SINT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 15 avril 2002
Á | 1100 |
Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)) |
M. Rohinton Medhora ((vice-président, Centre de recherches pour le développement international) |
Á | 1105 |
Le président |
M. Peter Clark (président, Grey, Clark, Shih and Associates Limited) |
Á | 1110 |
Le président |
Á | 1115 |
M. Gerry Shannon (consultant principal, Government Policy Consultants) |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Le président |
Mme Sharon Maloney (vice-présidente, Conseil canadien du commerce de détail) |
Á | 1130 |
Le président |
M. Patrick Vanasse (directeur responsable des recherches et représentations, Option Consommateurs) |
Á | 1135 |
Á | 1140 |
Le président |
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne) |
M. Gerry Shannon |
Á | 1145 |
M. Peter Clark |
M. Rick Casson |
M. Peter Clark |
M. Rick Casson |
Mme Sharon Maloney |
Á | 1150 |
M. Rick Casson |
Le président |
M. Gerry Shannon |
Le président |
M. Patrick Vanasse |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ) |
Á | 1155 |
M. Peter Clark |
M. Richard Marceau |
Mme Sharon Maloney |
 | 1200 |
M. Richard Marceau |
Mme Sharon Maloney |
M. Richard Marceau |
Mme Sharon Maloney |
M. Richard Marceau |
 | 1205 |
Mme Sharon Maloney |
M. Mac Harb |
Le président |
M. Gerry Shannon |
 | 1210 |
Le président |
M. Mark Eyking (Sydney--Victoria, Lib.) |
Mme Sharon Maloney |
 | 1215 |
M. Mark Eyking |
Mme Sharon Maloney |
M. Mark Eyking |
Mme Sharon Maloney |
M. Eyking |
Mme Sharon Maloney |
M. Mark Eyking |
Le président |
M. Peter Berg (attaché de recherche auprès du comité) |
M. Gerry Shannon |
 | 1220 |
Le président |
M. Peter Clark |
Le président |
M. Mark Eyking |
 | 1225 |
Le président |
M. Gerry Shannon |
Le président |
M. Rohinton Medhora |
 | 1230 |
Le président |
Dre Susan Joekes (chef d'équipe, Centre de recherches pour le développement international) |
Le président |
CANADA
Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 15 avril 2002
[Enregistrement électronique]
Á (1100)
[Traduction]
Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)): Bonjour, à tous.
Bienvenue à vous tous aujourd'hui qui venez nous faire part aujourd'hui de votre point de vue sur la position du Canada concernant les négociations de l'OMC.
Nous commencerons par une présentation d'au plus cinq minutes par chacun de nos invités, puis nous ouvrirons la séance aux questions de mes collègues.
Nous avons la chance d'avoir des spécialistes distingués du Centre de recherches pour le développement international et du secteur privé, notamment de Grey, Clark, Shih and Associates Limited, de Government Policy Consultants, du Conseil canadien du commerce du détail, et de Option Consommateurs.
Nous débuterons avec monsieur Rohinton Medhora. Vous avez cinq minutes.
M. Rohinton Medhora ((vice-président, Centre de recherches pour le développement international): Je suis ravi d'être ici ce matin pour vous parler de la proposition canadienne visant à améliorer l'accès au marché des exportations pour pays les moins avancés (PMA). Compte tenu des contraintes de temps signalées, je me limiterai à quatre points. Ma collègue, Susan Joekes, qui dirige le programme commercial du CRDI, et moi serons heureux de répondre à vos questions éventuelles. Merci, monsieur le président, membres et membres associés du sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux.
Je devrais d'abord dire que, même si le CRDI n'est pas un organisme de défense, nous pensons que le Canada doit, manifestement participer au débat sur les questions de développement de l'heure. Ainsi, vu la portée de cette initiative, nous l'accueillons sans hésitation pour de nombreuses raisons. Comme les pays les plus démunis semblent être ceux qui doivent affronter les mesures protectrices les plus rigoureuses, il s'agit définitivement d'une initiative de défense des pays pauvres. En fait, comme nous le soutenons dans le mémoire que nous vous remettrons, les modalités des échanges commerciaux concernant les exportations de ces pays se sont dégradées considérablement au fil des ans; tout ce qui améliore l'accès au marché sera utile. Si on tient compte du fait que les exportations de ces pays vers le Canada ne représentent pas une part importante des importations canadiennes, cette initiative représente beaucoup plus pour ces pays que pour le Canada sur le plan de l'amélioration des niveaux de vie.
Cela étant dit, en deuxième lieu, il revient aux PMA de se prévaloir des débouchés que leur procure cette initiative. Cela comprend ce que nous concevons comme le renforcement de la capacité d'approvisionnement, une question difficile qui implique le développement d'infrastructures afin d'accroître les exportations, mais aussi comme une question d'autorégulation, visant à améliorer les régimes commerciaux et politiques qui influent sur l'exportation, l'investissement et le commerce. Il y a beaucoup de travail à faire dans ces deux domaines. De fait, le mandat du CRDI englobe ces aspects sensibles de la gouvernance, de sorte que notre priorité consiste à améliorer les politiques susceptibles d'accroître l'efficacité de telles initiatives.
En troisième lieu, je dirais que, même si les barrières douanières et les contingents sont réduits, il s'avère de plus en plus que les barrières non douanières au commerce et aux exportations constituent un obstacle important. Les normes sanitaires et phytosanitaires et les obstacles techniques au commerce ont tendance à toucher particulièrement les exportations primaires des PMA. Il y en a une myriade. Il est onéreux pour ces pays de s'y conformer. Plusieurs de nos projets visaient d'ailleurs à en étudier certains coûts. Certains se préoccupent vraiment d'améliorer les normes de protection de la santé et de l'environnement dans le Nord, mais dans d'autres cas, il ne s'agit que de protectionnisme déguisé. On pourrait au moins s'efforcer davantage d'harmoniser certaines normes. Nous croyons vraiment que des pays comme le Canada ont aussi un rôle à jouer à cette fin, cela serait un complément utile à la réduction des tarifs douaniers proposée dans cette initiative.
En quatrième et dernier lieu, cela vise en fin de compte à favoriser le développement soutenu dans ces pays. Cela revient à s'assurer que les maillons reliant les niveaux du secteur économique de ces pays jusqu'aux sources de la pauvreté soient forts et efficaces. Je répète qu'il s'agit d'une question de politique et de renforcement de capacités à laquelle mon organisme s'intéresse vivement. Nous avons, certes, une myriade de programmes dans ce domaine et des projets qui réussissent dans ces pays. Nous sommes donc préoccupés par l'ensemble des obstacles tarifaires, non tarifaires et techniques, et par leur incidence sur la pauvreté. Nous sommes donc prêts à collaborer avec les autorités.
Merci.
Á (1105)
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Peter Clark, bienvenue encore une fois.
M. Peter Clark (président, Grey, Clark, Shih and Associates Limited): Merci, Monsieur le président.
L'initiative proposée par le gouvernement concernant les PMA est très intéressante et se fait attendre depuis longtemps. Je me rappelle avoir participé à des discussions sur ce sujet à Seattle, alors que les deux pays qui s'opposaient aux dispositions sur les textiles étaient le Canada et les États-Unis, puis à Doha, où la même situation s'est reproduite. L'imposition de tarifs douaniers à ces pays est une mesure abusive, injuste et immorale. Cela ne veut pas dire que nous en imposer. Mon point de vue sur cette question n'est pas tout à fait celui de mes amis qui sont présents, car j'ai occupé le poste de président de l'Institut canadien des manufacturiers du vêtement pendant huit ans. Il y a longtemps de cela et rien ne me lie à eux actuellement, mais nous devons examiner les questions et voir comment nous pouvons les absorber.
La préoccupation que l'on évoque inévitablement tient à la possibilité d'une inondation soudaine de marchandises en provenance du Bangladesh. Franchement, si j'étais dans l'industrie du vêtement, je serai davantage préoccupé par la possibilité d'une inondation de marchandises en provenance de la Chine dans deux ans ou à la suite de l'élimination du contingent imposé à ce pays. Ce sera une toute autre paire de manches pour tous ceux qui tiennent à leurs contingents et qui touchent une prime de pénurie.
Mais nous sommes en présence de plusieurs questions. D'abord, l'industrie du vêtement a profondément changé au fil des ans. Quand j'ai vu les chiffres figurant dans le document de travail sur le site Web, les grandes fluctuations de l'emploi d'une année à l'autre m'ont frappé. Franchement, ils ne me semblent pas corrects, car il s'agit d'une industrie plutôt stable selon mes sources.
Ensuite--et je m'en rappelle assez bien--le Canada a mis en place le régime de tarifs préférentiel le 1er juillet 1974. Ce jour-là, je devais travailler à Genève et me rendre aux réunions pour présenter notre programme. Dans le programme, nous avons inséré une clause échappatoire, un mécanisme anti-invasion afin de faire face aux problèmes. Sous l'autorité de l'ancienne Commission du tarif, il y a eu plusieurs audiences relatives à ces mesures de protection. Dans un ou deux cas, la préférence tarifaire a été retirée ou réduite en présence d'un préjudice avéré causé à une industrie canadienne.
Quand je vois ce qui est proposé ici dans le domaine de la chaussure, il ne s'agit pas vraiment d'une question de pays moins avancés. C'est relativement petit. Les plus grands problèmes que vivent les PMA en agriculture sont ceux qui ont été soulevés par l'intervenant précédent: les obstacles techniques au commerce et les MSP. En fait, nous ne pouvons avoir deux ensembles de normes. Nous devons en avoir un seul, le même que celui qui s'applique aux Canadiens. Il semble que l'assistance technique serait utile ici.
