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SCYR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 19 mars 2003




¹ 1535
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.))
V         Mme Claudette DeWitt (responsable du programme, «Ben Calf Robe Society»)
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Susanne Gudmundson (coordonnatrice de programmes, «Ben Calf Robe Society»)
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         M. John Anderson (vice-président, Recherche, Conseil canadien de développement social)

¹ 1540

¹ 1545

¹ 1550
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)
V         Mme Susanne Gudmundson

¹ 1555
V         Mme Wendy Lill
V         M. John Anderson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)
V         Mme Claudette DeWitt

º 1600
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Susanne Gudmundson

º 1605
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Mme Claudette DeWitt
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Mme Claudette DeWitt
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)

º 1610
V         Mme Wendy Lill
V         M. John Anderson
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Claudette DeWitt

º 1615
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Susanne Gudmundson

º 1620
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Mme Karen Kraft Sloan

º 1625
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         M. John Anderson
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Anderson

º 1630
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Wendy Lill
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Mme Claudette DeWitt

º 1635
V         Mme Wendy Lill
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne)
V         Mme Claudette DeWitt
V         M. Larry Spencer
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Susanne Gudmundson
V         Mme Claudette DeWitt
V         Mme Susanne Gudmundson
V         M. Larry Spencer
V         Mme Wendy Lill
V         M. Larry Spencer
V         Mme Claudette DeWitt

º 1640
V         M. Larry Spencer
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         M. John Anderson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         M. Larry Spencer

º 1645
V         M. John Anderson
V         Mme Claudette DeWitt
V         M. John Anderson
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)
V         Mme Karen Kraft Sloan

º 1650
V         Le président suppléant (M. Alan Tonks)










CANADA

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 009 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 19 mars 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président suppléant (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Nous pouvons commencer. Je souhaite la bienvenue à nos invités et je les remercie d'avoir répondu à notre invitation.

    Je vous présente Wendy Lill et Karen Kraft Sloan qui font partie du comité. Un ou deux autres membres se joindront peut-être à nous plus tard.

    C'est avec plaisir que nous accueillons Claudette DeWitt, gestionnaire de programme, et Susanne Gudmundson, du Ben Calf Robe Society, de même que John Anderson, du Conseil canadien de développement social.

    Qui aimerait être le premier? Claudette, voulez-vous commencer?

+-

    Mme Claudette DeWitt (responsable du programme, «Ben Calf Robe Society»): Bonjour. Je m'appelle Claudette DeWitt et je suis gestionnaire de programme au Ben Calf Robe Society. C'est moi qui supervise un programme de soutien à domicile et un programme de placement familial. Voilà neuf ans que je travaille dans le noyau central d'Edmonton auprès de la collectivité autochtone.

    C'est vrai que la pauvreté a affecté les Autochtones vivant en milieu urbain, mais il est aussi vrai qu'elle a eu beaucoup de répercussions sur les Autochtones qui vivent dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci. La pauvreté est aggravée par de nombreux autres facteurs comme les toxicomanies, les mauvais traitements, la violence et la faible estime de soi. Souvent, ces facteurs se transmettent de génération en génération.

    Le nombre de bandes dans les villes s'accroît... ces bandes donnent à nos jeunes un sentiment d'appartenance et les moyens d'obtenir des choses matérielles. Cela touche notre système judiciaire.

    Les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain avec lesquels nous travaillons sont touchés par des questions de logement, d'éducation et, naturellement, d'alimentation. La consommation de drogues a augmenté sensiblement et a eu, à son tour, un impact sur notre système de santé. L'éducation et la sensibilisation sont cruciales.

    J'ai entendu dire qu'au sein même de la ville d'Edmonton, un enfant autochtone sur trois environ est atteint à la naissance du syndrome d'alcoolisation foetale. Nos banques alimentaires sont limitées, et le coût du logement est tellement élevé que les pauvres s'appauvrissent alors que les riches s'enrichissent. Par exemple, la semaine dernière, j'ai rencontré la mère célibataire de deux enfants. Elle reçoit 600 dollars environ par mois pour vivre, ce qui inclut l'épicerie, les vêtements et le logement. À Edmonton, les services publics à eux seuls peuvent absorber jusqu'à la moitié de ce montant.

    La Ville d'Edmonton a travaillé de concert avec les Autochtones vivant en milieu urbain qui sont touchés par la pauvreté. Ils ont ensemble publié une brochure, que j'ai apportée aujourd'hui, dans laquelle vous trouverez des citations de personnes qu'ils ont interviewées. Tout récemment, durant la période de grand froid, la Ville a ouvert les stations de transport en commun parce que les refuges débordent.

    Je comprends que nous ne disposons pas de beaucoup de temps. Tout ce que je puis vous fournir, en réalité, c'est un bref aperçu des questions reliées à la pauvreté qui touchent la population d'Edmonton.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Claudette, je vous remercie.

    Suzanne, vouliez-vous...?

+-

    Mme Susanne Gudmundson (coordonnatrice de programmes, «Ben Calf Robe Society»): Bonjour.

    Je m'appelle Susanne Gudmundson et je suis gestionnaire de programmes au foyer de groupe Ben Calf Robe Society. Je travaille avec des enfants et des jeunes depuis 1985. J'ai eu amplement le temps de constater les effets de la pauvreté sur ceux-ci. J'ai en effet travaillé la plus grande partie de ces années dans la ville et, pendant quelques années, dans de petites localités.

    Le manque de fonds et de soutien a contribué à faire augmenter le nombre d'enfants et de jeunes pris en charge par le système, par exemple dans nos foyers de groupe et dans les programmes de la justice. Il est difficile de faire des études quand les parents sont incapables d'assumer le coût des livres, des frais de scolarité et des fournitures. Les enfants et les jeunes sont humiliés parce qu'ils vivent dans la pauvreté, ce qui contribue à une faible estime de soi. L'absence de nourriture dans la maison, ou le peu de nourriture, empêche les enfants et les jeunes de se concentrer à l'école. À nouveau, ces problèmes causent de faibles notes, le décrochage, la délinquance et des mises sous protection.

    Bon nombre des enfants accueillis à notre foyer de groupe souffrent d'hyperactivité avec déficit de l'attention, de troubles oppositionnels avec provocation, du syndrome d'alcoolisation foetale, des effets de l'alcoolisme foetal ou ils ont été si traumatisés qu'ils exigent des soins spéciaux, une thérapie spéciale et une éducation spéciale. Nous remarquons qu'en matière de thérapie, ils n'ont droit qu'à dix séances. C'est tout ce que leur permettent les fonds gouvernementaux. C'est juste assez pour mettre à nu le problème. La thérapie ne va pas plus loin. On met à nu leurs problèmes et leurs traumatismes passés, puis il n'y a plus rien. Ils n'ont nulle part où aller.

    Tous ces enfants qui viennent à notre foyer de groupe sont marqués par la pauvreté, qui est le seul mode de vie qu'ils connaissent depuis le peu de temps qu'ils sont au monde. Avec les enfants et les jeunes, nous discutons des grands problèmes, de gouvernement, de financement, de problèmes à l'école ou à la maison ou encore de problèmes dans leur vie personnelle. Il n'y a pas que les enfants...

    Le personnel de notre foyer de groupe se demande, si le gouvernement est capable d'investir massivement dans des programmes comme l'enregistrement des armes à feu, pourquoi il ne peut pas investir davantage dans nos enfants. Ils sont sacrés. Ils représentent notre avenir. Les enfants sont la raison d'être de mon travail.

    Si je pouvais accomplir une seule chose, ce serait de rendre un enfant heureux et de lui permettre de vivre une vie autant que possible normale. Nous vous demandons, lorsque vous ferez vos budgets, de ne pas oublier les enfants. Montrez-leur que vous avez réellement leur bien-être à coeur, parce qu'ils représentent notre avenir.

    Je vous remercie.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Susanne, je vous remercie beaucoup.

    John, c'est à votre tour.

