INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 10 mars 2004
º | 1605 |
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)) |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Frederick Abbott (Edward Ball Eminent Scholar, chercheur et professeur de droit international, Florida State University College of Law, À titre individuel) |
º | 1610 |
Le président |
M. Frederick Abbott |
º | 1615 |
Le président |
M. John Kelsall (président, Partenaires canadiens pour la santé internationale) |
º | 1620 |
Le président |
M. Kevin Perkins (directeur général, Partenariat Canada-Afrique sur le SIDA) |
º | 1625 |
Le président |
M. Dave Toycen (président, Vision mondiale Canada) |
º | 1630 |
º | 1635 |
Le président |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC) |
M. Frederick Abbott |
M. James Rajotte |
M. Frederick Abbott |
M. James Rajotte |
M. Frederick Abbott |
º | 1640 |
M. James Rajotte |
M. Frederick Abbott |
M. James Rajotte |
M. John Kelsall |
Le président |
L'hon. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.) |
º | 1645 |
M. Frederick Abbott |
L'hon. Joe Fontana |
M. Frederick Abbott |
º | 1650 |
Le président |
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) |
M. Frederick Abbott |
M. Paul Crête |
M. Frederick Abbott |
º | 1655 |
M. Paul Crête |
M. Frederick Abbott |
Le président |
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.) |
M. Frederick Abbott |
Mme Marlene Jennings |
M. Frederick Abbott |
» | 1700 |
Mme Marlene Jennings |
M. Frederick Abbott |
Mme Marlene Jennings |
M. Dave Toycen |
Mme Marlene Jennings |
M. Dave Toycen |
Mme Marlene Jennings |
L'hon. Lyle Vanclief (Prince Edward—Hastings, Lib.) |
Mme Marlene Jennings |
M. Dave Toycen |
Mme Marlene Jennings |
» | 1705 |
M. Dave Toycen |
Mme Marlene Jennings |
Le président |
Mme Marlene Jennings |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Frederick Abbott |
M. Brian Masse |
» | 1710 |
M. Frederick Abbott |
L'hon. Joe Fontana |
Le président |
M. Frederick Abbott |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Dave Toycen |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.) |
M. Frederick Abbott |
M. Andy Savoy |
M. Frederick Abbott |
» | 1715 |
M. Andy Savoy |
M. Frederick Abbott |
M. Andy Savoy |
M. John Kelsall |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 10 mars 2004
[Enregistrement électronique]
º (1605)
[Traduction]
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)): Bonjour.
J'ai le plaisir d'annoncer l'ouverture de la séance du mercredi 10 mars du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie; nous continuons notre étude du projet de loi C-9.
Nous remercions les témoins de leur indulgence au moment où nous sommes allés voter à la Chambre des communes. C'est un projet de loi important.
Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de Partenaires canadiens pour la santé internationale, de Partenariat Canada-Afrique sur le SIDA, de Vision mondiale Canada et d'un professeur de droit international, Frederick Abbott.
Sans plus attendre, je vais—oui, Brian, vous avez un rappel au Règlement.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.
Je voulais simplement préciser qu'à la fin de la dernière séance, M. Fontana a indiqué que le droit de premier refus n'était plus à l'ordre du jour. Il nous faudrait des éclaircissements à ce sujet, je pense.
Le président: Monsieur Masse, c'est demain que nous entamons ce processus. Nous parlerons demain des amendements et aborderons ce point à ce moment-là.
M. Brian Masse: Quelle est la véritable position du gouvernement?
Si le secrétaire parlementaire laisse entendre qu'il dispose de renseignements différents de ceux du comité, je crois que nous avons le droit de...
Le président: Brian, désolé, votre rappel au Règlement n'en est pas un. Si vous voulez discuter avec le secrétaire parlementaire après, vous le pouvez, mais nous allons traiter des amendements à partir de demain, à 11 heures.
Je rappelle aux membres du comité d'arriver à temps pour ce faire.
Je devrais indiquer aux membres du comité que M. Louis, qui devait comparaître à 15 h 30, pour la première heure, ne peut être là pour des raisons personnelles. Nous avons demandé à nos témoins qui se trouvent autour de la table aujourd'hui de venir un peu plus tôt et nous les remercions d'avoir accédé à notre demande.
M. Brian Masse: Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le président, lorsque nos renseignements sont différents de ceux dont dispose le gouvernement ou de ceux qu'il a prévus, votre présidence, ainsi que le travail du comité s'en trouvent ébranlés.
Le président: Monsieur Masse, la ministre elle-même a indiqué au cours de sa déclaration liminaire que le gouvernement était ouvert à des amendements.
M. Brian Masse: Apparemment, ce n'est plus à l'ordre du jour, si l'on en croit le secrétaire parlementaire.
Le président: Il n'y a rien de secret à cet égard et je pense que demain sera le moment tout indiqué pour débattre des amendements, y compris ceux que vous pourrez avoir à présenter.
M. Brian Masse: Eh bien, je continue de protester.
Le président: Je vais maintenant demander à M. Abbott de prendre la parole.
Nous allons suivre l'ordre du jour et je vais limiter les déclarations liminaires à cinq minutes ou un peu plus; ce sera à moi d'en décider.
Monsieur Abbott, vous pouvez commencer. Merci.
M. Frederick Abbott (Edward Ball Eminent Scholar, chercheur et professeur de droit international, Florida State University College of Law, À titre individuel): Bonjour.
C'est un grand honneur pour moi que de parler devant votre distingué comité sur une question d'importance aussi cruciale pour la communauté internationale.
Il est bien sûr remarquable que le gouvernement du Canada et les Canadiens aient pris l'initiative de s'attaquer à l'un des plus graves problèmes auxquels des gens sont confrontés dans le monde entier, soit le fait de ne pas avoir accès à des médicaments abordables.
J'ai préparé deux mémoires qui ont été distribués aux membres du comité: mon exposé ainsi qu'une annexe à celui-ci.
Dans mon exposé, je vise essentiellement à examiner le soi-disant droit de premier refus sous le libellé actuel du projet de loi C-9. Si je comprends bien, un membre du gouvernement a déclaré hier devant le comité que ce droit de premier refus n'était plus à l'ordre du jour. Je ne suis pas sûr du sens que cela peut avoir au plan législatif au Canada, mais il semble que l'on admette de façon assez générale pour l'instant que cet aspect du projet de loi présente des défauts rédhibitoires.
L'annexe à mon exposé expose quelques-uns des détails de la solution de rechange au droit de premier refus présentée par les entreprises de recherche pharmaceutique détentrices de brevets. L'annexe souligne le fait que cette proposition est irréaliste, irréalisable et anticoncurrentielle. Il est très important que les membres du comité en comprennent les raisons. Comme je dispose de très peu de temps pour m'adresser aux membres du comité, je vais me contenter de vous faire un résumé de mon exposé et de décrire une solution de rechange importante et intéressante au projet de loi C-9.
J'aimerais également brièvement indiquer que lors de mes discussions avec le greffier, j'avais compris que je disposerais peut-être de dix minutes pour ma déclaration liminaire; vous pourrez peut-être en tenir compte.
La décision sur l'article 6 a été adoptée au terme de près de deux années de préparation intensive sous forme d'analyses de fond, d'examen de politiques, de réunions à Genève et ailleurs, sans compter l'examen de multiples ébauches. Entre novembre et décembre 2002, ces négociations se sont déroulées quasiment 24 heures par jour et j'y ai participé de près avec les délégations de pays en développement qui y ont joué un rôle majeur. Ces négociations ont été menées par des délégués qui savaient ce qu'ils faisaient. Ils font partie de l'élite de leurs pays respectifs. L'industrie tout comme les ONG n'ont pas cessé de nous présenter des propositions et de nous critiquer.
On a laissé entendre que si seulement les parties avaient réfléchi davantage à certaines questions, un droit fondamental ou procédural aurait été accordé et on aurait réparé des oublis. Ce n'est pas vrai. Chaque décision ainsi que son rapport avec l'accord sur les ADPIC ont été soigneusement envisagés par toutes les parties. On est arrivé à un consensus et des compromis ont été faits par toutes les parties, reflétant en fin de compte une prépondérance très délicate des intérêts en jeu.
Les modalités de la décision sur l'article 6 ne sont pas accidentelles et la décision doit être lue conjointement avec l'accord sur les ADPIC, lequel a fait l'objet de huit années de négociation sans compter les années de préparation préalables.
La décision sur l'article 6 vise essentiellement à faciliter l'approvisionnement en médicaments à bas prix tout en rendant le marché plus concurrentiel au bénéfice des pays qui disposent d'une capacité de fabrication insuffisante, voire nulle, dans le secteur pharmaceutique. La façon de créer un marché concurrentiel dans le secteur pharmaceutique consiste à encourager les producteurs de médicaments génériques.
On a dit lors de témoignages de l'industrie détentrice de brevets que c'était une occasion historique unique pour les détenteurs de brevets et les producteurs de médicaments génériques de collaborer en vue de résoudre les problèmes de l'accès aux médicaments. Je dirais bien respectueusement que partir de ce point de vue pour adopter le projet de loi C-9 revient à faire fi de la réalité du marché pharmaceutique mondial et des événements qui ont conduit aux demandes des pays en développement à l'OMC.
