CC38 Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité législatif chargé du projet de loi C-38
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 31 mai 2005
¹ | 1535 |
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)) |
Mme Marie Clarke Walker (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada) |
¹ | 1540 |
Le président |
M. Dennis Stimson (membre, Parents, Familles et Amis des Gais et Lesbiennes (Canada)) |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
Le président |
M. Philip Horgan (président, Ligue catholique pour les droits de l'homme) |
M. Richard Bastien (directeur, Région de la capitale nationale, Ligue catholique pour les droits de l'homme) |
¹ | 1555 |
M. Philip Horgan |
º | 1600 |
Le président |
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.) |
º | 1605 |
º | 1610 |
Le président |
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC) |
º | 1615 |
M. Philip Horgan |
º | 1620 |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
M. Philip Horgan |
M. Richard Marceau |
M. Philip Horgan |
º | 1625 |
M. Richard Marceau |
M. Pat O'Brien |
Le président |
M. Richard Marceau |
M. Philip Horgan |
M. Richard Marceau |
M. Philip Horgan |
M. Richard Marceau |
M. Philip Horgan |
M. Richard Marceau |
Le président |
º | 1630 |
M. Philip Horgan |
Le président |
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD) |
M. Philip Horgan |
M. Bill Siksay |
M. Philip Horgan |
M. Bill Siksay |
M. Philip Horgan |
M. Bill Siksay |
M. Bill Hawke (membre, Parents, Familles et Amis des Gais et Lesbiennes (Canada)) |
º | 1635 |
M. Bill Siksay |
Le président |
M. Bill Siksay |
Mme Sue Genge (représentante nationale, Condition féminine et droits de la personne, Congrès du travail du Canada) |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.) |
Mme Marie Clarke Walker |
º | 1640 |
Mme Sue Genge |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mme Marie Clarke Walker |
L'hon. Paul Harold Macklin |
º | 1645 |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
M. Philip Horgan |
Le président |
M. Mark Warawa (Langley, PCC) |
º | 1650 |
M. Philip Horgan |
M. Mark Warawa |
M. Philip Horgan |
M. Mark Warawa |
M. Pat O'Brien |
º | 1655 |
Le président |
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.) |
M. Dennis Stimson |
M. Michael Savage |
M. Dennis Stimson |
M. Michael Savage |
M. Dennis Stimson |
M. Michael Savage |
M. Bill Hawke |
M. Michael Savage |
M. Bill Hawke |
M. Michael Savage |
Le président |
M. Bill Siksay |
» | 1700 |
M. Philip Horgan |
M. Bill Siksay |
Le président |
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.) |
M. Richard Bastien |
» | 1705 |
Mme Françoise Boivin |
M. Richard Bastien |
Mme Françoise Boivin |
M. Richard Bastien |
Mme Françoise Boivin |
M. Richard Bastien |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
» | 1710 |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
M. Bill Hawke |
M. Brian Jean |
M. Bill Hawke |
M. Brian Jean |
M. Bill Hawke |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Mme Marie Clarke Walker |
M. Brian Jean |
Le président |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
M. Philip Horgan |
» | 1715 |
L'hon. Don Boudria |
M. Philip Horgan |
L'hon. Don Boudria |
M. Philip Horgan |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
L'hon. Don Boudria |
M. Philip Horgan |
Le président |
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle) |
M. Pat O'Brien |
» | 1720 |
M. Andrew Scheer |
M. Bill Hawke |
M. Andrew Scheer |
M. Bill Hawke |
M. Andrew Scheer |
M. Bill Hawke |
M. Andrew Scheer |
M. Bill Hawke |
M. Andrew Scheer |
M. Bill Hawke |
M. Andrew Scheer |
M. Pat O'Brien |
M. Andrew Scheer |
Le président |
M. Mark Warawa |
» | 1725 |
M. Philip Horgan |
M. Mark Warawa |
Le président |
M. Andrew Scheer |
M. Philip Horgan |
» | 1730 |
Le président |
CANADA
Comité législatif chargé du projet de loi C-38 |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 31 mai 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1535)
[Français]
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)): Bon après-midi. Bienvenue au Comité législatif chargé du projet de loi C-38.
[Traduction]
Nous sommes très contents de vous accueillir ici cet après-midi. Nous commencerons par vos déclarations. La première sera celle du congrès du travail du Canada, suivie du groupe PFAGL soit parents, familles et amis des gays et lesbiennes, suivie de la ligue catholique pour les droits de l'homme et, en quatrième lieu, M. O'Brien, puisqu'il est très patient et qu'il connaît nos habitudes.
Vous avez dix minutes pour présenter votre exposé, dix minutes maximum, puis nous passerons aux questions. Pendant la première ronde, chaque partie aura droit à sept minutes puis nous passerons à la ronde des questions de cinq minutes, en alternant, entre l'opposition et le parti ministériel.
[Français]
On va commencer par Mme Clarke Walker et Mme Genge, du Congrès du travail du Canada. Vous avez 10 minutes.
[Traduction]
Mme Marie Clarke Walker (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada): Merci.
Nous donnons un exposé, mais nous veillerons à envoyer un texte écrit au comité, en anglais et en français.
Je m'appelle Marie Clarke Walker et je suis vice-présidente exécutive du Congrès du travail du Canada. Je suis accompagnée de Sue Genge, notre représentante nationale pour les femmes et les droits de l'homme.
Le Congrès du travail du Canada représente plus de trois millions de travailleurs canadiens tant du secteur public que du secteur privé, dans chaque province et territoire du pays. Nous comprenons que les audiences du comité sont absolument nécessaires mais nous vous encourageons à agir aussi rapidement que possible puisque toutes les positions et tous les arguments ont déjà été entendus au cours des dernières années. Voilà pourquoi nous ne parlerons pas longtemps.
Nous sommes ici pour manifester notre appui au projet de loi C-38, puisque c'est une loi qui à notre avis est conforme à notre charte. Le Congrès du travail du Canada et bon nombre de ses affiliés, notamment les Travailleurs canadiens de l'automobile ; le Syndicat canadien de la fonction publique ; le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, les Métallurgistes unis d'Amérique, le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale et bien d'autres sont en faveur de droits égaux au mariage.
Depuis longtemps, le mouvement syndical a adopté une politique qui s'oppose à toutes formes de discrimination et notre appui à un projet de loi qui respecte les droits de tous en est une conséquence légitime. En 1994, nous avons eu un débat approfondi sur la politique se rapportant à l'orientation sexuelle et nous avons alors confirmé notre position. Dans un peu plus d'une semaine et demie, nous tiendrons un autre congrès où nous confirmerons de nouveau notre position sur la question du mariage entre conjoints de même sexe et sur les droits des homosexuels.
Nous exhortons le comité à mettre à profit l'engagement pour l'égalité qui est si répandu. La loi est claire, les lesbiennes et les hommes gays ne doivent pas faire l'objet de discrimination. Le gouvernement a reconnu son obligation de promouvoir l'égalité et l'acceptation de tous, ce qui comprend les hommes gays et les lesbiennes. Les couples de même sexe qui ont obtenu un accès égal à bon nombre d'avantages sociaux importants et qui ont accepté aussi de nombreuses responsabilités sociales seraient injustement empêchés d'obtenir la reconnaissance légale de leur mariage.
Si c'était le cas, si le projet de loi n'était pas adopté, presque 90 p. 100, en fait 89 p. 100 de la population aurait toujours le droit de se marier, mais 11 p. 100 ne l'aurait pas. C'est un sujet de préoccupation. On créerait un système d'inégalité, puisque dans les provinces où les tribunaux ne se sont pas prononcés, la discrimination serait permise. C'est indéfendable.
L'inégalité des droits au Canada sème la confusion chez tous. Nous représentons des travailleurs qui déménagent d'une province l'autre. Sans le projet de loi C-38, le mariage d'un travailleur ontarien qui déménage au Nouveau-Brunswick pourrait ne pas être reconnu. Il y a aussi dans nombre de conventions collectives des droits relatifs au mariage qui ont été obtenus de haute lutte par nos membres, par exemple le congé de mariage. S'il n'y a pas une loi pour l'ensemble du pays, certains y auront accès et d'autres pas. Nous ne voulons pas perdre du terrain.
Comme les couples hétérosexuels, les couples homosexuels peuvent vivre une rupture. Sans le projet de loi C-38, il y a une inégalité en droit, puisque l'Ontario est la seule province où le divorce est permis. Cela crée aussi une occasion d'invoquer la clause dérogatoire, un dangereux précédent pour les droits des minorités et pour les droits garantis à tous par la Charte.
Nous exhortons le comité à prendre la décision qui s'impose, à assumer sa responsabilité sociale et juridique et à recommander l'adoption du projet de loi C-38 pour que la Loi fédérale sur le mariage soit conforme à la Charte, et à le faire avant le congé estival de la Chambre.
Nous vous remercions d'avoir pris le temps de nous écouter, et nous espérons une réaction positive.
¹ (1540)
Le président: Merci.
Monsieur Stimson ou monsieur Hawke.
M. Dennis Stimson (membre, Parents, Familles et Amis des Gais et Lesbiennes (Canada)): Monsieur le président, honorables membres du comité, je m'appelle Dennis Stimson et je comparais devant vous cet après-midi en compagnie de mon épouse Diana, et de Gail et Bill Hawke. Nous sommes tous depuis longtemps membres de PFLAG Ottawa. J'entreprends également ma troisième année en tant que membre de PFLAG Canada où je suis l'un des deux représentants de la région du Nord de l'Ontario et je suis membre du conseil d'administration de PFLAG Canada.
PFLAG Canada anciennement « Parents, Families and Friends of Lesbians and Gays », est un organisme national qui s'occupe des problèmes relatifs à l'orientation et à l'identité sexuelles sous l'angle de la famille, en fournissant son soutien et des ressources et en transmettant des connaissances. Dans tout le Canada, nos bénévoles ouvrent leur coeur et leur foyer avec compassion, ils donnent gratuitement leur temps et sont à l'écoute des personnes en situation de crise.
Avant de vous parler de notre propre famille, j'aimerais vous lire un article rédigé par Eldon Hay, membre de PFLAG Moncton, du Nouveau-Brunswick. Cet article s'intitule comme suit : Qu'ils soient hétérosexuels ou gais, mes fils ont des droits (Straight or Gay, My Sons Have Rights).
Le débat sur le mariage des personnes de même sexe est si intense en partie parce que ce n'est que récemment que les termes comme « gai » et « lesbienne » sont utilisés poliment. Pendant des siècles, les attitudes et la terminologie reliées au terme « homosexuel » et à ses équivalents étaient négatives - des attitudes comme la honte, le déshonneur et le dégoût; des termes comme le mal, abominable et le péché. Ces attitudes et ces termes sous-tendent toujours le débat, peut-être davantage parmi les personnes religieuses, mais également chez celles qui ne le sont pas. |
Un homme avait deux fils, dont l'un était hétérosexuel et l'autre gai. Cet homme, c'est moi. Je suis un pasteur protestant de race blanche et d'origine anglo-saxonne. Voici comment je vois cette question : un père est le point d'appui de ses enfants. |
L'homosexualité est-elle une abomination? À ce sujet, il est faux de dire que l'un ou l'autre de mes fils est pécheur à cause de son orientation sexuelle. Il est possible qu'ils soient tous deux pécheurs, s'ils utilisent leur sexualité de façon égoïste et égocentrique. Mais tous deux peuvent être des cocréateurs avec Dieu, si leur sexualité exprime leur amour, leur confiance envers leur partenaire, leur compassion et leur passion pour celui-ci, en s'ouvrant à une collectivité plus large dans laquelle ils assument des responsabilités et fournissent des services. |
Est-on gai par choix? Mes fils n'ont pas plus choisi leur orientation sexuelle que la couleur de leurs yeux. Dans une large mesure, leur orientation sexuelle leur était donnée dès leur naissance. L'influence de leur milieu et de leur famille a peut-être facilité la confirmation de leur orientation à l'âge adulte, mais il est déraisonnable de s'attendre à ce que l'un ou l'autre change. Je crois que les tentatives de ce type sont nuisibles et ne sont habituellement pas durables à long terme. |
Mes fils peuvent-ils demeurer célibataires? Ils peuvent naturellement prendre une décision en ce sens. Mais en tant que père croyant, je ne peux obliger ni l'un ni l'autre à demeurer célibataire. J'estime que la sexualité est un don et j'incite à l'exprimer en établissant une relation avec un seul partenaire gai ou hétérosexuel. |
Il écrit plus loin :
Il est déraisonnable que l'orientation de l'un ou de l'autre l'empêche d'exercer normalement une profession, d'obtenir des promotions et une pension. Les droits, les responsabilités et les libertés de mon fils hétérosexuel devraient être les mêmes que ceux de mon fils gai. |
Et ensuite :
J'estime qu'il est injuste que mon fils hétérosexuel adulte puisse se marier, mais pas mon fils gai. La Charte canadienne des droits et libertés donne sûrement à chacun d'eux la possibilité de se marier. L'un de mes fils peut vivre avec un partenaire sans se marier. Il peut prendre cette décision et c'est son droit. |
J'apprécie que la liberté de religion existe dans notre pays - c'est un autre bienfait inappréciable que nous procure la Charte. Il ne fait aucun doute que les autorités religieuses opposées au mariage des personnes de même sexe ont le droit de refuser que des mariages de ce type soient célébrés dans leurs lieux de culte. D'autre part, les groupes religieux qui reconnaissent aux couples de même sexe la capacité de contracter mariage ont le droit d'utiliser leurs lieux de culte pour célébrer leur mariage. |
De toute façon, des fils choisissent eux-mêmes leur confession religieuse. Les couples gais et hétérosexuels peuvent contracter mariage devant un fonctionnaire de la cour lorsqu'ils n'ont pas de convictions religieuses ou que cela fait leur affaire - mais dans certaines administrations (par exemple, au Nouveau-Brunswick où j'habite), les couples de même sexe ne peuvent contracter un mariage civil. J'espère sincèrement qu'après l'adoption du projet de loi, les couples gais et hétérosexuels pourront se marier et je prie avec ferveur pour que cela se produise. |
En ce qui concerne les « valeurs familiales », j'aime et je respecte mon fils homosexuel et mon fils hétérosexuel. J'aime et je respecte également leur partenaire respectif. Ils font tous partie de ma famille étendue. L'amour partagé, l'intégrité, la responsabilisation, l'équité et l'égalité sont sûrement d'authentiques valeurs familiales. |
¹ (1545)
Voilà qui termine l'article de Eldon.
