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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 053 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 mars 2011

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    C'est la 53e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Pour le compte rendu, je mentionne que nous sommes aujourd'hui le mercredi 9 mars 2011.
    Vous avez devant vous l'ordre du jour. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et apportant des modifications connexes et corrélatives à d'autres lois.
    Comme d'habitude, nous allons entendre un certain nombre de témoins qui vont nous aider à effectuer cette étude. Nous allons accueillir deux groupes aujourd'hui. Dans le premier, nous avons Anita Desai, de la Société Saint-Léonard du Canada, ainsi qu'Elizabeth White. Bienvenue à toutes les deux.
    Nous allons également entendre à nouveau l'Association du Barreau canadien au sujet de ce projet de loi. Bienvenue à Gaylene Schellenberg et à M. Stroppel.
    Nous allons également réentendre M. Nicholas Bala de la Faculté en droit de l'Université Queen's. Bienvenue à vous aussi.
    Nous allons commencer par Mme White. Vous avez 10 minutes pour présenter votre exposé.
    Lorsque vous aurez tous terminé, nous passerons aux questions.
    Merci, monsieur le président, de nous avoir invités à comparaître devant le comité.
    Je parle au nom de la Société Saint-Léonard du Canada et cela fait quelques années que nous n'avons pas comparu devant vous; je mentionnerai simplement que nous avons 45 ans d'expérience dans le domaine de la justice pénale et de la justice sociale, et que nous appuyons nos agences membres qui fournissent des services directs dans toutes les régions du Canada. Nous avons été surtout connus auparavant pour notre intérêt pour les personnes condamnées à des peines d'emprisonnement de longue durée et à perpétuité et pour nos services résidentiels, mais nous pensons et savons que les jeunes sont l'élément clé de la sécurité de nos collectivités, et c'est la raison pour laquelle nous sommes heureux de comparaître sur cette question.
    J'ai eu la chance de participer à une table ronde à Toronto sur le système de justice pour les jeunes en 2008 et maintenant que je viens d'obtenir le rapport de cette réunion, je suis frappée par les ressemblances qui existent entre les conclusions de cette table ronde et les sujets que nous abordons dans le mémoire que nous vous avons transmis il y a quelques mois.
    La Société Saint-Léonard du Canada estime qu'il est important de noter que, depuis l'adoption de la LSJPA en 2003, il y a eu une diminution importante de l'incarcération des jeunes sans qu'il y ait d'augmentation importante de leur criminalité. Il est évident qu'il y a quelque chose qui donne de bons résultats.
     Pour en venir au projet de loi C-4, nous sommes favorables à l'ajout à l'article 3 du principe de la « culpabilité morale moins élevée » et nous voulons également manifester notre appui à l'article 21 qui interdit l'emprisonnement des adolescents dans les établissements correctionnels pour adultes. Par contre, la Société Saint-Léonard est gravement préoccupée par les articles 4, 7, 8, 11, 18, 20 et 24. J'aimerais prendre quelques instants pour les examiner. Nous sommes également inquiets de l'élargissement de la définition d'infraction avec violence par l'adoption d'une formulation très large, ce qui est pour nous une grave source de préoccupation.
    Nous aimerions également mentionner que la LSJPA a donné à notre pays la possibilité de perdre la distinction quelque peu odieuse d'avoir le plus fort taux d'incarcération des jeunes parmi tous les pays occidentaux. C'est une grande réussite.
     Nous pensons que ces modifications sont une réponse à des cas isolés et sensationnalistes, ce qui n'est pas la meilleure façon de réformer une loi. Nous estimons qu'il faudrait procéder à un examen plus rigoureux et qu'il serait bon de donner à cette loi le temps de montrer quels peuvent en être les effets avant d'introduire des changements. Nous estimons que la plupart des questions soulevées par le projet de loi C-4 sont déjà réglées de façon appropriée.
    La dissuasion en tant que principe de détermination de la peine n'est pas un ajout utile. Il n'existe aucune preuve qui démontre qu'elle ait un effet sur la prévention de la criminalité. Nous estimons que la LSJPA a délibérément et à juste titre omis de mentionner la dissuasion comme principe de détermination de la peine, et que cette loi répond aux besoins des tribunaux parce qu'elle leur permet d'imposer des peines appropriées aux jeunes qui leur offrent de bonnes chances de se réintégrer à la société et de s'amender. Étant donné l'absence de preuve concrète démontrant l'efficacité de la dissuasion, nous sommes inquiets de constater que l'on s'apprête à modifier les règles relatives à la détention avant le procès. Les lignes directrices que contient la loi au sujet de la détention préalable au procès paraissent être suffisamment précises. Le pouvoir de détenir un adolescent existe déjà lorsque le tribunal pour adolescents est convaincu de l'utilité de cette mesure. Nous estimons que les modifications proposées imposent aux tribunaux le fardeau d'envisager la détention pour une gamme d'infractions tellement large que rares seront les cas où la détention ne sera pas envisagée.
    Les sanctions extrajudiciaires sont conformes aux valeurs fondamentales de la LSJPA parce qu'elles visent à éviter les peines privatives de liberté sauf si elles sont nécessaires et qu'elles favorisent les mesures de rechange viables qui augmentent la possibilité qu'elles aient des effets positifs sur les jeunes. L'approche actuelle considère que la reconnaissance par le jeune de sa culpabilité est une base qui lui permet d'aller de l'avant, plutôt qu'un moyen de le mêler davantage au système pénal. Les jeunes acceptent de prendre leurs responsabilités. Si l'on élargit le critère pour que ces aveux soient admissibles en preuve au moment de la détermination d'une peine privative de liberté, ces aveux de culpabilité associés aux sanctions extrajudiciaires auront pour effet de dissuader, d'après nous, non seulement les jeunes, mais également les policiers, d'y avoir recours.
(1535)
    Pour ce qui est de l'interdiction de la publication, la loi autorise actuellement la levée de l'interdiction lorsqu'elle est dans l'intérêt du jeune ou de la sécurité publique. Nous savons que la publication de son identité a des effets stigmatisants. Nous savons que cette étiquette stigmatisante limite les possibilités qui s'offrent au jeune et le conduit bien souvent sur le chemin de la récidive. Cela n'est tout simplement pas compatible avec les principes sur lesquels repose la loi. Comme M. Doob l'a fait remarquer au cours de sa comparution la semaine dernière, si l'on veut élargir la publication de ces renseignements, il faudrait qu'elle ne puisse se faire qu'après épuisement de toutes les voies d'appel.
    J'aimerais parler brièvement des rapports qui existent entre la santé mentale et la criminalité des jeunes. Il semble qu'environ 10 p. 100 des jeunes ayant des démêlés avec la justice pénale souffrent de troubles mentaux. Je le signale parce que nous estimons que, si nous voulons lutter contre la criminalité juvénile, il conviendrait de répondre aux besoins des nombreux jeunes qui souffrent de troubles mentaux, et oui, par conséquent, aux risques qu'ils posent. Il est essentiel qu'ils aient accès à des services de soutien pour les aider de se retrouver en situation de conflit avec la loi. Étant donné que plus de 70 p. 100 des détenus adultes qui souffrent de troubles mentaux ont eu des démêlés avec la justice avant d'atteindre l'âge de 18 ans, il est évident qu'il est essentiel de tenir compte de la santé mentale des jeunes si l'on veut minimiser les coûts de santé à long terme et les souffrances.
     Dans la même veine, nous sommes inquiets des récents rapports faisant état d'un taux de 70 p. 100 de comorbidité chez les jeunes incarcérés qui ont des problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Il a également été constaté que plus de 30 p. 100 des jeunes qui ont un grave problème médical ont aussi des problèmes de santé mentale. Il est évident que de meilleurs résultats sur le plan de la santé mentale entraîneront de meilleurs résultats sur le plan de la justice. Nous ne sommes pas certains que les modifications proposées s'attaquent à ce problème très grave et nous sommes certains que des mesures punitives ne permettront pas de le régler.
    Il existe des preuves très fortes qui démontrent la nécessité de réduire la criminalisation des jeunes souffrant de troubles mentaux de façon à favoriser leur réinsertion sociale, leur réintégration, la sécurité de la population et réduire les coûts, d'une façon générale.
    J'aimerais citer l'exemple de London en Ontario, où les services communautaires de Saint-Léonard dans cette région comprennent un programme qui s'appuie sur un centre d'accueil. Ce centre supervise environ 150 jeunes sur une période de six mois, et obtient un bon taux de succès grâce à des programmes de déjudiciarisation. Ils fonctionnent depuis six ans et on a évalué que les économies réalisées sur le plan de la garde par rapport aux centres d'accueil s'élèvent à près de 7 à 10 millions de dollars. De tels montants permettent vraiment d'aider les jeunes.
    J'aimerais également parler de l'ordonnance de placement et de surveillance dans le cadre d'un programme intensif de réadaptation (PSPIR). Cette mesure, qui est excellente, n'est toujours pas utilisée pleinement. En fait, nous avons appris cette semaine que de nombreux juges canadiens ne savaient même pas qu'ils pouvaient l'utiliser. Malgré des attributions de fonds qui permettraient d'imposer 50 peines de ce genre par année, il y en a eu moins de 80 depuis 2003. Il faut prendre des mesures pour mieux faire connaître cette intervention très efficace qui a en outre pour effet de réduire la criminalisation.
    Nous pensons que les coûts supplémentaires qu'entraîneraient des mesures de placement sous garde renforcées ne sont ni nécessaires ni appropriés pour la population canadienne. La Société Saint-Léonard estime qu'il faut donner à cette loi le temps d'être mise en oeuvre. Le rapport qui fait suite aux tables rondes fait état d'un consensus très général sur le fait que les lacunes ne se trouvent pas dans la loi, elles sont dans le système. Il convient de faire davantage d'efforts pour mieux la mettre en oeuvre.
    Nous pensons qu'il est effectivement nécessaire de prendre des mesures dans le domaine de la justice pour les jeunes: non pas adopter des lois ou emprisonner les jeunes, mais faciliter l'accès aux interventions et aux services de soutien grâce à des initiatives fédérales-provinciales-territoriales axées sur la collaboration, en dépassant les questions de compétence et en répondant aux besoins réels.
    Merci.
(1540)
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Schellenberg. Allez-y.
    Je m'appelle Gaylene Schellenberg, je suis avocate auprès de la Direction de la législation et réforme du droit de l'Association du Barreau canadien. Nous comparaissons régulièrement devant votre comité et avons déjà comparu au sujet de ce projet de loi; je sais que vous connaissez bien l'ABC.
    Je suis accompagnée aujourd'hui de Rick Stroppel, avocat du Bureau de la défense pénale des jeunes à Edmonton et membre de la Section nationale de droit pénal de l'ABC. M. Stroppel va présenter l'essentiel de notre mémoire et il répondra aux questions.
    Merci.
    Je m'appelle Rick Stroppel. Je suis avocat depuis 27 ans. Pendant sept ans et demi, je me suis exclusivement occupé de dossiers de jeunes. Je travaille également comme avocat au Youth Criminal Defence Office d'Edmonton. Je me suis occupé de tous les niveaux de ces dossiers, je me suis occupé de toutes sortes de dossiers depuis le vol à l'étalage jusqu'au meurtre. J'ai participé à l'élaboration du mémoire de l'ABC et je suis ici pour l'appuyer.
    J'aimerais commencer par dire que les modifications que l'on se propose d'apporter à la LSJPA sont, dans un certain sens, nécessaires. Dans le cas d'une loi pénale, il est très courant, certains diraient même inévitable, que la mise en oeuvre de la loi dans le monde réel soulève des difficultés qu'il faut régler. C'est ce qui s'est passé avec la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
    Je dois dire que, pour ce qui est du mémoire de l'ABC, nous avons tenté de respecter un certain équilibre. Cela reflète l'équilibre qui règne au sein de l'ABC elle-même. Notre organisme comprend non seulement des avocats de la défense, mais aussi des poursuivants et des juges. Ainsi, lorsque nous commentons un projet de loi comme celui-ci, nous aimons souligner les aspects que nous considérons comme étant positifs, par exemple, les changements positifs qui sont proposés, et nous en avons tenu compte dans notre mémoire.
     Je me permets de vous demander de vous reporter à la page 5 de notre mémoire où nous félicitons le Parlement d'avoir ajouté la présomption de culpabilité morale moins élevée tirée de l'affaire R. c. B. (D.). Au bas de la page 6 de notre mémoire, nous affirmons être favorables à l'interdiction d'amener des jeunes à purger leur peine dans des prisons pour adultes. Nous appuyons la nouvelle définition d'infraction grave avec violence parce qu'elle précise cette notion. Ce sont là certains éléments du projet de loi C-4 qui nous paraissent positifs et que nous appuyons. Il nous est apparu évident que, d'une façon générale, les modifications ont été préparées par des gens qui connaissaient assez bien le droit applicable aux jeunes, qui possédaient une certaine expertise dans ce domaine, et qui ont beaucoup réfléchi à toute cette question.
    J'aimerais, dans mes commentaires d'ouverture, replacer le problème de la criminalité des jeunes dans son contexte. Je parlais à M. Bala avant de comparaître ici aujourd'hui. Il m'a dit qu'il estimait qu'environ 80 p. 100 des crimes commis par les jeunes sont de nature non violente. Pour ce qui est du 20 p. 100 restants, plus de la moitié de ces crimes représentent ce que l'on pourrait objectivement qualifier de crimes violents relativement mineurs, qui ne vont pas au-delà des voies de fait simples. Les personnes qui viennent ici plus tard cet après-midi pourront vous fournir les chiffres exacts, mais je crois savoir que les crimes graves avec violence représentent moins de 10 p. 100 des crimes commis par les jeunes. Chaque fois que l'on comparaît dans un contexte comme celui-ci, on consacre 90 p. 100 de son temps à parler des 10 p. 100 des crimes commis par les jeunes qui constituent des crimes graves avec violence. Il ne faudrait pas oublier que, dans le cas des infractions sans violence et des infractions avec violence relativement mineures, cette loi donne d'excellents résultats. C'est une très grande réussite et nous devrions en tenir compte dans notre étude de la loi.
    J'aimerais également faire remarquer que la loi actuelle prévoit une très importante soupape de sécurité qui permet d'imposer une peine pour adultes à un adolescent. Nous mentionnons dans notre mémoire l'affaire Lacassse. C'est évidemment une affaire tragique. Nous faisons remarquer à la page 3 de notre mémoire que cet adolescent a été déclaré coupable de meurtre au second degré à titre d'adulte, qu'il a au moins reçu une peine à titre d'adulte, et qu'il s'est vu imposer une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de demander la libération conditionnelle avant sept ans. C'est une peine d'emprisonnement à perpétuité. Il est possible que cet adolescent passe le restant de sa vie en prison. Une autre conséquence qui découle de cette affaire est que nous pouvons mentionner son nom parce que lorsque les adolescents reçoivent une peine pour adultes, ils sont traités sur tous les autres plans comme des adultes, y compris pour ce qui est de la publication de leur nom.
    Les modifications qu'introduit le projet de loi C-4 visent des questions et des problèmes qui sont déjà en fait réglés par loi et sont donc inutiles. Un jeune de 16 ou 17 ans qui est déclaré coupable de meurtre au premier degré ou qui plaide coupable à une telle accusation, peut recevoir une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de demander la libération conditionnelle avant 10 ans, et cette peine est prévue par l'article 745.1 du Code criminel. C'est évidemment une peine très lourde, mais nous avons déjà une loi qui a été très soigneusement rédigée pour aménager une soupape de sécurité pour la très petite minorité de jeunes qui commettent des crimes très graves. Ils risquent déjà de recevoir une peine très lourde.
(1545)
    Mme White a déjà parlé des économies associées à une diminution du taux d'incarcération des jeunes, comme étant une des fonctions de la peine. Il nous est apparu, et cela est mentionné dans notre mémoire que, lorsqu'on examine l'historique de la loi, on constate non seulement que le taux d'incarcération a diminué, mais que, d'une façon générale, celui de la criminalité des jeunes a également diminué. C'est pourquoi nous devons nous poser une question grave: Qu'avons-nous obtenu il y a 10 ans à l'époque où le taux d'incarcération de nos jeunes était un des taux les plus élevés des pays occidentaux? Eh bien, une des choses que nous avons obtenues, c'est que nous avons gaspillé beaucoup d'argent qui aurait été beaucoup mieux dépensé sur des programmes qui visent à aider les jeunes à se réadapter.
