FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 31 mars 2015
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons l'étude de la protection des enfants et des jeunes dans les pays en développement.
Je souhaite la bienvenue à tous les témoins et je les remercie de leur présence.
D'Oxfam Canada, nous recevons Caroline Marrs, directrice du Centre for Gender Justice. Bienvenue, madame Marrs.
De l'Initiative pour les micronutriments, nous accueillons Joel Spencer, président, et Mark Fryars, vice-président des programmes et services techniques.
La dernière et non la moindre: Helen Scott, directrice du Réseau canadien sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants.
J'ai l'impression que la sonnerie retentira. Nous avons bon espoir de pouvoir au moins entendre les exposés préliminaires, mais nous verrons bien. Si la sonnerie retentissait, nous irions faire le nécessaire, puis nous reviendrions pour la période de questions.
Commençons sans attendre.
Madame Marrs, vous avez la parole.
Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de tout coeur de me donner l'occasion de vous faire part de l'expérience d'Oxfam auprès des jeunes et des enfants. À Oxfam, nous estimons que la définition du mot développement doit inclure la jouissance universelle de certains droits. Mon exposé portera sur la mobilisation citoyenne, qu'Oxfam considère comme le fondement du développement axé sur les droits. Je me concentrerai en particulier sur le sort des femmes et des filles.
Je sais que vous connaissez beaucoup de statistiques, mais j'en cite néanmoins quelques-unes. Le taux de chômage chez les jeunes représente manifestement un problème criant. Selon les chiffres que j'ai consultés, il était d'environ 12,6 % dans le monde en 2010, contre 4,8 % pour les adultes. La situation est encore pire pour les jeunes femmes: selon la même source, leur taux d'activité n'est que de 40,8 %, contre 56,3 % pour les jeunes hommes. Les taux d'alphabétisation se sont nettement améliorés depuis 20 ans, mais les jeunes femmes représentent encore aujourd'hui 61 % de la jeunesse analphabète. En outre, si vous étiez une Zimbabwéenne, une Sénégalaise ou une Colombienne de 15 à 19 ans habitant actuellement dans une région rurale, il y aurait une chance sur cinq que vous ayez déjà donné naissance.
De l'avis d'Oxfam, les obstacles auxquels se heurtent les jeunes et les enfants sont ancrés dans le déséquilibre des rapports de force. Les jeunes sont sous-représentés aux tribunes aussi bien officielles que traditionnelles où se prennent les décisions qui les concernent. En parallèle, leurs besoins et leurs commentaires y sont ignorés des décideurs ou leur sont inconnus. Les jeunes femmes et les filles sont doublement accablées. En effet, comme nous le savons, dans tous les pays, les femmes se heurtent aux multitudes de conséquences de la discrimination sexiste ancrée dans l'inégalité entre les sexes.
Sur le plan du développement économique, Oxfam se réjouit de l'intensification des efforts, dans le monde entier, visant à favoriser l'émancipation économique des femmes de tous âges et les appuie, mais il n'en demeure pas moins essentiel, selon nous, de comprendre les causes premières des inégalités. Nos recherches préliminaires montrent, par exemple, que l'augmentation du revenu d'une femme peut intensifier la violence conjugale à son endroit.
Comprendre les causes premières constitue par ailleurs un élément charnière pour abolir les obstacles à la participation. Les jeunes et les enfants, en particulier les jeunes femmes et les filles, peuvent être victimes de violence chez elles ou dans leur milieu, ce qui les empêche de profiter d'excellents programmes. Parce qu'il leur revient souvent de s'occuper de la famille, les femmes et leurs filles n'ont pas le temps de se prévaloir des occasions susceptibles de les intéresser. Par contre, changer l'heure à laquelle un programme de formation est offert de manière à permettre aux jeunes femmes d'y assister ajoute souvent une heure de travail de plus à leur journée.
Bref, nous devons prendre conscience de ces réalités souvent occultées. Selon nous, l'élaboration d'un bon programme doit, par définition, commencer par une analyse des pouvoirs de manière à faire ressortir ces réalités. De plus, nos programmes doivent offrir un soutien moral et technique aux femmes et aux jeunes pour leur permettre d'assumer des rôles de responsabilité en vue d'éliminer les obstacles et les atteintes aux droits de la personne, comme la violence, qui les touchent. À Oxfam, nous savons que les organismes de défense des jeunes et des femmes finissent toujours par s'occuper également de problèmes communautaires et sociaux plus vastes. Invariablement, les personnes qui ont l'assurance d'être entendues et de jouir d'un soutien pour améliorer leurs compétences afin de trouver et d'appliquer des solutions s'investissent corps et âme dans leur démarche.
Ainsi, des jeunes, hommes et femmes, jouent un rôle très actif et transformateur au sein des programmes d'Oxfam dans le but de faire évoluer les mentalités, les normes et les comportements qui perpétuent la violence envers les femmes et les filles. Ils cherchent à sensibiliser leurs pairs à l'école et sur le terrain, et ils interpellent courageusement les détenteurs du pouvoir au sein de leur famille, de leur communauté et de leur société de manière à dénoncer la violence et à remettre en question l'inégalité entre les sexes qui la perpétue.
Ce travail essentiel s'inscrit dans la durée. Pas plus tard qu'en 2011, une enquête nationale menée au Bangladesh a révélé que, parce qu'on leur apprend dès le plus jeune âge à se soumettre et à se sacrifier, les femmes gardent le silence lorsqu'elles sont victimes ou témoins de violence conjugale. En Zambie, la Constitution permet d'appliquer le droit coutumier qui, dans certaines communautés, autorise des pratiques discriminatoires et dangereuses telles que le mariage hâtif.
Pour terminer, voici trois idées pour orienter l'approche du Canada de manière à faire valoir les droits des jeunes et des enfants dans le monde en développement.
Primo, il faut payer au suivant. Finançons les organismes de défense des droits des femmes et faisons-les participer aux programmes jeunesse. Par exemple, le programme Raising Her Voice d'Oxfam, au Pakistan, aide des organismes de défense des femmes à revendiquer inlassablement un resserrement des lois pour protéger les jeunes et les enfants, notamment la Loi de 2011 sur le droit pénal, qui traite des règles coutumières misogynes.
Difficile, en effet, d'envisager de mettre un terme aux mariages précoces et forcés des enfants, que ce soit au Pakistan ou ailleurs, sans collaborer avec les organismes de défense des femmes, qui sont pourtant honteusement sous-financés. En 2013, l'Association pour les droits de la femme et le développement a mené auprès de 740 organismes un sondage révélant qu'ils ont un revenu moyen d'à peine 20 000 $ par année. La création d'un fonds canadien pour les organismes de défense des femmes susciterait l'enthousiasme dans le monde entier et s'inscrirait selon nous dans une stratégie efficace de protection des enfants et des jeunes.
Secundo, il faut consentir davantage de financement variable aux jeunes dirigeantes, surtout celles qui proviennent de groupes marginalisés. Le programme AMAL d'Oxfam, un mot qui signifie « espoir », vient ainsi de lancer un fonds d'innovation destiné à inciter les jeunes femmes et les femmes marginalisées de pays comme le Yémen et la Tunisie à proposer des moyens novateurs d'apporter des changements transformateurs. Les fonds peuvent aussi servir à renforcer leur confiance en elles et leurs capacités ainsi qu'à financer des activités d'apprentissage et de mise en commun du savoir, autant d'éléments selon nous essentiels.
Tertio, il faut hausser considérablement le financement et la visibilité des programmes de lutte contre la violence envers les femmes et les filles. Il faut beaucoup plus d'argent pour accomplir beaucoup plus de choses en vue de faire évoluer les mentalités, les normes et les comportements qui perpétuent la violence, d'offrir davantage de services de meilleure qualité aux survivantes, et de veiller à la présentation, au renforcement et à l'application efficace de mesures législatives. La violence est l'indicateur le plus courant du sexisme que subissent les filles et les jeunes femmes au quotidien.
À Oxfam, nous sommes immensément fiers que le Canada soit reconnu de longue date comme un chef de file en matière d'égalité homme-femme et comme un défenseur des organismes de la société civile en tant que rouages essentiels de la démocratie. Il faut faire fond sur cette réputation plus qu'enviable pour élaborer la stratégie jeunesse efficace et viable qui fait si cruellement défaut compte tenu des tendances démographiques actuelles. Les organismes de défense des femmes, les jeunes et les citoyens mobilisés nous disent qu'ils ne se contenteront de rien de moins que de la transformation de leur communauté et de leur société. Ils comptent sur le Canada pour assurer un rôle structurant à l'appui de ce qu'ils font déjà et de ce qu'ils rêvent d'accomplir.
Merci de m'avoir donné l'occasion de m'entretenir avec vous aujourd'hui.
Merci beaucoup, madame Marrs.
Passons maintenant à vous, monsieur Spicer. Bienvenue. Vous avez la parole.
