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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 032 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 30 avril 2012

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bonjour. Nous sommes le lundi 30 avril 2012, et il s'agit de la séance no 32 du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
    Je dois trouver un moyen d'abréger cet ordre du jour — il est trop long à lire.
    Tout d'abord, j'aimerais savoir si vous vous êtes ennuyés de moi la semaine dernière.
    Une voix: Oh, oui, terriblement.
    Monsieur le président, je tiens à vous souhaiter un bon retour parmi nous. De toute évidence, nous nous sommes véritablement ennuyés de vous.
    Cela dit, je souligne que, durant votre absence, M. Lamoureux n'a eu aucune difficulté à lire l'ordre du jour. Par conséquent, je ne sais pas s'il s'agit d'un...
    Il est meilleur lecteur que moi.
    M. Rick Dykstra: Je vois.
    Le président: D'abord et avant tout, je tiens à féliciter Mme Sims de sa nomination au sein du comité.
    Je sais que vous ferez du bon travail. Vous avez été membre du comité dans le passé. Je vous souhaite la bienvenue. Je suis certain que vous donnerez du fil à retordre à M. Dykstra.
    Je tenterai de le faire.
    Bien entendu. Je crois comprendre que M. Lamoureux et vous m'avez remplacé durant mon absence, et je vous en remercie.
    Nous allons entreprendre nos travaux. Nous avons beaucoup de témoins à entendre.
    Nous accueillons tout d'abord un représentant du ministère, à savoir M. Les Linklater, sous-ministre adjoint, Politiques stratégiques et de programmes.
    Bonjour à vous, monsieur. Je crois comprendre que vous allez présenter un exposé. Vous disposez d'un maximum de cinq minutes.
    Nous accueillons également Jennifer Irish, directrice, Programmes et politiques des droits d'asile.
    Si je ne m'abuse, vous étiez tous deux présents à la dernière réunion, à laquelle participait le ministre.
    Marie Bourry, directrice exécutive et avocate générale principale, Services juridiques, est également parmi nous.
    Bonjour à vous.
    Le comité entendra également M. Michael MacDonald, directeur général, Direction générale des opérations de la sécurité nationale, Sécurité publique Canada.
    Je crois que vous étiez présent vous aussi jeudi dernier. Bienvenue.
    M. Peter Hill, directeur général, Programmes après le passage à la frontière, Agence des services frontaliers du Canada, est également parmi nous.
    Vous disposerez vous aussi d'un maximum de cinq minutes pour présenter votre exposé, monsieur.
    Enfin, le comité accueille M. Joe Oliver, directeur général, Intégrité des frontières, Gendarmerie royale du Canada.
    Bonjour.
    Monsieur Linklater, je vous invite à ouvrir le bal. Merci.

[Français]

     Nous vous remercions de nous avoir invités à témoigner devant vous aujourd'hui. Nous sommes heureux d'être ici pour vous parler de la loi visant à protéger le système d'immigration du Canada, laquelle comporte des dispositions législatives qui permettraient de renforcer et d'améliorer le système d'immigration de notre pays.
    J'ai été invité pour vous parler plus particulièrement de la réforme du système d'octroi de l'asile ainsi que des mesures concernant la traite de personnes dont il est fait mention dans le projet de loi C-31. Dans le cadre du prochain panel, mes collègues et moi répondrons aux questions que vous pourriez avoir au sujet des mesures relatives à la biométrie incluses dans le projet de loi C-31.

[Traduction]

    Dans un premier temps, permettez-moi, monsieur le président, de souligner que le projet de loi C-31 se veut un complément aux réformes depuis longtemps nécessaires dans le cadre du système d'octroi de l'asile — réformes qui ont été adoptées par le Parlement en juin 2010 dans le cadre de l'adoption de la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés. Les nouvelles mesures proposées permettraient d'accélérer encore davantage le traitement des demandes d'asile présentées par des ressortissants de pays désignés qui ne sont habituellement pas source de réfugiés. Elles permettraient également de réduire le nombre de recours dont les demandeurs déboutés peuvent se prévaloir pour retarder leur renvoi du Canada.
    Certains membres du comité pourraient être surpris d'apprendre que le Canada reçoit plus de demandeurs d'asile en provenance des pays d'Europe que de demandeurs en provenance de l'Afrique et de l'Asie. L'année dernière seulement, près du quart des demandes d'asile au Canada ont été présentées par des ressortissants de l'Union européenne.
    Je pense, monsieur le président, que nous sommes tous d'accord pour dire que les pays de l'Union européenne disposent de solides systèmes démocratiques et de protection des droits de la personne, systèmes qui sont semblables aux nôtres. Quoi qu'il en soit, ces pays sont la source de presque 25 p. 100 des demandes d'asile que notre pays a reçues en 2011. Il s'agit d'une augmentation de 14 p. 100 par rapport à l'année précédente.
    Au cours des dernières années, presque toutes les demandes d'asile présentées par des ressortissants de l'Union européenne ont été retirées, abandonnées ou rejetées. Les mesures de réforme du système d'octroi de l'asile contenues dans le projet de loi C-31 contribueraient à prévenir le recours abusif à notre système, et nous permettraient de simplifier le plus possible l'ensemble de nos processus d'octroi de l'asile. Nous y parviendrions en ne diminuant aucunement l'équité du système et sans compromettre le respect des obligations nationales et internationales du Canada à l'égard des réfugiés.
    Monsieur le président, il est essentiel, pour préserver l'intégrité de notre système d'immigration, de sévir contre les passeurs de clandestins. C'est la raison pour laquelle le projet de loi C-31 comporte des dispositions visant à aider le gouvernement à prendre des mesures à l'encontre des lucratives, mais très dangereuses activités des passeurs de clandestins.
    Le projet de loi C-31 prévoit la détention obligatoire pendant un maximum de un an des personnes qui viennent au Canada dans le cadre d'une « arrivée irrégulière », et ce, dans le but d'établir leur identité et leur admissibilité, notamment pour savoir s'ils sont impliqués dans une activité illégale.
    La détention obligatoire ne viserait pas les étrangers âgés de moins de 16 ans. Par ailleurs, une personne serait remise en liberté une fois sa demande d'asile approuvée.
    Le projet de loi C-31 permettrait de rendre le Canada moins attrayant pour les personnes qui souhaitent y venir en ayant recours au passage de clandestins, et ce, en limitant la capacité de ces personnes de profiter de nos généreux services sociaux et système d'immigration.
    Pour terminer, monsieur le président, j'aimerais souligner que les mesures proposées dans le cadre du projet de loi C-31 visent à atteindre le juste équilibre entre la protection de la sécurité du Canada et des Canadiens et la protection des personnes qui en ont vraiment besoin.
(0850)

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, M. Peter Hill, qui est directeur général à l'agence.
    Je remercie le comité de m'avoir donné la possibilité de comparaître devant lui aujourd'hui. La dernière fois que je me suis adressé au comité, j'ai parlé du mandat de l'agence en tant qu'organisme d'exécution de la loi à la frontière ainsi que de son rôle relativement à l'application des lois canadiennes en matière d'immigration. Pour faire suite à ma présentation précédente, j'aimerais aujourd'hui mettre l'accent sur l'incidence qu'aurait le projet de loi C-31 sur l'agence s'il était adopté par le Parlement.

[Traduction]

    Pour commencer, j'aimerais parler des répercussions sur la réforme du système d'octroi de l'asile.
    La mise en oeuvre du projet de loi C-31 ne modifierait pas les responsabilités opérationnelles de l'ASFC à l'égard du traitement des demandes d'asile présentées par des étrangers à leur arrivée à un point d'entrée. Ce qui changerait, par contre, c'est que l'ASFC serait tenue, dans la mesure du possible, de renvoyer les personnes dans un délai de un an après la date à laquelle la dernière décision négative relative à leur demande d'asile au Canada aura été rendue.
    Afin de se préparer à une éventuelle augmentation du nombre de demandes de renvoi, l'ASFC a mis en place une stratégie de renvoi qui prévoit, entre autres, l'expansion du programme pilote d'aide aux retours volontaires et à la réintégration. Ce programme favorise les retours volontaires en tant que solution économique et rapide qui constitue une solution de rechange aux renvois forcés habituels en offrant aux personnes visées du soutien, de la formation et d'autres mesures les incitant à partir.
    Ce programme a donné de bons résultats dans d'autres pays. Comme il facilite la réintégration des participants, il fait en sorte que ces derniers soient moins enclins à tenter de revenir au Canada.
    J'aimerais maintenant mettre l'accent sur les répercussions de ce projet de loi sur la lutte contre le passage de migrants clandestins.
    Lorsque des personnes arrivent au Canada dans le cadre d'une opération de passage de migrants clandestins, il incombe à l'ASFC de déterminer si ces personnes constituent une menace pour le pays. Actuellement, les périodes de détention de 48 heures, de 7 jours et de 30 jours, prévues aux fins d'évaluation, ne conviennent pas lorsqu'un nombre élevé de personnes arrivent au pays dans le cadre d'opérations complexes de passage de migrants clandestins.
    Les enquêtes visant à distinguer les vrais réfugiés de ceux qui pourraient constituer une menace à la sécurité publique sont complexes et prennent beaucoup de temps. Si les autorités canadiennes disposent de plus de temps pour mener leurs enquêtes, elles pourront mieux évaluer les personnes et prendre les décisions qui s'imposent de façon plus efficace.
    Voilà pourquoi les dispositions relatives à la détention obligatoire sont nécessaires — elles permettent aux autorités canadiennes d'enquêter sur les personnes dont l'identité n'a pu être confirmée, ou qui pourraient être interdites de territoire au Canada pour des motifs liés à la criminalité ou à la sécurité. Un an après le premier jour de détention, puis de nouveau six mois plus tard, les motifs de détention des personnes n'étant pas considérées comme des réfugiés feraient l'objet d'un contrôle par la CISR. En outre, des personnes pourraient être mises en liberté après qu'elles ont présenté une demande au ministre de la Sécurité publique, si celui-ci est d'avis que des circonstances exceptionnelles justifient une mise en liberté anticipée.
    En ce qui concerne la détention de mineurs, je tiens à ajouter que, dans tous les cas, il s'agirait d'une mesure de dernier recours. L'ASFC soutient qu'il est essentiel de toujours considérer l'intérêt supérieur de l'enfant visé, et continuera de le faire si le projet de loi C-31 est adopté.
(0855)

