:
Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis heureux d'être accompagné à la table par Catherine Kane et Douglas Hoover, respectivement avocate générale principale intérimaire et avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal.
Monsieur le président, je suis ravi de me présenter devant votre comité, qui entreprend l'examen du projet de loi C-10, Loi sur la lutte contre les crimes violents.
Il s'agit du premier projet de loi déposé par le gouvernement depuis que le Parlement a repris ses travaux. La Loi sur la lutte contre les crimes violents met l'accent sur notre engagement à protéger les Canadiens dans leur foyer, dans les rues et au sein de leur collectivité. C'est une mesure visant à accroître la confiance du public. Le projet de loi C-10 démontre la profondeur de cet engagement inébranlable qu'a pris le gouvernement du Canada.
[Français]
En tant que mesure visant à accroître la confiance du public, le projet de loi démontre la profondeur de cet engagement solide et prometteur envers la population.
[Traduction]
Les Canadiens perdent confiance dans notre système de justice pénale. Ils veulent un système reposant sur des lois claires et rigoureuses qui dénoncent et découragent la perpétration de crimes violents. Ils veulent un système de justice qui impose des peines reflétant adéquatement la gravité de ces crimes et qui permette la réhabilitation des délinquants afin de prévenir les récidives. Le projet de loi vise à redonner confiance aux Canadiens dans notre système en rétablissant la sécurité dans les collectivités, et c'est dans ce sens que va le préambule du projet de loi C-10.
Le projet de loi sur la lutte contre les crimes violents contient cinq mesures législatives que nous avions présentées à la session dernière du Parlement et visant à réformer la justice pénale. L'une d'elles, le projet de loi , prévoyait le rehaussement des peines minimales d'emprisonnement pour huit types d'infractions commises avec usage d'une arme à feu à autorisation restreinte ou d'une arme à feu prohibée, ou lorsqu'il existe un lien entre l'infraction et une organisation criminelle, ce qui inclut bien sûr les gangs de rue, et aussi pour des infractions qui ne mettent pas en jeu des armes à feu, notamment le trafic ou la contrebande d'armes, la possession illégale d'une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte avec des munitions. La Loi sur la lutte contre les crimes violents reprend l'ancien projet de loi C-10 tel qu'il a été adopté par la Chambre des communes.
Elle englobe également une de mes mesures législatives favorites, le projet de loi , qui fait passer de 14 à 16 ans l'âge de consentement à une activité sexuelle afin de protéger les jeunes contre les prédateurs sexuels adultes. Ce projet de loi propose, je suis certain que vous le savez, une exception de proximité d'âge de cinq ans pour empêcher la criminalisation d'activités sexuelles entre des adolescents consentants. La Loi sur la lutte contre les crimes violents comprend le projet de loi C-22, qui a été adopté par la Chambre des communes.
Elle inclut également le projet de loi , qui porte sur la conduite avec capacités affaiblies, en proposant un cadre législatif pour le programme de détection des cas de conduite avec capacités affaiblies par l'effet d'une drogue et le contrôle routier pour vérifier la présence de drogues; en simplifiant les processus d'enquête et d'accusation pour conduite avec capacités affaiblies; en proposant des modifications dans la procédure et dans le libellé, y compris en appliquant de nouvelles peines pour les personnes qui « dépassent 0,8 », qui refusent de fournir un échantillon d'haleine et qui ont causé des lésions corporelles ou la mort en conduisant un véhicule. La Loi sur la lutte contre les crimes violents présente de nouveau l'ancien projet de loi C-32 modifié dont le comité de la justice a fait rapport.
Il y a également le projet de loi , qui impose une inversion du fardeau de la preuve concernant le régime de remise en liberté sous caution pour les personnes accusées d'une des huit infractions graves mettant en jeu des armes à feu ou d'autres armes réglementées, dans le cas d'une arme prohibée par décret en conseil ou pour trafic ou encore possession d'armes en vue d'en faire le trafic et la contrebande.
La Loi sur la lutte contre les crimes violents présente de nouveau les réformes qui avaient été proposées dans le cadre de l'ancien projet de loi au sujet des délinquants dangereux et des récidivistes, mais avec des améliorations.