+-

    M. John Anderson (vice-président, Recherche, Conseil canadien de développement social): Je vous remercie beaucoup de m'offrir la possibilité de prendre la parole aujourd'hui.

    Je m'appelle John Anderson. Je suis vice-président de la recherche au Conseil canadien de développement social, un organisme national sans but lucratif dont le siège se trouve à Ottawa. Le conseil existe depuis 80 ans environ et il se spécialise dans la recherche et l'orientation au sujet de questions de développement social, comme la pauvreté.

    Avant de commencer mon exposé, je tenais simplement à dire que j'ai apporté de la documentation à distribuer, dont notre publication annuelle intitulée Progrès des enfants au Canada. J'en ai des exemplaires en français et en anglais. Le document est en réalité un portrait de ce qui se passe chez les enfants canadiens. Il a été publié l'an dernier, en novembre 2002. Vous pouvez le commander sur notre site Web.

    L'autre document que j'ai apporté en plusieurs exemplaires et dont j'ai un sommaire en français s'intitule Urban Poverty in Canada (La pauvreté urbaine au Canada). J'en ai laissé plusieurs exemplaires auprès de Jeremy. Il s'agit d'une étude de la pauvreté en milieu urbain au Canada fondée sur les données de recensement de 1996. L'étude sera reprise cette année, en fonction des nouvelles données de recensement. Certains chiffres que je vais vous citer remontent au recensement de 1996, parce que les données économiques liées au dernier recensement ne seront pas publiées avant le mois de mai. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons obtenir les séries spéciales de données portant sur des questions comme la pauvreté des Autochtones au Canada, particulièrement en milieu urbain.

    Je tenais également à dire que, pour la préparation de cet exposé, j'ai lu beaucoup de documents, notamment un papier rédigé par une étudiante et activiste autochtone, Cindy Blackstock, qui prouve que le Canada, qui était au premier rang de l'indice de développement humain, se classait 79e ou 80e dans le cas des Canadiens autochtones. Il existe donc tout un écart entre les deux réalités et le classement réel du Canada en termes de développement humain.

    Je vais vous donner un aperçu très rapide, après quoi nous pourrons revenir sur certaines questions, si vous le souhaitez.

    Les données récentes du recensement révèlent que la population autochtone au Canada est en croissance et qu'elle représente maintenant, en termes de peuples s'identifiant comme étant Autochtones, 3,3 p. 100 de la population totale. Toutefois, de plus en plus d'Autochtones vivent à l'extérieur des réserves. Il n'en reste plus que 31 p. 100 dans les réserves et les établissements. Les peuples autochtones et les enfants autochtones vivent de plus en plus dans les grandes villes . En 2001, 49 p. 100 de la population autochtone vivaient en milieu urbain, dont le quart dans les dix grandes zones métropolitaines, soit Winnipeg, Edmonton, Vancouver, Calgary, Toronto, Saskatoon, Regina, Ottawa-Gatineau, Montréal et Victoria. De nombreuses villes ont maintenant une très forte population autochtone. Winnipeg a plus de 55 000 Autochtones et Saskatoon, plus de 20 000. À Prince Albert, 29 p. 100 de la population totale sont Autochtones.

    Nous savons également, comme le révèle notre étude sur la pauvreté en milieu urbain, qu'en règle générale, le nombre de Canadiens pauvres est plus élevé en milieu urbain. Nous savons aussi que la population autochtone est beaucoup plus jeune que la moyenne canadienne. Elle est de 13 ans inférieure à l'âge médian de la population non autochtone, et un tiers des Autochtones sont âgés de 14 ans et moins, contre seulement 19 p. 100 de la population non autochtone.

¹  +-(1540)  

    Nous savons aussi que de plus en plus d'enfants autochtones vivent dans la pauvreté. Nous savons, quand nous examinons les données statistiques sur la pauvreté en milieu urbain de tout le Canada, d'après le recensement de 1996, que 55,6 p. 100 des Autochtones qui habitent dans des villes canadiennes étaient pauvres en 1995 et qu'un très fort pourcentage de pauvres—plus élevé que leur pourcentage en milieu urbain—sont Autochtones.

    Nous sommes également conscients que trois groupes d'enfants, les enfants autochtones, les enfants de minorités visibles et les enfants handicapés, sont plus susceptibles d'être pauvres. Cependant, ce sont les enfants autochtones qui sont les plus vulnérables, parmi ces trois groupes. Nous n'avons pas les données du dernier recensement, mais en 1995, 52,1 p. 100 des enfants autochtones âgés de 0 à 14 ans vivaient dans la pauvreté, contre 42,7 p. 100 des enfants de groupes minoritaires visibles et 23 p. 100 des enfants handicapés.

    Nous savons que les enfants autochtones—et nous avons de nombreux articles portant sur l'évolution des enfants au Canada—sont quatre fois plus susceptibles d'avoir faim, qu'ils ont plus de problèmes de santé. Il existe toute une série d'autres indicateurs. Nous savons aussi que de plus en plus d'Autochtones et, par conséquent, d'enfants autochtones vivant en milieu urbain risquent d'habiter dans des quartiers défavorisés, c'est-à-dire dans des quartiers où sévissent de forts taux de pauvreté. Nous savons que le phénomène a déjà été étudié à Winnipeg. Nous l'examinerons nous-mêmes quand nous disposerons des nouvelles données de recensement.

    Nous savons également que plus d'enfants autochtones vivent dans des familles monoparentales. Deux fois plus d'enfants autochtones vivent au sein d'une famille monoparentale que les autres enfants. Le fait a son importance, parce que nous savons que les familles monoparentales ont tendance à être plus pauvres; il s'agit là d'un indicateur très important.

    Nous avons aussi appris que les enfants autochtones sont plus mobiles que les autres. Ce sont là tous des facteurs qui peuvent avoir une influence sur le niveau de vie et sur les questions entourant la pauvreté.

    Dans la mesure où le groupe à l'étude, c'est-à-dire celui des tout-petits jusqu'à l'âge de 12 ans, est visé, il importe de prendre note qu'il deviendra rapidement, dans très peu d'années, un très important groupe de la population active. Même d'après les données du recensement de 1996, cela pose plusieurs problèmes. Quelque 75 p. 100 des jeunes Autochtones gagnaient moins de 10 000 $, contre 69 p. 100 chez les non-Autochtones, et nous savons que les jeunes Autochtones courent vraiment le risque, lorsqu'ils arrivent sur le marché du travail, d'avoir à faire face à une discrimination généralisée.

    J'ai travaillé, il y a deux ans, à une étude de Grace Edward Galabuzi, intitulée Canada's Creeping Economic Apartheid, qui portait sur les collectivités racialisées et les collectivités de minorités visibles au Canada. Je crains bien que les Autochtones fassent de plus en plus l'expérience de cet apartheid économique, en termes d'emplois et de la rémunération que leur rapporteront ces emplois.

¹  +-(1545)  

    J'ai sauté beaucoup d'éléments, mais nous pouvons toujours y revenir.

    En termes de solutions aux problèmes, pour aboutir à une société qui rejette l'exclusion sociale et la racialisation croissante de la pauvreté, il faut tout d'abord—et le Conseil canadien de développement social en a déjà fait état—se doter d'une stratégie efficace de lutte contre la pauvreté, d'une stratégie visant à réduire le taux et l'ampleur de la pauvreté, d'une stratégie nationale de garde d'enfants, d'une initiative nationale visant à relever au-delà du seuil de pauvreté le salaire minimum dans toutes les juridictions, d'une norme nationale de bien-être qui se situe au-delà du seuil de pauvreté, d'une stratégie efficace donnant plein accès à toutes les mesures de soutien pour personnes handicapées, d'une prestation nationale bonifiée pour enfants, assortie d'assurances selon lesquelles toutes les familles bénéficiant d'aide sociale sont admissibles, de l'élimination des obligations de résidence interprovinciales et des écarts des frais pour les soins à long terme et les études postsecondaires ainsi que d'autres services. Il faut aussi une stratégie coordonnée de construction d'habitations à loyer modéré et de lutte contre l'itinérance, de même que la sécurité sur le plan de l'alimentation.

