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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 008 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 23 juillet 2020

[Énregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    J'entends de l'écho. Ça va, maintenant? Très bien.
    Bienvenue à la huitième séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Lorsque nous avons organisé cette réunion, nous pensions nous réunir en personne. Lundi, heureusement, nous avons pu modifier cela pour tenir une réunion virtuelle. Je pense que dans un avenir prévisible, le Comité de la sécurité publique tiendra des réunions virtuelles plutôt que des réunions en personne.
    Je demande aux collègues, aux témoins et à ceux qui nous regardent de faire preuve d'indulgence et de compréhension aujourd'hui. Il pourrait y avoir quelques difficultés qui viendront principalement de la présidence, probablement.
    Lorsque vous aurez la parole, si vous comptez passer d'une langue à l'autre, vous remarquerez des icônes au bas de l'écran pour l'anglais et le français, et pour basculer d'une langue à l'autre. Si vous décidez de changer de langue, veuillez faire une brève pause.
    Veuillez attendre que je vous nomme; vous pourrez alors activer votre microphone. J'ai déjà indiqué qu'il m'est impossible de couper votre microphone, ce qui est vraiment très regrettable, à mon avis.
    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être faits par l'intermédiaire de la présidence.
    Aux témoins, je vous invite à regarder de temps à autre dans ma direction. J'essaierai de vous indiquer que votre temps est écoulé. Je ne veux pas vous interrompre, mais je vais... Malheureusement, le temps est impitoyable.
    Lorsque vous n'avez pas la parole, veuillez mettre votre micro en sourdine. Évidemment, nous vous encourageons à utiliser un casque d'écoute, et il semble que presque tout le monde en ait un.
     Pour commencer, nous avons trois témoins: l'Assemblée des Premières Nations et...
    Je vois que mon collègue M. Harris a une motion, dont nous avons discuté précédemment. J'invite M. Harris à la lire rapidement et à demander immédiatement un consensus à cet égard.
    Très bien, monsieur le président; merci.
    Je pense que vous constaterez que cette motion fait consensus. Je pense qu'elle a été distribuée dans les deux langues. Elle se lit comme suit:
Que, en lien avec l’étude du racisme systémique dans les services policiers au Canada et nonobstant la motion adoptée le 20 février 2020 concernant le questionnement des témoins, pour la suite de l’étude la rotation pour les questions soit faite telle que suit :
Première ronde: six minutes par parti dans l’ordre habituel (Conservateurs, Libéraux, Bloc Québécois et NPD) pour un total de 24 minutes, suivi de la deuxième ronde: trois minutes pour les Conservateurs, Libéraux, Conservateurs, Libéraux suivi de 1,5 minutes chaque pour le Bloc Québécois et le NPD pour un total de 15 minutes et un grand total de 60 minutes (21 minutes ayant été allouées aux déclarations des témoins).
    Merci.
    Nous sommes saisis de la motion.
    Le greffier doit-il procéder de façon officielle, ou pouvons-nous simplement lever la main?
    Je suis désolé, monsieur le président, nous devons procéder au vote par appel nominal dans tous les cas.
    Un vote par appel nominal.
    Devons-nous consigner tous les votes?
    Oui. Je vais essayer de procéder rapidement.
    (La motion est adoptée par 10 voix contre 0.)
    La motion est adoptée. Merci.
    Je vois qu'il est déjà 11 h 10. Je tiens donc à informer ceux qui gèrent les réunions que nous terminerons à 12 h 10.
    Notre premier témoin représente l'Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Il s'agit du chef régional Terry Teegee. Je vois qu'il est en ligne. Nous accueillons aussi M. Natan Obed, président de l'ITK, et Mme Aluki Kotierk, présidente de Nunavut Tunngavik.
    Chef Teegee, la parole est à vous pour sept minutes. Merci.
(1110)
    Je tiens à souligner que je me trouve actuellement sur le territoire de la Nation Shuswap, en Colombie-Britannique.
    Je n'ai que sept minutes; je tiens donc à tous vous remercier de cette très importante étude sur les services policiers. Je pense que nous avons vu, pendant cette pandémie qui sévit depuis mars, beaucoup de situations où de nombreuses Premières Nations ont été victimes des services de police, notamment les trois cas de Winnipeg, le cas de Mme Chantel Moore, au Nouveau-Brunswick, tuée lors d'une vérification du bien-être, ou le cas de M. Levi, aussi au Nouveau-Brunswick. Un membre de ma propre famille, M. Everett Riley Patrick, est mort en détention à Prince George, en Colombie-Britannique.
     J'avais une présentation qui était assez longue et qui traitait essentiellement de l'histoire du maintien de l'ordre, non seulement en Colombie-Britannique, mais dans l'ensemble du Canada, je suppose.
    J'aimerais passer directement aux recommandations qui, à mon avis, sont assez importantes. J'ai 14 recommandations qui proviennent de nos organisations. Je tiens aussi à souligner qu'à titre de chef régional de la Colombie-Britannique, je pilote ce dossier pour la justice, tout comme M. Ghislain Picard, le chef régional pour le Québec et le Labrador.
    La première recommandation est d'accélérer réellement l'action du gouvernement fédéral concernant les appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Le gouvernement fédéral a terminé le rapport l'année dernière et a promis un plan d'action dans un délai d'un an. Ces 12 mois sont passés et nous sommes au point où ces appels à la justice doivent absolument être mis en œuvre. Il y avait au-delà de 231 recommandations.
     La deuxième recommandation est la nécessité de travailler avec les Premières Nations à l'élaboration d'un cadre législatif pour appuyer, avec les ressources financières adéquates, les efforts d'autodétermination des services de police dirigés par les Premières Nations. Le gouvernement fédéral nous a récemment indiqué qu'il s'est engagé à passer du financement par programme au financement des services essentiels, mais il faut aller encore plus loin, en particulier pour les Premières Nations qui affirment leur souveraineté et leur autodétermination en matière de services de police. Il y a des accords tripartites avec de nombreuses Premières Nations, ainsi qu'avec les Premières Nations qui ont des traités. Il convient de les terminer afin de préciser les modalités d'application de ces lois. Je dirais, essentiellement, qu'il est nécessaire d'établir de meilleures relations avec les gouvernements fédéral et provinciaux.
    La troisième recommandation est le soutien fédéral et provincial aux initiatives de justice réparatrice des Premières Nations et le respect des compétences qui en découlent. Avant la colonisation, de nombreuses Premières Nations, les Inuits et les Métis avaient leurs propres modèles de maintien de l'ordre et leurs propres lois. Ils ont fait valoir leurs lois, et ces lois doivent être respectées.
    La quatrième recommandation est le lancement immédiat d'un examen indépendant des pratiques opérationnelles de la GRC lors des vérifications du bien-être, dans le but d'obtenir des recommandations de réformes. Comme expliqué au point numéro 5, les services policiers sont mal équipés pour intervenir dans des situations délicates comme les vérifications du bien-être. Il convient de faire un examen indépendant pour obtenir des recommandations sur la façon dont d'autres services — soutien en santé mentale, aide aux sans-abri et autres services sociaux — peuvent être offerts sans l'intervention de la police. C'est d'autant plus important et nécessaire en santé mentale.
    La cinquième recommandation consiste à réorienter le financement servant à la militarisation des services policiers vers des soutiens sociaux plus efficaces et plus que nécessaires, comme le soutien en santé mentale, l'aide aux sans-abri et les autres services sociaux qui ne nécessitent pas une présence policière.
    La sixième recommandation est la mise en œuvre de politiques de tolérance zéro à l'égard du recours à la force excessive.
(1115)
    La septième recommandation porte sur la révision de la Loi sur la GRC, notamment pour accroître les pouvoirs d'un organisme de surveillance civil et ajouter des dispositions précisant clairement la compétence des Premières Nations en matière de services policiers.
     La huitième recommandation consiste à élaborer une mesure législative interdisant les idéologies de suprématie blanche et renforçant le rôle de la Commission canadienne des droits de la personne pour l'examen d'affaires privées liées aux discours haineux et aux actes à caractère raciste.
     La neuvième recommandation vise à renforcer la reddition de comptes concernant la protection et le respect des droits fondamentaux des Premières Nations, y compris la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
    La recommandation 10 vise à accroître l'utilisation de caméras corporelles dans les services de police des collectivités des Premières Nations et l'accès aux enregistrements vidéo.
    La recommandation 11 est d'améliorer la formation sur le désamorçage et les préjugés implicites, y compris la formation interculturelle.
    La recommandation 12 vise le recrutement et la promotion de membres des Premières Nations au sein de la Gendarmerie royale du Canada.
    La recommandation 13 consiste à changer pour « service de police » le nom de la force de police nationale du Canada, puisqu'il ne s'agit pas d'une « force », mais d'un « service », pour signaler au reste du Canada que la violence envers les Premières Nations et les autres groupes racialisés n'est plus tolérée.
    La recommandation 14 vise la création, à l'échelle nationale, d'un cadre stratégique et d'un plan d'action et la prise d'engagements en matière de justice applicable aux Premières Nations, sous la direction des Premières Nations, en plein partenariat avec le Canada et les provinces, et avec leur appui total.
    En Colombie-Britannique, nous avons une stratégie en matière de justice applicable aux Premières Nations qui traite de justice non seulement en Colombie-Britannique, mais aussi à l'échelle nationale. Je crois que nous sommes la seule province et région à avoir un plan stratégique. Il convient de remercier notre président, M. Doug White, qui participe à cet appel aujourd'hui, et notre Conseil de justice des Premières Nations de la Colombie-Britannique d'avoir élaboré ce plan. Il faut plus de plans de ce genre.
    Nous travaillons actuellement sur une proposition au gouvernement fédéral, et il va sans dire que nous avons besoin de l'appui d'autres régions. Nous communiquons actuellement avec les autres régions et les Premières Nations des autres provinces pour connaître les orientations stratégiques qu'elles attendent d'une stratégie nationale en matière de justice.
    Je pense que la question des services de police en fait partie. Pendant de nombreuses années, depuis le début de la colonisation, les forces de police ont servi à arracher nos peuples de leurs terres. Plus récemment, avec l'adoption de la politique des pensionnats, beaucoup de nos enfants ont été arrachés à leur foyer et emmenés dans des pensionnats.
    Dans ma langue, le dakelh, la langue des Porteurs, nous utilisons le vocable nilhchuk-un pour désigner la GRC. Interprété dans notre langue, ce terme signifie « ceux qui nous emmènent », car essentiellement, c'est la GRC qui a emmené nos enfants. À bien des égards, c'est ainsi que nous percevons encore la GRC — nous l'avons vu même pendant cette pandémie —, étant donné les nombreux cas de recours excessif à la force contre nos peuples autochtones partout au pays. De toute évidence, un changement systémique s'impose: il faut abandonner les politiques très punitives à l'égard des peuples autochtones et des minorités racialisées au Canada.
    Nous sommes ici pour demander plus de justice réparatrice, une approche de réhabilitation et la recherche de solutions de rechange aux prisons. Statistiquement, au Canada et en Colombie-Britannique, de nombreuses Premières Nations présentent les taux d'incarcération et de décès en détention les plus élevés.
    Actuellement, les services policiers sont considérés comme un programme et financés comme tel, même si le ministre Blair nous a promis une transition vers le financement de services essentiels. C'est positif, mais je pense qu'il faut aller plus loin. Aujourd'hui, vous entendrez sans doute d'autres dirigeants autochtones faire la même demande. Il faut absolument changer l'approche à l'égard des services de police dans ce pays que nous appelons le Canada.
    Cela dit, je vous remercie tous d'avoir écouté ma présentation aujourd'hui. J'ai hâte d'entendre les autres intervenants qui sont ici aujourd'hui.
(1120)
    Mahsi cho, merci beaucoup.
    Merci, chef Teegee.
    J'ai accidentellement dit au chef Teegee qu'il avait sept minutes. En fait, les groupes nationaux disposent de 10 minutes. Cela dit, le chef Teegee a quand même eu droit à 10 minutes.
    Nous passons maintenant à M. Natan Obed et Mme Aluki Kotierk. Vous avez 10 minutes.
    Qui parlera en premier?
    Merci, monsieur le président. C'est un plaisir de voir tout le monde. Ublaahatkut, bonjour.
    Je vais partager mon temps de parole avec la présidente Kotierk.
    L'Inuit Nunangat est la patrie des Inuits; elle compte 51 collectivités réparties dans quatre régions: les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut, le Nunavik et le Nunatsiavut.
    En tant qu'Inuits, nous sommes victimes de violence policière de manière disproportionnée comparativement à la majorité des autres Canadiens, sans compter les innombrables obstacles à la justice. La violence policière n'est pas un problème isolé: elle fait partie d'un problème systémique plus large lié à l'inégalité sociale. Les questions comme le logement, les soins en santé mentale, l'accès à l'éducation, l'emploi et la pauvreté sont tous des facteurs qui doivent être examinés parallèlement au problème de la violence policière.
    La violence policière se reflète dans le taux élevé de décès liés à la police dans nos collectivités, comparativement aux autres régions du Canada. Bien que nous n'ayons pas de données agrégées pour les quatre régions inuites ni pour les Inuits vivant hors de l'Inuit Nunangat, les données connues brossent un tableau extrêmement troublant du caractère systémique de la violence policière et de la discrimination à l'encontre d'un grand nombre de nos communautés.
     Il y a eu 16 décès liés à la police au cours des 20 dernières années. Au Nunavut, le taux de décès liés à la police par habitant depuis 1999 est plus de neuf fois supérieur à celui de l'Ontario, et environ trois fois supérieur aux taux du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest.
    La situation au Nunavik est aussi désolante. Entre juillet 2014 et octobre 2018 seulement, huit Inuits ont été tués et au moins quatre autres ont été blessés par des membres du Corps de police régional Kativik. Entre 2016 et 2018, le CPRK a été impliqué dans environ 10 % de tous les cas de décès ou de blessures liés à la police dans la province, soit un taux 55 fois plus élevé que celui du Service de police de Montréal. La situation des Inuits des Territoires du Nord-Ouest, du Nunatsiavut et des personnes qui vivent à l'extérieur de l'Inuit Nunangat est moins claire.
    Ce qui est clair, c'est que le racisme systémique, et le racisme lui-même, tuent. Les forces de police sont en grande partie itinérantes, de sorte qu'elles n'ont pas de lien clair avec la communauté. En outre, très peu de policiers sont Inuits. Tout cela mène aux statistiques stupéfiantes que je viens de mentionner.
    Des mesures doivent être prises pour freiner ces tendances préoccupantes, et cela devrait comprendre un examen systématique et indépendant des pratiques policières de la GRC et du CPRK. Avant tout, il importe que les Inuits participent à l'élaboration du cadre de gouvernance d'un tel examen. Nous en avons assez d'être exclus lors de ces examens, car en fin de compte, nos opinions et nos perspectives risquent toujours d'être éclipsées par d'autres considérations.
