CC38 Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité législatif chargé du projet de loi C-38
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 1 juin 2005
¹ | 1530 |
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)) |
Mme Anne Lowthian (directrice exécutif, World Sikh Organization of Canada) |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
M. Ajit Singh Sahota (président, World Sikh Organization of Canada) |
Le président |
Mme. Choice Okoro (agente de programme, Initiatives sur les droits de la personne et le réconciliation, Église unie du Canada) |
¹ | 1545 |
Mlle Anne Squire (ancienne modératrice , Église unie du Canada) |
¹ | 1550 |
Le président |
Mlle Anne Squire |
Le président |
¹ | 1555 |
Mme Lorraine Pelot (agente principale de recherche, Commission du droit du Canada) |
Mme Nathalie Des Rosiers (présidente, Commission du droit du Canada) |
º | 1600 |
Le président |
Mme Nathalie Des Rosiers |
º | 1605 |
Le président |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
Mme Anne Lowthian |
M. Brian Jean |
Mme Anne Lowthian |
M. Ajit Singh Sahota |
º | 1610 |
M. Brian Jean |
Mme Anne Lowthian |
M. Brian Jean |
Mme Anne Lowthian |
M. Brian Jean |
M. Ajit Singh Sahota |
M. Brian Jean |
Mme Anne Lowthian |
M. Brian Jean |
Mlle Anne Squire |
M. Brian Jean |
Mlle Anne Squire |
M. Brian Jean |
Mme. Choice Okoro |
M. Brian Jean |
Mme. Choice Okoro |
M. Brian Jean |
Mme. Choice Okoro |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Brian Jean |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Brian Jean |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Brian Jean |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Brian Jean |
º | 1615 |
Le président |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Richard Marceau |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Richard Marceau |
º | 1620 |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Richard Marceau |
Mlle Anne Squire |
M. Richard Marceau |
Mme Anne Lowthian |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas) |
Mlle Anne Squire |
º | 1625 |
M. Bill Siksay |
Mlle Anne Squire |
M. Bill Siksay |
Mlle Anne Squire |
M. Bill Siksay |
Mlle Anne Squire |
M. Bill Siksay |
Mlle Anne Squire |
M. Bill Siksay |
Le président |
M. Bill Siksay |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Bill Siksay |
Le président |
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.) |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Mme Françoise Boivin |
Mme. Choice Okoro |
º | 1630 |
Mme Françoise Boivin |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Mme Lorraine Pelot |
Mme Françoise Boivin |
Mme Nathalie Des Rosiers |
º | 1635 |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
Mme Françoise Boivin |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC) |
Mme. Choice Okoro |
Mme Nathalie Des Rosiers |
º | 1640 |
M. Rob Moore |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Rob Moore |
Le président |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Le président |
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.) |
º | 1645 |
Mlle Anne Squire |
M. Michael Savage |
Mlle Anne Squire |
M. Michael Savage |
Mlle Anne Squire |
M. Michael Savage |
Mme. Choice Okoro |
M. Michael Savage |
Mme. Choice Okoro |
M. Michael Savage |
º | 1650 |
Mme. Choice Okoro |
M. Michael Savage |
Le président |
M. Richard Marceau |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Richard Marceau |
Mme Nathalie Des Rosiers |
º | 1655 |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. Richard Marceau |
Le président |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
Mme Nathalie Des Rosiers |
L'hon. Don Boudria |
Mlle Anne Squire |
L'hon. Don Boudria |
Mme Anne Lowthian |
» | 1700 |
L'hon. Don Boudria |
Le président |
M. Bill Siksay |
Mme. Choice Okoro |
M. Bill Siksay |
Mme. Choice Okoro |
M. Bill Siksay |
Mme Nathalie Des Rosiers |
» | 1705 |
M. Bill Siksay |
Le président |
Mme Françoise Boivin |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Mme Françoise Boivin |
Mlle Anne Squire |
Mme Anne Lowthian |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
Mme Françoise Boivin |
Le président |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
Le président |
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC) |
Mme Anne Lowthian |
M. Gord Brown |
Mme Nathalie Des Rosiers |
» | 1710 |
M. Gord Brown |
Mlle Anne Squire |
M. Gord Brown |
» | 1715 |
Mlle Anne Squire |
M. Gord Brown |
Mlle Anne Squire |
M. Gord Brown |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.) |
Mme Anne Lowthian |
L'hon. Paul Harold Macklin |
M. Ajit Singh Sahota |
Mme Anne Lowthian |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mlle Anne Squire |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mlle Anne Squire |
Mme Anne Lowthian |
L'hon. Paul Harold Macklin |
» | 1720 |
Mme Nathalie Des Rosiers |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Mme Nathalie Des Rosiers |
L'hon. Paul Harold Macklin |
Le président |
M. Richard Marceau |
Le président |
M. Brian Jean |
Mme Nathalie Des Rosiers |
» | 1725 |
M. Brian Jean |
M. Ajit Singh Sahota |
M. Brian Jean |
Mme Anne Lowthian |
M. Brian Jean |
M. Ajit Singh Sahota |
M. Brian Jean |
M. Ajit Singh Sahota |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Vic Toews (Provencher, PCC) |
» | 1730 |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Vic Toews |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Vic Toews |
Mme Nathalie Des Rosiers |
M. Vic Toews |
Le président |
M. Vic Toews |
Le président |
CANADA
Comité législatif chargé du projet de loi C-38 |
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l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 1 juin 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.)): Bonjour à tous et bienvenue à cette réunion du Comité législatif chargé du projet de loi C-38.
Au nom du comité, je souhaite la plus cordiale des bienvenues à nos témoins. Nous vous remercions beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
Nous accueillons cet après-midi des représentants de la World Sikh Organization of Canada, de l'Église Unie du Canada et de la Commission du droit du Canada.
[Français]
Si vous le permettez, nous allons débuter.
Chaque organisme dispose de 10 minutes pour faire une présentation. Ensuite, nous passerons à une période de questions et de réponses.
[Traduction]
Nous allons débuter avec Mme Lowthian ou M. Sahota. de la World Sikh Organization of Canada. Bienvenue à vous.
Mme Anne Lowthian (directrice exécutif, World Sikh Organization of Canada): Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité. C'est un honneur pour nous de comparaître devant le Comité législatif de la Chambre des communes chargé du projet de loi C-38, la Loi sur le mariage civil, au nom de la World Sikh Organization of Canada.
Je suis Anne Lowthian. Je suis directrice exécutive de la World Sikh Organization (WSO) depuis 1993. Je suis accompagnée de M. Ajit Singh Sahota, un des membres fondateurs de l'organisation et notre président national actuel.
Soucieux de promouvoir la bonne volonté, la paix, la dignité et l'équité dans une conjoncture mondiale fragile et tendue, les représentants élus, les bénévoles et le personnel de la World Sikh Organization ont rédigé différents mémoires qui ont été présentés à tous les paliers des pouvoirs judiciaire, législatif et exécutif des gouvernements canadiens depuis 1984. La WSO n'a cessé de prôner l'application et la protection des droits de la personne à tous les individus, sans égard à leurs croyances religieuses, à leur statut social, à leurs antécédents culturels, à leur mode de vie ou à leur orientation sexuelle.
Si l'importance que nous accordons à notre pratique religieuse à l'extérieur du cadre sécuritaire de notre culture panjabi ancestrale est devenue une telle source d'inspiration pour les autres Canadiens, c'est peut-être à cause des nombreux obstacles que nous avons dû surmonter en raison de notre identité visiblement distincte. Notre approche visionnaire et progressiste des questions sociales est fondée sur les enseignements, les philosophies et les pratiques sikhs qui affirment l'égalité de toutes les croyances, de tous les peuples et de toutes les nations et qui préconisent l'abolition de toutes les distinctions de classe, comme les systèmes hiérarchiques de castes. Ainsi, la WSO a revendiqué l'émancipation des populations opprimées en Inde, c'est-à-dire des intouchables qui sont traités, conformément à des stéréotypes bien ancrés qui les avilissent publiquement, comme des aberrations de la nature au sein de la société, plutôt que comme les êtres humains plein de dignité qu'ils sont vraiment.
Les textes sacrés sikhs demeurent uniques au monde en ce sens qu'ils contiennent la plupart des principes d'égalité que le Canadien John Humphrey a consignés par écrit cinq siècles plus tard en énonçant les articles de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations Unies. Conformément aux enseignements du gourou Nanak, fondateur de la religion sikh en 1469, les femmes ont un rôle remarquablement important dans les textes sacrés, qui sont rédigés d'un point de vue féminin et qui traduisent une croyance en un Dieu qui n'est ni homme ni femme et dont on parle comme d'un père et d'une mère. En outre, les institutions sikhs ont été créées en s'appuyant sur cette croyance fondamentale de l'égalité entre hommes et femmes dès le XVIe siècle, alors que plus du tiers des missionnaires sikhs étaient des femmes.
De fait, la manifestation la plus visible de l'identité sikhe, le turban recouvrant partiellement les cheveux jamais coupés, émane de ce précepte de l'égalité entre hommes et femmes. Dans les sociétés anciennes et modernes où ont vécu les gourous—ou guides spirituels—sikhs, il n'était pas rare que les femmes soient tenues de se voiler le visage devant les hommes en signe d'humilité et de respect pour ceux qui étaient censés occuper une position plus élevée dans la hiérarchie sociale. Le premier gourou, Nanak, fondateur du sikhisme, s'est élevé contre des traditions aussi misogynes et a déclaré publiquement qu'aucune femme ne devrait être obligée de se voiler le visage devant un homme, car hommes et femmes ont été créés égaux par Dieu.
Les Sikhs ont plutôt rendu obligatoire le port d'un couvre-chef, tant pour les hommes que pour les femmes. Ce couvre-chef doit être porté en tout lieu, parce que Dieu est partout, et autant par les hommes que par les femmes pour marquer l'égalité entre les sexes. Depuis l'époque du gourou Nanak, le turban est le symbole externe de l'identité sikhe et continue, depuis 1699, d'exprimer la croyance sikhe dans l'égalité entre les sexes, l'humilité et la suprématie de Dieu.
Je n'apprends sans doute rien aux honorables membres du comité en rappelant que les sikhs sont reconnus depuis l'époque de Nanak comme la minorité la plus visible de la planète. Il semble que les Sikhs aient tendance, comme les légumes-racines, à se retrouver dans les endroits les plus reculés du monde. Partout où les communautés sikhes se sont établies, nous n'avons jamais cessé de préconiser une société plus égalitaire.
Étant donné l'engagement de la WSO à l'égard de la philosophie sikhe de l'égalité pour tous les êtres humains et notre propre engagement envers la Charte canadienne des droits et libertés, il va de soi que nous sommes favorables à la Loi sur le mariage civil. La WSO n'a pas tardé à reconnaître que les perspectives d'avenir des différents groupes confessionnels sont entièrement fonction de la détermination des chefs religieux actuels à honorer et à respecter les droits de la personne au sein de nos populations diversifiées.
Comme le préambule même du projet de loi C-38 précise que la Loi sur le mariage civil n'entravera l'exercice d'aucune liberté religieuse, la World Sikh Organization est d'avis que tous le chefs religieux partagent l'impératif moral de limiter l'expression de leurs opinions religieuses aux seules questions de droit revêtant une importance doctrinale considérable.
¹ (1535)
Les articles 2, 15 et 27 de la Charte canadienne des droits et libertés ont protégé les droits des Sikhs de maintenir leur identité religieuse, leurs croyances et leur dignité tout en occupant des fonctions au sein d'institutions canadiennes comme la Gendarmerie royale du Canada et les Forces armées canadiennes, ainsi que dans le cadre des activités de la Légion royale canadienne. Ainsi, la World Sikh Organization s'est fait un devoir d'intervenir dans ces causes pour défendre le droit des Sikhs de porter un turban tout en étant membre de ces organisations si reconnues. Toute définition du mariage doit donc tenir compte des besoins et des aspirations des personnes qui sont les plus touchées par l'interdiction du droit au mariage civil. Les Canadiens transgendéristes, homosexuels et bisexuels méritent la même considération objective que celle à laquelle ont droit les membres des autres communautés minoritaires.
La WSO voit un paradoxe du pluralisme dans le fait que les nobles efforts consentis pour donner un sens moral et des visées religieuses à nos institutions et à nos lois ne peuvent être couronnés de succès qu'en entravant la libre expression de ces mêmes croyances que nous cherchons à protéger. Dans le cas des mariages civils au Canada, les gens qui ne sont pas favorables au mariage entre personnes de même sexe ne seront pas obligés de contracter de tels mariages. Les législateurs canadiens ont donc le devoir de veiller à ne pas prendre position sur des questions de doctrine religieuse ou d'orientation sexuelle et à considérer uniquement les questions légales concernant la Loi sur le mariage civil et leurs conséquences pratiques pour les citoyens canadiens.
Toute définition du mariage doit donc être le reflet fidèle des besoins et des aspirations de ceux qui sont les plus touchés par l'interdiction du droit au mariage civil. La définition du mariage en fonction d'une norme religieuse quelconque ne fera, de toute évidence, qu'obliger les communautés minoritaires et les contribuables à assumer les coûts de plus en plus élevés des actions en justice visant à contester les politiques et les lois qui contreviennent à la notion d'égalité articulée dans la Charte canadienne des droits et libertés. En bout de ligne, le seul aspect sacro-saint du processus législatif au sein d'une société véritablement laïque passe par une approche tolérante, pluraliste et large d'esprit visant à faire en sorte que nos citoyens continuent de profiter de la liberté de choisir et de manifester leurs croyances, leur mode de vie ou leurs traditions, sans ingérence ou interférence déraisonnable de l'Église ou de l'État.