    Nous avons demandé tout cela dans le cadre d'une stratégie générale de lutte contre la pauvreté, mais nous croyons qu'il faut aussi une stratégie particulière de lutte contre la pauvreté chez les Autochtones vivant en milieu urbain, une stratégie complète et ciblée sur les besoins des Canadiens autochtones qui doit engager un partenariat du gouvernement fédéral, des provinces, des municipalités et des territoires. Les gouvernements et les organismes autochtones assumeraient le rôle premier—par exemple les centres d'amitié, les organismes de service de protection de l'enfance, les centres de santé autochtones et les organismes de logement sans but lucratif.

    Dernier point, il faudrait que les questions entourant la pauvreté des enfants autochtones vivant en milieu urbain soient ciblées dans le nouveau transfert social. On a porté beaucoup d'attention aux transferts en matière de santé, particulièrement après la publication du rapport Romanow, mais on s'est très peu attardé à la question du transfert social, soit aux énormes montants qui sont consacrés aux questions sociales, mais pour lesquels il n'existe pas de ciblage.

    Nous croyons qu'au sein de cette enveloppe, il faudrait qu'il y ait non seulement des fonds périodiques et croissants suffisants pour répondre aux besoins des Autochtones vivant en milieu urbain, mais aussi un choix d'objectifs clairs visés par ces fonds de manière à ce que nous puissions suivre les montants engagés. Il faudrait aussi, dans le cadre de ce financement, prévoir qu'il servira en partenariat avec différents ordres de gouvernement et qu'il inclura les organismes et gouvernements autochtones dans la mise en oeuvre de tout programme qui y est associé.

    En guise de conclusion, nous estimons que la question de la pauvreté chez les enfants autochtones vivant en milieu urbain est très grave. Elle mine l'avenir du pays. Les enfants autochtones représenteront une partie de plus en plus grande de notre destinée, puisque leurs nombres iront croissant. Il est temps d'agir tout de suite pour régler ces questions.

    Voilà. C'est tout ce que j'avais à dire.

¹  +-(1550)  

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): C'est bien. Merci, John.

    Madame Lill, voulez-vous commencer la ronde des questions, s'il vous plaît?

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci beaucoup.

    Votre présence est très appréciée.

    Je voudrais demander à John d'en dire un peu plus long au sujet de l'idée concernant le transfert social. Vous recommandez que les questions autochtones soient inclues dans une nouvelle entente en matière de transfert social.

    J'ai entendu l'opinion de personnes handicapées. Elles craignent qu'en mettant davantage l'accent sur la santé dans le cadre du programme gouvernemental de paiements de transfert, elles seront mises à l'écart. Je crois que la question est de savoir à quel point les paiements de transfert augmentent, ou quelle proportion est transférée à la santé. Il ne faut pas mettre de côté la question du transfert social et des soins à fournir aux personnes vulnérables. Il serait utile que vous en disiez plus long sur le sujet.

    Quant à la stratégie anti-pauvreté, vous avez exposé huit ou neuf mesures très concrètes, dont l'élaboration d'une stratégie nationale en matière de services de garde qui soit véritablement efficace et financée convenablement, l'augmentation du salaire minimum, la hausse du taux des prestations d'aide sociale, l'élaboration d'une stratégie nationale relative aux personnes handicapées, la création de logements abordables, etc.

    Je partage votre avis. Je voudrais demander aux deux autres témoins ce qu'elles pensent de ces mesures. C'est vous qui travaillez avec des jeunes, des enfants et des familles autochtones souvent très pauvres. Comment pensez-vous que les propositions de M. Anderson contribueraient à améliorer la situation actuelle?

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Je dois dire que je suis en faveur de l'augmentation du taux des prestations d'aide sociale. La plupart des enfants qui viennent au foyer pour enfants, par exemple, proviennent de familles monoparentales qui disposent à peine d'assez d'argent pour offrir de petites gâteries à leurs enfants une fois qu'elles ont payé le loyer et les services de base comme l'électricité. En outre, si une thérapie ou une formation quelconque est nécessaire, il est impossible d'obtenir du financement à cet égard.

    Alors je conviens avec M. Anderson que les prestations versées aux assistés sociaux doivent certainement être augmentées.

¹  +-(1555)  

+-

    Mme Wendy Lill: Monsieur Anderson, peut-être que vous pourriez développer l'idée d'inclure la question de la pauvreté des Autochtones vivant en milieu urbain dans toute entente fédérale-provinciale. J'aimerais savoir comment cela fonctionnerait. La population serait-elle le critère? Comment envisagez-vous cela?

+-

    M. John Anderson: Premièrement, je dois dire que nous croyons qu'il devrait y avoir un débat à propos de ces questions, car on en a très peu discuté. Il y a eu la Commission Romanow sur les soins de santé, mais il n'y a eu aucune commission sur les questions sociales. Nous n'avons pas eu l'occasion de tenir un débat national sur les questions sociales.

    Il existe un lien entre la santé et les facteurs sociaux qui ont une incidence sur la santé. Autrement dit, de nombreuses questions de santé peuvent être éliminées en consacrant davantage de fonds notamment aux logements et aux revenus. Nous savons que les questions de santé et les questions sociales sont étroitement liées.

    Donc, nous pensons qu'il doit d'abord y avoir un débat sur ces questions. Je ne suis pas ici aujourd'hui pour dire que j'ai toutes les réponses sur la façon de procéder. Je veux plutôt attirer votre attention sur la question du transfert social. Je ne crois pas qu'il soit acceptable de verser aux provinces une importante somme d'argent sans examiner la façon dont elle sera dépensée et sans savoir quels programmes sociaux en bénéficieront et quelle incidence elle aura sur les prestations d'aide sociale et sur d'autres questions sociales.

    C'est là l'essentiel de notre discours. Les détails, bien sûr, doivent faire l'objet d'un débat national. Quoi qu'il en soit, je crois certainement que les questions sociales sont importantes, à l'instar des questions de santé. Nous n'avons pas à déterminer lesquelles sont les plus importantes. Les deux sont extrêmement importantes pour le bien-être des Canadiens, et surtout pour celui des Autochtones. Les questions autochtones sont considérées à part dans le cadre des programmes de santé, alors il devrait en être de même dans le cadre des programmes sociaux. Nous devrions déterminer comment nous allons cibler des fonds particuliers—pas seulement le transfert social, car de toute évidence, il existe d'autres programmes fédéraux.

    Ce n'est qu'un autre élément que nous devons examiner.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Merci.

    Madame Kraft-Sloan, la parole est à vous.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'aimerais en savoir un peu plus long à propos d'une stratégie nationale en matière de services de garde, en particulier à propos d'un volet s'adressant aux enfants autochtones. Quels éléments, d'un point de vue pratique, seraient très utiles selon vous, surtout pour les enfants autochtones, car ce sont eux qui intéressent le comité? À quoi ressemblerait ce volet et comment estimez-vous qu'il pourrait aider les familles de ces enfants?

    Ma question s'adresse à tous les témoins qui souhaitent répondre.

+-

    Mme Claudette DeWitt: À titre d'exemple, certaines des initiatives que nous avons mises en place à Edmonton consistent en l'établissement d'un partenariat avec les services d'aide sociale à l'enfance. Nous avons établi des partenariats avec certains des services de garde qui se trouvent dans les régions et les collectivités au sein desquelles nous travaillons. Par exemple, si nous sommes à la recherche d'un logement pour une mère et ses cinq enfants, nous pouvons téléphoner au service de garde de notre région, qui réservera cinq places pour deux ou trois jours.

    Le partenariat et l'entraide facilitent notre travail. Cela nous dépanne pendant quelques jours lorsque nous devons trouver un logement ou d'autres soutiens pour les parents avec lesquels nous travaillons. Ce système fonctionne dans nos petites collectivités.