     Cela m'amène à parler d'un aspect qui nous préoccupe, à savoir qu'un bon nombre des propositions que contient le projet de loi C-4 visent à faciliter l'incarcération des jeunes, et, pour ce qui est du paragraphe 29(2), à faciliter leur détention avant le procès. Nous n'appuyons donc pas les modifications au paragraphe 29(2) et ce sera ma dernière remarque puisque je vois que mon temps de parole est pratiquement écoulé. Pour ce qui est des modifications du paragraphe 29(2), qui autorisent le tribunal à détenir un adolescent lorsqu'il existe une probabilité marquée qu'il commette une infraction grave s'il était libéré, nous faisons remarquer dans notre mémoire que la notion d'« infraction grave » recouvre toute une gamme d'infractions que nous qualifierions plutôt de relativement bénignes, comme la falsification de chèques et ce genre de choses. L'autre problème que nous avons signalé est le fait que l'expression « probabilité marquée » est plutôt nébuleuse.
    Dans le droit relatif aux jeunes, par rapport à tous les autres domaines du droit, nous devons privilégier la certitude et la prévisibilité, mais ce qui nous trouble, c'est que nous sommes en train d'envisager de placer sous garde des gens qui n'ont pas encore été déclarés coupables de quoi que ce soit. Cela nous paraît contraire, tout d'abord, à la Charte des droits, à l'alinéa 11e), qui énonce que tout inculpé a le droit de ne pas être privé sans juste cause d'une mise en liberté assortie d'un cautionnement raisonnable, et également à un autre principe qui est garanti par la Loi sur le système de justice pénale, le sous-alinéa 3(1)b)(iii), qui énonce que les adolescents doivent faire l'objet de mesures procédurales supplémentaires pour leur assurer un traitement équitable.
    Voici quelques-unes des raisons pour lesquelles nous nous opposons au paragraphe 29(2). Il y a d'autres modifications proposées qui auraient, d'après nous, un effet très négatif, savoir augmenter le nombre des placements sous garde imposés aux adolescents et celui des adolescents détenus avant leur procès; ce dernier nombre a, comme cela est noté à la page 3 du mémoire de M. Bala, malheureusement augmenté depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur le système de justice pénale pour les jeunes. J'ai honte de dire que ce nombre a particulièrement augmenté dans les provinces des Prairies. C'est presque comme si nous donnions quelque chose d'une main pour le reprendre de l'autre. Nous imposons moins de placements sous garde, mais nous détenons plus fréquemment les jeunes avant leur procès.
    Ce sont les commentaires que je voulais présenter au nom de l'ABC. Je suis reconnaissant d'avoir eu cette possibilité et serais heureux de répondre à vos questions plus tard.
(1550)
    Merci.
    Nous allons donner la parole à M. Bala pour 10 minutes.
    Merci. C'est un privilège d'être invité à revenir ici. J'étais ici en juin dernier et j'ai présenté un mémoire; je crois savoir que vous avez des copies de ce mémoire. Je connais la formule et je vais dire quelques mots d'introduction.
    Je suis professeur de droit et je me spécialise dans une série de questions touchant la famille et les enfants, y compris les questions concernant les jeunes contrevenants. C'est sans doute moi qui a le plus écrit au sujet de la justice pour les jeunes que n'importe quel autre professeur de droit au Canada; il y en a d'autres qui ont écrit davantage que moi du point de vue d'autres disciplines.
    Je reconnais que le moment est bien choisi pour examiner la loi et y apporter quelques modifications. Je ne pense toutefois pas qu'il conviendrait de la modifier en profondeur. Je pense que, si la criminalité chez les jeunes est effectivement un grave problème, une loi ne peut avoir qu'un effet limité sur ce type de criminalité. En fait, le système de justice pour les jeunes ne peut avoir qu'un effet limité sur la criminalité des jeunes.
    Je dirais que, dans l'ensemble, cette loi a été une réussite, du moins une réussite relative, dans la mesure où le nombre des comparutions devant les tribunaux et celui des jeunes placés sous garde ont diminué, comme on nous l'a dit. La criminalité chez les jeunes n'a pas augmenté. Nous avons enregistré à la fois des économies financières importantes et des économies également importantes sur le plan des ressources humaines.
    Je crains que ces modifications aient pour principale conséquence d'augmenter le recours aux tribunaux et au placement sous garde et que cela va augmenter les coûts, même si je dois dire que cela ne touchera pas le gouvernement fédéral. À la différence de certains autres changements apportés au droit pénal à la suite desquels le gouvernement fédéral assume une partie des coûts de l'incarcération des détenus, ce projet de loi fait reposer le fardeau financier supplémentaire sur les provinces. Cela m'inquiète.
    Cela dit, je dirais que cette loi contient quelques bonnes dispositions. On nous en a mentionné quelques-unes. Il y a bien sûr l'introduction de la notion de culpabilité morale moins élevée. Dans le projet de paragraphe 29(2), je pense que la question de la détention avant le procès est extrêmement importante. En fait, nous avons reçu des données depuis que j'ai présenté ce mémoire. Statistique Canada va vous dire que nous détenons davantage d'adolescents avant leur procès que nous les plaçons sous garde. Ce problème est aujourd'hui plus important que celui du recours au placement sous garde.
    Un des problèmes que soulève le fait d'envoyer en détention les adolescents, c'est que cela rend très difficile leur réadaptation. Ils se retrouvent en détention dans des établissements qui offrent peu de programmes. Ils risquent davantage d'être agressés par les autres détenus, ils ont accès à moins de programmes, les taux de suicide et les problèmes de santé mentale sont élevés. C'est une situation très inquiétante.
    Cela dit, je dirais que le projet du paragraphe 29(2) a pour effet de resserrer certaines choses; il précise le droit dans ce domaine. Dans l'ensemble, c'est probablement une amélioration par rapport à ce que nous avons à l'heure actuelle, mais j'estime que le paragraphe 29(2) — et je sais que nous pourrons en parler au cours de vos questions — va en fait réduire le recours à la détention avant le procès par rapport à ce qu'il est actuellement.
    Je vais faire référence à deux parties de la loi au sujet desquelles, tout comme mes collègues ici et ceux qui sont ailleurs, j'ai de graves préoccupations. L'un de ces aspects est l'introduction de la dissuasion et de la dénonciation dans les principes fondamentaux de la loi. Je sais qu'il est important d'avoir un système de justice pour les adolescents qui les dissuade de commettre des infractions et qui les oblige à rendre des comptes — et si vous le voulez, pour parler simplement, — qui « dénonce les crimes ». Mais si nous utilisons les mots « dissuasion et dénonciation » pour les introduire dans la loi, le message que nous envoyons aux juges est qu'ils doivent augmenter le nombre des placements sous garde imposés aux adolescents. Ce sera le seul effet de cet ajout. Il est regrettable que les adolescents qui commettent des infractions ne pensent pas aux conséquences qui s'ensuivront s'ils étaient pris. C'est la réalité. Ils ne se disent pas que le législateur a fait passer de quatre à six mois la peine d'emprisonnement dont est punissable l'infraction qu'ils s'apprêtent à commettre.
    L'augmentation de la sévérité des peines n'aura aucun effet sur leur comportement. Il existe de nombreuses études qui démontrent que l'augmentation de la gravité des peines infligées aux jeunes ne modifie pas leur comportement. Par contre, si l'on insère ces termes dans la loi, cela va modifier le comportement de la magistrature, en particulier dans le sens d'une augmentation des peines. Je trouve cela inquiétant.
    Pour ce qui est de la publicité... et l'on peut comprendre le point de vue du public, et encore plus celui des victimes, qui disent « Je veux que l'on rende des comptes. Je veux que cet adolescent rende compte de ses actes et je veux qu'il ait honte de ce qu'il a fait. » Malheureusement, en réalité, si nous imprimons leurs noms dans les journaux — et c'est l'expérience qu'ont connue les États-Unis qui autorisent cette publicité — les contrevenants se promènent en disant: « Regardez, c'est moi le dur ici. J'ai même mon nom dans le journal. » Cela ne modifie pas leur comportement, mais cela complique leur réadaptation. Cela stigmatise leurs frères et soeurs et leurs parents. Cela n'a pas le genre d'effet positif sur la réduction de la criminalité chez les jeunes que l'on pourrait espérer.
(1555)
    Autrement dit, il faut adopter, à l'égard du problème de la criminalité chez les jeunes, une approche sophistiquée, réfléchie, appuyée sur la recherche, si nous voulons renforcer la sécurité de la société et ne pas faire des choses qui pourraient, si l'on se fie uniquement à l'intuition et non pas au raisonnement, constituer une réponse à la criminalité des jeunes qui risque d'avoir comme conséquence pour la société d'augmenter la criminalité des jeunes.
    Nous voulons apporter des changements à la loi, mais des changements intelligents qui vont nous donner une société plus sûre, non pas des changements qui sont, si je peux m'exprimer ainsi, des changements irréfléchis qui vont augmenter la criminalité chez les jeunes ainsi que les problèmes que pose à notre société cette criminalité.
    Je vais m'arrêter ici. Merci.
    Je vous remercie.
    Nous allons commencer les questions avec M. Murphy; vous avez sept minutes.
    Si je ne commence pas par parler de ces grandes questions générales, c'est parce que, diraient nos témoins, nous avons déjà fait un peu le tour de cette question. Il y a des différences importantes entre le gouvernement et ce côté de la table au sujet de la dénonciation. J'aimerais concentrer mon intervention sur certains aspects très particuliers.
    Premièrement, je tiens à vous remercier tous d'être venus. J'ai lu vos mémoires et entendu vos exposés, et je vais aborder des aspects précis du recours aux sanctions extrajudiciaires dont traite l'article 39 de la loi, tel que modifié.
    Je dirais tout d'abord aux représentants de l'ABC que nous avons apprécié son mémoire. Il est détaillé. Vous avez correctement paraphrasé les recommandations du juge Nunn lorsqu'il disait que la protection du public n'était pas le seul, ni le principal objectif, mais l'un des buts et des objectifs, et c'est ce que dit en fait le rapport Nunn. Les députés de l'opposition vont essayer de vous faire dire autre chose, je vous invite donc à être prudents.
    J'ai également beaucoup apprécié les commentaires, que vous avez exprimés avec beaucoup de sensibilité, au sujet de la Loi de Sébastien. Bien sûr, nous pensons à la famille de la victime. Toutefois, le fait est que l'issue juridique — comme vous le dites dans votre mémoire — était appropriée dans les circonstances et que ce projet de loi cherche un peu à exploiter la situation, de sorte que le titre abrégé de la loi — pour lequel nous ne félicitons pas le gouvernement — est un aspect auquel nous pourrions nous opposer.
     J'aimerais maintenant aborder un sujet de préoccupation légitime et nous pourrions l'aborder de deux façons: la prise en compte des sanctions extrajudiciaires par le tribunal et les modifications qu'apporte le projet de loi C-4 à l'alinéa 39(1)c) de la LSJPA. Je vais paraphraser cette disposition, mais elle énonce que le tribunal, lorsqu'il décide s'il y a lieu de placer le jeune sous garde, doit maintenant tenir compte des sanctions extrajudiciaires prises à son endroit.
    Je crois, monsieur Bala, que vous avez fait remarquer, tout comme l'a fait aussi Mme White, que le tribunal a déjà le pouvoir de tenir compte de ces aspects lorsqu'un rapport présententiel est préparé, parce que celui-ci contient un historique des sanctions extrajudiciaires prises à l'endroit du jeune et la façon dont il y a répondu.
    Ma question s'adresse à vous tous, pourquoi a-t-on modifié l'alinéa 39(1)c) pour y inclure les sanctions extrajudiciaires? Est-ce nécessaire? Est-ce exagéré? Est-ce plus précis? Quel est d'après vous le but recherché avec cette répétition? S'agit-il ici d'un véritable problème? Craint-on vraiment ici que le tribunal ne tienne pas compte de ce que contient le rapport présententiel, alors que celui-ci contient un historique de ces sanctions?
    Qu'en pensez-vous? Nous pourrions peut-être commencer par Mme White.
    Nous pensons que cela va inciter les tribunaux à envisager plus souvent le placement sous garde. Nous disons que cette modification n'est pas vraiment justifiée par le souci de rappeler davantage les antécédents des jeunes, mais nous craignons également beaucoup, comme je l'ai mentionné, que le fait de prendre en compte les sanctions extrajudiciaires dans ce contexte risque d'inciter les jeunes aguerris à ne pas admettre leur culpabilité et à ne pas réagir après un incident, et que cela pourrait même inciter les policiers à ne pas s'engager dans cette voie.
    Voilà comment nous considérons cette question.
(1600)
    Nous allons donner la parole à M. Bala. Le mémoire de l'ABC ne disait pas grand-chose sur ce point.
    Je devrais dire que les dispositions touchant le recours aux sanctions extrajudiciaires dans un but de déjudiciarisation a été un des grands indicateurs du succès de cette loi. Notre pays a réussi à réduire le nombre des petits délinquants qui se retrouvent dans nos tribunaux et augmenté celui de ceux qui se retrouvent dans des programmes. Il se trouve que je travaille en tant que bénévole pour le programme de Kingston. Notre intervention est axée, comme de nombreux autres programmes, sur la justice réparatrice, sur la rencontre entre les victimes et les délinquants et sur le souci de répondre aux besoins des victimes. Ce sont là des dispositions très importantes. Elles ont des répercussions financières.
    Je mentionnerai en passant que je suis bien sûr d'accord avec vous, lorsque vous dites que les juges peuvent déjà tenir compte du dossier du délinquant en matière de sanctions extrajudiciaires, et qu'ils le font, comme vous l'avez fait remarquer. Mais je crains que cette disposition et la disposition suivante concernant les sanctions extrajudiciaires et les dossiers de police n'incitent les services de police à ne pas utiliser ces dispositions. Cela semble dire à la police que celle-ci a trop souvent recours aux sanctions extrajudiciaires — et je ne pense pas que ce soit vraiment le cas, au Canada. En fait, nous continuons à avoir un taux de recours aux tribunaux relativement élevé. Il y a beaucoup de pays qui déjudiciarisent beaucoup plus que nous le processus de sorte que, si nous devons faire quelque chose, ce serait plutôt de déjudiciariser davantage de ces cas peu graves.
    Ces dispositions m'inquiètent donc beaucoup. En fait, lorsqu'on calcule le grand nombre de dossiers que cela va toucher, si ces derniers sont renvoyés devant les tribunaux en plus grand nombre, cela aura un effet important sur les coûts, les délais, et dans ce sens, sur les victimes qui souffrent dans notre système de justice. Ces dispositions n'auront pas l'effet souhaité.
    J'aimerais aborder cette question en retirant mon chapeau d'avocat et en mettant celui de contribuable. Chaque fois qu'un adolescent comparaît devant un tribunal, il y a un juge, un poursuivant, un avocat de la défense, un greffier, un travailleur social et un agent de probation — et tous ces gens-là coûtent de l'argent. Nous devons les rémunérer.
    Un des buts de la LSJPA — et cela me paraît être un but louable — était de soustraire ces cas au système judiciaire habituel. Je ne comprends toujours pas très bien ce qui se passe, lorsque je vais dans un tribunal et que je vois qu'on a accusé un adolescent d'avoir volé une canette de boisson gazeuse et un sac de croustilles. L'affaire traîne plus de deux semaines pour que les parties puissent envisager les sanctions extrajudiciaires et l'affaire est ensuite remise à une semaine parce que l'examen du dossier n'est pas encore terminé. On en arrive bientôt à quatre mois avant que le dossier soit complet. Si nous voulions faire quelque chose, il faudrait plutôt renforcer et améliorer le processus de déjudiciarisation. Nous devrions prendre tous les moyens pour inciter les intervenants à soustraire davantage de dossiers au processus judiciaire habituel.
    Je considère, premièrement, que c'est une façon subtile de donner de l'importance à cette possibilité. Je peux vous dire qu'en Alberta — et je suis sûr que la situation est la même dans toutes les provinces — nous avons une règle simple. Les sanctions extrajudiciaires sont réservées aux infractions non violentes commises par un délinquant primaire ou secondaire. Les dossiers qui débouchent sur de telles sanctions sont du genre que je viens de décrire, et je ne pense pas qu'ils devraient de toute façon se trouver devant les tribunaux.
    On pourrait en réalité épargner beaucoup d'argent de cette façon. Je considère que cet article est un peu superficiel ou superflu. Lorsqu'un tribunal doit décider si l'adolescent doit être envoyé devant un tribunal pour adultes — ou je devrais plutôt dire, d'imposer une peine pour adulte, parce que c'est la façon dont nous en parlons maintenant — est-il important que l'adolescent ait volé un sac de croustilles et une canette de boisson gazeuse au début de sa vie de délinquant? Je ne le pense pas. Je pense que le tribunal devrait principalement se concentrer sur les condamnations graves, y compris sur les dossiers qui ont donné lieu à des sanctions extrajudiciaires.
    Ce sont là quelques-unes des raisons pour lesquelles nous nous opposons à la modification proposée.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Ménard pour sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup de vos rapports, d'autant plus que nous avons eu l'occasion de les lire puisque nous les avons reçus à temps. Nous avons pu les souligner abondamment.
     Je remarque que personne ici ne provient du Québec. L'Association du Barreau canadien représente l'ensemble des avocats. Je voudrais savoir si vous êtes familier avec la méthode particulière du Québec de juger les jeunes contrevenants depuis une génération.
(1605)