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais remercier le comité de m'avoir donné la possibilité de m'adresser à lui aujourd'hui. L'agence est déterminée à faire en sorte que les lois canadiennes en matière d'immigration soient respectées et continuera de prendre les mesures qui s'imposent pour assurer la sécurité de la population canadienne. Je serai heureux de répondre à toute question que vous pourriez vouloir poser.
     Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci, messieurs Linklater et Hill, de vos exposés. Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité.
    Monsieur Menegakis.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à tous, et merci d'être ici aujourd'hui pour témoigner devant le comité en ce merveilleux lundi matin ensoleillé.
    J'aimerais que nous discutions un peu de la manière dont le projet de loi C-31 permettrait de rendre le Canada moins attrayant pour les personnes qui souhaitent y entrer en ayant recours au passage de clandestins. Bien entendu, nous voulons réduire au minimum le nombre de personnes qui emploient de tels moyens pour venir ici.
    Tout d'abord, j'aimerais que vous m'indiquiez pourquoi, selon vous, certaines personnes présentent une demande d'asile au Canada plutôt que dans un pays situé plus près du leur? Si elles font tout ce chemin pour venir au Canada, il doit bien y avoir quelque chose ici qui les attire.
    À mes yeux, l'attrait qu'exerce le Canada témoigne réellement de sa réussite en tant que pays qui s'est bâti grâce à l'immigration. La générosité de notre système, qui a été présenté par les Nations Unies comme un modèle à suivre pour les autres pays en matière de détermination du statut de réfugié, rend de très grands services au Canada. Notre très généreux filet de sécurité sociale — dont peuvent profiter les personnes ayant obtenu le statut de résident permanent —, notre grand nombre d'institutions juridiques solides et les multiples processus d'appel actuellement en place incitent les gens à prendre le risque de présenter une demande d'asile ici ou, ce qui est encore plus dangereux, à faire appel à des passeurs de clandestins afin d'entrer au Canada.
    Le ministre s'est présenté devant le comité jeudi dernier — vous étiez présent, monsieur Linklater. Nous avons entendu bien des choses, mais l'une de celles qui m'ont frappé concernait le temps qu'exige actuellement le traitement d'une demande d'asile authentique et légitime et le temps qu'exigerait ce processus si le projet de loi C-31 était adopté.
    Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous présenter une fois de plus ces renseignements?
    Bien sûr. À l'heure actuelle, un demandeur d'asile doit attendre 20 ou 21 mois avant d'obtenir une audience de première instance devant la CISR. En d'autres termes, comme le ministre l'a dit de façon très éloquente jeudi dernier, une personne qui a des cicatrices dans le dos et a désespérément besoin d'une protection doit remplir un formulaire et attendre 20 mois avant la tenue d'une audience, à l'issue de laquelle sa demande serait approuvée.
    Dans le cadre du nouveau système, une personne ayant désespérément besoin d'une protection ferait l'objet d'une audience de première instance devant la CISR dans les 45 jours si elle est originaire d'un pays désigné. Toutes les autres personnes feraient l'objet d'une audience dans les 60 jours. Ainsi, toutes les demandes seraient examinées dans des délais beaucoup plus courts, et les personnes s'étant vu attribuer la qualité de personne à protéger au Canada pourraient obtenir beaucoup plus rapidement le statut de résident permanent.
    Si ma mémoire est bonne, à l'heure actuelle, le processus complet peut exiger plus de 1 000 jours, alors qu'il en exigerait environ 200 si le projet de loi C-31 était adopté.
    C'est exact.
    D'après vous, pourquoi est-il plus facile pour un demandeur d'asile en provenance d'Europe que pour un demandeur d'asile en provenance de l'Afrique d'entrer au Canada? Les chiffres sont stupéfiants — le Canada reçoit plus de demandeurs européens que de demandeurs africains.
    Il y a un certain nombre de facteurs que nous examinons. Par exemple, il y a beaucoup plus de voies de communication directes entre l'Europe et le Canada qu'entre l'Afrique et le Canada. En outre, la plupart des pays européens sont dispensés du visa, de sorte qu'il est plus facile pour des personnes originaires de certains pays de venir au Canada par un vol direct ou en transitant par un pays tiers en Europe, mais également d'utiliser des documents frauduleux de pays dispensés du visa au Canada.
    Pouvez-vous nous donner une idée de la manière dont les gens entendent parler du Canada et en viennent à connaître son système d'octroi de l'asile? Il doit bien y avoir des choses qui se disent sur le terrain. Avez-vous une idée des choses qui se disent sur le terrain et qui incitent les gens à chercher à venir au Canada et à présenter une demande d'asile ici?
(0900)
    Je crois que les réseaux communautaires sont très efficaces au moment de faire passer le mot dans les pays d'origine. Nous avons des raisons de croire que cela explique en partie le phénomène lié aux demandeurs d'asile hongrois. Les Hongrois présents au Canada informent leurs amis et les membres de leur famille qui se trouvent là-bas de l'état actuel du système et de l'existence de divers avantages.
    En outre, le Canada dispose d'une très solide communauté de représentants qui aident les personnes à s'orienter dans le système une fois qu'elles sont au Canada en portant ces avantages à leur connaissance. Bien sûr, Internet est un outil incroyable qui aide les gens à comprendre ce qui se passe dans les pays loin de chez eux.
    Un témoin a indiqué au comité que, l'an dernier seulement, le site Web des services d'immigration canadiens a enregistré quelque 43 millions d'accès, dont 56 p. 100 provenaient de l'extérieur du pays. Ainsi, je suis convaincu qu'il s'agit d'un facteur.
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste moins de deux minutes.
    En règle générale, quels pays sont visés par les demandes d'asile présentées par des personnes originaires de l'Afrique?
    Vous voulez savoir de quels pays ils proviennent...
    Non, je veux savoir quels pays sont visés par les demandes d'asile provenant de personnes originaires de l'Afrique.
    Dans quels pays ils présentent une demande?
    Oui.
    Cela peut varier. La France reçoit un nombre exceptionnel de demandes soumises par des Africains, de même que l'Espagne et la Grèce, surtout depuis le printemps arabe.
    Je crois comprendre que bon nombre d'entre eux aboutissent ici.
    Certains d'entre eux. L'Europe constitue un important lieu de transit pour les demandeurs originaires de l'Afrique.
    Dans le cadre du système actuellement en place, combien de personnes ne se voient pas reconnaître la qualité de réfugié après qu'elles ont utilisé tous les recours possible en matière d'appel? Cela crée de l'engorgement dans le système, n'est-ce pas?
    Il existe un certain nombre de processus d'appel. Une personne peut demander à la Cour fédérale l'autorisation d'interjeter appel d'une décision négative. Il y a également l'examen des risques avant renvoi, et la personne qui a été déboutée à tous les échelons peut présenter une demande fondée sur des motifs d'ordre humanitaire. Je ne crois pas que nous disposions de statistiques exactes en ce qui a trait au nombre de personnes qui ont recours à chacun de ces processus d'appel. À coup sûr, nous pouvons transmettre à la greffière les renseignements dont nous disposons.
    Merci.
    Madame Sims.
    Merci beaucoup. Je remercie également les témoins de l'exposé qu'ils nous ont présenté.
    J'aimerais commencer par une question que j'ai posée l'autre jour au ministre. Il n'y a pas si longtemps — l'encre utilisée pour le projet de loi C-11 n'a probablement pas encore séché —, nous sommes parvenus à un grand compromis canadien, et toutes les parties ont dit à quel point ce projet de loi était merveilleux.
    Depuis combien de temps travaillez-vous avec les nouvelles règles instaurées par le projet de loi C-11?
    Les dispositions transitoires contenues dans le projet de loi C-11 et liées à un certain nombre d'éléments de la loi sont entrées vigueur à divers moments. Deux ou trois d'entre elles — y compris celles touchant l'évaluation des demandes pour motifs d'ordre humanitaire — sont entrées en vigueur au moment de la sanction royale. Quelques modifications opérationnelles connexes ont été apportées en juin 2011. La majeure partie des mesures transitoires devait entrer en vigueur au plus tard deux ans après la date de la sanction royale, à savoir le 29 juin 2012. Nous avons travaillé dans l'optique de respecter cette date d'entrée en vigueur. Un certain nombre d'ensembles de dispositions réglementaires ont fait l'objet d'une publication préalable l'été dernier. Lorsque nous nous sommes butés à des problèmes plus vastes au chapitre de la mise en oeuvre, le ministre a conclu que nous devions envisager une autre réforme législative. Pour l'heure, très peu de dispositions du projet de loi C-11 sont entrées en vigueur.
(0905)
    À l'issue de la dernière séance, l'une des choses qui m'ennuyaient, c'était que nous n'avions pas posé de question à propos de la mise en oeuvre. Nous sommes en train de procéder à une réforme majeure, alors que nous n'avons même pas mis en oeuvre des dispositions sur lesquelles toutes les parties s'étaient entendues, ni observé les répercussions qu'elles pourraient avoir sur le système.
    Durant la réunion, le ministre Kenney a laissé entendre que le fait d'être détenu dans les installations de l'ASFC pour des motifs liés à l'immigration ne causait de tort à personne. À l'entendre, on pourrait croire que les centres de détention sont des lieux très agréables. J'ai peine à imaginer que l'on puisse considérer un centre de détention comme un lieu agréable. À l'heure actuelle, combien y a-t-il de centres de détention de l'ASFC au Canada? En règle générale, le nombre de personnes détenues est-il bien inférieur, ou alors supérieur à la capacité de ces installations? À quel endroit détiendra-t-on ces personnes lorsqu'il n'y aura plus de place dans ces installations?
    Je demanderai à M. Hill, de l'ASFC, de répondre à cette question.
    L'ASFC administre trois centres de détention. Celui de Vancouver se trouve dans l'aéroport de Vancouver. Il est destiné aux détentions de très courte durée — il compte 24 places pour les détentions de 72 heures et moins. À Toronto, le centre de surveillance de l'Immigration compte environ 220 places. À Montréal et à Laval, il y a un centre de surveillance d'à peu près 150 places. De plus, nous nous en remettons aux provinces pour ce qui est de la détention des personnes à risque élevé et des cas pour lesquels l'ASFC ne dispose pas d'installations de détention. Au cours des deux ou trois dernières années, le nombre maximal quotidien de personnes détenues dans les installations provinciales et celles de l'ASFC oscillait entre 400 et 500.
    Merci.
    Ainsi, même sous le régime actuel, dans le cadre duquel nous ne détiendrons jamais autant de personnes que nous le ferons sous le régime des nouvelles dispositions législatives, nous ne disposons, disons, que d'à peu près 394 places — mes calculs ne sont pas toujours exacts, mais je crois que ce nombre est assez près de la vérité —, et le nombre de détenus est bien supérieur à cela, et on envoie des personnes en prison aux fins de leur détention.
    Où les enfants sont-ils détenus?
    Nous disposons de 400 ou 500 places, ce qui est suffisant pour prendre en charge ce nombre de personnes. Lorsque les personnes sont détenues dans une prison provinciale, elles sont dans des conditions qui respectent les normes internationales en matière de détention liées à l'immigration. Ainsi, il est important de souligner que, même si elles sont détenues dans un établissement provincial, ces personnes sont hébergées et prises en charge conformément aux règles et aux normes en matière de détention liées à l'immigration administrées et surveillées, par exemple, par le HCNUR, et auquel nous adhérons.
    Je sais que les coûts — je vous demande, à ce sujet, d'être indulgent à mon égard — quotidiens liés à la détention en prison d'une personne déclarée coupable d'un acte criminel sont assez élevés. Avez-vous une idée du coût lié à la détention d'une personne dans un établissement provincial?
    À coup sûr, nous connaissons ces coûts — nous les surveillons de très près.
    Quel est donc le coût quotidien?
    Le coût quotidien s'élève en moyenne à 200 ou 230 $. En fait, ces coûts sont à la hausse. Nous observons une augmentation des coûts. Plus particulièrement, dans le cadre des ententes que nous avons conclues avec les provinces, les coûts augmentent graduellement, et s'élèvent à présent à environ 230 $ par jour.
    Qu'en est-il du coût de la détention dans une prison? Quel est ce coût?
    Les coûts sont comparables.
    Est-ce qu'on vous offre un escompte, dans ce cas?
    Non.
    D'accord, je me posais simplement la question, car je suis stupéfaite de constater que le coût est si peu élevé. Les coûts liés à la détention de toute autre personne envoyée en prison sont bien supérieurs à 230 $ par jour. Quoi qu'il en soit, j'en resterai là sur cette question.
    En outre, lorsque nous...
(0910)
    Vous avez 30 secondes, madame Sims.
    C'est tout le temps qu'il me reste? Je suis extrêmement désolée.
    S'il ne me reste que 30 secondes, je crois que je m'en tiendrai à une observation.
    À la lecture de ces documents, je constate que l'on évoque souvent le renforcement et l'amélioration du système d'immigration du pays, de même que la protection de la citoyenneté canadienne. Bien entendu, nous voulons protéger la citoyenneté canadienne, mais je m'attends à ce que vous me prouviez, au moyen de renseignements solides, que les politiques énoncées dans le projet de loi C-11, si elles entraient en vigueur, feraient courir des risques aux Canadiens. Je ne veux pas évoquer le Bonhomme sept heures ou des scénarios hypothétiques, car il y a des inconnues chaque fois qu'une personne entre au pays.
    Merci.
    Merci, madame Sims. Nous devons passer à un autre intervenant.
    Monsieur Lamoureux.
    Monsieur Hill, j'aimerais savoir si vous connaissez le Sun Sea et l'Ocean Lady. Je suis certain que ces noms vous disent quelque chose. Pouvez-vous m'indiquer si des personnes entrées au Canada sur l'un ou l'autre de ces bateaux sont toujours en détention?
    Oui, certainement. Les 76 migrants arrivés ici à bord de l'Ocean Lady ont été mis en liberté sous réserve de conditions, et ils les respectent. Des 492 migrants arrivés à bord du Sun Sea, six demeurent en détention. Les autres ont été libérés sous réserve de certaines conditions, qu'ils respectent eux aussi.
    En vertu de quel pouvoir ou autorité peut-on actuellement détenir ces personnes pendant plus de un an?
    Sous le régime actuel, le délégué du ministre, qui est un agent d'audience de l'ASFC, présente, au cas par cas, des observations et des arguments sur la question de savoir s'il convient de poursuivre la détention d'une personne parce que son identité n'a pas été confirmée, si la personne pose un danger pour le public ou s'il y a une raison de croire qu'elle pourrait être interdite de territoire pour des motifs liés à la criminalité ou à la sécurité. Les observations sur ces questions sont présentées à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, organisme quasi judiciaire auquel il revient de décider s'il convient de maintenir une personne en détention.
    Avez-vous eu l'occasion d'observer que ce système fonctionne mal ou ne fonctionne pas?
    Je peux vous dire que, dans certains cas liés aux deux navires mentionnés plus tôt, le délégué du ministre n'était pas convaincu que l'identité d'une personne avait été confirmée, et que, malgré cela, sa mise en liberté a été ordonnée par un commissaire de la CISR.
    Avez-vous de la difficulté à localiser, par exemple, quelques-uns des 76 migrants de l'Ocean Lady?
    Ils respectent les conditions auxquelles ils sont assujettis, et nous savons très bien où ils se trouvent au pays. La plupart d'entre eux se trouvent dans la région de Toronto.
    Est-il difficile pour l'ASFC d'être en mesure de maintenir une personne en détention plus de six mois?
    En règle générale?
    En règle générale, est-il difficile pour l'ASFC de maintenir une personne en détention pendant plus de six mois, advenant qu'il ait été conclu qu'il était nécessaire que cette personne demeure en détention?
     L'ASFC a un très bon bilan — elle parvient généralement à faire valoir, au cas par cas, que la poursuite d'une détention est justifiée. Toutefois, les règles exigent qu'un contrôle des motifs de détention soit effectué dans les 7 jours, puis aux 30 jours par la suite, et que l'ASFC montre que des activités raisonnables sont menées aux fins du maintien de la détention.
    Ainsi, dans cette mesure, il semble que, en fait, le système fonctionne. Toute cette question des délais de traitement n'est pas nouvelle. Ma question à M. Linklater est la suivante: quand tout cela a-t-il commencé? Depuis combien de temps cela dure-t-il?
    Vous parlez des audiences devant la CISR?
    Oui, je parle des délais — nous entendons des histoires à propos de gens qui sont ici depuis quatre ou six ans. Depuis combien de temps cette situation dure-t-elle?
    Cela varie selon les fluctuations du nombre de demandes soumises chaque année. Par exemple, avant que l'on exige, en 2009, que les personnes en provenance du Mexique ou de la République tchèque soient munies d'un visa pour entrer au Canada, je crois que le nombre de demandes était bien supérieur à 30 000.
    Ainsi, avant 2005, disons, est-ce que cela était un grave problème?
    Je ne dispose pas de renseignements en ce qui concerne les années passées. Mme Irish peut peut-être vous répondre.
    À la fin des années 1990, il y a également eu un pic, et cela a mené à la stratégie de réduction de l'arriéré que la Commission a mise en oeuvre de 2002 à 2004. Environ à divers moments, nous recevions annuellement plus de 25 000 demandes d'asile.
    Il est donc raisonnable de dire que, avant le début ou le milieu des années 1990, cela ne posait pas véritablement un problème, et que celui-ci est apparu à la fin des années 1990.
(0915)
    Je n'ai pas sous la main les données qui me permettraient de tirer cette conclusion.
    J'aimerais que vous transmettiez cette information au comité, par l'entremise de son président. Je crois qu'il s'agit d'une information précieuse.
    Madame Irish, vous pouvez transmettre ces renseignements à la greffière.
    Monsieur Linklater, je me demande si vous pouvez me dire pourquoi il a fallu que les bureaucrates portent le problème à l'attention du ministère si ce problème était si grave. Depuis combien de temps le ministre est-il au courant de la gravité du problème lié à l'arriéré?
    Je crois que nous devons prendre du recul, et examiner combien de temps l'on investit pour effectuer le travail stratégique soutenant certaines initiatives législatives comme celles dont nous parlons en ce moment.
    Je suis désolé, le temps est écoulé.
    Monsieur Leung.
    Monsieur le président, j'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées. Si le coût s'élève actuellement à 230 $ par jour — soit environ 84 000 $ par année —, ne serait-il pas plus expéditif d'établir, dans les 30 jours, qu'une personne est interdite de territoire au Canada, et de l'expulser du pays?
    D'après nos estimations, grâce aux dispositions contenues dans le projet de loi C-31, de façon générale, c'est ce qui va se passer. Les demandes seront traitées beaucoup plus rapidement. Les demandes présentées par des personnes ayant besoin d'une protection seront acheminées beaucoup plus rapidement vers le volet lié à la résidence permanente, et ces personnes ne seront pas visées par une mesure de renvoi. Quant à celles qui n'ont pas besoin de recevoir la protection du Canada, leur dossier sera acheminé vers le volet des mesures de renvoi dans la perspective que ces personnes soient renvoyées du pays dans un délai de un an après la date à laquelle la dernière décision négative à leur égard aura été prise par la CISR, c'est-à-dire par la SPR ou la nouvelle division d'appel. Nous sommes d'avis que, en combinaison avec les nouveaux outils comme le Programme d'aide au retour volontaire — que M. Hill a mentionné durant sa déclaration préliminaire —, cela contribuera à inciter les gens à quitter volontairement le Canada, et permettra à l'ASFC de se concentrer sur les cas de renvoi graves et très médiatisés à l'intérieur de ce délai de un an.
    Pourriez-vous m'indiquer comment se déroule, étape par étape, le processus menant à une décision en ce qui concerne les personnes faisant partie d'une arrivée en masse ou d'une arrivée irrégulière? Quelle est la première étape? Si une personne déclare, à son arrivée, qu'elle veut présenter une demande d'asile, quelle est la première mesure que nous prenons pour confirmer son identité? Avec qui communiquons-nous dans son pays d'origine pour obtenir cette confirmation? Je présume que l'étape suivante consiste à déterminer si cette personne est un demandeur d'asile authentique, et s'il pose une menace pour le Canada. Pourriez-vous me décrire chacune des étapes de ce processus, en précisant le temps requis pour réaliser chaque étape?
    À mon avis, si nous étions en mesure de prendre plus tôt une mesure d'expulsion à l'égard de ces personnes, cela accélérerait beaucoup le processus.
    Je vais demander à M. Hill, de l'ASFC, de vous décrire le processus lié à l'examen initial.
    Sur le plan opérationnel, lorsqu'un bâtiment arrive au pays avec plusieurs centaines de personnes à son bord, notre première préoccupation a trait à la santé et à la sécurité. Pour nous, la première étape consiste à nous assurer que les passagers ne sont atteints d'aucune forme de maladie transmissible.
    La deuxième étape consiste à établir l'identité de ces personnes. Cela peut poser des difficultés. Souvent, les personnes arrivent ici sans papiers, ou ont jeté leurs papiers d'identité par-dessus bord durant le voyage. Elles ont peut-être tenté de détruire leurs documents d'identité. Ainsi, la confirmation de leur identité constitue un travail laborieux, qui exige du temps. Si les gens nous fournissent des pièces d'identité, nous devons confirmer qu'elles leur appartiennent bel et bien. Nous devons procéder à une évaluation pour déterminer s'il s'agit de faux documents, ou de documents obtenus frauduleusement.
    Nous ne tentons pas de communiquer ou d'échanger des renseignements avec les autorités du pays d'origine, car nous veillons à ce que l'identité des demandeurs d'asile ne soit pas révélée, vu les préoccupations que cela peut soulever. Par conséquent, l'ASFC compte sur la coopération des pays attachés aux mêmes principes que ceux du Canada pour qu'ils lui transmettent des renseignements qui l'aideraient à établir l'identité de ces personnes.
    La troisième étape consiste à déterminer, au cas par cas, si ces personnes sont interdites de territoire au pays. Une fois que nous avons établi l'identité d'une personne, nous procédons à d'autres vérifications liées à la sécurité, nous effectuons des vérifications dans des bases de données en partenariat avec des organismes canadiens et des partenaires internationaux, et nous déterminons si la personne a trempé dans le crime organisé, si elle a commis des crimes contre l'humanité ou si elle a été liée d'une quelconque façon à une organisation terroriste.
    Ce processus exige du temps. En raison des préoccupations liées au passage de clandestins, il peut mettre en jeu un certain nombre de pays. De façon générale, c'est le processus qui s'applique lorsque nous avons affaire à une arrivée massive.
    J'aimerais souligner que le calendrier des contrôles des motifs de détention — c'est-à-dire un premier contrôle dans les 48 heures, un deuxième dans les sept jours suivants, et les contrôles subséquents, aux 30 jours — représente un énorme fardeau pour l'ASFC. À l'heure actuelle, elle se démène pour fournir les renseignements requis à la CISR aux contrôles des motifs de détention, pour confirmer l'existence de préoccupations relatives à l'identité et à l'admissibilité des personnes et pour le maintien en détention.
    Ce processus n'est pas bénéfique pour l'agence. Il n'a pas été conçu pour prendre en charge les arrivées massives. L'une des dispositions clés du projet de loi vise à régler ce problème, de manière à ce que l'ASFC et la GRC, par exemple, disposent du temps nécessaire pour procéder aux vérifications requises.
(0920)
    Avons-nous tiré une quelconque leçon de ce qui s'est passé en Israël ou à Taïwan, qui ont tous deux fait face à des problèmes semblables dans le passé? Quelles mesures de prévention doit-on prendre pour éviter que d'éventuels terroristes passent à travers les mailles du filet? Il arrive que nous ne parvenions pas à recueillir nulle part dans le monde des renseignements à ce sujet. À l'échelle mondiale, comment faire pour empêcher que des terroristes passent entre les mailles du filet?
    Puis-je demander à M. MacDonald de répondre à la question?
    Vous avez raison de dire qu'il s'agit d'un phénomène mondial. Tous les pays se heurtent à cela et, comme M. Linklater l'a mentionné, le printemps arabe, par exemple, qui a eu lieu il n'y a pas si longtemps, a posé certaines difficultés aux autorités frontalières un peu partout dans le monde, et assurément en Europe.
    Les mesures que nous devons prendre pour éviter que des terroristes passent entre les mailles du filet vont de pair avec ce que je disais la semaine dernière, à savoir que nous devons travailler avec nos principaux alliés, disposer d'une solide stratégie de prévention dont les activités s'étendent au-delà de nos frontières et échanger adéquatement des renseignements avec nos partenaires clés. Bien souvent, cela se résume à de très solides activités de renseignement.
    Par conséquent, advenant une arrivée massive à la frontière, l'élément clé renvoie à ce que M. Hill vient tout juste de dire à propos des leçons tirées de l'épisode du Sun Sea et de l'Ocean Lady, à savoir que nous devons faire en sorte que les autorités frontalières disposent du temps requis pour mener les vérifications qui s'imposent et, au besoin, pour échanger des renseignements avec leurs collègues de l'étranger afin d'établir l'identité et l'admissibilité des personnes concernées.
    Votre temps est écoulé depuis un bon moment. Je suis désolé.
    Madame Groguhé.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous ce matin.
    J'aimerais poser une question au sujet du projet de loi C-11.
    Il y avait dans le cadre de ce dernier un comité chargé de désigner les pays d'origine sûrs. En ce qui a trait à la désignation de ces pays sûrs, le ministre considère important de jouir d'une certaine flexibilité pour être en mesure d'agir rapidement.
    Que pensez-vous de l'idée d'imposer un délai à ce comité plutôt que de lui retirer le pouvoir de désigner les pays d'origine sûrs?
    Si je comprends bien la question, monsieur le président, il s'agit de savoir si on va considérer un délai...
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de l'idée d'imposer un délai à ce comité constitué pour qu'il puisse agir et rendre une décision le plus rapidement possible plutôt que de lui retirer complètement la responsabilité de désigner les pays sûrs.
    Dans l'actuel projet de loi, on prévoit que certains facteurs inclus dans des règlements seront pris en compte en ce qui a trait à l'élément déclencheur d'une évaluation des conditions relatives aux pays pouvant être désignés par le ministre. C'est le ministre qui va le faire, alors que dans le cadre de l'ancien projet de loi, on se fondait sur une recommandation du comité.
    En ce qui concerne le maintien d'une certaine flexibilité et le travail des ministères impliqués dans le processus d'asile, on croit qu'à partir des informations disponibles, on pourra soumettre des recommandations plus rapidement au ministre sur la désignation des pays et qu'il n'y aura pas de décisions immédiates fondées sur les critères de la loi. Un élément d'analyse qualitatif sera ajouté aux facteurs quantitatifs.
(0925)
    Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a souligné l'importance d'adopter un mécanisme permettant de réviser la liste des pays sûrs de façon à pouvoir répondre aux changements progressifs ou soudains survenus dans un pays donné. Je vous demanderais d'expliquer la procédure qui a été prévue pour la révision, la mise à jour et le prononcé des désignations par arrêté ministériel.
    Je vais demander à Mme Irish de vous expliquer comment cela va fonctionner.

[Traduction]

    Le HCNUR indique qu'un processus de pays d'origine désigné est valable pour autant qu'il soit fondé sur des renseignements vérifiables et objectifs, et reconnaît que le traitement accéléré est l'une des conséquences de ce processus.
    Afin de répondre aux critères énoncés par le HCNUR, nous avons mis en place un système à deux étapes. La première consistera en l'atteinte d'un seuil quantitatif servant d'élément déclencheur. Ce seuil sera fixé par arrêté du ministre. Un taux de rejet de 75 p. 100 et plus, ou un taux d'abandon de 60 p. 100 et plus, feront office d'élément déclencheur. Il n'y aura aucune exigence liée au volume de demandes soumises.
    Dans les cas où moins de 30 demandes sont reçues, un critère distinct s'appliquera. Pour l'essentiel, le critère reposera sur une liste de vérification des qualités vérifiables associées à un pays, y compris sa capacité de respecter les libertés démocratiques fondamentales, la présence d'ONG exerçant librement leurs activités et d'une magistrature indépendante. Le respect de ces critères déclenche une analyse, qui porte notamment sur l'appareil gouvernemental et la capacité de l'État d'offrir aux citoyens la possibilité de porter plainte et de respecter les droits fondamentaux de la personne. Cette analyse sera menée par un organisme interministériel qui recevra de l'information d'intervenants indépendants, y compris le HCNUR. C'est de cette manière que nous nous y prendrons pour respecter les critères énoncés par le HCNUR dans ses recommandations.

[Français]

    Est-ce qu'il serait possible de remettre au comité l'information à laquelle vous faites référence?
    Oui, bien sûr.
    Il faudrait que cela soit envoyé par écrit.

[Traduction]

    Pourriez-vous transmettre ces renseignements à la greffière, s'il vous plaît?

[Français]

    Dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, le législateur a permis de détenir le demandeur d'asile pour des motifs limités, notamment pour s'assurer de son identité tout en se conformant à la législation canadienne qui porte sur la détention au Canada. Dans le projet de loi C-31, on introduit des dispositions qui, apparemment, dérogent à la loi et à la Charte.
     J'aimerais savoir ce que vous en pensez et sur quoi s'appuient ces nouvelles dispositions.

[Traduction]

    Nous avons dépassé le temps. Je crains que vous ne deviez attendre le prochain tour pour répondre à cette question.
    Monsieur Weston.

[Français]

    Merci, monsieur le président et je remercie nos invités qui sont parmi nous aujourd'hui.
    Quand nous commençons une analyse comme celle-ci, il y a beaucoup de suppositions. Nous venons d'entendre Mme Sims supposer que le taux de personnes en détention va augmenter si le projet de loi C-31 est adopté.
    Monsieur Linklater, est-il possible que le taux de personnes en détention diminuera parce que le reste du monde saura que le Canada n'accueille pas des gens qui ne sont pas de vrais réfugiés?
    Je vais commencer et M. Hill va compléter.
    L'impact des arrivées imprévues sur les services de détention sont difficiles à prévoir. Par exemple, quand les deux bateaux sont arrivés en Colombie-Britannique, on ne savait pas combien de gens il y avait à bord, quelle était leur condition, s'ils avaient des documents d'identité et s'il serait difficile d'établir leur identité. S'il y a d'autres arrivées de ce genre, il y aura évidemment un impact sur les services de détention. À ce moment-là, c'est l'agence qui va régler la situation avec les autorités provinciales pour s'assurer qu'elles peuvent accueillir ces gens.
(0930)
    Monsieur Linklater, vous avez laissé entendre qu'il y a un réseau d'information dans le monde et que tout le monde parle de la possibilité de venir au Canada. Si les règlements sont plus raisonnables et plus précis, peut-on penser que ce réseau va répandre la nouvelle?
    Les dispositions du projet de loi auront un impact sur les demandes de statut de réfugié. Le fait qu'on prévoie des pénalités plus graves pour les transporteurs de clandestins aura un impact sur les réseaux de transporteurs. Cela incitera les gens à revoir leur intention de traverser le Pacifique s'ils savent bien que les transporteurs eux-mêmes seront emprisonnés et se verront imposer des pénalités plus graves ou différentes.

