ACVA Rapport du Comité
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Par la présentation de ce rapport, tous les members du comité permanent des Anciens combattants de la Chambre des communes désirent offrir leurs sincères remerciements et témoigner de leur admiration envers les milliers d’hommes et de femmes des Forces canadiennes ainsi qu’envers les vétérans qui ont servi leur pays et préservé notre liberté. Nous sommes tout particulièrement reconnaissants envers les familles qui leur ont apporté un soutien essentiel à travers les épreuves.
Durant ce service, plusieurs ont péri, subi de terribles blessures, ou ont été atteints d’incapacités moins visibles, mais tout aussi insidieuses, tant physiques que psychologiques. Ce qu’ils ont payé, et continuent de payer, dépasse de beaucoup ce que le pays pourra leur offrir en retour. Leur sacrifice fut notre inspiration tout au long de notre étude de l’implantation de la nouvelle Charte des anciens combattants. Nous sommes conscients des nombreux défis qui restent à surmonter à cet égard et espérons que notre contribution pourra démontrer notre engagement à en faire davantage pour nos vétérans.
Le comité des Anciens combattants de la Chambre des communes a entrepris le 20 octobre 2009 une étude sur l’implantation de la Loi sur les mesures de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes, mieux connue sous son appellation de « nouvelle Charte des anciens combattants » (NCAC). Le comité a tenu six réunions sur le sujet durant la deuxième session de la 40e législature, et treize autres au cours de la troisième session[1].
La NCAC a obtenu l’appui unanime des députés de la
Chambre des communes, et a reçu la sanction royale le 13 mai 2005. Ses
dispositions sont entrées en vigueur
le 1er avril 2006. Elle constitue une réforme majeure et redéfinit
le régime d’indemnisation des anciens combattants en cas de blessure,
d’invalidité ou de décès, en plus d’offrir tout un éventail de services afin de
venir en aide aux anciens combattants et à leurs familles. Elle se substitue au
régime précédent qui était régi par la Loi sur les pensions. Son
objectif premier est d’encourager la réinsertion sociale et professionnelle des
anciens combattants. La nature des services offerts ainsi que le détail des
conditions d’admissibilité sont précisés dans le Règlement sur les mesures
de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces
canadiennes.
La NCAC ne définit pas les critères d’admissibilité des vétérans aux programmes de soins de santé (hébergement de courte ou longue durée, programme pour l’autonomie des anciens combattants, appareils spéciaux, etc.). Ces critères sont précisés dans le Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants qui est indépendant de la NCAC. Elle offre toutefois aux vétérans la possibilité de cotiser au Régime de soins de santé de la fonction publique afin de bonifier la couverture offerte par les régimes provinciaux.
Avant 2006, la Loi sur les pensions accordait aux militaires souffrant de blessures ou de maladie liées au service une pension mensuelle à vie, dont le montant variait en fonction de la gravité de la déficience. Cette pension avait la même valeur, peu importe le grade, et diverses primes pouvaient s’ajouter en fonction de la situation familiale, ou de circonstances exceptionnelles. Si la condition du vétéran se détériorait, la pension était ajustée à la hausse, et inversement si sa condition s’améliorait.
Le fait de recevoir une pension permettait également d’accéder à une panoplie de services médicaux régis par le Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants. Tous les soins de santé jugés nécessaires pour le traitement de la blessure ou de la maladie donnant droit à une pension — « l’état indemnisé »— y compris des soins de longue durée, étaient à la charge du gouvernement fédéral.
Le témoignage d’un représentant d’Anciens combattants Canada résume bien les constats qui ont mené à la remise en question du régime d’indemnisation dont les principes avaient peu changé depuis 1919 :
« À l'époque, la seule façon d'avoir accès aux services d'ACC était d'obtenir une pension. Le montant des pensions attribuées était bien souvent insuffisant pour fournir un revenu adéquat aux bénéficiaires, parce qu'elles visaient à indemniser les douleurs et les souffrances subies au service du Canada et non à être un revenu. Nous étions donc en mesure d'offrir une pension d'invalidité et des prestations de soins connexes, mais nous ne pouvions pas offrir un revenu régulier et permanent. De plus, il n'y avait pas de services de réadaptation. Le ministère ne répondait pas aux besoins réels des anciens combattants, puisqu'un trop grand nombre d'anciens combattants des FC, recevant ou non une pension, n'ont pas réussi à faire le passage de la vie militaire à la vie civile. Nous avons conclu qu'il fallait adopter un nouveau modèle axé sur le mieux-être et appliquer des principes modernes de gestion des invalidités. »[2]
Sous le régime de la Loi sur les pensions, il aurait été possible d’introduire des mesures visant à faciliter la transition vers la vie civile pour les militaires libérés pour raisons médicales. Plusieurs programmes — généralement d’envergure modeste — ont été développés par le ministère de la Défense nationale et par Anciens combattants Canada au fil des ans. Tous ces programmes se heurtaient toutefois à un problème qui limitait la motivation des vétérans à participer à des programmes de réadaptation : la valeur de la pension diminuait si la condition physique du vétéran s’améliorait, ce qui incitait de nombreux vétérans à être centrés davantage sur leurs déficiences que sur leur réadaptation. Toutes les évaluations faites au cours des vingt dernières années ont convenu, de manière explicite ou non, que ce n’était pas là la meilleure manière de favoriser une transition réussie vers la vie civile. De plus, toutes les démarches visant la réadaptation physique devaient se faire à l’initiative du vétéran qui devait en plus prouver que ce besoin était véritablement une conséquence de son « état indemnisé ». C’était beaucoup demander à des personnes qui auraient souvent préféré ne pas quitter l’armée. Comme nous l’a affirmé Ken Miller, d’Anciens combattants Canada :
« Pour ceux qui ne pouvaient pas travailler, la pension d'invalidité ne constituait pas une source de revenu suffisante pour compenser la perte de revenus. Cela a amené certains clients à se concentrer davantage sur leur invalidité, étant donné qu'en vertu de l'approche antérieure fondée sur le droit à pension, la seule façon d'obtenir plus de soutien était de démontrer que l'invalidité s'était aggravée. Cette situation a eu pour effet que la transition se faisait mal et que les besoins n'étaient pas comblés. Cela n'était pas le fruit de notre seule réflexion; c'est ce que les membres des Forces canadiennes et les anciens combattants, ainsi que des intervenants clés, nous disaient. »[3]
La nouvelle Charte des anciens combattants est une
tentative de réponse à ce nouveau contexte de la vie militaire et aux lacunes
que ne pouvaient pas combler la
Loi sur les pensions. Son objectif premier est d’assurer que les
militaires qui sont libérés pour des raisons médicales, et qui, grâce aux
programmes modernes de réadaptation, sont en mesure d’occuper un emploi
convenable, puissent compter sur tout le soutien dont ils ont besoin pour y
parvenir. Il n’était cependant pas réaliste d’imaginer que les programmes de
réadaptation puissent connaître un succès à grande échelle si le principe de la
pension mensuelle à vie était maintenu. C’est pourquoi la NCAC fait une
distinction très nette entre les avantages financiers qui servent à compenser
la perte de revenus, et l’indemnisation qui est versée pour compenser la
douleur et les souffrances liées à une blessure liée au service. L’absence
d’une telle distinction dans la Loi sur les pensions avait entraîné
plusieurs ambiguïtés.
Les avantages financiers servant à compenser la perte de revenus ne sont versés que si le vétéran participe activement à un programme de réadaptation, ou si la déficience est trop grave pour permettre une transition professionnelle adéquate. D’une manière distincte, une indemnité d’invalidité est versée sous forme de paiement forfaitaire pour toute blessure liée au service entraînant une déficience durable. Ainsi, selon la philosophie de la NCAC, dès qu’un vétéran redevient en mesure d’occuper un emploi rémunérateur, ACC peut cesser de lui verser des avantages financiers. Il recevra par contre son indemnité d’invalidité peu importe ses perspectives professionnelles.
Si la déficience est trop grave pour permettre au vétéran d’occuper un emploi rémunérateur, divers avantages financiers sont offerts, dont une allocation pour perte de revenus qui peut être versée jusqu’à l’âge de 65 ans, et une allocation mensuelle à vie pour invalidité permanente qui peut également être versée dans les cas les plus graves.
De manière presque unanime, l’esprit de la nouvelle Charte des anciens combattants a été bien accueilli. Par contre, il existe un doute sérieux sur la capacité des mesures mises en œuvre par la loi d’atteindre ces objectifs louables. Personne ne doute de la pertinence d’aider les militaires libérés, y compris ceux qui le sont pour raisons médicales, à retrouver une activité professionnelle gratifiante dans la vie civile lorsqu’ils le peuvent. Les conditions favorables doivent toutefois être présentes. À la lumière des témoignages entendus, pour qu’une telle transition réussie soit possible, il faut au moins quatre conditions : un soutien continu et personnalisé à la réadaptation physique, un soutien rapide et personnalisé à la réadaptation professionnelle, des incitatifs financiers à court terme orientés vers la transition professionnelle, et la garantie d’une sécurité financière à long terme. De plus, chacun de ces éléments doit tenir compte de la famille du vétéran, et, au besoin, des mesures distinctes de soutien doivent être offertes aux membres de la famille. De ces quatre éléments, la Loi sur les pensions ne fournissait adéquatement que le dernier. La principale critique adressée à la nouvelle Charte des anciens combattants est qu’elle ne fournit que les trois premiers, et de manière inadéquate. Selon des témoins, depuis le 1er avril 2006, les militaires libérés pour raisons médicales craignent d’avoir échangé la sécurité financière pour une réadaptation improbable.
Ce rapport vise à faire le point sur ce que les membres du comité ont entendu sur les vertus et les lacunes des programmes mis en place depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle Charte des anciens combattants. Toute évaluation de cette loi impliquera nécessairement une comparaison avec le régime précédent. Dans ce rapport, cette comparaison se fera à partir des trois grands groupes de programmes mis en œuvre par la NCAC : d’abord la réadaptation et l’aide au placement, dans laquelle est incluse la bonification de la couverture médicale; ensuite les avantages financiers servant à compenser la perte de revenus liée à l’incapacité, et finalement le paiement forfaitaire d’une indemnité d’invalidité et les mesures connexes visant à compenser la douleur et les souffrances.
En raison de la difficulté de saisir dans une perspective d’ensemble la complexité des mesures introduites par la NCAC, nous avons dû mettre de côté de nombreux problèmes touchant les processus administratifs d’ACC qui ont été révélés dans le cadre de cette étude. L’entrée en vigueur de la NCAC a certainement pu avoir des répercussions sur ces processus, mais la très grande majorité des problèmes soulevés existaient avant la NCAC. Environ la moitié des quelques 300 recommandations faites par les divers comités consultatifs d’ACC se rapportent à ces processus (voir l’Annexe A), et ils sont assez sérieux pour justifier une éventuelle étude d’envergure sur l’administration des programmes d’ACC dans leur ensemble, y compris ceux du Tribunal des Anciens combattants (révision et appel).
Les membres du comité se sont donc concentrés sur les trois groupes de programmes introduits par la NCAC et se sont posé trois grandes questions auxquelles ce rapport tente d’apporter des éléments de réponse :
- Les services de réadaptation offerts en vertu de la NCAC permettent-ils au vétéran de réussir mieux qu’avant une transition harmonieuse vers la civile ?
La réponse d’ensemble à cette question, de la part des témoins que nous avons entendus, est un « oui » prudent. Les nouveaux programmes visant la réadaptation ont insufflé l’esprit positif de la NCAC orienté vers un soutien accru à la transition vers la vie civile. Beaucoup de questions demeurent toutefois en suspens quant au nombre de vétérans pouvant réellement en bénéficier, à la coordination des efforts de transition avec le ministère de la Défense nationale, et au dédoublement des programmes. Nos recommandations à ce sujet visent à soutenir les efforts continus qui ont été faits, autant par Anciens combattants Canada que par le ministère de la Défense nationale, afin de régler plusieurs de ces problèmes.
- Les avantages financiers offerts par la NCAC garantissent-ils au vétéran et à sa famille une sécurité financière plus solide qu’avant ?
La réponse d’ensemble à cette question, de la part des témoins que nous avons entendus, est un « non » prudent. Les avantages financiers semblent surtout soutenir adéquatement ceux qui ont le moins besoin d’aide, c’est-à-dire les vétérans dont le degré d’incapacité est faible ou modéré, et qui ont de bonnes perspectives de réadaptation physique et professionnelle à l’intérieur d’une période de moins de deux ans. Mais pour les autres, c’est-à-dire les vétérans dont les déficiences sont plus graves, ou plus complexes en raison de leur dimension psychologique, la NCAC constitue un net recul sur le plan financier en comparaison de ce que permettait la Loi sur les pensions, en particulier pour les jeunes vétérans.
- Le paiement forfaitaire d’une indemnité d’invalidité permet-elle au vétéran et à sa famille de mieux accepter qu’avant la douleur et les souffrances liées à la blessure ou au décès?
Parmi les témoins entendus, très peu ont appuyé cette mesure dans sa forme actuelle, surtout en raison des risques liés au versement forfaitaire d’une somme élevée. Des modalités de paiement échelonné pourraient atténuer le problème assez facilement, mais cette solution ne sera vraisemblablement pas suffisante à moins d’envisager des modifications importantes aux programmes d’avantages financiers servant au remplacement du revenu.
* * *
Le jugement d’ensemble est donc que l’esprit de la NCAC doit être nourri et soutenu de toutes les manières possibles, mais que plusieurs des mesures mises en place doivent être réévaluées, en particulier celles qui touchent le remplacement du revenu pour les vétérans les plus gravement blessés.
Ce jugement s’inscrit dans la lignée des rapports soumis par les comités consultatifs, et que l’on retrouve également en filigrane dans la première phase du rapport d’évaluation qu’a entrepris Anciens combattants Canada. Ces rapports ont constitué une source inestimable d’information sans laquelle il aurait été impossible de poser un jugement éclairé, et la plupart des recommandations s’inspirent d’une manière ou d’une autre de celles contenues dans ces rapports. Il faut souligner le fait que le ministère a fait preuve d’une grande ouverture et n’a pas hésité à fournir rapidement l’information dont le comité a pu avoir besoin pour mener son étude. Le comité désire également remercier chaleureusement l’ensemble des témoins qui ont accepté de partager leurs expériences et leurs connaissances afin de nous aider à faire progresser la cause des anciens combattants.
S’il est important pour les vétérans blessés de réussir leur transition vers la vie civile, on oublie souvent qu’il est tout aussi important pour les civils d’être prêts à accueillir avec tous les égards qu’ils méritent ceux et celles qui ont souffert en leur nom. C’est pourquoi nous désirons réitérer notre appui indéfectible à toute mesure susceptible d’améliorer le bien-être des personnes qui ont choisi de défendre nos valeurs de liberté au risque de leur intégrité physique et de leur vie. Ils peuvent être assurés qu’ils jouiront toujours d’une oreille attentive et d’une infinie reconnaissance de la part de tous les membres de ce comité.
