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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 012 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 août 2020

[Enregistrement électronique]

(1235)

[Traduction]

    Est-ce qu'il est possible de sortir les caméras?
    Allez-y, monsieur Kurek.
    Merci, madame la présidente. J'aimerais invoquer le Règlement afin de faire prêter serment au témoin.
    D'accord, nous allons lui faire prêter serment.
    Je vous souhaite la bienvenue. Comme vous le savez, monsieur Shugart, nous étudions la motion suivante, adoptée par le Comité le 22 juillet dernier:
Que, conformément à l'article 108(3)h) du Règlement, le Comité examine les mesures qui sont en place pour éviter et prévenir les conflits d'intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matières de marchés, de contrats, de subventions, de contribution et autres dépenses;
    Monsieur Shugart, nous vous avons demandé de témoigner aujourd'hui en votre qualité de greffier du Conseil privé. Je vais vous donner 10 minutes pour nous présenter votre déclaration liminaire, et les députés vous poseront ensuite leurs questions.
    Je vous rappelle que nous avons des contraintes de temps. Je vais interrompre la période des questions quand [Inaudible] minutes. Je m'en excuse à l'avance. Je ne veux pas sembler impolie, mais je tiens à être juste et à utiliser judicieusement le temps qui nous est alloué.
    Sur ce, monsieur Shugart, je vous...
    Oui?

[Français]

     Madame la présidente, il n'y a pas d'interprétation en ce moment.

[Traduction]

    Je vais suspendre la réunion un instant.
(1235)

(1245)
    Nous allons reprendre.
    Monsieur Shugart, vous avez 10 minutes pour nous présenter votre déclaration liminaire. Nous passerons ensuite aux questions des députés.
    Oui, monsieur Gerretsen?
    J'invoque le Règlement. Comme nous avons repris la séance, j'aurais une question concernant le point soulevé par M. Green, qui a été remplacé par M. Angus, relativement au témoignage sous serment du greffier du Conseil privé.
    Je pense que certains membres du Comité ont été surpris par la réponse de la présidente, qui semble avoir tenu pour acquis qu'il y avait eu consentement unanime...

[Français]

    Madame la présidente, l'interprète n'entend pas les propos.

[Traduction]

    Désolée, monsieur Gerretsen, je dois vous interrompre un instant.
    Je comprends, monsieur Fortin. Merci.
    Je vais suspendre la réunion. Nous avons encore des problèmes avec l'interprétation.
(1245)

(1250)
    Nous sommes prêts.
    Vous avez la parole, monsieur Kurek.
    Je vais retirer la motion. Comme j'ai peur qu'elle nous fasse perdre du temps, je retire la motion que j'ai présentée.
    Merci infiniment, monsieur Kurek.
    Nous allons maintenant écouter la déclaration de M. Shugart.
    Monsieur Shugart, vous avez 10 minutes.
    Madame la présidente, je n'ai pas préparé de déclaration liminaire.
    La seule remarque que je pourrais faire est que je célèbre cet été 40 ans de collaboration avec les parlementaires. À titre de fonctionnaire, je ne compte plus les fois où j'ai été appelé à comparaître devant des comités parlementaires. Je comprends très bien les rituels sacrés de la Chambre des communes. Peu importe que je prête serment ou non, les membres du Comité entendront exactement le même témoignage.
    Merci.
    Monsieur Shugart, merci beaucoup.
    Nous allons donc passer à la période des questions. Pour la première ronde, chaque député disposera de six minutes pour poser ses questions.
    Monsieur Barrett, à vous l'honneur.
    Monsieur Shugart, je crois que les documents qui ont été soumis au Comité des finances pourraient aussi nous aider dans le cadre de notre étude. Vous serait-il possible de les transmettre à notre comité?
    Je serai très heureux de les fournir à tous les comités de la Chambre qui les demanderont. Je ne connais pas les procédures de tous les comités, mais je pourrai volontiers vous fournir les mêmes documents.
    Merci.
    Vous les avez soumis avant l'échéance fixée par le comité. Si j'ai bien compris, ils font actuellement l'objet d'un contrôle. Les membres du Comité auront-ils accès à la même version des documents que vous?
    Selon ce que j'en sais et comme je l'ai déjà dit, madame la présidente, je crois que les greffiers des comités parlementaires passent les documents en revue. Je pense que la traduction n'est pas terminée, mais les documents qui seront ou qui ont été soumis au Comité sont maintenant son entière responsabilité.
     Le premier ministre a déclaré qu'il a demandé que la mise en oeuvre de votre recommandation soit retardée le 8 mai, soit avant la réunion du Cabinet, parce que vous ne l'aviez pas convaincu que tous les points sur les i et toutes les barres sur les t avaient été mis. Il a aussi demandé à ce moment que la diligence voulue soit exercée. Cette discussion s'est-elle déroulée par voie électronique ou en personne?
     Elle a eu lieu en personne. Je précise que pendant toute cette période, étant donné que les fonctionnaires travaillaient à distance, les séances d'information du premier ministre, le plus souvent, et certainement après sa sortie de quarantaine, des personnes étaient présentes physiquement et d'autres participaient par téléphone.
    Est-ce qu'il y a un enregistrement? Est-ce que ces réunions sont enregistrées lorsqu'elles se déroulent par conférence Zoom ou par l'entremise du système de téléconférence du gouvernement du Canada?
    Je ne suis pas certain, mais je pense qu'elles ne sont pas enregistrées. Tout ce que je peux dire, c'est qu'on m'a demandé l'enregistrement d'une réunion par conférence Zoom et que, quand j'ai voulu répondre à cette demande, je me suis aperçu qu'il n'existait pas d'enregistrement. Donc, pour autant que je sache, ces réunions n'ont pas été enregistrées.
(1255)
    Merci.
     Le premier ministre a-t-il exigé une preuve concrète de l'impossibilité pour la fonction publique d'assurer la prestation du programme de la BCBE?
    Les questions étaient très précises et les réponses, je pense, ont été jugées honnêtes et sincères. Il s'agissait d'une question importante et sérieuse, et elle a été traitée comme telle. Les fonctionnaires ont répondu au meilleur de leurs connaissances.
    Mais a-t-il posé la question clairement, parce que...
    Vous parlez de preuves documentaires, par exemple?
    Oui.
    Non, il n'a pas fait cette demande, en tout cas pas à mon souvenir.
    A-t-il demandé, par exemple, si le mouvement UNIS était régi par un conseil d'administration fonctionnel.
    Non.
    A-t-il demandé si le mouvement UNIS avait enfreint de quelque façon ses engagements bancaires?
    Non.
    A-t-il demandé si leurs états financiers étaient en règle?
    Non. Je crois qu'il avait confiance que les fonctionnaires rempliraient leurs obligations de diligence raisonnable à l'égard de l'accord de contribution proposé et du programme qui serait offert.
    Vous a-t-il demandé de proposer d'autres organismes qui pourraient fournir ce service?
     Comme nous l'avons expliqué au président du Comité des finances, nous avons eu de longues discussions avant la séance d'information du premier ministre, et de nouveau le 8 mai et avant les autres séances d'information, au cours desquelles nous avons expliqué que toute la diligence voulue avait été exercée. Comme les parlementaires le savent, il n'y a pas eu d'appel d'offres en bonne et due forme, mais les fonctionnaires ont fait une analyse rigoureuse compte tenu des paramètres du programme.
    Est-ce qu'on a posé la question de savoir si le mouvement UNIS pouvait offrir le programme dans les deux langues officielles du Canada, tel que le prévoit la Loi sur les langues officielles?
    Oui.
    Et est-ce que la réponse a été qu'il était en mesure de le faire?
    Oui.
    Êtes-vous au courant que le mouvement UNIS comptait confier la totalité de la prestation du volet francophone du programme à des sous-traitants?
    Non, je n'étais pas au courant.
    Vous n'avez pas vu passer les articles de la presse concernant le contrat passé avec le Cabinet de relations publiques NATIONAL pour la prestation des services en français aux communautés francophones?
    Non, je n'ai rien vu passer de ce genre.
    Le premier ministre voulait s'assurer que les points sur les i et les barres sur les T seraient mis au cours des deux semaines séparant les deux réunions du Cabinet. Quelle partie du processus de diligence restait-il à faire durant cette période parce qu'elle n'avait pas été faite avant le 8 mai?
    Comme nous l'avons déjà expliqué, les mesures de diligence pour vérifier la capacité de l'organisme à mettre le programme en oeuvre portaient sur les langues officielles, les moyens envisagés pour offrir le programme partout au pays — autrement dit, pour tenir compte de toutes les dimensions régionales — et pour faciliter l'accès aux Canadiens qui sont défavorisés et à d'autres groupes pour qui il est généralement plus difficile...
    Désolé, mon temps de parole tire à sa fin, et j'ai une autre question.
    Quand vous avez témoigné devant le Comité des finances, vous avez dit que le premier ministre avait été informé au sujet de la BCBE avant les réunions du Cabinet et à au moins une autre occasion afin de discuter du développement du programme, des options, des caractéristiques de conception, etc. C'est ce que vous avez dit. Quelle était la date de la séance d'information au cours de laquelle vous avez discuté du développement du programme et des options avec M. Trudeau?
    Si je me souviens bien, c'était à la fin d'avril, quelque chose comme le 21 avril... C'est durant cette séance que les grandes lignes du programme complet pour les étudiants lui ont été données.
    Votre temps est écoulé. Merci.
    Madame Brière, vous avez six minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Bonjour, monsieur Shugart.
    Je vous remercie d'avoir accepté l'invitation de vous joindre à nous cet après-midi.
    Pouvez-vous nous expliquer simplement comment le dossier progresse une fois rendu au Bureau du Conseil privé?
    Il y a une période préliminaire pendant laquelle les fonctionnaires d'Emploi et Développement social Canada, ou EDSC, et le ministère des Finances dressent les grandes lignes du programme et élaborent les détails. Je n'ai pas les dates précises présentement, mais, à un certain moment pendant cette période, les fonctionnaires du Bureau du Conseil privé ont été informés et ils ont été invités à participer aux conversations. Quant à l'élaboration générale du programme, les détails étaient de mieux en mieux établis et les discussions plus détaillées.
    Le rôle du Bureau du Conseil privé est de préparer les éléments de la proposition en vue de l'examen devant être effectué par le Comité spécial sur la pandémie de la COVID-19 et, finalement, par le Cabinet.
(1300)
    Je vous remercie.
    Vous avez mentionné que, dans les circonstances, il était justifié de procéder par un accord de contribution, qui est un outil standard, plutôt que par appel d'offres.
    Aujourd'hui, pouvez-vous nous dire pourquoi c'était justifié?
    C'était un mécanisme standard pour travailler avec une

[Traduction]

tierce partie pour la prestation du programme. Il avait déjà été établi à ce moment qu'en raison de ses caractéristiques, l'intervention d'une tierce partie serait nécessaire et qu'il faudrait recourir à un accord de contribution. L'accord de contribution ressemble pour l'essentiel à tous les autres accords de contribution. Ces accords comportent des clauses types. Un modèle d'accord de contribution a été adopté pour garantir la probité financière et les résultats pour les Canadiens. Il a fallu un certain temps pour établir un accord, comme c'est toujours le cas. Plus le programme est élaboré et complexe, plus il est d'envergure, plus l'accord de contribution doit être détaillé. C'est le mécanisme qui a été suivi quand il est devenu évident que le ministère n'avait pas la capacité interne pour assurer la mise en oeuvre du programme tel qu'il avait été conçu.

[Français]

    Au moment de votre nomination, vous avez dit qu'il était de votre responsabilité de conseiller les ministres et de leur faire part des bonnes et des moins bonnes nouvelles. Tant sous le gouvernement de M. Harper que sous celui de M. Trudeau, vous avez toujours considéré qu'il était de votre devoir de dire la vérité et de leur donner les meilleurs conseils possible. J'estime que vous vous attendez à la même chose de tous les sous-ministres du gouvernement.
    En cours de route, si vous aviez douté que l'organisme UNIS était la meilleure option, l'auriez-vous dit?
    Oui.
    Je ne l'aurais pas dit personnellement. C'était l'opinion des hauts fonctionnaires d'Emploi et Développement social Canada. Je n'ai pas donné ce conseil moi-même, mais c'était déjà l'opinion des hauts fonctionnaires d'EDSC à ce moment.
    D'accord. Toutefois, je voudrais avoir des précisions sur votre sens du devoir et sur votre responsabilité de toujours bien conseiller les ministres du mieux que vous le pouvez.
    C'est absolument cohérent avec les devoirs des fonctionnaires de considérer les options et de répondre aux demandes des ministres en tenant compte des préférences établies à l'élaboration d'un programme. C'est normal et c'est ce qui a été fait dans ce cas. Les conseils et l'analyse des hauts fonctionnaires ont été transmis aux ministres, comme à l'habitude.
    Au Bureau du Conseil privé, existe-t-il des mécanismes, comme des procédures de diligence raisonnable, pour découvrir des sujets préoccupants et liés potentiellement à des conflits d'intérêts?
(1305)
    Tout est basé sur la Loi sur les conflits d'intérêts. Comme le Comité le sait, c'est la responsabilité des individus de faire connaître leur affaire au commissaire. Si des mesures sont estimées nécessaires par le commissaire, c'est la responsabilité des hauts fonctionnaires ou des ministres...

[Traduction]

    Je suis désolée, votre temps est écoulé. Merci.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Je donne maintenant la parole à M. Fortin. Vous disposez de six minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Bonjour, monsieur Shugart.
    En ce qui concerne la vérification diligente de l'organisme UNIS, vous avez dit tantôt que M. Trudeau ne s'était pas informé à ce sujet, mais qu'il présumait que les fonctionnaires l'avaient fait.
    Pouvez-vous nous dire exactement quelles vérifications diligentes ont été faites concernant les activités de l'organisme UNIS?
    J'ai indiqué auparavant que la vérification diligente portait sur la capacité de l'organisme de mettre en œuvre le programme. Les autres questions relatives à l'organisme, comme celle liées au conseil d'administration, n'ont pas été prises en considération à ce moment-là.
    En ce qui concerne l'aspect financier, est-ce que la solvabilité de l'organisme UNIS a été vérifiée?
    Non, parce que les hauts fonctionnaires ont dit qu'ils avaient déjà traité avec cet organisme — qu'il y avait un track record. Le contenu du mécanisme de contribution est suffisamment précis pour déterminer que les dépenses, par exemple, sont bien gérées. Cette sorte de vérification diligente évalue également la capacité de l'organisme de mettre en œuvre le programme et d'interagir avec les citoyens, entre autres.
    Je ne veux pas être impoli, M. Schugart, mais nous avons tellement peu de temps que je me sens obligé de vous coincer. Veuillez m'excuser. Vous avez dit que cet organisme avait des antécédents établis et que c'était suffisant pour qu'on puisse le juger. Quelle a été la durée du tracking — je crois que c'est le terme que vous avez employé — de l'organisme UNIS qui vous a rassuré?

[Traduction]

    Malheureusement, j'ignore les détails. Le ministère avait déjà collaboré avec cet organisme de bienfaisance. Il le connaissait bien.

[Français]

    Savez-vous que l'accord de contribution n'a pas été donné à l'organisme UNIS, mais plutôt à la We Charity Foundation?
    Oui, je l'ai appris récemment.
    Est-ce que vous savez depuis combien de temps la We Charity Foundation était constituée en société?
    Non.
    Est-ce que vous savez quelle était la solvabilité de la We Charity Foundation et à combien s'élevait son actif, entre autres?
    Je sais seulement que, lors de conversations tenues entre des fonctionnaires d'EDSC et des gens de l'organisme UNIS, on a déterminé, notamment pour des raisons liées à l'administration, que la We Charity Foundation était le meilleur véhicule.
    Je n'ai pas le chiffre exact en tête, mais l'organisme UNIS avait un passif de quelques dizaines de millions de dollars.
    Étiez-vous au courant?
    Je ne connais pas les détails, mais je comprends qu'il y a...
    Si je vous disais que la We Charity Foundation n'avait aucun actif connu, croiriez-vous que c'est possible?
    Je n'ai aucune information précise à cet égard.
    Est-ce que cela arrive souvent que le gouvernement fédéral donne des contrats de 43,5 millions de dollars pour gérer 900 millions de dollars à des coquilles vides qui n'ont pas d'actif ni d'antécédents connus?

[Traduction]

    Tout ce que je peux dire, madame la présidente, c'est que l'accord de contribution qui a été signé était tout à fait ordinaire pour ce genre de collaboration entre un ministère et un organisme externe. Ces accords reposent sur des principes de vérification et de diligence raisonnable eu égard aux intérêts de la Couronne. Ils sont examinés au même titre que tous les autres mécanismes approuvés par le Conseil du Trésor et appliqués depuis très longtemps au sein du gouvernement.
(1310)

[Français]

    Je veux bien vous croire, monsieur Shugart. Il me semble que cela a du sens. Je ne peux pas croire que le gouvernement fédéral ait confié à un organisme la gestion de 900 millions de dollars de nos économies, voire des économies futures de nos enfants puisqu'on n'a pas cet argent et qu'il faut l'emprunter, sans aucune vérification diligente.
    Je ne peux pas croire qu'on ait payé une coquille vide, qui n'a pas d'actif, sans rien vérifier. Cela m'apparaît absurde. C'est pourquoi je vous demande de me rassurer, parce que vous êtes quand même le greffier du Conseil privé. Vous conseillez le premier ministre sur ces choses. Vous avez été impliqué dans ces décisions. Or vous me dites qu'il n'y a eu aucune vérification diligente de nature financière et que vous vous êtes simplement basés sur le fait que le ministère avait déjà traité avec l'organisme UNIS et sur le fait que l'on connaissait ces gens. Cela ne me rassure pas.
    Pouvez-vous me dire autre chose pour me rassurer?
    Vous avez absolument raison à propos de la responsabilité du gouvernement de rassurer les Canadiens quant à la fiabilité des choses. Je dirais tout simplement qu'il y avait une relation établie entre l'organisme UNIS et le ministère. Comme je l'ai mentionné auparavant, je ne connais pas les raisons précises pour lesquelles on a transféré le véhicule entre l'organisme UNIS et la We Charity Foundation. Cependant, je peux dire que les procédures et les règles ont été suivies pour ce qui est de la réalisation de cet accord de contribution.
    Je vais vous poser une dernière question, monsieur Shugart. Tout à l'heure, mon collègue vous a d'ailleurs questionné à ce sujet.
     Le 8 mai, le premier ministre a fait marche arrière, parce qu'il sentait qu'il était peut-être en conflit d'intérêts dans cette affaire. La décision ayant trait à l'attribution du contrat à l'organisme UNIS a été reportée de deux semaines. Cela fait partie de l'histoire, et nous savons aujourd'hui que, deux semaines plus tard, MM. Trudeau et Morneau ont voté en faveur de la décision.
    Entre le 8 mai et le 22 mai, avez-vous été consulté pour ce qui est de savoir si, oui ou non, un conflit d'intérêts empêchait le premier ministre de se prononcer?

[Traduction]

    Vous avez 10 secondes pour répondre.
    Je savais, en gros, parce que ce point avait été retiré de l'ordre du jour de la réunion du Cabinet, que la chef de cabinet et le premier ministre avaient demandé une vérification diligente et qu'elle devait être effectuée entre les deux réunions du Cabinet. Je n'ai pas personnellement pris part à cet exercice. On ne m'a pas demandé mon avis, et je n'ai rien relevé à ce moment qui aurait pu exiger que je donne un avis sur cette question précise au premier ministre. Des fonctionnaires ont donné suite à la demande. Je tiens à souligner que ni à ce moment-là ni après, quand j'y ai réfléchi, il ne m'est jamais venu à l'esprit que la situation nécessitait davantage que le suivi fait par les fonctionnaires.

[Français]

    Avez-vous une copie du rapport?

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup.
    Ces questions sont du plus haut intérêt. Par votre entremise, madame la présidente, j'aimerais demander à qui aurait incombé la diligence raisonnable à cet égard.
    Madame la présidente, le suivi a été fait par des fonctionnaires d'EDSC, qui était responsable du dossier, et le Bureau du Conseil privé assurait aussi une surveillance.
    Vous avez donc donné des conseils à Mme Telford sur la question de la diligence raisonnable?
    Nous avons donné des conseils quand ce point est revenu à l'ordre du jour, une fois que les fonctionnaires ont terminé leur travail et qu'il a fallu à nouveau informer le premier ministre avant la réunion du Cabinet...
    À votre avis, est-ce que le degré de diligence raisonnable exercé a été suffisant?
    À mon avis, oui.
    Comment se fait-il que devant le Comité des finances, Mme Telford ait affirmé qu'elle ne savait même pas que le contrat avait été conclu avec la WE Charity Foundation?
    Quand le contrat a été signé, nous n'avions pas cette information.
    Comment se fait-il que vous, pas vous personnellement... Madame la présidente, je voudrais savoir comment il se fait que durant le processus de diligence raisonnable, personne n'ait pensé à consulter les états financiers vérifiés de 2019, qui révélaient que l'organisme UNIS se trouvait en situation d'infraction pour une seconde année de suite?
(1315)
    Je le répète, la diligence raisonnable portait sur la capacité de l'organisme à mettre en œuvre le programme...
    M. Matthew Green: Est-ce que la diligence raisonnable...
    M. Ian Shugart: ... et les interactions avec l'organisme...
    Lequel? Par souci de clarté, madame la présidente, j'aimerais savoir de quel organisme il s'agit.
    Avec l'organisme UNIS.
    Avec la WE Charity Foundation?
    Selon ce que j'ai compris, c'est ce qui a été suggéré.
    Madame la présidente, j'aimerais qu'il soit précisé, pour les fins du compte rendu, si nous parlons bien de la WE Charity Foundation.
    Non. Selon ce que j'en sais, l'organisme UNIS a suggéré que la WE Charity Foundation serait un meilleur véhicule.
    Madame la présidente, j'aimerais savoir si le processus de diligence raisonnable visait la WE Charity Foundation ou l'organisme UNIS lui-même.
    Les mêmes questions... Je ne sais pas à quel moment l'attention s'est déplacée de l'organisme UNIS à la WE Charity Foundation. Je ne sais pas si les mêmes personnes ont répondu aux questions concernant l'une et l'autre partie de l'organisme. Tout ce que je sais, c'est que les discussions entre les fonctionnaires et leurs interlocuteurs d'UNIS au cours du processus de diligence raisonnable ont été centrées sur la capacité à mettre en œuvre le programme.
    Madame la présidente, je m'excuse auprès de M. Shugart, mais je ne peux pas croire qu'avant de lui verser 43 millions de dollars pour l'administration d'un programme de 912 millions de dollars, personne ne s'est préoccupé de vérifier la gouvernance de la WE Charity Foundation durant le processus de diligence raisonnable. Je vais donc poser la question très clairement. Est-ce que la stabilité de la gouvernance de la WE Charity Foundation a été vérifiée durant le processus de diligence raisonnable, une fois qu'il a été connu que cette société-écran serait responsable du programme?
    Madame la présidente, je comprends parfaitement la question et sa légitimité. Je suis convaincu que nous ferons la lumière sur la situation et que nous saurons éventuellement si ces aspects auraient dû faire partie de l'examen. Toutefois, pour l'instant, je ne suis pas en mesure de vous donner des précisions sur les négociations au sujet de l'accord de contribution entre les fonctionnaires d'EDSC et le mouvement UNIS.
    Madame la présidente, ce n'est pas ce que je veux savoir. Je veux savoir si dans votre rapport sur la diligence raisonnable, il a été question de la structure de gouvernance de la WE Charity Foundation.
    Je vais expliquer pourquoi je pose cette question. Selon le rapport de Charity Intelligence, le processus de diligence raisonnable aurait dû viser à établir si l'organisme de bienfaisance pouvait expliquer au bailleur de fonds, de manière exhaustive et franche, pourquoi la structure de gouvernance avait subi un changement aussi radical. Comment expliquer, par exemple, que rien de tout cela n'aurait filtré sans le gazouillis publié le 28 juin par l'ancienne présidente Michelle Douglas, qui révélait que le conseil d'administration était passé de sept à cinq membres. C'est un changement très important.
    Madame la présidente, j'ai participé à de nombreux processus. J'ai été membre de la Hamilton Community Foundation. J'ai participé au City Enrichment Fund, le fonds de dotation de la ville de Hamilton. Je vous garantis que si j'avais eu connaissance que le conseil d'administration d'un organisme auquel je m'apprêtais à verser du financement avait subi un changement aussi important et qu'il n'avait pas d'explication plausible, j'aurais tiré la sonnette d'alarme. Or, dans votre témoignage... Madame la présidente, M. Shugart a déclaré que personne n'avait sonné l'alarme. Monsieur Shugart, comment est-ce possible?
    J'ai déjà expliqué très clairement et à plusieurs reprises qu'aucun problème concernant la WE Charity Foundation n'a été soulevé au cours de la séance d'information qui a suivi. À ma connaissance, aucun problème important n'a été signalé durant la vérification de la capacité d'UNIS à mettre le programme en œuvre.
    Est-ce que c'est toujours votre avis maintenant que nous en savons plus sur cet organisme?
    Avec le recul, je crois que si nous avions su ce que nous savons maintenant, nous aurions probablement creusé un peu plus. Je tiens tout de même à ajouter que même avec le recul, si le programme n'avait pas été annulé, je n'ai aucune preuve que mouvement UNIS n'aurait pas été en mesure de le mettre en œuvre conformément à l'accord de contribution.
    J'aimerais poser une dernière question. Lors de la mise à jour que vous avez faite en avril et que vous avez évoquée dans votre réponse à mon prédécesseur, le premier ministre a-t-il été informé qu'il était mis en cause? Nous savons que les ministres Chagger, Ng et Morneau étaient déjà très engagés avec UNIS. Est-ce que le premier ministre savait, au moment de cette séance d'information, qu'UNIS figurait sur la liste des candidats pour ce programme en particulier?
    À ma connaissance, il ne le savait pas.
    J'ai du mal à saisir comment c'est possible.
    Merci.
    Monsieur Poilievre, vous avez la parole pour cinq minutes.
(1320)
    Donc, le premier ministre n'avait aucune idée de la manière dont le programme serait mis en oeuvre quand il en a fait l'annonce le 22 avril?
    Les détails de la conception du programme n'avaient pas encore été arrêtés quand le premier ministre a annoncé la politique. Les détails devaient être précisés ultérieurement.
    « Ultérieurement », c'est-à-dire le 8 mai. Et durant cette réunion, personne n'a parlé des relations de la famille du premier ministre avec UNIS?
    Non, pas à mon souvenir. Les liens du premier ministre avec UNIS étaient...
    Oui, je le sais.
    ... mais au-delà de cela, monsieur, la réponse est non.
    En a-t-il été question d'une manière ou d'une autre?
    Je ne crois pas.
    Vous ne le croyez pas.
    Pour autant que je sache, la réponse est non.
    Vous étiez présent.
    Soit j'étais présent, soit c'était mon collègue, Phil Jennings, le sous-secrétaire du Bureau du Conseil privé, qui assistait à cette réunion.
    Lors de cette réunion, le premier ministre a-t-il demandé des preuves que la fonction publique n'avait pas la capacité de mettre en œuvre le programme?
    Comme je l'ai déjà mentionné dans ma réponse à une question précédente, il s'agissait de discussions de vive voix, mais je me souviens qu'il a en effet posé des questions sur la capacité de la fonction publique, et que nous avons répondu à ces questions.
    A-t-il posé des questions sur la situation financière de mouvement UNIS?
    Non.
    A-t-il demandé une preuve de l'existence d'une structure de gouvernance de l'organisme?
    A-t-il demandé s'il existait des problèmes de gouvernance? Non.
    Il a effectivement déclaré que la fonction publique n'avait pas mis tous les points sur les i et toutes les barres sur les t et que, selon l'information qu'il avait reçue à cette réunion, l'examen n'avait pas été assez minutieux. Quelles ont été vos lacunes? Quels renseignements les fonctionnaires ont-ils omis de lui donner qui l'ont amené à faire marche arrière, selon ses propres mots?
    Selon ce que j'ai compris, le premier ministre voulait avoir l'assurance que nous avions mis tous les points sur les i et toutes les barres sur les t.
    Mais ce n'était pas le cas...
    Selon ce que j'en sais, il n'a pas trouvé de lacunes précises dans l'information qui lui a été donnée.
    Il doit en avoir trouvé puisqu'il a affirmé... Il a affirmé qu'il avait demandé le retrait du document lors de la réunion du Cabinet.
    M. Ian Shugart: Oui...
    L'hon. Pierre Poilievre: Il a forcément trouvé des lacunes.
    Il n'était pas satisfait...
    Et pourquoi pas?
    ... mais il voulait de meilleures garanties. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il a pointé des lacunes précises dans l'information qui lui a été donnée.
    Est-ce qu'il vous a donné une liste de mesures de diligence raisonnable à prendre?
    Oui. C'est ce que nous avons appelé les questions liées...
    Il existe une liste?
    Nous en avons parlé lors de la réunion. J'ai déjà indiqué qu'il nous a été demandé de vérifier la capacité de l'organisme à atteindre les Canadiens pour qui l'accès est plus difficile, le bilinguisme, la portée régionale, etc.
    Mais il n'a pas posé de questions concernant la situation financière ou la gouvernance, même si c'est essentiel pour vérifier la capacité d'un organisme à mettre un programme en œuvre. Malgré tout, il proclame qu'il a exigé qu'une diligence raisonnable soit exercée.
    Mouvement UNIS a-t-il remboursé l'argent qu'il a reçu du gouvernement?
    Je crois que le processus est en cours, mais je n'ai pas les détails.
    Il a toujours cet argent, du moins pour ce que nous en savons.
    Nous devrons vous revenir avec cette information, madame la présidente.
    EDSC était responsable du dossier, mais aucun ministre n'a approuvé l'accord de contribution. À votre connaissance, est-il fréquent qu'un ministère signe un accord de contribution avec un bénéficiaire sans que le ministre donne son approbation?
    En fait, la responsable était la ministre Chagger, et elle a signé l'accord de contribution.
    Elle n'est pas la ministre d'EDSC, donc elle n'est pas la responsable du ministère qui a...
    Elle est, par décret, associée à EDSC pour certains programmes.
    Quand a-t-elle été désignée comme signataire autorisée de cet accord?
    Je vais devoir le confirmer. Je crois que c'est en mars, mais je devrai le confirmer.
    Quand la ministre de l'Emploi a-t-elle décidé de ne pas signer ni le mémoire pour le Cabinet ni l'accord de contribution?
    La ministre de l'Emploi n'était pas responsable de ce programme. C'est tout ce que je sais.
    Je n'ai jamais vu un ministre qui n'est pas responsable d'EDSC signer un accord de contribution et un mémoire au Cabinet présenté par EDSC. Il m'apparaît étrange qu'aucun des ministres de ce ministère n'ait participé aux discussions concernant l'une ou l'autre de ces deux propositions.
    M. Ian Shugart: Mais la...
    L'hon. Pierre Poilievre: On pourrait penser que ni l'un ni l'autre ne voulait voir son nom associé à ces propositions.
(1325)
    Monsieur Poilievre, votre temps est écoulé.
    Vous pouvez répondre brièvement.
    Je tiens à ce qu'il soit très clair que la ministre Chagger était associée au ministère pour ce qui concerne les programmes destinés aux jeunes et établis par décret, ce qui est loin d'être un précédent. Un ministre peut être désigné comme responsable d'un programme relevant d'un autre ministère. C'est exactement ce qui s'est passé dans ce cas-ci.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme Zahid. Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Shugart, de témoigner devant le Comité. Merci également pour tout le travail que vous accomplissez au bénéfice de la population canadienne.
    Depuis cinq mois, nous avons abondamment discuté de la capacité de la fonction publique d'assurer la prestation de programmes comme la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Je suis bien consciente que nos fonctionnaires hors pair ont dû s'adapter aux circonstances très singulières dans lesquelles nous nous trouvons actuellement et qu'ils ont fait au mieux pour que les Canadiens puissent toucher rapidement des prestations d'urgence essentielles en ces temps de pandémie. De toute évidence, la capacité de prestation des programmes a été poussée à sa limite.
    Seriez-vous d'accord qu'au moment de la mise sur pied du programme de Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant et de l'examen des options offertes, il est devenu évident que la fonction publique aurait besoin de soutien pour le mettre en œuvre parce qu'elle n'avait pas la capacité nécessaire?
    Nous avons déjà expliqué qu'à cause du concept particulier du programme, de son envergure et de la nécessité de le lancer rapidement, le meilleur organisme pour le mettre en oeuvre au sein de la fonction publique aurait été Service jeunesse Canada, et du travail de conception et de structuration a été amorcé. Toutefois, il a fallu se rendre à l'évidence qu'il ne serait pas en mesure de mettre en oeuvre un programme de cette envergure et de faire le travail d'amont pour favoriser la participation des étudiants canadiens. C'est à ce moment qu'il est devenu clair qu'il faudrait faire appel à une tierce partie et que la question de savoir qui pourrait faire ce travail s'est posée.
    Diriez-vous que le gouvernement du Canada s'occupe normalement de la prestation de programmes comme la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, qui est en fait un programme de jumelage et de formation de type conciergerie pour venir en aide aux jeunes Canadiens? Le gouvernement offre toutes sortes de programmes de financement comme Emplois d'été Canada, mais ce n'est pas lui qui fait le travail de jumelage, d'embauche ou de formation des jeunes Canadiens. Est-ce que c'est exact?
    C'était le cas, de manière générale, jusqu'à tout récemment, selon des formules variables. Par exemple, le programme canadien Guichet-Emplois, offert depuis longtemps, est en fait un service informatisé de jumelage entre les offres d'emplois et les candidats. Ce programme comportait des caractéristiques beaucoup plus pratiques. En soi, rien n'empêche un ministère d'offrir ce genre de programme, mais il doit déterminer, selon ses politiques administratives, si c'est la manière la plus efficace d'utiliser les ressources publiques.
    Quand un gouvernement envisage de faire appel à des fournisseurs du secteur privé pour la prestation de services publics, la question qui se pose est sensiblement toujours la même: qui sera le mieux en mesure de mettre en œuvre le programme compte tenu de l'intérêt public? Dans ce cas-ci, à cause du manque de temps et de capacité spécialisée, aucun programme de la fonction publique ne pouvait assumer cette responsabilité.
    Merci.
    Monsieur Gerretsen, allez-y.
    Merci.
    Madame la présidente, comme je n'ai pas le temps de poser une question, je vais y aller d'une observation.
    Monsieur Shugart, je vous félicite pour vos 40 années passées dans la fonction publique. C'est tout à fait remarquable.
    À quelque titre que ce soit, je tiens à vous présenter mes excuses pour l'obligation que vous avez ressentie de commencer en informant le Comité que vous ne diriez que la vérité, bien évidemment. Je crois que tous mes distingués collègues n'en attendraient pas moins de notre plus haut fonctionnaire. Je tiens à dire qu'à mon point de vue... Les autres personnes autour de cette table ne font que passer, mais ce sont les gens comme vous qui gèrent le fonctionnement journalier, qui veillent à l'intégrité du système et qui s'assurent que notre démocratie sera toujours en place pour les générations à venir, et nous vous en remercions.
(1330)
    Si vous me le permettez, madame la présidente, je voudrais dire brièvement que je ne tiens pas rigueur aux membres du Comité pour ce qui s'est passé tout à l'heure. Je suis parfaitement conscient que les fonctionnaires vont et viennent eux aussi. J'ai passé les 10 premières années de ma carrière — ou plutôt mes années de jeunesse perdues — sur la Colline du Parlement. Je n'étais donc pas tout à fait un fonctionnaire durant cette décennie.
    Merci beaucoup, monsieur Shugart.
    Nous allons poursuivre avec M. Gourde. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    J'aimerais, moi aussi, vous féliciter, monsieur Shugart, pour vos 40 ans de service. Bravo!
    Quelque chose m'intrigue. Vers la fin avril, lors de votre première rencontre avec le premier ministre, combien de scénarios lui avez-vous présentés pour la mise en oeuvre de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant?
    Si je me souviens bien, je n'étais pas présent à cette réunion, mais il a été question de tous les programmes destinés aux étudiants. Cela comprenait les éléments annoncés par le premier ministre, mais pas le programme qui a retenu la plus grande part de l'attention. À ce point, des lignes directrices étaient établies, mais pas déterminées. Il y avait beaucoup de détails à clarifier à ce point-là.
    Pendant la crise de la COVID-19, le gouvernement a mis sur pied beaucoup d'initiatives pour aider les Canadiens, mais d'où venait l'idée d'établir la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant? Est-ce que c'était une commande politique ou une initiative faisant suite à des conseils présentés au premier ministre par des ministères? Est-ce, au contraire, le premier ministre ou le Conseil des ministres qui a demandé que cette initiative soit lancée?
    Je dirais que c'était une combinaison de choses quant à la volonté. Quant aux objectifs personnels...
    Est-ce que c'était une volonté politique?
    Je comprends votre question. Toutefois, lorsque le personnel des bureaux des ministres et les fonctionnaires ont discuté, ils ont trouvé un problème.
     Il y a eu une explosion d'idées quant aux possibilités. Il y a eu une sorte de va-et-vient typique de l'élaboration de programmes dans n'importe quel champ d'activités. À ce moment, il y avait bien sûr des discussions entre le bureau du ministre des Finances, le bureau du premier ministre, EDSC et les fonctionnaires.
    Je vous remercie, monsieur Shugart.
    La même journée que le premier ministre a annoncé l'initiative, les médias nous ont appris que l'organisme UNIS était déjà prêt à poser sa candidature.
    Est-ce que d'autres organisations ont pu poser leur candidature à ce programme? Est-ce que l'organisme UNIS est la seule organisation a avoir eu l'information avant même que le premier ministre n'annonce l'initiative?
    À ce moment-là, il n'y avait pas de programme établi. Bien sûr, l'organisme UNIS a transmis ses idées, mais ce n'était pas un concours. On n'a pas offert à l'organisme UNIS de gérer le programme.

