que des projets de loi se rapportant à l'économie, au droit pénal ou à la justice, pourtant, le sort de ces oiseaux est digne d'intérêt.

Puisque la Loi sur les oiseaux migrateurs est demeurée pratiquement inchangée depuis 1917, on peut supposer, si le passé est garant de l'avenir, que la nouvelle loi ne sera pas modifiée avant 50, 60 ou 70 ans.

Plus important, la santé des oiseaux migrateurs, et de toute la faune, d'ailleurs, est un miroir de la santé des êtres humains.

C'est dans un tel contexte que les membres du comité ont étudié le projet de loi C-23 et les propositions d'amendement avec sérieux. La Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs est la loi de mise en oeuvre de la Convention concernant les oiseaux migrateurs signée en 1916 par le Canada et les États-Unis.

Cette convention sera renégociée à l'automne de 1994 pour mieux refléter la situation actuelle. Le projet de loi C-23 ira dans le sens de la convention.

La convention originale avait été signée en 1916 par le Canada et les États-Unis pour mettre fin à la chasse excessive qui avait entraîné l'extinction de certaines espèces d'oiseaux et en avait presque exterminé d'autres.

Comme un témoin nous l'a dit, la Convention concernant les oiseaux migrateurs et d'autres mesures prises pour mettre fin au massacre et à la quasi-extermination de certaines espèces d'oiseaux ont connu un succès incroyable dans la partie nord du continent.

Depuis le tournant du siècle, le contexte a changé et, à l'aube du XXIe siècle, nous devons élaborer et mettre en oeuvre une loi qui tienne mieux compte des besoins actuels.

Après avoir étudié le projet de loi C-23, entendu des témoins et reçu des mémoires, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable est arrivé à la conclusion que le projet de loi était acceptable avec quelques amendements.

Même si un processus distinct concernant les droits ancestraux ou issus de traités des premières nations est en cours et sera inclus dans les négociations sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs entre le Canada et les États-Unis, le comité a décidé d'inclure dans le projet de loi une disposition de non-dérogation qui reconnaît clairement les droits ancestraux ou issus des traités des autochtones.

Donc, il demeure entendu que cette loi ne porte pas atteinte aux droits ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones du Canada visés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Les oiseaux migrateurs jouent un rôle clé dans la vie des premières nations. Celles-ci ont besoin des oiseaux migrateurs et de toutes les espèces sauvages non seulement pour préserver leur culture, mais aussi, dans certains cas, pour se nourrir et assurer leur survie.

Cela ne veut pas dire que le principe de la conservation de ces espèces est compromis. Comme Matthew Coon-Come, chef du grand conseil des Cris, l'a dit de façon simple et éloquente: «Les oies d'abord, puis les Cris et, en dernier lieu, les amateurs de chasse sportive.»

D'ici à ce qu'on ait modifié la Convention concernant les oiseaux migrateurs pour tenir compte des droits ancestraux ou issus de traités des autochtones, on a mis en place des mesures spéciales qui permettent aux autochtones de prendre des oiseaux migrateurs et des oeufs pendant la période d'interdiction.

Un autre amendement au projet de loi C-23 soustrait les garde-chasse agissant dans l'exercice de leurs fonctions à l'application de cette loi ou des règlements, ou de telle de leurs dispositions. Cela facilitera beaucoup l'application de la loi puisque les garde-chasse seront ainsi en mesure d'entreprendre des opérations d'infiltration avec des personnes soupçonnées d'infractions sans craindre de faire eux-mêmes l'objet de poursuites. De cette façon, ils devraient être capables de recueillir des preuves plus concluantes contre les contrevenants.

La faune et les ressources naturelles de notre pays sont précieuses pour les Canadiens. Bien que beaucoup de Canadiens s'adonnent à la chasse ou à la pêche, plus de 75 p. 100 d'entre eux font une utilisation non consommatrice de nos espèces sauvages. En 1991, les Canadiens ont dépensé 2,4 milliards de dollars au titre de voyages et d'excursions axés principalement sur une utilisation non consommatrice de nos espèces sauvages, tandis qu'ils ont dépensé 1,2 milliard de dollars au titre de la chasse.

La protection des oiseaux migrateurs est très importante pour les Canadiens et contribue de façon positive à notre économie.

(1725)

Le braconnage à des fins commerciales et la contrebande des oiseaux migrateurs présentent de grands risques. Dans cette optique, les membres du comité ont longuement discuté des amendes à infliger aux contrevenants. Après mûre réflexion, ils ont décidé de hausser les amendes pour les infractions punissables sur déclaration sommaire de culpabilité jusqu'à un maximum de 50 000 $ dans le cas d'un individu et de 100 000 $ dans le cas d'une société.


5238

Les amendes maximales pour les infractions punissables sur acte d'accusation passent à 100 000 $ dans le cas d'un individu et à 250 000 $ dans le cas d'une société. L'amende prévue pour les récidives peut représenter le double de l'amende exigée pour l'infraction précédente, nonobstant les maximums déjà mentionnés.

Certains peuvent railler et dire qu'il est exorbitant de fixer la valeur d'un oiseau à 100 000 $ ou à 250 000 $. Je crois que s'ils le font, c'est par ignorance. Le fait de tuer un oiseau ou un animal appartenant à une autre espèce faunique n'a pas de prix si cela a vraiment contribué à mettre l'espèce en danger.

Le gouvernement est déterminé à faire participer davantage les comités à la conduite des affaires de notre pays. Je loue son initiative et voit, comme résultat de cette nouvelle attitude dans l'exercice du pouvoir, le travail inestimable que les membres du Comité de l'environnement et du développement durable ont accompli en proposant des amendements au projet de loi C-23.

Le dernier amendement dont j'aimerais parler aujourd'hui découle de suggestions faites par des témoins qui ont comparu devant le comité. Je crois que l'inclusion de cet amendement renforce le processus démocratique en élargissant la participation à ce dernier. Cet amendement propose que toute modification à la Convention concernant les oiseaux migrateurs soit déposée aux deux endroits et débattue à la Chambre des communes.

Pendant que les témoins comparaissaient, il nous est apparu évident que nous devons aussi nous pencher sur un certain nombre d'autres questions dépassant la portée de ce projet de loi si nous voulons vraiment protéger les oiseaux migrateurs et améliorer leur situation.

Le comité a examiné le projet de loi C-23 et le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la faune du Canada. De nombreuses préoccupations formulées par les témoins s'appliquent non seulement aux oiseaux migrateurs, mais aussi à la catégorie plus générale des espèces fauniques.

Les témoins ont souvent parlé de problèmes liés à l'application de la loi et à la protection de l'habitat. D'après l'étude que j'ai faite des deux projets de loi C-23 et C-24, j'en suis arrivée à respecter le dévouement et l'engagement manifestés par les fonctionnaires du Service canadien de la faune.

En ce qui a trait cependant à l'exécution de la loi, ils ont un grand besoin d'appui pour faire augmenter les effectifs de garde-chasse. Les témoins ont signalé les uns après les autres les problèmes réels auxquels ils faisaient face, car le territoire qu'ils ont à surveiller est beaucoup trop vaste pour les effectifs actuels de garde-chasse.

Il peut donc être difficile de mettre en application même la meilleure des lois. La protection de l'habitat, un autre sujet de préoccupation essentiel des témoins, comporte plusieurs dimensions. Il faut déployer de nombreuses stratégies pour assurer la durabilité et la viabilité de l'habitat.

La convention concernant les oiseaux migratoires avait initialement pour objet de remédier aux graves problèmes de chasse excessive qui menaçaient de nombreuses espèces à l'époque. Même si le braconnage commercial et la contrebande représentent des menaces importantes, la protection de l'habitat constitue le sujet de préoccupation le plus sérieux pour la préservation non seulement des oiseaux migrateurs, mais aussi de toutes les espèces sauvages du Canada.

La modification apportée à la Loi sur la faune du Canada afin d'élargir le champ d'application de la faune pour inclure tous les organismes vivants constitue un changement très nécessaire et fournit non seulement un bon point de départ mais aussi une précieuse réflexion sur ce que signifie vraiment la préservation des espèces.

Si nous tenons vraiment à préserver et à protéger les espèces sauvages dans notre pays, nous devons d'abord et avant tout nous préoccuper très sérieusement de la protection de l'habitat. On a appelé la faune le baromètre de la terre. La capacité de la terre ou de l'habitat à entretenir la vie des poissons, des oiseaux et des mammifères constitue un bon indice de sa capacité à répondre aux besoins des humains. L'habitat de la faune est un habitat humain.

Tant que nous aurons des espaces menacés dans notre pays, nous continuerons d'avoir des espèces menacées. Il existe un certain nombre de stratégies et de programmes visant à restaurer, préserver et protéger les habitats.

Nous avons conclu des ententes avec les États-Unis et encore récemment avec le gouvernement mexicain, dans le cadre du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, pour faire en sorte que les oiseaux aquatiques migrateurs bénéficient de zones sûres et saines pour nicher et se nourrir.

Comme je l'ai déjà dit dans mon intervention, même si nous avons réalisé une réussite vraiment unique et merveilleuse en renversant la tendance à l'extinction de certaines espèces, je crains que nous ne tirions de l'arrière. Nos précieux marais, qui constituent les écosystèmes les plus biologiquement diversifiés, sont menacés. Ils sont drainés à des fins agricoles ou de développement.

(1730)

Les produits toxiques sont entrés dans nos bassins hydrographiques et ont contaminé le poisson dont les oiseaux se nourrissent, occasionnant des difformités, des coquilles d'oeufs molles qui ne peuvent résister à la pression de l'incubation parentale, des becs croisés, des défauts de la mâchoire ainsi que des malformations des pattes et des articulations. Des forêts qui protégeaient l'habitat d'espèces fauniques ont été sacrifiées à cause de la coupe à blanc.

La plupart de ces questions dépassent la portée du projet de loi dont nous sommes saisis. Ce sont toutefois des considérations importantes que nous ne devons pas oublier si nous voulons vraiment assurer la survie et protéger la santé des oiseaux migrateurs.

J'invite tous les députés à appuyer, sans délai et intégralement, le projet de loi C-23 et les amendements qui y sont proposés.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi comme pour mon confrère de Frontenac tout à l'heure, en tant que membre du Comité de l'environnement et du développement durable, de prendre aujourd'hui la parole sur le projet de loi C-23.


5239

Ce projet de loi remplace la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, qui était en vigueur depuis 1917. Depuis 1917, est-ce utile de le rappeler, bien des choses ont changé. C'est pourquoi je trouve qu'il est essentiel de reconsidérer cette loi, qui est demeurée à peu près inchangée depuis son adoption.

Pour bien comprendre le sens de la législation fédérale sur le sujet, il est essentiel pour nous de faire un petit historique des sources de cette loi. La loi fut promulguée en 1917, suite à une convention internationale conclue entre le Canada et les États-Unis, en 1916. La convention concernant les oiseaux migrateurs visait à protéger ces oiseaux du massacre auquel ils faisaient face à l'époque, et à sauvegarder leur population des gestes souvent insensés posés par les humains.

Les dispositions de la loi de 1917 visaient à réglementer la chasse faite aux oiseaux migrateurs et à empêcher leur trafic et leur commercialisation. Les objectifs de la loi sont encore aujourd'hui d'actualité, mais ce sont les moyens qui sont utilisés qui sont devenus, avec le temps, désuets.

En effet, l'essor technologique et scientifique qu'a connu le 20e siècle ne pouvait certainement pas être imaginé par les légistes de la loi de 1917. La science a connu, nous le savons tous, un essor remarquable. Notamment la protection des embryons et des cultures tissulaires, la protection des espèces en voie d'extinction et le commerce illégal sont des préoccupations qui doivent guider cette nouvelle législation.

Une nouvelle législation, donc en l'occurence le projet de loi C-23, qui s'avère essentiel à la sauvegarde des oiseaux migrateurs. Des articles récents du Saskatoon Star Phoenix et de La Presse nous indiquaient que 1000 des 9600 espèces d'oiseaux étaient menacées d'extinction, soit plus de 10 p. 100 de nos oiseaux qui pourraient disparaître, et ce, à court terme. L'urgence de la situation nous paraît donc des plus évidentes.

De plus, la revue américaine World Watch nous expliquait l'une des raisons de la diminution du nombre d'oiseaux dans le monde et au Canada. Et je cite: «La plupart des espèces d'oiseaux sont en déclin, parce que les équilibres naturels sont bouleversés par l'expansion globale de l'humanité. Nous sommes entièrement responsables de la situation et nous devons trouver des solutions.»

Par exemple, les problèmes liés au déboisement engendré par l'étalement urbain ou l'expansion des terres agricoles et l'augmentation grandissante de la population qui se fait à un rythme exponentiel sont des sources de détérioration des habitats fauniques. La pollution industrielle et domestique sont aussi d'autres exemples des nouvelles préoccupations qui doivent guider notre législation en matière de protection des oiseaux migrateurs et de notre environnement en général.

Examinons maintenant plus en détail les propositions émises dans le projet de loi C-23, qui vise à moderniser l'ancienne loi qui datait de 1917. L'article 2, soit la définition, est modifié pour élargir la portée de la loi. À titre d'exemple, la définition d'un moyen de transport inclura maintenant tout moyen de transport utilisé, notamment pour la chasse aux oiseaux.

(1735)

De plus, on modifie la définition d'oiseau migrateur de façon à y inclure les embryons, le sperme, les oeufs et les cultures tissulaires. Cette modification, comme je l'ai dit précédemment, est d'une importance capitale pour la survie des espèces en cette ère de révolution technologique.

D'autre part, une autre modification importante consiste à séparer l'interdiction «d'avoir en sa possession» et «d'acheter ou vendre», qui permettra aux tribunaux de traiter de la commercialisation et du commerce illégal d'oiseaux comme étant une infraction plus grave que la simple possession.

Plusieurs modifications techniques réitèrent les pouvoirs de contrôle et de perquisition des gardes-chasse. Cependant, on y ajoute une protection contre les fouilles abusives, conformément à la Charte des droits et libertés.

De plus, des règlements pourront être adoptés en vertu de l'alinéa 12.(1)f) permettant un plus grand contrôle lors de l'émission des permis. C'est à la source souvent que nous pouvons régler les problèmes. Il est plus que souhaitable que le gouvernement ne tarde à adopter une telle réglementation qui lui est permise dans la loi.

Un changement majeur et fort approprié s'il est utilisé à bon escient, selon nous, est l'augmentation considérable des amendes en cas de contravention à la loi. La loi de 1917 n'ayant jamais été modifée à ce sujet, permettait des amendes imposées au contrevenant d'un montant entre 10 $ et 300 $. Rien pour dissuader un contrevenant à l'heure actuelle.

Avec les modifications, les amendes seront de 50 000 $ et jusqu'à 250 000 $, dépendant du genre d'infraction. En cas de récidive, les montants pourront être doublés. C'est une nette amélioration. J'émets ici le souhait que les législateurs n'attendront pas encore 77 ans avant de mettre ces montants à jour, mais qu'un suivi serré et constant de cette loi accompagnera les parlementaires futurs.

En conclusion, je désire rappeler l'importance de la protection et de la conservation des oiseaux migrateurs au Canada. Pensons au huard sur nos dollars. Pensons au harfang des neiges et aux autres oiseaux qui sont nos symboles. Nous avons ici un bel exemple de la complexité internationale des problèmes environnementaux. En effet, les oiseaux migrateurs, tout comme la pollution, traversent les frontières étatiques, d'où l'importance des conventions internationales et non simplement des lois nationales.

Le Canada, s'il veut s'assurer un développement durable devra, en plus de se munir de législations efficaces, s'assurer d'être partie à de solides conventions internationales de façon à bien se protéger des problèmes environnementaux transfrontaliers.

Il serait peut-être sage aussi de s'interroger sur la pertinence ou la non-pertinence d'avoir une charte sur le respect de l'environnement et la promotion du développement durable; une charte complète et applicable, comme la Charte des droits et libertés, qui permettrait aux individus d'avoir l'assurance que, comme eux, l'environnement est bien protégé.


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Nos vies et surtout celles de nos enfants dépendent des gestes qui sont posés aujourd'hui. Afin de leur assurer un avenir où il fait bon vivre et où les ressources sont encore disponibles, Il nous faut prendre part et répondre à ces problèmes qui se présentent à nos portes.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LA FAUNE DU CANADA

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la faune du Canada et une autre loi en conséquence, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.

L'hon. John Manley (au nom de la ministre de l'Environnement) propose: Que le projet de loi soit agréé.

(La motion est adoptée.)

(1740)

M. Manley propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Clifford Lincoln (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je voudrais entamer le débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-24 en citant un extrait de l'ouvrage de David Rains Wallace, Life in the Balance: «Pourtant, la faune et la nature sauvage ne sont pas la cause de la pauvreté. L'homme ne se porterait pas mieux si toutes les forêts étaient abattues, les prairies labourées, les montagnes vidées de leurs ressources minières, les déserts irrigués, la toundra forée, les rivières endiguées, les terres humides drainées, les richesses des océans épuisées et les îles dépouillées de leur flore et de leur faune propres. La science et la simple logique nous disent que la civilisation ne peut pas impunément défigurer la planète.»

Je crois que c'est là le fondement de ce projet de loi sur la faune que nous voulons faire adopter aujourd'hui.

[Français]

C'est donc avec plaisir que je présente la troisième lecture du projet de loi visant à modifier la Loi sur la faune du Canada. À un moment où plusieurs Canadiens pensent avant tout à la santé de l'économie, certains peuvent se demander pourquoi nous nous penchons sur une question concernant la protection de la faune et des espèces sauvages. Ma réponse est ceci: «La protection de la faune et la protection de l'environnement canadien sont essentielles à la prospérité à long terme de notre pays, la prospérité au sens le plus large du mot».

Pour les Canadiens, et pour les gens autour du monde, notre faune aide à identifier notre pays et ce qui le rend unique. Les espèces sauvages continuent d'être au centre du style de vie traditionnel des autochtones canadiens. Les espèces sauvages peuvent offrir des trésors encore inconnus; des espèces pourraient être utilisées de diverses façons dans l'intérêt des êtres humains. La faune est une ressource écologique, sociale et culturelle, d'essentielle importance.

