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Je dirais que le changement s'est ressenti dans les façons de procéder, mais également sur l'essence de notre travail.
Pour ce qui concerne les façons de procéder, je crois que notre expérience a été similaire à celle des parlementaires. Nos interactions avec des groupes et des communautés disséminés partout au pays ont beaucoup diminué. Nous prenons des décisions et nous menons beaucoup d'autres processus par des moyens virtuels, comme c'est le cas pour les comités, et souvent à toute heure du jour ou de la nuit en raison de l'ampleur de la tâche et des répercussions de la pandémie. Il fallait faire vite et tout le monde était fatigué. Des fonctionnaires accomplissaient des tâches qui n'avaient pas été demandées. D'autres fonctionnaires subissaient une pression continue pour produire des résultats. C'était la même chose pour les ministres.
Pour ce qui a trait à l'essence, je dirais que personne n'a été ravi d'avoir à faire des analyses aussi rapidement. En fait, nous avons même jugé nécessaire, comme l'avait fait le gouvernement précédent durant la crise financière, d'avertir informellement le Bureau du vérificateur général que nous nous attendions à ce qu'il y ait des erreurs. Nous avons établi nos objectifs à l'avance pour que le Bureau du vérificateur général comprenne bien les contraintes dans lesquelles le travail a été fait.
Dans le cas qui nous occupe, si nous avions eu tout le temps voulu, je suis certain — c'est une hypothèse — que l'une des options qui auraient été envisagées pour la mise sur pied d'un tel programme aurait été d'accélérer le développement du Service jeunesse du Canada. Les circonstances commandaient une intervention plus rapide, avec le résultat que nous connaissons maintenant.
Je ne cherche aucunement à excuser les erreurs que nous avons pu faire collectivement ou qui feront peut-être surface. Je veux simplement vous expliquer le contexte dans lequel nous avons travaillé.
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Loin de moi l'intention d'établir une nouvelle théorie des conflits d'intérêts, mais lorsque des décisions sont prises par un décideur qui a un intérêt personnel qui n'a pas été divulgué, ce n'est pas acceptable parce que personne ne peut savoir sur quelle base ces décisions ont été prises. Que le décideur ait privilégié son intérêt personnel ou qu'il ait agi dans l'intérêt public, c'est impossible de le savoir. C'est pourquoi la Loi sur les conflits d'intérêts oblige les titulaires d'une charge publique à déclarer tout intérêt personnel, y compris leurs intérêts financiers et ce que beaucoup de Canadiens considéreraient comme des détails intimes concernant leurs affaires et leur famille. L'objectif est que leurs intérêts soient dévoilés.
Cette mesure n'élimine pas tous les risques de conflits d'intérêts, mais c'est l'une des façons habituelles de les aborder. La divulgation permet aux autres parties de déterminer par elles-mêmes s'il y a effectivement un conflit d'intérêts et, si c'est le cas, s'il a été réglé dans l'intérêt public.
Dans ce cas-ci, le a été le ministre de la Jeunesse au cours de la législature précédente et il a été associé assez étroitement à un organisme dont une partie des activités touchent les jeunes. Il n'y a donc rien de surprenant à ce qu'il ait eu des liens avec UNIS. La question de savoir si, en soi, cette association crée un conflit d'intérêts sera tranchée par le commissaire. Je crois que le premier ministre a indiqué, lors de son témoignage, qu'il ferait entièrement confiance à son jugement.
Je voulais simplement dire que durant toute cette période, il ne m'est jamais venu à l'esprit qu'il pouvait exister un intérêt personnel puisque l'association du avec UNIS et ses antécédents avec celui-ci était tout sauf secrets. C'était du domaine public. C'est pourquoi je n'ai pas pensé à dire au premier ministre que vu ses antécédents avec UNIS, il devait se retirer des discussions. C'était, je le répète, de notoriété publique.
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C'est intéressant parce que notre bureau a été inondé de demandes. Nous étions en lien avec les bureaux des ministres, mais jamais personne n'a mentionné qu'il y avait un problème avec le bénévolat. Nous avions un sérieux problème avec la difficulté des étudiants universitaires à trouver un emploi.
Je ne critique pas le Bureau du Conseil privé. On vous a imposé un programme déjà formaté par EDSC. Nous savons que Craig Kielburger avait approché , de même que la , et que le bureau du était impliqué. Ils ont refusé la première proposition et en ont demandé une deuxième.
Le 23 avril, le a annoncé un programme qui ressemblait étrangement à celui qu'avait proposé M. Kielburger. À compter de cette date, tout semble indiquer que son organisme était le seul joueur sur la glace.
Je veux vraiment savoir ce qui s'est passé, comment il se fait que les frères Kielburger, dont la situation financière est en chute libre, aient réussi à parler à du personnel dans trois bureaux de ministres et à soumettre une proposition, qui est pratiquement une copie conforme de celle qui a été annoncée par le , et comment ils en sont venus à conclure un marché de 900 millions de dollars.
Comment les paramètres qui leur ont permis de se retrouver seuls sur la glace, ont-ils... Est-ce que ce sont les ONG? Est que c'est UNIS qui a élaboré les paramètres, en suivant les conseils que leur ont donnés la et la ? Est-ce que c'est ce qui s'est passé?
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Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, Canadiens et Canadiennes, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis accompagnée de ma sous-ministre déléguée principale, Gina Wilson. Je vais la désigner comme mon adjointe.
Nous sommes ici, à votre demande, pour vous fournir des renseignements sur les mesures ayant été mises en place par le gouvernement fédéral pour éviter, atténuer et prévenir les conflits d'intérêts. Ces mesures s'appliquent aux politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contributions et autres dépenses.
J'aimerais tout d'abord souligner que le gouvernement du Canada s'est engagé à faire preuve d'ouverture et de transparence dans sa gouvernance. Ce que je veux dire par cela, c'est que le gouvernement donne à tous les Canadiens largement accès aux données et aux renseignements en sa possession. En effet, depuis 2014, la Directive sur le gouvernement ouvert promeut la transparence et la reddition de comptes dans tous les ministères.
À titre de ministre de la Diversité et de l'Inclusion et de la Jeunesse, j'ai reçu une lettre de mandat très claire du . On peut en prendre connaissance en ligne. Elle énonce qu'à l'instar de tous mes collègues du Cabinet, je me suis engagée à former un gouvernement transparent, honnête et redevable aux Canadiens; un gouvernement qui respecte les normes d'éthique les plus rigoureuses; qui porte une attention soutenue à la gestion des fonds publics et observe la plus grande prudence dans ce domaine. Ces valeurs me guident chaque jour dans mon travail. C'est vrai en ce qui me concerne, et ça l'est également pour mes collègues, et j'espère que vous admettrez avec moi que ça l'est aussi pour les fonctionnaires de mon ministère. Tous les ministres ont reçu ces mêmes directives dans leur lettre de mandat, et nous sommes tous assujettis aux mêmes lois.
