FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 26 mars 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la protection des enfants et des jeunes dans les pays en développement.
Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. Nous accueillons Janine Maxwell et son mari, Ian Maxwell, cofondateurs de l'ONG Heart for Africa.
Je suis heureux de vous voir parmi nous, après votre long voyage à partir du Swaziland. Je vous remercie de votre présence au comité.
Nous accueillons également Tim Lambert, qui représente les Producteurs d'oeufs du Canada.
Encore une fois, bienvenue au comité. J'ai eu l'occasion hier de discuter avec les Maxwell, qui m'ont raconté un peu de leur histoire.
Tous les membres du comité vont maintenant pouvoir vous entendre parler de ce que vous faites et de ce qui vous motive. Je vais vous céder la parole pour vous permettre de présenter un exposé préliminaire.
Tim, je crois que vous aussi avez quelques observations à présenter. Nous allons donc commencer.
Je vous remercie.
Bonjour, mesdames et messieurs les députés. Je vous remercie de nous avoir invités à présenter notre point de vue au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
Je m'appelle Janine Maxwell. Je suis accompagnée de mon mari, Ian Maxwell. Nous sommes cofondateurs d'une ONG portant le nom de Heart for Africa. Même si je suis née à Matheson, en Ontario, qui se trouve à mi-chemin entre Kirkland Lake et Timmins, et si mon mari a grandi à Crystal Beach, tout près d'ici, nous vivons maintenant au Swaziland, dans une exploitation agricole durable que nous avons baptisée projet Canaan.
Le Swaziland est un petit pays enclavé ayant des frontières communes avec l'Afrique du Sud et le Mozambique. Il est dirigé par le roi Mswati III, dernier monarque absolu du continent africain. Le Swaziland a le taux de VIH le plus élevé du monde. Quoi que les statistiques varient, nous croyons que ce taux se situe à 46 %. L'espérance de vie moyenne y est de 29 ans, et plus de la moitié de la population est composée d'enfants orphelins et vulnérables. Le Swaziland se classe cinquième parmi les pays du monde qui ont les plus forts taux de mortalité infantile.
L'insécurité alimentaire est l'un des plus grands problèmes du Swaziland: plus de 95 % des aliments consommés sont importés. De plus, 65 % de tous les Swazis dépendent de l'aide alimentaire internationale pour recevoir un seul repas par jour.
Le pays compte quelque 15 000 ménages dirigés par des orphelins âgés de 15 ans ou moins. La majorité des enfants sont gravement sous-alimentés parce qu'ils n'ont ni parents ni adultes qui s'occupent d'eux. La plupart de ces enfants mangent un seul repas par jour du lundi au jeudi, ce repas étant fourni par le programme alimentaire parrainé par le gouvernement et financé par la communauté internationale que je viens de mentionner. Du vendredi au dimanche, ces enfants n'ont souvent rien à manger.
Le projet Canaan a été mis en place pour affronter cette grave situation chronique. Il s'agit d'une initiative agricole à grande échelle axée sur la faim, les orphelins, la pauvreté et l'éducation, ce qui explique le sigle anglais HOPE (hunger, orphans, poverty, education). La terre a été achetée par l'oeuvre caritative Heart for Africa en 2009, à titre de bien foncier privé (TDL dans le régime foncier swazi). Notre initiative contre la faim permet de servir à 3 500 orphelins et enfants vulnérables plus de 74 000 repas chauds par mois, par l'entremise de notre réseau de 27 partenaires répartis entre les collectivités les plus rurales du Swaziland.
Notre initiative en faveur des orphelins nous permet de collaborer directement avec le cabinet du vice-premier ministre, qui nous a nommés tuteurs légaux de plus de 90 enfants orphelins ou abandonnés de moins de 4 ans. Ces petits vivent dans le campus des enfants du projet Canaan et y resteront jusqu'à la fin de leurs études secondaires.
Le désespoir incite beaucoup de femmes à jeter leurs nouveau-nés dans les latrines ou à les mettre dans des sacs en plastique et à les abandonner au bord d'une rivière où ils seront dévorés par les crabes. Ce sont les enfants qui vivent maintenant au projet Canaan et qui sont élevés dans une communauté aimante où ils grandiront et feront des études. Ces enfants représentent l'espoir dans l'avenir du Swaziland.
Notre initiative antipauvreté est axée sur l'emploi et la formation. Au projet Canaan, nous employons plus de 250 personnes dont chacune fait vivre en moyenne 13 personnes. Cela signifie que 3 250 personnes bénéficient directement de nos emplois. Nous donnons également de la formation en menuiserie, en joaillerie, en mécanique, en garde d'enfants et en pratiques agricoles.
Notre initiative d'éducation comprend l'Académie du projet Canaan, que nous avons créée pour donner une excellente éducation aux enfants qui vivent chez nous. Nous avons actuellement une maternelle et un jardin d'enfants et avons l'intention de construire une école primaire et une école secondaire à mesure que les enfants grandiront. Notre clinique médicale offre aussi des conseils et de l'éducation sur le VIH/sida, la santé maternelle et les questions générales de santé.
En moyenne, le gouvernement swazi nous demande de nous occuper d'un nouveau bébé tous les 12 jours, de sorte que, d'ici 2020, le projet Canaan sera le foyer de plus de 260 enfants. Notre objectif est de devenir autonomes d'ici 2020. Toutes nos initiatives visent cet objectif soit en générant des revenus soit en réduisant nos frais de fonctionnement grâce à la production d'aliments destinés à nos enfants, comme des légumes, des produits laitiers et, bien sûr, des oeufs.
La sécurité alimentaire est de la plus haute importance pour notre organisation. C'est la raison pour laquelle notre partenariat avec les Producteurs d'oeufs du Canada joue un rôle aussi important dans l'atteinte de nos objectifs. Permettez-moi donc de présenter M. Tim Lambert, chef de la direction des Producteurs d'oeufs du Canada, qui vous donnera plus de détails sur la participation de son organisation à notre initiative.
Je vous remercie.
Avant de céder la parole à M. Lambert, je me demande, Ian, si vous voulez bien nous parler brièvement de ce que Janine et vous faisiez avant de vous lancer dans cette aventure. Comment en êtes-vous arrivés là?
Je donnerai ensuite la parole à Tim.
Janine et moi avions une entreprise de marketing à Toronto. Janine l'avait fondée et y a travaillé pendant 16 ans. De mon côté, j'y ai travaillé pendant près de 10 ans. Nous étions alors en relation avec des sociétés de marchandises emballées, comme Disney.
Janine se trouvait à New York le 11 septembre 2001. J'étais moi-même à bord d'un vol American Airlines à destination de Chicago. Tout à coup, notre monde a basculé, nous amenant à nous poser des questions existentielles. Nous avions tout, mais nous aurions pu tout perdre en un instant. À partir de là, Janine a fait un voyage en Afrique pour voir ce qui se passait à Lusaka, en Zambie. Ensuite, elle est allée au Kenya dans le même but. Elle pensait que nous devions faire quelque chose de plus que ce que nous faisions.
En 2004, nous avons fermé notre société et avons commencé à concentrer nos efforts sur l'Afrique. En 2006, nous avons lancé Heart for Africa et avons travaillé au Swaziland, en Afrique du Sud, au Malawi et au Kenya, offrant simplement notre aide dans le domaine agricole. Nous avons ensuite décidé de nous concentrer sur le Swaziland à cause des grands besoins de ce pays. La pandémie de VIH en avait fait un pays d'enfants et de personnes âgées. Les enfants mouraient de faim et avaient besoin d'aide. Nous avons donc combiné toutes nos ressources et tous nos efforts pour les aider.
C'est ainsi qu'en 2009, nous avons acheté une terre de la catégorie des biens fonciers privés du Swaziland et avons lancé le projet Canaan. Voilà comment nous en sommes arrivés là.
Je vous remercie.
Je laisserai les membres du comité vous interroger sur les autres détails, une fois que nous aurons commencé nos tours de questions.
Tim, je vous souhaite la bienvenue. La parole est à vous.
Merci beaucoup. Je suis aussi très reconnaissant d'avoir aujourd'hui l'occasion de présenter quelques observations aux membres du comité.