Les principes de la Loi sur les pensions, élaborés pendant la Première guerre mondiale, étaient adaptés aux conséquences des grands conflits mondiaux où des centaines de milliers de citoyens devaient participer pendant une période relativement courte à une guerre de masse d’une extrême intensité qui mobilisait la quasi-totalité des énergies du pays tout entier. Les anciens combattants étaient en grande majorité des citoyens ordinaires qui mettaient en suspens leurs activités, leurs ambitions et leur vie familiale pour aller défendre des valeurs de liberté en sachant qu’ils y risqueraient leur vie. Très peu d’entre eux projetaient une « carrière » militaire. La Loi sur les pensions fut donc adoptée en 1919 dans le but de remercier et récompenser des citoyens patriotiques dont l’avenir s’était assombri suite à une blessure de guerre, ainsi que les familles de ceux qui avaient fait le sacrifice de leur propre vie.
La Loi sur les pensions visait à adoucir les douleurs du passé. Elle n’était pas conçue comme un contrat définissant d’avance et pour l’avenir ce que la nation était prête à faire dans l’éventualité où un membre de ses forces armées subirait une blessure ou mourrait en service. Elle était faite pour une armée temporaire de citoyens, pour un « corps expéditionnaire », pas pour une armée professionnelle permanente. Elle avait donc très peu à offrir comme soutien à la transition vers la vie civile.
Après la Guerre de Corée, le Canada n’a heureusement pas eu besoin de lever une armée temporaire de citoyens. Si c’eut été le cas, la Loi sur les pensions aurait été bien adaptée à cela et les conditions de versement des pensions auraient été ajustées en fonction de la nature particulière du conflit. Plutôt que cela, le Canada s’est doté de forces armées professionnelles, bien entraînées et bien équipées. Leurs membres choisissent de s’engager pour une période qui n’est pas dépendante du début ou de la fin d’un conflit en particulier. La « carrière » militaire n’est certes pas une carrière comme les autres, et il faut en reconnaître la dimension sacrée qui accompagne le risque de la mort au nom de valeurs collectives. Il s’agit tout de même bel et bien d’une carrière, c’est-à-dire d’un engagement à long terme dans une activité professionnelle rémunérée.
Depuis le milieu des années 1950, les militaires qui s’engagent dans les Forces armées le font habituellement dans une perspective à long terme, et ce n’est plus dans une perspective de « retour » à la vie civile que l’État doit leur apporter un soutien, mais bien dans une perspective de « transition » vers la vie civile. Ce sont des militaires de vocation, alors que les soldats des grandes guerres étaient des civils avant la guerre, et il était clair qu’ils le redeviendraient après la guerre.
Avec les grands conflits mondiaux du 20ème siècle, l’incitatif du retour à la vie civile et du rétablissement était implicite. Lorsque la déficience était trop grave pour permettre ce retour, l’État intervenait pour garantir un revenu stable et des soins appropriés. Lorsque la déficience n’était pas trop grave, on s’assurait que les blessures de guerre seraient soignées, une pension était versée chaque mois en compensation pour les souffrances subies, et on présumait que le retour à la vie civile se ferait de lui-même. Ceux qui revenaient du front sans blessures graves ne posaient évidemment pas problème.
Depuis une cinquantaine d’années, ceux et celles qui quittent les forces armées le font soit parce qu’ils prennent leur retraite, soit qu’ils décident qu’ils n’ont plus la vocation et quittent volontairement, soit sont libérés pour raisons médicales. Les personnes qui quittent volontairement n’ont habituellement aucune blessure permanente qui soit apparente, ou souffrent de blessures mineures.[4] Elles n’ont besoin que d’un soutien minimal pour réintégrer la vie civile puisque la décision est la leur, et les pensions versées pour les blessures sont modestes et ne représentent donc pas un fardeau contraignant pour les contribuables.
Entre 1955 et le début des années 1990, la proportion de militaires libérés pour raisons médicales était faible, ce qui a d’une certaine manière retardé la prise de conscience des lacunes de la Loi sur les pensions dans le contexte d’une armée professionnelle. Au début des années 1990, la fin de la Guerre Froide, la multiplication des missions de paix, et les coupures budgétaires importantes ont commencé à faire augmenter cette proportion. La Vérificatrice générale avait estimé qu’en 2001, environ 12 % des libérations l’avaient été pour raisons médicales, et cette proportion a continué d’augmenter avec l’intensification de la participation canadienne au conflit en Afghanistan. [5] Aujourd’hui, entre 5 500 et 6 500 militaires sont libérés chaque année, et environ le quart le sont pour des raisons médicales.[6] C’est essentiellement à ces personnes que s’adressent les modifications introduites par la nouvelle Charte des anciens combattants.
La grande majorité de ces personnes auraient préféré ne pas quitter l’armée, mais leur condition ne correspondait plus aux critères d’universalité du service militaire. Selon ce principe d’universalité, tout membre des Forces armées doit pouvoir être affecté en tout temps et en tout lieu où se déroule une opération militaire.[7] Si une quelconque incapacité fait qu’un membre ne peut plus être déployé à l’étranger avec son unité, ce membre doit être libéré pour raisons médicales. Ce principe est essentiel au maintien de la solidarité militaire, mais limite considérablement la capacité de replacer des militaires blessés dans des fonctions où leur déficience ne serait pas un handicap. À la Gendarmerie Royale du Canada, par opposition, si un officier est blessé en service, il y va du devoir d’accommodement de garder cet officier à l’emploi de la force dans des fonctions qui correspondent à ses capacités. La transition vers la vie civile pose donc un problème très particulier à l’organisation militaire. Le membre qui a fait le sacrifice de son intégrité physique au nom de l’accomplissement de son devoir, au lieu d’être récompensé, doit en plus faire le sacrifice de sa vocation et de son milieu de vie. D’après des témoignages que nous avons entendus, beaucoup de membres libérés pour des raisons médicales le vivent comme une injustice.
L’un des témoignages a fait état des conséquences que pouvait avoir la libération involontaire sur les familles. Mme Pickrell Baker, dans le cadre d’une étude sur les conséquences du stress post-traumatique sur les familles, a bien illustré le drame de la libération et les contraintes de l’universalité du service :
« Aucun des membres que j'ai interviewés n'a été libéré volontairement; ils m'ont dit avoir été poussés à partir. L'une d'entre eux luttait contre une grave dépression. Un autre a été libéré parce qu'après 27 ans dans les forces armées, il s'était mis à avoir peur de voler. Ça n'avait rien à voir avec l'endroit où il s'en allait; c'était une peur irrationnelle de voler. Il a donc été libéré.”[8]
L’ombudsman des anciens combattants a raconté sa propre expérience en des termes similaires :
« Pour moi et, j'ose dire, pour un grand nombre d'anciens combattants, le fait de quitter l'armée représente un choc culturel immense, ce qui rend la réinsertion sur le marché du travail beaucoup plus problématique que la simple recherche d'emploi. »[9]
Il est donc de la plus haute importante pour le maintien de la cohésion des forces militaires que cette libération pour raisons médicales ne soit pas vécue comme une punition. Il est de la nature même d’une opération militaire d’exiger de ses membres qu’ils puissent se placer en situation de risque. Les militaires doivent être convaincus qu’en cas de passage obligé à la vie civile ils seront soutenus avec les égards qui sont à la mesure de la noblesse de ce risque. Sinon, ils hésiteront peut-être à le prendre, et nuiront par le fait même au succès de l’opération.
L’un des objectifs principaux que vise la NCAC est justement de faciliter cette transition vers la vie civile, et c’est pour cela que, dans son esprit, elle a été accueillie dans l’enthousiasme général. Peu importe les critiques légitimes qui ont été adressées depuis aux moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif, la NCAC gardera toujours le mérite d’avoir insufflé cet esprit orienté vers le mieux-être des vétérans.
La nouvelle Charte des anciens a été déposé comme
projet de loi en première lecture le 20 avril 2005, et a reçu la sanction
royale un peu plus de trois semaines plus tard, soit le 13 mai 2005. Ce texte
complexe, qui constitue une réforme profonde des principes d’indemnisation des
vétérans en cas de blessure ou décès, et a pris le relais d’un régime en place
depuis 90 ans, a été adopté à la Chambre des communes sans amendement ni débat.
Une motion unanime, présentée par l’ancienne ministre des Anciens combattants,
l’honorable Albina Guarnieri, a été adoptée le 10 mai 2005 permettant de sauter
toutes les étapes habituelles du cheminement d’un projet de loi : débat en
deuxième lecture, renvoi à un comité, débat lors de l’adoption du rapport,
troisième lecture et adoption. Le même jour, un débat a eu lieu au Sénat suite
au discours du parrain du projet de loi à la Chambre haute, l’honorable Roméo
Dallaire. Le projet de loi a été immédiatement adopté en deuxième lecture et
renvoyé au comité sénatorial permanent des Finances nationales, puisque le
comité sénatorial permanent de la Sécurité nationale et de la Défense voyageait
durant cette semaine. Le comité s’est réuni le lendemain soir et a tenu une
séance marathon de quatre heures et demie durant laquelle il a entendu de
nombreux témoignages, dont celui de la ministre Guarnieri.
Le lendemain, le 12 mai 2005 à 15h, le rapport recommandant l’adoption du
projet de loi sans amendement était adopté. La sanction royale fut apposée le
lendemain, soit le vendredi 13 mai.
Certains témoins ont reproché aux parlementaires de ne pas avoir fait leur travail en adoptant des mesures aussi complexes de manière aussi expéditive. Les mesures exceptionnelles prises pour l’adoption du projet de loi visaient à éviter qu’il meure au feuilleton et que son implantation soit retardée. Cette procédure inhabituelle témoignait plutôt de l’importance qu’avaient alors accordée les parlementaires à cette question de manière unanime.
N’ayant pas pu soumettre le projet de loi au débat public qu’il aurait mérité, la ministre s’était engagée à en corriger rapidement les lacunes si elles apparaissaient après l’entrée en vigueur de la loi. C’est cet engagement qui a fait de la NCAC ce qu’on a appelé un « document vivant » (living document). Dans cet esprit de charte vivante, divers comités consultatifs furent mis sur pied afin d’aider le gouvernement à apporter les modifications qui pourraient s’avérer nécessaires. De son côté, le gouvernement a entrepris une évaluation complète des programmes de la NCAC en trois phases, et le rapport de la phase I a été déposé en décembre 2009. L’évaluation doit se terminer en décembre 2010. Cinq ans après avoir reçu la sanction royale, aucune modification n’a été introduite à la loi ou au règlement qui l’accompagne, et une certaine impatience a commencé à se manifester au sein des organisations qui ont à cœur le mieux-être des vétérans. Des représentants d’Anciens combattants Canada ont d’ailleurs manifesté une certaine souplesse face à l’éventualité d’apporter des amendements :
« La nouvelle Charte des anciens combattants a toujours été qualifiée (…) de document en évolution. En termes simples, cela veut dire que la nouvelle Charte des anciens combattants n'est pas immuable. Nos programmes et nos services ont évolué et continueront d'évoluer pour répondre aux besoins de nos clients des FC qui évoluent également constamment. »[10]
Les attentes sont donc élevées envers les résultats de cette évaluation gouvernementale. Afin de maintenir cet esprit d’ouverture, le comité recommande :
Recommandation 1
Qu’Anciens combattants Canada réitère son engagement à faire de la nouvelle Charte des anciens combattants un document vivant, et implante aussitôt que possible les 16 recommandations cadres formulées par le Groupe consultatif sur la nouvelle Charte des anciens combattants (voir Annexe B), y compris celles qui impliquent des amendements législatifs ou réglementaires.
Dans les sections qui suivent, les nombreuses mesures introduites par la NCAC seront passées en revue. Il est toutefois important de rappeler que ces mesures sont un moyen de mettre en œuvre toute une philosophie visant à soutenir le mieux-être des vétérans et de leur famille, et de faciliter la transition vers la vie civile de ceux qui ont été libérés pour des raisons médicales. Les critiques qui peuvent être adressées aux mesures particulières ne doivent pas entraîner la remise en question de ce que nous proposons d’appeler « l’esprit de la Charte ». La NCAC demeurera à notre avis une contribution majeure au mieux-être des vétérans, en raison de cet esprit qu’elle a insufflé et qui continue de transformer de manière positive notre manière d’envisager le soutien aux vétérans.
L’introduction de services de soutien à la réadaptation incarne l’esprit de la NCAC. Il est du devoir de l’État de veiller à ce que les militaires blessés puissent se rétablir physiquement et mener une vie professionnelle et personnelle gratifiante. On peut diviser cette suite de services en quatre programmes : l’aide au placement, récemment rebaptisé « services de transition de carrière », la réadaptation physique et psychosociale, l’assistance professionnelle et le régime d’assurance collective pour les soins de santé.
Certains de ces programmes sont offerts par le ministère de la Défense nationale (MDN), et certains autres le sont par Anciens Combattants Canada (ACC) depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle Charte des anciens combattants. Le MDN offre des services d’aide au placement et d’assistance professionnelle par l’entremise du Régime d’assurance revenus militaire (RARM) jusqu’à deux ans après la libération. ACC offre des services d’aide au placement aux membres actifs qui seront libérés, et des services d’assistance professionnelle aux vétérans qui ont complété le programme du RARM ou qui n’y étaient pas admissibles. Comme nous le verrons, certains de ces services posent problème, dont la duplication et le fait que la participation aux programmes d’aide au placement et d’assistance professionnelle d’ACC s’est avérée plus faible que prévu.[11]
Pour les services d’assistance professionnelle et les services de réadaptation physique et psychosociale, les conditions d’admissibilité sont les suivantes :
· Être un ancien membre des Forces canadiennes dont la maladie ou la blessure, ou son aggravation, est survenue dans une zone de service spécial ou lors d’une opération de service spécial, ce qui, en gros, signifie toutes les opérations militaires auxquelles les forces canadiennes ont participé depuis 1947 à l’exception de la Guerre de Corée;
- Peuvent avoir droit aux services les militaires libérés pour raisons médicales, même si les problèmes de santé ne sont pas liés au service;
- Le Ministère doit juger que les problèmes de santé physique ou mentale entravent le retour à la vie civile;
- Les vétérans de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre de Corée ont accès à des services en vertu d’autres lois ou règlements.
A. Aide au placement/Transition de carrière
Les caractéristiques principales des services d’aide au placement décrits à la Partie 1 de la NCAC sont les suivantes :
- Tous les anciens membres des Forces canadiennes sont admissibles à ces services, peu importe que leur situation soit régie par la NCAC ou par la Loi sur les pensions;
- Les conjoints et les survivants sont également admissibles;
- L’aide doit être jugée nécessaire pour la réintégration dans la vie civile;
- Le ministre peut refuser d’offrir les services si le vétéran a droit de les recevoir d’un tiers.
Ces services sont essentiellement destinés aux militaires qui sont sur le point d’être libérés. Ils sont donc offerts à des personnes qui sont toujours en service au sein des FC, ce qui rend nécessaire un effort supplémentaire de coordination. Ces services comprennent trois types d’activités : des ateliers sur des sujets pratiques (curriculum vitae, préparation d’entrevues, démarrage d’entreprise, etc.), des services personnalisés d’orientation professionnelle (tests de compétence, counseling sur les choix de carrière, etc.) afin d’élaborer un plan de transition, et de l’aide à la recherche d’emploi avec le soutien d’un formateur. Des services similaires existaient par l’entremise du RARM, mais ils n’étaient accessibles qu’aux personnes qui avaient été libérées pour raisons médicales. La NCAC a étendu ces services à tous ceux et celles qui quittent les FC.
