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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 015 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 1er juin 2016

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Bonjour à tous. Encore une fois, nous accueillons des témoins dans le cadre de notre étude sur le Programme des travailleurs étrangers temporaires, le PTET. Nous attendons toujours quelques témoins qui seraient en train de passer à la sécurité, mais nous commencerons sans plus tarder avec notre premier témoin, M. Bruce Webster.
    Monsieur Webster, m'entendez-vous?
    Oui, monsieur, je vous entends très bien.
    Excellent. Monsieur Webster comparaît à titre personnel par vidéoconférence de Langley, en Colombie-Britannique. Nous allons commencer par votre exposé. Pouvez-vous vous en tenir à sept minutes, s'il vous plaît, monsieur?
    Merci beaucoup et bienvenue.
    Merci.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, veuillez m'excuser si je lis mes notes. Je ne voudrais rien oublier.
    J'ai vécu moi-même toutes les situations que je m'apprête à vous décrire, en tant que mandataire de ma mère décédée.
    Premièrement, la méthode qu'utilise Emploi Canada pour évaluer l'admissibilité d'un demandeur au remboursement de toutes les dépenses associées au travail d'un aide familial est limitée et incorrecte. Le ministère fonde son jugement sur l'évaluation de l'ARC de l'année précédente, de la ligne 150, si je ne me trompe pas. Cette méthode est juste pour quiconque occupe un emploi, mais ne l'est pas pour la plupart des retraités qui cherchent des aides familiaux.
    Par exemple, les revenus de ma mère étaient en général de moins de 50 000 $ par année; cependant, elle avait plus de 350 000 $ en investissements et était propriétaire à part entière de sa maison. Il a fallu de longues discussions avec Toronto pour prouver que la déclaration de ma mère relativement à son aptitude à payer était valide.
    Deuxièmement, le temps de traitement constitue un énorme obstacle pour les personnes âgées qui souhaiteraient embaucher une aide à domicile. Dans le cas de ma mère, 21 mois se sont écoulés entre le début de l'AMT, comme on l'appelait à l'époque, et le moment où j'ai finalement eu accès à de l'aide à domicile. Ma mère a célébré son 99e et son 100e anniversaires en stade de démence avancée, dans un état de confusion de plus en plus totale, alors que j'essayais de lui offrir des soins à domicile adéquats. Certains jours, nous avons dû la placer en institution, ce qu'elle détestait.
    Troisièmement, l'information demandée en double — et c'est fondamental — par les divers ministères à l'appui de l'AMT et pour la délivrance d'un permis de travail en vertu du Programme des travailleurs étrangers temporaires représente beaucoup de doublons et, à mon avis, une perte de temps pour les demandeurs comme pour les fonctionnaires. Le processus devrait être simplifié et même harmonisé. Il devrait y avoir une forme d'interaction entre les divers organismes relevant des ministères de l'Emploi et de l'Immigration, pour réduire les doublons et du coup, ce temps d'attente de 21 mois.
    Par exemple, je voulais embaucher une dame des Philippines qui m'avait été recommandée. Elle répondait à tous les critères du Programme des TET pour les soins aux aînés, mais un moment donné, l'ambassade lui a envoyé un courriel, qui m'a été transmis en partie. Elle ne se rendait pas compte qu'elle devait... [Note de la rédaction: difficultés techniques] le courriel.
    Je crois honnêtement que si un organisme travaille à assurer la légitimité du PTET et que l'employeur est viable, l'organisme en question (qu'il s'agisse de l'Immigration ou de l'Emploi) devrait m'envoyer directement la demande ou, si les fonctionnaires croient qu'elle doit être acheminée à la demanderesse aux Philippines, je devrais au moins être mis en copie conforme pour pouvoir leur répondre. Cette situation a presque provoqué le refus de la demande, après 14 ou 16 mois. C'est grâce à l'intervention spéciale d'une personne que nous avons réussi à convaincre l'ambassade de poursuivre le traitement de la demande.
    Quatrièmement, dans les cas où le TET se trouverait ici, au Canada, à l'emploi d'une personne âgée et que cette personne âgée décédait, le TET serait gravement désavantagé, particulièrement à la lumière des modifications adoptées l'an dernier, si je ne me trompe pas, en août 2015, au sujet des soins à domicile, concernant les aides familiaux résidants. Soudainement, la personne se verrait contrainte de trouver un nouvel emploi et de fournir une nouvelle EIMT (ce n'est plus un AMT), ce qui engendre d'énormes délais et tout.
    Je crois que les TET, lorsqu'ils sont admis au Canada dans le cadre d'un contrat fondé sur une EIMT, devraient avoir l'autorisation de voir leur contrat prolongé. Les modifications adoptées en août 2015 ont pratiquement fait basculer les soins aux aînés par des TET dans la clandestinité en raison des dispositions sur les aides familiaux résidants, et l'augmentation salariale a rendu pratiquement impossible l'embauche à long terme de TET par des personnes âgées. De même, l'augmentation de 5 $ de l'heure ne rend pas la situation beaucoup plus avantageuse pour le TET non-résident.
(1540)
    Je trouve injuste cette façon de traiter un TET arrivé au pays dans le cadre de ce que j'appelle un contrat tripartite entre la personne âgée (dans mon cas, j'en étais le mandataire), le PTP lui-même et le gouvernement du Canada, parce que le gouvernement se trouve à être celui qui approuve, si l'on veut, le processus d'EIMT. Nous remplissons un formulaire du gouvernement du Canada. Il s'agit d'un contrat tripartite, et ce n'est pas parce que l'une des parties est décédée que le contrat devrait être annulé.
    L'intention du PTET (particulièrement pour les soins aux aînés, à mon avis) est d'offrir des soins à domicile de qualité à nos personnes âgées qui souhaitent demeurer chez elles et représenter un moindre fardeau pour les contribuables. Si elles peuvent subvenir à leurs besoins et à ceux d'un aide familial à domicile, nous aurons prolongé leur qualité de vie. Après tout, nous parlons ici de gens qui ont donné énormément au Canada, qui en forment le tissu social. Je pense que nous devrions nous demander comment nous pouvons... [ Note de la rédaction: inaudible] utiles pour les TET et les personnes âgées.
    Je vous remercie d'avoir sollicité mon point de vue.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous accueillons maintenant M. Robert Watson, président et directeur général de l'Association canadienne de la technologie de l'information. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur.
    Nous entendrons également un troisième témoin par vidéoconférence. Nous sommes en train d'essayer d'établir la connexion avec elle.
    Monsieur Watson, la parole est à vous pour sept minutes.
    Je m'excuse de mon retard, mais la sécurité est la sécurité, et l'on ne peut pas passer à côté.
    Je m'appelle Robert Watson. Il y a 40 ans ce mois-ci, j'ai obtenu mon diplôme de l'Institut polytechnique Ryerson, quand il s'agissait toujours d'un institut polytechnique. Je suis dans le domaine depuis longtemps et j'ai travaillé dans divers secteurs de l'industrie. J'ai passé la plus grande partie de ma carrière dans le domaine des communications. Cependant, j'ai également eu la chance de diriger une petite centrale électrique en Saskatchewan.
    Je suis ici au nom de l'ACTI, une organisation nationale qui représente plus de 300 membres qui se compose d'entreprises canadiennes, de propriété canadienne ou de propriété étrangère. Elle compte de grandes entreprises comme des entreprises de toutes les tailles. Nous sommes la voie du secteur des TIC au Canada.
    Il s'agit d'un secteur unique qui contribue au PIB du Canada à hauteur de plus de 70 milliards de dollars. Nous générons, directement ou indirectement, un million d'emplois au Canada et investissons plus de 4,8 milliards de dollars chaque année en R-D, plus que tout autre secteur privé au Canada.
    Les TIC touchent aujourd'hui de plus en plus de secteurs traditionnels. En fait, tous les secteurs au Canada ont un volet TIC, qui change radicalement leur réalité.
    Nous souhaitons vous remercier d'être ici aujourd'hui et nous souhaitons vous parler des travailleurs hautement qualifiés dans le cadre du Programme des TET.
    Il y a d'énormes pénuries de compétences et de main-d'oeuvre dans mon secteur. L'ACTI estime que d'ici 2020, il y aura plus de 200 000 emplois inoccupés dans le secteur des TIC. Je parle ici d'emplois très bien rémunérés, assortis d'un revenu moyen de 71 000 $. Ils font partie de l'épine dorsale de notre économie du savoir.
    Les collèges et les universités canadiens forment d'excellents étudiants, et les entreprises du secteur au Canada embauchent surtout ces jeunes diplômés. Mon organisation fait sa part pour contribuer à former les Canadiens afin qu'ils puissent occuper ces emplois. Nous administrons actuellement deux programmes qui connaissent énormément de succès. Le premier s'intitule Ma carrière en TIC et vise les élèves du secondaire. Ce programme incite les élèves à choisir les TIC et à relier les points qui unissent la technologie, la santé, les arts et les autres disciplines. Ma carrière en TIC inspire les élèves et leur donne des bases solides pour suivre des études postsecondaires dans le secteur des TIC.
    Nous administrons également un programme de gestion des technologies d'affaires au Canada, GTA, qui vise les étudiants postsecondaires et leur enseigne des compétences technologiques d'affaires. Ce programme connaît un taux de placement de plus de 90 % et existe grâce aux contributions généreuses du gouvernement fédéral et du secteur privé.
    Les entreprises des TIC, au Canada, souhaitent vivement embaucher des travailleurs localement, et nous investissons dans des programmes comme le programme de GTA pour leur offrir un marché de talents. Cependant, en dépit de tous ces efforts, le Canada ne produit pas tous les talents dont nous avons besoin. C'est là où les travailleurs étrangers temporaires entrent en ligne de compte.
    Soyons clairs, l'embauche de travailleurs étrangers temporaires dans notre secteur coûte plus cher et est moins commode que l'embauche de travailleurs locaux, et les travailleurs étrangers temporaires ne privent pas les Canadiens locaux d'emplois dans notre secteur. Ils viennent combler les pénuries cruciales pour permettre à nos entreprises de croître et d'embaucher un plus grand nombre de Canadiens. Nous cherchons surtout des travailleurs étrangers temporaires dans le cadre de projets spéciaux et de formation. Par exemple, si une imprimante 3D avancée présente une défaillance, il peut n'y avoir qu'une poignée d'ingénieurs dans le monde qualifiés pour la réparer.
    Il y a aussi l'exemple de l'IO, l'Internet des objets. Le domaine de l'Internet des objets n'a pas 10 ans dans le monde. Si nous voulons attirer des compétences en IO au Canada ou que nos compétences soient exportées, il doit y avoir un mouvement de personnel.
    Ils viennent également de l'extérieur pour former des Canadiens dans le cadre de projets spéciaux et créer de nouveaux produits. Il est particulièrement important pour les sociétés canadiennes du domaine des TIC désireuses de prendre de l'expansion de pouvoir offrir de la formation et du mentorat. Elles doivent prendre de l'expansion pour participer à l'économie mondiale...
    Un peu plus tôt cette année, l'un des fondateurs de BlackBerry, Mike Lazaridis, a publié un livre blanc intitulé Scaling Success: Tackling the Management Gap in Canada’s Technology Sector. Il a interrogé les dirigeants de plus de 125 sociétés de pointe du domaine des TIC pour mettre en lumière les obstacles à la croissance et a constaté que le manque de talents exécutifs et en gestion était un inhibiteur de croissance important. Le Canada n'a pas beaucoup de talents de ce type, puisque nous n'avons pas tendance à créer de grandes entreprises. L'une des façons pour nous de combler cette lacune et d'aider les sociétés canadiennes à prendre de l'expansion consiste à faire venir des talents de l'étranger.
    Ce que j’aimerais vraiment souligner ici, c’est que les travailleurs étrangers temporaires, dont mon industrie a besoin, sont hautement qualifiés et peu nombreux. Si le Canada ne peut trouver de moyens pour accéder au talent étranger plus aisément, cela risque de nuire au secteur des TIC et de retarder la croissance et le progrès de la technologie dans d’autres secteurs de l’économie. Voilà pourquoi je voudrais formuler les observations et les recommandations suivantes.
    Le Canada doit moderniser les codes professionnels nationaux. Ces codes fournissent des renseignements clés sur l’emploi dans notre industrie. À l’heure actuelle, ils sont désuets, et un certain nombre de professions discrètes se retrouvent classées dans les catégories plus vastes. Il est donc plus difficile pour le Canada de détecter les endroits où des pénuries sévissent sur le marché du travail et où des programmes devraient être élaborés. Cela fait également en sorte que les entreprises essuient davantage de refus lorsqu’elles présentent des demandes au Programme des travailleurs étrangers temporaires. La mise à jour de ces codes aurait donc le double avantage de favoriser la formation des travailleurs canadiens et de contribuer à trouver des solutions à court terme. Voilà ce qu’il en est des travailleurs étrangers temporaires.