Comme viennent de le dire Ian et Janine, le projet Canaan est un vrai message d'espoir. Dans les régions dévastées du monde, l'espoir revêt pour nous un intérêt particulier. Je ne sais pas comment vous ferez le lien avec l'ovoculture, mais j'imagine que c'est mon rôle d'expliquer la situation.
Je représente ici les Producteurs d'oeufs du Canada, c'est-à-dire le millier de familles et d'entreprises réglementées qui produisent des oeufs dans le pays. Cette organisation se livre depuis longtemps à de nombreuses activités de responsabilité sociale, comme le financement de banques alimentaires et du Club des petits déjeuners. Nous comptons parmi les commanditaires de la Course à la vie CIBC, et nous nous occupons depuis des années de banques alimentaires et de clubs de petits déjeuners.
À vrai dire, l'oeuf est l'aliment parfait, la protéine parfaite pour nourrir un monde affamé. Il offre, dans un seul aliment, les protéines et les nutriments dont nous avons tous besoin. Sous forme d'oeuf dur, il peut être conservé pendant de longues périodes.
La poule constitue en outre une petite unité biologique d'une efficacité incroyable. Il n'y a qu'un seul autre être vivant — le poisson — qui soit capable de produire des protéines d'une façon encore plus efficace. Après cela, il y aurait les tout petits animaux. En réalité, il suffit d'un tout petit nombre de volatiles pour nourrir beaucoup de gens. C'est une forme d'élevage d'une grande flexibilité, qui peut être aussi grande ou aussi petite qu'on le souhaite. C'est vraiment très simple. L'humble oeuf constitue une solution absolument brillante à la malnutrition dans des pays tels que le Swaziland et les autres pays du monde qui connaissent des problèmes de sous-alimentation.
À part notre partenariat avec Ian et Janine, nous sommes membres fondateurs d'une organisation appelée la Fondation internationale des oeufs. Des entreprises de production d'oeufs et des propriétaires de sociétés d'un peu partout dans le monde ont investi dans la fondation. Ils appuient le projet Canaan de l'ONG Heart for Africa et financent des projets de développement de capacités dans huit autres pays africains, surtout dans le sud du continent. Notre rôle dans ces projets consiste à offrir des connaissances techniques.
Nous avons également des agriculteurs qui se rendent là pour rencontrer les petits exploitants qui cherchent à créer des capacités, à se familiariser avec les pratiques agricoles modernes et à mieux soigner les volatiles qu'ils élèvent. Nos agriculteurs offrent bénévolement leur temps pour transmettre leurs connaissances et leurs compétences.
Cette initiative de création de capacités est tout à fait unique, comme l'ont expliqué Ian et Janine dans le contexte de l'orphelinat et de ce que fait notre fondation. Nous avons comme président M. Bart Jan Krouwel, qui dirigeait auparavant la Fondation Rabobank. Je suis moi-même administrateur, de même que Carlos Saviani, qui est vice-président du Fonds mondial pour la nature. Nous avons différentes compétences à offrir dans les différents cas qui se présentent. Et nous avons une occasion tout à fait extraordinaire avec Ian et Janine.
Nous faisons donc du développement de capacités. Nous travaillons au Mozambique, où nous avons choisi de petits propriétaires terriens pour mettre en oeuvre de petits systèmes de production. Nous les faisons venir pour leur donner de la formation, après quoi nous les aidons à obtenir des microsprêts pour démarrer leur propre production d'oeufs à petite échelle.
Nous envisageons de collaborer avec une organisation d'Afrique du Sud, la Hollard Foundation, qui étudie la possibilité de réaliser des projets à plus grande échelle. La fondation essaie d'établir des liens entre différentes entreprises et des entrepreneurs locaux. Autrement dit, elle cherche des gens capables de créer des élevages allant au-delà du niveau de subsistance ou du niveau du village local, c'est-à-dire des sociétés durables de production d'oeufs. Tout cela est ancré dans la conviction que l'humble oeuf peut jouer un rôle pour fournir des protéines et augmenter l'efficacité des vaccins et même l'efficacité des médicaments antirétroviraux utilisés pour combattre le VIH et le sida.
Voilà comment se présente pour nous la production des oeufs. C'est un peu notre vision élargie du rôle que les Producteurs d'oeufs du Canada peuvent jouer dans cette initiative.
C'est excellent. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant commencer notre premier tour de questions à sept minutes. Il y aura probablement des questions qui seront posées en français. Par conséquent, vous pourriez profiter de l'occasion, si vous avez besoin d'interprétation, pour essayer vos écouteurs.
À vous, madame Laverdière. Vous avez sept minutes.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie aussi nos témoins d'être venus nous entretenir aujourd'hui de leurs très intéressants projets.
Monsieur Lambert, vous avez parlé de l'oeuf avec une éloquence tout à fait particulière, défendant même son côté écologique. J'ai trouvé cela assez intéressant.
Vous disiez que votre entreprise était présente dans huit pays africains. Or je me demandais s'il s'agissait essentiellement de la partie Sud de l'Afrique et si vous étiez également présents dans d'autres régions du monde .
[Traduction]
Je vous remercie de votre question.
Nous examinons un projet au Pakistan et un autre au Nicaragua. La fondation dont je vous ai parlé n'existe que depuis près de deux ans. Plutôt que d'aller au-delà de nos moyens, si je peux m'exprimer ainsi, nous avons essayé de concentrer nos efforts sur les projets qui ont les meilleures chances de réussir et d'être durables.
Dans le cas d'Ian et Janine, avant que nous ayons pris l'engagement de soutenir leur projet, Janine était venue présenter un exposé à notre conférence internationale. Le président de notre conseil d'administration, M. Peter Clarke, et moi-même avions été très intrigués par ses propos. Comme nous avions d'autres affaires à traiter en Afrique du Sud, nous sommes allés visiter le projet Canaan. Nous avions alors été vraiment impressionnés de constater qu'ils faisaient exactement ce qu'ils avaient dit avoir l'intention de faire. Nous avons vu les barrages. Nous avons vu les bâtiments. Nous avons vu les enfants.
C'est une longue réponse à une petite question, mais nous voulons être sûrs de réussir en formant des partenariats qui ont d'excellentes chances de succès. Et quand ce succès se matérialise, nous espérons susciter de l'intérêt à l'échelle internationale et obtenir des fonds pour développer la vision et la mission de la Fondation internationale des oeufs. Bref, nous sommes extrêmement sélectifs. À l'heure actuelle, nous envisageons de financer deux projets, mais il est encore trop tôt pour dire si nous le ferons ou non.
Si vous me permettez de le dire, je crois que c'est une approche très sage.
J'ai une autre petite question. Vous avez parlé de vos agriculteurs. Combien d'entre eux participent à ces projets de votre côté?
Tout notre conseil d'administration a appuyé le projet, mais nous avons une équipe de projet composée de sept agriculteurs, du président de notre conseil d'administration et de plusieurs membres du comité exécutif. Chose intéressante — même si ce n'est qu'une coïncidence puisque les gens sont des bénévoles —, nous avions dans le groupe un type qui construit des granges et des bâtiments de ferme et un autre qui possède une société de broyage des aliments pour animaux. Ils font tous de la production d'oeufs. Une autre personne est propriétaire d'une entreprise de transport. Nous avions donc réussi à réunir tout cet ensemble de compétences.
Nous faisons une collecte de fonds pour construire notre ferme au Swaziland, mais les Producteurs d'oeufs du Canada s'occupent des frais de transport, et tous les participants offrent bénévolement leur temps.
[Français]
Très bien. Merci beaucoup.
Madame Maxwell, à l'heure actuelle, la communauté internationale se préoccupe sérieusement de la question de l'enregistrement des enfants, ne serait-ce que pour leur permettre d'avoir une identité lorsqu'ils débutent leur vie.
Je me demandais quelle était à cet égard la situation au Swaziland, étant donné les défis auxquels fait face ce pays.
[Traduction]
C'est vraiment une excellente question et un grand défi pour nous. Ian et moi sommes les tuteurs légaux de ces enfants. En fait, nous avons reçu hier notre bébé n° 91, de sorte que nous en avons un de plus que ne l'indiquent nos dossiers d'aujourd'hui.