On en vient donc aux textiles. L'industrie du textile est hautement capitalistique. Elle n'est pas aussi travaillistique que par le passé. Cela n'inquiète pas beaucoup les PMA. Quand on parle de vêtements provenant de ces 49 ou 50 pays, il s'agit essentiellement d'un pays en particulier: le Bengladesh. N'oublions pas que, quand le comité du GATT sur la désorganisation du marché a analysé le besoin de protéger les importations à faible coût, comme qu'on les appelait en 1959, il a envisagé des mécanismes spéciaux, car les tarifs douaniers, les droits antidumping et les droits compensateurs ne servaient à rien. Le tarif ne changera pas grand chose pour ce qui est du Bangladesh ou de quiconque, car leurs prix sont déjà tellement bas que je n'envisage pas d'invasion. Les autres pays du groupe des PMA auxquels le Canada impose des contingents ne sont pas des joueurs importants. La suppression des contingents aura l'effet d'accroître les importations ou de les redistribuer dans la mesure où les contingents visant le Bangladesh sont rigoureusement appliquées.
Á (1110)
Nous avons des bassins d'emploi au Québec, en Ontario, au Manitoba et ailleurs dans l'industrie du vêtement. Ce sont des emplois très utiles, car si vous passez dans une usine, vous savez que la plupart des femmes qui y travaillent sont de nouvelles Canadiennes. C'est leur premier emploi. Elles s'intègrent dans l'économie canadienne. Pour elles, c'est un emploi très utile sur les places sociologique et économique. On ne peut pas les sacrifier, pour ainsi dire, sur un point d'honneur. On pourrait régler la question en adoptant une norme précisant en quoi consiste une augmentation subite, en examinant l'effet d'augmentations éventuelles et en traitant de leurs incidences à la lumière du préjudice, réel ou démontrable, que subirait la production au Canada.
Pour moi, il n'y a aucune raison de manquer de discernement en redoutant ce qui pourrait arriver. Nous devrions examiner les mécanismes de développement qui peuvent être utilisés efficacement pour régler les vrais problèmes et continuer à vivre, car franchement, cet exercice prend l'allure d'un grave problème.
Merci, Monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup de vos observations judicieuses, monsieur Clark.
Gerry Shannon, de Government Policy Consultants.
Á (1115)
M. Gerry Shannon (consultant principal, Government Policy Consultants): Merci beaucoup, Monsieur le président.
La perspective d'ouverture des marchés du G-8, dont le marché canadien, aux exportations des pays les moins avancés du monde apparaît comme un résultat très important du prochain sommet de Kananaskis. L'attention portera inévitablement sur l'option de suppression des droits et des contingents, épousée par les dirigeants du G-8. Je peux apporter quelques observations fondées sur mon rôle de négociateur en chef durant la dernière ronde à Genève, ainsi que sur le travail que mes collègues et moi avons effectué en réponse à une demande de l'ACDI d'examiner la relation entre le commerce et le développement international dans le cadre des nouvelles négociations lancées à Doha.
D'abord, Monsieur le président, en principe, il est logique d'ouvrir davantage aux PMA les marchés des pays industrialisés. Contrairement à certaines perceptions populaires, les pays en développement, dans leur ensemble, ont en fait gagné dans la ronde de l'Uruguay, comme on peut le voir dans l'expansion sensible de leurs exportations durant la dernière décennie; elles sont passées de près d'un billion à près de 2,4 billions de dollars en 2000. Cela est, bien sûr, moins vrai pour certains des pays les plus pauvres, en particulier en Afrique, qui manquent des ressources nécessaires pour profiter des possibilités du système. Un grand nombre de ces pays continuent aussi de s'accrocher à une politique fortement interventionniste de l'État au détriment des forces du marché, laquelle est perdante, a mon avis, et va à l'encontre du but recherché.
Quoique vous pensiez du débat sur la mondialisation, deux choses semblent claires. D'abord, le commerce mène à la croissance, comme en témoigne l'expérience récente de la Chine. Ensuite, les pays qui prennent des décisions fortes pour supprimer les obstacles internes à la croissance, favorisant ainsi l'action des forces du marché, qui surclassent en général ceux qui s'accrochent à une forme fortement dirigiste de gouvernement.
Un de nos plus grands défis actuels consiste à rendre le commerce efficace pour les pauvres dans le monde, tout comme pour les riches et pour ceux dont l'avenir est prometteur, et Doha regorge d'engagements à faire des efforts spéciaux pour aider les PMA dans les nouvelles négociations sur le commerce, y compris un engagement à l'égard de l'accès sans douanes et sans contingents aux marchés des pays industrialisés.
Les avantages et les coûts potentiels de l'initiative de l'ouverture du marché canadien aux PMA doivent être mis en perspective. Comme le signalent des documents récemment distribués par les Affaires étrangères, les importations provenant des 49 pays de la catégorie des PMA des Nations unies représentent seulement une fraction de 1% des importations totales du Canada, et la moitié de ces produits entrent déjà hors taxes au Canada. Ces chiffres indiquent que l'incidence nationale d'une politique d'absence de droits et de contingents au Canada pour les PMA sera proportionnellement minime. Je comprends que, malgré cela, les industries canadiennes du textile et du vêtement soulèvent des questions dans cette optique, mais je pense, monsieur le président, que leurs sérieuses préoccupations ne semblent pas justifiées.
Premièrement, la capacité matérielle des PMA à faire des percées importantes dans le marché canadien est limitée, à l'exception possible du Bengladesh, qui fournit actuellement 3% des importations canadiennes de textiles et de vêtements. La présence des PMA sub-sahariens sur le marché est bien moindre.
Deuxièmement, conformément aux termes de la dernière ronde de l'OMC, une période de sept ans est accordée afin de permettre le retrait graduel de tous les produits vestimentaires de la liste des produits à entrée restreinte. Le processus de retrait a été si sélectif qu'il ne commencera à se faire sentir que dans les dernières années de l'entente. Les entreprises nationales locales ont eu amplement de temps pour s'adapter.
Troisièmement, monsieur le président, il est peut être utile de rappeler aussi que la négociation de l'ALÉ entre le Canada et les É.-U. qui était probablement l'accord commercial le plus perturbateur que nous ayons jamais signé, n'a pas conduit au lancement d'un important programme d'aide à l'adaptation. En fait, seules les industries vinicoles ont reçu une aide spéciale, alors le reste des industries touchées ont fait appel à des programmes existants. En renversant tout ceci, la faible présence des PMA sur le marché canadien indique qu'on ne devrait pas surestimer les avantages que leur procure cette politique.
Á (1120)
En fin de compte, les coûts et les profits dépendront évidemment de la réaction des bénéficiaires. Le fait d'élargir l'accès au marché ne garantit pas forcément un flux plus important ou encore, comme l'a souligné mon ami Peter Clark, que les exportations des PMA ne seront pas submergées par celles provenant de Chine ou d'autres exportateurs importants, même au demeurant si ces derniers devraient toujours être confrontés à des tarifs élevés après la suppression des quotas en 2005.
L'une des choses les plus utiles que le Canada pourrait faire serait d'intensifier son aide pour aider les pays les plus pauvres à développer leurs activités commerciales, dans le contexte de la décision prise par le gouvernement d'affecter 500 millions de dollars en faveur de l'Afrique sub-saharienne. Les débouchés professionnels n'ont pas une grande valeur si vous ne disposez pas de produits à vendre ou d'une infrastructure et des intermédiaires de vente. C'est la raison pour laquelle il est devenu tout aussi important, pour bon nombre de pays en développement, et plus particulièrement pour les plus petits et les moins avancés, d'augmenter leur capacité commerciale que d'ouvrir des marchés.
Si nous voulons pousser l'Afrique sub-saharienne et d'autres pays à se tourner vers des économies plus ouvertes et axées sur les marchés, il nous faut porter une attention particulière au renforcement des capacités commerciales. La Banque mondiale, l'OMC, les organismes des Nations Unies et les gouvernements utilisent de plus en plus ce terme. Le renforcement des capacités commerciales englobe énormément de choses pour ne pas dire tout, comme par exemple aider les pays à participer à l'OMC ou mettre en place le type d'infrastructure institutionnelle nécessaire à une exploitation dans le système commercial moderne. Ce qui n'implique pas, bien entendu, que l'on doive considérer le commerce comme une certaine panacée du développement ou qu'il doive primer sur tout autre forme traditionnelle de développement. Il suffit simplement de reconnaître qu'il ne va bientôt plus être possible de considérer le commerce et le développement comme deux solitudes que l'on va instituer individuellement. Le commerce fait maintenant partie intégrante du développement et inversement.
Monsieur le président, les initiatives visant à élargir l'accès aux marchés ne pourront vraisemblablement pas être fructueuses si l'on ne cherche pas à atténuer les difficultés chroniques rencontrées par bon nombre de ces pays, pour attirer les investissements étrangers . En d'autres termes, qui va venir investir dans les industries africaines et à quelles conditions? L'élargissement des marchés ne pourra pas en lui-même profiter aux pays que nous tentons d'aider, en l'absence d'investissements à long terme de qualité. Une des solutions pourrait consister à améliorer peu à peu la gouvernance de ces pays et à atténuer la perception des risques politiques et économiques, qui ont découragé de tels investissements par le passé.
Toutefois, cela soulève également la question des garanties d'investissement. Il est improbable que les entreprises canadiennes investissent en Afrique sans que leurs garanties ne soient stipulées par un organisme national ou par l'Agence multilatérale de garantie des investissements de la Banque mondiale. À cet égard, il est toutefois à noter que l'initiative américaine récemment annoncée en faveur de l'Afrique comprend, je crois, environ 200 millions de dollars de garanties d'investissement de Ex-Im Bank pour les entreprises américaines se décidant à y investir.
Enfin, monsieur le président, il est primordial de continuer à élargir l'accès au marché pour les raisons valables. À ce sujet, permettez-moi de faire quelques mises en garde.