    Je voudrais également recommander l’instauration de normes de service pour le traitement des demandes. Sachez que ce traitement prend parfois plus de six mois. Dans notre industrie, la prise de décision est une question de jours ou d’heures. Ces retards font en sorte que des entreprises canadiennes perdent des clients ou des mandats au profit de leurs concurrents étrangers. Notre industrie ne se soucie pas outre mesure de l’augmentation des droits, mais elle souhaiterait un traitement plus rapide.
    Les entreprises du secteur des TIC sont très concurrentielles au pays et à l’étranger. Or, elles doivent rendre les salaires publics dans l’étude d’impact sur le marché du travail, ou EIMT, ce qui a pour effet d’en décourager certaines. Comme l’industrie est très concurrentielle, la situation peut être difficile pour les petites entreprises, qui ne peuvent pas toujours offrir les mêmes salaires que les grandes entreprises internationales. Voilà pourquoi j’aimerais recommander que les entreprises du secteur des TIC ne soient pas tenues de divulguer les salaires dans l’étude d’impact sur le marché du travail.
    En outre, la définition de « connaissances spécialisées » devrait être clarifiée. Cette expression semble utilisée dans les programmes de mobilité internationale et des travailleurs étrangers temporaires, sans toutefois avoir de définition précise. Je recommande donc d’établir une définition claire fondée sur plusieurs facteurs : la formation, l’instruction, l’expérience de travail et le salaire. Cela rendrait le processus de demande plus prévisible pour les entreprises qui y font appel.
    Enfin, je voudrais essentiellement demander deux choses au Comité.
    Je voudrais d’abord recommander qu’Emploi et Développement social Canada et Statistique Canada fournissent des renseignements plus précis. Nous avons besoin d’information plus approfondie. Nous ne pouvons préparer les étudiants pour le marché du travail de demain si nous n’en surveillons pas étroitement les tendances. Le fait de disposer d’une meilleure idée de l’avenir à cet égard aiderait les universités, les collèges et les groupes privés comme BTM et CareerMash à adapter leurs programmes et réduirait ainsi la dépendance aux travailleurs étrangers temporaires. Il faut que les renseignements soient plus précis.
    J’aimerais également demander au Comité d’envisager de rétablir l’exemption sectorielle préexistante du secteur des TIC. Compte tenu de la gravité de notre pénurie de compétences et de la concurrence dont les travailleurs étrangers temporaires font l’objet sur la scène mondiale, cela permettrait à l’industrie de prendre de l’expansion. Si l’on ne peut accorder d’exemption sectorielle, on pourrait peut-être alors envisager un programme d’employeurs de confiance.
    Je conclurai en disant que je représente les intérêts d’une industrie confrontée à des pénuries importantes de compétences et d’employés hautement qualifiés et très motivés. Le gouvernement doit recueillir davantage de données sur le marché du travail dans le domaine des TIC et exempter ce dernier de l’analyse du marché du travail.
    Merci beaucoup d’avoir pris le temps de m’écouter.
(1550)
    Merci, monsieur Watson.
    Je crois comprendre que nous avons une représentante du Caregivers' Action Centre. Malheureusement, Teta Bayan, qui est déjà venue ici et qui avait offert de revenir, ne pouvait pas se libérer lundi et ne pouvait apparemment pas non plus se libérer aujourd'hui. Nous accueillons donc Marcia Barret pour représenter le Caregivers' Action Centre.
    Je vous remercie d'être ici et de remplacer votre collègue. Vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
(1555)
     Merci de me recevoir et de m'écouter.
    Je m'appelle Marcia Barret, je suis la cousine de Sheldon McKenzie, qui avait 39 ans quand il s'est blessé et qui est mort à l'âge de 40 ans.
    Sheldon était le père aimant et dévoué de deux adolescentes. Il est arrivé au Canada comme travailleur migrant il y a 13 ans, pour subvenir aux besoins de sa famille. Sheldon aimait jouer au soccer, il adorait la musique et était même entraîneur.
    Sheldon s'est blessé le 26 janvier 2015. Il est mort le 17 septembre 2015, le jour de l'anniversaire de sa fille cadette.
    C'est pendant la période qui s'est écoulée entre la blessure et la mort de Sheldon que j'ai pris conscience de la frustration et des conditions difficiles qu'endurent les travailleurs agricoles migrants. En plus de la blessure et du décès qui ont traumatisé notre famille, les politiques en place ont été une source de frustration pendant tout ce temps. Nous avons dû vivre dans la crainte d'un rapatriement, de l'expiration de son permis, d'un manque de couverture médicale, et sa famille... [Note de la rédaction: difficultés techniques]. Nous avons été très surpris de nous rendre compte qu'il n'y avait pas de politique adéquate pour prendre soin de ces travailleurs, qui contribuent beaucoup au marché canadien.
    Les conditions horribles qu'ils doivent endurer... [Note de la rédaction: difficultés techniques]... nous n'aurions jamais cru que cela pouvait arriver ici, au Canada. Certaines des conditions horribles qu'ils devaient endurer... C'était à l'époque où nous prenions soin de Sheldon, en Ontario, et où nous avons eu l'occasion de parler avec d'autres travailleurs migrants, qui vivent une peur constante. Ils ont peur d'être rapatriés s'ils dénoncent les conditions de travail qu'ils doivent endurer; de plus, ils craignent de n'être jamais rappelés pour travailler.
    Pour certains d'entre eux, c'est la seule façon de subvenir aux besoins de leur famille. Ce sont des hommes et des femmes qui travaillent dur et qui sont venus ici pour contribuer au Canada et subvenir aux besoins de leur famille. On leur demande de travailler des heures... Je pense qu'on n'astreint même pas un animal de ferme à un tel horaire.
    Bien souvent, en tant que membre de sa famille présente, je me suis demandé si nous aurions subi la perte d'un proche des suites d'une blessure évitable si des politiques adéquates avaient été en vigueur.
    Pour ce qui est de la formation, y avait-il... [Note de la rédaction: difficultés techniques]. C'est une question qui nous trotte constamment dans la tête. Les espadrilles qu'il portait dans une serre humide, le plastique sur le plancher mouillé... Y a-t-il une politique en place afin d'offrir une formation adéquate?
    J'ai parlé à des hommes qui sont tombés de tracteurs et se sont blessés. Ils ont été rapatriés sans soins de santé. De retour dans leur pays, ils n'ont rien du tout. Ils se sont blessés ici, mais on les renvoie chez eux sans rien.
    Ces conditions horribles doivent changer. L'histoire des travailleurs qui sont renvoyés chez eux est... [Note de la rédaction: difficultés techniques]... de retour dans un pays, la Jamaïque, nous avons parlé aux femmes et aux amies d'anciens travailleurs agricoles migrants qui se sont blessés au Canada et qui ont été renvoyés en Jamaïque. Ils sont là, incapables de travailler, sans aucune forme d'aide.
    C'est difficile à comprendre, compte tenu de la position que le Canada adopte sur ce genre de question; comment se fait-il que ces conditions et ces choses peuvent exister?
    De même, c'est pendant cette période que je me suis rendu compte que ces travailleurs étaient liés à un seul employeur, que cet employeur les traite bien ou non, et qu'ils devaient endurer ces conditions horribles, parce que s'ils s'en plaignent... ils ne peuvent pas changer d'emploi; leur permis est lié à un employeur en particulier. Ils ne peuvent pas changer ce permis; ils ne peuvent pas se chercher un autre emploi. S'ils veulent continuer de subvenir aux besoins de leur famille, ils doivent endurer ces abus horribles.
(1600)
     J'ai parlé à des personnes d'un groupe de la Colombie-Britannique. Elles n'avaient pas le droit d'utiliser les toilettes, parce que cela prend du temps. C'est le genre d'histoires que j'entends encore et encore et qui m'amènent à parler franchement aujourd'hui.
    Je ne peux pas ramener mon cousin. Sa fille ne pourra plus célébrer l'anniversaire de son père. La raison pour laquelle je me trouve ici aujourd'hui devant le Comité, comme membre de sa famille, c'est que j'ai besoin que vous agissiez comme des pères et des frères et que vous revoyiez les politiques actuelles sur les travailleurs étrangers, les politiques qui les forcent à endurer des choses que personne ne devrait avoir à endurer.
    On dit souvent des travailleurs étrangers qu'ils sont « peu spécialisés ». Qu'ils soient peu spécialisés ne signifie pas qu'ils ont peu de valeur ou qu'ils ont moins de droits de la personne que d'autres.
    Je ne demande pas au Comité d'annuler le programme. Le programme s'est avéré très profitable pour la famille de mon cousin et pour de nombreuses familles qui sont ici pour travailler. Je demande au Comité de retirer du programme des choses qui privent les travailleurs étrangers de l'accès à des soins de santé adéquats, à des avantages adéquats, à une formation adéquate et à des conditions de travail comme en ont les travailleurs canadiens ordinaires.
    Je demande au Comité de retirer du programme les éléments qui sont à l'origine des neuf pires mois de ma vie, où j'ai vécu dans la crainte constante que mon cousin, qui se trouvait dans un lit d'hôpital et souffrait d'une blessure à la tête, ne soit plus soigné et retourné dans son pays qui ne possède pas les installations ni les ressources médicales nécessaires pour prendre soin de lui.
    C'était un supplice de voir ce jeune homme, plus fort que moi, couché et incapable de faire quoi que ce soit... Le pire, c'est que j'étais là chaque jour à me demander si on n'allait pas le retourner dans son pays pendant que j'avais le dos tourné. J'avais cette peur constante: ses soins médicaux seront-ils coupés? Sera-t-il retourné dans son pays?
     Les familles sont laissées à elles-mêmes. Elles n'ont pas de ressources. Il n'y avait pas de ressources vers lesquelles je pouvais me tourner pour m'assurer qu'il recevait des soins médicaux adéquats et que les avantages médicaux ne disparaissaient pas une fois son permis expiré. Il était blessé et aurait dû avoir la même possibilité d'obtenir des soins médicaux adéquats que n'importe quel Canadien.
    Encore une fois, j'insiste pour dire que je ne demande pas au Comité d'éliminer le programme. Je lui demande de le réviser et de prendre les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs étrangers et leurs familles.
    Merci beaucoup pour votre témoignage, madame Barret.
    Merci.
    Nous allons passer immédiatement aux questions.
    Nous commençons par M. Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins pour le temps précieux qu'ils nous accordent aujourd'hui.
    Monsieur Webster, merci d'être là. J'ai eu l'occasion de vous connaître ainsi que votre mère, Muriel. Je suis très heureux de savoir qu'elle avait atteint l'âge vénérable de 100 ans. Votre famille était très respectée dans notre communauté, mais votre mère avait des racines ici, à Ottawa. Je crois me souvenir qu'au milieu des années 1960, elle était responsable de la clinique d'oncologie d'Ottawa. Elle était une infirmière et une radiologue fort respectée. La famille a ensuite déménagé à Langley, où nous avons eu la chance de la voir vivre et grandir.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour parler du Programme des travailleurs étrangers temporaires et des changements à y apporter.
    Monsieur Webster, vous avez précisé qu'il a fallu 14 à 16 mois pour avoir un fournisseur de soins à la maison pour votre mère et qu'ensuite vous avez dû faire rétablir votre demande. Au total, le processus a duré 21 mois.
    Un fonctionnaire de Citoyenneté et Immigration Canada était ici lundi, il y a deux jours. Il nous a dit que la durée du processus était de 56 jours, mais vous nous avez dit qu'elle a été de 14 à 16 mois, puis de 21 mois. Il y a un écart considérable entre 56 jours et 21 mois.
    Le gouvernement envisage de donner immédiatement le statut de résident permanent aux personnes qui présentent une demande de TET et qui se qualifient comme tel après une EIMT pour régler les problèmes touchant les personnes dont on s'occupe mal, à propos desquelles nous avons entendu quelques histoires très tristes. Nous venons tout juste d'entendre une autre histoire très triste.
    Nous avons appris que le processus d'obtention du statut de résident permanent est selon CIC un processus d'environ 6 mois, plutôt que de 56 jours, car il faut aller plus en profondeur pour le statut de résident permanent. Le gouvernement envisage maintenant de donner le statut de résident permanent en même temps que l'approbation de TET. La grande question est de savoir s'il faudra plus de temps pour obtenir un TET, ou si le processus sera tellement simplifié qu'il se pourrait que nous ne soyons pas assez sélectifs.