[Traduction]

    À ce moment, le programme n'existait pas encore. Il était en cours d'élaboration, mais il a été établi qu'UNIS avait fait des propositions à ce moment.

[Français]

    L'organisme UNIS a donc tellement bien contribué à l'élaboration du programme que l'on s'est inspiré de ses recommandations et de son expertise. C'était un programme fait sur mesure pour cet organisme, qui était donc, indirectement, le seul à pouvoir déployer le programme, puisqu'il était fait sur mesure pour lui.
    En passant, il s'agit d'une organisation unilingue anglophone qui ne pouvait pas déployer le programme au Québec, où elle n'avait aucune assise. Vous avez utilisé une tierce partie pour mettre en place un programme qui a recours à une tierce partie afin de le déployer dans des provinces où elle n'a aucune assise. Était-ce vraiment faire preuve de diligence raisonnable que de penser que l'organisme UNIS était le seul à pouvoir mettre en oeuvre le programme?
    Le premier ministre a affirmé que les hauts fonctionnaires — et, indirectement, vous — lui ont dit que c'était la seule organisation capable de le faire, mais c'est cette même organisation qui a élaboré le programme.
(1335)

[Traduction]

    Je répète, madame la présidente, que l'élaboration du programme s'est échelonnée sur une certaine période. Quand UNIS a présenté ses propositions — il y en avait plus d'une —, le gouvernement en a rejeté une. Il a fait savoir qu'un des programmes proposés ne l'intéressait pas.
    L'élaboration de ce programme, comme c'est le cas de tous les programmes, s'est faite de façon organique. La première étape a été de déterminer les caractéristiques du programme et à quel problème il devait répondre. Les idées ont surgi d'un peu partout et, peu à peu, il a pris forme. À mesure que le programme prenait forme et que ses caractéristiques se précisaient, il est devenu évident qu'il faudrait faire appel à une tierce partie pour son élaboration, mais il n'a jamais été question qu'UNIS élabore un programme pour le gouvernement.
    Merci, monsieur Shugart.
    Je donne maintenant la parole à M. Gerretsen. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Shugart, quand vous avez comparu devant le Comité des finances le 21 juillet dernier, vous avez dit ce qui suit: « [J]e ne vois pas comment le premier ministre ou le ministre des Finances responsable des fonds publics auraient pu ne pas participer à l'élaboration de la politique et à l'approbation de sommes d'une telle importance. »
    Notre comité a reçu les témoignages de deux universitaires hier qui nous ont affirmé que les conflits d'intérêts doivent toujours être pris en compte, peu importe l'envergure d'un projet.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet de votre déclaration devant le Comité des finances?
    Oui. Je crois que j'ai mentionné au Comité des finances que j'avais relevé un problème. Je n'ai pas de réponse définitive, mais j'ai bel et bien souligné que l'un des principaux mécanismes — la Loi sur les conflits d'intérêts est claire à ce sujet — pour éviter les conflits d'intérêts est la divulgation. De cette manière, toute contradiction entre les objectifs devient apparente et il devient plus facile de juger si un décideur est susceptible d'envisager son rôle décisionnel dans une optique intéressée.
    Permettez-moi de poursuivre dans le même ordre d'idées. Lors de votre passage devant le Comité des finances, vous avez également déclaré ce qui suit: « Je me permets évidemment d'ajouter que dans le cas de conflit d'intérêts […], la mesure habituellement prise est la divulgation. » Vous avez souligné ensuite que la participation du premier ministre dans UNIS était un fait bien connu et qu'elle était manifestement du domaine public, de sorte que, dans un sens, elle avait été divulguée.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    J'ai fait cette remarque pour expliquer, au moins en partie, pourquoi je n'ai jamais pensé qu'il aurait pu y avoir conflit d'intérêts. Il était bien connu que le premier ministre avait déjà été associé à l'organisme de bienfaisance.
    Le premier ministre a déclaré lui-même au sujet de sa récusation... Il s'agit de la deuxième mesure traditionnelle pour éviter les conflits d'intérêts. Il a déclaré que pour ce qui concerne le processus décisionnel lui-même, avec le recul, il regrette de ne pas s'être retiré des délibérations.
    Chaque situation de conflit d'intérêts est unique. Il existe bien entendu des écueils courants dont il faut se méfier et qu'il faut éviter, mais dans ce cas-ci, il s'agissait d'une politique gouvernementale très importante qui mettait en jeu des ressources publiques considérables. Essentiellement, il me semblait que le premier ministre et le ministre des Finances auraient dû à tout le moins en être conscients étant donné l'envergure de cette mesure.
(1340)
    Monsieur Shugart, seriez-vous prêt à affirmer que les problèmes d'éthique sont généralisés au sein du Bureau du Conseil privé, du bureau du premier ministre et de l'ensemble de la fonction publique?
    Non, assurément pas. Nous sommes régis par la Loi sur les conflits d'intérêts. Je vais m'abstenir, tout à fait intentionnellement, de commenter les dossiers dont le commissariat à l'éthique est actuellement saisi. C'est sa responsabilité. Toutefois, je tiens à dire que les titulaires d'une charge publique sont appelés tous les jours à se conformer à la Loi sur les conflits d'intérêts pour ce qui concerne les déclarations, les consultations du commissariat à l'éthique eu égard aux risques de conflits d'intérêts ou les ordonnances de dessaisissement, de même que les mesures à mettre en place pour prévenir les conflits d'intérêts, qui sont parfois plus rigoureuses que ce que le commissaire exige.
    Bref, la Loi sur les conflits d'intérêts est résolument une réalité bien concrète au sein des organismes gouvernementaux.
    À votre avis, est-ce que la Loi est efficace? Est-ce qu'elle remplit son objectif?
    La Loi, comme tout autre mécanisme de reddition de comptes, est le fruit des problèmes successifs rencontrés par les gouvernements depuis des décennies. En ce sens, on peut dire qu'il s'agit d'un document évolutif.
    Merci.
    Au bout du compte, c'est aux parlementaires de décider si elle est à la hauteur des défis à surmonter.
    M. Mark Gerretsen: Merci.
    Merci, monsieur Shugart.
    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour deux minutes et demie.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Shugart, il y a une foule de sujets que j'aimerais aborder avec vous. Si j'ai bien compris, vous avez dit que le premier ministre n'était pas en conflit d'intérêts étant donné que l'implication de sa famille avec l'organisme UNIS était connue du public.
    Est-ce bien ce que vous avez dit?
    Je ne suis pas certain que cela ait été public à ce point. C'est possible. Cela étant dit, j'imagine que l'engagement de sa mère auprès de l'organisme UNIS était du domaine public.
    Par contre, on s'entend pour dire qu'il pouvait être en conflit d'intérêts même si ces faits étaient connus, n'est-ce pas?
    Je parlais de l'engagement, de la relation passée du premier ministre lui-même avec l'organisme. La dimension familiale n'était pas nécessairement soulevée.
    D'accord. De toute façon, vous n'êtes pas ici en tant qu'expert en éthique. Je ne veux pas vous embêter avec des questions pointues. Nous allons poursuivre avec des faits.
    Plus tôt, je vous ai posé une question à laquelle vous n'avez pas vraiment répondu, à ma connaissance. Je vous ai demandé s'il arrivait fréquemment que le gouvernement fédéral donne un contrat de 43,5 millions de dollars à une organisation qui s'avère être une coquille vide, un organisme qui n'a aucun antécédent connu, qui est constitué en société depuis un an ou deux et qui n'a aucun actif, pour gérer 900 millions de dollars.
    Avez-vous déjà vu cela?

[Traduction]

    Non, je ne peux pas affirmer que c'est fréquent, mais je peux dire en revanche que la procédure suivie avec l'organisme en vue de la conclusion d'un accord de contribution aussi important n'est pas exceptionnelle. En fait, c'est la procédure standard.
(1345)

[Français]

    D'accord. Je vous remercie, mais vous avez déjà dit cela. Je ne dis pas que ce n'est pas important, monsieur Shugart, mais je n'ai que deux minutes et j'ai une dernière question à vous poser.
    Vous avez dit que vous étiez arrivés à la conclusion que la fonction publique ne pouvait pas gérer ce programme. Comment êtes-vous arrivés à cette conclusion?
    C'était l'opinion raisonnée des fonctionnaires du ministère responsable.
    Qui sont ces fonctionnaires?
    Comme le Comité le sait, ce sont les fonctionnaires d'Emploi et Développement social Canada, y compris le...
    Pouvez-vous nous donner le nom d'une personne qui a dit cela à un moment donné?
    Oui.

[Traduction]

    Merci. Votre temps est écoulé.

[Français]

     Mme Wernick a été désignée responsable et elle a présenté les faits au Comité.
    C'est donc Mme Wernick qui a décidé que la fonction publique ne pouvait pas gérer...

[Traduction]

    Messieurs Shugart et Fortin, c'est tout le temps que vous aviez. Merci.
    Monsieur Angus, vous avez deux minutes et demie.
    Merci de vos services.
    De toute évidence, il y a eu un énorme problème. Dès l'annonce du programme, tout s'est écroulé, à cause des liens évidents entre la famille du premier ministre et les Kielburger.
    La question du conflit d'intérêts a été la première à être soulevée, avant même que nous apprenions qu'une société-écran avait été créée et qu'elle n'avait aucun actif. Avant même que nous apprenions que le conseil d'administration avait été congédié. Avant même que nous apprenions que les membres de la famille du premier ministre étaient rémunérés alors qu'il avait été dit au conseil d'administration qu'ils ne l'étaient pas. C'était un conflit d'intérêts.
    Je ne prétends pas que c'est votre travail, mais étant donné que votre prédécesseur a perdu son emploi à cause du dernier scandale éthique, j'imagine que quelqu'un avait la responsabilité de sonner l'alarme devant un conflit aussi évident. Qui, au sein du Cabinet du premier ministre, est chargé de sonner l'alarme quand il se passe des choses aussi énormes, pour éviter que vous et tous les autres ne soyez pris de court quand la nouvelle sort? Qui devait faire ce travail?
    Je crois, madame la présidente, que Mme Telford a déclaré devant le Comité des finances qu'elle avait demandé des garanties que tout était fait selon les règles et de manière transparente parce qu'elle connaissait les liens et les antécédents du premier ministre avec cet organisme. C'est ce qui s'est passé dans le cas qui nous occupe, et les vérifications diligentes ont été faites comme nous l'avons expliqué...
    Donc, c'était la responsabilité de Mme Telford, parce que sous...
    Elle a mentionné qu'elle avait soulevé la question, mais je...
    C'est une bonne question. J'ai seulement deux minutes.
    Mon autre question — bien entendu, le programme s'est effondré — porte sur l'affirmation comme quoi seulement UNIS était en mesure de gérer un projet de près de 1 milliard de dollars. Les chiffres varient entre 530 millions, 43 millions et 912 millions de dollars, mais je voudrais parler des collaborations passées entre UNIS et le gouvernement, qui lui a octroyé des contrats de 40 000 $, de 24 990 $, de 24 996 $, de 17 050 $ et de 13 374 $. L'organisme a aussi conclu quelques accords de contribution, dont le plus élevé avait une valeur de 3 millions de dollars.
    Dans quel univers vous trouviez-vous pour penser, d'après les contrats somme toute assez minimes obtenus par UNIS, que vous pouviez approuver l'octroi d'une somme de 912 millions de dollars à ces gens et qu'il n'y aurait pas de problème? Cela aurait dû vous mettre la puce à l'oreille, mais personne ne s'est demandé pourquoi ils ont dû créer une société-écran ou pourquoi l'organisme était en pleine débandade financière quand il est venu demander de l'argent au gouvernement... Sa feuille de route ne contient pas ce genre d'expérience...
    Monsieur Angus, votre temps est écoulé. Votre question devra rester en suspens, je suis désolée.
    Merci.
    C'est au tour de M. Kurek.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, monsieur Shugart. Je vous suis reconnaissant d'être venu nous rencontrer et de la franchise dont vous avez fait preuve au début de votre témoignage.
    Est-il encore raisonnable d'affirmer que l'organisme UNIS était le seul à avoir la capacité de mettre ce programme en œuvre alors qu'il ne pouvait pas le faire dans les deux langues officielles et que sa capacité de l'offrir dans certaines régions du pays était aussi mise en doute?
    Comme je l'ai indiqué, madame la présidente, rien ne me permettrait d'affirmer que si le programme était allé de l'avant, l'organisme UNIS ne serait pas en mesure d'en assurer le fonctionnement aujourd'hui. Si vous examinez l'accord de contribution, y compris les clauses stipulant l'obligation de rendre des comptes en fonction des objectifs et des jalons établis... Le projet est tombé à l'eau, mais pas à cause d'une preuve quelconque de l'incapacité de l'organisme de livrer le programme.
(1350)
    N'empêche, le programme n'est pas offert.
    Pour ce qui concerne plus précisément la prestation, est-ce que la question de la capacité de l'organisme UNIS à offrir le programme efficacement dans les régions rurales du Canada a été soulevée, oui ou non?
    Je crois que oui, mais les représentants d'EDSC seraient mieux placés que moi pour vous donner des détails.
    Bien entendu.
     Avez-vous écouté le témoignage du premier ministre devant le Comité des finances?
    Oui, je l'ai écouté.
    Avez-vous été surpris par certaines de ses déclarations?
    Non.
    À quelle date les fonctionnaires ont-ils réalisé que Service jeunesse Canada ne serait pas en mesure de gérer le programme?
    Je ne connais pas la date exacte mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, à cause de l'envergure du projet — sur le plan du nombre de placements, des mesures à prendre pour atteindre les jeunes défavorisés, ce genre de choses —, il est devenu clair que le programme n'était pas assez bien établi pour s'en occuper.
    Je trouve cela très intéressant... On parle ici d'un organisme dont la capacité est manifestement limitée et d'un nouveau programme gouvernemental dont la capacité est tout aussi limitée. C'est tout sauf une équation gagnante, et cela m'amène à ma prochaine question.
    J'ai lu beaucoup de notes d'information du gouvernement, mais j'ai rarement vu une note qui proposait un choix aussi binaire que celui qui a été présenté à notre comité et à d'autres. Est-ce qu'il est courant que la fonction publique propose un choix binaire au premier ministre ou à un ministre en vue du lancement d'un programme aussi important, dont la valeur frôle le milliard de dollars?
    Une analyse avait été faite quant à la capacité d'autres organismes à mettre le programme en oeuvre et, compte tenu des faits, la seule question à trancher par les ministres était celle de savoir s'il fallait donner le feu vert ou non.
    Donc, si je comprends bien, c'était l'organisme UNIS ou rien.
    Pour ce qui concerne la mise en oeuvre du programme à cette étape et compte tenu de l'urgence de la situation, c'est exact.
    Bien.
    Le gouvernement a approché d'autres tierces parties en vue d'évaluer leur capacité à gérer le programme de Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Seriez-vous en mesure de nous fournir les dates et les détails des communications qui ont eu lieu entre le ministère et les organismes en question?
    Je crois que cette information figure dans les documents que nous nous sommes engagés à vous remettre. Si vous avez besoin de compléments d'information, nous vous les transmettrons volontiers.
    D'accord. Je vous en remercie.
    Selon ce que vous avez pu observer, est-ce que le premier ministre a pour habitude de lire tout le matériel d'information qui lui est remis avant de faire une annonce ou de prendre une décision?
    Je ne suis pas à ses côtés quand il lit les documents mais, à en juger par son travail et celui de ses prédécesseurs, je dirais que oui.
    D'accord. Merci.
    Arrive-t-il souvent que le gouvernement annonce un programme sans avoir une idée générale de son contenu précis, sans savoir comment ou quand il sera lancé, ou même sans avoir la certitude qu'il ira de l'avant?
    Je crois que les choses se sont passées ainsi essentiellement à cause du contexte. Il n'est pas rare que le chef d'un gouvernement — je m'excuse, je n'ai pas d'exemple précis en tête — annonce que le gouvernement prendra une mesure pour régler tel ou tel problème. Durant la pandémie, le gouvernement a souvent annoncé ses intentions pour rassurer les Canadiens, et il donnait ensuite des précisions. Comme nous avons pu le constater, il est arrivé qu'il apporte des modifications parce que la situation avait changé. Je peux confirmer qu'en ce sens, nous venons de vivre une période très inhabituelle.
    Merci.
    Je donne maintenant la parole à M. Dong. Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Shugart, d'être des nôtres. Je vous en suis très reconnaissant.
    Pouvez-vous nous expliquer comment vous, votre bureau et la fonction publique dans son ensemble vous vous êtes adaptés à ce qui est devenu la nouvelle norme en matière de gestion du gouvernement durant la crise nationale causée par la pandémie? Je vous pose cette question parce qu'il m'est souvent arrivé d'entendre des remarques durant les délibérations du Comité qui tendent à faire des comparaisons avec le fonctionnement et les processus du gouvernement en temps normal. Si je peux me permettre de le rappeler, les derniers mois n'avaient rien de normal.
    Comment votre bureau, le gouvernement et l'ensemble de la fonction publique s'en sont-ils sortis durant cette période où il n'y a plus rien de normal?
(1355)
    Je dirais que le changement s'est ressenti dans les façons de procéder, mais également sur l'essence de notre travail.
    Pour ce qui concerne les façons de procéder, je crois que notre expérience a été similaire à celle des parlementaires. Nos interactions avec des groupes et des communautés disséminés partout au pays ont beaucoup diminué. Nous prenons des décisions et nous menons beaucoup d'autres processus par des moyens virtuels, comme c'est le cas pour les comités, et souvent à toute heure du jour ou de la nuit en raison de l'ampleur de la tâche et des répercussions de la pandémie. Il fallait faire vite et tout le monde était fatigué. Des fonctionnaires accomplissaient des tâches qui n'avaient pas été demandées. D'autres fonctionnaires subissaient une pression continue pour produire des résultats. C'était la même chose pour les ministres.
    Pour ce qui a trait à l'essence, je dirais que personne n'a été ravi d'avoir à faire des analyses aussi rapidement. En fait, nous avons même jugé nécessaire, comme l'avait fait le gouvernement précédent durant la crise financière, d'avertir informellement le Bureau du vérificateur général que nous nous attendions à ce qu'il y ait des erreurs. Nous avons établi nos objectifs à l'avance pour que le Bureau du vérificateur général comprenne bien les contraintes dans lesquelles le travail a été fait.
    Dans le cas qui nous occupe, si nous avions eu tout le temps voulu, je suis certain — c'est une hypothèse — que l'une des options qui auraient été envisagées pour la mise sur pied d'un tel programme aurait été d'accélérer le développement du Service jeunesse du Canada. Les circonstances commandaient une intervention plus rapide, avec le résultat que nous connaissons maintenant.
    Je ne cherche aucunement à excuser les erreurs que nous avons pu faire collectivement ou qui feront peut-être surface. Je veux simplement vous expliquer le contexte dans lequel nous avons travaillé.
    Je suis d'accord avec vous. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les activités du gouvernement ne se déroulaient pas dans un contexte normal. Bon nombre de fonctionnaires ont dû travailler chez eux et s'adapter à une réalité tout à fait nouvelle.
    Devant notre comité, mais aussi devant le Comité des finances — j'ai visionné les témoignages —, il a beaucoup été question des accords de contribution. Pensez-vous que les accords de contribution posent des problèmes d'éthique? À votre avis, ou selon votre expérience, est-il courant pour le gouvernement d'acquérir les services d'une tierce partie au moyen d'un accord de contribution?
    Oui, c'est très courant. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'est automatique, mais c'est courant. Au Canada, les secteurs de la société civile et du bénévolat sont extrêmement dynamiques. L'aide publique aux refuges pour les femmes, aux banques alimentaires, aux établissements de soins de longue durée et à d'autres organismes durant la pandémie leur a été acheminée par l'intermédiaire de tierces parties, et les accords de contribution ont été l'instrument utilisé pour orchestrer cette aide.
    L'accord de contribution est un mécanisme éprouvé, auquel les gouvernements recourent depuis des décennies...
(1400)
    Merci, monsieur Shugart.
    ... et de manière de plus en plus précise pour assurer la probité.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur Shugart.
    Monsieur Poilievre, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Shugart, vous avez déclaré devant le Comité des finances qu'il n'existait aucune preuve que quiconque au sein du Bureau du premier ministre a été en contact avec l'organisme UNIS avant l'annonce de l'initiative. Sa chef de cabinet vous a contredit. Selon elle, au moins cinq membres du Bureau du premier ministre ont été en contact avec l'organisme UNIS. Pouvez-vous nous donner leur nom?
    Je n'ai pas les noms ici, madame la présidente, et ce n'est pas de mon ressort. Je crois que Mme Telford s'est engagée à faire un suivi.
    Très bien. Est-ce que quelqu'un au Bureau du premier ministre a eu des discussions avec quiconque au Bureau du Conseil privé au sujet de l'organisme UNIS entre le début de mars et la signature de l'accord de contribution?
    C'est possible. Je ne le sais pas vraiment, mais c'est quelque chose de possible, surtout vers la fin, aux dernières étapes du processus.
    C'est donc possible qu'il y ait eu des discussions avec le Bureau du Conseil privé concernant l'organisme UNIS avant le 8 mai, date à laquelle les fonctionnaires ont recommandé au premier ministre de confier la prestation du programme à cet organisme?
    Si vous parlez de discussions au sujet de la proposition qui était alors en voie d'élaboration, oui, c'est possible. Il se peut qu'il y ait eu des communications entre le Bureau du premier ministre et le Bureau du Conseil privé à ce sujet.
    C'est vrai qu'il est probable qu'il y ait eu des communications entre les services politiques et la fonction publique avant que celle-ci leur fasse ses recommandations.
    Il ne faut pas confondre communications et directives.
    C'est ce que nous verrons.
    Quand avez-vous eu connaissance de l'intention de confier la gestion du programme à l'organisme UNIS?
    Comme je l'ai indiqué au Comité des finances, je répondrai à cette question, madame la présidente, sur un plan personnel. J'ai pris conscience de cette affaire de manière assez accidentelle, au cours des dernières étapes.
    Avez-vous une date, pour nous éviter d'aller...
    Je ne me souviens pas exactement, mais c'était peut-être à la séance d'information du 8 mai.
    Étiez-vous présent à cette séance? Si j'ai bien compris votre réponse précédente, vous avez affirmé que vous y étiez peut-être, ou peut-être pas. Vous pensez que vous y étiez, mais vous...
    J'assiste parfois aux séances d'information. Je suis généralement présent aux séances d'information du premier ministre avant les réunions du Cabinet, mais il arrive que je n'y sois pas.
    Étiez-vous présent à la séance en question?
    Je pense que oui, mais je ne suis pas certain. Je peux le vérifier si c'est important.
    Cette séance d'information du Cabinet était particulièrement importante. C'est à ce moment, selon le premier ministre, qu'il aurait appris que l'organisme UNIS allait s'occuper du programme.
    J'ai pris connaissance du compte rendu et consulté mes collègues, et je peux confirmer que c'est ce qui s'est passé.
    Pourtant, vous ne pouvez pas confirmer que vous étiez présent à cette séance.
    Je pense que j'étais présent aux séances du 8 et du 22 mai, mais je ne veux pas l'affirmer devant le Comité avant d'en être bien certain. Je crois que j'étais présent.
    Vous pensez que vous étiez présent à cette séance.
    Je suppose que j'étais présent. Si vous voulez que je vérifie mon agenda, je vais le faire. Comme il peut arriver que j'assiste seulement à une partie d'une séance d'information du premier ministre parce que je suis appelé ailleurs...
    C'est sans doute le genre de réunion où je ne voudrais pas être et, si jamais je n'avais pas le choix, j'aimerais mieux ne pas m'en souvenir.
    Ce n'est jamais le cas.
    Je suis certain que cela peut arriver.
    Il y a souvent des endroits où je préférerais ne pas me trouver si on me donnait le choix, mais...
    Je ne vois pas du tout ce que vous voulez dire.
    D'un autre côté, le premier ministre affirme qu'il a fait marche arrière. Vous ne l'aviez pas mentionné dans votre témoignage initial. La ministre Chagger ne l'a pas mentionné non plus. Personne d'autre parmi ceux qui étaient présents ne l'a mentionné. Il me semble que si un premier ministre, et particulièrement s'il aime boxer, avait levé les poings et fait marche arrière, vous vous en souviendriez. Vous seriez probablement retourné à la maison en vous disant que ce n'était pas une bonne journée, que le patron avait fait marche arrière sur votre proposition, mais vous ne vous souvenez pas d'avoir assisté à cette séance.
    J'ai bel et bien mentionné devant le Comité des finances que Mme Telford a soulevé ces questions. Il est donc clairement établi que le premier ministre et sa chef de cabinet ont soulevé la question de la diligence raisonnable. C'est toujours ce qui a été dit, de manière claire et constante.
(1405)
    D'accord, mais il est absolument impossible de savoir quelles mesures de diligence raisonnable ont été demandées et lesquelles ont été exécutées. Personne n'était au courant de la situation financière, des démissions au sein du conseil d'administration, des problèmes qu'UNIS... Comme personne ne peut identifier les autres organismes consultés, il est difficile de croire qu'il y a eu une véritable...
    Nous avons fourni de l'information sur les autres organismes, et j'ai clairement indiqué que la diligence raisonnable ne visait pas la situation financière de la fondation.
    Oui, mais il était important de faire cette vérification pour établir si l'organisme était en mesure de mettre le programme en oeuvre...
    Votre temps est écoulé.
    J'aimerais conclure, si vous me le permettez, madame la présidente, en affirmant que je suis d'accord avec M. Gerretsen.
    Monsieur Shugart, vous êtes un fonctionnaire d'exception. Je trouve épouvantable que le premier ministre ait fait de vous et de la fonction publique ses boucs émissaires, qu'il ait insinué que c'est vous et votre organisme qui deviez être blâmés. Je tiens à ce que vous le sachiez...
    Monsieur Poilievre, vous n'avez plus de temps.
    ... que l'opposition officielle de Sa Majesté n'en croit pas un mot.
    Merci.
    Monsieur Shugart, si je peux me permettre, selon ce qui avait été prévu initialement, vous deviez rester avec nous jusqu'à 14 heures. Cependant, les difficultés techniques du début de la réunion nous ont passablement retardés. Seriez-vous d'accord pour rester jusqu'à 14 h 30?
    Je suis à votre entière disposition. Je suis ravi d'être ici.
    Monsieur Shugart, c'est une excellente réponse. Merci énormément d'être aussi conciliant.
    Je crois que nous avons commencé un peu en avance. J'ai d'autres rendez-vous, mais je vais rester avec plaisir.
    Je vous promets de vous libérer au plus tard à 14 h 30.
    Je voudrais invoquer le Règlement.
    Allez-y, monsieur Gerretsen.
    Merci, madame la présidente.
    M. Poilievre a fait une remarque à la fin de son intervention, et vous...
    Je ne crois pas qu'il y ait matière à invoquer le Règlement.
    Oui, justement, parce que cela concerne l'ordre de procédure de la réunion. C'est un rappel au Règlement. M. Poilievre a fait une remarque. Précédemment, quand des remarques ont été formulées à la fin — ce n'est pas un débat, c'est une question de procédure —, madame la présidente, vous avez permis au témoin, M. Shugart en l'occurrence, de répondre. Je voudrais savoir si, conformément à la procédure, vous allez permettre à M. Shugart de répondre à la remarque de M. Poilievre.
    Merci, monsieur Gerretsen.
    Désolé, mais je voudrais aussi invoquer le Règlement.
    Monsieur Angus.
    Madame la présidente, je ne vous critique pas mais, au cours des deux dernières réunions, vous n'avez pas permis au témoin de répondre à ma deuxième série de questions. M. Gerretsen est nouveau. Je trouve un peu prématuré de sa part de faire des remarques sur la manière dont nos réunions devraient se dérouler et de déprécier votre travail.
    Merci, monsieur Angus.
    Nous sommes tous égaux, monsieur Angus.
    Nous allons poursuivre.
    Madame Shanahan, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Comme nous avons abondamment parlé du Comité des finances, je me demandais, madame la présidente, si nous pourrions demander à notre greffière de nous procurer le compte rendu de la comparution du témoin devant ce comité pour éviter les répétitions inutiles à l'avenir. Je ferais la même demande pour tous les autres témoins qui comparaîtront devant nous sur les mêmes enjeux.
    Et parlant du Comité des finances... Monsieur Shugart, vous avez déclaré ce qui suit le 21 juillet: « Je me permets évidemment d'ajouter que dans les cas de conflit d'intérêts […], la mesure habituellement prise est la divulgation. ». Vous avez ensuite souligné que l'association du premier ministre avec UNIS était de notoriété publique, ce qui constituait essentiellement une divulgation. Pouvez-vous nous expliquer plus en détail ce que vous entendez par là?
    Loin de moi l'intention d'établir une nouvelle théorie des conflits d'intérêts, mais lorsque des décisions sont prises par un décideur qui a un intérêt personnel qui n'a pas été divulgué, ce n'est pas acceptable parce que personne ne peut savoir sur quelle base ces décisions ont été prises. Que le décideur ait privilégié son intérêt personnel ou qu'il ait agi dans l'intérêt public, c'est impossible de le savoir. C'est pourquoi la Loi sur les conflits d'intérêts oblige les titulaires d'une charge publique à déclarer tout intérêt personnel, y compris leurs intérêts financiers et ce que beaucoup de Canadiens considéreraient comme des détails intimes concernant leurs affaires et leur famille. L'objectif est que leurs intérêts soient dévoilés.
    Cette mesure n'élimine pas tous les risques de conflits d'intérêts, mais c'est l'une des façons habituelles de les aborder. La divulgation permet aux autres parties de déterminer par elles-mêmes s'il y a effectivement un conflit d'intérêts et, si c'est le cas, s'il a été réglé dans l'intérêt public.
    Dans ce cas-ci, le premier ministre a été le ministre de la Jeunesse au cours de la législature précédente et il a été associé assez étroitement à un organisme dont une partie des activités touchent les jeunes. Il n'y a donc rien de surprenant à ce qu'il ait eu des liens avec UNIS. La question de savoir si, en soi, cette association crée un conflit d'intérêts sera tranchée par le commissaire. Je crois que le premier ministre a indiqué, lors de son témoignage, qu'il ferait entièrement confiance à son jugement.
    Je voulais simplement dire que durant toute cette période, il ne m'est jamais venu à l'esprit qu'il pouvait exister un intérêt personnel puisque l'association du premier ministre avec UNIS et ses antécédents avec celui-ci était tout sauf secrets. C'était du domaine public. C'est pourquoi je n'ai pas pensé à dire au premier ministre que vu ses antécédents avec UNIS, il devait se retirer des discussions. C'était, je le répète, de notoriété publique.
(1410)
    Merci. Votre réponse est très éclairante, notamment pour ce qui concerne la motion à l'étude aujourd'hui.
    Plus loin dans votre témoignage, vous avez déclaré ce qui suit: « [J]e ne vois pas comment le premier ministre ou le ministre des Finances responsable des fonds publics auraient pu ne pas participer à l'élaboration de la politique et à l'approbation de sommes d'une telle importance. » Hier, nous avons demandé à des universitaires ce qu'ils en pensaient et ils nous ont dit que peu importe l'envergure d'un programme, il faut toujours tenir compte du risque de conflits d'intérêts. Pouvez-vous préciser vos propos, et notamment nous dire pourquoi il est si important d'avoir le point de vue du premier ministre sur l'approbation d'une aussi grosse dépense?
    Vous pouvez répondre brièvement.
    Je pense simplement que certains dossiers d'intérêt public exigent l'intervention du chef du gouvernement, le premier ministre. Le dilemme auquel nous faisons face actuellement suscitera certainement une bonne réflexion au sein du Bureau du Conseil privé.
    Merci.
    Madame Gaudreau, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