    À l'échelle nationale, nous sommes loin d'en être là, mais le système fonctionne lorsque nous en avons besoin au sein de notre propre collectivité.

º  +-(1600)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Ma circonscription est à la fois rurale et urbaine. Elle se trouve dans la portion nord de la région de York, et à bien des égards, le niveau des services n'est pas le même que dans le sud de cette région. On l'appelle aussi la circonscription du Grand Toronto, mais à de nombreux chapitres, il ne s'agit pas d'une circonscription urbaine. Nous ne bénéficions pas des mêmes services que dans les régions urbaines.

    Si nous comparons un service de garde au centre-ville de Toronto à un autre situé, par exemple, à Gwillimbury-Est où l'on trouve beaucoup de fermes et de personnes qui habitent dans des rangs et où l'accès au transport public constitue un gros problème... Même si vous pouvez vous permettre d'utiliser le transport public, il vous est très difficile d'y avoir accès. Il est certain que les services de garde en milieu rural semblent très différents de ceux qui existent au centre-ville de Toronto.

    J'estime très fortement qu'un programme national de services de garde doit être défini par les collectivités. Certaines collectivités sont caractérisées par leur emplacement géographique, certaines par d'autres éléments.

    Un peuple des Premières nations, les Chippewas, habitent également dans ma circonscription, précisément dans Georgina Island. Cette collectivité est quelque peu isolée, car elle vit dans une île, quoique certains de ses membres habitent également la partie continentale. L'île compte une école publique, mais une fois que les enfants atteignent un certain âge, ils doivent fréquenter une école qui se trouve dans la partie continentale. Cela pose des problèmes lorsque les conditions météorologiques sont mauvaises. Parfois, ces enfants doivent trouver un endroit où rester pendant qu'ils poursuivent leurs études secondaires.

    Vous avez parlé de l'idée d'établir des partenariats avec d'autres prestataires de services communautaires, ce qui favoriserait une certaine souplesse. Les personnes qui feraient appel à ce système n'en auraient pas besoin cinq jours par semaine, 52 semaines par année. Elles en auraient peut-être besoin pendant deux jours pendant qu'elles tentent de trouver une solution à un problème.

    Je me demande quel autre système, outre le partenariat... Certes, la souplesse sur le plan de l'utilisation serait nécessaire. Je veux aussi comprendre comment les aspects de la vie des Autochtones, dont la culture, peuvent être intégrés aux services de garde fournis aux enfants autochtones des régions urbaines.

+-

    Mme Claudette DeWitt: La Ben Calf Robe Society offre aussi un programme d'aide préscolaire aux Autochtones, qu'utilisent un grand nombre des familles avec lesquelles nous travaillons. Bien sûr, des services de garde sont nécessaires pour les enfants d'un certain âge, mais le programme d'aide préscolaire s'adresse aux enfants de trois et quatre ans et vise à les préparer à l'entrée à l'école.

    Je ne peux pas vous dire quels services existent dans les collectivités du nord. Je ne sais pas s'il existe des services de garde ou des programmes d'aide préscolaire.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Je proviens d'une petite collectivité métisse qui habite dans le nord de l'Alberta. Un programme d'aide préscolaire existe dans cette collectivité. Pour que les enfants puissent suivre le programme, nous devons assurer leur transport, sinon, les parents qui ne possèdent pas de voitures ne les amèneraient pas à l'école.

    Il n'existe aucun service de garde dans notre collectivité. Nous ne pouvions même pas nous permettre de mettre un plan en oeuvre.

º  +-(1605)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Comme je l'ai dit plus tôt, je m'interroge sur le rôle que joue la culture dans le cadre des programmes. Certains éléments doivent être pris en compte dans l'élaboration d'une stratégie en matière de services de garde destinés à des collectivités précises. Je me demande si la culture est une question sur laquelle nous devons nous pencher également.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Il s'agit en effet d'une question sur laquelle il faut se pencher, mais la difficulté est que certains peuples autochtones qui vivent en région urbaine ont perdu leur culture. Celle-ci ne fait pas partie de leur quotidien.

    Je ne peux pas parler de l'aspect culturel des services de garde. Mais je peux vous dire que dans le cadre du programme d'aide préscolaire, les activités culturelles font partie de la vie quotidienne des tout-petits et de leurs parents, que nous essayons d'inclure dans ces activités. Chaque classe compte ce qu'on appelle un kokum, qui est une femme âgée qui passe ses journées avec les enfants. Le programme d'aide préscolaire et les activités culturelles qu'offre l'école Ben Calf Robe...

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Susanne, vous avez parlé des dix séances de thérapie, et je crois que nous avons bien compris que ce nombre est insuffisant. La recherche montre que les enfants autochtones dont la mère est dépressive sont plus susceptibles d'éprouver des problèmes sur le plan des aptitudes cognitives et du comportement.

    Le financement de ces dix séances provient-il du ministère de la Santé? Est-ce un programme spécial? D'où provient le financement?

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Tous les parents des enfants qui habitent au foyer pour enfants vivent de l'aide sociale. Alors aux yeux du gestionnaire de cas, ils n'ont droit qu'à dix séances sans plus.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): C'est donc la situation des parents, dans ce cas-ci, qui détermine le nombre de séances de thérapie auxquelles ils ont droit.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Oui.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Êtes-vous au courant d'autres programmes qui existent?

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Non, je n'en connais pas d'autres. Une psychologue clinicienne vient au foyer une fois par semaine. Nous aimerions avoir les moyens de l'embaucher cinq jours par semaine, mais malheureusement nous sommes un organisme à but non lucratif et nous ne pouvons absolument pas payer un psychologue qui serait présent cinq jours semaine.

    La plupart...

+-

    Mme Claudette DeWitt: Je suis désolée.

    J'allais dire qu'en ce qui concerne le financement, nous avons un peu plus de latitude s'il s'agit d'un enfant qui est un Indien visé par un traité. Dans ce cas, la direction des services médicaux assume le financement.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): En ce qui concerne la question du lien qui existe entre la pauvreté et les enfants que le système oublie et qui n'atteignent pas leur plein potentiel, les compétences parentales ont un rôle à jouer. Êtes-vous en mesure de faire suivre un programme de compétences parentales aux parents?

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Allez-y.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Notre organisme offre un programme de formation au rôle de parent. Les parents suivent ce programme, qu'ils aient ou non la garde de leurs enfants. Les enfants, s'ils sont en famille d'accueil, peuvent accompagner leurs parents. Deux membres du personnel sont présents, et les enfants peuvent s'amuser dans une petite salle de jeux pendant que leurs parents suivent le programme. Les parents ont ainsi l'occasion de voir leurs enfants.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Je vois. C'est bien. Merci.

    Madame Lill, vous avez la parole.

º  +-(1610)  

+-

    Mme Wendy Lill: Si vous disposiez de beaucoup d'argent, y a-t-il certains programmes que vous feriez certainement suivre aux parents en raison des bénéfices immédiats qu'ils apportent aux familles et aux jeunes? J'aimerais bien que vous répondiez à cette question.

    En ce qui concerne la racialisation de la pauvreté, je dois vous mentionner qu'il y a vingt ans, j'ai conçu, en tant que journaliste, une série sur la migration des Autochtones dans les régions urbaines. Je me souviens d'avoir interviewé des femmes autochtones très pauvres, qui passaient leurs nuits à se demander d'où allait provenir leur prochain repas, comment la facture de chauffage allait être payée, etc. Toutes les prévisions qui avaient été faites à l'époque à propos de la migration des Autochtones dans les régions urbaines et du niveau de pauvreté ont empiré. Elles se sont avérées et sont devenues encore plus alarmantes.

    Je ne sais pas si on effectue un suivi des personnes et des populations sur le plan de leur état de santé et de l'évolution de cet état. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne pense pas que la situation des personnes que j'ai interviewées à l'époque s'est beaucoup améliorée. Comment le savoir et comment utiliser ces renseignements pour provoquer des changements, faire modifier les priorités de financement et obtenir l'argent et les programmes nécessaires pour renverser cette tendance à la racialisation de la pauvreté?