La World Sikh Organization recommande donc que le projet de loi C-38, le Loi sur le mariage civil, soit adopté étant donné qu'il est parfaitement conforme à la Charte canadienne des droits et libertés et à la Constitution canadienne, et qu'il accorde comme il se doit une protection égale de la loi et un accès égal au mariage à tous les Canadiens, sans discrimination fondée sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, l'orientation sexuelle, ou l'incapacité mentale ou physique.
Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de présenter les points de vue de la communauté sikhe.
Merci.
¹ (1540)
Le président: Merci.
Est-ce que M. Sahota a quelque chose à ajouter?
M. Ajit Singh Sahota (président, World Sikh Organization of Canada): J'aimerais dire que je suis biologiste de profession et que je travaille pour le gouvernement du Canada depuis 34 ans. J'étudie la vie animale et végétale, et il y a des anomalie et des variations dans la nature. C'est la chose la plus naturelle qui soit, il existe des variations. Si Dieu avait voulu que notre monde soit conçu sans variations ni anomalies, il l'aurait fait, mais il en a voulu autrement.
Comme nous le savons, ma collectivité souffre et est la cible de crimes haineux depuis 500 ans, et la plupart de ces crimes sont perpétrés par des dirigeants hindous, musulmans, chrétiens... Je peux vous nommer dix types de dirigeants qui nous persécutent, jusqu'à la torture et la mort. Nous savons comment l'on se sent lorsque l'on est la cible de la haine et du racisme. Je pense que les personnes qui s'opposent au mariage entre conjoints de même sexe, si elles croient vraiment en Dieu, devraient savoir que Dieu a bien voulu que les populations soient variables et que ces personnes différentes de la majorité font partie de la volonté de Dieu. Plutôt que de les haïr, nous devrions avoir pitié d'eux et ne pas les haïr. Si je suis une personne normale et ordinaire, je devrais remercier Dieu. Je ne devrais vraiment pas aller à l'encontre de la volonté de Dieu et croire que les autres minorités ne peuvent pas survivre.
Merci.
Le président: Votre temps est écoulé. Merci.
Nous recevons maintenant Mme Squire et Mme Okoro de l'Église unie du Canada.
Mme. Choice Okoro (agente de programme, Initiatives sur les droits de la personne et le réconciliation, Église unie du Canada): Bonjour.
Je vous salue au nom de l'Église unie du Canada. Je vous remercie infiniment de nous recevoir aujourd'hui.
Je vous présente la Dre Anne Squire qui représente l'Église unie ici aujourd'hui. La Dre Squire a été notre modératrice de 1986 à 1988.
Je m'appelle Choice Okoro. Je représente l'Église unie au sujet des droits de la personne et de la réconciliation. Je vais faire une brève introduction pour présenter très clairement nos recommandations.
Le Conseil général, au nom duquel nous nous exprimons aujourd'hui, est l'instance dirigeante nationale de l'Église unie du Canada. Les décisions prises par les personnes élues au Conseil général deviennent la politique de l'Église à l'égard des questions internes ainsi que des questions de politique publique auxquelles elle s'intéresse. Depuis le milieu des années 70, les Conseils généraux de l'Église se sont prononcés sur la nécessité d'assurer les droits à l'égalité aux gais et lesbiennes dans la société canadienne.
Le Conseil général appuie le projet de loi C-38 et en demande l'application immédiate, puisqu'il rendra les lois fédérales en matière de mariage conformes à la Charte. Il accorde des droits égaux au mariage dans l'ensemble du Canada, reconnaît la protection de la liberté religieuse assurée par la Charte et harmonise les lois qui existent maintenant dans l'ensemble du pays en ce qui concerne le mariage civil des couples homosexuels. Le projet de loi C-38 reflète des valeurs conformes à la conception que l'Église unie se fait d'une société civile forte, comme l'inclusion, la diversité, le respect mutuel et l'équité.
Au lieu de commenter les détails du projet de loi, nous allons présenter un résumé des politiques adoptées par le Conseil général, politiques qui nous amènent à appuyer le projet de loi.
¹ (1545)
Mlle Anne Squire (ancienne modératrice , Église unie du Canada): Une contribution importante et unique que l'Église fait valoir dans ce dialogue est l'expérience de notre confession religieuse qui offre à ses membres des cérémonies de mariage entre personnes de même sexe et qui, en même temps, respecte le droit des membres de cette confession religieuse de ne pas offrir ces services.
L'Église unie du Canada est attachée au droit à l'égalité pour les gais et les lesbiennes dans la société canadienne et elle appuie depuis longtemps la reconnaissance civile des unions entre personnes de même sexe. En août 2003, le 38e Conseil général a décidé de demander au gouvernement du Canada de reconnaître les mariages entre personnes de même sexe dans les lois sur le mariage. En août 2000, le 37e Conseil général a affirmé que les orientations hétérosexuelle et homosexuelle étaient un don de Dieu et faisaient partie de la merveilleuse diversité de la création, et il a résolu de préconiser la reconnaissance civile des unions entre personnes de même sexe. En octobre 2004, l'Église unie du Canada a comparu devant la Cour suprême pour appuyer le droit des couples homosexuels de se marier légalement, ainsi que le droit des représentants religieux et des congrégations de décider eux-mêmes s'ils offriront des services de mariage religieux aux couples homosexuels.
Dans sa déposition à la Cour suprême, l'Église unie du Canada réitérait ce qu'elle avait déclaré au Comité de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes en février 2003 : le gouvernement fédéral devra adopter un cadre législatif assurant la même reconnaissance civile aux couples hétérosexuels et homosexuels.
L'Église unie est le groupe confessionnel protestant le plus important du Canada, avec 2,8 millions de personnes qui se sont déclarées membres de cette Église au dernier recensement. L'Église unie a vu le jour en 1925. Elle résulte de l'union des méthodistes, des congrégationnalistes et de 70 p. 100 des Églises presbytériennes au Canada. Il y a actuellement au Canada plus de 3 500 Églises unies.
La doctrine de l'Église unie du Canada est exposée dans deux documents, les « Principes d'union » (1925) et la « Déclaration de foi » (1940). De plus, le « nouveau Credo » de l'Église unie (1968) est une affirmation de la foi qui est largement utilisée dans notre culte. Comme membres du corps du Christ, nous reconnaissons notre patrimoine issu de la Réforme et les enseignements des Credos de l'ancienne Église (notamment le Symbole des apôtres et le Symbole de Nicée). Notre appartenance au Conseil mondial des Églises nous relie à la communauté mondiale des Églises qui reconnaissent le Seigneur Jésus-Christ comme Dieu et Sauveur selon les écritures.
La Déclaration de foi de 1940 nous rappelle que « la foi de l'Église est basée sur l'Évangile immuable du saint amour de Dieu qui nous sauve, tel que révélé en Jésus-Christ ». Elle dit aussi que chaque génération est « appelée à en refaire (de l'Évangile) la formulation dans l'esprit de son époque et dans le ton qui convient à son contexte ».
Depuis le milieu des années 70, les Conseils généraux de l'Église unie se sont prononcés sur la nécessité de faire respecter les droits à l'égalité pour les gais et les lesbiennes dans l'Église et dans la société canadienne, et ils ont agi en conséquence. En 1984, l'Église unie du Canada a affirmé son acceptation de tous les êtres humains comme des personnes faites à l'image de Dieu, sans égard à leur orientation sexuelle. En 1988, l'Église a affirmé que toutes les personnes qui professent leur foi en Jésus-Christ, sans égard à leur orientation sexuelle, pouvaient être ordonnées. En 1992, le Conseil général a ordonné que des ressources liturgiques et pastorales pour les unions entre personnes de même sexe soient mises à la disposition des congrégations.
¹ (1550)
En 1997, le 37e Conseil général a adopté une résolution demandant que les Conférences régionales de l'Église unie pressent tous les syndicats et associations d'enseignants de dispenser une éducation sur l'homosexualité et la bisexualité afin de promouvoir la tolérance. À cette fin, l'Église unie a publié récemment Lesbian, Gay and Bisexual Youth Issues in Canada: Action Resources for United Church Congregations. En 1999, l'Église unie a comparu devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour appuyer le projet de loi C-23, Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations, ce qui était une manifestation concrète de l'engagement de l'Église unie à l'égard de l'égalité des relations hétérosexuelles et homosexuelles.
En 2000, le 37e Conseil général de l'Église unie a affirmé que les orientations hétérosexuelle et homosexuelle étaient un don de Dieu et faisaient partie de la merveilleuse diversité de la création. Chaque année, l'Église unie bénit plus de 15 000 mariages au Canada. Ce chiffre englobe l'échange de voeux entre personnes de même sexe. Sur les plans théologique et liturgique, l'Église unie estime que les couples hétérosexuels et homosexuels ont les mêmes droits et responsabilités. En 2000, le Conseil général a résolu de militer pour la reconnaissance civile des unions entre personnes de même sexe.
L'Église unie du Canada a fait diverses déclarations sur le mariage. Avant 1980, le mariage était défini comme l'union d'une femme et d'un homme. Par la suite, il a été dit au 30e Conseil général, en 1984, que la vie et le ministère de Jésus montraient ce que signifie le fait d'être un être humain complet, fait à l'image de Dieu. La caractéristique essentielle est le don total de soi à l'autre dans l'amour. Il n'y a pas d'humanité authentique en dehors de la relation et de la communauté, mais il y a plus d'une façon de symboliser et d'exprimer cette réalité qui plaise à Dieu et respecte son intention pour l'humanité.
En 1988, le Conseil général affirmait que toutes les « relations à vie » (il faut remarquer que le terme « mariage » n'est pas employé) doivent être fidèles, responsables, juste, saines, réconfortantes et enrichissantes pour la communauté et la personne. Cela veut dire que ces normes s'appliquent aux couples hétérosexuels et homosexuels, car l'Église unie a fini par reconnaître que ses membres homosexuels voulaient prendre les mêmes engagements permanents que ses membres hétérosexuels et prononcer leurs voeux solennels au sein de communautés de foi qui les soutiennent dans leur engagement.
En conséquence, les documents récents de l'Église unie pour la préparation au mariage, Passion and Freedom (2003) et les services, Celebrate God's Presence (2000), ne font aucune distinction entre hétérosexuels et homosexuels. Comme confession religieuse protestante, l'Église unie s'inscrit dans la tradition chrétienne qui ne considère pas le mariage comme un sacrement. La procréation n'est pas un aspect qui définit le mariage dans l'Église unie. Et l'Église ne condamne pas les personnes qui décident que le divorce est la seule issue pour un mariage malheureux. Les divorcés peuvent recevoir la communion de l'Église et se remarier avec quelqu'un d'autre.
Néanmoins, l'Église unie attache une valeur extrêmement élevée aux voeux prononcés devant Dieu et en présence de témoins.
Le président: Pardonnez-moi. Vous voulez peut-être passer directement à vos recommandations, parce que le temps file.
Mlle Anne Squire: D'accord.
L'Église unie du Canada recommande que le projet de loi C-38 soit adopté dans sa version actuelle. Ainsi, la législation fédérale sur le mariage sera conforme à la Charte, confirmera la liberté religieuse en respectant les droits des groupes religieux, harmonisera les lois qui existent maintenant dans l'ensemble du Canada et mettra fin à ce débat sur le traitement à réserver aux gais et lesbiennes au Canada.
Le président: Merci.
[Français]
C'est au tour de la Commission du droit du Canada.
Madame Pelot.
¹ (1555)
[Traduction]
Mme Lorraine Pelot (agente principale de recherche, Commission du droit du Canada): Bonjour. Je suis agente principale de recherche à la Commission du droit du Canada. Je tiens à remercier infiniment le comité d'avoir invité les membres de la Commission du droit du Canada à comparaître devant lui aujourd'hui.
Comme bon nombre d'entre vous le savez probablement, en 2002, la Commission du droit du Canada a publié un rapport intitulé « Au-delà de la conjugalité », qui a été déposé au Parlement et qui portait sur les relations d'interdépendance entre adultes. Mme Nathalie Des Rosiers, ancienne présidente de la Commission du droit du Canada, qui a participé à ce projet depuis ses tout débuts et qui en connaît tous les aspects en profondeur va s'exprimer devant vous aujourd'hui.
[Français]
Mme Nathalie Des Rosiers (présidente, Commission du droit du Canada): Encore une fois, je vous remercie d'avoir invité la Commission du droit du Canada à présenter son rapport. Elle avait eu l'occasion de le faire il y a de cela quelques années. Je vais décrire brièvement ce que le rapport visait à faire à l'origine, surtout le chapitre le plus pertinent ici, soit celui traitant de l'obligation de l'État à l'égard des citoyens, l'obligation de l'État de créer des institutions qui permettent aux citoyens de régler leurs affaires.
La commission a été mise sur pied en 1997. Dès le début, elle avait fait des consultations afin de savoir quels étaient les enjeux qui préoccupaient la société canadienne, et la question de la diversité des structures familiales face à l'encadrement juridique était apparue dès ce moment-là. Donc, dès 1997, beaucoup d'interventions nous invitaient à réfléchir à cette question. La commission a décidé de le faire et a entrepris une série de recherches qui ce sont étalées probablement de 1998 à 2001. Le rapport qui a été remis au ministre en décembre 2001 et déposé à la Chambre des communes en 2002 était le résultat de ces consultations et des travaux de recherches qui avaient été effectués.