    Bonjour, monsieur Shugart.
    Nous avons obtenu beaucoup de réponses. Je vous remercie de nous accorder plus de temps. J'aimerais revenir sur l'aspect public et vous expliquer pourquoi cela me préoccupe. Pendant plusieurs années, j'aidais des organismes à but non lucratif à obtenir de l'aide, notamment. Je me rappelle très bien à quel point cela pouvait être compliqué et difficile. Je me souviens également que, sans l'aide du gouvernement, certains organismes ne pouvaient pas offrir de services.
    Aujourd'hui, en tant que nouvelle députée, je dois composer avec des règles extrêmement précises. En vertu de celles-ci, lorsqu'on devient un personnage élu, public, on se doit de fournir l'ensemble des informations dont on dispose. Les règles sont déjà complexes pour les petites organisations, mais comment se fait-il que le gouvernement ait failli à ses propres responsabilités, qui étaient déjà connues du grand public? Comment se fait-il que, malgré l'urgence d'agir et un énorme besoin d'aide, le gouvernement n'ait pas suivi au minimum les règles qui doivent être respectées?
     Je ne comprends pas exactement ce qui n'a pas été fait de façon spécifique.
    À mon avis, en ce qui concerne l'accord de contribution, les fonctionnaires ont fait leur travail et ils se sont acquittés de leur responsabilité pour ce qui est de le négocier.
    Quant aux décisions du Cabinet, c'était finalement une question de politique publique. Il s'agissait d'appuyer les étudiants. Des facteurs ont été pris en considération et une analyse a été faite relativement à la conception et à la mise en œuvre du programme. Le Cabinet a pris les décisions et la fonction publique s'est acquittée de ses responsabilités.
(1415)
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Monsieur Angus, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci.
    Quand la pandémie a éclaté, j'ai été émerveillé par le travail extraordinaire et acharné des fonctionnaires pour que les dossiers avancent rondement. J'aimerais mieux être n'importe où ailleurs que dans ce gâchis. Il y a eu beaucoup de manquements tout au long du processus.
    J'aimerais savoir qui a établi les paramètres de ce programme.
    Il n'y avait pas un seul responsable. Comme toujours, il y a eu une collaboration organique entre le personnel politique des bureaux des ministres, le personnel chargé des politiques et les fonctionnaires, dans ce cas-ci ceux du ministère des Finances et d'EDSC. Le Bureau du Conseil privé a fourni son soutien et, à un certain point, il a collaboré de plus près à l'analyse.
    C'est le processus normal. Des ONG ont aussi été appelées en renfort pour la recherche de solutions axées sur les étudiants, notamment. C'est un amalgame.
    C'est intéressant parce que notre bureau a été inondé de demandes. Nous étions en lien avec les bureaux des ministres, mais jamais personne n'a mentionné qu'il y avait un problème avec le bénévolat. Nous avions un sérieux problème avec la difficulté des étudiants universitaires à trouver un emploi.
     Je ne critique pas le Bureau du Conseil privé. On vous a imposé un programme déjà formaté par EDSC. Nous savons que Craig Kielburger avait approché Bardish Chagger, de même que la ministre Ng, et que le bureau du ministre Morneau était impliqué. Ils ont refusé la première proposition et en ont demandé une deuxième.
     Le 23 avril, le premier ministre a annoncé un programme qui ressemblait étrangement à celui qu'avait proposé M. Kielburger. À compter de cette date, tout semble indiquer que son organisme était le seul joueur sur la glace.
    Je veux vraiment savoir ce qui s'est passé, comment il se fait que les frères Kielburger, dont la situation financière est en chute libre, aient réussi à parler à du personnel dans trois bureaux de ministres et à soumettre une proposition, qui est pratiquement une copie conforme de celle qui a été annoncée par le premier ministre, et comment ils en sont venus à conclure un marché de 900 millions de dollars.
    Comment les paramètres qui leur ont permis de se retrouver seuls sur la glace, ont-ils... Est-ce que ce sont les ONG? Est que c'est UNIS qui a élaboré les paramètres, en suivant les conseils que leur ont donnés la ministre Chagger et la ministre Ng? Est-ce que c'est ce qui s'est passé?
    Il ressort clairement du compte rendu des témoignages et des documents que nous vous transmettrons que la conception du programme a été l'oeuvre de plusieurs personnes.
    Les frères Kielburger en faisaient sûrement partie puisque c'était leur proposition.
    Monsieur Angus.
    Il y a eu des interactions avec eux, mais...
    Le temps est écoulé, je suis désolée. Merci.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Barrett, pour deux minutes et demie. Ce sera notre dernier tour de questions: le Parti conservateur interviendra en premier, suivi du Parti libéral, du Bloc québécois et, enfin, du Nouveau Parti démocratique. Comme je viens de l'annoncer, monsieur Barrett, vous avez deux minutes et demie.
    Est-ce que c'était la valeur totale de l'accord de contribution?
    Je vais devoir le demander aux responsables du programme, madame la présidente, parce que je ne connais pas les montants exacts de l'accord de contribution. Je sais que le financement était de l'ordre de 500 millions de dollars et qu'il pourrait aller être jusqu'à 900 millions de dollars, selon le taux de participation. C'était le coût du programme.
    Concernant les coûts administratifs exacts et les déboursés à diverses fins, ils seront indiqués dans l'accord de contribution, que nous allons vous transmettre.
    On a entendu à quelques reprises que le processus a échoué, qu'il faut tirer des leçons de tout cela, mais également qu'il faut des mesures de reddition de comptes. C'est loin d'être une réussite. Qui est responsable du fait que le programme n'a jamais été mis en oeuvre? Qui est responsable de ce programme? Il a été jugé essentiel à un moment crucial, on était prêt à verser 1 milliard de dollars pour qu'il fonctionne, il a été présenté au Cabinet et il a été approuvé. Un accord de contribution a été signé, mais nous nous retrouvons le bec à l'eau. L'argent qui a été dépensé n'a pas été rendu aux contribuables. Qui est responsable de ce gâchis?
(1420)
    Je ne vous apprendrai rien si je dis que des mécanismes sont en place pour le remboursement de fonds, et qu'ils sont stipulés dans tous les accords de contribution. C'est la norme et je suis certain qu'elle a été suivie dans le cas qui nous intéresse.
    Le programme n'a pas été mis en œuvre parce qu'UNIS y a mis fin à cause de la controverse publique qu'il a suscitée.
    Et tout cela parce que, comme il l'a lui-même affirmé, le premier ministre ne s'est pas récusé du processus. C'est ce qu'il a dit lors de son témoignage.
    Comme M. Poilievre l'a exprimé tout à l'heure, je ne crois pas non plus que la fonction publique doit être blâmée. Le Cabinet a pris la décision, il a accepté la recommandation de la fonction publique... C'est aux membres du Cabinet d'assumer la responsabilité de cette décision.
    Certains membres du Comité ont tenté de faire une analyse approfondie de l'application ou non de la Loi sur les conflits d'intérêts dans tel ou tel contexte. La divulgation n'est pas suffisante pour qu'une information soit du domaine public. La Loi exige que la divulgation soit faite au Commissariat. La Loi exige une récusation officielle en l'absence de mesures de prévention des conflits d'intérêts.
    Monsieur Barrett, votre temps est écoulé. Merci.
    Je donne maintenant la parole à M. Dong. Vous avez deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Shugart, je constate qu'il y a encore beaucoup de questionnement par rapport aux témoignages des hauts fonctionnaires sur le processus d'examen, et peut-être aussi sur le processus décisionnel entourant la BCBE. J'aimerais savoir si vous avez pleine confiance dans les réponses de vos collègues et dans l'intégrité de leur processus décisionnel?
    Oui, totalement, madame la présidente. Je suis toujours conscient, autant pour moi que pour les autres, qu'il existe toujours un risque de dire quelque chose d'inexact. Comme je l'ai dit à tous les comités parlementaires, y compris celui-ci, si mon témoignage en contredit un autre ou si une information ultérieure révèle qu'il contenait une erreur, je suis toujours disposé à donner les précisions et les explications nécessaires. Pour autant que je sache, tous les fonctionnaires ont ce même sens de l'éthique.
    Et quelle serait votre évaluation du travail de la fonction publique canadienne en sachant que notre bilan se compare avantageusement à celui d'autres pays pour ce qui a trait à la gestion de la pandémie et à la mise en oeuvre d'une panoplie de programmes d'aide aux Canadiens et à l'économie canadienne? Comment évaluez-vous le rendement de notre fonction publique?
    Je ne vous étonnerai sûrement pas si je dis que notre fonction publique a été extrêmement efficace en raison de sa structure très, très solide et très bien adaptée à nos institutions parlementaires, ce que bien des pays nous envient. Je n'hésite pas à affirmer que la fonction publique a été très efficace durant la pandémie parce que je sais qu'elle suit les traces des géants qui ont bâti cette institution, et mon souhait le plus profond est que nos successeurs pourront en dire autant de nous. Je sais aussi que le même principe vaut pour la Chambre des communes et toutes nos institutions.
    Merci, monsieur Shugart.
    Merci.
    Nous passons maintenant à madame Gaudreau. Vous disposez de deux minutes et demie.

[Français]

    J'aimerais revenir sur l'engagement du gouvernement, plus précisément en ce qui a trait à la confiance.
    Selon vous, à quel niveau se situe maintenant la confiance des citoyens à l'égard du gouvernement?
    Je dirais que cette question relève davantage de l'expertise des députés que de celle des fonctionnaires. J'espère et je crois que, de façon générale, le public fait confiance à nos institutions, y compris à la fonction publique. On respecte les éléments probants, l'indépendance et l'objectivité. Ce sont des valeurs que nous véhiculons. J'espère que, s'il y a des lacunes, nous sommes tous responsables pour ce qui est d'élaborer des solutions.
(1425)
    Voici où je veux en venir, en fait. La confiance peut se gagner rapidement, mais elle peut aussi se perdre, malheureusement. C'est un peu difficile de la regagner, lorsqu'on commet des erreurs.
    Dans un contexte où il y a des éléments publics, où l'on veut être transparent — on veut peut-être regagner cette confiance —, et compte tenu du travail que vous accomplissez et de votre compétence comme greffier et conseiller, n'aurait-il pas été valable, au contraire, de présenter au grand jour ce qui en était, étant donné la pluie d'idées et notre besoin d'aider les Canadiens?
    Qu'en pensez-vous?
    J'ai complètement confiance en mes collègues.
    Personne ne peut porter ces responsabilités sans une équipe ou sans les interactions entre les divers éléments de notre système de surveillance. C'est une dépendance avec laquelle nous travaillons tout le temps. C'est pourquoi nous cherchons constamment à améliorer nos systèmes, que ce soit le système législatif ou le système procédural. Cependant, le fait de sauvegarder cela est un élément très précieux.
    Comment se fait-il que...

[Traduction]

    Je suis désolée. Votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Angus, c'est à vous. Vous avez deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais revenir à ma question précédente à propos de qui a proposé les paramètres du programme.
    Vous avez parlé d'ONG. De quels ONG s'agit-il?
    Nous allons vous fournir une liste. Je sais que l'organisme Universités Canada a participé à certaines réunions, de même que l'Assemblée des Premières Nations... D'autres groupes ont été consultés au début du processus au sujet...
    Était-ce vraiment au début, ou un peu plus tard?
    Cette information figure au compte rendu, madame la présidente, mais je dirais dès le début d'avril.
    D'accord. Apparemment, tout a basculé avec l'appel de Craig Kielburger. Saviez-vous que les frères Kielburger ne sont pas inscrits comme lobbyistes? Ils ont quand même signé un accord de contribution stipulant qu'ils devaient se conformer à la Loi sur le lobbying...
    Je ne suis pas au courant de ces détails.
    D'accord.
    C'est important parce qu'il a téléphoné au bureau du ministre Morneau. Quelqu'un de ce bureau a demandé à Rachel Wernick de communiquer avec Craig Kielburger. Il a rencontré la ministre Chagger, de même que la ministre Ng. Il a ensuite écrit à Rachel Wernick et lui a mentionné que compte tenu des appuis reçus, un des deux programmes... Il lui a indiqué que son organisme pourrait s'occuper des deux programmes, ou d'un seul. Le programme qui a été retenu est celui qui a été approuvé par le premier ministre. Le second est celui qui fait l'objet de la proposition, ce qui nous ramène à la question de la diligence raisonnable...
    Je ne suis pas au courant de ces échanges, madame la présidente.
    D'accord. Il a écrit à Rachel Wernick pour se présenter. Dans ce message, il affirmait que pour donner suite à ses discussions avec la ministre Chagger et la ministre Ng, l'organisme a proposé deux programmes, et qu'il pourrait s'occuper de la mise en œuvre d'un de ces programmes ou des deux. C'est ce qu'il a fait pour se faufiler dans le processus.
    Je me demande comment un groupe qui n'est même pas inscrit au registre des lobbyistes et qui présente une proposition de 900 millions de dollars a pu obtenir l'appui de 3 ministères clés et de leurs ministres avant même que la fonction publique en ait pris connaissance. M. Kielburger avait déjà un projet clé en main. Quelle diligence raisonnable a été exercée pour protéger la population canadienne?
    Madame la présidente, je ne peux pas me rallier à cette interprétation des événements. Je n'ai jamais vu le message en question, mais je ne crois pas que les témoignages des fonctionnaires corroborent cette version des événements.
    Comment est-ce possible?
    Monsieur Angus, votre temps est écoulé. Merci.
    Monsieur Shugart, durant la période de questions qui vient de se terminer, vous avez mentionné que vous feriez un suivi au Comité pour deux éléments d'information manquants, si je ne m'abuse. Le premier élément a trait au remboursement ou non des sommes qui ont été versées à UNIS, et le second concerne votre présence ou non à la séance d'information du 8 mai. Nous vous serions reconnaissants de transmettre les réponses au Comité. Merci.
(1430)
    Volontiers.
    Monsieur Shugart, nous vous remercions infiniment de nous avoir consacré du temps aujourd'hui. Nous vous souhaitons une bonne fin de journée.
    La séance est suspendue.
(1430)

(1435)
    Si vous voulez bien regagner vos sièges... Nous allons reprendre.
    Madame la ministre Chagger, soyez la bienvenue.
    Comme vous êtes au courant, le Comité a adopté la motion suivante le 22 juillet dernier:
Que, conformément à l'article 108(3)(h) du Règlement, le Comité examine les mesures qui sont mises en place pour éviter et prévenir les conflits d'intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contribution et autres dépenses;
    Madame la ministre, il vous a été demandé de présenter une déclaration liminaire au Comité et de répondre aux questions des membres au sujet de la motion que je viens de lire. Dans un petit instant, je vais vous accorder 10 minutes pour nous présenter votre déclaration, et les membres du Comité vous poseront des questions.
    Je vous inviterais à respecter les temps de parole qui vous sont alloués. Pour la première ronde de questions, chaque intervenant disposera de six minutes. Vers la fin de cette période, je vous ferai signe, mais il est fort possible que j'aie à vous interrompre. Je ne voudrais pas paraître impolie, mais je dois assurer le bon déroulement de la réunion.
    Madame la ministre, vous avez la parole pour 10 minutes
    Oui, monsieur Poilievre.
    J'aimerais faire un rappel au Règlement. Les députés du Parti conservateur aimeraient que la ministre prête serment et s'engage à dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Merci.
    Madame la ministre, consentez-vous à prêter serment?
    Oui. J'ai déjà écrit un serment. Je peux le lire pour qu'il soit consigné au compte rendu.
    Merci.

[Français]

    Je, Bardish Chagger, affirme solennellement que je dirai dans mon témoignage la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

[Traduction]

    Merci, madame la ministre.
    Monsieur Angus.
    J'invoque le Règlement. Je suis désolé d'interrompre la ministre. Durant la pandémie de COVID, le Comité des finances a adopté des règles de politesse. Je ne voudrais pas qu'on me reproche de parler en même temps que la ministre. Est-ce que nous allons suivre le même protocole de questions brèves, de réponses brèves et de partage égal des temps de parole? Comme la ministre apparaît sur un écran, c'est beaucoup plus difficile de maintenir cet équilibre. Est-ce que nous pouvons suivre ce protocole?
    Monsieur Angus, je suis d'accord avec vous.
    Madame la ministre, vous serait-il possible de donner des réponses de la même longueur que la question, ou à peu près? Je vous remercie.
    Sur ce, nous allons écouter votre déclaration liminaire.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, Canadiens et Canadiennes, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis accompagnée de ma sous-ministre déléguée principale, Gina Wilson. Je vais la désigner comme mon adjointe.
    Nous sommes ici, à votre demande, pour vous fournir des renseignements sur les mesures ayant été mises en place par le gouvernement fédéral pour éviter, atténuer et prévenir les conflits d'intérêts. Ces mesures s'appliquent aux politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contributions et autres dépenses.
    J'aimerais tout d'abord souligner que le gouvernement du Canada s'est engagé à faire preuve d'ouverture et de transparence dans sa gouvernance. Ce que je veux dire par cela, c'est que le gouvernement donne à tous les Canadiens largement accès aux données et aux renseignements en sa possession. En effet, depuis 2014, la Directive sur le gouvernement ouvert promeut la transparence et la reddition de comptes dans tous les ministères.
    À titre de ministre de la Diversité et de l'Inclusion et de la Jeunesse, j'ai reçu une lettre de mandat très claire du premier ministre. On peut en prendre connaissance en ligne. Elle énonce qu'à l'instar de tous mes collègues du Cabinet, je me suis engagée à former un gouvernement transparent, honnête et redevable aux Canadiens; un gouvernement qui respecte les normes d'éthique les plus rigoureuses; qui porte une attention soutenue à la gestion des fonds publics et observe la plus grande prudence dans ce domaine. Ces valeurs me guident chaque jour dans mon travail. C'est vrai en ce qui me concerne, et ça l'est également pour mes collègues, et j'espère que vous admettrez avec moi que ça l'est aussi pour les fonctionnaires de mon ministère. Tous les ministres ont reçu ces mêmes directives dans leur lettre de mandat, et nous sommes tous assujettis aux mêmes lois.
    Quel que soit le rôle qui nous a été attribué, des mécanismes ont été mis en place pour nous guider. Tous les députés sont tenus de respecter le Code régissant les conflits d'intérêts des députés. Ministres et secrétaires parlementaires doivent aussi se conformer aux règlements et aux mesures prévus dans la Loi sur les conflits d'intérêts. Tous les membres de notre personnel doivent aussi respecter les normes de probité et d'intégrité les plus strictes énoncées dans les Politiques à l'intention des cabinets des ministres.
    C'est dans ce contexte que je remplis le mandat qui m'a été confié et qui me passionne tellement, c'est-à-dire de bâtir un pays plus ouvert, plus diversifié et plus inclusif dans lequel tous les Canadiens ont des chances égales de réussir.
     Mes responsabilités comprennent aussi les politiques et les programmes à l'appui des personnes et des jeunes de la communauté LGBTQ2. Il s'agit d'un vaste mandat qui nécessite la collaboration avec plusieurs ministres et ministères, et plus particulièrement avec Emploi et Développement social Canada, Patrimoine canadien, Femmes et Égalité des genres Canada, Santé Canada, Sécurité publique Canada et Justice Canada.
    Les fonctionnaires de tous ces ministères sont également tenus de respecter des règles strictes en matière d'intégrité. Ils doivent tous se conformer aux valeurs de la fonction publique et au code d'éthique du secteur public. Les fonctionnaires d'Emploi et Développement social Canada qui m'appuient, notamment dans le cadre du programme Service jeunesse Canada, sont régis par ce code de même que l'ensemble du personnel de Patrimoine canadien qui me soutient dans la prestation de programmes visant à promouvoir le multiculturalisme et à lutter contre le racisme. Ils reçoivent tous une formation à cet égard. Par ailleurs, les employés qui participent à la prestation des programmes de paiements de transfert reçoivent une formation supplémentaire pour les aider à repérer les conflits d'intérêts potentiels et à les gérer. Il faut également souligner que tous les Canadiens qui présentent une demande d'aide financière à titre individuel et tous les organismes qui font de même sont tenus de divulguer tout conflit d'intérêts potentiel lors de la demande.
    La distribution de l'aide financière est régie par la Loi sur la gestion des finances publiques et le gouvernement fédéral, dans son ensemble, est assujetti à des procédures de surveillance et de reddition de comptes établies par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Sans les énoncer toutes, j'aimerais mentionner notamment la politique de gestion financière, la politique sur les paiements de transfert et les politiques sur les résultats, l'évaluation et l'audit interne.
    Contrairement à l'image que veulent en donner les conservateurs, la politique sur les paiements de transfert, en particulier, permet au gouvernement de s'assurer que les paiements de transfert sont gérés de manière à respecter les principes de saine gérance et les niveaux les plus élevés d'intégrité, de transparence et de responsabilisation. Les programmes du gouvernement sont également régis par des conditions approuvées par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Le Plan d'action national de lutte contre le racisme, par exemple, comprend des conditions visant à garantir que tous les organismes ont un accès égal à l'aide financière. Dans ce cas précis, nous sommes tenus de publier les lignes directrices du programme au moins six semaines avant la date limite pour la présentation des demandes. Il existe aussi des directives entourant la communication avec les demandeurs d'aide financière.
    Permettez-moi d'aborder brièvement quelques points qui devraient à mon avis présenter un intérêt pour le Comité.
(1440)
    Le premier est la gestion des risques. La Loi sur la gestion des finances publiques nous aide à établir un juste équilibre entre les décisions à haut risque qui nécessitent l'intervention de la haute direction, et celles qui sont de nature plus opérationnelle. Les modèles de prise de décision en fonction du risque nous permettent d'évaluer les risques liés, entre autres choses, aux demandeurs de financement et aux activités que l'on envisage de financer. Ils réduisent les coûts relatifs à la prestation de programmes, allègent le fardeau administratif et réduisent le temps requis pour aviser les bénéficiaires.
    Le deuxième est le conflit d'intérêts. J'ai déjà abordé le sujet, et j'y reviens parce que c'est important. Des mécanismes ont été mis en place dans tous les ministères afin d'éviter le risque de parti pris ou de conflit d'intérêts. À Patrimoine canadien, par exemple, la décision d'approuver une subvention ou une contribution n'est jamais prise par une seule personne. En plus d'effectuer des évaluations internes régulières, on peut demander des examens par les pairs ou des examens par des comités internes ou externes. Les employés du gouvernement peuvent aussi travailler de concert avec le Bureau des valeurs et de l'éthique afin d'analyser toute situation susceptible de présenter un conflit d'intérêts ou l'apparence de conflit d'intérêts. Il faut aussi mentionner l'exigence de divulguer la participation d'anciens fonctionnaires qui sont assujettis aux directives régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat.
    Le troisième est les contrôles internes. En plus des contrôles gouvernementaux tels que la politique sur la sécurité du gouvernement, plusieurs ministères sont dotés de cadres de contrôle interne qui décrivent les rôles et les responsabilités en matière de gestion financière. Ces cadres sont conçus pour offrir une assurance raisonnable que les ressources publiques sont utilisées avec prudence et que les processus de gestion financière sont efficaces et efficients.
    Le quatrième est la transparence et la reddition de comptes. Par l'intermédiaire du portail du gouvernement ouvert à Canada.ca, tous les Canadiens peuvent prendre connaissance des subventions et contributions qui ont été accordées. Les Canadiens peuvent aussi consulter les divers sites Web ministériels pour obtenir des renseignements sur les plans, les résultats, les coûts engagés, les contrats attribués, les consultations et les évaluations effectuées, ainsi qu'une foule d'information sur les représentants du gouvernement et du secteur public. Les lettres de mandat et la documentation de transition peuvent aussi être consultés librement.
    Comme l'a indiqué le greffier du Conseil privé dans son 26e rapport annuel, les états financiers réalisés par la fonction publique du Canada font l'objet de « vérifications concluantes et sans réserve » depuis vingt ans. Elle s'est classée au premier rang à égalité avec celle du Royaume-Uni selon le Baromètre des données ouvertes 2018. Elle est reconnue internationalement comme l'une des plus efficaces. J'aimerais reconnaître et souligner le travail qu'elle accomplit.
    J'aimerais aussi conclure par un exemple concret qui illustre le raisonnement qui sous-tend toutes ces mesures et ces précautions.
    En mai dernier, en réponse aux effets dévastateurs de la pandémie de COVID-19, le gouvernement du Canada a adopté une série de mesures pour venir en aide aux individus et aux organismes dans de nombreux secteurs de notre économie. Pour ma part, j'ai insisté pour que mes programmes soient adaptés, soit en rationalisant les processus ou en accélérant les paiements, afin de soutenir les organismes qui font progresser le multiculturalisme, la diversité, l'inclusion et les occasions favorables pour les jeunes du Canada. Grâce aux mécanismes rigoureux qui encadrent nos actions, nous avons pu réagir rapidement et efficacement aux besoins pressants des Canadiens. Mais nous ne sommes pas encore tirés d'affaire, et il reste encore beaucoup de travail à accomplir.
    Nous nous sommes adaptés à la situation sans faire de compromis sur la rigueur, et tous ensemble nous continuons de bâtir un gouvernement qui est ouvert et transparent pour tous les Canadiens.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, je vous remercie de votre attention, et je suis prête à répondre à vos questions. J'ai essayé de limiter la durée de mon exposé afin que nous puissions répondre au plus grand nombre de questions possible.
(1445)
    Merci beaucoup, madame la ministre Chagger.
    Nous allons commencer la série de questions de six minutes. Monsieur Barrett, vous avez la parole.
    Merci, madame la ministre.
    Dans son témoignage, le greffier du Conseil privé vient de dire que vous avez obtenu le pouvoir de signer en tant que ministre pour EDSC par décret. Pourriez-vous nous dire à quelle date ce décret a été pris?
    Si mes souvenirs sont bons, le décret a été pris en mars afin de m'accorder des pouvoirs au sein du ministère, d'EDSC ainsi que de Patrimoine canadien en rapport avec mon mandat à titre de ministre de la Diversité et de l'Inclusion et de la Jeunesse.
    Madame la ministre, sauf dans le cas de l'entente de contribution relative à la BCBE, avez-vous utilisé ce pouvoir de signature vous ayant été conféré par décret pour tout autre programme?
    Madame la présidente, dans le cadre de mes responsabilités, je m'occupe aussi de trois secrétariats à Patrimoine canadien. De nombreuses subventions et contributions ont été accordées par l'intermédiaire du programme sur le multiculturalisme entre autres. Je peux demander à mon adjointe de vous répondre si vous souhaitez obtenir des exemples concrets.
    Non, madame la ministre, ma question ne vise pas ces subventions et contributions, mais plutôt celles qui concernent EDSC. Avez-vous utilisé ce pouvoir relativement à EDSC?
    Je veux seulement m'assurer de fournir des renseignements complets. Je sais que Service jeunesse Canada est de ma responsabilité. Aussi, j'ignore si des ententes ont été renouvelées depuis que je suis devenue ministre en 2019.
    Mais je peux fournir la réponse au Comité, si vous le souhaitez.
    Je vous en serais reconnaissant.
    Combien d'argent le gouvernement du Canada a-t-il versé au mouvement UNIS pour la BCBE? On nous a fournis des tas de chiffres différents, aussi j'aimerais obtenir les montants définitifs.
    Le 22 avril, nous avons annoncé l'octroi d'un montant de 9 milliards de dollars pour des programmes destinés aux étudiants. Quant à la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, l'entente de contribution se chiffrait, je pense, à 543 millions de dollars. À la demande du Comité permanent des finances, ces documents ont été fournis, et nous pouvons faire en sorte qu'ils vous soient transmis.
    Très bien.
    Quelle somme, précisément, a été versée, je ne parle pas du montant théorique, mais du montant qui a été réellement versé par le gouvernement du Canada au mouvement UNIS?
    Je peux vous reporter à l'entente de contribution pour la première cohorte, la cohorte supplémentaire et la deuxième cohorte. Je ne peux pas vous dire quel montant a été versé. Ce que nous savons, en revanche, c'est que le programme a pris fin. L'argent, comme l'a fait savoir l'organisme, sera rendu au gouvernement.
    Pourquoi l'argent n'a-t-il pas encore été retourné à ce jour? Ça me semble bizarre. Cela fait déjà un moment que le programme a été annulé, ou que l'organisme s'est retiré, depuis l'annonce du premier ministre s'excusant parce qu'il avait omis de se récuser. Qu'est-ce qui explique le retard?
    Madame la présidente, je pense, comme j'ai tenté de l'expliquer lors de mon témoignage et dans chacune de mes communications, que nous voulons nous assurer que toutes les règles soient bien suivies. Je peux vous assurer que la fonction publique travaille avec l'organisme à faire en sorte que l'argent soit rendu.
    Si vous le souhaitez, je peux demander à mon adjointe de vous fournir une réponse plus détaillée à cet égard.
    Non. Toutefois, si vous pouviez faire en sorte que ces renseignements soient transmis à notre comité, ce serait très apprécié.
    Ma prochaine question, madame la ministre, concerne vos communications avec l'un ou l'autre des proches collaborateurs du ministre des Finances ou des membres de son bureau ou avec n'importe quel fonctionnaire du ministère des Finances entre le 5 avril et le 22 avril concernant l'organisme UNIS, les Kielburger, l'aide aux étudiants et comment le mouvement UNIS pouvait offrir cette aide aux étudiants.
(1450)
    Madame la présidente, comme je l'ai déjà déclaré lors de mon témoignage devant le Comité des finances, durant la période mentionnée par le député, je n'ai eu personnellement aucune de ces conversations avec des fonctionnaires du ministère des Finances.
    Au Comité des finances, j'ai eu l'occasion de vous poser certaines questions, madame la ministre. J'ai constaté des disparités entre les questions que je vous ai posées et les réponses que vous m'avez fournies. Je vous avais demandé si vous aviez parlé avec le mouvement UNIS de la BCBE, et vous m'aviez répondu que non, vous n'en aviez pas parlé. Mais vous leur aviez parlé, comme nous l'avons appris par la suite, pendant la période en question. Je pense que la date de cette conversation était le 17 avril.
    Au cours de cette conversation, quels aspects avez-vous abordés avec cet organisme? Est-ce que cela avait quelque chose à voir avec ce qui s'est retrouvé ultérieurement dans la proposition relative à la BCBE?
    Madame la présidente, pour le compte rendu, le 10 décembre, j'ai fait une apparition lors de l'événement WE Day, à Ottawa, après ma nomination à titre de ministre de la Jeunesse. Je me suis adressée à un auditoire de jeunes au Centre national des arts.
    La deuxième fois que j'ai eu une interaction avec l'organisme UNIS, c'était lors d'une conversation téléphonique avec Craig Kielburger le 17 avril 2020. Je me suis entretenue avec lui ainsi qu'avec un membre de son équipe à 11 heures, dans la matinée. Cet appel a duré un peu plus de 30 minutes. Nous avons parlé d'un programme spontané en rapport avec l'entrepreneuriat chez les jeunes, l'entrepreneuriat social et quelque chose qui avait été communiqué. Comme il ne s'agissait pas de quelque chose que j'envisageais, j'ai demandé aux fonctionnaires de s'en occuper.
    Cet appel du 17 avril ne concernait pas du tout la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Je n'ai pas fait de commentaires à ce sujet.
    D'accord. Il ne me reste plus beaucoup de temps. Merci, madame la ministre.
    Votre signature apparaît sur...
    J'invoque le règlement...
    Merci.
    Monsieur Barrett, vous avez 10 secondes.
    Votre signature apparaît sur l'entente de contribution. Elle est antidatée du 5 mai. Avez-vous dit aux Kielburger ou à quiconque de UNIS qu'ils pouvaient commencer à engager des dépenses à compter du 5 mai?
    Sur les recommandations de la fonction publique, il s'agissait du seul organisme susceptible d'assurer la prestation du programme. Aussi, après bien des échanges, j'ai effectivement signé l'entente de contribution. Non, je n'ai pas personnellement tenu ces conversations avec l'organisme.
    Merci.
    Monsieur Dong et madame Brière, vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame la ministre, je vous remercie beaucoup de votre participation.
     Je me souviens que vous avez dit avoir parlé avec l'organisme UNIS après que l'organisme vous eut envoyé à vous personnellement ainsi qu'à quelques autres ministres une proposition concernant l'entrepreneuriat social des jeunes. Nous avons appris que l'organisme UNIS n'était pas à ce moment-là enregistré auprès du gouvernement à titre d'organisme de lobbying, mais vous avez néanmoins accepté de leur parler.
    Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous avez accepté de parler avec les représentants d'un organisme qui n'était même pas inscrit au registre des lobbyistes? Est-ce que vous vérifiez souvent si les organismes qui souhaitent s'entretenir avec vous sont enregistrés? D'après vous, à qui incomberait la responsabilité d'effectuer cette vérification?
    Madame la présidente, la proposition spontanée concernant l'entrepreneuriat social des jeunes a été communiquée à mon bureau. À titre de ministre de la Jeunesse, je parle sans arrêt avec de nombreux organismes. Je préconise une politique de la porte ouverte afin de pouvoir tenir ce genre de conversations. Étant donné que je fais partie d'un gouvernement fédéral qui s'est engagé à plus d'ouverture, de transparence et d'accessibilité envers les Canadiens, il est important de tenir ce genre de conversations.
    Pour ce qui est du lobbying, selon ma compréhension de la loi, il appartient aux lobbyistes eux-mêmes de déclarer qu'ils ont exercé des pressions auprès de ministres, de fonctionnaires et ainsi de suite. Par conséquent, je ne pense pas qu'il soit de ma responsabilité de faire des vérifications à ce sujet.