    L'achat de caméras et d'autres mesures sont nécessaires pour renforcer la transparence et la reddition de comptes des organismes d'application de la loi. Les corps policiers doivent recruter et retenir plus de gens qui parlent la langue inuite et l'inuktitut pour établir la confiance et améliorer la communication entre les Inuits et les services policiers. Des données agrégées propres aux Inuits pour l'ensemble de l'Inuit Nunangat, et pour l'extérieur, sont nécessaires pour mieux comprendre la violence policière à l'égard des Inuits et s'y attaquer.
     Je cède le reste de mon temps de parole à la présidente Kotierk.
(1125)
     Qujannamiik Natan. Ullukuut.
    Depuis le début, la relation entre la GRC et les Inuits du Nunavut est caractérisée par un déséquilibre du pouvoir et du contrôle. Cela a été bien documenté par la Commission de vérité du Qikiqtani, qui décrit la relation entre 1940 et 1975. La GRC est arrivée dans nos terres ancestrales à titre d'agent du gouvernement fédéral, non seulement en tant que vecteur de changement et agent du colonialisme, mais aussi avec la vision intéressée d'un pays qui avait besoin d'affirmer sa souveraineté dans l'Arctique.
    Il ne fait aucun doute que la relation entre les Inuits du Nunavut et la GRC est complexe et tendue. La GRC a contribué au déplacement de familles inuites dans les communautés; la GRC a contribué à l'envoi des enfants inuits dans les pensionnats; la GRC a contribué à l'abattage des chiens de traîneau inuits.
    Permettez-moi de citer M. John Amagoalik qui a expliqué comment sa famille a été déplacée d'Inukjuak, au Nunavik, dans le Nord-du-Québec, vers le Haut-Arctique, au Nunavut:
Je pense qu'il est important que les gens comprennent qu'à cette époque, les demandes de la GRC étaient en quelque sorte considérées comme des ordres. On vous ordonnait de le faire. Les agents de la GRC avaient beaucoup de pouvoir. Ils pouvaient vous mettre en prison. C'est ainsi qu'ils étaient perçus à l'époque. Une demande de la police était prise très, très au sérieux.
    Aujourd'hui, bon nombre des difficultés vécues par les Inuits sur les plans social et économique découlent de la perte de pouvoir et de contrôle entraînée par une bonne partie de la relation coloniale. Étant donné la rareté des services et du soutien en santé mentale, la GRC est souvent la première ressource vers laquelle les Inuits du Nunavut se tournent pour obtenir des soins, mais souvent, ils ne les obtiennent pas. Au lieu de cela, les Inuits sont victimes de force excessive dans leurs interactions avec la GRC.
    Comme M. Obed l'a souligné, la GRC est responsable d'au moins 15 décès au Nunavut depuis 1999. La GRC ne comprend pas notre culture ni notre langue, comme le démontre le rapport entre les agents inuits et les agents non inuits au Nunavut.
    La relation de méfiance entre les Inuits du Nunavut et la GRC n'a rien d'étonnant. Si la mission de la GRC est réellement de servir et de protéger, il lui incombe d'établir la confiance dans nos communautés inuites. Il faut une approche tenant compte des traumatismes et reconnaissant que les Inuits ont connu un changement de pouvoir et d'autorité dans l'histoire très récente, et que les difficultés sociales dans nos collectivités découlent de certains facteurs.
    Il faut un modèle de surveillance indépendant qui contrôle le comportement de la GRC et ses interactions avec les Inuits. Il faut plus d'agents inuits dans la GRC. Il faut offrir une meilleure formation culturelle aux agents de la GRC appelés à travailler dans nos collectivités inuites. En outre, pour entretenir et renforcer la confiance ou les relations dans les communautés, les agents de la GRC doivent y demeurer plus longtemps de façon à faire partie de la communauté.
    Merci.
    Merci.
    Il vous reste deux minutes, si vous ou M. Obed souhaitez ajouter quelque chose.
(1130)
    Je suis prêt à passer directement aux questions.
    Très bien. Nous passons donc aux questions.
    Les six premières minutes sont pour M. Vidal. Ensuite, nous avons Mme Khera, Mme Michaud et Mme Qaqqaq.
    Monsieur Vidal.
     Je suis reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée de me joindre à votre comité aujourd'hui et je remercie mes collègues de m'avoir permis d'être ici.
     Je tiens également à remercier les témoins. C'est un plaisir de vous accueillir, et c'est un plaisir d'entendre vos témoignages et vos observations sur cette question très importante.
    Vous avez tous parlé de l'importance des relations. Au moins deux d'entre vous ont parlé de remplacer « force » et autres termes du genre par « service ». Je comprends cela.
    Je suis un ancien maire d'une petite ville de la Saskatchewan; je peux dire que nous étions dans une situation unique sur le plan des services de police: nous avions un détachement partagé. Nous partagions le service de police de notre petite ville avec la municipalité rurale voisine et deux collectivités des Premières Nations. Il y avait une très évidente corrélation entre la relation de nos partenaires communautaires avec notre commandant et la nature de la relation avec le service en général.
    L'un des faits marquants de notre petite communauté, et de sa relation avec la GRC, est le suivant: à l'occasion d'un exercice de planification du rendement annuel, nous avons demandé à la GRC d'accorder la priorité à la promotion des relations et à la promotion des actions positives de la GRC. Nous avons constaté que cela s'était avéré très efficace pour les partenaires communautaires de la ville, de la municipalité rurale, des communautés des Premières Nations et de la GRC, car c'est devenu un exercice positif d'établissement de relations.
    J'aimerais vous donner à tous l'occasion de vous exprimer à ce sujet, si vous le pouvez. La question s'adresse à chacun de vous: pourriez-vous proposer, ou discuter, de pratiques exemplaires ou d'expériences que vous avez vécues dans vos relations passées avec la GRC et qui pourraient nous servir de leçon à tous, partout au pays, pour améliorer cette relation, dans l'esprit de servir plutôt que de jouer le rôle d'une force?
    La question s'adresse-t-elle d'abord au chef Teegee?
    Au chef Teggee et au président Obel... J'aimerais que tous les témoins aient l'occasion d'y répondre, si possible.
    D'accord.
    J'aimerais simplement rappeler aux témoins de faire leurs commentaires par l'intermédiaire de la présidence.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de cette question, monsieur Vidal. Je pense que l'exemple que vous avez donné d'une petite collectivité est un exemple parfait de la façon dont la GRC doit aborder les questions de gouvernance.
    Pour ma collectivité des Premières Nations... Je suis membre de la Première Nation de Takla Lake. Nous avons trois agents de police sur notre territoire. Les relations avec notre chef, notre conseil et notre communauté sont généralement bonnes, notamment pour l'intégration de certains policiers dans notre système de potlatch et l'adoption de certains d'entre eux dans le clan du Caribou.
    L'autre exemple que je peux donner est celui de la région de Prince George, où nous avons établi de bonnes relations avec les surintendants supérieurs. Essentiellement, tout a commencé avec Mme Brenda Butterworth-Carr, une femme de descendance autochtone. Elle a travaillé à Ottawa pendant un certain temps, et elle travaille maintenant pour le gouvernement provincial dans le domaine de l'application de la loi.
    J'ai toujours de bonnes relations avec les surintendants, mais même si nous avons de bonnes relations avec de nombreuses personnalités politiques de très haut niveau, cela ne se reflète pas dans les relations avec les policiers sur le terrain. À Prince George, les taux d'incarcération et de mortalité demeurent élevés. Cela remonte à M. Clayton Willey, un homme de la Nation Wet'suwet'en, en 2003, et à Dale Culver, en 2017. Plus récemment, en avril, il y a eu mon cousin, M. Everett Riley Patrick.
    Nous pourrions avoir une excellente relation au plus haut niveau, mais si cela ne se traduit pas sur le terrain, le changement dont nous avons besoin ne se concrétisera pas. La plupart du temps, c'est dans les grandes municipalités comme Winnipeg qu'ont lieu des décès. Nous avons de nombreux autres rapports, comme l'enquête sur M. Frank Paul, à Vancouver. Il y a 30 ans, pendant la crise d'Oka, dans cette municipalité... C'est l'utilisation de la force par bon nombre de policiers qui a entraîné la militarisation du conflit et mené à la crise d'Oka.
    Comme vous pouvez le constater, nous pouvons entretenir de bonnes relations à haut niveau, mais si elles ne se traduisent pas à sur le terrain, les difficultés seront nombreuses.
    Merci.
(1135)
    Il vous reste environ une minute.
    Le président Obed pourrait-il répondre?
    Merci.
    Dans ma propre expérience professionnelle à la société Nunavut Tunngavik, j'ai participé à l'élaboration de la Stratégie de prévention du suicide du Nunavut. À l'époque, le commandant de la Division V, M. Steve McVarnock, était présent. La GRC a été un partenaire pour la création de la Stratégie de prévention du suicide du Nunavut. C'était l'une des rares expériences positives que j'ai eues avec la GRC en tant qu'institution. J'étais stupéfait de voir à quel point notre relation était différente, comparativement à la plupart des autres interactions.
     J'aimerais aussi attirer votre attention sur les rapports du service de police Nishnawbe-Aski et le contraste saisissant entre ses états de service auprès des Premières Nations en Ontario [Difficultés techniques] communauté d'après les résultats et les statistiques présentés ici aujourd'hui.
    Monsieur Vidal et monsieur Obed, je vous remercie.
    Les six prochaines minutes sont à Mme Khera.
    Merci à tous d'être avec nous et merci de vos témoignages.
     Je vais commencer par le chef Teegee. J'ai lu une de vos entrevues. Vous avez déclaré — et à juste titre — que si cela n'en tenait qu'à vous, une refonte complète du système de police — tant la GRC que les services de police municipaux — serait nécessaire. Je suis d'accord avec vous. Je pense que les chiffres, les histoires et votre témoignage sont très évocateurs, qu'on parle du nombre de Canadiens autochtones, noirs et racialisés en détention ou du recours à la force, y compris l’usage létal de la force, au sein des services de police. C'est précisément le genre de questions que nous examinons dans le cadre de cette étude.
    Dans la lutte contre le racisme systémique, quels sont les problèmes les plus urgents, à votre avis? Quelles mesures précises doivent être prises? Pourriez-vous nous dire quelle est la première chose à faire et quel aspect doit être prioritaire?
     Je vais commencer par vous, chef Teegee, puis je demanderai peut-être aux autres de faire aussi un bref commentaire.
    Merci.
    Je vous remercie de la question.
    Actuellement, c'est dans les grandes municipalités qu'une réforme du système de police s'impose. Voilà l'aide dont beaucoup d'organisations sociales ont besoin. Un bon exemple, pour prendre le cas de Winnipeg, ce sont les quartiers pauvres de la ville. À Vancouver, c'est le Downtown Eastside. Beaucoup de ces endroits ont besoin de soutien social pour les sans-abri. Ils ont besoin d'aide en toxicomanie et en santé mentale. Quant au maintien de l'ordre, de nombreux services de police — services policiers municipaux ou la GRC — n'ont pas la formation requise pour affronter ces situations et ne sont pas formés pour faire des vérifications du bien-être.
    En ce moment, lorsqu'il est question d'une réforme du système de police, il faut certainement la relation avec les Premières Nations. Nous avons besoin de changements systémiques assortis d'une réelle reconnaissance de la nécessité de respecter non seulement les lois du Canada colonial, mais aussi les lois des peuples autochtones et les lois de notre peuple. La mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones doit se faire dans le cadre de politiques comme la Loi sur la GRC ou la Police Act. Je pense que cela peut être modifié immédiatement. Le ministre Lametti peut modifier les peines minimales.
    Je pense que ces choses peuvent être changées dès maintenant, mais le changement systémique et la réforme... Je pense que ce sera, peut-être, un long cheminement. Il va sans dire que nous devons aussi nous tourner vers d'autres organismes et d'autres Premières Nations, Inuits et Métis pour obtenir leur participation et leurs observations à cet égard.
    Merci.
(1140)
    Merci.
    Voulez-vous faire un commentaire, monsieur Obed?
    Très brièvement, je dirais que ce qu'on voit, c'est une prestation de services de police fondée sur des stéréotypes. Étant donné l'absence de liens entre la GRC et la communauté, les Inuits ne sont pas considérés comme des personnes. Ils sont plutôt perçus selon diverses idées négatives que peut avoir la société canadienne en général lorsqu'il est question des Inuits et de la nature des interventions policières auprès d'eux. En réalité, la GRC est là pour travailler avec la communauté à l'application d'un ensemble d'ordres et de contrôles communs qui fait partie de notre société, mais qui ne fait pas nécessairement partie de ce que fait la GRC ou non.
    Ce qu'on voit, c'est le résultat: des interventions policières soit excessives, soit insuffisantes, et le recours à la force excessive. En outre, on constate, par rapport aux femmes et aux filles autochtones disparues et assassinées, que la GRC en fait trop peu pour assurer la sécurité des femmes et veiller à ce que les dossiers, une fois ouverts, soient traités adéquatement au fil du temps.
    Cela découle de l'absence totale de relation. En outre, nous n'exerçons pas non plus un contrôle qui nous est propre sur les services de police dans nos communautés. Voilà ce qui doit changer.
    Il vous reste une minute environ.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Kotierk.
    Vous avez aussi mentionné en entrevue tout récemment, je crois, que les dirigeants du Nunavut ont demandé à la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC de procéder à un examen systémique complet des services de police dans le territoire après la révélation de 30 cas, je crois, d'allégations de brutalité et d'inconduite policières. Je sais que ces allégations viennent de femmes inuites qui ont porté plainte contre la GRC pour ses interventions lors d'appels liés à des cas de violence familiale et d'agression sexuelle, et pour le traitement des détenues en prison.
    Pouvez-vous nous parler brièvement de la situation et, peut-être, nous dire où en sont la demande et l'examen?
    C'est une question très importante, mais elle vous a malheureusement laissé seulement 15 secondes environ pour y répondre. Pourriez-vous tenter une réponse, s'il vous plaît?
    Très brièvement, je dirais simplement que le gouvernement du Nunavut a indiqué qu'il envisage un modèle de surveillance, ce qui est encourageant. Par ailleurs — ce qui est moins encourageant —, c'est que la ministre de la Justice du gouvernement du Nunavut a déclaré qu'il n'y a pas de racisme systémique au Nunavut. Je ne suis pas d'accord. Il est très intéressant de voir les messages contradictoires qui émanent du gouvernement du Nunavut; on verra ce que cela donnera.
    Merci.
    Je ne suis pas certain de ce qui s'est passé, mais il semble que je suis devant un écran vide. Je vais supposer que je suis le seul dans cette situation; j'invite Mme Michaud à commencer. Vous avez six minutes.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs témoignages.
    Des chiffres nous montrent que peu de personnes issues des communautés autochtones et inuites sont dans les services de police. Alors, une des solutions serait de faire en sorte qu'il y en ait davantage. Vous avez un peu abordé la question, monsieur Obed. Des initiatives ont été mises en place, notamment par la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC, comme le Programme de formation des cadets inuits pour les jeunes diplômés du secondaire qui souhaiteraient faire carrière dans la police.
    Cependant, il semble y avoir une espèce de préjugé selon lequel un jeune Autochtone ou Inuit trahirait, en quelque sorte, sa communauté en s'enrôlant dans la police à cause du passé colonial de la police. C'est ce que nous avons entendu de la part des communautés elles-mêmes.
    Est-ce quelque chose que vous voyez dans la communauté? Cela met-il un frein à la volonté des gens de s'engager dans la police?