[Français]
Tout d'abord, je vous remercie beaucoup. C'est un honneur d'être parmi vous aujourd'hui.
[Traduction]
Dans mes remarques préliminaires, j'aborderai trois grands points: premièrement, que la nutrition est un élément essentiel de la protection de l'enfance; deuxièmement, que le Canada est reconnu dans le monde entier en tant que chef de file dans le dossier de la nutrition; troisièmement, que nous pouvons en faire bien davantage pour mettre cette réputation à profit de manière à influencer le reste du monde afin de transformer pour le mieux la vie des enfants.
D'aucuns se demanderont pourquoi le président d'un organisme axé sur la nutrition témoigne aujourd'hui à propos de la protection de l'enfance et de la jeunesse. Je dirai quelques mots sur le lien entre la malnutrition et la vulnérabilité, en particulier chez les enfants. Considérons les faits suivants.
Chaque soir, 300 millions d'enfants vont au lit le ventre vide. Chaque année, près de trois millions d'enfants de moins de cinq ans meurent de malnutrition. Ils ne sont pas assez résilients pour combattre les maladies et les infections opportunistes. C'est près de la moitié de toutes les morts d'enfants dans le monde, 8 000 enfants par jour, un décès toutes les 10 secondes. Plus de 160 millions d'enfants présentent un arrêt de croissance prématuré. Ils sont petits pour leur âge et ils ne consomment pas assez des nutriments de base qu'il leur faut pour fonctionner, grandir et réaliser leur plein potentiel.
Au final, un enfant mal nourri, c'est un enfant vulnérable. C'est un enfant qu'il faut protéger.
J'ai trois enfants. Ils ont six ans, cinq ans et deux ans. Lorsque je visite des projets de l'Initiative pour les micronutriments sur le terrain, je ne peux faire autrement que m'intéresser aussi aux enfants, un peu parce que je m'ennuie des miens, mais aussi parce que les enfants sont les principaux indicateurs de la santé et du potentiel d'une collectivité.
L'an dernier, j'ai eu la chance de visiter des projets de l'Initiative pour les micronutriments en Afrique subsaharienne et dans le Sud de l'Asie. Je me souviens d'un village en particulier, un village éloigné. Nous marchions et nous avons vu de nombreux enfants jouer, ce qui n'a absolument rien d'anormal. On s'attend à voir cela. Ce n'est que lorsqu'on apprend l'âge des enfants que l'on constate que quelque chose ne tourne vraiment pas rond. L'enfant dont vous auriez cru qu'il avait deux ou trois ans a en fait six ans. Un autre, un peu plus loin, est aussi grand que votre enfant, à la maison, mais il a neuf ou dix ans, pas six. Quand on les prend dans ses bras... Vous savez, je connais la densité de mes enfants. Je les prends souvent dans mes bras. Ils sont lourds. Or, lorsqu'on prend un enfant qui souffre de malnutrition chronique, c'est une tout autre sensation. C'est comme prendre du chiffon.
Cela dit, même si leur densité est différente, même si leur masse musculaire est différente, leur sourire, leur lumière intérieure et leur immense potentiel sont les mêmes. C'est ce qui brise le coeur: les enfants qui souffrent de malnutrition chronique devront livrer un dur combat jusqu'à la fin de leurs jours pour réaliser leur plein potentiel. Nous pouvons protéger ces enfants.
Le plus pénible, c'est que ce cycle se perpétue d'une génération à l'autre. Une fille qui semble avoir 10 ou 11 ans a en fait 16 ans et elle est sur le point de se marier. Les risques qu'elle meure en couches et que son enfant meure ou subisse toute sa vie les conséquences de la malnutrition en sont d'autant plus élevés. C'est ainsi que le cycle se perpétue. Les adolescentes mal nourries donnent naissance à des bébés ayant une insuffisance pondérale à la naissance, qui deviennent des enfants présentant un arrêt de croissance prématuré, puis des adolescents rachitiques. C'est un cycle sans fin.
Bref, on ne peut espérer remporter la lutte contre la pauvreté et ses conséquences tant que des générations entières sont mal nourries, qu'elles s'arrêtent de grandir prématurément et qu'elles peuvent difficilement réaliser leur potentiel de développement par manque d'accès à une saine nutrition. Je répète que, au final, un enfant mal nourri, c'est un enfant vulnérable. C'est un enfant qu'il faut protéger.
Sur une note plus positive, le Canada est à l'avant-plan de la protection des enfants contre la malnutrition. Sa réputation de chef de file mondial n'est plus à faire. Je vous donne quelques exemples de mesures visionnaires qu'il a appliquées. Ils s'inspirent de mon propre organisme.
L'Initiative pour les micronutriments est un organisme canadien de portée internationale et axé sur la nutrition qui joint chaque année 500 millions de personnes dans plus de 70 pays. Nous ciblons l'élargissement d'interventions peu coûteuses aux retombées importantes qui comptent parmi les solutions optimales les plus reconnues en matière de santé mondiale.
Je parle des capsules de vitamine A. Un enfant n'a besoin que de deux capsules par année pour stimuler de manière spectaculaire son système immunitaire et éviter la maladie. Chaque année, l'IM fournit ces deux doses à 150 millions d'enfants, ce qui les protège de la maladie et réduit de 24 % le taux de mortalité infantile. Au total, nous avons sauvé quatre millions de vies jusqu'à présent. Les capsules coûtent 2 ¢ l'unité à fabriquer, et la plupart le sont ici même, au Canada.
Voici un autre exemple: il y a des décennies, les gens se sont rendu compte qu'ioder le sel pouvait prévenir certaines déficiences intellectuelles et d'autres problèmes de santé tout en entraînant une augmentation du QI susceptible d'atteindre 15 points. Au cours des cinq dernières années, grâce au soutien des Canadiens, nous avons protégé 30 millions de nouveau-nés d'une déficience intellectuelle permanente, pour une facture de quelque cents par personne, par année.
Ce n'est pas la seule chose que fait l'Initiative pour les micronutriments. Nous cherchons constamment de nouveaux moyens d’améliorer le sort des femmes et des enfants. Ce ne sont là que deux exemples de ce que fait le Canada au-delà de sa juste part pour changer les choses.
Les Canadiens ont à coeur d’améliorer le monde où nous vivons. Ce leadership mondial en matière de nutrition, dont j’ai parlé, est en partie attribuable à l’engagement à long terme que nous avons pris envers les enfants. Cet engagement pris par nos représentants, par des politiciens de tous les partis, par des ONG, par des universitaires et par des Canadiens d’un océan à l’autre donne des résultats qui ont conféré une réputation mondiale au Canada et en font une autorité en matière de nutrition.
La question qui se pose alors est: que faire de cette autorité? L’un des principaux messages que je veux transmettre au comité, c'est que le Canada pourrait profiter de son leadership pour atteindre encore plus d’enfants en faisant jouer de son influence auprès d’autres donateurs, d’autres pays et d’autres blocs géopolitiques.
Que penser des priorités du monde si l’on ne peut, pour le prix d’un latte au café du coin, offrir aux enfants des interventions des plus utiles qui sont essentielles pour qu’ils puissent lutter contre la maladie, grandir en force et avoir un développement mental optimal? Si la protection des enfants était vraiment une priorité dans le monde, nous ne serions pas témoins de toute cette vulnérabilité chez d’innombrables enfants. Le Canada peut profiter de son autorité pour obtenir qu’on accorde davantage la priorité aux enfants en se servant de ses capacités de développement ainsi que de ses ressources commerciales et diplomatiques comme d’un levier auprès des autres acteurs.
Comment faire? Nous l’avons fait récemment au Sommet de la Francophonie, au Sénégal, où notre ambassadeur et sherpa, M. Philippe Beaulne, a invité les donateurs, le secteur privé et les chefs de gouvernement à une assemblée parallèle sur la nutrition, où les représentants du MAECD ont mené les négociations pour s’assurer que des résolutions finales prévoient un engagement des pays en développement à augmenter leur propre budget consacré à l’alimentation ainsi qu’à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants.
La résolution globale a été signée par 57 chefs d’État, dont des États qui sont affligés des plus hauts taux de malnutrition dans le monde. Voilà un exemple d’influence. À partir de là, pour les six prochains mois, je suis sûr que beaucoup d’occasions se présenteront d’unir les objectifs de différents pays au plus haut niveau. Par exemple, dans deux semaines, le nouveau premier ministre de l’Inde viendra au Canada. Il importe bien sûr d’augmenter les relations commerciales avec ce pays qui comptera bientôt la plus importante population du monde, mais il faudrait aussi aborder la question de la malnutrition, qui afflige lourdement ce pays. L’Inde n’est plus bénéficiaire d’aide internationale. C'est maintenant une puissance naissante ayant une empreinte régionale et mondiale de plus en plus importante.
