J'entends de l'écho. Ça va, maintenant? Très bien.
Bienvenue à la huitième séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Lorsque nous avons organisé cette réunion, nous pensions nous réunir en personne. Lundi, heureusement, nous avons pu modifier cela pour tenir une réunion virtuelle. Je pense que dans un avenir prévisible, le Comité de la sécurité publique tiendra des réunions virtuelles plutôt que des réunions en personne.
Je demande aux collègues, aux témoins et à ceux qui nous regardent de faire preuve d'indulgence et de compréhension aujourd'hui. Il pourrait y avoir quelques difficultés qui viendront principalement de la présidence, probablement.
Lorsque vous aurez la parole, si vous comptez passer d'une langue à l'autre, vous remarquerez des icônes au bas de l'écran pour l'anglais et le français, et pour basculer d'une langue à l'autre. Si vous décidez de changer de langue, veuillez faire une brève pause.
Veuillez attendre que je vous nomme; vous pourrez alors activer votre microphone. J'ai déjà indiqué qu'il m'est impossible de couper votre microphone, ce qui est vraiment très regrettable, à mon avis.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être faits par l'intermédiaire de la présidence.
Aux témoins, je vous invite à regarder de temps à autre dans ma direction. J'essaierai de vous indiquer que votre temps est écoulé. Je ne veux pas vous interrompre, mais je vais... Malheureusement, le temps est impitoyable.
Lorsque vous n'avez pas la parole, veuillez mettre votre micro en sourdine. Évidemment, nous vous encourageons à utiliser un casque d'écoute, et il semble que presque tout le monde en ait un.
Pour commencer, nous avons trois témoins: l'Assemblée des Premières Nations et...
Je vois que mon collègue M. Harris a une motion, dont nous avons discuté précédemment. J'invite M. Harris à la lire rapidement et à demander immédiatement un consensus à cet égard.
Je tiens à souligner que je me trouve actuellement sur le territoire de la Nation Shuswap, en Colombie-Britannique.
Je n'ai que sept minutes; je tiens donc à tous vous remercier de cette très importante étude sur les services policiers. Je pense que nous avons vu, pendant cette pandémie qui sévit depuis mars, beaucoup de situations où de nombreuses Premières Nations ont été victimes des services de police, notamment les trois cas de Winnipeg, le cas de Mme Chantel Moore, au Nouveau-Brunswick, tuée lors d'une vérification du bien-être, ou le cas de M. Levi, aussi au Nouveau-Brunswick. Un membre de ma propre famille, M. Everett Riley Patrick, est mort en détention à Prince George, en Colombie-Britannique.
J'avais une présentation qui était assez longue et qui traitait essentiellement de l'histoire du maintien de l'ordre, non seulement en Colombie-Britannique, mais dans l'ensemble du Canada, je suppose.
J'aimerais passer directement aux recommandations qui, à mon avis, sont assez importantes. J'ai 14 recommandations qui proviennent de nos organisations. Je tiens aussi à souligner qu'à titre de chef régional de la Colombie-Britannique, je pilote ce dossier pour la justice, tout comme M. Ghislain Picard, le chef régional pour le Québec et le Labrador.
La première recommandation est d'accélérer réellement l'action du gouvernement fédéral concernant les appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Le gouvernement fédéral a terminé le rapport l'année dernière et a promis un plan d'action dans un délai d'un an. Ces 12 mois sont passés et nous sommes au point où ces appels à la justice doivent absolument être mis en œuvre. Il y avait au-delà de 231 recommandations.
La deuxième recommandation est la nécessité de travailler avec les Premières Nations à l'élaboration d'un cadre législatif pour appuyer, avec les ressources financières adéquates, les efforts d'autodétermination des services de police dirigés par les Premières Nations. Le gouvernement fédéral nous a récemment indiqué qu'il s'est engagé à passer du financement par programme au financement des services essentiels, mais il faut aller encore plus loin, en particulier pour les Premières Nations qui affirment leur souveraineté et leur autodétermination en matière de services de police. Il y a des accords tripartites avec de nombreuses Premières Nations, ainsi qu'avec les Premières Nations qui ont des traités. Il convient de les terminer afin de préciser les modalités d'application de ces lois. Je dirais, essentiellement, qu'il est nécessaire d'établir de meilleures relations avec les gouvernements fédéral et provinciaux.
La troisième recommandation est le soutien fédéral et provincial aux initiatives de justice réparatrice des Premières Nations et le respect des compétences qui en découlent. Avant la colonisation, de nombreuses Premières Nations, les Inuits et les Métis avaient leurs propres modèles de maintien de l'ordre et leurs propres lois. Ils ont fait valoir leurs lois, et ces lois doivent être respectées.
La quatrième recommandation est le lancement immédiat d'un examen indépendant des pratiques opérationnelles de la GRC lors des vérifications du bien-être, dans le but d'obtenir des recommandations de réformes. Comme expliqué au point numéro 5, les services policiers sont mal équipés pour intervenir dans des situations délicates comme les vérifications du bien-être. Il convient de faire un examen indépendant pour obtenir des recommandations sur la façon dont d'autres services — soutien en santé mentale, aide aux sans-abri et autres services sociaux — peuvent être offerts sans l'intervention de la police. C'est d'autant plus important et nécessaire en santé mentale.
La cinquième recommandation consiste à réorienter le financement servant à la militarisation des services policiers vers des soutiens sociaux plus efficaces et plus que nécessaires, comme le soutien en santé mentale, l'aide aux sans-abri et les autres services sociaux qui ne nécessitent pas une présence policière.