La politique canadienne ne devrait pas être modifiée sous prétexte de certaines idées fausses, par exemple que le Canada serait pour une raison ou une autre, plus en retard sur la question des tarifs à l'égard des PMA, que ses partenaires du Groupe des huit. Il nous faut considérer avec prudence certaines études internationales récentes aboutissant semble-t-il, à pareille conclusion. Celles que j'ai pu voir sont axées essentiellement sur les tarifs et laissent de côté des facteurs qui ne sont pas aussi faciles à mesurer, comme les contingents et autres barrières non tarifaires. Le contingent américain sur le sucre ou les règles d'origine européennes et les autres conditions d'importation, par exemple, ont certainement des répercussions beaucoup plus importantes sur la capacité d'exportation réelle des PMA que les lignes tarifaires canadiennes.
Le fait est qu'aucun régime tarifaire industrialisé pour les textiles et les vêtements ne gagnerait un concours de beauté. Le Canada n'est certainement pas pire que les autres et on pourrait dire que sa démarche est plus franche. Les problèmes découlant du le tarif canadien apparaissent notamment comme des crêtes tarifaires; on les rencontre également dans le secteur du textile et du vêtement, dont l'importance est considérable, étant donné que les PMA pratiquent maintenant la fabrication à faible coût et qu'il est évident que la protection canadienne est toujours la plus élevée dans ce domaine.
Quant au secteur de l'agriculture, monsieur le président, la plupart des tarifs agricoles dans des secteurs d'importance considérable pour les pays moins avancés, comme le sucre et les arachides sont comparativement peu élevés. En outre, les expéditeurs de la plupart, pour ne pas dire de toutes les importations qui peuvent toucher les secteurs canadiens extrêmement protégés par des régimes de gestion des approvisionnements, viennent de pays développés comme les États-Unis, l'Union européenne et l'Australasie, et non des PMA.
Il faut aussi se garder de rester cloué d’épouvante dans la foulée de mesures déjà annoncées par nos partenaires du G-8. Bien que l’initiative de l’UE visant «tout sauf les armes» semble orientée sur la bonne voie, elle semblerait toutefois se limiter à l’élargissement du régime préférentiel visant les anciennes colonies et n’entrera entièrement en vigueur qu’en 2009. Qui plus est, elle ne traite aucunement de la question très problématique du vaste éventail de mesures d’entrave au commerce de l’UE.
Á (1125)
Le programme américain visant l'Afrique est essentiellement un programme conditionnel qui offre un accès préférentiel au marché américain à condition d'utiliser le fil américain. Il peut éventuellement s'avérer utile aux PMA et il servira indubitablement les intérêts de l'industrie du textile américaine.
Il ne faut pas oublier, par ailleurs, que le marché canadien est relativement restreint pour les pays en développement, surtout si on le compare à des marchés beaucoup plus importants, comme les marchés américains et européens, auxquels certains de ces pays sont déjà étroitement liés. Aussi, les marchés en progression rapide d'autres pays en développement comme la Corée et le Brésil, dont les niveaux tarifaires historiques au détriment des exportations des PMA sont considérablement plus élevés que ceux des pays industrialisés, sont en constante augmentation. Il est permis de croire que le moment est venu où les pays en développement les plus avancés doivent intensifier leurs efforts visant à élargir l'accès au marché pour leur voisins dont les revenus sont moins élevés.
En fin de compte, monsieur le président, l'adoption d'une politique sensible à l'égard des PMA constituera un message important au sujet du prochain cycle de négociations commerciales multilatérales, où les attentes de tous les pays en développement et les enjeux seront considérables. Il serait appréciable que les dirigeants du G-8 se penchent sur cette question à Kananaskis.
Je vous remercie.
Le président: Merci beaucoup, Monsieur Shannon.
Nous allons écouter maintenant Sharon Maloney du Conseil canadien du commerce de détail. Vous avez cinq minutes tout au plus.
J'aimerais seulement rappeler à nos amis, que s'ils ont des suggestions ou tout autre sorte de documents écrits à nous remettre, qu'ils n'hésitent surtout pas à le faire.
Mme Sharon Maloney (vice-présidente, Conseil canadien du commerce de détail): Je vous remercie, monsieur le président.
Avant de commencer, je souhaiterais vous donner un bref aperçu de ce qu'est le Conseil canadien du commerce de détail, car je ne suis pas certaine que beaucoup d'entre vous connaissez notre organisation. Le Conseil canadien du commerce de détail est une association professionnelle nationale qui représente plus de 8 500 commerces de détail partout au Canada: grands magasins, chaînes de magasins, magasins de grande surface, détaillants indépendants et cybercommerçants. Ils vendent un éventail de produits qui va des tournevis aux chaussures, provenant de centaines de pays dans le monde et fabriqués par des centaines de milliers d'usines.
Les ventes au détail canadiennes s'élevaient à 277,2 milliards de dollars en 2000. Nos membres fournissent de l'emploi à 1,2 million de Canadiens et possèdent plus de 245 000 magasins au pays. Le commerce au détail représente 6 p. 100 du produit intérieur brut du Canada et comme vous le savez certainement, un commerce de détail, Wal-Mart a été nommé pour la première fois la plus grande compagnie du monde.
Le Conseil canadien du commerce de détail appuie activement tous les efforts de libéralisation du commerce. Nous croyons fermement que le développement du commerce profite aux Canadiens et aux citoyens des autres pays. Nous pensons également que la création d'emplois est la meilleure façon d'aider ces pays plus démunis que le nôtre sur le plan économique.
La croissance des importations dans les années 80 donne à penser que les Canadiens souscrivent également à la mondialisation des marchés et à ses avantages. La part des biens importés est passée de 18 p. 100 de la demande nationale en 1981 à 42 p. 100 en 1994. Comme le souligne le document de travail rédigé par le ministère des Affaires étrangères, la libéralisation du commerce a entraîné des économies dont les Canadiens ont bénéficié. Plus particulièrement, l'index du prix à la consommation indique que les prix de l'alimentation, du logement et de l'habillement sont les plus stables.
Ceci étant dit, nos membres sont conscients du fait que les Canadiens possèdent un esprit d'équité et qu'ils ne veulent pas acheter des biens qui auraient été fabriqués dans des conditions de travail inhumaines. C'est pour cette raison que le Conseil canadien du commerce de détail, avec l'aide de ses compagnies membres, a institué des lignes directrices sérieuses. Elles établissent des recommandations fondamentales en matière de commerce afin d'assurer que les marchandises sont fabriqués dans des conditions de travail humaines. Elles englobent et interdisent la main-d'œuvre enfantine, le travail forcé et la discrimination. Elles exigent aussi que les compagnies respectent la liberté d'association et le droit du travail local et mettent à disposition de leur personnel des installations sécuritaires et propres.
Nous soulevons cette question, car, bien que nous soutenions la libéralisation du commerce, nous pensons aussi que nos gouvernements et ceux des pays avec lesquels nous travaillons doivent coopérer et assurer le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques. Une mauvaise gestion publique ne va pas de pair avec les affaires. Nous nous opposons à ce que le Canada insiste seul sur cette question, indépendamment de ses autres partenaires commerciaux ou organisations internationales.
En outre, nous ne pensons pas que les entreprises doivent devenir un quatrième palier gouvernemental. Nous croyons plutôt qu'elles doivent évoluer avec l'appui d'une infrastructure mondiale qui reconnaît que les droits de l'homme sont aussi importants que la libéralisation du commerce.
Toutefois, le Conseil canadien du commerce de détail n'est pas persuadé que le Canada doive assumer un rôle d'impérialiste culturel. Jusqu'à présent, notre force consistait à coopérer avec les pays en développement et les autres. Agir autrement reviendrait à ignorer notre propre histoire et notre propre développement économique. Les changements que nous vivons aujourd'hui en matière de mondialisation sont évolutifs plutôt que révolutionnaires. La proposition de diminuer le nombre de terroristes pour les pays les moins avancés tout comme la demande du Canada aux pays africains de respecter les droits de l'homme et les principes démocratiques font partie de cela. Les citoyens des autres pays partenaires commerciaux ne tireront que peu de profits s'ils ne sont pas surveillés et ne sont pas reconnus comme faisant partie de ce défi.
Á (1130)
Dans le même ordre d'idées, nous ne devrons pas adopter des programmes dont le seul effet serait de freiner les entreprises canadiennes sans rien faire pour relever les défis fondamentaux de la protection des droits de l'homme et des principes démocratiques. Je fais bien sûr allusion à la proposition de modification du Numéro d'enregistrement canadien de façon à indiquer le nom et l'emplacement de chaque usine dans laquelle le bien est fabriqué. Les détaillants ont affaire à des milliers d'usines dans de nombreux pays. Ils changent souvent d'usines pour de multiples raisons. En effet, le fait de savoir qu'une compagnie peut changer de fournisseur doit motiver une usine à respecter le code de pratiques de cette même compagnie. Si vous empêchez les commerces de détail de le faire, vous allez supprimer un moyen d'influence essentiel.
Le programme proposé--et je fais de nouveau allusion à l'identification CA--ne servirait qu'à faire du tort aux entreprises canadiennes et ne résoudrait nullement les problèmes que nous voulons tous solutionner. Les compagnies seraient forcées de dépenser des sommes considérables pour enregistrer et réenregistrer l'information, plutôt que d'aider les usines à augmenter l'observation de leurs codes et de leur législation locale. De plus, elles seraient obligées de séparer l'information pour chaque vêtement. Elles seraient également tenues de publier ces renseignements en ligne, ce qui entraînerait une mise à jour permanente. Je pense réellement que ce serait un exemple classique d'une bureaucratie atteinte de folie. Le consommateur ne connaîtrait pas plus que le lieu de fabrication et le nom de l'usine. À notre avis, cette proposition est inconsidérée. Elle ne pourrait faire que du tort aux entreprises canadiennes comme aux pays en développement. Présentement, nos membres investissent des sommes considérables dans les programmes de surveillance et d'observation. Le respect de ces normes devient de plus en plus une clause des contrats. En d'autres termes, l'engagement à respecter les droits de l'homme et à se conformer au droit du travail local sont des coûts d'entreprise prévus.
