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Aucune pression. Tout le monde aime briser la glace. Merci.
Merci de nous accueillir ce matin. Nous sommes vraiment heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole. Permettez-moi d'entrer dans le vif du sujet.
Voici notre histoire.
Le matin du 26 avril 2016, j'ai découvert notre fils, Manuel, froid et raide dans son lit. J'ai couru dans notre chambre en le tenant dans mes bras et j'ai réveillé mon épouse en la priant de lui sauver la vie. J'ai composé le 911 pendant qu'elle lui criait de se réveiller et se démenait pour faire entrer de l'air dans ses petits poumons tout en tentant de ne pas réveiller notre fille qui venait de naître.
Les premiers intervenants sont arrivés en même temps que la police et ils nous ont demandé de trouver quelqu'un pour surveiller notre fille, car nous aurions besoin de les accompagner à l'hôpital. J'ai appelé mon père. Il était 6 h 15 le jour de son 65e anniversaire.
Cette scène rejoue en boucle dans ma tête tous les jours. Les heures qui ont suivi ont été tout aussi dommageables et ont joué un grand rôle dans le traumatisme subi par notre famille. Durant la première heure qui a suivi notre arrivée à l'hôpital, notre fils a été déclaré mort. On nous a demandé d'envisager de donner ses valvules prothétiques à un enfant présentant un besoin urgent. Une conseillère en matière de deuil, qui était déjà en pleurs, est venue dans la salle et a essayé de nous réconforter. Les policiers ont commencé à nous interroger dans la salle même où reposait le corps inerte de notre fils. Quand ils ont été convaincus qu'il n'y avait pas d'acte criminel ni aucun risque de contagion, ils nous ont dit de rentrer chez nous.
Un travailleur de l'hôpital nous a parlé d'une certaine maison funéraire qui offrait un forfait sans frais pour les familles d'enfants mort-nés, disant qu'elle pourrait peut-être nous aider, même si notre situation était différente. On nous a plus tard annoncé que, comme nous avions accepté de donner les valvules, les arrangements funéraires seraient reportés pour une période indéterminée. Les médecins nous ont dit qu'ils n'avaient rien pu faire. Ils ne savaient pas pourquoi notre fils était décédé.
C'est ce dont nous nous souvenons. C'est tout. Il n'y avait personne vers qui se tourner. Il n'y avait personne pour nous guider ni pour nous rediriger vers une fondation pour qu'on puisse y obtenir de l'aide. Il n'y avait aucune forme d'aide en place pour compenser les coûts financiers ou émotionnels des semaines qui ont suivi.
Dans un pays qui se targue de s'occuper de ses gens les plus vulnérables grâce à ses programmes sociaux, chaque porte unique à laquelle nous avons frappé a été fermée, depuis celle de notre médecin de famille, qui nous a dit que le mieux qu'elle pouvait faire, c'était nous aiguiller vers des soins psychiatriques — et, quand nous étions incapables de répondre à certaines de ses questions en raison de notre état de choc, on nous a dit carrément que, si nous ne faisons pas preuve d'une plus grande ouverture, il nous faudrait trouver un nouveau médecin de famille — jusqu'à celle des ONG, qui ont affirmé ne s'occuper que des familles dont les enfants étaient victimes du syndrome de mort subite du nourrisson ou de cancer, ou de quelque cause que ce soit, mais qui ne pouvait pas s'occuper de nous, parce que le nôtre n'avait pas le bon âge et que la cause du décès était inconnue. Nous avons dû traiter nous-mêmes avec le bureau du coroner pour remettre la dépouille de notre fils pour l'incinération, avec la maison funéraire, pour commander le certificat de décès, planifier les funérailles de notre enfant et envoyer au gouvernement l'avis du décès de notre fils.
Pendant tout ce temps, les factures continuaient d'arriver. Nous avons dû payer pour que la famille de mon épouse puisse venir des États-Unis, puis pour les funérailles de notre fils. Heureusement, notre employeur m'a généreusement accordé du temps avec ma famille et une rémunération pour les semaines qui ont suivi le décès de notre fils. Des amis et des membres de la famille nous ont aidés en aidant à couvrir les coûts immédiats et en préparant quelques repas.
Au bout de huit semaines, je suis retourné au travail. Je n'avais pas le choix. Même si mon employeur m'a dit de prendre tout le temps dont j'avais besoin, mon supérieur immédiat m'a laissé entendre que je devrais maintenant bien aller et que je devrais vraiment me montrer reconnaissant de ce qu'on m'avait donné et retourner au travail. C'était trop tôt. J'ai souvent pleuré à mon bureau ou j'ai pris des pauses prolongées pour calmer mon angoisse et ma colère. Les collègues me regardaient avec pitié, et des gens bien intentionnés sont venus me voir et m'ont avoué qu'ils étaient surpris que je n'aille pas encore mieux. Le fait de préserver les apparences et d'essayer de faire bonne figure a eu de terribles répercussions sur moi et ma famille.
Enfin, j'ai trouvé sur Internet une organisation qui s'appelle Souffle de bébé. Elle nous a aiguillés vers la SUDC Foundation, une fondation américaine qui s'occupe de familles dont des enfants sont morts de façon subite et inexpliquée, qui est la cinquième principale cause de décès chez les enfants de 1 à 4 ans aux États-Unis, où des statistiques sont disponibles. Bien que la fondation n'offre pas de soutien financier, elle nous a fourni, ainsi qu'à notre famille élargie, du counseling et un soutien moral fort nécessaires. Nous lui sommes donc à jamais reconnaissants.
Comme bon nombre des familles qui ont témoigné ici, nous avons pris ce que la vie nous a lancé et avons tenté d'en tirer le meilleur en améliorant la vie d'autres personnes. Nous procédons actuellement à la mise sur pied d'une organisation caritative qui aidera les familles à s'orienter dans le processus de deuil. Nous avons soumis la pétition E-1558, où nous demandons que le 26 avril soit désigné journée de sensibilisation à la mort subite et inexpliquée.
Avec d'autres familles, nous demandons fermement au gouvernement du Canada d'aider les parents orphelins au moyen d'une compensation financière de 12 semaines suivant immédiatement la perte d'un enfant, peu importe l'âge. Ce que nous aimerions voir comme recommandation de la part du Comité, c'est un service automatique qui ressemble à ce que l'on fait lorsqu'un bébé naît, qui est fait par l'hôpital, et non par la maison funéraire ou la famille. Ce processus automatique servirait aussi de déclencheur concernant deux aides financières différentes, la première de l'assurance-emploi, car les parents endeuillés sont incapables de travailler, et la deuxième, des prestations pour enfants, pour aider à payer les funérailles de votre enfant.
