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CAAM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur la relation économique entre le Canada et les États-Unis


NUMÉRO 004 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 16 mars 2021

[Enregistrement électronique]

(1500)

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à la quatrième réunion du Comité spécial sur la relation économique entre le Canada et les États-Unis. Conformément à la motion adoptée par la Chambre le 16 février 2021, le Comité spécial se réunit pour discuter de la relation économique entre le Canada et les États-Unis. Compte tenu de l'échéancier figurant dans la motion adoptée par la Chambre, le Comité se penche aujourd'hui sur la canalisation 5.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au premier témoin du premier groupe: M. Vern Yu, vice-président directeur et président, Pipelines de liquides.
    Monsieur Yu, je vous remercie grandement d'être parmi nous ici aujourd'hui. Nous nous réjouissons à la perspective d'une discussion très instructive. Je vous cède maintenant la parole pendant cinq minutes, puis nous passerons aux questions.
    Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie tous, vous et vos caucus respectifs, de votre leadership et de votre appui à la canalisation 5. Cela a véritablement été une approche Équipe Canada, et nous vous sommes très reconnaissants de l'appui que nous avons reçu.
    Mon nom est Vern Yu. Je dirige l'entreprise de pipelines de liquides d'Enbridge, et je suis responsable de la canalisation 5.
    Enbridge est la plus grande société de distribution d'énergie en Amérique du Nord. Nous distribuons du pétrole brut, du gaz naturel et de l'énergie renouvelable. L'année dernière, nous avons annoncé une série d'objectifs de rendement en matière d'ESG, y compris un plan détaillé pour atteindre la carboneutralité d'ici 2050. Cependant, je suis ici aujourd'hui pour parler de la canalisation 5.
    Je tiens à être très clair. Notre objectif a toujours été de régler le différend concernant la canalisation 5 au moyen de négociations ou d'une médiation. Nous croyons qu'il est dans l'intérêt du Canada et des États-Unis de poursuivre l'exploitation du pipeline pendant que nous construisons le tunnel des Grands Lacs le plus rapidement possible.
    Les enjeux ne pourraient être plus élevés. La canalisation 5 n'est pas juste un pipeline. Il joue un rôle vital dans l'économie des deux pays. Sa fermeture entraverait l'accès à l'énergie nécessaire pour faire rouler nos économies. Elle causerait des pénuries d'énergie, et elle aurait une incidence considérable sur le prix de l'essence, du diesel, du propane, du carburéacteur, du plastique et des produits chimiques. La fermeture de cette canalisation menace des milliers de bons emplois rémunérés dans les deux pays. On observerait des risques environnementaux beaucoup plus élevés sur nos routes, nos chemins de fer et nos voies maritimes parce qu'on tentera de remplacer la canalisation 5 en augmentant le nombre de camions, de trains et de pétroliers.
    La canalisation 5 fournit plus de 50 % du pétrole brut utilisé en Ontario et au Québec. Elle alimente le complexe pétrochimique de Sarnia, qui joue un rôle clé dans l'approvisionnement en propane et en butane. La canalisation fournit aussi la charge d'alimentation à une importante industrie pétrochimique de Montréal.
    Aux États-Unis, les produits acheminés par la ligne 5 chauffent des maisons et des entreprises, alimentent les voitures et les avions, et alimentent l'industrie. En fait, la canalisation 5 comble 55 % des besoins de propane du Michigan. Elle stimule aussi les économies de l'Ohio, du Wisconsin, de l'Indiana et de la Pennsylvanie. La fermeture de la canalisation 5 nuirait donc à l'économie des deux pays.
    La résiliation de la servitude de 1953, qui permet au pipeline de traverser le détroit de Mackinac, contrevient manifestement au traité sur les pipelines de transit conclu entre le Canada et les États-Unis en 1977. Enbridge et l'État du Michigan travaillent déjà ensemble pour en arriver à une solution d'un commun accord.
    Le tunnel des Grands Lacs est un investissement privé de 500 millions de dollars américains qui sera effectué par Enbridge. Le tunnel enfouirait le pipeline très profondément sous le détroit. Même si le pipeline actuel ne présente pas de risque et a été exploité sans incident depuis plus de 65 ans, le tunnel le rendrait encore plus sécuritaire.
    Toutefois, jusqu'à ce que nous ayons construit le tunnel, le pipeline doit demeurer ouvert. La sécurité n'est pas seulement une valeur fondamentale chez Enbridge; c'est la base sur laquelle repose notre entreprise. Nous surveillons le détroit 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, par l'entremise de personnel spécialement formé et de systèmes de surveillance très perfectionnés. Les personnes qui vivent le long des voies navigables près de nos pipelines, gagnent leur vie grâce à elles et s'attendent à ce que nous exploitions les pipelines en toute sécurité. Il s'agit là de notre principale priorité.
    Le tunnel nous offre l'occasion de moderniser un actif énergétique essentiel grâce à une technologie de pointe, tout en protégeant les emplois syndiqués bien rémunérés, en préservant la sécurité énergétique de l'Amérique du Nord, en protégeant l'environnement et en améliorant la sécurité. Nous croyons qu'une solution diplomatique binationale peut régler le différend rapidement, ce qui permettrait à toutes les parties de recommencer la construction du tunnel.
    Le Canada croit que la meilleure solution consiste à promouvoir une approche Équipe Canada, à souligner l'importance de la canalisation 5 auprès des autorités américaines chaque fois que l'occasion se présente, et à mettre l'accent sur l'application du traité sur les pipelines de transit. Par ailleurs, nous demandons que le gouvernement du Canada emploie tous les moyens pour convaincre les autorités américaines que la canalisation 5 est un important pipeline binational protégé par le traité, dont la fermeture aurait de graves conséquences sur le Canada et les États-Unis.
(1505)
    Le temps presse. Nous devons unir nos efforts pour nous assurer que les deux pays continuent de bénéficier d'un approvisionnement en énergie sûr, abordable et fiable.
    Je vous remercie encore une fois de votre appui continu à la canalisation 5 et de votre leadership dans ce dossier.
    Merci, monsieur Yu.
     Nous allons commencer la première série de questions avec Mme Gladu, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Yu, d'avoir comparu aujourd'hui.
    En tant que députée de Sarnia—Lambton, je sais pertinemment que ma circonscription souffrirait de la fermeture de la canalisation 5. Nous perdrions plus de 20 000 emplois uniquement dans ma collectivité.
    Je vous ai entendu parler de la solution binationale qui, d'après vous, nous aidera à régler le différend. Avec tous les États concernés, êtes-vous convaincu que le président Biden aura le pouvoir de rappeler à l'ordre la gouverneure et qu'il incombe à notre premier ministre de le lui demander?
    Nous explorons plusieurs voies pour poursuivre l'exploitation du pipeline jusqu'à l'achèvement du tunnel.
    Nous cherchons tout d'abord à garantir que, aux États-Unis, la sécurité et la fiabilité du pipeline sont réglementées par le gouvernement fédéral américain. Nous estimons que cela constitue la forme de réglementation appropriée. L'organisme de réglementation des États-Unis, qui est responsable des pipelines, a indiqué à de nombreuses reprises que le pipeline ne présente pas de risque et est en bon état de service. Nous croyons donc qu'il est très important de convaincre le gouvernement fédéral américain que c'est la bonne façon de procéder.
    Nous demandons notamment au gouvernement du Canada de nous aider à faire comprendre à la cour fédérale américaine que ce dossier devrait relever de la compétence fédérale. Nous demanderons aussi aux provinces d'aider le gouvernement fédéral à étayer ces affirmations.
    Cela dit, nous aimerions évidemment continuer de collaborer avec l'État du Michigan parce que nous croyons que le pipeline revêt une importance capitale pour l'ensemble de la région des Grands Lacs — Ohio, Indiana, Pennsylvanie et d'autres États — ainsi que pour l'Ontario et le Québec. Il s'agit de renforcer le caractère essentiel de cet actif et la sécurité énergétique de l'ensemble de la région des Grands Lacs.
    Pour m'assurer que je comprends bien, vous voulez dire que le pipeline existe grâce à un traité fédéral et qu'il incombe donc au gouvernement fédéral américain de se prononcer sur son avenir, au besoin.
    C'est ce que nous croyons.
    Pouvez-vous me faire un bref historique de l'interaction juridique entre la gouverneure Whitmer et Enbridge?
    Je pense que cette nouvelle controverse a commencé en novembre. Je crois que c'est le 13 novembre que la gouverneure a intenté une poursuite devant la cour de l'État du Michigan disant que l'État du Michigan estime que nous violons les normes de sécurité visées par la servitude de 1953, en vertu desquelles nous avons un devoir de diligence de veiller à ce que le pipeline fonctionne raisonnablement bien.
(1510)
    Vous avez dit que, en plus de 65 ans, il n'y a pas eu d'incidence sur l'environnement. Je crois que c'est quelque chose que l'Environmental Protection Agency et l'État du Michigan vérifient chaque année, n'est-ce pas?
    L'État prétend que nous ne respectons pas la servitude. Nous avons affirmé vigoureusement à la cour fédérale américaine que nous respectons pleinement la servitude et les règles de l'organisme fédéral de réglementation des États-Unis, soit l'administration des pipelines et du transport des matières dangereuses, en matière d'exploitation sûre et fiable du pipeline.
    Le pipeline est en service depuis plus de 65 ans, et il n'y a pas eu d'incident sur le détroit. Alors, ...
    J'ai lu ce qu'a dit l'ambassadrice Hillman, qui tente de négocier. Elle discutait avec le Michigan et sa gouverneure, et elle a affirmé que les discussions ont échoué. Pouvez-vous faire la lumière là-dessus?
    Je crois que l'ambassadrice Hillman a tenté d'établir un dialogue avec la gouverneure, et j'ai cru comprendre que la gouverneure n'était pas ouverte à cette idée.
    Je sais que le ministre O'Regan a aussi tenté vainement d'obtenir une rencontre avec la gouverneure Whitmer, mais je pense que Catherine McKenna a réussi à en obtenir une. Avez-vous découvert quelle a été l'issue de cette rencontre?
    Je n'ai pas entendu parler de cette réunion-là.
    Entendu.
    Pourriez-vous nous parler de l'incidence sur vos clients et nous dire ce qui se passera si la canalisation 5 est fermée, selon eux?
    Si la canalisation 5 devait cesser ses activités, nos clients perdraient environ 50 % du pétrole brut dont ils ont besoin à leurs raffineries. On parle de raffineries en Ohio, en Ontario, au Québec, en Pennsylvanie et en Indiana.
    Quelles sont les autres choix qu'elles ont?
    À court terme, il n'y a rien pour remplacer 540 000 barils de pétrole brut et de gaz naturel liquide. À long terme, il faudrait construire des installations de déchargement pour les camions et les wagons dans ces États et provinces pour remplacer le pipeline. Il faut du temps, manifestement, pour faire cela. Il faut un site. Il faut des permis. Il faut construire toute l'infrastructure.
    En plus, il faudrait de nouveaux wagons mieux conçus pour transporter le pétrole brut et le gaz naturel liquide. Ils n'existent pas pour l'instant. Il faudrait aussi construire de nouveaux camions pour acheminer tout ce pétrole brut et gaz naturel liquide aux marchés.
    La fermeture de la canalisation 5 entraînerait une pénurie énergétique immédiate dans la région. Elle entraînerait une augmentation vertigineuse des prix. Il faudrait des années pour la remplacer.
    Merci beaucoup, madame Gladu.
    Nous allons maintenant passer à M. Housefather, qui a six minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Yu, d'être avec nous aujourd'hui.Le gouvernement du Canada et les membres de ce comité se doivent de faire, selon moi, tout ce qui est en leur pouvoir, en adoptant une approche « Équipe Canada », pour que la canalisation 5 reste ouverte.
    Il y a des choses que j'aimerais voir consigner dans le procès-verbal du comité. Je veux m'assurer que nous disposons de certains faits pour pouvoir poser des questions aux futurs témoins.
    La canalisation 5, qui fait 645 miles, part du Wisconsin, rejoint la péninsule supérieure du Michigan puis en traverse la péninsule inférieure pour arriver en Ontario, mais la seule zone couverte par la servitude contestée est le tronçon de quatre miles à double canalisation passant sous le détroit de Mackinac, n'est-ce pas?
    Oui.
    Cette servitude existe depuis 1953, comme le disait Mme Gladu, et il n'y a jamais eu de fuites d'hydrocarbures dans le détroit de Mackinac depuis, n'est-ce pas?
    Non.
    Peut-on dire que la décision du Michigan de révoquer la servitude était fondée seulement sur des craintes hypothétiques, sans aucune preuve concrète d'aucune fuite?
    Tout à fait.
    Est-il exact qu'une étude a été réalisée montrant que le pipeline à double structure présente un risque de défaillance inférieur à 0,05 % par an, c'est-à-dire que le risque de défaillance est inférieur à 1 fois sur 2 000?
    C'est exact.
    Est-il aussi exact que, depuis l'établissement de la servitude, le Congrès américain a adopté une loi sur la sécurité des pipelines appliquée par la Pipeline and Hazardous Materials Safety Administration et régissant les normes de sécurité des pipelines interétatiques et internationaux comme celui-ci ?
(1515)
    Oui.
    Pour dire les choses plus clairement, pense-t-on, à Enbridge, que l'État n'a pas l'autorité pour fermer ce pipeline parce qu'il relève exclusivement des autorités fédérales?
    En effet, oui.
    En plus — et je pense que vous serez d'accord là-dessus —, monsieur, — c'est une question qui a déjà été soulevée —, il y aurait une importante question constitutionnelle de compétence en vertu de la disposition sur le commerce et le commerce extérieur de la Constitution américaine, n'est-ce pas?
    Oui.
    Est-il exact qu'Enbridge a demandé à la Cour fédérale un jugement déclaratoire afin que la canalisation 5 puisse continuer à fonctionner sans interruption jusqu'à ce que le projet de tunnel des Grands Lacs soit terminé?
    C'est exact, sous la supervision de la Pipeline and Hazardous Materials Safety Administration.
    Exactement.
    Quelle est la situation exactement dans cette affaire? Où en est-on des demandes?
    La demande faite par l'État au tribunal du Michigan est en suspens en ce moment, dans l'attente d'un examen par la cour fédérale américaine. La Cour fédérale américaine est en train de décider de la juridiction, à savoir si les arguments que nous avons présentés doivent être entendus par la Cour fédérale ou par le tribunal de l'État. La première audience à ce sujet est prévue pour le 12 mai.
    Est-il exact qu'un médiateur conjoint a été nommé? J'ai entendu dire cela.
    Le tribunal a demandé à Enbridge et à l'État de faire appel à la médiation en parallèle au processus judiciaire.
    Est-ce que la médiation a commencé?
    La première réunion avec le médiateur a eu lieu ce week-end.
    Est-ce que je peux me permettre de demander si cela a été positif? Je comprendrais tout à fait que vous n'ayez pas envie de répondre.
    Il est trop tôt pour faire des commentaires, je pense.
    D'accord.
    Vous avez dit dans votre réponse à ma collègue, Mme Gladu, que vous espériez que le gouvernement fédéral et les provinces interviendraient en déposant des mémoires à titre d'amicus curiae, je crois, dans le cadre de la poursuite, pour venir en appui de la position d'Enbridge selon laquelle il s'agit d'un problème de compétence fédérale, aux États-Unis.
    Nous pensons que cela pourrait être très utile.
    Je comprends. C'est bien que le Comité le sache.
    Une autre question. Nous avons un peu parlé du pouvoir exécutif du Michigan. Nous savons que la Chambre des représentants et le Sénat de l'État du Michigan sont contrôlés par l'autre parti. Est-il possible, selon vous, que la législature du Michigan intervienne?
    Je ne suis au courant d'aucune mesure prise en ce sens, à ce stade.
    J'ai une autre question. L'entreprise Enbridge a déclaré, avec force, qu'elle avait l'intention de poursuivre ses activités après la date limite du 12 mai fixée par l'État. Comment pense-t-elle y parvenir? Est-ce l'État qui devra obtenir une injonction pour empêcher l'exploitation de l'oléoduc, ou est-ce Enbridge qui devra obtenir une injonction pour empêcher l'État de révoquer la servitude? Ce n'était pas clair pour moi.
    C'est l'État qui devra obtenir d'un tribunal une injonction pour nous obliger à arrêter nos activités.
    En fonction de tous ces faits et preuves, ma principale question maintenant est la suivante: que peuvent faire le Comité et ses membres — pas le gouvernement du Canada à ce stade, mais le comité et ses membres — pour aider Enbridge à continuer à exploiter la canalisation? Serait-ce utile que nos membres parlent aux représentants du Michigan? Dites-le nous.
    Comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, il est très important pour nous de nouer le dialogue avec tous les membres des gouvernements américains, qu'ils soient étatiques ou fédéral, pour que les gens comprennent bien les faits que vous venez juste d'indiquer, à savoir que le pipeline devrait être sous réglementation fédérale américaine, que le pipeline respecte tous les règlements fédéraux américains et que l'organisme de réglementation a confirmé que le pipeline ne présentait aucun risque à de nombreuses reprises, très récemment notamment. Le pipeline a été exploité pendant plus de 65 ans sans aucun incident.
    Le pipeline est essentiel à la sécurité énergétique de toute la région des Grands Lacs. Une fermeture du pipeline causerait un grave préjudice économique aux citoyens américains et canadiens.
    À Enbridge, nous sommes déterminés à construire le tunnel des Grands Lacs aussi rapidement que possible, et nous le construirons uniquement avec des fonds privés. Nous comprenons combien la sécurité est importante et qu'il est important de préserver la région des Grands Lacs, et nous nous engageons à respecter cela.
(1520)
    Merci, monsieur Housefather.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie notre témoin d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Yu, j'aimerais vous poser une question que j'ai posée lors de réunions passées du présent Comité, parce que nous n'avons malheureusement jamais eu de réponse claire là-dessus.
    Avez-vous des chiffres précis concernant les pertes d'emplois potentielles au Québec que pourrait occasionner la fermeture de la canalisation 5?