C'est un problème. Beaucoup des habitants du Swaziland n'ont aucune identité et aucun papier. Pour ce qui est de nos travailleurs agricoles, nous devons les pays en espèces, mais nous voulons que chacun d'entre eux ait un compte bancaire. Nous les incitons à en ouvrir, mais, pour pouvoir le faire, ils ont besoin d'une carte d'identité. Et, pour obtenir une carte identité, il faut pouvoir présenter un acte de naissance.
Pour les 250 personnes qui travaillent dans l'exploitation, nous faisons sans cesse tout notre possible pour leur fournir du transport et des jours de congé tout en continuant à les payer pour qu'ils puissent aller se chercher un acte de naissance. Cela leur impose de rentrer chez eux pour demander au chef local de trouver quelqu'un pouvant attester qu'ils existent. C'est un grand problème auquel nous essayons de nous attaquer de front dans notre exploitation. Dans le cas de nos bébés, quand un nourrisson est largué… La semaine dernière, un nouveau-né a été placé par sa mère dans un sac en plastique et a été abandonné au bord de la rivière. Avant que les voisins le trouvent, les crabes avaient sérieusement commencé à le dévorer. Il a survécu. Il a subi une colostomie et se trouve maintenant chez nous. C'est peut-être l'un des futurs chefs du pays, mais il sera très difficile d'obtenir un acte de naissance pour lui.
Toutefois, le gouvernement collabore très étroitement avec nous. Le cabinet du vice-premier ministre est vraiment déterminé à nous aider à obtenir le certificat de naissance de cet enfant. Ainsi, s'il a besoin, à l'avenir, de quitter le pays — peut-être pour aller étudier dans une université étrangère, ce qui serait formidable —, il aura au moins un acte de naissance.
Oui, il faudra qu'il fasse partie des dirigeants pour pouvoir venir au Parlement canadien. Le cabinet du vice-premier ministre travaille très fort avec nous, mais ce n'est pas facile. Quoi qu'il en soit, sur nos 91 bébés, nous avons peut-être 88 actes de naissance, ce qui est énorme.
Merci, monsieur le président.
Bienvenue au comité. Nous sommes enchantés de votre présence.
Ian et Janine, j'ai été très heureuse d'avoir l'occasion de bavarder avec vous hier et de découvrir que nous avons vécu certaines choses en commun dans le passé.
Monsieur Lambert, j'ai une petite histoire à vous raconter, qui vous intéressera probablement. Lors de ma dernière visite en Éthiopie, l'ambassade m'a organisé une visite à deux projets dans lesquels le Canada avait investi. Dans les deux cas, l'objectif était de vendre des oeufs sur le marché. Chacun des projets avait un millier de poules pondeuses. J'avais alors pensé que la meilleure façon pour moi de laisser un peu d'argent dans le pays consistait à acheter à chacun des projets les 10 premières douzaines d'oeufs de sa production. Les choses allaient vraiment très bien. J'ai trouvé très intéressant d'assister au démarrage de projets de ce genre.
Comme vous le savez tous, nos discussions des derniers temps ont porté sur la protection des enfants.
Janine, vous venez de parler de l'importance des statistiques de l'état civil. Je suis vraiment heureuse que Mme Laverdière ait soulevé cette question. C'est un domaine sur lequel le Canada concentrera ses efforts entre 2015 et 2020 dans le cadre de son financement de l'initiative sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants.
Je me demande tout d'abord si vous pouvez nous en dire un peu plus sur la protection des enfants au Swaziland. Comment le travail que vous faites est-il relié au plan général du gouvernement swazi en matière de croissance et de développement, tout élémentaire qu'il puisse être en ce moment?
Ensuite, monsieur Lambert, j'aimerais vous demander de nous parler de l'aspect durabilité et des moyens que vous mettez en oeuvre pour vous brancher sur différents pays africains, et notamment sur le Swaziland. Quels sont les objectifs des ovoculteurs et comment intervenez-vous?
Je vais répondre d'abord à votre question concernant la protection des enfants parce que le problème des enfants à risque revêt une grande importance partout dans le monde. Comme l'a expliqué Ian, c'est la raison pour laquelle nous nous sommes établis au Swaziland. L'agriculture est très importante, mais c'est seulement un moyen d'atteindre un certain but. Nous devons pouvoir donner à manger aux enfants et générer des revenus pour être en mesure de prendre soin de 91 enfants — dont le nombre passera bientôt à 260 — qui sont nos enfants.
Le gouvernement du Swaziland travaille très fort pour relever ses services de protection de l'enfance au niveau mondial. Si j'ai bien compris, le pays étant membre des Nations Unies, il doit adhérer à la Convention de La Haye.
Dans la constitution de 2005, Swaziland n'avait pas une loi qui protégeait les enfants comme nous l'aurions voulu. Entre 2010 et 2012, il a beaucoup travaillé pour mettre en place un plan de protection de l'enfance sous le nom de Loi sur la protection et le bien-être des enfants. Cette mesure comprend toutes les dispositions qu'on peut souhaiter. En fait, chaque fois que je me rends au bureau de la sécurité sociale, qui relève du cabinet du vice-premier ministre, j'y vois des exemplaires de cette loi.
Elle est bien utilisée. Si nous avons affaire à un enfant abandonné par ses parents, ce qui est très courant dans la culture swazie… Quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, je peux aller n'importe où dans le pays, même dans les coins les plus reculés, et trouver un de ces ménages dirigés par un orphelin de 12, 13 ou 15 ans qui s'occupent d'enfants encore plus jeunes laissés seuls depuis plusieurs jours. La loi de protection de l'enfance dit expressément que les enfants de moins de 15 ans — je ne suis pas tout à fait sûre de l'âge minimum — ne peuvent pas être laissés seuls.
Nous ne pouvons pas aller chercher tous ces enfants pour les emmener au projet Canaan, mais nous pouvons utiliser la loi. Si nous savons qu'un enfant est maltraité ou que nous pouvons nous occuper de certains aspects particuliers, ou encore s'il y a un bébé de moins de 12 mois, nous pouvons intervenir en nous prévalant de la loi. Les Swazis la respectent beaucoup. Ils la connaissent bien, ce qui est excellent.
L'autre aspect intéressant de cette loi, c'est son caractère en quelque sorte très progressiste parce qu'elle ne permet pas que des filles de moins de 18 ans soient forcées à se marier. C'est une grande première dans le monde. Cette disposition est-elle constamment mise en vigueur partout dans le pays? Non. Dans différentes régions et différents coins, le fait de marier une fille de 12 ou 13 ans demeure culturellement acceptable parce que la famille a besoin de la dot ou lobola. Toutefois, si nous apprenons qu'un tel mariage est organisé, nous pouvons intervenir sans difficulté. Ian et moi prenons la voiture et le texte de la loi et nous nous rendons sur place avec la police, qui prend les mesures nécessaires. Elles ne sont sans doute pas très populaires dans la collectivité, mais la police fait respecter la loi.
Nous sommes très encouragés par ces développements. Il faudra du temps pour que ces dispositions soient appliquées partout, mais c'est une chose que nous pouvons défendre et, grâce au cabinet du vice-premier ministre, nous pouvons réaliser des progrès en faveur des enfants du Swaziland.
J'aimerais diviser ma réponse en deux parties.
Tout d'abord, comment faire pour que l'ovoculture soit rentable? Nous essayons de recueillir un peu plus d'un million de dollars pour construire une exploitation. Nous allons commencer avec 5 000 volatiles, puis augmenter progressivement pour atteindre quelque 30 000. Nous devons débourser environ 120 000 $ pour fournir les poulettes et les aliments nécessaires pendant un an. Par conséquent, il faut au départ recueillir de l'argent. Toutefois, il y a au Swaziland une société commerciale de production d'oeufs. Évidemment, les orphelins n'ont pas d'argent pour acheter des aliments, ce qui modifie la situation à court terme. Cette société a cependant offert son aide. En fait, elle donne actuellement des oeufs au projet pendant que nous mettons en train l'exploitation.
Il y a au Swaziland une population — assez petite, j'imagine — d'expatriés prêts à payer davantage pour obtenir différents types d'oeufs, produits par des poules élevées en liberté ou en plein air. La société cherche à former un partenariat avec nous pour réaliser ce projet. Elle est disposée à payer plus cher pour avoir des oeufs spéciaux. Nous envisageons même, à plus long terme, de créer une marque spéciale d'oeufs du projet Canaan, que nous pourrions vendre à un prix plus élevé. Nous réfléchissons donc à des moyens d'en arriver à une stabilité financière permanente.