Ce programme a été calqué sur les services similaires offerts par le ministère de la défense britannique. Lors de son témoignage, le directeur général des politiques et des programmes à ACC en a grandement vanté les mérites.[12] Malgré la valeur intrinsèque de ce programme, ACC a reconnu que ses résultats ont été très décevants. Il y a eu une certaine participation aux ateliers, mais les autres services ont été sous-utilisés. Dans son rapport d’évaluation déposé en décembre 2009, le ministère s’est attaqué au problème et a procédé à une évaluation complète du programme. De nouvelles mesures sont attendues à l’automne 2010. Le comité recommande donc :
Recommandation 2
Qu’Anciens combattants Canada :
- maintienne son calendrier d’implantation de nouvelles mesures pour ses services de transition de carrière offerts aux militaires sur le point d’être libérés;
- communique clairement les objectifs et le fonctionnement de ses programmes de transition de carrière
- poursuive sa collaboration avec le ministère de la Défense nationale, de manière à clarifier son rôle dans la fourniture de ces services, à combler les lacunes existantes, et à améliorer la participation aux programmes.
B. Les trois volets de la réadaptation : médicale, psychosociale et professionnelle
Ces programmes visent à offrir un complément aux services offerts par le Régime d’assurance-revenus militaire (RARM). Ce dernier offre depuis de nombreuses années des services d’assistance professionnelle durant les deux années qui suivent le départ des Forces canadiennes, mais il n’offre pas de services de réadaptation physique ou psychosociale.
La réadaptation médicale inclut les soins de santé au sens large, incluant les médicaments, la physiothérapie, le traitement des dépendances si nécessaire, les services psychiatriques, etc. La réadaptation psychosociale vise à rétablir l’autonomie du vétéran. Elle implique souvent du soutien psychologique, et c’est habituellement à partir de ces services que l’intervention auprès des familles se fait de la manière la plus directe. La réadaptation professionnelle vise à faire le bilan des compétences du vétéran, à déterminer quels sont les emplois civils les plus susceptibles d’y correspondre, à développer de nouvelles aptitudes, et à déterminer un plan de carrière et un suivi personnalisé. Les services de réadaptation professionnelle ont été donnés en sous-traitance à un consortium de trois entreprises spécialisées pouvant tisser un réseau de fournisseurs partout au pays.
Les services sont transférables à l’époux ou conjoint de fait en cas de décès, ou si le ministère juge que le programme de réadaptation ne sera pas suffisant pour permettre au vétéran de retrouver un emploi convenable. De plus, la participation à un programme de réadaptation est une condition pour bénéficier des avantages financiers décrits à la section suivante.
Le cheminement typique avant et après la libération pour raisons médicales
L’architecture des multiples services auxquels les vétérans sont susceptibles d’avoir eu recours avant et après leur libération est relativement complexe, étant donné que deux ministères sont impliqués. Il existe de nombreuses interactions, et quelques chevauchements, avec d’autres programmes du ministère de la Défense nationale, en particulier ceux du RARM. Le cheminement typique qui est illustré sert à mettre en évidence les étapes où ACC intervient.
À part quelques situations que nous décrirons plus loin, ACC n’intervient que lorsqu’il y a blessure ou maladie. La première chose qui devra être déterminée, c’est si cette blessure ou cette maladie est liée ou non au service. Si la personne blessée juge que c’est le cas, le second élément à déterminer est la permanence des séquelles de l’événement. Si la blessure est liée au service et qu’il y a de bonnes raisons de croire que les séquelles seront permanentes, peu importe leur degré de gravité, une demande d’indemnité d’invalidité pourra être présentée. Si le ministère juge que les séquelles seront permanentes, le paiement forfaitaire de cette indemnité d’invalidité sera versé en fonction de la gravité de l’incapacité. Si cette incapacité est permanente, mais n’empêche pas la condition du militaire de correspondre aux critères d’universalité du service, la personne pourra demeurer membre des Forces canadiennes, et ce sera possiblement la seule fois où des contacts auront été établis avec ACC.
Si on ne considère que les personnes qui étaient membres actifs des FC lors de l’entrée en vigueur de la NCAC, environ 5 000 ont reçu des indemnités d’invalidité au cours des trois années suivantes. Parmi ces personnes, les deux tiers étaient toujours des membres actifs après trois ans. Autrement dit, il n’y a que le tiers des récipiendaires d’une indemnité d’invalidité qui ont été libérés pour raisons médicales.
Le MDN fait de nombreux efforts pour garder ses membres, mais si l’universalité du service ne peut plus être respectée, le membre sera libéré pour raisons médicales, que sa condition soit ou non liée au service. Des quelque 1 500 militaires qui sont libérés chaque année pour raisons médicales, les trois quarts environ le sont pour des blessures ou des maladies liées au service.
Lorsque la décision est prise de libérer un membre pour raisons médicales, une équipe de transition est mise sur pied, comprenant des représentants des FC, d’Anciens combattants Canada et du Régime d’assurance revenus militaire (RARM). Cette équipe sera chargée d’établir un plan de transition avec le membre libéré. À cette étape, des services d’aide au placement sont offerts par ACC, mais, comme il a été mentionné à la section précédente, ces services sont très peu utilisés, pour de multiples raisons, y compris le fait que le RARM offre des services similaires. Parmi les 15 000 membres qui ont quitté les FC entre 2006 et 2009, incluant 1 533 récipiendaires d’une indemnité d’invalidité, seulement 233 ont participé à un aspect ou l’autre du programme d’aide au placement. De tous les membres libérés, 4 182 ont participé à un programme de réadaptation.
C’est également lors de l’élaboration du plan de transition, c’est-à-dire avant la libération, qu’ACC déterminera les besoins en réadaptation physique. Si des services immédiats sont nécessaires, c’est toutefois le ministère de la Défense nationale qui en sera responsable, puisque le membre est toujours actif. Autrement dit, ACC ne commencera à intervenir directement qu’après la libération. Lorsque la décision est prise de libérer un membre, il ou elle aura le choix de demeurer au sein des FC pour une période allant jusqu’à trois ans. Il pourra donc s’écouler jusqu’à trois ans après la blessure avant qu’ACC ne puisse intervenir.
Peu importe que leur incapacité soit ou non liée au service, tout membre des Forces canadiennes libéré pour raisons médicales sera automatiquement admissible aux prestations d’invalidité versées par le Régime d’assurance revenus militaire (RARM) durant les deux années qui suivront leur libération. Ces prestations correspondent à 75 % de la solde du membre au moment de la libération. Les conditions de ces prestations, comme nous le verrons dans la section sur les avantages financiers, sont les mêmes que celles de l’allocation pour perte de revenus qui pourra être versée par ACC.
Durant les deux années qui suivent une libération pour raisons médicales, le RARM a l’initiative des avantages financiers et de l’assistance professionnelle. ACC ne joue habituellement un rôle durant ces deux premières années que si le membre libéré décide de participer à un programme de réadaptation physique et psychosociale. Il est toutefois possible qu’un membre libéré volontairement, c’est-à-dire pour des raisons autres que médicales, puisse quand même avoir des besoins de réadaptation, tant médicale que professionnelle. Dans ce cas, si le ministère juge qu’un tel programme favoriserait la transition vers la vie civile, il pourra les offrir, même plusieurs années après la libération.
Donc, durant la période variant de 30 à 60 mois entre le moment de la blessure jusqu’à la fin des deux années qui suivent la libération, le rôle d’ACC consiste à verser une indemnité d’invalidité, à participer de manière relativement modeste à un plan de transition, et à élaborer un programme de réadaptation physique et psychosociale si le membre libéré en fait la demande, et qui débutera après la libération. Durant la période où le membre est toujours actif, ce sont les FC qui s’occupent de la réadaptation physique et psychosociale, et qui continuent de payer la solde du membre. Durant les deux années qui suivent la libération, ACC s’occupe de la réadaptation physique à la demande du membre libéré, et c’est le RARM qui verse les avantages financiers et s’occupe de la réadaptation professionnelle.
Environ un an et demi après la libération pour raisons médicales, une évaluation médicale sera faite du membre libéré par le RARM afin de déterminer si son incapacité est totale et permanente. Si le RARM juge qu’elle n’est pas totale et permanente, il cessera de verser des avantages financiers et d’offrir de la réadaptation professionnelle après les 24 mois qui auront suivi la libération.
Ce n’est qu’à ce moment qu’interviendra le programme d’assistance professionnelle d’ACC. Si deux ans après la libération pour raisons médicales, l’incapacité n’est pas totale et permanente, et le membre libéré n’a pas trouvé d’emploi rémunérateur dans le monde civil, il aura quand même accès au programme de réadaptation d’ACC. Si le ministère juge que malgré les deux années d’efforts d’assistance professionnelle du RARM et de réadaptation physique d’ACC, le membre n’est toujours pas employable, il pourra continuer de verser 75 % de la solde du membre au moment de la libération jusqu’à ce qu’il redevienne employable.
Si, deux ans après la libération, le RARM juge que l’incapacité est totale et permanente, c’est-à-dire qu’elle ne permettra vraisemblablement pas au membre de retrouver un emploi rémunérateur, il continuera à versera 75 % de la solde jusqu’à l’âge de 65 ans. Dans certaines circonstances très exceptionnelles, ACC pourra ajouter à ce montant une allocation pour incapacité permanente. Moins de dix personnes ont reçu cette allocation depuis l’entrée en vigueur de la NCAC.
Tant dans le cas des prestations du RARM que dans l’allocation pour perte de revenus d’ACC, toute autre forme de revenu réduira d’autant le montant des allocations. Autrement dit, si le membre a d’autres sources de revenus, par exemple une pension des FC ou des rentes d’invalidité du Régime de pensions du Canada, si la somme de tous ces autres revenus équivaut à 75 % de la solde au moment de la libération, le RARM ou ACC ne verseront rien. Il s’agit là d’une source importante de préoccupations de la part des membres du comité
Lorsque le membre libéré atteindra l’âge de 65 ans, ACC pourra verser en un paiement forfaitaire une prestation supplémentaire de retraite correspondant à 2 % de l’allocation pour perte de revenus à laquelle le membre a été admissible depuis sa libération, c’est-à-dire un paiement maximum unique d’environ 40 000 $ dans le cas d’une invalidité très grave et prolongée.
Après 65 ans, le vétéran devra s’en remettre à la pension des FC s’il peut en bénéficier, aux rentes du Régime de pensions du Canada ou de la Régie des rentes du Québec, et, si ses revenus sont vraiment faibles, à l’allocation de soutien du revenu des FC que gère ACC.
Le dédoublement des programmes
À la lumière de ce qui précède, et malgré les améliorations apportées, on perçoit donc aisément tout l’enchevêtrement complexe des programmes et des responsabilités, et on ne peut qu’imaginer les difficultés administratives par lequel les membres libérés devront possiblement traverser. Malgré les défis, les membres du comité souhaitent souligner l’amélioration de la collaboration entre ACC et le ministère de la Défense nationale à l’étape de l’élaboration du plan de transition, dans le cadre des unités interarmées de soutien au personnel mises sur pied récemment. [13]
Un autre élément qu’il est important de noter, c’est que, à part pour le paiement forfaitaire de l’indemnité d’invalidité — qui se limite à un chèque mis à la poste — l’intervention d’ACC arrive habituellement en deuxième ou en troisième lieu. ACC ne possède pas l’autorité législative lui permettant d’intervenir auprès des membres qui sont toujours en service. Son rôle en vertu de la loi est donc de compléter un programme initié par une organisation différente. Nous verrons dans l’analyse plus précise des divers programmes de la NCAC que cette intervention souvent tardive d’ACC limite considérablement sa capacité d’obtenir des taux de réussite élevés pour ses programmes.
Ce que nous désirons souligner ici, c’est que cette caractéristique crée une impression très nette auprès des membres libérés que les programmes d’ACC ne sont la plupart du temps qu’un dédoublement des programmes similaires du ministère de la Défense nationale et du RARM. La conséquence en est que, malgré toute la sincérité des intentions sous-jacentes à l’implantation de la NCAC, elle n’apparaît souvent que comme la récupération de programmes existants auxquels on a ajouté une indemnité d’invalidité moins généreuse que ce qui était auparavant versé en pension. Deux interventions du représentant de la Légion royale canadienne viennent illustrer cette perception :
« Nous ne traitons pas ici de similitudes, mais plutôt de choses en double ou en triple. Il faut se demander pourquoi ACC a élaboré une nouvelle Charte des anciens combattants, laquelle fait double emploi, dans plusieurs secteurs, de services qui étaient déjà offerts par le MDN et le RARM alors que, dans d'autres cas, certains des nouveaux programmes semblent entraîner des économies considérables pour les ministères et créer des catégories additionnelles d'anciens combattants. »[14]
« C'est certain que le programme d'Anciens Combattants Canada n'aurait pas les objectifs qu'on souhaite. Quand on regarde les programmes qui sont en vigueur dans les Forces canadiennes, on remarque qu'il y a déjà eu des interventions auprès des employeurs potentiels pour justement trouver des emplois. Selon moi, tout ça remet en question les objectifs et résultats qui ont été planifiés quand on a mis ces programmes en vigueur. Pourquoi cette duplication? »[15]
Le ministère lui-même reconnaît ce problème :
« Certains cas de chevauchement avec le Programme de réadaptation et le Programme d’aide au placement d’ACC ont été relevés. Dans certains cas, ACC devrait se pencher sur les chevauchements relevés afin de déterminer s’il doit rajuster ses programmes ou adopter une approche davantage axée sur la collaboration avec ces autres programmes fédéraux. »[16]
Selon plusieurs témoins, dans bien cas, plutôt que de créer un programme distinct, ACC aurait sans doute avantage à devenir partenaire de programmes existants du MDN, ou de les remplacer carrément. [17] Le comité n’est pas en mesure de déterminer quelle serait la meilleure formule, mais il trouve particulièrement regrettable qu’ACC ne puisse bénéficier qu’indirectement du réseau d’expertise développé par le ministère de la Défense pour ses programmes de réadaptation physique et psychosociale. De plus, il semble contraire au bon sens de ne pas coordonner les programmes d’assistance professionnelle et de réadaptation physique et psychosociale durant les deux années qui suivent la libération. Le comité recommande donc que
Recommandation 3
Qu’ACC collabore avec le ministère de la Défense nationale et le Régime d’assurance revenus militaire afin de définir des modalités lui permettant de donner une meilleure cohérence à ses programmes, d’éviter les dédoublements, et d’intervenir directement auprès du membre dès que la décision a été prise de le libérer pour raisons médicales.