[Traduction]

    Je ne connais pas précisément le nombre d'emplois qui seraient perdus par les industries touchées au Québec. C'est plutôt Suncor et Valero, les principaux exploitants des raffineries au Québec, qui devraient répondre à cette question. Évidemment, il y a aussi l'industrie chimique dans l'est de Montréal, qui serait également touchée. Ces entreprises seraient mieux placées que moi pour commenter la fermeture de la canalisation 5, parce qu'elle aurait de graves répercussions sur la canalisation 9, qui achemine aujourd'hui du brut au Québec.

[Français]

    Permettez-moi de vous questionner sur la canalisation 3 également.
    On a appris, dans les médias, récemment, que les coûts de construction de la canalisation 3 augmentaient rapidement. La partie canadienne a été construite, mais il reste à faire la partie américaine, si je ne m'abuse.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il y a une telle hausse des coûts de construction?

[Traduction]

     La canalisation 3 est un projet de remplacement d'un pipeline qui a été construit à la fin des années 1960. En 2014, nous avons obtenu l'approbation de la Régie de l'énergie du Canada et de nos clients pour aller de l'avant et remplacer ce pipeline au Canada. Puis, tout récemment, nous avons reçu le feu vert de l'État du Minnesota pour remplacer le tronçon qui traverse son territoire.
    Il s'agit d'un projet de 10 milliards de dollars, des deux côtés de la frontière, qui fait appel aux technologies les plus modernes et qui améliore considérablement la sécurité et la fiabilité de ce pipeline.
    Lorsque nous avons obtenu l'autorisation de construire le pipeline au Minnesota, le projet était assorti de conditions environnementales très strictes régissant la façon dont nous allions procéder au remplacement du pipeline. Ces conditions environnementales, conjuguées au fait que nous construisons un pipeline en hiver plutôt qu'en été, ont entraîné une augmentation relativement importante du coût de ce pipeline.
    Un autre facteur qui a influé sur les coûts, c'est le retard d'environ deux ans dans le processus réglementaire, pour de multiples raisons, dans l'État du Minnesota. Évidemment, le temps, c'est de l'argent. Ainsi, trois grands facteurs ont fait augmenter d'environ 1 milliard de dollars les coûts de construction d'un pipeline d'une longueur approximative de 300 miles dans l'État du Minnesota: la construction en hiver, la surveillance environnementale réglementaire et le retard de deux ans.

[Français]

     Je vous remercie de cette explication.
    Actuellement, y a-t-il un échéancier précis pour la suite des choses? Par ailleurs, d'autres augmentations de coûts sont-elles à prévoir?

[Traduction]

    Au Minnesota, nous nous occupons actuellement de l'exploitation et de la construction. Nous terminerons les travaux au cours de l'été et nous espérons pouvoir mettre le pipeline en service au début du quatrième trimestre. Nous serons alors en mesure de dire aux gens si notre estimation des coûts était assez juste ou si elle a changé depuis que nous avons fourni les derniers chiffres.

[Français]

    Revenons au Michigan et à la fameuse canalisation 5. Vous avez dit tout à l'heure à un de mes collègues que les craintes de la gouverneure du Michigan étaient tout à fait infondées et que vous aviez mené des études pour le prouver. Je présume que ces études ont été communiquées à la gouverneure.
    Comment se fait-il que cela ne débloque pas, si vous êtes bien certain qu'il est démontré scientifiquement qu'il n'y a aucun danger et qu'il n'y a rien à craindre relativement à la canalisation 5?
(1525)

[Traduction]

    Nous avons effectué de nombreuses études sur la sécurité de la canalisation 5. Il en va de même pour l'organisme américain de réglementation des pipelines, soit la PHMSA.
    L'administration du gouverneur Snyder, qui a précédé celle de la gouverneure Whitmer, avait demandé à une tierce partie d'examiner la sécurité de la canalisation. Cette étude a, elle aussi, confirmé que la canalisation était sans danger. Nous avons donc fait les études nécessaires, à l'instar du gouvernement fédéral américain et de l'administration précédente de l'État du Michigan; par conséquent, de nombreuses études ont abouti à la même conclusion, à savoir que le pipeline ne présente aucun risque.

[Français]