    Supposons que le gouvernement va de l'avant et que l'approbation de TET vient avec le statut de résident permanent. Que pensez-vous de cette idée? Est-ce que cela ralentira ou accélérera le processus? Pouvez-vous commenter?
     Vous avez fait preuve d'une grande compassion et de beaucoup d'attention, particulièrement envers les femmes qui avaient travaillé avec votre mère Muriel et qui avaient pris soin d'elle. Même après la mort de votre mère, vous avez traité ces femmes comme des membres de la famille et veillé à ce qu'elles ne manquent de rien. Vous vous êtes même occupé de leur hébergement. Comment pouvons-nous nous assurer de créer un système qui protège les TET et d'éviter que des histoires très tristes comme celles que nous avons entendues se produisent? Vous êtes un excellent exemple de la manière dont il faut faire correctement les choses, alors faites-nous part de vos observations.
    Merci.
(1605)
    Merci beaucoup, monsieur Warawa.
    À propos de la question des 21 mois contre 56 jours, j'ai lancé un processus d'AMT en février 2013 après avoir lu tous les documents et autres renseignements sur le site Web. À ce moment-là, il fallait afficher le poste pendant trois mois. Il y avait une erreur dans ce que j'avais publié à Abbotsford. En fait, le poste aurait dû être affiché à Langley, alors cela m'a coûté trois mois. C'était ma faute. [Notes de la rédaction: difficultés techniques]... à comprendre ce qu'il en était.
    En août 2013, le processus d'AMT a changé quelque peu. Il a changé parce que le gouvernement a décidé d'en faire un système de recouvrement des coûts. Il a ajouté à l'AMT une page sur laquelle on exigeait un paiement de 750 $.
    Il semble que cela a suffi pour que le gouvernement relance tous les processus d'AMT qui n'avaient pas été présentés avant le 31 juillet. Si votre demande arrivait le 1er août, c'était une malchance, semble-t-il. Il a fallu encore obtenir de l'aide, de la part du ministre, je crois, à ce moment-là. J'ai communiqué avec le ministre à Ottawa. Il a peut-être laissé entendre que ma proposition était correcte et qu'il devrait y avoir une sorte de période de transition, si l'on veut... Une période suffisamment longue est nécessaire, car un tel changement de processus ne devrait pas se faire du jour au lendemain.
    En résumé, un certain nombre de facteurs ont contribué aux retards dans le traitement de cette demande en particulier et dans le processus d'AMT.
    Cependant, pour répondre à votre question concernant l'octroi de la résidence permanente dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires, je ne vois pas nécessairement cela comme étant formidablement avantageux. Beaucoup de TET souhaitent avoir leur résidence permanente, mais ils sont prêts à attendre jusqu'à la fin de la période de probation de 24 mois dans... [Notes de la rédaction: difficultés techniques]... année civile pour l'obtenir.
    Le problème avec le processus de résidence permanente, comme je le vois maintenant et d'après deux exemples concrets, c'est que pour une des dames, il s'est écoulé 39 mois entre son arrivée au Canada et le moment où elle a obtenu sa résidence permanente, et que pour l'autre il s'est écoulé 46 mois, je crois. C'est un point qui a été soulevé par un employé de l'Association de la technologie de l'information. Le temps compte pour quiconque essaie de faire venir des travailleurs étrangers temporaires.
    Du point de vue de la TI, c'est essentiel sur le plan commercial. Du point de vue de celui qui cherche un fournisseur de soins pour une personne âgée, c'est capital, car il ne veut pas embaucher un TET pour assister à des funérailles; il veut l'embaucher pour qu'il fournisse des soins à une personne âgée, ce qui était l'objectif, comme vous le savez, monsieur Warawa.
(1610)
    Merci, monsieur Webster.
    C'est à vous, monsieur Long.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à nos témoins de cet après-midi.
    J'ai écouté avec grand intérêt les présentations d'aujourd'hui ainsi que celles des jours et des semaines précédents. Trouver le cadre ou la formule qui convient pour les travailleurs étrangers temporaires est une tâche ardue pour notre comité. Nous savons que des atrocités et de tristes histoires se sont produites et continuent de se produire.
    En même temps, nous voyons des exemples dans le secteur des technologies de l'information et des communications, dans l'industrie du jeu vidéo, chez Aliments Maple Leaf Foods à Brandon et dans d'autres situations et d'autres secteurs, où l'on ne peut se passer des travailleurs étrangers temporaires.
    Nous sommes ici pour essayer de trouver des solutions et pour établir un cadre pour l'avenir. Je pourrais vous poser une foule de questions sur votre secteur et sur tout ce qui s'y rapporte, mais je pense, monsieur Watson, que nous allons d'abord parler de l'ACTI et des efforts déployés par votre secteur pour recruter, retenir et attirer des travailleurs canadiens. Nous voulons embaucher d'abord des travailleurs canadiens lorsque c'est possible.
    Pourriez-vous nous donner des précisions sur les mesures prises par l'ACTI et par votre secteur pour recruter, retenir et attirer de nouveaux travailleurs canadiens?
    Merci.
    L'ACTI, l'Association canadienne de la technologie de l'information, exerce ses activités d'un océan à l'autre. Nous entretenons des rapports avec tous les grands établissements au Canada, y compris les collèges et les universités. Comme je l'ai dit, CareerMash a a fait son entrée dans les écoles secondaires. Nous offrons un programme de gestion des technologies d'affaires qui mène à l'obtention d'un grade. Nous travaillons en ce moment avec les établissements scolaires afin qu'il soit offert dans le plus grand nombre possible d'écoles postsecondaires.
    Est-ce un programme collégial ou universitaire?
    Il est de niveau universitaire.
    Mène-t-il à l'obtention d'un diplôme...
    Certains collèges communautaires l'offrent également.
    Mène-t-il à l'obtention d'un diplôme?
    Oui.
    Un diplôme en quoi?
    En gestion des technologies d'affaires. Ce sont des cours en TI, mais l'accent est mis sur les affaires. Ce n'est pas un cours de programmation, mais plutôt un cours sur les technologies dans le monde des affaires.
    D'accord.
    Je vous laisse continuer.
    Le 16 juin, nous lançons notre nouveau programme « Women on Boards » dans les technologies de l'information et des communications. Ce programme vise à encourager les femmes à postuler au sein des conseils d'administration dans le secteur des TI. Autrement dit, nous voulons équilibrer le ratio hommes-femmes. Dans les technologies de l'information et des communications, les hommes sont plus nombreux que les femmes, c'est pourquoi nous avons créé un programme visant à attirer les femmes dans ce secteur.
    Que faites-vous, concrètement?
    La cérémonie inaugurale aura lieu le 16 juin. L'initiative réunit tous nos membres. L'idée consiste à rétablir l'équilibre aux échelons supérieurs d'abord.
    Nous organisons continuellement des séminaires, des conférences. Nous ne cessons jamais de promouvoir le secteur des technologies de l'information et des communications.
    Parmi les autres défis que nous voulons relever, il y a celui des enfants — ceux de tous âges, mais surtout les très jeunes. Filles ou garçons, d'où qu'ils proviennent, ils sont tous curieux et aventuriers. Ils créent, par exemple, leurs propres petites applications. Il faut trouver un moyen de faire valoir leur talent et de les encourager dans cette voie.
    Nous sommes un programme. Notre champ d'action englobe presque tous les aspects. Nos membres sont aussi bien des particuliers que de grandes sociétés canadiennes et internationales.
    Obtenez-vous de bons résultats? Quel est votre avis?
    Oui, puisque 90 % des étudiants en TI diplômés au Canada sont embauchés au Canada. De plus, des sociétés canadiennes et étrangères mettent sur pied des centres d'excellence ici au Canada pour le logiciel, le spectre, le réseau et les applications.
    Quand on constitue un centre d'excellence, il faut être prêt à réagir. Il faut être rapide, car la technologie évolue. Pour les sociétés canadiennes qui entendent s'établir à l'étranger ou pour les sociétés étrangères établies au Canada qui veulent réunir des gens, la permanence des employés n'est pas en cause, car elles peuvent très bien faire venir des employés permanents au Canada. C'est un processus. Si une société veut faire venir quelqu'un pour vivre et travailler ici, le processus n'est pas le même que si elle veut faire venir quelqu'un ici pour un projet d'un an ou deux ou pour aider à régler un problème de logiciel.
    Si nous mettons sur pied de tels centres d'excellence au Canada, nous ferons la même chose ailleurs. L'accord de libre-échange nous permet non seulement d'importer et d'exporter des produits, mais également d'amener notre expertise à l'étranger.
(1615)
    De combien de travailleurs étrangers temporaires votre secteur a-t-il besoin?
    C'est une bonne question.
    Vous avez environ 30 secondes.
    L'ACTI publiera un rapport à la fin du mois qui fournira plus d'information à ce sujet.
    Alors...
    Pardon. J'essaie de répondre à votre question.
    C'est un nombre qui fluctue, vous savez.
    Approximativement.
    En ce moment, nous avons approximativement 70 000 emplois vacants pour les travailleurs étrangers temporaires et ce nombre devrait atteindre 200 000 à l'avenir.
    Si les sociétés peuvent fixer un délai déterminé, ou même êtres exemptées, c'est maintenant le moment. Les nouvelles technologies qui font leur apparition dans le monde... Nous avons déjà mentionné les imprimantes 3-D, et le 5G est devenu un phénomène mondial. Certains de nos membres veulent développer ces technologies au Canada.
    Excellent. Merci, monsieur. Je regrette, mais je dois vous interrompre.
    Madame Ashton, je vous prie.
    Je remercie tous les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui. Ma question s'adresse à vous, madame Barret. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation tardive et de nous avoir relaté la tragique histoire de Sheldon, l'un de vos proches. Son histoire a également été diffusée à l'échelle nationale et je sais qu'elle a touché le coeur de nombreux Canadiens.
    En apprenant ce qui s'était passé, beaucoup de Canadiens se sont demandé comment il était possible qu'une telle chose se produise dans leur pays. Comment se fait-il qu'un travailleur, quelle que soit sa provenance, puisse être traité de la sorte au Canada? Comment est-ce possible de traiter ainsi une personne qui fait ce genre de travail?
    Je voulais aussi mentionner que plusieurs histoires comme celle de Sheldon ont été racontées d'une manière très touchante dans un film qui a été présenté sur la Colline du Parlement, intitulé Migrant Dreams. Évidemment, notre Comité n'a pas entendu directement les témoignages de beaucoup de travailleurs étrangers. J'invite tous les membres du Comité et tous ceux qui nous écoutent à regarder ce film et à entendre leur histoire.
    Bien entendu, quand vous nous dites ce qu'à vécu Sheldon et comment il a été traité...Nous devons prendre ces choses très au sérieux, et les recommandations que vous avez formulées aussi.
    Je voulais parler du combat que vous avez mené pour garder Sheldon au Canada, car il n'avait pas accès à des soins de santé et l'on menaçait constamment de l'expulser. Des études ont été menées sur ce type d'expulsions. Vous avez aussi parlé de ceux qui sont retournés en Jamaïque, qui ont été expulsés après s'être blessés au travail. Je me demandais si vous pouviez nous dire à quel point il est inacceptable de refuser ainsi de soigner et d'aider ces gens qui se blessent au travail.
     Je suis citoyenne canadienne. Je suis venue au Canada, alors je pense que j'ai une bonne idée de la manière dont les choses fonctionnent ici. Il m'a été impossible de savoir où trouver de l'aide quand les problèmes ont commencé. De plus, les travailleurs migrants qui n'ont pas de famille ici comptent sur ce que leur disent leur employeur et les responsables de la liaison.
    La plupart des travailleurs à qui j'ai parlé qui sont retournés dans leur pays après avoir été privés de soins s'étaient fait promettre une aide à leur retour. Dans certains cas, on leur avait dit: « Nous avons quelque chose pour vous. Retournez chez vous et nous vous enverrons de l'argent ». Ils attendent toujours et n'ont pas de ressources.
    Personnellement, j'ai dû recourir à l'aide juridique. J'ai dû faire appel à des avocats pour m'aider, afin que Sheldon puisse rester pour des motifs humanitaires et être soigné. Quand je suis arrivée à Windsor, on ne m'a pas dit tout de suite qu'il avait glissé et était tombé au travail. J'avais l'impression qu'il avait fait un AVC. Mon mari et moi avons dû fouiller et enquêter considérablement pour découvrir exactement ce qui lui était arrivé.
    C'est à ce moment que les responsables de la liaison ont commencé à menacer de le rapatrier. Au début, ils étaient très gentils: «  Nous allons le renvoyer chez lui dans un appareil d'évacuation sanitaire et il pourra ensuite recevoir des soins de santé adéquats ». J'ai quitté mon pays il y a longtemps, mais je sais qu'une telle chose est impossible.