La sixième recommandation est la mise en œuvre de politiques de tolérance zéro à l'égard du recours à la force excessive.
La septième recommandation porte sur la révision de la Loi sur la GRC, notamment pour accroître les pouvoirs d'un organisme de surveillance civil et ajouter des dispositions précisant clairement la compétence des Premières Nations en matière de services policiers.
La huitième recommandation consiste à élaborer une mesure législative interdisant les idéologies de suprématie blanche et renforçant le rôle de la Commission canadienne des droits de la personne pour l'examen d'affaires privées liées aux discours haineux et aux actes à caractère raciste.
La neuvième recommandation vise à renforcer la reddition de comptes concernant la protection et le respect des droits fondamentaux des Premières Nations, y compris la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
La recommandation 10 vise à accroître l'utilisation de caméras corporelles dans les services de police des collectivités des Premières Nations et l'accès aux enregistrements vidéo.
La recommandation 11 est d'améliorer la formation sur le désamorçage et les préjugés implicites, y compris la formation interculturelle.
La recommandation 12 vise le recrutement et la promotion de membres des Premières Nations au sein de la Gendarmerie royale du Canada.
La recommandation 13 consiste à changer pour « service de police » le nom de la force de police nationale du Canada, puisqu'il ne s'agit pas d'une « force », mais d'un « service », pour signaler au reste du Canada que la violence envers les Premières Nations et les autres groupes racialisés n'est plus tolérée.
La recommandation 14 vise la création, à l'échelle nationale, d'un cadre stratégique et d'un plan d'action et la prise d'engagements en matière de justice applicable aux Premières Nations, sous la direction des Premières Nations, en plein partenariat avec le Canada et les provinces, et avec leur appui total.
En Colombie-Britannique, nous avons une stratégie en matière de justice applicable aux Premières Nations qui traite de justice non seulement en Colombie-Britannique, mais aussi à l'échelle nationale. Je crois que nous sommes la seule province et région à avoir un plan stratégique. Il convient de remercier notre président, M. Doug White, qui participe à cet appel aujourd'hui, et notre Conseil de justice des Premières Nations de la Colombie-Britannique d'avoir élaboré ce plan. Il faut plus de plans de ce genre.
Nous travaillons actuellement sur une proposition au gouvernement fédéral, et il va sans dire que nous avons besoin de l'appui d'autres régions. Nous communiquons actuellement avec les autres régions et les Premières Nations des autres provinces pour connaître les orientations stratégiques qu'elles attendent d'une stratégie nationale en matière de justice.
Je pense que la question des services de police en fait partie. Pendant de nombreuses années, depuis le début de la colonisation, les forces de police ont servi à arracher nos peuples de leurs terres. Plus récemment, avec l'adoption de la politique des pensionnats, beaucoup de nos enfants ont été arrachés à leur foyer et emmenés dans des pensionnats.
Dans ma langue, le dakelh, la langue des Porteurs, nous utilisons le vocable nilhchuk-un pour désigner la GRC. Interprété dans notre langue, ce terme signifie « ceux qui nous emmènent », car essentiellement, c'est la GRC qui a emmené nos enfants. À bien des égards, c'est ainsi que nous percevons encore la GRC — nous l'avons vu même pendant cette pandémie —, étant donné les nombreux cas de recours excessif à la force contre nos peuples autochtones partout au pays. De toute évidence, un changement systémique s'impose: il faut abandonner les politiques très punitives à l'égard des peuples autochtones et des minorités racialisées au Canada.
Nous sommes ici pour demander plus de justice réparatrice, une approche de réhabilitation et la recherche de solutions de rechange aux prisons. Statistiquement, au Canada et en Colombie-Britannique, de nombreuses Premières Nations présentent les taux d'incarcération et de décès en détention les plus élevés.
Actuellement, les services policiers sont considérés comme un programme et financés comme tel, même si le nous a promis une transition vers le financement de services essentiels. C'est positif, mais je pense qu'il faut aller plus loin. Aujourd'hui, vous entendrez sans doute d'autres dirigeants autochtones faire la même demande. Il faut absolument changer l'approche à l'égard des services de police dans ce pays que nous appelons le Canada.
Cela dit, je vous remercie tous d'avoir écouté ma présentation aujourd'hui. J'ai hâte d'entendre les autres intervenants qui sont ici aujourd'hui.
Mahsi cho, merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président. C'est un plaisir de voir tout le monde.
Ublaahatkut, bonjour.
Je vais partager mon temps de parole avec la présidente Kotierk.
L'Inuit Nunangat est la patrie des Inuits; elle compte 51 collectivités réparties dans quatre régions: les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut, le Nunavik et le Nunatsiavut.
En tant qu'Inuits, nous sommes victimes de violence policière de manière disproportionnée comparativement à la majorité des autres Canadiens, sans compter les innombrables obstacles à la justice. La violence policière n'est pas un problème isolé: elle fait partie d'un problème systémique plus large lié à l'inégalité sociale. Les questions comme le logement, les soins en santé mentale, l'accès à l'éducation, l'emploi et la pauvreté sont tous des facteurs qui doivent être examinés parallèlement au problème de la violence policière.
La violence policière se reflète dans le taux élevé de décès liés à la police dans nos collectivités, comparativement aux autres régions du Canada. Bien que nous n'ayons pas de données agrégées pour les quatre régions inuites ni pour les Inuits vivant hors de l'Inuit Nunangat, les données connues brossent un tableau extrêmement troublant du caractère systémique de la violence policière et de la discrimination à l'encontre d'un grand nombre de nos communautés.