Quel que soit le rôle qui nous a été attribué, des mécanismes ont été mis en place pour nous guider. Tous les députés sont tenus de respecter le Code régissant les conflits d'intérêts des députés. Ministres et secrétaires parlementaires doivent aussi se conformer aux règlements et aux mesures prévus dans la Loi sur les conflits d'intérêts. Tous les membres de notre personnel doivent aussi respecter les normes de probité et d'intégrité les plus strictes énoncées dans les Politiques à l'intention des cabinets des ministres.
C'est dans ce contexte que je remplis le mandat qui m'a été confié et qui me passionne tellement, c'est-à-dire de bâtir un pays plus ouvert, plus diversifié et plus inclusif dans lequel tous les Canadiens ont des chances égales de réussir.
Mes responsabilités comprennent aussi les politiques et les programmes à l'appui des personnes et des jeunes de la communauté LGBTQ2. Il s'agit d'un vaste mandat qui nécessite la collaboration avec plusieurs ministres et ministères, et plus particulièrement avec Emploi et Développement social Canada, Patrimoine canadien, Femmes et Égalité des genres Canada, Santé Canada, Sécurité publique Canada et Justice Canada.
Les fonctionnaires de tous ces ministères sont également tenus de respecter des règles strictes en matière d'intégrité. Ils doivent tous se conformer aux valeurs de la fonction publique et au code d'éthique du secteur public. Les fonctionnaires d'Emploi et Développement social Canada qui m'appuient, notamment dans le cadre du programme Service jeunesse Canada, sont régis par ce code de même que l'ensemble du personnel de Patrimoine canadien qui me soutient dans la prestation de programmes visant à promouvoir le multiculturalisme et à lutter contre le racisme. Ils reçoivent tous une formation à cet égard. Par ailleurs, les employés qui participent à la prestation des programmes de paiements de transfert reçoivent une formation supplémentaire pour les aider à repérer les conflits d'intérêts potentiels et à les gérer. Il faut également souligner que tous les Canadiens qui présentent une demande d'aide financière à titre individuel et tous les organismes qui font de même sont tenus de divulguer tout conflit d'intérêts potentiel lors de la demande.
La distribution de l'aide financière est régie par la Loi sur la gestion des finances publiques et le gouvernement fédéral, dans son ensemble, est assujetti à des procédures de surveillance et de reddition de comptes établies par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Sans les énoncer toutes, j'aimerais mentionner notamment la politique de gestion financière, la politique sur les paiements de transfert et les politiques sur les résultats, l'évaluation et l'audit interne.
Contrairement à l'image que veulent en donner les conservateurs, la politique sur les paiements de transfert, en particulier, permet au gouvernement de s'assurer que les paiements de transfert sont gérés de manière à respecter les principes de saine gérance et les niveaux les plus élevés d'intégrité, de transparence et de responsabilisation. Les programmes du gouvernement sont également régis par des conditions approuvées par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Le Plan d'action national de lutte contre le racisme, par exemple, comprend des conditions visant à garantir que tous les organismes ont un accès égal à l'aide financière. Dans ce cas précis, nous sommes tenus de publier les lignes directrices du programme au moins six semaines avant la date limite pour la présentation des demandes. Il existe aussi des directives entourant la communication avec les demandeurs d'aide financière.
Permettez-moi d'aborder brièvement quelques points qui devraient à mon avis présenter un intérêt pour le Comité.
Le premier est la gestion des risques. La Loi sur la gestion des finances publiques nous aide à établir un juste équilibre entre les décisions à haut risque qui nécessitent l'intervention de la haute direction, et celles qui sont de nature plus opérationnelle. Les modèles de prise de décision en fonction du risque nous permettent d'évaluer les risques liés, entre autres choses, aux demandeurs de financement et aux activités que l'on envisage de financer. Ils réduisent les coûts relatifs à la prestation de programmes, allègent le fardeau administratif et réduisent le temps requis pour aviser les bénéficiaires.
Le deuxième est le conflit d'intérêts. J'ai déjà abordé le sujet, et j'y reviens parce que c'est important. Des mécanismes ont été mis en place dans tous les ministères afin d'éviter le risque de parti pris ou de conflit d'intérêts. À Patrimoine canadien, par exemple, la décision d'approuver une subvention ou une contribution n'est jamais prise par une seule personne. En plus d'effectuer des évaluations internes régulières, on peut demander des examens par les pairs ou des examens par des comités internes ou externes. Les employés du gouvernement peuvent aussi travailler de concert avec le Bureau des valeurs et de l'éthique afin d'analyser toute situation susceptible de présenter un conflit d'intérêts ou l'apparence de conflit d'intérêts. Il faut aussi mentionner l'exigence de divulguer la participation d'anciens fonctionnaires qui sont assujettis aux directives régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat.
Le troisième est les contrôles internes. En plus des contrôles gouvernementaux tels que la politique sur la sécurité du gouvernement, plusieurs ministères sont dotés de cadres de contrôle interne qui décrivent les rôles et les responsabilités en matière de gestion financière. Ces cadres sont conçus pour offrir une assurance raisonnable que les ressources publiques sont utilisées avec prudence et que les processus de gestion financière sont efficaces et efficients.
Le quatrième est la transparence et la reddition de comptes. Par l'intermédiaire du portail du gouvernement ouvert à Canada.ca, tous les Canadiens peuvent prendre connaissance des subventions et contributions qui ont été accordées. Les Canadiens peuvent aussi consulter les divers sites Web ministériels pour obtenir des renseignements sur les plans, les résultats, les coûts engagés, les contrats attribués, les consultations et les évaluations effectuées, ainsi qu'une foule d'information sur les représentants du gouvernement et du secteur public. Les lettres de mandat et la documentation de transition peuvent aussi être consultés librement.
Comme l'a indiqué le greffier du Conseil privé dans son 26e rapport annuel, les états financiers réalisés par la fonction publique du Canada font l'objet de « vérifications concluantes et sans réserve » depuis vingt ans. Elle s'est classée au premier rang à égalité avec celle du Royaume-Uni selon le Baromètre des données ouvertes 2018. Elle est reconnue internationalement comme l'une des plus efficaces. J'aimerais reconnaître et souligner le travail qu'elle accomplit.
J'aimerais aussi conclure par un exemple concret qui illustre le raisonnement qui sous-tend toutes ces mesures et ces précautions.
