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Je vous remercie, madame la présidente, et bonjour.
Comme vous l'avez entendu, je m'appelle Michael Geist. Je suis professeur de droit à l'Universté d'Ottawa, où je suis titulaire de la Chaire en droit d'Internet et du commerce électronique. Je suis également membre du Centre de recherche en droit, technologie et société. Mes domaines de spécialisation sont la politique numérique, la propriété intellectuelle, la protection des renseignements personnels et Internet. Je comparais aujourd'hui à titre personnel et ne présenterai que mes propres points de vue.
Comme vous le savez, en général, un comité qui étudie un projet de loi l'examine et repère les dispositions à appuyer et les aspects à modifier. En l'espèce, cependant, ce qui compte vraiment, ce n'est pas le contenu du projet de loi, mais ce qui n'y est pas. De fait, les questions les plus notables du point de vue de la politique numérique sont absentes du projet de loi , car elles se trouvent dans le nouvel ALENA et les dispositions limitent généralement les options stratégiques du Canada quant à de futures réformes, au lieu d'exiger des mesures législatives immédiates. Il me semble que cela pose un problème de taille, car il est impossible, à ma connaissance, de remédier aux lacunes de l'accord dans le projet de loi C-4. En fait, il faudrait modifier un accord commercial qui est présenté, dans une large mesure, comme à prendre ou à laisser.
J'aimerais parler brièvement de quatre questions à ce propos: la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur, l'exemption culturelle, la protection des renseignements personnels et des données, et la responsabilité des plateformes Internet.
Je commencerai par la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur. Les dispositions de l'accord relatives à la propriété intellectuelle sont assez préoccupantes, surtout celle qui prévoit la prolongation de la durée de la protection de ces droits, qui passerait de la norme internationale de la vie de l'auteur plus 50 ans à la vie plus 70 ans. Les 20 années supplémentaires constituent un changement auquel le Canada a résisté à raison pendant des décennies. En cédant sur ce point, l'accord représente une véritable manne qui pourrait se chiffrer en centaines de millions de dollars pour les titulaires des droits et obliger le Canada à recalibrer son droit de la propriété intellectuelle afin de rétablir l'équilibre.
Les données indépendantes sur la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur sont sans équivoque. Elle limite l'accès aux œuvres, coûte plus cher aux consommateurs et n'encourage pas une nouvelle créativité. Pour citer Paul Heald, un des plus éminents chercheurs sur les effets de la prolongation, elle représente, en fait, une taxe sur les consommateurs au profit des éditeurs sans avantage pour le public.
L'examen du droit d'auteur auquel s'est livré le comité de l'industrie au cours de la dernière législature comprenait un examen approfondi de la question et le comité a conclu qu'une prolongation ne devrait intervenir que dans le cadre de la ratification d'un accord commercial. Dans ce cas, il recommandait d'instaurer une obligation d'inscription pour obtenir les 20 années de protection supplémentaires, afin d'atténuer les inconvénients de la prolongation et d'accroître la transparence du régime de droit d'auteur.
La prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur n'apparaît pas dans le projet de loi parce que le gouvernement a, selon moi, intelligemment négocié une période de transition de 30 mois pour régler la question. Il ne s'est pas précipité, et il devrait profiter pleinement de la période de transition pour suivre la recommandation de l'examen du droit d'auteur en instaurant l'obligation d'inscription pour les 20 années supplémentaires. Cela permettrait aux titulaires de droits qui souhaitent bénéficier de la protection additionnelle de l'obtenir, tout en garantissant que beaucoup d'autres œuvres tombent dans le domaine public une fois leur protection échue, après la vie de l'auteur plus 50 ans.
Ensuite, il y a l'exemption culturelle. Comme la prolongation de la durée de la protection des droits d'auteur, elle ne figure pas dans le projet de loi , et ce parce qu'elle ne nécessite pas de modifications législatives. Cependant, l'exemption culturelle est, à mon avis, un des aspects les moins bien compris de l'accord. Comme l'affirme le gouvernement, elle couvre un large éventail de secteurs, avec une exemption quasi totale pour le Canada.
Cependant, si le gouvernement insiste sur sa large portée, il parle rarement du paragraphe 32.6(4), qui vient juste après. Cette disposition était le prix de l'exemption et elle permet aux États-Unis de prendre des mesures de rétorsion « d’effet commercial équivalent » lorsque le Canada s'en prévaut. La disposition relative aux mesures de rétorsion veut dire que les États-Unis ont le droit d'imposer des droits de douane ou d'autres mesures qui ont un effet commercial équivalent en réponse à des politiques canadiennes qui enfreindraient autrement le nouvel ALENA, n'eût été l'exemption.
Comme la disposition ne limite pas la réponse au secteur culturel, on peut s'attendre à ce que les États-Unis ciblent des domaines sensibles de l'économie canadienne, comme les produits laitiers ou l'acier, afin de décourager le Canada de recourir à l'exemption. C'était la stratégie des États-Unis quand ils ont réagi dernièrement à un projet français de nouvelle taxe sur le numérique. Ils comptaient imposer pour 2,4 milliards de droits de douane sur des produits français comme le vin, le fromage et les sacs à main.
Que pourrait-il arriver dans un contexte stratégique canadien? Le récent rapport du Groupe d'examen du cadre législatif en matière de radiodiffusion et de télécommunications, le Rapport Yale, contient ce que j'estime être des recommandations peu judicieuses sur la réglementation d'Internet et des services de nouvelles en ligne tels que les agrégateurs de nouvelles.
Si le gouvernement adopte les recommandations du groupe d'examen sur le contenu, les États-Unis auront de bons arguments pour autoriser des mesures de rétorsion d'effet commercial équivalent. Certaines propositions du groupe d'examen pourraient contrevenir au nouvel accord commercial, comme le paiement de redevances pour financer le contenu canadien sans accès total aux mêmes mécanismes de financement que les Canadiens, l'obligation de permis pour les services Internet qui contrevient peut-être aux normes de l'ALENA, et les exigences en matière de découverte qui limitent la façon dont l'information est communiquée sur les sites Web et dans les services.
Je soulignerai qu'à mon avis, c'est une mauvaise politique qui devrait être rejetée. Toutefois, aux fins de cet examen du nouvel ALENA, notez que la latitude politique nécessaire pour mettre en œuvre des réformes dans ce domaine est très limitée par l'accord, qui prévoit la possibilité de représailles tarifaires pour la politique culturelle.
Ensuite, il y a la protection des renseignements personnels. Le Canada est également limité dans ses nouvelles mesures relatives à la protection des renseignements personnels et des données. Contrairement à l'exemption culturelle, qui permet de contrevenir au traité sous réserve de possibles représailles tarifaires, sur la question de la protection des renseignements personnels, le Canada courra le risque de ne pas tenir son engagement dans le cadre du nouvel ALENA.
Remarquez, là encore, l'absence de disposition à ce sujet dans le projet de loi . Il n'y en a pas besoin, puisque le nouvel ALENA interdit certaines dispositions en la matière, au lieu de les exiger.
Par exemple, le nouvel ALENA comprend une disposition qui interdit la localisation des données, ce qui renvoie aux mesures exigeant l'entreposage des données au Canada. Le nouvel ALENA comprend, en fait, une disposition plus restrictive que celle de l'Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, le PTPGP. Il existe certaines exceptions générales prévues prévues par l'Accord général sur le commerce des services, l'AGCS, mais le gouvernement canadien sera manifestement limité dans sa capacité d'établir des exigences en matière de localisation aux termes de cet accord.
Les conséquences de ces limites sont considérables. En ce qui concerne les données à présent, songez au large éventail de questions de politique que nous devons résoudre, qu'il s'agisse de la Charte canadienne du numérique et des propositions de réformes relatives à la protection des renseignements personnels et aux données, des préoccupations relatives à la souveraineté des données, des questions relatives à l'intelligence artificielle ou des craintes au sujet de la compétitivité des entreprises canadiennes par rapport aux données canadiennes.
Il est intéressant de noter que le gouvernement canadien a lui-même édicté des exigences en matière de localisation dans le cadre de sa politique de l’informatique en nuage. En fait, il est reconnu que la localisation des données peut être nécessaire dans certains cas. Toutefois, le Canada est très limité, aux termes de cet accord, dans sa capacité de mettre en œuvre de telles exigences.
Il en va de même de la question des transferts de données, car le nouvel ALENA limite notre capacité de les restreindre également. Alors que nous entamons des pourparlers avec l'Union européenne sur l'efficacité des lois canadiennes en matière de protection des renseignements personnels, certains craignent que la disposition sur les transferts de données place le Canada entre deux feux, l'Union européenne exigeant certaines restrictions en la matière et le nouvel ALENA interdisant les restrictions.
Enfin, il y a la responsabilité des plateformes Internet. Une dynamique similaire se dessine à cet égard, ce qui amène à se demander quelle est la responsabilité des entreprises Internet en ce qui concerne le contenu de tiers hébergé sur leurs sites. Cette question vise les grands acteurs, comme Google et Facebook, de même que quiconque offre des commentaires ou du contenu d'utilisateurs. Là non plus, il n'y a pas de disposition sur la question dans le projet de loi . La raison en est que le nouvel ALENA limite la politique en la matière, au lieu d'exiger une nouvelle disposition.
Le nouvel ALENA comprend une protection juridique pour les intermédiaires et les plateformes Internet en ce qui a trait au contenu affiché par leurs utilisateurs. La règle vise à exonérer les plateformes de toute responsabilité à la fois pour la suppression et la non-suppression de contenu. Contrairement à ce que certains affirment, la règle ne veut pas dire que tout passe. Les sites et les services restent assujettis à des ordonnances judiciaires et à l'application du droit pénal. Le régime de protection des droits de propriété intellectuelle est également exempté.
Cependant, certains soutiennent que la responsabilité des plateformes Internet devrait aller plus loin et s'étendre, pourquoi pas, à défaut d'agir même dans les cas de contenu préjudiciable, quoique légal. Cette position suscite des préoccupations importantes sur la liberté d'expression et des questions sur l'équilibre à trouver entre la protection de la liberté d'expression et la protection contre tout préjudice.
