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FAAE Rapport du Comité

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AU-DELÀ DE LA SURVIE : PROTÉGER ET RENFORCER L’AUTONOMIE DES ENFANTS ET DES JEUNES

INTRODUCTION

A. L’étude du Comité

Le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes (le Comité) a étudié la situation des enfants et des jeunes dans le monde en développement et le rôle que le Canada peut jouer dans le domaine de la protection des enfants et des jeunes, l’accent étant mis sur l’objectif de mettre fin aux pratiques nocives[1]. Le Comité a entendu divers témoins, provenant du ministère canadien des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD), de la société civile et d’organismes communautaires, des experts et des représentants du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP). Les témoignages ont abordé, selon des perspectives diverses, une gamme de difficultés en matière de développement que les enfants et les jeunes doivent surmonter.

B. Aperçu

Tout au long de son étude, on a donné au Comité des exemples déchirants de souffrances et de potentiel perdu. Les témoignages ont attiré l’attention sur de nombreux enfants et jeunes vulnérables partout dans le monde dont les droits ont été violés et qui ont été, par exemple, piégés dans la violence de conflits armés, retirés de l’école et contraints à des mariages précoces, et qui meurent de causes évitables – autrement dit, de maladies qu’on peut guérir ou de problèmes qu’on peut régler. Par ailleurs, le Comité a entendu le témoignage d’un certain nombre d’organisations ou de personnes qui s’efforcent de surmonter les difficultés qui compliquent la protection et le développement et de bâtir un meilleur avenir pour les enfants et les jeunes du monde.

La protection des enfants et des jeunes est au cœur du présent rapport. Mais celui‑ci soutient aussi que la protection n’est pas en soi un objectif ultime. C’est une condition nécessaire qui permet aux enfants et aux jeunes de participer pleinement à la vie de leur société et de profiter des bienfaits du développement. De la même façon, même si le point de départ essentiel est de veiller à ce que les enfants vivent jusqu’à leur cinquième anniversaire, ce n’est pas là, en soi, un objectif suffisant. Ces enfants doivent avoir un avenir vers lequel se tourner, une vie de leur choix qui n’aboutit pas à l’isolement et à la négligence, qui ne les amène pas à être les victimes de trafic, à faire un travail dégradant et dangereux, à être privés de services de santé et autres qui sont essentiels. Les enfants et les jeunes ont le droit de vivre dans un milieu qui leur permet d’atteindre leur plein potentiel, ce qui suppose qu’ils sont à l’abri de la violence, de l’exploitation et des mauvais traitements. En fait, le message central qui découle de l’étude du Comité, c’est la nécessité d’une approche de développement qui vise ultimement à ce que les enfants et les jeunes puissent non seulement survivre, mais encore s’épanouir.

Le présent rapport ne prétend pas apporter la solution définitive au problème de la protection et du bien‑être des enfants. Le Comité reconnaît que son étude a porté sur des problèmes à la fois d’une vaste portée et fort complexes dans leurs détails et que ces problèmes font l’objet d’un travail considérable des praticiens qui sont sur le terrain y compris des années d’initiatives, d’expérimentation et d’apprentissage. Par conséquent, les chapitres qui suivent montrent qu’il faut une approche pour la protection et le bien-être des enfants qui intègre les politiques du Canada en matière de développement international, de diplomatie, de commerce et de secours humanitaire. 

Le rapport débute par un aperçu du cadre international des droits des enfants et de leur développement ainsi que des progrès accomplis à ce jour et des lacunes qui subsistent dans la mise en œuvre. Il explique ensuite pourquoi 2015 est un moment charnière pour les enfants et les jeunes, étant donné les négociations en voie d’achèvement sur le nouveau cadre qui guidera les efforts du monde entier en matière de développement dans les années à venir. Après l’exposé du contexte, le reste du rapport est structuré autour de chapitres thématiques qui, pris dans l’ensemble, constituent une série de priorités d’action visant à protéger les enfants.

Le premier chapitre thématique porte sur l’importance des « 1 000 premiers jours », une période qui a une influence immense sur la trajectoire globale de la vie d’un enfant. Le deuxième est consacré aux réalités de la violence, de la pauvreté et de l’exclusion dans lesquelles sont piégés tant d’enfants et de jeunes et à la nécessité d’une réaction intégrée, fondée sur des systèmes et axée sur l’enfant. Le troisième concerne cette pratique destructrice que sont les mariages d’enfants, ses causes et conséquences, et les mesures nécessaires pour y mettre fin. Le quatrième met l’accent sur les urgences, les situations dans lesquelles les services aux enfants et aux jeunes visent essentiellement à répondre aux besoins essentiels, sans qu’on cherche toujours à s’attaquer à tous les problèmes de protection qui se posent également. Au cinquième, il est question de reconnaître les jeunes pour ce qu’ils sont, pour faire en sorte qu’on ne néglige pas les vulnérabilités, les besoins et les aspirations qu’ils ont en propre. Au sixième, le rapport soutient que, dans le contexte de la protection et de l’autonomisation des enfants et des jeunes, le changement peut souvent être stimulé par des programmes, un leadership et des capacités qui surgissent et sont soutenus au niveau local. Enfin, le dernier chapitre thématique souligne la nécessité d’adopter des innovations, qui peuvent favoriser le progrès du développement, ainsi que l’importance des données, ce qui est nécessaire pour informer les évaluations et la prise de décisions reposant sur des faits éprouvés. Le rapport se termine par les recommandations que le Comité soumet au gouvernement du Canada.

LE CONTEXTE

A. Le cadre international

Dès le début du rapport, il est important d’attirer l’attention sur le cadre international qui a été mis en place pour favoriser la survie de l’enfant, son développement et son bien-être[2]. Bien qu’elle ne prétende pas à l’exhaustivité, cette section met en évidence les principaux instruments juridiques et objectifs internationaux. Après avoir signalé certaines des réussites acquises à ce jour, elle présente certains des défis qui subsistent, enjeux dont il sera davantage question dans les chapitres ultérieurs du rapport.

L’instrument juridique le plus complet qui consacre les droits fondamentaux des enfants est la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE), qui a été adoptée le 20 novembre 1989 et est entrée en vigueur le 2 septembre 1990[3]. C’est aussi le texte international sur les droits de la personne qui a été le plus universellement ratifié[4].

Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), il est possible de grouper les articles de la CDE en quatre catégories :

  • Principes directeurs : la non-discrimination; la priorité donnée à l’intérêt supérieur de l’enfant; le droit à la vie, à la survie et au développement; et le droit de participer.
  • Droit à la survie et au développement : dont le droit aux ressources, aux compétences et à l’aide dont un enfant a besoin pour survivre et se développer au mieux de ses capacités (p. ex. l’existence et l’accessibilité des moyens de s’alimenter, de se loger, d’étudier et d’avoir des soins de santé primaires).
  • Droit d’être protégé : dont le droit à une protection contre toutes les formes de sévices, de négligence, d’exploitation et de cruauté.
  • Droit de participer : dont le droit de l’enfant d’exprimer des opinions et le droit de donner son avis sur des questions qui ont une incidence sur sa vie sociale, économique, religieuse, culturelle et politique[5]

L’UNICEF ajoute que la CDE repose sur des droits, comme la non-discrimination, qui sont « inhérents à tous », mais qu’elle « s’appuie aussi sur les préoccupations pour les besoins et les vulnérabilités propres aux enfants[6] » [traduction].

Depuis l’adoption de la Convention, trois protocoles facultatifs ont été élaborés qui accordent des protections additionnelles aux enfants. Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants sont tous les deux entrés en vigueur en 2002[7]. Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications est entré en vigueur en avril 2014[8].

Des droits clés liés à la protection de l’enfant se retrouvent également dans d’autres textes internationaux, comme le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants[9], qui complète la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. Les traités qui portent sur le travail forcé et le travail des enfants sont appliqués par l’Organisation internationale du travail[10]. Il existe également des normes internationales pour guider les mesures prises afin de protéger les enfants sur le terrain, dont les Standards minimums pour la protection de l’enfance dans l’intervention humanitaire. Diane Jacovella, sous-ministre adjointe, Enjeux mondiaux et développement, MAECD, a expliqué que les normes minimums, dont le Canada a appuyé l’application, visent « à améliorer la qualité et la prévisibilité des mesures de protection de l’enfance dans les situations humanitaires et la reddition de comptes à cet égard[11] ».

Novembre 2014 a marqué le 25e anniversaire de l’adoption de la CDE. Mme Jacovella a expliqué au Comité : « Il y a 25 ans, le Canada a joué un rôle clé dans la négociation de la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies. Le Canada a continué depuis à promouvoir les droits et la protection des enfants[12]. » L’ambassadeur Guillermo Rishchynski, représentant permanent du Canada auprès des Nations Unies, a dit que la CDE :

[…] a eu un effet extrêmement salutaire pour ce qui est de faire connaître auprès des États membres, notamment ceux en voie de développement, le besoin de travailler afin de mettre en place des politiques publiques qui ont comme priorité les enfants, que ce soit dans le domaine de la santé ou de l’éducation. Les pays comprennent clairement que leur capacité de progresser en tant que sociétés est liée de façon intime à leur capacité d’offrir un avenir aux enfants[13].

En dépit de cette intention générale, l’ambassadeur Rishchynski a admis que « dans certains cas, ils [les gouvernements] ont des capacités très limitées d’agir comme ils devraient le faire pour assurer l’avenir prospère des enfants[14] ». Ainsi, bien qu’on ait mis en place un cadre international solide et presque universellement accepté pour les droits fondamentaux des enfants, le respect des engagements dans le concret, la disponibilité des ressources et les capacités nécessaires pour honorer ces engagements demeurent un enjeu.

Bien entendu, le bien-être de l’enfant ne se résume pas à une question de droits de la personne. C’est aussi une question de développement. Des objectifs ambitieux pour les enfants sont un élément central des huit Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) de l’ONU, qui ont été établis à l’issue d’un sommet spécial de l’Assemblée générale de l’ONU, en septembre 2000. Depuis, les OMD offrent un cadre concret qui permet l’organisation cohérente des efforts internationaux visant à améliorer le sort des plus pauvres du monde. Les objectifs qui concernent les enfants sont les suivants :

  • éliminer l’extrême pauvreté et la faim, notamment en améliorant l’alimentation des enfants;
  • assurer l’éducation primaire pour tous;
  • promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, notamment en éliminant la disparité entre les sexes dans l’éducation primaire et secondaire;
  • réduire des deux tiers la mortalité des enfants;
  • améliorer la santé maternelle, notamment en réduisant des trois quarts le taux de mortalité maternelle;
  • combattre les maladies infectieuses, dont le VIH/sida et le paludisme[15]

Les OMD – et les cibles et indicateurs qui y sont associés – devaient être atteints au plus tard en 2015. Ils sont mesurés par rapport aux niveaux de 1990.

Un certain nombre de témoins ont insisté sur les OMD concernant la mortalité maternelle et infantile. Dans le monde, les décès d’enfants de moins de cinq ans ont été ramenés d’un nombre estimatif de 12,7 millions en 1990 à environ 6,3 millions en 2013. Pendant la même période, les décès de mères ont été ramenés de 523 000 à un nombre estimatif de 289 000[16]. Helen Scott, directrice générale du Réseau canadien sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, a décrit les efforts déployés pour atteindre les OMD qui concernent la santé comme les « réalisations les plus importantes en matière de développement[17] ». En fait, David Morley, président et chef de la direction d’UNICEF Canada, a qualifié les progrès des dernières années de « révolution dans la survie des enfants[18] ».

Néanmoins, M. Morley a rappelé au Comité qu’il y a toujours 17 000 enfants qui meurent « chaque jour de causes évitables, alors qu’il y aurait des interventions simples à faible coût pour les sauver[19] ». Par conséquent, malgré des progrès importants, la tâche que le monde a entrepris de réaliser il y a près de 15 ans n’est pas encore achevée.

B. Survivre et s’épanouir

Mis à part le programme de travail tracé dans les OMD, les témoins ont indiqué qu’il fallait insister davantage sur la nécessité de veiller à ce que les enfants et les jeunes soient protégés et en mesure de s’épanouir. Cet objectif requiert des actions dans un bon nombre de secteurs et en réponse à une multitude de défis, allant du trafic d’êtres humains et le travail dangereux, aux nombreuses formes de la violence sexospécifique. En se prononçant sur la situation mondiale des enfants et des jeunes, Mme Jacovella a informé le Comité que « les statistiques concernant la violence faite aux enfants sont alarmantes. En effet, entre 500 millions et 1,5 milliard d’enfants dans le monde sont victimes de violence, d’exploitation ou de mauvais traitements sous diverses formes[20]. »

Susan Bissell, directrice associée de la Division des programmes, Protection des enfants, à l’UNICEF, a défini le contexte :

Il est temps de dire que trop c’est trop et de placer la protection de l’enfance au centre de la scène internationale. Il est vrai qu’il n’y a jamais eu autant d’enfants sauvés de maladies que l’on peut prévenir. Ils vont à l’école, accèdent à l’eau potable, et les installations sanitaires ont énormément progressé. Alors que les pays poursuivent leur développement économique, les problèmes de base se résolvent, en partie tout au moins. Ce qui demeure, c’est une longue liste de problèmes de protection de l’enfance, du travail des enfants au trafic, des mutilations génitales et l’excision des filles, du mariage des enfants, de la vente d’enfants, de la maltraitance en ligne, etc. Hélas, aucun pays n’est immunisé contre la violence, les abus, la négligence et l’exploitation des enfants[21].

Mme Bissell a énuméré quelques exemples pour étayer ses arguments. Ainsi, elle a cité une estimation selon laquelle 1,2 million d’enfants dans le monde font l’objet d’un trafic chaque année, même s’il s’agit d’un « chiffre ancien » qui, selon elle, est probablement « une nette sous-estimation de la réalité[22] ».

Autre situation troublante, de nombreux enfants dans le monde font un travail dégradant et dangereux. Mme Bissell a insisté sur l’exemple d’enfants « qui sont envoyés tous les jours dans des mines de diamants et qui ne connaissent pas la lumière du jour », ajoutant que « nous sommes en 2014, pas en 1768 » et que « ce n’est pas tolérable[23] ». À ce même propos, Elly Vandenberg, directrice principale de Politiques et promotion des intérêts, à Vision mondiale Canada, a appris au Comité que, même s’il y a eu une baisse des chiffres depuis 2008, « il y a encore 85 millions d’enfants qui souffrent et subissent les pires formes de travail ». Ce ne sont pas, explique-t-elle, des « distributions de journaux »; il ne s’agit pas de donner « un coup de main à la ferme » mais plutôt de faire de « travaux sales, dangereux et dégradants [24] ».

Il existe de nombreuses statistiques mondiales qui trahissent de graves lacunes dans la protection des jeunes dans le monde, dont les suivantes :

  • Toutes les deux secondes, quelque part dans le monde, une jeune fille est mariée avant ses 18 ans[25].

  • Toutes les 10 minutes, une adolescente meurt des suites de violences[26].
  • Tous les ans, environ 70 000 adolescentes meurent de causes liées à la grossesse et à l’accouchement dans des pays en développement[27].
  • Au moins 130 millions de femmes et de jeunes filles qui vivent aujourd’hui, dans des pays d’Afrique et du Moyen-Orient, où la pratique est concentrée, ont été victimes de mutilation génitale ou d’excision[28].

Les enfants sont aussi victimes de conflits et de déplacements de population. L’instabilité au Moyen-Orient – qui a fait l’objet d’un rapport du Comité en mars 2015 – a fait un nombre particulièrement élevé de victimes chez les enfants et les jeunes de la région. L’UNICEF estime que la violence qui sévit en Syrie et en Iraq a touché jusqu’à maintenant 14 millions d’enfants. En Syrie même, pays qui en est à sa cinquième année de crise, il pourrait y avoir 2 millions d’enfants qui vivent dans des régions qui sont en grande partie hors de portée pour l’aide humanitaire[29]. Un autre exemple est celui du Nigéria, où, selon une estimation récente, 800 000 enfants ont été déplacés à cause du chaos et des souffrances attribuables à Boko Haram et au conflit armé qui y est associé dans le Nord‑Est du pays. Ces dernières années et ces derniers mois, des enfants ont été tués, « victimes d’une extrême violence », enlevés de leur milieu et contraints à se marier, entre autres violations de leurs droits. De plus, des écoles ont été détruites et des enseignants et des élèves ont été ciblés[30].

Chacun des défis évoqués ci-dessus a sa complexité propre, ce qu’il est difficile de saisir – et a fortiori de comprendre – au moyen de statistiques isolées. Ces exemples dévoilent néanmoins un tableau général, celui d’un monde où, en une période relativement brève, des millions de personnes ont été délivrées d’une pauvreté abjecte et des privations, mais parmi lesquelles beaucoup d’enfants et de jeunes sont toujours laissés pour compte.

Il y a des variations dans les progrès accomplis vers la concrétisation de divers aspects des droits et du développement de l’enfant. Dans certaines régions, les progrès sont moins nombreux voire à peu près nuls. Cela dit, de faire cette affirmation, ce n’est pas de privilégier un secteur au détriment des autres ni de considérer une mesure des résultats comme une représentation définitive du progrès ou d’un échec. Les principaux axes d’efforts – la survie de l’enfant, le développement de l’enfant et la protection de l’enfant – ne peuvent être dissociés les uns des autres. Ce sont les éléments d’un tout : le bien-être de l’enfant. Il est impossible d’assurer le bien-être de l’enfant lorsqu’il y a de la souffrance et de la violence, tout comme cela est impossible face à la maladie et à un milieu où il n’y a pas d’éducation.

Un certain nombre de témoins ont souligné les liens qui existent entre les objectifs de développement qui ont été définis pour les enfants et les jeunes et sur les liens entre ces objectifs et la protection de l’enfance. Evelyne Guindon, vice-présidente des Programmes internationaux, chez Right to Play, a affirmé qu’il était de plus en plus reconnu « que l’exploitation des enfants et la violence à leur endroit demeurent un obstacle majeur à l’atteinte des buts généraux de développement et compromettent les gains très importants réalisés en matière de santé, d’éducation et de croissance économique[31] ». D’autres témoins ont également fait valoir ce point de vue, dont Mark Lukowski, président-directeur général du Christian Children’s Fund of Canada, qui a soutenu : « Si cette violence à l’égard des enfants continue, il sera presque impossible de mener à bien les ambitieux objectifs de développement du Millénaire lancés par l’ONU[32] […] »

Tout au long de l’étude du Comité, des témoins ont insisté sur la nécessité de faire en sorte que les enfants non seulement survivent, mais soient aussi à même d’atteindre leur plein potentiel. Pour sa part, tout en soulignant que la protection de l’enfance est « une condition minimale pour respecter nos responsabilités politiques et éthiques à l’égard des filles et des garçons », Patricia Erb, présidente‑directrice générale d’Aide à l’enfance Canada, a fait valoir que la protection « ne devrait pas être une fin en soi ». Selon elle, l’objectif « devrait être de permettre aux enfants de devenir des citoyens en santé, instruits et autonomes, engagés sur le plan politique, social et économique, et de jeunes leaders[33] ». Dr Scott a avancé un argumentaire semblable, affirmant : « Il ne suffit pas que les enfants survivent après la naissance et leurs cinq premières années de vie. Les enfants doivent s’épanouir[34]. » M. Morley a éclairé la voie en se référant aux progrès nécessaires à l’avenir, comme l’enregistrement des naissances, « une éducation secondaire de qualité » et des cadres juridiques pour protéger les enfants de l’exploitation et de la violence. Tel qu’il l’a indiqué: « Il faut maintenant passer à la prochaine étape[35]. »

Il y a clairement un impératif moral et juridique pour que les États mettent un terme aux violations des droits fondamentaux des enfants. De plus, la valeur stratégique de la protection de l’enfant considérée comme un élément central et nécessaire des efforts de développement – et des politiques nationales – est confirmée par une étude de l’Overseas Development Institute, au Royaume-Uni, qui a tenté de quantifier certains des problèmes. L’institut a examiné les coûts économiques de la violence infligée aux enfants, estimant que « les coûts mondiaux liés à la violence physique, psychologique et sexuelle […] se situent entre 3 et 8 % du PIB [produit intérieur brut] mondial[36] » [traduction]. En soulignant que les estimations de l’étude révèlent des « coûts énormes », les auteurs font remarquer que ce coût est également « bien plus élevé que l’investissement nécessaire pour prévenir une grande partie de cette violence[37] ». Lorsqu’elle a pris la parole au Comité, Sarah Stevenson, représentante des Nations Unies, ChildFund Alliance, a fait remarquer que la limite supérieure de la fourchette indiquée dans l’étude, soit 8 % du PIB mondial, « équivaut aux PIB combinés de l’Australie, du Canada, de l’Inde et du Mexique[38] ».