Les détenteurs de brevets et les producteurs de médicaments génériques sont des concurrents féroces. Ils se battent constamment devant les tribunaux dans le monde entier ainsi qu'au Canada bien sûr. La décision prise à l'OMC n'est absolument pas fondée sur les relations amicales entre détenteurs de brevets et producteurs de médicaments génériques; bien au contraire. Elle s'appuie sur l'hypothèse selon laquelle de nouvelles règles juridiques solides s'imposent pour permettre aux producteurs de médicaments génériques de fabriquer et de vendre des médicaments.
Dans ce contexte, le droit de premier refus que l'on retrouve dans le projet de loi C-9 comble toutes les aspirations des monopoles. Il vise à faire en sorte que les producteurs de médicaments génériques ne seront jamais en mesure de devenir une source concurrentielle d'approvisionnement. Les détenteurs de brevets pourront toujours court-circuiter les contrats négociés.
Il est incroyable que le droit de premier refus ait été inscrit dans le projet de loi C-9, mais supposons un instant que tout le monde comprenne que des produits génériques ne pourraient pas être vendus à l'exportation à partir du Canada en vertu d'un régime de droit de premier refus, puisque cela inciterait les détenteurs de brevets à reprendre les contrats tandis que les producteurs de médicaments génériques ne se comporteraient pas de façon aussi irrationnelle et s'abstiendraient de poursuivre de vaines négociations.
º (1610)
Comprenant peut-être que votre comité ne recommande pas en fait de combler les aspirations des monopoles, l'industrie de recherche pharmaceutique détentrice de brevets a fait une contre-proposition. Il est également difficile d'expliquer ce qui pourrait inciter le comité à recommander cette solution de rechange qui est irréaliste, irréalisable et également considérablement anticoncurrentielle.
Le premier volet de la proposition envisage de créer un processus mondial d'appel d'offres multisource à partir d'un site Web de l'OMC. Ce volet de la proposition omet de mentionner que l'OMC ne dispose pas d'un tel système. Seuls les membres de l'OMC pourraient décider, par consensus, de le faire, mais il ne faut pas oublier que la dernière série de négociations sur le sujet a duré près de deux ans et il y a de bonnes raisons de croire que les membres de l'OMC seraient sceptiques et ne souhaiteraient pas que l'OMC intervienne plus directement dans leurs décisions en matière de santé publique.
Même en supposant que l'on puisse franchir cet obstacle d'ici quelques années, la proposition de l'industrie vise un appel d'offres mondial, puis renvoie uniquement au Commissaire aux brevets du Canada chargé de prendre des décisions en matière de licences; or, les entreprises canadiennes ne participeraient pas à la plupart des appels d'offres envisageables. La proposition omet ce point et il n'est pas non plus indiqué que le projet de loi C-9 propose d'appliquer une telle solution à une gamme restreinte de médicaments.
Ce volet de la proposition présente tellement de défauts qu'il ne vaut pas vraiment la peine de se soucier de savoir si le Canada a l'intention d'adopter une loi au cours des prochaines années.
Le deuxième volet de la proposition exige que les producteurs de médicaments génériques invitent les détenteurs de brevets à participer aux négociations. Vous avez donc une situation où un protagoniste dominant du marché, le détenteur de brevet, cherche à percer un marché. Des producteurs de médicaments génériques plus petits et beaucoup moins puissants visent à percer le marché, mais ils doivent inviter le détenteur de brevet qui peut alors user d'un droit de premier refus pour tout prix offert; il s'agit d'une situation où le producteur de médicaments génériques n'a pas de licence pour fabriquer et vendre le produit et où le détenteur de brevet va demander à son propre gouvernement d'exercer des pressions sur l'acheteur éventuel pour qu'il n'achète pas de médicaments génériques. Le protagoniste dominant serait certainement en mesure d'éliminer tous les concurrents potentiels.
J'aimerais maintenant passer au point clé, à savoir que la proposition du gouvernement dans le projet de loi C-9 est fondée sur une grave méprise quant aux exigences de l'accord sur les ADPIC, ce qui donne lieu à un résultat complètement faussé.
L'alinéa 31b) de l'accord sur les ADPIC établit deux régimes différents sur les conditions à l'octroi de licences obligatoires...
Le président: Désolé, mais je vais vous demander de terminer.
M. Frederick Abbott: D'accord.
Le premier régime correspond à l'exemple classique du fabricant d'automobiles voulant utiliser la technologie du moteur à injection et ce, dans un contexte commercial ordinaire. Le deuxième s'applique aux urgences, aux conditions d'extrême urgence ou aux cas d'utilisation publique à des fins non commerciales.
En vertu du premier régime, une négociation préalable avec le détenteur de brevet est exigée; on ne retrouve absolument pas pareille exigence dans le contexte du deuxième régime. Ce qui est crucial, c'est que le VIH/sida est reconnu universellement comme une urgence mondiale en matière de santé publique et toute licence obligatoire à cet égard n'exige aucune négociation préalable avec le détenteur de brevet. Le projet de loi C-9 ne tient absolument pas compte de cette réalité fort évidente et irréfutable.
J'aimerais faire d'autres observations au sujet du projet de loi, mais je vais maintenant conclure.
Alors que je me trouvais hier dans cet édifice, j'ai parlé avec quelques parlementaires. M. Masse, membre du comité, m'a demandé si je savais où en était la proposition de la Norvège relative à la mise en oeuvre de l'article 6.
Ce matin, j'ai téléphoné au ministère des Affaires étrangères de la Norvège et j'ai parlé au négociateur en chef de l'accord sur les ADPIC à l'OMC qui s'est également occupé de la mise en oeuvre de la décision. Il y a quelques mois, il m'avait envoyé une copie de l'ébauche du projet de loi et ce matin, il m'a envoyé une copie du règlement.
Ces deux documents devraient entrer en vigueur cet été.
Ce qui m'a beaucoup frappé à la lecture de la proposition norvégienne, c'est qu'elle est compatible avec l'accord sur les ADPIC et la décision, contrairement au projet de loi canadien C-9.
Je vais m'en tenir à l'essentiel. Le règlement norvégien prévoit expressément que des négociations préalables avec le détenteur de brevet ne sont pas nécessaires lorsqu'il s'agit d'une situation urgente, comme le VIH/sida dans les pays importateurs. Le règlement norvégien ne renferme aucune liste de médicaments ou de maladies; c'est plutôt le pays importateur qui est confronté au problème de santé publique qui décide ce dont il a besoin.
On retrouve quelques défectuosités dans le règlement norvégien qui, d'après le délégué norvégien—fait intéressant—s'expliquent par le projet de loi canadien C-9; la Norvège souhaitait les corriger; comme je manque de temps, je ne vais pas m'y attarder. Je recommande fortement à votre comité d'examiner le projet de règlement de la Norvège relatif à la mise en oeuvre de la décision sur l'article 6. Je me ferais un plaisir de vous en fournir copie.
Merci beaucoup.
º (1615)
Le président: Je vous remercie, monsieur Abbott.
Pendant la période des questions et réponses, vous pourrez éventuellement traiter des points que vous n'avez pas abordés. Je crois que nos attachés de recherche possèdent la loi et le règlement de la Norvège. Par conséquent, je vous remercie.
Je cède maintenant la parole à John Kelsall, président de Partenaires canadiens pour la santé internationale.
M. John Kelsall (président, Partenaires canadiens pour la santé internationale): Merci monsieur le président de m'offrir l'occasion de traiter d'une question qui est chère à une organisation préoccupée par les besoins de santé des populations des pays en développement. Notre objectif est d'apporter soulagement et espoir à ceux qui en ont besoin.
Partenaires canadiens pour la santé internationale est un organisme canadien d'aide médicale à but non lucratif, qui offre des dons de médicaments, de fournitures médicales, d'appareils médicaux et de vaccins à des médecins canadiens et à des organismes non gouvernementaux qui traitent des gens dans de nombreux pays parmi les plus pauvres de la planète. Nous avons aussi collaboré au fil des ans avec l'Agence canadienne de développement international et plusieurs ministères afin d'offrir une aide médicale à des pays tels que Cuba, l'Afghanistan, la Bosnie et l'Arménie.
Les médicaments et fournitures médicales que nous recevons nous viennent de l'industrie canadienne de la santé. Grâce à la générosité de cette dernière, PCSI a, depuis 1990, distribué de manière sécuritaire et efficace des produits de très grande nécessité dans plus de 100 pays. La valeur totale en gros de cette aide humanitaire approche les 130 millions de dollars jusqu'à maintenant.
PCSI est ici aujourd'hui pour vous dire combien nous sommes heureux que le gouvernement du Canada ait réaffirmé dans le discours du Trône, et maintenant dans un texte de loi, son engagement à contribuer à éviter les pertes de vie et à soulager les souffrances découlant en particulier des terribles effets de la pandémie que constitue le VIH/sida. À mon avis, il est juste de dire qu'aujourd'hui peu de Canadiens ignorent l'étendue de la situation, notamment alors qu'elle touche les pauvres gens de l'Afrique subsaharienne. Mais, c'est une toute autre chose que de ressentir au fond de notre coeur les effets dévastateurs de cette horrible réalité de notre époque.