Il ne s'agit pas dans l'examen du projet de loi de se demander quel devrait être le choix du Canada à cet égard. Ainsi, le Groupe d'examen du cadre législatif en matière de radiodiffusion et de télécommunications recommande la responsabilité par rapport aux préjudices en ligne, même si le contenu est légal. D'autres, comme moi-même, estiment que la responsabilité devrait se limiter au contenu illégal, car créer une responsabilité à l'égard du contenu légal revient à placer les entreprises dans une position de juge et partie décidant de ce qui reste en ligne, ce qui renforcerait encore le pouvoir des grandes entreprises Internet et limiterait la concurrence et la liberté d'expression.
L'essentiel, en l'occurrence, est qu'il y ait un débat sur les politiques. Dans le cadre du nouvel ALENA, le Canada s'est en fait déjà engagé envers une position qui limite notre capacité d'instaurer une responsabilité à l'égard du contenu de tiers.
Je répondrai volontiers à vos questions.
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Je vous remercie, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité.
J'aimerais vous faire part du point de vue de l'industrie sucrière canadienne sur la mise en œuvre du nouvel ALENA, l'accord commercial Canada-États-Unis-Mexique. L'Institut canadien du sucre (ICS) est vivement favorable à la ratification rapide du nouvel accord, mais il cherche aussi à obtenir du gouvernement l'assurance que les procédures administratives canadiennes à l'exportation, qui sont essentielles, seront en place quand l'ACEUM entrera en vigueur cette année.
L'ICS représente les producteurs canadiens de sucre raffiné pour ce qui concerne la nutrition et le commerce international. L'industrie a trois raffineries de sucre de canne, à Vancouver, Toronto et Montréal; une usine de transformation de betteraves à sucre à Taber, en Alberta; et deux autres unités de transformation de produits à valeur ajoutée contenant du sucre en Ontario, soit une à Belleville et une à Scarborough.
Les exportations canadiennes de sucre raffiné et de produits contenant du sucre restent limitées par des quotas fixés par les États-Unis dans les années 1980. Ces quotas n'ont pas été assouplis dans le cadre de l'ALENA ou de l'OMC. En fait, ces accords limitent encore plus notre accès au marché américain, au lieu de le faciliter. Notre industrie en a subi les conséquences avec la fermeture de l'usine de betteraves à sucre de Winnipeg, au Manitoba, et celle d'une raffinerie de sucre de canne à Saint John, au Nouveau-Brunswick. L'ICS était très favorable à la renégociation de l'ALENA, qui présentait une possibilité de peut-être rétablir une partie de l'accès ou d'adopter de nouvelles règles plus souples.
Malheureusement, l'ACEUM n'a pas amélioré l'accès aux marchés, comme l'espérait l'industrie, mais l'accès existant est préservé. Évidemment, pendant ces négociations, il nous est souvent arrivé de nous demander si nous n'allions pas perdre du terrain plutôt que d'en gagner, mais il en est ressorti deux nouveaux petits quotas.
L'accès existant qui est maintenu comprend 10 300 tonnes de sucre de betterave de l'Alberta, transformé à partir de betteraves à sucre de l'Alberta, et un peu plus de 59 000 tonnes de produits contenant du sucre. Il s'agit de produits à forte teneur en sucre, comme des mélanges de thé et d'autres mélanges de boissons, du chocolat chaud, des desserts contenant de la gélatine, de ce genre de produits. Ils sont fabriqués dans l'Est du Canada, avec du sucre raffiné à Montréal et à Toronto. Ce sont de tout petits quotas par rapport aux 11 millions de tonnes que représente le marché américain, mais ils sont essentiels pour une industrie qui est limitée par des obstacles au commerce étrangers.
Les deux nouveaux quotas américains prévus par l'ACEUM comprennent un quota de 9 600 tonnes de betteraves à sucre, ce qui est extrêmement important pour le Sud de l'Alberta et qui double pratiquement l'accès actuel, et un quota de 9 600 tonnes pour les produits contenant du sucre. C'est peu par rapport aux 59 000 tonnes existantes, mais l'accord prévoit aussi un assouplissement des règles qui permettra d'utiliser totalement le volume.
Le problème du quota existant, c'est que les règles d'origine restrictives des États-Unis et leurs limites quant à l'utilisation finale n'ont pas suivi l'évolution du marché. L'utilisation du quota est réduite d'environ 25 % depuis 2006. Les activités canadiennes de raffinage du sucre et de fabrication de produits contenant du sucre dans l'Est du Canada souffrent de cette perte, qui se chiffre à environ 11,5 millions de dollars et 10 000 tonnes.
Pour revenir à l'administration, la valeur de ces quotas pour le Canada dépend de la méthode choisie pour gérer l'administration des exportations. Les contrôles à l'exportation constituent la méthode fermement établie pour gérer l'accès à des marchés lucratifs mais limités dans l'ALENA et, par exemple, dans l'AECG. Ils sont nécessaires pour assurer une prévisibilité dans la conclusion de contrats d'approvisionnement avec des clients américains, dans le maintien de chaînes d'approvisionnement et dans la justification d'investissements continus de ces autres unités de transformation de produits contenant du sucre.
Nous avons toujours préconisé des contrôles à l'exportation parallèlement à nos objectifs en matière d'accès aux marchés dans les négociations commerciales de l'ACEUM, comme avant dans les négociations du PTP. Nous avons maintenant reçu l'assurance que le Canada mettra en œuvre des contrôles à l'exportation. La question sera celle du moment de ces contrôles. Il est important que les procédures soient en place avant la mise en œuvre de l'ACEUM. Autrement, la valeur ne sera pas transférée à notre industrie.
Une consultation publique est prévue. Nous avons été informés qu'il s'agira d'une consultation omnibus qui portera, en plus des quotas prévus par l'ACEUM, sur les quotas américains existants et sur les contingents liés à l'origine prévus par l'AECG. Nous sommes évidemment favorables à une consultation publique. Nous espérons qu'elle ne retardera pas la nécessaire mise en œuvre des contrôles à l'exportation et l'attribution aux entreprises des nouveaux quotas de l'ACEUM.
Nous cherchons également à obtenir l'assurance qu'il n'y aura aucun retard inutile, que le Canada informera immédiatement les États-Unis de la ratification de l'ACEUM, et qu'il utilisera les contrôles à l'exportation, car l'ACEUM prévoit qu'il le fasse 150 jours avant l'acceptation par les États-Unis des permis d'exportation à l'entrée. Il n'y aura pas de mesures d'exécution de la loi à la frontière cette année, mais elles devraient, en tout cas, être en place d'ici le début de la deuxième année, en 2021.
Il n'est pas nécessaire de consulter au sujet du quota de sucre de betterave, puisque le seul sucre qui répond à la définition est celui produit et transformé en Alberta. Pour ce qui est des produits contenant du sucre, qui est la question clé pour notre industrie, les quotas devraient être attribués aux entreprises qui ont fait et maintenu des investissements au Canada, qui ont toujours participé activement à ces quotas et qui ont essuyé des pertes financières et de volume. Il s'agit essentiellement des membres de l'Institut canadien du sucre qui raffinent le sucre et des unités connexes de fabrication de produits contenant du sucre. À l'heure actuelle, nos membres remplissent de 92 à 95 % du quota américain.
Je vous remercie.
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Je vous remercie. Je vais vous expliquer. Quand nous avons été invités, nous avons demandé si M. de la Cueva pouvait se joindre à nous et partager notre temps de parole. C'est ce que nous avons décidé de faire. Nous allons prendre chacun cinq minutes, ce qui correspond au temps imparti à Unifor. Je n'ai entendu parler des 10 minutes supplémentaires qu'aujourd'hui. Il était donc trop tard pour remplir la fiche de commentaires. Je vais prendre la parole le premier, si vous le voulez bien. Ensuite, ce sera le tour de M. de la Cueva.
Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je m'appelle Angelo DiCaro. Je suis directeur national de la recherche à Unifor.
Unifor est le plus grand syndicat du secteur privé au Canada. Il représente plus de 315 000 travailleurs dans presque tous les secteurs d'activité, d'un bout à l'autre du pays.
Je tiens à remercier le Comité de nous avoir invités à nous exprimer aujourd'hui sur le projet de loi et la mise en œuvre de l'ACEUM, et je vous transmets les salutations de notre président national, Jerry Dias, ainsi que de la secrétaire-trésorière, Lana Payne.
Je tiens aussi à remercier le Comité de me permettre de partager mon temps de parole avec Hector de la Cueva, un ami et allié de notre syndicat, qui est des nôtres par téléconférence depuis Mexico. Hector est le coordinateur général du centre de recherche sur le travail et de consultation syndicale, et il a été notre principal point de contact pendant toutes ces négociations sur l'ALENA.
Je commencerai par dire ce qui est probablement évident. L'ALENA est un accord très difficile pour les travailleurs, qui a eu beaucoup d'effets négatifs au fil du temps.
Il a été structuré de manière à limiter les contrôles démocratiques du commerce et de l'investissement et à lier les mains des décideurs gouvernementaux. C'était un des premiers accords à créer des tribunaux privés auxquels les investisseurs pouvaient recourir pour contester la réglementation canadienne et, potentiellement, poursuivre les gouvernements et leur réclamer des sommes illimitées. Il a cédé aux États-Unis la souveraineté sur la production d'énergie canadienne. Et malgré les pressions concurrentielles évidentes que le « libre-échange » ferait peser sur les travailleurs des trois pays, l'ALENA et ses négociateurs ne s'en sont pas préoccupés.
Une génération plus tard, nous voyons le résultat: un déficit du commerce manufacturier avec le Mexique qui est passé de 3,5 milliards de dollars au début à plus de 27 milliards de dollars aujourd'hui, pour moitié dans le seul secteur automobile, ce qui comprend les pièces.
Nous avons vu une main-d’œuvre sous la pression des baisses de salaire et la menace de pertes d'emplois au profit d'États à bas salaires assurant le droit au travail ou des zones industrielles mexicaines axées sur l'exportation. Pas la peine d'aller bien loin pour trouver des exemples. Il suffit de penser aux difficultés récentes auxquelles nous faisons face à Newmark, à Essex et, bien entendu, à notre bataille avec l'usine de montage de General Motors à Oshawa.