[Traduction]

    En ce qui concerne les personnes qui décident d'entrer au Canada de façon irrégulière, je crois que le fait que les personnes ayant besoin d'obtenir la protection du Canada se verront octroyer un statut conditionnel aura également un effet sur les comportements. Si les gens comprennent que, comme le ministre l'a dit jeudi, ils devront attendre cinq ans avant de pouvoir venir rejoindre leurs parents proches, ils pourraient revoir leur décision d'entrer au pays en ayant recours à un passeur de clandestins ou dans le cadre d'une arrivée massive.
    Monsieur Hill, voulez-vous faire des commentaires à propos des répercussions sur l'accroissement ou la diminution éventuelle du nombre de personnes détenues?
    Oui. Je dirais que, dans l'ensemble, le projet de loi C-31 comporte un certain nombre de mesures qui pourraient très bien dissuader des gens de venir au Canada, mais je tiens à souligner que la détention n'a aucunement pour but ou pour fonction d'avoir un effet dissuasif.
    Conformément à nos normes internes en matière de détention liées à l'immigration, une personne est maintenue en détention dans les trois situations suivantes: lorsque nous voulons confirmer son identité, lorsque nous voulons protéger le public en veillant à ce que des personnes dangereuses ne soient pas mises en liberté au pays, et lorsque nous craignons que les personnes présentent un risque de fuite et que nous avons des raisons de croire qu'elles se soustrairont vraisemblablement aux formalités liées à leur demande d'asile ou d'immigration. Ces trois conditions constituent le fondement des dispositions relatives à la détention contenues dans le projet de loi C-31.
    Merci.
    Madame James.
    Merci, monsieur le président. Je vous souhaite un bon retour parmi nous. Je souhaite la bienvenue à tous nos invités.
    J'ai écouté tout ce qui s'est dit ici à propos des divers éléments du projet de loi C-31, et j'ai peine à croire que le Canada est le seul pays qui traitera certaines demandes plus rapidement que d'autres. J'aimerais que M. Linklater nous en dise un peu plus long à ce sujet.
    Est-ce que le Canada est le seul pays qui agira de cette façon, ou est-ce que d'autres pays industrialisés occidentaux auxquels le Canada peut être comparé adopteront également le même processus et le même système?
    Non, le Canada ne sera pas le seul pays à faire cela. En fait, il est l'un des seuls pays à ne pas disposer actuellement d'un régime dans le cadre duquel de telles distinctions sont établies. La plupart des pays de l'Europe de l'Ouest traitent certains types de demandes de façon accélérée, et cela fait partie de l'analyse que nous avons menée au moment d'élaborer les dispositions contenues dans le projet de loi.
    Je crois que Mme Irish dispose de renseignements plus détaillés, et je lui demanderai donc de compléter ma réponse.
    Presque tous les pays membres de l'UE disposent d'une procédure en matière de pays d'origine sûrs — c'est l'expression que l'on utilise dans la plupart des autres pays. L'Australie et la Nouvelle-Zélande disposent de tels processus. La manière dont chaque pays est défini varie quelque peu d'un endroit à l'autre, mais dans la plupart des cas, les demandes sont traitées en sept jours, et dans certains pays, ce délai peut être aussi court que 48 heures. Certains pays européens ont la capacité de mener un examen sur dossier, ce que ne permet pas le système juridique canadien.
(0935)
    Ainsi, pour l'essentiel, à ce moment-ci, le Canada est en mode « rattrapage ».
    Oui, on pourrait dire ça.
    Merci. Là encore, ma question s'adresse probablement à vous deux — j'aimerais savoir si vous pouviez fournir aux membres du comité des exemples de pays pouvant être comparés au Canada et où les demandeurs d'asile qui arrivent dans le cadre d'une opération de passage de clandestins sont détenus. Le Canada n'est sûrement pas le seul pays qui se propose de le faire ou le fait actuellement.
    Non. En fait, depuis longtemps, toutes les personnes qui arrivent en Australie de façon irrégulière font l'objet d'une détention obligatoire. En outre, dans le passé, l'Australie a utilisé un certain nombre d'installations situées à l'extérieur de son territoire pour examiner les personnes et prendre une décision à leur égard avant de les autoriser à entrer sur son territoire. Là encore, si Mme Irish possède de plus amples renseignements à ce sujet, je lui demanderai de nous les fournir.
    Peu de pays établissent une distinction entre une arrivée massive et une arrivée irrégulière massive. En Europe, la plupart des pays sont aux prises avec des arrivées irrégulières massives, mais celles-ci ne se font pas nécessairement par la mer. En outre, bon nombre de pays européens disposent d'un certain type de régime de détention obligatoire. Par exemple, au Royaume-Uni, une détention obligatoire est prévue pour les personnes originaires de la plupart des pays qu'ils considèrent comme un pays d'origine sûr. Cela varie d'un pays à l'autre.
    Ainsi, cela ne concerne pas uniquement le passage de clandestins ou les arrivées irrégulières massives. Certains pays détiennent des demandeurs d'asile qui arrivent de façon régulière. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Diriez-vous que, en comparaison avec les autres pays occidentaux, même si le projet de loi C-31 est adopté et que les dispositions qu'il contient entrent en vigueur, le Canada ne détiendra des demandeurs d'asile que de façon restreinte? Est-ce que cela est exact, ou est-ce que le Canada aura recours à la détention davantage que d'autres pays?
    Il est juste de dire que, même si le projet de loi C-31 entre en vigueur, le recours à la détention sera beaucoup moins fréquent au Canada qu'il ne l'est dans bon nombre d'autres pays. M. Hill a mentionné que, dans l'ensemble du pays, le nombre moyen de personnes détenues chaque jour pour des motifs liés à l'immigration était de 500 environ. Au regard du nombre de demandes que le Canada reçoit chaque année — l'an dernier, je crois qu'il en a reçu à peu près 25 000, et l'année précédente, environ 23 000 —, cela représente une petite fraction des personnes qui soumettent une demande d'asile au pays.
    J'aimerais revenir très rapidement sur une question posée par Mme Groguhé, du NPD. Tout d'abord, elle a affirmé que les dispositions du projet de loi contrevenaient à la Charte canadienne des droits et libertés ou à la convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, mais cela est faux. Les dispositions du projet de loi C-31 respectent toutes les dispositions de la Charte et de la Convention.
    Pourriez-vous formuler très rapidement des observations là-dessus?
    Je crois qu'il convient de souligner que le projet de loi C-31 continuera de faire en sorte que le Canada respecte ses obligations intérieures et internationales à l'égard des personnes cherchant à obtenir une protection. D'abord et avant tout, le principe de non-refoulement s'inscrit dans notre analyse des diverses dispositions de ce texte législatif. Aucune personne risquant d'être persécutée ou torturée dans son pays ne sera renvoyée là-bas par le Canada. Ces personnes obtiendront la protection du Canada s'il est conclu qu'elles ont besoin de cette protection.
    La nouveauté tient à ce que le projet de loi C-31 nous permettra de traiter les demandes beaucoup plus rapidement que par le passé, de manière à ce que ceux qui ont besoin de la protection du Canada puissent l'obtenir beaucoup plus promptement.
    Merci, monsieur Linklater.
    Madame Sitsabaiesan.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais revenir sur les propos qu'a tenus le ministre Kenney la dernière fois qu'il s'est présenté devant le comité. Il a affirmé que la détention et le fait d'interdire à une personne de demander le statut de résident permanent ou d'être réuni avec les membres de sa famille constituent non pas des sanctions, mais simplement le retrait de quelques privilèges à certains demandeurs.
    Il faut établir une distinction entre le fait de punir quelqu'un et celui de refuser de lui accorder certains privilèges. Pourquoi le ministre affirme-t-il que ces mesures ne constituent pas des sanctions, alors qu'elles sont manifestement préjudiciables pour les demandeurs d'asile et qu'elles sont destinées, d'après le ministre, à dissuader ces derniers de se présenter ici en groupes? Est-ce que l'un d'entre vous a des commentaires à formuler?
    Monsieur Linklater.
    Pour l'essentiel, le statut de résident permanent au Canada est un privilège accordé par le gouvernement et le pays. Comme je viens de l'expliquer, sous le régime du projet de loi C-31, les personnes qui ont besoin de la protection du Canada continueront de l'obtenir. J'estime que le ministre a raison de dire que les dispositions du projet de loi C-31 toucheront probablement une corde sensible chez les personnes qui envisagent d'entrer clandestinement au Canada, car elles comprendront quelles conséquences cela pourrait avoir sur leur situation familiale. En outre, on a veillé à accroître la sévérité des sanctions applicables aux passeurs clandestins pour tenter de dissuader davantage les réseaux dont ils font partie de poursuivre leurs activités.
(0940)
    Pourquoi dit-il que le fait de ne pas être détenu constitue un privilège, alors que les droits relatifs à la liberté et à la mobilité sans discrimination sont inscrits dans la Convention sur les réfugiés et la Convention relative aux droits de l'enfant? Une fois de plus, cela renvoie aux personnes qui arrivent ici en groupes.
    À mon avis, comme M. Hill l'a expliqué, le projet de loi C-31 n'aura aucune incidence sur les motifs de détention. Les personnes seront susceptibles d'être détenues si l'on éprouve des problèmes à établir leur identité, si elles posent un risque lié à la criminalité ou à la sécurité pour le Canada ou les Canadiens ou si elles présentent un risque de fuite. Je crois qu'il convient de souligner que les personnes faisant partie d'une arrivée massive désignée seront mises en liberté si elles sont en mesure de coopérer avec l'ASFC et la GRC aux fins de l'établissement de leur identité et si elles ne posent aucun risque pour le public.
    D'accord.
    Je vais passer à autre chose parce que l'on ne cesse de nous donner la même réponse. Êtes-vous conscient du fait que l'article 19 du projet de loi pourrait entraîner une remise en question du statut de résident permanent de milliers de personnes au Canada? S'il ne s'agit pas de l'objectif de cet article, comment s'y prendra-t-on pour le mettre en application?
    Lorsque le ministre s'est présenté ici jeudi, il a dit, si je ne m'abuse, que l'objectif ne consistait certainement pas à laisser planer la perspective que des personnes pourraient perdre leur statut de résident permanent si la situation qui règne dans leur pays change au fil du temps.
    Le ministre a également indiqué qu'il était disposé à entendre des commentaires constructifs touchant des modifications qui pourraient être apportées afin de préciser ces dispositions, car l'objectif ne consiste assurément pas à punir des personnes pour des raisons qui sont indépendantes de leur volonté.
    Le véritable objet de l'article 19 est de faire en sorte que les personnes qui, après s'être vu reconnaître la qualité de personnes à protéger ou octroyer le statut de résident permanent au Canada, décident de leur propre chef de retourner dans le pays où elles disent craindre d'être persécutées, assument elles-mêmes la responsabilité de renoncer, pour l'essentiel, à la qualité de personne à protéger que le Canada leur a octroyée.
    Voilà l'objet de l'article 19. Il ne s'agit certainement pas de punir des personnes qui se trouvent au Canada depuis un certain nombre d'années au motif que la situation dans leur pays d'origine a changé à un point tel qu'elles peuvent y retourner librement à titre de résidents permanents ou de citoyens du Canada.
    Sans aucun doute, nous sommes ouverts à l'idée de préciser les dispositions de cet article.
    Cela me semble quelque peu étrange. Je suis arrivée au pays à titre de résidente permanente. On s'attend à ce que les personnes qui arrivent ici à titre de demandeurs d'asile et à qui l'on accorde le statut de résident permanent afin qu'elles commencent une nouvelle vie retournent dans leur pays d'origine si la situation change là-bas. Je ne comprends pas comment on peut affirmer que cela est juste. Avez-vous des observations à formuler à ce propos?
    Je crois que le ministre et moi avons tous deux affirmé devant le comité que le gouvernement serait heureux d'apporter des précisions sur l'objet de l'article 19 dans le cadre de l'étude article par article pour faire en sorte que les personnes qui détiennent le statut de résident permanent ne se retrouvent pas dans ce genre de situation.
    Merci.
    Monsieur Opitz, vous avez environ deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question est brève, et je crois que je l'adresserai à M. MacDonald. Comment nous y prendrons-nous pour échanger des renseignements essentiels à l'établissement de l'identité ou du statut d'une personne si le Canada n'a pas conclu d'ententes en matière d'échange de renseignements avec d'autres pays? Avez-vous des commentaires à faire là-dessus? Si aucune procédure en bonne et due forme n'est en place aux fins de l'échange de renseignements, quelles seront les conséquences?
    Il faut que nous disposions des moyens de communication appropriés, et il faut que des limites rigoureusement prescrites soient fixées en ce qui concerne les cas dans lesquels on peut échanger des renseignements, le type de renseignements que l'on peut échanger et les pays avec lesquels nous pouvons le faire. L'échange de renseignements est absolument crucial pour les activités de l'ASFC en matière de sécurité ou d'application de la loi; toutefois, l'échange de renseignements doit se faire selon des règles conçues de façon très minutieuse, il doit être surveillé et être effectué avec le plus grand sérieux.
(0945)
    Je vais maintenant m'adresser au représentant de la GRC, car je ne veux pas qu'il se sente exclu de la discussion.
    J'avais cru comprendre que vous étiez colonel, mais vous êtes inspecteur d'état-major, n'est-ce pas?
    Je vous présente mes excuses.
    Parlez-nous des passeurs de clandestins. Quelles sont les répercussions de leurs activités? Comment s'y prennent-ils pour attirer les gens?
    L'introduction de clandestins est un problème mondial. Cette activité est sous l'emprise du crime organisé. L'expérience nous a appris que l'introduction de clandestins fait intervenir un réseau de réseaux. Partout dans le monde, des personnes qui cherchent à venir au Canada peuvent être recrutées d'un certain nombre de façons. Le passage de clandestins est une activité très complexe pour l'organisation qui s'en charge, surtout si elle se fait par voie maritime — elle exige une très importante logistique, par exemple en ce qui a trait à l'acquisition et à l'approvisionnement d'un navire. Cela exige du financement, souvent d'origine criminelle. Il faut également recruter des passagers, les héberger...
    Il me reste 30 secondes.
    Même pas — votre temps est écoulé.
    Bon, il vous reste 30 secondes.
    Quelles répercussions le trafic des personnes a-t-il sur les personnes, particulièrement sur les femmes? Qu'advient-il de ces personnes?
    Il faut établir une distinction entre l'introduction de clandestins et le trafic de personnes. Dans le cas de l'introduction de clandestins, le clandestin verse une somme d'argent au passeur — il conclut une entente avec lui. Dans le cas du trafic de personnes, on contraint et force des gens à se rendre dans un pays à des fins d'exploitation sexuelle ou d'exploitation par le travail.
    Il arrive qu'une situation d'introduction de clandestins se transforme en cas de trafic de personnes, par exemple lorsque le clandestin a une dette à l'égard d'une organisation criminelle. Parfois, on exploitera la personne de manière à ce qu'elle rembourse cette dette, ou on se servira d'elle dans le cadre d'une activité criminelle.
    Merci, monsieur Opitz.
    Je remercie M. Linklater, M. Hill et les autres témoins de s'être présentés ici ce matin. Vos témoignages ont été très utiles pour le comité. Je vais suspendre la séance pendant cinq minutes.

(0950)
    Merci beaucoup. Nous reprenons nos travaux. Si je ne m'abuse, la prochaine partie de la réunion portera sur la biométrie.
    Monsieur Linklater, je vous souhaite de nouveau la bienvenue. Vous êtes un homme polyvalent. Vous êtes sous-ministre adjoint, Politiques stratégiques et de programmes.
    Monsieur Desruisseaux, vous êtes directeur général, Direction générale de l'admissibilité.
    Marie Estabrooks, vous êtes gestionnaire, Politiques en matière de biométrie, Programmes et projets, Division des nouveaux enjeux liés aux programmes frontaliers de l'Agence des services frontaliers du Canada. Bonjour.
    Enfin, Chuck Walker est directeur général, Services canadiens d'identification criminelle en temps réel, Gendarmerie royale du Canada.
    Merci à vous tous d'être ici.
    Monsieur Linklater, vous disposez d'un maximum de 10 minutes.
    Merci, monsieur le président. Je ne pense pas que j'utiliserai les 10...
    Cela nous laissera plus de temps pour poser des questions.
    Excellent.
    Monsieur le président et membres du comité, je vous souhaite de nouveau le bonjour.
    Nous sommes heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler des modifications proposées par le projet de loi C-31 en ce qui a trait à l'utilisation de la biométrie dans le cadre du programme d'immigration du Canada.

[Français]

    Au début, je vais mettre l'accent sur les avantages du système de biométrie et, par la suite, je vais donner un aperçu relatif à notre mise en oeuvre planifiée pour la biométrie, dont le programme de résidence temporaire de CIC.

[Traduction]

    La vérification de l'identité est essentielle aux décisions prises par les personnes responsables de l'administration et de l'exécution de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés — la LIPR — puisque l'établissement de l'identité exacte d'une personne est l'élément fondamental pour déterminer efficacement son admissibilité. Le défi pour les agents d'immigration et frontaliers du Canada est de repérer les milliers de demandeurs de mauvaise foi parmi les millions de demandes authentiques. En cas de doute, nous devons investir du temps et des ressources pour authentifier l'identité d'un voyageur. Si des doutes subsistent lorsque le voyageur se présente de nouveau devant les agents d'immigration et frontaliers, il pourrait être nécessaire d'investir du temps et des ressources additionnels pour authentifier son identité.
    La biométrie est un outil de gestion de l'identité du XXIe siècle qui permet d'identifier les gens au moyen de caractéristiques physiologiques intrinsèques comme les empreintes digitales. Contrairement aux documents d'identité, les renseignements biométriques sont uniques pour chaque personne et ne peuvent être reproduits facilement.
    La biométrie vient donc compléter les outils de vérification existants fondés sur les renseignements biographiques en réduisant considérablement les risques qu'une personne se fasse passer pour une autre ou soit confondue avec une autre. Une fois que les renseignements biométriques, par exemple les empreintes digitales, ont été enregistrés, l'identité de la personne est établie tant et aussi longtemps que les renseignements sont conservés.

[Français]

    Le recours à la biométrie renforcera l'intégrité du système d'immigration du Canada, comme l'a mentionné le ministre la semaine dernière, en contribuant à empêcher Ies criminels connus, Ies demandeurs d'asile déboutés et les personnes expulsées antérieurement d'utiliser une fausse identité pour obtenir un visa canadien.
(0955)

[Traduction]

    La biométrie permettra également de faciliter les déplacements des voyageurs légitimes au Canada en offrant un outil rapide et fiable pour confirmer l'identité. En outre, l'utilisation de la biométrie permettra au Canada d'harmoniser ses pratiques avec celles de la plupart des autres pays occidentaux qui se servent de la biométrie, ou se préparent à le faire, à des fins d'immigration et de gestion frontalière. Ces pays comprennent le Royaume-Uni, l'Australie, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et de nombreux pays de l'Union européenne.

[Français]

    CIC travaille en partenariat avec l'agence et la GRC pour commencer à utiliser la biométrie dans le programme de résidence temporaire. À partir de 2013, les étrangers de certains pays qui veulent venir au Canada comme touristes, travailleurs temporaires ou étudiants seront tenus de fournir leurs données biométriques pour obtenir un visa.

[Traduction]

    Nous prendrons les empreintes digitales et une photo de toutes les personnes originaires de certains pays visés par l'obligation de visa qui présentent une demande. Les empreintes digitales recueillies seront envoyées à la GRC aux fins de stockage et seront comparées avec les empreintes digitales de demandeurs d'asile, des personnes expulsées antérieurement, des criminels et des anciens demandeurs de visa de résident temporaire. Les résultats de ces vérifications éclaireront le processus de prise de décision en matière de visa. Au point d'entrée, l'agent des services frontaliers utilisera la photo prise à l'étranger pour vérifier que le titulaire du visa est bien la personne à laquelle le visa a été délivré. Les empreintes digitales seront vérifiées aux lignes d'inspection secondaire, à la discrétion de l'agent des services frontaliers. L'utilisation de la biométrie signifie que ces agents seront en mesure de prendre des décisions plus éclairées, en fonction de renseignements plus justes.
    Monsieur le président, il convient de souligner que CIC reconnaît l'importance de se doter de mesures adéquates de protection des renseignements personnels afin de protéger les renseignements biométriques recueillis dans le cadre de cette initiative. C'est pourquoi nous continuons de consulter le Commissariat à la protection de la vie privée pour nous assurer que les mesures adéquates de protection des renseignements personnels sont en place pour tous les aspects de l'initiative.
    Enfin, en ce qui a trait aux articles contenus dans le projet de loi C-31, ils prévoient les pouvoirs nécessaires en matière de collecte et d'utilisation des renseignements personnels en permettant au gouvernement:
    a) d'établir par règlement les règles concernant les étrangers qui doivent fournir des renseignements biométriques, les renseignements qu'ils doivent fournir et les procédures qu'ils doivent suivre au moment de présenter une demande de visa de résident temporaire, de permis de travail ou de permis d'études;
    b) de prévoir des dispenses à ces exigences, par exemple pour les enfants, les personnes âgées ou les diplomates;
    c) d'établir des dispositions réglementaires pour faciliter l'utilisation des renseignements biométriques au regard de l'application des lois canadiennes;
    d) de dispenser de l'application de la Loi sur les frais d'utilisation l'imposition de frais pour l'inscription des renseignements biométriques.
    En vertu du projet de loi, CIC jouira aussi d'un plus grand pouvoir pour fournir des services à l'ASFC et pour collaborer avec d'autres gouvernements en vue de fournir des services aux demandeurs.
    En terminant, je souligne que la collecte et l'utilisation de renseignements biométriques, tel que le prévoit ce projet de loi, renforcera l'intégrité du programme d'immigration du Canada et facilitera les déplacements légitimes tout en protégeant les renseignements personnels des demandeurs.

[Français]