Les activités reliées à la faune représentent un loisir important au Canada. Elles injectent des milliards de dollars dans l'économie et maintiennent des dizaines de milliers d'emplois. En fait, une grande majorité de Canadiens veulent que notre faune soit protégée pour que les générations futures puissent profiter de la même abondance. Dans une enquête faite récemment par Statistique Canada, les Canadiens ont exprimé par une marge de plus de 90 p. 100 qu'ils ont un intérêt soutenu dans la conservation de notre faune. Ils ne sont pas motivés par les sentiments seulement, mais par une compréhension réaliste.

Ils ont entendu et ils appuient le message du développement durable: que la santé de l'environnement et le développement économique sont interdépendants, qu'on ne peut pas faire d'économie sans environnement et qu'on ne peut pas avoir de qualité de vie si l'économie n'est pas bâtie autour de l'environnement. Les Canadiens sont prêts à faire leur part pour le développement durable et ce qu'ils demandent, en fait, au gouvernement, c'est de faire la sienne.

[Traduction]

En 1990, le Conseil canadien des ministres de la Faune, formé des ministres fédéral et provinciaux responsables, a conçu une politique canadienne de la faune. La Loi sur la faune du Canada a été adoptée en 1973 pour permettre au gouvernement fédéral de faire de la recherche sur la faune et, en collaboration avec les provinces, d'entreprendre des activités très variées liées à la conservation et à l'information en matière de faune et d'habitat faunique, ce qui englobe la protection des espèces menacées. La loi permet au ministre d'acquérir des terres pour des activités de recherche, de conservation et d'interprétation concernant les oiseaux migrateurs et les intérêts internationaux et, avec l'appui des provinces, concernant d'autres espèces, y compris des espèces menacées.

(1745)

Les zones d'importance critique pour la faune au Canada sont protégées par des règlements d'application de la loi. Il existe en ce moment 45 réserves nationales de faune au Canada, totalisant 287 000 hectares. Par le passé, les efforts de conservation de la faune ont porté sur des espèces particulières ou des groupes d'espèces et ils ont généralement été limités aux animaux des ordres supérieurs. Il est maintenant largement reconnu qu'il nous faut une démarche plus globale en matière d'environnement, soit une démarche écosystémique qui englobe toutes les composantes de l'écosystème, y compris toutes les espèces animales et végétales et leurs habitats.

C'est cette démarche qui est recommandée dans la politique de la faune des ministres fédéral et provinciaux à laquelle je viens de faire allusion.

La conservation de la faune requiert souvent la protection de l'habitat nécessaire à la survie de l'espèce. La protection de l'habitat a traditionnellement porté sur les espèces fauniques terrestres. L'écosystème marin et sa biodiversité demeurent largement non protégés, en ce qui touche les habitats. À l'heure


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actuelle, l'application de la loi se borne à la limite territoriale de 12 milles.

Parmi les habitats fauniques critiques, on compte les secteurs comportant des concentrations importantes d'oiseaux de mer ainsi que les zones de reproduction et d'alimentation des baleines, qui se trouvent ou s'étendent au-delà de la limite territoriale du Canada. Au nombre de ces secteurs, mentionnons les polynies, les ouvertures dans la glace, les monts sous-marins et les remontées de substances nutritives dans l'océan, et autres zones liés à la plate-forme continentale du Canada.

Nous avons donc une disposition pour autoriser l'établissement de secteurs protégés à l'intérieur de la zone limitée par la mer continentale et les 200 milles nautiques afin que cela contribue à maintenir la biodiversité et les avantages connexes des écosystèmes marins.

En présentant ce projet de loi, le gouvernement fédéral répond à la demande des Canadiens qu'on trouve dans le livre rouge et voulant que nous nous engagions sur la voie du développement durable.

Nous savons ce que suppose cet engagement. Il suppose qu'il faut adopter une démarche écosystémique, s'attaquer aux problèmes dans leur contexte global. Il suppose qu'il faut travailler de concert avec les autres gouvernements, avec les autres secteurs d'activité, avec tous les Canadiens pour atteindre nos objectifs communs.

C'est ainsi que nous réaliserons le développement durable dans notre pays et c'est ainsi que le gouvernement fédéral prend des mesures pour préserver notre flore et notre faune. La modification de la Loi sur la faune du Canada n'est pas un geste isolé. Elle fait partie d'une stratégie coordonnée qui vise à doter notre pays d'une législation efficace afin de protéger les espèces animales et végétales sauvages, qui tient compte des derniers progrès de la science et qui est adaptée aux besoins de notre époque.

Cette stratégie comporte d'autres éléments, dont le projet de loi visant à modifier la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs que nous venons d'adopter, le projet de loi C-23, l'élaboration de règlements concernant la Loi sur la protection d'espèces animales ou végétales sauvages, la réglementation de leur commerce international et interprovincial et les négociations qui doivent se tenir prochainement avec les États-Unis en vue de modifier la convention bilatérale sur les oiseaux migrateurs.

La Loi sur la faune du Canada est une mesure législative essentielle. Elle donne au gouvernement fédéral un encadrement pour promouvoir les programmes de conservation de la flore, de la faune et des habitats. Elle permet la formation de partenariats productifs et la mise en oeuvre, avec les gouvernements provinciaux et le secteur privé, de programmes et de politiques visant à protéger les espèces animales et végétales sauvages.

Toutefois, depuis que la loi a été adoptée, en 1973, nous nous sommes rendu compte de ses limites. Le projet de loi C-24 a été présenté à la Chambre pour y remédier. Après la deuxième lecture de ce projet de loi, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a procédé à une étude approfondie du projet de loi C-24 dans le cadre de laquelle il a tenu des audiences publiques et entendu toute une série de témoins. Cette étude a abouti à l'apport de changements additionnels qui reflètent les préoccupations et les vues exprimées au sein du comité.

[Français]

Le projet de loi C-24 remplacera la définition de faune que l'on retrouve dans l'ancienne loi et qui semble beaucoup trop limitée. Au lieu d'animaux non domestiques, les modifications définiront le terme «faune» en incluant toutes les espèces sauvages, la faune et la flore. Cette définition plus large nous permettra d'adopter une approche écosystémique pour la protection des espèces sauvages, donc d'un habitat menacé. Nous pouvons travailler à aider toutes les différentes espèces qui, ensemble, soutiennent la vie, et non seulement les mammifères et les oiseaux bien connus.

(1750)

La nouvelle définition rend aussi la loi conforme à la politique fédérale-provinciale pour les espèces sauvages au Canada, adoptée en 1990, et la Convention sur la diversité biologique, que le Canada a signée en 1992 au Sommet de la terre à Rio de Janiero.

Un autre changement important du projet de loi C-24: le Canada pourra désormais protéger les habitats fauniques en milieu marin. Le projet de loi présentement devant la Chambre permet d'établir des aires protégées partout à l'intérieur de la zone de 200 milles nautiques, à l'extérieur des 12 milles nautiques antérieurs. Cette étendue comprendra les aires essentielles de reproduction et d'alimentation pour les baleines, les oiseaux de mer et les autres espèces. En incluant ces aires, nous pouvons offrir une protection beaucoup plus complète à plusieurs espèces.

Un autre changement rendra la loi plus efficace en améliorant son administration et sa mise en application. Les modifications rendront la loi plus stricte en augmentant les peines en cas d'infraction, les rendant ainsi réellement dissuasives pour les contrevenants potentiels. Les amendes maximales pour les infractions sérieuses seraient établies à 100 000 $ pour un individu, à 250 000 $ pour une corporation, avec des dispositions permettant d'augmenter les amendes pour une deuxième infraction ou des infractions continues. En même temps, la loi modifiée donnera plus de flexibilité à la justice et aux agents de mise en application, relativement aux infractions et aux peines. Ils pourront maintenant choisir la meilleure option pour réagir à une infraction, même le service communautaire ou le remboursement des coûts des dommages causés à une réserve nationale de la faune.

Les modifications concernant les dispositions reliées aux peines, aux pouvoirs et aux procédures de mise en application et à une clause de non-dérogation pour les droits ancestraux et issus de traités, sont semblables à celles décrites à la troisième lecture du projet de loi C-23.

[Traduction]

Je saisis donc cette occasion pour aborder certains aspects de la conservation des espèces animales et végétales sauvages qu'appuie cette mesure législative.


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Le projet de loi C-24 permettra au Canada de tenir ses engagements en vertu des accords internationaux. L'un des principaux accords est la Convention relative aux zones humides d'importance internationale que le Canada a signée en 1981. C'est, en matière de conservation, l'un des traités qui compte le plus d'ahérents au monde. Plus de 80 nations ont convenu de promouvoir la conservation et l'utilisation judicieuse des zones humides, particulièrement comme habitats de la sauvagine.

Les terres humides revêtent une importance particulière pour le Canada. C'est de là que provient une grande partie de notre approvisionnement en eau douce. Les terres humides filtrent les polluants provenant des écosystèmes. Elles nous protègent des inondations. Elle accroissent la qualité de l'eau et sont des habitats essentiels. Les terres humides représentent également un apport de plus de 10 milliards de dollars à l'économie en activités récréatives très variées de nature commerciale et non commerciale.

Les terres humides du Canada ont également une importance à l'échelle planétaire. Le territoire canadien renferme à peu près 24 p. 100 de l'ensemble des terres humides dans le monde. Nous avons donc la responsabilité de faire un usage approprié de cette ressource, ce que nous n'avons malheureusement pas toujours fait. Nous possédons encore 127 millions d'hectares de marécages, bien que plus du septième de la superficie initiale ait été reconvertie à d'autres utilisations, surtout dans le sud du Canada.

Depuis la signature de la convention de Ramsar, le Canada tente d'améliorer son image. Nous possédons maintenant un réseau de 32 zones marécageuses d'importance internationale, qui couvre toutes les provinces et les territoires et dont une bonne partie est constituée de réserves nationales de faune créées en vertu de la Loi sur la faune du Canada.

Au Canada, les terres humides assujetties à la convention de Ramsar couvrent plus de 13 millions d'hectares, soit plus de 30 p. 100 de toutes les terres humides visées par la convention. En outre, la politique fédérale de conservation des terres humides, adoptée en 1992, met l'accent sur la conservation des marais du Canada afin de préserver les volets écologique et socio-économique à la fois dans l'immédiat et dans l'avenir. De nombreuses provinces élaborent actuellement des politiques complémentaires sur les terres humides. De plus, le secteur privé et des organismes non gouvernementaux continuent de jouer un rôle important dans la conservation des terres humides.

(1755)

À l'heure actuelle, la conservation des terres humides au Canada repose sur la collaboration de divers ordres de gouvernement, de divers secteurs et d'individus, le gouvernement fédéral jouant un rôle de premier plan. Le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, que j'ai décrit à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-23, est un excellent exemple de coopération et assure une gestion durable des terres humides.

Une meilleure conservation des terres humides comporte de nombreux avantages directs pour les Canadiens, dont les plus évidents sont, bien sûr, l'amélioration de l'habitat faunique et l'accroissement de la population sauvagine.

Il y a cependant d'autres avantages, dont la réduction de l'érosion du sol, l'amélioration de la qualité de la nappe d'eau souterraine, la diminution de la dégradation des terres agricoles, la réduction des dommages résultant des inondations et des orages et une protection accrue contre les effets de la sécheresse et du changement climatique.

[Français]

La Convention sur la diversité biologique est de loin l'entente internationale la plus importante reliée aux espèces sauvages depuis plusieurs années. Elle est une des principales réalisations du Sommet de la Terre de 1992 au Brésil. La tâche de trouver un terrain d'entente acceptable pour autant de parties était quelquefois ardue et les Canadiens devaient être fiers de leur travail pour que la Convention soit appuyée par tous.

Nous avons aussi démontré notre engagement envers la Convention en la signant rapidement et en la ratifiant. De plus, avec les provinces et les territoires, le gouvernement fédéral a commencé à travailler à l'élaboration de la Stratégie canadienne pour la biodiversité, initiative qui nous permettra de respecter nos responsabilités en vertu de la Convention.

La Convention exige que les pays réglementent ou gèrent les ressources biologiques de façon à assurer la conservation et l'utilisation durable, que les pays établissent un système d'aires protégées pour conserver la biodiversité, que dans le cadre des initiatives de conservation, toutes les espèces d'un écosystème soient considérées et que les pays élaborent des dispositions législatives pour protéger les espèces en danger de disparition.

Le projet de loi C-24 aidera le Canada à respecter les exigences de cette Convention. La Convention sur la diversité biologique et les autres ententes internationales que j'ai mentionnées ne sont pas importantes pour ce que le Canada leur apporte mais pour ce qu'elles apportent au Canada. Elles établissent un contexte, un cadre de travail pour nos activités. Elles établissent des buts globaux. Elles reconnaissent l'importance des habitats vulnérables au Canada, et dans au moins un cas, le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine, elles canalisent les fonds pour protéger ces habitats. Mais avant tout, elles présentent les concepts qui doivent être à la base même de notre initiative visant à protéger les espèces sauvages au Canada.

[Traduction]

C'est dans ce contexte que le gouvernement fédéral propose des modifications à la Loi sur la faune du Canada et à la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi, les temps ont changé et nous devons nous y adapter. Nous devons nous conformer aux normes environnementales les plus rigoureuses, aussi bien chez nous que dans le monde entier. Nous devons intégrer dans nos programmes les plus récents progrès scientifiques. Nous devons composer avec des objectifs environnementaux en constante évolution. Et, par-dessus tout, nous devons répondre aux besoins et aux attentes des Canadiens, jeunes et vieux.

Dans l'ensemble de notre pays, les Canadiens reconnaissent la nécessité d'avoir des politiques et des pratiques favorables à la protection de la faune et ils exhortent les gouvernements, notamment le gouvernement fédéral, à donner l'exemple dans ce do-


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maine. Voilà pourquoi nous avons élaboré ces modifications à la Loi sur la faune du Canada.

La Gazette d'aujourd'hui publiait un article sur l'Institut d'écotoxicologie du Saint-Laurent. Je connais bien le Dr Pierre Béland, qui a fondé l'organisme il y a 11 ans. Depuis de nombreuses années, il repêche dans le Saint-Laurent les bélugas qui, malades, vont s'échouer sur nos rives. Il a ainsi pratiqué une autopsie chez 69 d'entre eux depuis 1983.

(1800)

L'article de la Gazette d'aujourd'hui décrit la situation critique des bélugas. Dans l'organisme des 69 bélugas qui ont été scientifiquement disséqués par l'Institut d'écotoxicologie du Saint-Laurent, on a trouvé 100 parties par million de PCB. La norme industrielle est de 50 parties par million de PCB. Dans le cas du poisson comestible, la norme est de deux parties par million de PCB. Or, 69 de ces bélugas avaient 100 parties par million de PCB dans l'organisme. Le Dr Pierre Béland dit par plaisanterie-mais c'est de l'humour grinçant-que les bélugas du Saint-Laurent devraient avoir des permis pour nager dans ces eaux parce qu'ils sont tellement intoxiqués.

Sur les 69 baleines disséquées depuis 1983, 28 étaient atteintes d'une tumeur, certaines malignes, 37 souffraient de graves lésions au système digestif et 31 femelles avaient des lésions aux glandes mammaires. C'est là une terrible condamnation que nous subissons tous pour avoir négligé notre patrimoine au point d'avoir laissé des produits toxiques infester nos lacs, nos rivières, nos terres et notre air, au point où les animaux, ces innocents habitants de l'écosystème, souffrent aujourd'hui des conséquences de nos fautes.

Nous devrions réfléchir à ce qui arrive aux bélugas du Saint-Laurent. Demandons-nous ce que serait le Canada sans l'ours polaire de l'Arctique, l'ours noir ou le grizzli des Rocheuses, les bélugas du Saint-Laurent ou des mers du Nord, l'oie des neiges ou d'autres oiseaux. Serait-ce là un patrimoine de la nature ou un patrimoine mort et muet?

C'est la raison pour laquelle nous désirons ardemment que la Loi sur les espèces sauvages du Canada, le C-24, et le projet de loi C-23, que nous venons d'adopter, deviennent des mesures législatives essentielles pour nous tous, afin qu'elles renforcent notre détermination à préserver les habitats, l'écosystème et l'environnement, qui est à la base de notre existence et de notre qualité de vie à tous.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole, encore une fois, sur un projet de loi concernant l'environnement, il s'agit du projet de loi C-24. Ce projet de loi modifie la loi de 1973 intitulée la Loi sur la faune du Canada. L'objectif de cette loi est de, et je cite ici le ministre: «Permettre au gouvernement fédéral d'effectuer de la recherche sur la faune et, en collaboration avec les provinces, d'entreprendre diverses activités liées à la conservation et à l'information en matière de faune. Les provinces ont la responsabilité de gérer les espaces sauvages et ce à l'exclusion de la plupart des espèces d'oiseaux migrateurs, des poissons et des mammifères».

Le projet de loi, un peu comme pour C-23, consiste à mettre à jour une loi déjà existante. Essentiellement, il modernise la loi et comprend quelques nouveautés. Il est primordial d'être à l'affût des problèmes environnementaux et de se munir des outils nécessaires afin de les éviter, surtout en ce qui concerne la biodiversité.

(1805)

Au chapitre 6 du rapport Brundtland, nous pouvons lire et je cite: «La conservation des ressources naturelles vivantes-les végétaux, les animaux et les micro-organismes-et non vivantes dont elles ont besoin pour vivre est essentielle pour le développement des ressources naturelles. À l'heure actuelle, la conservation de la flore et de la faune sauvages figure bien à l'ordre du jour des gouvernements: près de 4 p. 100 de la surface de la terre est, en effet, aménagée explicitement pour préserver des espèces et des écosystèmes. Les pays sans parcs nationaux sont très peu nombreux. Il ne s'agit pas de décider si oui ou non la défense de la nature est une bonne chose, mais bien de déterminer comment la mener à bien dans l'intérêt national et en fonction des moyens dont dispose chaque pays.»

Comme les dirigeants des autres pays signataires du rapport Brundtland, nous sommes tous convaincus en cette Chambre, j'en suis sûr, de l'importance de la protection des espèces en voie d'extinction. Il s'agit plutôt de trouver les moyens que l'on pourrait prendre afin d'arriver à nos fins. Ainsi, l'ancienne loi visait essentiellement la protection des animaux, des végétaux et autres organismes appartenant à des espèces sauvages. Le remplacement du mot «faune» par «espèces sauvages» élargit donc la portée de la nouvelle loi de façon considérable. Cet élargissement de la loi est essentiel, selon nous, à la protection des habitats naturels des espèces sauvages que nous désirons protéger. Cette modification de la loi a comme effet de remplir un vide juridique béant qui existait dans la précédente loi de 1973.

