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CC11 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité législatif chargé du projet de loi C-11


NUMÉRO 007 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 5 mars 2012

[Enregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bonjour à tous — témoins, invités et députés —, et bienvenue à la 7e séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-11.
    Deux votes ont eu lieu cet après-midi. Malheureusement, c'est ce qui nous a empêchés de commencer la séance à 15 h 30. Donc, nous devrons bien sûr ajuster le temps d'intervention.
    Bienvenue à tous. Je vais vous présenter. Nous accueillons M. Alain Lauzon et M. Martin Lavallée, de la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada; M. Elliot Noss, de Tucows inc.; et M. Jean Brazeau, Mme Cynthia Rathwell et M. Jay Kerr-Wilson, de Shaw Communications inc.
    Je crois que la greffière vous a dit que chaque organisme, et non chaque personne, dispose de 10 minutes, et seulement 10 minutes, pour présenter son exposé. Malheureusement, je vais vous interrompre si vous n'avez pas terminé après 10 minutes.
    Nous allons tout d'abord entendre la Société du droit de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada.
    Vous disposez de 10 minutes.

[Français]

    Bonjour.
    Je remercie les membres du comité législatif de nous permettre de témoigner devant eux aujourd'hui. Je me nomme Alain Lauzon et je suis le directeur général de la SODRAC. Je suis accompagné par Me Martin Lavallée, directeur, Licences et affaires juridiques.
    La SODRAC existe depuis 25 ans. En musique, nous assurons la gestion du droit de reproduction, et en arts visuels et métiers d'art, nous gérons l'ensemble des droits d'auteurs du répertoire que nous représentons.
    En tant que société de gestion collective, nous jouons un rôle économique important pour les milliers d'auteurs, compositeurs et éditeurs québécois, canadiens et étrangers que nous représentons. En effet, le droit d'auteur est parfois la seule rémunération d'un créateur.
    Les membres que je représente appartiennent à trois secteurs d'activité: celui des oeuvres musicales de chansons, celui des oeuvres musicales audiovisuelles — télévision, films, jeux vidéo —, celui des oeuvres artistiques en arts visuels et métiers d'art.
    La Loi sur le droit d'auteur est le fondement essentiel qui confère aux créateurs un droit de propriété relatif qu'ils créent. Le droit de reproduction, qui est distinct du droit d'exécution publique, est un droit fondamental reconnu dans la Loi sur le droit d'auteur et également dans les traités internationaux et la Convention de Berne, dont le Canada est signataire.
    L'avènement d'Internet a provoqué des changements technologiques qui ont transformé les modes de distribution, de diffusion et de consommation des oeuvres. C'est pourquoi la loi doit absolument être modernisée. La question est de savoir à quel prix. Les producteurs vous disent que les mesures proposées par le projet de loi C-11 sont suffisantes, mais pour les créateurs, ce n'est pas le cas.
    Dans le domaine de la musique, le projet de loi C-11 aura un impact considérable sur nos ayants droit. L'introduction et la modification des exceptions pour les radiodiffuseurs, la non-extension du régime de copie privée aux enregistreurs audionumériques, l'extension de l'utilisation équitable à des fins d'éducation, toutes ces dispositions touchent des sources de redevances existantes. Le projet de loi crée aussi de nouvelles exceptions en faveur des utilisateurs et des consommateurs, sans compensation pour les ayants droit.
    C'est plus de 40 p. 100 en pertes de redevances que vont subir les auteurs, et cela, sans compter la fragilisation des instruments financiers dont se sont dotés les auteurs, les sociétés de gestion collective. Également, le présent projet de loi ne règle d'aucune façon, ni sur les plans légal et monétaire, le problème de partage des fichiers illégaux et la responsabilité des fournisseurs de services Internet.
     La musique n'a jamais été aussi jouée, écoutée et copiée. La Loi sur le droit d'auteur doit continuer de nous donner un cadre légal nécessaire pour exercer le droit de propriété des oeuvres des auteurs, des compositeurs et des éditeurs que nous représentons et de nous permettre de jouer notre rôle de société de gestion collective en les rémunérant adéquatement.
    En ce qui concerne les oeuvres artistiques, nous croyons que le Canada devrait adopter un droit de suite, comme dans plus de 50 pays, dont ceux de l'Union européenne. Ce droit permettrait aux créateurs et à leurs ayants droit de bénéficier d'une portion du prix de revente des oeuvres.
     Les créateurs se doivent de participer à part entière à la culture et à la nouvelle économie numérique grâce à la Loi sur le droit d'auteur. Nous sommes en faveur de l'introduction de protections juridiques par les serrures numériques, même si certains supports de diffusion des oeuvres n'en comportent pas encore. Les serrures numériques peuvent être efficaces pour certains secteurs, comme le film et les jeux vidéo, même si, actuellement, elles servent davantage aux ayants droit producteurs qu'aux créateurs.
     Par ailleurs, plutôt que de créer des exceptions, sans rémunération, nous croyons qu'il faut privilégier le système d'octroi de licences par des sociétés de gestion collective pour l'accès aux oeuvres, car la gestion collective a démontré qu'elle est tout à fait aussi efficace pour l'utilisateur que pour les ayants droit, dont elle assure la rémunération.
    Les amendements techniques que nous proposons dans notre mémoire représentent un seuil minimum pour éviter qu'un déséquilibre irréversible s'installe entre ceux qui créent les contenus et ceux qui les utilisent et les consomment.
    Afin de rétablir cet équilibre, la SODRAC propose donc 13 recommandations spécifiques, avec de nouvelles formulations. Cela vous a été distribué cet après-midi. On pense que ces recommandations respectent les volontés exprimées par le gouvernement tout en évitant de bouleverser inutilement la relation d'affaires existant entre le créateur et les utilisateurs.
     On parle bien d'une relation d'affaires, ici, entre un auteur et l'exploitant de ses oeuvres. D'ailleurs, qui peut revendiquer les effets d'une législation sur la Loi sur le droit d'auteur? Ce n'est pas l'apanage du fournisseur Internet, du radiodiffuseur, du professeur ou même, semble-t-il, du titulaire de droits.
    La Loi sur le droit d'auteur protège la vie économique de l'oeuvre, en lui donnant le plus grand accès possible, en échange d'une rémunération raisonnable.
     Quand on parle de valeur économique, on ne parle pas de taxe ni de double paiement. On parle d'un versement d'une valeur d'utilisation de la musique, dans notre cas, par des exploitants qui, pour la plupart, font de la musique une principale composante essentielle de leur modèle d'affaires.
    Or, sous sa forme actuelle, le projet de loi C-11 s'immisce dans cette relation d'affaires privée, en créant de nombreuses exceptions qui sont parfois exprimées dans des termes qui dépassent la volonté clairement établie par le gouvernement, ou qui entraînent des conséquences inattendues.
    À titre d'illustration, j'aimerais m'attarder à deux de nos recommandations. La première porte sur le nouvel article 30.71 qui traite des reproductions dites temporaires pour processus technologique. Le gouvernement a indiqué que cet article n'avait pas d'impact sur les droits des auteurs parce qu'il couvre des reproductions temporaires et techniques effectuées dans le cadre d'un processus qui est lui-même technique, comme des transmissions en antémémoire sur Internet, ou mémoire cache.
    Cependant, le libellé proposé par l'article traite uniquement de facilitation d'un processus technologique, ce qui est tellement vaste et vague qu'on pourrait faussement l'interpréter comme englobant de nombreuses reproductions numériques dont la valeur a déjà été établie dans un libre marché.
    Il est donc nécessaire de préciser que ce type de reproduction, qui est visé par le gouvernement, est technique et sans valeur. Si une utilisation de cette reproduction temporaire et distincte — ce n'est pas la solution finale, mais la reproduction distincte de la reproduction temporaire — entraîne un bénéfice quantifiable pour l'utilisateur, l'exception ne devrait pas s'appliquer.
    De plus, le titre de l'article fait référence à une reproduction temporaire, mais le mot « temporaire » n'apparaît plus dans le reste du libellé. On parle plutôt d'une durée de processus technologique, ce qui est extrêmement vague. Or le sens courant du mot temporaire est « momentané » ou « limité dans le temps ». Nous vous proposons donc qu'on précise que la reproduction soit temporaire ou transitoire.
    Notre deuxième recommandation porte sur l'exception pour les enregistrements éphémères. On en a beaucoup parlé, la semaine dernière. Bien sûr, la SODRAC s'explique mal le retrait de l'obligation d'obtenir une licence d'une société de gestion pour ce type de reproduction, lorsqu'on réalise que l'utilisation de tous les droits de reproduction par les stations de radio commerciale représentait, en 2009, à peine 1,4 p. 100 de leur revenu annuel et, cela, en échange de l'utilisation — ce qui est encore vrai, à ce jour — de 80 p. 100 de musique dans leur programmation. Nous préférerions ainsi que le paragraphe 30.9(6) de la loi actuelle demeure intouché.
    Néanmoins, le gouvernement désire toujours que les ayants droit soient dûment rémunérés pour des copies des oeuvres conservées plus de 30 jours. Nous voulons simplement souligner qu'il est possible, aujourd'hui, de créer des systèmes automatisés de recopiage et de destruction de copies qui permettraient de faire indirectement ce que la loi interdit de faire directement, par exemple de détruire la copie à la 29e journée pour la recopier deux jours plus tard, repartant à l'infini le chronomètre du délai de 30 jours.
    Rappelons encore une fois qu'une copie conservée plus de 30 jours peut difficilement être qualifiée d'éphémère. On n'est pas, ici, dans un simple transfert. Il s'agit d'une reproduction qui sert à de multiples fonctions. La SODRAC perçoit ce type de droit depuis 1992, soit depuis déjà plus de 20 ans. L'industrie de la radio ne s'est pas effondrée pendant cette période, au contraire. Sa marge bénéficiaire est passée de 1 p. 100 à 21 p. 100, pendant cette même période.
    La SODRAC recommande donc d'intégrer les modifications mineures au paragraphe 34(2) du projet de loi que vous pouvez voir dans notre mémoire et qui sont proposées afin d'éviter le contournement de ces dispositions qui ne semble pas être souhaité par le gouvernement.
    Je remercie les membres du comité de leur attention et les invite à prendre connaissance des autres propositions de modifications techniques proposées dans notre mémoire qui visent à refléter plus précisément les intentions exprimées par le gouvernement.
(1550)
    Pour conclure, je tiens à souligner que la SODRAC est partie prenante des travaux et des recommandations des regroupements suivants: la Coalition des ayants droit musicaux sur Internet, le DAMIC, ou Droit d'auteur Multimédia-Internet Copyright, et la coalition des organismes culturels sous la coordination de la Coalition canadienne des arts.
    Au nom de la SODRAC, je remercie les membres du comité de nous avoir écoutés. Merci.
(1555)
    Je vous remercie de votre présentation.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Noss, pour 10 minutes.
    Je m'appelle Elliot Noss. Je suis PDG de Tucows inc. Je vous remercie tous de m'avoir donné l'occasion de venir témoigner devant vous aujourd'hui.
    J'aimerais tout d'abord vous remercier tous. Nous serons peut-être plus chanceux cette fois-ci, c'est la troisième fois, mais il semble que nous avons une réforme du droit d'auteur, ou du moins quelque chose qui s'y apparente, qui présente une solution équilibrée pour toutes les parties concernées. Je pense que vous méritez beaucoup d'éloges.
    J'ai une position à défendre au sujet des éléments contenus dans le projet de loi, mais je veux m'en tenir à quelques aspects clés pour lesquels Tucows a ouvert une fenêtre sur le monde, et je veux vous parler un peu de notre expérience.
    Tucows est une entreprise qui existe depuis la naissance d'Internet. Le site Web a été créé en 1993. En tant qu'entreprise canadienne, nous collaborons avec des fournisseurs de service partout dans le monde depuis 1995, soit depuis la naissance d'Internet. Nous avons inventé l'enregistrement de noms de domaine de gros. Aujourd'hui, nous sommes de loin le plus important registraire de nom de domaine au Canada: 1,7 million de noms de domaine ont été enregistrés pour les Canadiens et, fait important, pour plus de 2 300 clients canadiens.
    Je vais prendre un certain temps pour vous dire qui sont ces clients et pourquoi ils sont importants dans le cadre de la discussion.
    Nos clients les mieux connus sont des entreprises d'hébergement Web, des FAI, des firmes de télécommunications et des câblodistributeurs, mais il y a une énorme partie de ces 2 300 clients dont on ne parle pas assez souvent ou qui ne sont pas assez connus. Il s'agit des petites entreprises d'hébergement Web, des concepteurs Web, des distributeurs de produits modifiés et des intégrateurs qui emploient des dizaines de milliers de Canadiens.
    Nous collaborons avec environ 12 000 fournisseurs de service, mais je ne parle présentement que des 2 300 qui sont au Canada. Il s'agit des compagnies qui, pour l'essentiel, mettent de petites entreprises, des utilisateurs, des artistes et des créateurs en ligne et qui leur permettent de profiter de tous les grands avantages que leur apporte Internet.
    Malheureusement, on appelle parfois mes clients par un nom insidieux: « facilitateurs ». Il est extrêmement important de comprendre ce qui caractérise la plupart des petites entreprises, des utilisateurs. Comme nous le savons tous, notre économie connaît une transition vers le travail autonome; lorsque je parle des « utilisateurs », je parle des gens qui ont un emploi et qui démarrent une entreprise à domicile, des créateurs ou des gens qui aspirent à le devenir. Ils ont besoin d'aide pour accéder à Internet et utiliser les outils de façon à en profiter au maximum, qu'il s'agisse d'enregistrer un nom de domaine, de créer et de lancer un site Web, d'avoir une page Facebook pour promouvoir ce qu'ils font, ou d'avoir un compte Twitter, etc. Par exemple, un de nos clients pourrait aider 50 ou 100 petites entreprises et utilisateurs finaux, et lorsque nous parlons des dispositions habilitantes, nous parlons des gens qui ne sont tout simplement pas connus.
    J'adore le fait que de grandes firmes de télécommunications et des FAI peuvent être bien représentés dans les domaines des politiques et du droit. Tucows est une entreprise plutôt petite qui génère 100 millions de dollars de recettes. Il ne s'agit pas d'une très grande entreprise, mais nous avons ce qu'il faut pour gérer les plaintes relatives à la propriété intellectuelle et au droit d'auteur; ces petites entreprises dont je parle, celles qui mettent les petites entreprises en ligne, ne sont tout simplement pas en mesure de le faire, ce qui signifie que toute mesure législative trop floue... En toute honnêteté, à ma connaissance, le projet de loi actuel est le premier qui est suffisamment précis pour donner une chance à cette majorité, à cette base que forment les fournisseurs.
(1600)
    C'était sur cette partie, la première dont je parle, que nous avons d'excellentes connaissances, et je ne parle pas des meilleures connaissances seulement au Canada, mais dans le monde. Tucows est le chef de file mondial des services Internet de gros. Nous sommes reconnus dans le monde comme le meilleur et le plus important partenaire pour les fournisseurs de service dans la net-économie, et je vous donne donc un point de vue canadien, d'une entreprise canadienne, d'une position mondiale.
    Nous avons près de 10 p. 100 des noms de domaine dans la base générique de noms de domaine. Cela veut dire que nous sommes témoins d'un autre élément particulièrement, c'est-à-dire les pratiques employées quotidiennement par des détenteurs de droits de propriété intellectuelle et leurs services juridiques.
    Je vais vous ouvrir une petite fenêtre sur notre monde.
    En 2011, Tucows a reçu plus de 300 plaintes sur des cas de violation de propriété intellectuelle. Aucune d'entre elles n'a abouti.
    Je veux m'assurer que vous ne pensez pas que cela signifie que tout se passe bien dans notre espace de nommage. Nous avons 10 p. 100 des problèmes si nous avons 10 p. 100 des enregistrements. Nous travaillons régulièrement avec la police et les détenteurs de droits pour des questions d'hameçonnage, de pornographie juvénile, de drogues, etc., mais malheureusement, nous remarquons que la pratique typique utilisée par les détenteurs de droits de propriété intellectuelle consiste à commencer par faire des menaces et faire tout ce qu'ils peuvent pour nous intimider.
    Je dois agir dans le cadre de l'ICANN, l'organisme de réglementation des noms de domaine, et je fais donc affaire avec des représentants du secteur de la propriété intellectuelle de partout dans le monde — l'OMPI, etc. Lorsque j'en discute avec eux, ils ne nient rien et ne remettent pas leur pratique en question; ils disent que c'est une bonne pratique et qu'ils ne font simplement que représenter les intérêts de leurs clients comme ils se doivent de le faire.
    Je ne remets pas cela en question, mais en examinant les mesures que vous intégrerez dans le projet de loi, vous devez tous garder en tête qu'ils sont menaçants. Les petites entreprises — l'entreprise d'hébergement Web qui emploie 5 ou 10 personnes ou l'entreprise de conception Web qui emploie deux personnes — ne pourront que se replier lorsqu'elles se heurteront à des exigences.
    Je veux vous remercier tous encore une fois. Internet est la plus importante invention menant à des changements positifs que le monde n'a jamais connus — plus importante que l'imprimerie et assurément que la télévision ou le téléphone. Il jette les bases pour l'avenir. Nous ne ressentirons pas les effets de l'établissement de ces mesures équilibrées dans 3 mois ou l'an prochain, mais bien dans 5 et 10 ans.