Le Canada et l’Inde sont tous deux membres du Commonwealth, un groupe de pays où vivent moins de 40 % des enfants de moins de 5 ans dans le monde, mais où les décès d’enfants représentent plus de la moitié du chiffre mondial. Et si le Canada et l’Inde travaillaient ensemble à faire avancer la cause de l’alimentation des enfants à la prochaine rencontre des chefs de gouvernement du Commonwealth, en novembre? Ces discussions pourraient se dérouler entre chefs de gouvernement, entre parlementaires, entre ambassadeurs et entre fonctionnaires. Nous pourrions unir nos outils diplomatiques et commerciaux et nos moyens de développement. Ce n’est qu’un exemple. Je suis sûr que, si nous avions plus de temps, nous pourrions formuler beaucoup d’autres idées, parce que le besoin en leadership est énorme, mais les occasions d’en faire preuve le sont aussi.
En terminant, je veux dire que le monde se rend finalement compte qu’il ne peut pas avancer si une grande partie de sa population tire de l’arrière. Le fait que les parlementaires canadiens étudient les raisons qui font que des gens sont laissés pour compte et l’importance d’enjeux comme la protection des enfants est une preuve de plus, du moins pour moi, que les gouvernements, aux plus hauts échelons, jugent le statu quo inacceptable et que le Canada continuera à tirer parti de tout l’éventail de ses capacités en tant que défenseur des enfants dans le monde.
Je vous remercie de votre temps.
Je vous remercie tous les deux. Vos interventions étaient excellentes. Il est difficile de prendre la parole après deux orateurs aussi éloquents, mais je commence tout de même en vous remerciant tous. Je connais le travail que vous faites, le leadership dont vous faites preuve et les rôles que vous assumez. En tant que mère canadienne, je vous suis reconnaissante de manifester cet intérêt avec autant d’énergie. J’ai eu la chance de voyager et de travailler de plus près avec vous. Je sais combien vous travaillez fort et je l’apprécie grandement.
J’ai le bonheur de pouvoir, à ce point de ma carrière, coordonner les efforts du Réseau canadien sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Ce réseau est un partenariat entre plus de 80 organismes canadiens qui se consacrent à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Mes collègues à la table font partie du réseau. Nous parlons donc d’une même voix à bien des égards. Nos organismes sont actifs dans plus de 1 000 régions du monde où ils s’emploient à améliorer la vie des femmes, de leurs nouveau-nés et de leurs enfants. Le réseau a été créé officiellement en 2012, peu de temps après le lancement de l’Initiative de Muskoka.
Nous visons trois objectifs clés.
Le premier est la mesure des résultats. Nous savons que nous pouvons mieux rendre compte des résultats. Nous nous employons avec nos partenaires à mesurer le mieux possible notre impact et nos réussites et à mieux suivre nos investissements. Ainsi nous savons si nous faisons le meilleur travail possible avec nos ressources limitées.
Notre deuxième objectif clé est le partage des connaissances. Nous nous concentrons sur la mesure des résultats. Nous cherchons à savoir quel serait le meilleur moyen de nous attaquer aux causes. Nous recueillons cette information et la communiquons les uns aux autres. Il n'y a personne, dans le réseau, qui ne sache pas que tout programme doit comprendre la distribution de capsules de vitamine A. Je ne suis pas certaine que c’était le cas il y a cinq ou dix ans.
Notre troisième objectif est d’amener des intervenants à participer. Nous savons que nous n’arriverons pas seuls à nos fins. Nous savons que, par l’intermédiaire du réseau, la collaboration accrue entre les secteurs s’est avérée très efficace. Nous cherchons donc à amener plus de Canadiens à se joindre à nos efforts. En outre, nos experts profitent de toutes les occasions pour conseiller et informer le gouvernement du Canada au sujet des investissements.
À cet égard, j’en profite pour dire que le Canada a bien fait les choses, en 2010, quand il a accordé la priorité à la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Étant donné les énormes progrès que nous avons maintenant accomplis et tout le travail qu’il reste à faire, nous savons qu’il est impérieux pour les femmes et les enfants du monde que ces démarches se poursuivent. Nous savons que l’amélioration de la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants — et Joel l’a tellement bien expliqué — est la base de la croissance économique, de la stabilité politique et de la sécurité humaine, et que c'est un élément critique de la protection des enfants.
Je sais que vous avez entendu bon nombre de nos partenaires lors de séances antérieures du comité permanent. Je pense que l’un des principaux messages qu’ils vous ont communiqués, c'est qu’il n’y a pas de formule magique pour assurer la protection des enfants. Il faudra employer une approche multisectorielle à plusieurs volets. Je ne parle ici que d’un seul élément de cette approche, la santé. Bien qu’il s’agisse d’un élément critique, je sais que ce n’est qu’une des composantes des nombreux systèmes et structures qui peuvent donner aux enfants la possibilité de survivre et de s’épanouir. Je pense que vous avez reçu Peter Singer il y a quelques semaines. Peter accorde beaucoup d’importance à la notion d’épanouissement. Il ne suffit pas que les enfants survivent après la naissance et leurs cinq premières années de vie. Les enfants doivent s’épanouir. Je pense que c'est là-dessus que nous nous concentrons tous. Nous commençons à constater des progrès. Les taux de mortalité diminuent partout dans le monde. Le temps est maintenant venu de nous concentrer davantage sur la nécessité que ces enfants s’épanouissent.
Les efforts pour améliorer la santé mondiale ont abouti aux réalisations les plus importantes en matière de développement. Le Canada a joué un rôle tellement important dans la conception et le soutien des initiatives mondiales marquantes, qu’on pense au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme; à Gavi, l’Alliance du vaccin, qui assure la vaccination de millions d’enfants chaque année; à l’Initiative pour les micronutriments, autre magnifique exemple; enfin bien sûr à l’Initiative de Muskoka. Lancée après le sommet du G8 de 2010, l’Initiative de Muskoka a permis d’importantes améliorations dans la santé des femmes, des nouveau-nés et des enfants, notamment — et je pense que cela s’enchaîne bien avec ce dont Joel vient de parler — en mobilisant la communauté internationale et en galvanisant la volonté d’engagement.
Par exemple, le Canada a agi en chef de file pour galvaniser le soutien à la Stratégie mondiale du secrétaire général des Nations Unies pour la santé de la femme et de l'enfant, que nous appelons simplement la stratégie mondiale. Un rapport récent sur cette stratégie soulignait qu’il s’agissait du partenariat en santé publique qui connaissait la plus forte croissance dans l’histoire, et qu’elle a permis de sauver la vie de 2,4 millions de femmes et d’enfants depuis 2010.
Je m’arrête un instant. Je suis statisticienne de formation. Je sais que ces chiffres énormes ne signifient pas grand-chose pour nous. Je vous invite donc à penser à un enfant que vous aimez, qui occupe une place particulière dans votre vie. Pensez maintenant que, depuis 2010, on a sauvé la vie de 2,4 millions d’enfants qui sont aimés de la même façon. C'est phénoménal. C'est une réussite à célébrer. Cela signifie que nous savons quoi faire, que nous n’avons plus qu’à nous mettre à la tâche pour faire le travail qu’il reste à accomplir.
Nous voici en 2015. Le monde est sur le point de réaliser des progrès durables en matière de santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. À cette fin, le leadership du Canada doit servir à susciter des engagements politiques et financiers pour donner suite à notre annonce de 3,5 milliards de dollars faite en mai 2014.
Le nouveau ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement donne au Canada une opportunité unique de mettre à profit notre politique étrangère et nos outils commerciaux pour mieux réaliser notre programme de développement. Le réseau multisectoriel du Canada nous place mieux que quiconque pour faire des progrès sur le terrain. Nous travaillons avec des chercheurs, des universités, des ONG et des associations de professionnels de la santé du Canada, et avec des médecins, des sages-femmes, des infirmières et des chirurgiens qui sont déjà dans les régions visées.
Ensemble, le gouvernement du Canada et les 80 organismes du réseau favoriseront une plus grande rigueur et un engagement plus ferme en vue de la réalisation de nos aspirations communes à l’intention des mères et des enfants dans le monde.
Grâce à un leadership mondial accru, la communauté internationale peut donner du pouvoir aux femmes et favoriser une plus grande résilience en renforçant les systèmes de soins de santé, en luttant contre les maladies infectieuses, en favorisant des pratiques sexuelles saines et en améliorant la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Nous devons nous assurer que les objectifs du millénaire relatifs à la santé, qui ne sont pas complètement atteints, ne se perdent pas dans la transition vers les objectifs de développement durable que nous annoncerons au cours de l’année.
Nous proposons que le Canada prenne les engagements suivants — et je dois dire que le Canada a déjà ces engagements à coeur. Il faut réaffirmer les objectifs que nous poursuivons déjà. Nous devons renouveler nos engagements, et inciter le reste du monde à faire de même, dans le cadre de Muskoka et de la Stratégie mondiale pour la santé de la mère et de l'enfant. Pensons par exemple à Une promesse renouvelée, le plan d’action pour tous les nouveau-nés, ou à Planification familiale 2020. Faisons en sorte que ces engagements soient respectés.