    Je vous remercie de nous avoir écoutés. Nous serons disponibles pour répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Opitz.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins qui viennent de se joindre à nous. M. Linklater s'est présenté si souvent devant le comité que l'on gravera bientôt en permanence son nom sur sa chaise.
    Merci de vous être présentés ici aujourd'hui, et de nous avoir présenté un exposé sur la biométrie, sujet qui revêt une énorme importance. J'ai dû récemment passer par un processus semblable afin d'obtenir ma carte NEXUS — j'ai subi une lecture de l'iris, et on a pris mes empreintes digitales. Cela ne m'a posé aucun problème particulier, et cela facilite assurément mes déplacements, qui s'effectuent très rapidement — à mes yeux, cela est extrêmement commode.
    Monsieur Linklater, durant votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné qu'une deuxième procédure s'applique aux personnes qui cherchent à immigrer ici, dans le cadre de laquelle un agent a la possibilité de vérifier les renseignements biométriques.
    Est-ce que ces renseignements sont vérifiés immédiatement chaque fois, ou le sont-ils seulement à la discrétion de l'agent?
    Je demanderai peut-être à Mme Estabrooks de compléter ma réponse. Pour l'essentiel, dès qu'une personne entrera en contact avec Citoyenneté et Immigration à l'étranger, on établira son identité au moyen des empreintes digitales et de la photo qui seront prises là-bas. Les empreintes digitales seront envoyées à la GRC pour qu'elle vérifie si la personne en question a commis des infractions dans le passé ou si elles correspondent à celles de demandeurs antérieurs. Si aucune préoccupation n'est soulevée, les agents seront en mesure de délivrer le visa à l'étranger.
    Toutefois, au point d'entrée... Nous avons tous été témoins, par exemple, de l'arrivée d'un vol international à l'aéroport Pearson. Les voyageurs, dont bon nombre ne possédaient pas de carte NEXUS, font la queue devant les agents des services frontaliers pour être examinés afin d'être autorisés à entrer au Canada.
    Ce que nous prévoyons, c'est que le nouveau système permettra aux agents des services frontaliers de vérifier l'identité d'une personne en comparant son visage avec la photo qui a été prise d'elle à l'étranger. S'il n'y a aucune préoccupation, la personne sera autorisée à entrer au pays. Si la vérification soulève des questions ou met en évidence des incohérences, l'agent pourra faire subir un deuxième examen à la personne. À ce moment-là, on prendra ses empreintes digitales, et on effectuera une vérification au moyen des renseignements contenus dans la base de données.
(1000)
    Je suis désolé de vous interrompre — alliez-vous ajouter quelque chose à cela, madame Estabrooks?
    D'accord. Excellent.
    Combien de temps exigera la vérification des empreintes digitales? Je sais qu'il ne s'agit pas d'un épisode de CSI. Il faudra envoyer les empreintes à la GRC. Pendant combien de temps une personne sera-t-elle susceptible d'être détenue?
    D'après nos estimations, les vérifications secondaires ajouteront au maximum sept minutes à l'examen.
    C'est très bien, car cela n'est pas très important.
    Je sais que, malheureusement, le Canada a été aux prises avec plusieurs cas de criminels qui ont été expulsés du pays à de multiples reprises et qui ont réussi à revenir ici de nombreuses fois. Comment le nouveau système parviendra-t-il à mettre fin aux situations de ce genre? Dans certains cas, il s'agissait de criminels endurcis ayant commis des crimes très graves.
    Exact. Je crois que le ministre a présenté une liste de personnes ayant été expulsées de nombreuses fois et qui étaient revenues au Canada au moyen de documents frauduleux ou en empruntant une fausse identité.
    En établissant l'identité des personnes qui doivent être munies d'un visa pour entrer au Canada, nous serons en mesure d'éliminer les possibilités de fausses déclarations, ou d'empêcher que des personnes tentent d'utiliser des documents falsifiés ou qui ne leur appartiennent pas. Nous aurons la capacité d'identifier les personnes avant même qu'elles ne se présentent à un point d'entrée en refusant de leur délivrer un nouveau visa en raison de leurs antécédents, ou alors, pour l'essentiel, nous pourrons prendre des mesures coercitives — au point d'entrée, au besoin — si l'identité de la personne qui se trouve devant l'agent ne correspond pas aux renseignements contenus dans la base de données.
    Dans de telles situations, ces personnes seront détenues, et j'imagine que la GRC se penchera sur leur cas. À moins que l'on se contente de les refouler?
    Tout d'abord, l'ASFC procédera à un examen, et ensuite, bien sûr, nous examinerons comment la situation évolue. L'idée consisterait à refuser l'entrée à la personne et à la renvoyer dans son pays. Toutefois, si une personne décide de présenter une demande d'asile, nous devrons accepter de la prendre en considération s'il a été conclu que la personne est admissible.
    Il n'y a aucun représentant de l'ASFC ici, mais j'aurais aimé savoir combien de gens ont été pris à ce jour. Oh, désolé, vous représentez cette organisation. Je pensais à l'autre monsieur. Je vous présente mes excuses.
    Combien de personnes se sont fait prendre à ce jour à tenter d'entrer frauduleusement au Canada? Je sais que vous ne disposez pas encore de moyens biométriques, mais avez-vous été en mesure d'attraper des gens au moyen de cette procédure?
    Il existe un certain nombre d'exemples de cas où la biométrie nous a aidés à identifier des gens. Je n'ai pas les chiffres exacts sous les yeux, mais à coup sûr, la biométrie est un outil qui permet d'identifier une personne qui utilise des documents frauduleux ou une fausse identité. Il s'agit d'un énorme avantage pour les services frontaliers.
    Est-ce que les renseignements contenus dans la base de données biométriques pourront être échangés avec les alliés du Canada, par exemple les États-Unis, le Royaume-Uni et la Grande-Bretagne? Est-ce que vous disposez d'un processus vous permettant d'échanger rapidement des renseignements?
    Le représentant de la GRC voudra peut-être fournir des renseignements supplémentaires, mais pour ma part, je vous dirai, comme je l'ai mentionné durant ma déclaration préliminaire, que nous recueillerons des renseignements biométriques à l'étranger, et que nous les transmettrons à la GRC, qui les stockera et procédera aux vérifications pour notre compte.
    C'est exact. En ce qui concerne les normes, je mentionnerai que, en matière de biométrie, les pays qui ont été mentionnés plus tôt possèdent des normes compatibles. En fait, il existe un organisme, à savoir l'International Information Consortium, qui regroupe le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada, la Nouvelle-Zélande et l'Australie, et qui permet à ces pays de communiquer régulièrement entre eux à propos des normes relatives à l'échange de renseignements biométriques. Ainsi, tout se résume essentiellement à la mise en place des ententes appropriées, comme il a été dit avant la pause, et à la manière dont s'effectue l'échange de renseignements.
    D'un point de vue technique, cela ne pose aucun problème.
    Vous avez parlé du temps et des ressources. Quelles répercussions cela aura-t-il? Ces choses exigent également du temps et de l'argent, et l'enlisement dans des processus administratifs coûte de l'argent au pays. Quelles répercussions cela aura-t-il sur les simples économies, sur les simples budgets de l'ASFC et d'autres organisations?
    En ce qui concerne la mise en oeuvre du projet, j'ai mentionné que nous envisagerions l'imposition de frais liés aux renseignements biométriques, de sorte que nous récupérerons une partie des coûts liés à l'adoption du système de biométrie.
    Nous envisageons l'expansion de notre réseau mondial de centres de réception des demandes de visa de manière à ce que nous puissions nous assurer que nous disposons d'un certain nombre de points de service où les personnes peuvent se rendre pour fournir des renseignements biométriques, comme le font un certain nombre de pays — les États-Unis et le Royaume-Uni, par exemple, utilisent également ce genre de services.
    Je ne dirai pas que cela n'aura aucune incidence sur les personnes qui veulent présenter une demande pour venir au Canada, mais au bout du compte, comme vous l'avez souligné en donnant l'exemple de votre carte NEXUS, le fait d'aller de l'avant avec la biométrie comporte des avantages, et les investissements que l'on fait à cette fin contribuent à faciliter davantage les choses à partir du moment où l'identité d'une personne est établie.
(1005)
    Merci.
    Madame Sims.
    Merci beaucoup.
    Je dois mentionner que je fais partie de ces personnes qui craignent énormément toute violation de leur vie privée, et j'ai donc toujours beaucoup de questions à poser à propos de la biométrie. Je n'ai rien à cacher, mais je suis toujours préoccupée de ce que l'on fera avec les données que l'on recueille.
    J'avais cru comprendre, à la lecture des restrictions touchant la biométrie contenues dans le projet de loi C-31, que les renseignements de nature biométrique n'allaient être utilisés qu'aux fins de l'établissement de l'identité. Toutefois, à la lumière de ce que j'entends, je crois comprendre que toutes sortes d'échanges de renseignements ont lieu. Ainsi, vous pourriez peut-être m'expliquer de façon plus poussée si les renseignements biométriques que nous recueillerons en vertu du projet de loi C-31 pourraient être utilisés à des fins autres que celles de l'établissement de l'identité.
    Je vais demander à M. Desruisseaux de répondre à cette question.
    Les renseignements biométriques seront recueillis à des fins d'immigration et de gestion des frontières. En outre, ces renseignements seront communiqués à CIC et à l'ASFC. Comme M. Linklater l'a mentionné, ils seront stockés par la GRC, et seront utilisés également à des fins d'application de la loi — et ces vérifications présenteront de réels avantages dans les cas où des criminels connus tentent d'entrer au Canada — et pour faciliter les déplacements.

[Français]

    Dans certains cas, l'information peut servir pour recueillir des données complémentaires relativement à des informations qui ont pu être colligées sur des scènes de crime, ce qui peut aussi favoriser le travail des agents d'application de la loi pour ce qui est de l'identification des victimes. Il y a donc plusieurs utilisations possibles dans ce domaine.

[Traduction]

    Des mécanismes de protection des renseignements personnels très efficaces vont être mis au point. CIC travaille en collaboration très étroite avec la commissaire à la protection de la vie privée et les gens de son bureau. Le Canada dispose de règles qui figurent parmi les plus robustes dans le domaine, et on a assurément l'intention d'accorder beaucoup d'attention à cet aspect.
    Est-ce que des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée ont été réalisées dans le cadre des articles 6, 9, 30, 47 et 78? Est-ce que ces évaluations ont déjà été faites?
    Il y en a une qui a déjà été faite à l'égard des services qui vont être fournis par contrat aux CRDV. Il y en aura d'autres, et nous espérons qu'elles seront publiques.
    Je pense qu'il devient très important pour le comité, et pour nous, de savoir que ces évaluations ont été réalisées avant que nous ne commencions à examiner le projet de loi de plus près. Si vous le voulez, je peux répéter les numéros d'article, mais j'espère que vous les avez notés la première fois.
    Il s'agit d'un enjeu extrêmement important, et c'est le genre de choses, comme vous le savez, qui rendent la plupart des Canadiens nerveux, parce que nous attachons beaucoup de prix à la protection de notre vie privée, pas que nous ayons quoi que ce soit à cacher. En ce moment, il y a une limite. C'est une photo, et ça va être les empreintes digitales. Ce sont les deux seules données biométriques dont il est question.
    A-t-on réfléchi à des éléments ou sous-éléments qui pourraient être utilisés? Avez-vous d'autres projets en cours d'élaboration?
    Non. Pour l'instant, les normes internationales s'appuient effectivement sur les empreintes digitales et la reconnaissance du visage. C'est une norme que nous allons chercher à adopter. Tout comme les Américains, dans le cadre de la stratégie du périmètre dont le premier ministre et le président ont annoncé l'adoption, nous cherchons à nous assurer que nous adoptons des démarches complémentaires sur le plan des outils technologiques.
(1010)
    Par ailleurs, je sais que l'information va être conservée par la GRC, mais je veux savoir si d'autres organisations gouvernementales et non gouvernementales — le secteur privé et d'autres groupes — vont pouvoir y avoir accès. Qui peut accéder à l'information, une fois que la GRC en dispose? Nous voulons vraiment obtenir des réponses précises et pas seulement des généralités.
    Certainement. Il y a deux façons d'accéder à l'information que nous conservons dans la banque de données d'identité judiciaire CMP PPU 030, laquelle est décrite dans InfoSource. Cette information est vérifiée à l'aide de données biométriques. Toutefois, il y a une fonction de fichier judiciaire nominatif dans le système du CIPC, le Centre d'information de la police canadienne, qui permet à l'utilisateur d'au moins déterminer s'il semble y avoir un fichier dans la banque de données de l'identité judiciaire. Mais cela revient toujours à la mise en garde selon laquelle la seule façon d'être certain qu'il s'agit de la bonne personne, c'est de soumettre les empreintes digitales.
    En ce qui concerne l'échange d'information biométrique, cet échange se fait par l'intermédiaire du système d'identification en temps réel que la GRC a mis en place au cours des dernières années. Les seuls organismes qui peuvent se brancher sur ce système sont ceux qui ont reçu l'approbation dans le cadre des processus relatifs à la protection de la vie privée, comme l'ASFC et les services de police. Aux fins d'identification de citoyens, dans le respect des exigences relatives à la protection de la vie privée et avec le consentement éclairé de la personne, une société privée de prise d'empreintes digitales qui a été accréditée par la GRC et branchée au système peut également soumettre des empreintes par voie électronique au SITR pour obtenir une réponse.
    Merci. Pourriez-vous communiquer au comité l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée qui a été réalisée? Ce serait bien.
    Pendant combien de temps pensons-nous conserver cette information biométrique? Une fois la vérification effectuée, est-ce que nous la supprimons, ou est-ce que la suppression se fait une fois la résidence temporaire terminée, ou une fois que la personne est devenue un citoyen ou jamais? C'est le genre de questions qui est posée.
    Les règles concernant la conservation de l'information biométrique seront déterminées par voie réglementaire. Ce qui est envisagé pour l'instant, c'est la conservation de l'information pendant 15 ans ou jusqu'à l'obtention de la citoyenneté. C'est ce qui est prévu.
    Ce sera précisé.
    Ce sera précisé dans le règlement.
    D'accord, merci beaucoup. Nous allons pouvoir consulter le règlement avant que les choses aillent de l'avant. Je suis nouvelle, c'est pour cette raison que je pose la question.
    Je ne sais pas ce que vous voulez dire par « avant que les choses aillent de l'avant ». Ce n'est pas comme cela que cela fonctionne. Arrêtez le chronomètre pendant un instant.
    Arrêtez le chronomètre et venez en aide à la nouvelle.
    Vous avez dépassé de 30 secondes le temps qui vous était accordé, mais...
    Simplement pour vous donner quelques renseignements, le projet de loi a été adopté, et il reçoit ensuite la sanction royale. Par la suite, il est renvoyé au ministère pour que celui-ci établisse le règlement d'application. Celui-ci nous revient une fois qu'il est mis au point.
    J'ai essayé.
    C'était un bel essai, mais...
    Merci beaucoup.
    Je...
    Non, non. Malheureusement, le temps qui vous était accordé est écoulé.
    Il est écoulé?
    Il l'était avant que je ne vous interrompe.
    Mme Jinny Jogindera Sims: Merci.
    Le président: Monsieur Lamoureux
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Linklater, le gouvernement a l'intention d'utiliser la biométrie dans tous les pays dont les citoyens ont besoin d'un visa pour venir au Canada, n'est-ce pas?
    Le but ultime serait de nous assurer que nous disposons de cet outil pour tous les pays dont les citoyens ont besoin d'un visa. Toutefois, ce que nous avons fait dans le cadre du Projet de biométrie pour les résidents temporaires, c'est d'envisager un déploiement limité au cours de la première étape afin de nous assurer que la technologie, les activités et les services offerts aux clients touchés vont bien fonctionner avant que nous nous adressions de nouveau au Cabinet pour obtenir un mandat plus large.
    Je suis content de vous l'entendre dire, en fait. Selon vous, à quel moment la biométrie sera-t-elle utilisée dans tous les pays?
    Je pense que le moment va dépendre d'un certain nombre de variables. D'abord, dans le cadre de cette première étape, nous envisageons de commencer à recueillir des données biométriques en juin ou en juillet 2013, probablement, pour plusieurs des pays où nous projetons de le faire à l'heure actuelle. Nous allons donc mettre le modèle à l'essai, nous assurer que tout fonctionne et régler tous les petits problèmes, et je pense que ce sera probablement en 2014 ou en 2015 que nous envisagerons d'élargir le mandat et de donner à la chose une portée plus vaste.
(1015)
    À l'heure actuelle, dans combien de pays les gens ont-ils besoin d'un visa? Une centaine?
    Les pays dont les citoyens ont besoin un visa? Environ 140.
    Vous espérez donc lancer le projet en 2013. Y a-t-il un...?
    Il s'agit probablement de 25 à 30 p. 100 du volume, et pas nécessairement du nombre de pays. Nous délivrons un peu plus de un million de visas dans le monde, ce qui veut dire que nous viserions une couverture de l'ordre de 300 000 à 350 000 demandeurs au cours de la première étape.
    D'accord.
    Pouvez-vous garantir au comité que la mise en oeuvre de la politique ne va en aucun cas retarder le processus de délivrance des visas? Avez-vous le pouvoir de le faire?
    Eh bien, comme je l'ai dit tout à l'heure en réponse à une question, il va y avoir des conséquences pour les clients, qui devront fournir de l'information biométrique. C'est la raison pour laquelle nous envisageons d'étendre notre réseau de centres de réception des demandes de visa pour qu'il compte davantage de points de service. CIC n'a pas de bureau dans tous les pays dont les citoyens ont besoin d'un visa pour venir ici.
    Nous souhaitons nous assurer d'offrir la meilleure couverture possible dans ces centres, de façon à garantir que le processus d'obtention d'un visa est le plus efficace possible. Il se peut que le processus dure un peu plus longtemps, vu l'exigence pour le demandeur de se rendre dans un centre de réception des demandes de visa afin de fournir ses données biométriques.
    Sachant que vous aurez à faire prendre les empreintes digitales par une organisation que vous accréditerez, est-ce que cela va se faire de la même façon que lorsque vous exigez une preuve d'examen médical pour les résidents permanents? L'ambassade du Canada doit donc dire au demandeur où il doit se présenter pour obtenir ses papiers.
    C'est exact. Nous avons un certain nombre de centres de réception des demandes de visa, dans plusieurs pays, où nous avons conclu un marché avec une entreprise qui se spécialise dans ce genre de choses et qui a également fourni ses services au Royaume-Uni, si je ne m'abuse. Ces entreprises vont être nos partenaires accrédités, non seulement pour la réception de la demande, mais aussi pour la collecte de l'information biométrique.
    C'était intéressant. Il y a des pays, et l'Inde en particulier, où il y avait une énorme différence sur le plan des demandes accueillies entre New Delhi et Chandigarh. Croyez-vous que la mise en oeuvre de la biométrie va au bout du compte donner lieu à l'approbation d'un plus grand nombre de visiteurs?
    Je crois qu'elle possède un potentiel car les gens vont comprendre, par exemple, que leur identité va être établie une fois pour toutes. Nous allons pouvoir nous fier davantage à l'information dont nous allons disposer, pour ce qui est de repérer les gens qui essaient d'utiliser différents documents et différentes identités pour demander un visa. Dans certains marchés où il y a de la fraude et notamment de la fraude liée à l'identité, la biométrie va donc nous aider à établir l'identité une fois pour toutes dès le départ, et, dans le cas des voyageurs légitimes, nous permettre de délivrer les visas avec beaucoup plus d'assurance.
    Lorsque des personnes décident d'immigrer au Canada quelques années après avoir présenté une demande de visa, nous avons leurs empreintes digitales au dossier. Utiliseriez-vous ces empreintes digitales ou demanderiez-vous aux gens de fournir de nouvelles empreintes digitales dans leur demande de résidence permanente avant de leur permettre de s'installer au Canada?
    Pour l'instant, il n'est pas prévu d'étendre la biométrie aux demandes de résidence permanente. Nous nous concentrons sur les résidents temporaires dans le cadre du projet en question. À un moment donné, nous souhaiterons peut-être demander de l'information biométrique dans la demande de résidence permanente. Évidemment, cela permettrait d'établir l'identité avec certitude. Dans les cas où nous possédons un dossier dans notre système mondial de gestion des cas, toute l'information sera accessible dans le continuum de renseignements sur les clients.
    Merci.
    Madame James.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être restés.
    En réalité, le processus d'utilisation de l'information biométrique se déroule en deux temps. Premièrement, nous devons nous assurer que la personne qui présente la demande est bel et bien celle qui se présente. Deuxièmement, si la personne qui présente la demande n'est pas la personne qu'elle dit être, il est vraiment important que nous soyons en mesure de vérifier les données biométriques auprès des autorités étrangères.
    Pourriez-vous aborder l'aspect des autres pays qui utilisent eux aussi la biométrie et du fait que nous allons être en mesure de faire des vérifications dans les bases de données pour nous assurer que la personne qui présente la demande est bel et bien la personne qu'elle prétend être, et que la personne qui soumet la demande est bel et bien celle qui se présente?
    Je vais commencer, et peut-être M. Desruisseaux pourra-t-il compléter.
    Nous collaborons très étroitement avec nos principaux alliés, les membres de ce que nous appelons la Conférence des cinq pays: les États-Unis, l'Australie, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande. Dans le cadre de ce processus, l'Australie héberge depuis quelques années un serveur vers lequel tous les pays envoient une quantité limitée d'informations biométriques aux fins de vérification et de comparaison avec les données soumises par les autres membres.
    Ce que nous avons constaté, c'est qu'il y a eu un certain nombre d'exemples pour tous les pays où nous avons appris qu'une personne a essayé d'entrer dans un pays à l'aide d'identités différentes, et dans un cas précis, d'entrer dans les cinq pays en utilisant chaque fois une identité différente. Il y a un cas particulièrement alarmant où une personne a réussi à entrer en Australie sous une fausse identité, je crois, mais où, comme l'information biométrique avait été recueillie, on a été en mesure de la renvoyer au Royaume-Uni, où elle fait face à des accusations pour agressions sexuelles. Nous croyons qu'il s'agit d'un outil qui va nous permettre de protéger le Canada et les Canadiens beaucoup mieux que nous pouvons le faire en ce moment en utilisant de simples renseignements biographiques qui sont échangés pour garantir que nous savons, comme vous dites, que la personne qui se présente est bel et bien la personne qui a fait la demande.
(1020)
    Merci.
    Encore une fois, la biométrie n'est pas quelque chose de nouveau.
    Non.
    À l'échelle mondiale, le Canada est en fait en train de rattraper le reste du monde à de nombreux égards.
    C'est juste.
    Dans votre exposé, vous avez dit que l'utilisation de la biométrie va renforcer l'intégrité du programme d'immigration du Canada en contribuant à empêcher les criminels notoires, les demandeurs d'asile déboutés et les personnes ayant été expulsées antérieurement d'obtenir un visa canadien sous une fausse identité. Mis à part ce qui concerne l'obtention d'un visa canadien, va-t-on utiliser la biométrie dans les cas d'arrivées massives et de passages de clandestins, par exemple? Allons-nous être en mesure de faire une vérification dans la base de données et d'utiliser la biométrie dans ces cas?
    Pour ce qui est des gens qui entrent au Canada à l'heure actuelle à titre de demandeurs d'asile... Qu'ils entrent ou non dans le cadre de ce qu'on appelle une arrivée massive, nous recueillons de l'information biométrique auprès des demandeurs d'asile depuis un bon nombre d'années, et nous allons continuer de le faire.
    Nous échangeons de l'information biométrique avec les États-Unis de façon assez régulière. Ce processus nous a permis de déterminer qu'un nombre important de demandeurs d'asile au Canada sont connus des autorités américaines pour différentes raisons, que ce soit pour avoir déjà présenté une demande d'asile ou parce qu'ils ont commis une quelconque infraction criminelle ou ont un casier aux États-Unis.
    Merci.
    Au cours de la séance précédente, nous avons parlé des deux navires qui sont arrivés, le Ocean Lady et le Sun Sea. Des 492 personnes qui étaient à bord du Sun Sea, il y en avait encore 6 qui étaient détenues, d'après ce que quelqu'un a dit.
    Elles sont encore en détention.
    Est-ce que c'était en raison de l'utilisation de la biométrie, ou est-ce que ce se serait passé différemment s'il avait été possible d'utiliser la biométrie à l'égard de ces personnes?
    Les choses auraient pu se passer différemment.
    En outre, nous devons faire très attention au moment et à la façon dont nous échangeons de l'information avec de nombreux pays. Je dis cela parce que, si nous échangeons des renseignements avec un pays qui serait à l'origine d'une persécution et que l'on déterminait que la personne n'a pas besoin de protection, nous pourrions créer, en échangeant des renseignements, ce que nous appellerions un réfugié sur place. Il se pourrait que la personne n'ait pas eu de crainte de persécution auparavant, mais que, en transmettant ses renseignements personnels et en divulguant le fait qu'elle a présenté une demande au Canada, nous la mettions en danger en la renvoyant dans son pays. C'est la raison pour laquelle en recourant à la GRC, que nous chargerons de diffuser l'information par l'intermédiaire de ses relations, qu'il s'agisse d'Interpol ou d'autres bases de données à laquelle elle a accès, je pense que nous allons être en mesure de gérer ce genre de situations avec beaucoup plus de prudence.
    Je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose, Chuck.
    Je pense que vous avez pas mal fait le tour de la question.
    Le bon sens nous dit — à moi, en tout cas — que nous devons identifier les gens avant qu'ils n'arrivent au Canada. Nous entendons parler de ce qu'il en coûte aux contribuables de maintenir une personne en détention si elle arrive sans papier, alors nous devons identifier les gens.
    Pouvez-vous parler de la difficulté à localiser une personne qui a échappé au contrôle, une personne que nous n'avons pas pu identifier, qui s'est installée ici par des moyens frauduleux ou grâce au crime organisé? À quel point est-il difficile de localiser une personne dans cette situation et de l'expulser du Canada? Par ailleurs, dans quelle mesure la biométrie serait-elle utile à cet égard, si nous étions en mesure d'identifier les gens au départ?
    L'ASFC est chargée de la gestion des renvois et des expulsions. Il est très difficile pour l'agence de savoir où se trouvent les demandeurs d'asile déboutés qui ne sont pas en détention. Les gens sont souvent libérés sous réserve de certaines conditions. Beaucoup ne le sont pas, mais il y a des gens qui ne signalent pas leur changement d'adresse à l'agence ou qui décident d'aller aux États-Unis, ou encore de rentrer dans leur pays. L'une des lacunes qui existent en ce moment et que nous chercherons à combler, c'est l'absence de système d'information de sortie, et il s'agit d'une des initiatives qui vont être mises en branle bientôt dans le cadre de la stratégie du périmètre en collaboration avec les États-Unis. Cela va permettre à l'agence de savoir si des gens ont quitté le pays, volontairement ou pas. Cela va l'aider à cibler ses recherches pour déterminer où les gens en question peuvent être, dans les cas où l'on sait qu'ils n'ont pas quitté le pays.
(1025)
    Je vais poser une brève question concernant l'échange d'information avec d'autres pays. Comment fait-on pour savoir que les autres pays s'en tiennent à l'utilisation que nous autorisons? Je pense que M. Walker a expliqué qui a accès à l'information. Toutefois, celle-ci pourrait se retrouver entre les mains des dirigeants d'autres régimes. Y a-t-il des accords? Comment pouvons-nous savoir si les dirigeants d'autres régimes ou d'autres pays s'en tiennent à l'utilisation de l'information que le Canada autorise?
    Je dirais que vous avez mis le doigt sur la principale difficulté en ce qui concerne l'échange d'information, qu'elle soit de nature biométrique ou autre. Les accords sont essentiels, et ils doivent être conclus en tenant compte des valeurs canadiennes en ce qui concerne le respect de la vie privée et l'identité des personnes qui accèdent à l'information. Je ne sais pas ce que je pourrais vous dire pour vous donner des garanties définitives. Le Centre d'information de la police canadienne échange de l'information biographique avec les États-Unis par leur système du NCIC, qui est l'équivalent de notre CIPC, et il y a donc des mécanismes de contrôle en place qui garantissent que l'information est envoyée là où elle doit être et pas ailleurs. Toutefois, nous ne faisons pas de vérification entre les pays. Voilà en quoi consiste l'accord actuel en matière d'échange d'information biographique.
    La raison pour laquelle j'ai posé la question, c'est que M. Linklater a dit que si l'information était communiquée à certains pays, cela pourrait causer des problèmes aux personnes concernées.
    Je pense que je vais m'arrêter là. Si vous avez plus d'information à un moment donné, vous pourriez la fournir au comité.
    Je suis d'accord avec Mme Sims. Nous tenons au respect de la vie privée, que ce soit pour les Canadiens ou pour d'autres qui veulent devenir Canadiens, et c'est le genre de choses qui nous préoccupent.
    Madame Groguhé.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais savoir dans quelle proportion la biométrie a réduit les entrées avec une fausse identité en Australie, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Pourriez-vous nous donner des chiffres concernant ces différents pays? Si vous ne pouvez pas le faire maintenant, pouvez-vous nous envoyer ces informations ultérieurement?