Monsieur le président, aussi récemment que l'automne dernier, j'ai vu de mes propres yeux les visages d'orphelins du VIH/sida abandonnés et de mères en détresse. Au cours d'une mission d'évaluation des besoins en Afrique du Sud, au Mozambique, au Swaziland et à Madagascar, j'ai vu les corps émaciés d'hommes, de femmes et d'enfants à l'agonie, et j'en suis revenu complètement transformé. Je pense que quiconque a des yeux pour voir leur misère, des oreilles pour entendre leurs gémissements et un coeur pour ressentir de la compassion ne peut que désirer apporter son aide, sous quelle que forme que ce soit. Pendant plus d'une décennie, notre organisme humanitaire a fourni une aide médicale aux indigents d'Amérique latine, des Antilles, d'Asie, d'Europe de l'Est, du Moyen-Orient et d'Afrique.
C'est maintenant en Afrique que nous concentrons nos efforts. PCSI est prêt à travailler avec ses partenaires pour offrir des médicaments antirétroviraux qui sauront répondre aux besoins que nous avons ciblés en Afrique. Nous pouvons fournir, et nous fournissons, les produits requis pour traiter les infections courantes liées au VIH/sida. Il faut toutefois les fournir en beaucoup plus grandes quantités.
Nous sommes aussi fort conscients que les médicaments contre le VIH/sida doivent être fournis de façon coordonnée, ce qui suppose du counselling auprès des malades, des soins à domicile, du personnel médical professionnel, des laboratoires d'analyses sanguines et un approvisionnement régulier en médicaments antirétroviraux et autres ainsi qu'en fournitures médicales. PCSI aide donc à améliorer la santé générale des gens qui mourraient s'ils ne recevaient pas les médicaments et fournitures dont l'industrie pharmaceutique canadienne, surtout les sociétés de recherche, nous font généreusement don.
Monsieur le président, nous sommes très heureux que le Canada soit unanime concernant l'intention du projet de loi C-9, qui consiste à refléter la générosité et la compassion des Canadiens en facilitant l'accès aux produits pharmaceutiques nécessaires pour remédier aux problèmes de santé publics touchant de nombreux pays en voie de développement et pays les moins avancés, en particulier ceux résultant du VIH/sida et d'autres épidémies. Nous nous joignons à bien d'autres pour féliciter le gouvernement fédéral de s'être engagé à fournir des médicaments à prix abordable à certains pays parmi les plus pauvres de la planète. Nous espérons que cette initiative permettra aux organismes humanitaires canadiens comme le nôtre de devenir un prolongement raisonnable et responsable de la main tendue par les Canadiens.
Nous sommes toutefois conscients que le comité a des problèmes juridiques et réglementaires concrets à régler, et nous sommes convaincus que quiconque a le coeur à la bonne place trouvera des solutions réalistes et équitables. Nous sommes aussi conscients qu'il y a beaucoup à faire pour s'assurer que des médicaments essentiels seront fournis et utilisés dans l'esprit prévu par la loi. Des organismes canadiens qui ont fait leur preuve comme le nôtre peuvent contribuer à l'atteinte de cet objectif.
Comme l'enjeu est considérable, nous sommes très heureux de féliciter les entreprises pharmaceutiques de recherche et de produits génériques, ainsi que les autres intervenants qui ont comparu devant le comité, d'avoir travaillé avec diligence pour tenter de résoudre la crise actuelle dans les pays en développement. Nous saluons également nos partenaires du secteur de la biotechnologie et des soins de santé grand public pour leurs efforts concrets visant à apporter soulagement et espoir partout dans le monde.
º (1620)
Ce que j'ai de plus important à dire aujourd'hui, c'est de vous rappeler à tous que le changement proposé vise à apporter d'une manière planifiée et coordonnée la santé et l'espoir à nos frères et soeurs qui en ont désespérément besoin et qui ne sont pas ici avec nous, mais qui sont très présents dans nos pensées et dans nos coeurs.
Pour des millions de gens des pays pauvres, le seul véritable espoir, c'est notre désir d'aider, nous les Canadiens qui compatissons avec eux. Nombre d'entre eux comptent sur la volonté et l'ingéniosité des hommes et des femmes du monde industrialisé pour trouver des solutions pratiques qui permettront de soulager tant de souffrances inutiles et d'empêcher une situation alarmante de se détériorer davantage.
La situation exige de toute urgence que nous adoptions des solutions et des stratégies nouvelles pour que le Canada réalise sa mission humanitaire d'une façon déterminée et soutenue. Monsieur le président, nous sommes convaincus que les Canadiens ont à coeur d'encourager leur gouvernement à agir ainsi.
Je vous remercie infiniment.
Le président: Je vous remercie, monsieur Kelsall.
Je cède maintenant la parole à Kevin Perkins de Partenariat Canada-Afrique sur le SIDA.
M. Kevin Perkins (directeur général, Partenariat Canada-Afrique sur le SIDA): Merci.
Je souhaiterais commencer par remercier le comité permanent de m'avoir invité à prendre la parole au nom de PCA sur le SIDA au sujet de ce projet de loi d'une importance vitale.
PCA sur le SIDA est une ONG relativement nouvelle, dont la mission consiste à aider les Africains à lutter contre le sida et à le vaincre. Nous appuyons les initiatives locales déployées par les petits organismes qui sont au premier rang de la lutte contre le sida.
Nous le répétons, le sida constitue une crise mondiale en matière de santé. Au cours des cinq minutes qui me sont accordées, quelque 20 personnes mourront du sida uniquement en Afrique. Ces décès et les 6 000 autres qui surviendront dans les 24 prochaines heures laisseront des orphelins, des veuves, des grand-mères responsables de plus de bouches à nourrir, des usines et des exploitations agricoles sans travailleurs, des écoles sans enseignants et des pays sans futurs dirigeants.
Samedi prochain, le Torontois Joseph van Veen embarquera dans un avion à destination de Nairobi. Trois jours après son arrivée, il enfourchera sa bicyclette pour parcourir 6 000 kilomètres jusqu'à Cape Town, en Afrique du Sud. Il s'agit de la Randonnée en vélo de PCA sur le SIDA. Dans les meilleures conditions, c'est un exploit remarquable. Cependant, Joseph est séropositif depuis près de 18 ans, soit plus que les 12 ans qu'il était censé vivre selon les médecins lorsqu'ils ont établi le premier diagnostic en 1987. Maintenant, ses médecins lui disent que le sida est une maladie chronique qui peut être soignée, mais qui ne le tuera pas nécessairement. C'est imputable essentiellement au fait qu'il a pu recevoir un traitement antirétroviral.
Joseph sait que les 32 millions d'Africains infectés par le VIH ne partagent pas sa chance, la très grande majorité ne pouvant pas recevoir les médicaments susceptibles de leur sauver la vie, voire de réduire leurs souffrances. Il se demande pourquoi.
Par les modifications proposées à la Loi sur les brevets, le Canada essaie de répondre à la question en affirmant qu'ils doivent avoir accès à ces médicaments. Le projet de loi est susceptible d'être un geste humanitaire des plus importants, un geste qui s'élève au-dessus de la partisanerie politique intérieure ou des intérêts commerciaux. C'est le genre d'engagement international bienveillant qui rend un si grand nombre d'entre nous fiers d'être des Canadiens.
Comme il ne s'agit que d'une action humanitaire, il ne faut pas, selon moi, la juger à son efficacité, mais à la mesure dans laquelle elle permet de sauver ou de prolonger des vies en rendant les médicaments plus abordables et plus accessibles pour les peuples pauvres dans les pays défavorisés.
Il existe quelques moyens de réduire le prix des médicaments et d'en accroître l'offre au profit des pays en développement. Premièrement, je suppose qu'il s'agirait de fixer les prix par voie législative, même si, en fait, c'est probablement impossible. Deuxièmement, il serait possible d'acheter les médicaments aux prix protégés par les brevets et de les donner ou de les écouler à un prix inférieur grâce à des subventions publiques. Troisièmement, nous pourrions permettre essentiellement à la libre entreprise de réduire le prix des médicaments dans les pays qui ne peuvent payer les pris protégés par les brevets. Il semble que ce soit une méthode préconisée par le projet de loi C-9. Il faut se demander si elle fonctionnera. Favorisera-t-elle en fait la concurrence nécessaire à la réduction des prix et à l'accroissement de l'offre?
Je crains de devoir joindre ma voix à celle de mes collègues de la société civile pour dire que, dans son libellé actuel, le projet de loi n'entraînera fort probablement pas ces répercussions. J'emploie le verbe craindre parce que tous les gens préoccupés par ce problème souhaitent ardemment que le projet de loi soit adopté le plus tôt possible. Tout retard entraîne plus de décès.