En mai dernier, en réponse aux effets dévastateurs de la pandémie de COVID-19, le gouvernement du Canada a adopté une série de mesures pour venir en aide aux individus et aux organismes dans de nombreux secteurs de notre économie. Pour ma part, j'ai insisté pour que mes programmes soient adaptés, soit en rationalisant les processus ou en accélérant les paiements, afin de soutenir les organismes qui font progresser le multiculturalisme, la diversité, l'inclusion et les occasions favorables pour les jeunes du Canada. Grâce aux mécanismes rigoureux qui encadrent nos actions, nous avons pu réagir rapidement et efficacement aux besoins pressants des Canadiens. Mais nous ne sommes pas encore tirés d'affaire, et il reste encore beaucoup de travail à accomplir.
Nous nous sommes adaptés à la situation sans faire de compromis sur la rigueur, et tous ensemble nous continuons de bâtir un gouvernement qui est ouvert et transparent pour tous les Canadiens.
Madame la présidente, mesdames et messieurs, je vous remercie de votre attention, et je suis prête à répondre à vos questions. J'ai essayé de limiter la durée de mon exposé afin que nous puissions répondre au plus grand nombre de questions possible.
Voici le problème. On vous a posé une question très simple, mais bien entendu, nous avons le compte rendu. C'est dans le compte rendu. En fait, bien entendu, vous ne pouviez pas parler de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant le 17 avril parce qu'elle n'existait pas encore. On en a fait l'annonce seulement le 22 avril. Encore une fois, c'est le fait que vous coupiez les cheveux en quatre qui m'exaspère.
Maintenant, faisons un saut dans le temps, parce que vous nous avez dit aussi que Rachel Wernick en avait suggéré l'idée. Elle nous a dit que les fonctionnaires lui avaient suggéré de faire les premiers pas, mais c'est plutôt le lien entre Craig Kielburger et elle-même que je souhaite porter à votre attention. Il lui adresse un courriel — dans lequel il se présente — et lui déclare alors, à la lumière de la réunion qu'il a eue avec la , « Dans cette optique, nous proposons deux programmes — et nous pourrions assurer la prestation des deux ou d'un seul de ces programmes ». Vous êtes le laissez-passer de Craig Kielburger.
Je ne vois pas en quoi votre apparition lors d'un événement WE dans un auditorium est pertinente dans les circonstances, alors que c'est le 17 avril que vous avez une réunion avec Craig Kielburger. Vous ne nous en avez pas parlé. Il a fallu que cela sorte dans les médias. Le fait est que Craig Kielburger se sert de vous pour se présenter à Rachel Wernick. Il lui dit qu'il a non seulement un programme, mais qu'il en a même deux. Et que ces programmes sont prêts. Que s'est-il passé au cours de cette conversation pour les inciter à présenter deux programmes plutôt qu'un seul?
N'hésitez pas à m'interrompre à tout moment. Je ne m'en formaliserai pas; au contraire, je trouve cela utile.
Bonjour à tous. J'aimerais commencer par remercier le Comité de me permettre de participer à la réunion au téléphone. Cela me permet d'utiliser mon logiciel pour l'accessibilité et de participer de manière plus significative dans les deux langues, tout en ayant la possibilité de consulter mes notes d'allocution.
Je suis accompagnée du sous-ministre délégué Benoît Robidoux d'EDSC. J'espère que ma participation vous sera utile.
Si j'ai bien compris, d'après la motion qui a été adoptée par ce comité, vous êtes en train d'examiner les mesures qui sont en place, comme vous l'avez dit, pour éviter et prévenir les conflits d'intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contribution et autres dépenses. Plus précisément, je comprends que vous vous servez à titre d'étude de cas des apparitions publiques de , de Sophie Grégoire Trudeau, de Margaret Trudeau et d'Alexandre Trudeau. D'entrée de jeu, je dirai que je n'avais jamais entendu parler auparavant des apparitions publiques de Margaret Trudeau ou d'Alexandre Trudeau pour l'organisme UNIS ou pour d'autres organismes.
Je sais que Margaret Trudeau fait la promotion de la santé mentale et du bien-être, et j'admire sa passion pour cet enjeu important. Je sais que le et Sophie Grégoire Trudeau ont fait des apparitions publiques lors d'événements liés à UNIS dans le passé, et je considérais que cela était de notoriété publique. Tous deux font la promotion du leadership des jeunes et de l'autonomisation des jeunes depuis de nombreuses années.
Personnellement, j'ai fait une apparition publique lors d'un événement de l'organisme UNIS en novembre 2016, à Vancouver. J'ai parlé devant des milliers de jeunes du pouvoir de l'inclusion et des choix qu'ils peuvent faire dans la vie de tous les jours pour s'assurer que personne n'est laissé pour compte, en particulier les personnes handicapées. Je n'ai pas été rémunérée pour cette conférence, et je n'ai pas réclamé le remboursement de mes frais.
À titre de députée et de ministre du Cabinet, je suis très consciente de mes obligations au titre du Code régissant les conflits d'intérêts des députés et de la Loi sur les conflits d'intérêts. Je prends aussi très au sérieux la gestion de mes déclarations publiques et les exigences permanentes en matière de rapports.
Je n'offre aucune excuse ni justification pour le ou pour le qui ne se sont pas récusés lors des discussions et de la prise de décision entourant le choix de l'organisme UNIS pour assurer la prestation de la BCBE. Les deux ont présenté leurs excuses et reconnu qu'ils auraient dû se récuser. Par ailleurs, le commissaire à l'éthique mène actuellement une enquête à ce sujet, et les deux s'y prêtent volontiers.
Pendant cette période de pandémie, le rythme et l'ampleur de la prise de décisions sont sans égal. En tant que ministre de l'Emploi, je me suis retrouvée au centre de notre réponse à la pandémie. Pendant des mois, notre comité du Cabinet sur la COVID s'est réuni jour après jour pour planifier et mettre en œuvre notre intervention d'urgence. Le Cabinet se réunissait lui aussi régulièrement pendant plusieurs heures à la fois. Tous les jours, nous devons prendre des décisions aussi variées que celle de fermer la frontière ou d'organiser la distribution de l'EPI ou encore d'envoyer les forces armées dans les établissements de soins de longue durée parce que nos personnes âgées y meurent.
Mes propres responsabilités comprenaient notamment la PCU, le programme Emplois d'été Canada, les travailleurs étrangers temporaires, le soutien aux personnes handicapées et diverses mesures destinées aux étudiants. Nous avons exercé nos activités en respectant le principe consistant à offrir aux Canadiens de l'aide rapidement et de manière fiable.