[Français]

    Madame Brière, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur Dong et madame la présidente.
    Bonjour, madame la ministre.
    Je vous remercie de répondre à nos questions. Dans votre présentation, vous avez évoqué les valeurs qui vous guident dans votre travail et réitéré le fait que les gens travaillant autour de vous devaient respecter le Code régissant les conflits d'intérêts des députés, la Loi sur les conflits d’intérêts, et ainsi de suite. Plus tôt, M. Shugart, le greffier du Conseil privé, nous a affirmé de nouveau que son devoir était de bien conseiller les ministres, de manière impartiale, et de toujours dire la vérité. J'imagine que vous vous attendez également à cela de la part de toute votre équipe, n'est-ce pas?
(1455)
    Oui. Les membres de mon équipe et moi-même, ainsi que tout le monde, je crois, essaient de faire leur travail dans un contexte de pandémie. Nous travaillons donc à une vitesse jamais vue auparavant. Nous n'avons pas beaucoup d'expérience de ce type de situation. Nous faisons du mieux que nous pouvons. Notre priorité est de répondre aux besoins des Canadiens pendant cette pandémie. Cela demeure ma priorité.
    Vous n'aurez peut-être pas le chiffre exact et je le comprends, mais pouvez dire combien de personnes ont été impliquées dans la prise de décisions quant à la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant et combien ont participé à son élaboration?
    En ce qui concerne la fonction publique, c'est une question à laquelle ma sous-ministre peut aussi répondre. Toutes nos équipes, y compris la mienne, ont travaillé très fort avec plusieurs personnes. Je pense que toute mon équipe ainsi que plusieurs personnes de la fonction publique ont travaillé à cela. Je m'excuse de ne pas pouvoir vous donner un nombre précis.
     Je comprends.
    En tant que gouvernement, pourquoi a-t-on à coeur de mettre en oeuvre un programme qui soutient les jeunes?

[Traduction]

     Je dirais que le 22 avril, le premier ministre a annoncé une aide financière de 9 milliards de dollars pour de nombreux programmes destinés aux étudiants.
    Quant au portefeuille de la jeunesse, c'est un sujet qui intéresse particulièrement le premier ministre. Avant son entrée en fonction, il s'occupait activement d'organismes pour la jeunesse ainsi que de jeunes, et lorsqu'il était député dans le troisième parti, il agissait comme critique en matière de jeunesse. Lorsqu'il est devenu premier ministre, il a conservé ce portefeuille à titre de ministre de la Jeunesse. En 2019, il m'a demandé d'assumer ces responsabilités parce qu'il était essentiel de répondre aux besoins du deuxième groupe démographique en importance dans notre pays.
    La pandémie a touché tous les Canadiens, et les jeunes ne font pas exception. C'est parce que nous savons que les étudiants devront assumer des coûts à l'automne et que nous voulons nous assurer qu'ils disposeront aussi de mécanismes d'aide. Cette pandémie a touché de manière disproportionnée certaines communautés, et c'est la raison pour laquelle mon portefeuille et mes responsabilités sont si importants. Parce que nous devons nous assurer que personne n'est laissé pour compte. Tous les Canadiens méritent de recevoir de l'aide, et nous serons là pour les aider et pour offrir des programmes à tous.

[Français]

    À cet égard, quels sont les commentaires concernant le fait que le programme n'a pas été lancé?

[Traduction]

    Madame la présidente, lorsque je parle en anglais, j'entends la traduction en français dans mon casque d'écoute. C'est ainsi que la question de la députée m'a échappé. Si elle pouvait la répéter, ce serait bien. Je m'efforcerai de répondre brièvement.

[Français]

    Quels sont les commentaires concernant le fait que le programme n'a pas été lancé en fin de compte?

[Traduction]

    Nous avons reçu de nombreux courriels et commentaires. Et nous avons bien entendu pris connaissance de la couverture médiatique.
    La Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant représentait un programme supplémentaire. Nous avons déjà mis en place une série de programmes pour venir en aide aux étudiants durant la pandémie, reconnaissant le fait qu'ils ont eux aussi besoin de soutien financier. Nous savons par ailleurs que les étudiants font partie de la solution. Actuellement, nous savons que les Canadiens souffrent, que des collectivités souffrent.
    Nous faisons la promotion du bénévolat. Pour ma part, je sais qu'en grandissant je n'aurais pas pu acquérir l'expérience qui est la mienne si je n'avais pas fait de bénévolat. Le bénévolat, qui consiste à venir en aide à nos collectivités, est un autre moyen...
    Madame la ministre Chagger, je vous remercie.
    ... d'acquérir et de perfectionner des compétences. C'est un aspect important des programmes dont nous assurons la prestation. Il est vraiment malheureux et regrettable que nous n'ayons pu offrir cette bourse.
(1500)
    Merci.
    Je vais céder la parole à M. Fortin pour six minutes.

[Français]

    Bonjour, madame la ministre.
    Tantôt, vous avez dit à mon collègue conservateur que vous ne saviez pas combien d'argent avait été envoyé à l'organisme UNIS et combien d'argent avait été retourné par cet organisme. Est-ce que j'ai bien compris?
    Vous n'avez aucune idée des sommes d'argent qui ont transité entre le gouvernement et l'organisme UNIS depuis ce printemps, c'est cela?

[Traduction]

    Madame la présidente, ce n'est pas que nous ignorons le montant. Nous pouvons communiquer les détails concernant les sommes qui ont été déboursées: 30 millions de dollars ont été remis à l'organisme dans le cadre de l'entente de contribution. Je ne connais pas le montant qui a été remis. Mais j'ai offert de fournir ultérieurement ce renseignement au Comité.

[Français]

    Je vous remercie, madame la ministre. C'est gentil et je vous en suis reconnaissant.
    Si je comprends bien, vous pourrez nous transmettre l'information concernant les sommes exactes qui ont été envoyées et celles qui ont été retournées, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Oui. Je vais m'assurer que vous recevrez ce renseignement.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Nous savons que la première cohorte s'est vu attribuer un certain montant dans le cadre de l'entente de contribution, un document à cet effet a été fourni aux députés.

[Français]

    Vous allez donc nous envoyer les chiffres.

[Traduction]

    Puis, il y a eu la cohorte supplémentaire...
    M. Rhéal Fortin: J'ai un problème de temps, madame la ministre.
    L'hon. Bardish Chagger: C'est justement pour cela que je vous réponds en anglais. Je crois comprendre que vous disposez de plus de temps pour la traduction.

[Français]

    Je vous remercie.
    En réponse à une question posée plus tôt, vous avez répondu que vous aviez donné des conférences pour l'organisme UNIS sans vérifier si celui-ci était inscrit au Registre des lobbyistes. Vous avez dit que, selon vous, ce n'était pas votre responsabilité de vous informer à ce sujet.
    Avez-vous bel et bien dit que ce n'était pas votre responsabilité de vérifier si l'organisme UNIS était inscrit au Registre?

[Traduction]

    Madame la présidente, j'ai répondu que je comprends qu'il appartient aux lobbyistes de déclarer leurs activités de lobbying.

[Français]

    Vous ne pensiez donc pas que vous aviez la responsabilité de vérifier cette information. C'est cela?

[Traduction]

    Madame la présidente, j'ai des responsabilités envers toutes les parties prenantes. J'ai des responsabilités envers mes électeurs. Et je prends mes responsabilités très au sérieux.

[Français]

    Vous en avez beaucoup, des responsabilités, mais n'en avez-vous pas à l'égard du Registre?
    Est-ce que vous avez demandé au commissaire au lobbyisme si, en tant que ministre, vous aviez la responsabilité de vous assurer que les gens qui viennent vous voir sont bien inscrits au Registre des lobbyistes? Avez-vous vérifié cela auprès du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique?

[Traduction]

    Chaque fois que j'ai besoin de renseignements de la part du commissaire à l'éthique, je lui écris ou je demande à mon équipe de le faire afin d'obtenir les renseignements en question. De même, pour m'assurer de bien comprendre ce que j'ai le droit de dire aujourd'hui et ainsi de suite, je me suis renseignée auprès du commissaire. Je prends mes responsabilités très au sérieux.

[Français]

    Je vais répéter ma question: avez-vous vérifié auprès du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique ou du commissaire au lobbyisme si vous aviez la responsabilité de faire des vérifications dans le Registre? Avez-vous demandé une opinion?

[Traduction]

    Dans ce cas, je n'ai communiqué ni avec l'un ni avec l'autre pour savoir si je pouvais m'adresser à un organisme jeunesse ou non. En tant que ministre de la Jeunesse, je favorise une politique de la porte ouverte. Je m'entretiens avec de nombreux organismes. Je trouve qu'il est important d'être disponible et accessible aux organismes afin de pouvoir entendre non seulement leurs préoccupations, mais aussi leurs solutions. Je serai toujours accessible pour les Canadiens.

[Français]

     D'accord, je vous remercie, madame la ministre.
    Excusez-moi, je ne veux pas vous bousculer, mais j'ai seulement quelques minutes. Vous êtes sympathique, mais le temps joue contre moi.
    Madame la ministre, à votre connaissance, quelles vérifications avez-vous faites quant à la solvabilité de l'organisme à qui vous deviez confier ce mandat, en l'occurrence l'organisme UNIS?
    Madame la présidente, je vais demander à ma sous-ministre.
    Le savez-vous, madame la ministre?
    J'aimerais avoir la réponse de la ministre, madame la présidente.
    Nous pourrons entendre votre adjointe après, madame la ministre. Personnellement, quelles vérifications avez-vous faites?
    Madame la présidente, je sais qu'il n'y a pas beaucoup de temps pour que le député puisse poser des questions. Je veux qu'il reçoive l'information assurant que tout le travail a été fait. C'est important de donner au député quelques instants afin de fournir cette information et de lui permettre de la recevoir.
(1505)
    Ne perdez pas de temps à me dire tout cela, car je le sais déjà, madame la ministre. En tout respect, je suis au courant de cela.
    Je veux savoir si, oui ou non, vous étiez personnellement au courant de certaines vérifications concernant la We Charity Foundation.

[Traduction]

     Madame la présidente, je peux vous dire, tout comme je l'ai fait devant le Comité des finances, que de nombreuses conversations ont eu lieu. En effet, des préoccupations ont été soulevées, à savoir si l'on avait procédé à toutes les vérifications raisonnables. Je sais que la fonction publique, la fonction publique professionnelle et non partisane, travaille vraiment fort. Je suis convaincue que les fonctionnaires ont fait le nécessaire. C'est pourquoi...

[Français]

    Ce n'était pas ma question. Nous ne sommes pas à la Chambre.

[Traduction]

    ... mon adjointe pourrait fournir des exemples concrets du type de renseignement que souhaite obtenir le député. Je pense qu'il est important qu'elle puisse fournir ces précisions, si le député souhaite l'entendre.

[Français]

    Madame la présidente, j'ai seulement quelques minutes. Pouvez-vous demander à la ministre d'arrêter? Mon temps de parole s'écoule.

[Traduction]

    C'est votre question.

[Français]

     Excusez-moi, madame la ministre.
    Il y a le délai de l'interprétation et celui que vous prenez, madame la ministre prend pour nous expliquer toutes sortes de choses qui ne sont pas pertinentes quant à la question et je n'ai pas beaucoup de temps.
    Puisque vous m'avez dit que vous ne le saviez pas, je voudrais entendre votre adjointe, effectivement. Quelles vérifications a-t-elle faites au sujet de l'organisme UNIS?

[Traduction]

    Madame la présidente, les fonctionnaires signent de nombreuses ententes de contribution chaque année. Ils...

[Français]

    J'invoque le Règlement, madame la présidente.

[Traduction]

    ... agissent comme des professionnels qui font preuve de toute la diligence nécessaire...

[Français]

    Madame la présidente, vous nous avez dit tantôt que les questions et les réponses seraient environ de la même durée. Nous perdons notre temps.
    J'ai demandé à avoir la réponse de l'adjointe.

[Traduction]

    ... et c'est pour cette raison qu'il est important que la fonction publique...
    Excusez-moi, madame la ministre.
    Monsieur Fortin, je me ferai un plaisir de répondre à votre demande, mais il y a un ordre à respecter. Je dois demander à la ministre d'arrêter, et ensuite je peux vous redonner la parole.
    Monsieur Fortin, vous pouvez continuer.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je m'excuse, madame Chagger. Je ne veux pas vous bousculer, mais nous n'avons pas beaucoup de temps. J'ai eu votre réponse et je vous en remercie.
    Maintenant, je voudrais entendre la réponse de votre adjointe à la même question. Est-ce possible ou préférez-vous qu'elle n'y réponde pas?

[Traduction]

    Monsieur Fortin, je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
    Il me reste encore du temps.

[Français]

    Je regrette.

[Traduction]

    Non, votre temps est écoulé.
    Merci beaucoup. Je me ferai un plaisir de vous fournir ce renseignement.
    Madame la sous-ministre, je suis désolée, mais je ne vous ai pas cédé la parole.
    Dans chaque entente, il y a des clauses et des mesures d'atténuation des risques. Des vérifications financières sont effectuées...
    Madame la sous-ministre, veuillez cesser de parler s'il vous plaît.
    Très bien. Je m'excuse.
    Merci.

[Français]

    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.

[Traduction]

    Monsieur Fortin.

[Français]

    Nous avons un problème de délai supplémentaire à cause de l'interprétation.

[Traduction]

    Non, non.

[Français]

    Monsieur Poilievre, vous dites que non, mais c'est le cas.
    Madame la présidente, il y a des délais entre les questions et les réponses, ce qui fait perdre du temps. Quand on parle anglais ici, au Comité, on a davantage de temps pour questionner que...

[Traduction]

    Monsieur Fortin, je vous remercie.

[Français]

    Est-ce que je peux terminer d'expliquer la raison pour laquelle j'invoque le Règlement, madame la présidente?

[Traduction]

    Merci. Vous avez terminé.

[Français]

    Vous me remerciez, mais je voudrais terminer.

[Traduction]

    Merci.
    Vous en êtes à sept minutes et 26 secondes, monsieur Fortin. Jusqu'ici, je me suis montrée très généreuse avec vous pour ce qui est du temps. Je vous demanderais donc de respecter cette règle. La ministre peut répondre aux questions comme il lui plaît, il vous incombe de l'interrompre si sa réponse ne vous satisfait pas.
    Merci, monsieur Fortin.

[Français]

    Madame la présidente, au début, vous nous avez dit que nous aurions un temps de réponse équivalent à celui des questions, ce qui n'était plus le cas, sans compter le délai de l'interprétation.

[Traduction]

    Nous poursuivons.
    Monsieur Angus, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, madame Chagger, d'être revenue.
    Lorsque nous étions au Comité des finances, on vous a posé une question très directe, à savoir si vous aviez eu des interactions avec les Kielburger ou avec quelqu'un d'autre de l'organisme UNIS en prévision de cette réunion du Cabinet. Pourquoi ne nous avez-vous pas parlé de cette réunion du 17 avril avec Craig Kielburger?
    Madame la présidente, ces réunions sont publiques. La question que l'on m'a posée était si j'avais parlé avec l'organisme concernant la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. J'ai répondu à cette question avec franchise et honnêteté. Le député me donne aujourd'hui l'occasion de fournir des renseignements au sujet de l'organisme au sens large, et j'ai fourni ces renseignements pour le compte rendu. J'ai répondu à la question qui m'a été posée.
    En réalité, la question qui vous a été posée était très simple: Avez-vous eu des réunions avec quiconque du mouvement UNIS en prévision de la réunion du Cabinet? Ils n'ont pas mentionné la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. C'est vous qui venez d'ajouter cela. C'était pourtant une question simple.
    Ma frustration tient au fait que lorsque l'on vous pose une question simple — avez-vous rencontré les Kielburger? — vous ne semblez pas capable de fournir une réponse directe. Cela ne fait que brouiller les cartes. Je suis préoccupé parce que cette réunion, à mon sens, était d'une importance cruciale, et vous ne nous en avez pas parlé. Pourquoi ne pas nous avoir dit que vous aviez rencontré Craig Kielburger?
    Madame la présidente, je pense que vous avez pris note de la longueur de la question. Je prendrai donc le même temps pour y répondre.
    J'invite le député à consulter le compte rendu officiel, et il ne pourra que constater que la question m'a été posée dans le contexte de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant...
    C'est faux.
    ... soit le contexte dans lequel la motion a été introduite.
    Il peut m'interrompre, s'il le veut, c'est d'ailleurs une façon de faire qu'il adopte régulièrement. J'ai mis les choses au clair aujourd'hui en ce qui concerne les deux occasions au cours desquelles j'ai été en contact personnellement avec l'organisme. Le 10 décembre, j'ai participé à l'événement WE Day au cours duquel je me suis adressée à un auditoire de jeunes au Centre national des arts. C'était le 10 décembre 2019. On m'a demandé d'avoir une conversation avec l'organisme concernant une proposition spontanée d'entrepreneuriat social...
(1510)
    Madame la ministre, je vais maintenant céder la parole à M. Angus.
    Merci.
    Voici le problème. On vous a posé une question très simple, mais bien entendu, nous avons le compte rendu. C'est dans le compte rendu. En fait, bien entendu, vous ne pouviez pas parler de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant le 17 avril parce qu'elle n'existait pas encore. On en a fait l'annonce seulement le 22 avril. Encore une fois, c'est le fait que vous coupiez les cheveux en quatre qui m'exaspère.
    Maintenant, faisons un saut dans le temps, parce que vous nous avez dit aussi que Rachel Wernick en avait suggéré l'idée. Elle nous a dit que les fonctionnaires lui avaient suggéré de faire les premiers pas, mais c'est plutôt le lien entre Craig Kielburger et elle-même que je souhaite porter à votre attention. Il lui adresse un courriel — dans lequel il se présente — et lui déclare alors, à la lumière de la réunion qu'il a eue avec la ministre Chagger, « Dans cette optique, nous proposons deux programmes — et nous pourrions assurer la prestation des deux ou d'un seul de ces programmes ». Vous êtes le laissez-passer de Craig Kielburger.
    Je ne vois pas en quoi votre apparition lors d'un événement WE dans un auditorium est pertinente dans les circonstances, alors que c'est le 17 avril que vous avez une réunion avec Craig Kielburger. Vous ne nous en avez pas parlé. Il a fallu que cela sorte dans les médias. Le fait est que Craig Kielburger se sert de vous pour se présenter à Rachel Wernick. Il lui dit qu'il a non seulement un programme, mais qu'il en a même deux. Et que ces programmes sont prêts. Que s'est-il passé au cours de cette conversation pour les inciter à présenter deux programmes plutôt qu'un seul?
    Madame la présidente, on m'a invitée à venir témoigner, et je fais tout mon possible pour que les renseignements soient fournis rapidement. Je sais que définitivement, lorsque j'ai comparu devant le Comité des finances je me suis assurée de faire connaître les détails de l'entente de contribution. J'ai aussi déclaré que nous allions transmettre tous les documents pour que les députés et les Canadiens puissent avoir ces réponses. Je pense qu'il est important qu'ils obtiennent ces réponses.
     Pour ce qui est de la réunion du 17 avril à laquelle le député fait allusion, elle concernait la proposition spontanée d'un programme d'entrepreneuriat social pour les jeunes. À titre de ministre de la Jeunesse, il est important que je sois tenue au courant. Cette proposition n'est pas une chose qui m'a été présentée en premier. Comme l'a indiqué Rachel Wernick dans son témoignage, elle avait été présentée à un autre ministre aussi, et ensuite on m'en a fait part. Je me suis libérée pour écouter ce que l'on avait à dire à ce sujet. Ce n'est pas le genre de proposition sur laquelle je pourrais avoir pleine compétence ou dont je pourrais assumer la responsabilité...
    Non, je sais. Je comprends ça.
    ... néanmoins, j'ai écouté ce que l'on avait à dire, mais ce n'est pas une chose que j'envisageais d'entreprendre.
    Eh bien, de toute évidence, vous avez fini par l'envisager, parce que Rachel Wernick a reçu un courriel de Craig Kielburger dans lequel il affirme qu'il n'a pas seulement une proposition à faire, mais qu'il en a deux. Et c'est justement la deuxième proposition qui est devenue la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. C'en était la forme.
    En ce qui concerne le fait que vous avez tenu une réunion le 17 avril, que le premier ministre en a fait l'annonce le 22 avril, et que Craig Kielburger a communiqué ensuite avec Rachel Wernick parce qu'il vous a rencontrée et qu'il a deux propositions à faire, je pense que vous devriez faire des efforts pour vous montrer un peu plus transparente avec nous, madame la ministre. Vous devriez nous dire ce que vous avez recommandé à Craig Kielburger afin que nous puissions enfin obtenir une réponse sans détour.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Pour la deuxième fois aujourd'hui, M. Angus fait mention de cette communication entre M. Kielburger et Rachel Wernick.
    Un député: En quoi est-ce un rappel au Règlement?
    Je vais produire le document. Voulez-vous que je le produise?
    C'est moi qui ai le droit de parole.
    Un député: Ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Monsieur Dong...
    Je me demande si M. Angus pourrait communiquer ce document aux autres membres du Comité.
    Monsieur Dong, ce n'est pas un rappel au Règlement. Je vais poursuivre.
    Je suis désolé, mais est-ce que cet échange gruge mon droit de parole?
    Je suis tout à fait disposé à communiquer le courriel adressé à Craig Kielburger...
    Des députés: Oh, oh!
    Je ne sais pas de quoi il parle. Je pense que c'est une question légitime.
    Monsieur Dong, il ne s'agit pas d'un recours au Règlement touchant la procédure. Rien ne vous empêche d'aller voir le député après la réunion. S'il souhaite vous montrer le document en question, eh bien, il le fera.
    Je pense que c'est clairement...
    Madame la présidente, je suis tout à fait disposé à communiquer le courriel qui a été rendu public. Si mon collègue n'a pas fait son travail, je n'y peux rien, mais j'aimerais tout de même entendre la réponse de la ministre.
    Monsieur Angus, je remets le chronomètre en marche. Vous avez la parole.
    Pourrions-nous simplement obtenir de la ministre qu'elle nous dise ce qui s'est passé exactement au cours de cette réunion, sans ingérence de la part de ses collègues libéraux? Craig Kielburger s'est ensuite adressé à Rachel Wernick et lui a dit qu'il avait deux propositions. Cette deuxième proposition est devenue ce qu'il est convenu d'appeler la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, avec l'ajout de quelques fanfreluches.
     Il s'est passé quelque chose au cours de cette réunion, madame la ministre Chagger, et vous ne nous en avez pas parlé lors de votre comparution devant le Comité des finances. Le moment est venu de nous le dire. Parlez franchement.
    Madame la présidente, on m'a demandé de prêter serment. Je l'ai fait. Je pense qu'il est important d'admettre que je mets à votre disposition toute l'information dont je dispose. Ce n'est pas que je ne veuille tenir aucun compte de l'interprétation du député. Mais je n'accepte pas que l'on dise que je retiens de l'information. Au contraire, je vous fournis toute l'information avec franchise.
    À la première occasion que j'ai eue de me présenter au Comité des finances, c'est ce que j'ai fait.
(1515)
    Madame la ministre Chagger, je vous remercie beaucoup.
    À la première occasion que j'ai eue de me présenter au Comité de l'éthique, c'est ce que j'ai fait. Je suis présente afin de m'assurer que vous receviez toute l'information disponible.
    Si vous nous l'aviez dit devant le Comité des finances, nous ne nous retrouverions pas devant tout ce gâchis.
    Monsieur Angus, votre temps est écoulé.
    Monsieur Poilievre, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Est-ce que vous avez seulement prononcé le mot « bénévole » pendant votre réunion de 30 minutes avec M. Kielburger?
    Madame la présidente, si je me souviens bien, il s'est davantage agi d'écouter mon interlocuteur plutôt que...
    Le mot a-t-il été prononcé, oui ou non?
    Pas que je me souvienne. Je ne peux pas affirmer que je l'ai dit.
    Étiez-vous présente?
    Oui, je l'étais.
    Est-ce que quelqu'un d'autre a prononcé ce mot?
    Madame la présidente, je pourrais répondre de façon plus détaillée. Je me souviens que la conversation portait sur la possibilité de faire avancer et connaître leur proposition spontanée. Je les ai écoutés.
    Non, vous ne répondez pas à ma question. Je vous demande si le mot « bénévole » a été prononcé.
    Est-ce que Service jeunesse a été mentionné?
     Service jeunesse est prioritaire en ce qui me concerne.
    Très bien, donc la réponse est oui.
    Nous avons instauré Service jeunesse Canada en 2018.
    Oui ou non...
    Madame la présidente, je pense qu'il est important, puisque je suis...
    Oui ou non...
    ... désireuse de fournir des renseignements exacts, de fournir toute l'information que je possède.
    Madame la ministre, merci. Je comprends bien ce que vous dites, mais la question qui vous est posée est très simple. Il s'agit vraiment d'une question à laquelle vous pouvez répondre par oui ou par non. Vous devez faire preuve de respect envers le député qui vous pose la question et lui répondre en conséquence. Merci.
    Madame la ministre, oui ou non?
    Je dirais que l'expression « occasions de bénévolat » a été dite, en effet.
    Bon, très bien. Maintenant nous progressons. Cela s'est passé seulement cinq jours avant que l'on annonce le lancement de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant et que l'on fasse connaître son nom.
    Bien entendu, cette bourse n'a pas été mentionnée puisqu'elle n'existait pas encore au moment de votre réunion, mais avez-vous parlé de quoi que ce soit d'autre à part la proposition d'entrepreneuriat social des Kielburger, peu importe ce que c'est, oui ou non?
    J'ai certainement demandé comment les jeunes avec lesquels ils travaillent s'en sortaient pendant la pandémie.
    Est-ce que les Kielburger savaient que le premier ministre ferait une annonce seulement quelques jours plus tard, soit le 22 avril, concernant les programmes pour les jeunes?
    Je ne peux pas parler pour les Kielburger. Personnellement, je ne savais pas le 17 avril que le premier ministre ferait cette annonce.
    Très bien, donc vous ne le saviez pas, et ce, même si vous êtes la ministre responsable de cette annonce, c'est étrange.
    Combien de membres du personnel étaient présents lors de cette réunion avec vous-même et les Kielburger?
    Madame la présidente, pour plus de précision, fait-il allusion aux membres de mon équipe ou de celle des...
    J'étais la seule personne de mon équipe à participer à cet échange téléphonique, parce qu'il s'agissait d'une proposition spontanée.
    Très bien. Y avait-il des fonctionnaires présents?
    De mon équipe, non. C'est moi qui ai fait l'appel.
    Il s'agissait d'une simple conversation téléphonique, entre deux personnes.
    De mon équipe, il n'y avait que moi. Du mouvement UNIS, il y avait Craig Kielburger, et je pense aussi qu'il y avait Sofia au téléphone avec nous. C'est lui qui devrait savoir s'il y avait d'autres membres de son équipe présents. On m'a fourni le numéro de téléphone, et je l'ai composé.
    C'est parfait. Je vous remercie.
    Est-ce que quelqu'un du CPM ou du bureau du ministre des Finances savait que vous alliez faire cet appel?
    Pas que je sache, mais je peux vérifier et vous revenir ensuite à ce sujet.
    Avez-vous pris des notes?
    Madame la présidente, cet appel portait sur un programme d'entrepreneuriat social non sollicité, donc j'ai reçu...
    Non, ce n'est pas cela que je vous demande. Avez-vous pris des notes, oui ou non?
    On m'a fourni un document d'information, que j'ai transmis.
    D'accord. Avez-vous oui ou non pris des notes pendant cet appel téléphonique, pour la quatrième fois?
    Tout ce que j'ai reçu à ce sujet portait sur ce qui...
    Non, avez-vous pris des notes manuscrites? C'est ça la question. C'est une question simple, oui ou non?
    La seule note que j'ai pu prendre aurait été pour demander à mon équipe de faire le suivi avec les bureaux de mes collègues et avec les fonctionnaires au sujet de la proposition.
    C'est étrange, parce qu'il y a un moment, vous avez dit qu'une fois l'appel terminé, vous n'étiez pas intéressée par cette proposition. Maintenant, vous faites le suivi... Ce devait être sur une autre proposition que vous faisiez le suivi.
    Madame la présidente, le député peut essayer de me faire dire des choses que je n'ai pas dites. Ce ne serait pas la première fois.
    Ce sont vos propres mots.
    C'est un comportement répétitif...
    Ne nous laissons pas distraire.
    Je dirais que c'est une proposition que je n'envisageais pas, mais je trouvais important que l'équipe et les fonctionnaires en soient informés, et qu'ils l'examinent en vue d'en évaluer les mérites.
    D'accord. Très bien, donc vous avez décidé que vous n'étiez pas intéressée à aller de l'avant avec cette proposition, mais cependant vous avez pris des notes à l'intention de votre personnel et des fonctionnaires pour qu'ils fassent le suivi. Très bien. C'est très clair.
    Je vais passer à une autre question maintenant.
(1520)
    Madame la présidente, je pense que je devrais poursuivre.
    Madame la présidente...
    Madame la présidente, elle devrait avoir la possibilité de répondre.
    Non, je pose ma question. Je n'ai pas encore posé de question. Elle a eu amplement l'occasion de répondre, et je suis satisfait.
    Vous m'avez prêté des propos — très raffiné de votre part.
    Sur la prochaine question, étiez-vous au courant que le premier ministre avait retiré votre proposition de l'ordre du jour de la réunion du Cabinet, le 8 mai, oui ou non?
    Le premier ministrea confirmé cette information lors de son témoignage.
    Le mouvement UNIS avait déjà commencé la mise en œuvre de la Bourse canadienne pour le bénévolat canadien le 5 mai, trois jours plus tôt. Avez-vous donné des instructions à quelqu'un d'appeler immédiatement UNIS pour leur dire « Arrêtez tout. Le premier ministre a reculé. Ce programme n'a pas été approuvé par le Cabinet; par conséquent, UNIS doit cesser toute activité à cet égard », oui ou non?
     Madame la présidente, comme l'a déclaré le premier ministre, il s'agissait simplement de vérifier si les fonctionnaires avaient effectué les vérifications raisonnables, aussi j'aimerais que mon adjointe puisse disposer d'une minute pour répondre.
    Je suis désolée, madame la ministre. Nous n'avons plus de temps.
    Je vais céder la parole à M. Gerretsen pour cinq minutes.
    J'invoque le Règlement, madame la présidence. Je pense en effet qu'elle devrait avoir la chance de répondre, si c'est possible.
    Monsieur Poilievre, vous me mettez dans une position délicate.
    Je pensais qu'il n'employait ce stratagème qu'avec nous.
    Monsieur Gerretsen, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame la ministre, vous avez été la cible d'une accusation plutôt hostile de la part de M. Poilievre. Aimeriez-vous y répondre?
    Madame la présidente, je pense qu'il serait important que mon adjointe puisse répondre aux accusations portées par le député conservateur.
    Vous avez la parole.
    La question porte sur le fait que la date de début est antérieure à la réunion. Pourquoi la date d'entrée en vigueur était-elle le 5 mai? Comme c'est souvent le cas avec les ententes de contribution, une date de début peut être indiquée avant la date de signature de l'entente. C'est un procédé auquel on a recours habituellement lorsque les organismes sont susceptibles d'engager des dépenses avant la signature. Si la date de début antérieure n'est pas approuvée, l'organisme est remboursé pour les dépenses engagées, et il le fait entièrement à ses risques. De même, si l'entente n'est pas signée, l'organisme ne sera pas remboursé pour les dépenses engagées. La négociation d'une entente de contribution peut parfois prendre des semaines, et c'est ce qui s'est passé dans le cas qui nous occupe.
    Merci.
    Merci.
    Madame la ministre, ne tournons pas autour du pot. Il serait inutile de prétendre que votre comparution devant ce comité n'a rien à voir avec les retombées de la situation entourant la bourse pour le bénévolat et UNIS. Je vais aller droit au but. Avez-vous sciemment évacué les signes d'un conflit d'intérêts ou toute perception d'un conflit d'intérêts lorsque l'on vous a présenté la recommandation de choisir l'organisme UNIS pour assurer la prestation de ce programme?
    Madame la présidente, je peux vous dire que je prends très au sérieux les dispositions de la Loi sur les conflits d'intérêts. Non, je n'aurais jamais évacué de tels signes. C'est la raison pour laquelle j'ai travaillé avec les fonctionnaires afin de m'assurer que l'on avait effectué toutes les vérifications raisonnables. Et je pense que c'est justement ce qu'ils ont fait.
    Ils vous ont fait cette recommandation, n'est-ce pas, madame la ministre? Lorsque M. Barrett s'est entretenu avec le greffier du Conseil privé auparavant, il a dit ceci — je cite M. Barrett — « le Cabinet a accepté la recommandation de la fonction publique ». Cette déclaration s'éloigne un peu de la rhétorique des conservateurs qui insinuent que ce n'était pas le cas.
    Il s'agissait d'une recommandation de la fonction publique, comme l'a déclaré M. Barrett. Et-ce exact?
    Madame la présidente, c'est une recommandation qui a été réitérée en plusieurs occasions. Comme on l'a mentionné, c'est une proposition qui a été présentée au Comité sur la pandémie de COVID-19. De nombreuses questions ont été soulevées. Elles ont ensuite été transmises aux fonctionnaires. Ils ont répondu et sont revenus avec la même recommandation. Nous avons aussi demandé d'autres recommandations. Qui d'autre était en mesure d'assurer la prestation d'un programme de cette envergure, de cette portée et dans les délais impartis? Encore une fois, par écrit, la fonction publique nous a fait savoir qu'il s'agissait du seul organisme susceptible d'assurer la prestation d'un programme de cette envergure, de cette portée et dans les délais que nous avions prévus.
    Je vous remercie beaucoup, madame la présidente. Ce sera tout.
    Je vais poursuivre en accordant une question aux conservateurs et une question aux libéraux.
    La parole est à l'un des députés conservateurs.
    Merci beaucoup, madame la présidente. La question n'est pas de savoir pourquoi l'entente de contribution a été antidatée. La question est très simple. Le premier ministre affirme qu'il a mis l'ensemble du programme UNIS en suspens le 8 mai.
    Madame la ministre Chagger, est-ce qu'un membre du gouvernement, à ce moment, a donné des instructions à UNIS de cesser l'administration du programme lorsque le premier ministre a pris cette décision le 8 mai, oui ou non?
(1525)
     Madame la présidente, c'était une longue question, mais je répondrai brièvement: pas à ma connaissance.
    C'est étrange.
    Maintenant un député libéral.
    Madame Shanahan, vous avez la parole.
     Merci, madame la présidente, et merci à vous, madame la ministre de votre présence avec nous aujourd'hui.
    Le premier ministre et le ministre des Finances ont tous deux présenté des excuses pour avoir omis de se récuser lors de la prise de décision d'engager l'organisme UNIS pour assurer la prestation de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Toutefois, le greffier du Conseil privé a aussi déclaré dans son témoignage que compte tenu de l'échelle même et du coût du programme, il aurait été difficile de ne pas les inclure dans la discussion.
    Qu'est-ce que l'on attendait de vous, en tant que ministre responsable de la BCBE, lorsqu'est venu le moment d'évaluer l'éventualité d'un conflit d'intérêts avant de conclure une entente de contribution avec l'organisme UNIS?
    Madame la présidente, en ce qui me concerne, cela faisait partie d'une série de programmes. Une somme de 9 milliards de dollars avait été allouée pour les étudiants, afin de reconnaître qu'eux aussi étaient touchés par la pandémie.
     Lorsqu'il s'est agi de ce programme en particulier, ma priorité a consisté à veiller à ce que les étudiants qui avaient le plus besoin d'aide la reçoivent. Je me préoccupais des langues officielles, et je voulais m'assurer que le programme était disponible tant pour les francophones que pour les anglophones. Je voulais m'assurer que les jeunes et les étudiants dans les régions rurales et éloignées y aient aussi accès, et je voulais m'assurer que les collectivités sous-représentées y aient accès elles aussi. C'est la raison pour laquelle je voulais m'assurer que l'on recueillait des données désagrégées. Pour comprendre où s'en allait l'argent, et pour que des mesures de contrôle soient mises en place dans l'entente de contribution.
    D'après le mode de fonctionnement des ententes de contribution, nous devons être en mesure d'assurer la prestation du programme en respectant la portée, l'échelle et l'échéancier prévus. Ce sont des renseignements qui doivent nous être fournis continuellement avant de pouvoir envisager d'élargir le programme à une deuxième cohorte. Ce sont certaines des mesures de contrôle qui ont été mises en place...
    ... afin que ceux qui avaient besoin d'un coup de pouce le reçoivent vraiment par l'intermédiaire des programmes que nous étions en train de mettre en place.
    Madame la ministre, je vous remercie.
    Merci, madame la ministre.
    Ceci dit, nous allons mettre fin à la présente réunion, et je vais suspendre la séance pendant que nous passons au témoin suivant.
    Encore une fois, madame la ministre Chagger, merci beaucoup de nous avoir accordé du temps aujourd'hui.
    Merci, madame la présidente.
    Merci mesdames et messieurs les députés.
    La séance est levée.
(1525)