J'aimerais vous distribuez quelques photos pour que vous mettiez un visage sur ce problème, que vous voyez les personnes qui sont touchées. Il s'agit de photos du mariage de mon fils, ou de sa cérémonie d'engagement, ainsi que d'une réunion familiale l'été dernier.
Ma femme Diana et moi-même comparaissons devant vous aujourd'hui parce que nous ne pouvons plus faire partie de la majorité silencieuse. La question en jeu est beaucoup trop importante pour nous pour que nous nous contentions d'être des observateurs passifs, que nous nous bornions à espérer et à prier pour que le projet de loi sur le mariage des personnes de même sexe soit adopté sans que nous exprimions publiquement notre appui.
Au cours des prochaines semaines, vous serez inondés d'information présentant les deux côtés de la médaille, parfois des faits documentés, parfois des choses présentées comme des faits et parfois aussi des arguments non fondés sur des faits, ou si peu. Vous recevrez les témoignages d' experts—à la Défense nationale, c'est ainsi qu'on appelait ceux qui devaient faire plus de 50 kilomètres pour venir ici—mais aussi de personnes qui ont une expérience de la question, personnelle ou professionnelle. Ce dont je vais vous parler, vous ne le trouverez probablement pas sur Google.
Je ne vais pas passer beaucoup de temps à vous rappeler que d'après un article sur l'origine du mariage paru dans la revue The Week du 2 mai 2004, on disait que le mariage remontait probablement à 4 350 ans. Le premier mariage officialisé, entre un homme et une femme, remonte à 2350 avant Jésus-Christ, en Mésopotamie. Non, je vais plutôt vous dire ce que signifie le mariage entre conjoints de même sexe pour notre famille.
Je ne vais pas non plus consacrer beaucoup de temps à vous dire que, d'après le même article, les mariages homosexuels même s'il n'était pas nécessairement courants ne sont pas non plus absents de l'histoire. Ainsi, l'empereur Néron, qui a régné de l'an 54 à l'an 68 aurait épousé deux fois des hommes, dans des cérémonies officielles et aurait forcé la cour impériale à les traiter comme s'ils étaient ses femmes. L'article disait aussi :
Dans une cérémonie du rite grec orthodoxe du XIIIe siècle, soit la consécration de l'union de même sexe, le célébrant demandait à Dieu d 'accorder aux participants la grâce de s'aimer et de ne pas être détestés ni la cause de scandale, le reste de leurs jours, avec l'aide de la Sainte mère de Dieu et de tous ses saints. |
L'article ne mentionne pas, mais l'heureux couple c'étaient Saint Serge et Saint Bacchus.
Je vais vous dire qu'au début, le mariage était un contrat par lequel un homme prenait possession de sa femme et de ses enfants; il en était propriétaire. Depuis, le mariage n'a cessé d'évoluer, au fil des siècles. Le sens qu'on lui donne dépend beaucoup de l'époque où l'on vit, du lieu où l'on vit, de l'éducation qu'on a reçu et des expériences qu'on a vécues.
Mon épouse et moi-même formons un couple heureux depuis près de 42 ans. Nous sommes des membres fidèles de notre Église (l'Église anglicane) et pour nous, il n'y a pas de conflit entre la sexualité de nos deux fils et notre relation avec Dieu. Dieu nous a commandé de nous AIMER. Notre Dieu n'évite pas les êtres qu'Il a créés, Il ne les condamne pas, Il n'établit pas de discrimination entre eux, Il ne favorise pas la haine et la violence envers eux.
Dieu nous a donné nos deux fils pour que nous les élevions comme Il les a créés, pas pour que nous essayions de les changer pour qu'ils correspondent à ce que quelqu'un d'autre pense qu'ils devraient être. Nous ne sommes pas sur le point de remettre en question les dons du Créateur. Nous aimons nos enfants, nous en prenons soin et nous les soutenons, tels que Dieu nous les a donnés.
Depuis 21 mois, notre fils aîné Jeffery et son conjoint Denis ont contracté un mariage légal et rien ne nous a indiqué que ce mariage a porté préjudice à qui que ce soit. D'autre part, ce mariage a placé Jeffery et notre gendre sur un pied d'égalité avec nous et toutes les autres personnes mariées. En tant que membres d'une famille chrétienne, nous ne pourrions être plus heureux.
Ma mère âgée de 86 ans est membre très pratiquante de l'Église baptiste du Sud. Comme vous pouvez l'imaginer, son Église a des opinions très tranchées sur ces questions. Mais avec la sagesse acquise pendant 86 ans passés sur la terre, elle soutient Jeffery et Denis et leur accorde sa bénédiction. Elle est même venue de Victoria pour la cérémonie. Elle croit que ces questions sont entre les mains de Dieu et que nous, qui sommes ses créatures, ne devons pas formuler de jugement sur elles.
L'an dernier, nos fils et leur partenaire respectif ont accompagné Diana et moi-même à une grande réunion de la famille de ma mère. Il n'y avait pratiquement que des baptistes du Sud à cette réunion. Ils n'ont pas seulement été acceptés, mais ils ont été accueillis chaleureusement et on leur a fait sentir qu'ils faisaient partie de la famille.
¹ (1550)
Ce qui est ironique, c'est que contrairement à ce que certains organismes vous feraient croire, nous n'avons pas entendu dire que le fait de communiquer avec les membres de notre famille a entraîné la rupture d'un mariage ou porté atteinte à la structure morale de la famille de qui que ce soit.
Notre famille composée de Diana et de moi-même, de notre fils Jeffery et de son mari Denis, de notre fils David et de son partenaire Robert, passe probablement plus de temps ensemble que plusieurs d'entre vous avec votre propre famille. En plus de petites réunions informelles, nous nous réunissons pour fêter les anniversaires de naissance, la Fête de mères, la Fête des pères, Pâques, Noël, le Nouvel An, le jour de l'Action de grâce et d'autres occasions spéciales. Nous estimons que nous formons une famille traditionnelle dont les valeurs sont traditionnelles.
Notre gendre Denis nous a parlé d'une discussion qu'il avait eue avec notre fils Jeffery la veille de leur mariage. Denis a demandé à Jeffery ce qu'il souhaitait dans la vie. Jeffery lui a répondu simplement qu'il voulait posséder une maison entourée d'une clôture en lattes peintes en blanc comme celle de ses parents. Lorsque nous l'avons appris, Diana et moi avons été remplis de fierté et d'émotion. Notre fils avait une si haute opinion de notre famille qu'il voulait se modeler sur elle. Qu'est-ce qu'un père ou une mère peut demander de plus?
Le président: Merci, Monsieur.
Je cède maintenant la parole à la Ligue catholique pour les droits de l'homme.
[Français]
Monsieur Horgan ou monsieur Bastien.
[Traduction]
M. Philip Horgan (président, Ligue catholique pour les droits de l'homme): Merci, monsieur le président.
Je suis heureux d'être ici aujourd'hui, bien que je sois un peu mécontent du fait que nous avons demandé à comparaître devant votre comité il y a plusieurs mois, mais qu'on ne nous a donné que 24 heures d'avis pour notre témoignage aujourd'hui. J'ai dû reporter une comparution devant le tribunal et un engagement que j'avais pris à prononcer un discours dans le cadre d'une conférence sur la bioéthique à Toronto pour être ici; les organisateurs de la conférence sur la bioéthique ont compris l'importance de ce débat et de ma présence à vos audiences aujourd'hui. Mais je crains que bien d'autres témoins ayant demandé à comparaître devant votre comité ne puissent modifier leur emploi du temps pour le faire.
Je suis accompagné de Richard Bastien, directeur de notre section de la capitale nationale, qui vous présentera nos remarques. Pour ma part, je traiterai des déclarations qui ont été faites lors de vos audiences précédentes et selon lesquelles les autorités religieuses du pays s'inquiètent sans raison que l'on empiète sur la liberté de conscience ou de religion en passant en revue certaines affaires.
Monsieur Bastien.
[Français]
M. Richard Bastien (directeur, Région de la capitale nationale, Ligue catholique pour les droits de l'homme): Comme M. Horgan l'a mentionné, il exposera les vues de la Ligue catholique pour les droits de l'homme concernant le projet de loi C-38, et je me contenterai de rappeler très brièvement les principes fondamentaux qui sous-tendent notre position. Ces principes sont au nombre de sept.
Premièrement, le mariage est une institution qui transcende les cultures et les époques.
Deuxièmement, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme. De tout temps, la définition canadienne du mariage a été l'union d'un homme et d'une femme, sa fonction principale étant de promouvoir l'unité biologique de personnes de sexe opposé comme fondement naturel de la famille.
Troisièmement, le mariage est centré sur les enfants. Le mariage est une institution centrée non pas sur l'adulte mais sur l'enfant. Personne n'a le droit d'adopter une politique redéfinissant le mariage de manière à imposer délibérément à un enfant un foyer sans père ou sans mère.
Quatrièmement, le mariage se fonde sur quatre conditions. Le mariage est une structure sociale reposant sur quatre conditions visant le nombre, le genre, l'âge et l'inceste. On ne peut épouser qu'une personne à la fois. Les personnes qui se marient doivent être de sexe opposé. Elles doivent avoir atteint un certain âge. Elles ne doivent pas être consanguines. Ces conditions ont pour objet d'assurer le bien-être de l'enfant, de la famille et de la société. La suppression de l'une de ces conditions met en péril la stabilité de l'ensemble.
Cinquièmement, le mariage est plus qu'une affaire d'égalité. Toute politique gouvernementale est délibérément préférentielle. Si on veut une pension alimentaire pour enfant ou une prestation d'ancien combattant ou de personne mariée, il faut satisfaire à certaines conditions. L'absence d'égalité, au sens où on l'entend dans le contexte du débat sur le mariage homosexuel, ne peut donc être opposée à ces politiques.
Sixièmement, le mariage est plus que l'amour. Le fait que deux personnes disent s'aimer ne suffit pas à justifier le droit aux avantages que l'État accorde aux couples mariés. La seule forme d'amour susceptible d'être liée à l'intérêt public est l'amour entre deux personnes satisfaisant aux quatre conditions que je viens d'énoncer.
Septièmement, il n'appartient pas à l'État de redéfinir le mariage. Le mariage est issu de coutumes et de croyances séculaires qui sont antérieures aux États et qui sont indispensables au maintien du tissu social. Toute tentative des pouvoirs publics de modifier le mariage en amenuisant la relation père-mère-enfant au profit de la relation État-citoyen usurpe les libertés des citoyens et porte atteinte à la loi naturelle.
Je vous remercie.
¹ (1555)
[Traduction]
M. Philip Horgan: Il sera impossible de redéfinir le mariage sans créer de conflit avec les croyances religieuses et morales de la plupart des Canadiens.
Le projet de loi C-38 a déjà soulevé des questions de conscience chez les parlementaires et ministres qui se sont fait dire de voter selon les consignes de leur parti, sans égard pour leurs opinions personnelles. Déjà, on a remis en question le droit de particuliers et d'organisations de refuser de célébrer des mariages entre conjoints de même sexe ou de louer des installations à cette fin.
Passons en revue brièvement certains de ces cas. Les Chevaliers de Colomb de Port Coquitlam ont été persécutés devant la Commission des droits de la personne de la Colombie-Britannique à ce sujet. Les commissaires au mariage de quatre provinces risquent de perdre leur emploi s'ils refusent de célébrer les mariages entre conjoints de même sexe.
Monseigneur Henry a fait l'objet d'attaques et d'une plainte relative aux droits de la personne pour avoir écrit une lettre dans le cadre de ses activités pastorales et l'avoir fait publier dans un journal de Calgary.
Des corporations professionnelles s'en prennent à des citoyens ordinaires. Ainsi, Chris Kempling a fait l'objet de mesures disciplinaires de la part du Collège des enseignants de la Colombie-Britannique pour avoir écrit une lettre à un journal et s'être identifié comme enseignant.
Des problèmes surgissent même dans d'autres domaines : la partenaire lesbienne de la mère biologique d'un enfant, en Ontario, dans ce qu'on appelle l'affaire des trois parents, s'est adressée à la Cour d'appel de l'Ontario pour faire redéfinir la notion de parents et l'emploi de ces désignations dans la société canadienne.
Si on croit que la Constitution offre suffisamment de protection, je n'ai qu'à mentionner Marc Hall. On a outrepassé à la protection que confère à la Constitution aux écoles catholiques en Ontario pour lui permettre de se faire accompagner de son partenaire de même sexe au bal de fin d'études secondaires.
Nous assisterons à d'autres attaques semblables à l'avenir. D'ailleurs, notre organisation a été informée qu'une plainte de crime motivé par la haine a été déposée contre elle à la police de Toronto simplement parce qu'elle a publié une brochure décrivant sa position sur le mariage.
Si le Parlement prend vraiment au sérieux la liberté de religion et sa protection, il ne peut adopter ce projet de loi qui est fallacieux. Si le Parlement veut véritablement protéger la liberté de religion et de conscience, il doit agir dans les domaines où il a compétence, notamment l'impôt sur le revenu, le droit pénal et l'octroi du statut d'organisme de bienfaisance pour les organisations religieuses et autres.
Si ce projet de loi est adopté, nous avons de bons motifs de craindre que son application n'entraîne des litiges, de l'angoisse et de fortes dépenses pour les organisations religieuses et autres qui voudront défendre la liberté de conscience et de religion qu'ils chérissent.
Je serais maintenant heureux de répondre à vos questions et à vous donner plus de détails sur ces points.