    À l'heure actuelle, le paysage canadien est créatif et riche. Je vais vous donner un conseil. De toute évidence, ce sujet vous intéresse. Pour ceux d'entre vous qui ont des adolescentes, je vais faire d'une pierre d'un coup: emmenez vos filles voir le film sur Justin Bieber, Never Say Never. Faites-le pour deux raisons: premièrement, votre fille vous adorera, et deuxièmement, vous verrez ce que Guy Kawasaki, une légende de Silicon Valley, a décrit comme le meilleur film sur les médias sociaux qui a été fait jusqu'à ce jour. La plus grande vedette du disque du Canada n'a pas réussi grâce aux étiquettes, mais bien grâce au contenu généré par l'utilisateur et à l'accès libre à Internet et à la plateforme que tout cela crée.
    Je sais que je serai la seule personne qui parle des dizaines de milliers d'employés de ces milliers de petites entreprises représentant des millions d'utilisateurs canadiens qui vous dira « c'est équilibré, maintenez ces mesures ».
    Merci.
(1605)
    Merci, monsieur Noss.
    Je suppose que je vais louer le film Never Say Never en fin de semaine pour que mes filles et moi puissions l'écouter.
    Il est présentement à l'affiche.
    Cela dit, je cède la parole aux représentants de Shaw Communications. Vous disposez de 10 minutes.
    Monsieur le président, membres du comité, je m'appelle Jean Brazeau. Je suis le premier vice-président des affaires réglementaires et des relations gouvernementales de Shaw Communications. Je suis accompagné de Mme Cynthia Rathwell, qui est à ma gauche. Elle est vice-présidente des affaires réglementaires. Je suis également accompagné de M. Jay Kerr-Wilson, de Fasken Martineau.
    Nous vous remercions beaucoup de nous donner l'occasion de vous présenter notre point de vue au sujet du projet de loi C-11.
    Shaw Communications est une société diversifiée qui offre une vaste gamme de services de communication, notamment de télédistribution, de télévision satellitaire, d'accès Internet à haute vitesse, de téléphone résidentiel et de radiodiffusion.
    Dans le cadre de ses diverses activités, Shaw crée, acquiert, distribue et transmet aux Canadiens du contenu protégé par les droits d'auteur. À ce titre, Shaw comprend qu'il est important que des dispositions législatives sur le droit d'auteur efficaces existent pour les Canadiens et que tous les règlements sur le droit d'auteur doivent être dosés soigneusement afin de protéger les intérêts des consommateurs et de soutenir la créativité et l'innovation.
    À notre avis, le droit d'auteur devrait appuyer et favoriser le développement de marchés légitimes et de produits et de services. Il devrait donner aux détenteurs de droits d'auteur une protection adéquate contre la violation ainsi que la liberté de négocier une juste compensation pour l'utilisation de leurs oeuvres. Toutefois, une loi sur le droit d'auteur ne doit pas faire obstacle à l'innovation. Elle doit soutenir le développement de nouveaux services et de nouveaux modèles de gestion et non les gêner. Elle doit favoriser les partenariats entre les créateurs, les distributeurs et les consommateurs.
    Nous sommes heureux de constater que le gouvernement a adopté une approche équilibrée et conviviale dans le cadre de la réforme du droit d'auteur par le projet de loi C-11. Nous appuyons entièrement ce que dit le ministre en particulier: que le projet de loi vise à légaliser les activités quotidiennes des consommateurs, notamment l'enregistrement d'émissions de télévision pour écoute en différé, l'utilisation de l'informatique en nuage et de services de stockage à distance comme les enregistreurs personnels de vidéo en réseau, la création et le partage de contenu généré par l'utilisateur, et le déplacement de contenu acheté sur des dispositifs et sur le support de leur choix.
    Nous appuyons le souhait du gouvernement d'atteindre l'équilibre, et nous croyons que le projet de loi C-11 y parvient grandement.
    Nous aimerions attirer l'attention du comité sur trois dispositions précises qui, selon nous, ne permettent pas d'atteindre les objectifs du gouvernement. Ces dispositions pourraient être modifiées en grande partie par quelques amendements de forme mineurs.
    Pour faire en sorte que le nouveau régime d'avis du Canada, que nous appuyons fermement, fonctionne bien et se traduise par une collaboration efficace entre les détenteurs de droits et les FAI, et que les FAI n'aient pas à assumer la responsabilité des violations commises par leurs clients, il faut apporter des petits amendements de forme au projet de loi C-11. Les détails sont présentés dans notre mémoire.
    Cependant, en général, Shaw croit fermement que l'obligation qu'ont les FAI de fournir des avis et de conserver des données doit entrer en vigueur en même temps que des règles qui normalisent le format de l'avis requis et qui établissent des tarifs maximums pour la l'envoi d'avis. Le nouveau système automatisé pour l'envoi d'avis que les FAI doivent concevoir pour se conformer au nouveau régime ne peut être efficace que si les avis des détenteurs de droits contiennent des renseignements complets et que s'il y a un format. À ce titre, il est approprié que les nouvelles exigences relatives aux avis entrent en vigueur conformément aux règles qui garantissent que les systèmes d'avis peuvent être créés et qu'ils puissent fonctionner de façon efficace.
    Ensuite, le projet de loi contient une exception qui permet aux consommateurs d'enregistrer des émissions de télévision pour les écouter plus tard. Le ministre a dit que cette exception et celle sur le stockage permettront aux services d'enregistreur personnel de vidéo en réseau — PVR — de fonctionner sans qu'il n'y ait de responsabilités liées au droit d'auteur.
    Shaw appuie entièrement l'objectif du gouvernement d'autoriser les services de PVR en réseau. Toutefois, nous craignons que dans sa forme actuelle, la disposition sur le stockage ne reflète pas aussi clairement qu'elle le pourrait l'intention du gouvernement de permettre aux entreprises de câblodistribution et de communications par satellite d'offrir aux consommateurs des services de PVR en réseau.
    Autrement dit, pour fonctionner, un PVR en réseau doit remplir deux fonctions: faire une copie de l'émission de télévision que le consommateur veut enregistrer et diffuser l'émission pour le consommateur au moment où il veut l'écouter. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, contient une exception claire pour l'enregistrement d'une émission de télévision par le service de PVR en réseau, mais pas pour la diffusion de l'émission.
    Avec tout le respect que nous vous devons, nous soutenons qu'il serait utile que des précisions soient apportées au projet de loi sur la non-responsabilité du fournisseur de PVR en réseau lorsque l'émission est transmise au consommateur.
(1610)
    L’actuel manque de clarté pourrait conduire à des litiges vexatoires et constituer un obstacle à l’offre de services de PVR en réseau aux consommateurs canadiens. Nous croyons qu’une légère modification d’ordre technique à la disposition existante établirait clairement qu’un fournisseur de services de PVR en réseau n’est pas assujetti au droit d’auteur parce qu'il a hébergé ou diffusé des émissions de télévision qui ont été enregistrées à la demande du consommateur. Nous avons remis au greffier la modification technique précise qui est recommandée à cette fin.
    Notre dernière préoccupation concerne les dispositions qui s’appliquent à la vente de contenu en ligne, plus particulièrement au libellé du droit de mise à la disposition du public.
    Tel qu’il est rédigé, le projet de loi pourrait traiter toute diffusion sur Internet comme une diffusion à l’intention du public. Cela signifie que si quelqu’un a acheté une copie d’une chanson à partir d’un service comme iTunes, cette transaction serait traitée de la même façon que si la chanson avait été diffusée à la radio. Nous pensons qu’il est beaucoup plus approprié de traiter la vente en ligne d’une chanson, d’un film, ou d’un jeu comme si l’achat avait eu lieu en magasin.
    En raison de l’approche adoptée dans la mesure législative, les transactions en ligne faites au Canada pour l’achat de musique ne feront pas l’objet d’une libre négociation entre les parties, mais nécessiteront l’intervention de la Commission du droit d’auteur pour fixer le prix de la musique. Cela produira ce que nous croyons être des résultats inattendus. En vertu de l’approche adoptée dans le projet de loi C-11, négocier avec le créateur pour fixer un prix équitable pour la vente du jeu sur Internet n’est même pas une option. Le problème sera le même pour la vente en ligne de films, d’émissions de télévision et d’autres formes de divertissement multimédia.
    Étant donné la volonté du gouvernement d’inciter les Canadiens à devenir des chefs de file novateurs dans l’économie numérique, nous ne croyons pas que les dispositions législatives sur le droit d'auteur devraient empêcher les parties de négocier librement des licences conventionnelles et imposer au lieu de cela des prix fixés par un tribunal administratif. Nous soutenons respectueusement qu'il serait beaucoup plus raisonnable et convivial d’appliquer à la vente de produits dans le monde virtuel les mêmes règles que celles qui s’appliquent à la vente de produits dans le commerce de détail.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous croyons que le projet de loi C-11 est une mesure importante pour la modernisation des lois canadiennes sur le droit d’auteur. Nous soutenons les exceptions favorables aux consommateurs et la protection accrue contre le piratage. Indépendamment des amendements que nous proposons afin de mieux refléter la politique du gouvernement, Shaw pense que le Canada et les Canadiens seront bien servis par le projet de loi.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci.
    Merci, monsieur Brazeau.
    Nous passons maintenant à la première série de questions de cinq minutes. Nous commençons avec M. Braid.
    Merci, monsieur le président. Merci à tous les témoins d’être ici aujourd’hui.
    Monsieur Brazeau, j’aimerais commencer par vous poser deux ou trois questions. Pourriez-vous nous parler des avantages du régime avis et avis comparativement au régime d’avis et retrait?
    Nous pensons certainement que le régime avis et avis est une façon beaucoup moins intrusive de garantir que le gouvernement atteint son objectif en matière de politique. Nous serions très préoccupés si on commençait à retirer le service à nos clients. La réaction des clients par rapport à ces mesures serait très négative. Je pense que la mesure est un peu trop draconienne. Nous pouvons atteindre le même objectif avec le régime avis et avis.
    Actuellement, certains FSI envoient volontairement des avis à ceux qui violent les droits d’auteur sur Internet. Est-ce le cas de votre entreprise?
    Oui, nous le faisons actuellement.
    D’accord; formidable.
    Il est juste de décrire votre entreprise comme un intermédiaire Internet, si vous voulez. Compte non tenu des modifications techniques dont vous avez parlé — que je comprends —, pensez-vous que le projet de loi C-11 contient de bonnes mesures, de bonnes dispositions et une reconnaissance relativement au rôle d’intermédiaire de votre entreprise?
    Indépendamment des modifications techniques, nous appuyons fermement le projet de loi.
    D’accord.
    Pourriez-vous nous parler de l’importance des dispositions d'exonération?
    Je vais laisser à Jay le soin de répondre à la question.
(1615)
    Il ne fait aucun doute que toutes les autorités au monde qui ont envisagé la mise en oeuvre des traités de l’OMPI ont compris que les dispositions d'exonération sont essentielles pour les intermédiaires. Je voudrais faire écho au témoignage de Jacob Glick, de Google. Les investisseurs ont également reconnu que des règles claires sur la responsabilité des intermédiaires et des dispositions d'exonération claires et efficaces sont essentielles à la création d’un environnement où les investisseurs ne craignent pas d’appuyer de nouveaux produits et services novateurs.
    Croyez-vous que le projet de loi C-11 le permet?
    Oui. Indépendamment, encore une fois, des modifications techniques proposées par Shaw. En reconnaissant les rôles précis liés à l’hébergement et les services d’accès à Internet et en ayant des dispositions d'exonération par rapport à ces fonctions, le projet de loi C-11 adopte la bonne approche.
    Monsieur Noss, pensez-vous qu’il est important que le Canada respecte et ratifie les traités de l’OMPI et qu'il y adhère, en fin de compte?
    Oui, il est important que le Canada les respecte, mais il n’est pas aussi nécessaire qu’il les ratifie.
    Il y a une tendance très intéressante actuellement: lorsque les objectifs ne peuvent être atteints par la politique intérieure, on tente de les atteindre grâce à la politique internationale. C’est très inquiétant.
    Je vais vous parler de quelque chose qui s’est produit ces deux ou trois dernières semaines et qui n’était jamais arrivé auparavant. J’ai reçu trois appels téléphoniques distincts de grands fournisseurs de services américains après les discussions qui ont eu lieu aux États-Unis sur la SOPA et la loi sur la protection des renseignements personnels; on m’a demandé...
    S'agissait-il d'appels automatisés?
    Des voix: Oh, oh!
    Non.
    Je suis heureux que vous l’ayez demandé.
    On voulait savoir quel climat régnait au Canada par rapport à certaines de ces questions et on cherchait, au nom des clients, à localiser d’importantes bases de données et à les déplacer au Canada — les sociétés américaines et les clients américains — parce que le climat pourrait y être plus sain.
    Il ne s’agissait pas d’entreprises illégitimes, mais de très grandes entreprises que vous connaissez toutes certainement. On craint l’excès de pouvoir là-bas.
    Si le Canada peut être un chef de file mondial à cet égard, alors, pour moi, c’est beaucoup plus important, non seulement pour l’économie, mais aussi pour un réseau Internet sain et ouvert, ce que je veux pour mes enfants.
    Le projet de loi C-11 n’accorde pas de pouvoir excessif, n'est-ce pas?
    Le projet de loi C-11 me paraît très bien.
    Merci.
    Vous avez 30 secondes.
    Je pense que c’est le moment idéal pour terminer.
    Parfait. Merci, monsieur Braid.
    Nous passons maintenant à M. Angus, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. C’est une discussion très intéressante à tous les points de vue.
    J’aimerais revenir sur une question posée par mon collègue pendant le dernier tour.
    Monsieur Noss, vous avez dit que vous aimez l’équilibre, mais vous avez parlé de votre préoccupation par rapport au libellé des dispositions d’habilitation. Je vois que vous êtes membre de la Business Coalition for Balanced Copyright.
    C’est exact.
    Il y a d’assez gros joueurs là-dedans.
    Compte tenu de l’expérience avec SOPA et l’énorme contrecoup qui a brûlé les doigts de nombreux politiciens américains sur cette question, voyez-vous un libellé qui permettrait de régler...?
    Nous avons tous intérêt à cibler les gens qui devraient être fermés...
    C’est exact.
    Nous avons également un intérêt commun à veiller à ne pas détruire la plateforme encore nouvelle. Avez-vous vu un libellé qui peut vraiment être axé sur cette question? Est-ce le bon moment? Que recommandez-vous?
    Je vous dirais que lorsque j’ai examiné attentivement le projet de loi C-11 dans sa forme actuelle, j’ai été agréablement surpris. On pourrait dire cela. Il y a l’élargissement approprié des exceptions pour l’utilisation équitable, les dispositions sur le régime avis et avis, ainsi que les dommages-intérêts légaux. Trois ou quatre de ces choses sont novatrices et donnent au Canada une occasion de créer un modèle pour le reste du monde.
    Ce qui est intéressant — encore une fois, je rencontre des représentants dans le cadre de l’ICANN —, c’est qu’il y a des pays dans le monde qui sont à la recherche d’une solution de rechange à cette approche autoritaire que l’on observe dans certains pays, et particulièrement aux États-Unis, malheureusement. Je pense qu’il y a là une occasion formidable et unique pour le Canada.
    Merci.
    Monsieur Lauzon, nous nous sommes souvent parlé au fil des ans. Je voulais connaître votre définition du droit d’auteur. C’est peut-être simpliste, mais essentiellement, vous avez dit que le droit d'auteur est un paiement, un droit fondamental qui est au coeur de ce dont nous parlons. Il est question de ceux qui seront payés et du moment où ils le seront.
    Lors des audiences du comité, j’ai remarqué que mes collègues du Parti conservateur appellent le droit d’auteur une taxe. Ils utilisent « taxe » tout le temps. Ils disent que ce n’est pas équitable pour les entreprises. Pourtant, quand on parle de l’exemption pour les enregistrements éphémères qu'on est en train de créer, il semble que par rapport à quelque chose qui a été décidé par la Commission du droit d’auteur — qui a défini le droit d’être payé comme les 20 millions de dollars que les musiciens, les artistes et les éditeurs reçoivent —, ils veulent avoir recours à une exemption pour priver les gens du droit d’être payé qui leur a été accordé par la Commission du droit d’auteur.
    Croyez-vous qu'il revient au gouvernement d’intervenir auprès de la Commission du droit d'auteur et de dire que vous n'aurez pas les 20 millions de dollars, mais que pendant que nous y sommes, on va prendre les 30 millions de dollars que vous avez reçus à titre de redevance sur les supports numériques? Ils vont prendre 50 millions de dollars et intervenir dans votre modèle de gestion, puis ils diront que c’est équitable. Qu'en pensent les membres de la SODRAC?
(1620)
    La Commission du droit d’auteur est reconnue mondialement comme une autorité qui établit la valeur du droit. Les participants y ont recours, en particulier en matière de droits de reproduction, pour lesquels, en vertu de la loi, nous pouvons négocier avec notre partenaire. Nous pouvons choisir l’arbitrage ou un tarif.
    La Commission du droit d’auteur établit les tarifs et examine les pratiques. Il revient aux membres du comité d’établir les règles en vertu desquelles les titulaires de droits — les créateurs — seront payés. Dans mon texte, j’ai mentionné que parfois, surtout dans le secteur de la musique, les redevances constituent la seule rémunération que les artistes reçoivent.
    Tous les trois mois, quand je paie les 2 500 membres — des auteurs-compositeurs, compositeurs et éditeurs —, les redevances sont le seul paiement qu’ils reçoivent. Nous payons les redevances de droit de reproduction et la SOCAN paie les redevances de droit d’exécution. Donc, ils reçoivent des redevances diverses, mais ces droits sont tous reconnus.