(1535)
    Bienvenue à tous.
    Madame la ministre Qualtrough, je vous souhaite la bienvenue.
    Avec plaisir.
    Madame la ministre Qualtrough, comme vous le savez, notre comité a adopté la motion suivante le 22 juillet:
Que, conformément à l’article 108(3)(h) du Règlement, le Comité examine les mesures qui sont en place pour éviter et prévenir les conflits d’intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contribution et autres dépenses;
    C'est relativement à cette motion que vous avez été invitée à comparaître et à parler aujourd'hui. Dans un moment, je vais vous accorder 10 minutes pour présenter votre déclaration liminaire. Ce sera un peu difficile pour moi de surveiller la durée de votre intervention parce que je ne dispose d'aucun repère visuel. Je vous demande votre indulgence. Il se peut que je doive vous interrompre, mais j'essaierai néanmoins de le faire poliment.
    Nous vous demandons d'essayer d'harmoniser vos réponses avec la durée des questions qui vous sont posées. Ce sont les règles que nous utilisons compte tenu des contraintes imposées par la technologie pendant la pandémie de COVID.
    Ceci dit, je vous cède la parole, madame la ministre. Vous disposez de 10 minutes.
    Merci.
    Merci.
    N'hésitez pas à m'interrompre à tout moment. Je ne m'en formaliserai pas; au contraire, je trouve cela utile.
    Bonjour à tous. J'aimerais commencer par remercier le Comité de me permettre de participer à la réunion au téléphone. Cela me permet d'utiliser mon logiciel pour l'accessibilité et de participer de manière plus significative dans les deux langues, tout en ayant la possibilité de consulter mes notes d'allocution.
    Je suis accompagnée du sous-ministre délégué Benoît Robidoux d'EDSC. J'espère que ma participation vous sera utile.
    Si j'ai bien compris, d'après la motion qui a été adoptée par ce comité, vous êtes en train d'examiner les mesures qui sont en place, comme vous l'avez dit, pour éviter et prévenir les conflits d'intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contribution et autres dépenses. Plus précisément, je comprends que vous vous servez à titre d'étude de cas des apparitions publiques de Justin Trudeau, de Sophie Grégoire Trudeau, de Margaret Trudeau et d'Alexandre Trudeau. D'entrée de jeu, je dirai que je n'avais jamais entendu parler auparavant des apparitions publiques de Margaret Trudeau ou d'Alexandre Trudeau pour l'organisme UNIS ou pour d'autres organismes.
    Je sais que Margaret Trudeau fait la promotion de la santé mentale et du bien-être, et j'admire sa passion pour cet enjeu important. Je sais que le premier ministre et Sophie Grégoire Trudeau ont fait des apparitions publiques lors d'événements liés à UNIS dans le passé, et je considérais que cela était de notoriété publique. Tous deux font la promotion du leadership des jeunes et de l'autonomisation des jeunes depuis de nombreuses années.
    Personnellement, j'ai fait une apparition publique lors d'un événement de l'organisme UNIS en novembre 2016, à Vancouver. J'ai parlé devant des milliers de jeunes du pouvoir de l'inclusion et des choix qu'ils peuvent faire dans la vie de tous les jours pour s'assurer que personne n'est laissé pour compte, en particulier les personnes handicapées. Je n'ai pas été rémunérée pour cette conférence, et je n'ai pas réclamé le remboursement de mes frais.
    À titre de députée et de ministre du Cabinet, je suis très consciente de mes obligations au titre du Code régissant les conflits d'intérêts des députés et de la Loi sur les conflits d'intérêts. Je prends aussi très au sérieux la gestion de mes déclarations publiques et les exigences permanentes en matière de rapports.
    Je n'offre aucune excuse ni justification pour le premier ministre ou pour le ministre des Finances qui ne se sont pas récusés lors des discussions et de la prise de décision entourant le choix de l'organisme UNIS pour assurer la prestation de la BCBE. Les deux ont présenté leurs excuses et reconnu qu'ils auraient dû se récuser. Par ailleurs, le commissaire à l'éthique mène actuellement une enquête à ce sujet, et les deux s'y prêtent volontiers.
    Pendant cette période de pandémie, le rythme et l'ampleur de la prise de décisions sont sans égal. En tant que ministre de l'Emploi, je me suis retrouvée au centre de notre réponse à la pandémie. Pendant des mois, notre comité du Cabinet sur la COVID s'est réuni jour après jour pour planifier et mettre en œuvre notre intervention d'urgence. Le Cabinet se réunissait lui aussi régulièrement pendant plusieurs heures à la fois. Tous les jours, nous devons prendre des décisions aussi variées que celle de fermer la frontière ou d'organiser la distribution de l'EPI ou encore d'envoyer les forces armées dans les établissements de soins de longue durée parce que nos personnes âgées y meurent.
    Mes propres responsabilités comprenaient notamment la PCU, le programme Emplois d'été Canada, les travailleurs étrangers temporaires, le soutien aux personnes handicapées et diverses mesures destinées aux étudiants. Nous avons exercé nos activités en respectant le principe consistant à offrir aux Canadiens de l'aide rapidement et de manière fiable.
    Nous savions dès le départ que les choses ne seraient pas parfaites, et nous étions prêts à rectifier le tir, au besoin. Le temps manquait pour mettre les programmes à l'essai ou pour organiser des projets pilotes. Nous devions comprendre les limites des systèmes existants et travailler à l'intérieur de ces limites. Tout nouveau programme devait être simple. J'ai énormément de respect pour nos fonctionnaires, avec lesquels nous avons travaillé sans relâche. Ils ont accompli plus que leur devoir pendant cette période difficile.
    Ces derniers mois, nous avons fourni une aide financière aux Canadiens par l'intermédiaire de trois voies très importantes. Premièrement, une aide financière directe comme celle de la PCU et de la PCUE et les compléments apportés à l'Allocation canadienne pour enfants, à la TPS et à la SV. Deuxièmement, pour les provinces et les territoires, je pourrais vous donner l'exemple du complément salarial pour les travailleurs essentiels. Et troisièmement, nous avons collaboré avec des tierces parties à titre d'intermédiaires possédant de vastes réseaux et de bons antécédents. Ces tiers pouvaient assurer la prestation des programmes rapidement et venir en aide aux personnes d'une manière impossible à reproduire par le gouvernement. À titre d'exemple, nous avons demandé aux Fondations communautaires du Canada, à la Croix-Rouge et à Centraide d'assurer la prestation de notre Fonds d'urgence pour l'appui communautaire. Et nous avons aussi collaboré avec Hébergement femmes Canada pour assurer la distribution d'une aide financière aux refuges pour femmes des quatre coins du pays.
    Je vous cite les exemples du Fonds d'urgence pour l'appui communautaire et d'Hébergement femmes Canada dans le but de situer en contexte la décision de confier la prestation de la BCBE à l'organisme UNIS dans le cadre d'une entente de contribution sans appel d'offres. Il n'y a eu aucun appel d'offres dans l'un et l'autre de ces cas, parce que l'on a déterminé que ces organismes pouvaient avec efficacité et efficience mettre l'argent entre les mains des personnes et des organismes qui en avaient besoin tout en veillant à la reddition de comptes par le prestataire du programme. Les fonctionnaires d'EDSC peuvent fournir des renseignements précis sur les mesures de surveillance et de reddition de comptes intégrées dans ces ententes de contribution, y compris l'audit, les contrôles financiers, la surveillance et les exigences en matière de rapports.
(1540)
    À titre de ministre de l'Emploi, je suis responsable des mesures relatives à l'emploi étudiant, de la PCUE et des changements apportés au Programme canadien de prêts et bourses aux étudiants. La ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse est responsable de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant compte tenu de sa responsabilité à l'égard de Service jeunesse Canada. Nos responsabilités respectives sont très bien définies dans nos lettres de mandat.
    De jeunes Canadiens et des groupes d'étudiants nous ont fait savoir très clairement qu'ils se retrouvaient devant un été sans beaucoup de perspectives d'emploi et devant la possibilité réelle de ne pas pouvoir retourner aux études à l'automne. Ils avaient besoin d'un soutien au revenu, d'une hausse des prêts et bourses, et d'emplois. Ils souhaitaient aussi pouvoir se rendre utiles dans leur collectivité. Nous avons examiné les programmes existants afin de déterminer comment nous pourrions les améliorer ou en tirer parti. Le 22 avril, le premier ministre a annoncé un train de mesures d'une valeur de 9 milliards de dollars pour les étudiants. En tant que ministres, nous avons alors retroussé nos manches et commencé à fournir les mesures relevant de nos portefeuilles respectifs. Pour ma part, je me suis concentrée sur les prêts étudiants, sur l'emploi et les prestations. Cela représentait une somme de travail considérable qui comprenait notamment une nouvelle législation et des modifications réglementaires. La première fois que j'ai entendu parler de la recommandation de l'organisme UNIS pour assurer la prestation de la BCBE, le 5 mai, je me préparais en vue d'assister à une réunion du Comité du Cabinet sur la pandémie de COVID. C'était le jour même où on a discuté de la proposition. J'ai compris que le but de la BCBE était d'offrir aux jeunes gens des possibilités significatives de faire du bénévolat au sein de leur collectivité et de venir en aide au secteur sans but lucratif en fournissant des ressources qui manquaient cruellement.
    Compte tenu de la vitesse, de la portée et de l'échelle du programme, j'étais profondément convaincue que l'on avait besoin d'une tierce partie pour la mettre en œuvre. En tant que ministre responsable d'EDSC, je savais à quel point la fonction publique est sollicitée, et je savais ce qu'elle pouvait absorber ou non comme charge de travail. L'organisme chargé d'assurer la prestation de ce programme assumerait la tâche de sélectionner, accueillir, former et encadrer de jeunes Canadiens pendant ces importants mois d'été. Il devrait aussi faire le suivi des heures de bénévolat et distribuer les bourses. Je peux confirmer que la proposition de la BCBE était inscrite à l'ordre du jour de la réunion du Cabinet le 8 mai, mais qu'elle en a été retirée. Je n'ai pas participé aux discussions ayant conduit à son retrait de l'ordre du jour ni à celles relatives à la demande du premier ministre pour que l'on vérifie si on avait fait preuve de diligence raisonnable, étant donné que ce dossier ne me regardait pas. Comme vous le comprendrez, je ne peux vous communiquer le contenu des discussions qui ont eu lieu lors de la réunion du Cabinet le 22 mai au sujet de la BCBE en raison de la confidentialité des délibérations du Cabinet. Mais comme vous le savez, le Cabinet a décidé d'aller de l'avant avec la recommandation de signer l'entente de contribution avec UNIS en vue d'assurer la prestation de la BCBE.
    En conclusion, je déclare que la BCBE visait à offrir un moyen novateur d'offrir de l'aide aux étudiants, aux organismes sans but lucratif et aux collectivités, alors que plus que jamais le Canada a réellement besoin d'idées audacieuses et de solutions novatrices. Même si l'organisme UNIS n'offre plus le programme, nous demeurons tout aussi engagés à venir en aide aux jeunes et aux organismes sans but lucratif. Je peux assurer tous les membres de ce comité que notre gouvernement prend ses responsabilités en matière d'éthique très au sérieux. Nous n'avons pas été parfaits. Je réitère que tant le premier ministre que le ministre des Finances ont présenté des excuses pour ne pas s'être récusés. Je regrette que cette situation ait détourné l'attention du sujet sur lequel nous voulions justement l'attirer.
    Merci.
(1545)
    Je vous remercie, madame la ministre Qualtrough.
    Nous allons ensuite poursuivre avec une série de questions de six minutes, et M. Barrett va commencer.
    Merci, madame la ministre.
    Premièrement, est-ce que quelqu'un du Bureau du premier ministre ou tout autre responsable vous a jamais demandé d'être la ministre responsable de la BCBE?
    Vous avez mentionné votre participation aux réunions du Comité du Cabinet sur la COVID-19 et que c'est là que ce programme a été approuvé pour la première fois le 5 mai. Avez-vous informé votre adjoint, votre SMA, Mme Rachel Wernick ou tout autre fonctionnaire de votre ministère au sujet de la décision du Comité du Cabinet?
    J'en ai informé mon chef de cabinet, en effet.
    Avez-vous informé quiconque, ou est-ce que votre chef de cabinet a informé quelqu'un de l'organisme UNIS de cette décision?
    Absolument pas.
    Vous avez déclaré que lors de la réunion de ce comité, le 5 mai, c'était la première fois que vous entendiez parler de la BCBE. À ce moment-là, d'où pensiez-vous que venait l'idée de ce programme? Qui était à l'origine de cette idée?
    Permettez-moi de préciser que c'était la première fois que j'entendais dire que UNIS serait responsable de la prestation de la BCBE. Je tiens à me montrer parfaitement claire et honnête. J'avais entendu parler de la BCBE avant le 5 mai, mais je n'avais pas la moindre idée de qui serait recommandé pour en assurer la prestation avant le 5 mai.
    Une fois que vous en avez entendu parler, le 5 mai, madame la ministre, d'où pensiez-vous que venait l'idée? Qui en était à l'origine?
     J'avais compris que la ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse et son équipe avaient travaillé avec des fonctionnaires. Il y avait eu des échanges. Pour être honnête, je venais tout juste de comprendre qu'il s'agissait d'une recommandation de la fonction publique que la ministre voulait mettre de l'avant.
    Très bien.
    Devant le Comité des finances, le greffier du Conseil privé, M. Shugart, a déclaré que la recommandation de choisir UNIS en tant que partenaire provenait d'EDSC.
    Qui a présenté cette proposition?
    Devant le Comité du Cabinet, c'était la ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse. Désolée, je veux seulement éviter de faire des erreurs en donnant les titres.
    Madame la ministre, le greffier du Conseil privé nous a déclaré lors de son témoignage, et la ministre Chagger l'a confirmé, qu'elle-même avait obtenu en mars par décret le pouvoir de signer à titre de ministre d'EDSC.
    Comment se fait-il qu'un programme de près de 1 milliard de dollars a été confié à une ministre d'État plutôt qu'à vous?
     Si vous me permettez, nous avons été assermentées en novembre 2019. C'est à ce moment-là que la ministre est devenue ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse. Nous avons obtenu ensuite nos lettres de mandat le 13 décembre, et on lui a confié la responsabilité du développement d'un programme national de services aux jeunes Canadiens au sein de Service jeunesse Canada.
    Par la suite, nous avons travaillé en coulisse avec EDSC et le BCP à l'obtention de tous les moyens législatifs. Au total, nous sommes cinq ministres responsables de divers aspects d'EDSC. Par exemple, le décret que vous mentionnez pour la ministre Chagger a été pris le 6 mars; le décret pour le ministre Hussen a été pris le 8 mars, je crois — il faudra que je vérifie cette date. Puis nous avons commencé à déléguer diverses autorisations financières à l'intérieur du ministère. Au titre de la loi ayant constitué EDSC, il existe un ministre au titre de la loi, mais je peux déléguer des responsabilités à d'autres ministres. Il s'agit d'une structure juridique. Néanmoins, nous travaillons ensemble depuis le début de nos mandats respectifs et respectons nos champs de compétence réciproques.
(1550)
    Très bien, merci.
    Dans quelle mesure avez-vous participé à l'élaboration de ce programme depuis sa création?
    Aucunement. J'ai participé en fonction du volet qui m'appartient, c'est-à-dire l'emploi, les prêts étudiants et les bourses, ainsi que la prestation pour les étudiants.
    Jusqu'à deux ou trois jours avant l'annonce du 22 avril, je n'avais pas entendu parler des autres volets qui devaient faire partie de l'ensemble de ce programme.
    Avez-vous reçu ou examiné tout rapport ou toute note d'information concernant la vérification raisonnable en rapport avec un élément quelconque du mouvement UNIS, de l'organisme UNIS, de la WE Charity Foundation ou de l'une ou l'autre de leurs filiales, avant d'accorder votre appui à cet organisme pour qu'il administre un programme de 900 millions de dollars?
    En prévision de la réunion du 5 mai, j'ai examiné la recommandation qui devait être présentée au Cabinet. À ce moment-là, elle avait été validée par la fonction publique. On m'a dit à ce moment-là que les précautions voulues avaient été prises et qu'il n'y avait eu aucun signal d'alarme.
    Par conséquent, ma réponse à votre question serait « non », mais je veux que les choses soient bien claires.
    Merci, madame la ministre.
    On nous a fait savoir que le 5 mai, le Bureau du premier ministre avait transféré un appel de l'organisme UNIS à votre ministère. J'aimerais connaître les détails de cet appel. Qui a répondu, de quoi a-t-on discuté, est-ce que des notes ont été prises, existe-t-il un enregistrement, et est-ce que l'on a dit à ce moment-là à l'organisme UNIS qu'il pouvait commencer à engager des frais ou à tout le moins des « dépenses admissibles » pour ce programme?
    Je ne possède aucun renseignement, direct ou indirect, au sujet de cet appel.
    Accepteriez-vous de faire des recherches entourant les détails de cet appel pour notre comité?
    Certainement.
    Je vous remercie, madame la ministre.
    La parole est à M. Dong pour six minutes.
    Merci, madame la ministre, d'avoir accepté de venir témoigner devant notre comité.
    Avant de poser mes questions, je tiens seulement à vous remercier pour les efforts soutenus que vous avez déployés au cours des derniers mois. J'ai parlé avec de nombreux électeurs de Don Valley North. Ils souhaitent vous transmettre leur sincère gratitude pour tout le travail que vous avez accompli personnellement, ainsi que le personnel de votre ministère. Je tenais à vous le dire. Je sais que vous ne pouvez pas nous voir, mais je constate que de nombreuses personnes hochent la tête en signe d'assentiment autour de la table de notre comité.
    Concernant le programme Emplois d'été Canada, qui est très en demande, je me demande si vous avez tenu des discussions pour déterminer pourquoi le gouvernement n'a pas tout simplement doublé le nombre d'emplois d'été dans le cadre du programme plutôt que de créer un nouveau programme, en l'occurrence la BCBE. Nous pouvons affirmer avec certitude que la demande existe, et que le programme est dispensé par de nombreux organismes de la base. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement n'a pas exécuté ce programme dans le cadre d'Emplois d'été Canada?
    Je sais que l'on s'est beaucoup interrogé depuis quelques semaines sur les raisons pour lesquelles Emplois d'été Canada n'avait pas été mandaté pour mener ce programme. Vous savez, nous avons modernisé Emplois d'été Canada pour qu'il reflète les réalités engendrées par la pandémie de COVID. Nous avons aussi augmenté le financement pour que le nombre d'emplois passe de 70 000 à 80 000 cette année. Nous avons créé des dizaines de milliers d'autres emplois dans le cadre d'autres programmes d'emplois étudiants. Je sais à quel point ce programme donne de bons résultats. Je sais aussi que les entreprises l'apprécient, que les étudiants l'apprécient, et que les députés l'apprécient tout autant.
    Voici comment fonctionne Emplois d'été Canada. Nous fixons des objectifs, nous évaluons les emplois par rapport à ces objectifs, nous finançons les emplois qui remplissent ces objectifs, et puis nous affichons les emplois. Cependant, nous n'aidons pas les personnes à trouver ces emplois. Lorsque EDSC veut offrir un soutien plus direct aux personnes, nous le faisons toujours par l'intermédiaire d'un tiers au moyen d'une entente de contribution. Il suffit de penser au programme de la Stratégie emploi et compétences jeunesse, ou SECG. Nous finançons des organismes locaux pour aider des jeunes à risque à trouver un emploi et à s'épanouir dans cet emploi.
    La BCBE est un programme différent d'Emplois d'été Canada. Le but, comme je l'ai indiqué dans ma déclaration liminaire, consistait à offrir aux jeunes gens des possibilités intéressantes, mais aussi à aider les organismes sans but lucratif à combler leurs besoins en matière de capacité. L'organisme qui serait chargé de dispenser ce programme devrait effectuer énormément d'entrevues individuelles avec des jeunes, notamment pour la sélection, l'accueil et l'intégration, la formation et l'encadrement. Il devrait en outre faire le suivi des heures de bénévolat et distribuer les bourses.
    En plus de présenter un problème en matière de capacité, comme je l'ai déjà dit, Emplois d'été Canada n'a pas été conçu pour mener ce genre de programme. Quant à EDSC, ce genre de programme ne fait pas partie de ses activités habituelles. J'espère que vous comprenez.
(1555)
    Merci, madame la ministre. Oui, je comprends très bien.
    Vous avez soulevé la question de l'entente de contribution, une question que j'avais abordée avec le greffier du Conseil privé, un peu plus tôt aujourd'hui. De votre point de vue, est-ce que les ententes de contribution sont contraires à l'éthique, ou s'agit-il d'une pratique courante pour le gouvernement de requérir les services d'un tiers pour assurer la prestation de programmes complets?
    Les ententes de contribution sont extrêmement courantes. Je parie qu'il y en a des milliers. Je pense que M. Robidoux pourrait vous donner le nombre exact. Pendant des décennies, les gouvernements ont utilisé ce moyen d'offrir une aide financière à des individus par l'intermédiaire de tierces parties possédant de meilleurs moyens de le faire compte tenu de leurs relations ou de leurs liens avec les collectivités.
    Nous concluons une entente de contribution avec un organisme, et par la suite ce dernier fournit une aide directement aux personnes visées. Je ne sais pas quoi vous dire d'autre, c'est tellement courant.
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, nous avons procédé de cette manière pour le financement des maisons d'hébergement pour femmes durant la pandémie seulement. Mais il s'agit réellement d'un outil couramment utilisé par le gouvernement. C'est une forme très efficace d'entente avec un organisme.
    Vous ne trouvez donc pas que les ententes de contribution sont contraires à l'éthique, comme certains semblent le laisser entendre.
    Absolument pas. Je pense qu'elles permettent de se rapprocher des gens sur le terrain.
    D'accord.
    J'ai entendu dire plus tôt que la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant avait été mise au point par Emploi et Développement social Canada. Cependant, celle-ci ne relève pas de vous. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi la BCBE tombe sous la responsabilité d'un autre ministre, en l'occurrence la ministre Chagger ?
    Oui. Je ne voudrais pas me répéter, mais en deux mots, le Cabinet a été assermenté. Ensuite, nous avons reçu nos lettres de mandat. La ministre Chagger a obtenu Service jeunesse Canada et j'ai reçu la Stratégie emploi jeunesse. C'est comme cela que nous avons travaillé depuis le début. La ministre Chagger s'occupait de Service jeunesse Canada et je m'occupais des autres programmes d'emploi pour les jeunes. Plus tard, comme je l'ai déjà dit, un décret a été pris le 6 mars faisant de la ministre Chagger une ministre d'EDSC.
    Pour ce qui est des mesures concernant les étudiants, au moins cinq autres ministres y participaient. Il y avait moi, la ministre Chagger, le ministre de l'Immigration, le ministre des Services aux Autochtones, le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, le ministre des Finances et le président du Conseil du Trésor. Comme chacun sait, il s'agissait d'un programme complexe assorti d'un imposant budget. Aussi, bon nombre d'entre nous participaient.
    Donc, ces cinq ministres avaient un rôle à jouer dans votre ministère. Relevaient-ils de vous? Devaient-ils vous informer de ce sur quoi ils travaillaient? Devaient-ils demander votre permission pour aller de l'avant avec l'élaboration de leurs programmes?
    Permettez-moi de préciser que les cinq ministres...
    La présidente: Il vous reste 10 secondes.
    L'hon. Carla Qualtrough: D'accord. Cinq ministres différents, mais non, nous avons chacun nos champs de compétences à EDSC.
    Merci, madame la ministre.
    Merci.
    La parole est à M. Fortin.

[Français]

    Bonjour, madame la ministre.
    Dans votre témoignage, tout à l'heure, vous avez dit que, personnellement, vous n'aviez pas vu de rapport sur la vérification diligente concernant l'organisme UNIS, mais que vous avez supposé qu'il y avait eu une vérification et que le rapport avait été fait. Est-ce que j'ai bien compris?

[Traduction]

    Oui. Ce que j'ai dit — et je vais apporter des précisions si ce n'était pas clair — c'est que je n'ai pas vu le rapport sur la vérification diligente concernant l'organisme UNIS, mais que d'après ma lecture des documents qui ont été présentés au Comité, et par la suite au Cabinet, j'ai compris qu'aucun signal d'alarme n'avait été déclenché en rapport avec la diligence raisonnable.

