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FINA Rapport du Comité

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CHAPITRE 5 — MESURES PRISES À L’ÉCHELLE NATIONALE ET INTERNATIONALE POUR RÉDUIRE LA PLANIFICATION FISCALE ABUSIVE ET L’ÉVASION FISCALE

Les témoins ont décrit quelques mesures visant à réduire la planification fiscale abusive et l’évasion fiscale, y compris des règles supplémentaires pour éliminer les échappatoires fiscales, des programmes pour les dénoniciateurs, des mesures d’amnistie, des mesures relatives aux conseillers fiscaux et aux administrateurs de sociétés, et des modifications des rôles des groupes internationaux existants.

A. Règles supplémentaires pour éliminer les échappatoires fiscales

Pour certains témoins, des règles fiscales supplémentaires permettraient, soit d’infléchir l’évasion fiscale, soit de réduire le montant de l’impôt qui échappe au fisc. Par exemple, l’OCDE a recommandé que l’on rejette à des fins fiscales toutes les dépenses d’entreprise associées à des activités dans un pays étranger où l’on soupçonne un cas d’évasion. L’OCDE était également favorable à l’adoption du principe du renversement du fardeau de la preuve dans le cas de transactions réalisées dans un paradis fiscal, de sorte que le contribuable devrait convaincre ses autorités fiscales de la légitimité de ses opérations à l’étranger. Arthur Cockfield a déclaré qu’il pourrait être difficile, pour l’ARC, de rejeter les dépenses d’entreprise effectuées à l’étranger sans une certaine coordination avec les autorités fiscales étrangères.

Selon Don Johnston, les gouvernements doivent faire preuve de plus de transparence en communiquant les données relatives aux stratagèmes de fraude fiscale à l’étape de la rédaction des nouvelles règles visant à combattre l’évasion fiscale. Un fonctionnaire du ministère des Finances s’est dit d’avis que l’adoption d’autres règles ne réduirait pas le nombre de contribuables qui ne font pas de déclaration d’impôt et n’augmenterait pas non plus le montant des revenus déclarés, puisque les contribuables font les déclarations.

Dans son mémoire au Comité, le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires s’est dit favorable à l’abolition des règles fiscales qui permettent aux sociétés canadiennes de déduire les intérêts payés sur toute somme empruntée en vue d’investir, directement ou indirectement, dans des filiales à l’étranger. Un fonctionnaire du ministère des Finances a souligné que tout changement que le Canada apporterait aux règles d’imposition des divisions étrangères de sociétés canadiennes ou de divisions canadiennes de sociétés étrangères irait à l’encontre des dispositions fiscales appliquées par d’autres pays, puisque tous les pays développés traitent les revenus étrangers de la même façon en n’imposant pas les revenus dans le pays d’origine. Il estimait que toute modification, par le Canada, du régime d’imposition des revenus réalisés par une société canadienne à l’étranger pourrait porter atteinte à la compétitivité des entreprises canadiennes.

En ce qui concerne l’imposition du revenu gagné à l’étranger par une société résidente, H. David Rosenbloom a indiqué que le Canada devrait procéder à un examen systématique des règles applicables aux activités transfrontalières, en s’attardant aux règles particulières concernant les paradis fiscaux. Au principe de pleine concurrence appliqué actuellement aux sociétés établies dans d’autres pays, il a opposé des règles spéciales sur le prix de transfert applicables aux transactions effectuées par des sociétés établies dans des paradis fiscaux; ces règles spéciales tiendraient compte du revenu mondial de la société. Le Tax Justice Network a fait remarquer que les règles sur le prix de transfert qui reposent sur le principe de pleine concurrence entraînent une sous-imposition et il a suggéré la création d’une base d’imposition unitaire pour les multinationales qui permettrait de fournir des renseignements sur chaque pays où transigent ces multinationales pour qu’on puisse répartir équitablement les profits. H. David Rosenbloom estimait que le principe de pleine concurrence ne fonctionne pas et il recommandait un régime structuré, tandis qu’Arthur Cockfield préconisait une définition plus précise de la « juste valeur marchande ». Enfin, Brigitte Alepin était d’avis qu’il faudrait adopter un régime fiscal centralisé ou un seul impôt à l’échelle internationale.

Le budget fédéral 2013 a annoncé des mesures visant à réduire le recours à certains stratagèmes de planification fiscale abusive, telles que le commerce de pertes de sociétés, la capitalisation restreinte et la conversion d’un revenu d’entreprise en un gain en capital.

B. Programmes de dénonciation

Dans son témoignage, Robert Kepes a décrit le programme de dénonciations des États-Unis. Ce programme offre des récompenses — qui peuvent varier de 15 à 30 % de l’impôt perçu —à ceux qui lui fournissent des renseignements permettant de percevoir des impôts auprès des contribuables qui ne respectent pas la loi. Il a proposé la création d’un programme semblable au Canada. Paul Collier était lui aussi en faveur de la création d’un tel programme au Canada. Soulignant une hausse des divulgations volontaires aux États-Unis après la divulgation de renseignements secrets obtenus grâce au programme de dénonciation, Don Johnston a déclaré qu’un tel programme peut dissuader l’évasion fiscale. Le budget fédéral 2013 a annoncé le programme Combattons l’évasion fiscale internationale, qui permettrait à l’ARC de verser des récompenses à des particuliers possédant des renseignements sur des cas d’inobservation fiscale internationale de grande ampleur; l’indemnisation pourrait atteindre 15 % de l’impôt et des taxes recouvrés grâce aux renseignements en question.