    C’est pourquoi, dans cette nouvelle économie numérique, vous devez établir les règles dans la loi pour protéger la création de l’oeuvre pour les créateurs que nous avons...
    Monsieur Lauzon, monsieur Angus, je vous remercie. Le temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. McColeman, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie tous d’être ici et de nous faire part de vos observations et de vos idées afin de nous aider à déterminer quel est l’équilibre souhaité.
    Je voudrais simplement faire quelques remarques sur les commentaires de mon collègue qui vient de terminer. Je ne pense pas que quiconque à cette table ne souhaite pas trouver le bon équilibre et s’assurer que les créateurs, les gens qui créent l’oeuvre, les artistes du monde, ne soient pas rémunérés correctement. La structure en question est peut-être celle du modèle que nous étudions pour trouver le juste équilibre et afin de nous assurer qu’ils sont traités équitablement.
    J’entends des commentaires — ceux de M. Noss et des représentants de Shaw — selon lesquels nous avons là une occasion unique pour le pays. J’ai entendu M. Glick, le représentant de Google, parler de sa vision par rapport à ce que le Canada pourrait devenir dans le monde numérique si nous faisons les choses comme il se doit. C’est extrêmement important pour nous.
    Monsieur Noss, ma question s’adresse à vous. Vous avez parlé de vos clients et leurs clients. J’ai apprécié la façon dont vous avez décrit cette structure pour que les Canadiens ordinaires puissent comprendre. Pouvez-vous partir du petit entrepreneur qui s’occupe d’une entreprise qui emploie peut-être deux personnes et que l’on perdrait, selon vous, si nous ne parvenons pas à faire les choses correctement? Pourriez-vous nous en parler un peu plus et nous dire en quoi c’est important pour l’économie locale, comme celle de ma collectivité?
    Certainement. Depuis sa création, depuis le lancement du service par ligne commutée, Internet a vraiment été une entreprise locale. Il a eu des millions et des millions d’entreprises locales. Au début, toutes les villes au Canada avaient des fournisseurs d'accès Internet locaux qui étaient les premiers, deuxièmes ou troisièmes fournisseurs en importance. Cela n’a changé que lors de l’avènement du service à large bande et d’infrastructures importantes. En hébergement Web, c’est une entreprise locale. En conception Web, c’est une entreprise locale.
    Ce qui se passe à l’occasion, c’est qu’on a ce que j’appellerais un effet inhibiteur. Si les dispositions sont trop larges, on y aura recours, et le but sera de les utiliser à des fins d’intimidation et de découragement. Ce sont les plus petits fournisseurs qui sont les plus touchés.
    Au nom de nos clients, nous nous occupons tout le temps — et quand je dis « tout le temps », je veux dire chaque semaine — de ce qui est simplement une plainte: « Je ne sais pas quoi faire. On m’a fait des menaces. On m’a fait telle demande. » Cela touche tout le monde également, en passant. Un cabinet d'avocats peu versé sur les questions liées à Internet, comme beaucoup d’entre nous, et un pouvoir excessif. C’est égal des deux côtés, mais le résultat est le même.
    Voilà, encore une fois, pourquoi j’aime l’expression « arme tranchante ». Parce que ce que permet la mesure législative... Comme l’a dit M. Angus, nous voulons tous que les méchants soient arrêtés, et les fournisseurs de services s’y emploient probablement plus énergiquement que quiconque dans le monde d’Internet, mais il semble que les armes tranchantes frappent plus durement les petits joueurs.
(1625)
    C'est exact. Nous avons également entendu cela de ceux qui distribuent des oeuvres par l'intermédiaire, précisément, de petits postes de radio, des gens qui emploient peut-être jusqu'à 50 personnes dans leur entreprise. Nous avons entendu certains des défis qu'ils doivent relever pour ce qui est de s'assurer qu'ils paient leur juste part, mais qu'ils ne paient pas trop parce que quelqu'un dans cette équation a ses propres intérêts trop à coeur, ce qui l'amène à exiger plus dans cette équation que l'équation ne peut le permettre, sinon, tout s'effondre parce que tout le monde est tellement interdépendant.
    J'aimerais que les gens de Shaw nous parlent de cette question, si vous voulez. Serait-il avantageux pour tous les intervenants que l'équilibre soit établi de la bonne manière et que nous ayons cette occasion incroyable, au pays, d'étendre notre commerce numérique? Ne s'agirait-il pas là de quelque chose qui serait très avantageux pour les créateurs, pour les gens qui créent des oeuvres, à cause du marché qui s'ouvrirait à eux?
    Je suis tout à fait d'accord avec cette affirmation.
    J'écoutais le commentaire de M. Noss; plus vous imposez de conditions aux fournisseurs de services, les FSI, plus cela nous coûte cher. Plus nous avons des coûts, plus il devient coûteux de bâtir ces réseaux.
    Nous avons certains des meilleurs réseaux au monde. Nous sommes un chef de file dans le monde dans le domaine de la large bande. Si vous commencez à faire des économies de bout de chandelle, une petite réduction par-ci et une autre par-là, alors, tout à coup, les incitatifs pour construire ce réseau et demeurer à l'avant-garde et continuer d'être des chefs de file mondiaux dans le domaine de la large bande finissent tout simplement par s'évanouir. Je pense que les conséquences non voulues de certaines de ces propositions sont très importantes. C'est pourquoi nous croyons que cet équilibre est…
    Merci, monsieur Brazeau et monsieur McColeman.
    M. Regan a les cinq dernières minutes de ce tour.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Permettez-moi de commencer par vous, monsieur Brazeau; aussi bien continuer un peu plus loin. J'aimerais parler de quelque chose de légèrement différent — à savoir, combien de temps faudra-t-il aux FSI pour se conformer aux dispositions du système d'avis? Qu'y a-t-il de compliqué là-dedans et quels problèmes voyez-vous?
    Nous traitons probablement quelques centaines de milliers de telles demandes chaque mois, alors le volume est assez élevé. Nous voulons nous assurer qu'il y a de l'uniformité au sein de l'industrie sur la façon dont nous traitons ces demandes. Je pense qu'il faudra probablement une période d'environ 12 mois pour que l'industrie établisse les lignes directrices appropriées, le bon cadre, de façon que nous soyons tous en mesure de traiter ces demandes de manière structurée.
    Lorsque nous discutons de cette question du système d'avis, nous avons deux problèmes fondamentaux.
    D'un côté, un FSI a de la difficulté à être un arbitre et à décider quand il y a une violation et quand il n'y en a pas. C'est le problème du système d'avis et de retrait, de toute évidence: on demande aux FSI de jouer le rôle d'arbitre.
    L'autre problème, évidemment, c'est que pour un créateur, en particulier les petits artistes, il est de toute évidence peu pratique et impossible de faire respecter ses droits par des poursuites chaque fois qu'il y a une violation. Le problème, alors, c'est comment réduire la quantité de fraudes dans le domaine du droit d'auteur — les violations — et s'assurer en même temps que les artistes sont indemnisés? Un témoin a laissé entendre que nous avions besoin d'une solution typiquement canadienne pour surmonter cette question, particulièrement dans le cas des petits joueurs.
    Avez-vous quelque chose en tête qui pourrait fonctionner?
(1630)
    Je pense que le régime d'avis fonctionnerait efficacement.
    Dites-moi comment cela fonctionnerait pour le petit créateur qui ne peut se permettre de poursuivre chaque cas individuel de violation, et parfois même un seul cas.
    Jay, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je dirais que même les petits créateurs ont besoin de l'occasion de percer le marché. Il est certain qu'Internet, comme l'a dit Google, met à la disposition des petits créateurs une capacité sans précédent de trouver leur auditoire et de vendre leurs oeuvres. Nous devons avoir les outils pour promouvoir les marchés légitimes et limiter les comportements délinquants. Je pense que le présent comité et le comité qui étudiait le projet de loi C-32 ont entendu de nombreux témoignages indiquant que le système d'avis avait un rôle dissuasif important face aux comportements délinquants et qu'il fournit les outils nécessaires à un marché légitime.
    Par conséquent, vous découragez les gens d'adopter un comportement délinquant et vous les dirigez vers des services légitimes et des fournisseurs de services légitimes. Le petit créateur a la capacité, comme jamais auparavant, d'avoir accès au marché, de trouver son auditoire, de trouver ses consommateurs et de participer à de très petites transactions qui seront profitables.
    Monsieur Noss, j'ai l'impression que vous mourez d'envie de répondre à cette question.
    Eh bien, je dirais brièvement que les petits créateurs qui comprennent que le fait de partager est la façon de devenir des grands créateurs sont ceux qui ont les meilleures chances d'y parvenir. Les petits créateurs qui tentent de limiter le partage de leur contenu ont tendance à ne pas y arriver.
    Alors, quels modèles voyez-vous qui permettraient aux créateurs d'être rémunérés?
    Je pense que ce que nous voyons maintenant est en réalité à deux niveaux. Nous voyons que les créateurs innovateurs se font connaître à grande échelle par le biais du partage et nous voyons que maintenant, les modèles les plus innovateurs et qui capitalisent le plus efficacement sont ceux qui le font par l'intermédiaire des concerts et du marchandisage, etc. Il y a encore une occasion extraordinaire d'être payé directement par suite de la consommation de musique si seulement ce n'était pas si compliqué.
    Vous laissez entendre que les FSI travaillent plus fort que n'importe qui…
    J'ai dit les fournisseurs de services…
    Je suis désolé; ce sont les fournisseurs de services.
    … parce qu'il s'agit d'une catégorie plus large.
    C'est certain. Pardonnez-moi. Je vais laisser tomber le « I » pour le moment.
    Ils travaillent plus fort pour faire cesser les activités des gens malintentionnés, comme vous l'avez dit.
    C'est exact.
    Est-ce que le système d'avis élimine une partie de cette responsabilité? De plus, que font les fournisseurs de services pour arrêter les activités des gens malintentionnés?
    Il y a deux choses ici. La première, c'est que le système d'avis raffine la responsabilité de manière appropriée.
    Aucun fournisseur de services ne veut avoir de gens malintentionnés dans son réseau. Ce qui est intéressant, c'est que très souvent, il y a des transgressions innocentes que le système d'avis résout sans l'histoire classique du grand studio de musique qui poursuit grand-maman devant les tribunaux. La plupart des gens, lorsqu'ils sont saisis des problèmes, disparaissent tout simplement.
    Ce sont les véritables délinquants, les gens malintentionnés qui travaillent à grande échelle, que vous n'allez pas prendre avec le système d'avis ni avec le système d'avis et de retrait. C'est là que vous avez besoin d'un gros bâton. Lorsque je dis des fournisseurs de services qu'ils aident, je pense que ce sont eux véritablement qui, sur la ligne de front, font beaucoup de mise en application de la loi, parce qu'il est beaucoup plus facile d'agir intelligemment dès le départ et de préciser les règles du jeu.
    Merci, monsieur Noss et monsieur Regan.
    Je sais que vos cinq minutes ont filé rapidement, comme c'est le cas pour tout le monde, mais nous allons maintenant débuter le second tour de cinq minutes.
    Nous allons commencer par M. Armstrong.
    Je veux remercier tous les témoins ici présents.
    Je vais commencer par M. Noss.
    J'ai été très intéressé par vos observations selon lesquelles le projet de loi que nous avons sous les yeux donnera au Canada l'occasion de donner véritablement un essor aux affaires que nous faisons au pays et d’offrir de meilleurs moyens à tous, en particulier aux petits exploitants. Pouvez-vous nous en dire davantage sur la façon dont ce projet de loi nous permettra de faire cela?
    Le facteur le plus important, c'est que vous avez une industrie croissante et florissante de petits fournisseurs de services. Ils ne demandent pas d'incitatifs. Ils ne demandent pas d'aide financière. Ils demandent simplement qu'on leur permette de croître et de profiter de ce qu'ils peuvent faire sans perturbation ou découragement à l'arrivée, alors, simplement éliminer ces menaces, que certaines formes antérieures du projet de loi auraient pu fournir, est énorme.
    Ce dont ils ont besoin, c'est de cette chance, et ce que je pense que cela fait pour le Canada, c'est que le Canada deviendra une destination attrayante en matière de créativité et d'Internet ouvert. Cela ne veut absolument pas dire un refuge pour les pirates — c'est l'heure de faire jouer la musique mélodramatique —; cela permettra plutôt aux innovateurs créatifs qui veulent simplement être dans un environnement où ils peuvent faire ce qu'ils font de mieux sans avoir à s'inquiéter du bruit qui pourrait accompagner certaines lois qui vont trop loin, de s'exprimer.
(1635)
    Merci.
    Je vais maintenant m'adresser à Shaw et à M. Brazeau.
    Vous avez parlé de décalage dans le temps et de changement de format. Vous avez dit que la première partie de la loi traitait très bien de cette question — je parle de l'enregistrement et du déplacement de l'enregistrement —, mais vous avez dit qu'il faut travailler davantage la dernière partie, qui est la retransmission ou la transmission de ces données après qu'elles ont été reformatées ou décalées dans le temps. Vous avez dit que le libellé actuel pourrait mener à des poursuites vexatoires. Pouvez-vous nous en dire davantage et nous dire de quoi vous parlez?
    Oui, et dans une minute, je vais laisser la parole à Jay, qui est l'avocat ici.
    Notre grande préoccupation, c'est que bien qu'il y ait certainement une disposition explicite sur l'enregistrement, c'est le silence en ce qui concerne la transmission. Je pense que vous ne pouvez pas avoir l'un sans l'autre et le problème, c'est que nous avons certainement été mêlés à d'autres problèmes où il n'y avait pas d'exception explicite, et cela pourrait être contesté. C'est ce qui nous préoccupe.
    Jay, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.
    La préoccupation concerne l'exception pour le stockage. Dans le stockage, vous créez la capacité de stockage et vous stockez la copie dans le dispositif. Le libellé actuel dit que l'acte de fournir la mémoire numérique ne viole pas le droit d'auteur; la préoccupation, c'est si quelqu'un devait penser que le fait de copier l'oeuvre et ensuite, de la transmettre constituent deux actes distincts, cela pourrait amener cette personne à demander au tribunal de dire que la copie est légale, mais pas la transmission; cet acte est un deuxième acte.
    Tout ce que Shaw a proposé, c'est d'améliorer le libellé de manière à rendre explicite que le fait de faire la copie et le fait de la retransmettre à la personne seraient couverts par la même exception. Il ne s'agit pas d'étendre le sens; il s'agit simplement de clarifier l'intention.
    Je vous remercie.
    Monsieur Brazeau, dans certaines de vos observations relatives à la vente de contenu en ligne, vous avez parlé de la façon dont, dans l'avenir, de plus en plus de gens feront toutes sortes d'achats en ligne, et pas seulement concernant des médias numériques. Vous avez dit que nous devrions traiter cette question davantage comme nous le faisons pour la vente au détail, lorsque nous nous rendons en personne dans une boutique. Les mêmes règles et règlements devraient s'appliquer.
    Pouvez-vous nous donner certains exemples précis sur la façon dont nous pourrions le faire avec ce projet de loi?
    Jay, je ne suis pas certain si nous avons recommandé quelque chose de précis.
    La question se trouve dans le paragraphe proposé 2.4(1.1) du projet de loi actuel, qui traiterait toute communication sur Internet comme une communication au public par télécommunication, ce qui est généralement le droit qui est appliqué aux activités de télédiffusion. Ce que Shaw a suggéré, c'est que vous pouvez avoir des activités de télédiffusion sur Internet, auquel cas le droit de communication devrait s'appliquer et le droit devrait être payé, mais que, lorsque vous vendez une copie à un consommateur, ce qui remplace la vente qui aurait été faite si j'étais allé chez Best Buy, alors, c'est la reproduction qui s'appliquerait.
    Les titulaires de droits d'auteur sont quand même rémunérés. Il s'agirait d'un accord négocié avec les titulaires de droits pour la vente de cette copie. Alors, vous ne le traiteriez pas également comme une télédiffusion, parce que l'oeuvre a été transmise sur Internet.
    Très bien.
    Monsieur Noss, je viens d'une petite collectivité rurale. Nous ne nous attendons pas à ce que Google viennent s'installer chez nous dans un avenir rapproché, ni même Tucows, à ce compte-là, mais nous avons quelques petites entreprises familiales. En fait, cinq membres d'une même famille travaillent dans ce domaine. Comment ce projet de loi les aidera-t-il à faire croître leurs activités ou aidera-t-il d'autres personnes à créer des entreprises dans les régions rurales du pays?
    Je pense qu'une des merveilles d'Internet, c'est que vous n'êtes plus lié à un emplacement géographique donné. Vous seriez étonnés de voir les petites villes où sont nées d'énormes entreprises d'hébergement Web. En fait, la plupart du temps, elles ne sont pas situées dans les grands centres urbains, parce que leurs clients viennent de partout dans le monde et que leurs coûts de base sont moins élevés dans une petite collectivité.
    Il y a deux choses. La première, c'est éliminer les menaces dont j'ai parlé à quelques reprises. Je ne peux insister davantage sur l'importance de cette mesure, parce que ce fardeau est porté par le petit, qui devient le moyen, puis le gros.
    La deuxième chose, c'est que cela ne fait que cultiver cet Internet ouvert. Internet est, dans son âme…
(1640)
    Nous avons largement dépassé le temps, monsieur Noss; alors, pourriez-vous conclure rapidement, s'il vous plaît?
    … un médium de communication, un médium de partage et de collaboration. Cela signifie que plus il y a de personnes avec qui partager, mieux c'est.
    Merci beaucoup. Merci, monsieur Noss et monsieur Armstrong.