Comme vous l'avez noté, et à l'exception des dispositions visant les délinquants dangereux, toutes ces réformes ont fait l'objet de débats approfondis, ont été étudiées et approuvées par la Chambre des communes.
Ces réformes prévues dans le projet de loi C-27 n'ont pas été autant comprises et appuyées lors de la dernière session et comprennent maintenant des améliorations qui tiennent compte des préoccupations soulevées par la Chambre des communes et par mes homologues des provinces et des territoires. Permettez-moi de passer brièvement en revue ces réformes.
La Loi sur la lutte contre les crimes violents conserve toutes les réformes qui avaient été proposées dans le projet de loi C-27 en ce qui a trait aux ordonnances de bonne conduite, lesquelles avaient reçu bon accueil à la Chambre des communes et ailleurs. Par conséquent, le projet de loi C-10 propose de doubler la durée maximale de ces ordonnances de protection rendues par les tribunaux les faisant passer de un à deux ans et de préciser que les tribunaux peuvent imposer une série de conditions pour assurer la sécurité publique, y compris des couvre-feux, la surveillance électronique, des traitements et l'interdiction de consommer de la drogue et de l'alcool.
Je crois que cette disposition sera bien reçue partout au pays. Bien des gens se sont plaints pendant de nombreuses années que lorsqu'on réussit enfin à obtenir une ordonnance de bonne conduite, sa durée d'un an est trop courte et il serait beaucoup plus approprié que l'engagement dure deux ans.
Dans le cadre de ce projet de loi ainsi que dans l'ancien projet de loi C-27, les procureurs de la Couronne doivent toujours déclarer en cour qu'ils entendent présenter une demande de désignation de délinquant dangereux dans le cas où un délinquant est trouvé coupable d'une troisième infraction grave.
Nous avons conservé certaines améliorations de procédure en ce qui a trait aux délinquants dangereux afin d'assouplir les règles en ce qui concerne le dépôt des évaluations psychiatriques nécessaires.
Comme le prévoyait l'ancien projet de loi C-27, une personne trouvée coupable d'une troisième infraction violente ou sexuelle grave est encore présumée dangereuse.
Le projet de loi C-10 renforce également les dispositions concernant la détermination de la peine des délinquants dangereux à savoir s'il faut infliger une peine d'une durée indéterminée ou une peine moins sévère. Cet amendement modifie l'approche de l'ancien projet de loi C-27 afin de permettre aux tribunaux d'imposer une peine qui garantit la sécurité de la population.
Enfin, le projet de loi contient une nouvelle disposition qui permettrait à un procureur de la Couronne de faire une demande de deuxième audience de détermination de la peine pour délinquant dangereux dans le cas précis où une personne est reconnue coupable de violation d'une condition de son ordonnance de surveillance de longue durée.
Cette deuxième audience vise les délinquants qui, d'après le tribunal original, répondent aux critères décrivant le délinquant dangereux, mais qui ont néanmoins pu convaincre le tribunal qu'il serait possible de les gérer en les désignant comme délinquants à contrôler. S'ils démontrent par leur conduite, une fois libérés dans la communauté, qu'ils ne peuvent être gérés et s'ils sont reconnus coupables de violation des conditions de leur ordonnance de surveillance, ils sont alors assujettis à une autre audience pour les désigner, cette fois, comme des délinquants dangereux.
Fait important, cette nouvelle proposition n'attend pas que le délinquant commette une autre agression sexuelle ou un acte violent pour l'assujettir à une deuxième audience pour obtenir une ordonnance de désignation en tant que délinquant dangereux. Au lieu de cela, la convocation de cette audience serait simplement déclenchée par l'omission par le délinquant de respecter les conditions de sa libération stipulées dans son ordonnance de surveillance de longue durée pour ne s'être pas présenté à sa résidence avant le couvre-feu ou pour avoir consommé de l'alcool ou des drogues. Bien entendu, il y aura aussi seconde audience si le délinquant, de fait, commet une autre agression sexuelle ou un acte violent après sa libération dans la communauté.