[Traduction]

    Je vais juste donner quelques précisions sur les statistiques telles que nous les connaissons.
    En septembre 2019, trois des 131 agents de la GRC au Nunavut étaient des Inuits. À la même période, au Nunavik, seulement trois officiers sur 70 étaient des Inuits, nous n'avons pas de données pour les deux autres régions. Cela vous montre à quel point les Inuits sont peu nombreux dans la GRC.
    J'ai connu beaucoup d'amis qui ont pensé à devenir des agents de la GRC ou qui l'ont été à un moment donné. Je sais donc qu'il est vraiment difficile d'être agent de police dans sa propre communauté, surtout si l'on considère le fondement des règles qui doivent être suivies. En outre, le véritable défi est lié à l'effectif itinérant, car selon la structure de la GRC, les gens sont appelés à déplacer. Pour beaucoup d'Inuits de la région, ce n'est pas un mode de vie attrayant, surtout s'ils souhaitent rester dans leur collectivité.
    Il y a divers obstacles évidents à la création d'un effectif policier plus important. De toute évidence, il est très difficile pour un Inuit d'être agent de la GRC chez lui ou dans l'Inuit Nunangat. Il y a beaucoup de défis à relever. J'ai beaucoup d'empathie pour ceux qui veulent devenir et qui sont devenus des agents de la GRC au service de leur peuple.
(1145)

[Français]

     Je vous remercie.
    Je comprends de vos propos qu'il y a beaucoup d'obstacles. On parle d'un manque de confiance des communautés à l'égard des agents de la GRC. Qu'est-ce qui pourrait être fait, concrètement, pour inciter les gens à s'enrôler? Cela pourrait être une solution.

[Traduction]

    Je suis désolé. Si c'était une question complémentaire qui m'était adressée directement, je n'ai pas entendu l'interprétation.
    Oui, je pense que vous avez raison. Je ne l'ai pas entendue non plus.
    Madame Michaud, pourriez-vous...

[Français]

    J'ai pourtant activé le canal français. Est-ce que cela fonctionne maintenant?

[Traduction]

    Oui, cela fonctionne.
    Veuillez répéter la question, s'il vous plaît.

[Français]

    Monsieur Obed, vous dites qu'il y a beaucoup d'obstacles empêchant les jeunes de s'enrôler, que c'est difficile pour eux de le faire. On parle d'un manque de confiance général des communautés à l'égard des agents de la GRC ou des services de police.
    Que pourrait-on faire, concrètement, pour éliminer ces obstacles et faciliter le processus?

[Traduction]

    Cela nous ramène à ma première recommandation: la tenue d'un examen exhaustif et indépendant qui tient aussi compte de la gouvernance inuite et du rôle central des Inuits dans les services de police dans l'Inuit Nunangat serait un excellent point de départ. Cela pourrait comprendre la prise en compte explicite de la question des ressources humaines, mais aussi un examen approfondi de la relation nécessaire. Il faut transformer le lien entre la GRC et la communauté. Je pense qu'au fil de cette transformation, plus d'Inuits songeront à faire carrière à la GRC, non seulement à titre d'agents, mais aussi dans des postes administratifs et autres [Difficultés techniques].

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Vous avez aussi parlé d'agents qui utilisent une caméra d'intervention. Le ministre Blair a manifesté une certaine ouverture à l'idée qu'on les rende plus accessibles aux communautés. Pensez-vous que ce serait une bonne chose? De quelle façon ces informations pourraient-elles être accessibles aux communautés?

[Traduction]

    Voulez-vous répondre à cette question, présidente Kotierk?
    Allez-y, madame Kotierk.
    Est-ce pour moi?
    Oui.
    Je sais qu'au Nunavik, dans le Nord-du-Québec, la police utilise actuellement des caméras corporelles. C'est un outil qui a été demandé au Nunavut. Je pense que ce serait très utile, mais je ne pense pas que ce soit la seule façon d'améliorer les rapports entre la GRC et les Inuits. En fait, j'aimerais simplement souligner que le Nunavut est un cas assez unique parmi les diverses administrations: c'est la seule administration avec une population autochtone majoritaire dont la langue première n'est pas l'une des deux langues officielles du Canada. Il est donc extrêmement important que les policiers et leurs employés soient capables de comprendre la culture inuite et de comprendre l'inuktitut.
(1150)
    Merci.
    Je pense qu'au début, à son arrivée sur nos terres ancestrales, la GRC a beaucoup misé sur des gendarmes spéciaux inuits qui pouvaient servir à la fois d'interprètes linguistiques et culturels.
    Nous devons en rester là pour la question de Mme Michaud.
    Encore une fois, j'invite les témoins à regarder de temps à autre dans ma direction. Je tenterai de vous faire signe pour indiquer s'il reste du temps ou non.
    Pour la prochaine intervention de six minutes, nous passons à Mme Qaqqaq.
    Matna, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici pour partager leurs excellentes connaissances.
     Je tiens à remercier l'équipe informatique et les interprètes de nous aider à rester sur la bonne voie.
    Je tiens également à souligner qu'il s'agit de la présidente Kotierk et du président Obed. Son titre est présidente, et M. Obed est président.
     Mes questions s'adressent aux deux. Je vais commencer par la présidente Kotierk.
     Pensez-vous que la relation entre la GRC et les Inuits ait déjà été bonne?
    Je pense qu'elle a toujours été difficile.
    Pensez-vous qu'il y a du racisme systémique au sein de la GRC?
    Le racisme systémique est omniprésent au Nunavut, et il ne se limite pas seulement à la GRC.
    Merci.
    Aluki, présidente Kotierk, pouvez-vous nous parler du rôle de la GRC dans le symbole que peuvent représenter cette profession et de cet uniforme aux yeux des Inuits?
    J'ai brièvement évoqué le contexte historique de la relation. Pour moi, la GRC n'est qu'un aspect de l'ensemble du système judiciaire. Nous concentrer uniquement sur la GRC ne suffit pas. Il convient d'examiner d'une manière holistique nos approches à l'égard des maux sociaux de notre communauté, à la manière des Inuits, qui est axée sur la personne et qui vise à satisfaire à ses besoins, notamment pour les problèmes de santé mentale. Je pense que ce serait quelque chose qu'il serait utile d'examiner.
    Merci, présidente Kotierk.
    En une minute environ, pouvez-vous parler un peu des aspects historiques que vous avez abordés, comme certains éléments que les membres pourraient s'attendre à trouver dans la Commission de vérité du Qikiqtani, par exemple?
    Qujannamiik.
    Je pense que la relation entre les Inuits du Nunavut et la GRC est très complexe; la GRC dépendait beaucoup des Inuits, car les agents ne pouvaient pas vivre dans notre territoire ancestral qu'est l'Arctique, ne savaient pas quoi manger, ignoraient comment se tenir au chaud et ne connaissaient pas les moyens de transport. Les Inuits étaient les experts et étaient donc très utiles. En même temps, ils jouaient un rôle très autoritaire et étaient très intimidants. Ainsi, de nombreux Inuits comme M. John Amagoalik, dont j'ai lu la citation, étaient intimidés et avaient le sentiment de n'avoir d'autre choix que de respecter l'autorité de la GRC.
    Excellent. Matna, présidente Kotierk.
    Président Obed, les Inuits ne font pas nécessairement souvent les manchettes nationales, et il y a eu la discussion, en particulier dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, que les vies des Autochtones sont importantes. Nous avons vu ce genre de choses partout au pays. Pouvez-vous nous donner des exemples précis? Je vais citer un exemple pour commencer.
    Cet exemple, c'est qu'une vidéo faite à Kinngait a circulé et a attiré l'attention à l'échelle nationale. Pourriez-vous nous donner des exemples plus récents d'interactions entre la GRC et les Inuits qui se sont soldées par un décès?
(1155)
    Oui. Très récemment, au Nunavut, un homme a été tué par balle chez lui, devant sa conjointe de fait. Il était toujours menotté après qu'on ait tiré sur lui et il n'a pas reçu de soins médicaux immédiatement. Voilà le genre d'histoires que nous entendons. Des Inuits non armés, qui ne possèdent pas d'arme à feu, sont tués par des agents de la GRC. Ces récits me viennent parfois d'amis et de membres de la famille. Il arrive que des Inuits communiquent avec moi pour me parler des choses qu'ils veulent voir changer.
    Il est formidable de constater que les choses que nous vivons au quotidien, en particulier la violence que les Inuits ont vécue, font l'objet de discussions partout au pays. Il convient bien entendu de prendre en compte tous les facteurs qui mènent à cela, mais il ne fait aucun doute que le racisme tue. Les malentendus, les différences culturelles ou le manque de respect sont des causes sous-jacentes, mais en fin de compte, il m'est impossible d'accepter de vivre dans un pays où un volet des services gouvernementaux se trouve à tuer nos gens.
    Matna, président Obed. Il me reste environ 30 secondes avant le prochain intervenant.
    Nous parlons de mettre fin au financement de la police, et je pense que cela fait peur à certains. Au lieu d'aborder la question sous cet angle, dans quels autres services et ressources devrions-nous songer à investir pour les Inuits?
    Nous devons habiliter les communautés. Nous devons mettre fin au racisme systémique, mais cela commence aussi par l'iniquité sociale. Nous devons veiller à entretenir, au sein de nos communautés, des relations axées sur le respect de nos traditions, de nos lois et de notre façon d'interagir dans notre société. C'est le point de départ.
    Merci beaucoup.
    Nous passons aux interventions de trois minutes, en commençant par M. Berthold.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je vais être bref parce que, trois minutes, c'est très court.
    Chef Teegee, pouvez-vous nous parler du taux de rétention? Est-ce qu'il y a des statistiques qui existent sur le temps moyen pendant lequel les policiers de la GRC demeurent dans les communautés? Je suis persuadé que cela influe sur les relations avec les gens de la communauté.
    Est-ce que vous avez accès à ces chiffres, et est-ce vrai que les agents ne font que passer?

[Traduction]

    Non, je n'ai aucune statistique sur la durée de leur séjour. À titre d'exemple, dans ma collectivité des Premières Nations, nous accueillons des agents de police nouvellement formés. Je crois qu'ils sont tenus de rester pendant deux ans. Certains restent plus longtemps parce qu'ils aiment la communauté, mais je n'ai pas de statistiques à ce sujet. Je suis désolé.

[Français]

    Monsieur Obed, qu'en est-il de votre côté?

[Traduction]

    Je n'ai pas d'autres statistiques que celles que j'ai présentées concernant la violence policière. Je pourrais vous revenir là-dessus. Quant aux statistiques que nous avons sur la rétention et la durée du séjour des agents de la GRC, je suis certain que ces informations sont disponibles. Je m'engage à faire un suivi auprès du Comité pour vous les fournir.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Chef Teegee, selon le professeur Leuprecht du Collège militaire royal du Canada, la commissaire de la GRC, Mme Lucki, a plus de 180 rapports de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC qui attendent d'être traités sur son bureau.
    Quelles sont vos attentes concernant ces plaintes non traitées?
(1200)

[Traduction]

    Je pense que ces plaintes doivent être traitées, et je suis convaincu qu'il y a beaucoup plus de cas que cela, car très franchement, je sais qu'il y a des plaintes à la grandeur du pays. Je pense vraiment que cela témoigne du racisme qui existe dans la police et aussi au pays en général.
    Dans de nombreuses organisations, ici en Colombie-Britannique, nous constatons que ce phénomène est présent dans le système de santé, et c'est un problème qu'il faut vraiment régler.
    Merci, monsieur Berthold. Il vous reste seulement 20 secondes.
    Cela dit, nous passons...

[Français]

    Monsieur Obed, est-ce que vous trouvez aussi qu'on devrait agir plus rapidement?