    Lorsque j'ai commencé à dire: « Non, il doit rester ici pour être soigné », ils ont refusé de me donner son passeport, alors j'ai demandé aux avocats d'obtenir un visa humanitaire. On refusait toujours de me remettre son passeport. À titre de membre de la famille, j'ai embauché un avocat. J'avais une procuration pour obtenir le passeport, mais on n'a jamais voulu me le donner. Après sa mort, j'ai dû me battre encore pour obtenir le passeport afin de rapatrier le corps en Jamaïque pour l'enterrement.
    Tout cela se passe sans que les travailleurs ou leur famille puissent obtenir de l'aide, car s'ils parlent à leurs responsables, ils seront empêchés de revenir, et pour beaucoup, c'est leur seul espoir de faire vivre leur famille. Même si les conditions de travail sont terribles, ils travaillent très dur pour s'occuper de leur famille. Ils sont prêts à endurer n'importe quoi pour gagner de l'argent pour leur famille.
    Ce n'est pas le Canada que je connais, mais peut-être je vis dans une bulle ou je refuse de voir beaucoup de choses. Ce n'est pas le Canada qui défend les droits de la personne. Nous avons laissé tomber ces gens de façon misérable, peut-être parce que nous avons l'impression qu'ils prennent les emplois des Canadiens. Je ne pense pas que ce soit le cas. Ils prennent les emplois dont les Canadiens ordinaires ne veulent pas.
(1620)
    Merci, madame Barret.
    Les permis ne devraient pas être rattachés aux soins médicaux, il ne devrait pas y avoir de lien entre les permis et les soins qu'ils reçoivent.
    Merci beaucoup.
    Nous devons passer à la prochaine question.
    Madame Tassi.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à tous les témoins pour leur contribution aujourd'hui.
    Madame Barret, je tiens d'abord à exprimer mes regrets pour le drame que vous avez vécu. J'ai écouté ce que vous avez dit.
    Si je vous demandais de nous faire deux ou trois recommandations directes pour améliorer le régime des travailleurs étrangers temporaires, hormis les aspects que vous avez mentionnés en relatant votre expérience, quelles seraient-elles?
    De ne pas rattacher le permis des travailleurs à l'accès aux soins médicaux, car dès que leur permis expire, ils sont privés de l'accès aux soins. Ce serait la première.
    La deuxième concerne la crainte d'être rapatrié. Il faudrait faire en sorte que lorsqu'ils deviennent malades au travail ou qu'ils se blessent au travail ici, ils puissent être pris en charge immédiatement par le système de soins de santé. Quelle que soit la formule, indemnité ou autre, ils doivent recevoir des soins immédiats. Ils contribuent à l'assurance-emploi, mais beaucoup ne touchent aucune prestation. Cela doit changer.
    Troisièmement, le permis est rattaché à un seul employeur. S'il se passe quelque chose de terrible, ils ne peuvent pas se plaindre, car ils n'ont aucune autre ressource. Cela doit aussi changer. S'ils sont maltraités par leur employeur, ils doivent avoir le droit de changer d'emploi.
(1625)
     D'accord, merci.
    Voudriez-vous ajouter quelque chose au sujet de la dénonciation des mauvais traitements lorsque des travailleurs étrangers temporaires estiment qu'ils ne sont pas traités convenablement? Auriez-vous un conseil à nous donner?
    Évidemment, ce que je constate... je ne peux pas parler pour les autres. Certains m'ont raconté ce qu'ils vivaient, mais à en juger par ma propre expérience, le service de liaison n'est pas bon. D'après ce que je comprends, il est censé veiller à la protection des droits des travailleurs, mais il ne le fait pas. Dans la plupart des cas où j'ai eu à me battre, c'était contre des agents de liaison, et ils sont à l'origine de la plupart des injustices et des craintes des travailleurs. Beaucoup de travailleurs ont dit que s'ils se plaignent aux agents de liaison, leur patron en sera informé et leur demanderont de ne plus revenir.
    Personnellement, j'ai eu l'impression que les agents de liaison travaillaient davantage pour les patrons que pour les travailleurs migrants. Il faut établir un système qui permettra la dénonciation sécuritaire des mauvais traitements et la tenue d'enquêtes adéquates... J'imagine que chaque pays doit avoir des agents de liaison qui font le pont avec les travailleurs. Il ne faut pas leur laisser toute la latitude, car d'après ce que j'ai constaté, ils sont au Canada, mais ils forment une entité distincte. Ils étaient intouchables. Rien de ce que je pouvais dire ou réclamer pour mon cousin n'avait d'importance. Ils détenaient tout le pouvoir et pouvaient faire ce qu'ils voulaient.
    Une telle chose ne devrait jamais arriver ici. Le pouvoir en la matière devrait être détenu par une tierce partie du marché canadien du travail qui pourrait recevoir les plaintes des travailleurs et garantir leur protection.
    Merci.
    Monsieur Watson, mes deux prochaines questions s'adressent à vous. Vous nous avez donné certains chiffres, mais pourriez nous préciser le pourcentage des travailleurs de votre secteur qui sont actuellement des travailleurs étrangers temporaires?
    Nous n'avons pas encore cette statistique. Le rapport sortira à la fin du mois.
    À votre avis, aura-t-ton besoin de cette main d'oeuvre à court ou à long terme?
    Ce sera de toute évidence à long terme, car il ne s'agit pas d'embaucher des gens pour faire du codage ou développer un produit; nous aurons besoin de travailleurs pour aider des hôpitaux ou des compagnies d'électricité à convertir leur système de TI ou pour aider quelqu'un à concevoir un nouveau système pour l'énergie renouvelable, afin de coordonner l'énergie produite par des éoliennes, par exemple. Tous les secteurs traversent une période de grande transformation en matière de TI.
    En ce qui concerne vos efforts pour tenter de faire en sorte que les Canadiens enseignent aux Canadiens, vous ne croyez pas que l'ensemble des efforts en matière d'éducation que vous déployez seront suffisants pour répondre aux besoins à l'avenir.
    Tout d'abord, nous devons faire davantage pour aider les étudiants dans le système — nous devons non seulement encourager les étudiants à choisir le secteur des TI en plus grand nombre, mais aussi tenter de diversifier la clientèle étudiante dans le domaine des TI pour qu'elle ne se limite pas aux jeunes hommes. Nous devons d'abord favoriser la diversité.
    Cependant, même si le système canadien accueillait plus que sa part de candidats, si nous souhaitons accroître la portée des entreprises canadiennes ou si nous voulons que les entreprises internationales établissent des centres d'excellence ici, nous devons avoir plus de travailleurs. Il faut augmenter la taille des effectifs.
    Ce n'est pas une question de savoir si notre industrie peut les convaincre de venir ici. S'ils ne viennent pas ici, ils iront ailleurs ou ils peuvent se contenter d'acheter de la fibre optique ici pour créer des produits ailleurs. Il faut leur permettre de venir ici et non seulement de recevoir de la formation, mais également de travailler avec les Canadiens pour les former et les renseigner sur les récents développements — par osmose, en quelque sorte.
    D'accord. Votre industrie utilise-t-elle les voies d’accès à la résidence permanente qui sont déjà en place?
    Veuillez être très bref.
    Oui.
    C'était une brève réponse. Je considère qu'il s'agit de la réponse. Merci.
    Allez-y, monsieur Long.
    J'ai une brève question pour M. Watson. Pouvons-nous obtenir ce rapport? Pouvez-vous nous envoyer le rapport dont vous parliez?
    Ce n'est pas notre rapport. C'est un rapport produit par une tierce partie. Nous pouvons certainement vous le faire parvenir.
(1630)
    Merci.
    Étant donné que la première heure est écoulée, j'aimerais remercier le premier groupe de témoins d'avoir été ici aujourd'hui et de nous avoir communiqué leurs expériences.
    Merci, monsieur Watson, monsieur Webster et madame Barret. Nous vous sommes réellement reconnaissants de vos contributions. Nous suspendrons la séance pour une très brève... trois minutes, afin de permettre au prochain groupe de témoins de s'installer, et nous reprendrons les travaux.
    Merci.
(1630)

(1635)
    Tout d'abord, j'aimerais remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais m'assurer que tout le monde est ici. Je vois qu'il manque quelques témoins.
    De HyLife, nous accueillons Jeremy Janzen, directeur principal, Ressources humaines, et Baerbel Langner, conseillère juridique à l'interne, Immigration.
    Nous accueillons également, du Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture, Portia MacDonald-Dewhirst, directrice générale. De l'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire, nous accueillons Mark Wales. De Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce Canada, nous entendrons Claudia Colocho et Naveen Mehta, conseiller juridique principal, directeur du Service des droits de la personne, Équité et Diversité.
    Nous vous souhaitons la bienvenue.
    Nous entendrons d'abord les exposés de sept minutes.
    Jeremy, livrerez-vous un exposé? Excellent. Vous avez sept minutes. Vous avez la parole, monsieur.
    J'aimerais remercier le Comité HUMA de nous avoir invités à comparaître. J'aimerais également vous remercier de vous pencher sur cet enjeu et ce programme très importants.
    Ma collègue, Baerbel, m'accompagne. Elle est conseillère juridique en matière d'immigration pour notre entreprise. Elle a plein de choses intéressantes à vous communiquer. Je crois que nous partageons les sept minutes. Je vous serais reconnaissant de m'arrêter après quatre minutes, afin qu'elle puisse utiliser les trois dernières. Veuillez me faire signe, s'il vous plaît.
    Je lèverai simplement la main après quatre minutes.
    Excellent.
    Merci.
    Nous vous avons fourni certains documents. Il y a quelques diapositives PowerPoint, mais je ne les suivrai pas. Il y a une lettre d'un ancien maire de la collectivité où nous menons nos activités, et d'autres documents. Veuillez prendre le temps de les consulter, car ce sont de bons documents. Ils appuient ce que je vais vous communiquer et ce que Baerbel et d'autres témoins vous présenteront aujourd'hui.
    J'aimerais vous parler un peu de notre société. Je dois commencer par vous dire que lorsque j'ai assisté à la partie de baseball de mon jeune fils l'autre jour, le président de notre société était présent, et je me suis assis à côté de lui. Il m'a dit qu'il avait participé à une réunion. Nous étions au Manitoba — nous menons nos activités dans une région rurale du Manitoba — et il avait assisté à une réunion qui se déroulait à Calgary. Il comparaissait également devant un groupe gouvernemental. Les membres de ce groupe ont communiqué avec lui après la réunion et lui ont demandé quelle était la priorité de HyLife. Il a répondu que notre priorité, c'était de pouvoir continuer d'avoir accès à des travailleurs étrangers. Il a ajouté que nous avons de nombreuses autres priorités, mais que c'est la plus importante. Je tiens donc seulement à vous assurer que les programmes gouvernementaux qui nous aident à mener nos activités représentent la plus grande priorité de notre société. Permettez-moi de vous en dire plus.
    Nous avons fondé notre société en 1994, lorsqu'un groupe d'agriculteurs du sud-est du Manitoba a proposé de construire une porcherie. Ils l'ont construite et ont employé environ 10 personnes. Aujourd'hui, notre société emploie environ 1 850 personnes au Manitoba, en Saskatchewan et au Dakota du Nord.
    Avant 2008, nous n'avions pas beaucoup utilisé le Programme des travailleurs étrangers temporaires. Cette année-là, nous avons cessé d'être des agriculteurs pour devenir une entreprise qui fabrique des produits alimentaires. Nous élevions des porcs, mais nous les vendions à des entreprises comme Maple Leaf et d'autres entreprises de transformation d'aliments qui les transformaient pour nous. Mais nous avons décidé que nous souhaitions être pleinement intégrés. Dans notre énoncé de vision, nous affirmons que nous nous efforçons de devenir la meilleure société alimentaire canadienne dans le monde. Pour y arriver, il nous fallait devenir une entreprise alimentaire, et donc acheter ou construire une usine de transformation des aliments.
    Nous avons acheté une telle usine, plus précisément une usine de transformation des aliments située à Neepawa, au Manitoba. À l'époque, cette usine employait 300 personnes. Elle devait transformer tous les porcs que nous produisions, à savoir environ 1,7 million par année.
     La taille de l'usine et le nombre d'employés ne nous permettaient pas de transformer tous ces porcs. Essentiellement, il fallait embaucher 800 autres personnes. La ville de Neepawa comptait 3 000 habitants à l'époque. Nous avons exploré l'ensemble de la ville pour trouver des découpeurs de viande compétents et des employés pour notre usine. Le poste de transformation principal à pourvoir dans notre usine était celui de découpeur de viande. Nous avons cherché sur toute la côte Est du Canada. Nous avons embauché quelques éleveurs de homards. Nous avons également embauché des producteurs de champignons de l'Ontario et des travailleurs de la construction de l'Alberta. Nous avons embauché des gens de partout. Avons-nous trouvé 800 personnes? Non. Nous avons dû aller chercher des employés à l'étranger, et nous cherchions des gens compétents qui possédaient au minimum de deux ans d'expérience, et préférablement trois ou plus.