    Il vous reste 15 secondes, monsieur Savard-Tremblay.
    Je n'aurai pas le temps de poser de question en 15 secondes, alors je remercie notre témoin.
    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Passons maintenant à M. Blaikie, qui dispose de six minutes.
    Allez-y, je vous prie.
    Jusqu'ici, notre étude nous a déjà permis de constater que, de l'avis général, et peu importe notre prise de position à l'égard de la transition vers un autre type d'économie énergétique, la fermeture soudaine d'une partie importante de l'approvisionnement actuel ne sera pas une bonne chose non seulement pour l'industrie, mais aussi pour tous les gens qui travaillent dans cette industrie et ceux qui dépendent de ce produit pour faire fonctionner leur entreprise, pour chauffer leur maison ou pour assurer tout autre secteur d'activité.
    C'est pourquoi notre comité a été mis sur pied. Nous avons été chargés de produire un rapport sur le dossier de la canalisation 5 dans un délai très court, mais étant donné que nous nous entendons généralement sur la position que le Canada devrait défendre, et sachant que le gouvernement du Canada semble déjà avoir adopté une telle position, je me demande simplement... Il faut beaucoup de ressources pour créer un comité et mener une étude comme celle-ci. Y a-t-il, à votre avis, quelque chose que le gouvernement du Canada devrait faire ou s'engager à faire et qu'il n'a pas encore fait? Y a-t-il quelque chose que notre comité devrait ou pourrait faire afin d'influer sur une décision qui, en fin de compte, relève clairement de la compétence des États-Unis, peu importe le palier, que ce soit au niveau fédéral ou au niveau étatique?
    Il est très important que le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux de l'Ontario, du Québec, de la Saskatchewan et de l'Alberta fassent savoir très clairement que la canalisation 5 est un élément essentiel de l'infrastructure énergétique du Canada, pour toutes les raisons dont nous avons déjà parlé.
     Il est primordial que les gouvernements canadiens fassent comprendre aux gouvernements américains, tant au niveau étatique qu'au niveau fédéral, qu'il s'agit d'une question binationale essentielle, que la sécurité énergétique des États de la région américaine des Grands Lacs, ainsi que de l'Ontario et du Québec, dépend de cette infrastructure énergétique et que nous devons trouver une solution diplomatique pour résoudre les différends qui nous opposent aujourd'hui à l'État du Michigan.
    Même si tout le monde semble être d'accord là-dessus, il est très important de continuer à travailler sur ce dossier aussi vigoureusement que possible. Nous devons nous assurer de présenter nos meilleurs arguments devant la cour fédérale et de continuer à faire pression sur tous les gouvernements aux États-Unis afin de nouer le dialogue et de trouver une solution diplomatique au problème auquel nous faisons face aujourd'hui.
    Comme je l'ai dit, c'est quelque chose que les gens du côté canadien semblent être résolus à défendre. Craignez-vous qu'un gouvernement quelconque ne s'engage pas à défendre le projet comme vous le proposez?
    À ce stade-ci, tout le monde est en faveur et, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous sommes très reconnaissants d'avoir le soutien d'Équipe Canada. À mon avis, il est primordial de ne pas relâcher la pression.
(1530)
    En ce qui concerne les mesures que le Comité pourrait recommander au-delà de ce qui a déjà été engagé, y a-t-il des initiatives que les gouvernements provinciaux ou fédéraux pourraient prendre au Canada afin d'en arriver à un résultat qui ferait en sorte que la canalisation 5 demeure en service jusqu'à ce qu'un pipeline de remplacement soit construit?
    Il est important de répéter que nous devons garder les voies diplomatiques ouvertes; nous devons déposer tous les mémoires nécessaires devant les tribunaux, et nous devons faire savoir aux Canadiens que nous veillons tous collectivement à leurs intérêts.
    Dois-je comprendre alors que la décision de poursuivre ou non l'exploitation de ce pipeline se résumera à une demande d'injonction de la part de l'État du Michigan et que ce sera un juge du Michigan qui décidera si le pipeline demeurera ou non en service?
    Selon nous, cette affaire sera portée devant les tribunaux fédéraux des États-Unis. Nous croyons qu'il y aura des examens à divers échelons de la cour fédérale américaine, ce qui prendra de nombreuses années. Il est donc essentiel que nous essayions de trouver une solution diplomatique, négociée à l'aide d'un médiateur, pour éviter de nous en remettre à la cour et pour offrir une issue raisonnable à toutes les personnes concernées.
    Je suis curieux de savoir quel est le rôle des peuples autochtones, de part et d'autre de la frontière, dans le cadre de ce processus. Pouvez-vous nous parler de leurs droits et de leurs positions par rapport à la demande d'Enbridge?
    Depuis que nous exploitons le plus grand réseau de pipelines en Amérique du Nord, tant pour le gaz naturel que pour le pétrole brut, nous avons adopté une approche proactive en matière de collaboration avec les peuples autochtones. Nous voulons nous assurer d'être sur la même longueur d'onde qu'eux lorsque nous menons des activités sur leurs terres traditionnelles.
    Un bon exemple serait le travail que nous avons effectué au Canada avec les Premières Nations de la Saskatchewan et du Manitoba lors de la construction du remplacement de la canalisation 3. Nous leur avons offert d'importants débouchés économiques, en plus d'assurer une harmonisation avec leurs priorités. C'est également le cas au Minnesota, où nous travaillons au remplacement de la canalisation 3. Nous consultons les tribus du Michigan au sujet du tunnel afin de contribuer à l'essor économique des entreprises tribales et des membres des tribus pour qu'ils travaillent avec nous à la construction de ce nouveau tunnel, qui rendra le pipeline encore plus sécuritaire.
    Merci, monsieur Blaikie.
    Je vous remercie tous infiniment. Nous allons maintenant entamer le deuxième tour.
    Monsieur Hoback, c'est vous qui allez commencer. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Yu. J'admire vraiment la persévérance dont vous faites preuve pour nous fournir tous ces renseignements. Je vous remercie du temps que vous nous consacrez.
     J'aimerais examiner les solutions de rechange. Une des choses qui m'inquiètent, c'est l'éventualité que l'autre partie ait gain de cause. Qu'arrivera-t-il alors? Quels sont les précédents établis en ce qui concerne l'incidence sur les autres pipelines qui traversent d'autres États? Entrevoyez-vous un problème éventuel, le cas échéant?
    C'est une question très importante que le gouvernement fédéral américain se doit d’étudier. Voilà pourquoi nous estimons qu'il est important pour le gouvernement fédéral américain de se pencher sur ce défi particulier. La loi américaine sur la sécurité des pipelines prévoit assurément que la sécurité et l'exploitation des pipelines relèvent de la surveillance du gouvernement fédéral américain. Chaque État situé le long de l'emprise d'un pipeline ne devrait pas avoir le pouvoir de réglementer le commerce et le transport interétatiques.
    C'est pourquoi nous avons porté notre affaire devant la cour fédérale des États-Unis. Nous pensons qu'aux termes de la loi, les pipelines aux États-Unis sont des entités assujetties à la réglementation fédérale, tant sur le plan de leur sécurité que sur le plan de leur capacité d'assurer les échanges commerciaux pour les nombreux États situés le long du tracé.
    On peut dire que l'avenir du Canada et de Sarnia, ainsi que de cette région dépend d'un tribunal américain. Est-ce bien le cas?
    C'est fort possible.
    Si l'on revient... Vous avez parlé brièvement des camions, des trains, des pétroliers et de tous les défis qui en découlent. Si nous commencions à transporter le pétrole par train, quel serait le trajet? Les wagons iraient-ils de Superior à Sarnia? Est-ce qu'ils iraient de Chicago à Sarnia? Y a-t-il une plus grande capacité sur la ligne allant de Chicago à Superior? Peut-on acheminer plus de pétrole, et éviter la canalisation 5, en passant par Chicago pour remonter jusqu'à Sarnia?
    Est-ce même faisable, ou est-ce que les canalisations existantes fonctionnent déjà à plein régime?
(1535)
    À l'heure actuelle, nous fonctionnons presque à plein régime sur les lignes existantes. Nous pouvons transporter un peu plus de pétrole brut de Chicago à Sarnia, mais ce n'est pas vraiment considérable. Le remplacement de la canalisation 5 reviendrait en fait à transporter le pétrole d'Edmonton à Sarnia par train ou à acheminer par camion le pétrole produit aux États-Unis jusqu'à Sarnia. Nous ne sommes pas en mesure de décharger le pétrole brut à Superior, au Wisconsin, pour le transporter par train jusqu'à Sarnia. L'infrastructure est limitée.
    Si c'est le cas, alors — à supposer que nous obtenions un résultat négatif le 12 mai, et disons que la cour prononce une injonction contre nous, c'est-à-dire contre Enbridge —, qu'est-ce que cela signifiera vraiment pour Sarnia et toute cette région? Il n'y a pas que Sarnia. Qu'en est-il du Wisconsin, de l'Illinois et de l'Ohio? Qu'est-ce que cela signifie pour cette...
     En toute franchise, nous ne nous attendons pas à ce qu'un tribunal impose la fermeture du pipeline en mai. Nous ne voyons pas comment une telle situation pourrait se produire. Nous devons aller jusqu'au bout des audiences et du processus devant la cour fédérale américaine, à moyen terme, pour veiller à ce que les choses n'en arrivent pas là.
    À l'avenir, si un tribunal devait faire cesser nos activités, nous serions à court de pétrole brut et de liquides de gaz naturel pour les raffineries de l'Indiana, de l'Ohio, du Michigan et de la Pennsylvanie, ainsi que celles de l'Ontario et du Québec. Il leur manquerait immédiatement 50 % du pétrole brut dont elles ont besoin. Nous assisterions à des pénuries d'essence, de diesel, de carburéacteur, de propane et de butane, si bien que ces régions n'en auraient tout simplement pas assez.
    À plus long terme, les gens devraient trouver des moyens d'acheminer ce carburant de remplacement par train ou par camion. Il faudrait des milliers de camions pour remplacer le pipeline. Selon nos estimations, il faudrait 15 000 camions spécialisés par jour et 800 wagons supplémentaires par jour pour y arriver. Voilà tout un défi logistique.
    L'aéroport de Detroit n'aurait pas assez de carburant pour les avions. Ce serait la même chose pour l'aéroport international Pearson. Il y aurait donc des problèmes très importants qui empêcheraient les gens de maintenir le mode de vie auquel ils sont habitués aujourd'hui.
    Merci, monsieur Hoback. Je suis désolé, mais votre temps est écoulé.
    La parole est maintenant à M. McKay pour cinq minutes.
    Allez-y, je vous prie.
     Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier, monsieur Yu. Vous avez été très utile dans le cadre de notre étude. Comme vous pouvez le constater, il n'y a pas beaucoup de divergences entre les députés ou les partis. On dirait presque une chambre d'écho.
    Ce qui me laisse perplexe, c'est la position de la gouverneure Whitmer, position qui semble, au mieux, douteuse du point de vue juridique. Même sur le plan environnemental, je n'arrive pas à comprendre l'idée de transférer le pétrole brut d'un pipeline à des camions. C'est politiquement très difficile, car la gouverneure Whitmer doit se faire quelques ennemis parmi ses collègues. L'Assemblée législative est contrôlée par le Parti républicain. Je suis quelque peu décontenancé par la position de la gouverneure Whitmer, compte tenu des difficultés que créerait une éventuelle fermeture, ou même la menace d'une telle fermeture.
    Pouvez-vous nous présenter l'argument de la gouverneure pour expliquer en quoi c'est une bonne idée?
(1540)
    C'est justement ce que nous cherchons à comprendre depuis un bon moment.
    Lorsque la gouverneure est arrivée au pouvoir, nous nous sommes entretenus avec elle et nous avons essayé de lui expliquer nos travaux concernant le tunnel, la fiabilité opérationnelle du pipeline existant et les mesures de sécurité supplémentaires que nous avons mises en place pour veiller à ce que le pipeline demeure sans danger pendant la construction du tunnel. Nous lui avons expliqué comment nous nous servons du radar pour suivre tous les navires qui passent au-dessus du pipeline, dans le détroit, et comment nous vérifions tous les navires qui traversent le détroit pour nous assurer que leurs ancres sont levées afin que le pipeline ne soit pas endommagé par inadvertance.
    Nos propres navires se trouvent maintenant sur l'eau pour veiller à ce que les navires entrants respectent nos protocoles de sécurité. Nous surveillons le pipeline 24 heures sur 24, sept jours sur sept, au moyen de caméras et d'autres appareils perfectionnés, pour nous assurer qu'il n'y a absolument aucun risque. Le pipeline peut fonctionner à une pression de 600 livres, mais nous le faisons fonctionner à une pression de 150 livres. Les parois du pipeline ont presque un pouce d'épaisseur, soit trois ou quatre fois l'épaisseur normale des parois des pipelines que nous exploitons.
     C'est le bout de tuyau le plus surveillé en Amérique du Nord. Les normes de sécurité qui s'y rattachent sont les plus strictes parmi l'ensemble des canalisations nord-américaines. Il s'agit du pipeline le plus scruté par les organismes fédéraux de réglementation en matière de sécurité sur le continent nord-américain. Nous sommes absolument convaincus que le pipeline ne présente aucun danger.
    Nous sommes aussi perplexes que quiconque face aux motivations de la gouverneure. Les habitants du Michigan, eux-mêmes, appuient le tunnel. Je crois que, selon nos derniers sondages, les deux tiers des habitants du Michigan sont en faveur du tunnel des Grands Lacs.
    Vous avez dit que vous vouliez arriver à un résultat raisonnable, et cela semble très raisonnable, mais de votre point de vue, qu'aurait été un résultat raisonnable pour la gouverneure dans une situation comme celle-là?
    Dès le premier jour, la gouverneure a voulu que le pipeline soit fermé sur-le-champ et qu'il ne redémarre pas tant que le tunnel ne serait pas terminé. Nous avons dit que ce n'était pas une option raisonnable puisqu'elle allait mettre en danger la sécurité énergétique de toute la région des Grands Lacs, et que nous n'étions pas prêts à faire cela.
    Nous avons proposé de nombreuses mesures de sécurité supplémentaires. Nous avons offert à l'État de lui fournir plus d'informations. Nous avons proposé beaucoup de choses, mais pour le moment, c'est une conversation à sens unique.
    Merci, monsieur McKay.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Monsieur Yu, tout à l'heure, vous évoquiez les stratégies de remplacement alternatives. Vous disiez notamment qu'il y aurait plusieurs camions par jour.
    Je veux m'assurer de bien comprendre. Quand vous parliez du nombre quotidien de camions de denrées alimentaires qui devraient remplacer la canalisation, vous faisiez référence aux États-Unis, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Oui. Les chiffres dont j'ai parlé correspondent à ce qu'il faudrait pour répondre aux besoins du Michigan en matière de pétrole brut et de produits raffinés. Je pense que c'est à peu près la même chose pour le Canada. Cela se traduirait dans l'immédiat par des wagons, des camions ou un nombre accru de navires arrivant par le Saint-Laurent.

[Français]

    Avez-vous fait des évaluations ou de réelles études à ce sujet, advenant le cas où il faudrait avoir recours à une solution de rechange?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit au début, ces alternatives-là demanderont du temps.

[Français]

[Traduction]

    Ces autres solutions nécessiteront des permis d'emplacement et de construction. Elles sont moins sûres et beaucoup plus coûteuses qu'un pipeline.
    Avec le temps, vous pourriez remplacer la ligne 5 et la ligne 9 dans la province de Québec, mais cela sera beaucoup plus coûteux pour les consommateurs. De plus, une fermeture immédiate provoquera évidemment une pénurie d'énergie, comme je l'ai mentionné dans mes interventions précédentes. L'Ontario est dans une position plus difficile, car contrairement au Québec, elle n'a pas accès au pétrole brut par voie d'eau. En fait, l'Ontario serait dans la même situation que le Michigan, où le vide laissé par la fermeture du pipeline devra être comblé par les trains et les camions.
(1545)

[Français]

    Aucune étude ou évaluation concrète n'a donc été faite relativement à un éventuel remplacement.