En général, les risques auxquels on s’expose en ne prenant pas de mesures préventives sont amplifiés lorsqu’on prend en considération la taille de la population mondiale des enfants et des jeunes. En 2013, la population totale du groupe des 0 à 24 ans était estimée à 3,1 milliards, alors que la population mondiale totale était de 7,2 milliards. Dans les pays les moins développés, les enfants de moins de 15 ans représentaient 40 % de la population[39]. Mme Jacovella a résumé le contexte de la politique étayé par ces chiffres en disant : « La protection de l’enfance est essentielle à la stabilité, à la sécurité et à la prospérité mondiale[40]. »

SAISIR LE MOMENT EN CETTE PÉRIODE CHARNIÈRE POUR LES ENFANTS ET LES JEUNES

A. Le programme de développement de l’après-2015

Le monde a atteint un moment charnière dans la poursuite du développement économique et social. Au moment où le Comité achevait son étude, les représentants des gouvernements du monde à l’ONU ont amorcé le processus de la négociation finale du cadre qui succédera aux OMD, le « Programme de développement pour l’après-2015 » et des objectifs de développement durable (ODD). Le nouveau programme et les objectifs devraient être adoptés au sommet spécial qui doit avoir lieu du 25 au 27 septembre 2015 à New York.

Le nouveau programme est important pour un certain nombre de raisons. Premièrement, il est censé être le plan de haut niveau qui guidera les efforts du monde en matière de développement de 2015 à 2030. Deuxièmement, il est censé revêtir un caractère universel[41]. Troisièmement, sa portée est ambitieuse. Il est vrai que le nouveau programme fait toujours l’objet de négociations, mais il portera généralement sur toute la gamme des enjeux – économiques, sociaux et environnementaux – qui se rapportent au développement durable. Quatrièmement, alors que les OMD visaient des réductions, plusieurs ODD proposés préconiseraient l’élimination des problèmes comme l’extrême pauvreté et la faim. Cinquièmement, certains des buts et objectifs actuellement en négociation porteraient sur des problèmes qui ne figuraient aucunement dans les OMD initiaux.

Rosemary McCarney, ex-présidente et chef de la direction de Plan International Canada Inc., a signalé que la protection de l’enfant « ne figurait pas » dans les OMD[42]. Par conséquent, la négociation du nouveau cadre est une occasion importante de faire intégrer la protection de l’enfant comme priorité centrale du développement.

Pour arriver à cette fin, il faudra des porte-parole déterminés dans les processus de l’ONU et une volonté politique. Dans son témoignage, Mme Bissel a souligné que la prévention de la violence contre les enfants doit être un objectif clair[43]. Il est important d’avoir des énoncés non ambigus sur des enjeux importants dans le contexte d’un cadre mondial comme le programme pour l’après-2015. Les objectifs qui sont convaincants, compréhensibles et faciles à diffuser deviennent plus que des mots sur une page. Ils peuvent être un centre d’attraction pour mobiliser l’action et pour mesurer les progrès accomplis et en rendre compte. Ils peuvent également offrir un cadre organisationnel pour l’allocation des ressources. Inversement, les enjeux qui ne sont pas explicitement inclus dans les objectifs pourraient se perdre dans le processus. En soutenant que la protection de l’enfant doit être un élément visible du programme de l’après-2015, ce qui n’a pas été le cas pour les OMD, Mme Bissell a raconté que son « équipe dit souvent que si vous n’êtes pas à la table, vous êtes au menu, et vous avez été au menu tout au long des OMD[44] ».

Depuis que Mme Bissell a comparu devant le Comité, un document a été produit qui est la base principale des négociations intergouvernementales en cours sur les objectifs et les cibles[45]. Le rapport du Groupe de travail ouvert sur les objectifs de développement durable a proposé 17 objectifs et 169 cibles[46], dont certains sont toujours en voie de perfectionnement[47].

La liste actuelle des objectifs et cibles proposés touche de nombreuses questions qui concernent le bien-être des enfants. On y trouve notamment des objectifs qui portent sur la pauvreté des enfants, le retard de croissance et l’émaciation chez les enfants de moins de cinq ans et l’accès à un développement de qualité, à des soins et à l’éducation pré primaire pour la petite enfance. Une autre cible proposée consiste à éliminer, d’ici 2030, les décès évitables de nouveau-nés et d’enfants de moins de cinq ans. En ce qui concerne l’importante population de jeunes dans le monde, une cible proposée consisterait à faire baisser nettement, d’ici 2020, la proportion des jeunes qui n’ont pas d’emploi et ne sont pas aux études ou en formation.

En ce qui concerne la protection des enfants, l’un des 17 objectifs proposés est axé sur la promotion de sociétés pacifiques et ouvertes. L’une des cibles de cet objectif prévues pour l’instant est de mettre un terme à la maltraitance, à l’exploitation, à la traite, à toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les enfants.

Réagissant à ces propositions en novembre 2014, Mme McCarney a fait remarquer que les 17 domaines prioritaires du Groupe de travail ouvert « n’incluent pas la protection de l’enfance ». Elle a réaffirmé le souhait de son organisation, qui veut « voir une initiative autonome liée à la protection des enfants pour la période suivant 2015[48] », avec d’autres cibles et indicateurs précis.

À propos du cadre existant des OMD et du programme qui le remplacera bientôt, un certain nombre de témoins ont souligné qu’il était important d’adopter une approche qui repose sur le principe voulant que personne ne soit laissé pour compte. Les rapports qui donnent des statistiques sur un aspect ou l’autre des progrès en matière de développement selon les régions, et notamment ceux qui décrivent la situation au niveau mondial peuvent occulter des disparités notables entre les pays et à l’intérieur même des pays. Zulfiqar Bhutta, codirecteur du Centre for Global Child Health, Hospital for Sick Children, a soutenu que, jusqu’à maintenant, il y avait eu une « attention insuffisante accordée à l’équité », faisant remarquer que « l’essentiel des progrès et des changements globaux ont découlé des progrès accomplis dans un petit nombre de pays : tous les Brésil et toutes les Chine du monde ». La santé maternelle et infantile est un exemple instructif. Selon Dr Bhutta, « bon nombre de pays sont encore bien loin d’atteindre les objectifs au chapitre de la survie[49] ».

Au moment où la communauté internationale passe à la période postérieure aux OMD, Mme Erb estime que « certains enjeux commencent à prendre davantage d’importance. L’un d’eux porte sur la pauvreté et les populations “les plus difficiles à rejoindre”[50]. » Selon elle, pour étendre la portée de la prospérité par le développement de façon à honorer les nouveaux engagements qui sont envisagés, il faudra de nouvelles méthodes de développement. Dans le même ordre d’idées, M. Morley a souligné la conviction de son organisation : « Nous estimons essentiel de favoriser une approche équitable pour que les enfants les plus défavorisés soient inclus dans tout effort de développement futur[51]. »

Les OMD n’ont pas été conçus pour s’attaquer explicitement aux problèmes sous‑jacents qui peuvent contribuer aux vulnérabilités, dont la discrimination, l’inégalité et l’insécurité. Bien des enfants et des jeunes qui sont actuellement « difficiles à rejoindre » ou laissés pour compte sont ceux qui sont embourbés dans des conflits armés, négligés ou marginalisés par les institutions de l’État et habitent en zone rurale. Offrant un exemple, Mme Jacovella a partagé avec le Comité que, des 57 millions de filles et de garçons dans le monde qui ne fréquentent pas l’école primaire en ce moment, selon les estimations, environ 50 % « vivent dans un État fragile et touché par un conflit[52] ».

Adoptant la perspective de la santé de la mère et de l’enfant, Patricia Strong, gestionnaire principale du Développement des programmes, Opérations internationales, à la Croix-Rouge canadienne, a fait remarquer : « Plus de la moitié de ces décès [de mères et d’enfants] surviennent dans des pays affectés par une catastrophe, un conflit et une situation fragile dans certaines des régions les plus éloignées et les plus troublées du monde. » Elle a souligné : « C’est dans ces contextes d’éloignement et de danger que les femmes et les enfants font face aux plus grandes menaces à leur vie, à leur santé et à une survie digne. » Tirant la conclusion de cette observation à propos des ODD, Mme Strong a fait valoir que c’est seulement en rejoignant les femmes et les enfants dans ces régions « que nous pourrons voir de véritables progrès vers notre objectif global de prévention des décès évitables de mères et d’enfants d’ici 2030[53] ».

Bien que la plupart des témoins ont fait porter leurs observations concernant la période qui suivra les OMD sur les nouveaux objectifs et cibles – et sur les raisons pour lesquelles il faut une approche plus large si on veut les atteindre –, quelques-uns ont lancé une mise en garde : il ne faudrait pas, ce faisant, oublier les engagements existants. Après tout, il y a encore des choses importantes à faire pour atteindre les OMD. Dr Bhutta estime qu’il ne faut pas « crier victoire trop rapidement dans le dossier de la mortalité maternelle et infantile ». Il a rappelé au Comité :

N’oublions pas que 6 millions d’enfants meurent chaque année et près de 280 000 femmes meurent à l’accouchement. Il s’agit d’un énorme problème à l’échelle mondiale. Dans notre recherche de nouveaux indicateurs et de nouvelles cibles, il ne faudrait pas perdre de vue la principale fonction du processus[54].

Dr Scott s’inquiète du fait que, même s’il est tenu compte des enfants et des jeunes dans la longue liste des cibles proposées à ce jour, « aucun objectif spécifique ne vise les femmes, les nouveau-nés et les enfants, comme ce fut le cas dans les [OMD][55] ». On craint, si les objectifs ne sont pas les mêmes, qu’ils ne soient laissés de côté. Par conséquent, son organisation réclame des engagements renouvelés dans le cadre de l’Initiative de Muskoka et de la Stratégie mondiale pour la santé de la femme et de l’enfant, dont la version « 2.0 » sera également lancée en septembre 2015. Ainsi, Dr Scott a ajouté la nécessité de « soutenir l’objectif ambitieux, mais réalisable, de mettre fin aux décès évitables d’ici 2030 [dans les négociations sur l’après-2015] » et « de nous attaquer aux inégalités en nous concentrant sur les groupes qui tirent le plus de l’arrière[56] ».

B. Un rôle de leadership pour le Canada

Compte tenu des processus majeurs qui se déroulent au niveau international, plusieurs témoins ont soutenu, faisant des observations plus générales, qu’il y avait là pour le Canada une occasion de jouer un rôle de chef de file au niveau mondial pour faire avancer la cause de la protection de l’enfant. Comme Mme McCarney l’a affirmé, ce domaine « a longtemps été négligé[57] ». Pour sa part, Mme Guindon a tenu le raisonnement suivant : « Comme nous soulignons le 25e anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant et le 10e anniversaire de Un Canada digne des enfants, le moment est tout indiqué pour nous d’assumer un vrai leadership dans le domaine de la protection des enfants à l’échelle mondiale[58]. »

Une des cinq priorités du Canada en matière d’aide au développement international est d’« assurer l’avenir des enfants et des jeunes[59] ». En ce qui concerne le programme de développement de l’après‑2015, Mme Jacovella a fait savoir au Comité que le Canada s’efforce de garantir que les droits des enfants soient « au cœur » du programme. Elle a précisé :

Il [le Canada] recommande que la protection de l’enfance soit prise en considération et qu’elle s’accompagne d’objectifs et de cibles mesurables relativement à l’amélioration de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, à l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, à l’autonomisation des femmes et des filles et à l’élimination des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés[60].

Quant au dernier point de la liste, un certain nombre de témoins ont souligné que le Canada s’était déjà affirmé comme chef de file en réclamant l’élimination des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés, question qui sera abordée dans un chapitre ultérieur.

Le gouvernement du Canada est bien positionné pour jouer un rôle de premier plan en matière de protection de l’enfant, car il peut s’appuyer sur ses contributions à diverses initiatives mondiales en faveur des enfants et des jeunes, dont le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et Gavi (Global Alliance for Vaccines), entre autres programmes[61]. Plus récemment, en avril 2015, le ministre du Développement international a annoncé le soutien du Canada au Partenariat mondial pour l’éducation[62].

Le Canada a ciblé, comme grande priorité en matière de développement, des améliorations de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, initiative qui a été lancée au Sommet du G8 qui a eu lieu à Muskoka en 2010. Entre 2010 et 2015, le Canada a engagé 2,85 milliards de dollars dans cette initiative. L’an dernier, au sommet Sauvons chaque femme, chaque enfant : un objectif à notre portée, à Toronto, le premier ministre a annoncé que le Canada engagerait 3,5 milliards de dollars de plus pendant la période de 2015 à 2020[63]. Dr Scott a dit au Comité que le leadership du Canada a aidé à galvaniser le soutien pour la Stratégie mondiale pour la santé de la femme et de l’enfant, lancée par le secrétaire général de l’ONU en 2010[64].

Se tournant vers la prochaine phase du développement mondial, certains témoins ont aussi soulevé la question des ressources financières. Bien que le problème ne soit pas propre à la protection de l’enfant, il est généralement clair que, pour appliquer le nouveau programme de développement avec ses ODD, dont ceux qui concernent les enfants et les jeunes, il faudra des ressources financières importantes : aux niveaux national et international, et provenant des secteurs public et privé. Ces ressources et les stratégies nécessaires pour les mobiliser feront l’objet d’une prochaine conférence de l’ONU, la Troisième Conférence internationale sur le financement du développement, qui aura lieu à Addis Abeba, en Éthiopie, du 13 au 16 juillet 2015. L’ambassadeur Rishchynski a expliqué au Comité :

Le principal sujet de discussion en ce moment en ce qui concerne le programme de développement après 2015 porte sur la mobilisation des ressources internes, les recettes fiscales. Les pays devront investir leurs propres fonds en plus des sommes qui proviendront de l’aide officielle au développement, d’investissements privés et d’organismes philanthropiques. L’ampleur des besoins qui existent au sein d’une population mondiale de sept milliards, qui atteindra neuf milliards d’ici 2040, dépasse carrément les moyens des pays donateurs. Les sommes que nous versons représentent maintenant une goutte dans l’océan, c’est-à-dire 15 % du financement total nécessaire[65].

Parlant du point de vue de quelqu’un ayant travaillé tant au sein d’un organisme de développement de la base que dans le secteur privé, Debra Kerby, présidente et chef de la direction de Canadian Feed the Children, a dit : « [J]e vois très bien que les deux secteurs doivent travailler en harmonie. Ce ne sont pas des sphères distinctes, comme chacun sait. » Elle a dit aussi que « nous devons examiner tous ces flux, la chaîne de valeur, si vous voulez, de la communauté jusqu’au niveau mondial pour voir quels sont les points de jonction du financement de l'aide publique au développement et du financement du développement [aide officielle au développement – AOD][66]. »

Pour sa part, le gouvernement canadien a exploré de nouveaux mécanismes de financement du développement susceptibles de profiter de ces différents flux. Par exemple, en septembre 2014, de concert avec la Banque mondiale, la Norvège et les États-Unis, le Canada a annoncé la création d’un mécanisme de financement mondial soutenant Chaque femme, chaque enfant, une initiative visant à apporter des améliorations à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Selon la Banque mondiale, ce mécanisme vise « à servir d’éclaireur dans une nouvelle ère de financement du développement en expérimentant avec une nouvelle formule passant du modèle de l’aide officielle au développement uniquement à une démarche combinant le financement intérieur, le soutien extérieur et des sources inédites pour la mobilisation et l’exploitation de ressources (notamment le secteur privé) en synergie[67]. » Ce mécanisme sera officiellement annoncé durant la conférence de financement de juillet 2015.

Même si l’accent sur les diverses sources de fonds a évolué, M. Morley a soutenu que l’AOD joue toujours un rôle important :

Il sera de plus en plus important de trouver des sources de financement privées et novatrices pour le nouveau cadre des ODD, et nous saluons le leadership dont fait preuve le Canada dans la promotion de façons novatrices de financer le développement. Cela dit, l’aide officielle au développement demeure fondamentale pour les pays n’ayant accès qu’à des ressources publiques limitées à l’échelle nationale, et il faut arrêter le déclin de l’APD destinée aux pays les plus pauvres. L’aide au développement officielle et le financement à des conditions libérales doivent viser les pays où les besoins sont les plus grands, et il faut affecter une plus grande part de l’APD aux dépenses visant les enfants[68].

Pour ce qui est de la conférence de juillet 2015 sur le financement, UNICEF Canada invite le gouvernement du Canada « à proposer et à appuyer des messages forts pour investir dans nos enfants[69] ».

COMMENCER PAR LE DÉBUT

La protection des enfants doit avoir des assises solides. Pour atteindre le double objectif de la survie et de l’épanouissement, il faut commencer par des interventions qui ciblent le développement de la petite enfance et plus particulièrement la période qu’on appelle « les 1 000 premiers jours ». C’est à ce stade critique que la protection de l’enfant doit débuter. Autrement, les enfants s’engageront dans la vie à partir d’une position déjà vulnérable et ils ont bien moins de chances d’atteindre leur plein potentiel.

C’était là le message central de l’exposé du Dr Peter Singer, président-directeur général de Grands Défis Canada. Il a soutenu que « l’approche du Canada en matière de protection des enfants devrait commencer par la protection du cerveau des enfants durant les 1 000 premiers jours de vie, soit depuis un peu avant la conception jusqu’à l’âge de 2 ou 3 ans[70] ». Pour appuyer cette approche, Grands Défis Canada a lancé une initiative « Sauver des cerveaux ». Parlant des travaux dont Grands Défis Canada se fait le champion, le Dr Singer a attiré l’attention sur des innovations simples qui peuvent améliorer la santé de la mère et les soins donnés au nouveau-né. Ces innovations peuvent sauver des vies, mais « sauvent aussi des cerveaux et permettent aux enfants de réaliser leur plein potentiel ». Il parle à ce propos de « double dividende de l’engagement du Canada en matière de santé maternelle, néonatale et infantile[71] ».

D’autres témoins ont également établi des liens entre la santé des mères et celle des enfants. Ainsi, John Button, président de Kiwanis International, a informé le Comité que, dans les pays en développement, 89 % des enfants atteignent l’âge d’aller à l’école – 10 ans – si leurs mères survivent à la période néonatale, la période de 28 jours qui suit la naissance d’un enfant. Par contre, la proportion n’est que de 24 % dans le cas des enfants dont la mère est décédée pendant cette période. Comme Dr Button l’a fait clairement ressortir, la perte de la mère à des effets à long terme catastrophiques sur l’enfant[72]. Mme Kerby a expliqué pourquoi il est également au cœur de l’action de son organisation de mettre l’accent sur les femmes pour améliorer la santé et le bien-être des enfants. Reprenant l’idée de double dividende, elle a soutenu que la promotion de la santé des femmes et de leur autonomisation économique a des retombées favorables pour les enfants, puisque les femmes en cause sont plus en mesure de donner à leurs enfants des aliments nutritifs, de les garder à l’école et de payer les besoins de base[73]. Ainsi, la santé et l’autonomisation des femmes sont un élément indispensable si on veut s’assurer que les enfants entament leur vie dans un milieu qui leur permettra de s’épanouir.

Le Dr Singer a expliqué pourquoi les étapes très précoces de la vie d’un enfant revêtent autant d’importance. Il a cité des études, notamment une étude réalisée au Guatemala, qui révèle que « les enfants ayant reçu des suppléments nutritifs plus équilibrés avant l’âge de 3 ans gagnent 46 % de plus que les autres une fois adultes ». Une autre étude, en Jamaïque cette fois, « indique que chez les enfants ayant été stimulés, les taux de crimes violents sont plus faibles (de l’ordre des [deux tiers])[74] ».