Il y a eu 16 décès liés à la police au cours des 20 dernières années. Au Nunavut, le taux de décès liés à la police par habitant depuis 1999 est plus de neuf fois supérieur à celui de l'Ontario, et environ trois fois supérieur aux taux du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest.
La situation au Nunavik est aussi désolante. Entre juillet 2014 et octobre 2018 seulement, huit Inuits ont été tués et au moins quatre autres ont été blessés par des membres du Corps de police régional Kativik. Entre 2016 et 2018, le CPRK a été impliqué dans environ 10 % de tous les cas de décès ou de blessures liés à la police dans la province, soit un taux 55 fois plus élevé que celui du Service de police de Montréal. La situation des Inuits des Territoires du Nord-Ouest, du Nunatsiavut et des personnes qui vivent à l'extérieur de l'Inuit Nunangat est moins claire.
Ce qui est clair, c'est que le racisme systémique, et le racisme lui-même, tuent. Les forces de police sont en grande partie itinérantes, de sorte qu'elles n'ont pas de lien clair avec la communauté. En outre, très peu de policiers sont Inuits. Tout cela mène aux statistiques stupéfiantes que je viens de mentionner.
Des mesures doivent être prises pour freiner ces tendances préoccupantes, et cela devrait comprendre un examen systématique et indépendant des pratiques policières de la GRC et du CPRK. Avant tout, il importe que les Inuits participent à l'élaboration du cadre de gouvernance d'un tel examen. Nous en avons assez d'être exclus lors de ces examens, car en fin de compte, nos opinions et nos perspectives risquent toujours d'être éclipsées par d'autres considérations.
L'achat de caméras et d'autres mesures sont nécessaires pour renforcer la transparence et la reddition de comptes des organismes d'application de la loi. Les corps policiers doivent recruter et retenir plus de gens qui parlent la langue inuite et l'inuktitut pour établir la confiance et améliorer la communication entre les Inuits et les services policiers. Des données agrégées propres aux Inuits pour l'ensemble de l'Inuit Nunangat, et pour l'extérieur, sont nécessaires pour mieux comprendre la violence policière à l'égard des Inuits et s'y attaquer.
Je cède le reste de mon temps de parole à la présidente Kotierk.
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Qujannamiik Natan. Ullukuut. Depuis le début, la relation entre la GRC et les Inuits du Nunavut est caractérisée par un déséquilibre du pouvoir et du contrôle. Cela a été bien documenté par la Commission de vérité du Qikiqtani, qui décrit la relation entre 1940 et 1975. La GRC est arrivée dans nos terres ancestrales à titre d'agent du gouvernement fédéral, non seulement en tant que vecteur de changement et agent du colonialisme, mais aussi avec la vision intéressée d'un pays qui avait besoin d'affirmer sa souveraineté dans l'Arctique.
Il ne fait aucun doute que la relation entre les Inuits du Nunavut et la GRC est complexe et tendue. La GRC a contribué au déplacement de familles inuites dans les communautés; la GRC a contribué à l'envoi des enfants inuits dans les pensionnats; la GRC a contribué à l'abattage des chiens de traîneau inuits.
Permettez-moi de citer M. John Amagoalik qui a expliqué comment sa famille a été déplacée d'Inukjuak, au Nunavik, dans le Nord-du-Québec, vers le Haut-Arctique, au Nunavut:
Je pense qu'il est important que les gens comprennent qu'à cette époque, les demandes de la GRC étaient en quelque sorte considérées comme des ordres. On vous ordonnait de le faire. Les agents de la GRC avaient beaucoup de pouvoir. Ils pouvaient vous mettre en prison. C'est ainsi qu'ils étaient perçus à l'époque. Une demande de la police était prise très, très au sérieux.
Aujourd'hui, bon nombre des difficultés vécues par les Inuits sur les plans social et économique découlent de la perte de pouvoir et de contrôle entraînée par une bonne partie de la relation coloniale. Étant donné la rareté des services et du soutien en santé mentale, la GRC est souvent la première ressource vers laquelle les Inuits du Nunavut se tournent pour obtenir des soins, mais souvent, ils ne les obtiennent pas. Au lieu de cela, les Inuits sont victimes de force excessive dans leurs interactions avec la GRC.
Comme M. Obed l'a souligné, la GRC est responsable d'au moins 15 décès au Nunavut depuis 1999. La GRC ne comprend pas notre culture ni notre langue, comme le démontre le rapport entre les agents inuits et les agents non inuits au Nunavut.
La relation de méfiance entre les Inuits du Nunavut et la GRC n'a rien d'étonnant. Si la mission de la GRC est réellement de servir et de protéger, il lui incombe d'établir la confiance dans nos communautés inuites. Il faut une approche tenant compte des traumatismes et reconnaissant que les Inuits ont connu un changement de pouvoir et d'autorité dans l'histoire très récente, et que les difficultés sociales dans nos collectivités découlent de certains facteurs.
Il faut un modèle de surveillance indépendant qui contrôle le comportement de la GRC et ses interactions avec les Inuits. Il faut plus d'agents inuits dans la GRC. Il faut offrir une meilleure formation culturelle aux agents de la GRC appelés à travailler dans nos collectivités inuites. En outre, pour entretenir et renforcer la confiance ou les relations dans les communautés, les agents de la GRC doivent y demeurer plus longtemps de façon à faire partie de la communauté.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je suis reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée de me joindre à votre comité aujourd'hui et je remercie mes collègues de m'avoir permis d'être ici.
