SHUR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON HUMAN RIGHTS AND INTERNATIONAL DEVELOPMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
SOUS-COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 10 décembre 1997
[Traduction]
La présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton- Ouest—Mississauga, Lib.)): La séance du sous-comité des droits de la personne et du développement international, au sein du Comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international, est ouverte. Nous examinons la question de l'enlèvement international d'enfants. Nos témoins, aujourd'hui, sont Heather Ritchie—je crois savoir qu'Heather est une avocate spécialisée dans le droit des enfants et de la famille qui a contribué au rapatriement de l'enfant de Nancy White—et Angelina Medjed-Cosovic. Angelina, de même que Ron Reddy, continuent à attendre le retour de leur enfant.
Nous sommes très heureux que vous ayez pu venir ici aujourd'hui. Nous avons un certain nombre de questions à vous poser. Nous sommes très intéressés par ce qui vous est arrivé personnellement mais aussi par ce qu'il est possible de faire, à votre avis, pour prévenir et corriger les situations tragiques dans lesquelles pourraient se trouver d'autres parents.
Nous allons commencer par Heather. Vous avez la parole.
Mme Heather Ritchie (témoigne à titre personnel): Merci. Je suis contente de revenir dans ce bâtiment. Je l'ai beaucoup parcouru quand j'étais enfant. Mon père a été pendant des années à la tête des Affaires extérieures. Aujourd'hui, c'est l'édifice du Sénat. Il est normal que les choses changent.
Lorsque les avocats sont impliqués dans ce genre de situations, c'est parce que le mal a déjà été fait. Nous essayons de récupérer l'enfant. Nous entreprenons d'établir la compétence territoriale. Nous essayons à ce moment-là de mettre en place des moyens de protection juridiques pour éviter que la même chose ne se répète. Vous seriez horrifiés si vous saviez à quel point cela se répète souvent à plusieurs reprises au sein de la même famille.
Je reçois un appel désespéré d'un parent ou, dans certaines affaires, comme celle de Nancy, d'un membre de la famille. L'essentiel, à ce moment-là, est de ne pas perdre de temps. Je contacte Gar Pardy aux Affaires étrangères, car sans lui je suis sûre que la plupart d'entre nous ne pourraient rien faire. J'entre en contact avec le consulat du pays dans lequel se trouve désormais l'enfant. Je contacte Child Find et le service social international. Nous avons ici un représentant du service social international. Je communique aussi avec le bureau de la réciprocité à Toronto si l'affaire relève de la Convention de La Haye ou si le pays est signataire de cette convention.
• 1555
Le parent dont l'enfant a été enlevé a deux solutions pour
s'en sortir. Il peut essayer d'intervenir lui-même ou, comme me l'a
mentionné Gar Pardy «recourir à la politique de la canonnière». Il
doit faire preuve alors d'une certaine prudence. Il y a aussi la
solution des poursuites judiciaires, qui doivent avoir lieu dans
les deux pays.
Si j'ai recours à la première solution en intervenant moi-même et en recourant à la politique de la canonnière, je dois établir sans contestation possible que le Canada est compétent à la fois en vertu de son droit interne et de la Convention de La Haye si cette dernière est en fait applicable. Si j'interviens moi-même sans pouvoir établir ma compétence, il va me falloir ensuite lutter pied à pied contre toute requête en vertu de la Convention de La Haye ou autre procédure légale intentée au Canada contre la personne ayant récupéré l'enfant.
Autrement dit, cette solution peut très bien se retourner contre vous si vous n'avez pas une bonne cause et si vous n'avez pas réussi à établir que le lieu de résidence normal était le Canada avant l'enlèvement. C'est là l'essentiel. Il vous faut établir que le Canada est bien «le lieu de résidence habituel et ordinaire». Dans la Convention de La Haye, c'est la disposition essentielle. Dans notre droit, qu'il s'agisse du Code criminel ou des lois s'appliquant au droit de la famille, c'est la disposition fondamentale.
Il vous faut établir que le lieu de résidence habituel et ordinaire n'a pas été modifié par consentement. A-t-on déménagé en Grèce, au Pakistan, en Jordanie ou ailleurs? Ce lieu de résidence habituel ne va pas être modifié par un enlèvement en vertu du droit canadien, mais peut-il éventuellement l'être dans le droit d'un autre pays ou, éventuellement, une règle religieuse dicte que l'intérêt de l'enfant est mieux protégé si l'on établit le lieu habituel de résidence de l'enfant en fonction du pays d'origine du parent? Le temps qui s'écoule ne devrait pas venir modifier les choses, mais pourtant c'est le cas. Le statu quo joue un rôle fondamental.
Une fois que nous avons employé la politique de la canonnière et que nous avons récupéré l'enfant, nous attendons de pied ferme la contre-attaque, à la fois personnelle et juridique. Tout ce qu'on a pu faire, et je suis sûre que vous en entendrez parler, pour récupérer un enfant dans un autre pays en agissant personnellement plutôt qu'en recourant à la voie juridique peut être fait dans l'autre sens et nos frontières n'empêchent pas quelqu'un venu de l'étranger de faire exactement la même chose et d'enlever à nouveau l'enfant. Bien entendu, nous aurons à notre tour les recours juridiques que nous autorise la Convention de La Haye et d'autres dispositions nous permettant d'aller devant les tribunaux.
Si, par contre, nous jugeons préférable d'intervenir en justice pour récupérer l'enfant, nous entrons en contact avec le bureau de la réciprocité s'il s'agit d'un pays signataire de la Convention de La Haye. Le bureau de la réciprocité, qui relève du bureau des Avocats de l'aide à l'enfance de l'Ontario, nous autorise à présenter une requête par son intermédiaire. Il relève de la compétence provinciale.
Comme l'a indiqué M. Reddy en discutant avec nous aujourd'hui, le problème que pose le partage des compétences entre les provinces et le gouvernement fédéral au sujet des enfants nous crée d'énormes difficultés lorsque nous essayons de récupérer ceux-ci.
La procédure de requête présentée en vertu de la Convention de La Haye est terriblement lente, et je répète qu'il ne faut absolument pas perdre de temps. C'est le statu quo qui prime. Il est bien possible que l'intérêt de l'enfant soit déterminé en fonction du lieu et de la durée de son séjour, quelle que soit la méthode utilisée pour l'amener là.
Je dois dire que l'une des grosses difficultés que pose un recours en vertu de la Convention de La Haye, c'est la faible qualité de la représentation dont va bénéficier la personne concernée dans l'autre pays. Il est bien difficile de demander à un ressortissant de l'autre pays, qui touche l'équivalent du forfait attribué par l'aide juridique—ce qui le met tout juste au-dessus du seuil de la pauvreté au Canada—de plaider de manière véritablement convaincante le retour au Canada d'un enfant qui risque lui aussi d'être perçu comme un ressortissant de l'autre pays.
Il faut bien reconnaître que la cause n'est pas plaidée avec beaucoup de vigueur et que les démarches administratives qui sont faites dans certains pays retardent inutilement la solution. En fait, elles menacent sérieusement la sécurité de l'enfant et font courir des risques aux parents qui s'efforcent de récupérer celui-ci.
De plus, le bureau de la réciprocité et la requête présentée en vertu de la Convention de La Haye ont en soi le grand avantage de ne pas coûter trop d'argent, mais parfois les résultats en souffrent. Si l'on intente un recours en justice dans un pays non signataire de la Convention de La Haye, je recommande avant toute chose de prier et, en second lieu, de retourner à la première case, c'est-à-dire à la politique de la canonnière. À défaut, on cherche à obtenir une ordonnance au Canada. Cela vaut ce que cela vaut, mais l'on établit notre compétence et l'on exige par ordonnance le retour de l'enfant.
• 1600
S'il s'agit d'un enlèvement postérieur à une séparation, il
peut déjà y avoir une ordonnance. Supposons que les parties se
soient séparées avant que l'enlèvement ne se produise. Alors que la
mère a la garde de l'enfant, le père l'emmène avec lui. Il est
alors un peu plus facile de récupérer l'enfant parce qu'il existe
déjà une ordonnance judiciaire, mais c'est loin d'être fait, comme
va vous le dire mon ami ici. Une ordonnance judiciaire canadienne
vaut pour le Canada.
Nous essayons de faire en sorte que le pays dans lequel se trouve l'enfant reconnaisse la validité de l'ordonnance canadienne, mais comme mes trois amis qui sont ici vont vous le dire, on se heurte tout simplement à un mur. Quel est le lieu de résidence ordinaire? Quelles sont les priorités qui vont déterminer l'intérêt de l'enfant? Si nous obtenons une ordonnance au Canada, il se peut en fait, en vertu d'une décision de la Cour suprême du Canada, qu'elle ne soit même pas entérinée ou jugée valide parce qu'elle est considérée comme une ordonnance de poursuite. Dans un tel cas, l'enfant a quitté le pays et l'on obtient une ordonnance pour s'efforcer de le faire revenir, ce qui n'est pas la même chose que d'obtenir une ordonnance pour l'empêcher de quitter le pays. Il est malheureusement bien peu probable qu'un autre pays reconnaisse la validité d'une ordonnance canadienne.
Laissez-moi vous indiquer deux scénarios. Ils vous donneront une idée des difficultés et du type de procédure qui s'applique.
L'affaire de Mme Siddique a pris naissance au Pakistan. Mme Casselman, qui est assise derrière nous, a été d'une grande aide dans ce dossier. Mme Siddique est retournée au Pakistan pendant les vacances pour voir sa mère, qui se mourait du cancer. Une fois sur place, elle a constaté que sa mère n'était ni malade, ni en train de mourir et, à ce moment-là, son mari l'a fait interner dans un hôpital psychiatrique. Il lui a fallu s'y reprendre à deux reprises. Dans le premier, on lui a répondu que si elle avait un problème, ça venait uniquement de lui. Le deuxième l'a internée et l'a maintenue dans un état d'inconscience pendant 36 heures après lui avoir administré des calmants. Lorsqu'elle a enfin pu sortir, elle a été séparée de ses enfants et n'a été autorisée à les contacter que sous surveillance.
La présidente: Pouvez-vous ralentir un peu? L'interprète me dit qu'il a bien des difficultés à vous suivre.
Mme Heather Ritchie: Très bien.
En tant qu'avocate, je sais que lorsqu'un tribunal m'accorde 10 minutes, il me faut aller vite.
Voilà donc Mme Siddique qui doit vivre séparée de ses enfants au Pakistan et qui n'est autorisée à les voir que si elle se tient bien. Elle appelle le consulat. Le consulat lui dit que si elle rentre au Canada, il pourra l'aider. C'est donc ce qu'elle essaie de faire. Avant de partir, elle prend avec elle ses deux enfants, va habiter chez sa soeur et s'efforce de trouver une solution. La porte est enfoncée, le frère et sa famille entrent et lui enlèvent ses deux enfants. Les enfants crient et le petit garçon, qui a 11 ans, lui dit «Maman, est-ce que je peux demander à Dieu de me laisser mourir?» Ce sont les dernières paroles qu'elle a entendu prononcer par son fils; on ne sait même plus s'il est vivant. Après être retournée au Canada, Mme Siddique s'entend dire par le gouvernement du Canada qu'elle a mal compris. Si elle était revenue avec ses enfants, on aurait pu l'aider.
Quoi qu'il en soit, nous sommes allés devant le tribunal en Ontario et nous avons établi le lieu de résidence habituel. Les enfants sont nés et ont été élevés dans notre pays. Il est hors de doute que nous avons compétence sur les enfants, même s'ils se trouvent aujourd'hui au Pakistan et si le mari a demandé le divorce.
Nous avons intenté des poursuites pénales. Les enfants ont été enlevés par le mari et des accusations ont été finalement déposées en matière pénale. Il y a eu des obstacles juridiques. Apparemment, on a considéré que Mme Siddique était partie volontairement voir sa mère qui était en train de mourir. Un statu quo était désormais bien établi. Ces enfants étaient désormais là-bas depuis un bon bout de temps. Souvent, c'est la stabilité qui dicte l'intérêt des enfants.
Lorsque l'enfant est parti depuis un certain temps, on part perdant. Même si l'on établit que l'enfant était habituellement et normalement un résident de l'Ontario à une époque donnée, il réside maintenant habituellement et normalement ailleurs, et on va le bouleverser et déranger ses habitudes si l'on cherche à le réinstaller ailleurs. Il y a des enfants qui ont entendu dire des choses horribles au sujet de l'autre parent. Lorsqu'on leur demande après coup leur avis, ils ne veulent pas nécessairement retourner. Le parent qui a commis l'enlèvement a eu le temps de bloquer notre procédure en recourant à la procédure de son propre pays, en empruntant soit la voie du divorce, soit celle de la garde. S'il y a eu un enlèvement passible du pénal, nous devons établir qu'il s'agissait en réalité d'un retour involontaire dans le pays, en l'occurrence le Pakistan. On peut généralement le faire en recourant aux dispositions du Code criminel du Canada dans une ordonnance déjà établie.
• 1605
Nous avons réussi à obtenir une ordonnance ex parte en
informant l'autre partie que nous allions établir notre compétence
sur les enfants, ce qui nous a permis de faire venir M. Siddique,
qui nous a demandé de pouvoir disposer de deux semaines pour
constituer son dossier. Le tribunal a refusé de nous accorder une
ordonnance qui aurait protégé ces enfants en les ramenant chez nous
ou qui aurait obligé M. Siddique à rester dans notre pays en lui
retirant son passeport. M. Siddique est retourné au Pakistan et
n'est plus revenu depuis.
Nous avions établi notre compétence sur les enfants, M. Siddique était ici avec son passeport et le tribunal a refusé de me concéder une ordonnance lui confisquant son passeport et l'empêchant de faire justement ce qu'il a fait. Nous exercions notre compétence sur le père. Nous avons demandé l'appui de l'aide juridique. Il nous a été refusé. J'avais à m'occuper d'une femme indigente qui avait eu à peine les moyens de revenir ici. Nous avons demandé de l'aide au Pakistan et le fonds de défense des femmes était sur le point de nous aider, mais la procédure s'est révélée trop lente et, lorsque nous avons été en mesure de pouvoir faire quelque chose, trop de temps s'était écoulé et le statu quo était trop bien établi.