[Traduction]

    Je pense que Gaylene et moi pouvons parler de ce sujet.
    L'ABC est fière de représenter l'ensemble du pays. Je crois me souvenir que des avocats québécois ont participé à la préparation de ce mémoire. Nous étions nombreux. Nous avons certainement tenu compte de leurs commentaires au sujet de la situation au Québec. Je pense que le mémoire tient compte de leur expérience et de leurs commentaires.

[Français]

    Si je vous parle du principe de la bonne mesure, au bon moment et à la bonne personne, cela vous dit-il quelque chose?

[Traduction]

    Vous allez devoir m'aider sur ce point.
    Cela fait-il partie de la législation québécoise?

[Français]

    C'est ainsi que le juge en chef du Tribunal de la jeunesse du Québec résumait la philosophie de l'intervention. Je vois que M. Bala opine du bonnet. Il est probablement au courant puisqu'il est celui qui a écrit le plus sur les jeunes contrevenants.
     J'ai une crainte. Il y avait une inquiétude face aux changements qui ont été apportés la dernière fois. Je pense que c'était en 2002. On craignait que le Québec soit incapable de continuer à appliquer cette philosophie, parce qu'on limitait beaucoup la discrétion des juges. Elle leur permettait de prendre des mesures sévères pour des infractions moins graves quand elles étaient justifiées par la personnalité et les perspectives pour l'avenir du jeune. Ils pouvaient aussi, parfois, prendre des décisions plus clémentes pour des crimes très graves. Les juges appréciaient cette discrétion et ils étaient informés par des psychologues qui étaient au service du tribunal.
     Je suis certain que le fait de présenter des amendements à la présente loi serait pour eux une occasion de vous dire si les dangers qu'ils appréhendaient, relativement à cette loi, se sont matérialisés.

[Traduction]

    Je vais répondre à cette question au nom de l'ABC. Nous parlons de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents qui a été promulguée et est entrée en vigueur en avril 2003.
    Vous avez abordé un aspect qui nous concerne. Certains semblent penser qu'on ne peut pas faire confiance aux juges ni même aux poursuivants lorsqu'ils exercent leurs pouvoirs discrétionnaires. Une partie fondamentale de notre mémoire est consacrée au fait que nous mentionnons que nous choisissons les juges avec beaucoup de soin. Nous aimons croire que nous choisissons les meilleurs candidats possible. Ma femme travaille comme poursuivante à plein temps et je suis tous les jours en rapport avec les poursuivants. Je suis heureux de pouvoir vous dire que ce sont des gens extrêmement professionnels et compétents.
    Voulez-vous dire que vous travaillez avec votre femme tous les jours?
    Des voix: Oh, oh!
    Le projet de loi précise que les juges doivent prendre en compte une chose et que les poursuivants doivent prendre en compte autre chose. Cela va sans dire. Cela nous paraît inutile. Nous savons que les poursuivants envisagent toujours de demander une peine pour adultes lorsque l'affaire est grave. Ils le font toujours. Ils le feront toujours. Il n'est pas nécessaire de le mentionner dans la loi. Cela est inutile. C'est là un aspect de notre mémoire.
    Je pense que depuis quelques dizaines d'années, le Québec a adopté une approche différente à toute une série de questions reliées aux enfants. Lorsque cette loi est entrée en vigueur, on craignait qu'elle modifie l'approche adoptée au Québec. En fait, cette loi s'impose à tous les juges canadiens, mais le Québec a continué à connaître les plus faibles taux de comparution devant les tribunaux, de placement sous garde et de détention avant le procès. Cela me paraît un résultat très positif. En fait, certaines études indiquent que cette province a un taux de criminalité des jeunes qui est très faible. Dans ce sens, notre pays est un peu un laboratoire. Par contre, nous avons d'autres provinces où les taux de placement sous garde sont beaucoup plus élevés, tout comme ceux des infractions commises par les jeunes. Sur certains aspects, le Québec est un modèle pour le reste du pays.
(1610)

[Français]

    Merci de votre réponse.
    Vous critiquez, avec raison je pense, le changement de définition pour les infractions graves et avec violence. À titre d'experts, vous donnez une liste significative de crimes qui seront dorénavant considérés comme des crimes violents. Pouvez-vous nous donner cette liste?