Je tiens également à remercier les témoins. C'est un plaisir de vous accueillir, et c'est un plaisir d'entendre vos témoignages et vos observations sur cette question très importante.
Vous avez tous parlé de l'importance des relations. Au moins deux d'entre vous ont parlé de remplacer « force » et autres termes du genre par « service ». Je comprends cela.
Je suis un ancien maire d'une petite ville de la Saskatchewan; je peux dire que nous étions dans une situation unique sur le plan des services de police: nous avions un détachement partagé. Nous partagions le service de police de notre petite ville avec la municipalité rurale voisine et deux collectivités des Premières Nations. Il y avait une très évidente corrélation entre la relation de nos partenaires communautaires avec notre commandant et la nature de la relation avec le service en général.
L'un des faits marquants de notre petite communauté, et de sa relation avec la GRC, est le suivant: à l'occasion d'un exercice de planification du rendement annuel, nous avons demandé à la GRC d'accorder la priorité à la promotion des relations et à la promotion des actions positives de la GRC. Nous avons constaté que cela s'était avéré très efficace pour les partenaires communautaires de la ville, de la municipalité rurale, des communautés des Premières Nations et de la GRC, car c'est devenu un exercice positif d'établissement de relations.
J'aimerais vous donner à tous l'occasion de vous exprimer à ce sujet, si vous le pouvez. La question s'adresse à chacun de vous: pourriez-vous proposer, ou discuter, de pratiques exemplaires ou d'expériences que vous avez vécues dans vos relations passées avec la GRC et qui pourraient nous servir de leçon à tous, partout au pays, pour améliorer cette relation, dans l'esprit de servir plutôt que de jouer le rôle d'une force?
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Merci, monsieur le président.
Merci de cette question, monsieur Vidal. Je pense que l'exemple que vous avez donné d'une petite collectivité est un exemple parfait de la façon dont la GRC doit aborder les questions de gouvernance.
Pour ma collectivité des Premières Nations... Je suis membre de la Première Nation de Takla Lake. Nous avons trois agents de police sur notre territoire. Les relations avec notre chef, notre conseil et notre communauté sont généralement bonnes, notamment pour l'intégration de certains policiers dans notre système de potlatch et l'adoption de certains d'entre eux dans le clan du Caribou.
L'autre exemple que je peux donner est celui de la région de Prince George, où nous avons établi de bonnes relations avec les surintendants supérieurs. Essentiellement, tout a commencé avec Mme Brenda Butterworth-Carr, une femme de descendance autochtone. Elle a travaillé à Ottawa pendant un certain temps, et elle travaille maintenant pour le gouvernement provincial dans le domaine de l'application de la loi.
J'ai toujours de bonnes relations avec les surintendants, mais même si nous avons de bonnes relations avec de nombreuses personnalités politiques de très haut niveau, cela ne se reflète pas dans les relations avec les policiers sur le terrain. À Prince George, les taux d'incarcération et de mortalité demeurent élevés. Cela remonte à M. Clayton Willey, un homme de la Nation Wet'suwet'en, en 2003, et à Dale Culver, en 2017. Plus récemment, en avril, il y a eu mon cousin, M. Everett Riley Patrick.
Nous pourrions avoir une excellente relation au plus haut niveau, mais si cela ne se traduit pas sur le terrain, le changement dont nous avons besoin ne se concrétisera pas. La plupart du temps, c'est dans les grandes municipalités comme Winnipeg qu'ont lieu des décès. Nous avons de nombreux autres rapports, comme l'enquête sur M. Frank Paul, à Vancouver. Il y a 30 ans, pendant la crise d'Oka, dans cette municipalité... C'est l'utilisation de la force par bon nombre de policiers qui a entraîné la militarisation du conflit et mené à la crise d'Oka.
Comme vous pouvez le constater, nous pouvons entretenir de bonnes relations à haut niveau, mais si elles ne se traduisent pas à sur le terrain, les difficultés seront nombreuses.
Merci.
:
Après ma carrière à la GRC, j'ai passé sept ans comme chef de police, deux ans dans la région de Durham, puis cinq ans ici, à Ottawa. Pour ce qui est de mes études, j'ai un diplôme de premier cycle de l'Université Acadia, une maîtrise de l'Université Royal Roads et un doctorat de l'Australian Graduate School of Policing and Security de la Charles Sturt University. J'ai fait toutes mes études pendant que je travaillais à plein temps dans mes fonctions dans la police.
Après ma carrière dans la police, j'ai été nommé au Sénat. J'ai continué à enseigner dans diverses universités au Canada et à l'étranger. En outre, je fais des recherches, souvent sur les questions qui ont une incidence sur notre système de justice pénale et, bien sûr, sur les services de police eux-mêmes.
Par rapport au travail que vous avez entrepris, je voulais parler de quelques aspects qui, selon moi, sont importants pour cette discussion, notamment la formation et le recrutement, l'éducation et, bien sûr, l'argument le plus récent en faveur de l'élimination du financement de la police. Pour terminer, je présenterai mon point de vue sur le racisme systémique dans la police.
Le Comité voudra peut-être examiner le rapport du juge Goudge de 2014 intitulé « Le maintien de l’ordre au Canada au XXIe siècle », même s'il date déjà, car on y trouve de bonnes pistes de réflexion que vous pourriez examiner.
Concernant le recrutement et la formation, je pense que ces deux aspects doivent faire l'objet d'un examen national. Aujourd'hui, à mon avis, la prestation des services de police ne se fait plus selon des normes établies à l'échelle nationale, mais plutôt en fonction du mandat des provinces et des territoires. Par conséquent, il est difficile d'y adhérer complètement.