L'autre aspect vraiment important concerne la durabilité sur le plan humain. Ian et Janine ne font pas qu'adopter ces enfants. Ils vont les éduquer et les élever. Ils s'occuperont d'eux jusqu'à l'âge adulte. Une partie du processus, tant pour les enfants que pour les travailleurs agricoles, consiste à apprendre. Si on pense aux répercussions du décès de tant d'adultes du pays, on se rend compte de la perte correspondante des capacités nécessaires pour produire des aliments, faire des travaux de menuiserie ou d'électricité, etc. Il y a donc un important travail d'éducation et de formation professionnelle à faire auprès des enfants, dans quelque temps, et auprès de l'ensemble des travailleurs agricoles.
Les réalisations du projet Canaan se font sentir bien au-delà des avantages immédiats de la ferme et de l'orphelinat. Nous étions assis à l'extérieur un soir — avant l'aventure du serpent, dont nous vous parlerons un peu plus tard — et nous avons pu voir toutes ces lumières scintiller dans l'obscurité. Janine et Ian ont dit que c'est une chose dont ils étaient très fiers parce que ces lumières n'existaient pas auparavant. Il y avait quelques feux allumés pour faire la cuisine, mais personne n'avait l'électricité. Le niveau de vie est en train de monter un peu partout. Voilà ce qu'il en est de la durabilité financière et humaine de ce projet.
En ce qui concerne la Fondation internationale des oeufs, nous examinons les possibilités et, chaque fois que nous établissons un lien, chacun de nos projets aide quelqu'un à mieux faire son travail, à lancer une nouvelle entreprise ou à renforcer une initiative en cours. Si je prends l'exemple de la Hollard Foundation — qui n'est pas encore un projet puisque nous n'en sommes encore qu'au stade conceptuel —, nous essayons de faire correspondre la formation et l'expertise à une vision beaucoup plus vaste allant jusqu'à la création d'une grande entreprise.
Pour nous, la question de la durabilité est un impératif qu'on ne peut réaliser qu'en travaillant avec les gens de la place. Quel que soit le projet entrepris, il doit être adapté aux circonstances qui existent sur le terrain. Il faut être adaptable pour changer.
Merci beaucoup. Je trouve vos histoires extrêmement intéressantes. Elles m'inspirent beaucoup de respect et d'admiration pour ce que vous faites. Si plus de gens agissaient comme vous, je ne doute pas que nous aurions un meilleur monde. Cela s'applique aussi aux Producteurs d'oeufs du Canada, qui ont fait un travail extraordinaire pour aider différents pays d'Afrique à combattre la faim.
J'ai quelques questions techniques à poser, mais j'y reviendrai un peu plus tard. Vous avez parlé de ce que vous faites. Si vous aviez un message à transmettre aujourd'hui au gouvernement du Canada, quel serait-il? J'aimerais bien avoir une réponse de chacun d'entre vous.
Mon message serait… Je crois que chacun de nos messages sera différent parce qu'à la ferme, je travaille surtout avec les enfants et les femmes à risque. Mon message au gouvernement et à la population du Canada, c'est qu'il y a des gens, des enfants qui souffrent sans nécessité. Nous pouvons faire quelque chose. Nous ne sommes probablement pas en mesure de les sauver tous ou de régler tous les problèmes, mais nous pouvons agir pour que la situation s'améliore.
Nos enfants du Canada sont les dirigeants de demain, tout comme les enfants du Swaziland. Nous devons faire quelque chose maintenant pour améliorer leur avenir. Les efforts peuvent venir du gouvernement, peuvent découler de politiques ou simplement consister en une seule personne qui aide un enfant. Nous pouvons nourrir et sauver un enfant un oeuf à la fois. Nous pouvons et devons faire quelque chose.
Je voudrais m'associer à ce que ma femme vient de dire, mais j'ai aussi un message à transmettre au gouvernement canadien: j'aimerais qu'on explore la possibilité de conclure un accord de libre-échange avec le Swaziland. L'un des obstacles auxquels notre organisation est toujours confrontée, c'est le fait que quoi qu'on fasse, l'accès à un plus grand marché est toujours un défi. Le Swaziland faisait partie du groupe de l'AGOA, mais ce n'est plus le cas maintenant. Un accord de libre-échange avec le Canada l'aiderait considérablement.
En un mot, nous demanderions au gouvernement de nous aider à faire réussir cette initiative. Comme je l'ai dit plus tôt, les pays comme le Swaziland et d'autres ont un besoin désespéré d'une nutrition adéquate. On ne peut pas apprendre, on ne peut pas vivre, on ne peut pas grandir sans une nutrition appropriée. Rien n'est possible en l'absence d'aliments et d'eau, et surtout de protéines. Il se trouve que l'oeuf est l'aliment parfait dans ce contexte.
Nous avons la volonté, le talent et les compétences. Nous avons des gens qui sont prêts à donner leur temps. Nous nous sommes engagés pour le long terme. Nous avons besoin de ressources pour poursuivre la construction de la ferme et pour aller au-delà de ce projet, car je crois qu'il peut servir de modèle à beaucoup d'autres pays qui ont besoin d'aide au chapitre de la nutrition.
Je vous remercie.
Monsieur Lambert, j'ai une question à vous poser.
En ce qui concerne l'ovoculture, dont je ne connais absolument rien, y a-t-il en Afrique des problèmes particuliers que nous n'avons pas au Canada? Je pense par exemple aux maladies qui atteignent les poulets là-bas, mais qui n'existent pas chez nous. Les choses sont-elles en général plus faciles ou plus difficiles en Afrique?
C'est une bonne question.
Nous avons déjà combattu chez nous beaucoup des maladies qu'ils ont. Ces maladies sont plus répandues en Afrique à cause du manque d'accès aux soins vétérinaires, etc. Il y a aussi le problème de la température et les difficultés liées à des ressources telles que l'électricité et autres.
Nous avons trouvé un système spécialement conçu par la société Big Dutchman pour l'Afrique subsaharienne. Le système est très simple et fonctionne sans électricité et sans éclairage complémentaire pour les volatiles. Il consiste simplement en cages étagées. L'alimentation en eau se fait par gravité à partir d'une petite citerne. Il y a une petite manivelle qui permet de faire glisser le chariot rempli d'aliments, qui sont ainsi répartis uniformément. C'est un petit système parfait dont la taille peut facilement être adaptée aux circonstances.
En même temps, il y a beaucoup de difficultés. La présence de prédateurs fait qu'il est très difficile de laisser les poules en liberté. Toutefois, en fonction de nos recherches et de notre travail au Mozambique, nous croyons avoir trouvé un modèle parfaitement adapté à l'Afrique subsaharienne.
J'ai une dernière petite question à poser.
Je ne connais pas grand-chose du Swaziland, mais vous nous avez présenté d'épouvantables statistiques sur le VIH/sida et l'espérance de vie. Pouvez-vous me dire, pour ma propre gouverne, si le Swaziland était déjà en très mauvaise situation ou bien si les conditions actuelles sont attribuables au taux très élevé de VIH? De toute évidence, le pays a d'énormes problèmes. Y a-t-il eu un temps où le Swaziland était un pays beaucoup plus sain sur le plan économique et sur d'autres plans?
À l'ère du colonialisme — il faut dire que la plupart des pays africains étaient colonisés —, le Swaziland était sous protectorat britannique. Il avait l'avantage de ne pas… Sa situation avait des avantages et des inconvénients. Il n'était pas totalement colonisé, mais les Britanniques étaient présents en vertu d'un accord conclu avec le roi Sobhuza. Lorsqu'ils sont partis, il y a eu un va-et-vient de fonds, et différentes ententes ont été conclues. Je ne crois pas que le pays ait jamais été très fort… Ce n'était certainement pas un pays de première catégorie. Il s'est toujours agi d'un petit pays composé d'une seule tribu parlant une seule langue. Toutefois, le sida a tout changé.