[Traduction]

    Il faut que je précise un aspect qui découle de votre question. Il y a la notion d'« infraction grave avec violence » qui a été redéfinie, et nous appuyons cette mesure. Les tribunaux ont défini « infraction grave avec violence » comme étant « toute infraction commise par un adolescent et au cours de la perpétration de laquelle celui-ci cause des lésions corporelles graves ». Il y a eu toutes sortes de discussions et un grand débat sur la question de savoir si cela comprenait un préjudice psychologique. Cette notion était confuse. Elle compliquait la tâche des tribunaux. Il était difficile de savoir si une infraction donnée serait qualifiée d'infraction grave avec violence.
    C'est une des mesures que nous appuyons. La loi a redéfini cette notion en incluant quatre infractions très graves qui constituent les « infractions graves avec violence ». C'est une bonne chose. Mais vous voulez parler de la définition d'« infraction grave ». Cet aspect est abordé à la page 10 de notre mémoire. C'est une autre notion. Le problème que pose la nouvelle définition d'« infraction grave » est qu'elle a des répercussions notamment sur le refus de la mise en liberté provisoire, par exemple.
    Je crois que je peux expliquer la situation en vous donnant un exemple. La définition d'« infraction grave » comprend toute infraction pour laquelle un adulte, s'il était poursuivi par voie de mise en accusation, serait passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Cela comprend des infractions comme la fraude, le vol de plus d'un certain montant, l'emploi d'un document contrefait, la possession d'une carte de crédit volée, le méfait public, etc. Nous ne considérons pas qu'il s'agit là, objectivement, d'infractions graves.
    Si le tribunal est saisi d'un dossier de possession de carte de crédit volée et estime qu'il existe une probabilité marquée, quel que puisse être le sens de cette expression, que l'adolescent, s'il était libéré, se procurerait peut-être une autre carte de crédit volée, le tribunal peut alors détenir la personne jusqu'à son procès. Cela ne nous paraît pas judicieux. Nous pensons que c'est là une définition trop large et trop vague d'« infraction grave ». C'est donc un aspect du projet de loi auquel nous nous opposons.
    Merci.
    M. Comartin.
    Merci, monsieur le président.
    Je n'ai pas de question à poser.
    Très bien. Nous allons passer à M. Rathgeber pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Monsieur Stroppel, je dois dire qu'il est agréable de voir quelqu'un d'Edmonton comme moi venir témoigner devant notre comité.
    Je tiens pour acquis que vous avez tous lu le rapport de l'enquête Nunn et les recommandations du juge Nunn. Je pars du point de vue que vous les connaissez tous. Est-ce bien exact?
    En fait, j'ai témoigné à cette enquête pendant quelques jours.
    J'aimerais parler de ses recommandations. La première est la recommandation 20, dans laquelle il conseille au gouvernement de la Nouvelle-Écosse d'inviter le gouvernement fédéral à modifier la déclaration de principes de la loi pour ajouter une disposition indiquant que la protection du public est un des principaux objets de la loi. Je déduis de vos déclarations d'ouverture que sur le plan des principes et des idées, vous êtes tous en faveur de la recommandation 20. Y a-t-il quelqu'un qui est contre la recommandation 20?
    M. Bala.
    Je ne suis pas contre la recommandation 20 dans le sens que j'estime que la protection du public est une idée importante. Je n'aime toutefois pas la façon dont est formulé l'alinéa 3(1)a). La protection du public est évidemment un des aspects importants et on pourrait même soutenir que c'est le plus... C'est une des principales raisons pour lesquelles nous avons un système de justice pénale. Mais la formulation de l'alinéa3(1)a) me fait problème parce que cela peut amener les juges à examiner ce que disait la loi auparavant, à s'interroger sur le sens de la nouvelle formulation et sur l'importance de ce changement. Je crains que, lorsqu'ils liront le changement apporté à l'alinéa 3(1)a), ils penseront qu'ils ne devraient pas prendre en considération la protection du public à long terme mais sa protection à court terme, ce qui veut dire, pour certaines personnes, envoyer davantage de jeunes en prison.
    Nous reviendrons sur ce point.
    Monsieur Stroppel, la protection du public devrait-elle être, d'après vous, un des objets de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents?
    Oui, mais je pense qu'il faut replacer cette idée dans son contexte, et c'est ce que nous faisons à la page 2 de notre mémoire. Comme nous le disons à cet endroit — en citant directement le rapport Nunn — nous pensons que la protection du public doit être reconnue comme étant un des objets, mais pas le seul objet principal de la loi. Ce qui nous inquiète et nous préoccupe, c'est la proposition de supprimer la notion de protection à long terme du public, parce que nous estimons qu'une des grandes forces de la loi est qu'elle réussit à associer réadaptation et protection du public.
    Autrement dit, la meilleure façon de protéger le public est de réadapter l'adolescent, ce qui, dans la plupart des cas, veut dire qu'il ne faut pas l'incarcérer et que même l'incarcération peut avoir l'effet contraire. Elle risque de rendre l'adolescent plus dangereux. C'est pourquoi nous demandons que ce principe soit placé dans son contexte.
(1615)
    Madame White, d'après vos commentaires d'ouverture, je crois que vous êtes favorable à ce que la protection du public soit un des objets de la loi.
    Je suis favorable à la notion. Tout comme mes collègues, je me pose des questions au sujet de la méthode utilisée, de la formulation et des déductions que l'on pourrait en tirer. J'ai examiné la recommandation 20 dans le contexte du commentaire du rapport de la commission, qui disait à ce sujet qu'il ne faut pas voir là « une invitation à se lancer dans une grande réforme ». C'était un léger ajustement. Il est nécessaire que la loi mentionne la sécurité publique, mais ce n'est qu'un des objets ou des principes de la loi.
    Donc, un appui nuancé à la recommandation 20.
    Ai-je raison de penser que si l'on est favorable à la recommandation 20 et si l'on estime que la protection du public devrait être un des objets de la loi, celle-ci pourrait fort bien, et devrait certainement, mentionner également la dénonciation et la dissuasion spéciale?
    Je vais repartir ici avec M. Bala.
    Je ne pense pas que le fait d'inclure la dissuasion générale ou spéciale aura pour effet concret de protéger le public. Je pense qu'il existe de nombreuses études qui montrent, tout comme mon expérience personnelle, que le problème que posent les adolescents qui commettent des infractions, c'est qu'ils ne pensent pas aux conséquences de leurs actes, et encore moins, à la gravité de la peine. C'est pourquoi l'augmentation de la gravité des peines n'aura pas d'effet dissuasif sur leur comportement.
    La Cour suprême du Canada a déclaré dans R. c. B. (D.), au sujet de cette question, et je crois que c'est là un aspect important, que le système de justice pour les jeunes, l'effet de sa mise en oeuvre, devrait être de dissuader les jeunes de commettre des infractions. Le fait que la police arrête les adolescents, qu'elle les ramène chez leurs parents, qu'elle les amène devant un juge, tout cela aura un effet dissuasif. Si vous dites que la dissuasion devrait être un facteur en matière de détermination de la peine, vous allez augmenter les peines, ce qui n'aura aucun effet sur la criminalité des jeunes. Cela aura un effet sur les peines imposées aux jeunes et sur les juges de tribunaux pour adolescents.
    Vous avez dit dans vos déclarations d'ouverture que la durée de la peine et l'augmentation de sa sévérité n'ont pas d'influence sur le comportement des adolescents. Cela me trouble. Peut-être que je regarde cet aspect de façon trop simpliste, mais il me semble que si l'on condamne quelqu'un à une peine d'emprisonnement de 12 mois plutôt que de six mois, pendant cette période de six mois supplémentaires, cette personne-là ne commet pas de crime. Qu'est-ce qui ne va pas? Où est la faille dans mon raisonnement?
    Il ne s'agit pas en fait de dissuasion ici; il s'agit plutôt de neutralisation, ce qui est une autre question.
    Il n'est pas contestable que les adultes rationnels sont influencés par la durée de la peine. Si nous souhaitons, par exemple, faire cesser les fraudes commises par les sociétés, le fait d'imposer des peines plus longues et d'adopter des lois relatives aux valeurs mobilières plus efficaces va dissuader les comptables, les avocats et d'autres, mais cela ne modifiera pas le comportement des jeunes...
    Très bien.
    Vous reconnaissez donc avec moi que la neutralisation protège effectivement la population.
    Oui, mais permettez-moi de dire simplement que nous devons nous demander si, lorsque nous imposons une peine d'emprisonnement, nous favorisons également la réadaptation. Comme c'est souvent le cas, malheureusement, les établissements de garde sont souvent des lieux où les gangs recrutent des membres, où les adolescents ne sont pas réadaptés, et ils risquent davantage de récidiver. C'est pourquoi il faut, je crois, individualiser la peine comme cela se fait avec le régime actuel.
    Je vais donner ma dernière minute à monsieur Woodworth.
    Merci. Je vais voir ce que je peux faire en une minute.
    En passant, monsieur Bala, il est agréable de vous revoir, tout comme madame Schellenberg.
    Je ne pense pas avoir déjà rencontré monsieur Stroppel, je lui souhaite donc la bienvenue.
     Êtes-vous rassuré par le fait que l'article 3 du projet de loi C-4 qui en fait modifie l'alinéa 3(1)a)de la loi, en déplaçant la notion de protection du public de la dernière ligne à la première ligne — énonce toujours:
a) le système de justice pénale pour adolescents vise à protéger le public de la façon suivante
— notamment —
(ii) encourager la réadaptation et la réinsertion sociale des adolescents
    Cela me semble être le point sur lequel vous êtes tout à fait d'accord et je voudrais donc être sûr que cela vous satisfait et que vous n'avez pas manqué cette disposition.
(1620)
    Je suis rassuré par le fait que ce principe est toujours là. Mais dans l'ensemble, nous pensons que la loi était très bien comme elle était. C'est bien évidemment également l'avis de la Cour suprême du Canada. Dans l'arrêt R. c. B. (D.), la Cour a analysé de façon détaillée ces principes.
    Je veux être sûr qu'il n'y a personne à cette table qui va essayer de se faire valoir devant la population en disant que le principe de la protection du public exclut la réadaptation et la réinsertion sociale. Vous admettez avec moi que nous conservons l'idée qu'il est bon de protéger le public grâce à la réadaptation et à la réinsertion sociale.
    Ce principe est toujours là, oui.
    Très bien.
    J'ai dépassé ma minute.
    Merci.
    Merci.
    Vous avez largement dépassé votre temps de parole.
    Madame Jennings, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup à tous les témoins.
    J'ai deux questions à poser. Ma première question s'adresse au professeur Bala, mais si les autres témoins veulent y répondre et qu'il reste suffisamment de temps, je les invite à le faire.

[Traduction]

    Monsieur Bala, je crois comprendre que vous êtes en faveur de la modification qu'apporte l'article 4 du projet de loi C-4, et qui remplacerait complètement le paragraphe 29(2) de la LSJPA. Je sais également que le Barreau du Québec est également en faveur de cette modification. Il s'agit du cas où le tribunal pour adolescents ou le juge peut ordonner que l'adolescent soit placé sous garde dans le seul cas où celui-ci a été inculpé d'une infraction grave et lorsque le tribunal ou le juge est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, qu'il existe une probabilité marquée... Avez-vous une idée de la façon dont sera interprétée l'expression « probabilité marquée »? Y a-t-il de la jurisprudence sur ce qui constitue une probabilité marquée? C'est là ma première question.
    Ma deuxième question porte sur la façon dont le projet de loi C-4 intégrerait, à la détermination de la peine, les sanctions extrajudiciaires prévues à l'alinéa 39(1)c) de la LSJPA. J'ai votre mémoire devant moi, monsieur Bala, et vous dites:
Les juges possèdent déjà le pouvoir discrétionnaire de prendre en compte la participation du jeune à des sanctions extrajudiciaires comme facteur utilisé dans la détermination de la peine [voir le sous-alinéa 40(2)d)(iv)]. Le fait de modifier l'alinéa 39(1)c) pour faire spécialement référence aux sanctions extrajudiciaires semble contraire à l'intention de ces programmes, qui est de donner au jeune une « deuxième chance » cette modification est peut-être même inappropriée, étant donné qu'habituellement les jeunes acceptent de participer à ces programmes sans avoir obtenu auparavant des conseils juridiques.
    Pour la gouverne des membres du comité qui sont assis autour de cette table et celle des Canadiens qui regardent nos débats, pourriez-vous expliquer comment sont prises ces fameuses sanctions extrajudiciaires? Donnez-nous un cas hypothétique pour que les gens puissent comprendre ce dont vous parlez lorsque vous dites que cela se passe avant que le jeune ait eu accès à des conseils juridiques, par exemple.
    Merci.
    Je crois avoir entendu trois questions.
    Je ne sais pas compter.
    La première porte, je crois, sur la détention. Il faut commencer par nous demander si nous voulons augmenter le nombre des adolescents qui sont placés sous garde ou si nous voulons le réduire? Comme je l'ai signalé, nous avons connu une augmentation importante des détentions, mais pas des placements sous garde. Je dirais, et je crois que les consultations découlant de la table ronde nationale l'indiquent également, que nous devrions constater une diminution du recours à la détention. Il y a sans doute probablement certains jeunes qui devraient être détenus, et qui ne le sont pas, mais dans l'ensemble, on peut dire qu'il y a trop d'adolescents en détention.
    Si vous êtes d'accord avec moi sur ce point, il faut alors se demander si nous détenons les adolescents qui devraient l'être? Particulièrement, nous envoyons parfois les adolescents en détention parce qu'ils ont commis ce que l'on appelle des infractions reliées à l'administration de la justice — ils ne se présentent pas devant le tribunal. Ils sont alors détenus, non pas à cause de ce qu'ils ont fait dans la collectivité, mais parce qu'ils ne se présentent pas devant le tribunal, qu'ils ne vont pas à l'école et qu'ils ne se présentent pas non plus à d'autres endroits.
    Je pense que cette disposition aura, dans l'ensemble, tendance à réduire la portée de la détention et l'axer sur des points plus précis. Il y a des cas où la détention n'est pas une possibilité à l'heure actuelle, et cette modification nous accordera cette possibilité, mais dans l'ensemble, elle aura pour effet de réduire la portée de la détention préalable au procès. C'est la raison pour laquelle je suis en faveur de cette modification, parce qu'elle améliore la loi actuelle. Elle vient également la préciser. Le paragraphe 29(2) actuel a reçu toutes sortes d'interprétations. C'est une disposition très complexe. Voilà ma première remarque.
    Pour ce qui est de la « probabilité marquée », je ne peux pas vous dire exactement d'où elle vient, mais c'est une expression qui ne m'est pas inconnue et je crois qu'elle impose un fardeau assez lourd à la Couronne dans ce genre de situation. C'est une des raisons pour lesquelles ce projet de loi va réduire le nombre des adolescents envoyés en détention avant leur procès.
    Pour ce qui est des sanctions extrajudiciaires, cela se passe habituellement de la façon suivante: l'adolescent est arrêté par un policier qui, seul ou après avoir consulté le procureur de la Couronne, se dit que l'infraction commise est peu grave; il envisage de soustraire le jeune du système judiciaire et de l'envoyer suivre un programme offert dans la collectivité, peut-être par la Société Saint-Léonard ou par des bénévoles. Le jeune sera peut-être amené à rencontrer la victime, à essayer de se réconcilier avec elle et sera ainsi obligé de rendre des comptes, mais pas en passant devant un tribunal. Il faut tout de même signaler que lorsque l'adolescent choisit cette voie, il n'a habituellement pas eu la possibilité de parler à un avocat.
    Lorsque l'adolescent comparaît devant le tribunal, fait l'objet d'accusations, il a le droit, aux termes de l'article 25, d'avoir un avocat et d'obtenir des conseils sur la question de savoir s'il devrait plaider coupable. La crainte est qu'un adolescent — et je l'ai constaté moi-même —, soit poussé par ses parents qui lui disent: « On va régler tout cela avec des sanctions extrajudiciaires. C'est plus rapide, ça sera moins cher pour nous et la famille, et tout cela sera réglé. » L'adolescent répond: « Très bien, très bien, si c'est ce que vous voulez », et il n'a pas parlé à un avocat. Il peut finir par accepter sa responsabilité pour la sanction extrajudiciaire, même s'il n'est pas, légalement, coupable. C'est une des questions que soulève cette disposition et c'est la raison pour laquelle l'introduire dans le projet de loi soulève une question pour cette raison, notamment.
(1625)
    Merci.
    Nous allons passer à M. Lemay pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Professeur Bala, j'ai lu votre mémoire avec attention et j'aimerais que vous m'aidiez à interpréter le graphique 1, car tout de suite après votre intervention — ce n'est pas que nous voulions que vous partiez —, nous nous entretiendrons avec des représentants de Statistique Canada. Je veux vraiment que l'on parle des mêmes chiffres, et les vôtres sont intéressants. Dans un premier temps, j'aimerais savoir si ces chiffres proviennent de Statistique Canada ou s'il s'agit de compilations que vous avez faites vous-mêmes pour produire les graphiques 1, 2 et 3.

