Passer au contenu

FINA Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

CHAPITRE 4 — AUTORITÉS FISCALES ET ÉCHANGE DE RENSEIGNEMENTS FISCAUX

Les témoins ont fait diverses affirmations concernant le fisc et l’échange de renseignements. Ainsi, ils se sont exprimés sur la transparence des renseignements bancaires et relatifs à la propriété, la Foreign Account Tax Compliance Act américaine, les accords d’échange de renseignements à des fins fiscales, les conventions de double imposition et l’échange automatique de renseignements fiscaux.

A. Transparence des renseignements bancaires et relatifs à la propriété

Quelques témoins ont expliqué au Comité certains des défis auxquels se heurtent les autorités fiscales désireuses de recueiller des données auprès de pays étrangers. L’OCDE, Don Johnston et Global Financial Integrity ont déclaré que certains paradis fiscaux et centres financiers extraterritoriaux ont adopté des lois sur le secret bancaire, si bien qu’il est difficile d’obtenir des données financières concernant des particuliers. Le Tax Justice Network a communiqué les résultats de son analyse du secret financier dans le monde, qui a révélé que les cinq pays venant en tête sont la Suisse, les îles Caïmans, le Luxembourg, Hong Kong, les États du Delaware et du Nevada aux États-Unis.

Quelques témoins ont fait remarquer que des petites sociétés peuvent servir d’écran pour cacher des revenus et des activités au fisc et au public. Global Financial Integrity et la Halifax Initiative ont déclaré que le gouvernement devrait obliger toutes les sociétés ou les fiducies créées au Canada à fournir une grande quantité de renseignements sur la propriété effective pour connaître les véritables propriétaires de l’entité. Le Tax Justice Network a indiqué que tous les pays devraient exiger la divulgation obligatoire de la propriété de toutes les entreprises et les fiducies créées sur leur territoire. Paul Collier préconisait une responsabilité plus lourde pour les cabinets qui constituent ces entreprises, tandis que H. David Rosenbloom — un fiscaliste travaillant chez Caplin and Drysdale, qui a témoigné à titre personnel — a fait remarquer que le secret bancaire se pratique depuis longtemps à l’égard des renseignements fiscaux visant à s’assurer que les contribuables se conforment à la loi, mais il estimait qu’on pourrait examiner la communication de renseignements fiscaux relatifs aux sociétés et aux fiducies.

B. Foreign Account Tax Compliance Act des États-Unis

Lorsqu’ils ont comparu devant le Comité, quelques témoins ont discuté de la Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), qui est entrée en vigueur aux États-Unis le 18 mars 2010. Cette loi exige que les banques étrangères divulguent tous les ans au fisc américain, l’IRS, le nom de tous les Américains titulaires de comptes chez elles faute de quoi une taxe de 30 % est prélevée sur tous les revenus de l’institution ou du titulaire de compte. L’Association des banquiers canadiens a déclaré qu’avec la FATCA, les États-Unis tentent de s’affranchir des procédures de communication de renseignements entre l’IRS et les autorités fiscales étrangères pour obtenir directement ce genre de données auprès des institutions financières étrangères. Selon l’Association des banquiers canadiens, cette approche pourrait faire problème, à cause des contradictions entre la législation canadienne relative à la protection de la vie privée et les dispositions de la FACTA.

De plus, selon quelques témoins, c’est à la taille de leur économie et à l’importance des sommes investies dans leur pays par des non-résidents que les Américains doivent les résultats positifs qu’ils ont obtenus au chapitre des exigences relatives aux comptes étrangers. Si Arthur Cockfield a recommandé que le Canada impose aux institutions financières étrangères présentes au Canada qu’elles fassent rapport sur les comptes qu’elles administrent, David Sohmer, lui, jugeait qu’il serait beaucoup trop difficile pour le gouvernement du Canada d’appliquer une telle mesure à cause de la taille relativement faible de l’économie canadienne et de l’importance de l’investissement étranger chez nous. Robert Kepes a préconisé un examen de l’application d’un régime semblable à la FATCA aux institutions financières étrangères qui exercent leurs activités au Canada, tandis que Global Financial Integrity a indiqué que le Canada devrait mettre en œuvre sa propre version de la FATCA, afin de prévenir la fraude fiscale transfrontière par les particuliers. Le Tax Justice Network a demandé un régime semblable à celui de la FATCA qui s’appliquerait aux succursales étrangères des banques canadiennes et exigerait que ces succursales fournissent à l’ARC des renseignements financiers sur les titulaires de comptes canadiens, au risque de perdre leur droit d’exercer leurs activités au Canada si elles ne fournissent pas cette information. Enfin, afin de promouvoir l’échange de renseignements sur les contribuables, Arthur Cockfield a prêché en faveur de stimulants qui auraient pour objet d’inciter les paradis fiscaux et les centres financiers extraterritoriaux.