[Traduction]

    Je suis certain que M. Obed pense que nous devrions agir beaucoup plus rapidement, mais il ne sera malheureusement pas en mesure de répondre à cette question. Je suis sûr qu'il pourra intégrer cela à une autre réponse.
    Sur ce, nous passons à M. Anandasangaree, pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Cette question s'adresse aux trois témoins, qui ont tous parlé du besoin d'autodétermination en matière de services de police. Je crois que le chef Teegee parlait de l'autodétermination dans le cadre de services de police dirigés par les Premières Nations, et le président Obed a parlé de la GRC et de la nécessité d'un contrôle propre aux Inuits.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là, tous les deux? Je sais que le temps est très limité. Vous pourriez vous limiter à une minute chacun.
    Je pense que l'objectif est essentiellement de faire valoir nos droits de Premières Nations énoncés dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, notre souveraineté et notre autodétermination, par rapport à notre vision sur... Je suppose que le mot colonial est « maintien de l'ordre ». Pour les Premières Nations, il s'agit plutôt de faire respecter ce que nous considérons comme les lois de la grande maison ou de la maison du potlatch.
    Chacune des quatre régions de l'Inuit Nunangat suivra sa propre voie quant à l'autodétermination et au maintien de l'ordre. Certaines de nos ententes sur les revendications territoriales comprennent des annexes sur l'autonomie gouvernementale qui permettent aux Inuits d'assurer eux-mêmes la prestation des services de police, et d'autres non, mais nous devons sans contredit avoir le droit d'en discuter et avoir la possibilité de participer aux négociations. Nous nous écarterons du discours selon lequel la GRC doit faire ceci ou cela, ou que le Canada doit faire ceci ou cela, et nous tendrons vers une situation dans laquelle nos droits seront respectés et dans laquelle nous exercerons notre autodétermination en matière de services de police.
    Je pense que mon temps est écoulé.
    Il vous reste 45 secondes.
    Présidente Kotierk, pouvez-vous aussi faire un commentaire à ce sujet?
    Comme je l'ai dit au sujet des 25 communautés du Nunavut, je pense qu'il est possible d'inciter le corps policier à collaborer avec la communauté et à employer des gens, à titre d'agents ou non, comme les gendarmes spéciaux qu'on avait autrefois. Je pense que cela contribuerait à enrichir la relation et à renforcer la confiance entre les Inuits du Nunavut et la GRC.
    Merci, monsieur Anandasangaree.
    Monsieur Uppal, vous avez trois minutes.
    Que pouvons-nous faire de plus pour attirer un plus grand nombre d'Autochtones dans les forces de police elles-mêmes, qu'il s'agisse de services de police autodéterminés ou de la GRC?
    Je pourrais peut-être commencer.
    Étant donné que la GRC est, dans bien des cas, un prolongement du gouvernement fédéral, les diverses exigences relatives aux ressources humaines et à la formation deviennent des obstacles qui empêchent les Inuits de devenir des agents de la GRC ou de travailler dans la structure administrative de la GRC elle-même.
    Notre langue, l'inuktitut, n'est valorisée dans aucun des ensembles de compétences des ressources humaines qui sont requises ou valorisées à la GRC. De plus, outre la langue et notre proximité avec nos communautés, nos autres compétences n'ont aucune incidence sur la formation, le recrutement et la rétention, ou la capacité à réussir en tant qu'agent, autrement que pour affronter la dure réalité quotidienne d'un Inuit qui est agent de la GRC dans une communauté inuite. C'est important, mais pas nécessairement dans un contexte de ressources humaines.
     Il faut que cela change. Nous devons revoir notre façon de penser concernant les qualités des personnes aptes à être des agents de la GRC dans nos collectivités.
(1205)
    Globalement, en général, il nous faut nos propres corps policiers. Il y en a un ici, en Colombie-Britannique, et beaucoup d'autres en Ontario et dans d'autres provinces.
    Concernant la participation et le maintien au sein de la GRC, il y a un recours collectif en instance relativement à des actes racistes et sexistes non seulement à l'égard de femmes autochtones, mais aussi des peuples autochtones en général. Je pense que c'est extrêmement révélateur de l'organisation elle-même. Donc, pour ce qui est de la rétention, la situation doit absolument changer pour régler le problème de racisme qui existe à la GRC.
     De plus, dans la plupart des cas, les gens des Premières Nations qui veulent passer les tests et s'engager dans la GRC, sont toujours confrontés à des obstacles, de sorte qu'il leur est difficile d'entrer dans la GRC.
    Merci, monsieur Uppal.
    Madame Damoff, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins. Je tiens à reconnaître que je me trouve aujourd'hui sur le territoire non cédé du peuple algonquin.
    Président Obed, je tiens tout d'abord à vous remercier de votre témoignage très réfléchi, comme toujours. Vous êtes très bien informé, mais aussi très réfléchi dans la manière dont vous vous exprimez.
    Nous étudions les services de police des Premières Nations, et j'aimerais avoir votre avis sur l'inclusion des Inuits dans cette étude. Il n'existe actuellement aucun accord avec le Nunavut pour doter le territoire de son propre service de police. Plutôt que de compter sur la GRC, vous auriez votre propre service de police. Je me demande ce que vous en pensez.
    Je n'ai pas d'opinion précise, car le conseil d'administration de l'ITK n'a pas examiné la question. J'aimerais laisser la présidente Kotierk répondre à cette question. Toutefois, je dirais qu'il faut en effet étudier, aux échelons fédéraux en général, la question d'un service de police inuit, en fonction des distinctions, et revoir la prestation des services de police dans ces collectivités.
    Qujannamiik, Natan.
    Nous savons que le mode actuel de prestation des services de police ne fonctionne pas. Le recours à la force excessive et le nombre d'Inuits qui meurent aux mains de la GRC sont d'importantes préoccupations. Je pense qu'il serait très utile d'examiner comment faire les choses différemment.
    Qujannamiik.
    Ma prochaine question est pour vous, chef Teegee. La formation est l'une de mes préoccupations alors que nous envisageons un nouveau modèle. Former des agents selon l'ancien modèle ne donnera pas de nouveaux résultats. J'aimerais avoir vos observations sur la formation pour les services de police des Premières Nations, et savoir si vous considérez qu'il serait pertinent de créer une école de police autochtone distincte.
    Je ne sais pas s'il est nécessaire d'avoir une école distincte. Cela dépend de la situation; cela pourrait être pertinent s'il était nécessaire d'offrir une formation pour un déploiement dans les régions très isolées et rurales, mais je pense que dans l'ensemble, c'est en milieu urbain qu'on recense les plus hauts taux d'incarcération et de décès chez les Premières Nations, les Inuits et les Métis. C'est là que les agents ont vraiment besoin d'une formation en santé mentale et en toxicomanie, et peut-être aussi d'une formation d'un point de vue autochtone, afin qu'ils développent une certaine empathie à l'égard des Autochtones, pour qu'ils comprennent notre vécu et ce que nous subissons depuis la colonisation.
(1210)
    Merci.
    Madame Damoff, conformément à la motion, il y a encore...
    Je demande l'indulgence de notre personnel; nous allons poursuivre pour encore trois minutes. Nous aurons une minute et demie pour Mme Michaud et une minute et demie pour Mme Qaqqaq.
    Allez-y, madame Michaud.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Quand j'entends des témoignages comme celui où il était question d'un homme qui a été menotté et blessé par balle, il me semble évident que la GRC ou ses agents n'appliquent pas le Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents, selon lequel le recours à la force doit correspondre au degré de résistance de la personne. On sait que des rapports concernant les recours à la force sont remplis. En d'autres mots, il y a de la paperasse qui est remplie après ce genre de situation. Par la suite, il semble que rien d'autre ne soit fait.
    Chef Teegee, j'aimerais avoir vos commentaires sur le suivi qui devrait être fait au sein même des services de police pour assurer que de telles situations extrêmes ne se reproduisent pas. Vous avez notamment parlé de reddition de comptes.

[Traduction]

    Un examen indépendant est absolument requis. Il faut un examen réellement indépendant, pas nécessairement un examen des services policiers par la police, mais un examen civil sur les agissements de nombreux policiers. De manière générale, je suppose qu'il faut aussi revoir la formation, notamment les façons d'aborder certaines situations liées aux dépendances et peut-être à la santé mentale.
    Merci, madame Michaud.
    Allez-y, madame Qaqqaq.
    Merci, monsieur le président. Je tiens à vous féliciter. Vous avez remarquablement bien géré le temps aujourd'hui. Je vous en suis très reconnaissante.
    En guise de contexte, pour le reste du Comité, lorsque nous parlons du Nunavut, nous parlons d'une population à peine plus importante que celle de Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Nous savons que depuis 2010 au Nunavut, le taux de décès liés à la police est 14,35 fois plus élevé qu'en Ontario. Nous savons que le taux de suicide est neuf fois plus élevé. Nous savons que dans le Nord, les femmes subissent trois fois plus de violence que celles du reste du Canada.
    Ma question s'adresse à la présidente Kotierk.
    En juin, nous avons vu que ce gouvernement a reporté sa réponse au rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Selon vous, qu'est-ce que cela révèle sur la nature de la relation du gouvernement fédéral avec les Inuits et les communautés inuites majoritaires, sur la valeur de cette relation et la valeur de la vie des Inuits?
    Matna.
    Je pense que le message que cela envoie, très publiquement, c'est que ce n'est pas une priorité, malgré l'enquête très publique et les discours creux sur son importance et sur le fait que la relation avec les peuples autochtones est plus importante que d'autres.
    Cela me fait penser à un document récent que j'ai lu ici, au Nunavut, dans lequel on décrit des cas semblables de femmes inuites qui appellent la GRC pour obtenir de l'aide, dans une situation de violence, et que la GRC ne se présente pas. On a l'impression que toutes ces informations sont maintenant accessibles au public, mais que ce n'est pas assez important pour qu'on agisse.
    C'est là-dessus que se termine cette partie de la séance.
    Je tiens à remercier les députés et les témoins d'avoir fait preuve d'indulgence à mon égard, étant donné mon incompétence. Mes pauvres collègues du Comité y seront exposés davantage au fil du temps.
    Président Obed, présidente Kotierk, chef Teegee, votre contribution est un excellent point de départ pour cette étude. Au nom du Comité, je tiens à vous remercier des efforts que vous avez déployés pour être ici et pour présenter vos observations.
    On m'informe que je dois dire que la séance est suspendue. Je suppose que nous ne partons pas virtuellement, mais que nous attendons en ligne pendant que nous nous réorganisons pour le prochain groupe de témoins.
    Sur ce, la séance est suspendue. Merci.
(1215)