    Ma question s'adresse à vous, monsieur Anderson, qui êtes statisticien et qui effectuez un suivi à long terme. Disposez-vous du type d'information dont vous avez besoin et pensez-vous que davantage de ressources devraient être consacrées à ce type de suivi afin que nous puissions modifier la politique sociale et obtenir de meilleurs programmes?

+-

    M. John Anderson: Je crois qu'il y a de grandes lacunes en ce qui concerne le suivi. Pour avoir assisté à la Conférence sur la recherche en matière de politique autochtone, qui s'est tenue ici à Ottawa cet automne, et avoir assisté à quelques séances sur les questions touchant l'éducation, je sais que de nombreux élèves autochtones ne font l'objet d'aucun suivi en ce qui concerne les écoles qu'ils fréquentent. Certains conseils scolaires n'ont même aucune idée du nombre d'élèves autochtones qu'ils ont.

    Je sais qu'un des conseils scolaires dans l'Ouest canadien a affirmé qu'il ne fait que commencer à examiner cette question. En outre, des élèves autochtones fréquentent un grand nombre d'écoles différentes dans diverses régions. Je pense certainement que davantage d'information est nécessaire. Il s'agit d'une façon d'assurer un suivi des jeunes Autochtones. Mais selon moi, il faut aussi donner aux institutions autochtones la capacité de faire face à ces questions.

    Si les institutions autochtones ne disposent pas des fonds, de la capacité ni des ressources pour assurer un suivi et faire face à des questions particulières, comme je l'ai mentionné, qui sont propres aux collectivités autochtones en majeure partie, comme la question de la mobilité et des personnes qui vont et viennent entre la ville et la réserve, il est évident que nous risquons davantage de perdre la trace de certaines personnes.

    Nous avons donc besoin de plus de ressources, mais aussi de ressources particulières qui permettront aux personnes qui sont dans des situations vulnérables de faire l'objet d'un suivi.

+-

    Mme Wendy Lill: Avez-vous quelque chose à dire au sujet des programmes qui marchent bien et qu'il faudrait davantage financer et appuyer? De quoi ont besoin les jeunes dont vous vous occupez? Que faut-il vraiment injecter tout de suite dans notre structure d'entraide pour que certains partent du bon pied?

+-

    Mme Claudette DeWitt: Les familles avec lesquelles je travaille bénéficient de l'aide sociale à l'enfance et je préférerais qu'il y ait plus de financement pour la famille biologique et ses enfants, au lieu d'assister au départ des enfants qui sont placés dans une famille d'accueil, avec laquelle nous travaillons, en fin de compte. Je m'aperçois que les familles d'accueil reçoivent parfois plus de soutien. Le financement qu'elles obtiennent pour s'occuper de ces enfants est beaucoup plus élevé que ce que reçoit un parent biologique pour élever ses propres enfants. Par conséquent, l'argent permettant de vivre au quotidien est absolument important.

    Pour ce qui est du counselling, il suffit de placer un enfant dans une famille d'accueil pour qu'il bénéficie immédiatement de séances de counselling; par contre, lorsqu'un parent biologique recherche ces services ou ce financement pour que les enfants restent avec lui, il n'y a pas accès.

º  +-(1615)  

+-

    Mme Wendy Lill: Ce que vous dites est vraiment intéressant, car c'est ce que les parents d'enfants handicapés ne cessent de me dire. Ils obtiendraient beaucoup plus de soutien s'ils plaçaient leur enfant dans un établissement spécialisé; c'est la triste réalité. Il faudrait tout changer, puisque ces façons de procéder vont à l'encontre du but poursuivi, dévaluent la famille, mettent les enfants en danger; c'est un énorme problème.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: J'aimerais que notre foyer pour enfants soit mieux financé, par exemple. Nous sommes autochtones à 100 p. 100 et j'aimerais que plus d'argent soit injecté dans notre foyer pour enfants afin que nous puissions mieux desservir les enfants et leurs familles.

    Nous essayons de travailler avec les parents, de les faire venir pour qu'ils acquièrent quelques compétences. Nous aimerions en fait créer un programme axé sur le comportement des enfants; nous aimerions que le parent vienne au foyer au moment du souper pour apprendre comment traiter avec l'enfant à cette heure-là ou à l'heure du coucher. Nous ne pouvons toutefois pas nous permettre de faire venir les parents, car nous arrivons tout juste à nourrir nos enfants. Nous n'avons pas encore été en mesure de les inviter. Pourtant, dans le passé, nous nous sommes rendus compte que c'est ce qui fonctionnait vraiment bien pour les enfants et les parents, ces derniers venant faire la lecture à l'enfant, acquérir certaines compétences leur permettant ainsi de composer avec le comportement de l'enfant au moment du coucher ou du repas—la routine en quelque sorte—les parents pourraient ainsi s'en charger, ce qui assurerait une certaine cohérence pour l'enfant.

    Nous visons la réunification, mais à cause du manque de financement, nous ne pouvons pas le faire autant que nous le souhaiterions.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Merci pour ces observations.

    Madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Il est cruellement ironique de voir que des gens doivent vivre l'expérience effroyable d'abandonner leurs enfants sous prétexte qu'ils ne peuvent s'en occuper eux-mêmes; il n'y a rien de plus triste.

    Je me demande simplement, madame DeWitt, combien de familles d'accueil sont autochtones?

+-

    Mme Claudette DeWitt: Nous disposons à Ben Calf Robe de 30 lits et nous avons près de dix familles. Sur ces dix familles, deux sont autochtones. Il est difficile de recruter des familles autochtones comme familles d'accueil, car les préjugés sont énormes en ce qui concerne les Autochtones et l'aide sociale à l'enfance. Peu sont disposés à travailler dans ce domaine, et c'est difficile. Des parents éloignés de la famille se proposent parfois pour s'occuper des enfants, sans toutefois suivre un... d'accueil.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Un processus officiel d'accueil.

    Savez-vous si des études ont été faites au sujet des répercussions sur les enfants? Une fois de plus, je m'intéresse davantage aux questions interculturelles, et je sais que certains Autochtones vivant en milieu urbain ont des problèmes d'identité. Je me demande si vous êtes au courant d'études relatives aux problèmes auxquels ces enfants pourraient être confrontés, lorsqu'ils sont placés dans des familles dont le milieu culturel et ethnique n'est pas le même que le leur.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Je ne peux pas vous citer d'études, mais je connais des enfants qui sont placés dans des familles d'accueil non autochtones. Nous essayons de rester en contact avec ces enfants pour simplement apporter un soutien de plus à ces familles. Je peux vous donner l'exemple d'enfants qui se sont retrouvés dans une famille d'accueil—je ne vais pas dire la nationalité—et qui nous ont dit en avoir assez de manger des nouilles, qu'ils aimeraient bien manger les aliments traditionnels qu'ils connaissent comme le pain bannock. Certains enfants qui se retrouvent dans des familles d'accueil non autochtones trouvent la situation très difficile à vivre.

º  +-(1620)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: J'aimerais passer à un autre sujet. On nous dit souvent que parmi les questions auxquelles sont confrontés les Autochtones vivant en milieu urbain, l'accès aux services pose un problème de compétence. Les fonctionnaires provinciaux prétendent que l'accès aux services relève de la compétence fédérale, que le gouvernement fédéral est responsable des Autochtones dans notre pays. Les fonctionnaires fédéraux disent alors que ces Autochtones n'ont pas le statut, ou qu'ils vivent dans une grande ville et que les services dont ils ont besoin relèvent davantage de la compétence provinciale. Je me demande simplement comment, dans votre expérience de travail, le problème de compétence se pose, et si vous êtes en mesure de faire des suggestions pour mieux le régler.