Privilégier le maintien dans la vie militaire
Lors de son témoignage, la représentante de l’association canadienne des ergothérapeutes a mentionné un projet pilote particulièrement prometteur :
« Un projet qui a donné des résultats concrets est le projet de retour au travail conçu par l'ergothérapeute et réserviste Chantal Bérubé, major à la base de Valcartier. Le projet a eu des répercussions positives sur le bien-être des membres de l'armée qui revenaient d'un déploiement. Avant le projet mis sur pied par Mme Bérubé, 10 p. 100 des soldats reprenaient le service actif, tandis que, à la suite du programme, près de 70 p. 100 des soldats blessés sont retournés au travail dans un court délai. Ce programme a permis de réduire grandement le nombre de soldats considérés comme invalides et le nombre de soldats qui seraient sinon retournés à la vie civile et auraient, on l'espère, utilisé les nombreux services offerts par ACC. Nous disposons d'autres exemples de façons d'améliorer les soins offerts aux anciens combattants, et nous nous ferons un plaisir de vous en parler pendant notre discussion. »[18]
La réussite de ce programme nous apparaît tout simplement spectaculaire, et sachant toute l’importance que les membres accordent à leur maintien au sein des Forces canadiennes, le comité aimerait recommander que :
Recommandation 4
Qu’ACC collabore avec le ministère de la Défense nationale afin d’identifier et de mettre en œuvre toutes les stratégies fondées sur les meilleures pratiques dans le monde de la réadaptation, tel que celles présentées par l’Association canadienne des ergothérapeutes, afin de s’assurer que le plus grand nombre possible de soldats blessés lors d’un déploiement puissent demeurer actifs au sein des Forces canadiennes.
Cela pose toute la question du contrat tacite passé entre le membre, les Forces canadiennes et le gouvernement du Canada dans son ensemble. Lorsqu’un soldat est libéré pour des raisons médicales pour une blessure subie en service, cela signifie qu’il doit quitter l’armée justement parce qu’il a fait ce que l’armée et le peuple canadien s’attendaient à ce qu’il fasse, c’est-à-dire défendre la sécurité du Canada au risque de son intégrité physique si nécessaire. Il nous a semblé que le principe de l’universalité du service était nécessaire pour assurer la cohésion des forces, mais que ce principe prenait fin au moment où le membre était libéré. Il nous a également semblé que si le contrat prenait fin avec l’armée à cause de l’importance de maintenir ce principe d’universalité du service, il n’y avait pas de raison que le contrat prenne fin avec le gouvernement du Canada et le peuple canadien. Si un soldat a respecté les termes de son contrat, il ne devrait pas avoir à subir sa libération comme une punition ou comme un désavantage, et en ce sens, les efforts du gouvernement du Canada dans son ensemble ne semblent pas avoir été à la hauteur du sacrifice qu’on pouvait attendre des militaires.
Un témoin a mis de l’avant le principe de la responsabilité du gouvernement du Canada en tant qu’employeur, et a fait les recommandations suivantes :
« Pour ce qui est de l'avenir, j'ai des propositions précises à vous transmettre: la reconnaissance par le gouvernement du Canada de ses responsabilités en tant qu'employeur auprès des anciens combattants invalides; un engagement à l'égard de l'application des pratiques exemplaires en vue du retour au travail et des programmes de gestion des invalidités à l'aide de normes de pratiques optimales reconnues et adoptées internationalement; l'optimisation des résultats de réadaptation holistique lorsque des accommodements à l'interne ne sont pas possibles, par l'intermédiaire, et c'est là une suggestion, de partenariats créatifs, par exemple avec le Conseil canadien des chefs d'entreprise aux fins de l'embauche d'anciens combattants invalides; l'accroissement de la sensibilisation à la question des anciens combattants invalides, par exemple en collaborant avec le Congrès du travail du Canada pour leur permettre de comprendre les problèmes que vivent les anciens combattants invalides qui tentent de se réadapter; le recours aux services de réadaptation des commissions provinciales d'indemnisation des accidents du travail, dont le personnel a une connaissance intime et spécialisée de tous les domaines pertinents ayant trait à l'optimisation du potentiel de réadaptation des travailleurs invalides. »[19]
Les membres du comité souscrivent à ces recommandations, mais elles dépassent les limites de ce rapport. Sans en faire une recommandation formelle, le comité désire tout de même manifester son souhait:
Qu’à l’initiative d’Anciens combattants Canada, le gouvernement du Canada reconnaisse formellement sa responsabilité en tant qu’employeur auprès des anciens combattants, fasse davantage d’efforts pour intégrer dans la fonction publique ceux qui ont dû être libérés pour raisons médicales, et initie des partenariats avec les employeurs tant privés que publics pour favoriser leur embauche.
Le comité désire également souligner l’initiative des Forces canadiennes qui, au cours des dernières années, ont adopté des mesures exceptionnelles afin de garder les membres blessés durant jusqu’à trois ans avant que ne s’opère la transition vers la vie civile. En complément à notre réflexion, nous suggérons également qu’Anciens combattants Canada, au-delà des règles de la fonction publique qui donnent la priorité d’emploi aux vétérans dans les ministères, envisagent la création d’un programme d’embauche proactive des vétérans, et non seulement de ceux qui sont blessés ou souffrent d’incapacité. Cela rehausserait le niveau d’expérience de la main d’œuvre, en particulier dans les secteurs qui impliquent la communication avec les vétérans.
Les avantages de l’intervention rapide
Anciens combattants Canada est confronté à des limites évidentes du fait qu’il n’a pas l’autorité nécessaire pour intervenir avant la libération du vétéran. C’est un représentant du ministère qui ait le plus clairement exprimé ce problème :
« D'après le National Institute of Disability Management and Research, faute d'intervention précoce, un travailleur blessé n'a que 50 p. 100 de chances de reprendre le travail après une absence de six mois. Ce pourcentage tombe à 20 p. 100 après une absence d'un an, et à 10 p. 100, après une absence de deux ans. Le ministère collabore de près avec la Défense nationale dans le but de faire en sorte que les militaires qui deviennent des anciens combattants reçoivent l'aide dont ils ont besoin le plus tôt possible afin qu'ils puissent obtenir des résultats positifs et assurer leur transition vers la vie civile. Autrement dit, il faut intervenir le plus rapidement possible, avant qu'un militaire ne soit libéré des Forces à la suite d'une blessure ou d'une maladie. »[20]
Un travailleur blessé n’a que 10 p. cent des chances de reprendre le travail après deux ans. Les programmes de réadaptation professionnelle d’ACC ne peuvent commencer qu’après que ceux du RARM se soient terminés, c’est-à-dire deux ans après la libération.[21] Autrement dit, on sait déjà que les vétérans qui s’inscrivent aux programmes de réadaptation professionnelle d’ACC n’ont que peu de chances de le réussir. Le ministère a lui-même calculé que 15 % seulement des vétérans qui auront participé aux programmes d’assistance professionnelle du RARM participeront ensuite aux programmes d’ACC.[22]
Les membres trouvent difficile à comprendre qu’une telle évidence n’ait pas été considérée lors de l’élaboration des programmes de réadaptation professionnelle d’ACC. Si ACC doit avoir un programme de réadaptation professionnelle, il saute aux yeux que ce programme doit se mettre en branle dès l’instant où une décision a été prise de libérer un membre. Cela n’empêche pas le programme de continuer à être offert dans d’autres circonstances, par exemple aux membres qui ont été libérés il y a plusieurs années et qui ont de nouveau des besoins. Le comité recommande donc :
Recommandation 5 :
Qu’ACC collabore avec le ministère de la Défense nationale et le RARM les modalités lui permettant d’intervenir dans le cadre de son programme de réadaptation professionnelle dès l’instant où la décision a été prise de libérer un membre des Forces canadiennes.
Il faudra évidemment des stratégies d’intervention différentes, selon que l’incapacité soit physique ou liée à des problèmes de santé mentale, mais si l’objectif premier est de favoriser la transition vers la vie civile, il nous apparaît tout à fait clair qu’ACC doit pouvoir intervenir immédiatement auprès du membre, c’est-à-dire alors qu’il est encore actif.
L’accès aux programmes de réadaptation pour les membres de la famille
La NCAC est souvent présentée comme offrant un soutien accru aux familles, en comparaison de ce qui était offert sous le régime de la Loi sur les pensions. Plusieurs témoignages ont soulevé un doute sur cette affirmation. Par exemple, Brenda MacCormack d’Anciens combattants a dit au comité :
« L'aide à la famille est nettement plus substantielle avec la nouvelle Charte des anciens combattants. Si l'ancien combattant est lourdement handicapé et ne peut pas être réadapté professionnellement, nous payons la formation professionnelle du conjoint, notamment les frais de scolarité et les frais de garde d'enfant.
En outre, les services et les sommes fournis dans le quatrième exemple de l'étude de cas, où il y a décès, sont très généreux. Le conjoint de l'ancien combattant reçoit l'indemnité de décès, qui est actuellement de 276 000 $.
Le survivant a aussi droit aux indemnités pour perte de revenu jusqu'à ce que l'ancien combattant atteigne l'âge de 65 ans. Il reçoit la prestation de retraite supplémentaire. Les enfants peuvent obtenir de l'aide en vue de poursuivre leurs études postsecondaires. Le survivant peut de surcroît recevoir de l'assistance à la formation professionnelle. »[23]
En ce qui touche les avantages financiers, la seule mention des familles est en cas de décès, ou lorsque l’incapacité du vétéran est totale et permanente. Évidemment, le soutien aux familles est nécessaire dans ces cas les plus graves, mais il nous a semblé que le soutien aux familles se devait d’être plus généralisé. Dans le cas des programmes de réadaptation, le soutien aux familles est apparu comme une préoccupation secondaire, puisque la seule porte d’accès à des services de soutien pour les familles est de passer par le vétéran lui-même.
« Pour qu'une femme puisse aller chercher de l'aide au centre de traitements des traumatismes des forces armées, elle devait obtenir une recommandation du psychologue de son mari. C'était très frustrant, car ces femmes auraient vraiment pu profiter de ce programme de soutien par des pairs, de pouvoir se rendre quelque part pour parler de leur situation et avoir un baromètre qui leur permette de savoir si leurs attentes étaient déraisonnables — nous pouvons tous avoir des attentes déraisonnables — ou si c'était vraiment le comportement du mari qui était déraisonnable. » [24]
Ce point de vue nous apparaît tout à fait sensé, et le comité souhaite recommander :
Recommandation 6
Que les membres de la famille des vétérans puissent avoir accès aux programmes de réadaptation d’ACC de manière indépendante, et que toute l’information pertinente portant sur le programme de réadaptation puisse être accessible sans enfreindre les règles de confidentialité.
Les membres de la famille des militaires ont accès à plus d’une trentaine de Centre de ressources pour les familles des militaires. Ces centres semblent constituer un soutien important, mais « dès que l'on devient ancien combattant, on sort du système, et il devient ensuite extrêmement difficile d'obtenir l'aide nécessaire. »[25] Encore une fois, la transition vers la vie civile risque fort d’être interprétée comme une punition, et dans ce cas-ci, même pour les familles qui ne peuvent plus avoir accès à ces centres. Des discussions plus ou moins formelles semblent être en cours afin de permettre que l’accès à ces centres soit maintenu après que le membre ait été libéré. Le comité souhaite soutenir cette initiative.
La durée inattendue de la réadaptation
À l’origine, le ministère prévoyait qu’un programme normal de réadaptation durerait de 18 à 24 mois. Les coûts seraient donc limités, et les avantages financiers qui accompagnent le programme, en particulier l’allocation pour perte de revenus, ne seraient versés que pour une durée assez courte. Or, en réalité, environ 10 % seulement des participants à un programme de réadaptation l’ont terminé après 3 ans[26]. Il s’agit d’un résultat surprenant qui peut signifier soit que les programmes élaborés ne sont pas efficaces, soit que les besoins de réadaptation à long terme avaient été sous-estimés à l’origine. Les causes de ce phénomène semblent complexes, et il est important qu’ACC puisse les cerner précisément pour garantir l’efficacité de ses programmes. Le comité recommande donc :
Recommandation 7
Qu’ACC procède à une analyse détaillée des raisons permettant d’expliquer la durée inattendue du programme de réadaptation et en fasse connaître les résultats dans le cadre de son plan d’évaluation des programmes de la NCAC.
Régime des soins de santé de la fonction publique
La NCAC permet aux vétérans d’avoir accès aux avantages du Régime des soins de santé de la fonction publique en versant une cotisation mensuelle équivalente à celle versée par les autres employés de la fonction publique fédérale. Les membres du comité sont bien sûr en accord avec cette décision. Il s’agit d’une mesure qui serait inutile si les FC devaient, comme la Gendarmerie royale du Canada, accommoder un membre blessé en lui garantissant un poste différent au sein de l’organisation. Puisque le principe de l’universalité du service rend une telle mesure inapplicable, il est normal que les vétérans libérés pour raisons médicales jouissent d’une couverture équivalente à celle qu’ils auraient obtenue s’ils avaient pu rester à l’emploi des FC.
Plusieurs témoignages ont toutefois soulevé le fait qu’une telle couverture d’assurance n’était pas offerte en ce qui touche les soins dentaires. Or, si la NCAC vise effectivement à accroître le soutien aux familles, cette couverture devrait être offerte puisque les soins dentaires représentent souvent une dépense importante pour les enfants.[27] Le comité recommande donc :
Recommandation 8
Que tous les anciens membres des FC puissent être couverts par le Régime de soins dentaires de la fonction publique fédérale moyennant une cotisation mensuelle équivalente à celle versée par les employés de la fonction publique fédérale.
C. Avantages financiers
La participation à un programme de réadaptation est la condition pour être admissible aux avantages financiers définis dans la Partie 2 de la NCAC. Ces avantages financiers sont distincts du paiement forfaitaire de l’indemnité d’invalidité. Cette dernière a comme objectif de compenser la douleur et la souffrance subies suite à une blessure liée au service, alors que les avantages financiers visent à compenser la perte de revenus qui résulte de cette blessure si le membre doit être libéré des FC pour raisons médicales. Ces avantages financiers sont : l’allocation pour perte de revenus, la prestation supplémentaire de retraite, l’allocation de soutien du revenu et l’allocation pour déficience permanente.
Chacune de ces mesures sera analysée, mais auparavant, il est important d’insister sur le fait que ces mesures s’ajoutent ou remplacent les prestations d’invalidité versées par le Régime d’assurance revenus militaire (RARM). Il est essentiel de comprendre les mécanismes de ce programme, et jusqu’à un certain point son historique afin de poser un jugement sur l’efficacité des avantages financiers de la NCAC.
Les prestations d’invalidité du RARM
Les prestations d’invalidité du RARM sont un programme d’assurance. En tant que tel, la valeur des bénéfices est liée à celle des primes versées par les membres et leur employeur. La générosité du régime varie donc en fonction de ce que les membres et leur employeur jugent raisonnable de payer. Dans le cas des militaires libérés pour raisons médicales, le RARM verse automatiquement 75 % de la solde durant les deux années qui suivent la libération. La fixation de ce seuil est fonction d’un calcul économique de correspondance entre la valeur des avantages et le coût des primes. Elle est totalement indépendante d’une quelconque philosophie reflétant un contrat tacite entre les militaires et le Canada quant à des garanties de sécurité financière pour l’avenir en cas de blessure. Plus encore, le RARM a été conçu à l’origine, en 1969, de manière à exclure le versement d’avantages financiers aux militaires qui recevaient une pension. Autrement dit, si un militaire blessé recevait une pension en vertu de la Loi sur les pensions, il ne pouvait pas recevoir de prestations d’invalidité du RARM. Le régime visait la même chose que n’importe quel régime d’assurance collective auquel contribue l’employeur : garantir un minimum de sécurité en cas d’invalidité ou de décès.