Ces pertes d'emplois se produisent dans une large mesure à cause de l'ALENA, parce que des entreprises ont un accès inconditionnel à des marchés. C'est pourquoi les entreprises peuvent vendre ici, mais n'ont aucune obligation de fabriquer ici.
Sachant cela, il est presque impossible pour notre syndicat d'être entièrement satisfait des résultats de l'ACEUM. Les membres d'Unifor à Kitimat et à Saguenay, par exemple, ont raison d'être mécontents de l'inégalité de traitement dont fait l'objet le secteur de l'aluminium en ce qui concerne les règles de contenu en aluminium des automobiles. C'est un problème qu'il faut régler.
Nos membres dans le secteur du bois d'œuvre sont encore désavantagés par des droits injustes sur les exportations qui plombent encore plus un secteur forestier déjà en proie à des difficultés.
Mais pendant que nous nous intéressons de près à ces problèmes, il ne fait aucun doute que cet accord comprend des progrès importants négociés par la et son équipe, qui méritent d'être soutenus.
Dans l'ACEUM, pour la première fois, le commerce de l'automobile en franchise de droits est soumis à la condition d'une production à hauts salaires. Ce n'est pas une solution miracle, mais c'est un bon moyen d'arrêter l'hémorragie des investissements vers des usines à faibles salaires et une tentative de pression à la hausse sur la production à bas salaires.
Dans l'ACEUM, pour la première fois, le Canada a éliminé son mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, ou RDIE. C'est très bien. Franchement, nous encourageons le gouvernement fédéral à franchir un autre pas dans ses mesures de mise en œuvre et à ordonner la suppression du RDIE dans tous les autres accords commerciaux du Canada actuellement en vigueur.
Avec l'ACEUM, nous récupérons aussi notre souveraineté énergétique. Nous conservons notre exclusion culturelle et nous inversons certaines mauvaises politiques culturelles adoptées sous le gouvernement Harper.
Surtout, l'ACEUM corrige le libellé préexistant et comporte de nouvelles dispositions révolutionnaires sur les droits des travailleurs, des dispositions qui ont encore été renforcées, grâce aux récents changements énoncés dans le protocole d'amendement.
Non seulement les dispositions de l'ACEUM relatives au travail vont plus loin que les termes de l'ALENA original, mais elles vont plus loin aussi que celles de tout accord commercial négocié depuis, et ce sont des dispositions qui m'auraient paru impossibles à négocier il y a seulement trois ans.
Nous ne sommes toutefois pas assez naïfs pour croire que l'ACEUM, en soi, remédie aux pratiques anti-ouvrières profondément ancrées au Mexique. Si quelqu'un le croit, il connaît mal le problème au Mexique.
La mise en œuvre de cet accord doit s'accompagner d'engagements clairs aux termes desquels les représentants canadiens travailleront avec leurs homologues mexicains afin de financer des projets de soutien communautaire axés sur les droits et de doter de toutes les ressources nécessaires une approche d'enquête proactive du mécanisme d'intervention rapide.
Tout cela doit se faire en consultation avec les syndicats et les groupes de défense des travailleurs au Mexique, comme le groupe de M. de la Cueva.
Cela dit, je laisse le reste de mon temps de parole à M. de la Cueva.
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Merci, Angelo. Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
Je suis allé beaucoup de fois au Canada, mais il y fait très froid, surtout en hiver. Je vous remercie donc de me permettre de communiquer avec vous depuis Mexico, où il fait bien plus chaud et où nous avons un printemps précoce cette année.
J'ai passé une bonne partie de ma vie à travailler avec le mouvement syndical mexicain indépendant. Je vois les dégâts causés par un système de syndicalisme antidémocratique et par de fausses négociations collectives. Au Mexique, dans le cadre de l'ALENA, les salaires réels ont chuté sur 25 ans, malgré de grands progrès dans la productivité et le commerce.
Je partage la préoccupation soulevée par Unifor. Le nouvel ACEUM reprend beaucoup d'éléments de l'ancien ALENA, accord qui visait à exploiter mon pays, en profitant de ses travailleurs à bas salaires et de ses ressources naturelles, et à reproduire les inégalités entre les pays et à l'intérieur des pays. Dans sa relation avec l'Amérique du Nord, le Mexique est un fournisseur à faible coût de produits et de services. Il en résulte que plus de la moitié des Mexicains vivent toujours dans la pauvreté. Les Mexicains souffrent, mais les travailleurs canadiens souffrent aussi, avec des pertes d'emplois et des menaces de faibles salaires.
Dans l'ALENA, les travailleurs n'ont pas gagné. Je dirai, comme Angelo, qu'il y a des avancées importantes dans l'ACEUM en matière de droits des travailleurs. C'est peut-être son aspect positif. Le nouvel accord a déjà eu une conséquence immédiate pour ce qui est d'encourager des réformes du travail trop longtemps différées dans mon pays. Il s'agit notamment des dispositions visant à garantir une participation démocratique à la syndicalisation et aux négociations collectives.
Au Mexique, beaucoup de milieux de travail sont contrôlés par de soi-disant « contrats de protection », qui sont des conventions collectives mises en place par les employeurs et approuvées par des syndicats non élus. Au Mexique, ces puissants dirigeants syndicaux non élus siègent comme représentants des travailleurs à des comités tripartites, des sortes de commissions d'arbitrage, garantissant ainsi que les travailleurs ne sont pas entendus.
Le nouveau mécanisme d'intervention rapide destiné à vérifier la conformité est plus efficace que toute autre mesure prise par le passé, et nous espérons qu'il nous permettra de mieux contester ce système de corruption propice à des pratiques commerciales déloyales. Cependant, ces instruments d'application ne devraient pas être utilisés seulement comme arme pour attaquer le Mexique. En fait, ils devraient s'appliquer pleinement à toutes les parties à l'ACEUM, y compris au Canada.
Au Mexique, notre principal problème, ce n'est pas nos lois nationales ou la ratification d'accords internationaux. Il ne sert à rien d'avoir des lois efficaces conçues pour protéger les travailleurs et les droits de la personne si les États ou les entreprises en font totalement fi. Les mesures d'application du nouvel ACEUM prévoient des pénalités importantes pour les entreprises qui enfreignent les règles. C'est encourageant. Cela n'existait pas avant, mais il arrive que ce soient des entreprises américaines — et canadiennes — qui ignorent leurs obligations par rapport aux droits des travailleurs et aux droits de la personne, et cela doit aussi cesser.
Pour être vraiment efficaces, les dispositions de l'ACEUM relatives au travail doivent être utilisées pour combattre l'injustice des entreprises et les inégalités sociales, pas seulement pour attaquer le Mexique.
J'étais très heureux de venir rencontrer le négociateur en chef et d'autres représentants du Canada pendant le processus de négociation. Le croirez-vous si je vous dis qu'il était plus facile d'organiser des rencontres avec les représentants canadiens qu'avec nos propres représentants au commerce ici, au Mexique? Je tiens à remercier de leur disponibilité celles et ceux qui nous ont parlé et qui ont écouté nos préoccupations.
Encore merci de m'avoir donné la parole aujourd'hui. Je répondrai volontiers à toute question.
Merci infiniment.
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Voici une question vraiment intéressante. Je pense que, surtout dans le monde numérique, cela touche un éventail d'enjeux différents, dont le chapitre sur le commerce numérique et le droit d'auteur.
En ce qui concerne le droit d'auteur, je dirais que les travaux que nous avons menés en 2007 qui ont débouché sur la Loi sur la modernisation du droit d'auteur en 2012, de même que l'examen de la Loi sur le droit d'auteur que le comité de l'industrie a entrepris l'an dernier et jusqu'à maintenant, nous donnent une idée assez juste de la position du Canada. Je pense qu'en réalité le Canada s'est montré assez novateur au chapitre des règles entourant le droit d'auteur. Elles respectent les normes internationales, mais en même temps, bon nombre d'entre elles sont assez progressistes.
La question entourant la prolongation de la durée du droit d'auteur est une question vraiment intéressante, parce qu'elle est bipartite, c'est-à-dire que nous avons eu successivement des gouvernements conservateurs, et par la suite, des gouvernements libéraux, qui ont tous rejeté la notion de la prolongation de la durée du droit d'auteur. La position canadienne était que nous devions respecter la norme internationale minimale qui a été établie dans le cadre d'un instrument appelé la Convention de Berne. C'est une chose que nous faisons.
Il y a longtemps que les États-Unis font pression sur nous pour que nous prolongions la durée de la protection du droit d'auteur. Là-bas, on l'appelle souvent la prolongation de la durée de la protection du droit d'auteur sur Mickey Mouse parce que Disney a exercé des pressions pour empêcher que le personnage de Mickey ne tombe dans le domaine public. Nous nous sommes penchés sur cette question au Canada, et nous avons déclaré vouloir nous assurer que nos artistes soient bien rémunérés, tout en évitant que les consommateurs paient trop cher. Nous voulions voir à ce que les niveaux d'accès soient appropriés afin de préserver cet équilibre. Refuser de prolonger la durée de la protection du droit d'auteur est la voie que nous avons choisie pour essayer de maintenir cet équilibre.
Je n'ai pas eu accès aux négociations, aussi je suis incapable d'expliquer pourquoi après avoir refusé pendant des décennies de prolonger la durée du droit d'auteur, nous avons fini par céder dans le cadre de cet accord. En revanche, je sais très bien que le meilleur moyen de sauver cette situation difficile et déplorable à mon avis eu égard à la prolongation de la protection du droit d'auteur consiste à tirer parti de la période de transition que le gouvernement a néanmoins négociée.
En ce qui concerne certaines exigences relatives à l'enregistrement, je pense que cela offre à un petit nombre d'oeuvres, notamment ces oeuvres dont les titulaires de droits affirment vouloir demeurer concurrentiels et disposer de la période la plus longue possible de protection, la possibilité de demander l'enregistrement. Cela leur vaudra d'obtenir une prolongation de 20 ans de la durée de protection; mais pour une énorme partie du patrimoine canadien, pour d'autres oeuvres, ce sera l'entrée dans le domaine public, conformément à la norme internationale.