º (1600)
Le président: Merci, Messieurs Bastien et Horgan.
Je cède maintenant la parole à M. Pat O'Brien, député de London—Fanshawe.
Monsieur O'Brien, vous avez la parole.
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Merci, monsieur le président. Je dois avouer que j'ai davantage l'habitude de présider ce genre d'audiences que d'y témoigner. C'est probablement la première fois que je m'assois à ce bout-ci de la table. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant votre comité qui m'a demandé de témoigner, ce que j'ai accepté avec plaisir. J'aimerais d'abord décrire le... contexte, qui est probablement le mot juste, monsieur le président.
Premièrement, j'ai exprimé mon opinion personnelle à maintes reprises publiquement, y compris à la Chambre des communes. J'estime qu'une personne, quelle que soit son orientation sexuelle, mérite d'être traitée avec dignité et respect. Mes prises de position antérieure lors de votes le confirment. Toutefois, cela ne signifie pas et ne doit pas signifier que nous devons redéfinir l'institution fondamentale qu'est le mariage afin que tous soient traités avec dignité et respect.
J'affirme depuis au moins 1998, par écrit et en public, que ma conscience ne me permet pas d'appuyer la redéfinition du mariage. J'ai été attaqué quelques fois—non pas par des personnes bien informées, mais j'ai été attaqué quelques fois, comme l'ont été d'autres députés, comme l'ont été les tenants de l'autre camp. On m'a accusé d'homophobie. C'est une accusation qu'on s'est souvent empressé de porter contre moi au Comité de la justice où j'ai siégé de juin à février 2003.
Personne ne m'a traité d'homophobe quand j'ai appuyé le projet de loi sur les crimes motivés par la haine qui ajoutait l'orientation sexuelle au motif prévu par la loi, car je sais, à l'instar de la plupart des Canadiens, que c'est la triste réalité, qu'il arrive au Canada qu'on fasse l'objet d'attaque violente en raison de son orientation sexuelle. Les Canadiens de bonne volonté sont tout simplement horrifiés et dégoûtés par cela, et c'est pourquoi j'ai appuyé ce projet de loi. Il est ironique qu'on ne m'ait pas traité d'homophobe alors, mais que je l'ai été quelques fois depuis par quelques personnes qui me laissent indifférent en raison de la nature de leur accusation. Pourquoi? Parce qu'il s'agit ici d'une question de conscience qui, à mes yeux, l'emporte sur toute considération politique.
De février à juin 2003, j'ai eu le plaisir de siéger au Comité de la justice après avoir été secrétaire parlementaire du ministre du Commerce pendant deux ans et demi. Je ne l'avais pas demandé, mais il est intéressant qu'on m'ait demandé de siéger à ce comité. J'ai eu le plaisir de me joindre à des collègues comme M. Ménard et M. Macklin—ce sont les deux seuls députés que je vois ici qui siégeaient au Comité de la justice à l'époque—pour une série d'audiences extrêmement fascinantes et intéressantes. Cette étude a été exhaustive. Les témoins n'avaient pas reçu un préavis de moins de 24 heures avant leur comparution, comme on vient de nous le dire. Nous avons tenu des audiences exhaustives, nous avons fait une étude approfondie, nous avons entendu d'excellents témoins représentant les deux camps.
Malheureusement, et je le déplore, monsieur le président, ces audiences se sont transformées en une farce. Le comité n'a jamais rendu public son rapport final. Trois juges qui avaient été nommés à la Cour d'appel de l'Ontario ont eu l'arrogance incroyable de redéfinir le mariage en Ontario. Que je sache, rien de tel n'avait jamais été fait où que ce soit dans le monde. L'ancienne ministre de la Justice, Anne McLellan, l'actuelle vice Première ministre, a exprimé sa surprise et sa consternation. Le ministre de la Justice actuelle, Irwin Cotler, m'a dit personnellement qu'il avait aussi été choqué et consterné à l'époque. Dans ce contexte, le comité s'est trouvé totalement évincé.
En juin, pendant que la Cour de l'Ontario se substituait au Comité de la justice, j'ai déposé au comité une motion demandant qu'on interjette appel de la décision de cette Cour. Elle a été rejetée. Comment cela a-t-il pu se produire? Un député libéral de longue date, membre du comité, dont je ne donnerai pas le nom—il est facile de savoir qui s'est—n'a pu se rendre à la réunion du comité, pour une raison quelconque. Un membre du comité est arrivé quelques secondes seulement après la mise aux voix de ma motion; c'est à lui qu'il faut demander des explications.
Des députés—des députés libéraux, je regrette de le dire—qui ne s'étaient jamais intéressés aux travaux du comité ont été envoyés à cette réunion pour voter comme le gouvernement de l'époque leur a dit de faire.
Ma première motion a donc été rejetée. Puis, hélas, dans un grand spectacle de débat démocratique, des députés libéraux et d'autres se sont cachés dans le couloir et ont refusé de constituer le quorum afin d'éviter que ne soit déposée une deuxième motion demandant d'interjeter appel de la décision de la Cour d'appel de l'Ontario. Je sais que ça semble incroyable, mais c'est ainsi que les choses se sont passées.
º (1605)
La réalité, c'est que le ministre de la Justice actuel m'a dit personnellement qu'il convient avec moi que c'était une erreur que de n'avoir pas interjeté appel de la décision de la Cour de l'Ontario. Pas besoin d'être avocat, et je n'en suis pas un, pour comprendre que c'est la raison pour laquelle la Cour suprême du Canada a refusé de répondre à la quatrième question il y a quelques mois, à savoir que le gouvernement de l'époque n'a pas choisi la bonne méthode s'il voulait véritablement contester la décision de la Cour de l'Ontario.
Monsieur le président, pendant la dernière campagne électorale de 2004, j'ai déclaré de vive voix, par écrit et en public que si j'étais réélu pour un quatrième mandat, je ne pourrais, en toute conscience, appuyer le mariage homosexuel. C'est la raison pour laquelle j'ai été réélu. Certains m'ont dit que justement pour cette raison, ils ne voteraient pas pour moi. Je leur ai répondu : « je suis désolé de l'apprendre, mais, par respect pour moi-même et parce que je me dois d'agir selon ma conscience, il est plus important pour moi d'agir ainsi, que de vous dire ce que vous voulez entendre pour que vous votiez pour moi ». Dans d'autres cas, je suis certain que j'ai gagné des appuis. Honnêtement, je l'ignore mais peu m'importe. Cet enjeu est plus important à mes yeux que la politique partisane ou ma carrière politique.
Permettez-moi de vous décrire la réaction de mes électeurs de London-Fanshawe, telle qu'elle m'a été confirmée à maintes reprises après qu'ils aient pris connaissance de ma position. Je n'ai pas entrepris de sondage pour déterminer ma position. Je fais état de ma position sur le sujet depuis des années, comme je l'ai fait pendant la dernière campagne électorale. Les électeurs de London-Fanshawe se sont de façon régulière et répétée opposés à la redéfinition du mariage dans une proportion de 92 p. 100. Toutefois, quelque 60 p. 100 appuient la reconnaissance des relations entre conjoints de même sexe sous une autre forme. Pour des millions de Canadiens, il est contraire au bon sens et à la moralité de qualifier les relations entre conjoints de même sexe de ce qu'elles ne sont pas, et il n'est ni discriminatoire ni avilissant de le penser.
Pas un seul tribunal national—et ça s'adresse à certains des témoins qui m'ont précédé—n'a jugé que c'était une question de droits de la personne, pas un seul. Les tribunaux du Canada qui ont estimé qu'il s'agissait de droits de la personne sont des tribunaux inférieurs, mais d'autres juges et d'autres tribunaux inférieurs du pays sont aussi d'avis que ce n'est pas une question de droits de la personne. Je sais que la majorité a tranché, mais il est intéressant de noter que pas un seul tribunal national n'a rendu une telle décision.
Ces dernières semaines, j'ai failli quitter le Parti libéral et siéger comme député indépendant, ce n'est pas un secret. Le premier ministre m'a demandé de revenir sur ma décision, et j'ai accepté parce qu'il m'a assuré que votre comité tiendrait des audiences publiques complètes, sérieuses et justes. Étant donné, monsieur le président—et vous vous souvenez sans doute de la conversation que nous avons eue en privé—que certains membres du comité n'étaient pas encore députés, ne siégeaient pas au Comité de la justice alors, n'ont pas su ou ont oublié que l'étude de ce comité s'est transformée en farce, il m'est apparu très important que l'on s'engage dès maintenant à tenir de telles audiences. Peu m'importe, honnêtement, les subtilités du mandat d'un comité législatif. Nous savons tous qu'ici, quand la volonté politique existe, tout peut se faire et quiconque estime que le premier ministre n'exerce pas d'influence sur les travaux et les comités se trompent. Ce n'est pas le cas, cela ne devrait pas être le cas, et c'est la réalité. J'ai donc accepté de ne pas quitter le Parti libéral parce que le premier ministre m'a donné cette assurance, et pour cette raison seulement. Je ne m'en cache pas.
Par ailleurs, certaines choses me tracassent, notamment le rythme de vos audiences. Expliquez-moi pourquoi vous devez absolument avoir terminé à la mi-juin. On m'a expliqué que des témoins seraient regroupés. Il est rare qu'on regroupe ainsi des témoins. Je sais que cela se fait en comité, je l'ai moi-même fait, mais regrouper ainsi un nombre important de témoins ne devrait pas être pratique courante. En ce qui a trait au préavis donné aux témoins, ce monsieur, à ma gauche, avait des engagements très importants qu'il a dû reporter pour venir témoigner aujourd'hui. On ne lui a donné que 24 heures de préavis. Ce n'est pas une façon courtoise ou respectueuse de traiter les gens.
Monsieur le président, à mon avis, cette question devrait être un enjeu électoral. Je ferai tout en mon pouvoir pour que ce projet de loi soit rejeté. Je l'ai dit publiquement à la Chambre. Je l'ai aussi dit au caucus libéral. J'estime même qu'on devrait envisager de tenir un référendum sur la question, mais, à tout le moins, ce devrait être un enjeu électoral. Pourquoi? La Cour suprême a rendu sa décision. D'autres témoins ont fait valoir que cette question fait l'objet d'un débat depuis longtemps; or, on n'en a pas débattu depuis que la Cour suprême a tranché. La Cour suprême n'a rendu sa décision que récemment. J'ai demandé à deux premiers ministres d'invoquer la disposition dérogatoire, comme mesure de dernier recours, si nécessaire pour maintenir le mariage dans sa forme actuelle. Ce n'est pas une mesure radicale; il suffit d'invoquer l'article 33 de la Charte. J'ai cité à l'ancien premier ministre Jean Chrétien les paroles qu'il avait lui-même prononcées, à savoir que si on refuse d'invoquer cet article en dernier recours de temps à autre, ce seront les juges qui gouverneront. Sans l'article 33, comme tous ceux qui connaissent la politique du moment le savent, il n'y aurait pas de Charte.
º (1610)
Monsieur le président, en terminant, je dirais simplement que je n'ai pas décrit mes arguments contre le mariage entre conjoints de même sexe, car d'autres peuvent le faire. Je l'ai par contre fait de façon exhaustive à la Chambre des communes, dans deux discours. Si vous voulez savoir où les obtenir ou si vous en voulez des copies papier, vous n'avez qu'à appeler à mon bureau et je vous en fournirai.
Merci beaucoup. Je répondrai volontiers à vos questions.
Le président: Merci.
En réponse aux remarques de M. Horgan et de M. O'Brien, je m'excuse de ne l'avoir pas dit au début de la réunion, mais nous vous remercions sincèrement d'avoir bien voulu vous mettre à notre disposition aujourd'hui. Je dois vous expliquer que ce n'est qu'hier après-midi, il y a environ 24 heures, que les membres du comité ont convenu du genre d'audience qu'ils tiendraient, du regroupement de témoins.
Nous avons 63 témoins à entendre, dont six ont déjà comparu—en toute bonne foi, les deux camps ont accepté que ces six témoins soient entendus. Il nous reste donc 57 témoins à entendre d'ici le 14 juin. Le comité s'est entendu pour procéder à l'audition des témoins jusqu'au 14 juin inclusivement. Nous procéderons à l'étude article par article le 15 juin. Le rapport sera déposé le 16 juin.
Je m'excuse des inconvénients que cela a pu causer, et je vous remercie beaucoup de votre collaboration. Je suis certain que vous comprenez que nous avons des échéances à respecter.
Nous commençons maintenant la période de questions. Comme je l'ai déjà expliqué, pendant la première série de questions, chaque intervenant aura sept minutes. Je céderai d'abord la parole au Parti conservateur. Vous pouvez adresser vos questions au témoin de votre choix.
Monsieur Morre, vous avez sept minutes.
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui avec un si court préavis.
Monsieur Horgan, vous avez abordé des sujets dans votre exposé que j'aimerais que vous développiez.
J'aime à croire qu'autant les partisans que les adversaires de la redéfinition du mariage plaident leur cause en toute bonne foi. Il y est toutefois une question au sujet de laquelle, à mon avis, il y a de la mauvaise foi, celle de la protection de la liberté de religion. Vous êtes avocat et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
La Cour suprême a clairement statué que l'article 3 du projet de loi, qui prétend protéger la liberté de religion, outrepasse les compétences du gouvernement fédéral, que le gouvernement fédéral n'a pas le pouvoir d'affirmer que son projet de loi n'aura pas d'incidence sur la liberté de religion des particuliers. Cela dit, la disposition figure toujours dans le projet de loi. Je crois que cet article sert à vendre le projet de loi au public canadien, car bon nombre de Canadiens ne verront que cet article. On croit peut-être aussi pouvoir convaincre les députés avec cette disposition. Nous n'avons pas tous le temps de faire des recherches approfondies sur tous les sujets. Nombreux sont ceux qui croiront que cette mesure protège la liberté de religion.