Nous savions dès le départ que les choses ne seraient pas parfaites, et nous étions prêts à rectifier le tir, au besoin. Le temps manquait pour mettre les programmes à l'essai ou pour organiser des projets pilotes. Nous devions comprendre les limites des systèmes existants et travailler à l'intérieur de ces limites. Tout nouveau programme devait être simple. J'ai énormément de respect pour nos fonctionnaires, avec lesquels nous avons travaillé sans relâche. Ils ont accompli plus que leur devoir pendant cette période difficile.
Ces derniers mois, nous avons fourni une aide financière aux Canadiens par l'intermédiaire de trois voies très importantes. Premièrement, une aide financière directe comme celle de la PCU et de la PCUE et les compléments apportés à l'Allocation canadienne pour enfants, à la TPS et à la SV. Deuxièmement, pour les provinces et les territoires, je pourrais vous donner l'exemple du complément salarial pour les travailleurs essentiels. Et troisièmement, nous avons collaboré avec des tierces parties à titre d'intermédiaires possédant de vastes réseaux et de bons antécédents. Ces tiers pouvaient assurer la prestation des programmes rapidement et venir en aide aux personnes d'une manière impossible à reproduire par le gouvernement. À titre d'exemple, nous avons demandé aux Fondations communautaires du Canada, à la Croix-Rouge et à Centraide d'assurer la prestation de notre Fonds d'urgence pour l'appui communautaire. Et nous avons aussi collaboré avec Hébergement femmes Canada pour assurer la distribution d'une aide financière aux refuges pour femmes des quatre coins du pays.
Je vous cite les exemples du Fonds d'urgence pour l'appui communautaire et d'Hébergement femmes Canada dans le but de situer en contexte la décision de confier la prestation de la BCBE à l'organisme UNIS dans le cadre d'une entente de contribution sans appel d'offres. Il n'y a eu aucun appel d'offres dans l'un et l'autre de ces cas, parce que l'on a déterminé que ces organismes pouvaient avec efficacité et efficience mettre l'argent entre les mains des personnes et des organismes qui en avaient besoin tout en veillant à la reddition de comptes par le prestataire du programme. Les fonctionnaires d'EDSC peuvent fournir des renseignements précis sur les mesures de surveillance et de reddition de comptes intégrées dans ces ententes de contribution, y compris l'audit, les contrôles financiers, la surveillance et les exigences en matière de rapports.
À titre de ministre de l'Emploi, je suis responsable des mesures relatives à l'emploi étudiant, de la PCUE et des changements apportés au Programme canadien de prêts et bourses aux étudiants. La ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse est responsable de la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant compte tenu de sa responsabilité à l'égard de Service jeunesse Canada. Nos responsabilités respectives sont très bien définies dans nos lettres de mandat.
De jeunes Canadiens et des groupes d'étudiants nous ont fait savoir très clairement qu'ils se retrouvaient devant un été sans beaucoup de perspectives d'emploi et devant la possibilité réelle de ne pas pouvoir retourner aux études à l'automne. Ils avaient besoin d'un soutien au revenu, d'une hausse des prêts et bourses, et d'emplois. Ils souhaitaient aussi pouvoir se rendre utiles dans leur collectivité. Nous avons examiné les programmes existants afin de déterminer comment nous pourrions les améliorer ou en tirer parti. Le 22 avril, le a annoncé un train de mesures d'une valeur de 9 milliards de dollars pour les étudiants. En tant que ministres, nous avons alors retroussé nos manches et commencé à fournir les mesures relevant de nos portefeuilles respectifs. Pour ma part, je me suis concentrée sur les prêts étudiants, sur l'emploi et les prestations. Cela représentait une somme de travail considérable qui comprenait notamment une nouvelle législation et des modifications réglementaires. La première fois que j'ai entendu parler de la recommandation de l'organisme UNIS pour assurer la prestation de la BCBE, le 5 mai, je me préparais en vue d'assister à une réunion du Comité du Cabinet sur la pandémie de COVID. C'était le jour même où on a discuté de la proposition. J'ai compris que le but de la BCBE était d'offrir aux jeunes gens des possibilités significatives de faire du bénévolat au sein de leur collectivité et de venir en aide au secteur sans but lucratif en fournissant des ressources qui manquaient cruellement.
Compte tenu de la vitesse, de la portée et de l'échelle du programme, j'étais profondément convaincue que l'on avait besoin d'une tierce partie pour la mettre en œuvre. En tant que ministre responsable d'EDSC, je savais à quel point la fonction publique est sollicitée, et je savais ce qu'elle pouvait absorber ou non comme charge de travail. L'organisme chargé d'assurer la prestation de ce programme assumerait la tâche de sélectionner, accueillir, former et encadrer de jeunes Canadiens pendant ces importants mois d'été. Il devrait aussi faire le suivi des heures de bénévolat et distribuer les bourses. Je peux confirmer que la proposition de la BCBE était inscrite à l'ordre du jour de la réunion du Cabinet le 8 mai, mais qu'elle en a été retirée. Je n'ai pas participé aux discussions ayant conduit à son retrait de l'ordre du jour ni à celles relatives à la demande du pour que l'on vérifie si on avait fait preuve de diligence raisonnable, étant donné que ce dossier ne me regardait pas. Comme vous le comprendrez, je ne peux vous communiquer le contenu des discussions qui ont eu lieu lors de la réunion du Cabinet le 22 mai au sujet de la BCBE en raison de la confidentialité des délibérations du Cabinet. Mais comme vous le savez, le Cabinet a décidé d'aller de l'avant avec la recommandation de signer l'entente de contribution avec UNIS en vue d'assurer la prestation de la BCBE.
En conclusion, je déclare que la BCBE visait à offrir un moyen novateur d'offrir de l'aide aux étudiants, aux organismes sans but lucratif et aux collectivités, alors que plus que jamais le Canada a réellement besoin d'idées audacieuses et de solutions novatrices. Même si l'organisme UNIS n'offre plus le programme, nous demeurons tout aussi engagés à venir en aide aux jeunes et aux organismes sans but lucratif. Je peux assurer tous les membres de ce comité que notre gouvernement prend ses responsabilités en matière d'éthique très au sérieux. Nous n'avons pas été parfaits. Je réitère que tant le que le ont présenté des excuses pour ne pas s'être récusés. Je regrette que cette situation ait détourné l'attention du sujet sur lequel nous voulions justement l'attirer.
Merci.
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Je sais que l'on s'est beaucoup interrogé depuis quelques semaines sur les raisons pour lesquelles Emplois d'été Canada n'avait pas été mandaté pour mener ce programme. Vous savez, nous avons modernisé Emplois d'été Canada pour qu'il reflète les réalités engendrées par la pandémie de COVID. Nous avons aussi augmenté le financement pour que le nombre d'emplois passe de 70 000 à 80 000 cette année. Nous avons créé des dizaines de milliers d'autres emplois dans le cadre d'autres programmes d'emplois étudiants. Je sais à quel point ce programme donne de bons résultats. Je sais aussi que les entreprises l'apprécient, que les étudiants l'apprécient, et que les députés l'apprécient tout autant.