De plus, les modifications qui seront apportées à la loi permettront de créer des aires marines protégées à l'intérieur de toute zone de pêche prescrite par la Loi sur les mers territoriales et les zones de pêche. Ainsi, il y aura possibilité de procéder à des activités de recherche, de conservation et d'information concernant les espèces sauvages en milieu marin. Cet élargissement de la loi fort intéressant permettra une protection accrue d'un plus grand nombre d'espèces sauvages en milieu marin.

Pour une plus grande protection, les agents de la faune se verront dorénavant octroyer des pouvoirs d'agents de la paix. Ils pourront ainsi appliquer les dispositions du Code criminel. De plus, on leur donne un pouvoir, en cas d'urgence, de faire des inspections et des perquisitions sans mandat. La complexité des situations dans lesquelles se retrouvent souvent les agents de la faune, notamment l'éloignement en forêt, sera facilitée par ce pouvoir spécial qui leur est accordé.

Mais ici nous, du Bloc québécois, aurions aimé avoir une garantie de collaboration du fédéral avec les provinces dans ce cadre, mais il eut été difficile de l'obtenir au sein de notre comité. Dans la loi, on dit que les fonctionnaires provinciaux nommés par le ministre doivent avoir l'agrément et l'assenti-


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ment d'une province pour exercer leurs fonctions dans cette province. Plus loin, on dit que le ministre de l'Environnement pourrait, dans des situations spéciales, donner des pouvoirs spéciaux à ces agents. Ce que nous disions, c'est que oui, il peut leur donner des pouvoirs spéciaux, mais comme dans le cadre de leur nomination, avec l'accord de la province, c'eut été, on croit, un amendement qui aurait été profitable à la sécurisation de la loi, mais difficile à faire accepter.

De même donc, on accorde aux agents la possibilité d'inspecter n'importe quel endroit ou véhicule où peuvent se trouver des espèces sauvages. Sans cette disposition, l'efficacité de l'application de la loi serait grandement menacée, tous en conviennent. Cependant, le projet de loi s'assure du respect de la Charte des droits et libertés en spécifiant une protection au public contre les inspections injustifiées. Cela nous semble très important.

Comme dans le projet de loi C-23, on se donne un moyen de faire rembourser par les contrevenants les frais engagés suite au délit. Il est d'une grande importance que de tels coûts ne soient pas assumés par les contribuables. Enfin, une augmentation considérable des amendes pour les infractions à la loi permettront sûrement d'augmenter l'effet dissuasif de contrevenir à la loi. J'espère que le montant maximal prévu de 250 000 $ aura cet effet et que le gouvernement n'hésitera pas à le modifier, si le temps lui démontre qu'on n'atteint pas cet objectif et les objectifs visés par la loi.

(1810)

De plus, l'inclusion à la loi de la possibilité pour le tribunal d'émettre des ordonnances obligeant, par exemple, des contrevenants à réparer les dommages qu'ils auraient faits à l'environnement augmentera sûrement l'effet dissuasif recherché par cette loi.

En conclusion, les efforts déployés pour atteindre les objectifs de protection de l'environnement et du développement durable doivent se concrétiser par une application rigoureuse de la loi. En matière environnementale, les actions doivent être concrètes et continues pour réaliser le développement durable, guise d'une saine économie et d'un sain développement de la société.

Les Québécois et les Canadiens nous ont donné un mandat clair en matière environnementale et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour réaliser le mandat qu'ils nous ont donné, c'est-à-dire rétablir les erreurs du passé et voir à ne pas les répéter. L'environnement n'a pas de frontière et n'a pas de parti. Nous ne le dirons jamais assez.

[Traduction]

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, le projet de loi C-24 a pour but de modifier et de renforcer l'actuelle Loi sur la faune du Canada qui a été adoptée en 1973 et qui est essentiellement demeurée la même depuis vingt ans.

Les députés réformistes croient fermement que cette loi est insuffisante. Nous estimons qu'il faut la modifier et la mettre à jour pour mieux répondre aux préoccupations environnementales que les Canadiens peuvent avoir dans les années 90.

Le Parti réformiste se préoccupe beaucoup de l'environnement au Canada. Nous croyons notamment qu'il faut définir l'identité et la vision de l'avenir du Canada en nous fondant sur une nouvelle évaluation de notre territoire et sur l'importance extrême que représentent pour notre bien-être l'exploitation, le développement, le renouvellement et la préservation de nos ressources naturelles et de notre milieu physique. Cela fait partie de l'engagement que notre parti a pris d'assurer à tous les Canadiens un environnement sain et propre.

Dans le cadre des modifications qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur la faune du Canada, on envisage d'étendre la définition des espèces sauvages à tous les organismes appartenant à des espèces sauvages, dont les végétaux, les champignons et les insectes, pour la rendre conforme à la Convention sur la biodiversité qui a été ratifiée par le Canada en 1993.

On envisage également de créer des réserves nationales de faune dans les écosystèmes marins des eaux côtières du Canada, jusqu'à la limite des 200 milles, pour protéger les bélugas dans la baie Isabella, le saumon sur la côte ouest et les oiseaux marins. Ce projet de loi permettra aussi au gouvernement fédéral de remplir ses obligations quant à la recherche sur la faune et à une vaste gamme d'activités de conservation et d'interprétation de la faune et de son habitat.

La loi comportera aussi des mesures de dissuasion plus rigoureuses à l'égard des activités illégales comme le braconnage, car elle imposera une peine maximale de 100 000 $ ou cinq ans de prison, ou les deux, en cas d'infraction grave.

Le mandat du ministère fédéral de l'Environnement au Canada est de gérer et de sauvegarder les oiseaux migrateurs et, en coopération avec les provinces et les territoires, les autres espèces d'intérêt national ou international. En sa qualité de membre de la communauté internationale, le Canada a l'obligation de préserver et de protéger la faune et les réserves fauniques. Toutefois, en assurant la santé et le développement des populations d'espèces sauvages, le Canada contribue aussi à son propre bien-être économique, social et culturel.

La Loi sur la faune du Canada reconnaît la grande valeur de la faune et montre que la loi et les règlements devraient être les outils essentiels de la conservation de la faune pour les générations futures. Nous devons aussi garder à l'esprit qu'il reste d'autres mesures à prendre pour améliorer la situation actuelle.

Les Canadiens doivent se sensibiliser à la menace grave que représentent les activités illégales comme le braconnage pour notre faune. Des renseignements à ce sujet sont déjà offerts par plusieurs sources différentes, notamment des organismes gouvernementaux, des organisations non gouvernementales et les divers clubs de chasse et de pêche. Si vous voulez rencontrer un groupe d'environnementalistes dévoués, il vous suffit de vous rendre à votre club local de chasse et pêche.

Sur le plan économique, le ministère fédéral de l'Environnement a calculé que les dépenses rattachées à tous les types d'activités de loisir du domaine de la pêche et de la chasse représentaient environ 11,5 milliards de dollars de notre produit intérieur brut, 4,4 milliards de dollars en recettes fiscales et plus d'un quart de million d'emplois pour les Canadiens. Il est évident que les ressources naturelles vivantes du Canada jouent un


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rôle important dans notre bien-être sur les plans social et économique. Je le répète, les véritables écologistes, ceux qui attachent le plus d'importance à notre faune, sont les chasseurs responsables qui consacrent leur temps et leur argent à l'amélioration et au maintien de cette ressource.

(1815)

Je doute fort que quiconque dans cette enceinte ait besoin d'être persuadé que la conservation et la protection de l'environnement sont maintenant devenues des questions ayant beaucoup d'importance sur les plans politique et économique au Canada. Les sondages d'opinion montrent que plus de 90 p. 100 des Canadiens s'inquiètent de la qualité de notre environnement. Ils nous apprennent en outre que les Canadiens sont plus ou moins satisfaits de la capacité du gouvernement fédéral de traiter les questions environnementales délicates.

Les chasseurs responsables collaborent avec les gardes-chasse et les agents chargés d'appliquer la loi pour protéger la faune contre la chasse illégale, autrement dit le braconnage. Chaque année, des braconniers tuent des millions d'animaux pour leurs fins personnelles ou pour de l'argent. Ils sont vendus sur le marché noir ici au Canada et dans d'autres pays. On a souvent estimé que les animaux tués illégalement au Canada étaient pratiquement deux fois plus nombreux que ceux tués légalement. Les braconniers savent que leur activité présente peu de risques, notamment celui d'être pris. En effet, à peine un pour cent des crimes de braconnage font l'objet d'une enquête. Même s'ils sont pris, les braconniers considèrent que les amendes entrent dans leurs frais.

Le commerce illégal de la faune au Canada représente des millions de dollars. L'importance des profits, la faiblesse des risques et les sensations fortes qu'on retire de cette activité illégale rendent le braconnage extrêmement attrayant.

Les chasseurs responsables, ceux que l'on voit dans leurs véhicules de chasse, transportant et portant leur matériel de chasse à l'automne, disent tous que la loi sur la protection et la conservation de la faune au Canada doit être renforcée, afin de mettre un terme aux activités illégales comme le braconnage.

Cependant, nous devons nous demander si les dispositions de ce projet de loi sont suffisamment strictes. Et l'application de la loi et la punition des crimes? Toute nouvelle loi ou loi existante améliorée doit également être appliquée avec rigueur pour vraiment bien protéger notre faune. Aussi, il faut que les tribunaux, les procureurs aussi bien que les juges, considèrent que les délits touchant la faune sont graves et devraient être traités comme tels.

De façon générale, le Parti réformiste appuie les nouvelles dispositions après avoir eu l'occasion d'examiner des amendements possibles au comité. De nombreux groupes ont présenté des instances au comité et il serait possible d'apporter certaines améliorations au projet de loi.

Mon parti est très heureux que l'une des facettes du projet de loi soit approuvée presque intégralement, soit la partie qui renforce les règles d'application et les peines. Bien que ce projet de loi donne à la Loi sur la faune du Canada la poigne qui lui manquait, nous croyons que les dispositions sur les peines maximales auraient pu être encore plus sévères.

La partie sur la récupération des frais d'administration doit aussi être améliorée. Cette modification a été conçue par le Parti réformiste suivant le principe que le gouvernement doit être aussi prudent que possible et qu'il lui serait facile d'accepter cette mesure, compte tenu de la situation financière du Canada.

Nous croyons juste de récupérer les coûts relatifs à la gestion des terres publiques et des zones marines protégées. Cela réduira les dépenses du gouvernement, rendra le système de réglementation plus autosuffisant et assurera l'applicabilité de la loi, à long terme.

Cependant, je signale encore une fois, comme je l'ai fait durant le débat sur le projet de loi C-23, le fait que les autochtones ne soient pas soumis à l'application de cette loi et les problèmes que cela pourrait causer. Je vous en donne quatre exemples. D'abord, un troupeau d'animaux sauvages vient souvent déranger un troupeau d'animaux domestiques, dans le nord de la Saskatchewan. Le propriétaire du troupeau réagit en engageant un chasseur autochtone, qui peut tuer l'orignal en dehors de la saison de chasse.

Ensuite, dans le nord de la Colombie-Britannique, un groupe de non-autochtones a commencé à constituer un troupeau de bisons, dans le but de lancer une entreprise touristique, qui aurait pu amener des chasseurs de partout dans le monde. Leurs plans ont été contrecarrés lorsque des autochtones du nord de la province ont décimé leur troupeau.

(1820)

Troisièmement, il y a des chevreuils autour de Princeton, en Colombie-Britannique, à environ trois quarts d'heure de voiture à l'est de Vancouver. Il est de notoriété publique que des chasseurs autochtones du district de Cariboo, à cinq heures de voiture de là, viennent les chasser hors saison.

Quatrièmement, dans ma circonscription, un individu qui venait d'obtenir le statut d'Indien inscrit a pris sa voiture et a fait deux heures de route pour aller tuer un mouflon mâle qui se trouvait avec tout un troupeau à un endroit où on les nourrissait, pour la simple raison que ses magnifiques cornes constituaient un trophée de première classe.

Ces exemples illustrent ce qui arrive lorsqu'un projet de loi comme celui-ci ne s'applique pas à tout le monde et qu'un groupe particulier y échappe. Ils ne représentent pas la règle générale, et cela ne veut pas dire que toutes les personnes d'origine autochtone agiraient de la sorte. En fait, ce genre de comportement serait exceptionnel. Il n'en reste pas moins que le fait que le projet de loi ne s'applique pas aux autochtones rend ce genre de choses possible et suscite de graves préoccupations et beaucoup d'hostilité de la part de ceux qui ne peuvent se prévaloir d'une telle exception.

Les Canadiens nous disent vouloir que tous les paliers de gouvernement protègent et préservent la faune de ce pays. À cette fin, nous devons nous concerter et régler le dossier autochtone. En notre qualité de législateurs chargés de la réglementation, nous devons prendre cette responsabilité au sérieux et tenir


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notre promesse d'assainir l'environnement. Si nous y parvenons, ce sera pour le plus grand bien de tous les Canadiens.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole sur le projet de loi C-24 à l'occasion de la troisième lecture. Bien que le texte juridique de cette mesure législative définisse la portée de la loi, les autorités responsables, les pénalités, les pouvoirs d'application et les procédures administratives, c'est l'intention générale de la loi et des amendements qui lui donne son importance.

Le développement durable est une expression que l'on utilise communément de nos jours pour décrire la façon dont on devrait aborder la prise de décisions en matière d'environnement et d'économie. Bien que l'application puisse être interprétée de diverses façons, on admet généralement qu'il faut voir loin et considérer toutes les conséquences économiques et environnementales possibles d'une décision ou d'une action.

Ce qui est implicite dans cette façon de voir, c'est que le maintien ou l'amélioration de la santé de notre économie dépend directement de la santé de notre environnement et de la durabilité des ressources. Il y a beaucoup de situations qui ont exigé de difficiles décisions pour garantir une utilisation durable de nos ressources renouvelables. La pêche à la morue dans l'Atlantique et la pêche au saumon dans le Pacifique sont deux exemples récents ayant exigé des décisions radicales.

La conservation est devenue une priorité. Pour éviter des situations comme celles que je viens de mentionner, nous devons comprendre et prévoir les problèmes et tous les secteurs doivent être en mesure de travailler de concert et d'exploiter les forces des autres pour trouver les meilleurs moyens de gérer et d'intégrer l'économie et l'environnement.

Les solutions doivent être fondées sur de bons renseignements scientifiques, la consultation, la collaboration et l'entente. C'est pour cela que je trouve le projet de loi C-24 tellement important. Nous ne pouvons pas espérer atteindre le développement durable si nous n'avons pas les outils nécessaires. La Loi sur la faune du Canada est un instrument qui favorise le développement durable et que les modifications proposées rendront encore plus efficace.

Cette loi ne vise pas à autoriser le gouvernement canadien à agir seul, comme certains peuvent le prétendre. L'expérience nous a appris qu'on ne peut imposer des solutions à des problèmes comme ceux dont nous sommes actuellement saisis et qui concernent notamment la disparition d'espèces et la transformation des habitats, le manque d'information ou l'absence de décisions éclairées.

(1825)

Nous devons nous efforcer pour arriver à un consensus éclairé sur la nécessité d'agir et nous devons vraiment opter pour une action concertée. Voilà pourquoi le projet de loi s'apparente à une mesure habilitante. C'est aussi la raison pour laquelle le gouvernement doit établir des partenariats avec les diverses organisations provinciales et territoriales concernées ainsi qu'avec d'autres organisations non gouvernementales.

Les programmes qui ont été établis et qui le seront dans l'avenir aux termes de ce projet de loi sont en fait de véritables modèles de la façon dont nous devons collaborer au Canada pour traiter les questions qui vont au-delà des limites de compétence. Nous devons reconnaître les forces des divers partenaires et les utiliser, et non nous quereller pour savoir à qui revient le mérite d'une mesure qui permet la réalisation d'objectifs communs tels que la protection des habitats et la préservation d'espèces menacées. Nous devons faire en sorte que les Canadiens connaissent et apprécient l'importance de la faune pour leur bien-être économique et social, bref, qu'ils appuient le développement durable.

Grâce à la mise en oeuvre de la loi, un grand nombre de programmes de préservation, d'efforts en vue d'effectuer des recherches en collaboration et d'accords bilatéraux et multilatéraux relatifs à la préservation sont apparus. Par exemple, le Rétablissement des espèces canadiennes en péril (RESCAPÉ) est un programme de collaboration entre le gouvernement fédéral, les provinces et les organisations nationales de préservation, pour élaborer et mettre en oeuvre des programmes de rétablissement à l'échelle du Canada.

La protection des habitats aux termes de la loi dépend aussi de divers efforts de collaboration et de partenariats. D'après nos renseignements, il y a, à l'heure actuelle, 45 zones protégées qui couvrent une superficie de 287 000 hectares. Si l'on ajoute à cela les zones protégées aux termes de la Convention concernant les oiseaux migrateurs, on peut dire que les zones protégées font plus de deux fois la superficie de la Nouvelle-Écosse. Les administrations locales ainsi que les provinces et les territoires participent pleinement à la création de ces zones protégées. Dès que les objectifs en matière de conservation sont fixés, on s'entend sur les meilleures mesures de protection à prendre. On en vient à créer une méthode de gestion tenant compte des préoccupations de toutes les personnes concernées.

À titre d'exemple, mentionnons le projet auquel participent les Inuit de Clyde River qui veulent établir une réserve aquatique nationale à Isabella Bay, à l'Île de Baffin. Les Inuit ont proposé ce projet, parce qu'ils s'inquiétaient de l'avenir d'une espèce menacée, la baleine boréale, qui utilise cette région comme zone d'alimentation l'été. La réserve aquatique nationale deviendrait le centre d'une réserve internationale de la biosphère. La cogestion de cette zone sera axée sur la protection de cet habitat fragile grâce au maintien des pratiques traditionnelles de subsistance et à la promotion de l'écotourisme et de la recherche sur les baleines.