Le témoignage du Dr Singer donne à penser qu’il faut en faire davantage pour donner suite à ces recherches et rejoindre les enfants pendant cette période critique. Il a dit au Comité qu’« on évalue à au moins 200 millions le nombre d’enfants qui n’atteignent pas leur plein potentiel à cause d’un manque d’attention dans les premières années de leur vie ». Les risques pour les cerveaux des enfants pendant cette période sont de trois ordres : biologique – comme une alimentation insuffisante –, « développement et stimulation », ce qui concerne le « manque d’interaction des parents avec leur bébé », et facteurs externes, comme les conflits, la maltraitance et la violence[75].

Pour démontrer qu’il était important de se concentrer sur le développement précoce du cerveau, le Dr Singer a fait remarquer que cette approche s’imposait parce que la petite enfance est la période pendant laquelle les enfants sont le plus vulnérables :

Si on ne porte pas une attention à la survie et au progrès dans les premiers temps, pendant les mille premiers jours, on va essentiellement à contresens, même à l’école. On constate plus de problèmes comportementaux et de difficultés d’apprentissage. Il faut donc vraiment jeter les bases pour les soins de santé maternelle, néonatale et infantile[76].

Des investissements ciblés pendant ces premières années peuvent avoir des effets multipliés tout au long de la vie de l’enfant.

Comme on l’a signalé, la malnutrition est l’un des risques auxquels les jeunes enfants peuvent être exposés et qui peuvent compromettre leur potentiel de développement. Ce défi a été souligné plus particulièrement par Joel Spicer, président de l’Initiative pour les micronutriments. Ses observations ont porté sur la nutrition comme « élément essentiel de la protection de l’enfance[77] ». Certes, la malnutrition est le plus souvent traitée comme un problème de santé, mais M. Spicer a expliqué pourquoi c’était une question de protection de l’enfance en illustrant le lien entre les niveaux de nutrition et la vulnérabilité des enfants :

Chaque soir, 300 millions d’enfants vont au lit le ventre vide. Chaque année, près de trois millions d’enfants de moins de cinq ans meurent de malnutrition. Ils ne sont pas assez résilients pour combattre les maladies et les infections opportunistes. C’est près de la moitié de toutes les morts d’enfants dans le monde, 8 000 enfants par jour, un décès toutes les 10 secondes. Plus de 160 millions d’enfants présentent un arrêt de croissance prématuré. Ils sont petits pour leur âge et ils ne consomment pas assez des nutriments de base qu’il leur faut pour fonctionner, grandir et réaliser leur plein potentiel[78].

M. Spicer a également attiré l’attention sur les cycles de vulnérabilité que peut engendrer la malnutrition :

Une fille qui semble avoir 10 ou 11 ans a en fait 16 ans et elle est sur le point de se marier. Les risques qu’elle meure en couches et que son enfant meure ou subisse toute sa vie les conséquences de la malnutrition en sont d’autant plus élevés. C’est ainsi que le cycle se perpétue. Les adolescentes mal nourries donnent naissance à des bébés ayant une insuffisance pondérale à la naissance, qui deviennent des enfants présentant un arrêt de croissance prématuré, puis des adolescents rachitiques. C’est un cycle sans fin[79].

Comme on le soutiendra de façon plus détaillée au prochain chapitre, il n’y aura pas de vrai progrès en matière de développement – le type de progrès dont profiteraient tous les enfants et jeunes qui sont présentement marginalisés et risquent le plus de prendre du retard – tant que se perpétueront ces cycles de vulnérabilité.

M. Spicer a également suggéré que le Canada a l’occasion de capitaliser encore davantage sur le leadership qu’il a manifesté par le passé dans le domaine de la nutrition : « […] nous pouvons en faire bien davantage pour mettre cette réputation à profit de manière à influencer le reste du monde afin de transformer pour le mieux la vie des enfants ». Le Canada peut le faire, selon M. Spicer, « en faisant jouer son influence auprès d’autres donateurs, d’autres pays et d’autres blocs géopolitiques ». Il a ajouté : « Le Canada peut profiter de son autorité pour obtenir qu’on accorde davantage la priorité aux enfants en se servant de ses capacités de développement ainsi que de ses ressources commerciales et diplomatiques comme d’un levier auprès des autres acteurs[80]. »

Des témoins ont mis en évidence l’enregistrement des naissances comme une autre intervention précoce qui peut avoir une influence importante sur la trajectoire du développement à long terme de l’enfant. Il y a dans le monde, aujourd’hui, quelque 230 millions d’enfants de moins de 5 ans dont la naissance, dont l’existence n’a jamais été enregistrée. Le fait d’avoir le document qui accompagne le plus souvent l’enregistrement confère l’identité juridique, qui revêt une importance fondamentale pour la protection de l’enfant. Mme Bissell a même dit au Comité que l’UNICEF qualifie l’enregistrement de la naissance comme « le passeport pour une protection à vie de l’enfant ». Elle a dit fort à propos que, sans l’enregistrement, « l’enfant court un grand risque d’être vendu, acheté, d’être l’objet de trafics et d’autres maltraitances[81] ».

Pour obtenir l’identité juridique, il y a des complexités à surmonter pour les enfants nés dans des situations de conflits armés, plus particulièrement lorsque les mères sont elles-mêmes des enfants. Cette difficulté a été soulignée par Linda Dale, directrice exécutive de Children/Youth as Peacebuilders, qui a parlé au Comité des jeunes filles contraintes de devenir les « femmes » des combattants de l’Armée de résistance du Seigneur, dans le nord de l’Ouganda[82].

Plusieurs témoins ont souligné le fait que l’enregistrement de la naissance permet aux enfants d’avoir accès aux services sociaux comme les soins de santé et l’inscription à l’école. C’est également un moyen de protéger leurs droits aux termes de la loi. Par exemple, M. Morley a établi un lien entre les certificats de naissance valides et l’exécution des lois sur l’âge minimum, ce qui peut « protéger les enfants contre le mariage précoce, le recrutement par les forces armées ou les pires formes de travail des enfants[83] ». Mme Jacovella a fait remarquer que, grâce à l’enregistrement, les enfants « peuvent être retracés s’ils sont séparés de leurs familles, sont déplacés ou sont victimes de la traite de personnes[84] ». Globalement, en somme, si l’enregistrement des naissances est une forme d’armure, son absence équivaut à être recouvert d’un manteau d’invisibilité, ce qui a de terribles conséquences pour l’enfant. Parmi ses propositions en vue du programme de développement de l’après-2015, M. Lukowski a demandé au Canada de continuer à appuyer l’inclusion d’une cible précise pour l’enregistrement universel des naissances[85].

Mme Bissell a également fait ressortir que l’enregistrement des naissances faisait également partie de l’édification de systèmes d’enregistrement des déclarations d’état civil et de statistiques de l’état civil « de haute qualité », question sur laquelle nous reviendrons au dernier chapitre du présent rapport. Elle s’est reportée à un guide de l’UNICEF qui porte précisément sur cette question. On y lit : « Les améliorations de l’enregistrement des naissances vont presque toujours de pair avec l’amélioration du système d’enregistrement des faits d’état civil dans son intégralité[86]. » Du point de vue de l’aide au développement, le même guide affirme aussi : « La communauté des bailleurs de fonds peut et devrait fournir une assistance en matière de plaidoyer, des financements ainsi qu’un appui technique afin de réaliser le processus de réforme de l’enregistrement des faits d’état civil, ce qui peut s’avérer compliqué[87]. »

Une forme d’aide technique de cette nature consiste à travailler avec des pays pour les aider à exploiter le potentiel des technologies d’information et de communication. Kiernan Breen, directeur des Programmes internationaux chez Cuso International, a décrit le travail bénévole que son organisation accomplit en Tanzanie pour « faire augmenter l’enregistrement des naissances en sensibilisant les parents et en recourant à la technologie des téléphones mobiles pour faciliter le processus ». Après avoir signalé que « la plupart des pays d’Afrique n’ont pas beaucoup progressé dans la réforme de leur système d’enregistrement et de statistiques de l’état civil », M. Breen a avancé l’idée qu’« il s’agit là d’un problème de développement fondamental que le Canada peut grandement contribuer à régler[88] ».

BRISER LE CYCLE DE LA VIOLENCE, DE LA PAUVRETÉ ET DE L’EXCLUSION

En plus d’un fondement solide, les enfants et les jeunes ont besoin d’un chemin vers le développement et la prospérité. Comme les questions abordées dans le présent rapport le font ressortir clairement, les enfants et les jeunes peuvent avoir à affronter des risques et de l’adversité, ce qui risque de les faire dériver ou de leur faire quitter complètement le chemin. Certains tombent dans un piège dont plusieurs générations peuvent rester prisonnières. Ces risques prennent bien des formes, dont la pauvreté extrême, une mauvaise santé, une éducation insuffisante et la discrimination, ainsi que la violence, l’exploitation et les mauvais traitements.

Un grand nombre de ces défis en matière de développement ne se classent pas aisément dans des catégories. Un d’eux ou plusieurs d’entre eux peuvent être la cause ou le résultat des autres. L’inégalité entre les sexes et la dévalorisation des filles dans de nombreuses sociétés – fait que plusieurs témoins ont signalé – sont un exemple. Jacquelyn Wright, vice-présidente des Programmes internationaux chez CARE Canada, a dit au Comité que, dans tous les pays où son organisation est présente,

[…] nous constatons que les filles et les femmes sont touchées de façon disproportionnée par la pauvreté et la discrimination. Cette pauvreté découle de la rareté chronique des produits de première nécessité : de l’eau propre, de la nourriture et la protection contre les maladies mortelles comme la malaria ou la dengue. La lutte pour la survie au moyen de ressources limitées crée inévitablement une hiérarchie sociale, au bas de laquelle on trouve presque toujours les jeunes filles.
Une fois qu’on vous considère comme sacrifiable, il n’en faut vraiment pas beaucoup pour qu’on vous retire de l’école afin d’aider aux tâches ménagères, que vous sautiez des repas durant une saison de vaches maigres ou en temps de crise ou que vous deveniez victime de la violence sexiste[89].

La nutrition et le soin des mères et des nouveau-nés, dont il a déjà été question, sont d’autres exemples. Dr Bhutta a attiré l’attention sur eux en montrant comment des cercles vicieux peuvent s’installer :

[…] dans près d’un cinquième des cas, l’atrophie chez les enfants de six mois est causée par l’état nutritionnel du bébé. Son état nutritionnel dépend repose quant à lui sur celui de la mère. L’état nutritionnel de la mère repose sur sa situation lorsqu’elle était jeune. Les statistiques révèlent que pour environ le tiers des cas d’hypotrophie fœtale dans le monde — il s’agit de bébés qui pèsent moins de cinq livres à leur naissance et qui risquent de se développer de façon très différente par rapport aux bébés normaux —, la cause réside dans la façon dont nous aidons les jeunes mères, les jeunes filles, sur le plan des possibilités de développement et d’éducation[90].

Ainsi se forment les cycles de vulnérabilité. À l’intérieur de ces cycles, on trouve bien des gens qui sont l’incarnation humaine de descripteurs couramment utilisés dans le lexique du développement, tel que « marginalisé » ou « laissé derrière ».

Les témoins ont généralement souligné la nécessité de s’attaquer aux causes profondes de la violence, de l’exclusion et de la pauvreté que connaissent beaucoup trop d’enfants et de jeunes. Pour le faire, comme Mme Erb l’a souligné, il faut une « approche holistique[91] » et, comme le préconise Mme Guindon, une approche qui intègre « la protection des enfants dans toutes les interventions[92] ».

Les enfants et les jeunes doivent affronter une série de vulnérabilités. Un certain nombre de témoins ont souligné l’importance de systèmes de protection de l’enfant. Mme Bissell a expliqué que le secteur de la protection de l’enfant avait évolué au fil des ans « passant de programmes axés sur les problèmes et les réponses à apporter à des programmes systémiques et holistiques qui s’attaquent aux vulnérabilités multiples et sous-jacentes qui caractérisent les enfants et leurs familles[93] ». Étant donné le nombre de vulnérabilités possibles, Mme McCarney a signalé que l’idée derrière les interventions « ancrées dans de [solides] systèmes communautaires de protection des enfants et appuyées par des mécanismes nationaux de protection des enfants », c’est d’éviter toute intervention qui, a-t-elle dit, « accentue la vulnérabilité de l’enfant[94] ». Au plan de l’approche globale, en mettant l’accent sur le renforcement des systèmes, on veut aussi éviter toute situation où certains problèmes – des questions de protection précises – et certains enfants risquent d’être laissés de côté et de passer à travers les mailles du filet.

Mme Vandenberg a décrit l’« approche systémique » comme une approche qui vise à renforcer l’enfant et, en même temps, sert de « bouclier » autour de cet enfant[95]. Mme Erb a expliqué cette approche en détail en parlant des quatre piliers de la protection. L’un comprend les lois, politiques et règlements du gouvernement. Un autre comprend les services, y compris ceux qui sont fournis par les gouvernements mais également par les organisations non gouvernementales. Le troisième pilier, c’est le travail effectué par les enfants eux-mêmes pour devenir forts et autonomes. Le dernier pilier concerne le renforcement des collectivités, y compris les familles et les autorités religieuses, pour qu’elles « participent aussi à cet élément de protection ». Chacun de ces piliers est « essentiel ». Comme Mme Erb l’atteste, « [v]ous ne pouvez pas avoir un bon système qui soit viable s’il manque un de ces éléments ».[96] 

Il a été souligné également qu’une protection efficace des enfants ne vient pas d’un modèle unique ou imposé d’en haut. Plusieurs témoins ont insisté sur l’importance centrale de la participation des enfants aux programmes et aux décisions qui les concernent. Mme Guindon a insisté : « Les enfants doivent avoir des occasions réelles et inclusives d’exprimer leurs vues et d’engager un dialogue mutuellement respectueux avec les adultes et qu’ils doivent pouvoir agir pour que la protection des enfants soit efficace[97]. » Outre le fait qu’il s’agit d’un droit garanti par la CDE, Will Postma, vice-président des partenariats mondiaux, Aide à l’enfance Canada, a souligné que la participation est aussi « un moyen efficace pour protéger les filles et les garçons et pour les appuyer et les aider à accroître leur résilience[98] ». Cicely McWilliam, conseillère principale, Politiques et campagnes, Aide à l’enfance Canada, a même soutenu que la participation des enfants est importante précisément parce que ce sont les enfants eux-mêmes qui « peuvent […] nous dire quels sont les principaux risques auxquels ils sont confrontés[99] ».

Étant donné les vulnérabilités dont il faut tenir compte pour assurer la protection des enfants, les témoignages ont aussi indiqué que le travail doit être conçu comme une entreprise internationale qui recoupe plusieurs domaines, qui touche à la diplomatie, au développement et au commerce. En ce qui concerne le premier secteur, la diplomatie, les initiatives qui ont été mises en évidence sont celles qui visent la sensibilisation, de façon à susciter une dynamique de changement. Les résolutions et campagnes à l'ONU et dans d’autres instances multilatérales illustrent ces efforts, tout comme les efforts déployés pour qu’un libellé solide et des engagements fermes figurent dans les textes qui émanent de ces instances.

Le travail consacré à la politique et aux programmes de développement en ce qui concerne la protection des enfants est vaste et il est abordé dans tous les chapitres du présent rapport. Un exemple qui se rattache au thème général du présent chapitre est l’aide au développement qui vise à élaborer et à mettre en place de solides cadres nationaux de protection. Les lois et les politiques sont, comme on l’a signalé plus haut, l’un des piliers des systèmes de protection de l’enfant.

Lorsqu’elle a comparu devant le Comité, Mme Bissell a dénoncé « un manque d’exemples de programmes évolutifs pour obtenir des résultats pour les enfants[100] ». Elle a ensuite signalé avec optimisme deux exemples de projets en cours, dont l’un reçoit l’appui du Canada, en partenariat avec l’UNICEF, au Ghana. Comme l’explique le MAECD, le projet vise « à mieux protéger les enfants contre la violence, l’exploitation, la maltraitance et la discrimination en renforçant les lois et les politiques sur la protection des enfants, en améliorant les services de justice et d’aide à l’enfance et à la famille, et en sensibilisant le public sur les attitudes et comportements positifs et protecteurs envers les enfants ». Le soutien ciblera notamment l’élaboration d’une politique nationale sur l’aide sociale aux enfants et aux familles, ainsi qu’une politique de justice juvénile. Le Ministère ajoute que le projet « se concentrera sur les cinq régions les plus défavorisées du Ghana et atteindra plus de 4,5 millions d’enfants vulnérables[101] ». Selon l’évaluation de Mme Bissell, le projet « est très prometteur ». Elle a poursuivi, soulignant : « Il s’agit d’une bourse substantielle qui permettra à l’équipe d’adapter ses efforts aux besoins de protection de l’enfance. De tels investissements sont rares. Ils doivent être encouragés[102]. »

Janine Maxwell, cofondatrice de Heart for Africa, s’est fait demander le rôle des lois sur la protection des enfants au cours de son exposé sur le travail de son organisation auprès d’enfants orphelins au Swaziland, qui est axé sur une initiative agricole, le projet Canaan. Comme Mme Maxwell l’a signalé, le pays est une étude de cas sur la vulnérabilité des enfants. On estime par exemple qu’il a « le taux de VIH le plus élevé du monde ». De plus, il « compte quelque 15 000 ménages dirigés par des orphelins âgés de 15 ans ou moins[103] ». Quelque 90 enfants orphelins ou abandonnés qui ont tous moins de 4 ans vivent dans le campus pour les enfants du projet Canaan.

Le gouvernement du Swaziland a mis en place de la législation pour la protection des enfants : la Loi de 2012 sur la protection et le bien-être des enfants. Du point de vue de Mme Maxwell, « [c]ette mesure comprend toutes les dispositions qu’on peut souhaiter. » La Loi contient un certain nombre de parties, dont des principes généraux et des droits, dont, par exemple, le droit à l’enregistrement de la naissance et le droit d’être protégé des pratiques nocives. Des passages portent sur les enfants qui ont besoin de soins et de protection et d’autres sur la vente, le recel et l’enlèvement d’enfants, et sur des mesures de protection relatives à la santé des enfants[104]. Mme Maxwell, qui cite des dispositions sur les enfants abandonnés ou orphelins, estime que la Loi « est bien utilisée[105] ». Malgré tout, étant donné les défis systémiques que doivent relever les enfants au Swaziland, il est probable que, pendant de longues années, l’application de ces droits et protections demeurera un enjeu et une priorité.

En ce qui concerne les questions liées au commerce et aux politiques du Canada sur le commerce international, Mme Vandenberg a fait valoir qu’il était important d’examiner les chaînes d’approvisionnement et les accords commerciaux sous l’angle du travail des enfants. Pour qu’on puisse s’attaquer à ces problèmes, il faut aussi qu’il existe des « choix sécuritaires » au travail des enfants[106]. La position générale du gouvernement canadien, telle qu’énoncée dans sa politique relative à la responsabilité sociale des entreprises, c’est qu’« il encourage toutes les entreprises canadiennes présentes à l’étranger à respecter toutes les lois et les normes internationales applicables, à faire preuve de transparence en collaborant avec le gouvernement et les collectivités locales, et à mener leurs activités d’une manière responsable sur les plans social et environnemental, et il s’attend à ce qu’elles le fassent[107] ».

Des témoins ont parlé de la nécessité de veiller à ce que tous les enfants, y compris ceux qui vivent dans les collectivités appauvries, tirent parti du développement économique. M. Postma a soutenu : « Si on ne prête pas attention aux droits de l’enfant et à sa protection, une exploitation commerciale peut même avoir des conséquences négatives imprévues, dont une augmentation des pires formes de travail des enfants : conditions de travail dangereuses, violence et exploitation sexuelle[108]. » Lui et d’autres témoins ont insisté sur les Principes régissant les entreprises dans le domaine des droits de l’enfant, initiative lancée en 2012 par Aide à l’enfance, l’UNICEF et le Pacte mondial des Nations Unies. Ces principes ont été élaborés, comme M. Postma l’a expliqué, en réponse « à un appel des Nations Unies demandant aux sociétés du secteur privé de mieux respecter les droits de l’enfant ». Les principes « visent à guider les entreprises et à les encourager à respecter et appuyer les droits de l’enfant, dans le cadre de leurs activités sur les lieux de travail, dans le marché et dans la collectivité[109] ». Mme Jacovella a confirmé que le Canada s’était félicité de ces principes[110].