[Traduction]

    Nous n'avons pas fait d'études particulières pour l'Ontario et le Québec. Nous avons fait des études pour le Michigan, simplement parce que c'est une question qui préoccupe cet État depuis de nombreuses années.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Passons maintenant à M. Blaikie, pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup.
    De toute évidence, il vient d'y avoir un changement d'administration aux États-Unis. En fait, c'est passablement récent. Je me demande s'il y a eu un changement de ton ou de propos sur cette question de la part du gouvernement fédéral depuis l'élection. Quelle incidence croyez-vous que le changement d'administration pourrait avoir sur cette question?
    L'administration précédente était très favorable au pipeline. Je crois que l'administration Biden étudie toujours la situation. Pour l'instant, elle n'a pas fait d'annonce publique sur sa position actuelle à cet égard.
    D'accord. Donc, on ne sait pas trop quel sera l'impact du changement d'administration.
    C'est exact.
    Merci beaucoup.
    Je me demande dans quelle mesure Enbridge pense qu'elle devra ultimement s'appuyer sur l'« Accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique concernant les pipe-lines de transit ». Je ne crois pas que nous ayons beaucoup parlé de cela aujourd'hui. Je me demande dans quelle mesure ce recours fait partie de la stratégie. Croyez-vous que cela entrera en jeu ou que la question se règlera avant d'en arriver là? Pensez-vous que le Canada devrait invoquer l'accord si le problème ne se résout pas d'une autre manière?
    Nous pensons que l'accord sur les pipelines de transit est un levier très puissant pour le gouvernement fédéral canadien et le Canada en tant que pays. Nous pensons qu'un levier devrait être utilisé au besoin, c'est-à-dire si nous ne sommes pas en mesure de trouver une solution diplomatique raisonnable pour maintenir le pipeline en service, puisqu'il s'agit de toute évidence d'une infrastructure absolument névralgique pour le Canada. C'est un des outils disponibles, et nous devrons évaluer à quel moment il sera approprié de s'en servir.
    Merci beaucoup.
    C'est tout pour moi, monsieur le président.
    Merci, monsieur Blaikie.
    Nous allons maintenant passer à Mme Alleslev, pour cinq minutes.
    Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci à notre témoin de cet exposé des plus instructifs.
    Beaucoup de choses ont été dites, alors j'espère que nous pourrons revenir à... Nous avons beaucoup parlé des moyens de pression. De quoi le Canada dispose-t-il exactement pour faire pression? D'après ce qu'on nous a dit, notre avenir semble dépendre en très grande partie de la décision des États-Unis — d'une décision favorable aux intérêts supérieurs du Canada —, et que le Canada ne peut pas faire grand-chose d'autre que de supplier, de plaider, de faire comprendre, etc.
    Ai-je bien compris? De quels moyens de pression le Canada dispose-t-il?
    Les États-Unis et le Canada sont les plus grands partenaires commerciaux l'un de l'autre, et le commerce entre les États-Unis et le Canada est essentiel pour nos deux économies. L'énergie est une composante importante de ce commerce bilatéral. Ce pipeline particulier dessert les marchés du Canada et des États-Unis.
    Est-ce qu'il le fait de manière égale?
    Oui, à peu près. Il est donc essentiel pour les deux pays de s'assurer que le pipeline continue à fonctionner de manière sécuritaire et fiable, et que nous construisions ce tunnel privé aussi rapidement que possible pour assurer la pérennité de notre sécurité énergétique. Nous ne voulons pas créer une crise énergétique dans le Michigan, l'Ohio, l'Indiana, la Pennsylvanie, l'Ontario et le Québec au moment même où nous sortons de la crise économique créée par la COVID. C'est tout aussi important pour les Américains que pour les Canadiens.
(1550)
    Il ne semble pas que ce soit le cas pour la gouverneure du Michigan, et il est clair, je pense, qu'elle n'agit pas seule. Vous avez dit que c'est un problème qui dure depuis de nombreuses années et que vous avez mis l'accent sur le Michigan.
    Si c'est un problème depuis de nombreuses années, comment en sommes-nous arrivés là? Que pouvons-nous faire différemment maintenant pour désamorcer la situation et faire en sorte qu'elle cesse d'être un problème alors que, encore une fois, elle échappe à notre contrôle?
    La réponse est le tunnel des Grands Lacs. Nous avons travaillé pendant de nombreuses années avec le précédent gouverneur du Michigan pour faire adopter une loi nous permettant de construire le tunnel qui remplacerait la traversée actuelle du détroit de Mackinac. Pour l'État du Michigan, ce tunnel agirait comme un stimulant économique et fournirait une garantie de sécurité énergétique.
    Je sais que la gouverneure Whitmer est en faveur de ce tunnel, alors je pense qu'il faudrait le construire au plus vite afin d'éliminer ce petit risque environnemental sur lequel elle semble se concentrer.
    Si je peux me permettre de poser la question en tant que Canadienne cherchant à avoir une sécurité énergétique et, possiblement, à prévenir toute forme de vulnérabilité future à cet égard, comment pourriez-vous soutenir que le fait de dépendre encore d'une canalisation qui est à l'extérieur de notre pays est dans l'intérêt supérieur du Canada à long terme? Après tout, nous avons vu les conséquences négatives qu'a eues sur les Canadiens le fait de ne pas nous occuper nous-mêmes des vaccins et d'autres choses du genre en situation de crise.
    Malheureusement, au Canada, les pipelines sont problématiques, et la construction d'un tout nouveau pipeline à travers le pays serait une tâche aussi difficile que le maintien de l'exploitation du pipeline existant. En fait, il pourrait même être encore plus difficile d'obtenir l'unanimité des Canadiens à cet égard. Nous avons pu constater à plusieurs reprises qu'en tant que pays, nous ne sommes pas chauds à l'idée de construire des pipelines. Il est donc important de maintenir les pipelines existants en service.
    Merci de nous donner ces renseignements très importants sur ce sujet très important.
    Notre dernier intervenant est M. Sarai. Monsieur Sarai, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je veux d'abord remercier le témoin, M. Yu.
     Vous avez fait un excellent travail en expliquant cet enjeu avec beaucoup de soin et force détails, notamment quand vous avez répondu aux questions de mon collègue, M. Housefather. C'était presque un cours de droit sur ce à quoi vous êtes confronté au sud de la frontière.
    Ce que je veux savoir, c'est si vous avez obtenu le plein appui du gouvernement fédéral, en particulier du côté de l'ambassade, pour tout ce dont vous avez besoin. Ce serait ma première question.
    Deuxièmement, que faites-vous pour obtenir le soutien des groupes de consommateurs américains ou des groupes industriels américains à cet égard? De toute évidence, vous êtes un intermédiaire — littéralement — pour de nombreuses industries, qu'il s'agisse du gaz naturel, du pétrole, du chauffage ou des services publics. Dans quelle mesure ces groupes vous soutiennent-ils dans votre démarche? Vous apportent-ils un soutien sur le plan politique — et si oui, dans quelle mesure — afin que les habitants du Michigan et des régions environnantes soient au courant des conséquences des actions de leur gouverneure?
    Permettez-moi de commencer par le Canada. J'ai parlé à l'ambassadrice Hillman. J'ai parlé au ministre O'Regan. J'ai parlé au ministre Garneau. Je crois que notre PDG, M. Monaco, a également parlé à la ministre Freeland.
     Nous avons parlé à de nombreuses personnes au sein du gouvernement fédéral canadien. Tous nous ont dit qu'ils étaient saisis de cette question et qu'ils allaient faire tout en leur possible dans ce dossier, et qu'ils n'allaient pas ménager leurs efforts pour faire savoir au gouvernement fédéral américain qu'il s'agit d'une question de commerce bilatéral très importante. Il est important pour nous et pour ce comité de continuer à appuyer le gouvernement fédéral afin qu'il poursuive dans cette voie.
    J'ai parlé directement au premier ministre Ford et au premier ministre Legault au sujet de ce pipeline. Ils sont tous les deux très favorables aux gestes que nous posons aujourd'hui et ils promettent de continuer à faire savoir au gouvernement fédéral qu'il s'agit d'une question canadienne de premier plan.
    Du côté américain, nous avons une très vaste coalition de soutien dans l'État du Michigan et en dehors de l'État du Michigan. La Chambre de commerce du Michigan nous soutient à 100 %. La Chambre régionale de Détroit nous soutient à 100 %. Les électeurs de la péninsule supérieure de l'État du Michigan, qui dépendent à 100 % de la ligne 5 pour le propane qui chauffe leurs maisons, nous appuient dans une très large mesure.
    Au Michigan, l'Assemblée législative de l'État, le Sénat, est très favorable à la ligne 5 et au tunnel. En fait, à la fin de l'année dernière, lors d'un vote à la Chambre, les trois quarts de l'Assemblée législative se sont prononcés en faveur du tunnel. À cette occasion, de nombreux démocrates ont même traversé la salle pour soutenir le tunnel. Nous continuons à travailler d'arrache-pied avec les gens de l'État du Michigan pour veiller à ce qu'il y ait un soutien aussi fort que possible à l'égard du pipeline et du tunnel.
    L'État de l'Ohio est très intéressé, car la ligne 5 est essentielle pour les nombreuses raffineries de cet État, et parce que les problèmes auxquels l'Ohio doit faire face sont aussi importants que ceux de l'Ontario et du Québec. Le gouverneur et le procureur général de l'Ohio ont indiqué qu'ils soutenaient résolument la ligne 5 et le tunnel.
    Nous continuons d'édifier nos coalitions. Nous continuons à faire pression sur la gouverneure pour qu'elle sache qu'il s'agit d'une question très importante pour les habitants du Michigan ainsi que pour tous les États et toutes les provinces des Grands Lacs.
(1555)
    Avez-vous pu faire une analyse des émissions de gaz à effet de serre afin de connaître la quantité d'émissions supplémentaires qui résultera de la fermeture de ce pipeline, avec ces centaines de wagons et ces milliers de camions qu'il faudra mobiliser jour après jour pour transporter ces produits? De combien les coûts vont-ils augmenter à cause de cela, ce supplément que le consommateur finira par assumer?
    Comme vous le savez, pour les consommateurs — en particulier dans ces États —, les coûts de carburant sont passablement plus élevés que dans ma région, ici en Colombie-Britannique, où les étés et les hivers sont doux. Ces régions ont des hivers plus rigoureux et des étés plus chauds, et les dépenses en matière d'énergie sont élevées à longueur d'année. Avez-vous fait des études en ce sens? Je pense que si les Michiganais et les autres habitants de la région découvrent combien cela leur coûtera et dans quelle mesure la pollution augmentera en raison des gestes posés par la gouverneure, ils pourraient la forcer à revenir sur sa décision.
    Veuillez donner une réponse courte, monsieur Yu. Nous manquons de temps.
    Je n'ai pas les chiffres exacts sur les gaz à effet de serre sous les yeux, mais c'est quelque chose que nous pouvons examiner. Nous avons estimé que, pour les Michiganais, la suppression du pipeline fera grimper le prix du propane de 38 cents le gallon. C'est une forte augmentation.
    Merci, monsieur Sarai.
    Merci, monsieur Yu. Au nom du Comité, je peux vous dire que vous avez vraiment fait la lumière sur des questions qui nous préoccupaient beaucoup. Vous avez décortiqué ces enjeux pour qu'ils soient assimilables et faciles à suivre.
    Je tiens à vous remercier sincèrement, au nom du Comité, d'avoir pris le temps de venir ici et de nous avoir instruits sur ce qui, à mon avis, est une question complexe. Comme vous pouvez le constater d'après le sentiment qui se dégage de l'assemblée — le sentiment virtuel, s'entend —, nous sommes tous d'accord, et nous allons tous travailler ensemble.
    Merci encore d'être venu comparaître.
    Merci au Comité. Nous apprécions votre soutien.
(1600)
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps d'accueillir l'autre groupe de témoins.
(1600)