[Traduction]

    Je n'ai pas les chiffres là-dessus.

[Français]

    On a quelques statistiques. Je ne les ai pas présentement avec moi, mais on pourrait les faire parvenir au comité.
    D'accord.
    De façon générale, est-ce que ces chiffres sont assez élevés? Pouvez-vous nous en donner une idée sommaire?
    J'ai vu des rapports sur quelques cas. On a mis l'accent non pas tant sur leur volume que sur leur importance. Dans certains cas, on parle de criminels dangereux et, dans d'autres, de fraudes systématiques et répétées. Il s'agit en quelque sorte de faire l'historique. Quoi qu'il en soit, on va voir quelles statistiques sont disponibles.
    Autrement dit, on insiste plus sur les aspects qualitatifs que quantitatifs.
    Exactement.
    Combien avez-vous intercepté de personnes entrées au Canada au moyen d'une fausse identité et à quel niveau situez-vous les lacunes que la biométrie va corriger?
(1030)

[Traduction]

    Je n'ai pas les chiffres exacts concernant le nombre de gens que nous avons arrêtés. Toutefois, nous allons verser les données dans notre base de données et connaître de plus en plus de personnes, et la biométrie va permettre à l'Agence des services frontaliers d'identifier une personne et d'établir son identité de façon définitive. C'est un outil extraordinaire pour identifier une personne ou encore pour déterminer sous quelle identité elle a présenté une demande dans le passé.

[Français]

    Si je comprends bien votre réponse, on ne dispose pas à ce jour de mesures spécifiques concernant ces fausses identités.

[Traduction]

    Je pourrais fournir plus tard des chiffres plus précis au comité. Je ne les ai pas devant moi.

[Français]

    D'accord.
    Je vais céder la parole à mon collègue Alain Giguère.
    Ma question concerne les bases de données qui vont servir à constituer votre registre. Je sais que la Gendarmerie royale du Canada est le point de contact avec Interpol. Quand les empreintes des gens vont être prises, est-ce que celles-ci vont être comparées à celles contenues dans les bases de données d'Interpol?

[Traduction]

    Il faudrait que je vérifie pour pouvoir vous répondre. L'impression que j'ai, c'est que cela se fait au cas par cas et selon le bien-fondé de la question qui fait l'objet de l'enquête. Autrement dit, il n'y a pas de système en place qui envoie automatiquement de l'information de cette nature dans un sens et dans l'autre.

[Français]

    Très bien.
    Des accords ont été conclus avec un certain nombre de pays, dont les USA, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Or, ceux-ci sont tous membres du réseau Echelon. Est-ce que les bases de données de ce réseau vont être intégrées à la base de vérification?

[Traduction]

    Ce n'est pas prévu pour l'instant. Le dialogue actuel entre les pays porte en grande partie sur les normes relatives à l'information, le but étant de garantir que des normes semblables sont appliquées lorsqu'on met en au point les solutions techniques. Cela permet de...

[Français]

    Ce n'est pas technique. Je vais vous donner un exemple bien clair. Les bases de données du MI6 anglais seront-elles intégrées et disponibles aux fins des vérifications? Le MI6 fait partie d'Echelon.

[Traduction]

    Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit de prévu à cet égard pour l'instant.

[Français]

    Pouvez-vous me faire parvenir une réponse concernant les bases de données d'Interpol et d'Echelon? Je vous rappelle que la GRC est le point de contact avec ces deux entités. Echelon et Interpol passent par la GRC. À l'époque, cela prenait deux ou trois semaines, mais maintenant, grâce à l'informatique, vous allez pouvoir le faire en sept minutes. J'aurais bien aimé que ce soit le cas à l'époque. Cela m'aurait été bien utile.
    Qu'arrive-t-il une fois ces renseignements obtenus? Le réseau Echelon fait une vérification non seulement sur les dossiers criminels, mais aussi sur l'identité politique des personnes. Dans ce contexte, le renseignement...

[Traduction]

    J'ai bien peur que le temps soit écoulé. Votre nom figure sur la liste pour un autre tour.
    Monsieur Weston.
    Merci, monsieur le président.
    Nous examinons ce qu'il y a de préoccupant dans le fait de laisser des renseignements personnels aboutir entre les mains de dirigeants de pays qui pourraient ne pas respecter les valeurs du gouvernement, et je pense que, dans ces pays, nous n'aurions pas la possibilité de poser des questions à des gens comme vous, qui occupent le même genre de postes importants, et nous vous sommes reconnaissants d'être ici ce matin. Merci.
    Mon collègue, M. Opitz, a parlé des répercussions du programme NEXUS. Hier encore, j'ai été en contact avec un autre programme du genre, qui, pour vous citer, monsieur Linklater, garantit que la personne qui se présente est celle qui a fait la demande. Dans le cadre de ce programme, il faut obtenir une photo et une carte, et la carte doit être présentée au début de l'événement. L'événement en question est une partie de soccer pour les moins de 14 ans qui a lieu en Ontario, et, à un moment donné, les enfants doivent présenter leur carte.
    Là où je veux en venir, c'est qu'il faut bien se rendre compte que, même si le respect de la vie privée nous préoccupe — et cela nous préoccupe tous —, les répercussions du recours à la biométrie dépassent de loin le contexte de l'immigration que nous envisageons aujourd'hui.
    J'aimerais revenir sur l'idée que de l'information puisse aboutir entre les mains des dirigeants d'États souverains sur lesquels nous n'exerçons aucun pouvoir, et je me demandais si vous pouviez me donner quelques exemples de mécanismes de protection précis qui s'ajoutent à ce que vous avez déjà dit, de sorte que nous n'imaginions pas...
    L'information recueillie ici, par exemple, est communiquée au gouvernement iranien. Les citoyens de la circonscription que je représente, West Vancouver—Sunshine Coast—Sea to Sky Country, seraient très préoccupés par cela, et je suis sûr qu'il y a d'autres gens qui ont des préoccupations similaires.
(1035)
    Essentiellement, nous devons faire très attention de ne pas communiquer d'information systématique qui pourrait causer des problèmes à certaines personnes, comme dans le cas que vous avez cité.
    Lorsque nous recueillerons les données biométriques, comme nous l'avons dit, nous chercherons à échanger des renseignements au sujet des antécédents criminels et en matière d'immigration au Canada, et ce, avec des partenaires de confiance.
    Je pense que ce qui va être important au sujet de l'échange de renseignements avec nos partenaires, c'est de comprendre que ce ne sera pas tout un paquet d'information au dossier qui sera envoyé proactivement et systématiquement à nos partenaires, mais que nous allons envoyer des empreintes digitales, par exemple, et s'il y a une correspondance, à ce moment-là, cela va déclencher un échange au cas par cas avec le partenaire pour nous assurer que nous obtenons seulement l'information pertinente et essentielle à la prise d'une décision à l'égard de l'immigration ou de l'application de la loi. Nous ne dirions pas dès le départ — suivez-moi bien — voici les empreintes digitales de Jocelyn Bilodeau, né à telle date dans tel pays. Nous enverrions les empreintes digitales, et, s'il y avait une correspondance, nous demanderions à notre partenaire de nous communiquer l'information négative sans plus de détails.
    Puis-je simplement énoncer l'évidence et dire que nous n'échangerions pas de l'information avec un gouvernement comme le gouvernement iranien?
    C'est exact.
    Ce serait seulement avec les pays que vous avez nommés. Vous avez mentionné que, à l'heure actuelle, nous échangeons de l'information avec les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni, je crois. Pourquoi avons-nous choisi ces pays? Je crois connaître la réponse, mais j'aimerais vous l'entendre dire.
    Essentiellement, les cinq pays collaborent dans un certain nombre de domaines. Nous partageons des intérêts sur le plan du maintien de nos systèmes d'immigration. Nous partageons une partie de notre histoire et un cadre juridique commun, avec quelques variations.
    Et peut-être aussi un engagement commun à l'égard de certaines valeurs démocratiques.
    Assurément.
    Monsieur Walker, aimeriez-vous dire quelque chose sur ce qui s'est dit?
    C'est un sujet qui est très intéressant et tout à fait d'actualité, et c'est une chose à laquelle j'ai beaucoup réfléchi dans le cadre de mes anciennes fonctions de directeur général du Centre d'information de la police canadienne, parce que nous avons un processus établi d'échange avec... Je vais utiliser les États-Unis comme principal exemple. Nous échangeons de l'information avec les États-Unis par l'intermédiaire de cette passerelle que j'ai décrite tout à l'heure. Cela ne signifie pas que la chose n'a pas créé de problèmes pour les citoyens canadiens qui franchissent la frontière, puisque les États-Unis sont un pays souverain et prennent leurs propres décisions en ce qui concerne l'admissibilité. Nous ne pouvons pas y faire grand-chose.
    Ce que je dirais, pour ce qui est de l'échange de différents types d'information, c'est que la meilleure approche, du point de vue du respect de la vie privée, c'est toujours de créer une possibilité de découverte, et non, comme on l'a dit, de diffuser le dossier, si vous voulez. La création d'une possibilité de découverte permet un dialogue précis entre les parties intéressées, et l'information qui est détenue par la source peut alors être diffusée adéquatement en fonction des lois du pays.
    Merci. Le temps est écoulé.
    Monsieur Leung.
    Merci, monsieur le président.
    En fait, je veux donner suite à la question abordée par M. Walker. D'après ce que je comprends, l'idée de recourir à la biométrie, c'est pour la protection des frontières du Canada. Ce qui nous préoccupe, en réalité, ce sont les gens qui franchissent nos frontières. Les Canadiens qui se rendront aux États-Unis, par exemple, auront aussi à soumettre volontairement leurs données biométriques aux services frontaliers.
    Je veux simplement préciser que nous parlons de gens qui ne sont pas des citoyens canadiens. Le but du recours à la biométrie, c'est de compléter le contrôle exercé à l'entrée et à la sortie, et cela concerne au fond les gens qui franchissent nos frontières et qui ne sont pas des citoyens canadiens. Est-ce exact? Pouvez-vous dire quelque chose là-dessus, s'il vous plaît?
(1040)
    Oui, c'est exact. Personne ici ne pense que nous devons ou que nous devrions recueillir de l'information biométique sur les citoyens canadiens.
    Ainsi, ceux qui sont Canadiens... À moins que nous nous rendions dans un pays comme le Royaume-Uni, ou encore l'Australie... Ils ont également le droit de demander cette information sur nous.
    J'ai besoin de savoir si, en ce qui concerne la technologie, nous en sommes arrivés au point où nous avons la capacité de recueillir cette énorme quantité d'informations concernant les 300 000 personnes qui arrivent. J'imagine que cela peut continuer au même rythme chaque année. Dans très peu de temps, nous aurons peut-être des fiches sur des dizaines de millions de personnes dans une base de données. Sur le plan technologique, avons-nous la capacité nécessaire?
    Oui, nous avons les outils technologiques nécessaires, et nous sommes en fait en train de définir les spécifications des outils technologiques que le soumissionnaire devra mettre à notre disposition pour la réalisation du marché. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous envisageons la chose comme un déploiement assez limité, au départ, pour nous assurer de bien faire les choses et que nous disposons de la plateforme à laquelle nous pourrons ajouter graduellement des choses jusqu'à ce que nous puissions l'étendre à l'ensemble du programme des résidents temporaires.
    Je vois.
    Y a-t-il une estimation de coût pour la mise en place de ces outils technologiques?
    Je ne connais pas les chiffres par coeur, mais je pense que M. Desruisseaux les a.
    Oui, le budget qui a été dégagé pour l'initiative est de 174 millions de dollars sur cinq ans.
    En fait, cela semble être un coût assez modeste pour le genre de sécurité que nous allons obtenir.
    Vous avez dit que le déploiement ne se fera pas avant 2013.
    C'est exact.
    Je vois. D'accord.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste deux ou trois minutes, si vous voulez, monsieur.
    Oh, j'ai deux ou trois minutes.
    Je veux revenir sur les arrivées massives. Lorsque les gens arrivent au Canada, s'ils arrivent par avion, ils franchissent la frontière, et il est facile de leur demander des documents. Lorsqu'une personne vient au Canada à partir de l'étranger, par exemple, elle doit montrer son passeport aux représentants de la ligne aérienne pour qu'on établisse son identité.
    Si la personne monte à bord de l'avion avec ses pièces d'identité, qu'elle les détruit dans l'avion et descend ensuite de celui-ci, qu'est-ce qui se passe? Voulez-vous nous décrire le processus que nous suivons lorsque nous nous occupons de gens qui arrivent à l'aéroport sans papier?
    Mon autre question est la suivante: que faisons-nous dans le cas d'arrivées massives de gens qui n'ont pas de papier, les arrivées massives du Sun Sea ou d'autres arrivées massives qui se sont produites récemment?
    Très rapidement, si une personne descend d'un avion sans papier et présente une demande d'asile, l'ASFC l'interroge pour déterminer, dans la mesure du possible, la meilleure façon d'établir son identité. Il se peut en fait que la personne collabore avec nous et nous permette d'établir son identité, auquel cas son dossier est renvoyé à la CISR dans le cadre de la LIPR, pour la suite du traitement de sa demande. Il s'agit d'une personne qui arrive par avion après avoir déchiqueté ou détruit ses pièces d'identité.
    Dans le cas des arrivées de masse, le processus est en fait le même. Le cadre législatif demeure le même. Le problème que pose l'arrivée massive est en grande partie lié au volume et à l'endroit où cela se passe. Si les gens arrivent par bateau, par exemple, ça peut être à un endroit où l'ASFC et CIC n'ont pas de bureaux, ou encore la CISR, et, dans ce cas, nous pouvons prendre des dispositions d'ordre logistique pour héberger les gens et leur faire subir un examen médical aux fins de l'immigration, et ensuite suivre le processus d'établissement de l'identité.
    Monsieur Giguère, vous avez de nouveau la parole, monsieur.

[Français]

    C'est très bien.

[Traduction]

    Vous pouvez poser la question que vous étiez en train de poser lorsque je vous ai interrompu.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Parlons des vérifications de ces données biométriques.
    La personne sur laquelle on fait une enquête a-t-elle un droit de regard sur l'évolution de son dossier et sur la transmission de son dossier à d'autres agences?
(1045)

[Traduction]

    Je peux peut-être commencer et laisser M. Walker compléter ma réponse.

[Français]

    Tout ce qui concerne le partage des informations se passera, comme on dit, dans la salle qui se trouve à l'arrière. Essentiellement, les clients ne vont pas connaître le processus de vérification auprès de nos partenaires fédéraux nous permettant d'arriver à une recommandation ou à une décision relative aux agents à l'étranger.
    J'aimerais revenir un peu à la composition de votre base de données. Si c'est à l'interne, vous allez inclure les bases de données des pays étrangers. Cela est une chose, mais si vous faites une demande à Interpol, cette organisation saura que le dossier de cette personne est étudié au Canada. Cela fait donc partie de la banque de données générales et tous les membres d'Interpol y ont accès. Je me souviens bien de la situation à l'époque. C'était ainsi que cela se passait. Dès que vous faites une demande à Interpol, l'ensemble des pays membres d'Interpol sont informés que cette personne a fait une demande de visa au Canada. Est-ce exact?

[Traduction]

    Je peux seulement répondre en vous disant que je considérerais l'évaluation comme étant exacte, parce que je ne connais pas beaucoup Interpol.
    Il serait peut-être utile que je définisse le travail du SCICTR. Il s'agit essentiellement d'un service de police national, ce qui fait que mon rôle consiste en grande partie à fournir des services à des entités opérationnelles. Interpol est un client. Dans les affaires d'immigration, Citoyenneté et Immigration Canada est un client. M. Oliver, qui a témoigné devant vous plus tôt, travaille dans un secteur de la GRC qui est plus directement lié aux affaires opérationnelles de l'immigration, des passeports et liées à d'autres secteurs d'application des lois fédérales de la GRC.
    Mon rôle consiste surtout à fournir des services à des clients. En fait, la GRC est un autre de mes clients.

[Français]

    C'est très bien.
    J'aimerais revenir précisément à des dossiers que j'ai déjà traités. Parlons de l'Armée du Liban Sud. Ces renseignements nous provenaient en grande partie d'Interpol. À partir du moment où Interpol était informé, le gouvernement libanais savait que des membres de l'Armée du Liban Sud se trouvaient au Canada et allaient probablement être déportés. Ils ont d'ailleurs tous été déportés. C'est peut-être pertinent pour ces gens, qui se trouvaient dans une situation extrêmement embarrassante, alors qu'ils retournaient dans un pays où le gouvernement savait très bien qu'ils avaient fait quelque chose qu'il n'aimait pas. Comment pouvez-vous garantir que nous n'allons pas participer à des sanctions de nature politique?
    J'aimerais souligner comment on va circonscrire l'accessibilité aux données qu'on va recueillir. Au début, on fait affaire avec des partenaires en qui on a confiance et avec qui on peut travailler. Comme je l'ai dit plus tôt, nous n'allons pas transmettre toutes les informations que nous avons dans des domaines où on nous n'avons pas de contrôle sur leur circulation ou sur la façon dont elles vont être partagées avec d'autres entités. C'est pourquoi, comme M. Desruisseaux l'a mentionné, on travaille avec le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada pour s'assurer que lorsqu'on partage des informations en établissant des contrôles adéquats pour s'assurer qu'on garde la protection des renseignements personnels pour les gens qui vont être touchés par nos services.
    Je retiens deux de vos réponses.
     Premièrement, les gens qui donnent leurs renseignements biométriques n'ont pas de contrôle sur le transfert ou non de leur dossier à des gouvernements étrangers.
     Deuxièmement, vous reconnaissez le fait que vous allez faire affaire avec Interpol et qu'Interpol donne ce renseignement à tous ses participants.
    Pour clarifier, on ne partagera pas d'informations personnelles avec des entités comme Interpol s'il n'y a pas de contrôle adéquat en vigueur. En ce moment, un tel contrôle à Interpol sur le partage d'informations n'est pas prévu. On a des contrôles adéquats avec nos partenaires clés, soit les États-Unis, l'Australie, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande. On partage maintenant avec eux des informations biographiques dans des circonstances vraiment circonscrites. Cela restera le modèle pour la mise en oeuvre du projet sur la biométrie. On ne va pas partager d'informations avec des partenaires sans avoir ces assurances comme telles. Cependant, les institutions fédérales doivent partager entre elles ces informations afin de faire avancer les dossiers.
(1050)

[Traduction]

    Je l'ai laissé continuer. Nous avons dépassé le temps prévu de beaucoup.
    C'était une bonne question.
    Monsieur Menegakis, vous avez le temps de poser une question brève.
     Monsieur Linklater, vous avez dit de la biométrie qu'il s'agit d'un outil de gestion de l'identité du XXIe siècle. C'est un outil qui, je crois, va permettre à notre gouvernement, à la GRC, à l'ASFC, au SCRS et aux services de police dans l'ensemble du pays d'identifier les gens louches et de les empêcher d'entrer au pays.
    Permettez-moi simplement de dire ceci au lieu de poser une question: si nous laissons entrer 254 000 nouveaux Canadiens chaque année et que nous partons du principe que 99 p. 100 d'entre eux sont des citoyens respectueux de la loi et que 1 p. 100 ne le sont pas — en fait, si nous présumons que ces proportions sont de 99,9 p. 100 et 0,01 p. 100 de réputation douteuse, nous laisserions entrer 254 personnes au pays, dans nos quartiers, qui pourraient éventuellement mettre en grand danger des familles du Canada.
    Voilà, j'ai pris la minute que j'avais, monsieur.
    Merci.
    Bon travail.
    Merci à vous tous d'être venus et merci de votre contribution aux travaux du comité. Merci beaucoup.
    Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes.