Commentant les principes du point de vue de l’engagement du secteur privé dans le développement, Mme McCarney a fait valoir :

Alors que le Canada s’engage de plus en plus dans la voie des partenariats public-privé dans le domaine du développement, ce que nous appuyons tout à fait, des normes et des attentes claires doivent être formulées sur la manière dont nous faisons des affaires à l’étranger.
Dans le cadre d’un processus exhaustif de diligence raisonnable, nous encourageons le gouvernement à promouvoir activement les outils et les ressources nécessaires pour s’assurer que ces principes d’entreprises liés aux droits des enfants sont appliqués. Dans un premier temps, cela inclurait l’intégration des droits des enfants et des principes des entreprises dans les mandats, par exemple, de tous les partenaires du secteur privé du MAECD[111].

M. Morley a fait remarquer que son organisation encourageait également le gouvernement du Canada « à intégrer les droits des enfants aux principes d’affaires qu’il préconise et à exiger une analyse de l’impact sur les droits des enfants avant d’accorder du financement au secteur privé à l’étranger[112] ».

Le lien entre le développement économique, les pratiques commerciales et les droits de la personne a également sa place dans les discussions sur le contenu du programme de développement de l’après‑2015 et les ODD. Entre autres propositions, l’organisation de M. Lukowski, par exemple, demande au gouvernement du Canada « d’appuyer la mise en œuvre d’objectifs pour l’élimination immédiate du travail des enfants d’ici à 2025[113] ».

Les questions abordées dans le présent chapitre ont illustré les rôles que peuvent jouer, ainsi que l’expérience et les compétences que peuvent offrir, les gouvernements, les organisations de la société civile, les entreprises, les organisations internationales, les collectivités, les enfants et leur famille pour assurer la protection des enfants. Le chapitre montre que l’élaboration d’une réponse intégrée au problème de la protection des enfants, une réponse axée sur le renforcement des systèmes, exige l’engagement et le partenariat de tous les protagonistes.

METTRE FIN AU MARIAGE D’ENFANTS

La vie de nombreuses jeunes femmes est marquée par la violence, la pauvreté et l’exclusion à cause d’un mariage précoce. Le Comité a recueilli des renseignements détaillés sur ce problème au cours de son étude. Il a appris que le mariage des enfants est un abus des droits fondamentaux et entrave le développement. Par conséquent, cette pratique doit être prise en considération pour une foule de défis en matière de développement, dont la mortalité des mères et des enfants et l’inégalité des sexes. Le problème sera discuté longuement ici, mais il concerne aussi un chapitre ultérieur portant sur les adolescentes.

Sarah Degnan Kambou, présidente de l’International Center for Research on Women, a expliqué : « Les mariages précoces et forcés d’enfants consistent en toute union légale ou coutumière d’un garçon ou d’une fille de moins de 18 ans avec une autre personne ou en tout mariage conclu sans le consentement libre et entier des deux époux[114]. » Dans le monde en développement, une fille sur trois est mariée avant 18 ans et une sur neuf avant 15 ans. Mme Degnan Kambou a fait remarquer que le mariage d’enfants « est un problème mondial qui ne connaît pas les frontières géographiques ni celles de la culture et de la religion[115] ». Fournissant les mêmes statistiques, Mabel van Oranje, présidente de Filles, Pas Épouses : Le Partenariat Mondial pour la Fin au Mariage des Enfants, a fait savoir que « là où c’est le plus fréquent [cette pratique], c’est en Asie méridionale et en Afrique subsaharienne », précisant que, « en Asie méridionale, 46 % des filles sont données en mariage avant 18 ans, et, en Afrique subsaharienne, c’est 39 %[116] ».

Le Comité a recueilli le point de vue de deux organisations locales qui travaillent chacune dans l’une de ces régions pour régler le problème des mariages d’enfants. Elles font partie du réseau Filles, Pas Épouses. Ashok Dyalchand, membre de l’Institute for Health Management, Pachod, a décrit la situation qui règne en Inde, où on estime que, dans une population de 113 millions d’adolescentes, quelque 45 % – la « moyenne nationale » – doivent normalement « se [marier] avant l’âge de 18 ans, c’est‑à‑dire 51 millions de filles[117] ».

L’organisation d’Amina Hanga, Isa Wali Empowerment Initiative, est installée à Kano, dans le Nord‑Ouest du Nigéria. Elle a dit au Comité que, même si la pratique du mariage d’enfants reculait dans les zones urbaines du pays, « dans les régions rurales, c’est encore très fréquent qu’on donne des filles de 13, 14 ou 15 ans en mariage ». La principale raison, à son avis, est « qu’on n’accorde pas beaucoup de valeur aux filles ». Dans une région où les taux de pauvreté et d’analphabétisme sont élevés, « [l]es gens sont ignorants et n’apprécient pas la valeur de l’éducation, surtout pour les filles[118] ».

Ce n’est pas sans raison que le mariage d’enfants est considéré comme une pratique nocive par des organisations qui s’occupent des droits de la personne et qu’elle est ainsi qualifiée dans les résolutions de l’ONU sur les droits de l’homme. Les conséquences, décrites par de nombreux témoins, sont nettement négatives et, dans bien des cas, durables.

Mme van Oranje a offert plusieurs exemples qui montrent comment le mariage d’enfants est un abus des droits fondamentaux et qu’il « mine également nos efforts visant à mettre un terme à la pauvreté mondiale ». L’objectif de l’élimination de la mortalité des mères ne sera pas atteint tant qu’il y aura « des filles qui accouchent avec un corps de 13 ans ou de 14 ans[119] ». Mme van Oranje a ajouté que ces « fillettes données en mariage sont elles-mêmes encore des enfants ». Elle a aussi donné un autre exemple, celui de l’éducation. Aucun progrès n’est possible pour instaurer l’éducation universelle « si elles sont retirées de l’école pour être données en mariage ». L’absence d’éducation fait problème pour de nombreuses raisons, notamment la capacité lucrative, ce qui touche non seulement les jeunes filles, mais aussi la prospérité des collectivités. Mme van Oranje a fait valoir que, au total, « le mariage d’enfants est lié à six des huit objectifs actuels du Millénaire pour le développement qui ont été établis pour faciliter l’éradication de la pauvreté — six sur huit[120] ».

Des témoignages ont également fait ressortir un lien entre le mariage précoce et la grossesse chez les adolescentes, et des risques accrus de mortalité maternelle et d’invalidité attribuable à l’accouchement. Pour sa part, Mme Degnan Kambou a expliqué au Comité : « Lorsqu’une fille est forcée de se marier, elle peut être exposée à des complications graves causées par une grossesse précoce et des grossesses répétées par la suite, qui peuvent même entraîner sa mort. Il y a souvent aussi un risque accru d’infection au VIH et de violence aux mains du partenaire intime[121]. »

En indiquant le lien entre le mariage précoce et la santé maternelle, Mme Jacovella a souligné que « les complications qui se présentent à la grossesse […] sont l’une des principales causes de mortalité chez les filles dans le monde en développement, dont un bon nombre se sont mariées jeunes[122] ». Mme van Oranje a même fait observer que « si vous n’avez pas plus de 15 ans au moment où vous avez votre premier enfant, les probabilités que vous mouriez en donnant naissance ou que vous ayez des complications sont cinq fois plus élevées que si vous êtes au début de la vingtaine[123] ». James Chauvin, membre du conseil d’administration de la Société canadienne de santé internationale, a également souligné que bien des complications en matière de santé peuvent découler d’un mariage précoce, dont « l’inaccessibilité aux services de santé et […] la prématurité[124] ». Mme Wright a énuméré un grand nombre de mêmes défis, disant que ces jeunes filles « enfantent souvent seules, sans le soutien d’un professionnel formé[125] ».

Des témoins ont également décrit les liens entre mariage précoce et mauvais état de santé des enfants et des bébés. Mme van Oranje a dit : « La mortalité infantile est de 60 % plus élevée pour les enfants de ces fillettes données en mariage[126]. » M. Chauvin a aussi fait remarquer que « les indicateurs de malnutrition semblent pires chez les enfants nés de mères mariées avant leur majorité[127] ».

L’isolement qui découle souvent du mariage d’enfants mérite aussi de retenir l’attention. Mme Degnan Kambou a décrit ces conséquences en faisant observer : « La jeune fille est souvent isolée, éloignée de sa famille, de son école et de ses pairs, et elle a peu d’occasions de participer à la vie communautaire, voire pas du tout[128]. » Pareillement, Mme Wright a dit que « le mariage d’enfants précoce et forcé est une question particulièrement pernicieuse parce qu’elle éloigne encore plus les jeunes filles de ceux qui pourraient les aider[129] ». Le spectre troublant de la marginalisation a également été mentionné par Mme Hanga qui, inspirée de son travail au Nigéria, a parlé des raisons pour lesquelles les filles sont retirées tôt de l’école par leur famille. Elle a expliqué que parfois les parents « ont peur que les filles fassent honte à la famille, c’est-à-dire qu’elles puissent avoir des enfants en dehors du mariage ou qu’elles subissent du harcèlement sexuel. Ils préfèrent donner ces filles en mariage[130]. » L’organisation de Mme Hanga aide les familles à comprendre les conséquences associées à ce choix, notamment les risques pour la santé de la mère et la malnutrition de l’enfant.

Pour ce qui est des causes des mariages d’enfants, Mme van Oranje a expliqué au Comité : « Les facteurs exacts qui contribuent au mariage d’enfants varient d’un contexte à un autre […] » Cela dit, elle a énuméré « quatre principaux facteurs » : la pauvreté, la sécurité – y compris dans le contexte des camps de réfugiés –, la tradition et l’inégalité des sexes, y compris le fait qu’on n’accorde pas autant de valeur aux filles qu’aux garçons[131]. Mme Degnan Kambou a informé le Comité que : « Quoique diverses traditions et situations socioéconomiques perpétuent la pratique dans divers contextes, le mariage d’enfants a tendance à être plus fréquent qu’ailleurs dans les collectivités et les ménages pauvres et ruraux, ainsi que dans les pays ou les collectivités où les femmes et les filles reçoivent peu d’éducation et bénéficient de possibilités limitées sur le plan économique. » Elle a fait remarquer : « Dans bien des sociétés, le rôle principal de la femme est celui de la reproduction. » Elle a ajouté : « Les lois et les politiques régissant l’enregistrement des naissances et des mariages, les droits de propriété, l’éducation et la santé peuvent être des variables clés en ce qui concerne la pratique du mariage d’enfants[132]. »

Du point de vue de Sandeep Prasad, directeur général, Action Canada pour la santé et les droits sexuels, l’inégalité des sexes est un grand facteur. Il a soutenu que les causes des mariages précoces et forcés :

[…] sont profondément enracinées dans les inégalités entre les sexes, les normes et les stéréotypes, y compris dans la perception traditionnelle patriarcale du statut et du rôle des femmes dans la société, ainsi que dans le contrôle social du corps des femmes et des choix en matière de sexualité. Le mariage précoce et forcé des enfants constitue un exemple de la façon dont ces causes profondes se manifestent dans la société. Mentionnons également la mutilation des organes génitaux féminins et les attaques à l’acide, de même que le retrait des jeunes filles de l’école, qui est souvent le premier pas vers le mariage forcé[133].

M. Prasad a également signalé que les problèmes sont « exacerbés par d’autres facteurs d’inégalité tels que la pauvreté, le faible niveau de scolarité et la ruralité[134] ».

Des témoins ont indiqué un certain nombre de mesures à prendre pour faire reculer cette pratique préjudiciable. Mme van Oranje a énuméré quatre interventions principales. La première est l’autonomisation des filles. La deuxième est « le dialogue communautaire avec les parents, avec les hommes et les garçons et avec les chefs traditionnels et religieux, afin de les aider à comprendre qu’il y a des solutions de rechange au mariage d’enfants qui sont vraiment dans l’intérêt de la fille et de la collectivité ». La troisième est la prestation de services aux filles et notamment de services « adaptés aux besoins des adolescentes ». Mme van Oranje a ajouté une précision : « Souvent, quand nous étudions les services de santé, y compris les services de santé sexuelle, ils ciblent les femmes adultes, mais pas les jeunes filles[135]. » La quatrième est la promulgation est la mise en œuvre des lois interdisant le mariage d’enfants.

Pour sa part, Mme Degnan Kambou a présenté cinq stratégies qui ont été appliquées pour retarder le mariage. Dans un esprit semblable à celui des interventions énumérées par Mme van Oranje, elle a parlé comme première stratégie du renforcement de l’autonomie des filles « en leur permettant d’obtenir l’information, les compétences et les réseaux de soutien. » La deuxième stratégie implique la sensibilisation des parents et des membres de la collectivité, avec qui il faut discuter et qui, la plupart du temps, ont une forte influence sur les décisions concernant le moment du mariage. La troisième stratégie décrite par Mme Degnan Kambou est de s’assurer que les filles ont accès à une éducation de qualité. Elle a précisé :

Les filles qui n'ont pas d'éducation sont trois fois plus susceptibles de se marier que celles qui ont une éducation de niveau secondaire ou supérieur. Lorsque les filles sont à l’école, elles sont moins susceptibles d’être vues comme étant prêtes pour le mariage, et elles peuvent trouver les réseaux sociaux et de soutien et acquérir les aptitudes nécessaires pour exprimer leurs besoins. Des mesures d’incitation comme la distribution d’uniformes gratuits et de bourses d’études, des programmes visant à améliorer la sécurité et l’attitude des écoles envers les filles et des programmes d’études pertinents par rapport à la vie des filles peuvent encourager les filles à s’inscrire, et, surtout, à rester à l’école[136].

La quatrième stratégie évoquée par Mme Degnan Kambou est le soutien économique. À ce propos, elle s’est exprimée en ces termes : « Fournir à une fille ou à sa famille un prêt, un virement de fonds ou la possibilité d’acquérir une compétence permettant de générer des revenus peut alléger immédiatement le fardeau financier d’un ménage en difficulté et contribuer à la valeur perçue des filles dans les familles. » La cinquième stratégie repose sur l’introduction et l’application de la législation et des politiques, tel que mentionné plus tôt.[137] Certes, on peut percevoir le mariage d’enfants comme une pratique profondément enracinée, mais Mme Degnan Kambou a néanmoins fait valoir : « Nous avons des preuves abondantes du fait que les pratiques préjudiciables peuvent être modifiées, même celles qui font partie de la culture[138]. »

On a insisté tant et plus sur l’importance de l’éducation dans les échanges sur les moyens de prévenir les pratiques nocives et de faire évoluer les mentalités. Mme McCarney a fait savoir que l’expérience des programmes sur le terrain, les recherches et les données révèlent que « si nous pouvons permettre aux filles de poursuivre leurs études secondaires, elles sont six fois moins susceptibles de se marier avant d’être adultes comparativement aux filles qui ont seulement terminé leurs études primaires[139] ». Cela dit, elle a souligné elle aussi que les écoles doivent être un milieu d’apprentissage sûr, à l’abri de la violence sexuelle et sexiste « en vue de convaincre les parents que d’envoyer leurs enfants à l’école est une solution plus sécuritaire que le mariage, qui est souvent la principale motivation ». Elle a avancé l’idée qu’il fallait d’autres progrès sur ce front, précisant que « la violence contre les filles continue d’être fréquente dans les établissements où nous devrions tous nous sentir le plus en confiance : les écoles[140] ».

On perçoit des signes encourageants dans les réactions au problème du mariage d’enfants qui, récemment, a retenu davantage d’attention comme sujet de préoccupation au niveau international. Plusieurs témoins ont fait ressortir le leadership du Canada – qui travaille en partenariat avec d’autres gouvernements et des organisations de la société civile – pour réclamer la fin des mariages d’enfants. Pour la première fois, en 2013, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU et l’Assemblée générale ont adopté des résolutions sur les mariages d’enfants, mariages précoces et mariages forcés, résolutions qui ont été coparrainées toutes les deux par le Canada. Le mouvement amorcé par ces initiatives a continué de s’amplifier aux Nations Unies. Mme Jacovella a informé le Comité que « à l’automne 2014, le Canada et la Zambie ont préparé la résolution internationale la plus complète à ce jour sur les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés », ajoutant : « Nous sommes fiers du fait que la résolution a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée générale[141]. » Mme Degnan Kambou a estimé que l’engagement du Canada avait favorisé l’adoption de la résolution, « et il est à espérer qu’il mènera à l’inclusion de la prévention du mariage d’enfants dans les objectifs de développement durable qui seront adoptés cet automne[142] ».

Des témoins ont demandé au Canada de continuer à soutenir l’adoption d’une cible distincte portant sur l’élimination du mariage d’enfants dans le programme de l’après‑2015. La proposition avancée par le Groupe de travail ouvert contient un objectif d’instauration de l’égalité entre les sexes et d’autonomisation des femmes et des filles. Sous cet objectif, il y a maintenant une cible : « éliminer toutes les pratiques néfastes, comme, le mariage des enfants, le mariage précoce et le mariage forcé ainsi que les mutilations génitales féminines ». Une autre cible propose d’« éliminer toutes les formes de violence contre les femmes et les filles dans les sphères publiques et privées, y compris la traite, l’exploitation sexuelle et autres formes d’exploitation ».

Comme on lui demandait son opinion sur la façon dont le mariage d’enfants était abordé dans la proposition actuelle, Mme van Oranje a répondu que le libellé de la cible « fait le bonheur » de son organisation. Tout en ajoutant qu’elle aimerait « toujours qu’on emploie des termes plus forts », elle a dit que « ce libellé fait tout à fait notre affaire[143] ». Elle a également signalé que le Canada, l’un des pays qui a joué un rôle de premier plan dans ce dossier au cours des négociations, avait profité de ce rôle pour faire appel aux pays « où la prévalence est élevée » afin de « les faire participer ». À propos du travail qu’il reste encore à faire, Mme van Oranje s’est exprimée en ces termes :

Ce que nous ne savons pas, au moment où nous entamons les négociations relativement au document du Groupe de travail ouvert, c’est si des pressions seront exercées en vue de fusionner certaines des cibles. Ce que nous ne voulons pas, c’est que le mariage d’enfants se retrouve seulement associé à la violence contre les filles et les femmes, ou seulement à l’éducation, à la santé maternelle ou à l’égalité. Ce n’est pas ça, le mariage d’enfants. C’est lié à toutes ces choses[144].

M. Prasad a exprimé son avis : il est peu probable que quelque participant soit « parfaitement satisfait du résultat final », mais il y a maintenant « un objectif très ferme axé sur l’atteinte de l’égalité entre les sexes, et en ce moment, nous devons veiller à ce que ces éléments ne soient pas modifiés[145] ». Mme Stevenson avait un avis semblable, croyant que la prochaine étape serait de veiller à ce que la cible actuelle concernant le mariage d’enfants soit protégée dans les négociations finales[146]

S’il est vrai que la sensibilisation s’accentue et que la volonté politique se galvanise dans le contexte multilatéral autour de la nécessité de mettre fin à la pratique du mariage d’enfants, il semble que la communauté internationale soit toujours plus près du début de la démarche plutôt qu’aux dernières étapes dans la poursuite de cet objectif. C’est la réalité qui se profile derrière l’observation de M. Prasad sur la trajectoire qu’on suit actuellement dans le monde à propos de ce problème : « Au cours de la prochaine décennie, 142 millions de filles seront forcées de se marier à un âge précoce, et les efforts actuellement déployés sont insuffisants pour faire diminuer ce nombre[147]. »

Des témoins ont fait valoir des idées au sujet des mesures à prendre si nous voulons progresser. Mme McCarney a souhaité des « mesures concrètes » de la part du gouvernement du Canada :

[…] pour mettre fin aux mariages forcés en élaborant des programmes robustes qui luttent contre les mariages d’enfants précoces et forcés à de multiples niveaux simultanément. Ces mesures devraient comprendre une nouvelle enveloppe de financement réservée aux mariages d’enfants précoces et forcés semblable au mécanisme du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction de l’ancien ministère des Affaires étrangères, parce qu’il est important non seulement que nous réunissions nos paroles et notre poids à l’échelle mondiale, un domaine où le Canada excelle, mais que cela s’accompagne d’une action concrète sur le terrain[148].