Le consulat a contacté les enfants. Le Service social international s'est proposé de s'occuper du sort des enfants et un avocat de l'aide à l'enfance a finalement été nommé. Un matin, il était à peu près 5 heures lorsqu'un appel surprise est parvenu au domicile de ma cliente, qui a pu finalement parler avec sa fille pour la première fois depuis des années. Sa fille l'a copieusement injuriée, car tout ce qu'on lui avait dit, c'est que sa mère l'avait abandonnée, et l'on n'a rien su du fils.
Finalement, nous n'avons pu obtenir qu'un contact minimum avec la fille et nous n'avons rien su du fils. Nous avons été handicapés par le temps qui passe, par les mauvais conseils ou par les conseils mal compris du consulat, par la non-application de la Convention de La Haye et par le manque d'argent. Rien de ce que nous avons fait au Canada n'a été reconnu. Finalement, nous avons perdu la trace de M. Siddique.
Le deuxième scénario, plus court, se passe en Chine, lors du retour d'une toute mignonne petite fille dans ce pays, que ses parents accompagnaient pendant les vacances. Elle est restée chez ses grands-parents. Est-ce que le lieu habituel de résidence avait été ainsi changé volontairement? Nous avons intenté des poursuites civiles sur avis déposé au Canada pour essayer de récupérer l'enfant, mais le père n'a pas autorisé l'enfant à retourner. Nous avons obtenu une ordonnance générale de retour prononcée en matière civile, qui prévoyait la confiscation du passeport et s'accompagnait d'un mandat, et M. Chen s'est contenté de partir en passant par les États-Unis.
Nous avons fait intervenir Interpol et la GRC, dont les services ont bloqué l'aéroport de Vancouver, l'aéroport de Montréal et l'aéroport de Toronto. Ils ont bien intercepté un M. Chen. Ce n'était pas le bon, il mesurait un pied et demi de moins, il avait 20 ans de plus et il était absolument furieux. Notre fugitif s'est échappé en passant par les États-Unis.
Nous avons ensuite retenu les services d'un avocat en Chine afin de négocier le retour éventuel de l'enfant, ou du moins une possibilité d'accès. Nous avons réussi, mais pas pour les raisons que vous pensez. Cet homme devait retourner au Canada. Il avait un emploi. Interpol allait l'arrêter dans tous les aéroports et apparemment ses antécédents lors des événements de la place Tiananmen l'obligeaient à partir au plus vite, ce qui fait que nous avons récupéré l'enfant.
Il y a ensuite le cas de Nancy. Ça se passe en Grèce, un pays signataire de la Convention de La Haye. Elle a vécu dans ce pays, elle s'y est mariée et son enfant est né là-bas. Elle est revenue au Canada pour y habiter pendant quelques années, ou un peu moins que cela.
Mme Nancy White (témoignage à titre personnel): J'ai établi ma résidence ici.
Mme Heather Ritchie: Oui, elle a établi sa résidence dans notre pays et elle est retournée en Grèce passer ses vacances. Le jour où elle devait rentrer au Canada, son mari lui a dit non, qu'elle ne pouvait pas retourner avec son enfant, et il leur a pris tous leurs papiers.
Comme elle avait vécu là-bas, qu'elle s'y était mariée, que son enfant y était né et qu'elle se trouvait sur son territoire, il y avait désormais une compétence territoriale de la Grèce. Nous avons apporté toutes les preuves que vous pouvez imaginer, des quantités d'affidavits, nous avons établi qu'elle avait établi sa résidence dans notre pays. Son mari avait même demandé à bénéficier du statut d'immigrant reçu. Toutefois, notre dossier était bien trop faible pour que l'on puisse l'accuser d'enlèvement aux termes du droit pénal et l'on a dû recourir à une procédure civile.
Les parents m'ont contactée. Nancy était là avec son petit garçon. Nous avons déposé une requête. J'ai dû prendre mes instructions en parlant avec Nancy en prenant toutes les précautions que vous pouvez imaginer, grâce à des conversations codées, dans le restaurant familial de la petite ville de Killini, en Grèce. Elle m'a donné des instructions très claires et j'ai senti sa voix se raffermir.
Avec son père, nous avons obtenu une ordonnance de poursuite. C'est une ordonnance qui est prononcée une fois que l'enfant a été enlevé. Nous avions un problème; nous ne pouvions pas signifier l'ordonnance. Nous avions horriblement peur qu'il mette sa menace à exécution et qu'il se suicide en tuant l'enfant—on les aurait retrouvés en train de flotter dans la baie—ou qu'il fasse ce qu'il a fini par faire, soit menacer la mère avec une arme à feu.
• 1610
Elle a essayé de partir en se prévalant de l'ordonnance et
avec l'aide du consulat. Son père est venu la chercher. Ils n'ont
pas compris, j'imagine, combien ce genre d'affaire est grave et à
quel point il faut agir avec rapidité. L'affaire s'est sue. Ils ont
été arrêtés à 6 heures du matin la nuit de Noël et reconnus
coupables à 13 heures.
Nous avons contacté le bureau de la réciprocité et nous avons engagé la longue procédure de requête en vertu de la Convention de La Haye. Ce fut d'une lenteur désespérante et pratiquement inutile. Ce fut presque un obstacle. Les responsables étaient hésitants et ils ne pouvaient pas vraiment agir directement.
Les atermoiements et la bureaucratie nous ont perdus. Il fallait faire vite. Le statu quo s'imposait de plus en plus à mesure que les jours passaient. La solution—comme ce fut le cas pour la femme qui avait eu des démêlés avec la République de Chine, et ce qui nous a manqué dans l'affaire de Mme Siddique—c'est l'argent qui l'a rendue possible.
Nous avons rédigé et traduit des documents à grands frais. Ses parents ont financé son séjour car elle est restée sur place et a refusé d'abandonner l'enfant. Cela a coûté une fortune. Nous avons engagé un avocat grec et non un représentant de la Convention de La Haye pour aiguillonner l'avocat de la Convention, qui ne semblait pas très pressé de faire retirer à son pays un enfant qui en était l'un des ressortissants.
Nous avons fait des pieds et des mains des deux côtés de l'Atlantique. Finalement, je dois vous avouer que c'est une fois de plus l'initiative personnelle qui a payé. Nous avions l'ordonnance du tribunal. Il avait laissé l'enfant quelque part; nous ne pouvions pas le localiser. Nous étions passés par la Convention de La Haye, les tribunaux grecs et les tribunaux canadiens. On n'arrivait à le trouver nulle part. Les menaces étaient toujours présentes.
Un jour, il est venu menacer Nancy et elle l'a repéré. Il a rendu l'enfant. Elle a bénéficié d'une énorme aide de ses parents et elle a fait preuve d'une ténacité fantastique. Nous avons harcelé cet homme. Nous avons engagé des détectives privés. Nous avions mis ses téléphones sur écoute. Il ne pouvait pas bouger. Nous savions exactement où il rangeait ses chaussettes et ses sous-vêtements. Nous l'avions si bien coincé que sa vie allait être un enfer. Nous avions déposé des accusations au pénal, mais elles étaient bien faibles. Il semble que, dans ce pays, elles ne durent que quelque 48 heures.
Toutefois, lorsqu'il a finalement rendu ce petit garçon et que je l'ai vu arriver à l'aéroport de Toronto avec Nancy, c'était un petit être complètement perdu, âgé de trois ans, qui appelait sa mère «ma tante», parce qu'il ne la reconnaissait pas et ne parlait pas anglais. Nancy vient tout juste de me donner l'une de ses photos—il va très bien maintenant.
De manière générale, je dirais qu'il nous faudrait d'une manière ou d'une autre être mieux représentés dans l'autre pays lorsque des choses comme celle-là se produisent, et qu'il faut que cela parte de là. Chaque fois que j'ai pu avoir de l'argent dans l'autre pays—non pas pour l'avocat chez nous, mais de l'argent pouvant être payé dans l'autre pays—j'ai réussi à obtenir quelque chose. Il faut que ceux qui se retrouvent dans ce genre de situation puissent être représentés dans l'autre pays. Tout le monde n'a pas de l'argent à revendre et, souvent, les gens sont très pauvres. Le bureau de la réciprocité est terriblement inefficace. Il veut bien faire, mais il manque de crédits et il n'a pas suffisamment de poigne. Il faut que nous lui donnions les moyens d'agir.
Nous avons besoin que le Parlement et que les assemblées législatives adoptent de meilleures lois. Nous devons pouvoir bloquer les frontières pour que les gens ne puissent pas sortir.
J'en parlais à M. Reddy, et il propose que le parent qui veut quitter le pays tout seul avec son enfant ait non seulement un consentement signé de son conjoint, mais présente en outre un document homologué et notarié qui relève d'un bureau centralisé pour que l'on puisse vérifier que «À partir de telle date et jusqu'à telle date le conjoint a autorisé l'enfant à quitter le territoire avec telle personne sans que la compétence territoriale soit modifiée de ce fait». Que se passe-t-il lorsque des gens passent la frontière avec un consentement signé sans que l'on sache qui l'a signé? Qui peut savoir qui en est l'auteur? Qui sait s'il est légitime?
Nous devons bloquer le passage par les États-Unis. L'accès est bien trop facile. Nous devons informer les gens pour qu'ils sachent quelles sont les implications pour l'enfant de passer ses vacances dans un autre pays ou de voyager à l'étranger. Nous devons mettre des gens compétents dans le bureau de la réciprocité et l'amener à prendre ses responsabilités. Nous devons adopter à cette fin des modifications législatives visant à promouvoir quelque chose qui s'apparente à l'aide juridique et obtenir d'une façon ou d'une autre les ordonnances que les juges ne veulent pas nous accorder. Ils disent que les ordonnances de poursuite ne sont pas applicables, mais je veux quand même les avoir. J'en ai besoin parce qu'elles ont un certain poids et parce que si la personne concernée entre au Canada ou se rend dans un pays dans lequel je suis en mesure de les faire appliquer... mais je me heurte à des juges qui cherchent à les refuser. Nous avons besoin de clauses de non-déplacement et de dispositions imposant un consentement limité dans les ordonnances prononcées par la justice au sujet des enfants. C'est le travail des avocats et non pas le vôtre. Nous devons renforcer les frontières.
• 1615
Je vous ai fait part de deux réussites et d'une tragédie.
Chaque jour, j'entends parler davantage des tragédies que des
réussites. Nous avons désespérément besoin d'unir nos efforts de
façon à pouvoir disposer, sous une forme ou sous une autre, comme
l'a dit M. Reddy, d'un registre central des ordonnances de garde
pour que nous puissions contrôler les frontières, même si cela
suppose des inconvénients pour les gens. Lorsqu'un enfant est
enlevé à l'un de ses parents, la tragédie se répercute sur tout le
reste de cette génération et sur la génération suivante. Nous avons
avant tout des responsabilités envers ces enfants.
Si vous avez des questions à poser, je me ferai un plaisir d'y répondre.
La présidente: Nous laissons généralement les questions pour la fin. Ce fut très instructif. Merci.
Madame White, vous allez vous aussi faire un exposé?
Mme Nancy White: Si vous me le permettez, j'aimerais dire quelques mots.
La présidente: Allez-y.
Mme Nancy White: J'ai rédigé aussi un mémoire dont tout le monde, je pense, a une copie, pour exposer rapidement ma situation et indiquer par ailleurs certaines difficultés ainsi que mes recommandations.
La présidente: C'est exactement ce que nous cherchons. Je vous remercie.
Mme Nancy White: Je ne vais pas tout vous lire, mais je tiens cependant à vous remercier de m'avoir invitée aujourd'hui; c'est un plaisir pour moi d'être ici. Je tiens aussi à remercier Heather Ritchie et Gar Pardy, ainsi que l'ensemble du personnel des Affaires étrangères, qui m'a énormément aidé et qui continue à le faire. Je veux aussi remercier l'ambassade canadienne en Grèce, qui m'a incroyablement aidée. Ron m'a fait savoir que l'ambassade canadienne de Jordanie m'a beaucoup appuyée.
Attendez un instant, j'ai perdu le fil de ma pensée.
Heather a exposé en partie ma situation. Je suis retournée en Grèce pour y faire un court séjour avec mon premier mari et mon fils, Tom, qui avait à l'époque un an et demi. C'est en fait le deuxième jour de mon arrivée que j'ai constaté, en regardant dans mon sac, que mes papiers ainsi que ceux de Tom n'y étaient plus. À ce moment-là, je pouvais encore téléphoner et j'ai pu appeler chez moi et faire savoir à mes parents que j'avais besoin d'aide. J'étais retenue contre ma volonté. Ils ont pu entamer la procédure.
Quatre mois après cet appel téléphonique, alors qu'Heather s'était démenée auprès des Affaires étrangères pour obtenir ici des ordonnances en justice, tout restait bloqué. Nous ne pouvions pas avancer. Finalement, mes parents ont parlé avec un autre traducteur à Toronto, qui leur a dit qu'il leur fallait aller sur place et faire sortir leur fille. C'est le seul conseil qu'on a réussi à leur donner au bout de quatre mois. Personne d'autre au sein du gouvernement ne nous avait dit quoi faire. Personne ne paraissait savoir comment agir. Nous n'avions aucun contact. Aucune procédure n'avait été mise en place pour savoir qui contacter et que faire ensuite. Nous ne connaissions pas le nom de l'avocat qui avait été nommé pour me défendre alors qu'un avocat avait bien été nommé en Grèce en vertu de la Convention de La Haye. Je n'en avais pas été informée; il n'avait pas réussi à me contacter.