    C'était avant le milieu de l'année 2014, donc avant les changements qui ont été apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires. À l'époque, il fallait passer par le processus d'AMT, que vous connaissez sûrement. Nous l'avons utilisé sans problème.
    Je vais donner la parole à Baerbel, mais j'aimerais brièvement terminer mon histoire. Si nous pouvions retourner en arrière, si je vous amenais faire un tour dans la DeLorean qui servait à voyager dans le temps dans le film Retour vers le futur, et que nous retournions en 2008, étant donné les changements qui ont été apportés, si on nous avait imposé le calcul de la limite et la période d'un an, notre société n'existerait plus. Je n'exagère pas. En effet, d'autres producteurs de porcs ont fermé leurs portes dans les Prairies, et si nous avons été en mesure de poursuivre nos activités, c'est parce que des personnes formidables nous ont aidés et nous avons été en mesure d'avoir accès à ces personnes à l'échelon local et à l'étranger.
(1640)
     Notre société emploie donc maintenant 1 800 personnes dans les régions rurales du Manitoba et de la Saskatchewan. C'est une bonne nouvelle. C'est une entreprise qui continue de chercher des occasions de s'accroître, surtout sur le marché asiatique, ce qui correspond à la partie du mandat de notre gouvernement actuel qui vise à augmenter les exportations de produits alimentaires.
    La demande que nous présentons aujourd'hui, c'est que nous aimerions remplir le mandat du gouvernement visant à continuer d'accroître les exportations de produits alimentaires sur le marché asiatique, par exemple, et il nous faut des travailleurs pour y arriver. Jeremy n'a pas eu la chance de vous parler des initiatives auxquelles nous participons avec Sandy Bay, une collectivité Première Nation située à environ une heure et quinze minutes de route de notre usine de Neepawa. Nous collaborons avec la ministre Mihychuk et nous planifions la création d'une école de boucherie dans le cadre de cette initiative.
    Je sais que le temps est limité, et c'est un défi. Nous aimerions beaucoup vous parler à chacun d'entre vous, et j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec M. Cuzner. Il a gentiment écouté notre histoire en détail, et si vous souhaitez obtenir davantage de renseignements, vous n'avez qu'à nous téléphoner.
    En ce qui concerne les permis de travail d'un an, il faudrait les ramener à deux ans. Si on souhaite rendre ces programmes permanents, il faut revenir au permis de travail de deux ans. Même au Manitoba, où nous avons un merveilleux PCP — un Programme des candidats des provinces — qui traite les dossiers des travailleurs qui sont au pays pour six mois et qui ont réussi à travailler pendant six mois, on exerce des pressions pour accélérer le traitement des dossiers des travailleurs pendant qu'ils sont au pays, car une fois nommés, ils ne sont plus assujettis à la limite et ils peuvent prolonger leur permis de travail.
    Tout d'abord, comme vous le verrez dans les diapositives PowerPoint, il faut ramener la durée du permis à deux ans. L'autre chose, c'est que les limites de 10 %, 20 % ou 30 % ne fonctionnent pas pour la plupart des industries, mais nous sommes ici pour parler de l'industrie de la transformation de la viande. Le calcul de la limite n'a aucun sens. Dans les documents que nous vous avons fournis — je ne dirais pas qu'il n'a aucun sens, mais il est complexe. Il est discrétionnaire. Il n'est pas clair. Je vous ai fourni l'annexe E, où se trouvent les calculs, afin que vous n'ayez pas à cliquer sur toutes les diapositives. Si vous le consultez, vous constaterez rapidement que le calcul de la limite présente des difficultés, car il compte les travailleurs sur place, ainsi que ceux demandés dans l'EIMT et ceux qui attendent peut-être d'être déployés dans le cadre d'une ancienne EIMT.
    On pourrait faire valoir qu'on compte trois fois. Les calculs offrent un certain pouvoir discrétionnaire, mais c'est un bon résumé. Si nous visons 10 %, il se peut que nous soyons à 3 %. Je serais heureuse d'en parler avec chacun d'entre vous. J'aimerais féliciter le ministère, car ses représentants ont collaboré avec moi à cet égard. J'ai rencontré Janet Goulding à nouveau ce matin; elle poursuit cet examen avec Jacquie Manchevsky, et c'est une bonne nouvelle.
    J'aimerais vous offrir une brève conclusion. La limite ne devrait pas exister, surtout dans l'industrie de la viande. La solution serait d'accorder aux découpeurs de viande les mêmes exemptions qu'aux techniciens stagiaires en élevage du porc, afin qu'ils ne soient plus soumis à la limite si on souhaite continuer d'utiliser le calcul de cette limite.
    L'autre solution consiste manifestement à enlever ce dossier au ministère pour l'ajouter au mandat du ministre McCallum, et à accorder une exemption liée à l'EIMT aux industries admissibles. En nous fondant sur les recherches, nous soutenons que l'industrie de la transformation de la viande est admissible.
(1645)
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous entendrons maintenant Portia MacDonald-Dewhirst. Elle a sept minutes.
    Je suis la directrice générale du Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture. Je vous remercie de m'avoir invitée pour vous parler, au nom du conseil, de l'importance des travailleurs étrangers temporaires dans l'industrie agricole et agroalimentaire. Notre témoignage est important dans le cadre de cet examen, car plus de 40 % de tous les travailleurs étrangers temporaires qui arrivent au Canada travaillent dans notre industrie. Nous sommes une vaste industrie et nous utilisons énormément le programme.
    L'industrie agricole et agroalimentaire, y compris le secteur des produits de la mer, est très vaste et joue un rôle important dans l'économie canadienne et la prospérité du pays. Elle englobe plusieurs industries, notamment l'agriculture primaire, l'aquaculture, la transformation des aliments et boissons, etc. Elle emploie plus de 2 millions de Canadiens et représente un emploi sur huit au Canada, ou 12 % des emplois au pays. À l'échelle régionale, elle constitue une source importante d'activité économique dans de nombreuses provinces et génère plus de 108 milliards de dollars du PIB du Canada. C'est un moteur important de l'économie canadienne et des économies provinciales. Cette industrie a un énorme impact, et elle présente un gigantesque potentiel de croissance, car la demande pour les produits agricoles et alimentaires canadiens augmente à l'échelle mondiale. C'est un point très important.
    Même si la demande pour les produits de cette industrie est élevée, les parties intéressées comme HyLife ont soulevé d'importantes préoccupations relativement aux défis immédiats liés à la main-d'oeuvre auxquels font face l'industrie et ses entreprises, et les risques que ces défis posent pour la durabilité et la croissance. L'industrie a besoin de travailleurs pour demeurer concurrentielle à l'échelle mondiale, pour profiter des occasions d'exportation et pour assurer la sécurité, la salubrité et la durabilité alimentaires pour tous les Canadiens.
    En se fondant sur des recherches approfondies de renseignements sur le marché du travail menées dans l'industrie, le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture a précisé la situation liée à la pénurie de main-d'oeuvre et ses effets sur le secteur de l'agriculture primaire dans l'industrie. Il y a 10 ans, l'écart entre la demande de travailleurs et l'offre de main-d'oeuvre était d'environ 30 000 travailleurs. Aujourd'hui, cet écart a atteint 59 000 travailleurs, ce qui signifie qu'il a presque doublé en 10 ans. En se fondant sur l'augmentation de la demande à l'échelle nationale et internationale pour les produits agricoles et alimentaires du Canada, on prévoit que cet écart doublera au cours des 10 prochaines années, pour atteindre 114 000 travailleurs en 2025.
    Même si les employeurs déploient d'énormes efforts pour recruter et embaucher des travailleurs, les Canadiens sont moins disponibles dans les régions rurales et s'intéressent moins aux métiers liés à l'agriculture. Actuellement, l'industrie atténue cette grande pénurie de travailleurs en embauchant des travailleurs étrangers temporaires. Aujourd'hui, l'industrie agricole est appuyée par 45 600 travailleurs étrangers temporaires. On peut avoir accès à ces travailleurs par l'entremise du Programme des travailleurs agricoles saisonniers, ainsi que par les volets agricoles et réguliers du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Sans ces travailleurs, les entreprises seraient en détresse et les entreprises et les emplois canadiens seraient menacés.
    Le recours aux travailleurs étrangers temporaires contribue à réduire l'écart entre les emplois agricoles offerts et les travailleurs disponibles, mais cela n'élimine pas le problème. Même avec le recours aux travailleurs étrangers temporaires, il reste un grand nombre d'emplois à pouvoir dans l'industrie. En effet, 26 400 postes sont nécessaires pour appuyer les entreprises et pourtant, ils ne sont pas occupés par des Canadiens ou des travailleurs étrangers temporaires. Actuellement, l'industrie agricole a le taux de postes à pourvoir le plus élevé de l'ensemble des industries du Canada, car il atteint 7 % dans cette industrie, alors que la moyenne nationale est de 1,8 %. Les recherches menées par le conseil précisent que ces postes non pourvus font perdre aux producteurs canadiens 1,5 milliard de dollars par année, ou 3 % des recettes monétaires agricoles de l'industrie. Les recherches soulignent également que les pénuries de travailleurs actuelles sont très graves, car elles ont des conséquences catastrophiques sur la viabilité des entreprises, la durabilité de l'industrie et la croissance du secteur.
    Lorsque des Canadiens ne sont pas disponibles, les travailleurs étrangers temporaires jouent un rôle essentiel pour répondre aux besoins des employeurs agricoles. Les travailleurs étrangers temporaires permettent au secteur de réduire le manque de main-d'oeuvre, surtout dans les périodes de pointe saisonnières. Selon les prévisions liées au manque de main-d'oeuvre, les besoins en travailleurs étrangers augmenteront. Le conseil, en collaboration avec 75 autres associations de l'industrie, notamment HyLife, appuie la mise en oeuvre du Plan d'action canadien sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire, un rapport de recommandations produit par l'industrie qui vise à résoudre les grands problèmes immédiats liés au manque de travailleurs qui nuisent actuellement aux entreprises canadiennes.
(1650)
    Cette initiative est dirigée par une équipe de travail nationale sur la main-d'oeuvre et formule des recommandations pratiques et essentielles pour garantir la sécurité, la viabilité et le prix abordable des aliments pour tous les Canadiens, et pour conforter le Canada dans sa position de chef de file et de grand contributeur à la production alimentaire mondiale.
    Mark Wales, le président du Conseil, vous expliquera maintenant plus en détail le rôle significatif que jouent les travailleurs étrangers temporaires au sein du secteur, tout particulièrement en ce moment, alors que l'industrie est aux prises avec un grand nombre de postes vacants. M. Wales est également le coprésident du groupe de travail national sur la main-d'oeuvre dans le secteur agricole et agroalimentaire.
    Merci.
    Allez-y, monsieur Wales
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, merci d'avoir invité l'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire à participer à votre étude du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Je suis un agriculteur d'Elgin, en Ontario. Je suis président du Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture et coprésident de l'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire.
    L'industrie agricole est un secteur important qui fait face à une pénurie de main-d'oeuvre criante, comme l'a mentionné Portia. Elle compte actuellement sur les travailleurs d'autres pays pour combler une partie des postes vacants, grâce au Programme des travailleurs étrangers temporaires. Selon des recherches approfondies et de vastes consultations menées auprès de l'industrie, le secteur agricole et agroalimentaire a besoin de pouvoir embaucher plus facilement des travailleurs d'autres pays pour réussir et prospérer.
    Les mécanismes du Programme des travailleurs étrangers temporaires sont restrictifs et difficiles à utiliser. L'industrie agricole et agroalimentaire recommande de retirer ce secteur du programme existant et de créer un programme spécifique à la main-d'oeuvre de cette industrie pour tenir compte des particularités de celle-ci. Je suis heureux de vous faire part aujourd'hui des préoccupations et des recommandations de notre industrie afin de contribuer à votre étude.
    L'industrie agricole et agroalimentaire constitue un secteur de l'économie canadienne vaste et très significatif, dont les retombées comptent pour près de 7 % du PIB de notre pays. Elle est également le principal moteur de la plupart des économies provinciales, grâce à la production d'aliments et de produits agricoles qui répondent à une demande en croissance constante au Canada et dans le monde. Malheureusement, elle est actuellement aux prises avec une pénurie de main-d'oeuvre à la fois prolongée et de grande envergure. Les entreprises n'arrivent pas à trouver des Canadiens disposés à travailler dans leurs exploitations agricoles et dans leurs installations de transformation.