Le projet de loi C-24 renferme deux dispositions qui contribueront grandement à créer des zones protégées. La première vise à élargir la définition de la faune, qui inclut désormais toutes les espèces sauvages, qu'elles soient animales, végétales ou autres. Jusqu'ici, la conservation de la faune a surtout porté sur certaines espèces et en particulier sur des espèces animales plus évoluées.

Aujourd'hui, on s'accorde généralement pour dire qu'il nous faut une approche plus globale de la conservation, une approche écosystémique, qui tienne compte de toutes les fonctions et valeurs des écosystèmes, y compris toutes les espèces animales et végétales, ainsi que de la gamme de leurs besoins en matière d'habitat. La nouvelle définition de la faune va d'ailleurs dans le sens de la politique des espèces sauvages pour le Canada que les ministres fédéraux et provinciaux responsables de la faune ont approuvée en 1990. Cela permettra de mener des recherches et


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d'établir des zones protégées selon une approche basée sur les écosystèmes et de nous conformer aux recommandations de la Convention sur la biodiversité qui porte sur la conservation des habitats et des écosystèmes.

La deuxième disposition du projet de loi C-24 qui touche aux zones protégées permet la création de telles zones au-delà des eaux territoriales jusqu'à la limite de 200 milles marins. L'habitat critique de la faune, y compris des zones abritant des concentrations importantes d'oiseaux marins et les aires de reproduction et de nutrition des baleines, existe ou s'étend au-delà de la mer territoriale. Ces zones comprennent des ouvertures saisonnières ou permanentes dans la banquise où se concentrent notamment des oiseaux, des baleines et des ours polaires; des montagnes sous-marines; des remontées de substances nutritives dans l'océan; et d'autres zones associées à la plate-forme continentale du Canada.

(1830)

En protégeant ces zones clés, on contribue à préserver la biodiversité et les retombées économiques des écosystèmes marins, telles celles que représentent des possibilités récréatives améliorées.

Je le répète, la Loi sur la faune du Canada est valable parce qu'elle offre un fondement pour la recherche, le partenariat et la collaboration. Les modifications comprises dans le C-24 que je viens de décrire posent un nouveau défi aux Canadiens, à savoir réussir à comprendre et à protéger les écosystèmes et leur biodiversité, y compris en ce qui concerne les zones marines protégées; il leur faudra pour cela établir des partenariats nouveaux et novateurs avec beaucoup plus de groupes d'intérêts et d'intervenants que par le passé. De vastes stratégies de collaboration doivent être mises au point pour que les objectifs tant environnementaux qu'économiques puissent être atteints.

Je suis persuadé que le projet de loi C-24 nous aidera à atteindre ces objectifs. J'encourage vivement mes collègues députés à l'appuyer.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Débat.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, je dois vous dire que c'est avec joie que j'interviens sur le projet de loi C-24, immédiatement après mon collègue de Thunder Bay-Atikokan, puisque nous siégeons depuis plusieurs semaines ensemble au Comité de l'environnement et du développement durable et ça a été un des députés qui a contribué d'une façon marquée à notre comité par sa présence et par ses interventions.

Au Comité permanent sur l'environnement et le développement durable, nous avons étudié, parallèlement au projet de loi C-23, le projet de loi C-24, modifiant la Loi sur la faune et la flore. Cette loi a été proclamée en 1973. Elle avait comme objectif de permettre au gouvernement fédéral d'effectuer de la recherche sur la faune et, en collaboration avec les provinces, d'entreprendre des activités reliées à la conservation et à l'interprétation des espèces sauvages et de leur habitat, comprenant la protection des espèces en voie d'extinction.

Depuis sa proclamation, il semble qu'il n'y ait eu que des modifications mineures à cette loi. Tout comme le projet de loi C-23, les modifications que l'on suggère vont simplement permettre à une loi banale d'évoluer avec son temps. C'est pourquoi nous, du Bloc québécois, emboîtons le pas au gouvernement pour mettre de l'avant ces mesures qui nous permettront de protéger notre faune d'une façon plus adéquate.

Une des modifications qui, pour moi, est très importante, c'est que, dès son entrée en vigueur, la loi permettra de protéger-et c'est ça qui est important-non seulement tout animal non domestique, mais aussi tous les organismes vivants, et ça, c'est très large.

Les organismes vivants, ce ne sont pas seulement des animaux ou des oiseaux ou des poissons. Vous avez des micro-organismes, des êtres unicellulaires, qu'on ne peut même pas voir à l'oeil nu mais qui, dans la chaîne alimentaire, jouent un rôle très efficace.

(1835)

Vous avez toutes les plantes, le foin, le trèfle, les gros arbres, les chênes, qui sont plus que centenaires et vous avez la petite fleur démunie, coquette, qui ne vit qu'une courte saison. Dorénavant, donc, la loi C-24 protégera non seulement les animaux mais également les plantes, si bien que tout être vivant sera dorénavant protégé.

Il y a 20 ans, j'imagine qu'on ne voyait pas l'utilité de protéger l'animal et de protéger également l'habitat de l'animal. Mais, maintenant, il est clair comme de l'eau de roche que même si on protège, par exemple, les aigles à tête blanche mais qu'on détruit leur environnement, notre action n'a aucune logique. Cette nouvelle disposition nous permettra donc de nous inscrire dans une démarche de développement durable que mon collègue a si bien expliquée tout à l'heure.

Ici, je me permettrai de vous expliquer d'une façon très simpliste le cycle de vie. La terre, la planète bleue, est constituée de deux éléments: les vivants et les non-vivants. Parmi les non-vivants vous avez la source d'énergie première sur terre qui est le soleil. Vous avez dans l'air d'autres non-vivants, des gaz, dont le CO2, le gaz carbonique. Vous avez un autre non-vivant qui est le sol, dans lequel il y a des minéraux. Et, finalement, vous avez une autre richesse naturelle qui est très abondante au Québec et au Canada, un être non vivant, bien sûr, qui est l'eau.

À partir donc, du soleil, de l'eau, du gaz carbonique et des sels minéraux qu'on retrouve dans le sol, donc, quatre éléments non vivants qui ne coûtent absolument rien, avec ces quatre éléments, on a des êtres vivants qui s'en nourrissent, qui se développent, grandissent, se reproduisent et meurent. Ce sont des plantes qu'on appelle des producteurs puisqu'ils produisent leur propre nourriture. Ces producteurs se font manger par des herbivores, les herbivores se font manger à leur tour par des carnivores ou des omnivores. Et ces carnivores et ces omnivores, à leur tour, se font manger par d'autres carnivores ou d'autres omnivores, mais plus puissants. Et au sommet de la chaîne alimentaire, c'est vous, c'est moi, c'est mon collègue de Hochelaga-Maisonneuve. Nous sommes au sommet de la pyramide, bien sûr.


5248

Dorénavant, donc, la loi C-24 protégera tout ce beau monde mais seulement les vivants. On laisse de côté l'eau, le sol, la lumière et l'air. Espérons que, dorénavant, ces éléments non vivants ne feront pas défaut. C'est donc à tout profit, puisque cela ne coûte absolument rien. Les plantes, le trèfle qui poussent ne coûtent absolument rien.

J'aimerais prendre ici quelques secondes pour vous donner un exemple d'une chaîne alimentaire. Voyez-vous le gaz carbonique, l'eau, les sels minéraux du sol et le soleil font pousser du trèfle. Le trèfle est bouffé, lui, par les sauterelles, la sauterelle se fait manger par la grenouille, la grenouille se fait manger par la couleuvre, la couleuvre se fait manger par le raton laveur, et qui pourrait bien manger le raton laveur? Disons que c'est le coyotte ou le loup et ainsi de suite.

(1840)

Voyez-vous, plus on monte dans la chaîne alimentaire, plus les animaux sont puissants, sont gros, moins ils sont nombreux sur la terre, et heureusement. Imaginez-vous, monsieur le Président, s'il fallait que sur un territoire, un écosystème donné, il y ait plus de coyotes ou de loups qu'il y a de lièvres. Il y aurait un déséquilibre à court terme, bien sûr.

Je poursuis donc. Le projet de loi C-24 nous permettra aussi de créer des réserves nationales de faune par réglementation, dans la zone qui s'étend au-delà de la mer territoriale. Présentement, l'application est limitée à la mer territoriale, dont la limite s'étend seulement à 12 milles nautiques des côtes. Il serait maintenant question de rendre cette limite à 200 milles nautiques.

C'est donc dire que nous élargirons le bassin où il nous est possible d'agir, puisque l'écosystème marin et sa biodiversité sont actuellement presque totalement négligés, pour ce qui est de la protection de leur habitat. Si on en croit les spécialistes d'Environnement Canada, le potentiel de ce bassin est énorme. Notons seulement les aires à forte concentration d'oiseaux marins, ainsi que les zones de reproduction et d'alimentation des baleines.

Tout comme dans le projet de loi que nous venons d'adopter, il y a quelques instants, le projet de loi C-23, le ministre pourrait désigner des catégories de personnes, agents de la faune, avec ce projet de loi qu'on va probablement adopter, puisque le Bloc québécois va donner son assentiment, bien sûr. Alors, je cite ici une partie de la loi:

Le ministre peut désigner, individuellement ou par catégorie, les agents de la faune jugés nécessaires au contrôle de l'application de la présente loi et des règlements.
Je constate avec plaisir que dans cette loi, tout comme dans le projet de loi C-23, la désignation de fonctionnaires provinciaux est subordonnée à l'agrément du gouvernement provincial intéressé. Puisque cette disposition permettant au ministre de désigner des agents de la faune est la jumelle de celle du projet de loi C-23 en ce qui a trait aux gardes-chasse, la réponse obtenue au comité, à savoir si la ministre pourrait, par exemple, nommer une association de chasse et de pêche agent de la faune est toujours valide.

On m'avait alors répondu que oui, mais que de telles associations pourraient avoir des pouvoirs restreints. Toujours un peu sceptique quant aux bienfaits de cette disposition, je suis entré en contact avec le syndicat des agents de la conservation de la faune du Québec. Le président, M. Paul Legault, a pu nous faire part de l'expérience québécoise, puisque des pouvoirs semblables ont déjà été donnés par le gouvernement du Québec, par le biais de la Loi sur la conservation de la faune.

Donc, dès 1978, suite à l'abolition des clubs privés au Québec, il fut décidé de nommer des auxiliaires de la conservation de la faune afin de continuer à assurer la protection de la faune qu'exerçaient auparavant les gardiens des clubs privés. À l'origine, ces auxiliaires devaient être les yeux des agents de la faune et n'avaient pas de titre ou de fonction comme tels. Avec les années, les attentes vis-à-vis ces agents ont augmenté, sans que leur formation et leur encadrement ne deviennent plus rigoureux.

Le bilan n'est guère encourageant. Il semble que les gens n'étaient pas très productifs et se retrouvaient souvent en conflit d'intérêts, puisqu'ils devaient faire appliquer des règlements de la main droite, alors qu'ils gagnaient leur pain de la main gauche comme guide pour les chasseurs ou les pêcheurs.

(1845)

Imaginez la personne qui vous accompagne dans un club et qui est en même temps agent de la protection de la faune et votre guide. Si vous lui donnez 200 ou 300 $ par jour et que vous revenez bredouille, je pense que vous allez le congédier sur-le-champ, alors il doit être performant ou il perdra ses clients dans les années à venir. C'est dans ce sens qu'on trouve que c'était ambigu et que la main gauche ignorait souvent ce que la main droite devait réaliser.

Il est par ailleurs intéressant de noter que si on fait un rapide survol de la situation au Québec, on constate qu'il y a moins d'un rapport d'infraction rédigé par auxiliaire chaque année. Pour en avoir moins qu'un, il y en a qui n'en produise aucun. Certains en produisent un ou deux et s'il y en a qui produisent dix rapports vous comprendrez qu'il y en a plusieurs qui n'en font pas. Or, le gouvernement du Québec en est donc à revoir cette structure.

On dénote aussi des failles dans le système et je vous en cite trois: le processus de sélection est déficient en raison de critères trop faibles; le programme de formation est trop court et non adapté aux besoins des auxiliaires; et finalement, il n'y a pas de mécanisme de suivi du travail des auxiliaires.

Cependant, comme c'est le cas pour les gardes-chasse, c'est un fait reconnu qu'il manque d'agents de la faune pour faire appliquer la loi. Dans ce cas, admettons-le encore une fois, qu'on décide qu'il est nécessaire de nommer des surplus d'effectifs pour nous assurer de faire respecter nos lois.

Il serait tout de même utile, selon nous du Bloc québécois, de prendre certaines mesures pour éviter que les agents de la faune puissent manquer de qualifications et perdent ainsi leur crédibilité. C'est pourquoi nous avions suggéré les mêmes amendements au comité permanent. Comme je vous l'ai expliqué tout à l'heure, et ça arrive régulièrement, nos amendements ont été battus. On ne votera pas contre le projet de loi C-24, mais il me semble que cela aurait été à l'avantage de la loi d'accepter nos deux amendements.

Je vous les rappelle rapidement. Le premier visait donc à s'assurer que les personnes que le ministre désigne par catégorie aient au moins reçu une formation appropriée à l'exercice de


5249

leurs fonctions. Cet amendement est d'autant plus pertinent que l'expérience du Québec nous montre qu'il s'agit d'un aspect important de la question. Le deuxième amendement, que nous avions proposé, visait à rendre conditionnelle la désignation d'une catégorie de personnes à l'approbation du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

Nos deux amendements ont été battus, mais je demeure fermement convaincu qu'il serait important de revoir d'un peu plus près ce genre de nominations. Selon M. Legault, le manque de rigueur lors des nominations d'auxiliaires a engendré bien des frictions avec la population puisque certains individus ont «joué à la police». Un peu comme je vous le rappelais tout à l'heure, et je me permets de le citer encore une fois à mes collègues d'en face. Voyez-vous mes chers amis, lorsqu'on nomme une association de chasse au complet agents de la faune, il se glissera peut-être dans le bon groupe deux ou trois gros-bras-des gros-bras petites-têtes-qui, se servant de ces gros bras peuvent faire perdre toute crédibilité à l'ensemble des agents de la faune. C'est le danger lorsqu'on dit que certains individus pourraient être portés à jouer à la police.

(1850)

La demande d'implication de nouveaux partenaires se fait de plus en plus pressante et il ne faudrait cependant pas qu'on assiste à un pelletage de responsabilités envers les citoyens et les citoyennes. Il est néanmoins primordial de prendre des mesures pour pallier au vide de la protection de la faune, et je crois que le projet de loi C-24 remplit bien cet objectif. De la bonne volonté et de bonnes lois ne sont pas suffisantes pour protéger notre environnement d'une façon adéquate. C'est aussi utile qu'avoir un bon coffre d'outils rempli à craquer, mais ne pas avoir de menuisier pour s'en servir.

En terminant, le meilleur moyen, la meilleure arme pour sauver la faune, la flore, les habitats, les écosystèmes, c'est l'éducation. Lorsque le gouvernement aura compris qu'au Canada, au lieu d'avoir 2 000, 3 000 agents de la faune, si on avait 27 millions d'agents de la faune, chacun d'entre nous s'en ferait le gardien, pour que, lorsqu'on voit des gestes néfastes, nuisibles, des actions négatives, on prenne notre courage à deux mains et qu'on avertisse les responsables: «Eh! jeune homme, jeune fille, tu ne devrais pas faire ceci, tu ne devrais pas faire cela.»

Bien sûr, on risque d'avoir des bêtises, mais c'est le prix à payer si on veut faire notre part. Et ce prix à payer, je pense qu'à la longue, le gouvernement, le ministre des Finances qui doit se casser la tête jour après jour pour sabrer, afin d'abaisser le fameux déficit national, alors ce serait, je pense, un investissement dans la publicité. Qu'on commence au niveau des écoles à expliquer à notre jeunesse, aujourd'hui, que ce qu'on a, c'est pour eux autres, et demain, ce sera pour leurs petits enfants. On fait de l'éducation et, dans deux, trois générations, on aura une mentalité complètement renouvelée, une mentalité qui sera axée sur le développement durable, la durabilité et aussi la biodiversité.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR L'ACCISE

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Deux motions d'amendement figurent au Feuilleton pour l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.

[Français]

La motion no 1 sera débattue et mise aux voix séparément. La motion no 2 sera débattue et mise aux voix séparément.

[Traduction]

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville) propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 11:
a) par substitution, aux lignes 26 à 28, page 5, de ce qui suit:
«obtenir-à titre onéreux ou gratuit-

a) des cigarettes autrement que dans des paquets d'au moins vingt cigarettes par paquet;

b) du tabac, sauf des cigarettes, autrement qu'en quantités d'au moins 20 grammes.»

b) par substitution, aux lignes 3 à 5, page 6, de ce qui suit: «de la Loi sur l'accise, d'empaqueter:
a) des cigarettes dans un paquet qui contient moins de vingt cigarettes;

b) du tabac, sauf des cigarettes, en quantités de moins de vingt grammes.»

(1855)

-Monsieur le Président, je demande au gouvernement et à l'opposition officielle d'appuyer notre proposition d'amendement au projet de loi C-11.

Nous avons entendu des porte-parole de la Société canadienne du cancer et du Action Committee on Smoking and Health qui nous ont fait part de leurs préoccupations devant l'usage croissant du tabac sans fumée par les jeunes.

À Red Deer, en Alberta, 21 p. 100 des élèves de septième année ont essayé le tabac sans fumée et jusqu'à 11 p. 100 ont déclaré qu'ils utilisaient régulièrement ce type de tabac. Par ailleurs, selon certaines sources, l'usage du tabac sans fumée aurait plus que doublé chez les garçons de 12 à 17 ans depuis 1987.


5250

La principale source de préoccupation provient des paquets plus petits destinés aux jeunes. Notre proposition d'amendement à l'article 11 aurait pour effet de restreindre la vente et la présentation de produits du tabac autres que les cigarettes en paquets de moins de 20 grammes, ce qui rendrait illégaux les petits paquets de tabac sans fumée au même titre que les mini-paquets de cigarettes.

Le tabac sans fumée inclut le tabac à chiquer. Ce produit libère la nicotine qui est absorbée par l'organisme à travers les muqueuses de la bouche. L'utilisation prolongée du tabac à chiquer provoque des lésions graves des tissus mous et durs de la cavité buccale. Ce produit provoque la leucoplasie qui se manifeste par l'apparition de plaques blanchâtres dans la bouche. Il s'agit de tumeurs précancéreuses dont 3 à 6 p. 100 peuvent dégénérer en cancer.