La différence entre le Swaziland et le reste des pays africains, c'est que, dans ces pays, surtout en Afrique subsaharienne, les gens vivent au sein de tribus ou dans des villages. Comme vous le savez, on dit qu'il faut un village pour élever un enfant. Il y a eu de tout temps des parents qui disparaissaient. Un père peut être mangé par un lion. Dans ce cas, le village adopte l'enfant, qui s'y intègre. Toutefois, les Swazis vivent plutôt dans des fermes, pas dans des villages. Comme ils sont polygames, un homme peut avoir six épouses dont chacune lui donne autant d'enfants que possible pour lui faire honneur et pour montrer aux autres qu'il a les moyens de faire vivre une famille nombreuse. De plus, pour la femme, les enfants constituent une police d'assurance. Ainsi, quand elle sera vieille, elle aura quelqu'un pour s'occuper de son jardin et lui apporter de l'eau.
À cause du taux élevé de mortalité infantile, la femme peut finir par garder six des neuf enfants auxquels elle a donné naissance. De son côté, l'homme va en Afrique du Sud ou ailleurs pour trouver du travail et gagner le pain de sa famille. Pendant son absence, il a des relations sexuelles, est infecté par le VIH, puis rentre chez lui. Une fois rentré, il infecte ses six épouses.
Dans un autre pays, il aurait peut-être infecté une épouse et une maîtresse ou peut-être encore deux épouses. Cependant, comme la polygamie est une importante partie de leur culture, il infecte ses six ou ses huit épouses. Ensuite, quand lui et ses femmes sont tous morts, il reste une ferme où vivent 36, 45 ou 50 enfants. Voilà, je pense, la différence entre le Swaziland et les autres pays ravagés par le VIH. Ces enfants ne sont pas intégrés dans un village parce qu'ils ne vivent pas dans un environnement de village. Ils restent dans leur ferme, qui ne compte plus aucun adulte.
Merci beaucoup.
Je remercie également les témoins de leur présence au comité.
Monsieur Lambert, j'étais l'exécuteur testamentaire de mon beau-frère. Il possédait un élevage de 10 000 poulets et pondeuses, ce qui fait que j'ai certaines connaissances dans ce domaine. Il y a un ou deux ans, j'étais au Ghana, dans une université du nord du pays. Ils avaient là deux grands couvoirs qui pouvaient produire beaucoup de poussins pour les éleveurs de la région. Ces couvoirs sont en panne, peut-être à cause de la défaillance d'un relais, d'un court-circuit ou d'un autre problème auquel les gens sont incapables de remédier.
Lorsque vous établissez ces fermes, prévoyez-vous aussi des couvoirs pour produire les poussins dont elles ont besoin pour remplacer les pondeuses au terme de leur période de ponte? Bien sûr, à la fin de cette période, on obtient encore une autre source de protéines. Comment faites-vous pour assurer la continuité de l'opération? Prévoyez-vous des couvoirs dans vos plans?
Non, nous ne l'avons pas fait dans le cas du projet réalisé au Swaziland. Nous avons là un producteur commercial — la société Eagles Nest — qui a déjà accepté de nous approvisionner. Comme la société produit dans ses couvoirs les poulettes nécessaires aux installations de ponte, elle nous fournira les volatiles dont nous avons besoin. L'entreprise possède aussi une société d'aliments pour animaux auprès de laquelle nous achèterons le grain nécessaire. Bref, nous n'avons pas à nous occuper des couvoirs dans ce cas.
Dans d'autres projets, il faut les prévoir. En fait, l'un des membres de notre équipe de projet du Swaziland est un dénommé Brad Lawson, qui exploite un couvoir dans l'Ouest du Canada. Par conséquent, nous disposons des compétences nécessaires.
Vous soulevez cependant une question vraiment importante: une petite défaillance peut faire échouer beaucoup de projets, par exemple si un interrupteur cesse de fonctionner et que personne ne sait comment le réparer. C'est la raison pour laquelle j'ai parlé, en réponse à la question de M. Garneau, de la mise en place d'un système adapté aux ressources et aux compétences existantes.
Il y a un autre élément qu'il serait possible d'exploiter en Afrique. Là où il y a des activités commerciales et où la plupart des grandes sociétés internationales d'élevage de volailles, comme Hy-Line et Lohmann, s'établissent en Afrique, il pourrait être possible dans beaucoup de cas de commencer la production au point de ponte. On laisse une société professionnelle internationale s'occuper de la production des poussins. On appelle les poussins femelles poulettes jusqu'au moment où elles sont prêtes à pondre, à 18 ou 19 semaines. Elles sont livrées à cet âge à l'installation de ponte. On élimine ainsi de nombreuses difficultés techniques au départ. Par la suite, il est toujours possible d'ajouter des couvoirs à l'installation, mais on ne le fait pas tout de suite.
L'un des autres aspects auxquels il fallait faire extrêmement attention était la propreté des gens qui entrent dans les granges, etc. En fait, les étrangers n'étaient tout simplement pas admis. Seuls les travailleurs qui devaient être là pouvaient entrer dans les granges. Le tourisme, pour ainsi dire, est interdit parce qu'il est impératif d'avoir un environnement absolument propre.
Quant aux poussins ou aux poulettes qui sont livrés aux installations de ponte, y a-t-il une race particulière qui résiste mieux aux maladies? J'ai tendance à croire qu'il serait difficile de contrôler l'environnement en l'absence d'électricité, de climatisation et des autres éléments nécessaires à un environnement propre. Utilisez-vous donc une race particulière?
Oui, c'est une race développée par Hy-Line International qui porte le nom de Silver Brown. Lorsque nous sommes allés au Mozambique, les pondeuses étaient productrices entre 19 et 52 semaines et même plus tard. Certaines étaient encore en pleine forme à 60 semaines. Les taux de mortalité étaient très bas. Elles produisaient encore beaucoup d'oeufs et étaient en bonne santé. Je ne sais pas si elles étaient particulièrement adaptées à l'Afrique subsaharienne, mais je sais qu'elles étaient très robustes. C'est précisément cette race que nous utiliserons.
Et vous avez parfaitement raison. À la fin du cycle de ponte, on dispose d'une toute nouvelle source de protéines, qui contribue à la rentabilité de l'entreprise. Nous utilisons tout.
Je vous remercie.
Je suis moi aussi très ému par ce que vous avez fait et ce que vous faites encore. C'est une histoire vraiment extraordinaire. Je tiens à vous remercier d'être en quelque sorte les émissaires du Canada au Swaziland.
J'aimerais savoir comment vous obtenez de l'argent. Quelle est la source de votre financement? Au Canada, j'ai entendu dire dans les milieux d'immigrants qu'il est extrêmement coûteux et difficile d'envoyer de l'argent en Afrique. J'ai beaucoup d'immigrants dans ma circonscription, pas nécessairement du Swaziland — en fait, je ne le sais pas —, mais certainement de nombreux coins de l'Afrique. Le coût moyen des virements au Swaziland se situe entre 15 et 30 % du montant envoyé. Les sociétés qui cherchent à s'établir au Canada trouvent que les banques leur rendent la vie incroyablement difficile en grugeant leurs bénéfices.
À votre connaissance, quelle part de l'argent envoyé au Swaziland passe par le système de transferts de fonds en provenance d'autres pays, et particulièrement du Canada, et quelle part vient de subventions et d'organismes caritatifs?
Je vais essayer de répondre. Je vous remercie de votre question.
Heart for Africa a une fondation enregistrée au Canada à titre d'organisme de bienfaisance. Nous recueillons des fonds auprès de sources privées. Nous ne recevons pas d'argent du gouvernement et n'avons pas jusqu'ici demandé aux autorités du financement ou des subventions.
Au Canada, nous avons une modeste présence, mais nous sommes très efficaces. Je dirais que nos frais administratifs s'élèvent à environ 7 %, tout le reste bénéficiant directement au Swaziland.
Lorsque que nous nous sommes enregistrés comme organisme de bienfaisance, nous avons bien précisé que nous travaillons en Afrique, de sorte que, pour l'ARC, nous sortons de l'argent du pays pour financer les projets que nous réalisons au Swaziland. Nous n'avons pas eu de difficulté à envoyer de l'argent. Comme je l'ai dit, environ 93 % des fonds recueillis sont transférés au Swaziland. Nous sommes aussi présents dans ce pays. Nous y avons établi un organisme de bienfaisance, également baptisé Heart for Africa, conforme aux lois locales. Nous gérons les fonds d'une façon extrêmement rigoureuse.