Quatre problèmes ont été cernés et décrits par notamment le Réseau juridique canadien VIH-sida et le CCCI. J'aimerais axer mes observations sur la disposition régissant le droit de premier refus. Je pense que, par cette disposition, les rédacteurs du projet de loi ont voulu s'assurer que les fabricants de produits génériques offrent réellement les meilleurs prix aux pays en développement. En permettant aux titulaires de brevet d'assumer les contrats négociés par les fabricants de produits génériques, l'intention visée consistait peut-être à garantir que les concurrents dans la fabrication des produits génériques feront preuve d'honnêteté dans leurs négociations et offriront véritablement des bas prix en raison de l'aiguillon de la concurrence.
Le problème est le suivant: on suppose que la concurrence commence dès le début des négociations contractuelles et se termine à l'attribution de la licence. Je pense que la véritable concurrence ne peut naître qu'après l'attribution de la licence: des entreprises ont besoin de licences pour fabriquer le même médicament avant l'entrée en vigueur d'une réduction soutenue des prix. Par conséquent, tout ce qui retarde ou décourage l'intervention des concurrents détenant une licence met en péril l'efficacité du projet de loi.
Une licence obligatoire accorderait-elle à un fabricant de produits génériques un nouveau monopole en interdisant aux titulaires de brevet de tenir la concurrence? Je crois que ce n'est absolument pas le cas. Il y a un immense besoin de médicaments dans le monde.
º (1625)
Ce n'est pas un contrat entre un pays et un fabricant de produits génériques qui exercera beaucoup d'influence sur le besoin ou la demande. Si Dieu le veut, les entreprises titulaires d'un brevet auront de nombreuses occasions d'obtenir des contrats dans les pays en développement, et en fait je l'espère.
Quoi qu'il en soit, les gouvernements des pays en développement possèdent des négociateurs compétents, et tout porte à croire qu'ils pourront obtenir les meilleures offres lors des négociations contractuelles. Il n'est pas nécessaire que nous leur garantissions la concurrence. Tant qu'il y aura plusieurs concurrents, je suis sûr que les négociateurs réussiront à obtenir les meilleures offres possibles.
Pour que le projet de loi C-9 entraîne les répercussions humanitaires souhaitées, ce qui est la seule norme qui, selon moi, permette de déterminer la pertinence du projet de loi, il faudrait supprimer la disposition sur le droit de premier refus et les autres dispositions analogues. Loin de favoriser la concurrence, ces dispositions la freineront et seront susceptibles d'y mettre fin malheureusement.
Encore une fois, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le comité. Je souhaite que vos délibérations soient fructueuses et je prie pour qu'un projet de loi réellement efficace soit adopté le plus tôt possible.
Le président: Merci, monsieur Perkins.
Je cède la parole à Dave Toycen, président de Vision mondiale Canada.
M. Dave Toycen (président, Vision mondiale Canada): Je vous remercie, monsieur le président, de me donner l'occasion de vous entretenir de la pertinence du projet de loi C-9 et de l'importance de le libeller correctement. J'ai fait parvenir à la greffière un mémoire et un exemplaire de ma déclaration préliminaire.
Je comparais à titre de président-directeur général de Vision mondiale Canada, qui est l'ONG internationale la plus importante au pays. Actuellement, des Canadiens parrainent plus de 315 000 enfants par l'intermédiaire de Vision mondiale. Nous avons plus d'un demi-million d'adhérents canadiens. Je vous cite ces chiffres simplement pour que vous sachiez qu'il y a beaucoup de Canadiens qui ont beaucoup à coeur les enfants et les problèmes posés par le VIH/sida.
Nous intervenons dans 90 pays et nous prenons des mesures exhaustives face au VIH/sida, notamment la prévention, la défense des intérêts ainsi que les services à l'intention des enfants, des familles et de leurs collectivités. Selon nous, nous parrainons environ 60 000 enfants dans les pays durement touchés par l'épidémie du VIH/sida. C'est donc dire que certains de ces enfants sont séropositifs et que bon nombre d'entre eux vivent dans des familles où le père, la mère ou un proche parent est déjà mort.
Nous sommes heureux de cette mesure législative qui viendra compléter le travail effectué par de si nombreux organismes et gouvernements, particulièrement dans les collectivités dévastées par l'épidémie du VIH/sida. L'urgence du projet de loi C-9 est évidente, à mon avis. Selon ONUSIDA, la pandémie aura fait de 25 millions d'enfants des orphelins d'ici 2010. Actuellement, 2,5 millions d'enfants de moins de 15 ans sont aux prises avec le VIH/sida. Seulement l'an dernier, quelque 700 000 enfants ont été infectés.
Le projet de loi C-9 revêt un intérêt très personnel pour moi parce que j'ai été témoin de la dévastation causée par le VIH/sida depuis près de 20 ans. Les statistiques ne sont plus uniquement des chiffres, parce que ce sont des enfants qui meurent. À maintes occasions, j'ai rencontré des parents dont le plus grand souci était de savoir qui s'occuperait de leurs enfants après leur mort. J'ai pleuré avec eux, et comme un si grand nombre qui, comme moi, travaillent dans le même domaine, je ne peux tout simplement pas comprendre pourquoi une telle situation peut se poursuivre.
Ce que le Canada se propose de faire m'encourage. C'est un progrès remarquable. Pourquoi sommes-nous donc ici aujourd'hui? Nous comparaissons pour une seule raison. Nous accueillons très favorablement le projet de loi C-9, mais nous avons des préoccupations quant à sa nature précise.
Premièrement, nous demandons que l'annexe 3 soit modifiée pour accorder à tous les pays en développement le droit d'avoir accès aux médicaments qui, selon eux, sont nécessaires pour résoudre leurs problèmes de santé publique. Les ententes ou les déclarations ne justifient pas clairement cette disposition, qui empêche certains pays d'importer des produits pharmaceutiques génériques du Canada. La disposition restreint plutôt la capacité de certains pays en développement, notamment le Venezuela et le Vietnam, de s'attaquer à leurs problèmes très réels en matière de santé publique.
Deuxièmement, nous proposons de supprimer l'annexe 1, qui restreint la liste des produits pharmaceutiques visés par la mesure législative. Ces restrictions ne sont pas justifiées. En fait, les dispositions de l'annexe 1 indiquent que le Canada revient sur les engagements pris dans la Déclaration de Doha. Aucune disposition de l'Accord sur les ADPIC, de la Déclaration de Doha ou de l'entente du 30 août ne limite la liste des produits pharmaceutiques. Nous devons autoriser les experts médicaux directement aux prises avec les problèmes à déterminer les médicaments qui sont essentiels.
Enfin, nous proposons d'enlever la disposition sur le second droit de premier refus. Il s'agit d'un obstacle inutile qui pourrait mettre en péril les objectifs du projet de loi. L'alinéa 31b) de l'Accord sur les ADPIC renferme des dispositions claires qui accordent aux propriétaires de brevet le droit d'octroyer des licences facultatives «suivant des conditions et des modalités raisonnables» et «dans un délai raisonnable». La disposition actuelle n'incite pas les fabricants de produits génériques à négocier des contrats s'ils savent que les titulaires du brevet ont le droit d'annuler les ententes conclues.
Outre ces trois modifications, nous recommanderions fortement que le projet de loi C-9 soit adopté rapidement. Les organismes qui, comme la nôtre, oeuvrent dans ce domaine, pourraient par la suite continuer de s'attaquer aux problèmes d'accès. Nos programmes nous permettent déjà d'aborder les questions des stigmates et de la discrimination qui empêchent les gens de demander de l'aide. Nous nous efforçons de sensibiliser davantage les gens et de donner aux collectivités la capacité d'intervenir. Les gouvernements nationaux et les ONG collaborent pour s'assurer que les systèmes d'approvisionnement sont en place pour faire parvenir aux personnes qui en ont besoin les médicaments antirétroviraux et les autres médicaments. Au Kenya notamment, nous avons mis en oeuvre un programme pilote, et d'autres organismes nous emboîtent le pas pour prévenir la transmission entre la mère et l'enfant. À lui seul, un médicament comme la nevirapine peut réduire de moitié le nombre de ces cas.
º (1630)
Des défis se posent de toute évidence, mais il ne faut pas se laisser dissuader. Le projet de loi C-9 offre un espoir concret aux personnes ayant contracté le VIH/sida et de nombreuses autres maladies. Ces personnes méritent la chance de vivre et de contribuer à l'essor de leur collectivité. Il ne faut pas les laisser attendre plus longtemps les médicaments que nous savons fabriquer et que nous pouvons leur procurer.
Enfin, Globescan, maison de sondage canadienne, a publié récemment des résultats qui indiquent que 93 p. 100 des Canadiens sont d'avis que les pays riches ont la responsabilité morale de s'assurer que les pays pauvres reçoivent des médicaments abordables. C'est un fait. Les gens y croient, et il ne fait aucun doute que les Canadiens appuient cette mesure législative.
Nous tenons absolument à ce que la mesure législative soit libellée correctement. Personnellement, je vous dirai que j'ai rencontré beaucoup de malades souffrant du VIH/sida au cours des 20 dernières années ou quelque de ma vie. Certains sont décédés et d'autres vivent encore. Même aujourd'hui dans la présente salle, un groupe restreint de personnes, qui assistent à ces travaux, notamment des mères, m'a demandé: «Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir les médicaments? Vous les avez, alors pourquoi?»