(1220)
    Nous accueillons notre prochain groupe de témoins. Je note qu'il est 12 h 20; nous poursuivrons donc jusqu'à 13 h 20, ce qui fera une heure complète.
    Nous accueillons le sénateur White. Nous accueillons aussi M. Wright et M. Benson Cowan.
    Comme il n'y a pas d'ordre particulier, à moins qu'il y ait eu un accord dont je ne suis pas au courant, je vais suivre l'ordre dans lequel vous êtes inscrits sur la liste des témoins.
     Le sénateur White dispose de sept minutes.
    Merci beaucoup. Bon après-midi.
    Je tiens à vous remercier de m'avoir invité au Comité permanent de la sécurité publique et nationale, qui étudie le racisme systémique dans les services de police au Canada.
    Si vous me le permettez, je vais me présenter, ce qui aidera les membres à mieux cibler leurs questions.
    J'ai passé près de 25 ans dans la Gendarmerie royale du Canada. J'ai travaillé à Terre-Neuve-et-Labrador, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Yukon, en Nouvelle-Écosse et ici, à Ottawa, à la Direction générale. En presque 25 ans, j'ai passé 19 ans dans le Nord, soit dans chacun des trois territoires et dans le nord du Labrador. J'ai quitté la GRC alors que j'étais commissaire adjoint...
     Un député: Je n'entends rien du tout.
    Nous avons des difficultés techniques.
    Veuillez continuer.
    J'ai quitté la GRC en 2005; j'étais alors commissaire adjoint. Après ma carrière au sein de la GRC...
    Je suis désolé, nous semblons avoir d'autres difficultés techniques.
    Si vous voulez recommencer, vous êtes libre de le faire.
    Après ma carrière à la GRC, j'ai passé sept ans comme chef de police, deux ans dans la région de Durham, puis cinq ans ici, à Ottawa. Pour ce qui est de mes études, j'ai un diplôme de premier cycle de l'Université Acadia, une maîtrise de l'Université Royal Roads et un doctorat de l'Australian Graduate School of Policing and Security de la Charles Sturt University. J'ai fait toutes mes études pendant que je travaillais à plein temps dans mes fonctions dans la police.
    Après ma carrière dans la police, j'ai été nommé au Sénat. J'ai continué à enseigner dans diverses universités au Canada et à l'étranger. En outre, je fais des recherches, souvent sur les questions qui ont une incidence sur notre système de justice pénale et, bien sûr, sur les services de police eux-mêmes.
    Par rapport au travail que vous avez entrepris, je voulais parler de quelques aspects qui, selon moi, sont importants pour cette discussion, notamment la formation et le recrutement, l'éducation et, bien sûr, l'argument le plus récent en faveur de l'élimination du financement de la police. Pour terminer, je présenterai mon point de vue sur le racisme systémique dans la police.
    Le Comité voudra peut-être examiner le rapport du juge Goudge de 2014 intitulé « Le maintien de l’ordre au Canada au XXIe siècle », même s'il date déjà, car on y trouve de bonnes pistes de réflexion que vous pourriez examiner.
    Concernant le recrutement et la formation, je pense que ces deux aspects doivent faire l'objet d'un examen national. Aujourd'hui, à mon avis, la prestation des services de police ne se fait plus selon des normes établies à l'échelle nationale, mais plutôt en fonction du mandat des provinces et des territoires. Par conséquent, il est difficile d'y adhérer complètement.
    Le Canada compte environ 180 services de police, ce qui représente des dépenses de quelque 15 milliards de dollars. Les écarts relativement à la formation et au recrutement sont remarquables. Je dirais que c'est un aspect pour lequel le gouvernement fédéral pourrait tracer une voie à suivre en établissant des normes nationales en matière de maintien de l'ordre, tant pour les agents que pour les services de police. J'ai déjà rencontré les chefs de police des Premières Nations; ils ont soulevé des préoccupations semblables et déclaré qu'ils appuieraient aussi un mouvement en ce sens.
    D'autres pays l'ont fait en établissant un modèle de collège de services de police — à ne pas confondre avec une école de police —, notamment le Royaume-Uni, avec la création du College of Policing, un organisme professionnel pour tous ceux qui travaillent dans les services de police en Angleterre et au pays de Galles. Le collège vise à offrir à ceux qui travaillent dans les services de police les compétences et les connaissances nécessaires pour prévenir la criminalité, protéger le public et gagner la confiance du public.
    Ses fonctions comprennent trois principaux aspects: la connaissance, comme le développement de la recherche et des infrastructures pour améliorer les preuves sur ce qui fonctionne; l'éducation en appui au perfectionnement professionnel du personnel du maintien de l'ordre, y compris l'établissement d'exigences en matière d'éducation; enfin, l'établissement de normes en matière de service de police fondées sur les meilleures données disponibles sur ce qui fonctionne, pour les forces et les membres.
    J'avance qu'un modèle semblable devrait être créé au Canada. On invoquera peut-être des questions de compétences, et certaines administrations pourraient faire valoir qu'elles comptent se retirer. Je dirais que ce serait à leurs risques et périls.
    En l'absence de ce modèle, on constate au pays d'importantes disparités tant du point de vue des normes de recrutement que des normes de formation. En Ontario, il faut 13 semaines pour compléter la formation de base; à la GRC, c'est six mois, et dans certaines autres administrations, c'est même plus long. La dure réalité, c'est que les défis auxquels les services de police sont confrontés ont considérablement changé, et je ne suis pas certain que nous soyons restés à jour.
    La formation des policiers est essentielle au perfectionnement de l'agent et de l'organisation en général. Les recherches menées au Royaume-Uni et en Australie montrent l'importance non seulement de la formation continue des agents de police, mais aussi de l'éducation permanente.
     Je n'irai pas jusqu'à dire, comme d'autres pourraient le faire, que les policiers doivent avoir un diplôme universitaire pour commencer leur carrière, mais je crois fermement que la formation doit être un pilier de leur carrière et qu'elle doit être offerte de manière continue pendant leur carrière. Certains pays exigent qu'un policier obtienne un diplôme de premier cycle pour être considéré comme totalement agréé. Ailleurs, la formation doit être suivie intégralement avant l'entrée au sein du service de police, tandis que d'autres exigent une formation continue tout au long de la carrière. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il sera important de mettre l'accent sur l'éducation dans notre démarche.
    Le dernier aspect est celui de l'arrêt du financement de la police. Cet argument est avancé par les policiers et les dirigeants des services de police depuis des décennies, mais de manière différente: ils soutiennent que les exigences qu'on leur impose seraient mieux satisfaites par d'autres, dans bien des cas.
    En 2008, lorsque le gouvernement fédéral a annoncé qu'il financerait un programme pour 2 500 agents, de nombreuses personnes, dont moi-même et des dirigeants syndicaux, ont fait valoir qu'il serait plus judicieux de financer les services en santé mentale et en traitement des dépendances. Dans une certaine mesure, les attentes croissantes à l'égard de la police ont entraîné une croissance simultanée des budgets de la police.
    Par exemple, la désinstitutionnalisation des établissements de soins de santé mentale à la fin des années 1980 et dans les années 1990 a entraîné une augmentation des interventions de policiers lors d'appels liés à des problèmes de santé mentale. Les provinces considéraient que la réintégration des patients ou des clients dans la collectivité contribuait à la qualité de vie des gens, et c'était le cas. Toutefois, cela engendrait des économies substantielles qui, souvent, n'étaient pas réinvesties dans les programmes communautaires de soutien.
(1225)
    La conséquence de cela est que, trop souvent, la police devient dans les faits l’unité à laquelle il incombe de répondre aux appels de service en matière de santé mentale, sans toutefois, dans bien des cas, disposer des ressources nécessaires pour intervenir à fond. En lieu et place, elle se sert des outils qu'elle a.
    Certains services de police ont constaté que 20 % des appels de service ont à voir avec la santé mentale, et que ces appels sont rarement liés à des incidents de nature criminelle. Certains avancent qu’un nombre accru de travailleurs en santé mentale travaillant en collaboration avec la police qui répond à ces appels serait une formule qui permettrait de donner un meilleur service. C'est quelque chose qui a effectivement été tenté et qui s'est révélé être une amélioration. Toutefois, cette réponse demeure un service prodigué en aval.
    La dure réalité, c'est que les temps d’attente pour avoir accès aux ressources en santé mentale dont les collectivités ont tant besoin sont scandaleusement inappropriés, et qu'un investissement en amont dans le système de santé est ce qui pourrait produire le plus d'effet. Cela permettrait en outre de diminuer la pression exercée sur la police — surtout si la bonne ressource est engagée au bon moment et pour les bonnes raisons.
     On pourrait dire la même chose du manque de ressources en matière de toxicomanie. Dans de nombreuses provinces, il faut attendre de six à huit mois pour obtenir un traitement de désintoxication à l'externe ou même en établissement. Parmi les personnes inscrites sur ces listes d’attente pour accéder à un traitement, beaucoup se retrouvent mêlées dans l'intervalle au système de justice pénale.
    Là encore, le financement du traitement de la toxicomanie en établissement et hors établissement permettrait de soustraire un grand nombre de toxicomanes au travail que doivent leur consacrer notre système de justice pénale et notre police, et de placer ces personnes là où elles devraient être, c’est-à-dire dans le système de santé.
(1230)
    Sénateur White, pouvez-vous conclure? Je m’excuse de cette...
    J'y arrive.
     Mon dernier point concerne plus particulièrement le racisme systémique. Je dirais que dans tous les organismes gouvernementaux, il y a eu — et c'est bien souvent encore le cas — du racisme systémique. Cela inclut la police. Un exemple que j’ai utilisé est celui de la représentation. En fait, un rapport publié par un comité parlementaire intitulé L'égalité, ça presse! et sur lequel avait travaillé l’Association canadienne des chefs de police a établi que la police devait être une institution représentative. Les deux ont convenu de cela lorsque la discussion sur les préjugés raciaux était à l'avant-plan. Comme certains le disent, il nous faut du temps.
    Or, le rapport L'égalité, ça presse! et le rapport consensuel de l’Association canadienne des chefs de police datent de 1983 et 1984. La question est la suivante: combien de temps faudra-t-il?
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Notre deuxième présentation d'une durée de sept minutes échoit à M. Cowan.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole.
    Je suis le directeur général de la Commission des services juridiques du Nunavut, l'organisme responsable de l'aide juridique sur le territoire.
    Au Nunavut, le contexte de l'aide juridique est un peu différent de celui du reste du pays. Il y a très peu d'avocats privés au Nunavut. La Commission des services juridiques est de loin le plus grand employeur d'avocats du Nunavut, peut-être même de l'Arctique tout entier. C'est certainement le cas en ce qui a trait au droit pénal. Presque 100 % des affaires pénales passent par nos avocats salariés et nos avocats contractuels à un moment donné, et nous menons à terme probablement plus de 90 % de ces affaires.
    Je réside à Rankin Inlet, une communauté d'environ 2 500 personnes de la région de Kivalliq, dans le centre du Nunavut. J'y suis depuis janvier 2019. J'ai grandi dans diverses communautés autochtones isolées du nord du Manitoba et du nord de l'Ontario. Bien que j'aie une grande expérience de travail et de vie au sein des communautés autochtones, je tiens à préciser que ma perspective n'est pas celle d'un Autochtone. J'ai écouté les témoins précédents. En ce qui concerne le Nunavut, le témoignage et le point de vue du président Obed et du président Kotierk constituent, selon moi, la lentille à travers laquelle ces questions doivent être examinées. Je peux offrir quelques conseils techniques, mais je veux être très clair sur le fait que je ne vis pas le racisme systémique de la même manière que les membres inuits de ma communauté.
    Lorsque nous parlons de racisme systémique, pour moi c'est une équation assez simple : y a-t-il un groupe racialisé qui doit composer avec un fardeau ou des obstacles disproportionnés? S'agit-il d'une situation permanente et persistante? Les efforts de redressement sont-ils inefficaces ou inexistants? En ce qui concerne le maintien de l'ordre au Nunavut, je dirais que la preuve qui fait que nous pouvons répondre oui à toutes ces questions est accablante.
    Commençons par la preuve. Les données de Statistique Canada indiquent que les Nunavummiut, c'est-à-dire les personnes qui résident au Nunavut en dehors d'Iqaluit — dans la plupart des communautés, c'est plus de 90 % de la population —, que les Nunavummiut, donc, sont quatre fois plus susceptibles d'être accusés d'une infraction pénale que les autres Canadiens. Une fois inculpés, ils courent un plus grand risque d'être poursuivis. Une fois poursuivis, ils courent un plus grand risque d'être reconnus coupables. Une fois reconnus coupables, ils courent un plus grand risque d'être condamnés à la prison. Là, ils sont condamnés à des peines plus longues, et ils purgent une plus grande partie de ces peines. Si cela vous intéresse, j'ai résumé certaines de ces données dans le rapport annuel 2018-2019 de la Commission des services juridiques. Des sources sont également disponibles.
    De plus, lorsque nous nous penchons sur les preuves de racisme systémique au chapitre du maintien de l'ordre au Nunavut, nous pouvons en outre examiner les cas répétés dans tout le système judiciaire d'interactions entre la police et les membres de la communauté qui sont empreintes de violence et qui sont problématiques à maints égards. J'ai fait la description d'une trentaine de ces cas en juin dernier et j'ai fait parvenir le fruit de mes travaux à la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC. J'ai rencontré la commissaire et je lui ai demandé d'envisager la tenue d'un examen systémique. Les cas que j'ai signalés ne représentent toutefois qu'une fraction de ce que nous entendons dire sans arrêt dans la communauté. Ils sont présents dans les tribunaux. Il existe un processus cohérent de retrait des accusations ou de commentaires de la magistrature concernant ces affaires. Il existe une multitude de preuves qu'il y a, sur le terrain, des interactions problématiques d'une nature qui, franchement, n'existe tout simplement pas dans la même mesure dans d'autres administrations du pays.
    Ensuite, il y a cet autre élément de preuve qui est en quelque sorte ce qui manque: une approche systématique, publique ou transparente quant à la conduite des enquêtes et des procédures pénales en rapport avec cette conduite. Au Nunavut, dans les 20 dernières années, la police a fait l'objet de quelques enquêtes en matière de conduite, et une série d'accusations criminelles ont été portées contre elle.
(1235)
    Or, étant donné la quasi-absence d'approche systématique pour la conduite d'enquêtes du côté de la direction de la GRC et qu'il ne s'agit pas, de toute manière, d'un modèle transparent, j'estime de façon générale que nous n'avons tout simplement pas de preuve que ces problèmes sont traités.
    Très rapidement, je dirais qu'il ne fait aucun doute qu'au chapitre du maintien de l'ordre, le Nunavut a besoin d'un nouveau modèle. Quel que soit le contenu de ce modèle, je dirais qu'il y a trois choses dont il faudra tenir compte pour changer les choses de quelque façon que ce soit.
    Le premier est l'augmentation des ressources pour les services de police de première ligne. En cette ère où il est question de réduire le financement de la police, je sais que ce n'est pas une idée très populaire que de vouloir augmenter ses ressources, mais les conditions auxquelles les agents de première ligne sont confrontés sont incroyablement difficiles et stressantes, et aucun changement ne pourra se faire sans une bonification des ressources affectées à ces services. Du reste, vous n'arriverez jamais non plus à attirer des candidats inuits qualifiés pour travailler dans ces conditions. Sans une augmentation du financement des services de police de première ligne, aucun changement n'est possible.
    Deuxièmement, il faut augmenter les ressources pour la justice réparatrice et les services sociaux dans les communautés. Je ne saurais trop insister sur l'absence de modes alternatifs de règlement des conflits ou de services de conseil ou de thérapie dans les communautés du Nunavut. Essentiellement, c'est toute la gamme des services qui sont offerts dans les autres communautés du pays qui font cruellement défaut à notre territoire. Par conséquent, tous ces problèmes sont relayés à la police, et la police y répond avec les outils dont elle dispose, c'est-à-dire, la plupart du temps, la coercition, les arrestations et les inculpations.
    En troisième lieu, il faudra mettre en place un mécanisme de surveillance civile d'une bonne ampleur, rigoureux et indépendant qui sera en mesure de mener des enquêtes civiles indépendantes sur les allégations criminelles et les allégations de recours à la force et de décès, d'enquêter de façon indépendante sur les plaintes et d'exercer une surveillance indépendante au niveau national de la politique et de l'orientation stratégique de la GRC. Je pense qu'il est clair que la haute direction de la GRC est incapable d'opérer les changements qui s'imposent et de remédier à la situation actuelle. Le fait que la haute direction ne soit pas tenue de rendre des comptes de manière structurée à quelque organe de surveillance civile est en partie responsable du problème.
    Merci, monsieur Cowan.
    Sur ce, nous allons passer à M. Wright, notre dernier témoin pour ces présentations de sept minutes.
    Permettez-moi de me présenter: je suis Robert Wright, et je suis travailleur social et sociologue. Ma carrière de 30 ans à ce chapitre m'a amené à travailler en protection de l'enfance, en santé mentale en milieu correctionnel, en éducation et dans toute une série d'autres domaines. J'ai beaucoup travaillé avec les victimes et les auteurs de violence sous toutes ses formes. Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité à témoigner. J'espère que je pourrai lui apporter un point de vue éclairé sur la question à l'ordre du jour.
    Je suis originaire de la Nouvelle-Écosse, le territoire non cédé des peuples micmacs. Les personnes d'origine africaine qui sont sur ce territoire n'y sont pas arrivées en tant que colons, mais plutôt parce qu'on les y a placées. Or, nous sommes ici depuis plus de 400 ans et notre communauté est l'une des plus importantes et des plus anciennes communautés noires de tout le pays.
    Lorsqu'il s'agit de réfléchir au racisme systémique dans les services de police, rappelons que la Nouvelle-Écosse a la particularité d'avoir été la province où s'est tenue l'enquête sur la condamnation injustifiée de M. Donald Marshall Junior. La Nouvelle-Écosse est également la province où a été rendue la décision de la Cour suprême dans l'affaire connue sous le nom de R.D.S., et la province qui s'est imposée comme pionnière en ce qui concerne l'incidence de la race dans les évaluations culturelles. Je suis fier du fait que la Nouvelle-Écosse soit la première administration au Canada où les tribunaux utilisent ces rapports présentenciels spécialisés pour prononcer des peines qui sont mieux étayées, tentant en cela de remédier en partie à la surreprésentation dramatique des personnes d'origine africaine sous surveillance correctionnelle au Canada.
    Il y a plusieurs années, j'ai participé à un dialogue entre les membres des communautés afro-canadiennes et la Commission canadienne des droits de la personne. Le Bureau de l'enquêteur correctionnel avait des représentants à cette réunion, et c'est ce qui l'a incité à faire en sorte que la diversité dans les services correctionnels et les expériences des détenus noirs sous surveillance correctionnelle soient des points centraux de son rapport de 2013.
    Je ne crois pas avoir besoin de dire aux membres du Comité ou aux Canadiens qui regardent cette procédure que le racisme existe dans le système de justice pénale et que les services de police, en tant que porte d'entrée dans ce système, sont dans une position névralgique pour s'attaquer aux problèmes que sont le racisme systémique, la surreprésentation des personnes d'origine africaine au sein de ces systèmes et le traitement défavorable dont ces personnes font l'objet.
    En réponse aux questions que vous me poserez plus tard, je ferai sans doute référence aux recommandations qui ont été formulées dans d'autres rapports et études. Pour le moment, je préfère me servir de mon temps de parole pour souligner deux ou trois points qui me paraissent essentiels pour notre réflexion sur ce qu'il serait nécessaire de faire pour remédier au racisme systémique présent dans les services de police et dans d'autres couches du système de justice pénale.
    Le premier point est que toute réforme, toute étude, toute solution doit être menée par des personnes d'origine africaine. En réponse aux problèmes que nous avons eus récemment en Nouvelle-Écosse à propos des contrôles de routine qu'effectue la police — et je ne parlerai pas en détail des machinations qui ont accompagné l'accent mis sur la surreprésentation dramatique des Noirs dans ces statistiques —, je dirai que les membres des communautés afro-néo-écossaises ont réclamé que soit mise en place une stratégie provinciale de police afro-néo-écossaise. Nous sommes convaincus qu'aucune étude interne, aucune étude menée par la province ne suffira à résoudre le problème si elle ne se focalise pas sur le leadership et l'engagement des personnes d'origine africaine, et n'en fait pas une priorité.
(1240)
    La deuxième chose que je veux souligner est ceci: dans nos efforts pour résoudre les problèmes qui existent au sein des forces de l'ordre, et notamment lorsqu'il est question de transférer une partie des ressources accordées à la police vers des organismes communautaires, des services de santé mentale et d'autres organisations qui seraient mieux à même de servir nos populations, nous ne devons pas perdre de vue que les organismes vers lesquels nous transférerions ces fonds ont tous eux-mêmes des antécédents de racisme systémique contre les personnes d'origine africaine. Cela veut dire qu'en procédant de la sorte, nous ne ferions probablement que déplacer le lieu de notre oppression et de notre exclusion systémiques, plutôt que de régler le problème du racisme systémique.
    En dernier lieu, je me contenterai de dire que, dans nos efforts pour lutter contre le racisme systémique au sein des services de police, il sera important que tous les organismes qui supervisent les services de police — des commissions des droits de la personne aux commissions d'examen de la police et autres — mettent fin au racisme systémique qui a cours en leur sein. C'est là une partie essentielle du travail qui devra être fait.
    Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1245)
    Merci, monsieur Wright. Merci aussi à M. Cowan et au sénateur White.
    Sur ce, nous allons amorcer notre série de questions d'une durée de six minutes. Monsieur Berthold, vous avez la parole.

