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AFGH Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur l'Afghanistan


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 février 2022

[Enregistrement électronique]

(1850)

[Traduction]

    La séance est ouverte en mode public.
    Nous reprenons la 5e séance du Comité spécial sur l'Afghanistan, qui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre pris par la Chambre le 25 novembre 2021.
    Je rappellerai à toutes les personnes présentes dans la pièce de suivre les recommandations des autorités sanitaires et les directives émises par le Bureau de régie interne le 19 octobre 2021 afin de rester en santé et en sécurité.
    Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en aviser, puisque nous pourrions devoir suspendre la séance quelques instants pour assurer la participation pleine et entière de tous les membres.
    Je tiens à ce que les témoins sachent qu'ils peuvent obtenir des services d'interprétation en cliquant sur l'icône en forme de globe figurant au bas de leur écran, et en choisissant le français ou l'anglais.
    Au nom des membres du Comité, je voudrais souhaiter la bienvenue aux témoins à la séance de ce soir.
    Tout d'abord, nous recevons Mme Wendy Long, directrice d'Afghan-Canadian Interpreters. Nous entendrons également M. David Theodore Lavery, qui témoigne de très bon matin à titre personnel depuis la Turquie. Nous recevons enfin Eleanor Taylor et le directeur exécutif Brian Macdonald, d'Aman Lara.
    Tout le monde est là. Bienvenue. Chaque groupe de témoins dispose de cinq minutes pour présenter un exposé. Portez attention à votre temps.
    Nous commencerons par Mme Long.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Afghan-Canadian Interpreters, ou ACI, est un groupe communautaire de bénévoles formé il y a cinq ans, initialement pour soutenir un interprète. Une page Facebook a été créée à l'appui de cet effort, et je n'ai pas tardé à comprendre qu'il n'existait pas de réel moyen de faire venir ces alliés au Canada.
    En 2017, j'ai pris contact avec un cabinet d'avocats spécialisés en immigration, lequel a présenté gratuitement deux demandes pour circonstances d'ordre humanitaire. En 2019‑2020, j'ai présenté une demande de parrainage privé pour un autre interprète, ainsi que trois autres demandes pour de jeunes Afghans vulnérables en Indonésie.
    En novembre 2018, j'ai lancé une campagne de rédaction de lettres adressées au ministre Hussen, que j'ai annoncée sur la page Facebook. Red T, qui représente plus de 140 000 traducteurs et interprètes du monde entier, a également écrit de nombreuses lettres ouvertes pour demander au Canada d'instaurer un processus. Alors que progressaient les pourparlers de paix à Doha, les demandes pour un processus d'immigration ont augmenté et d'anciens combattants ont commencé à exprimer des préoccupations pour les personnes laissées derrière. Certains d'entre eux ont dépensé des milliers de dollars pour tenter de faire venir des interprètes ici, en vain. Cela a fait augmenter leur anxiété .
    Je compile des dossiers depuis 2018, et quand M. Powlowski a communiqué avec moi en janvier 2021, j'en avais constitué plus de 22.
    Je voudrais remercier M. Powlowski et Robert St. Aubin de leur travail extraordinaire et des efforts et de la détermination qu'ils déploient sans relâche à cet égard. Nous avons travaillé tous les deux avec diligence, ACI constituant des dossiers et les envoyant à M. St. Aubin pour entamer des démarches. Le nombre de bénévoles a lentement augmenté au sein d'ACI, et l'attention des médias s'est accrue alors que la situation continuait de se détériorer en Afghanistan. Le Canada n'avait toujours pas de processus, même si le temps filait impitoyablement.
    En mai 2021, ACI a lancé l'initiative d'aide à la réinstallation des interprètes canado-afghans. Le 1er juin, une lettre ouverte a été envoyée au nom d'ACI et de 15 autres groupes internationaux de défense des droits de la personne au premier ministre, ainsi qu'aux ministres Mendicino, Garneau et Sajjan, et à d'autres chefs d'État de pays membres de l'OTAN.
    La semaine suivante, nous avons eu notre première rencontre avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC. Lors de cette rencontre dirigée par M. Powlowski, nous avons souligné qu'il faut disposer de moyens rapides et efficaces de réaliser une évaluation initiale des gens, puis appliquer un processus plus exhaustif au Canada ou ailleurs, faisant remarquer que les gens n'avaient pas de temps ou d'argent pour obtenir un passeport s'ils n'en avaient pas déjà un. Nous avons donc recommandé un processus s'apparentant à celui utilisé pour les réfugiés. La plupart des demandeurs n'ayant pas accès à un ordinateur portable ou à une imprimante, le processus devrait s'effectuer au moyen d'un téléphone cellulaire, puisque toute autre méthode exposerait le demandeur au vol d'identité, à la fraude ou à la mort.
    La famille élargie des nouveaux et anciens demandeurs dans le cadre des mesures spéciales d'immigration et tous les membres à charge de la famille devaient être inclus dans le processus, puisque de nombreux ménages comprennent des parents veufs, des nièces et des neveux de parents décédés ou des sœurs célibataires. En juin, nous avons renforcé nos efforts d'accueil avec notre propre formulaire de demande et notre propre demande de documents. Au 1er juillet, nous avions 117 dossiers de demandeur principal, et ce chiffre augmentait quotidiennement.
    Enfin, le 22 juillet, un processus a été annoncé. Il s'agissait du processus le plus généreux et le plus complet adopté parmi les pays membres de l'OTAN. Le 28 juillet, des demandes ont été envoyées par courriel. S'en est suivi une panique en raison du délai de 72 heures. Des centaines d'anciens combattants sont passés à l'action pour aider leurs alliés afghans à remplir leurs formulaires. Nous avons mobilisé des groupes comme Northern Lights Canada et un vaste réseau, faisant même appel à des réfugiés afghans en Indonésie.
    Le personnel de l'ambassade et d'IRCC a travaillé avec diligence et fait tout ce qu'il pouvait avec les outils et les instructions qu'il avait reçus. Malheureusement pour bien des gens, le Canada avait accordé trop peu de temps pour faire le travail correctement. L'Afghanistan est tombé aux mains des talibans le 15 août, mettant fin à tout espoir d'une évacuation rapide, mais ordonnée, et des milliers de gens sont encore une fois restés derrière.
    ACI formule les recommandations suivantes: dans l'avenir, il faut trouver des solutions biométriques efficaces; traiter en urgence les arriérés de courriels et de demandes qui n'ont pas encore reçu de réponse; éliminer l'exigence voulant que toute personne présentant une demande dans le cadre des mesures spéciales d'immigration doive avoir été en Afghanistan le 22 juillet ou après; trouver des moyens efficaces et cohérents pour faire venir les gens sans passeport; et déclarer le statut prima facie des Afghans à l'extérieur de l'Afghanistan afin de faciliter les parrainages privés et accroître le nombre de signataires d'entente de parrainage.
(1855)
    En terminant, la communication et la collaboration continuent de croître entre IRCC, Affaires mondiales Canada, les Forces armées canadiennes et des organisations comme Aman Lara et ACI. L'augmentation marquée des évacuations réussies montre que cette collaboration est efficace et est essentielle à l'atteinte de nos objectifs.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Long. Vous avez parfaitement respecté le temps accordé.
    Nous entendrons maintenant Aman Lara.
     Madame Taylor, monsieur Macdonald, vous disposez de cinq minutes à vous deux.
    Voie protégée, ou Aman Lara, est un organisme sans but lucratif composé d'anciens combattants, d'anciens interprètes et de bénévoles qui aident les gens à quitter des régions dangereuses.
    En pachtou, « aman lara » signifie « voie protégée ». Notre organisme a été créé au cœur de la crise par un ancien combattant, Drummond Fraser, et son chef interprète, Zabihullah Hamdard.
    Nous existons parce que le Canada a besoin d'une organisation pour appuyer l'évacuation des Afghans, tant ceux qui ont aidé nos efforts de guerre que ceux qui ont travaillé à nos côtés pour faire progresser les principes démocratiques du Canada. Il est inacceptable d'abandonner ces gens dans une situation désespérée aux mains des talibans. Nous devons rétablir notre honneur national et permettre à ces gens de venir au Canada. Chaque vie sauvée constitue une victoire.
    Depuis sa création, Voie protégée a aidé près de 2 000 Afghans à échapper aux talibans. Ce mois‑ci seulement, nous avons évacué 79 familles, pour un total de 449 personnes. Toutes ces vies sont précieuses et chaque personne pourrait rendre le Canada plus fort.
    La situation en Afghanistan est instable, mais à l'heure actuelle, c'est le processus et non les talibans qui entrave les efforts d'évacuation.
     Nous collaborons étroitement avec le gouvernement du Canada. Nous ne faisons venir que les gens qui ont une voie d'accès au Canada et qui sont approuvés par IRCC. Une fois cette approbation obtenue, nous évacuons les gens la semaine même. Pourtant, notre liste comprend plus de 10 000 personnes coincées en Afghanistan. Plus de la moitié d'entre elles ont présenté une demande, mais n'ont pas encore reçu de réponse du gouvernement du Canada. Nous ne pouvons envisager de les faire venir avant qu'elles ne soient dans le système d'IRCC.
    Chacune des 5 000 autres personnes qui sont dans le système d'IRCC doit franchir au moins une étape supplémentaire dans le processus pour pouvoir venir. L'étape cruciale est la confirmation de l'identité par biométrie. Il s'agit d'une vérification de sécurité essentielle qui vise à confirmer que les demandeurs sont bien la personne qu'ils affirment être. Comme le gouvernement du Canada n'a aucune présence en Afghanistan, le seul moyen de confirmer son identité consiste à se rendre dans un pays tiers. Dans l'impossibilité de confirmer l'identité en Afghanistan, les demandeurs ont besoin d'un passeport et d'un visa pour se rendre dans un pays tiers pour faire confirmer leur identité. Voilà qui ajoute deux étapes qui dépendent de deux gouvernements étrangers, avec toute la bureaucratie, les retards et les risques que cela sous-entend.
    Les deux tiers de nos gens ne possèdent pas de passeport. Pour en obtenir un, les Afghans doivent pour ainsi dire déclarer aux talibans qu'ils veulent leur échapper. Imaginez: vous tentez de fuir les talibans, mais vous devez vous rendre dans un bureau contrôlé par eux et leur fournir votre nom, les noms des membres de votre famille, votre adresse et les empreintes digitales et les photos de votre famille. Cette situation expose les gens à un grand danger. En outre, l'obtention d'un visa dans un pays tiers représente un autre obstacle, qui expose les familles à un autre niveau de risque. La démarche peut aussi exiger beaucoup de temps et d'argent.
    Si nous trouvons un moyen de confirmer l'identité en Afghanistan, nous pouvons escamoter l'étape du passeport et du visa et éviter l'intervention de gouvernements étrangers que nous ne pouvons pas contrôler. Sans ces obstacles, Aman Lara pourrait faire venir le quart de sa liste presque immédiatement. Nous pourrions faire venir 2 500 personnes directement au Canada, éliminer les retards accumulés et libérer des ressources du gouvernement pour traiter les 7 500 dossiers restants.
    Notre grande priorité consiste à trouver un moyen de confirmer l'identité en Afghanistan. Le gouvernement du Canada doit travailler avec nous pour trouver une solution.
(1900)
    Un autre groupe important est coincé en Afghanistan: celui des gens qui ont mis leur sécurité en péril pour faire progresser les principes démocratiques du Canada. Il s'agit de dirigeantes, de défenseurs des droits de la personne, de journalistes et de personnes ayant aidé des journalistes canadiens, de la communauté LGBTQ et de membres de minorités ethniques et religieuses persécutées en Afghanistan. Même pour présenter une demande au Canada, ces personnes doivent être à l'extérieur de l'Afghanistan et être inscrites à titre de réfugiées. L'ennui, c'est qu'elles ne peuvent pas quitter l'Afghanistan et sont prises dans une impasse inimaginable. Nous devons trouver un moyen de les faire venir au Canada.
    Tournons maintenant notre attention à ce qu'il se passe en Ukraine. Nous avons été choqués par l'invasion russe non provoquée, mais nous sommes encouragés de voir les extraordinaires mesures d'immigration souples qu'IRCC a mises en place. Contrairement à ce qui est exigé pour les Afghans, les familles ukrainiennes n'ont pas besoin d'avoir le statut de réfugié pour venir au Canada, puisqu'on utilise des permis de séjour temporaire et des formulaires de voyage simple pour contourner les obstacles que contiennent les politiques. Ces mesures devraient être appliquées en Afghanistan. Les mécanismes existent, alors utilisons-les.
    En conclusion, nous présentons trois demandes au gouvernement; travailler avec nous pour trouver un moyen de confirmer l'identité en Afghanistan; répondre aux nombreux demandeurs dont la demande n'a pas encore été accueillie; et appliquer en Afghanistan les mesures d'immigration envisagées pour l'Ukraine.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Macdonald et madame Taylor.
    Nous entendrons maintenant M. Lavery, qui se trouve en Turquie.
    Je vous remercie de témoigner aujourd'hui. Vous avez la parole pour exactement cinq minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président et honorables membres du Comité spécial.
    Je m'appelle David Lavery, ancien sous-officier des Forces armées canadiennes. Après avoir pris ma retraite en janvier 2000, j'ai travaillé pour le Département de la sûreté et de la sécurité des Nations unies, où j'ai été appelé à intervenir avec une équipe spéciale après les attentats du 11 septembre, dans la foulée desquels nous avons fourni de l'aide humanitaire pendant cinq ans dans ce pays.
    J'ai pris ma retraite pour aller travailler dans le secteur privé. En 2010, je suis retourné en Afghanistan pour soutenir une grande entreprise canadienne d'atténuation des risques appelée Canpro. Nous avons offert du soutien holistique à la vie. Pendant 11 ans, nous avons pu faire profiter de nombreux clients et organismes de charité de notre expertise dans un grand nombre de domaines.
    Au début de juillet, j'ai été approché par plusieurs personnes que vous connaissez pour les avoir entendues témoigner — le Réseau de transition des vétérans, ACI, les généraux et maintenant Aman Lara et de nombreux autres intervenants. Ils m'ont demandé si je serais en mesure de soutenir l'initiative canadienne et la stratégie ciblée avec des mesures d'atténuation des risques, des troupes sur le terrain, du soutien, des installations sécuritaires et bien plus. Mon équipe s'est immédiatement mise à l'œuvre, travaillant sans relâche pour tenter d'amener les familles en lieu sûr et apportant de l'aide. Dans la plupart des cas, ces familles étaient très menacées par les talibans.
    Le 15 août, l'Afghanistan est tombé, comme nous le savons. Les talibans sont entrés dans la ville sans le moindre coup de feu. Le mythe et la croyance du mal absolu que tout le monde avait à l'esprit ont provoqué des événements catastrophiques d'une ampleur sans précédent. La panique et le désespoir sans fond ont créé une situation désespérée à tous les égards. Les temps désespérés donnent lieu à des mesures désespérées, comme nous l'avons tous constaté. C'est la pire expérience que j'ai vue de ma vie.
    Il y a quelques observations que je voudrais formuler.
    D'abord, les membres de l'équipe de soutien ont commencé leur travail avec cœur avec leurs partenaires pour se préparer à l'inévitable: l'évacuation des demandeurs afghans. Les membres de notre équipe ont tenté à maintes reprises de prendre contact avec Affaires mondiales Canada, IRCC et les Forces armées canadiennes au Canada pour offrir du soutien, les informer de la situation et leur proposer leurs capacités, suscitant une réponse et un intérêt tièdes ou nuls. À Kaboul, j'ai fait les mêmes tentatives auprès de l'ambassade du Canada et des représentants d'Affaires mondiales Canada, sans susciter d'intérêt ou de préoccupation. L'absence d'intérêt ou de volonté à mobiliser nos actifs à tous les échelons a eu des conséquences importantes.
    En outre, il n'y avait aucun représentant de l'ambassade du Canada sur le terrain. L'absence de l'ambassadeur et de son équipe a eu une incidence grave sur la capacité d'évacuer les demandeurs canado-afghans et leurs familles.
    De plus, je suis fier de l'armée canadienne et je suis certain qu'il y a un moyen d'expliquer pourquoi elle n'était pas sur le terrain à l'avance pour soutenir notre processus d'évacuation en temps opportun. Il n'y a eu aucun membre des Forces armées canadiennes dans notre région avant le soir du 20. D'après mes observations personnelles, il semble que notre présence militaire disposait de capacités limitées, dans la région où j'étais posté, du moins. Cette capacité semblait limitée, comme si quelqu'un la restreignait.
    À cela s'ajoute un manque de communication. Avec un groupe d'experts composé d'anciens combattants et d'autres intervenants qui apportaient du soutien dans une des pires crises de l'histoire moderne, pourquoi les Forces armées canadiennes, Affaires mondiales Canada, IRCC et l'ambassade du Canada à Kaboul n'ont-ils pas exploité ces personnes et ces organismes fiables et dignes de confiance? Qui entreprend une opération sérieuse sans faire appel aux entités connues déjà sur place?
    Aussi, j'aimerais savoir pourquoi le gouvernement du Canada a refusé d'évacuer ma conjointe ce soir‑là quand l'armée canadienne est intervenue. Il nous — et je dis « nous » — a alors placé dans une situation très inconfortable. J'étais là pour appuyer l'évacuation, et voilà qu'on voulait me faire sortir du pays sans que ma conjointe soit sur le vol.
    En conclusion, si je m'attarde au temps que j'ai passé en Afghanistan, c'est parce que c'est important pour comprendre les ressources et les capacités qui étaient présentes sur place et que le gouvernement n'a jamais utilisées. Malheureusement, alors que nous observions les événements et aidions de notre mieux avec les ressources dont nous disposions, nous avons travaillé séparément des Forces armées canadiennes, d'Affaires mondiales Canada et d'IRCC pendant ces terribles journées. La synergie, l'expertise... Les résultats auraient été différents si nous avions travaillé ensemble. Il faut tirer des leçons de cette expérience. Nous avons prouvé notre valeur, nos capacités, notre crédibilité et notre détermination. Le gouvernement doit investir dans des partenaires professionnels de valeur, comme Aman Lara et ACI, pour continuer de soutenir les familles afghanes laissées derrière.
    Je vous remercie beaucoup.
(1905)
    Je vous remercie, monsieur Lavery. Vous nous avez permis d'économiser quelques secondes.
    Nous entamerons immédiatement le premier tour de questions en accordant la parole à notre collègue conservateur, M. Ruff, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, j'offre mes remerciements à tous nos témoins ce soir. Wow. Le Canada et l'Afghanistan vous doivent à tous une fière chandelle pour tout ce que vous avez fait depuis le premier jour.
    Madame Long, tout votre travail remonte à très loin.
    Monsieur Lavery, ma première question est pour vous, compte tenu de votre expérience. Je veux que vous donniez un peu plus de contexte sur les signaux... Nous savions ce qui s'en venait et nous aurions dû être mieux préparés pour commencer l'évacuation rapidement.
    Pouvez-vous en parler, s'il vous plaît?
    Oui, nous aurions dû être mieux préparés, et nous avons fait de notre mieux collectivement. C'est ce qui nous a tous pris au dépourvu. Nous attendions l'inévitable. Pourquoi les hauts dirigeants et le gouvernement n'en ont-ils pas fait autant? Les signaux étaient là. Tout le monde les voyait. Nous en parlions en juillet. Mme Long et son équipe militaient en ce sens des années avant cette situation.
    Les signaux étaient là. Nous ne comprenons tout simplement pas. Les généraux de haut rang dans nos équipes, nos parrains et tous les autres anciens combattants de grade supérieur que vous regardez maintenant ont pris la parole à maintes reprises et à de nombreux niveaux, pour essayer de retenir l'attention des gens. Nous avons presque été traités comme une entité malhonnête.
    Les signaux étaient là. Les Afghans ont eux-mêmes... Vous pouviez voir l'économie et le système bancaire. Vous pouviez voir ce qui se passait à Kaboul à ce moment‑là. Souvenez-vous que le gouvernement commençait à se fragiliser. Cela se déroulait sous nos yeux. D'autres pays et l'ambassade canadienne en Afghanistan ne voulaient pas dialoguer avec notre équipe à ce moment‑là. L'armée canadienne ne voulait pas nous écouter.
    Nous pouvions voir les signaux. Pourquoi les autres ne les voyaient-ils pas? Je suppose que je dois m'arrêter et peut-être laisser mes collègues intervenir.
    Merci, monsieur Lavery. Je vais m'adresser à Mme Long et poursuivre dans la même veine.
    Vous avez parlé dans vos recommandations de l'importance de la collaboration entre IRCC, les Forces armées canadiennes, Affaires mondiales Canada et des ONG comme les vôtres ainsi que tous les autres intervenants. L'un des points soulevés par d'autres témoins était le manque de coordination, l'absence de ministère responsable et le manque de répercussions que l'ambassade a essentiellement fait remarquer très tôt, ainsi que le manque de leadership.
    Pouvez-vous dire qui devrait se charger du dossier à l'avenir? Quelles sont les conséquences, puisque vous suivez la situation depuis le premier jour, de l'absence de coordination en août?
(1910)
    Je ne peux pas dire quelle entité devrait être responsable, mais quelqu'un devrait s'occuper de la communication. Cela devrait être un travail d'équipe.
    Les Forces armées canadiennes sont responsables de confirmer qui, dans les faits, a travaillé pour notre ministère de la Défense nationale et l'a aidé. L'ambassade sait qui a travaillé pour elle. IRCC est l'entité qui, au bout du compte, décide qui vient au Canada, et il faut assurer efficacement la liaison avec les ONG et dans la gestion des dossiers, ainsi qu'avec d'autres entités comme Affaires mondiales Canada et les Forces armées canadiennes.
    Toutes ces entités doivent collaborer efficacement, et ce n'est pas ce qui s'est produit depuis le début. Il n'y a pas eu de partenariat efficace. Ces trois entités n'ont pas vu cela comme une mission à laquelle elles devaient toutes participer dans le but de faire revenir nos ressortissants au Canada.
    Dans vos recommandations, vous avez aussi parlé de l'absence de réponse d'IRCC, et vous avez dit que des gens ont envoyé des courriels.
    Pouvez-vous répéter le chiffre? Combien d'Afghans, approximativement, n'ont pas encore reçu de réponse du gouvernement du Canada ou d'IRCC?
    Je vais devoir céder la parole à Mme Taylor. Je crois que M. Macdonald a dit que c'était facilement 50 % de ces personnes qui n'ont pas reçu de réponse d'IRCC.
    En effet. Cinquante-deux pour cent des gens dans notre système — il y en a environ 10 000 — n'ont pas encore reçu d'avis de réception de leur demande.
    Merci, madame Taylor. Merci encore pour votre leadership.
    Ma dernière question est pour vous et M. Macdonald. C'est pour donner suite à ma question précédente au sujet de l'entité qui devrait diriger le dossier, surtout pour résoudre la question des services de biométrie dans le pays. C'est sans aucun doute la question essentielle à régler pour évacuer des gens.
    Merci, monsieur Ruff.
    Une collaboration est nécessaire. À Aman Lara, nous essayons de trouver une solution. Les ONG peuvent en faire partie. Je pense qu'il y a des moyens de vérifier l'identité en Afghanistan. Nous sommes impatients de travailler avec le gouvernement du Canada, peut-être par l'entremise de votre comité, pour présenter ces solutions.
    Merci beaucoup, monsieur Ruff, pour vos questions.
    Nous passons maintenant à M. El‑Khoury, pour six minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos invités, les témoins.
    Ma question s'adresse à M. Macdonald.
    La situation en Afghanistan n'est pas une situation normale. Pouvez-vous dire au Comité si, d'après votre expérience, des pays offrent les services de biométrie dans le pays lui-même?