Ceux qui recevaient une pension considéraient qu’ils étaient désavantagés puisque la pension qu’ils recevaient était souvent inférieure aux 75 % de la solde que garantissait le RARM. Autrement dit, ceux dont la blessure était liée au service pouvaient recevoir moins que ceux dont la blessure n’était pas liée au service. Pour corriger cette injustice, les vétérans qui recevaient une pension sont devenus admissibles au programme du RARM en 1976, mais afin d’uniformiser leurs prestations avec celles que recevaient les autres clients du programme, le fait de recevoir une pension réduisait d’autant les allocations versées par le RARM.[28]
À l’origine, si la déficience était jugée totale et permanente, le vétéran recevait ces prestations du RARM pour la vie. Encore une fois, en tant que programme d’assurance, la valeur des prestations du régime était liée à l’importance des primes versées, et non à une quelconque philosophie de l’engagement militaire.
En 1995, afin de limiter la croissance du coût des primes, le régime a été modifié et les prestations, plutôt que d’être versées pour la vie, étaient versées jusqu’à l’âge de 65 ans.[29] Ce détail est important puisque, comme nous le verrons plus loin, l’allocation pour perte de revenus est un calque des prestations d’invalidité du RARM. Il y a donc lieu de se demander si cette allocation pour perte de revenus aurait été versée pour la vie si elle avait été introduite 10 ans plus tôt.
Plusieurs témoins ont déploré le fait que, plutôt que de refléter une certaine philosophie de l’engagement militaire, les avantages financiers offerts par la NCAC relevaient tout bonnement d’une simple logique financière, en l’occurrence une logique d’assurance.
« D'un point de vue organisationnel, bureaucratique, le principe de l'assurance incite à minimiser les versements, parce qu'on verse le minimum que l'on peut payer, et cela nous mène sur la mauvaise voie, surtout dans les bureaucraties.
Je crois que l'une de nos inquiétudes est que le régime d'assurance-revenu militaire au sein du ministère de la Défense nationale a été construit selon ce principe, et que beaucoup de ces méthodes ont migré vers le ministère des Anciens Combattants également. Il y a beaucoup de programmes axés sur ce principe de l'assurance au ministère des Anciens Combattants. C'est ce qui nous préoccupe.
C'est un genre de raisonnement sous-jacent ou fondamental qui est intégré à l'approche adoptée pour ces avantages, et je crois que c'est ce qui nous inquiète vraiment. Nous devons nous éloigner de cela et commencer à envisager une démarche fondée sur la dimension humaine, plutôt que sur le principe de l'assurance. »[30]
Les politiques du RARM sont comparables à celles en vigueur dans le cadre des autres régimes collectifs d’assurance invalidité. Par exemple, un employé de la fonction publique fédérale qui se blesse durant ses vacances et dont l’incapacité devient totale et permanente recevra 70 % de son salaire jusqu’à l’âge de 65 ans. Les membres trouvent tout à fait raisonnable que les membres des FC possèdent une couverture d’assurance invalidité qui les protège en cas de blessure non liée au service. Ils jugent par contre que cette couverture ne devrait pas servir de modèle dans le cas d’une blessure liée au service.
Dans le cas d’une blessure liée au service, les membres des FC sont nettement désavantagés en comparaison d’autres emplois comportant un haut niveau de risque. Par exemple, en vertu des régimes provinciaux d’indemnisation des accidents de travail, dans la plupart des conventions collectives des policiers ou des pompiers, une personne blessée en service sera habituellement assurée de recevoir une compensation non imposable équivalant à 100 % de son salaire. La couverture minimale des régimes provinciaux d’indemnisation des accidents varie entre 80 % et 90 % du salaire net lorsque l’invalidité est temporaire, et divers ajustements sont versés lorsque l’invalidité est déclarée permanente.[31]
Les membres du comité comprennent mal que les conditions de remplacement du revenu soient moins avantageuses pour les militaires blessés en service que pour n’importe quel autre employé des services publics. Ils auraient même tendance à penser que ces conditions devraient être plus avantageuses pour les militaires, de manière à témoigner de la reconnaissance qu’ils méritent en mettant leur vie en danger.
« Disons que je sers mon pays, que je suis blessé et qu'on me libère pour cette raison. Je tente de me réadapter; je prends des médicaments ou je reçois un traitement médical. Mais voici qu'on réduit mon salaire de 25 p. 100, qu'on le frappe d'imposition puis qu'on me chasse d'une organisation dont je fais partie depuis que j'ai 17 ans. Cela n'a pas de bon sens.»[32]
Comme nous verrons dans l’analyse qui suit, les divers avantages financiers offerts en vertu de la NCAC n’offrent pas suffisamment de garantie de sécurité financière.
Il faut également éviter de considérer la valeur de l’indemnité d’invalidité qui a été versée lorsque l’on évalue un programme de remplacement du revenu. Ce paiement forfaitaire d’une indemnité d’invalidité n’est pas une mesure de remplacement du revenu et ne doit donc pas servir à compenser l’insuffisance d’un programme de remplacement du revenu.
Allocation pour perte de revenus
Si le vétéran participe à un programme de réadaptation, cette allocation garantit 75 % du revenu brut jusqu’à ce qu’il soit de nouveau en état d’occuper un emploi « rémunérateur et convenable » en fonction de ses qualifications, ou qu’il atteigne l’âge de soixante-cinq ans. L’objectif de l’allocation est de fournir un incitatif supplémentaire afin d’encourager les vétérans à participer à un programme de réadaptation. En cas de décès, l’allocation ne pourra être transférée au conjoint ou aux survivants que si le décès est une conséquence de la maladie ou de la blessure liée au service. Autrement dit, les conjoints ou survivants des vétérans qui ont été libérés pour des raisons médicales qui n’étaient pas liées au service ne sont pas admissibles à l’allocation.
L’un des mérites de cette allocation, c’est que ceux qui ne sont pas libérés pour raisons médicales, mais découvrent plus tard qu’ils souffrent d’une blessure, par exemple des conséquences d’un stress post-traumatique, seront couverts, alors qu’ils ne l’auraient pas été auparavant.
Cette allocation a toutefois le désavantage de calquer la couverture d’assurance offerte par le RARM, et nous apparaît donc adéquate dans le cas d’un membre libéré pour raisons médicales suite à une blessure qui n’est pas liée au service. Elle nous semble par contre tout à fait inadéquate comme mesure de remplacement du revenu pour les militaires dont les blessures sont liées au service.
L’une des raisons ayant motivé la décision de limiter à 75 % le montant de l’allocation était de motiver les vétérans à suivre un programme de réadaptation. Un représentant du ministère a exprimé cette idée de la manière suivante :
« Il importe de reconnaître un des principes de la gestion des limitations fonctionnelles, à savoir que le montant de soutien fourni dans le cadre du programme relatif à la perte de revenus (…) sera quelque peu inférieur au salaire que la personne touchait précédemment. Je sais que vous comprenez que des principes se rattachent à cela. »[33]
Une fois de plus, ce principe est valable dans le cas d’un régime d’assurance invalidité, mais perd de sa pertinence si on envisage la blessure comme un accident de travail. Il est possible que ce soit là une caractéristique efficace dans certains cas, mais cela équivaut dans les faits à pénaliser les vétérans pour lesquels un programme de réadaptation est inutile, c’est-à-dire ceux dont les blessures sont les plus graves. C’est pourquoi une distinction devrait être faite entre l’allocation pour perte de revenus, dans le cas où la déficience empêchera vraisemblablement le vétéran de retourner travailler, et le cas où la déficience n’empêchera pas ce retour. La plupart des régimes provinciaux d’indemnisation des accidents du travail font cette distinction entre une invalidité temporaire et une invalidité permanente.
Des travaux antérieurs avaient recommandé un taux de 75 % du revenu brut pour l’allocation pour perte de revenus, mais de la rendre non imposable, ce qui, dans les faits, aurait équivalu à une allocation de 90 % ou 100 % du revenu net :
« Conformément aux travaux antérieurs de Neary, on a utilisé le taux de 75 p. 100, parce qu'on avait décidé que l'allocation n'était pas imposable. Puis, la rendant imposable, on a maintenu le taux à 75 p. 100, ce qui, de fait, réduisait l'allocation. »[34]
De plus, la pension des FC, les prestations du RARM
et du Régime de pensions du Canada (RPC), et tout autre revenu du vétéran
réduisent ou annulent l’allocation pour perte de revenus. Puisque le seuil est
actuellement de 75 % de la solde, seulement la moitié des vétérans admissibles
ont des revenus suffisamment bas pour y avoir droit.
Par conséquent, l’allocation pour perte de revenus ne constitue un véritable
incitatif à la réadaptation que dans un nombre de cas très inférieur à ce qui
avait été anticipé, ce qui en fait une mesure moins importante et moins
coûteuse que prévu. En 2008-2009, un montant total de 19 millions de dollars a
été partagé au titre de l’allocation pour perte de revenus entre environ
1 000 vétérans, alors que plus de 6 000 ont reçu une indemnité
d’invalidité.[35]
Par conséquent, le comité recommande :
Recommandation 9
Que l’allocation pour perte de revenus devienne une allocation non imposable représentant l’équivalent de 100 % du revenu net du vétéran au moment de sa libération, si cette libération est la conséquence d’une blessure liée au service.
De plus, l’allocation pour perte de revenus, sous sa forme actuelle, n’est indexée en fonction de l’indice des prix à la consommation que si l’augmentation ne dépasse pas 2 %. Là également il s’agit d’un calque des régimes d’assurance invalidité. Cette limite imposée à l’indexation de l’allocation ne change rien dans le contexte actuel où l’inflation est très basse, mais dans une perspective d’avenir cette limite nous semble injuste. Le comité recommande donc :
Recommandation 10
Que l’allocation pour perte de revenus soit ajustée annuellement en fonction de l’indice des prix à la consommation.
L’autre élément évoqué par de nombreux témoins est que le seuil de 75 % du revenu au moment de la libération ne tient pas compte des possibilités de promotion dont aurait bénéficié le vétéran si sa blessure ou sa maladie ne l’avait pas empêché de poursuivre sa carrière.
« L'assiette n'augmente jamais. Elle n'est assortie d'aucune échelle d'augmentation. Le sort du jeune soldat ou du jeune caporal victimes d'un accident est scellé une fois pour toutes. Pour le reste de leur carrière, le calcul des prestations de retraite pour la période de service admissible est fondé sur leur salaire au moment de l'accident.
Nous proposons vivement une augmentation proportionnelle au cours des années, en supposant que le caporal ordinaire finira par devenir sergent ou même adjudant, etc., et, phénoménalement, colonel, comme l'officier à ma gauche. Si nous autorisions une majoration de l'assiette fidèle au déroulement normal de la carrière, l'augmentation serait considérable. Nous avons identifié divers cas de ce genre et nous les avons signalés au ministère des Anciens combattants. »[36]
La plupart des régimes d’indemnisation des accidents du travail prévoient de tels ajustements en fonction de ce qu’on appelle « le revenu net estimé perdu ». Il s’agit d’une demande généralisée des comités consultatifs mis sur pied par ACC. Le comité souscrit aux raisons évoquées pour soutenir cette demande et recommande donc :
Recommandation 11
Qu’ACC et le MDN s’enquièrent des meilleurs moyens d’offrir une rémunération de remplacement du revenu qui soit équitable et reflète la progression typique d’une carrière militaire.
Prestation supplémentaire de retraite
Cette prestation vise à compenser la difficulté d’épargner à laquelle sont confrontés les vétérans en réadaptation qui ne gagnent que 75 % du revenu qu’ils gagnaient à leur départ des Forces. Cette difficulté est aggravée du fait que l’allocation pour perte de revenus ne donne pas droit à des cotisations au RPC/RRQ ou à un régime enregistré d’épargne-retraite.
La prestation correspond à 2 % du revenu total gagné par le vétéran durant la période où il a participé à un programme de réadaptation, c’est-à-dire 2 % du 75 % déjà évoqué. La prestation moyenne est estimée à environ17 000 $, et la prestation maximale peut atteindre près de 40 000 $[37]. Elle est transférable au conjoint ou aux survivants en cas de décès. Elle est payée en un seul versement lorsque le vétéran atteint ou aurait atteint l’âge de soixante-cinq ans, et elle est imposable.
Le versement unique d’une prestation imposable en limite les avantages étant donné qu’elle influencera le seuil d’imposition du vétéran. Si ce dernier gagne déjà des revenus imposables, cette prestation fait augmenter son taux d’imposition. Le remède à cela serait que le vétéran verse ce montant à un REER, ce qu’il a le droit de faire jusqu’à l’âge de 71 ans, ce qui présuppose toutefois qu’il a gagné un revenu d’emploi suffisant pour avoir droit à cette contribution. Or ni l’allocation pour perte de revenus ni les autres prestations d’invalidité ne permettent d’accumuler des droits de contribuer à un régime de retraite. Le résultat le plus probable est que la prestation supplémentaire de retraite sera imposée au taux marginal d’imposition le plus élevé du vétéran dans l’année où elle aura été payée.
Autrement dit, lorsque le vétéran recevra son chèque, disons de 15 000 $ l’année où il atteindra l’âge de 65 ans, il aura possiblement la mauvaise surprise de devoir rembourser une portion importante de cette somme au moment de sa déclaration de revenus suivante, alors que la prestation devait compenser sa difficulté à épargner.
Un autre élément problématique de cette prestation tient au fait qu’elle se base sur une épargne de 2 % d’un revenu équivalant à 75 % de la solde au moment de la libération. Les vétérans ne refuseront sans doute pas ce revenu supplémentaire, mais un paiement forfaitaire imposable de 2 % sur 75 % du revenu initial équivaut en réalité à environ 1 % du revenu au moment de la libération si ce montant avait été versé à un régime de retraite, ce qui est loin de constituer une épargne suffisante.
Si ce 1 % d’épargne avait été investi dans un régime de retraite durant l’année où l’allocation pour perte de revenus a été versée, le vétéran aurait également pu bénéficier du rendement cumulé de cet investissement jusqu’au moment d’en retirer les fruits après 65 ans. Il s’agit donc dans les faits d’une épargne inférieure à 1 %.
Il faudra attendre 2017 avant qu’un nombre important de vétérans sous le régime de la NCAC atteignent l’âge de 65 ans après avoir participé à un programme de réadaptation. D’ici là, cette prestation supplémentaire de retraite ne constituera pas un enjeu important, mais elle pourrait le devenir si on constatait que le niveau de vie des vétérans diminue lorsqu’ils atteignent l’âge de 65 ans.
Certains régimes d’indemnisation des accidents du travail offrent, de manière obligatoire ou optionnelle, la possibilité de déposer par exemple 10 % de l’allocation annuelle d’invalidité permanente dans un régime de retraite, de manière à compenser la difficulté d’épargner. Une initiative de ce type corrigerait sans doute les lacunes de la prestation supplémentaire de retraite. Le comité recommande donc :
Recommandation 12
Que la prestation supplémentaire soit revue en profondeur de manière à rendre possible des cotisations régulières et suffisantes à un régime de retraite, en particulier pour les vétérans dont l’incapacité est totale et permanente.