Nous devons appuyer la nouvelle Stratégie mondiale pour la santé de la mère et de l'enfant, qui doit être amorcée en septembre 2015. Nous l’appelons la stratégie mondiale 2.0. Lors des négociations sur la stratégie après 2015, nous devons soutenir l’objectif ambitieux, mais réalisable, de mettre fin aux décès évitables d’ici 2030. Nous devons aussi accepter de nous attaquer aux inégalités en nous concentrant sur les groupes qui tirent le plus de l’arrière. Je pense que Caroline a abordé cet aspect de façon intéressante.
Nous devons fournir des ressources financières et non financières pour assurer la réalisation du cadre après 2015 et soutenir les pays dans leurs efforts pour consacrer des ressources intérieures à des services publics universels, notamment avec le nouveau Mécanisme de financement mondial qui appuiera l’initiative Chaque femme, chaque enfant. Cette initiative sera lancée à la Conférence sur le financement du développement qui doit se tenir à Addis-Abeba en juillet 2015.
Nous devons prendre un engagement ambitieux en ce qui a trait aux dépenses d’aide humanitaire à l’appui d’une mobilisation accrue des ressources intérieures et aligner l’aide publique au développement pour la santé et les droits des femmes et des enfants, y compris dans le cadre du Mécanisme de financement mondial.
Je veux parler de l’obligation de rendre des comptes. Nous devons maintenir le rôle de premier plan du Canada en matière de reddition de comptes. Nous devons élargir et renforcer notre leadership établi à l’échelle mondiale en réclamant des cadres de reddition de comptes simplifiés et harmonisés concernant la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. De meilleurs mécanismes de base dans les communautés et un effort accru pour produire des statistiques désagrégées fiables sont nécessaires pour améliorer la prestation des services de santé.
Il est si ennuyeux de tenir un registre de l'état civil. Il est difficile d’amener les gens à s’y intéresser. C'est pourtant essentiel parce que, quand on sait qu’un enfant est né, quand il est inscrit au registre, cet enfant compte. Il est compté. Nous pouvons ainsi savoir quels services sont offerts, comment ils sont offerts, et suivre le développement des enfants. C'est essentiel pour que les enfants soient protégés. Les statistiques rendent compte de tout le travail que nous essayons de faire.
Le dernier point que je veux faire valoir, c'est que — et je le dis humblement parce que je me compte chanceuse d’avoir cette possibilité — je vois combien nous pouvons être efficaces quand nous travaillons ensemble au lieu de le faire chacun pour soi, les universités d’un côté, les ONG de l’autre. J’insiste sur le fait que nous réunissons des organismes de tous les secteurs ayant des expertises différentes pour faciliter la collaboration, surtout dans les pays où différentes organisations se côtoient alors qu’elles devraient vraiment travailler ensemble, et le Canada en est un exemple. Pour avoir plus de succès, nous devons absolument collaborer.
Nous devons capitaliser sur les partenariats entre gouvernements, groupes de la société civile, communautés locales, professionnels de la santé, universités ou établissements de recherche, organisations multilatérales, fonds mondiaux existants et fondations. Les médias sont déterminants, ainsi que la participation du secteur privé, si l’on veut parvenir à nos fins.
Pour créer des changements et favoriser un développement durables, il est essentiel de répondre aux besoins des femmes et des enfants et de tenir compte de leurs droits. Au cours des cinq dernières années, la Stratégie mondiale pour la santé de la mère et de l'enfant, ainsi que l'Initiative de Muskoka, lancée au Canada, ont montré, grâce au travail acharné d’un bon nombre d’entre vous, que des interventions coordonnées et bien planifiées peuvent donner des résultats et sauver des vies. Nous devons maintenant nous concentrer sur l’objectif d’assurer l’épanouissement de ces enfants et de ces femmes.
En 2015, il est temps de nous appuyer sur nos réussites, de renouveler nos engagements et de soutenir de solides stratégies qui mettront fin aux décès évitables de mères, de nouveau-nés et d'enfants. Nous devons nous assurer que ces femmes et ces enfants survivent, et améliorer la santé globale des populations.
Merci.
Merci, madame Scott.
Chers collègues, vous avez remarqué qu'on entend le timbre. Je pense que nous avons 22 minutes pour nous rendre à la Chambre pour le vote.
Nous allons suspendre les travaux. Après le vote, nous commencerons notre première série de questions avec Mme Laverdière.
Merci.
Bon, tous les membres sont de retour, je crois. Merci de votre patience.
Passons tout de suite aux questions. Nous avons sept minutes pour la première série de questions.
Je donne la parole à Mme Laverdière.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous les témoins pour vos présentations très intéressantes.
[Traduction]
Je n'ai pas douté un instant que la séance d'aujourd'hui serait exceptionnellement intéressante.
[Français]
Ma première question s'adresse à Mme Marrs.
Dans votre présentation, vous avez mentionné la question de l'éducation. Pourriez-vous nous parler un peu plus longuement du lien entre l'éducation et la santé des jeunes filles?
Merci beaucoup.
Comme vous le savez, l'éducation des filles est une question primordiale. Comme je l'ai mentionné dans ma présentation, il est clair qu'il y a eu des gains à cet égard. Il y a quand même eu des engagements de la part du gouvernement du Canada et d'autres pays pour encourager l'éducation primaire et secondaire des filles dans les pays en développement.
En ce qui concerne la santé, je dirais qu'il y a à la fois des possibilités et des défis. Je vais donner un exemple de défi. Il est bien d'encourager la participation des jeunes filles ou des jeunes femmes à l'école, mais si on ne comprend pas l'équité entre les sexes quand on lance ces programmes, on peut passer à côté.
J'ai lu cette semaine que les jeunes filles peuvent manquer des classes à cause de leurs menstruations, qui sont quelque chose de parfaitement naturel. Certes, il faut faire de l'éducation et en faire encore plus pour qu'il y ait une parité entre les filles et les garçons dans les objectifs de développement durable, mais il faut aller un peu plus loin. Il faut examiner les relations entre les sexes pour savoir comment assurer la pleine participation et l'épanouissement des filles et des jeunes femmes.
Merci.
Merci beaucoup.
Vous avez été aussi très éloquente dans votre présentation au sujet de ce qu'on peut faire quant aux programmes liés à la question de l'égalité entre les sexes. Au-delà d'actions très précises, y a-t-il moyen d'intégrer davantage la question de l'égalité entre les sexes dans nos programmes de développement?
Mon Dieu! Vous me demandez comment faire?
Je sais que l'intégration des questions liées à l'égalité des sexes est une priorité pour le gouvernement du Canada — l'ACDI antérieurement et maintenant, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Cet enjeu constitue une priorité dans les programmes, que ce soit l'action humanitaire, la sécurité alimentaire ou le développement économique. On sait que le gouvernement du Canada accorde une priorité à cet égard, ce qui est vraiment bienvenu.
Chez Oxfam Canada, nous avons aussi cette priorité, comme beaucoup d'autres organisations. Tous ceux qui sont ici et qui ont déjà travaillé à ce genre de dossier savent que c'est très difficile. C'est un travail de longue haleine. Même chez Oxfam Canada, où nous donnons la priorité aux droits des femmes et à l'équité entre les sexes, nous apprenons tous les jours comment faire. Les relations de pouvoir ne peuvent pas être changées du jour au lendemain. Cela demande une réflexion personnelle, organisationnelle et institutionnelle.
Nous avons quand même établi un très beau partenariat avec le ministère concernant le programme Engendrer le changement. Avec les organisations, les ONG, nous avons beaucoup réfléchi à la façon dont nous pourrions promouvoir l'équité entre les sexes. Nous avons beaucoup appris. Grâce à ce beau programme, nous avons élaboré des documents, un cadre conceptuel et des outils. Nous en avons fait profiter nos partenaires et le public. J'espère que l'on continuera dans cette voie.
Oxfam Canada et moi-même, en tant que directrice du Centre pour la justice de genre, croyons que les programmes s'adressant uniquement aux femmes et aux jeunes femmes sont aussi très importants. Quand il y a un éventail de ressources, il faut parfois choisir entre deux bonnes choses. Je sais que votre travail est très difficile, mais chez Oxfam Canada, nous considérons que, dans la mesure du possible, il faut qu'il y ait deux approches: l'intégration des questions d'égalité entre les sexes et les programmes vraiment axés sur les besoins des femmes et des jeunes femmes.
Merci.
Merci beaucoup.
En effet, les questions des relations de pouvoir et de l'égalité des hommes et des femmes sont pertinentes dans toutes les sociétés et tous les milieux, y compris les nôtres.
Merci.