C. Accords d’échange de renseignements à des fins fiscales

Comme nous l’avons vu, des témoins ont indiqué au Comité que le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales de l’OCDE a adopté un modèle d’AERF dont l’objet est de promouvoir la coopération internationale en matière fiscale par la communication d’informations. Quelques témoins se sont dits favorables à l’idée que le Canada négocie, signe, puis ratifie des AERF et à ce qu’il participe à l’échange d’informations de façon générale, tandis que d’autres croient que l’existence d’accords sur la transparence et sur l’échange de renseignements entre des pays étrangers et le Canada permet d’infléchir le recours aux paradis fiscaux et aux centres financiers extraterritoriaux à des fins illégitimes. Scott Michel et David Sohmer ont souligné que les AERF permettent d’éviter aux autorités fiscales d’entreprendre des « expéditions de pêche » puisque les identités bancaires (nom du titulaire et numéro de compte) sont exigées. Claude Vaillancourt a déclaré que le genre de renseignements détaillés exigés pour poursuivre des fraudeurs du fisc complique énormément la tâche des autorités fiscales, la propriété des fonds étant souvent masquée par des sociétés écrans, comme des sociétés de portefeuille. Selon d’autres témoins, il faut souvent beaucoup de temps pour identifier les contribuables canadiens à partir des données communiquées par des pays étrangers. Afin de répondre aux problèmes dus au manque de renseignements et aux délais associés à leur transmission, l’Association des banquiers canadiens a recommandé que le gouvernement fédéral reprenne dans les AERF le principe de déclaration systématique imposée aux non-résidents énoncé dans la convention de double imposition conclue entre le Canada et les États-Unis. Elle appuyait également une augmentation du nombre d’AERF signés et ratifiés. Arthur Cockfield a fait remarquer que les pays signataires d’AERF peuvent ne pas collaborer et ne pas partager de renseignements parce qu’ils n’ont pas les mêmes lois fiscales et lois sur la protection des renseignements personnels. Dans ce contexte, il a préconisé l’adoption d’une charte multilatérale des droits du contribuable afin d’uniformiser les règles du jeu pour les contribuables et le fisc.

Interrogés au sujet de l’efficacité des AERF, quelques témoins ont dit ne pas connaître de mesures permettant d’évaluer les accords en question. En raison de la difficulté de traiter les demandes de renseignements, H. David Rosenbloom n’était pas convaincu que les AERF soient un moyen efficace pour obtenir des renseignements d’autres pays et la Halifax Initiative a fait observer que des conventions de double imposition récentes — qui comprennent la convention entre le Royaume-Uni et la Suisse — imposent une retenue d’impôt à la source au lieu d’exiger des renseignements sur l’identité du contribuable. Pour Gilles Larin, il conviendrait de se doter d’un mécanisme d’examen régulier portant sur l’efficacité des AERF et il faudrait que le gouvernement établisse des indicateurs clés de succès; ces indicateurs pourraient être modelés sur ceux élaborés par l’Union européenne et être inclus dans un protocole d’entente conclu avec les signataires, une fois l’AERF ratifié.