Vous avez décrit quelques causes mais il y en a d'autres que vous n'avez pas mentionnées et dont j'aimerais que vous nous parliez. On dit souvent que telle ou telle chose pourrait se produire si... on se fait alors accuser d'imaginer des complots partout, mais ces conséquences sont déjà visibles. Rapidement, j'aimerais que vous nous décriviez le cas des Chevaliers de Colomb, en Colombie-Britannique, ce qui leur est arrivé; la situation de Monseigneur Henry, à Calgary, dont nous savons qu'il a fait l'objet d'au moins une plainte concernant les droits de la personne et, de façon plus générale, les préoccupations que vous éprouvez en ce qui concerne la liberté de religion de votre organisation. J'aimerais aussi que vous nous parliez du statut d'organisme de bienfaisance dans l'affaire de Monseigneur Henry, car on l'a apparemment menacé de lui retirer ce statut.
Merci d'avance de vos réponses.
º (1615)
M. Philip Horgan: La Ligue catholique des droits de l'homme a été partie ou intervenant dans chacune des causes sur ce sujet en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec, jusqu'aux cours d'appel. D'ailleurs, monsieur O'Brien, nous avons demandé à la Cour suprême de nous accorder le statut d'intervenant dans l'affaire Halpern, à l'été et à l'automne 2003, mais une formation de cinq juges de la Cour a rejeté notre demande à l'unanimité. La Cour suprême s'est fondée sur un motif intéressant car elle a affirmé qu'il incombait à l'exécutif de gérer ce dossier, mais elle a accepté le renvoi.
Curieusement, une quatrième question est alors apparue et la cause a été reportée de mars à octobre 2004. Dans l'intervalle, il y a eu des élections et la décision concernant le renvoi a été rendue l'automne dernier.
Je suis d'accord avec vous concernant cette décision. L'avant-projet de loi sur lequel s'est penchée la Cour devait protéger les autorités religieuses. En fait, la Cour suprême a affirmé que le gouvernement fédéral n'a pas compétence à cet égard. Le projet de loi C-38 parle de la reconnaissance de droits déjà conférés par la Charte, ce que nous trouvons, honnêtement, plutôt préoccupant. Dans la plupart des provinces, il n'y a aucune mesure de protection provinciale. Même en Ontario, la province que je connais le mieux, le projet de loi 171 a été adopté sans qu'on y prévoit de mesures pour protéger la liberté de conscience, l'enseignement religieux, et ainsi de suite.
Mais en fait, nous ne sommes pas en territoire vierge. La protection de la liberté de religion ou de la liberté de conscience devra être contestée au cas par cas. La Cour suprême a dit clairement qu'elle se pencherait sur des cas précis dans le cours normal des choses. Mais qu'est-ce cela coûtera? Quel sera le coût pour les Canadiens? Quel sera le coût pour la vie publique au Canada en général?
Déjà, le coût est évident : les Chevaliers de Colomb, qui dirigent une salle de réception appartenant à une église à Port Coquitlam, ont accepté une réservation pour une noce. Quand ils ont découvert qu'il s'agissait d'un mariage entre deux lesbiennes, ils ont refusé de louer leur salle. Si j'ai bien compris la preuve, ils ont remboursé le dépôt qui avait été fait, offert une autre salle à leurs frais et remboursé les frais engagés pour les invitations qui avaient déjà été envoyées. Les Chevaliers de Colomb ont néanmoins fait l'objet d'une plainte devant le tribunal des droits de la personne de la Colombie-Britannique. Il y a eu cinq jours d'audience en janvier et nous attendons la décision... Dans cette cause, on a remis en question l'exercice des droits de propriété tels qu'on les connaît et les pratique depuis de nombreuses années au pays.
L'affaire de l'Évêque Henry est inhabituelle et assez remarquable. Elle ne met pas seulement Monseigneur Henry en cause. L'an dernier, avant les élections fédérales de juin, des représentants de la Conférence des évêques catholiques du Canada et de l'Alliance évangélique du Canada ont été invités à prendre le café avec des représentants d'ADRC; on leur a alors dit d'être prudents dans leurs propos pendant la campagne électorale, car l'ADRC comptait examiner le statut d'organisme de charité de ces organisations. Un représentant de l'ADRC s'est aussi adressé directement à Monseigneur Henry au sujet de remarques qu'il avait faites sur le premier ministre dans une lettre à caractère pastoral. Il semble qu'employer le terme « d'un berger de mon église » pour laisser entendre d'une personne qu'elle fait montre d'incohérence morale vous place dans la mire de l'État.
Monseigneur Henry fait maintenant face à deux plaintes pour avoir décrit la position de son église sur le mariage de conjoints de même sexe dans une lettre à caractère pastoral. Monseigneur Henry a peut-être les moyens de payer un avocat pour le défendre, alors que ce n'est pas le cas de tous les Canadiens. Nous avons vu bien d'autres cas de personnes qui ont dû renoncer, atténuer leurs remarques et accéder aux diverses demandes de l'État par crainte d'être traduit devant une Commission provinciale des droits de la personne.
Vous avez demandé quelle incidence cela peut avoir sur le statut d'organisme de bienfaisance. Cette une question qui reste sans réponse, mais, honnêtement, c'est curieux. Si les défenseurs du projet de loi estiment que la protection de la liberté de conscience et de religion est d'un grand intérêt, pourquoi ne font-ils pas ce qu'ils peuvent dans les domaines où ils ont compétence pour protéger le droit d'association et le droit de parole des autorités religieuses, des institutions de charité et d'autres? C'est remarquable.
º (1620)
De fait, l'avant-projet de loi qui a été transmis à la Cour suprême ne parlait que de la protection à accorder aux autorités religieuses. Qu'en est-il des laïques? Qu'en est-il des commissaires au mariage? Qu'en est-il du greffe municipal? Ici encore, la Cour suprême a statué que ces questions se régleraient au niveau provincial. Dans les domaines de compétence fédérale, le texte est muet.
[Français]
Le président: Thank you.
C'est maintenant à M. Marceau, du Bloc québécois. Vous disposez de sept minutes.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aux témoins d'être venus malgré le préavis assez court. Nous apprécions que vous soyez ici et que vous nous éclairiez sur vos points de vue respectifs.
Monsieur Horgan, je ne vous surprendrai pas en vous disant que la position qui est la mienne n'est pas la vôtre, et vice versa.
[Traduction]
M. Philip Horgan: Je me souviens que c'était le cas en 2003.
[Français]
M. Richard Marceau: Mais cela s'est fait gentiment. Nous sommes toujours bien gentils. C'est toujours moins désagréable qu'une visite chez le dentiste. D'ailleurs, les audiences de ce comité-là ont été tellement marquantes que mon ami Pat O'Brien m'a appelé Ménard tout à l'heure. Je suppose qu'il est nerveux parce qu'il est devant nous aujourd'hui.
Blague à part, monsieur Horgan, je comprends très bien que vous n'êtes absolument pas prêt à appuyer le projet de loi C-38. Si on apportait au projet de loi C-38 un amendement disant très clairement qu'aucune organisation ou aucune Église ne peut perdre son statut d'organisme caritatif parce qu'elle s'oppose au mariage de conjoints de même sexe — je ne vous demande pas si vous appuieriez C-38, car je connais la réponse —, est-ce que cela pourrait contribuer à calmer certaines craintes de la population? Je crois savoir que la crainte n'est pas qu'on force qui que ce soit à célébrer des mariages de conjoints de même sexe, comme l'Église n'est pas forcée de marier des divorcés catholiques. Est-ce qu'un amendement semblable calmerait un peu vos craintes? Je ne dis pas que vous appuieriez pour autant le projet de loi C-38, mais est-ce que cela calmerait vos craintes?
[Traduction]
M. Philip Horgan: Si un amendement comme celui-là était envisagé, cela montrerait au moins une certaine reconnaissance par le Parlement et ses députés de l'importance de ces questions dans les domaines de compétence fédérale. Mais je ne limiterai pas sa portée à la Loi de l'impôt sur le revenu. Il y a des problèmes concernant des déclarations qui pourraient être passibles d'accusation en vertu du Code criminel, simplement pour avoir fait de la prédication ou de l'enseignement concernant la conduite homosexuelle.
J'irai plus loin et dirai que cela ne répond pas à ce dont parlait M. Moore, en ce qui concerne la conscience, l'emploi, les droits de propriété et quantité d'autres sujets qui relèvent des provinces.
º (1625)
[Français]
M. Richard Marceau: Je sais qu'il y a des enjeux sur la scène provinciale, entre autres pour les tribunaux des droits de la personne.
Mais revenons à ce que vous dites sur les accusations criminelles. Le projet de loi C-250 — d'ailleurs, Pat O'Brien lui-même a dit qu'il avait voté à l'époque en faveur de C-250 — disait très clairement qu'on ne pouvait être trouvé coupable de propagande haineuse si ce qu'on avait dit était basé sur un texte religieux. Je ne me souviens pas de la formulation exacte, mais c'était quelque chose de semblable. Est-ce que cet article en faveur duquel même Pat O'Brien a voté n'apaise pas votre crainte?
[Traduction]
M. Pat O'Brien: Si mon collègue veut bien me pardonner, ce n'est pas du projet de loi C-250 que je parlais. J'oublie le numéro du texte, mais c'est celui qui a ajouté l'orientation sexuelle à la définition de crime haineux... ce n'était pas le C-250. C'était il y a six ou sept ans; ce n'était pas le dernier projet de loi C-250, auquel je me suis opposé d'ailleurs.
Le président: On me dit que c'est sans doute le projet de loi C-41.
[Français]
M. Richard Marceau: Je m'excuse, nous nous étions mal compris. Je croyais que c'était le projet C-250 qui prévoyait cela. Je suis désolé, monsieur O'Brien.
Monsieur Horgan.
[Traduction]
M. Philip Horgan: Dans le contexte de la situation à laquelle nous faisons face, je ne connais pas les détails des parties de cette brochure de notre coalition appelée Defend Marriage qui sont jugés insultants, discriminatoires, ou peu importe, alors qu'en fait ça établit efficacement, des arguments politiques ou juridiques au sujet de ces questions. Mais regardez les changements qui ont été apportés au projet de loi C-250 et ce que vous avez proposé comme moyens de défense pour plaider des motifs soit religieux ou des arguments tirés d'un texte religieux.
La Ligue catholique pour les droits de l'homme ou la Coalition de l'action pour la famille au Canada ou d'autres ont parfois une orientation religieuse, mais ne sont pas des religions. De fait, nous parlons de l'importance de la liberté religieuse en général. Est-il approprié dans les circonstances de débattre dans une démocratie de positions politiques que nous allons en fait devoir subir ou que la police de Toronto va devoir faire enquête sur nous pour un crime haineux parce que nous avons fait des déclarations politiques?
Voilà le genre d'avertissements que nous avons donné à ces comités au moment du débat sur le projet de loi C-250, que des particuliers allaient devoir se défendre contre ce qui peuvent être des accusations ou des plaintes futiles.
[Français]
M. Richard Marceau: Cela peut arriver pour toutes sortes de choses.
Monsieur Horgan, encore une fois, je ne vous demande pas d'appuyer le projet de loi C-38. Je sais que vous me diriez non. Cependant, vous serait-il possible de me faire parvenir des suggestions d'amendements qui pourraient calmer ces craintes? Je comprends fort bien que ce ne serait pas pour vous une façon d'appuyer le projet de loi, mais pouvez-vous nous faire des suggestions d'amendements qui calmeraient les craintes que vous avez soulevées quant à la propagande haineuse, à la Loi de l'impôt sur le revenu et ainsi de suite? Je les regarderais. Êtes-vous prêt à me faire parvenir cela?
[Traduction]
M. Philip Horgan: Je serai heureux de vous donner des suggestions. Me donnez-vous 24 heures? Que me donnez-vous?
[Français]
M. Richard Marceau: Vous avez jusqu'au 15.
[Traduction]
M. Philip Horgan: Mon Dieu, il va falloir que je parle au juge Farley qui s'occupe de l'affaire de la Commercial List où je comparais demain pour lui dire que j'ai ce devoir que m'a donné la colline du Parlement, et donc que cette affaire va être mise de côté.
J'imagine que ma crainte... je serais heureux de m'en charger. Ai-je l'assurance que vous ou le comité examineront ces possibilités suggérées avec sincérité et sérieusement avant le 16 juin?
[Français]
M. Richard Marceau: Je ne peux pas parler au nom de mes collègues des autres partis, mais je peux vous assurer que, pour ma part, je les regarderai sérieusement. Premièrement, je cherche à faire en sorte que les conjoints de même sexe aient le droit de se marier. C'est ce que je veux, car je crois que c'est la bonne chose. Cependant, je veux aussi m'assurer que les institutions religieuses, entre autres, ne craignent aucunement d'être forcées de marier des conjoints de même sexe ou de perdre un statut ou un droit qui est le leur, notamment le statut d'organisme de charité, parce qu'elles refusent de marier des conjoints de même sexe.
Pour moi, la liberté de religion est un droit aussi fondamental que le droit à l'égalité tel que défini par l'article 15 de la Charte. C'est l'engagement que je peux prendre, personnellement et au nom du Bloc.
[Traduction]
Le président: Merci.
Je précise que nous avons votre mémoire, qui est en train d'être traduit, et dès que la version française sera disponible, les versions anglaise et française seront distribuées. Selon nos règles, si vous voulez remettre quelque chose au comité, le document doit être disponible dans les deux langues officielles. Il est à la traduction et nous allons le distribuer.
º (1630)
M. Philip Horgan: Ça ne répond pas à la question posée par M. Marceau.
Le président: Non, mais je voulais m'assurer que vous compreniez bien que vous faites des recommandations dans votre document et que ce document sera distribué. Mais c'est autre chose.
Nous passons maintenant au Nouveau Parti Démocratique. Monsieur Siksay, vous avez sept minutes.
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être venus ici aujourd'hui. Le préavis a été court mais j'imagine que vous aviez une idée de l'exposé que vous vouliez nous faire. Pour avoir consulté le site Web de la Ligne catholique pour les droits de l'homme, je sais que vous avez une documentation volumineuse. Les exposés attendaient sans doute d'être présentés mais je vous remercie quand même d'être venus avec un si court préavis.