Quoi qu'il en soit, quatre mois après ce premier appel téléphonique, mon père est venu me chercher—me kidnapper, essentiellement. Nous avons été reconnus coupables d'avoir kidnappé mon fils. Six semaines plus tard, finalement, l'audience en vertu de la Convention de La Haye s'est tenue. Trois semaines après, alors que nous n'avions pas encore reçu la décision prononcée lors du procès en vertu de la Convention de La Haye, mon ex-mari a déposé une demande de garde qui a été entendue. C'est apparemment contraire aux règles de la Convention de La Haye. On ne peut avoir la garde—bref, je suis sûre que vous êtes au courant de l'ordonnance.
Heather, est-ce que tu peux m'aider.
Mme Heather Ritchie: On ne peut pas entamer une procédure distincte lorsqu'on a déjà engagé des poursuites en vertu de la Convention de La Haye.
Mme Nancy White: C'est exact, parce que la résidence n'avait pas encore été établie. Pourtant, l'audience s'est tenue en Grèce. Personne ne semblait non plus connaître les règles. C'est ici que ça a commencé, mais l'on aurait dû suivre toute la procédure. J'imagine qu'il en est de même dans bien d'autres pays, sinon dans tous les pays.
• 1620
Il n'y a donc pas de procédure bien définie. Sans l'aide
financière de mes parents, je suis sûre que je serais toujours en
Grèce et que j'habiterais avec ce criminel pour pouvoir rester avec
mon fils.
Comme l'a signalé Heather, nous avions cet avocat nommé en vertu de la Convention de La Haye qui n'était absolument pas motivé et qui ne parlait pas un mot d'anglais. Il se moquait totalement de ce qui pouvait m'arriver. Par conséquent, nous avons trouvé deux autres avocats que nous avons fait nommer pour défendre ma cause en Grèce. Je pense que les frais de traduction à eux seuls se sont montés à 15 000 $.
Au sujet de la traduction, lorsque l'ordonnance prononcée en vertu de la Convention de La Haye a été envoyée devant les tribunaux grecs, elle n'était pas traduite. Elle a dû être renvoyée pour être officiellement traduite et ensuite réexpédiée. Il apparaît tout simplement qu'il n'y a pas de procédure bien définie.
Sans l'argent et sans la persévérance de mes parents et d'Heather, je n'aurais pas pu récupérer mon fils. J'ai reçu une aide formidable de la part des Affaires étrangères et de l'ambassade, mais l'on aurait pu en faire bien davantage.
Comme vous l'a dit Heather, le temps pressait. Ma vie et celle de mon fils étaient menacées. On entend constamment parler de ce genre de personnes. Sur un coup de tête, ils tuent toute leur famille et se suicident ensuite. C'est la réalité, la triste réalité. Il faut donc faire vite, ce qui n'est certainement pas possible avec la procédure actuelle. Je ne manquerai pas à l'avenir de me pencher sur les recommandations que votre sous-comité va présenter.
J'ai proposé dans mon mémoire que l'on instaure une banque de données pour que chacun puisse prendre connaissance des expériences des autres et en tirer parti. Heather et plusieurs de ses amis qui sont avocats ont offert leurs services, et on ne peut pas trouver de meilleure source. J'attends là aussi avec impatience vos recommandations.
La présidente: Je vous remercie.
Angelina, vous voulez faire un exposé?
Mme Angelina Medjed-Cosovic (témoigne à titre personnel): Oui. Je tiens à remercier votre comité de m'avoir invitée aujourd'hui. J'espère que nous arriverons à quelque chose si nous unissons véritablement nos efforts. J'espère que mon affaire ne va pas se prolonger, j'aimerais obtenir des résultats à l'avenir et, pendant tout le temps qui me reste à vivre, je m'efforcerai d'obtenir quelque chose.
Je suis une nouvelle immigrante. Il n'y a que sept ans que je suis au Canada. Je ne sais pas parler anglais. Je fais beaucoup d'efforts pour apprendre. Excusez-moi si je bute un peu sur les mots; j'ai quelques difficultés et je ne m'en cache pas.
Lorsqu'un mariage vient à échouer, la grande question est celle de la garde. J'espère que le juge reconnaîtra tôt ou tard que s'il ne réussit pas à séparer les deux parties à l'amiable, il lui faut l'envisager très sérieusement et le plus tôt possible pour éviter un conflit familial. Je m'appuie en fait ici sur ma propre expérience et je vous dis cela du fond du coeur.
Il y a plus d'un an, j'ai entamé une procédure pour obtenir la garde unique. Mon ex-mari n'a rien voulu savoir et il a fait appel à toutes les ressources à sa disposition, y compris à ma mère. J'ai dû le traduire devant le tribunal et faire valoir ma cause. Ce n'était pas facile, mais je ne l'ai pas trouvé trop dur. Je me connais et je travaille dur. Je peux arriver à tout lorsque je suis en bonne santé. Je me suis fixé cet objectif et je l'atteindrai.
Ensuite, dans un procès très difficile—il s'est montré très brutal, sarcastique, humiliant et non coopératif—j'ai réussi à obtenir la garde. Il a demandé la garde conjointe. Je l'ai refusée parce que j'ai voulu éviter toute agression verbale, émotive et éventuellement physique. Il n'est pas facile d'expliquer à un enfant ce qui se passe en réalité. Tout lui paraît confus et ce n'est pas facile pour lui. J'ai privilégié le bien-être et la sécurité de mes enfants. J'essaie de faire de mon mieux et je fais beaucoup d'efforts pour atteindre mon objectif.
Ensuite, j'ai essayé surtout d'éviter qu'on ne délivre un passeport, parce qu'au fond de moi je savais qu'il allait enlever mon fils.
Le 27 avril, mon fils a été enlevé. C'était le dimanche, lors de la Pâque orthodoxe. Il a choisi le lieu, l'heure et tout le reste de manière à pouvoir réussir. Il a tout planifié.
Devant le tribunal, le 11 mars, j'ai imploré le juge comme une petite fille, «S'il vous plaît, s'il vous plaît, ne voyez-vous pas qu'il va faire ça?» On n'a pas tenu compte de ma demande et on m'a refusé l'accès. On m'a dit que je ne savais pas me tenir devant un tribunal et que j'irritais terriblement le juge. Cela m'a fait mal et je vais devoir le retrouver devant le tribunal tôt ou tard. Je ne pouvais plus dormir. Ça me tracassait jour et nuit.
• 1625
J'ai tellement essayé: «Je vous en supplie, est-ce que vous ne
comprenez pas, est-ce que vous ne voyez pas?» En entrant dans la
salle, il a pris un air sarcastique et son visage m'a fait peur
alors que le juge tournait le dos... Je pouvais le voir dans ses
yeux. Je suis peut-être la seule à savoir combien il peut se
montrer manipulateur et sarcastique envers moi.
J'ai bien essayé, mais je n'ai rien pu faire.
Au retour, j'ai téléphoné au service des passeports et à l'Université de Toronto pour leur expliquer ma situation. Évidemment, je n'avais pas encore l'ordonnance judiciaire que j'aurais pu leur envoyer par télécopieur comme preuve. Ils semblent toutefois s'être montrés très compréhensifs.
J'ai aussi téléphoné au consul de la Yougoslavie à Ottawa pour essayer d'éviter qu'il ne lui délivre un passeport parce que je savais ce qu'il allait faire. J'ai aussi expliqué à ses services qu'il était possible qu'il achète un passeport en blanc et lui appose un tampon. C'était son projet et parfois, lorsque les gens font ce genre de projet, ils révèlent la vérité parce que leur conscience les trahit.
Il semble que personne ne m'ait prise au sérieux. Je suis allée voir les responsables de l'école. Je leur ai parlé de mon fils et je leur ai dit de me téléphoner s'il s'absentait ne serait-ce que cinq minutes. J'ai dressé une liste des gens qui pouvaient aller le chercher. J'ai apporté des photographies. Je les ai montrées aux enseignants et j'ai tout fait pour éviter cet incident.
Toutefois, je n'ai rien pu faire et, lorsque mon enfant a été porté disparu, je me suis sentie très frustrée et en colère.
L'école m'a téléphoné. Il n'était pas allé à l'école. J'ai compris immédiatement. J'ai téléphoné à la police et on m'a répondu: «Ne vous énervez pas, madame, ce n'est pas encore le moment, nous devons attendre 24 heures.» Je leur ai répondu: «Ne voyez-vous pas qu'il a disparu» «Comment le savez-vous?» «Je le sais parce que j'ai fait des rêves horribles et parce que j'ai téléphoné à quelqu'un et que je lui ai dit que je ne savais pas ce qu'il pouvait faire d'autre pour me nuire.»
J'ai entamé des procédures immédiatement, même si je n'avais pas encore l'ordonnance. J'ai essayé de le poursuivre. J'étais en colère, désagréable, agressive et je les ai insultés. J'ai tout simplement craqué. Je ne pouvais plus me contrôler. Comment pouvaient-ils ne pas comprendre?
J'ai téléphoné à une agence et j'ai essayé de lui forcer la main. J'ai pu le retrouver. Il avait acheté un billet d'avion pour l'Allemagne. Lorsqu'on m'a dit cela, je savais qu'il se rendait en Yougoslavie.
C'est un homme tout à fait incapable. Il a besoin de quelqu'un. Il a besoin de sa famille. Sa famille, et certainement le gouvernement... Son oncle travaillait au comité central du Parti communiste et je sais que ce parti a de l'influence. Il a beaucoup d'influence. Il est très dur de lutter contre ces gens.
J'ai téléphoné à tout le monde. J'ai commencé par la police puis j'ai téléphoné à Missing Children, à Child Find, et au ministère à Ottawa. J'ai ensuite téléphoné à l'ambassade yougoslave à Belgrade, à des amis, au service social international, à la police du Monténégro, à la police bosniaque, à certains de mes amis. J'ai téléphoné au service social en essayant de l'intéresser au maximum à mon affaire parce que je sais qu'il va s'envoler avec mon enfant d'un endroit à l'autre, comme un oiseau. J'ai essayé d'éviter cela et j'ai fait tout mon possible, mais je n'ai bien sûr obtenu aucun résultat à ce jour.
J'ai fait tellement d'efforts et c'est bien difficile. Il semble que personne ne considère cette infraction comme un crime grave. Ce n'est pas simplement un crime, c'est un comportement de malade. Pour commettre un tel crime, il faut être malade.
J'ai une longue expérience de la psychiatrie. Je l'ai fréquentée pendant 20 ans et je sais ce qu'est la manipulation et ce qu'est la maladie.
J'espère que mon enfant ne va pas être tué. Je connais personnellement cette affaire parce que j'y travaille et il ne faudrait pas que l'on oublie la question de la sécurité sur un plan pénal. Un enfant est mort.
J'espère que je ne verrai pas cela parce que j'ai demandé aux responsables d'éviter cette situation, mais personne ne semble la prendre très au sérieux.
J'ai alors intenté des poursuites en Yougoslavie. J'ai engagé un avocat. Cet avocat a demandé à être payé en argent américain parce qu'il s'agissait de droit international. J'ai emprunté 5 000 $ sur mes cartes de crédit et je l'ai payé immédiatement par courrier électronique pour qu'il puisse entamer les poursuites.
Il a trouvé le moyen de retarder l'affaire. Tout d'abord il m'a accusée d'être une malade mentale en service psychiatrique en raison de ma santé mentale, déclarant que j'étais une droguée gravement déprimée qui envisageait le suicide.
Il m'a fallu un mois pour remédier à la situation. Je suis allée voir mes collègues et le chef de mon service infirmier. Je me suis adressée au service de la paie, qui m'a fait une lettre attestant que je travaillais dans ce service et que je n'étais pas une malade. Cela prend du temps. C'est très dur et très difficile.
J'ai obtenu gain de cause sur la première partie concernant la garde, mais l'on a trouvé le moyen de délivrer un... sa famille a évidemment beaucoup d'influence et elle retarde constamment la procédure.
• 1630
Il s'est mis alors à me téléphoner toutes les semaines pour me
narguer. Il a payé ensuite un homme de 53 ans pour qu'il vienne
attaquer mon garçon de 16 ans. J'étais constamment dans les locaux
de la police. Je ne savais pas quoi faire. Comment se pouvait-il?
Que se passait-il?
Le 30 octobre, il m'a téléphoné à nouveau. Il m'a mis en communication avec l'autre enfant, qui ne pouvait pas parler anglais. Il n'avait aucune idée de ce que pouvait représenter l'Halloween.
J'ai essayé de téléphoner à la police. J'ai essayé de retrouver son numéro en passant par les services de police, mais il est clair que ces derniers sont très peu coopératifs. Il est évident qu'ils ne savent pas quoi faire et ils accusent les deux pays. Ils m'ont dit que mon fils n'était pas canadien. Par naissance, mon fils est canadien. Mon fils a disparu du Canada, non pas de la Yougoslavie.
Lorsque j'ai téléphoné aux services yougoslaves, ils m'ont dit que j'étais canadienne et qu'ils ne voulaient donc pas traiter avec moi. Comment puis-je être canadienne? J'ai obtenu la citoyenneté en 1994 et mon fils est canadien de naissance. Est-ce que cela est réaliste dans le cas d'une personne normale et naturelle qui ne peut pas avoir d'amis normaux? Il cherche simplement à gagner du temps.
J'ai aussi parlé au ministère des Affaires étrangères, aux services sociaux, pour que l'on surveille la situation et que l'on contrôle régulièrement ce qu'il advient de mon fils. Il est évident que personne n'a pris l'affaire très au sérieux parce que les services sociaux du Montenegro nous ont fait dire que mon fils se portait bien et qu'il allait à l'école. Il est allé à l'école cinq jours alors qu'il vient juste de téléphoner. Qu'est-ce que cinq jours dans une période de trois mois?
C'est de l'abus psychologique et affectif. Il ne le laisse pas me parler au téléphone. Il l'isole. Il l'enferme. Quoi d'autre? S'il est capable de faire tout cela, il est capable de tout.