[Français]

    Monsieur Nantel, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier tous d'être ici aujourd'hui. J'aimerais m'adresser aux représentants de la SODRAC et vérifier s'ils font le même constat que moi. Les problèmes que vivent les gens qui oeuvrent dans le domaine de la musique seront vécus aussi par les gens qui travaillent dans le domaine de la vidéo. Ce n'est qu'une question de temps. Il s'agit de données et c'est beaucoup plus pesant.
    Les drames que vit aujourd'hui l'industrie musicale ont aussi été vécus il y a 20 ans. Aujourd'hui, l'industrie musicale se trouve dans une position difficile. Les gens de la vidéo sont peut-être moins sensibles à cette descente aux enfers, mais elle s'en vient pour eux aussi.
    On sait tous que 90 p. 100, en moyenne, de ce qui se trouve sur un iPod est illégal. Le projet de loi dont nous sommes saisis ne fait rien pour protéger les artistes de cette situation, du vol de leur matériel qui est sur Internet.
    J'aimerais savoir comment vous expliquez le fait qu'on a le culot de retirer encore, au détriment des artistes, plus de 20 millions de dollars en droits de reproduction mécanique. Ce droit était octroyé, il était là. De tous les gens qui sont à la table, les personnes qui sont le plus lésées sont les créateurs, clairement, car on leur a retiré plus de 20 millions de dollars en droits de reproduction mécanique. Comment avez-vous réagi à cela?
    Si vous me permettez, je vais répondre en partie à votre question et Martin complétera cette réponse par la suite.
    Vous comparez l'industrie de la vidéo à celle de la musique, qui vont vivre les mêmes problèmes. Tout est question de bande passante. La musique, c'est instantané. Par contre, télécharger une vidéo prend plus de temps. Il existe du piratage et des copies illégales de vidéos. Le projet de loi, à mon avis, vise à neutraliser le grand piratage. D'une part, il ne vise pas les sites étrangers et, d'autre part, le projet de loi va amener des mesures de protection technologiques.
    En musique, le problème est qu'il n'y a pas de mesures de protection technologiques, puisque l'on a favorisé l'interopérabilité. Historiquement, c'est ouvert.
    Quand j'entends des gens présents dans cette salle parler d'un Internet ouvert, je ne comprends pas. Les ayants droit veulent être rémunérés. Je ne vois aucun plan d'affaires dans tout cela. Tous ceux qui font des affaires, sont ceux qui utilisent le droit d'auteur. C'est quand même incroyable.
    Je vais compléter la réponse de mon collègue. On a entendu dire qu'on voulait un Internet ouvert, un partage massif, et à la fin un signe du dollar va peut-être sortir de cela. Je parle des oeuvres. On veut également avoir la chance de grandir.
    Cependant, on parle d'un chilling effect, de l'intimidation, de menaces et de litiges onéreux.
     Où donc est la valeur du droit dans tout cela, où est la valeur qui revient au créateur, à l'auteur-compositeur ou à l'éditeur dans le cas de la musique, et surtout où est la neutralité technologique? La Loi sur le droit d'auteur est censée être neutre. Cela veut dire qu'un droit qui existait auparavant, dans l'ancienne économie, doit continuer d'exister dans la nouvelle.
    Dans notre mémoire, on comprend les mesures qui touchent les consommateurs, les pratiques non commerciales. Toutefois, quand on tombe dans le domaine commercial apparaît alors le déséquilibre entre la valeur qui revient à l'artiste et la valeur, en termes de profit, dévolue aux industries commerciales qui font de l'argent aux dépens, comme l'a dit M. Lauzon, du droit d'auteur sous-jacent à tout cela.
    Merci.
     Dans le même domaine, j'aimerais entendre les représentants de Shaw Communications Inc. quant à la manière de tenir un répertoire sur les gens qui enfreignent le droit d'auteur.
    Monsieur Noss, vous avez dit que vous connaissez tous vos clients. Puisque c'est vous qui hébergez ce site, qui est le client derrière knowmulcair.ca? Vous ne me le direz pas.
(1645)

[Traduction]

    Ne vous donnez même pas la peine de répondre.
    Des voix: Oh, oh!
    Avec mes excuses — l'interprétation a fait défaut ici —, qui était le client derrière…?
    Derrière knowmulcair.ca; il s'agirait supposément d'un nom de domaine de Tucows.
    Oh, il faudra que je m'informe.
    Très bien…
    M. Elliot Noss: En fait, si…
    Merci pour la discussion sur la course à la direction.
    Il vous reste quelques minutes ou, en fait, quelques secondes.
    À l'intention de Mme Rathwell, de M. Brazeau ou de M. Kerr-Wilson, pouvez-vous m'en dire davantage au sujet du répertoire, l'enregistrement des avis? Comment vous arrangez-vous pour conserver les données, advenant qu'elles deviennent nécessaires?
    À l'heure actuelle, le système d'avis est une mesure volontaire. Nous recevons, comme l'a dit M. Brazeau, plus de 100 000 avis par mois. À l'heure actuelle, nous n'avons pas de système automatisé nous permettant de délivrer des avis et, par conséquent, il deviendra très important pour l'avenir, avec l'adoption du règlement dans ce projet de loi de s'assurer que le règlement précise un format normalisé avec des critères très clairs concernant ce que l'avis doit contenir.
    Ensuite, comme l'exige le projet de loi, nous allons conserver les données des abonnés pour une période de six mois, mais sans une approche hautement normalisée par le règlement, c'est très prohibitif.
    Merci, madame Rathwell et monsieur Nantel.
    Monsieur Lake, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être venus aujourd'hui.
    Monsieur Lauzon, lorsque vous défendez, comme vous le faites, des redevances accrues, j'aimerais savoir à quelles technologies précises ces redevances devraient s'appliquer.
    Nous parlons de la copie privée. Nous parlons de monétisation, au sujet des FSI. Nous parlons du fait que pour un titulaire de droit d'auteur, il n'y a aucune valeur pour les oeuvres qui sont utilisées par le consommateur ou par les FSI.
    Je ne vous demandais pas tellement une justification, parce que je pense que vous l'avez déjà fait, mais je vous demandais à quelles technologies précises ces redevances devraient s'appliquer.
    Je ne sais pas. Vous devez regarder ce qui se passe dans le monde. Il y a des technologies multiples que vous pouvez utiliser…
    Vous devez avoir une certaine idée de ce qu'elles sont. Je suis certain que vous avez réfléchi à la question.
    Oui, eh bien, si vous regardez ce qui se passe dans certains pays, ils utilisent le test en trois étapes, les trois prises...
    Est-ce que cela devrait s'appliquer à un iPod?
    Certainement, pourquoi pas?
    Un iPad?
    Aussi, certainement.
    Un ordinateur portatif?
    Encore, oui.
    Internet?
    C'est un autre moyen de monétiser la valeur d'un droit.
    Donc…
    Il y a une valeur…
    Vous êtes sûr à propos de l'ordinateur portatif. Je vais donc prendre cet exemple. Vous avez dit oui à propos de l'ordinateur portatif; d'accord, vous faites allusion à un modèle d'affaires. Vous avez dit qu'il ne s'agissait pas d'un impôt, mais d'un modèle d'affaires. Comment pouvez-vous justifier un modèle d'affaires concernant quelqu'un qui achèterait un ordinateur portatif, mais ne l'utiliserait pas du tout pour la musique, ou à d'autres fins créatives?
    Lorsque nous avons affaire à la Commission du droit d'auteur, celle-ci ne verse pas de redevances en fonction de nos demandes. Elle demande… Prenons l'exemple de la Société canadienne de perception de la copie privée. La commission connaît bien cette organisation et mène des enquêtes sur ses travaux. Lorsque la commission nous verse des redevances pour la copie privée, elle prend sa décision en fonction d'enquêtes, d'études, etc.
    Ce ne sont pas les créateurs qui déclarent à la Commission du droit d'auteur vouloir tel montant d'argent; c'est devenu une sorte d'entente avec elle…
    Mais vous avez fait valoir qu'il s'agit d'un modèle d'affaires. Je vous le redemande, mettez-vous sur pied un modèle d'affaires par lequel vous percevez de l'argent de quelqu'un qui n'utilise même pas votre produit? J'y vois là un modèle d'affaires de rêve.
    Il y a bien un moyen par lequel vous allez monnayer la valeur des chansons créées et payer pour ces chansons.
    Bien des témoins ont déclaré au comité que c'est ce que nous faisons. Ils disent que c'est exactement ce que le projet de loi C-11 fait. Il permet en fait de susciter de la valeur pour les créateurs parce qu'il empêche les gens de pirater des oeuvres et met en place un environnement dans lequel les créateurs peuvent être payés pour ce qu'ils font de façon à ce qu'un produit de meilleure qualité soit payé plus cher.
(1650)
    Nous ne voyons pas que la loi suscite de la valeur pour les créateurs. Vous créez de la valeur pour une partie des ayants droit…
    M. Mike Lake: D'accord, oui…
    M. Alain Lauzon: … mais ce sont surtout les producteurs, et vous ne créez pas…
    Je…
    Nous ne voyons pas cela. Ce que nous voyons, c'est que nous avons des droits prévus par la loi. Ils sont dans la loi, mais ils ne sont pas perçus. La copie mécanique et privée d'oeuvres diffusées ne s'applique pas à la récupération des données, à la reproduction.
    J'aimerais, si vous me le permettez, passer à la question de la reproduction mécanique d'oeuvres diffusées.
    Si vous ajoutez 21 millions de dollars pour les droits de reproduction dont vous avez parlé et les recettes des droits d'exécution publique versés par les stations de radio, est-il juste de dire que l'on paie aujourd'hui davantage qu'il n'y a 10 ans?
    Évidemment. Le…
    Est-il juste de dire que si vous enlevez les 21 millions de dollars correspondant aux droits de reproduction, des sommes beaucoup plus considérables qu'il y a 10 ans sont aujourd'hui versées pour les seuls droits d'exécution publique?
    Je ne travaille pas dans le secteur des droits d'exécution publique, mais en tant que législateurs, vous avez décidé en 1997 d'adopter d'autres droits, à savoir les droits versés aux artistes du spectacle et aux compagnies de disques, ou ce que nous appelons les droits voisins. Jusqu'à un certain point, c'était dans la loi. C'était en vigueur; certainement, cela va augmenter.
    Le deuxième point…
    Il y en a eu cependant beaucoup, qui…
    Le second point dont je voulais parler est la SOCAN, dont le taux a augmenté au cours des cinq ou six dernières années. Son taux était resté fixe pendant 20 ans; quant au droit de reproduction à la SODRAC, nous parlons évidemment d'autre chose.
    Nous avons cette discussion au Canada, mais dans le monde entier et en particulier en Europe, on n'en parle pas. Ailleurs, on paie les droits voisins, on paie les droits de reproduction et on paie les droits d'exécution publique. On paie tout cela. Ce n'est qu'ici que nous avons ce débat.
    Me reste-t-il du temps?
    Merci, monsieur Lauzon et merci, monsieur Lake. Malheureusement, nous avons largement dépassé les cinq minutes.
    Cela conclut notre deuxième tour de questions.
    Sur ce, j'aimerais remercier nos témoins d'être venus. Vos points de vue et votre contribution sont très appréciés.
    Nous allons nous arrêter quatre minutes et demie et recommencerons à 17 heures pile pour pouvoir terminer le deuxième tour.
    C'est la pause.
(1650)