Merci à vous tous de nous donner une voix dans le cadre de ce processus.
Comme l'intervenant précédent, je remercie le député Blake Richards d'appuyer la motion M-110 et le Comité de nous avoir fourni la possibilité de parler aujourd'hui de ce sujet important. J'aimerais également raconter ma propre histoire au Comité.
En 2010, mon épouse Kerstin et moi avons décidé que nous étions prêts à fonder notre famille et à l'élargir. Nous avions méticuleusement tout planifié. Nous avons fait des recherches pour connaître toutes les exigences alimentaires et l'information nutritionnelle pour mon épouse. Nous avons suivi un cours de réanimation cardiorespiratoire pour bébé. Nous avons assisté à de nouveaux ateliers pour parents, à des séances d'allaitement, et ainsi de suite. Nous nous sommes mis à la recherche de berceaux, de matériel pour l'allaitement et de toutes ces sortes de choses. Nous nous sentions vraiment préparés lorsque nous avons découvert que nous attendions un fils, en mars 2011.
La grossesse s'est déroulée sans complications, et mon épouse a porté le bébé jusqu'à la 41e semaine. Nous avions établi un cercle social de soutien dans le cadre des événements auxquels nous avions assisté avec d'autres futurs parents, des événements comme le yoga prénatal.
Cependant, tout s'est vraiment passé différemment que ce que nous avions prévu quand Marlon, notre fils, a manqué d'oxygène durant l'accouchement. Il a subi de graves lésions au cerveau, et son pronostic était pitoyable. Les médecins nous ont dit qu'il vivrait peut-être quelques heures. Malgré tous les cours que nous avions suivis et toutes les recherches que nous avions faites, nous nous sentions complètement et totalement démunis. À ce jour, nous savons gré à un médecin de nous avoir aiguillés vers le Canuck Place Children's Hospice ici, à Vancouver. Nous nous sommes déplacés vers ses installations un jour après la naissance de Marlon et avons passé un autre jour là-bas avec lui, créant des souvenirs avant qu'il décède dans nos bras.
Quand j'y repense, je ne peux insister assez sur l'importance du soutien que nous avons reçu de Canuck Place. Nous avons pu passer du temps avec Marlon. Nous avons des souvenirs. Nous avons pris des photos. Nous avons des moules de ses mains et de ses pieds, et ainsi de suite. Tous ces éléments nous ont plus tard aidés avec notre deuil, durant lequel nous avons été soutenus par l'équipe de deuil du centre de soins palliatifs.
Je vous raconte ces détails en particulier en raison des autres témoins qui ont d'autres histoires, parce que je me rends compte de la chance que nous avons eue d'obtenir le soutien et de l'importance que cela a eu pour notre deuil durant notre guérison. Sans Canuck Place, on ne nous aurait pas donné de renseignements par rapport à ce qu'il fallait faire. Il n'y aurait eu aucun counseling ni aucune possibilité de parler à d'autres parents endeuillés. Mon coeur saigne pour les familles qui n'ont pas l'occasion de passer du temps avec leurs enfants, qui n'ont personne à qui parler ou qui doivent découvrir eux-mêmes toutes les formalités.
En fait, pendant plusieurs mois, nous avons essayé d'obtenir un soutien spécialisé par d'autres moyens, et cela a été incroyablement difficile. À mon avis, il y a dans le système une lacune énorme pour des milliers de parents dans des situations comme la nôtre, et le système du soutien existant semble un peu à l'envers. Si notre fils avait vécu, toute notre propre préparation nous aurait servi. Nous aurions eu tous ces liens avec les autres parents avec qui parler et à qui poser des questions. Nous avions un accès relativement facile à divers services, comme des consultantes en allaitement, des ergothérapeutes, des spécialistes du sommeil ou des conseillers dans des cas comme la dépression post-partum. Lorsque l'inimaginable s'est produit et que notre fils est décédé, il y a eu très peu d'aide, outre celle que nous avons reçue de Canuck Place.
Avec Marlon, mon épouse avait déjà eu le congé de maternité, et aucune autre interaction n'était requise auprès de Service Canada. Mon employeur m'a énormément soutenu, et j'ai été en mesure de prendre des congés. Nous avions tous deux des régimes d'assurance-maladie complémentaires qui couvriraient plus tard une partie des services de counseling qui nous ont été fournis, mais pas pour le deuil, seulement pour la dépression. Encore une fois, ce n'est pas tout le monde qui a ces régimes d'assurance-maladie complémentaires.
Après plusieurs mois, nous avons réussi à reprendre un peu notre vie en main et avons essayé d'avoir un autre enfant. Mon épouse est de nouveau tombée enceinte, et nous avons estimé que le risque était faible. La deuxième grossesse s'est déroulée sans complications, jusqu'à ce qu'un matin, mon épouse se réveille et ne sente plus le bébé bouger. Le 9 décembre 2012, notre fils Tobias est mort dans l'utérus à 35 semaines de grossesse.
Comme d'autres parents l'ont mentionné, dans les semaines qui ont suivi le décès de nos enfants, nous n'avons pas pu réfléchir clairement et nous occuper des tâches les plus banales. Nos liens sociaux avec d'autres parents n'ont pas beaucoup aidé. Ils étaient des rappels beaucoup trop vifs de ce que nous avions perdu. Nous voulions nous cacher du monde, puisque le fait de voir une femme enceinte ou une famille avec des enfants était une torture. Cela voulait dire, par exemple, qu'il était hors de question d'aller faire des courses. De toute façon, nous n'en avions pas l'envie. Je peux vous dire que j'ai perdu des amis quand j'étais adolescent et que j'ai perdu mon père, qui est mort d'une tumeur au cerveau, mais ce type de deuil n'était pas comparable à ce que j'avais déjà vécu. Notre monde s'était complètement écroulé.