Le tabac à chiquer contient des taux élevés de nitrosamines, jusqu'à 10 000 fois les quantités que l'on trouve dans des produits réglementés comme la bière. Le tabac à chiquer contient aussi d'autres substances cancérigènes. Les personnes qui chiquent du tabac pendant longtemps sont 50 fois plus susceptibles que les autres d'avoir un cancer des gencives et de la bouche. De plus, le tabac à chiquer est une des causes du cancer du larynx, de l'oesophage, des fosses nasales, du pancréas, du rein et de la vessie. Soixante pour cent des consommateurs de tabac à chiquer souffrent de maladies des gencives.

Selon un rapport publié par Santé et Bien-être social Canada, l'effet le plus immédiat du tabac à chiquer touche probablement la santé dentaire des jeunes, car le tabac sans fumée peut contenir des édulcorants tels que le sucre, le miel, la mélasse et la réglisse.

En plus des statistiques que j'ai données pour la ville de Red Deer, en Alberta, une étude menée dans l'État de l'Arkansas en 1991 a révélé que 21 p. 100 des jeunes garçons de la maternelle chiquaient régulièrement du tabac. En Ontario, 13 p. 100 des garçons de la 7e à la 13e année ont déclaré qu'ils consommaient du tabac sans fumée et qu'ils fumaient des cigarettes.

La conclusion la plus bouleversante était que beaucoup d'élèves étaient d'avis que le tabac sans fumée ne créait pas la même accoutumance que la cigarette. Ils voyaient le tabac sans fumée comme une bonne solution de rechange pour les aider à arrêter de fumer.

En 1988, l'Organisation mondiale de la santé a lancé un appel urgent à tous les gouvernements des pays qui ne connaissent pas le tabac sans fumée pour qu'ils bannissent ce produit avant que son usage ne devienne répandu. Ce produit n'est pas fabriqué au Canada. Nous devons importer ces petits paquets, et j'espère que le gouvernement et l'opposition nous appuieront dans notre démarche.

Tout ce que le Parti réformiste demande, c'est que nous fassions ce petit pas pour voir à ce que le tabac sans fumée ne devienne pas plus facile à obtenir pour les jeunes qu'un paquet de cigarettes, et j'espère sincèrement que les députés et le gouvernement appuieront notre amendement.

Je crois que le bon sens exige que nous incluions cet amendement dans notre projet de loi, et c'est pourquoi je le propose.

(1900)

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé): Monsieur le Président, tout ce que le député vient de dire est vrai. En fait, le tabac sans fumée est extrêmement dangereux, et son amendement me paraît louable.

Il est cependant inopportun en ce moment pour plusieurs raisons. Quatre-ving-cinq pour cent du tabac vendu au Canada à l'heure actuelle l'est sous forme de cigarettes et, comme il l'a dit, nous importons tout notre tabac à chiquer et à priser. Or, seulement une proportion bien minuscule du tabac sans fumée que nous importons, lequel représente lui-même une faible proportion de tout le tabac vendu au Canada, est importée en quantités inférieures à 20 grammes. Nous n'avons donc pas affaire à un problème qui se présente vraiment sur le marché. D'ailleurs, comme vous le savez, le projet de loi vise à interdire la vente de tabac aux moins de 18 ans, de toute façon, de sorte que personne ne devrait vendre quelque paquet que ce soit aux moins de 18 ans.

Nous trouvons cependant cet amendement inopportun pour le moment parce qu'il présente certaines incidences commerciales du fait que tout le tabac sans fumée est importé. Nous devons analyser ce fait. J'aimerais bien qu'on ne retarde pas maintenant l'adoption de ce qui est un projet de loi extraordinairement important en attendant qu'on puisse adopter cet amendement. On pourra toujours modifier la loi à une autre occasion et il sera parfaitement acceptable de proposer une modification plus tard. Même si l'amendement me paraît louable, je trouve qu'il est inopportun de l'adopter pour le moment.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, la secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé a répondu il y a un instant qu'on pourrait modifier la loi n'importe quand, mais dois-je comprendre que le gouvernement appuierait plus tard une telle modification?

Mme Fry: Oui, je pense que nous aimerions examiner certaines des incidences commerciales que cela présente à cause du fait qu'une bonne partie du tabac à chiquer et à priser est importée. Nous estimons qu'il s'agit d'un excellent amendement, mais qu'il est inopportun pour le moment.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

(La motion est rejetée.)


5251

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot) propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-11, à l'article 11, par adjonction, après la ligne 32, page 6, de ce qui suit:
(3) Les articles 7.1 et 7.2 entrent en vigueur six mois après la sanction de la présente loi.
-Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole, au cours des prochaines minutes, pour expliquer le sens de l'amendement que le Bloc québécois propose au projet de loi C-11.

D'abord, il faut dire que le Bloc québécois appuie ce projet de loi, qui vise entre autres à modifier la Loi sur la vente du tabac aux jeunes, afin d'interdire, et c'est la disposition qui nous intéresse par rapport à l'amendement que nous proposons, aux fabricants de tabac et aux manufacturiers de tabac d'empaqueter des cigarettes dans des paquets qui contiennent moins de 20 cigarettes.

Ces articles du projet de loi C-11 interdisent donc la vente de paquets contenant 15 ou 5 cigarettes, qui sont présentement en vente sur le marché, et la vente aussi de cigarettes à l'unité. Nous appuyons un tel projet, nous l'appuyons certes puisque nous sommes des défenseurs de la santé des concitoyens et des concitoyennes, et en particulier des jeunes, qui sont incités à la consommation de tabac par l'existence, en partie du moins, de paquets de petit format et de la vente à l'unité.

(1905)

Je réitére la position de mon parti sur le fait que ce n'est pas suffisant pour empêcher les jeunes de commencer à consommer des produits du tabac, qu'il faudra une vaste campagne de sensibilisation auprès des jeunes pour les désinciter à consommer des produits nocifs pour la santé.

Malgré la plus belle loi, malgré les meilleures dispositions réglementaires aussi, on va toujours faire face-comme j'ai dû le faire dans ma tendre enfance aussi-à des vendeurs sans scrupule qui encouragent la consommation de cigarettes dès le jeune âge en vendant à l'unité. J'ai été moi-même consommateur de cigarettes dans mon quartier, à 11 ou 12 ans, justement face à un vendeur sans scrupule. Il en distribuait même gratuitement au début pour tenter les jeunes, puis les vendait 10c., 15c. par après et 20c. plus tard. Voilà un profiteur, un vendeur sans scrupule. Vous en avez un exemple. Et j'ai vécu un de ces exemples.

Alors, ce n'est pas contre le projet de loi que nous en avons, mais c'est sur la capacité des entreprises, des détaillants, des grossistes et des distributeurs à s'ajuster rapidement aux nouvelles dispositions contenues dans le projet de loi C-17 en leur demandant, pratiquement immédiatement après la proclamation de la loi, de retirer du marché les petits formats de cigarettes ou de tabac. Cela les oblige à essuyer des pertes assez considérables, si l'on se fie aux représentations qui ont été faites par la Fédération canadienne des épiciers indépendants, entre autres, qui a comparu devant le Comité des finances pour soulever cette lacune de la loi, tout en appuyant les efforts du gouvernement pour empêcher la consommation ou l'habitude de la consommation de cigarettes dès le jeune âge. La Fédération canadienne des épiciers indépendants a demandé s'il n'y avait pas moyen d'avoir un certain délai de quelques mois avant la mise en force de cette partie du règlement.

Le sens de la motion que le Bloc québécois dépose ce soir est justement de donner un délai de six mois aux distributeurs, aux détaillants, à ceux qui sont en possession de petits formats de 20 cigarettes et moins, pour qu'ils puissent écouler leur stock sans essuyer de perte considérable.

Vous savez que, depuis 1990, les détaillants comme les grossistes, comme les distributeurs, ont accusé des pertes considérables à cause de la récession. Et malgré tout ce que l'on peut dire, le ralentissement est encore là, même si on peut voir poindre à l'horizon une certaine croissance économique.

Alors, je demande l'indulgence des gens du gouvernement et du Parti réformiste aussi pour adopter un tel amendement qui, sans dénaturer le sens du projet de loi, sans lui enlever sa force, que nous appuyons pour désinciter les jeunes à commencer la consommation de cigarettes dès leur jeune âge, permet tout de même aux entreprises de s'adapter à ce nouveau contexte. N'oublions pas non plus que nous demandons beaucoup à l'industrie du tabac ainsi qu'à l'industrie connexe qui gravite autour de cette industrie-là depuis les sept ou huit dernières années, en ce qui a trait à l'ajustement.

Alors, un petit délai de six mois serait bienvenu, et je vous soumets cette motion au nom du Bloc québécois.

[Traduction]

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé): Monsieur le Président, je ne crois pas que nous puissions accepter cet amendement. Le tabagisme est la cause de décès et de maladie la plus facile à prévenir dans le monde aujourd'hui. Il y a 40 000 Canadiens qui meurent chaque année à cause du tabagisme.

Celui-ci coûte 3 milliards de dollars par année au secteur des soins de santé de notre pays et directement au gouvernement canadien. C'est le premier ministre qui a annoncé à la Chambre, le 8 février dernier, notre intention d'interdire la vente de petits paquets de cigarettes. C'était il y a un peu plus de quatre mois.

Nous estimons que les fabricants et tous les vendeuses vendent de petits paquets de cigarettes ont été avisés suffisamment à l'avance de nos intentions. Par ailleurs, les petits paquets sont très accessibles aux jeunes. Ces derniers aiment les acheter parce qu'ils sont attrayants, qu'ils coûtent moins cher et qu'ils sont faciles à dissimuler à leurs parents et à leurs professeurs.

(1910)

Il est donc très important que nous prenions des mesures pour empêcher cette cause de tabagisme très facile à prévenir chez les jeunes.

Il s'agit d'un produit qui crée une dépendance, et je ne sais pas pendant combien de temps encore nous continuerons de dire qu'il vaut la peine d'en encourager l'usage et pendant combien de temps encore nous accepterons de continuer de propager l'utilisation de ce qui est en réalité un produit mortel créant une dépendance. Je pense donc que nous avons laissé suffisamment de temps aux fabricants et aux détaillants pour retirer ce produit du marché.


5252

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, j'abonde dans le même sens que le député qui m'a précédé, et j'ajouterais quelques observations au sujet des mini-paquets. L'interdiction va s'appliquer.

Le Conseil canadien des fabricants des produits du tabac nie que les mini-paquets de 15 cigarettes aient été conçus pour les jeunes. C'est ce qu'il a affirmé dans une communication écrite adressée à la ministre de la Santé et, de nouveau, dans son mémoire au Comité permanent des finances, le 7 juin.

Il est très clair, d'après les statistiques qui nous ont été fournies, que les petits paquets sont vendus surtout à des jeunes. Les fabricants n'ont peut-être pas visé cette clientèle, mais il reste que ce sont les jeunes qui achètent ces petits paquets.

Si l'industrie du tabac continue de soutenir que ces paquets ne sont pas destinés aux jeunes, je crois qu'elle perdra de la crédibilité et que nous devrons peut-être nous demander s'il est possible de la croire sur d'autres sujets.

Les fabricants soutiennent que les réserves existantes, valant 2 millions de dollars, seront gaspillées, ce qui entraînera une perte de 2 millions de dollars et donc une diminution des recettes fiscales de 1 million. Ils croient aussi que de vendre les stocks existants à compter du 12 septembre est très injuste et que cela entraînera d'autres pertes. Comme la question a sûrement été abordée déjà, je ne vais pas m'attarder.

Nous devons faire la part des revendications et des intérêts des fabricants, des distributeurs et des détaillants d'une part et, d'autre part, de la santé des jeunes qui peuvent fumer en achetant des mini-paquets. Le Parti réformiste n'a aucun mal à prendre le parti de la santé de nos jeunes.

Au lieu d'appuyer la motion du Bloc, qui va dans le sens des affirmations de l'industrie du tabac, nous nous rallions au point de vue de la Société canadienne du cancer et du Committee for Action on Smoking and Health. Nous souhaitons mettre un terme le plus tôt possible à la vente des petits paquets aux jeunes.

Si l'industrie du tabac prétend que les petits paquets sont destinés aux adultes, nous pouvons leur proposer autre chose: grouper ces paquets par deux, les entourer de cellophane ou d'autre chose et ne les vendre qu'aux adultes, ce que la loi exige de toute manière, et il n'y aura plus de mini-paquets. La solution paraît si simple que les fabricants n'ont pas à essuyer des pertes aussi considérables. Qu'ils les vendent par deux et le tour est joué. C'est très simple et d'un élémentaire bon sens.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion de M. Loubier. Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est rejetée.)

L'hon. Fernand Robichaud (au nom du ministre du Revenu national) propose: Que le projet de loi, tel que modifié, soit agréé.

(La motion est adoptée.)

(1915)

[Traduction]

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. La présidence aurait-elle l'obligeance de demander quand le projet de loi sera lu pour la troisième fois?

Le vice-président: Je remercie le whip adjoint. Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois? À la prochaine séance de la Chambre?

Des voix: D'accord.

* * *

LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS TERRITORIALES DES PREMIÈRES NATIONS
DU YUKON

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 juin, de la motion: Que le projet de loi C-33, Loi approuvant, mettant en vigueur et déclarant valides les accords sur les revendications territoriales conclus entre Sa majesté la Reine du Chef du Canada, le gouvernement du territoire du Yukon et certaines premières nations du Yukon, permettant d'approuver, de mettre en vigueur et de déclarer valides les accords ainsi conclus après l'entrée en vigueur de la présente loi et modifiant d'autres lois en conséquence, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le vice-président: Le député de Crowfoot dispose encore de cinq minutes.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je serai le plus bref possible. Je voudrais soulever trois points pendant le temps qu'il me reste.

L'objectif que vise le projet de loi est le bon et nous l'appuyons. Tous les Canadiens sans exception veulent que les peuples autochtones soient autonomes et se gouvernent eux-mêmes. Cependant, nous croyons que le projet de loi ne nous permettra pas d'atteindre cet objectif.

Je voudrais donc dire quelques mots sur trois éléments du projet de loi. Le premier a trait au pouvoir qui sera conféré aux nouvelles collectivités autochtones de créer un code de citoyenneté. Une question à laquelle on n'a pas répondu pendant le débat a trait au pouvoir de créer un code de citoyenneté. Si elles ont le pouvoir d'accorder la citoyenneté, n'ont-elles pas aussi celui de la retirer? Comment cela fonctionnera-t-il? Si elles ont le pouvoir de déterminer qui est un citoyen de leur nouvelle nation, n'ont-elles pas aussi celui de retirer la citoyenneté? Si elles le font, comment procéderont-elles et quels genres de problèmes cela entraînera-t-il?


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Il faut examiner le système de gouvernement qui sera mis sur pied et en quoi il consistera. On ne dit pas dans ce projet de loi s'il y aura une procédure d'appel à laquelle les gens pourraient recourir s'ils sont en désaccord avec le décision de leurs dirigeants. Cette question devrait être précisée dans le projet de loi pour que les députés et les Canadiens qui appuient cette mesure législative soient contents que l'on accorde à ces gens des droits qui correspondent à ceux dont nous jouissons en tant que citoyens canadiens.

Le deuxième aspect a été abordé à maintes reprises. Si l'on veut que ce projet de loi soit accepté et acceptable, il doit signifier la fin de la dépendance des peuples autochtones à l'égard du gouvernement du Canada et des contribuables canadiens. Tout semble indiquer dans cet accord que ce n'est pas demain la veille. Autrement dit, bien au contraire, il est on ne peut plus clair que ces nouvelles nations autochtones pourront continuer de compter sur les largesses du gouvernement fédéral et que cette dépendance ne va pas cesser.

Enfin, je tiens à toucher un mot de l'égalité au chapitre de la citoyenneté. Il va sans dire que les membres de ces nouvelles nations, les nations autochtones, resteront citoyens canadiens. Avec ce projet de loi, on a institué des droits particuliers et des privilèges fondés sur la race et l'origine ethnique. Alors que le reste du monde, y compris l'Afrique du Sud, supprime les barrières entre les races et les groupes ethniques, on en érige au Canada. Nous avons vu le même genre de problème surgir avec l'Accord constitutionnel du lac Meech et l'Accord de Charlottetown et nous le voyons à nouveau surgir dans cet accord-cadre.

(1920)

On accorde des droits particuliers et des privilèges à certaines personnes en fonction de leur race et de leur origine ethnique. Ces droits et ces privilèges sont à la charge des contribuables canadiens, même si ceux-ci ne le savent pas, étant donné la vitesse avec laquelle ce projet de loi a été présenté, débattu et-j'imagine facilement-franchira toutes les étapes de lecture.

Cette formule de droits particuliers ne peut pas avoir de succès dans une société multiculturelle comme le Canada. Nous devons nous assurer que tous les Canadiens sont égaux devant la loi, sans égard à leur race, leur langue, leur culture ou leur religion. Ce projet de loi viole ce principe, ce qui constitue peut-être le plus grand défaut de l'accord avec les premières nations du Yukon. Il accorde des droits spéciaux fondés sur la race et l'origine ethnique et détruit le principe de l'égalité des citoyens du Canada.

M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, j'estime qu'il est difficile de parler du projet de loi C-33 sans faire au moins quelque peu référence au projet de loi C-34, puisque ces deux projets de loi ont été déposés simultanément et seront examinés ensemble en comité.

En général, mes préoccupations à l'égard de la partie des deux projets de loi qui concerne le règlement des revendications territoriales sont les mêmes que celles que j'avais au sujet du projet de loi C-16, l'entente sur les revendications territoriales dans la vallée du Mackenzie. Pour parler simplement, le processus que le gouvernement a choisi pour régler ces revendications territoriales est des plus contestables.

Étant donné l'importance de ces mesures législatives, de leur caractère sans précédent, de leur ouverture, de leurs conséquences pour les droits constitutionnels fondamentaux de tous les Canadiens, et de la rapidité vertigineuse avec laquelle le gouvernement cherche à les faire adopter, nous assistons ici à rien de moins qu'un abus du processus parlementaire et une invitation dangereuse à la catastrophe juridique et sociale.