[Français]

    À votre connaissance, qui a vu ce fameux rapport? Vous n'êtes pas la seule à nous dire cela. Tous les gens nous disent qu'ils supposent qu'il y a eu une vérification, mais personne ne semble avoir vu le rapport.
    Pouvez-vous nous éclairer là-dessus? Qui a vu le rapport sur la vérification diligente?

[Traduction]

    C'est une bonne question, et je vais demander à M. Robidoux de répondre à ma place. J'ignore si on appelle ce rapport un « rapport sur la vérification diligente », alors je ne veux pas créer un concept qui n'existe pas réellement.
    Monsieur Robidoux, pourriez-vous nous parler de la vérification diligente qui aurait figuré dans la recommandation de la fonction publique?
(1600)

[Français]

    Madame la ministre, dois-je comprendre que vous étiez d'accord pour que l'accord de contribution soit confié à l'organisme UNIS?
    À ce moment-là, saviez-vous que ce ne serait pas l'organisme UNIS qui aurait obtenu un contrat avec le gouvernement, mais plutôt la We Charity Foundation?

[Traduction]

    À ce moment-là, je ne connaissais pas la différence, aussi j'ai supposé que « UNIS » correspondait à l'organisme UNIS. J'ignorais quelle filiale d'UNIS signerait le contrat. Non, je ne savais pas.

[Français]

    À votre connaissance, à la table du Conseil des ministres, quand vous avez pris la décision, y avait-il quelqu'un qui savait que ce serait la We Charity Foundation, et non l'organisme UNIS, qui obtiendrait ce contrat?

[Traduction]

    Honnêtement, j'ignore ce que savaient les autres ministres. Je préfère vous parler seulement de ce je savais, et à ce moment-là, je ne le savais pas.

[Français]

    D'accord. Si je comprends bien, personne à la table du Conseil des ministres n'a discuté du fait qu'on ferait affaire avec une nouvelle entité qui était alors constituée en société depuis un an ou deux, c'est-à-dire la We Charity Foundation. Il n'y a eu aucune discussion là-dessus, c'est bien cela?

[Traduction]

    Comme vous pouvez le comprendre, je ne peux pas parler des discussions qui ont eu lieu lors de la réunion du Comité du Cabinet ou du Cabinet. En revanche, je peux vous parler de ce que je savais, moi personnellement. Je ne suis pas sortie de ces réunions avec cette distinction à l'esprit.

[Français]

    À votre connaissance, madame la ministre, est-il fréquent que le gouvernement du Canada confie un mandat de 43,5 millions de dollars pour gérer des bourses totalisant 900 millions de dollars à une organisation qui n'a aucun actif et qui a un an ou deux d'existence?
    Est-ce que c'est quelque chose que vous voyez fréquemment?

[Traduction]

    Je ne peux pas répondre à cette question, mais je peux dire que nous connaissions les antécédents de l'organisme UNIS, et que c'est en me fondant sur la connaissance que j'avais de l'organisme que j'ai décidé d'aller de l'avant avec l'entente de contribution.

[Français]

    Si je comprends bien, vous avez fondé votre décision sur la connaissance que vous aviez de l'organisme UNIS, mais vous ne saviez pas, à ce moment-là, que ce serait plutôt une autre coquille juridique qui aurait le contrat, soit la We Charity Foundation. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Si vous aviez à prendre la même décision aujourd'hui et qu'on vous disait que ce serait la We Charity Foundation qui obtiendrait le contrat, est-ce que vous vous poseriez des questions sur ce choix? Est-ce que vous vérifieriez quels sont ses actifs et s'il y a eu un rapport sur la vérification diligente là-dessus?
    Est-ce que ce sont des questions que vous vous poseriez aujourd'hui si vous aviez à prendre la même décision?

[Traduction]

    Je préfère ne pas spéculer là-dessus, parce que je suppose que nous tiendrions des discussions sur les mesures d'atténuation et d'autres facteurs susceptibles de répondre à nos interrogations. Mais aujourd'hui, je ne peux pas revenir en arrière, aussi je préfère ne pas me perdre en conjectures.

[Français]

    Étiez-vous au courant du fait que le premier ministre et le ministre des Finances se trouvaient en situation de conflits d'intérêts relativement à l'organisme UNIS au moment de la prise de décision?

[Traduction]

    Comme je l'ai déjà dit dans mes remarques, je n'étais pas au courant des liens entre le ministre des Finances et UNIS, et ce que je savais au sujet des liens entre le premier ministre et sa femme et l'organisme concernait leurs apparitions publiques. Je n'avais aucune idée de leurs liens familiaux ou de tout remboursement de dépenses ou versement de cachets.

[Français]

    Le 8 mai, lors de la réunion du Conseil des ministres, le premier ministre a décidé de retirer cette question de l'ordre du jour parce que la décision le mettait mal à l'aise. Il nous dit qu'il se sentait en situation de conflit d'intérêts à ce moment-là.
    Vous souvenez-vous d'avoir eu une discussion autour de la table sur le fait que le premier ministre reportait la décision parce qu'il se sentait en situation de conflit d'intérêts?

[Traduction]

    Encore une fois, je ne peux pas parler de ce dont nous avons discuté lors de la réunion. En revanche, je peux confirmer que cette question a été retirée de l'ordre du jour avant même que nous arrivions à la réunion. Elle ne figurait pas à l'ordre du jour de la réunion.

[Français]

    Vous ne saviez pas pourquoi cela avait été retiré de l'ordre du jour. C'est cela?

[Traduction]

    Je n'avais aucune connaissance précise des raisons pour lesquelles la question avait été retirée de l'ordre du jour. Toutefois, cela ne m'avait pas semblé inhabituel du tout, parce que la situation évoluait très rapidement à l'époque et qu'il y avait continuellement des faits nouveaux.

[Français]

    Vous nous avez dit, madame la ministre, que la fonction publique ne pouvait pas gérer le programme de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Au Comité permanent des finances, nous avons reçu le président de l’Alliance de la Fonction publique du Canada, qui nous a dit que, selon lui, c'était possible. Il a ajouté que, si la fonction publique avait eu à gérer le programme, tout serait déjà en place et fonctionnerait, que tout baignerait dans l'huile.
    Qu'avez-vous à nous dire là-dessus? Êtes-vous d'accord sur ce qu'a dit le président de l'Alliance ou croyez-vous qu'il fait erreur?
(1605)

[Traduction]

    Avec tout le respect que je vous dois, je préférerais répondre ni l'un ni l'autre. Je n'ai pas entendu son témoignage, mais je m'en tiens à ma propre évaluation comme quoi la fonction publique était très sollicitée, et qu'elle n'aurait pas pu offrir le genre d'expériences pratiques que nous souhaitions voir acquérir par les étudiants en tout état de cause. Mon opinion à ce sujet demeure inchangée, mais je respecte son opinion sur la question.
    Merci, madame la ministre.
    Monsieur Angus, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Et merci à vous, madame la ministre. J'aurais aimé vous avoir avec nous, mais néanmoins j'espère que vous êtes en sécurité, où que vous soyez, et que vous profitez bien de l'été.
    La transformation depuis le moment où ce programme a été annoncé est très problématique parce que je me rappelle l'annonce faite par le premier ministre le 8 avril, et la crise à laquelle faisaient face les étudiants de niveau universitaire. C'est ce dont nous avions entendu parler: il fallait trouver des emplois. C'est une question qui vous tenait très à cœur. Le 22 avril, il a annoncé cette Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant qui mettait l'accent sur le bénévolat, et les choses avaient pris un tour radicalement différent. Que s'est-il passé entre le 8 et le 22 avril pour que nous assistions à un tel changement de direction pour ce qui est de faire face à la crise que traversaient les étudiants des universités?
    Je me souviens très bien du 8 avril. C’est le jour où nous avons annoncé des changements au programme Emplois d’été Canada 2020, en réponse à la pandémie. Mais nous savions pertinemment, et je l’avais même prévu, qu’il ne faudrait pas s’arrêter là. J’ai parlé avec des groupes d’étudiants, avec des groupes de jeunes, avec des organisations d’étudiants, et ils m’ont tous dit qu’il fallait non seulement créer des emplois, mais aussi adopter des mesures de soutien du revenu, offrir des possibilités de bénévolat dans les collectivités et prévoir ce que nous allions faire à l’automne avec les prêts et les contributions aux étudiants. Nous nous sommes tous attelés à la tâche, c’est le cas de le dire, pas seulement moi, mais aussi la ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse, le ministre Miller, pour voir comment on pourrait aider les étudiants autochtones, et le ministre Bains, pour voir comment on pourrait aider les étudiants au niveau post-doctoral. Tous ensemble, nous avons réussi à concocter un super programme.
    Je vous suis tout à fait, car c’est exactement ce qu’on nous avait dit. À ce moment-là, je crois que tous les parlementaires, quelle que soit leur affiliation politique, étaient sur la même longueur d’onde. Mais ce projet était complètement différent. Les représentants des étudiants vous avaient dit qu’il fallait prévoir des mesures de soutien du revenu et qu’il fallait faire quelque chose au sujet des prêts aux étudiants, mais maintenant, nous nous retrouvons avec un programme qui offre aux étudiants des universités un salaire inférieur au salaire minimum. Qui a pris cette décision? Les frères Kielburger ont dit que c’était le gouvernement. C’était sans doute EDSC, c’est-à-dire votre ministère. Pourquoi, en plein milieu de la pandémie, s’est-on retrouvé avec un programme invitant les étudiants à travailler pendant 1 000 heures à raison de 10 $ de l’heure ou pendant 700 heures pour ne rien gagner du tout?
    Je comprends votre point de vue, monsieur Angus, mais je peux vous assurer que, chacun dans son ministère, nous nous sommes tous attelés à la tâche pour voir ce que nous pouvions faire. Nous savons que nous aurions beau créer des dizaines de milliers d’emplois, et même plus de 100 000 emplois, cela ne serait pas suffisant. Le premier ministre a toujours eu pour vision d'instiller une culture de service au Canada. La ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse a notamment pour mandat de créer une sorte de service jeunesse, une sorte de service national. Les jeunes nous avaient aussi dit que s’ils ne pouvaient pas trouver d’emploi, ils ne voulaient pas rester chez eux à ne rien faire, et qu’ils aimeraient bien avoir un soutien financier quelconque ou même faire du bénévolat. Tout cela a donc été pris en compte dans l’élaboration du programme. En tout cas, c’est comme cela que j’ai vécu cette expérience. Et croyez-moi, tout le monde était à pied d’œuvre.
    J’ai beaucoup de respect pour le travail que vous avez accompli. En revanche, je voudrais savoir pourquoi, en plein milieu d’une pandémie sans précédent, il était vraiment nécessaire de donner suite à cette passion du premier ministre pour le bénévolat. Ce n’est pas du tout ce qu’on nous avait annoncé.
    J’aimerais maintenant vous poser une question au sujet des vérifications appropriées. Pour le programme Emplois d’été Canada, les organisations étaient obligées, par souci de sécurité, de remplir d’innombrables formulaires pour votre ministère, alors que nous avons appris que les Kielburger offraient 25 000 $ aux camps d’été qui réussissaient à convaincre 75 bénévoles de s’inscrire. Je n’arrive pas à comprendre comment c’est possible en plein milieu d’une pandémie. Avez-vous fait des vérifications appropriées? Leur avez-vous dit que ce n’est pas comme ça qu’on procède avec le programme Emplois d’été Canada, qu’on ne peut pas recruter ainsi des moniteurs de camps d’été en plein milieu d’une pandémie? Qui a autorisé cela?
    Je n’étais pas présente lorsque ces détails ont été finalisés. Encore une fois, ce n’est pas moi qui pilotais le dossier. Je ne sais pas comment cela été décidé, car je n’ai pas participé à ces discussions. Je ne peux rien vous dire de plus.
    Très bien.
     On nous a dit, à maintes reprises, que la fonction publique ne pouvait pas administrer ce programme. Les fonctionnaires auraient certainement posé des questions: vous voulez vraiment payer les camps d’été qui réussiront à convaincre des moniteurs de s’inscrire, et ce, en plein milieu d’une pandémie?
     J’aimerais parler des 12 000 $ offerts à chaque enseignant. Je suis un ancien conseiller scolaire. Quand on dit aux enseignants qu’on va les payer s’ils réussissent à convaincre des élèves de s’inscrire, c’est une violation flagrante de toutes sortes de codes de déontologie. Je ne vois pas comment les fonctionnaires auraient pu accepter de faire cela, et pourtant, cela faisait partie de l’entente signée avec les Kielburger. Mais qui l’a signée exactement? Qui a fait les vérifications appropriées? Ce sont des questions qui ont des conséquences juridiques.
(1610)
    Tout à fait. Encore une fois, je n’étais pas présente lorsque ces détails ont été finalisés. En tout cas, ces détails n’étaient pas finalisés dans le document que j’ai vu le 5 mai.
     Mais il existe des mécanismes, au sein de la fonction publique, qui permettent de vérifier ce genre de choses, et c’est ce qu’on précise dans les ententes de contribution. Mais encore une fois, ce n’est pas de mon ressort, et je vous prie de m’en excuser. Je préfère ne pas me lancer dans des conjectures.
    Je comprends que, si cela avait été de votre ressort, vous auriez posé toutes ces questions, car elles sont fondamentales. Le problème que nous avons, c’est que tous ces clignotants étaient au rouge.
     Parlons de cette entente de contribution avec UNIS… Tout le monde se sentait à l’aise avec cet organisme parce que vous et vos collègues avaient été invités à un grand nombre de leurs rassemblements. Je ne dis pas que vous avez fait quelque chose de répréhensible, mais cela vous amenait à vous sentir à l’aise avec cet organisme. Puisque nous parlons d’ententes de contributions, je rappelle qu’UNIS a reçu du gouvernement une première contribution de 40 000 $, une autre de 24 990 $, une autre de 17 050 $ et une autre de 13 000 $. Il y en a une autre qui atteint près de 3 millions de dollars, les autres sont ridicules à côté. Le gouvernement se sentait tout à fait à l’aise avec les Kielburger parce que vous étiez nombreux à avoir été invités à prendre la parole lors de leurs rassemblements. Il suffisait à l’organisme d’appeler les ministres au téléphone. Ses représentaient n’étaient même pas inscrits au registre des lobbys.
    Merci, monsieur Angus.
    Ma dernière question est la suivante: vous faites les vérifications appropriées quand le dossier relève de vous, mais ne pensez-vous pas que si des vérifications plus approfondies avaient été faites, nous ne serions pas aujourd’hui dans la débâcle...
    Merci, monsieur Angus.
    ... que nous constatons aujourd’hui?
    Merci.
     Je donne la parole à M. Poilievre pour cinq minutes.
    À quelle date la ministre Chagger a-t-elle reçu le décret lui donnant le pouvoir de signer des ententes de contribution au nom de votre ministère?
    Le décret date du 6 mars.
    Je trouve renversant que vous n’ayez pas été informée des détails d’un programme de 1 milliard de dollars qui relevait de votre ministère avant la réunion du Cabinet pendant laquelle ce programme a été présenté.
     C’est moi qui occupais votre place en 2015, et je peux vous dire que si un programme de 1 milliard de dollars relevant de mon ministère allait être présenté au Cabinet, j’en aurai entendu parler avant.
    Pouvez-vous me confirmer que vous n’avez appris que ce programme allait être administré par UNIS que lorsqu’il a été présenté au Cabinet? C’est bien ce que vous nous avez dit?
    Je connaissais les grandes lignes du programme, comme je l’ai dit tout à l’heure. Mais je ne savais pas qui allait l’administrer, avant d’en être informée le 5 mai.
    C’est absolument renversant, que vous puissiez… C’est vraiment un exemple de mauvaise gouvernance que de laisser dans l’ignorance la ministre responsable d’un ministère chargé d’administrer un programme de 1 milliard de dollars.
     Un membre du Bureau du premier ministre était-il présent à la réunion du Cabinet du 5 mai?
    Je ne m'en souviens pas.
    Très bien.
    Lorsque l’entente de contribution visant à verser 500 millions de dollars à UNIS a été signée, en avez-vous pris connaissance avant qu’elle ne soit signée par Mme Chagger?
    Monsieur Poilievre, je n’ai pas de droit de regard sur les ententes de contribution qui relèvent des ministres auxquels j’ai délégué ce pouvoir. De la même façon, je ne vois pas les ententes de contribution qui relèvent du ministère de M. Blair. Ce sont des ministres de plein droit, qui ont leurs propres champs de responsabilités.
    Ce n'est pas la même chose, car le ministre Blair a son propre ministère. Là, il s’agit de votre ministère. C’est l’en-tête de votre ministère qui figure sur l’entente et, encore une fois, c’est absolument renversant que la ministre responsable du ministère chargé d’administrer l’entente n’ait pas été informée du contenu d’une entente d’une telle importance. Il ne s’agit pas d’une petite contribution de 25 000 $, mais bien d’une contribution de 500 millions de dollars. C’est à se demander qui tire les ficelles dans ce gouvernement, si les ministres responsables ne sont même pas informés du contenu des ententes avant que les fonds soient débloqués.
     Vous avez énuméré les objectifs de cette Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant: comptabiliser les heures des jeunes, leur donner une formation et soi-disant les « intégrer » dans des organisations. Le programme Emplois d’été Canada permet de faire tout cela. Il les aiguille vers des organismes caritatifs, des petites entreprises et d’autres groupes. Pouvez-vous me dire une seule chose que le programme Emplois d’été Canada ne peut pas faire et que les frères Kielburger pouvaient faire, eux?
(1615)
    Premièrement, contrairement à la BCBE, Emplois d’été Canada n’aide pas les étudiants à trouver des emplois en les aidant à rédiger des curriculum vitae, en leur donnant une formation, en les aidant à se préparer à des entretiens d’embauche ou en leur donnant des mentors. L’autre problème qu’avaient les organismes à but non lucratif, c’était leur manque de capacité. Ils nous disaient que, même s’ils pouvaient embaucher cinq personnes, ils n’avaient pas le temps de les intégrer, de les former et de les encadrer sérieusement. C’est ce que l’organisation chargée de l’administration du programme allait faire, c’est-à-dire renforcer la capacité d’autres organisations à but non lucratif. C’était donc davantage du travail sur le terrain, qu’avec Emplois d’été Canada.
    Ce n’est pas vrai, car les organismes à but non lucratif qui participent au programme Emplois d’été Canada font tout ça à la fois. Chaque année, ils embauchent des jeunes, ils leur donnent de la formation, ils leur imposent un horaire de travail, ils comptabilisent ces heures et ils soumettent des rapports contenant toutes ces informations.
     Tout ce que vous avez dit, les organismes à but non lucratif qui participent au programme Emplois d’été Canada le font déjà. La seule différence, c’est qu’on utilise le vrai mot, « emplois », au lieu d’utiliser un oxymore, « un bénévole rémunéré ». Très franchement, vous ne nous avez donné aucun argument convaincant pour démontrer que le programme qui existe déjà n’aurait pas permis de faire ce que vous vouliez prétendument faire avec la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant.
    Je crois que je vous en ai donné, et j’ajouterai que la fonction publique était déjà en flux tendu. Je ne suis pas d’accord avec vous lorsque vous dites que ces programmes ne sont pas différents. Je respecte votre point de vue, et je ne vois pas ce que je pourrais ajouter.
    Vos prétentions ne sont absolument pas crédibles. Quand vous dites que la fondation des frères Kielburger allait apprendre à un jeune de Red Deer comment travailler dans une soupe populaire ou un foyer pour sans-abri, et ce, par courriel, par Skype ou autrement, ce n’est absolument pas crédible. Il est évident que cette formation aurait été donnée par l’organisation locale, comme c’est le cas avec le programme Emplois d’été Canada.
    Merci.
    Qu’aurions-nous fait de plus que ces organisations ne pouvaient pas faire elles-mêmes?
    Monsieur Poilievre, merci.
     Mme Brière et Mme Zahid ont la parole.
     Je crois savoir que vous allez vous partager les cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Bonjour, madame la ministre. Je vous remercie d'être parmi nous cet après-midi.
    À la lecture de votre CV, on ne peut qu'être impressionné. Vous avez travaillé comme avocate dans le domaine des droits de la personne; vous êtes une athlète paralympique; et, ce qui est plus en lien avec le Comité, vous avez siégé au conseil d'administration du Centre canadien pour l'éthique dans le sport.
    Pouvez-vous nous dire comment vous prenez vos décisions? Quelle importance accordez-vous à l'éthique lorsque vous prenez des décisions?
    Je vous remercie de la question.

[Traduction]

    Je prends mes responsabilités très au sérieux, en tant que députée et en tant que membre du Cabinet. J’ai siégé au conseil d’administration du Centre canadien pour l’éthique dans le sport. En fait, j’ai donné un cours d’éthique au Collège Algonquin, à Ottawa. Je sais parfaitement quelles sont mes obligations en matière de divulgation. Je connais les dispositions de la Loi sur les conflits d’intérêts et du Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Je me soumets à des normes rigoureuses, et j’attends la même chose de mes collaborateurs.
     Avec mon équipe, nous examinons systématiquement si ma participation à un dossier ou à une décision représente un conflit d’intérêt réel ou perçu. Cela permet de protéger mon intégrité personnelle, mais aussi le processus qui conduit à ces décisions. En matière de divulgation, j’ai toujours respecté mes obligations.
     Au risque de me répéter, je dirai que, lorsque nous occupons de nouvelles fonctions, nous arrivons toujours avec des antécédents. Nous connaissons toutes sortes de gens. Nous avons tous eu des affiliations, des relations et des amitiés antérieures. J’ai consulté le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique de façon proactive, lorsque j’avais des questions à poser ou lorsque je voulais être sûre que la moindre circonstance ne pouvait pas être interprétée comme un conflit d’intérêts perçu, même de loin. Je me suis investie dans cette fonction parce que cela m’intéressait et parce que l’éthique est un souci personnel constant.
(1620)

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
     Merci, madame la ministre, de participer à notre réunion d’aujourd’hui. Au nom de tous les électeurs de Scarborough Centre, je tiens à vous remercier de tout ce que vous avez fait pour aider les Canadiens à traverser cette pandémie.
     Je sais, et vous l’avez indiqué, que vous avez participé à un rassemblement de l'organisme UNIS. Manifestement, vous n’êtes pas la seule personnalité politique ou publique à avoir été invitée à ce genre de manifestation. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous avez décidé d’y participer? Avez-vous été rémunérée, et l'organisme UNIS vous a-t-il remboursé vos dépenses? Je vous remercie d’avance de nous donner toutes ces explications.
    Merci.
     Comme je l’ai dit, j’ai participé à un rassemblement UNIS. C’était à Vancouver, en novembre 2016. J’étais accompagnée de mes deux filles. Nous y sommes restées environ une demi-heure. Je n’ai pas été rémunérée et je n’ai pas soumis une note de frais.
     Pour être franche avec vous, je vous dirai que la fonction de ministre n’est pas facile pour la famille, car elle nous en tient éloignés. Quand je me suis fait élire, mes plus jeunes enfants avaient deux et cinq ans, et avec mon mari, nous avions décidé que nous allions faire ça en famille et que nous allions expliquer à nos enfants pourquoi j’allais devoir m’absenter aussi souvent. Lorsque j’ai eu l’occasion de prendre la parole à un rassemblement UNIS, je me suis fait accompagner de mes deux filles pour leur montrer en quoi consistait mon travail.
     C’était aussi très important pour moi de parler de l’inclusion à l’occasion de ce rassemblement, car j’avais la possibilité de m’adresser à des milliers d’enfants et de jeunes et de leur montrer que c’était à eux de faire le choix d’inclure. Moi-même, quand j’étais enfant souffrant d’un handicap, je n’étais pas incluse. D’autres députés ont fait des discours très percutants lors de ces rassemblements. Mike Lake, quand il y est allé, a emmené Jaden avec lui pour parler de l’autisme. C’était très percutant. J’ai beaucoup de respect pour Mike, parce qu’il a su parler de son expérience, ce qui rend les choses plus faciles pour les autres familles. Je reconnais que, après avoir vu d’autres le faire, j’ai peut-être été trop enthousiaste à l’idée de participer à ce rassemblement avec ma famille.
    Je tiens à dire publiquement que, pour moi, le bénévolat est quelque chose de très important et que, surtout pendant cette pandémie, il est important que les jeunes fassent du bénévolat. Je remercie les milliers de bénévoles, surtout les jeunes, qui sont venus en aide aux Canadiens pendant la pandémie.
     Je suis fière du travail qu’ont accompli les jeunes bénévoles dans les banques alimentaires de ma circonscription. J’ai moi-même fait du bénévolat au Rogers Centre pour faire des boîtes, et j’avais demandé à mon fils de 22 ans de m’accompagner. Je pense qu’il est important d’offrir aux jeunes des possibilités de faire du bénévolat et d’apporter ainsi leur contribution à la collectivité.
    Merci, madame Zahid.
     Je vais maintenant donner la parole à M. Poilievre pour cinq minutes.
    Merci beaucoup.
     Monsieur Robidoux, Mme Wernick a déclaré que vous étiez la première personne à lui avoir remis la proposition d'UNIS. Vous en souvenez-vous?
    Madame la présidente, je n’ai pas entendu la seconde partie de la question.
     Pouvez-vous la répéter, s’il vous plaît, monsieur Poilievre?
     Mme Wernick a déclaré que vous étiez la première personne à avoir attiré son attention sur ce qui est devenu la proposition UNIS. Vous souvenez-vous de cela?
    Oui, je m’en souviens bien, c’était début avril, et je lui avais demandé de s’en occuper. Je supervisais alors le programme pour les étudiants, pour ce qui concerne EDSC, sous la direction de la ministre Qualtrough, et je lui ai donc demandé de m’appuyer étant donné que j’allais bientôt partir pour piloter tout le programme.
    Merci.
     C’est vous qui avez remis la proposition d’UNIS à Michelle Kovacevic, n’est-ce pas?
    La proposition m’a été remise par Rachel Wernick, sous la forme d’une annexe à une autre proposition déjà soumise, avant l’annonce qui a été faite aux environs du 15 avril, et j’ai envoyé cette proposition à Michelle Kovacevic. C’est la proposition qui m’avait été remise directement par Rachel Wernick.
    Rachel vous a remis la proposition d’UNIS et vous l’avez donnée à...
    Je suis désolé. Elle m’a remis une proposition qui venait d’EDSC et à laquelle était annexée la proposition d’UNIS sur l’entrepreneuriat social, dont il a beaucoup été question. Je l’ai transmise à Michelle Kovacevic, au ministère des Finances.
(1625)
    Quand avez-vous appris qu'UNIS était l’organisation qui allait probablement être choisie pour administrer la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant?
    Je n’ai pas participé à cette décision. C’est lorsque le programme a été annoncé que nous, à EDSC, nous avons appris le nouveau nom du programme.
    Je suis désolé, mais nous n’avons pas beaucoup de temps. Je vous ai demandé quand vous aviez appris, non pas le nouveau nom du programme, mais qu'UNIS était capable de l’administrer?
    On ne m’a jamais dit ça. On nous a parlé de la possibilité de recourir à UNIS comme complément à certaines propositions...
    Bien...
    ... que nous avions reçues, mais jamais en tant que...
    Bien, mais quand en avez-vous entendu parler pour la première fois? Je suis désolé de vous reposer toujours la même question. Quand avez-vous entendu pour la première fois qu'UNIS ou l'organisme UNIS était un candidat potentiel pour administrer le programme? Quand exactement?
    La première fois, c’était… En fait, on ne me l’a pas dit oralement, je l’ai appris dans un courriel de Rachel Wernick aux environs du 16 avril… Un courriel qui disait qu’on pourrait recourir à UNIS pour les médias sociaux, afin que ce que nous étions en train de faire au sujet de la proposition...
    Le 16 avril. Merci.
     A part Rachel Wernick, d’autres personnes vous ont-elles parlé d’UNIS avant qu’on annonce officiellement que cet organisme était chargé de l’administration du programme?
    La première fois que j’ai entendu parler d’UNIS dans des discussions au sujet des programmes pour la jeunesse, c’était dans ce courriel.

[Français]

    Ce n'était pas ma question. Je voulais savoir si vous aviez entendu d'autres personnes suggérer que l'organisme UNIS pouvait mettre en œuvre le programme.
    Me demandez-vous si j'ai entendu de telles suggestions avant le 16 avril?
    Cela pourrait être avant ou après le 16 avril, mais avant l'annonce concernant l'entente de contribution.
    En réalité, j'étais impliqué dans le dossier de façon marginale seulement, jusqu'à l'annonce du premier ministre, le 22 avril. Jusqu'à ce moment, l'organisme UNIS était impliqué dans les discussions que nous avions avec le ministère des Finances et que j'avais avec Mme Rachel Wernick.
    D'accord.
    Toutefois, ce n'était que l'une des organisations qui faisaient l'objet des discussions. Ce n'était pas du tout la proposition annoncée le 22 avril.
    Quelqu'un au ministère des Finances l'a mentionné. Qui, au ministère des Finances, a suggéré l'organisme UNIS?
    Je ne peux pas répondre à cette question, car je ne m'en souviens pas. Je crois que vous devriez retourner aux notes de la...
    Vous vous rappelez que c'était quelqu'un au ministère, mais pas qui. C'est cela.
    Je me rappelle que, dans son témoignage, Mme Michelle Kovacevic a souligné que quelqu'un du bureau du ministre des Finances avait parlé à un représentant de l'organisme UNIS, mais je ne me souviens pas de la date ni de qui il s'agissait exactement.
    Selon vous, l'idée de verser cette contribution à l'organisme UNIS venait du ministère des Finances. Est-ce exact?
    Je n'ai pas dit cela. J'ai simplement dit que l'organisme UNIS était l'une des organisations faisant l'objet des discussions. Je n'ai aucune idée de qui il s'agissait. La discussion, vraiment...
    Ce n'était qu'une voix dans l'air.
    C'est l'une des organisations dont on a discuté à partir d'une proposition qui était très différente de la proposition finale. Il y a donc eu une évolution. Le greffier a témoigné tantôt et a parlé d'un développement organique, ce qui est approprié par rapport à l'élaboration de cette proposition.