[Français]

     Monsieur Berthold, vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie beaucoup de vos témoignages, sénateur White, messieurs Wright et Cowan. Je vous remercie également d'être avec nous aujourd'hui.
    Mes premières questions s'adressent au sénateur White.
    Sénateur, en consultant votre curriculum vitae, j'ai constaté que vous aviez passé beaucoup de temps dans les services policiers un peu partout.
    Je vais commencer par une question simple. Quelle est la différence entre être un policier dans le Nord et être un policier dans une grande ville?

[Traduction]

    Dans les communautés du Nord, on s'attend à ce que vous soyez non seulement un policier, mais aussi un membre du comité des loisirs et que vous deveniez l'entraîneur de différentes équipes. Les communautés où vous êtes affecté ont des attentes à votre égard. J'en veux pour preuve la collectivité de Kimmirut, où j'ai été entraîneur de football et de volley-ball, deux sports que je n'ai pas pratiqués.
    Les attentes de ces communautés sont assurément très différentes de celles d'autres endroits. Il y a aussi — je pense que c'est quelque chose que j'ai pu vérifier en raison de ma longue affectation dans ces régions, c'est-à-dire 19 ans — le fait que la valeur que j'ai ressentie en étant capable d'aider la communauté était tellement plus facilement perceptible que dans une grande ville où les appels de service n'arrêtent pratiquement jamais. Souvent, dans vos premières années comme policier, vous n'avez pratiquement pas la chance de vous investir dans les activités communautaires parce que vous êtes trop occupé à répondre à des appels de service.
    Au Nunavut, l'endroit où j'ai servi pour la dernière fois dans le Nord, les attentes dites communautaires sont très différentes de ce qu'elles sont ailleurs. Les habitants s'attendent à beaucoup plus qu'un simple agent de police. Ils attendent beaucoup de choses de vous, et si vous n'êtes pas disposé à satisfaire ces attentes, vous ne réussirez probablement pas très bien en tant qu'agent de police dans certaines de ces communautés.

[Français]

    Je vous remercie, sénateur.
    Au cours de la première heure, j'ai posé une question aux représentants des communautés inuites sur la durée de séjour des policiers, qui commencent souvent leur carrière dans le Nord. Il n'y a malheureusement pas de statistiques là-dessus.
    Croyez-vous qu'un policier, en deux ans, a le temps de s'impliquer suffisamment dans ces communautés pour pouvoir entrer en relation avec les citoyens?

[Traduction]

    Je crois que cette question était pour moi. Je ne vous ai pas entendu dire qu'elle l'était, mais si c'est le cas, je vous répondrai que deux ans sont un laps de temps plutôt court. Je pense que de très bons policiers vont s'investir rapidement, puis forcer la cadence. Les collectivités ont souvent indiqué que deux ans, ce n'est pas assez long. Je peux comprendre qu'elles disent cela, mais pour être parfaitement juste, il faut savoir que j'ai servi quatre ans à Whitehorse et trois ans et demi à Yellowknife. Or, dans les autres collectivités où j'ai servi, les affectations duraient habituellement deux ans.
    C'était probablement souvent à mon détriment d'être parti aussi rapidement que je l'ai fait, mais l'organisation — en particulier au Nunavut, et probablement plus que dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon — essaie de déplacer ses effectifs aussi souvent qu'elle le peut, ce qui n'est pas toujours à l'avantage des collectivités. Ces dernières seraient assurément mieux servies si les agents étaient en poste pour de plus longues périodes. Or, il faut savoir qu'à l'heure actuelle, c'est un véritable problème que de trouver des agents pour des affectations au Nunavut. Il se peut que le nombre d'agents désireux de rester plus de deux ans dans une collectivité n'augmente pas.

[Français]

     Sénateur White, selon un mémoire du professeur Leuprecht, du Collège militaire royal du Canada, « au Nunavut, la GRC manque tellement de personnel que des membres d’autres divisions font régulièrement des séjours de six semaines sur le territoire pour pourvoir des postes vacants ».
    Selon vous, que devrait faire la commissaire de la GRC au cours des prochains mois pour résoudre ce problème, qui m'apparaît très urgent?
(1250)

[Traduction]

    Ce n'est toutefois pas nouveau comme problème. Quand j'y étais en 2001, à mon premier retour au Nunavut, nous faisions venir des officiers du Sud. Lorsque j'étais chef de police à Ottawa, j'ai détaché des policiers au Nunavut pour de courtes périodes afin de donner un coup de main.
    Je dirais que la solution pour augmenter le temps que les agents passent dans les communautés du Nord et pour avoir constamment un nombre suffisant d'agents serait de mettre en place une stratégie de recrutement au Nunavut et pour le Nunavut.
    Nous avons mené un projet pilote de recrutement d'Inuits en 2001-2003. Nous avons engagé plus d'une douzaine de policiers inuits, dont deux ou trois sont actuellement en poste sur la Colline du Parlement. Il y a beaucoup de problèmes qui viennent avec cela. Il y a un certain nombre d'obstacles à l'embauche sur lesquels il faudrait travailler, et aucun d'eux ne sera surmonté à peu de frais.
    Je crois vraiment que la solution — ou, du moins, une solution partielle — pour le Nunavut serait une stratégie de recrutement qui tiendra compte du nombre d'Inuits qu'il sera possible de faire entrer dans l'organisation aujourd'hui, demain et dans 10 ans. Que ladite organisation continue d'être la GRC ou que cette dernière se dote d'un mécanisme d'autosurveillance, il y aura toujours ce problème. Je persiste à croire que le recrutement d'Inuits fait partie de la solution.
    Vous avez un peu moins de 30 secondes.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Compte tenu de l'interprétation, ce sera encore moins que cela parce que je dois poser une question en français.
    Monsieur White, si je comprends bien, ces séjours devraient assurément être plus longs pour établir davantage de contacts avec la communauté.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Je suis d'accord que des séjours plus longs seraient mieux, mais il vous sera plus difficile de fournir les effectifs nécessaires si vous prolongez la durée des affectations dans le Nord. Il n'y aura pas autant d'officiers qui seront disposés à accepter ces postes.
    Merci, monsieur Berthold.
    Monsieur Berthold, vous avez déjà posé cette question deux fois, et je pense qu'elle est très importante. Je vais dire aux analystes de prendre contact avec vous ou votre bureau afin de la préciser. Il y aurait peut-être lieu pour le Comité de mener quelques recherches à ce sujet, car il s'agit d'un enjeu important.
    Passons maintenant à monsieur Sikand. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos experts.
    Monsieur Cowan et monsieur Wright, Statistique Canada a récemment annoncé qu’il allait commencer à recueillir des données sur la race des victimes d’actes criminels et des personnes accusées d’actes criminels. Toutefois, il semble que cela n’inclura pas les données relatives aux incidents de recours à la force ni aux contrôles de santé mentale, sauf si une infraction pénale est en cause. Que pensez-vous de ce changement?
    Commençons par M. Cowan.
    Dans le contexte du Nunavut, la collecte de ces données est moins pertinente, car la grande majorité des gens sont des Inuits. Quant au reste du pays, il n'est pas dans mes attributions de formuler des observations plus générales. Dans le contexte du Nunavut, nous pouvons supposer avec une certitude quasi complète que les personnes qui interagissent avec la police ou les services de santé mentale, en particulier à partir d'Iqaluit...
    Avez-vous des suggestions sur la façon dont ces données devraient être recueillies ou utilisées?
    Encore une fois, dans le contexte du Nunavut, je pense que les données rendent compte de la situation de manière éloquente. C'est formidable de recueillir des données et il est important de recueillir les bonnes données, mais lorsque nous en avons — c'est-à-dire là où les preuves sont vraiment claires —, il y a encore un grand écart entre ce qu'elles disent et la façon dont elles éclairent les choix stratégiques et opérationnels des institutions du système judiciaire.
    Merci.
    Je vais poser les mêmes questions à M. Wright.
    Je pense que la collecte de données sur la race est toujours un plus. Il est vraiment essentiel que nous commencions, en tant que pays, à mieux comprendre l'expérience réelle d'une diversité croissante de Canadiens.
    C'est plutôt l'utilisation que l'on fait de ces données qui me préoccupe. En effet, si certaines données ne sont pas examinées avec tout le sens critique de personnes qui sont au fait de la nature du racisme systémique, elles pourraient dans certains cas être utilisées pour soutenir ce que j'appellerais des « allégations racistes ». Si nous examinons les données et que nous constatons que dans telle ou telle région, les Noirs commettent plus de crimes que les Blancs, mais que nous ne tenons pas compte du fait que les Noirs de cet endroit sont radicalement surreprésentés parmi les pauvres, parmi ceux qui ne sont pas engagés de façon positive dans le système d'éducation, parmi ceux qui sont systématiquement exclus du marché de l'emploi, ces données ne vont pas vraiment nous aider.
    Lorsqu'il s'agit de recueillir de telles données, ce qui est vraiment déterminant, c'est que Statistique Canada disposent de spécialistes qui pourront procéder à une analyse « raciale » critique de ces données et ainsi empêcher que ces dernières soient utilisées pour renforcer des stéréotypes racistes.
(1255)
    En fait, vous soulevez un excellent point, et j'aimerais poursuivre avec une autre question.
    Vous avez beaucoup d'expérience en matière de travail social. Je sais que la ville de Halifax a un rapport sur les contrôles de routine effectués dans ses rues par la GRC. Or, cette pratique a été condamnée parce qu'on lui reprochait de viser les jeunes hommes noirs et d'avoir un impact disproportionné et négatif sur la communauté noire. Des excuses publiques ont donc été demandées. La Commission civile d’examen et de plaintes, la CCEP, a entrepris d'examiner les politiques et procédures de la GRC concernant ces contrôles de routine, mais son rapport n'a pas encore été rendu public.
    Selon vous, y aurait-il des réformes législatives ou politiques qu'il serait utile de faire à l'échelle nationale?
    Oui. Nous sommes préoccupés par le problème des contrôles de routine depuis 2003, c'est-à-dire depuis que le rapport de la Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse a reconnu que la police avait effectué un contrôle de routine auprès d'une personne de race noire bien en vue dans notre communauté. La Commission a déclaré que ces contrôles de routine devaient être examinés.
    Depuis 2003, la police et la GRC détenaient des données axées sur la race et elles n'en ont rien fait pendant 14 ans. Nous avions le rapport Wortley. Nous avions un avis juridique sur la légalité des contrôles de routine. Or, pas même trois heures après que l'avis juridique ait indiqué que les contrôles de routine étaient illégaux, nous avions une directive ministérielle provinciale qui brossait un aperçu de la façon dont des contrôles similaires pouvaient être effectués dans le cadre d'une sorte d'examen des activités suspectes.
    Nous pensons que la directive ministérielle provinciale invite toujours la police à commettre des actes illégaux comme elle le fait lorsqu'elle contrôle les citoyens, et bien entendu, nous croyons que les Noirs seront radicalement surreprésentés dans ces statistiques. Par conséquent, je pense qu'il serait nécessaire d'avoir une directive fédérale qui statuerait que ces pratiques ne peuvent pas enfreindre la loi.
    Merci, monsieur Sikand. Je vais devoir vous arrêter là.
    Très rapidement, monsieur Wright, pensez-vous oui ou non que cela justifie des excuses publiques?
    Oui, je le pense.
    Monsieur Sikand, vous avez été très rapide pour poser cette question en douce.