De l’avis de Mme McCarney, des projets doivent aussi cibler les femmes et les filles déjà mariées. Il faudrait notamment les aider à reprendre les études et leur donner accès à des formations professionnelles et à des soins de santé et notamment à « tous les soins de santé en matière de reproduction et de sexualité ». Ce serait une erreur d’abandonner ces filles, selon elle, « parce qu’elles deviendront rapidement les mères-enfants de la nouvelle génération[149] ».

Mme van Oranje a encouragé le maintien d’un leadership et un engagement à long terme – notamment en matière de financement et de programmes – pour lutter contre le problème des mariages d’enfants. Une partie de ce soutien financier devrait aller, a-t-elle dit, « aux organisations locales qui changent les choses dans la vie quotidienne des filles et dans leur collectivité ». Elle préconise aussi que le Canada place le travail sur les mariages d’enfants au centre de ses interventions en matière de développement. De plus, il faudrait donner plus d’ampleur aux programmes qui donnent des résultats[150].

Mme Wright a souligné que les efforts relatifs aux mariages d’enfants et à l’aide aux femmes et aux filles déjà mariées sont des efforts à long terme. Elle a soutenu : « L’élimination d’une pratique qui est à ce point ancrée dans le tissu social ne peut tout simplement pas se faire en quatre mois, ni même en quatre ans d’ailleurs[151]. » Mme Wright a situé le problème en ces termes pour le Comité :

Lorsque nous réussissons à toucher les cœurs et à changer les mentalités et que les autorités acceptent d’appliquer les lois en vigueur, qu’arrive-t-il à ces filles? On leur évite peut-être un mariage précoce, mais qui prendra soin d’elles? Souvent, les familles n’en veulent plus, et il n’y a pas de refuge pour elles, aucun service d’aiguillage, aucun organisme de protection de l’enfance comptant un personnel formé qui peut offrir un milieu de vie sécuritaire et une aide à l’éducation. Un financement à court terme ne nous permet pas de mettre en place ce genre de choses. Le financement actuel est peut-être suffisant pour nous dire que nous nous attaquons au problème, mais nous n’avons pas le droit de croire que nous réglons vraiment les problèmes. Si nous voulons obtenir des résultats, de vrais résultats, nous devons faire de ce dossier une priorité à long terme en matière de développement. Cela signifie que le dossier des mariages d’enfants, précoces et forcés doit être sur le dessus de la pile sur le bureau du ministre Paradis[152].

Selon Mme Wright, ce dont nous avons besoin en ce moment, « c’est de faire de ce dossier une priorité. Il faut aussi de la patience et un financement approprié pour concrétiser notre engagement[153] ».

À bien des égards, le mariage d’enfants est une étude de cas illustrant les défis abordés dans les autres chapitres du rapport. Il peut être la cause et la conséquence de cycles de vulnérabilité. Il peut être un moyen de s’en sortir pour les filles et leur famille dans les situations de conflit armé et de déplacement. Il laisse des jeunes filles et femmes isolées, des risques importants pesant sur leur bien-être. De plus, pour régler ce problème, il faut un soutien international allié à un travail au niveau local et avec des organisations locales. Toutes ces initiatives doivent être nourries par des données et des pratiques exemplaires qui peuvent aider à repérer les programmes les plus susceptibles d’avoir un effet déterminant.

PRIORISER LA PROTECTION DANS LES SITUATIONS D’URGENCE

Bien que, au cours des séances du Comité consacrées à l’étude, on n’ait pas abordé en détail la question des enfants placés dans des situations de conflit armé – ou dans des situations d’urgence, plus généralement –, deux points principaux ont été portés à l’attention du Comité. Le premier, est que les enfants et les jeunes souffrent énormément des effets des conflits armés et des privations et déplacements qu’ils provoquent. Dans beaucoup des régions touchées, les enfants et les jeunes ne peuvent pas profiter des progrès du développement à l’échelle du monde. Le deuxième point concerne les fonds et les programmes. Même si les besoins en matière de protection sont une réalité des situations d’urgence, il semble que les ressources nécessaires pour y répondre ne soient pas assez prioritaires dans le cadre des interventions en cas d’urgence.

Mme Vanderberg a bien capté la situation globale en disant que, dans les situations de conflit, « de nombreux enfants se retrouvent isolés et séparés des adultes qui les protégeaient. Cela les expose à de fortes violences, y compris des violences basées sur le genre, à l’exploitation, aux maltraitances et aux privations[154] ». D’autres témoins ont abordé la question du point de vue des risques pour la santé. Le Dr Bhutta a fait remarquer qu’« environ le tiers des enfants de moins de cinq ans et des mères qui décèdent viennent de régions touchées directement ou indirectement par des conflits[155] ». Mme Strong a signalé que souvent, pendant les catastrophes et les conflits, « les systèmes de santé s’effondrent ou ne suffisent pas à la tâche ». Elle a donné à cet égard un exemple d’actualité, celui de la Syrie, expliquant comment la « crise a contribué à la résurgence de maladies que nous pensions avoir éradiquées, comme la polio, et les enfants n’ont pas accès au traitement pour la pneumonie ou la diarrhée[156] ».

Quant au deuxième point, celui des programmes et des fonds, Dr Samantha Nutt, fondatrice et directrice exécutive de War Child Canada, a dit au Comité que, à tout prendre, le sommaire de la preuve sur la protection de l’enfant montre clairement que « l’éducation et le développement économique et, d’autre part, la protection des enfants et des jeunes est, sans exception, forte et positive dans tous les pays en développement ». À partir de ces constatations centrales, elle avance que :

[…] pour tirer pleinement profit de ces effets bénéfiques, la stratégie du Canada au chapitre de l’aide humanitaire d’urgence devrait évoluer de façon à refléter ces réalités en maintenant la priorité accordée aux programmes de protection dans le cadre de notre stratégie d’intervention précoce[157].

Dr Nutt a expliqué comment des lacunes en matière de protection peuvent apparaître en évoquant la guerre qui continue de sévir en Syrie. En Jordanie et au Liban, lorsque des familles sont incapables de travailler ou de trouver du travail, elles peuvent envoyer les enfants gagner un revenu par divers moyens, « comme la prostitution, ou par d’autres activités, comme la mendicité dans les rues ou le travail forcé ». Elle a ajouté qu’il pouvait y avoir aussi des risques plus élevés de mariage précoce et « certains cas de trafic d’enfants[158] ».

Le Comité a appris que, même dans la réponse initiale à une crise ou à une situation d’urgence, il est possible de mettre l’accent sur la prévention de la violence, de l’exploitation et des mauvais traitements. Mme Lorna Read, chef des opérations à War Child Canada, a dit que, outre les mécanismes d’intervention pour les problèmes qui donnent lieu à des préoccupations immédiates, « il nous faut aussi intégrer sans tarder un dialogue sur la prévention dans la stratégie à long terme[159] ».

Mme Guindon a fait écho à la nécessité d’« accorder la priorité à la protection des enfants, qui est essentielle non seulement dans le domaine du développement, mais également dans celui de l’aide humanitaire ». Elle a attiré l’attention sur un mécanisme en particulier, l’instauration de milieux protecteurs qui peuvent contribuer « à la sécurité et au bien-être des enfants avant, durant et après une situation d’urgence[160] ». Mme Vandenberg a proposé également : « […] le Canada peut concrètement garantir que la création d’espaces sûrs pour les filles et les garçons soit une priorité vitale[161] ». Ce problème a été porté à l’attention du Comité dans le cadre de ses études antérieures sur les situations de crise, qui ont toutes insisté sur la nécessité que les enfants aient accès à des lieux sûrs où ils peuvent apprendre, jouer et interagir.

M. Postma a soulevé la question de fonds ciblés pour les interventions humanitaires. Il a précisé que la protection de l’enfant est « l’un des secteurs les moins bien financés en cas d’intervention humanitaire, seule l'éducation étant encore plus délaissée dans les situations d'urgence ». Son organisation demande donc au gouvernement du Canada « de veiller à fournir un financement adéquat pour la protection de l’enfant dans le cadre d’interventions humanitaires et de renforcer les capacités de son personnel et de ses partenaires à appliquer les normes minimales de protection de l’enfant[162] ».

 L’aide humanitaire et l’aide au développement sont distinctes. Il peut souvent y avoir des délais et des occasions manqués lors de la transition entre l’une et l’autre, d’autant plus que ce sont souvent des personnels et des organismes différents qui interviennent. Toutefois, comme le Comité l’a appris, les vrais défis que doivent relever les enfants et les jeunes dans les situations d’urgence ne sont pas nettement définis ou classés. Sur ce point, Dr Nutt a avancé l’idée qu’il faut examiner de plus près les types d’intervention définis comme faisant partie des secours d’urgence afin d’y ajouter d’autres aspects « qui vont au-delà des besoins humains fondamentaux », comme l’éducation, l’emploi et les espaces sécuritaires. Mme Read a affirmé : « […] il y a eu un réel dialogue entre le volet humanitaire traditionnel et le volet qui concerne davantage le développement à long terme ». Cela dit, elle a avoué qu’« on a du mal » à imaginer et à jeter « un pont entre les deux[163] ».

Selon Dr Nutt, nous sommes depuis peu « plus disposés » à examiner des activités énumérées plus haut qui auraient été considérées par le passé comme « des activités non urgentes ». Tout en admettant qu’il y a des raisons claires et compréhensibles de mettre l’accent sur les besoins fondamentaux, elle a estimé que, « si, dans cette stratégie d’intervention en cas d’urgence, on n’inclut pas l’éducation, formelle et informelle; l’alphabétisation, formelle et informelle; des activités pour les jeunes, formelles et informelles, nous ratons, très tôt, l’occasion de créer un environnement plus protégé pour les filles[164] ».

Même s’il ne s’est pas manifesté à un stade précoce de la crise, Leslie Norton, directrice générale de l’Aide humanitaire internationale au MAECD, a expliqué qu’il y a eu un effort concerté afin d’intégrer des « programmes de résistance aux chocs » dans le cadre des appels les plus récents de l’ONU dans le contexte syrien. On « accorde beaucoup plus d’importance » à la protection, ce qui comprend la prise en considération de questions liées à la violence sexuelle et sexospécifique, aux besoins en matière d’éducation et aux espaces sécuritaires, ainsi qu’à la situation des mineurs seuls et au « soutien psychosocial aux enfants traumatisés[165] ». Mme Jacovella a informé le Comité que le Canada contribue à l’initiative « Non à une génération perdue », qui est un partenariat entre des organismes des Nations Unies, des donateurs internationaux, des gouvernements et des organisations non gouvernementales. Elle a dit que cette « initiative fait en sorte que les enfants syriens et irakiens puissent bénéficier d'un environnement sécuritaire et des possibilités d'apprentissage dont ils ont besoin[166] ».

Le Comité a appris que, pour avoir un impact dans tous ces domaines, il faut un engagement et des cycles de financement à long terme. Dr Nutt a eu l’observation générale suivante : « Il faut compter une génération avant de voir les effets d’une aide bien gérée. » Elle a donc soutenu que, dans le contexte du travail de protection de l’enfant,

[…] des cycles de financement de trois à cinq ans au minimum, même dans les phases d’urgence, offrent une structure et une continuité permettant aux familles d’entretenir des perspectives plus optimistes, de ne pas craindre pour leur avenir et de ne pas s’engager dans des activités à haut risque pour elles-mêmes et leurs enfants[167].

Ces observations ne sont pas sans rappeler celles qui ont été évoquées au chapitre précédent au sujet des efforts visant à éliminer les mariages d’enfants. Elles se rapprochent aussi de ce qu’on trouvera dans un chapitre ultérieur portant sur le renforcement des capacités des organisations et des collectivités. Pris tous ensemble, ces témoignages renforcent que le travail de protection des enfants et des jeunes est une entreprise complexe. Dans beaucoup de cas, il faut des activités – comme des efforts visant à renforcer les systèmes, à créer des espaces sécuritaires et à changer des normes sociales bien ancrées – qui sont nécessaires, mais ni faciles, ni susceptibles de donner des résultats rapides.

REJOINDRE ET AUTONOMISER LES JEUNES

En 2014, le groupe des 10 à 24 ans représentait 25 % de la population mondiale, et une forte majorité d’entre eux habitaient dans des pays en développement[168]. Dianne Stewart, directrice de la Division de l’information et des relations extérieures, au FNUAP, a souligné que la génération actuelle de jeunes est la plus importante de l’histoire. De plus, elle comprend « 600 millions d’adolescentes[169] ».

En général, le Comité a appris que les jeunes – et plus particulièrement les adolescents[170] – doivent affronter des défis et des vulnérabilités qui leur sont propres, depuis le manque de débouchés jusqu’à des risques aggravés en matière de santé. Toutefois, il semble que les jeunes, comme groupe distinct, puissent être négligés dans les initiatives de développement, si on compare celles-ci aux interventions mondiales proposées pour les enfants de moins de cinq ans. Il faut un soutien ciblé pour garantir que cette impressionnante génération mondiale de jeunes soit équipée pour mener une vie productive, qu’elle soit en santé et pleine d’espoir. Mme Stewart a soutenu : « On ne peut pas parler de développement durable sans d’abord nous assurer de répondre aux besoins des jeunes, et cela nécessite des investissements et des engagements. » Le rendement de ces investissements serait important, selon elle. S’ils sont protégés, instruits et autonomisés, les jeunes deviendront de « puissants catalyseurs de changement social et façonneront un avenir meilleur pour nous tous[171] ».

À l’heure actuelle, des obstacles se dressent sur le chemin de nombreux adolescents qui voudraient concrétiser cette vision. Mme Stewart a affirmé : « Dans bien des pays, l’adolescence est une période où la vie s’ouvre aux garçons, mais se termine pour les filles[172]. » Elle a énuméré des facteurs qui contribuent à compliquer le cheminement des adolescentes, dont des pratiques nocives et la violence sexuelle et la grossesse à l’adolescence. Elle a ajouté :

Des millions d’adolescentes et de jeunes femmes vivent dans une extrême pauvreté. Elles travaillent peut-être comme femmes de ménage, occupent des emplois non sécuritaires ou sont exploitées dans l’industrie du sexe. Elles peuvent être des migrantes ou elles peuvent être touchées par un conflit ou une catastrophe, soit des situations dans lesquelles les jeunes femmes et les filles sont souvent très susceptibles d’avoir une mauvaise santé sexuelle et reproductive et d’être victimes de violence et d’exploitation[173].

Mme Stewart a encore fait valoir que la promotion et la protection des droits fondamentaux de ces adolescentes et femmes pouvaient leur permettre de devenir « de puissants catalyseurs de développement social et économique[174] ».

Certains témoins ont attiré l’attention sur le fait que le chômage chez les jeunes est un défi particulier. Sarah Moorcroft, directrice des programmes internationaux chez Street Kids International, a estimé que le taux de chômage chez les jeunes dans le monde est actuellement supérieur à 12,6 % et « peut même atteindre 30 % » dans certaines régions. Dans ce contexte, soutient-elle, beaucoup d’enfants et de jeunes vivent, travaillent et mendient dans les rues. Elle a ajouté une observation générale : « Il y a également une menace croissante à la sécurité en raison d’une jeune population stagnante et d’une stigmatisation des jeunes exclus du marché du travail pendant de très longues périodes[175]. »

M. Breen a fait valoir devant le Comité que le phénomène du chômage chez les jeunes « peut également être lié à la montée de la culture des gangs et des modes de vie fondés sur la violence, surtout chez les jeunes hommes ». Il a signalé des projets pour jeunes où « l’accent est vraiment mis » sur l’emploi et la création d’entreprises qui sont réalisés dans des pays comme le Honduras, El Salvador, la Jamaïque, le Nigéria, le Pérou et la Bolivie[176].

Les moyens de subsistance et l’autarcie sont des aspects importants de l’autonomisation des jeunes. M. Breen a dit au Comité :

Même si cela peut paraître évident, il vaut la peine de mentionner que le sentiment d’accomplissement et la fierté que ressentent les jeunes femmes et hommes qui lancent leur propre entreprise se répercutent souvent sur d’autres aspects de leur vie et peut par exemple permettre à une jeune femme de pouvoir négocier davantage le moment où elle se mariera et aura des enfants, ainsi que le nombre d’enfants qu’elle aura. Il est vrai également que les jeunes à qui s’offrent des possibilités sur le plan économique sont moins susceptibles d’être attirés par les gangs et l’activité criminelle[177].

Dans le même ordre d’idées, Mme Moorcroft a fait remarquer que, « lorsqu’on donne à cette population des occasions d’être autonome et de renforcer sa dignité et qu’on lui donne des habiletés fondamentales en économie et en développement, elle peut prospérer, et elle y arrive[178] ». Entre autres recommandations, elle préconise « plus d’investissements dans nos jeunes », et les fonds seraient injectés « dans l’éducation et les formations traditionnelles et alternatives avec des programmes précis concernant l’entrepreneuriat pour les jeunes, l’apprentissage et la formation professionnelle, les habiletés fondamentales, la gestion financière, la littératie, les conseils sur la recherche d’emploi et le jumelage emploi-travailleur ». L’organisation de Mme Moorcroft demande aussi au Canada de soutenir « la création d’emplois et la diversification des moyens de subsistance » et « d’investir pour assurer aux jeunes un accès sécuritaire aux programmes de crédit, d’assurance et d’épargne pour réduire les facteurs économiques de la pauvreté chez les enfants et les jeunes[179] ».

Outre la création de moyens de subsistance et la promotion de l’entrepreneuriat, d’autres stratégies peuvent aider à autonomiser les jeunes : la création d’espaces sécuritaires et le soutien aux jeunes leaders. Patricia Pelton, membre du Comité des relations internationales de YMCA Canada, a expliqué au Comité que les espaces sécuritaires sont un « mandat » dans le travail du YMCA[180]. M. Chauvin a également fait ressortir l’importance des espaces sécuritaires. Il a décrit des initiatives réalisées il y a quelques années par la Société canadienne de santé internationale et l’Association canadienne de santé publique après la guerre des Balkans. Selon lui, elles « ont montré l’efficacité de créer des endroits sûrs dirigés par les jeunes où ils peuvent discuter des problèmes auxquels ils sont confrontés et trouver des stratégies pour réduire leur risque de maladies transmissibles sexuellement, d’exploitation sexuelle et de consommation ou d’abus de drogues[181] ».

Au sujet des aptitudes au leadership et du développement, Mary Anne Roche, vice-présidente, Initiatives internationales et gouvernance de YMCA Canada, a expliqué au Comité que le YMCA « met beaucoup l’accent sur les jeunes qui dirigent les jeunes ». Elle a résumé en ces termes la justification de cette stratégie : « En créant un sentiment d’appartenance communautaire parmi les jeunes, nous renforçons leur résistance et les encourageons à faire une contribution positive à la société civile[182]. »

Mme Roche a souligné le « modèle de responsabilisation des jeunes » que suit l’Alliance africaine des YMCA. L’appellation du modèle, a-t-elle précisé, « reflète le but de l’Alliance africaine des YMCA, qui croit que sa mission est de donner aux jeunes les moyens d’avancer vers une renaissance africaine, qui est une façon de parler du renouveau de l’Afrique dont les Africains eux-mêmes seront les maîtres d’œuvre ». On encourage les jeunes, au lieu de « se voir comme étant assujettis aux conditions dans lesquelles ils vivent », à sentir en eux la capacité d’agir. Comme elle l’a expliqué, le cheminement commence par la transformation de la mentalité du jeune : plutôt de se voir comme des « sujets », ils « se voient comme citoyens, un citoyen étant un jeune qui a le sentiment d’avoir la capacité d’agir, qui croit qu’il peut apporter une contribution à la collectivité, qu’il a une vie remplie d’espoir et de possibilités, entre autres, sur le plan de l’éducation et de l’emploi[183] ».