[Traduction]

    De toute évidence, ce sont des renseignements très délicats. Je sais que c'est une tribune publique, mais je vais dire ce qui suit. Aman Lara s'est adressé à d'autres entités canadiennes qui ont établi des dossiers de sécurité avec le gouvernement du Canada. Par exemple, presque la moitié des membres de notre personnel sont d'anciens militaires, ce qui signifie qu'ils avaient une cote de sécurité très élevée à un moment donné. Des solutions peuvent être trouvées. Je pense que nous pouvons offrir ces services en Afghanistan.
    Il est un peu difficile pour le gouvernement du Canada de recourir directement à la sous-traitance, mais je pense que des organismes comme les nôtres, des ONG qui peuvent mener leurs activités en Afghanistan, pourraient peut-être recueillir ces renseignements et les remettre au gouvernement du Canada dans un format sécurisé, en utilisant l'équipement et les cotes de sécurité qui s'imposent, afin d'offrir un niveau de service élevé.
    C'est le genre de chose que nous proposons. Nous espérons que le gouvernement du Canada donnera suite à notre offre.
(1915)

[Français]

    Nous avons eu une belle expérience dans le cas des réfugiés syriens. C'était beaucoup plus facile pour le gouvernement canadien, parce que les Syriens étaient à l'extérieur de leur pays. Or, c'est le contraire pour ce qui est de l'Afghanistan.
    D'après vous, y a-t-il des pays qui autorisent l'entrée de personnes sans visa ou sans passeport?

[Traduction]

    Tout à fait. On a recours à certains pays. Ce sont des pays tremplins. Par exemple, les Émirats arabes unis offrent des services aux sans-papiers, qui arrivent de l'Afghanistan et se rendent à des endroits comme Dubaï, où il y a un village humanitaire spécial. Le problème, c'est que beaucoup de personnes l'ont déjà fait. Dans le cas de Dubaï, le village humanitaire est plein. Il est plein de personnes qui ne semblent pas trouver un moyen de se rendre dans un autre pays. On a donc cessé d'accepter des gens. C'est la difficulté à laquelle nous faisons face.
    À Aman Lara, nous cherchons tous les moyens possibles pour faire sortir des gens de l'Afghanistan, mais nous devons nous assurer d'avoir un passage vers le Canada. C'est pour cette raison qu'il est si important de vérifier leur identité et d'obtenir une approbation totale avant qu'ils partent de l'Afghanistan.
    Ces pays tiers existent. Nous les envisageons comme des avenues, mais ils sont pleins dans la plupart des cas. D'ici à ce que les gens qui sont là partent, nous ne pouvons pas ajouter plus de monde dans le système. C'est le problème auquel nous faisons face.

[Français]

    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Eleanor Taylor.
    Y a-t-il eu des cas où des vols ont été annulés?

[Traduction]

    Je vais demander des précisions. Quels... Il y en a peut-être eu. Je n'ai pas de vol précis en tête. Je ne sais pas.

[Français]

    Pourquoi les talibans garantissent-ils la sécurité des officiers canadiens ou des contractants qui sont envoyés dans leur pays pour faire la biométrie?

[Traduction]

    La question est-elle encore pour moi?
    Oui, s'il vous plaît.
    Nous ne communiquons certainement pas directement avec les talibans, et nous ne pouvons pas laisser entendre qu'ils garantissent quoi que ce soit. Ce que nous pouvons dire — et M. Lavery pourrait le confirmer —, c'est que nous réussissons fort bien, avec l'aide des ressources de Raven Rar et de son équipe, à nous déplacer en Afghanistan. Des mécanismes nous permettent d'y faire entrer des gens et d'en faire sortir, ce qui signifie que l'idée de mettre sur pied une équipe qui assumerait le rôle décrit par M. Macdonald est tout à fait possible, selon notre expérience très solide.

[Français]

    Monsieur Lavery, quand vous étiez là-bas pour des opérations, les talibans étaient-ils au pouvoir ou non?
    Selon votre expérience, que peut-on faire présentement pour mieux assurer la sécurité des femmes en Afghanistan?

[Traduction]

    C'est là que cela se corse, mais permettez-moi de répondre rapidement.
    Oui, les talibans — l'autorité de facto en Afghanistan — exercent actuellement un contrôle total sur tout à ce stade‑ci, et la répression se poursuit.
    Quelle est la meilleure façon de soutenir les femmes qui se trouvent encore en Afghanistan? Encore une fois, je pense que ce sera au moyen d'une intervention politique. Nous allons devoir faire preuve d'un haut niveau de détermination diplomatique, en faisant immédiatement pression sur le gouvernement de facto pour tenter de lui demander des comptes. Il est encore sous les projecteurs. Il l'est en ce moment même. Cependant, nous voyons les efforts de guerre en Ukraine, et il y aura un effet dynamique sur l'Afghanistan.
    Merci beaucoup, monsieur Lavery.
    Merci, monsieur El‑Khoury. Vous avez parfaitement respecté le temps alloué.
    Nous allons passer à mon cher collègue du Bloc, M. Brunelle-Duceppe, pour six minutes.
(1920)

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Chers témoins, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Je vous remercie de ce que vous avez fait, de ce que vous continuez à faire et de ce que vous allez faire, dans un avenir rapproché, pour la population afghane.
    Notre comité est très important. Nous mettons l'accent sur la crise humanitaire actuelle. Nous examinons ce que l'on peut faire présentement et à très court terme.
    Plusieurs représentants d'ONG qui sont venus témoigner devant le Comité nous ont mentionné à quel point il était difficile de faire leur travail, par exemple acheminer des produits et offrir des services humanitaires en Afghanistan. Entre autres difficultés, puisque les talibans sont considérés comme une entité terroriste, les ONG qui font affaire avec eux pourraient être poursuivies en vertu du Code criminel canadien. Ce n'est quand même pas de leur faute; si elles veulent faire leur travail, elles doivent bien faire affaire avec eux.
    Il y a deux semaines, j'ai déposé une motion qui demandait au gouvernement d'assurer aux ONG qu'elles ne seraient pas poursuivies. Cela leur aurait permis de jouer leur rôle de coopération et d'assistance humanitaire dans les zones les plus menacées. Malheureusement, le Parti libéral, qui est d'ailleurs très bien représenté ici, a refusé d'adopter ma motion.
    Je me demande quel message cela a envoyé aux ONG qui sont sur le terrain.
    J'aimerais entendre, dans cet ordre, les réponses de M. Macdonald, de Mme Taylor, de Mme Long et de M. Lavery.