[Français]

     Madame Michaud, vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais d'abord m'adresser à M. White.
    Vous avez une grande expérience en tant que membre de la GRC et en tant que chef de police par la suite. Vous avez parlé de trois grands axes, soit la formation, le recrutement et le financement.
    Votre expérience remonte peut-être à quelques années, mais est-ce qu'on donnait de la formation spécifique sur la culture et les différentes communautés, quand on entrait en poste dans un service de police?

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup d'avoir posé cette question.
    C'est la GRC qui m'a donné ma formation de policier. Elle formait ses agents pour qu'ils puissent aller partout au Canada. Votre destination ne vous était révélée que vers la fin de votre formation. La formation n'était pas axée sur l'endroit où vous étiez sur le point d'aller. En lieu et place, elle était généralement identifiée au niveau national comme une communauté des Premières Nations, une communauté inuite ou une communauté métisse, par exemple. Je pense que nous avons constaté un changement.
    Il est certain que lorsque j'étais au Yukon, nous obligions les agents qui arrivaient à suivre une formation sur les collectivités des Premières Nations du Yukon. En fait, lorsqu'ils arrivaient dans une collectivité, ils étaient encadrés par un aîné local de cette collectivité. Je pense que cela a été bénéfique. Le Conseil des Premières Nations du Yukon s'est beaucoup impliqué dans cette dynamique. Je pense que cela a été bénéfique pour permettre aux agents non autochtones venus au Yukon — et même aux agents autochtones d'autres régions du Canada — de nouer des liens avec les Premières Nations et de mieux connaître et comprendre le milieu où ils arrivaient.
    Je pense que ce type de modèle fonctionne bien. Parce que le centre de formation de la GRC est si grand et qu'il accueille tant de gens, il est plus difficile de donner à chacun la formation adéquate pour toutes les destinations possibles.
    Je dois cependant dire que je suis préoccupé par le fait que la durée de la formation est toujours de six mois — et, comme je l'ai dit, en Ontario, elle est de 13 semaines. Je pense qu'il faudrait déterminer si la durée qui était nécessaire à l'époque de mon passage à l'école de formation de la GRC est toujours adéquate, 30 ans plus tard. Je pense qu'un éventuel changement à cet égard serait aussi un grand pas en avant.
(1300)

[Français]

     Je vous remercie.
    Vous avez aussi parlé de financement. Vous avez dit que des fonds devraient être consacrés ailleurs, par exemple, à des organismes en santé mentale. Serait-ce pour les communautés ou pour les agents également? Comment voyez-vous cela?
    Excusez-moi de vous interrompre, madame Michaud.

[Traduction]

    Y a-t-il d'autres personnes qui reçoivent la traduction? Non.

[Français]

    Je suis sur le canal français.
    Lorsque M. White parlait, tout à l'heure, il n'y avait pas d'interprétation non plus.
    Cela fonctionne-t-il maintenant?

[Traduction]

    Je la reçois maintenant.
    Pourriez-vous répéter votre question, madame Michaud?

[Français]

    En ce qui a trait au financement, vous avez parlé de consacrer les fonds ailleurs, par exemple, à des organismes qui œuvrent en santé mentale. Comment voyez-vous cela? Serait-ce pour les agents eux-mêmes ou pour les gens des communautés?

[Traduction]

    Cela s'adresse-t-il au sénateur White?

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Lorsque j'étais chef de la police d'Ottawa, nous avions une unité mobile d'intervention en santé mentale. Il y avait donc des intervenants en santé mentale qui travaillaient de près avec les policiers pour les soutenir [Difficultés techniques]. Le problème est qu'il s'agit toujours d'un service en aval. Je suis d'avis qu'il serait bien plus profitable d'injecter des fonds importants dans le traitement de la maladie mentale et de la toxicomanie pour essayer de prévenir ces problèmes que d'avoir encore à demander aux policiers de se présenter à la porte.
    Ma préoccupation est maintenant... La Nouvelle-Écosse est un exemple. Dans certains endroits, au moment où l'on se parle, il y a plus d'un an d'attente pour voir un psychiatre. Je pense qu'il faut en fait injecter des fonds dans le traitement des maladies mentales pour permettre aux gens de repérer ces troubles avant qu'ils ne débouchent sur un appel téléphonique à la police. Il en va de même pour la toxicomanie: le toxicomane moyen commet chaque jour de multiples délits juste pour essayer de satisfaire sa dépendance. Nombre de toxicomanes attendent encore des mois et des mois, voire plus longtemps, avant de pouvoir suivre un traitement en résidence pour contrer leur servitude. À mon sens, c'est vraiment en amont que l'argent devrait être dépensé, et non en aval.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur White.
    Monsieur Cowan, vous avez aussi abordé la question du financement, une question qui divise les gens. Certains parlent de perte de financement, tandis que d'autres parlent d’avoir plus de ressources. Comment voyez-vous cela, de votre côté?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    Je pense encore une fois que, dans le contexte du Nunavut, cette idée de retirer son financement à la police est entièrement... C'est un faux débat. La plupart des collectivités ont une poignée d'agents qui sont soumis à des conditions difficiles, et il est impossible d'imaginer que les choses pourront aller mieux sans une bonification des ressources et une stabilité accrue pour les affectations dans les collectivités.
    Parallèlement à cela, je pense qu'il faut investir massivement dans les ressources communautaires. Il est certain que dans les collectivités isolées du Nord, le maintien de l'ordre est très important en ce sens qu'il a une saveur et un caractère différents de ce qu'il est dans le sud du pays. Si cette police n'est pas financée adéquatement, elle sape la confiance du public dans toute une série d'institutions judiciaires. La sécurité des collectivités en souffre. Les personnes vulnérables sont moins portées à demander de l'aide à la police.
(1305)
    Il vous reste environ 20 secondes. Je crois donc que nous allons passer à M. Harris.
    Monsieur Harris, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs présentations.
    Permettez-moi de commencer par vous, monsieur Wright. Vous ne vouliez pas vous lancer dans les machinations des contrôles d'identité en Nouvelle-Écosse, mais vous avez en quelque sorte abordé la question. Aujourd'hui, un reportage de la CBC dit qu'à Halifax, les contrôles d'identité ont été rendus illégaux en 2019 — ou les contrôles de routine l'ont été, plutôt — et qu'ils y sont maintenant interdits. Vous dites que le gouvernement provincial semble avoir essayé de contourner ce problème. Cela n'a probablement pas réussi, mais il est clair que les preuves présentées à la Commission montrent que les Néo-Écossais noirs ont été ciblés de manière disproportionnée par ces pratiques.
    Pensez-vous, comme je pense que vous l'avez dit, qu'une sorte d'interdiction nationale pourrait être efficace pour contourner ce problème? Croyez-vous que c'est quelque chose que nous devrions examiner plus en profondeur?
    Je pense qu'il y a de la place pour une directive nationale qui intimerait les provinces à veiller à ce que les administrations qui supervisent la police s'assurent que les agents ne violent pas la loi dans le cadre de leurs procédures opérationnelles normales. Un avis juridique a déclaré que les contrôles de routine constituaient une pratique illégale. Nous pensons que l'actuelle directive ministérielle qui régit la manière dont la police devrait arrêter les gens lui ordonne elle aussi de faire quelque chose d'illégal. Plutôt que de demander une sorte d'autorité judiciaire ou législative pour faire ce travail, la province a choisi cette voie. Tous les systèmes locaux de surveillance de la police semblent avoir été impuissants à répondre à nos préoccupations ou trop maladroits pour le faire.
    Il semble effectivement qu'il y aurait de la place pour une intervention fédérale.
    À ce stade-ci, je me demande si les ententes contractuelles que nous avons avec la GRC concernant les services de police seraient en mesure ou non de composer avec cela. Toutefois, c'est une question sur laquelle nous pourrons nous pencher plus tard.
    Monsieur Cowan, j'ai une question pour vous. Je vous remercie de votre exposé. Bien entendu, on parle beaucoup de l'augmentation du nombre d'Inuits dans les forces de police. L'automne dernier, j'ai lu un rapport — et la commissaire Lucki a eu de bons mots à cet égard — au sujet de certains programmes de formation. Cependant, la vérité est qu'aucun Inuit n'a été recruté au Nunavut au cours des 15 dernières années, pas un seul.
    Est-ce une idée réaliste, ou seulement la réponse de l'heure à quelque chose qui dure depuis des décennies et qui n'a pas été réglé?
    Merci. C'est une question vraiment intéressante.
    Écoutez, j'ai du mal à recruter des avocats inuits — c'est l'une des choses qui m'occupent le plus — pour travailler dans mon organisation. D'après mon expérience, le premier principe, c'est que les Inuits et, de façon plus générale, les Autochtones savent reconnaître les organisations qui sont sûres pour eux et celles qui sont investies dans leur réussite. Lorsque je recrute, c'est une question fondamentale dont je discute avec les candidats inuits et les candidats autochtones en général. C'est au cœur de ma stratégie, de leurs questions et de la conversation que nous avons sur la façon dont nous allons faire avancer leur carrière. Je pense que le manque de succès dans le recrutement des Inuits à la GRC est, dans une large mesure, tributaire de l'évaluation que les Inuits font de la sécurité que leur offre l'organisation et de l'investissement réel de cette dernière dans leur réussite.
(1310)
    Une avocate inuite du Nunavut est passée récemment sur CBC. Elle a décrit la relation entre les Inuits et la GRC en disant que les gens craignaient cette police et qu'ils ne lui faisaient pas confiance. Peut-être que cela a quelque chose à voir avec le fait qu'ils ne veulent pas en faire partie. Seriez-vous d'accord avec cette affirmation?
    Oui.
    Je dirais aussi, encore une fois, une organisation qui ne... Le contrôle que la haute direction de la GRC exerce sur la conduite des enquêtes est pratiquement absolu. Le fait que la simple reconnaissance du racisme systémique ait suscité une telle résistance dans les hautes sphères de la direction laisse entendre que ces gens auraient du mal à admettre l'existence de violations du code de conduite et à prendre les mesures qui s'imposent. Et je ne parle même pas d'infliger des punitions, mais tout simplement d'instaurer des mesures correctives.
    Voici ce que je crois: j'imagine qu'il serait très difficile pour un Autochtone, et en particulier pour un Inuit, de se joindre à une organisation qui, en son sein même, n'a pas l'habitude de prendre ces questions au sérieux.
    Nous allons devoir en rester là, monsieur Harris.
    Sur ce, nous avons M. Morrison, pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à remercier les témoins d'aujourd'hui. Il est vraiment important pour nous d'avoir des experts comme vous pour nous guider et nous aider, grâce à vos connaissances du domaine, à élaborer certaines recommandations qui permettront d'améliorer l'application des lois et le maintien de l'ordre au Canada.
    Ma première question s'adresse au sénateur White.
    Il y a peu de temps, j'ai soulevé cette question auprès de la commissaire concernant l'embauche et la possibilité pour la GRC de céder l'embauche aux provinces et territoires en lieu et place d'un processus d'embauche qui, essentiellement, est centralisé pour l'ensemble du Canada.
     Je me demande si, lorsque vous étiez dans le Nord, vous vous êtes demandé s'il ne serait pas préférable que ce soit les provinces et les territoires qui procèdent à l'embauche? Je sais que la GRC a des agents de dotation dans chaque province, mais cette formule ne serait-elle pas meilleure?
    En 2001, lorsque nous avons lancé notre projet pilote de recrutement chez les Inuits, c'est exactement comme cela que nous avons procédé. Nous avons cerné ce qui faisait obstacle au recrutement des Inuits dans la GRC. Nous avons élaboré des solutions pour surmonter ces obstacles, sans toutefois faire de concessions au chapitre des qualifications. Il s'agissait d'élever les gens au niveau demandé, comme cela a été le cas pour la plupart d'entre nous dans nos vies respectives. C'est le modèle que nous avons examiné.
    En ce qui concerne l'embauche particulière d'habitants du Nunavut, le problème est que beaucoup de ces agents, comme la plupart des personnes qui se joignent à la GRC, veulent avoir la possibilité de s'installer ailleurs au pays s'ils le souhaitent. Il y a tout de même un certain nombre de normes que vous devez respecter.
     Maintenant, en ce qui concerne ces normes, prenons à titre d'exemple la norme en matière de vision. Les Inuits ont une plus grande propension à la myopie que la population en général. Pour nous, cela s'est traduit par le fait que la moitié de nos candidats ont dû subir une chirurgie des yeux au laser. Nous n'aurions certainement pas pu faire cela dans le Sud. En fait, à l'époque, la GRC n'avait pas été particulièrement enchantée que je le fasse dans le Nord.
    Je pense qu'il faut examiner les normes et cerner les obstacles qui peuvent être surmontés plutôt que ceux qui bloquent le recrutement.
    J'ai également une question pour M. Wright, et pour M. Cowan si nous avons le temps.
    Monsieur Wright, en lisant votre CV, j'ai remarqué que vous faisiez une comparaison entre la prévention de la criminalité et la réduction de la criminalité. Vous dites qu'il faut détourner les jeunes des activités criminelles et les orienter vers le droit chemin plutôt que de les laisser dériver vers la criminalité, ce qui rend ensuite les choses très difficiles. Vous l'avez mentionné dans votre déclaration liminaire.
    Je me demande si vous pourriez tour à tour y aller d'une brève observation. Il ne reste pas beaucoup de temps.
    M. Morrison vous a laissé 15 secondes chacun.
    Je dirai simplement que nous savons tous qu'il est beaucoup plus facile de prévenir la criminalité que de s'en occuper après coup, et qu'il est plus facile d'aider les gens à ne pas sombrer dans la délinquance que de réhabiliter un criminel.
    Très brièvement, je dirai que, comparativement à n'importe quelle autre administration au pays, les ressources disponibles pour la déjudiciarisation au Nunavut sont modestes au point où cela devient choquant, voire gênant. Il n'y a tout simplement pas d'options pratiques et la résistance est forte. J'ai commencé la pratique criminelle il y a 20 ans, à une époque où la déjudiciarisation n'était pas toujours possible. On la considérait souvent comme suspecte, et je dirais que c'est toujours l'approche qui prévaut au Nunavut.
(1315)
    Merci, monsieur Morrison.
    Monsieur Fergus, vous avez trois minutes.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais reconnaître aussi que nous nous trouvons sur le territoire non cédé des peuples algonquins.
    Je tiens à féliciter tous les témoins pour leurs témoignages d'aujourd'hui.
    Comme je ne dispose que de trois minutes, je vais être très bref.