[Traduction]
J'ai une brève question pour Mme Scott, s'il me reste du temps. Vous avez dit que vous êtes statisticienne. Vous avez aussi parlé de reddition de comptes. Je me demande si vous pouvez nous mettre au courant de ce qui est fait pour améliorer le contrôle et l'évaluation du programme pour la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants depuis la conférence sur ce programme qui s'est tenue en mai dernier.
Votre question ne pourrait mieux tomber, puisque j'arrive d'une réunion avec mes collègues du MAECD pendant laquelle nous avons échangé des idées sur la prochaine étape. En gros, au cours des dernières années, nous avons tiré beaucoup de leçons sur ce qui fonctionne et ne fonctionne pas. Je vais vous donner deux exemples qui arrivent tout juste à maturité et qui vont nous aider dans le futur.
Le premier exemple est l'élaboration par notre réseau d'un portail de mesure. Ce portail est un système en ligne de données ouvertes qui permet à nos partenaires d'entrer des données sur les indicateurs communs. Nous avons choisi les 11 indicateurs qui ont été publiés dans un document produit par la Commission d’information et de responsabilisation pour la santé de la femme et de l’enfant.
Je vais revenir un peu en arrière. Quand la stratégie mondiale visant à aider chaque femme et chaque enfant a été lancée en 2010, le Canada et la Tanzanie ont pris les devants et ont créé la commission d’information et de responsabilisation. Cette commission a établi 11 indicateurs au sujet desquels tous les pays et tous les partenaires ont été invités à recueillir des données. Notre organisme a vu le jour quelques années plus tard, mais nous avons créé ce portail afin que nos partenaires puissent entrer ces données en ligne. C'était un projet pilote. Il y a eu 22 partenaires qui ont entré des données provenant de 49 pays. Nous avons beaucoup appris sur les difficultés associées à la collecte, la publication et la diffusion des données. C'était néanmoins un très bon modèle qui nous permettra de passer à une autre étape de notre travail.
L'autre projet dont je veux vous parler est une collaboration entre quatre des plus importantes ONG canadiennes. Je ne les nommerai pas parce que je sais que je vais me tromper en disant leur nom. Ces ONG ont travaillé avec une institution universitaire, le programme mondial sur la santé de l'enfant, pour recueillir et colliger toutes les données tirées des projets avec leurs partenaires et répondre à des questions afin de mieux comprendre ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Cette initiative aussi a été semée d'embûches. Certaines de ces difficultés provenaient du fait que ce consortium — c'est le mot qu'elles utilisent — a été formé après la mise en oeuvre des projets et qu'il a donc dû travailler rétrospectivement, ce qui n'est pas la meilleure façon de faire un travail d'évaluation. Cela dit, ces ONG ont réussi en peu de temps à bien intégrer leurs efforts et à générer d'excellents résultats qui nous permettront d'évaluer ces programmes de manière plus efficace que jamais auparavant. Voilà un très bon exemple de collaboration entre le milieu universitaire et les ONG.
Merci à tous d'être ici.
J'aimerais commencer par les représentants de l'Initiative pour les micronutriments, MM. Spicer et Fryars.
J'ai passé un peu de temps en Tanzanie il y a un an avec Résultats Canada pour examiner certains programmes de nutrition et la situation relativement au VIH-sida et à la tuberculose, et ainsi de suite. C'était très impressionnant. Le Canada était partout. Ce qui m'a le plus impressionné, c'était... j'oublie le nom, c'était une genre de tablette de chocolat; je me trompe peut-être, mais il me semble que chaque tablette contenait quelque chose comme 2 000 ou 3 000 calories. C'était une substance pâteuse qu'on donnait aux gens souffrant de malnutrition. C'était ahurissant pour moi de voir qu'un pays plutôt riche en production alimentaire pouvait compter 60 000 enfants souffrant de carences alimentaires graves dans des familles en relativement bonne santé. Il semble que le problème soit en grande partie culturel et que les gens manquent d'éducation à propos du partage de la nourriture et des nutriments parmi tous les enfants. Ils travaillent beaucoup là-dessus.
Ma question est la suivante. Devons-nous aussi éduquer les responsables, les représentants du gouvernement, les bureaucrates et ainsi de suite? Pendant que vous vous employez à nourrir les gens qui en ont besoin, essayez-vous aussi de montrer aux autorités de ces pays comment prendre la situation en main?
Merci beaucoup, Laurie. C'est une question très pertinente.
Les tablettes dont vous avez parlé sont des barres alimentaires thérapeutiques prêtes à consommer. Elles sont très utiles pour traiter la malnutrition aiguë. Elles sont extrêmement efficaces.
Oui, l'éducation est la clé. Je suis content qu'on en ait parlé plus tôt en réponse à la question d'Hélène Laverdière. Une de nos problèmes, c'est la reconnaissance que la nutrition est un enjeu. Il n'y a pas que l'éducation qui est en cause, il y a aussi la prise de conscience de l'importance cruciale de la nutrition pour la croissance, la survie, le développement des fonctions cognitives et tout ce qui est important pour vivre en santé. Pour bien informer les autorités, et je crois que tous les intervenants gouvernementaux en sont bien conscients, il faut aller au-delà de sa sphère d'influence. Il faut franchir les fossés qui nous séparent.
La Tanzanie a connu un succès relatif à l'échelle des gouvernements des districts. Il faut que les services soient véritablement intégrés. Nous venons tout juste de parler de l'intégration de l'égalité entre les sexes, et il faudrait aussi parler de l'intégration de la nutrition. Je peux vous parler d'un mouvement qui s'appelle Renforcement de la nutrition. Ce mouvement a fait prendre conscience à bien des gens — je crois que plus de 60 pays y participent — de l'importance d'agir non seulement en distribuant des suppléments de vitamine A, qui sont peut-être plus faciles à voir, mais aussi en amenant les systèmes d'éducation et les instances décisionnelles gouvernementales à examiner les résultats des programmes de nutrition, d'égalité entre les sexes et d'autres.
Pour ce qui est d'aider les responsables, je crois qu'il faut les éduquer, oui, mais il faut aussi leur donner des outils de planification multisectorielle, ce qui est absolument essentiel. Le mouvement Renforcement de la nutrition a investi pour renforcer les capacités des pays à cet égard. Si les autorités d'un pays prennent une décision concernant leur secteur agricole, nous espérons qu'elles envisageront les effets de cette décision sur la nutrition de leur population.
Je suis d'accord avec vous. Je suis d'avis que c'est une pièce importante du casse-tête, mais je crois qu'il faut commencer par la sensibilisation, puis passer à l'éducation et donner les outils nécessaires au développement. Le Canada est peut-être bien placé pour fournir une aide technique aux gouvernements compétents.
Merci.
Madame Marrs, je poursuis dans la même veine. Oxfam existe depuis longtemps et est présent dans de nombreux pays. Si on prend l'exemple de ce qui se passe en Tanzanie, est-ce qu'Oxfam essaie de transférer les connaissances d'un pays à l'autre entre homologues du gouvernement, pour transmettre les leçons tirées en Tanzanie ou peu importe où? Combien de temps consacrez-vous à cet aspect du travail?
Je suis contente que vous me posiez cette question. Malheureusement, nous ne sommes pas vraiment actifs dans le domaine de la transmission de connaissances sur la nutrition. Nous laissons cela à l'Initiative pour les micronutriments.
Oui. Comme vous le savez, Oxfam est présent dans environ 90 pays. Une réunion des directeurs exécutifs des affiliés d'Oxfam — il y en a 17 actuellement — vient d'avoir lieu en Australie. Les directeurs exécutifs sont fortement en faveur de l'octroi de ressources pour l'éducation. Pour Oxfam, le partage et la création des connaissance sont des rôles très importants parce que nous sommes dans une position privilégiée. Dans les pays comme la Tanzanie, Oxfam travaille à bon nombre de projets de différentes natures avec beaucoup de partenaires différents. Le terme « partenaire » peut avoir plusieurs sens, mais nous collaborons avec des organisations de la société civile de toutes sortes. Nous travaillons de près avec les ministères, le secteur privé et les universités. Dans chaque pays, il y a toujours un bon réseau.
Je vais donner un bref exemple d'action multinationale. J'ai l'honneur de diriger ce que nous appelons un pôle de connaissances sur la violence faite aux femmes, à partir d'ici, à Ottawa, en collaboration avec Oxfam-Québec, à Montréal. Il se trouve que plus de 40 pays auprès desquels Oxfam oeuvre sont de très bons programmes de lutte contre la violence faite aux femmes. Nous agissons comme un pôle d'attraction des connaissance et de l'information que nos collègues recueillent sur les enjeux visés par leurs programmes.
Je vais m'arrêter ici, parce que je sais qu'il y aura beaucoup d'autres questions.