+-

    Mme Claudette DeWitt: En ce qui me concerne, je pense immédiatement au placement familial, car c'est l'endroit où vit l'enfant dans la région d'Edmonton qui détermine le lieu où il va se retrouver, si une famille d'accueil est prête à l'accueillir ou non. Le 1er avril, les régions doivent être légèrement modifiées, ce qui donnera un peu plus de flexibilité.

    À mon avis, si un enfant a besoin d'une famille, il faut le placer là où quelqu'un peut lui offrir un toit. Certains enfants sont dans des chambres d'hôtel avec des travailleurs sociaux. D'autres se retrouvent dans un foyer uniquement parce que la famille de l'autre côté de la rue se trouve au mauvais endroit au plan des compétences et ne peut donc pas l'accueillir. À mon avis, les lignes directrices relatives au lieu du placement ne devraient pas compter; ce qui compte avant tout, c'est que l'enfant soit accueilli dans une famille.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Qu'en est-il de la possibilité d'avoir accès à un service qui pourrait être jugé de compétence provinciale ou fédérale?

+-

    Mme Claudette DeWitt: Une telle possibilité n'existe pas, la question étant de savoir qui doit payer.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Dans notre foyer, il est difficile de faire passer un examen médical ou un examen de la vue aux enfants. Pour un examen de la vue, en particulier, le système provincial d'aide sociale à l'enfance ne veut pas couvrir les frais de lunettes, car l'enfant est un Autochtone visé par un traité, pourtant, un tel statut ne lui permet pas d'être couvert. Au bout du compte, c'est l'enfant qui en fait les frais.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, j'allais dire aux témoins, à M. Anderson en particulier, que nous sommes revenus à l'ancien modèle de transfert... À l'origine, le transfert relatif à la santé était distinct du transfert social, puis les deux ont été combinés en 1995 ou 1996. À partir de l'an prochain, les deux transferts vont de nouveau être séparés; nous aurons donc le transfert relatif à la santé et le transfert social.

    Je pense que cela va donner aux Canadiens la possibilité d'insister davantage sur la responsabilité au plan du transfert social. Beaucoup de travail a été fait dans le domaine du transfert relatif à la santé. Le rapport Romanow découle à de nombreux égards de pressions idéologiques qui se sont exercées dans l'ensemble du pays à propos de la nécessité d'un régime privé de soins de santé. Le rapport Romanow a décrété que non, que ce qui importe, c'est un régime public, universel. Maintenant que le gouvernement dispose de plus d'argent, il peut séparer les deux transferts et il est à espérer que nous allons revenir à une responsabilité plus marquée dans le domaine du transfert relatif à la santé.

    À mon avis, on pourrait s'inspirer du transfert relatif à la santé, notamment en ce qui concerne la responsabilité et certains principes, que l'on pourrait appliquer au régime social. Le régime social se compose d'éléments sociaux et éducatifs, si bien que l'on pourrait mettre l'accent sur la mise en oeuvre de programmes de bien-être social et de services sociaux ainsi que sur celle de programmes éducatifs. L'occasion nous est offerte au Canada d'envisager de nouveaux critères ainsi que des mécanismes de responsabilité plus solides au plan social.

    Je ne sais pas si quelqu'un a quelque chose à dire à ce sujet.

º  +-(1625)  

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Peut-être John veut-il intervenir.

+-

    M. John Anderson: Absolument. C'est exactement ce que nous pensons : nous avons une occasion unique de tenir un débat national sur les questions sociales, comme nous l'avons fait sur les questions de santé. Nous avons la possibilité de mettre au point des mécanismes de responsabilité, de décider comment dépenser les fonds disponibles et de permettre la participation des Autochtones au processus. Tout cela est possible, comme en témoignent les gros progrès réalisés en matière de santé.

    Il serait dommage de rater cette occasion, en disant simplement que nous allons séparer les deux transferts, le transfert social se résumant en un montant d'argent global qu'Ottawa affecterait aux questions sociales. Il faut se pencher sur la question des normes et des lignes directrices à adopter en matière de bien-être social, d'aide sociale.

    Cela ne veut pas dire qu'il ne devrait pas y avoir de flexibilité. Un tel débat est équivalent à celui qui se poursuit au sujet de l'aide à l'enfance où l'on dit que des normes nationales peuvent être fixées tout en permettant une certaine flexibilité de la part des provinces. Les deux concepts ne sont pas nécessairement diamétralement opposés et je pense qu'il faut en fait trouver ce qui est susceptible de fonctionner.

    Dire que nous ne pouvons pas aborder cette question ou qu'elle n'est pas importante et se contenter de laisser ces fonds tels quels serait dangereux non seulement pour les questions sociales en général, mais aussi pour les Autochtones en particulier. Nous avons l'occasion unique d'utiliser des fonds pour régler les problèmes et c'est aux Autochtones de décider la façon dont ils doivent être dépensés.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: J'aimerais savoir maintenant ce qui pourrait servir de moteur à ce débat? Dans le cas du débat sur les soins de santé, c'est une idéologie favorisant un système à deux vitesses, avec un régime privé de soins de santé à côté du régime public, qui a suscité le débat. Il y a eu énormément d'opposition, ce qui a donné lieu au rapport Romanow.

    Je ne sais pas si l'un des témoins, monsieur le président, pourrait nous dire ce qui pourrait servir de moteur à ce débat. J'ai essayé de susciter un tel débat lorsque la politique sociale et la réforme sociale ont été examinées. Au début des années 90 dans ma circonscription, il était impossible de trouver qui que ce soit pour en parler. Comment mobiliser les gens et d'après vous, qu'est-ce qui pourrait permettre de susciter un tel débat? Comment en tant que parlementaires pouvons-nous appuyer le genre de travail que vous faites dans vos collectivités?

+-

    M. John Anderson: L'économie canadienne affiche de très bons résultats par rapport à d'autres pays. D'après les budgets du gouvernement fédéral et de la plupart des gouvernements provinciaux, tout semble aller assez bien. Nous n'avons plus l'excuse de dire que nous ne pouvons nous permettre d'affecter des fonds aux questions sociales importantes. Nous sommes une société très riche, qui s'en sort très bien par rapport à d'autres pays industrialisés.

    Il n'est tout simplement plus acceptable dans une société riche comme celle du Canada d'afficher des taux de pauvreté de plus de 50 p. 100 parmi les Autochtones, des taux de pauvreté de plus de 40 p. 100 parmi les minorités visibles ou les groupes racialisés. Je ne crois pas non plus que ce soit acceptable, non seulement en termes de... Je ne pense pas que ce soit simplement la question des intérêts des Autochtones et des membres des minorités visibles ou des groupes racialisés, même si de toute évidence c'est la plus importante. Je crois également qu'il s'agit d'une question importante pour tous les Canadiens. Nous n'exploitons pas le plein potentiel des citoyens canadiens. Dans notre société, beaucoup de gens sont socialement exclus et si, en fait, nous leur permettions de participer à part entière à la vie de la société, tout le monde en récolterait les avantages.

    Un tel débat doit avoir lieu. Qu'est-ce qui va le déclencher? Eh bien, je ne le sais pas et je ne sais pas non plus s'il va porter sur un seul point. Le débat sur les soins de santé, comme vous le dites, portait sur la question de la privatisation, mais, dans le cas qui nous intéresse, il faut tenir un débat pour savoir si, oui ou non, dans une société riche, nous pouvons tolérer l'exclusion sociale des Canadiens à faible revenu, notamment celle des Canadiens autochtones.

º  +-(1630)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: D'accord, merci.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Pour susciter le débat, je crois qu'il faut partir des collectivités, car la perspective nationale sera complètement différente. Ce dont ont besoin les gens dans une réserve éloignée de C.-B. peut être complètement différent de ce dont ont besoin les Autochtones vivant en milieu urbain dans la région d'Edmonton, ou même dans les régions du nord de l'Alberta. Chaque lieu démographique aura des problèmes distincts et je crois qu'il est important d'être à l'écoute de chaque région du pays. D'un bout à l'autre du pays, la situation sera bien sûr différente.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Madame Lill.