Évidemment, l'encadrement des rapports personnels était une question classique de réforme du droit, parce que partout dans notre droit, on utilisait soit le mariage ou la conjugalité comme un indice d'interdépendance psychologique et économique entre des personnes. On s'est rendu compte que la société avait évolué. Trois aspects étaient particulièrement criants.
Par exemple, lorsqu'on utilise le mariage comme un indice d'interdépendance et que sa durée est moins longue qu'autrefois, cela entraîne des coûts de mise en oeuvre de politiques gouvernementales. Alors, plusieurs politiques qui avaient été faites à l'époque où on présumait que le mariage allait durer toute une vie finissaient, maintenant que les statistiques révélaient qu'un mariage durait en moyenne sept ans, par coûter très cher à l'appareil gouvernemental, qui devait constamment adapter la mise en oeuvre de ses politiques.
Bien sûr, la reconnaissance de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle était un phénomène qui devait être pris en compte.
Finalement, on devait aussi prendre en compte le fait qu'un grand nombre de Canadiens et de Canadiennes vivaient en dehors de l'institution du mariage.
Alors, je vous invite à ne pas oublier la première partie du rapport. J'insisterai entre autres sur le fait que la Loi sur la preuve au Canada est encore inconstitutionnelle parce qu'elle utilise le mot « mariage », sans étendre ses bénéfices. Je crois qu'il faudra, à un moment donné, s'en préoccuper.
La Loi sur l'assurance-emploi cause aussi beaucoup de problèmes. Les recommandations 12 et 15 du rapport de la commission sont donc toujours prédominantes. Il serait très important de les mettre en oeuvre.
Alors, la première partie du rapport explique comment l'État doit réfléchir au fait qu'il utilise le mariage comme un indice d'interdépendance, ce qui n'est plus suffisant. On invite donc le gouvernement à revoir des lois aussi diverses que la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et la Loi sur la preuve au Canada.
La deuxième partie de l'obligation de l'État est de mettre à la disposition des citoyens et des citoyennes des instruments juridiques pour régler leurs affaires. L'État le fait en droit commercial, mais il doit aussi le faire dans l'établissement et la réglementation des rapports personnels. L'approche de la commission était de déterminer comment l'État pouvait mieux répondre aux besoins des citoyens et des citoyennes dans cette diversité et dans leur besoin d'organiser leurs rapports personnels d'une façon qui leur convienne. On a tous intérêt à ce qu'il y ait une organisation ordonnée des rapports personnels, puisque c'est ce qui empêche, d'une certaine façon, une exploitation financière désordonnée ou même une exploitation physique.
º (1600)
Mettre à la disposition des citoyens et des citoyennes des instruments qui répondent bien à leurs besoins est un objectif légitime. Cependant, l'État doit évidemment être neutre dans son approche. En outre, il ne peut pas faire de discrimination. S'il crée des institutions, l'État ne peut pas les offrir de façon discriminatoire.
Le chapitre 4 du rapport de la commission est celui qui est pertinent aujourd'hui. Dans ce chapitre, on évalue toutes les solutions. On y examine le statu quo, de même que la possibilité de créer un système d'enregistrement unique qui remplacerait le mariage. L'État devrait-il se retirer et laisser la question du mariage aux communautés religieuses? On y examine également l'idée d'avoir un mariage civil et un mariage religieux, de même que la possibilité de permettre aux conjoints de même sexe de se marier. On en vient à la conclusion que, dans le contexte canadien, la meilleure chose à faire est de reconnaître le mariage entre les personnes de même sexe, pour les raisons suivantes.
Premièrement, si l'État se retire, n'offre qu'un système d'enregistrement et laisse aux groupes religieux le soin de se préoccuper de la question du mariage, cela a des effets difficiles pour les gens qui choisissent de se marier civilement. Nous avons constaté, lors de nos études, qu'en Colombie-Britannique, une plus grande proportion des gens optaient pour un mariage civil plutôt qu'un mariage religieux. Ainsi, si l'État se retirait de la question du mariage, cela enlèverait des choix à ses citoyens. Le but n'est pas d'enlever des choix aux citoyens dans leur façon de régler leurs affaires, mais bien de reconnaître que c'est bien de régler ses affaires et d'avoir un encadrement juridique adéquat. La solution de restreindre les choix des citoyens n'a donc pas été retenue comme étant valable.
La deuxième solution envisagée était basée sur ce qui existe en France: un mariage civil bien déterminé et un mariage religieux. Cela revient à « sortir la religion du mariage », si je peux m'exprimer ainsi. Le mariage religieux peut exister, mais l'État ne s'en préoccupe pas, cela n'a pas de valeur légale. La seule façon d'avoir un mariage légal, juridique, est d'avoir un mariage civil. Au Canada, compte tenu de notre histoire et de notre organisation sociale, c'est une solution possible, mais qui exigerait qu'on enlève toute une organisation très bien ancrée. D'ailleurs, ce serait assez dispendieux, car il faudrait établir une infrastructure pour les mariages civils. Il faudrait donc des mairies, un système d'enregistrement. Les consultations ont aussi démontré que, pour répondre à une petite question, on affecterait vraiment plusieurs Canadiens et Canadiennes. Cela semblait donc être une solution démesurée par rapport au problème.
Le président: Il vous reste une minute.
Mme Nathalie Des Rosiers: Je conclus.
La dernière solution semblait être la moins dramatique. En fait, il s'agissait d'étendre aux conjoints de même sexe l'accès au mariage. Cette solution, que je vous soumets, est toujours la meilleure. Elle répond bien aux objectifs d'un État laïque, puisque l'État laïque ne considère pas le mariage comme étant la seule institution où la procréation doit se faire. L'État laïque reconnaît que l'engagement entre deux personnes est un bénéfice pour la société, même quand on a 70 ans ou même quand on n'est pas en âge de procréer. On ne pouvait donc pas justifier dorénavant de restreindre le mariage aux conjoints hétérosexuels pour des raisons de procréation, puisque ce n'était pas là un objectif de l'État.
Pour conclure, la commission recommandait la protection de la liberté de religion, ce qui a été fait.
Je serai prête à répondre à vos questions, si vous en avez. Merci beaucoup.
º (1605)
Le président: Merci, mesdames.
Nous passons maintenant à la période de questions et de réponses. Lors du premier tour, chacun des partis aura sept minutes à sa disposition, ce qui inclura les réponses.
[Traduction]
Pour le Parti conservateur, monsieur Jean.
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci infiniment, monsieur le président. Merci aussi à nos témoins d'aujourd'hui.
D'abord, monsieur le président, je tiens à vous dire à quel point je trouve tout ce processus décourageant. Nous nous présentons à ces réunions sans recevoir aucune documentation à l'avance, aucune information du tout et nous nous dépêchons pour boucler ces réunions en deux jours. Je n'ai jamais rien vu de tel dans mon expérience de solliciteur ou d'avocat. Cela me dépasse complètement, comment pouvons-nous participer efficacement à ces réunions, compte tenu de ce que nous recevons. Je tiens à ce que ma critique soit consignée au compte rendu, parce que je n'ai jamais rien vu de tel et que je ne peux imaginer qu'un comité parlementaire procède ainsi si l'on veut que nous représentions bien les Canadiens. Je ne peux tout simplement pas imaginer comment quiconque pourrait le faire bien.
Je remercie les témoins. De toute évidence, nous constatons des priorités concurrentes entre deux ou trois groupes de Canadiens. Je ne peux vous dire à quel point il est important pour moi personnellement et pour notre parti de veiller à ce que tous les Canadiens jouissent de droits égaux.
Nous avons entendu le témoignage de l'organisation sikhe, et je suis curieux. D'abord, j'ai fait quelques lectures et je crois comprendre que le leader spirituel des Sikhs n'est pas d'accord avec votre position. J'aimerais entendre très brièvement ce que vous avez à dire sur le sujet, si c'est possible, parce que je suis limité dans mes questions.
Mme Anne Lowthian: En réponse à votre question, les Sikhs sont guidés par trois sources dans leur religion : le Guru Granth Sahib, qui sont les écritures sikhes; le code sikh d'éthique, qui est le code de conduite qui prescrit également les cinq articles de foi; enfin, l'Akal Takht, qui est le siège de l'autorité temporelle des Sikhs.
L'Akal Takht est l'autorité suprême du sikhisme, elle est dotée d'un mécanisme pour discuter des enjeux de controverse modernes, qu'il s'agisse de la recherche sur les cellules souches ou du mariage entre conjoints de même sexe. Ce mécanisme n'a pas été utilisé pour discuter de ces enjeux. Un individu a exprimé une opinion personnelle et il l'a fait publiquement. Bien qu'il en ait certainement le droit, nous répondons au comité que c'est tout ce qu'on peut espérer tant que l'Akal Takht n'aura pas diffusé directement un Hukamnama portant précisément sur la question du mariage entre conjoints de même sexe et une multitude d'autres questions qui préoccupent les Sikhs du Canada en ce moment.
M. Brian Jean: Cela n'a donc pas encore été fait, mais le leader religieux, ou l'Akal Takht, a pris position contre ces mariages, c'est bien cela?
Mme Anne Lowthian: Non. La personne qui a pris position est un Jathedar de l'organe administratif nommé politiquement et qu'on connaît sous le nom de SGPC, le Shiromani Gurdwara Parbandhak Committee. Il s'agit d'une nomination politique. Ce n'est pas représentatif; c'est une opinion personnelle.
M. Ajit Singh Sahota: Si je peux pousser l'explication un peu plus loin, il y a cinq membres qui siègent à ce comité de Jathedar, et ils doivent tous discuter ensemble pour en arriver à une décision unanime fondée sur les écritures sikhes. Cela n'a pas été fait. L'Hukamnama, que nous considérons comme un décret, n'est pas un décret; il s'agit seulement d'une opinion personnelle exprimée par des groupes d'intérêt qui sont allés lui communiquer des renseignements limités sur la base desquels le Jathedar a exprimé son opinion.
º (1610)
M. Brian Jean: Si je comprends bien, l'organisation sikhe internationale n'a pas encore pris position pour ou contre cela. Il n'y a pas encore eu de discussion.
Mme Anne Lowthian: C'est juste. Il faut habituellement qu'intervienne ce qu'on appelle le Guru Khalsa Panth, qui regroupe toute la diaspora sikhe, afin qu'elle examine ces questions. Cette réunion n'a pas encore eu lieu. Il n'y en a pas eu depuis un bon nombre d'années.
M. Brian Jean: Merci beaucoup.
Mme Anne Lowthian: Bienvenue.
M. Brian Jean: Ma prochaine question... J'ai entendu tous les témoins et je pense que tous sauf Mme Des Rosiers soutiennent, si j'ai bien entendu, qu'il devrait y avoir un mariage religieux et un mariage civil, qu'il devrait y avoir deux mariages distincts.
M. Sahota est d'accord. C'est bien cela, monsieur Sahota?
M. Ajit Singh Sahota: C'est ce que la Cour suprême recommande et c'est ce que je recommanderais aussi. Il y a un mariage civil, et les religieux ne devraient pas être obligés de présider à ces mariages.
M. Brian Jean: Je le comprends bien, mais nous dites-vous, monsieur, que vous seriez favorable à ce qu'il y ait deux types de mariage distincts, avec les mêmes droits et obligations? Je tiens à l'établir : qu'il y ait deux types de mariage différents en soi, mais qu'ils créent les mêmes droits et les mêmes obligations. Est-ce bien ce que vous dites?
Mme Anne Lowthian: Ce n'est pas la position de la World Sikh Organization. Nous sommes pour que cette loi sur le mariage s'harmonise parfaitement à la Charte du Canada, qui protège aussi les libertés religieuses. Il n'y a aucune obligation. Il n'y a pas d'annulation de la liberté religieuse. Il n'y a aucune contrainte à la religion.
Chaque religion a donc le droit de choisir si elle administrera ou non le mariage entre personnes de même sexe, et ce droit n'est pas compromis par ce projet de loi.
M. Brian Jean: Madame Squire, voulez-vous répondre à cette question? Vous avez laissé entendre à peu près la même chose, donc je suis curieux.
Mlle Anne Squire: Je suis désolée, je n'ai pas entendu la question.
M. Brian Jean: Je suis désolé, je vais me répéter.
Dans votre exposé, vous avez parlé d'un mariage religieux et d'un mariage civil. Vous semblez indiquer qu'il devrait y avoir deux types de mariage, ou du moins la reconnaissance de deux types de cérémonie, en gros.
Mlle Anne Squire: Non, c'est à chaque paroisse de décider si des mariages homosexuels peuvent être célébrés ou non, mais dans le cas d'une église où le pasteur ou la paroisse choisit de ne pas les autoriser, ces couples doivent alors s'adresser à une paroisse qui les permettent ou alors se marier civilement.
Nous ne le recommandons pas.
M. Brian Jean: Il ne me reste apparemment qu'une minute, si bien que je vais essayer...
Mme. Choice Okoro: Désolée.
En fait, nous demandons qu'on étende ce qui existe déjà. En l'état actuel des choses, les confessions religieuses ont toujours eu le droit de décider qui elles vont marier. Nous demandons que l'on étende les lois actuelles du mariage aux conjoints de même sexe. Il s'agit donc d'une question de droits de la personne, d'une question d'égalité. C'est ce que nous demandons.