Maintenant, concernant ce qu'il faudrait faire, je pense que ce comité ne devrait pas intervenir dans l'état actuel des choses et qu'il devrait recommander l'adoption du processus d'enregistrement en gardant à l'esprit les recommandations du comité de l'industrie relativement à l'examen de la Loi sur le droit d'auteur. Il faut consacrer les 30 prochains mois à l'élaboration d'un processus d'enregistrement, lequel, à l'instar d'autres questions que nous avons pilotées il y a quelques années, devrait inciter d'autres pays à considérer l'exemple du Canada comme une réussite, en vue de préserver l'équilibre qui convient.
L'Association des fabricants d'appareils électroménagers du Canada représente des fabricants de gros appareils électroménagers portatifs et pour l'entretien des sols au Canada et aux États-Unis. L'Association compte plus de 150 sociétés membres. Au Canada, le secteur fournit autour de 40 000 emplois dans les domaines de la fabrication, de la distribution et des ventes en gros et au détail. Les retombées du secteur de l'électroménager sur l'économie canadienne se chiffrent à quelque 6 milliards de dollars par année.
L'Association est en faveur d'une adoption rapide du projet de loi et de l'ACEUM.
Le Canada est un importateur net d'appareils ménagers, et ses principaux partenaires commerciaux sont les États-Unis et le Mexique. Les fabricants conçoivent des appareils qui sont vendus partout en Amérique du Nord. Dans un marché aussi vaste, les consommateurs ont plus de choix et bénéficient des coûts moindres et de l'optimisation des économies d'échelle.
Nous nous prononçons en faveur des chapitres 11 et 28 de l'accord, qui portent sur la réduction des obstacles techniques au commerce et l'harmonisation de la réglementation. Nous appuyons aussi l'annexe 12.D, qui s'applique expressément à notre secteur et exige l'harmonisation des normes de rendement énergétique et des procédures d'essais connexes. L'annexe encourage également le recours à des programmes à participation volontaire comme Energy Star comme moyens d'améliorer l'efficacité énergétique de toute une gamme de produits.
À ce propos, j'aimerais aborder une question qui préoccupe énormément nos membres du Canada et des États-Unis. Le Parti libéral s'est engagé à rendre la certification Energy Star obligatoire pour tous les appareils ménagers d'ici à 2022.
Si la certification Energy Star est obligatoire pour tous les appareils ménagers, c'est près de 50 % de l'offre actuelle qui disparaîtra, et cette proportion pourrait même grimper jusqu'à 75 %. Même si la mise en œuvre n'a pas commencé, l'incertitude est déjà palpable dans le marché, tant pour les fabricants que pour les détaillants. Si le gouvernement va de l'avant et impose la certification Energy Star, le Canada contreviendrait à l'esprit de l'ACEUM et, encore plus grave, l'offre de produits serait considérablement réduite pour les Canadiens. En fait, on parle de 41 % de tous les appareils vendus au Canada qui ne seraient pas conformes à la norme. C'est beaucoup. Le choix de modèles s'en trouverait très limité et les Canadiens moins bien nantis paieraient plus cher pour des modèles d'entrée de gamme. La hausse de prix pourrait aussi être accentuée du fait que le coût de fabrication de ces produits est plus élevé parce que les composants écoénergétiques peuvent coûter plus cher et que, dans certains cas, des modifications plus fondamentales doivent être apportées dans la construction. Malheureusement, les économies d'énergie seront parfois assez négligeables.
En effet, les appareils ménagers sont déjà très écoénergétiques, et il pourrait être très coûteux de les rendre encore plus efficaces, suivant la maturité de la technologie existante.
Ressources naturelles Canada et le département américain de l'Énergie ont fixé des normes d'efficacité énergétique pour tous les appareils, et ces normes ont été resserrées au fil du temps. La conformité à ces normes a entraîné toutes sortes de modifications aux appareils ménagers. Certains de ces appareils approchent leur efficacité maximale compte tenu de la technologie existante et, dans certains cas, des lois fondamentales de la thermodynamique.
La participation au programme Energy Star est volontaire. L'objectif est de faciliter le repérage des produits les plus écoénergétiques pour les consommateurs en mettant en vedette ceux qui se classent parmi les 25 à 30 % offrant la meilleure efficacité, ou les meilleurs de leur catégorie si vous voulez. Ce classement encourage les fabricants à innover, ce qui signifie qu'ils investissent beaucoup pour obtenir la certification du programme.
Si l'offre est limitée aux produits Energy Star sur le marché canadien, il n'y aura plus de course à l'innovation et la certification perdra tout son sens. Si le gouvernement impose la certification Energy Star pour tous les appareils, la marque n'aura plus aucune signification. L'article 12.D.5 de l'ACEUM appuie clairement les programmes à participation volontaire comme Energy Star pour promouvoir l'efficacité énergétique. C'est loin de la proposition du gouvernement d'exiger la certification Energy Star.
L'autre problème avec cet engagement des libéraux, et il est de taille, c'est que la marque Energy Star n'appartient pas au gouvernement canadien. Elle appartient à l'agence américaine de protection de l'environnement. C'est elle qui l'a enregistrée et c'est le gouvernement américain qui administre le programme et qui fixe les normes que doivent respecter les fabricants pour obtenir la certification. La marque Energy Star est perçue très positivement par Ressources naturelles Canada et l'ensemble du secteur. Elle est connue par 85 % du public, et son logo est utilisé dans le monde entier. Pourquoi changer un aussi bon modèle?
L'engagement lié à la certification Energy Star est également incompatible avec la vision de l'efficacité énergétique telle que l'envisagent les libéraux depuis quatre ans. Au Canada, le fédéral et les provinces ou les territoires ont tous un important rôle à jouer dans l'adoption de normes en matière d'efficacité énergétique. En 2016, ces gouvernements ont mis au point un cadre d'appui à la transformation du marché fondée sur la coopération au chapitre des normes d'efficacité énergétique. Il est expliqué dans ce cadre que le manque de cohésion entre le fédéral et les provinces ou les territoires oblige parfois les fabricants à répéter les essais de produits identiques pour les vendre partout au Canada. Il peut en découler des coûts inutiles, une réduction de l'offre dans le marché et des obstacles aux échanges interprovinciaux.
L'imposition de la norme Energy Star détonnerait aussi avec les efforts entrepris par le gouvernement pour harmoniser son approche de l'efficacité énergétique avec celle des États-Unis par l'entremise du Conseil de coopération en matière de réglementation.
En 2018, le Canada et les États-Unis ont signé un protocole d'entente qui créait le Conseil de coopération et réaffirmait le rôle déterminant de la coopération en matière de réglementation. Au moment de la signature, le président du Conseil du Trésor a déclaré que le travail du Conseil pour harmoniser les normes en matière d'efficacité énergétique s'imposait parce qu'il ferait économiser 1,8 milliard de dollars aux Canadiens en coûts d'énergie d'ici à 2030. C'est précisément pour cette raison que l'ACEUM favorise l'harmonisation de la réglementation et l'adhésion à des programmes à participation volontaire comme Energy Star.
Le Canada a toujours été plus lent que les États-Unis à resserrer les normes en matière d'efficacité énergétique. Depuis 2016, sous ce gouvernement, les travaux du Conseil de coopération ont énormément contribué au progrès de l'harmonisation et de la compatibilité entre nos deux pays, et on peut enfin affirmer que la réglementation canadienne est compatible avec celle des États-Unis. Il a fallu une dizaine d'années pour y arriver. Il serait scandaleux de bazarder tout ce travail.
L'harmonisation de la réglementation est essentielle pour éviter les répétitions d'essais inutiles et les obstacles aux échanges, mais aussi pour optimiser l'offre de produits aux consommateurs. Plutôt que d'imposer la certification Energy Star, le gouvernement devrait poursuivre ses travaux en vue de l'adoption d'un cadre réglementaire qui lui permettra d'accélérer la modernisation de ses normes. Le projet de loi et l'ACEUM offrent une structure idéale pour réussir cette harmonisation.
Notre association a toujours milité pour l'amélioration des normes en matière d'efficacité énergétique, et nous pensons que si la certification Energy Star devient obligatoire, ce sont les Canadiens de la classe moyenne qui en paieront le prix.
Merci.
Bonsoir, mesdames et messieurs, et bonsoir, madame la présidente.
Je voudrais tout d'abord vous remercier de me donner la possibilité de témoigner devant le Comité. Je m'exprimerai en mon nom et au nom de HTC Extraction Systems, une société de Regina qui conçoit des technologies exceptionnelles de récupération du carbone et sur laquelle je reviendrai plus en détail tout à l'heure.
J'ai déjà eu l'honneur de m'adresser au Comité permanent de l'environnement sur la question des stratégies du Canada en matière de gaz à effet de serre. J'ai aussi été porte-parole du gouvernement canadien auprès du département américain de l'Énergie au sujet du développement de technologies de conservation de l'énergie. Je suis considéré comme un spécialiste dans le domaine scientifique du traitement des gaz. Je suis un fier pétrolier de deuxième génération. J'ai consacré ma carrière à la mise au point de technologies de l'environnement exceptionnelles qui ont été utilisées dans cinq continents.
Mesdames et messieurs, je tiens tout d'abord à souligner que je suis extrêmement reconnaissant à nos leaders politiques canadiens d'avoir travaillé avec autant d'acharnement pour que nous puissions continuer d'exploiter le potentiel énorme du libre-échange entre le Canada et nos amis américains et mexicains. Cette initiative est une vraie bénédiction, mais il ne faut jamais perdre de vue que nous vivons à côté d'un pays dont l'économie est la plus forte et la plus compétitive sur la planète. Sa population est 10 fois plus importante que la nôtre et sa puissance économique est sans aucune comparaison possible avec la nôtre. Et nous aurions tort aussi de sous-estimer nos amis mexicains. Comme un témoin l'a dit avant moi, le Mexique dispose d'une main-d’œuvre qualifiée qui est prête à travailler pour la moitié moins que nos travailleurs.
En tant que Canadiens, si nous voulons tirer un avantage réel de cet accord de libre-échange, nous devons réfléchir et agir de manière stratégique. Nous devons nous demander si nos politiques publiques et nos stratégies fiscales sont efficaces, surtout si nos partenaires commerciaux n'ont aucune intention de les adopter. Nous devons prendre en considération les répercussions sur notre compétitivité. Notre économie, nos municipalités et nos entreprises doivent être compétitives pour tirer pleinement profit des accords de libre-échange. Pour que cette compétitivité soit efficace, il faut une structure.