À moins que nous n'atteignons un équilibre en arrêtant les pires formes de violation des droits de l'homme et en respectant le rôle des gouvernements nationaux, nous risquons d'être considéré comme un pays paternaliste et gênant. Nous sommes persuadés que les gouvernements et les organisations internationales doivent prendre les choses en main et faire front aux violations des droits de l'homme des partenaires commerciaux du pays. Nous pensons cependant que le rôle de l'OIT se prête d'avantage à cette fin, qu'il y aurait lieu d'apporter certaines modifications ententes internationales de l'OMC, plutôt que demander des programmes comme le numéro d'identification CA.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie beaucoup, madame Maloney.
Nous allons maintenant entendre Patrick Vanasse d'Option Consommateurs.
[Français]
M. Patrick Vanasse (directeur responsable des recherches et représentations, Option Consommateurs): Bonjour. Je suis Patrick Vanasse d'Option Consommateurs. Je suis accompagné de Mme Delphine Nakache. Je vais faire la présentation et Mme Nakache pourra répondre à vos questions, le cas échéant.
Au départ, Option Consommateurs est un organisme sans but lucratif dont le but est de protéger les intérêts des consommateurs à faible et à moyen revenus. Nous nous intéressons à plusieurs domaines et ce n'est que depuis peu que nous nous intéressons à la libéralisation du commerce international et, dans ce cas-là, nous ne pouvons pas intervenir sur toutes les questions soulevées par cette consultation. Nous avons donc limité nos propos aux questions touchant la libéralisation des services, plus particulièrement l'application du critère de nécessité.
Dans le cadre de la volonté du Canada de libéraliser le commerce avec les pays les moins avancés, nous voudrions que la position de négociation du Canada tienne compte d'un aspect particulier: l'application du critère de nécessité tel que contenu à l'article IV:4 de l'Accord général sur le commerce des services.
Dans le monde, le secteur des services représente 60 p. 100 du flux total des investissements étrangers directs. En 1999, la valeur du commerce transfrontières des services a totalisé 1 350 milliards de dollars américains, soit environ 20 p. 100 du commerce transfrontières total. Au cours des deux dernières décennies, le commerce des services a progressé plus rapidement que celui des marchandises.
Au Canada, la prestation des services est une importante source d'activité économique. Le secteur des services est celui qui croît le plus rapidement et il représente plus de 60 p. 100 du produit intérieur brut. L'industrie des services emploie les trois quarts de la population canadienne et crée neuf nouveaux emplois sur dix. La production de l'activité économique canadienne qui dépend du commerce international est plus élevée que dans n'importe quel pays du G-7 ou de l'OCDE.
Certes, aucun pays ne peut aujourd'hui prospérer sous le poids d'une infrastructure de services inefficace et onéreuse. En outre, l'importation de services peut procurer des avantages aux Canadiens en augmentant la concurrence et en favorisant l'accès à des idées nouvelles et à des technologies novatrices. La concurrence entraîne généralement une baisse des prix, l'amélioration de la qualité et l'élargissement du choix pour les consommateurs et les fournisseurs de services.
Cependant, l'élargissement du choix pour les consommateurs risque quelquefois de s'accompagner d'une perte des protections qui leur sont actuellement accordées. Il n'est donc pas évident, loin de là, que la relation entre une plus grande concurrence et une protection identique survive aux dispositions de l'Accord général sur le commerce des services et que, dans le cadre d'une plus grande ouverture du Canada aux services fournis par les pays les moins avancés, les consommateurs canadiens puissent toujours bénéficier de la même protection. Cet argument repose sur une étude d'Option Consommateurs portant sur les effets potentiels à l'article IV:4 de l'AGCS, test de nécessité, sur deux secteurs de services bien spécifiques: le tourisme et le secteur des services juridiques.
L'article VI:4 vise à protéger les membres contre l'utilisation protectionniste ou discriminatoire de certaines mesures prises par les États. Le pays qui allègue le maintien de sa mesure plus restrictive que nécessaire au commerce doit faire la preuve de la nécessité de cette mesure. La procédure s'opère en deux étapes. Tout d'abord, il faut montrer que le critère de nécessité associe la mesure appliquée à la poursuite d'un objectif légitime. L'étape suivante consiste à déterminer si la mesure en question est nécessaire pour atteindre cet objectif. En bref, la mesure mise en place par l'État pour répondre au critère de nécessité doit avoir un objectif légitime, ne doit pas être plus rigoureuse que nécessaire et doit être la moins restrictive au commerce. L'évaluation des autres mesures dont dispose le membre concerné est primordiale afin de déterminer si la mesure donnée est la mesure disponible ayant les effets les moins restrictifs sur les échanges.
Il est important de souligner qu'il existe deux conceptions du critère de nécessité. La première conception, défendue par le Canada, prescrit que les réglementations ne doivent pas être plus restrictives pour le commerce qu'il n'est nécessaire.
La deuxième conception, défendue par l'Union européenne, est en faveur du terme de «proportionnalité», dont la connotation est fort différente.
Pour le Canada, en effet, une mesure ayant pour effet de restreindre les échanges ne peut être considérée comme nécessaire que s'il n'existe pas d'autre mesure perturbant moins le commerce et dont on peut raisonnablement attendre qu'un membre l'utilise pour atteindre le même objectif de politique générale. Ce sont les termes de l'accord.
Á (1135)
Il s'agit donc d'attendre des pays qu'ils aient recours à une mesure restreignant le moins possible le commerce pour atteindre le même objectif et qui pourrait être adoptée en utilisant les facteurs de faisabilité technique et économique.
Pour l'Union européenne, en revanche, une mesure devrait être considérée comme n'étant pas plus restrictive pour le commerce et/ou pas plus rigoureuse qu'il n'est nécessaire si elle n'est pas disproportionnée par rapport aux objectifs poursuivis. La notion de proportionnalité ne renvoie pas nécessairement à la question de savoir s'il existe ou non une autre possibilité. Avec la proportionnalité, au contraire, une mesure donnée serait soumise à un critère d'équilibrage consistant à mettre en place l'objectif visé par la mesure et ses effets délétères.
Nous sommes d'avis que dans le cadre des négociations menant à l'ouverture aux marchés des pays les moins avancés, la position canadienne actuelle du critère de nécessité pourrait remettre en question plusieurs protections actuellement accordées aux consommateurs canadiens. Nous souhaiterions que le Canada choisisse plutôt une position qui tiendrait compte de la notion de proportionnalité afin de mieux mettre en contexte l'objectif des mesures de protection des consommateurs.
Nous utilisons présentement l'exemple du secteur des touristes qui a fait l'objet d'une recherche par Option Consommateurs. Cet exemple est très intéressant, car le secteur est déjà très libéralisé et le Canada s'inscrit dans le mouvement général de libéralisation qui s'est toujours opéré sans aucune contestation. On a tenu compte des engagements canadiens dans la catégorie des agences de voyages et voyagistes et du mode 3 de fourniture de services, présence commerciale au Canada, l'étude de la Loi québécoise sur les agents de voyages et ses règlements, particulièrement des exigences de la loi en termes de licence, conditions à l'octroi d'un permis d'agent de voyage.
Les mesures québécoises comme les critères relatifs à l'établissement, ceux en matière de documentation, entre autres la fourniture précise des états financiers des agents de voyage, ou encore celui de l'expérience professionnelle ou du cautionnement individuel ou collectif sont autant de normes peu susceptibles de passer le test de nécessité, avec la vision canadienne actuelle.
L'étude a démontré que ces exigences ont été établies afin de garantir une protection importante du consommateur en matière de voyages. Par conséquent, il existe le danger à moyen terme d'une protection moindre du consommateur, surtout par le biais de la remise en question des exigences liées au cautionnement, ces dernières étant les plus pratiques et les plus sûres d'aboutir lorsqu'il s'agit d'indemniser le consommateur en cas de litige ou en cas de fermeture de l'agence de voyages.
Protection moindre ne signifie pas protection minimum. Il y aura toujours une protection minimum du consommateur, mais nous sommes bien loin des protections accordées actuellement aux consommateurs grâce au permis, d'autant plus que la coopération générale ne prend pas le relais. Donc, pour ce secteur, il faudrait faire attention que la protection des consommateurs soit maintenue en matière de tourisme. Dans le cadre de négociations avec des pays moins avancés, il faudrait s'assurer de tenir compte de cet aspect.
Je vous remercie.
Á (1140)
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Sur ce, nous allons ainsi commencer la séance des questions avec monsieur Casson.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Je vous remercie, monsieur le président. Je tiens à tous vous remercier pour vos exposés qui étaient fort intéressants.
Monsieur Shannon, vous avez en quelque sorte esquivé la question entière portant sur l'élargissement de l'accès au marché canadien pour les pays les moins avancés et sur ce qu'il serait nécessaire de faire pour les aider à réussir. Ils doivent en être capables, mais pour ce faire il leur faut des investissements, des investisseurs et bien entendu, ils veulent des bénéfices en retour. Vous pourriez peut-être revenir à ce que vous disiez tout à l'heure. Comment pouvons-nous créer une atmosphère où les gens se sentent suffisamment confiants pour aller investir dans certains de ces pays, tout en étant conscients qu'il existe chez certains de ceux-ci des problèmes sociaux et politiques? Que pourrait-on faire pour assurer que ces pays puissent avoir la capacité et les investissements pour progresser, même si l'accès au marché canadien est bien instauré?
M. Gerry Shannon: C'est une très bonne question. Plusieurs gouvernements nationaux et institutions comme la Banque Royale s'efforcent d'établir des règles dans le domaine de la gouvernance pour essayer d'éviter qu'une société ait des excédents qui constitueraient un risque physique ou financier pour les entreprises qui voudraient faire des affaires avec un de ces pays. Si un pays est instable au point où vous même n'y investiriez pas votre propre argent, il y a de fortes chances que les hommes d'affaires y renonceraient également. Dans ma déclaration, j'ai mentionné que, par exemple, les investissements garantis par l'État pourraient encourager les investissements dans les pays qui possèdent le potentiel nécessaire pour produire des marchandises et les vendre. Cela pourrait être mis en application lorsqu'il y a de bonnes chances qu'un tel investissement soit honoré et qu'un produit de qualité, qui serait ensuite distribué sur le marché américain, européen ou le nôtre, en résulte.