Ces nouvelles propositions visent directement à contrer le grave problème qu'ont relevé les procureurs des provinces et territoires ces derniers mois. Certains de ces problèmes avaient d'ailleurs déjà été signalés depuis environ 2003. Depuis le jugement rendu en 2003 par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Johnson, de nombreux délinquants violents qui répondent au critère de délinquant dangereux ont néanmoins réussi à échapper à cette condamnation de durée indéterminée sous prétexte qu'il y avait moyen de les gérer; c'est-à-dire que le danger qu'ils présentent pour la communauté pourrait être géré avec succès dans la communauté en vertu d'une ordonnance de surveillance de longue durée.
Nous avons donc fait un examen des dossiers de délinquants dangereux depuis l'affaire Johnson de 2003, et en avons relevé soixante-quatorze. Nous avons ensuite examiné la situation de ces personnes une fois qu'elles ont été libérés dans la communauté. Jusqu'à maintenant, vingt-huit de ces soixante-quatorze délinquants dangereux ont été libérés dans la communauté. De ce nombre, plus de 60 p. 100 ont par la suite été détenus pour avoir enfreint les conditions de leur ordonnance de surveillance de longue durée, et dix ont été reconnus coupables de violation d'une condition de leur ordonnance de surveillance de longue durée.
Le projet de loi empêche que les délinquants dangereux puissent échapper à la peine d'emprisonnement pour une durée indéterminée qui est infligée aux délinquants dangereux tout d'abord, et il nous permettra de composer avec plus d'efficacité avec ceux qui se feront tout de même infliger une peine imposée aux délinquants visés par la SLD mais qui se révèlent par la suite incapables de respecter les conditions de leur ordonnance de surveillance de longue durée.
Bien entendu, j'ai soigneusement étudié la Charte canadienne des droits et libertés et la Déclaration des droits en regard de l'intégralité de ces nouvelles réformes concernant les délinquants dangereux, et je suis convaincu qu'elles sont tout à fait constitutionnelles. Ces mesures ont été soigneusement formulées pour constituer une réponse axée sur l'avenir, ciblée et équilibrée au problème réel et urgent que posent ces délinquants dangereux.
[Français]
En résumé, monsieur le président, la Loi sur la lutte contre les crimes violents propose des modifications qui ont déjà été appuyées par la Chambre des communes.
[Traduction]
Dans le cas des nouvelles dispositions concernant les délinquants dangereux, elles proposent des modifications que bien des gens se sont dits intéressés à appuyer.
J'apprécie l'esprit de collaboration que ce comité et ses membres ont manifesté jusqu'à présent pour permettre d'entamer l'examen du projet de loi , et j'espère bien, comme tous les Canadiens, que cette collaboration continuera afin que ce projet de loi puisse rapidement être adopté.
Merci, monsieur le président.
:
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur le ministre, pour votre présentation. J'ai quelques faits à soulever avant de vous poser deux questions. Je serai très brève.
[Traduction]
Le 26 octobre 2006, les libéraux ont présenté une première offre pour accélérer l'adoption de projets de loi relatifs à la justice à la Chambre. C'étaient notamment le projet de loi, tel que modifié; le projet de loi , pour l'identification avec l'ADN; le projet de loi , au sujet des courses automobiles dans les rues; le projet de loi , sur l'âge du consentement, qui fait maintenant partie du projet de loi ; le projet de loi , sur la procédure pénale; et le projet de loi , sur les prêts sur salaire. Cette offre garantissait, de fait, au gouvernement conservateur une majorité à la Chambre à ce moment-là pour l'adoption de ces mesures législatives, y compris celles qui se trouvent dans le projet de loi sur l'âge du consentement. Si le gouvernement veut accepter l'offre des libéraux, le projet de loi C-22, sur l'âge du consentement, serait devenu loi avant la fin de 2006 et nos enfants n'auraient plus été aussi vulnérables aux prédateurs sexuels.
Le 14 mars, l'honorable Stéphane Dion, alors chef de l'opposition officielle, a ajouté le projet de loi C-35, sur la réforme du cautionnement, à la liste des projets de loi que le caucus libéral offrait au gouvernement conservateur d'adopter rapidement. En dépit, encore une fois, de cette offre d'un appui majoritaire, il a fallu aux conservateurs jusqu'au 30 mai pour lui attribuer un ordre de priorité plus élevé au Feuilleton afin d'en saisir un comité.