(1655)
    Mesdames et messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs les témoins, bienvenue à la seconde moitié de la septième séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-11.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins: M. Stephen Stohn, d'Epitome Pictures inc.; MM. Gerry Barr et Tim Southam, de la Guilde canadienne des réalisateurs; et M. Greg Hollingshead et Mme Marian Hebb, de la Writers' Union of Canada. Bienvenue à tous.
    La greffière vous a informés que chaque organisation aurait 10 minutes pour faire son exposé. Vous aurez donc 10 minutes.
    Nous commencerons par vous, monsieur Stohn.
    Epitome Pictures inc. est une petite entreprise familiale. J'en suis le président, et mon épouse, qui est plus importante que moi, en est, comme il se doit, la PDG.
    Notre entreprise de production télévisée est en affaires depuis plus de 30 ans. Parmi les séries que nous produisons,Degrassi est celle que vous connaissez sans doute le mieux.
    Je préside par ailleurs la société Orange Lounge Recordings, qui fait sur Internet tout ce qu'une compagnie de disques peut faire, en se servant notamment de toutes les installations disponibles — Topspins et iTunes, et de toutes les autres formes inimaginables d'exploitation des droits numériques.
    Avec Sympatico, nous avons créé une coentreprise novatrice qui produit des vidéos de concerts d'artistes en visite à Toronto. Nous enregistrons leurs spectacles en studio et les diffusons ensuite sur Internet dans l'émission appelée Live at the Orange Lounge. Des dizaines d'artistes et de groupes canadiens se servent de ce médium. Certains sont très connus, comme Nelly Furtado et Avril Lavigne, d'autres moins. Nous avons eu aussi de nombreux artistes et groupes internationaux renommés, notamment Katy Perry, Amy Winehouse, the Pussycat Dolls et OneRepublic. Tout cela pour vous dire que nous nageons dans le monde numérique.
    Pour en revenir à notre production télévisée, notre série Liberty Street, qui a commencé en 1995, a été la première du monde à être lancée simultanément sur les ondes et sur un site Web. Notre série Riverdale, qui a débuté en 1997 et met en vedette de très célèbres talents canadiens — et notamment Tyrone Benskin — a été la première du monde à être diffusée sur un site Web affilié. Cette série hebdomadaire était en fait un feuilleton de ce qui se passait en coulisse. La nouvelle version de Degrassi, qui a commencé en 2001, a utilisé un site Web avant-gardiste qui a coûté plus de 1,5 million de dollars et qui associe les admirateurs de l'école Degrassi en les invitant à interagir avec les personnages de la série. Il s'agissait, en fait, d'un précurseur exclusif de Myspace, bien avant que ce dernier ne soit inventé.
    Degrassi a été la première série au monde à produire des épisodes suivis sur le Web avec nos principaux décors, notre principale distribution et nos principaux scénaristes, et filmée avec notre équipe principale. Degrassi a aussi été la première série à produire des épisodes complets légalement disponibles au Canada tant pour le téléchargement que la diffusion en flux. Nous expérimentons depuis diverses possibilités, notamment celle de mettre certains épisodes à disposition sur Internet avant leur diffusion. Nous les avons mis à disposition 24 heures avant, 24 heures après et maintenant, nous les diffusons simultanément sur iTunes et sur le Web. Une saison complète de Degrassi, qui comprend à ce jour 45 épisodes, est disponible gratuitement au Canada sur le site Web de MuchMusic. Il y a de la publicité, mais les admirateurs ont accès à une saison complète.
    Si vous cherchez « Degrassi » sur Google, vous obtiendrez plus de 11 millions de résultats. Nous avons plus de trois millions d'admirateurs « J'aime » sur Facebook et, fait intéressant, si vous cherchez « Degrassi mashup » sur Google, vous obtiendrez plus d'un million de résultats.
    La liste ne s'arrête pas là. Nous avons des comptes Twitter très actifs qu'alimentent nos rédacteurs pour étoffer nos personnages. Nous avons des blogues et des vidéoblogues. Nous avons un jeu Degrassi déjà disponible dans le magasin d'Apple de iTunes. Cet été sortira une autre application à deux écrans. Nous faisons tout ce que vous pouvez imaginer en numérique.
    Je vous ferai remarquer que notre nouvelle série,The L.A. Complex, qui sera lancée le mois prochain aux États-Unis, le sera simultanément sur The CW, qui est un réseau radiophonique, sur iTunes, Amazon et tous les services de téléchargement, ainsi que sur Hulu, qui est un service du genre Netflix.
    Je mentionne tout cela, non pas pour nous vanter, mais pour bien faire passer le message que, si nous sommes reconnaissants d'avoir les modes de distribution traditionnels — nous adorons nos télédiffuseurs, qui sont la pierre angulaire de l'industrie —, ce n'est pas sur eux que nous faisons une fixation. Nous sommes — et avons l'intention de le rester — à l'avant-garde absolue des nouveaux médias. Je ne suis pas un professeur d'université qui a des théories bien intentionnées, mais peut-être finalement erronées, sur ce qui pourrait marcher ou ne pas marcher sur Internet. Je fais partie d'une équipe de gens passionnés, dynamiques et engagés qui est plongée jour après jour dans l'univers pratique du monde numérique.
    J'ai deux messages clés à vous transmettre aujourd'hui.
(1700)
    Premièrement, nous, les producteurs, sommes catastrophés par les torrents et les sites de stockage de fichiers qui prennent les spectacles dont la production nous a coûté tellement de temps et d'efforts, qui font de l'argent avec et qui ne nous donnent rien en retour. À chaque jour qui passe, nous comptons de plus en plus sur le rendement des investissements que nous avons faits dans les droits numériques — et notamment dans la diffusion en flux légale et autorisée à partir de sites Web, dans les services de type Netflix ou Hulu, dans les téléchargements légaux et autorisés à partir de services de type iTunes ou Amazon, et dans des dizaines d'autres services numériques légalement autorisés qui font que Degrassi est aujourd'hui disponible. Dans ce premier message clé, nous vous demandons donc instamment d'adopter de toute urgence le projet de loi C-11.
    Dans le second message clé, nous vous supplions de procéder à tous les changements techniques nécessaires pour que l'esprit du projet de loi C-11 puisse être réellement respecté.
    Je ne suis pas ici pour discuter de virgules et de détails sur ce qui est raisonnable ou pas; je laisse cela aux experts, tel que mon brillant ami Barry Sookman, à notre organisation des producteurs du CMPA, et à d'autres organisations comme Music Canada et l'Association cinématographique - Canada. Je crois comprendre que si le projet de loi C-11 était mis en oeuvre dans sa forme actuelle, il aurait l'effet pervers de protéger par inadvertance les très nombreux sites Web, services et activités illicites que le gouvernement avait l'intention d'éliminer. Je vous prie donc de nous donner l'assurance absolue que les sites BitTorrent comme isoHunt et les sites de stockage de fichiers comme Megavideo seront mis hors circuit au Canada.
    J'aimerais enfin discuter des mashups ou pots-pourris. Nous les adorons. Comme on l'a fait remarquer précédemment, il y a une multitude de mashups de Degrassi disponibles sur toute la toile. Pour nous, cela témoigne de la loyauté et de l'engagement de nos admirateurs. C'est quelque chose que nous accueillons avec joie et que nous approuvons entièrement.
    Ce que nous n'aimons pas, c'est la partie du projet de loi C-11 qui, nous dit-on, pourrait permettre qu'un épisode puisse, en totalité ou dans sa presque totalité, être téléchargé ou diffusé en flux en vertu d'une échappatoire générale, s'il est présenté sous forme de mashup. Nous n'aimons pas non plus que l'on puisse profiter financièrement de ces mashups, notamment en les entourant de publicité, sans que nous puissions en partager les revenus. Nous avons besoin des recettes que nous procurent nos entreprises numériques pour continuer de produire nos spectacles. Nous ne pouvons pas faire concurrence à ceux qui offrent des documents gratuitement et nous ne voulons pas que d'autres se servent de notre travail et de nos investissements pour faire de l'argent sans en partager avec nous les bénéfices.
    En résumé, nous vous demandons instamment d'adopter de toute urgence le projet de loi C-11, mais en y intégrant les modifications techniques nécessaires pour éliminer sans ambiguïté les torrents et les sites de stockage, et en veillant à ce que l'exception accordée aux mashups ne s'applique vraiment qu'à ce que le gouvernement et nous tous entendons par ce terme, et non à des clauses générales ou à d'autres échappatoires.
    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à exprimer mon point de vue.
(1705)
    Merci, monsieur Stohn.
    Nous passons maintenant au représentant de la Guilde canadienne des réalisateurs, qui a 10 minutes.
    Mesdames et messieurs, je m'appelle Gerry Barr et je suis le directeur général national et chef de la direction de la Guilde canadienne des réalisateurs. M'accompagne aujourd'hui Tim Southam, directeur des films pour la télévision et des longs métrages des deux côtés de la frontière et président de la division des directeurs nationaux de la Guilde. Pour vous le présenter et pour ceux d'entre vous qui regardent l'émission House, ses plus récents travaux se retrouvent dans l'épisode de la semaine dernière. Si vous aimez l'émission et que vous voulez en connaître les dessous, c'est lui qu'il faut consulter.
    Cette série est, comme vous le savez, regardée par plus de 50 millions de téléspectateurs dans le monde et c'est un exemple classique de l'excellence dont fait preuve l'industrie audiovisuelle canadienne dans la production de séries dramatiques.
    La Guilde est membre du groupe que fréquente quotidiennement M. Stohn. En tant qu'organisation syndicale nationale, elle représente plus de 3 400 employés clés des services créatifs et logistiques de l'industrie du film, de la télévision et des médias numériques. Nous sommes donc tous heureux qu'après plus d'une décennie et de nombreuses tentatives, la loi canadienne sur le droit d'auteur soit mise à jour avec l'adoption de ce projet de loi.
    Le projet de loi C-11 harmonise notre régime des droits d'auteur avec les traités de l'OMPI. Le projet prévoit des mesures pour protéger les créateurs contre le vol de contenu, il adopte à juste titre les nouvelles catégories de la parodie et de la satire aux fins du traitement équitable et il vise à adapter les lois canadiennes sur le droit d'auteur à la nouvelle ère numérique. Ce sont de très bonnes nouvelles.
    Le préambule du projet de loi énonce l'importance de « règles claires, prévisibles et équitables » pour favoriser la créativité et l'innovation, ainsi que l'importance d'une loi qui « donne aux titulaires de droits d'auteur une reconnaissance et une rémunération et leur donne la faculté d'exercer leurs droits ».
    Naturellement, nous appuyons énergiquement ces principes, mais nous sommes ici pour dire que le projet de loi C-11 doit être encore retouché pour atteindre ces objectifs importants.
    En tant qu'organisation dont les membres créent et utilisent des oeuvres protégées par droit d'auteur, nous savons que la réforme de la loi vise à maintenir un équilibre, et nous sommes ici aujourd'hui pour demander les changements techniques qui feront en sorte que le projet de loi C-11 contienne les règles claires que prévoit son préambule.
    La précision est au coeur d'une loi efficace sur le droit d'auteur. Les créateurs et les titulaires de droits d'auteur doivent connaître leur position et les limites en vigueur au droit d'accès de l'utilisateur des oeuvres qu'ils créent, faute de quoi ce sont inévitablement les tribunaux qui devront trancher. Les litiges coûteux et longs ne profitent à personne — ni aux créateurs, ni aux utilisateurs, ni à d'autres intervenants dans la chaîne de production — et ne devraient jamais être préférés à des règles législatives claires et prévisibles.
    Des modifications techniques peuvent protéger les revenus des titulaires de droits d'auteur et la capacité de ces derniers de contrôler les modes et lieux de diffusion de leurs oeuvres. Ils peuvent également protéger les utilisateurs qui enfreindraient involontairement ces droits. La guilde fait partie des 68 groupes artistiques qui appuient à cette fin l'ensemble des changements proposés au comité par la Conférence canadienne des arts.
    J'aimerais laisser M. Southam vous dire quelques mots.
(1710)
    Si vous aimez Dr House, l'épisode a été diffusé lundi dernier. Le dernier épisode de la saison et de la télésérie aura lieu en avril. Dr House n'a pas été créé au Canada, mais c'est le cas de Flashpoint, des Recrues de la 15e et bien sûr de Degrassi, notre première télésérie parmi celles qui ont connu un succès retentissant partout dans le monde ces 15 dernières années.
    Aujourd'hui, nous voulons parler d'un problème qui n'est pas soulevé dans le mémoire de la CCA, mais qui est très important pour la GCR. Votre étude donne l'occasion d'apporter des précisions aux questions de propriété intellectuelle des oeuvres audiovisuelles. Pour la plupart des oeuvres visées par la loi, on sait clairement qui est le créateur: l'écrivain d'un roman, le sculpteur d'une sculpture, le peintre d'un tableau ou le compositeur d'une trame sonore est sans conteste le créateur de l'oeuvre.
    En ce qui a trait aux oeuvres audiovisuelles, les droits des créateurs ne sont pas reconnus aussi clairement par la Loi sur le droit d'auteur. Il est grand temps de combler cette lacune. La GCR croit que la question sera réglée grâce à la modification de forme indiquant avec beaucoup de précision que les créateurs d'une oeuvre audiovisuelle sont le réalisateur et le scénariste.
    Le réalisateur et le scénariste sont bien sûr les créateurs de l'oeuvre audiovisuelle. Partant de zéro, le scénariste invente les personnages, les dialogues et le déroulement de l'histoire. Le réalisateur donne une forme concrète à l'oeuvre: il choisit la distribution, les lieux de tournage, le montage, les effets sonores et visuels ainsi que la musique et il s'occupe de la correction des couleurs; tout ce qui permet de porter une oeuvre à l'écran.
    C'est essentiel d'établir qui sont les créateurs d'une oeuvre audiovisuelle pour tirer le maximum d'un certain nombre de modifications dans le projet de loi C-11 portant sur les droits moraux et l'utilisation des systèmes de gestion numérique des droits. La reconnaissance juridique des créateurs précisera les droits déjà accordés aux réalisateurs et aux scénaristes selon les précédents jurisprudentiels et les pratiques de l'industrie.
    Un exemple important de précédent jurisprudentiel, c'est l'affaire Films Rachel Inc. c. Druker & Associés Inc. et autres, entendue par la Cour supérieure du Québec. Dans ce différend opposant le créateur et le producteur, la décision rendue indiquait que le scénariste et le réalisateur du film étaient les créateurs, donc les premiers titulaires des droits d'auteur.
    La Loi fédérale sur le statut de l'artiste établit que les réalisateurs sont responsables de l'orientation générale des oeuvres audiovisuelles, tout comme les créateurs d'oeuvres artistiques, littéraires ou musicales dont les droits sont reconnus par la loi. La modification prévoyant que les scénaristes et les réalisateurs sont les créateurs permettra d'harmoniser la Loi sur le droit d'auteur et les autres lois fédérales pour reconnaître les droits d'auteur des réalisateurs et des scénaristes.
    L'industrie canadienne du film détermine aussi qu'en somme, les réalisateurs et les scénaristes sont les titulaires des droits d'auteur. Les conventions collectives négociées par la GCR prévoient la rémunération des réalisateurs pour l'utilisation de leurs oeuvres. Les contrats permettant le transfert des droits d'utilisation aux producteurs stipulent que les réalisateurs sont les créateurs de l'oeuvre. Les contrats des scénaristes reconnaissent leurs droits d'auteur sur les oeuvres audiovisuelles et prévoient le partage des profits sous forme de paiement résiduel.
    Notre amendement de forme au projet de loi C-11 n'accorde pas d'autres droits, mais il clarifie la question de la propriété intellectuelle. Il serait ajouté au paragraphe 2(2) et servirait à définir qui est le créateur. Notre amendement se lit comme suit:
« l'auteur », dans le cas d'une oeuvre cinématographique dont le récit, par la forme ou le fond, représente une oeuvre dramatique, est le scénariste et le réalisateur.
    Je répète qu'il faut apporter un tel amendement pour tirer le maximum de certaines modifications proposées par le gouvernement dans le projet de loi C-11. Par exemple, le projet de loi vise à clarifier ce qui constitue une infraction liée aux droits moraux, mais ces droits renvoient seulement aux créateurs et aux acteurs, sans définir qui sont les créateurs des oeuvres audiovisuelles. C'est pourquoi les réalisateurs et les scénaristes sont incapables de faire valoir leurs droits moraux liés à leur oeuvre.
    Le projet de loi C-11 prévoit un certain nombre de dispositions sur l'information liée à la gestion numérique des droits. C'est une sorte de sceau numérique qui donne des informations sur l'oeuvre et qui permet de la retracer. Le nom du créateur constitue un renseignement important. Les dispositions qui interdisent la suppression ou la modification de l'information sur la gestion numérique des droits sont importantes pour les réalisateurs et les scénaristes qui veulent protéger leurs droits et leurs redevances dans d'autres pays. Il faut donc reconnaître nos droits d'auteurs.
    Les créateurs d'oeuvres audiovisuelles doivent profiter des mêmes protections juridiques que les créateurs d'autres types d'oeuvres. C'est important surtout à l'ère numérique, où on peut facilement envoyer du contenu piraté partout dans le monde à l'aide d'un simple clic de souris. Il est essentiel de clarifier les questions de droit d'auteur pour protéger les créateurs canadiens, dont les réalisateurs et les scénaristes.
    Merci, monsieur le président. J'espère qu'il y aura des questions à ce sujet.
(1715)
    Merci, monsieur Barr.
    Passons à la Writers' Union of Canada, pour 10 minutes.
    Messieurs les députés, bonjour. Je m'appelle Greg Hollingshead et je préside la Writers' Union of Canada, qui représente environ 2 000 écrivains. Je suis moi-même écrivain et, pendant 30 ans avant ma retraite, j'étais professeur d'anglais à l'Université de l'Alberta. Je suis accompagné de Marian Hebb, notre avocate.
    Merci de l'invitation à témoigner devant vous. Je sais que vous avez beaucoup entendu parler de l'utilisation équitable en enseignement, mais en tant que professeur, écrivain, consommateur et créateur, je vais tenter de mettre en lumière comment et pourquoi cette vaste exception peut, sans qu'on le veuille, porter atteinte à la propriété intellectuelle des auteurs canadiens.
    Lorsque le projet de loi C-11 a été présenté, l'honorable ministre du Patrimoine canadien James Moore a déclaré que des lois claires permettaient aux consommateurs de connaître les limites à ne pas franchir et qu'il était injuste d'empêcher les créateurs de protéger ce dans quoi ils ont investi. Il parlait des serrures numériques, mais sans s'en rendre compte, il a évoqué exactement le problème que présente selon nous la nouvelle exception liée à l'enseignement: le manque d'orientation suffisante pour que les étudiants et les enseignants sachent ce qui est permis et ce qui ne l'est pas en ce qui a trait aux droits d'auteur. Cette exception ne respecte pas la propriété des créateurs.
    Il y a quelques années, une de mes nouvelles a été publiée dans une anthologie imprimée pour les collègues et les universités. J'ai reçu le paiement de mes droits d'auteur pour les éditions successives, mais ces dernières années, moins d'enseignants utilisent les manuels imprimés dans leurs cours. Les enseignants remettent plutôt aux étudiants un bloc de cours qui contient des textes photocopiés. Si vous voulez le consulter plus tard, j'ai amené un bloc de cours de mon université qui comporte des sections ou des chapitres de livres et un essai tiré d'une revue.