Le Canada compte environ 180 services de police, ce qui représente des dépenses de quelque 15 milliards de dollars. Les écarts relativement à la formation et au recrutement sont remarquables. Je dirais que c'est un aspect pour lequel le gouvernement fédéral pourrait tracer une voie à suivre en établissant des normes nationales en matière de maintien de l'ordre, tant pour les agents que pour les services de police. J'ai déjà rencontré les chefs de police des Premières Nations; ils ont soulevé des préoccupations semblables et déclaré qu'ils appuieraient aussi un mouvement en ce sens.
D'autres pays l'ont fait en établissant un modèle de collège de services de police — à ne pas confondre avec une école de police —, notamment le Royaume-Uni, avec la création du College of Policing, un organisme professionnel pour tous ceux qui travaillent dans les services de police en Angleterre et au pays de Galles. Le collège vise à offrir à ceux qui travaillent dans les services de police les compétences et les connaissances nécessaires pour prévenir la criminalité, protéger le public et gagner la confiance du public.
Ses fonctions comprennent trois principaux aspects: la connaissance, comme le développement de la recherche et des infrastructures pour améliorer les preuves sur ce qui fonctionne; l'éducation en appui au perfectionnement professionnel du personnel du maintien de l'ordre, y compris l'établissement d'exigences en matière d'éducation; enfin, l'établissement de normes en matière de service de police fondées sur les meilleures données disponibles sur ce qui fonctionne, pour les forces et les membres.
J'avance qu'un modèle semblable devrait être créé au Canada. On invoquera peut-être des questions de compétences, et certaines administrations pourraient faire valoir qu'elles comptent se retirer. Je dirais que ce serait à leurs risques et périls.
En l'absence de ce modèle, on constate au pays d'importantes disparités tant du point de vue des normes de recrutement que des normes de formation. En Ontario, il faut 13 semaines pour compléter la formation de base; à la GRC, c'est six mois, et dans certaines autres administrations, c'est même plus long. La dure réalité, c'est que les défis auxquels les services de police sont confrontés ont considérablement changé, et je ne suis pas certain que nous soyons restés à jour.
La formation des policiers est essentielle au perfectionnement de l'agent et de l'organisation en général. Les recherches menées au Royaume-Uni et en Australie montrent l'importance non seulement de la formation continue des agents de police, mais aussi de l'éducation permanente.
Je n'irai pas jusqu'à dire, comme d'autres pourraient le faire, que les policiers doivent avoir un diplôme universitaire pour commencer leur carrière, mais je crois fermement que la formation doit être un pilier de leur carrière et qu'elle doit être offerte de manière continue pendant leur carrière. Certains pays exigent qu'un policier obtienne un diplôme de premier cycle pour être considéré comme totalement agréé. Ailleurs, la formation doit être suivie intégralement avant l'entrée au sein du service de police, tandis que d'autres exigent une formation continue tout au long de la carrière. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il sera important de mettre l'accent sur l'éducation dans notre démarche.
Le dernier aspect est celui de l'arrêt du financement de la police. Cet argument est avancé par les policiers et les dirigeants des services de police depuis des décennies, mais de manière différente: ils soutiennent que les exigences qu'on leur impose seraient mieux satisfaites par d'autres, dans bien des cas.
En 2008, lorsque le gouvernement fédéral a annoncé qu'il financerait un programme pour 2 500 agents, de nombreuses personnes, dont moi-même et des dirigeants syndicaux, ont fait valoir qu'il serait plus judicieux de financer les services en santé mentale et en traitement des dépendances. Dans une certaine mesure, les attentes croissantes à l'égard de la police ont entraîné une croissance simultanée des budgets de la police.
Par exemple, la désinstitutionnalisation des établissements de soins de santé mentale à la fin des années 1980 et dans les années 1990 a entraîné une augmentation des interventions de policiers lors d'appels liés à des problèmes de santé mentale. Les provinces considéraient que la réintégration des patients ou des clients dans la collectivité contribuait à la qualité de vie des gens, et c'était le cas. Toutefois, cela engendrait des économies substantielles qui, souvent, n'étaient pas réinvesties dans les programmes communautaires de soutien.
La conséquence de cela est que, trop souvent, la police devient dans les faits l’unité à laquelle il incombe de répondre aux appels de service en matière de santé mentale, sans toutefois, dans bien des cas, disposer des ressources nécessaires pour intervenir à fond. En lieu et place, elle se sert des outils qu'elle a.
Certains services de police ont constaté que 20 % des appels de service ont à voir avec la santé mentale, et que ces appels sont rarement liés à des incidents de nature criminelle. Certains avancent qu’un nombre accru de travailleurs en santé mentale travaillant en collaboration avec la police qui répond à ces appels serait une formule qui permettrait de donner un meilleur service. C'est quelque chose qui a effectivement été tenté et qui s'est révélé être une amélioration. Toutefois, cette réponse demeure un service prodigué en aval.
La dure réalité, c'est que les temps d’attente pour avoir accès aux ressources en santé mentale dont les collectivités ont tant besoin sont scandaleusement inappropriés, et qu'un investissement en amont dans le système de santé est ce qui pourrait produire le plus d'effet. Cela permettrait en outre de diminuer la pression exercée sur la police — surtout si la bonne ressource est engagée au bon moment et pour les bonnes raisons.
On pourrait dire la même chose du manque de ressources en matière de toxicomanie. Dans de nombreuses provinces, il faut attendre de six à huit mois pour obtenir un traitement de désintoxication à l'externe ou même en établissement. Parmi les personnes inscrites sur ces listes d’attente pour accéder à un traitement, beaucoup se retrouvent mêlées dans l'intervalle au système de justice pénale.