Enfin, le 21 mars 2007, les libéraux ont encore une fois tenté, au moyen d'une motion présentée le jour des crédits qui, si elle avait été adoptée, aurait immédiatement engendré l'adoption, à toutes les étapes, de quatre projets de loi relatifs à la justice, soit les projets de loi C-18, sur l'identification avec l'ADN; C-22, l'âge de consentement, et c'est le projet de loi que nous retrouvons encore devant la Chambre des communes, dans votre projet de loi C-9 de lutte contre la criminalité; le projet de loi C-23 sur la procédure pénale; et le projet de loi C-35 sur la réforme du cautionnement. Fait incroyable, le leader du Parti conservateur à la Chambre a soulevé une objection d'ordre procédural pour bloquer la motion. Autrement dit, les conservateurs, de fait, se sont opposés à trois reprises aux tentatives du Parti libéral pour adopter des projets de loi relatifs à la justice, y compris celui qui a été incorporé au projet de loi C-9.
Maintenant, je remarque dans le projet de loi , la section qui traite des délinquants dangereux; deux catégories de modification ont été proposées. L'une concerne les délinquants à contrôler. Une violation de l'ordonnance de surveillance, par exemple, pourrait entraîner une deuxième audience du délinquant dangereux pour pouvoir lui imposer le type de condamnation dont sont passibles les délinquants dangereux. Monsieur le ministre, si vous avez examiné la transcription des séances du comité de la Chambre qui a étudié le projet de loi C-27, ou qu'il était en train de l'étudier au printemps dernier avant la prorogation de la Chambre, vous avez dû voir que les libéraux ont fait des propositions justement pour ce genre de modifications que nous voyons maintenant dans la section du projet de loi C-9 qui était le projet de loi C-27, et elles ont eu l'appui de l'Association canadienne des policiers, que représentait M. Tony Cannavino, et d'autres témoins qui ont comparu et qui trouvaient que c'était une excellente idée et que cela, de fait, allait renforcer le projet de loi C-27 et rendre le système plus efficace.
Je suis donc heureuse que le gouvernement ait été à l'écoute; cependant, nous avons aussi fait une autre proposition. En ce moment même, la Couronne jouit encore du pouvoir discrétionnaire de décider s'il y aura ou non une demande de renvoi et d'évaluation aux fins de désignation d'un délinquant dangereux, et votre renversement de la présomption ne sera valable et efficace que si la Couronne fait cette demande. Les libéraux proposaient qu'une troisième condamnation entraîne automatiquement l'audience de désignation comme délinquant dangereux. Ainsi chaque délinquant qui a été condamné trois fois pour un type de crime pouvant mener à l'audience de désignation en tant que délinquant dangereux serait convoqué avant une telle audience, pour être évalué.
Puis-je demander pourquoi le gouvernement a décidé, dans toute sa sagesse, de ne pas aller de l'avant avec le déclenchement automatique plutôt que le renversement de présomption, ce qui est susceptible de ne jamais, ou de rarement être appliqué parce que la Couronne garde le pouvoir discrétionnaire de faire une demande?
J'ai terminé.
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Monsieur le ministre, bonjour. Je salue également vos fonctionnaires.
Je commencerai par trois questions, si vous le permettez. Vous comprendrez que mes questions portent sur le projet de loi , puisque pour nous, c'est la dimension la plus problématique du projet de loi.
Premièrement, jusqu'à quel point peut-on faire un lien ou des comparaisons avec la législation en vigueur aux États-Unis? Plus particulièrement, 25 États et le gouvernement fédéral ont des désignations pour ce qu'on appelle three strikes and you're out. J'aimerais que vous établissiez des parallèles, si tant est qu'il en existe. Vous savez que le comité a eu accès à une littérature qui n'était pas concluante sur les bénéfices de cette législation aux États-Unis.