Après le décès de Tobias, nous avons dû prendre des dispositions avec Service Canada pour organiser le congé de maternité de mon épouse. Durant cette période difficile, nous avons dû quitter notre maison, le refuge où nous nous cachions, et nous aventurer dans le monde pour remplir quelques documents. Nous avons dû nous tenir debout dans le bureau à espace ouvert et expliquer notre situation. En plus de tout cela, plusieurs années plus tard — en fait, il y a deux ans aujourd'hui — nous avons reçu une lettre de Service Canada disant que nous avions réclamé trop d'argent. Il a fallu plusieurs appels téléphoniques et lettres sur plusieurs mois pour clarifier avec le personnel que nous n'avions pas commis de fraude concernant ce paiement en trop. Nous avions simplement demandé que la période commence immédiatement après le décès de Tobias, qui est survenu une fin de semaine, et mon épouse n'est pas retournée au travail le lundi.
En raison de quelque paramètre du système, le système de l'assurance-emploi avait rajusté la date de début du lundi que nous avions demandée pour qu'elle passe au lundi de la semaine suivante. Nous ne l'avions pas remarqué, et l'employeur de mon épouse a fait commencer le congé à la semaine que nous avions demandée, et il y avait donc cet écart d'une semaine. Nous avons ensuite dû expliquer pendant plusieurs mois que nous avions droit aux 15 semaines, mais qu'il y avait cet écart.
En 2014, notre fille Thea est née. Compte tenu de nos antécédents, nous l'avons mise au monde quatre semaines plus tôt et avons passé neuf jours avec elle dans l'unité néonatale de soins intensifs. C'est maintenant une fille de 4 ans en bonne santé, et nous profitons de chaque jour avec elle.
En 2015, nous avons essayé pour une dernière fois d'agrandir notre famille, mais avons vécu une fausse couche précoce à sept semaines.
Comme j'ai personnellement connu la fausse couche, la mortinaissance et le décès néonatal, il est important pour moi d'encourager le Comité à examiner la grossesse et la perte d'un bébé de façon holistique. Cela touche beaucoup de Canadiens dans des circonstances très différentes. Un des membres du Comité a dit plus tôt que les règles s'appliquent souvent en noir et blanc, sans zones grises. Malheureusement, ces situations tragiques sont tout sauf noir et blanc et nécessitent de la compassion et de l'empathie pour aider les parents à redevenir des membres fonctionnels de la société canadienne.
Merci de m'avoir permis de raconter notre histoire. Comme l'intervenant précédent, j'appuie entièrement la proposition de fournir aux parents 12 semaines de congé et d'automatiser le processus afin de le simplifier, et non pas de conserver cette nécessité indue pour eux de s'occuper de la paperasserie.
Merci.
Je vais parler pour nous deux et je parle aussi pour les parents de l'ensemble du Canada qui vivent actuellement leur propre épreuve de perte d'un bébé et dont la voix ne peut s'exprimer aujourd'hui. Je serai cette voix.
En tant que parent endeuillée qui a connu la perte d'un enfant durant la grossesse et la perte d'un bébé et comme cocréatrice de notre programme de soutien local des décès périnataux dans ma collectivité à l'extérieur d'Edmonton, en Alberta, j'aimerais raconter notre expérience et notre histoire et vous faire part des connaissances que nous possédons maintenant dans ce domaine unique et crucial.
Mon époux Bill et moi savions bien longtemps avant de nous marier que nous voulions tous deux fonder une famille plus grande que nature. Nous avons été chanceux que la conception ne soit jamais un problème, mais le fait de rester enceinte, parfois, est devenu un problème.
Les deux premières grossesses ont été faciles. Nous avons accueilli notre première fille, Chelsea, de façon naturelle, puis, deux ans plus tard, notre premier fils, Brady.
Avec notre premier enfant, j'ai pu profiter d'un congé de maternité payé, puis j'ai choisi de ne pas retourner travailler à temps plein en raison des coûts élevés des frais de garde d'enfant dans notre région. J'ai fini par rester à la maison avec quatre enfants pendant plus de 20 ans, une période que j'ai chérie et que je souhaite à tous les parents.
Quand nous avons eu notre troisième enfant, nous avons été choqués et surpris de vivre la première de nombreuses pertes, et nous étions très mal préparés. Notre médecin et notre sage-femme n'avaient pas de réponse pour nous, puisque notre perte s'est produite très tôt durant la grossesse. Nous avons pris du temps pour guérir, puis nous avons essayé de nouveau, accueillant heureusement un autre fils né naturellement et en santé, Brodie, l'année suivante.
Nous avons pris une courte pause pendant que Bill est retourné à l'université. Durant sa dernière année, nous avons décidé qu'il était temps d'avoir notre quatrième bébé. Encore une fois, nous avons vécu deux fausses couches avant de finalement accueillir notre deuxième fille, Chynna, juste 10 jours avant que Bill obtienne son diplôme. C'était une époque magique, puisque mon époux commençait sa nouvelle carrière et que nous commencions à vivre en tant que famille de six personnes.
Nos pertes durant ces années ont été profondes et très difficiles. Grâce au soutien de bons amis, de membres de la famille et de l'un et l'autre, nous nous sommes débrouillés, mais ce sont nos deux pertes suivantes qui ont changé notre monde et notre parcours de vie. Alors que nos enfants grandissaient en santé, heureux et forts, nous savions que nous voulions continuer d'agrandir notre famille et nous étions très enthousiastes à l'idée d'annoncer notre prochaine grossesse. Un soir, plus tard durant notre grossesse, je me suis rendu compte que j'étais en travail. Même si notre fils devait naître à la maison, nous avons décidé de nous diriger vers l'hôpital dans l'espoir qu'on puisse faire cesser ce travail précoce. Malheureusement, mon travail allait trop vite, et personne n'a rien pu faire.
On nous a traités avec grâce, dignité, bienveillance et compassion, mais le matin suivant, nous sommes arrivés à la maison les bras vides et le coeur brisé. Nous avons nommé notre fils Bretton-Elijah Lucas, et sa naissance et son décès ont modifié notre vie à jamais.
Au bout de quelques jours, nous avons su que ce n'était pas une perte que nous pouvions subir seuls et que nous pouvions comprendre, et à l'aide de soutien communautaire, nous avons créé dans notre hameau un programme nommé H.E.A.R.T.S. Baby Loss. Nous l'avons lancé en 1996, et aujourd'hui, nous avons soutenu, conseillé, tenu et servi plus de 4 600 familles en personne, par téléphone, par courriel et même sur Skype.
Nos services sont vastes. Ils couvrent l'Ouest du Canada, le Nord de l'Alberta jusqu'aux territoires et traversent les États. Nous offrons notamment des groupes de soutien, du clavardage en ligne, des visites à domicile, du counseling, des programmes pour les parents, une cérémonie annuelle aux chandelles et des ressources pour quiconque a besoin de soutien.