La capacité d’agir est un thème auquel a fait écho également M. Breen, qui a dit que son organisation, Cuso, voit que « les enfants et les jeunes sont des participants actifs et des agents de changement, plutôt que de simples utilisateurs de services ». Il a fait valoir que le Canada « devrait veiller à ce que les filles, les garçons, les jeunes hommes et les jeunes femmes participent toujours à la prise de décisions au sujet des enfants et des jeunes et devrait appuyer les pratiques novatrices visant à habiliter les enfants et les jeunes et à leur permettre de s’exprimer[184] ».

Mme Dale a parlé de la résilience et du leadership chez les jeunes filles du nord de l’Ouganda – dont beaucoup ont entre 11 et 14 ans – qui ont fui des mariages forcés et ont survécu à la violence sexuelle. Après avoir insisté sur le fait que ces filles ont « énormément de résilience », elle a fait remarquer que, étant donné les expériences qu’elles ont vécues, on a souvent tendance « à les considérer comme des victimes et à favoriser la passivité ». Elle a soutenu qu’il faudrait plutôt « leur donner des occasions d’apprendre quels sont les devoirs d’un citoyen dans la société civile et de renforcer leurs capacités et aussi leur suggérer des façons de contribuer à leur collectivité[185] ».

Selon Caroline Marrs, directrice du Centre for Gender Justice, Oxfam Canada, les obstacles à la participation des jeunes « sont ancrés dans le déséquilibre des rapports de force ». Les jeunes sont sous-représentés dans les tribunes où se prennent les décisions et « leurs besoins et leurs commentaires y sont ignorés des décideurs ou leur sont inconnus ». La discrimination sexuelle peut aggraver les effets de cette marginalisation. Mme Marrs a expliqué pourquoi il était important de comprendre les causes premières « pour abolir les obstacles à la participation ». Elle a expliqué, par exemple : « Les jeunes et les enfants, en particulier les jeunes femmes et les filles, peuvent être victimes de violence chez elles ou dans leur milieu, ce qui les empêche de profiter d’excellents programmes.[186] ».

Lorsqu’ils sont autonomisés, les jeunes peuvent s’engager de façon constructive dans les écoles, dans les familles, les collectivités et les sociétés. Mme Marrs a fait ressortir ce point en citant l’exemple de jeunes femmes et de jeunes hommes qui « jouent un rôle très actif et transformateur au sein des programmes d’Oxfam dans le but de faire évoluer les mentalités, les normes et les comportements qui perpétuent la violence envers les femmes et les filles », ajoutant : « Ce travail essentiel s’inscrit dans la durée[187]. »

En somme, les témoignages ont renforcé l’idée qu’investir dans les jeunes, c’est investir dans l’avenir et, plus précisément, dans une nouvelle génération de dirigeants mondiaux. Ce point a été évident dans l’exposé de Wilfrid Wilkinson, ancien président de Rotary International, qui a décrit le programme des Centres du Rotary pour la paix. Il a raconté que le réseau des anciens participants au programme avait ensuite accompli un travail important, notamment dans le domaine de la protection des enfants. Pour ne donner qu’un seul exemple, M. Wilkinson a parlé d’une ancienne participante qui est maintenant directrice de la politique relative à l’Amérique latine au Centre international pour les enfants disparus et exploités, centre dont le siège se situe à Brasilia, au Brésil. L’investissement en faveur des jeunes a donc eu un effet multiplicateur, car certains de ces jeunes occupent maintenant des postes de commande qui leur permettent d’aider d’autres jeunes[188].

Toutefois, les jeunes ont beaucoup moins de chances d’être en mesure d’exploiter les occasions d’exercer un leadership décrites plus haut s’ils ne sont pas munis de ce qu’il faut pour mener une vie saine. Le Comité a appris que des adolescents – y compris des filles mariées – ont des besoins en matière de santé qui nécessitent un soutien ciblé. Deux chiffres sont révélateurs. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), chaque année, environ 16 millions de femmes de 15 à 19 ans donnent naissance. Quelque 95 % de ces naissances « ont lieu dans des pays à revenu faible ou intermédiaire[189] ». L’OMS signale encore que, même si la mortalité maternelle chez les adolescentes « diminue de façon significative depuis l’année 2000 », elle « est la deuxième cause de décès chez les filles de 15 à 19 ans dans le monde, derrière le suicide[190] ». ONUSIDA a fait connaître une autre donnée révélatrice. L’organisation estime que « les adolescents sont le seul groupe d’âge où les décès attribuables au sida ne diminuent pas, tandis que, dans tous les autres groupes d’âge confondus, le recul a été de 38 % entre 2005 et 2013[191] » [traduction].

Comme Dr Dyalchand l’a expliqué, des interventions axées sur les adolescentes contribueraient beaucoup à accélérer la réalisation des objectifs mondiaux de réduction de la mortalité maternelle et néonatale. La raison est simple, selon lui. La mortalité maternelle chez les adolescentes « est cinq fois plus élevée que chez les femmes de plus de 20 ans[192] ». Après avoir fait état des statistiques mondiales sur les grossesses d’adolescentes, Mme Stewart a dit au Comité : « Bon nombre de ces grossesses sont le résultat de relations sexuelles non consensuelles, et cela se produit 9 fois sur 10 dans des mariages précoces[193]. »

L’une des causes de ces risques en matière de santé est l’insuffisance de l’accès à des services et produits pour assurer leur santé sexuelle et reproductive. Comme on lui demandait ce que les pays donateurs pouvaient faire pour aider à améliorer le sort des adolescentes, elle a répondu « qu’il y a deux éléments importants qui font défaut ». Le premier qu’elle a signalé : « Tout d’abord, il y a un besoin énorme de produits de santé génésique qui n’est pas comblé. » Elle a ajouté : « À l’heure actuelle, 221 millions de femmes aimeraient utiliser des moyens de contraception et n’y ont pas accès. » De surcroît, a-t-elle dit, les programmes mondiaux en ce domaine sont sous-financés. À propos du programme du FNUAP qui fournit ces produits « aux pays qui ne sont pas en mesure de gérer eux‑mêmes la situation », elle a appris au Comité que, pour 2015, « il nous manque 100 millions de dollars, et on ne parle pas d’accroître le programme. Il s’agit simplement de répondre à la demande actuelle[194] ».

Le deuxième élément qui manque, selon Mme Stewart, ce sont les « services adaptés aux jeunes ». Elle a fait savoir que, pour beaucoup de jeunes filles, « l’accès à ce type de services et de produits est limité en raison du peu de services qui sont offerts aux jeunes femmes et aussi du manque d’accessibilité aux services de toutes sortes ». Il est déjà difficile de rejoindre ces jeunes filles. Mme Stewart a fait remarquer que, même dans le cas des jeunes femmes qui ont été mariées, elles ne sont pas « assez âgées […] pour avoir accès elles-mêmes à ces services, (et) ne sont pas autorisées à obtenir ces services[195] ».

M. Prasad a avancé une opinion : étant donné la priorité qu’il donne à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants dans le monde, « le Canada pourrait investir davantage dans la planification familiale ». Se reportant à l’initiative de Muskoka, il a rappelé que 30,87 millions de dollars avaient été spécialement affectés au financement de la planification familiale pendant les exercices de 2010 à 2014. Pour reprendre ses propos : « Toutefois, cela représente seulement 1,2 % de l’ensemble des dépenses effectuées dans le cadre de l’Initiative de Muskoka à ce moment-là, c’est-à-dire 2,565 milliards de dollars. » M. Prasad a fait valoir que les investissements en santé sexuelle et reproductive – notamment en planification familiale – soutiennent le respect des droits de la personne et « sont également des investissements intelligents[196] ».

M. Prasad a également attiré une attention particulière au problème des avortements dangereux, disant : « Si une adolescente tombe enceinte malgré elle, il se peut qu’elle n’ait pas accès à un avortement sécuritaire ni aux soins prodigués après un avortement. » Il a énuméré une série de facteurs qui peuvent limiter l’accès à ces services, notamment les lois du pays, « la disponibilité du service et, encore une fois, le consentement de l’époux ». M. Prasad a ajouté que, selon l’estimation la plus récente, 48 000 femmes et filles meurent chaque année dans le monde entier des suites d’avortements dangereux[197].

En parlant de l’accès à l’avortement dans le contexte du travail de développement international et de la politique de financement du Canada en cette matière, Mme McCarney a dit : « Dans la plupart des pays, nous demanderions que ces services soient rares, légaux et sécuritaires, mais dans la plupart des pays où nous travaillons, ce n'est vraiment pas le cas. Ils ne sont ni accessibles, ni légaux. » Elle l’a dit que les acteurs du développement international ne peuvent « pas aller à l'encontre des lois des pays où nous travaillons, alors nous sommes limités, peu importe les politiques ». Mme McCarney a ajouté : « D'autres donateurs tentent de changer les lois ou de faire des choses de ce genre. Parfois, ils réussissent, mais d'autres fois, ce n'est pas vraiment très concluant[198]. »

Outre les services et produits nécessaires à la santé reproductive, il y a le problème de l’éducation. Abordant la question de la nécessité de « programmes d’éducation à la sexualité », Mme Stewart a affirmé : « Les jeunes ont le droit de comprendre le fonctionnement de leur corps, les différents moyens de protection et les changements que l’adolescence et la puberté apporteront dans leur vie[199]. » M. Prasad a fait valoir pour sa part que cette éducation est importante du point de vue de la prévention, « pour veiller à ce que les adolescentes et les jeunes femmes obtiennent les renseignements dont elles ont besoin pour prendre des décisions relatives à leur fertilité, pour se protéger du VIH, etc.[200] ».

Bien que les jeunes femmes et les jeunes filles soient souvent au centre des discussions sur les adolescents – y compris dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive –, plusieurs témoins ont signalé qu’il était important de tenir compte des jeunes hommes et des garçons dans l’examen des enjeux des jeunes et des programmes qui portent sur ces enjeux. Dr Dyalchand a fait observer que, au fil des ans, « nous avons lutté contre des problèmes liés aux femmes et aux filles, mais nous n’avons jamais vraiment tenu compte des garçons et des hommes. Nous n’avons jamais cru qu’ils avaient, eux aussi, des problèmes de santé reproductive et sexuelle qui devaient être réglés[201]. »

Dr Dyalchand a expliqué que les garçons et les jeunes hommes ont certes leurs besoins propres, mais qu’ils pouvaient aussi faire partie de la solution aux problèmes avec lesquels les jeunes femmes et les filles sont aux prises. L’un des éléments de la stratégie que son organisation applique pour régler le problème des mariages d’enfants en Inde « consiste à s’occuper des garçons et des jeunes hommes et à les sensibiliser aux différences sexospécifiques, à faire d’eux des personnes bienveillantes et à réduire les taux d’agression sexuelle et de violence familiale dans nos collectivités, car il s’agit d’une charge de morbidité supplémentaire dont souffrent ces filles[202] ». Travailler avec des dirigeants masculins au niveau local, comme Mme Stewart l’a indiqué, aide à faire évoluer les attitudes et les pratiques : « On a beau adopter des lois, si les dirigeants et les gouvernements locaux ne les appliquent pas, on n’aboutira à rien[203]. »

Comme la date butoir des OMD approche, des témoins ont fait valoir que la question des jeunes – et des problèmes qui les touchent – doit être abordée expressément dans le programme de développement de l’après-2015 et les ODD. Tout en notant que son organisation est « très encouragée » par le libellé actuel des ODD, notamment en ce qui concerne la prévention des mariages d’enfants et les décès évitables, Mme Degnan Kambou a précisé que l’organisation souhaite « qu’il y ait un accent accru précisément sur les adolescentes, parce que, selon nous, ce sont elles qui sont les plus vulnérables[204] ». De la même façon, Mme Stewart a soutenu : « Même si nous savons que les objectifs concernant la santé maternelle, néonatale et infantile n’ont pas été atteints, nous devons tenir compte de la santé des adolescentes dans le processus pour l’après-2015[205]. » À propos du même sujet, le DBhutta a exprimé l’espoir que, dans la version définitive des objectifs, « [n]ous n’allons pas mettre de côté les garçons seulement parce que nous nous sommes concentrés sur la santé génésique des filles en particulier[206]. »

Mme Roche a dit que son organisation encourageait le gouvernement du Canada à investir dans des stratégies d’autonomisation des jeunes, notamment « en mettant un accent plus marqué sur les jeunes et leurs préoccupations dans le contexte des Objectifs du Millénaire pour le développement après 2015 ». Lorsqu’on lui a demandé si, à son avis, la liste actuelle des ODD proposés tenait compte suffisamment des besoins des jeunes, Mme Roche a répondu par la négative. Elle a ensuite fait valoir qu’il y a possibilité de « mettre davantage l’accent sur les jeunes » dans les cibles. Pour reprendre ses propos : « Il y a toujours le risque que les jeunes soient laissés pour compte par mégarde si on oublie de les mentionner[207]. »

SOUTENIR LES CAPACITÉS LOCALES

Bien qu’il faille favoriser l’autonomisation au moyen d’initiatives qui ciblent directement les enfants et les jeunes, il est aussi possible de la favoriser en renforçant les collectivités où ils vivent. Les administrations locales, les organisations, les dirigeants et les mécanismes communautaires ont tous un rôle à jouer pour promouvoir la protection des enfants et des jeunes. Comme c’est le cas dans la plupart des travaux efficaces de développement, les capacités locales sont indispensables au travail de protection des enfants.

Le Comité a tiré des enseignements des expériences de deux organisations de bienfaisance, qui ont donné un aperçu de la façon dont des programmes de formation ciblés peuvent renforcer les capacités locales de protection des enfants. Le premier témoin a été Paul Gillespie, président de Kids’ Internet Safety Alliance (KINSA), dont les propos ont porté surtout sur les stratégies nécessaires pour combattre le mauvais traitement virtuel des enfants dans les pays en développement. M. Gillespie a insisté sur le fait que ce problème présente, par sa nature même, un défi mondial. Pour s’y attaquer, il faut donc que « les pays du monde entier (aient) des cyberpoliciers hautement qualifiés, car si nous leur donnons de la formation, il est inévitable que les cyberenquêteurs du Brésil au Botswana et au Bélarus nous en diront davantage sur ce que font les prédateurs du Canada, de la Colombie et de la Chine[208] ».

Les moyens de « mener des enquêtes sophistiquées sur Internet » sont une des difficultés principales que M. Gillespie a indiquée. Il a donné au Comité plusieurs exemples de la formation « rentable » que KINSA offre pour renforcer les capacités des forces de l’ordre dans divers pays, de la Roumanie au Brésil en passant par l’Afrique du Sud. KINSA fait appel à des formateurs provenant de diverses forces policières qui sont considérées comme des « leaders mondiaux » dans le domaine, y compris de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Les programmes de formation, par exemple, ont permis de créer une unité spécialisée pour réaliser des enquêtes sur la pornographie juvénile sur Internet en Roumanie et d’élaborer une stratégie nationale en Afrique du Sud pour réprimer la cybercriminalité qui s’attaque aux enfants[209].

 À l’avenir, « KINSA donnera de la formation régionale à 1 000 policiers et procureurs de l’Afrique de l’Est au cours des cinq prochaines années. » La formation est dispensée avec l’Organisation de coopération des chefs de police d’Afrique de l’Est. Le témoin a ajouté que « 100 agents recevront une formation de formateurs ». Renforcer les capacités des services policiers des pays en développement de l’Afrique est important, estime-t-il, parce que nombre de ces services « commencent à peine à regarder au-delà des exigences technologiques du maintien de l’ordre dans le monde matériel, et ils se voient obligés de partir de zéro, alors que les criminels locaux se servent des plus récentes technologies disponibles dans les pays en développement[210] ».

L’assistance au renforcement de capacités, qui peut soutenir les acteurs sur le terrain à adresser les défis de protection de l’enfant, n’est pas limitée à un enjeu ou un type d’intervention. Le Comité a entendu d’un autre exemple lors du témoignage de Rachel Pulfer, directrice exécutive des Journalists for Human Rights (JHR). Elle a décrit la mission de son organisation : « renforcer la capacité des médias dans les pays en développement, dans les sociétés en transition et dans d’autres milieux où le secteur des médias est habituellement peu développé ». Ces dernières années, l’organisation a déployé ses efforts en Afrique subsaharienne. Il s’agit d’envoyer « des instructeurs en journalisme travailler avec les journalistes locaux pour qu’ils les aident à développer leurs compétences et leur offre de la formation professionnelle ». Le résultat ultime, selon Mme Pulfer, est « un style journalistique robuste et percutant axé sur la responsabilisation, un journalisme qui priorise les questions locales en matière de droits de la personne et qui cherche à tenir les autorités locales responsables de leurs actions[211] ». Elle a soutenu que ce renforcement des capacités donne des résultats durables, puisqu’il catalyse l’initiative locale pour s’attaquer à des problèmes locaux.

Mme Pulfer a fait valoir que la responsabilisation que favorise un renforcement de la capacité journalistique locale peut avoir une influence sur les pratiques de gouvernance locales, notamment en ce qui concerne le développement et la protection de l’enfant. À ce propos, elle a décrit le travail d’un journaliste au Libéria, Theophilus Seeton, qui avait travaillé avec les JHR dans le cadre d’un programme récent. Il a mené une enquête pour « savoir pourquoi une école de la capitale du Libéria était toujours aussi délabrée malgré les millions que le ministère de l’Éducation recevait des donateurs internationaux ». Son article a été repris par le réseau de reporters des JHR, de sorte que d’autres articles ont été consacrés au même thème. Mme Pulfer a dit que le résultat ultime de cette couverture a été la suspension du ministre de l’Éducation et une enquête interne commandée par la présidente du pays. Le même ministre a ensuite été « congédié » pour corruption et remplacé par « un candidat plus responsable[212] ».

Mme Pulfer a fait valoir que, comme c’est le cas des programmes de KINSA, des interventions peu coûteuses peuvent avoir des résultats qui ont beaucoup d’impact, notamment l’autonomisation d’acteurs locaux qui se chargent eux-mêmes de la protection de l’enfant. Elle a expliqué au Comité qu’« un instructeur moyen de JDH travaille avec un minimum de 20 journalistes à la fois ». Elle a ajouté que le contrôle plus serré que permet le développement des médias locaux peut aider à « assurer une meilleure transparence dans le domaine de l’aide et d’améliorer le développement proprement dit[213] ».

Le Comité a aussi appris que l’existence d’organisations locales efficaces pouvait assurer le maintien des services en période difficile. S’appuyant sur l’expérience du mouvement de la Croix-Rouge, Mme Strong a parlé de « l’importance de systèmes de santé renforcés et résilients dans les collectivités et de la collaboration avec les partenaires locaux ainsi que du renforcement de leurs capacités, surtout en période de catastrophe, de conflit et de fragilité ». Lorsque les structures gouvernementales sont limitées ou carrément absentes, les intervenants locaux peuvent accéder aux collectivités et y être acceptés. Elle a donné l’exemple du Croissant-Rouge arabe syrien. Le réseau de la Croix-Rouge s’est efforcé de renforcer les capacités de ce partenaire local avant le conflit, et Mme Strong a dit au Comité : « Cette force lui a permis de continuer de fonctionner pendant toute la crise. Il a une portée sans égale dans l’ensemble du pays, et il offre des services d’urgence et de soins de santé primaires dans les régions les plus marginalisées[214]. »

Un autre élément clé des capacités locales, ce sont des collectivités bien équipées. Mme Guindon a insisté sur le fait qu’il était important de renforcer « les capacités et les mécanismes communautaires[215] ». Elle a rappelé l’expérience récente de son organisation au Mali pour illustrer la complexité du travail de protection de l’enfant et l’importance des capacités locales pour prévenir les problèmes de protection et réagir aux difficultés de cet ordre. Elle dit, à propos de cette expérience :

Nous étions en train de collaborer avec le gouvernement sur la rédaction de textes de loi, qui se faisait grâce à des programmes financés par le gouvernement canadien, mais nous avions plus récemment commencé à travailler avec une série de clubs. Nous mettons sur pied des clubs de protection des enfants dont l’un des buts est de dépister et de signaler les cas de mauvais traitements infligés aux enfants. À la suite des activités de formation et de sensibilisation aux droits des enfants et aux mauvais traitements des enfants, nous avons constaté, en particulier dans une localité appelée Bougouni, une augmentation subite du nombre de cas signalés de mauvais traitements. Les lois, les systèmes, étaient en place, mais ce qui a changé la situation c’était la présence de ces clubs de protection des enfants. Nous avons pu voir que cela a mené récemment à la première arrestation et condamnation d’un trafiquant d’enfants au Mali[216].