Deuxièmement, j'aimerais que vous m'expliquiez ce qui ne va pas dans le régime actuel. Par exemple, le fardeau de la preuve, pour le poursuivant, est-il trop élevé, tant et si bien que la Couronne n'utilise pas comme elle le devrait ces dispositions? Au Bloc québécois, nous ne remettons pas en cause le fait qu'il doit y avoir des dispositions sur les délinquants dangereux dans le Code criminel. Nous essayons seulement de comprendre pourquoi il faut aménager un régime comme celui que vous nous proposez.
Troisièmement, je veux revenir sur une question que Mme Jennings a esquissée sans aller complètement au bout. L'obligation de désigner une personne « délinquant dangereux » est d'en faire l'annonce, mais si j'ai bien compris, il n'y aura aucune obligation, de la part du poursuivant, d'utiliser cette disposition. Éclairez-moi sur cette partie.
Ce sont mes trois premières questions. Si le président est gentil à mon endroit, j'en poserai trois autres.
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Merci, monsieur le président. Je pense avoir compris.
Dans votre première question, monsieur Ménard, vous demandez en quoi c'est différent des lois américaines. Toutes les lois des États-Unis, c'est sûr, ne sont pas semblables. Le pouvoir en matière de droit criminel relève de chaque État. Peut-être parlez-vous de ce qu'on appelle généralement une loi dans l'État de la Californie — et je répète que je ne suis pas expert en droit californien — qui prévoit des peines automatiques, ou du moins des dispositions de condamnation automatique des personnes qui ont été reconnues coupables de trois crimes.
Au Canada, nous avons ce qui est appelé une présomption réfutable. Si quelqu'un a été reconnu coupable des trois types de crimes dont j'ai parlé dans mes observations préliminaires, c'est à la Couronne d'orienter l'attention du tribunal afin de déterminer si la Couronne fera une demande de désignation de délinquant dangereux. Le fardeau serait transféré à la personne qui devrait démontrer — et c'est une présomption réfutable, et cette personne jouirait de toutes les mesures de protection intégrées au système canadien... Elle peut présenter des preuves pour démontrer qu'elle ne peut pas ou ne devrait pas être désignée comme un délinquant dangereux. Alors, sur ce plan, il n'y a rien d'automatique là-dedans. Il y aurait, c'est entendu, une audience pour le déterminer, mais là encore, la personne pourrait réfuter cette présomption.
Quel sont les problèmes que pose la loi sur les délinquants dangereux telle qu'elle est actuellement? Je pense qu'il fallait tirer certaines choses au clair après l'arrêté R. c. Johnson, en 2003, pour clarifier certaines procédures et les critères relatifs aux délinquants dangereux.
Vous avez parlé des commentaires de Mme Jennings sur certains des problèmes qui surviennent relativement à une personne qui a été désignée comme un délinquant dangereux mais qui, néanmoins, se fait infliger une peine s'appliquant aux délinquants visés par une surveillance de longue durée, et sur le fait qu'il y a eu quelques difficultés. Elle a parlé de deux ou trois groupes qui ont dit qu'il y avait certains problèmes de ce côté-là. De plus, je peux vous dire qu'il y a des procureurs généraux des provinces qui pensent qu'il devrait y avoir une certaine résolution, des éclaircissements sur ce plan. Alors, je pense qu'il existe plusieurs problèmes, dont je ne vous ai exposé qu'un petit nombre.
Avez-vous une autre question?
:
Je vous remercie de vos observations, monsieur Harris et, très franchement, je vous sais gré d'avoir accepté de siéger au comité. Je sais que vous n'êtes pas un membre régulier du comité de la justice et, à vous et vos collègues qui êtes prêts à consacrer temps et efforts pour que cette mesure législative soit adoptée, nous vous disons merci.
La rédaction des projets de loi fait l'objet d'un examen très méticuleux. En tant que ministre de la Justice, il m'appartient de confirmer qu'à mon avis le projet de loi répond tout d'abord au critère énoncé dans la Déclaration canadienne des droits. Il s'agit d'une obligation que doit assumer le ministre de la Justice pour chaque mesure législative déposée à la Chambre des communes. De plus, le ministère procède avec une grande minutie pour s'assurer que le projet de loi, dans la mesure où nous pouvons prévoir ces choses, résistera à une contestation fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés.