Une grande part de la confusion que je ressens et exprime ici témoigne du temps insuffisant qu'on nous a accordé pour examiner ces documents législatifs énormes et extrêmement compliqués. Il y a beaucoup de choses dans ces documents que nous pourrions approuver. Cependant, comme nous pouvons seulement examiner le projet de loi proprement dit, et non l'entente, comme cela a été le cas pour le projet de loi C-16, il est difficile, voire impossible pour notre parti et pour d'autres groupes d'intérêts de s'acquitter de leur responsabilité et de leur droit de commenter, de critiquer ou d'améliorer cette mesure législative.

Étant donné ces préoccupations, je dois demander: pourquoi le gouvernement est-il si pressé de faire adopter ces projets de loi? Le processus dure depuis 23 ans. Pourquoi veut-il que le Parlement les adopte sans examen approprié? Serait-ce parce que, si on avait suffisamment de temps pour les analyser et les examiner, ils susciteraient l'opposition de la population? Serait-ce parce que, l'appui en faveur de ces projets de loi n'étant pas écrasant, le gouvernement doit les faire adopter précipitamment, sans que la population en soit au courant ou puisse les examiner?

Après 23 ans de négociations, pourquoi nous demande-t-on maintenant, alors que seulement quatre accords définitifs ont été conclus, de renoncer à notre responsabilité, en tant que parti d'opposition, d'examiner les dix autres accords définitifs? Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas achevé le processus de négociation au lieu de nous demander d'améliorer et d'adopter des accords qui n'existent pas encore? Cette façon de procéder a justement provoqué l'échec de l'Accord de Charlottetown.

La disposition relative aux mesures d'indemnisation me préoccupe également. Quand j'ai demandé aux fonctionnaires, à la séance d'information, sur quoi portait l'indemnisation, on m'a répondu qu'il ne s'agissait pas vraiment d'une indemnisation. Il s'agissait peut-être d'un mauvais choix de mot. J'ai obtenu la même réponse à la même question au sujet du projet de loi C-16.

J'ai l'impression qu'il existe un désaccord fondamental entre les peuples autochtones et le gouvernement du Canada sur les points de départ et d'arrivée de l'exercice. Sommes-nous engagés dans un processus qui vise à acheter ou à louer des terres du Canada des peuples autochtones? La Couronne détient-elle, de fait, un titre de propriété sur les terres du Canada, l'indemnisation versée servant uniquement à des fins de développement économique? La réponse à cette question est essentielle à l'avenir des accords sur les revendications territoriales au sud du 60e parallèle.


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(1925)

La constitutionnalisation de ces accords, en tant que traités modernes, devrait préoccuper tous les Canadiens. Les juristes semblent différer d'opinion à cet égard, mais il se peut que les droits conférés par ces accords ne puissent être modifiés que par le truchement de négociations constitutionnelles.

Le Parlement n'aurait donc pas le pouvoir de modifier ces droits dans l'avenir et les obligations que ces accords imposeraient aux contribuables canadiens auraient préséance sur l'obligation de financer, pour tous les Canadiens, les soins de santé, la sécurité de la vieillesse et les autres programmes de sécurité sociale créés par de simples lois du Parlement. Aussi, je crois que ces dispositions sont une erreur tragique puisqu'elles figeront pour toujours la politique gouvernementale, peu importe les conditions financières qui règneront au Canada dans l'avenir.

La création de 16 gouvernements pour 15 territoires distincts, chacun ayant ses propres lois et règlements et ses organismes bureaucratiques, va engendrer un cauchemar bureaucratique pour quiconque voudra faire des affaires au Yukon, sans parler du coût de toutes les nouvelles institutions bureaucratiques et gouvernementales.

En terminant, mon impression de cet accord sur les revendications territoriales est la même que celle que j'ai exprimée dans le débat sur le projet de loi C-16. Je crois, et la Cour suprême est de cet avis, que la Couronne détient un titre de propriété à l'égard de toutes les terres du Canada, à l'exclusion des terres qui sont des propriétés privées.

J'appuie toutefois les dispositions relatives aux terres cédées et la disposition visant à assurer l'autonomie économique par des paiements en espèces et par le partage des ressources. Je reconnais également aux peuples autochtones le droit d'utiliser les ressources de leur territoire traditionnel à des fins de subsistance.

Je ne suis pas en faveur de cette dépendance sans fin des autochtones. J'estime que, maintenant qu'ils se sont vu accorder ces avantages, la responsabilité des contribuables doit cesser et qu'ils doivent redevenir des Canadiens fiers et autonomes, jouissant des mêmes avantages économiques et sociaux que tous les autres Canadiens. Ils n'ont plus à être ces gens désillusionnés, découragés et dépendants, coincés dans une réserve qui leur a été imposée par le gouvernement fédéral dans un geste paternaliste.

Le président suppléant: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant: Convoquez les députés.

Conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le whip adjoint du gouvernement m'a demandé de reporter le vote à demain, 18 h 30.

En conséquence, conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à demain, 18 h 30. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

(1930)

LOI SUR LE RÈGLEMENT DE LA REVENDICATION DES DÉNÉS ET MÉTIS DU SAHTU

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-16, Loi approuvant, mettant en vigueur et déclarant valide l'entente conclue entre Sa Majesté la Reine du chef du Canada et les Dénés de Colville Lake, Déline, Fort Good Hope et Fort Norman, ainsi que les Métis de Fort Good Hope, Fort Norman et Norman Wells, représentés par le conseil tribal du Sahtu, et modifiant une autre loi.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose que le projet de loi soit agréé.

(La motion est adoptée.)

M. Irwin propose que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, c'est avec des sentiments partagés que je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-16. Ce projet de loi renferme sûrement des points positifs. Les négociations qui visaient à reconnaître aux autochtones le droit à l'autonomie gouvernementale, par exemple, ont mis beaucoup de temps à aboutir. Même si le Parti réformiste n'appuie pas le concept du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, il appuie l'idée de ne pas obliger les parties à participer aux négociations sur l'autonomie gouvernementale. À ma connaissance, il s'agit là d'un accord librement conclu, et c'est un aspect que nous approuvons.

Notre caucus est également heureux de constater que cet accord a été présenté au Parlement sous forme de projet de loi pour que nous puissions, au moins, avoir la possibilité d'en discuter devant les Canadiens et publiquement.


5255

La présentation de ce projet de loi crée un précédent et les députés qui siègent de ce côté-ci de la Chambre s'attendent dorénavant à ce que tous les accords qui auront fait l'objet de négociations soient aussi soumis à l'examen du Parlement. Nous regrettons seulement que le dernier projet de loi, celui qui approuvait l'accord sur le Nunavut, ait été examiné aussi superficiellement par la Chambre.

Je me contenterai donc de dire que les accords permettent aux autochtones de faire un pas de plus vers l'autonomie et que ce sont de bons accords. En théorie, le règlement des revendications territoriales dont nous parlons ce soir pourrait constituer une réconciliation historique entre les Dénés et les Métis du Sahtu et le gouvernement fédéral. Il présente toutes les caractéristiques d'un bon accord.

De fait, le Parti réformiste demande depuis longtemps que l'on règle les revendications territoriales en suspens. Toutefois, étant donné que c'est la première entente du genre à être soumise à ce Parlement et au Parti réformiste du Canada, on doit l'étudier plus attentivement qu'on ne le ferait peut-être autrement car elle crée encore un précédent que d'autres groupes citeront sans aucun doute un jour.

Les réformistes doivent s'efforcer d'établir des principes qui guideront les législateurs dans l'étude de cette entente et des autres à venir car, malgré ses nombreux bons points, elle révèle certaines faiblesses tant dans le procédé de négociation que dans le projet de loi lui-même et il faudra corriger ces lacunes avant qu'elle ne devienne loi.

Malheureusement, les médias et notre élite intellectuelle n'ont pas rendu service au pays en faisant pression sur le gouvernement pour qu'il s'engage dans de telles ententes fondamentales sans tenir compte de menus détails comme le coût, le processus politique, la définition de l'autonomie gouvernementale et les désirs des Canadiens non autochtones. On a laissé au Parti réformiste du Canada la tâche de poser les questions les plus épineuses sur le sujet et nous sommes prêts à le faire.

Les réformistes ont le sentiment qu'on a érigé en ce pays des obstacles à la liberté de pensée sur un certain nombre de questions comme celle-ci. Les forces politiques qui ont mené le gouvernement au cours des 15 ou 20 dernières années ont toujours eu du mal à distinguer la raison et la critique raisonnable de la pensée radicale.

Aujourd'hui, nos universitaires et nos médias interprètent la simple remise en question de certains points comme une tendance subversive dangereuse. C'est là un bien triste indice de l'état de la vie intellectuelle de ce pays. Celui qui s'interroge sur la politique à l'égard des premières nations est vite mis au ban et traité de raciste et de bigot par les médias.

La notion de rectitude politique peut se retrouver dans n'importe quel pays et se transformer en contrainte oppressive et vraiment dangereuse pour la politique publique.

Dans son oeuvre l'Archipel du Goulag, Alexandre Soljenitsyne raconte une histoire intéressante où un grand nombre de personnes s'étaient réunies pour écouter le discours d'un haut fonctionnaire. À l'époque, c'était la coutume d'applaudir en battant des mains au-dessus de sa tête après un discours politique.

(1935)

Après le discours, un tonnerre d'applaudissements a monté de la foule. Personne n'osait cependant arrêter d'applaudir, ni même ralentir, parce que des agents secrets les surveillaient, et que celui qui cessait d'applaudir le premier pouvait être considéré comme déloyal. La salle était bondée, et il faisait chaud. Tout le monde était debout. Il n'y avait pas de chaises, et les applaudissements se poursuivaient sans relâche.

Finalement, après quelques minutes, un vieil homme s'est évanoui, puis un brave homme, debout sur la tribune, s'est lassé de cette absurdité et a brusquement cessé d'applaudir pour s'asseoir. Évidemment, le silence s'est fait immédiatement dans le reste de la salle.

Cet exemple un peu comique cesse de l'être quand on apprend que les communistes ont plus tard supprimé l'homme qui avait cessé d'applaudir le premier sur la tribune.

Un phénomène semblable se produit de nos jours, dans notre pays, bien que de façon très atténuée. Les dirigeants du pays, les intellectuels et des groupes d'intérêts particuliers ont tous tenu le même discours. Ce discours maintes fois répété a été repris par les médias. Ensuite, les politiciens, prêts à faire à peu près n'importe quoi pour remporter la victoire, ont commencé à reprendre ces idées dans leurs discours, jusqu'à ce qu'ils en arrivent à applaudir tous à l'unisson.

On ne tient plus compte du fait qu'une politique particulière ne soit pas vraiment dans l'intérêt du Canada à long terme. Tout le monde applaudit. Ce serait déloyal de cesser d'applaudir, d'une façon ou d'une autre. Le premier qui le ferait risquerait sa carrière, son argent, son pouvoir, son prestige, son honneur, sa chaire ou que sais-je encore.

Que faut-il donc faire pour remédier à cette situation? Il s'agit que quelqu'un ait assez de courage au Canada pour dire qu'il en a assez de cette folie et arrêter d'applaudir.

Je suis heureux de dire qu'il y a quelqu'un sur la scène nationale à l'heure actuelle, à savoir le Parti réformiste du Canada, qui a assez de cran pour mettre un terme à ces applaudissements idiots, afin que les Canadiens puissent enfin entendre ce qui est dans l'intérêt public.

Tout comme dans l'histoire de Soljenitsyne où la foule est devenue silencieuse lorsque quelqu'un a osé arrêter d'applaudir, peut-être que maintenant, pour la première fois, un débat intelligent et rationnel pourrait avoir lieu sur ces questions soi-disant délicates.

Même si tout le monde avait peur de remettre en question la politique gouvernementale sur ces questions politiquement correctes, sitôt que quelqu'un a eu le courage de dire à la nation qu'il n'était plus prêt à accepter une politique qui n'était pas dans l'intérêt public et dont les gens ne voulaient pas en fait, on est enfin arrivé au coeur de ces questions importantes qui n'avaient jamais été discutées au Parlement. Je pense que notre parti a rendu un grand service au Canada en prenant des mesures pour mettre un terme à cette domination des intellectuels.


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La première question qu'on doit se poser et à laquelle il faut répondre au sujet du projet de loi C-16, c'est celle de savoir s'il est équitable. Les racines de cette question remontent à nos ancêtres qui ont négocié des traités avec les diverses bandes indiennes au cours du siècle dernier. Ils ont procédé de façon fragmentée, différentes bandes négociant des ententes différentes. Aujourd'hui le gouvernement fait exactement la même chose en semant, de nouveau, des germes de division et de jalousie.

Le problème a récemment été abordé par le chef national de l'Assemblée des premières nations, Ovide Mercredi, lorsqu'il a déclaré:

Toutes les premières nations du Canada qui ont conclu un traité doivent profiter de la même façon des promesses libérales. Le gouvernement ne peut décider quelle région ou quelle première nation pourra aller de l'avant en ce qui concerne les traités, l'autonomie gouvernementale ou l'éducation.
Il y a quelques semaines, le Star Phoenix a cité M. Mercredi qui aurait dit:

Les droits inhérents de notre peuple ne constituent pas un projet pilote. Il ne s'agit pas de les appliquer dans une province ou une région comme un modèle que toutes les premières nations pourraient copier [. . .]les chefs de tout le pays doivent accepter l'autonomie gouvernementale comme une politique nationale.
Les non-autochtones doivent être équitables à l'égard de tous les autochtones du pays, mais si le gouvernement ne peut être aussi généreux à l'égard de la National Sto:lo, par exemple, dans ma circonscription, que vis-à-vis les Dénés et les Métis du Sahtu, eh bien, qu'est-ce qui empêchera des groupes de retourner à la table des négociations dans 20 ans et de dire qu'ils ont encore un grief historique, qu'ils ont été bernés dans le cadre des négociations en fonction de ce que les Dénés et les Métis du Sahtu ont obtenu en 1994 et qu'ils veulent maintenant un accord équitable.

Comment pouvons-nous savoir que le projet de loi C-16 est juste? Est-ce là une norme nationale, un point de référence en fonction duquel nous jugeons tous les autres accords?

Si on considère tous ces accords, et on en a mentionné plusieurs autres ici ce soir, et qu'on en calcule le coût total, il convient de poser aux Canadiens une question du genre de celle-ci: Êtes-vous prêts à payer un tel prix pour régler les revendications territoriales et établir l'autonomie gouvernementale?

Ce projet de loi devrait être mis en attente, comme l'a dit plus tôt le député d'Athabasca, tant qu'il n'y a pas eu de négociations nationales et que les Canadiens n'ont pas été consultés en bonne et due forme. Pourquoi tant de précipitation? C'est une erreur de vouloir faire les choses si vite. Nous allons devoir renégocier la plupart de ces accords, négociations qui seront loin d'être terminées le siècle prochain. Les normes auront alors complètement changé. Ce genre de négociations est irresponsable, le gouvernement ouvre la porte à des affrontements incessants au cours des décennies à venir, concernant l'autonomie gouvernementale et les revendications territoriales

(1940)

Le deuxième problème découle logiquement du premier; il s'agit du coût exorbitant de cet accord qui va profiter à 1 755 personnes. Chaque adulte recevra 285 kilomètres carrés de terre. Chaque membre recevra personnellement, en fief simple, 42 kilomètres carrés. Je dis bien 42 kilomètres carrés chacun.

Le territoire de la province de l'Ontario, par exemple, appartient à tous les Canadiens, mais en vertu de l'accord du Sahtu, 74 000 kilomètres carrés appartiendront à des autochtones qui contrôleront un territoire quatre fois plus grand.

Les Canadiens se rendent-ils compte de l'importance de ce règlement? Il porte sur 280 000 kilomètres carrés de sol canadien, soit un tiers de la superficie de ma propre province, la Colombie-Britannique, qui à tout jamais seront soustraits au domaine public. Si on inclut les trois derniers accords, y compris ceux dont j'ai parlé plus tôt, il n'y aura bientôt presque plus de terres domaniales au nord du 60e parallèle.

Il n'y a rien dans la jurisprudence qui permette de dire que titre aborigène équivale à propriété. En fait, les tribunaux ont toujours rejeté cette idée de façon catégorique. D'où cela nous vient-il alors? Cela vient du Parti libéral du Canada, le parti qui depuis 20 ans nourrit des groupes d'intérêts et satisfait à tous leurs besoins. Les gouvernements libéraux donnent toujours la première place à leurs enfants politiques et la deuxième, je pense, à la population du Canada. Ce dernier cadeau est un présent politique qui a été emballé dans l'antichambre du Parti libéral.

Il y a plus. Cette entente a également un volet en espèces. Cent trente millions de dollars seront versés à 1 700 personnes sur une période de 15 ans, ce qui fait environ 100 000 dollars par personne, plus un pourcentage des redevances, plus des droits de chasse et de pêche, plus une nouvelle bureaucratie fort complexe payée par les contribuables, plus la continuation des avantages déjà offerts aux autochtones ailleurs au Canada.

Vous et moi, monsieur le Président, nous pourrions penser que cela est satisfaisant, mais pas du tout. Les Canadiens qui pensent que cette entente définit enfin ce que signifie l'autonomie seront fort déçus. Cette entente ne porte pas sur l'autonomie. Elle porte seulement sur le règlement de revendications territoriales. L'autonomie devra encore être négociée, nul doute qu'elle donnera encore plus d'avantages aux Sahtu, aux Dénés et aux Métis. Ce n'est pas la fin du processus, c'est juste le début.

Je voudrais maintenant parler d'un autre problème à propos de cette entente. Beaucoup d'autochtones du Canada s'inquiètent de cette ruée vers l'autonomie et le règlement des revendications territoriales. Lors du débat sur l'accord de Charlottetown, par exemple, les groupes de femmes autochtones prônaient le rejet de l'accord parce qu'elles n'avaient pas participé aux négociations et qu'elles ne se sentaient pas prêtes à approuver un accord qui pouvait leur enlever leur protection, leurs privilèges et leurs libertés.


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Dans ma propre circonscription de Fraser Valley-Est, de nombreux autochtones de souche qui tentent de composer avec ces accords négociés en secret, notamment la stratégie sur la pêche autochtone ou les structures des gouvernements locaux, se sentent frustrées face aux décisions et à un processus qui laissent énormément de pouvoir à un petit groupe au sein du gouvernement ou de ces structures gouvernementales.