En terminant, ma femme et moi sommes de nouveaux Canadiens. Nous sommes arrivés ici en 1988 après avoir vécu aux États-Unis et en Australie. Nous avons été conquis par le Canada. Il y a neuf ans, nous sommes devenus des citoyens canadiens. La cérémonie de citoyenneté qui nous a permis de devenir citoyens d'un pays qui est réputé pour sa générosité et son sens de la justice a constitué l'un des meilleurs moments de nos vies.
Un autre moment inspirant au Canada a été d'avoir pu écouter Roméo Dallaire parler des troupes canadiennes qui, sous l'égide de l'ONU, se sont rendues au Rwanda, alors que cette mission ne faisait pas partie de leur mandat et que des gens y étaient assassinés. J'étais alors tellement fier d'être un Canadien. Ici, nous croyons que, si quelqu'un est aux prises avec l'injustice, l'oppression ou l'insouciance, ce sont tous les Canadiens qui sont visés d'une façon ou d'une autre.
J'exhorte le comité à terminer l'examen de cette mesure législative et d'y apporter les modifications que nous proposons. Je pourrais vous citer le nom de tant de gens qui sont aux prises avec le VIH/SIDA actuellement et qui espèrent ardemment que les choses changeront et qu'ils auront une chance de s'en sortir: Margaret Talu et son bébé, Hope, au Kenya; Esther Mathias en Tanzanie; Marungwa Mepomisene au Rwanda; Gloria Mlango en Zambie; Alex Mutiso en Ouganda. Il y en a des millions d'autres comme eux.
J'exhorte le comité à agir. Ce n'est pas la seule solution, mais elle est l'une de celles qu'il est essentiel d'adopter. Nous devons libeller correctement le projet de loi parce que d'autres pays suivront notre exemple. Nous ne pouvons pas abandonner les pays et le nombre incalculable de personnes qui s'en remettent au Canada pour obtenir de l'aide dans le domaine de la santé publique.
Je vous remercie.
º (1635)
Le président: Merci, monsieur Toycen.
Nous commencerons par M. Rajotte, puis ce sera au tour de M. Fontana.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC): Je vous remercie infiniment, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leurs exposés.
Monsieur Abbott, j'aimerais commencer par vous. Vous avez critiqué passablement les fabricants de produits pharmaceutiques d'origine. Vous avez certes raison, mais je me demande si je peux préciser ce que vous nous recommandez précisément par rapport au projet de loi. Vous voulez que nous supprimions le droit de premier refus, mais quel sorte de système entrevoyez-vous à sa place? Recommanderiez-vous d'établir un simple taux de redevance de 2 p. 100 pour la concession de licence obligatoire?
M. Frederick Abbott: Oui. Autrement dit, je pense que j'envisagerais le genre de système que les Norvégiens ont adopté: en cas d'urgence, d'extrême urgence ou d'utilisation publique non commerciale, aucune négociation préalable avec le titulaire du brevet n'est exigée; le fabricant du produit générique présente une demande de licence au commissaire des brevets, et la redevance est établie en fonction de l'octroi de cette licence. Lorsqu'il n'y a aucune urgence, comme c'est le cas notamment pour le VIH/sida, vous pourriez prévoir une période de négociations préalables entre le fabricants du produit générique et le titulaire du brevet—notamment, une période de 60 jours—, et les motifs seraient exposés devant le commissaire des brevets, puis une licence serait accordée ou non.
M. James Rajotte: Établiriez-vous un taux de redevance fixe ou variable?
M. Frederick Abbott: Le taux de redevance proposé par le gouvernement me satisfait énormément. Il s'agit d'un taux fixe de 2 p. 100. Vous pourriez également établir un taux de référence de 2 p. 100 et prévoir une certaine marge de manoeuvre pour permettre de le fixer à 4 p. 100 ou à 0 p. 100, en fonction de la situation dans le pays importateur.
M. James Rajotte: Autoriseriez-vous le commissaire des brevets à refuser une licence obligatoire? Le commissaire disposerait-il de la marge de manoeuvre lui permettant d'exercer son jugement?
M. Frederick Abbott: En cas d'urgence et dans des situations analogues, je n'accorderais pas une telle marge de manoeuvre au commissaire des brevets. Je n'aurais aucun problème à permettre au titulaire du brevet d'exposer ses motifs devant le commissaire des brevets, mais je n'accorderais pas à ce dernier une telle marge de manoeuvre.
º (1640)
M. James Rajotte: Essentiellement, le commissaire n'exercerait qu'une simple fonction bureaucratique en accordant la licence. Il n'aurait pas à se servir de son jugement pour trancher.
M. Frederick Abbott: C'est exact.
M. James Rajotte: Je vous remercie de cette précision.
Monsieur Kelsall, je souhaite vous poser plusieurs questions parce que j'ai beaucoup aimé votre exposé. Vous avez, selon moi, soulevé des points très importants au sujet du fait que nous pouvons modifier la Loi sur les brevets et la Loi sur les aliments et drogues, mais il y a tant d'autres mesures qui doivent être prises pour que les gens ayant besoin de médicaments les obtiennent.
Pourriez-vous donner des précisions à cet égard. Vous pouvez même citer des exemples de ce qui, d'après vous, se passe et de ce qui doit être fait.
Je pense que vous avez parlé d'un montant de 130 millions de dollars en ce qui concerne la valeur en gros des médicaments et des fournitures qui sont donnés par les industries de la santé. Pourriez-vous nous indiquer ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et les améliorations que nous devons apporter.
Je tiens à vous féliciter. Je pense que vous avez reconnu que les deux industries prennent actuellement des initiatives. Pouvez-vous nous donner une idée de la part du montant de 130 millions de dollars qui a été accordée par les fabricants des produits génériques et de celle qui a été attribuée par l'industrie de la recherche? Quelles initiatives ont-ils prises que le gouvernement et l'ACDI devront essayer d'étayer?
M. John Kelsall: En ce qui concerne la répartition des 130 millions de dollars, je dirais qu'au moins 100 millions proviennent des entreprises de recherche. Nous collaborons avec elles depuis 1990, collaboration qui se poursuit toujours aujourd'hui.
Plusieurs d'entre elles ont mis en oeuvre leur propre programme, notamment Novopharm qui possède un organisme, CanMap, qui assure la distribution des médicaments. Il y a également Apotex qui fait don de médicaments aux médecins et aux organisations.
Je répète qu'au moins 100 millions des 130 millions de dollars, proviennent des entreprises de recherche. En fait, je peux vous préciser que, dans la majorité des cas, ces entreprises nous donnent directement les produits dont la date de péremption est éloignée, particulièrement au cours des dernières années.
Vous devriez savoir que notre organisme a appuyé officiellement les lignes de conduite de l'Organisation mondiale de la santé en matière de dons de médicaments, ce qui signifie que rien de ce qui n'est pas nécessaire n'est donné aux autres pays. L'aide est coordonnée, et la date de péremption doit être suffisamment éloignée pour que le médicament puisse être utilisé avant sa date d'expiration.
Nous essayons de traiter les gens à l'étranger comme si nous y étions. Nous avons décelé cette attitude au sein des entreprises avec lesquelles nous collaborons. Nous avons adhéré aux lignes de conduite de l'Organisation mondiale de la santé, tout comme les compagnies en recherches pharmaceutiques. L'ACIMVL, qui représente l'industrie des médicaments en vente libre, a fait de même. Je pense que plusieurs fabricants de produits génériques ont également emboîté le pas.
L'industrie biotechnologique nous a fourni des vaccins d'une valeur de plusieurs millions de dollars, que nous avons distribués dans les régions du monde en ayant besoin. De plus, l'industrie des médicaments en vente libre et les fabricants de produits génériques, particulièrement Novopharm, RhoxalPharma, RatiopharmRhoxal et d'autres... Apotex fait encore la distribution de ses propres produits aux médecins et aux organismes dans le monde. Nous les félicitons de ces initiatives.
C'est le tableau de la situation générale.
Le président: Je vous remercie, monsieur Kelsall.
Je vous remercie, monsieur Rajotte.
Monsieur Fontana.
L'hon. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'aimerais d'abord remercier les trois distinguées ONG qui comparaissent devant nous pour le travail vraiment fantastique qu'elles accomplissent. Nous sommes très fiers du magnifique travail que vous, des Canadiens, accomplissez dans le monde. Nous vous remercions d'aller sur le terrain parce que parfois, c'est là qu'est la véritable souffrance.
Monsieur Abbott, je vais commencer par vous. Vous avez un CV impeccable. J'aimerais parler un peu des négociations, parce que vous semblez en savoir beaucoup sur ce sujet et sur l'effort déployé pour en venir à l'Accord sur les ADPIC, entre autres. Soyons francs: les négociations n'auraient pas pris deux ans si elles avaient été faciles.
Évidemment, il y a des pays, y compris le vôtre, pour lesquels c'était donnant, donnant, pour ce qui était des brevets, mais en même temps, il y avait la noble cause qui consistait à fournir au plus bas prix possible des médicaments aux gens dont Dave, John, et Kevin ont parlé, des gens qui meurent parce qu'ils n'ont pas accès à ces médicaments.