Voici comment fonctionne Emplois d'été Canada. Nous fixons des objectifs, nous évaluons les emplois par rapport à ces objectifs, nous finançons les emplois qui remplissent ces objectifs, et puis nous affichons les emplois. Cependant, nous n'aidons pas les personnes à trouver ces emplois. Lorsque EDSC veut offrir un soutien plus direct aux personnes, nous le faisons toujours par l'intermédiaire d'un tiers au moyen d'une entente de contribution. Il suffit de penser au programme de la Stratégie emploi et compétences jeunesse, ou SECG. Nous finançons des organismes locaux pour aider des jeunes à risque à trouver un emploi et à s'épanouir dans cet emploi.
La BCBE est un programme différent d'Emplois d'été Canada. Le but, comme je l'ai indiqué dans ma déclaration liminaire, consistait à offrir aux jeunes gens des possibilités intéressantes, mais aussi à aider les organismes sans but lucratif à combler leurs besoins en matière de capacité. L'organisme qui serait chargé de dispenser ce programme devrait effectuer énormément d'entrevues individuelles avec des jeunes, notamment pour la sélection, l'accueil et l'intégration, la formation et l'encadrement. Il devrait en outre faire le suivi des heures de bénévolat et distribuer les bourses.
En plus de présenter un problème en matière de capacité, comme je l'ai déjà dit, Emplois d'été Canada n'a pas été conçu pour mener ce genre de programme. Quant à EDSC, ce genre de programme ne fait pas partie de ses activités habituelles. J'espère que vous comprenez.
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Je vous remercie de la question.
[Traduction]
Je prends mes responsabilités très au sérieux, en tant que députée et en tant que membre du Cabinet. J’ai siégé au conseil d’administration du Centre canadien pour l’éthique dans le sport. En fait, j’ai donné un cours d’éthique au Collège Algonquin, à Ottawa. Je sais parfaitement quelles sont mes obligations en matière de divulgation. Je connais les dispositions de la Loi sur les conflits d’intérêts et du Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Je me soumets à des normes rigoureuses, et j’attends la même chose de mes collaborateurs.
Avec mon équipe, nous examinons systématiquement si ma participation à un dossier ou à une décision représente un conflit d’intérêt réel ou perçu. Cela permet de protéger mon intégrité personnelle, mais aussi le processus qui conduit à ces décisions. En matière de divulgation, j’ai toujours respecté mes obligations.
Au risque de me répéter, je dirai que, lorsque nous occupons de nouvelles fonctions, nous arrivons toujours avec des antécédents. Nous connaissons toutes sortes de gens. Nous avons tous eu des affiliations, des relations et des amitiés antérieures. J’ai consulté le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique de façon proactive, lorsque j’avais des questions à poser ou lorsque je voulais être sûre que la moindre circonstance ne pouvait pas être interprétée comme un conflit d’intérêts perçu, même de loin. Je me suis investie dans cette fonction parce que cela m’intéressait et parce que l’éthique est un souci personnel constant.
Comme je l’ai dit, j’ai participé à un rassemblement UNIS. C’était à Vancouver, en novembre 2016. J’étais accompagnée de mes deux filles. Nous y sommes restées environ une demi-heure. Je n’ai pas été rémunérée et je n’ai pas soumis une note de frais.
Pour être franche avec vous, je vous dirai que la fonction de ministre n’est pas facile pour la famille, car elle nous en tient éloignés. Quand je me suis fait élire, mes plus jeunes enfants avaient deux et cinq ans, et avec mon mari, nous avions décidé que nous allions faire ça en famille et que nous allions expliquer à nos enfants pourquoi j’allais devoir m’absenter aussi souvent. Lorsque j’ai eu l’occasion de prendre la parole à un rassemblement UNIS, je me suis fait accompagner de mes deux filles pour leur montrer en quoi consistait mon travail.
C’était aussi très important pour moi de parler de l’inclusion à l’occasion de ce rassemblement, car j’avais la possibilité de m’adresser à des milliers d’enfants et de jeunes et de leur montrer que c’était à eux de faire le choix d’inclure. Moi-même, quand j’étais enfant souffrant d’un handicap, je n’étais pas incluse. D’autres députés ont fait des discours très percutants lors de ces rassemblements. , quand il y est allé, a emmené Jaden avec lui pour parler de l’autisme. C’était très percutant. J’ai beaucoup de respect pour Mike, parce qu’il a su parler de son expérience, ce qui rend les choses plus faciles pour les autres familles. Je reconnais que, après avoir vu d’autres le faire, j’ai peut-être été trop enthousiaste à l’idée de participer à ce rassemblement avec ma famille.
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Volontiers, madame la ministre.
Madame la présidente, la majorité des vérifications qu’il convient de faire au sujet de l’organisation, de sa capacité à administrer le programme et de tous les détails dont nous avons discuté jusqu’à présent sont effectuées dans le cadre de l’entente de contribution. Comme l’ont dit d’autres témoins aujourd’hui, tout cela prend du temps, et nous avons une équipe spéciale, à EDSC, qui ne s’occupe pratiquement que des ententes de contribution. Ce sont donc des spécialistes dans ce domaine. Ils sont aidés dans cette tâche par le contrôleur et par les services juridiques, afin de s’assurer que les Canadiens en ont vraiment pour leur argent.
Les ententes portent notamment sur les mécanismes de reddition de comptes et de surveillance. Elles imposent également des exigences en matière d’audit, de contrôle financier, et de rapports à soumettre. De façon générale, à partir du moment où un programme est approuvé, assorti des objectifs et des résultats escomptés, il faut beaucoup de temps à l’équipe de spécialistes pour élaborer une entente, et dans le cas qui nous intéresse, une entente avec l’organisme UNIS. Toutes les mesures de contrôle sont prévues dans l’entente.
Avant cette étape, il ne s’agit pas vraiment des mêmes contrôles. Le rapport qui est fait à ce moment-là, et pas avant, est celui auquel on peut se reporter au moment de la publication des documents, pour voir comment se font ces contrôles. Mais avant cela, il s’agit davantage de vérifier que l’organisation est en mesure d’administrer un programme comme celui qui a été annoncé le 22 avril. En a-t-elle la capacité? C’est une vérification très pointue, et je n’y ai pas participé, mais le mouvement UNIS étant l’une des plus grandes organisations de bienfaisance à but non lucratif au Canada à s’occuper des jeunes, je n’ai pas été étonné qu’elle ait été sélectionnée, et c’est la raison pour laquelle nous en avons parlé dans les discussions préliminaires auxquelles j’ai participé.