J'ai travaillé sur le terrain dans de nombreux pays et je sais que ceux qui travaillent en première ligne, comme mes collègues ici présents, nos partenaires, et cetera, sont des gens brillants et très dévoués. Ils sont dans le feu de l'action. Ils réfléchissent et s'adaptent constamment en fonction des objectifs qu'ils visent. Ils n'ont pas beaucoup de temps pour tout écrire, pour organiser des séminaires Web, pour tout expliquer et pour consigner toutes les connaissances. Une partie de notre rôle consiste à rassembler l'information, à la traduire et à la diffuser. Nous sentons que nous avons le devoir de traduire les documents en anglais, en français et en espagnol, et nous envisageons aussi d'autres langues pour nous permettre de comprendre ce qui se fait ailleurs sur le plan de l'apprentissage.
Merci beaucoup.
Nous allons conclure la première ronde de questions avec M. Garneau, qui dispose de sept minutes.
Merci, monsieur le président.
[Français]
Ma première question s'adresse à Mme Marrs.
Quand le public pense à Oxfam, je suppose qu'il pense à Oxfam dans un pays où il y a une crise humanitaire. On imagine votre organisation apporter de l'aide, qu'il s'agisse de nourriture ou d'hébergement. On pense à des gens déplacés, qui sont dans le besoin, mais on ne pense pas nécessairement à l'équité des sexes. C'est ce dont vous vous préoccupez.
J'aimerais avoir plus de détails. Comment, sur le terrain, communiquez-vous? Vous avez parlé de lois, notamment, mais sur le terrain, quand on parle de différences culturelles et de choses du même genre, comment réussissez-vous à communiquer avec les gens pour essayer de souligner l'importance de l'équité des sexes?
Merci beaucoup. Votre commentaire est vraiment intéressant à plusieurs égards.
Bien sûr, on connaît Oxfam partout dans le monde pour son action et sa compétence lors des crises humanitaires. Comme vous le savez peut-être, Oxfam Canada a fêté ses 50 ans l'année dernière. Depuis le début, on travaille dans le domaine humanitaire mais aussi au développement à long terme. Oxfam Canada, comme la famille Oxfam, privilégie le travail en partenariat avec les organisations de la société civile et d'autres partenaires dans les pays dans lesquels Oxfam travaille.
En ce qui a trait à l'équité des sexes, parlons du Nicaragua, par exemple, ou de l'Afrique du Sud et du Pakistan, là où Oxfam travaille. On bâtit des liens avec les organisations de la société civile de toutes sortes: des organisations communautaires de base, des ONG qui travaillent sur des thématiques comme l'égalité hommes-femmes, comme la vision humanitaire ou comme la sécurité alimentaire. Notre rôle, selon nous, est de les appuyer sur le plan du financement et du renforcement des capacités, mais aussi de se comporter en facilitateur.
Pour revenir à la question précédente de M. Hawn, on sait qu'on est comme un petit noyau. On travaille avec beaucoup de partenaires différents et on sait qu'on peut profiter, tous et chacun, des conversations. Il faut parler ensemble.
On le sait, la question des relations entre les hommes et les femmes est très sensible. Ici même, au Canada, on n'est pas rendu au bout de cette question. Il faut respecter cela dans les pays où on travaille. Les questions et la problématique seront différentes. Des choses se ressemblent, mais la problématique sera différente de pays en pays. Nous nous fions aux partenaires. On ne parle pas d'un seul partenaire bien sûr, mais de l'ensemble des partenaires avec lesquels nous travaillons pour analyser et mieux comprendre comment cet enjeu se manifeste dans ce pays ou dans ces communautés.
C'est une conversation, c'est un échange. Ce n'est pas à nous de dire ce qu'il faut faire en ce qui a trait à l'équité des sexes. Nous croyons que c'est important et nous parlons avec les partenaires pour savoir comment ils voient le problème et décider ce qu'on fait ensemble.
Merci.
[Traduction]
Ma deuxième question s'adresse aux représentants de l'Initiative pour les micronutriments.
Je dois admettre que votre organisation ne m'est pas très familière. Vous avez parlé de la vitamine A, de l'iode et des tablettes destinées aux personnes qui souffrent de malnutrition. Est-ce que votre organisation s'occupe uniquement de suppléments alimentaires, de vitamines et de tablettes spéciales, où est-ce que son champ d'action est plus large? Je ne la connais pas vraiment, je suis désolé.
Je vais me lancer, puis je céderai la parole à Mark, notre mémoire institutionnelle, qui travaille pour nous depuis très longtemps.
Notre travail va plus loin que cela. Nous sommes peut-être connus grâce à ces initiatives, mais quand on parle de supplémentation, il faut aussi penser à l'enrichissement des produits alimentaires. Alors qu'au Canada nous tenons pour acquis que la plupart de nos aliments sont enrichis depuis plus de 50 ans, ce n'est pas le cas dans de nombreux pays en raison de leur mode de fonctionnement. L'Initiative pour les micronutriments travaille aussi en étroite collaboration avec les intervenants locaux du secteur privé pour que l'enrichissement soit mis en oeuvre, que nous puissions offrir un soutien technique au gouvernement, et que d'autres mesures de la sorte soient appliquées pour améliorer la situation. C'est aussi un aspect où les plus grands gains restent à réaliser.
Il ne faut pas oublier que l'Initiative pour les micronutriments a été créée en 1992, dans la foulée du Sommet mondial pour les enfants. Cela fait longtemps. Ainsi, même si la vitamine A et l'iodation du sel ont en quelque sorte été nos mots d'ordre, le domaine a pris une ampleur considérable depuis l'époque.
Mark, vous avez peut-être d'autres précisions à ajouter quant à nos activités.
Merci, Joel.
Je dirais que nous nous concentrons également sur ce qui se passe en amont. En Tanzanie, dont nous venons tout juste de parler, l'intégration de la santé et de la nutrition à la planification dans d'autres secteurs revêt une grande importance. À l'Initiative pour les micronutriments, notre devise est de ne rater aucune occasion car, parfois, même si des services de santé sont offerts, nous devons sensibiliser les planificateurs pour qu'ils pensent à tenir compte de la nutrition. Dans certains pays, nous faisons beaucoup de travail directement auprès des autorités, à l'échelon de la hiérarchie où se prennent les décisions. Nous parlons des mesures qui pourraient être prises, de leur incidence et du rendement de l'investissement. C'est un genre d'approche où aucune occasion n'est laissée de côté.
Au-delà de ce qu'a dit Joel au sujet de la supplémentation et de l'enrichissement, nous savons que, dans les pays en développement, beaucoup de gens n'ont pas facilement accès aux systèmes de santé et aux marchés commerciaux, et nous cherchons des moyens de les aider. Ce n'est pas en Tanzanie, mais bien en Éthiopie que nous étudions les cultures, les produits auxquels les gens ont accès et les possibilités de combiner ces éléments de diverses manières pour rehausser la valeur nutritive des aliments qui sont servis aux enfants. Parallèlement, nous aidons les gens à comprendre que les enfants ont besoin de plats et d'aliments qui leur sont propres, de la même manière que vous donneriez à votre enfant ou à votre petit-enfant une nourriture qui lui est destinée. Notre travail porte également sur la sensibilisation et sur la diversité alimentaire, en plus des suppléments et des aliments enrichis dont Joel a parlé.
En terminant, Mark, j'aimerais ajouter que l'une des particularités de l'Initiative pour les micronutriments est qu'elle s'affaire à créer des données probantes, à mettre en oeuvre des lignes directrices que les pays peuvent utiliser quand de nouvelles données entrent en ligne de compte, puis à grande échelle, pas seulement sur un aspect de la question. C'est ce lien que nous établissons.
Merci beaucoup, monsieur Garneau.
C'est tout le temps dont nous disposions pour la première série de questions. Nous débutons la deuxième série de questions et chaque membre dispose de cinq minutes.
Monsieur Schellenberger, veuillez commencer.
Je vous remercie de l'exposé que vous avez présenté ce matin. C'est encourageant.
Monsieur Spicer, vous avez dit au cours de votre exposé que le Canada est un chef de file de longue date en matière de nutrition. Pouvez-vous donner plus de détails sur la façon dont le Canada pourrait exploiter ce leadership mondial reconnu en matière de nutrition pour inciter d'autres pays à agir de manière à transformer la vie des enfants?
Oui, j'aimerais me faire l'écho des remarques de Helen Scott, qui a parlé plus tôt de la nécessité de réunir des partenaires inhabituels, de même que des universitaires et des responsables de programmes. Le Canada serait l'un de ces intervenants.
En gros, je dirais que le Canada peut avoir grande influence en exerçant son influence de trois façons, c'est-à-dire en collaborant de différentes manières bilatéralement, multilatéralement et avec des groupes géopolitiques.
Qu'est-ce que j'entends par influence bilatérale? Je veux dire qu'il faut dresser la liste des pays où les enfants sont les plus susceptibles de souffrir de malnutrition et d'autres problèmes. Pour commencer, il faut établir des correspondances entre cette liste et les pays avec lesquels nos relations bilatérales sont les meilleures. Nous devons travailler avec nos homologues. Mettons à l'oeuvre nos capacités diplomatiques en matière de commerce et de développement et invitons les autres pays à faire un effort supplémentaire et à engager davantage de leurs propres ressources. C'est la première chose que le Canada peut faire, et c'est la plus facile.