Ainsi, dans le cas des détenteurs de brevets qui ont ces droits, l'Accord sur les ADPIC et les deux années visaient évidemment à mettre ces droits en balance, car les fabricants de médicaments de marque peuvent déjà expédier ou vendre leurs produits dans ces régions s'ils le veulent. Mais nous voulons un système concurrentiel et transparent qui garantit que les fabricants de médicaments génériques ou de marque livrent les médicaments dont les gens ont besoin. L'article 31 de l'Accord sur les ADPIC vise essentiellement à mettre ces droits en balance.
En fait, ce qu'ils ont produit reconnaît...et je parlerai un peu du droit de premier refus. Je conviens qu'il pose des difficultés. En fait, d'autres propositions ont été faites où il est question de négociations volontaires entre les fabricants de médicaments génériques et de marque, faute de quoi, un régime de licence obligatoire serait appliqué.
Voulons-nous faire en sorte que les fabricants de médicaments génériques et de marque puissent soumissionner afin que le prix soit le plus bas possible? Si les fabricants de médicaments de marque n'ont pas le droit de soumissionner, qu'est-ce qui vous fait croire que les fabricants de médicaments génériques vont réduire les coûts? Le fait est que les fabricants de médicaments de marque ont un avantage car ils ont déjà ces médicaments. Ils les ont créés. Il nous suffit de mettre la main dessus, de les changer, de mettre fin au détournement, et de les livrer aux personnes qui en ont vraiment besoin.
Je me demande donc quel type de régime, semblable à ce dont James a parlé, vous mettriez en place pour garantir la transparence, la concurrence et le coût le plus bas possible, pour que les gens qui ont vraiment besoin de ces médicaments les obtiennent.
º (1645)
M. Frederick Abbott: Le meilleur système en est un où toutes les parties évoluent dans un marché ouvert et où l'acheteur a le droit de s'adresser au fournisseur de son choix pour négocier les modalités qui sont négociables. C'est le système de marché qui existe actuellement, et la seule raison pour laquelle ce marché n'est pas concurrentiel est que les fabricants de médicaments génériques ne peuvent pas fournir le produit, puisqu'ils en sont empêchés par les brevets.
L'hon. Joe Fontana: Cet accord permettra au moins aux fabricants de médicaments génériques de négocier, de prendre quelque chose—des droits de propriété—quelque chose qui ne leur appartient pas pour l'instant, et notre pays est disposé à suspendre ces droits qui appartiennent aux détenteurs de brevets pour que les fabricants de médicaments génériques aient un accès et puissent négocier avec l'acheteur ou les fabricants de médicaments de marque, dans le but de fournir les médicaments.
Quant à la proposition de rechange au droit de premier refus, je crois que les fabricants de médicaments génériques et de marque sont près d'atteindre un accord. Par conséquent, si les deux fournisseurs trouvent un terrain d'entente avant qu'une licence obligatoire soit accordée, qu'y aurait-il de répréhensible à ce type de régime?
M. Frederick Abbott: J'aimerais d'abord préciser qu'il y a une différence entre des négociations entre le détenteur du brevet et le fabricant de médicaments génériques d'une part, et le fournisseur de médicaments génériques qui serait obligé d'inviter le détenteur du brevet à s'asseoir avec l'acheteur éventuel et à s'assurer que ce dernier est à peu près sur la même longueur d'onde que le fournisseur de médicaments génériques.
Ce que ce genre de système produit... Imaginons que sur le marché canadien, vous avez un fournisseur dominant, un fournisseur exclusif qui a ses propres acheteurs, et vous avez un compétiteur éventuel beaucoup plus faible, beaucoup plus modeste, qui veut pénétrer le marché et qui essaie de recruter des clients qui font affaire avec le fournisseur dominant. Mais, au moment de négocier avec ces clients, il envoie une lettre au fournisseur dominant pour lui dire: «Cher fournisseur dominant, je vais rencontrer votre client mardi prochain. Je voulais m'assurer que vous étiez au courant, au cas où vous croiriez que je vais conclure un contrat qui vous priverait de votre marché. Vous serez présent, et vous pourrez faire une contre-proposition à l'acheteur éventuel et veiller à ce que je ne puisse surenchérir.»
Je pense qu'aucune industrie ne fonctionne de cette manière, où un fournisseur qui pressent un client éventuel est obligé d'écrire à un fournisseur dominant pour l'avertir qu'il est sur le point de lui prendre un client, mais qu'il veut lui donner l'occasion d'être présent et de surenchérir.
Les grandes compagnies pharmaceutiques ont un immense réseau dans chaque pays du monde—elles ont des représentants, elles ont l'oreille des dirigeants, elles savent ce qui se passe, elles parlent avec les médecins. Les détenteurs de brevets pharmaceutiques sont très bien informés.
En outre—et je veux aborder cette réalité—, ce système crée une situation où le détenteur de brevet se tourne vers le gouvernement de son pays d'origine—que ce soit les États-Unis, la Grande-Bretagne ou l'Allemagne—et dit: «Vous savez, il y a des fabricants de médicaments génériques qui négocient avec le gouvernement du pays X, en Afrique, et cela me dérange; je ne veux pas que ce pays achète des médicaments génériques. Je veux que vous envoyiez l'ambassadeur parler aux responsables des approvisionnements publics.»
J'ai malheureusement été témoin de beaucoup de ces situations. Je crois que vous devez garantir aux fabricants de médicaments génériques le droit de faire des affaires sans ce genre d'intervention; c'est très important.
º (1650)
Le président: Merci.
Monsieur Crête, s'il vous plaît.
[Français]
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Abbott. Dans votre présentation, vous dites, à la première page de l'annexe à votre exposé:
L'OMC ne possède pas de site Web sur lequel ses membres puissent répondre à un appel d'offres, et il n'incombe ni à notre comité, ni au gouvernement du Canada ni à l'industrie détentrice des brevets d'en créer un. |
Cependant, après vérification--j'ai les copies entre les mains--, il y a effectivement un site web intitulé «ADPIC et santé publique: page du site web consacrée aux notifications» qui existe déjà comme tel et qui est prévu pour que les gens puissent s'inscrire. On dit même à la fin: «Aucune notification n'a été présentée à ce jour», parce qu'il n'y a encore personne qui se soit inscrit.
J'aimerais que vous m'expliquiez comment il se fait que dans votre mémoire, vous dites que l'OMC ne possède pas ce site web, alors qu'on voit qu'en réalité, ce site web existe actuellement sur le site de l'OMC.
[Traduction]
M. Frederick Abbott: J'ai bien peur que vous vous mépreniez sur la nature de ce site Web. Il s'agit du site Web prévu dans la décision sur la mise en œuvre de l'article 6, au terme duquel un pays donne avis qu'il est un pays importateur admissible et qu'il a l'intention de se servir du système. Il s'agit d'un avis unique qui n'implique aucun processus de négociation ou de soumission. Il s'agit simplement d'une déclaration d'admissibilité, et cela est expressément prévu dans le projet de loi C-9. Il n'existe pas de site Web d'appel d'offres de l'OMC.
[Français]
M. Paul Crête: Peut-être que je comprends mal, mais dans le texte, on dit:
Il est précisé que les Membres peuvent présenter cette notification à tout moment et qu'ils peuvent notifier qu'ils utiliseront le système en totalité ou d'une manière limitée, par exemple uniquement dans des situations d'urgence nationale ou d'autres circonstances d'extrême urgence. |
Ils expliquent sur le site de quelle façon les notifications vont se faire pour l'inscription des demandes.
[Traduction]
M. Frederick Abbott: J'ai bien peur qu'il y ait méprise. Ces avis concernent la notification prévue à l'alinéa 1b) de la décision sur la mise en œuvre de l'article 6:
b) ... «membre importateur admissible» s'entend de [...] et de tout autre membre qui a notifié (sic) (2) au Conseil des ADPIC son intention d'utiliser le système en tant qu'importateur, étant entendu qu'un membre pourra notifier à tout moment qu'il utilisera le système en totalité ou d'une manière limitée... |
C'est bien différent de ce que contient la proposition de l'industrie, c'est-à-dire un véritable processus d'appel d'offres. Cela ne veut pas dire qu'il n'existe dans le monde aucun système qui comporte un processus d'appel d'offres, voire des appels d'offres multisources, pour différents types de fournitures. À titre d'exemple, la Banque mondiale emploie des appels d'offres multisources dans un grand nombre de ses projets. Mais ce n'est pas une fonction de l'OMC, et je pense pouvoir vous assurer que le système décrit dans la proposition des détenteurs de brevets est bien différent du site Web dont vous parlez, et que c'est quelque chose qui devrait être négocié et convenu par les membres à Genève.
Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, les membres de l'OMC, surtout les membres des pays en développement, préfèrent de loin qu'un organisme axé sur la santé, comme l'Organisation mondiale de la santé, participe plus activement à la fourniture de produits pharmaceutiques. Ils ne sont pas satisfaits de l'OMC et de la situation à laquelle ils y font face. Je ne présumerais donc pas qu'un tel système puisse être négocié avec succès à l'OMC, plutôt qu'avec l'OMS, par exemple.