De toute évidence, les demandes visant un leadership honnête, une responsabilité financière et des principes démocratiques transcendent les frontières culturelles. Les Canadiens de tous les milieux veulent un gouvernement et un processus ouverts.

Deux leaders autochtones de ma ville ont communiqué avec moi à ce sujet. Il existe un vingtaine de bandes dans ma circonscription. Certaines d'entre elles se demandent si l'heure de l'autonomie gouvernementale est vraiment venue. Permettez-moi de lire une lettre que j'ai reçue d'un leader autochtone qui est actuellement très actif. Il déclare ce qui suit: «Dans ma région, les bandes ne s'entendent pas sur la manière dont les terres devraient être détenues ni sur la façon d'élaborer des méthodes de contrôle. Le conseil des Indiens du secteur Chilliwack et la Nation sto: lo ne semblent pas pouvoir s'entendre sur de simples questions. En ce qui concerne le financement, c'est le désordre total. Il existe de nombreux détournements de fonds.»

Il continue en citant des cas de mauvaise gestion des fonds gouvernementaux, y compris de l'argent du fédéral qui était destiné à créer de nouveaux emplois qui a plutôt servi à des augmentations salariales. Ce problème a été signalé au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Si les bandes manifestent ce comportement aujourd'hui, il ne faut pas s'étonner qu'elles se demandent si le processus, qui se déroule à huis clos, est vraiment celui qui leur donnera le type de direction et de contrôle qu'elles veulent désormais. Il faut examiner de plus près la gestion des bandes avant de confier à ces organismes les pouvoirs législatifs qu'exercent actuellement les provinces. La majorité des autochtones profiteront-ils des décisions prises par leurs propres gouvernements?

(1945)

Permettez-moi de vous donner un autre exemple qui m'a été rapporté, une autre expérience personnelle. La stratégie concernant la pêche pratiquée par les autochtones est en fait un accord conférant aux autochtones un privilège sans précédent, soit le droit de pêcher le saumon du Fraser, en Colombie-Britannique, et de le vendre. La gestion de cette ressource est entre les mains des autochtones, mais des dirigeants autochtones m'ont fait part d'allégations fort surprenantes, notamment le fait que les dossiers comptables n'ont pas été remis à temps, soit à la fin du mois de mai, comme l'exige l'accord original, ce qui laisse supposer que les fonds n'ont pas été utilisés et attribués de façon appropriée.

Comme d'habitude, le ministère est au courant de la situation, mais il ne fait rien. Un chef autochtone m'a même écrit pour me dire: «Il est décevant de voir que notre gouvernement autochtone préfère imposer son autorité à ses membres plutôt que de se laisser guider par eux.» Ce même chef m'a confié directement que sa bande n'était pas prête à accéder à l'autonomie gouvernementale.

Il y a 150 ans, les Canadiens, sous le règne des Britanniques, maugréaient, parce qu'ils voulaient exercer plus d'influence sur leur propre vie. Le gouvernement responsable fut finalement accordé par la Grande-Bretagne, mais après bien des efforts et seulement après que les dirigeants politiques canadiens eurent montré par leurs décisions qu'ils étaient prêts à l'assumer. Budget par budget, décision par décision, crise par crise, les dirigeants de la colonie ont acquis une énorme expérience et fait preuve d'un dévouement tel qu'on en vint à la conclusion qu'on pouvait leur faire confiance pour agir dans l'intérêt public.

Ne devrait-il pas en être de même pour les dirigeants autochtones? N'est-il pas sage de leur demander maintes petites preuves de responsabilité, de bonne administration, de compassion et de loyauté de telle sorte que nous soyons sûrs qu'ils agiront dans l'intérêt des autochtones de tout le Canada? Le pouvoir et l'argent ne suffiront pas à résoudre les problèmes des autochtones de notre pays. En fait, ils risquent de les aggraver.

Beaucoup d'autochtones veulent avoir l'assurance que tout nouvel accord les conduira vers un gouvernement vraiment meilleur, sensible et responsable, car personne n'a le droit inhérent de gouverner. C'est un privilège qu'il faut mériter.

Je tiens à dire quelques mots de cet accord. Le fiasco du lac Meech a soulevé un tollé général au sujet des négociations constitutionnelles au Canada. Plus jamais de négociations à huis clos! Des Canadiens de tous les milieux, excepté ceux qui adhéraient aux vieilles lignes de parti, se sont empressés de formuler de vives dénonciations et le groupe qui s'est senti le plus trahi et ceux qui étaient les plus amers et les plus mécontents n'étaient autres que les autochtones eux-mêmes. Ils ont condamné les négociateurs tout autant que l'accord lui-même.

Les Libéraux ont-ils tiré une leçon des accords du lac Meech et de Charlottetown? Pas la moindre. Maintenant que les Sahtu ont un accord de 125 pages dont chaque mot sera constitutionnalisé, qu'entend-on? Un silence assourdissant. Lorsque 200 administrations municipales canadiennes veulent avoir leur mot à dire dans le processus, elles doivent écrire une lettre. Voici un extrait de leur mémoire: «Les administrations municipales se sont senties exclues d'un processus auquel, jusqu'à maintenant, seuls les chefs autochtones et les gouvernements fédéral et provinciaux ont pris part.»

Même les provinces sont laissées dans le noir. Par exemple, il y a en ce moment des négociations avec les chefs autochtones du Manitoba en vue de démanteler le ministère des Affaires indiennes dans cette province et, selon le Toronto Star, le premier ministre du Manitoba n'aurait «absolument aucun renseignement lui permettant d'élaborer une position provinciale». Où est l'ouverture dans ce processus? Qu'est-il advenu des promesses libérales de franchise envers le public? Je vous cite un passage de la page 87 du fameux livre rouge libéral:


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Les citoyens sont mécontents parce qu'ils ne sont pas consultés, parce que leurs vues ne sont pas prises en compte, parce que les affaires publiques, lorsqu'elles deviennent cruciales, sont traitées à huis clos.
Les libéraux reprochaient aux conservateurs leur manque d'ouverture, mais tout cela n'est que de la politique. Ils ne voient pas la poutre dans leur oeil. Monsieur le Président, pourrions-nous, vous ou moi, assister aux négociations sur le démantèlement du ministère au Manitoba? Ces négociations seront-elles publiques? Pourrions-nous, vous ou moi, nous présenter devant les négociateurs pour exposer notre point de vue? Jamais, n'y pensez même pas.

J'ai posé au ministre quelques questions très importantes sur les négociations au Manitoba. Je lui ai écrit le 5 avril pour lui demander comment je pourrais participer, mais j'ai reçu une réponse où on passait complètement à côté de mes questions, mais où, cependant, on me révélait que le gouvernement avait versé 400 000 $ à l'Assembly of Manitoba Chiefs pour les aider à défendre leur cause devant le peuple canadien.

Ce processus est pire que les négociations du lac Meech. Les réunions sont gardées scrupuleusement secrètes. Les Canadiens ordinaires en sont totalement exclus. Même les médias n'y ont pas accès. Cette mesure législative concernant les autochtones du Sahtu est présentée au Parlement aujourd'hui en tant que fait accompli, sans que la population ait été consultée au préalable. Le gouvernement libéral se servira de sa majorité pour faire adopter à la hâte ce projet de loi à la Chambre, ayant pleinement confiance dans l'éternel silence de la majorité silencieuse.

(1950)

Nous avons vu les autochtones, les médias et les universitaires exploser de colère au sujet de l'Accord du lac Meech, mais, chose bizarre, ils sont tous silencieux aujourd'hui. Qui parle au nom des Canadiens ordinaires qui doivent assumer le coût de cet accord? Ils sont exclus du processus établi après une décennie de luttes constitutionnelles, un processus qui nous a été promis dans le livre rouge, un processus que les libéraux ne respectent pas aujourd'hui.

Cela montre bien que les promesses du livre rouge sont vides de sens, que le processus constitutionnel ne veut absolument rien dire, que les Canadiens et les députés sont traités comme des enfants qui ne peuvent pas manger à la même table que les adultes. Ils doivent rester à l'écart et attendre les miettes que leur jettent les négociateurs. C'est tout à fait inacceptable.

Tous les accords devraient être fondés sur des principes d'égalité et de justice acceptables pour tous les Canadiens. Permettez-moi de les énumérer. Le premier est un processus de négociation transparent à l'échelle nationale.

Le deuxième est un coût raisonnable définitif qui serait acceptable pour les non-autochtones d'un bout à l'autre du pays.

Le troisième est la reconnaissance de la suprématie du Parlement, ce qui veut dire qu'il faut accepter que la Charte s'applique à chaque personne au Canada. Cela me bouleverse énormément lorsque je lis, dans l'édition du 12 mai de la Gazette, que le système de droit pénal du Canada et la Charte ne s'appliqueront pas nécessairement aux peuples autochtones. Selon le ministre de la Justice, cela reste à déterminer. Tous les Canadiens, qu'ils soient autochtones ou non autochtones, doivent être égaux devant la loi.

Le quatrième principe, c'est que le texte de cette entente ne doit pas être inclus dans la Constitution. Ses modalités complexes sont trop difficiles à modifier, et le processus pour le faire n'est pas précisé dans la Constitution. Il faudra que l'usage sur une longue période légitimise ces modalités avant que nous puissions décider de les y inclure, le cas échéant.

Cinquièmement, toute entente doit prévoir la renonciation au titre autochtone. Nous voulons savoir si la signature de n'importe quelle entente mettra un terme aux demandes pouvant être présentées au Canada. Je tiens à ajouter que l'entente visant la région du Sahtu contient une disposition en ce sens, ce dont je me réjouis. Toute entente devrait exiger que les autochtones soient assujettis à une certaine forme d'imposition fédérale. Toute entente devrait réduire la dépendance des autochtones à l'égard du gouvernement, et enfin, aucune entente ne devrait créer de bureaucraties parallèles. La création d'une bureaucratie doit s'accompagner de la dissolution d'une autre.

En résumé, je crains aujourd'hui que le gouvernement n'apporte des changements imprudents et révolutionnaires aux terres, aux institutions et aux pouvoirs publics, sans avoir consulté la population. Il fait cela dans l'intérêt d'un très petit nombre.

Comme je ne veux pas qu'on interprète mal mes propos, je vais répéter mes convictions, si vous me le permettez. Je n'ai rien contre l'autonomie gouvernementale, ni contre une entente avec les Dénés et les Métis du Sahtu, mais ce contre quoi je m'insurge fermement, c'est le processus qui a mené à la conclusion de cette entente. Au nom de tous les Canadiens, je m'oppose aux conditions trop généreuses de l'entente.

Le ministre doit reprendre le processus avec la population et reformuler le projet de loi.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention les propos de mon collègue, particulièrement son introduction et son entrée en matière. Je dois vous avouer que je désire m'exprimer entre autres sur la question de la loyauté. J'ai l'impression d'être déloyal uniquement à l'égard du Parti réformiste ce soir parce que dans les faits je pense que le gouvernement est d'accord avec le projet de loi C-16. Nous avons déjà manifesté notre accord sur le projet de loi comme tel.

Je suis un peu réactionnaire aussi à ce type de discours, même si je le respecte, je ne le partage pas du tout. Je ne pense pas que les membres du Bloc québécois soient catégorisés comme des intellectuels de gauche au Canada et au Québec. Je ne pense pas non plus que nous soyons déloyaux à l'égard de qui que ce soit en disant que nous partageons les vues du projet de loi C-16.

Je vais reprendre quelques exposés de ce que j'ai soulevé déjà en deuxième lecture, assez rapidement cependant, parce qu'on en est à l'étape de l'adoption finale. Je dois vous avouer que lors de la deuxième lecture, j'avais déjà exprimé qu'une des prémices de ce type d'entente-là, des revendications territoriales, est l'importance de faire confiance aux deux parties.


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Je dois vous avouer que du côté des Dénés, des Métis, du côté du conseil tribal du Sahtu, nous sommes tout à fait d'accord pour dire que ces gens étaient représentatifs et ils peuvent s'estimer heureux que nous puissions leur dire que nous avons tout à fait confiance dans leurs négociations et la conclusion de cette négociation-là.

(1955)

Je dois vous dire aussi que l'entente comme telle. . . Sahtu signifie «grand ours» et, naturellement, on fait référence au Lac du grand ours dans les Territoires du Nord-Ouest. C'est un territoire qui est quand même très grand et qui est empreint d'une histoire qui tourne beaucoup autour du pétrole. Et d'ailleurs, on va voir que même l'entente financière sur laquelle nous nous sommes entendus est une entente qui est basée sur les prix du pétrole, particulièrement Norman Wells.

Je vais nommer les cinq localités les plus importantes du territoire. Entre autres, Colville Lake, une collectivité habitée par les Esclaves Dénés. C'est une tribu tout simplement. Ce sont les terres ancestrales et elle a a été fondée en 1962. Coleville Lake est la seule collectivité dans les Territoires du Nord-Ouest où tout est aménagé en bois rond. Je trouve cela important de le mentionner parce que ce sont des traits du paysage et des traits des habitations qui sont visés par l'entente. C'est un village très rustique, très beau et il m'apparaît important de le situer dans le paysage.

Deline, c'est ce qu'on appelle l'ancien Fort Franklin. En 1825, sir John Franklin faisait de Fort Franklin son poste de commandement hivernal et avec la découverte du pétrole à Norman Wells dans les années 1920, Fort Franklin était situé à proximité des voies de transport et devint, naturellement, un grand poste de traite.

Fort Norman, cette localité revêt une grande importance saisonnière pour les Dénés depuis fort longtemps pour, entre autres, leurs pelleteries. Ce sont des endroits de piégeage par excellence du côté de l'économie traditionnelle des Dénés.

Fort Good Hope est le plus ancien poste de traite de la base de la vallée du Mackenzie bien qu'il se trouve à l'intérieur du territoire des Dénés Esclaves du Nord, des Gwitchin Vuntut, qu'on appelle, et des montagnards, les Inuits du delta du Mackenzie avaient l'habitude de s'y rendre régulièrement. Tandis qu'à Normal Wells, je pense que c'est connu, et d'ailleurs bientôt nous aurons le projet de loi C-25, qui va nous permettre de creuser des puits supplémentaires à Norman Wells et aussi d'exploiter les puits actuels par une nouvelle méthode, entre autres, avec de l'eau et à pression qui fait en sorte que le puits peut être exploité dans un environnement beaucoup plus sain.

Normal Wells est important dans la discussion et je vais y revenir tantôt. On constatera que l'entente financière est basée entre autres sur les pétroles de Norman Wells.

L'entente qui est devant nous, qui a été adoptée, signée en 1993 à Fort Norman, la loi va tout simplement la mettre en application. Elle bénéficie effectivement d'une protection constitutionnelle, ce sont des choses qui, pour certains, apparaissent épouvantables, pour nous, elles n'apparaissent pas épouvantables, elles rentrent tout simplement sous l'égide des nouveaux traités, des traités modernes sous l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Une chose qui est bien importante, on l'a soulevée, mon collègue l'a soulevée sur l'espèce de questionnement qu'il a sur la représentativité au niveau de la signature de cette entente-là. Les chiffres que je vais révéler vont nous mettre à l'abri de ce côté-là, je pense. Il y a plus de 90 p. 100 de participation au niveau du vote parce que cette entente a été soumise à un vote et 90 p. 100 des gens sur un territoire de 28 000 kilomètres carrés, 90 p. 100 des participants se sont déplacés pour aller voter.

C'est dire l'importance qu'ils accordaient à cette entente et on ne peut pas mettre en doute, à mon point de vue, la représentativité des gens qui ont signé l'entente parce que non seulement il y avait 90 p. 100 de participation mais 85 p. 100 des Dénés ont dit qu'ils étaient favorables à cette entente-là et 99 p. 100 des Métis ont dit qu'ils étaient favorables à cette entente-là. Alors avec un taux de participation de 90 p. 100, il me semble important de souligner que du côté de la représentativité des signataires, ils étaient tout à fait représentatifs et ils avaient eu l'aval démocratique des gens qu'ils représentaient.

Si on regarde maintenant l'évolution politique de l'entente, c'est une évolution qui transpire aujourd'hui une revendication territoriale, mais elle ne met pas en cause l'autonomie gouvernementale. Effectivement, ce sont deux choses différentes et, d'ailleurs, en annexe de cette entente, on a convenu d'un ensemble de sujets sur lesquels les négociateurs devront se repencher et l'autonomie gouvernementale est dans cette annexe-là.

Alors, pour l'instant, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il s'agit uniquement d'un projet de loi qui vient approuver une entente qui porte sur les revendications territoriales.

Je passe rapidement, parce que j'ai mentionné beaucoup de ces faits lors de la deuxième lecture. Les Dénés et les Métis reçoivent les titres de propriété de 41 437 kilomètres carrés dont 1 813 kilomètres carrés incluent les mines et les minéraux. On voit aussi que c'est tout à fait dans la tradition économique européenne de l'époque, c'est-à-dire que le sous-sol fourmille de métaux précieux, dont, entre autres, l'or noir qui s'y trouve est une richesse très appréciable dans le territoire comme tel.

(2000)

J'en viens à l'indemnité. Effectivement, ce que l'entente prévoit, c'est une indemnité de 75 millions de dollars sur une période de 15 ans.

Cette indemnité est basée sur le montant d'argent tiré du sous-sol à Norman Wells en pétrole. On s'est rendu compte, avec les statistiques, qu'environ 75 millions de dollars étaient retirés du sous-sol annuellement et bénéficiaient à la compagnie Esso et au gouvernement du Canada qui sont partenaires dans les puits de Norman Wells.

Cette entente est basée sur ces 75 millions de dollars. On a simplement reconnu que ça coûte 75 millions de dollars par année, qu'ils ont eu un manque à gagner de 75 millions de dollars par année et on le leur concède sur une période de 15 ans. Ce qu'on regarde aussi, c'est le fameux développement économique. Le développement économique est essentiel, je pense, pour les nations autochtones et particulièrement pour les Dénés et les Métis. C'est non négligeable, ce développement économique, basé sur ces 75 millions de dollars.