Cela se fera progressivement. Ce qui est vraiment important, c'est que, si vous en arrivez à la conclusion qu'un certain nombre de pays en développement favorisent le fonctionnement de leur marché économique interne, ils seront beaucoup plus disposés à accepter les investissements étrangers et à s'en servir en conséquence, en sachant que, au bout du compte, cela leur assurera un certain nombre d'emplois.
Je ne sais pas ce que nous pourrions faire de plus, si ce n'est d'aider les gouvernements à instaurer des politiques et des programmes dans les domaines où la Banque mondiale et l'Organisation mondiale du commerce-ainsi que d'autres- sont maintenant impliqués, qui ont du sens pour ce qui est des droits fondamentaux de la personne, et qui fournissent un environnement propice à la conduite d'une activité économique. Ensuite, il faut trouver des moyens pour aider les entreprises qui possèdent les fonds nécessaires et qui pensent qu'il existe un potentiel pour leurs fonds dans ce marché, à investir ces fonds et à leur assurer, dans une certaine mesure, que leurs investissements seront avalisés, du moins à court terme, par des garanties de l'État.
Á (1145)
M. Peter Clark: Si vous leur donnez accès aux domaines où on leur a imposé le plus de restrictions, où ils auraient pu recevoir plus d'investissement par le passé, c'est déjà un début. Les industries que j'ai mentionné ont été les composantes de base de tous les pays en développement. Si vous leur garantissez l'accès, ils feront des investissements et ces investissements, seront plus importants que jamais.
Le matériel de production et l'infrastructure des usines sont assez faciles à déplacer. En fait, vous vous rendrez compte que ces industries sont aussi capables de se déplacer. Si elles pensent qu'un gouvernement ou qu'un pays se déstabilise, elles déménageront ailleurs sans grande difficulté.
M. Rick Casson: Si nous accordons une quelconque attention spéciale aux pays les moins développés, qu'ils entreprennent la phase de production et qu'ils prennent pied dans l'industrie, quelles garanties aurions-nous que les industries de ces pays y resteront présentes dans l'éventualité où ces concessions s'épuisent? Ne reviendront-elles pas automatiquement au pays impliqué? Je suppose qu'ils auraient intérêt à augmenter leurs économies et à devenir un véritable concurrent.
M. Peter Clark: Si vous mentionnez le fait qu'ils soient promus puis perdent des concessions, nous ne prévoyons pas que ce sera le cas pour beaucoup d'entre-eux à court terme. Il pourrait y en avoir un ou deux, mais il s'agirait des pays les plus avancés et ils procéderaient à d'autres perfectionnements au sein de leur industrie. Ce que vous avez relevé avec ces pays, une fois qu'ils ont pris pied dans l'industrie... Je me souviens, lorsque je négociais ces ententes restrictives sur les textiles, il y avait quelques pays qui se trouvaient dans la même position que le Bangladesh aujourd'hui, et maintenant ils ont des créateurs de mode reconnus mondialement qui vendent leurs créations dans les boutiques chic de New York, Londres et Paris. Cela n'arrive pas du jour au lendemain, cela se fait pas à pas. Vous grimpez les échelons jusqu'à ce que le prix, le coût et les tarifs ne soient plus la chose la plus importante. Si nous croyons tout ce que nous entendons, les contingents devraient disparaître bientôt.
M. Rick Casson: À l'attention de Mme Maloney, et pour les autres, s'ils sont intéressés, si toutes ces choses dont nous discutons se produisent, quelles en seront les répercussions pour les consommateurs au Canada? Que se passera-t-il? Obtiendront-ils de meilleurs prix? Auront-ils un meilleur choix? En fin de compte, que nous apportera cette entente?
Mme Sharon Maloney: En étudiant cette question d'un point de vue global, nous pensons--et je pense que mon ami d'Option consommateurs nous appuierait--que cela profitera aux consommateurs canadiens. Ils auront certainement plus de choix. C'est pourquoi nous appuyons toujours ce genre de choses, parce que, en fin de compte, c'est dans l'intérêt des Canadiens. De plus, le document du ministère des Affaires étrangères mentionne que le secteur du vêtement--et je présume que les chaussures entrent dans la même catégorie--n'a pas connu une forte augmentation des prix. En fait, les prix sont restés relativement stables au cours des dernières années grâce à cette expansion et à la libéralisation que nous avons encouragée et que nous avons pu constater.
Néanmoins, il y a l'envers de la médaille. Je pense que les Canadiens sont inquiets, et nous en tenons compte. Si les Canadiens ont des doutes au sujet des conditions de fabrication de ces marchandises, s'ils sont inquiets et ont peur que les pays auxquels nous achetons ces marchandises ne soutiennent et ne se prévalent pas de leurs propres lois, sans mentionner les normes qui pourraient être différentes de celles du Canada, je pense qu'il s'agit d'une source de préoccupation qui doit être examinée. C'est une source de préoccupations pour nous, en tant que détaillants, parce qu'on nous considère souvent comme étant la tête du triangle. Nous considérons que ce sont les consommateurs qui forment la tête du triangle, et que nous nous trouvons juste en-dessous. Si ces éléments suscitent réellement des craintes, s'il n'existe pas une certaine confiance et une certaine connaissance de ce qui se passe au niveau international, cela porte préjudice à notre secteur d'activité.
Dans ma présentation, j'ai mentionné que nous appuyons tout cela. Nous pensons que, puisqu'on construit l'économie de ces pays, puisqu'on leur fournit l'infrastructure, qu'on leur fournit de l'aide ainsi que des investissements directs, en fin de compte, nous pourrons développer un meilleur réseau et beaucoup de ces problèmes actuels perdront de leur importance.
Á (1150)
M. Rick Casson: Merci.
Le président: Monsieur Marceau.
Désolé, monsieur Shannon.
M. Gerry Shannon: Monsieur le président, si je peux me permettre, je pense que nous devons être prudents lorsque nous portons des jugements pour déterminer la limite où les valeurs sociales et les valeurs du travail se mêlent aux considérations commerciales. Visiblement, dans les cas les plus flagrants, lorsque vous êtes confrontés à des choses comme le travail des enfants, qui dépassent les limites de toutes les organisations, notamment celles de l'Organisation internationale du Travail, il est nécessaire de fixer une limite. Mais il faut rester prudent, car il y a également des cas où les valeurs sociales sont différentes d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre, pas seulement en ce qui concerne les questions des droits de la personne, mais également en ce qui concerne les questions environnementales. Par exemple, il se peut qu'une personne en Europe décide que la méthode canadienne pour l'exploitation forestière des billes va à l'encontre des enjeux mondiaux et environnementaux et que, pour ces raisons, il veuille interdire l'importation des produits forestiers canadiens. Avec ce genre de problème épineux, vous pourriez regretter, jusqu'à la fin de votre vie, les jugements qui sont portés. C'est une voie très sinueuse. Les négociateurs commerciaux, et donc les gouvernements, devront trouver un moyen de surmonter les problème que posent les zones conflictuelles en matière de commerce et d'environnement, de commerce et des relations de travail ainsi qu'en matière de commerce et des droits de la personne. Ce sont tous des points qui doivent être examinés attentivement.
Merci.
Le président: D'accord.
Monsieur Vanasse.
M. Patrick Vanasse: Nous sommes également préoccupés par la qualité des produits qu'importerait le Canada s'il ouvrait ses frontières aux pays en voie de développement, plus particulièrement par la qualité des produits agricoles. Le Canada pourrait peut-être défier certains règlements concernant la qualité des aliments; il est réputé pour avoir des normes rigoureuses en matière de qualité des aliments. Nous craignons que ces négociations ne provoquent l'abaissement de ces normes et nous nous inquiétons au sujet des OGM. Le Canada projette d'introduire la facturation volontaire pour les OGM. Si le Canada ouvre ses frontières à ces pays, ils devront connaître l'existence de ces projets. Lorsqu'on parle d'étiqueter les OGM, le Canada doit imposer des responsabilités à ces pays sans pour autant que leur mise en place ne nécessite des infrastructures ou de ressources financières supplémentaires. Il ne s'agit pas uniquement d'une question de tarifs, c'est également une question de réglementation de la qualité des aliments et de la qualité des produits. Pour nous, il est important de pouvoir garantir le maintien de la qualité du produit.
Le président: Je vous remercie beaucoup.
Monsieur Marceau.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg--Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président. D'abord, merci à vous tous de vous être présentés ce matin.
Monsieur Clark, vous avez touché à quelque chose de particulièrement intéressant, je pense, lorsque vous avez mentionné l'effet de l'ouverture des marchés sur les secteurs mous de l'économie canadienne et québécoise. Par exemple, prenons le textile.
Vous avez mentionné l'exemple des nouveaux immigrants qui se servent, dirais-je, de ce premier emploi pour mettre le pied sur le premier barreau de l'échelle de la progression sociale. Qu'arriverait-il, selon vous, à ces secteurs mous et aux travailleurs de ces secteurs mous si un projet d'ouverture des marchés avec les pays les moins développés prenait forme?
Á (1155)
[Traduction]
M. Peter Clark: J'ai commencé à négocier des ententes sur les textiles en 1967. L'industrie est actuellement dans la même situation qu'elle l'était à ce moment là. J'ai entendu tous les discours pessimistes. Pendant huit ans, c'est moi qui en ai écrit une bonne partie. J'ai écrit des livres qui expliquaient pourquoi nous devons protéger les industries textiles et les industries de l'habillement. J'essaie maintenant de me racheter.