Il y a un peu plus de six ans, nous avons lancé le programme Baby Steps Walk to Remember, auquel le député Blake Richards a assisté. Il a parlé de façon passionnée de la motion M-110 avec nos familles. C'est une journée pour tous ceux qui sont touchés par la perte d'un précieux bébé.
Le 14 octobre, il y a juste quelques semaines, nous avons fait notre marche sur le terrain de l'immeuble législatif de l'Alberta, dans le centre-ville d'Edmonton. Nous avons marché avec un peu moins de 300 parents, frères et soeurs, amis et membres de la famille, pour honorer 206 bébés. En six ans, plus de 1 800 personnes ont marché sur ce chemin, ce qui représente un peu plus de 1 200 précieux bébés.
Chaque année, en Alberta, près de 16 000 bébés sont perdus durant la grossesse ou après la naissance, une grossesse documentée sur quatre se termine en fausse couche, et plus de 400 bébés meurent à la naissance, comme notre fils, Bretton. Sans un souffle et sans ouvrir les yeux, Bretton, par sa brève existence, a créé du soutien, de l'éducation, de la sensibilisation et de la compassion pour ceux qui subissent cette perte unique et énorme.
Après la naissance et le décès de Bretton, nous nous sommes souvent posé la question: « Pourquoi? ». Avec le temps, nous nous sommes dit que son but était d'être le catalyseur de ce programme. Nous nous sentons tous deux chanceux de dévouer notre vie à cette cause nécessaire.
Quand nous élaborions notre programme, on nous a encouragés à offrir d'autres options aux familles de notre collectivité. Nous avons créé un centre d'initiation à la vie familiale en plus de notre programme de décès périnataux. C'était un travail incroyable qui a mobilisé notre famille, notre collectivité, nos amis et des collègues.
Puis, ça s'est reproduit. Nous avons attendu un certain temps pour guérir et pour créer notre centre de vie familiale. Notre médecin et notre sage-femme étaient convaincus que notre expérience de mortinaissance ne serait pas répétée, car j'étais toujours jeune et en santé, et que la mortinaissance est rare. Le soir du 21 août 1998, dans le confort de notre maison, nous avons accueilli Ciara-Rose Kennedi d'un salut rapide et d'un au revoir très triste, dans un moment qui a encore une fois arrêté notre vie.
Cette fois-là, nous savions comment trouver du soutien et comment intégrer cette perte incroyablement difficile à notre vie, une fois de plus. Malgré toute notre expérience, nos connaissances et la communauté qui nous entourait, nos bras étaient une fois de plus vides, et nos coeurs, brisés.
Au cours des années suivantes, tandis que nous poursuivions notre guérison, nous avons vécu trois fausses couches de plus et décidé que, sans raison médicale expliquant toutes nos pertes, nous continuerions nos efforts pour élever les quatre enfants incroyables que nous avions. Je crois qu'il est important de dire que, même si nous avions ces quatre enfants maintenant adultes et sommes bénis de les avoir élevés, cela ne réduit en rien notre deuil, car nous savons exactement ce que nous avons perdu, pas juste les rêves et les espoirs d'un bébé en santé dans l'avenir avec nos enfants désirés, mais aussi des moments importants: la première dent, les pas jamais faits, l'absence de la première journée d'école et tout ce qui mène à ces petits-enfants que nous n'aurons pas de ces gentils bébés innocents qui sont morts trop tôt.
Entretemps, nous avons renommé notre centre, combiné la première partie du nom de Bretton et le milieu du nom de Ciara pour créer notre projet patrimonial, le BriarPatch Family Life Education Centre.
Nous avons quatre enfants en santé, Chelsea, Brady, Brodie et Chynna. Deux mortinaissances importantes, Bretton et Ciara; six fausses couches précoces, Birkley, Cabriola, Cambria, Beau, Cree et Bentley. Ce sont des pertes que de nombreuses personnes ne connaîtront jamais, mais pour ceux qui le vivront, la noirceur de ces premiers jours de perte devient la noirceur des jours de deuil qui suivent pour le reste de leur vie.
Ce n'est pas un deuil qu'on peut simplement surmonter en lisant un livre ou en assistant à une séance de groupe de soutien. Pour la plupart des familles, la perte d'un bébé nécessite des soins intensifs de la part d'un médecin ou d'un soignant pour les répercussions physiques, du soutien spécialisé pour les répercussions émotionnelles, du soutien communautaire pour les répercussions sociales, du soutien didactique pour les répercussions spirituelles et du soutien psychologique pour des répercussions cognitives.
C'est une expérience de deuil qui ne ressemble pas aux autres. Personne d'entre nous ne commence une grossesse avec une liste de vérification pour savoir quoi faire si nous perdons notre bébé. Personne d'entre nous ne sait comment gérer une fausse couche, consoler les coeurs brisés et réparer les relations fracturées; nous ignorions où enterrer notre bébé, qui ferait le service et quel type de cercueil choisir.
J'aimerais maintenant vous faire part de mes réflexions à l'appui de la motion M-110. Cette initiative a d'abord été portée à notre attention par le député , et nous sommes heureux, pas seulement en tant que famille, mais en tant qu'organisation, de donner un aperçu du sort de nos familles et des répercussions de la perte d'un bébé sur les familles et la collectivité dans son ensemble.
Pour les familles qui ont été en mesure d'accéder à des prestations d'assurance-emploi au titre des congés de maternité et de paternité, il est bouleversant d'entendre les histoires de ceux qui se retrouvent coupés des prestations une fois que les responsables du système apprennent que leur bébé est décédé. En plus d'un revenu déjà réduit, de nombreux coûts sont associés à la perte d'un bébé, et la plupart des familles ne sont pas préparées à cette difficulté. Les funérailles coûtent cher, et même si les maisons funéraires aident souvent généreusement en réduisant les coûts, au final, nous devons tout de même payer certains frais. Si le père ou le conjoint s'absente du travail pour soutenir la mère et pour vivre son propre deuil, il faudrait peut-être réfléchir à des pertes de salaire supplémentaires et les couvrir.
Notre système de santé couvre de nombreuses interventions, mais dans le cas de la perte d'un bébé, il pourrait y avoir des médicaments ou des services qui ne font pas partie du régime d'assurance santé provincial ou qui ne sont pas couverts par des prestations privées. Le counseling peut être couvert, mais les coûts peuvent être élevés, et très peu de rendez-vous sont remboursés.