(1600)
    Distingués collègues, soyez les bienvenues à la deuxième heure de notre étude sur la ligne 5.
    Pour ce segment, nous sommes heureux d'accueillir, de la Chambre de commerce du Canada, M. Mark Agnew, vice-président, Politique et international, et M. Aaron Henry, directeur principal, Ressources naturelles et durabilité. Également, du Canadian American Business Council, nous entendrons Mme Maryscott Greenwood, directrice générale.
    Nous allons commencer par la déclaration liminaire de la Chambre de commerce du Canada.
    Messieurs, vous avez cinq minutes.
    Monsieur le président, honorables députés, je suis heureux de comparaître devant le comité spécial sur les relations canado-américaines. De même, il est bon d'apercevoir dans la salle virtuelle les visages familiers de certains membres du comité du commerce international. La Chambre de commerce se réjouit de travailler en collaboration avec votre comité à toutes les étapes de ses travaux sur la canalisation 5, ainsi que sur les autres sujets qu'il abordera dans le cadre de ses études à venir.
    Pour ceux d'entre vous que je n'ai pas encore rencontrés, je m'appelle Mark Agnew. Je suis vice-président, Politique et international, à la Chambre de commerce du Canada. Je partagerai avec mon collègue, Aaron Henry, le temps que vous nous avez accordé pour faire une déclaration préliminaire.
    Les membres du Comité comprennent l'importance que la canalisation 5 revêt pour la sécurité énergétique et la compétitivité économique du Canada. Au cours des conversations que nous avons eues avec nos membres au sujet des priorités que nous devons faire avancer dans le contexte nord-américain, les questions énergétiques constituaient un élément fondamental. La politique étrangère et les relations internationales peuvent parfois sembler abstraites, mais la canalisation 5 est une question tangible qui a une incidence réelle sur le Canada, comme nous allons l'expliquer dans quelques instants. Bien que d'autres l'aient déjà précisé, il convient de souligner que la canalisation 5 ne correspond pas au pipeline Keystone XL. Nous avons été déçus d'apprendre que le permis pour le projet Keystone XL avait été annulé, mais la canalisation 5 est matériellement différente en tant qu'élément d'une infrastructure déjà en service.
    Des différends peuvent survenir entre les alliés les plus proches. Même si l'idéal consisterait à régler nos différends par la diplomatie et le plaidoyer auprès des décideurs américains, l'histoire a démontré que les choses ne se passent pas toujours de cette façon, comme nous l'avons observé dans le cas du bois d'œuvre. Nous saluons les efforts déployés par le gouvernement dans le présent dossier, et nous l'encourageons à continuer de faire valoir que les intérêts canadiens et, ce qui importe encore plus, les intérêts américains sont bien servis par l'exploitation de la canalisation 5. Cependant, pour protéger nos intérêts, il devient parfois nécessaire d'avoir recours à des mécanismes prévus par les traités, comme nous l'avons constaté dans le cas d'autres irritants bilatéraux dans le contexte nord-américain.
    Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, M. Aaron Henry, afin qu'il décrive plus en détail nos points de vue sur la situation.
    Je vais m'y mettre tout de suite. Une partie de ce que j'ai à dire reprend ce qui a été dit au cours de la partie précédente de la séance.
    En bref, la révocation de la servitude et la fermeture de la canalisation 5 auront des répercussions importantes sur les économies canadienne et américaine. Elles mettront à rude épreuve l'infrastructure de transport du Canada et compromettront la sécurité énergétique de l'Amérique du Nord. Il y aura des conséquences à court terme et des conséquences à long terme.
    La canalisation 5 achemine 540 000 barils de combustibles fossiles par jour à travers le Canada et les États-Unis. Il n'est donc pas étonnant de constater qu'elle engendre d'importantes retombées économiques dans les deux pays, des retombées de l'ordre de plus de 65 milliards de dollars de revenus directs et de 28 milliards de dollars de revenus indirects découlant d'échanges commerciaux annuels. Elle approvisionne le centre du Canada en essence, en carburant d'aviation et en huile de chauffage. L'activité économique qu'elle génère à Sarnia seulement soutient 29 000 emplois directs et indirects. Elle répond également à plus de 50 % de la demande de propane du Michigan et fournit du brut aux principales raffineries du Midwest. Sans elle, les Canadiens et les Américains devront faire face à des coûts énergétiques plus élevés, à des pénuries temporaires et à des pressions économiques supplémentaires causés par la pression exercée sur nos systèmes de transport.
    Comme cela a été mentionné, il n'y a pas de solution de rechange pour la canalisation 5. Autrement dit, la capacité d'absorber les produits qu'elle transporte n'existe pas. Compte tenu de la gamme de produits transportés, il faudrait avoir recours à un maximum de 2 000 camions-citernes ou de 800 wagons par jour pour absorber les produits déplacés. Les groupes industriels américains nous ont prévenus que, du point de vue des camionneurs ou des camions, l'industrie du camionnage ne dispose pas de la capacité nécessaire pour absorber le propane que la canalisation expédie, sans parler du pétrole brut. La situation est similaire au Canada.
    Les produits qui seront absorbés au moyen de mesures de rechange auront des coûts élevés. De plus, les navetteurs canadiens et américains devront faire face à une circulation plus dense et congestionnée, ainsi qu'à des risques accrus en matière de sécurité. Les entreprises qui comptent sur le transport ferroviaire pour expédier des marchandises devront affronter une concurrence accrue, en raison des pénuries de wagons. Sur le plan économique, il sera deux fois plus coûteux de transporter les combustibles fossiles par voie ferrée et quatre fois plus coûteux de le faire par camion.
    Je ne saurais trop insister sur le fait que la canalisation 5, en tant qu'infrastructure interétatique et internationale, est essentielle à la sécurité énergétique de l'Amérique du Nord. Notre sécurité énergétique commune est importante, non seulement pour la prospérité de nos nations, mais aussi en ce qui concerne nos ambitions climatiques communes. L'élimination de la canalisation 5 et le recours au transport ferroviaire, aux camions-citernes et au transport maritime augmenteront considérablement les émissions de portée 3 associées aux produits énergétiques canadiens. Par émissions de portée 3, j'entends le carbone supplémentaire qui sera émis si les produits pétroliers et gaziers actuellement acheminés par la canalisation 5 sont transportés par voie ferroviaire, routière ou maritime. Cela minera les efforts déployés par nos deux nations pour faire progresser nos objectifs climatiques ambitieux. Cela obligera également Enbridge à rajuster le plan détaillé que l'entreprise a élaboré pour atteindre la carboneutralité, lequel comprend l'utilisation de produits à base d'hydrogène et de gaz naturel renouvelable. À l'avenir, ces carburants pourraient être mélangés aux produits de gaz naturel qui sont transportés en ce moment par la canalisation 5.
    À l'heure actuelle, la canalisation 5 assure une sécurité énergétique cruciale pour les produits énergétiques produits de manière responsable. Demain, elle pourrait jouer un rôle dans le développement de la décarbonisation des entreprises et des détaillants qu'elle dessert.
    Les efforts déployés par l'Équipe Canada pour soutenir la canalisation 5 sont ce dont nous avons besoin pour continuer. Nous voulons souligner que l'avenir de la canalisation 5 façonnera l'avenir énergétique, économique et climatique de l'Amérique du Nord. Nous encourageons le gouvernement fédéral à poursuivre son dialogue bilatéral avec l'administration Biden en vue de trouver rapidement une solution à l'amiable. L'ampleur du problème et les parties concernées font de cette question un sujet de négociation fédéral. En travaillant ensemble, nous pouvons nous assurer que les intérêts communs de nos nations passent en premier.
    Merci.
(1605)
    Je vous remercie infiniment de votre déclaration préliminaire
    Nous allons maintenant donner la parole à la représentante du Canadian American Business Council pendant cinq minutes.
    Vous avez la parole, madame.
     Merci, monsieur le président, merci, chers membres du Comité.
    Les membres du Comité et moi-même partageons un seul objectif. Dans mon cas, cet objectif a absorbé la quasi-totalité de ma vie professionnelle.
    Nous savons tous que, même si les relations entre le Canada et les États-Unis sont plutôt saines et que nous jouissons de toutes sortes d'avantages historiques, le fond sonore de nos échanges n'est pas le chant apaisant de Kumbaya. Non, notre relation a toujours été guidée par nos intérêts personnels, et vous savez qu'il y a eu des moments où nos dirigeants ne s'appréciaient même pas.
    Nous n'avons pas besoin d'attendre le jugement de l'histoire pour savoir que les quatre dernières années ont été un nadir, pour ainsi dire. Nous avons connu une guerre commerciale. L'un des membres du Canadian American Business Council est l'A. O. Smith Corporation. Elle fabrique des équipements de chauffage et de traitement de l'eau, et elle a été la cible de représailles commerciales de la part du Canada, vraisemblablement en raison de sa présence importante dans l'État d'origine du président du comité sénatorial des affaires étrangères.
    Pourtant, malgré tout ce chaos — ou peut-être à cause de celui-ci — le Canada a fini par obtenir un très bon résultat au cours des quatre dernières années. Le Canada a obtenu une version modernisée et mise à jour de l'ALENA. Cet accord est maintenant la norme de référence à l'échelle mondiale.
    Comment cela a-t-il pu se produire pendant une période aussi tendue et difficile? La réponse est simple: le Canada a reconnu le pouvoir des intérêts économiques personnels, et il a réussi à exploiter ce pouvoir. Lorsque le président a menacé de déchirer l'ALENA, le Canada a réagi à la menace économique existentielle en se mettant sur l'équivalent diplomatique du pied de guerre. Il s'est concentré sur les intérêts des États-Unis et a fait comprendre très clairement aux membres du Congrès américain le coût économique que paieraient leurs districts et leurs États si une telle mesure était prise. N'oublions pas que le Canada est le principal client des exportateurs américains.
    Pendant les périodes les plus intenses des négociations commerciales, il n'y avait pas de dissensions entre le gouvernement et l'opposition, entre le gouvernement fédéral et les provinces, entre les syndicats, les entreprises et l'opinion publique. En fin de compte, le Canada s'en est sorti non seulement indemne, mais aussi armé d'un accord commercial amélioré et exécutoire, approuvé par les deux côtés du Congrès américain.
    Nous vivons maintenant un retour à la normalité diplomatique. Le président Biden partage une certaine vision politique avec le premier ministre du Canada, et la plupart des Canadiens sont à l'aise avec ses valeurs. Certains Canadiens sont sans doute soulagés par la tournure des événements. Ils pensent peut-être qu'ils peuvent se détendre, que le monde a retrouvé son axe, ou qu'ils peuvent compter sur la courtoisie naturelle des Américains pour assurer leur sécurité économique et leur bonheur. Ils auraient tort de penser ainsi.
    Comme vous le savez, divers hommes d'État ont affirmé que les nations n'ont pas d'amis permanents; elles ont seulement des intérêts. J'aime à penser que le Canada et les États-Unis sont liés par une amitié, mais cette citation n'est pas sans fondement. Pour s'en convaincre, il n'est pas nécessaire d'aller plus au sud qu'à Lansing, au Michigan. Comme vous le savez, en novembre dernier, la gouverneure du Michigan, Gretchen Whitmer, a annoncé qu'elle révoquait la servitude de l'État dont Enbridge a besoin pour continuer d'exploiter en toute sécurité la canalisation 5 de son pipeline qui traverse le détroit de Mackinac, et bien sûr, dès le premier jour de son mandat, le président Biden a annulé le projet Keystone XL.
     La différence, c'est que le projet Keystone XL était encore en construction, alors que la canalisation 5 achemine en toute sécurité des millions de gallons de pétrole brut et de liquides de gaz naturel canadiens vers des raffineries américaines et canadiennes depuis près de 70 ans.
    Je dois interrompre mon exposé pendant un instant, afin de vous divulguer un renseignement. L'entreprise Enbridge est représentée au sein du conseil d'administration du CABC, et je travaille pour le gouvernement de l'Alberta à Washington.
    De toute façon, la canalisation 5 fournit plus de la moitié du propane que les habitants de la péninsule supérieure et inférieure du Michigan utilisent pour chauffer leurs maisons et leurs entreprises chaque hiver et pour faire fonctionner leurs entreprises tout au long de l'année. Le propane est également utilisé partout dans la région, que ce soit au Wisconsin ou en Ontario.
    Le kérosène chargé à bord des avions à l'aéroport Pearson de Toronto, à l'aéroport Trudeau de Montréal, à l'aéroport métropolitain de Détroit et à l'aéroport international de Pittsburgh provient du pétrole brut transporté par la canalisation 5. Il en va de même pour une grande partie de l'essence vendue à la pompe en Ontario et au Québec.
    La canalisation 5 fournit un service essentiel, un point c'est tout. Le ministre des Ressources naturelles, Seamus O'Regan, a qualifié son exploitation de « non négociable », mais le fait est que le ministre O'Regan n'exerce aucun pouvoir au Michigan. La gouverneure Whitmer a exigé que la canalisation 5 soit fermée à la mi-mai. Sa tentative de révocation de la servitude et sa tentative de faire fermer ce pipeline sont actuellement débattues devant un tribunal fédéral américain.
    La gouverneure Whitmer cherche à protéger l'environnement, et je pense qu'il est juste de dire que c'est une priorité pour le Canada aussi, ainsi que pour le CABC. Nous et nos membres appuyons la politique de transition en matière de carbone et l'objectif de carboneutralité d'ici 2050. Le Canada et les États-Unis collaborent à la mise en oeuvre de multiples initiatives environnementales — la réduction des émissions des véhicules, le captage et l'utilisation du carbone et la réduction du méthane, pour n'en nommer que quelques-unes —, et, le 22 avril, il y aura un important sommet des dirigeants sur le climat, organisé par la Maison-Blanche.
(1610)
    Toutefois, les intérêts économiques personnels demeurent la motivation inébranlable de toute nation. Nous dépendons toujours du pétrole et du gaz naturel, et le fait est que, si la canalisation 5 est fermée, les habitants du Michigan, de l'Ohio, de la Pennsylvanie, de l'Ontario et du Québec trouveront un autre moyen d'importer les hydrocarbures dont ils ont besoin pour alimenter leur vie quotidienne. D'autres barges et réservoirs chargés de pétrole brut apparaîtront sur les Grands Lacs, et davantage de camions remplis de pétrole brut circuleront sur nos autoroutes.
    Comme votre comité le sait, la canalisation 5 n'a jamais fui au niveau du détroit, et Enbridge est en train de la rendre encore plus sûre. L'administration du gouverneur Whitmer a récemment approuvé les permis permettant à Enbridge de faire passer la canalisation 5 par un tunnel souterrain revêtu de béton que l'entreprise a l'intention de creuser sous le lit du lac. Nous ne devons pas laisser des projets énergétiques ayant une importance économique régionale et internationale devenir des mises à l'épreuve décisives de l'allégeance de quiconque à la protection de l'environnement. En fait, il n'y a tout simplement pas de moyen plus sûr de transporter du pétrole brut que l'utilisation de pipelines.
    En attendant, le Canada doit continuer à réfléchir comme s'il vivait encore sur le pied de guerre — oui, même pendant l'ère Biden —, et pas seulement pour protéger la canalisation 5. Si nous voulons bénéficier de la reprise économique la plus efficace qui soit, nous avons besoin d'harmoniser nos réglementations. Nous devons rouvrir la frontière dès que les vaccins nous permettront de le faire en toute sécurité, et nous devons conclure des accords pour collaborer à la fabrication d'EPI et à la distribution de vaccins.
    Le Canada et les États-Unis sont à leur meilleur lorsque leurs citoyens sont solidaires. Nous ne pouvons pas nous laisser bercer par l'idée que tout ira bien. La gouverneure Whitmer a tiré la sonnette d'alarme.
    Merci beaucoup.
(1615)
    Je vous remercie beaucoup de vos observations.
    Nous allons passer directement aux questions.
    Monsieur Lewis, vous avez la parole pendant six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie aussi les témoins de leur participation. Leurs exposés étaient fantastiques.
    Si j'arrive à poser mes trois questions, tant mieux, mais j'en ai deux en particulier auxquelles j'aimerais que les deux témoins répondent.
    Le témoin du groupe précédent a expliqué que la conversation était à sens unique. Le Michigan est le seul à parler et, apparemment, l'Ontario et le Canada doivent écouter tout ce qu'il dit. Je trouve très intéressant de constater qu'une approche plus bilatérale n'a pas été adoptée dans ce dossier. Comme nous le savons tous, les deux économies dépendent fortement l'une de l'autre.
    Prenons l'exemple de l'industrie du montage d'automobiles. L'usine de Chrysler se trouve juste à l'extérieur de ma circonscription. Je crois que les pièces d'un véhicule font sept allers-retours sur le pont international le plus fréquenté qui soit, avant d'être assemblées pour former un véhicule. Ces pièces vont dans les deux sens: en Ontario, dans la région de Windsor-Essex, et au Michigan, en aval. Et cela n'englobe même pas les chaînes d'approvisionnement et les fabricants qui participent à ces processus.
    J'adresse ma question à chacun de nos témoins. Selon vous, quelle incidence économique cela aura-t-il sur les emplois et, plus précisément, sur l'hémorragie d'emplois que subit l'économie canadienne? Quelles répercussions voyez-vous?
    Je suis heureux de me lancer, à moins que Mme Greenwood ne veuille répondre.
    Je pense qu'il y aurait à la fois une incidence immédiate et une incidence à plus long terme. L'incidence immédiate est liée au fait que, à l'heure actuelle, le Canada ne compte que 14 raffineries capables de produire de l'essence. Au total, cinq d'entre elles sont touchées par la canalisation 5 ou la canalisation 9 au Québec.
    Dans cette période initiale où vous avez perdu toute la capacité de la canalisation 5, où elle a été déplacée, vous verrez que les coûts de ces raffineurs augmenteront. Il y aura beaucoup de plans d'urgence, de pénuries potentielles et de perturbations. Toutes ces choses perturberont directement la main-d'œuvre présente dans cette sphère d'activité et auront probablement aussi des répercussions sur les débouchés.
    Finalement, si nous étions dans pareille situation désespérée, une nouvelle chaîne d'approvisionnement se stabiliserait, mais vous verriez alors un effet domino. Vous constaterez que le coût du carburant a augmenté. Le coût du carburant pour avion a augmenté. Le coût du chauffage des maisons dans la plupart des régions du Québec a augmenté. Toutes ces choses auront des répercussions. C'est une sorte de perturbation initiale suivie de ce que l'on pourrait appeler une lente saignée.
    L'autre chose que je veux vraiment mettre en contexte, c'est qu'à certains égards, alors que nous nous engageons dans ces politiques de décarbonisation et d'avancement, cette situation a déjà exercé une forte pression sur nombre de ces différents segments. Par exemple, nos raffineurs se trouvent actuellement dans une situation où ils doivent faire face à des perturbations massives tout en essayant de planifier d'importantes mises à niveau pour se conformer à la norme de carburant propre. Vous allez voir que beaucoup de capitaux sont nécessaires pour toutes ces étapes.
    Si vous supprimez cette sécurité énergétique au moment décisif, vous constaterez qu'il y aura des répercussions. Vous constaterez ensuite que ces incidences se répercutent également sur l'ensemble de la chaîne de valeur que les canalisations 5 et 9 produisent en fin de compte. Il s'agira d'une incidence à long terme.
    Merci, monsieur Henry.
    Madame Greenwood, allez-y, je vous prie.
    Ce qu'il faut retenir, c'est que pour ce projet, l'histoire n'est pas encore terminée. Pour moi, il est difficile de vous dire quelle sera l'incidence globale sur l'emploi. Nous ne savons pas encore tout à fait ce qui va se passer.
    À long terme, la transition vers une économie à faibles émissions de carbone est susceptible de créer de nombreux emplois. Que l'on pense à la transition vers les véhicules électriques, au recyclage des batteries ou à d'autres choses du même genre, il y a une incidence économique qui est bonne pour l'environnement et également positive du point de vue de l'emploi. C'est ce que les décideurs politiques du Canada, des États-Unis et du monde entier tentent de faire.
    Le problème, c'est que si cela devait s'arrêter instantanément, les conséquences seraient assez dramatiques. Les gens s'adapteraient, mais la situation serait assez difficile si le gouverneur, par exemple, pouvait simplement fermer un pipeline.
    Ce n'est pas vraiment ainsi que fonctionne notre infrastructure. Nous avons un système qui permet de contester cette situation devant les tribunaux. Les tribunaux détermineront si une seule administration a la capacité de contrecarrer un projet d'infrastructure interétatique et international, alors...
(1620)
    Merci beaucoup, madame Greenwood. Je suis désolé de vous interrompre, mais j'ai encore une question.
    Je vais maintenant aborder un point très important. Notre dernier intervenant a parlé — et je crois que vous l'avez fait aussi — du fait que 540 000 barils devraient être acheminés par train, bateau ou camion. Le dernier témoin a mentionné plus de 15 000 camions par jour. Je crois que M. Henry en a mentionné environ 2 000.
    Non seulement un camion de plus sur le pont international le plus fréquenté interrompra la production...