M. Brian Jean: Vous voulez qu'on élargisse la définition actuelle.
Mme. Choice Okoro: Non, nous ne voulons pas un élargissement de la définition, nous voulons que l'on étende les lois du mariage actuelles aux conjoints de même sexe. Nous demandons l'inclusion des conjoints de même sexe dans ce qui existe actuellement. Les confessions religieuses, dans l'état actuel des choses, ont toujours eu le droit de choisir qui elles vont marier. Si elles choisissent de marier des divorcés, etc... C'est ce que nous demandons, car c'est la tradition de l'Église unie depuis plusieurs années.
M. Brian Jean: Je comprends. Je crois qu'il est possible d'avoir les mêmes droits et obligations avec deux définitions distinctes; c'est ce que je pense.
Mme. Choice Okoro: Je ne suis pas d'accord.
M. Brian Jean: Je le comprends.
Le président: Merci.
M. Brian Jean: J'ai une dernière question pour Mme Des Rosiers.
Le président: Désolé.
M. Brian Jean: Cela se rapporte à ce qu'elle a dit devant ce comité, monsieur. Je vais être très rapide.
Le président: Il faut que vous soyez très rapide, car vous avez déjà eu vos huit minutes, monsieur.
M. Brian Jean: Merci, monsieur.
Madame Des Rosiers, je dois dire que c'était très intéressant. La common law et la polygamie sont deux points dont vous avez parlé devant notre comité. Pouvez-vous nous donner une description très brève de ce qui d'après vous devrait se produire dans ces domaines particuliers?
Mme Nathalie Des Rosiers: La common... désolée.
M. Brian Jean: Je parle très mal le français.
Mme Nathalie Des Rosiers: Je sais que vous n'avez que 30 secondes, mais vous voulez connaître la position de la commission...
M. Brian Jean: Au sujet des relations de common law et de la polygamie.
Mme Nathalie Des Rosiers: Pour ce qui est de la common law, ces relations devraient continuer d'être réglementées comme elles le sont actuellement, c'est-à-dire avec des règles d'attribution, avec la présomption d'entretien après un certain temps. Nous recommandons d'étendre un système d'enregistrement quelconque aux personnes qui ont des formes de dépendance et qui ne sont pas couvertes actuellement. C'est donc pour les relations de common law.
Pour la polygamie, le problème est différent. Comme nous l'avons dit, la question de la polygamie dépend un peu de l'étude qu'il faut faire sur l'égalité des femmes et d'après le rapport, nous n'en savons pas suffisamment jusqu'à présent au sujet de la polygamie en tant que question d'égalité des femmes pour décider si oui ou non il faudrait apporter des changements.
M. Brian Jean: Je vais céder la parole à mon associé.
º (1615)
[Français]
Le président: Thank you.
Monsieur Marceau.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Merci aux témoins d'être venus ici aujourd'hui nous faire leurs présentations respectives, d'ailleurs fort intéressantes.
Maître Des Rosiers, je vais commencer par m'adresser à vous.
On a souvent entendu, dans le débat actuel, qu'il est faux de dire que la définition dite traditionnelle du mariage, à savoir l'union d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de tout autre, pour la vie, a été déclarée inconstitutionnelle.
Selon votre propre calcul, combien de cours ont déclaré que la définition traditionnelle était inconstitutionnelle?
Mme Nathalie Des Rosiers: Je ne pourrais pas garantir que mes chiffres sont à jour. Cependant, les cours d'appel de la Colombie-Britannique, du Québec, de l'Ontario, de même que la Cour suprême du Canada et des cours inférieures ont leur opinion. Évidemment, le rapport de la commission a été fait avant que les tribunaux se prononcent.
Nous présumons qu'il s'agit d'une question de bonne politique publique. Pourquoi le fait-on? Certainement, on ne veut pas de discrimination. Mais peu importe ce que les tribunaux auraient décidé, la commission disait que c'était dans le meilleur intérêt de l'organisation sociale canadienne, à ce moment-là, de le reconnaître.
M. Richard Marceau: Donc, vous n'y avez pas été forcés.
Mme Nathalie Des Rosiers: Non, nous n'y avons pas été forcés.
M. Richard Marceau: Vous dites qu'il faut le faire, non seulement pour des raisons de droit à l'égalité, dont on parle à l'article 15 de la Charte, mais ne serait-ce que pour la bonne politique publique.
Je profite du fait que vous êtes doyenne de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa, Section de droit civil — c'est quand même un poste prestigieux —, pour vous poser quelques questions un peu plus pointues sur l'article 3 du projet de loi C-38. Selon le ministre de la Justice, cet article est déclaratoire et réaffirme la liberté de religion, en vertu de laquelle aucune organisation religieuse ne peut être forcée de marier des conjoints de même sexe.
Selon vous, est-ce qu'il s'agit d'un empiètement dans les champs de compétence des provinces, ou est-ce que vous êtes d'accord avec le ministre de la Justice, M. Cotler, qui dit que ce n'est pas une intrusion dans les champs de compétence des provinces, que cela ne fait que réaffirmer un fait et que c'est parfaitement constitutionnel?
º (1620)
Mme Nathalie Des Rosiers: La première fois que nous sommes venus devant le comité, j'avais cité, dans ma présentation, le Code civil du Québec, qui reconnaît évidemment qu'aucun ministre du culte ne peut être contraint à célébrer un mariage contre lequel il existe quelque empêchement selon sa religion, en suggérant que cette approche, qui consiste à réaffirmer la liberté de religion, était une approche appropriée.
À mon avis, ce n'est pas nécessaire, mais dans la mesure où c'est rassurant de le faire... Cela peut permettre de rassurer la population qu'on a bien évalué l'interaction entre la liberté de religion et l'extension du mariage.
M. Richard Marceau: Merci beaucoup.
Madame la modératrice Squire et Mme Lowthian, l'argument de la liberté de religion peut aussi être inversé. Vous n'êtes pas sans savoir que les principales oppositions au projet de loi proviennent de groupes religieux qui craignent pour leur liberté de religion.
Ne peut-on pas dire que si la possibilité de marier des conjoints de même sexe existe pour une foi ou pour une Église et que cette dernière est située dans une province où on ne permet pas, à ce jour, le mariage entre conjoints de même sexe, par exemple le Nouveau-Brunswick ou l'Alberta, cela constitue une atteinte à la liberté de religion de ces organisations, qui, elles, voudraient marier des conjoints de même sexe?
[Traduction]
Mlle Anne Squire: Je ne le pense pas. L'Église unie prétend que la protection prévue pour l'objection de conscience relative à la célébration de mariages de même sexe, prévue par la Charte et confirmée par la mesure législative proposée, ne va pas à l'encontre du droit des conjoints de même sexe de se marier. La liberté de religion ne l'emporte pas sur l'égalité, et vice versa.
[Français]
M. Richard Marceau: Madame Lowthian.
[Traduction]
Mme Anne Lowthian: J'utiliserais l'exemple de l'affaire du turban sikh au sein de la GRC du Canada. Les agents de la GRC à la retraite qui ont interjeté appel des amendements au code vestimentaire qui permettaient aux Sikhs de la police fédérale prétendaient que le fait d'admettre un Sikh consistait à imposer le sikhisme à la majorité de la population canadienne. Heureusement pour nous, cet argument a été réfuté.
D'après moi, susciter ce genre de craintes équivaut à la même chose. C'est comme si on changeait de place sur le Titanic; on change simplement les groupes.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Nous passons maintenant au Nouveau parti démocratique, monsieur Siksay.
M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas): Merci, monsieur le président et merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
Je vais commencer par faire quelques observations. Tout d'abord, j'aimerais exprimer ma sympathie auprès de la collectivité sikh du Canada aujourd'hui, surtout après l'attaque terrible et apparemment inspirée par la haine qui s'est produite en Colombie-Britannique hier, où un jeune homme sikh a été agressé et grièvement blessé, son turban arraché et ses cheveux coupés. Il semble très clair, au moins pour l'instant, qu'il s'agit d'un crime inspiré par la haine. Je sais que les policiers ne ménagent pas leurs efforts pour mener l'enquête. Je tiens à dire que nous sommes solidaires de la victime de cette attaque et de la collectivité sikhe. Ce genre d'attaque ne peut être toléré au Canada. À mon avis, cela fait ressortir de façon frappante... Vous avez commencé votre exposé en disant que la collectivité sikhe est une minorité très visible au Canada et je tiens à souligner aujourd'hui ce terrible incident.
J'aimerais également dire qu'en tant que membre de l'Église unie et activiste au sein de cette église, Anne Squire fait partie de mes héros. Elle appartient au groupe de ceux qui favorisent l'évolution, puisqu'elle a dirigé l'Église unie à un moment très difficile de son histoire avec beaucoup de grâce et de sagesse. Ce moment a été très difficile pour l'Église unie et tout au long de cette période, probablement plus que de nombreux Canadiens et encore plus que de nombreux Canadiens homosexuels, Anne a fait l'objet d'homophobie et d'attaques et a su y réagir avec grâce et compassion. Elle a montré de véritables qualités de chef tout au long de cette période. Je tiens à exprimer ma fierté de l'accueillir aujourd'hui et de l'écouter parler au nom de l'Église unie à ce sujet.
J'aimerais demander à Anne et à Choice comment l'Église unie interprète la définition du mariage. À la page 4 de votre exposé, vous dites qu'avant 1980, le mariage était une union entre un homme et une femme. Nous entendons souvent ce genre de définition dans le cadre du débat actuel, mais l'Église unie semble avoir évolué différemment quant à la définition ou la description du mariage. Je me demande si vous pouvez parler davantage de l'interprétation du mariage au sein de l'Église unie à l'heure actuelle et nous dire pourquoi une telle évolution est intervenue.
Mlle Anne Squire: L'Église unie du Canada reconnaît qu'il existe des formes très différentes de relations entre les personnes et que ce n'est pas tout le monde qui tombe amoureux d'un membre du sexe opposé. Par conséquent, lorsque deux personnes manifestent le désir de vivre ensemble dans une relation de mariage, l'église va faire tout ce qui est en son pouvoir pour les aider à le faire. Elle accepte ces genres de relations. Tout comme on retrouve de nombreux modèles de familles et d'engagements, il existe de nombreuses formes de mariage.
On n'a pas essayé de redéfinir le mariage en tant que tel, mais je dois dire qu'en 1988, lorsque j'étais modératrice au sein du conseil général, lequel a déclaré que les homosexuels pouvaient être ordonnés ministres du culte au sein de l'Église unie du Canada, beaucoup ont manifesté leur opposition.
Au fil des ans, un gros travail de sensibilisation s'est fait et l'église a essayé d'aider les gens à reconnaître l'importance de ces relations. Par conséquent, lorsqu'on a procédé au vote en 2003 au sujet du mariage de conjoints de même sexe, seule une poignée de personnes s'y est opposée. Nous considérons que la société elle-même a accepté cette réalité et qu'il est inutile pour l'église de proposer une définition particulière.
º (1625)
M. Bill Siksay: Je remarque également dans votre mémoire que vous dites que les documents de l'Église unie pour la préparation au mariage et pour la cérémonie du mariage ne font aucune distinction entre les conjoints hétérosexuels et homosexuels.
Mlle Anne Squire: C'est exact.
M. Bill Siksay: Selon certains, le fait de se débarrasser des désignations homme-femme dans le processus du mariage va, en quelque sorte, semer la confusion, etc. La façon dont ces documents sont utilisés ou dont les gens préparent ou célèbrent les mariages a-t-elle causé des problèmes pour l'Église unie?
Mlle Anne Squire: Non. Je crois que les églises qui célèbrent de tels mariages, de même que les études qui ont été réalisées, témoignent très clairement de la position de l'église. Ce sont les gens qui n'ont pas étudié la question et qui expriment simplement leurs propres idées qui peuvent encore créer quelques difficultés.
J'ai été tout récemment témoin au mariage d'amies lesbiennes et je dois dire que c'est l'une des cérémonies de mariage les plus belles à laquelle j'ai jamais assisté.
Je ne suis pas sûre d'avoir répondu à votre question et peut-être que Choice voudrait intervenir.
M. Bill Siksay: Y a-t-il confusion quant à la façon d'utiliser ces documents?
Mlle Anne Squire: Non.
M. Bill Siksay: Est-ce que les termes mari et femme ou épouse et époux ou ces genres de désignation ont été retirés des documents?
Mlle Anne Squire: Non, absolument pas.
M. Bill Siksay: D'accord.
Je ne sais pas combien de temps il me reste, monsieur le président.
Le président: Il vous reste une minute et 15 secondes.
M. Bill Siksay: Je vais poser à Mme Des Rosiers une autre question rapide.
À la fin de votre exposé, vous parlez de la procréation et de la façon dont ce concept s'intègre dans la question du mariage et du droit civil. Pourriez-vous développer? Je ne pense pas que vous avez eu le temps de dire tout ce que vous vouliez dire.
Mme Nathalie Des Rosiers: On se demandait à l'époque, je crois, s'il était possible de prouver qu'il était discriminatoire de limiter le mariage à des conjoints hétérosexuels. Nous avons examiné tous les arguments présentés.