(1055)
    Nous reprenons nos travaux.
    Avant d'oublier, je tiens à vous dire que les analystes ont préparé des documents pour la séance d'aujourd'hui. Je vous conseille de les rapporter cet après-midi, parce que nous n'allons pas les distribuer de nouveau aujourd'hui.
    Nous allons entamer la dernière séance de la matinée. Nous recevons deux professeurs. Il s'agit de Mme Audrey Macklin, qui représente le David Asper Centre for Constitution Rights de l'Université de Toronto. Nous recevons aussi M. Sean Rehaag, qui est professeur adjoint à la Osgoode Hall Law School de l'Université York.
    Bonjour.
    D'après ce qu'on m'a dit, monsieur, vous allez utiliser une présentation PowerPoint pour la deuxième partie.
    Vous disposez de dix minutes pour présenter votre exposé, monsieur. Vous pouvez utiliser PowerPoint ou simplement nous parler, comme vous voudrez.
    Notre deuxième intervenant est Mme Barbara Jackman, avocate, et elle disposera elle aussi de dix minutes.
    Bonjour, madame Jackman.
    Monsieur Rehaag, vous pouvez commencer. Vous avez dix minutes, monsieur.
    Merci.
    Je m'appelle Sean Rehaag. Je suis professeur à la Osgoode Hall Law School. Je suis accompagné de Mme Audrey Macklin, professeure à la faculté de droit de l'Université de Toronto. Nous travaillons tous les deux surtout dans le domaine du droit de l'immigration et des réfugiés.
    Madame Macklin et moi partageons bon nombre des préoccupations concernant le projet de loi C-31 exprimées dans les mémoires soumis par les représentants de l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés, de l'Association du Barreau canadien et du Conseil canadien pour les réfugiés.
    Toutefois, plutôt que de tenter de résumer ces préoccupations ici, ce que nous aimerions faire, c'est de nous concentrer sur deux questions précises. Je vais parler de la Section d'appel des réfugiés, et Mme Macklin va parler des raisons pour lesquelles le projet de loi ne devrait pas conférer de nouveaux pouvoirs au ministre à l'égard du refus d'accorder la résidence permanente à des réfugiés.
    Permettez-moi d'aborder dès maintenant et rapidement les trois points que j'aimerais soulever concernant la Section d'appel des réfugiés.
    La première chose que je veux faire, c'est de rappeler au comité que les décisions concernant les réfugiés font partie des décisions les plus graves qui sont rendues au Canada. Si des personnes qui respectent les critères ne sont pas reconnues comme étant des réfugiés, elles peuvent être expulsées vers un pays où elles feront peut-être face à la persécution, à la torture ou même à la mort. En raison de ces enjeux de vie ou de mort, la Cour suprême a déterminé que les décisions concernant les réfugiés font intervenir des droits constitutionnels à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne.
    La deuxième chose que j'aimerais dire, c'est que tous les processus décisionnels d'ordre administratif peuvent contenir des erreurs et que les décisions concernant les réfugiés ne font pas exception à la règle. En fait, les décisions concernant les réfugiés sont susceptibles de contenir plus d'erreurs en raison des difficultés inhérentes à ce type de processus décisionnel. Les difficultés sont entre autres celles d'avoir à tirer des conclusions de fait au sujet de choses qui pourraient se passer dans l'avenir et dans des pays lointains et d'avoir à rendre des décisions concernant la crédibilité fondées sur le témoignage de demandeurs qui souffrent parfois de stress post-traumatique, qui ont dans certains cas un bagage culturel très différent du nôtre et dont le témoignage est habituellement soumis au filtre de l'interprétation.
    En plus de ces difficultés, il y a des preuves abondantes du fait que les décisions de la CISR concernant les réfugiés sont beaucoup trop souvent arbitraires. Depuis six ans, je publie des chiffres sur le site Web du Conseil canadien pour les réfugiés à l'égard du nombre de demandes d'asile accueillies par la CISR chaque année. Tous les ans, des écarts spectaculaires ressortent clairement de ces chiffres, certains commissaires accordant le statut de réfugié dans presque tous les cas qui leur sont soumis, alors que d'autres ne l'accordent que très rarement, voire jamais.
    Même lorsque des facteurs comme le pays d'origine sont pris en compte, des écarts très importants et inexpliqués continuent de ressortir à l'égard du nombre de demandes d'asile accueillies, ce qui donne à penser que l'issue dépend au moins en partie de la chance, de la personne qui examine la demande. Dans ce contexte, les erreurs touchant les décisions relatives aux réfugiés rendues par la CISR sont non seulement inévitables, mais probablement aussi chose courante.
    La deuxième chose que je veux dire, c'est donc que vu la probabilité que des erreurs soient commises et les enjeux de vie et de mort qui sont présents, il est essentiel que les demandeurs d'asile aient accès à un processus d'appel pour permettre de corriger les erreurs de façon fiable.
    La troisième chose que je veux dire, c'est que, mis à part les appels sur le fond à la Section d'appel des réfugiés, il n'y a pas de moyen fiable de repérer les erreurs dans les décisions concernant les réfugiés. Évidemment, il est possible de présenter une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale. Toutefois, le contrôle judiciaire est un processus très strict. Les demandeurs d'asile doivent demander l'autorisation ou la permission à la Cour avant de pouvoir avoir une audience. Dans la vaste majorité des cas, c'est-à-dire environ 85 p. 100 de ceux-ci, la demande d'autorisation est rejetée. Même lorsqu'elle est accueillie et qu'une audience est tenue, il y a des contraintes concernant le processus. Ce qui est encore plus important, c'est que la Cour fédérale ne réexamine que rarement les conclusions de fait ou les décisions liées à la crédibilité de la CISR. La plupart des cas reposent en fait sur ces facteurs.
    En plus de ces contraintes procédurales, il y a des preuves de ce que le processus décisionnel de la Cour fédérale dans ce domaine n'est pas uniforme. J'ai publié cette année une étude portant sur 23 000 demandes de contrôle judiciaire à l'égard de décisions concernant les réfugiés rendues entre 2005 et 2010. Au cours de cette période, certains juges de la Cour fédérale ont autorisé le contrôle dans 1 p 100 des cas, alors que d'autres l'ont accordé dans plus de 70 p. 100 des cas. C'est dont vraiment une question de chance; l'issue dépend de la personne qui examine le cas.
    Ensemble, les limites procédurales du contrôle judiciaire et les preuves de manque d'uniformité dans les décisions de la Cour fédérale donnent à penser que le contrôle judiciaire ne permet pas de repérer avec fiabilité les erreurs dans les décisions de la CISR.
(1100)
    Ainsi, à mon sens, vu les enjeux de vie et de mort qui sont en cause, vu les erreurs inévitables et vu que le processus de contrôle judiciaire ne permet pas de déceler ces erreurs avec fiabilité, il est essentiel que tous les demandeurs d'asile aient accès à un appel sur le fond. Le projet de loi C-31 supprime les droits d'appel de certains demandeurs, et ma recommandation, c'est que ces droits d'appel soient rétablis.
    Je vais parler des répercussions des dispositions du projet de loi C-31 qui visent à multiplier les situations dans lesquelles le statut de résident permanent des réfugiés peut être révoqué.
    J'ai formulé trois questions auxquelles je vais essayer de répondre ici. D'abord, le projet de loi C-31 confère-t-il de nouveaux pouvoirs au ministre? Oui. Ces pouvoirs supplémentaires sont-ils nécessaires pour atteindre des objectifs de politique légitimes? Non. Peut-on amender le projet de loi C-31 en fonction d'objectifs de politique légitimes? Oui.
    D'abord, il est important de savoir quelle est la situation actuelle? La LIPR permet actuellement au ministre de demander ce qu'on appelle l'annulation du statut de réfugié aux termes de l'article 109. L'annulation du statut de réfugié est un processus par lequel le ministre demande la révocation du statut de réfugié d'une personne qui n'a jamais eu besoin de la protection qui est offerte aux réfugiés. Il s'agit de personnes qui ont acquis le statut de réfugié en faisant de fausses déclarations ou par la fraude.
    Si le ministre réussit à obtenir l'annulation par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, la personne perd son statut de réfugié ainsi que le statut de résident permanent. Il y a une certaine harmonie à cet égard, puisque, bien entendu, de fausses déclarations sont également un fondement de révocation du statut de résident permanent. La conséquence de la perte du statut de réfugié pour fausse déclaration est la perte du statut de résident permanent pour fausse déclaration.
    Il y a également une autre disposition de la loi actuelle qui prévoit la perte du statut de réfugié. Le ministre peut demander que soit rejetée la demande d'asile d'une personne qui n'a plus besoin de protection, et il y a diverses preuves à partir desquelles on peut conclure que la protection n'est plus nécessaire, par exemple le fait que le réfugié s'est de nouveau réclamé de la protection du pays d'origine ou que des changements survenus dans le pays d'origine font en sorte qu'il n'y a plus lieu de craindre la persécution dans ce pays. Il y a donc annulation, lorsque le statut de réfugié n'a jamais été nécessaire, et perte, lorsque le statut de réfugié n'est plus nécessaire.
    Dans le cadre de la loi actuelle, lorsque la demande d'asile est rejetée, le statut de résident permanent n'est pas toujours révoqué. Pourquoi? Parce que la personne concernée n'a pas nécessairement fait quoi que ce soit qui empêche le maintien de son statut de résident permanent. Il n'y a pas d'inconduite, dans ce cas.
    Quel est l'effet du projet de loi C-31? Il applique la même conséquence de la perte automatique du statut de résident permanent lorsque la demande d'asile est rejetée et lorsqu'elle est annulée. Pour que vous compreniez la différence, je veux vous présenter deux situations où la personne perdrait son statut de résident permanent dans le cadre du projet de loi C-31, mais où elle ne le perdra pas dans le cadre de la LIPR actuelle.
    Dans le premier exemple, une réfugiée arrive de Bosnie en 1993. Elle obtient le statut de résident permanent. En 2008, elle retourne à Sarajevo pour travailler pendant un an pour une organisation internationale. Elle vit paisiblement en Bosnie pendant un an, puis rentre au Canada. Dans le cadre du projet de loi C-31, le ministre pourrait demander que soit rejetée sa demande d'asile, et, s'il a gain de cause, la conséquence automatique serait la perte du statut de résident permanent.
    Dans l'autre exemple, un demandeur d'asile quitte le Rwanda en 1994 et obtient son statut de résident permanent au Canada. Il parraine sa femme. Ensemble, ils fondent une famille au Canada. À un moment donné, disons en 2012, le ministre décide qu'il est maintenant sûr pour les Tutsis de retourner au Rwanda, et il demande donc que soit rejetée la demande d'asile de la personne. S'il a gain de cause, en raison d'un changement de situation au Rwanda, la personne perd son statut de réfugié ainsi que son statut de résident permanent et, presque 20 ans après les faits, elle devient automatiquement susceptible d'expulsion vers le Rwanda.
    La conséquence de la modification qui est apportée par le projet de loi C-31, c'est l'expulsion de gens qui sont des résidents permanents du Canada depuis longtemps sans recours, et sans appel à la Section d'appel de l'immigration, pour des gens qui n'ont rien fait de mal, et, en fait, dans le cas d'un changement de situation dans le pays d'origine, qui n'ont rien fait du tout. Ils n'ont fait que vivre leur vie au Canada.
    Il n'y a aucune limite quant à l'utilisation de ce pouvoir discrétionnaire par le ministre. Cela met à risque tous les réfugiés qui ont le statut de résident permanent. Ils ne sauront jamais si le ministre va à un moment donné demander que soit rejetée leur demande d'asile, ni pourquoi.
(1105)
    Vous pourriez peut-être conclure, madame Macklin.
    D'accord.
    Pour ce qui est des solutions, il faudrait supprimer les articles 18 et 19 du projet de loi C-31. Les pouvoirs prévus actuellement par la LIPR permettent déjà au ministre de demander la révocation du statut de résident permanent d'une personne si celui-ci est obtenu par la fraude ou à l'aide de fausses déclarations. Sinon, il faudrait ajouter une présomption dans la disposition d'annulation pour clarifier les situations où un retour dans le pays d'origine peu de temps après l'obtention du statut de réfugié et du statut de résident permanent est le fondement de la preuve de fausses déclarations ou de fraude dans l'acquisition de ce statut.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Madame Jackman.
    Je critique le projet de loi, et je veux simplement faire deux ou trois observations préliminaires concernant ma position par rapport à celui-ci.
    Premièrement, l'immigration, c'est la gestion des gens. Les règles s'appliquent à des gens, et si elles sont absolues et strictes, les gens passent par les mailles du filet, ou encore leur cas n'est pas examiné comme il devrait l'être parce qu'ils ne respectent pas les critères établis.
    Deuxièmement, il y a la Charte des droits et libertés. Vous, les parlementaires, êtes responsables de vérifier que la loi est conforme aux principes de la Charte. L'une des choses qui m'ont toujours dérangée — et je pratique dans le domaine depuis 35 ans — c'est que les lois adoptées par les parlementaires sont déformées lorsqu'elles sont appliquées. Des gens que vous n'avez jamais eu l'intention d'exclure de la protection le sont parce que vous ne connaissiez pas les conséquences du projet de loi que vous adoptiez. Je ne crois pas que les gens ici présents auraient adopté certains projets de loi qui l'ont été et qui ont fait du mal à des personnes s'ils avaient su que cela allait se produire.
    Troisièmement, chaque fois que vous prévoyez une interdiction absolue dans la loi, vous l'exposez à une contestation, parce que les choses absolues sont souvent contraires à la Charte. Les gens qui sont exclus du système peuvent par exemple avoir de bonnes raisons de faire examiner leur demande d'asile. Pour une personne qui a échoué à l'examen des risques avant renvoi, il y a une interdiction de présenter une nouvelle demande pendant 12 mois. Il se peut que la situation au pays ait changé avant son renvoi, mais en prévoyant une interdiction absolue pour elle de subir un deuxième ERAR même si les conditions le justifient, on la force à contester la décision devant les tribunaux en vertu de la Constitution. C'est le problème que posent les interdictions absolues.
    Je sais qu'il y a une préoccupation à l'égard du fait que les avocats ont un intérêt personnel à témoigner devant vous parce qu'ils gagnent leur vie en représentant des réfugiés. Croyez-moi, nous allons gagner beaucoup plus d'argent si vous ne modifiez pas le projet de loi que nous en gagnerons si vous faites en sorte que le processus soit équitable. C'est donc une mauvaise excuse pour ne pas tenir compte du genre de choses que nous affirmons.
    J'ai passé toute ma vie professionnelle à contester des lois injustes. Nous avons connu pas mal de succès, depuis l'affaire Singh en 1985 à l'affaire Charkaoui en 2007. Je peux vous dire que l'affaire Charkaoui est fondée sur la détention absolue sans examen.
    Lorsque j'ai lu la première mouture du projet de loi, je n'en croyais pas mes yeux. Nous avons passé des années à contester la détention arbitraire sans examen en temps opportun de la nécessité de la détention. Nous avons finalement eu gain de cause devant la Cour suprême en 2007, et maintenant, vous vous retournez et adoptez un projet de loi qui permettra la détention arbitraire de personnes pendant un an sans examen. C'est inapproprié. La Cour suprême vient juste de dire que vous ne pouvez pas le faire, alors pourquoi est-ce que c'est en train de se faire? Je ne comprends pas. Cela revient à exposer le projet de loi à une contestation. Le gouvernement pense peut-être que la loi va demeurer en vigueur jusqu'à ce que la Cour la supprime, qui va lui permettre d'atteindre son but. Ce n'est pas de cette façon qu'on adopte des lois pour régir l'immigration au Canada.
    Quatrièmement, le système actuel fonctionne. Si vous avez déjà assisté à l'examen des motifs de détention présidé par un commissaire de la Section de l'immigration, vous savez que le gouvernement a gain de cause la plupart du temps. Si le gouvernement souhaite qu'une personne soit détenue, il est probable qu'elle le soit jusqu'à ce qu'on puisse conclure une entente avec l'Agence des services frontaliers du Canada concernant sa libération. Ni la Section de l'immigration, ni la Section de la protection des réfugiés ni la Cour fédérale ne sont particulièrement sensibles à la cause des droits des non-citoyens. C'est le gouvernement qui a le plus souvent gain de cause, et pas les gens.
    Le système fonctionne très bien actuellement. Vous n'avez pas besoin de détenir arbitrairement des gens, puisqu'un commissaire de la Section de l'immigration va s'en charger de toute façon. S'il faut que la personne soit libérée, le commissaire va la libérer. C'est ainsi que les choses devraient être, parce que certaines des personnes qui sont détenues ont été victimes d'événements horribles dans le passé. Je pense qu'il est mal de détenir arbitrairement pendant un an une personne qui souffre de stress post-traumatique et qui a été gravement torturée. Nous avons vu des gens dans cette situation. J'ai un client qui n'a plus de mâchoire et qui a été détenu pendant six mois. Il n'a plus de mâchoire à cause d'un bombardement survenu en temps de guerre. Cette personne ne devrait pas être en détention pendant une période prolongée, parce que la détention aggrave le problème.
(1110)
    La dernière idée de portée générale que je veux exprimer, c'est que, au bout du compte, nous voulons que les gens que nous admettons comme réfugiés fassent partie de la société et en deviennent des membres productifs. Ce souhait ne se réalisera pas si on commence par les punir en les détenant pendant un an, si on les empêche de faire venir leur famille. Quelle est la meilleure façon pour les gens de s'établir et de s'intégrer? C'est d'avoir les membres de leur famille avec eux. Cela n'est pas écrit dans la loi. Au lieu de cela, même si nous avons l'obligation en droit international et en vertu de notre Charte de permettre à ces gens de rester au Canada, nous les empêchons de réussir à s'établir.
    J'ai des clients qui touchent des prestations d'invalidité à cause du temps qu'il a fallu pour que leur cas soit réglé. Je suis témoin de la décompensation qu'ils vivent au fil du temps. Je suis témoin de la destruction de leur vie et de leur intégrité, de l'épuisement. Ce n'est pas juste, ce n'est pas humain et cela ne correspond pas à notre tradition humanitaire à l'égard des réfugiés. S'ils doivent rester ici, il faut les traiter de façon équitable. Nous avons l'obligation de ne pas les renvoyer si ce sont des réfugiés.
    Il y a deux ou trois points précis dont je sais qu'ils ne seront pas abordés par d'autres. L'un de ceux-ci, c'est la question des titres de voyage. Le projet de loi empêche les gens d'obtenir des titres de voyage avant d'avoir acquis le statut de résident permanent. Vous ne vous rendez pas compte du fait que les titres de voyage étaient une porte de sortie pour nos clients. J'ai des clients qui sont dans les limbes. Le gouvernement du Canada a décidé de ne pas les expulser, mais il ne leur accorde pas le statut de résident permanent non plus. Certains d'entre eux sont ici depuis 10 ans, 20 ans, 30 ans et même plus. Pendant tout ce temps, si on leur enlève le droit d'obtenir un titre de voyage, droit qui est prévu par la Convention pour les réfugiés, pour les gens qui sont reconnus comme étant des réfugiés, ils ne peuvent même pas rendre visite à leur famille.
    L'une de mes clientes a un parent qui est médecin. Elle peut obtenir des soins médicaux de sa part dans un autre pays. Elle ne peut pas les obtenir au Canada parce qu'elle n'a pas le statut de résident permanent ici. C'est une soupape importante pour les gens. Il est important pour eux de pouvoir faire les voyages nécessaires grâce aux titres de voyage, même s'ils n'ont pas le statut de résident permanent, surtout que le gouvernement actuel permet simplement que les gens vivent dans les limbes. Ce n'est pas seulement le gouvernement actuel; le gouvernement précédent aussi. Ce sont des cas qui remontent à 10 ou 20 ans. Nous n'expulsons pas les gens, alors il faut au moins les laisser voyager.
    Encore une fois, je parle de différentes choses dont je sais qu'il est peu probable qu'elles soient abordées dans les mémoires qui vous ont été soumis. L'une de celles-ci, c'est l'incapacité de rouvrir un dossier en cas de déni de justice. Le projet de loi modifie l'article 171 de façon à empêcher le réexamen d'une demande d'asile si la personne a déjà perdu à la Section d'appel des réfugiés ou à la Cour fédérale.
    Je ne suis pas sûre qu'on puisse faire cela. On peut assurément mettre fin au processus d'appel, mais pas pour des motifs arbitraires. Il faut que les motifs aient du sens. Les motifs de restriction de l'appel dans ce cas-ci n'ont aucun lien logique avec les préoccupations abordées dans la loi, dans certains cas. Ce qui est sûr, c'est que je ne pense pas qu'on puisse empêcher le réexamen lorsqu'il y a eu déni de justice. La Charte ne le permet pas. S'il y a déni de justice, la procédure est annulée. La décision ne peut pas être appliquée. Il y a toujours eu un droit de revenir en arrière et de dire: « Écoutez, pour une raison quelconque, vous n'avez pas tenu compte du fait que la personne a des troubles mentaux, et vous auriez dû le faire. Le dossier doit être rouvert et faire l'objet d'un nouvel examen. »
    La dernière chose que je veux dire concerne les interdictions et une façon quelconque d'échapper à l'interdiction de cinq ans. Les ressortissants étrangers désignés ne peuvent obtenir le droit d'établissement avant cinq ans. S'il y a une quelconque infraction aux conditions de libération, la période est prolongée de douze mois, alors cela peut être long. Ensuite, il faut de deux à trois ans pour obtenir le droit d'établissement, ce qui veut dire que cela peut prendre dix ans à certaines personnes pour pouvoir s'établir avec leur famille au Canada. Cela ne va pas. C'est beaucoup trop long.
    Il n'y a aucune façon d'y échapper. Je ne sais pas si vous vous rendez compte du fait que le projet de loi élimine les permis de résidence temporaire, ainsi que les motifs d'ordre humanitaire. L'exercice d'un pouvoir discrétionnaire pour motifs d'ordre humanitaire permettant d'exempter des personnes des restrictions prévues par la loi existe depuis que la loi a été adoptée, sans aucune restriction. La loi existe depuis 1910, et il y a toujours eu un pouvoir discrétionnaire.