[Français]

     Monsieur le président, nous n'avons plus accès à l'interprétation depuis environ deux minutes.

[Traduction]

    Monsieur le président, l'interprétation semble fonctionner.
    D'accord. Continuez.
    Merci beaucoup. Je serai bref.
    Non seulement cette situation nuira à la production, à la fabrication et à la chaîne d'approvisionnement, mais elle affectera également nos infirmières, nos médecins et nos gens d'affaires qui tentent de traverser la frontière. Elle congestionnera complètement la circulation au poste frontalier international le plus fréquenté.
    Monsieur Henry, avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Oui, absolument. Il s'agit de 540 000 barils par jour, ce qui représente une quantité et un volume incroyables, et on n'a pas les capacités nécessaires. C'est une chose sur laquelle nous aimerions mettre l'accent.
    Le Canada s'attache à se rétablir après la COVID. Nous avons encore des incertitudes à cette frontière. Si vous deviez mettre cette mesure en œuvre, le fait de s'occuper du propane du Michigan à partir du seul terminal du lac Supérieur créerait d'importants embouteillages. Vous observeriez des retards massifs.
    Même si nous étions capables de trouver un nombre suffisant de camionneurs et de camions équipés pour le faire, ceux-ci s'ajouteraient inutilement au flux global des marchandises. Je pense que cette décision entraînerait des coûts économiques et de résilience de la chaîne d'approvisionnement. Elle aurait des répercussions sur d'autres éléments essentiels dont nous avons besoin pour traverser ces frontières et pour lesquels nous disposons actuellement d'un mécanisme.
    L'autre incidence, bien sûr, est celle sur la résilience globale des transports. Les coûts n'ont pas encore été calculés en fonction du risque de déversements potentiels et aussi simplement en fonction du volume de circulation sur les routes. Cette situation concerne surtout la frontière canado-américaine, mais aussi le transport des produits vers le centre de Sarnia, puis vers le Québec. Ce sont toutes des incidences qui touchent les navetteurs. Elles touchent d'autres industries. Il s'agirait d'un coût important.
    Merci, monsieur Lewis.
    La parole est maintenant à Mme Bendayan pour six minutes.
    Allez-y, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à nos témoins. C'est agréable de voir des visages familiers.
    Juste avant ce distingué groupe de témoins, nous avons eu le plaisir d'entendre le représentant d'Enbridge. Au cours de ce témoignage, nous avons appris que les responsables d'Enbridge ont eu des conversations très productives avec le premier ministre Ford et le premier ministre Legault, et que les deux premiers ministres étaient très favorables au projet ainsi, bien sûr, qu'à la canalisation 5. Nous avons entendu des choses similaires concernant les conversations entre les représentants d'Enbridge et la ministre Freeland, le ministre Garneau, le ministre O'Regan et d'autres hauts fonctionnaires de notre gouvernement. Bien entendu, on nous a aussi dit que notre gouvernement était favorable au maintien en service de la canalisation 5.
    Les représentants d'Enbridge nous ont aussi dit — et je cite — qu'ils cherchent et espèrent vivement « une solution diplomatique médiatisée et négociée qui nous permette de ne plus avoir affaire aux tribunaux ».
    Je me demandais si je pouvais entendre les commentaires de Mme Greenwood en particulier pour savoir à quoi se rapporte réellement la question, car en plus de tous ces fonctionnaires qui travaillent fort dans ce dossier, nous savons bien sûr que les chambres de commerce de Detroit et du Michigan sont également très favorables au maintien de la canalisation 5.
    Ma question est la suivante: comment pouvez-vous, en tant que chambre de commerce, travailler en étroite collaboration avec les chambres de commerce américaines afin de parvenir à une « solution diplomatique négociée » réussie entre nos deux pays?
(1625)
    La meilleure façon pour nous d'être utiles au Canadian American Business Council est de lancer la conversation à l'extérieur du Michigan. Comme vous le soulignez, les gens sont très sensibilisés au Canada — en Ontario et au Québec en particulier, mais aussi en Alberta, bien sûr. Au Michigan, on est conscient de l'existence du pipeline et des défis actuels, mais on ne l'est pas autant en Ohio, en Indiana, dans l'ouest de la Pennsylvanie et dans d'autres endroits aux États-Unis qui ressentiraient les effets immédiats de la fermeture du pipeline du jour au lendemain.
    Il est important de tenir cette conversation à l'extérieur du Michigan ou en plus de la tenir dans cet État. Il importe aussi d'avoir cette conversation dans le contexte d'un engagement très sérieux à protéger les Grands Lacs et à sauvegarder l'environnement, afin que les gens comprennent qu'il s'agit d'un effort pour mieux protéger le détroit de Mackinac et non d'un retour en arrière. Il ne s'agit plus d'un vieux dialogue qui oppose l'économie et l'environnement.
    Merci beaucoup, madame Greenwood.
    Je ne sais pas, monsieur Agnew, si vous aviez quelque chose à ajouter sur ce point particulier. Sinon, j'ai encore bien d'autres questions.
    Pour répondre brièvement à cette question, il y a deux façons avantageuses de travailler avec les chambres de commerce aux États-Unis. La première est d'échanger des informations et d'obtenir leurs points de vue, à la fois pour éclairer le travail que nous faisons et pour avoir des renseignements que nous pouvons transmettre à nos membres.
    De même, nous pouvons les équiper et les munir des faits et de la perspective canadienne pour qu'ils soient nos défenseurs sur le terrain, car un défenseur américain a certainement beaucoup plus de poids auprès d'un décideur américain.
    C'est très intéressant. Merci pour ces précisions, monsieur Agnew.
    Je crois que c'est M. Henry qui a mentionné ces statistiques: 800 wagons par jour ou 2 000 camions-citernes par jour. M. Henry a cité ces moyens comme une éventuelle solution de rechange si la canalisation 5 venait à ne plus être opérationnelle. Il a également cité quelques statistiques concernant la hausse des coûts.
    Je me demande si vous pourriez communiquer ces renseignements au Comité et lui préciser où vous avez pu obtenir ces statistiques. Serait-ce possible, monsieur Henry?
    Oui, je serai heureux de le faire après la discussion.
    Compte tenu de ces renseignements, pensez-vous que cette situation aurait une incidence sur le transport ferroviaire de passagers, par exemple? Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les dommages collatéraux?
    Je ne pense pas qu'il y aurait nécessairement une incidence directe, disons, sur le coût du transport ferroviaire de passagers, mais il y aurait certainement plus de circulation sur les lignes, ce qui peut entraîner des retards et d'autres conséquences.
    En réalité, si cette mesure était prise et vous cessiez d'utiliser la canalisation 5 pour adopter ces méthodes de remplacement, nous passerions d'un moyen très peu risqué, très rentable et peu polluant de transporter un produit à un moyen susceptible d'avoir beaucoup plus de conséquences.
    Absolument. Nous l'avons déjà entendu dire. Bien sûr, je crois que vous comprenez ce que je pense et ce que pensent divers députés de l'importance d'atteindre nos objectifs en matière d'émissions. Vous en avez parlé dans vos remarques liminaires.
    Si vous avez des estimations d'émissions dans le cadre du scénario de remplacement que vous décrivez, nous souhaiterions vivement en prendre connaissance également dans la documentation que vous soumettrez au Comité.
    Si j'ai le temps, monsieur le président, j'aurais une dernière question pour Mme Greenwood.
    Vous avez 30 secondes.
    Madame Greenwood, vous avez mentionné l'importance de l'ACEUM, et bien sûr, je suis tout à fait d'accord avec vous. Ce nouvel ALENA modernisé est vraiment le résultat de grands efforts déployés dans tout le pays et auxquels vous et votre association avez largement participé.
    Y a-t-il des leçons tirées de cette expérience que, selon vous, nous pouvons utiliser efficacement dans ce scénario, en plus de celles dont nous avons déjà discuté?
    Dans le temps qui nous est imparti, je dirais que nous devrions continuer à le faire. Ne présumez pas que la crise est terminée et que nous pouvons maintenant aller de l'avant. Nous devons déployer ce genre d'efforts dans les relations canado-américaines afin de maximiser les possibilités de collaboration et de minimiser les différends.
    Merci, madame Bendayan.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour six minutes.
(1630)
    Je salue et remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Étant donné que vous représentez certaines entreprises et certains groupes d'entreprises, j'aimerais savoir à quoi celles-ci se préparent. Quel est l'état d'esprit des entreprises actuellement? Penchent-elles davantage vers le maintien de la canalisation ou envisagent-elles un plan B?