Je connais bien ce site Web. Je sais que le site Web de l'OMC indique que jusqu'ici, personne n'a fait de notification, mais il n'existe pas de système comme celui qui est décrit dans la proposition.
º (1655)
[Français]
M. Paul Crête: D'accord, mais en tout cas, cela nous indique qu'il est possible d'avoir un site web qui puisse être utilisé à ces fins-là. Votre déclaration semblait dire que c'était impossible.
[Traduction]
M. Frederick Abbott: Non, non, je n'ai pas dit cela du tout. Ce n'est pas dans ma déclaration.
Ma déclaration disait qu'après quelques années de négociations, il pourrait y avoir un accord sur un tel site Web, mais que d'ici demain, au moment où ce comité siégera, je pense pouvoir affirmer avec assez de certitude que l'OMC n'aura pas atteint de consensus à propos d'un tel système.
Dans la mesure où nous parlons de mécanismes réalistes, je ne pense pas que le comité et le Canada, ou l'industrie des détenteurs de brevets, aient la capacité d'annoncer qu'un nouveau système de l'OMC a été créé et qu'il sera mis en œuvre en vertu du projet de loi C-9.
Cela est tout à fait étranger aux avantages et aux inconvénients d'un système mondial d'appel d'offres multisources. Comme je l'ai dit dans mon exposé, les avantages et inconvénients d'un système mondial d'appel d'offres multisources constitue une autre question, et il pourrait bien exister des moyens d'établir un bon système. Mais c'est beaucoup plus compliqué que ce que propose l'industrie.
Selon cette proposition, le soumissionnaire gagnant s'adresserait au commissaire canadien des brevets. Mais il est fort probable que ce soumissionnaire soit un fabricant de médicaments de marque indien, argentin ou brésilien qui n'a aucun lien avec le Canada. Le commissaire canadien aux brevets n'a rien à voir là-dedans. Le soumissionnaire gagnant s'adresserait alors au commissaire des brevets de l'Inde ou du Brésil. En outre, le système canadien est limité au chapitre des médicaments qui sont prescrits, entre autres.
Par conséquent, en théorie, ce n'est pas impossible, et je ne veux surtout pas dire que ce l'est. Tout ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas pour demain.
Le président: Merci.
Marlene Jennings, s'il vous plaît.
[Français]
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci pour vos présentations. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre présentation, docteur Abbott, et ma première question est la suivante. En tant qu'expert en matière de propriété intellectuelle, êtes-vous en faveur d'une loi sur les médicaments brevetés et, le cas échéant, croyez-vous qu'il serait utile que nous en adoptions une? Je ne parle pas ici du projet de loi C-9, mais bien d'une loi canadienne sur les médicaments brevetés.
[Traduction]
M. Frederick Abbott: Madame la députée, laissez-moi vous rappeler que je joue notamment le rôle d'arbitre auprès de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle.
[Français]
Mme Marlene Jennings: J'ai lu votre curriculum vitae en entier.
[Traduction]
M. Frederick Abbott: Je rends souvent des décisions en faveur des détenteurs de droits de propriété intellectuelle. Je ne suis pas contre la propriété intellectuelle. Je ne suis même pas contre les brevets.
Personnellement, ce que je ne peux supporter, c'est que des gens meurent à cause d'eux.
» (1700)
[Français]
Mme Marlene Jennings: Merci, vous avez bien répondu à ma question.
D'après ce que je comprends de votre présentation, vous considérez que les mesures de contrôle inscrites à l'article 31 de l'ADPIC sont suffisantes pour protéger les intérêts des compagnies de recherche et développement du domaine pharmaceutique. Ainsi, à votre avis, elles sont pleinement suffisantes pour protéger leurs droits et le fait qu'elles font beaucoup d'investissements avant de développer un médicament, d'obtenir la licence, le brevet, etc. Est-ce que je saisis bien votre position?
[Traduction]
M. Frederick Abbott: Oui, et dans ce contexte particulier, une combinaison de l'Accord sur les ADPIC et de la décision, les deux ensemble.
[Français]
Mme Marlene Jennings: Merci beaucoup.
Monsieur Toycen, votre présentation était très touchante. Je prends en note vos recommandations, par exemple en ce qui concerne la nécessité d'éliminer l'annexe 1, du fait que les restrictions, à votre avis, ne sont pas justifiées. Mais vous dites également que l'annexe 3 devrait être modifiée afin de permettre à toutes les compagnies d'en bénéficier. Mais d'après ce que je comprends, l'entente qui a été négociée à l'OMC ne s'adresse qu'aux membres de cet organisme. Est-ce que je fais erreur en disant qu'en fait, elle ne se limite pas aux membres de l'OMC?
[Traduction]
M. Dave Toycen: D'après moi, ce que nous demandons, c'est que tous les pays considérés comme en développement—il y a une liste précise—devraient être admissibles à recevoir ces produits pharmaceutiques.
Jusqu'ici, cela a été limité dans la loi canadienne. Tout ce que nous disons, c'est que des pays comme le Vietnam et le Liban ont d'importants...
[Français]
Mme Marlene Jennings: Mais la question que je vous pose est la suivante: la situation est-elle que l'entente de l'OMC concernant l'accessibilité des médicaments abordables n'est applicable qu'aux membres de l'OMC ou qu'au contraire, d'après ces derniers, elle serait ouverte à tous les pays, qu'ils soient membres ou non?
[Traduction]
M. Dave Toycen: Je ne suis pas certain de comprendre la question.
Mme Marlene Jennings: Je pose la question car je ne suis pas une experte de l'Accord sur les ADPIC, de la déclaration de Doha... Je comprends les principes.
Des témoins sont venus nous dire que l'annexe 3, qui énumère les pays que le Canada autorisera à bénéficier du projet de loi C-9 une fois qu'il aura été adopté, est restreinte, qu'il y a des pays en développement qui ne figurent pas à l'annexe 3, au projet de loi C-9, et que le Canada devrait simplement l'appliquer à tous les pays en développement.
Ma question est celle-ci: l'Accord de l'OMC, des ADPIC, de Doha, etc.—tous les composants—dit-il qu'il devrait s'appliquer à tous les pays en développement? Dans certains articles, je vois le terme «membres admissibles de l'OMC». C'est pour cette raison que je pose la question. Y a-t-il quelque chose qui m'a échappé?
L'hon. Lyle Vanclief (Prince Edward—Hastings, Lib.): Y a-t-il quelque chose à l'OMC qui interdit...
Mme Marlene Jennings: Ce n'est pas ce que je demande.
M. Dave Toycen: Le projet de loi C-9 s'applique au Canada en tant que membre de l'OMC.
Mme Marlene Jennings: Oui, je comprends cela. Mais le projet de loi C-9 est censé atteindre les objectifs qui ont été convenus à l'OMC. On nous demande de supprimer l'annexe 3, qui énumère tous les pays auxquels le Canada permettrait de bénéficier du projet de loi C-9. Ce que je demande, c'est si l'OMC a convenu que n'importe quel pays pourrait bénéficier de la suspension des droits de propriété intellectuelle dans la mesure où elle s'applique aux médicaments; ou cet accord prévoit-il des restrictions?
» (1705)
M. Dave Toycen: Oui, ils ont octroyé ce droit à tous les pays.
Mme Marlene Jennings: Quels articles?
Le président: Nous allons obtenir cette information pour vous.
Mme Marlene Jennings: Pourriez-vous envoyer au greffier, par écrit, les articles précis qui stipulent que les membres admissibles de l'OMC devraient appliquer l'Accord à n'importe quel pays?
Merci.
Le président: Marlene, c'était une très bonne question. Merci. Avec l'aide de M. Toycen et de nos recherchistes, nous essaierons d'y trouver une réponse satisfaisante.
Nous allons passer à M. Masse.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Ma première question est destinée à M. Abbott. Hier, nous avons entendu parler de la loi norvégienne qui est à l'étude, et nous sommes en train de faire de la recherche là-dessus. Nous avons beaucoup entendu dire que le Canada était le premier pays à adopter une telle mesure, mais il semble que les Norvégiens nous aient devancés.
Avez-vous plus d'information sur l'état de cette loi et des détails sur ce que les Norvégiens font différemment par rapport à notre situation actuelle?
M. Frederick Abbott: Merci, monsieur Masse.
Comme je l'ai indiqué plus tôt, la Norvège a abordé cette tâche en accordant, dans sa Loi sur les brevets, l'autorisation générale au roi et à son conseil d'adopter des règlements afin d'appliquer une exception qui permettrait l'exportation de produits pharmaceutiques en vertu de la décision. Cette mesure a été prise à la fin de 2003. Elle a été adoptée et est entrée en vigueur le 1er février 2004. Le gouvernement a ensuite proposé des règlements conformes à la loi, et ces règlements ont été publiés et sont soumis à des consultations.