Personne ne s'occupe de l'enfant. On me dit que ça coûte cher. J'ai essayé d'amener la GRC à le poursuivre par l'intermédiaire d'Interpol. Il ne peut pas fuir le pays. On me dit que c'est onéreux. On me dit que je savais ce qui se passait. Il est certain que c'est parce que je suis une femme immigrée. Si le fils de Mike Harris ou de Jean Chrétien disparaissait, je crois que dans les 24 heures il serait de retour au Canada. Je vous jure, c'est ce que je ressens au fond de moi.
L'argent ne devrait pas compter lorsqu'il s'agit du bien-être d'un enfant. N'oubliez pas que lorsqu'on fait du mal à un enfant, toute sa vie il en gardera les traces.
Tout au long, il y a la peur. Ils se font des reproches à eux-mêmes. Ensuite, ils sont nargués par les autres parents. Bien évidemment, comment pourra-t-il me considérer comme sa mère? Personne ne fait même attention à ce genre de choses.
En plus, je dois travailler tous les jours. C'est mon premier jour de congé aujourd'hui. J'ai travaillé pendant six mois sans jour de congé. Je dois aussi tenir compte du fait qu'il me faut gagner ma vie. J'ai aussi un autre enfant. Personne n'en tient compte. Je fais des gâteaux pour survivre. Je suis prête à tout faire. Je travaille dans les bateaux et j'ai recours à toutes sortes d'expédients alors que quelqu'un se prélasse dans un fauteuil relax au ministère des Affaires étrangères et mon coeur saigne—je le dis comme je le ressens—parce qu'un bon juge n'a pas pris l'affaire très au sérieux. Le mal est fait pour le reste de ma vie.
Je ne suis pas venue ici pour pleurer, mais c'est tout ce qu'il me reste à faire parce que je n'ai pas d'autre solution. Quoi que je fasse, il semble que ça ne serve à rien.
Nous avons besoin d'une meilleure information au Canada parce que mon enfant a disparu du Canada. Il est né au Canada. Je pense rester dans ce pays, mais qu'est-ce que j'en retire? Rien. Je travaille fort pour améliorer ma situation. Je remercie mes collègues de travail, qui sont très bons pour moi. Quoique je fasse, ils prennent soin de moi.
Parfois, je me demande comment je peux tourner. Il y a des jours où je me sens très déprimée et d'autres où je reprends mon optimisme et où je peux me remettre à vivre comme avant.
Je ne peux plus supporter cependant de lire dans les comptes rendus de police que mon enfant se trouve avec son père et que je dois m'estimer heureuse. Je n'aime pas qu'on dise comprendre ce que je ressens. Personne ne sait ce que je ressens. Je ne souhaite pas à mon pire ennemi de se sentir comme ça.
Je vous jure que je pensais voir Bob Mills. Son secrétaire n'a pas manqué de venir me voir. Si je peux trouver six heures dans la semaine pour me précipiter ici en prenant un jour de congé, pourquoi ne pourrais-je pas rencontrer cet homme? C'est parce qu'il doit travailler sur une vieille affaire.
Comment parvenir à quelque chose si nous ne sommes pas forts? Non, ce n'est pas juste. J'exprime ce que je ressens... et je ne veux plus compter sur les autres. On me dit que l'on a obtenu d'excellents résultats et que les gens de l'ambassade canadienne sont allés trois fois là-bas, mais ils n'ont pas vu mon garçon.
• 1635
Je leur ai demandé d'aller le voir, de le surveiller. Ils ne
me croient pas. Il semble qu'ils font davantage confiance à ce que
disent les grands-parents qu'à ce que je dis alors que j'ai la
garde de l'enfant. Ce n'est pas juste.
Il faut faire quelque chose. Il faut que quelqu'un réapprenne à vivre à ces gens. Je ne sais pas quoi faire. J'appelle la police chez moi et je sais. Je travaille tout le temps en psychiatrie médico-légale. Je me suis familiarisée avec le droit et je sais un peu quoi faire, mais la distance géographique, les vacances, le décalage horaire entre les jours et les nuits... je suis en train de perdre la partie. J'ai maintenant dépensé 15 000 $ US. J'ai distribué partout mes cartes pour que l'on achète mes gâteaux. C'est mon fils le plus âgé qui me nourrit. Que peut-on attendre de plus d'un enfant de 16 ans? Je ne sais pas.
Je ne sais plus à qui m'adresser. Je pense qu'il faut que votre comité fasse quelque chose, et j'espère en moins de deux ou de dix ans...
La présidente: Merci, Angelina.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Je vous remercie.
La présidente: Vous venez de nous dire quelque chose qui nous a tous frappés, je pense. Lorsque les gens vous disent qu'ils comprennent ce que vous ressentez, ils se trompent. Nous ne pouvons pas nous mettre à votre place. Il est indéniable que votre exposé d'aujourd'hui nous fait un peu mieux comprendre ce que vous ressentez. Je sais que ce fut pour vous difficile. Je vous remercie.
Ron.
M. Ron Reddy (témoignage à titre personnel): Merci, madame la présidente.
Tout d'abord, mes prières et mes meilleurs souhaits de réussite vont à mes amis qui sont venus témoigner aujourd'hui.
Je débuterai mon intervention en disant que l'enlèvement international d'enfants devrait être considéré comme un abus d'enfant et comme un kidnapping. Ce n'est pas un enlèvement, c'est un kidnapping.
Je suis père d'une ravissante fillette de deux ans nommée Yasmine Reddy. Je suis comme tout bon parent. Ma fille est la lumière de ma vie. Par conséquent, j'ai été foudroyé d'apprendre, le 16 février 1997, que mon ex-femme et son père avaient enlevé mon enfant et l'avaient emmenée en Jordanie. Les huit derniers mois de ma vie ont été un cauchemar pendant que je cheminais désespérément dans un bourbier bureaucratique corrompu afin de sauver ma fille. Il était évident que je n'avais aucun recours.
Le 16 février 1997, j'ai signalé à la GRC que ma fille et ma femme étaient disparues. La GRC hésitait à m'aider.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Excusez-moi, madame la présidente, et je regrette de vous interrompre, Ron, mais étant donné que le temps est limité, avez-vous l'intention de lire le...
M. Ron Reddy: Non. J'ai un mémoire que j'ai remis à tout le monde. Je ne vais pas le lire dans son intégralité. Je vais le survoler afin d'essayer d'en indiquer les grandes lignes.
M. Svend Robinson: Bon, très bien. Je voulais simplement m'assurer que nous aurions suffisamment de temps pour poser des questions.
La présidente: Nous avons de nombreuses questions à poser ici au groupe.
M. Ron Reddy: Je veux simplement exposer ma situation et donner les grandes lignes de mes arguments.
La présidente: Faites.
M. Ron Reddy: Enfin, après trois semaines de persévérance et de recherches, la GRC a noté ma déclaration et a commencé à approfondir le cas.
Néanmoins, ma propre enquête m'a permis de découvrir que ma femme demeurait avec son père dans la nation islamique de Jordanie. Malgré le fait que cela faisait près d'un mois que j'avais vu ma fille ou que j'avais entendu parler d'elle, la GRC refusait toujours d'intenter des poursuites et de procéder à une enquête approfondie. Manifestement, mon cas ne constituait pas une priorité.
Le 20 mars 1997, j'ai quitté mon emploi de pharmacien pour m'envoler vers la Jordanie afin de sauver ma fille. Avant de partir, j'ai reçu un appel téléphonique du père de mon ex-femme. Quand je lui ai demandé où était ma fille, il a répondu: «Tu reviens ici pour la reprendre et je te tue.»
C'est pourquoi, au moment où je suis arrivé en Jordanie, j'ai été traqué et harcelé par le père de mon ex-femme et ses acolytes. Ils ont même épié l'ambassade canadienne et traqué le personnel. La situation est devenue si grave qu'à un certain point, l'ambassadeur canadien a téléphoné au gouvernement de Jordanie afin d'obtenir une sécurité policière additionnelle pour moi et pour les principaux employés de l'ambassade. La sécurité est arrivée, sous la forme d'une jeep équipée d'une mitrailleuse sous tourelleau.
Il s'agit là de situations graves. C'est pourquoi je dis que l'on ne doit pas parler ici d'enlèvement, mais de kidnapping. Les enfants sont en danger et nous le sommes aussi. Il est certain qu'on n'en fait pas assez.
Comme l'a indiqué Nancy, l'ambassade canadienne a été d'une grande aide, mais je crois que cela venait des personnes. Laurie Poirier, la consule de l'ambassade, s'est montrée extrêmement sympathique et a été d'une grande aide, sur le plan personnel et humain, mais il est apparu clairement que l'ambassade ne disposait pas des équipements ni d'une procédure efficace permettant de régler depuis Ottawa mon affaire ou tout autre cas sérieux de ce type. Elle avait les mains liées.
• 1640
Je me suis rendu compte que je devais composer avec la loi
islamique, une culture étrangère et une langue étrangère par mes
propres moyens. Le bien-fondé du cas de ma fille est clair à mes
yeux. Elle est uniquement citoyenne canadienne, non pas
jordanienne. Quelle autorité la Jordanie possède-t-elle sur ma
fille et pourquoi Ottawa n'a-t-il pas réagi de façon décisive pour
protéger l'avenir d'une enfant canadienne? Ce sont les questions
que je me posais. J'ai décidé d'examiner la situation moi-même.
Par mes propres contacts, j'ai rencontré le chef de la Cour suprême de Jordanie, le chef de la Cour islamique de Jordanie, plusieurs membres du Parlement jordanien, un général de l'armée jordanienne et l'ancien conseiller du premier ministre de Jordanie et fondateur de la Chambre de commerce États-Unis-Arabie.
Ils m'ont dit que je ne pourrais jamais réaliser de progrès considérables en tant qu'étranger dans le système judiciaire de Jordanie. Le système était encore fondé sur des formes de justice féodales des tribus bédouines, qui étaient régies par l'influence de la famille. On m'a dit que les juges et la police seraient peu disposés à émettre des ordonnances contre d'importantes familles influentes. On m'a dit qu'en vertu de la loi islamique seulement eux pouvaient obtenir la garde des enfants, particulièrement une fille, jusqu'à l'âge de la puberté. De même, on m'a dit qu'entre-temps, le père ne pourrait la voir, sous supervision, qu'une heure par semaine. Bien évidemment, il est probable qu'un étranger n'obtiendra aucun de ces droits.
Ils m'ont dit qu'il n'existait pas de protocole judiciaire entre le Canada et la Jordanie; par conséquent, on m'a informé que la seule solution pour sauver ma fille, c'était que le premier ministre canadien et le ministre des Affaires étrangères en appellent au roi de Jordanie pour qu'il émette un décret royal afin de rapatrier ma fille qui est citoyenne canadienne.
En confidence, ils m'ont dit que le système jordanien était soumis à la corruption, et que le trafic d'influence, par exemple les pots-de-vin aux représentants du gouvernement, aux représentants du ministère étranger et aux juges par des Jordaniens influents, permettait d'obtenir des projets du gouvernement ou sa coopération sur certaines décisions. Par conséquent, de nombreuses initiatives importantes seraient interrompues à des niveaux inférieurs par le père jordanien de mon ex-femme grâce à des pots-de-vin bien placés ou au trafic de l'influence.
On m'a aussi informé que la Jordanie, comme de nombreux autres pays, servait sa propre économie, qui fonctionne avec un mouvement négatif de la Trésorerie, grâce à des sommes considérables provenant de l'aide étrangère de pays comme les États-Unis, le Canada, le Japon et l'Europe. De sorte que des pressions stratégiques exercées sous la forme de retenue, de mesures dilatoires ou de réduction de l'aide économique seraient très efficaces en vue de favoriser le respect des lois liées à des questions comme l'enlèvement international d'enfants, des droits de la personne et la violence faite aux enfants. Tous les représentants jordaniens ont convenu unanimement que mon cas exigerait une intervention beaucoup plus énergique de la part du gouvernement canadien.
À la mi-novembre 1997, notre honorable ministre des Affaires étrangères, M. Lloyd Axworthy, s'est rendu en Jordanie. Je crois comprendre que le ministre Axworthy a abordé la situation de ma fille avec le ministre jordanien des Affaires étrangères, en présence du prince héritier Hassan. À ce jour, nous n'avons reçu aucune réponse de la part de la Jordanie. Il est évident qu'un suivi vigoureux sera nécessaire pour régler le cas de ma fille. De même, ce cas peut servir de modèle et de guide à partir duquel on peut élaborer des relations bilatérales concernant les abus commis au niveau international.
Manifestement, afin de répondre aux besoins de nombreux enfants et parents canadiens et étrangers qui vivent de telles formes flagrantes d'abus des droits de la personne, une intervention musclée de la part du premier ministre et du ministre des Affaires étrangères s'impose, tout comme de la part d'Ottawa, avec la même intensité qui a récemment donné lieu à l'accord historique concernant les mines antipersonnel.
Les stratégies que j'ai exposées dans mon mémoire et que je vous ai présentées impliquaient essentiellement que l'on sépare en deux le mécanisme de négociations du traité. À l'heure actuelle, nous nous efforçons de régler la question des enlèvements d'enfants au moyen d'accords sur le rapatriement conçus sur le modèle de la Convention de La Haye, qui est un accord multilatéral. Je ne pense pas que cela va donner de bons résultats dans le monde. Ce ne sera certainement pas le cas au Moyen-Orient. Il nous faut séparer les problèmes et faire deux traités séparés, l'un sur le droit de visite et l'autre sur le rapatriement.