C. Amnistie

Quelques témoins se sont exprimés sur l’amnistie accordée aux coupables d’évasion fiscale qui négocient des peines inférieures ou qui ne règlent pas la somme totale d’impôt due à l’ARC. L’Accountability Research Corporation estimait que le fait d’accorder l’amnistie contre toute poursuite ultérieure n’inciterait pas les particuliers ayant réalisé des gains non déclarés grâce à des activités criminelles à divulguer leur situation, tandis qu’un fonctionnaire du ministère des Finances s’est dit d’avis que l’amnistie dans le cas de ces personnes reviendrait à les récompenser pour un comportement fautif. Arthur Cockfield s’est dit d’accord avec l’idée d’accorder une amnistie temporaire contre toute poursuite ultérieure au pénal, puisque c’est là le principal motif qui incite à la divulgation, tandis que Stephen Jarislowsky s’est élevé contre ce genre d’amnistie estimant que les fraudeurs se contenteraient d’attendre le prochain programme d’amnistie pour déclarer les revenus qu’ils auraient mis à l’abri du fisc; par ailleurs, il n’était pas d’accord avec l’idée de réduire les impôts dus afin d’encourager la divulgation. Il était favorable au resserrement des pénalités dans le cas des contribuables qui abusent de l’amnistie, affirmant que les revenus non déclarés devraient être imposés et que des intérêts devraient être exigés à partir du moment où le revenu est gagné, plutôt qu’à partir d’une échéance imposée par une loi quelconque. Dans son mémoire au Comité, Robert Kepes a indiqué qu’une « amnistie générale » inciterait les contribuables à éviter l’impôt et à attendre le prochain programme d’amnistie avant de déclarer les revenus non déclarés.

D. Conseillers fiscaux et administrateurs de sociétés

Quelques témoins se sont exprimés au sujet de l’encadrement des conseillers fiscaux et des méthodes destinées à faire en sorte que ces personnes soient également tenues responsables de toute évasion fiscale pratiquée par leurs clients. Pour Arthur Cockfield, il y aurait lieu de mieux encadrer la profession comptable, de contraindre les comptables à communiquer au gouvernement tous les stratagèmes de fraude fiscale; il a cependant précisé que ce genre de divulgation par les avocats et les comptables canadiens ne permettrait pas d’infléchir la fraude fiscale à cause de la possibilité de se prévaloir de services fiscaux à l’étranger sur Internet. L’Accountability Research Corporation était d’avis que les comptables et les organismes de fonds communs de placement devraient être soumis au contrôle de tiers. Elle a par ailleurs souligné qu’un organisme de réglementation des valeurs mobilières ne peut, à lui seul, parvenir à régler le problème de l’évasion fiscale associé aux fraudes dans le domaine des valeurs mobilières, puisque rien ne garantit que l’existence d’un seul organisme de réglementation ferait augmenter le nombre de poursuites. Le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires a affirmé que l’imposition d’amendes plus élevées aux conseillers fiscaux dont les clients sont reconnus coupables de fraudes fiscales aurait pour résultat de les décourager d’imaginer des stratagèmes de fraude fiscale. L’OCDE a signalé que d’autres pays, comme le Royaume-Uni, imposent des pénalités aux conseillers fiscaux qui incitent leurs clients à pratiquer la fraude fiscale.

Un fonctionnaire du ministère des Finances a fait remarquer que le projet de loi C-48, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu, la Loi sur la taxe d’accise, la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, la Loi sur la taxe sur les produits et services des premières nations et des textes connexes, prévoit des dispositions qui créeraient un régime de déclaration des opérations fiscales abusives et des peines pour ceux qui omettent de produire la déclaration.

Dans son mémoire au Comité, le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires a réclamé que la Loi canadienne sur les sociétés par action soit modifiée afin de définir le rôle des administrateurs vis-à-vis des stratégies fiscales de leurs sociétés, puisque des stratégies fiscales abusives peuvent avoir un effet sur la viabilité financière d’une société. Dans la même veine, l’OCDE a aussi recommandé que les lois encadrant la gouvernance des sociétés, comme la Loi canadienne sur les sociétés par actions, prévoient que la bonne gouvernance passe par le respect de la législation fiscale.

E. Groupes internationaux

Des témoins ont indiqué que, compte tenu de son influence actuelle dans le concert des nations, le Groupe des 20 serait idéalement désigné pour mettre sur pied un groupe de travail d’application des lois fiscales; celui-ci pourrait adopter des stratégies d’application coordonnées et multilatérales dont la portée pourrait être supérieure aux mesures que peut adopter l’OCDE. Afin d’inclure les pays en développement dans le processus d’exécution fiscale, la Halifax Initiative et l’Association québécoise pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens préconisaient de transformer le Comité d’experts de la coopération internationale en matière fiscale des Nations Unies en une commission intergouvernementale. Enfin, la Banque Scotia a mentionné que le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales de l’OCDE devrait servir à renforcer la transparence des renseignements bancaires.