Ici, je dois parler de l'éléphant dans la pièce, et je fais référence bien entendu aux préoccupations du Canada en matière de réchauffement climatique, à nos stratégies nationales et à leurs répercussions potentielles sur notre compétitivité. Il est urgent de trouver le bon équilibre, et je sais que c'est possible. Récemment, le et la vice-première ministre, Chrystia Freeland, ont déclaré publiquement que même si nous éliminons toutes les sources d'émission de carbone d'un océan à l'autre, le bilan mondial ne changera pas. Je suis tout à fait d'accord. Le mieux que le Canada peut faire est de mettre au point et de perfectionner des technologies que le reste du monde pourra adopter en toute confiance.
Le Canada a déjà joué un rôle de chef de file à ce chapitre, dirigeant de main de maître les relations environnementales et commerciales avec les Américains. Je vois des chevelures grises et d'autres moins grises, et je sais que nous sommes plusieurs ici à garder le souvenir d'une autre menace qui a pesé sur notre bien-être et notre environnement. Je parle bien entendu des pluies acides qui, dans les années 1970, constituaient une menace environnementale horrifiante et immédiate. Pour faire un résumé rapide, je dirai que les rejets des usines industrielles étaient à l'origine de pluies acides qui tuaient les lacs et d'autres plans d'eau en Amérique du Nord. Le gouvernement canadien et son homologue américain ont tous les deux adopté des politiques publiques intégrées à des lois sur la qualité de l'air qui obligeaient les industries à régler le problème. Et elles l'ont réglé. La menace environnementale a été le déclencheur de prouesses techniques et entrepreneuriales. Le plus important est que leur intervention a été rapide, sans y avoir été forcées par des sanctions et des politiques qui auraient nui à leur compétitivité. L'accord de libre-échange doit s'en inspirer.
Nous pouvons faire une analogie entre les problèmes à résoudre à cette époque et ceux qui nous inquiètent actuellement. J'ai l'absolue conviction qu'ensemble, nous pouvons trouver des solutions.
J'espère que vous avez encore un peu de patience. Le 12 février dernier, un communiqué de presse annonçait que les États-Unis étaient au premier rang mondial pour la réduction des émissions de dioxyde de carbone, mais qu'ils avaient aussi pris la tête pour la production d'hydrocarbures. Ce miracle environnemental a été accompli sans le recours à un régime de pénalités fiscales. Le Canada doit envisager des stratégies du même ordre.
Si le Canada se met en tête d'adopter des politiques publiques qui favoriseront l'éclosion du génie technique et entrepreneurial de la nation, les possibilités seront infinies. Nous pourrions guérir le cancer, la polio, la maladie d'Alzheimer, et nous pourrions certainement mettre au point des technologies exceptionnelles qui nous permettront de résoudre les problèmes environnementaux sans nuire à l'économie. C'est essentiel pour assurer notre compétitivité dans un marché régi par l'accord de libre-échange nord-américain dont nous discutons aujourd'hui.
Je crois aussi que la solution à ces problèmes ne peut pas être locale. Comme nous l'avons fait pour les pluies acides, il faut aborder le problème du point de vue de l'industrie et engager nos partenaires de l'accord de libre-échange dans la quête. C'est certainement une possibilité que nous offre un tel instrument et qui nous permettra de devenir un chef de file mondial dans le domaine des technologies environnementales.
C'est un exemple parmi beaucoup d'autres. Le 2 décembre 2017, le gouvernement de la Saskatchewan a signé un accord avec les gouverneurs du Montana, du Wyoming, du Dakota du Nord et du Sud qui visait à valoriser son initiative de capture et de stockage de carbone et de récupération assistée du pétrole. L'initiative a permis d'éliminer 3 millions de tonnes de dioxyde de carbone, ce qui équivaut à retirer 750 000 automobiles de la circulation. Le président Trump en a parlé dans son discours sur l'état de l'Union de 2018.
Pour ce qui concerne le libre-échange et nos engagements environnementaux... Il a été annoncé le 8 novembre dernier que la production de pétrole de schiste a atteint des sommets aux États-Unis. Cet exploit en a fait le plus important producteur de pétrole brut dans le monde. C'est toutefois en déclin actuellement, ce qui signifie que le pétrole et le gaz canadiens redeviendront stratégiques pour les États-Unis, et plus vite que nous pourrions le croire.
Nos ressources en pétrole et en gaz représentent une des plus grandes sources de richesse de notre pays, qui doit bénéficier à tous les Canadiens. Nous savons que pour certains de nos concitoyens, c'est tout à fait contraire à nos engagements environnementaux, mais je leur réponds que rien n'est plus loin de la vérité. Nous avons déjà été des chefs de file. Nous pouvons, et nous devrions renouer avec ce rôle.
J'ai collaboré avec SaskPower dans le cadre de l'initiative de capture et de stockage de carbone et de récupération assistée du pétrole, et je travaille actuellement avec HTC technologies, à Regina. La passion et le dévouement des membres de notre équipe sont remarquables. Nous mettons au point des technologies exceptionnelles pour capturer le dioxyde de carbone à l'échelle industrielle. À la recherche de la meilleure technologie de capture du carbone au monde, le gouvernement albertain a choisi la nôtre et nous sommes fiers de faire partie de l'équipe qui brigue le prix de la fondation XPRIZE dans le domaine environnemental.
Le libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique offre d'immenses possibilités à toutes les régions du pays, mais pour que nous puissions tous en bénéficier, il faut penser et agir stratégiquement.
Mesdames et messieurs, je vous remercie énormément. Avant de terminer, je m'en voudrais de ne pas souligner que parallèlement à notre étude de l'accord de libre-échange nord-américain, nous devons nous engager à ratifier l'article 121 de la constitution canadienne dans son intégralité. Cet article porte sur le libre-échange entre les provinces, comme vous le savez déjà. Il s'agit d'un problème stratégique majeur pour le Canada, et il faut le régler. J'oserais même dire que ce devrait être notre priorité, avant même de nous préoccuper d'un accord de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique. Nous devons mettre de l'ordre dans nos affaires si nous voulons assurer notre compétitivité mondiale.
Mesdames et messieurs, merci beaucoup d'avoir pris le temps de m'écouter.
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Merci. Je suis ravi de m'adresser de nouveau à vous, madame la présidente, ainsi qu'à vous, et mesdames et messieurs.
Où en sommes-nous et comment en sommes-nous arrivés là?
Nous débattons des composantes du nouvel ALENA, après des négociations d'une rapidité sans précédent, avec un partenaire commercial dont l'agressivité et la pugnacité étaient aussi du jamais vu. Ce partenaire et célèbre meilleur ami, je parle bien entendu des États-Unis, avait pour unique but de bouleverser l'ordre commercial mondial sans le moindre souci des précédents ou des conséquences.
Il est primordial de comprendre le contexte. Nous ne débattons pas d'un rapport de recherche universitaire rédigé en vase clos et destiné à être décortiqué par des spécialistes du domaine. Nous sommes ici pour discuter de ce qui s'est vraiment passé de 2015 à 2019 et qui nous a conduits là où nous nous trouvons aujourd'hui. Les membres du Comité feront partie des rares personnes qui devront voter pour ou contre la ratification du nouvel accord. Aucun mécanisme n'est prévu qui nous permettra de renégocier, de modifier ou de solliciter un débat avec nos deux partenaires commerciaux. Vous devrez voter pour ou contre, et ni vous ni le gouvernement qui a mené les négociations n'aurez à rendre de comptes.
Tout est là, il n'y a aucune surprise. Le texte de l'accord signé en octobre 2018 peut être consulté en ligne depuis novembre 2018. Le texte des révisions négociées entre les parties, une condition imposée par le Congrès américain, a été signé en novembre 2019 et il a été publié en ligne en décembre 2019.
Entre août 2017 et septembre 2018, les parties se sont réunies à plusieurs reprises à Washington, à Ottawa, à Montréal et à Mexico. J'étais présent à toutes les rondes de négociations, y compris à la ronde « ce n'est pas vraiment une ronde », en décembre 2017. J'ai rencontré des responsables avant, pendant et après chaque ronde, j'ai fait plus de 600 mentions officielles dans les médias sur nos attentes et ce qui devait être inclus, et il n'y a jamais eu de surprise.
Pour la troisième fois depuis le début des négociations, je me retrouve devant le Comité pour exprimer le plus sincèrement possible des réflexions et des opinions que vous tous connaissez sans doute déjà.
En juin 2015, dans le célèbre discours prononcé dans l'ascenseur de la tour Trump et dans lequel il a annoncé qu'il se portait candidat républicain à la présidence des États-Unis, Donald Trump a dit ceci au sujet de l'investissement de la Ford Motor Company au Mexique:
[...] pour chaque automobile et chaque camion qui traversera la frontière, nous imposerons une taxe de 35 % [...] et la taxe sera payée en même temps que le prix de la transaction. C'est aussi simple que ça.
Nous étions en plein dans les négociations exténuantes du partenariat transpacifique, dont est ressorti un document imparfait en octobre la même année. Dans un article du New York Times qui décrivait ce partenariat comme une source certaine de différends politiques aux États-Unis et ailleurs dans le monde, le journaliste citait mon commentaire comme quoi il était beaucoup trop tôt pour parler de gains ou de pertes.
En février 2016, Donald Trump a annoncé que s'il gagnait, il retirerait les États-Unis du partenariat et il remettait en question son statut de mise à jour de fait de l'ALENA. En juillet 2016, à une remarque sur l'improbabilité que l'OMC avalise sa proposition de formules tarifaires et le coût élevé d'une mise à exécution de sa menace de retrait du partenariat transpacifique, le candidat Trump a répliqué que soit les États-Unis renégocieraient, soit ils se retireraient. Et mettant l'ALENA dans le paquet, il a déclaré que ces accords commerciaux étaient un désastre, et que l'OMC était aussi un désastre.
Nous avons été avertis très clairement de ce que ferait le candidat Trump s'il était élu président et de ce que cela signifiait pour notre relation commerciale. À cette époque, personne ne croyait en sa victoire, et tout le monde se disait qu'au pire, c'étaient les paroles de quelqu'un de mal informé qui serait bientôt un ancien candidat.