    En 2010, les enseignants dans les universités et les collèges canadiens ont copié plus de 100 millions de pages dans près de 120 000 livres, seulement pour les blocs de cours. Toutefois, ils remplacent de plus en plus ces blocs par des sites Internet réservés aux enseignants et aux étudiants qui permettent de discuter des textes à l'étude.
    Une organisation chargée de délivrer des licences offre maintenant ma nouvelle aux enseignants partout dans le monde qui veulent inclure sur leurs sites Internet les textes des auteurs et des éditeurs qu'elle représente. Pour cette utilisation numérique, les universités ou les collèges versent une redevance à mon éditeur et à moi, tout comme l'organisme canadien Access Copyright paie mes droits pour l'impression de mes textes, leur ajout dans les blocs de cours ou la distribution en classe.
    C'est très bien. Qu'ils soient inclus dans les blocs de cours, distribués en classe ou affichés sur un site Internet approprié, les textes sont désormais fournis de façon bien plus efficace et à moindre coût pour l'étudiant, qui a ainsi un accès plus facile aux textes de professionnels canadiens. L'auteur et l'éditeur reçoivent de l'argent pour leur travail et leur produit. Les responsables d'universités et de collèges n'ont pas besoin de protéger les droits d'auteur ou de se préoccuper du viol de ces droits par les enseignants ou les étudiants. Toutefois, le projet de loi C-11 n'indique pas clairement quel genre de reproduction à des fins éducatives constitue une utilisation équitable et ce qui ne l'est pas.
    En tant que professeur, je sais que les enseignants ne sont pas les ennemis des créateurs, qu'ils croient que ces derniers doivent obtenir une rémunération pour leurs oeuvres et que les établissements scolaires doivent payer une licence générale.
(1720)
    Les enseignants veulent payer pour les droits d'auteur, comme ils l'ont dit devant votre comité et celui du projet de loi C-32. Ce qu'il faut établir, c'est à combien s'élève la juste rémunération, mais le projet de loi C-11 ne le fait pas encore. Nous croyons que la mesure et le Parlement, pas les tribunaux, doivent déterminer cette juste rémunération et ce que le secteur de l'enseignement doit débourser.
    Compte tenu de la culture d'information et de divertissement numérique gratuits dans laquelle nous vivons tous et étant donné qu'une imprimante munie d'un scanneur coûte moins de 100 $, on ne peut pas plus se fier aux personnes qu'aux serrures numériques pour ce qui est des livres.
    Par expérience, je vous assure que, si le projet de loi C-11 est adopté sans amendement, il y aura un déluge de copies non autorisées dans les établissements scolaires. C'est clair que les plus farouches opposants à la mesure présument avoir droit à un libre accès à tous les contenus numériques. En raison de la culture dans laquelle ils ont grandi, les étudiants actuels s'attendent à utiliser sans frais tout ce qu'ils peuvent télécharger.
    C'est clair que, parce qu'ils ont refusé de verser des redevances liées aux licences collectives, plus de 50 collèges et universités ont forcé les enseignants à consacrer du temps et des efforts supplémentaires pour se charger eux-mêmes d'obtenir les droits d'utilisation des oeuvres à l'étude.
    Cependant, combien d'enseignants vont se donner la peine d'obtenir ces droits si leurs établissements ont rejeté les licences collectives, si leurs sites Internet sont presque impossibles à surveiller et si, de l'avis général, tout indique que le projet de loi C-11 va diminuer les restrictions sur les droits d'auteur liés à l'enseignement, sans qu'on puisse dire exactement comment?
    La semaine dernière, des enseignants vous ont dit que la simple copie de quelques pages ici et là pour l'étude en classe doit être considérée comme une utilisation équitable. Mais si on songe à tous les cours donnés chaque année au pays, près de 250 millions de pages sont copiées dans les établissements scolaires. Les auteurs et les éditeurs perdent ainsi des dizaines de millions de dollars.
    La copie de quelques pages ici et là ne concerne pas la facilité d'accès aux documents, mais le paiement. Les enseignants vous demandent de leur permettre une utilisation pour laquelle ils détiennent déjà une licence.
    Dans la décision CCH, la Cour suprême a indiqué que les dommages subis par le marché n'étaient qu'un des six facteurs ou plus qu'il fallait examiner concernant l'utilisation équitable et qu'il n'était pas forcément le plus important. Une utilisation qui nuit au marché peut être considérée comme équitable. La copie de quelques pages çà et là pour l'utilisation en classe causerait beaucoup de tort au marché. Les dommages qu'il pourrait subir en raison de l'ambiguïté de la loi et l'incertitude associée aux investissements continus dans l'édition au Canada sont trop importants pour que le Parlement laisse les tribunaux trancher la question.
    Nous vous demandons de clarifier le projet de loi pour que les utilisations payantes de nos jours continuent de l'être. Sinon, les premières personnes pénalisées par les économies que les établissements d'enseignement vont réaliser seront celles qui peuvent le moins se le permettre; les auteurs canadiens gagnent en moyenne moins de 20 000 $ par année pour leurs écrits.
    La Writers' Union of Canada a participé activement à l'élaboration d'un document qu'elle et 67 autres organisations artistiques au Canada ont signé et qui vous a été envoyé en janvier. D'autres membres de ce groupe de témoins vous ont parlé de ce document, qui contient les amendements répondant à nos préoccupations.
(1725)
    Le mémoire que nous vous avons remis aujourd'hui traite également de ces préoccupations d'autres problèmes que présente le projet de loi C-11, dont le contenu généré par l'utilisateur et l'utilisation numérique par les bibliothèques.
    Monsieur Hollingshead, vos 10 minutes sont écoulées. Si vous avez d'autres commentaires, vous pourrez sans doute les formuler en réponse aux questions qui seront posées.
    Merci aux témoins. Je me demande ce que Joey Jeremiah dirait s'il apprenait que les députés ici présents ont parlé de lui abondamment. Quoi qu'il en soit, je cède la parole à M. Moore, qui a cinq minutes pour poser les premières questions.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins. Jusqu'à maintenant, nous avons écouté des exposés très intéressants.
    Monsieur Stohn, vous avez affirmé adorer les mixages, mais vous avez ensuite établi une distinction entre ceux qui vous plaisent et ceux que vous n'aimez pas. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par un mixage, ou un mashup? Pourquoi vous plaisent-ils, mais que certains vous semblent inquiétants?
    Les mixages que nous aimons sont ceux qui durent généralement trois minutes, environ — ils sont partout sur le Web. Un des couples de la série plaît tellement aux admirateurs que ceux-ci retournent voir ces épisodes. Les mordus font un travail incroyable, car il faut beaucoup de temps pour réaliser le montage de ces vidéos. Ils peuvent passer en revue 20 ou 50 épisodes pour en choisir des extraits, qu'ils réuniront dans une vidéo de trois minutes qui fait l'apologie d'une relation en particulier ou d'un couple, sur une chanson de Faith Hill qui joue en sourdine. Autrefois, il s'agissait là de violations du droit d'auteur. Nous adorons ces mixages, car un admirateur qui est prêt à investir tout ce temps dans les personnages de notre série est d'une grande valeur. Nous trouvons ce genre d'activités extrêmement positives.
    Ce qui nous déplaît, par contre, ce sont les mixages de 10 heures où un admirateur diffuse ses 10 épisodes préférés de Degrassi, par exemple. Les épisodes sont simplement juxtaposés et entrecoupés de commentaires de l'admirateur, qui présente la vidéo et explique ce qui lui plaît et ce que font certains personnages, par exemple.
    Ce sont les mixages auxquels nous nous opposons. Je pense que tout le monde comprend bien où nous voulons en venir. Je vais laisser les spécialistes s'occuper de formuler le libellé exact, mais je pense que si nous pouvions éliminer ce type de vidéos, nous pourrions favoriser les véritables mixages.
(1730)
    Les choses ont évidemment beaucoup évolué depuis le premier épisode de Degrassi — et je parle du tout premier. Vous avez dit être à l'avant-garde des nouveaux médias. Même si vous utilisez les modes de distribution traditionnels, vous ne semblez pas hésiter à saisir toute occasion de tirer parti des nouveaux médias.
    Pourriez-vous nous parler des problèmes de violation du droit d'auteur que vous avez déjà dû surmonter au sujet de vos séries télévisées, et des répercussions de ces violations sur vos affaires?
    Puisque nous sommes une petite entreprise, nous n'envoyons pas de mises en demeure nous-mêmes, sauf aux services comme YouTube qui, aux États-Unis, utilisent un système d'identification du contenu. Lorsqu'ils reçoivent un avis, ces services assurent le suivi et appliquent de manière uniforme leur politique sur le contenu pouvant être diffusé ou non. Par contre, nous ne nous attaquons pas à Megaupload ou à isoHunt.
    Aux États-Unis, notre radiodiffuseur est l'une des sociétés de Viacom. Nous croyons savoir que les avocats du groupe font peut-être de la surveillance pour nos séries télévisées et bien d'autres, mais nous n'intervenons pas.
    On ne peut pas dire que 100 000 téléchargements frauduleux correspondent au vol de 100 000 vidéos chez BestBuy. Je dois reconnaître qu'il est différent de se faire voler un épisode dont le coût marginal de production est nul. Les téléchargements nous font bel et bien perdre des occasions de vente, mais ces 100 000 personnes auraient-elles vraiment acheté l'épisode? Y a-t-il une valeur rattachée à ces activités?
    Je sais que mes propos sont hérétiques, car nous disons tous que le téléchargement est absolument épouvantable. Il est vrai que la notoriété accrue de la série a une certaine valeur, mais sur certains sites Web, 600 000 fichiers illégaux peuvent être téléchargés en 24 heures. Ces chiffres astronomiques créent tout un univers parallèle où nos épisodes sont gratuits. Nous essayons d'offrir nos séries légalement partout dans le monde, mais nous ne sommes tout simplement pas de taille devant la gratuité.
    Malheureusement, il ne vous reste que 10 secondes.
     Je vais en profiter pour vous remercier de votre réponse.
    Messieurs Moore et Stohn, je vous remercie.
    Le prochain intervenant est M. Benskin.
    C'est un peu comme les célébrations de la Old Home Week ici. J'ai aussi fait un film avec Tim Southam qui s'intitulait L'île des morts, pour ceux qui...
    Des voix: Oh, oh!
    Vous irez le voir.
    Vous le trouverez sur Amazon.
    Ces jours-ci, on semble en quelque sorte trouver irritant que les artistes, les créateurs et les détenteurs de droits demandent à être rémunérés dans le cadre du modèle d'affaires. Or, je suis d'avis que ces sociétés existent uniquement parce qu'il y a du contenu, et inversement. Sans contenu, les stations de radio et autres diffuseurs n'auraient aucune raison d'être.
    Autrefois, la diffusion des publicités était l'objectif de la télévision; les séries télévisées étaient alors présentées entre les publicités. À l'époque, les « romans savon » ou « soap operas » étaient des feuilletons commandités par Procter and Gamble et d'autres fabricants de savon, où les personnages présentaient leurs produits.
    Quoi qu'il en soit, le contenu fait partie intégrante du modèle d'affaires, n'est-ce pas?
(1735)
    Je suis d'accord. Il est intéressant d'entendre autant parler du Web alors qu'il n'existe toujours aucun modèle d'affaires fongible qui couvre tout l'éventail des possibilités qu'offre cet environnement. On s'y attend, mais il y a déjà du contenu sur le Web; c'est indéniable.
    Mais je pense que la réponse est un peu plus complexe. Comment ce contenu pourrait-il devenir fongible puisqu'il se trouve déjà sur le Web? Comment peut-on contrôler l'utilisation ou la consommation du matériel sur un environnement passé maître dans l'art de se soustraire aux autorités traditionnelles?
    La vraie réponse, c'est que les créateurs de contenus ne peuvent survivre sans rémunération, et que celle-ci comporte deux éléments: la main-d'oeuvre, qui est payée sur-le-champ au créateur, et la paternité de l'oeuvre, un lien économique continu qui perdure longtemps après la diffusion du matériel sur le marché.
    Avec Internet et les nouveaux médias en général, on remarque que le lien économique continu avec l'oeuvre est radicalement abrégé après la diffusion de celle-ci. Or, c'est lourd de conséquences pour les créateurs qui sont chez eux à essayer de terminer leur prochaine oeuvre et pour ceux qui essaient d'obtenir un prix juste en échange de leur travail au sein de la population active. Les pertes des réalisateurs qui n'arrivent pas à récupérer cet argent sur le marché se refléteront sur la main-d'oeuvre et la paternité de l'oeuvre. Au sein de ce nouveau Far West, la Guilde canadienne des réalisateurs croit qu'il faut continuer de tenir compte, sur les plans légal et économique, des investissements liés à la paternité de l'oeuvre.
    Monsieur Stohn, vous avez mentionné dans votre exposé la nécessité de mieux surveiller les sites de stockage de fichiers et les sites de transfert de fichiers torrent, car ils pourraient occasionner des pertes financières.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus là-dessus?
    Je ne m'étendrai pas sur les détails techniques; je vais laisser cette tâche à notre association. M. Noss a bien dit qu'il n'a rien contre le fait de se débarrasser des gros bonnets malintentionnés, comme les sites de stockage de fichiers. Or, il tient à ce que l'entrée en vigueur des dispositions ne nuise pas aux particuliers.
    Nous ne voulons pas que les utilisateurs soient pénalisés. Si j'ai bien compris, le projet de loi ne s'attaque pas vraiment aux gros bonnets. De plus, en essayant de trouver un équilibre pour aider les petits intervenants, on pourrait sans le vouloir créer un refuge pour les sites de stockage de fichiers.
    Monsieur Hollingshead, pourriez-vous nous parler plus en détail des enseignants qui ont déjà accès à des documents protégés par droits d'auteur au moyen d'une licence? Pourriez-vous aussi expliquer de quelle façon le processus d'utilisation équitable pénalisera financièrement les artistes?
    Les licences collectives couvrent actuellement les besoins des enseignants en classe. Or, la valeur des licences diminuera si ces derniers demandent de copier librement quelques pages ici et là pour leurs cours, puisque c'est considéré comme une utilisation équitable. Les enseignants paient actuellement pour le faire, mais ils ne voudront pas continuer ainsi. Par conséquent, l'auteur touchera moins de redevances.
    Messieurs Hollingshead et Benskin, je vous remercie.
    Je vais maintenant laisser la parole cinq minutes à M. Armstrong.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier de vos exposés.
    Monsieur Barr, ma première question s'adresse à vous. J'ai trouvé intéressantes vos inquiétudes sur la clarté de la loi en ce qui a trait à l'auteur, au réalisateur et au producteur.
    Pourriez-vous m'expliquer comment la loi actuelle définit la paternité d'une oeuvre? Qu'en est-il de l'industrie?
(1740)
    Je vais répondre aux deux questions. Si j'ai bien compris, vous voulez savoir comment la loi définit la paternité d'une oeuvre.
    C'est exact.
    Nous sommes venus comparaître aujourd'hui parce que le projet de loi C-11 comporte des lacunes dans le cas des oeuvres audiovisuelles, mais elles pourraient facilement être corrigées — il suffirait de quelques petits mots qui n'empiètent aucunement sur l'objectif de l'ensemble des modifications proposées. Vous pourriez donc régler le problème en claquant des doigts.
    Toutefois, je pense qu'il est essentiel de mentionner que l'industrie reconnaît déjà la paternité du droit d'auteur que nous vous demandons d'intégrer à la loi. La convention collective que nous avons conclue avec les réalisateurs indépendants du Canada fait valoir ouvertement leurs droits d'auteur. Ces droits et la capacité des producteurs de diffuser à plusieurs reprises font partie de la rétribution des réalisateurs. Les scénaristes passent également une entente contractuelle semblable avec les réalisateurs. Par conséquent, l'industrie tient compte de ces droits à l'heure actuelle.
    Vous dites que ce n'est pas prévu dans la loi actuelle, mais que l'industrie s'en occupe d'elle-même. Dans ce cas, pourquoi tenez-vous tant à ce que de telles dispositions soient intégrées à la loi?
    Il y a deux raisons. D'une part, l'industrie en tient compte lors de la négociation d'un contrat, mais cela n'inclut pas tous les cas de figure. La décision Films Rachel dont j'ai parlé est justement un exemple de litige opposant un réalisateur et un auteur. Dans cette affaire, le film n'était pas signé. Il ne faisait l'objet d'aucune convention collective ou autre entente contractuelle.
    D'autre part, la clarté de la loi est essentielle pour que les créateurs bénéficient d'une source de revenus durable. Il s'agit là d'une occasion en or de clarifier la loi. Ce n'est pas compliqué, et ce sera grandement profitable à l'avenir.
    J'aimerais poser une question à Steve.
    Compte tenu de votre travail, vous connaissiez probablement très bien Neil Hope.
    Oui.
    Je tiens à vous offrir mes condoléances. Je sais que c'est arrivé il y a un moment déjà, mais toute l'équipe de Degrassi a dû être assez bouleversée l'an dernier.
    Lorsque j'ai essayé d'annoncer la nouvelle à ma femme — j'en suis encore ému —, j'avais la gorge si serrée que je n'arrivais pas à prononcer les mots.
    Toutes mes condoléances.
    Cette série télévisée a véritablement été révolutionnaire; les séries originales comme les séries subséquentes ont remporté un succès international fulgurant, n'est-ce pas?
    Oui. Dans l'ensemble, les séries sont diffusées dans bien plus de 100 pays.
    Vous devez donc avoir affaire au droit d'auteur à l'échelle internationale.
    En effet.
    Les nouvelles dispositions du projet de loi C-11 vous posent-elles problème étant donné que votre série est diffusée dans un si grand nombre de pays? Ne vous attardez pas aux détails techniques puisque ce n'est pas votre domaine.
    Puisque le droit d'auteur s'applique à un territoire donné, nous devons respecter aux États-Unis la loi américaine sur le droit d'auteur, et en France, la loi française sur le droit d'auteur. À ce jour, ce n'est pas vraiment un problème. Les modalités qui s'appliquent sont relativement semblables.
    Tout ce que je peux dire — et ce sont des renseignements informels —, c'est que le marché international considère le Canada comme une sorte de refuge pour les pirates. C'est contrariant de l'apprendre en tant que Canadiens, car nous croyons exactement l'inverse.
    Vous nous encouragez à adopter le projet de loi le plus tôt possible pour que nous puissions notamment prendre des mesures afin de limiter le piratage du matériel d'ici et d'ailleurs, n'est-ce pas?
    Grâce au projet de loi, notre loi sera conforme à celles du reste du monde.
    Il me reste deux ou trois questions.
    Dès que les séries originales Degrassi sont arrivées aux États-Unis, elles ont été copiées presque sur-le-champ sous le nom de Beverly Hills 90210. Cette série reprenait véritablement l'ensemble de votre thème, mais dans un décor de Corvettes et de maisons bourgeoises. La situation vous a-t-elle dérangé?
    À vrai dire, non.
    Il s'agit ici de droits sur la forme ou les idées. La série américaine n'avait rien à voir avec la nôtre. La principale différence, c'est que Degrassi suit deux principes. D'une part, personne n'est seul. On pense parfois que ce qu'on vit est horrible, mais on n'est pas seul. D'autre part, on a le choix, mais chaque décision entraîne son lot de conséquences. Le pouvoir de décision appartient à chacun, mais chaque choix comporte des conséquences. Or, Beverly Hills 90210 n'a jamais adopté de tels principes.
    Des voix: Oh, oh!
(1745)
    Messieurs Stohn et Armstrong, je vous remercie.