    Comme l'a dit Portia, des dizaines de milliers de postes demeurent vacants, ce qui fait perdre des milliards de dollars de ventes à l'industrie. Je suis bien placé pour savoir qu'il n'y a rien de plus décourageant pour un agriculteur que de planter une culture et de ne pas avoir assez de personnel pour la récolter le temps venu. C'est ce qui fait en sorte que l'on décide de ne pas cultiver certaines denrées.
    Les intervenants de l'industrie se sont dits très inquiets des problèmes de main-d'oeuvre urgents que connaissent les entreprises agricoles et agroalimentaires canadiennes et des risques que cette situation représente pour leur viabilité et leur croissance à venir. C'est un problème crucial qui touche tous les aspects de l'industrie, y compris tous les produits de la chaîne de valeur. Cette pénurie constitue un risque considérable pour le secteur.
    Le Plan d'action canadien sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire a mené d'excellentes recherches sur la question et l'a bien documentée. Ses conclusions sont soutenues par de nouvelles recherches sur le marché du travail publiées récemment par le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture, dont Portia a parlé.
    De nombreux défis en matière de main-d'oeuvre spécifiques à l'industrie agricole et agroalimentaire contribuent à la pénurie actuelle. Comme on l'a déjà dit, cette industrie exerce ses activités principalement dans des régions rurales, là où la disponibilité de la main-d'oeuvre canadienne est limitée. Ces emplois exigent la manipulation d'animaux et de plantes vivants, qui mourront faute d'une attention particulière. Le travail est saisonnier en raison du climat canadien et il est parfois physique et ardu. C'est pour ces raisons que l'industrie a de la difficulté à répondre à ses besoins en matière de main-d'oeuvre.
    L'embauche de travailleurs canadiens est la priorité absolue de notre industrie. Les employeurs déploient des efforts considérables pour recruter des Canadiens et les maintenir en poste. Cependant, quand l'industrie ne trouve pas de Canadiens pour répondre à ses besoins en matière de main-d'oeuvre, elle doit avoir recours à des travailleurs étrangers pour combler les postes vacants.
    Le secteur agricole et agroalimentaire utilise divers volets du Programme des travailleurs étrangers temporaires, y compris le Programme des travailleurs agricoles saisonniers, aussi connu sous le nom de PTAS. Les producteurs de cultures qui ne figurent pas sur la liste nationale des secteurs agricoles et les transformateurs utilisent le volet principal du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Le Programme des travailleurs agricoles saisonniers souligne cette année son 50e anniversaire. Le PTAS est l'un des plus anciens programmes de mobilité de la main-d'oeuvre en Amérique du Nord et l'un de ceux qui ont connu le plus de succès. Les responsables canadiens gèrent le programme en collaboration avec les responsables du Mexique et des pays des Caraïbes participants, en coordination étroite avec les employeurs, tout en veillant à protéger les droits des travailleurs. Des études récentes précisent sa valeur pour les entreprises canadiennes ainsi que pour les travailleurs qui y participent dans le but de ramener l'argent ainsi gagné dans leur pays. Dans le cas du PTAS et des programmes du volet agricole, le salaire ainsi que le logement sont réglementés, et le régime de conformité est strict. L'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre ne recommande aucun changement au PTAS.
    Puisque le PTAS n'est pas accessible à toutes les autres entreprises du secteur agricole et agroalimentaire, d'autres volets du Programme des travailleurs étrangers temporaires servent aussi à combler des postes vacants. Les volets et les règles qui les régissent sont lourds et complexes, mais les agriculteurs et les transformateurs canadiens ont absolument besoin d'engager des travailleurs étrangers. Sans eux, les postes vacants au sein des entreprises agricoles et agroalimentaires seraient trop nombreux et celles-ci devraient mettre la clé sous la porte.
    Les études révèlent que les travailleurs étrangers créent des emplois. En effet, pour chaque travailleur étranger participant au Programme de travailleurs agricoles saisonnier, deux emplois canadiens sont créés. Pour chaque travailleur du secteur bovin, 4,2 emplois canadiens sont créés; et chaque boucher crée six postes canadiens de pareur de viandes dans les usines de transformation des viandes.
(1655)
    Ces statistiques sont importantes.
    Lorsqu'il n'y a pas de main-d'oeuvre canadienne disponible, pouvoir engager des travailleurs étrangers est essentiel pour satisfaire aux besoins de la production agricole et agroalimentaire. Il est évident qu'il faut faciliter l'embauche de ces travailleurs. Les changements apportés récemment au Programme des travailleurs étrangers temporaires ont aggravé la situation et causent d'énormes difficultés à l'industrie, ce qui limite les chances de réussite des entreprises agricoles canadiennes.
    L'industrie doit composer avec la règle de la durée cumulative, qui empêche les travailleurs saisonniers formés au Canada et possédant des compétences particulières, comme les apiculteurs et les céréaliculteurs, d'occuper ces postes pendant plus de quatre ans. Or, les entreprises ont besoin de ces travailleurs, car ils sont incapables de trouver des Canadiens pour combler ces postes.
    En outre, le plafond régressif de 30 %, puis 20 % et enfin 10 % imposé à la proportion de travailleurs étrangers au sein d'une entreprise restreint les activités des usines de transformation de la viande, par exemple, qui sont déjà aux prises avec une pénurie de main-d'oeuvre énorme.
    Par ailleurs, il faut faciliter l'accès à la résidence permanente, afin d'offrir aux travailleurs étrangers prospères des moyens concrets de devenir résidents permanents au Canada. Les entreprises veulent conserver leurs employés et, pour ce faire, elles les aident à divers égards, notamment en leur offrant une formation linguistique poussée. Elles ne peuvent pas retenir leurs travailleurs si l'accès à la résidence permanente est difficile ou impossible dans les secteurs associés à certains produits agricoles.
    L'incapacité des exploitations agricoles et des usines de transformation à combler les postes vacants met en péril la poursuite de leurs activités. C'est mauvais pour les affaires et pour le Canada.
    L'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire du Canada a déployé des efforts considérables pour étudier et analyser les enjeux relatifs à la main-d'oeuvre touchant tous les aspects de l'industrie. L'Équipe spéciale est composée de représentants de toutes les sphères de la chaîne de valeur agricole et agroalimentaire. Le groupe a établi un plan d'action axé sur les solutions qui recommande précisément des améliorations nécessaires pour que l'industrie puisse obtenir les travailleurs dont elle a besoin. Le Plan d'action sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire est soutenu par 75 associations du secteur agricole.
    Je vais conclure parce que le temps est limité.
    Le Canada est tributaire de l'activité économique que suscite l'industrie agricole et agroalimentaire ainsi que des excellents produits et aliments que génère ce secteur. En ce moment, l'industrie se heurte à un nombre de postes à pourvoir qui mine sa capacité de prospérer. L'Équipe spéciale sur la main-d'oeuvre recommande au gouvernement de s'associer avec l'industrie pour remédier au problème de main-d'oeuvre et mettre en oeuvre le Plan d'action canadien sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire, afin que le Canada puisse accroître sa part de marché et devenir le fournisseur d'aliment de prédilection du monde entier.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous passons maintenant aux représentants des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce Canada.
    Vous avez sept minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de nous permettre de présenter aujourd'hui le point de vue des TUAC Canada. Nous avons aussi soumis au Comité des mémoires détaillés.
    Je m'appelle Naveen Mehta. Je suis conseiller juridique principal et directeur du Service des droits de la personne pour les TUAC Canada. Depuis une dizaine d'années, j'ai l'honneur et le privilège de militer en faveur d'un système d'immigration durable et progressiste.
    Comme vous le savez peut-être, les TUAC Canada est l'un des plus grands syndicats du secteur privé au pays, qui compte parmi ses membres un plus grand nombre de travailleurs migrants que tout autre syndicat canadien. Ils se comptent par milliers. Nous sommes particulièrement bien placés pour vous exposer de façon concrète comment le système d'immigration pourrait servir les intérêts des citoyens canadiens, de l'économie, des employeurs et des travailleurs.
    J'ai l'honneur d'être en compagnie de Claudia Colocho, qui fait partie de nos syndiqués et qui travaille pour Maple Leaf Foods à Brandon. Elle décrira en détail son expérience à titre de travailleuse étrangère temporaire, ou travailleuse migrante, dans un milieu de travail syndiqué où le syndicat et l'employeur travaillent ensemble pour veiller à ce que pratiquement tous les travailleurs migrants de l'entreprise aient accès à un Programme des candidats des provinces solide. Claudia est ici pour vous donner un aperçu de ce que pourrait être un système d'immigration durable et progressiste qui tiendrait compte des besoins du marché du travail et qui offrirait une excellente occasion d'accéder à la résidence permanente.
    Compte tenu des relations de travail qui existent entre les TUAC Canada et les employeurs, comme Les Viandes Maple Leaf, Olymel, HyLife et Cargill, l'histoire de Claudia se termine bien, contrairement aux expériences déchirantes qu'ont vécues des travailleurs migrants embauchés dans des milieux non syndiqués et dont vous avez entendu parler au cours des deux dernières semaines.
    Cela dit, je cède la parole à Claudia.
(1700)
    Bonjour à tous. Je m'appelle Claudia Colocho. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous raconter mon histoire concernant le Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Je suis originaire d'El Salvador. En 2005, je suis venue au Canada comme travailleuse temporaire dans une usine de transformation d'aliments de Brandon, au Manitoba. Comme c'est le cas de la plupart des travailleurs migrants, la situation financière de ma famille était loin d'être idéale dans mon pays.
    Je vivais avec ma mère, qui nous a élevés seule, ainsi qu'avec mon frère et ma soeur cadette. Ma mère travaillait d'arrache-pied pour subvenir à nos besoins. Elle travaillait comme secrétaire pendant de longues heures tous les jours. Mon frère aîné était agent des douanes à El Salvador et ma soeur cadette travaillait pour payer ses études. Laissez-moi vous dire qu'il est très difficile pour nous de faire des études. Avant que j'aboutisse au Canada, nous avions toutes les deux un emploi et tentions d'aller à l'école.
    Nous vivions dans une des régions les plus pauvres d'El Salvador. Je n'arrivais à gagner que 5 $ par jour environ et l'école me coûtait approximativement 60 $ par mois. Pour ma soeur et moi, il était pratiquement impossible d'aller à l'école. Dans mon pays, j'avais de grands rêves et je voulais devenir avocate, mais il était extrêmement difficile de joindre les deux bouts. C'est alors que l'occasion de venir travailler pour les Aliments Maple Leaf au Canada s'est présentée.
    Je suis arrivée au Canada à 23 ans. J'étais célibataire et je n'avais pas d'enfants. J'ai pu me concentrer sur l'apprentissage de l'anglais et économiser de l'argent pour rentrer dans mon pays, mais je suis tombée amoureuse de la culture canadienne, des Canadiens et de la ville de Brandon. Pas de l'hiver, par contre.
    Le travail dans une usine d'emballage de viandes n'est pas facile, mais j'ai travaillé à Aliments Maple Leaf pendant quatre ans: d'abord comme découpeuse de viande, puis à l'hygiène, et ensuite au contrôle de la qualité dans le service des achats. J'étais déterminée à vivre au Canada, alors j'ai suivi les cours d'anglais offerts le soir par mon syndicat. Après être devenue résidente permanente, j'ai travaillé dans un bureau de services d'établissement. J'ai le privilège d'aider d'autres personnes à s'installer au Canada.
    Je ne sais pas comment j'aurais pu franchir toutes les étapes de ce processus sans l'aide précieuse de mon syndicat, la section locale 832 des TUAC, et de mon employeur, Aliments Maple Leaf. Ils m'ont offert les services d'établissement auxquels la grande majorité des travailleurs migrants n'ont pas accès. Mon assurance-maladie n'a pas été interrompue. Je bénéficiais de conditions de travail et d'un salaire convenables et je faisais partie d'une grande famille. Grâce à la chance que j'ai eue d'être embauchée dans un milieu syndiqué, j'ai pu profiter du Programme des candidats des provinces du Manitoba.
    Je sens que je fais partie intégrante de mon milieu de travail et de ma collectivité, comme tout le monde. J'ai été traitée avec respect et dignité. Mon syndicat et mon employeur ont tous deux investi en moi, et je peux maintenant investir dans le Canada. Plutôt que de n'être qu'une visiteuse temporaire de ce beau pays, j'en fais maintenant partie. Je suis devenue citoyenne canadienne. Je paie des impôts et une portion de plus en plus grande de mon argent demeure au Canada pour que je puisse y faire ma vie et contribuer à l'économie du pays. Sans le Programme des candidats des provinces et l'appui concerté de mon syndicat et de mon employeur, je ne serais probablement pas en train de vous parler aujourd'hui. J'aimerais que tous les travailleurs qui viennent au Canada ne soient pas que de simples visiteurs, ni des travailleurs temporaires, mais plutôt qu'ils puissent faire de ce beau pays leur pays.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
(1705)
    Merci.