J'ai pris très au sérieux cette menace électoraliste. En septembre 2016, je dirigeais une délégation de fournisseurs de pièces d'automobile qui s'est rendue au Capitole, à Washington, pour expliquer à des sénateurs importants et à du personnel haut placé ce qui arriverait si jamais les règles commerciales étaient revisitées par un Trump président. J'ai rencontré l'USTR et je lui ai parlé de la menace de retrait du partenariat transpacifique, que j'espérais en fait parce que, pour les fournisseurs de pièces d'automobile, il réduisait la teneur en valeur régionale, ou TVR, à un maigre 35 %, contre 60 % dans l'ALENA.
Le 28 septembre 2016, soit un mois avant l'élection, j'avais prononcé une allocution lors d'un événement du prestigieux Press Club dans laquelle je disais que le Canada était le moins important parmi les trois partenaires de l'ALENA et que, pour suivre le rythme de la croissance mexicaine et américaine, il avait besoin que les constructeurs d'automobiles étrangers prennent des engagements substantiels, nouveaux et anticipés en matière de production.
De toute évidence, les menaces concernant l'imposition de droits de douane agitaient l'industrie et elles ont été au cœur de nos activités préélectorales cette année-là.
En septembre 2016, dans un article au sujet de ces menaces publié dans Automotive News, l'auteur rapportait mes propos sur le fait que le Canada et d'autres pays comptaient sur les États-Unis pour donner l'exemple, et qu'une attitude irresponsable de leur part risquait d'inciter d'autres pays à transgresser les règles du commerce mondial.
Dans la déclaration citée, je reconnaissais un certain mérite aux récriminations de Trump, mais je servais aussi une mise en garde contre le risque qu'une réaction exagérée des États-Unis soit encore plus dommageable:
C'est vrai que certains pays ne respectent pas leurs obligations [...] mais la solution ne viendra pas d'un relâchement de ses normes par le leader du commerce mondial.
Ce n'est pas une position facile, mais il ne se retrouve pas là par hasard. C'est comme si Superman se battait dans un bar. Pourquoi ferait-il cela?
Le Canada, son plus important partenaire commercial, les États-Unis, et le Mexique se sont entendus pour que l'ACEUM remplace l'ALENA. C'est le premier accord signé entre de grands pays producteurs d'automobiles depuis la première mouture de l'ALENA qui prévoit une hausse de la teneur en valeur régionale, la TVR, dans le secteur de la production automobile. Cette hausse signifie que si un constructeur d'automobiles veut vendre son produit à un consommateur dans l'un des trois pays, une plus grande partie de ses composants doit provenir du pays en question.
Comme L'ALENA original a fait passer la teneur en valeur régionale des véhicules de 50 %, telle qu'elle avait été fixée dans l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, à 62,5 %, il s'est ensuivi une série d'accords commerciaux dans lesquels les gouvernements canadiens ont négocié une part de moins en moins importante pour les fournisseurs canadiens de pièces d'automobile: elle a été fixée à 55 % dans l'accord entre le Canada et la Corée, à 50 % dans l'Accord économique et commercial global, l'AECG, et à 45 % dans l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste.
Dans l'ACEUM, la teneur en valeur régionale pour les automobiles passe de 62,5 à 75 %, soit une hausse théorique de 20 % qui se traduit par une augmentation des activités et des emplois ici. Selon l'ALENA, un constructeur d'automobiles doit assurer la teneur en valeur régionale de pièces appartenant à 29 catégories. Pour que le véhicule soit admissible, la TVR des pièces d'automobile est fixée à 60 % seulement. Dans l'ACEUM, la liste des catégories a presque doublé et la TVR atteint 75 %, ce qui représente dans certains cas une hausse théorique de 25 % dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement.
Dans le marché automobile nord-américain, près de 21 millions d'unités sont vendues chaque année. C'est le marché de consommation le plus convoité. Le resserrement des normes d'accès profite aux sociétés qui ont investi dans les usines et le personnel des pays signataires de l'ACEUM.
Oui, le coût des automobiles peut être légèrement supérieur si les constructeurs doivent s'approvisionner dans les régions visées par l'ALENA au lieu de faire affaire avec des fournisseurs moins chers ailleurs dans le monde. Par contre, plus d'argent sera investi en Ontario, au Québec, en Colombie-Britannique, dans beaucoup d'États américains et au Mexique, et moins aux endroits qui nous vendent des produits, mais qui ne nous en achètent pas, comme les pays du partenariat transpacifique, de l'AECG ou la Corée.
Pour le secteur de l'automobile, l'ACEUM répond aux volontés protectionnistes de l'administration américaine, mais il profite aussi au Canada et au Mexique à titre de partenaires principaux.
Les accords additionnels créant des exemptions advenant l'imposition de droits de douane présentaient un défi de taille, mais le Canada et le Mexique ont obtenu des garanties qui méritent d'être soulignées. En réponse aux détracteurs qui ont décrié ces accords additionnels au Canada, j'ai déclaré au magazine The Economist que normalement, les accords commerciaux sont autorenforcés, mais que celui-ci survit à coups de menaces. C'est le contexte dans lequel nous travaillons, qui est loin d'un climat de négociations à armes égales entre des partenaires respectueux.
Pour tous les véhicules vendus dans les pays signataires de l'ACEUM , une proportion minimale de 40 % devra être fabriquée par des travailleurs qui gagnent 16 $ l'heure au moins. Ce sera avantageux pour le Canada, probablement beaucoup moins pour le Mexique.
Cette clause a été ajoutée à la fin des négociations bilatérales entre les États-Unis et le Mexique qui ont contrarié certains observateurs canadiens déplorant l'absence du Canada à la table. J'ai rencontré très fréquemment les négociateurs américains et mexicains durant cette période, et je ne partage pas ce point de vue. Dans un compte rendu publié en première page du Wall Street Journal, je déclarais que la proposition relative à la valeur ajoutée par la main-d'œuvre était démesurément désavantageuse pour le Mexique et que notre conseil au Canada était d'attendre la réaction des Mexicains avant de se prononcer ou de prendre position. Les négociateurs canadiens ont suivi ce conseil.
Le but des États-Unis est d'augmenter le coût d'importation de produits automobiles d'outre-mer. En juin 2019, j'ai déclaré au Comité que les États-Unis menaçaient d'imposer les droits de douane sur l'acier et l'aluminium visés à l'article 232 pour intimider leurs partenaires, et qu'ils avaient l'intention de recourir au processus de l'OMC pour obtenir une hausse marquée du tarif de 2,5 % de la nation la plus favorisée. Le 12 février dernier, à Washington, l'Agence Bloomberg faisait état de l'intention de l'administration Trump d'augmenter les taux tarifaires qui ont cours depuis longtemps au sein de l'OMC. En fait, le but est de revoir ses relations avec tous ses principaux partenaires commerciaux.
L'important, c'est que le Canada a obtenu une exemption à l'égard des mesures qui pourraient être prises en application de l'article 232 qui lui assure des niveaux de production largement supérieurs aux modèles de croissance des exportations vers les États-Unis au cours des 5 à 10 prochaines années. Plus précisément, le Canada pourra y expédier 2,6 millions de véhicules par année et l'équivalent de 32 milliards de dollars de pièces d'automobile en franchise de droits, c'est-à-dire 40 % de plus qu'aujourd'hui.
C'est tout bonnement extraordinaire qu'un processus de négociation aussi difficile ait abouti à une entente qui se traduira par une hausse des investissements et une compétitivité accrue du Canada sur les marchés. Contrairement aux frappeurs des Astros de Houston, le Canada ne pouvait pas se fier aux coups dans une poubelle. Nous ne savions jamais où la balle serait lancée, mais nous avons fait confiance à notre savoir-faire et nous avons gagné.
Les négociateurs canadiens ont fait preuve d'une rare ouverture à notre égard. En plus de ces contacts, j'ai demandé et obtenu une rencontre en personne à la Maison-Blanche, avec l'USTR de même qu'avec le président mexicain et son équipe de négociation.
Un jour, je vais écrire un livre sur ce qui s'est passé dans les coulisses. Le premier chapitre pourrait raconter comment, en novembre 2017, l'USTR a réagi quand la Presse canadienne a publié en gros titre ma sortie satirique contre leurs propositions ridicules sur la traçabilité documentaire, dans laquelle je demandais s'il était vraiment nécessaire de savoir où les dinosaures étaient morts.
Je tiens à souligner que le succès des négociations sur l'ACEUM est l'oeuvre de , de Steve Verheul et de leur équipe infatigable de fonctionnaires qui se sont fait un point d'honneur de consulter fréquemment les acteurs du secteur de l'automobile au Canada et partout sur le continent. Des félicitations toutes spéciales doivent être adressées à Martin Thornell, à Karen LaHay, à Andrei Marinescu, à Aaron Fowler, à toute l'équipe canadienne et au gouvernement du Canada. C'était un exercice non partisan de collaboration entre le public et le privé, et ils ont fait un travail remarquable. Je suis très fier d'avoir pu faire une humble contribution à ce chapitre de l'histoire.
Merci.
Je m'appelle Veso Sobot, je suis ingénieur et je travaille pour IPEX. Nous fabriquons des tuyaux de plastique pour la construction. Si vous regardez sous votre évier quand vous rentrerez ce soir, très tard ce soir — je dois dire que je suis très impressionné par votre endurance —, vous pourrez voir des tuyaux noirs. Il y a de bonnes chances qu'ils aient été fabriqués chez nous. Nous fabriquons aussi les conduits électriques gris qui courent sur les murs de vos maisons, les conduites d'eau principales bleues enfouies sous les artères et les tuyaux d'égout verts.
APEX a été fondée à Toronto en 1949. Nos fondateurs ont fui l'Estonie et se sont installés à Toronto. Ils ont commencé par des cerceaux de hula-hoop qu'ils fabriquaient le soir et vendaient le jour. Après trois ans, ils avaient gagné leur premier million. Ils se sont dit que le hula-hoop était peut-être une mode qui passerait et que mieux valait diversifier leurs produits. Ils ont redressé les cerceaux et ils ont commencé à fabriquer de la tuyauterie. Aujourd'hui, nous avons fabriqué assez de tuyaux pour faire le tour de la Terre au moins 200 fois.