[Traduction]

     Je n'aurai pas l'occasion de poser une question à tout le monde, mais monsieur Wright, monsieur Cowan et monsieur le sénateur White, je vous remercie beaucoup de vos témoignages.
    Monsieur Wright, vous avez mentionné l'importance d'avoir une perspective critique qui tient compte de la race. Vous nous avez donné l'exemple que lorsque des personnes sont arrêtées, on verra que les Noirs... Si vous n'utilisez pas une perspective critique du point de vue racial, vous arriverez à de mauvaises conclusions.
    Je comprends aussi ce que dit M. Cowan sur le fait que les Inuits et les Autochtones plus éloignés n'ont pas l'impression que notre service de police fédéral est un endroit sûr pour faire carrière.
    Monsieur Wright, croyez-vous que les Néo-Écossais d'origine africaine considèrent la GRC ou les services de police locaux comme des endroits dignes de confiance?
    Je dois dire non. Par souci de concision, je dirais que pour avoir une preuve factuelle de cela, il suffit de regarder le nombre de plaintes en matière de droits de la personne qui sont déposées par des gens d'origine africaine qui travaillent dans ces organisations. On constate la déposition de plaintes en matière de ressources humaines et de droit de la personne.
    Quand on pense à ce qui se passe dans le Nord — et c'est encore plus fort si on y réfléchit —, on s'aperçoit que l'on demande à des gens qui descendent d'ethnies colonisatrices de se former à un modèle colonial de maintien de l'ordre et de fournir ce service à une communauté autochtone. Or, le fait de demander aux peuples autochtones de s'entraîner à une forme coloniale de maintien de l'ordre pour veiller à l'application de la loi dans leurs propres communautés, c'est en fait leur demander d'adhérer à une lutte d'identité interne avant même d'avoir commencé à travailler.
    Alors, comment pouvons-nous dénouer l'impasse? Comment trouver une façon d'essayer...? Quelles mesures recommanderiez-vous pour accroître la présence de ces gens au sein de la police afin qu'y soit reflétée la diversité de nos communautés, et en particulier celles qui semblent être les plus ciblées par nos forces de police?
    En ce qui concerne surtout les communautés autochtones, je crois qu'il va probablement falloir que les Autochtones créent des formes de sécurité publique et de maintien de l'ordre qui leur sont propres et, peut-être, qu'ils envisagent le développement de façons autochtones de comprendre la loi et la sécurité publique.
    De la même façon, pour ce qui est des communautés noires, j'ai dit que nous avons besoin d'une stratégie policière afro-néo-écossaise, de quelque chose qui soit conçu et géré par des Noirs.
    Merci beaucoup, monsieur Wright.
    Au sein des comités, il existe un principe qui dit que nous ne pouvons pas faire de rapport à moins d'avoir écouté ou lu quelque chose qui vient de nos témoins, alors s'il y a quoi que ce soit que vous croiriez bon d'ajouter, je vous invite à le soumettre au greffier.
    Merci, monsieur Fergus.
    Monsieur Vidal, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier encore une fois tous les témoins, comme l'ont fait nombre de mes collègues.
    Ma première question s'adresse au sénateur White.
    Monsieur White, j'aimerais simplement profiter un peu de votre vaste expérience. La Presse Canadienne a récemment publié un article détaillant le travail du service de police de Nishnawbe Aski et le succès que ce service a eu avec sa formation adaptée à la culture. L'article traite de l'effet que la relation entre le service de police et la communauté a eu sur le niveau de confiance. Ce portrait contraste avec les obstacles que nous pouvons constater. J'ai vu un exemple de cela dans le nord de la Saskatchewan: la GRC a envoyé de nouvelles recrues dans des endroits où elles ont dû faire face à d'importantes barrières linguistiques et culturelles.
     Vous avez parlé du fait que les affectations dans les communautés du Nord duraient deux ans, sauf qu'il y a aussi, semble-t-il, cette politique qui consiste à envoyer de jeunes recrues dans ces communautés pour qu'elles y prennent de l'expérience. Je serais curieux de savoir ce que vous pensez de ce que cette politique dit à ces membres inexpérimentés, à ces jeunes recrues, et de connaître l'incidence que cela peut avoir sur l'absence d'occasions de nouer de bonnes relations au sein des communautés, comme vous l'avez dit au début de votre présentation.
(1320)
    Merci beaucoup de me poser la question.
    Il y a 15 ou 20 ans, la GRC ne vous aurait pas permis — ou vous aurait rarement permis — d'être transféré dans les collectivités isolées des trois territoires du Nord. À l'époque, nous avions des centaines, sinon plus, de candidats qui avaient déjà une expérience considérable et qui souhaitaient obtenir une mutation dans le Nord. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et je pense que le défi auquel la GRC est confrontée, c'est qu'il lui manque probablement des milliers d'agents. Elle n'a même pas assez d'agents pour pourvoir les postes qu'elle a à la grandeur du pays. De surcroit, il y a beaucoup moins d'agents qu'avant qui cherchent à obtenir des postes isolés dans les territoires du Nord.
    La GRC n'a donc pas d'autre choix que d'envoyer des personnes qui ont moins d'expérience que celles qu'elle avait l'habitude d'envoyer. C'est un problème. Je ne sais pas si c'est un problème que l'on peut facilement résoudre autrement que par l'augmentation des effectifs au niveau où ils devraient être et par la possibilité de recruter dans les communautés des Premières Nations, les communautés inuites et les communautés métisses avec l'intention de retourner ces agents dans ces communautés — et je dirais la même chose pour le nord de la Saskatchewan. Beaucoup d'Inuits ne voudraient pas nécessairement travailler dans la communauté où ils ont grandi, alors ce n'est pas ce que je propose, mais rien ne les empêcherait de travailler dans une autre communauté, ailleurs sur l'île de Baffin.
     Je reviens toujours à la même chose: si nous ne pouvons pas représenter ceux que nous servons, nous ne représentons pas ceux que nous servons. Comme j'avais l'habitude de dire, nous voulons recruter avec une fenêtre, pas avec un miroir. Si nous ne pouvons pas en arriver là, nous ne réussirons probablement pas à dénouer l'impasse, comme l'a dit M. Fergus, je crois.
    Merci beaucoup, monsieur Vidal.
    Madame Damoff, vous avez trois minutes.
    Monsieur le président, je crois que je vais prendre la place de Mme Damoff, si vous n'y voyez pas d'objection.
    Très bien.
    Monsieur Anandasangaree, vous avez la parole.
    Je vous remercie. Je tiens également à remercier les témoins.
    Monsieur Cowan, j'aimerais vous parler de la question de la reddition de comptes et de la surveillance civile. Je sais que vous avez parlé des difficultés que vous avez eues et des plaintes que vous avez déposées par l'intermédiaire du système.
    Dans ce contexte, que retenez-vous de votre expérience en ce qui a trait à la représentation des clients, aux résultats, aux délais et à la transparence du processus, ainsi qu'en ce qui concerne les mesures concrètes de reddition de comptes qui ont découlé de ces plaintes?
    Vous voulez dire à propos de la Commission civile d’examen et de plaintes en particulier, ou simplement en général en ce qui concerne la GRC?
    Si vous pouviez parler des deux, je pense que cela serait utile.
    Notre expérience avec la Commission civile d’examen et de plaintes est que... Je ne doute pas que ce soit une organisation bien intentionnée, mais son mandat est limité et elle a un grave problème de financement. Je dirais également que, pour autant que je sache, la Commission ne compte aucun commissaire autochtone ou originaire du Nord. Je pense que cette lacune pourrait être comblée immédiatement et rapidement.
    En fin de compte, la Commission est un organisme qui a un mandat très limité. Je me sens un peu mal à l'aise de m'en prendre à elle parce qu'elle ne peut faire que ce qu'elle est habilitée à faire.
    Monsieur Cowan, comme mon temps est limité, y a-t-il un modèle qui, selon vous, pourrait fonctionner pour la GRC? Y a-t-il un modèle qui, selon vous, pourrait être modifié pour aider la GRC à cet égard?
    Comme on peut le voir dans presque toutes les provinces — et d'ailleurs, le site Web de la Commission montre les différents modèles de surveillance pour les différentes provinces —, il faut une combinaison d'enquêtes civiles sur les affaires criminelles et d'enquêtes indépendantes sur les questions de conduites qui ont fait l'objet de plaintes.
    Qu'en est-il des problèmes systémiques? Je sais que les plaintes individuelles mènent à des résultats circonscrits. Comment devons-nous aborder les problèmes systémiques?
    En ce qui concerne les problèmes systémiques, ce qu'il faut, c'est un mandat qui permettrait à l'organisme qui mène habituellement les enquêtes d'effectuer aussi des examens systémiques. Encore une fois, j'envisagerais également le recours à un conseil civil qui exercerait une surveillance directe sur la GRC afin de la tenir responsable de ses décisions politiques et stratégiques.
    Merci.
    Monsieur Wright, j'aimerais aussi vous entendre à ce sujet.
    Répondez très brièvement, s'il vous plaît.
    Je dirais que de tels groupes auront souvent des profils ou des sous-comités de type « équité et diversité ». Je trouve ces types de comités génériques en matière d'équité très inadéquats. Il est peut-être nécessaire de créer des comités qui s'intéresseront précisément à la culture ou à la communauté visée et pourront ainsi mieux conseiller ces organismes.
(1325)
    Merci, monsieur Anandasangaree.
    Madame Michaud, vous avez une minute et demie.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Wright, compte tenu de votre expérience de travail social sur le terrain, pouvez-vous nous expliquer les effets du racisme systémique dans les services de police sur les personnes racisées, sur les Autochtones et plus particulièrement sur les jeunes?

[Traduction]

    Je pense que nous constatons l'impact, nommément la surreprésentation des personnes racialisées parmi celles qui ont des contacts avec la police. Je pense que c'est M. Cowan qui vient de reprendre la litanie: par rapport au reste de la population, nous faisons l'objet d'une surveillance exagérée par la police, nous écopons d'un nombre disproportionné d'accusations, de poursuites, de déclarations de culpabilité, nous avons des peines plus lourdes, nous sommes traités différemment lorsque nous sommes sous la responsabilité des services correctionnels et nos expériences à ce chapitre sont négatives, nous purgeons nos peines plus longtemps et, par la suite, nous avons plus de mal à faire la transition dans la collectivité, à recevoir une éducation et à décrocher un emploi.
    Pour ce qui est des services de police et des relations avec le système de justice pénale, je pense que c'est l'effet que le racisme systémique a tendance à avoir sur les personnes racialisées au Canada.
    Merci, madame Michaud.
    Monsieur Harris, vous avez une minute et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question pour M. Cowan concernant la Commission civile d’examen et de plaintes. J'ai cru comprendre que votre organisation avait récemment déposé deux lettres de plainte auprès de cette commission concernant la conduite de la GRC dans le traitement des détenus, et plus particulièrement quand ces derniers sont des femmes. Pourriez-vous présenter ces plaintes au Comité et nous dire si cela pourrait avoir une incidence sur notre étude sur le racisme systémique, notamment en ce qui a trait aux services de police au Nunavut?
    Je ne pense pas que nous ayons le temps de parler de cela en détail, mais je vais m'assurer que le Comité recevra une copie de mes deux lettres qui exposent divers problèmes à ce chapitre.
    En ce qui concerne la fouille corporelle qui a eu lieu en décembre, disons qu'il y a eu quelques cas que j'ai portés à l'attention de la Commission. J'en ai également parlé directement à l'officière supérieure de la GRC à Iqaluit. En toute bonne foi, j'ai essayé de lui dire: « Ce sont des choses qui ont cours. Qu'est-ce que votre organisation a l'intention de faire à ce sujet? »
    J'ai été très déçu par son approche, qui consistait à dire que tant qu'il n'y aurait pas de plaignants individuels, il n'y avait rien que la GRC pouvait faire. Ce n'est pas vrai et cela montre, je pense, le manque flagrant d'engagement et de volonté de changement au sein de la haute direction, ainsi que l'absence d'obligations redditionnelles.
    Je vais transmettre cette correspondance au Comité pour qu'il puisse s'en servir.
    Merci, monsieur Harris.
    Malheureusement, cela met fin aux interventions de ce groupe d'experts. Au nom du Comité, je dirai que les observations que vous nous avez fournies étaient très pertinentes et qu'elles seront très utiles pour la poursuite de notre étude.
    Chers collègues, nous allons maintenant ajourner. Vous devrez ouvrir une nouvelle session. Un nouveau mot de passe vous sera envoyé. Pour le moment, je m'attends toujours à ce que nous nous réunissions à nouveau à 14 heures. Je tiens à m'excuser auprès du personnel qui va devoir courir dans tous les sens pour faire ce que les protocoles exigent. Nous avons dépassé d'environ une demi-heure le temps qui nous était imparti.
    Sur ce, la séance est levée.
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