Cela signifie-t-il que 100 % de ce que vous dépensez au Swaziland vient de Heart for Africa? Êtes-vous au courant des difficultés de que les Swazis ont pour recevoir de l'argent venant d'autres pays? Vous avez mentionné des microprêts. Y a-t-il d'autres sources de financement outre-mer?
Nous ne faisons pas de microcrédit. Cela ne fait pas partie de notre projet. Tous les fonds du projet Canaan viennent soit de Heart for Africa Canada soit de Heart for Africa États-Unis. Nous avons également un organisme de bienfaisance à Taiwan.
De concert avec notre conseil d'administration, nous gérons tous les dons reçus pour nous assurer que les fonds sont entièrement consacrés à… Si nous construisons une exploitation d'ovoculture et que nous devons faire couler la fondation, l'argent qui arrive au Swaziland est à 100 % consacré à cette fondation. Je n'ai pas entendu parler des difficultés que vous avez mentionnées au sujet des virements… Je ne sais pas vraiment parce que l'argent est directement transféré de notre compte bancaire au Canada à notre compte bancaire là-bas.
Toutefois, nous ne distribuons pas de fonds aux gens qui vivent dans les fermes. Nous distribuons des aliments cuits et des repas chauds, de sorte qu'ils ne peuvent pas les vendre. Les enfants reçoivent un repas chaud dans un bol pour qu'ils le mangent.
Vous inquiétez-vous de la sécurité? Vous êtes à un endroit où il y a beaucoup de nourriture et vous êtes entourés de gens affamés.
Je pense que, dans tout pays du tiers monde où la pauvreté sévit, la sécurité est toujours un problème. Nous avons un service de sécurité 24 heures sur 24 au campus des enfants et à l'entrée principale. Les crimes violents ne sont vraiment pas très fréquents. Il y a plutôt des gens qui volent des objets, des aliments et d'autres petites choses.
Nous employons 250 travailleurs. Notre exploitation produit quelque 60 tonnes de maïs et, oui, une partie est subtilisée. Dans l'ensemble, cependant, nous ne souffrons pas vraiment de ce genre de problèmes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous nos témoins pour les choses remarquables qu'ils font.
Il se trouve qu'à la fin d'avril, je participe à un petit projet de sensibilisation de RÉSULTATS Canada intitulé Vivre sous la ligne. Je disposerai d'un budget de 8,75 $ pour manger et boire pendant cinq jours. Je suppose donc que je vais devoir consommer du poulet, mais pas dans les morceaux de choix, ainsi que des oeufs pour arriver à m'en tenir à 8,75 $.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Laurie Hawn: J'aimerais revenir à la pandémie de VIH/sida. L'année dernière, j'ai passé quelque temps en Tanzanie, qui connaît des problèmes du même genre pour des raisons culturelles et par manque d'éducation. En Tanzanie, par exemple, quel que soit le rôle joué par l'homosexualité dans la propagation du sida, les autorités considèrent officiellement que l'homosexualité n'existe pas dans le pays parce qu'elle est illégale. Par conséquent, rien n'est fait pour sensibiliser les gens au risque, etc. Avez-vous pu constater au Swaziland le même genre de problème culturel qui empêche la sensibilisation du public?
Il y a beaucoup de cas parce qu'à l'heure actuelle, le Swaziland constitue l'épicentre de la pandémie puisqu'il a le taux de VIH le plus élevé. Il y a quelque temps, c'était l'Ouganda qui était dans cette situation, mais l'épicentre se trouve maintenant au Swaziland. Il y a beaucoup de sensibilisation. Si les jeunes vont à l'école, ils recevront une certaine éducation à cet égard. S'ils ne vont pas à l'école, c'est un problème.
Au chapitre de l'homosexualité, je ne suis pas sûre… Je n'ai jamais vu ni entendu… En fait, ce n'est pas un sujet qu'on aborde. Je ne sais même pas si l'homosexualité est illégale ou non. Le grand problème, au Swaziland, c'est le viol et l'inceste.
Beaucoup de gens me disent que nous devons parler davantage aux Swazis de l'utilisation de préservatifs. Il y en a partout. On en trouve dans tous les bureaux du gouvernement. Au Swaziland, ils ressemblent à des emballages de bonbons. Il faut même dire aux enfants de ne pas les manger.
Toutefois, le problème de la faim est encore plus grave. La pauvreté mène les gens au désespoir. C'est un pays où les gens n'ont pas d'espoir. Dans cette situation, les hommes ne voient aucun avenir. Ils se mettent à boire, puis ils violent les filles. Je dirai que 95 % des femmes swazies ont été violées.
Il est évident que beaucoup d'enfants sont séropositifs à la naissance. Quelle est l'incidence? Elle doit être plutôt élevée.
Elle était élevée, mais des mesures sont maintenant prises dans le cadre du programme de prévention de la transmission de la mère à l'enfant. Je sais qu'une partie du financement canadien est consacrée à ce programme qui donne des résultats vraiment miraculeux. Je félicite le gouvernement pour son investissement dans ce domaine. Je vais vous donner un exemple.
Je dirais que 60 à 70 % de nos enfants sont exposés à la naissance. Autrement dit, ils courent le risque d'être infectés pendant leur passage dans le canal génital si la mère est séropositive. Nous procédons à un test rapide. Si nous trouvons un enfant abandonné par sa mère, nous faisons immédiatement le test et, si l'enfant est positif, nous commençons sur-le-champ un traitement de six semaines à la névirapine.
Si nous savons que la mère est séropositive — elle est soumise à un test avant la naissance et sa carte porte alors la mention « exposée » —, le traitement de l'enfant commence immédiatement à la naissance. J'imagine que 60 à 70 % de nos enfants sont exposés, mais seuls 10 % sont séropositifs. Je crois donc que c'est un médicament miracle.
C'est extraordinaire.
J'ai l'impression que le gouvernement du Swaziland fait vraiment un effort sérieux…
… pour bien faire les choses.
Je ne connais pas grand-chose au Swaziland. Le gouvernement est-il stable? Peut-on croire qu'il restera là pendant un bon moment?
C'est la dernière monarchie absolue du continent. Le roi Mswati est le monarque absolu. Il a cependant établi un régime parlementaire de type britannique, de sorte qu'il a un cabinet nommé et un Parlement. C'est un pays africain.
Le public n'est pas au courant. Lorsque le père du roi actuel est décédé… Ce n'est pas comme en Angleterre où les gens savent ou croient savoir qui succédera au présent souverain. Au Swaziland, les gens ne sont pas au courant. Il est cependant bien possible que les membres de la cour et du gouvernement le sachent.
Oui, il est très accessible. Si un visiteur arrivait du Canada, le roi l'accueillerait à bras ouverts. C'est un homme très bon. Nous l'avons rencontré une fois à son palais ainsi qu'au Kraal royal, comme on l'appelle, où vit la reine mère. Nous avons également des contacts réguliers avec les députés. Nous pouvons toujours compter sur leur appui. Lorsqu'ils viennent nous rendre visite, ils sont tous en larmes. Ils sont tous profondément émus parce qu'ils considèrent que c'est un endroit magique.
Ainsi, c'est l'un des rares dictateurs bienveillants de ce monde. À mon avis, une dictature bienveillante constitue la meilleure forme possible de gouvernement, mais il faut trouver ce dictateur bienveillant.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Laurie Hawn: D'après ce que vous dites, le roi du Swaziland pourrait bien appartenir à cette espèce rare.
Monsieur Hawn, votre temps de parole est écoulé.
Nous allons maintenant entreprendre le troisième tour.
Monsieur Schellenberger, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie pour votre témoignage de ce matin que j'ai trouvé merveilleux.
Avez-vous eu des difficultés, à titre d'organisation confessionnelle, à faire votre travail en Afrique?
Non, pas à titre d'organisation confessionnelle. On affronte beaucoup de difficultés pour offrir de l'aide en Afrique, mais pas pour cette raison.
J'ai quelque chose à dire. Je sais que les oeufs durs peuvent se conserver longtemps, et je sais que les Producteurs d'oeufs du Canada en gardent dans des entrepôts frigorifiques. J'en achète à différents moments. Ils se vendent par douzaine et portent une date de consommation recommandée. Gardés au réfrigérateur, ces oeufs restent bons à manger pendant quatre à six semaines.