Je ne vous surprendrai pas en déclarant que la relation commerciale avec les États-Unis est capitale pour nous. Nous avons 15 usines au Canada, dont 5 en Ontario, et nous avons maintenant 10 usines aux États-Unis. En 2009, le président Obama a signé l'American Recovery and Reinvestment Act, la fameuse loi Achetez américain qui nous a fermé les portes du marché américain pendant une année environ. Cette loi a été catastrophique pour nous. Nous avons perdu des clients de longue date que nous n'avons jamais réussi à reconquérir. Nous avons aussi perdu l'accès à des chaînes logistiques. Il a fallu environ une année au Canada pour négocier une exemption à l'application de la loi Achetez américain.
Ma principale recommandation est la suivante: adoptez rapidement l'AEUMC, ou l'ACEUM, peu importe. Protégez les gains réalisés, tout en sachant que l'ACEUM ne donne aucune garantie si les Américains décident d'adopter une nouvelle politique d'achat aux États-Unis. Ils peuvent nous fermer les portes demain et bloquer nos exportations demain s'ils le décident. Vous vous dites sans doute que ce n'est pas un problème pour nous puisque nous avons 10 usines aux États-Unis. Le problème, c'est que beaucoup de ces usines fabriquent des produits spécialisés. Nos usines s'échangent les produits entre elles. Un produit fabriqué à Chicago ou au Michigan revient à Toronto, où il est utilisé pour fabriquer un autre produit. Des produits fabriqués en Caroline du Nord sont réexpédiés à Toronto, et vice versa. Nous avons une certaine marge de manoeuvre, mais elle n'est pas énorme.
En fait, madame la présidente, je vous demande à vous et à vos collègues d'envisager la création d'un fonds ou d'un autre outil pour nous aider au cas où les États-Unis nous fermeraient les portes encore une fois. Je pense à un fonds de prévoyance qui pourra soutenir les fabricants canadiens malmenés si jamais les Américains remettent en vigueur leur politique d'achat aux États-Unis. Ce serait merveilleux. Ce pourrait être quelque chose comme ce que vous avez fait pour le secteur de l'acier et de l'aluminium, qui a été très efficace et très approprié. Ces mesures ont redonné un peu d'assurance à l'industrie canadienne.
Et une autre chose pour terminer. Dans le nouvel ALENA, l'article 32.11 porte sur une exemption accordée au Mexique concernant certains aspects de la politique d'achat aux États-Unis. Pour l'instant, personne ne sait comment tout cela s'articulera, mais je crois qu'il faut y regarder de plus près pour déterminer si l'article 32.11 procure un certain avantage au Mexique par rapport à nous. Si l'article n'accorde pas une exemption au Mexique concernant la politique d'achat aux États-Unis, tant mieux. Les entreprises canadiennes ne seront pas obligées de délocaliser leurs usines au Mexique pour pouvoir exporter leurs produits aux États-Unis.
L'important pour nous est que vous adoptiez rapidement l'ACEUM. Il faut préserver les gains et poursuivre nos efforts pour l'améliorer.
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Bonsoir. Merci de nous accueillir.
Je m'appelle Phil Benson, et je suis lobbyiste pour Teamsters Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de Christopher Monette, qui occupe le poste de directeur, Affaires publiques.
Teamsters Canada est le syndicat représentant les travailleurs de chaînes d'approvisionnement, c'est-à-dire plus de 125 000 travailleurs de l'industrie du transport et d'autres secteurs de l'économie comme le cinéma, l'alimentation et les boissons, ou l'industrie laitière. La Fraternité internationale des teamsters représente 1,4 million de travailleurs.
Teamsters Canada appuie l'adoption de l'ACEUM et du projet de loi . Ce n'est peut-être pas la meilleure solution, mais c'est une solution, un progrès si on considère la manière dont les Américains négocient dans l'intérêt de leurs entreprises et dans une optique de sécurité nationale. Nous avons fait des gains. Cependant, parce que nous n'avons pas compris que la nature et la substance fondamentales du processus de négociation des accords commerciaux ont changé, nous avons raté des occasions.
Dans beaucoup de cas, les emplois de nos membres sont tributaires des échanges commerciaux, et c'est l'une des raisons qui ont incité Teamsters Canada à participer à toutes les rondes de négociation de l'ACEUM. Le gouvernement libéral a pris une bonne décision en incluant les syndicats, les organismes non gouvernementaux et des membres de la société civile dans le processus. Le secret entourant les négociations des accords commerciaux a contribué à la désaffection des travailleurs. Notre participation a permis d'élargir les perspectives et d'aboutir à de meilleurs résultats. Malheureusement, certains ministères n'ont pas reçu le message. Pour eux, nous n'étions pas des « clients » et ils nous reléguaient au second plan. C'est une attitude inacceptable, qui doit changer.
La a clairement apprécié et soutenu nos efforts de mobilisation et de recherche d'un consensus à Washington et à Mexico. La coopération avec nos collègues et nos alliés a été déterminante dans les gains réalisés. Elle a contribué au renforcement des appuis à la conclusion d'une entente. À Washington, nos collègues de la Fraternité internationale des Teamsters ont été à l'avant-plan de la lutte pour obtenir les améliorations qui ont conduit au succès du processus aux États-Unis. Les modifications apportées et l'abolition des dispositions sur le RDIE sont des victoires.
Au cours de la ronde de négociation qui s'est déroulée au Mexique, nous avons rencontré des représentants de syndicats indépendants à l'occasion d'une conférence de la société civile organisée par le Sénat mexicain. Lors d'une séance à huis clos, les travailleurs de la chaîne d'approvisionnement du secteur de l'automobile nous ont parlé des conditions d'insalubrité inadmissibles dans lesquelles ils travaillent, et même d'actes de violence et d'agression sexuelle. Je suis fier de la lutte des teamsters et d'autres syndicats pour les droits de tous les travailleurs, mais aussi que le gouvernement les ait entendus. Les accords commerciaux doivent renfermer des dispositions sur la protection des travailleurs, des femmes, de l'environnement et des Autochtones, et je crois que le projet de loi marque un pas dans la bonne direction.
À cause de la fixation des négociateurs de l'accord de libre-échange sur l'ambition, ils ont raté des occasions de protéger des emplois canadiens, notamment dans les secteurs du transport ferroviaire et terrestre. C'est un recul. La politique d'achat aux États-Unis et l'imposition arbitraire de droits de douane sont en fait des push, c'est-à-dire que la mise du joueur est remboursée. Le mécanisme d'examen aux six ans et la disposition de temporisation sont contraires à l'esprit des accords commerciaux et confirment que l'ambition n'est plus au centre des négociations et qu'elles peuvent entraîner autant des risques que des possibilités.
Beaucoup d'industries ne profitent pas des dispositions de l'ALENA. Il en coûte plus cher de se conformer aux règles d'origine que de payer les droits de douane faibles ou nuls. Selon nous, il n'y aura pas de changement de ce côté. En réalité, les négociations de l'ALENA ont été menées dans un seul objectif: protéger les constructeurs d'automobiles aux États-Unis et démanteler le système canadien de gestion de l'offre.
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Bonsoir, mesdames et messieurs.
Vous savez peut-être que le syndicat des Teamsters est le plus gros syndicat du secteur des transports. Peut-être êtes-vous aussi au courant que nous sommes également le plus gros syndicat du secteur de l'industrie laitière.
Nous représentons 5 000 travailleurs et travailleuses dans le domaine de la transformation laitière au pays et plus de 500 travailleurs qui sont impliqués dans le transport de lait et de produits laitiers en vrac de l'île de Vancouver à Terre-Neuve-et-Labrador.
Conséquemment, notre syndicat appuie la gestion de l'offre et reconnaît les efforts qu'a déployés le gouvernement pour protéger la gestion de l'offre. Le fait que nous ayons pu repousser la tentative américaine de démanteler notre système de gestion de l'offre fut une victoire. Cependant, le fait que nous ayons dû céder d'autres parts de marché du secteur laitier fut une perte.
[Traduction]
Il ne faut surtout pas voir les répercussions de l'ACEUM sur les travailleurs de l'industrie laitière comme un phénomène isolé. Le Canada a souvent sacrifié le secteur laitier pour sceller des accords commerciaux. Les répercussions de l'AECG, du partenariat transpacifique et de l'ACEUM sur le secteur sont cumulatives et désastreuses. Près de 10 % du marché canadien des produits laitiers a été sacrifié sur l'autel de ces accords de libre-échange alors que la demande intérieure pour ces produits était en chute libre.
Le gouvernement a finalement reconnu la nécessité d'indemniser l'industrie laitière. Entendez-moi bien: je suis tout à fait solidaire du combat des producteurs laitiers, et nous ne sommes pas non plus contre l'idée d'aider financièrement des entreprises du secteur de la transformation laitière. Cependant, nous voulons porter à votre attention le fait que les travailleurs de l'industrie laitière ne reçoivent rien. Les travailleurs qui perdent leur emploi ne reçoivent rien pour de la formation ou du recyclage, aucune indemnité bonifiée d'assurance-emploi ou de départ.
[Français]
C'est zéro et une barre.
[Traduction]
Cette année, Saputo a annoncé le licenciement de 300 travailleurs après avoir reçu 7 millions de dollars du Fonds d'investissement dans la transformation des produits laitiers. Les travailleurs licenciés ne recevront rien d'un gouvernement qui a jugé opportun de donner des milliards à pratiquement tous les autres acteurs de l'industrie ces dernières années. Encore pire, il n'est même pas certain que les subventions du gouvernement contribueront à la création ou au maintien d'emplois dans le secteur puisqu'elles pourraient être investies dans l'automatisation des chaînes de production et faire disparaître encore plus d'emplois.
Les accords commerciaux sont vus comme l'une des causes de la désaffection croissante des travailleurs. Comment pensez-vous que les travailleurs de l'industrie laitière ou les Canadiens de la classe moyenne réagissent quand ils voient que l'industrie reçoit des milliards de dollars et que les travailleurs ne reçoivent rien?