Au fond, cela ne changera pas grand chose. Le principal souci restera de savoir ce qui va se passer avec la Chine, car ils possèdent une industrie textile perfectionnée qui est prête à s'attaquer à de nouveaux marchés. La question qui se pose, c'est quel marché leur ouvrira ses portes? Pourront-ils accéder seulement au marché canadien ou pourront-ils accéder à tous les marchés mondiaux? Ils sont en train de s'étendre. C'est pourquoi je vous ai dit que cela peut créer de sérieux problèmes. Ces problèmes peuvent être résolus en incluant une clause d'exemption qui régit cet accès en particulier, c'est ce que nous avions fait lorsque nous avons introduit le système généralisé de préférences. On peut s'y retrancher en cas de véritable préjudice ou de rupture.
Je ne suggère pas que des centaines de néo-canadiens perdent leur emploi à St-Denis, à St-Laurent, à St-Michel ou dans les Cantons de l'Est, là où ils travaillent. La qualité de ces emplois s'est améliorée et, comme vous le savez, au Québec ils sont également protégés par les comités paritaires, dans le but de garantir le même salaire aux travailleurs non syndiqués qu'aux travailleurs syndiqués. Les conditions de travail ne sont pas celles que vous pouvez voir dans les films sur Los Angeles ou sur le quartier chinois de New York. La plupart d'entre-eux travaillent dans des usines climatisées. Ils sont payés au rendement et c'est un excellent moyen pour eux de s'intégrer.
Nous n'achetons pas de la haute couture auprès de pays comme le Bangladesh, nous leur achetons des articles de base, des sous-vêtements, des t-shirts, le genre de produit que nous ne produisons de toute façon pas en grande quantité. Vous devez donc examiner la question dans son contexte général et, s'il y a un réel problème, il faut s'en occuper. Il ne serait pas prudent d'offrir un accès illimité, un accès sans restriction, sans avoir la possibilité de s'occuper des préjudices, alors qu'il est de mon avis que nous devrions justement nous en occupper.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci.
Madame Maloney, vous avez parlé des droits de la personne et vous avez mentionné, dans votre introduction, l'importance que pouvaient avoir les droits de la personne. Par contre, j'ai eu de la difficulté à suivre le reste de votre présentation sur le respect des droits de l'homme par opposition au commerce.
Est-ce que le respect des droits de la personne devrait être un prérequis à l'ouverture par le Canada de ses marchés à un pays déterminé? Si oui, comment le déterminer? C'est difficile à déterminer, car il n'y a pas d'éléments quantitatifs sur le respect des droits de la personne. Si non, à quoi cela sert-il d'en parler si, de toute façon, on n'en tient pas compte dans l'ouverture des marchés?
[Traduction]
Mme Sharon Maloney: Je veux qu'on me comprenne bien. Je ne dis pas qu'il faut renoncer à trouver des débouchés dans d'autres pays, uniquement à cause de leurs antécédents en matière de respect des droits de la personne. Je dis simplement que nous ne pouvons pas ignorer les craintes des Canadiens concernant les droits de la personne et, dans le cas de l'industrie qui nous intéresse, ignorer les droits dans le domaine du travail et le respect du code régional de travail. Nous estimons que cela évolue parallèlement avec les organisations internationales. Ce que je dis, c'est que si on prend l'exemple de votre industrie et qu'on demande aux entreprises de celle-ci de s'assurer que les normes soient respectées par leurs partenaires commerciaux, il faut que notre propre gouvernement joue un rôle actif. De plus, nous pensons que notre gouvernement doit traiter avec les gouvernements des pays auxquels nous achetons ce genre de marchandises, au lieu de dire que c'est avant tout et parfois exclusivement le secteur privé qui en a la responsabilité.
 (1200)
[Français]
M. Richard Marceau: Mais ça va faire drôle parce que les rôles vont être inversés. Souvent, des gens tels que vous disent à des élus tels que nous d'être concrets, de donner des exemples. Alors, quand vous dites qu'il faut prendre en considération l'opinion des Canadiens sur le respect des droits de la personne ou encore sur le respect des droits des travailleurs, concrètement, qu'est-ce que ça veut dire? Qu'est-ce que ça veut dire travailler en partenariat avec le gouvernement pour assurer que ces droits-là...
Si, demain matin, vous étiez en position de responsabilité pour déterminer ce genre de question, que diriez-vous, concrètement? Que feriez-vous, concrètement, pour respecter les principes que vous venez d'énoncer ?
[Traduction]
Mme Sharon Maloney: Lorsque je mentionne les droits de la personne, je me réfère à ce que nous pensons être les principales préoccupations des Canadiens. Nous pensons qu'il s'agit du travail des enfants, du travail forcé et de la discrimination. En fait, nous, en tant qu'industrie et nos entreprises, en tant que membres de cette industrie, avons développé des codes de conduite volontaires. Ces codes volontaires vont presque exclusivement dans le sens des normes en matière de droits de la personne de l'OIT. Le seul domaine qui n'est pas abordé par ces codes est celui de la liberté d'association. Dans notre code, nous avons clairement mentionné que le droit à la liberté d'association est légitime. Cela s'explique par les soucis que nous causent des pays comme la Chine, où la liberté d'association ne fait pas partie de la constitution et de la structure juridique. Donc, pour répondre à votre question, nous pensons que, dans les faits, c'est que qu'il faut faire.
En parlant de la collaboration du gouvernement dans les négociations avec des pays comme la Chine, je veux dire que vous ne pouvez pas demander à nos entreprises ou à nos détaillants de se rendre dans le pays de leurs partenaires commerciaux pour leur dire de respecter la liberté d'association et les négociations collectives, sans quoi le Canada n'y achètera pas de marchandises. C'est le rôle du gouvernement, pas celui des entreprises.
[Français]
M. Richard Marceau: D'accord. Alors, puisque vous faites régulièrement mention de l'Organisation internationale du Travail, qu'est-ce que vous pensez de la suggestion que plusieurs ont fait de prendre les principales conventions de l'OIT et de les intégrer aux accords de l'OMC pour que ceux-ci, les accords de l'Organisation internationale du Travail, puissent avoir la même possibilité d'être jugés par les panels, etc., au lieu d'être, comme c'est malheureusement souvent le cas, de grandes déclarations de principe qui n'ont, dans les faits, aucune dent, car peu importe qu'un pays ne respecte pas les grandes conventions de l'OIT, aucune sanction ne peut être prise?
[Traduction]
Mme Sharon Maloney: Je veux être certain de bien comprendre de quoi vous parlez. Parlez-vous de commissions ou de groupes qui suivraient cela de près?
[Français]
M. Richard Marceau: Non, ce que je veux dire c'est que, par exemple, si, à l'intérieur de l'OMC, une disposition d'un traité de commerce n'est pas respectée, cela va devant un tribunal, devant un panel de l'OMC, et il y a sanction. La même procédure ne pourrait-elle pas s'appliquer pour les grands accords de l'OIT? Je pars du principe que les accords de l'OMC sont justiciables, c'est-à-dire qu'un panel peut imposer des sanctions lorsqu'un pays ne respecte pas ses accords, alors que dans le cas des grands accords de l'OIT, il n'y a jamais eu de sanctions. Il n'est jamais arrivé que des sanctions soient imposées à un pays qui ne respectaient pas les grandes conventions de l'OIT. Alors, cela viendrait compléter l'espèce de guide déontologique que les entreprises se sont donné.
 (1205)
[Traduction]
Mme Sharon Maloney: J'appuierais cette position pour ce qui est de l'OIT. Je ne l'appuierais pas relativement à l'OMC pour la seule raison que j'estime qu'elle relève davantage du mandat de l'OIT. Je pense que cela devrait relever des fonctions de l'OIT et que c'est effectivement le cas pour ce qui est de l'élaboration des principes, de la négociation des principes, des relations entre gouvernements et des relations entre les gouvernements et le secteur des affaires. Il s'agit d'un processus tripartite. Je m'inquiéterais si on exigeait que l'OMC adopte le même processus, car cela aurait l'effet de mélanger les torchons et les serviettes. L'OMC est axé sur le commerce. À mon avis, l'OIT a pour mission de traiter des normes de travail. S'il y a lieu d'examiner l'organisation de l'OIT pour lui faciliter cette tâche, et si cela entraînait des sanctions ou des pénalités, nous serions définitivement intéressés à examiner cette question. Ce que nous prétendons, c'est qu'il faut donner plus de poids aux paroles que nous exprimons sur la tribune internationale relativement aux normes de travail.
C'est un défi pour nous tous, à mon avis, de décider où ce pouvoir devrait échoir, parce que je suis consciente, comme les membres du comité que... Je pense que M. Shannon a soulevé la question et l'a bien formulée. Nous ne pourrions accepter de voir le Canada devenir, comme je l'ai dit, un impérialiste culturel. Nous devons collaborer à l'élaboration de normes. Je pense que l'OIT a formulé celles qui traitent des normes fondamentales relativement aux droits de la personne. Voilà, à mon avis, les normes que nous devons aborder. C'est pourquoi j'estime que l'OIT est l'organisme le mieux placé à cette fin.
M. Mac Harb: Monsieur Clark, puis Monsieur Shannon.
Le président: Monsieur Clark, puis monsieur Shannon.
M. Gerry Shannon: Monsieur le président, M. Clark a parfaitement raison. Le seul point que j'ajouterais est que l'OIT ne dispose d'aucun mécanisme d'application rigoureux. Sur ces questions, ce n'est qu'un moulin à paroles. Certains veulent faire davantage, mais les membres ne semblent pas disposés à confier à l'OIT un autre rôle que celui d'adopter des résolutions sans effets réels.
En ce qui concerne l'OMC, la vaste majorité des membres, c'est-à-dire les pays en voie de développement, considèrent l'imposition de normes de travail au sein de l'OMC comme un moyen visant à ralentir leur développement. Ces membres seraient peu enthousiastes si l'OMC envisageait de les imposer, peu importe les arguments à l'appui de cette position. En fait, la vaste majorité des membres de cette organisation, dont le fonctionnement est essentiellement consensuel, s'oppose vivement à ce que l'OMC tienne un rôle d'arbitre dans les différends commerciaux concernant les droits des travailleurs.