Je peux vous dire d'expérience que le travail de PFLAG a été essentiel pour moi et ma famille. Si mes parents nous regardent aujourd'hui ils se seront reconnus dans votre témoignage, monsieur Stimson. Le travail de PFLAG a été très important pour eux et pour moi et je tiens à vous remercier de votre travail acharné et du dévouement de votre association au fil des ans.
J'ai une question pour vous, monsieur Horgan. Mon collègue du Parti conservateur vous a posé une question à propos de l'affaire des Chevaliers de Colomb en Colombie-Britannique. Je me demandais si vous étiez au courant de la politique et des pratiques de location de salle ou si vous saviez s'ils faisaient subir à tous les locataires potentiels une épreuve pour établir s'ils sont en conformité avec la doctrine et la pratique catholique. Êtes-vous au courant? Savez-vous quelles sont ces pratiques en pareil cas?
M. Philip Horgan: Je ne peux pas vous en parler en détail, monsieur Siksay, mais ce que je sais des autres provinces c'est que s'il y a une demande d'utiliser un lieu catholique, que ce soit un lieu sacré, des locaux connexes, etc., normalement l'utilisation de ce lieu est réservée au consentement ou à l'autorité ultime de l'ordinaire local, l'évêque.
M. Bill Siksay: Mais vous ne connaissez pas les politiques précises de cette section des Chevaliers de Colomb au sujet de cette salle de réception—si par exemple elle a été louée à des couples non catholiques pour des réceptions de mariage ou d'autres événements qui n'avaient rien à voir avec, ou qui n'allaient pas à l'encontre de, la doctrine et de la politique catholique sur d'autres questions.
M. Philip Horgan: Je ne le sais pas, mais j'ai le sentiment que c'est une chose de parler de mettre à disposition des locaux pour certaines fins et une autre, de les mettre à disposition à des fins que l'Église catholique réprouve.
Mais vous posez un thème très intéressant, à savoir, que faites-vous des fournisseurs de services du milieu des affaires? Le cas le plus important de ce genre est sans doute celui de Scott Brockie, imprimeur à Toronto. Il a été traduit devant la Commission des droits de la personne, a fait appel en Cour divisionnaire et a fini par se voir infliger une amende de 5 000 $ par la Commission des droits de la personne pour avoir dit qu'à cet endroit, soit la ville de Toronto, où il y a sans doute une quinzaine ou une vingtaine d'imprimeries dans un rayon d'un mille de la sienne, il ne voulait pas imprimer des cartes d'affaires ou du papier à en-tête pour une association de défense des droits des gais.
Voilà donc un cas de refus, pour des motifs religieux et de conscience, de faire des affaires dans des circonstances où c'est facilement et largement disponible, et la personne a quand même reçu une amende de la Commission des droits de la personne dans une affaire qui a traîné à peu près sept ans.
M. Bill Siksay: Je pense que dans ce cas, nous parlons de situations différentes. J'essayais de savoir si vous connaissiez l'affaire des Chevaliers de Colomb de la Colombie-Britannique, qui était sur quoi portait la question qui vous a d'abord été posée, il me semble.
M. Philip Horgan: J'ai soulevé les éléments de la preuve qui étaient importants, selon moi, soit que malgré les efforts déployés pour résoudre le problème, ils ont dû néanmoins comparaître devant la commission.
M. Bill Siksay: Merci.
Monsieur Hawke, je sais que vous n'avez pas eu l'occasion de prendre la parole pour faire votre exposé. Je me demandais si vous vouliez utiliser une partie de mon temps pour nous dire certaines des choses que vous auriez pu vouloir nous communiquer à ce propos. Je me ferai un plaisir de vous accorder un peu de mon temps.
M. Bill Hawke (membre, Parents, Familles et Amis des Gais et Lesbiennes (Canada)): Il y a deux ou trois choses que je voulais dire. Surtout d'abord que les députés sont invités à décider pour eux-mêmes ce qu'ils pensent de cette mesure législative. J'espère vraiment qu'ils vont examiner sérieusement les documents ou l'information dont ils disposent pour ce faire. Y a-t-il dans leur propre famille des homosexuels ou des lesbiennes? Y a-t-il des membres de leur famille qui pourraient être homosexuels ou lesbiennes mais sans l'avouer parce que ce ne serait pas considéré comme une chose acceptable? Y a-t-il dans leur circonscription des homosexuels ou des lesbiennes? Je dirais que tout député compte probablement des homosexuels et des lesbiennes dans sa circonscription. Sont-ils vraiment prêts à leur dire individuellement : « non, je regrette; je ne crois pas que vous ayez les mêmes droits que les couples hétérosexuels qui veulent se marier. Vous ne méritez pas de vous marier. »
Mon fils est homosexuel et ma fille hétérosexuelle, et si cette mesure législative n'était pas adoptée, le gouvernement me dirait en somme que mes deux enfants ne sont pas égaux. Qu'ils ne peuvent pas tous les deux se marier.
Je suis fier d'être le grand-père d'un nouveau-né de deux jours, et j'attends vraiment le jour où la mère de cet enfant—qu'elle soit lesbienne ou hétérosexuelle, peu importe—le jour où tous pourront être acceptés de la même façon et pourront se marier également dans un cas comme dans l'autre, sans la moindre discrimination. C'est vraiment ce à quoi les députés doivent réfléchir, et doivent prendre une décision en s'appuyant là-dessus.
Ce que je vous dis au fond, c'est que si vous rejetez ce projet de loi, vous direz non à des êtres en chair et en os qui en seront durement touchés. Ce n'est pas juste. Vous agirez de façon discriminatoire contre ces personnes.
º (1635)
M. Bill Siksay: Merci.
Combien de temps nous reste-t-il, monsieur le président?
Le président: Une minute, monsieur Siksay.
M. Bill Siksay: J'en profiterai donc pour demander aux représentants du CTC de nous parler un peu plus des dispositions concernant le congé de mariage qu'ils ont mentionné et de l'effet que ce projet de loi pourrait avoir sur celles-ci.
Mme Sue Genge (représentante nationale, Condition féminine et droits de la personne, Congrès du travail du Canada): Oui, je ferai quelques observations à ce sujet.
Ce qui préoccupe notamment nos membres, c'est que les travailleurs qui déménagent pour des raisons professionnelles afin de conserver leur emploi devraient pouvoir avoir les mêmes droits peu importe la province où ils vivent. Dans certaines provinces, nous devrons défendre les droits de personnes qui perdront les droits qu'elles avaient dans d'autres provinces. Il en résulte pour nous tous une situation complexe de procédure de griefs et de contestations judiciaires, et nous en avons déjà eu bien assez quand nous avons tâché d'obtenir des prestations et des droits égaux pour les conjoints de même sexe au fil des ans. Nous espérons simplement pouvoir compter sur une loi uniformisée à l'échelle du pays.
Bien sûr, nous sommes en faveur du droit égal au mariage parce qu'il est conforme aux droits énoncés dans la Charte et aux dispositions concernant l'égalité fondamentale de toutes les personnes au Canada. Par ailleurs, nous ne voulons nous lancer dans ce genre de bataille, parce que nous ne croyons pas que ce soit nécessaire. Nous pensons que le Parlement peut s'en tenir à la Charte et adopter ce projet de loi.
Le président: Merci.
C'est maintenant au tour du Parti libéral et de M. Macklin, secrétaire parlementaire.
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus comparaître.
À propos des interventions du CTC. Au cours de vos délibérations, celles que vous dites avoir eues et que vous aurez à nouveau, y a-t-il un débat en profondeur sur les questions soulevées par M. Horgan et d'autres qui défendent ce point de vue au cours du débat, ou vous en tenez-vous simplement à un débat sur une question de droits de la personne? Tenez-vous compte de la protection de la liberté de religion qui doit être assurée?
Mme Marie Clarke Walker: J'ai répondu à cette question la dernière fois où nous avons comparu devant le comité—le dernier comité, où siégeait M. O'Brien. Nous avons de longs débats très ouverts, si bien que diverses questions surgissent quand nous parlons d'égalité des droits—le mariage de conjoints de même sexe, les prestations pour les conjoints de même sexe. Aucun sujet n'est écarté; nous parlons franchement.
Le mouvement syndical est un vaste mouvement, composé de gens ayant des points de vue différents et des conceptions différentes. Certains ne partagent pas nécessairement le point de vue des autres, mais on s'entend toujours pour dire qu'il s'agit en l'occurrence d'une question d'égalité des droits. Nous nous sommes battus avec acharnement et pendant très longtemps pour assurer l'égalité des droits de tous, et si les droits d'une personne ne sont pas respectés, ceux de quelqu'un d'autre pourraient ne pas l'être non plus. C'est ouvrir la porte à des risques d'abus de toutes sortes, et vous connaissez peut-être le dicton du mouvement syndicat « un tort infligé à l'un est un tort infligé à tous ». Nous y croyons vraiment.
Il y a donc un débat ouvert et une discussion ouverte. Des questions sont mises aux voix et la majorité des délégués aux congrès, qu'il s'agisse du Congrès du Travail du Canada ou de congrès d'associations affiliées, comme c'est le cas partout, décident de notre position sur ces questions.
Sue, voulez-vous ajouter quelque chose.
º (1640)
Mme Sue Genge: Vous comprendrez bien sûr que les membres des syndicats au Canada appartiennent à de multiples confessions religieuses. Certains n'ont pas de religion, certains font partie d'églises opposées au mariage de conjoints de même sexe, et certains font partie d'églises qui acceptent le mariage de conjoints de même sexe. Mais les syndicats ne sont pas des églises et nous ne nous prononçons pas sur l'aspect religieux de la question, bien sûr. Nous ne pourrions pas arriver à une entente sur ce plan.
Nous croyons fermement par ailleurs à la liberté de religion et à la liberté d'association. Nous l'affirmons dans notre mémoire au Parlement sur cette question et nous appuyons aussi bien sûr ces principes. Ces sujets ont été abordés au cours de la discussion et du débat au sein de notre mouvement.
L'hon. Paul Harold Macklin: J'aimerais parler des craintes exprimées au sujet du respect de la liberté de religion. Au cours de votre témoignage devant le comité, au nom bien sûr de votre syndicat, avez-vous des recommandations à présenter ou des réflexions que vous aurait soumis vos membres et que nous devrions examiner eu égard à la protection de ceux qui croient qu'on ne protège pas suffisamment la liberté de religion, et qu'il faudrait aussi assurer la protection de la liberté de conscience? Avez-vous des réflexions à nous soumettre à ce sujet ou des points de vue que vous pourriez nous faire valoir à ce propos?
Mme Marie Clarke Walker: À nouveau, cela se trouve déjà dans nos mémoires précédents, et nous sommes plutôt d'avis que la liberté de religion est protégée. Nous savons que certaines églises refusent de marier des gens divorcés. D'autres organisations refusent le mariage et d'autres services religieux en raison de leurs doctrines religieuses, et nous pensons que leur liberté de religion est protégée en vertu de la Charte et qu'elle est aussi protégée dans le projet de loi. Il n'a pas été question de cette crainte parce que nos membres croient que cette protection est déjà assurée et que la liberté religieuse est déjà protégée.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.
Monsieur Horgan, vous avez soulevé bien des questions, et je pense que l'engagement que vous avez donné à M. Marceau est utile—et je voulais du reste vous poser quelques questions—pour nous guider quant aux éléments principaux de la législation fédérale qui pourraient poser des problèmes et auxquels nous pourrions effectivement remédier. Mais clairement, la Charte s'applique à l'échelle fédérale et provinciale et est donc universelle.
Quant aux sujets de préoccupation qui ont été examinés—et avec grande attention—ils relèvent dans bien des cas de la compétence provinciale. En fait, je pense que la majorité des cas que vous avez mentionnés relèvent de la compétence provinciale.
Je sais que dans l'affaire Caldwell la Cour suprême du Canada, relativement aux écoles confessionnelles, a confirmé le droit des institutions religieuses de renvoyer des enseignants qui ne respectaient pas leurs préceptes religieux. À Trinity Western, il a été reconnu que les écoles confessionnelles avaient le droit de former leurs futurs enseignants en fonction de leurs valeurs religieuses.
Il me semble qu'on s'est efforcé de répondre aux besoins que vous avez mentionnés, notamment, tout récemment, comme vous l'avez dit, en Ontario. On a apporté des amendements pour essayer de tenir compte de la liberté de conscience religieuse de ceux qui exercent des fonctions administratives, et pour tâcher de leur donner les assurances dont ils avaient besoin.
Je crois savoir qu'il existe une règle qu'on utilise assez souvent pour procéder à des adaptations en cas de conflit entre individus au sujet de la Charte et de questions de conscience. Par exemple, à une récente rencontre des ministres de la Justice de tout le Canada, les ministres du Québec et de l'Ontario se sont fait demander s'ils avaient du mal à tenir compte des préoccupations exprimées par ceux qui deviendraient l'équivalent de commissaires au mariage. En fait, le représentant de l'Ontario a dit n'avoir aucune difficulté à tenir compte des préoccupations de ceux qui pourraient avoir des inquiétudes au sujet de la conciliation de leurs croyances religieuses et du travail qu'ils ont à faire.
Peut-être, et vous pourrez y réfléchir, s'agit-il au fond de donner le temps aux provinces de s'adapter à ce régime et de leur permettre d'évoluer et de se conformer à la Constitution et au concept de libertés religieuses.
J'aimerais que vous nous en parliez.
º (1645)
Le président: Monsieur Macklin, vous serez étonné d'apprendre que vos sept minutes sont écoulées, mais nous permettrons au témoin de répondre très brièvement à votre question.
L'hon. Paul Harold Macklin: Excusez-moi. Merci.
Le président: C'est à vous, monsieur.
M. Philip Horgan: Merci, monsieur le président.
Vous avez mentionné l'affaire Caldwell c. Stuart et l'affaire de la Trinity Western University. Mais je pense qu'il est important de reconnaître que je ne mentionne pas ces cas pour rien. Il faut examiner ces questions.