[Traduction]

    Merci.
     Je donne la parole à Mme Shanahan pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     J’aimerais revenir sur ce que vous avez dit tout à l’heure, madame la ministre. Vous avez expliqué comment on examinait les propositions, comment on procédait aux vérifications préalables, et vous vouliez que M. Robidoux ait la possibilité de donner une réponse. Madame la ministre, avez-vous quelque chose à ajouter, ou puis-je m’adresser directement à votre sous-ministre?
    Allez-y, M. Robidoux pourra certainement vous donner plus de détails sur ce qu’est une entente de contribution, notamment en ce qui concerne les vérifications préalables.
    Volontiers, madame la ministre.
     Madame la présidente, la majorité des vérifications qu’il convient de faire au sujet de l’organisation, de sa capacité à administrer le programme et de tous les détails dont nous avons discuté jusqu’à présent sont effectuées dans le cadre de l’entente de contribution. Comme l’ont dit d’autres témoins aujourd’hui, tout cela prend du temps, et nous avons une équipe spéciale, à EDSC, qui ne s’occupe pratiquement que des ententes de contribution. Ce sont donc des spécialistes dans ce domaine. Ils sont aidés dans cette tâche par le contrôleur et par les services juridiques, afin de s’assurer que les Canadiens en ont vraiment pour leur argent.
     Les ententes portent notamment sur les mécanismes de reddition de comptes et de surveillance. Elles imposent également des exigences en matière d’audit, de contrôle financier, et de rapports à soumettre. De façon générale, à partir du moment où un programme est approuvé, assorti des objectifs et des résultats escomptés, il faut beaucoup de temps à l’équipe de spécialistes pour élaborer une entente, et dans le cas qui nous intéresse, une entente avec l’organisme UNIS. Toutes les mesures de contrôle sont prévues dans l’entente.
     Avant cette étape, il ne s’agit pas vraiment des mêmes contrôles. Le rapport qui est fait à ce moment-là, et pas avant, est celui auquel on peut se reporter au moment de la publication des documents, pour voir comment se font ces contrôles. Mais avant cela, il s’agit davantage de vérifier que l’organisation est en mesure d’administrer un programme comme celui qui a été annoncé le 22 avril. En a-t-elle la capacité? C’est une vérification très pointue, et je n’y ai pas participé, mais le mouvement UNIS étant l’une des plus grandes organisations de bienfaisance à but non lucratif au Canada à s’occuper des jeunes, je n’ai pas été étonné qu’elle ait été sélectionnée, et c’est la raison pour laquelle nous en avons parlé dans les discussions préliminaires auxquelles j’ai participé.
(1630)
    Je vous remercie de votre réponse, car je pense que plusieurs d’entre nous s’inquiétaient de certains clignotants qui étaient au rouge et des vérifications qui avaient été faites. Je suis rassurée de savoir que des procédures sont en place, malgré la pandémie et les difficultés qu’elle cause aux employés qui doivent collaborer étroitement. Il est évident que cela posait des problèmes, car les gens étaient obligés de faire du télétravail, dans toutes sortes de conditions. C’est bien entendu ce que nous attendons de notre fonction publique, et je suis sûre que tous mes collègues seront d’accord avec moi sur ce point.
     Madame la ministre, vous avez dit que vous n’aviez pas à excuser ou à justifier le fait que le premier ministre ou le ministre des Finances ne se soient pas récusés de la discussion lorsqu’il a été décidé de recourir à l’organisme UNIS pour administrer le programme, et je respecte votre position.
     Vous nous avez aidés à comprendre que les choses évoluaient très vite pendant la pandémie. Qu’il fallait prendre les décisions le plus vite possible pour aider le maximum de Canadiens. Je tiens à rappeler à mes collègues que c’était la situation à l’époque et que ça l’est encore maintenant.
     Dans ces circonstances, acceptez-vous leurs excuses, vous qui avez des antécédents dans le domaine des normes éthiques? Et pouvez-vous nous dire pourquoi?
    Je vous remercie de vos commentaires.
     Je dirai que oui, il y avait la pandémie et il y avait beaucoup de choses à faire très vite. Mais nous n’aurions pas dû baisser la garde. C’est regrettable. En attendant, cela ne retire rien, à mon avis, aux autres mesures fantastiques qui ont été prises pour les étudiants et pour les Canadiens en général.
     Mais j’estime qu’ils auraient dû se récuser. Ils ont présenté leurs excuses, et je les accepte. Je pense que nous en avons tiré des leçons et j’espère sincèrement que nous allons maintenant nous remettre à la tâche afin de répondre aux besoins des Canadiens, ce qui ne veut pas dire que nous avions cessé de le faire. Au contraire, nous avons maintenu le cap, même pendant toute cette polémique.
     Il était important que nous assumions la responsabilité de ce manquement. Comme je l’ai dit, nous avons baissé la garde et nous n’aurions pas dû. Mais maintenant, il faut passer à autre chose.
    Madame la ministre, nous vous remercions beaucoup d’avoir participé à notre réunion et d’avoir répondu à nos questions. Nous vous souhaitons une bonne fin de journée.
    Merci beaucoup.
     Prenez soin de vous.
    Merci.
     Nous allons faire une pause de cinq minutes.
     Nous passerons ensuite au témoin suivant, Mme Mary Dawson.
(1630)

(1640)
    Madame Dawson, je suis ravie de vous voir.
     Nous vous remercions de votre patience. Hier, vous avez attendu pendant 45 minutes pendant la réunion de notre comité, après avoir déjà attendu une demi-heure. Nous avons eu une discussion très intéressante avec vous hier, et en plus de vous remercier de votre patience, nous vous remercions aussi d’avoir accepté de revenir parmi nous aujourd’hui.
     Madame Dawson, encore merci. Nous vous en sommes très reconnaissants.
     Madame Dawson, comme vous le savez, le 22 juillet, le Comité a adopté la motion suivante: « Que, conformément à l’article 108(3)h) du Règlement, le Comité examine les mesures qui sont en place pour éviter et prévenir les conflits d’intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contributions et autres dépenses. »
     Madame Dawson, nous vous avons demandé de comparaître aujourd’hui pour parler de cette motion, étant donné que l’éthique est votre spécialité et que vous avez jadis occupé la fonction de commissaire à l’éthique.
     Vous disposez de 10 minutes pour faire votre déclaration liminaire. Ensuite, les députés auront la possibilité de vous poser des questions.
     Madame Dawson, je m’efforce toujours de le faire avec courtoisie, mais il se peut que je sois obligée d’interrompre une réponse à une question, car notre temps est limité, et il faut que tous les députés aient la possibilité de poser leurs questions aujourd’hui.
     Madame Dawson, sans plus tarder, je vous donne la parole.
     Vous avez 10 minutes pour votre déclaration liminaire.
    Merci beaucoup. Je ne sais pas si j’aurai besoin de 10 minutes, mais j’ai préparé quelques commentaires.
     Je vous remercie de m’avoir invitée à comparaître devant votre comité. C’est parce que j’ai beaucoup de respect pour le Parlement et ses différentes facettes que j’ai accepté votre invitation. J’espère pouvoir vous être utile en répondant à vos questions.
     J’ai été la première commissaire à être nommée en vertu de la Loi sur les conflits d’intérêts. Celle-ci est entrée en vigueur en juillet 2007. J’ai occupé ces fonctions pendant 10 ans et demi. J’ai pris ma retraite il y a deux ans et demi. J’ai l’impression que c’était hier.
     Le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique administre la Loi sur les conflits d’intérêts et le Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Ces deux documents se ressemblent beaucoup, à l’exception de certaines dispositions. Aujourd’hui, nous allons parler principalement de la Loi.
     Les titulaires de charge publique assujettis à la Loi sont notamment les ministres et les secrétaires parlementaires, qui sont aussi assujettis au Code régissant les conflits d’intérêts des députés. La Loi s’applique également à la plupart des personnes, à quelques exceptions près, nommées par le gouverneur en conseil, comme les hauts fonctionnaires et les employés du Sénat, de la Chambre des communes et de la Bibliothèque du Parlement, ainsi que les juges.
     Le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique a pour rôle de donner des conseils, d’informer, de recevoir des informations provenant de titulaires de charge publique, certaines de ces informations étant rendues publiques, et de mener des enquêtes en cas de contraventions présumées de la Loi. Lorsque j’étais commissaire, j’estimais que notre rôle le plus important était de conseiller les titulaires de charge publique afin qu’ils ne se retrouvent pas en contravention de la Loi.
     Les titulaires de charge publique qui exercent leurs fonctions à plein temps ou qui touchent un salaire annuel — dans la Loi, on les appelle des titulaires de charges publiques « principaux » — sont tenus de fournir des informations personnelles au commissaire, à intervalles réguliers, pendant toute la durée de leur mandat. Par exemple, lorsqu’ils sont nommés, ils doivent déclarer tous leurs biens, leur passif, leur rémunération antérieure et leur emploi antérieur. Chaque année, ils doivent actualiser ces informations, dont un résumé est rendu public.
     Chaque nouveau titulaire de charge publique est rattaché à un employé du commissariat qui le conseille sur les divulgations à faire et qui l’aide à éviter tout conflit d’intérêts. Cet employé devient normalement sa personne-ressource lorsqu’il a besoin de conseils ou d’informations sur le régime des conflits d’intérêts. Ensemble, ils doivent parfois prendre des mesures précises pour garantir l’observation de la Loi, par exemple interposer des écrans, se dessaisir de certains biens contrôlés, comme des titres cotés en Bourse, qui pourraient être affectés par des décisions gouvernementales.
     L’autre rôle important du commissariat consiste à mener des enquêtes en cas d’infraction présumée de la Loi. Lorsque l’enquête est officiellement lancée, elle devient une étude. Les médias ont tendance à confondre ces deux termes. Une étude peut être le résultat d’une plainte officielle déposée par un député ou par un sénateur qui a de bonnes raisons de croire qu’une ou plusieurs règles de la Loi ont été violées; elle peut aussi être déclenchée par le commissaire si celui-ci a de bonnes raisons de croire qu’il y a eu infraction à la Loi. Les études sont réalisées à huis clos. Un sténographe prend en notes toutes les délibérations. Le commissaire a le pouvoir de convoquer des témoins et d’ordonner la remise de documents.
     J’espère que ce bref aperçu de la Loi sur les conflits d’intérêts et du rôle du commissaire vous sera utile.
     J’aimerais, pour terminer, vous dire quelques mots au sujet de la disposition qui décrit une situation de conflit d’intérêts. Il s’agit de l’article 4, « Conflits d’intérêts », qui dispose que « Pour l’application de la présente loi, un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d’intérêts lorsqu’il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité » — et je souligne « fournit la possibilité » — « de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne ».
     D’après cette définition, il y a conflit d’intérêts si l’exercice d’un pouvoir ou d’une fonction fournit ne serait-ce que la possibilité de favoriser des intérêts privés. Il n’est pas nécessaire que cette possibilité ait été réellement exploitée pour favoriser des intérêts privés, ou que des intérêts privés aient été réellement favorisés, ni même qu’il y ait eu l’intention de favoriser des intérêts privés.
(1645)
    La plupart, sinon toutes, des principales mesures d’observation prévues par la Loi s’articulent autour du concept du conflit d’intérêts, et la description de ce concept sert à déterminer si certaines de ces principales mesures d’observation ont été violées. La contravention en soi est définie ailleurs.
     Il se peut, et ce sera ma dernière remarque, que votre comité envisage d’apporter des modifications à la Loi sur les conflits d’intérêts, une fois qu’il aura terminé son étude. Le seul examen obligatoire prévu par la Loi a eu lieu en 2013-2014, mais il n’a pas donné lieu à des amendements.
     Si cela vous intéresse, je vous conseille de relire la déclaration que j’ai faite le 30 janvier 2013 devant ce même comité, à propos de cet examen. J’ai alors proposé 75 recommandations pour améliorer la Loi. Certaines concernaient le libellé, d’autres étaient plus substantielles. J’ai résumé les principales recommandations dans mon dernier rapport annuel de commissaire, pour l’année 2016-2017, qui a été publié en juin 2017.
     Il y a aussi une autre recommandation qui ne faisait pas partie de celles dont je viens de parler, et qui concerne l’exception prévue pour les amis, à l’article 11 sur les cadeaux et autres avantages. Cette exception ne devrait pas figurer à l’article 11, car le libellé de cet article est suffisant, à mon avis. Autrement dit, j’estime que l’exception concernant les amis devrait être supprimée de cet article.
     Cela dit, même si j’ai fait 75 recommandations pour la modifier, j’estime que la Loi est dans l’ensemble tout à fait adéquate. Par exemple, quand j’étais commissaire, j’ai eu l’occasion de recevoir un certain nombre de délégations issues de différents pays, et l’objet de leur visite était toujours de se renseigner sur notre loi et sur la façon dont nous l’appliquions, afin de modifier la leur en conséquence ou d’en adopter une nouvelle.
     Je vous remercie de votre attention. J’espère être en mesure de répondre à vos questions.
(1650)
    Merci beaucoup, madame Dawson.
     Nous allons maintenant passer à notre première série de questions, à raison de six minutes par député.
     Monsieur Barrett, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
     Merci, madame Dawson, de revenir devant notre comité aujourd’hui. Je vous en suis reconnaissant.
    Hier, j’étais invisible.
    C’est vrai. Nous sommes ravis que vous soyez parmi nous aujourd’hui.
     J’aimerais revenir sur deux des remarques que vous avez faites. La première concerne les améliorations à apporter à la Loi. Pensez-vous qu’il faudrait alourdir les pénalités en cas de récidive, et dans l’affirmative, de quelle façon?
    Je ne suis pas favorable à des pénalités plus lourdes.
     Vous n’ignorez pas que la Loi prévoit déjà des pénalités, mais elles sont assez légères et concernent uniquement les manquements… On les appelle des pénalités administratives ou monétaires. Elles s’appliquent en cas de non-respect des délais pour soumettre les informations réglementaires, et ce sont des pénalités qui sont fréquentes.
     À part cela, il ne faut pas oublier que cette loi n’est pas une loi pénale mais une loi éthique. Il est intéressant de noter que le mot « éthique » n’apparaît que dans le titre et nulle part ailleurs dans la Loi. En fait, il apparaît non pas dans le titre de la Loi mais dans le titre du commissaire. C’est le seul endroit où on le trouve. Quoi qu’il en soit, cela montre que cette loi se fonde sur le principe de la probabilité raisonnable, comme en droit civil, et pas sur le principe du « hors de tout doute raisonnable », comme en droit pénal. Le dispositif pénal contient toutes sortes d’articles sur la corruption ou la fraude, par exemple, qui pourraient s’appliquer dans une situation semblable. En fait, si une infraction pénale a été commise, le commissaire doit transmettre le dossier aux services responsables des affaires pénales et mettre un terme à l’enquête, si elle a commencé.
     Tout ça pour vous expliquer pourquoi je ne suis pas très favorable aux pénalités.
    Bien.
     Que pensez-vous du mot « ami » dans la Loi?
    C’est un mot qui n’est pas défini, et ce n’est pas facile de… L’une de mes premières décisions concernait quelqu’un qui aurait été jugé en contravention de la Loi si on avait prouvé qu’il était ami avec une certaine personne. Or, j’ai constaté que c’était quelqu’un qui aimait se vanter de ses relations, et que la personne en question n’était pas du tout son ami, par conséquent il a été blanchi.
     Par ailleurs, et vous l’avez peut-être vu dans le premier rapport Trudeau, j’ai eu ce problème à examiner. Ce n’est pas un mot qui est facile à définir, et cela peut donner lieu à des situations embarrassantes lorsque quelqu’un prétend être l’ami d’une personne alors que ce n’est pas du tout le cas. C’est pour cela que j’emploie toujours l’expression « aux fins de la Loi ».
     Dans ce cas précis, j’avais donné une définition de ce mot. Je ne l’ai pas sous les yeux, mais je disais que c’était quelqu’un qui avait une relation étroite avec la personne, qui avait peut-être dîné chez elle, enfin une personne qui était plus qu’une simple connaissance. Comme je l’ai dit, il y a dans le rapport une très bonne définition de ce terme, mais malheureusement, je ne l’ai pas apportée avec moi.
     Cela ne fait rien, je vous remercie. Je connais bien les conclusions que vous avez rédigées dans le premier rapport Trudeau, au sujet des relations entre lepremier ministre et l’Aga Khan, dans lequel Trudeau a été jugé coupable d’avoir enfreint la Loi, avant de récidiver une deuxième fois.
     Ai-je raison de penser qu’à l’article 9 de la Loi, où il est question de favoriser des intérêts privés, par exemple, il y a une différence entre les parents et les amis?
    Je ne comprends pas bien, vous voulez savoir la différence qu’il y a entre...
    À l’article 9 de la Loi, lorsqu’il est question de favoriser des intérêts privés… J’essaie simplement de comprendre la différence qui existe entre amis et étrangers...
    Oui, et quelle est votre question?
    La différence qui existe entre amis et étrangers...
(1655)
    Les articles 9 et 6 portent tous les deux… À l’article 9, il n’est question que des amis: « favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne ». Est-ce l’expression « de façon irrégulière » qui vous pose problème? L’important, c’est de déterminer si une personne est ce qu’on peut considérer comme un ami. Comme je l’ai dit, beaucoup d’autres commissaires au Canada ont utilisé la définition qui se trouve dans cette décision, mais je ne comprends pas très bien ce que vous voulez que je vous dise.
    Comme il ne me reste qu’une minute, je dirai simplement que dans le cas qui est rapporté dans le premier rapport Trudeau, l’amitié était invoquée par la défense pour justifier le fait que la famille de M. Trudeau ait eu droit à des vacances de luxe en guise de cadeau, parce que les cadeaux donnés par les amis sont traités de façon plus indulgente par la Loi. C’est ce que je vous demande de me confirmer.
    Oui, et c’est dans ce contexte que je faisais référence à l’article 11. Cet article, qui porte sur les cadeaux et autres avantages, est celui qui s’appliquait au premier cas Trudeau. J’ai fait une enquête assez approfondie pour déterminer à quelle fréquence ces personnes s’étaient vues au cours des 30 années précédentes, car l’important, c’était de déterminer si c’était vraiment des amis.
    Merci.
    Merci.
    Je donne la parole à Mme Shanahan pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Merci, madame Dawson, de comparaître devant notre comité aujourd’hui, de faire preuve de patience à notre égard et d’avoir été longtemps au service de notre pays. Cela nous est très utile, étant donné le mandat qui nous a été confié.
    Il y a quelqu’un qui frappe à ma porte. Je ne vais pas aller ouvrir. Il n’y a rien que je puisse faire. De deux choses l’une, soit il entrera, soit il partira.
    Madame Dawson, j’aimerais brièvement parler du processus. Vous êtes ici aujourd’hui. Nous étudions la question dont nous avons été saisis, mais en même temps, l’actuel commissaire à l’éthique commence tout juste à étudier la même question.
     Que pensez-vous du fait que nous examinions tous les deux la même question et en même temps? Est-ce que cela aide le commissaire que le Comité ait entrepris cette étude ou est-ce que cela lui nuit?
    Je ne pense pas que cela lui nuise, car son rôle est de faire une étude approfondie des faits en cause et de déterminer ce qui s’est passé, de sorte que si de nouveaux faits sont révélés, cela lui sera certainement utile. Il est encore trop tôt pour dire quelles décisions seront prises, mais l’important, c’est d’aller chercher l’information.
    Merci.
     Nous avons entendu hier M. Conacher. Vous ne serez sans doute pas surprise si je vous dis qu’il ne vous apprécie pas beaucoup, madame Dawson. En 2013, en réponse à votre refus de faire une enquête au sujet de l’ancien premier ministre Stephen Harper, il vous a qualifiée de… Ce n’est pas un vocabulaire que j’utilise, mais il a dit que vous étiez une « boniche » de commissaire. Il a ajouté que vous aviez permis à des dizaines de députés conservateurs de tirer leur épingle du jeu alors qu’ils avaient clairement violé la Loi sur l’éthique.
     Que pensez-vous de ces déclarations? Comment ce genre de discours peut-il aider… J’aimerais savoir ce que vous en pensez.
    J’invoque le règlement, madame la présidente. Le procès-verbal va indiquer que c’est Mme Shanahan qui a proféré ces accusations sans fondement contre Mme Dawson.
    Pardon? Puis-je répondre?
    Monsieur Angus...
    Mon micro se ferme.
    Madame Dawson, est-ce que vous m’entendez maintenant?
    Oui, parfaitement.
    Si votre micro se ferme, c’est probablement parce que des députés se parlent entre eux, au lieu de passer par la présidence. Je leur demande de passer par la présidence afin d’éviter ce problème.
     Pour les besoins du procès-verbal, je vous demande, madame Shanahan, si vous citez des paroles prononcées hier par M. Conacher?
(1700)
    Non, c’est ce qu’il a dit en 2013.
    M. Conacher?
    Oui, M. Conacher.
     J’aimerais parler des enquêtes. Vous avez abordé la question des enquêtes qui peuvent ou non se dérouler en même temps. J’aimerais simplement savoir ce que vous en pensez, madame. Cela a-t-il un impact sur le travail du commissaire à l’éthique?
    Je ne suis bien sûr pas d’accord avec M. Conacher, puisque j’ai conclu qu’un certain nombre de personnes avaient contrevenu à la Loi. J’estime que mon rôle consiste à appliquer la Loi telle qu’elle est formulée, et pas à en interpréter certains aspects. J’ajouterai que M. Conacher m’a poursuivie à plusieurs reprises devant les tribunaux pour demander une révision judiciaire, mais qu’il n’a jamais réussi. C’était toute une série de révisions judiciaires.
     Il y a différentes façons d’appliquer la Loi. Certaines personnes vont aller au-delà de leur mandat. Personnellement, j’essaie d’appliquer la Loi telle qu’elle est formulée. Mais je vous dirai aussi qu’il est arrivé à M. Conacher de faire des suggestions tout à fait sensées et même de dire des choses sensées. Je ne suis pas toujours d’accord avec lui, mais ce n’est pas un imbécile.
    Je vous remercie de le reconnaître. Vous avez dit tout à l’heure que le commissaire à l’éthique a le pouvoir de convoquer les témoins et d’ordonner la remise de documents. A-t-il besoin de notre aide pour mener à bien ses enquêtes?
    Non, je ne pense pas, mais ça ne peut pas faire de mal. Tout ce que le commissaire à l’éthique peut faire, c’est rassembler les faits et faire son enquête à partir de là.
    Me reste-t-il du temps, madame la présidente?
    Oui, il vous reste une minute.
    Très bien.
     M. Conacher a dit hier, en réponse à une question, que la rhétorique partisane qui entoure les enquêtes à caractère éthique ne facilite pas les choses. Qu’en pensez-vous?
    La rhétorique qui entoure ces enquêtes?
    La rhétorique partisane.
    Oh, partisane.
    Vous avez fait allusion à des malentendus dans les médias.
    Oui.
     Les partis d’opposition diront toujours des choses négatives sur le gouvernement au pouvoir, et vice-versa, et parfois ces choses sont très exagérées. J’ai proposé une modification au Code des députés. Ce n’est pas dans la Loi, mais un député n’a pas le droit de faire de fausses déclarations. Il existe une petite disposition à cet effet, mais je ne me souviens pas du libellé exact. Quand les gens lançaient de fausses accusations, c’était vraiment un problème.
     Cela n’arrive pas tout le temps. Bien sûr, lorsqu’on est membre d’un parti, on essaye toujours de dénoncer les faiblesses de l’autre parti. C’est la politique qui veut ça, mais il ne faut pas aller trop loin.
    Merci.
     Je vais maintenant donner la parole à M. Fortin pour six minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie d'être parmi nous, madame Dawson.
    Vous avez parlé plus tôt de la définition d'un conflit d'intérêts. Ne pourrait-on pas dire qu'un conflit d'intérêts est une question intrinsèque, qui appartient à l'individu?
    À partir du moment où je me demande si je suis en situation de conflit d'intérêts, parce que des intérêts divergents me préoccupent, ne suis-je pas automatiquement en situation de conflit d'intérêts? Je n'ai peut-être pas commis de faute, mais le fait d'être en situation de conflit d'intérêts ne vient-il pas justement du fait que je me demande si j'ai l'occasion de favoriser les intérêts d'une partie ou de l'autre?

[Traduction]

    Oui, mais c’est seulement la définition de conflit d’intérêts. Ce n’est pas l’article sur les contraventions, c’est simplement une définition.
     Il faut se reporter à la définition. S’agissant des dispositions sur la récusation, si vous pensez qu’il y a conflit d’intérêts, vous devez aussi vous reporter, par exemple, à l’article 6. C’est sans doute le premier qui vient à l’esprit. Dans ce cas, vous ne pouvez pas participer à la prise d’une décision si vous êtes dans ce genre de situation de conflit d’intérêts.
(1705)

[Français]

    À partir du moment où l'on se pose la question ou que l'on a un doute, il y a un conflit d'intérêts. On n'a pas encore commis d'infraction, mais, si, malgré ce doute, on participe à un débat ou à une décision, on commet une faute.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    Non, il faut se reporter à un article substantiel. L’article 4 n’est pas un article substantiel, c’est l’article des définitions. Malheureusement… J’ai toujours préconisé — en fait, cela faisait partie de mes 75 recommandations — que cela figure dans l’article des définitions, parce que les gens ne s’y retrouvent pas. Ils pensent que c’est une règle substantielle et ça ne l’est pas.

[Français]

    D'accord, mais je vais vous donner un exemple. Supposons que ma mère ait reçu un quart de un million de dollars d'une entreprise, que mon frère ait reçu des dizaines de milliers de dollars de l'entreprise et que ma conjointe ait également reçu de l'argent en tant qu'ambassadrice.
    Le fait que ces intérêts se confondent dans mon esprit avec l'intérêt de l'État, n'indique-t-il pas qu'il y a un conflit d'intérêts et que je devrais par conséquent m'abstenir de participer à une décision?

[Traduction]

    Oui, mais il faut se reporter à l’article 11, qui concerne les cadeaux, en supposant que la Loi s’applique à ces personnes-là. L’article 11, c’est celui-là que vous devez interpréter. Chose curieuse, c’est l’article qui n’utilise pas le conflit d’intérêts comme point de départ.
     Quoi qu’il en soit, nous entrons dans des détails d’ordre sémantique.

[Français]

    Je vous remercie, madame Dawson. J'ai une autre question à vous poser.
    Supposons que l'individu qui se trouve en situation de conflit d'intérêts soit un « exemple » pour les gens avec qui il travaille. Autour de la table du Conseil des ministres, par exemple, le premier ministre est en quelque sorte le leader du Conseil. C'est lui qui inspire les autres ministres.
    Son devoir de diligence quant aux conflits d'intérêts n'est-il pas plus grand que celui d'un simple participant à la rencontre?

[Traduction]

    Il a peut-être un rôle symbolique… Mais le fait est que la Loi s’applique à tout le monde de la même façon, qu’il s’agisse du premier ministre ou du fonctionnaire le plus bas dans l’échelle qui est assujetti à la Loi. Les règles sont les mêmes pour tous.

[Français]

    Madame Dawson, supposons que l'on soit dans une situation qui fait en sorte que l'on doive prendre une décision un peu inhabituelle, c'est-à-dire que l'on va confier un contrat de 43,5 millions de dollars à une entreprise qui va gérer jusqu'à concurrence de 900 millions de dollars et l'on n'a pas le temps de faire un appel d'offres. On accorde alors un contrat sans appel d'offres.
    Notre devoir de diligence à l'égard du conflit d'intérêts n'est-il pas accru à ce moment-là?

[Traduction]

    Oui, si on en a le temps. C’est là le problème.
     J’aimerais vous reporter à l’article 19 de la Loi, qui dispose que: « La nomination ou l’emploi de tout titulaire de charge publique est subordonné à l’observation de la présente Loi. » Cela devrait avoir une incidence sur l’avenir de la personne trouvée coupable d’avoir contrevenu à la Loi. Ce n’est pas le commissaire à l’éthique qui aura cette incidence, ce sera le milieu de travail de cette personne, ou le système qui l’a nommée, élue ou embauchée.
     Je veux dire par là que les contraventions sont définies dans la Loi, et s’il y a des circonstances atténuantes, la décision indiquera que, oui, la personne a violé la Loi, peut-être pour des raisons qu’on peut comprendre, mais cela ne change rien au fait que la Loi a été violée.

[Français]

    Madame Dawson, nous savons que notre premier ministre fait présentement l'objet d'une enquête par le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique. C'est la troisième fois. Dans l'éventualité où il devait être reconnu coupable d'une quelconque infraction aux règles d'éthique, ce serait la troisième fois.
    À votre avis, la sanction devrait-elle être plus grande après trois fois ou est-il possible de contrevenir aussi souvent que l'on veut à la Loi sur les conflits d'intérêts et la sanction ne sera jamais plus importante que ce que nous avons vu jusqu'à maintenant, finalement?
(1710)

[Traduction]

    Comme je l’ai dit tout à l’heure, je ne suis pas favorable à des pénalités ou à des sanctions qui seraient déterminées par le commissaire à l’éthique. Je pense que cela incombe à la justice pénale. Mais je crois que la répétition des contraventions aura des répercussions, tôt ou tard. C’est la raison pour laquelle j’ai parlé de l’article 19. L’observation de la Loi est une condition que doit respecter la personne qui occupe l’emploi ou la fonction. Un jour ou l’autre, il y aura certainement des répercussions si vous avez contrevenu à la Loi, qui que vous soyez et où que vous soyez.

[Français]

    Je vous remercie, madame Dawson.

[Traduction]

    Je vais maintenant donner la parole à M. Angus pour six minutes.
    Merci, madame Dawson. Je suis ravi de vous revoir devant notre comité. Vous avez déjà comparu tellement de fois au fil des ans.
     Le « Rapport Trudeau » m’intéresse tout particulièrement, car je pense qu’il aidera mes collègues libéraux à mieux comprendre comment fonctionne la Loi sur les conflits d’intérêts. Vos conclusions sont très intéressantes. On a tendance à croire qu’un conflit d’intérêts, c’est de la corruption, quelqu’un qui vous offre de l’argent et vous leur renvoyez l’ascenseur, mais dans le « Rapport Trudeau », c’est beaucoup plus complexe parce que les membres de la famille étaient très impliqués dans les renvois d’ascenseur.
     Comme vous le savez, le premier ministre rencontre l’Aga Khan en novembre 2015 à Paris. On nous dit que c’est une rencontre privée, et c’est peut-être le cas. Ensuite, c’est la fille de l’Aga Khan qui prend contact avec Mme Grégoire pour l’inviter une première fois sur l’île. La décision est donc prise par l’intermédiaire de la famille. Et deux jours avant le départ de Mme Trudeau pour l’île, les représentants de l’Aga Khan appellent pour commencer à parler des 15 millions de dollars.
    Donc, dans vos conclusions, vous jugez que le premier ministre a commis un certain nombre de fautes. Il y a d’abord toute la question… qu’un titulaire de charge publique doit se récuser de toute discussion, décision, débat ou dossier pour lesquels il est en conflit d’intérêts… L’article 6 de la Loi dit que… le titulaire devrait « raisonnablement » savoir qu’en prenant cette décision, il se trouve en situation de conflit d’intérêts. Autrement dit, il devrait « raisonnablement » savoir qu’il y a un conflit… Il s’agissait d’un cadeau très avantageux pour la famille, et pour ce fameux voyage à l’époque de Noël, c’est Sophie Grégoire qui a appelé l’Aga Khan pour lui demander s’ils pouvaient venir passer des vacances, et la famille a dit oui. C’est bien ça?
     Je voudrais simplement que vous me confirmiez que, comme c’est le cas dans ce rapport, les membres de la famille peuvent être très impliqués et considérer que c’est tout à fait normal, alors qu’ils placent le titulaire de charge publique dans une situation de conflit d’intérêts.
    C’est là qu’il faut se reporter à la définition du conflit d’intérêts, à l’article 4, qui est l’article des définitions. Cette définition est la suivante:
la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne.
    Les parents ou amis sont déjà inclus dans la définition du conflit d’intérêts. Ce qui est intéressant, c’est que dans le cas de l’Aga Khan, l’article 11 ne se fonde pas sur le concept du conflit d’intérêts, mais sur un autre, et je cite:
qui pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné pour influencer le titulaire…
    Dans un sens, on amalgame un peu les deux concepts.
    Pour les autres articles comme celui que vous avez mentionné...
    J’aimerais revenir sur l’article 11, parce que c’est la raison qui semble avoir été donnée pour influencer le titulaire de charge publique, puisqu’il y a la création d’une relation, et ensuite, vous vous retrouvez avoir développé une relation inappropriée de par la façon dont vous l’avez créée.
     Ce qui est vraiment surprenant avec les Kielburger, et je ne vous demande pas d’anticiper la décision du commissaire Dion… Nous savons que Margaret Trudeau est une conférencière très connue. Nous avons été très surpris de constater qu'UNIS n’avait payé aucun autre conférencier. UNIS a dit au conseil d’administration qu’aucun autre conférencier n’avait été payé, mais il ne lui a pas dit que Margaret et Sacha Trudeau l’avaient été. On peut raisonnablement conclure que le premier ministre se trouvait en situation de conflit d’intérêts, ne pensez-vous pas, puisque sa famille a reçu une somme équivalant à un demi-million de dollars?
     J’aimerais revenir sur l’article 6, qui est relié à l’article 11, où il est dit que le titulaire d’une charge publique ne peut participer à la prise d’une décision dans l’exercice de sa charge « s’il sait ou devrait raisonnablement savoir que, en prenant cette décision, il pourrait se trouver en situation de conflit d’intérêts ». Les sommes d’argent que les Kielburger ont versées à des membres de sa famille le plaçaient dans une situation difficile.
(1715)
    Oui, mais vous amalgamez les deux articles.
     L’article 11 dit « qui pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné », et c’est propre à l’article 11, parce que dans les autres articles, qu’il s’agisse de l’article 6, 9 ou autre, on ne retrouve pas cette expression.
    Je comprends.
     L’article 11 dit:
qui pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné pour influencer le titulaire dans l’exercice de ses fonctions officielles.
    Je parle de la relation qui existe avec les Kielburger. Je parle de la responsabilité qui incombe au premier ministre en vertu de l’article 6, où il est dit qu’il aurait dû raisonnablement savoir qu’il se trouvait en situation de conflit d’intérêts, parce que personne d’autre ne pouvait savoir que la famille entretenait des relations financières avec eux. Ce n’était pas public. UNIS savait que la famille participait aux activités de l’organisme, mais UNIS laissait entendre que tout le monde était bénévole. À ce moment-là, c’est au premier ministre de prendre une décision.
     J’insiste là-dessus parce que j’ai constaté que le premier ministre, lorsqu’il a témoigné, ne parlait que de l’article 2, qui définit les membres de la famille comme étant l’époux et les enfants. Mais l’article 3 porte sur les parents, c’est-à-dire les personnes apparentées à un titulaire par la naissance, le mariage, l’union de fait ou l’adoption, ce qui élargit la définition de parents. J’ai l’impression que le premier ministre connaissait parfaitement la définition de l’article 2, et il me paraît évident, à la lecture de l’article 3, que les sommes que les Kielburger ont versées à sa famille le placent dans un conflit d’intérêts.
    Il s’agit en fait des alinéas de l’article 2.
     Très franchement, je n’en sais rien. Ce sont les faits, mais il ne m’appartient pas de décider.
    Exactement. Je comprends tout à fait.
     Merci beaucoup.
    Merci.
     Nous allons maintenant commencer la série des questions de cinq minutes.
     Monsieur Gourde, vous êtes le premier nom sur ma liste.
     Vous avez la parole.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame Dawson, je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Vous avez été à la tête du Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique pendant 10 ans et j'en ai été témoin. Vous aviez une main de fer dans un gant de velours et vous avez fait de l'excellent travail.
    D'un point de vue philosophique, quand on regarde ce qui se passe aujourd'hui, on constate que le travail que vous avez fait et celui que fait M. Mario Dion, le nouveau commissaire, ne semblent pas changer grand-chose dans l'opinion publique. Quelqu'un qui se fait condamner par le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique devrait sans doute perdre les élections, puisque le respect de l'éthique est un élément essentiel par rapport au lien de confiance avec l'électorat. Pourtant, quand quelqu'un se place sans cesse en situation de conflit d'intérêts et que les enquêtes le confirment, cela ne semble pas briser son lien de confiance avec l'électorat.
    Même si le Commissariat fait vraiment son travail, ou même s'il ne donne pas nécessairement les résultats de son enquête à l'électorat, cela n'a pas beaucoup de poids dans l'opinion publique. On l'a vu lors des dernières élections. Le premier ministre a été reconnu coupable deux fois: en ce qui concerne son voyage chez l'Aga Khan et en ce qui concerne l'histoire impliquant SNC-Lavalin. Toutefois, les gens ont quand même voté à nouveau pour le premier ministre actuel. La majorité des députés à la Chambre prennent cela au sérieux, mais pas l'électorat. Cela m'inquiète.
    Madame Dawson, maintenant que vous êtes à la retraite et que vous avez un regard extérieur sur cette situation, est-ce que cela vous inquiète?