Il faut dynamiser l'expertise des ONG canadiennes et de nos partenaires internationaux qui se trouvent déjà sur le terrain et s'assurer qu'ils collaborent avec les intervenants locaux pour trouver des solutions adéquates à l'échelle nationale. S'il faut davantage de soutien, incitons nos alliés à verser des fonds de contrepartie, car les autres donateurs, fondations et partenaires ne se gênent pas pour demander au Canada d'appuyer les projets sur lesquels ils travaillent. Cela vaut dans les deux sens.
En ce qui concerne l'influence multilatérale, pensez à toutes les sommes engagées par le Canada en termes de sièges aux conseils d'administration et d'investissements financiers auprès de la Banque mondiale, du Fonds mondial et de l'organisation des Nations Unies. Comme l'a dit mon collègue Mark, il y a encore trop de cloisonnement et nous ratons des occasions d'aider les enfants, mais nous pouvons utiliser cette influence pour améliorer la coordination des initiatives et la prestation des services destinés aux adolescentes, aux femmes enceintes, aux nouveau-nés et surtout aux enfants, car ce sont eux qui subissent les véritables préjudices. Voilà une autre façon de changer les choses.
Pour finir, il y a l'influence géopolitique. Nous avons parlé de la Francophonie et du Commonwealth, deux groupes dont le Canada fait partie, mais nous avons aussi des liens diplomatiques et commerciaux solides avec d'autres groupes géopolitiques. Nous ne faisons peut-être pas partie de ces groupes, mais ceux-ci peuvent néanmoins disposer d'une influence et de ressources considérables.
Prenons l'exemple du Conseil de coopération du Golfe. Les Émirats arabes unis, le Qatar, notamment, et le Koweït sont des pays qui disposent de ressources énormes, ce qu'ils prouvent constamment. Les contributions de ces pays prennent de l'ampleur, mais les possibilités de collaborer avec eux pour aider les enfants n'ont pas encore été pleinement exploitées. Je pense que le Canada est le pays le mieux placé pour servir de catalyseur à ce niveau.
Je tiens à signaler que les pays membres du Conseil de coopération du Golfe sont les principaux moteurs et les dirigeants de l'Organisation de la coopération islamique. Cette organisation est composée de 57 pays parmi lesquels on retrouve les problèmes de protection des enfants les plus graves au monde et des taux élevés de malnutrition. Il y a moyen de gagner du terrain dans l'intérêt des enfants et j'estime que le Canada peut faire beaucoup plus pour prendre les devants à cet égard.
Je m'arrête là.
Je vous remercie de votre question.
Notre source de financement principale est le gouvernement du Canada, mais, au cours des cinq dernières années, nous avons eu 14 donateurs, notamment des fondations comme la Fondation Gates, la Children's Investment Fund Foundation, ou CIFF, la Fondation Izumi et le Programme alimentaire mondial. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec l'UNICEF. Cependant, comme je l'ai dit, le gouvernement du Canada demeure notre principale source de financement pour l'instant.
Bien que votre organisme exerce ses activités dans 15 pays, quelles stratégies mettez-vous en oeuvre pour les étendre à d'autres pays?
À l'heure actuelle, nous menons nos activités dans 70 pays, mais nous avons des bureaux dans 12 pays, un centre principal au Sénégal, pour l'Afrique, et un autre centre à Delhi, pour l'Asie. Nous faisons concrètement deux choses pour étendre notre influence.
D'abord, en ma qualité de nouveau président, à mon arrivée, il était normal que je pose beaucoup de questions qui ont agacé les employés. Je pense que j'ai bien rempli cette tâche au cours de ma première année. Je vois des gens qui font signe que oui de la tête à ma gauche. L'une des questions que j'ai posées est la suivante: pourquoi sommes-nous présents dans ces pays en particulier? Y a-t-il une raison pour laquelle nous ne devons pas être présents là où nous sommes absents? S'agit-il tout simplement d'une évolution naturelle? L'un de nos tâches consiste à examiner en profondeur les données à jour. Par conséquent, quels préjudices découlent de la malnutrition dans ces pays?
La Tanzanie est l'un de ces pays. Nous n'y avons pas de bureau, mais c'est une région sur laquelle nous nous penchons dans le cadre de notre exercice de délimitation géographique. Nous envisageons d'étendre nos activités à plusieurs pays.
Pour en revenir à la question, nous estimons que nous pouvons obtenir de bien meilleurs résultats grâce aux autres modes de prestation, comme l'approche multilatérale ou d'autres ONG. Si d'autres organismes n'ayant rien à voir avec la nutrition font de l'excellent travail pour rejoindre des gens extrêmement vulnérables et que l'expertise en nutrition leur fait défaut, nous pouvons leur demander de quelle façon nous pourrions travailler avec eux pour exploiter leur mode de prestation à moindre coût, et ainsi obtenir de bien meilleurs résultats. Au cours des prochains mois et des prochaines années, vous constaterez que l'Initiative pour les micronutriments accordera beaucoup plus d'importance aux partenariats stratégiques afin d'influencer certains des joueurs principaux et de tirer parti de leur travail. Je pense que nous sommes bien placés pour faire cela, surtout en matière de nutrition.
Merci.
Je sais aussi que vous avez été en mesure d'établir des partenariats avec des gens d'affaires et des sociétés pour mettre à profit certains de vos produits. C'est bon de voir cela.
Merci beaucoup, monsieur Schellenberger.
C'est à votre tour, madame Laverdière. Vous disposez de cinq minutes.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
J'ai une petite remarque à faire pour commencer. J'ai trouvé très pertinentes vos observations sur l'approche politique bilatérale, multilatérale et liée aux ONG. J'en ai pris bonne note. Si vous vous demandez pourquoi vous oeuvrez dans certains pays et si vous êtes au bon endroit, moi qui ai habité au Sénégal pendant trois ans, je trouve que c'est un pays magnifique.
Bon, cela dit, j'ai encore une brève question pour Mme Scott.
Pouvez-vous nous dire si les fonds annoncés par le premier ministre à la conférence qui a eu lieu à Toronto en mai dernier ont tous été alloués?
Je vais tenter de répondre à cette question.
À ma connaissance, les fonds de 3,5 milliards de dollars n'ont pas entièrement été alloués. Je sais que plusieurs annonces ont été faites, mais les sommes allouées ne s'élèvent pas à 3,5 milliards de dollars.
Peut-être que vous pourriez transmettre ce renseignement au comité si vous pouvez l'obtenir plus tard?
J'aimerais apporter une précision, monsieur le président.
Une somme de 2,5 milliards de dollars a été affectée pour la période allant de 2010 à 2015. Tout l'argent a été alloué et 80 % de la somme prévue pour la période de 2010 à 2015 a été dépensée. Le reste de l'argent sera dépensé d'ici la fin de 2015. Quant à la nouvelle portion d'argent, elle sera versée au cours des cinq prochaines année.
En tout cas, le comité vous sera très reconnaissant de tout renseignement que vous pourrez lui fournir plus tard sur les fonds réels et l'argent alloué, selon votre point de vue. Je suis convaincue que le gouvernement présentera lui aussi des chiffres à ce sujet.
Merci.
J'ai une question qui s'adresse à vous tous.
Je veux savoir si vous pensez qu'on tient suffisamment compte des besoins des jeunes et des femmes dans le programme de l'après-2015 et dans les objectifs de développement durable, et si vous estimez que le Canada devrait encourager et promouvoir les négociations à venir pour le reste du programme?
Je vais prendre la question dans le sens contraire.
Le problème, c'est que nous avons créé ce système d'objectifs de développement durable qui consiste seulement en cette très longue liste d'objectifs visant 173 destinataires. Les enfants et les jeunes figurent parmi ces destinataires, mais aucun objectif spécifique ne vise les femmes, les nouveau-nés et les enfants, comme ce fut le cas dans les objectifs du millénaire pour le développement.
La crainte, c'est qu'on passe à côté des objectifs. Nous parlons ici d'intégrer l'égalité entre les sexes et l'importance d'investir dans les enfants. Ce qu'on craint, en l'absence d'objectifs précis visant la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, ainsi que la survie et la réussite comme le dirait Peter, c'est de rater la cible.
J'abonde dans le même sens, et j'ajouterai qu'il y a certains domaines où le Canada a fait figure de chef de file.
Par exemple, les cibles établies par l'Assemblée mondiale de la santé en matière de nutrition — évidemment, je parle de nutrition — sont bien reconnues. Le Canada a été un important moteur à cet égard. Tous les pays ont déjà souscrit à ces cibles. Ce serait une erreur colossale que de fixer des objectifs de développement durable qui ne tiennent pas compte de facteurs qui ont une telle incidence sur la vie des femmes et des enfants.