Un des arguments, c'était que le mariage servait à la procréation. Nous en avons conclu que ce n'est pas le cas. En fait, des gens qui ont dépassé l'âge de la procréation peuvent certainement se marier. Les gens l'ont volontiers accepté, parce que le mariage sert à réglementer la relation découlant d'un engagement, acceptant volontairement un devoir d'entretien à l'égard d'un autre être humain.
C'est une bonne chose que notre société permette à ses membres de le faire. En effet, il en découle une certaine stabilité, une certaine réciprocité, très utiles pour la société. C'est dans ce contexte que nous avons examiné la question.
M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
[Français]
C'est au tour de Me Boivin, du Parti libéral.
Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.
Bienvenue et merci d'être parmi nous.
J'aime bien le rappeler, nous sommes un comité législatif, et après deux votes à la Chambre en faveur du projet de loi C-38, nous en sommes à l'étape où l'on doit étudier le texte du projet de loi lui-même et vérifier s'il y a des raisons de l'amender, s'il y a des demandes d'amendement et si des textes font défaut. C'est la dernière occasion de le faire avant que le projet de loi ne retourne à la Chambre pour la troisième lecture, qui sera suivie d'un vote.
Dans ce contexte, j'aimerais savoir si vous avez des suggestions d'amendement.
Mme Nathalie Des Rosiers: Non.
Mme Françoise Boivin: Vous n'avez aucune suggestion à faire.
Madame Okoro, souhaitez-vous un amendement au texte du projet de loi?
[Traduction]
Mme. Choice Okoro: Merci.
Nous avons examiné cette option à la première séance du Comité des droits de la personne. Pour nous, c'est très clair. Nous avons interprété le projet de loi C-38 dans sa version initiale et, comme nous l'avons dit dans nos recommandations, nous l'appuyons tel quel.
º (1630)
[Français]
Mme Françoise Boivin: Merci.
Comme le disait mon collègue du Bloc, nous bénéficions de la présence de la doyenne de la mon alma mater. Ma question s'adresse donc à vous, maître Des Rosiers. Nous entendons beaucoup de témoins et nous recevons beaucoup de textes d'un peu partout au Canada sur le projet de loi C-38. Or, beaucoup de craintes sont liées à la liberté de religion. Je passerai sous silence ce qui touche la loi naturelle et la procréation, mais croyez-vous que le projet de loi C-38, tel qu'il est rédigé, menace la liberté de religion?
Mme Nathalie Des Rosiers: Il faut bien comprendre que l'un des aspects de cette évolution était la délégation par l'État à une autorité religieuse le pouvoir d'effectuer une transaction qui est essentiellement laïque. Le mariage est une institution laïque, et on permet à des autorités religieuses, comme on le permettrait à n'importe qui, de faire cette transaction.
L'inquiétude venait du fait que c'est une délégation faite par l'État. Donc, pourrait-on, du jour au lendemain, empêcher le mariage de francophones, par exemple? C'est pour cette raison qu'il fallait clarifier une certaine conception de la liberté de religion, qui venait, entre autres, du Code civil du Québec. Il fallait rassurer les gens afin qu'il sachent que l'on comprend que la liberté de culte fait partie du débat.
Depuis des années, le divorce est légal au Canada. On sait que la religion catholique ne permet pas aux gens divorcés de se remarier, à moins qu'ils aient obtenu une annulation de leur mariage. La question s'était posée dans ce contexte. Il n'était donc pas nouveau d'explorer cette question. Il y a longtemps que cela existe au Canada.
Mme Lorraine Pelot: Je voudrais simplement ajouter que le statu quo crée en effet une inégalité entre les religions, puisqu'il ne permet pas aux officiants des différentes religions qui veulent marier des personnes de faire reconnaître ce mariage sur le plan juridique dans un État.
Mme Françoise Boivin: C'est un bon point.
Je voudrais approfondir un peu plus, parce qu'on a entendu, encore lors de certaines présentations faites hier, certaines choses.
Que répondriez-vous à ceux qui diraient qu'ils représentent une école catholique et qu'ils ne veulent pas être obligés de changer le contenu de leurs livres? Qu'est-ce que vous répondriez à ce genre d'argument?
Mme Nathalie Des Rosiers: On fait toujours une évaluation du droit. Par exemple, est-ce que dans 50 ans on aura une conception différente de la liberté de religion et de la délégation du pouvoir étatique en matière de célébration du mariage?
Il sera toujours possible d'avoir un mariage civil et un mariage religieux. Rien ne change à ce niveau.
Même si certains disaient ne plus vouloir de cette délégation parce qu'ils veulent officier en dehors de l'État, cela sera toujours possible. S'ils ne veulent pas de la délégation de l'État, ils auront l'obligation de dire aux gens qu'il faut aller devant un juge, devant un protonotaire, s'ils veulent se marier civilement.
Dans la mesure où ils se sentiraient menacés, les officiants des religions qui décideraient de se retirer de cette entente avec l'État auront toujours cette porte de sortie.
º (1635)
Mme Françoise Boivin: S'il me reste un peu de temps...
Le président: Officiellement, il vous reste une minute.
Mme Françoise Boivin: Excellent. J'aurai probablement une minute de plus, pour que la durée de mon intervention soit équivalente à celle de mon collègue.
Le président: On verra. C'est à la discrétion du président.
Mme Françoise Boivin: Excusez-moi. Je viens de perdre 20 secondes.
J'imagine que vous avez eu le loisir de lire la décision de la Cour suprême du Canada sur le renvoi. Un des arguments maintes fois entendus concerne le refus de la Cour suprême du Canada de répondre à la question 4 du renvoi.
Comment l'interprétez-vous? Ma question rejoint celle de mon collège, mais sous une forme différente. Est-ce que cela signifie que la Cour suprême du Canada a laissé une porte ouverte — on va jusque-là dans certains milieux — à l'idée de considérer que le mariage entre un homme et une femme est, lui aussi, constitutionnel?
Mme Nathalie Des Rosiers: Je ne vais pas répondre à titre de présidente de la Commission du droit du Canada, mais à titre personnel. Toutes les opinions sont bonnes, quand on essaie de voir jusqu'où le droit peut aller. Ce n'est pas ma lecture de la décision de la Cour suprême du Canada.
Mme Françoise Boivin: D'accord. Merci.
Le président: Ça va? Merci.
Nous passons maintenant au deuxième tour de table. Les interventions seront de cinq minutes.
[Traduction]
Nous en revenons au Parti conservateur. Monsieur Moore.
M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci.
Cette question s'adresse à Mme Des Rosiers. Je sais que la Commission du droit s'est penchée sur cette question. Je me demande si vous avez examiné les impacts.
D'après la Cour suprême du Canada, le seuil très élevé prévu est inconstitutionnel. D'après la Cour, il n'appartient même pas au Parlement d'empêcher qu'un représentant d'une confession religieuse marie des gens d'une autre religion. Que dire de ce qui se passe en ce moment...? Je vais prendre l'exemple de la Colombie-Britannique, ou encore celui de l'évêque Henry, de Calgary, qui fait l'objet d'une plainte en vertu des droits de la personne sous prétexte qu'il s'est exprimé à ce sujet. Lors des dernières élections, il a d'ailleurs été menacé par un fonctionnaire ARC parce qu'il a exprimé ses points de vue à ce sujet. Également en Colombie-Britannique, les Chevaliers de Colomb qui, comme vous le savez, sont un ordre catholique, ont dû comparaître devant une commission des droits de la personne. Je dois ajouter que chaque fois qu'un tel incident se produit, c'est extrêmement coûteux, car vous n'êtes pas sans savoir qu'il est impossible de se défendre gratuitement.
Vous dites que c'est l'approche qui causerait le moins de problème. Je prétends que c'est le contraire, car nous parlons ici de mariages civils. Si des différences ressortent au Canada, historiquement ou culturellement—et je suis sûr que vous avez examiné d'autres compétences—il reste que notre pays n'a qu'une seule définition du mariage, soit l'union entre un homme et une femme. Il n'y a pas de mariage « civil » ou de mariage « religieux »; on ne parle que de mariage. Cette loi change le sens du mot mariage dans le contexte canadien.
J'ai donc quelques questions. Vous êtes-vous penché sur ces autres questions qui en découlent—non pas simplement la question de savoir s'il faut exiger d'une personne qu'elle marie des gens même si cela ne correspond pas à sa religion, mais celle relative à d'autres conséquences en matière de liberté de religion? Avez-vous également examiné le contexte international? D'après moi, aucun tribunal national, aucun tribunal du niveau le plus élevé qui soit, y compris chez nous, et aucun organisme international, n'a déclaré que modifier la définition du mariage s'impose comme un droit fondamental.
Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
Mme. Choice Okoro: J'aimerais vous signaler que l'ARC a communiqué avec l'Église unie sous prétexte, je pense, qu'elle fait de la politique en tant que communauté religieuse. Je tenais simplement à vous le signaler.
Mme Nathalie Des Rosiers: Vous demandez d'abord si nous avons examiné ce qui se produirait si l'on étendait l'institution du mariage aux conjoints de même sexe par rapport à ce qui se produirait dans le cas d'autres litiges portant sur la liberté de religion.
Il ne fait aucun doute que dans notre société, il y aura toujours des litiges. Lorsqu'il y a des conflits au plan des échelles de valeurs, ils finissent toujours par faire l'objet d'un litige.Lorsque j'ai dit que c'était l'option la moins difficile, c'était dans le contexte des choix qui nous sont offerts. Il y a le statu quo, ce qui n'a pas fonctionné. On pouvait également séparer l'église de l'État, n'avoir qu'un seul enregistrement, uniquement une union civile. Cette option allait amoindrir les choix de certains Canadiens et allait certainement avoir un impact sur beaucoup de gens. On pouvait également supprimer tout aspect religieux du mariage, pour indiquer clairement aux Canadiens que le mariage est civil; si vous voulez vous marier légalement, vous devez vous rendre au tribunal, et si vous voulez vous marier religieusement, allez-y. Ce serait là encore un changement important.
C'est dans ce contexte que j'ai dit qu'au niveau des options, c'était sans doute celle qui entraînait le moins de changement, pour la grande majorité des gens. C'est dans ce contexte que j'ai fait cette observation .
º (1640)
M. Rob Moore: Lorsque nous parlons d'impact, il suffit d'examiner n'importe quel sondage, et il y en a de toutes sortes, pour s'apercevoir qu'en général, les Canadiens sont partagés—cela me semble assez juste—50 p. 100 étant pour et 50 p. 100 contre quand on leur demande : « Souhaitez-vous changer? » Souvent c'est même au niveau du langage. Je viens de vous entendre dire « étendre » le concept du mariage, mais en fait, ce projet de loi change le sens du mot « mariage ».
J'aimerais également que vous parliez de la Cour suprême...
Mme Nathalie Des Rosiers: Voulez-vous que je parle de l'internationalisation, de ce qui se passe au plan international, ou non?
M. Rob Moore: Certainement et j'ajouterai un autre point. Oui, j'aimerais avoir vos observations sur le contexte international, sur ce que d'autres compétences ont décidé. Nous savons que deux d'entre elles ont adopté une définition différente, ont changé la définition du mariage, mais d'autres s'en sont abstenues, et je voudrais savoir si vous vous êtes penchés sur la question. Par ailleurs, j'aimerais savoir ce que vous pensez du renvoi particulier où la cour a décrété qu'il n'appartenait pas au gouvernement fédéral de protéger les libertés religieuses, de protéger les gens qui ne choisissaient pas de marier des conjoints de même sexe. Avez-vous examiné l'impact éventuel en ce qui concerne l'Église catholique, les Chevaliers de Colomb ainsi que le statut d'organismes de bienfaisance de diverses organisations?
Le président: Monsieur Moore, j'aimerais simplement vous indiquer que nous en sommes arrivés au temps de parole accordé à ma discrétion; nous allons donc prendre une minute.
Merci.
Mme Nathalie Des Rosiers: Je parlerai d'abord de l'internationalisation. Comme je l'ai dit, la commission est d'avis qu'il n'est pas nécessaire d'attendre que la cour vous dise de le faire. Nous avons donc examiné l'impact, par exemple, de cette reconnaissance ou non-reconnaissance, en ce qui a trait à la transférabilité de l'état civil. Je crois que c'est une question très importante dans l'infrastructure juridique que nous avons.
Nous avons rédigé notre rapport avant que la Cour suprême ne rende sa décision, alors je ne peux pas dire que la position de la commission repose sur son interprétation.
Si vous voulez savoir s'il y a des enjeux qui seront contestés à l'intérieur... Nous avons constaté au cours de nos consultations que divers organismes devaient tirer les choses au clair, et que ce n'était pas facile pour bon nombre d'entre eux qui devaient prendre une décision et réfléchir à la question. Et cet exercice se poursuivra.
Lorsqu'il y a des désaccords dans une société, les gens doivent s'exprimer, réfléchir et s'affronter pour mieux approfondir la question, et c'est ce qui s'est produit, je crois, lorsque nous avons mené nos consultations.
[Français]
Le président: Merci. On revient au Parti libéral.
Monsieur Savage.
[Traduction]
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. C'est un plaisir de vous accueillir ici.