Au plus haut niveau, le travail de protection de l’enfant est une question de lois, mais, comme Mme Guindon l’a souligné, cela concerne « aussi les mécanismes communautaires ». Comme elle l’a dit, les collectivités fortes « peuvent être la force motrice de la sensibilisation aux problèmes de protection des enfants et les prévenir, les contrôler et y répondre[217] ».

Mme Roche a parlé de l’importance du renforcement des collectivités du point de vue de l’accent que le YMCA met sur le principe de « l’engagement des jeunes dans les projets qui les concernent ». L’idée, c’est de garantir l’autonomie des YMCA locaux, qui ne feraient appel à aucun soutien extérieur. Comme elle l’a expliqué au Comité :

Tous les YMCA sont fondés et exploités par des dirigeants locaux qui en sont aussi propriétaires. C’est donc dire que les YMCA communautaires locaux, avec leurs capacités, leur savoir-faire, leurs racines profondes et leurs réseaux, sont souvent en mesure de répondre aux besoins de collectivités en situation de conflit ou d’instabilité. Lorsque les YMCA canadiens participent à des projets à l’étranger, ils le font en partenariat et offrent un soutien financier et technique égal au capital social local pour appuyer des projets qui répondent aux besoins locaux[218].

Dans le contexte du travail du YMCA, Mme Roche a aussi demandé le renforcement de la société civile dans les collectivités locales, notamment comme moyen de créer des « programmes sociaux forts et durables dont l’on peut tirer parti de bien des manières à différentes fins[219] ». L’appropriation des problèmes au niveau local peut en général aider également à apporter du changement. Mme Roche a fait remarquer que le changement social exige « un certain niveau de confiance », ce qu’il est plus facile d’obtenir pour des dirigeants locaux qui jouissent de cette confiance et sont perçus comme « des membres de la communauté qui en connaissent les réalités[220] ».

M. Breen a lui aussi fait ressortir l’importance d’une étroite collaboration durable avec les collectivités. Son organisation, Cuso International, affecte des bénévoles qui apportent leurs compétences et leur aide technique à des organismes partenaires. Le plus souvent, ces professionnels canadiens passent deux ans dans une collectivité rurale. Comme il l’a expliqué au Comité, l’approche de Cuso donne le temps nécessaire pour établir des partenariats et des relations efficaces, pour se renseigner sur le contexte local où se fait le travail et le comprendre[221].

En général, pour investir dans des organisations locales et bâtir une capacité efficace au niveau local, il faut faire preuve de patience et avoir une perspective à long terme. C’est ce qu’a fait valoir M. Chauvin : « Le renforcement de la capacité organisationnelle n’est plus aussi populaire, et malheureusement, nous en payons maintenant le prix. » Il a insisté sur le fait que ce travail demandait beaucoup de temps. Prenant l’exemple de ce qu’il faut consentir pour bâtir un institut de la santé publique qui fonctionne correctement dans un autre pays, il a estimé qu’il faudrait compter 10 ou 12 ans. Pour investir dans ces organisations, il faut donc des apports soutenus. Comme on lui demandait un exemple qui pourrait servir de modèle, il a rappelé le travail qu’il avait fait avec l’Association canadienne de santé publique, qui a appliqué un programme pour « favoriser la création et le développement de la capacité organisationnelle d’associations de santé publique non gouvernementales ». Il a ajouté que, pendant les 25 années où le programme a été financé, celui-ci a contribué à la création de 32 associations de santé publique. Aujourd’hui, « certaines d’entre elles jouent un rôle de chef de file[222] ».

S’APPUYER SUR L’INNOVATION ET LES DONNÉES

Comme on l’a soutenu dans les chapitres précédents, le bien-être des enfants et des jeunes doit reposer sur de solides fondements. En outre, le bien-être suppose de solides systèmes de protection et des environnements d’autonomisation. Pourtant, à l’intérieur de ce vaste tableau, il y a un processus constant d’examen et d’évaluation d’interventions et de modèles précis de façon à savoir lesquels d’entre eux peuvent avoir le plus d’impact sur la vie des enfants et des jeunes. Outre les nombreuses stratégies qu’on a vues dans les chapitres précédents, le Comité a appris que des idées avaient émergé de pratiques et de partenariats innovateurs. Il s’est fait dire également que les efforts pour comprendre à fond la nature des défis que les enfants et les jeunes doivent surmonter sont actuellement entravés par le fait que les données sont incomplètes, ce qui gêne les efforts déployés pour rejoindre les plus vulnérables.

En ce qui concerne l’innovation, Grands Défis Canada appuie un certain nombre d’innovations en matière de santé dans le monde. On peut même dire que le modèle propre de l’organisation est un exemple d’approche innovatrice. Le Dr Singer a expliqué que, à Grands Défis Canada, « [n]ous tirons également parti des ressources additionnelles que nous fournissent les organismes avec et sans but lucratif, ainsi que les milieux universitaires, pour dépasser le ratio 1:1 des fonds gouvernementaux ». Forte de ces ressources, l’organisation s’efforce de mobiliser et d’intégrer les innovations scientifiques, technologiques, sociales et entrepreneuriales pour améliorer la santé dans le monde[223].

Un exemple : la technique de la « mère kangourou ». Elle a été conçue parce qu’environ 15 millions de bébés naissent prématurément chaque année, dont 90 % dans le monde en développement. Le Dr Singer a présenté les faits : « Environ un million d’enfants meurent tous les ans des suites de complications dues à une naissance avant terme. Beaucoup de ceux qui survivent sont frappés d’incapacités à vie, notamment de difficultés d’apprentissage ainsi que de troubles de la vue ou de l’audition. » Il a expliqué l’innovation en ces termes : « La technique de la « mère kangourou » est une intervention simple, mais efficace, qui favorise la nutrition, l’apport de chaleur et le développement de liens entre la mère et l’enfant[224] ». Cette technique sauve aussi des vies.

Une autre innovation est le fait d’un diplômé de l’Université de Guelph qui est allé au Cambodge et a entendu parler d’un problème de déficience en fer. Le Dr Singer explique :

Voilà un problème qui touche deux à trois milliards de personnes dans le monde et qui cause des pertes de revenu à hauteur de milliards de dollars. Les enfants sont apathiques. Si les femmes tombent enceintes avec une faible numération globulaire et si elles font une hémorragie au moment de l’accouchement, elles sont plus susceptibles de mourir[225].

L’étudiant a eu l’idée de placer un lingot de fer dans les casseroles pour adresser ce problème. Pour garantir la popularité du produit – et son utilisation effective par la population –, l’étudiant a donné à la pièce de fer la forme d’un poisson porte-bonheur inspiré du folklore cambodgien. Il a aussi réussi à fabriquer le poisson à un coût relativement faible, soit environ 5 $ l’unité, et il dure cinq ans. Comme le Dr Singer a indiqué, Grands Défis Canada soutient cette entreprise sociale au Cambodge au moyen d’« une contribution, dont une partie est en fait un prêt; ainsi, l’entreprise sociale s’attaque au problème de l’anémie ferriprive, tout en acquérant une certaine discipline d’affaires[226] ».

Un autre exemple d’innovation dans le domaine de la santé est le travail de l’Initiative pour les micronutriments, organisation qui s’efforce depuis quelques années d’améliorer la nutrition des enfants. Comme M. Spicer l’a expliqué, l’organisation cible « l’élargissement d’interventions peu coûteuses aux retombées importantes qui comptent parmi les solutions optimales les plus reconnues en matière de santé mondiale ». Ainsi, l’organisation fournit des capsules de vitamine A aux enfants pour les protéger contre la maladie. Le témoin a précisé que le coût de fabrication d’une capsule est de seulement 2¢. Mark Fryars, vice-président aux Programmes et services techniques, Initiative pour les micronutriments, a expliqué que son organisation sait que, « dans les pays en développement, beaucoup de gens n’ont pas facilement accès aux systèmes de santé et aux marchés commerciaux ». Elle cherche donc les moyens de les aider[227].

Le Comité a aussi entendu parler de divers modèles de partenariats susceptibles d’améliorer la santé des enfants et des jeunes. Quelques témoins qui ont comparu s’efforcent de prévenir les problèmes de malnutrition grave en fabriquant et en distribuant des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi, ou ATPE. Mark More, chef de la direction chez MANA Nutrition, a décrit les composantes de l’ATPE, qu’il qualifie de « très simple » :

[…] du beurre d’arachide, du lait en poudre, un peu de sucre et quelques vitamines. C’est l’équivalent d’un verre de lait, d’un sandwich au beurre d’arachide et à la confiture et d’une vitamine. Les travailleurs humanitaires auraient beaucoup de mal à garder cela dans leurs poches toute une journée, alors que notre produit peut se conserver jusqu’à deux ans. Il est purgé à l’azote pour être entreposé et peut ensuite être expédié, par l’intermédiaire de diverses chaînes d’approvisionnement, c’est-à-dire les Nations Unies et le Programme alimentaire mondial, et d’autres entités, jusqu’aux enfants dans le besoin[228].

L’ATPE est peut-être composé d’ingrédients simples, mais étant donné qu’il a un impact salvateur, il constitue une innovation importante.

La Food for Famine Society, qui s’approvisionne en ATPE auprès de MANA Nutrition, a fourni des ATPE dans huit pays d’Afrique en partenariat avec Vision mondiale Canada. La fondatrice et directrice générale de l’organisation, Maria Martini, a expliqué au Comité : « La totalité des dons que nous recevons est consacrée à l’achat d’ATPE de façon à garantir la plus grande incidence possible[229]. »

Le produit ATPE appelé Plumpy’Nut a été mis au point au départ en 1996 par Nutriset, dont la directrice générale, Adeline Lescanne-Gautier, a également comparu devant le Comité. Le produit est maintenant donné à 25 millions d’enfants du monde entier. Elle a dit au Comité que Nutriset a également créé le « réseau PlumpyField » pour encourager la production locale afin de satisfaire les besoins locaux. Son organisation à des partenaires dans des pays en développement « qui fabriquent ce produit en utilisant les mêmes normes internationales de qualité que celles qui existent en France ou aux États-Unis ». Elle a ajouté que l’organisation avait transféré son savoir-faire à des usines partenaires en Haïti, au Niger, au Burkina Faso, au Soudan, en Éthiopie, à Madagascar et en Inde. Mme Lescanne-Gautier s’est dite fière du fait que, « en 2012, tous les besoins du Niger ont été comblés par la production locale[230]. »

Le réseau PlumpyField compte actuellement huit partenaires. Mme Lescanne‑Gautier estime qu’encourager cette production locale est un moyen de renforcer la capacité locale : « C’est aussi l’occasion de développer une agro-industrie locale de qualité qui peut mettre en valeur des matières premières locales. » Elle a soutenu qu’il est important d’acheter des produits locaux lorsque c’est possible, car cela aide l’économie locale : « […] il faut aider ces économies si nous voulons un jour arrêter d’envoyer des produits destinés à des enfants qui souffrent de la faim[231] ».

L’innovation en matière de développement ne se limite pas au secteur de la santé. Mme Moorcroft a présenté un exemple de pratique novatrice dans le contexte du travail de Street Kids International sur des programmes d’entrepreneuriat et d’emploi qui visent les jeunes vulnérables. Elle a expliqué au Comité que beaucoup de jeunes qui participent aux programmes de l’organisation « ont peu ou pas d’études ou de compétences en littératie ». Consciente de cette réalité, l’organisation a « recours à des approches axées sur les jeunes qui nécessitent peu de compétences en littératie, comme les histoires, les jeux, les discussions et les aides visuelles pour que chaque aspect de nos programmes soit significatif et pertinent pour les jeunes ». Mme Moorcroft a précisé en outre que ces programmes s’appuient sur les expériences et les connaissances que les jeunes ont acquises eux-mêmes pour « renforcer leurs capacités de gagner de l’argent de manière sécuritaire et décente[232] ».

À propos du travail novateur que font des organisations locales pour prévenir le mariage d’enfants, Dr Dyalchand a fait valoir que l’appui aux innovations n’était qu’une première étape. Ce qui est beaucoup plus important, selon lui, c’est donner ensuite plus d’ampleur aux pratiques innovantes. Pour reprendre ses propos, « nous ne pouvons pas expérimenter et innover pour le reste de notre vie ». Le témoin a donc soutenu qu’il fallait évaluer l’efficacité de différentes innovations pour qu’on puisse leur donner plus d’ampleur et les reproduire[233].

En général, la capacité d’observer les initiatives en matière de développement et de les évaluer pour voir ce qui réussit et ce qui échoue, ce qui prospère et ce qui périclite, dépend de la disponibilité de bonnes données. Elles renseignent sur les faits nécessaires à de saines décisions sur les programmes et les ressources nécessaires pour surmonter les défis du développement. En outre, les données sur les enfants et les jeunes sont indissociables de leur bien-être, car elles font connaître aux décideurs, de manière concrète et statistique, les difficultés qu’ils éprouvent. Pour employer une formule simple, pour qu’un enfant compte, il faut qu’il soit compté.

Au niveau mondial, le Canada s’est efforcé d’attirer l’attention sur l’importance de solides systèmes d’enregistrement des statistiques de l’état civil et des faits d’état civil (SEC/FEC) dans le contexte des efforts déployés pour améliorer la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. En septembre 2014, le premier ministre a annoncé la contribution du Canada au Mécanisme de financement mondial à l’appui de l’initiative Chaque femme, chaque enfant, dont il a été question plus haut. Le nouveau mécanisme vise notamment à établir « une plateforme multidonateurs pour aider les pays en développement à bâtir et à renforcer » leurs systèmes SEC/FEC[234]. Le Canada a affecté 100 millions de dollars de sa contribution expressément à cette fin[235].

Mme Jacovella a souligné que l’enregistrement était important « du point de vue du développement et des droits de la personne ». Comme on l’a vu dans un chapitre antérieur, l’enregistrement de l’enfant est lié à son accès futur aux services, à l’établissement de l’âge de la jeune personne au moment du mariage et à l’inscription à l’école, entre autres choses. Mme Jacovella a fait savoir que, malgré l’importance fondamentale de ce droit, dans plus d’une centaine de pays en développement « il n’y a pas de système qui fonctionne bien ». Ce que cela veut dire concrètement, c’est « qu’environ 40 millions de naissances, c’est-à-dire à peu près le tiers des naissances dans le monde, ne sont pas enregistrées; et les deux tiers des décès, encore une fois 40 millions, ne sont pas reconnus légalement[236] ».

Mme Stewart a indiqué que le FNUAP travaille à l’obtention de données. Elle a fait remarquer : « […] on ne peut pas protéger ces adolescentes si elles ne sont enregistrées nulle part ». Outre le travail sur les questions de systèmes SEC/FEC, qui sont le point de départ, le travail du FNUAP sur les recensements nationaux consiste à s’assurer que « la ventilation des données par sexe et par âge est considérée comme un élément essentiel de toutes les activités de recensement[237] ». M. Chauvin a aussi soutenu que les efforts visant à renforcer les capacités en ce domaine ne devraient pas s’arrêter à l’enregistrement civil. Il a plaidé pour des investissements qui visent à améliorer la capacité de faire des recensements nationaux, affirmant que ces données « sont essentielles pour évaluer l’efficacité des programmes de santé et déterminer la mesure dans laquelle ils favorisent la protection des femmes, des enfants et des jeunes[238] ».

Il peut aussi y avoir place pour l’innovation dans les efforts qui tendent à améliorer l’enregistrement et la capacité en matière de statistiques. Comme nous l’avons vu plus tôt, M. Breen a évoqué la possibilité d’utiliser des technologies simples pour faciliter la collecte des données, dont le téléphone mobile, aujourd’hui omniprésent. De plus, le témoin estime « qu’il y a là une tâche concrète dont pourraient s’acquitter des professionnels canadiens qualifiés. Ils pourraient aller travailler en collaboration avec des homologues, pour créer des bases de données et examiner les systèmes d’information ». Le témoin a avancé l’idée qu’il pourrait y avoir des possibilités de « fournir ce genre d’accompagnement au développement dirigé par des personnes et prenant la forme d’initiatives bénévoles à long terme pour permettre aux gens de mettre au point un système [de données] plutôt que de tout simplement leur en imposer un[239] ».

Un dernier mot à propos des données et des systèmes nécessaires pour les recueillir concerne le programme de développement de l’après-2015. Voici ce que l’ambassadeur Rishchynski a dit au Comité :

Nous commençons maintenant les négociations pour finaliser le cadre du développement au-delà de 2015, et les exigences en matière de surveillance et de suivi doivent être au centre du programme, afin que nous puissions ventiler les données et nous assurer que les fonds sont acheminés aux gens qui en ont le plus grand besoin dans un domaine particulier. En fait, nous en discutons maintenant, car nous établissons les cadres nécessaires aux indicateurs qui nous permettront d’effectuer ce travail au fur et à mesure que le programme sera mis sur pied après son adoption en septembre[240].

Étant donné les besoins et les lacunes énumérées, il est probable qu’un domaine où il faudra un renforcement des capacités et une assistance technique pendant quelques années encore est celui de la mise en place de systèmes nationaux solides qui puissent produire des données sûres et non ventilées qui permettront d’exercer un contrôle par l’entremise d’un cadre de suivi.

CONCLUSION

Le rapport du Comité touche une large gamme d’enjeux qui se rapportent à la protection de l’enfant. Quand on étudie un aspect ou l’autre du développement international, puisque c’est ainsi qu’on désigne ce vaste domaine, on se sent vite dépassé par l’ampleur du sujet. C’est que le seul fait de s’attaquer à des questions de développement international fait intervenir des défis d’une ampleur redoutable, avec d’infinis détails, et l’entreprise oblige en quelque sorte à se débattre avec la complexité de contextes économiques, sociaux et politiques différents et la réalité à laquelle sont confrontées des collectivités et des personnes bien précises. La situation et le sort de millions, voire de milliards de gens dans le monde sont littéralement en jeu. Le Comité est conscient de la complexité et de l’importance des enjeux auxquels il s’est attaqué.

Le Comité a également été frappé par la nature convaincante des témoignages et par le dévouement et la détermination manifestés par un si grand nombre de témoins. Comme dans la plupart des sphères de la politique, les idées – et le changement qu’elles tendent à apporter – doivent avoir leurs champions. La volonté de mettre un terme à la violence, à l’exploitation et aux mauvais traitements dont sont toujours victimes tant d’enfants et de jeunes a été évidente tout au long de l’étude réalisée par le Comité, tout comme l’engagement à bâtir quelque chose de meilleur : un avenir productif, placé sous le signe de la bonne santé et de l’espoir. Au concert de ces voix, le Comité apporte son soutien total.

Si complexe le sujet soit-il, un certain nombre d’idées centrales et de thèmes récurrents sont ressortis de l’étude. Pour commencer, la diversité des exposés a montré qu’il était impossible de classer les objectifs du développement dans des catégories nettement définies. Si le but ultime est le bien-être de l’enfant, alors la santé, la sécurité, la dignité, l’équité et l’égalité figurent toutes dans le même tableau.

De la même façon, la pertinence, la nécessité, l’urgence d’une mobilisation pour la protection des enfants et des jeunes ne se limitent pas au domaine du développement international. Il est clair qu’une approche intégrée et cohérente de la protection de l’enfance s’impose. Comme instance où se regroupent les politiques et les ressources consacrées au commerce, au développement et à la diplomatie, ainsi que le personnel qui s’en occupe, le MAECD devrait être bien équipé pour s’attaquer à la tâche. Le Canada, s’appuyant sur les investissements déjà importants qu’il a affectés à la santé et à l’éducation dans le monde, peut prétendre jouer un rôle de chef de file pour assurer la protection de l’enfance.