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Je vous remercie de vos commentaires.
Je dirai que oui, il y avait la pandémie et il y avait beaucoup de choses à faire très vite. Mais nous n’aurions pas dû baisser la garde. C’est regrettable. En attendant, cela ne retire rien, à mon avis, aux autres mesures fantastiques qui ont été prises pour les étudiants et pour les Canadiens en général.
Mais j’estime qu’ils auraient dû se récuser. Ils ont présenté leurs excuses, et je les accepte. Je pense que nous en avons tiré des leçons et j’espère sincèrement que nous allons maintenant nous remettre à la tâche afin de répondre aux besoins des Canadiens, ce qui ne veut pas dire que nous avions cessé de le faire. Au contraire, nous avons maintenu le cap, même pendant toute cette polémique.
Il était important que nous assumions la responsabilité de ce manquement. Comme je l’ai dit, nous avons baissé la garde et nous n’aurions pas dû. Mais maintenant, il faut passer à autre chose.
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Madame Dawson, je suis ravie de vous voir.
Nous vous remercions de votre patience. Hier, vous avez attendu pendant 45 minutes pendant la réunion de notre comité, après avoir déjà attendu une demi-heure. Nous avons eu une discussion très intéressante avec vous hier, et en plus de vous remercier de votre patience, nous vous remercions aussi d’avoir accepté de revenir parmi nous aujourd’hui.
Madame Dawson, encore merci. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Madame Dawson, comme vous le savez, le 22 juillet, le Comité a adopté la motion suivante: « Que, conformément à l’article 108(3)h) du Règlement, le Comité examine les mesures qui sont en place pour éviter et prévenir les conflits d’intérêts dans les politiques du gouvernement fédéral en matière de marchés, de contrats, de subventions, de contributions et autres dépenses. »
Madame Dawson, nous vous avons demandé de comparaître aujourd’hui pour parler de cette motion, étant donné que l’éthique est votre spécialité et que vous avez jadis occupé la fonction de commissaire à l’éthique.
Vous disposez de 10 minutes pour faire votre déclaration liminaire. Ensuite, les députés auront la possibilité de vous poser des questions.
Madame Dawson, je m’efforce toujours de le faire avec courtoisie, mais il se peut que je sois obligée d’interrompre une réponse à une question, car notre temps est limité, et il faut que tous les députés aient la possibilité de poser leurs questions aujourd’hui.
Madame Dawson, sans plus tarder, je vous donne la parole.
Vous avez 10 minutes pour votre déclaration liminaire.
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Merci beaucoup. Je ne sais pas si j’aurai besoin de 10 minutes, mais j’ai préparé quelques commentaires.
Je vous remercie de m’avoir invitée à comparaître devant votre comité. C’est parce que j’ai beaucoup de respect pour le Parlement et ses différentes facettes que j’ai accepté votre invitation. J’espère pouvoir vous être utile en répondant à vos questions.
J’ai été la première commissaire à être nommée en vertu de la Loi sur les conflits d’intérêts. Celle-ci est entrée en vigueur en juillet 2007. J’ai occupé ces fonctions pendant 10 ans et demi. J’ai pris ma retraite il y a deux ans et demi. J’ai l’impression que c’était hier.
Le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique administre la Loi sur les conflits d’intérêts et le Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Ces deux documents se ressemblent beaucoup, à l’exception de certaines dispositions. Aujourd’hui, nous allons parler principalement de la Loi.
Les titulaires de charge publique assujettis à la Loi sont notamment les ministres et les secrétaires parlementaires, qui sont aussi assujettis au Code régissant les conflits d’intérêts des députés. La Loi s’applique également à la plupart des personnes, à quelques exceptions près, nommées par le gouverneur en conseil, comme les hauts fonctionnaires et les employés du Sénat, de la Chambre des communes et de la Bibliothèque du Parlement, ainsi que les juges.
Le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique a pour rôle de donner des conseils, d’informer, de recevoir des informations provenant de titulaires de charge publique, certaines de ces informations étant rendues publiques, et de mener des enquêtes en cas de contraventions présumées de la Loi. Lorsque j’étais commissaire, j’estimais que notre rôle le plus important était de conseiller les titulaires de charge publique afin qu’ils ne se retrouvent pas en contravention de la Loi.
Les titulaires de charge publique qui exercent leurs fonctions à plein temps ou qui touchent un salaire annuel — dans la Loi, on les appelle des titulaires de charges publiques « principaux » — sont tenus de fournir des informations personnelles au commissaire, à intervalles réguliers, pendant toute la durée de leur mandat. Par exemple, lorsqu’ils sont nommés, ils doivent déclarer tous leurs biens, leur passif, leur rémunération antérieure et leur emploi antérieur. Chaque année, ils doivent actualiser ces informations, dont un résumé est rendu public.
Chaque nouveau titulaire de charge publique est rattaché à un employé du commissariat qui le conseille sur les divulgations à faire et qui l’aide à éviter tout conflit d’intérêts. Cet employé devient normalement sa personne-ressource lorsqu’il a besoin de conseils ou d’informations sur le régime des conflits d’intérêts. Ensemble, ils doivent parfois prendre des mesures précises pour garantir l’observation de la Loi, par exemple interposer des écrans, se dessaisir de certains biens contrôlés, comme des titres cotés en Bourse, qui pourraient être affectés par des décisions gouvernementales.
L’autre rôle important du commissariat consiste à mener des enquêtes en cas d’infraction présumée de la Loi. Lorsque l’enquête est officiellement lancée, elle devient une étude. Les médias ont tendance à confondre ces deux termes. Une étude peut être le résultat d’une plainte officielle déposée par un député ou par un sénateur qui a de bonnes raisons de croire qu’une ou plusieurs règles de la Loi ont été violées; elle peut aussi être déclenchée par le commissaire si celui-ci a de bonnes raisons de croire qu’il y a eu infraction à la Loi. Les études sont réalisées à huis clos. Un sténographe prend en notes toutes les délibérations. Le commissaire a le pouvoir de convoquer des témoins et d’ordonner la remise de documents.
J’espère que ce bref aperçu de la Loi sur les conflits d’intérêts et du rôle du commissaire vous sera utile.
J’aimerais, pour terminer, vous dire quelques mots au sujet de la disposition qui décrit une situation de conflit d’intérêts. Il s’agit de l’article 4, « Conflits d’intérêts », qui dispose que « Pour l’application de la présente loi, un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d’intérêts lorsqu’il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité » — et je souligne « fournit la possibilité » — « de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne ».