J'aimerais revenir à ce que M. Siksay a dit. L'Église unie a gagné mon admiration au fil des années, et vous, madame Squire, vous avez fait preuve d'un véritable leadership au chapitre de la modération, de la diversité, de l'acceptation des gens tels qu'ils sont, et je tiens à vous en féliciter. J'aimerais dire également que ce que je ressens face à cette question a toujours été clair dans mon coeur et dans ma tête, mais ce n'est qu'au moment où j'ai vu la lettre que le Dr Short a envoyée aux députés que j'ai pu vraiment mettre des mots sur cet enjeu. Il disait que cette mesure législative ne représentait pas un délaissement de la foi, mais bien un acte de foi et je crois que cet aspect est très important parce que, tout comme la Charte des droits est importante sur le plan juridique, il y a l'aspect spirituel qui, à mon avis, était en train de se perdre parmi tous ceux qui appuient le projet de loi C-38.
À mon avis, l'Église unie a rendu un grand service et a fait preuve de beaucoup de leadership. Je suis conscient que je dis cela parce que je suis d'accord avec vous et que c'est facile de rendre hommage à ceux qui partagent vos opinions, mais c'est ce que je crois et je tiens à vous féliciter.
Dans l'exposé que vous avez présenté aujourd'hui, vous avez dit ceci :
La Déclaration de foi de 1940 nous rappelle que « la foi de l'Église est basée sur l'Évangile immuable du saint amour de Dieu qui nous sauve, tel que révélé en Jésus-Christ ». Elle dit aussi que chaque génération est « appelée à en refaire (de l'Évangile) la formulation dans l'esprit de son époque et dans le ton qui convient à son contexte ». |
Depuis Vatican II, il existe un concept de conscience éclairée au sein de l'Église catholique qui ressemble à ceci, auquel j'ai réfléchi également au cours des derniers mois, et je crois que c'est très bien.
Je note également—et j'aimerais vous poser une question à ce sujet—que l'Église unie a officiellement reconnu le rôle que jouent les congrégations et les ministres du culte dans le soutien et la célébration des unions entre partenaires de même sexe,s'ils le souhaitent. Je crois que M. Marceau vous a posé quelques questions à ce sujet. J'aimerais poursuivre dans ce sens, en m'adressant soit à Mme Squire, soit à Mme Okoro. Si quelqu'un souhaite se marier à l'Église unie, pour avoir un mariage religieux, la congrégation locale peut choisir de ne pas célébrer ce mariage à l'église. Est-ce exact?
º (1645)
Mlle Anne Squire: J'ai un peu de difficulté à entendre, alors j'espère avoir saisi l'essentiel de votre question.
Les membres de l'Église unie ont toujours eu la possibilité de se marier religieusement ou civilement. C'est un choix individuel. Lorsque la personne se présente à la congrégation et dit vouloir se marier, c'est le ministre et le conseil officiel de cette congrégation qui prennent la décision. Habituellement, il n'y a pas de problème. Toutefois, on s'est posé des questions au fil des années au sujet des personnes divorcées. Oui, nous accepterons de marier les personnes divorcées. Aujourd'hui, la question est de savoir s'ils vont accepter de marier des personnes de même sexe.
M. Michael Savage: La décision revient donc à la congrégation locale.
Mlle Anne Squire: Oui.
M. Michael Savage: Si la congrégation locale du couple homosexuel refuse de célébrer le mariage, le couple aurait certains recours. Quels seraient ces recours?
Mlle Anne Squire: Dans presque toutes les régions, il y aura une église qui acceptera de marier des personnes qui ne sont pas membres de la congrégation. Nous n'avons pas une structure paroissiale comme d'autres églises. Nous n'avons pas à nous marier dans notre propre congrégation.
Ici à Ottawa, par exemple, on trouve plusieurs églises où le ministre et la congrégation sont prêts à le faire. En fait, nous avons été extrêmement occupés depuis un certain temps en raison de la forte demande.
M. Michael Savage: Il est donc pratiquement impossible qu'un couple homosexuel de l'Église unie ne trouve aucune église où il pourra se marier.
Mme. Choice Okoro: Ces couples vont toujours trouver une église. Certaines de nos congrégations offrent de marier des conjoints de même sexe, tandis que d'autres ont choisi de ne pas le faire.
Ce qui importe pour nous, c'est la liberté religieuse, les droits religieux. C'est ce que Mme Lorraine Pelot a mentionné. Depuis 2000, les congrégations bénissent les unions homosexuelles qui étaient consignées dans leurs registres. Nous parlons maintenant des droits, des droits à la liberté religieuse, que nous cherchons à élargir. Les ministres qui sont en faveur des mariages homosexuels devraient être en mesure de les célébrer.
M. Michael Savage: L'Église unie ne considère pas le mariage comme un sacrement.
Est-ce que l'Église unie offre ouvertement le baptême et la communion aux couples homosexuels?
Mme. Choice Okoro: Oui.
M. Michael Savage: Vous baptisez les enfants des conjoints de même sexe dans tous les cas?
º (1650)
Mme. Choice Okoro: Oui.
M. Michael Savage: Très bien.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Nous revenons maintenant à M. Marceau.
[Français]
M. Richard Marceau: Merci, monsieur le président.
Il m'est difficile de résister à la tentation de questionner et de mettre un peu sur la sellette — plutôt que l'inverse — un des anciens professeurs de mon alma mater, l'Université Western Ontario. Je profiterai donc un peu de la situation qui m'est offerte.
Maître Des Rosiers, dans ce débat, on a souvent affirmé, comme mes collègues du Parti conservateur l'ont fait un peu plus tôt, que la définition du mariage — je dirais même son concept — est en quelque sorte immuable. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet, à la lumière de l'expérience du Québec, qui n'est pas unique au Canada, où une femme, en se mariant, perdait certains droits et était un peu placée sous la responsabilité de son mari, dont elle devenait « l'annexe ».
Ai-je raison de dire que cette vision du mariage a changé et que c'est en soi une preuve que la théorie de l'immuabilité du concept du mariage est fausse?
Mme Nathalie Des Rosiers: Une des parties du rapport trace l'évolution et l'historique de certains attributs du mariage. Je souligne que la Loi sur la preuve au Canada continue d'empêcher une épouse de témoigner contre son mari; cela vient du concept selon lequel l'épouse perdait sa personnalité juridique au moment du mariage. Puisque l'accusé ne pouvait pas témoigner contre lui-même, l'épouse ne pouvait pas témoigner. C'est un vestige d'une certaine conception du mariage.
Je vous rappelle un peu l'historique de l'institution, un historique, comme vous le notez, où les attributs nécessaires au mariage... La question de l'âge a aussi beaucoup évolué. Toute cette évolution est bien tracée, et on y constate, entre autres, beaucoup de diversité.
Je suis d'accord, nous en tirons cette conclusion dans la mesure où c'est un concept juridique de l'État et qu'il doit évidemment être adapté à une conception moderne. Cela a déjà été fait et cela va continuer de l'être.
M. Richard Marceau: Merci beaucoup.
L'un des éléments soulevés — et non pas dans le cadre d'organisations religieuses — est celui des commissaires aux mariages. On nous a dit que cela n'avait aucun sens: un commissaire aux mariages, donc un employé de l'État séculier, serait forcé de marier des conjoints de même sexe, à l'encontre de sa liberté religieuse, de sa conscience religieuse.
Étant donné que le droit canadien considère maintenant l'orientation sexuelle sur la même base que la race, il ne serait pas plus acceptable, par exemple, qu'un employé de l'État refuse de marier des conjoints de même sexe par conviction religieuse, qu'il ne serait acceptable qu'il refuse de marier un Blanc et une Noire pour les mêmes raisons. Mon raisonnement est-il faux?
Mme Nathalie Des Rosiers: La question a été soulevée en Colombie-Britannique dans les termes que vous exposez. Des accommodements religieux, dans le contexte du travail, sont-ils faits pour d'autres...? On a vu des gens refuser de travailler le dimanche ou le samedi. Comment conceptualiser ce refus? Personnellement, je suis d'accord sur votre interprétation, mais je ne peux pas prédire comment une commission des droits de la personne verrait la chose. Par exemple, peut-on proposer à quelqu'un, sur la base de la religion, d'en faire plus une certaine journée et moins une autre, de la même façon qu'on compose avec toutes les objections religieuses? Je crois que dans ce contexte, les choses se régleront comme cela. Ce n'est pas la première fois qu'on essaie de composer avec une diversité d'opinion quant à toutes sortes d'aspects d'un travail.
º (1655)
M. Richard Marceau: En effet. Merci.
Le président: Ça va, monsieur Marceau?
M. Richard Marceau: Merci.
Le président: D'accord.
Monsieur Boudria, du Parti libéral.
[Traduction]
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Merci.
J'écoutais ce que M. Moore a dit tout à l'heure, et je ne suis pas d'accord avec lui pour dire qu'il n'y a aucune distinction entre un mariage civil et un mariage religieux. Je me suis marié en 1971 à l'église catholique romaine de Sarsfield, et je suis certain que si mon épouse avait été protestante, nous n'aurions pas pu nous marier. Pourtant, j'aurais pu m'adresser aux autorités civiles et nous nous serions mariés. Il est clair qu'il y avait deux instruments distincts, très différents l'un de l'autre. Ce n'était pas la même chose. Dans mon esprit, il y aurait certainement eu une différence. Évidemment, le problème ne s'est pas posé puisque nous étions de la même confession religieuse et nous le sommes toujours.
[Français]
Ma question porte sur l'article 3, mais elle aura peut-être une tangente un peu différente de celle de Me Boivin ou de Me Marceau. J'aimerais savoir si, à votre avis, madame Des Rosiers, la protection accordée aux ministres du culte est suffisante dans cet article tel qu'il est rédigé, ou si on pourrait le rédiger d'une meilleure façon. Je suis un catholique pratiquant et j'ai posé la question hier à des représentants d'un groupe catholique qui étaient ici. Je leur ai demandé si on pouvait améliorer le langage. On m'a répondu que oui: nous pouvions ne pas adopter le projet de loi. Cela m'aide beaucoup!
Alors, j'aimerais savoir si, selon vos connaissances, c'est la meilleure rédaction possible, ou si on peut l'améliorer. Après tout, nous sommes ici pour apporter des modifications techniques afin de bonifier ce projet de loi, si possible. En tant que personne qui appuie le projet de loi mais qui veut qu'il soit rédigé de la meilleure façon possible, j'aimerais entendre vos consignes.
Mme Nathalie Des Rosiers: Je ne me sens pas prête à vous dire quel langage pourrait être utilisé. À mon avis, ceci est suffisant. Il me semble qu'il faut se rendre compte qu'il y aura des conflits, c'est inévitable. On sait que dans l'interprétation des lois, on reconnaît le « metamessage ». Or, le « metamessage », qui est l'interprétation théologique de Ruth Sullivan, est très clair ici. Comment interprète-t-on une loi? On tient compte du texte, des mots qui sont utilisés, mais on tient compte aussi du préambule et on se pose la question à savoir quel était ce qu'on appelle le mischief to be corrected.
La tentative de protéger des valeurs qui doivent être protégées est très claire ici. C'est donc dans ce contexte qu'on doit convenir qu'il y a une limite au peaufinage.
[Traduction]
L'hon. Don Boudria: Puis-je demander, monsieur le président, si les deux autres groupes sont du même avis? Selon eux, les ministres du culte sont-ils protégés?
Je sais, par exemple, que dans votre groupe, madame Squire, les ministres du culte peuvent célébrer ces mariages, et certains pourraient refuser de le faire. Le libellé du projet de loi protège-t-il suffisamment ceux qui refuseront de célébrer les mariages?
J'aimerais poser la même question à l'organisation sikhe. Est-ce la meilleure formulation que nous pouvons avoir pour protéger les représentants des églises et des groupes religieux qui célèbrent les mariages et sinon, pouvez-vous proposer des améliorations qui nous seraient utiles?
Mlle Anne Squire: Les gens qui ont rédigé ce document étaient convaincus que le texte était suffisamment fort et qu'il était acceptable pour nous en tant que groupe confessionnel.
L'hon. Don Boudria: Merci.
Mme Anne Lowthian: La World Sikh Organization est d'avis que le texte est approprié, puisqu'il ne privilégie aucune religion en particulier et traite toutes les religions également.
» (1700)
L'hon. Don Boudria: Merci.
Je n'ai pas d'autres questions.
Le président: Pour le Nouveau Parti démocratique, monsieur Siksay.
M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir à l'intervention que Mme Okoro a faite en réponse à M. Moore. Il a mentionné que Mgr Henry avait reçu un appel de l'Agence des douanes et du revenu du Canada au cours des élections, et vous avez dit que l'Église unie avait reçu un appel également. Je me demande si vous pouvez nous dire ce dont il s'agissait et comment l'église a compris cet appel.
Mme. Choice Okoro: Il était question des communautés religieuses ayant le statut d'organisme de bienfaisance qui s'occupaient de politique partisane. Comme vous le savez sans doute, la démarcation peut être très subtile, et nous avons dû expliquer ce que nous faisions.
Je voulais qu'il comprenne que pour nous—et je crois que c'est peut-être le cas aussi pour la personne dont il a parlé—, ce n'était pas une question de politique partisane. Revenu Canada a communiqué avec de nombreuses églises, celles en faveur du projet de loi comme celles qui s'y opposent.
Nous avons donc expliqué nos actions, dans le plus grand respect. L'interlocuteur s'est montré très coopératif et franc; il n'y avait pas d'agressivité. On voulait nous faire comprendre les lois en vertu desquelles nous avons un statut d'organisme de bienfaisance. C'était une très bonne communication, faite en toute équité. Nous avons expliqué nos actions, et c'était très bien.