Là encore, le financement du traitement de la toxicomanie en établissement et hors établissement permettrait de soustraire un grand nombre de toxicomanes au travail que doivent leur consacrer notre système de justice pénale et notre police, et de placer ces personnes là où elles devraient être, c’est-à-dire dans le système de santé.
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Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole.
Je suis le directeur général de la Commission des services juridiques du Nunavut, l'organisme responsable de l'aide juridique sur le territoire.
Au Nunavut, le contexte de l'aide juridique est un peu différent de celui du reste du pays. Il y a très peu d'avocats privés au Nunavut. La Commission des services juridiques est de loin le plus grand employeur d'avocats du Nunavut, peut-être même de l'Arctique tout entier. C'est certainement le cas en ce qui a trait au droit pénal. Presque 100 % des affaires pénales passent par nos avocats salariés et nos avocats contractuels à un moment donné, et nous menons à terme probablement plus de 90 % de ces affaires.
Je réside à Rankin Inlet, une communauté d'environ 2 500 personnes de la région de Kivalliq, dans le centre du Nunavut. J'y suis depuis janvier 2019. J'ai grandi dans diverses communautés autochtones isolées du nord du Manitoba et du nord de l'Ontario. Bien que j'aie une grande expérience de travail et de vie au sein des communautés autochtones, je tiens à préciser que ma perspective n'est pas celle d'un Autochtone. J'ai écouté les témoins précédents. En ce qui concerne le Nunavut, le témoignage et le point de vue du président Obed et du président Kotierk constituent, selon moi, la lentille à travers laquelle ces questions doivent être examinées. Je peux offrir quelques conseils techniques, mais je veux être très clair sur le fait que je ne vis pas le racisme systémique de la même manière que les membres inuits de ma communauté.
Lorsque nous parlons de racisme systémique, pour moi c'est une équation assez simple : y a-t-il un groupe racialisé qui doit composer avec un fardeau ou des obstacles disproportionnés? S'agit-il d'une situation permanente et persistante? Les efforts de redressement sont-ils inefficaces ou inexistants? En ce qui concerne le maintien de l'ordre au Nunavut, je dirais que la preuve qui fait que nous pouvons répondre oui à toutes ces questions est accablante.
Commençons par la preuve. Les données de Statistique Canada indiquent que les Nunavummiut, c'est-à-dire les personnes qui résident au Nunavut en dehors d'Iqaluit — dans la plupart des communautés, c'est plus de 90 % de la population —, que les Nunavummiut, donc, sont quatre fois plus susceptibles d'être accusés d'une infraction pénale que les autres Canadiens. Une fois inculpés, ils courent un plus grand risque d'être poursuivis. Une fois poursuivis, ils courent un plus grand risque d'être reconnus coupables. Une fois reconnus coupables, ils courent un plus grand risque d'être condamnés à la prison. Là, ils sont condamnés à des peines plus longues, et ils purgent une plus grande partie de ces peines. Si cela vous intéresse, j'ai résumé certaines de ces données dans le rapport annuel 2018-2019 de la Commission des services juridiques. Des sources sont également disponibles.
De plus, lorsque nous nous penchons sur les preuves de racisme systémique au chapitre du maintien de l'ordre au Nunavut, nous pouvons en outre examiner les cas répétés dans tout le système judiciaire d'interactions entre la police et les membres de la communauté qui sont empreintes de violence et qui sont problématiques à maints égards. J'ai fait la description d'une trentaine de ces cas en juin dernier et j'ai fait parvenir le fruit de mes travaux à la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC. J'ai rencontré la commissaire et je lui ai demandé d'envisager la tenue d'un examen systémique. Les cas que j'ai signalés ne représentent toutefois qu'une fraction de ce que nous entendons dire sans arrêt dans la communauté. Ils sont présents dans les tribunaux. Il existe un processus cohérent de retrait des accusations ou de commentaires de la magistrature concernant ces affaires. Il existe une multitude de preuves qu'il y a, sur le terrain, des interactions problématiques d'une nature qui, franchement, n'existe tout simplement pas dans la même mesure dans d'autres administrations du pays.
Ensuite, il y a cet autre élément de preuve qui est en quelque sorte ce qui manque: une approche systématique, publique ou transparente quant à la conduite des enquêtes et des procédures pénales en rapport avec cette conduite. Au Nunavut, dans les 20 dernières années, la police a fait l'objet de quelques enquêtes en matière de conduite, et une série d'accusations criminelles ont été portées contre elle.
Or, étant donné la quasi-absence d'approche systématique pour la conduite d'enquêtes du côté de la direction de la GRC et qu'il ne s'agit pas, de toute manière, d'un modèle transparent, j'estime de façon générale que nous n'avons tout simplement pas de preuve que ces problèmes sont traités.
Très rapidement, je dirais qu'il ne fait aucun doute qu'au chapitre du maintien de l'ordre, le Nunavut a besoin d'un nouveau modèle. Quel que soit le contenu de ce modèle, je dirais qu'il y a trois choses dont il faudra tenir compte pour changer les choses de quelque façon que ce soit.
Le premier est l'augmentation des ressources pour les services de police de première ligne. En cette ère où il est question de réduire le financement de la police, je sais que ce n'est pas une idée très populaire que de vouloir augmenter ses ressources, mais les conditions auxquelles les agents de première ligne sont confrontés sont incroyablement difficiles et stressantes, et aucun changement ne pourra se faire sans une bonification des ressources affectées à ces services. Du reste, vous n'arriverez jamais non plus à attirer des candidats inuits qualifiés pour travailler dans ces conditions. Sans une augmentation du financement des services de police de première ligne, aucun changement n'est possible.