[Traduction]

    Les tableaux 1, 2 et 3 sont basés sur les données de Statistique Canada, effectivement. Il y a une partie des données qui n'ont pas été publiées et qui ont été interprétées par moi-même et en particulier, par mon collègue, M. Peter Carrington, mais ces tableaux sont fondés sur les données de Statistique Canada qui proviennent des tribunaux et des services de police. Cela devrait donc être conforme.
    En passant, je crois qu'ils pourront vous présenter des données relatives à une autre année. Il est possible qu'ils les aient. Je ne veux pas m'avancer. Mais vous constaterez la même chose, même avec une année en moins.

[Français]

    Il y a eu une augmentation du taux de criminalité dans les années 1990-1991, soit. Ce qui m'intéresse beaucoup, c'est la déjudiciarisation. Selon vos chiffres, est-ce que l'on doit comprendre qu'il y a eu une augmentation croissante de 1998 à 2003 et que depuis, cela se maintient pour ce qui est de la déjudiciarisation? Depuis la mise en vigueur de ces articles dans la loi, nous avons une augmentation de la criminalité et un maintien de la déjudiciarisation parallèlement à une diminution des causes portées devant les tribunaux contre les jeunes contrevenants.

[Traduction]

    Oui, c'est exact.
    Je devrais dire que la criminalité des jeunes, telle que rapportée par la police au Canada, a connu un sommet en 1992. Cette criminalité est mesurée à partir des infractions que la population signale à la police, après quoi les services de police ont le choix entre porter des accusations ou déjudiciariser le dossier. La ligne du milieu montre le nombre des affaires dans lesquelles des accusations ont été portées. Au départ, cette ligne était au-dessus de la ligne de la déjudiciarisation, et maintenant, elle se trouve en dessous de cette dernière. À l'heure actuelle, la déjudiciarisation l'emporte sur les accusations. Je devrais quand même dire que nous avons encore un taux d'utilisation des tribunaux relativement élevé et un faible taux de déjudiciarisation si on les compare aux chiffres enregistrés dans plusieurs autres pays.
    Mais je pense que votre interprétation est exacte.
(1630)

[Français]

    Merci de votre réponse.
    Professeur Bala, j'ai aussi lu votre recommandation à propos de la publication des renseignements et j'ai bien entendu ce que vous disiez plus tôt. Selon l'expérience des États-Unis où l'identité des jeunes est dévoilée et largement publiée, la publication de ces renseignements est même, pour certains jeunes contrevenants, une source de fierté.
    Ma question s'adresse à Me Stroppel ou à Me Schellenberg. Dans votre pratique, est-ce que vous ou vos collègues, qui ont rédigé avec vous le mémoire, avez constaté ou eu connaissance qu'effectivement, lorsqu'il y a une telle publication, bien souvent les jeunes sont fiers de se présenter devant le tribunal en proclamant être accusé de quelque chose. Pour eux, c'est une source de fierté, surtout dans les cours d'école, les polyvalentes et ce genre d'endroits.

[Traduction]

    J'ai déjà vu cette réaction, et j'ai également déjà vu cette réaction dans ma pratique — et j'ai mentionné plus tôt que je n'avais rien fait d'autre que de m'occuper de dossiers de jeunes pendant sept ans et demi — et cela devient un genre de prédiction auto-réalisatrice. Si vous dites à un jeune qu'il est vraiment méchant, il va penser, et bien, je vais être méchant, parce que tout le monde pense que je le suis; ils veulent que je sois méchant et c'est tout ce qu'ils attendent de moi. Par contre, si vous donnez une chance à un adolescent, si vous lui dites que vous allez le laisser repartir à zéro sans avoir ce nuage noir au-dessus de sa tête, qu'il aura une nouvelle chance pour faire sa place dans la société et devenir un citoyen utile, alors sans ce handicap, il pourra le faire. À long terme, n'est-ce pas ce que nous voulons tous? N'est-ce pas ce qui sert le mieux la société — que cet adolescent trouve sa voie et devienne un citoyen productif?

[Français]

    Puisque je n'ai pas beaucoup de temps, je veux maintenant parler de la recommandation.
    Je m'adresse aux représentants du Barreau. Le professeur Bala a fait la recommandation suivante: « La publication de renseignements permettant d’identifier de jeunes contrevenants devrait être réservée aux cas où une peine pour adulte a été imposée. Il convient d’abroger l’article 75. » Est-ce que les représentants du Barreau sont favorables à cette recommandation?

[Traduction]

    Pourrions-nous obtenir une brève réponse?
    C'est ce que dit la loi actuellement.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, lorsqu'un adolescent se voit imposer une peine pour adultes, il est traité sous tous les autres plans comme s'il était un adulte, ce qui veut dire que son nom peut être rendu public.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Dechert pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, mesdames et messieurs, d'être venus aujourd'hui.
    J'aimerais commencer par M. Stroppel.
    Monsieur Stroppel, vous avez mentionné dans vos commentaires que 80 p. 100 des crimes commis par les jeunes ne sont pas violents.
    Oui.
    Je ne pense pas que vous ayez fourni un chiffre, mais vous nous avez dit que la plupart des infractions avec violence — ce qui représente environ 20 p. 100 de toutes les infractions — sont en fait relativement mineures et qu'il y a moins de 10 p. 100 des crimes commis par les jeunes qui constitueraient ce que vous qualifieriez de crime grave avec violence. C'est bien ce que vous avez dit?
    C'est exact.
    Très bien.
     Étant donné que le projet de loi C-4 vise principalement les délinquants endurcis et les récidivistes, les changements dont nous parlons ne vont toucher qu'un assez faible pourcentage des jeunes délinquants. Est-ce bien exact?
    Je ne suis pas d'accord avec vous.
    La plupart des modifications ne visent pas les délinquants endurcis et violents. J'ai déjà fait remarquer que la définition d'infraction grave, qui aurait pour effet en réalité d'inverser le fardeau de la preuve et d'obliger l'adolescent à justifier sa mise en liberté, regroupe toutes sortes d'infractions contre les biens.
    Oui, mais pour être clair, les infractions graves sont des actes criminels pour lesquels la peine maximale est l'emprisonnement de cinq ans ou plus. Il s'agit donc d'infractions contre les biens assez graves, et je dirais alors —
    Eh bien cela pourrait être parfois le cas.
     Permettez-moi de vous poser une question. Je ne suis pas sûr d'avoir bien suivi la discussion que vous avez eue au sujet de l'imprécision de l'expression « probabilité marquée ». L'article 4 du projet de loi C-4 qui modifie le paragraphe 29(2) de la loi, énonce, je crois, ce qui suit:
Le juge du tribunal pour adolescents ou le juge de paix ne peut ordonner la détention sous garde que s'il s'agit d'une accusation d'infraction grave et que s'il est convaincu selon la prépondérance des probabilités, de ce qui suit:
    a) avant qu'il soit traité selon la loi, il y a une probabilité marquée que
Et l'on parle encore une fois là, d'infraction grave, et ensuite:
    b) aucune condition de mise en liberté ou combinaison de celles-ci n'amoindrirait la probabilité que l'adolescent [...] [commette une deuxième infraction]
et
(3) il incombe au procureur général [ou au poursuivant] de convaincre le juge du tribunal [...] de l'existence des conditions visées au paragraphe (2).
(1635)
    Oui.
    Vous avez mentionné une affaire de carte de crédit, mais il me semble que ce texte est assez clair, pondéré, qu'il a une portée limitée pour dire que ce sont là des mesures destinées aux délinquants endurcis qui ont une probabilité marquée de commettre non pas simplement une autre infraction, mais une autre infraction grave. Ai-je bien compris cette disposition?
    Tout à fait — et des gens intelligents peuvent ne pas s'entendre, si M. Bala estime qu'il s'agit là d'une bonne modification.
    Notre position est expliquée dans notre mémoire. Nous nous opposons à ces modifications pour les motifs que nous avons exposés. Il serait certainement beaucoup plus facile de l'accepter si la disposition parlait de « commettra un crime grave avec violence » ou « commettra une infraction avec violence ». Cela nous rendrait plus acceptable de définir de cette façon les cas où l'adolescent doit être détenu avant son procès.
     Je crois comprendre que cette formulation, cette proposition, découle en fait du rapport de la Commission Nunn. D'après mon souvenir, l'affaire qui est à l'origine de la Commission Nunn concernait un adolescent qui avait des antécédents de vol de voiture. Après avoir été accusé de vol de voiture, il en a volé une autre et en commettant la deuxième infraction, il a tué quelqu'un. Il avait volé un bien. Il est possible que la voiture ne valait que quelques centaines de dollars, mais elle a été utilisée de telle façon qu'elle a finalement tué quelqu'un. Ce sont les faits qui sont à l'origine de la Commission Nunn, qui a débouché sur cette proposition et sur le projet de loi C-4.
    Monsieur Bala, voulez-vous faire un commentaire?
    J'ai témoigné devant cette commission et j'ai même rencontré la famille de la pauvre femme qui a été tuée. La question qui se pose là concerne la définition d'infraction avec violence. C'est un aspect qui m'amène à appuyer le projet de loi et peut-être à ne pas souscrire aux commentaires de mes collègues. Ce qui est arrivé en Nouvelle-Écosse n'est pas le simple fait qu'il ait volé une voiture, mais que le jeune ait commis un vol de voiture et ait été ensuite poursuivi par la police à grande vitesse. La Cour suprême du Canada a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'une infraction avec violence parce que personne n'avait été blessé. Mais la deuxième fois qu'il a volé la voiture, il était malheureusement poursuivi par la police, et il a tué quelqu'un.
    Le juge Nunn a déclaré, avec sagesse, d'après moi, que la notion d'infraction avec violence devrait être élargie pour comprendre les situations où le public est en danger. C'est la définition d'infraction avec violence que l'on trouve dans le projet de loi. Nous ne sommes pas tous d'accord sur ce point. J'appuie par contre le projet de loi sur ce point. C'est en fait la recommandation du juge Nunn.
    Merci.
    Nous allons maintenant laisser nos témoins quitter la salle. Je les remercie tous de bien avoir voulu revenir ou venir pour la première fois. Nous allons demander aux autres témoins de Statistique Canada de prendre place.
    Entre-temps, nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes.