Les enfants et les adolescents, les frères et les soeurs, sont grandement touchés par la perte d'un bébé, ce qui entraîne des jours d'école manqués et des rendez-vous de counseling. Ils pourraient aussi manifester un comportement parce qu'ils auraient du mal à comprendre ce qui s'est passé. Les enfants et les adolescents n'ont pas les mots pour parler pleinement de leurs sentiments et de leurs émotions, et c'est là où apparaissent des comportements néfastes qui pourraient, sans soutien, s'aggraver et aller jusqu'à la consommation de drogues et d'alcool pour atténuer la douleur et engourdir l'expérience. Des problèmes de santé mentale pourraient apparaître, et c'est un autre coût pour le système.
En tant que pays, nous devons soutenir ces familles endeuillées qui vivent la perte d'un bébé au moyen d'une législation qui leur donne la possibilité de conserver leurs prestations, afin de leur donner du temps pour guérir et du temps, en famille, pour traverser cette incroyable épreuve de deuil. Nous avons besoin de mesures de soutien communautaire financées pour les parents, les enfants, les membres de la famille élargie et la collectivité dans son ensemble. La perte d'un bébé nous touche tous, que ce soit des heures de travail perdues, des activités sociales perdues, de l'exercice physique perdu et des moments d'émotion perdus.
Comme j'étais mère au foyer quand nos enfants grandissaient, je n'étais pas admissible aux prestations de maternité au-delà de notre premier enfant, mais une prestation qui aurait fourni à mon époux la possibilité de s'absenter du travail pour être à la maison avec nous, quand j'éprouvais des difficultés physiques et émotionnelles, pour être avec nos enfants qui essayaient de saisir le concept de deuil et de perte et, fait encore plus important, pour qu'il puisse avoir du temps pour vivre son propre deuil et passer à travers les complexités qui ont influencé notre relation et pour grandir durant cette période sombre aurait complètement changé les choses. Il a plutôt dû retourner au travail, et cacher ses larmes et sa douleur, tout en se montrant fort pour moi et nos enfants.
Nous avons réussi à nous en sortir, et, même si ce n'est pas chaque mariage qui survit à la grossesse ou à la perte d'un bébé, notre occasion d'aider les autres a renforcé notre engagement à l'égard de notre mariage et de notre famille. C'est toujours un travail en cours, mais c'est sain et c'est complet.
Aujourd'hui, si on nous demande ce qui aiderait ces familles blessées et vulnérables, ce dont nous avons besoin et ce qui pourrait changer les choses, je répondrais ceci: restructurez le système actuel pour les familles afin qu'elles puissent accéder aux prestations complètes auxquelles elles ont droit en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi et les conserver. Créez une nouvelle prestation, comme d'autres familles l'ont souhaité, de 12 semaines pour des mesures de soutien globales aux personnes endeuillées, partout au Canada, pour toutes les familles ayant perdu un bébé, dans toutes les collectivités; une prestation concrète de congé pour les parents et les partenaires afin qu'ils puissent composer avec les répercussions physiques, émotionnelles, sociales, cognitives et spirituelles de leur grossesse unique ou de leur deuil associé à la perte d'un bébé; un congé qui est simple à offrir et simple à demander pour les parents et fourni, dans l'idéal, automatiquement quand la nouvelle de l'interruption de leur grossesse ou de la perte de leur bébé est inscrite dans le système, sans qu'on se heurte à des obstacles. Créer du financement durable et à long terme et soutenir des programmes spécialisés comme le nôtre qui offrent l'aspect de soutien par les pairs.
Nous sommes souvent aiguillés vers des professionnels, et, en tant que professionnelle dans la collectivité, j'aimerais dire que ces mesures de soutien sont agréables, mais les parents veulent vraiment parler à d'autres familles ayant vécu la perte d'un bébé. Si nous pouvons créer des animateurs de groupe de décès périnatal avec des ressources professionnelles, ce serait idéal.
Le financement de cet aspect permettra de réduire les coûts de soins de santé à l'avenir pour ceux qui cherchent du soutien, de l'éducation et des ressources, s'ils pouvaient les recevoir au moment de la perte et quand ils en ont besoin plus tard, sans obstacles et sans coûts personnels.
Nous sommes convaincus que cette information fournie aujourd'hui est utile au Comité. Nous offrons notre expérience et notre expertise à ceux qui examinent cette question, à ceux qui présenteront les recommandations et à ceux qui décideront du résultat de cette motion importante pour nos familles endeuillées ayant vécu une grossesse et le décès d'un bébé partout au Canada.
Merci d'avoir pris le temps d'écouter notre histoire aujourd'hui et de nous soutenir en faisant de cette question essentielle une expérience positive et saine pour tous.
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Bonjour, et merci de nous fournir l'occasion d'être une voix pour ma Grace et pour le Vincent de Jessica, ainsi que pour d'autres parents endeuillés.
Bien que mon histoire soit extrêmement longue et compliquée, je vais m'en tenir aux parties qui s'appliquent ici.
Ma fille, Grace Neela Tamsin, est née en 2013. Elle était une surprise arrivée tard dans la vie et, au départ, c'était une jumelle. Nous avons découvert assez tôt que la jumelle avait probablement une maladie génétique fatale, et si le bébé se rendait jusqu'à la naissance, il ne vivrait probablement que quelques heures. On ne nous a donné aucun autre renseignement que celui-là, et on nous a renvoyés chez nous. Puis, à 17 semaines, j'ai contracté une maladie d'origine alimentaire qui s'appelle listériose, essentiellement la pire infection que vous pouvez attraper quand vous êtes enceinte. Rares sont les bébés qui y survivent.
Quand j'ai appelé mon service de maternité rural, on m'a suggéré de prendre un bain chaud, puisque nous n'avions pas atteint le stade viable de 20 semaines, et on m'a dit que je serais seulement assise à l'urgence pendant des heures, puisque je ne serais pas une priorité.
Notre hôpital pour femmes et enfants à Halifax, l'IWK, m'a admise immédiatement, a découvert que la jumelle en péril était décédée, puis, quand j'ai perdu les eaux deux jours plus tard, on m'a dit que je resterais essentiellement à l'hôpital sur antibiotiques par voie intraveineuse jusqu'à ce que le bébé survivant soit né. N'oubliez pas que j'étais enceinte de 17 semaines à ce moment-là. Neuf semaines plus tard, Grace est née en détresse, à 26 semaines. Elle est restée longtemps à l'IWK avant de recevoir son congé, à sept mois et demi. J'ai vécu à l'hôpital avec elle pendant tout ce temps.