En Afrique, cependant, il n'y a pas le même genre de réfrigération. Y a-t-il un moyen de conserver les oeufs assez longtemps par cette chaleur et dans ce climat?
Une voix: Dans le vinaigre.
M. Gary Schellenberger: Il m'arrive aussi de les faire mariner.
Oui, on peut les conserver dans le vinaigre. Il est également possible de les pasteuriser dans la coquille, mais nous n'avons pas encore envisagé cette technologie.
Compte tenu de la quantité d'oeufs que les Maxwell utilisent avec leur programme de repas chauds, je soupçonne que les oeufs sont cuits et consommés assez rapidement. Ils doivent être conservés pendant à peu près une semaine, et non pendant des mois. Pour notre ferme, nous avons prévu une certaine capacité d'entreposage frigorifique, ce qui fait que tout ira bien de ce côté.
Par ailleurs, nous ne réfrigérons pas nos oeufs en Afrique. Ils peuvent durer de quatre à six semaines à la température ambiante. Là-bas, personne ne met les oeufs au froid.
En Europe, il n'est pas permis de réfrigérer les oeufs. Si vous entrez dans une épicerie européenne, vous y verrez les oeufs à côté du pain. On ne les met pas dans la glacière avec le lait.
Je me souviens du temps où j'allais voir ma grand-mère et mon grand-père à la ferme. Nous ramassions les oeufs et les apportions à la maison. Ma grand-mère s'asseyait avec un chiffon à la main pour nettoyer les oeufs et s'assurer qu'ils étaient bien propres avant d'être envoyés au magasin.
Nous avons parlé de l'épouvantable situation à cause de laquelle vous recueillez tant d'orphelins. Je vous admire énormément pour votre travail, car vous faites votre petite part en y mettant toute votre énergie. Si chacun pouvait faire une petite part de son côté, on pourrait obtenir de très bons résultats.
Je parraine un enfant au Malawi. J'ai eu un peu la même réaction que vous lorsque je me suis demandé si je pouvais apporter une certaine aide aux gens qui entourent cet enfant. Je ne sais pas s'il se trouve ou non dans un village, mais vous m'avez certainement donné quelques idées aujourd'hui. Une fois que j'aurai quitté mes fonctions actuelles, c'est-à-dire aux prochaines élections, ces idées m'inciteront peut-être à faire un peu de bien à l'avenir. Ce n'était qu'une réflexion.
Merci beaucoup pour votre témoignage de ce matin. Je remercie aussi les Producteurs d'oeufs du Canada pour leur appui à cette grande cause.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je me demandais s'il y avait un problème sérieux de tuberculose au Swaziland. Comme on le sait, la tuberculose accompagne souvent le sida. Elle en est une complication importante.
[Traduction]
On dit souvent que la tuberculose et le sida vont de pair. Au Swaziland, nous avons un hôpital national chargé de soigner les tuberculeux. Au cours des deux dernières années, j'y ai passé beaucoup de temps parce que je m'occupe de quatre bébés dont les mères sont décédées à cet hôpital. En fait, si vous allez sur le site Web des Producteurs d'oeufs du Canada, vous y verrez la photo de deux belles petites filles, Rachel et Leah, en train de manger des oeufs durs. Leur mère est l'une des femmes qui ont succombé à une tuberculose multirésistante.
J'ai parlé aux médecins de l'hôpital. J'y suis allée chaque semaine, pendant près d'un an, pour rendre visite à la mère, en espérant qu'elle survivrait. Je lui apportais des photos et des vidéos de ses enfants. Je lui apportais des aliments, les protéines dont elle avait besoin parce que je pensais que si elle retrouvait la santé, j'aurais à m'occuper de deux orphelines de moins. En fin de compte, nous l'avions ramenée chez nous pour qu'elle puisse mourir avec dignité.
Personne ne connaît les chiffres, mais lorsque je m'entretenais avec les médecins de l'hôpital national des tuberculeux, ils me disaient que 70 % des habitants du pays avaient une tuberculose active ou inactive. Ils estimaient que 30 % de ces gens avaient la forme résistante de la maladie, ce qui est un véritable cauchemar. En effet, les gens se déplacent partout dans le pays dans des fourgonnettes toujours bondées qu'on appelle les kombis. Comme la plupart ont un système immunitaire déficient, c'est un vrai désastre.
Vous avez aussi dit une ou deux fois qu'il y a des femmes qui abandonnent leur bébé au bord de la rivière. Vous avez parlé de la situation désespérée des gens. Je suppose que les deux phénomènes sont liés, mais j'aimerais mieux comprendre ce qui incite ces femmes à abandonner ainsi leurs enfants.
J'aurais bien voulu le savoir. Je n'ai eu l'occasion de parler qu'avec une seule mère qui était dans cette situation car si un enfant est abandonné, il est abandonné. On ne retrouve plus la mère. J'ai rencontré une mère qui avait essayé de faire quelque chose. Tim était avec moi lorsque cela s'est produit. Cette jeune mère de 22 ans avait accouché vers 23 heures. Lorsqu'elle avait découvert qu'elle était enceinte, elle était allée voir le père, qui avait même nié qu'il la connaissait. Elle a donc dû en parler à sa famille. Elle avait honte, très honte. Sa famille l'a traitée de tous les noms.
La nuit de l'accouchement, à 23 heures, elle a pris le bébé et l'a jeté dans les latrines. À 5 heures, le lendemain matin, elle est allée voir si le bébé était encore vivant. Il l'était. Elle est donc allée chercher des braises dans un feu et les a jetées sur l'enfant. Son oncle ayant entendu des cris, il est allé chercher de la terre qu'il a lancée sur les braises pour les éteindre. Ensuite, quelqu'un est descendu de deux ou trois mètres dans la fosse pour retirer le bébé. C'était une petite fille. Elle avait de graves brûlures au visage, aux mains et aux jambes. Elle a perdu son gros orteil. Elle a été admise à l'hôpital du gouvernement où elle est restée six semaines. Elle a survécu. Je ne sais vraiment pas comment, compte tenu de ses blessures.
Bien sûr, la mère a dû rester là pour s'occuper d'elle. À l'hôpital, cette mère qui avait essayé de tuer son enfant est devenue la soignante. Lorsque l'enfant a pu quitter l'hôpital, la mère, elle, a été jetée dans la prison locale des femmes. C'est ce jour-là que le chef de la direction et le président du conseil d'administration des Producteurs d'oeufs du Canada sont arrivés. Je leur ai dit que je devais aller chercher un bébé et leur ai demandé s'ils voulaient m'accompagner. Ils sont donc montés dans la voiture avec moi. Il est probable qu'ils diraient non si la même situation se reproduisait. Je ne sais pas s'ils accepteraient de monter en voiture avec moi une autre fois. En fait, nous avons reçu deux bébés ce jour-là et deux autres le lendemain.
À mon arrivée, je suis entrée dans la prison des femmes et j'ai vu l'enfant. La mère était là. Je ne savais pas que la petite était brûlée. Je l'ai sortie de ses langes et l'ai posée sur le bureau du commandant pour évaluer la situation. J'ai demandé à la mère de me raconter son histoire. Elle l'a fait. À la fin, je lui ai dit — j'espère que vous m'excuserez d'avoir parlé aussi longuement — que je n'avais jamais eu l'occasion de parler à une mère qui avait abandonné son enfant. Je lui ai demandé: « Pourquoi l'as-tu fait? » J'étais gênée de poser cette question. Ce fut un moment embarrassant parce que j'ai ressenti sa honte. Elle a simplement éclaté en sanglots. Elle n'avait rien à répondre. Elle avait l'impression qu'elle ne pouvait rien faire d'autre.
Bref, je ne peux pas répondre à votre question.
[Français]
Merci beaucoup.
J'ai deux questions très rapides. Vous n'aurez peut-être pas le temps de répondre entièrement à la deuxième.
J'aimerais d'abord savoir quel nom vous avez donné au futur leader du pays. Ensuite, je voudrais savoir ce qui suit:
[Traduction]
Quel est l'histoire de la vipère?
Des voix: Oh, oh!
Je n'ai pas un nom à donner.