Dans le cas de la Trinity Western University, par exemple, le tribunal a conclu qu'il n'y avait pas contradiction entre le droit à la liberté de conscience, le droit à la liberté de religion et les enseignements de la Trinity Western University, et les allégations présentées par le B.C. College of Teachers. En l'occurrence, le tribunal a conclu que comme il n'y avait pas contradiction en matière de droits, il n'y avait en fait aucune question à trancher pour les tribunaux. En fait, c'est ce qu'on a conclu au tribunal de la première instance et au tribunal d'appel. La Cour suprême dans son arrêt, que je paraphrase, a dit que la liberté de croyance était plus vaste que la liberté d'agir en fonction de ces croyances.
Je présume que nous allons aborder cette question, soit qu'on parle de la législation ontarienne ou de toute autre législation provinciale.
Le fait demeure que les mariages au Canada sont célébrés par le clergé dans une proportion de 75 à 80 p. 100. Le dossier du mariage, c'est crucial. Il y a certainement des commissaires aux mariages qui célèbrent des mariages dans diverses régions du pays, mais la grande majorité au Canada sont célébrés par des membres du clergé, si bien que des questions vont certainement surgir à propos de la question de savoir si cette liberté d'agir ou de ne pas agir sera respectée quand un croyant ou quelqu'un qui a des convictions religieuses ou qui fait valoir ses convictions religieuses, s'oppose à la demande présentée.
Les membres du clergé, qu'il s'agisse d'un ecclésiastique, d'un rabbin, d'un imam, d'un prêtre ou de qui que ce soit, sont dans la plupart des cas autorisés par la province à célébrer des mariages. À ce titre, ces personnes pourront-elles invoquer comme défense leurs convictions religieuses pour refuser d'offrir des services qu'elles sont autorisées à fournir dans la province? Bien que dans le projet de loi il soit question de reconnaître le droit à l'abstention, il y aura certainement des contestations.
Le président: Merci.
Nous entamons la prochaine ronde de questions, et, surprise, vous avez maintenant cinq minutes.
Commençons par le Parti conservateur, monsieur Warawa.
M. Mark Warawa (Langley, PCC): Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier chacun des témoins d'être venu comparaître aujourd'hui.
Dans ma circonscription de Langley, en Colombie-Britannique, j'ai effectué un sondage maison. J'ai fait parvenir un envoi collectif à chaque ménage pour solliciter leur avis. Nous n'avons pas dénombré les réponses que nous avons reçues en ligne. Il s'agit donc ici des autres réponses que nous ont fait parvenir les résidents de Langley. Parmi les répondants, 96 p.100 appuient la définition traditionnelle du mariage, et acceptent de reconnaître aux Canadiens un droit égal à une union leur permettant de bénéficier des mêmes droits juridiques et des mêmes avantages. Mais parce qu'il s'agit d'une union de conjoints de même sexe, on pourrait parler d'union civile. Parmi les résidents de Langley qui ont répondu, 96 p. 100 appuyaient cette idée.
Ma première question s'adresse à M. Horgan. Un témoin précédent, de Egale, se trouvait parmi l'auditoire et a maintenant quitté la salle d'audience. Nous avons entendu ce monsieur et aussi le ministre, M. Cotler, dire qu'un financement a été accordé à Egale relativement à cette question. Je vous suis reconnaissant du travail que vous avez effectué à la Ligue catholique des droits de l'homme. Avez-vous reçu du financement du gouvernement fédéral?
º (1650)
M. Philip Horgan: Pas du tout. En fait, nous avons été condamnés aux dépens dans l'affaire du mariage au Québec, notre appel ayant été rejeté. Nous avons payé les honoraires des avocats des demandeurs qui ont obtenu gain de cause.
M. Mark Warawa: Combien cela vous a-t-il coûté, approximativement?
M. Philip Horgan: Ce que la Cour d'appel du Québec nous a obligé à payer, je crois, c'est environ 1 350 $ pour la décision rendue le 19 mars 2004.
Pourrais-je dire quelque chose au sujet des réponses des gens de votre circonscription?
J'ai entendu dire au cours des deux dernières semaines, et c'était dans les journaux, que l'unité nationale était apparemment une grande question qui expliquait pourquoi nous n'étions pas en ce moment en campagne électorale. Je suis renversé de voir les efforts déployés pour faire adopter ce projet de loi, qui a sur l'unité nationale l'effet le plus perturbateur que je puisse imaginer.
M. Mark Warawa: Je regrette de vous interrompre, mais je n'ai pas terminé.
La Trinity Western University se trouve aussi dans ma circonscription. J'y ai étudié. Pour essayer de se défendre, cela coûte à cette université beaucoup d'argent qu' elle aurait pu le consacrer à l'enseignement, et je suis heureux qu'elle ait eu gain de cause. Il est fort regrettable que cette université ait été la cible de ces attaques.
J'ai une question pour M. O'Brien, au sujet des assurances que vous avez reçues du premier ministre. Nous avons entendu dire au comité que le premier ministre n'avait aucune influence sur le comité. Vous nous avez assuré qu'une certaine influence était possible. Je me demande pourquoi vous, ou d'autres membres du Parti libéral qui vous prononciez contre le projet de loi C-38, n'êtes pas représentés au comité. J'aimerais que vous répondiez à cette question.
En outre, ce comité ne voyage pas, et nous avons entendu un des témoins dire que nous en avions assez entendu, que nous avions eu une participation adéquate. Le comité antérieur, qui a siégé il y a deux ans, avait entendu 467 témoins. Le présent comité s'en tient à 63 témoins, et nous limitons la période pendant laquelle les témoins peuvent comparaître. Il me semble qu'il y a précipitation et qu'un préjugé existe.
Je me demande si vous pourriez nous parler un peu plus des assurances que vous avez reçues du premier ministre, et que vous nous disiez si vous croyez avoir une participation adéquate du public.
M. Pat O'Brien: Merci beaucoup pour vos questions.
J'aurais accepté volontiers de siéger au comité; cela ne fait aucun doute. Je pense qu'il est assez clair, pour tous—il n'y a plus de politiciens débutants parmi nous—même pour les nouveaux députés, que lorsque le whip du parti choisit les gens qui feront partie du comité, il choisit des gens qui appuient la position du gouvernement. Je pense qu'on peut s'y attendre. Je pense quant à moi qu'on assurerait une meilleure représentativité au comité s'il y avait au moins un membre libéral qui représentait les 35 députés dont on sait qu'ils s'opposent à ce projet, de même que les autres qui se joindront à ces 35 au moment du vote décisif. Et il y en aura d'autres. C'est la réalité politique. Je suis ici depuis douze ans, et je ne m'étonne donc pas de la composition du comité, quel que soit le parti en question. Je ne veux pas manquer de respect à mes collègues; nous ne sommes tout simplement pas du même avis. Au Parti libéral, nous sommes assez partagés sur cette question du mariage de conjoints de même sexe, ce n'est pas étonnant.
Je n'ai pas insisté pour que le comité se déplace, confiant de l'assurance que j'avais reçue du premier ministre, et qui m'avait convaincu de demeure au sein du caucus; je n'ai pas insisté pour que le comité se déplace, et je vais vous dire pourquoi. Je faisais parti du comité qui c'était rendu à de nombreux endroits. Je m'étais dit, si le comité décidait de voyager, très bien. Quant aux témoins précédents qui ont dit que nous en avions suffisamment entendu, c'est tout à fait faux; nous n'avons pas entendu suffisamment de témoignages depuis l'arrêt de la Cour suprême. Même si l'on se reporte aux audiences du comité dont je faisais partie, je le répète, elles ont été une véritable farce : le comité n'a même pas rédigé de rapport, il n'a même pas essayé d'interjeter appel de la décision incroyablement arrogante de la Cour de l'Ontario de redéfinir instantanément le mariage.
Ai-je obtenu satisfaction? J'ai certaines préoccupations au sujet de ce qui se passe ici. Je comprends ce à quoi le président doit faire face. Je préside le Comité permanent de la défense nationale. Mais le fait demeure, comme l'a indiqué M. Siksay, que la position peut avoir été bien connue et facile à présenter ici, mais des gens ont renoncé à d'autres engagements très importants pour être ici, et ce n'est pas juste du tout à mon humble avis.
Je vais vous demander une dernière chose. Qu'est-ce qui presse? À moins que le comité impose l'échéance du 14 juin, il n'y a aucune raison de se hâter autant, et on pourrait éviter ce genre de situation.
º (1655)
Le président: Merci.
Nous revenons au Parti libéral. Monsieur Savage, vous avez cinq minutes.
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins ici présents.
J'aimerais commencer par une question que je pose aux deux messieurs qui représentent les PFLAG. Vous mettez certainement en lumière l'aspect humain de ce débat, que je trouve très important. Vous avez tous deux indiqué, au cours de votre témoignage, à quel point vous vous êtes montrés compréhensifs envers vos enfants, pour ce qui est de leur sexualité. Je me demande s'il en a toujours été ainsi. Aviez-vous réfléchi à la question avant d'apprendre que vos enfants étaient homosexuels?
M. Dennis Stimson: Monsieur Savage, je ne peux en toute honnêteté vous dire que j'y avais réfléchi... tout d'abord, je veux m'assurer sur quoi porte votre question, le mariage entre conjoints de même sexe ou l'hétérosexualité?
M. Michael Savage: Je n'arrive pas à me souvenir si vous nous avez dit quel âge ils avaient quand ils vous ont dit qu'ils étaient homosexuels?
M. Dennis Stimson: L'un avait environ 20 ans, et l'autre 25 ans.
M. Michael Savage: Dans un cas comme dans l'autre, alors, parlons précisément du mariage. Aviez-vous réfléchi au mariage entre conjoints de même sexe avant que vos enfants vous fasse cette annonce?
M. Dennis Stimson: Non. J'avais passé 34 ans dans les Forces canadiennes. Je crois vraiment que pendant tout ce temps je protégeais les droits, le droit à l'égalité de chaque citoyen du pays, mes fils compris. Quand ils nous ont annoncé qu'ils étaient homosexuels nous n'avons pas pensé à l'époque, compte tenu de la loi en vigueur, que cela les autoriserait à se marier. Le changement survenu en Ontario a certainement changé la situation pour nous, et nous en sommes extrêmement reconnaissants. Nous croyons qu'il devrait en être ainsi partout au pays.
M. Michael Savage: Je le pense aussi.
Monsieur Hawke, je pense que ce que je veux vous demander, c'est si le fait d'avoir appris que la question se posait de façon personnelle pour vous vous amène à y réfléchir davantage ou influence peut-être votre opinion?
M. Bill Hawke: Il est probable que dans notre cas le mariage de notre fille nous a vraiment fait percevoir le manque d'égalité dans le traitement des membres de notre famille, parce qu'à l'époque notre fils n'avait pas le droit de se marier. Il était à Edmonton, et l'Alberta ne reconnaît pas un droit égal en matière de mariage. Il a déménagé depuis en Colombie-Britannique, et heureusement il a maintenant ce droit, mais comme il ne fréquente personne pour l'instant, la question ne se pose pas. C'est pour nous assurer qu'il ait cette possibilité, s'il voulait se marier un jour, que nous sommes ici—c'est important pour nous.
Y avions-nous réfléchi auparavant? Oui, je pense que cette question de l'égalité de droits,est une chose que nous avons vu évoluer, et la question du mariage est une autre étape importante dans la reconnaissance de l'égalité de mes deux enfants.
M. Michael Savage: Si je pose la question, c'est que j'ai été élevé dans la religion catholique et que je suis catholique. Désormais, je vais à l'Église anglicane, où je me trouve très bien accueilli mais je me considère encore catholique. Mes parents étaient ce qu'on pourrait appeler de fervents catholiques, fait qui était connu dans la collectivité, car mon père y jouissait d'une grande notoriété. Je respecte les deux points de vue en l'occurrence, mais tout au long des discussions sur ce dossier, une seule chose m'a offensée, à savoir les lettres qui affirmaient que mes parents réprouveraient ma position.
Avant de mourir, une des dernières choses que m'a dite ma mère, sachant qu'elle allait mourir, concernait ma soeur qui vit une relation lesbienne à Toronto. Advenant que je sois en mesure de le faire, ma mère m'a demandé d'aider la cause de ma soeur en faisant en sorte que son pays reconnaisse cette relation comme le mariage qu'il représentait. Je sais que les familles qui vivent cela de très près sont plus réceptives mais je suis sûr que bien des gens au sein du PFLAG ont vécu d'importantes transformations quand ils ont appris la situation de leur propre famille.
Je me demande si on pourrait imaginer une telle situation, même si elle ne correspond pas à la réalité, et se demander s'il est juste d'interdire seulement aux homosexuels et aux lesbiennes de se marier—et je ne parle pas ici de criminels, de pédophiles, de meurtriers, mais bien d'homosexuels et de lesbiennes. Est-ce juste? Je ne pense pas.
M. Bill Hawke: Certainement pas à notre avis.
M. Michael Savage: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Monsieur Siksay.
M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président.
J'ai une question à poser à messieurs Horgan et Bastien. Je me demande ce que la Ligue catholique des droits civils pense des confessions religieuses qui choisissent de célébrer le mariage de couples homosexuels. Cela remet-il en question la liberté religieuse de faire ce choix et de célébrer ces mariages de la même façon que dans le cas des couples hétérosexuels. Considérez-vous cela comme une question de liberté de religion qui mériterait que le Parlement du Canada s'y attarde?
» (1700)
M. Philip Horgan: Il se peut très bien que la Cour d'appel de l'Ontario ait déterminé qu'il n'y avait pas atteinte à ces droits religieux dans l'affaire Halpern. Dans ces conditions, selon moi, si l'on doit invoquer ces arguments, il faudra le faire lors d'une affaire concrète. Très franchement, le projet de loi ne va pas trancher la question mais le résultat sera que ce recours existera pour ces groupes religieux. Je vous exhorte à revoir la décision Halpern du juge McMurtry car en l'occurrence, car elle ne reconnaît pas que la Metropolitain Community Church avait porté atteinte à la liberté de religion.