Avançons rapidement à trois ans; Grace est une enfant normale et heureuse, en santé, qui n'a qu'un problème intestinal, vestige de ses jours à l'unité néonatale de soins intensifs. Même ce problème avait été déclassé, au début décembre, et devait faire l'objet d'un suivi mineur. Puis, le 28 décembre, nous avons amené Grace à l'urgence en croyant comme tout le monde qu'il ne s'agissait que d'une autre infection bactérienne mineure de ses intestins. Dix-huit heures plus tard, elle est morte. Des tissus cicatriciels invisibles sur les appareils d'imagerie, le résultat inattendu d'une intervention subie à six semaines, ont étranglé ses intestins et causé son décès.
Étant donné les nombreux besoins de Grace, au début, je suis restée à la maison avec elle. Je venais à peine de recommencer à travailler dans un poste temporaire à l'été 2016, qui a pris fin en décembre de la même année. Quand Grace est morte, je n'ai pas songé tout de suite à l'assurance-emploi, puis, quand j'ai fini par présenter une demande, j'étais à peine admissible en raison des exigences liées aux heures. On m'a demandé pourquoi j'avais attendu aussi longtemps avant de présenter une demande. J'ai dit à la fille à l'autre bout du fil que ma fille de trois ans était décédée. Elle ne savait pas du tout quoi dire. J'ai ressenti le besoin de m'excuser, car je l'avais fait pleurer.
Elle a dû me transférer à un gestionnaire pour régler ma demande, donc j'ai dû expliquer de nouveau ce qui s'était passé. On m'a dit que je pourrais aussi demander des prestations de maladie de l'assurance-emploi si je présentais un billet du médecin, donc je suis allée voir mon médecin, qui a fourni un billet pour « deuil de ma fille ».
Des semaines plus tard, j'ai reçu par la poste une lettre disant que ma demande avait été rejetée, et aucune raison n'était fournie. J'ai rappelé le même gestionnaire de l'assurance-emploi. On m'a dit que le deuil n'était pas une excuse acceptable pour un congé de maladie. J'ai demandé ce qui serait acceptable. On n'a pas été en mesure de me le dire directement, mais quand j'ai parlé de stress, on m'a dit que cela pourrait fonctionner.
J'ai donc dû retourner voir mon médecin et lui expliquer que le premier billet avait été refusé. Il en a écrit un autre en utilisant le stress comme raison. Le stress est une excuse acceptable; le décès d'un enfant ne l'est pas.
Nous avons aussi reçu des dépôts automatiques inaperçus du crédit d'impôt pour enfants, des dépôts équivalant à des mois, même si la carte santé de Grace avait été annulée, que son numéro d'assurance sociale avait été annulé et qu'un certificat de décès avait été délivré.
Des témoins précédents ont mentionné que des membres de la famille et des amis sont intervenus pour s'occuper de certaines choses — s'assurer que les factures sont payées, faire des courses, toutes les petites choses dont on doit s'occuper. Ce sont les choses auxquelles je pensais habituellement pour les autres, donc nous ne l'avons juste pas remarqué avant des mois plus tard, et tout cela, évidemment, a dû être remboursé. Lorsque j'ai demandé à la dame de l'ARC pourquoi les paiements ne cessaient pas juste automatiquement dans ces situations, elle a répondu que c'était en raison de la sécurité: un ministère ne pouvait pas informer l'autre ministère même lorsqu'on avait affaire à un décès.
Durant tout ce temps, mon époux Neil a continué de travailler. Certains jours, il s'en sort; d'autres, non. Heureusement, il a un patron très compréhensif, mais nous n'étions pas dans une position financière qui lui permettait de prendre quelque congé que ce soit pour faire son deuil. Malheureusement, le parcours de Neil est beaucoup plus difficile. Après un an et demi, presque deux ans maintenant, c'est encore très fréquent pour lui d'être incapable d'affronter le monde. Serait-il dans une meilleure situation maintenant si nous avions pu lui offrir le temps nécessaire pour ne pas s'occuper des factures qui s'empilent et des obligations à respecter? Je crois que cela l'aurait certainement aidé.
Je vais céder le temps qu'il me reste à Jessica Weatherbee.
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Merci, monsieur le président.
Notre organisme a 25 ans, et voici sa mission.
Le premier volet de la mission est l'accompagnement de personnes qui sont en fin de vie à l'unité des soins palliatifs de l'Hôtel-Dieu-de-Saint-Hyacinthe ainsi qu'à domicile.
Notre deuxième volet est l'accompagnement de personnes qui vivent un deuil. C'est ce volet qui m'amène ici aujourd'hui.
Nous formons des bénévoles qui accompagnent ces personnes. Ils ont d'abord été sélectionnés parce qu'ils possèdent de grandes qualités d'écoute et un respect indéfectible de la capacité de l'être humain à se prendre en main. Nous accompagnons des personnes qui vivent des moments difficiles. Nous devons nous assurer que nos bénévoles le font avec tout le doigté nécessaire. Notre accompagnement est tout à fait gratuit, et j'insiste là-dessus: nous accompagnons les gens gratuitement. Actuellement, 60 bénévoles font partie de nos effectifs.
Notre formation de base, qui a pour titre « Accompagner l'autre c'est s'accompagner soi-même », est d'une durée de 30 heures. À la suite de cette formation, nous faisons une sélection des personnes qui deviennent bénévoles chez nous. Il faut dire que toutes les personnes qui suivent cette formation ne peuvent pas devenir bénévoles chez nous. Ensuite, avant de commencer tout accompagnement, nos nouveaux bénévoles reçoivent une formation de 15 heures sur la relation d'aide, qui s'appelle « L'accompagnateur ». À la suite de cette deuxième formation, les bénévoles décident s'ils désirent accompagner les personnes en fin de vie ou les personnes qui vivent un deuil.
Le nouveau bénévole peut immédiatement être intégré comme coanimateur dans un groupe d'adultes endeuillés. De fait, nous ne laissons pas nos bénévoles entreprendre un accompagnement tout seuls. Nous leur montrons la bonne façon de faire. Cela signifie que les personnes endeuillées sont accompagnées individuellement ou en groupe de cinq à huit personnes. Nous parlons de 10 rencontres étalées sur 10 semaines. Deux bénévoles accompagnent les groupes, et une personne bénévole accompagne une autre personne lors des rencontres individuelles. Ainsi, ces 10 semaines d'accompagnement se font de la bonne façon.