Ceci étant dit, toute personne accusée d'avoir commis un délit au Canada, ou l'avocat qui la défend, a le droit de demander de vérifier que les mesures respectent les critères établis. Cette fonction existe au Canada depuis les années 60, je suppose, suite à l'entrée en vigueur de la Déclaration des droits. Plusieurs projets de loi ont été contestés et, évidemment, depuis l'adoption de la Charte des droits et libertés, nous avons assisté à beaucoup de contestations. Cela représente des difficultés supplémentaires pour ceux qui rédigent ces projets de loi, mais c'est fondé. Je me rappelle qu'au milieu des années 80, lorsque j'étais député, une partie de notre travail consistait à vérifier les lois qui étaient déjà en vigueur — oublions les nouvelles mesures législatives, seulement les lois déjà en vigueur. Un grand nombre d'entre elles — je ne devrais pas dire un grand nombre, mais un bon nombre — comportaient des lacunes au plan constitutionnel. Donc, une partie du travail du comité de la justice était de s'occuper des nombreuses mesures législatives qui mettaient à jour les lois canadiennes, de tenir compte du fait qu'il y avait ces autres aspects qui devaient être respectés.
Nous avions ainsi l'assurance que peu importe le projet de loi que nous déposions, il résisterait à une contestation constitutionnelle. Je me souviens du projet de loi, en 1993, qui criminalisait la possession de pornographie juvénile. Dans mon bureau, j'avais pour au moins un pied d'épais d'observations, de mémoires et d'articles remettant en question la constitutionnalité du projet de loi et, en tant que membre du comité, le fait d'avoir examiné cette question et d'avoir tenu compte de la Charte des droits, il me semblait qu'en fait le projet de loi survivrait probablement à une contestation, qu'il s'agissait d'une mesure législative très raisonnable: pour la première fois, la possession de pornographie juvénile était criminalisée. Mais je ne me faisais pas d'illusions. Évidemment, le projet de loi a été contesté à au moins deux reprises, sans oublier qu'on a apporté quelques modifications à cette législation depuis, mais la loi a réussi à faire son chemin au fil des années et elle continue d'être encore un élément de la loi du pays.
Donc, ce n'est pas seulement moi; les gens du ministère de la Justice qui sont des spécialistes du domaine assument leurs responsabilités avec beaucoup de sérieux. Oui, ils rédigent toutes les mesures législatives, chaque ligne, chaque disposition, dans le but de s'assurer que dans toute la mesure du possible, ces lois résisteront à une contestation constitutionnelle.
Mais comme je vous l'indiquais, toutes les personnes qui sont accusées d'avoir commis un délit ont le droit de compter sur toutes les lois adoptées au pays et, je pense que la plupart des gens le disent, d'avoir les protections constitutionnelles. En toute honnêteté, elles sont antérieures à ces deux lois dont je vous ai parlé; vous pouvez remonter directement à la Grande Charte. En effet, lorsque j'étudiais en droit... toutes les dispositions concernant les brefs de mandamus et d'habeas corpus sont des protections constitutionnelles. Elles font partie des lois du pays. Je pense que la plupart des gens s'entendraient pour dire que le système de justice que nous avons au Canada est un bon système et qu'il a très bien réussi à protéger les droits des citoyens canadiens.
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... Hébert et d'autres en 1990.
Si c'est le cas, alors l'existence de la présomption dans cet article du nouveau projet de loi C-27, qui est... votre personnel saura de quoi je parle. L'existence d'une présomption au paragraphe 753(1.1) semblerait miner le droit de l'accusé de garder le silence. Si vous reléguez une présomption à une personne condamnée, cette personne doit apporter la preuve du contraire. Elle a dès lors perdu le droit au silence.
Si vous répondez par la négative, à savoir que le droit de garder le silence n'existe pas après une condamnation, alors je vous pose la question suivante. Nous demandons à la personne condamnée d'apporter la preuve du contraire, de prouver que l'événement n'a pas eu lieu, c'est-à-dire, que cette personne n'est pas dangereuse. Nous demandons à une personne qui vient d'être condamnée pour la troisième fois, en vertu d'une présomption qui lui a été reléguée, de prouver que l'événement n'a pas eu lieu, c'est-à-dire, qu'elle n'est pas dangereuse. Je ne pense pas que dans les cours de philosophie 101, on puisse demander à quiconque de prouver qu'un événement n'a pas eu lieu, parce que vous ne pouvez pas prouver selon la prépondérance des probabilités ou n'importe quelle norme, qu'un événement n'a pas eu lieu.