Je peux cependant vous dire que nous avons appelé River la petite fille abandonnée au bord de la rivière et Shirley, le bébé brûlé.
Tim, pouvez-vous parler des serpents?
Après la journée à la prison des femmes, nous avons aussi dû aller à l'hôpital psychiatrique pour y prendre un autre bébé, mais c'est encore une autre histoire.
Dans la soirée, nous nous sommes assis autour d'un feu pour nous détendre. Il y a beaucoup de chiens à la ferme. Tout à coup, ils se sont tous mis à aboyer. Janine a dit: « Que personne ne bouge! » Ian s'est levé et est allé chercher une torche et une pelle.
Presque exactement derrière ma chaise, il y avait une vipère heurtante. Ces vipères tuent plus de gens en Afrique que n'importe quelle autre espèce de serpent. Je hais les serpents. Je ne les aime vraiment pas. Ils me terrifient.
Bref, Ian essayait de tenir la torche et de tuer le serpent. Je lui ai pris la torche. La vipère s'est logée dans une fente d'un mur de pierre. La pelle n'était pas assez coupante, et le serpent essayait de fuir. De mon côté, je m'efforçais de ne pas mouiller mon pantalon pendant qu'Ian cherchait à couper la tête du serpent.
Des voix: Oh, oh!
M. Tim Lambert: J'ai en fait une photo de la vipère, que nous avons prise après avoir réussi à la tuer. Je pourrai vous la montrer plus tard. Quoi qu'il en soit, c'est l'histoire du serpent.
Tim, vous avez dû trouver ce lieu tellement accueillant que vous voudrez toujours y revenir.
Madame Brown, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
J'ai trouvé cela très instructif.
Janine, ce n'est pas facile, mais je tiens à vous remercier de nous avoir ouvert votre coeur. C'est difficile. Ayant déjà visité 22 pays africains, je sais qu'il y a un besoin désespéré. Aucun doute là-dessus.
Tim, pour revenir à la question des oeufs, je voudrais mentionner que nous achetons des oeufs en poudre. Je ne les achète pas souvent, mais je veux simplement dire qu'on peut s'en procurer. Nous en apportons avec nous quand nous allons camper. Y aurait-il moyen de faire ce genre de transformation en Afrique? Vous dites que vous pouvez faire des oeufs durs, mais il doit être difficile et coûteux de les transporter. Avez-vous envisagé un moyen de transformation pouvant servir à améliorer ce que vous essayez de faire? Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?
Je crois que nous faisons don de 16 tonnes d'oeufs en poudre chaque année à un organisme de bienfaisance qui s'occupe d'enfants. C'est un autre projet auquel nous participons.
Il faut dire que nous essayons surtout d'apprendre aux gens les techniques de base de la production agricole. Par conséquent, une transformation poussée peut poser d'importants problèmes. Il suffit d'un interrupteur qui cesse de fonctionner ou d'un fusible grillé pour tout arrêter parce que personne ne sait comment entretenir le matériel. Nous avons donc concentré nos efforts sur les choses que j'ai mentionnées.
Pour revenir à votre question, je dirais que rien ne nous empêcherait d'envisager une transformation poussée à un moment donné. C'est simplement qu'on aurait alors besoin de technologies perfectionnées qui occasionnent des problèmes d'entretien. Néanmoins, rien ne s'oppose en principe à l'adoption de telles technologies.
C'est peut-être une chose à envisager de concert avec les grandes sociétés dont vous nous avez parlé. Je sais que ces entreprises élèvent les poulettes pour les envoyer ailleurs, mais, si l'occasion se présentait, on pourrait peut-être envisager cette transformation comme élément de renforcement de la durabilité. Vous pourriez alors mettre des éléments nutritifs faciles à utiliser à la disposition des gens les plus vulnérables. J'essaie de penser un peu à l'avenir.
Si vous commencez sur petite échelle — puisqu'il y a évidemment des gens qui s'intéressent à de petites exploitations —, comment procéderez-vous? Vous avez dit que vous avez un système permettant de lancer le processus. Je pense qu'il s'agira déjà d'un niveau un peu plus avancé que celui d'une petite exploitation agricole. Combien de poulette faudrait-il à votre avis pour commencer? Quel serait le coût de cette technologie qui constituerait en quelque sorte un guichet unique pour les agriculteurs?
Je suppose qu'il serait possible de commencer avec un tout petit nombre de volatiles. Les systèmes que nous construisons au Swaziland comprennent deux unités pouvant abriter chacune 2 500 pondeuses. Le projet réalisé au Mozambique aura des unités pouvant accueillir quelque 2 000 volatiles qui pourront produire — je ne sais pas — un peu moins d'un oeuf par jour. Les pondeuses sont très productives, de sorte que 2 000 volatiles produisent probablement à peu près 1 500 oeufs. Cela suffit pour nourrir beaucoup de gens. On pourrait penser que 2 000 pondeuses, c'est beaucoup, mais il faut dire qu'aux États-Unis, par exemple, une exploitation commerciale moyenne compte 1,5 million de volatiles.
Mme Lois Brown: Oui, ce sont de grandes exploitations.
M. Tim Lambert: Avec 200 petites exploitations de ce genre, on pourrait atteindre ce niveau…
Je ne sais pas quel serait le coût par cage ou par unité.
Avez-vous une estimation approximative du coût d'une exploitation de ce genre, en dollars canadiens?
Oui, absolument. La taille est très flexible. Les cages sont mécaniquement attachées les unes aux autres. On peut en avoir aussi peu ou autant qu'on le désire.
Avec 200 volatiles, est-il raisonnable de penser que si quelqu'un souhaitait établir une petite exploitation, il lui suffirait d'avoir une mise de fonds initiale de 300 $ à 500 $? Pourrait-on lui fournir tout ce dont il a besoin à ce prix?
Probablement. Le prix serait peut-être un peu plus élevé, mais il serait vraisemblablement de cet ordre.
D'accord.
Ian et Janine, nous avons discuté hier d'un certain nombre d'idées. Parmi les mécanismes possibles de collecte de fonds, nous avons évoqué la possibilité d'inciter les gens à penser à une douzaine d'oeufs au Swaziland chaque fois qu'ils achètent des oeufs ici. Vous avez même parlé d'acheter un poulet, mais j'ai pensé que lorsque j'achète un poulet, c'est habituellement pour le manger. Je ne l'envisage pas vraiment comme un moyen de production tandis qu'avec une douzaine d'oeufs, on a quelque chose de tangible.
J'aimerais poursuivre la réflexion à ce sujet. Je serais très heureuse d'y ajouter un peu d'imagination et de voir si mes collègues ont d'autres idées. De toute évidence, vous pensez beaucoup aux moyens de financement. Je ne sais pas comment vous avez réussi jusqu'ici à faire autant avec les ressources limitées dont vous disposez. Nous avons évoqué la possibilité de subventions du gouvernement du Canada. Nous vous tiendrons au courant des perspectives à cet égard.
Pour ma part, je voudrais simplement vous remercier de ce que vous faites. On ne sait jamais lequel de ces petits sera le prochain dirigeant. Comme je l'ai déjà dit auparavant, lorsque j'étais en Afrique… Mon gendre vient du Ghana. C'est un jeune homme brillant qui a un doctorat en génie électrique. Si un de vos enfants devient un autre Kofi, nous pouvons nous attendre à un brillant avenir. Quoi qu'il en soit, nous avons aussi la responsabilité d'aider.
C'était bien plus un commentaire qu'une question. De toute façon, je vous remercie.
Merci.
Il nous reste encore quelques minutes. Avez-vous des observations à formuler pour conclure?
Y a-t-il d'autres questions? Nous avons fini notre troisième tour.
Je voudrais vous dire encore une fois à quel point nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de nous écouter. Nous apprécions beaucoup les réflexions et les idées exprimées ainsi que l'intérêt que vous portez à notre entreprise.
Je vous remercie.
Merci à vous.
Je peux vous dire, au nom des membres du comité, que nous trouvons remarquables les partenariats de ce genre à cause des effets synergiques qu'ils engendrent. Je crois que c'est la clé du succès. Chacun profite de l'expérience des autres, ce qui aboutit à des résultats concrets. Ce genre de collaboration sur le terrain est vraiment admirable. Sans compter que nous sommes toujours fiers d'entendre parler de réalisations canadiennes.
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