 (1210)
Le président: D'accord.
Monsieur Eyking.
M. Mark Eyking (Sydney--Victoria, Lib.): Ma question s'adresse à Sharon. Elle semble être sur la sellette.
Mme Sharon Maloney: C'est parce qu'il faisait un temps brumeux à Toronto.
 (1215)
M. Mark Eyking: Dans un exposé qu'ils nous ont fait la semaine dernière, les détaillants en alimentation ont exprimé une position presque identique à la vôtre, surtout en ce qui a trait à l'importation de produits moins chers par les multinationales. J'espère que ces multinationales et les détaillants se soucient davantage d'aider les pays en voie de développement plutôt que de faire bonne figure afin d'importer des produits moins chers pour les revendre, car personne n'ignore que la marge pour ces produits est supérieure à celle des marchandises de provenance locale.
La différence entre les deux exposés tient au fait que vous souhaiteriez que ce soit nous, à savoir le gouvernement, qui exercions le contrôle nécessaire. Je pense que cela nous placerait dans une situation délicate. Prenez, par exemple, une entreprise de fabrication d'outils de Toronto dont les produits sont excellents. Les employés sont syndiqués et tout va bien. Mais voici que Wal-Mart annonce qu'elle voudrait acheter les outils en question de la Chine, ou des ballons de soccer du Bangladesh et nous demande d'aller faire un tour dans ces pays pour voir si tout se passe comme il faut avant d'admettre ces produits au pays. La compagnie n'a pas de problème--et j'ai œuvré dans le secteur des affaires pendant 20 ans avant d'être élu député--lorsqu'il s'agit de voir si ses fournisseurs locaux procurent un milieu de travail salubre et tout le reste. Je ne comprend donc pas pourquoi elle n'irait pas vérifier la situation dans ces pays. Pourquoi ces détaillants ne peuvent-ils pas envoyer quelqu'un au Bangladesh pour voir dans quelles conditions on y fabrique des ballons de soccer? Si un groupe de défense des intérêts des consommateurs dit: «Minute!», ces ballons sont fabriqués avec le mauvais..., les détaillants répondront tous qu'ils n'ont pas vérifié les conditions de travail et c'est le gouvernement qui héritera du problème. Étant donné la taille de certains de ces détaillants, ils ont certes les ressources nécessaires.
Je ne veux pas amorcer un débat, mais je pense qu'il est trop tôt pour dire qu'il incombe au gouvernement d'approuver ces choses, ce qui le placerait dans une situation gênante. J'espère qu'il y a une solution mitoyenne où nous pouvons aider les pays en voie de développement, et ce sans nuire à nos industries, ni en passant pour les méchants.
Mme Sharon Maloney: Permettez-moi d'apporter des éclaircissements. Je ne propose pas que le gouvernement du Canada paie pour que quelqu'un aille faire l'inspection des fabriques. Ce que je propose, c'est que le gouvernement du Canada et d'autres pays précisent les règles du jeu. Si nous croyons, en tant que pays, que la liberté d'association et la négociation collective font partie des valeurs qui nous tiennent à cœur, nous devons lever la barre à ce niveau lors que nous traitons avec d'autres gouvernements.
Lorsque vous faites allusion à la vérification sur place, je suis heureuse de vous entendre mentionner Wal-Mart comme exemple, car je pense pouvoir avancer avec certitude que Wal-Mart Canada et, si je ne m'abuse, Wal-Mart US, dépense des millions de dollars précisément à cette fin. Nous acceptons cette responsabilité. Et je ne veux pas laisser entendre aujourd'hui que nos membres sont motivés par l'altruisme. Ils sont en affaires pour faire des profits. Lorsqu'ils font des profits, ils créent des emplois ce qui, à notre avis, profite aux Canadiens et aux autres.
Cela étant dit, il ne fait aucun doute qu'ils tiennent à leur image, leur image de marque, leur image d'entreprise et l'intégrité de l'industrie comme à la prunelle de leurs yeux, comme nous tous, d'ailleurs. C'est pourquoi ils participent au débat. Aux États-Unis, l'organisation analogue à la nôtre serait la National Retail Federation. Cette organisation n'a pas réussi à recueillir un consensus pour faire ce que nous avons fait. En fait, nous sommes la plus importante association commerciale à faire ce que nous avons fait. La question n'est pas facile à aborder dans le secteur des affaires, parce que tout le monde n'est pas convaincu que cette approche est la meilleure. Nous pensons qu'il faut forger un partenariat et veiller à la collaboration entre le secteur des affaires, les gouvernements et les organisations internationales. C'est la seule approche qui nous permettra de mettre en place les infrastructures économiques nécessaires pour réaliser, en fin de compte, ce que nous voulons faire. Et cela ne se produira pas du jour au lendemain.
M. Mark Eyking: Je pense que c'est extrêmement important, parce qu'il faut au moins travailler en partenariat. Il semble que je n'ai pas bien compris vos propos. Je pensais que vous disiez que ce n'était pas de votre ressort, mais je pensais aussi que le gouvernement se retrouverait dans une situation délicate susceptible de mettre nos industries en péril.
Mme Sharon Maloney: Je pense que nous avons tous un rôle à jouer, mais il faut s'entendre sur qui peut faire quoi et qui est le mieux placé pour faire ce qui s'impose. À mon avis, depuis l'arrivée des sociétés nationales qui emploient un grand nombre de personnes et dont le budget dépasse celui de la plupart des gouvernements nationaux, les gens pensent trop souvent que le rôle principal sur cette question revient à ces sociétés. Je crois que cette ligne de pensée est périlleuse. Il ne revient pas aux sociétés de faire cela et personne ne devrait s'attendre à ce qu'elles le fassent. Nous avons des élus pour faire ce que vous faites ici aujourd'hui : soulever des questions. Voilà les personnes qui doivent aborder ces questions au niveau des principes directeurs. Cette tâche ne revient pas aux sociétés.
M. Mark Eyking: Supposons que j'achète un ballon de soccer pour mon garçon à l'occasion de la fête de Pâques. Il s'agit d'un beau ballon. Le prix est raisonnable, mais lis que le ballon a été fabriqué au Bangladesh--je nomme ce pays à titre indicatif seulement. Comme la plupart des consommateurs, la question se pose à savoir si un enfant n'a pas été... Les consommateurs doivent avoir confiance qu'on exerce les contrôles qui s'imposent, tout comme il s'attendent à ce que les produits alimentaires qu'ils achètent soient salubres.
Mme Sharon Maloney: Je suis d'accord et nous croyons qu'il s'agit d'attentes raisonnables. Mais nous nous différencions de nos détracteurs sur une question fondamentale, à savoir la liberté d'association et la négociation collective. Ce n'est pas que nous nous opposons à la liberté, au contraire. Nous évoluons dans le contexte canadien. Nous souscrivons bien sûr à ces valeurs. Mais il ne nous appartient pas d'imposer nos codes volontaires aux autres pays, surtout les pays clés avec lesquels nous entretenons des relations commerciales, bref de leur dire qu'ils doivent respecter la liberté d'association et la convention collective lorsque ces pratiques ne font pas partie de leurs traditions. Voilà la direction que j'envisage quand je fais allusion au gouvernement.
M. Mark Eyking: Merci. Monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup.
Voulez-vous poser des questions, Peter?
M. Peter Berg (attaché de recherche auprès du comité): Ma première question porte sur la question de la régulation de l'offre, parce que M. Shannon en a parlé dans son exposé. Vous affirmez que la plupart des tarifs auxquels ces pays s'intéressent visent des denrées comme le sucre et les arachides, et qu'ils sont relativement bas. Les incidences de l'ouverture de ces marchés influeraient sur les industries dans les secteurs où l'offre fait l'objet de régulation dans certains pays, comme les États-Unis, l'Union européenne, l'Australie et les pays développés. Cette évaluation est-elle exacte? Doit-on exclure les produits dont l'offre fait l'objet de régulation ou doit-on les inclure?
M. Gerry Shannon: Ce que j'ai dit est une représentation exacte des faits. Les fournisseurs des produits de base que nous utilisons et qui font l'objet de régulation sont l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et l'Europe. Pourquoi les avons-nous exclus de la liste? Il faudrait poser la question aux Affaires étrangères. Quant à moi, je ne comprends pas pourquoi ils les élimineraient. La seule raison légitime tiendrait à des préoccupations de nature phytosanitaires ou à des obstacles techniques au commerce, mais qu'il faudrait examiner tout de même. Mais de façon générale, la majorité de ces pays, sinon la plupart--on parle des pays les moins développés--ne sont pas en mesure de pénétrer le marché canadien des produits laitiers, par exemple, ou des produits avicoles.
Un autre point est lié à cela, et comme vous m'avez ouvert la voie, je ferai l'observation que je voulais faire de toute façon. Nous avons mené la dernière ronde de négociations sous le signe d'une soi-disante politique agricole visant à équilibrer, d'une part, les intérêts en matière d'exportation de certains secteurs, par exemple les producteurs de grains et les producteurs de viande et, d'autre part, les intérêts en matière d'importation des éleveurs de bovins laitiers, des aviculteurs et des producteurs d'œufs. Nous avons soutenu cette politique aussi longtemps que possible, mais nous avons éventuellement été écartés du jeu par une combinaison de pays dont l'influence était supérieure à la nôtre. Le problème, à mon avis, c'est qu'il est difficile de dire aux pays en voie de développement qu'ils doivent réaliser d'importantes réformes de leur organisation intérieure. Vous leur dites qu'ils doivent surmonter les obstacles qui freinent la croissance chez eux et donner libre cours aux forces du marché, tout en leur disant que les industries dont l'offre fait l'objet de régulation font exception à la règle.
Voilà un problème qu'il est impossible de résoudre. Et il me semble qu'à un certain moment durant le processus de négociation, les membres de notre équipe de négociation devront affronter cette question et trouver la solution. Le cas échéant, il sera possible d'éliminer les tarifs anormalement élevés qui protègent actuellement nos industries laitière et avicole.