Il s'agira pour eux de marier le développement économique et le développement de leurs ressources traditionnelles. D'après ce


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que j'ai vu dans l'entente, ils réussiront sûrement. Du côté du développement économique, c'est un exemple de réussite, d'ailleurs je les en félicite. Je fais aussi une analogie avec ce qui se passe au Québec avec les Cris et les Naskapis. Vous savez que la Convention de la baie James a aussi mis de l'avant des sommes d'argent à être administrées par une société dirigées par les Cris. Je me devais de soulever que ce qui se passe avec les Dénés et les Métis n'est pas un précédent, mais c'est certainement un précédent ce qui s'est passé au Québec dans les années 1980 avec les Cris et les Naskapis.

Dans le contenu de l'entente, il y a des dispositions concernant la faune. On sait que c'est dans leurs traditions, la gestion des animaux sauvages. Ce sont des gens qui, par un réflexe presque inscrit dans leurs gènes, ont un très grand respect pour l'environnement. Donc, pour eux c'est important de préserver, dans l'entente et dans le projet de loi devant nous, cet aspect de la question, c'est-à-dire les droits de chasse, de piégeage, de pêche. Ce sont des choses qui apparaissent dans l'entente et qui, effectivement, viennent apporter le côté culture traditionnelle et territoires de chasse traditionnels des Dénés et des Métis.

Je désire vous mentionner que plusieurs groupes d'intérêt ont été consultés. Il n'y a pas que les Dénés et les Métis qui ont été consultés, mais plusieurs groupes d'intérêt de la région, entre autres la Chambre des mines des Territoires du Nord-Ouest a donné son aval à ce projet de loi, l'Association minière du Canada, l'Association canadienne des producteurs pétroliers, la Wildlife Federation des Territoires du Nord-Ouest, les Pourvoyeurs des Monts Mackenzie et Lynn Graham Trail Association.

En ce qui concerne les pourvoyeurs, c'est un trait intéressant de l'entente, il y a des gens qui exerçaient déjà des activités de piégeage et de chasse à l'intérieur du territoire et qui n'étaient pas nécessairement Dénés ou Métis. Ce qui est intéressant de voir au niveau de l'entente, c'est que ces gens-là pourront continuer d'exercer leur métier. C'est une preuve supplémenaire de la philosophie des autochtones au moment de l'arrivée des Européens. Pour eux, le territoire existe pour être partagé. Les Dénés et les Métis, tout comme les autres nations autochtones, ont toujours accepté de partager leur territoire. Maintenant, ce qui s'est produit, c'est qu'effectivement, les Européens ont énormément soutiré d'argent de ces territoires et les ont cantonnés dans des réserves et des territoires visés.

(2005)

Cette entente-là leur permet, je pense, de sortir partiellement, du moins, du joug de la Loi sur les indiens, parce que dans les faits, on pourra leur permettre un premier pas en direction de leur autonomie financière et c'est une chose sur laquelle on doit s'arrêter quelques minutes.

Cette autonomie financière est importante pour eux, parce que dans les faits, on sait que la Loi sur les indiens maintient l'ensemble des nations autochtones dans une question de tutelle, où tout est décidé pour eux. Et quand on nous mentionne qu'on est en train d'assister à la création d'une nouvelle bureaucratie, on se doit de mettre des bémols sur cette affirmation.

Je pense que le temps est venu, maintenant, pour nous, les gens du Québec et du Canada, de faire en sorte qu'on puisse mettre fin à cette fameuse tutelle et faire en sorte que ces gens-là puissent se prendre en main. Alors, avec l'entente financière qui est devant nous et avec la possibilité qu'ils auront maintenant d'avoir le droit de penser et le droit de préparer des programmes spéciaux pour les régions, le droit, finalement, de se gérer eux-mêmes, je crois que ce n'est pas une bureaucratie nouvelle à laquelle on est en train d'assister.

C'est tout simplement qu'on leur permet de prendre notre pouvoir en main et leur avenir en main. Ce ne seront plus des programmes décidés d'Ottawa pour eux. Ce seront eux qui pourront décider de ces programmes. Et je pense qu'à ce niveau, l'effort est louable du côté des négociateurs, et je vois que les dispositions qui ont été incluses dans l'entente et qui sont, naturellement, liées au projet de loi font en sorte que cette bureaucratie ou cette pseudo-bureaucratie va leur permettre de vraiment diriger leur coin de terre, avec leurs programmes, dans le respect de leur culture et dans le respect d'un nouveau développement économique.

Je me dois, finalement, de les saluer. Ce sont des gens qui accordent beaucoup d'importance à leurs aînés et ce sont souvent des gens qui vont penser pour sept générations à venir. Je suis sûr qu'il y a sept générations avant celle d'aujourd'hui, il y a des gens qui déjà étaient en pleine possession de leur territoire et avec l'arrivée des Européens, la dynamique a été énormément changée et ces gens ont toujours voulu reprendre possession de ce qui leur appartenait en tant que premiers occupants et je pense que la réflexion qui les a guidée, à l'intérieur de la négociation comme telle, me permet de dire qu'effectivement, ils ont pensé en termes de générations futures.

Les négociateurs et les gens du territoire visé sont d'ailleurs venus à mon bureau et m'ont fait mention qu'effectivement, leurs aînés avaient toujours été persévérants dans la cause poursuivie et ils étaient très heureux de voir qu'ils pouvaient avoir l'appui du Bloc québécois et c'est dans cette optique que je suis heureux de continuer de vous dire et de vous annoncer que pour la troisième lecture, le Bloc québécois sera tout à fait d'accord avec le projet de loi C-16.

[Traduction]

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer encore une fois au débat, cette fois-ci, en troisième lecture, sur le projet de loi C-16, qui traite de l'entente sur la revendication territoriale des Dénés et Métis du Sahtu.

Notre parti a bien examiné les conditions et les dispositions du projet de loi C-16 et, malheureusement, cette mesure suscite toujours des préoccupations. Le gouvernement est demeuré sourd à nos appels, tant à la Chambre qu'en comité.

Je voudrais seulement soulever quelques points, en commençant par un point qui est de nature générale, mais qui va au coeur des préoccupations de mon parti au sujet de la politique fédérale sur les revendications territoriales. Cette politique repose sur une fausse hypothèse. En mars 1993, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a publié un document portant sur la politique fédérale concernant le règlement des revendications territoriales des autochtones. On y faisait une observation frappante, à savoir que l'évolution et le développement de la politique fédérale sur les revendications territoriales sont étroitement liés aux décisions des tribunaux.

La première déclaration de principes sur les revendications a été faite en 1973, par la Cour suprême du Canada, dans son


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jugement Calder, qui reconnaît l'existence des titres ancestraux de propriété dans le droit canadien.

(2010)

Un peu plus loin on peut lire: «Le concept des droits autochtones que l'on trouve dans la common law a fait l'objet de la décision que la Cour suprême du Canada a rendue en 1973 dans l'affaire Calder. Six des sept juges de la Cour suprême qui ont entendu l'affaire ont reconnu l'existence du titre aborigène en droit canadien.»

À propos des rédacteurs du ministère, j'estime que ces déclarations ne sont pas conformes à la réalité historique. Dans ce cas, comment peut-on élaborer une politique sur les revendications territoriales à partir de ces interprétations erronées?

L'affaire Calder portait sur une revendication par la nation Nishga du titre aborigène sur la vallée Nass, en Colombie-Britannique. On revendiquait le titre aborigène sans préciser ce qu'on entendait par ces mots. Portée devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, la revendication avait été rejetée. L'affaire a ensuite été portée devant la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, où un tribunal de trois juges a rejeté la revendication du titre de propriété des autochtones.

Finalement, la Cour suprême du Canada, saisie à son tour de l'affaire, a elle aussi rejeté la revendication, trois juges ayant statué qu'un titre de propriété autochtone avait peut-être existé avant les premiers contacts coloniaux, mais que ce titre s'était éteint lorsque ces contacts ont débuté. Trois autres juges ont pris l'affaire en délibéré et le septième magistrat a rejeté l'appel pour des raisons de procédure.

En définitive, l'affaire Calder n'a pas confirmé l'existence d'un titre de propriété autochtone au Canada.

Même si la décision rendue dans cette affaire avait confirmé l'existence d'un titre de propriété, il se serait agi de beaucoup moins que d'un titre en fief simple. On n'a jamais fait valoir, dans cette affaire, que le titre de propriété autochtone était l'équivalent d'un titre de propriété en fief simple, à la différence du transfert proposé dans le projet de loi C-16. Ce projet de loi accorde la propriété en fief simple sur 41 000 kilomètres carrés, soit à peu près les trois quarts de la superficie de la Nouvelle-Écosse, et cela sans appui judiciaire.

Dans les quatre ententes conclues jusqu'ici, les territoires situés au nord du 60e parallèle, autrement dit ce que les Canadiens appellent communément les Territoires du Nord-Ouest et le Territoire du Yukon, la propriété en fief simple couvre une superficie de 505 000 kilomètres carrés, soit environ la moitié de celle de l'Ontario. Toute entente sur le règlement de revendications territoriales qui retire du domaine public de vastes zones de terres devrait terriblement nous inquiéter.

L'autre réserve importante de mon parti à l'égard du projet de loi C-16 concerne la clause d'inscription dans la Constitution. Le projet de loi donne un caractère constitutionnel à l'accord. Si notre interprétation est juste, cela signifie que l'accord ne peut être modifié autrement que par la procédure de modification de la Constitution, qui a été convenue en 1982. Or, si l'on examine la procédure de modification convenue en 1982, elle ne se prête guère à ce genre d'ententes sur le règlement des revendications territoriales. Comme la Chambre le sait, il existe six formules de modification et aucune d'elles ne semble s'appliquer à des cas comme ceux créés par des mesures législatives comme le projet de loi C-16.

Je m'interroge sur la validité de l'article 3.1.26, qui dit que des modifications peuvent être faites. En effet, si une entente peut être aussi facilement modifiée par un décret du gouvernement fédéral et l'approbation du Conseil tribal du Sahtu, si elle peut être aussi facilement modifiée de cette façon, comment pouvons-nous dire que cette entente est inscrite dans la Constitution? Ces arguments sont tombés dans l'oreille de sourds au comité, mais je les répète.

Pareillement, nous réitérons notre réserve à l'égard du fait que des dispositions aussi détaillées et sans précédent que celles qui figurent dans ce document soient coulées dans le béton. Des centaines de pages de clauses et de dispositions sont coulées dans le béton, alors que seul le temps dira si elles sont applicables.

(2015)

J'espère que, dorénavant, des accords de ce genre, qui doivent être inscrits dans la Constitution, se limiteront aux revendications territoriales. C'est d'ailleurs sur cela que porte l'article 35 de la Constitution. Peut-être faudrait-il rattacher à ces dispositions coulées dans le béton une clause prévoyant un examen de l'accord après dix ans.

Le projet de loi C-16 confère un pouvoir législatif, ce qui soulève la question de la Charte des droits. Les lois qui seront adoptées seront-elles assujetties à la Charte canadienne des droits et libertés? Je sais que le ministre a dit qu'elles le seraient, mais, avec tout le respect que je lui dois, je pense que cela ne peut se faire par décret ou par ordonnance.

Si je comprends bien, le seul moyen d'assujettir à la Charte les lois qui seront adoptées en vertu des ententes d'autonomie gouvernementale sera de modifier la Charte pour veiller à ce qu'il en soit ainsi. C'est ce qui avait été proposé dans l'Accord de Charlottetown. C'était et c'est encore l'unique moyen.

Faute d'une disposition précise dans la Charte des droits, il est fort improbable que la Charte s'applique aux mesures législatives adoptées par les gouvernements autochtones autonomes.

Pour terminer, je suis franchement abasourdi de constater le nombre de couches bureaucratiques que crée ce projet de loi, à partir de l'Office des ressources renouvelables jusqu'à un office de planification environnementale, en passant par des conseils d'administration, de planification et de régie des eaux. Tout y est. Je suppose que ce sont actuellement le ministère des Affaires indiennes ou les gouvernements des territoires qui assument ces fonctions.

En fin de compte, il s'agit de savoir si le projet de loi confère aux peuples du Sahtu l'autonomie et l'indépendance qu'ils recherchent. Je crains, comme pour l'accord du Yukon, que ce critère déterminant n'échoue à long terme et peut-être même à moyen terme. Malgré les meilleures intentions, les solutions bureaucratiques ont détourné de leur but les volontés des deux parties à l'entente, les peuples du Sahtu et le gouvernement fédéral.

Certains désincitatifs à l'action, eux aussi conçus par les bureaucrates, font partie intégrante du projet de loi. Il existe un précédent, la Loi sur les indiens, qui renferme, elle aussi, plu-

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sieurs désincitatifs à l'action. Je suis convaincu qu'il est possible d'en arriver à une conception plus simple.

J'ai eu d'excellents échanges avec les peuples du Sahtu; j'espère qu'ils ont le même sentiment. Je leur souhaite les meilleurs résultats possibles dans leur aventure et face au défi qu'ils doivent relever. On peut vaincre de grandes adversités avec l'esprit et l'attitude appropriés. Je connais l'importance de Norman Wells pour les gens de cette région et j'ai parlé à de nombreux intervenants. Cette entreprise survivra; c'est une oeuvre nouvelle qui constitue tout un défi. J'espère sincèrement que les faits démentiront mes principales craintes.

M. David Chatters (Athabasca): Monsieur le Président, j'ai parlé assez longuement de ce projet de loi pendant le débat en deuxième lecture et aussi en comité. J'ai seulement quelques brèves observations à faire avant de clore le débat.

Je pense que c'est une autre étape dans le processus de décernement de cadeaux aux Territoires du Nord-Ouest et au Territoire du Yukon. Retirer tout ce territoire à l'État, et donc le soustraire à l'utilisation par l'ensemble des Canadiens, est un dangereux précédent. Non seulement c'est un précédent que de donner tout ce territoire sans y être légalement obligé, mais c'est aussi un autre précédent dont j'ai déjà parlé, celui de revenir sur un traité encore en vigueur qui prévoyait l'extinction des revendications territoriales et des droits des autochtones dans cette région.

(2020)

Nous sommes actuellement en train de renégocier, de rouvrir cet accord pour parvenir à quelque chose de plus vaste, de plus généreux et couvrant un territoire beaucoup plus grand. Je pense que c'est un dangereux précédent qui augure mal pour l'avenir lorsque nous devrons négocier les traités un à onze dans les mêmes circonstances que celui-ci.

Je m'objecte à la générosité de cet accord surtout parce qu'il ne met pas fin à la responsabilité du contribuable canadien vis-à vis de ces autochtones. Les revenus provenant des ressources naturelles, du gisement pétrolier Norman Wells entre autres, qui seront répartis à raison de 100 000 $ par personne, devraient suffire à assurer l'autonomie et l'autodétermination de ces gens et leur permettre un développement économique semblable au nôtre qui leur apportera tout ce dont les Canadiens jouissent et qu'ils tiennent pour acquis.

Après avoir remis leur destin entre les mains de ces autochtones, nous devrions mettre fin aux responsabilités financières des contribuables canadiens à leur égard. Le Bloc s'est prononcé en faveur de ce projet de loi, aux étapes de la deuxième et de la troisième lectures. Il est facile de comprendre la position des députés du Bloc sur ce projet de loi.

Il va très loin dans la reconnaissance de la souveraineté d'un groupe ethnique donné et apporte donc de l'eau à leur moulin. Les membres du Bloc n'ont certes pas à s'inquiéter du coût financier ou de la responsabilité financière à l'égard des générations actuelles et à venir de Canadiens, car manifestement, ils ne veulent pas faire partie du Canada et être soumis à cette obligation pour les générations futures.

Il est vrai qu'on a tiré beaucoup de pétrole et d'argent du gisement pétrolifère de Norman Wells, mais j'y ai travaillé et il est extrêmement coûteux dans cette région d'extraire cette ressource et de la mettre en valeur.

Lorsqu'il est question de ce type de choses, il faut tenir compte du coût non seulement de la mise en valeur du gisement pétrolifère, mais également de la technologie que cela exige. Parlons donc de la valeur nette des ressources qu'on a tirées de ce gisement pétrolifère.

Penchons-nous en même temps sur les énormes montants de deniers publics qui ont été redistribués à la région sous la forme de dépenses sociales pour couvrir toutes sortes de choses, allant du logement au développement économique en passant par les écoles et le reste. Je pense qu'une bonne partie de cette ressource a été rendue à cette région et continue de l'être.

L'autre chose dont je voudrais parler brièvement est le processus suivi pour l'adoption de ce projet de loi à la Chambre et le fait que nous, en tant que parti de l'opposition, n'avons pas eu la chance de faire connaître notre point de vue dans le rapport final sur le projet de loi, lorsqu'il a été renvoyé à la Chambre à l'étape du rapport, simplement du fait que nous n'avons pas été en mesure de recommander des modifications à l'entente ou d'en discuter. Nous n'avons pu que parler du projet de loi lui-même qui était très mince et ne portait pas vraiment sur les termes de l'accord.

Le comité a entendu un certain nombre de témoins venant de la région même, des autochtones de cette région. Il était clair que certains d'entre eux ne comprenaient pas les dispositions de l'entente et ne les acceptaient pas, mais on n'a tenu aucun compte de leur point de vue.

À l'étape du rapport, on n'a fait aucune mention du fait que des gens s'opposaient à cette mesure. Je tiens à ce que ce soit consigné au compte rendu que mon parti et moi-même sommes contre ce processus et cette entente, simplement parce que, selon moi, c'est une grave erreur que de s'acheminer, au Canada, vers un système que l'Afrique du Sud est heureuse d'avoir aboli.

Nous imposons des bantoustans à ces peuples, et nous les piégeons avec ces ententes. C'est un terrible précédent que nous sommes en train d'établir. Nous devrions aspirer à un traitement égal pour tous les Canadiens, quel que soit le lieu où ils vivent ou leurs origines ethniques ou raciales.

En terminant, nous tenons à ce que ce soit su que le Parti réformiste s'est opposé à cette entente et que les libéraux en ont forcé l'adoption, malgré les objections de notre parti et d'un certain nombre des principaux intéressés.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

5263

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont d'accord veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45(5)a) du Règlement le whip adjoint du gouvernement m'a demandé de différer le vote à plus tard.

[Traduction]

En conséquence, conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à 18 h 30 demain. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

M. Boudria: Monsieur le Président, compte tenu des progrès réalisés aujourd'hui, je demande s'il y a consentement unanime à ce qu'on dise qu'il est 22 heures.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime à ce qu'on dise qu'il est 22 heures?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Comme il est 22 heures, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain.

(La séance est levée à 20 h 27.)