D’après cette définition, il y a conflit d’intérêts si l’exercice d’un pouvoir ou d’une fonction fournit ne serait-ce que la possibilité de favoriser des intérêts privés. Il n’est pas nécessaire que cette possibilité ait été réellement exploitée pour favoriser des intérêts privés, ou que des intérêts privés aient été réellement favorisés, ni même qu’il y ait eu l’intention de favoriser des intérêts privés.
La plupart, sinon toutes, des principales mesures d’observation prévues par la Loi s’articulent autour du concept du conflit d’intérêts, et la description de ce concept sert à déterminer si certaines de ces principales mesures d’observation ont été violées. La contravention en soi est définie ailleurs.
Il se peut, et ce sera ma dernière remarque, que votre comité envisage d’apporter des modifications à la Loi sur les conflits d’intérêts, une fois qu’il aura terminé son étude. Le seul examen obligatoire prévu par la Loi a eu lieu en 2013-2014, mais il n’a pas donné lieu à des amendements.
Si cela vous intéresse, je vous conseille de relire la déclaration que j’ai faite le 30 janvier 2013 devant ce même comité, à propos de cet examen. J’ai alors proposé 75 recommandations pour améliorer la Loi. Certaines concernaient le libellé, d’autres étaient plus substantielles. J’ai résumé les principales recommandations dans mon dernier rapport annuel de commissaire, pour l’année 2016-2017, qui a été publié en juin 2017.
Il y a aussi une autre recommandation qui ne faisait pas partie de celles dont je viens de parler, et qui concerne l’exception prévue pour les amis, à l’article 11 sur les cadeaux et autres avantages. Cette exception ne devrait pas figurer à l’article 11, car le libellé de cet article est suffisant, à mon avis. Autrement dit, j’estime que l’exception concernant les amis devrait être supprimée de cet article.
Cela dit, même si j’ai fait 75 recommandations pour la modifier, j’estime que la Loi est dans l’ensemble tout à fait adéquate. Par exemple, quand j’étais commissaire, j’ai eu l’occasion de recevoir un certain nombre de délégations issues de différents pays, et l’objet de leur visite était toujours de se renseigner sur notre loi et sur la façon dont nous l’appliquions, afin de modifier la leur en conséquence ou d’en adopter une nouvelle.
Je vous remercie de votre attention. J’espère être en mesure de répondre à vos questions.
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Je ne suis pas favorable à des pénalités plus lourdes.
Vous n’ignorez pas que la Loi prévoit déjà des pénalités, mais elles sont assez légères et concernent uniquement les manquements… On les appelle des pénalités administratives ou monétaires. Elles s’appliquent en cas de non-respect des délais pour soumettre les informations réglementaires, et ce sont des pénalités qui sont fréquentes.
À part cela, il ne faut pas oublier que cette loi n’est pas une loi pénale mais une loi éthique. Il est intéressant de noter que le mot « éthique » n’apparaît que dans le titre et nulle part ailleurs dans la Loi. En fait, il apparaît non pas dans le titre de la Loi mais dans le titre du commissaire. C’est le seul endroit où on le trouve. Quoi qu’il en soit, cela montre que cette loi se fonde sur le principe de la probabilité raisonnable, comme en droit civil, et pas sur le principe du « hors de tout doute raisonnable », comme en droit pénal. Le dispositif pénal contient toutes sortes d’articles sur la corruption ou la fraude, par exemple, qui pourraient s’appliquer dans une situation semblable. En fait, si une infraction pénale a été commise, le commissaire doit transmettre le dossier aux services responsables des affaires pénales et mettre un terme à l’enquête, si elle a commencé.
Tout ça pour vous expliquer pourquoi je ne suis pas très favorable aux pénalités.
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Merci, madame Dawson. Je suis ravi de vous revoir devant notre comité. Vous avez déjà comparu tellement de fois au fil des ans.
Le « Rapport Trudeau » m’intéresse tout particulièrement, car je pense qu’il aidera mes collègues libéraux à mieux comprendre comment fonctionne la Loi sur les conflits d’intérêts. Vos conclusions sont très intéressantes. On a tendance à croire qu’un conflit d’intérêts, c’est de la corruption, quelqu’un qui vous offre de l’argent et vous leur renvoyez l’ascenseur, mais dans le « Rapport Trudeau », c’est beaucoup plus complexe parce que les membres de la famille étaient très impliqués dans les renvois d’ascenseur.
Comme vous le savez, le rencontre l’Aga Khan en novembre 2015 à Paris. On nous dit que c’est une rencontre privée, et c’est peut-être le cas. Ensuite, c’est la fille de l’Aga Khan qui prend contact avec Mme Grégoire pour l’inviter une première fois sur l’île. La décision est donc prise par l’intermédiaire de la famille. Et deux jours avant le départ de Mme Trudeau pour l’île, les représentants de l’Aga Khan appellent pour commencer à parler des 15 millions de dollars.
Donc, dans vos conclusions, vous jugez que le a commis un certain nombre de fautes. Il y a d’abord toute la question… qu’un titulaire de charge publique doit se récuser de toute discussion, décision, débat ou dossier pour lesquels il est en conflit d’intérêts… L’article 6 de la Loi dit que… le titulaire devrait « raisonnablement » savoir qu’en prenant cette décision, il se trouve en situation de conflit d’intérêts. Autrement dit, il devrait « raisonnablement » savoir qu’il y a un conflit… Il s’agissait d’un cadeau très avantageux pour la famille, et pour ce fameux voyage à l’époque de Noël, c’est Sophie Grégoire qui a appelé l’Aga Khan pour lui demander s’ils pouvaient venir passer des vacances, et la famille a dit oui. C’est bien ça?
Je voudrais simplement que vous me confirmiez que, comme c’est le cas dans ce rapport, les membres de la famille peuvent être très impliqués et considérer que c’est tout à fait normal, alors qu’ils placent le titulaire de charge publique dans une situation de conflit d’intérêts.
L’article 11 dit:
qui pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné pour influencer le titulaire dans l’exercice de ses fonctions officielles.
Je parle de la relation qui existe avec les Kielburger. Je parle de la responsabilité qui incombe au premier ministre en vertu de l’article 6, où il est dit qu’il aurait dû raisonnablement savoir qu’il se trouvait en situation de conflit d’intérêts, parce que personne d’autre ne pouvait savoir que la famille entretenait des relations financières avec eux. Ce n’était pas public. UNIS savait que la famille participait aux activités de l’organisme, mais UNIS laissait entendre que tout le monde était bénévole. À ce moment-là, c’est au premier ministre de prendre une décision.