Les formations suivantes viennent s'ajouter à la formation de base. Il y a une approche particulière qui a été conçue pour l'accompagnement des enfants qui vivent un deuil. Elle s'appelle « J'écoute ma toute petite voix ». Il s'agit d'une formation de 15 heures. Les bénévoles ainsi formés peuvent accompagner des groupes d'enfants qui vivent un deuil. Nous avons aussi une approche particulière destinée aux adolescents, qui s'appelle « À la découverte de ta route ». Il s'agit là aussi d'une formation de 15 heures qui permet aux personnes qui la suivent d'accompagner les adolescents.
Nous avons également entrepris l'élaboration d'une approche qui concerne le deuil périnatal. Souvent, plusieurs personnes dans notre société ne considèrent pas la perte d'un enfant à naître ou nouvellement né comme un véritable deuil. Pourtant, les parents, les grands-parents et les autres membres de la famille sont très touchés par cette perte. Nous allons donc offrir une formation particulière qui va permettre à des bénévoles ainsi formés d'accompagner cette clientèle touchée par un deuil tout aussi important.
En ce qui concerne les membres d'une famille qui ont perdu un enfant, nous les accompagnons à partir des différentes approches que nous avons élaborées. Chaque deuil est unique, et nous sommes à l'écoute des besoins particuliers de chaque personne qui fait appel à nous.
En tenant compte des budgets disponibles, nous inscrivons nos bénévoles à différents congrès et formations. Plusieurs bénévoles ont reçu la formation Agir en sentinelle pour la prévention du suicide.
Le vendredi 2 novembre, c'est-à-dire demain, au Centre de congrès de Saint-Hyacinthe, se tiendra un colloque que nous avons organisé. Il a pour titre « Deuil et famille ». Plusieurs de nos bénévoles y assisteront. Environ 100 personnes seront présentes pour entendre les conférences sur différents sujets liés à ce thème.
Notre organisme s'est bâti une excellente réputation au cours de ses 25 ans d'existence. Les personnes endeuillées qui ont eu recours à notre accompagnement ont toutes témoigné du mieux-être qu'elles éprouvaient par la suite. Les rencontres leur ont permis de s'exprimer librement sur le grand vide qu'avait laissé la personne décédée. Elles ont pu reconnaître les émotions qu'elles vivaient et repartir avec des outils qui allaient les aider à l'avenir. Le retour à la vie normale s'en trouvait donc facilité.
Je me permets de vous parler de notre situation financière.
Nous recevons une subvention du gouvernement du Québec par l'entremise du Programme de soutien aux organismes communautaires, mais elle est insuffisante. Elle ne compte que pour 40 % de notre budget annuel.
Heureusement, nous avons de généreux donateurs qui nous soutiennent financièrement chaque année. Malgré cela, nous devons tenir deux activités de financement, sous la forme de soupers-bénéfice. Quand cela va bien, les revenus provenant de ceux-ci nous permettent de boucler notre budget. Toutefois, année après année, nous constatons une diminution de l'engouement de la population pour ce genre d'activité.
Quoi qu'il en soit, nous investissons de nombreuses heures dans la préparation de ces événements. Le temps que nous y consacrons, c'est du temps de moins que nous avons pour élaborer nos approches, soutenir nos bénévoles ou accentuer notre collaboration avec le centre de santé et nos différents partenaires.
Je vous remercie de m'avoir entendu. J'espère que vous aurez été à notre écoute.
Je voulais tout simplement revenir à une question précédente: qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire pour les parents? J'ai en fait préparé quelques exemples dont j'aimerais vous faire part.
Je suis tout à fait d'accord avec ce que Paula a dit, avec tout ce que vous ont déjà dit les chercheurs qui ont témoigné. Ce serait merveilleux s'il pouvait y avoir un groupe de travail ou une commission chargé de créer du matériel à l'échelon fédéral dans le sens de ce que Cheryl vient tout juste de mentionner, de façon à décrire l'expérience de deuil à laquelle les gens peuvent s'attendre, à leur dire simplement que tout ce qu'ils vivent est normal. Beaucoup de parents ont l'impression de devenir fous et ils se demandent ce qui leur arrive.
C'est tout simplement cette idée de pouvoir leur dire: « Regardez, nous savons ce qui se passe. Voici les recherches sur ces sujets. Voici ce qui, selon nous, peut vous être utile et voici certaines suggestions quant à ce que vous pouvez faire ». Ce pourrait être un document comme les dépliants que je vous montrerai, ici.
En Colombie-Britannique, par exemple, tout le monde se voit remettre ces livrets. Toutes les personnes qui ont un enfant vivant et en santé obtiennent ces livrets très complets qui décrivent tout ce qui se produira au cours des trois ou quatre prochaines années. Tout cela est issu de recherches. C'est très bien préparé. Il s'agit d'une très bonne ressource.
Lorsqu'un enfant meurt, voici ce à quoi ressemble le document que nous remet l'hôpital: un document de six pages imprimé recto verso par l'hôpital. En fait, on peut lire au verso: « Produit en 1989. Révisé en 1999 ». Le document contient très peu d'information, et il est surtout question de considérations physiques qui concernent ce qui peut arriver au corps d'une mère une fois qu'elle donne naissance. Il y a une demi-page sur les changements émotionnels et il est indiqué que, si on a plus de questions, il faut en parler au personnel infirmier, ce que nous avons fait, et le personnel ne connaissait aucune ressource, pas même le groupe de soutien dans son propre hôpital.
Voici ce que je propose: qu'est-ce qui nous empêche de créer un registre national des parents endeuillés? Ce pourrait être une solution facultative. Parce que nous avons demandé les documents sur tous nos enfants à l'hôpital, j'ai pu voir tous les documents qui sont déjà communiqués par l'hôpital aux diverses organisations. J'en ai un, ici: c'est une déclaration de naissance vivante ou d'enfant mort-né. La déclaration contient toute l'information dont on aurait besoin pour créer une telle chose. Le document est envoyé aux organismes responsables des statistiques, l'organisme provincial —dans ce cas-ci, l'organisme de l'état civil de la Colombie-Britannique —, mais, ensuite, je crois que l'information est fournie à Statistique Canada.