Les règlements associés à la Loi sur les brevets comprendront un article, parmi sept, qui commence par faire mention des pays admissibles, ce qui, à ce stade-ci, est semblable au système canadien. Comme je l'ai dit, j'ai fait état de la critique qui a été formulée par le milieu des ONG à ce sujet, et les Norvégiens se sont montrés enclins à changer cette disposition et à augmenter le nombre de pays admissibles.
Ensuite, les règlements stipulent que, sauf dans des circonstances où ce n'est pas requis par l'Accord des ADPIC, c'est-à-dire des circonstances prévues à l'alinéa 31b)—des urgences nationales, des circonstances d'extrême urgence ou des cas d'utilisation publique à des fins non commerciales—il y aura des négociations préalables à l'octroi d'une licence. Mais, dans ces dernières situations, cette condition ne s'appliquera pas.
Ensuite, les règlements stipulent que c'est le pays importateur qui formulera ses exigences à l'égard du produit—et la Norvège n'a pas de liste de médicaments qui sont ou ne sont pas admissibles au système. C'est le pays importateur qui doit déterminer ses besoins en matière de santé publique. Puis, bien sûr, il y a la conformité aux dispositions de la décision qui portent sur la notification, entre autres.
Ainsi, la loi norvégienne se distingue surtout en ce qu'elle n'impose pas de négociations préalables avec le détenteur du brevet et qu'elle ne confie aucun pouvoir discrétionnaire au commissaire aux brevets—pour répondre à une question qui m'a été posée plus tôt. Le commissaire norvégien aux brevets n'a pas de pouvoir discrétionnaire quant à l'octroi d'une licence, pourvu que les dispositions de l'article 6 soient respectées. Il s'agit donc d'un examen ministériel, pour répondre à l'autre question.
Enfin, et c'est aussi très important, la liste de produits n'est pas limitée.
M. Brian Masse: On vous a présenté comme un témoin expert et votre curriculum vitae a été remarqué. Êtes-vous d'avis que la loi canadienne pourrait bénéficier d'un examen de la loi norvégienne actuelle, dans le but d'améliorer ce que nous avons ici? En tant qu'expert, conseilleriez-vous que nous examinions cette loi?
» (1710)
M. Frederick Abbott: Oui. Quand j'ai examiné les règlements norvégiens, que je n'ai reçus que ce matin, j'ai été frappé par leur capacité de bien régler les problèmes fondamentaux qui ne sont pas pris en compte dans le projet de loi C-9, et par le fait qu'ils sont beaucoup plus conformes à l'esprit et à l'intention de la décision de mettre en œuvre l'article 6. Par conséquent, je recommanderais que le comité et le gouvernement examinent cette loi.
L'hon. Joe Fontana: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je suis certain que M. Abbott voudrait faire une mise au point. Les Norvégiens n'ont pas adopté la loi. Elle en est encore au stade des consultations. Je suis certain que M. Masse, en posant la question, demandait votre opinion d'expert. Mais cette loi n'en est qu'au stade consultatif. Nous devrions aussi préciser au procès-verbal que les Norvégiens n'ont pas d'industrie des médicaments génériques et que, par conséquent, il y a une importante différence.
Le président: C'est compris.
M. Frederick Abbott: Puis-je commenter cela? J'ai été assez précis dans mes propos. Les Norvégiens ont adopté une modification à leur Loi sur les brevets qui autorise le roi et son conseil à adopter les règlements. Le gouvernement a proposé les règlements et il prévoit qu'ils entreront en vigueur cet été. J'ai été très clair—et je l'ai dit dans mes remarques d'introduction—à propos de l'état de cette loi. Il y a une différence entre une loi habilitante et les règlements. Il y a une distinction à faire.
Le président: Considérons que la question a été clarifiée.
Allez-y, Brian. Vous avez une autre minute.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Monsieur Toycen, vous avez parlé des pays qui ne figurent pas sur la liste et qui pourraient être touchés par ce projet de loi. Votre organisme peut-il aider la population des pays qui ne figurent pas sur la liste?
M. Dave Toycen: Je n'ai pas la liste complète en main, mais, par exemple, nous avons des programmes en cours au Vietnam et au Liban. Ces deux pays figurent sur la liste. Nous avons apporté des secours au Venezuela. C'est, que je sache, un troisième pays sur la liste. Il ne fait pas de doute que les besoins au chapitre de la santé sont importants. Le Vietnam est un cas évident, tout comme le Liban, qui se relève encore des terribles combats et des tueries de la dernière décennie. Il y a donc des occasions de le faire.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Le président: Le dernier intervenant est M. Savoy.
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Messieurs, bienvenue.
Je pense que nous avons tous les mêmes objectifs malgré cet débat très animé sur la manière de les atteindre.
Au sujet de la disposition sur le droit de premier refus, monsieur Abbott, au cas où nous devrions l'inclure dans la loi, pouvez-vous citer d'autres mesures pratiques que nous pourrions adopter pour garantir que les fabricants de médicaments génériques participeront à ce plan d'accès? Existe-t-il d'autres avenues ou orientations, hormis le retrait du droit de premier refus? Y a-t-il d'autres mesures que nous pouvons adopter pour garantir que nous maximiserons la participation du secteur des médicaments génériques?
M. Frederick Abbott: Il m'est difficile, voire impossible, de répondre à cette question, car je ne peux imaginer ce qui vous obligerait à laisser cette disposition dans la loi.
M. Andy Savoy: Je comprends votre opinion.
Quelqu'un d'autre veut-il répondre à cela?
Quant à la question des pays en développement et des pays moins avancés, nous savons qu'en l'occurrence, tous les pays moins avancés sont visés par la loi, mais pour ce qui est des pays en développement, il faut être membre de l'OMC pour participer. À mon avis, c'est injuste, surtout dans les situations d'urgence. Refuser les médicaments aux gens qui en ont le plus besoin parce qu'un pays n'est pas membre de l'OMC va à l'encontre de l'objet de cette loi et de ce projet. Monsieur Abbott, pouvez-vous commenter la nécessité de n'inclure que les pays en développement qui sont membres de l'OMC et qui figurent à l'annexe 3? Est-ce une question d'imputabilité? Quelle est votre opinion sur cette question?
M. Frederick Abbott: Rien ne vous oblige à n'inclure que des membres de l'OMC. Soit dit en passant, permettez-moi de souligner que, par exemple, en plus des membres de l'OMC, il y a de nombreux pays qui sont en voie de devenir membres ou qui siègent comme observateurs à l'OMC. Il y a donc une catégorie de pays qui ont déjà indiqué leur souhait de devenir membres de l'OMC, mais il leur faut franchir le processus d'adhésion qui, dans certains cas, peut être assez long. Il y a un nombre assez important de ces pays, puis il y a d'autres pays en voie de développement qui ne sont pas membres de l'OMC.
Il n'y a absolument rien dans les règlements de l'OMC qui dit que le Canada ne peut pas accorder les avantages de son système à d'autres pays en développement. Il peut certainement le faire. Bien sûr, le Canada pourrait très bien obtenir de ces pays, par la voie diplomatique, qu'ils s'engagent à se comporter en bons citoyens, comme d'autres participants à ce système, et qu'ils ont sincèrement l'intention d'agir de la même manière que les autres pays, d'assumer les obligations, quelles qu'elles soient, qui découlent du système. Par le truchement de son ministère des Affaires étrangères, le Canada peut certainement négocier ce genre d'entente diplomatique avec ces pays, pour qu'ils soient sur le même pied que les pays en développement; puis il y a aussi les pays moins avancés.
Du point de vue législatif, c'est donc un problème qu'il est tout à fait possible de résoudre.
» (1715)
M. Andy Savoy: Alors, selon votre opinion d'expert, pour ce qui est des pays en développement, nous n'avons pas à nous en tenir à l'obligation pour eux d'être membres de l'OMC. C'est quelque chose que nous pouvons changer, et il serait pertinent de le faire pour les aider.
M. Frederick Abbott: À mon avis, oui, c'est absolument exact.
M. Andy Savoy: Les autres témoins voudraient-ils ajouter quelque chose?
M. John Kelsall: J'ajouterais simplement que, comme je l'ai indiqué dans mes remarques, il est très important que les médicaments antirétroviraux qui servent à soigner le VIH/sida soient livrés de manière coordonnée et planifiée. Il ne suffit pas de les expédier à bord d'un Hercules C-130 et de les laisser tomber à mille pieds d'altitude. Il faut des laboratoires d'hématologie, des professionnels formés, et la capacité d'offrir du counseling aux gens qui prendront ces médicaments. Je pense que l'un des véritables enjeux est que les pays auxquels le Canada s'intéressera particulièrement disposent d'une certaine capacité et de la possibilité d'administrer les traitements associés aux antirétroviraux. Je pense que c'est l'un des principaux points dont il faut vraiment tenir compte.
Le président: J'aimerais remercier chaleureusement nos témoins d'avoir pris le temps de participer à notre séance d'aujourd'hui, particulièrement ceux qui sont venus de loin. Je leur en suis reconnaissant.
Nous allons lever la séance, mais je vais demander aux membres de rester encore un moment. J'ai une suggestion à faire à propos de demain.
Cela dit, la séance est levée. Merci.