M. Bill Siksay: Le fait que l'ADRC communique avec l'Église unie a-t-il été perçu comme quelque chose d'inhabituel ou d'extraordinaire? J'ai travaillé moi-même comme bénévole auprès de l'Église unie et je sais que l'ADRC communiquait souvent avec l'Église au sujet des avantages fiscaux accordés aux ministres du culte et qu'on faisait souvent des enquêtes particulières sur la façon dont les ministres du culte remplissaient leur déclaration de revenu.
Je ne sais pas si quelqu'un a senti qu'il s'agissait d'une attaque particulière envers l'Église ou d'une menace d'examen particulière parce que l'ADRC était chargée de veiller à ce que cela soit fait correctement. Y a-t-il eu pareille perception?
Mme. Choice Okoro: Non, nous n'avons pas senti que c'était une attaque. C'était une communication tout à fait convenable. Je crois que vous avez raison. Il y a des communications courantes sur la façon de gérer notre statut d'organisme de bienfaisance. Il y a des relations continues avec l'ADRC dans ce sens, une relation de communication, et les choses ont été faites correctement. Nous avons compris pourquoi c'est arrivé et nous savions que nous avions la responsabilité d'expliquer nos actions; c'est ce que nous avons fait et nos explications ont été acceptées.
M. Bill Siksay: D'accord, merci.
Par ailleurs, quelqu'un a dit ici qu'il fallait faire en sorte que les organisations religieuses, plus particulièrement, soient plus à l'aise avec cette mesure législative. La question a été posée à propos de l'article 3. Madame Des Rosiers, vous avez dit que cet article pourrait contribuer, selon vous, à augmenter le niveau de confort et à rappeler aux gens la liberté de religion qui existe au Canada. Concernant toute la question du statut des organismes de bienfaisance, quelqu'un a suggéré qu'un amendement pouvait être fait pour préciser qu'aucune Église ne perdrait son statut en raison d'une opinion divergente sur le mariage homosexuel.
J'espère qu'on n'ira pas dans cette direction. Il me semble que l'on remettrait en question la protection qui existe, je crois, pour les organisations religieuses, mais il me semble aussi qu'on entrerait dans des détails qui ne seraient pas très utiles à long terme. Je me demande si vous pouvez faire des commentaires sur cette approche, sinon sur l'exemple précis que j'ai donné.
Mme Nathalie Des Rosiers: On présume aussi que le statut d'organisme de bienfaisance, tel qu'il est compris, restera le même. C'est une question de fiscalité. Nous nous éloignons passablement de... Ce que j'essayais de dire, c'est que vous pouvez essayer d'ajouter une virgule ici et d'en enlever une autre là, mais dans 10 ou 15 ans, quels outils la cour aura-t-elle pour interpréter cette loi? Le langage. Elle aura accès au contexte dans lequel elle a été adoptée. Elle aura accès au méfait qu'elle devait corriger—et je crois que nous savons ce dont il s'agit—, le contexte de la jurisprudence. À mon avis, c'est clair, dans le contexte dans lequel la loi est adoptée.
Il faudrait peut-être tenir un débat sur le statut d'organisme de charité et sur son rôle. Certaines améliorations s'imposent peut-être dans la manière dont les choses sont faites. Je crois que les organismes bénévoles partout au Canada ont des idées à ce sujet, au sujet de la règle de 10 p. 100, etc. Cette question pourrait être soulevée dans ce contexte. Faisons un examen de l'outil que nous essayons d'utiliser. Nous essayons maintenant de mêler trop de choses.
» (1705)
[Français]
Je parle simplement au nom de Nathalie Des Rosiers.
[Traduction]
M. Bill Siksay: D'accord, merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Siksay.
Nous revenons au Parti libéral.
[Français]
Maître Boivin.
Mme Françoise Boivin: J'ai une question très brève, mais la réponse ne sera peut-être pas aussi brève.
L'autre jour, dans ma circonscription, j'ai eu une discussion sur le projet de loi C-38. Les propos étaient semblables à ceux qu'on entend entre ces murs. On me demandait pourquoi on ne choisirait un autre nom pour décrire la même chose. On prétendait que cela réglerait bien des problèmes. En outre, on me demandait en quoi le fait d'utiliser les mots « union civile » pour décrire un type de mariage et les mots « mariage civil » pour décrire l'autre type de mariage pouvait constituer une si grande discrimination.
Je vais voir quelle réponse vous auriez donnée et je la comparerai avec celle que j'ai donnée. Je suis curieuse d'entendre votre réponse.
[Traduction]
Mme Nathalie Des Rosiers: Je crois que c'est un argument que tout le monde a entendu et nous avons tous une part de sagesse que nous pouvons amener dans le débat.
[Français]
Évidemment, c'est un argument qui a été invoqué très souvent dans le cadre de nos travaux, parce que nous recommandions aussi l'élargissement d'un mode d'enregistrement. La question portait sur le fameux dictum separate but equal. Quand on crée deux institutions pour atteindre un même but, on crée une hiérarchie, qu'on le veuille ou non. Ce dictum nous vient de la compréhension de la notion d'égalité dans le traitement réservé aux Noirs aux États-Unis. C'est ma réponse.
[Traduction]
Mme Françoise Boivin: Est-ce la même réponse pour les autres groupes ou est-ce différent?
Mlle Anne Squire: Je dirais très certainement que l'égalité, c'est l'égalité, et qu'on ne respecte pas le principe d'égalité en faisant des distinctions entre les mariages d'un groupe et ceux d'un autre.
Mme Anne Lowthian: La World Sikh Organization est du même avis et dit que le fait de définir différemment les mariages est une ségrégation qui ne servirait qu'à attiser, injustement, la haine envers certains groupes.
Mme Françoise Boivin: Merci de votre réponse.
J'espère que mes électeurs écoutent. Ça ressemble beaucoup à ce que j'ai dit.
Merci. Je n'ai rien d'autre à dire.
Le président: Il vous reste encore trois minutes pour le Parti libéral.
Mme Françoise Boivin: C'est tout.
Le président: Peut-être que Mme Neville, qui vient tout juste d'arriver...
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Elle reprend son souffle. J'étais à la réunion d'un autre comité. Donnez-moi une minute, merci.
Le président: Nous revenons aux conservateurs. Monsieur Brown.
M. Gord Brown (Leeds—Grenville, PCC): Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier les témoins d'être venus.
Je vais commencer avec la World Sikh Organization. Vous pourriez peut-être parler davantage de votre organisation, nous dire combien de membres vous avez et si vous recevez un financement du gouvernement fédéral.
Mme Anne Lowthian: La World Sikh Organization existe depuis 1984. C'est un organisme financièrement autonome. Il n'a jamais reçu de financement d'un palier quelconque de gouvernement, dans aucun des pays où il mène ses activités. Nous essayons de préserver notre neutralité politique et notre crédibilité en étant autosuffisants.
Au Canada, on compte une centaine de Gurdwaras, qui sont des temples sikhs. La plupart ont le statut d'organisme de bienfaisance. Donc, la plupart des temples individuels ont ce statut.
M. Gord Brown: Je connais davantage le travail de la Commission du droit, qui s'intéresse à la réforme électorale. J'ai passé beaucoup de temps à l'étude de leur plaidoyer. Vous pourriez peut-être nous parler de vos membres et nous dire si vous recevez un financement du gouvernement fédéral.
Mme Nathalie Des Rosiers: La Commission du droit reçoit évidemment un financement du gouvernement fédéral. La Commission a été créée par une loi du Parlement, la Loi sur la Commission du droit du Canada. Son mandat consiste à évaluer, de façon continue, la nécessité de modifier ou d'adapter le droit en fonction des idées et des circonstances changeantes.
Je vais paraphraser la loi, que je connaissais par coeur. Mais ça fait six mois...
Tous les Canadiens peuvent participer et avoir accès aux travaux de la Commission. Cette dernière doit situer le droit et le système judiciaire dans le vaste contexte socioéconomique. Elle doit faire preuve d'ouverture et travailler en partenariat.
Les fonds de recherche viennent en grande partie du gouvernement fédéral. Nous avons été en mesure de conclure des partenariats avec d'autres institutions pour mener des recherches, notamment des recherches empiriques, qui sont très coûteuses.
La Commission doit faire preuve d'innovation et prendre en compte l'incidence du droit sur les divers groupes de la société.
La mission que nous nous sommes donnée consiste à faire participer les Canadiens à une réflexion sur le droit, pour qu'il soit juste pour tous et accessible à tous.
La Commission fonctionne en grande partie par consultations. Comme je l'ai dit, elle se penche sur ce qui fait défaut dans le droit. La liste est longue, mais nous ne pouvons pas tout faire. De par la loi, nous avons un comité consultatif—25 Canadiens, de tous les milieux—qui donne son avis sur les projets qui continuent d'être importants.
Le ministère de la Justice, le ministre de la Justice, peut donner du travail à la Commission. Ceci ne fait pas suite à un renvoi du ministre de la Justice. Comme je l'ai expliqué, ça remonte aux premières consultations que la Commission a tenues en 1997, lorsqu'il est apparu qu'il fallait se pencher sur la diversité des structures familiales. La Commission a commencé ses travaux en 1998; elle a présenté son rapport en 2001, qui a été rendu public en 2002.
» (1710)
M. Gord Brown: Merci infiniment.
Je m'adresse maintenant à la représentante de l'Église unie du Canada. Je serais l'un des 2,8 millions de Canadiens qui se considèrent comme membres de cette église, et je suis un pratiquant depuis que j'ai assisté à la classe de religion du dimanche à 7, 8 ou 9 ans. Au cours des dernières années, j'ai toujours écouté avec intérêt le débat qui a cours au sein de notre église, particulièrement sur les questions sociales.
Vous pourriez peut-être nous parler un peu davantage de ces 2,8 millions de Canadiens, chiffre que vous avez obtenu du Recensement. Ce chiffre a-t-il augmenté ou ces dernières années à cause de ce débat?
Je vous demande également s'il existe, au niveau local, une solution de rechange au mariage entre personnes de même sexe. Dites-nous en un peu plus à cet égard.
Je voudrais aussi connaître la position de l'Église unie du Canada sur l'attribution du statut d'organisme de bienfaisance aux groupes appartenant aux autres confessions religieuses qui continuent à militer en faveur de la définition traditionnelle du mariage.
Mon temps de parole est probablement écoulé, mais je vous pose néanmoins ces questions.
Mlle Anne Squire: Je fais partie de l'Église unie du Canada depuis que je suis née, et je suis plus vieille que mon église, qui célébrera son 80e anniversaire le 10 juin. Je peux donc vous dire que, à ma connaissance, l'Église unie du Canada n'a jamais reçu directement de fonds pour le travail qu'elle effectue.
Vous voulez parlé du nombre de membres. Celui-ci a effectivement baissé un peu lors du débat sur l'orientation à long terme entre 1986 et 1988, mais la situation semble être la même que celle des autres confessions religieuses. La plupart des groupes religieux, particulièrement les principaux, ont perdu des membres, et l'Église unie ne fait pas exception.
Ce qui est intéressant à mon avis, c'est que le débat sur les questions sociales s'est certes élevé au sein de l'église au fil des ans, de plus en plus de gens s'intéressant aux questions fondamentales auxquelles l'église est confrontée.
N'ayant pas pris de notes, j'ignore donc si j'ai répondu à toutes vous questions.
M. Gord Brown: Existe-t-il, au niveau local, une solution de rechange au mariage entre personnes de même sexe, si une église particulière décidait de ne pas célébrer une telle union?
» (1715)
Mlle Anne Squire: Oh, oui. C'est la congrégation—c'est-à-dire le ministre du culte et la direction de l'église—qui prend ce genre de décision. Parfois, c'est l'ensemble des fidèles qui est mis à contribution, mais cela ne signifie pas qu'on ne peut pas trouver quelqu'un pour célébrer ce genre de mariage.
M. Gord Brown: Il me reste probablement très peu de temps, mais je veux vous poser une question sur l'attribution du statut d'organisme de bienfaisance aux groupes appartenant aux autres confessions religieuses qui continuent à militer en faveur de la définition traditionnelle du mariage. Vous opposez-vous à cela?
Mlle Anne Squire: Non.
M. Gord Brown: Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Macklin.
L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins de comparaître aujourd'hui.
Premièrement, je souhaiterais clarifier un point au cas où quelque chose m'aurait échappé. Vous représentez la World Sikh Organization of Canada. Pouvez-vous m'indiquer le nombre approximatif de membres de votre organisation—nous venons d'entendre que l'Église unie du Canada compte environ 2,8 millions de membres ou de fidèles?
Mme Anne Lowthian: Nous estimons que le Canada compte actuellement entre 300 000 et 400 000 sikhs. Il y en a environ 300 000 aux États-Unis et 500 000 au Royaume-Uni. Nous croyons qu'il est raisonnable d'établir que 35 p. 100 d'entre eux partagent la position de la WSO sur cette question, si c'est bien ce que vous cherchez à savoir.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci. Je voulais simplement obtenir certaines précisions.
Vos deux organisations comptent des membres ou des fidèles en Ontario. Cette province est sur le point de célébrer le deuxième anniversaire de l'adoption de la nouvelle loi provinciale qui a changé la définition. L'une ou l'autre de vos églises a-t-elle été aux prises avec des difficultés par la suite?