M. Bill Siksay: Je pense que ce sont là toutes mes questions pour cette fois-ci. Je suis inscrit au deuxième tour. Je laisse la parole aux autres.
Le président: Nous allons revenir aux libéraux.
Madame Boivin.
[Français]
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Je remercie tous les témoins d'être venus nous rencontrer. Je sais que certains de vous ont eu un préavis très court.
C'est tout un projet de loi que nous avons devant nous. Je suis une recrue, pour reprendre l'expression de mon collègue Pat O'Brien, mais j'ai compris qu'on était ici au stade du comité législatif. C'est le rôle de ce comité que d'analyser le projet de loi qui est devant lui et de le renvoyer à la Chambre après l'avoir modifié, s'il y a lieu.
Je pense que toutes les personnes qui siègent au comité sont conscientes du fait que ce débat peut sembler diviser certaines personnes, mais il y a déjà eu en Chambre deux votes faisant état d'un appui majoritaire au projet de loi. Pour moi, il est important de le faire valoir.
Cela dit, en tant que recrue, je n'ai pas eu le bénéfice d'entendre les différentes visions des quelque 400 groupes vous avez eu le plaisir d'entendre au Comité permanent de la justice il y a quelques années. Toutefois, je peux vous dire qu'en tant que membre très consciencieuse de ce comité, j'ai pris connaissance de la plupart des opinions de ces groupes et des opinions de bien d'autres groupes. Cela va bien au-delà des quelque 60 groupes que nous allons entendre ici.
J'aimerais maintenant poser une question à M. Bastien. Vous avez fait certaines affirmations, et je voudrais que vous m'expliquiez un peu plus précisément ce que vous entendez par là. J'ai peut-être mal compris, mais vous sembliez dire que le mariage transcendait les cultures et les époques. Est-ce que vous reconnaissez que le mariage tel que vous le comprenez et tel que vous nous l'avez défini a déjà subi des modifications au fil du temps?
M. Richard Bastien: Bien entendu, l'institution du mariage a subi des modifications et elle n'est pas uniforme dans toutes les cultures. Je voulais cependant signaler que l'institution du mariage comportait une caractéristique fondamentale, qui est d'être l'union entre un homme et une femme. Cela a été le cas à toutes les époques que l'on connaît.
Certains signalent parfois que dans la civilisation musulmane, ce n'est pas tout à fait la même chose, puisque l'islam admet la polygamie jusqu'à concurrence de quatre épouses, sans interdire un nombre indéterminé de concubines.
J'ai des amis musulmans avec qui j'ai débattu de cette affaire. Généralement, ils sont un peu embarrassés quand on soulève cette question avec eux. Toutefois, ils me disent que c'est une disposition qui est faite, au fond, pour les gens très riches. Le Coran exige que le mari qui a deux épouses ou plus soit en mesure de les faire vivre dans le même confort matériel. Ils disent donc que pour la plupart des musulmans, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme.
» (1705)
Mme Françoise Boivin: Monsieur Bastien, concentrons-nous strictement sur le mariage au sens de la religion catholique. Vous faites partie de la Ligue catholique pour les droits de l'homme. J'espère que vous vous préoccupez aussi des droits de la femme. Est-ce que le mariage catholique, d'après vous, a subi des transformations au cours de l'histoire?
M. Richard Bastien: Non, pas fondamentalement. En fait, d'après certains historiens, le mariage catholique ou chrétien a contribué énormément à la promotion de la femme. Je vous renvoie en particulier à des écrits d'historiennes.
Mme Françoise Boivin: Il faudrait que je dise cela à ma mère, qui aimait beaucoup le voeu d'obéissance à l'époque.
M. Richard Bastien: Je pense notamment à Régine Pernoud. Cela dit, je ne défends pas l'interprétation que tous les membres du clergé ont pu donner au mariage au cours des ans. Je parle de l'interprétation officielle du mariage tel qu'il est défini dans la tradition. Je sais qu'il y a eu des écarts, mais cela est vrai partout. Ce n'est pas un argument sérieux.
Mme Françoise Boivin: Vous me dites que mon argument n'est pas sérieux?
M. Richard Bastien: Non, mais un argument sérieux...
Mme Françoise Boivin: Je ne veux pas débattre de cela avec vous, monsieur Bastien. C'était une blague.
Monsieur Horgan...
Le président: Madame Boivin, vos cinq minutes sont écoulées.
Mr. Jean, five minutes.
[Traduction]
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci à nos témoins.
Je ne dispose que de cinq minutes de sorte que vous aurez l'impression que je me presse.
Ma question s'adresse aux représentants du Congrès du Travail du Canada. Je voudrais savoir tout d'abord comment vous avez procédé pour faire un sondage auprès de vos membres? Quel genre de sondage avez-vous utilisé pour obtenir les réponses qui constituent votre position?
Mme Marie Clarke Walker: Nous ne faisons pas de sondage. Nous avons des congrès au cours desquels les questions sont mises en délibération et où nous discutons de nos énoncés d'orientation. Nous avons des groupes de travail et les gens discutent autour de la table des questions qui importent à tous les travailleurs, y compris le mariage homosexuel et d'autres questions d'égalité. On fait rapport de ces discussions aux divers affiliés. Il y a également des congrès où les gens votent sur leur propre énoncé d'orientation, et cela va...
M. Brian Jean: Sur cette question en particulier...
Mme Marie Clarke Walker: C'est vrai pour toutes les questions, y compris celle-ci. Cela nous revient et ce que je vous explique vaut pour toutes les questions dont nous discutons.
M. Brian Jean: Il n'y a que celle-ci qui m'intéresse cependant.
Mme Marie Clarke Walker: Nous suivons la même démarche pour toutes les questions.
M. Brian Jean: En quelle année cela s'est-il fait?
» (1710)
Mme Marie Clarke Walker: Dès 1980, nous avons entrepris des discussions sur l'égalité des droits. En 1994, nous...
M. Brian Jean: Quand cette résolution a-t-elle été adoptée?
Mme Marie Clarke Walker: En 1994, nous avons adopté cette position par résolution et un énoncé d'orientation. Il y a plusieurs dossiers que nous présentons à nos congrès chaque année et,comme je l'ai dit tout à l'heure dans mon exposé, nous allons reprendre ce sujet de nouveau cette année.
M. Brian Jean: Si je vous pose la question, c'est parce que je représente de 10 000 à 20 000 de vos membres dans la circonscription de Fort McMurray et cela les intrigue. Certains travailleurs m'ont signalé qu'ils n'étaient pas au courant de cette résolution et j'étais curieux de savoir...
Mme Marie Clarke Walker: Tous les dossiers et tous les énoncés d'orientation sont diffusés. On peut les trouver sur l'Internet et chaque membre individuellement en reçoit un exemplaire et on en envoie aux comités de chaque affilié de sorte que tout le monde devrait être au courant de cette question-là.
M. Brian Jean: Ma question maintenant s'adresse à tous ceux qui sont pour. Pendant des années, j'ai plaidé dans le Nord de l'Alberta des affaires pénales, des affaires autochtones et des affaires constitutionnelles et reliées à la Charte. Question de mariage, j'ai même procédé au divorce de bien des gens. Je suis curieux. Je ne peux pas m'imaginer pourquoi nous n'aurions pas deux mots d'où découleraient les mêmes droits. Voilà la difficulté que j'éprouve. Je vois une définition du mariage traditionnel qui existe depuis bien des années, et pour moi, la question des droits n'a rien à avoir avec le mot utilisé.
Je comprends les droits car, anglophones et francophones, ont les mêmes droits—du moins je l'espère. Il existe diverses catégories et définitions de gens qui ont les mêmes droits—des droits identiques en fait—mais on utilise des mots différents. Je vous dis que je suis un fervent partisan des droits car j'ai plaidé ce genre d'affaires vigoureusement par le passé et j'ai obtenu gain de cause.
Mais je suis curieux de savoir pourquoi ceux qui sont en faveur de ce projet de loi n'adhèrent pas à ce à quoi semble adhérer la majorité des Canadiens, à savoir deux définitions qui couvriraient deux entités différentes, distinctes, lesquelles en l'occurrence auraient les mêmes droits.
M. Bill Hawke: Quant à moi, j'ai deux enfants, un fils gai et une fille hétérosexuelle et ma fille est mariée. Vous dites que mon fils ne peut pas se marier et selon moi, cela met en cause l'égalité. Vous dites que mon fils n'est pas égal à ma fille.
M. Brian Jean: Non, monsieur, ce n'est pas ce que je dis. En fait...
M. Bill Hawke: C'est ce que vous dites. Vous dites que nous ne pouvons pas utiliser le mot « mariage » et cela porte atteinte à l'égalité. Vous faîtes de mon fils quelqu'un de différent.
M. Brian Jean: Ce n'est pas ainsi que je vois les choses, monsieur.
M. Bill Hawke: Eh bien moi, si.
M. Brian Jean: Si je voulais dire que je suis une femme, je ne le pourrais pas. Je ne pourrais pas revendiquer ce statut, puisque je ne suis pas une femme.
Ma question toutefois s'adresse à Marie Clarke Walker, si vous le voulez bien, madame. Voyez-vous les choses de la même façon?
Mme Marie Clarke Walker: Je pense que l'exemple que vous avez donné, que vous ne pourriez pas dire que vous êtes une femme même si vous le vouliez, est un exemple ridicule, car un homme est différent d'une femme. Pour le mariage, qu'il s'agisse de deux personnes du même sexe ou du sexe opposé, c'est la même chose.
M. Brian Jean: Vous estimez donc vous aussi que c'est une question d'égalité, n'est-ce pas?
Mme Marie Clarke Walker: Actuellement il existe des mariages religieux et des mariages civils. Dans les deux cas ce sont des mariages.
M. Brian Jean: Pensez-vous que c'est une question d'égalité quand les mêmes droits s'appliquent à deux définitions différentes? Pensez-vous que c'est encore une question d'égalité?
Mme Marie Clarke Walker: Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?
M. Brian Jean: Certainement. Votre organisation accepterait-elle qu'il existe deux mots différents, quels qu'ils soient, mais que ces deux mots soient assortis des mêmes droits exactement?
Mme Marie Clarke Walker: Pourquoi utiliser deux mots différents pour décrire la même chose?
M. Brian Jean: Les deux mots ne signifient pas la même chose. Ils sont assortis des mêmes droits...
Mme Marie Clarke Walker: Vous venez de donner la réponse.
M. Brian Jean: C'est bien ce que je dis. La question est une question d'égalité. Je vous demande pourquoi deux mots différents qui confèrent des droits égaux n'aboutiraient pas à l'égalité?
Mme Marie Clarke Walker: Comme vous l'avez dit, ce mots ne signifient pas la même chose.
M. Brian Jean: Eh bien, ils correspondent à des définitions différentes mais ils sont assortis des mêmes droits.
Mme Marie Clarke Walker: Mais pourquoi y aurait-il des mots différents... pourquoi les mots seraient-ils différents?
M. Brian Jean: Je n'essaie pas ici de lancer un débat. Je ne comprends pas pourquoi on en fait une question d'égalité et c'est ce que j'essaie de comprendre. Pourquoi y aurait-il souci d'égalité si les droits et les obligations sont les mêmes... Franchement, je souhaiterais que les couples qui vivent en union de fait puissent jouir de ces droits. Pourquoi les mêmes droits et obligations ne s'appliqueraient-ils pas à deux mots différents—ou trois, si vous le voulez?
Mme Marie Clarke Walker: J'ai encore du mal à comprendre votre explication. Si c'est la même chose, donnons-lui le même mot. Pourquoi traiter un groupe différemment? Cela revient à la notion d'être séparé mais égal, n'est-ce pas? Vous dites qu'il y a deux définitions distinctes...
M. Brian Jean: Il s'agit bien de deux groupes différents.
Mme Marie Clarke Walker: ... mais d'après votre définition, il y a égalité.
M. Brian Jean: Mais vous avez expliqué qu'il s'agit de deux groupes différents, et c'est à cela que je m'attardais.
Le président: Merci, monsieur Jean.
[Français]
Nous revenons aux libéraux.
Monsieur Boudria.
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Merci, monsieur le président.
Nous sommes un comité législatif et notre but est d'apporter les modifications techniques nécessaires pour améliorer le projet de loi. Il ne s'agit pas ici, au comité, d'être pour ou contre le projet de loi. Ce projet de loi a été présenté à la Chambre en deuxième lecture, et la Chambre l'a approuvé en principe. Elle l'adoptera ou le rejettera en troisième lecture.
Nous sommes le comité législatif, et notre rôle est très clair. Le Règlement de la Chambre est très clair quant aux modifications que nous pouvons proposer. S'agissant des protections pour les ministres du culte, avez-vous étudié le détail des articles pertinents? Pouvez-vous nous suggérer des modifications pour mieux protéger les membres du clergé, ou croyez-vous que le texte tel que rédigé les protège suffisamment?
[Traduction]
M. Philip Horgan: Je pense que l'on pourrait envisager un amendement, à savoir prévoir un temps d'arrêt quant à la mise en oeuvre de ce projet de loi jusqu'à ce que les assemblées législatives provinciales adoptent les mesures de protection que le Parlement estimerait importantes. En fait, il faudrait être convaincu qu' une province est prête à offrir mesures de protection nécessaires pour garantir la liberté de conscience et de religion du clergé, avant que ce projet de loi entre en vigueur dans une province.
» (1715)
L'hon. Don Boudria: Monsieur, vous ne répondez pas à ma question.
M. Philip Horgan: Vous m'avez demandé quels amendements réalistes pourraient être apportés. C'est un amendement réaliste.
L'hon. Don Boudria: Je veux bien, mais je vous dirai que de proposer un amendement qui ne serait pas recevable n'est pas réaliste.
Je vous demande plus particulièrement si vous avez lu le texte de cet article. Si vous ne pensez pas que les mesures de protection soient suffisantes, et je suis moi-même catholique pratiquant, dites-moi ce que vous proposeriez pour amender le projet de loi. Me dire que je pourrais présenter un amendement non recevable, ne m'aide en rien, sauf le respect que je vous dois.