[Traduction]

    Pour l'essentiel, il s'agit bien d'un plan B. La situation n'incite pas à l'optimisme. En fait, comme l'ont clairement montré certaines des autres déclarations, nous ne sommes même pas sûrs d'avoir la capacité d'absorber ces déplacements, que ce soit en nombre de camions disponibles ou de chauffeurs formés. Il est certainement possible que ce flux soit absorbé d'une manière ou d'une autre, mais ce n'est pas un résultat sur lequel nous allons insister. La déclaration de haut niveau est que la canalisation 5 est essentielle à la sécurité énergétique non seulement du Canada, mais aussi des États-Unis, et qu'à l'heure actuelle, il n'y a pas de solution de rechange ou du moins pas de solution de rechange viable.
    J'ai foi en notre système démocratique, en fait, et contrairement au cas d'un permis présidentiel, dans lequel l'autorité repose réellement sur une seule personne, dans ce scénario, les actions prises par le titulaire particulier d'une charge politique font l'objet d'un examen judiciaire ainsi que de nombreuses négociations diplomatiques. Je ne veux pas dire que je suis optimiste ou pessimiste, mais je fais confiance au système, et nous sommes au milieu du processus, donc je ne veux pas en préjuger.
    Il est toutefois important d'aider les Américains, en particulier, à comprendre ce qui est en jeu.

[Français]

    Si je comprends bien la première intervention, on ne sait pas même si une solution de rechange est envisageable.
     Par ailleurs, si la canalisation devait cesser d'être exploitée, ce qui semble assez peu probable compte tenu des précédents juridiques et du dialogue actuel, que se passerait-il? Est-ce qu'il faudrait tout simplement conclure par un échec, une faillite ou une fermeture? Comment feriez-vous?
    Je suis un peu surpris d'entendre que cela n'a pas été envisagé et que c'est simplement vu comme une catastrophe, sans qu'on ait pensé aux moyens d'y faire face.

[Traduction]

    Je pense que vous avez raison. Si le pipeline était fermé, rien que dans le Michigan, il y aurait une pénurie de propane de 756 000 gallons par jour; les conséquences immédiates sont donc considérables.
    J'espère que nous n'en arriverons pas là, mais vous avez raison de dire que nous devons envisager tous les scénarios possibles étant donné où nous en sommes dans ce processus.
    Pour faire écho à ces commentaires, je dirais que je suis d'accord pour dire que si le pipeline devait être fermé, les conséquences seraient assez importantes. Cependant, je suis également d'accord avec Mme Greenwood pour dire que si l'on considère la situation dans son ensemble, l'état d'avancement de la conversation et les mesures prises par le Canada jusqu'à présent, nous sommes encore en bonne position pour continuer à faire monter la pression.
    Comme on l'a mentionné vers la fin de la dernière conversation, j'aimerais également réitérer que, si cette question ne peut être réglée à l'amiable et par des voies diplomatiques autres que les tribunaux, le Canada peut compter sur le traité de 1977 sur le transit des pipelines. Ce n'est pas la mesure par laquelle il faudrait commencer, mais ce pourrait certainement être la mesure par laquelle il faudrait finir si on en arrive là.

[Français]

     Non seulement cela n'a pas été étudié, mais on entend, dans votre témoignage, un appel pour que nous, de la classe politique, surveillions ce plan B, s'il devait y en avoir un.

[Traduction]

    C'est exact. Il est important que vous en parliez maintenant. Il est important que vous mobilisiez vos homologues aux États-Unis, à l'extérieur et à l'intérieur de Washington, comme vous l'avez fait lorsque vous avez été confrontés à la menace existentielle de déchirer l'ALENA.
    Vous avez raison de vous engager dans cette voie.
(1635)
    Nous y serions également favorables.

[Français]

    Nous sommes maintenant devant une situation où la gouverneure, l'autorité au Michigan, estime que les preuves ou les études soumises par Enbridge ne sont pas convaincantes et ne viennent ni apaiser ni calmer ses craintes.
    Cela me surprend beaucoup, parce qu'il y a derrière tout cela une vérité scientifique; il y a forcément quelqu'un qui dit vrai ou non quant aux questions posées et aux réponses d'Enbridge.
    Selon vous, est-ce que oui ou non les réponses ont été satisfaisantes? En effet, selon les autorités du Michigan, elles ne l'ont pas été.

[Traduction]

    Je ne prétends pas avoir lu tous les documents qui ont été soumis, mais ce que nous avons entendu de la part de nos entreprises, c'est qu'Enbridge a envoyé une quantité assez importante de documents, comme le fait toute entreprise lorsqu'elle s'engage auprès de gouvernements et d'organismes de réglementation. La triste réalité est que la politique se met en travers du chemin.
    J'aimerais poursuivre en disant que dans l'ensemble, d'après ce que nous avons vu, Enbridge a fait plus que ce qu'il fallait pour apaiser les inquiétudes de la gouverneure. La société a notamment dépassé le simple projet de tunnel proposé pour recouvrir la canalisation. Elle a également utilisé le système de protection des biens Guardian, à la fine pointe de la technologie. Ce système est conçu spécialement pour contrer le risque numéro un dans le détroit de Mackinac, à savoir un dépôt d'ancre, grâce à un système de communication avec tous les navires commerciaux qui cartographie le pipeline sous le détroit.
    Je suis d'accord avec mon collègue. En fin de compte, il est ici question de politique plutôt que de matérialité.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Monsieur Blaikie, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais m'éloigner de la question particulière de la canalisation 5 et vous demander ce que vos organisations considèrent comme des possibilités. Avec la nouvelle administration, il est possible de faire davantage front commun contre les changements climatiques. De nombreux débouchés économiques peuvent en découler, tant pour aider nos deux pays respectifs à réduire leur empreinte carbone que pour créer de nombreux emplois et de nouvelles entreprises.
    Je me demande si vous aimeriez, à tour de rôle, parler un peu de certaines des possibilités que vos membres envisagent, et des types de politiques publiques qui pourraient favoriser une meilleure collaboration et de meilleurs résultats en matière de réduction de notre empreinte carbone.
    Je peux commencer. Le Canada et les États-Unis peuvent vraiment faire avancer le débat sur le climat grâce à l'innovation. Pour vous donner un exemple, il ne s'agit plus seulement de capter et de stocker le carbone, mais bien de le capter et de l'utiliser, c'est-à-dire de le capter au point d'émission et de le transformer en quelque chose que l'on peut ensuite utiliser.
    L'exemple que j'ai est une société canadienne appelée Capital Power. Elle a des actifs aux États-Unis et a investi dans une technologie qui crée des nanotubes de carbone. Vous prenez le carbone capté et vous le mélangez au ciment, par exemple. Lorsque vous envisagez de construire des infrastructures, vous pouvez en fait avoir un type d'infrastructure plus écologique qui a pour effet de réduire le carbone.
    Il existe des possibilités très intéressantes dans ce domaine. Les politiques publiques qui encouragent la collaboration transfrontalière, comme la cohésion réglementaire, et qui ont une structure pour encourager l'innovation sont la voie à suivre. Il existe beaucoup de possibilités entre le Canada et les États-Unis. Nombre d'entre elles feront l'objet de discussions lors du sommet des chefs de file en matière de climat du 22 avril que j'ai mentionné dans mon témoignage.
    Un certain nombre d'éléments différents me viennent à l'esprit. Par exemple, la COP26 aura lieu plus tard cette année. Étant donné l'intégration des économies nord-américaines, il serait logique que le Canada et les États-Unis se rendent aux réunions de la COP avec une idée de ce qui profiterait à l'Amérique du Nord en tant que bloc économique, par exemple.
    On a également beaucoup discuté des minéraux essentiels et des terres rares. Si nous devons déployer un grand nombre de nouvelles technologies qui permettront d'améliorer l'efficacité énergétique, nous avons besoin de ces produits minéraux essentiels comme intrants pour pouvoir les construire. Nous disposons de certains de ces produits minéraux ici. Comment pouvons-nous mieux travailler à les extraire du sol et à les intégrer à une chaîne d'approvisionnement nord-américaine?
    Ce ne sont que deux exemples parmi d'autres.
(1640)
    En examinant notre économie traditionnelle de l'énergie, et en particulier le pétrole et le gaz au cours des quelque 30 dernières années, certaines personnes s'inquiètent du fait qu'une grande partie du travail à valeur ajoutée a quitté le Canada. Nous nous sommes retrouvés avec un modèle dans lequel nous extrayons des ressources naturelles brutes que nous envoyons aux États-Unis où se fait le travail à valeur ajoutée, pour finir par racheter un produit fini.
    À votre avis, quel genre de cadre pourrait faire en sorte que ce genre de modèle ne se reproduise pas lorsqu'il s'agit de quelque chose comme les minéraux des terres rares? Comment pouvons-nous nous assurer que, même si nous voulons avoir une stratégie nord-américaine, nous effectuons une part équitable du travail à valeur ajoutée au Canada au lieu d'être un simple fournisseur de matières premières pour le travail à valeur ajoutée qui se fait ailleurs?
    C'est une question parfaite. Nous savons que les minéraux essentiels et les éléments des terres rares se trouvent presque partout dans le monde, mais que 80 % d'entre eux sont transformés en Chine. C'est donc le marché de la transformation — de la valeur ajoutée réelle dont vous parlez — que le Canada pourrait détenir.
    Il faudrait un énorme investissement. Il faudrait collaborer avec les États-Unis pour s'assurer qu'il y a un utilisateur final pour ce produit et trouver des capitaux privés. Il serait donc nécessaire d'offrir une certaine certitude sur le plan de la réglementation pour attirer les capitaux.
    L'énorme potentiel du Canada se situe au niveau de la transformation plutôt que de l'exploitation minière. Le Canada est une économie de ressources, et les Canadiens savent évidemment comment exploiter les mines. Ils ont l'infrastructure et tout le reste, mais je suis tout à fait d'accord pour dire que le processus d'ajout de valeur pourrait se produire au Canada — et encore plus au Canada, en fait, qu'aux États-Unis. Vous disposez de vastes espaces et d'une énergie hydroélectrique abondante, propre, verte et renouvelable qui réduit considérablement les émissions de carbone d'un processus relativement intensif. Le Canada possède toutes sortes d'avantages naturels, comme l'ingénierie, les ports en eau profonde, les chemins de fer et un processus réglementaire visant à protéger l'environnement, qui en font un choix évident.
    Monsieur Agnew, voulez-vous également répondre à cette question?
    En bref, bien qu'il faille se rappeler qu'il y a trois ordres de gouvernement et que chaque ordre de gouvernement compte de multiples ministères, en fin de compte, c'est une seule entreprise qui supporte le fardeau cumulatif de toutes les mesures, donc il s'agit vraiment d'un ensemble de mesures cumulatives. Quels sont les incitatifs fiscaux? Quels sont les incitatifs à l'investissement? Quel est le fardeau réglementaire, l'accès à la main-d'œuvre et aux infrastructures?
    Mme Greenwood a parlé de la croissance du marché et de la demande pour les éléments des terres rares et de la nécessité de savoir qu'il y aura un acheteur à l'autre bout. Il y a beaucoup de façons différentes d'aborder la question, mais il doit y avoir une personne à l'autre bout pour que ce soit financièrement viable pour les entreprises.
    Merci beaucoup.
    Nous avons terminé notre première série de questions. Nous allons maintenant entamer la deuxième série, en commençant par Mme Alleslev pour cinq minutes.
    Allez-y, je vous prie.
    Merci beaucoup. Quelle conversation percutante.
    Mme Greenwood a bien résumé la situation en disant que l'intérêt personnel est toujours un facteur déterminant, mais je pense que ce dont les Canadiens ont besoin, même pour examiner la situation de la canalisation 5, c'est de mieux comprendre le contexte dans lequel les États-Unis envisagent cet intérêt personnel.
    Je sais que nous avons eu des tarifs sur l'acier et l'aluminium qui, à bien des égards, ont entraîné un rapatriement de ces emplois et une augmentation des emplois manufacturiers dans ces secteurs aux États-Unis. Nous avons également vu la promulgation récente de la Loi sur la production de défense, qui limite quelque peu l'autosuffisance en matière de vaccins, d'équipements de protection individuelle et de ce qui est expédié à l'extérieur des États-Unis.
    Devrions-nous considérer la canalisation 5 de la même manière? Est-ce peut-être le début d'une tendance à plus long terme? À mesure que les États-Unis accroissent leur autosuffisance et leur capacité à produire davantage de pétrole et de gaz, seront-ils en mesure de rapatrier ces ressources et d'être plus autosuffisants sur ce plan?
    M. Henry voudra peut-être prendre la parole après moi pour fournir un peu plus de détails.
    L'une des choses que nous avons examinées — j'espère que le Comité pourra en tenir compte dans son rapport —, c'est que l'administration Biden a émis, au début du mois dernier, un décret sur les examens de la chaîne d'approvisionnement, et l'énergie était l'un des secteurs cernés dans ce décret. Nous encourageons le gouvernement à collaborer avec l'industrie pour trouver une façon d'exposer une perspective canadienne dans ces examens de la chaîne d'approvisionnement, afin de comprendre le rôle important que joue le Canada dans le paysage américain de la sécurité de la chaîne d'approvisionnement.
    Monsieur Henry, je ne sais pas si vous avez des observations supplémentaires à faire sur les pipelines d'énergie plus précisément.
(1645)
    Nous devons comprendre, comme M. Agnew l'a évoqué, que les chaînes d'approvisionnement sont en train de changer. Ces chaînes d'approvisionnement créent des occasions pour nous dans ces nouvelles sphères, mais nous devons tenir compte du fait que les États-Unis, en tant que puissance énergétique, ont également subi de nombreux changements.
    Il y a peut-être des occasions pour le pétrole et le gaz canadiens, étant donné ce qui s'est produit avec la production de schiste. C'est peut-être une pénurie que nous pourrions régler, mais de façon générale, ce que vous voyez avec les États-Unis, c'est un effort pour accroître considérablement leur souveraineté énergétique, à la fois en termes de ce qu'ils peuvent exporter, mais aussi dans leurs marchés d'électricité.
    Nous devons être très attentifs à la création de possibilités — par exemple, pour notre espace de services publics pour faire ces exportations —, mais aussi réfléchir aux moyens de continuer à servir nos propres marchés internes pour nous assurer que nous avons une longueur d'avance sur les changements à long terme que nous constaterons probablement dans l'économie énergétique américaine.
    Par ailleurs, lorsque nous parlons d'intérêt personnel et d'un aspect, il semble que la négociation ne porte jamais uniquement sur le pétrole et le gaz. Nous avons vu maintenant, avec la feuille de route que Biden et Trudeau ont signée, que nous examinons la défense, la sécurité et, comme vous l'avez dit, la sécurité des chaînes d'approvisionnement. Nous nous penchons sur les minéraux essentiels. Nous nous penchons sur le passage du Nord-Ouest et sur un certain nombre de questions.
    Le Canada devrait-il chercher à mieux comprendre que les négociations d'un point ne se font jamais de façon isolée, mais que d'autres domaines peuvent également devoir être examinés en même temps, ainsi que l'effet de levier ou la conversation entre l'ensemble du paysage et pas seulement la canalisation 5, comme dans ce cas-ci?
    Mon approche est légèrement différente. Je ne pense pas que les États-Unis puissent imaginer faire cavalier seul sur quoi que ce soit sans le Canada. Nous sommes tellement intégrés. Aux États-Unis, c'est parfois une bonne tactique, ou cela semble l'être, de dire qu'il faut faire des achats aux États-Unis. En réalité, ce n'est pas possible, surtout quand on parle du Canada, et ce n'est pas souhaitable. Les pays qui nous inquiètent du point de vue de la fabrication ne sont pas en Amérique du Nord.
    L'une des choses sur lesquelles nous nous concentrons est la manière dont nous nous ressaisissons ensemble. Nous avons une initiative, la campagne de reprise nord-américaine, que vous pouvez aller consulter, où des Américains et des Canadiens ordinaires disent que nous sommes tous dans le même bateau.
    À votre question directe quant à savoir si le Canada devrait tirer parti de tous ses différents atouts dans la conversation, je répondrais que oui, absolument. Les diplomates vous diront qu'il n'y a pas de liens. Les réalistes vous diront que, bien sûr, dans la nature humaine, tout est lié. Le Canada dispose d'un grand nombre d'atouts et d'avantages naturels et devrait être prêt à les vanter haut et fort, comme il l'a fait lors des négociations de l'ALENA.
    Merci, madame Alleslev.
    La prochaine intervenante est Mme Romanado, s'il vous plaît, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci beaucoup aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Notre témoin précédent a qualifié la canalisation 5 comme étant « le bout de tuyau le plus surveillé en Amérique du Nord ». Je veux mieux comprendre l'urgence et la motivation de la gouverneure du Michigan. Pourquoi maintenant?
    Quand je regarde un extrait de ce qu'elle a dit dans un article de Great Lakes Now en juin 2019, elle a dit qu'un litige prolongé sans le tunnel ou autre solution de rechange serait le « pire des scénarios ». J'examine la chronologie. Elle a dit cela en juin 2019. Elle a été élue en novembre 2018 et elle est entrée en fonction en janvier 2019. Un troisième accord entre Enbridge et le Michigan a été conclu en décembre.
    Je me penche sur cette chronologie. Nous voyons qu'il y a eu une ordonnance d'interdiction temporaire en juin 2020. Elle a ensuite été levée pour redémarrer les travaux pour la canalisation 5 en juillet et en septembre. Ensuite, le 7 novembre, les médias annoncent l'élection du président Biden et, six jours plus tard, la gouverneure publie l'ordonnance sur sa servitude.
    J'essaie de comprendre pourquoi maintenant, alors que ce tunnel est en construction et doit être ouvert en 2024. Pourquoi maintenant? Compte tenu des conséquences des deux côtés de la frontière, qu'il s'agisse de l'accès au pétrole brut ou de l'emploi, pourquoi maintenant? Il est utile pour nous de comprendre la situation afin de nous assurer de bien communiquer notre position.
(1650)
    Il faudrait peut-être que la gouverneure soit présente pour poser cette question. Je signale que ce qui est important, c'est que pendant qu'elle demandait qu'on mette fin à la servitude de pipeline, son gouvernement a approuvé le processus pour le tunnel.
    Exactement. J'essaie seulement de m'assurer que je vous comprends bien, madame Greenwood, alors merci.
    Nous avons parlé un peu du traité. Je crois savoir que le gouverneur de l'époque, M. Biden, a voté en faveur du traité en 1977. Ce n'est pas quelque chose que nous voulons utiliser, évidemment. Nous espérons que nous pourrons trouver une solution diplomatique à ce problème. De toute évidence, l'affaire est devant les tribunaux. Nous adopterons l'approche d'Équipe Canada, comme vous l'avez suggéré, parce que nous devons nous assurer que tant que le tunnel n'est pas construit, nous ne pouvons pas endiguer le flot.
    Je veux changer un peu de sujet maintenant, madame Greenwood. Vous avez mentionné l'initiative de reprise nord-américaine, sur laquelle j'ai lu quelques articles, et la politique d'achat en Amérique du Nord. Je veux discuter un peu des possibilités. Nous voyons très clairement ce que nous devons faire avec la canalisation 5, mais nous avons également la reprise économique. Pouvez-vous consacrer la prochaine minute et demie à parler de l'initiative d'achat en Amérique du Nord et de la raison pour laquelle nous devons nous concentrer là-dessus?
    L'initiative d'achat en Amérique du Nord n'a de sens que du point de vue des États-Unis. Si vous dites à un fournisseur américain que nous, le gouvernement, allons lui dire à quoi ressemble sa chaîne d'approvisionnement, et que nous ne voulons pas que ses propres gains d'efficacité ou ses propres relations comptent, c'est problématique. Ce n'est pas vraiment la façon dont les États-Unis fonctionnent, habituellement, quand ils fonctionnent bien.
    Nous savons que l'initiative d'achat nord-américain, ou d'achat canado-américain, fonctionne dans le secteur de la défense. Nous avons l'Accord sur le partage de la production de défense depuis les années 1960. Les entreprises de défense canadiennes peuvent soumissionner pour des projets du Pentagone comme si elles étaient américaines, alors nous avons un bon modèle pour cela. Nous avons également toutes ces industries et tous ces secteurs qui bénéficient d'un accès en franchise de droits aux États-Unis grâce à l'ALENA.
    Lorsque nous parlons d'acheter aux États-Unis, il s'agit en fait de marchés publics qui découlent des mesures de relance qui sont sur le point de se produire, et nous ne voulons pas les rendre plus chers. Une dérogation canadienne, comme nous l'avons obtenue en 2009 et comme nous l'avons obtenue l'année dernière durant la pandémie pour l'EPI... Il y a eu une dérogation canadienne qui n'a pas été médiatisée, mais qui a été mise en œuvre dans le cadre du règlement de la Loi fédérale sur la gestion des urgences. Ce genre de mesures sont éminemment sensées. C'est dans l'intérêt des États-Unis de le faire, donc je pense que vous devez continuer de revenir à la charge.
    Dans les 20 dernières secondes qu'il me reste, permettez-moi de remercier nos témoins. L'une des choses que nous venons d'entendre, c'est que nous n'avons vraiment pas la capacité de transporter du pétrole brut si la canalisation 5 ferme. Je tiens à vous remercier d'avoir signalé les problèmes auxquels nous serions confrontés en ce qui concerne les camionneurs, l'accès aux camionneurs et aussi l'accès à l'infrastructure ferroviaire.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Depuis le début, quelque chose m'échappe, dans ce dossier.
    D'un côté, il y a des craintes environnementales. On a entendu la gouverneure du Michigan parler notamment des soutiens qui n'étaient pas à tous les 75 pieds, de la couche qui n'était pas assez épaisse et de toutes sortes de conditions que, selon elle, Enbridge ne remplissait pas. Enbridge a répondu que tout se déroulait bien.
    Pourquoi n'est-ce pas réglé?
    Quelque chose m'échappe dans ce dossier. Il n'y a pas matière à débat. Il est question de science, non pas d'opinions.
    Y a-t-il, oui ou non, des manquements à certaines conditions? La question ne devrait pas donner lieu à un débat, elle devrait être tranchée.
    Comment se fait-il que cette question ne soit pas encore réglée?
    Comment peut-il y avoir litige sur des questions de fait et des questions scientifiques?
(1655)