(1640)
     Nous reprenons la séance et poursuivons notre étude du projet de loi C-4.
    Notre groupe de témoins suivant comprend des représentants de Statistique Canada. Nous avons à nouveau Julie McAuley, et nous allons entendre Craig Grimes, Rebecca Kong et Mia Dauvergne. Bienvenue à tous.
    Voulez-vous présenter un exposé? Oui. Allez-y
     Je vous remercie de nous fournir la possibilité de présenter au comité notre point de vue sur le projet de loi C-4. Statistique Canada ne prend pas position sur les modifications proposées dans ce projet de loi. Le mémoire que nous avons préparé contient nos données les plus récentes sur le système de justice pénale pour les jeunes et il a été mis à jour depuis notre comparution de juin 2010 pour appuyer l'étude de ce projet de loi.
     Les sources des données utilisées sont clairement indiquées sur les diapositives, tout comme les notes pertinentes concernant les données. Nous vous avons fait distribuer les derniers rapports Juristat concernant la criminalité des jeunes et les tribunaux pour adolescents.
    Les collègues qui m'accompagnent, Mme Mia Dauvergne, Mme Rebecca Kong et M. Craig Grimes m'aideront à répondre aux questions.
    Veuillez regarder la deuxième diapositive de la série. À l'aide des données reçues des services de police de l'ensemble du Canada, nous pouvons examiner les tendances chez les jeunes accusés de crimes déclarés par la police. Au cours des 10 dernières années, les tendances relatives aux jeunes accusés par la police ont connu un changement marqué. Le taux des jeunes inculpés a diminué tandis que le taux des jeunes dont les dossiers ont été classés par d'autres moyens a augmenté.
    En 2009, 45 p. 100 des jeunes accusés d'avoir commis un crime déclaré par la police ont fait l'objet d'accusations ou de recommandations en ce sens. Les dossiers des autres 55 p. 100 ont été classés par voie d'avertissement verbal, de mise en garde écrite, de renvoi à un programme communautaire, de renvoi à un programme de sanctions judiciaires ou par d'autres moyens, y compris les cas où le plaignant a refusé de porter des accusations.
    Les crimes peuvent être classés en deux catégories, les crimes violents et les crimes sans violence. Comme nous pouvons le voir sur la diapositive 4, la plupart des crimes commis par les jeunes sont des crimes sans violence. C'est une tendance constante que l'on constate depuis 10 ans. En 2009, sur 10 jeunes accusés d'avoir commis un crime, sept avaient commis une infraction sans violence. Le taux des crimes sans violence commis par les jeunes au Canada a diminué depuis les dernières années tandis que le taux des crimes violents est demeuré relativement stable.
    Étant donné que le taux de la criminalité chez les jeunes est surtout influencé par les crimes sans violence, le taux général de la criminalité tel que rapporté par les services de police au Canada a également diminué au cours des 10 dernières années.
    Les 10 infractions les plus fréquemment commises, qui sont montrées sur la diapositive 5, représentent environ 80 p. 100 de toutes les infractions déclarées par la police et commises par des jeunes en 2009. Huit des 10 infractions mentionnées sont classées comme étant des infractions sans violence. L'infraction déclarée par la police commise la plus fréquemment par des jeunes en 2009 était le vol de moins de 5 000 $. Cette infraction avec le méfait, les voies de fait de niveau 1 et les infractions relatives à l'administration de la justice représentaient environ la moitié de toutes les infractions déclarées par la police commises par des jeunes en 2009.
     Avec la diapositive 6, nous voyons ce qui se produit lorsque les accusations portées par la police sont examinées par les tribunaux pour adolescents du Canada. En 2008-2009, le vol était le genre de dossier le plus couramment présenté aux tribunaux par la jeunesse, suivi par les infractions relatives à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, les introductions par effraction, et les voies de fait simples. Les 10 infractions les plus courantes montrées sur cette diapositive représentaient un peu plus de 75 p. 100 de l'ensemble des dossiers soumis aux tribunaux pour adolescents en 2008-2009.
    La répartition des dossiers réglés par les tribunaux pour adolescents est en évolution. Nous voyons moins de dossiers concernant des infractions moins graves, comme la possession de biens volés, et une augmentation des infractions plus graves comme le vol qualifié, les voies de fait graves et les menaces.
    Veuillez vous reporter à la diapositive suivante. Depuis l'introduction de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, il y a eu une diminution de 23 p. 100 des causes réglées par les tribunaux pour adolescents. L'ampleur de cette réduction de la charge des tribunaux varie, mais toutes les provinces et tous les territoires ont connu une telle diminution depuis l'adoption de la LSJPA.
    Outre la diminution du nombre total des causes, nous avons également enregistré une diminution du nombre des déclarations de culpabilité prononcées par les tribunaux pour adolescents. Cette diminution a commencé au début des années 1990, mais l'entrée en vigueur de la LSJPA a coïncidé avec la période au cours de laquelle nous avons constaté une diminution à la fois du nombre total des causes réglées et du nombre des causes ayant donné lieu à des déclarations de culpabilité.
(1645)
    Passons à la diapositive 8, 59 p. 100 des 58 500 causes entendues par les tribunaux pour adolescents au Canada en 2008-2009 ont débouché sur une condamnation. Dans la moitié des dossiers où l'adolescent a été déclaré coupable, la probation a été la peine la plus grave qui ait été prononcée.
    Comme on peut le voir avec la diapositive 9, ces dernières années, le pourcentage d'infractions avec violence ayant entraîné une peine de placement sous garde a diminué et se situait, en 2008-2009, à son plus faible niveau. Toutes les provinces et tous les territoires ont connu de fortes diminutions tant des nombres que des pourcentages des causes associées à des condamnations ayant débouché sur des placements sous garde depuis la première année d'entrée en vigueur de la LSJPA. Le recours au placement sous garde a également diminué pour toutes les catégories d'infraction.
    Sur la diapositive suivante, en 2008-2009, la durée médiane du placement sous garde pour tous les dossiers d'adolescents au Canada était de 36 jours, contre 30 jours pour les adultes. Si l'on répartit ces chiffres entre les infractions avec violence et sans violence, nous constatons une différence dans la durée médiane de la peine de placement sous garde imposée: 65 jours pour les infractions avec violence, contre 30 jours pour les infractions sans violence ayant donné lieu à un placement sous garde. De loin, la durée médiane du placement sous garde a été la plus longue pour l'homicide, à savoir deux ans et demi, suivie par la tentative de meurtre et l'agression sexuelle.
    En 2009-2010, il y avait en moyenne chaque jour 835 jeunes, âgés de 12 à 17 ans, en placement sous garde, soit une diminution de 7 p. 100 par rapport à l'année précédente et de 46 p. 100 par rapport à 2003-2004. En fait, ces chiffres ont diminué chaque année depuis 1995-1996.
    La diapositive 11 montre que les adolescents en détention avant leur procès sont plus nombreux que ceux qui sont placés sous garde. En 2009-2010, 53 p. 100 de tous les adolescents détenus attendaient leur procès contre 35 p. 100 en 2003-2004.
    Les adolescents continuent à passer des périodes relativement courtes en détention avant leur procès. Comme le montre la diapositive 12, quatre des huit provinces et territoires qui ont fourni des données pour 2008-2009 ont signalé que les jeunes passaient une semaine ou moins en détention, en se basant sur le nombre moyen de jours de détention. Depuis l'entrée en vigueur de la LSJPA, le nombre médian des jours passés en détention avant procès a varié selon la province ou le territoire. Dans l'ensemble, en 2008-2009, 54 p. 100 des jeunes mis en liberté après avoir été détenus avaient passé une semaine ou moins en détention provisoire. Cette proportion a varié entre 53 et 56 p. 100 depuis 2004-2005.
    Pour les jeunes, il y a en pratique deux types de placement sous garde: le placement sous garde en milieu ouvert, qui est moins restrictif, par exemple dans un foyer de transition et le placement sous garde en milieu fermé, qui s'effectue dans des établissements de sécurité, ce qui comprend les centres de détention.
    Comme l'indique la diapositive 13, d'après les provinces et territoires qui fournissent des données, la tendance de la durée du placement sous garde en milieu ouvert et en milieu fermé a varié.
    Encore une fois, je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de présenter un exposé au comité.
(1650)
    Merci.
    Nous allons passer aux questions.
    Pour les libéraux, monsieur Murphy.
    Il y a beaucoup d'information dans ce document et je n'ai pas constaté de corrélation très forte entre ce que disent les statistiques et les raisons pour lesquelles nous modifions la Loi sur le système de justice pénal pour les adolescents.
    Vous avez parlé de fournir des renseignements pour alimenter notre étude du projet de loi. Entre 1998 et 2008, le pourcentage des dossiers concernant des infractions sans violence, exprimé en pourcentage des dossiers ayant donné lieu à une condamnation, est passé d'environ 30 p. 100 à près de 15 p. 100. C'est une diminution importante. Ce sont bien là les dossiers qui entraînent un placement sous garde, n'est-ce pas?
    Oui, c'est le cas.
    Un jeune commet une infraction, il est déclaré coupable et il est placé sous garde. Nous savons ce que le tribunal doit prendre en compte, parce que nous venons de discuter de cet aspect. Nous constatons que les dossiers sans violence ont entraîné davantage de détention que les dossiers avec violence. Ensuite, en 2008-2009, cette tendance s'inverse de sorte que, comme je l'aurais pensé, les dossiers avec violence l'emportent sur les dossiers sans violence.
    Pouvez-vous m'expliquer pourquoi ces deux tendances se sont inversées? Il me semble que les affaires avec violence devraient entraîner plus fréquemment le placement sous garde que les affaires sans violence. Y a-t-il une explication pour cette situation?
    Tout ce que nous pouvons faire, c'est vous fournir les données. Nous ne sommes pas en mesure de vous fournir des explications au sujet des données. Le graphique montre la tendance constatée parmi les dossiers avec et sans violence ayant entraîné un placement sous garde.
    Nous pouvons examiner ce pourcentage et nous constatons que depuis 2003-2004, avec l'entrée en vigueur de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, le nombre des affaires violentes ayant entraîné un placement sous garde a diminué. En 2003-2004, 21 p. 100 des dossiers avec violence débouchaient sur un placement sous garde. Nous sommes passés en 2008-2009, à 17 p. 100
    J'aurais une autre question à ce sujet, au sujet du graphique qui concerne l'ensemble de la période. Je crois que j'ai eu ma réponse à savoir que la mise en oeuvre de la LSJPA a eu un effet sur tout ceci. Je suis spécialisé en littérature, je vais donc avoir besoin d'aide. Le pourcentage des dossiers avec condamnation est de 30 p. 100 pour 1998 et d'environ 26 p. 100... Il y a d'autres pourcentages concernant les dossiers avec condamnation. Comment les classez-vous? Que reste-t-il une fois retirés les dossiers avec violence et les dossiers sans violence?
    Et ensuite, globalement, il y a environ 55 p. 100 des dossiers débouchant sur un placement sous garde et maintenant en 2008, ce pourcentage est d'environ 35 p. 100. Il y a moins de dossiers avec condamnation qui entraînent un placement sous garde depuis 10 ans, c'est ma première remarque. Je crois que ma principale question est la suivante: Quelles sont les autres catégories?
(1655)
    Les données ont été préparées de la façon suivante pour ce tableau: les infractions avec violence comprennent l'homicide, la tentative de meurtre, le vol qualifié, l'agression sexuelle, les autres infractions sexuelles, les voies de fait simples, le harcèlement criminel, les menaces et les autres crimes contre la personne.
    Les dossiers sans violence comprennent toutes les autres catégories d'infraction, y compris les infractions aux autres lois fédérales, ce qui comprend les infractions à la LDS. Tout le reste fait partie de la catégorie des infractions sans violence.
    Allez-y.
    Si vous regardez le graphique, sur le côté gauche, la légende montre que c'est le pourcentage des dossiers avec condamnation. Si nous examinons le graphique en termes de pourcentage des dossiers avec condamnation, pour les dossiers avec violence, cela représente environ 17 p. 100 de toutes les causes soumises aux tribunaux et si vous regardez les dossiers sans violence, cela représente environ 15 p. 100.
    S'agit-il de dossiers soumis aux tribunaux ou débouchant sur un placement sous garde?
    Excusez-moi, ce sont les placements sous garde. Désolée.
    En 1998, 55 p. 100 des dossiers avec condamnation ont débouché sur un placement sous garde, n'est-ce pas? Non?
    En 1998, si vous ajoutez ces deux chiffres, il y avait eu légèrement plus de 55 p. 100 des dossiers avec condamnation qui ont entraîné un placement sous garde. Si vous regardez l'évolution au cours des années, le pourcentage actuel est plus proche de 35 à 37 p. 100.
    Merci.
    Il me reste du temps pour...
    Le pourcentage global est d'environ 15 p. 100 de causes débouchant sur un placement sous garde. Il ne suffit pas d'ajouter ces chiffres. Il faut recalculer les pourcentages parce que nous parlons de pourcentages.
    Le reste de ces dossiers ont donné lieu à des probations, des amendes et à d'autres choses, si l'on prend l'ensemble des dossiers avec condamnation.
    En 1998, 29 p. 100 des dossiers avec condamnation ont débouché sur un placement sous garde — que ce soit en milieu ouvert ou en milieu fermé — et ce chiffre a diminué, jusqu'à l'entrée en vigueur de la LSJPA, et est passé à 22 p. 100 environ. Pour la première année d'application de la LSJPA, ce pourcentage était de 22 p. 100 — c'était en 2003-2004 — et il est maintenant de 15 p. 100.
    Merci.
    Me reste-t-il un peu de temps?
    Oui, une minute et demie.
    Sur deux de vos diapositives, qui montrent le nombre médian de jours passés par les adolescents en détention ou sous garde, vous dites que certaines provinces ne figurent pas parce qu'il n'y a pas de données les concernant. Pouvez-vous expliquer pourquoi il n'y a pas de données provenant du Québec? C'est ma première question.
    Ma seconde question serait celle-ci. D'après ce que je comprends de la Loi sur les jeunes contrevenants, au moment où elle était en vigueur, le Québec était, de toutes les provinces, celle où le pourcentage des adolescents qui étaient « judiciarisés », traduits devant les tribunaux était le plus faible. Une fois traduit devant les tribunaux, le taux d'incarcération était élevé et à cette époque, avec la Loi sur les jeunes contrevenants, le taux de récidive chez les adolescents du Québec était plus faible. Était-ce bien le cas? Deuxièmement, compte tenu des statistiques que vous nous avez montrées, je crois qu'un des témoins précédents, si ce n'est vous, a déclaré qu'aujourd'hui encore le taux de récidive au Québec est le plus faible au Canada avec la LSJPA. Est-ce bien exact?
    Je vais demander à Mme Kong de répondre à la question au sujet des données du Québec.
    Je n'ai pas de renseignements particuliers concernant le Québec ou le taux de récidive avec moi, à moins que d'autres ne les aient apportés avec eux.
    Je ne peux pas faire de commentaire sur le taux de récidive au Québec, mais j'ai devant moi certaines statistiques sur le pourcentage des placements sous garde au Québec et dans les autres provinces. En 1999-2000, le pourcentage des dossiers avec condamnation débouchant sur un placement sous garde était au Québec, de 23 p. 100. Le chiffre national était de 28 p. 100. En 2008-2009, il était de 12 p. 100 au Québec, et le pourcentage national, de 15 p. 100.
    Merci.
    Nous allons être obligés de donner la parole à M. Ménard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie de l'effort que vous avez fourni afin de nous envoyer les statistiques à l'avance. Vous semblez cependant utiliser les dernières versions de logiciels disponibles sur le marché. Malheureusement, j'ai dû constater que je ne les avais pas. J'ai tout de même réussi à ouvrir les documents après plusieurs essais. Vous remarquerez cependant qu'il y a des différences entre ma version et celle qu'il y a ici.
    Vous nous présentez beaucoup de statistiques afin de nous permettre de juger de ce qui se passe une fois que les jeunes délinquants sont arrêtés. J'aurais bien aimé commencer par la base et pouvoir connaître le taux de criminalité chez les jeunes au Canada et ce que cela représente par province. Je sais que les policiers partout au Canada ont une formule qui, je crois, se nomme la déclaration uniforme sur la criminalité. C'est la formule selon laquelle tous les renseignements d'un crime sont notés de la même façon. C'est la première chose que je m'attendais à voir. Est-ce que la criminalité juvénile augmente ou est-ce qu'elle diminue? Je crois que les déclarations faites par les policiers, au moment où un crime est déclaré, donnent une idée précise, quoique non absolue, du taux de criminalité. Nous ne l'avons pas. Serait-il possible de l'avoir et que les renseignements s'échelonnent sur une longue période?
(1700)