[Traduction]

    Vous avez parfaitement raison. Il est certainement difficile de faire affaire avec les talibans ou d'offrir une aide en Afghanistan, car il s'agit d'une organisation terroriste reconnue. Je ne suis pas avocat. Je ne peux pas parler des détails juridiques. Ce que je peux vous dire, c'est que nous menons des opérations malgré les talibans, et nous faisons de notre possible pour assurer la sécurité des gens dans le pays. Nous respectons la loi et nous faisons sortir des personnes du pays. Pour ce faire, nous travaillons étroitement avec le gouvernement du Canada. En ayant ces principes à l'esprit, nous assurons la sécurité de nos gens et nous nous assurons de pouvoir les sortir du pays.
    Madame Taylor, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Mme Eleanor Taylor: Non.
    Le président: Madame Long, allez‑y, s'il vous plaît.
    Afghan-Canadian Interpreters ne fait pas directement... et n'a jamais donné la moindre somme ou mené des opérations dans le pays. Même si nous comprenons comment la législation peut lier les mains des ONG, je ne suis pas en mesure de parler de ce qui doit être fait pour faciliter leur travail à cet égard.
    Monsieur Lavery, allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup. C'est un dossier chaud d'entrée de jeu, mais je peux assurer au Comité que tous nos membres — ceux qui soutiennent l'équipe de gestion des biens — se gouvernent à l'aide de pratiques exemplaires. Nous ne donnons pas de financement direct au gouvernement de facto. Nous ne pouvons pas le faire à ce stade‑ci. Nous ne le ferons pas.
    Pour ce qui est de l'aide et du travail humanitaires, ainsi que des fonds et du développement en ce sens, nous savons que les Nations unies reçoivent un soutien du gouvernement de facto pour escorter ses articles de charité et ses aliments afin de les acheminer sur le terrain. Cela se fait à d'autres niveaux.
    Je suis retourné dans le pays en décembre, et j'ai rencontré beaucoup de membres du ministère de l'Intérieur du gouvernement de facto, des forces policières et ainsi de suite. Ils ne demandent jamais un financement direct ni autres choses du genre. Nous n'en sommes pas arrivés là. C'est un aspect délicat dont nous devons tous être conscients. Je pense que nous devrions l'étudier de manière plus approfondie du point de vue du gouvernement.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez deux minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Lavery, votre témoignage m'a touché droit au cœur. J'aimerais vous poser deux questions.
    D'abord, qu'est-ce qui vous déçoit le plus du gouvernement relativement à la crise afghane? Ensuite, quelles recommandations ce comité devrait-il faire pour aider dès maintenant les gens sur le terrain?

[Traduction]

    Ma plus grande déception serait de laisser derrière toutes les personnes qui n'ont pas à rester là. Nous avons laissé énormément de personnes derrière. Je l'ai observé sur place pendant 12 jours et j'ai travaillé avec tous les autres témoins pour tenter de faire sortir le plus grand nombre possible de personnes, et j'ai vu une situation que nous aurions dû mieux maîtriser. Je pense que notre gouvernement aurait pu faire mieux. Nous aurions dû établir un dialogue, comme d'autres témoins l'ont mentionné.
    Nous aurions dû avoir une meilleure coordination, ainsi qu'une meilleure planification et la nomination d'une organisation tout indiquée. Je ne veux pas nous vanter, mais je peux vous dire que cela fonctionne en ce moment. Nous sommes les seuls à faire sortir des gens comme nous le faisons. Donnez-nous l'occasion d'en faire sortir plus. Travaillez avec nous et nous allons travailler avec le gouvernement. C'est le message primordial en ce moment.
    Nous pouvons le faire. Nous montrons que nous pouvons le faire. Nous avons besoin de soutien. Nous ne devrions pas faire le gros du travail seuls. C'est un événement collectif. L'objectif est de faire participer tout le monde.
    Ce n'est plus une phase d'évacuation. Nous faisons sortir des gens. La crise est passée, et nous craignons maintenant qu'elle se déplace ailleurs.
(1925)
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous avez six secondes. À vous de décider. Il ne vous reste que six secondes.

[Français]

    Monsieur Lavery, pensez-vous que nous allons accueillir 40 000 réfugiés afghans d'ici l'an prochain, comme le gouvernement l'a promis?

[Traduction]

    Si vous laissez Aman Lara et nous faire le travail, oui, nous les aurons.
    Merci beaucoup, monsieur Brunelle-Duceppe.
    Nous passons maintenant à notre dernière députée pour cette série de questions.
    Madame Kwan, vous avez six minutes, s'il vous plaît. Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins pour les services que vous rendez et vos efforts soutenus.
    J'aimerais poser ma question à tous les témoins. Vous avez tous dit que vous pouvez prendre des mesures et vous avez parlé à des responsables à ce sujet. Ce que je veux savoir, c'est quand vous leur avez parlé? Qui sont-ils et quelle a été leur réponse?
    Je peux peut-être commencer par Mme Long et suivre ensuite l'ordre de comparution de chaque intervenant.
    Merci, monsieur le président.
    On commence par s'adresser à son député. Le mien savait très bien que j'avais milité pour un seul interprète afghan et que je l'ai ensuite fait pour d'autres.
    En janvier 2019, j'ai préparé une lettre et une demande de différents anciens combattants et membres actuels des forces armées pour que mon député la remette au ministre Hussen, qui était ministre à l'époque. Ils demandaient une réunion avec lui ou une personne-ressource. Cela n'a rien donné. J'ai fait un suivi le mois suivant, et il n'y avait aucune réponse du ministre ou de quelqu'un d'autre au ministère.
    Dans le cas d'IRCC, il fallait que ce soit la personne-ressource. Aucune politique n'existait pour faire venir ces personnes, et une décision en matière de politique publique s'imposait. Compte tenu des mesures d'immigration en vigueur à l'époque, il fallait une nouvelle politique publique ou la mise en œuvre d'une ancienne politique. La discussion devait avoir lieu avec IRCC.
    M. Powlowski a également essayé pendant des années, comme d'autres anciens combattants qui ont soulevé la question en 2006 et en 2007 dans la région de Thunder Bay.
    Monsieur Macdonald, allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Nous nous considérons comme des partenaires du gouvernement du Canada. Nous rencontrons régulièrement des fonctionnaires d'IRCC et d'Affaires mondiales Canada. Nous les rencontrons presque toutes les semaines. De plus, nous avons des réunions hebdomadaires avec des membres du personnel ministériel. Je dois dire que je suis impressionné par l'attention qu'ils nous accordent. Ils nous donnent certainement du temps. Ils écoutent nos demandes. L'information circule bien.
    Nous avons soulevé ces points devant vous ce soir et nous l'avons fait devant eux. Je sais que ces situations sont difficiles. Aucune de ces demandes n'est facile. Nous poursuivons le travail avec eux. Comme ma collègue, Mme Taylor, l'a dit ce soir, nous sommes optimistes lorsque nous voyons les mesures appliquées pour l'Ukraine. Dans ces échanges avec des fonctionnaires et le personnel ministériel, nous allons les diriger dans cette voie. Ils doivent prendre ces mesures pour l'Afghanistan afin que nous ayons un processus à suivre pour traiter ces dossiers humanitaires, plus particulièrement, ainsi que le dossier des sans-papiers.
    Nous avons un bon accès. Nous avons régulièrement de bons échanges avec le personnel. Comme je l'ai dit dès le départ, j'ai bon espoir que nous parviendrons à une solution avec eux pour vérifier l'identité des gens en Afghanistan. Espérons que nous pourrons leur faire franchir la ligne d'arrivée et donner suite à cette option.
    Je tiens à souligner pour Mme Long, qui participe ce soir...
(1930)
    Merci.
    Je vais passer à M. Lavery, car je dois entendre tous les témoins, s'il vous plaît.
    Je vais vous parler de ce qui s'est passé au tout début.
    En juillet, nous avons voulu communiquer avec tous les responsables à l'ambassade canadienne et notamment avec les gens du service de sécurité et les gestionnaires de programme. Nous avons tenté de rejoindre le chargé d'affaires, le chef de mission adjoint. Nous leur avons envoyé un message en même temps qu'à l'ambassadeur. Le plus souvent, et surtout aux premières étapes du processus, ils nous répondaient qu'ils étaient trop occupés et qu'ils n'avaient pas vraiment de temps à nous consacrer. Vous voyez le portrait.
    Nous n'avons pas cessé de revenir à la charge. Nous avons mobilisé notre équipe au Canada pour essayer d'exercer une influence et de provoquer l'étincelle dont nous avions besoin. Je ne sais pas si ces gens‑là étaient surchargés ou préoccupés par d'autres enjeux, mais on n’avait tout simplement pas l'impression qu'il y avait un désir et une volonté d'essayer de travailler avec nous à ce stade… Ils nous ont simplement écartés.
    Je suppose que l'un des éléments qui ont changé la donne pour nous a été ce refus de l'ambassade canadienne de travailler à ce moment‑là non seulement avec moi sur le terrain, mais aussi avec les dirigeants de notre équipe au Canada.
    Je vais en rester là pour l'instant.
    Merci.
    On a fait le parallèle avec l'Ukraine. L'exemption de visa va être essentielle dans le cas de l'Ukraine, et le gouvernement n'a encore rien fait à ce sujet. Je suppose qu'il en va de même dans le cas qui nous préoccupe. Il faut absolument régler la question des données biométriques et renoncer à exiger ces documents pour que les gens puissent quitter l'Afghanistan.
    Dans ce contexte, est‑ce que la priorité pour le gouvernement devrait être de renoncer aux données biométriques ou bien de travailler avec les ONG sur le terrain pour faire le nécessaire afin que ces Afghans puissent se retrouver en sécurité?
    Peut-être pouvons-nous entendre d'abord M. Lavery, puis Mme Long.
    Merci.
    Il reste 30 secondes. Vous pouvez répondre.
    Je dirais très brièvement qu'il faudrait faire les deux à la fois, c'est-à-dire travailler avec les gens sur le terrain, mais aussi mettre en place une exemption en s'assurant toutefois que cela est rendu possible par l'entremise de partenaires fiables sur place.
    Peut-être que l'une de mes collègues pourrait répondre également.
    Pour Aman Lara, la grande priorité serait certes de trouver une façon de confirmer l'identité en Afghanistan. Nous comprenons bien que le gouvernement du Canada a l'obligation de confirmer l'identité de ceux qui veulent quitter le pays. Il y a toutefois une précision que je souhaiterais apporter. Certains croient que le Canada exige un passeport. Le Canada n'exige pas de passeport. Le passeport afghan est requis pour les Afghans qui quittent leur pays en traversant la frontière avec le Pakistan. Ce n'est pas une exigence du gouvernement du Canada. Nous croyons effectivement pouvoir aider, directement ou indirectement, le gouvernement afghan relativement à cette exigence de confirmation de l'identité.
    Merci beaucoup. Les sept minutes sont écoulées. C'est tout le temps que nous avions avec ce groupe de témoins.
    Au nom des députés et de notre comité, je tiens à vous remercier, mesdames Long et Taylor et messieurs Macdonald et Lavery, pour les connaissances et les informations pertinentes que vous avez bien voulu nous transmettre. Nos meilleurs vœux vous accompagnent. Vous pouvez maintenant vous déconnecter.
    Nous allons interrompre la séance quelques instants, le temps que nos prochains témoins se connectent.
(1930)