Allocation de soutien du revenu des Forces canadiennes
Cette allocation vise à compenser la perte de revenus d’un vétéran qui est redevenu employable — et ne reçoit donc plus l’allocation pour perte de revenus — mais n’a pas encore trouvé d’emploi. L’allocation est non imposable et peut atteindre environ 1 200 $ par mois pour une personne seule, 1 800 $ pour un couple, et 300 $ de plus par enfant à charge. Elle est calculée en fonction du revenu familial et est réduite en proportion des autres revenus du foyer.
Elle constitue à proprement parler un soutien de dernier recours pour les vétérans à faible revenu qui ont participé avec succès à un programme de réadaptation, mais qui n’ont pas d’autres sources de revenus que cette allocation. Ce programme ne fait que reprendre les termes d’un programme existant des Forces canadiennes, et il en a été peu question dans le cadre des travaux du comité.
Allocation pour déficience permanente
Cette allocation peut être versée de manière exceptionnelle lorsque le ministre juge que l’invalidité est trop grave et que le programme de réadaptation ne sera vraisemblablement pas suffisant pour permettre au vétéran de retrouver un emploi rémunérateur. Un montant imposable de 500 $, 1 000 $ ou 1 500 $ par mois pourra être versé selon la gravité de la déficience. Dix-sept allocations pour déficience permanente ont été versées depuis 2006, en date du 10 juin 2010.
Il semble que l’objectif initial de cette allocation ait été de ne pas pénaliser les vétérans dont le handicap était trop grave pour pouvoir bénéficier d’un programme de réadaptation, ou tout simplement de reconnaître les charges supplémentaires qu’entraîne pour toute la famille le drame d’une incapacité grave. C’est donc avec un certain étonnement que le comité a appris que cette allocation avait également prévue pour compenser les revenus perdus par l’absence de progression de carrière :
« Vous comprenez bien qu'il n'est pas facile de prédire l'avenir et de prévoir combien d'échelons une personne gravira au cours de sa carrière, mais c'est un facteur réel. Nous reconnaissons qu'une indemnisation établie en fonction du moment où se produit l'interruption dans le cheminement de la personne est injuste à long terme. C'est d'ailleurs l'une des raisons principales pour laquelle nous avons créé l'allocation pour déficience permanente.
On s'entendait généralement pour dire qu'elle devait être centrée sur les personnes les plus gravement handicapées, et les critères y afférents se rapportent principalement aux blessures les plus graves. L'objectif précis du programme d'allocation pour déficience permanente, c'est de reconnaître les répercussions potentielles sur l'avancement professionnel. On pourrait se demander si l'indemnisation et la reconnaissance sont totales, mais elles sont du moins partielles, et c'est ce que nous voulions. »[38]
Les membres du comité n’ont pas été convaincus que l’allocation pour déficience permanente était le moyen approprié pour compenser la perte d’avancement professionnel puisque cette allocation n’est pas graduelle et n’est versée que dans les cas les plus graves, alors que tous les vétérans dont l’invalidité est permanente perdent ces possibilités d’avancement professionnel. Lors d’un témoignage précédent, il semble que ce soit un autre objectif qui ait été poursuivi par cette allocation pour invalidité permanente :
« Si quelqu'un est gravement blessé, il peut avoir droit à une indemnité permanente pour invalidité. C'est une prestation qui est versée périodiquement pour tenir compte du fait que ces personnes vont sans doute travailler de façon intermittente. Autrement dit, elles peuvent trouver un travail, cessent de recevoir ces prestations, mais ont un problème par la suite et doivent les redemander. Les anciens combattants qui ont été gravement blessés reçoivent donc une indemnité pour incapacité permanente. »[39]
Si cette allocation est prévue justement pour les cas les plus graves, il semble raisonnable d’imaginer que les personnes ayant subi les blessures les plus graves seront vraisemblablement les moins susceptibles de « travailler de façon intermittente ». L’ambiguïté de cette allocation a été soulevée par plusieurs témoins.
« Le ministère vous dira qu'il y a une indemnité d'invalidité permanente — IIP — à laquelle les anciens combattants ayant des besoins spéciaux pourraient être admissibles. Il s'agit d'une indemnité à vie, mais elle est imposable. Le principal inconvénient est que les critères d'admissibilité sont si restrictifs qu'à ce jour, seulement trois IIP ont été accordées. Il y en a peut-être cinq, mais en tout cas, c'est très peu. C'est de la poudre aux yeux. De nombreux anciens combattants ayant des besoins spéciaux en raison d'une invalidité permanente ne seront pas admissibles à l'IIP. »[40]
Les principes de cette allocation demeurent donc nébuleux, et la sévérité des critères d’admissibilité fait en sorte qu’elle ne devrait même pas être mentionnée dans la structure d’ensemble des avantages financiers de la NCAC.
Le fait de promouvoir l’allocation pour déficience permanente comme étant une mesure démontrant la générosité des avantages financiers de la NCAC nous apparaît trompeur.
« Les anciens combattants grièvement blessés ont également droit à une indemnité d'invalidité permanente, qui tient compte des difficultés qu'ils rencontrent à obtenir un emploi stable et permanent. »[41]
De tels commentaires laissent soupçonner que la plupart des blessés graves recevront l’allocation pour invalidité permanente, ce qui n’est manifestement pas le cas. Plusieurs représentants du ministère ont fait des commentaires dans ce sens.
« Les programmes sont conçus pour compenser, dans une certaine mesure, la perte de revenus futurs. J'ai parlé de l'allocation pour déficience permanente, qui tient compte de l'incapacité de la personne à poursuivre une carrière ou, si elle peut travailler quand même, de la difficulté qu'elle aura à faire avancer sa carrière, en raison de sa déficience. Cette allocation est payée à vie au bénéficiaire. »[42]
L’allocation est présentée comme faisant contrepoids au fait que l’allocation pour perte de revenus cesse à l’âge de 65 ans. Cela serait certainement le cas si les critères d’admissibilité étaient souples, mais tant qu’une ou deux personnes par année seulement en bénéficieront, il ne nous apparaît pas justifié d’en faire miroiter les avantages.
Recommandation 13
Qu’ACC définisse plus clairement les objectifs de l’allocation pour déficience permanente, et s’assure que les vétérans dont les blessures sont trop graves pour leur permettre de retrouver un emploi rémunérateur soient admissibles.
L’incertitude du niveau de vie à 65 ans
Les membres du comité se sont montrés inquiets face au peu d’éléments leur ayant permis d’anticiper la situation d’un vétéran gravement blessé au moment où il atteint l’âge de 65 ans. L’allocation pour perte de revenus cesse à 65 ans, et l’allocation pour déficience permanente n’est versée que dans des cas exceptionnels. Il ne reste donc que le Régime de pensions du Canada ou la Régie des rentes du Québec et la Sécurité de la vieillesse. Étant donné que l’allocation pour perte de revenus ne donne pas droit à des cotisations au titre des régimes de pension, il est raisonnable de s’attendre à une baisse significative des revenus pour les vétérans blessés qui ne reçoivent pas de pension substantielle des FC.
« L'allocation pour perte de revenus n'est pas considérée comme un revenu gagné, mais, fait intéressant, elle est imposable, ce qui est un autre de nos motifs de préoccupations. On ne la considère pas comme revenu gagné ni pour les besoins du RPC ni pour le régime enregistré d'épargnes-retraite. Franchement, nous pensons que c'est injuste. On enlève ainsi au bénéficiaire la possibilité d'augmenter d'abord ses prestations de retraite à la faveur du RPC ou d'un REER; ensuite, bien sûr, quand il atteint l'âge de 65 ans, on coupe l'allocation. C'est un double coup dur. »[43]
Cela risque d’affecter tout particulièrement les militaires gravement blessés qui avaient moins de dix années de service et ne sont donc pas admissibles à une pleine pension des FC. Cela est préoccupant quand on sait qu’en 2006, 31 p. cent des effectifs de la Force avaient moins de six années de service.[44]
Recommandation 14
Qu’ACC révise la structure d’ensemble des avantages financiers offerts en vertu de la nouvelle Charte des anciens combattants, de manière à garantir que les vétérans continueront de recevoir des allocations équivalentes après qu’ils aient atteint l’âge de 65 ans.
La Partie 3 de la NCAC est celle qui a donné lieu aux plus intenses discussions, car c’est elle qui définit les termes de l’indemnité d’invalidité qui est venue remplacer les versements mensuels à vie que prévoyait la Loi sur les pensions, par un paiement forfaitaire unique en cas de blessure ou de maladie liée au service ou aggravée par le service.
Elle est la seule partie permettant de demander une révision ou un appel auprès du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), et, en vertu de l’article 43, elle jouit d’un principe d’interprétation qui doit favoriser le demandeur.
Cette partie de la Loi définit également les termes d’une indemnité de décès, d’une allocation vestimentaire et d’une indemnité de captivité.
A. Indemnité d’invalidité
Son objectif est de compenser la douleur et la souffrance dues à une blessure ou à une maladie liée au service ou aggravée par le service. Elle peut être versée au militaire qui demeure actif autant qu’au vétéran. Elle est calculée en fonction du degré d’invalidité entre 0 % et 100 %, multiplié par le montant maximal établi à 250 000 $ en 2005 et indexé par la suite. Le montant maximal non imposable pour 2010 est de 276 079,70 $.
La question principale touchant cette indemnité peut être formulée de la manière suivante : ne blessure ou une maladie entraînant une invalidité durable provoque des bouleversements importants dans la vie de n’importe quel individu. Quand cet événement suit en plus une exposition au stress parfois extrême subi au cours des opérations militaires, est-il raisonnable d’attendre du vétéran qu’il soit capable de réfléchir avec assez de sérénité pour prendre les décisions les plus judicieuses quant à l’usage qu’il fera de ce montant forfaitaire?
De manière unanime, les témoins ont répondu « non » de manière assez ferme à cette question. Par exemple, le colonel (retraité) Patrick Stogran a dit au comité :
« À mon avis, il est insensé de remettre une poignée de dollars à des anciens combattants atteints d'une invalidité et de s'attendre à ce qu'ils soient ensuite en mesure de refaire leur vie. » [45]
Les militaires peuvent bénéficier de conseils financiers de la part de professionnels jusqu’à concurrence de 500 $. Cette initiative est certes bienvenue, mais il est apparu assez clairement que le fait d’offrir des conseils financiers aux personnes qui reçoivent cette indemnité n’était pas suffisant pour garantir que les décisions d’investissement les plus judicieuses étaient prises. En effet, ces services semblent sous-utilisés. Il existe des cas où le versement forfaitaire d’une somme importante ne semble tout simplement pas approprié, par exemple lorsque la vie d’une personne est totalement bouleversée par les conséquences physiques, psychologiques, familiales, sociales et professionnelles d’une invalidité.
Tout en respectant le principe de la responsabilité individuelle, il pourrait être souhaitable d’offrir des alternatives, en particulier lorsque les prestataires d’une indemnité d’invalidité font encore partie des FC, et qu’une évaluation professionnelle suggère que la personne pourra difficilement prendre de bonnes décisions quant à son avenir financier.
« Ces gens sont jeunes et ne voient pas loin. Je leur ai demandé directement combien il leur restait d'argent? Ils ont tous répondu qu'il ne leur restait plus rien. Ce sont des réactions normales. Ils se sont acheté un gros véhicule qui vaut entre 35 000 $ et 40 000 $. C'est de l'argent mal placé, et j'aurais peut-être fait la même chose. Le gouvernement doit penser pour eux afin d'assurer leur sécurité financière. On est en train de créer des sans-abri. Quand ces anciens combattants auront 50 ou 60 ans, même s'ils ont reçu de l'argent, ils n'en auront plus. Même si on discutait jusqu'à minuit et qu'on répétait qu'ils n'auraient pas dû faire ceci ou cela, le gouvernement doit penser pour eux, comme il l'a fait pour les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée, comme moi. Par contre, s'ils m'avaient donné 200 000 $ ou 300 000 $, j'aurais peut-être fait comme ces jeunes et je n'aurais plus d'argent aujourd'hui. »[46]
La plupart des commentaires pointent vers une forme ou une autre de paiement échelonné. Lors de sa comparution, le ministre des Anciens combattants s’est montré ouvert à de telles alternatives, mentionnant notamment la possibilité d’étaler le paiement de l’indemnité sur une période de cinq ans. D’autres options existent et elles pourraient être offertes, avec une certaine insistance si nécessaire, sans remettre en question le principe de l’indemnité.
Certains ont fait valoir que certains pays offrent des paiements forfaitaires et que cela ne semble pas poser problème. Or, des spécialistes sont venus expliquer que même si la valeur de l’indemnité est calculée comme si elle était un paiement forfaitaire, son versement se fait toujours de manière échelonnée :
« Les commissions d'indemnisation des accidents du travail d'Australie accordent encore des sommes forfaitaires, mais elles sont toujours accordées sous forme de règlement échelonné, parce qu'il y a des données écrasantes montrant que... pour beaucoup de gens, obtenir cela, c'est presque comme gagner à la loterie. Tout d'un coup, on n'avait plus rien et, du jour au lendemain, on reçoit beaucoup d'argent. Or, dans notre monde, il est amplement démontré que si l'on a beaucoup d'argent, vous trouverez beaucoup d'amis qui vous aideront à le dépenser. C'est ainsi que les choses se passeront. C'est aussi pour cela qu'on rejette cette approche. »[47]
Toute forme de paiement échelonné de l’indemnité d’invalidité se heurterait toutefois au problème de la comparaison avec ce que versait le régime de la Loi sur les pensions. À partir des scénarios présentés au comité par le ministère, et après consultation auprès de l’Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, il s’est avéré que, dans le cas d’un militaire qui devient totalement invalide et reçoit à 31 ans le maximum du paiement forfaitaire, soit environ 276 000 $, cette personne pourrait s’acheter une rente viagère lui garantissant un revenu mensuel oscillant entre 1 000$ et 1 500 $, selon son état de santé et les aléas des taux d’intérêt. En comparaison, une pension mensuelle à vie en vertu de la Loi sur les pensions lui aurait rapporté autour de 4 000 $ par mois, avec des primes en fonction de sa situation familiale. Autrement dit, en imaginant la décision la plus raisonnable possible qu’un jeune vétéran pourrait prendre, l’indemnité d’invalidité représenterait pour lui presque quatre fois moins que ce qui aurait été payé en pension.
Cette situation est susceptible de causer du mécontentement à l’intérieur des FC, puisque les membres actifs qui ont reçu une indemnité d’invalidité se trouvent nettement désavantagés face à ceux qui ont une invalidité comparable, mais reçoivent une pension.[48]
La Loi sur les pensions n’était pas pensée pour offrir des mesures de remplacement du revenu, mais sa relative générosité dans les cas les plus graves et son versement mensuel régulier ont fait qu’elle a été interprétée comme une mesure de remplacement du revenu. Elle était généreuse en grande partie parce qu’elle ne s’accompagnait d’aucune autre forme de remplacement du revenu. Avec le développement du système moderne des pensions de retraite, la pension d’ancien combattant était à juste titre considérée comme une prime supplémentaire au revenu et non comme une compensation pour la souffrance. [49] Il ne fait pas de doute qu’il faudrait un montant forfaitaire considérable pour remplacer le revenu perdu de toute une vie.