    Il vous reste environ une minute, monsieur.
    Fantastique.
    En terminant, je vous demanderais de lire notre mémoire, dans lequel nous décrivons ce que nous considérons être un régime d'immigration progressiste.
    Je tiens également à remercier le gouvernement fédéral d'avoir eu le courage d'entreprendre un examen de ce programme bancal.
    Ce mémoire fait partie d'une série de mémoires provenant de l'industrie, d'employeurs syndiqués tels que les Aliments Maple Leaf et HyLife, d'organismes communautaires tels que Migrant Workers Alliance for Change et de TUAC Canada, qui représente les intérêts des travailleurs migrants. Nous avons travaillé ensemble à l'élaboration d'une solution qui profiterait aux Canadiens, à l'économie canadienne et aux travailleurs.
    Par exemple, ce que nous avons fait en 2014 était très ingénieux. TUAC Canada et nos employeurs ont négocié un protocole d'entente qui exposait tout ce qu'un régime d'immigration durable devrait comporter.
    Je vais vous en citer un extrait:
    
Le Programme des travailleurs étrangers temporaires n'a jamais été une solution de rechange cohérente, stratégique ou raisonnable à ce dont l'économie canadienne a besoin, c'est-à-dire un régime d'immigration qui permet à des personnes possédant diverses compétences de devenir résidents permanents et éventuellement citoyens canadiens.
    C'est ce qu'en pensent le syndicat et les employeurs.
    Je vous remercie de m'avoir donné cette possibilité de témoigner aujourd'hui. Voilà pour mes commentaires, mais si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Deltell.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue à la Chambre des communes. Nous sommes très heureux de vous accueillir ici.

[Français]

     Je vais vous adresser quelques mots dans ma langue maternelle. Je vous souhaite la bienvenue .
    Le sujet dont il est question ici est d'actualité dans vos provinces respectives. Toutefois, je peux vous dire qu'au Québec, nous sommes confrontés exactement à la même réalité. Nous avons des entreprises de production qui ont besoin de travailleurs.
    Des employés temporaires sont embauchés pour la cueillette de denrées alimentaires, dont les fruits et légumes, mais également dans beaucoup d'usines de transformation des produits du porc, par exemple. Au Québec, il y a une blague qui circule selon laquelle il y a plus de porcs que de citoyens. La production annuelle est d'environ sept millions de porc et la province compte environ sept millions de citoyens.

[Traduction]

    Je peux le répéter. Il y a plus de porcs au Québec que de citoyens. Mon collègue, M. Cuzner, en a souvent fait mention.
    Mais sérieusement, nous sommes confrontés aux mêmes difficultés. D'une part, il y a les gens qui travaillent dans les exploitations agricoles, et d'autre part, il y a ceux qui travaillent dans les usines de transformation.
    J'aimerais que vous me donniez des renseignements là-dessus.
    Mes questions s'adressent à Mme Langner et à M. Janzen. J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi nous devons recruter des gens à l'extérieur du Canada. Je sais que votre ville n'a pas de problème de chômage. Avec un taux de 2 %, on peut dire que tout le monde travaille. Dans votre province, le taux de chômage se situe à 6,4 %, ou 6,1 % à Winnipeg; la situation est donc relativement bonne, mais comment pouvez-vous expliquer que nous devons recourir à la main-d'oeuvre étrangère alors qu'il y a des chômeurs au Canada? Qu'en est-il dans votre secteur?
    Vous conviendrez que dans notre secteur d'activité, nous n'avons d'autre choix que d'embaucher à l'étranger.
    Oui. Pourquoi a-t-on besoin de recruter à l'extérieur du Canada? Comment expliquez-vous la situation?
    En ce qui nous concerne, comme vous l'avez mentionné, la population locale peu nombreuse est un facteur qui entre en ligne de compte. Si la ville de Neepawa compte 3 000 habitants et que nous avons besoin de 1 000 ouvriers à l'usine...
    En outre, ces travailleurs doivent également avoir un certain niveau d'habiletés en coupe de viande, parce que nos clients sont au Japon. Nous produisons de la viande de porc de la plus haute qualité dans le monde. HyLife exporte la plus importante quantité de porcs au Japon, alors nous avons non seulement besoin de travailleurs, mais aussi de découpeurs de viande qualifiés. Nous devons recruter des travailleurs des Philippines, qui ont travaillé dans des usines de catégorie « AA » ou « AAA », et qui n'ont pas seulement dépecé de la viande dans leur cour arrière. Malheureusement, ces personnes sont difficiles à trouver.
    Comme vous l'avez indiqué, notre faible taux de chômage, qui s'élève à 2,4 %, fait en sorte qu'il n'y a tout simplement pas assez de gens pour combler nos besoins. C'est un autre facteur.
    Il faut également mentionner le taux de roulement, et ce, même si l'usine n'est pas en pleine croissance. Je vous ai dit comment nous étions passés de 300 à 1 200 employés, mais sachez que pour simplement combler les besoins... Nous avons un taux de roulement de 10 %, ce qui est très faible par rapport à la moyenne de l'industrie, qui se situe à 25 %. Si le taux s'élevait à 25 %, cela voudrait dire qu'on aurait besoin de 250 nouveaux travailleurs par année. Il serait impossible de les recruter dans la région et même ailleurs au Canada.
(1710)
    Pourquoi ne recrutez-vous pas des gens de l'Alberta? Il y a beaucoup de gens qui perdent leur emploi en ce moment, alors pourquoi embauchez-vous des travailleurs de l'étranger?
    Nous participons également chaque année aux salons de l'emploi en Alberta. Nous y étions d'ailleurs il y a quelques mois. Nous essayons activement d'embaucher des gens, mais personne ne postule à nos emplois.
    Les efforts que vous déployez ne donnent aucun résultat?
    Non. Au cours des dernières années, lorsque nous avons instauré un deuxième quart de travail, nous avons recruté quelques travailleurs de la construction en Alberta. Nous avons réussi à en embaucher quelques-uns, mais je vous fais remarquer que ce sont des travailleurs de la construction et non pas des travailleurs de notre secteur. Par conséquent, ils n'avaient peut-être pas les compétences que nous recherchions, mais comme nous avions un grand besoin de travailleurs, nous les avons embauchés.
    La fin de semaine dernière, nous avons participé à un salon de l'emploi à Winnipeg, qui se trouve à deux heures de notre usine, et nous avons rencontré une organisation qui facilite le déplacement des résidents permanents venant de différentes régions du monde et qui sont déjà ici au Canada. Nous les avons encouragés à venir travailler pour nous. Nous sommes prêts à les accueillir. Nous sommes entrés en contact avec le Programme des candidats des provinces et leurs divers bureaux d'établissement partout au Manitoba pour savoir si des réfugiés syriens souhaiteraient venir s'établir dans les régions rurales du Manitoba. Nous serions prêts à les accueillir également.
    Je vais revenir à ma première question. Comment expliquez-vous le fait que les Canadiens ne veulent pas travailler à votre usine?
    Je crois qu'on vous a donné une réponse semblable lundi, mais je vais vous la redonner aujourd'hui.
    Le problème que nous avons, c'est que les gens ne vont pas quitter une région du Canada pour aller s'établir dans un secteur rural du Manitoba, y transformer de la viande et y dépecer des porcs. Nous vous invitons à venir visiter notre usine. Vous pourriez ainsi voir le travail qui y est accompli. Je n'ai pas d'autres réponses à vous donner. En fait, la réponse est très simple. Les gens ne veulent pas s'installer en milieu rural pour transformer du porc. Ce n'est pas attrayant, malheureusement.
    Il y a aussi le fait que le travail est dur, mais il y a beaucoup d'autres emplois difficiles, alors je ne pense pas que ce soit la seule explication. On peut occuper différents postes à l'usine, que ce soit dans les secteurs de l'hygiène, de la qualité, de la coupe de viande et de l'empaquetage. Toutefois, encourageriez-vous vos enfants à se lancer dans la transformation de la viande?
    Si vous veniez voir notre usine, je pense que vous verriez que nous offrons de très bons emplois, mais ce n'est pas dans la mentalité des jeunes d'aujourd'hui. Ils n'aspirent pas à être découpeurs de viande, même s'ils pourraient gagner jusqu'à 21 $ de l'heure, conformément à notre convention collective, plus 1 $ pour leur assiduité et d'excellents avantages sociaux. Ce n'est tout simplement pas le type de travail auquel la plupart des jeunes aspirent.
    Merci beaucoup.
    Je suis désolé, mais je vais devoir vous arrêter ici. Je vais maintenant céder la parole à M. Long.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
    J'ai moi-même déjà travaillé comme découpeur de viande dans une usine de transformation de la viande. J'ai travaillé pour Canada Packers, et j'ai également travaillé dans les domaines de l'aquaculture, de la transformation et de la commercialisation. Visiblement, vous faites front commun sur cette question, et comme je l'ai dit à des témoins précédemment, il y a des atrocités et des gens qui abusent du système. Toutefois, il y a des besoins réels, et il pourrait être désavantageux de ne pas pouvoir recourir aux travailleurs étrangers temporaires.
    Je pense que je vais tout d'abord m'adresser à Mme MacDonald-Dewhirst.
    Pouvez-vous me dire ce qu'il adviendra de votre industrie, au cours des cinq prochaines années, si vous n'avez pas accès aux travailleurs étrangers temporaires dont vous avez besoin?
    L'industrie affiche actuellement un recul. Nous savons que l'industrie et le secteur agricole ont perdu 1,5 milliard de dollars de ventes. Je parle du volet agricole de l'industrie agroalimentaire; il s'agit d'un moteur important de notre économie.
    Si ça ne vous dérange pas, je vais passer rapidement...
    Il y a déjà un recul.
    L'industrie est-elle limitée par un mécanisme de marché? Y a-t-il de la disponibilité ou est-ce aussi simple que...?
    Je suis un bon ami de Scott McCain. Je ne suis pas allé à l'usine de Brandon, mais nous avons passé tout près en nous rendant à la coupe Memorial. Est-ce que le fait d'avoir accès à plus de travailleurs étrangers temporaires vous permet de transformer plus de porcs? Est-ce aussi simple que ça?
    C'est aussi simple. L'industrie est prête à prendre de l'expansion. Il y a un énorme potentiel de croissance. Nous pourrions grossir davantage, mais à l'heure actuelle, nous sommes limités par la pénurie de main-d'oeuvre.
    Ces postes vacants sont ce qui nuit le plus à la réussite des entreprises, sans parler de l'expansion de leurs activités. Dans les usines de transformation de la viande, on trouve des centaines de postes de travail vides. On n'arrive tout simplement pas à doter ces postes. Ces usines et ces exploitations agricoles se trouvent en milieu rural partout au Canada. Où la population habite-t-elle? Dans les centres urbains.
(1715)
    Selon vous, à combien pourraient s'élever les pertes de revenus et d’emplois?
    Je sais qu'en ce moment, on évalue à 1,5 milliard de dollars les pertes au chapitre des ventes.
    Vous avez dit 1,5 milliard de dollars?
    C'est exact.
    Par année.
    Cela se traduit par des pertes de revenus annuelles pour le volet agricole de l'industrie agroalimentaire. Notre industrie affiche un recul incroyable. Sa viabilité est donc compromise.
    Nous vous sommes très reconnaissants de votre comparution, et nous sommes ici pour recueillir vos opinions, alors je vais de nouveau m'adresser à vous, madame MacDonald-Dewhirst.
    En sachant qu'il n'y a pas de solution universelle et unique pour l'ensemble du Canada, si vous étiez la ministre de l'Emploi et du Travail, que feriez-vous pour remédier à la situation? J'aimerais connaître votre avis là-dessus. Que feriez-vous exactement?
    Je suis heureuse que vous me posiez la question, car l'industrie s'est justement réunie pour trouver une réponse à cette question. On a mené des recherches et on a élaboré le Plan d'action canadien sur la main-d'oeuvre du secteur agricole et agroalimentaire. On y présente deux grandes recommandations: tout d'abord, augmenter l'offre de main-d'oeuvre et investir dans l'acquisition de compétences dans ce secteur d'activité. C'est en trouvant la main-d'oeuvre et en nous assurant que cette main-d'oeuvre est qualifiée que nous pourrons connaître du succès et prendre de l'expansion.