[Traduction]

    Il y a beaucoup de variables dans tout cela, et je ne peux pas fournir une vue d'ensemble de toutes ces variables. Pendant un certain temps, le dialogue est resté ouvert avec le bureau de la gouverneure Whitmer. Toutefois, étant donné que nous sommes maintenant au point où les tribunaux doivent décider s'il s'agit d'un domaine qui relève du pays ou de l'État, ces dialogues ont pris fin, simplement parce que la gouverneure ne veut pas faire de commentaires sur les affaires qui sont devant les tribunaux.
    C'est une impasse et, à certains égards, malgré le fait que ces études ont été publiées et qu'Enbridge a déployé de nombreux efforts pour respecter une série de conditions, c'est en partie la raison pour laquelle les choses n'ont pas progressé. C'est pourquoi il est impératif qu'au moment où ces tribunaux prennent leurs décisions, le gouvernement fédéral et Équipe Canada soient en mesure de présenter un mémoire à titre d'intervenant désintéressé qui fait essentiellement état qu'il s'agit d'une question fédérale et non pas d'une question que le Michigan doit décider seul.
    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez 15 secondes.

[Français]

     Je n'ai pas le temps de formuler d'autres questions en 15 secondes. Je vous remercie.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Pour la dernière question aujourd'hui, monsieur Blaikie, vous disposez de deux minutes et demie, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Dans le cadre de l'ACEUM, le Canada a continué d'autoriser l'accès aux marchés publics aux entrepreneurs américains, sans obtenir le même type d'accès réciproque. Encore une fois, je m'interroge à ce sujet, juste sur le thème des occasions de faire front commun pour lutter contre les changements climatiques.
    Si le Canada n'est pas en mesure d'avoir accès aux projets de travaux publics américains de manière générale, que pensez-vous de certaines possibilités pour les entreprises qui construisent des autobus électriques, par exemple, ou qui ont différents types de technologies vertes qui serviraient un intérêt de politique publique dans un grand nombre de municipalités ou de gouvernements d'État américains, et qui les utilisent comme moyen d'accéder à certains types de marchés publics américains auxquels les entreprises canadiennes pourraient autrement être bloquées?
    Oui, c'est un point intéressant. Je pense que vous allez avec votre partenaire américain de la chaîne d'approvisionnement, bras dessus bras dessous, de sorte que la situation ne vous échappe pas complètement. De plus, vous auriez à déterminer le rapport coût-efficacité relatif de vous associer à un partenaire canadien.
    Vous savez, le Canada est plus proche d'un grand nombre de sites de fabrication américains que le sont les sites aux États-Unis, donc lorsque vous faites valoir vos arguments et que vous faites venir votre partenaire américain, vous avez de bonnes chances d'obtenir les dispenses dont vous avez besoin de la Maison-Blanche.
    Merci de nous avoir fait part de ce point de vue.
    Monsieur Agnew, avez-vous quelque chose à ajouter à la question?
    Mme Greenwood a très bien résumé le fait d'avoir un partenaire américain qui travaille de concert avec vous, alors il y a une discussion à l'échelle locale également.
    Je dirais seulement, pour revenir à votre point initial sur l'ACEUM, que nous sommes maintenant rendus au point où il n'y a aucune couverture des marchés publics en conséquence. Nous comptons seulement sur l'Accord sur les marchés publics de l'OMC pour avoir accès aux marchés publics.
    Merci.
    C'est tout ce que j'avais à dire, monsieur le président.
    Je vois que M. Hoback a la main levée. Je veux m'assurer qu'il reste quelques minutes à la réunion pour lui.
    Allez-y, monsieur Hoback.
    Je n'ai qu'une question.
    Madame Greenwood, vous pouvez peut-être m'aider à répondre à cette question.
    Si le projet de la canalisation 5 était interrompu, comment les États-Unis pourraient-ils s'en sortir seuls avec leur initiative d'achat aux États-Unis? Comment pourraient-ils mener à bien ce projet? Ce sera déjà assez difficile pour eux d'y parvenir seuls avec leur propre canalisation 5 en service, mais si elle ne fonctionne pas, c'est toute la région des États-Unis qui ne fonctionne pas. Comment peuvent-ils aller de l'avant?
    Il vous reste 30 secondes ou moins, madame Greenwood. Nous sommes à court de temps.
    C'est tout à fait exact. Je souscris à la prémisse de la question. Je ne sais pas comment les États-Unis pourraient faire cela dans ce scénario.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Je sais, madame Greenwood, que vous devez vraiment quitter à cinq heures, alors je veux respecter ce délai.
    Je tiens à remercier tous les témoins de nous avoir donné tous ces renseignements, de nous faire part de leurs différents points de vue et de nous aider à approfondir cette question.
    Merci beaucoup, tout le monde, et merci encore une fois aux témoins du temps qu'ils nous accordent.
    La séance est levée. Bonne semaine, tout le monde.
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