[Traduction]

    Je vais vous renvoyer au Juristat, qui vous a été envoyé avec les documents distribués, intitulé « Statistiques sur les crimes déclarés par la police au Canada, 2009 ». Ce document comprend à la fin un certain nombre de tableaux de données détaillées qui vous fourniront des données pour les 10 dernières années, notamment l'indice de gravité des crimes violents et l'indice de gravité des crimes sans violence pour le Canada ainsi que le taux total de criminalité au Canada. Il contient également des renseignements précis à partir, je crois, du tableau 7A, qui examine les indices de sévérité des crimes commis par les adolescents, de 1999 à 2009, et fournit ensuite différents renseignements concernant les jeunes, par province et par territoire.

[Français]

    Quand nous avez-vous envoyé cela? C'est la première fois que je le vois. Il s'agit bien de ce document dont vous parlez?

[Traduction]

    Oui. Cette information a été publiée par Statistique Canada en juillet 2010 dans sa publication quotidienne. Nous l'avons apportée aujourd'hui pour qu'elle soit distribuée, mais elle est mise à la disposition du public sur le site Web de Statistique Canada.

[Français]

    D'accord, mais quand nous l'avez-vous envoyé? Est-ce aujourd'hui?

[Traduction]

    Je vais vérifier avec notre agente des relations avec le Parlement si ce document a été envoyé à l'avance.
    Elle me dit que les documents ont été envoyés la semaine dernière.

[Français]

    Nous devrons à l'avenir vérifier nos moyens de communication, car je ne l'ai pas reçu et c'est précisément ce que je cherchais.
    Je vois que l'article a été écrit par Mme Mia Dauvergne, qui est ici avec nous. Suivant ce que vous demandait Mme Jennings tout à l'heure, est-il vrai que le taux de criminalité juvénile est plus bas au Québec que partout ailleurs au Canada?

[Traduction]

    Je vous invite à vous reporter au tableau 9 de ce rapport; il contient des renseignements sur le taux de criminalité des jeunes au Canada et ce taux est réparti par province et par territoire.

[Français]

    Cela correspond à quelle page dans le document en français?

[Traduction]

    Dans la version anglaise, ce serait à la page 35. Dans la version française...

[Français]

    Cela se trouve juste avant les références, à la fin de l'article.

[Traduction]

    D'accord? Et oui, vous pouvez constater en regardant ce tableau que le taux des crimes chez les jeunes au Québec était le plus faible au pays en 2009.
    Ces données concernent uniquement 2009; cependant, si cela intéresse le comité, nous pouvons vous donner les chiffres des années antérieures.

[Français]

    Justement, vous auriez pu nous les donner, mais vous ne l'avez pas fait.
(1705)
    Je ne les ai pas avec moi aujourd'hui, mais il m'est possible de les fournir au comité si nécessaire.
    Vous ne nous avez pas fourni de tableaux qui nous permettraient de voir si la criminalité par province augmente ou non.

[Traduction]

    Il y a un tableau qui montre les totaux pour le Canada, qui est le tableau 15, qui se trouve également à la fin du rapport, mais qui n'est pas réparti par province et par territoire sur le long terme. Mais comme Mme McAuley l'a dit, nous pourrions certainement fournir ces chiffres au comité.

[Français]

    J'aimerais obtenir cette information, s'il vous plaît.

[Traduction]

     Merci.
    Nous allons passer à M. Comartin, pour sept minutes.
    Je n'ai pas de questions à poser, monsieur le président.
    Très bien, nous allons passer à M. Petit.

[Français]

    Je dispose de sept minutes? Si je n'ai pas suffisamment de questions, je partagerai mon temps de parole avec M. Dechert.
    Madame McAuley, j'ai une question à vous poser. Vous nous avez fourni des documents et vous nous les avez expliqués un peu plus tôt devant le comité. Par exemple, à la page 12, on retrouve un tableau intitulé: « Nombre médian de jours passés en détention provisoire par les jeunes, selon certains provinces et territoires ». Est-ce qu'il est approprié de dire aux gens qui écoutent que cela exclut l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec, la Saskatchewan, l'Alberta et le Nunavut? Êtes-vous d'accord pour dire que ce tableau, qui parle de détention provisoire, ne contient pas de chiffres pour 2008-2009 pour ces provinces? Je dirais même que vous n'avez aucun chiffre en ce qui concerne la détention provisoire pour la période préalable à 2008. Cela est-il vrai ou faux?

[Traduction]

    Non, nous n'avons pas reçu les données de ces provinces et territoires pour l'année 2008-2009, mais nous possédons des données pour les années antérieures.

[Français]

    Dans le tableau de la page 13, c'est différent. On parle de « Nombre médian de jours passés sous garde par les jeunes, selon certains provinces et territoires ». C'est le cas le plus fréquent que l'on retrouve au Tribunal de la jeunesse. Comme le dit la note, un peu comme celle sous le tableau précédent, cela exclut l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec, la Saskatchewan, l'Alberta et même les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. Vous n'avez donc aucune statistique pour près de la moitié du Canada. Non seulement vous nous dites que vous n'avez pas les chiffres pour 2008-2009, mais vous n'avez rien non plus pour la période préalable à 2008.

[Traduction]

    Non. Pour les provinces et territoires qui ne figurent pas dans ce graphique, comme l'indique la note, nous n'avons pas obtenu de données les concernant sur ce point particulier, qui est le nombre médian de jours de détention. Il y a des provinces et des territoires qui ne sont pas en mesure de fournir ces renseignements. Nous nous basons sur les renseignements qu'ils collectent grâce à leurs systèmes de gestion des délinquants.
    Nous pourrions vous fournir des données antérieures pour ces provinces et territoires, si vous le demandez. Je ne les ai pas avec moi, mais nous pourrions les transmettre au comité.

[Français]

    Madame McAuley, vous parlez au nom de Statistique Canada. Vous avez peut-être entendu d'autres personnes affirmer que les modifications à la loi feraient augmenter ou risqueraient de faire augmenter le nombre d'incarcérations. Compte tenu de ce que vous nous présentez et du fait que cela exclut l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec, la Saskatchewan, l'Alberta, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, comment voulez-vous que nous prenions une décision si nous n'avons aucune statistique indiquant s'il y a plus ou moins d'incarcérations ou de jours passés sous garde pour les jeunes? Êtes-vous en mesure de nous les fournir pour 2008-2009? Vous indiquez au bas de la page qu'il y a une indisponibilité des données. Comment puis-je prendre une décision? Certains nous ont dit, devant ce comité, que l'on créerait plus d'incarcérations pendant que d'autres nous ont dit le contraire. Pourtant, j'ai vérifié et on n'a pas les données complètes pour 2008-2009 et vous ne les avez pas non plus pour 2006-2007. Vous ne semblez pas comprendre que nous avons besoin de vous pour prendre un décision, mais que nous n'avons aucune statistique pour nous aider. Comment peut-on faire pour les trouver? Avez-vous des documents qui nous permettraient de les trouver?
(1710)

[Traduction]