C'est bien connu, les femmes sont la force vive du développement et tant qu'on y mettra un frein...Selon moi, le taux de malnutrition parmi les femmes est l'un des freins les plus importants et la plus grande source d'injustice dans le monde. Il y a 500 millions de femmes dans le monde qui souffrent d'anémie. Quelque 40 millions de femmes enceintes sont atteintes d'anémie sévère. Il est impossible pour les femmes de contribuer pleinement au développement si elles n'ont pas d'énergie et qu'elles peinent constamment à atteindre leur plein potentiel.
Ce n'est là qu'un des aspects de la question. J'aimerais revenir à ce qu'Helen a dit. Il ne s'agit pas seulement de nutrition. Nous devons assurément axer nos efforts sur la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, selon moi.
Je joins ma voix à celles de mes collègues.
Comme nous l'avons mentionné tout à l'heure, je suis une fervente adepte de l'intégration de la problématique hommes-femmes. Beaucoup de gens, de féministes, travaillent dans ce domaine absolument crucial. Le danger, c'est qu'en se concentrant sur l'intégration de la dimension hommes-femmes, il est possible de perdre de vue les problèmes qui affligent les femmes et les filles.
Pour ce qui est des objectifs en matière de développement durable, il est évident que nous prônons un objectif sur l'égalité des sexes. Nous faisons beaucoup de pressions pour que les autres objectifs intègrent aussi cette dimension. C'est donc très important.
Au risque d'ajouter d'autres cibles spécifiques — je maintiens que la santé des mères et la nutrition des femmes et des jeunes filles sont importantes —, nous militons en faveur d'un objectif concernant la violence. Nul besoin de mettre en concurrence les diverses causes d'injustice. Les filles et les jeunes femmes vivent de multiples problèmes et leurs droits sont violés à bien des égards.
Il est certain que je me rallierais à mon collègue pour réclamer une cible en matière de nutrition. De notre côté, grâce au travail que nous accomplissons — je parle du carrefour du savoir —, nous recueillons beaucoup de faits. Nous collaborons avec de nombreux partenaires. Soulignons que la violence envers les femmes est un frein majeur au développement.
Merci. C'est tout le temps dont nous disposons.
Nous allons terminer la rencontre avec Mme Brown.
Vous êtes la dernière intervenante. Vous avez cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence. Je me réjouis de voir nos partenaires collaborer avec nous.
C'est l'actuel gouvernement qui a mis de l'avant les initiatives en 2010. Je suis heureuse de constater les progrès accomplis en matière de santé des mères, des nouveau-nés et des enfants.
J'ai une question à laquelle le représentant de l'Initiative pour les micronutriments pourrait peut-être répondre.
J'ai rencontré d'innombrables organismes ou entreprises qui veulent acheminer de la nourriture en Afrique, notamment des arachides, dont on me parle souvent. Je me demande pourquoi il nous faudrait envoyer des arachides en Afrique. Je me réjouis de voir que vous travaillez auprès des gouvernements afin d'améliorer leurs connaissances en matière de nutrition.
L'Afrique pourrait fournir des produits pour nourrir ses habitants. Dans ces pays, sait-on à quel point une bonne nutrition est nécessaire? Sont-ils ouverts à ces questions?
Votre question touche plusieurs points. Je vais aborder le dernier point en premier.
Tout comme au Canada, les gens ont du mal à séparer le bon grain de l'ivraie quand il s'agit de la multitude de renseignements qui circule en matière de nutrition. Soulignons toutefois que les villageois vivant dans la pauvreté n'ont pas accès à un choix aussi abondant que celui offert aux consommateurs canadiens. Ils n'ont droit qu'à des céréales et c'est tout. Comment peut-on bien se nourrir avec si peu d'ingrédients?
Selon moi, il faut mettre sur pied des initiatives holistiques et intersectorielles sur le plan de la diversité agricole et de l'éducation en matière de production, dans les petites entreprises et même dans les communautés. Certaines microentreprises offrent leurs services dans les pays en développement, aux habitants des régions rurales et aux gens pauvres des villes. Selon moi, la priorité est là. Il faut déployer beaucoup d'efforts pour que les marchés fonctionnent pour les pauvres, car ce n'est vraiment pas le cas actuellement.
Le deuxième point concerne les arachides. Pourquoi envoyer des arachides en Afrique? Elles sont extrêmement nutritives, mais elles ont aussi tendance à attirer les aflatoxines. Les esprits scientifiques parmi vous savent qu'il s'agit d'une substance toxique. Il est très important, quand il s'agit d'arachides, que la capacité de transformation alimentaire soit très bien développée et assortie de contrôles de la qualité et de la salubrité. Voilà qui limite les possibilités au niveau local. Il faudrait donc viser des petites ou des moyennes entreprises.
Je crois que l'utilisation d'ingrédients locaux dans la fabrication de produits est stratégie porteuse, mais, encore une fois, le marché doit être au rendez-vous, c'est-à-dire qu'il doit y avoir des consommateurs en mesure de se payer les produits en question. Il s'agit d'une avenue très prometteuse, selon moi. Nous avons vu de belles avancées en ce sens, mais il reste encore beaucoup de chemin à faire.
Vous serez sans doute intéressé d'apprendre que nous avons rencontré jeudi dernier un représentant des Producteurs d'oeufs du Canada. L'organisme entreprend des projets en Afrique pour y élever des poulettes en santé et approvisionner en oeufs — un miracle de la nature en matière de nutrition — les programmes d'alimentation scolaires et les populations les plus vulnérables. Les producteurs avec lesquels collaborent les Producteurs d'oeufs du Canada connaissent une belle croissance, ce qui est très emballant.
Helen, j'ai une question pour vous et pour Oxfam à laquelle vous pourriez répondre si nous avons le temps.
Beaucoup d'excellents projets ont été entrepris pour promouvoir la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants, et les résultats sont probants. Serait-il possible d'élargir certains projets en cours parmi ceux qui sont les plus prometteurs sur le plan de la protection des enfants?
Absolument, et c'est d'ailleurs notre raison d'être. Alors que le réseau n'était encore qu'un rêve, nous nous sommes tournés vers nos partenaires et avons constaté que notre organisation faisait un travail exceptionnel. Elle a fait l'objet d'une évaluation rigoureuse, de sorte que nous savons qu'elle peut produire une valeur ajoutée du même ordre dans un autre contexte.
La gestion de cas en milieu communautaire, une approche dans laquelle investit le MAECD, est un bon exemple. Nous savons que la gestion de cas en milieu communautaire est un excellent outil pour améliorer la santé des femmes et des enfants.
Par ailleurs, les groupes de femmes ne dépendent pas de la technologie. Ils ne nécessitent pas de grandes connaissances scientifiques. Et pourtant, nous avons vu que réunir des femmes pour les outiller a une incidence incroyable, entre autres, sur le taux d'allaitement — ce qui se traduit par des enfants en meilleure santé — ou sur le recours à des traitements adéquats en cas d'infection du cordon ombilical, par exemple. Comment faut-il s'y prendre pour que cela se produise? Donnez aux femmes les moyens de se réunir pour échanger leur savoir.
Plusieurs possibilités s'offrent à nous: quels programmes sont les plus efficaces et comment faire pour les appliquer à plus grande échelle? Il existe plusieurs modèles canadiens que nous pourrions élargir et nous songeons à l'endroit pour le faire. Le modèle Grands défis Canada, un de nos partenaires, est un bon exemple; on y évalue rigoureusement les projets pilotes afin d'en déterminer l'efficacité et de choisir ceux qui seront élargis et financés.
Nous savons ce qui fonctionne. Nous avons les connaissances scientifiques et les moyens technologiques. Il faut maintenant aller sur le terrain et faire le travail.
Je veux simplement faire écho aux observations d'Helen concernant le financement des organismes pour femmes. Je veux aussi revenir sur le thème à l'étude aujourd'hui, c'est-à-dire les jeunes et la situation démographique actuelle. Mon collègue qui se trouve derrière moi vient de me parler d'une visite au Bénin, où j'ai travaillé il y a longtemps.
Les nouveaux organismes de jeunes ont une énergie extraordinaire et souhaitent apporter une plus grande contribution. Ils veulent venir en aide. Une solution facile consiste à les jumeler avec des organismes de défense des droits des femmes qui oeuvrent depuis des années. Il suffirait de peu, car ils ont peu de financement actuellement. Selon moi, il y a là un énorme potentiel d'accroissement.
Merci beaucoup.
Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Nous connaissons la plupart d'entre vous. Je remercie les gens de l'Initiative pour les micronutriments d'être venus expliquer leur travail, que de nombreux Canadiens ne comprennent pas. Vos propos sont très percutants. Tout le travail que vous effectuez dans ce dossier est très important.
Merci beaucoup.
Sur ce, la séance est levée.
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