+-

    Mme Wendy Lill: Je voulais simplement poser une autre question sur les services de soutien à la famille. Il me semble que nous savons depuis longtemps que les Autochtones veulent s'occuper eux-mêmes de leurs services sociaux, de leurs services à la famille.

    Vous dites qu'il y a beaucoup de préjugés en ce qui concerne les Autochtones et le régime d'aide à l'enfance. Que pensez-vous des services sociaux, des services à la famille dirigés par des Autochtones? Cela fonctionne dans certaines provinces. Malheureusement, ce n'est pas ce qui se fait dans tout le pays et ce modèle ne bénéficie pas de l'appui du gouvernement fédéral. D'après vous, est-ce qu'un tel système dirigé par des Autochtones fonctionnerait et comment se passent les choses en Alberta?

+-

    Mme Susanne Gudmundson: C'est une excellente idée, selon moi et j'aimerais que plus de services soient dirigés par des Autochtones. Je ne sais pas combien nous en avons à Edmonton, peut-être deux. Je n'en suis pas sûre, mais dans tous les cas, les Autochtones se sentent plus à l'aise lorsqu'ils ont affaire à un travailleur social, un travailleur responsable des familles d'accueil ou un travailleur de soutien autochtone.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Je trouve moi-même difficile de répondre à cela. Il y a des pour et des contre.

    J'ai travaillé pendant un certain temps dans une petite collectivité autochtone, et il est difficile de travailler dans sa propre collectivité, d'y offrir des services sociaux lorsqu'on connaît cette personne et celle-là, que les deux connaissent la dynamique de votre famille. Cet aspect n'est pas évident lorsqu'on offre des services sociaux dans sa propre collectivité.

    Dans la région où nous nous trouvons, dans la région d'Edmonton, comme Suzanne l'a dit, il est beaucoup plus facile pour certaines familles de travailler avec des Autochtones. J'ai déjà participé à des discussions où certains soutenaient que lorsqu'on travaille avec une personne provenant d'une famille de la classe moyenne ou de la classe supérieure, qui est allée à l'université et a eu beaucoup de possibilités, il est difficile de discuter de la dynamique d'une famille autochtone qui vit dans la pauvreté, parce qu'elle ne comprend pas. On peut prendre toutes les formations culturelles possibles lorsque l'on n'est pas Autochtone, mais est-ce que je crois que l'on peut vraiment arriver à comprendre? Probablement pas. C'est difficile.

    Cela répondra-t-il aux besoins de tout le monde et à tous les besoins des gens avec qui nous travaillons? Probablement pas.

º  +-(1635)  

+-

    Mme Wendy Lill: Merci.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Merci.

    M. Larry Spencer vient de se joindre à nous. Il fait également partie de notre comité.

    Larry, on nous a présenté des exposés très éclairants. Vouliez-vous poser des questions aux délégués?

+-

    M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Malheureusement, je n'ai pas eu le plaisir de les entendre, je n'ai donc pas beaucoup de choses à leur demander, puisque je ne sais pas ce qu'ils ont dit.

    Bien entendu, la pauvreté n'est pas un problème exclusif aux collectivités autochtones. D'une collectivité à l'autre, il y a évidemment des différences, mais je crois qu'il est possible de dégager des thèmes communs, les facteurs fondamentaux de la pauvreté. Pouvez-vous nous dire quels sont ces facteurs et comment on tente d'y remédier ou comment on devrait tenter d'y remédier?

+-

    Mme Claudette DeWitt: Je dirais que dans la région d'Edmonton, à tout le moins, le problème le plus grand et le plus commun des personnes qui vivent dans la pauvreté est le logement. C'est le problème numéro un à Edmonton.

    Les taux d'inoccupation sont bas. Lorsqu'on vit de l'aide financière, il est impossible d'en arriver à économiser un dépôt en cas de dommages. On n'en a pas les moyens.

    Je me répète, il n'y a pas de logement. Ce serait probablement le problème numéro un parmi tous les autres.

+-

    M. Larry Spencer: D'accord. Je peux comprendre les répercussions de la pauvreté, je ne suis moi-même pas un homme riche, mais je me demandais quels étaient les facteurs à l'origine de la pauvreté. Peut-être en avez-vous déjà discuté. Il doit y avoir un grand thème, des grands facteurs dont on pourrait s'occuper, qui maintiennent ces gens dans la pauvreté, qui les y mènent et qui les y maintiennent.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Les dépendances sont immenses.

+-

    Mme Susanne Gudmundson: Et le manque d'éducation.

+-

    Mme Claudette DeWitt: Oui.

    En Alberta, aussi, on ne voit pas seulement des dépendances à la drogue ou à l 'alcool, mais une dépendance au jeu, qui y est pour beaucoup dans la situation de certaines des familles avec lesquelles nous travaillons. Je ne sais pas vraiment quel autre facteur ajouter, mis à part les dépendances et le manque d'éducation...

+-

    Mme Susanne Gudmundson: En effet, ce sont de grands facteurs.

+-

    M. Larry Spencer: C'est un fait assez bien connu. Je le savais avant même de vous poser la question.

    Y a-t-il quelque chose qu'il faudrait faire de manière générale pour régler ces problèmes et que notre comité et notre gouvernement devraient se donner pour objectif?

    Jusqu'à maintenant, ce problème semble infini. Les choses semblent même empirer plutôt que de s'améliorer.

    Je vois que Mme Lill hoche la tête. Peut-être sait-elle que les choses s'améliorent.

+-

    Mme Wendy Lill: Non, je pensais à autre chose.

+-

    M. Larry Spencer: Oh, d'accord. J'allais vous dire que si les choses s'amélioraient, je n'en avais pas entendu parler et que je voulais en entendre parler.

    C'est un problème qui persiste depuis la nuit des temps, bien sûr, et il y aura toujours des personnes assez malheureuses pour s'appauvrir, mais ces causes de pauvreté facilement repérables me semble être celles sur lesquelles nous devons nous concentrer vraiment. Pensez-vous que nous le faisons?

+-

    Mme Claudette DeWitt: Je crois—et je ne peux me baser que sur les personnes avec lesquelles nous travaillons—que l'éducation est une réponse à ce problème. L'éducation ne devrait pas être un privilège : tout le monde devrait y avoir droit.

    Lorsqu'on vit dans la pauvreté, l'éducation n'est pas toujours un acquis. Heureusement, dans l'école où nous travaillons, il y a un programme de repas. Les enfants viennent à l'école, où ils reçoivent un déjeuner et un dîner. Ce n'est pas le cas de tout le monde. Il y a beaucoup d'enfants qui manquent l'école parce qu'ils n'ont pas de nourriture à la maison.

    Dans nos écoles, lorsque les chèques de prestation fiscale pour les enfants et les chèques de bien-être social arrivent, l'absentéisme est élevé, parce que les enfants doivent rester à la maison pour avoir leur part du gâteau.

    Bref, à mon avis, l'éducation est un facteur immense.

º  +-(1640)  

+-

    M. Larry Spencer: D'accord. Je pense que c'est tout ce que j'ai besoin de vous demander sans que nous nous frustrions tous.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): J'aimerais seulement poursuivre très brièvement dans la foulée des questions de Mme Kraft Sloan à John, si je peux me le permettre.

    Nous cherchons un modèle idéal, global et axé sur les collectivités; un modèle qui répondrait avec souplesse aux besoins des familles qui ont des enfants de 12 ans et moins; un modèle qui engloberait toute la gamme de problèmes liés au logement, à l'emploi, à la thérapie post-traumatique parfois nécessaire, soit le genre de problèmes qui a été soulevé.

    Votre organisme a fait énormément de recherches et vous allez continuer. Vous avez proposé de tirer parti de la séparation du transfert en matière de santé et de programmes sociaux. Voyez-vous dans votre mandat le rôle de concevoir un modèle qui, comme vous l'avez dit en ce qui concerne les programmes sociaux, relierait les diverses stratégies de garde des enfants, de soutien des personnes invalides, de logement et qui associerait les divers facteurs de pauvreté à des mécanismes pertinents? Fait-il partie du mandat de votre organisme de le faire?