Deuxièmement, il faut augmenter les ressources pour la justice réparatrice et les services sociaux dans les communautés. Je ne saurais trop insister sur l'absence de modes alternatifs de règlement des conflits ou de services de conseil ou de thérapie dans les communautés du Nunavut. Essentiellement, c'est toute la gamme des services qui sont offerts dans les autres communautés du pays qui font cruellement défaut à notre territoire. Par conséquent, tous ces problèmes sont relayés à la police, et la police y répond avec les outils dont elle dispose, c'est-à-dire, la plupart du temps, la coercition, les arrestations et les inculpations.
En troisième lieu, il faudra mettre en place un mécanisme de surveillance civile d'une bonne ampleur, rigoureux et indépendant qui sera en mesure de mener des enquêtes civiles indépendantes sur les allégations criminelles et les allégations de recours à la force et de décès, d'enquêter de façon indépendante sur les plaintes et d'exercer une surveillance indépendante au niveau national de la politique et de l'orientation stratégique de la GRC. Je pense qu'il est clair que la haute direction de la GRC est incapable d'opérer les changements qui s'imposent et de remédier à la situation actuelle. Le fait que la haute direction ne soit pas tenue de rendre des comptes de manière structurée à quelque organe de surveillance civile est en partie responsable du problème.
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Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de me présenter: je suis Robert Wright, et je suis travailleur social et sociologue. Ma carrière de 30 ans à ce chapitre m'a amené à travailler en protection de l'enfance, en santé mentale en milieu correctionnel, en éducation et dans toute une série d'autres domaines. J'ai beaucoup travaillé avec les victimes et les auteurs de violence sous toutes ses formes. Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité à témoigner. J'espère que je pourrai lui apporter un point de vue éclairé sur la question à l'ordre du jour.
Je suis originaire de la Nouvelle-Écosse, le territoire non cédé des peuples micmacs. Les personnes d'origine africaine qui sont sur ce territoire n'y sont pas arrivées en tant que colons, mais plutôt parce qu'on les y a placées. Or, nous sommes ici depuis plus de 400 ans et notre communauté est l'une des plus importantes et des plus anciennes communautés noires de tout le pays.
Lorsqu'il s'agit de réfléchir au racisme systémique dans les services de police, rappelons que la Nouvelle-Écosse a la particularité d'avoir été la province où s'est tenue l'enquête sur la condamnation injustifiée de M. Donald Marshall Junior. La Nouvelle-Écosse est également la province où a été rendue la décision de la Cour suprême dans l'affaire connue sous le nom de R.D.S., et la province qui s'est imposée comme pionnière en ce qui concerne l'incidence de la race dans les évaluations culturelles. Je suis fier du fait que la Nouvelle-Écosse soit la première administration au Canada où les tribunaux utilisent ces rapports présentenciels spécialisés pour prononcer des peines qui sont mieux étayées, tentant en cela de remédier en partie à la surreprésentation dramatique des personnes d'origine africaine sous surveillance correctionnelle au Canada.
Il y a plusieurs années, j'ai participé à un dialogue entre les membres des communautés afro-canadiennes et la Commission canadienne des droits de la personne. Le Bureau de l'enquêteur correctionnel avait des représentants à cette réunion, et c'est ce qui l'a incité à faire en sorte que la diversité dans les services correctionnels et les expériences des détenus noirs sous surveillance correctionnelle soient des points centraux de son rapport de 2013.
Je ne crois pas avoir besoin de dire aux membres du Comité ou aux Canadiens qui regardent cette procédure que le racisme existe dans le système de justice pénale et que les services de police, en tant que porte d'entrée dans ce système, sont dans une position névralgique pour s'attaquer aux problèmes que sont le racisme systémique, la surreprésentation des personnes d'origine africaine au sein de ces systèmes et le traitement défavorable dont ces personnes font l'objet.
En réponse aux questions que vous me poserez plus tard, je ferai sans doute référence aux recommandations qui ont été formulées dans d'autres rapports et études. Pour le moment, je préfère me servir de mon temps de parole pour souligner deux ou trois points qui me paraissent essentiels pour notre réflexion sur ce qu'il serait nécessaire de faire pour remédier au racisme systémique présent dans les services de police et dans d'autres couches du système de justice pénale.
Le premier point est que toute réforme, toute étude, toute solution doit être menée par des personnes d'origine africaine. En réponse aux problèmes que nous avons eus récemment en Nouvelle-Écosse à propos des contrôles de routine qu'effectue la police — et je ne parlerai pas en détail des machinations qui ont accompagné l'accent mis sur la surreprésentation dramatique des Noirs dans ces statistiques —, je dirai que les membres des communautés afro-néo-écossaises ont réclamé que soit mise en place une stratégie provinciale de police afro-néo-écossaise. Nous sommes convaincus qu'aucune étude interne, aucune étude menée par la province ne suffira à résoudre le problème si elle ne se focalise pas sur le leadership et l'engagement des personnes d'origine africaine, et n'en fait pas une priorité.
La deuxième chose que je veux souligner est ceci: dans nos efforts pour résoudre les problèmes qui existent au sein des forces de l'ordre, et notamment lorsqu'il est question de transférer une partie des ressources accordées à la police vers des organismes communautaires, des services de santé mentale et d'autres organisations qui seraient mieux à même de servir nos populations, nous ne devons pas perdre de vue que les organismes vers lesquels nous transférerions ces fonds ont tous eux-mêmes des antécédents de racisme systémique contre les personnes d'origine africaine. Cela veut dire qu'en procédant de la sorte, nous ne ferions probablement que déplacer le lieu de notre oppression et de notre exclusion systémiques, plutôt que de régler le problème du racisme systémique.