Ce qui inquiète avant tout le parent, sa grande préoccupation, c'est de savoir où se trouve l'enfant. L'enfant est-il vivant ou mort? Se porte-t-il bien? Est-ce que le Service social international pourra avoir accès à cet enfant? Est-ce que cet enfant va bénéficier des mêmes droits qu'au Canada? Sera-t-il suivi médicalement? Va-t-il être nourri? Va-t-on lui donner des vêtements? Va-t-il aller à l'école? Est-ce qu'on s'occupe de lui? Toutes ces questions devraient être réglées dans un traité séparé en attendant que l'on règle la question du rapatriement. La question du rapatriement est très complexe, surtout lorsqu'on pense au Moyen-Orient, où les questions liées à la religion, à la culture et aux traditions doivent être réglées car elles revêtent une énorme importance.
• 1645
Voici donc ce que je propose au titre de l'accord bilatéral
concernant le droit d'accès et de visite dans les pays qui ne sont
pas parties à la Convention de La Haye où se pratique l'enlèvement
d'enfants. On devrait immédiatement accorder au parent qui a perdu
la garde le droit inconditionnel de voir périodiquement son enfant,
à moins que ce droit ne soit réputé représenter un danger pour ce
dernier. Dans ce cas, on peut accorder un droit de visite supervisé
jusqu'à ce qu'on puisse prouver de telles allégations.
Ce droit de visite devrait être de trois jours par semaine ou plus, selon l'entente mutuelle. Par conséquent, le parent qui a perdu la garde aurait la permission d'avoir librement accès à son enfant trois jours par semaine.
Le non-respect de cette ordonnance, qui serait appliquée par des organismes locaux, serait passible de sanctions criminelles et d'amendes. Les autorités locales veilleraient à faire respecter cette ordonnance.
Un organisme central semblable à celui de La Haye, c'est-à-dire le bureau du procureur général, serait chargé de l'application de l'ordonnance. On devrait accorder sans délai ce droit aux parents.
La GRC pourrait, en vertu d'une entente, présenter une demande qui serait reconnue par les autorités étrangères. Ces autorités étrangères repéreraient et interrogeraient le conjoint ravisseur, qui serait tenu de présenter chaque semaine aux autorités locales un compte rendu des allées et venues et du bien-être de l'enfant. Le non-respect de cette exigence serait passible de sanctions criminelles.
L'ambassade pourrait demander en tout temps et fournir pour la première fois un médecin qui évaluerait la santé de l'enfant. On permettrait également au SSI, soit au Service social international, d'évaluer périodiquement la condition de l'enfant par la suite. Cette ordonnance serait applicable par les autorités locales et entrerait en vigueur sans délai.
Tout projet de voyage du parent ravisseur doit être signalé.
L'enfant canadien qui a été enlevé et qui est détenu dans un pays étranger conserverait ses droits fondamentaux à de la nourriture, à un refuge, à des soins médicaux, à des vêtements et à une éducation. On permettrait au Service social international d'évaluer l'enfant, à qui l'ambassade serait obligée de fournir des services sociaux.
On devrait favoriser la création d'une tribune permettant le dialogue entre les parents.
Le ministère des Affaires étrangères devrait former une équipe d'intervention chargée d'aborder cette question, soit l'enlèvement d'enfants, de façon spécifique. Cette équipe devrait comporter des avocats spécialisés dans le droit international tels que Heather Ritchie et éventuellement des avocats spécialistes de la loi islamique ainsi que des travailleurs sociaux, des médecins et tous les spécialistes jugés nécessaires par le comité.
Des objectifs et des buts précis devaient être fixés. Que ces traités bilatéraux soient ratifiés ou non, on devrait toujours faire dépendre l'aide internationale du respect de certains droits de la personne bien déterminés, tels que la protection contre les violences et l'enlèvement des enfants.
Le deuxième accord devrait porter sur le rapatriement. Il serait rédigé selon les mêmes principes que la Convention de La Haye. Ces accords bilatéraux devraient être signés individuellement avec chacun des pays du Moyen-Orient. Je pense que la Jordanie serait le pays idéal pour commencer parce qu'il est certain que le roi de Jordanie est pro-occidental et qu'il est prêt à nous écouter. Une fois que l'accord bilatéral aura été passé avec le roi, il servira certainement de modèle pour les autres pays du Moyen-Orient. Le roi est très respecté par les autres dirigeants islamiques de la région et je pense que ce serait la tribune idéale qui permettrait au Canada et à la communauté internationale d'aider à résoudre un bon nombre de ces affaires et de venir au secours d'un bon nombre de ces enfants.
Pour terminer, j'aimerais évoquer un certain nombre des conséquences de l'enlèvement d'enfants.
Ces conséquences sont les suivantes. Ce n'est pas seulement l'enfant que l'on enlève et qui se retrouve dans un autre pays. Il est indéniable que dans certains pays du Moyen-Orient, l'enfant va être exposé à certains risques physiques, tels que la mutilation génitale pour les filles et les crimes d'honneur pour les femmes et les enfants—j'ai fait figurer dans mon dossier un certain nombre d'articles sur la Jordanie pour vous montrer en quoi consiste ces crimes d'honneur, où une femme est accusée de certaines choses et où elle est finalement tuée—le manque d'éducation, l'absence de soins médicaux, etc. C'est un crime, c'est un kidnapping. Ces enfants courent de toute évidence un risque et il convient qu'un comité comme le vôtre se penche immédiatement sur la question.
La présidente: Je vous remercie.
Madame Debien.
Que de choses à dire, n'est-ce pas? Nous avons de quoi réfléchir aujourd'hui.
[Français]
Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Bonjour, mesdames, monsieur. D'abord, je voudrais vous remercier d'être venus témoigner devant notre comité de cas aussi concrets, aussi pathétiques et tragiques.
Devant cette masse d'information, vous comprendrez que notre comité aura des recommandations très précises à faire au ministre des Affaires étrangères et au gouvernement canadien.
• 1650
Plusieurs d'entre vous ont donné un certain nombre de
pistes de solutions et des exemples concrets, entre
autres Mme Ritchie.
Je poserai une question en ce sens puisque cela
fait partie de notre mandat de législateur. Vous avez
dit qu'un des moyens les plus importants pour essayer de
solutionner le problème de l'enlèvement international,
c'était d'apporter des améliorations importantes sur le plan
législatif.
Nous sommes des législateurs et j'aimerais que vous
nous disiez, sachant
qu'on ne pourra pas tout faire et que
toutes vos recommandations ne pourront pas être mises en
oeuvre dès maintenant, quelles recommandations nous
devrions retenir dans le cadre de notre rapport et quelles
améliorations législatives le gouvernement canadien
devrait apporter dans l'immédiat afin d'obtenir
des résultats concrets dans l'immédiat. Bien sûr, il y
a des solutions à court terme, à moyen terme et à long
terme.
Mais dans l'immédiat, puisque nous sommes plongés dans ce problème actuellement, qu'est-ce que vous suggérez? Que nous recommandez-vous de faire immédiatement? Qu'est-ce que le gouvernement canadien pourrait faire immédiatement pour apporter une amorce de solution au problème de l'enlèvement international?
[Traduction]
Mme Heather Ritchie: Il y a un certain nombre de domaines dans lesquels il serait utile de modifier la législation. Dans certains cas, ce serait par voie de réglementation, et je pense à ce dont nous avons parlé au sujet du renforcement des frontières. Ceux d'entre nous qui pratiquent le droit estiment que la législation qui traite de l'enlèvement des enfants est tellement générale qu'il est devenu trop facile pour un autre pays de l'interpréter de manière tout à fait différente. J'imagine que si l'on fait référence dans le Code criminel aux enlèvements d'enfants—et je parle ici du Code criminel—alors qu'il n'existe pas d'ordonnance pour dire que l'un ou l'autre des parents a la garde, il est difficile de prouver que c'est un enlèvement. Il nous faut donc prévoir dans le Code criminel une disposition permettant de régler le genre de situation que nous avons décrite ici.
Il faut que ce soit une disposition qui prévoit qu'il peut en fait y avoir enlèvement si les deux parents, par définition, ont la garde conjointe de l'enfant étant donné qu'ils résident ensemble en tant que mari et femme ou en tant que parents de l'enfant, et si l'un d'eux emmène l'enfant. On parlera alors d'enlèvement sans qu'il y ait à obtenir une ordonnance judiciaire distincte. Autrement dit, si l'on ne prévoit pas ou si l'on ne veut pas précipiter une séparation, il faut que l'on ait la garantie que si l'un des parents fait sortir l'enfant du territoire, on considérera qu'il y a eu enlèvement indépendamment de toute ordonnance judiciaire. Je pense que c'est le premier point.
Les tribunaux civils, que ce soit au niveau du pays ou des provinces, sont appelés à se prononcer sur la question du lieu de résidence habituel ou ordinaire de l'enfant. Il faut que ce soit défini plus strictement et que les tribunaux soient davantage disposés dans notre pays à accepter leur compétence. Le tribunal sera bien entendu guidé par la loi; il faut que la loi soit plus précise pour que les juges puissent en fait s'en prévaloir.
Il y a un autre problème, dont nous avons discuté, qui a trait aux ordonnances de poursuite, au sujet desquelles les juges nous disent qu'ils ne peuvent pas nous accorder une ordonnance que l'on ne peut pas faire appliquer. Si l'enfant se trouve en Jordanie, par exemple, et si la Jordanie n'est pas disposée à reconnaître une ordonnance de poursuite, le juge ne va pas me l'accorder. Bien évidemment, si la femme de M. Reddy se rend dans un pays où elle est susceptible d'être reconnue, ou si elle vient au Canada, cette ordonnance serait tout à fait précieuse. Nous avons donc besoin d'un instrument qui nous donnerait les moyens de faire appliquer ce que l'on appelle à l'heure actuelle les ordonnances de poursuite.
Là encore, c'est la Cour suprême qui a pris les décisions, et elle l'a fait en fonction de la loi. Nous demandons que l'expression «lieu de résidence ordinaire et habituel» soit plus clairement définie pour qu'on ne puisse pas en modifier le sens par un acte qui n'est peut-être pas illégal en soi mais qui revient en fait à un enlèvement. Nous avons besoin de définitions plus strictes pour que les juges puissent faire le travail qu'ils souhaitent en fait accomplir mais que la loi les empêche de faire.
• 1655
Nous avons besoin de sanctions plus lourdes à l'encontre de
tous ceux qui commettent ces infractions lorsqu'ils se trouvent à
relever de la compétence du Canada, et nous avons besoin de mettre
en place des mesures de protection concernant les enfants une fois
que nous les récupérons. Lorsqu'une infraction a été commise par
l'un des parents, que l'enfant a été récupéré, mais que ce dernier
revient pour reprendre une fois de plus l'enfant—je peux vous dire
que ça se produit souvent—il faut qu'il y ait de lourdes
sanctions.
Ce sont là un certain nombre de points à aborder mais, de manière générale et dans la pratique, il faut simplement qu'on nous donne et qu'on donne aux tribunaux les moyens d'agir.
La présidente: Merci.
Monsieur Robinson, M. Bonwick doit nous quitter bientôt.
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Vous m'excusez, Svend?
M. Svend Robinson: Oui, allez-y.
La présidente: Vous avez sept minutes.
M. Paul Bonwick: Je n'ai pas besoin d'autant. Je serai bref. Je vous demanderai de m'excuser: je suis pressé, car je dois assister à un autre comité.
C'est sûrement l'une des situations les plus délicates qui m'ait été donné d'entendre en comité. Comme j'ai des enfants, j'imagine tout à fait ce que vous ressentez et, croyez-moi, nous sommes très émus par tout cela.
Pendant vos exposés, j'ai pris des notes sur les différentes solutions possibles que vous avez proposées. Mme Ritchie a déclaré ou plutôt suggéré—comme d'autres témoins l'ont fait avant elle d'ailleurs; pas aujourd'hui, mais dans les semaines précédentes—que ce ne sont pas là forcément des crimes ponctuels. Les enfants sont restitués ou remis à leur gardien légitime, puis les choses se reproduisent. J'ai deux ou trois remarques à faire à ce sujet.
Je me demande si l'on ne pourrait pas imposer une peine dissuasive, une deuxième fois, en réclamant éventuellement les coûts de récupération de l'enfant à la personne l'ayant enlevé. Troisièmement, on pourrait extrader le coupable. Est-ce que l'extradition serait efficace?
Je vais vous poser mes questions en bloc, madame Ritchie. Je vous invite à en noter quelques-unes pour que vous puissiez y répondre plus tard.
Avez-vous des recommandations à formuler au sujet des contrôles aux postes frontières, qui ne sont pas assez serrés—je crois que c'est ce qu'on a dit—pour, justement, resserrer ces contrôles? D'après ce que nous ont dit d'autres témoins, avant vous, on peut parler de zones à haut risque, de pays à haut risque et de cultures à haut risque. Vous aurez peut-être quelques suggestions à nous faire sur la façon dont nous pourrions nous occuper des voyageurs qui passent par nos aéroports, ou franchissent notre frontière avec les États-Unis par train ou autre.
Encore une fois, avec les témoins précédents, le comité s'est penché sur les politiques spécifiques à adopter quand il y suspicions. Je serai curieux d'entendre votre réaction à ce sujet. Il semble qu'il n'existe aucune politique à cet égard. Si, par exemple, M. Robinson et moi-même constations quelque chose de louche à bord d'un avion, nous ne pourrions nous appuyer sur rien pour savoir comment agir. Nous signalerions le cas à l'agent de bord, mais il n'existe pas de règle qu'on est censé suivre. Chacun est un peu laissé à soi-même et doit seul décider si ses suspicions sont légitimes ou pas. Je me demande donc si nous ne devrions pas adopter un ensemble de règles. Par exemple, on pourrait préciser: que tous les soupçons doivent être communiqués au commandant de bord, parce que ce n'est pas à nous d'agir; que le commandant de bord doit faire rapport aux autorités compétentes, parce que ce n'est pas à lui d'agir, et qu'un affidavit ou un acte notarié doit être rédigé au moment de l'atterrissage de l'avion, sans quoi la personne concernée ne pourra pas aller dans son pays de destination.
• 1700
Vous avez parlé de la saisie des passeports, madame Ritchie.
De quels passeports parlez-vous? Des passeports canadiens ou des
passeports d'autres pays, car il ne faut pas oublier la question de
propriété?