M. Philip Horgan: Je vais répondre à la question. Je vais proposer une chose qui, franchement, n'a pas recueilli la faveur de tous les membres de votre parti. La protection émanant de la disposition dérogatoire en l'occurrence mériterait-il d'être envisage?
C'est irrecevable également. En effet, vous dites que...
L'hon. Don Boudria: Cela va au-delà de la portée du projet de loi. Merci.
Monsieur le président, je n'y peux rien. Je pose une question. Nous connaissons le contenu des articles et j'essaie d'obtenir de l'aide de nos témoins. On est censé nous donner de l'aide technique. Je demande si quelqu'un peut proposer des améliorations qui nous viendraient en aide.
Je voudrais demander comment nous pouvons améliorer le projet de loi. Incorporer une disposition dérogatoire, monsieur le président, si on songeait à cela, constituerait un nouvel élément qui déborde le cadre du projet de loi. Le projet de loi n'en prévoit pas. Monsieur le président, si je proposais une telle disposition, vous la refuseriez. Je le sais, car j'ai déjà été président de comité.
Il en va de même pour une recommandation ou un nouvel article qui disposerait qu'une période d'attente doit s'écouler avant que le projet de loi soit promulgué. Un comité législatif ne... un comité permanent pourrait peut-être offrir cette solution dans le cadre d'une étude, mais ce n'est pas possible au moment de l'étude article par article.
Le président: Monsieur Boudria, posez-vous une question à nos témoins ou faites-vous une déclaration?
L'hon. Don Boudria: Eh bien, je serais reconnaissant à quiconque ferait une recommandation à cet égard.
M. Philip Horgan: Nous proposons un article dans nos documents mais malheureusement, n'étant pas traduit, vous ne l'avez pas entre les mains. Nous avons certainement abordé la question des diverses mesures de protection, qu'il s'agisse de protéger dans la Loi de l'impôt les organisations caritatives ou de garantir le droit d'association et de liberté d'expression afin que les chefs religieux, le clergé et les autres, ne soient pas inquiétés pour avoir tenu des propos, au nom de leur confession, sur la conduite homosexuelle ou sur le mode de vie des gais et des lesbiennes.
Il est difficile de prévoir comment chaque projet de loi émanant de cette Chambre peut et sera affecté. En fait, avec le temps, il faudra intervenir de façon ponctuelle. Vous êtes le législateur. C'est moi qui doit faire valoir mon point de vue. Si en fait le gouvernement est sérieux quand il dit vouloir offrir cette protection dans la loi, je suppose qu'il devrait l'affirmer en faisant référence à une disposition dérogatoire. Je ne sais pas si cela est du ressort du rôle technique que doit remplir ce comité mais franchement, je m'en remets à M. O'Brien pour le nécessaire.
Le président: Excusez-moi, les cinq minutes sont écoulées.
Monsieur Scheer.
M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle): Monsieur le président, je voudrais qu'une partie de mon temps soit utilisée par M. O'Brien pour répondre à...
M. Pat O'Brien: Merci beaucoup.
Moi aussi j'ai eu un court préavis mais j'étais déjà sur place.
Je reviens à l'argument de M. Boudria. Je m'inquiète de cette façon de procéder—et mes inquiétudes croissent de plus en plus—car les gens se présentent au comité avec un préavis extrêmement court. Le président a expliqué pourquoi. Cela ne change rien à la réalité. Cela revient à intimider le témoin car à mon avis, il doit reconnaître qu'il n'adhère pas au sens strict du terme à la routine du comité alors qu'on ne lui a pas donné le temps nécessaire pour le faire.
C'est l'un ou l'autre. Ou bien le processus est sérieux, complet et équitable, ou bien il ne l'est pas. Ce que je constate aujourd'hui me donne des impression contradictoires.
Je voudrais de nouveau vous remercier de me donner l'occasion de témoigner. On m'a demandé plus tôt de me prononcer sur ces dispositions et on a évoqué un accord que j'aurais conclu avec le premier ministre. Je répète que je n'ai pas... Je n'ai pas soulevé la question des déplacements avec le premier ministre. Je vous explique pourquoi. Je considère le premier ministre comme un homme de parole et je sais, en tant que parlementaire depuis 12 ans, que la plupart des audiences se déroulent sur la Colline. C'est là que la plupart des comités siègent.
Le comité a longuement voyagé en 2002-2003, même si le processus a tourné à la blague et que le comité n'a pas présenté de rapport. On doit présumer qu'étant donné que le comité ne se déplacera pas, il ne sert à rien d'imposer une date limite artificielle, le 14 juin, ou une autre date. Il ne faudrait pas s'attendre à ce que les témoins soient invités au pied levé et qu'on leur reproche ensuite de ne pas respecter les consignes du comité quand ils s'éloignent du sujet, quand ils ne sont pas précis. C'est tout simplement... Soyons réalistes. Ou bien on souhaite consulter les groupes intéressés ou bien on ne le souhaite pas. Appliquer de façon stricte certaines consignes ne respecte pas nécessairement l'esprit dans lequel un dialogue doit s'engager pour combler le déficit démocratique comme nous le souhaitons tous.
Merci.
» (1720)
M. Andrew Scheer: Ma question s'adresse à M. Hawke.
Vous avez dit que vous avez un enfant homosexuel. Avez-vous l'impression qu'il n'a pas accès à l'institution du mariage, qu'il est victime d'une certaine discrimination... empêché de se marier comme votre enfant hétérosexuel a pu le faire?
M. Bill Hawke: Il vit en Colombie-Britannique et il a pu se marier, mais son mariage n'est pas reconnu au niveau fédéral. S'il allait vivre en Alberta, son mariage ne serait pas reconnu et dans d'autres régions du Canada non plus.
M. Andrew Scheer: Le mariage est une institution fondamentale qui existe depuis 2000 ans. Votre fils a tout à fait le droit de se marier, comme n'importe quelle autre personne humaine, dans la mesure où l'institution du mariage est respectée, n'est-ce pas? Il ne faut pas dire que lui, un homosexuel, ne peut pas se marier. Tout simplement, la personne avec laquelle il souhaite s'unir n'est pas apte au mariage.
M. Bill Hawke: L'institution, telle qu'elle existe actuellement au niveau fédéral, ne lui permet pas de choisir son partenaire.
M. Andrew Scheer: Il est vrai également que je n'ai pas la permission de choisir de me marier avec certaines personnes. En effet, par définition, je ne peux pas me marier avec un proche... Les personnes avec qui j'ai des liens de consanguinité, les personnes d'un certain âge.
Ensuite il y a la maternité. Je ne peux pas dire que je suis victime de discrimination dans le cas de la maternité, parce que je ne peux pas être mère. Une personne homosexuelle a tout autant accès à l'institution du mariage qu'une personne hétérosexuelle, car elle peut épouser une personne du sexe opposé à l'exclusion de tous les autres.
M. Bill Hawke: Vous faites preuve de discrimination contre lui...
M. Andrew Scheer: Absolument pas. En tant qu'homosexuel, il a tout à fait le droit de le faire.
M. Bill Hawke: Vous faites preuve de discrimination car vous dites qu'il faut que ce soit une relation hétérosexuelle.
M. Andrew Scheer: Je n'affirme rien car c'est un fait.
M. Bill Hawke: Oui, c'est ce que les autorités fédérales affirment en effet.
M. Andrew Scheer: La maternité, c'est pour une femme et son enfant. Nous ne disons pas qu'à cause d'une orientation sexuelle donnée, l'accès à l'institution du mariage est refusé. Il faut s'en tenir à ce qu'est l'institution et ceux qui veulent y avoir accès ont tous les mêmes droits. Votre fils homosexuel souhaite un autre type de relation et personne ne lui en refuse le droit. Nous disons tout simplement que cela ne peut pas être le mariage.
Je vois que M. O'Brien veut intervenir.
M. Pat O'Brien: Je souhaite vivement intervenir brièvement. Je répète ce que j'ai dit à la personne qui pose la question, monsieur Hawke, et je veux entendre la réponse. Aucun tribunal national ou international n'a décrété qu'il s'agit d'une question de droits de la personne. Certains juges au Canada ont tranché dans un sens, et d'autres dans l'autre, en ce qui concerne les droits de la personne.
M. Andrew Scheer: Ainsi parce que votre fils...
Le président: Monsieur Scheer, excusez-moi.
Y a-t-il des questions du côté libéral?
Monsieur Warawa voudrait poser une question. Nous en sommes aux dernières cinq minutes de séance.
M. Mark Warawa: Merci, monsieur le président.
Le dialogue s'est révélé fort intéressant et encore une fois je remercie les témoins...
Mes questions portent sur les écoles confessionnelles et s'adressent aux représentants de la Ligue catholique pour les droits de l'homme.
Nous avons parlé de droits religieux en mettant l'accent sur le clergé, responsable de la célébration du mariage, mais il faut dire qu'il y a beaucoup de jeunes qui fréquentent des écoles confessionnelles, des écoles punjabi ou encore chrétiennes ou encore musulmanes. On m'a dit personnellement qu'on s'inquiétait du fait que les écoles vont peut-être devoir dispenser un enseignement qui va à l'encontre de leurs croyances... et que se passerait-il?
Vous représentez la foi catholique, la foi chrétienne. Pouvez-vous nous dire comment ce projet de loi pourrait avoir une incidence sur les écoles?
» (1725)
M. Philip Horgan: Nous avons déjà formulé ces préoccupations dans le cadre des procédures judiciaires et dans nos mémoires présentés à d'autres instances. Nous avons de graves craintes au sujet des écoles publiques, que ce soit dans votre province ou d'autres, à qui les ministères provinciaux de l'Éducation fixeront un programme d'études. Dans les circonstances, si la norme culturelle et juridique du pays redéfinit le mariage comme étant une institution entre deux personnes, toutes sortes de problèmes en découleront. Des parents musulmans dont les enfants vont dans des écoles publiques ontariennes ont dû se battre pour être simplement avisés de ce qui était enseigné dans la classe, qui aurait pu paraître critiquable pour leurs enfants, sans qu'ils puissent avoir le droit de retirer leurs enfants de ces classes.
Du côté des écoles religieuses, il est probablement plus facile de se protéger. Ce qui nous donne plus de souci, c'est le fait que des élèves religieux ou pour qui la religion est importante, dans les écoles publiques, se feront inculqués une norme culturelle ou juridique qui est moralement contestable pour leur foi.
Bien franchement, la Cour suprême s'est en partie penchée sur cette question, mais a eu tort, à mon avis. C'était dans l'affaire du Conseil scolaire de Surrey, qui imposait des textes positifs pour les homosexuels dans les classes de maternelle et de première année.
Des enseignants gais et lesbiennes de Colombie-Britannique ont demandé, dans le cadre d'une requête devant la Commission des droits de la personne que certains termes soient changés dans le programme scolaire, pour supprimer des mots comme « mère » et « père » et y substituer « parent » et « aidant ». Autrement dit, toute cette désexualisation de la culture est un revirement remarquable. En fait, les textes et les théoriciens gais qui se prononcent pour le mariage homosexuel ne le font pas pour revendiquer leurs droits à l'égalité, mais ils le font dans le contexte de la désexualisation, de la promotion des études gaies, etc.
Bien franchement, nous nous lançons dans une expérience extrême de sociologie appliquée. Voilà vraiment de quoi il s'agit. Ce n'est pas le début de la pente savonneuse, nous avons déjà glissé beaucoup, à mon avis.
M. Mark Warawa: M. Jean voulait partager son temps avec moi, si c'est possible.
Le président: Monsieur Scheer.
M. Andrew Scheer: J'ai une très courte question qui se rapporte à la forme du projet de loi. Ma question s'adresse à la Ligue catholique pour les droits de l'homme.
Dans le projet de loi, on emploie les termes « célébrer » et on dit qu'on les protégera contre l'obligation de « célébrer » des mariages homosexuels. Vous l'avez dit, on est déjà bien avancé sur la pente savonneuse et je me demande si vous êtes préoccupés à l'idée que vous ayez un jour à reconnaître des mariages homosexuels? Nous savons que les cérémonies catholiques... Les écoles de confession catholique pourraient avoir des difficultés à reconnaître quelqu'un qui vient d'un autre type de cérémonie religieuse, d'un autre contexte éducatif. On leur fera savoir que pour l'état civil, ils seront reconnus comme un couple marié, mais certains groupes religieux, comme pour d'autres cérémonies, pourraient s'y opposer.
Est-ce que cela vous inquiète?
M. Philip Horgan: J'ai un exemple à vous donner. Imaginons que les enfants d'un couple hétérosexuel, pour une raison ou pour une autre, vont à une école catholique, en Ontario. Présumons que la mère, dans ce couple hétérosexuel, met fin à la relation pour vivre avec une conjointe et peut-être se marier, grâce à ce projet de loi ou en vertu du contexte juridique actuel en Ontario. Elle pourrait vouloir que ses enfants restent à l'école où ils sont. On se posera alors en effet de très intéressantes questions.
Peut-on expulser un élève catholique qui va à cette école, à cause de la relation religieuse de sa mère, et des préoccupations que cela suscite? Est-ce que ce genre de question se posera?
J'ai entendu M. Boudria et d'autres se déclarer des catholiques pratiquants. Sauf votre respect, ils n'ont pas suffisamment approfondi leur foi pour comprendre ce que cela veut dire, surtout ce que cela signifie que d'être un politique catholique. Dans ce contexte crucial, avec ce genre de scénario, il sera très difficile de déterminer quelle protection les tribunaux accorderont aux écoles confessionnelles.
» (1730)
Le président: Merci beaucoup. Votre temps est épuisé.
À l'intention des membres du comité et à ceux qui s'intéressent à notre calendrier pour le reste de la semaine, demain nous siégerons de 15 h 30 à 17 h 30. Jeudi, nous aurons une séance de 15 h 30 à 17 h 30 et de 18 heures à 20 heures.
Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui.
La séance est levée.