En dernier lieu, je me contenterai de dire que, dans nos efforts pour lutter contre le racisme systémique au sein des services de police, il sera important que tous les organismes qui supervisent les services de police — des commissions des droits de la personne aux commissions d'examen de la police et autres — mettent fin au racisme systémique qui a cours en leur sein. C'est là une partie essentielle du travail qui devra être fait.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Je vous remercie beaucoup d'avoir posé cette question.
C'est la GRC qui m'a donné ma formation de policier. Elle formait ses agents pour qu'ils puissent aller partout au Canada. Votre destination ne vous était révélée que vers la fin de votre formation. La formation n'était pas axée sur l'endroit où vous étiez sur le point d'aller. En lieu et place, elle était généralement identifiée au niveau national comme une communauté des Premières Nations, une communauté inuite ou une communauté métisse, par exemple. Je pense que nous avons constaté un changement.
Il est certain que lorsque j'étais au Yukon, nous obligions les agents qui arrivaient à suivre une formation sur les collectivités des Premières Nations du Yukon. En fait, lorsqu'ils arrivaient dans une collectivité, ils étaient encadrés par un aîné local de cette collectivité. Je pense que cela a été bénéfique. Le Conseil des Premières Nations du Yukon s'est beaucoup impliqué dans cette dynamique. Je pense que cela a été bénéfique pour permettre aux agents non autochtones venus au Yukon — et même aux agents autochtones d'autres régions du Canada — de nouer des liens avec les Premières Nations et de mieux connaître et comprendre le milieu où ils arrivaient.
Je pense que ce type de modèle fonctionne bien. Parce que le centre de formation de la GRC est si grand et qu'il accueille tant de gens, il est plus difficile de donner à chacun la formation adéquate pour toutes les destinations possibles.
Je dois cependant dire que je suis préoccupé par le fait que la durée de la formation est toujours de six mois — et, comme je l'ai dit, en Ontario, elle est de 13 semaines. Je pense qu'il faudrait déterminer si la durée qui était nécessaire à l'époque de mon passage à l'école de formation de la GRC est toujours adéquate, 30 ans plus tard. Je pense qu'un éventuel changement à cet égard serait aussi un grand pas en avant.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais reconnaître aussi que nous nous trouvons sur le territoire non cédé des peuples algonquins.
Je tiens à féliciter tous les témoins pour leurs témoignages d'aujourd'hui.
Comme je ne dispose que de trois minutes, je vais être très bref.
[Traduction]
Je n'aurai pas l'occasion de poser une question à tout le monde, mais monsieur Wright, monsieur Cowan et monsieur le sénateur White, je vous remercie beaucoup de vos témoignages.
Monsieur Wright, vous avez mentionné l'importance d'avoir une perspective critique qui tient compte de la race. Vous nous avez donné l'exemple que lorsque des personnes sont arrêtées, on verra que les Noirs... Si vous n'utilisez pas une perspective critique du point de vue racial, vous arriverez à de mauvaises conclusions.
Je comprends aussi ce que dit M. Cowan sur le fait que les Inuits et les Autochtones plus éloignés n'ont pas l'impression que notre service de police fédéral est un endroit sûr pour faire carrière.
Monsieur Wright, croyez-vous que les Néo-Écossais d'origine africaine considèrent la GRC ou les services de police locaux comme des endroits dignes de confiance?
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Merci beaucoup de me poser la question.
Il y a 15 ou 20 ans, la GRC ne vous aurait pas permis — ou vous aurait rarement permis — d'être transféré dans les collectivités isolées des trois territoires du Nord. À l'époque, nous avions des centaines, sinon plus, de candidats qui avaient déjà une expérience considérable et qui souhaitaient obtenir une mutation dans le Nord. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et je pense que le défi auquel la GRC est confrontée, c'est qu'il lui manque probablement des milliers d'agents. Elle n'a même pas assez d'agents pour pourvoir les postes qu'elle a à la grandeur du pays. De surcroit, il y a beaucoup moins d'agents qu'avant qui cherchent à obtenir des postes isolés dans les territoires du Nord.
La GRC n'a donc pas d'autre choix que d'envoyer des personnes qui ont moins d'expérience que celles qu'elle avait l'habitude d'envoyer. C'est un problème. Je ne sais pas si c'est un problème que l'on peut facilement résoudre autrement que par l'augmentation des effectifs au niveau où ils devraient être et par la possibilité de recruter dans les communautés des Premières Nations, les communautés inuites et les communautés métisses avec l'intention de retourner ces agents dans ces communautés — et je dirais la même chose pour le nord de la Saskatchewan. Beaucoup d'Inuits ne voudraient pas nécessairement travailler dans la communauté où ils ont grandi, alors ce n'est pas ce que je propose, mais rien ne les empêcherait de travailler dans une autre communauté, ailleurs sur l'île de Baffin.
Je reviens toujours à la même chose: si nous ne pouvons pas représenter ceux que nous servons, nous ne représentons pas ceux que nous servons. Comme j'avais l'habitude de dire, nous voulons recruter avec une fenêtre, pas avec un miroir. Si nous ne pouvons pas en arriver là, nous ne réussirons probablement pas à dénouer l'impasse, comme l'a dit M. Fergus, je crois.