Vous avez dit également qu'à l'occasion, le tribunal de La Haye est une entrave. D'autres témoins nous ont dit exactement l'opposé, autrement dit qu'il est excessivement difficile de régler ce genre de situation et de rapatrier un enfant quand on a affaire à un pays ne reconnaissant pas le tribunal de La Haye.
Vous avez dit que certains consulats ne sont pas aussi coopératifs qu'ils le devraient, ou peut-être qu'ils n'administrent pas correctement ces dossiers. C'est du moins ce que j'ai compris de deux ou trois de vos déclarations. Cela aussi va à l'encontre de tout ce qu'on nous a dit à ce sujet, car les autres témoins semblaient penser que nos consulats sont très coopératifs.
M. Svend Robinson: C'est la dernière fois que je vous cède mon tour.
M. Paul Bonwick: Il me reste trois minutes.
Une dernière chose, au sujet des coûts. Ne serait-il pas intéressant que vous puissiez déduire tous les coûts, ou bénéficier d'un crédit d'impôt?
Mme Heather Ritchie: Oui.
M. Paul Bonwick: Désolé, Svend; je vous abandonne la place maintenant.
M. Ron Reddy: À condition que vous ayez un revenu déclarable pendant cette période.
M. Paul Bonwick: Eh bien, il y a toujours la possibilité de reporter sur les années suivantes, à moins qu'on fasse faillite. On peut revenir plusieurs années en arrière.
Mme Heather Ritchie: Pour ce qui est des coûts, en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, les frais de justice encourus pour obtenir les pensions alimentaires sont déductibles aux fins d'impôt. Je suis d'accord avec vous que c'est là une excellente façon de consentir un modeste soulagement aux intéressés, mais je dois vous dire que la plupart des personnes avec qui je traite n'ont pas les revenus voulus pour bénéficier de ces abattements fiscaux.
Pour passer à autre chose, ce n'est pas avec les consulats que nous avons en des problèmes, mais plutôt avec le bureau de la réciprocité. Je ne dirai jamais assez de bien du consulat ou du ministère des Affaires étrangères ou de Gar Pardy. Quant au bureau de la réciprocité, je ne dirai pas que ces gens-là sont difficiles. J'estime qu'ils sont en sous effectif et qu'ils ne sont pas assez informés sur le sujet.
Quand j'affirme que La Haye est un obstacle, je ne fais pas la comparaison avec ce qui se passe dans les pays ne reconnaissant pas ce tribunal. Ce que je veux dire, c'est qu'on s'aperçoit que le tribunal pourrait faire mieux, qu'il pourrait accélérer les procédures. On dirait que le processus administratif en place fait entrave à ce que le tribunal est censé faire. Il n'y a rien à redire sur son mandat. En fait, les choses sont tellement lentes qu'il s'établit une sorte de statu quo dans l'autre pays, comme nous vous l'avons dit, ce qui est un gros problème.
La présidente: Je voudrais tirer une chose au clair. Vous avez parlé du bureau de la réciprocité. Est-ce l'autorité centrale? Les deux sont-ils interchangeables, selon vous?
Mme Heather Ritchie: Effectivement. Nous nous adressons au bureau de la réciprocité à Toronto.
Quant aux conséquences, l'établissement de la peine pourrait bien sûr être un aspect à considérer. Je pense que la saisie de biens mobiliers serait une excellente façon de réprimander une personne. Siddique, lui, n'avait rien ici qui soit vraiment de valeur, mais s'il avait eu une entreprise ou quelque chose du genre, nous aurions pu saisir... Nous agissons avec effet inverse. Dans le cas de Nancy, nous avons obtenu une ordonnance alimentaire dont le montant est tellement élevé que M. Spiros Voultsos doit penser que s'il se pointait dans notre pays, il devrait déclarer faillite dans les 15 minutes.
Pour ce qui est des contrôles aux frontières, je trouve que l'idée de M. Reddy est excellente. Je vais vous en donner un exemple. Le père de mes enfants était d'origine grecque. Leur nom de famille commence par un Z, il comporte beaucoup de «ou» et ne ressemble en rien au mien. L'année suivant le décès de leur père, mes deux enfants et moi sommes allés au Mexique. Eh bien, j'ai été arrêtée à la frontière parce qu'ils étaient mineurs et que je n'avais pas d'affidavit ni aucun autre document signé par mon ex-conjoint. Les douaniers ont insisté pour que je leur remette une déclaration signée par le père, ce qui faisait problème puisqu'il n'était pas là pour signer; nous avons dû engager un avocat à l'aéroport pour obtenir un affidavit. Ces gens-là n'avaient aucune idée de qui j'étais. L'avocat n'avait, lui non plus, aucune idée de qui j'étais. Eh bien, j'ai signé un affidavit déclarant que le père était décédé. Les enfants étaient assez âgés pour dire que c'était exact, mais ce pourrait de ne pas toujours être le cas.
La suggestion de M. Reddy est bonne. On pourrait adopter une sorte de mécanisme central, agrémenté d'une carte ou d'un document notarié par un bureau autorisé, déclarant, par exemple, que du 9 au 25 juin un tel se déplacera avec tel et tel enfant et que le voyage n'aura pour objet de changer leur lieu habituel de résidence. La signature de la personne concernée pourrait être vérifiée, parce qu'il est toujours possible d'imiter une signature. Je trouve que ce serait un excellent mécanisme.
• 1705
Nous avons constaté que bien des ravisseurs passent par les
États-Unis. Je sais qu'il est difficile d'exercer un contrôle à
cause du grand nombre de voitures franchissant la frontière, mais
on pourrait toujours le faire dans le cas des véhicules ayant des
enfants à bord.
Quant au mécanisme de rapport dont vous parliez, il pourrait certainement être identique au mécanisme de compte rendu du CAS. Comme l'a dit M. Reddy, l'enlèvement d'un enfant est une forme de mauvais traitement. Si votre voisin brutalise son enfant, vous devez le signaler, que vous soyez ou non en position de confiance.
Si l'on exigeait la même chose de tous les voyageurs internationaux, je ne sais pas si cela ferait une grande différence, mais peut-être bien.
Nous pourrions peut-être modifier la façon dont nous émettons les passeports pour les enfants. Il est peut-être trop facile d'obtenir un passeport pour un enfant ou de faire coucher un enfant sur le passeport de quelqu'un.
Supposons qu'on se trouve dans un cas où une ordonnance de tribunal a été émise. L'enfant a été couché sur le passeport de sa mère. Le père obtient la garde de l'enfant. La mère va enlever l'enfant. Le nom de l'enfant est encore dans le passeport de sa mère et n'apparaît nulle part ailleurs, sur aucun autre passeport, si bien qu'elle peut traverser n'importe quelle frontière avec un enfant en bas âge.
Voilà les quelques suggestions que je ferais à cet égard.
La présidente: Merci. Monsieur Robinson.
M. Svend Robinson: Merci beaucoup. Je tiens à remercier les témoins. Excusez-moi d'être arrivé en retard. J'ai dû assister à une autre réunion avant de me présenter ici.
Aujourd'hui, c'est le Jour international des droits de l'homme, ce que je trouve ironique car j'estime qu'il n'y a pas de violation plus grave des droits de la personne que d'enlever un enfant...
Mme Heather Ritchie: Ou d'être dans la peau de l'enfant qui est enlevé.
M. Svend Robinson: ...ou d'être dans la peau d'un enfant enlevé. Les témoignages d'aujourd'hui, dans le cadre de ces audiences ne pouvaient donc pas mieux tomber.
Je pratique ces lieux depuis longtemps déjà, depuis un peu plus de 18 ans, et j'ai siégé à de nombreux comités; mais je puis vous assurer qu'il est rare de voir une telle combinaison d'analyses solides, bien senties, et d'émotions et de témoignages personnels poignants.
Je tiens à remercier les témoins. Je sais qu'il n'est pas toujours facile de parler ainsi du coeur. Je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de le faire.
J'ai rencontré Ron dans mon bureau de circonscription. Je peux vous garantir—et je suis certain que je m'exprime au nom de tous les membres du comité—que nous nous débattons pour essayer de faire des recommandations efficaces au gouvernement afin qu'il agisse rapidement. Angelina a tout à fait raison: nous ne devons pas attendre deux, cinq ou dix ans. Que l'on change la loi ou la politique, il faut faire quelque chose très vite. Et je peux vous assurer que tel est notre engagement.
J'aurais deux ou trois questions à vous poser. J'ai l'impression, en entendant les témoignages des deux témoins et des autres, que la chose la plus importante que nous pourrions recommander serait de trouver une façon permettant, d'abord, d'empêcher à quelqu'un de faire subrepticement sortie un enfant du pays, n'est-ce pas? Parce qu'une fois qu'il en est sorti, surtout s'il se retrouve dans un pays ne reconnaissant pas le tribunal de La Haye, il faut bien reconnaître que la situation se transforme en véritable cauchemar où apparaissent avocats et ambassades et tout le reste, comme nous l'a raconté Ron. Personnellement, j'ai l'impression que c'est sur ce plan que nous devrions faire tout notre possible: il faut, dans un premier temps, empêcher que les enfants puissent sortir du pays.
La question du contrôle aux frontières est importante. Je pense qu'il y a des pays—et je ne sais si nos chargés de recherche ou Mme Ritchie se sont intéressés à cela—où les règles régissant la sortie des enfants sont beaucoup plus strictes que les nôtres. Je sais qu'il existe de tels pays. J'en ai parlé avec des amis.
Cuba en est un. Un adulte seul ne peut absolument pas s'approcher d'un avion en compagnie d'un enfant, sauf s'il est en mesure de prouver hors de tout doute qu'il a le droit de quitter le pays avec lui.
J'estime que les choses sont beaucoup trop relâchées au Canada. J'espère donc que nous pourrons nous pencher sur cette question.
J'en reviens à la question que je veux poser et, je crois, qui s'adresse à Mme Ritchie. Je veux parler de la double citoyenneté. C'est délicat, parce que les gens peuvent avoir deux passeports. Le gouvernement du Canada est propriétaire du passeport canadien. Mais quel pouvoir légal un juge aurait-il, par exemple, pour ordonner la saisie d'un passeport appartenant à un autre pays? Les juges peuvent confisquer un passeport canadien, mais la personne peut alors prendre son deuxième passeport et s'en aller.
Madame Ritchie, pouvez-vous aider un peu le comité sur ce plan?
Mme Heather Ritchie: Je sais que, par exemple, un juge d'une cour générale a ordonné la confiscation du passeport de M. Chen, originaire de la République populaire de Chine, et la GRC était prête à agir dans ce sens. Je pense donc qu'il a estimé être compétent en la matière. Je ne sais pas ce qui lui a permis de penser qu'il avait compétence, mais il a dû le trouver quelque part.
M. Svend Robinson: Comme je le disais, nos attachés de recherche essaient de trouver s'il existe un fondement juridique à la confiscation de passeports d'autres pays.
Mme Heather Ritchie: J'imagine que cela se justifie probablement dans tous les cas où l'on peut éviter la commission d'un crime.
M. Svend Robinson: Eh bien, ce serait très bien si vous pouviez nous donner un petit coup de main à ce propos. Il est évident que nous ne voulons pas nous retrouver dans des situations où, après avoir saisi le passeport canadien, la personne peut tout de même partir grâce à un deuxième passeport.
Mme Heather Ritchie: Il y a un autre problème avec cette question de double citoyenneté, pas forcément par choix, mais de fait. Par exemple, le petit garçon de Nancy est citoyen canadien et il n'a jamais été inscrit comme ressortissant grec, mais il est considéré comme étant Grec par ce pays. Mes enfants n'ont jamais été en Grèce, mais ils sont considérés comme étant des citoyens grecs. Cela pose problème.
M. Svend Robinson: Deux petites questions, après quoi je céderai la parole à mes collègues.
Monsieur Reddy, vous avez parlé de l'importance des accords bilatéraux et je partage votre avis à ce sujet. On peut s'attendre à ce que des pays ne signent jamais la Convention de La Haye, pour une raison ou une autre. Si nous ne pouvons invoquer la Convention de La Haye, peut-être pourrions-nous invoquer d'autres accords portant sur les éléments que vous avez soulevés. La première étape doit avoir pour objet de permettre de voir l'enfant, pour s'assurer qu'il est en sécurité, la deuxième étape consistant à le rapatrier.
Je crois savoir que, récemment, le Canada a signé une entente bilatérale avec l'Égypte. Pourriez-vous nous dire si cette entente fonctionne bien et si, selon vous, elle constitue une étape dans la bonne direction?
M. Ron Reddy: Très certainement. Je me suis entretenu avec André Dugas, du cabinet de Gar Pardy, à cet égard. Personnellement, je n'ai pas lu l'accord, mais d'après ce qu'on m'a dit, il ne s'agit pas vraiment d'un traité, mais beaucoup plus d'une tribune permettant aux deux parents de se rencontrer pour essayer de parvenir à une solution.
J'insiste pour que nous signions un accord énonçant clairement le droit d'accès à l'enfant. Il faudrait aller au-delà d'une simple déclaration du genre: «Vous pouvez vous réunir pour essayer de trouver une entente à l'amiable». Il est, certes, important de favoriser le dialogue, mais il faudrait indiquer très clairement que le père et la mère ont tous deux le droit d'avoir accès à l'enfant. Les deux gouvernements devraient ratifier ce genre d'entente.
Je me suis entretenu avec des représentants du gouvernement jordanien qui m'ont dit ne pas y être opposés, parce que c'est une nation islamique. En effet, il est dit dans la loi religieuse que les deux parents ont le même droit d'accéder à leur enfant. Soyons francs! Selon les gouvernements de la région qui signeront la Convention de La Haye seront rares. J'ai parlé avec des avocats jordaniens et plusieurs personnes d'origine arabe qui m'ont déclaré, sans ambages, que leurs pays ne signeraient pas la Convention de La Haye. En revanche, ils seraient prêts à conclure des ententes bilatérales garantissant le droit d'accès et de visite.