+-

    M. John Anderson: Oui et nous allons justement tenter, dans les prochains mois, de trouver la structure stratégique sociale dont nous avons besoin au Canada. Nous voulons concevoir une vision globale.

    Je crois qu'il nous faut une vision globale en ce moment. Pendant un certain temps, nous nous sommes adressés à différents ordres de gouvernement dans nos efforts pour remédier à toute une série de problèmes. Je pense que nous nous sommes éloignés du modèle global dont nous avons besoin. Je pense qu'il faut maintenant y revenir.

    Pour résoudre les problèmes des Autochtones, il nous faut un modèle stratégique propre aux Autochtones. Il ne fait pas de doute que nous sommes déterminés à travailler en ce sens, mais seulement en partenariat avec des organismes autochtones. Nous nous efforçons donc d'élaborer divers projets de recherche en collaboration avec l'Association nationale des centres d'amitié.

    Voilà le rôle que nous nous voyons jouer dans notre collaboration avec les organismes autochtones. Nous avons des ressources pour établir des stratégies et effectuer des recherches, entre autres choses, et si nous pouvons en faire profiter les organismes des peuples autochtones, je pense que nous pourrons contribuer utilement à régler ces problèmes.

+-

    Le président suppléant (M. Alan Tonks): C'est important, parce que nous sommes en train de nous engager dans cinq projets pilotes qui seront menés d'un bout à l'autre du pays en collaboration avec des groupes autochtones locaux, si je ne me trompe pas. Nos recherches permettront de faire un suivi... et il me semble qu'il y a des liens ou des raccordements très compatibles entre ce que vous faites et ce que nous faisons. J'espère que ce dialogue va aider à enrichir l'initiative que ce sous-comité et que le gouvernement ont prise.

    Larry.

+-

    M. Larry Spencer: Votre question me rappelle une autre question que je voulais poser.

    Puisque vous examinez ces stratégies, dans quelle mesure est-il possible que certains programmes d'éducation visant à aider les gens à se sortir de la pauvreté dans laquelle ils se trouvent soient liés aux services ou dans quelle mesure y sont-ils déjà liés? En d'autres mots, si un enfant se fait garder pendant la journée, le parent doit lui-même recevoir de l'éducation pendant un certain temps, ce qui associe l'éducation à un avantage. Il ne s'agit pas de travailler en vue d'un avantage, mais en même temps, c'est comme le chômage, qui aide les personnes à se préparer à aller chercher plus que des prestations de chômage. Y a-t-il un lien entre ces éléments?

º  +-(1645)  

+-

    M. John Anderson: Voulez-vous répondre en premier? J'ai quelque chose à dire, mais vous pouvez y aller.

+-

    Mme Claudette DeWitt: À Edmonton, nous collaborons en ce sens. Si le parent a besoin d'une garderie pendant qu'il va à l'école ou qu'il participe à des programmes parentaux qui offrent des services de garderie pour les enfants, absolument, les services sont là.

    Nous cherchons toutefois à multiplier les partenariats avec d'autres ressources dans la ville, parce que nous ne voulons pas dupliquer les services, mais travailler avec ceux en place afin d'habiliter les gens à recevoir de l'éducation ou à trouver un emploi s'ils participent à un programme de métier.

+-

    M. John Anderson: Ainsi, cela signifie que nous pourrions certainement, encore une fois, établir des lignes directrices et des normes nationales concernant le bien-être social, que ce pourrait être l'un de nos objectifs, afin que les bénéficiaires de l'aide sociale puissent en même temps acquérir une éducation post-secondaire ou même secondaire. Comme nous le savons, malheureusement, en Ontario ce n'est pas possible. C'est la même chose dans bien d'autres provinces.

    Ce genre de situation est très important. Il faut adopter des stratégies pertinentes.

    Peut-être pouvons-nous nous interroger sur la façon d'établir des liens étroits entre l'éducation et les services de garderie, comme on l'a dit. Le manque d'accessibilité à des garderies abordables mais de grande qualité empêche bon nombres de mères monoparentales de poursuivre les études qu'elles voudraient, parce qu'elles n'ont pas accès à des services de garderie adéquats.

    Il est à espérer que la situation va commencer à changer grâce à la nouvelle initiative fédérale sur les garderies au cours des prochaines années et que les fonds octroyés aux services de garderie augmenteront de sorte que nous puissions commencer à concevoir un programme national de garderies vraiment solide.

    J'aime bien le modèle de la Suède. Le taux de pauvreté des mères monoparentales oscille entre 4 et 6 p. 100, si ma mémoire est bonne, alors qu'il se situe autour de 50 ou de 60 p. 100 au Canada. L'une des grandes différences entre nos deux pays, c'est que la Suède s'est dotée d'un programme national de garderies réglementées.

    Nous connaissons quelques solutions. Il ne s'agit pas de physique quantique. Les solutions que nous pouvons appliquer pour remédier à ces problèmes sont plutôt faciles à trouver. On peut même les voir à l'oeuvre dans d'autres pays. Je crois que je viens tout juste d'en mentionner quelques-unes.

    Si le gouvernement fédéral prenait le leadership pour renforcer le lien entre l'éducation et l'aide sociale dans certains cas et qu'il permettait aux personnes d'y participer, ce serait évidemment un grand pas vers l'avant pour beaucoup de personnes qui aimeraient se libérer de l'aide sociale, mais qui auraient besoin de parfaire leur éducation.

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    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Ces statistiques sont vraiment choquantes.

    Y a-t-il d'autres questions du comité?

    Karen.

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    Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur Anderson, j'aimerais vous féliciter pour l'ensemble de votre publication, mais j'aimerais m'arrêter au chapitre sur la qualité de l'environnement des enfants. J'estime très important de tenir compte de ces facteurs lorsqu'on étudie la santé et le bien-être des enfants, parce qu'il est parfois difficile de parler de la contamination de l'environnement et de ses effets sur les enfants.

    J'ai travaillé beaucoup avec la Conférence circumpolaire inuite. Les Inuits s'inquiètent beaucoup des effets des contaminants sur les aliments d'un pays.

    Notre président est le secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, il siège au Comité de l'environnement et a participé à divers débats de notre comité.

    Prenons l'exemple d'une substance chimique considérée comme un polluant organique persistant. Cette substance crée des troubles neurologiques, des problèmes de comportement et une réduction du QI. Si l'on s'arrête aux enjeux de la justice environnementale, très souvent les peuples autochtones sont exposés à beaucoup de contaminants, parce qu'ils vivent dans des parties du Canada qui ne sont pas les endroits les plus sûrs où habiter pour ce qui est de la qualité de l'eau potable et de la présence de divers contaminants. Cela a des effets sur les enfants. Cela a des effets sur les foetus. Cela a des effets sur la capacité d'un enfant de se débrouiller, sur sa réussite scolaire et sur toutes sortes d'autres choses.

    C'est un autre point d'inquiétude, donc je tiens à vous remercier de l'inclure dans ce chapitre.

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    Le président suppléant (M. Alan Tonks): Vous pouvez voir d'après les questions du comité que nous partageons clairement le sentiment que nous avons une mission à accomplir pour offrir aux enfants et aux familles autochtones un accès plus transparent aux services qui leur garantiront—à titre de droit—qu'ils font maintenant partie du noyau de notre société.

    Au nom de John Godfrey, qui est le véritable président de notre comité mais qui est sur la route, comme on dit—je crois qu'il effectue une tournée de Premières nations ou de responsables de projets autochtones—je vous remercie beaucoup d'être venus ici. Je sais qu'il aurait été très satisfait des exposés qui ont été présentés et de la qualité du dialogue qui s'est tenu. Je vous remercie donc beaucoup. Nous l'apprécions.

    La séance est levée.