 (1220)
Le président: Merci.
Monsieur Clark.
M. Peter Clark: Je ne vais pas amorcer un débat au sujet de la gestion de l'offre avec mon honorable ami M. Shannon. C'est un domaine où j'ai des clients alors que visiblement, il n'en a pas. Cependant, l'un des principes de la gestion de l'offre consiste à estimer la demande pour une année. En tenant compte des contingents établis par l'ALENA ou à l'issue de négociations, nous pouvons connaître le volume des importations. Toute personne admissible qui respecte les règlements de l'Agence canadienne d'inspection des aliments peut atteindre ces contingents, et ces derniers sont principalement maintenus par des Canadiens. Ils sont libres d'acheter où ils le veulent. Nous importons du fromage de partout dans le monde. Évidemment, nous n'importons pas de fromage des pays les moins avancés, mais l'accès ouvert d'un certain nombre de pays me paraît contradictoire alors que pour la gestion de l'offre un nombre limité est déjà établi.
Si le gouvernement veut modifier la politique relative à la gestion de l'offre, cela pourrait ouvrir une voie comportant toutes sortes d'autres trous. Le problème qui se pose avec tout produit agricole provient du fait que c'est la dernière quantité sur le marché qui détermine le prix; nous parlons de denrées alimentaires. Cet argument est peut-être simpliste, mais je comprends pourquoi le gouvernement pourrait déclarer que nous ne pouvons avoir une gestion de l'offre qui suppose un certain volume d'exportations; nous savons ce que sera le volume des importations en raison des contingents tarifaires, mais nous allons laisser ce trou ici. Nous ne parlons pas de faire quelque chose pour les pays moins avancés pour une période de six mois, 18 mois ou deux années. Nous parlons de le faire aussi longtemps qu'ils rempliront les conditions requises, je l'espère.
Nous avons là une question de politique qui, je suis d'accord avec mon collègue M. Shannon, sera certainement soulevée à Genève. Elle a déjà été posée et elle le sera une fois de plus, mais à ce stade-ci, je ne considère pas qu'une politique gouvernementale d'exclusion des produits gérés par l'offre soit contradictoire.
Le président: Monsieur Eyking.
M. Mark Eyking: Je voudrais seulement faire une observation concernant la gestion de l'offre, M. Shannon. Je fais également partie du Comité de l'agriculture et du groupe de travail constitué par le premier ministre et nous voyageons dans tout le pays. Je ne dis pas que les denrées alimentaires qui ne sont pas régies par le système de la gestion de l'offre sont en mauvaise posture, mais la plupart le sont. Lorsque nous parlons de barrières tarifaires, le principe de vente de ces denrées repose sur la formule de calcul des coûts de production. Ainsi, on ne peut pervertir le prix du lait. Plusieurs de ces denrées sont les mêmes aux États-Unis, et je sais que nous devons penser affaires en tout temps.
En ce qui concerne le tissu social, les collectivités agricoles en milieu rural qui s'en sortent bien dans ce pays sont celles qui bénéficient de la gestion de l'offre. Parfois, les gens de la ville croient que nous devrions sacrifier les produits laitiers et les oeufs parce que nous pourrions sans doute obtenir ces produits à meilleur prix à Toronto ou dans d'autres régions, mais les répercussions en seraient graves. Je crois que nous possédons l'un des meilleurs systèmes pour le secteur de l'agriculture et je pense que les citadins ne sont pas toujours suffisamment informés de son efficience en milieu rural.
 (1225)
Le président: Quelqu'un veut-il faire un commentaire?
M. Gerry Shannon: Monsieur le président, j'aimerais faire une observation.
Je veux bien croire que les gens qui sont dans le domaine de la production des oeufs, des produits laitiers et de volaille sont satisfaits du système de la gestion de l'offre. Il réglemente le marché et empêche les forces concurrentielles de s'attaquer à notre dollar. Vous avez tout à fait raison, en ce qu'en certains cas, les prix des produits laitiers aux États-Unis, comme par exemple celui du lait, correspondent à celui du Canada. Cela s'explique par le fait que, pour une raison ou une autre, les distributeurs de lait ont déjà prélevé frauduleusement une bonne partie du profit réalisable à la production, à la distribution et à la vente de produits laitiers aux États-Unis.
Ce que je veux souligner, c'est que théoriquement, lorsque nous examinons les négociations commerciales internationales et que l'on parle des avantages de la libéralisation des échanges, tout est sur la table. Si vous choisissez de restreindre l'accès de certaines denrées sur le marché, il y aura un prix à payer pour cela. Si les consommateurs canadiens sont disposés à accepter une hausse des prix, due en partie aux droits de douane très restrictifs, alors qu'il en soit ainsi. Cela les regarde, mais il devient difficile en de telles circonstances, à mon avis, de discuter avec ces pays auxquels vous vantez les mérites de la libéralisation des échanges ou vos produits sur le marché et, dans un même temps, de déclarer que nous devrions faire cela pour nous-mêmes. Cependant, lorsqu'il s'agit des secteurs dont l'offre est réglementée, c'est une toute autre affaire: cela nous convient, laissez-nous tranquilles. Notre situation n'est pas très différente de celle des Japonais ou des Coréens au sujet du riz, alors qu'ils utilisent les mêmes raisons politiques et sociales fondamentales pour maintenir ce qui est en effet une restriction quasi générale, sur les importations du riz. Elle n'est ni très différente de celle qu'utilise la Suisse sur les produits laitiers et ce, pour plusieurs de ces raisons qui nous sont chères dans ce pays.
Vous pouvez tranchez la question comme vous le voulez, mais dans le contexte commercial, cette politique n'a aucun sens. Si vous choisissez d'aller de l'avant de toute manière car cela est sensé du point de vue social, le gouvernement devra décider de la façon dont il négociera avec ses partenaires commerciaux et les autres, parce que je peux vous assurer qu'au prochain cycle, les tarifs élevés, qui en ce moment protègent nos industries, feront l'objet d'attaques sévères, et vous ne connaîtrez pas des résultats dans les trois chiffres en appui aux produits régis par la gestion de l'offre.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Shannon.
J'ai une question pour le CDRI et j'invite toute personne qui souhaite intervenir à le faire. Cette question a trait à la définition des pays moins avancés. Les critères utilisés par ce pays pour identifier les PMA sont fondés sur un PIB par habitant de 100 $ ou moins en prix de 1968, sur un taux d'alphabétisation égal ou inférieur à 20 p. 100 ou sur la part de l'industrie manufacturière de ce pays qui représente moins de 10 p. cent de ses recettes totales. Je vous demande donc si le temps n'est pas venu de réviser ces critères. Est-ce qu'ils conviennent? Comment voyez-vous l'évolution de cette question?
M. Rohinton Medhora: Il existe, comme vous l'avez mentionné, une définition technique focalisée presque exclusivement sur le revenu annuel nominal. Il n'y a même pas de correction pour ce qui est de la parité du pouvoir d'achat. D'aucuns pourraient faire valoir une définition plus large sur le plan du développement humain, incluant la santé et l'éducation, deux des points que vous avez soulevés. Nous obtiendrions alors un tableau un tant soit peu différent. À mon avis, cette liste des 48 pays présente un aspect intéressant lorsqu'on examine la percée de ces pays sur le marché. Les seuls pays de la liste susceptibles de poser un problème en Europe, aux États-Unis et au Canada sont le Bangladesh, qui ne cesse de revenir à la surface, l'Ouganda et le Zimbabwe. C'est à peu près tout.
Voyons un deuxième aspect. Selon moi, la manière dont la liste est dressée devient une question litigieuse lorsque l'on considère l'échange que vous aviez antérieurement à l'égard des normes du travail et des droits de la personne. Une fois que vous commencez à ajouter d'autres considérations, la liste devient moins technique, donc d'autant moins objective et d'autant plus litigieuse. Si nous sommes satisfaits de cette liste et qu'elle nous permette d'aller de l'avant en ce qui concerne notre question, je propose que nous la conservions ainsi.
 (1230)
Le président: Docteur Joekes.
Dre Susan Joekes (chef d'équipe, Centre de recherches pour le développement international): Merci.
Pourrais-je uniquement faire une observation à titre d'information qui, je l'espère, pourrait susciter l'intérêt des membres du Comité relativement aux normes du travail, des codes de conduite et ainsi de suite? Il existe en Grande-Bretagne une initiative conjointe du gouvernement et du secteur privé que l'on nomme l'initiative de l'éthique commerciale. Il s'agit d'un forum de discussion qui aborde précisément les questions intéressantes qui ont été soulevées par le Conseil canadien du commerce de détail dans notre discussion aujourd'hui. Ce forum se fonde, je crois, sur ce que l'on désigne aujourd'hui par une approche de liste blanche, où les principales entreprises qui reconnaissent les avantages à tirer d'une bonne image de marque comprennent également les très grandes difficultés liées à cela et que les tentatives vouées à l'imposition de telles normes risquent d'aller à l'encontre du but recherché. La preuve existe qu'ils peuvent être très déplorables à cet effet. Comme je l'ai mentionné, il existe un forum conjoint au cours duquel ces questions sont soumises et discutées.
Le président: Merci beaucoup.
Je tiens à vous remercier tous pour vos excellentes présentations aujourd'hui. Vous nous avez fourni plusieurs éléments de réflexion et vos présentations nous aideront à formuler le rapport de comité qui devrait être déposé à la Chambre au plus tard la 2eou la 3esemaine du mois de mai. Si vous avez d'autres suggestions ou observations, n'hésitez pas à les transmettre au greffier du comité. Vous pourriez également me les envoyer ou les adresser directement au ministre. Elles seront transmises aux personnes concernées.
Alors, chers collègues, nous allons ajourner jusqu'à mercredi prochain, jour où nous traiterons du projet de loi concernant l'adhésion à l'OMC. Je tiens à vous remercier vivement de votre présence.