Dans l'entente conclue avec l'Égypte, il n'est pas dit explicitement que les parents ont le droit d'accès à l'enfant ou pas, on n'y précise pas non plus la période d'accès ni qui pourra voir l'enfant. Bien souvent, un des parents canadiens réside au Canada. Devra-t-il laisser son travail pour se rendre en Égypte, voir son enfant pendant une semaine ou à raison d'une heure une fois par semaine, puis rentrer, et faire ainsi des allers et retours?
Il faudrait prévoir un autre mécanisme pour que, pendant la période de transition, l'ambassade ou les Services sociaux internationaux aient également la possibilité d'évaluer la situation de l'enfant. Ce n'est pas la situation du père ou de la mère qui est importante, mais celle de l'enfant. Il faut que cela soit bien précisé, même dans le cadre de cet accord avec l'Égypte et très certainement, bien sûr, dans le cadre des accords ultérieurs que nous élaborerons.
La présidente: Monsieur Reddy, dans le cas qui vous intéresse, votre beau-père menace de vous tuer, n'est-ce pas?
M. Ron Reddy: C'est cela, c'est un élément du dossier, et c'est un monsieur qui a beaucoup d'influence dans son pays.
La présidente: Mais alors, comment ce genre de recommandations pourrait vous aider dans des situations comme la vôtre?
M. Ron Reddy: Ça pourrait certainement m'aider. Mon beau-père est un homme qui a beaucoup d'influence aux paliers inférieurs du gouvernement, là où il peut bloquer le processus de négociation que j'ai entrepris. En revanche, le roi est un homme très raisonnable. Je pense que la plupart des dirigeants de ces pays, quelle que soit leur croyance, sont des gens raisonnables. Ils connaissent les droits d'un parent, qui est même énoncé dans la loi islamique. Le père et la mère ont un droit absolu d'accéder à leur enfant.
Si cela était précisé dans une entente bilatérale, conclue entre gouvernements, et que je rende visite à mon enfant, je ne pense pas qu'un pays comme la Jordanie serait très heureux de permettre à ce monsieur de me menacer, parce que cela ferait mal paraître le gouvernement. Je sais que la Jordanie obtient beaucoup d'aide économique de divers pays étrangers. Je suis sûr que le palais royal et les échelons supérieurs du système parlementaire contribueraient à régler la situation.
M. Svend Robinson: Merci beaucoup.
La présidente: Merci.
Madame Augustine.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: J'aimerais intervenir sur cette question du passeport.
La présidente: Je vous en prie.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Depuis que j'ai imploré le juge et qu'il n'a pas tenu compte de ma déclaration, je me demande s'il ne serait pas possible de faire quelque chose sur-le-champ, le jour même où l'on passe devant le tribunal; ne pourrait-il pas faire quelque chose qui serait répercuté par courrier électronique? Après tout, le Canada est un pays informatisé. Il faut faire quelque chose sur ce plan.
• 1715
Par ailleurs, j'essaie de déterminer qui a signé le passeport
pour moi. Qui l'a signé? Pourquoi la police ne s'en mêle-t-elle pas
et n'essaie-t-elle pas de faire quelque chose? Je l'ai appelée.
J'ai demandé pourquoi personne ne faisait rien. Qui a signé ce
passeport? Qui m'a représentée et a soumis mes documents?
Il serait possible de faire quelque chose en cour, sur place, le jour même. Il suffirait de lancer un message par courrier électronique pour mettre les gens en alerte. Voilà ce qu'on peut faire, ce n'est pas insurmontable.
Je pense qu'au moment de franchir la frontière yougoslave, mon fils était sous sédatif. On l'a endormi dans l'avion. Je lui ai demandé, quand je l'ai vu en Yougoslavie, comment il avait toléré le voyage. Il m'a répondu qu'il n'avait rien vu. Que s'est-il passé? On l'a endormi à bord de l'avion. Il ne sait même pas quand il a pris cet avion.
Pourquoi ne l'a-t-on pas aidé? Pourquoi la police ne s'en est-elle pas mêlée? Croyez-moi, je n'ai reçu aucun soutien de la police. Je les maudis tous les jours. La police, elle, me dit: «Ne vous inquiétez pas madame, il est avec son père». Eh bien ce n'est pas juste.
Je pense qu'on devrait l'appeler, la police.
La présidente: Je vois que vous avez quelques questions justifiées auxquelles vous aimeriez obtenir réponse. Nous allons nous efforcer de faire venir les gens des passeports, ici, pour leur poser le genre de questions que vous avez soulevées: que s'est passé? Comment pourrait-on éviter la répétition de tels événements?
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Comment ce monsieur pourrait...
La présidente: Nous allons poser toutes ces questions.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Comment quelqu'un a-t-il pu acheter un billet sans mon... L'agence fait de l'argent sur notre dos. Elle fait des affaires. C'est un crime. Personne ne voit cela.
La présidente: Mme Augustine veut vous poser des questions.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Moi aussi, je veux faire écho à mes collègues et vous dire à quel point je trouve très grave tout ce que vous nous avez relaté dans votre témoignage.
Je veux mieux comprendre le critère de résidence habituelle et la façon dont tout cela fonctionne. J'aimerais que vous nous en parliez pendant deux ou trois minutes.
Deuxièmement, monsieur Reddy, on vient de nous remettre des documents supplémentaires, la pièce A, et je me demande si elle est reliée à votre cas. Votre femme, elle aussi, a été enlevée...
M. Ron Reddy: Non.
Mme Jean Augustine: ... par son père?
M. Ron Reddy: La pièce dont je vous ai parlé vient à l'appui de... J'ai fait certaines déclarations qui sont étayées par ces pièces.
Par exemple, il y a ici la circulaire d'Interpol dont je vous ai parlé. Il y a aussi une lettre de l'ambassade canadienne dont je fais référence dans ma lettre. Il y a une lettre du Bureau de la reine en Jordanie dans laquelle Sa Majesté indique qu'il n'existe aucun protocole judiciaire. Je n'ai fait qu'étayer mon argumentation des preuves appropriées.
Mme Jean Augustine: J'ai lu le document où il est question de harcèlement, à Sacramento.
M. Ron Reddy: Oui.
Mme Jean Augustine: C'était avant votre mariage?
M. Ron Reddy: Nous étions déjà mariés, mais comme je suis Chrétien et que ma femme est Musulmane, son père est venu la menacer de la tuer et de tuer notre enfant. Voilà toute l'histoire et je me pose des questions sur l'état mental de la personne auprès de laquelle réside ma fille, car ce n'est certainement pas un bon milieu pour elle.
J'ai des documents juridiques émis par les tribunaux de Sacramento. Celui-ci a été signé par ma femme. Elle parle de son père et de ce qu'il lui a fait. Maintenant, elle vit à ses côtés avec ma fille. Cela montre bien le genre de mainmise que ces gens-là ont sur leurs enfants et le genre de milieu dans lequel vit actuellement ma fille.
Mme Jean Augustine: Mais vous aviez déjà entendu parler de la charia, avant?
M. Ron Reddy: Non. Je l'ai étudiée. J'ai obtenu mon Ph.D. sur ce sujet, en Jordanie. Je l'ai étudiée en profondeur pour m'y accoutumer quand j'ai dû m'élever contre cette loi sacrée pour essayer de rapatrier ma fille et d'avoir accès à elle.
J'ai, maintenant, réussi à obtenir une injonction d'un tribunal jordanien me permettant d'avoir accès à ma fille. Cela fait un mois à peu près, après huit mois de combat. J'ai étudié la loi musulmane pour savoir comment appréhender le système jordanien. Si on s'y prend mal, on n'aboutit à rien. Je devais savoir contre quoi j'allais lutter et dans quel milieu tout cela se passait. Voilà pourquoi j'ai appris la charia.
Mme Jean Augustine: J'aimerais que Mme Ritchie nous parle de toute la question de la résidence habituelle. Pourriez-vous nous en parler?
Mme Heather Ritchie: On parle indifféremment de résidence habituelle ou de résidence ordinaire, la dernière définition étant celle du Code criminel. Je n'ai pas apporté un exemplaire du Code avec moi.
• 1720
Dans la Loi portant réforme du droit de l'enfance, en Ontario,
on parle de résidence habituelle et les autres provinces ont des
lois semblables.
Il est dit, à propos de la compétence des tribunaux ontariens:
-
22. (1) Le tribunal ne peut exercer sa compétence en matière d'ordonnance
de garde ou d'accès à un enfant que
-
a) si l'enfant résidait
habituellement en Ontario au début des procédures de demande
d'ordonnance.
Il arrive que, même si l'enfant n'a pas sa résidence habituelle en Ontario, le tribunal considère que celui-ci réside tout de même dans la province si, au début de la procédure de demande d'ordonnance, il était effectivement présent dans la province, ou si le tribunal dispose de preuves raisonnables établissant que le meilleur intérêt de l'enfant consiste à considérer qu'il réside en Ontario.
Voici comme on définit la résidence habituelle:
-
(2) Un enfant est habituellement résident du lieu où il demeurait
-
a) avec ses deux parents;
-
b) si les parents sont séparés, avec le
parent-gardien désigné dans l'entente de séparation; ou quand
l'autre parent a donné sont consentement implicite ou son
assentiment; ou quand il existe une ordonnance de tribunal;
-
c) ou encore, quand il est avec une personne autre que les
parents, de façon permanente.
Le problème, c'est que l'expression «résidence habituelle» est très générale. L'enfant doit-il être un résident habituel de l'Ontario le jour où je dépose ma demande d'ordonnance de garde? Nancy, elle, était bloquée en Grèce avec son enfant, quand j'ai dû me débattre avec ce problème. Il m'a fallu établir qu'il existait un lien substantiel et qu'aucun des époux n'avait rompu ses liens avec le Canada. Par exemple, ils y avaient laissé des effets en entreposage. Ils étaient en possession d'un billet de retour par avion, bien que cela se soit avéré tangent, parce que le mari, lui, n'avait pas acheté de billet de retour. Elle avait un emploi et avait pris des dispositions pour placer son enfant en garderie à son retour. Il nous a fallu faire traduire cette masse de documents. Nous avons dû démontrer qu'il existait un lien véritable avec le Canada.
Mais que se passe-t-il dans le cas de Mme Siddique, quand elle va là-bas et que son mari coupe tous les ponts pour qu'il n'y ait plus aucune trace de lui au Canada, au moment où elle sort de l'hôpital psychiatrique, qu'elle cesse de prendre des médicaments et qu'elle commence à entreprendre des démarches pour obtenir une ordonnance d'accès à son retour au Canada? À ce moment-là, au moment où je dépose la demande au tribunal, il est évident que l'enfant n'est pas résident canadien. En outre, il ne reste plus aucun lien avec le Canada pouvant prendre la forme d'un emploi, d'une inscription scolaire et de choses du genre, parce que l'enfant est demeuré pas mal de temps hors du pays.
À partir de quel moment le tribunal de l'autre pays, ou un tribunal canadien, estime-t-il qu'il y a eu une forme de consentement, un consentement implicite ou un acquiescement? Nancy s'est rendue à l'étranger pour des vacances prolongées, de deux ou trois mois. Cela revient-il à dire qu'elle a consenti à changer de lieu de résidence? Dans ce cas, les tribunaux se fondent sur les éléments établissant, implicitement, que la personne a maintenu ses liens avec le pays.
Mme Jean Augustine: Et l'on ne se fie pas au nombre de mois ou au nombre d'années en question?
Mme Heather Ritchie: Ce n'est qu'un tout petit élément. Cependant, si j'ai emballé tout ce que je possède, que j'ai fait mes bagages et ai pris la direction d'un autre pays où que je me sois mise à la recherche d'un travail et ai pris des dispositions pour inscrire mes enfants à l'école, si j'ai trouvé un logement là-bas, après avoir dit au revoir à tout le monde, je pense qu'on peut dire que j'ai changé de lieu de résidence.
D'un autre côté, si je laisse tout derrière moi et que je m'en aille en disant: «Je m'en vais passer des vacances là-bas, peut-être pour six mois, mais je ne change pas de lieu de résidence», c'est très tangent. Voilà pourquoi je dis qu'il convient de resserrer la définition de ce qui constitue un lieu de résidence habituel ou ordinaire. En outre, il faut mieux informer les gens à ce sujet.
M. Ron Reddy: Si je puis me permettre de faire une remarque à propos de la question de la résidence habituelle, comme Mme Ritchie l'a soulignée, la période d'enlèvement de l'enfant ne devrait pas entrer en ligne de compte. On a affaire là à un acte criminel. On ne peut récompenser quelqu'un pour avoir commis un acte criminel. On ne peut considérer que le temps qu'un enfant passe au Pakistan ou en Jordanie, ou ailleurs, intervient dans la définition de résidence habituelle.
Mme Heather Ritchie: C'est exactement ce qui se passe au civil. Mais quand vous jetez un coup d'oeil sur l'article qui en traite dans le Code criminel...
M. Ron Reddy: C'est permis.
Mme Heather Ritchie: ... il est dit très précisément que si l'on enlève un enfant cela ne change pas son lieu ordinaire de résidence.
Cependant, il ne peut y avoir enlèvement d'enfant quand les deux parents ont la garde conjointe—ce qui est votre cas, sauf si vous disposez d'une ordonnance de cour stipulant que vous seule en avez la garde. Autrement dit, si vous n'avez pas d'ordonnance de cour parce que vous êtes en train de vivre en parfaite harmonie avec votre mari au moment où se produit l'événement, on considère que les deux parents ont la garde partagée de l'enfant.
Dans ce cas de figure, la GRC estime que s'il n'y a pas d'ordonnance de garde, il n'y a pas enlèvement. Nous prétendons le contraire. Si on étire un peu la chose en prétendant que les gens ont vécu sous le même toit, mais en séparation de corps, l'un des deux parents étant sous la contrainte...