(1935)
    Nous reprenons nos travaux.
    Je tiens à remercier nos interprètes pour leur excellent travail malgré les difficultés sonores que nous éprouvons.
    Au nom du Comité, je veux souhaiter la bienvenue à nos deux prochains témoins qui comparaissent à titre personnel. Il s'agit de M. Corey Shelson et de M. Stephen Peddle.
    Vous avez droit à cinq minutes chacun pour nous présenter vos observations préliminaires. Si cela vous convient à tous les deux, je vais demander à M. Peddle de commencer.
    Merci encore une fois de m'avoir invité à participer à votre séance de ce soir. Je suis un membre à la retraite des Forces armées canadiennes. Lorsque j'ai quitté les forces, j'étais officier supérieur du renseignement avec le grade de major. J'ai été déployé en Afghanistan pour la première fois à Kandahar en 2007, puis au sein de la Deuxième Force opérationnelle interarmées dans le cadre de l'opération Attention en 2012.
    Lors de ma première affectation là‑bas, j'ai eu le plaisir de faire partie de l'équipe de liaison et de mentorat opérationnel, ou ELMO, sous le commandement du colonel Wayne Eyre, qui a depuis été promu au rang de général.
    J'ai intégré les rangs d'un kandak, un bataillon regroupant quelque 500 Afghans. C'est à ce moment‑là que j'ai rencontré des interprètes afghans. Dans mon rôle de S3 et S2 au sein d'un kandak — soit l'équivalent afghan d'un officier des opérations et d'un officier du renseignement —, il était crucial que je puisse communiquer avec les officiers et les soldats de l'armée afghane ainsi qu'avec les citoyens afghans avec lesquels nous interagissions dans les zones de combat.
    C'est au cours de cette mission que je me suis lié d'amitié avec un gars qui s'appelait Sangeen avec lequel je suis encore en contact aujourd'hui. C'est lui qui a communiqué avec moi l'été dernier pour que je fasse quelque chose pour sa famille qui avait désespérément besoin d'aide en raison de la tournure des événements en Afghanistan. Il faut d'ailleurs noter que sa famille a été d'une aide précieuse pour le Canada. Son frère, qui était également interprète, a travaillé par la suite pour ATCO et KBR. Son père n'était pas interprète, mais plutôt haut gradé dans l'armée nationale afghane. Comme il était colonel, il représentait également une cible de choix pour les talibans.
    C'est donc pour cette raison que Sangeen a communiqué avec moi pour que j'aide sa famille à quitter l'Afghanistan. C'est alors que j'ai commencé à travailler avec ce comité et avec l'équipe d'intervention du gouvernement du Canada qui s'efforçait à ce moment‑là d'évacuer les Afghans avant que la situation se détériore à la fin de l'été 2021.
    Pendant cette période, j'ai eu souvent affaire à IRCC. J'ai eu aussi des contacts avec l'État-major interarmées stratégique des Forces armées canadiennes pour le filtrage des interprètes afghans. J'ai également été en communication avec l'ambassade.
    Je suis intervenu directement pour aider les familles à remplir les formalités administratives en essayant de leur expliquer sur le terrain les exigences à remplir pour pouvoir éventuellement monter dans l'un de ces avions et venir au Canada.
    Il y avait toutes sortes de renseignements contradictoires qui circulaient à l'époque. Je sais, pour en avoir été témoin personnellement, que l'Afghanistan a vécu une période particulièrement chaotique en juillet et août 2021. Ces gens‑là s'adressaient à moi pour que j'intervienne et que je communique avec différents membres de notre gouvernement pour savoir exactement quelles étaient les exigences à remplir afin de franchir l'étape du filtrage et pouvoir immigrer au Canada.
    Pour que les choses soient bien claires, Sangeen est venu s'installer au Canada il y a 10 ans déjà. C'était en février 2012 dans le cadre du programme spécial de réinstallation des interprètes afghans qui a été en place, si je ne m'abuse, entre 2009 et 2012. Ce ne sont pas nécessairement les bonnes dates, mais je sais qu'il est arrivé ici en février 2012. Il a donc vécu au Canada au cours de la dernière décennie, et je suis demeuré en contact avec lui depuis son arrivée au pays.
(1940)
    Merci, monsieur Peddle.
    Nous allons maintenant passer à M. Shelson pour les cinq prochaines minutes.
    Bonsoir à tous. Merci de m'avoir invité à participer à votre séance.
    Je m'appelle Corey Shelson. J'ai servi au sein des Forces armées canadiennes de 2002 à 2015, ce qui comprend un déploiement de huit mois en Afghanistan en 2010 à titre de commandant de troupe de génie de combat.
    Je veux d'abord et avant tout souligner le caractère tragique des événements qui ont cours en Ukraine et témoigner de ma plus vive sympathie pour tous ceux qui sont affectés par les actes brutaux de la Russie. Je veux également exprimer mon admiration pour le président Zelensky et son leadership ainsi que pour les forces armées ukrainiennes qui continuent à se défendre avec courage et bravoure au nom de la liberté.
    Je tiens en outre à exprimer ma reconnaissance à tous les membres des Forces armées canadiennes qui ont servi durant la mission du Canada en Afghanistan, y compris ceux qui ont risqué leur vie pour évacuer des Afghans touchés par la crise.
    Les événements survenus en Afghanistan ne devraient nullement nous surprendre, si ce n'était de la vitesse avec laquelle les talibans ont pris le contrôle du pays. Mon objectif pour ce soir est très simple. Je veux vous faire part de l'expérience que j'ai vécue lors de l'évacuation et dresser, pour la gouverne de votre comité, une liste des défaillances que j'ai pu observer. J'ose espérer que cela vous permettra de pousser plus loin l'analyse des causes profondes afin de pouvoir tirer des enseignements de cette expérience au bénéfice des prochaines opérations d'évacuation de non-combattants.
    J'aimerais d'abord vous citer quelques dates importantes à retenir. Le 1er juillet 2021, je prends connaissance d'un article indiquant que les troupes américaines se sont retirées de l'aérodrome de Bagram. Le 5 juillet, je commence à jouer un rôle actif lorsqu'un interprète avec lequel j'ai travaillé, et qui s'est installé au Canada dans le cadre du programme spécial d'immigration offert entre 2009 et 2012, me demande d'aider sa famille à venir le rejoindre au Canada.
    Le 8 juillet 2021, trois anciens commandants de la force opérationnelle, les généraux Milner, Fraser et Thompson, réclament dans une lettre ouverte l'évacuation immédiate des Afghans laissés sur place.
    Le 23 juillet 2021, Mendicino, le ministre de l'Immigration alors en poste, présente un plan qu'il qualifie de flexible et d'inclusif pour la réinstallation de plusieurs milliers d'Afghans directement affectés. Le 4 août, le premier avion de réfugiés atterrit au Canada. Le 15 août, les talibans prennent le contrôle de Kaboul. Le 30 août, l'évacuation prend fin.
    Nous sommes rendus au 28 février, et un grand nombre, si ce n'est la totalité, des demandeurs que j'ai commencé à aider sont toujours en attente d'une réponse. La plupart n'ont pas encore obtenu leur numéro de dossier G et ne savent toujours pas comment ils pourront se rendre au Canada.
    J'aimerais d'abord vous parler de nos responsabilités à la suite d'une campagne militaire. Il y a une chose qu'il faut bien comprendre. Lorsque le Canada déploie des troupes, notre mission ne prend pas fin lorsque les militaires rentrent au pays. J'estime que notre comportement à ce titre a miné notre crédibilité sur la scène internationale. Rappelez-vous que l'on ne peut pas refaire l'histoire et que les gens se souviendront d'abord et avant tout des gestes que nous posons.
    À ce propos, je tiens à souligner que les interprètes ayant servi avec les Forces armées canadiennes qui ont été réinstallés entre 2009 et 2012 n'ont pu présenter une demande en vertu des mesures spéciales en matière d'immigration qu'à compter du 9 décembre 2021. Je n'en connais pour ma part aucun qui soit parvenu à se rendre jusqu'au Canada.
    Par ailleurs, la lourdeur bureaucratique du processus de demande qui exige que des formulaires pouvant être ouverts uniquement avec Adobe Acrobat Pro DC soient signés, numérisés et retournés, témoigne d'un manque de sensibilité envers la situation sur le terrain et fait courir des risques indus aux personnes touchées. Ce manque de sensibilité s'est aussi manifesté par l'envoi de courriels initiaux qui n'étaient pas traduits en pachtou et en dari, sans compter toutes les adresses courriel de retour que les gens ne savaient pas comment écrire dans la plupart des cas.
    Pourquoi d'ailleurs utiliser le courriel? Comment se fait‑il que nous ne pouvons pas mettre en place des moyens plus efficients pour collecter cette information, comme un portail? Nos déficiences techniques dans un monde axé sur le numérique sont absolument aberrantes. C'est également très révélateur. Je peux vous assurer que si notre gouvernement était une entreprise privée, nous serions en faillite.
    Concernant nos défaillances, les renseignements que je m'apprête à vous transmettre ont été recueillis à la faveur d'interactions avec différents individus. Je pense qu'il serait souhaitable que vous vous penchiez sur ces enjeux pour tirer les choses au clair.
    Voici le premier élément d'information. Lorsque le programme spécial d'immigration a été annoncé, IRCC n'avait que deux employés affectés au tri des courriels reçus. À peu près au même moment, un appel aux volontaires a été lancé à l'interne dans d'autres ministères pour une affectation temporaire à IRCC. L'appel a été lancé à l'Agence du revenu du Canada et à Service Canada, et des volontaires ont été présélectionnés et invités à se tenir prêt à commencer d'un jour à l'autre.
    Ils n'ont cependant entrepris leur affectation qu'en septembre, alors que l'évacuation avait déjà pris fin. Tout le monde a dû dans un premier temps répondre aux appels téléphoniques, et ce n'est qu'en octobre que l'on a demandé à certains de débuter le triage des courriels. On leur a dit de considérer uniquement les courriels reçus depuis le 23 août, et il a fallu attendre le début novembre pour que tous les courriels soient traités.
(1945)
    Ce sont là des faits troublants compte tenu du nombre de personnes qui attendaient devant leur ordinateur une réponse d'IRCC.
    Merci beaucoup, monsieur Shelson. C'est tout le temps que vous aviez.
    Nous allons maintenant passer aux questions des membres du Comité.
    La première période de six minutes va à Mme Findlay.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier de tout mon cœur nos deux témoins pour leur déploiement en Afghanistan et l'ensemble des services rendus à notre pays.
    Je connais déjà M. Peddle et je veux le féliciter également pour avoir été fait chevalier de l'Ordre de Saint-Georges.
    Ma première question est pour M. Shelson. Avez-vous eu connaissance de vols qui ont quitté l'Afghanistan sans que l'avion soit rempli, alors qu'il aurait dû l'être?
(1950)
    Vous pouvez répondre, M. Shelson.
    Je peux vous parler du vol qui est arrivé le 4 août. D'après ce que j'ai pu apprendre de notre source, environ 40 personnes évacuées sont descendues de cet avion qui était pour ainsi dire rempli de membres du personnel de l'ambassade avec leurs proches et d'autres intervenants clés qui travaillaient pour l'ambassade.
    J'ai trouvé intéressant de voir le ministre Mendicino alors en poste attendre sur le tarmac pour accueillir ces gens‑là et essayer ensuite de manipuler les médias en leur faisant croire qu'il s'agissait d'un vol d'évacuation, alors que je ne pense pas que c'était le cas. Il faut se rappeler qu'un appareil C‑17 peut accueillir 188 passagers. Il est absolument ignoble de placer ainsi seulement 40 personnes dans un avion destiné à une évacuation déjà annoncée.
    Avez-vous une idée des raisons pour lesquelles les choses se sont passées de cette manière?
    Eh bien, je vais risquer l'hypothèse d'un processus de demande simplement trop bureaucratique et trop lent qui a sans doute fait en sorte qu'il n'y avait pas d'autres candidats dont la demande avait été approuvée à ce moment‑là.
    Major Peddle, vous avez parlé de vos relations avec les interprètes, et des témoins nous ont indiqué que certains des alliés afghans qui appuyaient votre travail ne le faisaient pas uniquement du point de vue linguistique, mais aussi parfois pour les questions de culture et, dans une perspective plus générale, pour vous aider à vous y retrouver dans un milieu inconnu. Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails sur les efforts que vous avez déployés pour aider ces personnes à quitter l'Afghanistan?
    À vous la parole, monsieur Peddle.
    Vous devez activer votre micro.
    Merci beaucoup. Je vous prie de m'excuser encore une fois. Je suis habitué aux outils technologiques de mon bureau à la maison.
    Comme je l'ai déjà mentionné, j'ai tout de suite remarqué que les formalités administratives étaient trop complexes, notamment quant au format qui était exigé. Ces gens‑là, qui n'avaient pas accès à Internet à la maison, se trouvaient dans les provinces à l'extérieur de Kaboul. Pour accéder à Internet, ils devaient se rendre dans des cybercafés lesquels accueillaient assurément à ce moment‑là des talibans ou leurs sympathisants — pour remplir des formulaires où ils indiquaient comment ils avaient aidé le Canada à participer à la guerre contre les talibans, tout ça pour que leur demande d'immigration soit approuvée et qu'ils puissent éventuellement monter dans ces avions.
    J'ai notamment été troublé et consterné par les informations contradictoires qui étaient transmises aux interprètes et à leurs familles. Il y en avait une concernant un examen médical qui devait être passé avant que les données biométriques soient collectées. Les directives à cet égard étaient totalement illogiques. À titre d'exemple, on disait aux gens de remplir un formulaire spécial pour ensuite se prêter à un examen médical dans un hôpital allemand avant de pouvoir aller plus loin dans le processus. J'ai en main un courriel daté du 6 août à ce sujet. Les responsables de l'hôpital allemand leur écrivaient qu'il leur faudrait attendre six semaines pour cet examen et qu'il n'y avait rien de certain. Je suis intervenu en demandant pour quelles raisons on exigeait même un examen médical à cette étape pour pouvoir passer à la collection des données biométriques et au filtrage. J'ai alors eu droit à des précisions contradictoires en provenance du personnel d'IRCC.
    J'ai obtenu la contribution du député fédéral Michael Cooper, ici en Alberta, pour qu'il intervienne en mon nom également. En fin de compte, les gens d'IRCC ont admis quelques jours plus tard que c'était une erreur de leur part. Il n'était pas nécessaire de passer cet examen médical dans un hôpital allemand de Kaboul. On pouvait en fait poursuivre avec les formalités administratives comme on aurait dû pouvoir le faire des jours ou des semaines auparavant.
    Lorsqu'ils ont pu enfin se soumettre au processus de filtrage et se débrouiller pour se rendre jusqu'à Kaboul pour l'évacuation, on ne leur a fourni pour ainsi dire aucun détail sur ce qui allait se passer par la suite, le moment où des avions allaient partir et comment ils devaient s'y prendre pour être du voyage. Pendant cette période de quelques semaines, j'ai reçu une foule de courriels provenant de quelque 13 proches de Sangeen qui se déplaçaient un peu partout en Afghanistan en se faufilant entre les points de contrôle des talibans pour se rendre à Kaboul. Puis, une fois rendus à Kaboul, ils n'avaient aucune indication claire et précise quant à la suite des choses et à la marche à suivre pour se retrouver dans l'un de ces avions.
(1955)
    Monsieur Peddle, j'ai un temps de parole limité et j'aimerais savoir si vous étiez satisfait de l'aide reçue du gouvernement canadien pour aider ces gens à sortir, ou avez-vous dû frapper à d'autres portes pour obtenir ce que vous recherchiez?
    Je n'étais aucunement satisfait de l'aide reçue du gouvernement canadien. J'ai dû faire appel à d'autres gens qui étaient sur le terrain, des Afghans que Sangeen avait connus et avec qui j'avais travaillé dans une certaine capacité pendant mon affectation afin de pouvoir indiquer aux gens là où il était possible de traverser le pays en sécurité et là où il ne fallait pas aller. Je n'avais même pas des renseignements que l'on pourrait qualifier de fiables, mais c'était préférable à zéro renseignement.
    J'ai été consterné par le processus administratif qui m'a été présenté, et je suis un fonctionnaire avec 28 années de service et un ancien haut gradé des FAC. Je ne peux imaginer les efforts consentis par les Afghans dont les vies étaient menacées et qui devaient faire toutes les démarches administratives pour s'extirper de la zone de guerre, en sachant pertinemment que ces gens ont aidé le Canada pendant deux décennies et sont maintenant menacés de mort, encore…
    Merci beaucoup, monsieur Peddle. Le temps de parole est échu.
    Je comprends. Merci.
    Madame Findlay, merci pour vos questions.
    Au tour maintenant de Mme Damoff, qui aura six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les deux témoins d'être des nôtres ce soir.
    En écoutant le groupe précédent ainsi que les témoins devant nous, je me suis dit qu'il faut se rappeler que les opérations de combat du Canada ont pris fin en 2011, et que nos troupes ont quitté le sol afghan en 2014. Lorsque nous avons tenté d'évacuer les gens du pays, nous n'avions aucune présence en Afghanistan, et nous devions nous fier à d'autres pays pendant les opérations d'évacuation.
    Le gouvernement du Canada doit traiter avec les talibans en Afghanistan, ce n'est donc pas un gouvernement ami. Ce sont les talibans qui, comme vous disiez, ciblent les personnes qui ont aidé le Canada.
    Les témoins précédents ont parlé de la possibilité de constituer les dossiers biométriques sur place, mais nous ne savons même pas, et je n'ai pas pu leur poser des questions à ce sujet, si le bien-être et la sécurité des employés d'une entreprise chargée de faire la biométrie seraient même garantis par les talibans. Il y a tant d'inconnus, et vous connaissez beaucoup mieux que moi le type d'ennemi qui est aux commandes du gouvernement afghan et à qui nous avons affaire.
    En moins d'un an, nous sommes confrontés à des circonstances tragiques, la crise en Afghanistan et maintenant celle de l'Ukraine. Les Canadiens ont toujours été incroyablement généreux en accueillant des réfugiés au pays, que ce soit les réfugiés de la mer vietnamiens ou les réfugiés syriens, ces derniers ayant marqué ma carrière de députée, mais je crois qu'il faut faire attention lorsque nous comparons l'Ukraine à l'Afghanistan, car les Ukrainiens peuvent en fait quitter leur pays. Ils peuvent se rendre dans des pays comme la Pologne et y faire leur dossier biométrique, alors que le Pakistan exige maintenant des visas de sortie. Dans le passé, les autorités pakistanaises acceptaient une lettre du gouvernement du Canada indiquant que la personne avait travaillé comme interprète et lui permettaient de transiter par le Pakistan pour aller au Canada.
    Je crois que nous devons faire très attention. Je ne dis pas qu'une crise est pire qu'une autre, parce que les deux sont horribles. Nous devons toutefois examiner avec soin les possibilités d'extraire les gens qui sont toujours en Afghanistan pour les faire venir au Canada, compte tenu des lourdes contraintes actuelles, du gouvernement afghan hostile et de l'incapacité de faire transiter les gens par un pays tiers ami, comme c'est le cas pour l'Ukraine.
    Monsieur Peddle, vous avez travaillé avec La Patrie gravée sur le cœur pour évacuer les gens vers le Canada. Offrons-nous les soutiens nécessaires aux Afghans que vous avez réussi à faire venir au Canada une fois qu'ils sont établis ici? Nous voulons certes les accueillir, mais nous voulons également être sûrs qu'ils disposent d'un soutien en santé mentale, par exemple.
    Les gens ont-ils ce qu'il leur faut une fois qu'ils sont établis au Canada? Sinon, que pouvons-nous améliorer afin de les aider à s'adapter à notre pays?
(2000)
    Merci.
    Monsieur Peddle, allez‑y.
    Je me suis entretenu longuement avec Sangeen et des membres de sa famille. Les réfugiés ont accès à de très bons soutiens une fois qu'ils arrivent au Canada; ils bénéficient d'un soutien financier le temps qu'ils puissent gagner leur vie, ainsi que d'un logement et d'une formation. Bien souvent, la réussite à long terme dépend de facteurs individuels. Je pense notamment aux personnes qui facilitent la transition à partir de la première année au Canada, lorsque les gens trouvent leurs repères, et aident ces derniers à se mettre sur la bonne voie afin de contribuer au Canada et de travailler au sein de la société avec les compétences linguistiques et professionnelles nécessaires.
    En ce qui concerne les gens que j'ai moi-même aidés, j'ai eu beaucoup de chance, parce que Sangeen est électricien et dirige son entreprise en électricité dans le secteur commercial. Les affaires vont bien et Sangeen aide les Afghans qui arrivent dans la région de Toronto en leur trouvant du travail sur divers chantiers et projets. Ma plus grande préoccupation...
    Reçoit‑il de l'aide du gouvernement du Canada pour ce faire, ou est‑ce sa propre initiative?
    C'est sa propre initiative, car c'est un fier Néo-Canadien qui porte le peuple afghan dans son cœur. Il a fait beaucoup de bonnes actions et a fait l'objet de nombreux reportages et d'interviews à la télévision.
    Cependant, je crois que Sangeen est l'exception à la règle. Ces circonstances ne sont pas celles de la plupart des réfugiés qui arrivent. Il est plus difficile pour eux s'ils n'ont personne qui soit prêt à leur donner un coup de pouce lorsqu'ils arrivent.
    D'accord. Le gouvernement aide les réfugiés pendant un an. Sangeen a‑t‑il été parrainé par le secteur privé ou le gouvernement?
    Sangeen était un interprète de combat. Il a travaillé comme interprète pour le Canada pendant six années dans le théâtre des opérations. Il est venu au pays en 2012 en vertu du programme spécial pour les interprètes. Il avait la chance de parler un anglais impeccable lorsqu'il est arrivé au Canada grâce a son travail d'interprète.
    Nous avons agrandi le programme afin que les membres de la famille...
    Merci beaucoup, madame Damoff. Je suis désolé.
    Au tour maintenant de M. Brunelle-Duceppe, qui aura six minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je veux remercier les témoins de leur présence aujourd'hui ainsi que de leurs services. Je veux également leur dire qu'ils auront plus de temps de parole avec moi qu'avec la précédente interlocutrice. Je ne ferai pas de politique. Voilà la première chose que je voulais préciser.
    J'aimerais maintenant vous poser une question au sujet de la santé mentale, qui a été évoquée tantôt. Il y a quelque chose que je considère comme important, mais dont on ne parle pas assez dans ce comité, à mon avis. Comment les vétérans canadiens se sentent-ils devant l'impossibilité d'aider leurs collaborateurs et amis afghans, après leur avoir donné leur parole qu'ils le feraient? Cela ne crée-t-il pas de l'anxiété ou des traumatismes chez eux? Ces gens éprouvent-ils présentement des problèmes de santé mentale?
    Messieurs Peddle et Shelson, vous êtes bien placés pour nous en parler. Vous pouvez répondre à tour de rôle.
    Je suis désolé, mon français n'est pas bon.