    Le projet de loi a commencé dans sa dernière mouture à restreindre le pouvoir discrétionnaire exercé pour des motifs d'ordre humanitaire, mais il n'y avait pas de restrictions concernant les personnes qui peuvent l'exercer. La mouture actuelle limite l'accès à certaines personnes. C'est du jamais vu dans notre histoire. Si vous supprimez ce genre de pouvoir discrétionnaire, vous nous forcez à nous adresser aux tribunaux. Il va finir par y avoir une contestation constitutionnelle, et je parie qu'au bout du compte, la Cour va dire qu'il faut laisser quelqu'un présenter une demande, qu'il faut faire examiner la chose, parce qu'il y a trop de droits de la personne qui interviennent dans le processus pour qu'on puisse simplement supprimer le pouvoir discrétionnaire. Vous ne faites donc que susciter une contestation. Pourquoi? Pourquoi ne pas faire les choses comme il faut dès le départ?
    Merci.
(1115)
    Merci, madame Jackman, de votre exposé.
    Les membres du comité vont avoir des questions à poser.
    Monsieur Dykstra.
    Merci.
    Pour donner suite à ce que vous avez dit à la fin au sujet des motifs d'ordre humanitaire, madame Jackman, évidemment, selon votre point de vue et votre expérience, vous avez une tonne d'exemples et de motifs pour lesquels une personne provenant d'un pays désigné comme étant sûr pourrait avoir perdu sa cause, mais avoir des motifs d'ordre humanitaire à invoquer.
    Pourriez-vous me donner trois ou quatre exemples de cas où une personne provenant d'un pays désigné comme étant sûr pourrait avoir perdu sa cause et demander que sa demande soit accueillie pour des motifs d'ordre humanitaire...?
    Un des cas qui fait probablement partie des plus courants, c'est celui des gais qui viennent de pays où on ne tolère pas les gais. On peut ne pas leur accorder le statut de réfugié parce que le degré de risque auquel ils font face n'est pas aussi important que le risque de persécution, de torture ou de traitement cruels. C'est le genre de situation où les gens ne seront jamais à l'aise dans les pays en question. Ces gens ont besoin des motifs d'ordre humanitaire...
    Vous savez bien que nous admettons cela. En ce qui a trait à la façon dont nous désignons les pays comme étant sûrs, c'est l'une des exemptions pour ce qui est de l'admissibilité au statut.
(1120)
    D'accord. Je ne savais pas, en fait, mais je pense qu'il est important pour les gens qui passent à travers les mailles du filet de pouvoir faire examiner leurs cas.
    Ce n'est pas de ça qu'il s'agit, par contre. L'idée, c'est que nous tenons bel et bien compte des motifs d'ordre humanitaire. Ce recours peut ne pas être accessible à une personne qui vient d'un pays désigné comme étant sûr, mais, lorsque la demande est examinée au départ, ne doutez pas du fait que cela va faire partie du processus et que, si la personne va être persécutée dans son pays d'origine parce qu'elle est gaie, et que nous avons désigné ce pays comme étant sûr, elle va pouvoir rester ici au Canada et obtenir le statut de réfugié...
    Peut-être, mais vous parlez d'une demande d'asile, pas d'une demande pour motifs d'ordre humanitaire.
    Vous pouvez jouer sur les mots pour décrire ce que vous aimeriez voir se produire, mais c'est tenir compte des motifs d'ordre humanitaire que d'admettre une personne dont le mode de vie n'est pas admis dans son pays d'origine, mais l'est ici, au Canada, et d'être prêt à offrir l'asile à cette personne.
    Permettez-moi simplement de préciser.
    Pour que l'on considère qu'elle est un réfugié, la personne doit prouver qu'elle serait persécutée; non pas qu'elle mènerait une vie inconfortable, mais bien qu'elle serait persécutée. On n'examinera pas les motifs d'ordre humanitaire pour les gens qui proviennent des pays en question, d'après ce que je comprends, et c'est une norme moins élevée. Il se peut que les gens n'arrivent jamais à mener une vie confortable dans ces pays et soient toujours victimes de discrimination, mais sans que cela ne devienne un préjudice.
    Vous avez cependant admis que vous ne saviez pas qu'ils vont pouvoir être admissibles.
    Je suis d'accord là-dessus.
    Merci.
    Monsieur Rehaag, ce que vous avez dit m'intéresse. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il est difficile de contester les chiffres lorsqu'on examine le processus décisionnel et la question des personnes qui rendent les décisions à la CISR. Il y a des commissaires qui accueillent presque toutes les demandes et il y en a d'autres qui n'en accueillent presque aucune.
    Vous savez que, dans le cadre du projet de loi C-11 et de la loi en vigueur, nous allons faire passer le processus de personnes nommées à une centaine de personnes qui vont faire partie de la fonction publique. Ainsi, ce processus va beaucoup changer par rapport à ce qu'il est maintenant, ce qu'il a été dans le passé et ce qu'il sera dans l'avenir, et cela vise donc directement les chiffres que vous recueillez et que vous pouvez évidemment produire.
    Essayer d'accroître l'uniformité à la première instance, c'est-à-dire à la Section de la protection des réfugiés, est un objectif important. Même s'il existe une façon d'améliorer les décisions de première instance, l'une des choses que j'ai dites, c'est que les erreurs sont inévitables, même dans le cadre des processus les plus robustes au Canada. Nous savons que nous rendons parfois une mauvaise décision dans le cadre des procédures relatives au droit pénal. Si nous commettons des erreurs dans le cadre de ces processus robustes sur le plan de la procédure, il est clair que nous allons en commettre dans le cadre de processus administratifs qui sont moins robustes à cet égard. Il demeure important que les gens aient accès à la Section d'appel des réfugiés. Ce serait l'une des choses.
    L'autre, ce serait que, dans les pays où ce sont des fonctionnaires qui jouent le rôle de décideurs de première instance, la vaste majorité des demandes sont rejetées à la première étape. C'est en fait à la deuxième étape, à l'étape de l'appel, que les gens réussissent habituellement à avoir gain de cause.
    Croyez-vous que nous devrions dans ce cas simplement éviter de modifier le système actuel?
    Je ne pense pas que nous devrions laisser le système tel quel.
    Je suis heureux de voir, par exemple, que, dans la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés, le gouvernement indique finalement qu'il va mettre en place la Section d'appel des réfugiés. C'est quelque chose que les gens qui travaillent dans le domaine des droits des réfugiés demandent depuis 2002. Il y a des façons d'améliorer le système. Je pense que la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés a apporté des améliorations. Je pense que le fait que tous les demandeurs d'asile puissent interjeter appel est une chose particulièrement importante.
    Moi aussi. Je pense que c'est la raison pour laquelle la loi autorise toute personne à interjeter appel. Il y a bien deux volets différents, mais la loi autorise certainement toute personne...
    Elle n'autorise pas d'appel sur le fond pour certains groupes de demandeurs d'asile, y compris ceux...
    Des pays désignés comme étant sûrs...
    ... des pays désignés comme étant sûrs. Ce sont les seules personnes qui n'ont pas accès à un appel. Les ressortissants étrangers désignés n'ont pas accès à un appel. Les gens qui passent par les États-Unis pour venir au Canada n'ont pas accès à un appel. Les gens dont la demande d'asile est rejetée ou...
    Pourquoi croyez-vous que les gens qui passent par les États-Unis n'ont pas directement accès à un appel? Pensez-vous qu'ils ont probablement suivi le processus aux États-Unis et subi un échec avant de venir au Canada?
    Pour entrer au Canada à partir des États-Unis, il faut pouvoir se prévaloir d'une exception très précise prévue par l'Entente sur les tiers pays sûrs. Il s'agit de choses comme le fait d'avoir des membres de sa famille au Canada. Il est tout à fait raisonnable pour les réfugiés qui trouvent le moyen d'entrer aux États-Unis de vouloir revenir au Canada pour présenter une demande ici plutôt que là-bas. Il n'y a donc aucune véritable raison logique pour laquelle la personne ne devrait pas avoir accès à un appel.
    Je pense qu'il est particulièrement important...
(1125)
    Tout le monde a accès à un appel. Vous n'aimez peut-être pas l'idée que l'accès à un appel se fasse « sur le fond », et je respecte votre point de vue là-dessus. Toutefois, il est inexact d'affirmer catégoriquement qu'il n'y a pas de motifs permettant d'interjeter appel.
    Eh bien, les gens ont accès à un contrôle judiciaire. Ce n'est pas un appel. Il ne s'agit pas d'un appel sur le fond.
    D'accord, vous venez d'admettre ce que j'ai dit. Il y a un accès à un appel. Vous n'êtes peut-être pas d'accord avec le processus d'appel. Vous pensez peut-être qu'il est injuste, et je respecte votre opinion. Toutefois, il est inexact d'affirmer qu'il n'y a pas d'appel.
    De toute façon, je n'ai pas beaucoup de temps, et je voulais demander à Mme Macklin...
    Votre temps est écoulé.
    Madame Sims.
    Merci beaucoup. Je veux vous remercier tous les trois d'être venus présenter votre exposé.
    L'élément qui m'a le plus frappée dans votre témoignage est le fait que vous nous rappelez de regarder le côté humain lorsqu'il est question de la situation des réfugiés. Nous ne sommes pas ici pour parler seulement de l'immigration clandestine. Nous avons déjà la capacité de punir les passeurs de clandestins — ce que nous approuvons tous, mais cela renvoie au côté humain.
    J'ai un certain nombre de questions, et je vous demande d'y répondre brièvement afin que je puisse passer tout le monde.
    Audrey, j'ai une question pour vous. Vous avez fourni deux scénarios dans le cadre desquels une personne perdrait son statut de résident permanent aux termes du projet de loi C-31, ce qui n'arriverait pas dans le système actuel. Que pouvez-vous nous dire sur les problèmes liés à une telle situation et comment modifieriez-vous le projet de loi pour les résoudre?
    J'espère que vous êtes tous d'accord avec moi lorsque j'affirme que les exemples que j'ai donnés ne sont pas des situations laissant supposer que la personne a commis une inconduite qui justifie la révocation automatique du statut de résident permanent.
    Le projet de loi C-31 accroît la possibilité de révocation, et cela fait qu'il a une portée trop large. Autrement dit, il inclut des personnes et en pénalise certaines qui, d'après ce que j'ai compris des commentaires du ministre, ne sont pas visées par cette disposition. Néanmoins, elle est incluse dans la loi.
    Pourquoi une loi à trop large portée est-elle problématique? En fait, cela présente deux problèmes: d'une part, elle laisse dans l'insécurité et la peur toute personne qui pourrait en faire l'objet, et, d'autre part, elle donne au ministre un pouvoir discrétionnaire qui ne correspond pas du tout aux objectifs légitimes de la loi. Cela entraîne donc la possibilité d'un risque d'exercice de pouvoir arbitraire. Je crois que ces deux problèmes importants peuvent être facilement atténués si on modifie la loi de façon à ce qu'elle réponde légitimement au besoin déterminé ou qu'elle corresponde à l'objectif stratégique.
    J'ai deux mesures à proposer. Je peux vous les présenter en détail, mais je sais que vous vouliez une réponse brève.
    Merci. Vous avez répondu à la question.
    Sean, j'ai une question pour vous. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi le droit d'appel est si intimement lié aux droits à la vie et à la sécurité?
    Je crois que cela a un lien avec les questions relatives à la détermination du statut de réfugié. Un réfugié a une raison bien fondée de craindre la persécution, la torture ou la mort. Si nous ne reconnaissons pas le statut de réfugié d'une personne, elle pourrait être renvoyée dans un pays où elle pourrait faire l'objet d'une persécution. Compte tenu de la question de vie ou de mort et d'un risque connexe très élevé, la Cour suprême a déterminé que le processus doit être conforme à la justice fondamentale, dont un des principes est l'accès à une procédure d'appel fiable.
    Plus ou moins récemment, l'arrivée du navire en provenance du Sri Lanka a permis d'accélérer quelque peu le processus législatif et soulève la question des possibilités offertes à bon nombre de ses passagers... Ils ont été nombreux à être considérés comme des demandeurs légitimes. Pourtant, nous proposons un système qui, essentiellement, criminalisera les personnes qui arrivent ici après avoir déjà souffert d'horribles préjudices.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur la façon dont le projet de loi accroît les pouvoirs et les confie à une seule personne, soit le ministre? J'invite l'un de vous à répondre.
    Ce n'est pas seulement une question de réfugiés. En vertu de la présente loi modifiée, le ministre peut formuler des instructions. À titre d'avocate en exercice, je peux vous affirmer que je n'ai pas encore réussi à consulter toutes les instructions qu'il a données. Il y a de nouvelles instructions presque tous les jours, des instructions fondamentales qui modifient l'exercice et permettent au ministre de donner des ordres sans que personne n'ait l'occasion de le remettre en question.
    Nous avons un cadre législatif dont de nombreux éléments sont régis par le règlement d'application, mais le fait de donner à une seule personne le pouvoir de formuler des instructions — par exemple, pour éliminer les demandes de parrainage de parents, que nous avons depuis des temps immémoriaux et de supprimer le dossier de toutes les personnes de l'arriéré dont la demande est antérieure à février 2008 seulement parce que le ministre a décidé de le faire, sans que personne ne se pose de questions — c'est un pouvoir incroyable qui n'a pas de raison d'être. Cela est antidémocratique, et j'ajouterais même complètement erroné.
    Je n'arrive même pas à suivre le rythme. Il y en a eu environ dix au cours des deux dernières semaines, et des modifications sont apportées tous les jours. Qui peut travailler comme ça? Comment pouvons-nous connaître le droit au Canada, si le ministre peut tout simplement changer d'idée, signer un papier et nous transmettre ses modifications le lendemain? Ce n'est pas correct. La situation devrait faire l'objet d'un suivi; il n'y en a aucun.
(1130)
    Audrey.
    Les deux autres activités prévues au projet de loi C-31 sont la désignation de pays sûrs et la désignation par le ministre de prétendues arrivées irrégulières. Il est important de savoir que ces activités ne sont pas visées par la Loi sur les textes réglementaires, ce qui veut dire qu'elles ne font l'objet d'aucun suivi parlementaire ni même d'un processus décisionnel réglementaire par le Cabinet. Cela soulève un réel problème de légitimité démocratique. Le projet de loi donne à un ministre le pouvoir de faire sa propre loi. Cela est différent d'un pouvoir discrétionnaire; il s'agit plutôt du pouvoir d'établir des règles contraignantes et parfois des règles qui ne respectent pas le règlement et peut-être, à l'occasion, la loi.
    Mis à part ce que vous considéreriez comme les mérites de toute instruction ministérielle, selon moi, d'un point de vue démocratique et parlementaire, la pratique de l'instruction en soi n'est guère fondée sur le plan juridique.
    Merci beaucoup.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, Sean?
    J'aimerais seulement confirmer ce que Barbara a dit: la vitesse à laquelle des modifications sont apportées par le truchement d'instructions ministérielles a été incroyable au cours des six derniers mois.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Lamoureux.
    Mon temps est déjà écoulé?
    Effectivement.
    Monsieur Rehaag et madame Macklin, mes questions s'adressent à vous deux.
    Ma première question est assez bizarre, mais je veux vous la poser. Au cours des prochaines années, votre niveau de revenu diminuera-t-il en conséquence directe de l'adoption du projet de loi C-31?
    Je suis enseignante. Tout cela ne m'apporte aucun revenu. Je ne travaille pas pour...
    Monsieur Rehaag.
    Moi non plus.
    Laissez-moi vous dire que je perds de l'argent en venant ici.
    Merci.
    Le ministre a affirmé qu'il est certain que le projet de loi C-31 respecte la Charte. Très brièvement, croyez-vous que c'est le cas?
    Dans un certain film, quelqu'un dit « Montre-moi le fric! ». C'est un peu comme cela. Montrez-moi l'opinion juridique qui affirme que le projet de loi respecte la Charte.
    Monsieur Rehaag.
    Non, je ne crois pas qu'il respecte la Charte.
    Vous connaissez sans doute la Convention sur les réfugiés de 1951. Cette convention traite de l'importance de réunir les familles. En ce qui concerne la capacité du ministre d'empêcher les familles d'être réunies par le truchement de parrainages, si les membres sont détenus pendant un an, selon vous, la loi est-elle contraire à la Convention sur les réfugiés de 1951?
    En plus de ne pas respecter la Convention de 1951, les gens ici accorderont peut-être plus d'importance au fait que cela est contraire à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, dont l'objectif est de réunir les familles au Canada.
    Les données empiriques de diverses administrations montrent clairement que l'intégration est souvent plus efficace lorsque les familles sont réunies. Il ne faut pas oublier que les personnes qui font l'objet du délai de cinq ans et de l'interdiction de réunification familiale ont été considérées comme des réfugiés, des personnes ayant besoin de protection. Le Canada a déterminé qu'elles avaient besoin de protection. D'après ce que j'ai compris des commentaires du ministre, la réunification familiale leur est refusée pour les punir.
    Il faut donc se poser la question suivante: pourquoi punissons-nous les réfugiés?
(1135)
    Enfin, cela a été révélé par le critique du NPD et j'aimerais obtenir des éclaircissements. Pouvez-vous particulièrement étayer l'exemple du Rwandais que vous avez donné? Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
    Un des motifs d'annulation est le changement de circonstances. Il est indiqué que la demande d'une personne peut être annulée si les raisons qu'elle a données pour demander asile n'existent plus. Une telle situation peut être soulevée à tout moment, même durant l'audience sur la demande d'asile, si les circonstances ont changé entre la présentation de la demande et la tenue de l'audience.
    Vous pouvez imaginer qu'un changement de circonstances peut avoir lieu à l'autre bout du monde. Une personne, comme celle du Rwanda que je prends en exemple, est ici au Canada et ne fait rien de mal. Elle vit sa vie, elle travaille, elle élève sa famille et contribue à la société canadienne. À l'autre bout du monde, au Rwanda, la situation change. Que propose la loi dans de telles circonstances? Elle indique que le ministre peut annuler le statut de réfugié en raison d'un changement au Rwanda et que la personne peut automatiquement être expulsée du Canada. Il s'agit d'une expulsion automatique, sans droit d'appel devant la Section d'appel de l'immigration.
    Ainsi, la personne se voit déracinée. C'est comme si les années qu'elle a passées au Canada, où elle a construit sa vie et contribué à la société canadienne n'ont aucune importance et n'existent pas; elles sont effacées. Voilà l'important problème que pose cette disposition.
    En conclusion, croyez-vous que la meilleure chose à faire avec ce projet de loi est tout simplement de le jeter à corbeille et de recommencer? Croyez-vous qu'il est préférable de le modifier?
    Parlez-vous du projet de loi en général ou de la disposition?
    Du projet de loi en général.
    Je crois que la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés semble viser bon nombre des objectifs stratégiques légitimes que le gouvernement cherche à atteindre avec le projet de loi C-31.Ce que le projet de loi C-31 y ajoute, ce sont des dispositions inconstitutionnelles et, d'un point de vue stratégique, problématiques qui ne permettront pas au gouvernement de les réaliser.
    J'aimerais ajouter que les articles 18 et 19 sous-entendent l'incapacité de gérer les personnes qui, par exemple, s'installent au Canada, obtiennent le statut de réfugié et retournent ensuite dans leur pays d'origine pour prendre des vacances. C'est ça, le scénario, non? Il est possible de gérer une telle situation dans le cadre de la loi en vigueur. Toutefois, il y a peut-être un manque de ressources. On a peut-être choisi de ne pas affecter de ressources à cette situation, mais la capacité est bel et bien là. Elle est même suffisante.
    Merci, madame Macklin.
    Monsieur Dykstra.
    Merci.
    Je veux seulement conclure la question des articles 18 et 19. Je sais que votre recommandation était de supprimer les articles 18 et 19. Mis à part votre préférence, quelles options proposez-vous?
    Vous n'avez pas à répondre aujourd'hui. Si vous voulez fournir au comité, par l'entremise de la greffière, certaines options qui vous permettraient de modifier les articles 18 et 19 en vue de régler les problèmes que vous avez soulevés, cela serait grandement apprécié.
    J'ai déjà une solution de rechange sur une diapositive. Voulez-vous que je vous en parle maintenant?
    Non. Si vous l'avez sur une diapositive, j'aimerais bien l'obtenir, et nous aurons l'occasion de l'étudier.
    Il s'agit plutôt d'une question générale, Audrey, fondée simplement sur vos commentaires selon lesquels vous n'avez vu aucun document juridique montrant que ces dispositions résistent à toute contestation fondée sur la Charte et la Constitution. Vous avez dit que vous n'en avez vu aucun. Croyez-vous vraiment que le ministère de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme présenterait un texte législatif sans avoir vérifié sa conformité avec la Charte et la Constitution?
    Ce n'est pas le ministère qui l'a déposé, c'est le ministre.
    Je vois. Vous croyez donc que l'ensemble des lois présentées à la Chambre des communes par le gouvernement ne sont élaborées que par des politiciens et qu'elles ne sont pas vérifiées, examinées, élaborées et approuvées par ceux qui travaillent au sein...
    Le ministre a dit devant le Parlement qu'il a écrit ce projet de loi. Quoi qu'il en soit, je veux simplement...
    Ce n'est pas ce qu'il a dit. Il n'a pas dit qu'il a écrit le projet de loi. Si vous ne...
    Est-ce que je peux répondre à votre question?
    Silence, s'il vous plaît.
    Je suis désolé. Arrêtez le chronomètre une minute.
    Les esprits commencent à s'échauffer, et je préférerais que vous vous en teniez à vos témoignages. Vous pouvez poser des questions et donner des réponses, mais si nous continuons ainsi, vous devrez passer par le président.
    Continuez, s'il vous plaît.