D. Conventions de double imposition

Dans son témoignage, Gilles Larin a déclaré que des changements aux lois nationales et aux normes internationales rendent nécessaire l’adoption de mécanismes de modification des conventions de double imposition. Il a plus particulièrement fait mention des changements apportés aux conventions fiscales par le truchement de la négociation d’une nouvelle convention fiscale ou d’un amendement à une convention fiscale existante (on parle alors de « protocole »), ou encore d’une entente entre autorités fiscales. À son avis, le Canada devrait entreprendre un examen de toutes les conventions de double imposition en vigueur pour repérer celles dont les dispositions relatives à la communication de renseignements sont obsolètes dans le dessein de les abroger en l’absence d’une nouvelle convention, d’un protocole ou d’une entente. L’Association québécoise pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens a fait valoir que le Canada ne devrait pas négocier de conventions fiscales selon le modèle actuel de l’OCDE et devrait plutôt réviser les conventions actuelles pour prévenir les « fuites fiscales ».

Gilles Larin a évoqué la convention fiscale entre le Canada et la Suisse et fait remarquer que, contrairement à la majorité des conventions fiscales actuellement en vigueur au Canada, la prévention de la fraude fiscale ou de l’évasion fiscale ne fait pas partie des objectifs mentionnés dans le récent protocole destiné à modifier cette convention. Par ailleurs, toujours selon lui, la Suisse n’assistera aucune autorité fiscale étrangère dans les situations où les renseignements réclamés sont fondés sur des déclarations d’informateurs ou de dénonciateurs. En février 2011, le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales de l’OCDE a décidé que les AERF signés jusqu’ici par la Suisse n’étaient pas conformes aux normes de l’Organisation en la matière. En février 2011, la Suisse a donc réduit le nombre de documents qu’elle exigeait des autres autorités fiscales pour donner suite à une demande de renseignements fiscaux; elle permet désormais l’identification des contribuables sans que leur nom soit donné et l’institution financière demeure anonyme. Dès lors, toutes les conventions fiscales et tous les protocoles de modification signés jusqu’ici par la Suisse, y compris avec le Canada, devront être modifiés.

Au sujet de l’amélioration de l’échange de renseignements, un fonctionnaire du ministère des Finances a fait remarquer que le Canada a signé des protocoles d’amendement avec l’Autriche, la Barbade, le Luxembourg et la Suisse, et qu’il négocie des protocoles avec la Malaisie et la Belgique.

E. Échange automatique de renseignements fiscaux

Quelques témoins ont évoqué la possibilité d’échanger automatiquement des renseignements fiscaux entre les autorités fiscales afin de contribuer à l’imposition des revenus étrangers et de prévenir l’évasion fiscale. Faisant remarquer que les AERF qui prévoient l’échange de renseignements sur demande d’une autorité fiscale peuvent être inefficaces, la Halifax Initiative et les Canadiens pour une fiscalité équitable ont préconisé la création d’un cadre multilatéral pour l’échange automatique de renseignements entre les autorités fiscales et pour la collecte de renseignements financiers se rapportant aux transferts effectués par des institutions financières à des particuliers, des sociétés et des fiducies non résidents. l’Association des banquiers canadiens et quelques banques canadiennes, comme la Banque Scotia, la BMO Banque de Montréal, la Banque Canadienne Impériale de Commerce, la Banque HSBC Canada, la RBC Banque Royale et le Groupe financier Banque TD appuyaient une approche multilatérale afin que les règles soient harmonisées entre les pays. Mais un fonctionnaire du ministère des Finances a déclaré que l’échange automatique de renseignements ne serait efficace qu’entre des pays qui ont des régimes fiscaux semblables et qui recueillent des renseignements semblables.

Global Financial Integrity a souligné le succès de la Directive multilatérale de l’UE sur la fiscalité de l’épargne, qui exige l’échange automatique de renseignements financiers entre une institution financière et l’autorité fiscale nationale du contribuable qui reçoit un paiement de cette institution; l’organisation recommandait un système semblable pour les pays membres de l’OCDE. Le Tax Justice Network a fait remarquer que l’échange automatique de renseignements sur l’identité du bénéficiaire du paiement — et non sur le montant du paiement — serait exigé. Au sujet de l’échange de renseignements sur l’identité du contribuable, Arthur Cockfield a mentionné que les contribuables pourraient être identifiés par un numéro unique afin que les pays puissent suivre le revenu de chaque contribuable.