Voilà les trois questions que je vous pose: le droit de garder le silence avant et après la condamnation, et savoir si vous pouvez, en vertu de la Charte, reléguer à une personne reconnue coupable la nécessité, à la faveur d'une présomption, de prouver que l'événement ne s'est pas produit. Si vous voulez m'appeler un avocat des personnes condamnées, je suppose que nous devrons le faire, mais c'est mon travail.
Monsieur Harris, c'est notre travail ici. Nous devons vérifier que tout cela répond aux critères établis dans la Charte avant de donner notre aval.... C'est mon travail.
Il y a une question.
Bonjour, monsieur le ministre.
D'abord, je suis content que vous ayez pu regrouper l'ensemble des projets de loi dans le projet de loi . J'aimerais surtout vous apporter un témoignage qui vient de la province de Québec.
M. Boisvenu, dont la fille a été tuée, a pris connaissance d'une partie du projet de loi. Il était très content que cela puisse servir, parce qu'il fait partie d'une association dont beaucoup de membres ont vu leur enfant tué par des récidivistes au moyen d'une arme à feu.
Une autre personne, d'une certaine façon, vous remercie. Il s'agit de M. Livernoche, le père du petit qui avait été étranglé à la suite de la sortie d'un délinquant sexuel. Peut-être qu'à l'avenir, on ne verra plus ces choses.
Un troisième groupe, de la ville de Montréal, voudrait peut-être aussi vous remercier. Je ne demeure pas là, mais je sais que mon confrère M. Ménard y demeure. Il y a 36 gangs de rue extrêmement violents. Mme Mourani a écrit un livre sur ce sujet. Ces gangs de rue tuent uniquement parce que quelqu'un ne porte pas des vêtements de la bonne couleur. Dans certains cas, ça va jusque là.
Un autre groupe, auquel j'ai souvent eu affaire dans le cadre de ma pratique personnelle, peut vous remercier. Ce sont les cas de facultés affaiblies. Le groupe MADD, je pense, est très au courant de tout ce qui s'est passé dans ce qu'on appelle les décès dus aux facultés affaiblies. Or, vous savez qu'au Québec, plusieurs personnes ont littéralement été tuées par des gens qui conduisaient avec des facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue.
La question que je voudrais vous poser, monsieur le ministre, est quand même importante. Même si cela a déjà été dit et redit, je voudrais que vous expliquiez, car il faut que ce soit bien compris, pourquoi vous avez décidé de remettre aujourd'hui, dans le projet de loi , toutes ces lois qui étaient à gauche ou à droite, à la Chambre des communes ou au Sénat. Le citoyen canadien qui vous regarde aujourd'hui doit-il s'attendre à ce que cela aille vite? Quel message voulez-vous lui envoyer?
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Merci, monsieur Petit, de votre question.
Vous avez tout à fait raison de dire que ce projet de loi touche à un vaste éventail de domaines visés par le Code criminel. Je pense qu'ils ont tous trait à la défense des droits des victimes. Je pense que c'est une réponse raisonnable à plusieurs problèmes différents auxquels nous sommes confrontés. Ce sont assurément des problèmes dont nous avons parlé lors de la dernière campagne électorale et auxquels nous voulions nous attaquer.
Vous me demandez pourquoi nous avons réuni en une seule mesure législative globale tout cela. Je commencerai par dire que c'est parce que nous n'avons pas réussi à les faire adopter au printemps, ou à l'hiver, et je pense que ce sont des mesures législatives qui, en général et pour la plupart, sont bien accueillies par la population canadienne. Les Canadiens veulent que ces différents éléments de la mesure législative soient mis en place.