[Traduction]

    Je n'entends pas la traduction avec le casque.
    Quelle était la question? Je suis désolé.
    Moi non plus, je n'ai pas entendu la traduction.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous aurez vos six minutes entières.
    Madame la greffière, pouvez-vous vérifier si le service d'interprétation fonctionne?
    Je crois qu'il fonctionne maintenant, monsieur le président.
(2005)

[Français]

    Si je vous parle en français, entendez-vous l'interprétation, messieurs?
    Je parle français, mais ce serait mieux en anglais.
    Moi aussi, je parle anglais. Cependant, vu la formation politique que je représente, il faudrait qu'il y ait de l'interprétation, monsieur le président.

[Traduction]

    Je suis d'accord.
    Madame la greffière, nous voulons bien rétablir le service, si possible.
    Monsieur le président, puis‑je vérifier auprès des témoins s'ils ont sélectionné l'interprétation en français dans le petit globe au bas de l'écran?
    Je l'ai fait.
    Parfait.
    Et vous, monsieur Peddle? En bas à droite, vous devriez voir la fonction « lever la main ». Vous y trouverez un bouton. Si vous cliquez dessus, vous avez le choix du canal anglais ou français. Vous devez choisir l'anglais.
    Monsieur le président, le problème, c'est que j'utilise un iPad, et je ne crois pas que la configuration soit la même...
    Vous devriez trouver l'interprétation quelque part sur votre écran d'iPad.
    Effectivement. Essayons.
    D'accord.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous repartez à zéro.

[Français]

    Je l'espère bien, monsieur le président. Je sais que vous êtes un homme juste.
    Messieurs, entendez-vous l'interprétation, maintenant?

[Traduction]

    Parfaitement. Merci beaucoup.

[Français]

    Dans ce cas, je vais recommencer à partir du début.
    Je disais que j'allais vous donner plus de temps de parole que la personne qui m'a précédé. Vous allez pouvoir nous donner plus de réponses.
    Nous avons abordé la question de la santé mentale, mais il y a une chose que nous n'avons pas abordée suffisamment à notre comité, et c'est la santé mentale de nos vétérans.
    Comment se sentent nos vétérans qui ont donné leur parole qu'ils allaient aider leurs collaborateurs afghans, mais qui voient maintenant que c'est difficile, voire impossible, dans certains cas? Je parle des vétérans qui ont servi en Afghanistan et qui veulent aider leurs collaborateurs afghans, mais qui en sont incapables. Comment se sentent-ils? Cela n'entraîne-t-il pas chez eux des problèmes d'anxiété ou de santé mentale, ou même des traumatismes?
    J'aimerais entendre votre opinion à ce sujet, parce que vous êtes vraiment bien placés pour nous en parler. J'aimerais entendre d'abord la réponse de M. Peddle, ensuite celle de M. Shelson.

[Traduction]

    Il y existe absolument une corrélation entre l'abandon de nos alliés afghans et cela devient ce que nous pourrions éventuellement appeler un « préjudice moral ».
    D'après ce que je comprends, de nombreux anciens combattants comme moi-même ont beaucoup souffert en voyant l'Afghanistan se morceler. J'ai été meurtri de voir comment les gens qui nous ont aidés et protégés lorsque nous étions en Afghanistan ont été laissés pour compte.
    J'ai d'autres amis qui sont des anciens combattants et bien franchement, leur TSPT est aggravé par le fait que nous avons abandonné nos alliés, nos compagnons d'armes, nos frères qui ont marché côte à côte avec nous pendant les opérations de combat. C'est dur à avaler.
    Je pense que de nombreux anciens combattants comme moi éprouvent toujours des difficultés aujourd'hui, en sachant que les personnes qui nous ont aidés sont toujours en Afghanistan, pourchassées par les talibans pour avoir travaillé à nous protéger lorsque nous étions là‑bas.
    Monsieur Shelson, allez‑y.
    Je n'en dirai pas plus sur la santé mentale des anciens combattants. M. Peddle a donné une excellente réponse et je suis d'accord avec lui.
    Je veux parler de la crise de santé mentale que je perçois chez les gens qui répondent aux appels et aux courriels à IRCC. La communauté des anciens combattants a établi des liens serrés avec les employés d'IRCC, et à mon avis, le gouvernement les a abandonnés.
    Ces gens devaient répondre à des appels de personnes qui leur disaient essentiellement : « Aidez-moi. Je vais mourir », comme le font les employés du 911. Souvenez-vous, la plupart de ces employés ont quitté Service Canada et l'ARC pour travailler à IRCC parce qu'ils voulaient aider en répondant aux appels ou aux courriels. Ils pensaient pouvoir contribuer aux efforts. La plupart de ces employés travaillaient de la maison et communiquaient au moyen de Microsoft Teams. Ils avaient accès au portail grâce à une connexion VPN. On n'a toujours pas reconnu le travail ardu de la plupart de ces gens, qui ont fourni des efforts énormes, en utilisant un système de traitement brisé pour traiter les demandes que nous avons soumises.
    Je suis perturbé par l'inefficacité du traitement des demandes par nos organismes gouvernementaux. Je crois que les gens chargés de répondre aux appels et aux courriels en portent les séquelles.
    J'aimerais approfondir la question en parlant de la crise de santé mentale nationale actuelle. Si vous tentez actuellement de prendre rendez-vous avec un psychologue, en supposant que vous en trouvez même un, vous aurez à attendre de quatre à six mois.
    Ma question pour vous est la suivante: que faites-vous tous pour aider à résoudre la crise de santé mentale du pays?
(2010)

[Français]

    Ce que vous dites est extrêmement intéressant. D'ailleurs, c'est la première fois que le Comité entend cela, ce qui prouve l'importance de votre témoignage.
    J'ai demandé à des témoins quelles recommandations devraient se retrouver en priorité dans le rapport que nous allons rédiger. Plusieurs ont été mentionnées: suspendre les formalités techniques; ne plus exiger que les formulaires soient remplis par Internet, dans un contexte où les gens sont en danger de mort; retirer l'obligation d'avoir le statut de réfugié si l'on veut être parrainé par quelqu'un au Canada; enfin, avoir une présence diplomatique sur le terrain, entre autres au Pakistan, afin d'aider les Afghans à venir au Canada.
    Êtes-vous d'accord sur ces priorités? Si vous n'en aviez qu'une à choisir, laquelle serait-ce?
    Je vous demanderais de répondre rapidement, car il ne reste que peu de temps de parole.

[Traduction]

    Une partie du travail aurait pu être effectuée dans un autre endroit à l'extérieur de l'Afghanistan, comme un triage. On aurait pu faire certaines des démarches nécessaires à l'extérieur de la zone de guerre pour faire venir les gens au Canada.
    Les choses auraient pu être beaucoup plus faciles pour tout le monde à la fin août, lorsque la situation est partie en vrille et les gens tentaient d'avoir une place à bord des derniers vols quittant Kaboul.
    Monsieur Shelson, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Oui. Ma priorité numéro un est beaucoup plus grande que ça. J'aimerais que les députés parlementaires qui représentent tous les citoyens du Canada commencent à mieux travailler ensemble.
    J'ai carrément honte lorsque je regarde les députés à la télévision. Les paroles creuses de part et d'autre à la Chambre des communes sont gênantes. Nous, les citoyens, méritons plus que ça. Les députés parlementaires auraient dû se réunir autour d'une table pour trouver une solution au problème, plutôt que de se lancer des bêtises à la Chambre des communes et présumer que les ministères bureaucratiques allaient tirer leur épingle du jeu.
    Merci, monsieur Shelson.
    Merci, monsieur Brunelle-Duceppe. Message reçu.

[Français]

    Je suis bien d'accord avec vous, monsieur Shelson.

[Traduction]