    Nous travaillons en collaboration avec les provinces et les territoires du Canada pour qu'ils nous fournissent des données. Nous avons des exigences nationales en matière de données et notre objectif est que les provinces et les territoires fournissent tous des données pour notre enquête, en respectant ces normes nationales en matière de données.
    Il y a des provinces et des territoires qui ne sont pas en mesure pour le moment de convertir leurs données selon nos normes nationales dans ce domaine. Nous travaillons avec ces provinces et territoires pour voir ce qu'il serait possible de faire progressivement.
    Mme Kong veut peut-être ajouter quelque chose à ce sujet.
    J'aimerais préciser que ces graphiques particuliers traitent du temps passé en détention avant le procès ou en placement sous garde par les adolescents. Comme je l'ai dit, ce sont des données que certains gouvernements ne sont pas en mesure de nous fournir. Si vous voulez de l'information sur le nombre des jeunes en détention et sur la tendance dans ce domaine, je vous invite à examiner la diapositive 11, qui fournit des renseignements sur le nombre quotidien moyen de jeunes en détention.
    Nous avons vu que le nombre moyen des jeunes placés sous garde diminue régulièrement. Nous disposons de meilleurs renseignements sur ce point; il n'y a que le Nunavut qui n'a pas été en mesure de nous fournir ces données pour ces années-là.
    Cela correspond aux renseignements que Mme McAuley a fournis au sujet de la diminution des dossiers transmis aux tribunaux, ainsi que du recours au placement sous garde. La diapositive 11 donne également le nombre quotidien moyen de jeunes en détention provisoire, si c'est le genre de renseignement que vous recherchez.
    Je vous renvoie également aux statistiques des tribunaux pour adolescents, Juristat, qui vous a été distribué. Si vous regardez à la page 34, le tableau 8, vous trouverez le pourcentage des dossiers d'adolescents ayant entraîné un placement sous garde depuis 2002-2003. Ces renseignements proviennent de l'enquête annuelle sur les tribunaux pour adolescents que nous faisons depuis 1990.
    M. Dechert, une minute.
    Merci, monsieur le président.
    Rapidement, Mme McAuley, pouvez-vous nous dire quel est le pourcentage des adolescents entre 14 et 25 ans, cette cohorte — si je me souviens bien de la terminologie en démographie — par rapport à la population totale du Canada? Comment ce pourcentage a-t-il évolué au cours des 10 ou 20 dernières années et certainement depuis 1999? Je pense que la plupart des statistiques que vous avez présentées concernent cette période.
    Je ne vois ça nulle part dans ces statistiques.
    Je n'ai pas ces renseignements avec moi. Je vous transmettrai le pourcentage ou la proportion que les jeunes représentent dans la population.
    Nous serions heureux d'avoir ces chiffres.
    Si je prends le livre du démographe de l'Université de Toronto, David Foot, je crois comprendre que nous nous trouvons peut-être dans une période creuse où cette cohorte comprend moins de personnes qu'elle n'en avait auparavant. Cela pourrait expliquer jusqu'à un certain point pourquoi le taux de la criminalité chez les jeunes diminue.
    Je ne pourrais pas faire de commentaire sur ce point sans avoir les renseignements devant moi.
    Étant donné que nous disposons de ces renseignements en fonction des taux par 100 000 habitants, nous pourrions examiner les tendances démographiques pour les jeunes de 12 à 17 ans, mais nous pourrions également nous baser sur le nombre des signalements faits à la police concernant ce groupe d'âge.
    Merci.
    Monsieur Lee, vous avez cinq minutes.
    Je me trouvais un peu dans la même situation que M. Dechert. Ces données ne nous donnent aucune idée des résultats pour les jeunes. C'est un aperçu statistique et nous nous intéressons tous, bien sûr, aux résultats, mais c'est un autre aspect. Je veux simplement faire remarquer — et en arriver très rapidement à une conclusion avec un commentaire de votre part, si vous en avez un à faire — que depuis 1991, soit au cours des 20 dernières années, nous avons constaté une diminution considérable de la charge des tribunaux pour adolescents, une diminution importante du nombre des dossiers transmis aux tribunaux pour adolescents et dans celui des crimes. Toutes les données que vous nous avez montrées font état d'une diminution importante.
    Nous ne savons pas très bien pourquoi. M. Dechert affirme que c'est peut-être la population de cette cohorte qui a diminué, mais les dossiers des tribunaux pour adolescents sont passés de 95 000 il y a 25 ans à près de 58 000 en 2009. Cela représente une diminution de moitié environ. Je ne pense pas que la population des jeunes ait diminué de moitié.
    Il y a beaucoup de gens qui font de bonnes choses ou alors il y a un phénomène très puissant qui s'est fait sentir dans la société pour expliquer ce genre de tendance. Y a-t-il, d'après vous, les statisticiens, un autre élément qui pourrait expliquer une tendance à la baisse aussi rapide? Nous aimerions le savoir.
    Le projet de loi propose, dans certains cas, de privilégier la dissuasion et la dénonciation pour les jeunes, alors que les statistiques ne démontrent aucunement que ces facteurs soient le moindrement pertinents, en particulier compte tenu du fait que le nombre des peines imposées diminue, le nombre des crimes diminue, le nombre des jeunes traduits devant les tribunaux diminue, etc.
(1715)
    Je vous renvoie à la diapositive 2 de l'exposé, qui montre les jeunes de 12 à 17 ans, auteurs présumés de crimes déclarés par la police, selon l'état de classement. Vous remarquerez que ce tableau montre les taux par 100 000 jeunes au Canada de 1999 à 2009. Nous avons inclus un pourcentage pour tenir compte des variations de la population, qu'il s'agisse de celles des accusés ou de celles des victimes, de sorte que cela offre une mesure réelle de l'évolution des crimes déclarés par la police au Canada.
    Vous pouvez voir avec cette tendance que le taux des jeunes qui ont été accusés, ou pour qui des accusations ont été recommandées, a diminué au cours de cette période tandis que le taux des dossiers classés autrement a en fait augmenté. Encore une fois, c'est le taux que nous montrons ici.
    Qu'entendez-vous par « dossier classé »?
    Je vous renvoie à la diapositive 3 qui répartit les données relatives à 2009. Les « dossiers classés » comprennent les avertissements verbaux, les mises en garde écrites, les renvois à un programme communautaire, les renvois à un programme de sanctions extrajudiciaires et autres moyens. « Autres moyens » comprend des cas où le plaignant refuse de porter des accusations ou ceux où le jeune est décédé ou est déjà incarcéré.
    Un bref coup d'oeil au tableau 2 montre une légère diminution des crimes commis par les jeunes, si je peux m'exprimer ainsi, mais le taux des crimes commis par les jeunes ne baisse pas très rapidement. Est-ce que j'ai interprété ce tableau correctement? Est-ce qu'entre les dossiers classés et les dossiers donnant lieu à des accusations, les taux sont demeurés à peu près constants pendant toute cette période?
    Vous voyez ici les jeunes accusés de crimes déclarés par la police. Si vous voulez examiner le taux des crimes commis par des jeunes et déclarés par la police, je vous invite à vous reporter à la diapositive 4 qui montre le nombre total de crimes avec et sans violence, par 100 000 jeunes au Canada, sur plusieurs années.
    Je vois une légère diminution des crimes sans violence.
    Nous pouvons dire que le taux des crimes commis par les jeunes a diminué progressivement en raison des changements constatés avec les crimes sans violence, puisque parmi les crimes dont sont accusés les jeunes au Canada, 7 sur 10 concernent des infractions sans violence.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Lemay pour cinq minutes.

[Français]

    J'ai ici un document qui s'intitule Statistiques sur les crimes déclarés par la police au Canada, 2009.
    S'agit-il de tous les crimes commis, aussi bien par les jeunes que par les adultes?

[Traduction]

    Ce rapport est notre Juristat annuel sur les crimes déclarés par la police au Canada. Il y a une section qui parle des crimes déclarés par la police en général, des crimes rapportés par la police pour les adultes et des crimes rapportés par la police pour les jeunes. Je vous invite donc... l'article contient de nombreuses références à la population des jeunes et à des tableaux particuliers qui concernent uniquement les jeunes.

[Français]

    Je vais maintenant passer au document intitulé Statistiques sur les tribunaux de la jeunesse, 2008-2009.
     Il y a bien eu une diminution de 23 p. 100 des causes traitées par les tribunaux de la jeunesse au Canada depuis 2002-2003. Est-ce bien cela?
(1720)

[Traduction]

    Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur le système de justice pénale pour les jeunes, il y a eu une diminution de 23 p. 100 des dossiers ayant donné lieu à une décision des tribunaux pour adolescents au Canada.

[Français]

    Je sais que la question de s'adresse pas à vous, mais plutôt aux gens d'en face.
     Pourquoi sommes-nous en train de discuter d'un amendement à un projet de loi alors qu'il y a une diminution de 23 p. 100? C'est la même chose du côté des crimes violents. D'après les statistiques qui figurent à la page 4 du texte intitulé Renseignements de base sur la justice pénale pour les jeunes au Canada, que vous nous avez présenté, j'en conclus que les crimes violents sont restés stables. C'est bien ce que signifie la ligne rouge?

[Traduction]

    Les crimes avec violence sont montrés par la ligne rouge. Leur nombre est demeuré relativement stable au Canada depuis 1999.

[Français]

    À la page 5 du document intitulé Statistiques sur les tribunaux de la jeunesse, 2008-2009, donc dans la version française, on dit ceci: « En 2008-2009, près de la moitié (48 %) des peines de placement sous garde et de surveillance étaient d’une durée d’un mois ou moins. » M. Petit doit être rassuré puisque cela inclut le Québec. Cela comprend tous les crimes, incluant les crimes violents. Tout y est, monsieur Petit. C'est bien dommage que vous ne sachiez pas lire. Il faudrait que vous alliez voir ce qui est écrit dans ces pages.

[Traduction]

    Ce sont tous les crimes commis par des jeunes qui ont été portés à l'attention des tribunaux. Ce sont donc des crimes commis par des jeunes qui ont été accusés et traduits devant les tribunaux; en 2008-2009 — pendant ce seul exercice financier — près de la moitié des peines de placement sous garde et de surveillance étaient d'une durée d'un mois ou moins.
    Cela représente la peine la plus grave pour l'infraction la plus grave au dossier, et chaque dossier peut comprendre plusieurs accusations.

[Français]

    En tant qu'avocat, j'avais compris qu'il s'agissait des crimes les plus graves. La page 27 est extrêmement intéressante, n'en déplaise encore une fois à M. Petit, qui ne l'a pas lue. Dans les tableaux de statistiques sur les tribunaux de la jeunesse qui se trouvent aux pages 27 et 28, on voit qu'entre 2002 et 2009 au Québec ainsi que dans toutes les autres provinces, il y a une diminution constante des causes réglées devant les tribunaux de la jeunesse. Cette diminution totalise 23,4 p. 100 et inclut les causes reliées à des crimes violents.

[Traduction]

    Pourriez-vous nous dire quel est le numéro du tableau auquel vous faites référence?

[Français]

    Cela se retrouve dans les statistiques sur les tribunaux de la jeunesse pour 2008-2009.
    Au haut de la page, c'est lequel?
    En haut, c'est le tableau 1. Excusez-moi. Il s'agit des tableaux 1 et 2. Il y a une diminution de 23,4 p. 100 entre 2002-2003 et 2008-2009, incluant les crimes violents.

[Traduction]

    C'est exact. Cela comprend tous les dossiers.

[Français]

    Donc, tous les crimes sont inclus.

[Traduction]

    Cela comprend tous les dossiers — Code criminel et autres lois fédérales. Cela comprend donc également les infractions à la LDS et à d'autres lois.

[Français]

    Que signifie CDSA?
(1725)

[Traduction]

    La LDS est la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.

[Français]

    C'était bien important que vous le précisiez.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer à M. Dechert.
    Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs. Je suis heureux de vous revoir, madame McAuley.
     La dernière fois que vous avez comparu devant le comité, vous nous avez présenté un exposé sur le projet de loi C-54. La question que je vais vous poser se rapporte au projet de loi que nous étudions aujourd'hui. Vous avez abordé dans votre exposé un sujet appelé « Peine la plus grave imposée dans les affaires d'agression sexuelle par les tribunaux pénaux pour adultes, Canada, 2000-2001 à 2008-2009 ». Ce tableau montre une forte augmentation des peines privatives de liberté après 2005 environ.
    Je crois me souvenir que le gouvernement libéral précédent avait imposé un certain nombre de peines minimales obligatoires pour certaines infractions sexuelles autour de 2005 ou un peu avant cette année-là. Je ne me souviens pas du moment exact. Ai-je raison d'affirmer que cela a entraîné une augmentation importante des peines privatives de liberté? Vous pourriez peut-être nous indiquer quelle est, d'après vous, l'augmentation des coûts qu'a entraînés l'imposition de ces peines privatives de liberté. Est-ce que le gouvernement précédent de cette époque, qui avait présenté ce projet de loi au Parlement, avait fourni des prévisions sur l'augmentation des coûts due à ces types de peines?
    J'aimerais obtenir une précision. J'ai une question et je sais que M. Norlock sera en mesure d'y répondre. Est-ce que les peines minimales obligatoires imposées par le gouvernement libéral précédent pour les infractions sexuelles visaient les crimes commis par les adultes?
    Oui, c'était pour les crimes commis par des adultes. Comme je l'ai dit, la raison...
    C'est la seule question que je voulais poser. Merci de cette précision.
    Je sais que de ce point de vue, la situation est différente. Comme nous en avons parlé, les dispositions du projet de loi C-4 que nous étudions vont entraîner une augmentation des coûts pour les contribuables et je voulais pouvoir faire une comparaison.
    Cette information concerne les tribunaux pénaux pour adultes. Je n'ai pas devant moi l'information pour les tribunaux pour adolescents, qui pourrait alimenter l'étude du projet de loi. C'est également l'infraction la plus grave pour les « Autres infractions sexuelles » et non pour « Toutes les infractions sexuelles ». La catégorie « Autres infractions sexuelles » comprend des choses comme les contacts sexuels, l'incitation à des contacts sexuels, l'exploitation sexuelle et le leurre d'enfant par Internet. Cette catégorie comprend un certain nombre de choses.
    C'est le genre de choses dont nous parlons à propos du projet de loi C-4.
    Tout à fait. Dans le cas des tribunaux pénaux pour adultes, il y a une augmentation des peines privatives de liberté, à titre d'infraction la plus grave pour « Autres infractions sexuelles ». Je ne suis pas en mesure de vous parler du coût de ce genre de peine.
    Est-ce que des prévisions relatives aux coûts de ce projet de loi ont été fournies au comité au moment où le projet de loi a été déposé au Parlement?
    Je ne sais pas.
    J'aimerais partager mon temps de parole avec M. Woodworth.
    Je dispose de renseignements tirés d'une publication de 2006 sur le taux des crimes commis par les jeunes. Il semble qu'en 2006, le nombre et le taux des jeunes âgés de 12 à 17 ans accusés d'homicide avaient atteint un sommet, depuis la première année où ces données ont été collectées, soit en 1961. J'aimerais demander des renseignements sur le nombre et le taux des jeunes âgés de 12 à 17 ans qui ont été accusés d'homicide en 1961, en 2006 et à l'heure actuelle, pour que je puisse faire des comparaisons. Je devrais peut-être inclure l'année 1997, parce que les renseignements que je possède indiquent que le taux d'homicide chez les jeunes a augmenté de 41 p. 100 entre 1997 et 2006. Cela me permettrait de suivre cette évolution.
    L'information que je possède montre que le taux des crimes avec violence chez les jeunes a augmenté de 12 p. 100 entre 1997 et 2006, et de 30 p. 100 depuis 1991. Je me demande si je pourrais obtenir le taux pour les crimes avec violence pour 1991, 1997, 2006 et aujourd'hui, pour voir si nous sommes vraiment retombés au niveau de 1991 pour les crimes avec violence.
(1730)
    Nous pourrons certainement vous fournir cette information. Je vous renvoie à la page 33 de l'article de Juristat sur les statistiques relatives aux crimes déclarés par la police au Canada. Le tableau 7b représente l'ensemble des crimes déclarés par la police à partir de 1999. Nous serons heureux de vous fournir l'information concernant le taux des homicides. Nous vous fournirons également des données sur les crimes avec violence, ainsi que des documents sur la définition de crime avec violence, puisque cette définition a peut-être changé, avec les modifications apportées au Code criminel.
    Merci, et merci à nos témoins d'être venus. Nous vous réinviterons, j'en suis certain.
    La séance est levée
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