L’indemnité d’invalidité aurait sans doute été mieux acceptée si les mesures de remplacement du revenu avaient été plus adéquates. Comme nous l’avons vu dans la section précédente, la logique des avantages financiers de la NCAC est difficile à comprendre, et leur valeur globale est inférieure à celle des régimes d’indemnisation des accidents du travail. La carrière militaire n’est pas une carrière comme les autres, et les soldats qui risquent leur vie pour préserver les valeurs nationales ne devraient pas être considérés comme moins que des accidentés du travail. Cette difficulté saute aux yeux, mais pour une raison ou une autre, les concepteurs de la NCAC ne semblent pas en avoir tenu compte.
Certains ont recommandé d’abandonner complètement l’indemnité d’invalidité, et de revenir au système de la Loi sur les pensions.[50] Cette option ne nous semble pas raisonnable, étant donné tous les problèmes qui étaient soulevés quant au fait que cette loi n’était plus adaptée à la situation de la vie militaire contemporaine.
Si les avantages financiers de la NCAC permettaient réellement de garantir la sécurité financière des vétérans, le montant de l’indemnité d’invalidité aurait moins d’importance puisqu’il serait considéré comme une prime, comme un « bonus » servant à compenser la souffrance, et non comme une manière de compenser une perte de revenus.
Certains ont mentionné la possibilité d’offrir une option entre soit un montant forfaitaire, soit un montant étalé. Les membres du comité ont plutôt été sensibles aux propos de l’ombudsman des anciens combattants pour qui cette option reviendrait à ne rien faire puisque la grande majorité des militaires prendraient le montant forfaitaire. Pour reprendre son expression, il faut que les FC et ACC fassent ici preuve de « fermeté affectueuse ».
À la lumière des témoignages entendus, et en insistant sur la nécessité de réformer en profondeur le système des avantages financiers servant au remplacement du revenu, les membres du comité se sont ralliés à l’idée que l’étalement de l’indemnité d’invalidité permettrait de favoriser la sécurité financière des vétérans. Le comité recommande donc :
Recommandation 15
Que d’ici le 1 novembre 2010, Anciens combattants Canada présente au Comité permanent des Anciens combattants de la Chambre des communes un plan comprenant des options de versement de l’indemnité d’invalidité — paiement forfaitaire, rentes et/ou règlement échelonné — qui tiennent compte de manière personnalisée de la gravité et de la nature de l’incapacité, ainsi que de l’âge et du contexte de vie du soldat ou du veteran.
La valeur maximale de l’indemnité d’invalidité a été remise en question à quelques reprises. Les membres du comité n’ont pas pu poser un jugement définitif sur cette question, étant donné les informations contradictoires qui leur ont été fournies. Il faudrait qu’ACC lève une fois pour toutes l’ambiguïté qui plane au sujet des indemnisations qui sont versées par les tribunaux dans les cas similaires d’invalidité.
« Nous avons (…) examiné les décisions des tribunaux dans le domaine, et à l'époque — corrigez-moi si je me trompe — si je me souviens, les montants tournaient autour de 276 000 $, soit un peu plus que les 250 000 $ versés au début. Je pense que le montant actuel est d'environ 326 000 $. Encore une fois, corrigez-moi si je me trompe.
Nous sommes donc un peu en deçà du montant alloué par les tribunaux. Le montant versé est exactement le même toutefois que celui versé dans le cadre d'autres programmes fédéraux, notamment le RARM, qui était à l'époque 250 000 $. » [51]
L’hésitation manifestée par les représentants du ministère sur cette question pourrait laisser croire qu’elle n’a pas été étudiée en profondeur. Encore une fois, les mesures d’indemnisation des militaires blessés en service ne devraient jamais être en-deçà de ce qui est versé à la population en général dans des circonstances similaires.
« Comme vous le remarquerez dans l'une de nos comparaisons, nous comparons le montant forfaitaire versé à nos soldats s'ils perdent une jambe ou un bras avec celui que recevrait un civil s'il subissait une perte semblable dans un accident de voiture, par exemple. C'est environ la moitié du montant. (…) Si un soldat perd une jambe, il devrait recevoir au moins le même montant qu'un civil qui perd une jambe dans un accident de voiture. C'est là l'essence de notre message. Nous ne demandons pas qu'on leur accorde des prix couverts d'or, mais bien des sommes équivalentes. »[52]
De plus, aucune comparaison ne devrait être faite avec les régimes collectifs d’assurance invalidité, puisqu’en vertu même de ces régimes, la valeur de l’indemnisation est un choix qui entraînera un ajustement en conséquence des primes versées. En plus, la valeur de cette indemnisation est établie à partir du montant d’une couverture d’assurance-vie. Autrement dit, si le programme du RARM a fixé à 250 000 $ la couverture maximale en cas de décès, cela ne dit rien de significatif sur la valeur intrinsèque d’une invalidité totale pour un ancien membre des FC. N’importe quel souscripteur à un régime d’assurance-vie peut choisir d’augmenter ou de réduire sa couverture en fonction de ses besoins. Le programme d’assurance-vie du RARM offre d’ailleurs à n’importe quel membre des FC la possibilité d’augmenter sa couverture jusqu’à 400 000 $. Pourquoi ne pas avoir fixé le seuil maximal de l’indemnité d’invalidité à 400 000 $ selon la même logique ?
Les principes de l’assurance ne semblent pas appropriés pour fixer la valeur de la souffrance et des douleurs qui sont conséquences d’une blessure en service ou d’un décès. À ce titre, les membres du comité croient que les arguments invoqués par les tribunaux devraient être considérés. Le comité recommande donc :
Recommandation 16
Qu’ACC commande une analyse professionnelle indépendante des jugements des tribunaux afin d’établir la valeur réelle des compensations versées pour la douleur et la souffrance liées à une incapacité permanente.
Allocations pour les membres de la famille
Sous le régime de la Loi sur les pensions, il y avait un ajustement qui était consenti afin de tenir compte de la situation familiale du militaire blessé. Cette considération des membres de la famille est disparue de la NCAC, ce qui a été mal reçu de plusieurs témoins, surtout si l’on considère que la promotion des nouveaux programmes s’est faite en insistant sur le soutien accru à la famille.
« Ce qu'on a éliminé dans la nouvelle Charte des anciens combattants, c'est une allocation au conjoint. Il ne s'agissait pas d'un gros montant, mais elle reconnaissait l'importance du conjoint et de son appui. En tant qu'ancien combattant handicapé, je ne peux pas prendre ma douche sans que ma femme soit dans les parages, au cas où je tombe. C'est un handicap pour elle que d'avoir à prendre soin de mon handicap. Toutefois, elle a été rémunérée, dans une certaine mesure.
Puisque je suis un ancien combattant aux termes de la Loi sur les pensions, mes enfants ont touché également ce qu'on appelait une allocation des enfants. Ce n'était pas grand-chose, mais puisque je suis un double amputé, je ne peux pas jouer au hockey de ruelle avec eux, donc je les amenais voir des parties de hockey. Je me servais de l'allocation des enfants à cette fin. C'est le genre de chose qu'une famille fait.
Pour ceux qui sont encore plus handicapés — et j'en suis —, il existait une allocation pour soins. Cela nous permettait d'avoir de l'aide de temps à autre, au besoin, pour les petits travaux dans la maison que je ne peux tout simplement pas faire.
Or, toutes ces mesures ont été éliminées de la nouvelle Charte des anciens combattants. »[53]
Cela peut représenter une tâche énorme de s’occuper d’une personne gravement blessée. Évidemment, le vétéran est indemnisé, mais la conjointe ne peut espérer le même cheminement de carrière étant donné ces obligations qu’implique le vétéran blessé.
« Encore une fois, la nouvelle Charte des anciens combattants trahit notre confiance. Je suis plus que complètement invalide, et mon épouse a été forcée de quitter son travail pour prendre soin de moi. Et pourtant, elle ne reçoit aucune indemnisation. Lorsque je leur en ai demandé la raison, ils ont répondu qu’étant ma femme, elle était censée s’occuper de moi. J’ai trouvé leur comportement très dégradant.»[54]
Le ministère a manifesté une certaine ouverture face au problème :
« Le raisonnement qui a été tenu à l'époque — et c'est une charte en évolution, de sorte que ce raisonnement peut changer — était que la famille était couverte par le Régime de soins de santé de la fonction publique, parce qu'elle avait accès aux prestations des anciens combattants si celui-ci n'était pas en mesure d'en profiter à cause de son service militaire. Tout comme les montants adjugés par les tribunaux et les montants forfaitaires accordés par les commissions des accidents du travail, il n'est pas tenu compte du statut social de l'individu, mais uniquement des souffrances et des douleurs qu'il a subies. Il est vrai que l'on peut contrer cet argument et nous le savons, mais grâce à cette charte en évolution, il y a au moins des discussions à ce sujet et nous sommes sensibles à cet aspect. »[55]
Afin de souligner l’importance du soutien à la famille que devrait incarner la NCAC, le comité recommande :
Recommandation 17
Qu’Anciens combattants Canada s’assure que les membres de la famille qui s’occupent des vétérans souffrant d’incapacités sévères soient rémunérés de manière adéquate.
Indemnité de décès
Cette indemnité est payable si le décès survient dans les trente jours après la blessure, la maladie ou leur aggravation ayant entraîné le décès. Le montant est le même que le montant le plus élevé de l’indemnité d’invalidité. Si le décès survient plus de trente jours après la blessure, la maladie ou leur aggravation, l’indemnité d’invalidité de 100 % tient lieu d’indemnité de décès.
Cette indemnité a fait l’objet d’un débat au comité en raison d’une ambiguïté qui persiste toujours malgré les explications fournies par les représentants du ministère.
« Ce qui se produit après 30 jours, c'est que l'indemnité payée au survivant n'est pas l'indemnité de décès. Il s'agit du montant total ou restant de l'indemnité d'invalidité qui aurait été payée à l'ancien combattant. On a établi les choses ainsi parce qu'après 30 jours, l'ancien combattant pourrait bien avoir fait une demande d'indemnité d'invalidité et en avoir reçu une partie. Ce qui se passera, c'est que le montant total ou restant de l'indemnité d'invalidité sera payé au survivant.
Par exemple, si l'ancien combattant se blesse et que 20 à 30 p. 100 du montant lui était versé, et que plus tard, il décède des suites de ses blessures, le montant restant sera payé au survivant. » [56]
L’ambiguïté qui persiste est la suivante : en vertu de l’article 54. (1) de la NCAC, le montant maximal d’une indemnité d’invalidité ne peut pas dépasser 100 %. Autrement dit, si, dans un cas très grave, le cumul des incapacités dépassait 100 %, le montant de l’indemnité serait limité à 100 % : « Aucune indemnité d’invalidité n’est accordée pour toute partie du total des degrés d’invalidité estimés ou réputés à l’égard du militaire ou vétéran excédant cent pour cent. »
Par contre, l’indemnité de décès est versée, peu importe les circonstances, et n’est pas réduite du montant déjà versé d’une quelconque indemnité d’invalidité. Voici donc ce qui pourrait se produire : un membre actif des FC pourrait avoir reçu une indemnité d’invalidité pour une blessure X ayant entraîné une incapacité de 15 %. Dans le cadre d’une mission subséquente, le même membre subit une autre blessure et décède le 32ème jour suivant la blessure. Sa famille n’aura pas droit à l’indemnité de décès puisque plus de trente jours se sont écoulés, mais elle aura tout de même droit à la portion restante de l’indemnité d’invalidité, c’est-à-dire 85 %.
Si le membre était décédé le trentième jour au lieu du trente-deuxième, sa famille aurait reçu l’indemnité de décès au complet. Dans ce second cas, la famille aurait reçu en tout 115 % du montant maximal de l’indemnité d’invalidité, alors que l’autre famille n’aurait reçu que 100 %, tout simplement en raison du délai de trente jours. Le même calcul prévaut si le membre décédé a déjà bénéficié d’une pension au titre de la Loi sur les pensions. Une formule complexe est définie dans le Règlement qui accompagne la NCAC, et permet d’estimer la valeur totale de la pension qui a déjà été versée, et de déduire ce montant de l’indemnité d’invalidité qui reste à verser suite au décès, s’il est survenu après trente jours. Dans le cas d’un décès, c’est la générosité qui doit s’imposer plus que jamais, pas la logique réglementaire, si cohérente et justifiable fût-elle. Le comité recommande donc :
Recommandation 18
Qu’Anciens combattants Canada s’assure que tous les soldats qui décèdent des suites d’une blessure liée au service soient traités de manière équitable.
La nouvelle Charte des anciens combattants constitue une réforme profonde des programmes de soutien et d’indemnisation des anciens combattants. La très grande majorité des acteurs concernés ont accueilli cette réforme avec un grand enthousiasme, et cela s’est traduit par l’appui unanime qu’elle a reçue, tant à la Chambre des communes qu’au Sénat. Il s’agit toutefois d’une loi complexe aux multiples ramifications, et il était impossible d’en anticiper tout de suite toutes les conséquences. C’est pourquoi elle a été présentée comme un document vivant, susceptible d’être modifié si on s’apercevait que certaines des conséquences imprévisibles de certaines des mesures adoptées allaient à l’encontre de l’esprit de la loi. Plusieurs groupes consultatifs ont formulé leurs recommandations, et le gouvernement, en s’appuyant sur le travail de ces groupes, s’affaire également à évaluer les programmes mis en place en vertu de la NCAC. Le comité désire donc ajouter sa contribution à ces multiples efforts en se faisant l’écho des témoignages des personnes et des groupes qui ont été affectés par ces transformations importantes.
À la lumière des témoignages que nous avons entendus, nous pouvons formuler, en guise de synthèse, quatre grands constats qui reflètent à la fois les progrès réalisés depuis l’entrée de la vigueur de la NCAC et les nombreux défis qui persistent afin que les programmes qui en découlent puissent pleinement en incarner l’esprit.
Notre premier constat est à l’effet que la NCAC constitue un progrès significatif en comparaison du régime de la Loi sur les pensions. L’esprit de soutien à la réadaptation et à la transition vers la vie civile est profondément ancré dans la législation, et nous sommes confiants que cet esprit permettra de corriger les irritants que l’on a pu découvrir après quatre ans d’implantation.
Notre deuxième constat porte sur les programmes de soutien à la réadaptation : aide au placement, réadaptation professionnelle, réadaptation physique, soins de santé et soutien à la famille. Ces programmes constituent une amélioration importante en comparaison de l’ancien régime, puisque tout est désormais en place pour assurer au vétéran qu’il pourra compter sur toute l’aide nécessaire en cas de blessure. Il faut cependant reconnaître que ces programmes n’ont pas encore donné leur pleine mesure. Leur valeur intrinsèque n’est pas remise en question, mais les résultats se font attendre. Le défi principal réside dans la coordination des efforts entre le ministère de la Défense nationale et Anciens combattants Canada afin de permettre une intervention la plus rapide possible, c’est-à-dire lorsque le membre est toujours actif au sein des Forces canadiennes. Or, les frontières législatives entre les ministères nuisent parfois à la volonté sincère des efforts de collaboration. Des progrès significatifs ont été accomplis depuis l’entrée en vigueur de la NCAC, mais il demeure encore difficile pour Anciens combattants Canada d’offrir ses programmes lorsque les membres n’ont pas encore été libérés. Nous souhaitons vivement que des solutions puissent être apportées rapidement à ces problèmes, car la qualité de la réadaptation des vétérans en dépend directement, et c’est par elle que pourra le mieux s’incarner l’esprit de la NCAC.