J’insiste là-dessus parce que j’ai constaté que le premier ministre, lorsqu’il a témoigné, ne parlait que de l’article 2, qui définit les membres de la famille comme étant l’époux et les enfants. Mais l’article 3 porte sur les parents, c’est-à-dire les personnes apparentées à un titulaire par la naissance, le mariage, l’union de fait ou l’adoption, ce qui élargit la définition de parents. J’ai l’impression que le premier ministre connaissait parfaitement la définition de l’article 2, et il me paraît évident, à la lecture de l’article 3, que les sommes que les Kielburger ont versées à sa famille le placent dans un conflit d’intérêts.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Madame Dawson, je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Vous avez été à la tête du Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique pendant 10 ans et j'en ai été témoin. Vous aviez une main de fer dans un gant de velours et vous avez fait de l'excellent travail.
D'un point de vue philosophique, quand on regarde ce qui se passe aujourd'hui, on constate que le travail que vous avez fait et celui que fait M. Mario Dion, le nouveau commissaire, ne semblent pas changer grand-chose dans l'opinion publique. Quelqu'un qui se fait condamner par le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique devrait sans doute perdre les élections, puisque le respect de l'éthique est un élément essentiel par rapport au lien de confiance avec l'électorat. Pourtant, quand quelqu'un se place sans cesse en situation de conflit d'intérêts et que les enquêtes le confirment, cela ne semble pas briser son lien de confiance avec l'électorat.
Même si le Commissariat fait vraiment son travail, ou même s'il ne donne pas nécessairement les résultats de son enquête à l'électorat, cela n'a pas beaucoup de poids dans l'opinion publique. On l'a vu lors des dernières élections. Le a été reconnu coupable deux fois: en ce qui concerne son voyage chez l'Aga Khan et en ce qui concerne l'histoire impliquant SNC-Lavalin. Toutefois, les gens ont quand même voté à nouveau pour le premier ministre actuel. La majorité des députés à la Chambre prennent cela au sérieux, mais pas l'électorat. Cela m'inquiète.
Madame Dawson, maintenant que vous êtes à la retraite et que vous avez un regard extérieur sur cette situation, est-ce que cela vous inquiète?
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Je vous remercie, madame la présidente.
Madame Dawson, nous allons fantasmer. Supposons que je suis premier ministre du Canada et que vous êtes commissaire à l'éthique. Je vous consulte et je vous dis que j'ai une décision importante à prendre. On s'apprête à accorder un contrat de 43,5 millions de dollars à un organisme pour gérer 900 millions de dollars de bourses étudiantes. Je vous dis que, compte tenu de l'urgence, la décision devra être prise de façon inhabituelle, c'est-à-dire sans appel d'offres. Je vous dis également qu'il n'y a eu aucune vérification diligente complète de l'entreprise pour confirmer sa capacité de gérer le programme.
Ensuite, je vous dis que l'organisme en question a versé à ma mère, au cours des deux dernières années, un quart de un million de dollars pour avoir donné des conférences. Je vous dis que l'organisme a aussi payé quelques dizaines de milliers de dollars à mon frère pour les mêmes choses, que l'organisme retient les services de ma conjointe à titre d'ambassadrice et que j'ai moi-même donné des conférences pour cet organisme et encouragé les gens à travailler avec celui-ci.
Je vous dis finalement que la situation me trouble, madame la commissaire à l'éthique, et je vous demande de m'éclairer.
Est-ce que je devrais participer à ce processus de décision? Quel conseil me donneriez-vous?
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Mon Dieu! Quand j’ai quitté le commissariat, j’en ai sélectionné un certain nombre pour les faire ressortir. Je les ai avec moi. Je vais rapidement les passer en revue.
L’une d’entre elles portait sur une transparence accrue en ce qui concerne les cadeaux. Une autre préconisait d’abaisser le seuil de divulgation.
Il y avait aussi des questions de terminologie. Le Code s’applique à des entités, mais la Loi ne s’applique qu’à des personnes. Dans certains cas, elle devrait aussi s’appliquer à des entités. Je fais aussi plusieurs recommandations pour atténuer certaines dispositions trop lourdes pour les gens. Je n’entrerai pas dans les détails.
Je préconise aussi de renforcer les obligations liées à l’après-mandat. Lorsqu’ils sont en situation d’après-mandat, les gens ne sont pas tenus de faire un rapport. Personne n’est tenu de faire un rapport. En général, l’après-mandat dure un ou deux ans. Ce sont des règles qui doivent être respectées. Ce serait donc bien d’obliger les gens à faire un minimum de rapports. Quant aux titulaires de charge publique ordinaires, il faudrait qu’ils soient eux aussi tenus de faire un nombre limité de rapports. Ils ne le sont pas pour le moment.
J’ai déjà dit qu’il serait souhaitable d’harmoniser certaines dispositions de la Loi et du Code, car c’est une source de confusion pour les députés, surtout ceux qui sont ministres, car les règles ne sont pas les mêmes.
J’ai fait allusion tout à l’heure, dans ma déclaration liminaire, à une autre de mes recommandations. Je pense que l’article 11 crée… Il n’y a pas de définition du mot « ami ». Il n’est pas nécessaire d’inclure les amis dans les exceptions, parce que « pourrait raisonnablement donner à penser qu’il a été donné pour influencer le titulaire » est suffisant. S’il s’agit d’un ami et que les circonstances ne sont pas exceptionnelles, l’exception est inutile. Je pense donc qu’il n’est pas nécessaire d’inclure les amis dans les exceptions et qu’on peut améliorer le libellé.
J’en ai beaucoup. Comme je l’ai dit, j’en ai 75. Je dirai qu’une trentaine sont plutôt d’ordre technique et concernent des détails relatifs au libellé de la Loi. À plusieurs endroits, la version anglaise et la version française ne correspondent pas tout à fait, par exemple. Mais ce n’est rien de grave.
Je vous ai donné un petit échantillon.
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Non, je pense que ces définitions sont correctes. Elles sont assez claires.
Ce qui n’est pas clair, par contre, c’est ce que comprend le mot « parents », jusqu’à quel degré de cousinage, etc. Très souvent, ça dépend des circonstances, vous n’avez pas toujours des relations étroites avec tous vos cousins. Il faut décortiquer tout ça.
En revanche, ce qui n’est pas défini, c’est l’expression « intérêts privés ». C’est un point intéressant. En fait, je pense que le commissaire actuel en a peut-être élargi le sens. J’ai toujours pensé que cela concernait principalement les affaires financières, parce que c’est généralement le genre de choses qui est divulgué, et que cela ne concernait pas les intérêts politiques.
C’est comme dans les tribunaux: c’est sur la base des précédents qu’on essaie de mieux définir ce que cela veut dire. Pour un certain nombre de termes qui figurent dans la Loi, c’est ce qu’il faut faire: déterminer jusqu’où ils s’appliquent.