Selon notre analyse, un programme d'aide aux 25 000 travailleurs du secteur de la transformation des produits laitiers coûterait moins de 1 % des 3,9 milliards de dollars qui ont été prévus dans le budget fédéral du printemps 2019 pour soutenir les secteurs touchés par les derniers accords commerciaux. La bonne nouvelle est que Teamsters Canada a engagé des pourparlers avec certains ministères. Nous sommes encore au début du processus, après des années d'efforts.
Nous demandons au Comité d'appuyer notre initiative. Il faut cesser d'adopter des politiques en tenant pour acquis que l'argent consenti à une industrie bénéficiera automatiquement aux travailleurs. Il serait sage pour le gouvernement de se donner comme politique que toute mesure d'indemnisation destinée à une industrie qui subit les contrecoups d'un accord commercial doit automatiquement prévoir une aide pour les travailleurs.
Je termine ici. Nous serons ravis de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
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Ce n'est certainement pas ambitieux.
L'un des problèmes est que les produits laitiers ont été jetés aux oubliettes. Ce n'est pas une question de commerce. Le gouvernement a décidé d'y consacrer 3,9 milliards de dollars et, d'après la , si je l'ai bien comprise lors de son témoignage devant ce comité, elle nous a indiqué que le gouvernement va faire la même chose pour l'ACEUM. Il n'y a que les travailleurs qui sont oubliés.
Le problème avec l'ambition est que, en collaborant avec nos partenaires et nos alliés au Mexique et aux États-Unis, nous travaillons sur une entente déjà conclue entre le Mexique et les États-Unis que le Canada est aussi invité à signer. Cela pose parfois des problèmes dans le secteur ferroviaire, d'autres dans le domaine routier, certains moins importants et d'autres plus gênants, mais le Canada ne participe pas aux négociations parce qu'il n'était pas ambitieux. Nous négocions avec des partenaires qui privilégient leurs propres intérêts et ceux de leurs nations.
J'ai parlé des oeillères. Nous demandons simplement de les retirer et de réaliser que nous ne négocions pas dans le cadre d'une forme de construction théorique d'un professeur d'université dans sa tour d'ivoire. Il s'agit là de questions concrètes concernant des emplois réels, de vraies personnes. Minimiser les choses et les ignorer parce qu'elles ne cadrent pas avec votre notion théorique de l'ambition dans ce monde moderne dans lequel nous évoluons est tout simplement triste.
Quelqu'un a posé une question sur la peur. J'ai un peu d'expérience en négociations et je sens la peur. La peur était celle, au moins dans une certaine mesure, des négociateurs qui ne voulaient absolument pas soulever certaines questions par crainte de brouiller les cartes parce que leur objectif était d'obtenir un accord. Félicitations, ils ont obtenu un accord. Nous avons besoin d'un accord. Nous sommes en faveur de l'accord. Dans l'ensemble, c'est un bon accord, mais il faut que nous en tirions des leçons à partir de ces questions. C'est un message adressé à Affaires mondiales Canada sur la façon dont les gens négocient ces accords pour qu'ils prennent conscience que s'ils aiment la vieille façon de procéder en secret, en silence, depuis 30 ans…
Cela a commencé avec l'Accord de libre-échange. À cette époque, nous avions librement accès à tout. C'était étonnant. Cela est un petit peu mieux. Nous entrouvrons la porte, mais voyez ce qui s'est passé. J'appuie la déclaration faite hier par Hassan Yussuff. C'est pourquoi nous ne sommes pas revenus sur tout cela à nouveau.
Il y a là des gens venant des syndicats, des ONG, et d'autres disant que, somme toute, nous avons là un accord. Nous aurons peut-être à le réviser dans six ans avec d'autres partenaires. D'ici là, nous parviendrons peut-être à régler quelques-uns de ces problèmes et à l'améliorer. Le risque est qu'il soit là. C'est là qu'il y a place pour l'ambition. Ce n'est pas une insulte ni une attaque. C'est tout simplement que le monde a changé. Retirez vos oeillères, s'il vous plaît.
Nous travaillons actuellement sur le Mercosur et sur l'ALE, ainsi que sur quelques autres accords. La situation est la même. Je crois que certains offrent des perspectives très séduisantes, qu'il est tout à fait possible de les appuyer. Parfois, nous devons les retirer et nous assurer que des gens comme M. Sobot qui est ici, et d'autres entreprises… Il ne faut peut-être pas avoir peur de se tenir debout ou de s'impliquer dans les questions de main-d'oeuvre pour protéger nos intérêts. C'est bien de le faire. Tous les autres le font, en particulier les Américains. Pourquoi n'en ferions-nous pas autant?
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Tout à fait, monsieur Shields, et je vous remercie de cette question.
C'est le 12 février 2017 qu'un accord a été conclu entre le gouvernement de la Saskatchewan, plus précisément SaskPower, et les gouverneurs du Wyoming, des Dakota du Nord et du Sud et du Montana pour permettre à une technologie intégrée au Régime des rentes du Québec, appelé Cansolv, de se diffuser. C'était la première tentative de capture massive de CO2 dans une centrale électrique alimentée au charbon. Le résultat final a été très intéressant pour tout le monde parce qu'il a permis de capturer du CO2 et de l'injecter dans des réservoirs vides de pétrole. Cette technologie permettait non seulement de retirer d'énormes quantités de CO2 de notre environnement, mais aussi de les convertir en une énorme source de richesse.
Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, ils ont battu un record l'an dernier en ayant capturé trois millions de tonnes de CO2, ce qui, mesdames et messieurs, équivaut à avoir retiré 750 000 véhicules de la circulation. Nous n'en sommes plus à installer des ampoules de 40 W dans votre maison. C'est là une étape majeure pour l'amélioration de notre environnement et la baisse de nos émissions atmosphériques.
Les États-Unis ne vont pas parapher l'Accord de Paris. Ils n'ont aucune intention de le faire. Ils ont été très clairs à ce sujet. Cela ne signifie toutefois pas qu'ils ont abaissé le niveau de leurs ambitions pour l'environnement. Ce que j'essaie de communiquer aujourd'hui aux membres de ce comité est que nous devrions peut-être envisager la possibilité de suivre l'exemple américain. Travaillons sur ces questions d'un point de vue technologique. Pourquoi ne pas envisager d'étendre ces types de relations dans d'autres domaines. Choisissons ce type d'orientation pour résoudre les problèmes environnementaux qui, à notre avis, affectent notre société.
Monsieur Shields, avec cette annonce, alors que Donald Trump a, semble-t-il, fait allusion à cet accord en 2018 dans son discours sur l'état de l'Union, ils ont également consacré 2 milliards de dollars provenant de l'USEPA à cette initiative stratégique. Les Américains se lancent maintenant dans certains des projets de loin les plus importants dans le monde de capture de CO2.
Au départ, c'est le Canada qui disposait de cette technologie, élaborée d'abord chez Suncor Energy à Fort McMurray, en Alberta et, bon sang, c'est le leadership dont le Canada peut faire preuve.
Taxe sur le carbone…? Tout ce qu'elle fait est d'entraver notre développement. Regardez les exemples antérieurs: les pluies acides. Examinons la politique publique qui traite de cette question au niveau des mégatonnes plutôt qu'à celui de l'ampoule de 40 W dans votre résidence.
Cela répond-il à votre question?
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Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins.
Je vais m'adresser à M. Volpe.
Monsieur, j'ai écouté très attentivement votre déclaration préliminaire, qui était très bien préparée. Vous aviez beaucoup de citations et de dates.
Dans ma circonscription, près d'Essex — bien sûr, je me répète — nous sommes tellement ancrés dans l'industrie automobile. Nous sommes très près de notre frontière, la frontière internationale la plus fréquentée d'Amérique du Nord. Je vous ai écouté, toujours avec un vif intérêt.
Je tiens à porter à votre attention, monsieur, une seule date, soit avril 2019. C'est à cette date que les législateurs des États-Unis ont reçu une étude d'impact économique pour les aider à prendre des décisions à propos de leur nouvel accord commercial, l'ALENA. C'est une étude dont au moins ce côté-ci de la table n'a pas encore pris connaissance. Nous sommes bien convaincus que le moment viendra, mais nous ne l'avons pas encore vue. Je tenais simplement à attirer votre attention sur cette date, ainsi que sur quelques brèves citations. Je les ai tirées du site Web de l'ASFC.
On peut lire dans le site Web de l'ASFC que « Pour le moment, l’ASFC ne sollicitera pas de ressources supplémentaires en vue de la mise en œuvre et de l’administration de l’ACEUM ».
Nous pouvons lire plus loin:
L’ASFC devra mettre à jour des politiques et des procédures normales d’exploitation et définir les nouveaux besoins opérationnels et en matière de systèmes. Si la mise en œuvre des nouveaux avantages de l’ACEUM pour la collectivité des négociants exerce des pressions supplémentaires sur les opérations de l’ASFC, on réévaluera les besoins en ressources afin de formuler des recommandations au ministre, s’il y a lieu.
Il me semble que c'est un peu après coup.
Je reconnais votre appui enthousiaste au nouvel ALENA, monsieur. Il semble bien y avoir de bonnes nouvelles pour le secteur de l'automobile, et c'est, bien sûr, une bonne nouvelle pour les travailleurs et les entreprises de ma circonscription d'Essex.
Mes questions ne portaient pas sur la pertinence de ratifier, mais plutôt sur la mise en œuvre, la préoccupation étant qu'il y a un délai très court de 90 jours entre la ratification et la mise en œuvre, dont s'occupera l'ASFC. Le Comité a été informé que les règles d'origine sont l'un des éléments les plus complexes de cet accord, en particulier dans le secteur de l'automobile. Les règles sur la teneur sont beaucoup plus rigoureuses, tout comme le seuil de la teneur en main-d’œuvre, que les entreprises doivent désormais suivre tout au long de la chaîne d'approvisionnement.
À votre avis, monsieur, l'ASFC dispose-t-elle des outils et de la formation nécessaires pour garantir qu'elle est prête à monter au front et, par ailleurs, que nos entreprises et nos fabricants canadiens, ceux qui nourrissent littéralement nos familles, ne sont pas bloqués en cours de route? Je suppose qu'à votre avis, ces questions difficiles ont été posées à nos entreprises et au gouvernement?