    Au tour maintenant de Mme Kwan, qui aura six minutes.
    Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs services et de leurs exposés. Vos exposés nous aideront notamment à comprendre ce qui s'est passé, les erreurs commises, et bien sûr à aider le gouvernement à en tirer des leçons.
    Il reste un problème critique, à savoir comment évacuer les gens. Nous avons entendu les témoins précédents dire que 52 % des gens qui ont envoyé un courriel, car le gouvernement leur avait demandé d'envoyer un courriel, n'avaient même pas obtenu de réponse. J'ai envoyé de nombreuses feuilles de calcul au gouvernement sur des gens qui se retrouvaient dans des situations urgentes, et je ne reçois que rarement une réponse.
    J'aimerais savoir ce que vous recommandez au gouvernement pour lutter contre cette crise des gens qui ont été abandonnés, afin qu'ils sachent qu'une aide est possible et qu'elle sera offerte? Que devrait faire le gouvernement?
    Je demanderai a M. Peddle et ensuite à M. Shelson de répondre.
    S'il s'agit d'une question d'effectifs, ce sera une belle occasion pour le gouvernement du Canada de créer des emplois pour les Canadiens qui répondraient aux appels ou traiteraient les demandes. Certains Néo‑Canadiens venus d'Afghanistan, qui parlent anglais parce qu'ils ont travaillé comme interprète, en sus de parler couramment le dari ou le pachto, pourraient peut-être gagner leur vie en aidant leurs frères et sœurs en Afghanistan à venir au Canada.
    J'y vois une belle occasion d'offrir du travail utile à plus de Canadiens et d'évacuer des Afghans. On pourrait songer à monter un dispositif semblable à l'avenir avec l'Ukraine.
(2015)
    L'un des plus gros problèmes n'a rien à voir avec les effectifs. Je crois que c'est le système informatique périmé utilisé par le gouvernement du Canada.
    J'ai beaucoup appris en travaillant dans ce dossier sur la façon dont les demandes ont véritablement été traitées au sein d'IRCC. Chaque Canadien et chaque Afghan devrait savoir que lorsqu'on soumet une demande en ligne par le portail, cela génère tout simplement un courriel automatique auquel un être humain doit répondre. Le portail a seulement commencé à être opérationnel vers Noël.
    Les données des demandeurs ont été versées dans deux différentes bases de données. Les personnes chargées de répondre aux appels et aux courriels n'ont même pas accès à l'une des bases de données. J'ai moi-même envoyé 15 demandes différentes à partir de 15 adresses courriel distinctes. Un employé d'IRCC bien aimable a ensuite cherché chacun de mes courriels. Devinez combien de courriels il a pu trouver? Un.
    Où sont allés mes courriels? Pourquoi les fonctionnaires ne peuvent-ils pas accéder à l'information? Il faudrait mener une enquête sur les bases de données utilisées par le gouvernement canadien. Où se trouve toute l'information? Où sont toutes les données? Pourquoi aucun des courriels envoyés n’est lu et pourquoi aucune suite n'est donnée?
    De plus, certains de mes courriels se sont retrouvés dans la boîte du courrier indésirable. On utilise Outlook et les courriels vont dans le courrier indésirable. Pouvez-vous imaginer être coincé en Afghanistan et le courriel que vous avez envoyé a été désigné indésirable? Comment est‑ce possible?
    L'un des problèmes soulevés par les témoins précédents, c'est l'exigence des données biométriques. Or, cela est impossible pour les Afghans actuellement.
    La présence d'ONG ayant des gens en mesure de faire ce travail, ou encore la suspension de l'exigence des données biométriques par le gouvernement…
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de la proposition qui consiste à suspendre l'exigence des données biométriques et la présence d'ONG sur le terrain, et possiblement d'anciens militaires et d'autres, pour soutenir les efforts.
    Allez‑y, monsieur Peddle.
    Ayant déjà occupé un poste d'officier dans le renseignement, j'ai beaucoup travaillé dans le domaine de la biométrie et des politiques qui l'encadrent. Dans le présent cas de figure, alors que nous ne sommes pas en Afghanistan, il est question de recueillir les données biométriques de ces gens à l'extérieur de l'Afghanistan. Si les résultats ne sont pas concluants, nous pourrions toujours peut-être renvoyer les gens dans leur pays. C'est une possibilité si les talibans permettent aux gens de quitter le pays, ce qu'ils disent être le cas. Je suis sûr qu'il y aurait beaucoup de facteurs qui viendraient compliquer le travail.
    Sinon, nous pourrions peut-être, comme vous l'avez dit, suspendre temporairement l'exigence des données biométriques. On pourrait trouver un temps et un lieu pour faire le nécessaire avant d'intégrer les gens à la société canadienne.
    Des militaires à la retraite ont suggéré de suspendre les exigences pour les faire venir au Canada et de suivre le processus une fois qu'ils sont ici. Si leur demande est rejetée, il y a une procédure pour les renvoyer.
    Est‑ce une possibilité?
    D'après moi, oui. Ce ne serait pas la première fois que ce serait fait. Les réfugiés du Kosovo...
    Nous pouvons les faire venir au Canada et les placer sous surveillance jusqu'à ce que toutes les vérifications nécessaires aient été faites. Une fois leur demande approuvée, nous les intégrons au reste de la société. Si leur demande est refusée, des mécanismes sont en place pour les renvoyer.
    Merci beaucoup, madame Kwan. Nous sommes à six minutes pile.
    [Difficultés techniques] la deuxième série de questions, monsieur Ruff. Vous disposez de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    D'abord, je remercie les deux témoins de leur présence et de leur service. Je vous prie de répondre le plus succinctement possible puisque nous n'avons que quatre minutes.
    Ma première question s'adresse à M. Peddle. Vous êtes un ancien agent du renseignement et vous avez suivi l'évolution de la situation. Les projections étaient claires; tous les signes étaient là. Selon vous, le gouvernement canadien aurait‑il pu en faire plus, plus rapidement, pour aider les Afghans à sortir?
    Absolument.
    Dès que le président Donald Trump a annoncé au monde entier que les États-Unis allaient sortir d'Afghanistan, je pense que tout le monde en Afghanistan savait ce qui allait se produire. La question, c'était: quand? Puis, le président Biden a donné une date.
    Le Canada a eu beaucoup d'occasions, bien avant juillet et août 2021, de faire venir au Canada tous les Afghans qui nous ont aidés. Nous savons qui ils sont. Le Canada n'a aucune excuse pour avoir attendu jusqu'à août 2021, alors que nous savions que l'Afghanistan allait tomber. Absolument rien ne justifie d'avoir attendu si longtemps.
(2020)
    Merci, monsieur Peddle.
    Monsieur Shelson, vous vous êtes joint aux efforts d'évacuation dès le début du processus. Que vous disaient les gens sur le terrain, les Afghans? Que leur disaient Affaires mondiales Canada et le gouvernement canadien pendant qu'ils se rendaient à l'aéroport?
    Pouvez-vous nous en dire plus sur les défis et sur les messages qu'ils recevaient?
    Essayer de faire entrer les gens à l'aéroport, c'était le chaos. Il y avait une porte par laquelle les gens pouvaient entrer, puis elle était refermée derrière eux. C'était aussi simple que cela, mais nous l'avons seulement su par la suite.
    Les gens recevaient le message de se rendre à n'importe quelle porte et d'attendre, mais les militaires canadiens étaient postés principalement à une seule porte, la porte Baron. Après, nous avons appris que c'était un fait bien connu.
    Les responsables disaient aux gens... Imaginez-vous... Je ne sais pas s'il y a des parents parmi vous. Imaginez que vous avez une femme et un enfant de deux ans, un autre de trois ans et un troisième de quatre ans. Vous recevez un appel à quatre heures du matin. La personne au bout du fil vous dit de faire vos bagages et de vous rendre à l'aéroport avec votre famille parce que votre avion à destination du Canada s'en vient. Vous prenez vos enfants, vous sautez dans un taxi et vous vous rendez jusqu'à l'aéroport, et là, vous attendez, longtemps, très longtemps.
    N'oubliez pas que toutes ces personnes avaient des téléphones cellulaires. Elles avaient toutes des numéros de téléphone. Nous étions en communication avec elles. Pourquoi le gouvernement canadien était‑il incapable de trouver une façon de communiquer avec elles individuellement? Pourquoi les militaires canadiens à l'intérieur de l'aéroport n'avaient-ils pas moyen de communiquer avec chaque personne?
    Si le gouvernement savait qu'il n'y aurait pas de représentants canadiens à toutes les portes, pourquoi disait‑il aux Afghans de se rendre à n'importe quelle porte? Tout ce qu'il faisait, c'était les mettre en danger.
    J'aimerais avoir plus de détails là‑dessus. Qu'est‑ce qui explique cette situation? Était-elle causée par un manque de coordination entre les différents ministères, ou encore par l'absence d'un ministre ou d'un ministère responsable?
    De plus, des rumeurs ont circulé; je ne sais pas si vous avez une connaissance directe des faits. Y a‑t‑il eu de l'ingérence dans l'ordre de priorité des personnes évacuées à bord de certains vols?
    C'est IRCC qui traitait les demandes et qui communiquait avec les gens par courriel pour leur dire de se rendre à l'aéroport. À ma connaissance, ce sont les Forces canadiennes qui étaient postées aux portes, et c'est Affaires mondiales Canada qui décidait qui était autorisé à entrer. Il y avait donc trois ministères qui ne se parlaient pas entre eux. Des gens ont reçu le message de se rendre à l'aéroport, mais quand ils sont arrivés, Affaires mondiales les a empêchés d'entrer parce que le nom de certains membres du groupe ne figurait pas sur un visa. IRCC ne communiquait pas avec Affaires mondiales, et les Forces armées canadiennes... J'ai parlé à plusieurs députés, y compris M. Mendicino. Ils m'ont dit que la décision revenait aux membres des Forces armées canadiennes postés à la porte. Ce n'est pas arrivé une fois. Si un nom ne figurait pas sur une liste d'Affaires mondiales Canada, la personne n'entrait pas.
    En outre, selon moi, il devrait y avoir une enquête sur la possibilité que les Forces armées canadiennes aient donné la priorité à des ressortissants étrangers. J'ai entendu la rumeur en ce sens.
    Merci beaucoup, monsieur Shelson, merci, monsieur Ruff.
    Nous passons maintenant à M. Dong. Vous disposez de quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Avant de commencer, j'aimerais réagir à un commentaire que mon honorable collègue du Bloc québécois a fait tout à l'heure. D'après mon expérience au sein des comités, les membres ont le choix de commencer leur intervention par un préambule ou de passer directement aux questions. D'après le Règlement, c'est à l'entière discrétion des membres du Comité. Je suis toujours respectueux envers mes collègues et les témoins, mais je tenais à apporter cette précision, pour le compte rendu et pour les gens qui nous écoutent. J'ai trouvé que le préambule de la députée Damoff comprenait des arguments valables. Elle a parlé notamment de tourner nos regards vers l'avenir. À mes yeux, c'est là une partie très importante de notre étude. Nous devons tourner nos regards vers l'avenir pour trouver les changements positifs à apporter au système.
    Cela dit, je tiens à remercier les deux témoins pour leur service. Je les remercie également de prendre le temps de nous faire part de leurs points de vue et de leur expérience de l'évacuation des Afghans qui ont aidé les Canadiens.
    Monsieur Shelson, vous avez mentionné plus tôt la lourdeur bureaucratique. Vous êtes d'avis qu'il est possible d'améliorer le système. Pouvez-vous nous en dire plus là‑dessus? Avez-vous des suggestions précises quant aux mesures que le gouvernement peut prendre pour assouplir la fonction publique ou pour mieux la préparer?
(2025)
    Nous vous écoutons, monsieur Shelson.
    Ma question serait: quels sont les incitatifs? Quelles mesures les ministères prennent-ils à l'heure actuelle pour encourager leur personnel à être plus efficace?
    Cependant...
    Je vous prie de me laisser répondre à la question qui m'a été adressée, monsieur Dong.
    Pardon. Excusez-moi.
    Je trouve intéressant que Mme Damoff et M. Dong aient commencé par de longs préambules. Je n'ai même pas pu parler à Mme Damoff.
    Monsieur Shelson, les commentaires de ce genre ne sont pas nécessaires. Répondez simplement à la question, s'il vous plaît.
    Comment l'améliorer? Des mesures incitatives sont nécessaires pour que les ministères s'améliorent. En ce moment, d'après ce que j'ai vu à IRCC durant le processus de demande, il y a très peu de reddition de comptes entre les différents niveaux de gestion à l'intérieur des organismes gouvernementaux. Les représentants d'IRCC auxquels nous avons parlé n'arrivaient même pas à obtenir des réponses de leurs patrons. Il fallait une semaine pour recevoir une réponse sur une demande particulière, et tout était fait à distance, à l'aide de Microsoft Teams.
    Je le répète, si c'était une entreprise privée, elle aurait fait faillite.
    Est‑ce en raison de la COVID que le personnel travaillait à domicile ou...
    Oui, c'était certainement en raison de la COVID...
    Je veux dire, vous avez salué la fonction publique. Je suis d'accord avec vous. Vous avez salué les fonctionnaires et les travailleurs de première ligne. Moi aussi, je les ai remerciés plusieurs fois pour leur travail durant la pandémie. C'est très difficile. Certains travaillent 16 heures par jour pour faire tout ce qu'il y a à faire.
    Cela dit, je prends bonne note de votre commentaire. Je suis aussi membre du comité des comptes publics.
    Par ailleurs, vous avez mentionné en public, durant des entrevues, qu'à votre avis, la marge de manœuvre laissée aux soldats canadiens n'était pas aussi grande que celle donnée à leurs collègues d'autres pays. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendiez par là?
    Merci, monsieur Dong. Votre temps de parole est écoulé.
    Je donne maintenant la parole à M. Brunelle-Duceppe. Vous disposez de deux minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Plus tôt, j'ai simplement dit que j'allais donner davantage la parole aux témoins. Je n'ai pas dit que c'était mieux; c'est vous qui avez interprété les choses de cette façon.
    J'en arrive rapidement à mes questions, car nous n'avons pas beaucoup de temps à notre disposition.
    Monsieur Shelson, je vous ai demandé tantôt quelle était votre priorité absolue et vous avez répondu que les députés devraient arrêter de se crier des bêtises et passer à l'action. C'est parfait. On me considère comme quelqu'un de très transpartisan: je veux travailler avec tout le monde et arriver à des solutions.
    J'aimerais savoir quelle est, à très court terme, votre priorité absolue pour venir en aide dès maintenant à nos amis afghans sur le terrain.

[Traduction]

    Eh bien, les gens sont toujours là. Leurs demandes doivent toujours être traitées. En fait, je peux vous dire que la majorité des demandes ont pris du retard. Je ne sais pas pourquoi; je n'ai pas accès à cette information. Je demanderais au Comité de trouver pourquoi il y a du retard et de régler le problème afin que les demandes soient traitées.
    Nous avons fait entrer 2 personnes au Qatar il y a environ 12 semaines. Ce sont les dernières personnes que nous avons réussi à déplacer. Tout s'est complètement arrêté.

[Français]

    Merci, monsieur Shelson.
    Monsieur Peddle, pourriez-vous me dire rapidement quelle est présentement votre priorité absolue sur le terrain?

[Traduction]

    Faites-les sortir au moyen de vols civils si les talibans leur permettent de partir, puis suivez le processus d'intégration dans un pays tiers ou ici au Canada, dans des conditions contrôlées.

[Français]

    Selon vous, arriverons-nous à accueillir 40 000 réfugiés afghans au Canada d'ici l'an prochain, comme l'a promis le gouvernement, si les choses se poursuivent de la même façon?

[Traduction]

    Aujourd'hui, ma réponse serait non. Le nombre de personnes que nous avons fait sortir depuis le 1er septembre est lamentable. Selon moi, c'est tout à fait impossible d'atteindre ce chiffre sans apporter de changements.
    Merci beaucoup, monsieur Brunelle-Duceppe.

[Français]

     Je remercie beaucoup les deux témoins de leurs réponses.

[Traduction]

    Madame Kwan, vous disposez de deux minutes. La parole est à vous.
(2030)
    Monsieur Shelson, je n'ai pas eu le temps de vous demander de répondre à ma question concernant la biométrie. Pouvez-vous y répondre maintenant, s'il vous plaît?
    Faites‑le dans un pays tiers. Cela se fait déjà. Ayez un plan pour les gens dont la demande est rejetée parce que ce sera très difficile de les renvoyer en Afghanistan.
    Comment les gens peuvent-ils atteindre un pays tiers? C'est l'autre problème.
    Nous avons des vols nolisés qui partent de l'aéroport de Kaboul.
    Le gouvernement canadien devrait‑il engager des ONG sur le terrain pour l'aider à accomplir ce travail?
    Absolument.
    Je pense qu'il y a des restrictions très strictes sur ce plan aussi en ce moment.
    Vous avez soulevé de nombreuses préoccupations par rapport à ce qui s'est produit; vous en avez mentionné quelques-unes aujourd'hui. Nous n'avons pas le temps de dresser une liste exhaustive des choses qui ont mal tourné. Pourriez-vous soumettre au Comité un document contenant toutes ces informations?
    À mon avis, une partie du problème, c'est que pour aller de l'avant, il faut comprendre ce qui est arrivé dans le passé. C'est ainsi que nous apprenons de nos erreurs; du moins, c'est ce qu'on m'a appris. Pourriez-vous faire cela pour le Comité?
    Je vais y penser, oui.
    Je vous remercie.
    Ma dernière question s'adresse à M. Peddle. Je pense que mon temps de parole tire à sa fin. Nous avons appris qu'étant donné la crise en Ukraine, le gouvernement n'affectera pas plus de ressources à l'élimination des retards. Cela signifie qu'IRCC ne dispose que de ses ressources actuelles. D'après vous, est‑ce un problème?
    Oui. Tout comme en temps de guerre, nous pouvons redoubler d'efforts; nous pouvons réaffecter les ressources pour réagir vigoureusement pendant un temps limité, même si ce n'est pas soutenable à long terme. Je ne comprends pas pourquoi les autres ministères ne peuvent pas faire de même.
    Merci beaucoup.
    Au nom des membres du Comité, je vous remercie, monsieur Peddle, monsieur Shelson, de vous être joints à nous aujourd'hui. Les informations que vous nous avez fournies seront très utiles à notre étude et à notre rapport. Je vous salue.
    Je vais suspendre la séance quelques instants avant d'accueillir le prochain groupe de témoins.
(2030)

(2035)
    Nous reprenons nos travaux. La séance d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 25 novembre 2021. Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en aviser. Nous pourrions devoir suspendre la séance quelques instants pour nous assurer que tous les membres peuvent y participer pleinement.
    J'informe les témoins que des services d'interprétation sont à leur disposition. Il suffit de cliquer sur l'icône du globe au bas de l'écran et de sélectionner l'anglais, le français ou la langue originale. Nous travaillerons simultanément dans les deux langues officielles.
    Maintenant, au nom des membres du Comité, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos invités.
    Nous accueillons M. Julian Spencer-Churchill, professeur de sciences politiques à l'Université Concordia; Mme Brandi Hansen, de Vector Global Solutions; et Mme Friba Rezayee, de Women Leaders of Tomorrow.
    Bienvenue à toutes et à tous. Vous aurez droit à cinq minutes chacun pour faire une déclaration préliminaire. Je vous prie de respecter votre temps de parole, car les membres du Comité doivent vous poser des questions.
    Nous allons commencer par le professeur Julian Spencer-Churchill. Vous disposez de cinq minutes.
(2040)

[Français]

    Je remercie le député M. Brunelle‑Duceppe et les autres membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole au sujet de l'aide aux réfugiés afghans.
    Je suis professeur à l'Université Concordia, à Montréal, depuis 1998. Je ne suis jamais allé en Afghanistan, mais j'ai mené des recherches au Pakistan et sur le Pakistan pendant 10 ans, de 1999 à 2011. J'ai interviewé près d'une centaine de militaires, de membres du personnel des services de renseignements, de policiers et de politiciens, et j'ai visité toutes les provinces pakistanaises, à l'exception du Baloutchistan.
    Au cours des 25 dernières années, mes collègues occidentaux et pakistanais et moi avons été frappés par la faible probabilité de succès de l'OTAN en Afghanistan, de toute évidence. J'en parlerai davantage plus tard. Nous avons publié nos points de vue à de nombreuses reprises, mais mes recommandations ont été systématiquement ignorées.
    Je vais présenter les trois points clés, selon moi.
    Premièrement, le développement économique de l'Afghanistan dépend du Pakistan, qui est le gardien des exportations afghanes vers l'Inde et l'étranger. L'Iran et l'Asie centrale n'ont pas de réseaux d'infrastructure lui donnant accès à un marché viable. Le Pakistan a mis en œuvre des mesures ponctuelles depuis l'expiration de l'accord sur le commerce de transit conclu en 1965 et modifié en 2010.
    Deuxièmement, les organismes d'aide internationale à l'Afghanistan ont constamment tenté de marginaliser le rôle du Pakistan, avec l'aide des États occidentaux, dans le cadre d'un effort irréaliste et insoutenable pour rendre l'Afghanistan indépendant du Pakistan.
    Troisièmement, le récit commun selon lequel les problèmes de l'Afghanistan ont commencé lors de l'invasion soviétique de 1979 est faux. Il est perpétué par plusieurs acteurs pour diverses raisons. L'Union soviétique a envahi l'Afghanistan pour consolider un régime qui avait rapidement été victime des insurrections rurales parrainées par le Pakistan et qui serait probablement tombé en 1982.
    Laissez-moi expliquer pourquoi. La frontière afghano-pakistanaise, délimitée par la ligne McMahon, n'est toujours pas reconnue par Kaboul. En 1948, le ministre afghan de la Défense...