[Traduction]

    Je pense que le niveau de gravité de ces contraventions n’est pas toujours le même. Tantôt, il s’agit simplement de négligence, tantôt c’est beaucoup plus sérieux.
     Par ailleurs, vous pensez surtout aux députés qui sont aussi des titulaires de charge publique principaux. Certes, il y a beaucoup de gens qui sont assujettis à la Loi et que le public ne connaît pas beaucoup, mais c’est alors à l’organisation de prendre des mesures, ou au gouvernement qui les a nommés. Je pense à ceux qui ont été nommés par le gouverneur en conseil.
     Je suis sûre qu’il va y avoir d’autres contraventions à la Loi, mais il y a des circonstances atténuantes dans le cas présent, car la situation est inhabituelle à cause de la pandémie. Je ne suis pas vraiment surprise. Je pense que la Loi sur les conflits d’intérêts sert avant tout à prévenir ce genre de choses, comme je l’ai déjà dit. Chaque décision rendue est en quelque sorte une leçon pour tous les autres titulaires principaux qui risquent de se retrouver dans ce genre de situation. On espère toujours que tout le monde saura tirer des leçons de la contravention commise par une autre personne.
(1720)

[Français]

    Seriez-vous d'accord pour dire qu'un ministre, un premier ministre ou un secrétaire parlementaire qui ferait l'objet d'une enquête sérieuse par le Commissariat, à la suite de plaintes légitimes, devrait renoncer à son poste et devenir un député indépendant jusqu'à ce que le Commissariat rende sa décision? Au moins, il ne serait pas une distraction pour son parti.

[Traduction]

    À mon avis, c’est une décision politique et pas une décision morale.
     Premièrement, ces cas ne sont pas tranchés tant qu’une décision n’a pas été rendue, et c’est difficile de dire quoi que ce soit tant que l’enquête suit son cours. Certains cas sont plus évidents que d’autres, et dans celui qui nous intéresse aujourd’hui, il y a encore des zones grises, à mon avis.
     Ce n’est pas quelque chose d’automatique. Mais je vous reporte encore une fois à l’article 19, où il est dit que la nomination ou l’emploi de tout titulaire de charge publique est subordonné à l’observation de la Loi. Cela devrait avoir un impact, mais cela n’en a pas toujours.

[Français]

    Cependant, après qu'un député a commis une infraction vraiment sérieuse, est-il possible qu'il ne puisse jamais revenir en tant que ministre?

[Traduction]

    Monsieur Gourde, votre temps est écoulé.
    Ce sera à la population d’en décider.
     En fait, excusez-moi, vous parlez d’un ministre et pas d’un député. C’est alors au parti, ou au premier ministre, je suppose, de le décider. Une décision s’impose, mais elle n’est pas évidente.
    Merci, madame Dawson.
     Pour une autre question de cinq minutes, je vais donner la parole à M. Dong et à Mme Zahid.
    Merci, madame la présidente.
     Madame Dawson, je suis un nouveau membre du Comité, et l’occasion qui m’est offerte de vous poser des questions est pour moi un plaisir et une possibilité d’en apprendre davantage sur la question.
     J’ai écouté attentivement les questions de mes collègues de l’opposition et les réponses que vous leur avez données. J’ai l’impression que leur frustration vient avant tout du fait que les conclusions que vous avez tirées de cet incident ne leur ont pas donné des munitions pour remporter les dernières élections.
     Je crois que les Canadiens aimeraient bien savoir ce que vous pensez de notre dispositif législatif en matière d’éthique. Pensez-vous que, dans l’ensemble, il est plutôt efficace?
    Je pense que c’est un bon dispositif. J’ai dit tout à l’heure, dans mes remarques liminaires, que j’avais été surprise, quand j’étais commissaire, d’accueillir autant de délégations de différents pays — la Chine, la Russie, l’Ukraine, certains pays africains, l’Angleterre, l’Australie et la Nouvelle-Zélande — qui voulaient savoir comment fonctionne notre régime. Je pense qu’on peut toujours améliorer ces régimes. C’est ce que nous appelons le modèle canadien. Les provinces ont des régimes semblables, à quelques petites différences près. Les Canadiens devraient être fiers des régimes qu’ils ont. J’estime qu’ils représentent un modèle pour le monde entier, même s’il est toujours possible de les améliorer.
     Par exemple, j’ai eu l’occasion de participer à un groupe de discussion avec d’anciens commissaires à l’éthique des États-Unis. Aux États-Unis, ils n’ont pas le pouvoir de faire enquête, simplement celui de conseiller. Ces régimes ont leurs qualités et leurs avantages, mais ils ne permettent pas d’aller plus loin, c’est-à-dire de faire appel à la justice pénale. C’est différent. Je vous livre des réflexions qui me viennent à l’esprit.
(1725)
    C’est très utile. Pensez-vous qu’il y ait un problème d’éthique au sein du Parlement, ou même au gouvernement? Je ne parle pas du gouvernement libéral actuel, mais du système en général.
    Il y aura toujours des problèmes d’éthique. Et nous avons des instruments qui permettent d’y faire face et d’essayer d’améliorer les choses.
    Pensez-vous que les commissaires à l’éthique devraient travailler de façon proactive avec les décideurs du gouvernement, ou bien qu’ils devraient se contenter de lire, d’interpréter et d’appliquer le Code? Entre ces deux extrêmes, où vous situez-vous?
    Je ne comprends pas tout à fait ce que vous voulez dire, mais quand j’étais commissaire, et c’est encore le cas aujourd’hui, je rencontrais fréquemment des gens dans les bureaux des ministres ou dans les différentes commissions pour discuter des responsabilités en matière d’éthique. C’était un excellent exercice parce que cela nous permettait de discuter des problèmes qui se posaient. Je ne vous donnerai pas d’exemples en particulier, mais c’est un rôle très important du commissariat, comme je l’ai dit dans ma déclaration liminaire.
    Merci.
     Je donne la parole à Mme Zahid.
    Merci.
     Merci, madame Dawson, d’avoir accepté de comparaître devant notre comité puisque le système ne fonctionnait pas hier. Dans une entrevue que vous avez accordée au Globe and Mail en 2018, vous avez dit qu’il n’y avait pas beaucoup d’entorses à la Loi. Êtes-vous toujours du même avis?
    Oui. Mais je n’en sais pas plus que ce que je lis dans les médias. Je pense que notre société est foncièrement bonne, et je suis fière d’être canadienne.
    Avez-vous des recommandations à nous faire au sujet de la définition des membres de la famille et au sujet de leur implication dans des activités caritatives ou professionnelles qui pourraient influer sur les décisions que les députés et le Cabinet ont à prendre?
    Je ne vois pas très bien où vous voulez en venir. Nous avons déjà les écrans qu’on peut interposer pour écarter les risques de conflits. La question est de savoir si l’organisme de bienfaisance a besoin de l’argent ou de l’aide du gouvernement. Dans ce cas, celui qui prend les décisions doit respecter les règles sur les conflits d’intérêts. Et dans certains cas, cela peut concerner votre propre situation, celle des membres de votre famille ou celle de vos parents.
    Merci beaucoup, madame Dawson.
     Je vais maintenant donner la parole à M. Kurek pour cinq minutes.
(1730)
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Merci, madame Dawson, de comparaître devant notre comité.
     J’aimerais revenir sur une question que M. Dong a posée. Est-ce que le gouvernement actuel a un problème d’éthique? Nous savons que le premier ministre fait l’objet d’une enquête, pour la troisième fois. Que pensez-vous du comportement du gouvernement actuel sur le plan éthique?
    Le premier ministre est un membre du gouvernement parmi d’autres. Je pense qu’il a le cœur à la bonne place, de façon générale, mais il n’est peut-être pas assez prudent. Qu’en sais-je? Pourtant, quand on considère toutes les choses qu’il a faites pendant la pandémie, je pense qu’on peut dire qu’il a fait du bon travail, même si on se retrouve dans une situation assez bizarre aujourd’hui.
     Quand des gens au gouvernement font des choses qui contreviennent aux règles d’éthique, il faudrait que quelqu’un le leur dise. Mais je ne vais pas… Les années passent et ce genre de problème ressurgit régulièrement.
    Je vous remercie.
     Je sais qu’après la publication du Rapport Trudeau, vous avez eu l’occasion de comparaître devant le comité de l’éthique et de répondre à des questions au sujet de ce rapport. J’ai été abasourdi en février dernier, alors que je venais d’être élu député, de voir des députés de la majorité s’opposer à une comparution du commissaire actuel devant le Comité au sujet du deuxième Rapport Trudeau.
     Qu’en pensez-vous? Le commissaire à l’éthique devrait-il être autorisé à comparaître devant le Comité pour présenter les conclusions de son rapport?
    Je ne me souviens plus très bien de ce que j’ai dit à l’autre comité, mais la Loi sur les conflits d’intérêts prescrit une règle selon laquelle le commissaire à l’éthique n’est pas censé divulguer des informations qu’il a recueillies au cours de son enquête ou quoi que ce soit qui ne figure pas déjà dans son rapport.
     Quand on est commissaire à l’éthique, il faut faire très attention à ne pas déborder de ce cadre. Je ne vois donc pas en quoi la comparution du commissaire aurait pu être utile, si ce n’est pour parler de façon générale de la façon dont la Loi est appliquée. Personnellement, je restais toujours très discrète. Je ne suis plus commissaire, mais le commissaire actuel a une obligation juridique de réserve, et il ne doit pas parler publiquement du rapport qu’il est en train de rédiger; une fois qu’il est rédigé, le rapport suffit à lui-même.
    J’aimerais vous poser quelques questions au sujet de votre interprétation de la Loi. Vous avez déclaré aux médias, et je cite: « on ne peut pas commettre deux fois la même faute ». Et vous avez ajouté: « on dirait qu’il a un angle mort quelque part ». Vous parliez du comportement éthique du premier ministre. Je voulais que cela soit consigné au procès-verbal. Avez-vous quelque chose à ajouter à ce que vous aviez alors déclaré, précisément dans le contexte actuel de l’enquête sur l’organisme UNIS et le comportement du premier ministre et du ministre des Finances? On dirait que la portée de cette enquête s’élargit de jour en jour.
     J’avais dit cela en réponse à une question sur trois rapports qui venaient de sortir et qui avaient tous plus ou moins un lien avec la Loi sur les conflits d’intérêts. C’étaient peut-être des propos un peu acerbes, mais ce que je voulais dire, c’est que je pense que le premier ministre a le coeur à la bonne place, comme je l’ai dit tout à l’heure. Il essaie de faire ce qu’il faut, il essaie de faire ce qui est bien, mais il y a eu des manquements, voilà ce que je pense.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste 30 secondes.
    Dans ce cas, je vais poser une courte question.
     Pendant toute la durée de votre mandat de commissaire à l’éthique, vous est-il arrivé de décrocher le téléphone pour transférer un dossier aux services d’exécution de la loi appropriés, comme la GRC?
    Oui, ça m’est arrivé à plusieurs reprises, et il est aussi arrivé que ces services m’appellent lorsqu’ils entamaient une enquête pour que je cesse la mienne.
    Merci.
    Monsieur Gerretsen, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame Dawson.
     Comme d’autres de mes collègues, je suis heureux que vous soyez ici aujourd’hui. J’ai appris beaucoup de choses en vous écoutant.
     Vous avez dit quelque chose de très intéressant en réponse à une question tout à l’heure, à savoir qu’il y a toujours des problèmes d’éthique qui surviennent, de temps à autre.
     Je ne sais pas comment la population réagirait à cela. L’objectif de la Loi sur les conflits d’intérêts n’est-il pas d’empêcher que ce genre de problème ne survienne? Que voulez-vous dire?
(1735)
    Je veux dire qu’on ne peut pas tous les repérer. Et c’est précisément la raison pour laquelle je vous ai dit, dans ma déclaration liminaire, que notre rôle principal consiste à informer, à rencontrer des gens et à donner des conseils.
     Il y a des entorses à la Loi qui tombent entre les mailles du filet, et il y en aura toujours parce que personne ne s’en aperçoit.
    Pendant votre mandat, est-ce que les problèmes qui survenaient de temps à autre faisaient l’objet de mesures appropriées, suite à vos enquêtes?
    Je l’espère bien. Je me suis toujours efforcée de prendre la bonne décision dans toutes mes enquêtes.
    Par curiosité, j’aimerais savoir si, au cours de vos enquêtes, vous faisiez une distinction entre les personnes qui avaient violé la Loi délibérément et celles qui l’avaient fait probablement par inadvertance?
    Oui. Dans mes rapports, je faisais souvent des commentaires sur la façon dont les faits s’étaient produits, en expliquant abondamment les circonstances dans lesquelles…
    J’ai perdu le fil de la question.
    Depuis que vous avez rendu votre deuxième décision, on vous a posé beaucoup de questions, tout au moins certains députés d’autres partis, pour savoir s’il faudrait alourdir les pénalités. Vous avez dit, et je le respecte, qu’il n’appartient pas au commissaire aux conflits d’intérêts de prendre position là-dessus, et qu’il faudrait qu’il y ait une accusation au pénal. Votre réponse était claire.
     Mais j’essaie de faire une distinction entre la personne qui commet une faute délibérément et celle qui la commet par inadvertance. Quelle est votre position là-dessus?
    À mon avis, l’intention malveillante ou la préméditation doivent être prises en compte. Je vous reporte encore une fois à l’article qui dit que le respect de la Loi est une condition de votre emploi ou de votre nomination.
     Mes rapports, comme ceux du commissaire actuel, j’en suis sûre, décrivent bien les circonstances. Les gens n’ont qu’à les lire.
    J’aimerais parler maintenant du moment auquel vous êtes censé déclarer ce genre de choses. Quand on parle d’un conflit d’intérêts qui concerne un membre de votre famille, un ami ou un parent, il va sans dire que vous avez besoin de savoir au préalable qu’il existe un conflit. Sinon, chaque fois que quelqu’un prend une décision, il va devoir demander à tous ses parents et à tous ses amis s’ils ont un lien quelconque avec l’organisation.
    Est-ce que je me trompe?
    L’article 6 dit précisément: « s’il sait ou devrait raisonnablement savoir que… ». Cela ne signifie pas nécessairement qu’il le sait, mais s’il préfère fermer les yeux, autrement dit s’il ne prête pas attention à ce qui se passe, il devrait quand même raisonnablement savoir, et c’est ça le critère.
    Bien.
     La tâche de notre comité consiste à faire des recommandations au gouvernement. Je comprends bien que, s’agissant d’un conflit, l’alternative est assez claire: soit vous êtes en conflit, soit vous ne l’êtes pas. Mais il y a peut-être certaines circonstances qui justifieraient qu’on applique un barème avec plusieurs degrés.
     Lorsqu’on établit le niveau des relations qui existent ou les conflits qui peuvent exister au sein de ces relations, devrait-on selon vous tenir compte des sommes impliquées dans le conflit présumé? Devrait-on avoir un barème avec différents critères?
    Je vous prie de donner une réponse succincte, madame.
(1740)
    D’un point de vue philosophique, peut-être… Une contravention est une contravention, mais les circonstances qui l’entourent sont décrites dans le rapport. C’est à ceux qui en prennent connaissance de déterminer l’ampleur du problème.
    Merci, madame Dawson.
     Nous allons maintenant passer à la série de questions de deux minutes et demie.
     M. Fortin a la parole.
    Merci.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame Dawson, nous allons fantasmer. Supposons que je suis premier ministre du Canada et que vous êtes commissaire à l'éthique. Je vous consulte et je vous dis que j'ai une décision importante à prendre. On s'apprête à accorder un contrat de 43,5 millions de dollars à un organisme pour gérer 900 millions de dollars de bourses étudiantes. Je vous dis que, compte tenu de l'urgence, la décision devra être prise de façon inhabituelle, c'est-à-dire sans appel d'offres. Je vous dis également qu'il n'y a eu aucune vérification diligente complète de l'entreprise pour confirmer sa capacité de gérer le programme.
    Ensuite, je vous dis que l'organisme en question a versé à ma mère, au cours des deux dernières années, un quart de un million de dollars pour avoir donné des conférences. Je vous dis que l'organisme a aussi payé quelques dizaines de milliers de dollars à mon frère pour les mêmes choses, que l'organisme retient les services de ma conjointe à titre d'ambassadrice et que j'ai moi-même donné des conférences pour cet organisme et encouragé les gens à travailler avec celui-ci.
    Je vous dis finalement que la situation me trouble, madame la commissaire à l'éthique, et je vous demande de m'éclairer.
    Est-ce que je devrais participer à ce processus de décision? Quel conseil me donneriez-vous?

[Traduction]

    Je vous dirais que c’est à vous de décider, car c’est à la personne de décider. Mais si la personne était au courant de toutes les circonstances, alors je lui signalerais les problèmes d’éthique qui se posent. Il n’est pas toujours parfaitement clair que la relation qu’un membre de la famille peut avoir à un moment donné se poursuivra dans l’avenir. Les circonstances varient beaucoup, d’un cas à l’autre. C’est tout ça qu’il faut décortiquer.
     La façon dont vous avez présenté les choses n’est pas suffisamment détaillée pour qu’on puisse se prononcer. Le rôle du commissaire à l’éthique est de repérer les risques et de donner les meilleurs conseils possible. Ici, le meilleur conseil à donner serait sans doute d’éviter ce genre de situation dans toute la mesure du possible, car c’est dangereux.

[Français]

    Je vous remercie.
    Ajoutons à la situation qu'au moment de prendre la décision, je réalise que l'organisme qui va se voir confier la gestion de ce programme n'est pas celui que je croyais, mais plutôt un autre organisme avec lequel le premier entretient des liens étroits. Le second n'a pas d'antécédents financiers ni aucun actif, à ma connaissance, et il n'y a eu aucune vérification diligente me permettant de déterminer si cet organisme est solvable ou non.
    Quel conseil me donneriez-vous?

[Traduction]

    Est quoi? Je suis désolée, je n’ai pas entendu… Je crois que les interprètes ont raté la dernière partie de votre intervention. Vous avez présenté un cas avec plusieurs choix possibles, si j’ai bien compris. Vous pourriez peut-être tout simplement nous dire en quelques mots ce que vous cherchez à savoir. Je crois que les interprètes ont raté un passage… Je suis désolée.
    Monsieur Fortin.

[Français]

    L'interprétation n'est pas mon fardeau. Je suis désolé qu'il y ait des problèmes concernant le système, mais, malheureusement, je ne le contrôle pas. Je vais répéter ma question.
    Ajoutons à la situation qu'au moment de signer ce contrat ou de prendre une décision, je réalise que l'entité qui va se voir accorder le contrat n'est pas celle que je pensais, mais une autre entité à laquelle elle est liée. Cette dernière n'a pas d'antécédents financiers ni aucun actif et elle est constituée en société depuis seulement un an ou deux. De plus, il n'y a eu aucune vérification diligente.
    Quel conseil me donneriez-vous?

[Traduction]

    Je vous conseillerais la prudence. Je vous conseillerais de discuter avec ceux qui vous ont recommandé cet organisme pour voir quelles sont leurs justifications, et j’hésiterais beaucoup. Si vous n’obtenez pas les assurances nécessaires sur un aspect important, je vous conseillerais de ne pas aller de l’avant.
(1745)

[Français]

    Je vous remercie, madame Dawson.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole pendant deux minutes et demie.
    Tout à l’heure, vous avez défini l’éthique comme une situation et un apprentissage. Pendant que vous étiez commissaires aux conflits d’intérêts et à l’éthique, combien de fois le premier ministre vous a-t-il demandé conseil?
    Quel premier ministre?
    L’actuel, Justin Trudeau.
    Un certain nombre de fois, même quand il était simple député, mais...
    Lui est-il arrivé de vous demander conseil et, ensuite, de décider quand même d’aller de l’avant et de violer la Loi sur les conflits d’intérêts?
    Non.
    Avez-vous déjà pris l’initiative de lui donner des conseils sans qu’il ne vous en ait demandé?
    Il est arrivé, mais pas très souvent, que certains faits soient portés à mon attention ou que, par exemple, un de ses collaborateurs vienne me demander… Mais c’était la même chose avec M. Harper...
    Parce que d’après ce que vous nous avez dit, nous avons beau avoir une loi efficace… Vous avez dit qu’elle était considérée avec respect à l’échelle internationale, vous avez parlé de la Russie, de la Chine et d’autres pays. Mais le problème, c’est que nous nous retrouvons dans une situation où les manquements à l’éthique se répètent et font manifestement partie des habitudes, d’une culture.
     Sur les 75 recommandations que vous avez présentées, aucune n’a été retenue. Est-ce que certaines d’entre elles auraient permis de prévenir la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui?
    Sans doute pas. Vous savez...
    Ma dernière question est la suivante: à quoi bon avoir une loi si elle ne permet pas de prévenir les manquements à l’éthique?
    Je pense qu’elle en prévient beaucoup, mais pas tous.
    À votre avis, est-ce que les gens tirent des leçons de leur comportement passé? Est-ce que le premier ministre a tiré des leçons des trois ou quatre fois qu’il a fait l’objet d’une enquête?
    Je n’en ai aucune idée, mais dans chacun des trois cas dont vous parlez, les circonstances étaient très différentes. Ce n’est pas comme s’il avait commis la même erreur deux fois. Je pense que les trois cas — les deux précédents et le troisième qui va faire l’objet d’une décision — permettront de jeter un nouvel éclairage sur certaines règles éthiques. Que puis-je vous dire d’autre?
    Certes, cela va jeter un nouvel éclairage sur toute cette affaire.
     Merci.
    Merci.
     Nous allons entamer la dernière série de questions, à raison de cinq minutes par intervenant.
     Monsieur Kurek, vous êtes le premier sur ma liste.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Encore une fois, votre témoignage est très intéressant, madame Dawson, et je vous en remercie.
     J’aimerais aborder plusieurs sujets, le premier étant celui des cadeaux. Est-ce qu’un voyage ou un cadeau offert par une organisation à la famille d’un ministre peut être considéré comme une façon d’influencer ou de favoriser ce même ministre?
    Bien sûr, si l’organisation a la ferme intention de lui demander quelque chose en échange. En fait, c’est ce qui s’est passé dans l’affaire avec l’Aga Khan.
    Vous avez été commissaire à l’éthique, et je serais curieux de savoir si vous pensez qu’il y a eu influence dans le cas de l’actuel ministre des Finances qui a remboursé les 41 000 $ le jour où il a comparu devant le Comité des finances, pour un voyage qu’il avait fait avec sa famille, et dont la fille travaille pour l’organisation, etc.
    Je me garderai de dire quoi que ce soit en ce qui concerne la situation de M. Morneau. Il faut examiner les faits, mais un voyage tous frais payés relève de l’article 11 s’il n’est pas approprié.
    Je vous remercie de votre réponse.
     J’aimerais maintenant parler de la question des amis. Vous avez une expérience unique en ce qui concerne cette définition, et, sur la base de ce que vous avez vu et entendu dans la presse et les médias au sujet du scandale UNIS, diriez-vous que les frères Kielburger étaient les amis de M. Trudeau?
    Je n’en ai aucune idée. J’ai passé une bonne partie des deux dernières semaines à mon chalet et je n’ai pas écouté les médias. Je n’étais pas rivée à mon poste de télévision, mais j’ai quand même regardé des reportages là-dessus. L’essentiel, ce sont les faits.
    Je comprends, et je suis sûr que vous avez eu du bon temps à votre chalet. Personnellement, je suis originaire des Prairies, et j’ai du mal à supporter les étés humides d’Ottawa, mais...
(1750)
    Moi aussi, surtout en ce moment.
    Lorsqu’un titulaire de charge publique consulte le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, pour faire approuver certaines de ses activités externes, profitez-vous généralement de l’occasion pour lui rappeler son obligation de se récuser si de nouvelles circonstances le nécessitent?
    Cela peut arriver, mais généralement, ceux qui viennent demander conseil s’adressent aux collaborateurs du commissaire, car celui-ci ne peut pas… Bien sûr, si c’est nécessaire, ils peuvent toujours parler au commissaire.
     Cela dépend. Si les gens vous demandent des conseils généraux, vous leur donnez. S’ils ont une question bien précise, vous n’en profitez pas, généralement, pour donner des conseils généraux.
    Je comprends.
     Puis-je vous demander combien de temps il me reste?
    Il vous reste deux minutes.
    Je tiens aussi à vous remercier, car même si vous n’étiez plus commissaire quand j’ai été élu député, je n’ai eu que des expériences formidables avec le commissariat, que ce soit pour la divulgation annuelle de mes informations, mon intégration en tant que nouveau député ou toutes les questions que j’ai eu l’occasion de poser afin de m’assurer que j’étais en parfaite conformité avec la Loi sur les conflits d’intérêts. Je suis convaincu que les efforts que vous avez déployés lorsque vous étiez commissaire pendant 10 ans ont contribué à l’instauration de la culture qui prévaut actuellement au commissariat et que je trouve très positive.
     J’aimerais vous poser une question au sujet des conseils que vous donnez. Lorsque le titulaire d’une charge publique vous consulte au sujet d’un scénario précis, lui conseillez-vous de faire un suivi si sa situation connaît le moindre changement matériel?
    Oh oui, c’est évident. Vous donnez des conseils en fonction de la situation que la personne vous décrit, et si cette situation change, vous supposez qu’elle reviendra vous voir pour vérifier.
    Je comprends. J’ai toujours trouvé que le commissariat était incroyablement accessible, et il est encourageant de voir que les députés ont la possibilité d’entretenir un dialogue continu avec lui. J’espère que les autres députés sauront en profiter.
     Dans le cas qui nous intéresse, le contrat de 500 000 $ passé avec une personne très proche de la famille du premier ministre est la question centrale. Pendant les 60 secondes qui me restent, auriez-vous d’autres choses à nous dire au sujet des problèmes éthiques que nous sommes en train d’étudier et des modifications que nous pourrions apporter à la Loi afin que ce genre d’infraction ne se reproduise plus?
    Madame Dawson, je vous demande de donner une réponse très brève, pas plus de 10 secondes.
    Les circonstances sont inhabituelles, nous vivons une période inhabituelle, mais cette nouvelle affaire va susciter des commentaires qui vont donner du grain à moudre en matière d’éthique.
    Merci beaucoup.
    Le dernier nom sur ma liste est celui de Mme Brière. Vous avez la parole pour cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Bonjour, madame Dawson.
    C'est un réel privilège de pouvoir échanger avec vous cet après-midi, particulièrement lorsqu'on considère votre passé ici.
    Vous avez dit plus tôt que la Loi faisait l'envie de plusieurs autres pays. Puisque l'on peut toujours faire mieux, quelles seraient vos trois recommandations prioritaires pour moderniser la Loi?

[Traduction]

    Mon Dieu! Quand j’ai quitté le commissariat, j’en ai sélectionné un certain nombre pour les faire ressortir. Je les ai avec moi. Je vais rapidement les passer en revue.
     L’une d’entre elles portait sur une transparence accrue en ce qui concerne les cadeaux. Une autre préconisait d’abaisser le seuil de divulgation.
     Il y avait aussi des questions de terminologie. Le Code s’applique à des entités, mais la Loi ne s’applique qu’à des personnes. Dans certains cas, elle devrait aussi s’appliquer à des entités. Je fais aussi plusieurs recommandations pour atténuer certaines dispositions trop lourdes pour les gens. Je n’entrerai pas dans les détails.
     Je préconise aussi de renforcer les obligations liées à l’après-mandat. Lorsqu’ils sont en situation d’après-mandat, les gens ne sont pas tenus de faire un rapport. Personne n’est tenu de faire un rapport. En général, l’après-mandat dure un ou deux ans. Ce sont des règles qui doivent être respectées. Ce serait donc bien d’obliger les gens à faire un minimum de rapports. Quant aux titulaires de charge publique ordinaires, il faudrait qu’ils soient eux aussi tenus de faire un nombre limité de rapports. Ils ne le sont pas pour le moment.
     J’ai déjà dit qu’il serait souhaitable d’harmoniser certaines dispositions de la Loi et du Code, car c’est une source de confusion pour les députés, surtout ceux qui sont ministres, car les règles ne sont pas les mêmes.
     J’ai fait allusion tout à l’heure, dans ma déclaration liminaire, à une autre de mes recommandations. Je pense que l’article 11 crée… Il n’y a pas de définition du mot « ami ». Il n’est pas nécessaire d’inclure les amis dans les exceptions, parce que « pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné pour influencer le titulaire » est suffisant. S’il s’agit d’un ami et que les circonstances ne sont pas exceptionnelles, l’exception est inutile. Je pense donc qu’il n’est pas nécessaire d’inclure les amis dans les exceptions et qu’on peut améliorer le libellé.
     J’en ai beaucoup. Comme je l’ai dit, j’en ai 75. Je dirai qu’une trentaine sont plutôt d’ordre technique et concernent des détails relatifs au libellé de la Loi. À plusieurs endroits, la version anglaise et la version française ne correspondent pas tout à fait, par exemple. Mais ce n’est rien de grave.
     Je vous ai donné un petit échantillon.
(1755)

[Français]

    Je vous remercie.
    Vous avez parlé d'améliorer les définitions, notamment celle du mot « amis ». Tantôt, nous avons aussi parlé de la définition du mot « parenté ». Cette définition mériterait-elle, elle aussi, d'être étudiée à nouveau?

[Traduction]

    Non, je pense que ces définitions sont correctes. Elles sont assez claires.
     Ce qui n’est pas clair, par contre, c’est ce que comprend le mot « parents », jusqu’à quel degré de cousinage, etc. Très souvent, ça dépend des circonstances, vous n’avez pas toujours des relations étroites avec tous vos cousins. Il faut décortiquer tout ça.
     En revanche, ce qui n’est pas défini, c’est l’expression « intérêts privés ». C’est un point intéressant. En fait, je pense que le commissaire actuel en a peut-être élargi le sens. J’ai toujours pensé que cela concernait principalement les affaires financières, parce que c’est généralement le genre de choses qui est divulgué, et que cela ne concernait pas les intérêts politiques.
     C’est comme dans les tribunaux: c’est sur la base des précédents qu’on essaie de mieux définir ce que cela veut dire. Pour un certain nombre de termes qui figurent dans la Loi, c’est ce qu’il faut faire: déterminer jusqu’où ils s’appliquent.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Vous pouvez poser une dernière question.

[Français]

    Dans une entrevue parue dans The Globe and Mail, vous avez dit que, de façon générale, il n'y avait

[Traduction]

« Il n’y a pas beaucoup d’entorses à la Loi. »

[Français]

    Êtes-vous toujours du même avis que celui exprimé dans cette entrevue?

[Traduction]

    Je suis désolée, mais je ne vous ai pas entendue, ni l’interprète. Je n’ai pas entendu la question.
    Bien. Pensez-vous toujours ce que vous avez déclaré dans une entrevue, en 2018, au Globe and Mail, à savoir qu’« il n’y a pas beaucoup d’entorses à la Loi »?
    Est-ce que j’ai dit ça?
     Je pense que, dans l’ensemble, les Canadiens sont de bonnes personnes. Certes, il y a toujours des manquements à l’éthique, et c’est pour cela qu’on a adopté une loi. Mais, de façon générale, nous ne sommes pas une société pourrie. Le gouvernement a généralement de bonnes intentions et il est généralement bon. C’est le commentaire général que je voulais faire.
    Merci beaucoup. Bonne soirée.
    Merci.
    Madame Dawson, je vous remercie encore une fois d’avoir fait preuve d’une grande patience hier, et, bien sûr, d’être revenue nous voir aujourd’hui. Nous vous en sommes reconnaissants. Nous vous souhaitons un excellent séjour et beaucoup de repos dans votre chalet.
    Merci beaucoup, j’ai eu beaucoup de plaisir à vous revoir.
    Parfait. Merci beaucoup.
     Sur ce, je lève officiellement la séance.
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