L’une des cibles doit être de faire évoluer les mentalités. La discrimination sexuelle et la dévalorisation des filles sont à l’origine de nombreuses difficultés en matière de développement. Certes, le Comité s’est fait dire qu’il n’était pas facile de changer des normes sociales profondément ancrées, mais cela demeure possible, surtout si on s’attelle à la tâche avec patience et avec le soutien de partenariats locaux. L’histoire de l’humanité fourmille d’exemples de pratiques nocives qui ont persisté pendant un certain temps, mais qui ne sont plus tolérées. De même, les attitudes négatives à l’égard des femmes et des filles doivent être considérées pour ce qu’elles sont : un anachronisme qui n’a pas sa place dans le monde du XXIe siècle.

L’autonomisation est un autre impératif. Cette notion s’étend aux enfants et aux jeunes, qui doivent être traités et perçus comme des agents actifs plutôt que comme des bénéficiaires passifs, mais aussi aux collectivités et aux organisations. Grâce à l’autonomisation, ils sont tous ensemble la solution, pour la mise en place de milieux protecteurs et l’application des engagements pris au niveau international. Ces intervenants doivent à leur tour être soutenus par une volonté politique internationale, et leurs efforts doivent être appuyés par des fonds et une aide au renforcement des capacités qui est mise en place pour le long terme.

La négociation du programme de développement pour l’après-2015 et des objectifs de développement durable offre une occasion importante. Le Comité estime également que les enfants et les jeunes doivent constituer la priorité de ce nouveau programme. Pour assurer le bien-être de tous les enfants et de tous les jeunes, il faudra que tous les efforts – y compris ceux qui portent sur une meilleure santé, la nutrition et l’éducation, et ceux qui visent à prévenir la violence, l’exploitation et les mauvais traitements – soient intégralement soutenus et conçus pour s’harmoniser. C’est la seule voie à suivre pour concrétiser la vision ultime : un monde où tous les enfants et tous les jeunes non seulement survivent, mais peuvent aussi s’épanouir.

Le Comité présente les recommandations suivantes au gouvernement du Canada :

RECOMMANDATION 1

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de mettre l’accent sur la protection des enfants et des jeunes au niveau international et qu’il intègre la protection de l’enfance à ses politiques et programmes internationaux.

RECOMMANDATION 2

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de préconiser que les enfants et les jeunes ainsi que l’égalité des sexes soient au centre du programme de développement international pour l’après-2015 et des objectifs de développement durable et que, dans le contexte des négociations intergouvernementales afin de finaliser le nouvel agenda aux Nations Unies, il soutienne l’inclusion de cibles spécifiques portant sur:

  • l’élimination de toutes les formes de violence, d’exploitation et de mauvais traitements infligés aux enfants et aux jeunes;
  • l’élimination des mariages d’enfants, des mariages précoces et des mariages forcés;
  • l’enregistrement libre et universel des naissances;
  • l’élimination de toutes les formes de travail des enfants d’ici 2025;
  • l’élimination de toute la mortalité évitable des mères, des nouveau-nés et des enfants d’ici 2030;
  • l’accès, pour tous les adolescents, à des soins et à une éducation en santé sexuelle et reproductive et à des services de planification familiale;
  • l’autonomisation, l’emploi, la formation professionnelle et l’éducation des jeunes.

RECOMMANDATION 3

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada considère les moyens de s’assurer plus efficacement de la protection des enfants et des jeunes dans le cadre de ses réponses aux situations d’urgence internationales, tout en veillant à ce que ces efforts respectent les Normes minimales pour la protection des enfants.

RECOMMANDATION 4

Le Comité reconnaît le rôle de chef de file qu’a joué le Canada en protégeant la vie des mères, des nouveau-nés et des enfants. Plus particulièrement, le Comité reconnaît que le Canada a rempli son engagement de Muskoka 2010 de consacrer 2,85 milliards de dollars à l’initiative. Le Comité recommande de plus que le gouvernement remplisse l’engagement qu’il a pris récemment au Sommet de Toronto de dépenser 3,5 milliards de dollars pour 2015-2020.

RECOMMANDATION 5

Le Comité recommande que, comme suite à la résolution présentée à l’Assemblée générale des Nations Unies à l’automne 2014, le gouvernement du Canada poursuive ses efforts d’obtention de fonds et de soutien auprès d’autres pays donateurs et les autres investisseurs en vue d’établir une solide initiative de programmes internationaux pour prévenir et éliminer les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés, qu’il envisage sérieusement des cycles de financement à long terme pour la mise en œuvre de ces programmes et que, entre autres éléments, cette initiative comprenne une aide ciblée visant :

  • la multiplication des occasions de faire des études dans des milieux d’apprentissage sûrs et sécuritaires;
  • le soutien d’organisations locales et communautaires qui s’efforcent de prévenir les mariages d’enfants;
  • l’aide aux jeunes filles déjà mariées, notamment à l’égard de la santé sexuelle et reproductive, de la formation professionnelle et de l’accès aux études.

RECOMMANDATION 6

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada considère des moyens, notamment travailler avec le secteur privé et des partenaires philanthropiques par lesquels il peut apporter un plus grand soutien au renforcement des capacités pour les organisations communautaires et de la société civile dans les pays en développement qui s’intéressent surtout à la protection de l’enfance et à l’autonomisation des enfants et des jeunes.

RECOMMANDATION 7

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada intègre les Principes régissant les entreprises dans le domaine des droits de l'enfant au mandat de tous les partenariats du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement avec le secteur privé. Ces principes devraient s’appliquer également aux partenariats avec le secteur privé dans le cadre de l’initiative du financement du développement proposée sous les auspices d’Exportation et développement Canada.

RECOMMANDATION 8

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de travailler avec le secteur privé – et de trouver des solutions novatrices pour aider à sauver des vies et favoriser la croissance économique afin d’extirper les gens de la pauvreté – et invite le gouvernement à faire usage de l’initiative de financement du développement figurant dans le Plan d’action économique de 2015.

RECOMMANDATION 9

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de fournir un soutien au renforcement des capacités et une assistance technique pour aider à renforcer les systèmes d’enregistrement civil et des faits d’état civil dans les pays en développement.


[1]             Chambre des communes, Comité permanent des affaires étrangères et du développement international (FAAE), Procès-verbal, 2e session, 41e législature, 9 avril 2014. 

[2]             L’article 1 de la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE) des Nations Unies définit l’enfant comme « tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ».

[3]             Ratifiée par le Canada en 1991. 

[4]             Au 1er mai 2015, 195 États étaient parties à la CDE. Les États-Unis ont signé la CDE, mais ne l’ont pas ratifiée.

[6]             Ibid. L’UNICEF ajoute que, comme la CDE « réunit des droits définis dans d’autres traités internationaux, il existe de nombreux parallèles entre la Convention et d’autres traités » [traduction]. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), qui est entré en vigueur en 1976, par exemple, consacre les principaux droits civils et politiques, dont le droit à la vie, le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et le doit à la liberté d’opinion et d’expression. L’article 24(1) du Pacte prévoit le droit de tout enfant – sans discrimination – « de la part de sa famille, de la société et de l’État, aux mesures de protection qu’exige sa condition de mineur ». 

[8]             Le Canada n’a pas ratifié le Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications. Au 1er mai 2015, 17 États étaient parties à ce protocole facultatif.

[9]             Ratifié par le Canada en 2002.

[10]           Voir l’Organisation internationale du travail (OIT), Conventions et Recommandations de l’OIT sur le travail des enfants; Convention 29 de l’OIT, Convention sur le travail forcé, 1930, en vigueur le 1er mai 1932; Convention 182 de l’OIT, Convention concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, en vigueur le 19 novembre 2000; Convention 138 de l’OIT, Convention sur l’âge minimum d’admission à l’emploi, en vigueur le 19 juin 1976. Le Canada a ratifié les conventions 29 et 182 de l’OIT, mais non la Convention 138. 

[11]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015. Note : les normes ne sont pas juridiquement contraignantes en vertu du droit international.

[12]           Ibid.

[13]           Ibid.

[14]           Ibid.

[15]           Division statistique des Nations Unies, Département des affaires économiques et sociales, « Liste officielle des indicateurs associés aux OMD, » Indicateurs des Objectifs du Millénaire pour le développement, en vigueur le 15 janvier 2008.

[16]           Organisation mondiale de la santé (OMS), UNICEF, Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Banque mondiale et ONU, Trends in Maternal Mortality: 1990 to 2013, Genève, OMS, 2014, p. 25; et ONU, Objectif 4 : Réduire la mortalité des enfants, Addenda, Objectifs du Millénaire pour le développement - Rapport 2014, New York, 2014.

[17]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[18]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[19]           Ibid.

[20]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[21]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[22]           Ibid.

[23]           Ibid.

[24]           Ibid.

[25]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014; 19 février 2015; 28 avril 2015.

[26]           UNICEF, A Statistical Snapshot of Violence Against Adolescent Girls, New York, octobre 2014.

[27]           FNUAP, La mère-enfant : Face aux défis de la grossesse chez l’adolescente, État de la population mondiale 2013, New York, 2013.

[28]           Chiffre établi d’après 29 pays d’Afrique et du Moyen-Orient pour lesquels des statistiques étaient disponibles. UNICEF, A Statistical Snapshot of Violence Against Adolescent Girls, New York, octobre 2014, p. 19.

[29]           UNICEF, Quelque 14 millions d’enfants subissent les effets du conflit en Syrie et en Iraq, affirme l’UNICEF, Communiqué de presse, New York/Amman, 12 mars 2015.

[30]           UNICEF, Enfances perdues : L’impact du conflit armé sur les enfants au Nigéria et au-delà, SOS Enfants en danger, UNICEF, avril 2015.

[31]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014. Depuis le 23 février 2015, Évelyne Guindon est chef de la direction de Cuso International.

[32]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[33]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[34]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[35]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[36]           Paola Pereznieto, Andres Montes, Solveig Routier et Lara Langston, The costs and economic impact of violence against children, Overseas Development Institute, Londres, septembre 2014, p. ix. Le rapport a été commandé par le ChildFund Alliance. Les chercheurs admettent que « la tâche qui consiste à recueillir des faits dans ce domaine à l’échelle mondiale est redoutable. Le principal obstacle, reconnu par tous les chercheurs qui étudient la violence faite aux enfants et notamment ses coûts économiques, est la pénurie de données complètes dans la majorité des pays, de sorte qu’il est difficile de calculer des estimations nationales et mondiales exactes » [traduction]. Voir la page 6.

[37]           Ibid, p. ix.

[38]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[39]           Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, Division de la population, World Population Prospects: The 2012 Revision, Volume I: Comprehensive Tables, New York, 2013, p. 7.

[40]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[41]           Les objectifs proposés constituent « un ensemble intégré, indivisible de priorités mondiales en vue du développement durable ». Les cibles associées sont décrites ainsi par le Groupe de travail ouvert : « Si des cibles idéales sont définies à l’échelle mondiale, c’est à chaque gouvernement qu’il revient de fixer ses propres cibles nationales pour répondre aux ambitions mondiales tout en tenant compte des spécificités nationales. » Voir Assemblée générale de l’ONU, Rapport du Groupe de travail ouvert de l’Assemblée générale sur les objectifs de développement durable, A/68/970, 12 août 2014.

[42]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014. En juin 2015, Rosemary McCarney est devenue ambassadrice et représentante permanente du Canada au Bureau des Nations Unies et au Bureau des affaires du désarmement des Nations Unies à Genève.

[43]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[44]           Ibid.

[45]           La dignité pour tous d’ici à 2030 : éliminer la pauvreté, transformer nos vies et protéger la planète - Rapport de synthèse du Secrétaire général sur le programme de développement durable pour l’après-2015, Assemblée générale de l’ONU, A/69/700, 4 décembre 2014. Pour de plus amples renseignements sur les dates clés et les séances intergouvernementales, voir ONU, Département des affaires économiques et sociales, Plateforme de connaissances en matière de développement durable, 2015 Année d’action mondiale pour les peuples et la planète.

[46]           Assemblée générale de l’ONU, Rapport du Groupe de travail ouvert de l’Assemblée générale sur les objectifs de développement durable, A/68/970, 12 août 2014. Le groupe comprenait des représentants de 70 pays, et ses discussions ont débuté en mars 2013.

[47]           Au début de mai 2015, les co-facilitateurs des négociations intergouvernementales sur le programme de développement pour l’après-2015 ont présenté un document révisé sur les cibles – avec une justification des modifications proposées – pour examen par les États membres.

[48]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[49]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[50]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[51]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[52]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[53]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[54]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[55]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[56]           Ibid.

[57]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[58]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014. Le document Un Canada digne des enfants, publié en 2004, a été le plan d’action national que le gouvernement du Canada a élaboré pour donner suite à la Session spéciale des Nations Unies sur les enfants, en 2002.

[59]           MAECD, Priorités thématiques, Défis et priorités du développement; MAECD, Un avenir sûr pour les enfants et les jeunes.

[60]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015. Pour de plus amples renseignements, voir MAECD, Le programme de développement pour l’après-2015 - priorités du gouvernement du Canada.

[61]           Le Canada s’est engagé à donner 500 millions de dollars pour la stratégie 2016-2020 de Gavi et il a annoncé un engagement de 650 millions de dollars pour le Fonds mondial en 2014-2016. Pour de plus amples renseignements, voir MAECD, Le ministre Paradis réitère l’appui du Canada à l’égard de la stratégie de Gavi pour 2016-2020, Communiqué, 28 janvier 2015; MAECD, La contribution canadienne au Fonds mondial confirme le rôle de chef de file du Canada dans la lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme, Communiqué, 2 décembre 2013. 

[62]           Le Canada s’engage à donner 120 millions de dollars au Partenariat mondial pour l’éducation. Voir MAECD, Le gouvernement Harper annonce un appui pour donner aux enfants dans les pays en développement un meilleur accès à une éducation de qualité, Communiqué, 16 avril 2015, Washington (D.C.).

[63]           Premier ministre du Canada, La stratégie vers l’avant du Canada Sauvons chaque femme, chaque enfant : un objectif à notre portée, Toronto (Ontario), 29 mai 2014.

[64]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[65]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[66]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mai 2015.

[67]           La Banque mondiale, Global Financing Facility in Support of Every Woman Every Child: Executive Summary. En ce qui concerne la mortalité des nouveau-nés, des enfants et des mères, il est souligné dans le résumé qu’il « y a toujours un important déficit de financement – 33,3 milliards de dollars US en 2015 seulement dans les pays à fardeau élevé et à revenus faibles et moindres, équivalant à 9,42 $US par habitant par année – qui ne peut être comblé que par de fortes hausses du financement provenant de sources tant intérieures qu’internationales. » Pour de plus amples informations, se reporter à Banque mondiale, Global Financing Facility in Support of Every Woman Every Child, mémoire, 17 mai 2015. [traduction]

[68]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[69]           Ibid.

[70]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[71]           Ibid.

[72]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mai 2015.

[73]           Ibid.

[74]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[75]           Ibid.

[76]           Ibid.

[77]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[78]           Ibid.

[79]           Ibid.

[80]           Ibid.

[81]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014. Pour de plus amples renseignements, voir Un droit de chaque enfant à sa naissance : Inégalités et tendances dans l’enregistrement des naissances, New York, 2013.

[82]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 mai 2014.

[83]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[84]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[85]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[87]           Ibid., p. 45. La question de l’enregistrement de l’état civil sera discutée plus loin dans le dernier chapitre thématique intitulé « S’appuyer sur les innovations et les données ».

[88]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[89]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[90]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[91]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[92]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[93]           Ibid.

[94]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[95]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[96]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[97]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[98]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[99]           FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[100]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[101]         MAECD, Profil de projet : Appui au Programme pour la protection des enfants, projet no D000306-001.

[102]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[103]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015.

[104]         Document de référence remis à FAAE par Janine Maxwell (Heart for Africa).

[105]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 mars 2015.

[106]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[107]         MAECD, Responsabilité sociale des entreprises. Des dispositions volontaires de responsabilité sociale des entreprises ont été comprises dans les récents Accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers et accords de libre-échange, notamment ceux conclus par le Canada avec le Pérou, la Colombie, le Panama et le Honduras.

[108]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[109]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014. Pour de plus amples renseignements, voir Droits des enfants et principes commerciaux, Introduction.

[110]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015. Pour de plus amples renseignements, voir MAECD, Le gouvernement du Canada salue l’adoption des Principes régissant les entreprises dans le domaine des droits de l’enfant, Communiqué, Toronto (Ontario), 13 février 2014.

[111]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[112]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[113]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[114]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[115]         Ibid.

[116]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[117]         Ibid.

[118]         Ibid.

[119]         Ibid.

[120]         Ibid.

[121]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[122]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[123]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[124]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[125]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[126]         Ibid.

[127]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[128]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[129]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[130]         Ibid.

[131]         Ibid.

[132]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[133]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[134]         Ibid.

[135]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[136]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[137]         Ibid.

[138]         Ibid.

[139]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[140]         Ibid.

[141]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[142]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[143]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[144]         Ibid.

[145]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[146]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[147]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[148]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[149]         Ibid.

[150]         Ibid.

[151]         Ibid.

[152]         Ibid.

[153]         Ibid.

[154]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[155]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[156]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[157]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[158]         Ibid.

[159]         Ibid.

[160]         Ibid.

[161]         Ibid.

[162]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[163]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[164]         Ibid.

[165]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[166]         Ibid.

[167]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[168]         UNFPA, Le pouvoir de 1,8 milliard : D’adolescents et de jeunes et la transformation de l’avenir, État de la population mondiale 2014, New York, 2014, p. 117. Environ 9 sur 10 de ces jeunes âgés de 10 à 24 ans vivent dans ce que l’UNFPA appelle des « pays moins développés ». Les régions les moins avancées « comprennent toutes les sous-régions de l’Afrique, l’Asie (sauf le Japon) l’Amérique latine et les Caraïbes, ainsi que la Mélanésie, la Micronésie et la Polynésie » Voir p. 3 et 117. L’UNFPA précise plus loin que : « Dans les pays les moins avancés (catégorie définie par les Nations Unies qui englobe 33 pays de l’Afrique subsaharienne, huit pays de l’Asie, six pays de l’Océanie et Haïti dans les Caraïbes), ce groupe d’âge constitue 32 % de la population. » Voir p. 3.

[169]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[170]         L’ONU définit les adolescents comme les personnes qui ont entre 10 et 19 ans.

[171]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[172]         Ibid.

[173]         Ibid.

[174]         Ibid.

[175]         Ibid.

[176]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[177]         Ibid.

[178]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[179]         Ibid.

[180]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[181]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[182]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[183]         Ibid.

[184]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[185]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 mai 2014.

[186]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[187]         Ibid.

[188]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mai 2015.

[190]         OMS, Département Santé de la mère, du nouveau-né, de l’enfant et de l’adolescent, Sommaire, La santé pour les adolescents du monde – Une deuxième chance pour la deuxième décennie, OMS, Genève, 2014, p. 2.

[191]         ONUSIDA, All In to #EndAdolescentAIDS, 2015.

[192]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[193]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[194]         Ibid.

[195]         Ibid.

[196]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[197]         Ibid.

[198]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014. Pour d’autres informations, voir MAECD, Où nous travaillons en développement international, et Nations Unies, World Abortion Policies 2013, Tableaux de données. [en anglais seulement]

[199]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[200]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[201]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[202]         Ibid.

[203]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[204]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[205]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[206]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[207]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[208]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 mai 2014.

[209]         Ibid.

[210]         Ibid.

[211]         Ibid.

[212]         Ibid.

[213]         Ibid.

[214]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[215]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 14 mai 2014.

[216]         Ibid.

[217]         Ibid.

[218]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 26 février 2015.

[219]         Ibid.

[220]         Ibid.

[221]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[222]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[223]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 2 juin 2014.

[224]         Ibid.

[225]         Ibid.

[226]         Ibid.

[227]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 31 mars 2015.

[228]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015. Nota : le Canada a versé une contribution de plus de 350 millions de dollars au Programme alimentaire mondial (PAM) en 2014, ce qui a fait de lui le troisième donateur (pays) du PAM en importance cette année-là. « Contributions au PAM 2014 », À propos, 31 mai 2015.

[229]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 21 avril 2015.

[230]         Ibid.

[231]         Ibid.

[232]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[233]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 18 novembre 2014.

[235]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.

[236]         Ibid.

[237]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 19 février 2015.

[238]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 23 avril 2015.

[239]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 28 avril 2015.

[240]         FAAE, Témoignages, 2e session, 41e législature, 12 mars 2015.