    Degrassi était bien mieux que Beverly Hills 90210. Nul besoin d'en débattre.
    Pour les cinq prochaines minutes, la parole est à M. Regan.
    Merci, monsieur le président; j'appuie votre commentaire.
    Ma première question s'adresse à M. Hollingshead.
    Vous avez parlé de l'arrêt CCH de la Cour suprême du Canada. Croyez-vous que le projet de loi serait assez clair, ou du moins plus clair s'il comportait l'évaluation en six étapes proposée par la Cour suprême?
    Je ne crois pas que ces six facteurs suffisent, car les répercussions sur le marché n'y sont pas prioritaires. À mon avis, le document d'information décrit bien la finalité du projet de loi, mais ce n'est pas ce qu'il fait en réalité. Autrement dit, le projet de loi devrait tenir compte des intérêts légitimes des titulaires du droit d'auteur sans causer de tort au marché d'une oeuvre, et à condition que l'utilisation équitable soit véritablement juste. Je pense qu'il faut accorder la priorité aux répercussions sur le marché, mais ce n'est pas le cas dans l'arrêt CCH.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Barr, pour ce qui est de l'application du droit d'auteur aux réalisateurs, voyez-vous une raison de distinguer les droits moraux des droits économiques?
    Les réalisateurs contribuent certainement aux droits moraux et aux droits économiques. Généralement, selon le régime de rémunération auquel ils adhèrent, les réalisateurs canadiens lèvent leurs droits moraux et vendent l'utilisation des droits d'auteurs, si je peux m'exprimer ainsi, aux fins de la retransmission.
    Les droits moraux renvoient à la façon dont une oeuvre peut être représentée et à la façon dont elle peut être retransmise. Ils visent à préserver l'intégrer de l'oeuvre, et c'est évidemment ce qui est énoncé dans la loi.
    Ce qui pose problème selon nous dans la loi, et je l'ai souligné tout à l'heure, c'est que cela ne s'applique qu'aux auteurs. Si le projet de loi C-11 n'inclut pas les réalisateurs et les scénaristes d'oeuvres audiovisuelles dans la notion d'auteurs, cela viendra jeter le flou sur leurs droits moraux.
    Ils détiennent déjà ces droits. Cet amendement ne leur conférerait pas un droit qu'ils n'ont pas déjà...
    Je pense que vous avez fait la distinction entre les droits économiques et les droits moraux, en ce sens que les droits économiques sont souvent cédés, alors que cela ne devrait pas être le cas pour les droits moraux.
    Ils sont maintenus jusqu'à ce qu'ils soient levés, mais ce n'est pas pour de l'argent.
    Monsieur Stohn, comment voyez-vous cela? Qu'en penseraient la plupart des compagnies de production, à votre avis?
    Malheureusement, nous ne voyons pas du tout la chose du même oeil.
    C'est pour cette raison que je veux connaître votre point de vue.
    Aux États-Unis, la compagnie de production ou le producteur est effectivement considéré comme l'auteur et détient tous les droits. Ce sont nos principaux partenaires. L'ACEM et moi-même, en mon nom personnel, avons réclamé au fil des ans que soit clarifiée la loi pour que les producteurs soient considérés comme des auteurs. C'était très pertinent de demander s'il y avait une différence entre les droits économiques et les droits moraux, et il pourrait effectivement y en avoir une. Cela pourrait s'avérer un bon compromis au bout du compte.
    Selon moi, il ne s'agit pas d'un amendement de forme. Je tiens à bien préciser que les réalisateurs font un travail absolument essentiel et très précieux pour la création d'une oeuvre audiovisuelle, au même titre que les rédacteurs et le directeur de la photographie — le jeu des caméras est primordial —, et tout comme les monteurs, les monteurs de son, les auteurs de la musique et les acteurs. Environ 150 personnes travaillent à la réalisation d'un épisode régulier de Degrassi. La contribution et le talent de chacune de ces personnes sont essentiels au succès de l'émission.
     Il y a une personne qui rassemble tous ces gens. Il y a une personne qui décide qu'il s'agit de la bonne équipe pour que tout se déroule bien, et qui détermine quelle est l'approche appropriée selon le réseau. Ce qui l'est pour la chaîne CW ne le sera pas nécessairement pour HBO. Une personne trouve les fonds pour faire tout cela. Cette personne, c'est l'auteur, et cette personne, c'est le producteur.
    Puis-je répliquer à cela?
    Des voix: Oh, oh!
    L'hon. Geoff Regan: Pourquoi pas?
    Le président: Vous avez 30 secondes.
    M. Gerry Barr: En 30 secondes, je répondrai ceci: les droits de propriété du producteur sur l'oeuvre produite par l'industrie de la culture sont évidemment extrêmement importants, mais il est aussi important de souligner que M. Stohn est membre d'une organisation qui fait régulièrement affaires avec la Guilde canadienne des réalisateurs, et les ententes conclues avec elle reconnaissent formellement les droits d'auteurs associés au rôle de réalisateur.
(1750)
    Merci, monsieur Barr.
    Puis-je simplement ajouter que je suis heureux d'avoir posé la question?
    Des voix: Oh, oh!
    Absolument.
    C'est ce qui met fin à notre première série de questions de cinq minutes. Nous entamons donc la deuxième, toujours de cinq minutes.
    Monsieur McColeman, c'est à vous.
    Merci à vous tous d'être ici.
    J'ai vu que M. Stohn secouait la tête pendant que le représentant de la Guilde des réalisateurs donnait sa réponse. Je vais poursuivre sur la même lancée que M. Regan pour savoir ce que vous en pensez, parce que vous ne sembliez pas d'accord.
    Je ne crois pas que l'entente de production indépendante confère de quelque manière que ce soit le statut d'auteur aux réalisateurs, pas plus que l'entente conclue avec l'union des écrivains. On leur verse effectivement des redevances, comme aux écrivains et aux acteurs, et cela peut aussi être négocié avec d'autres en cours de route, dont d'autres producteurs. Mais, selon moi, cela ne... Ce genre de liens économiques, qui existent aussi aux États-Unis, là où on reconnaît formellement le statut d'auteur des producteurs, ne constituent pas une telle reconnaissance.
    Je change de sujet: le piratage. Nous en avons parlé un peu tout à l'heure.
    Vous avez abordé la question dans votre présentation, monsieur Stohn, en nous disant que c'était dévastateur pour votre entreprise en ce moment. Est-ce quelqu'un de votre entreprise a étudié les répercussions exactes...? Est-il possible de quantifier l'ampleur des dommages actuels, en tenant compte du fait que le phénomène est de plus en plus répandu et qu'on continue à voler l'industrie?
    J'aimerais entendre la réponse de chacun de nos groupes de témoins. Quel est l'impact du piratage à l'heure actuelle sur vos entreprises?
    Je vais commencer.
    Je n'ai pas tous les chiffres, mais je crois que nos associations les ont. Avec un peu de chance, elles les auront inclus dans leurs mémoires.
    Je vous dirai très brièvement, avant de céder la parole aux autres, qu'au cours des dernières années, les redevances que versent les télédiffuseurs ont diminué, et ce, pour deux raisons: elles ont commencé à baisser lorsque les chaînes spécialisées et les chaînes câblées ont pris le marché de force, à une époque où il n'y avait que quatre grands réseaux aux États-Unis. En fait, il n'y en avait que trois à ce moment-là. Ils dominaient alors les cotes d'écoute et pouvaient verser d'énormes redevances. L'arrivée des chaînes spécialisées et des chaînes câblées a eu pour effet de fragmenter le marché, et par le fait même de fragmenter l'auditoire. C'est donc à ce moment que les droits payés par émission ont diminué. La même chose se produit aujourd'hui avec la nouvelle génération, étant donné que l'avènement de l'Internet vient fragmenter le marché une fois de plus.
    Si on veut retrouver la même qualité, notamment dans les dramatiques à gros budget, auxquelles j'inclus Degrassi , ces redevances devront idéalement être remplacées d'une façon ou d'une autre. On peut réduire les coûts jusqu'à un certain point, mais si on veut conserver la qualité afin de vraiment fidéliser l'auditoire, il faut trouver l'argent ailleurs. C'est possible de combler la différence, et même plus, grâce aux revenus tirés des plateformes numériques.
    Monsieur Barr, qu'en pensez-vous?
    Je crois que le piratage vampirise les revenus des créateurs et des producteurs d'oeuvres créatrices.
    Permettez-moi, monsieur McColeman, d'en profiter pour répondre rapidement à mon collègue M. Stohn.
    Dans la convention collective modèle, l'article intitulé « Concession de droits » se lit comme suit:
a) Aucune disposition du présent Accord ou de tout contrat auquel le présent Accord s'applique n'a pour effet de diminuer les droits que le réalisateur peut avoir par ailleurs de percevoir ce qui est convenu d'appeler la « part de l'auteur » à la suite de paiements pour usage secondaire en rapport avec la Production. [Traduction]
    Donc, la part de l'auteur est la « part de l'auteur », et je peux me permettre de le dire. C'est une reconnaissance des droits d'auteur.
    Monsieur Hollingshead, voulez-vous répondre à la question ou...?
    Je vais laisser Marian Hebb y répondre.
    Je dirais simplement que les dispositions sur les dommages-intérêts légaux sont extrêmement importantes pour la Writers' Union. Beaucoup de piratage se fait sur Internet actuellement. Nous entendons beaucoup parler de la musique, mais le piratage touche aussi les livres, les articles et autres, alors c'est très important.
    C'est très facile pour un créateur de poursuivre pour dommages-intérêts, car ce n'est pas très cher, mais la sévérité des sanctions prévues à cet égard est grandement amoindrie par des facteurs qui vous échappent probablement. On fait notamment la distinction entre ceux qui commettent des infractions à des fins commerciales et ceux qui le font à des fins non commerciales. La disposition modifiée ne permet plus de poursuites pour dommages-intérêts dans les cas de violation à des fins non commerciales, mais les grandes entreprises peuvent aussi commettre des infractions graves qui ne sont pas de nature commerciale. Il en va de même pour les organismes de bienfaisance d'envergure qui violent les droits d'auteur. C'est donc une distinction que nous vous pressons de revoir et de réexaminer.
    Aussi, si des écrivains ont été nombreux à être victimes d'un même contrevenant, seul le premier à se manifester devant les tribunaux pourra être compensé par dommages-intérêts. Cela nous paraît plutôt injuste. Ceux qui voudront poursuivre ce contrevenant par la suite n'auront rien...
(1755)
    Merci, madame Hebb.
    Monsieur McColeman, votre temps est écoulé, malheureusement.
    Je rappelle aux témoins que notre agent des délibérations et de la vérification est très rapide. Vous n'avez donc pas à toucher à vos microphones. Nous allons nous assurer qu'ils sont allumés pour vous. C'est un simple rappel.
    La parole est maintenant à M. Cash pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être ici.
    Je pense qu'il est important que le comité sache comment cela se passe dans la vraie vie pour les artistes, les écrivains, les cinéastes et les producteurs qui essaient de gagner leur vie. Disons-le, pour chaque Degrassi, il y a beaucoup de producteurs, de réalisateurs et d'écrivains qui peinent à s'en sortir.
    Je veux d'abord vous féliciter pour votre réussite et pour le talent et les capacités que vous apportez à vos industries respectives. Je crois que c'est très important. Je sais que vous agissez tous comme mentors également. C'est important ça aussi.
    J'aimerais avoir des précisions sur quelques-uns des commentaires qui ont été formulés, tout d'abord concernant les mixages.
    Monsieur Stohn, pour vous, à tout le moins pour Degrassi, les mixages ont été très utiles. Ils reflètent en quelque sorte les impressions de cette communauté.
    À votre avis, est-ce une pratique qui est monnayée? Autrement dit, est-ce que les gens le font à des fins commerciales?
    Les gens dont je parlais ne font absolument pas cela à des fins commerciales. Ils ne font pas d'argent avec cela. YouTube, par contre, pourrait en faire.
    Bien sûr. D'accord.
    Monsieur Barr et monsieur Southam, que pensez-vous des mixages? Partagez-vous le point de vue de M. Stohn à ce sujet?
    En quelques mots, oui. De façon générale, le problème est que les sites qui regroupent les mixages attirent des visiteurs et génèrent des revenus de cette façon. C'est à ce moment-là que les mixages deviennent monnayables, grâce aux publicités et à ce genre de choses.
    Je pense aussi aux compilations dont parlait M. Stohn. C'est certainement envisageable que des compilations soient publiées; cela représenterait également des pertes financières. Je me range donc de son côté à cet égard.
    Avant d'aller plus loin, Tim, je crois important de souligner que nous voulons que les artistes soit rémunérés. Si des organisations comme isoHunt ou Megaupload font de l'argent sur le dos des artistes et des producteurs, il faut remédier à la situation.
    Toutefois, vous parlez de quelque chose de très différent. Je tiens à le préciser, parce qu'il est parfois difficile de tracer la ligne. En fait, notre mandat consiste entre autres à clarifier la distinction à faire entre les deux, car ce n'est pas nécessairement évident.
    Je veux aborder rapidement la question de la paternité d'une oeuvre. Ce que le projet de loi met de l'avant est un droit qui a été conféré aux musiciens, aux créateurs de contenu et aux propriétaires de musique, et personne ne met en doute que ce droit leur appartient. C'est aussi un droit qui est monnayable; personne ne dément cela. Cependant, le projet de loi crée une faille dont se serviront les utilisateurs de la musique, c'est-à-dire les radiodiffuseurs, pour éviter de payer les redevances rattachées à ce droit, à l'égard duquel la Commission du droit d'auteur a déjà tranché.
    Qu'est-ce qui vous fait croire que codifier la paternité d'une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle serait synonyme de protection, alors qu'on voit que le projet de loi a l'effet contraire? Les musiciens vont perdre 21 millions de dollars d'un simple coup de crayon.
    C'est inacceptable à notre avis. Ce n'est pas la voie à prendre, et pas seulement pour les musiciens. Il n'est pas question de payer deux fois pour le même...
(1800)
    Il vous reste 20 secondes.
    Allez-y.
    J'ai cru bon vous aider.
    Codifier ce droit ne garantira pas qu'il sera appliqué correctement. En l'absence d'un code, on peut facilement s'y perdre et il est encore plus difficile pour les titulaires légitimes de faire valoir leurs droits, tant sur le plan moral qu'économique, et c'est pour cette raison que nous le réclamons. Il ne s'agit pas de conférer un droit nouveau à qui que ce soit, mais bien de préciser les modalités entourant le monnayage des droits en question, et aussi de clarifier les amendements proposés par le gouvernement.
    Merci, monsieur Barr. Je suis persuadé que vous connaissez la valeur du temps en tant que réalisateur.
    M. Braid a la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Monsieur Barr, je vais commencer avec vous. Je suis heureux de vous revoir.
    Heureux de vous revoir également.
    Pour ce qui est de la paternité des oeuvres audiovisuelles et de la notion de paternité pour les écrivains et les réalisateurs, est-ce que vous pensez principalement aux oeuvres télévisuelles et cinématographiques, ou...
    C'est pour les oeuvres cinématographiques sur toutes les plateformes. Pour les oeuvres audiovisuelles, oui.
    Y a-t-il d'autres pays où les écrivains et les réalisateurs sont considérés comme des auteurs selon une législation semblable? Pourriez-vous nous en parler?
    Oui. L'Union européenne en constitue l'exemple parfait. Dans le cadre des politiques établies, les pays membres répertorient les créateurs susceptibles de réclamer la paternité d'une oeuvre audiovisuelle. Cependant, le réalisateur est toujours reconnu. Je dis bien toujours. Parfois, le nom du scénariste est mentionné. En Grande-Bretagne, les producteurs et les directeurs sont répertoriés. M. Stohn et moi y sommes allés ensemble.
    Aux États-Unis, le système est fondamentalement différent. Les redevances sont versées aux producteurs qui les partagent avec les scénaristes et les réalisateurs. Les parties prenantes sont nombreuses, mais je crois pouvoir dire que les réalisateurs sont toujours inclus, sauf ici. C'est important.
    Très bien. Cependant, est-ce une question d'indemnisation? Dans la majorité des situations actuelles, il semble que le régime d'indemnisation fasse l'objet de négociations. Le cas échéant, pourquoi est-ce si important?
    Cela fait l'objet de négociations. L'industrie tient compte des droits d'auteur. Pour nous, ces négociations sont monnaie courante. Le réalisateur canadien qui cède son droit d'auteur peut obtenir plus de 100 p. 100 du montant initial. Aux États-Unis, on peut obtenir jusqu'à 300 p. 100. Il y a donc un écart considérable. Toutefois, cela ne tient plus lorsqu'il n'y a pas de négociation, ce qui arrive très souvent.
    La Société canadien canadienne de gestion des droits des réalisateurs perçoit les redevances et autres indemnisations des sociétés européennes. Par conséquent, nous sommes indemnisés, mais nous ne pouvons pas rendre la pareille, car nous ne sommes pas en mesure de le faire. Cette absence de réciprocité entraîne une asymétrie qui porte vraiment préjudice au régime mondial du droit d'auteur. La réciprocité est le moteur d'un tel régime. Les sociétés nationales de gestion des droits perçoivent les redevances pour ensuite les répartir. Nous en recevons des sociétés européennes, mais l'inverse est impossible.
(1805)
    Je m'adresse maintenant à M. Stohn. Que se passera-t-il si, par auteur d'oeuvre audiovisuelle, nous entendons également le directeur et le scénariste? Tous ici présents savent que le projet de loi vise à tenir compte non seulement des intérêts des créateurs et des consommateurs, mais également de ceux de toutes les parties prenantes. Y parviendra-t-on?
    La situation pourrait changer radicalement. Je vous donne un exemple: les droits de retransmission. Au Canada, des dizaines de millions de dollars sont en jeu, et ce sont les détenteurs du droit d'auteur pour l'oeuvre originale qui touchent les redevances.
    Que se passerait-il si les réalisateurs étaient inclus dans la définition d'auteur et devenaient détenteurs du droit d'auteur de l'oeuvre originale? Cela voudrait-il dire que les producteurs qui obtiennent les fonds pour monter les spectacles n'auraient pas droit à cette indemnisation? Faudrait-il mener des négociations dans l'ensemble de l'industrie pour répartir ces droits économiques afin de pouvoir indemniser un réalisateur?
    Tout cela nous ramène aux propos évoqués sur la différence entre les droits économiques et les droits moraux. Aux États-Unis, les droits économiques sont très clairement accordés aux producteurs et peuvent être partagés avec les autres parties prenantes dans le cadre de négociations pour l'ensemble de l'industrie. C'est le régime qui est en oeuvre pour les droits économiques. Il pourrait y en avoir un autre pour les droits moraux.
    Merci, monsieur Stohn et monsieur Braid.
    Nous entendrons maintenant monsieur Dionne Labelle, qui dispose de cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Dans les témoignages des différents groupes qui comparaissent depuis le début devant ce comité, on entend souvent parler de la nécessité d'avoir un projet de loi équilibré. C'est le mot qui est revenu dans toutes les présentations.
    Je crois que les gens de la SODRAC, les membres de ce groupe qui représente les écrivains canadiens, n'ont pas l'impression que ce projet de loi est équilibré. Si les grands fournisseurs et les grands producteurs sont heureux de lutter contre le piratage, ce qui est une bonne chose, j'ai le sentiment que M. Hollingshead pourrait voir son oeuvre piratée à cause des exceptions qui sont actuellement incluses dans la loi.
    D'un côté, on lutte contre le piratage industriel; de l'autre, on légalise une certaine forme de piratage des oeuvres des artistes. Est-ce que je comprends cela de la bonne façon?