[Traduction]

    J'invoque le Règlement.
    Oui. Je vais suspendre la séance le temps de vérifier l'interprétation.
(2040)

(2045)
    Monsieur Spencer-Churchill, vous pouvez reprendre. Il vous reste trois minutes.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je disais donc que la frontière afghano-pakistanaise, délimitée par la ligne McMahon, n'est toujours pas reconnue par Kaboul. En 1948, le ministre afghan de la Défense, Mohammad Daoud, a déclaré son soutien aux sécessionnistes de la province frontalière du nord-ouest du Baloutchistan, ce qui a conduit à un conflit frontalier avec le Pakistan, qui a persisté jusqu'en 1963. L'équivalent d'un bataillon a été perdu par le Pakistan en quelques années. Le commerce afghan a été gravement perturbé et s'est déplacé du nord vers l'Union soviétique.
    En 1963, à la suite des effets d'un blocus, Mohammad Daoud a été destitué par Zaher Chah, le roi d'Afghanistan, et s'en est suivie une période de 10 ans qui a marqué le point culminant des relations pakistano-afghanes. Le commerce de transit à travers le Pakistan a repris. L'Afghanistan a fourni un transit pour les armes iraniennes vers le Pakistan, et Kaboul a fourni une base pour les avions pakistanais pendant les guerres indo-pakistanaises de 1965 et 1971.
    En 1973, le susmentionné Mohammad Daoud...

[Traduction]

    Je suis désolé. Nous allons suspendre la séance pendant un instant.
(2045)

(2050)
    Nous vous écoutons, monsieur Spencer-Churchill.

[Français]

    Monsieur le président, avant que nous poursuivions la séance, j'aimerais savoir si nous disposerons de plus de temps, compte tenu des difficultés techniques que nous avons connues.

[Traduction]

    Ne vous inquiétez pas, monsieur Brunelle-Duceppe, votre temps de parole ne sera pas écourté.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Allez‑y, monsieur Spencer-Churchill.

[Français]

    En 1973, le susmentionné Daoud Mohammad a renversé le roi d'Afghanistan, déclaré son soutien aux sécessionnistes du Pakistan et déclenché une série de coups d'État internes. Le premier ministre pakistanais, Zulfikar Ali Bhutto, a répondu en tendant la main aux décideurs afghans, y compris à la Muslim Youth Organization de l'Université de Kaboul, en leur fournissant refuge, financement et entraînement aux armes.
    Une révolte parrainée par le Pakistan et dirigée par Faizani a échoué en 1974 et 1975. L'échec des réformes agricoles a conduit à une accélération de l'aide pakistanaise aux insurgés, qui a abouti à un massacre de conseillers militaires soviétiques et à une intervention soviétique à la fin de 1979.
    La guerre en Afghanistan a été déclenchée par le Pakistan, et non par l'Union soviétique ou par la CIA, contrairement à ce qui est véhiculé par les films hollywoodiens et par la sagesse conventionnelle sur Internet. À ce sujet, j'ai eu d'innombrables désaccords publics avec le personnel du renseignement américain et canadien.
    Bien que le Pakistan soit incapable d'influencer le gouvernement de Kaboul quel qu'il soit, il n'en demeure pas moins l'un des principaux acteurs du gâchis de l'économie afghane. Tant et aussi longtemps que le Pakistan ne deviendra pas un partenaire, tout investissement dans le développement de l'Afghanistan sera gaspillé, comme l'a été chaque sou au cours des 50 dernières années.
    Le Pakistan ne demande rien de plus qu'un retour à la normalité des années 1963 à 1973.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup [difficultés techniques].
    Nous passons maintenant à Mme Hansen. Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les membres du Comité de me permettre de m'adresser au Comité aujourd'hui.
    Je m'appelle Brandi Hansen et je suis directrice de Vector Global Solutions au Canada, un organisme sans but lucratif. Je suis également directrice des opérations pour Ark Salus, aux États-Unis.
    Nous formons un groupe de Canadiens et d'Américains. Nos membres sont principalement des pilotes, des gens en service actif, des intervenants du secteur du renseignement, des particuliers, des analystes, des employés en administration des affaires et des agents de liaison avec le gouvernement. Nous étions en Afghanistan au mois d'août et nous avons évacué plus de 1 000 Afghans avant que les portes de Kaboul ne cèdent, ce qui nous a permis d'obtenir une validation de principe pour les évacuations. Nous avons également évacué 53 membres de l'escadre des missions spéciales de l'Ouzbékistan, avec la coopération du président ouzbek. Ces gens sont maintenant réinstallés aux États-Unis.
    Notre mission consiste à intervenir en cas de crise mondiale, pas seulement en Afghanistan, mais à l'échelle internationale.
    Nous nous spécialisons dans les évacuations par voie aérienne. Nos évacuations aériennes ont un code CAGE de l'OTAN. Grâce à notre longue liste de performances passées, nous pouvons atterrir et décoller dans n'importe quel pays du monde. Notre appareil affrété est petit, car il ne prend que 180 passagers. Ce n'est pas un avion commercial affrété. Nous n'évacuons que des personnes dont les déplacements ultérieurs ont été approuvés et dont l'itinéraire est clairement établi. Nous avons une équipe au sol. Nous disposons d'une équipe logistique qui a accès à une vaste base de données. Nous avons aussi une équipe du renseignement et un programme alimentaire en Afghanistan. Nous avons également une équipe de réinstallation, ainsi qu'une équipe qui s'occupe de la biométrie.
    Nous nous concentrons sur toutes les catégories, c'est‑à‑dire les orphelins et les mineurs non accompagnés, les femmes, les veuves, les groupes ciblés, les minorités vulnérables, les relations de longue date — les personnes qui ont des relations de longue date avec le gouvernement canadien et américain — et les missions diplomatiques. Nous menons actuellement une mission diplomatique très importante, car la quasi-totalité du cabinet afghan est sous notre responsabilité en ce moment.
    Nous évacuons des défenseurs humanitaires de première ligne. Nous avons un catalogue de con‑op — il s'agit de concepts d'opérations ou de missions — pour le Canada uniquement. Notre objectif est de recenser tous les obstacles et de trouver des solutions concrètes pour aller de l'avant. J'aimerais utiliser le temps qui m'est imparti pour parler de nos projets d'avenir.
    D'après ce que je comprends, nos objectifs sont la biométrie, les personnes sans papiers, les itinéraires, les évacuations par voie aérienne, les pays intermédiaires et le financement. À l'heure actuelle, nous sommes en mesure d'offrir des évacuations par voie aérienne à raison de deux vols par semaine, pour 180 personnes qui poursuivent ensuite leur voyage — par exemple des personnes qui ont une relation de longue date avec le gouvernement canadien et dont les demandes ont déjà été acceptées par IRCC.
    Monsieur le président, veuillez me faire savoir si je dépasse le temps qui m'est imparti, car j'ai la tête plongée dans mes notes.
(2055)
    Il vous reste 90 secondes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Pour les résolutions, mes recommandations concernent la collecte de données biométriques par l'entremise d'un entrepreneur ou d'un sous-traitant, peut-être pas une ONG qui effectue des évacuations, mais plutôt une tierce partie, soit à l'intérieur de l'Afghanistan ou peut-être sur un navire de croisière au port de Karachi, au Pakistan, pour établir un centre humanitaire flottant où l'on pourrait s'occuper de la biométrie et ensuite, éventuellement…
    La loi change lorsqu'on se trouve dans les eaux internationales, et on pourrait alors naviguer vers le Canada, ce qui serait économique.
    Je recommanderais de mettre en œuvre des mesures d'immigration similaires à celles utilisées pour l'Ukraine ou des mesures nouvelles et novatrices, car celles que nous avons utilisées jusqu'ici n'ont pas donné de très bons résultats.
    La seule mesure d'IRCC qui a donné de bons résultats est l'activité de coopération entre le Canada et les États-Unis qui a permis le passage sécuritaire au Canada des 5 000 réfugiés qui avaient été évacués par les États-Unis. Cette mesure a donné de très bons résultats. Je recommanderais donc à IRCC d'établir un autre partenariat avec le département d'État américain en vue d'aider 5 000 ou 10 000 autres réfugiés, puisque cette opération a été couronnée de succès.
    Par notre entremise, le Canada dispose d'une capacité d'évacuation par voie aérienne, grâce à notre code CAGE de l'OTAN, notre numéro DUNS et notre vaste expérience dans ce domaine. Au lieu de déplacer de 200 à 300 personnes par mois, nous sommes en mesure d'en déplacer 360 par semaine, selon notre plan de vol. Cela représente 360 personnes par semaine, 1 440 personnes par mois et 17 000 personnes par année.
    Je vous remercie beaucoup, madame Hansen. Vous avez terminé juste à temps.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Nous entendrons maintenant Mme Friba Rezayee, la représentante de l'organisme Women Leaders of Tomorrow. Elle a cinq minutes.
    Bonsoir, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître et de m'exprimer devant le Comité spécial sur l'Afghanistan aujourd'hui.
    Je m'appelle Friba Rezayee. Je suis née et j'ai grandi en Afghanistan. Je suis l'une des premières personnes afghanes…

[Français]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Pour des raisons de santé et de sécurité, il est présentement impossible pour les interprètes, qui travaillent vraiment très fort, de fournir l'interprétation des propos de notre chère témoin.

[Traduction]

    Encore une fois, je dois suspendre la séance pendant quelques secondes.
(2100)