Notre troisième constat porte sur les avantages financiers, c’est-à-dire les mesures de remplacement du revenu qui sont distinctes du paiement forfaitaire de l’indemnité d’invalidité. Elles comprennent l’allocation pour perte de revenus, l’allocation pour déficience permanente et l’allocation de soutien du revenu des Forces canadiennes qu’administre Anciens combattants Canada. Nous sommes d’avis que ces mesures ne sont pas parvenues à trouver le juste équilibre entre l’incitatif à la réinsertion professionnelle et l’assurance d’une sécurité financière qui soit proportionnelle aux sacrifices considérables que l’on attend des personnes qui défendent le plus dangereusement nos valeurs. C’est pourquoi nous avons recommandé, conformément à ce qu’avaient déjà recommandé la plupart des groupes consultatifs, que soit augmentée l’allocation pour perte de revenus, et que soient revus les critères d’admissibilité de l’allocation pour déficience permanente.
Le quatrième et dernier constat porte sur le paiement forfaitaire de l’indemnité d’invalidité qui a certes été la question la plus débattue au sein du comité. Deux aspects ont surtout été abordés : le fait que l’indemnité soit payée en un seul versement, et le montant de l’indemnité. Sur les modalités de paiement de l’indemnité, il est évident qu’une forme ou une autre d’option doit être offerte afin de minimiser le risque pour les personnes dont la condition permet d’envisager qu’elles auront de la difficulté à administrer une somme importante de manière adéquate. Il ne faut toutefois pas pénaliser les personnes pour qui le montant forfaitaire constitue l’option la plus avantageuse. Quant au montant de l’indemnité, nous sommes d’avis qu’il ne serait pas une source d’insatisfaction aussi importante que certains témoins l’ont affirmé si les mesures de remplacement du revenu étaient plus généreuses. En effet, l’indemnité d’invalidité est fréquemment critiquée parce qu’elle n’assure pas la sécurité financière des vétérans. Or, c’est justement ce qu’elle n’est pas supposée faire. Ce sont les mesures de remplacement du revenu, en particulier l’allocation pour perte de revenus, qui doivent assurer la sécurité financière, alors que l’indemnité d’invalidité est une compensation pour la douleur et la souffrance vécues suite à une blessure. Étant donné certaines lacunes des mesures de remplacement du revenu, les vétérans peuvent être tentés de percevoir l’indemnité d’invalidité comme servant à pallier ces insuffisances. Le réflexe sera alors de comparer l’indemnité d’invalidité à la pension à vie qui était versée en vertu de la Loi sur les pensions. La pension paraîtra alors plus avantageuse, mais on oubliera souvent que cette loi ne prévoyait pas d’allocation pour perte de revenus. On rétorquera alors que les prestations du RARM sont la même chose que l’allocation pour perte de revenus, et il s’ensuivra une confusion grandissante quant aux mérites d’un régime par rapport à l’autre qui s’embourbera petit à petit dans les nuances ésotériques de chacune des mesures. Cette confusion n’est pas salutaire, et nous sommes d’avis que si les mesures de remplacement du revenu étaient plus généreuses et cessaient de s’arrimer sur celles du RARM, une grande part des insatisfactions exprimées face à l’indemnité d’invalidité s’adouciraient. Autrement dit, si les mesures de remplacement du revenu permettaient d’assurer la sécurité financière des vétérans, l’indemnité d’invalidité cesserait d’être conçue comme une mesure de remplacement du revenu et on cesserait de la comparer aux pensions versées antérieurement.
À notre avis, le cœur des défis à relever au cours des prochaines années afin de permettre à la NCAC de réaliser pleinement sa mission se trouve dans deux éléments clés : la capacité d’Anciens combattants Canada d’offrir ses programmes de réadaptation le plus tôt possible aux membres et à leur famille après qu’une décision a été prise de libérer le membre, et la bonification de l’allocation pour perte de revenus. De cette manière, les vétérans auraient de bien meilleures chances de réussir leur transition vers la vie civile, et durant le processus, ils auraient l’assurance de pouvoir répondre aux besoins financiers de leurs familles. De plus, les vétérans dont l’incapacité est trop sévère pour pouvoir occuper un emploi rémunérateur, à défaut de pouvoir bénéficier des programmes de réadaptation, pourraient compter sur le soutien financier à long terme d’Anciens combattants Canada. Dans une telle optique, l’indemnité d’invalidité apparaîtrait pour ce qu’elle devrait être. Aucune somme d’argent ne pourra évidemment soulager les souffrances physiques, psychologiques et émotionnelles que vivent les militaires blessés et leur famille, mais cette somme d’argent serait le symbole concret de cette reconnaissance que désirent manifester le gouvernement et la population du Canada envers le service qu’ils nous rendent et nous ont rendu.
[1] Le comité a adopté une motion l’autorisant à utiliser pour son rapport les témoignages entendus durant la deuxième session.
[2] Témoignages, M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0900
[3] M. Ken Miller (directeur, Direction des politiques sur les programmes, ministère des Anciens Combattants), 6 mai 2010, 1110
[4] L’importance grandissante accordée au cours des dernières années aux blessures liées au stress opérationnel a entraîné une plus grande souplesse dans la manière d’envisager la distinction entre les membres qui sont libérés pour des raisons médicales, et les membres qui sont libérés volontairement, car les symptômes peuvent prendre plusieurs années à se manifester. Les membres libérés volontairement, mais chez ces symptômes font leur apparition, doivent pouvoir compter sur le même soutien que ceux qui ont été libérés pour raisons médicales, ce que le régime de la Loi sur les pensions rendait difficile.
[5] Rapport de la Vérificatrice générale du Canada, mai 2006, ch. 2, p. 61. http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/docs/20060502cf.pdf
[6] Environ 6 200 membres ont été libérés en 2008-2009, et de ce nombre, 1 600 l’ont été pour raisons médicales. On s’attend à ce que ce nombre augmente avec la fin des opérations de combat en Afghanistan. Voir le témoignage M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0900
[7] « Entre autres choses, le personnel des FC doit pouvoir faire ce qui suit : utiliser et entretenir une arme personnelle; effectuer des exercices militaires nucléaires, biologiques et chimiques; combattre les incendies; administrer les premiers soins, y compris la RCR; communiquer à l’aide d’une radio; préparer la correspondance militaire écrite; se déployer à court préavis dans n’importe quel lieu géographique et sous n’importe quel climat; travailler selon un horaire de travail irrégulier ou pendant des heures prolongées; fonctionner efficacement malgré des repas irréguliers ou manqués; voyager en tant que passager dans n’importe quel mode de transport; accomplir des tâches dans des conditions de stress mental et physique; accomplir des tâches avec un soutien médical limité. En outre, du fait que la force et l’endurance peuvent faire la différence entre la réussite et l’échec au cours d’une opération militaire, le personnel des FC doit être physiquement plus en forme que la population canadienne en général. » Des effectifs aptes à servir : l’universalité du service et les programmes de soutien connexes, 16 mars 2009, http://www.forces.gc.ca/site/news-nouvelles/news-nouvelles-fra.asp?cat=00&id=2918
[8] Mme Sandra Pickrell Baker (à titre personnel), 20 avril 2010, 1250
[9] Colonel (à la retraite) Patrick Stogran (ombudsman des vétérans, Bureau de l'ombudsman des vétérans), 22 avril 2010, 1145
[10] Témoignages, M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0900
[11] Témoignages, M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0910
[12] Témoignages, M. Darragh Mogan (directeur général, Division des politiques et des programmes, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0925
[13] Colonel Gerry Blais (directeur, Gestion de soutien aux blessés, ministère de la Défense nationale), 23 mars 2010, 1140; aussi M. Darragh Mogan (directeur général, Division des politiques et des programmes, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0950
[14] M. Pierre Allard (directeur du Bureau d'entraide, Direction nationale, Légion royale canadienne), 22 avril 2010, 1155
[15] M. Pierre Allard (directeur du Bureau d'entraide, Direction nationale, Légion royale canadienne), 22 avril 2010, 1210
[16] Anciens Combattants Canada, Évaluation de la nouvelle Charte des anciens combattants – Phase I, décembre 2009, p. 24
[17] Voir Colonel (à la retraite) Patrick Stogran (ombudsman des vétérans, Bureau de l'ombudsman des vétérans), 22 avril 2010, 1150; aussi M. Pierre Allard (directeur du Bureau d'entraide, Direction nationale, Légion royale canadienne), 29 octobre 2009, 0935.
[18] Mme Elizabeth Taylor (présidente, Association canadienne des ergothérapeutes), 24 novembre 2009, 0915
[19] M. Wolfgang Zimmermann (directeur exécutif, Institut national de recherche et de gestion de l'incapacité au travail), 20 avril 2010, 1130
[20] M. Bernard Butler (directeur général, Gestion des programmes, ministère des Anciens Combattants), 16 mars 2010, 1105; voir aussi M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0900
[21] M. André Bouchard (président, Régime d'assurance-revenu militaire (RARM), ministère de la Défense nationale), 23 mars 2010, 1115
[22] Anciens Combattants Canada, Évaluation de la nouvelle Charte des anciens combattants – Phase I, décembre 2009, p. 21.
[23] Mme Brenda MacCormack (directrice, Réadaptation, ministère des Anciens Combattants), 16 mars 2010, 1145
[24] Mme Sandra Pickrell Baker (à titre personnel), 20 avril 2010, 1210
[25] Mme Muriel Westmorland (professeure et présidente du Comité, New Veterans Charter Advisory Group), 19 novembre 2009, 1000; voir aussi Colonel (à la retraite) Donald S. Ethell (président, Comité No 3 — Support familial, New Veterans Charter Advisory Group), 19 novembre 2009.
[26] Anciens Combattants Canada, Évaluation de la nouvelle Charte des anciens combattants – Phase I, décembre 2009, p. 14.
[27] M. Bruce Henwood (Groupe consultatif Ad Hoc sur les besoins spéciaux), 27 avril 2010, 1215
[28] M. André Bouchard (président, Régime d'assurance-revenu militaire (RARM), ministère de la Défense nationale), 23 mars 2010, 1135
[30] Brigadier-général (à la retraite) Gordon Sharpe (à titre personnel), 19 novembre 2009, 0910; aussi Dr Patrick Loisel (New Veterans Charter Advisory Group), 19 novembre 2009, 0915; et M. Lorne McCartney (secrétaire de la Direction nationale-trésorier, Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes), 24 novembre 2009, 0910
[31] Voir le site de l’Association des commissions des accidents du travail du Canada à http://www.awcbc.org/fr/workerscompensationbenefitsandrehabilitation.asp
[32] M. Hugh Marlowe Fraser (directeur général de promotion des droits, Association canadienne des vétérans pour le maintien de la paix), 26 novembre 2009, 0950
[33] M. Ken Miller (directeur, Direction des politiques sur les programmes, ministère des Anciens Combattants), 6 mai 2010, 1125
[34] Brigadier-général (à la retraite) Gordon Sharpe (à titre personnel), 19 novembre 2009, 1015; aussi M. Lorne McCartney (secrétaire de la Direction nationale-trésorier, Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes), 24 novembre 2009, 0925
[35] Anciens Combattants Canada, Évaluation de la nouvelle Charte des anciens combattants – Phase I, décembre 2009, p. 15.
[36] Brigadier-général (à la retraite) Gordon Sharpe (à titre personnel), 19 novembre 2009, 1015; aussi M. Lorne McCartney (secrétaire de la Direction nationale-trésorier, Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes), 24 novembre 2009, 0925; M. Pierre Allard (directeur du Bureau d'entraide, Direction nationale, Légion royale canadienne), 22 avril 2010, 1150; . Victor Marshall (président, Conseil consultatif de gérontologie), 29 avril 2010, 1110; M. Lorne McCartney (secrétaire de la Direction nationale-trésorier, Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes), 24 novembre 2009, 1000
[37] Voir le « Résumé de l’étude d’impact de la réglementation », annexé au Règlement sur les mesures de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes.
[38] M. Ken Miller (directeur, Direction des politiques sur les programmes, ministère des Anciens Combattants), 6 mai 2010, 1125
[39] M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0940
[40] M. Bruce Henwood (Groupe consultatif Ad Hoc sur les besoins spéciaux), 27 avril 2010, 1140; aussi M. Hugh Marlowe Fraser (directeur général de promotion des droits, Association canadienne des vétérans pour le maintien de la paix), 26 novembre 2009, 1010
[41] M. Brian Ferguson (sous-ministre adjoint principal, Politiques, programmes et partenariats, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0905
[42] Mme Brenda MacCormack (directrice, Réadaptation, ministère des Anciens Combattants), 16 mars 2010, 1145;
[43] Brigadier-général (à la retraite) Gordon Sharpe (à titre personnel), 19 novembre 2009, 1015; aussi M. Bruce Henwood (Groupe consultatif Ad Hoc sur les besoins spéciaux), 27 avril 2010, 1140
[44] Rapport de la Vérificatrice générale du Canada, mai 2006, ch. 2, p. 61. http://www.oag-bvg.gc.ca/internet/docs/20060502cf.pdf
[45] Colonel (à la retraite) Patrick Stogran (ombudsman des vétérans, Bureau de l'ombudsman des vétérans), 22 avril 2010, 1145; et entre autres : Colonel Gerry Blais (directeur, Gestion de soutien aux blessés, ministère de la Défense nationale), 23 mars 2010, 1130; aussi M. Elphège Renaud (président, Association du Royal 22e Régiment), 27 avril 2010, 1220; M. Claude Sylvestre (premier vice-président, Association du Royal 22e Régiment), 27 avril 2010, 1245; Victor Marshall (président, Conseil consultatif de gérontologie), 29 avril 2010, 1110
[46] M. Elphège Renaud (président, Association du Royal 22e Régiment), 27 avril 2010, 1240
[47] M. Wolfgang Zimmermann (directeur exécutif, Institut national de recherche et de gestion de l'incapacité au travail), 20 avril 2010, 1145
[48] M. Pierre Allard (directeur du Bureau d'entraide, Direction nationale, Légion royale canadienne), 29 octobre 2009, 0915
[49] M. Elphège Renaud (président, Association du Royal 22e Régiment), 27 avril 2010, 1220
[50] Mémoire de Sean Bruyea, Recommandation 29, p. 4.
[51] M. Ken Miller (directeur, Direction des politiques sur les programmes, ministère des Anciens Combattants), 6 mai 2010, 1155; aussi M. Darragh Mogan (directeur général, Division des politiques et des programmes, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0915
[52] Brigadier-général (à la retraite) Gordon Sharpe (à titre personnel), 19 novembre 2009, 0935
[53] M. Bruce Henwood (Groupe consultatif Ad Hoc sur les besoins spéciaux), 27 avril 2010, 1200
[54] M. William Maguire (à titre personnel), 29 avril 2010, 1235
[55] M. Darragh Mogan (directeur général, Division des politiques et des programmes, ministère des Anciens Combattants), 20 octobre 2009, 0945
[56] M. Ken Miller (directeur, Direction des politiques sur les programmes, ministère des Anciens Combattants), 6 mai 2010, 1220