Nancy, par exemple, a été contrainte de vivre, de manger et de coucher avec son compagnon sans quoi elle se serait retrouvée dans les rues de Killini, sans nulle part où aller, avec son petit garçon dans les bras. Le conjoint aurait eu la garde de l'enfant, ce qui l'a contrainte à se plier. C'était une situation horrible.
La présidente: J'ai ici sous les yeux l'article 283 du Code criminel qui traite de l'enlèvement. Est-ce que...
M. Ron Reddy: Il y a l'article 283, mais en fait un autre article parle d'enlèvement en cas d'absence d'ordonnance de garde, c'est l'article...
La présidente: En l'absence d'ordonnance de garde.
M. Ron Reddy: Oui, l'article 283 ou dans ce cas, l'article 250.2.
La présidente: Donc, quand il existe une ordonnance de garde conjointe, il n'y a pas enlèvement. C'est ce que vous dites?
Mme Heather Ritchie: Il n'y a pas enlèvement, et de plus, si vous n'avez eu aucune raison de vous rendre devant un tribunal pour obtenir une ordonnance, la garde est automatiquement conjointe. En l'absence d'ordonnance judiciaire, quand les choses se passent bien, le père et la mère ont tous deux la responsabilité de l'enfant...
La présidente: Mais en vertu de l'article 283, ce n'est pas un enlèvement?
Mme Heather Ritchie: Deux ou trois articles du code traitent d'enlèvement. Vous avez peut-être une version différente, mais étant donné la numérotation...
M. Ron Reddy: Cela coïncide avec l'article 283, dans la version que j'ai.
Mme Heather Ritchie: Oui, la numérotation a été récemment changée. Elle parle peut-être de la même. Puis, il y a l'article du code qui précise qu'il y a enlèvement quand il existe une ordonnance judiciaire. Les choses se compliquent quand il n'y a pas d'ordonnance de ce genre, mais un acte précipité par un parent pourrait déclencher la demande d'ordonnance. L'absence d'ordonnance n'équivaut certainement pas à un consentement.
Mais que se passe-t-il si je dis à mon mari qu'il peut emmener mon petit garçon en Iran, ou ailleurs, pour les vacances? J'ai consenti à ce que l'enfant parte, et comment alors peut-on invoquer l'enlèvement après? Eh bien, j'ai en fait consenti à ce que l'enfant s'en aille et revienne...
M. Ron Reddy: Selon l'article 283, on pourrait soutenir que la loi est rédigée de sorte à priver ce parent de l'accès à l'enfant et qu'aux termes de cette loi, une ordonnance pour enlèvement pourrait être émise.
Mme Heather Ritchie: Le problème, c'est que nous avons affaire là à une question de preuve et, pour l'étayer, il faut resserrer cette définition.
La présidente: Madame Bradshaw.
Mme Claudette Bradshaw (Moncton, Lib.): Excusez-moi d'arriver en retard, je reviens de l'université où j'ai pris la parole devant un groupe.
J'ai travaillé longtemps au contact des enfants victimes de violence. Dès que j'entends parler d'un parent qui perd son enfant, j'ai peur que mes deux fils soient enlevés. Je tenais à vous remercier d'être venu nous voir, parce que ça ne doit pas être facile pour vous, alors que nous sommes si près de Noël. Croyez-moi, je penserai à vous le matin de Noël.
J'aimerais avoir votre avis sur deux choses. Je suis d'accord, le plus important est d'éviter que de tels événements se produisent.
Je pensais que Mme Debien allait vous poser ma question, mais elle ne l'a pas fait cette fois-ci. Qu'en est-il du soutien juridique? Nous avons posé cette question à tous nos témoins. Comme j'ai travaillé au contact des gens pauvres, j'ai vu ce qui se passe... Je ne sais pas combien la parenté de Nancy a dû verser à l'avocat. Je sais que vous avez parlé d'un maximum de 15 000 $, Angela et Ron, mais je n'ai aucune idée de ce que vous avez versé jusqu'à présent. En tant qu'avocate, je me soucis d'abord de ce qui arrive aux pauvres qui ne peuvent s'offrir le soutien juridique. Deuxièmement, je me demande comment on peut les indemniser, je me demande ce qu'on peut faire. Nous avons parlé de l'aspect fiscal.
Vous-même, qui êtes avocate, avez sans doute été associée à cette question et avez dû rédiger des recommandations à de nombreuses personnes à ce sujet. Avez-vous vraiment l'impression qu'on vous a écoutée? Que pensez-vous de tout cela?
J'ai deux choses à demander aux parents. D'abord, est-ce que vous vous rassemblez entre parents dont les enfants ont été enlevés pour constituer un groupe de soutien? Je me demande s'il existe un comité national de parents. Ce serait une bonne opération de relations publiques, parce qu'on n'entend pas beaucoup parler de ce problème. J'estime qu'on pourrait en profiter pour informer les services de police, car d'après ce que j'ai entendu de bien des gens avec qui je me suis entretenue et de vous-même, aujourd'hui, il semble que tout commence quand vous faites votre premier appel téléphonique.
En outre, plusieurs personnes viendront témoigner devant ce comité et formuler des recommandations, mais en vous entendant, aujourd'hui, je me suis dit une chose: je vous garantis que c'est sans doute vos recommandations que nous retiendrons, parce que vous êtes directement concernés par ce problème et que c'est pour vous et pour vos enfants que ce comité a été mis sur pied.
Avez-vous communiqué avec le Bureau d'enregistrement des enfants disparus? Avez-vous eu un rapport quelconque avec cet organisme fédéral?
Si nous sommes en retard, vous pourrez toujours me donner votre réponse par écrit, à moins que vous ne préfériez le faire maintenant; c'est comme vous voulez...
La présidente: Je pense que vous trouverez certaines de ces réponses dans les exposés de nos témoins.
Mme Claudette Bradshaw: Effectivement, je suis arrivée en retard.
Mme Heather Ritchie: Je pourrais quand même vous donner ma réponse très vite. Comme elle était indigente, Mme Siddique a eu recours à l'aide juridique. J'ai donc dû me contenter de ce qui est prévu en Ontario. On m'a imposé de me limiter au tribunal provincial et c'est donc à nos frais que nous avons porté la cause aux instances supérieures. La province ne m'a rien versé pour les procédures à un autre palier.
• 1730
Dans le cas de Nancy, après avoir payé les frais de traduction
et le reste—qui se sont élevés à 15 000 $—ma cliente a dû
certainement débourser 100 000 $, dont très peu pour mon cabinet.
Toutes ces dépenses étaient dues à la nature des procédures, car
nous devions verser l'argent dans l'autre pays.
Nous avons essayé de mettre sur pied—et je vous dis cela pour que vous soyez au courant—ce que nous avons appelé le Fonds Tommy, Tommy étant le nom du fils de Nancy. Nous voulions recueillir des fonds pour envoyer de l'argent dans l'autre pays, et la Banque de Montréal s'est proposée pour le gérer. Nous n'avons pas besoin de cet argent pour le Canada. Ici, il est toujours possible d'obtenir des services bénévoles, contrairement à ce qui se passe dans l'autre pays où nous dépensons l'essentiel de l'argent.
Parfois, la différence entre gagner et perdre ce genre de poursuite dépend du montant... Bien sûr, M. Reddy a dû dépenser encore plus d'argent sans pour cela obtenir de résultat, mais toutes les causes ne se ressemblent pas; nous, nous avons essayé de lancer un fonds pour dédommager le parent demeuré au Canada et lui permettre de payer les frais exigés dans l'autre pays.
Quant aux groupes de soutien, on y vit des expériences qui sont sans doute les plus bouleversantes qu'on puisse imaginer. Enfin, je ne pense pas qu'on ait suivi mes recommandations, mais c'est sans doute parce qu'il n'existait pas alors les mécanismes actuels dont je me réjouis.
M. Ron Reddy: Dans mon exposé, j'ai parlé de la question des fonds. Je suis d'accord avec vous. Je me réjouis de la participation de la Banque de Montréal. Comme je suis pharmacien, j'ai sollicité tous les laboratoires pharmaceutiques pour constituer un fonds corporatif. Il serait merveilleux, pour des questions comme celle-ci, que le gouvernement et le secteur de la grande entreprise s'unissent. Comme l'a précisé Heather, ce n'est pas tant pour le Canada qu'il faut constituer un fonds, mais plus pour disposer d'argent dans le pays étranger.
J'ai eu un différend avec l'ambassade, parce qu'elle ne voulait m'offrir que très peu de services de traduction. Certes, elle a malgré tout fait le travail, mais on avait ordonné au personnel de ne pas le faire. J'avais des masses de documents que je devais faire traduire et certifier par l'ambassade. On me facturait 10 $ la pièce; ma propre ambassade me facturait 10 $. Bien sûr, Laurie agrafait deux ou trois documents ensemble, mais techniquement elle était censée me facturer 10 $ par document et j'en avais des milliers à faire traiter.
On devrait renoncer à cela; on pourrait le faire tout de suite, il suffirait de téléphoner au ministre et de le lui demander.
Je payais... et cela faisait déjà huit mois. Je ne suis certainement pas millionnaire. J'ai dépensé tout ce que j'avais, mais j'aurais dépensé plus encore si je l'avais pu. Si j'avais pu vendre un rein, je me le serais fait enlever pour faire revenir ma fille. J'ai trouvé cela très insultant. Je suis retourné à l'ambassade et là, eh bien, on m'a dit qu'elle n'avait pas le choix. Je n'ai pas de reproche à faire à Laurie, parce qu'elle a essayé de faire passer les choses. Mais j'étais censé verser 10 $ par document adressé au tribunal, et je devais d'abord le faire sceller par l'ambassade et obtenir une signature.
Mme Heather Ritchie: Ce fut la même chose dans notre cas.
M. Ron Reddy: Je me suis plains auprès de l'ambassade, disant que c'était ridicule. Bien sûr, Laurie rassemblait trois ou quatre documents ensemble et les agrafait, mais elle était censée me faire payer 10 $ par document.
Vous devriez examiner ce genre de détails. Il serait possible d'économiser beaucoup d'argent à ce niveau. L'ambassade aurait pu faire faire beaucoup de traduction pour moi. Encore une fois, je le rappelle, Laurie a fait plus que ce qu'on attendait d'elle. Elle a dépêché des employés de l'ambassade au tribunal, pour qu'ils traduisent pour moi. Mais en fin de compte, j'ai dû engager des traducteurs pour faire traduire les documents à raison de 20 à 30 $ la pièce. Ils passaient toute une journée au tribunal... et je n'avais même pas des traductions correctes. On pourrait immédiatement régler ce genre de problème. Ce n'est pas compliqué.
La présidente: Ce sont effectivement des questions qu'il faut régler sans tarder.
D'autres questions? Bien des députés voudraient intervenir, pour engager le dialogue, mais j'ai peur que nous n'en ayons pas le temps. Je puis vous garantir que votre exposé valait la peine d'être entendu et que nous tiendrons sérieusement compte de vos recommandations.
Angelina, nous allons essayer d'obtenir quelques réponses.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: J'en doute.
Mme Heather Ritchie: Mais ils vont essayer.
La présidente: Effectivement, nous allons essayer d'obtenir des réponses.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Essayez donc, même si cela ne va pas m'aider et même si les résultats sont négatifs. Je dois faire face à la réalité et être prête à subir les conséquences.
Un agent des Affaires extérieures, autorisé par le Canada, me télécopie ce que les grands-parents de mon enfant et mon ex-époux ont à dire, puis ils font la même chose avec mes demandes. Quand j'appelais les services sociaux, je tombais sur mon ex-beau-père. Alors, je me disais que j'avais oublié le numéro de téléphone, je consultais mon agenda, recomposais et tombais à nouveau sur lui.
Comment puis-je prouver que je suis aux prises avec quelque chose de très grave? On me dit qu'il n'y a pas de solution magique. Mais quelle est la solution magique? C'est la vie de l'enfant que cela concerne. Il s'agit d'une vie. Ce n'est pas un objet. Cette vie on me l'a enlevée. Personne ne pourra me convaincre, personne.
Mme Heather Ritchie: Nous allons essayer.
Mme Angelina Medjed-Cosovic: Qu'est-ce que ça veut dire essayer? Cela fait sept mois que ça dure. Nous avons un enfant, nous savons où il est. J'ai demandé l'aide des services sociaux pour qu'ils s'en occupent, pas parce qu'il est là-bas... Il est en bonne santé, il va bien, mais je veux qu'on le surveille pour qu'il ne lui arrive rien, pour qu'on ne le transporte pas d'un endroit à l'autre. On l'a déjà changé cinq fois de lieu de résidence. Personne ne sait où il pourrait aboutir la prochaine fois. Quelqu'un a enlisé les procédures, quelqu'un n'a pas voulu faire le travail.
Plus personne ne peut revendiquer quoi que ce soit devant moi. Je veux obtenir un résultat, même s'il doit être négatif. Je veux pouvoir faire face aux conséquences. Je veux trouver une façon de réussir. Pourquoi? Je veux savoir pourquoi.
La présidente: Nous demanderons aussi pourquoi.
Je vous remercie beaucoup. Je sais que cela est extrêmement difficile pour vous et nous apprécions d'autant plus votre présence.
Pour ce qui est de l'autre point à l'ordre du jour, nous allons devoir suspendre nos audiences pour la période des Fêtes. Nous pourrions peut-être accueillir des représentants d'Immigration Canada pour leur poser certaines questions concernant leur domaine. Est-ce que tout le monde est d'accord pour que nous poursuivions nos audiences à la reprise?
Des voix: D'accord!
Mme Heather Ritchie: Personnellement, je serais très heureuse de continuer à collaborer avec ce comité à longue échéance.
M. Ron Reddy: Moi aussi.
Mme Heather Ritchie: C'est un sujet très important.
La présidente: Je suis certain que nous vous reverrons. Je vous remercie beaucoup.
La séance est levée.