Ce serait une façon parfaite de faire en sorte que toute cette information soit transmise au gouvernement fédéral et, essentiellement, nous pourrions faire un suivi lorsque l'information est fournie aux parents, soit par lettre, soit par courriel, pour demander: « Voulez-vous faire partie d'un réseau qui vous permettrait de créer des liens avec d'autres familles qui ont vécu quelque chose de similaire? » On pourrait tout simplement coordonner les activités d'extension entre pairs de cette façon.
Une fois que c'est fait, la prochaine étape logique serait d'étendre le registre à ceux qui fournissent vraiment des services aux familles afin de pouvoir dire aux familles endeuillées: « Nous savons que vous êtes dans cette zone, et il y a 15 fournisseurs enregistrés, ici. » Il pourrait s'agir de tous les témoins que vous avez entendus aujourd'hui et qui ont des organisations, des réseaux de pairs et des groupes de soutien. Essentiellement, ces organisations pourraient demander de figurer au registre, et on pourrait tout simplement assurer le jumelage, qui est le principal problème pour beaucoup d'organisations avec lesquelles j'ai dû composer. Comme je l'ai dit tantôt, c'est l'argument lié à la protection de la vie privée.
En tant qu'organisation, on ne peut pas tout simplement aller à l'hôpital et demander les coordonnées de toutes les personnes qui perdent un enfant afin d'aller les voir et de leur offrir des services. Habituellement, on tente, ensemble, d'inscrire l'information sur un dépliant ou on travaille avec certaines des personnes à l'hôpital et on crée des relations de confiance, mais ce n'est pas un système infaillible, parce qu'il s'appuie sur les gens. Si une personne se présente à l'hôpital à un moment précis et qu'il y a un infirmier précis qui est là et qui connaît l'information, il pourra peut-être la fournir à la famille, mais, dans une autre situation, si la même personne n'est pas là, l'information n'est pas communiquée.
Je préconiserais vraiment un système holistique et central faisant en sorte que personne ne passe entre les mailles du filet tout simplement parce que, à un moment donné, une personne précise n'est pas à l'hôpital pour faire le travail. Si vous organisez les choses de cette façon en misant sur les processus actuels d'avis envoyés aux divers organismes gouvernementaux pour consigner le décès d'un enfant, la prochaine étape tout à fait logique serait peut-être d'élargir ce service pour prévoir un tel registre et, de cette façon, lier les parents les uns avec les autres et avec les organisations.
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Je vais commencer par remercier tous les parents et les défenseurs des parents qui sont parmi nous aujourd'hui de leur courage et de leur altruisme.
Vous parlez d'une situation très tragique que vous avez vécue et vous essayez de la transformer de façon à pouvoir aider les autres. Même si c'est peut-être une façon qui vous permet de garder la mémoire de vos enfants en vie, bien sûr, cela ne changera rien à ce que vous avez vécu. Il est évident que vous travaillez pour vous assurer que d'autres personnes n'ont pas à passer par là où vous êtes passés, sans soutien et sans compassion. Je vous remercie de vos efforts et du travail que vous faites au nom d'autres parents qui ont perdu des enfants.
Vous avez tous parlé rapidement du point de contact, généralement au niveau de l'hôpital, et vous estimez que c'est là qu'il doit y avoir un changement quelconque en ce qui concerne l'information. On parle de la communication des renseignements qui vous sont fournis, les renseignements sur les mesures de soutien auxquelles les parents ont accès. C'est quelque chose qui relève de l'échelon provincial, mais, au Comité, nous avons tout de même la capacité de formuler une recommandation pour encourager une telle chose. On peut le faire par l'intermédiaire d'un mécanisme comme, par exemple, les réunions des ministres fédéral et provinciaux de la Santé, où on pourrait encourager une telle chose, que des renseignements soient communiqués à l'échelle du pays. C'est assurément quelque chose que nous pouvons quand même recommander.
De plus, s'il y a vraiment des problèmes liés à la protection de la vie privée dans l'échange de renseignements au niveau des gouvernements, on a la capacité de faire signer un formulaire ou je ne sais quoi afin que ce soit possible. C'est assurément quelque chose qu'on peut faire. Nous apprécions ces suggestions. Je crois que ce sont des suggestions très importantes, et nous les prenons bien en note.
J'aimerais aborder un aspect précis du dossier, et j'ai une autre question. Si possible, j'aimerais que vous me répondiez tous.
Premièrement, vous aujourd'hui, et d'autres parents, nous avez parlé de certaines des expériences terribles associées au fait d'avoir à raconter l'histoire de votre perte plusieurs fois, dans certains cas, à de nombreux bureaucrates et fonctionnaires afin d'essayer d'avoir accès à ce qui pourrait vous être offert. Les résultats ont été différents à différents endroits. Selon moi, deux choses découlent de cette situation.
Dans un premier temps, il devrait y avoir une ligne d'aide quelconque par l'intermédiaire de Service Canada, par exemple, où des parents endeuillés ou des personnes qui vivent un deuil peuvent appeler pour parler à quelqu'un qui comprend vraiment leurs besoins et qui a l'information nécessaire à leur fournir, de façon qu'on n'ait pas des résultats différents et des expériences différentes d'une situation à l'autre. J'aimerais obtenir vos commentaires à tous à ce sujet. Est-ce, selon vous, quelque chose qui serait important?
Dans un deuxième temps, il y a la question des prestations en tant que telles. Beaucoup de parents qui sont venus nous voir ont souligné qu'il est important que ce soit un congé lié précisément au deuil. L'exemple de Paula montre très bien à quel point c'est important. La possibilité des congés de maladie a été soulevée, mais ce n'est pas possible pour tout le monde pour diverses raisons. Vous avez peut-être constaté que vous n'y aviez pas droit. Dans certains cas, des congés ont déjà été utilisés, durant la grossesse, par exemple,
L'idée, c'est que les prestations devraient être spécifiques et automatiques, de sorte que les gens n'ont pas à se battre contre la bureaucratie pour y avoir accès. C'est quelque chose qui serait accessible à tous les parents endeuillés.
J'aimerais que vous me disiez tous ce que vous pensez de cet aspect précis — l'importance de miser sur une prestation automatique, spécifique et universelle — et aussi de l'idée d'une ligne qui serait accessible pour tous les parents, une ligne où l'interlocuteur comprend vraiment le deuil.
C'est une question que je vous pose à vous quatre, mais nous allons commencer par vous, Cheryl.