[Traduction]

    Estimez-vous que ce que veulent faire les enseignants est du piratage? En un sens, c'est effectivement du piratage, parce qu'ils veulent obtenir gratuitement le contenu des documents produits par des professionnels canadiens.

[Français]

    Cette forme de piratage n'est pas essentiellement différente de celle que l'on voit à l'échelle industrielle. On parle d'une mise à niveau de notre Loi sur le droit d'auteur. Or je constate que les auteurs, les créateurs, sont perdants dans cette mise à niveau.
    Avez-vous le sentiment que cette mise à niveau se fait au détriment des créateurs, des écrivains?

[Traduction]

    Ce sera effectivement au détriment des créateurs, si le projet de loi est adopté sans amendement. Je ne pense pas qu'il faudrait beaucoup de...
    Vous le savez tous, c'est une question extrêmement complexe. Ce n'est pas une mince tâche que de tenir compte des intérêts de toutes les parties prenantes. Je ne suis pas le premier à affirmer qu'il faut féliciter le gouvernement de cette initiative. Nous demandons simplement des précisions. Je me fais l'écho de M. Barr, je pense.
    Nous voulons que des précisions soient apportées dans l'intérêt des créateurs. Cette précision pourrait être apportée dans le cadre d'un amendement de forme, comme ceux que nous avons proposés, et le tour serait joué.
(1810)
    Nous avons huit amendements qui concernent les écrivains et les éditeurs. Nous aimerions vraiment que vous les examiniez très attentivement. Nous les avons remis à la greffière.

[Français]

    Le sommaire du projet de loi parle de « mettre à jour les droits et les mesures de protection dont bénéficient les titulaires du droit d’auteur — il ne s'agit pas de les leur enlever —, en conformité avec les normes internationales ».
    Vos textes seraient-ils plus protégés à l'extérieur qu'à l'intérieur du Canada, si on tient compte des normes internationales actuelles?

[Traduction]

    Les dispositions du projet de loi C-11 sur l'utilisation équitable offriront de telles possibilités que nous sommes extrêmement inquiets des répercussions pour les écrivains.
    Ce qui nous préoccupe également, ce sont les dispositions sur le contenu généré par l'utilisateur. Dans leur libellé, ces dispositions autoriseraient le matériel pédagogique comme celui que mon collègue a apporté. Le libellé est beaucoup trop vague.
    Plusieurs amendements nous inquiètent vraiment. Nous ne pensons pas qu'ils atteindront l'objectif visé, mais plutôt qu'ils entraîneront des répercussions imprévisibles. Nous tenons donc à ce qu'on s'attaque à la question des préjudices pour le marché.

[Français]

    Voulez-vous compléter? La patinoire est à vous.

[Traduction]

    Je suis tout à fait d'accord.
    Nous demandons au comité de donner suite à l'engagement du ministre Moore d'adopter des projets de loi clairs afin de protéger les investissements. C'est ce que nous demandons. Si vous n'agissez pas en ce sens, vous vous attaquerez à ceux qui n'ont pas les moyens de payer.

[Français]

    Je trouverais cela...

[Traduction]

    Merci, monsieur Hollingshead et monsieur Dionne Labelle.

[Français]

    Vos cinq minutes sont écoulées.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant M. Lake qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voulais aborder un aspect tout à fait différent, mais je pense que je vais poursuivre dans la même veine dans un premier temps.
    Dans des termes analogues aux vôtres, bien des témoins nous ont fait part de leurs inquiétudes à propos du libellé beaucoup trop vague des dispositions du projet de loi. Je préférerais m'en tenir au texte et au sens du projet de loi.
    On a évoqué notamment le contenu généré par l'utilisateur. Madame Hebb, vous venez de soulever ce problème. Le projet de loi précise ce qui ne constitue pas une violation du droit d'auteur lorsque certaines conditions sont réunies, dont la suivante:
l'utilisation de la nouvelle oeuvre ou du nouvel objet, ou l'autorisation de le diffuser, n'a aucun effet négatif important, pécuniaire ou autre, sur l'exploitation — actuelle ou éventuelle — de l'oeuvre ou autre objet ou de la copie de ceux-ci ayant servi à la création ou sur tout marché actuel ou éventuel à son égard, notamment parce que l'oeuvre ou l'objet nouvellement créé ne peut s'y substituer.
    Quelle partie de ce libellé vous apparaît trop vague ou trop floue?
    Entre autres, vous ne pourrez déterminer l'effet négatif important qu'a posteriori. Vous ne pourrez pas porter plainte avant. Par conséquent, lorsque...
    Je comprends, mais il est assez difficile de prétendre à l'avance à une violation du droit d'auteur.
    Il s'agit en fait de très légères violations dans un sens, mais il n'empêche qu'elles sont commises par bien des gens. Supposons qu'un de ces mixages commence à circuler sur Internet. Il se pourrait alors que toutes ces légères violations ou même une seule d'entre elles aient un effet désastreux.
    Que se passe-t-il si quelqu'un écrit une suite à mon roman? Le lecteur n'y voit peut-être aucun problème, peut-être à tort. Peut-être s'est-on servi de mon roman pour écrire une suite que je m'apprêtais à rédiger. Si cette suite est reproduite sur Internet et si je mène à terme mon projet, on pensera que j'ai copié.
    Vous avez parlé de nombreuses légères violations. Cela ne s'applique peut-être pas à la littérature, mais si je veux entendre une chanson, je ne vais probablement pas regarder sept versions différentes sur YouTube pour en saisir l'essence. Ce ne rimerait à rien. De la même façon, je ne vais probablement pas recourir à Internet pour obtenir huit ou neuf versions différentes de la nouvelle de M. Hollingshead pour en saisir l'essence. Cela me semble peu logique de...
(1815)
    Cependant, vous pourriez utiliser l'intégralité de l'oeuvre. Je pense que Stephen Stohn a dit qu'il y avait des échappatoires.
    Encore une fois, je voudrais préciser que le libellé est clair: c'est interdit. Vous ne pouvez faire une utilisation qui aurait « un effet négatif important [...] sur l'exploitation — actuelle ou éventuelle — de l'oeuvre ou autre objet [...] ou sur tout marché actuel ou éventuel à son égard ».
    Ce libellé précise clairement que vous ne pouvez agir ainsi.
    Vous pouvez...
    Je pense que c'est important de le préciser. Si l'on s'en tient au libellé du projet de loi, il est assez clair que c'est interdit.
    Je comprends fort bien, mais vous ignorez cependant ce qui arrivera si vous le faites.
    Je m'adresse à M. Stohn, car je veux connaître son avis.
    Lorsque vous examinez le libellé... Vous vous êtes servi de l'exemple de quelqu'un qui avait rassemblé 10 épisodes de Degrassi en un seul vidéoclip sur YouTube.
    Oui.
    Pour moi, c'est très clair que cela serait interdit.
    À mon avis, une telle situation pose un problème sans équivoque que, de toute évidence, vous interprétez d'une façon. Une autre personne pourrait dire que le seul téléchargement vers YouTube des épisodes de Degrassi n'exerce aucun effet négatif important sur le marché à son égard.
    Si c'est transféré ensuite vers Megaupload et si c'est téléchargé plusieurs fois par des internautes, ou même si c'est transféré sur YouTube et si c'est vu plusieurs fois par la suite, l'effet négatif finira par survenir, sauf que la personne à l'origine de tout cela n'aura peut-être commis qu'une seule légère violation en vertu du libellé actuel et peut-être ne s'agira-t-il pas d'une seule violation.
    Je ne sais pas. Je ne peux pas regarder le tout éternellement. Cependant, si quelqu'un regroupe 10 épisodes de votre émission sur YouTube, c'est votre exemple, il serait très facile de faire valoir au tribunal que cela a un effet négatif important sur l'exploitation éventuelle de l'oeuvre. Je pense que le projet de loi précise clairement que cela serait interdit.
    Nous sommes tout simplement en désaccord à ce sujet. En ce qui me concerne, ce n'est pas clair que...
    Je pense qu'on pourrait faire valoir l'argument contraire. Vous avez peut-être raison, du moins je l'espère.
    Ce qui est bien, c'est que beaucoup d'avocats sont à l'écoute et prêtent une oreille attentive à ce que vous et moi disons à l'heure actuelle...
    Effectivement.
    ... et, si jamais un problème survenait, ils nous offriraient leurs services.
    Des voix: Oh!
    Merci, monsieur Lake et monsieur Stohn.
    Monsieur Benskin, vous disposez de cinq minutes.
    Je voudrais revenir aux mixages et à la monétisation ainsi qu'au lien entre les deux.
    Au tout début de la télévision, le financement des spectacles était l'apanage des annonceurs, ce qui est encore le cas. Pour les stations de télévision, les contrats de licences et les redevances sont établis en fonction des annonceurs, qui investissent dans les émissions les plus populaires. Nous sommes tous au courant des montants vertigineux versés par les annonceurs pour 30 secondes de publicité lors du Super Bowl.
    Prenons la publicité sur Internet, notamment sur YouTube et sur les sites dont le contenu est généré par l'utilisateur. Les bannières et les annonces permettent à YouTube de faire de l'argent. Je présume que la facture est fonction du nombre de requêtes, conformément aux bonnes pratiques commerciales.
    Quant à la monétisation d'une utilisation non autorisée d'une oeuvre, ne pourrait-on pas parvenir à une entente en vertu de laquelle l'argent serait perçu des revenus publicitaires touchés?
    Ce serait certes une bonne chose. D'emblée, je verrais d'un bon oeil de recevoir de l'argent de ces mixages. Cependant, si l'auteur de ce mixage — qu'il s'agisse d'un admirateur ou de tout autre personne n'ayant pas participé à l'oeuvre original — touche un montant, j'aimerais bien avoir ma part. Cela ne me semble qu'équitable.
    La Guilde canadienne des réalisateurs représente les réalisateurs d'émissions dramatiques et de documentaires. Un débat intéressant s'est engagé au sein de la guilde. Les réalisateurs de documentaires prônent le gauche d'auteur, souhaitant pouvoir se servir de tous les genres d'oeuvre de tout pays afin de faire valoir leur point de vue dans leurs documentaires. Ils veulent les utiliser dans le cadre d'un nouveau film, et ce à un coût raisonnable.
    Par contre, les réalisateurs d'émissions dramatiques font valoir qu'ils ont accès aux diverses oeuvres au prix qu'ils ont négocié. C'est ce que veut le marché. Ils ne peuvent utiliser un autre long métrage gratuitement. Il y a également la question des droits moraux.
    J'ai vécu une expérience semblable. J'ai réalisé le filmOne Dead Indian. Une des actrices dans ce film a réalisé un magnifique documentaire décrivant la crise d'Ipperwash en se servant de longs passages de mon film. Le seul aspect qui me rend mal à l'aise, c'est que mon film semble représenter la vérité dans son documentaire, alors que je ne faisais valoir qu'un seul point de vue. Un débat fascinant s'est donc engagé au sein de notre organisation sur l'utilisation ou la réutilisation d'oeuvres.
    Je n'ai pas demandé à ce qu'elle me verse un montant. Cependant, si son documentaire lui avait rapporté beaucoup d'argent, je pense que j'aurais voulu obtenir ma part, tout comme mes producteurs. Après tout, ce sont eux qui avaient financé mon projet.
(1820)
    La question de la réciprocité a déjà été soulevée en ce qui concerne le respect des traités de l'OMPI. Je pense que c'est vous, Gerry, qui avez dit que les sociétés de gestion européennes perçoivent les redevances pour le compte des Canadiens, sans que la réciproque ne soit vraie. Les artistes européens ne peuvent donc pas percevoir de redevances de la part des sociétés canadiennes.
    Que proposeriez-vous à cet égard?
    Vous avez tout à fait raison, et cela ne date pas d'hier.
    Ayant été mis en c.c. sur de la correspondance, je sais que c'est l'une des raisons pour lesquelles les sociétés de gestion européennes se sont plaintes avec véhémence auprès de leur négociateur en chef dans le cadre des pourparlers commerciaux entre le Canada et l'Europe. Selon elles, les réalisateurs européens sont désavantagés parce que les règles ne sont pas suffisamment claires ici pour permettre à la Société canadienne de gestion des droits des réalisateurs de percevoir...
    Je n'ai presque plus de temps...
    Merci, monsieur Barr et monsieur Benskin.
    Je cède maintenant la parole à M. Lake, qui dispose des cinq dernières minutes.
    Merci encore une fois, monsieur le président.
    Monsieur Hollingshead, j'aborderai d'abord un point sur lequel nous sommes d'accord.
    Je pense que tous ici présents conviennent que les créateurs doivent être indemnisés. Nous sommes tous d'accord sur ce point. Ce sont les modalités qui nous posent problème.
    En fait, le projet de loi vise à donner les moyens de rémunérer les créateurs pour leurs oeuvres.
    N'enseignez-vous pas la littérature anglaise à l'Université de l'Alberta?
    Je suis à la retraite.
    Je vois. Très bien. Vous rappelez-vous votre matériel pédagogique de votre dernier cours?
    Mon dernier cours a porté sur la création littéraire. Je me servais donc d'oeuvres littéraires. Lorsque j'enseignais la littérature du 18e siècle, j'utilisais les documents de Tillotson et des autres spécialistes.
    Vous avez évoqué...
    Le coût était très élevé. C'était plus de 100 $.
    C'est là où je veux en venir. Lorsque j'étais étudiant à l'Université de l'Alberta, je me souviens avoir été obligé d'acheter une anthologie cartonnée dont j'ai oublié le titre et dont le prix très cher avait nécessité de nombreuses heures de travail de ma part.
    N'était-ce pas le volumineux ouvrage de Norton?
    Oui. J'ai lu environ trois nouvelles de cet ouvrage, parce que c'était des lectures obligatoires, mais j'ai dû payer pour le reste du contenu. Ce n'est qu'une anecdote pour illustrer le problème auquel feraient face certains des groupes étudiants que nous avons accueillis.
    Je voudrais revenir à vos commentaires sur les dispositions relatives à l'utilisation équitable. Selon vous, ces dispositions n'indiquent pas clairement aux étudiants et aux enseignants ce qui est autorisé. Vous avez fait allusion aux six facteurs qui, d'après la Cour suprême, devraient être retenus pour déterminer si une utilisation est équitable. Corrigez-moi si je fais erreur, mais vous avez dit que le premier facteur devrait être l'effet de l'utilisation sur l'oeuvre. Vous avez indiqué ou laissé entendre que vous classeriez ces facteurs...
    Le premier facteur serait l'effet sur le marché.
    C'est-à-dire l'effet de l'utilisation sur le marché. Pourriez-vous établir l'ordre des autres facteurs? Estimez-vous que l'objectif ou la nature de l'utilisation ne sont pas des facteurs importants, notamment le nombre de copies faites? Selon vous, l'aspect quantitatif de l'utilisation est-il un facteur important ou beaucoup moins important?
(1825)
    Je préférerais ne pas me lancer dans le classement des facteurs en fonction de la décision CCH. Je me suis servi de cet exemple uniquement pour faire valoir que, jusqu'à présent, les tribunaux n'ont pas établi de règles très claires à cet égard. De toute évidence, la cour d'appel et la Commission du droit d'auteur avait une certaine opinion de ce qu'était la reproduction. Ils en avaient une vue d'ensemble. Ils avaient établi les répercussions d'une reproduction abondante pour le marché.
    Les enseignants ont interjeté appel plus d'une fois. La Cour suprême a accepté d'entendre l'appel à cet égard. J'estime qu'il n'incombe pas aux tribunaux de trancher. C'est au Parlement de le faire. Cette question est fondamentale. L'incertitude du marché et la perte de revenu pour les éditeurs et les auteurs sont des facteurs trop importants pour ne pas en tenir compte. Le projet de loi sera adopté avant que l'affaire ne soit entendue devant la Cour suprême...
    Cependant, les six facteurs ont déjà été établis.
    Effectivement.
    Lorsque le projet de loi sera adopté, les six facteurs s'appliqueront pour déterminer si l'utilisation est équitable.
    C'est exact. J'estime tout simplement que le premier facteur n'est pas les répercussions sur le marché, alors qu'il devrait l'être.
    Si vous prenez quelques pages ça et là...
    Je crois que certains de vos collègues ne partagent pas votre avis. Ils estiment qu'il faudrait faire preuve de souplesse. En fait, je pense qu'Access Copyright, si je ne m'abuse, a indiqué qu'il fallait faire preuve de souplesse par rapport à ces six facteurs établis par le tribunal.
    Je ne comprends tout simplement pas. Si j'examine les faits, si je lis la décision de la Cour suprême, il m'est impossible de partager votre avis lorsque vous dites que cela manque de clarté. Ces six facteurs m'apparaissent très clairs.
    J'estime que... Marian Hebb, je vous cède la parole.
    Nous ne tenons pas vraiment à ce que les six facteurs figurent dans le projet de loi.
    Le tribunal a déterminé que les six facteurs s'appliqueraient de toute façon. C'est la décision à laquelle est arrivée récemment la Cour suprême après mûre réflexion dans l'affaire CCH. Elle a tranché. Ce qui nous préoccupe, c'est l'ordre de priorité de ces six facteurs car, selon nous, celui concernant l'effet sur le marché n'est pas pris en considération à sa juste valeur.
    Nous souhaiterions que vous amendiez le projet de loi pour que le premier facteur soit l'effet sur le marché ou du moins qu'il soit un des premiers facteurs. Nous serions très heureux si vous n'apportiez que ce seul changement. Le tribunal continuera de se servir des six facteurs...
    Il est intéressant...
    Merci...
    ... que vous vous serviez de cet argument dans cet exemple-ci, mais pas...
    Monsieur Lake, nous sommes...
    ... pour les dispositions sur le contenu généré par l'utilisateur.
    Je m'excuse, mais je ne vous entends pas.
    Malheureusement, nous n'avons plus de temps. Il y a longtemps que nous avons dépassé le délai de cinq minutes. Je félicite M. Lake de sa ténacité à vouloir poser sa dernière question.
    Je voudrais remercier nos témoins de leur présence aujourd'hui, de leur témoignage et de leurs réponses.
    Je veux rappeler à mes collègues que notre comité est celui qui travaille le plus. Dans quatorze heures et demie, nous serons donc de retour. La prochaine réunion se tiendra demain matin dans la salle 253-D de l'édifice du Centre.
    La séance est levée.
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