M. Ajit Singh Sahota: Non, nous n'avons été témoins d'aucun changement dans les gurdwaras, comme nous appelons les temples sikhs au Canada. En fait, personne n'a demandé un mariage entre personnes du même sexe. Il n'y a donc aucun problème.
Mme Anne Lowthian: La question ne s'est pas encore posée.
L'hon. Paul Harold Macklin: Très bien. Merci.
Quelle est la situation à l'Église unie du Canada?
Mlle Anne Squire: Il n'y a eu aucun problème qui n'a pas pu être réglé au sein de la congrégation ou de l'église.
L'hon. Paul Harold Macklin: Ma deuxième question est alors la suivante : on nous a beaucoup parlé de ce qu'on pourrait appeler la peur ou la crainte des organisations religieuses devant la possibilité que certains de leurs dirigeants puissent être contraints, sur le plan juridique, de célébrer des mariages contre leur gré. Je sais que, dans la doctrine sikhe, il n'y a aucun problème à cet égard. Mais lorsqu'il existe une solution de rechange sur le plan local, comme c'est le cas pour l'Église unie, une telle possibilité suscite-t-elle des craintes chez vos ministres du culte, qui pourraient en fait choisir de ne pas célébrer un mariage entre personnes de même sexe?
Mlle Anne Squire: Non. Je pense qu'ils peuvent simplement ainsi choisir librement de ne pas célébrer un tel mariage pour respecter leurs convictions. J'ai parlé à de nombreux ministres du culte à propos des deux aspects de cette question, et je ne les ai jamais entendu exprimer de craintes.
Mme Anne Lowthian: C'est la même chose pour nous. On ne craint nullement d'être contraints parce que la Loi sur le mariage civil s'applique à toutes les religions de la même façon. Elle traite toutes les religions avec le même respect, c'est-à-dire qu'elles peuvent déterminer comment appliquer la loi à ce chapitre.
L'hon. Paul Harold Macklin: Oui. Merci.
Madame Des Rosiers, en ce qui concerne certains des problèmes dont nous ont fait part d'autres groupes religieux, il est parfois difficile de saisir exactement tous les détails. Il semble y avoir eu un manque d'adaptation au niveau local—en fait, il s'agit plutôt du niveau provincial. Je dirais que certains tribunaux des droits de la personne semblent difficilement s'adapter à ce changement. La Commission du droit du Canada l'avait-elle prévu? Dans l'affirmative, quelle serait, selon vous, la solution?
» (1720)
Mme Nathalie Des Rosiers: À mon avis, le changement entraîne toujours des difficultés. Toutes les institutions doivent s'adapter et s'interroger sur la façon dont elles réagiront. Le Canada est un pays où l'on favorise la réflexion sur la façon d'être tolérant dans toutes les formes d'expression. On peut donc prédire qu'il y aura des conflits.
Les choses pourraient pencher d'un côté comme de l'autre, selon moi. Les gens doivent inévitablement s'adapter à ce changement. Il y aura une période de conflits, et des erreurs seront alors commises. L'erreur est humaine dans le système juridique.
Je pense que nous essayons tous d'exprimer comment nous envisageons les options qui s'offrent à nous. Nous nous retrouvons aujourd'hui dans la situation que nous avons préconisée en 2002. Rien ne nous indique que ce n'est plus la bonne solution.
Le président: Soyez très bref.
L'hon. Paul Harold Macklin: Mon temps de parole est-il écoulé?
Le président: Votre temps de parole officiel est écoulé.
L'hon. Paul Harold Macklin: Je m'en tiendrai donc à mon temps de parole non officiel. Le point de vue de la Commission du droit du Canada a éveillé ma curiosité. Comme nous reconnaissons qu'il s'agit d'un mariage, estimez-vous que nous devrions nous préoccuper des répercussions internationales à ce chapitre?
Mme Nathalie Des Rosiers: Nous avons étudié ces répercussions. C'est ce qui justifie entre autres le choix de mariage de préférence à tout autre terme, c'est-à-dire...
Maintenant, puis-je garantir aujourd'hui qu'il n'y aura aucune difficulté dans un autre pays? Non. Je pense que le terme « mariage » est plus sûr et est préférable à « union civile » par exemple, parce qu'il y a une reconnaissance de celui-ci. Cependant, l'application des jugements rendus dans d'autres pays créent parfois des problèmes au Canada et ailleurs. Il naîtra certainement des litiges, mais c'est certes le terme qui convient le mieux.
L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.
Le président: Merci.
[Français]
Monsieur Marceau, voulez-vous prendre la parole?
M. Richard Marceau: Non, monsieur le président. J'ai déjà posé les questions que je voulais poser.
[Traduction]
Le président: Monsieur Jean.
M. Brian Jean: Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir sur la dernière observation. J'ai étudié entre autres le droit international. Comme vous le savez, l'Australie, notamment—et, je crois, d'autres pays européens—, n'autorise pas le mariage entre personnes de même sexe. Naturellement, il serait donc un peu difficile de l'y faire reconnaître. Comme vous le savez, la plupart des pays reconnaissent l'union civile, tout comme le fait le Parti conservateur dans sa proposition.
Cependant, ma question porte sur un aspect qui a été évoqué précédemment. J'ai toujours pensé que l'union de fait posait un problème en droit canadien. De toute évidence, certaines provinces reconnaissent que les unions de fait, après un certain délai, sont assujettis aux mêmes droits et obligations, mais ne sont pas appelées des mariages. Aux termes notamment de la Parentage and Maintenance Act ou de la Domestic Relations Act de l'Alberta et de certaines autres lois provinciales, l'appellation est différente, mais les droits et obligations sont les mêmes.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez, parce que, de toute évidence, cela a fait naître de graves difficultés en matière de litiges. C'est probablement l'un des principaux problèmes avec lesquels nous sommes aux prises au Canada, parce que l'union de fait—les gens ne se marient pas—devrait, à mon avis, avoir la même reconnaissance qu'un mariage après un certain délai.
Mme Nathalie Des Rosiers: À mon avis, l'un des principaux problèmes est la notion de volonté. L'une des décisions fondamentales que nous devons prendre—et il y a deux façons d'envisager le tout—, c'est qu'il faut établir qu'il appartient aux personnes de décider, car le mariage ou l'inscription aux registres civils est un acte de volonté. Le gouvernement doit notamment—et je pense que ce rapport le préconise également—donner aux citoyens les outils lui permettant de gérer leurs affaires et de prendre des engagements clairs les uns envers les autres.
En ce qui concerne les unions de fait, un tel acte de volonté n'est pas exprimé—c'est parfois un engagement volontaire, mais on ne peut en être certains. C'est pourquoi l'outil est différent. Nous parlons alors d'attribution. Nous attribuons certaines obligations—pas toutes—, selon la province, en raison notamment de la longévité. Par exemple, nous établissons une obligation de soutien. Nous n'établissons pas souvent l'obligation du partage des biens. Cela varie selon la province. Je crois certes qu'il existe une différence considérable entre le Québec et les autres provinces à ce chapitre.
Jusqu'où le gouvernement peut-il aller pour imposer des règles? Cette question est longuement abordée dans le rapport, étant donné que c'est un problème très grave, quant à la façon dont nous... Il y a de l'exploitation financière—certains disant : « Ne t'en fait pas, demain nous nous marierons. » Puis, il se tisse des liens d'interdépendance qui changent au fil du temps.
Par conséquent, l'idée de reconnaître qu'il s'agit en fait d'un outil différent—ce n'est pas la volonté... Nous ne nous penchons pas sur la façon dont les gens mènent leurs affaires, mais nous essayons de trouver une réponse au risque éventuel d'exploitation. C'est dans ce contexte qu'est née l'imposition de règles par l'État, qui dit : « Peu nous importe que vous vouliez ou non avoir une obligation envers cette personne, nous vous l'imposerons, étant donné la dépendance qui s'est établie entre vous. »
Il est clair que nous établissons des distinctions lorsque des enfants sont en cause, parce que, le cas échéant, la dépendance est plus grande.
À ce chapitre, Il faut apporter d'autres modifications aux lois, j'en conviens, et cette question pourrait faire l'objet opportunément d'un autre rapport de la Commission du droit du Canada.
» (1725)
M. Brian Jean: Je peux vous indiquer que mon chef en est conscient et que ce problème le préoccupe grandement. Nous sommes aux prises avec une situation particulière. J'ai plaidé de nombreuses affaires dans ce domaine, et je vous dirai franchement que les femmes font l'objet de discrimination. C'est tout à fait inutile et inacceptable. Cependant, nous avons, à mon avis, deux expressions distinctes qui comportent les mêmes droits et obligations. Vous avez établi qu'il y avait une différence, mais je maintiens le contraire.
Je pense qu'il y a un acte de volonté. Vous emménagez dans une maison avec vos effets personnels pour cohabiter avec quelqu'un. Je crois franchement que cet état de fait devrait être reconnu indubitablement dans les lois, et cela rejoint, à mon avis, la position du Parti conservateur à cet égard.
J'aurais une autre question. C'est une question que j'ai à coeur en ma qualité de député devant prendre une décision sur ce problème particulier. Je voudrais savoir combien il y a de membres dans votre organisation au Canada. Je ne parle pas du nombre de sikhs.
M. Ajit Singh Sahota: Il y a cent gurdwaras, dont 42 font partie de notre organisation. Certains de nos membres sont des personnes. Il y a des chapitres qui sont disséminés dans chaque région... Le bureau de notre organisation compte 31 membres, et il s'occupe de l'administration de nos affaires au Canada. Ces membres sont élus démocratiquement. Un congrès se tient tous les deux ans, au cours duquel un nouveau bureau est élu.
M. Brian Jean: Combien de membres votre organisation compte-elle?
Mme Anne Lowthian: En règle générale, nous ne divulguons ni le nom, ni le nombre de nos membres. En précisant la composition au sein des gurdwaras ou des églises, nous indiquons le type de représentation que nous essayons...
M. Brian Jean: Avez-vous une liste d'adresses de vos membres?
M. Ajit Singh Sahota: Nous en avons effectivement une, mais...
M. Brian Jean: Puis-je vous demander combien de personnes figurent sur cette liste d'adresses au Canada?
M. Ajit Singh Sahota: Cette liste compte environ 3 000 noms.
M. Brian Jean: Je vous remercie infiniment, monsieur.
Je cède le reste de mon temps de parole à M. Toews.
Le président: Il vous reste environ 30 secondes.
M. Vic Toews (Provencher, PCC): Eh bien, je vous en remercie.
Des voix: Oh!
M. Vic Toews: Je vous en sais gré.
J'ai été tout simplement étonné de l'observation formulée par la Commission du droit, selon laquelle nous voulons notamment que le mariage entre personnes de même sexe porte l'appellation de « mariage » pour qu'il n'y ait qu'une seule expression, ce qui simplifie les choses sur le plan international. Je trouve qu'on peut très difficilement croire à cela, étant donné que la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a déclaré que le mariage était l'union d'un homme et d'une femme. En fait, toutes les organisations internationales analogues ont adopté une position similaire, et j'avancerais que vous créerez des problèmes juridiques considérables en intégrant l'union entre personnes de même sexe à la définition de mariage.
L'Alliance évangélique du Canada a fait valoir notamment que, étant donné qu'aucune condition de résidence n'est exigée au Canada, un couple homosexuel pourrait venir se marier ici puis retourner dans son pays. Par la suite, s'ils veulent divorcer, ils ne pourront pas le faire dans leur pays et devront résider pendant un an au Canada pour divorcer. Une telle situation entraîne d'énormes difficultés, car s'ils se remarient dans leur pays d'origine et reviennent au Canada, on les considérera comme des bigames. En fait, nous créons une multitude de problèmes internationaux plutôt que de simplifier la situation.
» (1730)
Mme Nathalie Des Rosiers: Je pense que je faisais valoir simplement que, s'ils ont contracté une union civile, ce qui est un concept nouveau, et s'ils s'établissent dans une province dépourvue d'un régime de partenariat domestique, les couples homosexuels auront certes de la difficulté à faire reconnaître leur union civile s'ils veulent divorcer. Je ne dis pas qu'il ne devrait pas y avoir de problèmes ou qu'il n'y en aura pas, mais c'est plus facile, parce que le mariage est reconnu, par opposition à un nouveau concept qui n'est pas autant... C'est donc dans un tel contexte, et je ne pense pas dire...
M. Vic Toews: Dites-vous alors que, si on donne l'appellation de mariage à une telle union, un autre pays accordera le divorce aux couples homosexuels?
[Français]
Mme Nathalie Des Rosiers: C'est tout probable.
[Traduction]
M. Vic Toews: En avez-vous la preuve?
Mme Nathalie Des Rosiers: Il ne fait aucun doute—et je pense l'avoir dit plusieurs fois—que divers pays ont adopté une position différente, qui...
M. Vic Toews: Permettez-moi simplement...
Le président: Je m'excuse, monsieur Toews, mais il est 17 h 30.
M. Vic Toews: Nous sommes à la fin de notre séance. Je vous signale qu'absolument rien ne permet d'établir qu'un pays qui ne reconnaît pas le mariage entre personnes du même sexe accordera le divorce aux couples qui ont contracté une telle union au Canada. Si vous trouvez un exemple, je vous prie de me l'indiquer.
Le président: Merci infiniment.
Je remercie les témoins d'avoir comparu aujourd'hui.
Je rappelle aux membres que nous tiendrons deux séances demain: l'une à 15 h 30, et l'autre à 18 heures.
La séance est levée.