    On a fait tout le travail et toutes les recherches nécessaires dans le cadre du plan d'action. C'est le Groupe de travail national sur la main-d'oeuvre qui est à la tête de cette initiative. Tous les secteurs de l'industrie ont uni leurs efforts afin de s'exprimer à l'unisson.
    Je vous demande pardon. Je dois vous interrompre. Comme vous l'avez remarqué, la sonnerie d'appel retentit. Je demande donc le consentement unanime pour poursuivre la séance pendant environ 15 minutes — en fait, moins que ça. Nous devrons quitter la salle à 17 h 30. Ai-je le consentement unanime?
    Des voix: Oui.
    Le président: Merci.
    Continuez, je vous prie.
    J'aimerais terminer en disant que nous vous avons préparé des cahiers d'information. Je constate que tous les témoins vous transmettent des renseignements et des recherches utiles. Par conséquent, ce plan d'action sur la main-d'oeuvre se trouve devant vous. Vous y trouverez des recommandations claires, donc celle dont a parlé Mark Wales au sujet de cette industrie très complexe. L'industrie espère qu'on créera un centre de spécialisation et qu'on accordera une attention particulière à ses besoins, comme le décrit le plan d'action sur la main-d'oeuvre.
    Dans ce rapport, vous parlez également de l'amélioration et de l'expansion des voies d'accès vers la résidence permanente pour les travailleurs agricoles et agroalimentaires et, si je ne me trompe pas, de la création d'un bureau unique pour les EIMT. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Il serait essentiel d'améliorer les voies d'accès vers la résidence permanente pour régler les problèmes dont il est question ici. Nous voulons nous assurer que ces travailleurs qui arrivent par l'intermédiaire d'un quelconque programme de travailleurs étrangers temporaires peuvent continuer d'être des travailleurs qualifiés au sein de l'industrie puis d'évoluer et de se perfectionner dans leur emploi. Il est très difficile d'obtenir la résidence permanente selon les différentes provinces et les divers ensembles de compétences, et cela nuit réellement à la capacité des travailleurs qualifiés canadiens qui sont venus au pays de rester au sein des entreprises qui les ont appuyés.
    Excellent. Merci.
    Je suis désolé; je crains que vous n'ayez pas suffisamment de temps pour poser une autre question.
    Je vais maintenant céder la parole à Mme Ashton.
    Merci, et merci à tous nos témoins d'être ici aujourd'hui dans le cadre de cette étude importante.
    Au cours des dernières semaines, nous avons recueilli beaucoup de témoignages et, visiblement, le principal enjeu ici est l'immigration au pays. En tant que fille d'immigrants — mes deux parents ont immigré au Canada —, je sais ce que cela signifie de venir ici pour offrir un meilleur avenir à ses enfants. Malheureusement, les travailleurs étrangers temporaires n'ont pas cette possibilité, et certains d'entre eux n'obtiendront jamais la résidence permanente. Depuis 2006, le Canada a admis plus de travailleurs étrangers temporaires que d'immigrants, et cela pose problème.
    Ces dernières semaines, on a beaucoup parlé de la nécessité d'améliorer l'accès à la citoyenneté, et j'ai trouvé cela encourageant. Je pense que c'est au coeur de la solution, mais il reste encore beaucoup à faire à cet égard.
    Mes questions s'adressent aux représentants de TUAC Canada et portent sur certains éléments que vous avez abordés.
    Premièrement, je tiens à souligner — et cela a également été soulevé par le représentant de HyLife — que les travailleurs du Manitoba ont accès au Programme des candidats des provinces. Le gouvernement provincial, qui est un gouvernement néo-démocrate, s'est distingué des autres provinces en faisant preuve d'un leadership sans pareil dans ce dossier. Je pense que cela mérite d'être souligné. Il doit y avoir une volonté politique pour que les travailleurs aient accès à la citoyenneté. La théorie ne suffit pas; il faut passer aux actes.
    J'aimerais maintenant parler du manque d'accès au statut de résident permanent et aux abus potentiels auxquels les travailleurs peuvent être confrontés. Nous avons entendu plus tôt le témoignage de la cousine de Sheldon McKenzie, ce Jamaïcain qui cueillait des légumes dans la région de Leamington qui a été blessé à la tête et qui a finalement succombé à ses blessures. Il était constamment sous la menace d'être expulsé. C'est sa cousine, qui est une citoyenne canadienne, qui a pu empêcher son expulsion. Elle a parlé de la capacité de rester au pays et de ce que représente l'accès à la citoyenneté. Lorsque les gens n'ont pas accès à la citoyenneté, pouvez-vous nous dire quels sont les risques auxquels ils s'exposent?
(1720)
    Le modèle que TUAC Canada établit fonctionne dans un contexte syndiqué. Nous avons eu du succès avec Maple Leaf, HyLife, Olymel et Cargill parce que même s’il faut cheminer vers la résidence permanente, pendant ces deux années, ils sont soumis à une convention collective et un syndicat surveille l’application de cette convention collective et s’occupe des griefs et des questions de santé et de sécurité. Il y a une énorme famille syndicale qui travaille avec l’employeur, ce qui fait que celui-ci est capable de garder ces travailleurs.
     Ils reçoivent un salaire décent. Ils ont des avantages. Certains peuvent faire venir leur famille pendant cette période. C’est le jour et la nuit, par rapport au régime que connaissent la plupart des travailleurs migrants partout dans le pays. Même en Alberta, par exemple, on agite comme une carotte la possibilité de participer au Programme des candidats des provinces dans un milieu non syndiqué, et nous avons de très nombreux cas de travailleurs qui sont maltraités.
     Je sais que nous avons discuté de cela du point de vue économique, ce qui est fondamental pour nous en tant que Canadiens, mais nous ne pouvons tout simplement pas voir les travailleurs comme de la simple marchandise. Ce sont des humains qui ont des enfants, qui paient des taxes, qui font partie des efforts de construction d’une nation et du tissu du pays. Si nous devons parler de cela, nous devons veiller à ce que la route vers la résidence permanente ne soit pas longue. En fait, l’option préférée est la résidence permanente dès l’arrivée au pays; la pire option, c’est la voie vers l’obtention de la citoyenneté et de la résidence permanente.
     Nous savons, en raison du Programme des aides familiaux résidants, qu’il y a des milliers et des milliers de cas de maltraitance et d’exploitation de travailleurs migrants, dans le pays. Il y a environ quatre ans, nous avons créé un livre intitulé The Migrant Worker Book of Abuse, le livre de la maltraitance envers les travailleurs migrants. Il est composé de quatre gros volumes. Je ne les ai pas apportés en avion parce que c’est trop gros.
     Il est important de garder cela à l’esprit. Nous croyons en l’importance de l’économie du Canada, mais la clé est de veiller à ce que nous ayons de bons travailleurs en santé. Si nous avons besoin de travailleurs, c’est manifestement parce que ce ne sont pas des emplois temporaires, alors pourquoi ne pas leur donner l’occasion de rester? S’ils travaillent à obtenir leur résidence permanente, nous devons nous assurer qu’ils ne sont pas laissés à eux-mêmes, parce que c’est alors que la maltraitance s’installe. C’est alors que les gens sont blessés ou tués.
    Monsieur Mehta ou madame Colocho, pouvez-vous nous parler de ce que cela représente pour des travailleurs migrants de contribuer à l’AE sans pouvoir s'en prévaloir?
    Je trouve difficile de comprendre qu’on paie des primes d’AE sans pouvoir profiter de la protection pour laquelle on paie. J’ai vu des travailleurs s’en prévaloir par erreur puis devoir payer des pénalités pour avoir fait une chose à laquelle ils ne savaient pas qu’ils n’avaient pas droit. Je présume que si je paie quelque chose, j’ai le droit de m’en prévaloir. Je ne comprends pas pourquoi nous n’y avons pas accès. Je pense qu’il faut revoir cela.
(1725)
    Nous allons laisser le dernier mot à M. Ruimy.
    Je remercie toutes les personnes qui sont venues aujourd’hui.
     Monsieur Mehta, nous avons entendu beaucoup d’histoires de maltraitance, et cela semble se trouver à la base de nombreux témoignages. Cependant, vous nous dites le contraire. Vous avez à côté de vous une histoire formidable. Qu’est-ce qui explique que votre histoire soit si différente de toutes les autres?
    Je suis content que vous me posiez cette question. La différence, c’est que pendant le cheminement vers la résidence permanente, il y a tout un régime de mesures de protection du travailleur, dans ce contexte. C’est un milieu syndiqué.
     Si les travailleurs sont seuls, sans personne, sans syndicat, ils doivent se débrouiller complètement seuls; ce ne serait pas votre cas ni le mien, même sans le syndicat. Si je n’aime pas mon emploi, je peux partir. Eux sont liés à l’employeur. Ils n’ont aucune mobilité. L’employeur les tient par la gorge.
    Il existe une ligne de dénonciation pour les travailleurs étrangers temporaires, les TET, qui subissent de la maltraitance. Trouvez-vous que cela convient? Avez-vous des idées de façons dont nous pourrions améliorer cela pour les travailleurs non syndiqués?
    La ligne de dénonciation, comme l’exécution de la loi, est dénuée de sens. D’après ce que je comprends, le gouvernement précédent a dressé une liste noire des employeurs. Pendant des années, il y avait très peu de noms sur cette liste.
     Nous ne pouvons pas compter sur les travailleurs pour dire qu’ils ont un problème. Il nous faut une exécution proactive de la loi. Cela signifie que les gouvernements doivent aller sur le terrain, dans les milieux de travail, et surveiller activement les employeurs. Sans cela, nous allons continuer d’avoir de la maltraitance, et des humains vont continuer d’être traités comme de la marchandise. Je ne pense pas que c’est le Canada que nous voulons.
    Quel organisme devrait d’après vous surveiller la situation pour repérer les cas de maltraitance?
     Cela se passe à l’échelle du pays, alors comment pouvons-nous surveiller la situation? Nous ne pouvons pas simplement envoyer des inspecteurs partout. Pouvons-nous le faire?
    Bien sûr que vous le pouvez. Pourquoi pas? Nous inspectons toutes sortes de choses, dans ce pays.
     Je pense que vous pouvez le faire à l’échelon fédéral, pour les choses qui relèvent de la compétence fédérale, mais il faut aussi une conversation honnête entre les provinces et le fédéral concernant la forme que nous voulons que prenne le régime d’immigration. Cela relève du gouvernement fédéral, mais si nous n’avons pas cette conversation, vous aurez un ensemble disparate de systèmes. En Alberta, vous aurez peut-être 5 000 personnes dans le cadre du Programme des candidats des provinces, alors que vous pourriez n’en avoir aucun en Ontario, selon le niveau de compétence exigé.
    D’accord. Merci.
     Avec les permis de travail transférables, en ce moment, la relation de pouvoir est injuste. Tout en maintenant le respect des études d’impact sur le marché du travail, ou EIMT, comment pouvons-nous trouver un juste équilibre entre les droits des travailleurs et le besoin de veiller à ce que les travailleurs demeurent dans les secteurs et les régions où ils ont été engagés en application de leurs EIMT antérieures?
    C’est dans notre mémoire, et d’autres témoins ont aussi parlé de cela. Nous pourrions faire preuve d'un peu d'ingéniosité — et je ne crois pas que ce soit une solution ingénieuse. Vous avez la négociation sectorielle et vous avez les permis de travail sectoriels aussi. Je pense que c’est un début de réponse à la question.
     Si vous avez un employeur horrible, ma réponse préférée à cela est d’adhérer à un syndicat; si vous avez un employeur horrible, vous pourriez au moins aller travailler pour un autre employeur du même secteur.
    En apportant les modifications de 2014, on a cherché à réduire le nombre de travailleurs étrangers temporaires, et c’était le gouvernement précédent. Que pensez-vous de ces changements? Quelles ont été les incidences sur la situation?
    Très brièvement, s’il vous plaît.
    Très brièvement.
    En quelques mots, cela a constitué une réponse ridicule aux impératifs politiques du régime précédent, qui estimait que c’était mauvais pour l’industrie, pour les travailleurs, pour le Canada et pour l’économie.
    Merci.
    Je vois que nous arrivons à la fin de l’heure, alors je vous remercie tous de votre présence et de vos témoignages pour cette étude. J’aimerais remercier tous les membres du Comité, mon irréprochable greffière et les analystes. Encore une fois, merci beaucoup.
     Nous n’allons pas revenir. Malheureusement, nous avons plus d’un vote, alors nous allons lever la séance.
     Je remercie en particulier M. Bossio d’être venu remplacer Yves. Je remercie aussi tous ceux qui travaillent à nous faire paraître fantastiques à la télévision.
     La séance est levée.
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