Dans mes propos liminaires, j'ai dit que l'un de mes éléments préférés était l'âge de protection. Nous devrions l'avoir depuis longtemps au Canada. Nous pouvons soutenir qu'il aurait dû être adopté au printemps ou à l'été, mais j'irais jusqu'à dire qu'il aurait dû être en place depuis plus d'un siècle. Cette mesure législative reflète les moeurs et certaines des pensées du XIXe siècle, l'idée que... et cela se produit. Cela se produit. Un type de 40 ans peut être le prédateur d'un jeune de 14 ans et réussir ensuite à établir le bien-fondé que le droit canadien ne couvre pas cela. Pour moi, cela n'a aucun sens. Donc, je veux que cette mesure législative soit adoptée et j'espère que le fait d'avoir rassemblé...
Encore une fois, nous pourrions débattre pendant encore une heure des raisons pour lesquelles le projet de loi n'a pas été adopté le printemps dernier ou l'été dernier, mais je pense que c'est une bonne façon de profiler ces questions. Je pense qu'elles ont été complètement diffusées. J'espère que le comité ira de l'avant et dira que ce sont des points raisonnables. Ils font l'objet d'un débat public depuis au moins un an. Il est vrai que nous avons apporté des changements, des modifications, en réponse aux interventions de plusieurs groupes, notamment les procureurs généraux, mais j'espère que votre comité ira de l'avant avec ce projet de loi. Je suis fermement convaincu que les Canadiens vous remercieront si nous allons de l'avant et adoptons cette mesure législative globale.
Merci beaucoup de vos observations. Je vous remercie de votre engagement à cet égard.
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Je suis toujours disposé à les communiquer, monsieur Keddy.
Merci beaucoup de vos commentaires et merci de faire partie du comité. Je vous suis reconnaissant de votre engagement vis-à-vis de la lutte contre la criminalité au Canada.
Je pense que nous faisons un exercice louable dans le cadre de notre responsabilité de législateurs. J'ai, à de nombreuses reprises, joué le même rôle que vous par rapport à diverses mesures législatives, et pour la majeure partie des années 80 et 90, nous avons donné des lignes directrices aux juges quant à l'importance que nous accordons au crime. Habituellement, nous l'avons fait en termes de sentences maximales.
Je me souviens qu'à plusieurs reprises, lorsque nous sommes revenus sur certains articles du Code criminel et que nous avons dit que la peine maximale ne reflète pas l'importance que la société attache à ce genre de comportement. C'était un exercice légitime de nos responsabilités législatives. Et, à mon avis, le fait d'infliger des peines minimales est aussi un exercice responsable de nos responsabilités législatives.
Ce que nous essayons de faire, c'est de donner une certaine orientation quant à l'importance que le Parlement attache à cette activité. Tout comme moi, vous êtes au courant de certains problèmes graves qui sont survenus et qui peuvent survenir au Canada en ce qui concerne les délits et les crimes commis à l'aide d'armes à feu. Vous, en tant que représentant de vos électeurs de la Nouvelle-Écosse, vous savez quelle importance les gens attachent à cette question et à quel point les gens en sont renversés.
Je pense qu'il nous incombe d'essayer de rédiger une loi qui tienne compte de ces préoccupations légitimes des personnes respectueuses de la loi, tout en reconnaissant la charte et les droits des personnes qui sont accusées d'un crime en vertu de la Déclaration canadienne des droits. Ce que nous essayons de faire, c'est de trouver un équilibre raisonnable. Je suis convaincu que c'est ce que nous faisons. Encore une fois, c'est un exercice légitime et c'est pour cette raison que nous sommes envoyés ici et c'est ce que nous sommes censés faire.
Je pense que tous les parlementaires — et j'espère que je peux dire cela —, lorsque projet de loi sera adopté, pourront s'enorgueillir de l'adoption de ces mesures législatives. Il s'agit d'un projet de loi important. Comme vous le savez, c'est le premier projet de loi de la présente session. Ce n'est pas une coïncidence qu'il porte le nom de projet de loi C-2 et qu'il soit regroupé. Ce sont des pas dans la bonne direction.
Je vous remercie de votre appui et, effectivement, de celui de tous les membres du comité. Encore une fois, je vous souhaite de bonnes délibérations. J'espère que le projet de loi sera adopté le plus rapidement possible.