(2105)
    La séance reprend. Nous verrons comment nous pourrons nous débrouiller.
    Je suis désolé, madame Rezayee. Nous préférerions qu'il en soit autrement, mais nous voulons simplement nous assurer que nous pouvons au moins poser des questions aux deux autres témoins.
    Il me faut le consentement unanime des membres du Comité. Les membres du Comité sont-ils d'accord?
    Je vous remercie.
    J'ai maintenant un meilleur casque. Est‑ce qu'il marche?
    Pouvons-nous entendre quelques mots de plus, s'il vous plaît?
    J'ai un bien meilleur casque. Il vaut 200 $.
    Non? Très bien. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Madame la greffière, la réunion peut se poursuivre. Le consentement est unanime.
    Nous reviendrons, à un moment donné, à Mme Rezayee.
    La parole est maintenant aux membres. Les questions peuvent commencer.
    Monsieur Hallan, vous disposez de cinq minutes. Nous vous écoutons.
    Monsieur le président, je suis censé remplacer M. Hallan. Il est pris ailleurs également. Êtes-vous d'accord?
    Très bien. J'avalise personnellement les observations de M. Spencer-Churchill, ayant passé au moins une année et demie en Afghanistan. J'en connais un bout sur la complexité de la question concernant le Pakistan et l'Afghanistan.
    Monsieur Spencer-Churchill, la situation ne souligne‑t‑elle pas que nous aurions dû essayer de sortir autant d'Afghans que possible du pays avant sa chute entre les mains des talibans?
    Loin de moi l'idée de critiquer la politique actuelle d'évacuation des Afghans qui ont coopéré avec les Forces armées canadiennes.
    J'ai voulu montrer, et je le répète depuis 20 ans, que les politiques qui ont précédé cette catastrophe ont constamment fait l'impasse sur le Pakistan. Pour ceux d'entre nous qui y ont travaillé, ça semblait inspiré par une politique. À de nombreuses conférences, j'ai soulevé la question. Je n'y ai jamais plus été invité. Je peux donc seulement supposer que c'est une sorte de conspiration.
    J'en comprends que, sur le plan militaire, les Forces canadiennes s'en sont remises en grande partie aux forces américaines qui, pour diverses raisons, n'entendaient pas céder sur l'exclusion du Pakistan.
    Quant aux organismes d'aide, j'ai simplement supposé qu'ils ne voulaient pas compliquer les choses. Tant qu'ils étaient subventionnés par le gouvernement canadien, ils étaient contents de ne pas devoir aborder la question pakistanaise.
    Il est certain que l'opinion du Pakistan n'influe en rien sur les efforts visant à aider les personnes qui se trouvent maintenant en Afghanistan.
(2110)
    Très bien. Merci.
    Monsieur Spencer-Churchill, pouvez-vous approcher un peu votre microphone de vos lèvres? Merci.
    Poursuivez, monsieur Ruff.
    Merci, monsieur le président. Je questionne maintenant Mme Hansen.
    Pouvez-vous en dire un peu plus sur l'importance et, peut-être, sur votre propre interprétation…? Il est bien dommage que les autres témoins ne puissent témoigner, parce que l'un de mes sujets de préoccupation, c'est les femmes, les enfants et les minorités visibles que les talibans persécutent. C'est aussi l'importance de faire sortir ces réfugiés ou ces Afghans de l'Afghanistan.
    Je crains que, suivant notre doctrine actuelle, nous atteignions les chiffres auxquels le gouvernement s'est engagé à l'égard de personnes qui ont déjà réussi à sortir sans danger de l'Afghanistan. Elles se trouvent peut-être encore dans un autre pays, ce qui n'est pas parfait, mais je crains vraiment pour ceux qui sont encore en Afghanistan.
    Allez‑y, madame Hansen.
    À vrai dire, dans ce que nous faisons, nous sommes dans le flou sur les moyens de les en faire sortir. Les humanitaires, les personnes vulnérables et les personnes à risque font partie des personnes les plus difficiles, actuellement, à sortir d'Afghanistan. Beaucoup n'ont pas de papiers ni de relations suivies avec le gouvernement canadien. L'accord conclu entre le Canada et les États-Unis sur les personnes évacuées et la création d'une trace écrite, avec le département d'État, qui rédigerait ses recommandations, ça me semblerait certainement une solution concrète.
    À ce que je sache, ces personnes ne se sont pas toutes passées tout de suite par le département d'État. Elles ne sont pas aux États-Unis, et les États-Unis ne les envoient tout simplement pas au Canada. Ces personnes sont encore en train de faire sortir leur famille d'Afghanistan; certaines sont en Turquie ou dans des pays intermédiaires. Ce n'est pas réservé aux personnes qui se trouvent dans un pays intermédiaire et qui pourraient être en sécurité pour le moment. Je crois que cet accord qui vise 5 000 personnes et qui, d'après moi, a fait le plein, c'est‑à‑dire de personnes de l'humanitaire et de personnes vulnérables ainsi que de personnes appartenant à des groupes et à des minorités ciblées, c'est le meilleur moyen pour les sortir de l'Afghanistan. Peut-être pouvons-nous mieux l'adapter à la sortie immédiate de personnes de ce pays plutôt que de pays intermédiaires.
    J'espère que ça répond à votre question.
    Oui, c'est…
    Merci beaucoup, monsieur Ruff, pour vos excellentes questions.
    Madame Zahid, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je partage mon temps avec M. Sidhu.
    Je voulais questionner Mme Rezayee. Si elle pouvait nous répondre par écrit ce serait vraiment génial. Elle a été une ardente avocate de l'instruction des femmes et des filles ainsi que de l'égalité des genres. Je voudrais connaître son point de vue sur ce que le Canada peut faire pour s'assurer que les jeunes Afghanes auront accès à l'éducation et à d'autres formes d'aide humanitaire. Si, en raison de problèmes d'interprétation, elle ne peut répondre, qu'elle nous réponde par écrit, ce serait excellent.
    Ma prochaine question est pour M. …
(2115)
    Est‑ce que les autres membres sont d'accord pour ce qui concerne la réponse écrite?
    Madame Kwan, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Qu'on m'éclaire. Le Comité a‑t‑il l'intention de réinviter Mme Rezayee? C'est ce que j'avais cru comprendre.
    Nous pouvons essayer, mais, si c'est acceptable, nous pouvons demander une réponse écrite. Si ça vous convient, ce serait parfait pour le moment. Si nous pouvons trouver une place, nous pourrons la réinviter, mais nos listes sont complètes.
    Est‑ce que ça signifie que si elle répond par écrit, on ne la réinvitera pas?
    Non. Avec un peu de chance, nous la réinviterons, mais, sinon, nous ne le ferons pas, si ça vous va.
    Eh bien, non. Je voudrais qu'elle revienne, parce que je tenais vraiment à entendre son témoignage.
    Je vous remercie, madame.
    Je demandais qu'elle nous renseigne.
    Je questionne maintenant M. Spencer‑Churchill. Peut‑il expliquer le rôle du Pakistan pour aider à sortir des Afghans de leur pays et pour leur réinstallation dans d'autres pays?
    Quel rôle préconiserait‑il pour le Canada dans l'évacuation des Afghans, particulièrement pour le grand nombre d'entre eux qui n'ont pas de passeport valide? Quel rôle le Canada peut‑il jouer pour les sortir de leur pays et comment les pays voisins peuvent‑ils l'y aider?
    Je n'ai pas de renseignements précis sur les réfugiés; mes antécédents sont manifestement l'examen de la situation générale. D'après moi, le Pakistan serait très bien disposé à aider le Canada, si le Canada le lui demandait, évidemment contre rétribution, pour le développement. On exagère souvent l'influence du Pakistan en Afghanistan, mais si c'est lié à de l'aide, le Canada doit se rappeler qu'il a pu se féliciter à tous les points de vue d'en avoir accordé au Pakistan, lequel est très susceptible de lui fournir ce dont il a besoin de la part des talibans. Évidemment, ça signifie que le Canada devra parler au gouvernement des talibans et lui conférer une certaine légitimité. Malheureusement, je n'ai pas plus de détails à ce sujet.
    Je vous en remercie.
    Je m'adresse rapidement à M. Spencer‑Churchill pour développer la question de ma collègue.
    Vous avez dit que vous avez fait beaucoup de recherche au Pakistan et dans la région. Pouvez-vous nous donner un aperçu de la manière par laquelle ce pays ou les pays voisins peuvent jouer un rôle élargi dans l'aide à nos efforts d'évacuation? Je sais que vous ne pouvez pas vraiment… Vous n'avez rien dit de précis sur les réfugiés, mais, sur les pays voisins, grâce à votre recherche dans la région…
    Le Pakistan, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, est un objectif extrêmement étroit. L'aide étrangère a constamment été accordée à l'Afghanistan, mais en éludant le problème principal, la reconnaissance de la frontière. Si quelqu'un permettait une ouverture au Pakistan, simplement en entamant un dialogue avec les Afghans, qui résistent depuis très longtemps à cette demande d'ordre politique du Pakistan, ce pays est très susceptible de normaliser ses rapports avec l'Afghanistan et il serait un intermédiaire très commode.
    Le principal problème dans les relations entre l'Afghanistan et l'Occident réside dans la perception de ce pays, qui paraît très religieux. Vous avez là les intérêts politiques de Takfiri, mais aucun parti religieux n'y a reçu plus de 5 % des suffrages aux élections fédérales. Dans l'assemblée antérieure, environ 20 % des députés avaient également la citoyenneté américaine, canadienne ou britannique. La classe politique adhère parfaitement aux valeurs libérales. Manifestement, elle se trouve dans une position stratégiquement inconfortable, mais le Pakistan est d'un abord beaucoup plus facile qu'on ne le dit souvent.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins. Malheureusement, une témoin a dû nous quitter.
    C'est extrêmement important que vous soyez ici ce soir. Je sais qu'il se fait tard. Je ne veux pas que vous blâmiez nos techniciens et nos interprètes, car ce n'est pas de leur faute. Ils travaillent extrêmement fort et il faut leur tirer notre chapeau.
    Monsieur Spencer‑Churchill, j'ai eu l'occasion de lire le document que vous avez envoyé au Comité. Vous n'y allez pas de main morte, vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère, vous n'épargnez personne.
    Le Canada devrait-il tenter de travailler plus sérieusement avec le Pakistan en ce qui a trait à ses relations avec l'Afghanistan? Est-ce en gros ce que vous nous dites ce soir?
(2120)
    Oui, c'est cela.
    Il est dommage que, pendant les 14 années où nous étions en Afghanistan, nous n'ayons pas conclu d'accords avec le Pakistan sur un grand nombre de sujets. Le grand problème, c'est que notre stratégie de développement n'avait pas de bon sens dès la première étape.
    Le défi, maintenant, est d'évacuer les gens et de rétablir les efforts de développement en Afghanistan. C'est encore possible de le faire, à mon avis. Je répète que j'ai beaucoup plus d'expérience en développement au Pakistan. Du temps de l'ancienne Agence canadienne de développement international, on avait même accès aux villages dans les secteurs du Pakistan les plus conservateurs culturellement. Ce n'est pas cela, le problème.
    La difficulté, c'est qu'on semble penser qu'il est illégitime de s'engager directement avec le gouvernement pakistanais. Or, mes vues sont différentes. J'ai eu une rencontre avec les six hauts-commissaires du Canada au Pakistan, et tous sont d'avis qu'il y a, en Amérique du Nord, une barrière culturelle à l'idée de s'engager avec le Pakistan.
    C'est important, ce que vous nous dites ce soir. Plusieurs témoins qui ont comparu devant ce comité nous ont dit qu'une présence canadienne sur le terrain, au Pakistan, serait bénéfique et simplifierait la venue de réfugiés ici. Donc, ce que vous nous dites est important.
    Quels seraient les avantages d'une meilleure présence diplomatique au Pakistan? Qu'est-ce qui y fait obstacle présentement?
    Me demandez-vous quels sont les avantages d'être sur place, au Pakistan?
    Oui, et je vous demande aussi quels sont les obstacles. Vous avez un peu parlé des obstacles culturels, mais y en a-t-il d'autres?
    Parmi les obstacles dont les hauts-commissaires m'ont fait part, il y a les barrières mises en place par nos alliés.
    Par exemple, au départ, le Canada avait un programme où les officiers du Pakistan s'entraînaient avec nos forces armées, comme ils s'entraînaient avec l'armée française et l'armée anglaise. Cependant, à cause des Américains, ce programme a été supprimé pendant plus de 10 ans.
    L'une des conséquences de ce programme est que, au Pakistan, l'armée est maintenant l'une des organisations qui appuient le plus la démocratie. Cela semble paradoxal, mais, chaque fois qu'il y a un coup d'État pour prendre le contrôle du gouvernement, l'armée essaie immédiatement de le renverser. Dans presque tous les cas, elle intervient en politique parce que le budget de la défense nationale est endommagé par la corruption des civils. Elle veut régler cela et en ressortir.
    Alors, notre influence au Pakistan s'exerçait fortement par l'entremise de cette organisation, mais ce programme a été annulé, puis renouvelé en 2015, si je ne me trompe pas. Le Canada agit donc un peu de façon schizophrénique: on ne sait pas quoi faire et on suit les conseils des mauvais alliés.
    Au fond, vous nous dites que, pour rééquilibrer les relations entre l'Occident et l'Afghanistan, le pays qui a un rôle central à jouer est le Pakistan, inévitablement.
    Oui, toujours, et c'est le cas sur plusieurs plans, que ce soit les réfugiés internationaux, la sécurité, le renseignement ou la lutte contre le terrorisme. Tout cela passe par le Pakistan.
    Ce qui intéresse notre comité ici, ce soir, c'est la crise humanitaire en Afghanistan. Logiquement, ce que vous nous dites, c'est que le Pakistan devrait jouer un rôle central et que le Canada ne fait pas son travail à cet égard présentement.
    C'est exact, et ce n'est pas parce que le Pakistan nous résiste. Je peux vous donner des exemples illustrant la présence pakistanaise qu'il y a déjà au Canada. La famille du commissaire qui occupe le troisième poste en importance au Pakistan habite à Oakville, en Ontario. Le chef adjoint de l'armée pakistanaise, qui était également ministre de l'Agriculture, a habité en Alberta pendant un an. Il y a donc déjà beaucoup de Pakistanais ici qui occupent des postes importants au Pakistan, mais qui ne sont pas reconnus.
(2125)
    Je vous remercie beaucoup de ces informations, monsieur Spencer‑Churchill.

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre excellente intervention.
    Sans plus attendre, vous disposez, madame Kwan, de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs exposés. Je m'adresse d'abord à Mme Hansen.
    L'un de nos problèmes immédiats est, bien sûr, que le programme du gouvernement canadien pour les réfugiés afghans exige d'eux qu'ils soient dans un pays tiers. Mais beaucoup sont coincés en Afghanistan et incapables de s'y rendre. Que proposez-vous alors pour que nous en aidions certains à se mettre en sûreté et à venir au Canada?
    Le nombre de pays intermédiaires, de pays tiers, se compte sur les doigts d'une main… Une telle opération équivaudrait à devoir atterrir à Kaboul.
    Le seul obstacle à ce pont direct entre l'Afghanistan et le Canada est la biométrie. Mais, particulièrement, si on ne considère que des pays intermédiaires, il y a le Pakistan. Il y a aussi les Émirats arabes unis où se trouve la Cité internationale humanitaire. Ils ont accepté d'accueillir des Afghans, s'ils trouvent un vol de l'Afghanistan jusqu'à la Cité humanitaire. Ils sont disposés à le faire si le gouvernement canadien veut bien les aider à résorber une partie de l'arriéré du traitement des dossiers dans la Cité humanitaire. En ce moment, plusieurs Afghans ont un vol pour le Canada. Ils ont accepté le déplacement. Ils ont un trajet bien défini, mais la seule entrave est l'obtention d'un vol vers les Émirats, où se fait la biométrie. Il y a là un consulat, un haut-commissaire, après quoi ils poursuivent leur route jusqu'au Canada.
    Le seul obstacle véritable est le vol et peut-être l'acquiescement du Canada à aider à résorber l'arriéré, attribuable à l'intervention de tous les groupes sans but lucratif, les groupes d'évacuation, qui ont ramassé des gens, les ont sortis et les ont laissés en panne dans les Émirats.
    Nous pouvons nous servir de la Cité humanitaire. J'ai la confirmation que c'est possible. Il suffit peut-être qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada dise qu'il réclame des catégories, par exemple 100 orphelins, 100 mineurs non accompagnés, 100 médecins, à son gré. Pour autant que les Émirats se voient aidés à résorber l'arriéré dans la Cité humanitaire, nous sommes autorisés à nous servir d'eux comme d'un pays intermédiaire.
    Les réfugiés pourraient s'y rendre grâce à un organisme sans but lucratif comme le nôtre ou peut-être un autre organisme canadien crédible, comme Aman Lara ou peu importe qui obtient les vols. Si le gouvernement finance les vols, parce que leur prix est un facteur… Leur financement est très difficile.
    C'est donc simplement une question de financement, de ramassage des réfugiés en Afghanistan et de leur transport vers les Émirats.
    Merci.
    Vous dites que vous avez des pièces justificatives. Pourriez-vous en communiquer copie à notre comité?
    J'ai reçu la confirmation par l'entremise d'une organisation des Émirats qui administre la Cité humanitaire et qui contrôle de 95 à 98 % des vols vers les Émirats. Je peux certainement obtenir pour vous la confirmation que les Émirats sont disposés à accueillir des particuliers là‑bas tant que nous les aiderons à libérer une partie des places prises dans la Cité humanitaire. J'obtiendrai pour vous ces renseignements.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Parmi les pays tiers, le Pakistan, manifestement, est un pays voisin.
    Monsieur Spencer-Churchill, vous avez dit que ce pays serait un éventuel auxiliaire du gouvernement du Canada pour aider les Afghans [difficultés techniques].
    Pour ce qui concerne la présence sur place, madame Hansen, comment les gens, particulièrement les femmes sans accompagnateur masculin gagnent‑elles ce pays tiers?
(2130)
    Il faut passer par des organismes financés par le gouvernement ou des donateurs, qui peuvent payer le déplacement. Ces organismes les font monter à bord pour le vol puis les transportent jusque dans le pays intermédiaire. Beaucoup de ces personnes sont engagées par des organismes sans but lucratif de réinstallation ou des organismes humanitaires, et c'est de cette manière qu'on les trouve et qu'on les fait figurer dans le document de bord. Je serai heureuse de vous communiquer plus de renseignements à ce sujet également.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie également, madame Kwan.
    Au nom du Comité, je remercie tous les témoins de s'être déplacés, Mmes Hansen et Rezayee, M. Spencer-Churchill.
    Je remercie également l'interprète, qui a dû affronter la situation.
    Monsieur Brunelle-Duceppe, je n'ai pas eu, directement ou non, l'intention de faire des reproches aux techniciens. J'ai simplement dit que nous bénéficierions de leur aide. En notre nom, je tiens à les remercier d'avoir affronté la situation qui, je le sais, était stressante.
    Chers interprètes et techniciens, madame la greffière et, bien sûr, chers témoins, nos invités d'aujourd'hui, veuillez accepter de notre part un gros merci.

[Français]

    Monsieur le président, je n'ai pas pensé cela une seule seconde. Ne vous inquiétez pas à ce sujet.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Bonne chance.
    La séance est levée.
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