    Démarrez le chronomètre.
(1140)
    Je suis seulement préoccupé par votre affirmation. Vous croyez que chaque texte législatif du gouvernement est élaboré par des politiciens, alors que vous savez que c'est faux. Ensuite, le ministre n'a pas dit qu'il a écrit le projet de loi. Il a indiqué qu'il l'a influencé, et il l'a certainement approuvé avant qu'il soit présenté à un comité de son cabinet et ensuite au Cabinet aux fins d'approbation.
    Il y a tout un processus mis en place, mais je vais vous donner l'occasion de réagir.
    Je n'ai toujours pas entendu quiconque défendre la légalité du projet de loi; il a seulement été dit qu'il a été vérifié. J'aimerais entendre un engagement en bonne et due forme à l'égard du contenu du projet de loi, et je m'y attends.
    D'accord, votre demande est juste.
    Barbara, j'ai une dernière question pour vous concernant la question de la détention des arrivants. Vous nous avez dit clairement que cela s'applique seulement aux personnes qui arrivent en masse, par navire ou par avion. Cela ne touche pas les autres 98 ou 99 p. 100 qui présentent une demande d'asile dans notre pays.
    D'après ce que je comprends, si un couple et deux enfants arrivent au pays, ou seulement les parents, ils peuvent être désignés. Il faut plus de deux et...
    Il en faut beaucoup plus que ça pour être désigné.
    ... un certain lien avec le passage de clandestins, par exemple. Dans tous les cas, peu m'importe que cela s'applique à 1 ou 3 000 personnes, c'est une erreur d'incarcérer des gens arbitrairement pendant un an, sans examen des motifs de la détention. La Cour suprême l'a confirmé dans la décision Charkaoui.
    J'apprécie votre point de vue sur le sujet. Comprenez-moi bien.
    Eh bien, j'ai gagné à la Cour suprême. Désolée.
    Félicitations.
    Là où je veux en venir, c'est que nous avons une responsabilité non seulement à l'égard des réfugiés et de leurs droits, mais aussi à l'égard des Canadiens et de leurs droits. Voici la question que je me pose: allons-nous donner à une personne non identifiée que nous ne connaissons pas le droit ou l'occasion d'être libre dans la société sans avoir à prouver son identité et ses antécédents? Le problème est évident: et si la personne qui est libérée grâce à ses propres affirmations aurait dû ne pas l'être?
    Cela est déjà abordé dans la loi.
    Je vous renvoie à l'histoire des passagers du MV Sun Sea. Ces personnes ont été détenues pendant des mois pendant qu'elles faisaient l'objet d'enquêtes et de vérifications pour que l'on puisse savoir qui elles étaient et si elles présentaient une menace à la sécurité. La Section de l'immigration est votre meilleure ligne de défense sur le terrain contre les personnes qui s'échappent, si elles présentent un risque pour qui que ce soit. Elle ne les laisse pas partir.
    Mais cela est possible.
    Ces personnes demeurent incarcérées pendant longtemps. Le gouvernement est demeuré agressif tout au long du processus. Si l'une d'entre elles devait être libérée, le gouvernement s'y opposait devant les tribunaux.
    Précisons. J'interprète peut-être mal la situation, mais il semble que, selon vous, les passagers du MV Sun Sea — à titre d'exemple — seraient détenus pendant 12 mois fermes, ils ne seraient pas libérés une fois leur identité prouvée et leur statut de réfugié établi ou que, une fois leur identité prouvée, ils ne seraient pas admissibles au statut de réfugié.
    Croyez-vous que, en vertu de cette loi, toutes les personnes seraient détenues pendant 12 mois, peu importe le processus qui s'ensuit?
    Si je comprends bien, il y a une période de détention de 12 mois, sauf si le statut de réfugié est confirmé durant cette période. Le problème, c'est que nous vivons dans un pays qui respecte la liberté. On ne met pas une personne sous garde s'il n'y a aucune raison de le faire. Si l'on sait qui elle est et qu'elle ne présente pas de risque, si elle présente une demande d'asile et qu'il y a des personnes pour signer, pourquoi devrait-on l'incarcérer, sauf pour la punir? Ce n'est pas le but ici.
    Donc le contraire est aussi vrai: si une personne est inconnue ou présente une menace potentielle, elle devrait être détenue.
    Ces personnes sont déjà détenues par la Section de l'immigration. Nous n'avons pas besoin de ce projet de loi pour cela.
    Vous avez une minute, John.
    Nous vantons souvent la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit dont nous jouissons dans notre grand pays. Je suis très heureux que vous soyez ici aujourd'hui, non seulement parce que je suis aussi avocat et diplômé d'Osgoode, mais parce que l'on met énormément l'accent sur l'équité procédurale et la justice en général. Je suis donc très content que vous soyez ici.
    J'aimerais vous rappeler que nous nous préoccupons aussi des personnes légitimes qui demandent à vivre dans notre pays, qui portent leurs cicatrices et qui doivent maintenant subir un processus de 21 mois ou plus. On ne met pas l'accent sur l'ordre public, même si cela est très important. Il est aussi question d'accélérer le processus dans le cas des personnes qui en ont vraiment besoin rapidement. J'espère que nous allons tenir compte de cela, sans toutefois oublier nos réserves à propos du processus.
(1145)
    Merci, monsieur.
    Madame Sitsabaiesan.
    Merci, monsieur le président.
    Nous parlons des personnes qui portent leurs cicatrices. Qu'en est-il des personnes dont les cicatrices sont invisibles, présentes dans leur tête et leurs émotions, comme un enfant de cinq ans traumatisé et hanté par la guerre — mais cela est mon histoire.
    En vertu du projet de loi C-31, les « étrangers désignés » auxquels on accordera le statut de réfugié seront, contrairement aux autres réfugiés, assujettis à des restrictions, comme un délai d'attente de cinq ans avant de pouvoir présenter une demande de résidence permanente. Ils ne pourront pas parrainer leur famille afin que tous les membres puissent être réunis et, évidemment, ils seront également tenus de se présenter à un agent.
    Ces mesures sont-elles justifiées si l'on tient compte du mode d'arrivée des demandeurs d'asile? C'est généralement le mode d'arrivée qui entraîne la désignation. Quelles seront les conséquences sur les personnes qui s'installent au Canada, si elles ne peuvent pas présenter une demande de résidence permanente et faire venir leur famille au pays?
    Vous pouvez tous répondre aux questions.
    Comme je l'ai déjà mentionné, le refus de permettre la réunification familiale retarde et empêche l'intégration. Il en découle des conséquences psychologiques, émotionnelles, pratiques, sociales et économiques pour toutes les personnes touchées. Ainsi, l'absence d'un document de voyage — précisons non seulement pour les voyages vers le pays d'origine, mais n'importe où à l'extérieur du Canada — cause un préjudice.
    De plus, un élément n'a pas encore été mentionné: l'exigence de se présenter à un agent pendant cinq ans. Les personnes sont tenues de se présenter régulièrement à un agent de l'ASFC, de répondre aux questions et de fournir des documents, mais la loi n'indique pas pourquoi l'information est demandée, à qui elle sera communiquée ni comment elle sera utilisée.
    Ensemble, tous ces éléments créent de l'insécurité et la perpétuent, et cela nuit non seulement aux personnes touchées, mais aussi à la société canadienne entière. Ce sont des idées empruntées de l'Europe, qui, comme vous le savez, ne présente pas un dossier sans failles en ce qui a trait à l'intégration des nouveaux arrivants.
    Barbara et Sean, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je crois que le mode d'arrivée n'est pas un facteur légitime à prendre en considération pour faire la distinction entre les personnes. Ce ne l'est tout simplement pas lorsqu'elles sont reconnues comme réfugiées.
    Merci.
    Connaissez-vous des solutions de rechange à la détention utilisées dans d'autres pays pour gérer l'arrivée massive de demandeurs d'asile?
    Nous avons au Canada un programme de cautionnement qui fonctionne bien comme solution de rechange à la détention. Il est intéressant de mentionner que d'autres pays sont intéressés à le mettre en oeuvre.
    Je suppose que la détention obligatoire en cas d'arrivées massives est fondée sur les mesures prises en Australie, qui s'est rendu compte que, en plus d'être mauvaise sur le plan des droits de la personne, cette solution n'empêche pas, comme on le souhaite, d'autres arrivées par navire. Cela a donc été un échec. En fait, l'Australie a abandonné cette solution.
    Comme je l'ai déjà dit, la pratique canadienne qui consiste à proposer diverses conditions de mise en liberté semble intéresser d'autres pays.
    Effectivement. En plus d'abandonner la détention obligatoire pour ces raisons, l'Australie s'est aussi rendu compte du fait que cela était extrêmement onéreux. Je crois qu'il ne faut pas oublier ce point. La détention est très onéreuse, particulièrement s'il y a des solutions de rechange.
    Je sais que, dans certains cas, les personnes se sont vu imposer des limites géographiques. Elles doivent s'installer dans une ville particulière, par exemple, ce qui peut constituer une meilleure façon de gérer certains cas, car on sait où ils sont.
    Vous avez une minute.
    Il me reste encore une minute? Merveilleux.
    Je veux revenir sur l'annulation du statut de résident permanent. Parmi les cas qui feraient l'objet d'une annulation automatique du statut de RP, lesquels ne sont pas visés par la loi en vigueur?
    Les deux exemples que j'ai donnés concernent une personne qui vit au Canada depuis de nombreuses années et qui provient d'un pays où les circonstances ont changé, 10, 20 ou 30 années plus tard. Aux termes du projet de loi C-31, une telle personne verrait son statut de réfugié annulé, comme dans le cadre de la loi en vigueur, mais la loi proposée prévoit aussi la perte automatique du statut de résident permanent. C'était le premier exemple.
    Il y a aussi des personnes qui se réclament à nouveau de la protection. Le ministre semble craindre que les personnes obtiennent immédiatement le statut de réfugié et retournent dans leur pays, n'est-ce pas? Par contre, une personne peut se réclamer à nouveau de la protection de son pays d'origine — c'est-à-dire y retourner — 15 ou 20 ans plus tard, non pas parce qu'elle ne craignait pas la persécution au moment où elle est arrivée au Canada et a présenté une demande d'asile, mais bien parce que les circonstances ont changé dans son pays.
    Ces deux contextes d'annulation légitime n'ont toutefois pas leur raison d'être pour l'annulation du statut de résident permanent, et, compte tenu de la trop grande portée du projet de loi C-31, ces personnes seraient vulnérables. Il reviendrait tout simplement au ministre de décider s'il veut lancer le processus contre elles.
(1150)
    Puis-je seulement ajouter que ce n'est pas...
    Non, je suis désolé. Nous n'avons pu le temps, madame Jackman.
    Monsieur Opitz.
    En fait, c'est au tour de M. Weston.
    Merci.
    Ne vous en faites pas, madame Jackman. Je crois que vous aurez l'occasion de répondre.
    Je veux seulement nous rappeler les divers types d'équité procédurale auxquels nous avons fait allusion. Il y a la Charte. Il y a la Cour fédérale. Il y a le droit d'appel. Nous avons des obligations envers d'autres pays et les Nations Unies. Il y a la volonté démocratique des Canadiens. Il y a aussi le rôle de l'opposition loyale de Sa Majesté, que nous observons ici. Tous ces éléments montrent que nous aspirons à une certaine équité.
    Je veux passer rapidement en revue le but des modifications. Il en a été question plus tôt ce matin dans l'exposé de Les Linklater, SMA responsable des Politiques stratégiques et de programmes, et de Peter Hill, directeur général des Programmes après le passage à la frontière. Les objectifs mentionnés sont: la réduction du nombre de demandes d'asile provenant de pays dont les réfugiés ne sont habituellement pas authentiques; le maintien de nos obligations envers les autres pays; la lutte contre l'organisation d'entrée illégale; la détention des personnes qui entrent au pays de façon irrégulière; l'expulsion des personnes dans un délai de un an, si leur demande est rejetée; la détention obligatoire durant la vérification de l'identité et des risques pour la sécurité — je vais y revenir; et la promotion de l'intérêt supérieur de l'enfant.
    Pour ce qui est de la détention obligatoire, voici mon analogie: nous avons tous de la sympathie pour une personne qui fait l'objet d'une saisie parce qu'elle ne pouvait plus rembourser son hypothèque. Par contre, il ne faut pas oublier que, si les banques ne donnaient aucune occasion aux emprunteurs au départ, elles ne prêteraient de fonds à aucun emprunteur légitime, et personne n'aurait de maison pour se loger. Nous avons donc besoin de telles dispositions pour s'assurer que les personnes légitimes peuvent bénéficier du système.
    Avez-vous des commentaires à formuler à cet égard?
    Vous qui avez été coupée, qu'en pensez-vous, madame Jackman?
     Cela n'est pas nécessaire. Le projet de loi prévoit des infractions plus sévères dans le cas de passages de clandestins. Cela est excellent. À propos de vos craintes liées à l'abus du système, il suffit d'accélérer le processus, de le rendre plus rapide. Cela est la meilleure façon d'exclure du système les personnes qui n'auront pas de réponse favorable parce que, au bout du compte, elles sont expulsées vers leur pays.
    Quant à l'inclusion des mouvements irréguliers... Les mouvements de réfugiés sont irréguliers. Par définition, un réfugié est une personne qui ne peut pas se réclamer de la protection de son pays. Nous savons depuis toujours — du moins, depuis que nous avons la Convention sur les réfugiés — que les réfugiés arrivent au pays sans documents appropriés et sans passeport, entre autres. Par conséquent, si l'on vise ces personnes, on vise tous les réfugiés en vue de les empêcher d'entrer au Canada.
    Madame Jackman, j'étais récemment au Mexique, où j'ai présidé le Groupe d'amitié Canada-Mexique. J'y ai appris que, dans les journaux, certaines personnes indiquent qu'une bonne façon de bénéficier de services de santé et d'autres services gratuits pendant plusieurs années est de se rendre au Canada et d'y présenter une demande d'asile. Nous avons dû intervenir, et la façon rapide de s'y prendre était d'imposer un visa aux arrivants du Mexique, mais l'intervention à long terme était un engagement envers les Canadiens en vue d'améliorer notre système de demandes d'asile.
    Dans le Karaté Kid, M. Miyagi mentionne que la meilleure façon d'éviter un coup de poing est de ne pas être là. Si nous pouvons empêcher les gens de présenter une demande d'asile alors qu'ils savent très bien qu'ils ne sont pas des réfugiés, l'ensemble du système se verra améliorer. Le système s'en trouvera amélioré. Il le sera certainement, et les personnes légitimes pour lesquelles, grâce à votre passion et à votre détermination, vous vous êtes battue jusqu'en Cour suprême du Canada, obtiendront une réponse favorable plus rapidement. Je veux dire...
    Je ne vois pas comment l'attente de cinq ans peut régler ce problème. Je comprends ce que vous voulez dire, mais comment le délai de cinq ans imposé aux réfugiés reconnus le réglera-t-il? Il n'en est rien.
    Eh bien, nous prenons votre question en note et nous l'examinerons. Vous pouvez en être assurée... il reste encore environ 60 témoins, alors nous aurons l'occasion de l'étudier.
    Eh bien, vous allez en entendre parler — beaucoup.
    Avez-vous d'autres commentaires, monsieur Rehaag?
    Vous avez mentionné le cas du Mexique. Je conviens qu'un processus équitable, efficace et rapide de détermination du statut de réfugié est de loin préférable à l'imposition d'un visa aux Mexicains. Je crois que tout le monde est d'accord sur ce point-là.
    Cela dit, par contre, le simple fait que les taux d'approbation associés au Mexique oscillent autour de 15 p. 100 laisse croire qu'un grand nombre de personnes entrant au pays présentent des demandes non fondées, mais aussi qu'il y a chaque année au Canada des centaines de Mexicains qui obtiennent le statut de réfugié. Il s'agit souvent de personnes qui demandent l'asile en raison de leur orientation sexuelle et de la violence qu'ils subissent en raison de leur sexe. Certaines personnes ne sont pas en sécurité au Mexique.
    Voici donc ma question: pourquoi en raison d'un certain nombre de demandes non fondées provenant d'un même pays devons-nous refuser aux personnes présentant une demande bien fondée — orientation sexuelle et violence liée au sexe — l'accès à un processus équitable avec droit d'appel?
(1155)
    Merci.
    Monsieur Menegakis.
    Merci beaucoup. Je crois que c'est le tour de M. Opitz.
    Nous allons partager, d'accord?
    Très bien.
    Je vais commencer.
    Les faux réfugiés sont nombreux à abuser du système. Vingt-cinq pour cent proviennent de l'Union européenne. Ce ne sont pas toutes les personnes qui viennent ici et réclament le statut de réfugié qui sont des victimes, très franchement. Bon nombre d'entre elles cherchent une façon de bénéficier de notre système. Certains disent même aux agents de l'ASFC qu'ils viennent ici pour l'argent, comme ça, directement.
    Nous avons non seulement le droit d'assurer la sécurité du pays et de protéger la crédibilité de notre système d'immigration, mais aussi la responsabilité envers les contribuables canadiens de vérifier concrètement ce que leur coûte ce système, et, lorsqu'on traite beaucoup de demandes d'asile non fondées, les coûts sont énormes. Je crois que vous devriez le reconnaître — les chiffres sont énormes.
    Il doit y avoir un équilibre en ce qui a trait aux droits des réfugiés... Je crois que nous sommes tous d'accord sur le fait que nous vivons dans un pays très généreux. Mes parents sont arrivés ici après la Deuxième Guerre mondiale. Ils ne pouvaient pas retourner dans leur pays. Si mon père l'avait fait, il aurait reçu une balle de Staline.
    Je comprends cela. C'est ancré dans ma famille. Par contre, beaucoup de personnes abusent du système, et il n'y a pas que des bonnes personnes. Il y a beaucoup de passeurs, et cela débouche souvent sur le trafic humain. Le trafic touche des personnes qui ont des chaînes invisibles et qui sont prises dans un système dans lequel elles font face à des situations extrêmement dangereuses. Notre pays a aussi la responsabilité de s'assurer que cela ne se produit pas, et c'est pourquoi une modification des processus s'impose.
    Quels sont vos commentaires à ce sujet? Vous trois pouvez répondre à tour de rôle: où devrait se trouver le juste l'équilibre entre l'acceptation des réfugiés et la sécurité des Canadiens, compte tenu du fait que, parmi les faux réfugiés, certains sont des criminels et peut-être même des terroristes?
    Je crois que tout le monde est d'accord sur le fait qu'il est important de trouver une façon de régler le problème des demandes non fondées. D'après moi, la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés visait à résoudre cette question en accélérant le processus afin que les personnes présentant une demande non fondée restent au pays le moins longtemps possible. Je crois que les mesures prévues fonctionnaient raisonnablement bien.
    Il est important dans le cadre de telles discussions ici au Parlement et au sein du public de ne pas utiliser un langage enflammé, et je crois que le terme « faux réfugié » est, d'une certaine façon, problématique. En fait, de nombreuses personnes...
    Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]
    M. Sean Rehaag: Nombreuses sont les personnes qui présentent des demandes non fondées et qui peuvent tout de même courir un risque chez elles; la question consiste à déterminer si le niveau de risque est suffisant. Si le risque d'être tué dans son pays d'origine est de 1 p. 100, est-ce suffisant? Et s'il s'agit d'une probabilité de 2 p. 100, de 10 p. 100... Le simple fait qu'une demande a été rejetée ne veut pas dire qu'elle est fausse, et je crois que l'on ne devrait pas utiliser ces termes.
    Est-ce que quelqu'un a quelque chose à ajouter?
    N'importe quel système générera des faux positifs et des faux négatifs. Autrement dit, aucun système ne saisira parfaitement toutes les personnes que l'on veut inclure et toutes celles qui devraient être exclues.
    Jusqu'à maintenant, il a été question presque uniquement des personnes qui devraient être exclues et de la façon dont le système accueille à tort leur demande. Très peu d'attention a été prêtée à ceux dont la demande a été rejetée, mais qui devraient être inclus dans le système ainsi qu'au nombre de personnes qui seront exclues dans le cadre d'un nouveau système, mais qui devraient voir leur demande accueillie. Cela nous ramène à la question de la nécessité d'un processus d'appel adéquat et d'autres types de recours.
    En ce qui concerne le concept de faux réfugié dont la portée est si large, prenons l'exemple le plus populaire de faux réfugié, le préféré du gouvernement: les Roms. Selon de nombreuses sources, les Roms sont victimes d'une incroyable discrimination. Il reste à savoir si la discrimination escalade jusqu'à la persécution dans tous les cas, dans certains cas ou dans de nombreux cas.
    Imaginez comment se sent une victime de discrimination extrême qui, par exemple, présente une demande d'asile et qui se fait dire: « Vous savez, vous êtes victime de discrimination, mais votre situation n'est pas assez grave pour être considérée comme de la persécution ». Cette personne n'est peut-être pas un réfugié, mais le fait de la placer dans la même catégorie de faux réfugiés qu'une personne qui, un matin, décide tout simplement de se rendre au Canada et de présenter une demande d'asile....
(1200)
    Mais il y a des gens le matin qui se lèvent...
    Mme Audrey Macklin: Effectivement, mais...
    M. Ted Opitz: ... et décident de faire cela.
    D'accord. Alors, on a maintenant...
    Alors, comment allez-vous régler cela? De nombreuses personnes...
    Mme Audrey Macklin: Vous avez...
    M. Ted Opitz: ... veulent simplement tirer profit de notre générosité.
    Mme Audrey Macklin: Il y a beaucoup...
    M. Ted Opitz: Vous ne pouvez pas le rejeter en disant, eh bien, il y a plusieurs degrés. Le terme « faux ... Faux, c'est faux. Il n'y a pas de distinction à faire. Je suis désolé. Vous faites erreur.
    Dire que notre système... Laissez-moi vous donner l'exemple d'un autre système.
    Le temps est écoulé. Les esprits s'échauffent beaucoup ici, et c'est le temps de partir, je crois.
    Madame Jackman, monsieur Rehaag et madame Macklin, vous laissez au comité beaucoup de matière à réflexion, et nous vous remercions du temps que vous nous avez accordé. Merci beaucoup.
    La séance est levée. Nous reprendrons nos travaux à 15 h 30, cet après-midi.
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